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When there's a will, there's a way. Quien la sigue la consigue Crois en tes rêves, the future is in your hands Ce sont des phrases qu'on entend, qui nous guident, qui nous aident aussi dans notre cheminement de vie. Pour ma part ce sont des phrases que j'utilise au quotidien, et aujourd'hui, je vous invite à les partager avec moi. Donc bienvenue, welcome, bienvenidos. Aujourd'hui 35 ans, Maman d'un merveilleux poupon de cinq mois et demi, d'une fillette pimpante d'énergie de quatre ans et demi, mariée depuis bientôt neuf ans, directrice et propriétaire d'une école non subventionnée, pré-scolaire, primaire, trilingue, privée, ici à Sainte-Marie, également, je suis conseillère municipale depuis maintenant sept ans, j'œuvre aussi au sein de certains comités comme la politique familiale, les loisirs, la politique culturelle des fois je fais partie aussi. Bref, ce sont mes codes, ma vie : la famille, le développement de notre région, l'entrepreneuriat et la culture sous toutes ses formes. Aujourd'hui, j'ai décidé d'enlever mes lunettes d'adulte et de vous charmer de la façon dont je me laisse charmer par les enfants au quotidien. C'est beau des enfants, hein ? C'est beau, c'est simple, c'est naturel. Je mets un chapeau, parce que je révèle plusieurs chapeaux. Mais aussi, aujourd'hui, cet après-midi, je vous invite à vous lever. On vient de déjeuner, on veut digérer donc tout le monde, levez-vous, faites-vous du bien, on va se dégourdir un peu à la manière des enfants. Tout le monde, tout le monde, sans exception, vous allez répéter après moi : Hello Bonjour buenos días on fait comme les enfants good day guten tag Konichiwa ciao ! Shalom dobry dzień et on fait comme tous les enfants Hello to all the children of the world ! c'est beau ! ça fait du bien ! vous pouvez vous asseoir, bravo tout le monde ! Ça fait du bien parfois d'enlever ses lunettes d'adulte, de redevenir enfant. Je crois qu'on ne se le permet pas assez en tant qu'adultes. On est toujours dans notre routine, dans notre quotidien : lever, boite à linge, faire les sacs, etc. pour ceux qui sont encore à cette phase-là -- présentement, j'en suis à cette phase de ma vie -- donc on est beaucoup dans notre quotidien mais pourquoi est-ce qu'on ne pourrait pas se laisser le temps, nous les adultes, un peu de vivre, un peu comme les enfants, un peu au quotidien ? Donc, la simplicité a toujours sa place. Lorsque j'avais sept ans, j'ai débuté mon aventure avec les Danseurs de Sainte-Marie. Vous voyez ma belle photo ? donc c'était moi. Vivre la culture à travers la danse, l'apprentissage des langues, des mots dans toutes sortes de langues, connaître des gens d'autres pays, faire des voyages, ici au Canada, puis ailleurs, ce sont toutes des expériences qui m'ont forgée, qui ont fait qui je suis aujourd'hui. Et puis j'aimerais ajouter qu'aujourd'hui même, après 28 ans, aujourd'hui même, ce matin, c'est ma petite fillette de quatre ans et demie, Félicia, qui a débuté son parcours au sein de l'école de danse Manigance, anciennement des Petits Danseurs. J'en suis très fière, pour moi c'est en même temps un retour aux sources et puis c'est une belle fierté, et puis je remercie aussi Lise Sirianni qui est une des grandes partenaires de l'événement d'aujourd'hui qui a été beaucoup présente pour moi lors de mes premières années au sein de l'école de danse des Petits Danseurs. Bon, entrons maintenant dans le vif du sujet : l'éducation. Pourquoi est-ce que l'éducation, c'est un secteur, c'est un sujet si fascinant selon vous ? Parce que c'est un sujet d'actualité qui nous touche tous de près ou de loin qu'on aime l'école ou... qu'on l'aime moins, à l'occasion. L'éducation est un secteur porteur de croissance économique future qui peut procurer des bénéfices à toutes les régions du Canada, d'un océan à l'autre, et à toutes les communautés, quelque soit leur taille. Selon plusieurs études, le Canada va connaitre une grave pénurie de travailleurs qualifiés d'ici 10 ans La pénurie va toucher toutes les sphères d'activité : des postes de gestion, des poste de professionnels, postes techniques spécialisés, les scientifiques aussi. A l'heure actuelle au Canada l'immigration est à l'origine de 75% de la croissance de la main-d'œuvre puis d'ici la fin de la décennie, ça va être 100% de la main-d'œuvre qui va provenir de l'immigration. C'est quand même assez incroyable comme chiffre. Les étudiants internationaux forment un excellent bassin de main-d'œuvre hautement qualifiée et spécialisée qui peut répondre aux besoins actuels et futurs du marché du travail. Notre belle région de la Beauce ne fait pas exception à cette règle-là. Notre relève devra être forte, polyvalente, bilingue, et même plus encore, puis prête surtout à affronter les réalités linguistiques et technologiques qui nous entourent. Ce qui était, pas si longtemps, vrai de dire : "bon on est dans la région de la Beauce, l'anglais, c'est important, oui, mais plus tard je n'aurai pas nécessairement besoin d'être bilingue", ce ne sera pas vrai pour les générations futures. Regardez un enfant de 5 ans manipuler des petits jeux électroniques en répondant à toutes sortes de questions qui sont en anglais. Regardez un enfant d'âge préscolaire manipuler un iPad, vous viendrez m'en reparler. Regardez un enfant de 7-8 ans effectuer une conversation Skype avec des enfants d'autres pays. Puis je vous le conjure, je vous le dis, la maîtrise de l'anglais est essentielle en 2012. Apprendre les langues, c'est apprendre le monde. Il ne faut pas se leurrer, c'est vrai. Apprendre les langues, c'est s'ouvrir des portes, apprendre les langues, c'est connaitre les autres, c'est les comprendre, c'est éviter de rire pour des préjugés, c'est même avoir de l'empathie dans certaines circonstances. J'aimerais vous faire part de certaines idées préconçues en lien avec l'apprentissage des langues que je dois débattre, encore à l'occasion, mais qui sont tout simplement vraies. On dit qu'il faut être intelligent pour apprendre les langues. Oui, il y a une certaine aptitude intellectuelle qui est nécessaire pour apprendre la grammaire, le vocabulaire, mais l'usage de la langue s'acquiert comment ? Il s'acquiert par la pratique, par l'imprégnation, l'immersion. Apprendre plusieurs langues, aussi, c'est risquer la confusion linguistique C'est sûr que la compétence linguistique, des fois dans certaines langues, il y a des mots qui s'apparentent, des mots qui se ressemblent. Quand on montre plusieurs langues à un enfant, au début il va se tromper. Il va pouvoir faire une phrase francophone, anglophone, hispanophone, une phrase mélangée, mais avec le temps, tout se catégorise dans le cerveau de l'enfant et c'est ça qu'il faut comprendre. De manière générale, des études montrent qu'apprendre une langue étrangère rend non seulement meilleur dans sa propre langue, mais développe aussi des capacités cognitives qui sont bénéfiques à l'acquisition des autres disciplines. Donc cet élément est important à considérer. Apprendre une langue, on dit que ce serait long et ennuyeux. Long, peut-être, si on veut se perfectionner, si on veut apprendre sur la linguistique, se spécialiser, mais plus tôt on va être capable d'apprendre d'autres langues, plus tôt on va montrer à l'enfant que les langues, c'est l'ouverture sur le monde, et plus tôt on va commencer à faire l'immersion, moins ce sera difficile pour l'enfant ; parce qu'un enfant, vous savez, le cerveau d'un enfant c'est comme une ?... éponge, oui. Donc, je le vis au quotidien. Je côtoie des enfants au quotidien qui apprennent trois langues, qui vivent dans trois langues, et puis quand un enfant de 6 ans, 7 ans, vient me voir, puis qu'il ne se rappelle plus s'il a répondu à la question en anglais, en français ou en espagnol, ou qu'il y en a qui vient me voir, et qui se dit, "Mrs. Boissoneau, last night I dreamt in English" "Mme Boissoneau la nuit passée j'ai rêvé en anglais" je vous le conjure, ça veut dire que c'est bon signe, apprendre les langues en bas âge. On rit trop souvent de fait que l'on ne comprend pas parce que l'on ne prend pas le temps de s'attarder à comprendre. Chaque culture est bien particulière et tant et si longtemps que les générations ne seront pas capables de se comprendre entre elles, il va toujours y avoir des conflits. De là l'importance de l'ouverture sur le monde et l'appropriation des langues. L'éducation est une priorité culturelle. Oui, c'est un fait. Mais à mes yeux de directrice, l'éducation c'est aussi ce qui fait vivre l'imagination de l'enfant, sa créativité. Dire à un enfant d'âge préscolaire : « Aujourd'hui, on va apprendre les couleurs en trois langues », c'est une chance. Mais de lui dire : « Today, we're going to learn the colours at the circus. Do you want to follow me in my adventure ? », là, l'enfant va faire « Ouaaah ! » « Yes, Mrs. Boissoneault ! » Donc, toujours un contexte, c'est ça qui est important aussi, de faire vivre la créativité de l'enfant. Souvent on veut se rappeler de notre première représentation, de notre premier beau bricolage qu'on montrait à nos parents, de notre première chanson qu'on a apprise par cœur, et qu'on était content d'aller montrer à papa maman, mais ces éléments-là, ces traces de vie, sont en lien avec deux éléments : l'estime de soi, et la créativité. La créativité de l'enfant est fondamentale et il ne faut surtout, surtout pas la brimer. En tant que maman, je pourrais dire que parfois ce n'est pas toujours évident de gérer la créativité d'un enfant. Des pots de peinture échappés par terre, toutes sortes de petits morceaux de papier découpés, de la colle sur le mur, ça m'est arrivé à l'occasion aussi. Il faut gérer avec la créativité de l'enfant mais surtout, il ne faut pas la brimer. Un fait auquel j'ai dû faire face ces dernières années c'est le manque de créativité chez certains enfants, et des fois c'est attristant. Dans une cour de récréation « À quoi, est-ce qu'on peut jouer ? » Devant un écran d'ordinateur blanc « Qu'est-ce qu'on peut écrire ? » C'est quoi notre rôle à nous en tant qu'éducateurs, en tant que professionnels ? C'est de donner des outils aux enfants, c'est de les outiller de leur donner des stratégies d'apprentissage. Donc je leur dis « Allez les amis, inventez-vous des solutions. S'il faut que vous créiez un rap pour apprendre vos tables de multiplication, allez-y mais faut trouver des solutions. Plus grand sera votre esprit créatif, plus facile sera votre adaptation à affronter toutes sortes de réalités et à trouver des solutions pertinentes une fois rendus à l'âge adulte. » Ce qui m'attriste aussi parfois de voir, ce sont des enfants d'âge préscolaire, qui ont déjà, à cet âge-là, peur de se tromper. Ils frappent un mur, ils ont peur de se tromper, ils n'osent pas parler. Leur créativité est déjà brimée à cet âge-là. Donc, l'enfant comme l'adulte doit comprendre que se tromper, le comprendre puis l'affirmer, c'est une grande vertu. Pourquoi ? Parce que ça permet l'avancement et le dépassement de soi. On soupçonne encore qu'Einstein se serait trompé sur la théorie de la relativité, encore en 2012. Ben, ce doute, ça fait en sorte que certains sont encore en train de travailler à la peaufiner, cette théorie-là. Donc, pour dire que l'avancement n'est jamais terminé, il faut le comprendre aussi. De nos jours avoir une superbe mémoire n'est plus nécessairement ce qui est valorisé. La preuve ? Je n'ai pas appris mon texte par cœur aujourd'hui. Les ordinateurs contribuent à laisser de la place au cerveau humain pour opérer différemment. Ceux qui vont savoir se démarquer, au XXIe siècle, seront ceux qui auront réussi à laisser place à la créativité et à l'innovation. La croissance massive des réseaux sociaux plus le développement des technologies en sont des preuves on ne peut plus concrètes. Se démarquer, c'est savoir faire avancer les idées. Savoir faire avancer les idées des gens en leur fournissant des preuves concrètes. Aujourd'hui je vais vous démontrer le parallèle entre le développement d'une communauté qui s'apparente beaucoup au développement d'un enfant. Le développement d'une communauté repose sur les idées de tous et chacun. Quand on parle du développement d'une communauté aujourd'hui on parle de "Villes et Villages en Santé", on peut parler de "Défi Santé", on parle aussi de développement local, de développement social, on peut parler du développement de beaux parcs aussi, ici en région. Quand on regarde un enfant, on parle de son développement, on parle de sa capacité à socialiser, on parle aussi de sa motricité, de son développement, de sa capacité à mobiliser des gens, et Dieu sait qu'il n'y a pas meilleur qu'un enfant pour savoir mobiliser des gens. Si un enfant est capable d'apprendre à marcher, une communauté est aussi capable d'unir ses forces, de se tenir debout puis de déployer toutes ses énergies vers des buts communs. Un enfant qui est exposé à toutes sortes de situations, toutes sortes d'expériences enrichissantes, pour permettre à son cerveau de créer des liens encore plus de qualité. La communauté, pour évoluer dans ses échanges, a besoin de voir participer ses citoyens et de les voir se concerter pour pouvoir exécuter son pouvoir d'agir et le besoin d'un lien de confiance très très très fort entre elle et ses citoyens, comme vous pouvez le voir. Dès la naissance aussi, l'enfant développe un lien de confiance très très fort avec ses parents. Le plus beau lien de confiance c'est lorsqu'il est mis dès sa naissance sur le sein de sa maman. Donc tout comme un enfant qui a besoin de parents réconfortants et présents qui lui servent de guides, pour pouvoir cheminer, pour pouvoir s'épanouir, une communauté se doit d'avoir des bases solides, des axes de référence auxquels l'on peut se fier s'associer pour partager, pour développer, pour faire avancer des dossiers. La confiance et la sécurité contribuent à l'autonomie d'une part, puis d'autre, permet de faire face à des défis de taille, comme apprendre à marcher pour un enfant ou tout simplement savoir développer de beaux projets comme la construction de complexes culturels et sportifs ici à Sainte-Marie. Comme je l'ai dit un petit peu avant le cerveau de l'être humain est en constante évolution donc l'enfant se développe rapidement. La génération Y puis les générations qui vont suivre se développent très très vite. On pourrait dire à la vitesse d'un tweet. Il faut être très rapide et compétitif pour pouvoir faire face à la vitesse de la communication et de l'information de nos jours. Les générations se succèdent, mais attention, les prochaines ne se ressembleront peut-être pas toujours. Les valeurs changent aussi, les façons de travailler aussi. En tant qu'employeur, il faut se faire un devoir de comprendre ces réalités puis de faire en sorte que les employés se sentent stimulés et valorisés dans leur travail. Il faut innover dans notre façon de travailler et surtout... écouter Le défi entrepreneurial doit être présent en toutes circonstances. Pourquoi ? parce qu'il alimente les idées. Soyez un modèle pour vos employés, soyez aussi un modèle pour vos enfants, puis pour tous ceux que vous côtoyez. Devenir un excellent chef, c'est comme devenir parent, c'est un apprentissage quotidien et permanent même si certaines personnes ont de meilleures prédispositions pour devenir de bons parents ou de bons leaders. On ne devient pas leader, on ne naît pas leader, on le devient avec le temps. Appliquez-vous donc chaque jour à améliorer les qualités que je vais vous dire et assurément, tôt ou tard, vous obtiendrez de la part de votre équipe, de la part de votre famille aussi, des résultats exceptionnels. 1 : établissez et communiquez clairement vos objectifs. 2 : dites les raisons pour lesquelles vous voulez atteindre ces objectifs, soyez transparent dans la façon dont vous vivez et que vous communiquez. 3 : utilisez une communication rétroactive. Ce qui veut dire, vérifiez toujours si ce que vous avez dit a été perçu de la façon dont vous, vous le percevez pour vous-même 4 : soyez un modèle par vos actions. vos actions doivent être en harmonie avec vos paroles. C'est un beau défi entrepreneurial à relever au quotidien et c'est un beau défi aussi, en tant que parents, à relever au quotidien. Devenir leader en matière de technologies est un autre défi de taille auquel il faut faire face. Regardez cette image, elle parle beaucoup non ? De un, elle nous dit que la technologie ça s'acquiert maintenant peu après la naissance, c'est pratiquement devenu un jouet fondamental. De deux, il y a un petit vent de panique qui souffle à l'intérieur de moi quand je vois cette image-là. L'individualisme. Ça me dit que maintenant, c'est difficile de regarder un iPad et de communiquer en même temps. Notre défi actuel, c'est de cohabiter avec les technologies afin qu'elles deviennent des outils de performance et d'avancement. Elles ne doivent pas enlever le fait que nous sommes d'abord et avant tout des êtres humains. La facilité d'accessibilité et la rapidité sont les deux mots d'ordre puis gare à ceux qui ne seront pas efficaces ! Ils vont être pointés du doigt sur les médias sociaux. Est-ce qu'on veut être comme Obélix puis Astérix ? puis continuer à vivre dans notre réserve comme de vrais Gaulois ? ou est-ce qu'on est prêts à oser changer ? oser aller de l'avant autant du côté social que technologique pour permettre aux futures générations de comprendre que nous vivons tous dans le même bateau ? Gens d'affaires, jeunes entrepreneurs, gens d'ambition, take a chance! n'ayez jamais peur de ce que vous avez en tête, la peur, c'est vous qui vous la créez. Je termine en vous disant : « You have to go confidently in the direction of your dreams, and live the life you've ever imagined » Je vous remercie beaucoup de votre attention, et souvenez-vous toujours que vous êtes proactifs. Merci.
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Est-ce qu'il y a des indépendants dans la salle ? Levez la main, les indépendants ! Je ne vois pas bien, mais je vois quand même quelques mains qui se lèvent. Est-ce que parmi vous il y en a qui ont déjà expérimenté le coworking ? Une main, deux mains ... En fait, le coworking, ça repose sur deux principes : le premier principe, c'est partager des espaces de travail et de former un réseau, une communauté. Et ce réseau va favoriser les échanges, va favoriser l'entraide, va favoriser la créativité. C'est une idée toute simple, et on se demande comment on n'y a pas pensé avant. Le coworking, c'est né en 2005 à San Francisco. Et en fait, ce qui a favorisé l'émergence du coworking, c'est l'essor des nouvelles technologies. Maintenant, avec votre ordinateur, vous êtes devenu complètement mobile. Vous pouvez aller n'importe où. Un clic, et vous avez accès à tout votre bureau. Et vous avez accès à toute l'information, à toutes les connaissances du monde. C'est l'équivalent de bibliothèques entières, et vous êtes connecté au monde entier. Dans ces conditions, vous pouvez vous mettre n'importe où pour aller travailler. Est-ce qu'il y en a parmi vous qui prennent le train ? Moi, je l'ai pris pendant pas mal de temps et j'ai été frappée de voir comme avant même d'arriver au travail, la plupart de gens sont déjà en train de travailler, avec leur ordinateur, dans le train. Alors, les trains ne sont pas des espaces de coworking, mais qui sait, un jour, ça va devenir des espaces de coworking. En fait, tout est possible. Je continue avec les questions. Est-ce qu'il y en a parmi vous des abonnés à Mobility ? Personne ? Bien, vous avez tort. Moi j'ai expérimenté ça pendant deux ans, parce que je n'avais plus de voiture, et c'est absolument génial. D'abord, j'avais des voitures beaucoup mieux que celles que j'ai maintenant, et puis j'avais zéro souci. Je vous encourage à vous intéresser à ce que propose Mobility. Peut-être aurais-je plus de succès avec ma deuxième question : y en a-t-il parmi vous qui ont déjà vécu ou qui vivent actuellement en colocation ? Des souvenirs d'étudiant, peut-être. Alors, quand vous aurez expérimenté Mobility, et quand vous avez vécu en colocation, en fait, vous viviez, vous pratiquiez l'économie collaborative. L'économie collaborative, c'est un état d'esprit. En fait, ça se base sur la consommation et sur le mode de vie. Quand vous partagez une voiture, vous êtes dans la consommation collaborative. On vous propose un bien, plutôt que de l'acheter, vous l'utilisez. On optimise les ressources. Quand vous vivez en colocation, vous êtes dans un mode de vie collaboratif. Plutôt que d'avoir chacun son appartement, on partage le même appartement, on partage la cuisine, on partage le salon, on fait le ménage à tour de rôle. C'est un mode de vie collaboratif. On mutualise les ressources. Avec le coworking, on est dans la même logique. Dans un espace de coworking, vous avez des places de travail, vous avez les connexions wifi, vous avez une photocopieuse imprimante scanner, une cuisine où vous pouvez vous faire à manger. En bref, tout ce qu'il vous faut pour travailler en compagnie d'autres coworkeurs. Le coworking, c'est une réponse à la crise économique. L'économie collaborative aussi. Ce sont des réponses à la morosité ambiante, à la méfiance et à la défiance. Comment ça se passe dans un espace de coworking ? Dans un espace de coworking, vous allez chercher et trouver la solution qui vous convient. La plupart du temps, les coworkeurs, ce sont des indépendants. Il y a plusieurs types d'indépendants. Vous pouvez être indépendant à fond et avoir besoin d'une certaine régularité, d'une structure, mais pas forcement être prêt à investir dans des structures fixes et très coûteuses. Donc, vous choisissez de venir à plein temps dans un espace de coworking. Vous avez votre bureau, vous pouvez disposer d'un meuble de rangement et vous avez tous les outils technologiques de base nécessaires pour pouvoir mener à bien votre travail. Peut-être que vous n'avez pas envie de passer tout votre temps dans un espace de coworking comme vous l'aviez peut-être fait dans une autre... Moi, je l'avais fait dans une autre vie, en travaillant dans un bureau. Ça ne m'a pas tellement convenu, en fait. Donc, dans un espace de coworking, vous pouvez aussi choisir de venir pour casser un peu la solitude du travail à la maison, pour rencontrer d'autres personnes, pour confronter vos avis avec les avis des autres coworkeurs. Vous pouvez venir à mi-temps. Quand on est indépendant, on peut se retrouver dans une configuration où on est très occupé, on doit beaucoup bouger et on a besoin de solutions qui soient flexibles. Dans un espace de coworking vous pouvez choisir de venir à la journée, il y a des packs de quatre journées, dix journées. À ce moment-là, quand vous en avez besoin, vous vous inscrivez sur un agenda on line et vous réservez votre place à l'espace de coworking. Tout cela vous pouvez le varier sur du long terme ou sur du court terme. Et quand vous avez trouvé la bonne formule, comment ça se passe dans un espace de coworking ? En principe, quand vous y arrivez, c'est pour travailler. Bien, je vous assure que certains jours, je défie la personne qui débarque à l'espace Simplon 8 à Martigny de savoir si dans les locaux il y a une, trois ou huit personnes qui y travaillent. On entendrait voler des mouches. La concentration est à son maximum. C'est comme dans une bibliothèque : chacun est concentré dans son travail et d'ailleurs, souvent les coworkeurs me disent que c'est la concentration du voisin qui déteint sur lui et qui lui permet d'aller jusqu'au bout de son travail et d'avancer et de ne pas se laisser distraire par toutes sortes des choses. D'autres jours, c'est une véritable ruche, ça discute dans tous les sens, ça échange. Dans un espace de coworking, vous avez toute une communauté de ressources, des gens qui sont complémentaires, qui ont envie d'échanger, des gens qui ont des talents et à un moment donné, forcément, ces gens vont entrer en contact et ces gens échangent. Ces échanges peuvent prendre plusieurs sortes. Dans mon espace de coworking, j'ai une personne qui sera peut-être appelée un jour à faire un rapport d'activité sur son travail, sur sa petite entreprise. Pour bien faire, elle va décider de le faire en français et en allemand. Elle parle et maîtrise l'allemand, pas de problème. Elle prépare son rapport d'activité, et au dernier moment elle se dit quand même : « L'allemand n'est pas ma langue maternelle, ça serait bien que je puisse trouver quelqu'un qui me relise tout ça. » Il y a un traducteur dans mon espace de coworking. Cette personne va lui demander de jeter un petit coup d'œil sur son travail, d'avoir un petit feedback, de faire quelques corrections, éventuellement. Ce traducteur, il n'y a pas très longtemps qu'il est installé et depuis quelque temps, il a commencé à s'organiser pour faire son site internet. Il a rencontré un webmaster qui est en train de faire le travail avec lui. Mais ce n'est pas simple. Même que vous avez quelqu'un qui le fait, vous leur devez fournir des textes, des images, et ce qu'il se passe pour lui. Un moment donné, il ne savait plus très bien et se disait : « Les images, qu'est-ce que je mets, ce que je peux mettre comme onglets, qu'est-ce qu'il y a comme thème ? etc. » Depuis peu, il y a un webmaster qui fréquente l'espace de coworking. Alors, lui, il ne va pas faire le site du traducteur. Mais, par contre, quand il a entendu parler de ses problèmes avec son site, il lui a donné des conseils. Il lui a dit : « Fais attention, ne mets pas trop de textes, fais en sorte que chaque page soit bien accessible facilement, que l'internaute sache où il en est dans le site. » Ça lui a rendu de précieux services. Ce webmaster, comme il est nouveau, il vient d'ouvrir sa boîte, de faire sa start-up. Quand il a des mandats pour des clients, des fois il est un peu coincé avec les histoires de graphisme. Parce que ce n'est pas son métier. Il préfère programmer, s'occuper de ce qu'il y a derrière mais le graphisme, ce n'est pas son métier. Il n'y a pas de graphiste dans mon espace de coworking. Mais bon, il a essayé de demander aux autres : « Est-ce que par hasard tu connaîtrais un graphiste qui pourrait m'aider ? » Et je connais un graphiste avec qui je travaille régulièrement et je lui ai donné son adresse et désormais, il travaille avec ce graphiste. Et ce graphiste, il aura peut-être besoin d'une traduction. Et ça continue à circuler comme ça, dans tous les sens. Ce n'est pas de gros jobs. Il n'y a pas de circulation d'argent. On est dans l'entraide pure et simple : « Je t'aide un jour, demain tu aides quelqu'un d'autre, et après-demain ce quelqu'un d'autre va peut-être me renvoyer l'ascenseur. » C'est une formule, c'est l'entraide. Elle se passe d'une façon très informelle presque tous les jours. Une autre formule est le troc. Vous savez tous ce que c'est. Les gens qui fréquentent les espaces de coworking sont très souvent des gens qui sont dans la communication. Et, quand on écrit des textes, ça peut être utile de pouvoir se les faire relire. Moi, j'écris des textes. Dans la boîte où j'ai bossé avant on payait de relecteurs officiels pour faire ça, maintenant, je n'ai personne. J'ai des gens à qui demander ponctuellement mais ils ne sont pas toujours disponibles. Il y a une autre personne au Simplon 8 qui fait de la communication et qui écrit. Et régulièrement on se fait relire nos textes. C'est du troc. Alors, le traducteur, avec son site internet, il s'est dit : « Il faut que je fasse une campagne Google Adwords. » Mais il n'a jamais fait ça. Les réseaux sociaux ne sont pas son truc. Du coup, il en a parlé et s'est rendu compte qu'il y avait une spécialiste en communication sur le web. Comme elle est très occupée, elle ne va pas pouvoir prendre du temps, vraiment, sur son temps de travail professionnel pour lui faire sa campagne AdWords. Mais, ils ont discuté d'un prix, ils se sont mis d'accord et finalement, le traducteur a engagé la responsable en communication sur le web pour lui faire sa campagne Google AdWords. Qui sont les personnes concernées par le coworking ? Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, principalement, des indépendants. J'ai eu l'occasion, au début de l'année, d'accueillir un chef d'entreprise. Il avait une PME d'environ 30 personnes. Il est venu me voir parce qu'il voulait me vendre ses services internet. Donc, il est venu là, il y avait d'autres coworkeurs, on a pris un verre ensemble, on a commencé à discuter et il a trouvé ça assez sympa, d'avoir toutes ces ressources dans un même endroit. Il se trouve qu'il était en train de faire une formation postgrade et il devait rédiger une publication. C'était un jeune père de famille, chez lui il n'avait pas le temps pour le faire tranquillement. Au boulot, il était toujours dérangé. Donc, il a décidé de venir à l'espace Simplon 8 pour travailler sa publication. Il est venu, il a pris un abonnement de 4 journées flexibles, il est venu quand ça l'arrangeait et ça lui a été très utile pendant quatre journées complètes de ne pouvoir se consacrer qu'à ça. En plus, Il a fait des échanges avec les autres. Je ne sais pas s'il a vendu ses services internet mais, ce n'est pas exclu. En dehors de ça, il peut y avoir des directeurs, des managers, qui à un moment donné, dans leurs vies, ont besoin de prendre du recul par rapport à l'entreprise. Dans un espace de coworking, on fonctionne à l'horizontal. Il n'y a pas de hiérarchie, pas de fonctionnement vertical. Il n'y a pas de compétition ni de jugement. Ça change pour un chef d'entreprise. Vous imaginez les pressions et tensions d'avoir toute une équipe. À qui on peut se confier quand on a des problèmes? Personne. C'est la jungle. Il y a peut-être des gens qui rêvent de vous piquer votre place. Ce n'est pas évident. Dans le coworking, il n'y a pas ce problème. ll peut venir travailler et échanger avec les autres, trouver des solutions à ses problèmes, avoir des avis complètement désintéressés, et même, on a un spécialiste en innovation dans notre espace de coworking. Eh bien, je peux vous dire qu'il en a fourni déjà des solutions à nombre des gens qui sont venus là, qu'ils soient des coworkeurs, qu'ils soient leurs clients, ou qu'ils soient des simples visiteurs. Et puis, il y a aussi des gens qui font du home office. Si vous habitez à Martigny et vous êtes amenés a travailler à Lausanne ou à Genève, peut-être, que si vous avez un patron sympa, il vous dira : « Ok, un jour par semaine tu peux travailler à la maison. » Alors, vous commencez à faire du home office. Sauf que vous n'avez pas l'habitude de travailler comme un indépendant, vous n'avez pas l'habitude de vous donner un cadre, une discipline, et ça n'est pas évident. En plus, les gens autour de vous, si vous êtes à la maison ils pensent que vous êtes disponible. Pour les enfants, c'est pareil. Vous êtes tenté d'aller dans le frigo. Il y a plein de tentations chez vous. La solution peut-être, effectivement, travailler un jour par semaine dans un espace de coworking. Évidemment, il ne faut pas que ça soit à Brigue ou à Bumpliz, car sinon vous n'avez rien résolu. Mais si vous en avez à côté de chez vous, c'est une excellente solution que d'aller travailler un jour par semaine, de faire du home office un peu en dehors du home, en fait. Maintenant, j'aimerais qu'on fasse une petite expérience. J'aimerais vous demander d'imaginer que vous venez de monter votre boîte de production d'événements. Votre boîte d'événementiel. Vous travaillez tout seul, et vous avez décidé de prendre une formule mi-temps dans un espace de coworking. Les coworkeurs, c'est vous. Les autres coworkeurs, c'est vous. Toutes les personnes qui vous trouvez ici. À la fin de la soirée, les organisateurs de TED viennent vous dire : « On sait que vous avez une boîte d'événementiel. Nous, on a trop de choses, l'organisation est devenue trop lourde, on aimerait que vous nous organisiez la soirée TED de l'année prochaine. » Vous êtes très honoré, vous prenez le mandat, vous discutez un peu les conditions, ok. Vous vous retrouvez dans votre espace de coworking et vous vous dites maintenant : « Comment je vais procéder ? » D'abord, le plus important, il faut penser au fond. Donc, cette soirée, par exemple, a un thème, ça s'appelle Galaxie. Vous dites : « Il va falloir trouver un thème. » Tout seul dans votre coin, votre petit brassage d'idées, ce n'est quand même pas évident. Peut-être que dans l'équipe ici, il y a quelqu'un qui a l'habitude d'animer des séances et qui serait capable de faire un brainstorming. Est-ce qu'il y a quelqu'un capable d'en faire un, qui en a déjà fait ? Je vois quelques doigts qui se lèvent au fond. Vous allez pouvoir faire du brassage d'idées, et toutes sortes de choses. Il ne faut pas que l'animateur, mais d'autres personnes pour ramener des idées. Je pense que vous allez trouver des personnes qui sont d'accord de donner un peu de leur temps pour que vous trouviez le thème de la soirée de l'année prochaine. Maintenant, vous avez le thème. Il faut que vous trouviez les orateurs. En fonction du thème, vous allez réfléchir à qui peut venir parler l'année prochaine. Peut-être que parmi vous il y a des gens. Le thème, je ne l'ai pas, c'est vous qui allez voir avec votre équipe ce que vous aurez comme thème. Peut-être que parmi les coworkeurs il y a des gens qui pourraient intervenir, qui ont des compétences, des ressources, du savoir, qui pourraient apporter leur expérience, leur vécu. Mais, s'il n'y a personne qui peut venir apporter sa compétence comme orateur, je suis sûre que parmi vous, il y en a qui connaissent des gens, ou qui ont entendu parler de gens qui peuvent venir assurer le rôle d'orateur pour TED l'année prochaine. Quand on a fait le brainstorming, on était dans l'entraide. Maintenant, on est dans le réseau. Chacun fait fonctionner son réseau et on trouve des solutions. Maintenant vous avez le thème et les orateurs, il faut que vous pensiez aux choses pratiques. Le lieu, c'est bon, vous allez le refaire ici. Mais il va falloir communiquer sur l'événement. Il va falloir que vous fassiez un programme, que vous mettiez les informations en ligne. Pour les mettre en ligne, il faut avoir quelqu'un capable d'écrire du texte, il faut avoir quelqu'un pour faire le graphisme. Vous avez compris comment ça marche. Vous allez trouver quelqu'un pour faire la communication et pour mettre les informations en ligne sur le site internet. Vous allez trouver un imprimeur, et je suis sûre que s'il n'y a pas tout ça parmi vous, vous connaissez des gens qui peuvent répondre à ces besoins. Là, il va falloir payer un peu pour les services, quand même. Je crois que TED vous aura donné un budget. Il faut trouver des partenaires, des sponsors pour financer l'événement. Mais là, c'est facile. Avec toutes les personnes qui sont ici, je suis sûre que vous avez des connexions avec des banques, avec des assurances, avec des privés qui ont de l'argent et qui sont prêts à soutenir l'événement, qui croient en TEDx. Alors, c'est bon. On a l'argent, on a le site internet, on a les informations, Il y a sûrement des choses que j'ai oubliées, mais vous allez y penser. Et maintenant, il reste une chose importante. C'est vous, en fait, c'est le public. Comment on va faire pour trouver du public ? Bien, on va faire fonctionner le réseau. Et puis, ça va être plein et mémorable, cette soirée. Alors voilà. C'est comme ça que ça peut fonctionner dans un espace de coworking. Là, on est dans la gestion de projet, mais il peut y avoir toutes sortes de configurations en fonction des coworkeurs. Les gens plus représentés dans les espaces de coworking, comme je vous l'ai dit, il y a les gens dans la communication, il y a des créatifs, il y a des graphistes. Chez moi comme je vous ai dit, il y a un traducteur, il y a un webmaster, il y a une spécialiste en communication sur le web. Depuis le début de cette semaine, il y a un chercheur qui s'intéresse à ce qui se passe en Grèce. Alors, je peux vous dire qu'il a du boulot. Et, c'est ouvert à toutes sortes de personnalités. On a des fois un peu dans l'esprit que c'est forcement des créatifs qui sont dans les espaces de coworking, j'ai aussi une spécialiste en finances et on pourrait imaginer un comptable, une fiduciaire, enfin, les possibilités sont infinies. Et les gens qui arrivent dans un espace de coworking bien souvent, ils se sont quand même un peu renseignés avant, ils sont déjà acquis aux valeurs du coworking. Alors, quelles sont ces valeurs ? Je vous en ai déjà parlé de manière informelle. La première de ces valeurs, c'est la durabilité. On a une connexion wifi, on a du matériel, et on met toutes ces ressources en activité à disposition des coworkeurs. La deuxième valeur, c'est la communauté. La communauté, c'est tous les gens qui travaillent dans un espace de coworking et c'est ce qu'on essaye de constituer avec ces personnes, en essayant de répondre à leurs besoins, en essayant de répondre à leurs attentes, en essayant de répondre à leurs valeurs. La troisième valeur est la coopération. Je crois que vous avez compris. je n'ai pas besoin de refaire l'exposé. C'est bon, on peut coopérer dans un espace de coworking. La quatrième valeur, c'est l'ouverture. On partage des expériences, on partage des idées, on s'enrichit mutuellement, on croît et on fait croître son entreprise. Et enfin, la dernière des valeurs, c'est l'accessibilité. Travailler, ok. Mais où, quand, comment et avec qui je veux, et c'est possible avec le coworking. Ces valeurs constituent les cinq piliers de base du coworking. Une fois qu'elles sont en place, elles sont génératrices de créativité, d'innovation, de partage, d'échange et de qualité. Je vous ai dit avant que le coworking était né en 2005 à San Francisco. En Suisse Romande, le premier centre de coworking a été ouvert à Lausanne. C'est « L'Eclau » et c'était en 2008. Il a vite été suivi par « La Muse » à Genève dont vous avez sûrement déjà entendu parler parce que c'est un endroit très dynamique, très médiatisé. C'est la référence du coworking en Suisse Romande, et depuis 2009, il a déjà accueilli plus de 400 coworkeurs. Depuis, il y a d'autres centres qui se sont ouverts, à Lausanne, à Fribourg, à Montreux, à Neuchâtel, à Genève également. L'espace Simplon 8, que j'ai fondé il y a une année, c'est le premier, c'est le seul, à ma connaissance, centre de coworking en Valais. Mais, par le réseau, j'ai entendu dire, qu'il y avait un centre en préparation à Sierre, qu'il y avait un centre en préparation à Colombais, et qu'il y a un centre en préparation à Sion. Alors, si vous êtes convaincu par le coworking, n'hésitez plus. Allez-y, foncez, faites l'expérience.
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La France change et il nous faut adapter notre système politique à ce changement. J'ai bien observé le modèle français et je l'ai compris. Dans ce marasme économique, nous avons besoin d'une France forte. Ensemble, réinventons notre système pour une société plus efficace, plus durable et plus juste. Liberté, égalité, fraternité, ce sont les valeurs de la République et elles sont méprisées. Aujourd'hui, je fais un rêve. Celui d'une République exemplaire. Je rêve qu'un jour notre nation se réveille et combatte son ennemi intérieur. Notre ennemi n'a pas de nom, pas de visage, pas de parti. Il ne présentera jamais sa candidature et pourtant, il gouverne. Cet ennemi, c'est le monde de la défiance. Nous traversons une crise de confiance sans précédent. Les Français ne croient plus dans notre modèle économique et politique. Il nous faut moraliser la vie publique et moraliser l'entreprise. J'aime l'entreprise mais je ne serai pas le président des riches. Moi, président de la République, je laisserais sa place à chaque Française, à chaque Français. Moi, président de la République, je déclarerais une guerre totale contre les injustices. Moi, prési... En fait, on ne peut plus faire de la politique comme ça. Je pense que vous en avez bien conscience, ça ne peut pas marcher ! Ce que je vous propose plutôt, c'est une anti-candidature présidentielle. Je vous propose qu'on soit tous co-président d'une autre société qu'il faut qu'on invente ensemble. Il y a un an, je suis parti pendant six mois faire un tour de France. Je suis parti sur les routes en stop. J'ai été pris par près de 500 conducteurs et à chaque fois que je rentrais dans une voiture, je lui demandais dans quelle société il avait envie de vivre demain et de ce qui posait les problèmes dans la société d'aujourd'hui. J'ai fait plus de 8000 km, je suis allé voir aussi des élus et des candidats aux élections municipales. C'est-à-dire que j'ai été rencontrer ces candidats, j'ai été dormir chez eux, j'ai été les interviewer sur leur vision de la démocratie et la société qu'ils aimeraient léguer demain à leurs enfants ou à leurs petits-enfants. Et je suis revenu de ce voyage, de ce tour de France, avec plein d'idées, plein d'envies et avec une conviction : c'est qu'il faut absolument qu'on ait une vision à proposer. Aujourd'hui, notre société, elle est en panne de vision. Je ne vais pas vous proposer une vision toute faite. J'ai juste quelques témoignages à vous apporter, quelques idées, quelques envies de choses à partager. La première, c'est que j'ai l'impression qu'il faut qu'on forme des citoyens. Des vrais citoyens, c'est-à-dire pas des gens passifs, qui vont être attentistes, qui vont attendre que la société leur dise quoi faire. Des gens qui sont capables d'agir par eux-mêmes. Pour ça, il nous faut des écoles de citoyens. Il faut que dans les écoles d'aujourd'hui, ce soit une école pour tous : pour les filles et les garçons et tous les âges. Qu'on puisse se former à n'importe quel âge, tout au long de sa vie. Il faut que ça soit une école basée sur l'échange réciproque de savoir. C'est-à-dire ne plus avoir le système des sachants qui, de manière descendante, vont décréter ce qui est vrai ou pas et donner leur savoir. Non, il faut qu'on soit sur du pair-à-pair. C'est-à-dire partager le savoir et les compétences qu'on peut avoir parce qu'on a tous des compétences à partager. Pour ça, on peut apprendre en faisant. C'est-à-dire être sur un mode projet, fonctionner en projet ou même fonctionner en laboratoire. Ne pas avoir peur de se tromper. En fait, l'échec, il fait partie du processus d'apprentissage et pour avoir des citoyens, il faut s'être trompé. Il faut se tromper tous les jours pour, derrière, pouvoir réussir. Il faut qu'on n'ait pas de notes dans cette école, pas de classement, pas de compétition parce que cette société dans laquelle on est, elle est préparée dès le plus jeune âge. Si on veut une société de la coopération, il faut une école de la coopération : c'est-à-dire qu'il faut qu'on puisse travailler en groupe, qu'on puisse copier. Il ne faut pas que ce soit interdit de copier - au contraire ! Regardez ce que fait le voisin et faites avec lui ! Mais même au-delà de l'école, il faut que toute la société nous pousse et nous prépare à devenir des citoyens. Quand devient-on citoyen aujourd'hui ? A 18 ans, on n'a pas le choix. On devient citoyen. On a un droit de vote qui nous arrive et puis, c'est à peu près tout. Ce qu'il faudrait, c'est peut-être remettre en place ou mettre en place une forme de service civil. C'est-à-dire, passer du temps au service du bien commun avant de devenir citoyen. Découvrir les institutions, découvrir et toucher du doigt l'intérêt général. Le jour où on devient citoyen, finalement, on devrait pouvoir le choisir. Entre 15 et 30 ans, je choisis quand je deviens citoyen, une fois que j'ai fait mon service civil, et je signe un contrat social personnalisé. C'est-à-dire un engagement que je prends envers la société et la société va s'engager aussi envers moi et on peut s'engager plus ou moins. La société nous délivre alors plus ou moins de services. Plus je contribue, plus je partage, plus la société va me donner. Alors ça, c'est des exemples qui sont issus de pistes que j'ai été voir sur ce tour de France. On avait le service militaire. On a aujourd'hui de plus en plus de jeunes qui sont en service civique et c'est quelque chose qui a l'air de tellement bien marcher que pourquoi ne pas le généraliser ? Il y a un maire qui m'a raconté une anecdote qui m'a beaucoup touché. Il me disait finalement : « Avant de travailler, j'ai fait mon service militaire et puis dès ma retraite, je me suis proposé pour être maire de mon tout petit village et j'ai fait un mandat de six ans, et c'est les deux moments où j'ai eu l'impression d'être connecté à l'intérêt général ou au bien commun. » Pourquoi ne pourrait-on pas être connecté à cet intérêt général ou ce bien commun tout le long de notre vie ? Donc, pour ça, après avoir fait le service civil, un contrat social personnalisé, pourquoi est-ce qu'on ne pourrait pas avoir un parrainage citoyen ? C'est-à-dire pouvoir se faire coacher par un autre citoyen sur la place qu'on pourrait avoir dans la société. Et au bout d'un certain temps, nous aussi, on pourrait devenir coach. C'est juste quelques idées mais finalement, l'objectif de ces idées ou de ces propositions, ce serait que cette société nous pousse à devenir des citoyens de plus en plus actifs. La deuxième idée dont je voudrais vous parler : c'est finalement pourquoi ne pas transformer le service public en services communs ? Au pluriel. Le service public, qu'est-ce que c'est ? Le service public, c'est les services que la société nous rend. Mais la société, c'est nous. C'est nous tous ici. Donc finalement le service public, c'est les services qu'on se rend les uns aux autres. Sauf qu'on passe par un intermédiaire. On a délégué ces services à une administration, à des élus, donc ce service public, on se le rend pas directement les uns aux autres. Est-ce qu'aujourd'hui, on n'est pas capable de se rendre plus de services les uns aux autres ? Est-ce que les plateformes collaboratives dont on parle, qui nous connectent, qui nous permettent de proposer des services : le covoiturage, c'est un service qu'on rend à d'autres, le « coach surfing », quand on invite, on dit : « Voilà, j'ai une place sur mon canapé. Vous pouvez venir dormir chez moi. » C'est des services qu'on propose aux autres. Est-ce qu'on peut pas imaginer ça à une échelle plus large et concernant les biens communs et le service public ? C'est ce qu'on appelle le service public aujourd'hui, c'est-à-dire, partir du service public pour le transformer en services communs, dans lesquels on est autant des contributeurs que des bénéficiaires. Les exemples que j'ai été voir qui m'ont inspiré cette idée, c'est des exemples tout bêtes de chantiers participatifs. Il y a de plus en plus de villes, notamment des villages qui ont recours à ces chantiers participatifs. Je pense à des villages sur le plateau de Millevaches ou à Trémargat, en Bretagne, où en fait la collectivité, les élus, disent : « On peut faire une partie du service public mais il y a énormément de choses qu'on pourrait faire ensemble si on met tous la main à la pâte. » Du coup, ils invitent à venir sur la place du village construire un nouveau bâtiment ou rénover quelque chose et finalement, c'est des gens qui viennent apporter du temps au service de l'intérêt général, au service du commun. Est-ce que, si on imagine ces communs, ces services communs, d'une manière extrêmement large, comme des services qui nous permettraient de nous procurer le minimum vital, c'est-à-dire, si on imagine de pouvoir vivre de ces services communs, qu'est-ce que ça donne ? Si on prend la pyramide de Maslow et qu'on prend toute la base, et qu'on se dit : « Ça, ça devient des services communs qu'on peut se rendre les uns aux autres : manger, boire, se loger s'habiller, vivre en sécurité, apprendre, se déplacer, communiquer... » Tout ça, ça pourrait être des services qu'on se rend les uns aux autres finalement, en passant par ce type de plate-forme. C'est une logique de gouvernement, de gouvernance comme une plateforme et ça devient une sorte de revenu de base qui est payé, non pas avec de l'argent, payé en nature. On pourrait aussi être équipé de cartes de citoyen qui nous permettent d'accéder à des plateformes de répartition du service public ou des services communs. De proposer nos propres services communs. Je sais faire quelque chose, je suis designer je veux mettre ça au service de la collectivité, eh bien, je le propose sur cette plateforme et on propose ce qu'on a envie de faire, ce qu'on sait faire, et la collectivité, en échange, va nous rendre des services, en échange des services que nous on propose. C'est finalement s'inscrire dans des missions d'intérêt général parce que, ce qui me paraît complètement fou, aujourd'hui, c'est qu'on s'aperçoit que la société est de plus en plus inégalitaire. Il y a plus de gens qui ont besoin de services et de l'autre côté, on a du chômage ou de l'inactivité ou des gens qui ne sont pas épanouis dans leurs activités et qui aimeraient agir plus dans le sens de l'intérêt général. Si on met ces deux besoins en regard, si on les connecte, qu'est-ce que ça donne ? Là, il y a déjà des débuts d'exemples aussi. Je pense au Conseil Général de la Gironde qui a mis en place une bourse d'échange de services et de savoir. C'est des pistes mais qui peuvent, à mon avis, nous emmener loin. Il y a un troisième exemple qui me semble primordial : c'est l'impôt. Aujourd'hui, on paie nos impôts en argent. Est-ce qu'on ne pourrait pas remplacer cet impôt par de la contribution directe ? Parce qu'en fait le principe même de l'impôt, j'ai l'impression qu'il est en train de mourir. Déjà, les entreprises et les contribuables les plus riches, ils réussissent à échapper à l'impôt et puis ce recours à l'impôt, il est bouleversé par le développement des monnaies mondiales ou locales, par les plateformes d'échange direct sur Internet, par la dématérialisation et la multiplication exponentielle des échanges qui deviennent du coup incontrôlables, par l'abandon progressif du pouvoir de création monétaire par les États-nations au profit de grandes banques, par la concurrence fiscale entre des États et du coup le recours accru à des paradis fiscaux, par la folie de la finance, le trading haute fréquence, les marchés spéculatifs... Tout ça, c'est en train de remettre en cause ce principe de l'impôt et pourtant toute notre société, elle est basée là-dessus. Si on essaye de contourner ce fonctionnement, qu'est-ce que ça donne ? Est-ce qu'on ne peut pas, pour éviter que l'argent se concentre dans les mains des plus riches, et continue à se concentrer dans les mains des plus riches, finalement créer une contribution-temps dans laquelle chacun doit consacrer un temps minimum au profit de l'intérêt général en contribuant directement à des services communs et en échange, on reçoit les services vitaux minimums, ce qui ne nous empêche pas de continuer à travailler, d'avoir la liberté de faire les deux. Il y a des exemples, là aussi, aujourd'hui qui bouleversent ce paysage-là, par exemple, des banques de temps, des systèmes d'échange locaux, des « SEL ». Le Bitcoin qui est une monnaie mondiale et qui pose ces questions de la monnaie ou toutes les monnaies citoyennes et locales : le SoNantes à Nantes, le Symba en Ile-de-France, le Sol-violette à Toulouse, et un peu partout, il y a des monnaies qui se créent. Ça revient remettre en cause cette place aussi de l'impôt. Et le quatrième sujet qu'il faut aborder, c'est, d'après moi, la démocratie. On en parlait en introduction. Qu'est-ce que c'est, ce mot « démocratie » ? Aujourd'hui, je pense qu'il faut une nouvelle démocratie pour le XXIème siècle mais notre système représentatif a été inventé, il faut bien se rendre compte, à une époque où 80% des gens ne savaient pas lire ou écrire, à une époque où la radio, la télé et Internet n'existaient pas, et quand on prend le mot « démocratie », ça veut dire « le pouvoir aux gens. » On a énormément gagné en pouvoir d'agir individuel. Internet, ça change la manière qu'on a de s'informer, de communiquer, de travailler, de se former... Est-ce qu'on ne pourrait pas aujourd'hui gagner aussi en pouvoir de décider et d'agir collectivement ? Est-ce qu'on ne pourrait pas, au lieu de déléguer notre pouvoir de décision et d'action à une administration ou à des élus, reprendre une partie de ce pouvoir et avoir un autre rôle pour les élus et les administrations qui soit plus l'animation de ce pouvoir, qui soit plus l'encadrement de ce pouvoir mais qu'on le récupère nous-mêmes ? Est-ce qu'on ne pourrait pas écrire ensemble des nouvelles règles du jeu ? Ne plus penser à la Constitution au singulier mais la conjuguer dans tous les territoires, un peu comme des poupées gigognes, parce qu'à l'échelle du quartier, on a besoin de nouvelles règles du jeu. A l'échelle du bassin de vie aussi, à l'échelle de la région, à l'échelle de l'État-nation, à l'échelle du continent ou de la planète. Là aussi, on a des enjeux globaux qu'on a en face de nous et il faut qu'on ait des règles du jeu, une organisation qui nous permette de répondre à ces enjeux. Donc des constitutions complémentaires, qui aillent du local au global et qui soient écrites par les citoyens pour les citoyens. Et finalement, est-ce qu'on ne pourrait pas tous proposer un projet d'intérêt général sur les plateformes de répartition des services communs ? C'est-à-dire que, moi ou mon parti politique, si je suis dans un parti, ou mon association ou mon organisation, propose quelque chose en disant : « Ça, je pense que ça irait dans le sens de l'intérêt général et je suis d'accord pour l'animer. » Et qui est-ce qui déciderait si, oui ou pas, ça va dans le sens de l'intérêt général, ça pourrait être des jurys citoyens, des groupes de citoyens tirés au sort, formés, informés, qui peuvent aller voir des experts, débattre de manière contradictoire, et décider si, oui ou non, ça va dans le sens de l'intérêt général, parce que tout le monde est capable de situer l'intérêt général après en avoir débattu. C'est comme les jurys citoyens : tout le monde est capable de dire « coupable » ou « innocent » après en avoir débattu. Là aussi, il y a des exemples qui commencent à arriver. Je pense par exemple à des villes qui mettent en place des tableaux de bord qui permettent de piloter et de rendre transparent les politiques publiques. Et en fait, on voit la politique publique se faire au fur et à mesure. Aujourd'hui, on ne peut pas encore y participer, mais Internet change déjà la manière qu'ont les collectivités de gouverner. Je pense qu'il n'y a pas besoin d'attendre que les choses changent à l'échelle nationale ou mondiale pour agir. On peut déjà construire des nouvelles règles du jeu et les expérimenter. On peut déjà mettre en œuvre des nouveaux types de fonctionnement dans nos quartiers, dans nos villages, et c'est un peu dans ce sens-là que le collectif avec lequel j'agis, Démocratie Ouverte, est en train de proposer un programme qui s'appelle « Territoire hautement citoyen » et qui propose aux collectivités locales d'animer et d'expérimenter des transitions démocratiques locales. Durant tout mon tour de France, à chaque rencontre, j'ai demandé à celui qui m'accueillait de me dessiner le monde dans lequel il rêverait de vivre. Et vous ? Si vous deviez dessiner une société idéale, laquelle est-ce que vous dessineriez ? A quoi ça ressemblerait ? Après avoir passé six mois à poser inlassablement cette question, j'ai eu envie d'y répondre. C'est ça qui a inspiré cette anti-candidature présidentielle, c'est ça qui inspire le bouquin que je suis en train d'écrire, c'est ça qui inspire Démocratie Ouverte et le collectif dans lequel on travaille, et ce que je vous invite à faire ce soir, c'est à redonner ses lettres de noblesse à la politique. Parce qu'en fait, tous ces problèmes que notre société rencontre, dont on parle ce soir, ils viennent avant tout de la manière dont on s'organise pour vivre ensemble sur la planète. Autrement dit, c'est des problèmes qui sont profondément politiques, des problèmes de gouvernance et on constate que la société ne tourne pas rond. Là-dessus, on est d'accord, il y a des choses à changer mais quand on regarde de plus près, on se rend compte que le monde, il est déjà en train de se métamorphoser. Quand on prend une loupe, on regarde que les racines de ce nouveau monde, elles sont déjà là aujourd'hui. Ceux qui font le monde de demain, ils sont en train de porter des alternatives au modèle dominant. Il y en a sûrement beaucoup dans la salle. Il y en a un peu partout, en France et dans le monde. Alors ce soir, j'ai une chose à vous proposer : allons-y ! Lançons-nous ! Soyons du côté des solutions plutôt que d'être du côté de la dénonciation des problèmes. Arrêtons de tirer les sonnettes d'alarme ! Agissons concrètement dans nos vies et n'attendez pas 2017 pour devenir co-président de cette nouvelle société. Merci.
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Eh bien moi, je suis paysanne. Alors je vous dis paysanne, j'aurais pu vous dire agricultrice, fermière, maraîchère. Mais j'aime beaucoup ce concept, ce vocable de paysanne parce que, au-delà de ce qu'il signifie, les paysans sont vraiment ceux qui travaillent la terre, qui travaillent le sol, qui mettent les mains dans la terre comme tu le disais tout à l'heure. Mais il y a aussi cette notion de façonner les paysages. Les paysans, ce sont eux qui façonnent les paysages de nos pays. Et c'est ce que nous faisons! Quand je dis "nous", c'est Charles, mon mari et puis moi-même puisque nous avons créé il y a 5 ans de cela une ferme qui s'appelle « La ferme biologique du Bec Hellouin ». Vous allez voir quelques images défiler pendant que je parle. Et on a vraiment créé ça de A à Z. On avais juste racheté une longère en Normandie, c'était un herbage, il y avait un petit verger et on a recréé une ferme. L'aventure commence un petit peu plus tôt qu'il y a 5 ans, c'était il y a 9 ans. En fait, nous étions des citadins ; nous avions tous les deux une autre vie avant. Et on était dans cet espèce d'idéal, dans ce rêve d'autosuffisance. Pour moi ça passait par : j'ai envie de donner de bonnes choses à manger à mes enfants ; j'ai sérieusement envie de prendre mes distances avec cette société de consommation sur laquelle je commence à m'interroger ; donc j'étais en quête. Et donc on s'est mis à faire notre petit potager, à cultiver des légumes, comme ça, et puis Charles un beau jour m'a dit : « Ah! Moi, j'aime tellement ça que j'ai envie d'en faire un métier. » Moi j'ai dit : « Ben écoute, super pour toi! Tu le fais, moi je vais aller faire autre chose ailleurs parce qu'à la fin de la journée, quand même le dos, bonjour! » Donc, je lui ai dit : « Je te donnerai quand même un petit coup de main de temps en temps. » Et vous imaginez bien ce que ça donne, quand on donne un coup de main, finalement on saute à pieds joints dedans. Et c'est ce qui m'est arrivé... Inutile de vous dire que les deux premières années furent une véritable galère. Et je ne vous dis pas ça parce que Charles, mon mari, était marin dans une précédente vie, Ouf ouf ouf! C'était vraiment difficile! Et ce n'était pas difficile parce que nous étions nous. Enfin si, peut-être. Parce que nous arrivions là avec un soupçon de créativité, une pincée de connaissances agricoles, un chouïa de réalisme, et des brouettes entières d'idéalisme et de grande naïveté. Donc ça a été difficile, mais ce parcours du combattant qu'on a traversé, les porteurs de projets aujourd'hui, c'est à dire les personnes qui ont envie de faire un retour à la terre, comme on a pu le faire, le vivent encore, accéder au foncier, se former en technique d'agro-écologie, toutes les techniques agricoles respectueuses de la terre et de l'environnement ; être aidé techniquement, être aidé financièrement, parce que c'est une difficulté que de faire la césure entre deux vies; eh bien, c'est compliqué! Et pour toutes ces raisons-là, au bout de deux ans, j'étais vraiment prête à tout abandonner. Je disais : « Moi, l'autosuffisance c'est mon truc, mais faire ça comme ça, non! » Et puis un jour, un jour est arrivé un article avec un mot : permaculture ! Et là, ce fut la révélation, une vraie révélation. Je ne sais pas s'il y en a des fausses, mais ça c'en était une vraie. En fait la permaculture, qu'est ce que c'est ? C'est un mot qui vient de l'anglais, c'est une scission de mots, en fait. Une fusion de mots, pardon, plus qu'une scission. Et en anglais on dit « permanent agriculture », donc l'agriculture permanente. Jusque là, ça ne parle pas trop. En fait, c'est un concept, c'est presque une philosophie ou une science, la permaculture, qui vise à concevoir des ensembles, des systèmes, à les designer d'une certaine façon. Et pour ce faire, on utilise tout un tas de principes mais les trois buts ultimes sont de rendre des ensembles ou des systèmes, -- alors quand je dis un ensemble, un système, chez nous c'est la ferme, mais un ensemble ou un système, ça peut être un groupe de personnes, ça peut être une entreprise, ça peut être une ville, pourquoi pas ? Donc, c'est rendre ces systèmes économiquement viables, environnementalement durables et socialement équitables. Paradis sur terre, me direz-vous! Alors cette permaculture, elle a une éthique ; l'éthique c'est de systématiquement respecter l'humain, respecter la terre et puis de partager les ressources, les richesses, d'une certaine façon. Elle se décline en tout un tas de principes ; il y en a une bonne vingtaine, je ne vais bien évidement pas vous les énumérer ce soir, mais j'aimerais en illustrer quelques-uns parce que la permaculture est un système tellement simple, c'est tellement du bon sens que c'est excessivement compliqué à expliquer, finalement. Donc ces quelques principes, je vais vous en citer, allez, 3 ou 4. Le premier, c'est que les déchets des uns peuvent être les ressources ou les trésors des autres. Le second, et c'est ce qu'on n'a pas fait du tout au départ, parce qu'on ignorait la permaculture, c'est qu'il faut commencer tout petit ; plus on a un système petit, plus on y accorde de soin et d'attention, plus il va prospérer, quels que soient les fruits, les yields, comme disent les Anglais, que vous vouliez en tirer. Ensuite, dans un système en permaculture, on dépense un minimum d'énergie, que ce soit d'énergie fossile, typiquement du pétrole, ou même l'énergie humaine. On fait tout pour faire en sorte d'économiser l'énergie et donc, d'une certaine façon la pénibilité au travail. Et enfin, dans un système permaculturel, une fonction peut être remplie par plusieurs éléments et un élément a plusieurs fonctions. Et c'est ce système-là que je vais vous expliquer, que je vais vous illustrer concrètement. On imagine la ferme comme un cercle. Nous à la ferme, on travaille en traction animale, c'est-à-dire qu'on travaille le sol -- alors c'est un travail très léger, il ne s'agit pas de labour, mais on travaille avec le cheval ou l'âne ou les poneys, donc nous sommes en traction animale. Imaginez dans ce cercle, notre cheval de trait, Winnick. Ça ce n'est pas Winnick, c'est Inu, le chien. Donc on va voir Winnick tout à l'heure. Donc si on met Winnick dans notre système, dans notre cercle, qu'est-ce qu'il a comme fonctions? Je vous ai dit : il fait un travail du sol, il nous aide à porter les charges lourdes, c'est une tondeuse écologique, donc d'une certaine façon il entretient la ferme. Le voilà Winnick qui mange mes radis. Il mange éventuellement les résidus de culture, et puis je vous avoue que je préfère de loin ma relation en tant que collègue de travail avec Winnick plutôt qu'avec un tracteur, parce qu'en termes de bruit et d'odeur... quoique Winnick n'en est pas exempt parfois, mais bon! Au moins il nous donne du crottin et donc du fumier. Donc vous comprenez bien la chose : Winnick a plusieurs fonctions sur la ferme. Mais en même temps, si je prends une fonction de Winnick, me donner de la matière organique, c'est tout bête, la matière organique il y a d'autres personnes dans la ferme qui peuvent le faire, d'autres personnes ou d'autres éléments... Ben, si je prends les poules, elles me donnent aussi du fumier. Mes résidus de culture, ils me donnent aussi du compost. Donc je n'ai jamais de rupture. Vous voyez mon cercle? Il y a toujours la quadrature du cercle, comme on pourrait dire. Il n'y a jamais un maillon de la chaîne qui peut être manquant parce que tout le monde peut toujours arriver et combler ce rôle-là. Et l'interaction est permanente entre les différents membres et les différentes fonctions. Et on s'est dit au bout d'une année, une année a suffi, on s'est dit : « Mais ce système est absolument fabuleux ! » Parce qu'on a mis en place les techniques de permaculture ; alors je ne vais pas passer à des techniques agricoles, ce serait trop fastidieux, mais on a mis en place toutes ces techniques de permaculture, notamment la culture sur buttes qu'on voit à un certain moment, et d'un coup en une année, donc 2 saisons, l'été et l'hiver, on a vu la production quasiment doubler de façon assez extraordinaire. Alors on s'est dit: « C'est quoi ? C'est la chance du débutant, le hasard, le fait qu'on a un super sol ? » Mais non, on n'a pas un bon sol du tout. On a que 10 centimètres de bon sol, certes. Mais après c'est du caillou qui remonte tout le temps, donc il faut enlever le caillou, ce qui n'est pas forcement évident, donc ça n'était pas ça. C'est vraiment la conception de la permaculture en tant que telle, parce qu'au final, qu'est-ce que c'est? Les concepteurs de la permaculture, quand ils l'ont découverte, quand ils l'ont mise au point, parce que finalement ils n'ont rien inventé du tout, ils ont juste fait une synthèse, une synthèse des bonnes pratiques qu'il y a pu y avoir à travers le monde, pendant des millénaires, sous toutes les latitudes ; et comme leur dada c'était l'agriculture, ils se sont dit : « Mais, si on observe un écosystème, un écosystème à l'état naturel, c'est-à-dire non transformé par l'homme, qu'est ce qu'on observe ? » Et ils ont noté toutes les règles de la nature sans que l'homme n'intervienne. Et ils se sont dit : « Mais voilà! C'est ça qu'il faut qu'on fasse ! » C'est qu'il faut faire produire la nature en fonction et en vertu de ses lois, de ses principes, et arrêter de la forcer, de l'exploiter. Vous savez on dit : « On est des exploitants agricoles. » Ça veut bien dire ce que ça veut dire... Donc faisons produire la nature selon ses propres principes, ses propres règles. Alors, il y a tout un cheminement à faire qui n'est pas forcément évident, parce que on n'a pas été formé comme ça. Quand vous devenez agriculteur, on ne vous dit pas : il faut replanter des haies, il faut avoir une biodiversité, il faut attirer les petits oiseux, il faut attirer les pollinisateurs, il faut qu'il y ait une interaction entre vos différentes plantes et vos différentes éléments dans la ferme. Non, non ! On ne vous apprend pas ça, du tout ! Et au bout de la deuxième année, me semble-t-il, de pratique de la permaculture, la rumeur a commencé à se répandre, tant et si bien que des scientifiques ont eu vent de ce qu'on faisait à la ferme. Et on a vu arriver des ingénieurs de l'INRA, d'AgroParisTech, de groupements d'ingénieurs agronomes. Et ils nous ont dit : « Mais écoutez, nous ça nous intéresse ! des petits systèmes comme ça qui finalement... » C'est quoi un petit écosystème en permaculture? Ça n'est rien d'autre que du biomimétisme : on copie la nature pour pouvoir produire. « Nous on aimerait bien étudier avec vous ce système-là. » Et donc depuis quelques semaines maintenant, on a mis en place à la ferme une étude menée par l'INRA et AgroParisTech. Et toutes les expériences se font à la ferme, et ils notent tout : tout ce qui rentre, tout ce qui sort, les productions, les intrants naturels, etc. Tous les phénomènes, notre temps de travail, la qualité de travail que l'on mène, etc. Et on se dit : si cette étude, la première phase de l'étude va se terminer dans un an, si cette étude donne les résultats escomptés, et les résultats escomptés, c'est d'essayer de prouver que sur mille mètres carrés, donc mille mètres carrés c'est tout petit, hein, c'est un dixième d'hectare, on pourrait éventuellement faire vivre, décemment, une personne. Révolutionnaire dans le paysage agricole actuel parce que aujourd'hui les agriculteurs, c'est quoi ? C'est sur 150 hectares, un énorme tracteur, une énorme moissonneuse-batteuse, l'agriculteur qui regarde son DVD parce que tout est fait par le GPS ; et il n'y a plus de rapport avec la terre. Donc on se dit si on en revient à un système tel qu'il pouvait être à Paris dans le 18ème, au 18ème siècle... Paris au 18ème siècle était autosuffisante intra-muros en terme de production de légumes et de fruits. Vous me direz : la population n'était pas la même, le type de vie n'était pas le même, c'est vrai que la traction animale, ils connaissaient donc il y avait du fumier en abondance, etc, etc. Mais imaginez la révolution dans le paysage agricole actuel, et quand je dis paysage agricole, c'est fondamental pour tout le monde. C'est produire la nourriture, c'est produire ce que vous mangez au quotidien. Aujourd'hui tout peut s'arrêter sauf la production de nourriture, bien évidemment. Donc si on arrivait à prouver que cela, ça fonctionne, eh bien, on imagine un maillage du territoire, de petites fermes, de petites entités qui produisent beaucoup parce que produire, dès lors qu'il y a une éthique et un respect de la terre, ça n'est pas du tout un gros mot. Moi, je suis très fière de dire aujourd'hui que notre production est très intensive. Donc imaginez, deux gros mots : « productif » et « intensif ». Mais non, c'est une réalité. Et là, on tordrait le cou à tous ceux qui nous disent : « Oui, mais le bio, l'agro-écologie, ça ne peut pas nourrir le monde, ça ne va pas arrêter la faim dans le monde. » Eh bien, si! Bien évidement, on n'a pas encore les résultats de l'étude mais on perçoit un petit peu tout ça. Et j'imagine que les agronomes qui travaillent avec nous le font aussi, sinon, ils ne se seraient pas donné la peine de mener cette étude. Donc tordre le cou à tous ces gens qui nous disent : « Non, on ne peut pas arrêter la faim dans le monde avec ça. On va être neuf milliards dans quelque temps, on ne peut pas nourrir tout le monde ! » Mais si ! On va pouvoir. Si on arrive à répliquer ces petites entités par ci par là, on va pouvoir. On va pouvoir aussi adresser des problématiques telles que le chômage ; Oui, ce sont des systèmes très intenses en main-d'œuvre et pourquoi pas ? Il y a combien de chômeurs dans notre pays ? Moi, j'étais juriste internationale avant. Je suis paysanne. Je ne suis pas déshonorée du fait de mettre mes mains dans la terre tous le jours, d'avoir un petit peu le dos qui fait mal, surtout en début de saison, comme ça... et d'être penchée à longueur de journée. J'aime ce métier, je l'ai pris à bras le corps et c'est une passion. C'est techniquement très pointu, intellectuellement, c'est un challenge renouvelé jour après jour et c'est absolument passionnant. Et je suis fière de pouvoir nourrir les gens avec ce que je fais. Donc, résoudre une problématique du chômage, recréer de la dynamique dans les territoires, du lien social parce que nous, on commercialise la plupart de nos produits en circuit court donc forcément, en circuit court vous rencontrez la personne à qui vous vendez les produits et vous êtes fier ou alors, vous êtes un petit peu gêné pour lui expliquer, ben dans la laitue qu'elle a eu la semaine dernière dans son panier il y avait six limaces. Ben oui, on a un petit problème de limaces parce qu'on est en zone très humide. Mais voilà, c'est ça aussi l'échange. Vous dites : ce n'est pas grave, c'est une laitue qui est végétale et qui apporte un petit peu de protéine en même temps. Bon, petit raccourci. Donc voyez, cette étude est vraiment un challenge pour nous mais si nous y arrivons, moi je rêve du jour où on va pouvoir adapter tous ces principes de permaculture à l'agriculture, oui ! Mais pourquoi pas à d'autres systèmes? L'éducation, les hôpitaux, les entreprises, tout ce lien, ce cercle que je vous décrivais tout à l'heure avec cette interaction, tous ces principes, cette éthique, pour moi, c'est tout à fait transposable et applicable à plein d'autres domaines. Vous savez depuis le début de l'Humanité, je pense qu'on a vécu des transitions énergétiques tout le temps; aujourd'hui on est en plein dedans avec toute une problématique environnementale qui vient s'y ajouter mais de tous les temps, les humains ont fait preuve de trésors d'ingéniosité et de créativité pour dépasser ces problèmes, trouver les solutions adéquates. Moi je pense qu'aujourd'hui on peut faire de même avec des systèmes vertueux comme celui-là. En se remettant en question, en utilisant la permaculture. Et pour moi véritablement ce métier, il a comblé tout ce dont j'avais besoin. J'ai toujours fait beaucoup de sport à haut niveau ; du basketball notamment. Je vous dis : j'ai été juriste internationale, j'ai toujours eu besoin de cet équilibre entre le physique et l'intellectuel et je suis comblée. Et cette reconnaissance, peut-être que j'attendais avant en faisant carrière en faisant carrière très vite, très jeune, avec beaucoup d'ambition, ben, je crois qu'aujourd'hui je l'ai trouvée. C'est une reconnaissance, je fais mon métier, je suis utile. Je ne vais pas dire que c'est la fin d'une quête ; c'est presque le début : j'ai trouvé à quoi je servais sur cette Terre. Et autant j'ai pu vous dire qu'au début, notre expérience était vraiment compliquée, autant je peux dire aujourd'hui que nous ne sommes plus seuls. Quand je vois les AMAP, les villes en transition, quand je vois tous nos intervenants ce soir, je crois qu'il y a vraiment un mouvement qui est en marche. Mon mari, Charles, que je taxe souvent d'idéalisme un peu naïf, me dit toujours : « Mais il y a un monde qui est en train de mourir et un autre est en train de naître. » Ben, je pense qu'en fait il a raison. Et ce mouvement qui est en marche, c'est nous ici ce soir qui venons parler, c'est vous dans la salle qui vous intéressez à nous et à ce qu'on fait. Et pour moi, ce n'est pas une mode, ce n'est pas une vague, ce serait plutôt un raz-de-marée, un tsunami mais salvateur celui-là. Merci.
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J'aimerais vous poser une question : est-ce que vous avez envie de vivre dans une planète dont les océans seront essentiellement vidés de poissons et où les poissons auront été remplacés par des méduses ? C'est en gros ce qui risque de nous arriver entre 2040 et 2050 si nous continuons à pratiquer la pêche industrielle en eaux profondes comme nous le faisons maintenant. Autre question : est-ce que vous et moi on a vraiment envie de vivre sur une planète où il n'y aura plus d'abeilles ? Parce qu'on les aura toutes tuées à force d'utiliser des néonicotinoïdes dans l'agriculture intensive telle qu'on la pratique aujourd'hui. C'est déjà ce qui arrive dans certaines régions de la Chine où des femmes pauvres, rurales pollinisent à la main. A-t-on a vraiment envie, vous et moi, de vivre sur une planète dont les campagnes n'auront plus d'oiseaux ? Il faut poser cette question aujourd'hui vu la vitesse à laquelle les oiseaux disparaissent. Toutes ces questions, qui plombent un peu l'ambiance, ce sont des questions qui relèvent toutes du même défi, l'immense défi écologique que nous avons devant nous. Et il faut admettre que nous n'avançons pas très vite dans la réponse articulée que nous devrions apporter à ce défi gigantesque. Ce que je vous propose, c'est deux points. Premièrement, les obstacles à surmonter pour essayer d'apporter des réponses. Et deuxièmement, quelques solutions que nous avons devant nous. Premièrement : les obstacles. Je fais partie des économistes - je crois que l'un des obstacles, c'est les économistes. Parce qu'eux-mêmes sont habitués à penser le monde comme s'il y avait uniquement du capital et du travail. Et pour les économistes, le capital, c'est essentiellement de l'argent - donc vous imaginez des billets de banque et des lignes de code sur des écrans d'ordinateur car l'essentiel de la monnaie aujourd'hui, c'est des lignes de code informatique. Et en face, le travail, c'est ce que nous fournissons tous les jours, quelquefois même le week-end. Et vous voyez bien que du capital sans énergie et sans matière en fait ça n'existe pas. Les ordinateurs, pour les faire tourner, il faut de la matière et de l'énergie. Et puis vous et moi, pour fournir du travail sans énergie, sans nourriture par exemple, on en fournira à peu près autant qu'un cadavre. Et donc le monde que nous autres, économistes, nous analysons, c'est un monde peuplé de lignes de code informatique avec des ordinateurs en panne - il n'y a plus d'énergie - et de cadavres. Vous voyez qu'avec ça, c'est assez compliqué d'essayer d'appréhender intelligemment les défis écologiques. Première difficulté, nous ignorons complètement la matérialité physique de notre vie. Deuxième difficulté, nous faisons comme si cette matérialité physique nous dispensait d'avoir à affronter la limitation des ressources naturelles. Or, même pour faire fonctionner un petit bijou électronique comme ceci, que certains d'entre nous ont dans leur poche, il faut énormément de métaux et d'énergie. Ces métaux ne sont pas en quantités infinies sur la planète. Il y en a un certain nombre, par exemple le cuivre, dont probablement nous allons atteindre le pic d'extraction mondial avant 2060. Ça ne veut pas dire qu'il n'y en aura plus après 2060, il en restera, mais ça veut dire qu'après 2060, très vraisemblablement, on n'arrivera plus à augmenter la quantité de cuivre que nous extrayons du sous-sol tous les jours, car les réserves encore disponibles auront une densité tellement faible qu'on ne pourra plus augmenter cette quantité. Même chose pour le pétrole, qui risque vraisemblablement d'atteindre son pic d'extraction, toutes techniques confondues, avant 2060. Or, notre prospérité dépend de manière cruciale de cette énergie et de ces métaux. Par exemple, là, pour vous parler, il faut de l'électricité pour se voir et s'entendre - c'est l'énergie. Si on n'en a plus, les choses vont changer assez radicalement. Mais nous économistes, sommes incapables de le prendre en compte parce qu'on vit dans un monde où il n'y a que des lignes d'écrans d'ordinateur et du travail qui est fourni par des cadavres. Troisième grande difficulté : on utilise des indicateurs qui sont très mauvais. Le pire de tous est probablement le PIB, dont on a tous entendu parler, le Produit Intérieur Brut, qui sert de boussole universelle à toutes les politiques publiques. Par exemple, demandez-vous quelle est la boussole qui sert à discuter des projets de loi de finances en France, eh bien, c'est le PIB. Sauf que, par exemple, si vous faîtes un accident sur l'autoroute parce que vous répétez votre talk TEDx sur l'autoroute en conduisant, cela fait augmenter le PIB. Si vous polluez une rivière, cela fait augmenter le PIB, parce qu'il faut dépolluer la rivière, désintoxiquer les gens qui sont malades, les soigner. Tout ça sont des services marchands qui font augmenter le PIB. A telle enseigne qu'un économiste britannique, John Maynard Keynes, disait dans les années 30 : « Pour augmenter le PIB, ce n'est pas compliqué, le lundi, vous faites faire des trous, le mardi, vous faites reboucher les trous, le mercredi, vous refaites faire des trous, etc. » En fait, cela veut dire que le PIB nous envoie dans le mur doublement, parce qu'il nous empêche de prendre en compte la raréfaction des ressources naturelles, alors que c'est un enjeu majeur pour la transition écologique. Et en plus, il nous conduit à une vie absurde dans laquelle beaucoup d'entre nous ont ce qu'on appelle des « bullshit jobs » qui consistent à faire des trous, les reboucher, les refaire, etc. Quatrième obstacle, en plus de tout ça, et particulièrement le PIB, la plupart d'entre nous, économistes, ignorons totalement les rapports sociaux. Et si vous réfléchissez une seconde, vous vous dites : « Au fond, qu'est-ce qui fait le sel de l'existence ? » Les relations humaines qu'on entretient les uns avec les autres. Les relations d'amour, d'amitié, de fraternité. Si on oublie ça, on est peut-être un peu passé à côté de l'essentiel de la vie. Sauf que cela ne se mesure absolument pas avec le PIB. Donc vous voyez, le PIB nous envoie trois fois dans le mur, nous empêche de saisir l'essentiel de l'existence, ne nous permet pas de voir notre dépendance aux ressources naturelles et nous conduit à une vie complètement absurde. Je crois que ce sont les obstacles principaux. Deuxième grand sujet : comment sort-on de ça ? Alors d'abord, le thermomètre étant mauvais, il faut changer de thermomètre, d'indicateur. Heureusement, il y a pas mal d'indicateurs alternatifs qui existent, et pas mal d'économistes qui cherchent à construire des indicateurs alternatifs au PIB. Parmi ceux-ci, j'en retiens un. Ce sont des amis, deux économistes de Lille, Florence Jany-Catrice et Jean Gadrey, qui ont construit avec des citoyens des Hauts-de-France un indicateur de prospérité participatif. Comment ? Ils ont réuni des gens comme vous et moi dans une salle comme ici, leur ont expliqué rapidement comment construire un indicateur macroéconomique, et ensemble, ils ont brainstormé : c'est quoi pour nous le sens de la vie, au nom de quoi voulons-nous être prospères et comment est-ce qu'on va mesurer ça ? Évidemment, vous voyez bien que ce type de recherche participative, c'est complètement orthogonal à la vision top-down de la construction du PIB par des experts dans leur bureau. Deuxième exemple d'indicateur alternatif, c'est le Bhoutan qui a troqué le PIB contre le Bonheur national brut. Cela prouve que la lutte pour les indicateurs alternatifs, elle avance, même si on n'a pas encore gagné. Vous voyez qu'il ne suffira pas de changer le thermomètre, il faut aussi, je crois, changer de modèle économique radicalement si on veut apporter une réponse au défi écologique. Et pour ça, ça suppose premièrement d'intégrer dans les prix la vérité du désastre écologique qu'induit la production d'un certain nombre de biens et services que nous consommons. Tant que ces prix ne refléteront pas ça, on sera toujours à côté de la plaque. Comment le faire ? Une manière parmi d'autres, c'est d'instaurer par exemple une taxe carbone. On en a parlé en France ces dernières années. Suisse et Suède l'ont fait avec des taxes très élevées supérieures à 90€ la tonne. On n'a pas entendu parler de faillite monumentale en Suisse et en Suède. On l'a fait en France, mais timidement, et certainement il faut aller beaucoup plus loin. Sans doute, vous avez l'intuition qu'il ne suffira pas de faire redonner aux prix la vérité des désastres écologiques que nous produisons. Si on veut changer de modèle, il faut aller beaucoup plus loin. Ma conviction, c'est qu'il faut que la puissance publique s'investisse nettement plus dans la transition écologique. L'une des raisons de ceci, c'est que les estimations qu'on a pu faire entre économistes du coût global mondial des infrastructures vertes qu'il faut mettre en place pour que nous transmettions une planète vivable à nos enfants à la fin du siècle, ce coût on peut l'estimer entre 50 000 et 90 000 milliards de dollars. Ce sont des sommes tellement astronomiques qu'on ne sait plus à quoi ça correspond. C'est de l'ordre de grandeur du PIB mondial, donc c'est de l'ordre de grandeur de la richesse que la planète tout entière produit chaque année. C'est une somme colossale. Et le secteur privé mondial, on le sait dès aujourd'hui, ne sera pas capable de payer cette facture. Pourquoi ? Parce que le secteur privé est déjà lui-même très endetté, plus endetté en fait que la puissance publique. Donc je fais partie de ceux qui croient qu'il faut absolument que la puissance publique aide à financer en France, par exemple, la rénovation thermique des bâtiments, des bâtiments publics, du résidentiel privé, la mobilité verte - on en parle beaucoup en ce moment : plus de trains et la réhabilitation du réseau ferroviaire dans les campagnes. Et pour les quelques voitures qui vont rester, des voitures électriques ou des voitures à hydrogène. Ça veut dire aussi une agriculture verte et ça veut dire des processus industriels verts. Donc vous sentez déjà que la transition écologique, c'est beaucoup plus qu'un peu de technique, c'est un vrai projet de société. Une fois qu'on s'est dit tout ça, je suis sûr que vous vous demandez : « Mais moi, comme humble citoyen, qu'est-ce que je peux faire ? » Il y a une deuxième question, non moins importante à mon avis : finalement, c'est quoi la racine du diagnostic de la contribution de l'humanité à la crise écologique ? Je crois qu'une des réponses à cette deuxième question, c'est une absolutisation indue de la propriété privée. Si vous y réfléchissez, par exemple aux États-Unis, lorsque vous êtes propriétaire de votre jardin, vous êtes aussi propriétaire du sous-sol de votre jardin. Et donc si vous trouvez du pétrole en creusant dans votre jardin, personne n'a le droit a priori de vous empêcher de sortir ce pétrole de terre, même si l'extraction de cet hydrocarbure fossile va provoquer des émissions de gaz à effet de serre qui vont avoir des conséquences cataclysmiques sur la planète. Ça, c'est parce que nous avons tendance à absolutiser la propriété privée. Prenons l'exemple des poissons dans les océans que je mentionnais tout à l'heure, ce qui tue la ressource, donc le stock de poissons dans les océans, c'est leur privatisation, c'est qu'un certain nombre de pêcheries, considèrent que le stock de poissons, c'est un bien privé dans lequel elles peuvent puiser. Vous voyez bien aussi qu'on ne peut pas considérer ces poissons comme des biens publics. Parce que si c'en était, ça voudrait dire qu'il y aurait un super État mondial, par exemple dirigé par Xi Jinping, qui déciderait pour l'ensemble de l'humanité de la gestion des poissons dans les océans. Heureusement, nous n'avons pas, ou pas encore, cet État mondial. Et donc ça veut dire que les poissons dans nos océans, c'est une catégorie de ressources qui a vocation à n'être ni un bien privé, ni un bien public, c'est autre chose, c'est ce qu'on appelle les biens communs. Les communs, c'est quoi ? C'est une ressource qui est partagée par une communauté avec des règles assez précises d'allocation de la ressource. Dit comme ça, cela paraît un peu abstrait, mais en fait, vous et moi nous pratiquons les communs depuis toujours. L'exemple le plus familier, c'est un ascenseur de copropriété. Un ascenseur, j'ai le droit de l'utiliser évidemment si je suis copropriétaire ; je n'ai pas le droit de le casser, a priori, je n'ai pas le droit non plus d'obliger ma voisine de palier à me payer une taxe à chaque fois qu'elle monte dans mon ascenseur. J'ai un droit d'usage dessus mais je n'en suis pas le propriétaire privé absolu. Et en plus, je paye au prorata de l'usage que j'en fais. Si j'habite au rez-de-chaussée, je ne paye rien puisque je n'utilise pas l'ascenseur. Si j'habite au dernier étage, évidemment je paie le prix fort puisque c'est moi l'usager le plus intensif de cet ascenseur. Autre exemple que vous connaissez très très bien, ce sont les vélos en accès libre Indigo qui viennent d'arriver à Tours, ou bien les Vélib à Paris, les Vélov à Lyon, et tous ces vélos qu'on trouve maintenant dans toutes les capitales de la planète. Je n'ai pas le droit de casser le vélo - normalement, je n'ai pas le droit de le revendre à qui que ce soit, donc j'ai le droit simplement de louer l'usage temporaire de ce vélo pendant le temps que j'ai envie d'aller batifoler avec mon vélo. Vous voyez que c'est un autre rapport aux choses, un autre rapport au monde. D'une certaine manière, on pourrait dire : les biens communs, c'est notre rapport le plus ancien et le plus ancestral au monde qui nous entoure. Si vous allez vous promener dans des villages de brousse, en Afrique subsaharienne, vous verrez que la population qui vit là, le rapport qu'elle a à la terre, c'est un rapport de bien commun. Personne n'est le propriétaire exclusif de la terre. Tout le monde partage la terre comme un commun, éventuellement sous l'autorité du chef du village, mais il n'empêche que c'est un commun, et la forêt, les rivières, c'est la même chose, etc. Et très certainement, l'humanité a toujours vécu avec les choses dans un rapport de communs, bien avant qu'un certain nombre de juristes romains, il y a 2 000 ans, inventent le concept de propriété privée. Aujourd'hui on est en train de redécouvrir sur des ressources extrêmement simples, extrêmement élémentaires. Exemple : La Paz, qui est la capitale de la Bolivie à 4000 mètres, a connu une crise extrêmement aiguë d'adduction d'eau pour les citoyens en 2016. Et on s'est rendu compte, à l'agence française de développement où je travaille, qu'en fait il y a de petites communautés locales en périphérie de la ville, qui ont très bien traversé la crise parce qu'elles s'étaient organisées en amont de la crise pour faire une gestion communautaire de l'eau comme commun, avec des responsabilités partagées d'entretien du système d'adduction d'eau. Sujet fondamental, car vous savez par exemple que tout le Maghreb aujourd'hui est en stress hydrique, sujet qu'on retrouve à Kinshasa et de plus en plus dans le monde entier à mesure que la température augmente sur la planète. Et donc ça nous rejoint sur des lieux qui sont très très fondamentaux pour notre humanité. Ça ne veut pas dire que la gestion des communs, ce soit un truc anarchique où chacun fait ce qu'il veut avec une terre partagée pour tous ou une ressource partagée pour tous. Un exemple, c'est les jardins Volpette, dans la banlieue stéphanoise, qui ont été créés en 1894, qui étaient des jardins partagés pour les ouvriers qui travaillaient dans le bassin industriel de Saint-Étienne. En fait, on a constaté qu'il y avait des règles d'attribution des jardins extrêmement précises, mises au point par Volpette et ses conseillers, et même des méta règles, c'est-à-dire des règles qui permettaient de résoudre les conflits d'interprétation des règles de base. Et donc derrière ça, il y a une inventivité institutionnelle et surtout une grande sagesse humaine, parce que le retour d'expérience qu'on a partout, et qu'a eu notamment Elinor Ostrom, économiste, seule femme qui a eu le prix Nobel en économie en 2009, qui a travaillé sur les communs, c'est que quelle que soit la qualité des règles que vous choisissez, arrive toujours un moment où on s'engueule sur la mise en œuvre des règles, il y a un différent d'interprétation sur ces règles. Ce qui permet de sauver le commun, c'est une méta règle qui dit à l'avance, pas dans le feu de l'action une fois que tout le monde se tape dessus, comment on va régler le différend entre les différents membres de l'assemblée, de la communauté, sur l'interprétation des règles aujourd'hui. C'est ce qu'on retrouve sur les jardins Volpette, et dans toutes les expériences de communs qui ont bien marché. Peut-être certains ici se disent : « Gaël Giraud est sympa, mais il veut nous faire revenir un petit peu à l'âge de pierre, on aura de l'eau, c'est vrai, et on va partager les jardins pour faire le potager. » En fait, ce n'est pas vrai, les communs sont à la fois ce qu'il y a de plus ancien pour l'humanité et aussi de plus moderne. Exemple : tous les fab lab qui essaiment un peu partout, ces lieux de fermentation et d'innovation pour les entreprises d'aujourd'hui et de demain sont tous construits sur le principe que l'intelligence collective partagée nous rend tous collectivement plus intelligents que la somme de nos intelligences individuelles. Vous pouvez penser par exemple à un fab lab très connu en Afrique, au Togo, le Woelab de Agbodjinou, ou bien au Jokkolabs de Karim Sy et puis à tous les fab lab qui essaiment en France. Ils sont tous construits sur ce principe. Autre exemple : les logiciels libres qui fleurissent aujourd'hui sur Internet, qui sont construits par les petits geeks la nuit, extrêmement talentueux, et qui sont transmis au monde entier comme de l'intelligence partagée, à condition le plus souvent que, moi qui vais utiliser ce logiciel libre, jamais je ne m'en institue comme le propriétaire privé. Donc c'est un renversement, une subversion de la propriété privée, au contraire, je suis sommé, si je veux utiliser la ressource, de ne pas me l'attribuer exclusivement. C'est ce qu'on appelle quelquefois le copyleft, par opposition au copyright. Là aussi, il y a une inventivité institutionnelle extraordinaire, liée à des objets extrêmement contemporains, qui sont certainement les objets de la civilisation humaine de l'avenir. Donc j'espère que vous sentez à travers ça que les communs, c'est ce à quoi tous, chacun d'entre nous, vous et moi, on peut contribuer sur son territoire, dans son quartier, là où je suis, dans son boulot. Par exemple, on peut contribuer à mettre en place des monnaies locales. Une monnaie complémentaire locale est une manière pour une communauté de se réapproprier le pouvoir de création monétaire et de faire de la monnaie un commun. On pourrait s'interroger aussi : est-ce vraiment très légitime de considérer que le travail est une marchandise privée qui s'échange sur un marché au même titre que les cigarettes ? Peut-être que le travail, au fond, c'est un bien commun, mais qui demande du coup des règles spécifiques pour pouvoir fleurir dans notre société. Ce à quoi je nous engage, c'est à lever des obstacles que j'ai énoncés tout à l'heure et à travailler ensemble aux communs qui feront la société de demain. Merci.
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Bonjour à tous ! J'adore venir en Belgique, je suis ravi d'être là, c'est déjà bien. Je suis effectivement le papa de la Famille Zéro Déchet, une famille qui n'a évidemment pas pu venir aujourd'hui. Par contre, je vous présente notre poubelle. Voilà ça, c'est notre poubelle réalisée à quatre pendant un an. Voilà, c'est un bocal. On l'appelle Bob. Parce qu'on donne toujours un prénom à sa poubelle quand on la garde un peu longtemps. Un an : on a le temps de lui parler ! Voilà Bob. Pourquoi on s'est mis à faire cette folie-là de vivre avec un bocal de déchets par an ? Je vais vous expliquer ça. Parce qu'on a passé 18 ans - c'est long 18 ans - 18 ans dans les ONG à faire de l'éducation à l'environnement, de la sensibilisation, de la protection de tous les milieux : en montagne, à l'océan, à la campagne... On a sensibilisé un maximum de gens, tous ceux qu'on pouvait : actifs, élus, enfants, à la question de l'empreinte écologique, du changement climatique, et à la question des déchets notamment. Donc, on a vécu ces années, rappelez-vous les années 2000, les années développement durable. J'ai vécu le pacte écologique en 2006, les Grenelles de l'environnement en 2007, 2008, 2009. Alors, on marchait sur l'eau : on allait changer la planète, on pensait changer les choses par le haut, tordre un petit peu le bras des politiques. Ils nous ont bien rattrapés après. Ça a un petit peu plombé. Mais là, une nouvelle énergie arrive. Pendant toutes ces années, j'ai vu dans le milieu, j'ai vu dans l'écosystème, l'impact de notre mode de vie, l'impact de notre consommation et notamment les déchets. Donc, je les ai ramassés. La première fois, au début des années 2000 avec Mountain Riders, je ramassais les mégots et les déchets sur les pistes de ski à la fonte des neiges et au début de la pollution du cycle de l'eau. Parce que je vais vous donner un scoop : les déchets circulent. Ils circulent sur terre et ils circulent avec le cycle de l'eau. Je vous montre quelques petites photos très simples de ce que j'ai pu voir, moi, dans ses 18 ans de sensibilisation. Ça, c'est une photo de ma plage. J'habite dans le sud-ouest de la France dans les Landes, dans le sud des landes. Je suis chanceux, merci. En tout cas, ça, c'est ma plage au mois de janvier quand les grandes houles, les grands creux pendant l'hiver des 10-12 m de vagues, nous ramènent tout ce que le cycle de l'eau amène à l'océan. Voilà essentiellement, vous voyez du plastique qu'il va falloir ramasser évidemment et tout ça n'est qu'une petite partie infime de ce qui peut arriver dans le cycle de l'eau. S'il y a bien un chiffre que vous pouvez retenir, ce sont 200 kg de déchets qui arrivent chaque seconde dans l'océan aujourd'hui à l'heure actuelle. 200 kg qui sont liés à notre mode de vie qu'on peut avoir sur Terre, 200 kg qui sont absolument intolérables puisqu'on est aujourd'hui dans une pollution de la chaîne alimentaire vraiment en profondeur. Quand ce plastique arrive dans l'océan, il se dégrade sous l'effet de l'iode et des UV, pour devenir de fines particules de plastique qu'on retrouve sur la plage quand vous vous baignez. Surtout ce plastique va se fragmenter de plus en plus pour aller jusqu'à 10 puissance -6, jusqu'à des micro-plastiques et polluer la chaîne alimentaire en profondeur. Alors, vous connaissez ces continents de déchets qui sont regroupés à différents endroits du globe par les courants marins. Dans ces zones-là, on estime qu'il y a cinq fois plus de plastique que de plancton et on estime surtout que d'ici 2050, il y aura plus de plastique que de poissons dans l'océan. Voilà un petit peu l'état des lieux de notre planète aujourd'hui et du plastique que l'on consomme, un plastique à longue durée de vie, qu'on utilise de manière jetable et rapide : une incohérence totale. Voilà ce que j'ai vu, avec un impact sur la faune et la flore car les mammifères marins, les oiseaux, les poissons, tout ça va manger le plastique et ça nous revient directement puisqu'on fait toujours partie de la chaîne alimentaire. Alors pourquoi tous ces déchets ? Ça, c'est la grande question. Pourquoi on en a autant ? Pourquoi 200 kg par seconde ? Parce que tout notre système est basé sur la consommation. Enfin, je devrais dire la sur-consommation, l'hyper-consommation. Je ne veux pas faire le débat de la croissance, je vais vous faire la traduction écologique - c'est mon souci. Pour avoir un bien de consommation, il faut extraire de la matière. La planète nous donne tout. Elle est d'une générosité incroyable et nous puisons sans fond de la matière qu'on va transformer avec de l'énergie, aujourd'hui essentiellement sur Terre, du charbon et du pétrole ; et de l'eau, car tout process industriel nécessite de l'eau, voire beaucoup d'eau : un tee-shirt, c'est 8 000 litres d'eau, pour avoir ce bien de consommation qui va finir, et vous le savez, en déchet en fin de vie. Nous sommes aujourd'hui dans une logique de production qui est linéaire. On est très très loin, très très loin de l'économie circulaire qu'on nous annonce comme la grande solution à tous nos maux. Alors ces déchets, ça représente quand même 390 kg par personne et par an. Si j'ajoute tout ce qu'on jette à la déchetterie, c'est 590 kg de déchets par an. Et je vais vous donner un autre scoop ce soir : ces 590 kg ne sont que la partie visible de vos déchets. C'est ceux qui vous arrivent dans la main et que vous allez jeter à la poubelle. La majeure partie de ceux que vous produisez, que je produis, est cachée. Elle est dans la partie immergée de l'iceberg. Pourquoi ? Ces déchets sont liés au process de fabrication. Prenons un exemple : une brosse à dents. Vous allez avoir en fin de vie, la fin de vie dont je parlais tout à l'heure, vous allez voir 30 g de déchets que vous allez jeter à la poubelle. Mais pour fabriquer cette brosse à dents, il a fallu extraire de la matière. Il a fallu la transformer. Il a fallu la conditionner. Il a fallu la transporter et la distribuer. Tout le long de la chaîne de vie de la brosse à dents, on va produire 1,5 kg de déchets. Ce sont ces déchets cachés. Alors si je prends le BTP, l'industrie, l'agriculture, dans notre pays, c'est quatorze tonnes de déchets qui sont cachées et qui sont liées individuellement à notre mode de vie. Si je prends tout ce que l'on consomme et qui vient de loin parce que, vous le savez, on produit très loin aujourd'hui, principalement en Chine. Je ne peux pas vous donner le tonnage de déchets cachés. Par contre, ce que je peux vous dire, c'est que chaque personne, chaque Européen, chaque année consomme 50 tonnes de ressources pour assurer son mode de vie. Évidemment, vous l'avez compris, c'est beaucoup trop. 50 tonnes, ça signifie qu'on est aujourd'hui à crédit écologique. On consomme en sept mois ce qu'on devrait consommer en 12. Nous sommes à crédit écologique à partir du mois de juillet. Quand j'ai commencé ces sensibilisations à l'empreinte écologique, il y a une dizaine d'années, on parlait du mois d'octobre. Chaque année on recule la date : on en est donc à sept mois. Peut-être que je reviendrai dans 10 ans, on en sera au mois de mars. Et puis je vous dis l'équation : il faut prélever la matière et la transformer : beaucoup d'énergie, on en consomme trop. Donc on émet trop de CO2, c'est le changement climatique. Je vous ai dit qu'il fallait de l'eau pour ce process. Aujourd'hui la moitié des masses d'eau sur Terre est en surexploitation : deux tiers de l'eau douce est au-delà de sa capacité d'assimilation des pollutions. Voilà notre empreinte écologique. Voilà l'état de l'écosystème et de notre planète, et vous l'avez compris, c'est lié à notre surconsommation aujourd'hui. C'est lié à notre mode de vie, c'est notre responsabilité ici individuelle et collective. Alors je vous ai résumé ça très rapidement mais j'ai passé 15 ans à sensibiliser tout ceux que je pouvais, de toutes les façons possibles : plaquettes, vidéos, conférences... Je n'ai pas dû être bon parce que la croissance a continué. Mais je pensais être bon. Je pensais être conscient. Je pensais être écolo, faire ce qu'il fallait. J'avais une AMAP, un compost, vraiment, je pensais être bon. Pourtant, j'avais toujours cette poubelle. J'emmenais les enfants sur la plage ramasser les déchets plastiques. Je leur disais : « Les Pompot', c'est fini. » et puis je rentrais chez moi et je mettais du plastique dans ma poubelle. Je devais être schizophrène ! Toujours est il qu'en 2014, avec ma femme, on a pris la poubelle pour essayer de comprendre, on l'a renversée dans notre jardin. Je vous la présente. Je vous présente deux poubelles aujourd'hui. Ça, c'est notre poubelle en 2014. On a essayé de voir ce qu'il y avait dedans. Vous l'avez compris : surtout du plastique, de l'emballage en tout genre. Et là, on s'est dit : est-ce possible de vivre sans tout ça ? Voilà ce qu'on s'est demandé. Et pas : « On va se lancer dans le Zéro déchet. » Mais : « Peut-on continuer à manger sans emballages ? Peut-on continuer à jouer, à avoir une vie sociale, etc... ? » C'est comme ça qu'on a commencé notre aventure. La première année, on est passé d'une poubelle à peu près tous les 3-4 jours, ce qui est la moyenne, à une poubelle par mois. La deuxième année, on est passé à une poubelle en six mois. Elle s'appelait Martine et pas Bob. Je vous l'ai dit, on donne un prénom à ses poubelles quand on les garde. Et puis la troisième année, on est passé à ce bocal-là. C'est-à-dire, à peu près 1 litre en un an et puis évidemment à côté une partie de recyclable et puis un énorme compost parce que vous allez comprendre, on achète beaucoup beaucoup de produits frais. Comment a-t-on fait ? Quand on s'est trouvé devant cette poubelle en 2014 on s'est dit « Waouh ! », quelle est la solution ? On a regardé chaque emballage, un par un : deux poules qui ont trouvé un couteau. Et puis, la solution c'est simple : si vous ne voulez pas de déchet dans votre poubelle ne l'achetez pas, voilà, merci ! Ne l'achetez pas, refusez-le. Du coup, la deuxième question, c'est : comment le remplacer ? Quelles solutions j'ai ? Donc on a cherché pour chaque aliment, pour chaque chose qu'on avait chez nous, chaque bien, comment le remplacer sans avoir un déchet en fin de vie. Et puis évidemment, on s'est posé la question : est-ce que j'en ai vraiment besoin ? Car on est dans une société de surconsommation, nous consommons trop, vous le savez, et il a fallu qu'on réduise. Si on ne veut pas du déchet en fin de vie, il faut en posséder moins. On s'est mis dans une démarche de désencombrement, de minimalisme. On a tout vendu. On a fait des vide-grenier pendant deux ans et demi et on a vraiment liquidé tout ce qu'on possédait pour vraiment avoir l'essentiel, pour éviter de l'avoir dans la poubelle. Quand on a dû consommer, on s'est posé la question de la durabilité. Aujourd'hui, on est dans une logique d'obsolescence. Tout est obsolescent. Les trois mamelles de la consommation aujourd'hui, c'est la pub, le crédit et l'obsolescence. Pour lutter contre ça, on s'est dit : il faut acheter des produits qui durent. Si un produit dure 20 ans, on a le temps de l'amortir au niveau écologique. On s'est mis à acheter des choses durables, labellisées pour limiter l'impact à la production, réparables pour encore allonger la durée de vie et puis en fin de vie, qu'elle soit vertueuse, c'est-à-dire recyclable. On a appliqué ça à tous les pans de notre vie. Je vais juste vous en présenter un car je n'ai pas le temps aujourd'hui mais vous présenter les courses, l'alimentation. Vous avez compris, aujourd'hui, l'alimentation génère énormément d'emballages puisque c'est un système mondialisé, Votre yaourt va être produit en Pologne, vos tomates en Andalousie, votre ketchup en Turquie, etc. Donc, l'emballage est la clef de ce système agroalimentaire. Pour sortir de l'emballage, on a donc choisi d'avoir un petit kit de courses : un cabas, des boîtes en verre, des petits sacs en tissu et d'aller chez notre maraîcher. C'est-à-dire de faire la part belle aux circuits courts, d'acheter des fruits et des légumes, une belle cagette, 50-60 euros pour la semaine avec nos œufs. Puis, on va dans notre magasin de vrac avec notre sac en tissu. On prend nos farines, nos pâtes, nos fruits secs, tout ce dont on a besoin pour manger, ensuite avec nos petites boîtes en verre, on va chez nos commerçants : notre fromage, notre beurre. On nous met tout dans la petite boîte qu'on peut ranger, pareil pour la viande. Comme ça, on a éliminé tous les emballages et contenants. Et ô miracle ! Au passage ce qui est génial, c'est qu'on a redécouvert le goût, le goût de l'alimentation. Le beurre à la motte, ce n'est pas un beurre suremballé de grande surface. Les grandes surfaces, aujourd'hui on n'y va plus. On est sorti du grand système industriel de la grande distribution. Et au passage, vous allez voir, on a gagné beaucoup de choses. Je vous montre ça en images : c'est plutôt beau la belle cagette, le beurre, la crème fraîche, le fromage. Et puis chez nous, on joue à la famille Olson avec les bocaux et tous les produits dedans. Je monte à l'échelle pour aller chercher à manger dans la cuisine. Voilà comment on a fait. Je montre juste l'alimentation mais on a appliqué ça à tous les pans de notre vie quotidienne, pour éliminer un maximum de déchets. Aujourd'hui, on est quasiment arrivé à trouver les solutions pour tout. Il nous reste quelques petites choses que la société ne nous donne pas, en termes de solution. Je pense par exemple au verre recyclé. Le verre, c'est peut-être bien mais c'est très énergivore. Il faudrait mieux avoir des consignes. Je n'ai pas de consigne où j'habite, j'ai encore ces bouteilles de verre. Les médicaments, ces petites tablettes en aluminium plastifié ne se recyclent pas donc elles finissent dans mon bocal, etc. Surtout le grand problème aujourd'hui, mais je ne le développerai pas : qui sont l'ordinateur, le téléphone et la voiture, et dont on est tous archi-dépendants, voir addicts, hein ? Que nous a apporté ce mode de vie ? Je vous l'ai dit, au départ, on voulait éliminer le déchet, éliminer ce plastique de notre poubelle. Et puis on a voulu le mesurer. A la fin de cette année, de cette aventure, On a fait notre empreinte carbone notre empreinte écologique, en eau et notre empreinte épargne. Avec ces 4 empreintes, on voulait mesurer si notre mode de vie zéro déchet était finalement beaucoup plus soutenable pour notre planète. Je vous ai mis l'empreinte carbone. Ô miracle ! Quand on arrête de consommer, quand on consomme d'occasion, quand on consomme local, on passe sous la barre des 175 kg équivalent carbone par personne et par an, qu'il faudrait tous qu'on passe pour avoir un impact limité en termes de réchauffement climatique. Quand on mange bio local, saison, quand on a un circuit court, on décarbone son assiette, on passe encore sous la petite barre des 175 pour l'alimentation. Vous l'avez compris, notre grand problème aujourd'hui, c'est le transport. Pour l'instant, j'habite en campagne en France et je n'ai pas de solution. Rappelez-vous le petit iceberg, je vous disais 590 kg de déchets produits égalent 50 tonnes de ressources consommées. Si j'arrête mes logiques de surconsommation, si je n'ai plus qu'un bocal en fin d'année, un petit kilo de déchets, évidemment je ne consomme pas 50 tonnes de ressources. Évidemment, je n'émets pas autant de CO2. je ne prélève pas autant d'eau. En gros, en faisant du zéro déchet, nous avons une démarche de transition écologique. Et nous avons limité notre empreinte écologique sur la planète. Ça nous a aussi permis de faire beaucoup d'économies. En deux ans, on a calculé qu'on avait économisé 30% sur notre budget annuel familial. 30%, c'est un beau temps partiel, hein ? Surtout on est passé en bio, local, saison. Si vous voulez manger bio, je vous l'ai dit, la clé, c'est d'acheter des fruits et légumes d'aller chez un maraîcher en circuit court. Surtout on protège notre santé. On a détoxifié complètement notre alimentation, nos produits d'hygiène, notre cosmétique. On a enlevé toute cette chimie qui est toxique et qui va aujourd'hui générer un maximum de maladies qu'on dit « de civilisation ». On a fait aussi du bien à notre moral, parce que de trouver des solutions au quotidien, d'être acteur, de créer du lien social avec des circuits courts, et des gens du territoire, tout ça fait beaucoup de bien au moral. On se dit qu'on ne subit pas, qu'on peut être une part de la solution, qu'on peut être le colibri qui limite son empreinte. Et ça, ça fait beaucoup, beaucoup de bien au moral. Enfin quelque chose à quoi on ne s'attendait pas au départ : en mangeant local, en consommant local, en allant sur des circuits courts, on favorise une autre économie. On sort de l'économie mondialisée dont on subit aujourd'hui tous les conséquences et on va vers une démarche de relocalisation de ses achats : une économie locale et résiliente. Voilà, nous avons un pouvoir aujourd'hui. Nous avons le pouvoir de changer les choses et d'être les colibris du changement. C'est notre pouvoir d'achat. Ce pouvoir d'achat, il ne faut pas le mesurer en quantité de choses consommées mais plutôt en qualité. Comment je consomme ? A qui je donne mon euro ? Si je le donne à mon maraîcher, bio-local-saison, je suis acteur du changement. Et cet euro-là, c'est à nous de décider à qui on a envie de le donner. Et puis pour conclure, je n'ai pas perdu en confort. j'ai même gagné en qualité de vie. Je vous l'ai dit : j'ai gagné du temps, de l'argent, j'ai économisé beaucoup de choses. J'ai protégé ma santé, j'ai favorisé l'économie locale, etc. En faisant de la sobriété volontaire, j'ai gagné en qualité de vie, et ça, ça rend heureux. Merci à vous !
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Bonjour. Alors, les conférences TED sont bien souvent l'occasion d'entendre de très beaux messages d'espoir. En ce qui me concerne, je viens tenter plutôt aujourd'hui de vous désespérer. Je ne veux pas vous désespérer totalement. J'imagine qu'un désespoir total conduit au suicide, ce que je ne souhaite évidemment à personne ici. Je veux plus précisément tenter de vous enlever un espoir, l'espoir que notre civilisation puisse durer encore longtemps, un espoir qui s'exprime par exemple, dans cette notion omniprésente de développement durable, ou dans celle plus récente de croissance verte. Pourquoi vouloir vous ôter cet espoir, à vous qui êtes si jeunes, pleins d'enthousiasme, de belles idéees, d'énergie positive ? Parce que c'est, je crois, l'une des conditions pour éviter peut-être, je dis bien peut-être, une terrible catastrophe. Je m'explique : depuis plus de 50 ans maintenant, des travaux de recherche s'accumulent pour souligner une contradiction fondamentale de notre civilisation. Nous vivons dans un monde fini, aux ressources limitées, et pourtant, nous visons une croissance économique infinie, une croissance illimitée. Certes, l'univers est immense, peut-être même infini, mais pour le moment au moins, l'espèce humaine n'a pas d'autre endroit que la planète Terre où se reproduire. Nous habitons donc bel et bien un espace fini, un espace dans lequel même nos ressources dites renouvelables, ne le sont que jusqu'à un certain point. Une espèce vivante trop malmenée finit par disparaître. Pourtant, nous prétendons pouvoir produire dans cet espace relativement clos toujours plus de biens et de services, en un mot, toujours plus de marchandises. Dans la mesure où cette production implique nécessairement la consommation de ressources terrestres et la production de déchets, elle ne peut pas croître indéfiniment. Pour avoir une croissance économique durable ou soutenable, il faudrait que son impact écologique se stabilise, voire décline, ce qui n'est point ce que nous observons actuellement, malgré des discours rassurants sur les effets bénéfiques d'une dématérialisation progressive de nos économies. Il y a plusieurs raisons à cela. Tout d'abord, l'économie de service n'a pas remplacé l'économie industrielle, elle s'est ajoutée aux activités industrielles qui, pour une grande part ont été délocalisées. À l'échelle planétaire, l'impact écologique de nos économies s'est donc accru. Par ailleurs, l'économie dite du savoir ou de l'information n'est pas si immatérielle qu'on veut bien le croire ou le dire. Sur le plan énergétique en particulier, nos petites machines informatiques et des infrastructures qui permettent leur usage sont très gourmandes. Un iPhone consomme en moyenne autant d'électricité qu'un réfrigérateur standard. Plus simplement encore, des marchandises immatérielles, cela n'existe pas. Même pour vendre un service, il faut au minimum un humain qu'il convient de nourrir, d'habiller, de loger, de transporter, etc. On peut donc très difficilement vouloir produire toujours plus de marchandises sans accroître toujours plus notre impact écologique. Bien sûr, nous pouvons réaliser certains progrès dans l'utilisation des ressources terrestres, mais ces progrès sont limités, notamment par un phénomène : l'effet rebond. Il a été repéré il y a plus d'un siècle par l'économiste Stanley Jevons qui avait remarqué que les gains d'efficacité des machines à vapeur ne se traduisaient pas par une baisse de la consommation du charbon mais par une hausse de cette consommation. Pour quelles raisons ? Mais parce que le charbon devenait ainsi toujours plus rentable à utiliser. Dans une société productiviste, tout moyen d'économiser une ressource, va, en fait, souvent, en stimuler la consommation. On peut aussi bien sûr mettre en place des incitations pour réduire cette consommation ou réduire la production de déchets suivant le principe de l'utilisateur payeur ou du pollueur payeur. Mais ces dispositifs, s'ils ne sont pas simplement symboliques, vont en fait imposer généralement, un ralentissement de ces activités économiques. Ils ont donc toutes les chances de faire l'objet de vives oppositions comme l'a montré par exemple, la révolte des Bonnets rouges contre l'éco-taxe en France à l'automne dernier. Dans des sociétés qui dépendent de la croissance économique, toute mesure qui menace de ralentir celle-ci risque d'être rejetée par la majorité. On en vient donc à cette contradiction fondamentale : il y a des limites physiques et biologiques à notre capacité à produire toujours plus de marchandises, mais en même temps, nos sociétés reposent sur la quête de croissance et nous agissons donc comme si ces limites n'existaient pas. Dans ces conditions, le moment va arriver fatalement où, soit par manque de ressources soit par trop plein de déchets, ces formidables machines à produire des marchandises que sont les entreprises, ne vont plus pouvoir tourner. Nos économies vont alors s'effondrer et une grande partie des 7, 8, 9, ou 10 milliards d'humains qui peupleront la planète vont tout simplement disparaître. Pour le dire de manière imagée, lorsque le garde-manger se vide et que la poubelle envahit la cuisine, il faut s'attendre à ce que le gâteau que l'on y prépare, ne puisse plus nourrir toute la maisonnée, mais qu'en plus, il empoisonne ceux qui le mangent. Quand est-ce que cet effondrement de nos économies risque-t-il de se produire ? Sans doute bien plus vite qu'on ne le pense. La croissance économique en effet, même à un taux peu élevé, suit une progression exponentielle, c'est-à-dire qu'elle accélère constamment. Pour illustrer cet effet d'accélération, on peut évoquer l'exemple classique du nénuphar dont la surface double chaque jour et à qui il faut 30 jours pour recouvrir l'étang sur lequel il pousse. Au début, sa progression est lente, à peine perceptible d'une journée à l'autre. Le 28e jour, encore seul 1/4 de l'étang est recouvert de nénuphars, Mais le 30e jour, c'est terminé. Deux jours ont suffi pour que les 3/4 de l'étang soient envahis. La croissance de nos économies ne double pas chaque année ; elle n'en reste pas moins exponentielle. À 2% par an, le volume des marchandises produites, va doubler non pas en 50 ans, mais en 35 ans. Du coup, son impact écologique tend également à suivre une telle progression. On est aux prises ici avec les phénomènes de rétroaction positive. Les spécialistes des systèmes désignent ainsi les effets d'un processus qui ont tendance à renforcer ce dernier. Autrement dit, la conséquence d'un phénomène devient elle-même l'une des causes de celui-ci. Un bel exemple, si j'ose dire, est celui de certains effets du réchauffement climatique. Ce réchauffement fait fondre actuellement les neiges et les glaces qui réfléchissent les rayons de soleil et contribuent de la sorte, au refroidissement terrestre. La disparition de ces neiges et de ces glaces va donc encore augmenter le réchauffement de l'atmosphère. Autre rétroaction positive du même genre, la fonte du pergélisol, qui retient prisonnier d'énormes quantités de méthane, un gaz à effet de serre, dont la libération dans l'atmosphère devrait aggraver rapidement le phénomène du réchauffement global. En somme, notre situation sur le plan écologique risque de se dégrader, sinon d'un seul coup, en tout cas d'une manière soudaine, ne nous laissant plus guère de temps alors pour réagir. En outre, certains dégâts seront devenus irréversibles. On ne recréera pas, d'un coup de baguette magique, les espèces animales qui sont en voie d'extinction aujourd'hui. Cette thèse de l'effondrement est de plus en plus admise par ceux qui tentent d'appréhender ces questions dans leur globalité. Elle n'est pas nouvelle. Cependant, cela fait plus de 40 ans qu'elle est défendue, entre autres, par l'équipe de Dennis Meadows. Cette équipe de chercheurs travaillant au MIT à l'origine, a tenté, au début des années 70, de modéliser les interactions entre l'espèce humaine et la planète Terre, en se servant de la théorie des systèmes et de l'informatique. Leur objectif n'était pas tant de prédire l'avenir que de comprendre la dynamique du système global Les différents scénarios générés par leur modèle aboutissent tous à la même conclusion : sauf si nous stoppons la croissance économique à l'échelle mondiale, notre civilisation se condamne à l'effondrement, et cela probablement avant la fin du 21e siècle, car nous sommes d'ores et déjà, en situation de dépassement des limites écologiques de notre planète. Dans le cas du scénario standard, celui dans lequel rien n'est fait pour corriger les problèmes causés par la croissance économique, l'effondrement débute même avant 2050. Or, si l'on observe ce qu'il s'est réellement passé depuis que ce scénario a été élaboré, on constate que sur le plan économique, démographique et écologique, les choses se sont déroulées d'une manière très semblable aux projections de ce scénario qui était aussi baptisé « business as usual ». C'est d'autant plus préoccupant que les efforts qu'il faudrait accomplir pour tenter de stabiliser la situation, sont désormais bien plus considérables qu'au début des années 70. Nous avons perdu un temps précieux qu'il sera difficile de rattraper. Pour l'équipe Meadows qui a actualisé récemment son étude initiale, nous avons toutefois encore le choix, un choix très restreint cependant, entre, d'un côté, une décroissance forcée, subie, qui s'imposera spontanément et de manière catastrophique d'ici quelques décennies à peine, et d'un autre côté, une décroissance volontaire assumée, contrôlée autant que possible et lancée sans plus attendre. Cette deuxième option, celle d'une décroissance choisie, repose sur l'espoir d'une sortie en douceur de notre modèle de civilisation, une sortie pas trop désastreuse pour l'espèce humaine. Bien sûr, à cet espoir, on peut opposer celui d'une série d'innovations technologiques majeures qui résoudraient le problème de la fin du pétrole ou celui des gaz à effet de serre par exemple et permettraient ainsi, de poursuivre la croissance en éloignant le risque d'effondrement. Une telle éventualité est très peu probable mais pas impossible. Est-ce raisonnable de faire le pari qu'elle advienne ? Je ne le crois pas. Toutefois, l'avenir reste inconnaissable et on ne peut empêcher personne de se raccrocher à un tel espoir, aussi peu fondé soit-il. Cela dit, il y a d'autres bonnes raisons de vouloir en finir avec la course à la production de marchandises dans laquelle nous sommes embarqués à l'échelle planétaire. Et c'est celle que je voudrais évoquer à présent dans la 2e partie de mon exposé. Tout d'abord, il faut prendre conscience que cette fameuse croissance ne constitue plus un facteur de bien-être dans les sociétés les plus riches. Elle semble l'être encore dans les sociétés les plus pauvres, mais plus dans les nôtres. Au-delà d'un certain niveau de PIB par habitant, la corrélation disparaît, en effet, entre croissance économique et bien-être, que celui-ci soit appréhendé à partir d'indicateurs subjectifs comme le sentiment de bonheur ou d'indicateurs objectifs tels que le niveau de scolarisation ou encore l'espérance de vie. Dans le cas du sentiment de bien-être au quotidien, il n'y a plus de corrélation avec le PIB dans les pays où celui-ci dépasse environ 15 000 $ annuels par habitant. Dans le cas du niveau d'éducation, ce seuil se situe autour de 12 000 $ annuels par habitant. Dans le cas de l'espérance de vie, ce seuil est environ à 18 000 $. Pour mémoire au Québec, nous sommes bien au-delà de ces seuils puisque le PIB par habitant y dépasse les 30 000 $ annuels. Si l'on ajoute à cette décorrélation entre PIB et bien-être, le fait que la croissance économique ne génère plus forcément d'emplois dans nos sociétés, à quoi bon poursuivre cette course à la production de marchandises ? Pourquoi en faire un impératif absolu comme le font nos dirigeants politiques et économiques ? À qui profite vraiment cette croissance, sinon à une toute petite frange de la population de nos pays ? Si l'on souhaite véritablement augmenter le bien-être du plus grand nombre, il semble qu'une solution prometteuse se trouve du côté d'une réduction des inégalités au sein de nos sociétés. Sur ce point, je vous renvoie en particulier aux travaux de Richard Wilkinson et au livre qu'il a publié avec Kate Pickett sur le sujet. Wilkinson a offert également au moins une conférence TED. Vous y apprendrez, entre autres choses intéressantes, qu'en matière d'espérance de vie, mieux vaut, par exemple, être un pauvre Suédois qu'un riche Anglais. L'égalité des conditions profite à tout le monde, alors que l'inégalité affecte même le bien-être des mieux nantis. Telle est la thèse centrale de Wilkinson qui vaut vraiment la peine de découvrir. Une chose est certaine, la croissance économique a cessé d'être un facteur de mieux-être pour les humains actuels, au moins en Occident. Si l'on considère en outre que la poursuite de cette croissance menace l'avenir de l'humanité, on dispose donc à présent de deux bonnes raisons de refuser cette course à la production de marchandises. Mais on peut aller plus loin. Cesser de courir collectivement après l'augmentation de notre PIB pourrait également s'avérer libérateur pour la plupart d'entre nous. Cette course est très dure en effet, y compris pour ceux qui en occupent la tête. Elle repose sur une concurrence généralisée entre nous tous, le « nous » désignant à présent l'humanité entière, ou presque. Le sociologue Max Weber en parlait comme d'une cage d'acier qu'il décrivait ainsi : « Chacun trouve aujourd'hui, en naissant, l'économie capitaliste établie comme un immense cosmos, un habitacle dans lequel il doit vivre et auquel il ne peut rien changer, du moins en tant qu'individu. Dans la mesure où l'individu est impliqué dans les rapports de l'économie de marché, il est contraint à se conformer aux règles d'action capitalistes. Le fabricant qui agirait continuellement à l'encontre de ces règles, serait éliminé de la scène économique, tout aussi infailliblement que serait jeté à la rue l'ouvrier qui ne pourrait ou ne voudrait s'y adapter. » Autrement dit, chacun doit trouver le moyen de contribuer directement ou indirectement à la production de marchandises, sous peine de rester sur le bord du chemin. Quiconque n'y parvient pas, non seulement perd toute autonomie sur le plan matériel, mais se retrouve également sans identité, sans identité positive en tout cas, d'où l'angoisse et le désespoir de ceux qui sont sans emploi, d'où aussi la peur, le stress, l'anxiété qu'éprouvent ceux qui ont la chance d'en avoir un et qui craignent de le perdre, d'où le surinvestissement dans le travail pour garder sa place ou essayer d'en gagner quelques-unes, d'où la surconsommation de toutes sortes de substances, reconnues ou non par le corps médical, pour tenter de tenir le coup, d'où les épidémies d'épuisement professionnel, les dépressions, qui frappent un grand nombre d'entre nous. Mais cette course n'est pas seulement épuisante ; elle a aussi quelque chose de profondément insensé, y compris sur le plan individuel. L'écrivain Bukowski exprime avec sa rage coutumière, au moins une partie du problème : « Comment diable un être humain peut-il se réjouir, de se faire réveiller à 6 h 30 du matin par une alarme, sauter du lit, s'habiller, se forcer à avaler quelque chose, chier, pisser, se brosser les dents et les cheveux, puis affronter des embouteillages pour aller faire gagner un paquet de fric à quelqu'un, qui s'attend en plus, ce qu'on lui en soit reconnaissant ? » Nous n'en sommes pas tous là, certes, il reste que nous avons appris à trouver normal de soumettre nos aspirations les plus profondes aux règles d'action capitalistes, comme dit Max Weber. C'est ainsi que bon nombre des plus grandes décisions de nos vies sont prises en considérant d'abord la question : « Combien cela va-t-il me rapporter ou me coûter ? » plutôt que la question : « Ce choix va-t-il me permettre de me réaliser pleinement, de m'accomplir et de m'épanouir en tant qu'être humain ? » Pour en avoir souvent parlé avec eux, je sais que beaucoup d'étudiants de cette école ont choisi de s'y inscrire, non pas par goût pour la gestion, mais, avant tout, dans l'espoir de s'assurer une place pas trop inconfortable dans cette course à la production de marchandises. Ce faisant, ils ont renoncé à des projets plus personnels ; ils ont renoncé en somme, à être eux-mêmes. Ce n'est pas les critiquer que de le souligner, cette contrainte s'impose à tout le monde, y compris à ceux qui, comme vous et moi, disposent d'une marge de liberté bien plus considérable que celle de la plupart des êtres humains aujourd'hui. Faire objection de croissance, c'est donc aussi tenter de s'évader de cette cage d'acier dont nous sommes prisonniers, de sortir de cette roue infernale dans laquelle nous tournons sans fin comme des hamsters. Ce ne sera certes pas facile. L'une des choses qui nous retiennent dans cette cage, ce sont les marchandises qui s'y accumulent, merveilleuses et fascinantes marchandises. Comment résister à leur pouvoir d'attraction ? Il est évidemment bien plus facile d'aller à l'épicerie du coin offerte à un prix dérisoire, que de fabriquer soi-même cette pizza. La cage d'acier a quelque chose d'un pays de cocagne où les poulets rôtis vous tombent tout cuits dans le bec. Mais c'est un piège, un terrible piège : plus nous subvenons à nos besoins à l'aide de marchandises, plus celles-ci se rendent indispensables, moins nous devenons capables de nous en passer, plus les entreprises qui les produisent deviennent alors nécessaires et puissantes, plus se renforce, en définitive, la course à la croissance et ses règles du jeu contraignantes. Bref, acheter une pizza surgelée à 3 $ à l'épicerie du coin coûte en réalité très cher, puisqu'il en va de notre autonomie et de notre liberté la plus essentielle. Vous en doutez ? Pensez à cette marchandise particulièrement séduisante, qu'est l'automobile. Nous avons aujourd'hui la liberté d'en acquérir une assez facilement, nous avons le choix entre de nombreux modèles et de multiples marques. En revanche, il y a une liberté dont nous ne disposons plus, c'est celle de vivre sans voiture. Même ceux qui comme moi n'en ont pas, dépendent étroitement dans leur quotidien de l'automobile. Si les voitures de la région montréalaise ne peuvent plus rouler demain, ce sera le chaos absolu pour tout le monde, même pour moi. Comme dit le philosophe Louis Marion, acheter une voiture, ce n'est pas acheter seulement un moyen de déplacement, c'est acheter une civilisation. Avec la bagnole, vient toute une armada : la route, le parking, les bétonneuses, les diverses pollutions, la défiguration du paysage et les catastrophes industrielles, comme celle de Lac-Mégantic, sans compter les morts et les accidentés de la route. À ces contraintes lourdes sur le plan collectif, s'ajoute le temps passé individuellement à gagner l'argent nécessaire pour utiliser cette machine et le temps perdu dans des embouteillages, causés par ces mêmes machines. Bref, vu sous cet angle, la voiture n'a rien de cet instrument de liberté que les publicitaires continuent de nous faire miroiter. Et ce qui vaut pour cette marchandise emblématique vaut pour toutes les autres. Elles tendent, au bout du compte, à réduire bien plus notre autonomie que notre labeur. Voilà pourquoi il est essentiel de résister à leur charme ensorceleur. Voilà aussi pourquoi il faut rompre résolument avec cette course à la production de marchandises dans laquelle nous sommes entraînés. Au total et en résumé, refuser la croissance économique s'impose pour au moins 3 raisons essentielles : parce qu'elle est destructrice sur le plan écologique, parce qu'elle n'améliore plus le sort de la majeure partie d'entre nous et enfin parce qu'elle est aliénante, c'est-à-dire qu'elle nous empêche d'exercer notre liberté et de rester maîtres de nous-mêmes. Il me semble que ce sont là des raisons amplement suffisantes pour, comme je le disais au départ, cesser d'entretenir l'espoir que notre civilisation fondée sur la croissance perdure encore longtemps. Et plus vite nous abandonnerons cet espoir, plus nos chances d'éviter le pire augmenteront. Reste une série d'objections. J'en évoquerai 3 rapidement : la première, la plus évidente, une décroissance volontaire à l'échelle planétaire est-elle vraiment envisageable ? N'est-ce pas un projet totalement utopique ? Il est grand temps, je crois, de renverser l'accusation. L'utopie aujourd'hui, c'est de continuer à penser qu'une croissance économique infinie soit possible dans un monde fini. Les rêveurs ou les affabulateurs sont ceux qui entretiennent cet espoir. Mais, deuxième objection : la croissance n'est-elle pas dans la nature de l'homme ? Celui-ci ne cherche-t-il pas toujours à améliorer sa condition et n'entre-t-il pas alors nécessairement en concurrence avec ses semblables, puisque les ressources terrestres sont limitées ? Il suffit de faire un peu d'histoire, d'anthropologie ou d'éthologie, pour réaliser que l'homme n'est pas forcément un loup pour l'homme, qu'il n'est pas toujours cet animal égoïste cherchant à maximiser son utilité que nous présente la théorie économique standard. Si beaucoup d'êtres humains semblent agir aujourd'hui conformément aux prédictions de cette théorie, c'est la conséquence de la course à la croissance qui leur est imposée et non pas sa cause. Non seulement nous sommes capables de coopérer entre humains, mais nous en avons profondément besoin. En ce sens, nos sociétés qui nous placent en situation de concurrence permanente les uns contre les autres, sont proprement inhumaines. Et c'est pourquoi il faut en réinventer les bases. Troisième et dernière objection : mais avez-vous un plan, un programme, un modèle au moins ? D'une part, je ne crois pas qu'il soit possible de planifier l'innovation radicale. Il y a là une contradiction fondamentale dans les termes. D'autre part, il y a un grand danger à vouloir mettre en œuvre un plan prédéfini qui vaudrait pour tout le monde et en tout lieu. Pour ne pas accoucher du pire, l'invention de sociétés post-croissance doit être rigoureusement démocratique. Cela suppose d'abord qu'une majorité d'entre nous soient convaincus de la nécessité d'en finir avec la course à la croissance. Je suis venu cet après-midi pour vous demander de contribuer à former cette majorité. Merci.
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