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JADE/CETATEXT000045931538.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 20 août 2021 par lequel la préfète de l'Orne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Par un jugement n° 2102076 du 13 janvier 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 14 février 2022, M. B..., représenté par Me Cavelier, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 13 janvier 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 20 août 2021 de la préfète de l'Orne lui refusant un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ; 3°) d'enjoindre à la préfète de l'Orne de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans l'attente un récépissé de demande de titre de séjour avec autorisation de travailler ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : en ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour : - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile eu égard à son parcours personnel et éducatif et alors qu'il remplit les conditions posées par la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour ; - pour les mêmes motifs elle est intervenue en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle est intervenue en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à l'atteinte portée à sa vie privée et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mars 2022, le préfet de l'Orne conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 mars 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C... B..., ressortissant malien né le 5 février 2003, déclare être entré irrégulièrement sur le territoire français le 22 août 2018. Sa demande de prise en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance a été rejetée par le département de l'Orne. Par un arrêté du 20 août 2021, la préfète de l'Orne a rejeté sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'a obligé à quitter le territoire français. Par un jugement du 13 janvier 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté. M. B... relève appel de ce jugement. Sur la décision de refus de titre de séjour : 2. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". 3. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant sur la liste réglementairement établie au plan national ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Dans ces conditions, il appartient seulement au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que l'administration n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'elle a portée sur l'un ou l'autre de ces points. 4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est un ressortissant malien entré en France en août 2018 qui a entamé en juillet 2019 une formation au certificat d'aptitude professionnelle cuisine dans un centre de formation des apprentis situé à Alençon. A cette fin il a conclu un contrat d'apprentissage de trois ans avec la responsable d'un restaurant. Si les avis de sa maitre d'apprentissage sont élogieux, il demeure que ses bulletins de notes pour l'année 2020/2021 attestent d'une dégradation de son implication personnelle que les effets du confinement et ses difficultés à maitriser la langue française ne permettent pas d'expliquer complétement. Son dernier bulletin fait ainsi état d'un nombre important d'heures d'absence injustifiées, relève son " manque d'implication " et l'intéressé est le dernier de sa classe. Par ailleurs, il est constant que M. B... est célibataire, sans famille établie en France, et s'il peut se prévaloir du soutien d'une personne qui l'héberge gracieusement, il n'est pas autonome financièrement malgré sa rémunération perçue en qualité d'apprenti. Si enfin il expose que ses parents sont décédés, il a vécu l'essentiel de son existence au Mali, où il n'est pas dépourvu de famille. Dans ces conditions, y compris en tout état de cause au regard de la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière et en admettant même qu'il aurait dû bénéficier d'une prise en charge par l'aide sociale à l'enfance, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que la préfète de l'Orne a rejeté sa demande de régularisation de sa situation administrative présentée sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 5. En deuxième lieu aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". 6. Pour les motifs exposés au point 4, et eu égard à la date d'entrée récente de M. B... sur le territoire français, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : 7. Pour les motifs exposés aux points 4 et 6, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée est intervenue en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 août 2021 de la préfète de l'Orne. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. C... B..., à Me Cavelier et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet de l'Orne. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, C. A... Le président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00415
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 17 décembre 2015 contre dix ordres de reversement que lui a notifiés l'Agence de services et de paiement le 20 novembre 2015, pour la somme totale de 7 719,67 euros, ainsi que la décision du 2 juin 2015 par laquelle le préfet de l'Aube l'a informé qu'un taux de réduction de 100 % serait appliqué sur la totalité des aides qui lui avaient été versées dans le cadre de la Politique agricole commune au titre de la campagne 2014. Par un jugement n° 1600741 du 5 mars 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté cette demande. Par un arrêt n° 18NC01334 du 23 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation de la décision de rejet implicite du recours gracieux formé le 17 décembre 2015, a annulé cette décision, et a rejeté le surplus des conclusions à fin d'annulation de M. B.... Procédure d'exécution : Par une lettre enregistrée le 10 août 2020, M. A... B..., représenté par Me Zillig, a demandé à la cour d'assurer l'exécution de l'arrêt n° 18NC01334 du 23 juillet 2019. Par une ordonnance du 21 janvier 2021, la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy a ordonné, sous le n° 21NC00216, l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de statuer sur cette demande d'exécution. Par des mémoires, enregistrés les 1er février et 12 avril 2021, M. B... demande à la cour : 1°) d'enjoindre à l'Etat de lui octroyer le bénéfice des aides à la politique agricole commune au titre de la campagne 2014 à hauteur de 11 242,97 euros dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard au-delà de l'expiration de ce délai ; 2°) d'enjoindre à l'Agence des services de paiement de procéder au versement de ces aides dans le mois suivant la décision de l'Etat, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que[VS1] l'arrêté attaqué n'a pas été exécuté. Par un mémoire, enregistré le 23 février 2021, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la demande d'exécution de M. B.... Il soutient avoir, pour sa part, entièrement exécuté l'arrêt n° 18NC01334 du 23 juillet 2019. L'instruction a été close le 31 mars 2022. L'Agence de services et de paiement, à laquelle la procédure a été communiquée, n'a pas présenté d'observation en défense. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Rees, président, - les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique, - et les observations de Me Di-Rosa substituant Me Zillig, pour M. B.... Considérant ce qui suit : 1. Par une décision du 22 juillet 2015, le préfet de l'Aube a prononcé la suppression des aides de la politique agricole commune pour la campagne 2014 au bénéfice de M. B.... Le 20 novembre 2015, l'Agence de services et de paiement a notifié à l'intéressé dix ordres de reversement pour un montant total de 7 719,67 euros. Le 17 décembre 2015, M. B... a formé un recours gracieux contre ces ordres de reversement auprès de cette agence, qui n'y a pas répondu. Par un jugement du 5 mars 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'agence sur son recours gracieux, ainsi que de la lettre du 2 juin 2015 par laquelle le préfet de l'Aube l'avait informé qu'un taux de réduction de 100 % serait appliqué sur la totalité des aides qui lui avaient été versées dans le cadre de la politique agricole commune au titre de la campagne 2014. Par un arrêt du 23 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation de la décision de rejet implicite du recours gracieux du 17 décembre 2015, a annulé cette décision, et a rejeté le surplus des conclusions à fin d'annulation de l'intéressé. 2. Le 10 août 2020, M. B... a demandé à la cour d'assurer l'exécution de cet arrêt. Par une ordonnance du 21 janvier 2021, la présidente de la cour a ordonné l'ouverture de la présente procédure juridictionnelle en vue de statuer sur cette demande d'exécution. Sur les conclusions aux fins d'exécution : 3. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte (...) ". 4. Par son arrêt du 23 juillet 2019, la cour a seulement prononcé l'annulation de la décision de rejet du recours gracieux formé par M. B... contre les dix ordres de reversement émis par l'Agence de services et de paiement le 20 novembre 2015, pour un montant total de 7 719,67 euros. Si cette annulation a été prononcée en raison de l'illégalité de la décision du préfet de l'Aube du 22 juillet 2015, sur le fondement de laquelle les ordres de reversement ont été émis, la cour n'a pas, en outre, prononcé l'annulation de cette décision, laquelle, du reste, n'avait pas été sollicitée par M. B.... En l'absence d'annulation de cette décision du 22 juillet 2015, l'exécution de l'arrêt ne saurait impliquer que l'Etat octroie à M. B..., à hauteur de 11 242,97 euros, le bénéfice des aides à la politique agricole commune au titre de la campagne 2014, ni par suite que, sur le fondement de cette nouvelle décision, l'Agence des services de paiement procède au versement de ces aides. 5. Il résulte de ce qui précède que la demande d'exécution présentée par M. B... ne peut qu'être rejetée. Sur les frais de l'instance : 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : Article 1 : La demande d'exécution de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et à l'Agence de services et de paiement. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - M. Goujon-Fischer, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022 Le rapporteur, Signé : P. Rees La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet [VS1]Quid ' N° 21NC00216 2 2
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Vu la procédure suivante : Par une requête enregistrée le 27 novembre 2019, des pièces et des mémoires respectivement enregistrées le 30 novembre 2019, le 6 décembre 2019, le 10 août 2021, le 28 septembre 2021, le 6 décembre 2021 et des mémoires récapitulatifs des 19 et 29 avril 2022, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, les consorts F... et Marie-Cécile E..., les consorts D... et Denise B... et Mme A... du Rivau, représentés par Me Menard demandent à la cour : 1°) d'annuler la décision du 26 juillet 2019 par laquelle la préfète de la Haute-Marne a autorisé l'exploitation d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent (10 éoliennes) ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros à chacun des requérants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens. Ils soutiennent que : - l'étude de dangers est insuffisante quant aux risques relatifs à la faille de Bray-Vittel ; - l'étude d'impact est insuffisante quant à l'impact du projet sur l'avifaune, à l'absence de mention d'une demande de dérogation au titre des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement, sur l'habitat et le bâti et quant aux garanties financières concernant le démantèlement et la remise en état du site ; - l'avis du commissaire enquêteur est insuffisamment motivé et est entaché d'un défaut d'impartialité ; - l'arrêté méconnait les dispositions des articles L. 222-1 et R. 222-1 du code de l'environnement en ce qu'il vise le schéma régional éolien annexé au plan climat air énergie régional de Champagne Ardennes du 29 juin 2012 annulé par la cour administrative d'appel de Nancy ; - l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit au regard des articles L. 511-1 alinéa 1er du code de l'environnement et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en ce qu'il ne prend pas en compte l'atteinte aux paysages naturels en raison de l'effet d'encerclement et de saturation visuelle sur les communes de Signéville, Chantraine, Darmannes et sur les monuments historiques du château de Briaucourt et de l'abbaye de Septfontaine ; - l'arrêté méconnait l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en portant une atteinte disproportionnée à la valeur de leurs biens. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 août 2021, le ministre de la transition écologique conclut à l'irrecevabilité de la requête, ni l'association, ni les autres requérants n'ayant intérêt à agir contre l'arrêté du 26 juillet 2019 et à titre subsidiaire, au rejet de la requête, aucun des moyens soulevés n'étant fondés. Par des mémoires enregistrés le 25 février 2021, le 30 septembre 2021, le 29 octobre 2021, le 12 janvier 2022 et un mémoire récapitulatif du 19 avril 2022, et des pièces du 12 mai 2022 communiquées à la demande de la cour, la société éolienne des Limodores représentée par Me Cambus, conclut à titre principal à l'irrecevabilité de la requête, l'association n'ayant démontré ni la qualité pour agir de son représentant, ni sa qualité d'association agréée, et les autres requérants n'ayant pas intérêt à agir contre l'arrêté du 26 juillet 2019 ; et à titre subsidiaire, au rejet de la requête, aucun des moyens soulevés n'étant fondés et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le protocole additionnel n° 1 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'environnement ; - l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement ; - l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale ; - le décret n° 2014-450 du 2 mai 2014 relatif à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement ; - l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement tel que modifié par l'arrêté du 22 juin 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Barrois, première conseillère, - les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique, - et les observations de Me Menard, pour la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France et autres, ainsi que celles de Me Cambus, substituant Me Versini-Campinchi, pour la société éolienne des Limodores. Une note en délibéré, présentée par l'association société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France et autres, a été enregistrée le 25 mai 2022. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 26 juillet 2019, le préfet de la Haute-Marne a autorisé la société éoliennes des Limodores sur le fondement des articles L. 512-1 du code de l'environnement et L. 421-1 du code de l'urbanisme, à construire et à exploiter une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent (10 éoliennes et deux postes de livraison) sur les territoires des communes de Viéville, Bologne, Andelot-Blancheville et Rochefort-sur-la côte. Par la présente requête, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, les consorts F... et Marie-Cécile E..., les consorts D... et Denise B... et Mme A... du Rivau demandent l'annulation de cet arrêté. Sur les fins de non-recevoir soulevées par la société éoliennes des Limodores et le ministre de la transition écologique : 2. Aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'environnement : " Toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci./ Toute association de protection de l'environnement agréée au titre de l'article L. 141-1 ainsi que les fédérations départementales des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique et les associations agréées de pêcheurs professionnels justifient d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec leur objet et leurs activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elles bénéficient de l'agrément dès lors que cette décision est intervenue après la date de leur agrément ". 3. L'association société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, agréée au niveau national au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement, a notamment pour objet la préservation des sites naturels et urbains. Elle justifie ainsi d'un intérêt à agir pour demander l'annulation de l'autorisation unique en litige délivrée pour l'exploitation d'un parc éolien composé de dix aérogénérateurs. Par ailleurs, l'article 9 des statuts de la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France prévoit que l'association est représentée en justice par son président ou par un autre membre du conseil d'administration désigné à cet effet par ce conseil. La requête de première instance a été présentée par le président, lequel avait qualité pour représenter l'association. Par suite, les conclusions de la requête collective sont recevables sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité en tant qu'elles émanent de chacun des autres demandeurs. Sur la légalité de l'arrêté du 26 juillet 2019 : S'agissant du moyen relatif à l'insuffisance de l'étude d'impact : 4. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. 5. En premier lieu, les requérants soutiennent que l'étude de dangers serait insuffisante quant à l'appréciation des risques relatifs à la faille de Bray-Vittel qui serait proche de la zone d'implantation du projet. Toutefois, l'étude de dangers, réalisée dans le cadre de la demande d'autorisation en litige, procède à une analyse de la localisation du site et de l'environnement de l'installation, examine les différents risques majeurs auxquels est exposé le projet, décrit les installations, identifie les potentiels dangers induits par celle-ci, analyse les retours d'expérience et les risques et décrit les moyens d'intervention et de limitation des conséquences des dangers. Par ailleurs, en l'absence de risques lié au mouvement de terrain et au retrait-gonflement des argiles et, compte tenu du risque très faible de sismicité de la zone d'implantation du projet et des communes concernées, cette étude n'avait pas à étudier les conséquences de la proximité de la faille de Bray-Vittel sur le projet en litige. En tout état de cause, ils n'apportent aucun élément de nature à démontrer que les éoliennes seraient implantées à proximité de ladite faille, ni, à supposer que tel soit le cas, que cela entrainerait des risques qui auraient dû être évalués par l'étude de dangers. 6. En deuxième lieu, les requérants ne peuvent utilement soutenir que l'étude d'impact serait insuffisante concernant les garanties financières du pétitionnaire, notamment celles liées au coût du démantèlement dès lors qu'aucune disposition du code de l'environnement relative au contenu de l'étude d'impact n'impose d'y faire figurer de tels éléments, qui doivent en revanche être indiqués à l'appui de la demande d'autorisation en vertu des dispositions de l'article R. 512-3 5° du code de l'environnement dans leur rédaction applicable . 7. En troisième lieu, les requérants soutiennent que l'étude d'impact alors même qu'elle relève que le projet pourra affecter l'alouette lulu, le bruant jaune, le milan royal et la cigogne noire, ne contient aucune étude scientifique sur l'évaluation de ce risque, comporte des mesures compensatoires insuffisantes et ne fait état d'aucune dérogation sollicitée concernant la présence du milan royal et de la cigogne noire. 8. L'étude d'impact critiquée procède à une analyse de l'état initial du site et de son environnement et fait état notamment des différents impacts du projet sur l'avifaune. Elle intègre ensuite des mesures réductrices et compensatoires afin de protéger l'avifaune. Elle a ainsi relevé un impact fort lié au dérangement provoqué par la phase travaux pour l'alouette lulu et le bruant jaune en période de nidification et un impact modéré sur le milan royal lié aux collisions en période d'exploitation. Compte tenu de l'observation répétée de cette dernière espèce au sein de l'aire d'implantation du projet, une étude spécifique sur les impacts sur cette espèce a d'ailleurs été réalisée. Elle récapitule également dans un tableau exhaustif l'ensemble des impacts potentiels pour l'avifaune, de toute nature, leur degré et la durée des effets néfastes, en fonction des espèces concernées. Les mesures d'évitement telles que l'éloignement du parc éolien par rapport aux autres parcs existants, l'absence d'implantation des éoliennes dans des couloirs de migrations principaux ou secondaires, dans les secteurs boisés et dans les zones naturelles d'intérêt, et les mesures de réduction telles que l'optimisation de la date de démarrage des travaux, la mise en place d'un suivi ornithologique de chantier ainsi que des mesures spécifiques pour le milan royal (réduction de l'attractivité des zones d'implantation des éoliennes, mise en place d'un système de régulation des éoliennes et arrêt des éoliennes en période de reproduction) sont ensuite détaillées dans l'étude. Ainsi, l'étude d'impact conclut à l'abandon de la zone de nidification de Vouécourt entre 2015 et 2017 et à la présence de ces rapaces uniquement en phase de chasse lors des moissons l'été sur la zone d'implantation. S'agissant par ailleurs, de la cigogne noire, même si une étude réalisée par l'office national des forêts en 2015 sur le département de la Haute-Marne produite par les requérants a révélé la présence de la nidification de la cigogne noire dans la vallée du Rognon, il résulte du volet avifaunistique de l'étude d'impact qu'aucune observation de la cigogne noire sur les 18 diligentées n'a été recensée dans le secteur d'implantation du projet malgré la proximité établie d'un nid. En outre, le courrier de l'association ENVOL environnement du 10 janvier 2022 produit au contentieux confirme cette absence de la cigogne noire dans l'aire d'étude, impliquant une exposition très faible de l'espèce à des effets potentiels de collisions avec les éoliennes en litige. Enfin, même si l'étude d'impact mentionne qu'en phase de construction, l'impact est fort pour l'alouette lulu et le bruant jaune pendant la période de nidification, elle ajoute cependant que l'altération de la faune et de son habitat seront temporaires, que la date de démarrage des travaux des éoliennes E3 et E4 est adaptée avec un évitement entre début avril et mi-juillet et qu'elles sont évaluées de nulles à faibles pendant la phase d'exploitation. Par ailleurs, une distance d'évitement de 4,75 kilomètres a été respectée avec les autres éoliennes à proximité alors que la ligue de protection des oiseaux recommande une distance de 1,5 kilomètres. 9. Ainsi, il résulte de ce qui précède que l'étude d'impact a suffisamment évalué et pris en compte les atteintes potentielles à l'avifaune en en réduisant les risques par des mesures de prévention sans que les requérants puissent utilement lui opposer le fait qu'elle n'ait pas pris position sur l'opportunité d'une demande de dérogation au sens de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, ce qui ne relève pas de son objet. 10. Enfin, les requérants soutiennent que l'étude d'impact omet de prendre en compte l'impact sur l'habitat et la dévalorisation du bâti et du patrimoine inscrit, notamment le château de Briaucourt et l'abbaye de Septfontaines située à 990 mètres de la plus proche des éoliennes. Il résulte de l'étude d'impact que l'impact a été évalué au moyen de 58 photomontages représentatifs permettant d'obtenir une vision globale et, notamment du volet paysager, que la zone d'implantation est en dehors de tout périmètre de protection des monuments historiques et que la sensibilité des deux monuments mentionnés est très faible pour l'abbaye et faible pour le château en raison de sa position en contrebas du plateau où se situent les éoliennes et sur les pentes duquel existe une forêt qui fait écran et réduit ainsi la co-visibilité à la seule partie haute des pâles des éoliennes E9 et E10. Par suite, l'étude d'impact est également suffisante sur ce point, alors au demeurant qu'aucune dévalorisation des biens immobiliers situés à proximité du projet n'est établie, compte-tenu de l'impact visuel faible voir nul du projet. S'agissant du moyen relatif au défaut d'impartialité du commissaire enquêteur et à l'insuffisance de motivation de son avis : 11. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 512-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " L'autorisation prévue à l'article L. 512-1 est accordée par le préfet, après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du présent code relative aux incidences éventuelles du projet sur les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et après avis des conseils municipaux intéressés (...) ". Et aux termes de l'article R. 123-19 du même code : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (..) ". L'enquête publique prévue par ces dispositions doit se dérouler dans le respect des principes d'égalité et d'impartialité, dont il découle que la consultation doit être sincère, en permettant notamment au public de donner utilement son opinion et en conduisant le commissaire enquêteur, dans son rapport, à procéder à une synthèse fidèle des observations du public ainsi qu'à une analyse objective des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, des observations du pétitionnaire en réponse aux observations du public. 12. Les requérants font grief au commissaire enquêteur d'une part, de ne pas avoir répondu à certaines observations des déclarants sur l'impact de la faille de Bray-Vittel, l'absence d'étude sur la pollution de l'eau de captage et la mesure des infrasons et d'autre part, d'avoir manqué d'impartialité dans ses propos en dénigrant et ridiculisant les observations des déclarants, en se posant en défenseur des éoliennes face aux " anti-éoliens doctrinaires " et en présentant de façon faussée les résultats des votes des habitants des communes concernées et notamment ceux de Bologne et Andelot. 13. D'une part, le commissaire enquêteur doit dans son rapport, procéder à une synthèse fidèle des observations du public ainsi qu'à une analyse objective des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, des observations du pétitionnaire en réponse aux observations du public, sans toutefois être tenu d'y répondre de manière exhaustive. En l'espèce, même si certaines des réponses apportées peuvent paraître lacunaires, le commissaire enquêteur a retranscrit l'intégralité des observations du public, a tenté d'y répondre et a interrogé le maitre d'ouvrage le 17 décembre 2018 qui y a répondu d'ailleurs le 31 décembre suivant. Ainsi, sur les captages d'eau potable, le maître d'ouvrage a précisé que les éoliennes ne se situaient dans aucun des périmètres de protection, a communiqué une étude hydrogéologique portant en particulier sur les sources de Roocourt-la-côte et Vieville et sur les points de captage de Briaucourt et Rochefort, qui a été transmise à l'autorité régionale de santé. En ce qui concerne les infrasons, le maitre d'ouvrage en réponse au commissaire enquêteur a rappelé qu'il était tenu de réaliser une réception acoustique la première année de fonctionnement de l'éolienne afin de s'assurer de la conformité du parc aux seuils réglementaires et qui, en cas de dépassements sonores, peut contraindre l'exploitant à brider les éoliennes. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de motivation de l'avis du commissaire enquêteur doit être écarté. 14. D'autre part, il résulte des réponses du commissaire enquêteur que celui-ci a effectué une balance entre l'objectif poursuivi par la politique environnementale et les impacts paysagers des éoliennes et le ressenti des habitants vivant à proximité. Ainsi, si le commissaire enquêteur, dans ses rapport et avis, a émis des jugements et réserves à l'égard des observations de certains déclarants au cours de l'enquête publique, en soulignant leur opposition de principe à tout projet éolien, le seul fait de critiquer en des termes vifs la position d'opposants au projet dans le rapport ne permettait pas de regarder celui-ci comme étant dénué d'objectivité dès lors qu'il ne résulte pas en outre de l'instruction que le commissaire enquêteur n'aurait pas assuré fidèlement le recueil et la restitution de l'ensemble des observations du public, ni que son comportement au cours de l'enquête publique ou lors de la rédaction de ses rapport et avis aurait été empreint d'un parti pris en faveur du projet ou d'une volonté de discréditer ses opposants, ni enfin qu'il ait travesti ou manifestement exagéré la réalité des faits dans ses observations. Dès lors, le moyen tiré du défaut d'impartialité du commissaire enquêteur doit être écarté. S'agissant du moyen relatif à l'atteinte au paysage et au patrimoine : 15. Aux termes du premier paragraphe de l'article L. 181-3 du même code : " L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. ". Aux termes de l'article L. 211-1 du même code : " I.- Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; (...) / II.- La gestion équilibrée doit permettre en priorité de satisfaire les exigences de la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile et de l'alimentation en eau potable de la population. (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour statuer sur une demande d'autorisation d'exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement, il appartient au préfet de s'assurer que le projet ne méconnaît pas, notamment, l'exigence de protection des paysages. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage de nature à fonder un refus d'autorisation ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de cette autorisation, il appartient au préfet d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel l'installation est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette installation, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. 16. En cinquième lieu, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué vise un schéma régional éolien annexé à un plan climat air énergie régional de Champagne Ardennes du 29 juin 2012 par la suite annulé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 14 janvier 2016, confirmé par une décision du Conseil d'Etat du 18 décembre 2017, ne peut être utilement soulevé dès lors qu'une erreur dans les visas est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. 17. En sixième lieu, les requérants soutiennent que le projet porte atteinte aux paysages et aux monuments compte-tenu de l'effet d'encerclement et de saturation visuelle sur les communes de Signéville, Chantraines et Darmannes. En l'espèce, il résulte de la méthodologie suivie dans l'étude d'impact que le degré de saturation visuelle des villages de Briaucourt, Chantraines, Darmannes, et Rochefort-sous-côte, a été calculé suivant trois critères habituels, l'angle d'occupation d'horizon, l'angle de respiration visuelle et la densité d'éolienne. Il en ressort que le village de Briaucourt est entouré de 18 éoliennes construites ou autorisées dans un rayon de 5 kilomètres et atteint ainsi un niveau de densité de 0,1895 bien au-delà du seuil de 0,1 normalement accepté, de même pour le village de Chantraines dont la densité atteint 0,1818. Le village de Darmanes, même s'il n'est entouré que de 11 éoliennes, dépasse toutefois le seuil de l'angle de respiration visuelle. Enfin, le village de Rochefort-sous-côte dépasse les trois seuils d'alerte. Des éléments relatifs à la zone d'implantation des éoliennes peuvent toutefois minorer le ressenti d'encerclement des habitants des villages concernés. Ainsi, même si les éoliennes d'une hauteur de 150 mètres en bout de pâle se situent sur un plateau en surplomb des villages, à l'exception de celui de Darmanes, également sur un plateau, et sont ainsi visibles de loin, elles sont séparées des villages avoisinants par un environnement boisé qui créé un écran végétal dissimulant ainsi une grande partie de l'ouvrage depuis le centre du village. Leur visibilité est ainsi limitée aux abords des villages. Par ailleurs, ces mêmes circonstances ont ainsi permis de conclure à un impact très faible sur l'abbaye de Septfontaines pourtant monument historique le plus proche d'une éolienne et à un impact faible sur le château de Briaucourt, dont les photomontages produits ne font pas apparaitre d'altération significative de l'environnement de ces monuments et du paysage. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux méconnaît les dispositions combinées des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement en raison de l'atteinte portée aux paysages et au patrimoine culturel doit être écarté. 18. Par suite, l'arrêté contesté du 26 juillet 2019 du préfet de la Marne ne procède pas d'une appréciation erronée de l'incidence du parc éolien en cause sur le caractère et l'intérêt des lieux avoisinants, et ne méconnait donc pas les dispositions précitées. S'agissant du moyen relatif à la méconnaissance de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 19. Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ". Si ces stipulations ne font pas obstacle à l'édiction, par l'autorité compétente, d'une réglementation de l'usage des biens, dans un but d'intérêt général, ayant pour effet d'affecter les conditions d'exercice du droit de propriété, il appartient au juge, pour apprécier la conformité aux stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales d'une décision individuelle prise sur la base d'une telle réglementation, d'une part, de tenir compte de l'ensemble de ses effets juridiques, d'autre part, et en fonction des circonstances concrètes de l'espèce, d'apprécier s'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les limitations constatées à l'exercice du droit de propriété et les exigences d'intérêt général qui sont à l'origine de cette décision. 20. En l'espèce, l'autorisation litigieuse a été délivrée conformément aux dispositions du code de l'environnement. La circonstance selon laquelle les éoliennes apporteraient des nuisances aux propriétaires riverains ou auraient pour effet de dévaloriser leurs propriétés, n'apparait pas, dans les circonstances de l'espèce, comme portant à leur droit de propriété une atteinte disproportionnée à l'objectif poursuivi. 21. Il résulte de tout ce qui précède que la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, les consorts F... et Marie-Cécile E..., les consorts D... et Denise B... et Mme A... du Rivau ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 26 juillet 2019 du préfet de la Marne. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Sur les conclusions de la société éoliennes des Limodores présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 22. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société éoliennes des Limodores présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, les consorts F... et Marie-Cécile E..., les consorts D... et Denise B... et Mme A... du Rivau est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la société éoliennes des Limodores présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, à M. et Mme F... E..., à M. et Mme D... B..., à Mme A... du Rivau, à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société éoliennes des Limodores. Copie en sera adressée à la préfète de la Haute-Marne. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - Mme Barrois, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La rapporteure, Signé : M. C...La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 19NC03451
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme D... B... épouse E... et M. C... E... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Etat à leur verser la somme totale de 2 112 051 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de fautes commises à l'occasion du contrôle de l'activité de formation professionnelle de la société FH Consulting, assortie des intérêts de droit à compter du 8 août 2016 et de la capitalisation des intérêts échus à compter de cette même date et de le condamner aux entiers dépens. Par un jugement n° 1605402 du 4 décembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 24 janvier 2020, Mme D... B... épouse E... et M. C... E..., représentés par Me Plançon, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 4 décembre 2019 ; 2°) de condamner l'Etat à leur verser la somme totale de 2 112 051 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de fautes commises à l'occasion du contrôle de l'activité de formation professionnelle de la société FH Consulting, assortie des intérêts de droit à compter du 8 août 2016 et de la capitalisation des intérêts échus à compter de cette même date ; 3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la prescription quadriennale n'est pas applicable à leur demande dès lors qu'elle ne s'applique pas à la responsabilité pour faute de l'Etat et qu'en tout état de cause, le délai n'a pu commencer à courir qu'à compter de l'arrêt de la cour d'appel de Colmar les relaxant ; - la DIRECCTE a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en retenant l'existence de manœuvres frauduleuses émanant des époux E... et en en informant l'ensemble de leurs partenaires, ce qui a entrainé notamment le placement en liquidation judiciaire de leur société ; - dès lors que la cour d'appel les a relaxés des infractions, les sanctions administratives ne sont plus fondées ; - en ne procédant qu'à un retrait partiel le 17 août 2016 de sa décision du 21 septembre 2010, le préfet a méconnu l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel de Colmar ; - les dispositions de l'article L. 6354-2 du code du travail sur lesquelles se fonde la DIRECCTE dans son rapport du 18 mars 2010 ayant été abrogées le 26 novembre 2009, le préfet aurait dû faire application des nouvelles dispositions et sa décision est dès lors dépourvue de tout fondement juridique ; - la responsabilité sans faute de l'Etat doit être engagée dès lors que la volonté manifeste de la DIRECCTE de leur nuire dans le cadre de son contrôle leur a causé un préjudice anormal et spécial ; - ils sont fondés à demander l'indemnisation de leur préjudice financier et de leur préjudice moral tenant à l'atteinte portée à leur réputation à hauteur de 2 112 051,02 euros. Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2020, le ministre du travail conclut au rejet de la requête. Il soutient à titre principal, que le délai de quatre années pour demander l'indemnisation du préjudice résultant de l'illégalité de la décision du préfet du 21 septembre 2010 a expiré le 1er janvier 2015 et que dès lors la créance était prescrite au 8 août 2016. A titre subsidiaire, que ni la responsabilité pour faute de l'Etat ne peut être engagée en raison de la procédure de contrôle de la DIRECCTE qui a respecté les dispositions du code du travail, ni sa responsabilité sans faute. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code du travail ; - la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Barrois, première conseillère, - les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme E... a créé en 2006 une école de formation dénommée Renaissance académie de formation, qui est devenue la société à responsabilité limitée (ci-après SARL) FH Consulting le 2 février 2010. A la suite d'un contrôle administratif et financier de l'activité de prestataire de formation professionnelle de la société diligenté par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (ci-après DIRECCTE), le préfet de région a, par une décision du 21 septembre 2010, mis à la charge de la société une somme totale de 271 395,07 euros, consistant pour l'essentiel en des sommes à rembourser à divers cocontractants en raison de la nullité de contrats de formation professionnelle et de la non-réalisation d'actions de formation, en 60 212,61 euros à verser au Trésor public au titre de dépenses rejetées et en 27 420,63 euros à verser au Trésor public au titre d'une pénalité pour manœuvres frauduleuses. La société FH Consulting a été placée en liquidation judiciaire par une décision de la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg en date du 28 mars 2011. Par ailleurs, à la suite de l'ouverture d'une instruction pénale sur signalement au parquet par le conseil des prud'hommes, Mme et M. E... ont été condamnés, par un jugement du tribunal correctionnel de Strasbourg en date du 15 novembre 2013, pour escroquerie et recel de biens obtenus à l'aide d'une escroquerie, avant d'être relaxés des fins de poursuite par un arrêt de la cour d'appel de Colmar en date du 23 avril 2015. Par une demande préalable du 8 août 2016, reçue le 10 août 2016 par les services de la DIRECCTE, les époux E... ont sollicité de l'Etat le versement d'une somme de 2 112 051 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de la rédaction du rapport de contrôle rédigé par la DIRECCTE le 18 mars 2010 qui a fondé l'enquête pénale dont ils ont fait l'objet et en raison de l'illégalité de la décision du 21 septembre 2010 qui ont entrainé la liquidation judiciaire de leur société. Par une décision du 17 août 2016, l'autorité administrative a rejeté leur demande indemnitaire mais a procédé au retrait partiel de la décision du préfet de région en date du 21 septembre 2010 en réduisant le montant des pénalités pour manœuvres frauduleuses à hauteur de 14 857,86 euros. Par la présente requête, M. et Mme E... demandent l'annulation du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 4 décembre 2019 et la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 2 112 051 euros en réparation de leurs préjudices. Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription quadriennale : 2. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics, dont les dispositions sont applicables au présent litige : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ". Aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui (...), ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ". Lorsqu'est demandée l'indemnisation du préjudice résultant de l'illégalité d'une décision administrative, le fait générateur de la créance doit être rattaché non à l'exercice au cours duquel la décision a été prise mais à celui au cours duquel elle a été valablement notifiée à son destinataire ou portée à la connaissance du tiers qui se prévaut de cette illégalité. 3. En l'espèce, les préjudices invoqués par les époux dans leur demande indemnitaire préalable du 8 août 2016 reçue le 10 août suivant, comme étant à l'origine de la créance qu'ils estiment détenir contre l'Etat, procèdent de l'illégalité de la décision du 21 septembre 2010 du préfet de la région Alsace édictée à la suite du rapport du 18 mars 2010 des services de la DIRECCTE établi dans le cadre du contrôle administratif de la société qui constitue un acte préparatoire à la décision préfectorale et dont les requérants ne contestent pas qu'elle leur a été valablement notifiée, et contre laquelle ils ont du reste exercé un recours qui a été rejeté par une ordonnance du 14 juin 2011 du tribunal administratif de Strasbourg. Par suite, ils ne peuvent utilement soutenir qu'ils ignoraient l'existence de cette créance avant que n'intervienne l'arrêt de la cour d'appel de Colmar du 23 avril 2015. Il en résulte que le fait générateur de la créance devant être rattaché à l'année 2011, leur créance était prescrite à la date de leur demande indemnitaire préalable, le 8 août 2016. Sur la responsabilité pour faute : 4. D'une part, à supposer même que des erreurs puissent être décelées dans le rapport émis le 18 mars 2010 par la DIRECCTE à l'issue des opérations de contrôle administratif de l'activité de la société FH Consulting, il ne résulte pas de l'instruction que le préjudice dont les requérants se prévalent, constitué par la mise en liquidation judiciaire de leur société, trouve son origine directe et certaine dans l'édiction de ce rapport, alors même qu'il a servi de base à l'édiction de la décision du préfet du 21 septembre 2010. En effet, il ne résulte pas de l'instruction que cette décision, dont l'illégalité partielle a été admise par l'administration qui a procédé à son retrait en tant qu'elle mettait à la charge de la société FH Consulting une somme de 14 857,86 euros sur les 27 420,63 euros initialement réclamés au titre des manœuvres frauduleuses, était illégale pour le reste des sommes perçues par la société, dont elle demandait le remboursement. En tout état de cause, si les requérants se prévalent de l'arrêt du 23 avril 2015 par lequel la cour d'appel de Colmar les a relaxés des faits d'escroquerie et respectivement de faits de recel de biens obtenus à l'aide d'une escroquerie pour lesquels ils avaient été condamnés par le tribunal correctionnel, cet arrêt n'a ni pour objet ni pour effet de rendre irrégulier le contenu du rapport du 18 mars 2010. Par conséquent, les requérants ne démontrent ni que le contenu du rapport de la DIRECCTE, ni que les conditions dans lesquelles il a été réalisé, serait de nature à engager la responsabilité de l'Etat. 5. D'autre part, aux termes de l'article L. 6362-11 du code du travail, " Lorsque les contrôles ont porté sur des prestations de formation financées par l'Etat, les collectivités territoriales, le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, l'institution publique mentionnée à l'article L. 5312-1, les employeurs ou les organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle continue, l'autorité administrative les informe, chacun pour ce qui le concerne, des constats opérés ". 6. Il appartenait ainsi à la DIRECCTE d'informer les cocontractants de la société FH consulting que celle-ci devait leur rembourser certaines prestations. Dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas établi que la DIRECCTE aurait outrepassé son obligation d'information, M. et Mme E... ne sauraient sérieusement faire grief à l'Etat d'être à l'origine de la cessation des relations contractuelles de la société FH Consulting avec ses cocontractants concernés par la décision du 21 septembre 2010. Par suite, les conclusions présentées par les époux E... sur le fondement de la responsabilité pour faute doivent être rejetées. Sur la responsabilité sans faute : 7. La mise en œuvre par la DIRECCTE de la procédure de contrôle administratif de l'activité de prestataire de formation professionnelle de la société FH Consulting en application des dispositions des articles L. 6361-2 et suivants du code du travail ne présente aucun caractère spécial ni ne faisait courir de risque anormal à la société. En outre, aucune volonté manifeste de nuire aux requérants n'est démontrée en l'espèce. Par suite, les conclusions présentées par les époux E... sur le fondement de la responsabilité sans faute doivent être rejetées. 8. Il résulte de ce qui précède que les conclusions indemnitaires présentées par M. et Mme E... doivent être rejetées, de même que, par voie de conséquences leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles relatives aux dépens préalable. D É C I D E : Article 1er : La requête de M et Mme E... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E..., à M. C... E... et au ministre du travail. Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - Mme Barrois, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La rapporteure, Signé : M. A...La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui le concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 20NC00219
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du 30 juin 2017 par laquelle le conseil municipal d'Amnéville a approuvé la cession de la collection Maurice Chapleur à la société Passeport prévention et autorisé le maire à signer tout acte utile à cette fin et d'enjoindre au maire de procéder aux démarches nécessaires pour signer avec lui l'acte de vente de cette collection dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par un jugement n° 1703729 du 6 décembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 10 février 2020, M. C..., représenté par Me Vorms demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 6 décembre 2019 ; 2°) d'enjoindre au maire de la commune d'Amnéville de procéder aux démarches nécessaires auprès d'un notaire pour signer l'acte de vente de la collection du musée du vélo et de la moto au prix d'1,5 millions d'euros dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de la commune d'Amnéville le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la commune ne pouvait retirer sa délibération du 2 avril 2015 dès lors qu'elle était créatrice de droits ; - la délibération du 30 juin 2017 est illégale en ce qu'elle a de contraire à la délibération du 2 avril 2015 ; - il en résulte que le maire est engagé au nom de la commune à lui vendre la collection du musée du vélo et de la moto. Par un mémoire du 6 avril 2020, la société Passeport Prévention représentée par Me Guidon conclut à l'irrecevabilité de la requête en raison de sa stricte identité avec la requête de première instance, à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. C... le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2020, la commune d'Amnéville représentée par Me Soler-Couteaux conclut à l'irrecevabilité de la requête en l'absence d'éléments et de moyens nouveaux exposés en appel, à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. C... le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de propriété des personnes publiques ; - le code du patrimoine ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Barrois, première conseillère, - les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique, - et les observations de Me Vorms, pour M. C..., ainsi que celles de Me Schultz pour la commune d'Amnéville et de Me Guidon pour la société Passeport Prévention. Considérant ce qui suit : 1. En novembre 2000, la commune d'Amnéville a acquis la collection de Maurice Chapleur afin de l'exposer dans son musée du vélo et de la moto. A la suite d'une baisse de la fréquentation du musée et de son coût trop élevé de fonctionnement, la commune a décidé de le fermer en juillet 2015 et de déménager la collection en août 2015 dans un lieu de conservation. Par une délibération du 2 avril 2015, le conseil municipal a approuvé la vente de ladite collection à M. C... pour un montant de 1,5 millions d'euros. A la suite d'échanges avec la direction du patrimoine en mai 2015 sur le statut de cette collection, la commune par une délibération du 22 décembre 2016 a décidé de retirer sa délibération du 2 avril 2015, de désaffecter la collection, de la déclasser du domaine public mobilier de la commune et de saisir pour avis la commission scientifique nationale des collections. Par une délibération du 30 juin 2017, le conseil municipal a autorisé le maire à vendre la collection à la société Passeport Prévention aux fins d'exposer les biens vendus et de promouvoir la collection. Un contrat de vente a par suite été signé pour un montant de 1,5 millions d'euros. Par la présente requête, M. C... fait appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg rejetant sa demande d'annulation de cette dernière délibération. 2. D'une part, aux termes de l'article L. 2112-1 du code général de propriété des personnes publiques : " Sans préjudice des dispositions applicables en matière de protection des biens culturels, font partie du domaine public mobilier de la personne publique propriétaire les biens présentant un intérêt public du point de vue de l'histoire, de l'art, de l'archéologie, de la science ou de la technique, notamment : (...) 8° Les collections des musées ; " et de l'article L. 410-1 du code du patrimoine : " Est considérée comme musée, au sens du présent livre, toute collection permanente composée de biens dont la conservation et la présentation revêtent un intérêt public et organisée en vue de la connaissance, de l'éducation et du plaisir du public. ". 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 2141-1 du code général de propriété des personnes publiques : " Un bien d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1, qui n'est plus affecté à un service public ou à l'usage direct du public, ne fait plus partie du domaine public à compter de l'intervention de l'acte administratif constatant son déclassement." et de l'article L. 1 de ce même code : " Le présent code s'applique aux biens et aux droits, à caractère mobilier ou immobilier, appartenant à l'Etat, aux collectivités territoriales et à leurs groupements, ainsi qu'aux établissements publics. ". 4. Il ressort des pièces du dossier que la collection de Maurice Chapleur dont la conservation et la présentation revêtait un intérêt public et qui a été acquise par la commune en novembre 2000, a été exposée jusqu'en juillet 2015 au musée municipal du vélo et de la moto. Dès lors, à la date de la délibération du 2 avril 2015 autorisant sa vente à M. C... qui n'était assortie d'aucune condition suspensive, ladite collection appartenait au domaine public de la commune et devait, avant toute vente, faire l'objet d'une désaffectation et d'un déclassement par un acte formel. Par suite, en l'absence d'un acte préalable de désaffectation et de déclassement de la collection, la délibération du 2 avril 2015, qui n'a pas reçu exécution, et qui, au demeurant, n'a pas créé de droits à son profit, était illégale et pouvait dès lors, comme cela résulte également de l'ordonnance du 24 octobre 2017 du tribunal administratif de Strasbourg devenue définitive, être rapportée par l'autorité compétente par la délibération du 22 décembre 2016. Il en résulte que le moyen tiré de ce que la délibération du 30 juin 2017 serait illégale en ce qu'elle porte sur la vente de la collection à la société Passeport Prévention alors que la commune s'était déjà engagée à la vendre à M. C... par sa délibération du 2 avril 2015 doit être écarté. 5. En outre, les circonstances que la commune ait décidé discrétionnairement de vendre un bien de son domaine privé à la société Passeport Prévention à un prix identique à celui proposé au préalable par M. C... et qu'elle ait ajouté une condition tenant à l'exposition de la collection au grand public sont sans incidence sur la légalité de la délibération du 30 juin 2017. 6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais liés à l'instance : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune d'Amnéville et non compris dans les dépens, ainsi qu'une somme identique au profit de la société Passeport prévention. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : M. C... versera à la commune d'Amnéville une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : M. C... versera à la société Passeport Prévention une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à la commune d'Amnéville et à la société Passeport prévention. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Goujon-Fischer, premier conseiller, - Mme Barrois, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La rapporteure, Signé : M. B...La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 20NC00348
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... F... B..., née D..., a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du ministre de l'intérieur portant refus de délivrance d'une carte nationale d'identité et d'un passeport, d'enjoindre au ministre de lui délivrer sans délai une carte nationale d'identité et un passeport français et de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 euro symbolique en réparation du préjudice qu'elle a subi. Par un jugement n° 1803549 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 30 août 2020, sous le n° 20NC02535, Mme B..., née D..., représentée par Me Houessou, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 30 juin 2020 ; 2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur portant refus de délivrance d'une carte nationale d'identité et d'un passeport ; 3°) d'enjoindre au ministre de lui délivrer sans délai une carte nationale d'identité et un passeport français ; 4°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 euro symbolique en réparation du préjudice qu'elle a subi. Elle soutient que : - le signataire de la décision du ministre de l'intérieur n'était pas compétent ; - cette décision est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'une erreur de fait ; - en estimant que l'acte de naissance de son père, délivré par le service central d'état civil de Nantes, ne suffisait pas à justifier qu'il avait conservé de plein droit la nationalité française après l'accession à l'indépendance des anciens territoires d'outre-mer ou sous tutelle de la France, le ministre de l'intérieur a entaché sa décision d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ; - le ministre a commis une erreur de droit et d'appréciation et violé l'article 32-3 du code civil, notamment en affirmant que toutes les personnes qui étaient de nationalité française au moment de leur naissance ont perdu la nationalité française après l'accession à l'indépendance des anciens territoires d'outre-mer ou sous tutelle dont elles étaient originaires ; - la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article 4 du décret du 22 octobre 1955 et de l'article 5 du décret du 30 décembre 2005 ; elle est fille et petite-fille de personnes ayant la nationalité française ; - la décision attaquée a été prise en violation de la circulaire n° IOCK1002582C. Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juillet 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - la requête de première instance était tardive ; - les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil, - le code des relations entre le public et l'administration, - le décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 instituant la carte nationale d'identité, - le décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 relatif aux passeports, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller, - et les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Le 16 avril 2018, Mme B..., née D..., a, pour la première fois, sollicité du préfet de Meurthe-et-Moselle la délivrance d'une carte nationale d'identité et d'un passeport. Le silence gardé par le préfet a fait naître une décision implicite de rejet, contre laquelle l'intéressée a formé un recours hiérarchique auprès du ministre de l'intérieur le 18 juillet 2018. Par une décision expresse du 27 novembre 2018, le ministre de l'intérieur a rejeté ce recours. Mme B..., née D..., relève appel du jugement du 30 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme d'un euro symbolique en réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi. Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur : 2. La requérante soulève pour la première fois en appel le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision prise par le ministre de l'intérieur sur son recours hiérarchique. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée n'avait, en première instance, présenté que des moyens de légalité interne. Par suite, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de sa décision, qui se rattache à une cause juridique distincte, doit être écarté comme irrecevable. Sur la demande de la légalité de la décision du 27 novembre 2018 : 3. En premier lieu, la décision du ministre de l'intérieur du 27 novembre 2018 est signée de Mme Séverine Reymund, conseillère d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, chef du bureau des titres d'identité et de voyage, à qui le sous-directeur des libertés publiques, lui-même compétent en vertu du 2° de l'article 1er du décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement, a donné délégation par une décision du 2 septembre 2016, publiée au Journal officiel de la République française n° 0206 du 4 septembre 2016 à l'effet de signer tous actes, arrêtés et décisions dans la limite des attributions de l'intéressée, au nombre desquelles figure la délivrance des titres d'identité et de voyage. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision contestée manque en fait. 4. En second lieu, aux termes de l'article 2 du décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 instituant la carte nationale d'identité : " La carte nationale d'identité est délivrée sans condition d'âge à tout Français qui en fait la demande (...) ". Aux termes de l'article 4 du décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 relatif aux passeports électroniques : " Le passeport électronique est délivré, sans condition d'âge, à tout Français qui en fait la demande (...) ". Pour l'application de ces dispositions des décrets des 22 octobre 1955 et 30 décembre 2005, il appartient aux autorités administratives compétentes de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que les pièces produites à l'appui d'une demande de carte nationale d'identité ou de passeport sont de nature à établir l'identité et la nationalité du demandeur. Seul un doute suffisant sur l'identité ou la nationalité de l'intéressé peut justifier le refus de délivrance ou de renouvellement de passeport. 5. Il ressort des pièces du dossier que la requérante, qui revendique la nationalité française par filiation paternelle, s'est vue refuser la délivrance d'un certificat de nationalité française le 2 novembre 2016 par le greffier du tribunal d'instance de Villejuif au motif qu'elle ne justifiait pas de la conservation de la nationalité française par son grand-père paternel, M. C... D..., lors de l'accession à l'indépendance du Dahomey, alors que, selon la loi n° 60-752 du 28 juillet 1960, les personnes originaires de ce territoire devaient, pour conserver la nationalité française, avoir établi leur domicile hors des ex-territoires d'outre-mer ou avoir souscrit une déclaration de reconnaissance de nationalité française, et qu'en conséquence son père, M. G... (E...) D..., mineur au 1er août 1960, avait suivi la condition de son propre père et avait lui aussi potentiellement perdu la nationalité française. Si à la date de la décision du ministre, la requérante avait formé un recours contre ce refus de délivrance d'un certificat de nationalité auprès du tribunal et s'était prévalue devant le ministre de l'acte de naissance de son père, lequel suffisait selon elle, à attester de sa nationalité française, la présentation de cet acte d'état civil ne permettait pas, au regard du motif de refus avancé par le greffier du tribunal d'instance de Villejuif, de vérifier que son père avait conservé la nationalité française. Dans ces circonstances, le ministre de l'intérieur n'a pas inexactement apprécié les faits de l'espèce en estimant que le refus de délivrance à l'intéressée d'un certificat de nationalité française faisait naître un doute suffisant sur sa nationalité française pour justifier un refus de délivrance des titres sollicités. Au demeurant, le 30 octobre 2019, le tribunal de grande instance de Paris a jugé que la requérante n'était pas française, après avoir relevé qu'une incertitude entachait l'état civil de G... D..., père mentionné dans l'acte de naissance de l'intéressée, l'identité entre cette personne et M. E... D..., fils de M. C... D..., n'étant pas établie par les pièces produites devant le tribunal. 6. Ainsi qu'il a été dit, le refus de délivrance d'une carte d'identité et d'un passeport opposé à la requérante est fondé sur un doute sur sa nationalité, né du refus des services judiciaires de lui délivrer un certificat de nationalité française lié lui-même à l'incertitude quant au fait que son père, réputé être né français, ait conservé la nationalité française à la suite de l'entrée en vigueur de la loi n° 60-752 du 28 juillet 1960. Eu égard au motif de refus que lui a ainsi opposé le ministre, l'intéressée ne saurait utilement se prévaloir du principe selon lequel un acte de naissance délivré par le service central d'état civil du ministère des Affaires étrangères est une preuve de nationalité française, qui résulte selon elle des articles 2 et 7 de la loi n° 68-671 du 25 juillet 1968, de l'article 141 du code de la nationalité, des articles 1er, 2-1 et 4 du décret n° 65-422 du 1er juin 1965 portant création d'un service central d'état civil au ministère des Affaires étrangères, de l'article 1er du décret n° 80-308 du 25 avril 1980, de l'article 98 du code civil et des articles 1057 et 1058 du code de procédure civile. 7. La requérante n'invoque pas utilement non plus les dispositions de la circulaire NORIOCK1002582C du 1er mars 2010 relative à la simplification de la procédure de délivrance et de renouvellement des cartes nationales d'identité et des passeports prescrivant aux services instructeurs de ne pas vérifier plus avant la nationalité française d'un demandeur qui produit un acte d'état civil établi par le service central d'état civil du ministère des Affaires étrangères, dès lors, en tout état de cause, que ces dispositions, qui n'ajoutent pas à l'état du droit et se bornent à recommander aux services instructeurs l'allègement des procédures en matière de délivrance des cartes d'identité et de passeport, sont dépourvues de caractère réglementaire et ne présentent pas davantage le caractère d'une interprétation d'une règle au sens de l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration. 8. Enfin, le ministre n'a pas estimé que toutes les personnes nées sur le territoire des anciens territoires d'outre-mer ou territoires sous tutelle qui étaient de nationalité française au moment de leur naissance ont perdu la nationalité française après l'accession à l'indépendance de ces territoires. Ainsi, il n'a, en tout état de cause, pas méconnu l'article 32-3 du code civil. 9. Il s'ensuit que le ministre de l'intérieur n'a entaché sa décision d'aucune erreur de fait, d'erreur de droit ou d'erreur d'appréciation. 10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B..., née D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 11. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentée par la requérante. Sur les conclusions indemnitaires : 12. Le rejet du recours hiérarchique présenté par la requérante auprès du ministre de l'intérieur n'étant pas illégal, celle-ci n'est pas fondée à demander la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice qu'elle soutient avoir subi du fait de cette décision. Sur les frais liés à l'instance : 13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 14. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, la somme demandée par la requérante au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme B..., née D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... F... D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - M. Goujon-Fischer, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. Goujon-FischerLa présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 20NC02535
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2021 par lequel le préfet de l'Aube l'a obligé à quitter le territoire avec délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays de destination. Par un jugement n° 2101728 du 24 septembre 2021, le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 26 octobre 2021, M. B..., représenté par Me Gaffuri, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 24 septembre 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2021 par lequel le préfet de l'Aube l'a obligé à quitter le territoire avec un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays de destination ; 3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de réexaminer sa demande dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée et sa situation personnelle n'a pas fait l'objet d'un examen particulier ; - elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation familiale ; - la décision fixant le pays de destination méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle méconnait les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er avril 2022, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 23 mai 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., de nationalité camerounaise, né le 16 août 1984, déclare être entré en France le 30 novembre 2018 et a sollicité des autorités françaises son admission au séjour au titre de l'asile en raison de craintes pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 25 septembre 2020 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile le 5 juillet 2021. Par arrêté du 19 juillet 2021, le préfet de l'Aube l'a obligé à quitter le territoire français sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en lui octroyant un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination. Par la présente requête, M. B... fait appel du jugement du 24 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Toutefois, les motifs des décisions relatives au délai de départ volontaire et à l'interdiction de retour édictées le cas échéant sont indiqués ". 3. Il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée mentionne les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et les éléments de faits relatifs à la situation administrative et personnelle de M. B... sur lesquels s'est fondé le préfet de l'Aube pour édicter la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation est écarté comme manquant en fait. 4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé au regard des pièces dont il disposait à la date de la décision attaquée. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 6. Pour prendre la décision attaquée à la suite du rejet de sa demande d'asile, le préfet de l'Aube s'est fondé sur les déclarations de M. B..., célibataire et arrivé récemment en France en novembre 2018, qui ne justifiait d'aucun lien privé et familial stable et intense sur le territoire français. Même s'il a, postérieurement à la décision attaquée et en dernier lieu en cause d'appel, produit des pièces mentionnant qu'il vivrait en concubinage avec Mme A... et leur fille, née le 20 avril 2021, dont il prendrait soin, il est constant que Mme A... qui est titulaire d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'au 1er février 2022 n'a pas vocation à s'installer de manière pérenne sur le territoire français. En outre, contrairement à ce que soutient le requérant, les pièces contradictoires produites et notamment une attestation du centre d'hébergement de la CADA du 27 juillet 2021 qu'il y aurait été hébergé depuis le 6 avril 2020 jusqu'à cette date, ne permettent pas d'établir avec certitude qu'il vivrait en concubinage avec Mme A.... Enfin, il n'établit pas, alors qu'il aurait un autre enfant né en 2009 et résidant au Cameroun, être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation familiale doivent être écartés. Sur la décision fixant le pays de destination : 7. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " et aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ;2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " 8. M. B..., dont la demande de protection internationale a, au demeurant, été rejetée par une décision du 25 septembre 2020 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 5 juillet 2021, ne produit aucune pièce de nature à établir l'existence de risques actuels, personnels et sérieux auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine, le Cameroun. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Aube. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - Mme Barrois, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La rapporteure, Signé : M. C...La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 21NC02797
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2021 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint de français, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination duquel il était susceptible d'être éloigné à l'expiration de ce délai, d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer un certificat de résidence en qualité de conjoint de français ou, à défaut, de réexaminer sa situation, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 2107322 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet des Yvelines, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, de délivrer à M. A... B... un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. A... B.... Procédure devant la cour : I. Par une requête, enregistrée le 29 novembre 2021 sous le n° 21VE03165, le préfet des Yvelines demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. A... B... devant le tribunal administratif. Il soutient que : - M. A... B... ne remplit pas les conditions d'obtention d'un certificat de résidence dès lors qu'il n'établit pas être régulièrement entré en France ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est bien fondée ; - compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de l'intéressé, l'arrêté n'a pas porté une atteinte disproportionnée aux droits et intérêts de M. A... B..., qui n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; - il n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant de délivrer le certificat de résidence à M. A... B.... Par un mémoire en défense enregistré le 5 janvier 2022, M. A... B..., représenté par Me Saligari, avocat, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête du préfet des Yvelines ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'incompétence ; - elle est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ; - elle méconnaît les stipulations du 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dès lors qu'il est entré régulièrement en France muni d'un visa Schengen en cours de validité ; - les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui sont pas opposables en application de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; - à supposer le non-respect de la déclaration d'entrée en France avéré, cette irrégularité aurait seulement pu entraîner sa remise aux autorités espagnoles ; - à titre subsidiaire, l'absence de déclaration d'entrée en France constitue une substitution de motif de la décision du préfet ; ce motif n'aurait pas conduit le préfet à prendre la même décision et la substitution doit donc être refusée ; - il est marié à une ressortissante française et entretient une communauté de vie avec elle ; - la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour. II. Par une requête, enregistrée le 29 novembre 2021 sous le n° 21VE03166, le préfet des Yvelines demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 2107322 du tribunal administratif de Versailles du 9 novembre 2021. Il soutient que les conditions d'application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative sont satisfaites. Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ; - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B..., ressortissant algérien né le 23 janvier 1986, a fait l'objet d'un arrêté du 20 juillet 2021 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. Saisi par M. A... B..., le tribunal administratif de Versailles a, par un jugement du 9 novembre 2021, annulé cet arrêté et enjoint au préfet de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de cette notification. Par les requêtes nos 21VE03165 et 21VE03166, le préfet des Yvelines demande l'annulation et le sursis à exécution de ce jugement. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes du 2° de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968, le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit " au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ". 3. Pour annuler l'arrêté du 20 juillet 2021, le tribunal administratif a estimé que le préfet des Yvelines avait fait une inexacte application des stipulations précitées du paragraphe 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 en refusant de délivrer à M. A... B... le certificat de résidence qu'elles prévoient au motif tiré de son entrée irrégulière en France. 4. L'accord franco-algérien régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité. Parmi ces règles, l'article 9 de cet accord impose que les ressortissants algériens venant en France pour un séjour inférieur à trois mois présentent un passeport en cours de validité muni d'un visa délivré par les autorités françaises. 5. Toutefois, ne sont pas incompatibles avec ces règles, les stipulations de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, introduite dans l'ordre juridique interne à la suite de la loi du 30 juillet 1991 qui en autorise l'approbation et du décret de publication du 21 mars 1995, dont l'article 22 stipule que les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. 6. Il n'est pas établi ni même allégué que M. A... B... a effectué la déclaration d'entrée en France prévue par ces stipulations. Ainsi et sans qu'y fasse obstacle que la circonstance que M. A... B... est entré en France muni d'un visa en cours de validité, le préfet des Yvelines est fondé à soutenir qu'il ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire français. Ce motif figurant dans l'arrêté contesté, aucune substitution n'est nécessaire et le moyen tiré de ce qu'il n'est pas établi que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif est inopérant. 7. Il résulte de ce qui précède que le préfet des Yvelines est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté au motif qu'en considérant que M. A... B... ne justifiait pas d'une entrée régulière sur le territoire français, il avait fait une inexacte application des stipulations précitées du paragraphe 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. 8. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... B... devant le tribunal administratif et devant la cour. Sur la légalité de l'arrêté contesté : 9. En premier lieu, par un arrêté n° 78-2021-03-01-008 du 1er mars 2021, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture des Yvelines le même jour, Mme D..., sous-préfète, a reçu délégation de signature du préfet des Yvelines pour prendre, dans la limite de son arrondissement, les arrêtés de refus de titre de séjour et les obligations de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué doit être écarté. 10. En deuxième lieu, l'arrêté contesté cite les dispositions du 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien et vise la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux obligations de quitter le territoire français. Il indique également que M. A... B... est titulaire d'un visa C Schengen délivré par les autorités espagnoles, qu'il est entré le 8 mars 2020 sur le territoire espagnol et qu'il ne justifie pas d'une entrée régulière en France. Il précise que l'intéressé ne déclare pas avoir d'enfant, que ses parents et ses frères et sœurs résident en Algérie où il a vécu jusqu'à ses trente-quatre ans. Il relève que dans ces circonstances, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Il indique, enfin, que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. L'arrêté contesté comporte, ainsi, l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement des décisions litigieuses. Par suite, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le préfet n'aurait pas mentionné l'ensemble des éléments caractérisant la situation de M. A... B..., l'arrêté est suffisamment motivé. 11. En troisième lieu, cette motivation révèle un examen réel et sérieux de la situation de M. A... B.... 12. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 621-2 du même code : " Peut faire l'objet d'une décision de remise aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne (...) ". Aux termes de l'article L. 621-3 du même code : " L'étranger en provenance directe du territoire d'un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 peut se voir appliquer les dispositions de l'article L. 621-2 lorsqu'il est entré ou a séjourné sur le territoire français (...) sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité ". 13. Le champ d'application des mesures obligeant un étranger à quitter le territoire français et celui des mesures de remise d'un étranger à un autre Etat ne sont pas exclusifs l'un de l'autre et le législateur n'a pas donné à l'une de ces procédures un caractère prioritaire par rapport à l'autre. Il s'ensuit que, lorsque l'autorité administrative envisage une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger dont la situation entre dans le champ d'application de l'article L. 621-3, elle peut légalement soit le remettre aux autorités compétentes de l'Etat membre de l'Union Européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, sur le fondement des articles L. 621-2, soit l'obliger à quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 611-1. Ces dispositions ne font pas non plus obstacle à ce que l'administration engage l'une de ces procédures alors qu'elle avait préalablement engagée l'autre. Toutefois, si l'étranger demande à être éloigné vers l'Etat membre de l'Union Européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, ou s'il est résident de longue durée dans un Etat membre ou titulaire d'une " carte bleue européenne " délivrée par un tel Etat, il appartient au préfet d'examiner s'il y a lieu de reconduire en priorité l'étranger vers cet Etat ou de le réadmettre dans cet Etat. 14. Il résulte des principes énoncés au point ci-dessus que si M. A... B... était au nombre des étrangers pouvant faire l'objet d'une mesure de remise aux autorités espagnoles, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce qu'une obligation de quitter le territoire français soit prise à son encontre, le champ d'application de ces mesures n'étant pas exclusif l'un de l'autre. En outre, il n'est pas établi ni même allégué que l'intéressé aurait demandé à être éloigné à destination de l'Espagne qui lui a délivré un visa de type C. Par suite, le moyen tiré de ce que M. A... B... ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français doit être écarté. 15. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". 16. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B... est entré en France le 8 mars 2020 et s'est marié à une ressortissante française le 6 août 2020. Ainsi, ce mariage était récent à la date de l'arrêté contesté. En outre, M. A... B... n'établit pas avoir noué d'autres liens en France et n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et deux de ses six frères et sœurs et où il a vécu jusqu'à trente-quatre ans. Dans ces conditions, le préfet des Yvelines n'a pas, en prenant l'arrêté attaqué, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Pour les mêmes motifs, le préfet des Yvelines n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation sociale et personnelle. 17. Enfin, il résulte de ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de délivrance d'un certificat de résidence. 18. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Yvelines est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 20 juillet 2021. Sur le sursis à exécution : 19. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête n° 21VE03165 du préfet des Yvelines tendant à l'annulation du jugement n° 2107322 du tribunal administratif de Versailles du 9 novembre 2021, les conclusions de la requête n° 21VE03166 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer. Sur les frais liés à l'instance : 20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Par suite, les conclusions présentées, à ce titre, par M. A... B... doivent être rejetées. D É C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2107322 du tribunal administratif de Versailles du 9 novembre 2021 est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. A... B... devant le tribunal administratif de Versailles et ses conclusions d'appel sont rejetées. Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 21VE03166 du préfet des Yvelines. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. E... A... B.... Copie en sera adressée au préfet des Yvelines. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, G. C...La présidente, C. Signerin-IcreLa greffière, C. Yarde La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 Nos21VE03165...
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Vu la procédure suivante : Procédures contentieuses antérieures : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles : 1°) sous le n° 1504075, d'annuler la saisie à tiers détenteur émise par le directeur départemental des finances publiques des Yvelines le 2 décembre 2014 en vue de recouvrer la somme de 3 437,20 euros, ainsi que la décision implicite, née le 22 février 2015, par laquelle ce directeur a rejeté la réclamation qu'elle avait formée contre cette saisie et tendant, en outre, au versement d'une indemnité de 10 000 euros, de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 3 437,20 euros indûment saisie, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation à compter de cette saisie, ainsi que l'indemnité susmentionnée de 10 000 euros, d'enjoindre à l'Etat de lui verser les sommes ainsi réclamées, dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 15 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blin de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. 2°) sous le n° 1602460, d'annuler la décision du 8 juin 2015 par laquelle le recteur de l'académie de Versailles l'a informée d'un trop perçu de rémunération de 2 524,72 euros, ainsi que le titre de perception émis par le directeur départemental des finances publiques de l'Ariège le 30 juin 2015 lui en réclamant le paiement, de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 2 524,72 euros indûment saisie, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation à compter de cette saisie et à lui verser une indemnité de 15 000 euros, d'enjoindre à l'Etat de lui verser les sommes ainsi réclamées, dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 15 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blin de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par deux jugements du 4 juin 2018, ce tribunal a rejeté la demande n° 1602460 et, sur la demande n° 1504075, a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de décharge à hauteur de la somme de 424,82 euros et rejeté le surplus des conclusions de cette demande. Procédure devant la cour : Par requêtes respectivement enregistrées les 28 novembre et 3 décembre 2018 sous les n° 18VE04006 et 18VE04037, Mme A... a fait appel de ces jugements. Par une requête et des mémoires, respectivement enregistrés les 14 mai, 11 juillet 2019 et 25 août 2020 sous le n° 19VE01861, Mme A..., représentée par Me Boiardi, avocate, demande à la cour : 1°) de surseoir à l'exécution de ces jugements ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Boiardi de la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que les conditions d'application du sursis à exécution prévues par les articles R. 811-15 et suivants du code de justice administrative sont satisfaites. Par une décision du 24 janvier 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Versailles a accordé à Mme A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2020, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête. Il soutient que la requête est irrecevable dès lors que cette demande de sursis à exécution, en premier lieu, n'est pas accompagnée de la copie des requêtes d'appel n° 18VE04006 et 18VE04037, en méconnaissance de l'article R. 811-17-1 du code de justice administrative, en deuxième lieu, qu'elle est fondée sur l'article R. 811-15 du même code, lequel est inapplicable en l'espèce, les jugements entrepris ne prononçant pas l'annulation d'une décision administrative, en troisième lieu, que ces jugements de rejet n'entraînent aucune mesure d'exécution susceptible de faire l'objet d'un sursis et, en dernier lieu, qu'elle est dépourvue d'objet dès lors que la contestation des titres de perception a pour effet de suspendre le recouvrement de la créance, en vertu de l'article 117 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012. Par une ordonnance du 31 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juillet 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique, - et les observations de Mme A.... Une note en délibéré, enregistrée le 15 juin 2022, a été présentée par Mme A.... Considérant ce qui suit : Sur les conclusions à fin de sursis à exécution des jugements attaqués : 1. Par deux arrêts n° 18VE04006 et 18VE04037 rendus ce jour, la cour a statué sur les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation des jugements attaqués n° 1504075 et 1602460 du 4 juin 2018. Dans ces conditions, les conclusions de la présente requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ces deux jugements sont devenues sans objet. Dès lors, il n'y a plus lieu d'y statuer. Sur les frais liés à l'instance : 2. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Mme A... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme A... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution des jugements n° 1504075 et 1602460 rendus par le tribunal administratif de Versailles le 4 juin 2018. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par Mme A... est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Versailles, au directeur départemental des finances publiques des Yvelines, au directeur départemental des finances publiques de l'Ariège et au directeur régional des finances publiques de Paris. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président-assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, E. B...La présidente, C. SIGNERIN-ICRELa greffière, C. YARDELa République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, N° 19VE01861 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société anonyme Héli-Union a demandé au tribunal administratif de Versailles de résilier le marché d'acquisition d'heures de vol sans équipage d'un hélicoptère civil de type H225 au profit de l'armée de l'air conclu le 20 décembre 2016 entre le ministère des armées et le groupement temporaire Icare/Airtelis, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 000 d'euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice résultant de son éviction irrégulière de ce contrat et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1701902 du 19 septembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de la société Héli-Union. Procédure devant la cour : Par une requête, des mémoires et des pièces, enregistrés les 19 novembre 2019, 6 février 2020, 7 août 2020 et les 5, 19 octobre 2021, 15 avril 2022 et 18 mai 2022, la société Héli-Union, représentée par Me Baverez, avocat, demande à la cour, dans le dernier état de ses conclusions : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de résilier le marché conclu le 20 décembre 2016 entre le ministère des armées et le groupement Icare/Airtelis ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 9 000 000 d'euros, sauf à parfaire, assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice résultant de son éviction irrégulière du marché ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - son offre était régulière dès lors qu'elle portait sur des hélicoptères H225 visés par les stipulations de l'article 2 de l'annexe 1 au cahier des clauses particulières du marché ; elle a fourni tous renseignements relatifs à la liste des spécifications techniques des appareils concernés conformément aux stipulations de l'article 7.3 du règlement de la consultation qui n'exigeait pas de décrire de manière circonstanciée les caractéristiques techniques de l'appareil ; le ministre ne peut opposer le caractère irrégulier de son offre alors que dans le rapport de présentation, son offre a été estimée conforme en tous points au cahier des charges ; - le moyen tiré de l'illégalité de la méthode de notation du critère financier est opérant dès lors qu'elle a été évincée en raison de la notation du critère financier ; ce moyen est fondé dès lors que cette méthode surévalue le poids du sous-critère financier n° 3 dont l'exécution est aléatoire et prive de toute portée les trois autres sous-critères ; elle conduit à attribuer la meilleure note à l'offre la plus chère et méconnaît les règles de publicité et de mise en concurrence ; - le marché conclu est illégal car il porte atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats, au principe d'impartialité de la procédure et fausse la concurrence, eu égard aux informations privilégiées communiquées à la société attributaire avant l'avis d'appel public à la concurrence, ainsi qu'il résulte des éléments de l'enquête préliminaire diligentée à la suite de la plainte qu'elle a déposée et des mentions du jugement du tribunal correctionnel du 29 juin 2021 condamnant la société attributaire et son président à une peine d'exclusion immédiate de tous les marchés publics, et dont il résulte que ces derniers ont bénéficié de la transmission d'informations privilégiées de la part de membres du ministère des armées ; - les vices invoqués sont en rapport direct avec son éviction ; les moyens invoqués sont opérants ; elle disposait d'une chance très sérieuse de se voir attribuer le marché, étant précisé qu'elle était le seul concurrent de l'attributaire ; - elle a droit à être indemnisée du manque à gagner résultant de son éviction irrégulière du marché qui s'établit à 9 000 000 d'euros sur six ans. Par des mémoires en défense enregistrés les 17 juillet 2020, 4 décembre 2020, 2 et 24 novembre 2021 et 17 mai 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Héli-Union la somme de 2 500 euros à verser à l'Etat au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par la société Héli-Union ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense enregistré le 15 avril 2022, la société Icare, représentée par Me Laskier, avocat, conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par la société Héli-Union ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ; - le décret n° 2016-361 du 25 mars 2016 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique, - et les observations de Me Béas, pour la société Héli-Union. Une note en délibéré, enregistrée le 3 juin 2022, a été présentée par le ministre des armées. Considérant ce qui suit : 1. Le service spécialisé de la logistique et du transport du commissariat des armées a engagé en 2016, en application du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics de défense ou de sécurité alors en vigueur, une procédure négociée avec mise en concurrence préalable en vue de la passation d'un marché à bons de commande ayant pour objet l'acquisition d'heures de vol sans équipage sur un hélicoptère civil de type H225 au bénéfice de l'armée de l'air. Le 18 mai 2016, la société anonyme Héli-Union s'est portée candidate à l'attribution de ce marché. Elle a remis son offre finale au pouvoir adjudicateur le 24 juin 2016. Par un courrier du 18 juillet 2016, le pouvoir adjudicateur lui a notifié le rejet de son offre et l'a informée de l'attribution du marché au groupement momentané d'entreprises Icare/Airtelis. Le marché a été conclu entre le pouvoir adjudicateur et le groupement Icare/Airtelis le 20 décembre 2016 pour une période initiale de deux ans et a été, par la suite, reconduit à plusieurs reprises. La société Héli-Union relève appel du jugement du tribunal administratif de Versailles du 19 septembre 2019 rejetant sa demande tendant à la résiliation de ce marché et à la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice résultant de son éviction qu'elle estime irrégulière. Sur la validité du marché : 2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu'au représentant de l'Etat dans le département dans l'exercice du contrôle de légalité. Si le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini, les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Le tiers agissant en qualité de concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif ne peut ainsi, à l'appui d'un recours contestant la validité de ce contrat, utilement invoquer, outre les vices d'ordre public, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction. En ce qui concerne l'atteinte au principe d'égalité : 3. Aux termes de 1er de l'ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics alors en vigueur : " I. - Les marchés publics soumis à la présente ordonnance respectent les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. / Ces principes permettent d'assurer l'efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics (...) ". 4. Il résulte de l'instruction, notamment d'un procès-verbal d'audition du 9 février 2018 établi dans le cadre de l'enquête préliminaire mise en œuvre à la suite de la plainte de la société requérante et soumis au débat contradictoire des parties dans le cadre de la présente instance, qu'une réunion a été organisée à Bordeaux le 6 novembre 2015 au cours de laquelle le président de la société Icare, membre du groupement attributaire du marché en litige, a indiqué aux personnes présentes, en particulier au chef de la composante hélicoptère du commandement des forces aériennes, être en mesure de mettre à disposition de l'armée de l'air un hélicoptère civil de type H225. Ces deux personnes sont restées en contact après cette réunion, plusieurs échanges ayant eu lieu entre elles ultérieurement. Si le président de la société Icare a nié l'intérêt de ces échanges pour l'obtention du marché, il n'est pas sérieusement contesté que le groupement attributaire a reçu des informations précises sur les critères techniques et financiers du futur marché plusieurs mois avant la publication de l'avis de marché, le 23 avril 2016, la société Héli-Union n'ayant eu de son côté qu'un mois pour préparer son offre. Les notes retrouvées lors d'une perquisition confirment d'ailleurs que le président de la société Icare disposait depuis plusieurs mois d'informations précises sur les attentes du commandement des forces aériennes et connaissait en réalité la quasi-intégralité des besoins techniques et des conditions financières du marché à venir. Par ailleurs, il n'est pas contesté que, tout en livrant ces informations, le chef de la composante hélicoptère du commandement des forces aériennes a suivi la préparation du marché, en rédigeant l'expression des besoins du pouvoir adjudicateur en qualité de prescripteur technique. 5. Dans ces conditions, alors même que l'existence de ces échanges d'informations n'a pas été révélée au service spécialisé de la logistique et du transport du service du commissariat des armées chargé de lancer la consultation ayant abouti à la signature du marché en litige, la société Héli-Union est fondée à soutenir que les graves irrégularités qui en résultent ont porté atteinte au principe d'égalité entre les candidats, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le jugement du tribunal correctionnel de Paris du 29 juin 2021 condamnant les protagonistes a été contesté en appel. En ce qui concerne les conséquences des vices affectant le marché contesté : 6. Il appartient au juge, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences. Il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, soit d'inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu'il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat. En présence d'irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l'exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s'il se trouve affecté d'un vice de consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d'office, l'annulation totale ou partielle de celui-ci. 7. Eu égard à la particulière gravité du vice affectant le marché contesté, son exécution ne saurait se poursuivre. Aucune mesure de régularisation n'est possible et l'annulation totale du marché doit être envisagée. 8. Le ministre des armées relève cependant que ce marché a pour objet de mettre à disposition des forces armées des appareils permettant la réalisation de vols d'entraînement et de préparation opérationnelle pour les équipages de l'armée de l'air, plus précisément pour les pilotes de l'escadron d'hélicoptères 01-067 " Pyrénées ", dont le parc est fortement sollicité et ne permet plus d'assurer la préparation et le maintien au niveau opérationnel minimal des équipages. Cet escadron réalisant des missions de recherche et de sauvetage au combat ainsi que des missions au profit du commandement des opérations spéciales nécessitant un entraînement permanent et spécifique, le ministre soutient que l'annulation du marché porterait une atteinte excessive à l'intérêt général et sollicite dans le dernier état de ses écritures, à titre subsidiaire, un effet différé d'une année à la mesure prononcée par la cour. 9. Toutefois, si ce marché répond à un besoin essentiel des forces armées, il a été conclu initialement pour une période de deux ans, renouvelable quatre fois par périodes d'une année. Ainsi, son exécution doit s'achever au plus tard le 31 décembre 2022. Compte tenu de cette échéance dont l'administration ne peut ignorer l'existence, de ce que le ministre ne fait état d'aucune circonstance particulière faisant obstacle, le cas échéant, au lancement, en urgence, d'une consultation tendant à la conclusion d'un nouveau marché en vue de l'acquisition d'heures de vol sans équipage sur un hélicoptère civil de type H225 au bénéfice de l'armée de l'air et de ce qu'il n'est d'ailleurs pas établi qu'une consultation ne serait pas déjà en cours pour répondre à ce besoin ou qu'il ne peut en aucun cas y être répondu temporairement d'une autre manière, l'annulation totale du marché ne porte pas une atteinte excessive à l'intérêt général et, dans les circonstances de l'espèce, cette annulation devra prendre effet trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les conclusions indemnitaires : 10. Lorsqu'un candidat à l'attribution d'un contrat public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce contrat et qu'il existe un lien direct de causalité entre la faute résultant de l'irrégularité et les préjudices invoqués par le requérant à cause de son éviction, il appartient au juge de vérifier si le candidat était ou non dépourvu de toute chance de remporter le contrat. En l'absence de toute chance, il n'a droit à aucune indemnité. Dans le cas contraire, il a droit en principe au remboursement des frais qu'il a engagés pour présenter son offre. Il convient en outre de rechercher si le candidat irrégulièrement évincé avait des chances sérieuses d'emporter le contrat conclu avec un autre candidat. Si tel est le cas, il a droit à être indemnisé de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu'ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l'offre, lesquels n'ont donc pas à faire l'objet, sauf stipulation contraire du contrat, d'une indemnisation spécifique. En revanche, le candidat ne peut prétendre à une indemnisation de ce manque à gagner si la personne publique renonce à conclure le contrat pour un motif d'intérêt général. 11. Il résulte de l'instruction, en particulier du courrier du service spécialisé de la logistique et du transport du 18 juillet 2016, que l'offre de la société Héli-Union a été rejetée au motif qu'elle n'était pas la plus avantageuse économiquement, celle-ci n'ayant obtenu que 34 points sur 100. Toutefois, le ministre des armées soutient devant le juge du contrat que l'offre de la société Héli-Union était irrégulière et qu'en conséquence, cette société, dont l'offre devait être rejetée, était dépourvue de toute chance d'emporter le marché. Contrairement à ce que soutient la requérante, la circonstance que son offre a été examinée et classée, ne peut faire obstacle à ce que le pouvoir adjudicateur se prévale de l'irrégularité de cette offre devant le juge du contrat. 12. Aux termes de l'article 56 du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics de défense ou de sécurité : " I. - L'acheteur vérifie que les offres qui n'ont pas été éliminées en application du IV de l'article 43 sont régulières, acceptables et appropriées. / Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation notamment parce qu'elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale. (...) ". Aux termes du point 2 de l'annexe 1 au cahier des clauses particulières du marché litigieux : " La configuration de l'hélicoptère du titulaire doit être similaire à celle des appareils en service dans l'armée de l'air. L'hélicoptère doit être de type EC 225, EC 725, H225 ou H225M ". Et aux termes du point 7.3 du règlement de la consultation : " L'offre technique du candidat permet au représentant du pouvoir adjudicateur de juger des moyens d'exécution des prestations proposées tant d'un point de vue quantitatif que qualitatif. / Un exemplaire du mémoire technique commercial, rédigé en langue française, est fourni avec l'offre. Le candidat y expose la manière dont il appréhende et envisage de réaliser l'objet du marché. (...) L'offre technique du candidat est constituée d'un mémoire technique détaillé. Elle doit notamment comporter tous les renseignements relatifs : - aux spécifications techniques détaillées du ou des hélicoptères mis à disposition ; - liste des équipements proposés sur chaque hélicoptère ; - aux normes appliquées (...). L'attention du candidat est appelée sur le fait que le mémoire technique constitue une des pièces contractuelles du marché. Aussi, le document fourni doit impérativement répondre de manière circonstanciée à l'ensemble des problématiques du marché, qu'il s'agisse des caractéristiques techniques des hélicoptères, de la couverture de la maintenance ou de l'ensemble des prestations proposées dans le cadre du suivi du marché ". 13. Il résulte de l'instruction que, dans son offre finale du 24 juin 2016, la société Héli-Union a indiqué avoir " désormais accès à deux hélicoptères civils différents de celui que nous vous avions dans notre offre initiale ". Elle a également précisé dans ce courrier avoir pu élargir considérablement sa recherche de machines disposant des caractéristiques primordiales et impératives du marché, en raison d'un accident survenu en Norvège et de l'interdiction de vol qui en a résulté. En outre, elle a assuré le pouvoir adjudicateur de ce qu'elle était en mesure de mettre à la disposition de l'armée de l'air un appareil répondant " à toutes les caractéristiques primordiales et impératives, à toutes les caractéristiques techniques importantes sauf celle relative à l'exigence " NVG compatible cabin lightning pour le travail en soute sous JVN ", à la caractéristique technique souhaitable ". 14. Toutefois, d'une part, la société Héli-Union n'a fourni aucune autre précision dans son offre finale sur le type d'hélicoptère proposé. Compte tenu de la mention y figurant selon laquelle elle avait accès à " deux hélicoptères civils différents de celui " mentionné dans son offre initiale, les documents produits à l'appui son offre initiale ne peuvent être regardés comme répondant à l'exigence prévue par les stipulations précitées de l'article 7.3 du règlement de la consultation de fournir les spécifications techniques détaillées du ou des hélicoptères mis à disposition. 15. D'autre part, à supposer que la société Héli-Union ait entendu continuer à proposer, dans son offre finale, de mettre à disposition de l'armée de l'air l'appareil mentionné dans son offre initiale, il résulte de l'instruction qu'une incertitude demeurait, s'agissant d'un hélicoptère en cours de fabrication, sur la possibilité de le mettre effectivement à disposition de l'armée de l'air dans le délai prévu par les stipulations du marché. Cette incertitude ne peut être regardée comme ayant été levée dans la réponse de la société Héli-Union aux questions posées par le pouvoir adjudicateur le 30 mai 2016. Elle a également été évoquée lors de la réunion de négociation du 16 juin 2016. Enfin, le rapport de présentation du 1er juillet 2016 souligne pour ce motif " le manque de garanties et les incertitudes " de l'offre finale de la société Héli-Union. Par suite, la société Héli-Union n'a pas justifié de sa capacité à disposer dans le délai prévu d'un hélicoptère répondant aux spécifications du marché. 16. Dans ces conditions, alors même qu'il a été procédé à l'examen et au classement de l'offre finale de la société Héli-Union, le ministre des armées est fondé à soutenir que cette offre était irrégulière et qu'elle devait être écartée. Par suite, le ministre est également fondé à soutenir que la société Héli-Union était dépourvue de toute chance de remporter le marché et qu'elle n'a droit à aucune indemnité. 17. Il résulte de tout ce qui précède que la société Héli-Union est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation du marché conclu le 20 décembre 2016 entre l'Etat et la société Icare. Sur les frais liés au litige : 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société Héli-Union qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Héli-Union à ce titre. D É C I D E : Article 1er : Le jugement n° 1701902 du tribunal administratif de Versailles du 19 septembre 2019 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la société Héli-Union tendant à la résiliation du marché d'acquisition d'heures de vol sans équipage d'un hélicoptère civil de type H225 au profit de l'armée de l'air conclu le 20 décembre 2016 entre le ministère des armées et le groupement temporaire Icare/Airtelis. Article 2 : Le marché conclu entre l'Etat et le groupement Icare/Airtelis le 20 décembre 2016 est annulé à compter de l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à la société Héli-Union au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la société Héli-Union est rejeté. Article 5 : Les conclusions présentées par le ministre des armées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Héli-Union, au ministre des armées et au groupement Icare/Airtelis. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, G. A... La présidente, C. Signerin-Icre La greffière, C. Yarde La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, N° 19VE03858 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 8 juin 2015 par laquelle le recteur de l'académie de Versailles l'a informée d'un trop perçu de rémunération de 2 524,72 euros, ainsi que le titre de perception émis par le directeur départemental des finances publiques de l'Ariège le 30 juin 2015 lui en réclamant le paiement, de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 2 524,72 euros indûment saisie, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation à compter de cette saisie et à lui verser une indemnité de 15 000 euros, d'enjoindre à l'Etat de lui verser les sommes ainsi réclamées, dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 15 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blin de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 1602460 du 4 juin 2018, ce tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, respectivement enregistrés les 3 décembre 2018 et 18 janvier 2019, Mme B..., représentée par Me Blin, avocat, doit, dans le dernier état de ses écritures, être regardée comme demandant à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler ces décisions ; 3°) de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 2 524,72 euros indûment saisie et à lui verser une indemnité de 15 000 euros ; 4°) de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 14 288,71 euros indûment saisie et à lui verser une indemnité de 20 000 euros ; 5°) d'enjoindre à l'Etat de lui verser les sommes ainsi réclamées, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 20 euros par jour de retard ; 6°) de saisir du présent litige la chambre régionale des comptes, la cour de discipline budgétaire et financière et la cour des comptes ; 7°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blin de la somme de 5 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - le tribunal administratif ne pouvait écarter le moyen tiré de l'incompétence de Mme D..., signataire de la décision contestée du 8 juin 2015, en se fondant sur des délégations de signature qui ne lui ont pas été communiquées sans entacher d'irrégularité le jugement attaqué ; - le tribunal administratif ne pouvait écarter l'irrecevabilité qu'elle avait opposée au mémoire en défense produit par le recteur de l'académie de Versailles en retenant la qualité de M. F... A... pour signer ce mémoire au vu d'actes qui ne lui ont pas été communiqués ; - le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qui concerne la multiplicité des prélèvements dont elle a fait l'objet, sur lesquels le tribunal administratif a omis de se prononcer ; - le tribunal administratif, pour rejeter sa demande, ne pouvait lui opposer l'autorité de chose jugée sans entacher d'irrégularité le jugement attaqué ; - comme le tribunal administratif l'a retenu, il n'y a plus lieu de statuer sur ses conclusions à hauteur de la somme de 424,82 euros, correspondant au rappel d'un trop perçu d'indemnité de suivi et d'orientation des élèves, cette somme lui ayant été remboursée ; - la justification chiffrée des prélèvements dont elle a fait l'objet n'a pas été apportée par l'administration, le tribunal administratif ayant lui-même, sur ce point, insuffisamment motivé le jugement attaqué ; - compte tenu de l'ampleur du travail que représente l'ensemble des démarches et contentieux qu'elle a dû mener pour pallier aux erreurs et carences commises par l'administration à son égard depuis de nombreuses années, elle doit être regardée comme ayant accompli son service ; - les rappels de trop perçus dont elle a fait l'objet sont entachés de détournement de pouvoir ; - il n'est pas justifié que le signataire de la décision contestée du 8 juin 2015 disposait d'une délégation de signature du recteur de l'académie de Versailles ; - le titre de perception du 30 juin 2015 n'indique pas avec une précision suffisante les bases de liquidation de cette créance ; - la créance lui étant réclamée par ce titre de perception, à hauteur de 2 524,72 euros, n'est pas justifiée dès lors qu'elle concerne le rappel de sa rémunération à compter du 3 novembre 2014 alors qu'elle n'a été radiée des cadres que par un arrêté du 4 décembre 2014, qu'elle a d'ailleurs contesté devant les juridictions administratives, qu'elle procède d'un bulletin de paye de mai 2015, qui est entaché de multiples erreurs et alors qu'elle n'a perçu aucun traitement au titre de mai 2015, et que le montant ainsi rappelé, au titre de la période du 3 au 30 novembre 2014, est erroné et devrait être fixé, pour 27/30ème de sa rémunération, à 2 742,04 euros ; - en rappelant irrégulièrement des trop perçus injustifiés, l'administration a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, qui lui a causé des préjudices chiffrés à 15 000 euros. Par une décision du 28 septembre 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Versailles a accordé à Mme B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 31 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juillet 2021. Par une lettre du 19 mai 2022, la cour a informé les parties, en application de l'article R.611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur le moyen, d'ordre public, tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant au remboursement de la somme de 14 288,71 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, qui ont le caractère de conclusions nouvelles en appel. Par un mémoire, enregistré le 25 mai 2022, Mme B... a présenté ses observations sur ce moyen d'ordre public. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 61-825 du 29 juillet 1961 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C..., - les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique, - et les observations de Mme B.... Une note en délibéré, enregistrée le 15 juin 2022, a été présentée par Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Par arrêté du 13 octobre 2014, le recteur de l'académie de Versailles a affecté Mme B..., professeure certifiée titulaire, sur un emploi d'enseignement en technologie au sein du collège Alain Fournier à Orsay, à compter du 3 novembre 2014. L'intéressée n'ayant pas rejoint son poste à cette dernière date, le recteur, après l'avoir vainement mise en demeure de reprendre ses fonctions par lettre du 6 novembre 2014, a prononcé, par un nouvel arrêté du 4 décembre 2014, sa radiation des cadres pour abandon de poste. Par une lettre du 8 juin 2015, ce recteur a informé Mme B... qu'elle avait, depuis le 3 novembre 2014, continué à tort de percevoir son traitement, l'indemnité de résidence et l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves (ISOE) et qu'en conséquence, un titre de perception serait émis afin de rappeler le trop-perçu correspondant, d'un montant total de 2 524,72 euros. Par un courrier du 24 juin 2015, reçu le 25 juin suivant, Mme B... a formé un recours gracieux contre cette lettre et sollicité, en outre, le versement d'une indemnité de 15 000 euros. Cette réclamation a été implicitement rejetée, par décision née le 25 août 2015. Entre temps, le directeur départemental des finances publiques de l'Ariège, département dans lequel se situe le domicile de Mme B..., avait émis, le 30 juin 2015, un titre de perception assignant à celle-ci le paiement du trop-perçu susmentionné de 2 524,72 euros. Par réclamation du 25 août 2015, concomitamment adressée au recteur et à ce directeur et reçue par ces services le 27 août suivant, Mme B... a contesté le bien-fondé de cette créance. Cette réclamation ayant été implicitement rejetée, Mme B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la lettre du 8 juin 2015, ainsi que le titre de perception du 30 juin 2015, de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 2 524,72 euros indûment saisie, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, et à lui verser une indemnité de 15 000 euros, et d'enjoindre sous astreinte à l'Etat de lui verser les sommes ainsi réclamées. Par un jugement du 4 juin 2018, ce tribunal a rejeté sa demande. Mme B... relève appel de ce jugement et demande, en outre, à la cour de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 14 288,71 euros qui aurait également été indûment saisie. Sur les conclusions tendant au remboursement de la somme de 14 288,71 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation : 2. Si Mme B... demande à la cour de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 14 288,71 euros au titre de saisies autres que celles procédant de l'exécution du titre de perception du 30 juin 2015, ces conclusions, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en appel et sont, par suite, irrecevables. Elles doivent, dès lors, être rejetées. Sur le surplus des conclusions : En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué : 3. En premier lieu, il ressort de l'examen du jugement attaqué que, pour écarter le moyen tiré de ce que la décision contestée du 8 juin 2015 serait entachée d'incompétence, à défaut que le recteur de l'académie de Versailles justifie avoir confié à Mme D..., signataire de cette décision, une délégation régulière pour ce faire, le tribunal administratif s'est fondé sur un arrêté de délégation de signature en date du 3 avril 2015, dont le recteur avait produit copie à l'appui de son mémoire en défense enregistré le 15 décembre 2016. Il ressort des pièces du dossier de première instance que ce mémoire, ainsi que ses pièces jointes, ont été communiquées le jour même au mandataire de Mme B.... Dès lors, le moyen tiré par cette dernière de ce que les premiers juges auraient méconnu le caractère contradictoire de la procédure en ne lui communiquant pas cet arrêté de délégation manque, en tout état de cause, en fait. 4. En deuxième lieu, il ne ressort pas du dossier de première instance que Mme B... aurait invoqué l'irrecevabilité du mémoire en défense produit par le recteur de l'académie de Versailles, au motif d'une absence de délégation consentie à cet effet à son signataire, ni davantage que le tribunal administratif aurait, dans le jugement attaqué, examiné d'office cette cause d'irrecevabilité en l'écartant au vu d'une pièce que le recteur aurait produite. Par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif se serait irrégulièrement abstenu de communiquer une telle pièce à Mme B... doit être écarté. 5. En troisième lieu, Mme B... soutient que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé sur " la multiplicité des prélèvements " dont elle aurait fait l'objet, conclusions sur lesquelles le tribunal administratif aurait, en outre, omis de statuer. Toutefois, il ressort du dossier de première instance que la requérante, ainsi qu'il a été rappelé aux points 1 et 2, avait uniquement contesté le rappel du trop-perçu de 2 524,72 euros lui ayant été réclamé par le titre de perception du 30 juin 2015. Or le tribunal administratif a indiqué, avec une précision suffisante, les motifs de droit et de fait pour lesquels il a rejeté au fond la demande présentée à ce titre par Mme B.... Cette dernière n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé ou entaché d'une omission à statuer. 6. En dernier lieu, le tribunal administratif, contrairement à ce que soutient Mme B..., n'a pas, pour rejeter sa demande, opposé l'autorité de chose jugée s'attachant à une précédente décision rendue par les juridictions administratives. Par suite, le moyen tiré de ce que ce tribunal ne pouvait se fonder sur un tel motif sans entacher le jugement attaqué d'irrégularité manque, en tout état de cause, en fait. En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué : S'agissant des conclusions à fin d'annulation des décisions contestées : Quant à la lettre du 8 juin 2015 : 7. Il ressort des pièces du dossier que, par sa lettre du 8 juin 2015, le recteur de l'académie de Versailles s'est borné à informer Mme B... qu'elle avait, depuis le 3 novembre 2014, continué à tort de percevoir son traitement, l'indemnité de résidence et l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves et qu'en conséquence, un titre de perception serait émis afin de rappeler le trop-perçu correspondant, d'un montant total de 2 524,72 euros. Une telle lettre d'information, ainsi que l'a opposé le recteur en première instance, ne constitue pas une décision faisant grief et n'est, dès lors, pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de cette lettre. Quant au titre de perception du 30 juin 2015 : 8. En premier lieu, aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation (...) ". En vertu de ces dispositions, la mise en recouvrement d'une créance doit comporter, soit dans le titre de recettes lui-même, soit par la référence précise à un document joint à ce titre ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul ayant servi à déterminer le montant de la créance. 9. En l'espèce, le titre de perception contesté du 30 juin 2015 précise que la somme de 2 524,72 euros correspond au montant total de la rémunération indue servie à Mme B... au cours de la période du 3 au 30 novembre 2014, au titre du traitement, de l'indemnité de résidence et de l'ISOE, postes de trop-perçu dont ce titre détaille, en outre, les montants respectifs. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que ce titre de perception n'indiquerait pas, avec une précision suffisante, les bases de liquidation de cette créance. Enfin, la circonstance que le bulletin de paye de Mme B... antérieurement établi en mai 2015, sur lequel étaient notamment reportés ces trop perçus de rémunération et auquel le titre de perception contesté fait également référence de manière surabondante, aurait comporté, selon l'intéressée, de multiples erreurs, est sans incidence sur la régularité de ce titre au regard des dispositions précitées de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012. 10. En deuxième lieu, aux termes, d'une part, de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de l'article 64 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération (...) ". Aux termes, d'autre part, de l'article 4 de la loi du 29 juillet 1961 de finances rectificative pour 1961, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) L'absence de service fait, pendant une fraction quelconque de la journée, donne lieu à une retenue dont le montant est égal à la fraction du traitement frappée d'indivisibilité (...). / Il n'y a pas service fait : / 1°) Lorsque l'agent s'abstient d'effectuer tout ou partie de ses heures de service (...) ". En l'absence de service fait, l'administration est tenue, selon le cas, de suspendre la rémunération jusqu'à la reprise du service, d'ordonner le reversement de la rémunération indûment perçue ou d'en retenir le montant sur les rémunérations ultérieures. 11. En l'espèce, l'administration fait valoir, sans être contredite, que Mme B... n'a pas rejoint le poste auquel elle avait été affectée, dans les conditions rappelées au point 1, le 3 novembre 2014, et n'a pas davantage repris ensuite ses fonctions jusqu'à la date à laquelle elle a, pour ce motif, été radiée des cadres pour abandon de poste, par arrêté du 4 décembre 2014. En l'absence de service fait par la requérante, au cours de la période du 3 au 30 novembre 2014, et en l'absence de reprise ultérieure de ses fonctions jusqu'à cette radiation, l'administration était ainsi tenue de rappeler, suivant la règle du trentième indivisible découlant des dispositions précitées de l'article 4 de la loi du 29 juillet 1961, la rémunération indûment perçue par l'intéressée au titre de cette période. A cet égard, Mme B... ne saurait sérieusement contester cette absence de service fait, durant la période concernée, en soutenant que, compte tenu de l'ensemble des démarches et contentieux qu'elle a dû mener afin, selon ses dires, de pallier aux erreurs et carences commises par l'administration à son égard depuis de nombreuses années, elle devrait être regardée comme ayant accompli son service. Par suite, la requérante n'est pas fondée à contester le principe même de ce rappel de trop perçu. Enfin, Mme B... n'établit pas le caractère exagéré du montant de ce rappel en soutenant qu'il devrait être fixé à 27/30èmes de sa rémunération, soit 2 742,04 euros, alors que le montant ainsi avancé est supérieur au trop-perçu rappelé, à hauteur de 2 524,72 euros seulement, par le titre de perception contesté du 30 juin 2015. 12. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le titre de perception contesté du 30 juin 2015, qui est légalement justifié pour les motifs précédemment exposés, serait entaché de détournement de pouvoir. 13. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de perception contesté du 30 juin 2015. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au remboursement de la somme susmentionnée de 2 524,72 euros, dont l'administration indique qu'elle n'a d'ailleurs jamais été réglée par l'intéressée ou saisie, ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées. S'agissant des conclusions indemnitaires : 14. Eu égard aux motifs précédemment exposés, Mme B... n'établit pas qu'en procédant, par le titre de perception contesté du 30 juin 2015, au rappel du trop-perçu de 2 524,72 euros en litige, l'administration aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Au surplus, la requérante ne justifie pas de la réalité du préjudice qu'elle prétend avoir subi. Dès lors, les conclusions indemnitaires présentées par l'intéressée doivent être rejetées. 15. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu, en tout état de cause, de saisir du présent litige la cour des comptes, la chambre régionale des comptes ou la cour de discipline budgétaire et financière, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation du titre de perception du 30 juin 2015 et à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 15 000 euros. Par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions présentées par la requérante aux fins d'injonction, d'astreinte, et d'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Versailles, au directeur départemental des finances publiques des Yvelines, au directeur départemental des finances publiques de l'Ariège et au directeur régional des finances publiques de Paris. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président-assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, E. C...La présidente, C. SIGNERIN-ICRELa greffière, C. YARDELa République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, N° 18VE04037 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision implicite, née le 15 août 2015, par laquelle le recteur de l'académie de Versailles a rejeté sa réclamation indemnitaire préalable du 11 juin 2015, ainsi que la décision du 8 juillet 2015 par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a proposé de lui verser une indemnité totale de 140 000 euros, sous déduction de la somme de 132 510 euros correspondant au montant total des pensions de retraite déjà rappelées, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité totale de 1 010 386,17 euros ou, à défaut, une indemnité globale et forfaitaire de 500 000 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, d'enjoindre à l'Etat, d'une part, de compenser la dette relative au rappel de ses pensions de retraite avec sa créance indemnitaire et, d'autre part, de reconstituer sa carrière et ses droits à pension, en prenant à sa charge leurs parts patronale et salariale, et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Rochefort de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 1506076 du 4 juin 2018, ce tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, respectivement enregistrés les 20 novembre 2018 et 31 mai 2021, Mme B..., représentée par Me Rochefort, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler ces décisions ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité totale de 1 010 386,17 euros ou, à défaut, une indemnité globale et forfaitaire de 500 000 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation ; 4°) d'enjoindre à l'Etat, d'une part, de compenser la dette relative au rappel de ses pensions de retraite avec sa créance indemnitaire et, d'autre part, de reconstituer sa carrière et ses droits à pension, en prenant à sa charge leurs parts patronale et salariale ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Rochefort de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors, d'une part, qu'il ne lui permet pas de comprendre pour quels motifs le tribunal administratif a rejeté toutes ses demandes et, d'autre part, qu'il ne cite pas les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative sur le fondement desquelles il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision contestée du 8 juillet 2015 ; - le tribunal administratif a omis de statuer, d'une part, sur les conclusions et moyens dirigés contre la décision contestée du 8 juillet 2015 et, d'autre part, sur l'ensemble des conclusions indemnitaires qu'elle avait présentées ; - contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, ses conclusions à fin d'annulation de la décision contestée du 8 juillet 2015 étaient recevables dès lors qu'elles étaient assorties de moyens, conformément à l'article R. 411-1 du code de justice administrative, tirés de ce que l'indemnisation proposée par le ministre est insuffisante au regard de l'ensemble des demandes indemnitaires présentées dans sa réclamation préalable ; - contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, l'autorité de chose jugée qui s'attache au jugement n° 1205122 du 7 avril 2016, par lequel le tribunal administratif de Versailles a uniquement statué sur sa demande tendant à l'indemnisation des préjudices moral et financier subis, jusqu'en 2012 seulement, à raison de l'illégalité de la décision du 8 février 2007 l'ayant placée en retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007, ne faisait pas obstacle à l'examen de la présente demande, qui tend également à l'indemnisation des préjudices moral et financier subis à raison de l'illégalité de la décision du 3 avril 2013 l'ayant de nouveau placée en retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007, de l'illégalité de la décision du 4 décembre 2014 l'ayant radiée des cadres pour abandon de poste et de l'illégalité des conditions dans lesquelles était, dans l'intervalle, intervenue sa réintégration, sans que l'administration ne lui ait proposé un poste adapté ni invité à présenter une demande de reclassement ; - l'illégalité fautive des décisions susmentionnées des 8 février 2007 et 3 avril 2013, qui ont été annulées, engage la responsabilité de l'Etat ; - par ailleurs, en s'abstenant, lors de sa réintégration en 2014, de lui proposer un emploi adapté, compte tenu de ce que son domicile se trouvait désormais en Ariège, ou de l'inviter à présenter une demande de reclassement, l'Etat a également commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; - enfin, la décision du 4 décembre 2014 l'ayant radiée des cadres pour abandon de poste est également entachée d'une illégalité fautive dès lors, d'une part, qu'elle ne peut être regardée comme ayant manifesté son intention de rompre tout lien avec le service, d'autre part, que le délai qui lui avait été imparti par la mise en demeure de reprendre ses fonctions était insuffisant et, enfin, que le signataire de la décision du 4 décembre 2014 ne disposait pas d'une délégation de signature régulière ; - ces fautes lui ont causé des préjudices moral et financier, évalués à un montant total de 1 010 386,17 euros. Par une décision du 28 septembre 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Versailles a accordé à Mme B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 31 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juillet 2021. Mme B... a présenté un nouveau mémoire, enregistré le 19 mai 2022, soit postérieurement à la clôture de l'instruction. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C..., - les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique, - et les observations de Me Rochefort, pour Mme B..., et celles de Mme B.... Une note en délibéré, enregistrée le 15 juin 2022, a été présentée par Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Par décision du 8 février 2007, le recteur de l'académie de Versailles a admis Mme B..., professeure certifiée titulaire, à la retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007. Après que cette décision a été annulée par un arrêt de la cour n° 10VE01442 du 2 février 2012, le recteur a réitéré sa décision, par arrêté du 3 avril 2013. Par un jugement n° 1303877 du 10 février 2014, devenu définitif, le tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté et enjoint au recteur de réintégrer rétroactivement Mme B..., en reconstituant sa carrière, à compter du 24 septembre 2007. En exécution de ce jugement, le recteur de l'académie de Versailles a, par arrêté du 23 avril 2014, réintégré rétroactivement l'intéressée à compter de cette dernière date, puis, par décision du 13 octobre 2014, l'a affectée dans un collège en Essonne. Par un arrêté du 4 décembre 2014, ce recteur a prononcé la radiation des cadres de Mme B... pour abandon de poste. Entre-temps, Mme B... avait demandé au tribunal administratif de Versailles, le 10 août 2012, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité totale de 433 945,95 euros en réparation des préjudices moral et financier qu'elle estimait avoir subis à raison de l'illégalité de la décision du 8 février 2007 l'ayant admise à la retraite pour invalidité. Par jugement n° 1205122 du 7 avril 2016, devenu définitif, ce tribunal, après avoir constaté l'illégalité fautive de cette décision, a, d'une part, condamné l'Etat à verser à Mme B... une indemnité de 1 500 euros au titre de son préjudice moral et, d'autre part, renvoyé l'intéressée devant l'administration pour qu'il soit procédé au calcul et à la liquidation de l'indemnité due en réparation des pertes de rémunérations subies au cours de la période durant laquelle elle avait ainsi été illégalement évincée du service. Par ailleurs, par lettre datée du 11 juin 2015 et reçue le 15 juin suivant, Mme B... a adressé au recteur de l'académie de Versailles, une réclamation préalable tendant à l'indemnisation de l'ensemble des préjudices moral et financier qu'elle estimait avoir subis à raison de l'illégalité des décisions des 8 février 2007 et 3 avril 2013 l'ayant placée en retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007, de l'illégalité des conditions dans lesquelles était, après annulation de celles-ci, intervenue sa réintégration, sans que l'administration ne lui ait proposé un poste adapté ni invité à présenter une demande de reclassement, et de l'illégalité de la décision du 4 décembre 2014 l'ayant radiée des cadres pour abandon de poste. Cette réclamation a été implicitement rejetée par le recteur, par décision née le 15 août 2015. Cependant, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a, par décision du 8 juillet 2015, proposé à Mme B... de lui verser une indemnité totale de 140 000 euros, sous réserve que l'intéressée accepte de signer un protocole transactionnel. N'ayant pas accepté cette proposition, Mme B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision implicite du 15 août 2015, ainsi que la décision susmentionnée du 8 juillet 2015, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité totale de 1 010 386,17 euros ou, à défaut, une indemnité globale et forfaitaire de 500 000 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, et, enfin, d'enjoindre à l'Etat, d'une part, de compenser la dette relative au rappel de ses pensions de retraite avec sa créance indemnitaire et, d'autre part, de reconstituer sa carrière et ses droits à pension, en prenant à sa charge leurs parts patronale et salariale. Par un jugement du 4 juin 2018, dont Mme B... relève appel, ce tribunal a rejeté sa demande. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, la décision du 15 août 2015 par laquelle le recteur a implicitement rejeté la réclamation indemnitaire préalable présentée par Mme B... et la décision du 8 juillet 2015 par laquelle le ministre a partiellement refusé d'y faire droit, ont eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande de la requérante qui, en formulant les conclusions sus-analysées, a donné à l'ensemble de sa requête le caractère d'un recours de plein contentieux. Au regard de l'objet d'une telle demande, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressée à percevoir la somme qu'elle réclame, les vices propres dont seraient, le cas échéant, entachées les décisions qui ont ainsi lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige. Par suite, la circonstance, invoquée par Mme B..., que le tribunal administratif aurait, d'une part, rejeté à tort pour irrecevabilité et sans motivation suffisante ses conclusions à fin d'annulation de la décision expresse du 8 juillet 2015 et, d'autre part, omis d'examiner ses conclusions à fin d'annulation de la décision implicite du 15 août 2015, ainsi que les moyens qu'elle développait à l'encontre de ces deux décisions, est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué. 3. En second lieu, il ressort des motifs du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutient Mme B..., le tribunal administratif a statué sur l'ensemble des conclusions indemnitaires que celle-ci avait présentées, pour le quantum total de 1 010 386,17 euros. Si la requérante fait, à cet égard, également valoir que ce tribunal aurait rejeté ces conclusions à tort, en opposant l'autorité de chose jugée qui s'attachait à son précédent jugement n° 1205122 du 7 avril 2016 alors que celui-ci n'avait statué que sur sa demande d'indemnisation des préjudices moral et financier subis à raison de l'illégalité de la décision susmentionnée du 8 février 2007, ce moyen, qui se rattache au bien-fondé du raisonnement suivi par les premiers juges, n'est pas de nature à affecter la régularité du jugement attaqué. 4. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, serait entaché d'irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne les conclusions indemnitaires tendant à la réparation des préjudices causés par l'illégalité de la décision du 8 février 2007 : 5. Aux termes de l'article 1351 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur et dont les dispositions sont désormais reprises à l'article 1355 du même code : " L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité ". 6. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 1, par le jugement n° 1205122 du 7 avril 2016, devenu définitif, le tribunal administratif de Versailles, statuant sur la demande de Mme B... tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité de 433 945,95 euros en réparation des préjudices moral et financier qu'elle estimait avoir subis à raison de l'illégalité de la décision du 8 février 2007 l'ayant admise à la retraite pour invalidité à compter du 24 septembre 2007, a constaté l'illégalité fautive de cette décision, annulée par la cour dans son arrêt n° 10VE01442 du 2 février 2012, a condamné l'Etat à verser à Mme B... une indemnité de 1 500 euros au titre de son préjudice moral et a renvoyé l'intéressée devant l'administration pour qu'il soit procédé au calcul et à la liquidation de l'indemnité due en réparation des pertes de rémunérations subies au cours de la période durant laquelle elle avait été illégalement évincée du service du fait de la décision illégale ici en cause, soit du 24 février 2007 au 2 février 2012. L'autorité de la chose jugée qui s'attache à ce jugement s'opposait ainsi à ce qu'il soit de nouveau statué sur les conclusions de Mme B... tendant à ce que l'Etat soit condamné à l'indemniser des préjudices moral et financier résultant de l'illégalité de la décision du 8 février 2007. La requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a, pour ce motif, rejeté ses conclusions indemnitaires en tant qu'elles avaient pour objet la réparation réclamée en raison de l'illégalité fautive de cette dernière décision. En ce qui concerne le surplus des conclusions indemnitaires : 7. Le jugement n° 1205122 du 7 avril 2016 mentionné au point 6 n'a, en revanche, pas pour objet de statuer sur les conclusions, présentées par Mme B... à l'occasion de la présente instance, et tendant à ce que l'Etat soit condamné à l'indemniser des préjudices moral et financier résultant de l'illégalité de la décision du 3 avril 2013 l'ayant, de nouveau, placée en retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007, de l'illégalité des conditions dans lesquelles, après annulation de celle-ci, est intervenue sa réintégration, et de l'illégalité de la décision du 4 décembre 2014 l'ayant radiée des cadres pour abandon de poste. Ainsi, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du 7 avril 2016 ne s'opposait pas à ce qu'il soit statué sur le surplus des conclusions indemnitaires présentées par l'intéressée. Dès lors, il appartient à la cour de statuer sur le surplus de ces conclusions dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. S'agissant de la responsabilité de l'Etat : 8. En premier lieu, en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte des rémunérations ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions. Il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations nettes et des allocations pour perte d'emploi qu'il a perçues au cours de la période d'éviction. 9. Il résulte de l'instruction que, par un jugement n° 1303877 du 10 février 2014, devenu définitif, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 3 avril 2013 par lequel le recteur de l'académie de Versailles avait, de nouveau, admis Mme B... à la retraite d'office pour invalidité rétroactivement à compter du 24 septembre 2007, au motif que cette décision était entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation. Par suite, la requérante est fondée à soutenir que l'arrêté du 3 avril 2013 est entaché d'une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l'Etat. 10. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction qu'alors que le recteur de l'académie de Versailles, en exécution du jugement du 10 février 2014 mentionné au point 9, avait, par arrêté du 23 avril 2014, réintégré rétroactivement Mme B... dans ses fonctions à compter du 24 septembre 2007 et, par arrêté du 3 mars 2014, affectée celle-ci, à compter de cette dernière date, sur un emploi de professeur en technologie dans un collège situé à Vigneux-sur-Seine, l'intéressée a concomitamment sollicité et obtenu, par arrêté du 7 avril 2014, son placement en disponibilité pour convenances personnelles, au titre de la période du 3 mars au 31 août 2014. A l'issue de cette période de disponibilité, le recteur a, par arrêté du 24 septembre 2014, affecté Mme B... sur un emploi de professeur en technologie dans un collège situé à Orsay (Essonne). Si la requérante soutient que ces mesures de réintégration effective dans des fonctions d'enseignement seraient entachées d'illégalité, faute pour l'administration de lui avoir proposé un poste adapté ou, à défaut, de l'avoir invitée à présenter une demande de reclassement, ainsi que l'avait relevé le jugement susmentionné du 10 février 2014 pour annuler l'arrêté du 3 avril 2013, il ressort des motifs de ce jugement que Mme B..., compte tenu de son état de santé, avait été déclarée, d'un côté, définitivement inapte uniquement à l'exercice des fonctions qu'elle avait précédemment occupées, par voie de détachement, en tant que directrice du centre départemental de documentation pédagogique de l'Ariège mais, de l'autre, apte à l'exercice de fonctions d'enseignement en tant que professeur de technologie, emploi qu'elle occupait antérieurement à ce détachement et dans lequel elle avait, d'ailleurs, sollicité sa réintégration à plusieurs reprises au cours des années 2012 et 2013. Compte tenu de son aptitude à exercer ces dernières fonctions, au demeurant non contestée à l'occasion de la présente instance, la requérante ne saurait sérieusement soutenir, au seul motif qu'elle avait entre-temps transféré son domicile en Ariège, que le recteur de l'académie de Versailles aurait, à l'occasion de sa réintégration effective, illégalement omis de lui proposer un emploi adapté à son état physique ou de l'inviter à présenter une demande de reclassement. Dans ces conditions, les conclusions indemnitaires présentées, à ce titre, par Mme B... ne peuvent qu'être rejetées. 11. En dernier lieu, Mme B... soutient que l'arrêté du 4 décembre 2014 l'ayant radiée des cadres pour abandon de poste serait, d'une part, entaché d'incompétence. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que cet arrêté a été signé par M. Philippe Diaz, secrétaire général adjoint et directeur des ressources humaines de l'académie de Versailles. Or M. A... bénéficiait d'une délégation de signature lui ayant été consentie par arrêté rectoral du 2 janvier 2013, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la région Ile-de-France. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté du 4 décembre 2014 doit être écarté. D'autre part, si la requérante prétend également qu'elle n'aurait pas bénéficié d'un délai suffisant pour rejoindre son poste et qu'elle n'avait pas l'intention de rompre tout lien avec le service, l'intéressée, à l'occasion de la présente instance, n'assortit pas ces moyens de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé. Dans ces conditions, Mme B... n'établit pas que cette décision serait entachée d'une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Par suite, les conclusions indemnitaires qu'elle a présentées, à ce titre, doivent également être rejetées. 12. Il résulte de ce qui précède que Mme B... est seulement fondée à engager la responsabilité de l'Etat à raison de l'illégalité fautive de l'arrêté du 3 avril 2013 et pour la période d'éviction supplémentaire en ayant directement résulté, à savoir du 2 février 2012, date à laquelle a été prononcée l'annulation de la décision du 8 février 2007 par l'arrêt mentionné au point 6, au 3 mars 2014, date à laquelle la requérante a été réintégrée dans ses fonctions d'enseignement dans les conditions rappelées au point 10. S'agissant des préjudices et du lien de causalité : 13. En premier lieu, Mme B... est en droit, en application des principes rappelés au point 8, d'être indemnisée pour la perte des rémunérations qu'elle aurait dû percevoir au cours de la période d'éviction demeurant en litige, soit du 2 février 2012 au 3 mars 2014, sous déduction des pensions de retraite qu'elle a perçues au titre de la même période mais à l'exception de celles dont elle a déjà effectivement remboursé le montant en exécution des titres de perception émis à cet effet par l'administration. Toutefois, l'état de l'instruction ne permet pas de déterminer exactement, pour cette seule période, le montant de l'indemnité due à la requérante à raison de cette perte de rémunérations, ni davantage celui des pensions de retraite perçues mais non remboursées devant en être ainsi déduit, et, par suite, de chiffrer la somme différentielle qui devrait lui être versée. Par suite, il y a lieu de renvoyer l'intéressée devant l'administration pour qu'il soit procédé au calcul et à la liquidation de cette indemnité. 14. En second lieu, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par Mme B... du fait de l'illégalité de l'arrêté du 3 avril 2013, durant la période d'éviction en ayant directement résulté et indiquée au point 12, en condamnant l'Etat à lui verser une indemnité de 5 000 euros. S'agissant des intérêts et de leur capitalisation : 15. Mme B... a droit, sur les sommes mentionnées aux points 13 et 14, aux intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2015, date à laquelle l'administration a reçu sa réclamation préalable, ainsi qu'à la capitalisation de ces intérêts au 15 juin 2016, date à laquelle ceux-ci étaient alors dus pour au moins une année entière, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date. 16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à la réparation réclamée en raison de l'illégalité fautive de l'arrêté du 3 avril 2013. Sur les conclusions à fin d'injonction : 17. L'exécution du présent arrêt, qui se borne à faire partiellement droit aux conclusions indemnitaires de Mme B..., n'appelle aucune des mesures sollicitées par l'intéressée. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante doivent être rejetées. Sur les frais liés à l'instance : 18. Mme B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Rochefort, avocate de Mme B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Rochefort de la somme de 2 000 euros. D É C I D E : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à Mme B... une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par l'intéressée du fait de l'illégalité de l'arrêté du 3 avril 2013. Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme B... l'indemnité représentative du préjudice financier subi par l'intéressée du fait de l'illégalité de l'arrêté du 3 avril 2013, telle que définie dans les motifs du présent arrêt. Article 3 : Mme B... est renvoyée devant l'administration pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité mentionnée à l'article 2. Article 4 : Les indemnités mentionnées aux articles 1er et 2 porteront intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2015. Les intérêts échus le 15 juin 2016, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 1506076 du 4 juin 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 6 : L'Etat versera à Me Rochefort la somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Rochefort renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par Mme B... est rejeté. Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B..., au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, au recteur de l'académie de Versailles et à Me Magali Rochefort. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président-assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, E. C...La présidente, C. SIGNERIN-ICRELa greffière, C. YARDELa République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, N° 18VE03825 2
JADE/CETATEXT000045931444.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler les décisions implicites, nées les 26 et 29 novembre 2014, par lesquelles le recteur de l'académie de Versailles et le directeur départemental des finances publiques des Yvelines ont respectivement rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une provision de 256 526,90 euros sur le montant des indemnités dues en réparation des préjudices subis à raison de l'illégalité fautive des décisions des 8 février 2007 et 3 avril 2013 l'ayant admise à la retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007, ainsi que la décision du 8 juillet 2015 par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a proposé de faire partiellement droit à cette demande à hauteur de 140 000 euros, de condamner l'Etat à lui verser cette provision de 256 526,90 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, d'enjoindre à l'Etat de lui verser les sommes correspondantes et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Rochefort de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 1504052 du 4 juin 2018, ce tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, respectivement enregistrés les 20 novembre 2018 et 31 mai 2021, Mme A..., représentée par Me Rochefort, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler ces décisions ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser la provision susmentionnée de 256 526,90 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, ou, à défaut, de compenser cette créance avec le montant des pensions de retraite répétées dont elle est débitrice ; 4°) d'enjoindre à l'Etat de lui verser les sommes correspondantes ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Rochefort de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne lui permet pas de comprendre pour quels motifs le tribunal administratif a rejeté toutes ses demandes ; - le tribunal administratif a omis de répondre aux moyens tirés de ce que les trois décisions contestées sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ; - contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, ses conclusions à fin d'annulation de la décision du 8 juillet 2015 étaient recevables dès lors que celle-ci s'est substituée, en cours d'instance, à la décision implicite de rejet antérieurement opposée par le recteur ; - les décisions implicites de rejet contestées des 26 et 29 novembre 2014 sont insuffisamment motivées dès lors que l'administration n'a pas répondu à la demande de communication de motifs qu'elle avait présentée le 11 juin 2015 et reçue par le rectorat le 15 juin suivant ; - les trois décisions contestées, portant rejet de sa demande de provision, sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors, d'une part, que les décisions des 8 février 2007 et 3 avril 2013 l'ayant admise à la retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007 ont été respectivement annulées par l'arrêt n° 10VE01442 rendu par la cour administrative d'appel de Versailles le 2 février 2012 et le jugement n° 1303877 rendu par le tribunal administratif de Versailles le 10 février 2014 et, d'autre part, que ce tribunal s'est également prononcé, par jugement n° 1205122 du 7 avril 2016, sur ses conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices qu'elle a subis à raison de l'illégalité de ces deux décisions ; - c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à l'octroi d'une provision en accueillant l'exception de chose jugée opposée par l'administration, au regard du jugement n° 1205122 rendu sur sa demande indemnitaire par le tribunal administratif de Versailles le 7 avril 2016, dès lors que les deux instances concernées n'avaient pas le même objet ; - dès lors que les trois décisions contestées, portant rejet de sa demande de provision, sont entachées d'une illégalité fautive engageant la responsabilité de l'Etat, elle est en droit de percevoir la provision réclamée sur le montant total des indemnités lui étant dues. Par une décision du 28 septembre 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Versailles a accordé à Mme A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - la requérante ayant introduit un recours de plein contentieux tendant à l'octroi d'une provision, les conclusions d'excès de pouvoir contre la décision ministérielle du 8 juillet 2015 étaient irrecevables ; - les trois décisions contestées ayant pour seul objet de lier le présent contentieux indemnitaire, les vices propres dont elles seraient entachées ne peuvent être utilement invoqués ; - le tribunal administratif a pu à bon droit rejeter les conclusions indemnitaires tendant à l'octroi d'une provision dès lors que la demande indemnitaire distinctement présentée par la requérante, qui avait le même objet, a été examinée par le tribunal administratif de Versailles, dans son jugement n° 1205122 du 7 avril 2016, lequel est devenu définitif et a depuis lors été exécuté, l'indemnité consécutivement due à la requérante ayant déjà été liquidée ; - les autres moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 31 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juillet 2021. Mme A... a présenté un nouveau mémoire, enregistré le 19 mai 2022, soit postérieurement à la clôture de l'instruction. Par lettre du 19 mai 2022, la cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur le moyen, d'ordre public, tiré de l'irrégularité du jugement attaqué, le tribunal administratif ayant omis de constater un non-lieu à statuer sur la demande de provision alors qu'il avait été statué sur la demande indemnitaire. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique, - et les observations de Me Rochefort, pour Mme A..., et celles de Mme A.... Une note en délibéré, enregistrée le 15 juin 2022, a été présentée par Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Par décision du 8 février 2007, le recteur de l'académie de Versailles a admis Mme A..., professeure certifiée titulaire, à la retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007. Après que cette décision a été annulée par un arrêt de la cour n° 10VE01442 du 2 février 2012, le recteur a réitéré sa décision, par arrêté du 3 avril 2013. Par un jugement n° 1303877 du 10 février 2014, le tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté et enjoint au recteur de réintégrer rétroactivement Mme A..., en reconstituant sa carrière, à compter du 24 septembre 2007. En exécution de ce jugement, le recteur de l'académie de Versailles a, par arrêté du 23 avril 2014, réintégré rétroactivement l'intéressée à compter de cette dernière date, puis, par décision du 13 octobre 2014, l'a affectée dans un collège en Essonne. Par un arrêté du 4 décembre 2014, ce recteur a prononcé la radiation des cadres de Mme A... pour abandon de poste. Entre-temps, Mme A... avait demandé au tribunal administratif de Versailles, le 10 août 2012, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité totale de 433 945,95 euros en réparation des préjudices moral et financier qu'elle estimait avoir subis à raison de l'illégalité de la décision du 8 février 2007 l'ayant admise à la retraite pour invalidité. Par jugement n° 1205122 du 7 avril 2016, devenu définitif, ce tribunal, après avoir constaté l'illégalité fautive de cette décision, a, d'une part, condamné l'Etat à verser à Mme A... une indemnité de 1 500 euros au titre de son préjudice moral et, d'autre part, renvoyé l'intéressée devant l'administration pour qu'il soit procédé au calcul et à la liquidation de l'indemnité due en réparation des pertes de rémunérations subies au cours de la période durant laquelle elle avait été illégalement évincée du service. Dans l'attente de ce jugement, Mme A... avait, le 24 septembre 2014, adressé au recteur de l'académie de Versailles et au directeur départemental des finances publiques des Yvelines des demandes, respectivement reçues par ces destinataires les 26 et 29 septembre 2014, tendant à l'octroi d'une provision de 256 626,90 euros à valoir sur l'indemnité totale précédemment réclamée de 433 945,95 euros. Ces réclamations ont été implicitement rejetées, par des décisions nées les 26 et 29 novembre 2014. Cependant, après réexamen de celles-ci, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a, par décision du 8 juillet 2015, proposé à Mme A... de lui verser, non pas la provision sollicitée, mais une indemnité totale de 140 000 euros, sous réserve que l'intéressée accepte de signer un protocole transactionnel. N'ayant pas accepté cette proposition, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler les décisions implicites des 26 et 29 novembre 2014, ainsi que la décision ministérielle du 8 juillet 2015, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une provision de 256 526,90 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, et, enfin, d'enjoindre à l'Etat de lui verser les sommes correspondantes. Par un jugement du 4 juin 2018, dont Mme A... relève appel, ce tribunal a rejeté sa demande. 2. D'une part, les décisions des 26 et 29 novembre 2014 ayant implicitement rejeté la demande de provision présentée par Mme A..., de même que la décision du 8 juillet 2015 par laquelle le ministre a ultérieurement confirmé le rejet de cette demande, ont eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande de la requérante qui, en formulant les conclusions sus-analysées, a donné à l'ensemble de sa requête le caractère d'un recours de plein contentieux. Au regard de l'objet d'une telle demande, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressée à percevoir la somme qu'elle réclame, les vices propres dont seraient, le cas échéant, entachées les décisions qui ont ainsi lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige et il n'y a lieu pour le juge ni d'examiner de tels moyens, ni de statuer sur les conclusions d'annulation de telles décisions. 3. D'autre part, il résulte de l'instruction que, par ses jugements n° 1205122 du 7 avril 2016 et n° 1506076 du 4 juin 2018, le tribunal administratif de Versailles a statué sur les demandes indemnitaires de Mme A..., sur le montant desquelles l'intéressée avait sollicité l'octroi de la provision de 256 626,90 euros ici en litige. Dans ces conditions, à la date du jugement attaqué, cette demande de provision était devenue sans objet. Dès lors, en omettant de constater qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur cette dernière demande, le tribunal administratif a entaché le jugement attaqué d'irrégularité. Par suite, il y a lieu d'annuler ce jugement, d'évoquer les conclusions de la demande ainsi devenues sans objet au cours de la procédure de première instance et de constater qu'il n'y a pas lieu d'y statuer. 4. Eu égard aux motifs précédemment exposés, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante devant la cour. Enfin, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la requérante au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 1504052 du 4 juin 2018 est annulé. Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de provision présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Versailles. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par Mme A... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Versailles et au directeur régional des finances publiques de Paris. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président-assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, E. B...La présidente, C. SIGNERIN-ICRELa greffière, C. YARDELa République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, N° 18VE03824 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la saisie à tiers détenteur émise F... le directeur départemental des finances publiques des Yvelines le 2 décembre 2014 en vue de recouvrer la somme de 3 437,20 euros, ainsi que la décision implicite, née le 22 février 2015, F... laquelle ce directeur a rejeté la réclamation qu'elle avait formée contre cette saisie et tendant, en outre, au versement d'une indemnité de 10 000 euros, de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 3 437,20 euros indûment saisie, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation à compter de cette saisie, ainsi que l'indemnité susmentionnée de 10 000 euros, d'enjoindre à l'Etat de lui verser les sommes ainsi réclamées, dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 15 euros F... jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blin de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. F... un jugement n° 1504075 du 4 juin 2018, ce tribunal a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur ses conclusions à fin de décharge à hauteur de la somme de 424,82 euros et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Procédure devant la cour : F... une requête et des mémoires, respectivement enregistrés les 28 novembre, 2 décembre 2018 et 18 janvier 2019, Mme C..., représentée F... Me Blin, avocat, doit, dans le dernier état de ses écritures, être regardée comme demandant à la cour : 1°) de réformer ce jugement, en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; 2°) d'annuler ces décisions ; 3°) de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 3 437,20 euros indûment saisie, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation à compter de cette saisie, ainsi que l'indemnité susmentionnée de 10 000 euros ; 4°) de condamner l'Etat à lui rembourser la somme complémentaire de 14 288,71 euros au titre d'autres trop saisis, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation à compter de cette saisie ; 5°) d'enjoindre à l'Etat de lui verser les sommes ainsi réclamées, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 15 euros F... jour de retard ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blin de la somme de 5 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - comme le tribunal administratif l'a retenu, il n'y a plus lieu de statuer sur ses conclusions à hauteur de la somme de 424,82 euros, correspondant au rappel d'un trop perçu d'indemnité de suivi et d'orientation des élèves, cette somme lui ayant été remboursée ; - le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qui concerne la multiplicité des prélèvements dont elle a fait l'objet, sur lesquels le tribunal administratif a omis de se prononcer ; - le tribunal administratif, pour rejeter le surplus des conclusions de sa demande, a opposé à tort, en l'absence d'identité de cause et de parties, l'autorité de chose jugée qui s'attache à l'arrêt n° 13VE03859 rendu F... la cour le 21 janvier 2016 ; - le juge administratif est compétent pour statuer sur le présent litige ; - la saisie à tiers détenteur du 2 décembre 2014 est entachée d'incompétence, en l'absence de justification de ce que M. A... B... disposait d'une délégation de signature du directeur départemental des finances publiques des Yvelines ; - la notification de saisie à tiers détenteur du 2 décembre 2014 est insuffisamment motivée, au regard des précisions qu'elle devrait comporter en application de l'article 12 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général de la comptabilité publique ; - la notification de saisie à tiers détenteur du 2 décembre 2014 ne comporte aucun décompte, quant aux sommes réclamées de 3 339,86 euros et de 424,82 euros, de nature à permettre de contrôler l'exactitude des sommes liquidées, conformément à l'article 13 du même décret ; - l'administration ayant déjà effectué des prélèvements de trop perçus à hauteur de 6 033,87 euros, au titre de la période concernée du 24 septembre 2005 au 31 décembre 2007, elle ne justifie pas du bien-fondé des sommes rappelées F... la saisie à tiers détenteur du 2 décembre 2014 ; - en rappelant des trop perçus qui demeuraient injustifiés, malgré ses demandes d'explication réitérées, l'administration a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, qui lui a causé un important préjudice, chiffré à 10 000 euros ; - la prescription est acquise pour les deux créances réclamées F... l'administration. F... une décision du 28 septembre 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Versailles a accordé à Mme C... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. F... un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - il n'appartient pas à la juridiction administrative de se prononcer sur les moyens tirés de l'irrégularité en la forme de la saisie à tiers détenteur du 2 décembre 2014, dont l'examen relève de la compétence des juridictions judiciaires ; - les autres moyens de la requête ne sont pas fondés. F... une ordonnance du 31 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juillet 2021. F... une lettre du 19 mai 2022, la cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur deux moyens, d'ordre public, respectivement tirés, d'une part, de l'irrecevabilité des conclusions tendant au remboursement de la somme complémentaire de 14 288,71 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, qui ont le caractère de conclusions nouvelles en appel, et, d'autre part, de l'irrecevabilité de la contestation du bien-fondé de la créance mise à la charge de Mme C... F... le titre de perception du 28 septembre 2009, lequel présente un caractère définitif. F... un mémoire, enregistré le 25 mai 2022, Mme C... a présenté ses observations sur ces moyens d'ordre public. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. D..., - les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique, - et les observations de Mme C.... Une note en délibéré, enregistrée le 15 juin 2022, a été présentée F... Mme C.... Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., professeure certifiée titulaire, a été placée en congé de longue maladie pendant un an, à compter du 24 septembre 2002, puis en congé de longue durée du 24 septembre 2003 au 23 septembre 2007. A la suite d'erreurs de liquidation, l'intéressée a perçu un plein traitement, au lieu d'un demi traitement, du 24 septembre au 31 décembre 2005, ainsi que l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves, à tort, du 24 septembre 2005 au 31 mai 2006. En conséquence, le recteur de l'académie de Versailles a émis, le 28 septembre 2009 et 22 février 2010, deux titres de perception afin de rappeler ces trop perçus de rémunération et d'indemnité, pour des montants respectifs de 3 339,86 euros et de 424,82 euros. Mme C... ne s'étant pas acquittée de leur règlement, le trésorier payeur général des Yvelines l'a informée, F... lettre du 20 août 2010, qu'il allait procéder à une saisie à tiers détenteur. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Versailles, sous le n° 1005746, d'annuler cette décision. Le 1er octobre 2010, le trésorier payeur général des Yvelines a notifié à Mme C... une saisie à tiers détenteur émise en vue de recouvrer la somme totale de 3 437,20 euros. L'intéressée a demandé à ce même tribunal, sous le n° 1100298, d'annuler cette saisie à tiers détenteur du 1er octobre 2010 et, en outre, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité totale de 4 000 euros. F... un jugement du 23 septembre 2013, le magistrat désigné F... le président de ce tribunal, après avoir joint ces deux demandes, les a rejetées. Le titre de perception du 22 février 2010, relatif à la somme de 424,82 euros, ayant cependant été annulé F... l'administration et cette somme remboursée à Mme C..., cette dernière n'a fait appel de ce jugement qu'en tant qu'il avait rejeté ses demandes portant sur la somme de 3 339,86 euros. F... un arrêt n° 13VE03859 du 21 janvier 2016, devenu définitif, la cour a, dans cette mesure, annulé le jugement attaqué et rejeté ces demandes comme étant mal fondées. Entre temps, le directeur départemental des finances publiques des Yvelines, se fondant sur le jugement de rejet du 23 septembre 2013, avait émis, le 2 décembre 2014, une nouvelle saisie à tiers détenteur en vue d'obtenir, de nouveau, le recouvrement de la somme susmentionnée de 3 437,20 euros. F... courrier du 18 décembre 2014, reçu le 22 décembre suivant, Mme C... a contesté celle-ci et, en outre, sollicité une indemnité de 10 000 euros. Après que la somme de 3 437,20 euros a été prélevée, le 5 janvier 2015, sur le compte bancaire de Mme C..., la réclamation qu'elle avait ainsi formée a été implicitement rejetée, F... décision née le 22 février 2015. Mme C... a alors demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la saisie à tiers détenteur du 2 décembre 2014, ainsi que la décision implicite du 22 février 2015, de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 3 437,20 euros indûment saisie, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation, ainsi que l'indemnité susmentionnée de 10 000 euros, et d'enjoindre, sous astreinte, à l'Etat de lui verser les sommes ainsi réclamées. F... un jugement du 4 juin 2018, ce tribunal a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de cette demande à hauteur de la somme susmentionnée de 424,82 euros, eu égard à l'annulation du titre de perception correspondant du 22 février 2010 F... un nouveau titre du 22 mai 2015, et a rejeté le surplus de ces conclusions. Mme C... doit, dans le dernier état de ses écritures, être regardée comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ledit surplus et sollicite, en outre, la condamnation de l'Etat à lui rembourser la somme complémentaire de 14 288,71 euros au titre d'autres trop saisis, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation. Sur les conclusions tendant au remboursement de la somme de 14 288,71 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation : 2. Si Mme C... demande à la cour de condamner l'Etat à lui rembourser la somme complémentaire de 14 288,71 euros au titre de saisies autres que celles procédant de l'exécution de la saisie à tiers détenteur du 2 décembre 2014, ces conclusions, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en appel et sont, F... suite, irrecevables. Elles doivent, dès lors, être rejetées. Sur le surplus des conclusions : En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué : 3. En premier lieu, Mme C... soutient que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé sur " la multiplicité des prélèvements " dont elle aurait fait l'objet, conclusions sur lesquelles le tribunal administratif aurait, en outre, omis de statuer. Toutefois, il ressort du dossier de première instance que la requérante, ainsi qu'il a été rappelé aux points 1 et 2, avait uniquement contesté le rappel de la somme de 3 437,20 euros recouvrée en exécution de la saisie à tiers détenteur du 2 décembre 2014, correspondant, d'une part, au trop-perçu de rémunération de 3 339,86 euros et, d'autre part, au trop perçu d'indemnité de 424,82 euros diminué de sa fraction déjà remboursée F... l'intéressée, à hauteur de 327,48 euros, faisant ainsi ressortir un reliquat encore impayé de 97,34 euros. Or le tribunal administratif a indiqué, avec une précision suffisante, les motifs de droit et de fait pour lesquels il a, d'un côté, constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur ces conclusions en tant qu'elles portaient sur la seconde somme de 424,82 euros, non-lieu partiel que la requérante ne conteste d'ailleurs pas en cause d'appel, et, de l'autre, rejeté au fond le surplus de ces conclusions portant sur la première somme de 3 339,86 euros. Dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait, à ce titre, entaché d'irrégularité. 4. En second lieu, si Mme C... soutient que le tribunal administratif aurait, pour rejeter le surplus des conclusions de sa demande portant sur la somme susmentionnée de 3 339,86 euros demeurant en litige, accueilli à tort l'exception de chose jugée, opposée en défense F... l'administration, qui s'attache à l'arrêt n° 13VE03859 rendu F... la cour le 21 janvier 2016, ce moyen, qui se rattache au bien-fondé du raisonnement suivi F... les premiers juges, n'est pas de nature à affecter la régularité du jugement attaqué. Il doit, F... suite, être écarté. En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué : S'agissant des conclusions à fin de décharge de l'obligation de payer la somme de 3 339,86 euros restant en litige : 5. En premier lieu, il n'appartient pas au juge administratif de connaître d'une contestation relative à la régularité en la forme de l'acte de poursuite, qui ressortit, ainsi que l'oppose l'administration en défense, de la compétence du juge de l'exécution et, F... voie de conséquence, de celle des juridictions judiciaires. F... suite, les moyens tirés F... Mme C..., d'une part, de l'incompétence du signataire de la saisie à tiers détenteur du 2 décembre 2014 et, d'autre part, de l'insuffisante motivation de cet acte de poursuite, qui portent sur sa régularité en la forme, ne peuvent être utilement invoqués F... Mme C... à l'appui de sa contestation, portée devant le juge administratif, de son obligation de payer. 6. En deuxième lieu, si Mme C..., dans le dernier récapitulatif de ses conclusions, demande à la cour de " constater que la prescription est acquise ", l'intéressée n'assortit ce moyen d'aucune précision, notamment quant aux dispositions dont elle entendrait ici invoquer l'application, de nature à permettre d'en apprécier le bien-fondé. Ce moyen ne peut, dès lors, qu'être écarté. 7. Enfin, aux termes de l'article 118 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, dans sa rédaction alors en vigueur : " Avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit adresser une réclamation appuyée de toutes justifications utiles au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer. / La réclamation doit être déposée, sous peine de nullité : / 1° En cas d'opposition à l'exécution d'un titre de perception, dans les deux mois qui suivent la notification de ce titre ou du premier acte de poursuite qui procède du titre en cause (...) ". 8. En l'espèce, si Mme C... doit être regardée comme sollicitant la décharge de l'obligation de payer la somme de 3 339,86 euros restant en litige, dont le paiement lui avait été assigné, ainsi qu'il a été rappelé au point 1, F... le titre de perception du 28 septembre 2009, il résulte de l'instruction que la requérante a déjà formé opposition à l'exécution de ce titre de perception à la suite de la notification du premier acte de poursuite en ayant procédé, à savoir la saisie à tiers détenteur du 1er octobre 2010, opposition qui a été rejetée F... l'arrêt n° 13VE03859 rendu F... la cour le 21 janvier 2016 et devenu définitif. En application des dispositions précitées de l'article 118 du décret du 7 novembre 2012, Mme C... n'est pas recevable à faire, de nouveau, opposition à l'exécution du même titre de perception à l'occasion de la notification ultérieure de la saisie à tiers détenteur du 2 décembre 2014. Dès lors, ces conclusions ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées. S'agissant des conclusions indemnitaires : 9. Eu égard aux motifs précédemment exposés, Mme C... n'établit pas, ainsi qu'elle le soutient, que l'administration aurait, en l'espèce, procédé à un rappel de trop perçus qui s'avèrerait injustifié et, F... suite, commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Au surplus, si elle soutient avoir, en conséquence, subi un " important préjudice " chiffré à 10 000 euros, la requérante ne justifie pas de la consistance exacte et de la réalité de celui-ci, ni davantage du montant ainsi avancé. Dès lors, les conclusions indemnitaires présentées F... l'intéressée doivent être rejetées. 10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, F... le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. F... voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions présentées F... la requérante devant la cour aux fins d'injonction, d'astreinte, et d'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Versailles, au directeur départemental des finances publiques des Yvelines et au directeur régional des finances publiques de Paris. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président-assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public F... mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, E. D...La présidente, C. SIGNERIN-ICRE La greffière, C. YARDELa République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, N° 18VE04006 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 27 décembre 2016 par laquelle le directeur du groupement d'intérêt public (GIP) Médiation Nocturne à Saint-Denis l'a licencié à titre disciplinaire et de mettre à la charge du GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis une somme de 2 300 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1703350 du 23 février 2018, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision de licenciement du 27 décembre 2016, mis à la charge du GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis le versement à M. A... d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté les conclusions présentées par le GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis. Procédure initiale devant la cour : Le GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis a demandé à la cour administrative d'appel de Versailles d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de M. A.... Par un arrêt n° 18VE01443 du 2 juillet 2020, la cour a rejeté la requête du GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis et a mis à la charge de ce dernier le versement à M. A... de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure d'exécution devant la cour : Par une lettre du 22 février 2021, M. A... a demandé à la cour de prescrire les mesures d'exécution de l'arrêt n° 18VE01443 du 2 juillet 2020. Par une ordonnance du 2 septembre 2021, le président de la cour administrative d'appel de Versailles a procédé à l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de prescrire, si nécessaire, les mesures propres à assurer l'entière exécution de cet arrêt. Par deux mémoires enregistrés respectivement les 15 avril 2022 et 13 mai 2022, le GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis, représenté par son liquidateur, présenté par Me Carrère, avocate, conclut au rejet de la demande d'exécution de M. A.... Il soutient que l'exécution du jugement du 23 février 2018 est impossible dès lors qu'aucun emploi identique ou équivalent à l'emploi qu'occupait M. A... n'est devenu vacant depuis l'annulation du licenciement de l'intéressé ; en raison de difficultés budgétaires, le GIP exposant n'a d'ailleurs pu renouveler le contrat de deux agents et, pour les mêmes raisons, sa dissolution a été décidée et est intervenue le 31 juillet 2021 ; contrairement à ce que soutient M. A... son activité n'a été transférée à aucune entité et l'ensemble des agents contractuels du groupement a été licencié. Par deux mémoires enregistrés respectivement les 2 mai 2022 et 16 mai 2022, M. A..., représenté par Me Boukheloua, avocat, demande à la cour de prescrire l'exécution complète de l'arrêt du 2 juillet 2020, dans un délai de quinze jours sous astreinte de 400 euros par jour de retard et demande, en outre, à la cour de mettre à la charge du GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - en ne procédant pas à sa réintégration après le jugement du tribunal administratif et, de surcroît, l'arrêt de la cour, le GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis a méconnu l'autorité de la chose jugée ; - la décision de licenciement ayant disparu rétroactivement, il doit être réintégré dans l'emploi qu'il occupait ; - à la date du jugement du tribunal administratif, le GIP procédait au recrutement de nouveaux agents ; - il doit non seulement être réintégré mais également bénéficier de la reconstitution de ses traitements et droits sociaux, y compris en matière de cotisations de retraite, et d'une indemnité de licenciement. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C..., - les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique, - et les observations Me Lefébure, substituant Me Carrère, pour le liquidateur du GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis. Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. ". 2. En exécution d'un jugement annulant une décision illégale d'éviction d'un agent public, l'autorité administrative est tenue de procéder d'office, sans qu'il soit nécessaire que l'intéressé en fasse la demande, à sa réintégration juridique et à la reconstitution de sa carrière. Quels que soient les motifs d'annulation de la décision d'éviction, cette reconstitution de carrière, qui revêt un caractère rétroactif, soit à compter de la date d'effet de l'éviction illégale, comprend la reconstitution des droits sociaux, notamment des droits à pension de retraite, que l'agent aurait acquis en l'absence de cette éviction illégale et, par suite, le versement par l'administration des cotisations nécessaires à cette reconstitution. En outre, il incombe également à l'autorité administrative, de sa propre initiative, de régler la situation de l'agent pour l'avenir, notamment en procédant, en principe, à sa réintégration effective ou, le cas échéant, en prenant une nouvelle décision d'éviction. 3. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'arrêt de la cour du 2 juillet 2020 rejetant sa requête dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 23 février 2018 annulant la décision de licenciement de M. A... du 27 décembre 2016 et mettant à sa charge la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis n'a pas procédé à la réintégration de M. A... et ne lui a pas versé ladite somme. Dès lors, il y a lieu d'enjoindre au GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis de procéder à la réintégration juridique de M. A..., avec effet rétroactif à compter du 31 décembre 2016, date d'effet de son licenciement. Cette réintégration juridique comprendra la reconstitution des droits sociaux, notamment des droits à pension de retraite, que M. A... aurait acquis en l'absence de cette éviction illégale et, par suite, le versement par l'administration des cotisations nécessaires à cette reconstitution. En outre, compte tenu de la dissolution du GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis le 31 juillet 2021, il incombe également à son liquidateur de régler la situation de l'agent pour l'avenir, en procédant à une nouvelle éviction de l'agent et en lui versant l'ensemble des indemnités auxquelles il peut prétendre en cas de licenciement pour motif économique. Dans les circonstances de l'espèce, compte tenu du retard injustifié du GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis à exécuter non seulement l'arrêt de la cour du 2 juillet 2020 mais aussi le jugement du tribunal du 23 février 2018, il y a lieu d'enjoindre au GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis de procéder à la réintégration juridique de M. A... avec toutes les conséquences qui s'y attachent dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard. 4. Enfin, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis le versement à M. A... de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : Il est enjoint au GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis, représenté par son liquidateur, de réintégrer juridiquement M. A... dans les conditions prévues au point 3 du présent arrêt et de lui verser la somme de 2 000 euros résultant de l'arrêt de la cour du 2 juillet 2020, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 2 : Une astreinte est prononcée à l'encontre du GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis, représenté par son liquidateur, s'il ne justifie pas avoir, dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, exécuté l'arrêt de la cour n° 18VE01443 du 2 juillet 2020 et jusqu'à la date de cette exécution. Le taux de cette astreinte est fixé à 100 euros par jour, à compter de l'expiration du délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt. Article 3 : Le liquidateur du GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis communiquera à la cour copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter l'arrêt du 2 juillet 2020. Article 4 : Le GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis, représenté par son liquidateur, versera la somme de 2 000 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au GIP Médiation Nocturne à Saint-Denis, représenté par son liquidateur. Copie du présent arrêt sera adressé au préfet de la Seine-Saint-Denis. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, G. C...La présidente, C. SIGNERIN-ICRE La greffière C. YARDELa République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE02549
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme F... C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 4 décembre 2014 par lequel le recteur de l'académie de Versailles l'a radiée des cadres pour abandon de poste, ainsi que la décision du 19 mars 2015 par laquelle le recteur a rejeté son recours gracieux contre cet arrêté, d'enjoindre au recteur de la réintégrer rétroactivement dans ses fonctions à compter du 4 décembre 2014 et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blin de la somme de 2 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 1503777 du 4 juin 2018, ce tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, respectivement enregistrés les 28 novembre 2018 et 7 janvier 2020, Mme C..., représentée par Me Blin, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler ces décisions ; 3°) d'annuler la décision du 18 septembre 2018 par laquelle le ministre de l'éducation nationale a rejeté sa demande du 10 juillet 2018 tendant au retrait de l'arrêté contesté du 4 décembre 2014 ; 4°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Versailles de la réintégrer rétroactivement dans ses fonctions à compter du 4 décembre 2014 ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blin de la somme de 2 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - en écartant ses moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté du 4 décembre 2014 et du signataire du mémoire en défense du rectorat, en se fondant sur des délégations de signature produites par l'administration après la clôture de l'instruction et qui ne lui ont pas été communiquées, le tribunal administratif a méconnu le caractère contradictoire de la procédure ; - il n'est pas établi que M. E... A... disposait d'une délégation de signature du recteur lui permettant de signer l'arrêté contesté du 4 décembre 2014 ; - le jugement attaqué, en tant qu'il écarte le moyen tiré de l'incompétence de M. G... B... pour signer le mémoire en défense du recteur, est insuffisamment motivé ; - en écartant le moyen tiré de ce que le recteur aurait dû lui proposer un emploi adapté ou l'inviter à formuler une demande de reclassement, le tribunal administratif n'a pas correctement pris en compte sa situation de fait ; - c'est à tort que le tribunal administratif a écarté les moyens tirés, d'une part, de ce que la mise en demeure de rejoindre son poste n'était pas assortie d'un délai approprié pour ce faire et, d'autre part, de ce qu'elle ne pouvait être regardée comme ayant entendu rompre tout lien avec le service ; - en la maintenant durant une période prolongée sans poste approprié, en la poussant à prendre un congé pour convenance personnelle et en ne lui proposant pas un emploi adapté ou un reclassement, le recteur a commis une faute engageant la responsabilité de l'Etat, avant même qu'elle ne soit radiée des cadres pour abandon de poste par l'arrêté contesté du 4 décembre 2014 ; - compte tenu de sa situation personnelle et familiale, qui l'avait conduite à établir son domicile en Ariège, de l'impossibilité matérielle en résultant de rejoindre le poste auquel elle avait été affectée à Orsay, et des propositions de travail à distance qu'elle avait alors formulées pour y remédier, il ne peut lui être imputé d'avoir entendu rompre tout lien avec le service, de sorte que sa radiation des cadres pour abandon de poste est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - son absence de recrutement par le recteur de l'académie de Toulouse est entachée discrimination ; - le traitement de sa carrière administrative par les recteurs des académies de Versailles et de Toulouse révèle un déficit dans la gestion des ressources humaines et une méconnaissance des possibilités qu'offre désormais la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique ; - le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance de cette dernière loi ; - la décision de radiation des cadres pour abandon de poste n'a pas donné lieu à la consultation préalable de la commission administrative paritaire ; - le poste auquel elle avait été affectée à Orsay, compte tenu de l'éloignement de son domicile situé en Ariège, étant incompatible avec les règles de santé et de sécurité au travail prévues par le décret n° 82-453 du 28 mai 1982, elle doit être regardée comme ayant exercé son droit au retrait, et non comme étant en situation d'abandon de poste ; - sa radiation des cadres pour abandon de poste est entachée de détournement de procédure et de pouvoir. Par une décision du 28 septembre 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Versailles a accordé à Mme C... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 7 janvier 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 février 2020. Par une lettre du 19 mai 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur le moyen, d'ordre public, tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision contestée du 18 septembre 2018, qui ont le caractère de conclusions nouvelles en appel. Par un mémoire, enregistré le 25 mai 2022, Mme C... a présenté ses observations sur ce moyen relevé d'office. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. D..., - les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique, - et les observations de Mme C.... Une note en délibéré, enregistrée le 15 juin 2022, a été présentée par Mme C.... Considérant ce qui suit : 1. Par décision du 8 février 2007, le recteur de l'académie de Versailles a admis Mme C..., professeure certifiée titulaire, à la retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007. Après que cette décision a été annulée par un arrêt de la cour n° 10VE01442 du 2 février 2012, le recteur a réitéré sa décision, par arrêté du 3 avril 2013. Par un jugement n° 1303877 du 10 février 2014, le tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté et enjoint au recteur de réintégrer rétroactivement Mme C..., en reconstituant sa carrière, à compter du 24 septembre 2007. En exécution de ce jugement, le recteur de l'académie de Versailles a, par arrêté du 23 avril 2014, réintégré rétroactivement l'intéressée à compter de cette dernière date. Entre temps, Mme C... avait sollicité et obtenu, par arrêté du 7 avril 2014, son placement en disponibilité pour convenances personnelles, au titre de la période du 3 mars au 31 août 2014. A l'issue de cette période de disponibilité, le recteur a, par arrêté du 24 septembre 2014, rattaché administrativement Mme C... au collège Alain Fournier à Orsay, pour la période du 1er septembre 2014 au 31 août 2015, puis, par arrêté du 13 octobre 2014, affecté l'intéressée sur un emploi de professeur en technologie au sein de ce collège, à compter du 3 novembre 2014. Mme C... n'ayant pas rejoint son poste à cette dernière date, le recteur, après l'avoir vainement mise en demeure de reprendre ses fonctions par lettre du 6 novembre 2014, a prononcé, par un arrêté du 4 décembre 2014, sa radiation des cadres pour abandon de poste. Le recours gracieux présenté par l'intéressée à l'encontre de cet arrêté, le 18 décembre 2014, a été rejeté par décision du 19 mars 2015. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 4 décembre 2014, ainsi que la décision du 19 mars 2015 ayant rejeté son recours gracieux, et d'enjoindre au recteur de l'académie de Versailles de la réintégrer rétroactivement dans ses fonctions à compter du 4 décembre 2014. Par un jugement du 4 juin 2018, ce tribunal a rejeté sa demande. Mme C... relève appel de ce jugement et demande, en outre, à la cour d'annuler la décision du 18 septembre 2018 par laquelle le ministre de l'éducation nationale a rejeté sa demande du 10 juillet 2018 tendant au retrait de l'arrêté du 4 décembre 2014. Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision du 18 septembre 2018 : 2. Les conclusions de Mme C... tendant à l'annulation de la décision du 18 septembre 2018, qui n'ont pas été soumises au tribunal administratif, ont le caractère de conclusions nouvelles en appel et sont, par suite, irrecevables. Elles doivent, dès lors, être rejetées. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. En premier lieu, si le caractère contradictoire de la procédure fait, en principe, obstacle à ce que le juge se fonde sur des pièces produites au cours de l'instance qui n'auraient pas été préalablement communiquées à chacune des parties, le juge peut toutefois régulièrement se fonder, pour écarter un moyen d'incompétence, sur un arrêté de délégation de signature publié au bulletin officiel d'un ministère ou au recueil des actes administratifs d'une préfecture, sans être tenu de communiquer préalablement cet arrêté aux parties. Ainsi, et en l'espèce, le tribunal administratif, pour écarter les moyens tirés par Mme C... de l'incompétence de M. E... A..., signataire de l'arrêté contesté du 4 décembre 2014, et de M. G... B..., signataire du mémoire en défense produit par le recteur de l'académie de Versailles le 10 mars 2016, a pu régulièrement se fonder sur les délégations de signature respectivement consenties par ce dernier aux intéressés par des arrêtés des 2 janvier 2013 et 7 janvier 2016, qui ont été publiés au recueil des actes administratifs de la préfecture de la région Ile-de-France, sans communiquer ces pièces à la requérante. Enfin, est sans incidence la circonstance, alléguée par Mme C..., selon laquelle elle n'aurait pu alors consulter ces arrêtés sur le site internet de cette administration en raison d'une opération de maintenance informatique. 4. En deuxième lieu, pour soutenir que le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé, Mme C... fait valoir que le tribunal administratif a affirmé que M. G... B..., signataire du mémoire en défense produit par le recteur de l'académie de Versailles le 10 mars 2016, avait été nommé secrétaire général de l'académie de Versailles par un décret du 1er aout 2017, sans que la preuve en soit fournie et alors que ce décret est postérieur au mémoire. Toutefois, le bien-fondé du motif retenu par le tribunal est sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation du jugement attaqué. Par suite, le moyen ainsi soulevé doit être écarté. 5. En troisième lieu, il ressort du point 9 du jugement attaqué que le tribunal administratif a écarté le moyen tiré par Mme C... de ce que le traitement de sa carrière par l'administration et, notamment, les décisions contestées des 4 décembre 2014 et 19 mars 2015, révèlerait une méconnaissance des dispositions de la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique, au motif que ce moyen n'était pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé. Dès lors, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait omis d'examiner ce moyen doit être écarté. 6. En quatrième lieu, il ressort du dossier de première instance que le mémoire en défense produit par le recteur de l'académie de Versailles, le 10 mars 2016, a été signé par M. Jean-Marie Pelat, secrétaire général de cette académie. D'une part, M. B... avait été nommé et détaché dans cet emploi, du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2019, par arrêté du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en date du 19 novembre 2014, régulièrement publié au bulletin officiel de ce ministère du 1er janvier 2015. D'autre part, M. B... bénéficiait d'une délégation de signature lui ayant été consentie par arrêté rectoral du 7 janvier 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la région Ile-de-France, à l'effet de signer, notamment, les " mémoires en défense devant les tribunaux administratifs ". Dès lors, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que M. B... n'avait pas qualité pour représenter le recteur devant le tribunal administratif et, par suite, que celui-ci aurait admis à tort la recevabilité du mémoire en défense ainsi produit. 7. En dernier lieu, si Mme C... soutient que le tribunal administratif aurait écarté à tort, au prix d'erreurs de droit, de fait ou encore d'appréciation, plusieurs des moyens qu'elle développait à l'encontre de sa radiation des cadres pour abandon de poste, de telles erreurs, qui ont trait au bien-fondé du raisonnement suivi par ce tribunal, sont sans incidence sur la régularité du jugement attaqué. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation des décisions attaquées : 8. En premier lieu, l'arrêté contesté du 4 décembre 2014 ayant radié Mme C... des cadres pour abandon de poste a été signé par M. Philippe Diaz, secrétaire général adjoint et directeur des ressources humaines de l'académie de Versailles. Ainsi qu'il a été exposé au point 3, M. A... bénéficiait d'une délégation de signature lui ayant été consentie par arrêté rectoral du 2 janvier 2013, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la région Ile-de-France, à l'effet de signer, notamment, tous les actes relevant " de la gestion des personnels d'encadrement, des personnels enseignants, administratifs, techniques, ouvriers ou de service sous l'autorité du recteur de l'académie de Versailles (...) ". Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté du 4 décembre 2014 serait entaché d'incompétence doit être écarté. 9. En deuxième lieu, la radiation des cadres prononcée à l'égard d'un agent public en cas d'abandon de poste n'est pas subordonnée à la consultation préalable du comité médical ou de la commission administrative paritaire. Ainsi, Mme C... ne peut utilement invoquer, à l'appui ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté contesté du 4 décembre 2014, une absence de saisine préalable de ces organismes consultatifs. 10. En troisième lieu, une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié qu'il appartient à l'administration de fixer. Une telle mise en demeure doit prendre la forme d'un document écrit, notifié à l'intéressé, l'informant du risque qu'il court d'une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable. Lorsque l'agent ne s'est pas présenté et n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé. 11. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre de l'exécution du jugement n° 1303877 du 10 février 2014, mentionné au point 1, lui enjoignant de réintégrer Mme C... dans ses fonctions, le recteur de l'académie de Versailles, à l'issue de la période de disponibilité pour convenance personnelle qu'avait obtenue l'intéressée du 3 mars au 31 août 2014, l'a affectée, par arrêté du 13 octobre 2014, reçu le 18 octobre suivant, sur un emploi de professeur de technologie au sein du collège Alain Fournier à Orsay à compter du 3 novembre 2014. Si Mme C..., qui vivait depuis plusieurs années en Ariège, avait entre-temps proposé en vain au recteur, par lettres des 2 et 16 octobre 2014, d'assurer ces fonctions d'enseignement " à distance ", il est constant que l'intéressée, au jour du 3 novembre 2014, n'a pas rejoint son poste à Orsay, ni ne s'est alors manifestée auprès des services académiques ou de son chef d'établissement. En conséquence, le recteur, par une lettre du 6 novembre 2014 reçue le 13 novembre suivant, a mis Mme C... en demeure de reprendre ses fonctions, dans un délai de 48 heures suivant la réception de ce courrier, en lui indiquant qu'à défaut d'y déférer, il pourrait prononcer sa radiation des cadres pour abandon de poste, sans procédure disciplinaire préalable, et en lui rappelant, par ailleurs, que ses fonctions exigeant un enseignement devant les élèves, l'exercice de telles missions à distance n'était pas envisageable. Cependant, Mme C... n'a pas rejoint son poste dans le délai lui ayant été ainsi imparti et ne s'est, d'ailleurs, pas davantage manifestée jusqu'au prononcé, par l'arrêté contesté du 4 décembre 2014, de sa radiation des cadres pour abandon de poste. A cet égard, la requérante, pour contester cette dernière décision, ne saurait sérieusement soutenir que ce délai de 48 heures aurait été insuffisant, compte tenu de l'éloignement entre son domicile en Ariège et son collège d'affectation en Essonne, alors qu'il lui appartenait au préalable, compte tenu du jugement du 10 février 2014 et de ce qu'elle n'avait pas sollicité le renouvellement de sa disponibilité pour convenance personnelle au-delà du 31 août 2014, de prendre ses dispositions pour être en mesure de reprendre ses fonctions d'enseignement au sein de l'académie de Versailles, à la date de rentrée fixée au 3 novembre 2014 et dont elle avait été clairement informée le 18 octobre précédent. Dans ces conditions, le moyen tiré par Mme C... de ce que la mise en demeure du 6 novembre 2014 n'aurait pas été assortie d'un délai approprié pour qu'elle puisse rejoindre son poste doit être écarté. 12. D'autre part, pour soutenir que son abandon de poste n'était pas caractérisé, Mme C... prétend que le recteur de l'académie de Versailles ne pouvait légalement la réintégrer, par son arrêté du 13 octobre 2014, dans des fonctions d'enseignante en technologie au sein d'un collège de cette académie mais aurait dû, eu égard à son état de santé et à sa domiciliation en Ariège, lui proposer un poste adapté ou, à défaut, l'inviter à présenter une demande de reclassement, ainsi qu'il ressortirait des motifs du jugement du 10 février 2014 annulant l'arrêté du 3 avril 2013 la plaçant à la retraite d'office pour invalidité. Toutefois, il ressort des motifs de ce jugement que Mme C..., compte tenu de son état de santé, avait été déclarée, d'un côté, définitivement inapte uniquement à l'exercice des fonctions qu'elle avait précédemment occupées, par voie de détachement, en tant que directrice du centre départemental de documentation pédagogique de l'Ariège mais, de l'autre, apte à l'exercice de fonctions d'enseignement en tant que professeur de technologie, emploi qu'elle avait occupé antérieurement à ce détachement et dans lequel elle avait, d'ailleurs, sollicité sa réintégration à plusieurs reprises au cours des années 2012 et 2013. Par suite, la requérante n'est, en tout état de cause, pas fondée à exciper, à l'occasion de la présente instance, de l'illégalité de l'arrêté de réintégration du 13 octobre 2014. Par ailleurs, Mme C..., après avoir reçu, le 13 novembre 2014 la mise en demeure de rejoindre le poste d'enseignement auquel elle avait été ainsi affectée, n'a pas déféré à cette injonction et n'a fourni à l'administration aucun élément, d'ordre matériel ou médical, de nature à justifier de son absence depuis la rentrée fixée au 3 novembre 2014 et jusqu'à la date d'édiction de l'arrêté contesté du 4 décembre 2014, la seule invocation de l'éloignement de son domicile et de sa proposition corrélative d'enseignement " à distance " ne pouvant, pour les motifs déjà exposés au point 11, être regardée comme établissant une justification pertinente. Enfin, si la requérante soutient également que cette carence prolongée à rejoindre son poste traduirait un nécessaire droit au retrait, ces fonctions étant, selon ses dires, incompatibles avec les règles de prévention de la santé et de la sécurité au travail prévues par le décret n° 82-453 du 28 mai 1982, elle n'établit, ni même n'allègue, s'être, à l'époque, manifestée auprès de l'administration afin d'exercer ce droit. Ainsi, et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le recteur de l'académie de Versailles a pu, à juste titre, estimer que le lien avec le service avait été rompu du fait de la requérante et, par suite, prononcer légalement, par l'arrêté contesté du 4 décembre 2014, sa radiation des cadres pour abandon de poste. 13. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté attaqué, qui est légalement fondé pour les motifs précédemment exposés, serait entaché de détournement de procédure ou de pouvoir. 14. En dernier lieu, Mme C..., à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation, soutient également, d'une part, que le recteur de l'académie de Versailles aurait, dans la gestion de sa carrière antérieurement à l'édiction de l'arrêté attaqué, commis des fautes de nature à engager sa responsabilité, d'autre part, que son absence de recrutement sur les postes auxquels elle avait postulé au sein de l'académie de Toulouse serait entachée de discrimination et, enfin, que le traitement de sa carrière par ces deux recteurs révèlerait un déficit dans la gestion des ressources humaines, ainsi qu'une méconnaissance des possibilités d'emploi qu'offre désormais la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique. Toutefois, ces circonstances sont sans aucune incidence sur la légalité de la mesure de radiation des cadres dont la requérante a fait l'objet pour abandon de poste. Par suite, ces moyens doivent être écartés comme inopérants. 15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions présentées par la requérante aux fins d'injonction et d'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... C... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Versailles. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président-assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, E. D...La présidente, C. SIGNERIN-ICRELa greffière, C. YARDELa République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, N° 18VE03960 2
JADE/CETATEXT000045931475.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... et Mme D... C... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner la commune de Richelieu et/ou le syndicat mixte d'alimentation en eau potable du Richelais à leur verser la somme de 28 013,72 euros, augmentée des intérêts à taux légal à compter du 15 janvier 2019 et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation des préjudices subis du fait des infiltrations dans la cave de leur maison d'habitation. Par un jugement n° 1901697 du 22 juin 2021, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande et a mis définitivement à leur charge, outre les sommes de 600 euros à verser à la commune de Richelieu et au syndicat mixte d'alimentation en eau potable du Richelais sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 3 548,18 euros correspondant aux frais et honoraires d'expertise liquidés et taxés par ordonnance de la présidente de ce tribunal du 30 avril 2018. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement le 5 août 2021 et le 19 mai 2022, M. et Mme C..., représentés par Me Martin-Sol, avocate, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de condamner la commune de Richelieu et/ou le syndicat mixte d'alimentation en eau potable du Richelais à leur payer la somme de 28 013,72 euros en réparation de leurs préjudices, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2019, avec capitalisation des intérêts ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Richelieu et/ou du syndicat mixte d'alimentation en eau potable du Richelais la somme de 7 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - à titre principal, le comportement de la commune et du syndicat constitue une résistance abusive caractérisant une faute de nature à engager leur responsabilité ; - à titre subsidiaire, la responsabilité de la commune et du syndicat peut être engagée sur le fondement de la responsabilité sans faute ; l'expert a retenu que l'humidité du mur de leur cave provient du fonctionnement défectueux du système d'évacuation des eaux de pluie dont la commune est responsable ; - ils justifient à ce titre d'un préjudice financier de 23 013,72 euros eu égard aux frais engagés pour faire valoir leurs droits et d'un préjudice moral qu'il convient d'indemniser à hauteur de 5 000 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 2 mai 2022, le syndicat mixte d'alimentation en eau potable du Richelais, représenté par Me Meunier, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens des requérants ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense enregistré le 9 mai 2022, la commune de Richelieu, représentée par Me Tissier-Lotz, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient, à titre principal, que les moyens des requérants ne sont pas fondés et, à titre subsidiaire, que la charge indemnitaire doit être partagée équitablement entre elle et le syndicat mixte d'alimentation en eau potable, le désordre n'étant apparu qu'en raison de la modification de la nature du sous-sol à l'occasion des travaux de déplacement du compteur d'eau. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, en particulier son article 63 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique, - les observations de Mme Larre, auditrice de justice, substituant Me Martin-Sol, sous le contrôle de cette dernière, pour M. et Mme C..., celles de Me Hallé pour la commune de Richelieu et celles de Me Catry, pour le syndicat mixte d'alimentation en eau potable du Richelais. Considérant ce qui suit : 1. M. et Mme C..., propriétaires d'une maison au 32 rue Henri Proust à Richelieu (Indre-et-Loire), relèvent appel du jugement du 22 juin 2021 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Richelieu et/ou du syndicat mixte d'alimentation en eau potable (SMAEP) du Richelais à leur verser la somme de 28 013,72 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'ils estiment avoir subis en raison d'infiltrations dans leur cave constatées à partir de la fin de l'année 2013 et de l'inertie fautive de ces deux collectivités. Ils sollicitent, à titre principal, l'engagement de leur responsabilité pour faute et, à titre subsidiaire, l'engagement de leur responsabilité sans faute. Sur la responsabilité pour faute : 2. Il résulte de l'instruction que le 27 mai 2014, M. et Mme C... ont informé le syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable du Richelais, devenu le SMAEP du Richelais, et la commune de Richelieu de l'existence d'infiltrations dans la cave de leur maison, qu'ils pensaient liées aux travaux de déplacement de leur compteur d'eau réalisés par le syndicat en 2013. Le syndicat a effectué une visite sur place le 4 juin 2014. Il a informé M. et Mme C..., par un courrier du 11 juin 2014, que les infiltrations étaient liées à une défectuosité du trottoir situé au droit de leur maison. La commune de Richelieu en a été informée. M. et Mme C... ayant déclaré ce désordre auprès de leur assureur, une première expertise contradictoire a eu lieu le 24 juillet 2014 en présence de la commune. Un rapport a été établi et a constaté un " défaut d'étanchéité entre le bitume du trottoir et le regard EP se trouvant près de la trappe de visite d'arrivée d'eau ". Une nouvelle réunion d'expertise amiable a été organisée le 24 juin 2015 en présence notamment de la commune, du syndicat et de l'entreprise Humbert ayant réalisé les travaux de déplacement du compteur pour le compte du syndicat. Il n'est pas contesté que la commune a, à la suite de cette réunion, fait procéder à des travaux tendant à assurer l'étanchéité du regard des eaux pluviales. Les infiltrations ayant malgré tout perduré, une nouvelle réunion a été organisée le 22 mars 2016 afin d'établir un protocole d'accord. Aucun élément ne permet d'établir que la commune et le syndicat ont tenté de faire échec aux démarches amiables engagées dans ce litige. Enfin, il n'est pas contesté que l'entreprise Humbert est intervenue en avril 2016 pour remplacer le joint du tampon du regard des eaux pluviales et installer un joint en silicone entre le regard et le béton du trottoir. 3. Dans ces conditions, la commune de Richelieu et le SMAEP, qui ont participé à la recherche de la cause des désordres et ont tenté d'y remédier, ne peuvent être regardés comme ayant fait preuve de résistance abusive et comme ayant ainsi commis une faute de nature à engager leur responsabilité. Sur la responsabilité sans faute : 4. Le maître de l'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage n'est pas inhérent à l'existence même de l'ouvrage public ou à son fonctionnement et présente, par suite, un caractère accidentel. 5. Il résulte du rapport de l'expert désigné par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans du 6 juin 2017 que les désordres constatés dans la cave de M. et Mme C..., consistant en une humidité permanente évoluant selon les conditions météorologiques et pouvant entraîner à moyen ou long terme une dégradation des joints et pierres calcaires ainsi qu'une apparition de salpêtre pouvant engendrer des tassements, voire une fissuration de la maçonnerie, sont dus à un défaut d'étanchéité d'une canalisation d'eaux pluviales. Dès lors qu'il est constant que l'entretien du réseau d'eaux pluviales relève des attributions de la commune de Richelieu, les requérants ne sauraient rechercher la responsabilité sans faute du SMAEP du Richelais en se prévalant du défaut d'étanchéité de la canalisation en cause. En revanche, ils sont fondés à rechercher la responsabilité sans faute de la commune de Richelieu, sans avoir à démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils ont subi dès lors que le dommage présente un caractère accidentel. Sur le partage de responsabilité : 6. Si la commune de Richelieu sollicite à titre subsidiaire un partage de responsabilité avec le SMAEP du Richelais, aucun élément ne permet d'établir que la responsabilité sans faute de ce syndicat serait engagée à l'égard de commune. En outre, cette dernière n'établit l'existence d'aucune faute commise par ce syndicat de nature à engager sa responsabilité à son égard. Ainsi, la seule circonstance que les désordres seraient apparus à la suite des travaux de déplacement du compteur d'eau ne permet pas de retenir le partage de responsabilité sollicité par la commune. Sur les préjudices : 7. En premier lieu, M. et Mme C... justifient avoir engagé des frais d'analyse technique, s'élevant respectivement à la somme de 550 euros TTC et de 4 160 euros TTC (soit 2 160 euros et 2 000 euros), des frais d'huissier d'un montant de 300 euros TTC et des frais d'avocat, d'un montant total de 14 455,54 euros TTC (soit 1 068 euros, 2 160 euros, 5 094 euros et 6 133,54 euros), en lien avec les désordres subi dans la cave de leur maison. Les factures et notes d'honoraires afférentes à ces dépenses exposées par M. et Mme C... entre 2014 et 2018, qui figurent en annexe au rapport d'expertise à l'exception de l'une d'elles et dont l'objet est dépourvu de toute ambiguïté, présentent un lien direct avec les désordres subis par les requérants. Ces dépenses d'analyse technique, frais d'huissier et frais d'avocat doivent être regardés, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant été utiles au règlement du litige. Par ailleurs, la commune de Richelieu n'apporte aucun élément de nature à établir que les frais d'avocat, qui ne correspondent qu'à des diligences effectivement accomplies dans le cadre de l'assistance qui a été apportée à M. et Mme C... pour mettre un terme aux dommages qu'ils subissaient, présenteraient un caractère excessif. Ainsi, M. et Mme C... sont fondés à demander la condamnation de la commune de Richelieu à leur verser totale de 19 465,54 euros. 8. En second lieu, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste évaluation du préjudice moral subi par les requérants en l'évaluant à la somme de 2 000 euros. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... sont fondés à demander la condamnation de la commune de Richelieu à leur verser la somme totale de 21 465,54 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 15 janvier 2019 et capitalisation à compter du 15 janvier 2020 et à chaque échéance annuelle ultérieure. Sur les dépens de première instance : 10. Il y a lieu de mettre à la charge définitive de la commune de Richelieu les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 3 548,18 euros par ordonnance de la présidente du tribunal administratif d'Orléans du 30 avril 2018. Sur les frais liés à l'instance : 11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Richelieu la somme de 2 000 euros à verser à M. et Mme C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, M. et Mme C... n'étant pas partie perdante dans la présente instance, ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune de Richelieu. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du syndicat mixte d'alimentation en eau potable du Richelais tendant à l'application de ces dispositions. D É C I D E : Article 1er : Le jugement n° 1901697 du tribunal administratif d'Orléans du 22 juin 2021 est annulé. Article 2 : La commune de Richelieu est condamnée à verser la somme de 21 465,54 euros à M. et Mme C..., avec intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2019 et capitalisation des intérêts à compter du 15 janvier 2020 et à chaque échéance annuelle ultérieure. Article 3 : Les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 3 548,18 euros par ordonnance de la présidente du tribunal administratif d'Orléans du 30 avril 2018 sont mis à la charge de la commune de Richelieu. Article 4 : La commune de Richelieu versera à M. et Mme C... la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Mme D... C..., à la commune de Richelieu et au syndicat mixte d'alimentation en eau potable du Richelais. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, G. A...La présidente, C. SIGNERIN-ICRE La greffière, C. YARDE La République mande et ordonne au préfet d'Indre-et-Loire, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE02327
JADE/CETATEXT000045931472.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris de l'admettre provisoirement à l'aide juridictionnelle, d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2019 D... lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros D... jour de retard, et, dans cette attente, de le mettre en possession d'une autorisation provisoire de séjour. D... une ordonnance n° 1925953 du 4 décembre 2019, le président du tribunal administratif de Paris a transmis le dossier de cette requête au tribunal administratif de Montreuil. D... un jugement n° 2000360 du 19 février 2020, la magistrate désignée D... le président du tribunal administratif de Montreuil a admis provisoirement M. A... à l'aide juridictionnelle et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Procédure devant la cour : D... une requête enregistrée le 16 mars 2021, M. A..., représenté D... Me Semak, avocate, demande à la cour : 1°) de réformer ce jugement, en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; 2°) d'annuler ces décisions ; 3°) d'enjoindre à l'autorité administrative compétente de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous une astreinte de 100 euros D... jour de retard, et, dans cette attente, de le mettre en possession d'une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Semak de la somme de 2 400 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ; - elle méconnaît les articles L. 741-1, L.743-1 et R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est, en outre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il n'a ni reçu les informations utiles en vue de l'enregistrement de sa demande d'asile ni été orienté vers l'autorité administrative compétente, alors qu'il avait indiqué craindre pour sa vie et sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - la décision fixant le pays de destination est illégale D... voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle est insuffisamment motivée ; - elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale D... une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Versailles du 29 décembre 2020. Le préfet de police a produit un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2022, soit postérieurement à la clôture de l'instruction. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant afghan né le 28 août 1995 et déclarant être entré en France en novembre 2019, a fait l'objet d'un contrôle d'identité, à la suite duquel le préfet de police, D... un arrêté du 21 novembre 2019, lui a fait obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil de l'admettre provisoirement à l'aide juridictionnelle, d'annuler les décisions du 21 novembre 2019 portant éloignement et fixation du pays de destination et d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros D... jour de retard, et, dans cette attente, de le mettre en possession d'une autorisation provisoire de séjour. D... un jugement du 19 février 2020, la magistrate désignée D... le président de ce tribunal a admis provisoirement M. A... à l'aide juridictionnelle et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. M. A... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions. Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête : 2. Aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres D... un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus D... le même règlement, dans des conditions fixées D... décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 741-2 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsque l'étranger présente sa demande auprès (...) des services de police ou de gendarmerie (...), la personne est orientée vers l'autorité compétente (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 741-3 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. ". 3. Il ressort des pièces du dossier et, en particulier, du procès-verbal d'audition de M. A... D... les services de police le 20 novembre 2019, que l'intéressé, assisté d'un interprète en langue pachtoune, a notamment indiqué qu'il était afghan, entré en France depuis deux jours, qu'il n'avait pas encore déposé de demande de titre de séjour ou d'asile, mais qu'il avait quitté son pays d'origine car les talibans l'avaient menacé du fait qu'il avait travaillé pour l'Etat et qu'il ne voulait pas retourner en Afghanistan dès lors qu'il y éprouvait des craintes pour sa vie. Compte tenu du caractère suffisamment précis et non équivoque de ces dernières déclarations, il appartenait aux services de police, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'orienter M. A... vers l'autorité administrative compétente pour qu'il puisse présenter sa demande d'asile, laquelle faisait obstacle à ce que l'intéressé puisse légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Le requérant est, dès lors, fondé à soutenir qu'en lui faisant, D... l'arrêté contesté du 21 novembre 2019, obligation de quitter le territoire français, le préfet de police a méconnu les dispositions citées au point 2. 4. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, D... le jugement attaqué, la magistrate désignée D... le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte : 5. L'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le préfet de police réexamine la situation de M. A... et, dans cette attente, lui délivre une autorisation provisoire de séjour. Dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de procéder à ce réexamen, dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt, et, dans cette attente, de mettre l'intéressé en possession d'une autorisation provisoire de séjour. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés à l'instance : 6. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. D... suite, Me Semak, son avocate, peut se prévaloir des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Semak de la somme de 1 500 euros en application de ces dispositions, sous réserve que ce mandataire renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. D É C I D E : Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Montreuil du 19 février 2020 et l'arrêté du préfet de police du 21 novembre 2019 sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M. A..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et, dans cette attente, de le mettre en possession d'une autorisation provisoire de séjour. Article 3 : L'Etat versera à Me Semak la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Semak renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête présentée D... M. A... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur, au préfet de police et à Me Amélie Semak. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente de chambre, M. Camenen, président-assesseur, M. Toutain, premier conseiller. Rendu public D... mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, E. B...La présidente, C. SIGNERIN-ICRE La greffière, C. YARDE La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 3 2 N° 21VE00761
JADE/CETATEXT000045945076.xml
Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 19 mai 2022, Mme B... A..., représentée par Me Gravé, demande au juge des référés de la cour : 1°) de prononcer, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la délibération du 24 novembre 2021 par laquelle le jury d'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats a prononcé son ajournement ; 2°) d'enjoindre à l'université Paris 8, sous astreinte, de l'autoriser à s'inscrire au prochain examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats ; 3°) de mettre à charge de l'université Paris 8 une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : En ce qui concerne la condition d'urgence, l'urgence est constituée dès lors qu'elle a présenté l'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats trois fois, de sorte qu'elle n'est plus en mesure de le présenter une nouvelle fois et que les nouvelles épreuves à l'examen d'entrée ont lieu à partir du 5 septembre 2022 ; En ce qui concerne le doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée, la composition du jury était irrégulière au regard de l'article 53 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, dès lors que les 3 avocats membres du jury n'ont pas été " désignés en commun par les bâtonniers des ordres d'avocats concernés ", cette irrégularité la privant d'une garantie essentielle. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2022, l'université Paris 8, représentée par Me Moreau, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le moyen soulevé par Mme A... n'est pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée. Vu les autres pièces du dossier et notamment la requête enregistrée le 19 mai 2022, sous le n° 22PA02334 par laquelle Mme A... a demandé à la Cour d'annuler la délibération du 24 novembre 2021 par laquelle le jury d'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats a prononcé son ajournement. Vu : - le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ; - le code de justice administrative. Vu la décision de la présidente de la cour administrative d'appel de Paris du 15 octobre 2021 désignant M. Célérier, président de chambre, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative, pour statuer en qualité de juge des référés. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Célérier, juge des référés ; - et les observations de Me Gravé, représentant Mme A... et de Me Benhamouda, représentant l'université Paris 8. Considérant ce qui suit : 1.Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. (...) ". 2. Mme A..., candidate à l'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle des avocats (CRFPA) pour la session 2021 au sein de l'université Paris 8, a été déclarée ajournée à l'issue de la phase d'admission par une délibération du jury, révélée par son relevé de notes et résultats. Par la présente requête, Mme A... demande au juge des référés de suspendre l'exécution de cette délibération en tant qu'elle prononce son ajournement. Sur les conclusions aux fins de suspension : 3. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il en va ainsi, alors même que cette décision n'aurait un objet ou des répercussions que purement financiers et que, en cas d'annulation, ses effets pourraient être effacés par une réparation pécuniaire. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande de suspension d'une décision, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. 4. Au soutien de la condition d'urgence, Mme A... fait valoir qu'elle ne pourra pas se présenter de nouveau à l'examen d'entrée au CRFPA dès lors qu'elle le passait pour la troisième fois. Il résulte en effet des termes de l'article 52 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat que " Nul ne peut se présenter plus de trois fois à cet examen ". En outre, le prochain examen est prévu en septembre 2022. Par suite, la condition d'urgence est remplie. 5. Aux termes de l'article 53 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat : " Le jury de l'examen est composé ainsi qu'il suit : / (...) 3° Trois avocats désignés en commun par les bâtonniers des ordres d'avocats concernés (...) ". 6. En l'état de l'instruction, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 53 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, en ce que la preuve d'une désignation par les bâtonniers des ordres d'avocats concernés à l'issue d'une procédure préalable de concertation entre eux n'est pas apportée, ce qui a privé la requérante d'une garantie, est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée. 7. Il résulte de tout ce qui précède que les deux conditions prévues par l'article L. 521- 1 du code de justice administrative sont remplies. Il y a lieu, dans ces conditions, d'ordonner la suspension de l'exécution de délibération attaquée, en tant qu'elle prononce l'ajournement de la requérante. Sur les conclusions aux fins d'injonction : 8. La présente ordonnance, qui prononce la suspension de l'exécution de la décision attaquée, implique seulement mais nécessairement que l'université Paris 8 autorise Mme A... à s'inscrire au prochain examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats, jusqu'à qu'il soit statué au fond sur la légalité de la délibération attaquée. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par l'université Paris 8 au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'université Paris 8 une somme de 1 500 euros à verser à Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. ORDONNE : Article 1er : L'exécution de la délibération du 24 novembre 2021 du jury d'examen d'entrée au CRFPA en tant qu'elle a prononcé l'ajournement de Mme A... est suspendue. Article 2 : Il est enjoint à l'université Paris 8 d'autoriser Mme A... à s'inscrire au prochain examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de la délibération attaquée. Article 3 : L'université Paris 8 versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A... et à l'Université Paris 8. Fait à Paris, le 20 juin 2022. Le juge des référés, T. CELERIERLa greffière, K. PETIT La République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA02335
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2019 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a ordonné de se dessaisir de toutes les armes en sa possession, lui a interdit d'acquérir et de détenir des armes et a retiré la validation de son permis de chasser, ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux du 25 juillet 2019. Par un jugement n° 1902200 du 11 mars 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 avril et 31 août 2021, M. A..., représenté par Me Meyrand, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 11 mars 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2019 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a ordonné de se dessaisir de toutes les armes en sa possession, lui a interdit d'acquérir et de détenir des armes et a retiré la validation de son permis de chasser ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de lui restituer ses armes et munitions et de procéder à sa radiation du fichier national automatisé nominatif des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision méconnaît l'article 312-3 du code de la sécurité dès lors que les faits de violences, de vol et de cambriolages commis les 7 juillet et 2 et 3 août 1998, qui fondent la décision, ne sont pas mentionnés au bulletin n° 2 de son casier judiciaire ; - pour les mêmes raisons, elle méconnaît l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure ; - les faits en cause, même si leur gravité est incontestable, ont été commis il y a vingt ans et il est irréprochable depuis, rien ne laissant craindre une utilisation dangereuse de son arme. - il chasse depuis 1985 et a déclaré être en possession d'armes en 2008 et en 2015 ; - il ne souffre d'aucun trouble de comportement comme en atteste le certificat médical qu'il produit. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 avril 2022, le préfet de la Charente-Maritime conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par ordonnance du 12 avril 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 mai 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité intérieure ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme D... F..., - et les conclusions de Mme C... E.... Considérant ce qui suit : 1. Le 13 septembre 2018, M. A... a déclaré aux services de la préfecture de Charente-Maritime détenir un fusil de chasse de marque Renato Baldi. Après avoir diligenté une enquête administrative, le préfet de la Charente-Maritime, par arrêté du 16 juillet 2019, a ordonné à M. B... A... de se dessaisir de toutes les armes en sa possession dans un délai de trois mois, lui a interdit d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie et lui a retiré la validation de son permis de chasser. M. A... relève appel du jugement du 11 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la décision ordonnant à M. A... de se dessaisir de ses armes : 2. Aux termes de l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure : " Sans préjudice des dispositions de la sous-section 1, le représentant de l'État dans le département peut, pour des raisons d'ordre public ou de sécurité des personnes, ordonner à tout détenteur d'une arme, de munitions et de leurs éléments de toute catégorie de s'en dessaisir. / Le dessaisissement consiste soit à vendre l'arme les munitions et leurs éléments à une personne titulaire de l'autorisation, mentionnée à l'article L. 2332-1 du code de la défense, ou à un tiers remplissant les conditions légales d'acquisition et de détention, soit à la remettre à l'État. Un décret en Conseil d'État détermine les modalités du dessaisissement. / Sauf urgence, la procédure est contradictoire. Le représentant de l'État dans le département fixe le délai au terme duquel le détenteur doit s'être dessaisi de son arme, de ses munitions et de leurs éléments. (...) ". Aux termes de l'article R. 312-67 du même code : " Le préfet ordonne la remise ou le dessaisissement de l'arme ou de ses éléments dans les conditions prévues aux articles L. 312-7 ou L. 312-11 lorsque : / (...) 2° Le demandeur ou le déclarant a été condamné pour l'une des infractions mentionnées au 1° de l'article L. 312-3 figurant au bulletin n° 2 de son casier judiciaire ou dans un document équivalent pour les ressortissants d'un État membre de l'Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ; / 3° Il résulte de l'enquête diligentée par le préfet que le comportement du demandeur ou du déclarant est incompatible avec la détention d'une arme ; cette enquête peut donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ; / 4° Le certificat médical prévu au premier alinéa de l'article L. 312-6 établit que l'état de santé du demandeur ou du déclarant est incompatible avec la détention d'une arme ". 3. L'arrêté contesté est fondé sur la circonstance que l'enquête administrative a fait apparaître que M. A... " s'est signalé par des vols et cambriolages les 7 juillet, 2 et 3 août 1998 et des faits de violences envers sa concubine ", et que " ce comportement laisse craindre une utilisation dangereuse pour lui-même ou pour autrui, des armes qu'il détient et s'avère donc incompatible avec la détention de celles-ci ". Toutefois, par courrier du 27 juillet 2021 adressé au conseil du requérant, le vice-procureur de la République de Saintes a confirmé que le bulletin n° 1 du casier judiciaire de l'intéressé ne comportait aucune mention. En l'absence de preuve de la matérialité des faits qui lui sont reprochés, et qui fondent l'arrêté contesté, M. A... est fondé à soutenir que la décision litigieuse lui ordonnant le dessaisissement de ses armes doit être annulée. Sur la décision portant interdiction d'acquérir ou de détenir des armes : 4. Aux termes de l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Sont interdites d'acquisition et de détention d'armes, de munitions et de leurs éléments des catégories A, B et C : / 1° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes : (...) violences volontaires prévues aux articles 222-7 et suivants dudit code ". Aux termes de l'article L. 312-3-1 du même code : " L'autorité administrative peut interdire l'acquisition et la détention des armes, munitions et leurs éléments des catégories A, B et C aux personnes dont le comportement laisse craindre une utilisation dangereuse pour elles-mêmes ou pour autrui ". 5. Pour les motifs énoncés au point 3, le requérant est fondé à soutenir que la décision litigieuse doit être annulée. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 11 mars 2021 et l'arrêté du 16 juillet 2019 sont annulés. Article 2 : L'État versera à M. A... la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de la Charente-Maritime. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient : M. Éric Rey-Bèthbéder, président, Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. La rapporteure, Frédérique F... Le président Éric Rey-Bèthbéder La greffière, Angélique Bonkoungou La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 21BX01613
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Le syndicat mixte départemental de transport et de traitement des ordures ménagères de la Corrèze (SYTTOM 19) a demandé au tribunal administratif de Limoges de condamner solidairement la société Inova, venant aux droits de la société Inova France SAS, et la société Inova opérations, venant aux droits de la société Inova France opérations, à lui verser la somme de 2 644 053,57 euros hors taxe en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de l'inexécution par ces sociétés de leurs obligations résultant du marché d'exploitation de l'usine d'incinération d'ordures ménagères du 26 août 2002. Par un jugement n° 1600824 du 31 octobre 2019, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 20 décembre 2019, le 23 juillet 2020 et le 25 mai 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le SYTTOM 19, représenté par Me Soltner, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 31 octobre 2019 ; 2°) de condamner solidairement la société Inova, venant aux droits de la société Inova France SAS, et la société Inova opérations, venant aux droits de la société Inova France opérations, à lui verser la somme de 2 644 053,57 euros hors taxe en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de l'inexécution par ces sociétés de leurs obligations résultant du marché d'exploitation de l'usine d'incinération d'ordures ménagères du 26 août 2002 ; 3°) de mettre à la charge des sociétés Inova et Inova opérations la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'usine d'incinération concernée subit des désordres qui sont imputables aux conditions d'exploitation par la société Inova, ainsi que l'expert et le maître d'œuvre l'ont relevé ; ainsi, cette société lui a dissimulé les dysfonctionnements de l'installation ; en outre, elle a méconnu ses obligations contractuelles, des carences d'entretien et des désordres affectant plusieurs éléments de l'installation ayant été relevés ; sa responsabilité doit être engagée à hauteur de 90 % du fait des préjudices consécutifs aux désordres constatés sur le traitement des fumées, estimés à 2 466 955,51 euros par l'expert désigné par le tribunal, désordres résultant de manquements de la société Inova dans la maintenance et le suivi de l'échangeur et d'aléas dans la conception de la filière de traitement des fumées ; la responsabilité de la société Inova doit également être engagée du fait des préjudices relatifs à l'état général de l'usine résultant à hauteur d'un tiers des conditions d'exploitation par la société Inova ; - par ailleurs, ni la société Inova opérations ni la société Inova elle-même ne peuvent, contrairement à ce qu'elles prétendent, être regardées comme tierces au contrat d'exploitation mais ont été au contraire exploitantes successives de l'usine d'incinération ; - son préjudice est établi, en ce qu'il a dû supporter le coût et les conséquences des désordres objets du litige ; de plus, il est nécessaire de remplacer le filtre à manche, ainsi que préconisé par l'expert, cet équipement étant irréparable en raison de sa corrosion. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2020, la société par actions simplifiée Avime, représentée par Me Vacheron conclut au rejet de la requête et à ce que la partie perdante lui verse la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que, contrairement à ce que la société Inova a soutenu durant les opérations d'expertise, le défaut d'isolation en atelier du passage de l'arbre du ventilateur de tirage ne lui est pas imputable ; en tout état de cause, elle est liée à la société Inova par un contrat de droit privé, de sorte que le juge administratif n'est pas compétent pour connaître d'un appel en garantie dirigé à son encontre par la société Inova. Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mai 2020, la société par actions simplifiée SETEC Énergie environnement, représentée par Me Renaudie, conclut au rejet de la requête et à ce que le SYTTOM 19, à titre principal, et la société Inova, à titre subsidiaire, lui versent la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - seul le débat sur le désordre relatif au traitement des fumées est susceptible de la concerner ; - par ailleurs et comme l'a estimé le tribunal administratif, seul le juge judiciaire est compétent pour connaître d'un litige opposant une entreprise à ses sous-traitants ; - en outre, la demande du SYTTOM 19 est irrecevable en ce qu'elle tend à l'indemnisation du coût du remplacement du système de traitement des fumées, remplacement qui a été confié à la société CNIM ; - en tout état de cause, il ne ressort pas de l'expertise que sa responsabilité puisse être engagée ; - enfin, les sommes demandées par l'appelant excèdent largement les montants auxquels l'expert est parvenu. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2021, la société par actions simplifiée Inova et la société par actions simplifiée Inova opérations, représentées par Me Juffroy, concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du SYTTOM 19 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - elles n'ont commis aucune faute contractuelle dans le cadre de l'exécution du contrat d'exploitation conclu le 30 décembre 2002, ainsi que l'a jugé le tribunal, les désordres constatés étant la résultante des prestations effectuées dans le cadre du marché de travaux de mise en conformité avec la règlementation applicable, passé en 2006 ; - par ailleurs, aucune faute ne peut davantage leur être reprochée s'agissant du mauvais état général de l'usine, ce dernier trouvant son origine dans l'ancienneté des équipements concernés ; - en outre, aucune condamnation solidaire ne peut être prononcée à leur encontre, eu égard à l'absence de lien contractuel les unissant et compte tenu de ce que la société Inova est tierce par rapport au contrat d'exploitation de l'usine ; en tout état de cause, il n'est nullement établi qu'elles aient, en qualité d'exploitant successif de l'usine d'incinération indissociablement concouru à la totalité du préjudice dont le SYTTOM 19 réclame l'indemnisation. - à titre subsidiaire, et en ce qui concerne le montant du préjudice, elles ne peuvent être regardées comme responsables de plus de 10 % du préjudice indemnisable éventuellement retenu ; de plus, les différents postes de la demande du SYTTOM 19 sont dépourvus de caractère sérieux si bien que le montant de l'indemnisation sollicitée ne saurait être retenu. Par un mémoire, enregistré le 23 avril 2021, la société par actions simplifiée Liz France, venant aux droits de la société Ferbeck et Fumitherm, représentée par Me Sinai-Sinelnikoff, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la société Inova au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - à titre principal, comme l'a estimé le tribunal administratif, seul le juge judiciaire est compétent pour connaître d'un litige opposant une entreprise à ses sous-traitants ; - à titre subsidiaire, sa responsabilité ne saurait être engagée, la cause des désordres lui étant extérieure. Par ordonnance du 3 mai 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 28 mai 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des marchés publics ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur, - les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique, - et les observations de Me Soltner, représentant le syndicat mixte départemental de transport et de traitement des ordures ménagères de la Corrèze (SYTTOM 19), de Me Bernadou, représentant les sociétés Inova et Inova opérations, et de Me Roux, représentant la société de Tuyauterie chaudronnerie d'aujourd'hui. Considérant ce qui suit : 1. Par un acte d'engagement du 26 août 2002, le syndicat mixte départemental de transport et de traitement des ordures ménagères de la Corrèze (SYTTOM 19), a confié à la société Inova France SAS, devenue la société Inova, l'exploitation d'une usine d'incinération des ordures ménagères située sur le territoire de la commune de Saint-Pantaléon-de-Larche, pour une durée de dix ans à compter du 1er janvier 2003. Par un marché de travaux signé le 10 mars 2005, la société Inova France SAS a été chargée de la mise en conformité de l'installation à l'arrêté du 20 septembre 2002 relatif aux installations d'incinération et de co-incinération de déchets non dangereux et aux installations incinérant des déchets d'activités de soins à risques des deux usines de traitement thermique des déchets ménagers et assimilés, dont le lot 1 portait sur l'usine de Saint-Pantaléon-de-Larche. Le 18 décembre 2009, la société Inova France opérations, devenue Inova opérations, a été substituée à la société Inova France SAS dans l'exécution du marché de prestations de services du 26 août 2002. En novembre 2011, le SYTTOM 19 a relevé des désordres sur le traitement des fumées. Par une ordonnance du 8 février 2013, le président du tribunal administratif de Limoges a désigné un expert, qui a rendu son rapport le 19 octobre 2015. Par lettre du 4 février 2016, le SYTTOM 19 a sollicité de la société Inova le versement d'une somme de 2 644 053,57 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'inexécution des obligations résultant du marché d'exploitation de l'usine d'incinération des ordures ménagères. Par une ordonnance du 13 avril 2017, le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté la demande de provision du SYTTOM 19. 2. Le SYTTOM 19 relève appel du jugement du 31 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire des sociétés Inova France SAS, devenue société Inova, et Inova France opérations, devenue Inova opérations, à l'indemniser de son préjudice. 3. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Limoges, que l'usine présente, d'une part, des désordres localisés sur le traitement des fumées et, d'autre part, des désordres consistant en une détérioration d'alimentation des trois fours, une usure des casings des fours 1 et 2, des défauts sur les calorifugeages des éléments des fours et des chaudières ainsi qu'une corrosion du système de transport des mâchefers. Sur les conclusions du SYTTOM 19 tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il invoque : En ce qui concerne les désordres constatés sur le traitement des fumées : 4. Le SYTTOM 19 soutient que la responsabilité de la société Inova et celle de la société Inova opérations doivent être engagées solidairement du fait des fautes commises en leur qualité d'exploitants successifs de l'usine d'incinération des ordures ménagères de Saint-Pantaléon-de-Larche en exécution du contrat du 26 août 2002. 5. Toutefois, il résulte de l'instruction et notamment des constats opérés par l'expert dans son rapport, que l'ensemble des désordres constatés sur le traitement des fumées sont la conséquence de manquements dans le marché de mise en conformité à l'arrêté du 20 septembre 2002, dont les travaux ont été confiés à la société Inova France SAS. L'expert précise que ces désordres résultent d'un phénomène de condensation acide de fumées dû à une température trop basse de celles-ci en sortie de la batterie de préchauffage Flucorrex et ajoute que le mauvais rendement de l'échangeur, installé au cours de ce marché, n'en permet pas un réchauffage suffisant. Selon l'expert, la baisse de température dans le système de traitement des fumées est due à la condamnation de tubes de l'échangeur " à la suite d'un constat de fuite par la société Inova ". Contrairement à ce que soutient le syndicat mixte appelant, il ne résulte pas de l'instruction que ces travaux auraient été réalisés par la société Inova France ou la société Inova France opérations en leur qualité d'exploitant. Dès lors et ainsi que l'a estimé le tribunal, les désordres présentés par le système de traitement des fumées sont la conséquence de manquements dans l'exécution du marché de travaux du 10 mars 2005 et non, comme le soutient le SYTTOM 19, de fautes commises par les sociétés intimées en tant qu'exploitantes de l'usine. En ce qui concerne les désordres relatifs à l'état général de l'usine : 6. Le SYTTOM 19 reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de ce que la responsabilité solidaire des sociétés Inova et Inova opérations, en leurs qualités d'anciens exploitants successifs de l'usine, doit être engagée du fait du mauvais état général de l'usine, lui-même causé partiellement par les conditions d'exploitation et notamment par une maintenance insuffisante de l'usine. Il n'apporte aucun élément de droit ou de fait nouveau, ni aucune pièce nouvelle à l'appui de ce moyen auquel le tribunal a suffisamment et pertinemment répondu. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges. 7. Il résulte de tout ce qui précède que le SYTTOM 19 n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Sur les frais de l'instance : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par le SYTTOM 19 sur ce fondement soit mise à la charge des sociétés Inova et Inova opérations, qui ne sont pas les parties perdantes dans cette instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions, présentées à ce titre, par la société Inova, venant aux droits de la société Inova France SAS, par la société Inova opérations venant aux droits de la société Inova France opérations, par la société Avime, par la société Liz France, venant aux droits de la société Ferbeck et Fumitherm, et par la société SETEC Énergie environnement, venant aux droits de la société Cadet. DÉCIDE : Article 1er : La requête du SYTTOM 19 est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la société Inova, venant aux droits de la société Inova France SAS, de la société Inova opérations venant aux droits de la société Inova France opérations, de la société Avime, par la société Liz France, venant aux droits de la société Ferbeck et Fumitherm, et de la société SETEC Énergie environnement, venant aux droits de la société Cadet, relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat mixte départemental de transport et de traitement des ordures ménagères de la Corrèze, et aux sociétés par actions simplifiées Inova France, Inova opérations, Avime, Liz France, à SETEC Énergie environnement, à la société SEMECA et à la société de Tuyauterie chaudronnerie d'aujourd'hui. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient : M. Éric Rey-Bèthbéder, président, Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La présidente-assesseure, Frédérique Munoz-PauzièsLe président-rapporteur, Éric Rey-BèthbéderLa greffière, Angélique Bonkoungou La République mande et ordonne au Préfet de la Corrèze en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 19BX04981
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. J... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, par deux requêtes distinctes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 18 juin 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé le renouvellement d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination et d'autre part, d'annuler la décision du 5 août 2019 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial présentée en faveur de son épouse. Par un jugement n° 1904045-1905329 du 15 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a fait droit à ses demandes. Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2020, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse ; 2°) de rejeter les demandes portées par M. A... devant le tribunal administratif de Toulouse. Il soutient que : - les soins nécessaires à l'état de santé de M. A... sont disponibles dans son pays d'origine ; - ne disposant pas d'un droit de séjour en France, sa demande de regroupement familial ne peut qu'être rejetée. Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 et 29 octobre 2020 et le 19 novembre 2020, M. A..., représenté par Me Rivière, demande à la cour : - de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne ; - d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois ; - de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la requête est signée d'une personne incompétente et est irrecevable ; - les moyens de la requête sont infondés. Par une seconde requête, enregistrée le 3 juillet 2020, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 15 juin 2020. Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 octobre et 19 novembre 2020, M. A..., représenté par Me Rivière, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de l'État au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un arrêt n° 20BX02193-20BX02195 du 18 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la requête n° 20BX02193 du préfet de la Haute-Garonne et prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête n° 20BX02195. Par une décision n° 449917 du 30 décembre 2021, le Conseil d'État a annulé l'arrêt du 18 décembre 2020 et renvoyé l'affaire devant la cour. Procédure devant la cour après cassation : Par un mémoire, enregistré le 21 février 2022, le préfet de la Haute-Garonne conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens. Par une ordonnance du 28 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 avril 2022. Par un mémoire, enregistré le 15 avril 2022, M. A..., représenté par Me Rivière, demande à la cour : - de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne ; - d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois ; - de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la requête d'appel est irrecevable, Mme C... n'ayant pas reçu délégation de signature ; - le traitement de son affection n'est pas disponible au Bangladesh ; - les conditions climatiques et atmosphériques au Bangladesh rendent illusoire tout traitement de son asthme sévère ; - l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation professionnelle ; - la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. M. A... a produit une note en délibéré, enregistrée le 19 mai 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme G... I..., - les conclusions de Mme D... H..., - et les observations de Me Rivière, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. J... A..., de nationalité bangladaise, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, en 2011, et a sollicité son admission au bénéfice de l'asile le 12 janvier 2012. Cette demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 15 mars 2012, confirmée le 29 mai 2013 par la Cour nationale du droit d'asile. Le 8 septembre 2015, il a demandé la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, et a bénéficié d'un tel titre jusqu'au 21 septembre 2017. Le 27 juillet 2017, il a déposé une demande de renouvellement de son titre de séjour, mais, par arrêté du 18 juin 2019, le préfet a rejeté cette demande, a fait obligation à M. A... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. 2. Par ailleurs, le 30 août 2018, M. A... a demandé le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse de nationalité bangladaise. Par décision du 5 août 2019, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté cette demande, au motif que, du fait de l'arrêté du 18 juin 2019 lui refusant le renouvellement de son titre de séjour, il ne se trouvait plus en situation régulière sur le territoire français. 3. M. A... a saisi le tribunal administratif de Toulouse de demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 juin 2019 et de la décision du 5 août 2019. Par un jugement du 15 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a fait droit à ses demandes, et, par un arrêt du 18 décembre 2020, la présente cour a confirmé ce jugement. Toutefois, par une décision n° 449917 du 30 décembre 2021, le Conseil d'État a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour. Sur la recevabilité de la requête d'appel : 4. Par arrêté du 2 avril 2020, publié au recueil des actes administratifs spécial du même jour, le préfet de la Haute-Garonne a donné délégation à Mme F... C..., adjointe au chef du bureau de l'éloignement et du contentieux des étrangers, à l'effet de signer " l'ensemble des pièces, mémoires en défense et requêtes d'appel, relatives aux contentieux de toutes décisions prises en matière de droit des étrangers, devant les juridictions administratives et judiciaires ". Le moyen tiré de ce que la requête du préfet de la Haute-Garonne serait signée d'une autorité incompétente doit être écarté. Sur l'arrêté du 18 juin 2019 : En ce qui concerne le moyen retenu par les premiers juges : 5. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". 6. L'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 1er octobre 2017 mentionne que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que l'état de santé de l'intéressé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. 7. M. A..., qui souffre d'une pathologie respiratoire chronique associée à un asthme allergique sévère, fait valoir qu'il est traité par Symbicort 400, Montelukast, Azélastine et Salbutamol, et que ces médicaments ne sont pas disponibles au Bangladesh. Toutefois, il n'établit ni même n'allègue qu'il ne pourrait y bénéficier d'un traitement équivalent. Il produit le certificat du 1er août 2017 d'un médecin généraliste de " La Case de Santé " à Toulouse, qui affirme que " la qualité des services de soins au Bangladesh n'est pas comparable aux standards européens " et se prévaut des chiffres de la mortalité au Bangladesh. Il produit également le certificat d'un membre de l'association " Médecins du monde ", du 25 juillet 2019, qui affirme que l'appareil respiratoire qu'il utilise la nuit ne peut fonctionner correctement au Bangladesh, en raison de la chaleur et des fréquentes coupures d'électricité nocturnes. Toutefois, ces éléments, dont au demeurant aucun n'émane des médecins, généralistes et spécialistes, chargés du suivi de l'intéressé, ne sont pas de nature à démontrer qu'il ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Bangladesh. De même, l'appelant n'établit pas l'impossibilité d'entretenir son appareil respiratoire au Bangladesh. S'il se prévaut également de la pollution de l'air au Bangladesh, facteur aggravant de son asthme, cet élément n'est pas de ceux dont l'administration doit faire application en vertu du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu, pour annuler l'arrêté du 18 juin 2019 et, par voie de conséquence, la décision du 5 août 2019, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 8. Toutefois, il appartient à la cour, saisie du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensemble des moyens présentés par M. A... devant le tribunal administratif de Toulouse. 9. Par arrêté du 10 novembre 2018, régulièrement publié au recueil des actes administratifs, le préfet de la Haute-Garonne a donné délégation à Mme E... B..., directrice des migrations et de l'intégration, à l'effet de signer les décisions de refus d'admission au séjour et les mesures d'éloignement. Le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait signé d'une autorité incompétente doit être écarté. En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour : 10. Il résulte des termes de la décision contestée que le préfet ne s'est pas cru lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. 11. M. A... se prévaut d'un contrat à durée indéterminée à temps plein en qualité de cuisinier serveur depuis le 3 avril 2018. Toutefois, il n'est pas isolé dans son pays d'origine, où vit son épouse. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté. En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination : 12. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté. 13. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 7, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait contraire à l'article 3-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, M. A... ne pouvant bénéficier au Bangladesh d'un traitement adapté à son état de santé, doit être écarté. 14. Le présent arrêt statut sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 15 juin 2020, et les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution doivent être rejetées. 15. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 18 juin 2019 et la décision du 5 août 2019. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions de M. A... à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 15 juin 2020 est annulé. Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du préfet de la Haute-Garonne tendant au sursis à exécution du jugement du 15 juin 2020. Article 3 : Les demandes portées par M. A... devant le tribunal administratif de Toulouse, ainsi que ses conclusions reconventionnelles, sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. J... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient : M. Éric Rey-Bèthbéder, président, Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La rapporteure, Frédérique I...Le président Éric Rey-Bèthbéder La greffière, Angélique Bonkoungou La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 21BX04760
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 250 732,94 euros, assortie des intérêts au taux légal, avec capitalisation annuelle des intérêts, en réparation du préjudice que lui a causé la carence fautive du ministre de la justice. Par un jugement n° 1903660/5-2 du 3 février 2021, le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à lui verser la somme de 3 661,67 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2018 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 17 septembre 2019 puis à chaque échéance annuelle, a mis à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 31 mars et 17 novembre 2021 et 17 janvier 2022, M. B..., représenté par Me Dokhan, demande à la Cour : 1°) de réformer le jugement n° 1903660/5-2 du 3 février 2021 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande indemnitaire ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme totale de 247 071,27 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2018 et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation du préjudice que lui a causé la carence fautive du ministre de la justice ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne ressort pas de sa motivation que les premiers juges ont examiné l'ensemble des mémoires présentés par les parties et les 725 pièces qu'il a produites ; - les premiers juges n'ont pas omis de répondre à la fin de non-recevoir tirée de l'absence de caractère décisoire de la lettre du 21 décembre 2018 dès lors que le ministre n'a pas opposé cette fin de non -recevoir ; - sa demande de première instance n'est pas tardive ; - il ressort de l'article D. 311-1 du code de la sécurité sociale que les personnes exerçant les activités énumérées au 21° de l'article L. 311-3 de ce code sont des collaborateurs occasionnels du service public par détermination de la loi sans qu'il soit besoin d'apprécier le caractère occasionnel des missions qu'ils accomplissent en appliquant un critère jurisprudentiel ; en tout état de cause, les missions des collaborateurs occasionnels du service public sont par nature occasionnelles ; - les critères retenus par le tribunal pour qualifier d'occasionnelle l'activité d'expert devant les tribunaux ne reposent sur aucun fondement légal ; la circulaire du 21 juillet 2000 relative à la mise en œuvre des dispositions relatives au rattachement au régime général de la sécurité sociale des collaborateurs occasionnels du service public qui les mentionne est dépourvue de toute valeur juridique ; - ces critères jurisprudentiels sont dépourvus d'objectivité et sont difficiles à mettre en œuvre ; la durée des missions n'est pas prévisible et ces missions génèrent des revenus d'un montant très variable ; en outre, le montant maximal des revenus générés par les missions d'expertise judiciaire à partir duquel un expert devant les tribunaux cesse de relever de la catégorie des collaborateurs occasionnels du service public n'est pas fixé ; - ces critères portent atteinte au principe constitutionnel d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et, par suite, au principe de sécurité juridique ; - ils ne sont pas appliqués par le ministre de la justice qui, depuis le 1er janvier 2016, s'acquitte, sur le fondement des articles D. 311-2 et suivants du code de la sécurité sociale, des cotisations sociales afférentes aux missions accomplies par les collaborateurs occasionnels du service public quel que soit le nombre de missions, leur durée ou le montant des rémunérations ; or, les dispositions de ces articles sont parfaitement identiques à celles du décret n° 2000-35 du 17 janvier 2000 sous l'empire desquelles ses demandes doivent être appréciées ; - les montants retenus par les premiers juges compris entre 45 109 euros et 188 364 euros ne constituent pas des revenus ou bénéfices nets mais correspondent aux chiffres d'affaires annuels générés par les missions accomplies entre 2004 et 2015 desquels il convient de déduire les charges sociales salariales et patronales qui s'élèvent à un total de 247 071,27 euros ; dans ces conditions, sa rémunération annuelle avant imposition est de 94 114 euros ; il s'ensuit que c'est à tort que cette rémunération a été qualifiée de substantielle et une telle qualification échappe au demeurant au juge administratif ; - en outre, son niveau de revenus ne peut pas être évalué rétrospectivement à partir d'une moyenne calculée sur les douze années en cause car ce raisonnement a pour effet de le priver du bénéfice des cotisations sociales dues par l'Etat au seul motif que ce dernier ne les aurait pas réglées au fur et à mesure au titre de chacune des missions accomplies sur les douze années concernées ; - il a accompli ses missions d'expert devant les tribunaux en qualité de collaborateur occasionnel du service public au sens du 21° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale en fonction des besoins du service public de la justice pendant la période de 2004 à 2015 ; ses interventions ont été occasionnelles par nature et par détermination de la loi ; - la responsabilité pour faute de l'Etat est engagée en raison de la carence fautive du ministère de la justice qui n'a pas versé de cotisations sociales auprès des caisses de retraite du régime de base et du régime complémentaire pendant la période en cause en méconnaissance des dispositions du décret n° 2000-35 du 17 janvier 2000 ; - en outre, il doit également être indemnisé des frais d'avocat exposés pour la défense de ses intérêts qui s'élèvent à 3 600 euros ainsi que des frais exposés auprès du cabinet MetC... d'un montant de 960 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 9 décembre 2021, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande à la Cour d'annuler le jugement du 3 février 2021 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il l'a condamné à verser à M. B... la somme de 3 661,67 euros. Il soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de viser et de statuer sur la fin de non-recevoir tirée de l'absence de caractère décisoire de la lettre du 21 décembre 2018 qui n'a pas pour objet de rejeter sa demande indemnitaire ; - la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Paris est irrecevable du fait de l'absence de caractère décisoire de la lettre du 21 décembre 2018 ; elle est également tardive ; - il ressort notamment de la jurisprudence de la Cour d'appel de Paris que pour présenter un caractère occasionnel au sens des dispositions de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, l'activité en cause doit être exercée de façon discontinue, ponctuelle, irrégulière ou accessoire ; or, eu égard au nombre de missions exercées et aux revenus perçus chaque année, l'activité d'expert devant les tribunaux de M. B... présentait, au cours de la période 2004 à 2015, un caractère régulier, sans présenter de caractère accessoire puisque l'intéressé n'exerçait pas d'autre activité à titre principal ; dans ces conditions, l'activité d'expertise judiciaire de M. B..., qui doit être regardée comme régulière, ne peut pas être qualifiée de collaboration occasionnelle au service public ; il s'ensuit qu'en ne procédant pas à l'affiliation de M. B... au régime général de la sécurité sociale et au régime complémentaire obligatoire de l'Ircantec, l'Etat n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ; - en tout état de cause, les pièces versées au dossier par le requérant, notamment le tableau établi par le cabinet d'expertise comptable, ne permettent pas de déterminer le montant exact de l'indemnité qui lui serait due au regard de l'assiette établie ; aucun lien ne peut être établi entre l'indemnité sollicitée et les sommes versées par le ministère de la justice dans le cadre de son activité d'expert judiciaire susceptible d'être assujettie aux cotisations sociales ; - le tribunal ayant fait droit à la demande de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, c'est à bon droit que sa demande tendant au remboursement des frais d'avocat exposés pour la défense de ses intérêts qui s'élèvent à 3 600 euros et des frais exposés auprès du cabinet MetC... d'un montant de 960 euros a été rejetée. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de la sécurité sociale ; - le décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 ; - le décret n° 2000-35 du 17 janvier 2000 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme D..., - les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique, - et les observations de Me Dokhan, avocat de M. B.... Une note en délibéré a été présentée pour M. B... le 16 mai 2022. Considérant ce qui suit : 1. M. B... a accompli en qualité d'expert judiciaire plusieurs missions confiées par les juridictions du ressort de la Cour d'appel de Douai ainsi que par les juridictions administratives entre 2002 et 2015. Par un courrier du 10 septembre 2018, reçu le 17 septembre 2018, il a sollicité de la ministre de la justice le versement d'une indemnité de 250 732,94 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en sa qualité de collaborateur occasionnel du service public du fait de l'absence de versement par l'Etat des cotisations sociales afférentes aux rémunérations perçues dans le cadre des missions d'expertise. Cette demande a été implicitement rejetée. Par un jugement du 3 février 2021, le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à lui verser la somme de 3 661,67 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2018 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 17 septembre 2019 et a rejeté le surplus de sa demande. M. B... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande indemnitaire. Par la voie de l'appel incident, le ministre de la justice demande à la Cour d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à M. B... la somme de 3 661,67 euros. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. (...) " 3. Il ressort du dossier de première instance transmis par le Tribunal administratif de Paris à la Cour que dans sa demande introductive d'instance, M. B... a sollicité l'annulation de la décision de la ministre de la justice du 21 décembre 2018 et que dans son mémoire en défense enregistré au greffe du tribunal le 6 mars 2020, la ministre de la justice a opposé une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de ces conclusions en l'absence de caractère décisoire du courrier du 21 décembre 2018. Le tribunal, d'une part, n'a pas visé cette fin de non-recevoir et, d'autre part, n'y a pas répondu. Dans ces conditions, les premiers juges ont entaché d'irrégularité le jugement attaqué. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen relatif à la régularité du jugement attaqué soulevé, le ministre de la justice est fondé à en demander l'annulation. 4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. B... présentée devant le Tribunal administratif de Paris. Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 21 décembre 2018 : 5. Il ressort des pièces du dossier, comme il a déjà été dit, que par un courrier du 10 septembre 2018, reçu le 17 septembre 2018, M. B... a présenté à la ministre de la justice une demande tendant au versement d'une indemnité de 250 732,94 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en sa qualité de collaborateur occasionnel du service public du fait de l'absence de versement par l'Etat des cotisations sociales afférentes aux rémunérations perçues dans le cadre des missions d'expertise. Par un courrier en date du 21 décembre 2018, la ministre de la justice, après avoir rappelé les termes de la demande de M. B..., l'a informé que sa demande était en cours d'instruction. Eu égard à ses termes, ce courrier ne présente pas de caractère décisoire et ne constitue pas un acte faisant grief. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la ministre de la justice tirée de ce que les conclusions à fin d'annulation de la décision du 21 décembre 2018 sont dirigées contre un acte insusceptible de recours doit être en tout état de cause accueillie. 6. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 21 décembre 2018 ne peuvent qu'être rejetées. Sur les conclusions indemnitaires : Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la justice : 7. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa version en vigueur à la date d'introduction de la demande devant le tribunal : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ". L'article R. 421-2 du même code dispose que : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Toutefois, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient avant l'expiration de cette période, elle fait à nouveau courir le délai de recours. / La date du dépôt de la demande à l'administration, constatée par tous moyens, doit être établie à l'appui de la requête ". 8. Il résulte de l'instruction que la demande indemnitaire présentée par M. B..., qui porte sur les missions qui lui ont été confiées en qualité d'expert judiciaire entre 2002 et 2015 par les juridictions judiciaires du ressort de la Cour d'appel de Douai et par les juridictions administratives, a été reçue par l'administration le 17 septembre 2018. Du silence gardé par la ministre de la justice pendant deux mois sur cette demande est née le 17 novembre 2018 une décision implicite de rejet contre laquelle le délai de recours expirait en principe le 18 janvier 2019. Toutefois, par un courrier du 21 décembre 2018, intervenu alors que le délai de recours contre la décision implicite n'était pas encore expiré, la ministre a indiqué à M. B... que sa demande était " actuellement en cours d'instruction " et que ses services " ne manqueront pas de revenir vers vous afin de vous communiquer des éléments de réponse ". Ce courrier a pu légitimement induire en erreur M. B... sur les conditions de la survenance d'une décision sur sa demande. Dans ces conditions, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la justice tiré de ce que les conclusions indemnitaires enregistrée le 21 février 2019 au greffe du tribunal sont tardives doit être écartée. Sur la responsabilité de l'Etat : 9. D'une part, l'article L. 611-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur du 9 décembre 2005 au 1er janvier 2017, dispose que : " Le régime social des indépendants couvre : / 1° Au titre de l'assurance maladie et maternité les personnes mentionnées à l'article L. 613-1 ; / 2° Au titre de l'assurance vieillesse, de l'invalidité-décès et de l'assurance vieillesse complémentaire obligatoire les personnes appartenant aux groupes des professions artisanales et des professions industrielles et commerciales mentionnées à l'article L. 621-3 ". En application de l'article L. 613-1 de ce code, dans sa version applicable pour la période en cause, les travailleurs membres du groupe des professions libérales sont " obligatoirement affiliés au régime d'assurance maladie et d'assurance maternité des travailleurs non-salariés des professions non agricoles ". L'article L. 621-3 du même code alors applicable dispose que : " Les groupes professionnels mentionnés à l'article L. 621-2 sont : / 1° Le groupe des professions artisanales ; / 2° Le groupe des professions industrielles et commerciales ; / 3° Le groupe des professions libérales ; / 4° Le groupe des professions agricoles. ". L'article L. 641-1 du même code alors applicable dispose que : " L'Organisation autonome d'assurance vieillesse des professions libérales comprend une caisse nationale et des sections professionnelles, dotées de la personnalité juridique et de l'autonomie financière. / La compétence territoriale des sections professionnelles est nationale ". Aux termes de l'article R. 641-1 du même code : " La Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales comprend dix sections professionnelles : (...) 11° La section professionnelle des (...) experts et conseils (...) et de toute profession libérale non rattachée à une autre section. ". Enfin, aux termes de l'article L. 622-5 du même code : " Les professions libérales groupent les personnes exerçant l'une des professions ci-après ou dont la dernière activité professionnelle a consisté dans l'exercice de l'une de ces professions : (...) 2) (...) expert devant les tribunaux (...) ". 10. D'autre part, aux termes de l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale : " Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat ". L'article L. 311-3 du même code, dans sa version applicable au litige, dispose que : " Sont notamment compris parmi les personnes auxquelles s'impose l'obligation prévue à l'article L. 311-2, même s'ils ne sont pas occupés dans l'établissement de l'employeur ou du chef d'entreprise, même s'ils possèdent tout ou partie de l'outillage nécessaire à leur travail et même s'ils sont rétribués en totalité ou en partie à l'aide de pourboires : (...) 21°) Les personnes qui exercent à titre occasionnel pour le compte de l'Etat (...) une activité dont la rémunération est fixée par des dispositions législatives ou réglementaires ou par décision de justice. Un décret précise les types d'activités et de rémunérations en cause. Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables, sur leur demande, dans des conditions fixées par décret, aux personnes exerçant à titre principal une des professions visées à l'article L. 621-3, lorsque les activités occasionnelles visées ci-dessus en sont le prolongement. (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 17 janvier 2000 portant rattachement de certaines activités au régime général, dans sa version en vigueur jusqu'au 1er janvier 2016 : " Pour l'application du 21° des dispositions de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, les activités mentionnées audit 21° sont celles effectuées par les personnes suivantes : 1° Les personnes mentionnées au 3° et au 6° de l'article R. 92 du code de procédure pénale ; / ) 2° Les experts désignés par le juge en application de l'article 264 du nouveau code de procédure civile (...) L'Etat (...) qui [fait] appel aux personnes mentionnées ci-dessus versent les cotisations de sécurité sociale, la contribution sociale généralisée et la contribution pour le remboursement de la dette sociale aux organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 du code de la sécurité sociale, sous réserve des dispositions de l'article 3 ci-dessous ". L'article R. 312-4 du code de la sécurité sociale, alors en vigueur, disposait que : " L'immatriculation au régime général s'effectue obligatoirement (...) à la diligence de l'employeur, dans le délai de huitaine qui suit l'embauchage de toute personne non encore immatriculée et remplissant les conditions prévues aux articles L. 311-2 et suivants ". 11. Enfin, aux termes de l'article 3 du décret du 23 décembre 1970 portant création d'un régime de retraites complémentaire des assurances sociales en faveur des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques : " Le régime complémentaire géré par l'I.R.C.A.N.T.E.C. s'applique à titre obligatoire : / a) Aux administrations, services et établissements publics de l'Etat (...) ". 12. Il résulte de ces dispositions que, jusqu'en 2015, les experts devant les tribunaux devaient, lorsqu'ils avaient la qualité de collaborateurs occasionnels du service public au sens de ces dispositions, être obligatoirement affiliés au régime général de la sécurité sociale au titre du 21° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, sauf s'ils renonçaient à cette affiliation et exerçaient leur droit d'option au rattachement au régime des travailleurs indépendants. Ces dispositions ne sauraient être interprétées, contrairement à ce que soutient M. B..., comme attribuant systématiquement aux experts devant les tribunaux la qualité de collaborateurs occasionnels du service public. En outre, le requérant ne peut pas utilement invoquer les dispositions de l'article D. 311-1 du code de la sécurité sociale qui fixent la liste des personnes qui contribuent de façon occasionnelle à l'exécution d'une mission de service public à caractère administratif au sens des dispositions du 21° de l'article L. 311-3 ainsi que celles de l'article D. 311-2 du même code dès lors que ces dispositions ne sont entrées en vigueur que le 1er janvier 2016, soit postérieurement à la période pour laquelle M. B... sollicite une indemnité. 13. Pour présenter un caractère occasionnel au sens des dispositions applicables au litige citées aux points 9 à 11, l'activité d'expert devant les tribunaux doit être exercée de manière accessoire à une activité principale ou si elle est exercée à titre exclusif, elle doit l'être de façon discontinue, ponctuelle et irrégulière. Si M. B... critique ces critères en soutenant qu'ils ne seraient pas objectifs, ni suffisamment précis et seraient difficiles à mettre en œuvre dès lors notamment que le nombre de missions confiées aux experts devant les tribunaux et les revenus procurés par ces missions sont variables et dépendent des besoins des tribunaux, il ne propose cependant aucun autre critère de nature à opérer une distinction entre les experts devant les tribunaux exerçant leurs activités en qualité de collaborateurs occasionnels du service public ou au titre d'une profession libérale. Enfin, il ne peut utilement soutenir que ces critères jurisprudentiels méconnaissent l'objectif d'accessibilité et intelligibilité de la loi et le principe de sécurité juridique. 14. Il résulte de l'instruction qu'entre 2002 et 2015, M. B... n'exerçait pas d'autre activité professionnelle que celle d'expert en bâtiment dans le cadre des missions d'expertise qui lui étaient confiées par les juridictions judiciaires du ressort de la Cour d'appel de Douai et par les juridictions administratives. Il ressort des nombreuses ordonnances de référé, de mise en état, de taxes, des jugements rendus pendant la période en cause et versés au dossier ainsi que du tableau récapitulatif établi par M. B..., qui n'est pas contesté sur ce point par le ministre de la justice, qu'au titre des années 2002 et 2003, M. B... n'a été désigné en tant qu'expert devant les tribunaux que quatre et dix-huit fois et que cette activité d'expertise lui a procuré des revenus annuels bruts de 2 782 euros et 15 185 euros. Dans ces conditions, eu égard tant au nombre de missions d'expertises réalisées que des revenus générés par celles-ci au cours de chacune de ces deux années, son activité d'expert judiciaire exercée à titre exclusif, comme il a été dit, présentait un caractère discontinu, ponctuel et irrégulier. Par suite, au titre de ces deux années, M. B... doit être regardé comme ayant la qualité de collaborateur occasionnel du service public et aurait dû, à ce titre, être affilié au régime général de la sécurité sociale ainsi qu'au régime complémentaire obligatoire de l'IRCANTEC. Il résulte des dispositions citées aux points 9 et 10 qu'il incombait à l'Etat, en sa qualité d'employeur, d'entreprendre les démarches nécessaires à l'affiliation de M. B... au régime général de la sécurité sociale et au régime complémentaire des agents non titulaires au titre des années 2002 et 2003. Or, le ministre de la justice n'a pas procédé à cette immatriculation ni versé les cotisations correspondantes. Dans ces conditions, l'Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de M. B.... 15. En revanche, il résulte de l'instruction qu'au cours des années 2004 à 2015, M. B... a, chaque année, régulièrement été désigné en qualité d'expert par les juridictions judiciaires et administratives. Il a ainsi effectué sur cette période un nombre de missions d'expertise annuel compris entre trente et quatre-vingt-quinze, lui procurant des revenus allant de 45 109 euros à 188 364 euros brut par an. Eu égard à la nature de l'appréciation qui est portée sur le caractère occasionnel de l'activité d'expert judiciaire de l'intéressé, il n'y pas lieu de déduire les charges sociales et patronales de ces revenus. Au vu du nombre de missions exercées annuellement et des revenus perçus chaque année, et alors que, comme il a déjà été dit, M. B... n'exerçait pas d'autre activité professionnelle à titre principal, son activité d'expert devant les tribunaux présentait, au cours de cette période, un caractère régulier. La circonstance que son activité est soumise aux besoins du service public de la justice n'est pas de nature à lui retirer son caractère régulier. Dans ces conditions, M. B... ne peut être regardé comme ayant eu, entre 2004 et 2015, la qualité de collaborateur occasionnel du service public au sens du 21° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale. Par suite, en ne l'affiliant pas durant cette période au régime général et au régime complémentaire obligatoire au cours de cette période, l'Etat n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité. Sur les préjudices : 16. En premier lieu, il ressort des points 13 et 14 que M. B... est seulement fondé à demander réparation du préjudice résultant de la carence fautive de l'Etat qui n'a pas versé les cotisations sociales dues au titre de ses missions d'expertise pour les seules années 2002 et 2003. Ce préjudice présente un caractère certain. Pour établir le montant de son préjudice, M. B... verse au dossier des tableaux dont il n'est pas contesté qu'ils ont été établis par le cabinet M et C..., lequel a procédé à une reconstitution du coût global du régime de base et des points IRCANTEC. En se bornant à soutenir que les montants retenus par ce cabinet ne sont pas justifiés sans apporter aucun élément chiffré, ni aucun autre élément sérieux de nature à les infirmer, le ministre de la justice n'est pas fondé à soutenir que le préjudice de M. B... n'est pas établi. Dans ces conditions, M. B... est fondé à solliciter une indemnité de 3 661,67 euros en réparation du préjudice subi. 17. En deuxième lieu, M. B... a droit au remboursement des frais qu'il a engagés pour le calcul du montant des cotisations patronales et salariales d'assurance vieillesse du régime de base et du régime complémentaire IRCANTEC réalisé par le cabinet M et C.... Il produit une facture du 5 février 2018 d'un montant de 960 euros. Dans ces conditions, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 960 euros au titre de ces frais. 18. En troisième lieu, les frais de justice, s'ils ont été exposés en conséquence directe d'une faute de l'administration, sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de l'illégalité fautive imputable à l'administration. Toutefois, lorsque l'intéressé a fait valoir devant le juge une demande fondée sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le préjudice est intégralement réparé par la décision que prend le juge sur ce fondement. Il n'en va autrement que dans le cas où le demandeur ne pouvait légalement bénéficier de ces dispositions. 19. M. B... sollicite une indemnité à hauteur de 3 600 euros au titre des frais d'avocat exposés pour la défense de ses intérêts. Toutefois, dès lors que l'intéressé présente, dans le cadre de la présente instance, des conclusions sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ce préjudice doit être regardé comme intégralement réparé par la décision prise dans le présent arrêt sur ce fondement. 20. Il résulte des points 16 à 19 que l'Etat est condamné à verser à M. B... la somme de 4 621,67 euros en réparation de ses préjudices. Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts : 21. M. B... a droit aux intérêts au taux légal de la somme qui lui est due à compter du 17 septembre 2018, date de la réception par les services du ministre de la justice de sa demande indemnitaire préalable. 22. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond. Si, à la date où elle est demandée, les intérêts sont dus depuis moins d'une année, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée par M. B... le 21 février 2019 au Tribunal administratif de Paris. Il y a ainsi lieu de capitaliser les intérêts au 17 septembre 2019, date à laquelle une année d'intérêts a été due, et à chaque échéance annuelle ultérieure. Sur les frais liés à l'instance : 23. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1903660/5-2 du 3 février 2021 du Tribunal administratif de Paris est annulé. Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. B... la somme de 4 621,67 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2018 et ces intérêts seront eux-mêmes capitalisés à compter du 17 septembre 2019 puis à chaque échéance annuelle. Article 3 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande de M. B... présentées devant le Tribunal administratif de Paris et de ses conclusions d'appel est rejeté. Article 5 : Le surplus des conclusions du ministre de la justice est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice. Délibéré après l'audience du 16 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Le Goff, président, - M. Ho Si Fat, président assesseur, - Mme Larsonnier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, V. D...Le président, R. LE GOFF La greffière, E. VERGNOL La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA01673
JADE/CETATEXT000045945071.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A..., agissant au nom de Mme D... A... sous tutelle, a demandé à la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 37 461,15 euros émis le 19 août 2014 par le département de Seine-et-Marne en vue de la récupération des ressources de sa mère, Mme D... A..., admise à l'aide sociale à l'hébergement pour personnes âgées, pour la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2013 ainsi que la mise en demeure de payer du 21 janvier 2015. Par une décision du 22 septembre 2016 notifiée le 12 décembre 2016, la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne a déclaré prescrite la créance du département de Seine-et-Marne au titre de la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement au sein du centre hospitalier de Fontainebleau pour la période antérieure au 15 juin 2010, a fixé la créance du département au titre de ces frais à la somme de 26 424 euros pour la période du 15 juin 2010 au 31 décembre 2013, a fixé la créance du département au titre du recours sur succession à la somme de 22 364,78 euros et a rejeté le surplus des demandes des parties. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée au greffe de la commission centrale d'aide sociale le 10 février 2017 puis au greffe de la Cour le 18 octobre 2021 sous le n° 21PA05408, transmise à la Cour en application de l'article 12 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle par un arrêt du 8 octobre 2021 de la Cour d'appel de Paris, et un mémoire enregistré le 24 janvier 2022, M. A..., agissant en qualité d'ayant droit de Mme A..., représenté par Me Rebiffé, demande à la Cour, dans le dernier état de ses conclusions : 1°) à titre principal, d'annuler la décision du 22 septembre 2016 notifiée le 12 décembre 2016 de la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne en tant qu'elle n'a pas entièrement fait droit à sa demande et, par voie de conséquence, de rejeter l'ensemble des conclusions du département de Seine-et-Marne présentées devant la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne ; 2°) à titre subsidiaire, d'annuler le titre exécutoire émis le 19 août 2014 par le département de Seine-et-Marne, l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 ; 3°) d'annuler l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 et, en tant que de besoin, la mise en demeure de payer du 21 janvier 2015 ; 4°) de mettre à la charge du département de Seine-et-Marne la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision de la commission départementale d'aide sociale est irrégulière : elle ne mentionne pas la composition de la commission et il n'est pas établi que le quorum ait été atteint ; en outre, elle n'est pas signée par le rapporteur et le greffier en méconnaissance de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles, des articles 454 et 456 du code de procédure civile et de l'article R. 741-3 du code de justice administrative ; par voie de conséquence, il n'est pas établi que les principes d'impartialité et d'équité énoncés notamment par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aient été respectés ; - elle est insuffisamment motivée ; - la commission départementale d'aide sociale a omis de répondre aux moyens tirés de ce que le paiement différentiel a été mis en place seulement à compter du 1er janvier 2014 et que, par suite, le caractère certain de la créance du département n'était pas établi, de ce que le département a procédé d'office au calcul de la somme due par Mme A... au titre de ses frais d'hébergement et de ce que le bordereau de titre de recettes n'a pas été produit malgré ses nombreuses demandes ; - sa demande présentée devant la commission départementale d'aide sociale est recevable ; - il n'a pas été destinataire du titre exécutoire émis le 19 août 2014, ce que ne conteste pas le département ; dans ces conditions, ce document qui n'existe pas juridiquement ne peut être invoqué par le département ; - les mentions des voies et délais de recours figurant sur l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 sont erronées et l'ont privé d'un degré de juridiction pour contester la régularité formelle de cet avis des sommes à payer ; - le caractère erroné de ces mentions l'a conduit à saisir à tort, d'une part, le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de Melun, qui s'est déclaré incompétent et l'a condamné à verser au département la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, d'autre part, le Tribunal administratif de Melun ; il a ainsi subi un préjudice ; - l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 est insuffisamment motivé en méconnaissance des dispositions de l'article 24 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, de la réponse ministérielle du 4 novembre 2002, de la circulaire du 21 mars 2011 et de l'instruction n° 11-022MO du 16 décembre 2011 ; - le département ne pouvait annuler sans méconnaître les premier et deuxième alinéas de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales la procédure de mise en recouvrement engagée le 24 janvier 2015 pour la remplacer par une autre procédure postérieurement à la saisine des juridictions judiciaire et administrative ; - l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 est irrégulier dès lors qu'il a été signé par une personne qui n'avait plus qualité pour représenter le conseil départemental depuis le 21 mars 2015, date des élections des conseillers départementaux ; le département a produit un faux document en versant au dossier le 27 mai 2016 l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 émis par M. C... ; - la créance du département est prescrite pour la période comprise entre le 1er février 2009 et le 19 mars 2010 ; - elle est également prescriptible pour la période antérieure au 15 juin 2010 dès lors que lorsqu'une dette est payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette et court ainsi contre chacune de ces dettes mensuelles à compter de leur échéance ; en outre, le titre exécutoire du 19 août 2014, qui n'a pas été régulièrement notifié, la mise en demeure du 21 janvier 2015 et l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015, qui n'ont pas été accompagnés de mesure conservatoire prise en application du code des procédure civiles d'exécution ou d'un acte d'exécution forcée, ne sauraient valoir interruption de prescription ; - la créance du département est dépourvue de caractère exigible, certain et liquide dès lors que ce n'est que le 1er janvier 2014 que le paiement différentiel a été mis en place et rendu obligatoire pour tous les établissements du département accueillant des personnes âgées dépendantes bénéficiaires de l'aide sociale et que le département n'a pas exigé de paiement pendant quatre ans ; celui-ci ne justifie pas des modalités de calcul du montant de sa créance et ne produit aucun justificatif ; le décompte qu'il a finalement produit est incompréhensible et ne correspond pas au montant total de la créance ; - le département ne peut pas réclamer à la fois le versement de la somme de 37 461,15 euros en vue de la récupération des ressources de Mme A... admise à l'aide sociale à l'hébergement pour personnes âgées et le remboursement des frais d'hébergement et d'entretien qui ont été réglés à l'établissement d'hébergement. Par un mémoire en défense enregistré au greffe de la commission centrale d'aide sociale le 11 mai 2017 puis au greffe de la Cour le 18 octobre 2021 et un mémoire enregistré le 17 février 2022, le département de Seine-et-Marne, représenté par Me Lefevre, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour par la voie de l'appel incident : 1°) d'annuler la décision du 22 septembre 2016 notifiée le 12 décembre 2016 de la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne en tant qu'elle a déclaré prescrite la créance du département pour la période antérieure au 15 juin 2010 et fixé le montant de sa créance à la somme de 26 424 euros ; 2°) de condamner M. A... à lui verser la somme de 37 461,15 euros correspondant à la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement au sein du centre hospitalier de Fontainebleau ; 3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux dépens. Il soutient que : - la requête est tardive ; - la commission départementale d'aide sociale n'est pas compétente pour statuer sur la régularité formelle du titre exécutoire du 19 août 2014 et de l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 ; - le moyen nouveau en appel tiré de ce que la première saisine du juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de Melun a suspendu la procédure, ce qui faisait obstacle à ce que le département de Seine-et-Marne puisse annuler et remplacer le premier titre exécutoire est irrecevable ; - les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés ; - sa créance n'est pas prescrite pour la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 15 juin 2010 ; à titre subsidiaire, seule la période comprise entre le 1er février 2009 et le 18 août 2009 peut éventuellement être regardée comme prescrite ; - la créance est certaine à compter du 23 janvier 2009 et elle est exigible à compter du 1er février 2009 et liquide. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de l'action sociale et des familles ; - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n° 2008-561 du 17 janvier 2008 ; - la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 ; - le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme E..., - les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique, - et les observations de Me Doulain, avocat du département de Seine-et-Marne. Considérant ce qui suit : 1. Mme D... A..., née le 8 novembre 1918 et décédée le 15 août 2015, a été hébergée au sein du centre hospitalier de Fontainebleau à partir du 14 décembre 2006. Elle a été admise à l'aide sociale pour personnes âgées pour la prise en charge de ses frais d'hébergement dans cet établissement à compter du 1er février 2009 par une décision du 15 janvier 2009 du président du conseil départemental de Seine-et-Marne, sous réserve " de la récupération de 90 % des ressources de l'intéressée, y compris des revenus des comptes de dépôts et livret et de 100 % de l'aide au logement et sous réserve de la participation mensuelle de l'obligé alimentaire à hauteur de 200 euros par mois à compter du 1er février 2009 ". Par un jugement du 13 décembre 2011, le Tribunal de grande instance de Fontainebleau a remplacé le régime de la curatelle aggravée mis en place pour protéger Mme A... à compter du 12 juin 2007 par le régime de la tutelle et a désigné comme tuteur son fils unique, M. B... A.... Le 19 août 2014, le département de Seine-et-Marne a émis à l'encontre de Mme A... un titre exécutoire d'un montant de 37 461,15 euros en vue de la récupération des ressources de l'intéressée pour la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2013. En l'absence de règlement, il lui a adressé une mise en demeure de payer en date du 21 janvier 2015, réceptionnée le 24 janvier 2015. Par un courrier du 15 avril 2015, reçu le 23 avril suivant, la paierie départementale de Seine-et-Marne a retiré la mise en demeure du 21 janvier 2015 et a adressé à Mme A... un nouvel avis des sommes à payer. 2. Le 23 mars 2015, M. A..., agissant au nom de Mme A..., a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation du titre exécutoire du 19 août 2014 et de la mise en demeure du 21 janvier 2015 ainsi qu'à la décharge de l'obligation de payer la somme de 37 461,15 euros. Par une nouvelle demande du 18 juin 2015, il a demandé au tribunal d'annuler l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 émis par la paierie départementale de Seine-et-Marne. Par des ordonnances des 22 avril et 3 juillet 2015, la présidente du Tribunal administratif de Melun a transmis à la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne les demandes de M. A.... Par ailleurs, lors de leur instruction par la commission départementale, le département de Seine-et-Marne a formé une demande en récupération sur la succession de Mme A..., qui est décédée le 15 août 2015. Par une décision du 22 septembre 2016 notifiée le 12 décembre 2016, la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne a, s'agissant des demandes relevant de la compétence du juge administratif en application de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle, rejeté les conclusions de M. A... tendant à l'annulation du titre exécutoire et de l'avis des sommes à payer émis les 19 août 2014 et 15 avril 2015 par la paierie départementale de Seine-et-Marne, déclaré prescrite pour la période antérieure au 15 juin 2010 la créance du département au titre de la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement au sein du centre hospitalier de Fontainebleau, fixé la créance du département à la somme de 26 424 euros au titre de la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement pour la période du 15 juin 2010 au 31 décembre 2013 et rejeté le surplus des demandes des parties. 3. M. A... a saisi la commission centrale d'aide sociale le 10 février 2017 d'un recours contre la décision du 22 septembre 2016 notifiée le 12 décembre 2016 de la commission départementale d'aide sociale. En application de l'article 12 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle, son recours a été transmis à la Cour d'appel de Paris, qui, par un arrêt du 8 octobre 2021, a, en ce qui concerne la partie du litige pour laquelle la juridiction administrative est compétente, soit le recours contre les actes de recouvrement des frais d'hébergement de Mme A..., considéré que le juge judiciaire n'était pas compétent pour connaître des conclusions de M. A... tendant à l'annulation du titre exécutoire du 19 août 2014 et de l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 en vue de recouvrer une part des ressources de Mme A... admise à l'aide sociale pour personnes âgées pour la prise en charge de ses frais d'hébergement au centre hospitalier de Fontainebleau, a disjoint l'instance concernant ces actes de recouvrement et ordonné la transmission à la Cour administrative d'appel de Paris du dossier de la procédure n° 21/08226, lequel a été enregistré le 18 octobre 2021 au greffe de la Cour. 4. La Cour est seulement saisie, par les conclusions de M. A..., des conclusions aux fins d'annulation de la décision du 22 septembre 2016 notifiée le 12 décembre 2016 de la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne en tant qu'elle a rejeté les conclusions de M. A... tendant à l'annulation du titre exécutoire et de l'avis des sommes à payer émis les 19 août 2014 et 15 avril 2015 par la paierie départementale de Seine-et-Marne, déclaré prescrite pour la période antérieure au 15 juin 2010 la créance du département au titre de la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement au sein du centre hospitalier de Fontainebleau, fixé la créance du département à la somme de 26 424 euros au titre de la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement et rejeté le surplus des demandes des parties. Par la voie de l'appel incident, la Cour est saisie par le département de Seine-et-Marne de conclusions qui tendent à la condamnation de M. A... à lui verser la somme de 37 461,15 euros correspondant à la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement au sein du centre hospitalier de Fontainebleau. Sur la fin de non-recevoir opposée par le département de Seine-et-Marne : 5. Aux termes de l'article R.134-10 du code de l'action sociale et des familles, dans sa version alors en vigueur : " Les recours sont introduits devant la commission centrale d'aide sociale ou la commission départementale d'aide sociale dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision (...) ". 6. Il résulte de l'instruction que le courrier notifiant à M. A... la décision du 22 septembre 2016 de la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne est daté du 12 décembre 2016. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que cette décision a été notifiée à M. A... au plus tôt à cette date. M. A... a saisi la commission centrale d'aide sociale le 9 février 2017, soit dans le délai de recours contentieux de deux mois prévu par les dispositions de l'article R. 134-10 du code de l'action sociale et des familles. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée par le département de Seine-et-Marne tirée de la tardiveté de la requête présentée par M. A... doit être écartée. Sur la régularité de la décision de la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne en tant qu'elle a rejeté les conclusions de M. A... tendant à l'annulation du titre exécutoire et de l'avis des sommes à payer émis les 19 août 2014 et 15 avril 2015 par la paierie départementale de Seine-et-Marne, déclaré prescrite la créance du département de Seine-et-Marne au titre de la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement pour la période antérieure au 15 juin 2010, fixé sa créance au titre de ces frais à la somme de 26 424 euros pour la période du 15 juin 2010 au 31 décembre 2013 et rejeté le surplus des demandes des parties : 7. Aux termes de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles, dans sa version en vigueur à la date de la décision de la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne : " La commission départementale est présidée par le président du tribunal de grande instance du chef-lieu ou le magistrat désigné par lui pour le remplacer. En cas d'égal partage des voix, le président a voix prépondérante. (...). Il n'a pas voix délibérative. Les fonctions de rapporteur sont assurées par le secrétaire de la commission. Il peut lui être adjoint un ou plusieurs rapporteurs. Le secrétaire et les rapporteurs sont nommés par le président de la commission parmi les personnes figurant sur une liste établie conjointement par le président du conseil départemental et le préfet. Ils ont voix délibérative sur les affaires qu'ils rapportent. Le secrétaire, les rapporteurs et les commissaires du Gouvernement sont choisis parmi les fonctionnaires ou magistrats en activité ou à la retraite ". 8. Il ressort de la lecture de la décision attaquée que celle-ci ne comporte pas de mentions précisant la composition de la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne et qu'elle est signée par le seul président de la commission. Or, les dispositions de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles ne permettent au président ni d'exercer les fonctions de rapporteur, ni de siéger seul. Dans ces conditions, la composition de la commission départementale d'aide sociale ayant rendu la décision attaquée était irrégulière. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens tirés de l'irrégularité de la décision attaquée, il y a lieu d'annuler cette décision en tant qu'elle a rejeté les conclusions aux fins d'annulation du titre exécutoire et de l'avis des sommes à payer émis les 19 août 2014 et 15 avril 2015 par la paierie départementale de Seine-et-Marne, déclaré prescrite la créance du département de Seine-et-Marne au titre de la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement pour la période antérieure au 15 juin 2010, fixé sa créance au titre de ces frais à la somme de 26 424 euros pour la période du 15 juin 2010 au 31 décembre 2013 et rejeté le surplus des demandes des parties. 9. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. A... en tant qu'elle tend à l'annulation du titre exécutoire émis le 19 août 2014 et de l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 ainsi qu'à la décharge de l'obligation de payer la somme de 37 461,15 euros. Sur la demande de M. A... : 10. L'annulation d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation par l'administration, l'extinction de la créance litigieuse, à la différence d'une annulation prononcée pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre. Il en résulte que, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions tendant à l'annulation d'un titre exécutoire, des conclusions à fin de décharge de la somme correspondant à la créance de l'administration, il incombe au juge administratif d'examiner prioritairement les moyens mettant en cause le bien-fondé du titre qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de la décharge. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens qui seraient de nature à justifier le prononcé de la décharge mais retient un moyen mettant en cause la régularité formelle du titre exécutoire, le juge n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler le titre. Statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande de décharge de la somme litigieuse. En ce qui concerne les conclusions à fin de décharge de l'obligation de payer : S'agissant de la prescription de la créance du département antérieure au 24 avril 2010 : 11. L'article 2224 du code civil issu de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription dispose que : " Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ". Aux termes de l'article 2235 du même code : " Elle ne court pas ou est suspendue contre les mineurs non émancipés et les majeurs en tutelle, sauf pour les actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, les actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts ". 12. Il résulte de l'instruction, comme il a déjà été dit, que le conseil départemental de Seine-et-Marne a, par une décision du 15 janvier 2009, admis Mme A... à l'aide sociale pour personnes âgées pour la prise en charge de ses frais d'hébergement dans le centre hospitalier de Fontainebleau à compter du 1er février 2009 sous réserve " de la récupération de 90 % des ressources de l'intéressée y compris des revenus des comptes de dépôts et livret et 100 % de l'aide au logement et sous réserve de la participation mensuelle de l'obligé alimentaire à hauteur de 200 euros par mois à compter du 1er février 2009 ". Le département n'est pas en mesure de justifier de la réception par Mme A... et M. A... de l'avis des sommes à payer du 4 septembre 2014 et de la relance du 17 octobre 2014 aux fins de récupération de 90 % des ressources de Mme A... au titre de sa participation à ses frais d'hébergement au centre hospitalier de Fontainebleau qui leur avaient été adressés par un envoi sous pli simple comme le prévoit l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et que M. A... conteste avoir reçus. En outre, la mise en demeure de payer du 21 janvier 2015 a été retirée le 17 avril 2015 par le département. Cependant, l'avis de réception du pli recommandé portant notification de l'avis des sommes à payer en date du 15 avril 2015 comporte la seule mention manuscrite de la date de présentation de ce pli, le 17 avril 2015. La date figurant sur le cachet de la poste apposé sur l'avis de réception lors de la remise du pli au destinataire au bureau de poste est le 23 avril 2015 et M. A... a signé l'accusé de réception. Dans ces conditions, la créance du département est prescrite pour la seule période courant du 1er février 2009 au 23 avril 2010 alors que la dette de M. A..., en sa qualité d'ayant droit de sa mère, reste exigible pour la période comprise entre le 24 avril 2010 et le 31 décembre 2013. S'agissant du bien-fondé de la créance du département pour la période du 24 avril 2010 au 31 décembre 2013 : 13. L'article L. 113-1 du code de l'action sociale et des familles dispose que : " Toute personne âgée de soixante-cinq ans privée de ressources suffisantes peut bénéficier, soit d'une aide à domicile, soit d'un accueil chez des particuliers ou dans un établissement. Les personnes âgées de plus de soixante ans peuvent obtenir les mêmes avantages lorsqu'elles sont reconnues inaptes au travail ". Aux termes de l'article L. 132-1 du même code : " Il est tenu compte, pour l'appréciation des ressources des postulants à l'aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. (...) ". Aux termes de l'article L. 132-3 du même code : " Les ressources de quelque nature qu'elles soient à l'exception des prestations familiales, dont sont bénéficiaires les personnes placées dans un établissement au titre de l'aide aux personnes âgées ou de l'aide aux personnes handicapées, sont affectées au remboursement de leurs frais d'hébergement et d'entretien dans la limite de 90 %. Toutefois les modalités de calcul de la somme mensuelle minimum laissée à la disposition du bénéficiaire de l'aide sociale sont déterminées par décret. La retraite du combattant et les pensions attachées aux distinctions honorifiques dont le bénéficiaire de l'aide sociale peut être titulaire s'ajoutent à cette somme ". 14. Aux termes de l'article R. 132-1 du même code : " Pour l'appréciation des ressources des postulants prévue à l'article L. 132-1, les biens non productifs de revenu, à l'exclusion de ceux constituant l'habitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative s'il s'agit d'immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s'il s'agit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux ". Aux termes de l'article R. 231-6 du même code : " La somme minimale laissée mensuellement à la disposition des personnes placées dans un établissement au titre de l'aide sociale aux personnes âgées, par application des dispositions des articles L. 132-3 et L. 132-4 est fixée, lorsque l'accueil comporte l'entretien, à un centième du montant annuel des prestations minimales de vieillesse, arrondi à l'euro le plus proche. Dans le cas contraire, l'arrêté fixant le prix de journée de l'établissement détermine la somme au-delà de laquelle est opéré le prélèvement de 90 % prévu audit article L. 132-3. Cette somme ne peut être inférieure au montant des prestations minimales de vieillesse ". 15. Il résulte de ces dispositions que les personnes âgées hébergées en établissement au titre de l'aide sociale doivent pouvoir disposer librement de 10 % de leurs ressources et que la somme ainsi laissée à leur disposition ne peut être inférieure à 1 % du minimum vieillesse. Ces dispositions doivent être interprétées comme devant permettre à ces personnes de subvenir aux dépenses qui sont mises à leur charge par la loi et sont exclusives de tout choix de gestion, telles que les sommes dont elles seraient redevables au titre de l'impôt sur le revenu. Il suit de là que la contribution de 90 % prévue à l'article L. 132-3 du code de l'action sociale et des familles doit être appliquée sur une assiette de ressources diminuée de ces dépenses. En outre, eu égard aux exigences résultant du onzième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 en vertu duquel la Nation garantit à tous la protection de la santé, les dispositions du code de l'action sociale et des familles doivent être interprétées comme imposant également de déduire de cette assiette soit la part des tarifs de sécurité sociale restant à la charge des assurés sociaux du fait des dispositions législatives et réglementaires et le forfait journalier prévu par l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale, soit les cotisations d'assurance maladie complémentaire nécessaires à la couverture de ces dépenses. 16. Il résulte du point précédent que le département de Seine-et-Marne peut légalement solliciter le reversement des 90 % des ressources de Mme A... qui devaient être affectées au remboursement de ses frais d'hébergement et d'entretien au centre hospitalier de Fontainebleau pour la période du 24 avril 2010 au 31 décembre 2013. 17. Il résulte de l'instruction que la notification de la décision du 15 janvier 2009 du conseil départemental de Seine-et-Marne accordant l'aide sociale à Mme A... a été signée et retournée par M. A... et que ce dernier était ainsi informé des conditions d'attribution de l'aide sociale pour personnes âgées pour la prise en charge des frais d'hébergement de sa mère au sein du centre hospitalier de Fontainebleau. La circonstance que ni le centre hospitalier ni le département de Seine-et-Marne ne lui ait réclamé avant le 8 avril 2014 le reversement de 90 % des ressources de Mme A... alors que cette dernière bénéficiait de l'aide sociale versée par le département et que le paiement différentiel a été mis en place et rendu obligatoire le 1er janvier 2014 pour tous les établissements du département accueillant des personnes âgées dépendantes bénéficiaires de l'aide sociale est sans incidence sur le bien-fondé de la créance du département pour la période du 24 avril 2010 au 31 décembre 2013. Il appartenait en effet à M. A..., tuteur de sa mère et dûment informé de l'obligation de reversement de 90 % des ressources de Mme A..., d'entrer en contact avec le centre hospitalier ou les services du département en raison de l'absence de contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient M. A..., le recours sur succession du département de Seine-et-Marne engagé après le décès de Mme A... et visant à obtenir le remboursement de l'aide sociale versée à l'intéressée pour couvrir ses frais d'hébergement ne fait pas obstacle à la procédure tendant à récupérer les 90 % des ressources de Mme A... qui auraient dû être versés en contrepartie de l'aide sociale qui lui a été accordée. Il suit de là que la créance du département de Seine-et-Marne présente un caractère exigible et certain pour la période du 24 avril 2010 au 31 décembre 2013 et que, par voie de conséquence, M. A... n'est pas fondé à demander la décharge de l'obligation de payer la somme mise à sa charge au titre de cette période. En ce qui concerne la régularité du titre exécutoire du 19 août 2014 et de l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 émis par la paierie départementale de Seine-et-Marne : 18. Aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Dans les conditions prévues pour chaque catégorie d'entre elles, les recettes sont liquidées avant d'être recouvrées. La liquidation a pour objet de déterminer le montant de la dette des redevables. Les recettes sont liquidées pour leur montant intégral, sans contraction avec les dépenses. Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation. (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un titre exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la dette. En application de ce principe, un département ne peut mettre en recouvrement une créance sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge du débiteur. 19. Aux termes du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " Une ampliation du titre de recettes individuel ou de l'extrait du titre de recettes collectif est adressée au redevable sous pli simple. Lorsque le redevable n'a pas effectué le versement qui lui était demandé à la date limite de paiement, le comptable public compétent lui adresse une mise en demeure de payer avant la notification du premier acte d'exécution forcée devant donner lieu à des frais. (...) ". 20. Il résulte de l'instruction que si l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 valant ampliation du titre exécutoire du 19 août 2014 adressé à M. A... porte la mention " JO754 recup ress du 01/01/2009 au 31/12/2013 A... Paulette CH Fontainebleau " permettant à l'intéressé de comprendre qu'il correspondait au recouvrement par le département d'une part des ressources de Mme A... au titre de ses frais d'hébergement au sein du centre hospitalier de Fontainebleau pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2013, il ne précise pas les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour constituer M. A... débiteur de cette somme. En outre, l'avis des sommes à payer ne se réfère à aucun autre document joint en annexe ou précédemment adressé à M. A... en sa qualité de tuteur de sa mère. Dans ces conditions, il ne peut être regardé comme satisfaisant aux conditions de motivation des titres exécutoires rappelées au point 18. 21. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tenant à la régularité du titre exécutoire et de l'avis des sommes à payer litigieux, que M. A... est seulement fondé à demander l'annulation du titre exécutoire du 19 août 2014 et de l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 valant ampliation du titre exécutoire Sur l'appel incident du département de Seine-et-Marne : 22. L'annulation d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme, comme il a déjà été dit, n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation par l'administration, l'extinction de la créance litigieuse, à la différence d'une annulation prononcée pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre. En l'espèce, si l'irrégularité formelle retenue au point 20 fait obstacle à ce que le département de Seine-et-Marne poursuive le recouvrement de la somme de 37 461,15 euros sur le fondement du titre litigieux, cette irrégularité n'implique pas que M. A... soit déchargé de l'obligation de payer la somme qui reste due au département de Seine-et-Marne pour la période allant du 24 avril 2010 au 31 décembre 2013. Il suit de là que le département de Seine-et-Marne pourra poursuivre le recouvrement de la somme due par M. A.... Par suite, sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, ses conclusions tendant à ce que M. A... soit condamné à lui verser la somme de 37 461,15 euros correspondant à la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement au sein du centre hospitalier de Fontainebleau doivent être rejetées. Sur les frais liés à l'instance : 23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le département de Seine-et-Marne demande au titre des frais liés à l'instance. Dans les circonstances de l'espèce, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de M. A... les frais exposés à l'instance et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La décision du 22 septembre 2016 notifiée le 12 décembre 2016 de la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne est annulée en tant qu'elle a rejeté les conclusions aux fins d'annulation du titre exécutoire et de l'avis des sommes à payer émis les 19 août 2014 et 15 avril 2015 par la paierie départementale de Seine-et-Marne, qu'elle a déclaré prescrite la créance du département de Seine-et-Marne au titre de la contribution de Mme A... à ses frais d'hébergement pour la période antérieure au 15 juin 2010 et qu'elle a fixé sa créance au titre de ces frais à la somme de 26 424 euros pour la période du 15 juin 2010 au 31 décembre 2013. Article 2 : Le titre exécutoire du 19 août 2014 et l'avis des sommes à payer du 15 avril 2015 émis par la paierie départementale de Seine-et-Marne sont annulés. Article 3 : M. A... est déchargé de l'obligation de payer la somme correspondant au reversement de 90 % des ressources de Mme A... au titre de la prise en charge de ses frais d'hébergement au sein du centre hospitalier de Fontainebleau pour la période comprise entre le 1er février 2009 et le 23 avril 2010. Article 4 : Les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le surplus de la demande de M. A... présentée devant la commission départementale d'aide sociale de Seine-et-Marne et de ses conclusions d'appel est rejeté. Article 6 : Les conclusions du département de Seine-et-Marne présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 7 : Le surplus des conclusions du département de Seine-et-Marne est rejeté. Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au département de Seine-et-Marne. Délibéré après l'audience du 16 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Le Goff, président, - M. Ho Si Fat, président assesseur, - Mme Larsonnier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, V. E... Le président, R. LE GOFF La greffière, E. VERGNOL La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA05408
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 du préfet de l'Indre portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par un jugement n° 2100231 du 27 mai 2021, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 26 août 2021, M. B..., représenté par Me Thinon, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 27 mai 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 du préfet de l'Indre portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ; 3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'arrêté est signé d'une autorité incompétente ; S'agissant de la décision de refus de séjour, - elle est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ; - l'article 3 de l'accord franco-algérien n'exige pas, pour la délivrance d'un titre de séjour " salarié ", de visa supérieur à trois mois ; - le préfet a méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que, entré régulièrement sur le territoire français, il dispose d'une promesse d'embauche et dispose d'une formation et d'une expérience professionnelle en adéquation, qu'il adhère aux valeurs de la République et est profondément attaché à la France et la culture française ; - le refus de titre est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il dispose de la formation nécessaire pour exercer la profession d'animateur sportif ; - il y a méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français, - elle est insuffisamment motivée ; - elle est dépourvue de base légale ; - elle méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi, - elle est insuffisamment motivée ; - elle est dépourvue de base légale. Par une décision du 29 juillet 2021, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de Mme C... D... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B..., de nationalité tunisienne, est entré régulièrement en France le 9 janvier 2019, muni d'un visa de court séjour, et a déposé, le 25 septembre 2019, une demande de titre de séjour en qualité de salarié. Par arrêté du 8 décembre 2020 le préfet de l'Indre a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 27 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. 2. Par arrêté du 8 mars 2021, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 9 mars 2021, le préfet de l'Indre a donné délégation à M. Stéphane Sinagoga, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous arrêtés, relevant des attributions de l'État dans le département de l'Indre, à l'exception de certaines décisions qui ne sont pas en cause dans cette instance. La délégation de signature n'est pas subordonnée à l'absence ou l'empêchement du préfet. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté. Sur la décision portant refus de titre de séjour : 3. En premier lieu, M. B... reprend en appel, sans les assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision contestée, du défaut d'examen de sa situation personnelle et de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il convient d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail, du 17 mars 1988 : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable et portant la mention " salarié " ". En vertu du point 2.3.3 du protocole du 28 avril 2008 : " Le titre de séjour portant la mention " salarié ", prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'Accord du 17 mars 1988 modifié, est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'Annexe I du présent Protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi ". Aux termes du premier alinéa de l'article 11 de l'accord du 17 mars 1988 : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord ". Enfin, aux termes de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, repris par l'article L. 412-1 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23 et L. 313-24 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1 (...) ". 5. Il résulte de la combinaison de ces stipulations et dispositions que la délivrance aux ressortissants tunisiens d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est subordonnée à la présentation d'un visa de long séjour et d'un contrat visé par les services en charge de l'emploi. M. B... étant entré sous couvert d'un visa de court séjour, le préfet de l'Indre, en lui refusant pour ce motif la délivrance du titre sollicité, n'a pas méconnu l'article 3 de l'accord franco-tunisien, quand bien même la formation et l'expérience professionnelles de M. B... seraient en adéquation avec la promesse d'embauche dont il bénéficie. 6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 7. M. B... fait valoir qu'il est entré régulièrement sur le territoire français, dispose d'une promesse d'embauche et d'une formation et d'une expérience professionnelle en adéquation, qu'il adhère aux valeurs de la République et est profondément attaché à la France et la culture française. Toutefois, il est entré très récemment en France, est célibataire et sans enfant et possède des attaches en Tunisie, où résident notamment ses parents et ses cinq frères et sœurs. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré par M. B... de ce que le refus de titre de séjour attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté, ainsi que, pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation. Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi : 8. M. B... reprend en appel, sans les assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, les moyens tirés du défaut de motivation, du défaut de base légale et de la méconnaissance des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dont seraient entachées les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi. Il convient d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles 37 de la loi n° 91-347 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de l'Indre. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient : M. Éric Rey-Bèthbéder, président, Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. La rapporteure, Frédérique D...Le président Éric Rey-Bèthbéder La greffière, Angélique Bonkoungou La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 21BX03535
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... E..., épouse C..., a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2020 du préfet de La Réunion portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par un jugement n° 2001259 du 17 mars 2021, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 juillet 2021 et le 13 mai 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, Mme E..., épouse C..., représentée par Me Belliard, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 17 mars 2021 ; 2°) de surseoir à statuer dans l'attente que le juge judiciaire tranche la question de la paternité de son enfant ; 3°) d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2020 du préfet de La Réunion portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ; 4°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois ; 5°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - il y a lieu de surseoir à statuer en attendant que le juge judiciaire tranche la question de la paternité ; - à titre subsidiaire, elle a droit à un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2022, le préfet de La Réunion conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens ne sont pas fondés. Par une décision du 10 juin 2021, Mme E..., épouse C..., a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de Mme B... D... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... E..., épouse C..., de nationalité mauricienne, est entrée à La Réunion le 15 septembre 2019 pour y rejoindre M. C..., ressortissant français avec lequel elle s'est mariée le 7 juin 2019, et a bénéficié d'un titre de séjour en qualité de conjoint de Français. La vie commune a cessé quelques semaines après son arrivée, à la fin du mois de novembre 2019. Par courrier du 11 septembre 2020, elle a sollicité, par l'intermédiaire de son conseil, le renouvellement de ce titre, en se prévalant de violences conjugales et de sa qualité de parent d'enfant français, et, par arrêté du 8 octobre 2020, le préfet de La Réunion a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Elle relève appel du jugement du 17 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant (...) ". 3. La requérante produit l'assignation de M. C... en recherche de paternité le 3 novembre 2020 devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis, et demande à la cour de surseoir à statuer jusqu'à ce que le juge judiciaire se soit prononcé sur la question de la paternité de l'enfant, né le 2 mars 2020, et donc sa nationalité. Toutefois, le préfet a produit devant les premiers juges une ordonnance de clôture d'instruction du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Saint-Denis du 16 février 2021, informant les parties de ce que le jugement de l'affaire serait rendu par mise à disposition au greffe le 18 mai 2021. Par courrier du 28 mars 2022, la présente cour a demandé au conseil de Mme E... de lui communiquer " tous éléments relatifs à la suite donnée à l'assignation en recherche de paternité du 3 novembre 2020 ", et en réponse, ce dernier l'a informée de ce que le jugement avait été reporté et qu'il serait mis à disposition le 13 mai 2022, mais n'a, depuis cette date, donné à la cour aucune information. Par suite, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'enfant de la requérante serait français, elle ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 4. En deuxième lieu, Mme E... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable à la date de la décision contestée. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges. 5. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 du présent arrêt, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E..., épouse C..., n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles 37 de la loi n° 91-347 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme E..., épouse C..., est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E..., épouse C..., et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de La Réunion. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient : M. Éric Rey-Bèthbéder, président, Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. La rapporteure, Frédérique D...Le président Éric Rey-Bèthbéder La greffière, Angélique Bonkoungou La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 21BX3008
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2017 par lequel le préfet de la Creuse a ordonné la saisie définitive de ses armes, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux du 28 mai 2018, de condamner l'État à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de ses préjudices financiers, moraux et des troubles dans ses conditions d'existence et d'enjoindre au préfet précité de procéder à la restitution d'une carabine à air comprimé n° de matricule 61, d'un fusil de chasse n° de matricule 1395, d'un fusil de chasse n° de matricule 1360 et d'une carabine de chasse et de tir n° matricule 1CA16848. Par un jugement n° 1801904 du 23 juillet 2020, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 22 septembre 2020, le 18 mai 2021 et le 7 avril 2022, M. A..., représenté par Me Plas, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 23 juillet 2020 en tant qu'il rejette sa demande tendant à la condamnation de l'État à l'indemniser des préjudices subis du fait de l'illégalité fautive de l'arrêté préfectoral du 29 décembre 2017 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2017 par lequel le préfet de la Creuse a ordonné la saisie définitive de ses armes, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux du 28 mai 2018 ; 3°) de condamner l'État à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de ses préjudices financiers, moraux et des troubles dans ses conditions d'existence. 4°) de mettre à la charge de l'État le paiement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de droit dès lors que le préfet a méconnu l'autorité de la chose jugée en ne procédant pas à la restitution de ses armes à la suite du jugement du 19 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 22 juillet 2015 ; - de plus, cet arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation dès lors que, conformément à l'article R. 312-6 du code de la sécurité intérieure, le certificat médical du 5 décembre 2017 établit que son état de santé ne présente aucune contre-indication à la détention d'armes et à la pratique de la chasse ; - il est en droit d'obtenir la réparation des préjudices subis en raison de l'illégalité de l'arrêté concerné. Par deux mémoires en défense, enregistrés le 3 décembre 2020 et le 8 septembre 2021, la préfète de la Creuse conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - la requête est irrecevable en raison de ce que l'appelant se borne à réitérer ses écritures de première instance, sans critiquer le jugement attaqué ; - par ailleurs, aucune illégalité fautive n'a été commise et les préjudices allégués ne sont pas établis. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité intérieure ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur, - et les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... a fait l'objet d'un arrêté préfectoral ordonnant la conservation pendant un an par les services de gendarmerie de ses cinq armes, qui ont été remises à ces derniers le 6 juillet 2014. Par un arrêté du 22 juillet 2015, le préfet de la Creuse a prononcé, sur le fondement des articles L. 312-7 et suivants du code de la sécurité intérieure, la saisie définitive de quatre armes soumises à déclaration ou enregistrement, ainsi que l'interdiction d'en acquérir ou d'en détenir de nouvelles quelle que soit leur catégorie. Par un jugement du 19 octobre 2017, le tribunal administratif de Limoges a annulé cette décision. Par un nouvel arrêté du 29 décembre 2017, le préfet de la Creuse a prononcé la saisie définitive des quatre armes de M. A... ainsi que l'interdiction de détenir ou d'acquérir des armes. Par un courrier du 18 mai 2018, M. A... a sollicité le retrait de cette décision et l'indemnisation de ses préjudices en lien avec l'illégalité de l'arrêté du 29 décembre 2017. Cette demande a fait l'objet d'une décision de rejet du préfet le 28 mai 2018. 2. M. A... relève appel du jugement du 23 juillet 2020 du tribunal administratif de Limoges qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2017 et de la décision du 28 mai 2018 du préfet de la Creuse ainsi qu'à la condamnation de l'État à l'indemniser des préjudices subis en raison de l'illégalité fautive de cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation: 3. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". 4. Il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal d'audition de M. A... que l'intéressé a déclaré s'être vu notifier le 29 décembre 2017 à 17 heures l'arrêté préfectoral n° CAB2017032 par lequel le préfet de la Creuse a procédé à la saisie de ses quatre armes. Il ressort également des pièces du dossier que la décision contestée porte mention des voies et délais de recours. Dans ces conditions et comme l'ont relevé les premiers juges, le recours gracieux formé par M. A... le 18 mai 2018 n'a pas eu pour effet de proroger le délai de recours prévu par les dispositions précitées de l'article R. 421-1 du code de justice administrative. Par suite, c'est à bon droit que le jugement attaqué a accueilli la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2017, ensemble la décision du 28 mai 2018 portant rejet du recours gracieux dirigé contre cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'indemnisation : 5. L'appelant soutient que l'arrêté du 29 décembre 2017 pris par le préfet de la Creuse est illégal en ce qu'il est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation et que cette illégalité fautive doit ainsi conduire à l'engagement de la responsabilité de l'État pour faute. 6. S'agissant, en premier lieu, de l'erreur de droit dont serait entaché cet arrêté, elle découlerait de la méconnaissance par le préfet de l'autorité de la chose jugée en ne procédant pas à la restitution de ses armes à la suite du jugement du 19 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 22 juillet 2015. Cependant, dans ce même jugement, le tribunal a rejeté les conclusions de l'intéressé à fin d'injonction de lui restituer ses armes. Au demeurant, l'arrêté du 29 décembre 2017 se fonde sur de nouveaux éléments de fait postérieurs au jugement précité, notamment sur trois procès-verbaux de renseignement administratif établis par les services de gendarmerie de Bourganeuf le 20 mai 2016 et les 6 et 26 décembre 2017 ainsi que sur le courrier du maire de Pontarion en date du 5 décembre 2017 émettant un avis défavorable à la restitution des armes saisies. Par conséquent, le moyen tiré de l'existence d'une méconnaissance de l'autorité de la chose jugée ne peut qu'être écarté. 7. En ce qui concerne, en second lieu, l'existence d'une erreur d'appréciation, si l'appelant s'appuie sur un certificat médical du 5 décembre 2017 indiquant que son état de santé ne présente aucune contre-indication à la détention d'armes et à la pratique de la chasse, il résulte de l'instruction, d'abord, que M. A... a été admis en établissement psychiatrique en 2014 en raison d'intentions suicidaires et de menaces de mort à l'encontre de son épouse, qu'en outre et ainsi que mentionné dans un procès-verbal de renseignement administratif établi par les services de gendarmerie le 20 mai 2016, il a tenu des propos confus, aurait eu une attitude inquiétante dans la cour d'une école en invectivant violemment une institutrice devant ses élèves apeurés et aurait eu des propos menaçants tels que " j'ai envie de tuer un gendarme ", qu'une brève enquête de voisinage révèle également qu'il suscite auprès des riverains une réelle inquiétude et, enfin, qu'il ressort du procès-verbal de renseignement administratif établi le 26 décembre 2017 par les services de gendarmerie qu'il " est suivi à l'hôpital psychiatrique de Bourganeuf et qu'il est en soins réguliers auprès de l'établissement plusieurs fois par semaine ". Dans ces conditions et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le préfet n'a commis aucune erreur d'appréciation des risques que le comportement ou l'état de santé de l'intéressé présentait pour lui-même ou pour autrui en décidant la saisie définitive de ses armes dans son arrêté du 29 décembre 2017. 8. Il suit de ce qui vient d'être exposé que cet arrêté n'est entaché d'aucune illégalité fautive et, en conséquence, que les conclusions indemnitaires de M. A... ne peuvent qu'être rejetées. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2017 et de la décision du 28 mai 2018 du préfet de la Creuse ainsi qu'à la condamnation de l'État à l'indemniser des préjudices subis en raison de l'illégalité fautive de cet arrêté. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée à la préfète de la Creuse. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient : M. Éric Rey-Bèthbéder, président, Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La présidente-assesseure, Frédérique Munoz-PauzièsLe président-rapporteur, Éric Rey-Bèthbéder La greffière, Angélique Bonkoungou La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 20BX03187
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Pau la décharge de l'obligation de payer, d'une part, la somme de 212 096,71 euros réclamée aux ayants droit de M. A... B... par mises en demeure de payer du 16 mai 2018, et, d'autre part, les sommes d'un montant total de 243 366 euros réclamées par le titre exécutoire signifié le 7 février 2020. Par jugement n° 1801284, n° 1802297 et n° 2000333 du 5 novembre 2020, le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 8 janvier 2021, Mme E..., représentée par Me Draï, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 8 janvier 2021 ; 2°) à titre subsidiaire, d'accorder le dégrèvement des impositions au vu de la situation d'indigence de Mme E... ; 3°) de mettre à la charge de l'État les frais d'instance. Elle soutient que : - les impositions en cause ne sont pas fondées, en application des articles 4A et 4B du code général des impôts, dès lors que M. B... n'avait ni domicile ni centre d'intérêt en France ; il y a lieu d'appliquer l'article 14 de la convention franco-néerlandaise, M. B... exerçant un travail marin hors de France au sens de l'article 81 A du code général des impôts ; - les contestations portent sur l'imposition elle-même, et donc sur l'exigibilité des sommes réclamées ; - à titre subsidiaire, il y a lieu de prononcer le dégrèvement des sommes en cause en raison de sa situation d'indigence. Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête et fait valoir que : - la requête est irrecevable en tant qu'elle émane de Mme E... en qualité de représentante de son fils, qui est majeur ; - elle est irrecevable en tant qu'elle est dirigée contre la signification de titres exécutoires ; - le juge administratif n'est pas compétent pour accorder des remises gracieuses ; - les moyens ne sont pas fondés. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence de la cour pour connaître des conclusions relatives aux cotisations de taxe d'habitation qui relèvent de la cassation devant le Conseil d'Etat. Par ordonnance du 22 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 13 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme F... H..., - les conclusions de Mme D... G..., - et les observations de Me Dreyer, représentant Mme E.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... B..., de nationalité australienne, qui résidait en France depuis 1987, est décédé le 2 août 2016. Le 16 mai 2018, sa veuve, Mme E..., a été mise en demeure de payer les dettes successorales de M. B..., d'un montant de 212 096,71 euros, correspondant à des cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2010, 2011, 2013 et 2014, et de taxe d'habitation au titre de 2015 et 2016, et le 7 février 2020, le service a signifié à Mme E... des titres exécutoires. Mme E... relève appel du jugement du 5 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes tendant à être déchargée de ces sommes. Sur la compétence de la cour : 2. Aux termes de l'article R. 222-13 du code de justice administrative : " Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue en audience publique et après audition du rapporteur public (...) : (...) 5° Sur les recours relatifs aux impôts locaux et à la contribution à l'audiovisuel public, à l'exception des litiges relatifs à la contribution économique territoriale ". Et aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance : / Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) 4° Sur les litiges relatifs aux impôts locaux et à la contribution à l'audiovisuel public, à l'exception des litiges relatifs à la contribution économique territoriale ". 3. Il ressort des termes mêmes de l'article R. 222-13 du code de justice administrative que l'expression " recours relatifs aux impôts locaux et à la contribution à l'audiovisuel public, à l'exception des litiges relatifs à la contribution économique territoriale " a une portée générale et qu'elle recouvre aussi bien les recours relatifs à l'assiette de ces prélèvements que ceux relatifs à leur recouvrement. Dès lors, l'article R. 811-1 du code de justice administrative, qui prévoit que le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort dans les litiges relevant du 5° de l'article R. 222-13 du même code, est applicable au contentieux du recouvrement des impôts locaux et de la contribution à l'audiovisuel public, à l'exception des litiges relatifs à la contribution économique territoriale. Par suite, les conclusions de Mme E... dirigées contre le jugement du 5 novembre 2020 du tribunal administratif de Pau en tant qu'il rejette les conclusions dirigées contre l'obligation de payer les sommes afférentes aux cotisations de taxe d'habitation des années 2015 et 2016 ont le caractère d'un pourvoi en cassation qui relève de la compétence du Conseil d'État et non de la présente cour. Sur les conclusions à fin de décharge : 4. Aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable jusqu'au 31 décembre 2018 : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199 ". Aux termes de ce même article, dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 2019 : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances, amendes, condamnations pécuniaires et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. (...) Les contestations relatives au recouvrement ne peuvent pas remettre en cause le bien-fondé de la créance. Elles peuvent porter : / 1° Sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° À l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, sur l'obligation au paiement, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués et sur l'exigibilité de la somme réclamée. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés dans le cas prévu au 1° devant le juge de l'exécution. Dans les cas prévus au 2°, ils sont portés : / a) Pour les créances fiscales, devant le juge de l'impôt prévu à l'article L. 199 (...) ". 5. Les moyens relatifs au bien-fondé des impositions dont le recouvrement est poursuivi par l'administration ne peuvent être utilement invoqués à l'appui d'une opposition au recouvrement formée dans les conditions prévues à l'article L. 281 du livre des procédures fiscales. Dès lors, les moyens tirés de ce que M. B... ne pouvait être imposé en France, en application des articles 4A et 4B du code général des impôts, de la convention franco-néerlandaise et de l'article 81 A du code général des impôts, qui sont relatifs au bien-fondé des impositions et non à leur exigibilité au sens de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, ne peuvent qu'être écartés. Sur les conclusions à fin de remise gracieuse : 6. Mme E... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de ce qu'elle serait en situation d'indigence et dans l'impossibilité de payer les sommes que le service lui réclame. Il convient d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge. 7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par le ministre, que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, et en tout état de cause, il y a lieu de rejeter ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Les conclusions de la requête relatives au jugement du 5 novembre 2020 du tribunal administratif de Pau doivent être renvoyées au Conseil d'État en tant que ce jugement a statué sur la demande de Mme E... d'être déchargée de l'obligation de payer les sommes correspondant aux cotisations de taxe d'habitation des années 2015 et 2016. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme E... est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Une copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient : M. Éric Rey-Bèthbéder, président, Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. La rapporteure, Frédérique H... Le président Éric Rey-Bèthbéder La greffière, Angélique Bonkoungou La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 21BX00083
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, par deux demandes distinctes, de prononcer la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013. Par jugement n° 1800302-1800303 du 17 février 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 13 avril 2021, M. A..., représenté par Me Richard, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 17 février 2021 ; 2°) de prononcer la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 ; 3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'avis de mise en recouvrement n'a pas été régulièrement notifié à son avocat, alors que ce dernier avait informé l'administration, par courrier du 4 juillet 2014, que son client élisait domicile pour l'ensemble des actes de la vérification de comptabilité ; - il a été privé de la garantie du recours à l'interlocuteur départemental. Par un mémoire en défense, enregistré le 20 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 16 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme D... G..., - et les conclusions de Mme C... E.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., qui exerce à titre individuel une activité de travaux du bâtiment sous l'enseigne " MV Rénovation ", a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012. À l'issue de ce contrôle, après avoir dressé un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité, le service vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires réalisé dans le cadre de l'activité de travaux immobiliers et constaté qu'il dépassait les limites de la franchise en base en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été notifiés selon la procédure de taxation d'office, en l'absence de dépôt des déclarations malgré l'envoi de mise en demeure. M. A... relève appel du jugement du 17 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui trouve son origine dans le contrôle précité. 2. Aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public compétent à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité ". Aux termes de l'article 1984 du code civil : " Le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ". L'article 6 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques dispose que " les avocats peuvent assister et représenter autrui devant les administrations publiques, sous réserve des dispositions législatives et réglementaires ". 3. Sauf stipulation contraire, le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition et y répondre emporte élection de domicile auprès de ce mandataire. Par suite, lorsqu'un tel mandat a été porté à la connaissance de l'administration fiscale, celle-ci est en principe tenue d'adresser au mandataire l'ensemble des actes de la procédure d'imposition. Lorsque le mandataire du contribuable a la qualité d'avocat et que celui-ci déclare que son client a élu domicile à son cabinet, l'administration fiscale est tenue de lui adresser les actes de la procédure d'imposition sans qu'il soit besoin d'exiger la production d'un mandat exprès. 4. Il résulte de l'instruction que, par courrier du 4 juillet 2014, en réponse à la proposition de rectification du 24 juin 2014, le conseil de M. A... a informé l'administration que son client faisait élection de domicile à son cabinet " pour l'ensemble des actes de la procédure de vérification de comptabilité ". Par courriers des 12 août et 12 novembre 2014 et du 5 janvier 2015, le même conseil a rappelé à l'administration qu'il " intervient pour son client qui a fait élection de domicile à son cabinet pour l'ensemble des actes de procédure de vérification de comptabilité dont il fait actuellement l'objet. " Par suite, en notifiant l'avis de mise en recouvrement du 30 janvier 2015 au siège de l'entreprise individuelle de M. A..., l'administration a entaché la procédure d'imposition d'irrégularité. 5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : M. A... est déchargé du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012. Article 2 : Les conclusions de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Une copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient : M. Éric Rey-Bèthbéder, président, Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure, Mme C... F..., première-conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. La rapporteure, Frédérique G... Le président Éric Rey-Bèthbéder La greffière, Angélique Bonkoungou La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 21BX01608
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... E... et Mme D... A..., épouse E..., ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012. Par jugement n° 1803592 du 3 juillet 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 septembre 2020 et 27 septembre 2021, M. et Mme E..., représentés par Me Ribes, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 juillet 2020 ; 2°) de transmettre à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante : La directive 2009/133/CE du Conseil du 19 octobre 2009 doit-elle être interprétée comme comprenant dans son champ d'application les opérations d'apports purs et simples à titre temporaire ' 3°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'années 2012 ; 4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - le régime du 5.1 de l'article 13 du code général des impôts est contraire à l'intention du législateur lors du vote de la loi de finances pour 2004 et de la loi de finances rectificatives pour 2012, et il y a une contradiction entre la première phrase dans laquelle figure les termes " cession à titre onéreux " et l'ensemble du processus législatif ; l'apporteur d'un usufruit à terme fixe doit relever, selon la situation, de l'article 150 UB-II ou du 150-0 B ter du code général des impôts ; - il y a rétroactivité de la loi, dès lors que l'article 15 de la loi de finances rectificative pour 2012, qui a introduit le paragraphe 5 de l'article 13, a été voté le 29 décembre 2012, et prévoit que sa prise d'effet rétroagira au 14 novembre 2012 ; - ils auraient pu bénéficier des dérogations prévues par le BOFIP du 5 août 2015 s'ils en avaient connu les conditions à l'automne 2012 ; - le 5.1 de l'article 13 méconnaît la directive 2009/133/CE du Conseil du 19 octobre 2009. - en relevant que le montant du prix de cession indiqué au contrat d'apport devait être réintégré sans retraitement préalable dans leurs revenus fonciers, le service n'a pas respecté l'instruction BOI-IR-BASE-10-10-30, en application de laquelle il y a lieu de retenir, non pas le prix stipulé à l'acte mais la valeur vénale de l'usufruit temporaire " lorsque le prix de cession de cet usufruit temporaire, comme stipulé entre les parties, est inférieur à la valeur vénale de ce même usufruit ... ", soit un revenu brut imposable de 35 783,40 euros après application du II de l'article 669 du code général des impôts ; - pour le calcul du revenu net, il convient d'appliquer à la plus-value brute un abattement pour durée de détention en application de l'article 150 VC du code général des impôts dans sa version en vigueur au 7 mai 2012 ; - il y a lieu de retraiter le prix d'acquisition en application de l'instruction référencée au BOI-RFPI-SPI 20 ; Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 mars et 9 novembre 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 28 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 15 novembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme F... H..., - les conclusions de Mme C... G..., - et les observations de Me Lavoisier, représentant M. et Mme E.... Considérant ce qui suit : 1. Mme D... A..., épouse E..., est la gérante de la SCI Les Rosiers. En 2015, les époux ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel le service a imposé dans la catégorie des revenus fonciers au titre de l'année 2012 la somme de 155 580 euros résultant de l'apport de l'usufruit temporaire de parts de sociétés civiles immobilières effectuées par Mme E... à la SCI Les Rosiers. M. et Mme E... relèvent appel du jugement du 3 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qui trouvent leur origine dans le contrôle précité. Sur l'application de la loi fiscale : En ce qui concerne l'application du 5.1 de l'article 13 du code général des impôts : 2. Aux termes de l'article 13 du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur à compter du 14 novembre 2012 : " 1. Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu. / 2. Le revenu global net annuel servant de base à l'impôt sur le revenu est déterminé en totalisant les bénéfices ou revenus nets visés aux I à VII bis et au 1 du VII ter de la 1re sous-section de la présente section ainsi que les plus-values et créances mentionnées à l'article 167 bis, compte tenu, le cas échéant, du montant des déficits visés aux I et I bis de l'article 156, des charges énumérées au II dudit article et de l'abattement prévu à l'article 157 bis. / 3. Le bénéfice ou revenu net de chacune des catégories de revenus visées au 2 est déterminé distinctement suivant les règles propres à chacune d'elles. (...) 5.1. Pour l'application du 3 et par dérogation aux dispositions du présent code relatives à l'imposition des plus-values, le produit résultant de la première cession à titre onéreux d'un même usufruit temporaire ou, si elle est supérieure, la valeur vénale de cet usufruit temporaire est imposable au nom du cédant, personne physique ou société ou groupement qui relève des articles 8 à 8 ter, dans la catégorie de revenus à laquelle se rattache, au jour de la cession, le bénéfice ou revenu procuré ou susceptible d'être procuré par le bien ou le droit sur lequel porte l'usufruit temporaire cédé./ Lorsque l'usufruit temporaire cédé porte sur des biens ou droits procurant ou susceptibles de procurer des revenus relevant de différentes catégories, le produit résultant de la cession de cet usufruit temporaire, ou le cas échéant sa valeur vénale, est imposable dans chacune de ces catégories à proportion du rapport entre, d'une part, la valeur vénale des biens ou droits dont les revenus se rattachent à la même catégorie et, d'autre part, la valeur vénale totale des biens ou droits sur lesquels porte l'usufruit temporaire cédé. / 2. Pour l'application du 1 du présent 5 et à défaut de pouvoir déterminer, au jour de la cession, une catégorie de revenus, le produit résultant de la cession de l'usufruit temporaire, ou le cas échéant sa valeur vénale, est imposé : / a) Dans la catégorie des revenus fonciers, sans qu'il puisse être fait application du II de l'article 15, lorsque l'usufruit temporaire cédé est relatif à un bien immobilier ou à des parts de sociétés, groupements ou organismes, quelle qu'en soit la forme, non soumis à l'impôt sur les sociétés et à prépondérance immobilière au sens des articles 150 UB ou 244 bis A (...) ". 3. Il résulte de l'instruction que, par délibération de son assemblée générale extraordinaire du 30 novembre 2012, la SCI Les Rosiers, dont Mme E... détenait 98 % des parts, a décidé de procéder à une augmentation de capital d'un montant de 152 550 euros, en approuvant l'apport de l'usufruit temporaire sur trois ans de parts sociales de sociétés civiles immobilières détenues par Mme E..., pour un montant total apporté évalué à 155 580 euros. En contrepartie de ces apports, Mme E... s'est vu attribuer 15 255 parts sociales nouvelles de 10 euros dans le capital de la SCI Les Rosiers, assorties d'une prime d'apport globale de 3 030 euros. Lors du contrôle sur pièces cité au point 1, le service a constaté qu'il s'agissait de la première cession à titre onéreux d'un usufruit temporaire de parts sociales, réalisée postérieurement à l'entrée en vigueur, le 14 novembre 2012, du dispositif issu de la loi de finances rectificative pour 2012, codifié au 5.1 de l'article 13 du code général des impôts. Par proposition de rectification du 25 septembre 2015, il a réintégré la somme de 155 580 euros aux revenus fonciers imposables de M. et Mme E... au titre de l'année 2012. 4. En premier lieu, l'apport de l'usufruit temporaire de parts sociales de sociétés civiles immobilière à la SCI Les Rosiers, en contrepartie de parts de la même société et d'une prime d'apport, constitue une cession à titre onéreux, nonobstant la circonstance que l'apport n'a pas été rémunéré par des liquidités. Par suite, M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que l'apport en cause ne relèverait pas des dispositions du 5.1 de l'article 13 du code général des impôts, mais du régime des articles 150 UB ou 150-0 B ter du même code. 5. En deuxième lieu, dès lors que les dispositions législatives en cause ne présentent pas d'ambiguïté, M. et Mme E... ne peuvent utilement soutenir que le régime du 5.1 de l'article 13 du code général des impôts serait contraire à l'intention du législateur et qu'il y aurait une contradiction entre la première phrase de ce texte, dans laquelle figure les termes " cession à titre onéreux ", et l'ensemble du processus législatif. 6. En troisième lieu, les requérants soutiennent que la loi est rétroactive, dès lors que l'article 15 de la loi de finances rectificative pour 2012, qui a introduit le paragraphe 5 de l'article 13 du code général des impôts, a été voté le 29 décembre 2012 et prévoit une entrée en vigueur du dispositif au 14 novembre 2012, et que cette rétroactivité est contraire à la Constitution. Toutefois, en tout état de cause, le Conseil constitutionnel, saisi de ce moyen d'inconstitutionnalité dirigé contre la loi de finances rectificative pour 2012, a déclaré cet article 15 conforme à la Constitution dans sa décision n° 2012-661 du 29 décembre 2012. 7. En quatrième lieu, l'opération d'apport en cause ne concernant que des sociétés de droit français, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de la directive 2009/133/CE du Conseil du 19 octobre 2009, laquelle, en tout état de cause, aux termes de son article 1er, ne s'applique qu'aux " opérations de fusion, de scission, de scission partielle, d'apport d'actifs et d'échange d'actions qui concernent des sociétés de deux ou plusieurs États membres ". Il n'y a donc pas lieu pour la cour de transmettre à la Cour de justice de l'Union européenne une question préjudicielle relative à cette directive. En ce qui concerne le calcul du produit de la cession : 8. En premier lieu, en application du 5.1 de l'article 13 du code général des impôts, la base imposable est constituée du produit résultant de la cession ou, si elle est supérieure, de la valeur vénale de cet usufruit. Il est constant qu'en contrepartie de l'apport, Mme E... a reçu 15 255 parts sociales nouvelles de 10 euros dans le capital de la SCI Les Rosiers, assorties d'une prime d'apport globale de 3 030 euros, pour un montant total de 155 580 euros. Les requérants ne peuvent utilement soutenir qu'il y aurait lieu d'appliquer le pourcentage de 23 % prévu par le II de l'article 669 du code général des impôts, qui est relatif, non à l'impôt sur le revenu, mais aux droits d'enregistrement. 9. En second lieu, dès lors que le 5.1 de l'article 13 du code général des impôts s'applique " par dérogation aux dispositions du présent code relatives à l'imposition des plus-values ", M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir qu'il y aurait lieu d'appliquer à la plus-value brute un abattement pour durée de détention en application de l'article 150 VC du code général des impôts dans sa version en vigueur au 7 mai 2012. Sur la doctrine : 10. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " (...) Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. (...) ". 11. Eu égard aux règles qui régissent l'invocabilité des interprétations ou des appréciations de l'administration en vertu de cet article, les contribuables ne sont en droit d'invoquer, sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 A, lorsque l'administration procède à un rehaussement d'impositions antérieures, que des interprétations et appréciations antérieures à l'imposition primitive, ou sur le fondement du deuxième alinéa de l'article L. 80 A, qu'il s'agisse d'impositions primitives ou supplémentaires, que des interprétations antérieures à l'expiration du délai de déclaration. 12. M. et Mme E... ne peuvent utilement se prévaloir de l'instruction administrative référencée BOI-IR-BASE-10-10-30, dans ses versions publiées le 5 août 2015 et le 6 avril 2017, et de l'instruction administrative BOI-RFPI-SPI 20, publiée le 24 août 2018 et au demeurant relative aux plus-values de l'article 150-0 B du code général des impôts, qui sont postérieures à l'expiration du délai de déclaration des revenus au titre de l'année 2012. 13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... E... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Une copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient : M. Éric Rey-Bèthbéder, président, Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. La rapporteure, Frédérique H... Le président Éric Rey-Bèthbéder La greffière, Angélique Bonkoungou La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 20BX02968
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) CEJECA a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la société à responsabilité limitée (SARL) A..., sa filiale, a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009 et dont elle est redevable en tant que société mère d'un groupe fiscalement intégré. Par un jugement n° 1701873 du 19 mars 2020, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 juin 2020 et le 2 mars 2022, la SAS CEJECA, représentée par Me Fonlupt, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des impositions en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - pour pouvoir fournir les pièces détachées nécessaires à son activité de maintenance industrielle, la SARL A... dispose d'un stock de près de 20 000 références couvrant des gammes de produits hétérogènes ; afin de traduire comptablement le risque de mévente attaché à chacune de ces références, cette société constate des provisions, d'une part, sur les stocks dormants, d'autre part, sur les stocks dont la rotation est lente ; ce risque de mévente est lié à l'obsolescence technique due à la disparition de certaines activités industrielles, à la modification des normes techniques qui invalide certaines références, à la difficulté de prévoir les besoins de ses clients ; ainsi les références d'articles peu vendus sont versées aux stocks de rotation lente et dépréciées en fonction de la méthode de la durée de couverture des ventes par le stock ; dans un second temps, les références ne faisant l'objet d'aucune vente sont versées dans les stocks dormants ; enfin, des articles, répertoriés dans les stocks dormants comme dans les stocks à rotation lente, sont détruits quelle qu'ait été la dépréciation pratiquée ; la méthode que la SARL A... met en œuvre pour déterminer le montant de ces provisions se fonde, le plus finement possible, sur les données de l'entreprise ; or, l'administration, qui a admis le bien-fondé de la méthode de dépréciation mise en œuvre s'agissant des stocks dormants, a remis en cause à tort celle utilisée s'agissant des stocks à rotation lente, alors que les données de l'entreprise sur les quatre années antérieures révèlent que les références de ces stocks qui connaissent le moins de mouvements aboutissent systématiquement dans les stocks dormants ; contrairement à ce que retient l'administration, l'appréhension des dépréciations subies doit être opérée pour chaque référence et non par catégorie de références, ce qui constituerait une méthode inadaptée à l'activité de la SARL A..., et la méthode mise en œuvre par cette dernière tient compte à la fois du nombre de biens de chaque référence composant ses stocks et de la réalité du risque de mévente subi par chaque référence ; le réapprovisionnement, au cours de la période vérifiée, de références faisant l'objet d'un provisionnement pour rotation lente est sans incidence à cet égard, dès lors qu'il ne concerne qu'un nombre très résiduel de ces références ; il en est de même des circonstances que celles des références en stocks à rotation lente qui font finalement l'objet d'une vente sont commercialisées à un prix supérieur ou égal au coût de revient, dès lors que la SARL A... a provisionné un risque de mévente et non un risque lié à la perte de marge commerciale ou à une altération des qualités des articles ; enfin, contrairement à ce qu'estime l'administration, la mise au rebut concerne aussi des références placées dans les stocks à rotation lente et non exclusivement des références incluses dans les stocks dormants ; dans ces conditions, les provisions constatées par la SARL A... sont conformes aux dispositions des articles 38 et 39 du code général des impôts ; les doctrines publiées sous les références BOI-BA-BASE-20-20-20-10, en son paragraphe n° 300 et BOI-BIC-PDSTK-20-20-10-20, en son paragraphe n°1, confortent sa position ; - la SARL A... était fondée à porter en provision sur créances douteuses des créances qu'elle détenait sur une société cliente ayant rencontré des difficultés liées à une diminution soudaine des commandes de son principal client ; la SARL A... n'a pu, malgré ses demandes amiables, obtenir le paiement de ces créances, hormis des règlements très partiels, par cette société débitrice, dont la trésorerie ne permettait pas d'y faire face ; elle était ainsi fondée à estimer, à la clôture de chacun des exercices concernés, que l'absence de recouvrement de ses créances était probable, ce qui suffisait à justifier les provisions contestées, sans qu'il ait été nécessaire que la SARL A... adresse des mises en demeure ou facture des intérêts à sa débitrice, ni qu'elle suspende ses livraisons ; la doctrine administrative publiée le 1er avril 2015 sous la référence BOI-BIC-PROV-40-20 conforte, en son paragraphe n° 10, sa position sur ce point. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 novembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - eu égard aux termes de la réclamation introduite par la SARL A..., les conclusions de la requête de la SAS CEJECA ne sont recevables qu'en tant qu'elles tendent à la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés résultant de la remise en cause de la déduction de provisions pour dépréciation de stocks et pour créances douteuses ; - en soutenant que les provisions pour dépréciation de stocks dont la déductibilité a été remise en cause par l'administration ont été constituées par la SARL A... pour faire face à un risque de mévente, la SAS CEJECA n'établit pas le caractère probable, ni la réalité, de la dépréciation ; en effet, la rotation lente de certains stocks est inhérente à la politique commerciale de la SARL A..., consistant à disposer en permanence d'un stock important de pièces afin de pouvoir répondre instantanément à la demande de sa clientèle ; le service a d'ailleurs constaté que certains articles avaient fait l'objet d'un réapprovisionnement l'année même de la constitution de la provision ; or, il est contradictoire de réapprovisionner, même dans une mesure limitée, un stock pour lequel un risque de mévente est constaté ; d'ailleurs, sur 440 articles ayant fait l'objet d'une provision pour dépréciation au taux de 66% au cours de l'exercice clos en 2008, 269 articles ne faisaient plus l'objet d'une telle provision au titre de l'exercice clos en 2009 ; au demeurant, les articles provisionnés au titre d'une rotation lente sont toujours vendus à un prix moyen supérieur au coût de revient unitaire du stock ; la SAS CEJECA n'apporte aucun élément probant au soutien de son allégation selon laquelle la mise au rebut a pu concerner aussi des articles conservés en stocks à rotation lente, les procès-verbaux de constat d'huissier qu'elle produit ne permettant pas de déterminer la nature des stocks dont sont issus les articles mis au rebut ; en outre, les articles " de quincaillerie " figurant dans les stocks de la SARL A... ne subissent aucune altération dans le temps, ni aucune obsolescence liée à des changements de normes ; les provisions pour dépréciation de stocks dont la déduction a été remise en cause par le service ne sont ainsi pas justifiées dans leur principe ; - il n'est pas justifié que la SARL A... aurait adressé à sa cliente défaillante, qui est une société sœur, des relances présentant un caractère contraignant, les seules éditions de courriers électroniques qu'elle produit n'ayant pas ce caractère ; il ressort des réponses apportées à ces courriers que cette société bulgare débitrice y justifie d'ailleurs ses retards de paiement par la circonstance qu'elle doit payer d'autres factures ; la SARL A... ne peut ainsi être regardée comme ayant mis en demeure sa débitrice d'honorer sa dette et ne lui a pas facturé d'intérêts de retard, ni ne lui a même suspendu ses livraisons ; il s'agit, dans ces conditions, quand bien même cette société débitrice aurait rencontré des difficultés de trésorerie dont l'ampleur n'est pas précisée, d'un simple retard de paiement et non d'une créance douteuse justifiant la constitution, à hauteur d'un taux de 89,30%, d'une provision, dont la déduction a, par suite, été remise en cause à bon droit par l'administration. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, - les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Roucoux, substituant Me Fonlupt, représentant la SAS CEJECA. Considérant ce qui suit : 1. La société par actions simplifiée (SAS) CEJECA est la société mère d'un groupe fiscalement intégré dont est membre la société à responsabilité limitée (SARL) A..., qui exerce une activité de négoce en gros de visserie et de boulonnerie destinées à la maintenance industrielle. La SARL A... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009. Ce contrôle a notamment amené l'administration à remettre en cause la déduction de provisions pour dépréciation de stocks de pièces détachées et de provisions pour créances douteuses et à majorer, en conséquence, les bénéfices imposables déclarés par cette société au titre des exercices clos en 2009 et 2010, ce qu'elle lui a fait connaître par une proposition de rectification qui lui a été adressée le 11 octobre 2011, dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire. Les observations formulées par la SARL A... n'ayant pas amené l'administration à revoir son appréciation, pas davantage que les entretiens accordés par le supérieur hiérarchique du vérificateur et par l'interlocuteur fiscal interrégional, ni que l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés résultant des rehaussements notifiés ont été mises en recouvrement, pour un montant total, en droits et pénalités, de 333 102 euros. 2. La SAS CEJECA, redevable de ces impositions en application de l'article 223 A du code général des impôts, ayant présenté une réclamation qui a été rejetée, elle a porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL A..., sa filiale, a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009. La SAS CEJECA relève appel du jugement du 19 mars 2020 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande. Sur l'étendue du litige : 3. Eu égard aux termes de la réclamation introduite par la SARL A..., ainsi qu'aux écritures contentieuses produites, devant les premiers juges et devant la cour, par la SAS CEJECA, la requête introduite par cette dernière doit être regardée, ainsi qu'elle le confirme d'ailleurs expressément, comme tendant à la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL A... a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009 et qui résultent de la seule remise en cause de la déduction de provisions pour dépréciation de stocks et pour créances douteuses. Sur le bien-fondé des impositions en litige : En ce qui concerne la déductibilité des provisions pour dépréciation de stocks : 4. Il résulte de la combinaison des dispositions du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts et du 3 de l'article 38 de ce code que lorsqu'une entreprise constate que tout ou partie des matières ou produits qu'elle possède en stock a, à la date de clôture de l'exercice, une valeur probable de réalisation inférieure au prix de revient, elle est en droit de constituer, à concurrence de l'écart constaté, une provision pour dépréciation. Pareille provision ne peut cependant être admise que si l'entreprise est en mesure de justifier de la réalité de cet écart et d'en déterminer le montant avec une approximation suffisante. 5. Il résulte de l'instruction que la SARL A... a constitué un stock important de pièces détachées comportant environ 20 000 références au cours des deux années vérifiées, afin d'être en mesure de faire face, dans les meilleurs délais, aux besoins de ses clients en matière de maintenance industrielle. La nécessité de demeurer en capacité de fournir, dans des délais courts, des pièces nécessaires au dépannage de lignes de production ou de machines industrielles indispensables à l'activité de ses clients et de maintenir un taux de couverture immédiate des commandes de 97% a conduit la SARL A... à approvisionner régulièrement ses stocks afin de détenir un nombre suffisant d'articles dans chacune des références disponibles. Il n'est pas contesté que ces pièces, qui consistent essentiellement en des éléments métalliques stockés dans des conditions optimales, ne subissent pas d'altération physique avec le temps. Cependant, il résulte de l'instruction et n'est pas sérieusement contesté que la valeur d'usage de certains des articles stockés est susceptible de diminuer, les ventes de nombreuses références ayant tendance à se réduire dans le temps, voire à atteindre un niveau nul, en raison d'une obsolescence technique de pièces spécifiques à certaines activités industrielles en déclin ou de l'évolution technologique des machines, des modifications des normes techniques ou des fluctuations, difficiles à anticiper, des besoins de la clientèle. 6. A partir d'une observation des données issues de sa gestion, la SARL A... a entendu traduire comptablement le risque lié à cette perte de la valeur d'usage des articles figurant dans ses stocks en constituant des provisions pour dépréciation, résultant de la mise en œuvre une méthode d'évaluation de ce risque. Les provisions dont la déductibilité a été remise en cause par l'administration fiscale au titre des deux exercices vérifiés ont été constituées par application de cette méthode. Celle-ci distingue des stocks dormants, qui contiennent des références ne faisant plus l'objet d'aucun achat ni d'aucune vente, et des stocks à rotation lente, regroupant des articles n'ayant fait l'objet que d'un nombre réduit d'achats et de ventes durant la période antérieure. Ainsi, au sein des stocks dormants, les références n'ayant fait l'objet d'aucune entrée et d'aucune sortie depuis le début de l'exercice considéré ont donné lieu, à la clôture de cet exercice, à la constitution d'une provision pour dépréciation à hauteur de 70% de leur prix de revient. Celles qui n'ont fait l'objet d'aucun achat et d'aucune vente au cours de l'exercice considéré et de l'exercice précédent ont donné lieu à la constitution d'une provision à hauteur de 80% de leur prix de revient. Enfin, les articles n'ayant fait l'objet d'aucun mouvement durant les deux exercices précédents et ayant vu cette situation se maintenir depuis l'ouverture de l'exercice considéré ont donné lieu à la constatation d'une provision au taux de 90%. L'administration a admis le bien-fondé de cette méthode, appliquée aux stocks dormants, mais a, en revanche, contesté sa pertinence dans son application aux stocks à rotation lente. En effet, la SARL A... a mis en œuvre, pour ce qui concerne ces stocks, une méthode procédant de la même logique statistique, en appliquant une provision au taux de 15% aux références pour lesquelles la durée prévisible de couverture des ventes par les stocks, telle qu'elle ressortait des données de l'entreprise, s'avérait comprise entre deux et cinq ans, et au taux de 33% aux références pour lesquelles cette durée s'avérait comprise entre cinq et dix ans. Elle a, en outre, appliqué une provision au taux de 50% aux références pour lesquelles cette durée était comprise entre dix et vingt ans et, enfin, au taux de 66% lorsque cette durée excédait vingt années. 7. Il résulte de l'instruction que, eu égard notamment à ce qui a été dit au point 5 s'agissant de l'absence d'altération physique des pièces figurant dans les stocks constitués par la SARL A..., ces pièces doivent être regardées comme subissant une dépréciation homogène, de sorte qu'il n'était ni utile ni raisonnable que cette société se livre à une individualisation de cette dépréciation pour les 20 000 références de pièces que comptait son stock au cours des deux années vérifiées, ni qu'elle définisse, au contraire, des catégories de références en tenant compte de leurs caractéristiques intrinsèques, la méthode mise en œuvre par elle permettant de tenir compte de manière satisfaisante de l'obsolescence technique propre à chacune de ces références. En outre, si, comme le relève le ministre, certaines des références incluses dans les stocks dormants et ayant fait l'objet des provisions dont la déductibilité a été remise en cause ont donné lieu à un réapprovisionnement durant la période vérifiée, la SAS CEJECA soutient, sans être contredite, que, sur les 14 000 références les moins mouvementées, seules 6% ont fait l'objet d'un réapprovisionnement au cours de l'exercice clos en 2008 et 3% au cours de l'exercice clos en 2009, en précisant que ces réapprovisionnements sont systématiques aussitôt qu'une référence connaît un mouvement. Or, ces réapprovisionnements très limités, s'ils pouvaient justifier que l'administration identifie et reprenne la quote-part des provisions s'y rapportant, ce qu'elle n'a pas entendu faire, ne peuvent suffire à remettre en cause, dans son ensemble, le bien-fondé de la méthode mise en œuvre en ce qui concerne l'intégralité des références incluses dans les stocks à rotation lente. Il en est de même de la circonstance, relevée par le ministre, que sur 440 articles ayant fait l'objet d'une provision pour dépréciation au taux de 66% au cours de l'exercice clos en 2008, 269 articles ne faisaient plus l'objet d'une telle provision au titre de l'exercice clos en 2009, dès lors que la probabilité de réalisation du risque lié à la perte de valeur d'usage doit s'apprécier à la clôture de chaque exercice et que la réalisation ultérieure d'un niveau significatif de ventes d'articles ayant fait l'objet d'une provision demeure sans incidence sur le bien-fondé de cette appréciation. Il en est de même, pour le même motif, de la circonstance que les ventes qui ont pu être opérées en ce qui concerne des références ayant fait l'objet de provisions ont toutes été conclues pour un prix de vente excédant le coût de revient des articles en cause. Enfin, à supposer même que, comme le soutient le ministre, la SARL A... n'aurait opéré des mises au rebut qu'en ce qui concerne les articles figurant dans ses stocks dormants, un tel constat n'aurait pas davantage d'incidence sur le bien-fondé de la méthode mise en œuvre. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la spécificité de l'activité exercée par la SARL A..., la méthode que celle-ci a mise en œuvre doit être regardée comme ayant déterminé le montant des provisions qu'elle a constituées avec une approximation suffisante. En ce qui concerne la déductibilité d'une provision pour créance douteuse : 8. En vertu du 1. de l'article 39 du code général des impôts, qui, conformément à l'article 209 de ce code, régit la détermination du bénéfice passible de l'impôt sur les sociétés, le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, en vertu du 5° de ce 1., les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. 9. Il résulte des dispositions, citées au point précédent, de l'article 39 du code général des impôts, qu'une entreprise ne peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle qu'à la condition, notamment, que ces pertes ou charges apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice. Il appartient à cette entreprise contribuable de justifier tant du montant des provisions qu'elle entend ainsi déduire de son bénéfice net que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. 10. La SARL A... a déduit, dans la comptabilité de son exercice clos en 2008, une provision pour créance douteuse d'un montant de 450 000 euros, correspondant à 89,30% du montant de la créance détenue par elle sur une société cliente, implantée en Bulgarie, qui est une entité du groupe à laquelle appartient la SARL A... et dont la société mère est la SAS CEJECA. Pour remettre en cause la déduction de cette provision, l'administration a estimé que l'irrécouvrabilité, à la clôture de l'exercice 2008, de cette créance n'apparaissait pas suffisamment probable et que la SARL A..., qui n'avait pas cessé ses livraisons à cette cliente, ne justifiait pas de l'accomplissement de démarches suffisamment comminatoires pour obtenir de cette dernière le paiement de sa créance. 11. Toutefois, les nombreux échanges de courriers électroniques entre la SARL A... et la société défaillante, produits par la SAS CEJECA, établissent que cette société bulgare a fait l'objet de relances régulières au sujet de la créance en cause et qu'elle a fait valoir l'insuffisance et les difficultés de sa trésorerie, non contestées par le ministre, liées à une diminution soudaine des commandes de son principal client, et l'existence d'autres dettes concurrentes pour expliquer qu'elle ne se soit trouvée dans l'impossibilité d'honorer cette créance et de n'effectuer des règlements très modestes. Les circonstances que la SARL A... a continué, conformément à son intérêt de fournisseur, à livrer des marchandises à cette société, qu'elle n'a pas cherché à obtenir, autrement que par des voies amiables, de cette société sœur, membre du même groupe, le recouvrement de sa créance et qu'elle ne lui ait pas facturé d'intérêts n'étaient pas de nature à faire obstacle à ce qu'elle apprécie, à la clôture de l'exercice 2008, le risque d'irrécouvrabilité de sa créance et regarde ce risque comme très probable et, par suite, à ce qu'elle constitue une provision à hauteur de la presque intégralité de la créance restant due à cette date. 12. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS CEJECA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL A..., sa filiale, a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009, en conséquence de la remise en cause de la déductibilité de provisions pour dépréciation de ses stocks et pour créance douteuse. La SAS CEJECA est, en outre, fondée à demander la décharge de ces impositions, ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties. 13. Enfin, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés, pour la présente instance, par la SAS CEJECA. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1701873 du 19 mars 2020 du tribunal administratif d'Amiens est annulé. Article 2 : La SAS CEJECA est déchargée, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL A... a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009, en conséquence de la remise en cause de la déductibilité de provisions pour dépréciation de ses stocks et pour créance douteuse, et dont elle est la redevable. Article 3 : L'Etat versera à la SAS CEJECA la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à SAS CEJECA et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ; - Mme Dominique Bureau, première conseillère ; - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de la formation de jugement, Signé : M. B... La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Suzanne Pinto Carvalho 1 2 N°20DA00878 1 3 N°"Numéro"
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société civile immobilière (SCI) Bali a demandé au tribunal administratif de Rouen de lui accorder la restitution d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 107 234 euros au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2010. Par un jugement n° 1702335 du 11 février 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 avril 2020 et le 9 mars 2022, la SCI Bali, représentée par Me Mazot, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de lui accorder la restitution d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée ramené à 80 287 euros au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2010. Elle soutient que : - c'est à tort que l'administration s'est fondée sur l'absence de respect du délai prévu par les dispositions du I de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts pour rejeter sa demande, en méconnaissance, d'une part, des principes d'effectivité du droit de l'Union européenne et de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée, et, d'autre part, des dispositions de l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales ; - c'est à tort que l'administration s'est également fondée sur la circonstance que le montant de la taxe sur la valeur ajoutée dont la déclaration avait été antérieurement omise, n'avait pas fait l'objet d'une inscription distincte sur sa déclaration rectificative, dès lors que cette formalité répond à une exigence excessive ; - elle est en droit de se prévaloir de la doctrine de l'administation fiscale énoncée dans la réponse ministérielle " Valbrun " du 23 août 1975, pour demander la compensation de ce crédit de taxe sur la valeur ajoutée et des rappels de taxe qui lui ont été assignés au titre de l'année 2013, à raison de la taxation de la livraison à soi-même d'immeubles non revendus dans les deux années suivant leur achèvement ; - dans un souci de " bonne justice ", il y a lieu de faire application des dispositions de l'article R. 211-1 du livre des procédures fiscales, permettant au contribuable d'obtenir le dégrèvement ou la restitution d'impositions qui n'étaient pas dues, postérieurement à l'expiration du délai de réclamation. Par des mémoires, enregistrés le 29 juillet 2020 et le 12 mai 2022, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la SCI Bali ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société civile immobilière (SCI) Bali a déposé le 30 décembre 2016 une déclaration rectificative de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2010 en se prévalant d'un montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible de 107 234 euros, à l'origine d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée reportable de 80 287 euros au titre de la période correspondant à cette même année. Par une décision du 30 mai 2017, l'administration a refusé de lui accorder le bénéfice de ce crédit de taxe sur la valeur ajoutée. La SCI Bali relève appel du jugement du 11 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à ce que lui soit accordée la restitution d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 107 234 euros. Dans le dernier état de ses écritures, elle ramène à 80 287 euros le montant du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle demande la restitution. 2. En premier lieu, d'une part, l'article 179 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, prévoit que la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les opérations effectuées par un assujetti est opérée globalement par l'assujetti par imputation, sur le montant de la taxe due pour une période imposable, du montant de la taxe sur la valeur ajoutée pour laquelle le droit à déduction a pris naissance au cours de la même période. En vertu des dispositions combinées des articles 180 et 182 de la même directive, les Etats membres peuvent autoriser un assujetti à procéder à une déduction qui n'a pas été effectuée conformément à ces dispositions, selon des modalités qu'ils déterminent. 3. D'autre part, aux termes du I de l'article 271 du code général des impôts : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. (...) / 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance ". Aux termes de l'article 287 de ce code : " 1. Tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est tenu de remettre au service des impôts dont il dépend et dans le délai fixé par arrêté une déclaration conforme au modèle prescrit par l'administration. / 2. Les redevables soumis au régime réel normal d'imposition déposent mensuellement la déclaration visée au 1 indiquant, d'une part, le montant total des opérations réalisées, d'autre part, le détail des opérations taxables. La taxe exigible est acquittée tous les mois. / (...) ". Enfin, aux termes du I de l'article 208 de l'annexe II au même code : " Le montant de la taxe déductible doit être mentionné sur les déclarations déposées pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, à condition qu'elle fasse l'objet d'une inscription distincte, la taxe dont la déduction a été omise sur cette déclaration peut figurer sur les déclarations ultérieures déposées avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'omission. Les régularisations prévues à l'article 207 doivent également être mentionnées distinctement sur ces déclarations ". 4. Il résulte des dispositions précitées de l'article 271 du code général des impôts, qui assure en droit interne la transposition de celles de l'article 179 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, que le droit à déduction par un redevable de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé ses opérations taxables prend naissance lorsque la taxe devient exigible chez son fournisseur et doit, en principe, être opéré par imputation sur la taxe due par le redevable au titre de la période pendant laquelle le droit à déduction a pris naissance. Le principe de neutralité, principe général du système commun de taxe sur la valeur ajoutée, tel que rappelé, notamment, par les décisions C-95/07 et C-96/07 du 8 mai 2008 et C-332/15 du 28 juillet 2016, ne fait pas obstacle à ce que, afin d'assurer le respect du principe de sécurité juridique, les autorités étatiques, exerçant la faculté prévue par les dispositions des articles 180 et 182 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, soumettent à un délai la possibilité pour le redevable de corriger ses omissions de déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée déductible. Toutefois, en vertu du principe d'effectivité du droit de l'Union européenne, un tel délai ne doit pas avoir pour effet de rendre l'exercice du droit à déduction impossible ou excessivement difficile. Tel n'est pas le cas du délai prévu par les dispositions de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts, aux termes desquelles l'omission ne peut être réparée que sur les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée déposées au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant l'omission, c'est-à-dire suivant celle au cours de laquelle la taxe sur la valeur ajoutée est devenue exigible chez le fournisseur. Enfin, ces dispositions, relatives aux conditions particulières dans lesquelles s'exerce le droit à déduction en matière de taxe sur la valeur ajoutée en cas d'omission initiale de déclaration de la taxe déductible, s'appliquent sans qu'y fassent obstacle celles de l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales fixant le délai dans lequel un contribuable peut contester les impositions mises à sa charge par l'administration à la suite de l'exercice par cette dernière de son droit de reprise ou de rectification. 5. Ainsi qu'il a été dit au point 1, la déclaration rectificative déposée par la SCI Bali au titre de l'année 2010, sur laquelle cette société avait porté un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 80 287 euros, n'a été déposée que le 30 décembre 2016, alors qu'il n'est pas contesté que le droit à déduction était né chez les fournisseurs de cette société au cours de cette même année 2011 ou antérieurement. Cette déclaration visant à réparer des omissions antérieures de déclaration par la SCI Bali de taxe de valeur ajoutée déductible, a ainsi été déposée au-delà du 31 décembre de la deuxième année suivant celle de l'omission, soit après l'expiration du délai prévu par les dispositions, citées au point 3, du I de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts. L'administration était dès lors, pour ce seul motif, fondée à rejeter la demande de restitution du crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 80 287 euros porté par la SCI Bali sur cette déclaration rectificative. 6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande ". Aux termes de l'article L. 205 de ce livre : " Les compensations de droits prévues aux articles L. 203 et L. 204 sont opérées dans les mêmes conditions au profit du contribuable à l'encontre duquel l'administration effectue une rectification lorsque ce contribuable invoque une surtaxe commise à son préjudice ou lorsque la rectification fait apparaître une double imposition ". La compensation en matière de taxes sur le chiffre d'affaires doit s'effectuer entre impositions dues et payées au cours de la période d'imposition couverte par l'avis de mise en recouvrement en litige. 7. La SCI Bali demande le bénéfice d'une compensation entre le crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 80 287 euros dont elle se prévaut et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée, résultant de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée de la livraison à soi-même de deux biens immobiliers achevés en 2011 et non revendus dans les deux années suivantes, dont elle a fait l'objet, à la suite d'un contrôle sur pièces, au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2013. Toutefois, l'absence de déclaration rectificative souscrite dans le délai prévu par les dispositions, citées au point 3, du I de l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts, fait obstacle à ce qu'il soit fait droit à cette demande. En outre, la SCI Bali ne saurait demander la compensation entre, d'une part, le crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle se prévaut au titre de l'année 2010, résultant de la prise en compte de la taxe déductible dont la déclaration a été initialement omise, et, d'autre part, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période distincte correspondant à l'année 2013, lesquels ne sont d'ailleurs pas contestés dans le cadre du présent litige, mais ont fait l'objet d'une demande de décharge distincte rejetée par un arrêt de cette cour devenu définitif. La SCI Bali, qui ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article 1649 quinquies C de l'ancien code général des impôts, abrogées à compter du 1er janvier 1982, n'est, en tout état de cause, pas fondée à se prévaloir de la doctrine de l'administration fiscale énoncée dans la réponse ministérielle " Valbrun " du 23 août 1975, selon laquelle " l'assujetti qui fait l'objet d'un redressement peut, dans le cadre de l'article 1649 quinquies C du code général des impôts relatif à la compensation, obtenir le bénéfice de la déduction, au titre de la taxe déductible dont il aurait omis la mention sur les déclarations déposées au cours de la période soumise à redressement ", dès lors, ainsi qu'il vient d'être dit, que le présent litige n'a pas pour objet la contestation des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de l'année 2013. 8. En dernier lieu, la société requérante ne saurait, dans le cadre du présent litige relevant du contentieux d'assiette, dont elle a saisi le juge de l'impôt à la suite de la décision de rejet, citée au point 1, du 30 mai 2017, utilement se prévaloir de la faculté ouverte à l'administration par les dispositions de l'article R. 211-1 du livre des procédures fiscales, de prononcer d'office le dégrèvement ou la restitution d'impositions qui n'étaient pas dues postérieurement à l'expiration du délai de réclamation. 9. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Bali n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la SCI Bali est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière (SCI) Bali et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ; - Mme Dominique Bureau, première conseillère ; - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : D. Bureau Le président de la formation de jugement, Signé : M. A... La greffière, Signé : S. Pinto-Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière Suzanne Pinto Carvalho 2 No20DA00652
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Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959 ; - le code général des impôts ; - le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A... a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012. Le directeur départemental des finances publiques du Var a conclu au non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de sa demande. Par un jugement n° 1900965 du 10 mai 2021, le tribunal administratif de Toulon a, d'une part, constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige, pour un montant total de 283 612 euros en droits et pénalités et, d'autre part, rejeté le surplus de ses conclusions à fin de décharge. M. A... doit être regardé comme relevant appel du jugement du 10 mai 2021 en tant que le tribunal administratif de Toulon a rejeté, par son article 3, le surplus de ses conclusions tendant à ce qu'il soit déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012. Il demande également à la Cour de condamner l'Etat à lui payer une indemnité d'un montant de 10 000 euros en réparation de ses préjudices financiers et moraux. Sur les conclusions à fin de décharge : En ce qui concerne le domicile fiscal de M. A... au cours de l'année 2012 : 2. Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut, par elle-même, directement servir de base légale à une imposition. Par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale. S'agissant de l'application de la loi fiscale française : 3. Aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française ". Aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques (...) ". 4. Il résulte de l'instruction, et notamment des formulaires administratifs que M. A... a renseignés au cours de l'année 2011, comme son certificat d'immatriculation de scooter mentionnant une adresse à Cogolin (Var), de son bail d'habitation pour une villa à Gassin conclu en septembre 2012 et du contrat d'assurance de ce bien en tant qu'habitation principale, mais aussi de ses relevés de consommation d'électricité qui révèlent un usage régulier de cette énergie de janvier à décembre 2012 ainsi que de ses relevés bancaires portant sur les années 2008 à 2012, que M. A... avait, au titre de l'année 2012, son foyer et le lieu de son séjour principal en France. S'il réitère en appel ses arguments selon lesquels il justifie avoir occupé un studio appartenant à sa mère sur le territoire allemand et qu'il a réglé des cotisations sociales en Allemagne en 2012, ces éléments ne suffisent pas à démontrer qu'il y avait établi, cette année-là, son foyer ou le lieu de son séjour principal. Par ailleurs, il ne justifie pas plus en appel qu'il ne l'avait fait en première instance, que son activité professionnelle liée à l'entreprise qu'il gérait en Allemagne présentait un caractère principal. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé, par les points 5 à 7 de leur jugement dont il convient d'adopter les motifs, que le domicile fiscal de M. A..., au sens des dispositions précitées de l'article 4 B du code général des impôts, se situait en France au titre de l'année 2012. Par suite, il était passible de l'impôt sur le revenu en France au titre de l'année 2012, sous réserve que les stipulations de la convention conclue entre la France et l'Allemagne en vue d'éviter les doubles impositions ne s'y opposent. S'agissant de l'application de la convention fiscale franco-allemande : 5. Aux termes de l'article 1er de la convention fiscale signée le 21 juillet 1959 entre la France et l'Allemagne : " (1) La présente Convention a pour but de protéger les résidents de chacun des Etats contractants contre les doubles impositions qui pourraient résulter de la législation de ces Etats en matière d'impôts prélevés directement sur le revenu ou sur la fortune ou à titre de contribution des patentes ou de contributions foncières, par les Etats contractants (...). / (2) Sont considérés comme impôts visés par la présente Convention : / (...) 2. En ce qui concerne la République fédérale d'Allemagne : a) Die Einkommensteuer (impôt sur le revenu) ; b) Die Körperschaftsteuer (impôt sur les sociétés) ; c) Die Abgabe Notopfer Berlin (impôt " sacrifice pour Berlin ") ; d) Die Vermögensteuer (impôt sur la fortune) ; e) Die Gewerbesteuer (contribution des patentes) ; f) Die Grundsteuer (contribution foncière). / (3) La présente Convention s'applique à tous autres impôts analogues ou semblables par leur nature qui pourront être institués, après sa signature, dans l'un des Etats contractants (...). ". Aux termes de l'article 2 de cette convention : " 4. a) Au sens de la présente convention, on entend par " résident d'un Etat contractant " toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère analogue. / b) Lorsque, selon la disposition de l'alinéa a) ci-dessus, une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, le cas est résolu d'après les règles énoncées ci-dessous : / (aa) Cette personne est réputée résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent. Lorsqu'elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans chacun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) ; / (...) ". Selon l'article 2 § 4 a) de cette convention : " Au sens de la présente convention, on entend par " résident d'un Etat contractant " toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère analogue ". 6. D'une part, il résulte de la définition figurant au a) du § 4 de l'article 2 cité au point précédent, alors même que la convention franco-allemande ne précise pas que l'expression " résident d'un Etat contractant " ne comprend pas les personnes qui ne sont assujetties à l'impôt dans cet Etat que pour les revenus de sources situées dans cet Etat ou pour la fortune qui y est située, que l'assujettissement à un impôt dans un Etat ne suffit pas à démontrer que le contribuable serait assujetti dans cet Etat en raison de son domicile, de sa résidence ou d'un lien personnel analogue et non en raison de la seule existence de revenus trouvant leur source dans cet Etat. Par suite, la seule circonstance, à la supposer établie, que M. A... aurait été soumis à l'impôt sur le revenu en Allemagne au titre de l'année d'imposition en litige ne suffirait pas, par elle-même, à lui conférer la qualité de résident allemand au sens des stipulations précitées. Par ailleurs, et ainsi que le fait valoir le ministre en défense sans être contredit, le requérant se borne à produire un document, librement traduit, au terme duquel l'administration fiscale allemande constate qu'il ne doit payer aucun impôt sur le revenu en Allemagne et lui rembourse un trop-perçu. Cette pièce n'est pas de nature à elle seule à justifier l'assujettissement de M. A... à l'impôt en Allemagne au cours de l'année en litige. 7. D'autre part, il résulte des stipulations précitées que toute résidence dont une personne dispose de manière durable est pour elle, au sens de la convention, un foyer d'habitation permanent. Or, et ainsi que l'a jugé le tribunal par des motifs qui ne sont pas sérieusement contestés par l'appelant, qui se borne à soutenir sans le justifier que les revenus tirés durant l'année 2012 provenaient de son activité principale en Allemagne, il résulte de l'instruction que M. A... disposait, en 2012, d'un foyer d'habitation permanent en France où il avait établi son lieu d'habitation principale, le centre de ses intérêts économiques et celui de ses intérêts vitaux, tandis qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'il disposait, en Allemagne, d'un tel foyer. Dès lors, devant être regardé comme domicilié en France au titre de l'année 2012 et y avoir son foyer d'habitation permanent ainsi que le centre de ses intérêts économiques et vitaux au sens des stipulations de la convention franco-allemande, il doit être réputé résident de l'Etat français. En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition : 8. En premier lieu, le requérant ne conteste pas que l'imposition en litige est celle maintenue par l'administration fiscale telle que figurant en annexe de la réponse aux observations du contribuable n° 3926 du 29 mai 2017 faisant suite à la proposition de rectification du 16 décembre 2015. Dans ces conditions et comme l'a exactement jugé le tribunal, l'irrégularité de la proposition de rectification du 31 mai 2017 est sans conséquence sur la régularité de la procédure d'imposition afférente aux impositions restant en litige, qui résultent de la seule proposition de rectification du 16 décembre 2015. 9. En second lieu, aux termes de l'article L. 80 F du livre des procédures fiscales : " Pour rechercher les manquements aux règles de facturation auxquelles sont soumis les assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée (...) les agents des impôts ayant au moins le grade de contrôleur peuvent se faire présenter les factures, la comptabilité matière ainsi que les livres, les registres et les documents professionnels pouvant se rapporter à des opérations ayant donné ou devant donner lieu à facturation et procéder à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation. Ils peuvent également, lorsque l'authenticité de l'origine, l'intégrité du contenu et la lisibilité des factures sont assurées par les contrôles prévus au 1° du VII de l'article 289 du code général des impôts, accéder à l'ensemble des informations, documents, données, traitements informatiques ou systèmes d'information constitutifs de ces contrôles et à la documentation décrivant leurs modalités de réalisation (...). Les agents de l'administration peuvent obtenir ou prendre copie, par tout moyen et sur tout support, des pièces se rapportant aux opérations ayant donné ou devant donner lieu à facturation. Si les contrôles prévus au 1° du VII du même article 289 sont effectués sous forme électronique, les assujettis sont tenus de les présenter sous cette forme. Les agents de l'administration peuvent prendre copie des informations ou documents de ces contrôles et de leur documentation par tout moyen et sur tout support. Ils peuvent recueillir sur place ou sur convocation des renseignements et justifications. Ces auditions donnent lieu à l'établissement de comptes rendus d'audition (...) ". 10. Il résulte de l'instruction que, d'une part, la société Contec, gérée par M. A..., a fait l'objet lors d'un contrôle de facturation mis en œuvre par l'administration fiscale sur le fondement des articles L. 80 F et L. 80 H du livre des procédures fiscales et que, d'autre part, M. A... a été avisé par l'administration fiscale de la tenue d'un examen de sa situation fiscale personnelle (ESFP) par un courrier daté du 8 avril 2015. Si le requérant soutient que l'administration a excédé les prérogatives qu'elle détient du droit d'enquête en faisant valoir qu'il ressort du compte-rendu d'audition du 20 janvier 2015 que les enquêteurs ont rapproché " les factures des enregistrements comptables et des mouvements enregistrés sur les relevés bancaires ", une telle circonstance est, ainsi que l'a jugé le tribunal sans qu'il n'articule de critique à cet égard, inopérante. Il y a donc lieu d'adopter les motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 15 et 16 du jugement attaqué. En ce qui concerne le bien-fondé des impositions : 11. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ". 12. Il résulte de l'instruction que M. A... n'a pas souscrit, au titre de l'année 2012, de déclaration de revenus en France en dépit de la mise en demeure qui lui a été adressée à cette fin le 20 mars 2015 et qu'il a, ainsi, régulièrement été taxé d'office. Dès lors, il lui incombe d'établir l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration. 13. M. A... soutient que les facturations remises en cause par l'administration fiscale au titre de l'impôt sur les sociétés auxquelles est assujettie la société Contec, dont il est l'unique gérant, correspondent à des prestations réelles, justifiées et réalisées à son profit. 14. Il résulte toutefois de l'instruction que M. A... ne justifie pas l'inscription des crédits du compte courant d'associés ouvert à son nom, d'un montant de 92 023 euros, au titre de l'exercice 2012, en l'absence de justificatif de nature à rattacher ces dépenses à l'activité de la société Contec. Par ailleurs, l'administration fiscale a estimé que M. A... faisait un usage personnel à hauteur de 60% et professionnel à hauteur de 40 % du logement loué au nom de la SARL Contec et a, par conséquent, exclu des charges déductibles de la société la part du loyer correspondant à l'utilisation privée du logement faite au titre de l'année 2012. Si le requérant soutient qu'il versait un loyer à cette société, dont il est l'unique gérant, il ne le justifie en tout état de cause pas. 15. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme ayant établi l'existence et l'appréhension par M. A... de la somme de 99 589 euros. 16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté le surplus de sa demande après avoir décidé, par son article 1er, qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige pour un montant de 283 612 euros. Sur les conclusions indemnitaires : 17. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. (...) ". 18. Il résulte de l'instruction que la présentation devant la Cour par M. A... des conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement de dommages et intérêts n'a pas été précédée d'une demande indemnitaire adressée à l'administration fiscale et ayant un tel objet. En conséquence, ainsi que le soutient le ministre, ces conclusions sont irrecevables. Par suite, elles doivent être rejetées. Sur les frais liés au litige : 19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée à ce titre par M. A.... D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient : - Mme Massé-Degois, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Point, premier conseiller. - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. 2 N° 21MA02522
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner le centre hospitalier (CH) de Hyères à lui verser une somme de 826 196,15 euros en réparation des préjudices subis en lien avec la prise en charge de sa mère au sein de cet établissement de santé le 31 mai 1997. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Var a demandé au tribunal de condamner le CH de Hyères à lui verser la somme de 40 167,45 euros au titre des débours exposés pour son assuré M. B... et la somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. Par un jugement n° 1803633 du 20 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulon a condamné le CH de Hyères à payer, à M. B..., 252 477,22 euros, à la CPAM du Var 39 346,62 euros au titre des débours outre 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, et a mis les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 720 euros, à la charge définitive du CH de Hyères. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 septembre 2020 et le 27 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Bourgin, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Toulon en portant à 983 858,94 euros le montant de l'indemnité mise à la charge du CH de Hyères ou, à titre subsidiaire, à 826 771,63 euros et de faire application du barème publié par la Gazette du Palais en 2020 pour l'indemnisation des préjudices futurs ; 2°) de fixer le point de départ des intérêts au taux légal au 31 août 2009, date d'enregistrement de la requête en appel de ses parents, ou, à titre subsidiaire, à compter du 31 mai 2015, date de consolidation de son état de santé ; 3°) d'ordonner l'exécution provisoire de toutes les dispositions de la décision à intervenir ; 4°) de mettre à la charge du CH de Hyères une somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens de la présente instance. Il soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors que sa lecture ne permet pas de connaître le calcul effectué pour aboutir à la somme, avant réduction de l'indemnité, de 137 605 euros allouée au titre de l'assistance pour tierce personne pour la période du 31 mai 2000 au 31 mai 2015 ; - le jugement est insuffisamment motivé en ce que le tribunal n'a aucunement exposé les motifs qui l'ont conduit à rejeter sa demande d'indemnisation au titre de l'assistance par une tierce personne après la consolidation de son état de santé ; - enfin, le jugement est insuffisamment motivé dans la mesure où le tribunal n'a pas précisé le coût journalier retenu pour déterminer l'indemnité allouée au titre du déficit fonctionnel temporaire ; - la responsabilité du CH de Hyères a été reconnue par un arrêt définitif de cette cour du 25 juin 2015 qui a évalué le taux de perte de chance à 50 % en raison du défaut d'information de sa mère sur les risques d'un accouchement prématuré par voie basse d'un enfant en position caudale ; - contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ses frais de médecin-conseil doivent être indemnisés à hauteur de 720 euros, et ses frais d'avocat à hauteur de 1 500 euros ; - c'est à tort que le tribunal n'a pas alloué d'indemnité au titre de l'assistance par une tierce personne pour les trois premières années de sa vie et il a, à tort également, fait application d'un taux horaire insuffisant ; il y a par conséquent lieu de porter à la somme de 150 018,07 euros l'indemnité correspondant aux frais de l'assistance par une tierce personne avant consolidation de son état de santé ou, à titre subsidiaire, à la somme de 130 887,30 euros ; - l'indemnité allouée au titre de l'assistance par une tierce personne à titre viager doit être portée à 528 354,27 euros ou, subsidiairement, à 408 389,75 euros, dès lors que ses besoins sont de deux heures par jour ; - les frais de véhicule adapté seront indemnisés par une somme totale de 144 214,08 euros ; - c'est à tort que le tribunal a refusé d'indemniser le préjudice scolaire qui doit être évalué à la somme de 10 000 euros ; - l'indemnisation allouée au titre du préjudice lié au déficit fonctionnel temporaire, dont le mode de calcul n'a pas été explicité par le tribunal, doit être réévaluée à la somme de 58 052,52 euros, ou, à titre subsidiaire, à la somme de 40 060,25 euros ; - contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le préjudice esthétique temporaire, évalué à 3,5 sur une échelle de 1 à 7, doit être indemnisé à hauteur de 10 000 euros ; - l'indemnité allouée au titre du préjudice d'agrément doit être portée à 20 000 euros ; - c'est à tort que le tribunal a jugé que le préjudice sexuel n'était pas établi ; l'indemnisation de ce poste de préjudice doit être évaluée à la somme de 12 500 euros ; - de même, c'est à tort que le tribunal a jugé que le préjudice d'établissement n'était pas établi ; ce poste de préjudice doit être indemnisé par une somme de 50 000 euros ; - le point de départ des intérêts doit être fixé non pas au 15 février 2017, mais au 31 août 2009, date d'enregistrement de la requête en appel de ses parents ou, à titre subsidiaire, à compter du 31 mai 2015, date de consolidation de son état de santé. Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2020, le CH de Hyères, représenté par la SELARL Abeille et associés, demande à la cour : 1°) de réformer le jugement attaqué sauf en ce qu'il l'a condamné à indemniser M. B... sous forme de rente, fait application du barème de capitalisation de la Gazette du Palais de 2018 et fixé comme point de départ des intérêts le 15 février 2017 avec capitalisation à compter du 16 février 2018 ; 2°) de débouter M. B... du surplus de ses demandes ; 3°) de mettre à la charge de l'appelant, outre les dépens, une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - M. B... n'établit pas que les frais divers n'auraient pas été pris en charge par un organisme de protection juridique et ne produit, en tout état de cause, aucun justificatif relatif à ces dépenses ; - aucune somme ne saurait être accordée à M. B... au titre de l'assistance par une tierce personne pour la période comprise entre sa naissance et ses trois ans dès lors qu'il n'est pas rapporté des besoins d'assistance qui seraient sensiblement différents de ceux d'un enfant qui n'aurait pas subi de tels préjudices ; - le taux horaire de l'assistance par une tierce personne non spécialisée est de 13 euros et les prestations versées au titre de l'AEEH doivent être déduites de l'indemnisation octroyée pour ce poste de préjudice ; - le préjudice lié à l'assistance par une tierce personne à titre viager doit être réparé sous forme de rente trimestrielle d'un montant de 1 183 euros ; - M. B... ne pouvant prétendre à l'indemnisation de l'acquisition du véhicule, seul le surcoût lié à l'aménagement du véhicule d'une boîte automatique et d'un frein électrique pourront être pris en charge, ainsi que l'a jugé le tribunal ; - il ne ressort pas du rapport d'expertise que M. B... aurait subi un préjudice scolaire, en outre, aucune preuve de perte d'année d'étude ou de déscolarisation n'est rapportée ; - le déficit fonctionnel temporaire, calculé sur une base mensuelle de 690 euros, pourrait être réparé par une somme de 40 060,25 euros après application du taux de perte de chance ; - le préjudice esthétique temporaire doit être indemnisé de façon globale au sein du préjudice esthétique permanent, lequel a déjà été indemnisé par la cour dans son arrêt du 25 juin 2015 ; - le montant sollicité par M. B... au titre du préjudice d'agrément est largement supérieur à ce qui est habituellement alloué par les cours et tribunaux, et la somme allouée par le tribunal devra être confirmée ; - le rapport d'expertise ne retient pas de préjudice sexuel, et aucun des trois types de préjudice de nature sexuelle n'est établi ; - le préjudice d'établissement n'est pas démontré ; à titre subsidiaire, la cour ne pourrait octroyer une somme supérieure à 10 000 euros à ce titre ; - la condamnation au paiement des intérêts au taux légal ne peut être accordée que pour la période du 20 juillet 2020 au 10 août 2020. La CPAM du Var, par une lettre enregistrée le 23 octobre 2020, a indiqué à la Cour ne pas intervenir dans la présente instance. Par ordonnance du 11 août 2021, la clôture immédiate de l'instruction a été prononcée. Un mémoire présenté pour le CH de Hyères a été enregistré le 10 septembre 2021, après la clôture de l'instruction, et n'a pas été communiqué. Un courrier présenté pour la CPAM du Var a été enregistré le 10 mai 2022, après la clôture de l'instruction, et n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'action sociale et des familles ; - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 ; - l'arrêté interministériel du 30 décembre 2021 relatif au tarif minimal mentionné au I de l'article L. 314-2-1 du code de l'action sociale et des familles et fixant son montant pour 2022 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteure, - les conclusions de M. Gautron, rapporteur public, - et les observations de Me Bourgin, représentant M. B..., et de Me Cuordifede, représentant le CH de Hyères. Considérant ce qui suit : 1. M. B... est né prématurément le 31 mai 1997 au CH de Hyères, par voie basse et en présentation de siège décomplété, en état de mort apparente avec une anoxie cérébrale pouvant être estimée à six minutes ainsi qu'une lésion du plexus brachial droit. Par un arrêt n° 09MA03310 du 25 juin 2015, la cour a retenu une faute commise par le CH de Hyères pour défaut d'information de la mère de M. B... sur les risques respectifs d'un accouchement par voie basse ou par césarienne en cas de présentation par le siège et a évalué à 50 % le taux de perte de chance d'éviter les complications dont il a été victime. Par le même arrêt, et avant la consolidation de son état de santé, la cour a indemnisé M. B... de ses préjudices liés au déficit fonctionnel permanent, aux souffrances endurées, au préjudice esthétique et au préjudice professionnel par des indemnités d'un montant total de 35 000 euros. A la suite d'une demande d'expertise médicale adressée au tribunal administratif de Toulon aux fins d'évaluer les préjudices non encore indemnisés, dont le rapport a été déposé le 29 novembre 2017 devant cette juridiction, M. B..., après avoir vainement sollicité l'indemnisation de ces préjudices auprès du directeur du CH de Hyères, a demandé audit tribunal de condamner le CH de Hyères à lui verser une somme de 826 196,15 euros. Par un jugement du 20 juillet 2020, le tribunal a condamné le CH de Hyères à payer à M. B... une indemnité de 252 477,22 euros, cette somme portant intérêts à compter du 15 février 2017, et rejeté le surplus de ses conclusions. M. B... relève appel de ce jugement afin que l'indemnité en capital octroyée par les premiers juges soit portée, en l'état de ses dernières écritures, à la somme de 983 858,94 euros à titre principal et de 826 771,63 euros à titre subsidiaire et que le point de départ des intérêts au taux légal soit fixé au 31 août 2009 ou subsidiairement le 31 mai 2015. Par la voie de l'appel incident, le CH de Hyères demande à la cour " de réformer le jugement rendu par le tribunal administratif de Toulon sauf en ce qu'il " l'a condamné " à indemniser M. B... sous forme de rente, et fait application du barème de capitalisation de la Gazette du palais de 2018 " et l'a condamné " aux intérêts légaux à compter du 15 février 2017 avec capitalisation à compter du 16 février 2018 ". I - Sur la régularité du jugement : 2. Il résulte des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont exposé, s'agissant de l'indemnisation de l'assistance par une tierce personne du 31 mai 2000 au 31 mai 2015, les différentes périodes au cours desquelles M. B... a eu besoin d'une telle aide, le nombre d'heures par jour qui lui était nécessaire pour chacune de ces périodes, le taux horaire fixé à 13 euros, ainsi que la non prise en compte des congés payés, des dimanches et des jours fériés prévus par la règlementation du travail. Ce faisant, ils ont suffisamment motivé leur jugement à cet égard. 3. Après avoir rappelé que M. B... demandait la prise en compte d'une assistance par tierce personne à hauteur de 14 heures hebdomadaires après consolidation de son état de santé, les premiers juges ont relevé qu'il résultait " toutefois de l'instruction que le requérant n'aura besoin que d'une aide viagère à compter du 1er juin 2015 qu'à raison d'une heure par jour ", motivant ainsi suffisamment leur rejet de sa demande présentée à ce titre. 4. Contrairement à ce que soutient M. B..., le tribunal, qui a procédé à une juste appréciation du préjudice résultant du déficit fonctionnel temporaire et n'avait pas, de ce fait, à préciser le coût journalier à prendre en compte pour procéder à ce calcul, a suffisamment motivé sa décision sur ce point. II- Sur le bien-fondé du jugement : II-1 Sur les préjudices de M. B... : 5. Par un arrêt n° 09MA03310 du 25 juin 2015, la cour a retenu un défaut d'information de la mère de M. B... sur les risques respectifs d'accouchements réalisés par voie basse et par césarienne en cas de présentation par le siège, et a fixé le taux de perte de chance d'éviter les complications dont M. B... a été victime à 50 %. Par suite, les préjudices subis par M. B... doivent être indemnisés par le CH de Hyères à hauteur de 50 % du dommage corporel advenu. II-1.1 En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux : II-1.1.1. S'agissant des frais divers : 6. S'il résulte de l'instruction que M. B... a exposé la somme de 720 euros pour l'intervention du médecin-conseil qui l'a assisté lors des opérations d'expertise, il ne produit, en revanche, aucun justificatif démontrant que, comme il le soutient, il a dû payer à son conseil des honoraires d'un montant de 1 500 euros pour son assistance à l'occasion de cette même expertise. Il y a donc lieu, en l'espèce, de limiter à la somme de 720 euros l'indemnité qui lui est due au titre des frais exposés pour les besoins de l'expertise laquelle, eu égard à sa nature, ne doit pas supporter de réfaction correspondant au taux de perte de chance retenu par le précédent arrêt de la cour. II-1.1.2. S'agissant de l'assistance par une tierce personne : 7. Lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire déterminé, au vu des pièces du dossier, par référence, soit au montant des salaires des personnes à employer augmentés des cotisations sociales dues par l'employeur, soit aux tarifs des organismes offrant de telles prestations, en permettant le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat et sans être lié par les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée par un membre de la famille ou un proche de la victime. II-1.1.2.1. Quant à la période comprise entre le 31 mai 1997 et le 31 mai 2015 : 8. En premier lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'état de M. B... aurait nécessité une assistance par une tierce personne durant les trois premières années de sa vie, dès lors que, comme les premiers juges l'ont retenu à juste titre, il n'est pas établi qu'il aurait eu, durant cette période, besoin d'une surveillance dépassant les besoins spécifiques d'un enfant de cet âge. 9. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que M. B... a eu besoin d'une assistance par une tierce personne pour les actes de la vie courante à raison de 2 heures 30 par jour du 31 mai 2000 au 31 mai 2006, de 2 heures par jour du 1er juin 2006 au 31 mai 2011 et d'1 heure 30 par jour du 1er juin 2011 au 31 mai 2015, date de la consolidation de son état de santé. Cette assistance lui ayant été apportée par sa mère et non par du personnel spécialisé, M. B..., qui ne justifie pas de l'existence de besoins spécifiques liés à sa situation personnelle, n'est pas fondé à soutenir que le coût horaire de cette aide aurait dû être fixé à un montant supérieur à celui de 13 euros retenu par les premiers juges, qui tient compte du taux horaire moyen du salaire minimum interprofessionnel de croissance au cours de ces périodes, augmenté des charges sociales. Toutefois, et dès lors qu'il n'y a pas lieu de tenir compte, pour l'évaluation de ce poste de préjudice, de la circonstance que cette assistance lui a été apportée par un membre de la famille, il est fondé à soutenir qu'en fondant leurs calculs sur la base d'une année de 365 jours, et non de 412 jours pour tenir compte des congés payés et des jours fériés prévus par le code du travail, les premiers juges n'ont pas correctement déterminé le montant de l'indemnité qui lui était due à ce titre qui, eu égard à ce qui vient d'être dit, doit être évaluée à la somme de 166 036 euros. Il y a donc lieu de lui allouer à ce titre une indemnité, tenant compte du taux de perte de chance, de 83 018 euros pour la période du 31 mai 2000 au 31 mai 2015. 10. D'autre part, en vertu des principes qui régissent l'indemnisation par une personne publique des victimes d'un dommage dont elle doit répondre, il y a lieu de déduire de l'indemnisation allouée à la victime d'un dommage corporel au titre des frais d'assistance par une tierce personne le montant des prestations dont elle bénéficie par ailleurs et qui ont pour objet la prise en charge de tels frais. Il en est ainsi alors même que les dispositions en vigueur n'ouvrent pas à l'organisme qui sert ces prestations un recours subrogatoire contre l'auteur du dommage. La déduction n'a toutefois pas lieu d'être lorsqu'une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement au bénéficiaire s'il revient à meilleure fortune. 11. Les règles rappelées au point précédent ne trouvent à s'appliquer que dans la mesure requise pour éviter une double indemnisation de la victime. Par suite, lorsque la personne publique responsable n'est tenue de réparer qu'une fraction du dommage corporel, notamment parce que la faute qui lui est imputable n'a entraîné qu'une perte de chance d'éviter ce dommage, la déduction ne se justifie, le cas échéant, que dans la mesure nécessaire pour éviter que le montant cumulé de l'indemnisation et des prestations excède le montant total des frais d'assistance par une tierce personne. 12. Il résulte de l'instruction que le total des prestations versées au titre de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé sur la période du 31 mai 2000 au 31 mai 2015 s'élève à la somme de 29 468,72 euros. Ainsi, et dès lors que le montant cumulé de ces prestations et de l'indemnité de 83 018 euros déterminée comme il a été dit au point 9 demeure inférieur au montant total de ce chef de préjudice, évalué à 166 036 euros, M. B... est fondé à soutenir qu'il y a lieu de ne procéder à aucune réfaction sur l'indemnité qui lui est due au titre de l'assistance par une tierce personne au cours de la période considérée. II-1.1.2.2. Quant à la période du 1er juin 2015 à la date de lecture du présent arrêt : 13. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, qu'à compter de la date de consolidation de son état de santé, M. B... a besoin d'une assistance par une tierce personne de 7 heures hebdomadaires, soit pendant une heure par jour et non, comme il le soutient sans en apporter la démonstration, pendant deux heures par jour. Il n'établit par ailleurs pas avoir des besoins particuliers susceptibles de justifier l'assistance par du personnel spécialisé devant être rémunéré à un taux horaire supérieur à 13 euros jusqu'au 31 décembre 2017, à 14 euros jusqu'au 31 décembre 2020 et à 15 euros à compter de cette dernière date. Eu égard à ces taux horaires, et en faisant application des modalités de calcul définies au point 9, il y a lieu d'évaluer ce poste de préjudice jusqu'à la date du présent arrêt à la somme totale de 40 153 euros soit, en tenant compte du taux de perte de chance, la somme de 20 076,50 euros. 14. Le total des prestations versées au titre de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé sur la période du 1er juin 2015 au 31 octobre 2016 s'élève à la somme de 2 210,74 euros. Ainsi, et dès lors que le montant cumulé de ces prestations et de l'indemnité de 20 076,50 euros déterminée comme il a été dit au point précédent inférieur au montant total de ce chef de préjudice, évalué à 40 153 euros, il y a lieu de ne procéder à aucune réfaction sur le montant de l'indemnité qui lui est due pour cette période. II-1.1.2.3. Quant à l'assistance par une tierce personne future : 15. Pour la période postérieure au présent arrêt, M. B... aura besoin, ainsi qu'il a été dit au point 13, d'une assistance hebdomadaire de 7 heures. En appliquant, pour une aide non spécialisée le taux horaire de 22 euros fixé par l'arrêté du 30 décembre 2021 pris pour l'application de l'article L. 314-2-1 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de l'article 44 de la loi du 23 décembre 2021, sur la base de 365 jours dès lors que cette moyenne horaire est réputée intégrer l'ensemble des charges sociales ainsi que les droits à congés payés des salariés, il convient de retenir un montant annuel de 4 015 euros après application du taux de perte de chance. Il y a lieu de capitaliser cette somme par application du coefficient de 54,404 issu du barème 2020 de la gazette du palais et correspondant à la rente versée à un homme de 25 ans, soit l'âge de M. B... à la date du présent arrêt. Dès lors, le préjudice subi à ce titre à compter de la date de lecture du présent arrêt s'élève à la somme de 218 432,06 euros. M. B... est ainsi fondé à soutenir que l'indemnité qui lui a été allouée par le tribunal est insuffisante. II-1.1.3. S'agissant des frais d'acquisition et d'adaptation du véhicule : 16. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que l'état de santé de M. B... rend nécessaire l'utilisation d'un véhicule adapté à son handicap. Ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, l'appelant est seulement fondé à être indemnisé des frais liés au surcoût d'acquisition d'un véhicule adapté à ses besoins et des frais d'adaptation de ce véhicule et non du coût total d'acquisition de ce véhicule. Par suite, eu égard aux éléments versés aux débats, ainsi que le fait valoir le CH de Hyères, les premiers juges n'ont pas fait une insuffisante appréciation de ce poste de préjudice en l'évaluant à la somme de 26 374,70 euros après application du taux de perte de chance de 50 % sur la base d'un surcoût de 6 600 euros occasionné par l'aménagement d'un véhicule avec une boîte à vitesse automatique et un frein à main électrique ainsi que cela ressort du rapport d'expertise en tenant compte du prix de l'euro de rente viagère tel que défini par le barème de capitalisation des rentes actualisé en 2018 publié à la Gazette du Palais, soit 47,954, et du coût annuel d'un tel équipement basé sur un renouvellement du véhicule tous les six ans. II-1.1.4. S'agissant du préjudice scolaire : 17. Il y lieu de rejeter la demande d'indemnisation du préjudice scolaire que M. B... soutient avoir subi par adoption des motifs retenus par les premiers juges qui y ont exactement répondu au point 9 de leur jugement, le requérant ne produisant en appel aucun élément nouveau ou déterminant distinct de ceux soumis à leur appréciation. II-1.2. En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux : II-1.2.1. S'agissant du déficit fonctionnel temporaire : 18. Il résulte de l'instruction que M. B... a subi un déficit fonctionnel temporaire total en lien avec le défaut d'information du CH de Hyères pendant 36 jours du 31 mai au 6 juillet 1997, puis un déficit fonctionnel temporaire partiel évalué à 60 % pendant 3 250 jours du 7 juillet 1997 au 31 mai 2006, à 50 % pendant 1 825 jours du 1er juin 2006 au 31 mai 2011 et à 40 % pendant 1 460 jours du 1er juillet 2011 au 31 mai 2015. Les premiers juges n'ont pas fait une réparation insuffisante de ce préjudice en allouant à la victime la somme de 29 004,16 euros, tenant compte du taux de perte de chance, la circonstance qu'ils ont écrit " 250 jours " au lieu de 3 250 jours pour la période du 7 juillet 1997 au 31 mai 2006 ne résultant que d'une simple erreur de plume qui est demeurée sans incidence sur le calcul de l'indemnisation due à ce titre. II-1.2.2. S'agissant du préjudice esthétique : 19. C'est à bon droit les premiers juges, après avoir relevé que le préjudice esthétique temporaire de M. B... avait déjà été indemnisé par l'arrêt précité du 25 juin 2015, et que l'intéressé n'établissait pas qu'il aurait subi un préjudice esthétique temporaire différent de celui déjà réparé, ont rejeté sa demande d'indemnisation. M. B... ne faisant valoir devant la cour aucun élément distinct de ceux soumis à leur appréciation, il y a lieu de rejeter la demande d'indemnisation de ce poste de préjudice par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 12 de leur jugement. II-1.2.3. S'agissant du préjudice d'agrément : 20. Contrairement à ce que soutient M. B..., les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante de son préjudice d'agrément en le fixant au point 13 de leur jugement à la somme de 2 500 euros après application du taux de perte de chance de 50 % eu égard à la gêne éprouvée pour la pratique d'activités sportives impliquant les membres supérieurs. II-1.2.4. S'agissant du préjudice sexuel : 21. M. B..., en raison du handicap de son bras droit, subit un préjudice sexuel pour lequel la réparation doit être fixée à 1 500 euros après application du taux de perte de chance. II-1.2.5. S'agissant du préjudice d'établissement : 22. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, il ne résulte pas de l'instruction, notamment pas du rapport d'expertise, que M. B... serait empêché de fonder une famille en raison de son handicap. Il n'est, dans ces conditions, pas fondé à solliciter l'indemnisation d'un préjudice d'établissement. 23. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à demander que le montant de l'indemnité de 252 477,22 euros à laquelle le tribunal a condamné le CH de Hyères soit porté à 381 625,42 euros. En outre, la demande de M. B... tendant à l'exécution provisoire du présent arrêt doit être rejetée dès lors que celui-ci présente un caractère exécutoire en vertu des dispositions de l'article L. 11 du code de justice administrative. II-2 Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts : 24. Les intérêts sur l'indemnité réparatrice à verser à M. B... sont dus, ainsi que l'ont retenu les premiers juges au point 22 du jugement attaqué, à compter de la date à laquelle ce dernier a sollicité une provision en référé par une demande enregistrée le 15 février 2017 et non, ainsi que le soutient M. B..., à compter du 31 août 2009, date d'enregistrement de la requête d'appel dans la première instance d'indemnisation de ses préjudices, ou de la date de consolidation de son état de santé, ni même à compter, ainsi que le soutient le CH de Hyères dans ses écritures devant la cour sans pour autant demander la réformation du jugement à cet égard dans ses conclusions, du 20 juillet 2020, date de lecture du jugement attaqué. Comme l'ont également retenu les premiers juges au même point 22 du jugement attaqué, la capitalisation des intérêts est due à compter du 16 février 2018, date à laquelle une année d'intérêts était échue, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date. III- Sur les demandes incidentes du CH de Hyères : 25. Ainsi qu'il a été dit au point 1 ci-dessus, le CH de Hyères demande à la cour " de réformer le jugement rendu par le tribunal administratif de Toulon sauf en ce qu'il " l'a condamné " à indemniser M. B... sous forme de rente, et fait application du barème de capitalisation de la Gazette du palais de 2018 " et l'a condamné " aux intérêts légaux à compter du 15 février 2017 avec capitalisation à compter du 16 février 2018 ". 26. D'une part, il est constant que par le jugement attaqué, le tribunal n'a pas condamné le CH de Hyères à indemniser les préjudices subis par M. B... sous forme de rente. 27. D'autre part, en ce qui concerne le point de départ des intérêts dus sur l'indemnité réparatrice allouée à M. B..., eu égard à ce qui a été dit au point 24 ci-dessus, il y a lieu de confirmer le point 22 du jugement attaqué. Dès lors, à supposer même que le CH de Hyères soit regardé, par l'argumentation développée dans ses écritures devant la cour au soutien de ses conclusions, comme sollicitant la réformation du jugement en tant que le tribunal l'a condamné " aux intérêts légaux à compter du 15 février 2017 avec capitalisation à compter du 16 février 2018 " et comme demandant application des intérêts au taux légal à compter de la date du 20 juillet 2020 qui est celle de la lecture du jugement attaqué, ces conclusions doivent être rejetées. IV- Sur les dépens : 28. La présente instance n'ayant pas occasionné de dépens, les demandes de M. B... et du CH de Hyères tendant à ce que ces derniers soient mis à la charge respective du CH de Hyères et de M. B... doivent être rejetées. V- Sur les frais liés au litige : 29. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le CH de Hyères demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du CH de Hyères une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1 : La somme de 252 477,22 euros que le centre hospitalier de Hyères a été condamné à verser à M. B... par l'article 1er du jugement n° 1803633 du tribunal administratif de Toulon du 20 juillet 2020 est portée à 381 625,42 euros. Article 2 : Le jugement n° 1803633 du tribunal administratif de Toulon du 20 juillet 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le centre hospitalier de Hyères versera à M. B... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Enzo B..., au centre hospitalier de Hyères et à la caisse primaire d'assurance maladie du Var. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient : - Mme Massé-Degois, présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Point, premier conseiller, - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022 2 N° 20MA03563 nl
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 20 août 2021, notifié le 13 septembre 2021, par lequel la préfète du Bas-Rhin a ordonné son transfert aux autorités italiennes, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et un formulaire de demande d'asile, sous astreinte de 100 euros par jour de retard au-delà de huit jours à compter de la notification du jugement et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Par un jugement n° 2106546 du 11 octobre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté de la préfète du Bas-Rhin du 20 août 2021, a enjoint à la préfète du Bas-Rhin d'enregistrer la demande d'asile et de remettre à Mme A... B... une attestation de demande d'asile portant la mention " procédure normale - première demande d'asile " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement à Me Gaudron, avocat de Mme A... B..., de la somme de 900 euros, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Mme A... B... obtienne le bénéfice de l'aide juridictionnelle et que Me Gaudron renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée sous le n° 21NC02856 le 2 novembre 2021, la préfète du Bas-Rhin demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 octobre 2021 ; 2°) de rejeter la demande présentée par Mme A... B... devant le tribunal administratif de Strasbourg. Elle soutient que : - sa requête, introduite dans le délai d'appel, est recevable ; - si la situation de grossesse de Mme A... B... pouvait affecter l'exécution de la décision de transfert, elle était en revanche sans incidence sur sa légalité ; - c'est à tort que le tribunal a jugé que le transfert de l'intéressée était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2022, Mme A... B..., représentée par Me Gaudron, conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à l'annulation de l'arrêté du 20 août 2021, par lequel la préfète du Bas-Rhin a ordonné son transfert aux autorités italiennes ; 3°) à ce qu'il soit enjoint à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et un formulaire de demande d'asile dans un délai de 8 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Elle fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 23 mai 2022. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que, la France étant devenue responsable de l'examen de la demande de protection de Mme A... B... à l'expiration du délai de six mois prévu à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, la requête est privée d'objet et il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions. Par un mémoire en réponse au moyen relevé d'office enregistré le 17 mai 2022, la préfète du Bas-Rhin, informe la cour que le transfert de la requérante n'ayant pu intervenir avant le 11 avril 2022, l'intéressé ne relève plus, depuis cette date, de la procédure Dublin, et qu'il n'y a dès lors plus lieu de statuer sur la requête. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le traité sur l'Union européenne ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; - le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B..., ressortissante somalienne, est entrée irrégulièrement en France selon ses déclarations le 15 juillet 2021 et a déposé une demande d'asile auprès de la préfecture du Bas-Rhin le 23 juillet 2021. La consultation du fichier Eurodac ayant révélé qu'elle avait précédemment sollicité l'asile auprès des autorités italiennes, ces dernières ont été saisies le 2 août 2021 d'une demande tendant à sa reprise en charge. Les autorités italiennes ont donné leur accord explicite le 10 août 2021. Par un arrêté du 20 août 2021, la préfète du Bas-Rhin a prononcé son transfert aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile. La préfète du Bas-Rhin relève appel du jugement du 11 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté et lui a enjoint d'enregistrer la demande d'asile ainsi que de remettre à Mme A... B... une attestation de demande d'asile portant la mention " procédure normale - première demande d'asile " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement. 2. Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite ". 3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code applicable au litige : " (...) II. - Lorsqu'une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert ou lorsque celle-ci est notifiée alors que l'étranger fait déjà l'objet d'une telle décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence, l'étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de la décision de transfert et de la décision d'assignation à résidence. Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans le délai prévu au III de l'article L. 512-1. (...) ". 4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date de notification à l'autorité administrative du jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale. 5. La requête de Mme A... B..., introduite le 24 septembre 2021 devant le tribunal administratif de Strasbourg a interrompu le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Italie. Ce délai a recommencé à courir à compter de la notification, le 11 octobre 2021, à la préfète du Bas-Rhin, du jugement de ce tribunal et n'a pas été interrompu par l'appel de la préfète devant la cour. Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que cet arrêté de transfert aurait été exécuté ni que ce délai aurait été prolongé, en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement du 20 août 2013. Ainsi, la France est devenue responsable de l'examen de la demande de protection internationale de Mme A... B... à la date du 11 avril 2022. Par suite, la décision de transfert étant devenue caduque postérieurement à l'introduction de l'appel et ne pouvant plus être légalement exécutée, les conclusions d'appel sollicitant l'annulation du jugement attaqué ont perdu leur objet. 6. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les autorités françaises sont devenues responsables de l'examen de la demande d'asile de Mme A... B... à compter du 11 avril 2022. Cette responsabilité découle cependant de la seule expiration du délai fixé par les dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Le présent arrêt, qui se borne à prononcer en conséquence un non-lieu à statuer sur la requête d'appel de la préfète du Bas-Rhin n'implique par elle-même aucune mesure d'exécution au sens des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative. Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par Mme A... B.... 7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de Mme A... B... tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions d'appel de la préfète du Bas-Rhin tendant à l'annulation du jugement du 11 octobre 2021 du tribunal administratif de Strasbourg. Article 2 : Le surplus des conclusions de Mme A... B... est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - M. Goujon-Fischer, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. Goujon-FischerLa présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 21NC02856
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Sous une requête enregistrée sous le numéro 1906989, l'assistance publique-hôpitaux de Marseille (AP-HM) a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'avis du 18 juin 2019 par lequel la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière a proposé de prononcer à l'encontre de M. B... A... la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans dont un an avec sursis. Sous une requête enregistrée sous le numéro 2000347, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'avis du 18 juin 2019 par lequel la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière a proposé de prononcer à son encontre la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans dont un an avec sursis en tant que la sanction proposée est trop sévère eu égard aux faits qui lui sont reprochés. Par un jugement n° 1906989, 2000347 du 12 avril 2021, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'avis du 18 juin 2019 de la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 14 juin 2021 présentée par Me Mboup, et un mémoire, enregistré le 15 mars 2022 présenté par Me Pelgrin, M. A... demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 12 avril 2021 ; 2°) de rejeter la demande de l'AP-HM devant le tribunal administratif de Marseille ; 3°) d'annuler l'avis du 18 juin 2019 de la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière en tant que la sanction qu'il propose est trop sévère eu égard aux faits qui lui sont reprochés ; 4°) d'enjoindre au directeur général de l'AP-HM de procéder au réexamen de sa situation administrative et de le réintégrer au sein de ses effectifs à compter de la notification de la décision à intervenir ; 5°) de mettre à la charge de l'AP-HM une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision du 18 mars 2019 par laquelle le directeur de l'AP-HM l'avait révoqué ayant été retirée par une décision du 8 juillet 2019 prononçant également sa réintégration, la procédure juridictionnelle dirigée contre l'avis de la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière est devenue sans objet, et le tribunal a commis une erreur de droit en considérant qu'il n'y avait pas de non-lieu à statuer ; - sa demande présentée en première instance aux fins d'annulation de l'avis du 18 juin 2019 de la commission des recours est recevable, cet avis lui faisant grief en ce que la sanction qu'il a proposée est trop sévère ; - la sanction de révocation est disproportionnée dès lors qu'il a toujours fait l'objet d'appréciations et de notations excellentes dans l'exercice de ses fonctions de technicien hospitalier ; - en outre, à la date du prononcé de la sanction de révocation, il avait formellement mis un terme à l'activité de traiteur à domicile depuis plusieurs années, celle-ci ne lui rapportant aucun revenu depuis au moins 2013, raison pour laquelle l'URSSAF avait radié définitivement son auto- entreprise en avril 2015 ; - il a entrepris d'exercer cette petite activité supplémentaire afin de faire face à ses lourdes charges et difficultés familiales ; - le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les faits reprochés étaient prescrits en application de l'article 36 de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 septembre 2021, l'AP-HM, représentée par Me Pichon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A... le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - la requête est irrecevable, M. A... ne démontrant pas d'intérêt à agir à l'encontre d'un jugement qui a fait droit à sa demande ; - la décision du 8 juillet 2019 prononçant la réintégration de M. A... n'a pas eu pour effet de retirer la décision de la commission de recours contestée ; - le recours d'un agent contre un avis de la commission de recours de la fonction publique est irrecevable ; - la sanction de la révocation n'est pas disproportionnée eu égard à la nature de la faute commise. Par ordonnance du 22 avril 2022, la clôture immédiate de l'instruction a été prononcée. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ; - la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires ; - le décret n° 2012-739 du 9 mai 2012 relatif au Conseil supérieur de la fonction publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C... ; - les conclusions de M. Gautron, rapporteur public, - et les observations de Me Pelgrin, représentant M. A..., de Me Migault, représentant l'AP-HM. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., exerçant au sein de l'AP-HM, a fait l'objet d'une sanction de révocation par une décision du directeur général de l'AP-HM du 18 mars 2019 alors que le conseil de discipline, réuni le 7 mars précédent, n'avait émis aucun avis faute de majorité sur les propositions de sanctions soumises au vote. Saisie par M. A..., la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière a, le 18 juin 2019, émis un avis selon lequel il y avait lieu de substituer à la sanction de révocation une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de deux ans, dont un avec sursis. L'AP-HM et M. A... ont chacun saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande d'annulation de ce dernier avis, l'AP-HM estimant que la sanction proposée était insuffisamment sévère, M. A... estimant au contraire qu'elle était d'une sévérité excessive. Après avoir joint les deux affaires, le tribunal administratif de Marseille, par un jugement du 12 avril 2021, a rejeté la demande de M. A... comme irrecevable et a fait droit à celle de l'AP-HM en annulant l'avis contesté. M. A... relève appel de ce jugement. Sur la recevabilité de la requête : 2. Comme l'a jugé à bon droit le tribunal, l'avis du 18 juin 2019 par lequel la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière a considéré qu'il y avait lieu de substituer à la sanction de révocation qui lui avait été infligée celle de l'exclusion de fonction pour une durée de deux ans dont un avec sursis, rendu sur sa demande, ne peut être regardée comme défavorable pour M. A... qui, par suite, n'est pas recevable à le contester par la voie du recours pour excès de pouvoir, ce dont il résulte que ses conclusions tendant à l'annulation de cet avis, réitérées en appel, doivent être rejetées. 3. En revanche, et contrairement à ce que fait valoir l'AP-HM, M. A... est recevable à contester le jugement par lequel le tribunal a fait droit à la demande de l'APHM en annulant l'avis contesté de la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière qui, comme il vient d'être dit, lui est favorable. Sur la régularité du jugement attaqué : 4. Par deux décisions du 8 juillet 2019, le directeur général de l'AP-HM a, respectivement, retiré sa décision du 18 mars 2018 portant révocation de M. A... en procédant à sa réintégration dans les effectifs de l'établissement et infligé à l'intéressé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans dont un avec sursis. Comme l'ont exactement relevé les premiers juges, la première de ces décisions n'a eu ni pour objet, ni pour effet de retirer l'avis contesté de la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en retenant qu'il y avait lieu de statuer sur la demande d'annulation de cet avis dont l'avait saisi l'APHM, le tribunal a entaché d'irrégularité le jugement attaqué. 5. Eu égard à ce qui a été dit au point 2, M. A... n'est pas non plus fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté comme irrecevable sa demande d'annulation de l'avis du 18 juin 2019 de la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 6. Aux termes de l'article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 dans sa rédaction applicable au litige : " I. Le fonctionnaire consacre l'intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. Il ne peut exercer, à titre professionnel, une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit, sous réserve des II à V du présent article. (...) ". 7. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 dans sa rédaction applicable au litige : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. ". L'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 dispose que : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...) Troisième groupe : La rétrogradation, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans ; Quatrième groupe : La mise à la retraite d'office, la révocation. (...) ". Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. 8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a créé le 1er juin 2009 une entreprise de traiteur à domicile dénommée " JPP Paella " dont il faisait la publicité sur internet à partir d'une page Facebook en utilisant comme moyen de contact le numéro du téléphone mobile mis à sa disposition par son employeur pour les besoins du service. Tout en cherchant à minimiser la portée de tels agissements au moyen d'explications qui ont varié au fil de ses déclarations, M. A..., qui ne conteste pas les faits, ne conteste pas davantage avoir créé cette activité sans avoir sollicité d'autorisation. De tels agissements, qui constituent une infraction aux dispositions rappelées ci-dessus de l'article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983, lesquelles s'imposent à l'ensemble des fonctionnaires, revêtent un caractère fautif de nature à justifier une sanction disciplinaire. 9. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., technicien hospitalier affecté au magasin de la plateforme logistique de l'AP-HM et employé depuis près de trente ans par cet établissement public, a toujours bénéficié de bonnes appréciations professionnelles sans jamais faire l'objet d'aucune sanction disciplinaire. Ainsi, et dès lors qu'il n'est pas allégué que les agissements qui lui sont reprochés ont eu un retentissement sur la réputation et ou sur le fonctionnement du service, M. A... est fondé à soutenir que la sanction de révocation qui lui a été initialement infligée est d'une sévérité excessive et, par suite, que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a annulé l'avis par lequel la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière a proposé de substituer à cette sanction une sanction du troisième groupe et ce, alors même qu'il a bénéficié de plusieurs arrêts de maladie au cours des années 2016, 2017 et 2018. 10. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par l'AP-HM devant le tribunal administratif de Marseille. 11. L'AP-HM soutient que l'avis contesté serait entaché d'erreur de droit pour avoir distingué selon le caractère lucratif ou non de l'activité privée non déclarée par M. A.... A supposer même qu'il soit assorti de précisions suffisantes pour permettre au juge d'en apprécier son bien-fondé, ce moyen manque en fait dès lors qu'il ressort des termes de l'avis de la commission des recours que les manquements qui peuvent être regardés comme établis à l'encontre de M. A... sont constitués par l'exercice d'une activité privée lucrative non déclarée. 12. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler l'article 1er du jugement attaqué du tribunal administratif de Marseille annulant l'avis du 18 juin 2019 de la commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière et de rejeter le surplus des conclusions à fin d'annulation de la requête de M. A.... Sur les conclusions aux fins d'injonction : 13. L'annulation de l'article 1er du jugement attaqué et le rejet de la demande de l'AP-HM devant le tribunal administratif de Marseille impliquent nécessairement que le directeur général de l'AP-HM procède au réexamen de la situation de M. A... et à sa réintégration au sein des effectifs de l'AP-HM. Il lui est enjoint d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la présente décision. Sur les frais liés au litige : 14. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chaque partie la charge des frais exposés sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Marseille du 12 avril 2021 est annulé. Article 2 : La demande présentée par l'AP-HM devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée. Article 3 : Il est enjoint au directeur général de l'AP-HM de réexaminer la situation de M. A... et de le réintégrer au sein des effectifs de l'AP-HM dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'assistance publique-hôpitaux de Marseille. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient : - Mme Massé-Degois, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Point, premier conseiller, - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. 2 N° 21MA02339 nl
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par une requête enregistrée sous le n° 1900453, M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) mis à sa charge, en droits et pénalités, au titre de l'année 2012. Par une requête enregistrée sous le n° 1900454, M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge, en droits et pénalités, au titre des années 2010 à 2012. Par un jugement n° 1900453, 1900454 du 1er décembre 2020, le tribunal administratif de Bastia a, d'une part, déchargé M. A... de l'amende de 1 500 euros mise à sa charge au titre de l'année 2012 et, d'autre part, rejeté la requête n° 1900453 ainsi que le surplus des conclusions de la requête n° 1900454. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er et 8 février 2021, M. A..., représenté par Me Naïm, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du 1er décembre 2020 du tribunal administratif de Bastia en tant qu'il a rejeté ses demandes ; 2°) de prononcer la décharge de la totalité des impositions sur le revenu et contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2010 à 2012 ainsi que les rappels de TVA mis à sa charge au titre des années 2012 et 2013, en droits, intérêt et pénalités ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - c'est à tort que les premiers juges n'ont pas estimé que la durée irrégulière de l'examen de la situation fiscale personnelle avait pour conséquence l'irrégularité de l'ensemble des redressements notifiés en matière de TVA et d'impôt sur le revenu ; - les redressements portant sur l'amende et les pensions alimentaires au titre des revenus de 2012 procèdent de la même procédure et de la même proposition de rectification du 1er juin 2015 alors qu'il ne peut pas y avoir, pour une même proposition de rectification, l'application de deux procédures différentes que seraient un examen contradictoire de situation personnelle et un contrôle sur pièce et qu'il ne peut pas y avoir en même temps deux procédures de contrôle portant sur la même période, les mêmes déclarations et les mêmes impositions ; - le " Cerfa n° 3924 " utilisé pour redresser les impositions mentionnées dans les deux propositions de rectifications des 25 novembre 2014 et 1er juin 2015 est celui utilisé lors des procédures de contrôle d'ESFP ; or, s'il s'agissait d'un contrôle sur pièces, l'administration aurait dû avoir recours au " Cerfa n° 2120 " ; - la pénalité de 40 % appliquée au titre de l'année 2012 est injustifiée. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2021, le ministre des finances et des comptes publics, conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 1er février 2022, par application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du même jour. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., qui relève appel du jugement du 1er décembre 2020 en tant que le tribunal administratif de Bastia a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit prononcé la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2010 à 2012 consécutives à l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle dont il a fait l'objet et, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre des années 2012 et 2013 du fait de son activité d'expert-comptable, doit être regardé comme demandant l'annulation de l'article 2 de ce jugement. 2. Aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales : " (...) Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification (...) La période mentionnée au troisième alinéa est portée à deux ans en cas de découverte, en cours de contrôle, d'une activité occulte. Il en est de même lorsque, dans le délai initial d'un an, les articles L. 82 C ou L. 101 ont été mis en œuvre ". Selon l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction, applicable en l'espèce, antérieure à la loi du 29 décembre 2015 de finances rectificatives pour 2015 : " L'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle peut recueillir, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une manœuvre quelconque ayant eu pour objet ou ayant eu pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt, qu'il s'agisse d'une instance civile ou commerciale ou d'une information criminelle ou correctionnelle même terminée par un non-lieu (...) ". Aux termes de l'article 49 du code de procédure pénale : " Le juge d'instruction est chargé de procéder aux informations (...) " et de l'article 75 du même code : " Les officiers de police judiciaire et, sous le contrôle de ceux-ci, les agents de police judiciaire (...) procèdent à des enquêtes préliminaires soit sur les instructions du procureur de la République, soit d'office. Ces opérations relèvent de la surveillance du procureur général (...) ". 3. M. A... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012, prolongée jusqu'au 31 mars 2013 en matière de TVA, à l'issue de laquelle il a fait l'objet de rappels de TVA mis en recouvrement pour une somme totale de 27 063 euros. Il a également fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle pour les années 2010, 2011 et 2012 et mis en demeure de déposer ses déclarations personnelles de revenus au titre de ces trois mêmes années et, à l'issue de la procédure contradictoire, trois propositions de rectification lui ont été notifiées les 9 décembre 2013, 25 novembre 2014 et 1er juin 2015. 4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, s'agissant de l'impôt sur le revenu, les rectifications en litige relatives aux années 2010 à 2012 procèdent de la seule déclaration d'ensemble des revenus au titre de ces années déposée par M. A... après mise en demeure. Dès lors, cette situation n'a pas été révélée par l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle. D'autre part, il résulte également de l'instruction que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de M. A... au titre de l'année 2012, l'année 2013 n'ayant fait l'objet d'aucun rappel, s'inscrivent dans le cadre de la vérification de comptabilité portant sur son bénéfice non commercial au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012 et procèdent des seuls éléments portés sur sa déclaration annuelle CA12 relative à l'année 2012 remise aux services fiscaux le 4 juillet 2013. Dès lors, cette situation n'a pas été davantage révélée par l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle. 5. Par suite, les redressements contestés n'étant pas fondés sur des documents obtenus dans le cadre du droit de communication, prévu à l'article 101 du livre des procédures fiscales, exercé par l'administration fiscale auprès de l'autorité judiciaire, le moyen soulevé par le requérant tiré de ce que les rappels de TVA et les impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de l'impôt sur le revenu contestés procèderaient d'une procédure irrégulière, ce qui n'est d'ailleurs pas établi, est inopérant et doit, dès lors, être rejeté. 6. En deuxième lieu, M. A... soutient que la proposition de rectification " Cerfa n° 3924 " datée du 1er juin 2015 est irrégulière. Toutefois, contrairement à ce que fait valoir l'intéressé, la circonstance que cette proposition ait porté à la fois sur l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle et sur le manquement à ses obligations déclaratives est demeurée sans influence sur la régularité de la procédure, de même que celle qu'elle lui a adressée au moyen d'un imprimé " Cerfa " non adapté, dès lors que, d'une part, il n'est ni démontré ni même allégué qu'elle aurait eu pour conséquence de le priver d'une garantie légale et notamment qu'elle l'aurait empêché de présenter utilement ses observations et, d'autre part, qu'elle comporte la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition et énonce les motifs sur lesquels l'administration a entendu se fonder pour justifier les redressements envisagés. Par ailleurs, si le requérant soutient que " il ne peut pas y avoir en même temps deux procédures de contrôle portant sur la même période, les mêmes déclarations et les mêmes impositions ", ce moyen n'est pas assorti de précisions de droit permettant au juge d'en apprécier le bienfondé. En tout état de cause, aucun des deux contrôles critiqués n'a été mené après que l'autre n'ait été achevé. 7. En troisième lieu, aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai (...) ". 8. Il résulte de l'instruction, et il n'est pas au demeurant contesté, que l'administration fiscale a, le 4 juillet 2013, remis en mains propres à M. A..., ainsi que l'atteste la signature de ce dernier et les mentions qu'il a lui-même portées sur le document, la mise en demeure de déposer une déclaration de revenus au titre de l'année 2012, dans les trente jours suivant sa réception. Il résulte également de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 1er juin 2015, et il n'est au demeurant pas davantage contesté, que M. A... a souscrit le 23 septembre 2013 sa déclaration de revenus 2012, soit plus de trente jours après la date de la réception de la mise en demeure notifiée le 4 juillet précédent. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à demander la décharge de cette pénalité appliquée conformément aux dispositions précitées de l'article 1728 du code général des impôts. 9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa requête enregistrée sous le n° 1900453 et le surplus des conclusions de sa requête enregistrée sous le n° 1900454. Doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à la DIRCOFI Sud-Est. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient : - Mme Massé-Degois, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Point, premier conseiller, - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. 2 N° 21MA00458 nl
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Montpellier à lui verser la somme de 80 273,25 euros en réparation des conséquences dommageables qu'il estime avoir subies à la suite de l'intervention chirurgicale pratiquée le 11 janvier 2017. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Hérault a demandé à ce même tribunal de condamner le CHU de Montpellier à lui verser la somme de 2 712,10 euros en remboursement des prestations versées à son assuré, M. A..., à la suite de l'intervention chirurgicale pratiquée le 11 janvier 2017 et la somme de 904,30 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. Par un jugement n° 1902658 du 22 juin 2020, le tribunal administratif de Montpellier a condamné le CHU de Montpellier à verser, d'une part, à M. A... une somme de 21 092 euros, sous déduction de la somme de 7 000 euros qui lui a été allouée à titre de provision par ordonnance du juge des référés n° 1902660 du 2 juillet 2019 et, d'autre part, une somme de 2 712,10 euros à la CPAM de l'Hérault en remboursement de ses débours ainsi qu'une somme de 904,03 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 août 2020 et le 9 septembre 2021, M. A..., représenté par Me Bedois, demande à la Cour : 1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 juin 2020 en tant qu'il a limité à la somme de 21 092 euros le montant des indemnisations accordées en réparation des préjudices subis lors de sa prise en charge par le CHU de Montpellier ; 2°) de porter le montant de cette indemnité à 66 216,25 euros ; 3°) de mettre à la charge du CHU de Montpellier, outre les dépens et les frais d'expertise, une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il a droit à une meilleure indemnisation de son déficit fonctionnel temporaire, de son préjudice sexuel, de son préjudice esthétique permanent et de son préjudice d'impréparation ; ainsi, des sommes respectives de 1 870 euros, de 15 000 euros, de 1 500 euros et de 10 000 euros doivent lui être allouées au titre de ces chefs de préjudice ; - il subit un préjudice d'agrément, un préjudice moral du fait de la perte de chance de bénéficier d'un traitement complet, des pertes de gains professionnels actuels et une incidence professionnelle qui doivent être indemnisés respectivement à hauteur de 8 000 euros, de 5 000 euros, de 6 053,25 euros et de 5 000 euros. Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2021, le CHU de Montpellier, représenté par Me Le Prado, conclut : 1°) à la réformation du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 juin 2020 en ce qu'il a retenu l'existence à son encontre d'un manquement au devoir d'information ; 2°) à ce que l'indemnité à verser à M. A... soit ramenée à 13 000 euros ; 3°) au rejet de la requête de M. A... et des demandes de la CPAM de l'Hérault présentées devant le tribunal. Il soutient que : Sur l'appel incident : - le manquement au devoir d'information du patient n'est ni établi, ni en lien avec le dommage subi par M. A... ; dès lors, c'est à tort que les premiers juges lui ont accordé une indemnité réparant un préjudice d'impréparation ; - le requérant, qui n'a produit aucun justificatif attestant de son absence de perception d'aide, n'établit ni la réalité de son préjudice d'assistance par tierce personne ni le lien de causalité avec la faute invoquée ; - les déficits temporaires total et partiel subis par M. A... ne sont pas imputables à la faute commise ; en tout état de cause, la période d'invalidité que l'exérèse de la 11ème côte aurait causé ne saurait être indemnisée ; - le préjudice esthétique invoqué par le requérant n'est pas en lien avec la faute invoquée et doit, en tout état de cause, être réparé par une indemnité limitée à la somme de 1 200 euros ; - le préjudice sexuel invoqué par le requérant n'est pas en lien avec la faute invoquée et, en tout état de cause, l'indemnité allouée à ce titre par le tribunal doit être réduite ; - les dépenses de santé actuelles ne sont pas en lien direct avec la faute invoquée ; Sur l'appel principal : - le préjudice des gains professionnels actuels n'est pas en lien avec la faute commise mais avec l'état antérieur de M. A... ; - le préjudice lié à l'incidence professionnelle de l'appelant n'est ni établi ni en lien avec la faute commise ; - le tribunal n'a pas fait une insuffisante indemnisation de son déficit fonctionnel temporaire total calculé sur une base de 15 euros par jour, ni de son préjudice esthétique évalué à 1,5/7 et réparé par une somme de 1 400 euros, ni de son préjudice sexuel indemnisé à hauteur de 3 000 euros ; - le préjudice d'agrément n'est aucunement justifié ; - le préjudice d'impréparation n'est pas établi et, en tout état de cause, il a été suffisamment indemnisé par l'octroi d'une somme de 1 500 euros ; - le préjudice moral " du fait d'une perte de chance de bénéficier d'un traitement complet " ne présente pas un caractère certain et, en tout état de cause, la somme demandée de 5 000 euros est excessive. Par un mémoire, enregistré le 10 mai 2021, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Hérault demande à la Cour de confirmer le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 juin 2020 en ce qu'il a condamné le CHU de Montpellier à lui verser, au titre des débours qu'elle a exposés pour son assuré M. A..., la somme de 2 712,10 euros avec intérêts de droit ainsi que, au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, la somme de 904,03 euros. Par un courrier du 29 septembre 2021, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement attaqué en l'absence de communication par le tribunal de la demande présentée par M. A... à son employeur, l'Entente départementale pour la démoustication du littoral méditerranéen, en méconnaissance des dispositions des articles 3 et 7 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques. Une réponse à cette mesure d'information, présentée pour M. A..., a été enregistrée le 6 octobre 2021. Une réponse à cette mesure d'information, présentée par l'Entente départementale pour la démoustication du littoral méditerranéen, a été enregistrée le 28 octobre 2021 par laquelle elle informe la Cour de ce qu'elle n'a aucune observation à formuler dans le cadre de cette instance. Par un courrier du 10 février 2022, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement attaqué en l'absence de communication par le tribunal de la demande présentée par M. A... à la Caisse des dépôts et consignations, gérante de la Caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), et ainsi méconnu les dispositions de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques. Par un mémoire, enregistré le 14 février 2022, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Hérault produit un justificatif de ses débours consécutivement à l'envoi d'une mesure supplémentaire d'instruction en date du 10 février précédent et déclare ne pas intervenir à l'instance. Par une ordonnance du 10 février 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques ; - l'ordonnance n° 1902660 du 2 juillet 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier ; - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A... demande à la Cour de réformer le jugement du 22 juin 2020 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a limité à la somme de 21 092 euros le montant de l'indemnité au versement de laquelle il a condamné le CHU de Montpellier, en réparation des préjudices ayant résulté de l'intervention chirurgicale pratiquée le 11 janvier 2017 et de porter cette indemnité à 66 216,25 euros. Par la voie de l'appel incident, le CHU de Montpellier demande à la cour de réformer le jugement attaqué et de ramener l'indemnité qu'il a été condamné à payer à M. A... à 13 000 euros et de rejeter les demandes de la CPAM de l'Hérault formées devant le tribunal. Sur le désistement de la CPAM de l'Hérault de ses conclusions d'appel : 2. La CPAM de l'Hérault qui a demandé à la Cour, dans son mémoire enregistré le 10 mai 2021, de confirmer le jugement 22 juin 2020 en ce qu'il a condamné le CHU de Montpellier à lui verser, au titre des débours exposés pour son assuré M. A..., la somme de 2 712,10 euros avec intérêts de droit ainsi que, au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, la somme de 904,03 euros, déclare en l'état de ses dernières écritures enregistrées le 14 février 2022 ne plus intervenir à l'instance. Elle doit être ainsi regardée comme se désistant de ses conclusions d'appel. Il y a, dès lors, lieu d'en donner acte. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article 3 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques, les agents de l'Etat ou d'une personne publique mentionnée à l'article 7 de cette ordonnance ou leurs ayants droit qui demandent en justice la réparation d'un préjudice qu'ils imputent à un tiers " doivent appeler en déclaration de jugement commun la personne publique intéressée et indiquer la qualité qui leur ouvre droit aux prestations de celle-ci ". Cette obligation, dont la méconnaissance est sanctionnée par la possibilité reconnue à toute personne intéressée de demander pendant deux ans l'annulation du jugement, a pour objet de permettre la mise en cause, à laquelle le juge administratif doit procéder d'office, des personnes publiques susceptibles d'avoir versé ou de devoir verser des prestations à la victime ou à ses ayants droit. 4. Alors que la qualité d'agent du service public de l'Entente départementale pour la démoustication du littoral méditerranéen de M. A... ressortait des pièces du dossier de première instance, cet établissement, employeur public, n'a pas été appelé à la cause. En ne communiquant pas la demande de M. A... à l'Entente départementale pour la démoustication du littoral méditerranéen qui l'employait et à la Caisse des dépôts et consignations, en sa qualité de gérante de la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales, le tribunal administratif de Montpellier a entaché, sur ce point, son jugement d'irrégularité. Ce jugement doit par suite être annulé. 5. L'Entente départementale pour la démoustication du littoral méditerranéen et la Caisse des dépôts et consignations ayant été mises en cause par la Cour, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. A... et sur l'intervention de la CPAM de l'Hérault présentées devant le tribunal administratif de Montpellier. Sur la responsabilité du CHU de Montpellier : En ce qui concerne la responsabilité pour faute médicale : 6. Aux termes du 1er alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. ". 7. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport rédigé par l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, que la prise en charge de la lésion tumorale localisée sur l'arc postérieur de la 11ème côte droite que présentait M. A... nécessitait de procéder, d'abord, à une résection chirurgicale de cette côte, puis à une radiothérapie centrée sur ce même point. Toutefois, alors que le diagnostic de plasmocytome de l'arc postérieur de la 11ème côte droite avait été clairement établi par la biopsie réalisée le 20 octobre 2016, l'indication chirurgicale d'exérèse a porté sur la 9ème côte, indemne de toute lésion. Cette erreur médicale commise par le CHU de Montpellier en intervenant sur la 9ème côte de M. A... alors que la lésion tumorale affectait la 11ème côte, révélée à l'occasion d'une IRM de contrôle réalisée le 14 juin 2017, a constitué une faute médicale engageant sa responsabilité. En ce qui concerne la responsabilité au titre du manquement au devoir d'information : 8. Il résulte de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique que doivent être portés à la connaissance du patient, préalablement au recueil de son consentement à l'accomplissement d'un acte médical, les risques connus de cet acte qui, soit présentent une fréquence statistique significative, quelle que soit leur gravité, soit revêtent le caractère de risques graves, quelle que soit leur fréquence. En cas de manquement à cette obligation d'information, si l'acte de diagnostic ou de soin entraîne pour le patient, y compris s'il a été réalisé conformément aux règles de l'art, un dommage en lien avec la réalisation du risque qui n'a pas été porté à sa connaissance, la faute commise en ne procédant pas à cette information engage la responsabilité de l'établissement de santé à son égard, pour sa perte de chance de se soustraire à ce risque en renonçant à l'opération. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction, compte tenu de ce qu'était l'état de santé du patient et son évolution prévisible en l'absence de réalisation de l'acte, des alternatives thérapeutiques qui pouvaient lui être proposées ainsi que de tous autres éléments de nature à révéler le choix qu'il aurait fait, qu'informé de la nature et de l'importance de ce risque, il aurait consenti à l'acte en question. 9. Alors qu'il résulte de l'instruction que M. A..., qui a été reçu en consultation préalable à l'intervention pratiquée 11 juin 2017, a bénéficié d'une information sur l'exérèse à laquelle il a accepté de se soumettre, il ne résulte pas, en revanche, de l'instruction et ainsi que l'a relevé l'expert, que l'intéressé a été informé, avant la réalisation de cet acte chirurgical, des douleurs neuropathiques liées à cette exérèse costale. Le CHU de Montpellier ne démontre pas devant la Cour avoir satisfait à son obligation d'information sur ce risque particulier inhérent à la résection d'une côte. 10. Il n'était pas certain que M. A..., qui souffrait d'une tumeur à la 11ème côte droite, aurait, compte tenu de l'existence d'une alternative thérapeutique consistant en la pratique d'une radiothérapie, même avec un risque accru de récidive, ainsi qu'il l'avait déjà subie en 2008 sur la vertèbre T8, consenti à l'intervention chirurgicale pratiquée le 11 janvier 2017 s'il avait été informé des complications algiques qu'elle comportait. Dès lors que le CHU de Montpellier n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que M. A... a été informé de ce que cette opération comportait ce risque, le manquement de l'établissement à son devoir d'information a privé l'intéressé d'une chance de se soustraire à ce risque en renonçant à l'intervention. Celui-ci est dès lors fondé à ce titre à engager la responsabilité du CHU de Montpellier. Sur les préjudices de M. A... : En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux : Quant au déficit fonctionnel temporaire : 11. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que M. A... a, du fait de l'intervention chirurgicale pratiquée le 11 janvier 2017, subi un déficit fonctionnel temporaire total du 10 au 14 janvier 2017, un déficit fonctionnel temporaire partiel évalué par l'expert à 50 % du 15 janvier au 15 avril 2017, un déficit fonctionnel temporaire partiel évalué par l'expert à 25 % du 16 avril au 16 mai 2017 et un déficit fonctionnel temporaire partiel évalué par l'expert à 10 % du 17 mai 2017 au 1er mai 2018. Il résulte également de l'instruction que ces périodes de déficit fonctionnel temporaire sont directement liées aux conséquences de l'intervention inutilement supportée par M. A... le 11 janvier 2017 dès lors que si ce dernier devait, en toutes hypothèses, subir de tels troubles consécutivement à l'intervention chirurgicale portant sur la côte atteinte par la lésion tumorale, il n'en demeure pas moins qu'il a subi un préjudice lié à la faute commise et non à son état antérieur. Il sera dès lors fait une juste appréciation du préjudice subi au titre du déficit fonctionnel temporaire en l'évaluant à la somme de 1 600 euros. Quant aux souffrances endurées : 12. Il résulte de l'instruction que l'expert a évalué à 2,5 sur une échelle allant de 1 à 7 les souffrances endurées par M. A... du fait de la résection de la 9ème côte. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice, en lien direct avec la faute commise, en l'évaluant à la somme de 3 000 euros. Quant au déficit fonctionnel permanent : 13. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise, que M. A... conserve, du fait des douleurs post-thoracotomie et du retentissement psychologique causé par l'erreur commise lors de l'intervention chirurgicale du 11 janvier 2017, un déficit fonctionnel permanent évalué à 7 %. Compte tenu de ce que M. A... était âgé de 55 ans à la date de la consolidation de son état, le 1er mai 2018, ce chef de préjudice, sera justement indemnisé par l'octroi d'une somme de 6 000 euros. Quant au préjudice esthétique : 14. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que M. A... a subi, du fait de la cicatrice résultant de l'intervention chirurgicale inutilement réalisée et à laquelle il aurait pu se soustraire, un préjudice esthétique permanent évalué à 1,5 sur une échelle allant de 1 à 7. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en l'évaluant à une somme de 1 400 euros. Quant au préjudice d'agrément : 15. M. A... justifie, notamment par la production de deux attestations certifiant qu'il ne pratique plus le football et le tennis alors qu'il était licencié, l'existence d'un préjudice d'agrément. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en l'évaluant à la somme de 300 euros. Quant au préjudice sexuel : 16. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que M. A... a subi un préjudice sexuel important dû au traitement neuroleptique qui lui a été administré et aux douleurs liées à la thoracotomie subie inutilement. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en l'évaluant à une somme de 1 500 euros. 17. Si M. A... demande l'indemnisation de son préjudice moral résultant du fait " de la perte de chance de bénéficier d'un traitement complet ", il ne résulte pas de l'instruction, et notamment pas du rapport d'expertise, que les erreurs commises par le CHU de Montpellier ont rendu impossible tout traitement de sa pathologie et l'ont privé d'une chance de bénéficier d'un traitement complet. En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux : Quant aux pertes de gains professionnels actuels : 18. M. A..., qui exerçait la profession de technicien au sein de l'Entente interdépartementale pour la démoustication, a été contraint de cesser toute activité professionnelle du 1er janvier 2017 au 31 janvier 2018, qu'il a ensuite pu reprendre son activité en bénéficiant d'un temps partiel thérapeutique, à concurrence de 50 % au cours de la période du 1er au 29 février 2018, puis de 60 % au cours de la période du 1er mars au 1er avril 2018, puis de 70 % au cours de la période du 2 au 30 avril 2018. Il résulte de l'instruction, et notamment des éléments expertaux, que M. A... a été placé en arrêt de travail entre le mois de janvier et la mi-septembre 2017 et que cette situation est liée à la réalisation de la résection costale fautive le 11 janvier 2017 et aux douleurs post-opératoires ainsi qu'aux insomnies qu'elle a engendrées. Par ailleurs, si M. A... s'est soumis au mois du mois de septembre 2017 à la radiothérapie qui devait en toutes hypothèses lui être administrée, les arrêts de travail du mois de septembre 2017 à la fin du mois d'avril 2018 demeurent directement liés aux conséquences de l'intervention inutilement pratiquée le 11 janvier 2017 et en particulier à la persistance des douleurs post-opératoires. Le requérant produit aux débats, au titre de l'ensemble de ces périodes, les éléments établissant les retenues sur traitement opérées ainsi qu'une perte sérieuse de chance d'obtenir prime et indemnités. Par suite, il y a lieu d'indemniser, au vu des éléments versés à l'instance, la perte de gains professionnels de M. A... par l'octroi d'une somme globale de 6 000 euros. Quant aux frais d'assistance par une tierce personne : 19. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que M. A... a eu besoin de recourir à l'assistance par une tierce personne à hauteur de 52 heures pour la période du 15 janvier au 15 avril 2017 puis de 8 heures pour la période du 16 avril au 16 mai 2017. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice subi en l'indemnisant sur la base d'un taux horaire moyen de rémunération, tenant compte des charges patronales et des majorations de rémunération pour travail du dimanche sur la base de 412 jours, fixé à 13 euros du fait, au vu des éléments du dossier, de l'absence de nécessité de recourir à une aide personnalisée médicalisée ou spécialisée. Ainsi, il y a lieu de fixer les frais d'assistance par une tierce personne qui, contrairement à ce que soutient le CHU de Montpellier, n'ont pas à être justifiés dans la mesure où ils peuvent être dispensés par un proche, à la somme de 800 euros dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'intéressé a bénéficié d'une quelconque aide octroyée à ce titre. Quant à l'incidence professionnelle : 20. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport établi par son employeur, que si M. A... a pu reprendre son activité professionnelle sur un poste aménagé, il a cependant été contraint d'abandonner le poste d'opérateur de démoustication qu'il occupait depuis mai 1984 et qu'il a fait l'objet d'un reclassement sur un poste éloigné du terrain. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en l'évaluant à la somme de 2 000 euros. En ce qui concerne le préjudice d'impréparation : 21. Il y a lieu d'allouer une somme de 1 500 euros à M. A... au titre de la souffrance morale éprouvée du fait de n'avoir pas pu se préparer psychologiquement au risque de douleurs qui s'est finalement réalisé à la suite de l'opération pratiquée le 11 janvier 2017 et dont, comme il l'a été dit au point 10, il ne résulte pas de l'instruction qu'il les aurait subies si cette intervention avait été correctement effectuée. 22. Il résulte de tout ce qui précède que le CHU de Montpellier doit être condamné à verser la somme de 24 100 euros à M. A..., sous déduction de la somme de 7 000 euros qui lui a été allouée à titre provisionnel par l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier n° 1902660 du 2 juillet 2019. Sur les droits de la caisse : 23. La CPAM de l'Hérault, qui ne s'est pas désistée de ses conclusions présentées en première instance, justifie, par la production d'un relevé de ses débours, avoir pris en charge, pour le compte de son assuré, M. A..., des frais d'hospitalisation d'un montant de 2 142,80 euros pour la période du 10 au 14 janvier 2017, des frais médicaux d'un montant de 470,25 euros pour la période du 11 janvier au 14 juin 2017 ainsi que des frais pharmaceutiques d'un montant de 99,05 euros au titre de la période du 14 janvier au 28 février 2017. Il résulte de l'instruction, notamment des éléments expertaux, que l'ensemble de ces frais, d'un montant total de 2 712,10 euros, est en lien avec la faute médicale commise par le CHU de Montpellier. La CPAM de l'Hérault est ainsi fondée à en demander le remboursement par le CHU de Montpellier. 24. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, de mettre à la charge du CHU de Montpellier à verser à la CPAM de l'Hérault l'indemnité forfaitaire de gestion qui, en l'espèce, est égale au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, soit la somme de 904,03 euros. Sur la déclaration d'arrêt commun : 25. Appelées à la cause, l'Entente départementale pour la démoustication du littoral méditerranéen et à la Caisse des dépôts et consignations n'ont formulé aucune prétention. Par suite, il y a lieu de leur déclarer le présent arrêt commun. Sur les frais liés au litige : 26. D'une part, par une ordonnance du 11 avril 2019, la présidente du tribunal administratif de Montpellier a liquidé et taxé les frais et honoraires de l'expert à la somme de 1 494,79 euros. Ces frais et honoraires doivent être, en application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, mis à la charge définitive du CHU de Montpellier. 27. D'autre part, il y a lieu de mettre à la charge du CHU de Montpellier une somme de 2 000 euros à verser à M. A... au titre des frais d'instance en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 1902658 du tribunal administratif de Montpellier du 22 juin 2020 est annulé. Article 2 : Le CHU de Montpellier versera la somme de 24 100 euros à M. A..., sous déduction de la somme de 7 000 euros qui lui a été allouée à titre provisionnel par l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier n° 1902660 du 2 juillet 2019. Article 3 : Le CHU de Montpellier versera à la CPAM de l'Hérault la somme de 2 712,10 euros en remboursement de ses débours. Article 4 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 494,79 euros, sont mis à la charge définitive du CHU de Montpellier. Article 5 : Le CHU de Montpellier versera à la CPAM de l'Hérault une somme de 904,03 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. Article 6 : Le CHU de Montpellier versera à M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 8 : Le présent arrêt est déclaré commun à l'Entente départementale pour la démoustication du littoral méditerranéen et à la Caisse des dépôts et consignations. Article 9 : Le présent arrêt sera notifié à M. A..., au centre hospitalier universitaire de Montpellier, à la caisse primaire d'assurance-maladie de l'Hérault, à l'Entente départementale pour la démoustication du littoral méditerranéen et à la Caisse des dépôts et consignations. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient : - Mme Massé-Degois, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Point, premier conseiller, - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. 2 N° 20MA03187
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Cannes a rejeté sa demande indemnitaire préalable formulée le 18 mai 2017 ainsi que la décision explicite du 28 juillet 2017 la confirmant et, d'autre part, de condamner la commune de Cannes à lui verser une somme de 66 444,30 euros en réparation des préjudices résultant du refus de la titulariser à l'issue de son stage, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa demande préalable. Par un jugement n° 1704094 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Nice a condamné la commune de Cannes à payer à Mme A... la somme de 1 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 septembre 2017 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés le 1er décembre 2020, le 14 juin 2021 et le 23 mars 2022, Mme A..., représentée par Me Favier, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Nice en portant à la somme de 91 054,02 euros le montant, à parfaire, des indemnités qu'il a condamné la commune de Cannes à lui payer augmenté des intérêts à compter du jour de la réception de la demande préalable ; 2°) d'enjoindre à la commune de Cannes de procéder à la reconstitution de sa carrière et de l'indemniser à ce titre ; 3°) de mettre à la charge du de la commune de Cannes une somme de 7 428,06 euros, à parfaire, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle doit être indemnisée du préjudice lié à sa perte de rémunération et à sa reconstitution de carrière dès lors que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, elle avait accepté le poste de chargée de mission auprès de la direction générale des services de sorte qu'elle ne peut pas être regardée comme ayant refusé sa réintégration en qualité de stagiaire ; - alors qu'elle aurait dû percevoir entre le 29 octobre 2015, date de son éviction illégale du service, et le 3 mai 2017, date du jugement ayant annulé cette éviction, une somme de 28 452,32 euros au titre de sa rémunération, elle a perçu la somme de 17 821,44 euros d'indemnité chômage ; elle doit être indemnisée de la différence entre ces deux sommes, soit à hauteur de 10 631,88 euros ; - contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le préjudice qu'elle a subi du fait de la perte de chance d'avoir pu être titularisée en qualité d'attachée territoriale doit être réparé par la reconstitution de sa carrière et de ses droits sociaux ; - le jugement doit être réformé en qu'il a rejeté sa demande de remboursement des frais de formation dispensée par l'ESSEC, d'un montant de 5 300 euros, dès lors que le principe de suivre cette formation a été expressément accepté par la directrice de la culture et la directrice générale adjointe, et que cette formation s'inscrivait dans le cadre de ses droits à la formation ; - contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les frais de conseil qu'elle a engagés pour un montant de 10 731,96 euros sont la conséquence de la faute commise par l'administration et doivent donc lui être remboursés ; - le jugement sera réformé en ce qu'il a rejeté sa demande d'indemnisation relative aux dépenses de santé exposées à hauteur de 3 770,78 euros ; - elle doit également être indemnisée par une somme de 5 000 euros de l'atteinte portée à sa réputation dès lors qu'elle a retrouvé un emploi précaire après 16 mois de recherches ; - les frais qu'elle a exposés en recherche d'emploi doivent être remboursés à hauteur de 6 010,68 euros ; - son préjudice moral sera réparé par l'octroi d'une indemnité de 30 000 euros. Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 février, 2 et 3 mars, et 7 avril 2022, la commune de Cannes, représentée par Me Paloux, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - Mme A... n'apporte pas la preuve de son acceptation du poste de chargée de mission auprès de la direction générale des services alors que lui a été adressé tant son arrêté de réintégration qu'une mise en demeure de reprendre son service ; - elle ne saurait être indemnisée d'une quelconque perte de revenus au cours de la période d'éviction illégale dès lors qu'elle a perçu au cours de cette période une somme de 18 378,36 euros d'allocations chômage et une somme de 14 058,10 euros au titre de son nouvel emploi alors que sa rémunération aurait été de 26 799,09 euros ; - en qualité de stagiaire, elle ne peut prétendre à aucune reconstitution de carrière et elle ne peut reprocher à la commune de l'avoir privée d'une perte de chance d'être titularisée ; - les dépenses de formation ne peuvent être remboursées dès lors qu'il s'agit de frais et de charges liés à l'exercice effectif des fonctions alors, en outre, que Mme A... n'a reçu aucun accord relatif au financement de cette formation, cette prise en charge ayant au contraire été refusée pour des motifs budgétaires ; - les frais de conseil sont compris dans sa demande fondée sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; - les dépenses de santé dont elle demande l'indemnisation ne sont pas en lien avec l'illégalité fautive commise ; - la circonstance qu'elle a retrouvé un emploi 16 mois après son éviction illégale n'est pas de nature à établir l'existence d'une atteinte à sa réputation ; - elle n'établit ni la réalité et l'effectivité de ses recherches d'emploi pendant 16 mois, ni les difficultés rencontrées à ce titre ; - elle ne démontre pas que l'indemnité de 1 000 euros allouée par les premiers juges en réparation de son préjudice moral serait insuffisante ; - la demande d'injonction relative à la reconstitution de sa carrière doit être rejetée. Par une ordonnance en date du 22 avril 2022, la clôture de l'instruction a été fixée 22 avril 2022. Un mémoire présenté pour Mme A... a été enregistré le 3 mai 2022, après la clôture de l'instruction, et n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; - le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale ; - le décret n° 87-1099 du 30 décembre 1987 portant statut particulier du cadre d'emplois des attachés territoriaux ; - le code civil ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - les conclusions de M. Gautron, rapporteur public, - et les observations de Me Remis, représentant Mme A..., et de Me Paloux, représentant la commune de Cannes. Considérant ce qui suit : 1. Par un jugement n° 1505077 du 3 mars 2017 devenu définitif, le tribunal administratif de Nice a, d'une part, annulé la décision du 29 octobre 2015 par laquelle le maire de la commune de Cannes a refusé de titulariser Mme A... à l'issue de sa période de stage en qualité d'attachée territoriale et l'a radiée des effectifs de la commune et, d'autre part, enjoint au maire de cette collectivité de la réintégrer en qualité d'attachée stagiaire dans le cadre d'une prolongation de stage. Mme A... relève appel du jugement du 1er octobre 2020 de ce même tribunal en ce qu'il a limité à la somme de 1 000 euros le montant de l'indemnité qu'il lui a allouée en réparation des préjudices résultant de son éviction illégale du service. Sur les conclusions indemnitaires : En ce qui concerne les préjudices matériels : S'agissant de l'absence de réintégration effective : 2. Il y a lieu de rejeter les conclusions par lesquelles Mme A... demande la réparation d'un préjudice qui aurait résulté de l'absence de réintégration effective au sein de la commune de Cannes à la suite du jugement du tribunal administratif de Nice du 3 mars 2017 par adoption des motifs suffisamment circonstanciés retenus à bon droit par les premiers juges au point 5 du jugement attaqué, que la requérante ne critique pas utilement en réitérant son argumentation de première instance sans apporter d'élément nouveau. S'agissant de l'indemnisation au titre de la perte de revenus et de la reconstitution de carrière : 3. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions. Enfin, il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations que l'agent a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction. 4. L'arrêté du 29 octobre 2015 par lequel le maire de Cannes a refusé de titulariser Mme A... a été annulé pour erreur manifeste d'appréciation par le jugement du 3 mars 2017 du tribunal administratif de Nice mentionné au point 1, qui lui a également enjoint de procéder à la réintégration effective de l'intéressée. Il résulte en l'espèce de l'instruction et, notamment de l'arrêté du 5 mai 2017 la réintégrant en qualité d'attachée stagiaire à compter du 9 mai 2017 qui a été présenté à son domicile par un agent assermenté le jour même, puis lui a été adressé par courrier recommandé avec demande d'avis de réception et a été retourné à la commune avec la mention " pli avisé et non réclamé ", ainsi que de la mise en demeure de rejoindre son poste, datée du 15 juin 2017, dont elle a accusé réception le 17 juin suivant, que, quelles que soient les raisons dont elle se prévaut pour tenter de justifier son abstention à rejoindre le poste qui lui avait été assigné, Mme A... doit être réputée avoir refusé sa réintégration. Il en résulte que la fin de la période d'éviction illégale doit être fixée à la date à laquelle elle était initialement attendue dans le service soit, en l'espèce, le 9 mai 2017. 5. Il résulte de l'instruction, notamment des certificats administratifs produits par la commune de Cannes et des bulletins de salaire produits par Mme A..., que cette dernière aurait dû percevoir pour la période du 1er novembre 2015 au 8 mai 2017 inclus une somme de 32 804,27 euros, représentant le montant total des rémunérations dont elle a été irrégulièrement privée en raison de son éviction illégale du service. 6. Pour déterminer le montant de l'indemnité qui est due à ce titre à Mme A..., il y a lieu de déduire du montant des rémunérations dont elle a été irrégulièrement privée l'ensemble des revenus dont elle a bénéficié au cours de cette même période constitués, d'une part, par les allocations pour perte d'emploi que lui a versées la commune de Cannes entre les mois de novembre 2015 et de février 2017, d'un montant de 18 378,36 euros, et, d'autre part, par les revenus d'activité qu'elle a perçus de la métropole Nice-Côte d'Azur entre le 1er mars 2017 et le 8 mai 2017, qui s'élèvent à 5 173,17 euros. Il en résulte que la perte de revenus résultant de l'éviction illégale de Mme A... doit être indemnisée par une somme de 9 252,74 euros. 7. Il y a lieu, en revanche, de rejeter les conclusions de Mme A... tendant à la reconstitution de sa carrière et de ses droits sociaux par adoption des motifs retenus par le tribunal qui y a exactement répondu au point 8 de son jugement en relevant qu'en sa qualité de stagiaire, elle ne pouvait prétendre détenir de tels droits. S'agissant des dépenses de formation : 8. Il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient Mme A..., le service formation de la commune de Cannes a, par une décision du 18 mai 2015, expressément refusé de prendre en charge les dépenses de la formation de fundraising dispensée par l'ESSEC en raison de contraintes budgétaires. Il suit de là que, comme les premiers juges l'ont exactement retenu, Mme A... n'est pas fondée à soutenir, en se prévalant de sa fiche d'entretien professionnel de l'année 2014 mentionnant le caractère compatible avec l'évolution de son poste de son souhait de suivre un " Certificat Essec ", que ce refus de prise en charge présenterait un lien avec l'illégalité de son licenciement ni, par suite, à demander que les frais de 5 300 euros qu'elle a exposés à ce titre devraient lui être remboursés. S'agissant des frais de conseil : 9. Il y a lieu de rejeter la demande d'indemnisation des frais de conseil supportés par Mme A... par adoption des motifs retenus par les premiers juges qui y ont suffisamment répondu au point 10 du jugement attaqué. En ce qui concerne les troubles dans les conditions d'existence : 10. Il y a lieu de rejeter les demandes de Mme A... tendant à l'indemnisation de dépenses de santé, de l'atteinte portée à sa réputation et du préjudice résultant de la difficulté de retrouver un emploi par adoption des motifs suffisamment circonstanciés retenus par les premiers juges aux points 11 à 17 du jugement attaqué dès lors qu'elle ne fait valoir devant la cour aucun élément nouveau ou déterminant sur ces différentes demandes. En ce qui concerne le préjudice moral : 11. Il résulte de l'instruction, et notamment des deux certificats médicaux des 4 janvier 2016 et 10 février 2017, que l'éviction illégale du service de Mme A... a généré un préjudice moral pour cette dernière dont le tribunal n'a pas fait, contrairement à ce qu'elle soutient, une insuffisante appréciation en l'indemnisant à hauteur de 1 000 euros. Sur les conclusions aux fins d'injonction : 12. Comme il a été dit au point 7, Mme A... ne peut, en sa qualité de stagiaire, prétendre à la reconstitution de sa carrière et de ses droits sociaux. Il y a donc lieu de rejeter les conclusions de sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint au maire de Cannes de procéder à une telle reconstitution. Sur les intérêts : 13. En vertu des dispositions de l'article 1231-6 du code civil, les intérêts au taux légal, quelle que soit la date de leur demande, courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue à l'administration. Il résulte de l'instruction, et notamment du relevé versé aux débats de première instance de La Poste des détails de l'acheminent du pli envoyé par courrier avec accusé de réception, que la demande indemnitaire préalable de Mme A... en date du 18 mai 2017 a été réceptionnée par la commune de Cannes le 26 mai 2017. Par suite, Mme A... a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 10 252,74 euros à compter de la date du 26 mai 2017, et Mme A... est fondée à soutenir que le jugement du tribunal doit être réformé sur ce point. 14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est fondée à demander que le montant de l'indemnité allouée par les premiers juges en réparation de ses préjudices consécutifs à son éviction illégale du service soit porté à 10 252,74 euros, et que cette somme soit augmentée des intérêts au taux légal à compter du 26 mai 2017. Sur les frais liés au litige : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Cannes demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Cannes une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1 : La somme de 1 000 euros que la commune de Cannes a été condamnée à verser à Mme A... par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Nice du 1er octobre 2020 est portée à 10 252,74 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 26 mai 2017. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 1er octobre 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : La commune de Cannes versera une somme de 2 000 euros à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Cannes. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient : - Mme Massé-Degois, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Point, premier conseiller, - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. 2 N° 20MA04471
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Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts ; - le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La SARL La Chrysalide relève appel du jugement du 5 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 octobre 2014, en droits, pénalités et intérêts de retard. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a expressément répondu aux critiques formulées par la société requérante à l'encontre de la méthode suivie par l'administration pour déterminer le montant du chiffre d'affaires au titre des exercices en litige et, contrairement à ce qu'elle soutient, a notamment répondu au point 8 de ce jugement, par des motifs suffisamment précis et circonstanciés, à l'assertion selon laquelle le service vérificateur aurait insuffisamment tenu compte de la dégradation de ses conditions d'exploitation au cours de l'année 2013. Par suite, la SARL La Chrysalide n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé. Sur les conclusions à fin de décharge : En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition : 3. La société La Chrysalide réitère en appel son moyen tiré de ce que l'administration n'aurait pas répondu à l'un de ses arguments concernant l'existence d'un récapitulatif journalier de recettes, dits " tickets Z ", en persistant à se prévaloir de la méconnaissance du principe du contradictoire qui n'a, contrairement à ce qu'elle soutient, nullement pour effet de faire obligation à l'administration de répondre à tous les arguments avancés par le contribuable. En tout état de cause, il ressort des termes mêmes de la décision datée du 27 juin 2018 rejetant la réclamation de la requérante que l'administration a exposé dans cette décision les motifs l'ayant conduit à regarder lesdits tickets produits comme insuffisants en indiquant que " les tickets Z journaliers ne détaillant pas ces produits mais globalisant par touche les recettes / (...) le service doit pouvoir obtenir un ticket Z permettant de déterminer la nature du produit vendu avec son prix. ". Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté. En ce qui concerne le bien-fondé des impositions : S'agissant de la charge de la preuve : 4. La société requérante ne conteste pas que la charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe à cette dernière tandis que la charge de la preuve de l'exagération des impositions lui appartient en revanche ensuite lorsque le rejet de la comptabilité est fondé. S'agissant du rejet de la comptabilité : 5. Aux termes de l'article 54 du code général des impôts : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration. (...) ". 6. Il résulte de l'instruction que, pour écarter comme étant non sincère et non probante la comptabilité présentée, le service s'est fondé sur la circonstance que s'agissant de la période du 1er janvier au 30 juin 2012, l'établissement ne disposait pas de billetterie, de caisse enregistreuse, ni même de carnet à souche numéroté et inscrivait sur des registres journaliers les recettes de manière globalisée, ne faisant ainsi pas apparaître le détail des ventes. S'y ajoute le fait que, à compter du mois de juillet 2012, la seule présentation de tickets Z journaliers, sans doubles des tickets clients ni de carnet à souche avec suivi de numérotation, ne permettait pas d'identifier le détail des produits vendus et que, en globalisant l'ensemble des données d'une journée, ces tickets ne permettaient ni d'appréhender l'exhaustivité des opérations réalisées au cours d'une même journée ni d'effectuer un rapprochement entre les achats de marchandises, les stocks d'ouverture et de clôture d'exercice et les produits vendus. Si la société requérante fait valoir que, à compter du mois de juin 2012, elle utilisait deux caisses enregistreuses, l'une pour le paiement des entrées, dont la méthode d'enregistrement n'a pas été contestée par l'administration, l'autre pour le paiement des autres recettes, que l'administration a estimée défaillante au regard des règles comptables, il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification datée du 17 juillet 2015, que l'administration n'a pas écarté l'ensemble de la comptabilité mais remis en cause les seules recettes liées à cette seconde caisse et ainsi procédé à la seule reconstitution des recettes des consommations vendues au bar de la discothèque, de la " bal-néo " et du restaurant puis a ajouté à ce " chiffre d'affaires des liquides reconstitué " les recettes du restaurant et des entrées comptabilisées au grand livre pour ainsi déterminer un " chiffre d'affaires total reconstitué ". Dès lors, l'administration a pu à bon droit regarder la comptabilité qui lui était présentée comme partiellement non sincère et non probante et procéder par voie de conséquence à la reconstitution du chiffre d'affaires de la société. S'agissant de la reconstitution de recettes : 7. Au titre des années 2012 et 2013 en litige, le service vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires et le bénéfice de l'établissement exploité par la SARL La Chrysalide par la " méthode des liquides ". Ainsi, le service a utilisé l'ensemble des factures d'achats de liquides afférentes à la SARL La Chrysalide fournies par la gérante de la société, a pris en compte la variation des stocks telle que définie par la société et malgré les anomalies qu'il a constatées, a utilisé les dosages indiqués au cours des opérations de contrôle et les tarifs de l'année 2015, ceux-ci n'ayant pas évolués depuis l'année 2012, en effectuant une moyenne entre les prix pratiqués pour les consommations du bar de la " bal-néo " et ceux de la discothèque, en retenant un taux de 5 % au titre des pertes et offerts, porté à 7 % pour le café et à 10 % pour la bière. Puis, le service a déduit les boissons offertes comprises dans le prix d'entrée. 8. La société requérante fait valoir, en premier lieu, que l'administration n'a pas pris en compte le fait qu'elle a exercé son activité, du 1er juillet au 29 novembre 2013, dans des locaux provisoires où elle ne pouvait pas fournir les mêmes prestations à sa clientèle que celles offertes dans ses locaux précédents, notamment la " bal-néo ", et soutient qu'il est incohérent que les recettes reconstituées par l'administration pour les exercices 2012 et 2013 soient similaires. Il résulte toutefois de l'instruction, d'une part, que le " chiffre d'affaires retenu " réalisé au titre de l'année 2013, tel qu'issu de la reconstitution de comptabilité figurant dans la proposition de rectification (289 238 euros), est inférieur de 16,7 % au chiffre d'affaire reconstitué de l'année 2012 (347 225 euros) et, d'autre part, que l'administration a reconstitué les recettes de l'exercice 2013 en prenant en compte les boissons achetées et revendues durant l'exercice complet. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que celle-ci n'a pas, contrairement à ce qu'elle soutient, exercé son activité durant seulement " 196 jours en 2013 au lieu de 365 en 2012 ", mais durant toute l'année 2013 ainsi que l'indiquent, d'une part, l'administration qui fait valoir que les tickets Z montrent une exploitation continue au cours de cette année et, d'autre part, les propres écritures de la société qui relate avoir cessé son activité à Saint-Cyr-sur Mer le 30 juin 2013, puis qu'une " exploitation limitée et dans des conditions compliquées a eu lieu du 01/07/2013 au 29/11/2013 " puis avoir rouvert le 29 novembre 2013 à La Seyne-sur-Mer. Dès lors, la critique selon laquelle la méthode utilisée par l'administration parviendrait à des résultats en incohérence avec la réalité économique de la société ne peut qu'être écartée. 9. La société requérante fait valoir, en deuxième lieu, que compte tenu de ce que son activité de club est totalement différente de celle des bars, restaurants et boîtes de nuit, les tickets Z donnent des détails tout à fait précis sur les prix de ventes unitaires et le nombre de ventes réalisées sur une journée jusqu'à l'édition du ticket Z qui clôture cette dernière. Mais comme il l'a été dit au point 6, ces seuls documents, en l'absence de doubles des tickets clients et de carnet à souche avec suivi de numérotation, insuffisamment probants, ne sont pas de nature à remettre en cause la pertinence de la méthode mise en oeuvre par le service. 10. La SARL La Chrysalide fait valoir, en troisième lieu, et par les mêmes arguments que ceux développés en première instance sans apporter de justification, que l'administration s'est méprise sur le nombre de cocktails et de mojitos réalisés et de Martini servis. Il résulte toutefois de l'instruction, ainsi que l'a jugé le tribunal par des motifs précis et circonstanciés aux points 10 et 11 de son jugement, motifs non sérieusement critiqués en appel, que le dosage de ces boissons retenu par l'administration résulte des déclarations de la gérante de la société requérante et que leur contestation n'est étayée d'aucun élément autre que de pures assertions. 11. Dans ces conditions, la société requérante n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère radicalement vicié ou excessivement sommaire de la méthode suivie par le vérificateur, qui a analysé les données concrètes de la société, et qu'elle n'établit pas davantage l'exagération des impositions supplémentaires qui lui sont réclamées. En ce qui concerne les pénalités : 12. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". 13. Il résulte de l'instruction que la SARL La Chrysalide n'a pas, tant en 2012 qu'en 2013, mis en place une comptabilité détaillant le produit de ses ventes ni tenu un inventaire de ses stocks, manquant ainsi gravement à ses obligations comptables qui ne se limitent pas, contrairement à ce qu'elle fait valoir dans ses écritures, à se doter de deux caisses enregistreuses agréées par les services fiscaux. Il résulte, en outre de l'instruction, que le montant des minorations de recettes qui ressortent de la reconstitution de recettes précise et complète effectuée par le vérificateur, fondée sur une étude menée contradictoirement et tenant compte des données propres à l'entreprise s'élève respectivement à 30 % et 82 % du chiffre d'affaires déclaré pour 2012 et 2013. Dans ces conditions, et comme l'a exactement jugé le tribunal, l'administration doit être regardée comme établissant l'intention délibérée de cette société d'éluder une partie de l'impôt dont elle était redevable. Dès lors, elle n'est pas fondée à contester la majoration de 40 % dont ont été assorties les impositions en litige sur le fondement des dispositions rappelées au point 12 ci-dessus de l'article 1729 du code général des impôts. 14. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL La Chrysalide n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 15. Par voie de conséquence de qui vient d'être dit, les conclusions de la SARL La Chrysalide tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme demandée au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de la SARL La Chrysalide est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL La Chrysalide et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à la DIRCOFI Sud-Est. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient : - Mme Massé-Degois, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Point, premier conseiller, - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. 2 N° 21MA00031 nl
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 7 octobre 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Bastia a refusé de reconnaître l'imputabilité au service d'un incident qui s'est produit le 30 juillet 2019, d'enjoindre à cette autorité de procéder à un nouvel examen de sa demande et de mettre à la charge du centre hospitalier de Bastia une somme de 1 500 euros au titre des frais du litige. Par un jugement n° 1901631 du 22 décembre 2020, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision contestée du directeur du centre hospitalier de Bastia, lui a enjoint de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont a été victime Mme B... le 30 juillet 2019, a enjoint au directeur du centre hospitalier de Bastia de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 30 juillet 2019 dans le délai d'un mois et a mis à la charge du centre hospitalier une somme de 1 500 euros au titre des frais du litige. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 18 février 2021, le centre hospitalier de Bastia, représenté par Me Canazzi, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du 22 décembre 2020 du tribunal administratif de Bastia ; 2°) de rejeter la demande de Mme B... ; 3°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 2 000 euros au titre des frais du litige. Il soutient que : - la directrice-adjointe du centre hospitalier chargée des ressources humaines dispose d'une délégation de signature qui lui a été régulièrement consentie par le directeur de ce centre ; s'agissant d'un acte courant de gestion relevant de ses attributions, elle était compétente pour signer la décision contestée ; - la décision contestée est suffisamment motivée ; - Mme B..., qui admet elle-même entretenir de mauvaises relations avec l'un des obstétriciens et lui " tenir tête ", a refusé de quitter le bloc opératoire où elle était entrée de sa propre initiative malgré les consignes du médecin, qui lui a demandé de sortir à plusieurs reprises ; - en refusant d'obéir aux instructions données par le médecin, Mme B... a commis une faute, ce qui a pour conséquence de détacher du service l'accident dont elle se plaint. Par un mémoire en défense enregistré le 12 octobre 2021, Mme B..., représentée par Me Genuini, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Bastia une somme de 3 000 euros au titre des frais du litige. Elle fait valoir que : - comme l'a justement retenu le tribunal, la décision contestée a été signée par une autorité incompétente ; - cette décision n'est pas motivée ; - les faits en cause ayant eu lieu dans le temps et sur le lieu du service alors qu'aucune faute personnelle détachable du service ne peut lui être reprochée, c'est à bon droit que le tribunal a retenu le lien entre l'altercation du 30 juillet 2019 et le service ; en tout état de cause, elle n'a pas outrepassé ses fonctions. Par ordonnance du 21 avril 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme D..., - et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Le centre hospitalier (CH) de Bastia relève appel du jugement du 22 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bastia, après avoir annulé la décision du 7 octobre 2019 par laquelle son directeur a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont Mme B..., qui y est employée en qualité de sage-femme, a été victime le 30 juillet 2019, lui a enjoint de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident dans le délai d'un mois. 2. Il ressort des pièces du dossier que le 30 juillet 2019, alors que le docteur C..., obstétricien, venait de pratiquer l'accouchement d'une patiente par césarienne sous anesthésie générale, Mme B... a pénétré dans le bloc opératoire en portant le nouveau-né pour le présenter à sa mère que le chirurgien était en train de suturer et qui était encore sous l'effet de l'anesthésie. Mme B... ayant à plusieurs reprises refusé de quitter le bloc malgré l'ordre qu'il lui en avait donné, le chirurgien s'est, selon ses propres déclarations, adressé à elle sur un ton violent en la menaçant avec un instrument chirurgical jusqu'à ce qu'elle finisse par obtempérer. 3. Alors même que, comme le soutient le CH de Bastia, le comportement de Mme B..., qui a refusé d'obtempérer aux instructions données par le chirurgien dont l'intervention était toujours en cours, présente un caractère fautif, une telle faute, commise à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, ne peut être regardée comme présentant un caractère de gravité telle qu'elle doive être réputée se détacher du service. Par suite, et dès lors qu'il n'est pas contesté que le chirurgien a fait preuve d'un comportement manifestement excessif, ce qu'il a lui-même reconnu et qu'à la suite de cette altercation Mme B... a souffert d'un stress post traumatique ayant donné lieu à des arrêts de travail, c'est à bon droit que les premiers juges ont, par leur jugement attaqué, retenu un tel motif pour fonder, outre l'annulation de la décision contestée du directeur du CH de Bastia, l'injonction qu'ils ont prononcée à son encontre. 4. Il résulte de tout ce qui précède que le CH de Bastia n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a fait droit à la demande de Mme B.... 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacune des parties la charge de ses propres frais d'instance. D É C I D E : Article 1er : La requête du centre hospitalier de Bastia est rejetée. Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Bastia et à Mme A... B.... Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient : - Mme Massé-Degois, présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Point, premier conseiller, - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. 2 N° 21MA00732 nl
JADE/CETATEXT000045945198.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013. Par un jugement n°1803234 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2020, et des mémoires, enregistrés les 27 novembre 2020 et 11 février 2021, M. B..., représenté par Me Buchet, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n°1803234 du tribunal administratif de Rouen ; 2°) de lui accorder la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013 en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la réintégration d'une fraction des loyers sur le fondement de l'article 239 sexies du code général des impôts, qui n'est pas contestée dans le principe, doit être effectuée au titre de l'année 2010 qui est prescrite, et non au titre de l'année 2013, car c'est la levée de l'option d'achat du contrat de crédit-bail qui conduit à la cessation d'activité de sous-location ; - à titre subsidiaire, le calcul du montant de la réintégration est erroné et la fraction des loyers à réintégrer doit être limitée à un montant total de 60 598 euros au lieu de 91 469 euros ; - au regard de la décision du Conseil d'Etat du 4 mars 2015 n° 360508, la levée d'option par le locataire entraîne le transfert de propriété de l'immeuble par le crédit-bailleur, transfert de propriété qui ne peut intervenir postérieurement à l'échéance du bail ; la vente était donc parfaite au 21 mai 2010 et la plus-value était imposable en 2010 qui est prescrite ; - à titre subsidiaire, le bénéfice du report d'imposition est subordonné au respect des conditions posées par les dispositions législatives de l'article 93 quater, IV du code général des impôts qui prévoient, à peine de déchéance, que la demande doit être formulée de manière expresse dans l'acte constatant le transfert de propriété de l'immeuble ; les dispositions réglementaires de l'article 41 novovicies de l'annexe III au code général des impôts, prévoyant des obligations déclaratives, ne peuvent instituer une déchéance du droit au report d'imposition en cas de manquement à ces obligations déclaratives ; or, la société civile immobilière (SCI) Le Progrès a adressé à l'administration fiscale le 14 octobre 2016, la déclaration rectificative n°2035 de l'année 2013, dans laquelle les associés ont tous souscrit à l'ensemble des obligations déclaratives du report d'imposition prévues à l'article 41 novovicies de l'annexe III au code ; - la valeur vénale de l'immeuble de 650 000 euros retenue par l'administration fiscale pour le calcul de la plus-value est erronée ; la valeur vénale doit être fixée à 275 000 euros. Par un mémoire en défense et des mémoires, enregistrés les 27 octobre 2020, 27 janvier 2021 et 15 mars 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé et au rejet du surplus des conclusions de la requête. Il soutient que : - il est fait droit aux conclusions relatives à la validité de l'option pour le report d'imposition de la plus-value et le dégrèvement de l'imposition correspondante sera communiqué à la cour ; - les autres moyens de la requête de M. B... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 17 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 10 décembre 2021. Un mémoire, présenté pour M. B... a été enregistré le 18 mars 2022, après la clôture de l'instruction. Vu la lettre adressée en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative informant les parties que la cour était susceptible de se fonder sur un moyen relevé d'office tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions relatives au litige sur la valeur vénale de l'immeuble en raison de l'octroi par l'administration du report d'imposition prévu au IV de l'article 93 du code général des impôts. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Massounga, avocat de M. B.... Une note en délibéré présentée par M. B... a été enregistrée le 10 juin 2022. Considérant ce qui suit : 1. La SCI Le Progrès, qui n'a pas opté pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés et dont M. B... est l'un des associés, a pris en crédit-bail auprès de la société anonyme (SA) Finamur, le 30 juin 1998, un bien immobilier situé sur la commune du Havre. Elle a levé l'option d'achat le 21 mai 2010. L'acte notarié d'achat a été signé le 25 janvier 2013 et mentionne une valeur vénale du bien immobilier acquis de 650 000 euros. La SCI Le Progrès a fait l'objet d'une vérification sur place de ses documents comptables à l'issue de laquelle l'administration, d'une part, a réintégré une quote-part des loyers à l'échéance du contrat de crédit-bail et, d'autre part, a imposé la plus-value résultant de la levée de l'option de l'achat de l'immeuble. En conséquence, l'administration a rectifié le résultat imposable de l'exercice 2013 de la SCI Le Progrès. L'administration a tiré les conséquences du rehaussement du résultat imposable de l'exercice 2013 de la société au niveau des associés et, par une proposition de rectification du 4 juillet 2016, l'administration a assujetti M. B... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013, dont il a vainement demandé la décharge au tribunal administratif de Rouen. Sur l'étendue du litige : 2. Aux termes de l'article 93 du code général des impôts : " (...) IV. 1. Pour l'application des dispositions du premier alinéa du I aux immeubles acquis dans les conditions prévues au 6 de l'article 93 et précédemment donnés en sous-location, l'imposition de la plus-value consécutive au changement de régime fiscal peut, sur demande expresse du contribuable, être reportée au moment où s'opérera la transmission de l'immeuble ou, le cas échéant, la transmission ou le rachat de tout ou partie des titres de la société propriétaire de l'immeuble ou sa dissolution. ". 3. Par une décision du 10 février 2021, l'administration a décidé d'accorder à M. B... un dégrèvement d'un montant de 33 743 euros correspondant aux suppléments d'imposition procédant de la rectification résultant du refus de report d'imposition de la plus-value à court terme sur le fondement du 1. du IV de l'article 93 du code général des impôts. 4. En raison de l'octroi par l'administration fiscale en cours d'instance du report d'imposition de la plus-value et du dégrèvement consécutif prononcé, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à la décharge des rappels de prélèvement libératoire assignés à M. B... au titre de l'année 2013. Ce non-lieu à statuer s'étend nécessairement au litige relatif au montant de la plus-value imposable qui est l'assiette du prélèvement libératoire mis à la charge du requérant. Par voie de conséquence, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge de M. B... à hauteur du dégrèvement prononcé. Sur le surplus des conclusions de la requête en ce qui concerne la réintégration d'une fraction des loyers : 5. Il résulte des mentions de la proposition de rectification que la SCI Le Progrès a levé l'option d'achat le 21 mai 2010, pour un prix de 15 centimes d'euros, d'un bien immobilier situé sur la commune du Havre qui avait été pris en crédit-bail auprès de la société anonyme (SA) Finamur le 30 juin 1998, d'une valeur de 228 673,53 euros. L'administration a estimé qu'en application des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts, l'exercice de la levée d'option d'achat par la SCI Le Progrès aurait dû conduire celle-ci à réintégrer la fraction des loyers antérieurement déduits, soit en 2013 la différence entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat diminué du prix de la levée d'option et les amortissements techniques que le preneur aurait pu déduire s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. L'administration a donc calculé une réintégration de 91 469 euros qu'elle a rapportée aux bénéfices non commerciaux de l'année 2013 de la société. 6. Aux termes de l'article 239 sexies du code général des impôts : " I. Lorsque le prix d'acquisition, par le locataire, de l'immeuble pris en location par un contrat de crédit-bail conclu avec une société immobilière pour le commerce et l'industrie est inférieur à la différence existant entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat et le montant total des amortissements que le locataire aurait pu pratiquer s'il avait été propriétaire du bien depuis cette date, le locataire acquéreur est tenu de réintégrer, dans les résultats de son entreprise afférents à l'exercice en cours au moment de la cession, la fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat et correspondant à ladite différence diminuée du prix de cession de l'immeuble (...) ". Aux termes de l'article 239 sexies B du même code : " Les dispositions du premier alinéa du I et celles du paragraphe II de l'article 239 sexies sont applicables aux locataires qui acquièrent des immeubles qui leur sont donnés en crédit-bail par des sociétés ou organismes autres que des sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie ". 7. Il résulte des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts que la réintégration dans les résultats imposables d'une fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat intervient lors de l'exercice en cours au moment de la cession de l'immeuble. 8. En premier lieu, M. B... ne conteste pas le principe de la réintégration d'une fraction des loyers sur le fondement de l'article 239 sexies du code général des impôts, mais soutient que cette réintégration devait être effectuée au titre l'année de levée de l'option d'achat du contrat de crédit-bail en 2010. Toutefois, il ressort des mentions du contrat de crédit-bail immobilier conclu le 30 juin 1998 que le paragraphe 302.3 stipulait que " la demande de réalisation de la vente n'emportera pas transfert de propriété, lequel s'opérera par l'acte de vente notarié ". Ainsi, si la société a levé l'option par courrier du 21 mai 2010, l'acte notarié de vente à titre de levée d'option n'a été signé que le 25 janvier 2013 et stipule dans le paragraphe " Propriété jouissance " que " l'acquéreur sera propriétaire du bien vendu à compter de ce jour ". Par suite, l'immeuble doit être regardé comme ayant été cédé en 2013 et c'est à bon droit que l'administration a réintégré la fraction des loyers dans les résultats de l'exercice clos en 2013. 9. En second lieu, pour calculer le montant des loyers à réintégrer de 91 469 euros, l'administration s'est fondée sur une période de douze ans pour calculer le montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. Cette période de douze ans s'étend de la signature de l'acte de crédit-bail le 30 juin 1998 jusqu'à la date de la levée d'option le 21 mai 2010. La société requérante fait valoir, à titre subsidiaire, que le calcul du montant de la réintégration est erroné et que la fraction des loyers à réintégrer doit être limitée à un montant total de 60 598 euros au lieu de 91 469 euros, correspondant à un montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant une période de 14,7 ans, soit au-delà de la date de levée de l'option jusqu'à la date de réalisation de la vente le 25 janvier 2013. 10. Toutefois, il résulte des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts que la réintégration dans les résultats imposables d'une fraction des loyers versés s'entend de la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat du crédit-bail, c'est-à-dire de la période où il a versé les loyers de crédit-bail en exécution du contrat. Or, il résulte des mentions de la proposition de rectification que la SCI Le Progrès a signé un contrat de crédit-bail pour un immeuble auprès de la société anonyme (SA) Finamur le 30 juin 1998 d'une valeur de 228 673,53 euros et d'une durée de douze ans. Par suite, le contrat de crédit-bail a pris fin le 30 juin 2010, la SCI Le Progrès ayant levé l'option d'achat le 21 mai 2010. En conséquence, à cette date, la SCI Le Progrès a cessé d'être tenue de verser des loyers en exécution du contrat de crédit-bail et, en tout état de cause, elle n'apporte la preuve ni que le bail a été prorogé ni qu'elle a continué de verser des loyers au-delà du 30 juin 2010 jusqu'à la signature de l'acte de vente le 25 janvier 2013. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que doit être prise en compte, pour le calcul du montant des amortissements techniques, la période courant du 30 juin 2010 au 25 janvier 2013. En conséquence, c'est à bon droit que, pour fixer le montant des loyers à réintégrer à la somme de 91 469 euros, l'administration s'est fondée sur une période de douze ans pour calculer le montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. 11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande aux fins de décharge des impositions supplémentaires en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante à l'instance pour l'essentiel, la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B... à concurrence de la somme de 33 743 euros correspondant au rappel de prélèvement libératoire mis à sa charge au titre de l'année 2013. Article 2 : La somme de 1 000 euros est mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. C...La conseillère la plus ancienne, Signé : D. Bureau La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Suzanne Pinto Carvalho N°20DA01116 2
JADE/CETATEXT000045945199.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2013. Par un jugement n°1800928 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 30 juillet 2020 et des mémoires, enregistrés les 27 novembre 2020, 11 février 2021, Mme C..., représentée par Me Buchet, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n°1800928 du tribunal administratif de Rouen ; 2°) d'accorder la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013 en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la réintégration d'une fraction des loyers correspondant sur le fondement de l'article 239 sexies du code général des impôts, qui n'est pas contestée dans le principe, doit être effectuée au titre de l'année 2010 qui est prescrite et non au titre de l'année 2013 car c'est la levée de l'option d'achat du contrat de crédit-bail qui conduit à la cessation d'activité de sous-location ; - à titre subsidiaire, le calcul du montant de la réintégration est erroné et la fraction des loyers à réintégrer doit être limitée à un montant total de 60 598 euros au lieu de 91 469 euros ; - au regard de la décision du Conseil d'Etat du 4 mars 2015 n° 360508, la levée d'option par le locataire entraîne le transfert de propriété de l'immeuble par le crédit-bailleur, transfert de propriété qui ne peut intervenir postérieurement à l'échéance du bail ; la vente était donc parfaite au 21 mai 2010 et la plus-value était imposable en 2010 qui est prescrite ; - à titre subsidiaire, le bénéfice du report d'imposition est subordonné au respect des conditions posées par les dispositions législatives de l'article 93 quater, IV du code général des impôts qui prévoient, à peine de déchéance, que la demande doit être formulée de manière expresse dans l'acte constatant le transfert de propriété de l'immeuble ; les dispositions réglementaires de l'article 41 novovicies de l'annexe III au code général des impôts, prévoyant des obligations déclaratives, ne peuvent instituer une déchéance du droit au report d'imposition en cas de manquement à ces obligations déclaratives ; or, la société civile immobilière (SCI) Le Progrès a adressé à l'administration fiscale le 14 octobre 2016, la déclaration rectificative n°2035 de l'année 2013, dans laquelle les associés ont tous souscrit à l'ensemble des obligations déclaratives du report d'imposition prévues à l'article 41 novovicies de l'annexe III au code ; - la valeur vénale de l'immeuble de 650 000 euros retenue par l'administration fiscale pour le calcul de la plus-value est erronée ; la valeur vénale doit être fixée à 275 000 euros. Par un mémoire en défense et des mémoires, enregistrés les 28 octobre 2020, 26 janvier 2021 et 15 mars 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé et au rejet du surplus des conclusions de la requête. Il soutient que : - il est fait droit aux conclusions relatives à la validité de l'option pour le report d'imposition de la plus-value et le dégrèvement de l'imposition correspondante sera communiqué à la cour ; - les autres moyens de la requête de Mme C... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 17 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 10 décembre 2021. Un mémoire, présenté pour Mme C..., a été enregistré le 18 mars 2022, après la clôture de l'instruction. Vu la lettre adressée en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative informant les parties que la cour était susceptible de se fonder sur un moyen relevé d'office tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions relatives au litige sur la valeur vénale de l'immeuble en raison de l'octroi par l'administration du report d'imposition prévu au IV de l'article 93 du code général des impôts. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Massounga, avocat de Mme C.... Une note en délibéré présentée par Mme C... a été enregistrée le 10 juin 2022. Considérant ce qui suit : 1. La SCI Le Progrès, qui n'a pas opté pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés et dont Mme C... est l'une des associés, a pris en crédit-bail auprès de la société anonyme (SA) Finamur, le 30 juin 1998, un bien immobilier situé sur la commune du Havre. Elle a levé l'option d'achat le 21 mai 2010. L'acte notarié d'achat a été signé le 25 janvier 2013 et mentionne une valeur vénale du bien immobilier acquis de 650 000 euros. La SCI Le Progrès a fait l'objet d'un contrôle sur place de ses documents comptables à l'issue de laquelle l'administration, d'une part, a réintégré une quote-part des loyers à l'échéance du contrat de crédit-bail et, d'autre part, a imposé la plus-value résultant de la levée de l'option de l'achat de l'immeuble. En conséquence, l'administration a rectifié le résultat imposable de l'exercice 2013 de la SCI Le Progrès. L'administration a tiré les conséquences du rehaussement du résultat imposable de l'exercice 2013 de la société au niveau des associés et, par une proposition de rectification du 4 juillet 2016, l'administration a assujetti Mme C... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013, dont elle a vainement demandé la décharge au tribunal administratif de Rouen. Sur l'étendue du litige : 2. Aux termes de l'article 93 du code général des impôts : " (...) IV. 1. Pour l'application des dispositions du premier alinéa du I aux immeubles acquis dans les conditions prévues au 6 de l'article 93 et précédemment donnés en sous-location, l'imposition de la plus-value consécutive au changement de régime fiscal peut, sur demande expresse du contribuable, être reportée au moment où s'opérera la transmission de l'immeuble ou, le cas échéant, la transmission ou le rachat de tout ou partie des titres de la société propriétaire de l'immeuble ou sa dissolution. " 3. Par une décision du 10 février 2021, l'administration a décidé d'accorder à Mme C... un dégrèvement d'un montant de 33 743 euros correspondant aux suppléments d'impositions procédant de la rectification résultant du refus de report d'imposition de la plus-value à court terme sur le fondement du 1. du IV de l'article 93 du code général des impôts. 4. En raison de l'octroi par l'administration fiscale en cours d'instance du report d'imposition de la plus-value et du dégrèvement consécutif prononcé, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à la décharge des rappels de prélèvement libératoire assignés à Mme C... au titre de l'année 2013. Ce non-lieu à statuer s'étend nécessairement au litige relatif au montant de la plus-value imposable qui est l'assiette du prélèvement libératoire mis à la charge de la requérante. Par voie de conséquence, il n'y a donc plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge de Mme C... à hauteur du dégrèvement ainsi prononcé. Sur le surplus des conclusions de la requête en ce qui concerne la réintégration d'une fraction des loyers : 5. Il résulte des mentions de la proposition de rectification que la SCI Le Progrès a levé l'option d'achat le 21 mai 2010, pour un prix de 15 centimes d'euros, d'un bien immobilier situé sur la commune du Havre qui avait été pris en crédit-bail auprès de la société anonyme (SA) Finamur le 30 juin 1998 d'une valeur de 228 673,53 euros. L'administration a estimé qu'en application des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts, l'exercice de la levée d'option d'achat par la SCI Le Progrès aurait dû conduire celle-ci à réintégrer la fraction des loyers antérieurement déduits, soit en 2013 la différence entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat diminué du prix de la levée d'option et les amortissements technique que le preneur aurait pu déduire s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. L'administration a donc calculé une réintégration de 91 469 euros qu'elle a rapporté aux bénéfices non commerciaux de l'année 2013 de la société. 6. Aux termes de l'article 239 sexies du code général des impôts : " I. Lorsque le prix d'acquisition, par le locataire, de l'immeuble pris en location par un contrat de crédit-bail conclu avec une société immobilière pour le commerce et l'industrie est inférieur à la différence existant entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat et le montant total des amortissements que le locataire aurait pu pratiquer s'il avait été propriétaire du bien depuis cette date, le locataire acquéreur est tenu de réintégrer, dans les résultats de son entreprise afférents à l'exercice en cours au moment de la cession, la fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat et correspondant à ladite différence diminuée du prix de cession de l'immeuble (...) ". Aux termes de l'article 239 sexies B du même code : " Les dispositions du premier alinéa du I et celles du paragraphe II de l'article 239 sexies sont applicables aux locataires qui acquièrent des immeubles qui leur sont donnés en crédit-bail par des sociétés ou organismes autres que des sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie ". 7. Il résulte des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts que la réintégration dans les résultats imposables d'une fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat intervient lors de l'exercice en cours au moment de la cession de l'immeuble. 8. En premier lieu, Mme C... ne conteste pas le principe de la réintégration d'une fraction des loyers sur le fondement de l'article 239 sexies du code général des impôts, mais soutient que cette réintégration devait être effectuée au titre l'année de levée de l'option d'achat du contrat de crédit-bail en 2010. Toutefois, il ressort des mentions du contrat de crédit-bail immobilier conclu le 30 juin 1998 que le paragraphe 302.3 stipulait que " la demande de réalisation de la vente n'emportera pas transfert de propriété, lequel s'opérera par l'acte de vente notarié ". Ainsi, si la société a levé l'option par courrier du 21 mai 2010, l'acte notarié de vente à titre de levée d'option n'a été signé que le 25 janvier 2013 et stipule dans le paragraphe " Propriété jouissance " que " l'acquéreur sera propriétaire du bien vendu à compter de ce jour ". Par suite, l'immeuble doit être regardé comme ayant été cédé en 2013 et c'est à bon droit que l'administration a réintégré la fraction des loyers dans les résultats de l'exercice clos en 2013. 9. En second lieu, pour calculer le montant des loyers à réintégrer de 91 469 euros, l'administration s'est fondée sur une période de douze ans pour calculer le montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. Cette période de douze ans s'étend de la signature de l'acte de crédit-bail le 30 juin 1998 jusqu'à la date de la levée d'option le 21 mai 2010. La requérante fait valoir, à titre subsidiaire, que le calcul du montant de la réintégration est erroné et que la fraction des loyers à réintégrer doit être limitée à un montant total de 60 598 euros au lieu de 91 469 euros, correspondant à un montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant une période de 14,7 ans, soit au-delà de la date de levée de l'option jusqu'à la date de réalisation de la vente le 25 janvier 2013. 10. Toutefois, il résulte des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts que la réintégration dans les résultats imposables d'une fraction des loyers versés s'entend de la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat du crédit-bail, c'est-à-dire de la période où il a versé les loyers de crédit-bail en exécution du contrat. Or, il résulte des mentions de la proposition de rectification que la SCI Le Progrès a signé un contrat de crédit-bail pour un immeuble auprès de la société anonyme (SA) Finamur le 30 juin 1998 d'une valeur de 228 673,53 euros et d'une durée de douze ans. Par suite, le contrat de crédit-bail a pris fin le 30 juin 2010, la SCI Le Progrès ayant levé l'option d'achat le 21 mai 2010. En conséquence, à cette date, la SCI Le Progrès a cessé d'être tenue de verser des loyers en exécution du contrat de crédit-bail et, en tout état de cause, elle n'apporte la preuve ni que le bail a été prorogé ni qu'elle a continué de verser des loyers au-delà du 30 juin jusqu'à la signature de l'acte de vente le 25 janvier 2013. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que doit être prise en compte, pour le calcul du montant des amortissements techniques, la période courant du 30 juin 2010 au 25 janvier 2013. En conséquence, c'est à bon droit, pour fixer le montant des loyers à réintégrer à la somme de 91 469 euros, l'administration s'est fondée sur une période de douze ans pour calculer le montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqué s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. 11. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande aux fins de décharge des impositions supplémentaires en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante à l'instance pour l'essentiel, la somme de 1000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme C... à concurrence de la somme de 33 743 euros correspondant au rappel de prélèvement libératoire mis à sa charge au titre de l'année 2013. Article 2 : La somme de 1 000 (mille) euros est mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. B...La conseillère la plus ancienne, Signé : D. Bureau La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Suzanne Pinto Carvalho N°20DA01117 2
JADE/CETATEXT000045945114.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Stallini SA (Stallini) a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, à titre principal, d'une part, de procéder à la rectification du décompte général relatif au lot n°11 " plomberie - sanitaire " du marché de restructuration d'une partie des bâtiments et de construction d'un bâtiment du centre hospitalier de Pfastatt, afin de faire apparaître à son crédit un solde de 151 346,03 euros, majoré des intérêts de retard, d'autre part, de condamner le centre hospitalier de Pfastatt à lui verser la somme de 4 755,30 euros correspondant à une facture émise le 24 octobre 2013, majorée des intérêts de retard, la somme de 58 240,20 euros au titre du préjudice subi dans le cadre de l'exécution du contrat et la somme de 400 euros au titre des intérêts de retard dans le cadre du paiement de la facture n° 1111092 du 30 novembre 2011 et, enfin, de condamner le centre hospitalier de Pfastatt à lui restituer la retenue de garantie de 38 870 euros, majorée des intérêts de retard à compter du 1er janvier 2014, ainsi que de mettre à la charge du centre hospitalier de Pfastatt le versement d'une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le centre hospitalier de Pfastatt, dans son mémoire en défense du 12 mars 2018, a demandé au tribunal de fixer le solde du marché à la somme de 371 328,83 euros au débit de la société Stallini et, à titre reconventionnel, de condamner cette dernière à lui verser un montant de 242 542,09 euros au titre du solde du marché, sans préjudice de la somme de 128 786,74 euros due à la compagnie Allianz IARD, son assureur subrogé, ainsi que de mettre à la charge de la société Stallini le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La compagnie Allianz IARD a demandé, à titre principal, la jonction avec l'instance enregistrée sous le n° 1604148 devant le tribunal administratif de Strasbourg, dans laquelle le centre hospitalier de Pfastatt demandait sa condamnation à lui verser la somme de 125 715,09 euros et de réserver ses droits et, à titre subsidiaire, de condamner la société Stallini à lui verser la somme de 128 786,74 euros, de limiter les demandes présentées par le centre hospitalier de Pfastatt à hauteur de 78 336,70 euros et de mettre à la charge solidaire de la société Stallini et du centre hospitalier de Pfastatt le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1500535 du 6 février 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la société Stallini à verser la somme de 28 637,97 euros au centre hospitalier de Pfastatt, à verser la somme de 128 786,14 euros à la Compagnie Allianz IARD et a rejeté le surplus des demandes des parties. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 4 avril 2019, 23 mars et 30 août 2021 et 23 mars 2022, la société Stallini, représentée par Me Cereja, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 6 février 2019 ; 2°) d'appeler en cause la société EDEIS, venant aux droits de la société SNC Lavalin ; 3°) si nécessaire, de designer un expert ; 4°) à titre principal, de procéder à la rectification du décompte général du marché afin de faire apparaître à son profit un solde de 151 346,03 euros, majoré des intérêts de retard ; 5°) de condamner le centre hospitalier de Pfastatt à lui verser la somme de 58 240,20 euros au titre du préjudice subi dans le cadre de l'exécution du marché ; 6°) de condamner le centre hospitalier de Pfastatt à lui verser la somme de 400 euros au titre des intérêts de retard dans le cadre du paiement de la facture n° 1111092 en date du 30 novembre 2011 ; 7°) à titre subsidiaire, de procéder à la réduction des pénalités mises à sa charge dans le décompte général du marché ; 8°) de condamner la société MMA IARD Assurances Mutuelles à la garantir des éventuelles condamnations prononcées à son encontre en sa qualité d'assureur responsabilité civile décennale ; 9°) dans tous les cas, de mettre à la charge du centre hospitalier de Pfastatt le versement d'une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que : - les dysfonctionnements de l'installation d'eau chaude sanitaire ne résultent pas d'un défaut d'exécution mais d'un défaut de conception des pompes mises en œuvre par le titulaire du lot n° 10 " chauffage-ventilation-désenfumage " ; - la réserve qui lui a été opposée par le maître d'ouvrage concernant l'équilibrage hydraulique des réseaux d'eau chaude sanitaire et de bouclage de l'eau chaude sanitaire ne portait que sur un réglage de température de mise en service mais pas sur la résolution d'un dysfonctionnement ; - elle n'était pas tenue, selon les stipulations du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) de son lot, d'équilibrer l'ensemble des réseaux d'ECS des trois bâtiments, mais était seulement chargée du bâtiment C ; - les travaux de mises en conformité prescrits par le " rapport BECS " du 2 mai 2013 impliquaient qu'elle réalise des prestations qui relevaient du lot n° 10 ; - il ne peut lui être reproché un défaut de conseil au cours du chantier concernant des prestations étrangères à son lot ; - elle est fondée à mettre en cause la société EDEIS, venant aux droits de la société SNC Lavalin, concepteur du bouclage d'eau chaude sanitaire à l'origine des problème d'équilibrage de la température de l'eau chaude sanitaire sur le réseau ; - subsidiairement, le montant des pénalités restant à sa charge à la suite du jugement du tribunal demeure manifestement disproportionné ; - dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, elle renvoie aux moyens développés dans ses mémoires de première instance. Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 juin 2019, 10 septembre 2021, 23 mars 2022[BN1] et 26 avril 2022, le centre hospitalier de Pfastatt, représenté par la SELARL CM Affaires publiques, conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement n° 1500535 du 6 février 2019 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a fixé le solde du marché à la somme de 157 424,71 euros au débit de la société Stallini, de fixer le solde du marché à la somme de 353 888,99 euros au débit de la société Stallini, de condamner la société Stallini à lui verser à ce titre une somme de 225 102,85 euros, sans préjudice de la somme de 128 786,64 euros due à la société Allianz en qualité d'assureur subrogé et, dans tous les cas, à ce que soit mis à la charge de de la société Stallini le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la requête, qui ne contient aucune critique du jugement, est irrecevable ; - les moyens soulevés par la société Stallini ne sont pas fondés ; - la société Stallini intervenait sur le chantier lorsque les détecteurs d'incendie du bâtiment A ont été endommagés par des dépôts de poussière ; elle est donc fondée à inscrire au débit de la société, dans le décompte général du marché, une somme de 14 947,33 euros, au titre des pénalités de retard pour l'ouverture du bâtiment A ; - c'est à tort que les premiers juges ont procédé à la modulation du montant des pénalités de retard concernant les travaux du bâtiment C alors que la société Stallini n'a produit aucun élément de nature à démontrer son caractère manifestement excessif ; - les travaux sur la conduite d'eau usée étaient compris dans le forfait. Par un mémoire enregistré le 6 août 2019, la société Allianz IARD, représentée par la SELARL Le Discorde, Deleau, conclut, à titre principal, au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société Stallini le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, à titre subsidiaire, à la condamnation de tout constructeur auquel les désordres seraient imputables à lui verser la somme de 128 786,14 euros et à ce que soit mis à la charge de tout constructeur auquel les désordres seraient imputables le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Par un mémoire enregistré le 11 mars 2021[RM2][BN3], la société MMA IARD, représentée par Me Wetterer, forme une intervention volontaire en qualité d'assureur de la société Stallini. Elle soutient qu'elle intervient au soutien de la société Stallini. Par un mémoire enregistré le 7 mars 2022, la société EDEIS, représentée par Me De Puineuf, conclut, à titre principal, au rejet de la requête de la société Stallini, à titre subsidiaire, à la désignation d'un expert judiciaire et, dans tous les cas, à ce que soit mis à la charge de la société Stallini le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle est étrangère au litige, - les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office, tirés, d'une part, de l'incompétence de la juridiction administrative pour statuer sur les conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société MMA IARD, d'autre part, de l'irrecevabilité des conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier de Pfastatt à verser à la société Stallini la somme de 400 euros au titre des intérêts de retard dans le cadre du paiement de la facture n° 1111092 en date du 30 novembre 2011 et, enfin, de l'irrecevabilité de l'intervention de la société MMA IARD pour absence de motivation. Par ordonnance du 25 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 8 avril 2022. Par un mémoire enregistré le 16 mai 2022, la société MMA IARD a présenté des observations sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité de son intervention. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picque, première conseillère, - les conclusions de M. Michel, rapporteur public, - et les observations de Me Cereja, pour la société Stallini ainsi que celles de Me Durgun pour le centre hospitalier de Pfastatt. Considérant ce qui suit : 1. Dans le cadre d'une opération de restructuration de ses bâtiments A et B et de la construction d'un nouveau bâtiment C, le centre hospitalier de Pfastatt, par un acte d'engagement signé le 7 juin 2011, a confié à la société Stallini l'exécution du lot n° 11 " sanitaire - plomberie " du marché public de travaux. Le 26 mars 2014 la société Stallini a transmis son décompte final au maître de l'ouvrage. Par un courrier reçu le 23 juillet 2014, l'entreprise a mis en demeure le centre hospitalier d'établir le décompte général de son lot, ce qui a été fait le 18 août 2014. La société Stallini a formé une réclamation contre ce décompte général faisant apparaître un solde de 289 890,94 euros en faveur du centre hospitalier de Pfastatt. Cette réclamation, reçue le 25 septembre 2014, a été implicitement rejetée. 2. La société Stallini fait appel du jugement n° 1500535 du 6 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser la somme de 28 637,97 euros au centre hospitalier de Pfastatt et la somme de 128 786,14 euros à la Compagnie Allianz IARD. Par la voie de l'appel incident, le centre hospitalier de Pfastatt conteste le montant du solde fixé par les premiers juges et demande, à titre reconventionnel, la condamnation de la société requérante à lui verser une somme de 225 102,85 euros à ce titre. Sur l'intervention de la société MMA IARD : 3. Le jugement à rendre sur la requête de la société Stallini est susceptible de préjudicier aux droits de son assureur. Dès lors, l'intervention de la société MMA IARD est recevable. Sur les conclusions principales de la société Stallini et du centre hospitalier de Pfastatt : En ce qui concerne le coût des travaux de levée des réserves : 4. Aux termes de l'article 41.3 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux (CCAG Travaux) : " Au vu du procès-verbal des opérations préalables à la réception et des propositions du maître d'œuvre, le maître de l'ouvrage décide si la réception est ou non prononcée ou si elle est prononcée avec réserves. S'il prononce la réception, il fixe la date qu'il retient pour l'achèvement des travaux. La décision ainsi prise est notifiée au titulaire dans les trente jours suivant la date du procès-verbal. La réception prend effet à la date fixée pour l'achèvement des travaux. Sauf le cas prévu à l'article 41. 1. 3, à défaut de décision du maître de l'ouvrage notifiée dans le délai précisé ci-dessus, les propositions du maître d'œuvre s'imposent au maître de l'ouvrage et au titulaire / (...) ". Selon l'article 41.6 du même document contractuel : " Lorsque la réception est assortie de réserves, le titulaire doit remédier aux imperfections et malfaçons correspondantes dans le délai fixé par le représentant du pouvoir adjudicateur ou, en l'absence d'un tel délai, trois mois avant l'expiration du délai de garantie défini à l'article 44. 1. Au cas où ces travaux ne seraient pas faits dans le délai prescrit, le maître de l'ouvrage peut les faire exécuter aux frais et risques du titulaire, après mise en demeure demeurée infructueuse ". 5. En premier lieu, si le titulaire défaillant doit être mis à même de suivre l'exécution d'un marché de substitution conclu entre le maître de l'ouvrage et un autre entrepreneur pour l'achèvement des travaux, les contrats passés par le maître d'ouvrage avec un autre entrepreneur pour la seule reprise de malfaçons auxquelles le titulaire du marché n'a pas remédié ne constituent pas, en principe, des marchés de substitution soumis au droit de suivi de leur exécution. Il en résulte que le moyen tiré la méconnaissance du droit de suivi des marchés de substitution prévu par les stipulations de l'article 48.5 du CCAG, inapplicable en l'espèce, ne peut être utilement invoqué pour faire obstacle à ce que les frais occasionnés pour la résorption des malfaçons soient inscrits au décompte du titulaire du lot défaillant. 6. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que, le 21 janvier 2013, le centre hospitalier de Pfastatt a assorti de réserves sa décision de réception de la phase 1 des travaux, concernant la construction du bâtiment C. Par une décision du 15 février 2013, sur proposition du maître d'œuvre, le maître de l'ouvrage a maintenu certaines réserves, qui devaient être levées au plus tard le 7 février 2013 selon la décision de réception, dont celles intitulées " mise en service des réseaux eau froid sanitaire (EFS) + eau chaude sanitaire (ECS) + bouclage eau chaude sanitaire (BECS) " et " réaliser l'équilibrage hydraulique des réseaux ECS et BECS (température à régler) ". Le 26 avril 2013, le centre hospitalier de Pfastatt a mis en demeure la société Stallini de lever l'ensemble des réserves restantes à cette date, et notamment de procéder à l'équilibrage des réseaux d'ECS, ainsi que de mettre en place des " filtres terminaux " dans un délai d'une semaine, en l'informant qu'à défaut de respecter ce délai, une mise en régie à ses frais et risques pourrait être ordonnée. Le 7 mai 2013, le maître de l'ouvrage, en présence du maître d'œuvre et de la société Stallini, a constaté que les réserves n'étaient pas levées. Le 31 mai 2013, le bureau d'étude SNC Lavalin a remis au maître de l'ouvrage un rapport intitulé " Bouclage ECS n° 2 " ayant pour objet d'examiner les problèmes rencontrés sur l'installation d'ECS du bâtiment C et de proposer des solutions pour y remédier. Par un ordre de service (OS) n° 13 du 12 juin 2013, le maître d'œuvre a demandé à la société Stallini de réaliser l'ensemble des travaux de mise en conformité de l'installation d'ECS mentionnés dans l'étude du 31 mai 2013 au plus tard le 5 juillet 2013, en indiquant à l'entreprise qu'à défaut les travaux seraient exécutés à ses frais et risques par le maître de l'ouvrage. Par un courrier reçu le 24 juin 2013, la société Stallini a transmis au centre hospitalier de Pfastatt un devis pour la réalisation des travaux demandés par l'OS n° 13 en faisant valoir que ceux-ci avaient le caractère de travaux supplémentaires non prévus par les stipulations contractuelles du lot n° 11, conclu à prix forfaitaire. Le centre hospitalier de Pfastatt, après avoir déclaré à son assureur le sinistre relatif au déséquilibre et au manque de débit général des installations d'ECS, n'a pas donné suite à ce devis et a finalement conclu, le 15 novembre 2013, avec la société Génie climatique de l'Est (GCE), un marché intitulé " lot n° 111 - eau chaude sanitaire " ayant pour objet la réalisation des travaux prescrits par l'étude du 31 mai 2013, d'un montant de 58 236,38 euros HT. Ces travaux ont été réceptionnés le 6 mai 2014 par le maître de l'ouvrage. 7. Aux termes de l'article 1.4 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du lot n° 11 : " L'entrepreneur s'engage à exécuter tous les travaux nécessaires à la réalisation de l'ouvrage complètement achevé et en état de bon fonctionnement. (...) / Il doit procéder à la mise en service ". Selon l'article 1.5 du même document contractuel : " Description sommaire des travaux. Ces travaux comprennent essentiellement : (...) le raccordement et la distribution d'ECS depuis la production d'ECS créée par le lot chauffage ". Les articles 2.3.2 et 2.3.3 de ce document indiquent les bases de calcul pour la distribution d'eau chaude sanitaire, l'article 2.6 précisant que l'entreprise Stallini devait fournir, avant le début des travaux, les notes de calcul détaillées des réseaux d'alimentation eau froide, eau chaude sanitaire et bouclage d'eau chaude sanitaire. Enfin, aux termes de l'article 4 du CCTP : " (...) 4.3.2. Production d'eau chaude sanitaire : (...). La production ECS de type instantanée est à la charge du lot " chauffage " dans la chaufferie existante au sous-sol du bâtiment B. / 4.3.3. Canalisation ECS et BCS : L'origine d'ECS pour la bâtiment C sera la vanne laissée en attente par la lot chauffage en sortie de sa production d'ECS. A partir de ce réseau, la distribution de l'eau chaude à 60° sera réalisée en tube cuivre vers les appareils sanitaires du bâtiment (...). / Une nourrice réalisée en tube cuivre DN 60/63 d'une longueur de 1 m environ sera créé en sortie de production (...). / Le réseau ECS sera bouclé (...). Des vannes de réglages à 3 fonctions seront mises en place (...) y compris des vannes d'équilibrage avec rédaction d'un procès-verbal des valeurs de réglage et des températures obtenues remis eau BET. / Une pompe double à corps en laiton de bouclage ECS sera installée, d'un débit de 2 m3/h à 7 mCE (débit et HMT à vérifier en phase EXE) ". 8. Il résulte de ces stipulations que la société Stallini était en charge des notes de calcul nécessaires à la fourniture des canalisations, vannes et pompes du réseau d'eau chaude sanitaire, et notamment du bouclage d'eau chaude sanitaire, du bâtiment C sur la base des indications de diamètres minimaux, de débits minimaux et de pertes de charge maximales indiquées par le CCTP. 9. Il résulte de l'instruction, et en particulier, du rapport " Bouclage ECS " du 24 avril 2013, du rapport " Bouclage ECS n° 2 " du 31 mai 2013, du rapport d'expertise de l'assureur du maître de l'ouvrage du 17 juillet 2013 et, enfin, du rapport de l'expert judiciaire du 15 décembre 2020, que le déséquilibrage de température constaté sur le réseau d'eau chaude sanitaire du bâtiment C, ayant fait l'objet de réserves à la réception du marché en litige, trouve sa cause, d'une part, dans le sous-dimensionnement des tuyauteries et de la pompe du circuit de bouclage ayant pour effet d'occasionner d'importantes pertes de charge et, d'autre part, dans l'existence de multiples antennes de courtes longueurs destinées à boucler l'ECS au plus près des installations sanitaires (principe dit du " multi-bouclage "). Le rapport d'expertise judiciaire impute ces malfaçons à la société Stallini et précise à cet égard que le système de multi-bouclage conçu par le maître d'œuvre était conforme à la réglementation et aux documents techniques alors applicables. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la société Stallini, les réserves formulées par le maître de l'ouvrage, qui ne se cantonnent pas à des réglages de températures, correspondent bien à des imperfections et des malfaçons en lien avec ses obligations contractuelles rappelées aux points 7 et 8 et non à une erreur de conception ou à des obligations contractuelles du lot " chauffage ". 10. Il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier de Pfastatt pouvait, comme il l'a fait, inscrire au débit du décompte du marché conclu avec la société Stallini le coût de travaux nécessaires à la levée des réserves. En ce qui concerne les pénalités de retard : S'agissant de leur bien-fondé : 11. En premier lieu, il appartient au requérant, tant en première instance qu'en appel, d'assortir ses moyens des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé. Il suit de là que le juge d'appel n'est pas tenu d'examiner un moyen que l'appelant se borne à déclarer reprendre en appel, sans l'assortir des précisions nécessaires. 12. La société Stallini déclare reprendre en appel les moyens présentés en première instance contestant le bien-fondé et le montant des pénalités de retard mises à sa charge en ce qui concerne le bâtiment C sans fournir les précisions indispensables à l'appréciation de leur bien-fondé ni joindre à sa requête une copie du mémoire de première instance qui contenait ces précisions. Ce faisant, elle ne met pas la cour en mesure de se prononcer sur les erreurs que le tribunal administratif aurait pu commettre en écartant ces moyens. 13. En second lieu, aux termes de l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP), l'entrepreneur devait " prendre toutes les précautions pour sauvegarder dans leur état tous les ouvrages existants pouvant subir du fait des travaux des dommages (...) ". S'il ressort du compte rendu de l'OPC du 28 mai 2013 que l'ouverture de la polyclinique installée dans le bâtiment A été retardée en raison du dysfonctionnement des têtes de détection d'incendie provoqué par des dépôts de poussières, il ne résulte pas de l'instruction que ce dommage serait imputable à la société Stallini. Par suite, le centre hospitalier de Pfastatt n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les pénalités d'un montant de 14 947,33 euros au titre des 23 jours de retard pour l'ouverture du bâtiment A ne pouvaient être inscrites au débit de la société Stallini dans le décompte général du marché. S'agissant de leur modulation : 14. Les pénalités de retard prévues par les clauses d'un marché public ont pour objet de réparer forfaitairement le préjudice qu'est susceptible de causer au pouvoir adjudicateur le non-respect, par le titulaire du marché, des délais d'exécution contractuellement prévus. Elles sont applicables au seul motif qu'un retard dans l'exécution du marché est constaté et alors même que le pouvoir adjudicateur n'aurait subi aucun préjudice ou que le montant des pénalités mises à la charge du titulaire du marché qui résulte de leur application serait supérieur au préjudice subi. 15. Si, lorsqu'il est saisi d'un litige entre les parties à un marché public, le juge du contrat doit, en principe, appliquer les clauses relatives aux pénalités dont sont convenues les parties en signant le contrat, il peut, à titre exceptionnel, saisi de conclusions en ce sens par une partie, modérer ou augmenter les pénalités de retard résultant du contrat si elles atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire, eu égard au montant du marché et compte tenu de l'ampleur du retard constaté dans l'exécution des prestations. 16. Lorsque le titulaire du marché saisit le juge de conclusions tendant à ce qu'il modère les pénalités mises à sa charge, il ne saurait utilement soutenir que le pouvoir adjudicateur n'a subi aucun préjudice ou que le préjudice qu'il a subi est inférieur au montant des pénalités mises à sa charge. Il lui appartient de fournir aux juges tous éléments, relatifs notamment aux pratiques observées pour des marchés comparables ou aux caractéristiques particulières du marché en litige, de nature à établir dans quelle mesure ces pénalités présentent selon lui un caractère manifestement excessif. Au vu de l'argumentation des parties, il incombe au juge soit de rejeter les conclusions dont il est saisi en faisant application des clauses du contrat relatives aux pénalités, soit de rectifier le montant des pénalités mises à la charge du titulaire du marché dans la seule mesure qu'impose la correction de leur caractère manifestement excessif. 17. Compte-tenu de l'importance du retard imputable à la société pour absence de levée des réserves et de ce que cette dernière ne présente aucun élément d'appréciation ou de comparaison permettant d'établir qu'au cas d'espèce le montant de ces pénalités présenterait un caractère manifestement excessif, il n'y a pas lieu de modérer leur montant arrêté par le tribunal à la somme non contestée de 277 532,52 euros, correspondant à 45,1 % du montant HT du marché (614 018,64 euros). Le centre hospitalier de Pfastatt est donc fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont ordonné la modulation du montant des pénalités de retard relatives aux travaux effectués dans le cadre du bâtiment C en réduisant leur montant à 100 000 euros. En ce qui concerne la facture du 24 octobre 2013 : 18. Le caractère global et forfaitaire du prix du marché ne fait pas obstacle à ce que l'entreprise cocontractante sollicite une indemnisation au titre de travaux supplémentaires effectués, même sans ordre de service, dès lors que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art et dont la charge définitive de l'indemnisation incombe, en principe, au maître de l'ouvrage. 19. Il résulte de l'instruction que la société Stallini est intervenue le 24 octobre 2013 sur site afin de réparer et déboucher une canalisation bloquée par du béton. Il ne résulte pas de l'instruction que, comme l'affirme le centre hospitalier de Pfastatt, une telle prestation était comprise dans la rémunération forfaitaire de l'entrepreneur. En outre, il n'est pas établi, ni d'ailleurs soutenu, que le bouchage de la canalisation serait imputable à un manquement contractuel que la société Stallini aurait été tenue de reprendre sans pouvoir exiger de rémunération supplémentaire. Par suite, le centre hospitalier de Pfastatt n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la somme de 4 755,30 euros, correspondant à la facture émise par la société Stallini pour la réalisation de ces travaux supplémentaires, devait être portée au crédit de la société dans le décompte général du marché. En ce qui concerne les difficultés rencontrées dans l'exécution du marché : 20. La société Stallini, qui se borne à renvoyer à ses écritures de première instance, ne met pas la cour en mesure de se prononcer sur le bien-fondé de ses prétentions indemnitaires. En ce qui concerne les intérêts de retard dans le cadre du paiement de la facture n° 1111092 du 30 novembre 2011 : 21. Il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont fait droit à la demande de la société Stallini concernant ce poste du décompte. Les conclusions de la société Stallini reprises en appel sont donc sans objet et doivent, par suite, être rejetées comme irrecevables. En ce qui concerne le solde : 22. Compte tenu du rejet de la demande de la société Stallini tendant à la modulation du montant des pénalités de retard, il y a lieu de rectifier le solde du marché arrêté par les premiers juges à la somme de 157 424,71 euros TTC, au débit de la société requérante, en le fixant à la somme de 257 424,71 euros TTC. 23. Il résulte de tout ce qui précède que la requête d'appel de la société Stallini doit être rejetée, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par l'intimé. Par la voie de l'appel incident, le centre hospitalier de Pfastatt, est quant à lui seulement fondé à demander que le solde du marché en litige soit fixé à la somme de 257 424,71 euros TTC au débit de la société et que la condamnation de la société à son bénéfice soit ramenée, au regard de la somme versée à la société Allianz IARD subrogée (128 786,14 euros), à la somme de 128 638,57 euros. L'article 1er du jugement attaqué doit en conséquence être réformé dans cette mesure. Sur l'appel en garantie de la société Stallini à l'encontre de la société MMA IARD : 24. Il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé, alors même que l'appréciation de la responsabilité de son assuré dans la réalisation du fait dommageable relèverait de la juridiction administrative. Par suite, les conclusions d'appel en garantie de la société Stallini doivent être rejetées comme étant portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître. Sur les frais liés à l'instance : 25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre hospitalier de Pfastatt, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Stallini demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société requérante le versement de la somme de 1 000 euros, d'une part, au centre hospitalier de Pfastatt, d'autre part, à la société Allianz IARD et, enfin, à la société EDEIS, sur le fondement des mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : L'intervention de la société MMA IARD Assurances mutuelles est admise. Article 2 : Les conclusions d'appel en garantie présentées par la société Stallini à l'encontre de la société MMA IARD sont rejetées comme étant portées devant un ordre de juridiction incompétent. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par la société Stallini est rejeté. Article 4 : La société Stallini est condamnée à verser au centre hospitalier de Pfastatt la somme de 128 638,57 euros. Article 5 : L'article 1er du jugement n° 1500535 du 6 février 2019 du tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 4. Article 6 : La société Stallini versera au centre hospitalier de Pfastatt la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 7 : La société Stallini versera à la société Allianz IARD la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 8 : La société Stallini versera à la société EDEIS la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 9 : Le surplus des conclusions du centre hospitalier de Pfastatt est rejeté. Article 10 : Le présent arrêt sera notifié à la société Stallini, au centre hospitalier de Pfastatt, à la compagnie d'assurance Allianz IARD, à la compagnie d'assurance MMA IARD et à la société EDEIS. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Grossrieder, présidente assesseure, - Mme Picque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2022. La rapporteure, Signé : A.-S. PicqueLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet du Haut-Rhin en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso. [BN1]Il y a également un mémoire le 26/04/2022 qui n'a pas été communiqué, ne faut-il pas le mentionner ' [RM2]Je ne retrouve pas cette date pour le mémoire en intervention pour MMA. Dans skipper, je vois la date du 16 mai 2022 pour le mémoire en intervention de Me WETTERER pour MMA. Est-ce que le 16 mai 2022 serait la date concernée par ce mémoire ' Mais ce mémoire est annoncé dans la 1ère phrase page 5 [BN3R2]Le mémoire en intervention est dans télérecours. c'est bon 2 N° 19NC01022
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Vu les procédures suivantes : Procédures contentieuses antérieures : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 21 mars 2018 par laquelle le directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement de la région Bourgogne-Franche-Comté a décidé de ne pas reconnaître l'imputabilité au service de la maladie professionnelle qu'elle a déclarée et d'enjoindre, à titre principal, à l'Etat de lui attribuer un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 16 octobre 2017 dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir . Par un jugement n° 1800836 du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par une seconde requête, Mme B... a demandé au même tribunal d'annuler la décision du 17 mai 2019 par laquelle le directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement de la région Bourgogne-Franche-Comté a refusé de lui accorder le bénéfice du congé pour invalidité temporaire imputable au service au titre d'un accident intervenu le 13 octobre 2017 et d'enjoindre à l'Etat de lui accorder le bénéfice d'un " congé pour invalidité " imputable au service à compter du 16 octobre 2017 dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois à compter de cette notification. Par un jugement n° 1901268 du 19 mars 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Procédures devant la cour : I. Par une requête enregistrée le 26 juin 2019, sous le n° 19NC02006, Mme B..., représentée par Me Komly-Nallier, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1800836 du 26 avril 2019 du tribunal administratif de Besançon ; 2°) d'annuler la décision du 21 mars 2018 du directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement de la région Bourgogne-Franche-Comté ; 3°) d'enjoindre à l'Etat de lui attribuer un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 16 octobre 2017 dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) à défaut, en cas d'annulation de la décision pour un motif de légalité externe, d'enjoindre à l'Etat de se prononcer de nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier en ce qu'il est entaché d'une omission à statuer : les premiers juges ne se sont pas prononcés sur la question de savoir si le nombre de médecins présents à la commission de réforme du 7 février 2018 était conforme aux dispositions de l'article 12 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - la procédure suivie devant la commission de réforme est irrégulière : - le principe du contradictoire a été méconnu par la transmission tardive de son rapport disciplinaire ; - la communication de ce rapport disciplinaire au médecin psychiatre ainsi qu'à la commission de réforme a été commise en violation du principe d'impartialité des procédures administratives ; - au regard des dispositions des articles 5, 6 et 12 du décret du 14 mars 1986, la composition de la commission de réforme était irrégulière en l'absence d'un médecin spécialiste à la séance de la commission de réforme ; - l'administration a bien commis une erreur d'appréciation en ne reconnaissant pas l'imputabilité au service de son état de santé. Par un mémoire en défense enregistré le 12 décembre 2019, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés et elle s'en remet également aux écritures de première instance du préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté. Par une ordonnance du 1er avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2022 à 12h00. II. Par une requête enregistrée le 29 mai 2020, sous le n° 20NC01180, Mme B..., représentée par Me Komly-Nallier, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1901268 du 19 mars 2020 du tribunal administratif de Besançon ; 2°) d'annuler la décision du 17 mai 2019 du directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement de la région Bourgogne-Franche-Comté ; 3°) d'enjoindre à l'Etat de lui accorder le bénéfice d'un congé pour invalidité imputable au service à compter du 16 octobre 2017 dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et, à défaut, en cas d'annulation de la décision pour un motif de légalité externe, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois à compter de cette notification ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier car les premiers juges ne se sont pas prononcés sur deux moyens : - celui tiré de ce que le médecin de prévention n'avait pas été informé de la tenue de la commission de réforme qui s'est réunie le 4 avril 2018 ; - celui tiré de l'erreur de droit entachant la décision attaquée dans la mesure où la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) avait fondé son refus sur la circonstance qu'elle n'avait pas présenté de déclaration d'accident de service ; - la décision attaquée est entachée de vices de procédure tirés de la méconnaissance des articles 18 et 19 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 : - le médecin de prévention n'a pas été informé de la tenue de la commission de réforme qui s'est réunie le 4 avril 2018 ; - la présence d'un médecin spécialiste à la séance de la commission de réforme était nécessaire pour éclairer de manière pertinente son cas médical ; - la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur dans la qualification juridique des faits : - le II du nouvel article 21 bis du statut général des fonctionnaires instaure une présomption d'imputabilité au service des accidents qui sont survenus dans le temps et sur le lieu de travail ; - la découverte du document à la photocopieuse lui a provoqué un choc psychologique ; elle a découvert de manière soudaine que sa direction allait lui retirer une partie de ses missions. La requête a été communiquée à la ministre de la transition écologique et solidaire qui n'a pas présenté de mémoire en défense. Par une ordonnance du 5 avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2022 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère ; - les conclusions de M. Michel, rapporteur public ; - et les observations de Me Komly-Nallier, représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., agente titulaire de la fonction publique d'Etat au grade d'ingénieur divisionnaire de l'agriculture et de l'environnement, exerçait les fonctions de chef de pôle " politique de l'eau " au sein du service eau biodiversité paysages de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Bourgogne-Franche-Comté. Le vendredi 13 octobre 2017 au matin, elle a pris fortuitement connaissance d'un document, qui se trouvait sur la photocopieuse, établi par son supérieur hiérarchique (N+2). Ce document formalisait un échange qui avait eu lieu la veille entre la nouvelle cheffe du département " eau et milieux aquatiques ", affectée depuis le 1er septembre 2017, le chef du service " biodiversité eau patrimoine " et son adjoint. Il avait pour objet de reprendre l'ensemble des objectifs assignés au département " eau et milieux aquatiques " dont ceux assignés au pôle " politique de l'eau ", placé sous la responsabilité de Mme B.... Cette dernière interprétant ce document comme une réaffectation de ses propres missions à sa cheffe de département, s'est rendue dans le bureau de sa cheffe afin de lui demander des explications. Elle s'est ensuite dirigée vers le bureau du chef du service " biodiversité eau patrimoine ", dont celui-ci sortait. Mme B... l'a invectivé en lui adressant des reproches sur la gestion du service et le mépris dont faisaient preuve, selon elle, les responsables de pôle. Elle a manifesté sa colère et fait preuve d'un comportement agressif, donnant des coups de pieds dans les murs puis dans l'extincteur, elle a ensuite levé son casque de vélo en menaçant le chef de service avec son casque qu'elle a fini par taper contre le mur à la hauteur de la tête de son supérieur. Elle a ensuite quitté les locaux de la DREAL, puis réintégré son bureau vers 11h20, et a adressé un courriel à sa hiérarchie et aux organisations syndicales. La directrice adjointe du service a convenu d'un rendez-vous avec Mme B... le 16 octobre 2017. Cette dernière a été par la suite placée en congé de maladie pour motif de " burn-out " jusqu'au 7 janvier 2018. Mme B... a adressé le 22 novembre 2017 à son administration une demande tendant à ce que sa pathologie de " burn-out " soit reconnue comme une maladie professionnelle. Après un avis défavorable du 7 février 2018 de la commission de réforme, le directeur de la DREAL de Bourgogne-Franche-Comté, par une décision du 21 mars 2018, a opposé un refus à cette demande. Parallèlement, Mme B... a sollicité son administration le 16 mars 2018 afin que son accident du 13 octobre 2017 soit reconnu comme imputable au service. Par une décision du 19 avril 2018, après avis défavorable de la commission de réforme émis le 4 avril 2018, l'administration a rejeté cette demande. Par un jugement n° 1801002 du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a annulé cette décision pour un motif de forme. En exécution de ce jugement, le directeur de la DREAL a, par une décision du 17 mai 2019, de nouveau rejeté la demande de l'intéressée. Par deux requêtes enregistrées à la cour sous les nos 19NC02006 et 20NC01180, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, Mme B... relève appel, d'une part, du jugement n° 1800836 du 26 avril 2019 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 mars 2018 du directeur de la DREAL qui a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie professionnelle et, d'autre part, du jugement n° 1901268 du 19 mars 2020 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 mai 2019 par laquelle le directeur de la DREAL a refusé de lui accorder le bénéfice du congé pour invalidité temporaire imputable au service au titre d'un accident intervenu le 13 octobre 2017. Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 21 mars 2018 : 2. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat, alors applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...)2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions, prévus en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) ". 3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 4. Il résulte de l'instruction que la DREAL de la région Bourgogne-Franche-Comté a connu depuis le 1er janvier 2016 des réorganisations successives des services résultant de la fusion des régions Bourgogne et Franche-Comté, laquelle a conduit à la suppression de certains des postes d'encadrement et à une réattribution des tâches. Le rapport annuel de 2017 du service médical relève chez les agents de la DREAL des troubles psychosociaux, avec notamment sur un plan clinique des manifestations d'anxiété généralisée observées lors des consultations. Il a été notamment constaté des troubles de l'adaptation bio-psychologique à des changements organisationnels, des conduites individuelles inappropriées et un défaut de communication. Ce contexte professionnel pathogène ressort également du compte-rendu de la réunion d'encadrement de la DREAL du 6 juin 2017. Mme B... a été affectée par la réorganisation des services puisqu'elle s'est vue attribuer d'autres tâches que celles dont elle avait la charge en perdant sa mission d'encadrement correspondant à son grade. Si la requérante a accepté la modification de son poste, les copies de courriels adressés à sa hiérarchie dès le début de l'année 2017 révèlent qu'elle souffrait de la charge importante de travail et alertait la direction sur son état d'épuisement et sur ses difficultés à absorber les reproches. Comme l'indique le certificat médical du médecin du travail du 21 décembre 2017, Mme B... lui a fait part de ses difficultés dans l'exercice de son métier et du mal-être au travail de plusieurs agents en raison notamment des changements organisationnels. C'est dans ce contexte de souffrance au travail que Mme B... s'est violement emportée le 13 octobre 2017, lors de la découverte d'un document qu'elle a interprété comme une nouvelle réattribution de ses missions. Le " burn out " qui a suivi a été considéré par l'expertise médicale du 20 décembre 2017, conduite par un médecin psychiatre, qui mentionne l'absence d'antécédent de nature dépressive, comme imputable au service. Ni la circonstance selon laquelle la requérante entretenait des liens compliqués avec sa hiérarchie, ni le fait que l'administration a accompagné l'intéressée dans sa prise de poste ne sont de nature à remettre en cause le lien entre la pathologie de la requérante et le service en l'absence de toute autre cause extérieure. Dans ces conditions, la maladie de Mme B... doit être regardée comme présentant un lien direct avec l'exercice de ses fonctions. Par suite, la décision du 21 mars 2018 portant refus de reconnaissance d'imputabilité au service de la maladie de Mme B... est entachée d'erreur d'appréciation. 5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué, ni de se prononcer sur les autres moyens soulevés par Mme B..., que la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1800836 attaqué du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 21 mars 2018. Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 17 mai 2019 : 6. Aux termes de l'article 12 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986, dans sa rédaction applicable au litige : " Dans chaque département, il est institué une commission de réforme départementale compétente à l'égard des personnels mentionnés à l'article 15. Cette commission, placée sous la présidence du préfet ou de son représentant, qui dirige les délibérations mais ne participe pas aux votes, est composée comme suit : (...) Les membres du comité médical prévu à l'article 6 du présent décret. /Le secrétariat de la commission de réforme départementale est celui du comité médical prévu à l'article 6 du présent décret. ". Aux termes de l'article 6 du même décret : " Dans chaque département, un comité médical départemental compétent à l'égard des personnels mentionnés à l'article 15 ci-après est constitué auprès du préfet. La composition de ce comité est semblable à celle du comité médical ministériel prévu à l'article 5. (...) ". Aux termes de cet article 5 : " (...) Ce comité comprend deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, pour l'examen des cas relevant de sa qualification, un spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le bénéfice du congé de longue maladie ou de longue durée prévu à l'article 34 (3e et 4e) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée.(...) ". 7. Il est constant qu'aucun médecin spécialiste, dont la présence est requise en application des dispositions précitées indépendamment de l'objet de la demande, n'a siégé au sein de la commission de réforme qui s'est réunie le 4 avril 2018 alors qu'elle était saisie de la demande de reconnaissance d'imputabilité au service d'un accident survenu le 13 octobre 2017. Dès lors, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commission de réforme qui s'est réunie le 4 avril 2018 ait été destinataire des mêmes informations que celle qui s'est tenue le 7 février 2018 pour l'appréciation de l'imputabilité au service de la maladie de Mme B..., l'absence d'un médecin psychiatre parmi les membres de la commission de réforme a entaché la composition de cette dernière d'irrégularité. Mme B... est donc fondée à soutenir que la décision du 17 mai 2019 a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière. 8. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué, ni de se prononcer sur les autres moyens soulevés par la requérante, Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1901268 attaqué du 19 mars 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 mai 2019. 9. Il résulte de tout ce qui précède que les jugements n° 1800836 du 26 avril 2019 et n° 1901268 du 19 mars 2020 ainsi que les décisions du directeur de la DREAL du 21 mars 2018 et du 17 mai 2019 doivent être annulés. Sur les conclusions à fin d'injonction : 10. Le motif d'annulation de la décision du 21 mars 2018 implique nécessairement, par application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre à la DREAL, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme B... à compter du 16 octobre 2017, date de son premier arrêt de travail et d'en tirer toutes les conséquences sur sa situation administrative. Du fait de cette injonction, l'annulation de la décision du 17 mai 2019 n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction de la requête n° 20NC01180 doivent en conséquence être rejetées. Sur les frais liés aux instances : 11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans les présentes instances, la somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Les jugements n° 1800836 du 26 avril 2019 et n° 1901268 19 mars 2020 du tribunal administratif de Besançon et les décisions des 21 mars 2018 et 17 mai 2019 du directeur de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de la région Bourgogne-Franche-Comté sont annulés. Article 2 : Il est enjoint à l'Etat de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme B... à compter du 16 octobre 2017, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et d'en tirer toutes les conséquences sur sa situation administrative. Article 3 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête n° 20NC01180 est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis , présidente, -Mme Grossrieder, présidente assesseur - Mme Roussaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2022. La rapporteure, Signé : S. Roussaux La présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 19NC02006, 20NC01180
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme H... I... divorcée C... et M. F... C..., agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants légaux de leur fils mineur Adrian C..., ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Caen : 1°) de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à leur verser à titre de complément de provision, pour le compte de leur fils mineur Adrian, une somme de 2 805 401,20 euros, après déduction de la provision de 301 143 euros déjà allouée, à valoir sur l'indemnisation définitive de ses préjudices subis du fait de l'infection nosocomiale qu'il a contractée peu après sa naissance en septembre 2009 au centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen, cette indemnisation devant être réglée sous forme de capital à hauteur de 1 831 712,30 euros et sous forme d'une rente trimestrielle de 37 449,57 euros revalorisable chaque année jusqu'à sa majorité, à minorer des éventuelles prestations obtenues pour ses besoins en tierce personne ; 2°) de condamner l'ONIAM à verser à Mme I..., à titre de provision, une somme de 666 233,78 euros à valoir sur l'indemnisation définitive de ses divers préjudices, dont 505 421,65 euros au titre des frais de logement adapté, 60 812,13 euros au titre des frais de véhicule adapté, 50 000 euros au titre du préjudice d'affection et 50 000 euros au titre du préjudice extrapatrimonial exceptionnel ; 3°) de condamner l'ONIAM à verser à M. C..., à titre de provision, une somme de 380 057,36 euros, dont 117 268,60 euros au titre des frais de logement adapté, 100 946,78 euros au titre des frais de véhicule adapté, 61 841,98 euros au titre de l'incidence professionnelle, 50 000 euros au titre du préjudice d'affection et 50 000 euros au titre du préjudice extrapatrimonial exceptionnel ; 4°) de condamner l'ONIAM à verser à Mme I... et à M. B... une somme de 16 655,23 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation définitive de leurs préjudices représentés A... des frais de transport pour 14 405,44 euros et A... des frais divers pour 2 249,79 euros. A... une ordonnance n° 2001683 du 3 septembre 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Caen a condamné l'ONIAM à verser une provision complémentaire de 300 200 euros à M. C... et à Mme I..., au nom et pour le compte de leur fils mineur Adrian, une somme de 41 000 euros à M. C... et a rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la cour : A... une requête, enregistrée le 16 septembre 2021, Mme H... I... divorcée C... et M. F... C..., agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants légaux de leur fils mineur Adrian C..., représentés A... la SCP Goddefrot-Gancel et Gréco, demandent à la cour : 1°) de réformer l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Caen du 3 septembre 2021 en tant qu'elle ne leur a pas donné entière satisfaction ; 2°) de condamner, l'ONIAM à verser : - à M. C... et à Mme I..., pour le compte de leur fils mineur Adrian et à titre de complément de provision, une somme de 2 887 879,65 euros, ou subsidiairement de 2 133 470,24 euros à valoir sur l'indemnisation définitive des préjudices subis A... ce dernier, somme assortie des intérêts au taux légal et capitalisation de ces intérêts ; - à Mme I... une somme de 124 881,35 euros à titre de provision, assortie des intérêts au taux légal et capitalisation de ces intérêts, à valoir sur l'indemnisation définitive de ses préjudices après déduction de la provision de 21 000 euros déjà accordée A... un arrêt de la cour du 6 juillet 2018 ; - à M. C..., une somme de 276 908,92 euros, assortie des intérêts au taux légal et capitalisation de ces intérêts, à valoir sur l'indemnisation définitive de ses préjudices après déduction de la provision de 21 000 euros déjà accordée A... un arrêt de la cour du 6 juillet 2018 ; - à M. C... et à Mme I... une somme de 5 531,53 à titre de provision à valoir sur l'indemnisation définitive de leurs préjudices représentés A... des frais de transport et A... des frais divers ; 3°) de mettre à la charge de l'ONIAM, la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la créance qui pèse sur l'ONIAM n'est pas contestable puisque leur fils Adrian est atteint d'un handicap résultant d'une infection nosocomiale survenue six jours après sa naissance alors qu'il était pris en charge A... le centre hospitalier universitaire de Caen et dont le seuil de gravité excède celui fixé au II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, ce qui a été jugé A... un arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes, devenu définitif ; - l'ordonnance en litige devra être confirmée en tant qu'elle prévoit la capitalisation des postes de préjudice jusqu'à la majorité d'J..., soit jusqu'au 16 septembre 2027, tenant aux dépenses de santé, aux frais de tierces personnes temporaire et aux préjudices personnels et en faisant application du barème de capitalisation publié en 2020 A... la Gazette du Palais ; En ce qui concerne les préjudices subis A... le jeune Adrian : - alors que selon les experts les séquelles d'J..., bien que non consolidées, sont définitives, la provision complémentaire à accorder jusqu'à sa majorité et déduction faite des prises en charge éventuelles A... des tiers-payeurs s'établit comme suit : * les dépenses de santé déjà exposées, comprenant une poussette plus adaptée, un fauteuil roulant manuel et son aménagement, les lunettes ainsi que les dépenses en consommables seront indemnisées à hauteur de 13 332,20 euros au titre des arrérages échus et de 8 843,29 euros au titre des arrérages à échoir, ce qui représente un total de 22 175,49 euros ; après déduction des sommes accordées A... l'arrêt de la cour du 6 juillet 2018 et A... l'ordonnance du tribunal administratif attaqué, il est demandé un complément de versement de 2 175,49 euros ; * les dépenses en matériel non exposées comprenant le fauteuil roulant électrique, le lit médicalisé, la table de lit, trois alèses, un système complet de transfert sur rail, un siège de douche/toilette ainsi qu'un système de bras automatisé (Neater Eater) avec la cuillère, les verres et le couvert adaptés, seront indemnisées à hauteur de 45 063,61 euros, ce qui inclus les frais d'acquisition et de renouvellement ; hormis pour le fauteuil roulant électrique, ces frais doivent être indemnisés pour chacun des deux domiciles des parents ; * les dépenses de santé restées à leur charge s'élèvent ainsi à la somme totale de 67 239,10 euros à laquelle il convient de retrancher la somme de 14 000 euros allouée A... l'ordonnance de la cour du 6 juillet 2018 ; * les dépenses nécessitées A... l'assistance d'une tierce personne, de la naissance jusqu'au 18 ans d'J..., doivent être évaluées à la somme de 2 065 469,88 euros, Adrian souffrant de tétraplégie, ce qui nécessite une assistance de trois heures d'aide active de la naissance jusqu'au trois ans, de 4 heures de ses trois ans à ses 5 ans et de 24 h / 24 depuis qu'il a intégré l'institut d'éducation motrice (IEM) à l'âge de 5 ans ; sous réserve de déductions des aides sociales (1 849,33 euros) et des provisions déjà versées (138 287,80 euros), le complément de provision demandé s'élève, pour ce chef de préjudice, à 1 925 332,55 euros ; à titre subsidiaire, l'évaluation doit a minima reprendre l'estimation de l'expert G..., ce qui représente une somme totale de 1 311 060,27 euros ; pour ces calculs, il convient de retenir un coût horaire de 21,30 euros TTC en cas de tierce-personne active et de 11 euros en cas de tierce personne passive ; * au titre du préjudice scolaire : 87 000 euros, dont 25 000 euros au titre des arrérages échus ; compte tenu des provisions déjà versées, il est demandé un complément de provision de 80 000 euros ; * au titre du déficit fonctionnel temporaire : 160 008 euros, sur une base de 80 % en dehors des périodes de déficit fonctionnel temporaire total, et de 30 euros A... jour pour 6 202 jours jusqu'à la majorité ; compte tenu des provisions déjà versées, il est demandé un complément de provision de 138 308 euros ; * au titre des souffrances endurées estimées à 6 sur une échelle de 7 A... la dernière expertise : 50 000 euros ; compte tenu des provisions déjà versées, il est demandé un complément de provision de 39 500 euros ; * au titre du préjudice esthétique temporaire, caractérisé notamment A... la tétraparésie spastique des quatre membres, A... un strabisme important et de nombreuses cicatrices post-opératoires : 35 000 euros ; compte tenu des provisions déjà versées, il est demandé un complément de provision de 31 500 euros ; * les préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux qui seront nécessairement subis après consolidation seront indemnisés à hauteur de la somme totale de 700 000 euros, ce qui comprend, d'une part, les dépense de santé future, les frais de logement adapté, les frais de véhicule adapté, les frais d'assistance A... une tierce-personne permanente, les pertes de gains professionnels, et l'incidence professionnelle, et d'autre part, le déficit fonctionnel permanent, évaluable à un minimum de 567 600 euros pour un taux de 80 %, le préjudice d'agrément nécessairement très important, le préjudice esthétique d'ores et déjà évaluable à 5 sur une échelle de 7, un préjudice sexuel total et irréversible, devant être indemnisé entre 50 000 et 80 000 euros et un préjudice d'établissement tout aussi certain ; * la provision complémentaire, dont il est demandé le versement dans la présente instance, représente, ainsi, un total général de 2 967 879,65 euros ; à cette somme, il convient cependant de retrancher la provision globale accordée A... la cour A... son ordonnance du 3 octobre 2013, soit 80 000 euros, ce qui représente dès lors un total de 2 887 879,65 euros ; à titre subsidiaire, en déduisant les mêmes aides sociales et provisions déjà versées, le complément de provision devra être fixé à 2 133 470,24 euros ; En ce qui concerne les préjudices subis A... les parents d'J... : * ils justifient avoir exposé des frais de transport au cours des années 2009 à 2018, nécessités A... le lourd suivi médical de leur fils, pour un montant total de 14 405,44 euros ; * M. C... a dû réaliser des travaux pour aménager son pavillon conformément aux recommandations de l'ergothérapeute et procéder à l'acquisition d'équipements domotiques spécialisés pour un montant total de 117 143,92 euros comprenant les frais d'acquisition et de renouvellement dont il devra être indemnisé ; * ils doivent remplacer leurs véhicules anciens en procédant à l'acquisitions de nouveaux véhicules qui devront être adaptés au handicap d'J... ; Mme I... a subi, à ce titre, un préjudice estimé à hauteur de 53 397,25 euros comprenant l'acquisition de deux véhicules, les frais de renouvellement et l'augmentation des cotisations d'assurance ; M. C... a subi, au même titre, un préjudice de 88 280,06 euros ; * ils ont exposé des frais divers comprenant le forfait hospitalier, les frais de bilan ergothérapique et psychologique et de copie du dossier médical, ce qui représente un préjudice total de 2 249,79 euros ; * ils ont subi un préjudice d'affection du fait du grave handicap de leur fils et des souffrances physiques et morales qu'ils endurent et qui sera estimé pour chacun d'eux à la somme de 50 000 euros ; * ils ont également subi un préjudice extrapatrimonial exceptionnel, caractérisé A... les changements de vie radicaux induits A... l'état de leur fils, y compris le divorce intervenu en 2014 qui sera estimé pour chacun d'eux à la somme de 50 000 euros. A... un mémoire, enregistré le 5 octobre 2021, le centre hospitalier universitaire de Caen, représenté A... Me Le Prado, demande à ce qu'il soit mis hors de cause. Il soutient que l'indemnisation à laquelle peuvent prétendre le jeune Adrian et ses parents, du fait de l'infection nosocomiale et du taux d'handicap de l'enfant, sont à la charge de l'ONIAM en application du II. de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique. A... un mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2021, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, représenté A... la SELARL Birot-Ravaut et associés, conclut au rejet de la requête et, A... la voie de l'appel incident, à la réformation de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle statue sur les dépenses de santé actuelles, l'assistance A... tierce personne, le préjudice scolaire, le déficit fonctionnel temporaire et les préjudices extrapatrimoniaux permanents ainsi que sur les frais d'aménagement du logement de M. C.... Il soutient que : - le principe de l'indemnisation, sur le fondement de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, n'est pas contesté et pourra donner lieu à provision, mais seulement à hauteur de l'obligation d'indemnisation des préjudices non sérieusement contestables ; il y aura lieu de retenir, à hauteur de 70 %, une perte de chance d'éviter les préjudices subis, dès lors que ceux-ci, comme estimés A... le premier expert, peuvent être au moins partiellement imputables à la grande prématurité de l'enfant, génératrice elle-même d'un risque neurologique susceptible de se concrétiser tardivement ; c'est à tort que le second expert, le Dr G..., excédant les termes de sa mission et entachant ainsi d'irrégularité son rapport d'expertise, a émis un avis différent ; compte tenu du désaccord entre les deux experts, c'est donc à bon droit que le juge des référés a indemnisé les préjudices à hauteur de 70 % ; - c'est à tort que le juge des référés a indemnisé, A... capitalisation, les préjudices futurs de l'enfant dès lors que son état de santé n'est pas consolidé et que la créance des organismes sociaux pour l'avenir n'est pas connue ; - les prestations complémentaires ne pourront être allouées que pour des périodes postérieures à l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 6 juillet 2018 et en tenant compte des conclusions du rapport d'expertise et non sur la base du rapport de l'ergothérapeute de mars 2017 ; En ce qui concerne les préjudices subis A... le jeune Adrian : - s'agissant des dépenses de santé actuelles, seules peuvent être indemnisées A... la solidarité nationale celles qui ont été déjà exposées ; en conséquence, l'ordonnance attaquée sera réformée en tant qu'elle alloue aux requérants la somme de 5 500 au titre des dépenses non encore exposées ; - les requérants n'établissent pas avoir engagé de nouvelles dépenses de santé depuis l'arrêt de la cour du 6 juillet 2018 ; au surplus, il n'est pas établi de lien de causalité entre les dépenses engagées pour l'hygiène corporelle et le dommage résultant de l'infection nosocomiale, de sorte que leur demande ne peut être que rejetée ; à supposer même que la cour alloue une provision à ce titre, elle ne pourrait être accordée que sous forme de rente trimestrielle et sous réserve de présentation des justificatifs des montants des aides perçues au titre de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) et de son complément et de la prestation de compensation du handicap (PCH) ; - il y a lieu de réformer l'ordonnance attaquée quant au montant de la provision allouée au titre du préjudice scolaire qui sera fixé, après application du taux de perte de chance de 70 % et pour les seules années 2019 à 2021, à la somme de 7 000 euros ; - il y a lieu de réformer l'ordonnance attaquée quant au montant de la provision allouée au titre du déficit fonctionnel temporaire qui sera fixé, après application du taux de perte de chance de 70 %, et pour la période courant de la date de la précédente ordonnance de la cour du 6 juillet 2018 à la date prévisible de la présente décision (30 mars 2022), à la somme de 7 875 euros ; - l'ordonnance attaquée sera confirmée quant à la provision complémentaire accordée pour les souffrances endurées et le préjudice esthétique temporaire ; - aucune provision ne saurait être allouée au titre des préjudices extra patrimoniaux permanents en l'absence de connaître l'évolution de l'état de santé du jeune Adrian, son état de santé n'étant pas consolidé ; l'ordonnance attaquée sera donc réformée sur ce point ; En ce qui concerne les préjudices subis A... Mme I... et M. C... : - la demande de remboursement des frais de transport pour les années 2009 à 2018 sera rejetée, la cour ayant déjà statué sur ce chef de préjudice dans son ordonnance du 6 juillet 2018 sans que les requérants fassent valoir de dépenses qui n'auraient pas été indemnisées ; l'ordonnance attaquée sera donc confirmée sur ce point ; il en est de même s'agissant des frais divers ; En ce qui concerne les préjudices subis A... Mme I... : - l'ordonnance attaquée sera confirmée en tant qu'elle rejette un complément de provision pour les préjudices tirés des frais de véhicules, du préjudice d'affection et du préjudices extra patrimonial exceptionnel ; En ce qui concerne les préjudices subis A... M. C... : - l'ordonnance attaquée sera réformée en tant qu'elle alloue à M. C... une somme de 41 000 euros au titre des frais de logement adapté ; - l'ordonnance attaquée sera confirmée en tant qu'elle rejette un complément de provision pour les préjudices tirés des frais des véhicules, du préjudice d'affection et du préjudice extra patrimonial exceptionnel. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique, - le code de la sécurité sociale, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. L'hirondel, - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - et les observations de Me Greco représentant Mme I... et M. C... et de Me Demailly représentant le centre hospitalier universitaire de Caen. Considérant ce qui suit : 1. Le jeune Adrian C..., né le 16 septembre 2009 à 28 semaines de grossesse, a été victime au cours de son séjour dans le service de réanimation néonatale du centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen d'une infection nosocomiale dont il garde des séquelles importantes. Ses parents, M. F... C... et Mme H... I... divorcée (J...)C...(/J...), ont demandé, le 12 novembre 2010, au tribunal administratif de Caen de désigner un expert afin notamment de déterminer les responsabilités encourues lors de la prise en charge de leur enfant A... le CHU de Caen. L'expert, le Dr E..., gynécologue-obstétricien, qui s'était entouré de l'avis de deux sapiteurs, un pédiatre néonatologue et un médecin bactériologiste, a déposé son rapport le 30 juillet 2011. Il a conclu que le jeune Adrian avait été victime d'une infection nosocomiale favorisée A... sa très grande prématurité et son faible poids à la naissance. Ses parents ont alors saisi le 6 juin 2012, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, le juge du référé du tribunal administratif de Caen d'une demande tendant à la condamnation, à titre principal, de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à leur verser une allocation provisionnelle de 176 735,07 euros en réparation des divers préjudices subis A... leur fils. A... une ordonnance du 2 novembre 2012, réformée A... un arrêt du 3 octobre 2013 de la cour, l'ONIAM a été condamné à verser aux consorts C... à une somme provisionnelle de 80 000 euros. 2. A... une nouvelle demande présentée le 6 octobre 2017, M. F... C... et Mme H... I..., agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants légaux de leur fils mineur Adrian, ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Caen à fin d'obtenir, dans l'attente de l'évaluation définitive des préjudices de leur fils, dont l'état de santé ne sera consolidé qu'à compter de sa majorité, une provision complémentaire. L'ordonnance du 5 mars 2018 rendue A... le tribunal administratif a été annulée A... un arrêt de la cour du 6 juillet 2018 qui a condamné l'ONIAM à verser à M. C... et à Mme I... au nom et pour le compte de leur fils mineur Adrian, une provision complémentaire, de 221 143 euros, portant intérêts à compter du 6 octobre 2017 et, à chacun des parents, la somme de 21 000 euros au titre de leur préjudice d'affection et du préjudice extrapatrimonial exceptionnel. 3. A... une troisième demande enregistrée le 7 août 2018, les mêmes ont de nouveau saisi le juge des référés du tribunal administratif de Caen afin de voir ordonner une expertise médicale pour Adrian et une expertise architecturale au domicile de chacun des parents. Le juge des référés a fait droit à leur demande en tant qu'elle porte sur l'expertise médicale. Le Dr G..., pédiatre réanimateur, expert désigné A... le tribunal, a déposé son rapport le 22 juin 2020. 4. M. C... et Mme I... ont alors introduit le 1er août 2020, auprès de l'ONIAM une demande tendant au versement d'une provision complémentaire. Cette demande a été rejetée A... l'Office A... une décision du 14 août 2020. C'est dans ces conditions que les intéressés ont saisi le 7 septembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Caen d'une quatrième demande tendant, d'une part, à ce que dans l'attente de l'évaluation définitive des préjudices de leur fils, qui n'interviendra qu'après qu'il ait atteint l'âge de 18 ans, une provision complémentaire de 2 805 401,20 euros soit accordée pour l'indemnisation de ses préjudices subis ou à subir jusqu'à sa majorité, d'autre part, qu'une provision de 700 000 euros leur soit accordée au titre de la créance qu'ils estiment non sérieusement contestable représentée A... le droit à réparation des préjudices que leur fils subira de façon certaine après sa majorité, et, enfin, qu'une provision complémentaire soit accordée à chacun des deux parents au titre de leurs propres préjudices. A... une ordonnance du 3 septembre 2021, le juge des référés de ce tribunal a condamné l'ONIAM à verser une provision complémentaire de 300 200 euros à M. C... et à Mme I..., au nom et pour le compte de leur fils mineur Adrian, une somme de 41 000 euros à M. C... et a rejeté le surplus de la demande. M. C... et Mme I... relèvent appel de cette dernière ordonnance en tant qu'elle ne leur a pas donné entière satisfaction. A... des conclusions incidentes, l'ONIAM demande la réformation de cette ordonnance. Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : 5. La seule circonstance qu'un rapport d'expertise, à l'initiative de l'expert, se prononce sur des questions excédant le champ de l'expertise ordonnée A... la juridiction, n'est pas, A... elle-même, de nature à entacher cette expertise d'irrégularité. Elle ne fait pas obstacle à ce que, s'ils ont été soumis au débat contradictoire en cours d'instance, les éléments de l'expertise A... lesquels l'expert se prononce au-delà des termes de sa mission soient régulièrement pris en compte A... le juge, soit lorsqu'ils ont le caractère d'éléments de pur fait non contestés A... les parties, soit à titre d'éléments d'information dès lors qu'ils ne sont pas infirmés A... d'autres éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige. A... suite, l'ONIAM n'est pas fondé à soutenir que le juge du référé du tribunal administratif aurait entaché son ordonnance d'irrégularité en prenant en compte le rapport du Dr G... au motif que l'expert aurait outrepassé sa mission en se prononçant sur la part des préjudices exclusivement en lien avec l'infection nosocomiale alors qu'au surplus, cette partie des conclusions de l'expertise n'a pas été prise en compte A... le juge des référés. Sur la réparation au titre de la solidarité nationale : 6. D'une part, aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". 7. D'autre part, il résulte des dispositions des articles L. 1142-1-1, L. 1142-17 et L. 1142-22 du code de la santé publique que l'ONIAM est tenu d'assurer la réparation au titre de la solidarité nationale des dommages résultant des infections nosocomiales, à la seule condition qu'elles aient entraîné un taux d'incapacité permanente supérieur à 25% ou le décès du patient. Il ne peut s'exonérer de cette obligation en invoquant, sur le fondement du I de l'article L. 1142-1 du même code, la responsabilité de l'établissement de santé dans lequel l'infection a été contractée. L'office peut uniquement demander à cet établissement de l'indemniser de tout ou partie des sommes ainsi à sa charge en exerçant à l'encontre de ce dernier l'action subrogatoire prévue au septième alinéa de l'article L. 1142-17 du même code, s'il a versé une indemnité à titre transactionnel, ou l'action récursoire prévue au deuxième alinéa de l'article L. 1142-21 du même code, si une indemnité a été mise à sa charge A... une décision juridictionnelle ou, dans le cadre d'une instance dirigée contre lui, pour le cas où serait prononcée une telle décision. La responsabilité de l'établissement n'est engagée, au titre de l'une comme de l'autre de ces actions, qu' " en cas de faute établie à l'origine du dommage, notamment le manquement caractérisé aux obligations posées A... la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales ". 8. Dès lors, l'obligation de réparer un dommage remplissant les conditions définies à l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique constitue pour l'ONIAM une obligation non sérieusement contestable de nature à justifier la mise à sa charge d'une provision A... le juge des référés, sans que puissent y faire obstacle les fautes qui seraient imputables à l'établissement de santé. L'office peut, en revanche, obtenir à son tour de l'établissement, y compris dans le cadre de l'instance en référé relative à la réparation du dommage, le versement d'une provision au titre de l'action récursoire prévue au deuxième alinéa de l'article L. 1142-21 du même code, couvrant tout ou partie de la provision devant être mise à sa propre charge, à condition que l'obligation de l'établissement à l'indemniser sur ce fondement ne soit elle-même pas sérieusement contestable. 9. En l'espèce, il résulte de l'instruction, notamment des deux rapports d'expertise, et n'est au demeurant pas contesté A... l'ONIAM, que les séquelles dont est atteint le jeune Adrian C... sont imputables à une infection nosocomiale contractée peu après sa naissance et que les préjudices ainsi subis, compte tenu du taux d'atteinte à l'intégrité physique ou psychique de l'enfant qui est supérieur à 25 %, doivent être pris en charge A... cet organisme au titre de la solidarité nationale, en vertu des articles L. 1142-1, L. 1142-1-1, L. 1142-17 et L. 1142-22 du code de la santé publique. Le dommage subi A... le jeune Adrian remplit ainsi les conditions pour être indemnisé A... l'ONIAM au titre de la solidarité nationale. Sur la demande de provision complémentaire : 10. D'une part, il résulte des dispositions précitées de l'article R. 541-1 du code de justice administrative que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis A... les parties sont de nature à établir l'existence d'une créance avec un degré suffisant de certitude. Le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état. Dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui paraît revêtir un caractère de certitude suffisant. 11. Il résulte de l'instruction que l'expert désigné en 2011 a conclu dans son rapport, en se fondant sur l'étude française appelée EPIPAGE (Epidémiologie petit âge gestationnel), que " du fait de ces facteurs de risque (grande prématurité et faible poids de naissance), la part des préjudices exclusivement en relation avec l'infection nosocomiale peut être évaluée à 70 % du total des préjudices ". Le Dr G..., dans son rapport d'expertise rendu le 22 juin 2020, estime en revanche que les lésions dont souffre le jeune Adrian, en l'occurrence " les abcès cérébraux et l'hydrocéphalie sont des complications directement liés à l'infection nosocomiale et (...) sont à l'origine des séquelles neuro-motrices et cognitives ". Il suit de là, compte tenu du désaccord entre les experts sur la perte de chance pour le jeune Adrian d'éviter tout ou partie des séquelles dont il est resté atteint et eu égard à l'office du juge du référé provision rappelé au point précédent, que les créances non sérieusement contestables pouvant donner lieu au versement d'une provision en application des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative doivent être estimées, en l'espèce, après application d'un taux de perte de chance de 70 %. 12. D'autre part, aucune disposition ni aucun principe ne fait obstacle à ce qu'une personne à laquelle une provision a déjà été allouée, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, en réparation des conséquences dommageables d'une infection nosocomiale, saisisse le juge des référés d'une nouvelle demande de provision au titre du même dommage, au vu notamment d'un changement dans les éléments de droit ou de fait ou d'un nouveau document. En ce qui concerne l'évaluation provisoire des préjudices du jeune Adrian C... : S'agissant des préjudices à caractère patrimonial : Quant aux dépenses de santé : 13. Les requérants sollicitent, en premier lieu, au titre des dépenses de santé déjà exposées, et des frais liés à l'hygiène corporelle et qui n'ont pas été pris en charge A... les organismes sociaux, le versement de provisions pour des montants respectifs de 2 411,53 euros et de 19 763,96 euros. Il est toutefois constant que ces chefs de préjudice ont donné lieu à une provision globale de 20 000 euros A... l'ordonnance de la cour du 6 juillet 2018. En particulier, s'agissant des dépenses de santé portant sur l'acquisition d'une poussette plus adaptée (acquise le 23 juillet 2011 pour un montant de 100 euros), d'un fauteuil roulant manuel (acquis le 26 décembre 2013 - 60 euros) et des aménagements de celui-ci (achats effectués entre octobre 2014 et mars 2015 pour un montant total de 679,80 euros), de l'achat de lunettes (acquises le 26 février 2015 - 151,74 euros) et d'un siège auto (acquis le 12 mars 2016 - 224,91 euros), la cour a jugé que seule l'acquisition du fauteuil roulant manuel et ses aménagements constituaient, compte tenu des justificatifs fournis, une obligation non sérieusement contestable. Dans la présente instance, les requérants n'apportent pas de nouveaux documents permettant d'établir cette obligation. En revanche, s'agissant des frais liés à l'hygiène corporelle, et contrairement à ce que soutient l'ONIAM, il résulte du rapport de l'expert G... que, compte tenu du handicap dont souffre l'enfant, le renouvellement des " consommables " s'avèrent indispensables et présentent, A... suite, un caractère non sérieusement contestable. Selon l'estimation réalisée A... les requérants et qui n'est pas utilement contestée A... l'ONIAM, ces dépenses s'élèvent à 1 275,34 euros A... an. Au titre des dépenses déjà exposées, il y a donc lieu d'accorder une provision complémentaire pour la période allant du 6 juillet 2018 à la date du présent arrêt, de 4 995 euros, soit 3 496,50 euros après application du taux de perte de chance de 70 %. 14. En deuxième lieu, si les requérants sollicitent également une provision pour pourvoir au renouvellement de certains de ces matériels de santé, ils n'établissent pas, A... les pièces versées au dossier, la fréquence du renouvellement qu'ils allèguent et, A... suite, la nécessité de pourvoir à leur remplacement avant la majorité du jeune Adrian. En revanche, et pour le même motif qu'exposé au point précédent, l'utilisation des produits d'hygiène jusqu'à la majorité de l'enfant est établie. Pour la période courant du présent arrêt à la majorité du jeune Adrian, soit le 16 septembre 2027, le montant de ces dépenses peut être estimée à une somme qui ne saurait être inférieure à 6 695 euros. La provision pour cette période, en appliquant le taux de perte de chance de 70 %, doit être ainsi fixée à 4 686,50 euros. 15. En troisième lieu, les requérants sollicitent une provision à hauteur de 45 063,61 euros, après déduction des participations attendues des tiers payeurs, pour diverses autres dépenses en matériels nécessaires mais non encore exposées avec capitalisation jusqu'à l'âge de 18 ans et comprenant un fauteuil roulant électrique, un lit médicalisé, trois alèses de lit, une table de lit, un système de transfert sur rail (incluant les sangles, les batteries moteur, le kit platine pour le moteur, le kit roue latérale, le kit sangle moteur et le contrat de maintenance), un siège de douche/toilette, un système de bras automatisé Neater Eaeter et ses équipements. L'expert G... qualifie notamment comme " indispensables " le fauteuil roulant mécanique, le système de verticalisation, le lit médicalisé avec matelas adapté, la chaise de douche et le soulève-personne avec rail. Si les requérants, pour justifier la nécessité des autres matériels, se prévalent d'un rapport d'un ergothérapeute réalisé en 2017, l'expert conclut cependant qu'il reviendra au médecin de réadaptation fonctionnelle qui suit l'enfant de valider, s'il les juge utiles, les nouveaux appareillages préconisés A... l'ergothérapeute. Dans ces conditions, il n'y a lieu d'admettre, comme portant sur une obligation non sérieusement contestable, que l'acquisition d'un lit médicalisé, d'une table de lit, de trois alèses, d'un système de transfert sur rail et du siège de douche/toilette. Il résulte de l'instruction que le lit médicalisé est totalement pris en charge A... les organismes sociaux alors que le siège douche /toilette bénéficie d'une prise en charge partielle. Les autres équipements ne donnent lieu à aucune participation. A... suite, et ainsi qu'il résulte des justificatifs versés aux débats, la part restant à la charge des requérants s'élève à 15 341,76 euros, soit 10 739,23 euros après application du taux de perte de chance de 70 %. Il ne résulte pas de l'instruction, notamment du rapport de l'expert qui indique que la nécessité d'un renouvellement sera précisée A... le médecin de réadaptation fonctionnelle qui suit l'enfant, qu'un remplacement de ces équipements serait nécessaire avant la majorité de l'intéressé. Enfin, la demande des requérants tendant à ce que l'obligation due à ce titre, hormis pour le fauteuil roulant électrique, soit étendue aux deux domiciles des parents dès lors qu'ils sont divorcés et qu'ils assurent la garde alternée de l'enfant soulève une question de droit présentant une difficulté sérieuse qui ne peut être regardée comme une obligation dont l'existence n'est pas sérieusement contestable. A... suite, il n'y pas lieu, pour le juge du référé provision de faire droit à leur demande tendant à ce que ces dépenses soient étendues au domicile de chacun des parents. Il en résulte que le complément de provision alloué à ce titre doit être porté à la somme de 10 739,23 euros. Quant aux frais de transport : 16. Les requérants sollicitent une provision à hauteur de 14 405,44 euros au titre des frais de transport exposés au cours des années 2009 à 2018. A... son ordonnance du 6 juillet 2018, la cour a alloué une provision de 13 767 euros au titre des frais de transport supportés A... les parents du jeune Adrian et nécessités A... le lourd suivi médical de leur fils. Si les requérants allèguent avoir, en outre, entrepris des allers-et retours entre le CHU de Caen et la ville de Bayeux en janvier et juin 2018, d'une part, et entre le même hôpital et Caen en novembre 2018 d'autre part, les pièces qu'ils produisent, en l'occurrence un compte-rendu d'hospitalisation du 8 janvier au 26 janvier 2018 du service pédiatrique de l'ADAPT de Bayeux, les résultats d'un électroencéphalogramme réalisé au CHU de Caen le 20 juin 2018 et une lettre de liaison du 21 novembre au 23 novembre 2018 du même centre hospitalier pour une ablation d'une lame-plaque, ne permettent pas d'établir qu'ils auraient exposés, après l'arrêt rendu A... la cour, de nouveaux frais de transport non remboursés A... l'organisme social. A... suite, l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation présentant un caractère incertain, la demande de complément de provision présentée à ce titre doit être rejetée. Quant aux autres frais divers : 17. M. C... et Mme I... sollicitent le versement d'une provision à hauteur de 2 249,79 euros au titre de divers frais annexes correspondant au remboursement du forfait hospitalier pour une somme de 252 euros, des frais de bilan ergothérapeutique d'un montant de 1 658 euros, des frais de bilan psychologique pour 178 euros et des frais de copie de dossier médical pour 161,79 euros. Toutefois, A... son arrêt du 6 juillet 2018, la cour a accordé une provision de 2 124 euros après application du taux de perte de chance de 70 %. Compte tenu de ce qui a été dit au point 11, les requérants ne sont pas fondés à demander un complément de provision à ce titre en alléguant que le taux de perte de chance de 70 % n'a pas lieu d'être appliqué. Quant aux frais de logement adapté : 18. Les requérants sollicitent le versement d'une somme provisionnelle de 117 143,92 euros en réparation du préjudice correspondant à la nécessité d'adapter le pavillon de plain-pied de M. C... au handicap dont souffre le jeune Adrian. 19. D'une part, il résulte du rapport d'expertise du Dr G... que l'aménagement du logement doit comprendre un accès facile avec le fauteuil, une vaste chambre individuelle, de larges couloirs et portes, une douche avec siège de bain et des toilettes séparées adaptées. Il est constant, A... ailleurs, que depuis la naissance d'J..., M. C... a divorcé puis s'est remarié et a eu avec sa dernière compagne deux enfants. Dans ces conditions, eu égard aux conclusions de l'expert et au fait que la famille se soit agrandie, les factures produites A... les intéressés, qui concernent des travaux intérieurs et extérieurs (terrasse) portant sur l'ensemble du logement, pour un montant de 96 210,50 euros, ne permettent pas au juge du référé provision d'apprécier la part non contestable des dépenses relevant des aménagements indispensables destinés à adapter le logement au handicap de l'enfant. 20. D'autre part, il résulte du même rapport d'expertise, et ainsi qu'il a été dit au point 15, qu'il appartiendra au médecin de réadaptation fonctionnelle de valider, s'il les juge utiles, les nouveaux appareillages préconisés A... l'ergothérapeute et de préciser la nécessité du renouvellement de ces appareillages. A... suite, et en l'état de l'instruction, l'obligation de réaliser les travaux domotiques préconisés A... l'ergothérapeute et le renouvellement des appareils ainsi installés, pour un montant total capitalisé jusqu'à la majorité d'J... de 20 933euros, présente un caractère qui n'est pas non sérieusement contestable. Quant aux frais de véhicules adaptés : 21. Les requérants sollicitent pour chacun des véhicules des parents du jeune Adrian le versement d'une provision à hauteur respectivement de 48 752,82 euros et de 85 957,50 euros. La cour, dans son arrêt du 6 juillet 2018, après avoir constaté que les véhicules dont il s'agit devaient être remplacés, a alloué aux intéressés une provision globale de 21 474 euros, destinée au renouvellement de leurs véhicules automobiles afin qu'ils soient adaptés au handicap de leur enfant. Il résulte de l'instruction que Mme I... a acquis depuis l'arrêt de la cour, en 2019, un véhicule. Dans le cadre d'un renouvellement d'un véhicule tous les sept ans, celui de Mme I... devra être renouvelé en 2026, soit avant la majorité du jeune Adrian. A... suite, la somme non sérieusement contestable destinée à permettre à Mme I... d'adapter le nouveau véhicule qu'elle sera amenée à acquérir au handicap de l'enfant ne saurait être inférieure à 12 000 euros, soit 8 400 euros après application du taux de perte de chance. Il en est de même pour M. C..., qui doit procéder à un renouvellement de son véhicule avant la majorité de l'enfant, dont il résulte de l'instruction que les aménagements nécessaires pour tenir compte du handicap du jeune Adrian ne saurait être inférieur à la somme de 12 000 euros, soit après application du taux de perte de chance, 8 400 euros. En revanche, il n'est pas, enfin, justifié que l'adaptation des véhicules à acquérir entraînerait un surcoût d'assurance devant donner lieu à un complément de provision. Il suit de là que le complément de provision doit être porté, pour ce chef de préjudice, à la somme de 16 800 euros. Quant à l'assistance A... une tierce personne : 22. Les requérants sollicitent, à ce titre, et sous réserve de déduction de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) dont bénéficie le jeune Adrian et des provisions perçues, le versement, à titre principal, d'une provision à hauteur de 2 065 469,68 euros ou à titre subsidiaire de 1 311 060,27 euros. Ils soutiennent, à titre principal, que leur enfant, qui souffre d'une tétraplégie a besoin de l'assistance d'une tierce personne, sur la base de 3 heures A... jour d'aide active de sa naissance jusqu'en septembre 2012, puis de 4 heures A... jour d'aide active entre septembre 2012 et septembre 2014, date de l'entrée à l'institut d'éducation motrice (IEM), ce qui représente sur l'ensemble de la période une aide active de 4 963 heures et une aide passive de 3 296 heures. Depuis la rentrée à l'IEM et jusqu'à sa majorité, les requérants allèguent que le besoin d'aide doit être apporté 24 h / 24. Subsidiairement, pour cette même période, ils s'en remettent aux conclusions de l'expert selon lesquelles l'aide dont a besoin le jeune Adrian est une aide active qui doit être évaluée à 4 041 heures. Ils soutiennent, enfin que, compte tenu du handicap de l'enfant, l'aide nécessite l'intervention d'une personne qualifiée dont le coût horaire de la prestation doit être fixé à 21,30 euros pour une aide active et à 11 euros pour une aide passive. Pour la période allant jusqu'à la date du présent arrêt : 23. Lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire permettant, dans les circonstances de l'espèce, le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat, sans être lié A... les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée A... un membre de la famille ou un proche de la victime. En outre, afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés, il y a lieu de calculer l'indemnisation sur la base d'une année de 412 jours. Enfin, en vertu des principes qui régissent l'indemnisation A... une personne publique des victimes d'un dommage dont elle doit répondre, il y a lieu de déduire d'une indemnisation allouée à la victime du dommage dont l'ONIAM doit assurer la prise en charge dans le cadre de la solidarité nationale, au titre de l'assistance A... tierce personne, les prestations versées A... ailleurs à cette victime et ayant le même objet, hors le cas où une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement si le bénéficiaire revient à meilleure fortune. Ces règles ne trouvent à s'appliquer que dans la mesure requise pour éviter une double indemnisation de la victime. A... suite, lorsque la personne publique responsable n'est tenue de réparer qu'une fraction du dommage corporel, notamment dans le cas où n'est retenue qu'une perte de chance d'éviter ce dommage, la déduction ne se justifie, le cas échéant, que dans la mesure nécessaire pour éviter que le montant cumulé de l'indemnisation et des prestations excède le montant total des frais d'assistance A... une tierce personne. 24. Il résulte de l'arrêt de la cour du 3 octobre 2013 complété A... celui du 6 juillet 2018 que la provision pour tierce personne a été allouée en se fondant sur une aide nécessaire trois heures A... jour telle qu'évaluée A... l'expert en 2011 pour un coût horaire de 18 euros, après déduction de l'ensemble des prestations perçues A... l'intéressé au titre du handicap, et en appliquant le taux de perte de chance de 70 %. Selon la nouvelle expertise ordonnée A... le juge des référés du tribunal administratif de Caen et rendue en 2020, alors qu'J... est totalement dépendant pour les repas, les transferts, les toilettes, l'habillage-déshabillage, l'assistance d'une tierce personne non spécialisée mais formée à la prise en charge des grands handicapés moteurs est impérative. Si l'expert a maintenu jusqu'à septembre 2012, le besoin qui avait été chiffré à 3 heures A... jour en actif lors de l'expertise d'octobre 2011, ce besoin a été majoré, à partir de septembre 2012, d'une heure de plus pour le porter à 4 heures A... jour. A compter du 1er septembre 2014, qui correspond à l'intégration de l'enfant en IEM, l'expert a fixé les besoins en assistance A... tierce personne à 5 heures A... jour en actif lorsqu'il est pris en charge A... cet institut et, à 10 heures A... jour en actif dans le cas contraire. Les conclusions de cette nouvelle expertise sur les besoins du jeune Adrian, et qui ne sont pas contestées A... l'ONIAM, doivent être regardées comme fixant l'obligation de réparation non contestable correspondant à ce chef de préjudice. Dans ces conditions, il y a lieu d'accorder une provision complémentaire aux requérants afin de tenir compte des conclusions de la dernière expertise. L'expert ne prévoyant pas, A... ailleurs, d'assistance spécialisée mais seulement formée à la prise en charge du handicap, il y a lieu de maintenir le montant horaire de la prestation à 18 euros. 25. En premier lieu, pour la période antérieure au 1er septembre 2012, il n'y a pas lieu d'accorder un complément de provision aux requérants dès lors que les besoins de l'enfant n'ont pas évolué au regard de ce qu'a jugé la cour dans son arrêt du 3 octobre 2013. En revanche, pour la période allant du 1er septembre 2012 au 31 août 2014, qui comprend 730 jours (ou 824 jours rapportés sur une année de 412 jours), le besoin d'assistance en tierce personne étant réévalué à une heure supplémentaire A... jour, il y a lieu d'accorder une provision complémentaire de 14 832 euros (824 h x 18 euros). 26. En deuxième lieu, pour la période courant du 1er septembre 2014 au 6 juillet 2018, date du second arrêt de la cour, il résulte de l'instruction que l'enfant a été placé en IEM qui est ouvert 36,5 semaines A... an. Durant cette période de 3 ans, 10 mois et 10 jours (soit 1 405 jours ou 1 585 jours rapportés sur une année de 412 jours), l'enfant a fréquenté, sur une année rapportée à 412 jours, cet institut pendant 981 jours et est resté à la charge de ses parents pendant 604 jours. La provision déjà allouée A... la cour ayant été fixée selon un besoin estimé à 3 heures A... jour, il convient, eu égard aux conclusions de l'expert, d'accorder un complément de provision calculé sur un besoin supplémentaire de 2 heures A... jour lorsque l'enfant fréquentait l'IEM et de 7 heures A... jour lorsqu'il ne le fréquentait pas. A... suite, le complément de provision dû doit être évalué à 35 311,56 euros en période IEM (981 jours x 2 heures supplémentaires x 18 €) et à 76 092 euros hors période IEM (604 jours x 7 heures supplémentaires x 18 €), ce qui représente un montant total pour cette période de 111 404,52 euros. 27. En troisième lieu, s'agissant de la période courant du 6 juillet 2018 au 17 juin 2022, date de la présente décision, la cour ayant également apprécié le besoin en tierce personne du jeune Adrian à trois heures A... jour, il y a lieu, pour le calcul du complément de provision à accorder aux requérants, d'appliquer les mêmes modalités de calcul que celles définies au point précédent. Il s'ensuit que, durant cette période et sur une année portée à 412 jours, le jeune Adrian doit, être regardé comme ayant fréquenté l'IEM pendant 1 007 jours et avoir été à la charge de ses parents pendant 620 jours. A... suite, le complément de provision dû doit être évalué à 36 242,14 euros en période IEM (1 007 jours x 2 heures supplémentaires x 18 €) et à 78 098,25 euros hors période IEM (620 jours x 7 heures supplémentaires x 18 €), ce qui représente un montant total pour cette période de 114 340,39 euros. 28. Il résulte des points 25 à 27 que le complément de frais pour l'aide A... une tierce personne présentant un caractère non contestable pour la période allant jusqu'au 17 juin 2022, date du présent arrêt, doit être fixé à la somme de 240 576,91 euros, soit une créance dont peuvent se prévaloir les requérants d'un montant de 168 403,84 euros après application du taux de perte de chance de 70 %. Il résulte également de l'instruction, et notamment des justificatifs produits A... les requérants, qui sont suffisants contrairement à ce que soutient l'ONIAM, que ces derniers ont perçu à compter du 6 juillet 2018 et jusqu'à la date de la présente décision, en intégrant les quelques montants manquants qu'ils sont appelés à recevoir, l'AEEH pour un montant total de 6 357,63 euros. Compte tenu de la somme de 16 190 euros perçue A... les requérants au titre des aides attribuées pour la période antérieure ainsi que cela ressort de l'arrêt de la cour du 6 juillet 2018, le montant cumulé de l'ensemble de ces prestations et de l'indemnisation mise à la charge de l'ONIAM n'excède pas le montant total des frais d'assistance A... tierce personne. Il n'y a donc pas lieu de déduire le montant de ces prestations de la provision due à ce titre aux requérants pour un montant de 168 403,84 euros. Pour la période courant à compter de la date du présent arrêt jusqu'au 16 septembre 2027, date de la majorité du jeune Adrian : 29. A la date du présent arrêt, la consolidation de l'état de santé du jeune Adrian n'est pas encore intervenue et il ne peut être exclu qu'à l'avenir, son état de santé requière son placement dans une institution spécialisée ou en centre hospitalier, rendant ainsi sans objet l'assistance d'une tierce personne au domicile. A... suite, en l'absence d'élément suffisamment certain concernant les conditions de la prise en charge d'K... pour l'avenir et jusqu'au 16 septembre 2027, date de sa majorité, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de provision complémentaire présentée A... les requérants. Quant à l'incidence scolaire : 30. Lorsque la victime se trouve privée de toute possibilité d'accéder à une scolarité, la seule circonstance qu'il soit impossible de déterminer le parcours scolaire qu'elle aurait suivi ne fait pas obstacle à ce que soit réparé le préjudice ayant résulté pour elle de l'impossibilité de bénéficier de l'apport d'une scolarisation. 31. Si les requérants sollicitent au titre de l'incidence scolaire une provision de 87 000 euros, la cour, A... son arrêt du 6 juillet 2018, a accordé une provision de 10 000 euros pour la période courant jusqu'à la date de son arrêt. Une obligation non sérieusement contestable peut être admise à ce titre, du fait de l'impossibilité irréversible dans laquelle se trouve le jeune Adrian de suivre un cursus scolaire et universitaire normal, au titre de la période courant de la date de ce dernier arrêt jusqu'à sa majorité, à hauteur d'une somme complémentaire de 45 000 euros, soit 31 500 euros après application du taux de perte de chance de 70 %. S'agissant des préjudices à caractère extra-patrimonial : Quant au déficit fonctionnel temporaire : 32. A... son arrêt du 6 juillet 2018, la cour a accordé au titre du déficit fonctionnel temporaire et sur la période courant jusqu'à la date de son arrêt, une provision complémentaire, avant application du taux de 70 %, de 31 000 euros sur une base de 500 euros A... mois pour un taux d'incapacité qui ne saurait être inférieur à 50 % au regard des conclusions du rapport d'expertise rendu le 30 juillet 2011 qui évaluait ce taux à 60 %. L'expert G..., dans son rapport rendu le 22 juin 2020, a désormais fixé le déficit fonctionnel temporaire partiel à 80 % depuis la période périnatale jusqu'à l'examen auquel il a procédé le 8 novembre 2019 et a étendu ce taux jusqu'à la date de consolidation de l'état de santé du jeune Adrian. Dans ces conditions, une obligation non sérieusement contestable doit être retenue à ce titre, en tenant compte des éléments nouveaux résultant de ce rapport d'expertise quant au taux de déficit fonctionnel temporaire partiel dont est atteint le jeune Adrian, en allouant, une provision complémentaire, d'une part, de 9 300 euros, soit 6 510 euros après application du taux de perte de chance, pour la période courant depuis la période périnatale jusqu'au 6 juillet 2018, et une autre provision complémentaire de 71 500 euros, soit 50 050 euros après application du taux de perte de chance, pour la période allant du 6 juillet 2018 jusqu'à la date de la majorité de l'enfant. Il suit de là que le complément de provision dû à ce titre doit être fixé à 56 560 euros après application du taux de perte de chance. Quant aux souffrances endurées : 33. Les requérants demandent au titre des souffrances endurées le versement d'une provision de 50 000 euros en se prévalant des conclusions de la seconde expertise rendue le 22 juin 2020 qui a réévalué l'intensité de ces souffrances endurées en la fixant à 6 sur une échelle de 7, contre 5 selon l'évaluation du premier expert. Alors que ce chef de préjudice avait déjà été pris en compte dans l'évaluation de la provision de 80 000 euros faite dans son arrêt du 3 octobre 2013, la cour a accordé, en sus, un complément de provision de 15 000 euros, avant application du taux de perte de chance, pour tenir compte des interventions chirurgicales intervenues depuis le rapport d'expertise du 30 juillet 2011. Compte tenu des conclusions de la nouvelle expertise du 22 juin 2020, il y a lieu d'accorder au titre de la part des souffrances endurées qui peut être regardée comme certaine jusqu'à la date du présent arrêt une provision complémentaire de 3 000 euros en tenant compte du taux de perte de chance de 70 %. Quant au préjudice esthétique temporaire : 34. Les requérants demandent le versement d'une provision de 35 000 euros, en se prévalant des conclusions de la seconde expertise du 22 juin 2020 qui a évalué à 5 sur une échelle de 7 le préjudice esthétique temporaire eu égard au strabisme, aux cicatrices et à l'image de la personne dont est atteint le jeune Adrian. Alors même que le premier expert n'avait retenu aucun préjudice à ce titre, la cour, dans son arrêt du 6 juillet 2018, a accordé une provision de 5 000 euros, avant application du taux de perte de chance. Compte tenu des conclusions de la nouvelle expertise du 22 juin 2020, il y a lieu d'accorder, au titre de la part du préjudice esthétique temporaire qui peut être regardée comme certaine jusqu'à la date du présent arrêt, une provision complémentaire de 1 000 euros, tenant compte du taux de perte de chance de 70 %. Quant au déficit fonctionnel permanent : 35. L'absence de consolidation, impliquant notamment l'impossibilité de fixer définitivement un taux d'incapacité permanente, ne fait pas obstacle à ce que soient mises à la charge du responsable du dommage la réparation de l'ensemble des conséquences déjà acquises de la détérioration de l'état de santé de l'intéressé. 36. Il résulte du rapport d'expertise du Dr G... que les lésions dont souffre le jeune Adrian ne sont pas consolidées dans leur expression clinique à la date de l'expertise compte-tenu de l'évolution de la maturation neuropsychologique et de la croissance et que cette consolidation définitive ne peut être envisagée avant l'âge de 18 ans, à partir du 2ème semestre 2027. Toutefois, selon ce même expert, les lésions neurologiques restent graves et irréversibles. Dans ces conditions, la partie de la créance certaine du déficit fonctionnel permanent due après la majorité, date à laquelle l'état de santé pourra être regardé comme consolidé, peut être évalué à un taux qui ne saurait être inférieur à 50 %. Il y a lieu d'accorder à ce titre une provision à hauteur de la somme de 150 000 euros, tenant compte du taux de perte de chance de 70 %. Quant au préjudice esthétique permanent : 37. Eu égard à ce qui a été dit au point 34, la part certaine du préjudice esthétique permanent du jeune Adrian peut être évaluée à la somme de 10 000 euros soit 7 000 euros après application du taux de perte de chance. Quant aux autres chefs de préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux permanents : 38. Si les requérants demandent le versement de provisions au titre du préjudice d'agrément, du préjudice sexuel et du préjudice d'établissement, la réalité et l'ampleur de ces préjudices ne sont pas déterminables en l'état de l'instruction. A... suite, les demandes formées A... les requérants à ce titre doivent être rejetées. 39. Il résulte de ce qui a été dit aux points précédents qu'un préjudice non sérieusement contestable peut être reconnu à hauteur de la somme de 453 186,06 euros après l'application du coefficient de 70% défini au point 11, au titre des divers chefs de préjudices évoqués ci-dessus, couvrant les préjudices d'ores et déjà subis, ou à subir d'une façon suffisamment certaine jusqu'à l'âge de 18 ans, autres que ceux ou en complément de ceux ayant fait l'objet d'une allocation provisionnelle accordée A... les arrêts de la cour du 3 octobre 2013 et du 6 juillet 2018. Dans ces conditions, il y a lieu de porter la provision complémentaire que l'ONIAM est condamnée à verser à Mme I... et M. C... au nom et pour le compte de leur fils mineur Adrian de 300 200 euros telle que fixée dans l'ordonnance attaquée du juge du référé provision du tribunal administratif de Caen du 3 septembre 2021 à la somme totale arrondie de 453 186 euros. 40. Les requérants ont droit aux intérêts au taux légal de la somme de 453 186 euros à compter du 1er août 2020, date de réception A... l'ONIAM de leur réclamation préalable. La capitalisation des intérêts a été demandée A... la requête enregistrée au greffe de la cour le 16 septembre 2021. A cette date, il était dû au moins une année d'intérêts. Dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande. En ce qui concerne l'évaluation provisoire des préjudices propres de Mme I... et de M. C... : 41. Les dispositions du 1° de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique instituent un régime spécifique de prise en charge A... la solidarité nationale des dommages résultant des infections nosocomiales les plus graves qui a vocation à réparer l'ensemble de ces dommages, qu'ils aient été subis A... les patients victimes de telles infections ou A... leurs proches. 42. M. C... et Mme I... renouvellent leur demande tendant à ce que soient allouée à chacun d'eux une somme provisionnelle de 50 000 euros au titre du préjudice d'affection ainsi qu'une autre somme provisionnelle du même montant au titre du préjudice extrapatrimonial exceptionnel. A... son ordonnance du 6 juillet 2018, la cour a accordé à chacun d'eux pour ces chefs de préjudice, une somme de 30 000 euros, avant application du taux de perte de chance de 70%. Les requérants n'apportent aucun élément nouveau de nature à justifier le versement d'un complément de provision à ce titre. A... suite, leur demande ne peut être que rejetée. Sur les frais liés au litige : 43. Pour l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge de l'ONIAM la somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés A... Mme I... et M. C... et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : L'ONIAM est condamné à verser à Mme I... et à M. C..., au nom et pour le compte de leur fils mineur Adrian, une provision complémentaire de 453 186 euros. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er août 2020, ces intérêts portant eux-mêmes intérêts à compter du 16 septembre 2021. Article 2 : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Caen du 3 septembre 2021 est réformée en tant qu'elle est contraire à l'article précédent. Article 3 : L'ONIAM versera à Mme I... et à M. C... la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme I... et de M. C... ainsi que les conclusions présentées A... l'ONIAM A... voie d'appel incident sont rejetés. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... I... divorcée C..., à M. F... C..., à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, au centre hospitalier universitaire de Caen, à la caisse primaire d'assurance maladie de Normandie, à la société Malakoff Médéric, et à la caisse nationale militaire de sécurité sociale. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller, Rendu public A... mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, M. L'HIRONDELLe président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de la prévention en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT02592
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La SCI Futuris a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner solidairement la communauté de communes de l'Arc Mosellan, le syndicat intercommunal des eaux de l'Est Thionvillois, la SA Groupama Grand Est à lui verser la somme de 29 461,20 euros en réparation du préjudice matériel subi, la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice de jouissance subi et de les condamner solidairement aux entiers frais et dépens. Par un jugement n° 1505514 du 20 décembre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande et a mis à sa charge la somme de 1 500 euros à verser à la communauté de communes de l'Arc Mosellan en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 février 2019 et 15 janvier 2021, la SCI Futuris, représentée par Me Mathieu, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 20 décembre 2018 en tant qu'il a écarté la responsabilité de la communauté de communes de l'Arc Mosellan ; 2°) de dire et juger que la communauté de communes de l'Arc Mosellan a engagé sa responsabilité à son encontre ; 3°) d'enjoindre à la communauté de communes de l'Arc Mosellan à faire procéder aux travaux de confortement afin de mettre un terme aux désordres, tels que préconisés par l'expert dans son rapport du 2 mars 2015 ; 4°) de condamner la communauté de communes de l'Arc Mosellan à lui verser la somme de 10 000 euros au titre du préjudice de jouissance subi ; 5°) de mettre à la charge de la communauté de communes de l'Arc Mosellan une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers frais et dépens de première instance et des deux instances de référé. Elle soutient que : - l'accroissement du volume d'eau arrivant jusqu'à son habitation est établie ; - la responsabilité de la communauté de communes de l'Arc Mosellan est établie : . avant les travaux, aucun volume d'eau n'arrivait jusqu'à son habitation ; . la seule présence d'une cunette d'évacuation ne saurait présumer l'existence d'eau de ruissellement préalablement aux travaux entrepris ; . l'expert et les parties présentes lors de l'expertise ont pu constater, lors du test consistant à arroser le parking, que l'eau déversée sur la zone de parking s'écoule in fine le long des murs de la cave de son habitation ; - le lien de causalité entre la faute de la communauté de communes de l'Arc Mosellan et son préjudice est donc établi ; - son préjudice est anormal ; - il est justifié à hauteur de 10 000 euros : il perdure depuis 2009 et elle ne peut utiliser sa cave ; - elle est fondée à solliciter à ce qu'il soit enjoint à la communauté de communes de l'Arc Mosellan de procéder à la reprise des désordres. Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2020, la communauté de communes de l'Arc Mosellan, représentée par Me Zimmer, conclut : - au rejet de la requête. - à ce que le syndicat intercommunal des eaux de l'Est Thionvillois la garantisse des éventuelles condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ; - à ce qu'il soit mis à la charge de la SCI Futuris et du syndicat intercommunal des eaux de l'Est Thionvillois la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - à titre principal, la requête d'appel est irrecevable car elle est tardive ; - s'agissant de sa responsabilité : . le phénomène d'infiltration dans la cave était préexistant aux travaux réalisés par la communauté de communes ; . de surplus, la requérante n'établit pas le caractère anormal et spécial du préjudice qu'elle expose avoir subi ; une simple gêne ne suffit pas pour engager la responsabilité sans faute de l'administration ; . elle ne démontre pas que les travaux de la communauté de communes de l'Arc Mosellan sont la cause directe et certaine de son préjudice ; . en tout état de cause, la faute de la requérante, qui n'a pas mis en place un dispositif d'étanchéité de sa cave, est de nature à l'exonérer totalement de toute responsabilité ; . à titre infiniment subsidiaire, aucun préjudice de jouissance, que la requérante établit à 10 000 euros, n'est établi puisque les infiltrations ne font pas obstacle à l'utilisation de la cave à titre de réserve alimentaire ; - s'agissant des conclusions à fin d'injonction tendant à faire procéder aux travaux de confortement tels que préconisés par l'expert : . elles sont irrecevables car elles sont présentées pour la 1er fois en appel ; . en tout état de cause, ces conclusions ne sont pas fondées ; - en cas de condamnation, elle est fondée à appeler en garantie le syndicat intercommunal des eaux de l'Est Thionvillois sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle. Par ordonnance du 16 décembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 janvier 2021 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, - les conclusions de M. Michel, rapporteur public ; - les observations de Me Mathieu, représentant la SCI Futuris et de Me Schultz, représentant la communauté de communes de l'Arc Mosellan. Considérant ce qui suit : 1. Au cours de l'automne 2009, le syndicat intercommunal des eaux de l'Est Thionvillois a procédé à des travaux de réfection des branchements particuliers d'eau potable et de déplacement des compteurs de l'intérieur vers l'extérieur des habitations. A cette occasion, il est intervenu au droit de la maison, propriété de la SCI Futuris, en opérant une ouverture dans la couche de surface de l'usoir adjacent. Concomitamment, la communauté de communes de l'Arc Mosellan a fait réaliser des travaux de voirie à proximité immédiate de l'habitation. Le 14 janvier 2010, la SCI Futuris a adressé un courrier au syndicat intercommunal des eaux de l'Est Thionvillois dans lequel elle se plaint d'importantes infiltrations dans sa cave. Le 24 janvier 2011, elle a saisi le juge des référés d'une première requête en expertise au contradictoire du syndicat intercommunal des eaux de l'Est Thionvillois. L'expert a rendu son rapport le 21 septembre 2012. Le 19 septembre 2012, la requérante a introduit une seconde requête en référé expertise afin d'étendre les précédentes mesures au contradictoire de la communauté de communes de l'Arc Mosellan. L'expert a rendu son rapport le 6 mars 2015. La SCI Futuris a alors saisi le tribunal administratif de Strasbourg afin d'obtenir la condamnation solidaire de la communauté de communes de l'Arc Mosellan, du syndicat intercommunal des eaux de l'Est Thionvillois et de la société Groupama Grand Est, l'assureur du syndicat, à lui verser la somme de 29 461,20 euros en réparation du préjudice matériel, la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice de jouissance et de les condamner solidairement aux entiers frais et dépens. La SCI Futuris relève appel du jugement du 20 décembre 2018 du tribunal administratif de Strasbourg en tant que celui-ci a rejeté sa demande tendant à condamner la communauté de communes de l'Arc Mosellan à l'indemniser des préjudices subis du fait des travaux réalisés par celle-ci. Sur la demande indemnitaire : 2. Le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers, tant en raison de leur existence que du fait de leur fonctionnement. Il appartient alors au demandeur ayant la qualité de tiers par rapport à cet ouvrage d'apporter la preuve de la réalité des préjudices qu'il allègue avoir subis et de l'existence d'un lien de causalité entre l'ouvrage public et ces préjudices. Le maître de l'ouvrage ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage présente un caractère accidentel. 3. Pour que la responsabilité sans faute de la communauté de communes puisse être engagée, il appartient à la SCI Futuris, tiers par rapport aux travaux de voirie, d'apporter la preuve de la matérialité du dommage accidentel qu'elle subit et d'établir son lien de causalité direct avec les travaux. 4. D'une part, il résulte de l'instruction et plus particulièrement des photographies produites à l'instance que la cave de la propriété de la SCI Futuris subit des infiltrations. Le rapport d'expertise judiciaire révèle par ailleurs que le déversement d'une forte quantité d'eau sur le parking accroît ces infiltrations. Leur matérialité est par suite, contrairement à ce que soutient la communauté de communes, établie. 5. D'autre part, le rapport d'expertise précise que les infiltrations sont dues en partie à l'eau de ruissellement sur la surface du parking canalisée vers la bande verte qui ne peut l'absorber en totalité. Or, il résulte de l'instruction que les travaux de voirie de la communauté de communes de l'Arc Mosellan ont débuté en septembre 2009 pour être réceptionnés en avril 2011. C'est dès le 14 janvier 2010, que la SCI Futuris s'est plainte d'importantes infiltrations dans sa cave. A cette date si les travaux de voirie étaient en cours de réalisation, il ne résulte pas de l'instruction que le parking était déjà imperméabilisé. Ainsi et nonobstant les termes du rapport d'expertise, l'imperméabilisation du parking ne peut être regardée comme la cause directe des infiltrations de la cave de la requérante. Aussi, et alors que la SCI Futuris ne fait état d'aucune aggravation des infiltrations d'eau dans sa cave depuis la fin des travaux de voirie réalisées par la communauté de communes de l'Arc Mosellan, le lien de causalité entre les infiltrations et les travaux d'imperméabilisation du parking n'est pas établi. La responsabilité de la communauté de communes de l'Arc Mosellan ne peut donc être engagée. 6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la communauté de communes de l'Arc Mosellan, que la SCI Futuris n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande indemnitaire et a mis les dépens à sa charge. Sur les frais liés à l'instance : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté de communes de l'Arc Mosellan, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, tout ou partie des frais exposés par la SCI Futuris et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la communauté de communes de l'Arc Mosellan. D E C I D E : Article 1er : La requête de la SCI Futuris est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté de communes de l'Arc Mosellan sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Futuris et à la communauté de communes de l'Arc Mosellan. Copie en sera adressé à M. A..., expert. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Grossrieder, présidente assesseure, - Mme Roussaux, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2022. La rapporteure, Signé : S.RoussauxLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 19NC00583 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 19 août 2021 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit d'office. Par un jugement n° 2102026 du 13 janvier 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 11 février 2022, M. C... D..., représenté par Me Balouka, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 13 janvier 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 19 août 2021 du préfet du Calvados refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il sera reconduit d'office ; 3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-23 ou L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ou, à défaut, mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : en ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour : - elle n'est pas suffisamment motivée et révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ; - elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à sa situation familiale ; - elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant eu égard à la situation de ses deux enfants nés en France de sa relation avec une personne établie régulièrement en France depuis plus de dix ans ; - elle est intervenue en violation des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle n'est pas suffisamment motivée et révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ; - elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à sa situation familiale ; - elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant eu égard à la situation de ses deux enfants nés en France de sa relation avec une personne établie régulièrement en France depuis plus de dix ans - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation familiale ; en ce qui concerne la décision accordant un délai de départ volontaire : - elle n'est pas suffisamment motivée et révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ; - elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à sa situation familiale ; - elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant eu égard à la situation de ses deux enfants nés en France de sa relation avec une personne établie régulièrement en France depuis plus de dix ans ; - un délai de départ volontaire supérieur s'imposait eu égard à sa situation familiale ; - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; en ce qui concerne la décision portant fixation du pays de renvoi : - elle n'est pas suffisamment motivée et révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ; - elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à sa situation familiale ; - elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant eu égard à la situation de ses deux enfants nés en France de sa relation avec une personne établie régulièrement en France depuis plus de dix ans - elle est illégale du fait de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français. Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2022, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés. M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 mars 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale des droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Rivas a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C... D..., ressortissant nigérian né le 23 avril 1980, est entré en France, selon ses déclarations, le 25 octobre 2017. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 21 août 2018 et par la Cour nationale du droit d'asile le 2 mai 2019. Par une décision du 15 mai 2019, le préfet du Calvados l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. D... a ensuite sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet du Calvados a, par un arrêté du 19 août 2021, rejeté la demande de titre de séjour présentée le 6 janvier 2021 par M. D..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 13 janvier 2022, dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation. 3. Il ressort des pièces du dossier que, venant d'Italie où il séjournait régulièrement, M. D... s'est installé sur le territoire français en octobre 2017. Il y a rejoint Mme A..., une compatriote installée en France, mère de ses enfants nés les 28 octobre 2017 et 25 juin 2020, et avec laquelle il s'est marié le 6 juillet 2019. Celle-ci bénéficie en France d'une carte de séjour pluriannuelle délivrée le 5 septembre 2019 valable jusqu'au 5 septembre 2023, et est titulaire depuis le 8 juillet 2019 d'un contrat à durée indéterminée en qualité de cueilleuse de champignons. M. D... justifie par ailleurs de sa propre inscription à des cours d'apprentissage du français en septembre 2019 et du fait qu'il accompagne ses enfants à l'école maternelle et à la crèche. Il s'ensuit, alors même que l'intéressé a été destinataire d'une décision du préfet du Calvados du 15 mai 2019 l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, qu'eu égard à la situation familiale de M. D..., la décision de refus de titre de séjour est intervenue en violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. 4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens soulevés, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 août 2021 du préfet du Calvados lui refusant le titre de séjour sollicité, ainsi que, par voie de conséquence, des décisions du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays de renvoi. Sur les conclusions à fin d'injonction : 5. Le présent arrêt implique, eu égard au motif qui le fonde, que le préfet du Calvados délivre à M. D... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sur les frais d'instance : 6. M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me Balouka dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2102026 du 13 janvier 2022 du tribunal administratif de Caen est annulé. Article 2 : L'arrêté du 19 août 2021 par lequel le préfet du Calvados a refusé de délivrer le titre de séjour sollicité par M. D..., l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office est annulé. Article 3 : Il est enjoint au préfet du Calvados de délivrer à M. D... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Article 4 : L'Etat versera à Me Balouka la somme de 1 500 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié M. C... D..., à Me Blache et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet du Calvados. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, C. Rivas Le président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00397
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté d'alignement individuel pris par le maire de la commune de Grusse le 28 juillet 2011, ainsi que la décision du 14 octobre 2011 rejetant son recours gracieux. Par un jugement n° 1101793 du 26 février 2013, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 13NC00760 du 10 octobre 2013, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé ce jugement et les décisions contestées. Elle a, en outre, enjoint au maire de Grusse d'adopter un arrêté d'alignement individuel de la voie communale n° 26 En Vallot au droit de la propriété de M. B.... Procédure d'exécution : Par un courrier enregistré le 22 mai 2020, M. B... a demandé à la cour d'assurer l'exécution de son arrêt n° 13NC00760 du 10 octobre 2013. Par une ordonnance du 26 mai 2021, la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy a ordonné, sous le n° 21NC01518, l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de statuer sur cette demande d'exécution. Par des mémoires, enregistrés les 28 juin 2021 et 21 février 2022, la commune de Val-Sonnette, représentée par Me Gillig, conclut au rejet de la demande d'exécution de M. B... et à ce que la somme de 1 000 euros à lui verser soit mise à sa charge en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le maire de Grusse ayant pris un nouvel arrêté d'alignement individuel le 25 février 2014, l'arrêt n° 13NC00760 du 10 octobre 2013 a été entièrement exécuté ; - l'alignement fixé par l'arrêté du maire du 25 février 2014 est conforme à l'injonction de la cour ; - M. B... ne peut pas utilement discuter de la légalité de cet arrêté dans le cadre de la présente instance. Par des mémoires, enregistrés les 9 février, 9 mars et 24 mars 2022, M. A... B..., représenté par Me Gras, demande à la cour : 1°) d'enjoindre au maire de la commune d'adopter un nouvel arrêté d'alignement individuel de la voie communale n° 26 au droit de l'ensemble de sa propriété, conforme aux motifs de l'arrêt n° 13NC00760 du 10 octobre 2013, et de poser les bornes afférentes ; 2°) de mettre à la charge de la commune de Val-Sonnette la somme de 2 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il n'a pas refusé de médiation ; - la commune n'a pas exécuté l'arrêt n° 13NC00760 du 10 octobre 2013, dès lors que l'alignement fixé par l'arrêté du maire du 25 février 2014 comporte la même erreur que celle censurée par la cour, et empiète encore sur sa propriété. L'instruction a été close le 18 avril 2022. Le 24 mai 2022, M. B... a déposé un mémoire qui n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Rees, président, - les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique, - et les observations de Me Schultz, pour la commune de Val-Sonnette. Considérant ce qui suit : 1. Par arrêté du 28 juillet 2011, le maire de la commune de Grusse, à la demande de M. B..., a fixé l'alignement individuel de la voie communale n° 26 En Vallot au droit des parcelles cadastrées ZB n° 24, ZB n° 144 et ZB 27 appartenant à l'intéressé. Le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision de rejet de son recours gracieux, mais la cour administrative d'appel de Nancy, par un arrêt n° 13NC00760 du 10 octobre 2013, a annulé ce jugement et ces décisions, et a enjoint au maire de Grusse d'adopter à nouveau un arrêté d'alignement individuel de la voie communale n° 26 En Vallot au droit de la propriété de M. B.... 2. Le 22 mai 2020, M. B... a demandé à la cour d'assurer l'exécution de cet arrêt par la commune de Val-Sonnette, entretemps créée en lieu et place des communes de Bonnaud, Vercia, Vincelles et Grusse. Par une ordonnance du 26 mai 2021, la présidente de la cour a ordonné l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de statuer sur cette demande d'exécution. Sur les conclusions aux fins d'exécution : 3. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte (...) ". 4. Il ressort de l'arrêt du 10 octobre 2013 que la cour a annulé l'arrêté du 28 juillet 2011 et la décision de rejet du recours gracieux de M. B... au motif que le maire, qui ne s'était pas borné à constater la situation et l'état des lieux, s'était mépris sur les limites de la voie publique et avait commis une erreur d'appréciation, l'alignement fixé le long des parcelles cadastrées ZB n° 24 et ZB n° 144, propriétés de M. B..., incluant à tort dans l'emprise de la voie publique, d'une part, une entrée de garage empierrée, une pelouse et une terrasse pavée desservant l'entrée de la maison de l'intéressé et, d'autre part, un muret en pièces sèches et une haie fournie. 5. Ce motif d'annulation imposait que l'alignement individuel de la voie communale n° 26 En Vallot au droit de la propriété de M. B... fût fixé conformément aux limites de la voie publique. 6. Il résulte de l'instruction que, par un arrêté du 25 février 2014, pris au visa, notamment, de l'arrêt de la cour du 10 octobre 2013, la maire de la commune de Grusse a fixé l'alignement de la voie communale n° 26 En Vallot au droit des parcelles cadastrées ZB nos 24, 27 et 144. S'il est constant que cet alignement exclut l'entrée de garage empierrée, la pelouse et la terrasse pavée desservant l'entrée de la maison de M. B..., il ressort du plan de géomètre annexé à l'arrêté du 25 février 2014 que, pour le reste, il excède les limites de la voie publique, et inclut notamment le muret et la haie situés au sud de la maison. Dans ces conditions, la maire de Grusse ne peut pas être regardée comme ayant, par cet arrêté, pris une mesure propre à assurer l'exécution de l'arrêt du 10 octobre 2013. 7. Par suite, et alors même qu'il n'a pas formé de recours contentieux contre l'arrêté du 25 février 2014, lequel, au demeurant, n'avait été pris que pour une durée d'une année, M. B... est fondé à demander qu'il soit à nouveau enjoint au maire de la commune de Val-Sonnette de prendre un arrêté d'alignement individuel de la voie communale n° 26 En Vallot au droit de sa propriété. En revanche, l'exécution de l'arrêt du 10 octobre 2013 n'implique pas que la commune procède, en outre, à la pose de bornes de part et d'autre de la voie publique. Sur les frais de l'instance : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre une somme à la charge de la commune de Val-Sonnette sur le fondement de ces dispositions. D E C I D E : Article 1er : Il est enjoint au maire de la commune de Val-Sonnette de fixer l'alignement individuel de la voie communale n° 26 En Vallot au droit de la propriété de M. B.... Article 2 : Les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Val-Sonnette. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - Mme Barrois, première conseillère. Rendu public par mise à disposition, le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : P. Rees La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au préfet du Jura en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet N° 21NC01518 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... D..., agissant en son nom propre et en qualité de représentante légale de ses enfants mineurs C... et E... A..., a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, par deux requêtes distinctes, de condamner l'Etat à lui verser deux fois la somme de 196 500 euros en réparation du préjudice causé par l'absence de prise en charge de ses enfants E... et C... au sein d'un institut médico-éducatif. Par un jugement n° 1800033-1800034 du 25 juin 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'Etat à verser à Mme D... la somme de 5 000 euros ainsi que deux fois la somme de 7 000 euros en sa qualité de représentante légale de E... et de C... A... et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 2 juillet 2019, Mme D..., représentée par Me Vocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 25 juin 2019 en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à sa demande ; 2°) de condamner l'Etat à verser à son fils C... A... la somme de 121 500 euros au titre du préjudice subi du fait du non-respect de l'obligation de prise en charge au sein d'un institut médico-éducatif ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 50 000 euros au titre de son préjudice moral ; 4°) de condamner l'Etat à verser à son autre fils, E... A..., une somme de 25 000 euros au titre de son préjudice moral ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle est fondée à solliciter une indemnisation supérieure à celle accordée par le tribunal administratif qui a retenu la carence fautive de l'Etat ; - son fils, C..., a droit à une indemnité 121 500 euros du fait de l'absence de prise en charge éducative adaptée à son état pendant plus de trois ans : . au regard du barème retenu par la cour administrative d'appel de Marseille pour un cas similaire, le montant alloué par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est sous-évalué ; . il a subi un préjudice de formation qui ne pourra être indemnisé à moins de 15 000 euros ; . il a subi des troubles dans ses conditions d'existence qui ne pourront être indemnisés à moins de 31 500 euros ; . il a subi un préjudice moral qui ne pourra être indemnisé à moins de à 75 000 euros ; - elle a subi un préjudice moral de 50 000 euros car elle a dû garder pendant trois ans son enfant à demeure ; - le frère jumeau de C..., E..., a également subi un préjudice moral qui ne pourra être indemnisé à moins de 25 000 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 15 juin 2021, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - les moyens ne sont pas fondés ; - le préjudice de l'enfant évalué à hauteur de 7 000 euros par le tribunal administratif ne pourra qu'être confirmé ; - le préjudice moral de la mère évalué à 5 000 euros par le tribunal administratif ne pourra qu'être confirmé ; - le montant sollicité de 25 000 euros est manifestement excessif. Par une ordonnance du 8 avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2022 à 12h00. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - le code de l'action sociale et des familles ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, - et les conclusions de M. Michel, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. E... et C... A..., nés le 11 mars 2010, souffrent de troubles autistiques. Par un courrier du 1er septembre 2017, leur mère, Mme D..., a demandé à l'Agence régionale de santé Grand Est la réparation de son préjudice et de ceux subis par ses fils, à raison de la carence de l'Etat dans la mise en place d'une prise en charge de ses enfants conforme à l'orientation décidée par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par l'Agence régionale de santé Grand Est sur cette demande. Mme D..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de ses enfants E... et C..., a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, par deux requêtes distinctes qui seront jointes par le tribunal, de condamner l'Etat à réparer les préjudices subis pour un montant global de 196 500 euros pour chacun de ses deux enfants. Mme D... relève appel du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 25 juin 2019 en tant que dans l'instance 1800034 relative à l'enfant C..., celui-ci n'a pas fait droit à l'intégralité des sommes demandées au titre de la réparation des préjudices subis. Sur le montant des préjudices En ce qui concerne les préjudices de C... : 2. Si l'enfant a été privé d'une prise en charge pluridisciplinaire spécifiquement adaptée à ses troubles conformément à l'orientation décidée par la CDAPH pendant deux ans et six mois, soit du 30 mars 2015 au 3 octobre 2017, il n'a cependant pas été privé de toute prise en charge éducative. Au cours de cette période, C... a d'abord bénéficié jusqu'au 6 janvier 2016 d'une prise en charge éducative adaptée en milieu scolaire avec la présence d'un accompagnant d'élèves en situation de handicap trois heures quarante-cinq par semaine puis d'une prise en charge dans un hôpital de jour et par le service d'éducation spéciale et de soins à domicile " Aubtimisme " trois fois par semaine en complément d'une scolarisation en école préélémentaire. Au regard de ces éléments et alors que la requérante se borne à se prévaloir d'un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 11 juin 2012 pour contester le montant qui a été alloué au bénéfice de C..., il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges auraient procédé à une inexacte évaluation des préjudices subis par l'enfant en la fixant à la somme globale de 7 000 euros. En ce qui concerne le préjudice moral de Mme D... : 3. Alors qu'il résulte de ce qui précède que son enfant a été partiellement pris en charge, la requérante n'apporte à hauteur d'appel aucun élément de nature à démontrer que l'évaluation retenue par les premiers juges serait insuffisante. Il n'y a donc pas lieu de lui accorder, au titre de son préjudice moral, une indemnité supplémentaire à celle qui lui a été allouée par les premiers juges. En ce qui concerne le préjudice moral de E... : 4. Il ressort des termes du jugement que celui-ci a alloué une indemnité globale de 7 000 euros à E..., laquelle répare en partie le préjudice moral subi par celui-ci du fait de la carence de l'Etat dans la prise en charge tardive de son frère jumeau au sein d'un institut médico éducatif. La requérante n'apporte à hauteur d'appel aucun élément au soutien de sa demande tendant à ce qu'une somme de 25 000 euros soit allouée à E... pour ce seul préjudice. Dans ces circonstances, et en l'absence de toute critique permettant de remettre en cause le montant alloué par les premiers juges, les conclusions de Mme D... ne peuvent qu'être rejetées. 5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg n'a fait droit que partiellement à sa demande indemnitaire. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et à la ministre de la santé et de la prévention. Copie en sera délivrée à l'agence régionale de santé Grand Est. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient : Mme Ghisu-Deparis, présidente, Mme Grossrieder, présidente assesseure, Mme Roussaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 juin 2022. La rapporteure, Signé : S. RoussauxLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de la prévention en qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 19NC02082
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 15 mai 2019 par lequel le préfet de la Marne lui a ordonné de se dessaisir des armes de toute catégorie en sa possession et lui a interdit d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie. Par un jugement n° 1901761 du 9 juin 2020 le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 26 août 2020, M. A..., représenté par la SELARL Antoine et BMC associés, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 9 juin 2020 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Marne du 15 mai 2019 ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de le radier du fichier national automatisé nominatif des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes. 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que le préfet a fait une inexacte application du 3° de l'article R. 312-67 du code de la sécurité intérieure. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2021 le préfet de la Marne conclut au rejet de la requête. Il soutient que le moyen soulevé par le requérant n'est pas fondé. Vu : - le code de la sécurité intérieure ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picque, première conseillère, - et les conclusions de M. Michel, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A... fait appel du jugement du 9 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 mai 2019 du préfet de la Marne lui ordonnant de se dessaisir des armes de toute catégorie en sa possession et lui interdisant d'en acquérir ou d'en détenir de nouvelles. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure : " Sans préjudice des dispositions de la sous-section 1, le représentant de l'Etat dans le département peut, pour des raisons d'ordre public ou de sécurité des personnes, ordonner à tout détenteur d'une arme de toute catégorie de s'en dessaisir. / Le dessaisissement consiste soit à vendre l'arme à une personne qui fabrique ou fait commerce des armes, mentionnée à l'article L. 2332-1 du code de la défense, ou à un tiers remplissant les conditions légales d'acquisition et de détention, soit à la remettre à l'Etat. Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités du dessaisissement (...) ". Aux termes de l'article L. 312-13 du code de la sécurité intérieure : " Il est interdit aux personnes ayant fait l'objet de la procédure prévue à la présente sous-section d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie (...) ". Selon l'article R. 312-67 de ce code : " Le préfet ordonne la remise ou le dessaisissement de l'arme ou de ses éléments dans les conditions prévues aux articles L. 312-7 ou L. 312-11 lorsque : (...) 3° Il résulte de l'enquête diligentée par le préfet que le comportement du demandeur ou du déclarant est incompatible avec la détention d'une arme ; cette enquête peut donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ". 3. Il ressort des pièces du dossier et en particulier des termes de la décision attaquée que, pour conclure à l'incompatibilité du comportement du requérant avec la détention d'armes à feu, le préfet s'est fondé sur la circonstance que M. A... était signalé dans le fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ) comme auteur des faits suivants : recel de bien provenant d'un vol à Reims le 10 décembre 2018, violences volontaires sur personne chargée d'un service public entrainant une incapacité temporaire de travail (ITT) inférieure à huit jours le 30 août 2012, recel d'un bien provenant d'un vol du 13 au 14 février 2008 et vol de véhicule et destruction ou détérioration importante du bien d'autrui du 1er au 14 février 2008. Toutefois, bien que les faits commis en 2008 et 2012 soient fortement regrettables, ils ne sauraient suffire, en raison de leur caractère ancien et isolé, à caractériser, à la date de la décision contestée, soit 12 et 8 ans plus tard, un comportement violent chez M. A... et, par suite, à faire craindre une utilisation dangereuse des armes qu'il détient. Par ailleurs, le requérant soutient sans être contesté que les faits de 2018 se sont produits alors qu'il avait acheté un bateau de pêche sans avoir connaissance de ce que celui-ci avait été volé. Ces faits ne sauraient au demeurant caractériser un comportement incompatible avec la détention d'armes. Par conséquent, dans les circonstances de l'espèce, c'est par une inexacte application des dispositions du 3° de l'article R. 312-67 du code de la sécurité intérieure que le préfet de la Marne a ordonné au requérant de se dessaisir des armes en sa possession. 4. Il résulte de ce qui précède, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 mai 2019 du préfet de la Marne lui ordonnant de se dessaisir des armes de toute catégorie en sa possession et lui a interdit d' acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie. Sur les conclusions à fin d'injonction : 5. Aux termes de l'article L. 312-16 du code de la sécurité intérieure : " Un fichier national automatisé nominatif recense : 1° Les personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes en application des articles L. 312-10 et L. 312-13 (...). / Les modalités d'application du présent article, y compris la nature des informations enregistrées, la durée de leur conservation ainsi que les autorités et les personnes qui y ont accès, sont déterminées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ". 6. L'annulation de l'arrêté du 15 mai 2019 du préfet de la Marne ordonnant à M. A... de se dessaisir des armes de toute catégorie en sa possession et lui interdisant d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie, implique nécessairement la suppression de la mention de cette interdiction dans le fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes. Il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Marne de faire procéder à cette suppression dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les frais liés à l'instance : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 1901761 du 9 juin 2020 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et l'arrêté du 15 mai 2019 du préfet de la Marne ordonnant à M. A... de se dessaisir des armes de toute catégorie en sa possession et lui interdisant d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Marne de faire procéder à la suppression de l'inscription de M. A... au fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes dans un délai de deux mois à compter de l'exécution du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Marne. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Grossrieder, présidente assesseure, - Mme Picque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2022. La rapporteure, Signé : A.-S. PicqueLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso. 2 N° 20NC02511
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B..., Mme D... B... et M. C... B... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner in solidum la commune de Singly, la communauté de communes des crêtes préardennaises et l'Etat à verser à M. A... B... la somme globale de 970 604 euros, augmentée à 1 058 796 euros en cas de retard d'un an, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2017 et de la capitalisation des intérêts, en indemnisation des préjudices subis à raison de l'empoisonnement de son troupeau de bovins, de condamner in solidum la commune de Singly, la communauté de communes des crêtes préardennaises et l'Etat à verser à M. C... B... la somme de 512 292 euros, augmentée à 560 972 euros en cas de retard d'un an, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2017 et de la capitalisation des intérêts, en indemnisation des préjudices subis à raison de l'empoisonnement de son troupeau de bovins, de condamner la compagnie SMACL et la compagnie Groupama à garantir les condamnations mises à la charge des personnes publiques et d'enjoindre à la communauté de communes des crêtes préardennaises, à la commune de Singly et à l'Etat de prendre toutes les mesures nécessaires pour stopper la pollution provenant du réseau d'assainissement sur le territoire de la commune de Singly, dans un délai de six mois à compter du jugement. Par un jugement n° 1800492 du 17 octobre 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 17 décembre 2019 et 24 avril 2020, M. A... B..., Mme D... B... et M. C... B..., représentés par la SCP Blocquaux et associés, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 octobre 2019 ; 2°) de condamner in solidum la commune de Singly, la communauté de communes des crêtes préardennaises et l'Etat à verser à M. A... B... la somme globale de 960 604 euros, augmentée à 1 048 796 euros en cas de retard d'un an, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2017 et de la capitalisation des intérêts, en indemnisation des préjudices subis à raison de l'empoisonnement de son troupeau de bovins ; 3°) de condamner in solidum la commune de Singly, la communauté de communes des crêtes préardennaises et l'Etat à verser à M. C... B... la somme de 502 292 euros, augmentée à 560 972 euros en cas de retard d'un an, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2017 et de la capitalisation des intérêts, en indemnisation des préjudices subis à raison de l'empoisonnement de son troupeau de bovins ; 4°) de condamner la compagnie SMACL et la compagnie Groupama à verser le montant des condamnations au bénéfice des demandeurs ; 5°) d'enjoindre à la communauté de communes des crêtes préardennaises, à la commune de Singly et à l'Etat de prendre toutes les mesures nécessaires pour stopper la pollution provenant du réseau d'assainissement sur le territoire de la commune de Singly, dans un délai de six mois à compter de l'arrêt à intervenir ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat,[BN1] de la communauté de communes des crêtes préardennaises, à la commune de Singly le versement d'une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - le réseau d'assainissement de la commune de Singly est à l'origine de l'empoissonnement de leurs troupeaux de bovins, en raison du rejet des eaux usées domestiques dans le ruisseau servant de source d'abreuvement aux bêtes lorsqu'elles sont en pâturage ; - la surmortalité et l'amaigrissement de leurs bêtes trouvent leur cause dans leur abreuvement ; les autres causes ont été exclues ; - la pollution de l'eau d'abreuvement des bovins par les eaux usées domestiques est établie ; - la pollution de l'eau d'abreuvement des bovins par le molybdène a été écartée ; - à titre principal, la responsabilité sans faute de la commune de Singly, propriétaire du réseau ou, subsidiairement, de la communauté de communes des crêtes préardennaises, à qui la compétence en matière d'assainissement a été transférée, est donc engagée au titre des dommages liés au fonctionnement d'un ouvrage public ; - à titre subsidiaire, la responsabilité pour faute de la commune de Singly, est engagée dès lors que le maire a manqué à son obligation de veiller à la salubrité publique ; - à titre subsidiaire la responsabilité pour faute de la communauté de communes des crêtes préardennaises est aussi engagée dès lors qu'elle a manqué à ses obligations de contrôle du réseau d'assainissement de la commune de Singly ; - à titre principal, la responsabilité pour faute de l'Etat est conjointement engagée dès lors que le préfet des Ardennes n'a pas usé de ses pouvoirs de police pour mettre un terme à la pollution du ruisseau ; - ils ont subis un préjudice important à raison de la mortalité anormale de leur bétail qu'ils estiment à la somme globale à parfaire de 960 604 euros en ce qui concerne M. A... B... et à la somme globale à parfaire de 502 292 euros en ce qui concerne M. C... B.... Par un mémoire en défense enregistré le 27 mars 2020, la commune de Singly et la SMACL, représentées par la SELAS Devarenne associés Grand Est, concluent au rejet de la requête des consorts B... et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à leur charge sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - le traçage des eaux a démontré que seule une minorité des eaux de rejet du réseau unitaire d'assainissement ressurgissait au niveau des points d'abreuvement des bêtes en pâturage ; le vétérinaire a relevé une légère contamination des eaux prélevées ; - il existe un doute sur le point de savoir si ce n'est pas une intoxication au molybdène, une maladie, leur alimentation ou bien un acte de malveillance qui a provoqué la sur-morbidité et l'amaigrissement des bêtes ; - par conséquent, le lien de causalité direct et certain entre le déversement des eaux de rejet du réseau unitaire d'assainissement et la perte des animaux n'est pas établi ; - le lien de causalité direct et certain entre la pollution des eaux du ruisseau dans lesquels les bêtes s'abreuvaient et la surmortalité du cheptel n'est pas établi ; - en tout état de cause, les dommages qui trouvent leur origine dans l'exercice de la compétence en matière d'assainissement ne sont susceptibles de mettre en cause que la responsabilité de la communauté de communes de crêtes préardennaises ; - à titre subsidiaire, il conviendra d'ordonner une expertise sur le quantum du préjudice ; - il n'est pas établi que le préjudice perdure, de sorte que les conclusions à fin d'injonction seront rejetées. Par un mémoire en défense enregistré le 21 octobre 2020, la communauté de communes des crêtes préardennaises et la société Groupama Grand Est, représentées par Me Thomas, concluent au rejet de la requête des consorts B... et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à leur charge sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - la requête d'appel, qui se borne à reprendre littéralement la demande de première instance, est irrecevable ; - s'il n'est pas contesté que l'eau d'abreuvement était incompatible avec la consommation humaine, il n'est pas établi qu'elle l'était pour le cheptel ; il n'est pas établi que les symptômes observés chez les animaux résultaient de l'impropriété de l'eau à la consommation ; - les autres causes possibles de la surmortalité du cheptel n'ont pas été formellement écartées ; - l'expertise réalisée par l'assureur des requérants ne lui est pas opposable ; - l'évolution de l'état sanitaire du troupeau est [BN2]imprécise ; - les quantités d'escherichia coli et d'enterocoques intestinaux trouvées dans l'eau en mai et novembre 2016 respectent les indicateurs donnés par l'agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) pour l'eau d'abreuvement des animaux d'élevage, dont la qualité sanitaire n'est pas réglementée en France ; - les requérantes ne démontrent pas avoir pris les précautions minimales préconisées pour l'abreuvement du bétail avec de l'eau prélevée en milieu naturel ; la carence des éleveurs est constitutive d'une faute de nature à exclure toute responsabilité de la communauté de communes des crêtes préardennaises ; - l'injonction sollicitée est sans objet dès lors que les travaux de mise en conformité des installations individuelles d'assainissement sur le territoire de la commune de Singly sont en voie d'être achevés ; - en tout état de cause, les dommages qui trouvent leur origine dans l'exercice de la compétence en matière de gestion des eaux pluviales ne sont pas susceptibles de mettre en cause la responsabilité de la communauté de communes de crêtes préardennaises qui n'est compétente qu'en ce qui concerne l'assainissement des eaux usées ; - à titre subsidiaire, il conviendra d'ordonner une expertise sur le quantum du préjudice. Par un mémoire enregistré le 22 décembre 2021, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - la faute lourde du préfet, qui résulterait d'une carence dans l'exercice de son pouvoir de substitution du maire dans l'exercice des pouvoirs de police n'est pas caractérisée ; - le lien de causalité n'est en tout état de cause pas établi. La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur qui n'a pas présenté de mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picque, première conseillère, - les conclusions de M. Michel, rapporteur public, - et les observations de Me Bazin, substituant Me Bloquaux, représentant les consorts B... et de Me Thomas pour la communauté de communes des crêtes préardennaises. Considérant ce qui suit : 1. Les consorts B... relèvent appel du jugement du 17 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes tendant, à titre principal, à la condamnation de la commune de Singly, ou, subsidiairement, de la communauté de communes des crêtes préardennaises, sur le fondement de la responsabilité sans faute du fait des dommages liés au fonctionnement d'un ouvrage public, et de l'Etat, sur le fondement de la responsabilité pour faute et, à titre subsidiaire, la condamnation de la commune de Singly et de la communauté de communes des crêtes préardennaises sur le fondement de la responsabilité pour faute, à les indemniser des préjudices subis par leurs cheptels de bovins, ainsi qu'à prendre toutes les mesures nécessaires pour stopper la pollution provenant du réseau d'assainissement sur le territoire de la commune de Singly. Sur les conclusions indemnitaires et à fin d'injonction : 2. La responsabilité de l'administration ne peut être engagée que si le fait dommageable qui lui est imputable est la cause directe du préjudice subi par la victime. 3. Les consorts B... sont éleveurs de bovins. Durant le printemps et l'été, leurs cheptels, de cinq-cent-cinquante bêtes au total, sont mis en pâturage sur des parcelles situées sur le territoire de la commune de Singly. Il résulte de l'instruction que, lorsqu'ils sont en pâture, les animaux se nourrissent principalement d'herbe et de fourrage et s'abreuvent au fond du vallon de Thièves par l'eau issue d'un ruisseau, lequel est alimenté par des eaux en provenance des versants sur lesquels sont situées les communes de Singly et de Villers-le-Tilleul et d'une source appelée " Le Petit trou ". Alors qu'au mois d'octobre 2015, les agriculteurs avaient constaté un amaigrissement chez les animaux de retour de pâturage, des diarrhées profuses et des décès sont survenus chez plusieurs vaches à compter du mois de mars 2016. Il est dénombré cinquante bêtes décédées en juin 2016 et un total de cent-trente décès en mars 2017. Les autopsies pratiquées sur les animaux ont montré des défaillances au niveau du foie et des reins et des entérites tandis que des prélèvements effectués sur des vaches allaitantes saines et malades ont révélé une carence en cuivre. La cause des décès n'a toutefois pas pu être médicalement identifiée. Les requérants incriminent la contamination bactérienne de l'eau d'abreuvage des bovins. Ils imputent cette pollution au réseau public de collecte des eaux de la commune de Singly. 4. Il résulte de l'instruction que les immeubles de la commune de Singly, qui compte cent-quarante habitants, ne sont pas raccordés à un réseau d'assainissement collectif des eaux usées. Les eaux domestiques, dont l'assainissement incombe aux propriétaires des immeubles, sont recueillies dans un réseau unitaire commun aux eaux de pluie. Ces eaux transitent ensuite par un ouvrage d'infiltration, situé le long de la route départementale 27, lieu-dit " La Couture ", destiné à l'assainissement des eaux pluviales, avant d'être rejetées dans le milieu naturel. Il ressort du rapport de traçage des eaux souterraines effectué par " Sciences Environnement " au mois de janvier 2017 qu'une partie des eaux collectées au niveau de l'ouvrage d'infiltration ressurgissent en fond de vallon dans le ruisseau utilisé pour l'abreuvement des bovins des consorts B..., en particulier lors de périodes extrêmement pluvieuses. A l'initiative de la direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations, des prélèvements ont été effectués le 6 juillet 2016 au niveau de l'ouvrage communal d'infiltration et à deux points du ruisseau. Les résultats ont révélé une teneur en Escherichia coli (E. coli) et en entérocoques intestinaux supérieure à la normale. 5. Toutefois, si la teneur en E. Coli et en entérocoques intestinaux était très largement supérieure aux valeurs attendues pour la consommation humaine et les eaux de baignades au niveau de l'ouvrage d'infiltration, ce qui a conduit le préfet des Ardennes, le 7 août 2017, à mettre en demeure le maire de Singly de prendre des mesures propres à la préservation de la santé publique et de l'environnement, il ressort des mêmes analyses que la charge bactérienne au niveau des deux autres points de prélèvement était sensiblement plus faible. Ainsi, elle était, au maximum de 500 UFC/100 ml en ce qui concerne l'E. Coli, ce qui correspond à une eau d'abreuvement de qualité moyenne à médiocre selon l'étude de l'agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) " Etat des lieux des pratiques et recommandations relatives à la qualité sanitaire de l'eau d'abreuvement des animaux d'élevage " publiée en 2010. De plus, d'autres prélèvements effectués en mai 2016 et novembre 2016 ont révélé une eau correspondant à une eau d'abreuvement de bonne qualité avec une présence d'agents pathogènes inférieure à 100 UFC/100 ml, le vétérinaire du cheptel ayant lui-même constaté " une contamination bactériologique légère " de l'eau du ruisseau en mai 2016. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que la contamination bactérienne de l'eau d'abreuvement des animaux soit la cause directe et certaine des pertes de poids importantes, des diarrhées, de l'absence de vêlage et de la surmortalité constatées dans les cheptels des consorts B.... En outre, contrairement à ce qui est soutenu, il ne résulte pas de l'instruction que la pollution de l'eau d'abreuvement des bovins par une autre cause, et en particulier le molybène, puisse être écartée. 6. Il résulte de tout ce qui précède que l'imputabilité des dommages subis par les cheptels des consorts B... au rejet d'eaux usées dans le milieu naturel ne peut être regardée comme établie. Par conséquent, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, ni si les intimés ont commis des fautes de nature à engager leur responsabilité, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont, pour ce motif, rejeté leurs conclusions indemnitaires, tout fondements confondus et tendant à ce qu'il soit enjoint de mettre fin à la pollution des eaux du ruisseau. Sur les frais d'instance : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des intimés, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des consorts B... le versement des sommes demandées en défense sur le fondement des mêmes dispositions. D E C I D E: Article 1er : La requête des consorts B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions des autres parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Mme D... B..., à M. C... B..., à la commune de Singly, à la communauté de communes des crêtes préardennaises, la SMACL, à la société Groupama Grand Est, au ministre de l'intérieur et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Copie en sera adressée pour information au préfet des Ardennes. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Grossrieder, présidente assesseure, - Mme Roussaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2022. La rapporteure, Signé : A.-S. PicqueLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet des Ardennes en qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso. [BN1]Ne faut-il pas une virgule ' [BN2]Ne manque-t-il pas un mot ' 2 N° 19NC03634
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... A..., épouse B..., a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 23 juillet 2018 par laquelle le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un agrément pour l'exploitation, sous l'enseigne " SPPF ", d'un centre de sensibilisation à la sécurité routière et la décision du 2 octobre 2018 rejetant son recours gracieux. Par un jugement n° 1802513 du 4 février 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 3 avril 2021, Mme B..., représentée par Me Philippot, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 4 février 2020 ; 2°) d'annuler la décision du 23 juillet 2018 par laquelle le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un agrément pour l'exploitation d'un centre de sensibilisation à la sécurité routière et la décision du 2 octobre 2018 rejetant son recours gracieux ; 3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de lui délivrer l'agrément sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le préfet n'a pas respecté la procédure du I de l'article 3 de l'arrêté du 26 juin 2012 fixant les conditions d'exploitation des établissements chargés d'organiser les stages de sensibilisation à la sécurité routière dès lors qu'il a, dans le même courrier, accusé réception de la demande et rejeté celle-ci sans contrôler les documents fournis ; il n'a pas réalisé d'enquête ; - le préfet était tenu de lui délivrer l'agrément en application du III de l'article 3 de l'arrêté du 26 juin 2012 fixant les conditions d'exploitation des établissements chargés d'organiser les stages de sensibilisation à la sécurité routière dès lors que Mme B... n'a fait l'objet d'aucune des condamnations mentionnées aux articles L. 213-3 et R. 212-4 du code de la route et que son dossier était complet et conforme ; - le préfet a entaché sa décision d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard de l'article R. 213-2 du code de la route. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er février 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la route ; - l'arrêté du 26 juin 2012 fixant les conditions d'exploitation des établissements chargés d'organiser les stages de sensibilisation à la sécurité routière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picque, première conseillère, - et les conclusions de M. Michel, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Le 3 juillet 2018, Mme B... a demandé au préfet de l'Aube de lui délivrer un agrément l'autorisant à exploiter un établissement chargé d'animer des stages de sensibilisation à la sécurité routière sous l'enseigne " Stage point permis France " (SPPF). Par une décision du 23 juillet 2018, cette demande a été rejetée au motif que Mme B... avait fait l'objet, le 28 juillet 2016 d'une décision de retrait d'agrément pour l'exploitation d'un établissement organisant des stages de sensibilisation à la sécurité routière dans le département de la Haute-Marne. Mme B... fait appel jugement n° 1802513 du 4 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et de la décision du 3 octobre 2018 rejetant son recours gracieux. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 213-1 du code de la route : " L'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière ainsi que l'animation des stages de sensibilisation à la sécurité routière mentionnés à l'article L. 223-6 ne peuvent être organisés que dans le cadre d'un établissement dont l'exploitation est subordonnée à un agrément délivré par l'autorité administrative ". 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 213-1 du code de la route : " Les agréments visés à l'article L. 213-1 sont délivrés pour une durée de cinq ans par le préfet du lieu d'implantation de l'établissement (...) ". Selon I de l'article 3 de l'arrêté du 26 juin 2012 fixant les conditions d'exploitation des établissements chargés d'organiser les stages de sensibilisation à la sécurité routière : " Le préfet accuse réception du dossier du demandeur dans un délai d'un mois et l'informe, le cas échéant, de tout document manquant. Il complète le dossier avec l'extrait du casier judiciaire n° 2 du demandeur afin de vérifier que ce dernier n'a fait l'objet d'aucune des condamnations mentionnées aux articles L. 213-3 et R. 212-4 du code de la route ". Selon le II du même article : " Le préfet peut faire procéder aux enquêtes nécessaires pour vérifier la conformité du ou des locaux et des moyens de l'établissement à la réglementation ". 4. Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le préfet accuse réception du dossier du demandeur et refuse concomitamment la délivrance de l'agrément dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande alors même que celle-ci est complète. En l'espèce, le préfet, pour accuser réception et refuser, par la décision du 23 juillet 2018, l'agrément sollicité par la requérante le 3 juillet 2018, ne s'est pas fondé sur le caractère incomplet du dossier mais sur le fait qu'elle avait fait l'objet, le 28 juillet 2016 d'une décision de retrait d'agrément. Il pouvait par ailleurs, eu égard au motif du refus, prendre la décision contestée sans faire procéder aux enquêtes prévues par les dispositions précitées. Par suite, les moyens selon lesquels le préfet ne pouvait accuser réception et refuser la demande concomitamment et sans enquête préalable doivent être écartés. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 213-2 du code de la route : " II.- Pour les personnes assurant l'exploitation effective d'au moins un établissement organisant des stages de sensibilisation à la sécurité routière mentionnés aux articles L. 223-6 et R. 223-5 (...) l'agrément prévu à l'article L. 213-1 est délivré si celles-ci remplissent les conditions suivantes : 1° Ne pas avoir fait l'objet d'une condamnation prononcée par une juridiction française ou par une juridiction étrangère à une peine criminelle ou à une peine correctionnelle pour l'une des infractions prévues à l'article R. 212-4 ; 2° Justifier d'une formation initiale à la gestion technique et administrative d'un établissement agréé pour l'animation des stages de sensibilisation à la sécurité routière ; 3° Être âgé d'au moins vingt-cinq ans ; 4° Ne pas avoir fait l'objet dans les trois années précédentes d'un retrait de l'agrément prévu aux articles L. 213-1 et R. 213-1 en raison d'un manquement aux règles régissant l'exercice de l'activité d'exploitant d'un établissement mentionné à l'article L. 213-1. Cette condition s'applique à toute demande présentée sur le territoire national. A cette fin, ce retrait est inscrit dans le registre national mentionné à l'article R. 213-1. Il n'a pas pour effet de mettre fin aux autres agréments dont l'intéressé serait titulaire à la date de ce retrait ;5° Justifier des garanties minimales concernant les moyens de formation de l'établissement. Ces garanties concernent les locaux, les moyens matériels, les modalités d'organisation de la formation et, le cas échéant, les véhicules ; 6° Justifier de la qualification des personnels animateurs qui doivent être titulaires de l'autorisation mentionnée au II de l'article R. 212-2 ". Selon le III de l'article 3 de l'arrêté du 26 juin 2012 précédemment mentionné : " Le préfet délivre l'agrément pour une durée de cinq ans lorsque toutes les conditions sont remplies ". 6. Il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de délivrer l'agrément prévu à l'article L. 213-1 du code de la route pour l'animation de stage de sensibilisation à la sécurité routière que lorsque le demandeur remplit l'ensemble des conditions mentionnées au II de l'article L. 213-2 du même code. Par suite, contrairement à ce que soutient Mme B..., la seule circonstance qu'elle n'avait fait l'objet d'aucune des condamnations mentionnées aux articles L. 213-3 et R. 212-4 du code de la route ne plaçait pas l'autorité préfectorale en situation de compétence liée pour délivrer l'agrément sollicité. 7. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 28 juillet 2016, le préfet de la Haute-Marne a abrogé l'arrêté du 7 janvier 2016 par lequel il avait délivré à Mme B... un agrément l'autorisant à exploiter, dans le département, un établissement chargé d'animer des stages de sensibilisation à la sécurité routière, sous la dénomination " RPPC ". Par conséquent, le préfet de l'Aube pouvait légalement, en application des dispositions du 4° du II de l'article L. 213-2 du code de la route, dans leur rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée, à laquelle s'apprécie sa légalité, refuser de délivrer l'agrément sollicité par Mme B... pour l'exploitation d'un établissement chargé d'animer des stages de sensibilisation à la sécurité routière dans son département. La circonstance que l'abrogation de l'agrément qui a fondé le refus en litige soit antérieure à la législation, fondement de la décision attaquée, est à cet égard sans incidence sur sa légalité. 8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Sur les frais liés à l'instance : 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E: Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... épouse B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Aube. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022 laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Grossrieder, présidente assesseure, - Mme Picque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2022. La rapporteure, Signé : A.-S. PicqueLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso. 2 N° 20NC00875
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... C..., en qualité de représentante légale de l'enfant B... D..., a demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner la commune d'Offemont à l'indemniser des préjudices causés par la chute de sa fille sur le domaine public le 23 avril 2017, en ordonnant, avant-dire droit, une expertise de nature à déterminer l'étendue et le montant des préjudices subis ou, à titre subsidiaire, en fixant l'indemnité due à la somme de 10 000 euros. Mise en cause, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône a également demandé la condamnation de la commune au remboursement des prestations qu'elle a versées du fait de cet accident. Par un jugement n° 1802121 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté les demandes de Mme C... et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 19 mars 2020, Mme A... C..., en qualité de représentante légale de B... D..., représentée par Me Besançon, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 28 janvier 2020 ; 2°) de faire droit à sa demande de condamnation ; 3°) de mettre à la charge de la commune d'Offremont le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la chute de sa fille B... a été provoquée par l'absence de joint entre des pavés défectueux, créant des trous de plusieurs centimètres de profondeur, avec des différences de niveaux, excédants les risques auxquels doivent normalement s'attendre les usagers de la voie publique ; - la responsabilité de la commune d'Offemont est engagée dès lors que celle-ci ne rapporte pas la preuve d'un entretien normal de l'ouvrage public ; - la commune d'Offemont ne saurait se fonder sur la faute de la victime ou d'un tiers à l'accident pour s'exonérer de sa responsabilité ; - sa fille B... a été victime d'une fracture de la base métatarsienne du 5e rayon droit du pied ; - compte tenu de la nature des lésions, et de l'âge de l'enfant, il conviendra d'ordonner une mesure d'expertise médicale ; - subsidiairement, il y aura lieu de fixer à 10 000 euros l'indemnité due en raison des souffrances endurées et de la gêne occasionnelle subie. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2021, la commune d'Offremont, représentée par la SCP Lorach avocats associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'excavation dans laquelle l'enfant a chuté était de faible profondeur et parfaitement visible ; - la défectuosité de la voie n'excède pas les risques ordinaires contre lesquels doivent se prémunir les usagers des voies publiques ; - la faute de la victime est la cause exclusive du dommage. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picque, première conseillère, - et les conclusions de M. Michel, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Le 23 avril 2017, la jeune B... D... est tombée sur le parvis devant chez elle, sur le territoire de la commune d'Offremont. L'enfant, ressentant des douleurs au pied droit, a été transportée à l'hôpital. Des examens médicaux ont permis de diagnostiquer un léger arrachement de la base du cinquième métatarse du pied droit, qui a été immobilisé dans une attelle plâtrée. Mme C..., mère et représentante légale de B..., a demandé la condamnation de la commune à l'indemniser des préjudices qui ont résulté de cette chute. La caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône a également sollicité la condamnation de la commune au remboursement des prestations versées du fait de cet accident. Mme C..., en qualité de représentante légale de la victime, fait appel du jugement n° 1802121 du 28 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande indemnitaire. Sur la responsabilité de la commune d'Offremont : 2. Pour obtenir réparation, par le maître de l'ouvrage, des dommages qu'ils ont subis à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public, les usagers doivent démontrer devant le juge administratif, d'une part, la réalité de leur préjudice et, d'autre part, l'existence d'un lien de causalité direct entre l'ouvrage et le dommage. Pour s'exonérer de la responsabilité qui pèse ainsi sur lui, il incombe au maître de l'ouvrage d'établir soit que l'ouvrage était en état d'entretien normal, soit que le dommage est imputable à une faute de la victime ou à un cas de force majeure. 3. Il résulte de l'instruction que, le 23 avril 2017 vers 15 heures, alors qu'elle était accompagnée de sa mère, la jeune B... D..., âgée d'une dizaine d'années, a chuté sur le trottoir devant son domicile, rue Jean Debrot à Offremont. Il ressort des photographies versées au dossier que le revêtement du trottoir était composé de pavés non joints et que les écarts de niveaux entre ceux-ci et le sol étaient inégaux. Toutefois, lorsque l'accident est intervenu, en plein jour, ces pavés étaient visibles de la victime, qui connaissait parfaitement les lieux compte tenu de leur proximité directe avec son domicile. De plus, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment pas de la seule circonstance que des travaux aient ensuite été réalisés par la commune pour combler les écarts de niveaux, que le revêtement du sol présentait, du fait de ce pavage irrégulier, des risques excédants ceux que les usagers de la voie publique doivent s'attendre à rencontrer. Dans ces conditions, le dommage subi par la jeune B... ne peut être regardé comme étant imputable à un défaut d'entretien normal de la voie publique. La requérante n'est par suite pas fondée à rechercher la responsabilité de la commune. 4. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande indemnitaire. Sur les frais d'instance : 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune d'Offremont, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la requérante demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme C... le versement d'une somme de 1 000 euros à verser à l'intimée, sur le fondement des mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Mme C... versera à la commune d'Offemont la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., à la commune d'Offemont, et à la caisse primaire d'assurance-maladie de la Haute-Saône. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Grossrieder, présidente assesseure, - Mme Picque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2022 La rapporteure, Signé : A.-S. PicqueLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet du Territoire de Belfort en ce qui concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso. 2 N° 20NC00734
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... et Mme D... A... ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 12 janvier 2021 par lesquels le préfet des Vosges a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et leur a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un jugement[GG1] n° 2100430 et 2100431 du 20 avril 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande. Procédures devant la cour : I. Par une requête enregistrée le 13 décembre 2021 sous le n° 21NC03250, M. A..., représenté par Me Gehin, demande à la cour : 1°) d'annuler, en ce qui le concerne, le jugement du tribunal administratif de Nancy du 20 avril 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Vosges du 12 janvier 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet des Vosges à titre principal de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire de réexaminer sa demande de titre de séjour et de lui délivrer, durant cette attente, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard dans un délai de 48 heures suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : En ce qui concerne la décision refusant le titre de séjour : - le préfet a entaché sa décision d'une erreur de qualification juridique des faits et d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de faire application des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ; - le préfet a entaché sa décision d'une erreur de fait, d'une erreur de qualification juridique des faits et d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de faire application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi qu'au regard des lignes directrices de la circulaire dite " Valls " du 28 novembre 2012, désormais invocable car publiée ; - la décision méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - la décision doit être annulée par voie d'exception en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur de qualification juridique des faits ; En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi : - la décision doit être annulée par voie d'exception en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français : - la décision doit être annulée par voie d'exception en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - la décision est entachée d'une erreur de droit ; - la décision est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de sa situation personnelle et de ses attaches sur le territoire français ; elle est disproportionnée au regard de ses attaches en France. II. Par une requête enregistrée le 13 décembre 2021, sous le n° 21NC03251, Mme A..., représentée par Me Gehin, demande à la cour : 1°) d'annuler, en ce qui la concerne, le jugement du tribunal administratif de Nancy du 20 avril 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Vosges du 12 janvier 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet des Vosges à titre principal de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire de réexaminer sa demande de titre de séjour et de lui délivrer, durant cette attente, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard dans un délai de 48 heures suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient les mêmes moyens que ceux de son époux dans la requête n° 21NC03250. Par un mémoire en défense commun, enregistré le 2 mai 2022, le préfet des Vosges conclut au rejet des requêtes. Il soutient que : - à titre principal, les requêtes sont irrecevables : M. et Mme A... ne démontrent pas avoir introduit leurs recours dans le délai d'appel de 30 jours à compter de la notification de la décision leur accordant l'aide juridictionnelle ; - à titre subsidiaire, aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé. M. et Mme A... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 novembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale des droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, - les observations de Me Géhin, représentant M. et Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. M. et Mme A..., ressortissants monténégrins, nés respectivement les 4 septembre 1989 et 18 juin 1993, sont entrés irrégulièrement en France le 11 août 2013 afin d'y solliciter l'asile. Leurs demandes ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 10 février 2014, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 17 février 2014. Par des arrêtés du 22 avril 2014, le préfet des Vosges a refusé à M. et Mme A... la délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés. Les requêtes des intéressés présentées contre ces arrêtés ont été rejetées par un jugement du tribunal administratif de Nancy du 30 octobre 2014, qui a été confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 17 février 2015. Par des arrêtés du 20 mai 2016, le préfet des Vosges leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, sollicité en raison de l'état de santé de M. A..., leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Les recours contentieux des intéressés contre ces arrêtés ont également été rejetés par le tribunal administratif de Nancy par un jugement du 24 janvier 2017. Les requérants ont alors présenté une nouvelle demande de titre de séjour. Cette demande a également fait l'objet d'un refus par des arrêtés du 16 février 2018, aux termes desquels le préfet les a, en outre, obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel ils pourront être renvoyés et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Le tribunal administratif de Nancy, par un jugement en date du 22 août 2018, a rejeté les requêtes dirigées contre ces arrêtés et la cour administrative d'appel de Nancy a confirmé ce jugement par une ordonnance du 21 février 2019. Le 31 juillet 2019, M. et Mme A... ont sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 12 août 2019, le préfet des Vosges a refusé d'examiner leur demande de titre de séjour et par un jugement du 15 septembre 2020 le tribunal administratif a annulé ce refus et a enjoint au préfet des Vosges d'enregistrer leur demande de titre de séjour. Le 7 octobre 2020, ils ont sollicité un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-10 et L. 313-14, ainsi que sur celles du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par des décisions du 12 janvier 2021, le préfet des Vosges a à nouveau refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et leur a fait interdiction de retourner sur le territoire français pendant une durée de deux ans. Par deux requêtes enregistrées sous les nos 21NC03250 et 21NC03251, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 20 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés. Sur les décisions portant refus de titre de séjour : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". 3. Il ressort des pièces des dossiers que M. et Mme A... sont entrés irrégulièrement en France le 11 août 2013. S'ils se prévalent de la présence en France d'oncles, tantes et cousins, les requérants n'établissent ni l'intensité de leurs relations familiales en France, ni être dépourvus de toutes attaches familiales dans leur pays d'origine où ils ont vécu respectivement jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans et vingt ans. Par ailleurs, si leur fille ainée, née le 31 janvier 2014, était scolarisée en cours élémentaire au titre de l'année scolaire 2020-2021, rien ne s'oppose, compte tenu en particulier du jeune âge de cette enfant, à ce qu'elle poursuive sa scolarité dans leur pays d'origine. Enfin, s'ils produisent des attestations de bonne intégration au sein de la société française, notamment une émanant du maire de Golbey et des promesses d'embauche au sein de la même société, Monsieur en qualité de plaquiste-enduiseur et Madame en qualité d'agent d'entretien, ces circonstances ne sont pas suffisantes pour établir que les requérants ont déplacé le centre de leurs intérêts en France. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier des conditions du séjour des requérants en France, qui se maintiennent sur le territoire malgré les mesures d'éloignement prises à leur encontre, les décisions attaquées portant refus de titre de séjour n'ont pas porté au droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne saurait être accueilli. Pour les mêmes motifs, les décisions ne sont pas entachées d'un défaut d'examen sérieux de leur situation. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ". 5. En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, telle que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour. 6. D'une part, il ne ressort ni des pièces des dossiers, ni des termes des arrêtés attaqués que le préfet se serait abstenu de procéder à un examen de la situation de chacun des requérants en ce qui concerne leur droit à un titre de séjour, au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 7. D'autre part, il ne ressort pas des pièces des dossiers que les requérants justifieraient de motifs humanitaires ou exceptionnels tant au regard de leur vie privée et familiale que professionnelle. Par ailleurs, si M. A... se prévaut d'une promesse d'embauche pour un contrat à durée indéterminée en qualité de plaquiste-enduiseur, il ne fait état d'aucun élément permettant d'apprécier ses qualifications, son expérience et les diplômes qu'il possède pour occuper ce poste. Si Mme A... fait valoir une promesse d'embauche en qualité d'agent d'entretien à temps partiel établie par la même entreprise, elle n'établit pas le caractère sérieux de cette proposition, laquelle ne précise au demeurant pas la quotité horaire pour laquelle elle serait embauchée. Par suite, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que le préfet des Vosges aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige. 8. Enfin, les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui est dépourvue de caractère réglementaire, constituent seulement des orientations générales adressées par le ministre aux préfets pour les éclairer dans la mise en œuvre de leur pouvoir de régularisation, ces autorités administratives disposant d'un pouvoir d'appréciation pour prendre une mesure au bénéfice de laquelle la personne intéressée ne peut faire valoir aucun droit. Cette circulaire, qui ne prévoit pas la délivrance de plein droit d'un titre de séjour à l'étranger qui totaliserait les durées de résidence et d'emploi qu'elle indique, ne comporte ainsi pas de lignes directrices dont les intéressés pourraient utilement se prévaloir devant le juge et ne comporte pas davantage une interprétation du droit positif ou d'une règle qu'ils pourraient invoquer sur le fondement des articles L. 312-2 et L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration. Dès lors, les requérants ne sauraient utilement se prévaloir des critères de régularisation figurant dans la circulaire du 28 novembre 2012. 9. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. 10. Les décisions litigieuses n'ont ni pour objet, ni pour effet, de séparer les enfants de leurs parents, et il n'est pas établi que les filles des requérants, en particulier l'aînée qui était âgée de sept ans à la date des décisions attaquées, ne pourraient pas poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à demander l'annulation des décisions qui leur ont refusé un titre de séjour. Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français : 12. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. et Mme A... ne sont pas fondés à invoquer, par la voie de l'exception, le moyen tiré de l'illégalité des refus de titre de séjour à l'encontre des décisions leur faisant obligation de quitter le territoire français. 13. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". 14. Compte tenu de ce qui a été dit au point 3, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté. 15. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation des décisions leur faisant obligation de quitter le territoire français. Sur les décisions fixant le pays de destination : 16. Compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré de l'exception d'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté. 17. Il en résulte que M. et Mme A... ne sont pas fondés à demander l'annulation des décisions fixant le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être éloignés d'office à l'expiration du délai de départ volontaire. Sur les décisions d'interdiction de retour sur le territoire français : 18. En premier lieu, faute pour M. et Mme A... d'avoir démontré l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligations de quitter le territoire français, les moyens tirés de cette illégalité, invoqués par voie d'exception, à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français doivent être écartés. 19. En second lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ". 20. Alors que les intéressés ont déjà fait l'objet de trois mesures d'éloignement, qu'ils n'ont pas exécutées, et qu'ils ne justifient pas des relations intenses qu'ils entretiendraient avec leurs oncles, tantes et cousines présents sur le territoire français, il ne ressort pas des pièces des dossiers que le préfet aurait commis une erreur de droit ou une erreur d'appréciation au regard de la situation personnelle des intéressés en prononçant à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, ni que celles-ci seraient disproportionnées dans[BN2] leur durée. 21. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté chacune de leur demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter également les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. D E C I D E : Article 1 : Les requêtes de M. et Mme A... sont rejetées. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à Mme D... C... épouse A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet des Vosges. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente de chambre, - Mme Grossrieder, présidente assesseur, - Mme Roussaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2022. La rapporteure, Signé : S. RoussauxLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière : N. Basso [GG1]Plutôt au pluriel non ' " Par des jugements nos°... " [BN2]Ce n'est pas " dans " ' 4 N° 21NC03250, 21NC03251
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 12 août 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour en l'obligeant à quitter le territoire dans un délai de trente jours, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois en lui délivrant, dans l'attente, un récépissé, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros au titre des frais du litige. Par un jugement n° 2004571 du 21 mai 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 21 octobre 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 28 février 2022, M. A..., représenté par Me Lucaud-Ohin, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 21 mai 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté contesté du préfet des Alpes-Maritimes ; 3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais du litige. Il soutient que : - contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il établit résider en France depuis 2009, soit depuis plus de dix ans, de sorte que le préfet aurait dû soumettre son cas à la commission du titre de séjour ; - le préfet ne l'a pas mis à même de justifier l'impossibilité d'accéder aux traitements qui lui sont nécessaires dans son pays d'origine et ne justifie pas qu'il pourrait y avoir effectivement accès, alors qu'il souffre d'une hépatite chronique pour laquelle il bénéficie en France d'un protocole de soins, valable jusqu'au 8 octobre 2023 ; - en raison de l'ancienneté de son séjour, il a nécessairement tissé des liens personnels intenses et stables en France ; l'arrêté contesté a donc été pris en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ; - l'arrêté contesté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation. La requête a été communiquée le 28 décembre 2021 au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 septembre 2021. Par ordonnance du 22 avril 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 mai 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant mauritanien, relève appel du jugement du 21 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 août 2020 lui refusant un titre de séjour en l'obligeant à quitter le territoire dans un délai de trente jours. 2. Comme l'a exactement retenu le tribunal, les documents produits ne permettent pas d'établir que M. A... a résidé de manière habituelle en France au cours des dix années précédant la décision contestée du préfet, notamment en ce qui concerne l'année 2015, pour laquelle ne sont produits que quelques documents, certains en plusieurs exemplaires, relatifs à un emploi occupé au cours de la journée du 17 juillet 2015 et à des engagements pour la journée du 18 juillet 2015 ainsi que pour la période du 7 au 10 août 2015 dont au demeurant il n'est pas justifié qu'ils aient été suivis d'effet, l'année 2016, pour laquelle n'est produit qu'un seul bulletin de paie du mois de novembre et l'année 2019 pour laquelle n'est produit qu'un avis d'impôt sur les revenus établi le 12 juillet 2020 faisant état de la perception de " Pensions, retraites, rentes " d'un montant de 966 euros non imposable. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont, par des motifs qu'il y a lieu d'adopter, écarté le moyen tiré de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, les témoignages, pour l'un, rédigé postérieurement au refus de séjour contesté pour les besoins de la cause et, pour l'autre, non daté, ne permettant pas, eu égard à leur imprécision, d'établir la présence de l'intéressé au cours des années 2015, 2016 et 2019. 3 En se bornant à soutenir que le préfet ne l'a pas mis à même de justifier de l'impossibilité de bénéficier de soins adaptés dans son pays d'origine sans contester l'avis du collège des médecins de l'OFII selon lequel son état de santé ne nécessite pas de suivi médical autrement que par l'invocation d'un protocole de soins particulièrement laconique qu'il a produit en trois exemplaires, M. A... ne critique pas utilement les motifs par lesquels les premiers juges ont, aux points 6 et 8 à 11 de leur jugement, écarté les moyens tirés de ce que cet avis ne lui avait pas été communiqué et de la violation des dispositions alors en vigueur du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 4. Enfin, en réitérant à cet égard son argumentation de première instance, M. A..., célibataire sans charge de famille qui n'établit, ni même n'allègue, être dépourvu d'attaches personnelles en Mauritanie, n'apporte, en appel, aucun élément susceptible de constituer une critique pertinente des motifs par lesquels les premiers juges ont écarté les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché l'arrêté contesté du préfet des Alpes-Maritimes. Etant précisé que les pièces produites pour la première fois devant la Cour, notamment les deux attestations de proches, le contrat de travail à durée indéterminée du 30 septembre 2021, les bulletins de salaires à compter du mois de juillet 2021 et l'attestation d'hébergement en date du 10 juin 2021, ne permettent ni de remettre en cause les motifs des premiers juges ni de démontrer une insertion significative de l'intéressé au sein de la société française alors même qu'il s'exprimerait parfaitement en français et qu'il connaitrait les règles ainsi que les valeurs de la République. 5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Il suit de là que sa requête doit, en toutes ses conclusions, être rejetée. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Lucaud-Ohin. Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient : - Mme Massé-Degois, présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Point, premier conseiller - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. 2 N° 21MA04188
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 22 octobre 2020 par lequel le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée. Par un jugement n° 2100238 du 6 mai 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 26 novembre 2021, Mme B..., représentée par Me Géhin, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 6 mai 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Vosges du 22 octobre 2020 ; 3°) d'enjoindre au préfet des Vosges, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour et à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier car les premiers juges ont procédé à une substitution de base légale de manière irrégulière : - cette substitution de base légale n'était pas justifiée ; - celle-ci démontre que le préfet des Vosges n'a pas examiné sa demande de titre de séjour ; - celle-ci l'a privée d'une garantie, à savoir l'examen des pièces et éléments produits à l'appui de sa demande de titre de séjour. En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour : - le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ; En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - la décision sera annulée en conséquence de l'annulation du refus de délivrance d'un titre de séjour ; - la décision est entachée d'une erreur de droit : . les dispositions du 2° de de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui étaient pas applicables car elle a sollicité un titre de séjour par courrier reçu par les services préfectoraux le 30 septembre 2020 ; . une telle mesure ne pouvait être prise à son encontre sans que la préfecture ait préalablement examiné sa demande de titre de séjour ; - le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et il a commis une erreur manifeste d'appréciation. Le préfet des Vosges, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense. Par une ordonnance du 8 avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2022 à 12h00. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, - les observations de Me Géhin, représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ressortissante arménienne[GG1] née le 1er janvier 2000, est entrée en France le 2 septembre 2014, alors qu'elle était mineure, accompagnée de ses parents et de son frère. Elle s'est maintenue irrégulièrement en France après sa majorité et le préfet des Vosges a mis en œuvre une procédure contradictoire avant de prendre éventuellement à son encontre une décision d'éloignement. La requérante a alors répondu au préfet par un courrier du 27 septembre 2020, reçu en préfecture le 30 septembre 2020. Par un arrêté du 22 octobre 2020, le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite. Mme B... relève appel du jugement du 6 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 22 octobre 2020. Sur la régularité du jugement : 2. Le moyen tiré de ce que le tribunal aurait à tort substitué un motif à un autre relève non de la régularité mais du bien-fondé du jugement. Sur la légalité de la décision de l'arrêté préfectoral du 22 octobre 2020 du préfet des Vosges : En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour : 3. Il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet des Vosges, après avoir rappelé le parcours de l'intéressée et sa situation personnelle et familiale et notamment la circonstance que ses parents et son frère font également l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'elle est sans ressource et qu'elle n'atteste pas être dépourvue de tous liens familiaux dans son pays d'origine, a considéré qu'il n'y avait pas lieu de procéder à sa régularisation et de lui délivrer un titre de séjour. Ainsi, il ne ressort pas des termes de la décision contestée que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme B.... En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : 4. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de séjour ne peut qu'être écarté. 5. En deuxième lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). ". 6. Il résulte de ces dispositions que si la demande d'un étranger qui a régulièrement sollicité un titre de séjour ou son renouvellement a été rejetée, la décision portant obligation de quitter le territoire français susceptible d'intervenir à son encontre doit nécessairement être regardée comme fondée sur un refus de titre de séjour, donc sur la base légale prévue au 3° du I de cet article. Il en va ainsi tant lorsque la décision relative au séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire interviennent de façon concomitante que, en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires prévoyant qu'une décision relative au séjour devrait être regardée comme caduque au-delà d'un certain délai après son intervention, lorsqu'une décision portant obligation de quitter le territoire intervient postérieurement à la décision relative au séjour, y compris lorsqu'une nouvelle décision portant obligation de quitter le territoire intervient à l'égard d'un étranger qui s'est maintenu sur le territoire malgré l'intervention antérieure d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire. 7. Par ailleurs, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point. 8. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le préfet a invité la requérante à présenter ses observations sur la mesure d'éloignement qu'il s'apprêtait à prendre à son encontre. Par un courrier du 27 septembre 2020, Mme B... a fait valoir ses observations. Cette lettre a été interprétée par le préfet des Vosges comme une demande de titre de séjour qu'il a refusée par l'arrêté en litige qui porte à la fois refus de titre de séjour et mesure d'éloignement. Aussi, si, au regard de cette décision de refus de titre de séjour, le préfet des Vosges ne pouvait pas légalement faire application des dispositions du 2° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prendre une mesure d'éloignement à son encontre, il est possible, comme l'ont fait à juste titre les premiers juges, de substituer à ce motif les dispositions du 3° du I de cet article dès lors que cette substitution de fondement n'a pour effet de priver l'intéressée d'aucune garantie et que le préfet disposait du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions. 9. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée est entachée d'erreur de droit, ni qu'une telle mesure d'éloignement ne pouvait pas être prise à son encontre sans que la préfecture ait préalablement examiné sa demande de titre de séjour, laquelle a fait l'objet d'un examen comme il vient d'être dit. 10. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". 11. Mme B... est entrée en France le 2 septembre 2014, alors qu'elle était mineure, accompagnée de ses parents. Elle se prévaut de la durée de sa présence en France, de sa pratique de la langue française ainsi que de son inscription dans une formation au lycée Pierre Mendès France à Epinal dans le cadre d'un dispositif d'aide à l'insertion professionnelle. Toutefois, cette formation n'a pas de vocation diplômante et la requérante n'établit pas qu'elle serait dépourvue de toute attache dans son pays d'origine, ni qu'elle aurait tissé des liens intenses, anciens et stables en France et ce alors que ses parents et son frère y séjournent irrégulièrement et ont également fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Dans ces conditions, au regard des conditions de séjour de l'intéressée, qui s'est maintenue sur le territoire irrégulièrement, le préfet des Vosges n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi par la décision attaquée. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent donc être écartés. 12. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 octobre 2020 du préfet des Vosges. Ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet des Vosges. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Grossrieder, présidente asseseure, - Mme Roussaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 juin 2022. La rapporteure, Signé : S. RoussauxLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso [GG1]Et nationalité ukrainienne (précisé dans la requête, sans preuve) 2 N° 21NC03061
JADE/CETATEXT000045945183.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... et Mme D... A... née C..., son épouse, ont demandé au tribunal administratif de Rouen, par deux demandes successives, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 à 2013. Par un jugement nos 1704014, 1703568 du 14 janvier 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ces demandes. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 23 mars 2020, M. et Mme A..., représentés par la société d'avocats KPMG, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions et prélèvements sociaux en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - les mentions de l'avis de vérification adressé le 25 mai 2016 à Mme A... révèlent que, à la date à laquelle elle a établi ce document, l'administration disposait de suffisamment d'éléments d'information pour regarder les revenus perçus par l'intéressée des détournements de fonds qui lui ont été imputés comme ayant la nature de bénéfices non commerciaux, pour se prévaloir du délai de reprise spécial applicable aux activités occultes prévu aux articles L. 169 et L. 188 C du livre des procédures fiscales et pour identifier la période concernée ; or, ces renseignements n'ont pu être obtenus de l'administration qu'à partir d'un examen des pièces de la procédure pénale transmise et notamment de pièces comptables, avant même l'envoi de l'avis de vérification ; ce début anticipé de la vérification de comptabilité constitue une irrégularité substantielle qui entache la procédure d'imposition mise en œuvre à leur égard et qui justifie la décharge des suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux en litige ; - si la cour estimait que l'administration n'a pas anticipé les opérations de contrôle, elle devrait alors retenir que l'administration disposait d'autres éléments d'information que ceux auxquels elle s'est référée ensuite au cours de la procédure d'imposition ; or, l'administration ne les a pas informés de la teneur, ni de l'origine des renseignements et documents ainsi obtenus par le service et qui lui ont permis, dès le 25 mai 2016, d'en tirer ces conclusions, ni ne leur a communiqué, en dépit de leur demande en ce sens, ces éléments, mais seulement ceux obtenus par le service le 27 juin 2016, un mois après l'envoi de l'avis de vérification ; ces manquements, qui constituent des méconnaissances des obligations posées par l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, ont aussi une nature substantielle et sont également de nature à justifier la décharge des suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux en litige ; la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-CF-PGR-30-10, en son paragraphe n° 210, conforte leur position sur ce point ; la réponse apportée par le tribunal administratif pour écarter ce moyen, ainsi d'ailleurs que le précédent, est erronée ; - l'administration n'a pu régulièrement établir d'office, sans mise en demeure préalable, les suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux en litige, dès lors qu'elle n'a pas démontré, comme la charge lui en incombait dès l'établissement de la proposition de rectification, que Mme A... aurait exercé une activité occulte, aucune obligation de porter à connaissance ou de déclaration ne pouvant lui être opposée au titre de l'exercice de cette activité et celle-ci n'ayant été qualifiée d'illicite par le juge pénal que pour la période courant du 7 octobre 2010 au 7 octobre 2013 ; - les suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux en litige sont atteints par la prescription, l'administration ne pouvant se prévaloir du délai de reprise spécial prévu aux articles L. 169 et L. 188 C du livre des procédures fiscales, dès lors, d'une part, que Mme A... ne peut être regardée comme ayant exercé une activité occulte et, d'autre part, que les faits reprochés à l'intéressée ont été révélés à l'administration par l'enquête préliminaire et non par une instance devant un tribunal répressif ; la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-CF-PGR-10-70, en ses paragraphes n° 60, n° 80 et n° 90, conforte leur position sur ce point ; - l'administration n'a pas rapporté la preuve, qui lui incombe, de l'appréhension, par Mme A..., des sommes regardées comme des bénéfices non commerciaux, les dates d'émission des chèques, reprises dans le tableau joint à la proposition de rectification, ne concordant pas nécessairement avec celle de leur encaissement ; - les rehaussements de leurs bases imposables qui leur ont été notifiés n'ont pu légalement être soumis à des prélèvements sociaux sur le fondement des articles 1600-0 C et suivants du code général des impôts, dont les dispositions ne peuvent être appliquées qu'aux revenus du patrimoine, tels que définis à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale ; - la majoration de 80% prévue, en cas de découverte d'une activité occulte, par le c. du 1 de l'article 1728 du code général des impôts, a été appliquée à tort par l'administration, dans une situation dans laquelle Mme A... ne peut être regardée comme ayant exercé, à titre habituel, une activité professionnelle soumise à une obligation d'immatriculation ou de déclaration, le caractère licite ou non de cette activité étant sans incidence pour l'application de cette disposition. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que, en ce qui concerne les années 2010 à 2012, la majoration de 10 % prévue au a. du 1 de l'article 1728 du code général des impôts et, en ce qui concerne l'année 2013, la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A de ce code, soient substituées à la majoration de 80 % prévue au c. du 1 de l'article 1728 du même code, dont l'administration a fait application. Il soutient que : - à supposer même que le service ait eu connaissance, avant l'envoi de l'avis de vérification, de l'ensemble des documents obtenus de l'autorité judiciaire, sur le fondement des articles L. 80 C et L. 101 du livre des procédures fiscales, ce qui est contesté, les appelants ne seraient pas fondés à soutenir que la vérification de comptabilité aurait débuté de façon anticipée, dès lors que les documents ainsi obtenus ne comportaient aucun extrait d'une comptabilité qui aurait été tenue par Mme A... ; - Mme A... ayant été informée de la teneur et de l'origine de ces documents et ceux-ci lui ayant été communiqués à sa demande, les exigences posées par l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales n'ont pas été méconnues ; - il est établi que Mme A... s'est livrée, au cours des années d'imposition en litige, à l'exercice habituel d'une activité illicite, qui a d'ailleurs justifié sa condamnation par le juge pénal ; en outre, eu égard au niveau des recettes tirées de cette activité, celle-ci relevait du régime micro, tel que prévu par le 1 de l'article 102 ter du code général des impôts et aurait dû faire l'objet, en vertu du 2 du même article, de déclarations annuelles ; or, il n'est pas soutenu que Mme A... aurait souscrit une quelconque déclaration à ce titre ; dès lors, elle doit être regardée comme s'étant livré à une activité occulte, au sens de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ; les revenus tirés de cette activité ont, dès lors, pu à bon droit être taxés d'office sur le fondement du 2° bis de l'article L. 73 de ce livre, sans qu'il ait été nécessaire d'adresser préalablement une mise en demeure à Mme A..., ainsi que l'autorise, dans une telle hypothèse, le 3° de l'article L. 68 du même livre ; - la proposition de rectification adressée à Mme A... est suffisamment motivée au regard de l'exigence posée à l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ; - dès lors que Mme A... a exercé, au sens de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, une activité occulte au cours des années d'imposition en litige, l'administration était fondée à se prévaloir du délai de reprise de dix années prévu par ce même article ; au surplus, l'administration était tout autant fondée, au égard à la procédure pénale dont Mme A... a fait l'objet à ce titre, à se prévaloir des dispositions de l'article L. 188 C du même livre, qui accordent à l'administration, en cas d'instance pénale, un délai de reprise de même durée ; - dès lors que Mme A... a été à bon droit taxée d'office à raison des revenus de son activité occulte, les appelants supportent la charge de la preuve, en application des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales ; - si M. et Mme A... soutiennent que la date d'émission des chèques retenus par le service pour évaluer les recettes de l'activité occulte exercée par Mme A... ne correspond pas nécessairement à celle à laquelle ces chèques ont été remis à l'encaissement, il leur appartient, dès lors qu'ils supportent la charge de la preuve, de justifier de la date d'encaissement de ces chèques ; en tout état de cause, il résulte des principes généraux régissant l'impôt sur le revenu et notamment de ceux énoncés à l'article 12 du code général des impôts, applicables en matière de bénéfices non commerciaux prévus à l'article 93 du code général des impôts, que l'impôt est dû à raison des sommes mises à la disposition du contribuable et qu'en cas de paiement par chèque, la mise à disposition de la somme correspondante intervient à la date de remise du chèque ; le service n'a ainsi commis aucune erreur d'année d'imposition en tenant compte de la date d'émission des chèques en cause ; - en vertu du f du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, sont soumis aux contributions sociales, dans les mêmes conditions que les revenus du patrimoine, les revenus non commerciaux qui n'ont pas supporté ces contributions au titre des revenus d'activité ; or, les revenus tirés de l'activité occulte de Mme A..., qui n'est pas une activité professionnelle, n'ont pas été soumis aux contributions sociales au titre des revenus d'activité ; dès lors, ils ont pu à bon droit être soumis aux contributions sociales sur les revenus du patrimoine ; - dès lors qu'il est établi que Mme A... a perçu, sans les porter sur ses déclarations de revenus, des fonds qu'elle a détournés, de sorte que son activité, par nature illicite, doit être regardée comme occulte, l'administration était fondée à lui appliquer la majoration de 80 % prévue, en cas de découverte d'une activité occulte, par le c. du 1 de l'article 1728 du code général des impôts ; si la cour estimait que cette majoration n'était pas applicable, il lui appartiendrait de lui substituer, en ce qui concerne les années 2010 à 2012, la majoration de 10 % prévue au a. du 1 du même article et, en ce qui concerne l'année 2013, la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. L'administration a été informée, par l'autorité judiciaire, sur le fondement de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, du dépôt d'une plainte pénale à l'encontre de Mme D... C... épouse A..., dont l'employeur lui reprochait d'avoir perçu, au cours d'une période couvrant les années 2006 à 2013 au moins, des revenus provenant de détournements de fonds commis, à l'occasion de l'exercice de ses fonctions de responsable de la structure, qui incluaient la gestion comptable de celle-ci. Dans ces conditions, l'administration a soumis à vérification de comptabilité l'activité ainsi exercée par Mme A..., au titre de la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2015, ce dont elle a informé l'intéressée par un avis de vérification adressé le 25 mai 2016. A l'issue de ce contrôle, qui s'est tenu du 8 juin au 12 octobre 2016, l'administration a estimé que les revenus ainsi perçus de manière illicite par Mme A... résultaient de l'exercice d'une activité occulte et qu'ils avaient la nature de bénéfices non commerciaux qu'il convenait de réintégrer dans ses revenus imposables des années en cause. Elle a fait connaître cette analyse à Mme A... par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 21 octobre 2016 dans le cadre de la procédure de taxation d'office. Une autre proposition de rectification a été ensuite adressée, le 25 octobre 2016, à M. et Mme A... pour leur faire connaître les conséquences emportées, sur les revenus imposables de leur foyer fiscal, par les rehaussements notifiés à Mme A... en matière de bénéfices non commerciaux, en tenant compte d'une légère minoration des traitements et salaires déclarés par Mme A..., dont une partie correspondait à des sommes détournées. Entre-temps, à l'issue de la procédure pénale dont elle a fait l'objet, Mme A... a été condamnée, par un jugement du 24 août 2016 du tribunal correctionnel d'Evreux, à raison de faits d'escroquerie commis au préjudice de son employeur. Les observations présentées par M. et Mme A... n'ayant pas amené l'administration à reconsidérer son appréciation, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant des bases notifiées ont été mises en recouvrement, à hauteur d'un montant total, en droits et pénalités, de 92 451 euros. 2. Leurs réclamations ayant été rejetées, M. et Mme A... ont, par deux demandes successives, porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 à 2013. Ils relèvent appel du jugement du 14 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté ces demandes. Sur la régularité de la procédure d'imposition : En ce qui concerne le moyen tiré de la vérification de comptabilité anticipée : 3. Aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / (...) ". 4. Une vérification de comptabilité consiste à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par un contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont le service prend alors connaissance et dont il peut remettre en cause l'exactitude. 5. Il résulte de l'instruction que, comme il a été dit au point 1, l'administration a été informée par l'autorité judiciaire, sur le fondement de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, du dépôt d'une plainte pénale par l'employeur de Mme A..., à raison de faits d'abus de confiance et d'escroquerie, commis à son détriment au cours d'une période couvrant les années 2006 à 2013 au moins, à l'occasion de l'exercice de ses fonctions. L'administration a formé, auprès du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Evreux, une demande tendant à avoir accès à la procédure pénale qui serait, le cas échéant, mise en œuvre. Cependant, sans même qu'elle ait eu à attendre la réponse qui serait apportée à cette demande, les informations qui lui avaient été d'ores et déjà transmises, tenant à l'existence et à l'objet de la plainte pénale déposée à l'encontre de Mme A..., ainsi qu'à la période concernée, étaient, par elles-mêmes, suffisantes pour que le service en déduise l'exercice potentiel, par Mme A..., d'une activité habituelle, a priori illicite par nature, et justifiaient que le service décide, sans même attendre de pouvoir être autorisé à accéder aux pièces de la procédure pénale, d'engager une vérification de la comptabilité afférente à cette activité, ce dont il a informé Mme A... par l'avis de vérification qu'il lui a adressé le 25 mai 2016, sans revendiquer, à ce stade, le bénéfice d'un délai de reprise allongé. En revanche, il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que l'administration aurait, avant l'autorisation qui lui a été donnée par le procureur de la République le 27 juin 2016 de consulter les pièces de la procédure pénale diligentée à l'encontre de Mme A..., eu accès à d'autres éléments que ceux contenus dans l'information initiale qui lui avait été communiquée par l'autorité judiciaire, ni que ces éléments auraient contenu des documents ayant la nature de pièces comptables de l'activité vérifiée. Il suit de là que le moyen, au soutien duquel d'ailleurs M. et Mme A... n'apportent aucun élément, tiré de ce que la vérification de comptabilité a irrégulièrement débuté avant l'envoi de l'avis de vérification, sans lui offrir les garanties attachées par la loi à cette procédure, ne peut qu'être écarté. En ce qui concerne le moyen tiré de l'exercice irrégulier par le vérificateur de son droit de communication auprès d'un tiers : 6. En vertu de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée. Il en va autrement s'agissant des documents et renseignements qui, à la date de la demande de communication, sont directement et effectivement accessibles au contribuable dans les mêmes conditions qu'à l'administration. Dans cette dernière hypothèse, si le contribuable établit qu'il ne peut avoir effectivement accès aux mêmes documents et renseignements que ceux détenus par l'administration, celle-ci est alors tenue de les lui communiquer. 7. Ainsi qu'il a été dit au point 5, il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que l'administration aurait disposé, avant d'être autorisée, le 27 juin 2016, à prendre connaissance des pièces de la procédure pénale, de renseignements obtenus de tiers et susceptibles d'avoir fondé les suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux en litige, hormis l'information initiale, communiquée par l'autorité judiciaire, tenant à l'existence d'une plainte pénale à l'encontre de Mme A..., ainsi qu'à l'objet de cette plainte et à la période en cause. Or, il ressort des termes de la proposition de rectification adressée à cette dernière le 21 octobre 2016 que l'administration l'a informée, dans ce document, de la teneur et de l'origine des pièces de la procédure pénale auxquelles elle a eu accès et sur lesquelles elle a fondé les rehaussements notifiés, dans des termes suffisamment précis pour qu'elle puisse demander leur communication, ce qu'elle a d'ailleurs fait. Enfin, il est constant que l'administration, en réponse à cette demande, a communiqué à Mme A..., avant la mise en recouvrement des suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux en litige, ces pièces, sur lesquelles elle a fondé son raisonnement et auxquelles, au demeurant, Mme A... était susceptible d'accéder librement en tant que partie à la procédure pénale. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance, par l'administration, des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales au détriment de Mme A... doit être écarté. M. et Mme A... ne sont pas fondés à invoquer, à cet égard, les prévisions du paragraphe n°210 de la doctrine administrative publiée au bulletin officiel des finances publiques sous la référence BOI-CF-PGR-30-10, qui, s'agissant d'une question afférente à la régularité de la procédure d'imposition, ne peuvent être regardées comme comportant une interprétation formelle de la loi fiscale opposable à l'administration sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales. En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité de la taxation d'office : 8. Aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : / (...) / 2° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; / (...) / Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2°. ". En vertu de l'article L. 68 de ce livre, la procédure de taxation d'office n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure, ce même article précisant qu'il n'y a toutefois pas lieu de procéder à cette mise en demeure, notamment, en vertu du 3°, si le contribuable s'est livré à une activité occulte, au sens des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 169. Ces dernières dispositions énoncent qu'une activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable qui s'y livre n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. Enfin, en vertu de l'article 97 du code général des impôts, les contribuables exerçant une activité qui génère des bénéfices non commerciaux et qui sont soumis, obligatoirement ou sur option, au régime de la déclaration contrôlée sont tenus de souscrire chaque année, dans des conditions et délais prévus aux articles 172 et 175 de ce code, une déclaration de résultats. 9. L'administration a constaté, après avoir consulté les pièces de la procédure pénale qui lui ont été communiquées par l'autorité judiciaire, à la suite de l'autorisation donnée par le procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Evreux, que Mme A... s'était livrée, de manière habituelle, sur une période couvrant à tout le moins les années 2007 à 2013 en litige, à une activité consistant à détourner des fonds à son profit, dans le cadre de l'exercice de ses fonctions de responsable de la structure qui l'employait, lesquelles incluaient la gestion comptable de cette structure. Ces détournements ont consisté en la perception de primes indues et d'augmentations de salaire non décidées par le conseil d'administration, mais portées sur des bulletins de salaire émis au nom de l'intéressée. Des investigations conduites dans le cadre d'un audit interne par un cabinet d'expertise comptable et auxquelles les pièces de la procédure pénale consultées par l'administration font référence ont évalué les détournements de cette nature à hauteur d'une somme totale de 15 143 euros. En outre, ces investigations ont révélé que Mme A... avait également perçu des sommes en règlement de factures de fournisseurs qu'elle avait falsifiées au moyen d'un logiciel de traitement d'image, ce qui lui permettait de justifier les enregistrements comptables correspondants. Selon les conclusions de ces investigations, ces règlements sur factures falsifiées ont atteint au cours de la période couvrant les années 2006 à 2013, la somme de 152 939 euros, qui a notamment permis à Mme A... de financer plusieurs achats personnels. S'y sont ajoutés un virement frauduleux, à hauteur d'une somme de 1 138,79 euros, justifié au moyen du même procédé de falsification de factures, ainsi que des retraits en espèces pratiqués, pour un montant total de 4 500 euros, au moyen de la carte bancaire de la structure dont Mme A... avait la disposition et qu'elle a, en outre, utilisée pour effectuer des achats personnels à hauteur d'une somme totale de 2 694,14 euros. Eu égard à l'importance des montants sur lesquels ils portent et à l'ampleur de la période au cours de laquelle ils ont été perpétrés, ces détournements doivent être regardés comme s'inscrivant dans le cadre de l'exercice habituel d'une véritable activité, dont les revenus sont, par nature, assimilables aux bénéfices non commerciaux prévus aux articles 92 et suivants du code général des impôts. 10. Si, comme le relèvent M. et Mme A..., ceux-ci ont porté certaines des sommes détournées par Mme A... dans les déclarations de revenus qu'ils ont souscrites au titre des années d'imposition en litige, en particulier celles perçues par elle à titre de salaires, il est constant que Mme A... n'a souscrit aucune des déclarations que les dispositions de l'article 97 du code général des impôts imposent aux titulaires de bénéfices non commerciaux, y compris à ceux relevant du régime micro, tel que prévu par le 1 de l'article 102 ter du code général des impôts, de souscrire annuellement. En outre, l'activité alors exercée par Mme A... est, par nature, illicite au sens et pour l'application des dispositions, rappelées au point 8, de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que le juge pénal ne l'a qualifiée ainsi que pour une partie seulement de la période en cause. En effet, cette qualification, donnée au regard de la loi pénale, ne s'impose pas, par elle-même, à l'administration fiscale pour l'application de la loi fiscale. Dans ces conditions, cette activité doit être regardée comme présentant un caractère occulte au sens des dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales. Dès lors, l'administration, après avoir constaté l'absence de souscription, par Mme A..., des déclarations annuelles auxquelles elle était astreinte à raison de cette activité, ainsi que le caractère occulte de celle-ci, a pu, sans entacher d'irrégularité la procédure d'imposition ainsi mise en œuvre à l'égard de Mme A..., notifier, selon la procédure de taxation d'office, à celle-ci, sans préalablement lui adresser une mise en demeure de régulariser sa situation, les rehaussements, en matière de bénéfices non commerciaux, résultant de l'imposition entre ses mains des bénéfices de cette activité. Sur le bien-fondé des impositions en litige : En ce qui concerne le moyen tiré de la prescription : 11. En vertu de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, pour l'impôt sur le revenu, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. Cependant, cet article ajoute que, par exception, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte, dont le même article donne la définition. Selon cette définition, une activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable qui s'y livre n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. 12. Ainsi qu'il a été dit au point 10, Mme A... doit être regardée comme ayant exercé, au titre des années 2007 à 2013 en litige, une activité occulte au sens des dispositions précitées de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales. Dès lors, en matière d'impôt sur le revenu, le droit de reprise dont disposait l'administration était susceptible d'être exercé non pas jusqu'à la fin de la troisième année, mais jusqu'à la fin de la dixième année suivant celle au cours de laquelle l'imposition est devenue exigible. Par suite, le moyen tiré par M. et Mme A... de ce que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige seraient, en tout ou partie, atteintes par la prescription doit être écarté. M. et Mme A... ne sont pas fondés à invoquer, à cet égard, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations des paragraphes n° 60, n° 80 et n° 90 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012, sous la référence BOI-CF-PGR-10-70, au bulletin officiel des finances publiques, qui ne comportent pas une interprétation différente du texte fiscal de celle retenue par le présent arrêt. En ce qui concerne la charge de la preuve : 13. Ainsi qu'il a été dit au point 10, les rehaussements contestés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ont été notifiés à bon droit à Mme A... selon la procédure de rectification d'office. Il s'ensuit que M. et Mme A... supportent, en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve et qu'il leur appartient, en vertu de l'article R. 193-1 de ce livre, d'établir que les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis, présentent un caractère exagéré. En ce qui concerne le moyen tiré de l'exagération des suppléments d'impôt en litige : 14. En se bornant à faire observer que le tableau joint en annexe à la proposition de rectification adressée à Mme A... le 21 octobre 2016 et présentant un état des chèques indûment encaissés par l'intéressée, comporte la mention de la date d'émission de ces chèques, alors que celle-ci ne correspond que rarement à celle de leur encaissement, M. et Mme A..., qui n'apportent aucun élément au soutien de cette assertion, ne peuvent être regardés comme apportant la preuve qui leur incombe, ainsi qu'il a été dit au point 13. Au demeurant, dès lors que ces chèques ont été établis par Mme A... elle-même et que leur encaissement sur son compte bancaire dépendait essentiellement de sa propre volonté, l'administration était fondée à retenir, en l'absence d'élément contraire, qu'elle avait eu la disposition des sommes en cause à chacune des dates d'émission des chèques correspondants. Il suit de là que la contestation, par ce seul moyen, du bien-fondé des impositions en litige ne peut qu'être écartée. Sur le bien-fondé des prélèvements sociaux en litige : 15. En vertu du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, auquel renvoie l'article 1600-0 C du code général des impôts, les personnes physiques fiscalement domiciliées en France, au sens de l'article 4 B du code général des impôts, sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, à l'exception de ceux ayant déjà supporté la contribution, au titre de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, à raison notamment de tous revenus qui entrent dans la catégorie des bénéfices des bénéfices non commerciaux. 16. Il est constant que les bénéfices non commerciaux tirés, par Mme A..., de l'activité de détournement de fonds qu'elle a exercée, à titre habituel, au cours des années d'imposition en litige, n'ont pas été soumis à aucune contribution sociale assise sur les revenus d'activité. Ces bénéfices industriels et commerciaux ont, dès lors, pu être à bon droit soumis, contrairement à ce que soutiennent les appelants, aux prélèvements sociaux prévus par les dispositions du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, dans les conditions applicables aux revenus du patrimoine. Sur les pénalités : 17. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; / (...) / c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte. / (...) ". 18. L'administration a appliqué aux seuls suppléments d'impôt sur le revenu auxquels M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2010 à 2013 la majoration de 80 % prévue, en cas de découverte d'une activité occulte, par le c. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts. Pour justifier, comme la charge lui en incombe, l'application de cette majoration, l'administration a retenu, dans la proposition de rectification qu'elle a adressée le 21 octobre 2016 à Mme A..., que l'activité de détournement de fonds exercée à titre habituel par l'intéressée, qui n'avait pas souscrit les déclarations de résultats qui lui incombaient, était, par nature, illicite, de sorte qu'elle présentait un caractère occulte. Le ministre s'approprie cette analyse dans ses écritures d'appel. 19. Toutefois, cette analyse se réfère implicitement à la définition du caractère occulte donnée par les dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, en vertu desquelles une telle activité est réputée exercée lorsque le contribuable qui s'y livre n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. Or, ces dispositions, auxquelles celles, précitées, du 1 de l'article 1728 du code général des impôts ne renvoient aucunement, ne sauraient être légalement invoquées par l'administration pour retenir qu'un contribuable entre dans le champ d'application de la majoration de 80% prévue en cas de découverte d'une activité occulte. Ainsi, les éléments retenus par l'administration et repris par le ministre ne sont pas de nature à justifier légalement l'application de la majoration contestée. 20. Le ministre demande toutefois que soit substituée à cette majoration, en ce qui concerne les années 2010 à 2012, la majoration de 10 % prévue par les dispositions précitées du a. du 1 de l'article 1728 du code général des impôts et, en ce qui concerne l'année 2013, la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A de ce code. 21. Aux termes du I de l'article 1758 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits supplémentaires ou de la créance indue. / (...) ". 22. Il est constant que, comme le fait valoir le ministre, Mme A... n'a souscrit aucune des déclarations auxquelles elle était tenue, en application des dispositions de l'article 97 du code général des impôts, en tant qu'exploitante, à titre habituel, d'une activité génératrice de revenus imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. Elle est ainsi passible, en ce qui concerne les années 2010 à 2012, de la majoration de 10 % prévue par les dispositions, citées au point 17, du a. du 1 de l'article 1728 de ce code et, en ce qui concerne l'année 2013, de la majoration de 10 % prévue par les dispositions, citées au point précédent, de l'article 1758 A du même code. Dès lors que la substitution demandée conduit à ne priver M. et Mme A... d'aucune garantie de procédure, il y a lieu d'y faire droit. 23. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... sont seulement fondés, dans la mesure de ce qui vient d'être dit au point précédent, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs demandes. 24. Enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans le présent litige, la partie perdante pour l'essentiel, au titre des frais non compris dans les dépens exposés par M. et Mme A.... DÉCIDE : Article 1er : La majoration de 10 % prévue, en cas de défaut de déclaration des bases imposable, par les dispositions du a. du 1 de l'article 1728 du code général des impôts et la majoration de 10% prévue, en cas d'omission de déclaration, par l'article 1758 A de ce code, sont substituées, respectivement, en ce qui concerne les années 2010 à 2012 et en ce qui concerne l'année 2013, à la majoration de 80% prévue, en cas de découverte d'une activité occulte, par le c de l'article 1728 du code général des impôts, dont l'administration a fait application aux bénéfices non commerciaux perçus par Mme A... au titre des années 2010 à 2013. Article 2 : Le jugement nos 1704014, 1703568 du 14 janvier 2020 du tribunal administratif de Rouen est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A..., ainsi qu'au ministre de l'économie et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ; - Mme Dominique Bureau, première conseillère ; - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de la formation de jugement, Signé : M. E... La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Suzanne Pinto Carvalho 1 2 N°20DA00543 1 3 N°"Numéro"
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Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts ; - le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. C... A... relève appel du jugement du 10 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013. Il demande également à la Cour de condamner l'Etat à lui payer une indemnité d'un montant de 10 000 euros en réparation de ses préjudices financiers et moraux. Sur les conclusions à fin de décharge : En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition : 2. Aux termes de l'article L. 80 F du livre des procédures fiscales : " Pour rechercher les manquements aux règles de facturation auxquelles sont soumis les assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée (...) les agents des impôts ayant au moins le grade de contrôleur peuvent se faire présenter les factures, la comptabilité matière ainsi que les livres, les registres et les documents professionnels pouvant se rapporter à des opérations ayant donné ou devant donner lieu à facturation et procéder à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation. Ils peuvent également, lorsque l'authenticité de l'origine, l'intégrité du contenu et la lisibilité des factures sont assurées par les contrôles prévus au 1° du VII de l'article 289 du code général des impôts, accéder à l'ensemble des informations, documents, données, traitements informatiques ou systèmes d'information constitutifs de ces contrôles et à la documentation décrivant leurs modalités de réalisation (...). Les agents de l'administration peuvent obtenir ou prendre copie, par tout moyen et sur tout support, des pièces se rapportant aux opérations ayant donné ou devant donner lieu à facturation. Si les contrôles prévus au 1° du VII du même article 289 sont effectués sous forme électronique, les assujettis sont tenus de les présenter sous cette forme. Les agents de l'administration peuvent prendre copie des informations ou documents de ces contrôles et de leur documentation par tout moyen et sur tout support. Ils peuvent recueillir sur place ou sur convocation des renseignements et justifications. Ces auditions donnent lieu à l'établissement de comptes rendus d'audition (...) ". 3. Il résulte de l'instruction que, d'une part, la société Contec, gérée par M. A..., a fait l'objet lors d'un contrôle de facturation mis en œuvre par l'administration fiscale sur le fondement des articles L. 80 F et L. 80 H du livre des procédures fiscales et que, d'autre part, M. A... a été avisé par l'administration fiscale de la tenue d'un examen de sa situation fiscale personnelle (ESFP) par un courrier daté du 8 avril 2015. Si le requérant soutient que l'administration a excédé les prérogatives qu'elle détient du droit d'enquête en faisant valoir qu'il ressort du compte-rendu d'audition du 20 janvier 2015 que les enquêteurs ont rapproché " les factures des enregistrements comptables et des mouvements enregistrés sur les relevés bancaires ", une telle circonstance est, ainsi que l'a jugé le tribunal sans qu'il n'articule de critique à cet égard, inopérante. Il y a donc lieu d'adopter les motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 3 du jugement attaqué. En ce qui concerne le bien-fondé des impositions : 4. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ". 5. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a considéré comme des revenus distribués à M. A... par la société Contec la somme de 89 636 euros correspondant à celle portée au crédit du compte courant d'associé ouvert à son nom, et à la somme de 11 196 euros correspondant à des loyers payés par la société Contec pour des locaux qu'il a utilisés de façon privative. 6. En premier lieu, les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé, alors même que l'inscription résulterait d'une erreur comptable involontaire, et ont donc, même dans une telle hypothèse, le caractère de revenus distribués, imposables entre les mains de cet associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu du 2º du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Pour que l'associé échappe à cette imposition, il lui incombe de démontrer, le cas échéant, qu'il n'a pas pu avoir la disposition de ces sommes ou que ces sommes ne correspondent pas à la mise à disposition d'un revenu. Or, tout comme en première instance, M. A... ne justifie nullement des sommes portées au crédit du compte courant d'associé figurant au passif de la SARL Contec et se borne à exposer que celles-ci correspondent à des charges de la société, payées par lui-même, en espèces ou par carte bancaire, auprès de fournisseurs sans toutefois démontrer avoir assumé des dépenses incombant normalement à cette société. 7. En second lieu, l'administration fiscale a estimé que M. A... faisait un usage personnel à hauteur de 60 % et professionnel à hauteur de 40 % du logement loué au nom de la SARL Contec et a, par conséquent, exclu des charges déductibles de la société la part du loyer correspondant à l'utilisation privée du logement faite par M. A... au titre de l'année 2013. Si M. A... soutient qu'il versait un loyer à cette société, dont il est l'unique gérant, il ne le justifie en tout état de cause pas. 8. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme ayant établi l'existence et l'appréhension par M. A... de la somme de 100 832 euros. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013. Sur les conclusions indemnitaires : 10. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. (...) ". 11. Il résulte de l'instruction que la présentation devant la Cour par M. A... des conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement de dommages et intérêts n'a pas été précédée d'une demande indemnitaire adressée à l'administration fiscale et ayant un tel objet. En conséquence, ainsi que le soutient le ministre, ces conclusions sont irrecevables. Par suite, elles doivent être rejetées. Sur les frais liés au litige : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée à ce titre par M. A.... D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, où siégeaient : - Mme Massé-Degois, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Point, premier conseiller. - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. 2 N° 21MA02534
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La SCI D...Immobilier a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2013. Par un jugement n° 1800077 du 28 mai 2020, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 14 juillet 2020, la SCI D... Immobilier, représentée par la SELARL Franck Demailly, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'appréciation à laquelle s'est livrée l'administration, sur la base d'une seule opération, consistant en la cession, après travaux, d'un bien immobilier deux années après son acquisition, pour retenir qu'elle aurait exercé l'activité de marchand de biens, est erronée ; en outre l'administration entretient une confusion entre sa propre activité et celle de son associé, ce qu'elle ne pouvait faire sans méconnaître les principes à valeur constitutionnelle d'égalité des citoyens devant les charges publiques et devant l'impôt, dès lors que cette position implique que les opérations à caractère patrimonial réalisées dans le cadre privé par les personnes exerçant, par ailleurs, la profession de marchand de biens soient soumises à un régime d'imposition différent de celui assigné à n'importe quel contribuable agissant dans des conditions similaires ; - l'administration n'a pas apporté la preuve, qui lui incombe, de ce qu'elle se serait livrée, de manière habituelle et indépendamment de l'activité de ses associés, à des acquisitions et cessions de biens immobiliers, ni qu'elle aurait été animée, dans le cadre de l'opération en cause, par une quelconque intention spéculative, qui doit être appréciée à la date d'acquisition du bien ; la mise en location constante de ce bien à l'issue des travaux révèle, au contraire, le caractère purement patrimonial de l'opération en cause, la vente du bien n'ayant été décidée que parce qu'une opportunité s'est présentée et par un besoin de liquidités généré par un autre projet patrimonial ; elle s'était d'ailleurs endettée sur le long terme pour financer le projet en cause, avait souscrit une hypothèque à titre de garantie et a finalement dû payer des pénalités pour cause de remboursement anticipée de son emprunt ; - la doctrine administrative publiée le 4 janvier 2017 au bulletin officiel des finances publiques sous la référence BOI-BIC-CHAMP-20-10-10, conforte, en son paragraphe n°30, sa position en ce qui concerne l'impossibilité de retenir, en présence d'une seule vente, que la condition d'habitude est satisfaite ; - elle ne s'est jamais comportée comme un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et n'a jamais opté pour son assujettissement à cette taxe, de sorte que les rappels de taxe mis à sa charge, qui sont établis sur des textes antérieurs à la réforme introduite par la loi n°2010-237 du 9 mars 2010 et ne trouvant plus à s'appliquer au titre de la période d'imposition en litige, ne sont pas légalement fondés ; - les doctrines administratives publiées au bulletin officiel des impôts sous les références BOI-TVA-CHAMP-10-10-20 et BOI-TVA-IMM-10-10-10-10, confortent, respectivement en leurs paragraphes n° 330 et n°70, sa position sur ce dernier point. Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - les éléments recueillis au cours de la vérification de comptabilité dont la SCI D... Immobilier a fait l'objet ont conduit à bon droit l'administration à estimer que la vente par cette société, le 29 avril 2013, d'un bien immobilier qu'elle avait acquis deux ans auparavant et sur lequel elle a fait réaliser d'importants travaux, ne constituait pas une simple opération de gestion privée de son patrimoine, mais une opération de nature économique assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ; en effet, l'environnement professionnel de la SCI D... Immobilier, à savoir l'activité de ses associés, la SARL Didier B... Gestion et M. A... B..., ainsi que le nombre d'opérations immobilières réalisées par les sociétés civiles immobilières gérées par ce dernier justifiait que le critère d'habitude soit regardé comme établi ; à cet égard, des conséquence ont pu être tirées, en ce qui concerne la SCI D... Immobilier, de l'activité exercée par M. B... sans méconnaissance des principes à valeur constitutionnelle d'égalité devant l'impôt et les charges publiques ; en outre, l'intention spéculative, que le service ne s'est pas borné à présumer, est établie par les circonstances de fait de l'espèce, à savoir par la revente, vingt-trois mois seulement après son acquisition, d'un bien immobilier, après travaux et division, moyennant un profit de 68 988 euros ; or, cette intention s'apprécie à la date d'acquisition du bien, de sorte que les difficultés financières rencontrées, depuis lors, par une autre structure en recherche de financement pour un autre projet immobilier sont dépourvues d'incidence sur cette appréciation ; les circonstances que la SCI D... Immobilier a été créée trois semaines avant l'acquisition du bien en cause, que celui-ci a constitué son unique actif et qu'il a fait l'objet d'importants travaux, qui ont représenté 92% du prix payé pour cette acquisition, confortent l'appréciation du service quant à l'intention spéculative qui a animé cette société ; - les extraits de doctrine invoqués par la SCI D... Immobilier ne donnent pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle retenue par l'administration pour fonder les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société civile immobilière (SCI) D... Immobilier a été créée le 24 mai 2011, avec pour objet social comprenant l'acquisition, la propriété, la mise en valeur, la transformation, la construction, l'aménagement, l'administration et la location de tous biens et droits immobiliers. Elle a fait l'objet, au cours de l'année 2014, d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 24 mai 2011, date de sa création, au 31 décembre 2013, date de clôture de son dernier exercice avant le contrôle. A l'issue de ce contrôle, l'administration a estimé que la SCI D... Immobilier devait être regardée ayant exercé, au cours de la période vérifiée, l'activité de marchand de biens. Elle lui a donc fait connaître, par une proposition de rectification adressée le 7 octobre 2014 dans le cadre de la procédure de taxation d'office, que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée seraient, en conséquence, mis à sa charge. Les observations formulées par la SCI D... Immobilier n'ayant pas conduit l'administration à revoir son appréciation, pas davantage que les entretiens successivement accordés à la société par le supérieur hiérarchique de la vérificatrice et par l'interlocuteur fiscal interrégional, et que l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée annoncés ont été mis en recouvrement le 29 février 2016, pour un montant, en droits et pénalités, de 53 108 euros. Sa réclamation ayant été rejetée, la SCI D... Immobilier a porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2013. Elle relève appel du jugement du 28 mai 2020 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande. Sur l'application de la loi fiscale : 2. Aux termes de l'article 257 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige, issue de la loi n°2012-1510 du 29 décembre 2012 : " I. - Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée dans les conditions qui suivent. / (...) / 2. Sont considérés : / (...) / 2° Comme immeubles neufs, les immeubles qui ne sont pas achevés depuis plus de cinq années, qu'ils résultent d'une construction nouvelle ou de travaux portant sur des immeubles existants qui ont consisté en une surélévation ou qui ont rendu à l'état neuf : / a) Soit la majorité des fondations ; / b) Soit la majorité des éléments hors fondations déterminant la résistance et la rigidité de l'ouvrage ; / c) Soit la majorité de la consistance des façades hors ravalement ; / d) Soit l'ensemble des éléments de second œuvre tels qu'énumérés par décret en Conseil d'Etat, dans une proportion fixée par ce décret qui ne peut être inférieure à la moitié pour chacun d'entre eux. / (...) ". L'application de ces dispositions est subordonnée à la double condition que les opérations présentent un caractère habituel et procèdent d'une intention spéculative. La condition d'habitude n'est pas, en principe remplie, dans le cas d'une société civile qui a eu pour seule activité la réalisation d'une opération spéculative unique consistant à acheter et revendre en l'état un immeuble déterminé. Il en va toutefois différemment lorsque les associés qui jouent un rôle prépondérant ou bénéficient principalement des activités de la société sont des personnes se livrant elles-mêmes de façon habituelle à des opérations immobilières soit par des achats et des ventes faites en leur propre nom, soit par leur participation à des sociétés civiles dont chacune réalise une opération déterminée. En pareil cas, la société étant l'un des instruments d'une activité d'ensemble entrant dans le champ d'application l'article 257 du code général des impôts, doit être réputée remplir la condition d'habitude à laquelle l'application de ce texte est subordonnée. 3. Il résulte de l'instruction que la SCI D... Immobilier a acquis, le 16 juin 2011, soit moins d'un mois après sa création, le 24 mai 2011, une maison d'habitation située rue D... à Amiens, pour un prix de 205 000 euros. Elle y a fait réaliser d'importants travaux, pour un montant total de 187 900 euros, consistant en une extension d'une surface de 30m², répartie sur deux niveaux, ainsi qu'en la division de l'immeuble en six appartements. Le 29 avril 2013, soit moins de vingt-trois mois après l'acquisition de cet immeuble, la SCI D... Immobilier a procédé à la revente de celui-ci, après sa transformation, à une société d'investissements, pour un prix de 448 000 euros et a déposé une déclaration de plus-value portant sur un montant de 192 200 euros. Il est constant que, depuis cette cession, la SCI D... Immobilier n'a inscrit aucun autre bien à son actif. 4. Il résulte de l'instruction que le capital de la SCI D... Immobilier est détenu à 99,5 % par la SARL Didier B... Gestion, qui exerce l'activité d'agence immobilière, et par M. A... B..., qui est le gérant de la SCI D... Immobilier et qui est aussi l'actionnaire majoritaire, pour en détenir 99,80% des parts, de la SARL Didier B... Gestion, ainsi que le gérant de trois autres sociétés civiles immobilières, dont l'une a effectué quatre cessions sur une période couvrant les années 2011 à 2013. Ainsi, quand bien même l'opération de revente, après travaux, de l'immeuble en cause, par la SCI D... Immobilier, présente, pour cette société, un caractère unique, elle s'inscrit dans le contexte de l'exercice habituel, par son associée principale, de l'activité de marchand de bien et, comme le relève d'ailleurs, la proposition de rectification adressée à la SCI D... Immobilier le 7 octobre 2014, elle procède, ce qui n'est pas contesté, du même mode opératoire que celui habituellement mis en œuvre par son gérant au travers des autres sociétés civiles immobilières qu'il dirige, consistant à vendre, en tant qu'immeuble de rapport, à d'autres sociétés exerçant dans l'immobilier, des biens à usage d'habitation après réalisation d'importants travaux de transformation. Dès lors, c'est, dans ces conditions, à bon droit et sans méconnaissance des principes à valeur constitutionnelle d'égalité devant l'impôt et devant les charges publiques, que l'administration a retenu que l'opération ainsi réalisée en 2013 par la SCI D... Immobilier présentait un caractère habituel. 5. Le court laps de temps, de vingt-trois mois, séparant, d'une part, l'acquisition de l'immeuble en cause, situé à Amiens, d'autre part, sa revente, durant lequel d'importants travaux d'agrandissement et de transformation, représentant 92% du prix payé pour cette acquisition, ont été effectués sur une durée d'environ quatre mois, révèle l'intention spéculative qui animait la SCI D... Immobilier lorsqu'elle a engagé, moins d'un mois après sa création, cette opération d'achat et de revente, quand bien même les six appartements aménagés dans l'immeuble ont été, à compter du mois d'octobre 2011, donnés en location avant la revente de celui-ci. La SCI D... Immobilier n'apporte, à cet égard, aucun élément probant au soutien de son allégation selon laquelle elle aurait, dès l'origine, destiné cet immeuble à la location et n'aurait finalement consenti à le revendre qu'en saisissant une opportunité, ce que les modalités choisies par elle pour financer cette opération ne peuvent suffire à établir. 6. Eu égard à ce qui vient d'être dit aux deux points précédents, c'est à bon droit que l'administration a estimé que l'opération d'achat et de revente effectuée par la SCI D... Immobilier durant la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2013 constituait, eu égard à son caractère habituel et à l'intention spéculative qui animait son auteur, l'exercice d'une activité de marchand de biens assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement des dispositions précitées de l'article 257 du code général des impôts, qui, contrairement à ce que soutient la SCI D... Immobilier, qui doit ainsi être regardée comme s'étant comportée comme un assujetti en tant que tel, sont temporellement applicables à la période en cause. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en résultant ont, dès lors, été mis à bon droit à sa charge. Sur l'interprétation de la loi fiscale par l'administration : 7. La SCI D... Immobilier n'est pas fondée à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations des doctrines administratives publiées le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des finances publiques sous les références BOI-BIC-CHAMP-20-10-10, en son paragraphe n°30, BOI-TVA-CHAMP-10-10-20, en son paragraphe n°330 et BOI-TVA-IMM-10-10-10-10, en son paragraphe n°70, dès lors qu'elles ne comportent pas, s'agissant des critères permettant de caractériser l'exercice d'une activité de marchand de biens assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée et s'agissant, en particulier, de l'appréciation du critère habituel des opérations d'achat et de revente contribuant à caractériser l'exercice d'une activité de marchand de biens, une interprétation formelle de la loi fiscale qui soit différente de celle dont le présent arrêt fait application. 8. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI D... Immobilier n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la SCI D... Immobilier est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI D... Immobilier et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ; - Mme Dominique Bureau, première conseillère ; - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de la formation de jugement, Signé : M. C... La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Suzanne Pinto Carvalho 1 2 N°20DA01009
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013. Par un jugement n°1803231 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2020, et des mémoires, enregistrés les 27 novembre 2020 et 11 février 2021, M. C..., représenté par Me Buchet, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n°1803231 du tribunal administratif de Rouen ; 2°) de lui accorder la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013 en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la réintégration d'une fraction des loyers correspondant sur le fondement de l'article 239 sexies du code général des impôts, qui n'est pas contestée dans le principe, doit être effectuée au titre de l'année 2010 qui est prescrite et non au titre de l'année 2013 car c'est la levée de l'option d'achat du contrat de crédit-bail qui conduit à la cessation d'activité de sous-location ; - à titre subsidiaire, le calcul du montant de la réintégration est erroné et la fraction des loyers à réintégrer doit être limitée à un montant total de 60 598 euros au lieu de 91 469 euros ; - au regard de la décision du Conseil d'Etat du 4 mars 2015 n° 360508, la levée d'option par le locataire entraîne le transfert de propriété de l'immeuble par le crédit-bailleur, transfert de propriété qui ne peut intervenir postérieurement à l'échéance du bail ; la vente était donc parfaite au 21 mai 2010 et la plus-value était imposable en 2010 qui est prescrite ; - à titre subsidiaire, le bénéfice du report d'imposition subordonné au respect des conditions posées par les dispositions législatives de l'article 93 quater, IV du code général des impôts qui prévoient, à peine de déchéance, que la demande doit être formulée de manière expresse dans l'acte constatant le transfert de propriété de l'immeuble ; les dispositions réglementaires de l'article 41 novovicies de l'annexe III au code général des impôts, prévoyant des obligations déclaratives, ne peuvent instituer une déchéance du droit au report d'imposition en cas de manquement à ces obligations déclaratives ; or, la société civile immobilière (SCI) Le Progrès a adressé à l'administration fiscale le 14 octobre 2016, la déclaration rectificative n°2035 de l'année 2013, dans laquelle les associés ont tous souscrit à l'ensemble des obligations déclaratives du report d'imposition prévues à l'article 41 novovicies de l'annexe III au code ; - la valeur vénale de l'immeuble de 650 000 euros retenue par l'administration fiscale pour le calcul de la plus-value est erronée ; la valeur vénale doit être fixée à 275 000 euros. Par un mémoire en défense et des mémoires, enregistrés les 28 octobre 2020, 27 janvier 2021 et 15 mars 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé et au rejet du surplus des conclusions de la requête. Il soutient que : - il est fait droit aux conclusions relatives à la validité de l'option pour le report d'imposition de la plus-value et le dégrèvement de l'imposition correspondante sera communiqué à la cour ; - les autres moyens de la requête de M. C... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 17 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 10 décembre 2021. Un mémoire, présenté pour M. C..., a été enregistré le 18 mars 2022, après clôture d'instruction. Vu la lettre adressée en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative informant les parties que la cour était susceptible de se fonder sur un moyen relevé d'office tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions relatives au litige sur la valeur vénale de l'immeuble en raison de l'octroi par l'administration du report d'imposition prévu au IV de l'article 93 du code général des impôts. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Massounga, avocat de M. C.... Une note en délibéré présentée par M. C... a été enregistrée le 10 juin 2022. Considérant ce qui suit : 1. La SCI Le Progrès, qui n'a pas opté pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés et dont M. C... est l'un des associés, a pris en crédit-bail auprès de la société anonyme (SA) Finamur, le 30 juin 1998, un bien immobilier situé sur la commune du Havre. Elle a levé l'option d'achat le 21 mai 2010. L'acte notarié d'achat a été signé le 25 janvier 2013 et mentionne une valeur vénale du bien immobilier acquis de 650 000 euros. La SCI Le Progrès a fait l'objet d'une vérification sur place de ses documents comptables à l'issue de laquelle l'administration, d'une part, a réintégré une quote-part des loyers à l'échéance du contrat de crédit-bail et, d'autre part, a imposé la plus-value résultant de la levée de l'option de l'achat de l'immeuble. En conséquence, l'administration a rectifié le résultat imposable de l'exercice 2013 de la SCI Le Progrès. L'administration a tiré les conséquences du rehaussement du résultat imposable de l'exercice 2013 de la société au niveau des associés et, par une proposition de rectification du 4 juillet 2016, l'administration a assujetti M. C... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013, dont il a vainement demandé la décharge au tribunal administratif de Rouen. Sur l'étendue du litige : 2. Aux termes de l'article 93 du code général des impôts : " (...) IV. 1. Pour l'application des dispositions du premier alinéa du I aux immeubles acquis dans les conditions prévues au 6 de l'article 93 et précédemment donnés en sous-location, l'imposition de la plus-value consécutive au changement de régime fiscal peut, sur demande expresse du contribuable, être reportée au moment où s'opérera la transmission de l'immeuble ou, le cas échéant, la transmission ou le rachat de tout ou partie des titres de la société propriétaire de l'immeuble ou sa dissolution. " 3. Par une décision du 10 février 2021, l'administration a décidé d'accorder à M. C... un dégrèvement d'un montant de 33 743 euros correspondant aux suppléments d'imposition procédant de la rectification résultant du refus de report d'imposition de la plus-value à court terme sur le fondement du 1. du IV de l'article 93 du code général des impôts. 4. En raison de l'octroi par l'administration fiscale en cours d'instance du report d'imposition de la plus-value et du dégrèvement consécutif prononcé, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à la décharge des rappels de prélèvement libératoire assignés à M. C... au titre de l'année 2013. Ce non-lieu à statuer s'étend nécessairement au litige relatif au montant de la plus-value imposable qui est l'assiette du prélèvement libératoire mis à la charge du requérant. Par voie de conséquence, il n'y a donc plus de statuer sur les conclusions aux fins de décharge M. C... à hauteur du dégrèvement ainsi prononcé. Sur le surplus des conclusions de la requête en ce qui concerne la réintégration d'une fraction des loyers : 5. Il résulte des mentions de la proposition de rectification que la SCI Le Progrès a levé l'option d'achat le 21 mai 2010, pour un prix de 15 centimes d'euros, d'un bien immobilier situé sur la commune du Havre qui avait été pris en crédit-bail auprès de la société anonyme (SA) Finamur le 30 juin 1998, d'une valeur de 228 673,53 euros. L'administration a estimé qu'en application des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts, l'exercice de la levée d'option d'achat par la SCI Le Progrès aurait dû conduire celle-ci à réintégrer la fraction des loyers antérieurement déduits, soit en 2013 la différence entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat diminué du prix de la levée d'option et les amortissements techniques que le preneur aurait pu déduire s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. L'administration a donc calculé une réintégration de 91 469 euros qu'elle a rapporté aux bénéfices non commerciaux de l'année 2013 de la société. 6. Aux termes de l'article 239 sexies du code général des impôts : " I. Lorsque le prix d'acquisition, par le locataire, de l'immeuble pris en location par un contrat de crédit-bail conclu avec une société immobilière pour le commerce et l'industrie est inférieur à la différence existant entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat et le montant total des amortissements que le locataire aurait pu pratiquer s'il avait été propriétaire du bien depuis cette date, le locataire acquéreur est tenu de réintégrer, dans les résultats de son entreprise afférents à l'exercice en cours au moment de la cession, la fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat et correspondant à ladite différence diminuée du prix de cession de l'immeuble (...) ". Aux termes de l'article 239 sexies B du même code : " Les dispositions du premier alinéa du I et celles du paragraphe II de l'article 239 sexies sont applicables aux locataires qui acquièrent des immeubles qui leur sont donnés en crédit-bail par des sociétés ou organismes autres que des sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie ". 7. Il résulte des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts que la réintégration dans les résultats imposables d'une fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat intervient lors de l'exercice en cours au moment de la cession de l'immeuble. 8. En premier lieu, M. C... ne conteste pas le principe de la réintégration d'une fraction des loyers sur le fondement de l'article 239 sexies du code général des impôts mais soutient que cette réintégration devait être effectuée au titre l'année de levée de l'option d'achat du contrat de crédit-bail en 2010. Toutefois, il ressort des mentions du contrat de crédit-bail immobilier conclu le 30 juin 1998 que le paragraphe 302.3 stipulait que " la demande de réalisation de la vente n'emportera pas transfert de propriété, lequel s'opérera par l'acte de vente notarié ". Ainsi, si la société a bien levé l'option par courrier du 21 mai 2010, l'acte notarié de vente à titre de levée d'option n'a été signé que le 25 janvier 2013 et stipule dans le paragraphe " Propriété jouissance " que " l'acquéreur sera propriétaire du bien vendu à compter de ce jour ". Par suite, l'immeuble doit être regardé comme ayant été cédé en 2013 et c'est à bon droit que l'administration a réintégré la fraction des loyers dans les résultats de l'exercice clos en 2013. 9. En second lieu, pour calculer le montant des loyers à réintégrer de 91 469 euros, l'administration s'est fondée sur une période de douze ans pour calculer le montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. Cette période de douze ans s'étend de la signature de l'acte de crédit-bail le 30 juin 1998 jusqu'à la date de la levée d'option le 21 mai 2010. M. C... fait valoir, à titre subsidiaire, que le calcul du montant de la réintégration est erroné et que la fraction des loyers à réintégrer doit être limitée à un montant total de 60 598 euros au lieu de 91 469 euros, correspondant à un montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant une période de 14,7 ans, soit au-delà de la date de levée de l'option jusqu'à la date de réalisation de la vente le 25 janvier 2013. 10. Toutefois, il résulte des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts que la réintégration dans les résultats imposables d'une fraction des loyers versés s'entend de la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat du crédit-bail, c'est-à-dire de la période où il a versé les loyers de crédit-bail en exécution du contrat. Or il résulte des mentions de la proposition de rectification que la SCI Le Progrès a signé un contrat de crédit-bail pour un immeuble auprès de la société anonyme (SA) Finamur le 30 juin 1998 d'une valeur de 228 673,53 euros et d'une durée de douze ans. Par suite, le contrat de crédit-bail a pris fin le 30 juin 2010, la SCI Le Progrès ayant levé l'option d'achat le 21 mai 2010. En conséquence, à cette date, la SCI Le Progrès a cessé d'être tenue de verser des loyers en exécution du contrat de crédit-bail et, en tout état de cause, elle n'apporte pas la preuve ni que le bail a été prorogé ni qu'elle a continué de verser des loyers au-delà du 30 juin jusqu'à la signature du l'acte de vente le 25 janvier 2013. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que doit être prise en compte, pour le calcul du montant des amortissements techniques, la période courant du 30 juin 2010 au 25 janvier 2013. En conséquence, c'est à bon droit, pour fixer le montant des loyers à réintégrer à la somme de 91 469 euros, l'administration s'est fondée sur une période de douze ans pour calculer le montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqué s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. 11. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande aux fins de décharge des impositions supplémentaires en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante à l'instance pour l'essentiel, la somme de 1000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. C... à concurrence de la somme de 33 743 euros correspondant au rappel de prélèvement libératoire mis à sa charge au titre de l'année 2013. Article 2 : La somme de 1000 (mille) euros est mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, - M. E... A..., premier-conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. D...La conseillère la plus ancienne Signé : D. Bureau La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Suzanne Pinto Carvalho N°20DA01118 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013. Par un jugement n°1803233 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2020, et des mémoires enregistrés les 27 novembre 2020 et11 février 2021, M. A..., représenté par Me Buchet, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n°1803233 du tribunal administratif de Rouen ; 2°) de lui accorder la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013 en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la réintégration d'une fraction des loyers correspondant sur le fondement de l'article 239 sexies du code général des impôts, qui n'est pas contestée dans le principe, doit être effectuée au titre de l'année 2010 qui est prescrite, et non au titre de l'année 2013, car c'est la levée de l'option d'achat du contrat de crédit-bail qui conduit à la cessation d'activité de sous-location ; - à titre subsidiaire, le calcul du montant de la réintégration est erroné et la fraction des loyers à réintégrer doit être limitée à un montant total de 60 598 euros au lieu de 91 469 euros ; - au regard de la décision du Conseil d'Etat du 4 mars 2015 n° 360508, la levée d'option par le locataire entraîne le transfert de propriété de l'immeuble par le crédit-bailleur, transfert de propriété qui ne peut intervenir postérieurement à l'échéance du bail ; la vente était donc parfaite au 21 mai 2010 et la plus-value était imposable en 2010 qui est prescrite ; - à titre subsidiaire, le bénéfice du report d'imposition est subordonné au respect des conditions posées par les dispositions législatives de l'article 93 quater, IV du code général des impôts qui prévoient, à peine de déchéance, que la demande doit être formulée de manière expresse dans l'acte constatant le transfert de propriété de l'immeuble ; les dispositions réglementaires de l'article 41 novovicies de l'annexe III au code général des impôts, prévoyant des obligations déclaratives, ne peuvent instituer une déchéance du droit au report d'imposition en cas de manquement à ces obligations déclaratives ; or, la société civile immobilière (SCI) Le Progrès a adressé à l'administration fiscale le 14 octobre 2016, la déclaration rectificative n°2035 de l'année 2013, dans laquelle les associés ont tous souscrit à l'ensemble des obligations déclaratives du report d'imposition prévues à l'article 41 novovicies de l'annexe III au code ; - la valeur vénale de l'immeuble de 650 000 euros retenue par l'administration fiscale pour le calcul de la plus-value est erronée ; la valeur vénale doit être fixée à 275 000 euros. Par un mémoire en défense et des mémoires, enregistrés les 28 octobre 2020, 27 janvier 2021 et 15 mars 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé et au rejet du surplus des conclusions de la requête. Il soutient que : - il est fait droit aux conclusions relatives à la validité de l'option pour le report d'imposition de la plus-value et le dégrèvement de l'imposition correspondante sera communiqué à la cour ; - les autres moyens de la requête de M. A... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 17 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 10 décembre 2021. Un mémoire, présenté pour M. A..., a été enregistré le 18 mars 2022, après la clôture de l'instruction. Vu la lettre adressée en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative informant les parties que la cour était susceptible de se fonder sur un moyen relevé d'office tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions relatives au litige sur la valeur vénale de l'immeuble en raison de l'octroi par l'administration du report d'imposition prévu au IV de l'article 93 du code général des impôts. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Massounga, avocat de M.A.... Une note en délibéré présentée par M. A... a été enregistrée le 10 juin 2022. Considérant ce qui suit : 1. La SCI Le Progrès, qui n'a pas opté pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés et dont M. A... est l'un des associés, a pris en crédit-bail auprès de la société anonyme (SA) Finamur le 30 juin 1998 un bien immobilier situé sur la commune du Havre. Elle a levé l'option d'achat le 21 mai 2010. L'acte notarié d'achat a été signé le 25 janvier 2013 et mentionne une valeur vénale du bien immobilier acquis de 650 000 euros. La SCI Le Progrès a fait l'objet d'une vérification sur place de ses documents comptables à l'issue de laquelle l'administration, d'une part, a réintégré une quote-part des loyers à l'échéance du contrat de crédit-bail et, d'autre part, a imposé la plus-value résultant de la levée de l'option de l'achat de l'immeuble. En conséquence, l'administration a rectifié le résultat imposable de l'exercice 2013 de la SCI Le Progrès. L'administration a tiré les conséquences du rehaussement du résultat imposable de l'exercice 2013 de la société au niveau des associés et, par une proposition de rectification du 4 juillet 2016, l'administration a assujetti M. A... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013, dont il a vainement demandé la décharge au tribunal administratif de Rouen. Sur l'étendue du litige : 2. Aux termes de l'article 93 du code général des impôts : " (...) IV. 1. Pour l'application des dispositions du premier alinéa du I aux immeubles acquis dans les conditions prévues au 6 de l'article 93 et précédemment donnés en sous-location, l'imposition de la plus-value consécutive au changement de régime fiscal peut, sur demande expresse du contribuable, être reportée au moment où s'opérera la transmission de l'immeuble ou, le cas échéant, la transmission ou le rachat de tout ou partie des titres de la société propriétaire de l'immeuble ou sa dissolution. " 3. Par une décision du 10 février 2021, l'administration a décidé d'accorder à M. A... un dégrèvement d'un montant de 33 743 euros correspondant aux suppléments d'impositions procédant de la rectification résultant du refus de report d'imposition de la plus-value à court terme sur le fondement du 1. du IV de l'article 93 du code général des impôts. 4. En raison de l'octroi par l'administration fiscale en cours d'instance du report d'imposition de la plus-value et du dégrèvement consécutif prononcé, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à la décharge des rappels de prélèvement libératoire assigné à M. A... au titre de l'année 2013. Ce non-lieu à statuer s'étend nécessairement au litige relatif au montant de la plus-value imposable qui est l'assiette du prélèvement libératoire mis à la charge du requérant. Par voie de conséquence, il y a donc plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge de M. A... à hauteur du dégrèvement ainsi prononcé. Sur le surplus des conclusions de la requête en ce qui concerne la réintégration d'une fraction des loyers : 5. Il résulte des mentions de la proposition de rectification que la SCI Le Progrès a levé l'option d'achat le 21 mai 2010, pour un prix de 15 centimes d'euros, d'un bien immobilier situé sur la commune du Havre qui avait été pris en crédit-bail auprès de la société anonyme (SA) Finamur, le 30 juin 1998, d'une valeur de 228 673,53 euros. L'administration a estimé qu'en application des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts, l'exercice de la levée d'option d'achat par la SCI Le Progrès aurait dû conduire celle-ci à réintégrer la fraction des loyers antérieurement déduits, soit en 2013 la différence entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat diminué du prix de la levée d'option et les amortissements techniques que le preneur aurait pu déduire s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. L'administration a donc calculé une réintégration de 91 469 euros qu'elle a rapporté aux bénéfices non commerciaux de l'année 2013 de la société. 6. Aux termes de l'article 239 sexies du code général des impôts : " I. Lorsque le prix d'acquisition, par le locataire, de l'immeuble pris en location par un contrat de crédit-bail conclu avec une société immobilière pour le commerce et l'industrie est inférieur à la différence existant entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat et le montant total des amortissements que le locataire aurait pu pratiquer s'il avait été propriétaire du bien depuis cette date, le locataire acquéreur est tenu de réintégrer, dans les résultats de son entreprise afférents à l'exercice en cours au moment de la cession, la fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat et correspondant à ladite différence diminuée du prix de cession de l'immeuble (...) ". Aux termes de l'article 239 sexies B du même code : " Les dispositions du premier alinéa du I et celles du paragraphe II de l'article 239 sexies sont applicables aux locataires qui acquièrent des immeubles qui leur sont donnés en crédit-bail par des sociétés ou organismes autres que des sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie " ; 7. Il résulte des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts que la réintégration dans les résultats imposables d'une fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat intervient lors de l'exercice en cours au moment de la cession de l'immeuble. 8. En premier lieu, M. A... ne conteste pas le principe de la réintégration d'une fraction des loyers sur le fondement de l'article 239 sexies du code général des impôts mais soutient que cette réintégration devait être effectuée au titre l'année de levée de l'option d'achat du contrat de crédit-bail en 2010. Toutefois, il ressort des mentions du contrat de crédit-bail immobilier conclu le 30 juin 1998 que le paragraphe 302.3 stipulait que " la demande de réalisation de la vente n'emportera pas transfert de propriété, lequel s'opérera par l'acte de vente notarié ". Ainsi, si la société a bien levé l'option par courrier du 21 mai 2010, l'acte notarié de vente à titre de levée d'option n'a été signé que le 25 janvier 2013 et stipule dans le paragraphe " Propriété jouissance " que " l'acquéreur sera propriétaire du bien vendu à compter de ce jour ". Par suite, l'immeuble doit être regardé comme ayant été cédé en 2013 et c'est à bon droit que l'administration a réintégré la fraction des loyers dans les résultats de l'exercice clos en 2013. 9. En second lieu, pour calculer le montant des loyers à réintégrer de 91 469 euros, l'administration s'est fondée sur une période de douze ans pour calculer le montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. Cette période de douze ans s'étend de la signature de l'acte de crédit-bail le 30 juin 1998 jusqu'à la date de la levée d'option le 21 mai 2010. Le requérant fait valoir, à titre subsidiaire, que le calcul du montant de la réintégration est erroné et que la fraction des loyers à réintégrer doit être limitée à un montant total de 60 598 euros au lieu de 91 469 euros, correspondant à un montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant une période de 14,7 ans, soit au-delà de la date de levée de l'option jusqu'à la date de réalisation de la vente le 25 janvier 2013. 10. Toutefois, il résulte des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts que la réintégration dans les résultats imposables d'une fraction des loyers versés s'entend de la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat du crédit-bail, c'est-à-dire de la période où il a versé les loyers de crédit-bail en exécution du contrat. Or il résulte des mentions de la proposition de rectification que la SCI Le Progrès a signé un contrat de crédit-bail pour un immeuble auprès de la société anonyme (SA) Finamur le 30 juin 1998 d'une valeur de 228 673,53 euros et d'une durée de douze ans. Par suite, le contrat de crédit-bail a pris fin le 30 juin 2010, la SCI Le Progrès ayant levé l'option d'achat le 21 mai 2010. En conséquence, à cette date, la SCI Le Progrès a cessé d'être tenue de verser des loyers en exécution du contrat de crédit-bail et, en tout état de cause, elle n'apporte pas la preuve ni que le bail a été prorogé ni qu'elle a continué de verser des loyers au-delà du 30 juin jusqu'à la signature du l'acte de vente le 25 janvier 2013. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que doit être prise en compte, pour le calcul du montant des amortissements techniques, la période courant du 30 juin 2010 au 25 janvier 2013. En conséquence, c'est à bon droit, pour fixer le montant des loyers à réintégrer à la somme de 91 469 euros, l'administration s'est fondée sur une période de douze ans pour calculer le montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqué s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. 11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande aux fins de décharge des impositions supplémentaires en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante à l'instance pour l'essentiel, la somme de 1000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A... à concurrence de la somme 33 743 euros correspondant au rappel de prélèvement libératoire mis à sa charge au titre de l'année 2013. Article 2 : La somme de 1000 (mille) euros est mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, - M Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. C...La conseillère la plus ancienne Signé : D. Bureau La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Suzanne Pinto Carvalho N°20DA01119 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013. Par un jugement n° 1802098 du 29 juin 2020, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 28 août 2020 et un mémoire enregistré le 1er mars 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Lamrani, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1802098 du tribunal administratif d'Amiens ; 2°) de prononcer la décharge des impositions supplémentaires mises à leur charge au titre de l'année 2013 ; à titre subsidiaire la décharge de la majoration de 40% pour manquement délibéré et des intérêts de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la SCP D... devait tirer les conséquences fiscales de la dissolution anticipée de la société et déterminer ses résultats de l'année 2013 avec la méthode créances/dettes conformément à l'article 202 du code général des impôts ; - les intérêts de retard sont mal fondés car l'article 1727 du code général des impôts était applicable ; - les pénalités appliquées ne sont pas justifiées. Par un mémoire en défense enregistré le 5 février 2021 et un mémoire enregistré le 17 décembre 2021, qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet des conclusions de la requête. Il soutient que les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir des dispositions de l'article 202 du code général des impôts dès lors que les opérations de liquidation de la société étaient toujours en cours au 31 décembre 2013. Par une ordonnance du 24 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 3 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Les docteurs Krief et A... exerçaient leur activité au sein de la SCP D..., qui relevait du régime fiscal prévu aux articles 8 et 8 ter du code général des impôts et dont Mme A... était alors l'une des associés. La SCP D... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a rectifié le bénéfice non commercial de la société de l'exercice 2013, imposable entre les mains des associés. En conséquence, l'administration a assujetti Mme A... à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013, dont elle a vainement demandé la décharge au tribunal administratif d'Amiens. Sur le bien-fondé de l'imposition supplémentaire : 2. Au titre des revenus de l'année 2013, Mme A... a déclaré 50% du résultat de la SCP D... établi selon la méthode dite des créances acquises et dettes certaines prévue au 1 de l'article 202 du code général des impôts, selon les comptes sociaux transmis par le liquidateur et a déclaré un déficit de 2 083 013 euros dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. L'administration a toutefois entrepris une vérification de comptabilité de la SCP D... et a rectifié le bénéfice imposable de l'exercice 2013 en refusant, pour le calcul du bénéfice, l'application de la méthode dite des créances acquises et dettes certaines prévue au 1 de l'article 202 du code général des impôts et en faisant application de la méthode de calcul du bénéfice prévue au 1 de l'article 93 du code général des impôts selon lequel " le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. ". 3. En premier lieu, aux termes du 1 de l'article 202 du code général des impôts : " Dans le cas de cessation de l'exercice d'une profession non commerciale, l'impôt sur le revenu dû en raison des bénéfices provenant de l'exercice de cette profession y compris ceux qui proviennent de créances acquises et non encore recouvrées et qui n'ont pas encore été imposés est immédiatement établi. (...) ". Cet article précise que les contribuables doivent, dans un délai de soixante jours courant, lorsqu'il s'agit de la cessation de l'exercice d'une profession autre que l'exploitation d'une charge ou d'un office, à compter du jour où la cessation a été effective, aviser l'administration de la cessation et lui faire connaître la date à laquelle elle a été ou sera effective, ainsi que, s'il y a lieu, les nom, prénoms et adresse du successeur. 4. En second lieu, selon l'article 1844-8 du code civil, applicable aux sociétés civiles professionnelles en vertu de l'article 30 de la loi du 29 novembre 1966 relative à ces sociétés : " La dissolution de la société entraîne sa liquidation. (...) La personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de celle-ci ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 4113-90 du code de la santé publique, qui précise la mise en œuvre de ces mêmes dispositions s'agissant notamment des sociétés civiles professionnelles de médecins : " La société est en liquidation dès sa dissolution pour quelque cause que ce soit ou dès que la décision judiciaire déclarant sa nullité est devenue définitive. / La personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation, jusqu'à la clôture de celle-ci. / La raison sociale est obligatoirement suivie de la mention "société en liquidation". ". 5. Il résulte des principes applicables en cas de dissolution de sociétés, et notamment des dispositions du code civil citées au point 3, qu'une société soumise au régime fiscal des sociétés de personnes exerçant une activité relevant des bénéfices non commerciaux qui est placée en liquidation ne doit déposer la déclaration prévue par l'article 202 du code général des impôts en cas de cessation d'exercice d'une profession non commerciale que lorsque les comptes définitifs du liquidateur ont été approuvés dans les conditions prévues par la loi. Les associés d'une telle société ne sont, par suite, pas fondés à se prévaloir, pour la détermination du montant des bénéfices imposables entre leurs mains, de la méthode de calcul prescrite par les dispositions du 1 de l'article 202 du code général des impôts avant l'approbation des comptes définitifs du liquidateur. 6. En l'espèce, il est constant que la dissolution judiciaire de la SCP D... est intervenue en 2011 par l'effet d'un arrêt de la cour d'appel d'Amiens en date du 9 juin 2011 et que les opérations de liquidation de la SCP D... étaient toujours en cours au 31 décembre 2013. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions du 1 de l'article 202 du code général des impôts. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a rectifié le bénéfice imposable à l'impôt sur le revenu de la SCP D... en faisant application du 1 de l'article 93 du code général des impôts. Sur l'intérêt de retard : 7. Aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : " I.- Toute créance de nature fiscale, dont l'établissement ou le recouvrement incombe aux administrations fiscales, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard. A cet intérêt s'ajoutent, le cas échéant, les sanctions prévues au présent code. / II.- L'intérêt de retard n'est pas dû : (...) / 2. Au titre des éléments d'imposition pour lesquels un contribuable fait connaître, par une indication expresse portée sur la déclaration ou l'acte, ou dans une note annexée, les motifs de droit ou de fait qui le conduisent à ne pas les mentionner en totalité ou en partie, ou à leur donner une qualification qui entraînerait, si elle était fondée, une taxation atténuée, ou fait état de déductions qui sont ultérieurement reconnues injustifiées (...) ". En raison de l'objet des dispositions précitées, le juge se fonde sur le résultat de l'instruction pour apprécier si une déclaration de revenus comportait une mention de nature à écarter, au bénéfice du contribuable, l'application de l'intérêt de retard. Une indication expresse au sens de ces dispositions doit comporter des éléments précis et circonstanciés sur les motifs de droit et les éléments de fait mettant l'administration en mesure d'apprécier immédiatement si les conditions du régime ou des dispositions invoquées sont remplies. 8. Il résulte de l'instruction que le motif de droit permettant à l'administration d'apprécier immédiatement le bien fondé des arguments des contribuables était précisément et expressément indiqué dans l'indication expresse jointe à la déclaration des revenus modèle n° 2042 pour 2013 établie le 6 juin 2014. En revanche, les éléments chiffrés précisés dans une note produite à l'instance, relative à l'exercice clos le 31 décembre 2012, ne peuvent être regardés comme une indication expresse précise et circonstanciée portée sur la déclaration modèle n° 2035 pour 2013, établie le 6 juin 2014 par Mme A..., ou dans une note annexée à cette dernière, au sens de l'article 1727 du code général des impôts. Pour ce dernier motif, l'administration n'était pas en mesure d'apprécier immédiatement le bien fondé des arguments des contribuables à la date du 6 juin 2014, notamment de leur donner une qualification pouvant entraîner une taxation atténuée. C'est donc à bon droit que l'administration a appliqué l'intérêt de retard prévu par l'article 1727 du code général des impôts. Sur les pénalités pour manquement délibéré : 9. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. ". 10. En l'espèce, pour justifier l'application de cette majoration, l'administration fait valoir, notamment, que le manquement reproché dans la présente instance avait déjà été porté à la connaissance des requérants, à l'occasion de deux contrôles antérieurs dans deux propositions de rectification des 21 décembre 2012 et 12 juin 2013 portant, pour les années 2009 à 2011, sur le même impôt et la même question de droit. Toutefois, les époux A... avaient contesté devant le tribunal administratif d'Amiens cette rectification et le tribunal avait fait droit à leur demande pour l'année 2011, par un jugement 6 juillet 2017, au motif que c'était à tort que l'administration, estimant que la clôture de la liquidation de la SCP n'étant pas intervenue en 2011, avait refusé de faire application de l'article 202 du code général des impôts. La cour avait d'ailleurs rejeté l'appel du ministre par un arrêt du 2 avril 2020. Le litige n'a été définitivement tranché que le 25 juin 2021 par une décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux sur le pourvoi en cassation du ministre contre l'arrêt de la Cour du 2 avril 2020. Par suite, à la date de la déclaration des revenus de l'année 2013 établie par Mme A..., la persistance d'un litige entre les contribuables et l'administration, résultant d'une interprétation divergente sur l'application de l'article 202 du code général des impôts, ne peut être regardée, en l'espèce, comme la preuve de l'intention délibérée d'éluder le paiement de l'impôt justifiant l'application de la majoration pour manquement délibéré. Par suite, l'administration ne peut être regardée comme justifiant l'application de la majoration de l'article 1729 du code général des impôts, dont les requérants sont donc fondés à demander la décharge. 11. Il résulte de ce qui précède que les requérants sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a refusé de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré qui leur a été infligée au titre de l'année 2013. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance pour l'essentiel, les conclusions de M. et Mme A... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : M. et Mme A... sont déchargés de la majoration de 40% appliquée à la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, - Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. C...La conseillère la plus ancienne, Signé : D. Bureau La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Suzanne Pinto Carvalho N°20DA01334 2
JADE/CETATEXT000045945202.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013. Par un jugement n°1803235 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2020, et des mémoires, enregistrés les 27 novembre 2020 et 11 février 2021, M. A..., représenté par Me Buchet, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n°1803235 du tribunal administratif de Rouen ; 2°) de lui accorder la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013 en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la réintégration d'une fraction des loyers correspondant sur le fondement de l'article 239 sexies du code général des impôts, qui n'est pas contestée dans le principe, doit être effectuée au titre de l'année 2010 qui est prescrite, et non au titre de l'année 2013, car c'est la levée de l'option d'achat du contrat de crédit-bail qui conduit à la cessation d'activité de sous-location ; - à titre subsidiaire, le calcul du montant de la réintégration est erroné et la fraction des loyers à réintégrer doit être limitée à un montant total de 60 598 euros au lieu de 91 469 euros ; - au regard de la décision du Conseil d'Etat du 4 mars 2015 n° 360508, la levée d'option par le locataire entraîne le transfert de propriété de l'immeuble par le crédit-bailleur, transfert de propriété qui ne peut intervenir postérieurement à l'échéance du bail ; la vente était donc parfaite au 21 mai 2010 et la plus-value était imposable en 2010 qui est prescrite ; - à titre subsidiaire, le bénéfice du report d'imposition est subordonné au respect des conditions posées par les dispositions législatives de l'article 93 quater, IV du code général des impôts qui prévoient, à peine de déchéance, que la demande doit être formulée de manière expresse dans l'acte constatant le transfert de propriété de l'immeuble ; les dispositions réglementaires de l'article 41 novovicies de l'annexe III au code général des impôts, prévoyant des obligations déclaratives, ne peuvent instituer une déchéance du droit au report d'imposition en cas de manquement à ces obligations déclaratives ; or, la société civile immobilière (SCI) Le Progrès a adressé à l'administration fiscale le 14 octobre 2016, la déclaration rectificative n°2035 de l'année 2013, dans laquelle les associés ont tous souscrit à l'ensemble des obligations déclaratives du report d'imposition prévues à l'article 41 novovicies de l'annexe III au code ; - la valeur vénale de l'immeuble de 650 000 euros retenue par l'administration fiscale pour le calcul de la plus-value est erronée ; la valeur vénale doit être fixée à 275 000 euros. Par un mémoire en défense et des mémoires, enregistrés les 28 octobre 2020, 27 janvier 2021 et 15 mars 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé et au rejet du surplus des conclusions de la requête. Il soutient que : - il est fait droit aux conclusions relatives à la validité de l'option pour le report d'imposition de la plus-value et le dégrèvement de l'imposition correspondante sera communiqué à la cour ; - les autres moyens de la requête de M. A... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 17 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 10 décembre 2021. Un mémoire, présenté pour M. A..., a été enregistré le 18 mars 2022, après la clôture de l'instruction. Vu la lettre adressée en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative informant les parties que la cour était susceptible de se fonder sur un moyen relevé d'office tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions relatives au litige sur la valeur vénale de l'immeuble en raison de l'octroi par l'administration du report d'imposition prévu au IV de l'article 93 du code général des impôts. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Massounga, avocat de M. A.... Considérant ce qui suit : 1. La SCI Le Progrès, qui n'a pas opté pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés et dont M. A... est l'un des associés, a pris en crédit-bail auprès de la société anonyme (SA) Finamur, le 30 juin 1998, un bien immobilier situé sur la commune du Havre. Elle a levé l'option d'achat le 21 mai 2010. L'acte notarié d'achat a été signé le 25 janvier 2013 et mentionne une valeur vénale du bien immobilier acquis de 650 000 euros. La SCI Le Progrès a fait l'objet d'une vérification sur place de ses documents comptables à l'issue de laquelle l'administration, d'une part, a réintégré une quote-part des loyers à l'échéance du contrat de crédit-bail et, d'autre part, a imposé la plus-value résultant de la levée de l'option de l'achat de l'immeuble. En conséquence, l'administration a rectifié le résultat imposable de l'exercice 2013 de la SCI Le Progrès. L'administration a tiré les conséquences du rehaussement du résultat imposable de l'exercice 2013 de la société au niveau des associés et, par une proposition de rectification du 4 juillet 2016, l'administration a assujetti M. A... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013, dont il a vainement demandé la décharge au tribunal administratif de Rouen. Sur l'étendue du litige : 2. Aux termes de l'article 93 du code général des impôts : " (...) IV. 1. Pour l'application des dispositions du premier alinéa du I aux immeubles acquis dans les conditions prévues au 6 de l'article 93 et précédemment donnés en sous-location, l'imposition de la plus-value consécutive au changement de régime fiscal peut, sur demande expresse du contribuable, être reportée au moment où s'opérera la transmission de l'immeuble ou, le cas échéant, la transmission ou le rachat de tout ou partie des titres de la société propriétaire de l'immeuble ou sa dissolution. " 3. Par une décision du 10 février 2021, l'administration a décidé d'accorder à M. A... un dégrèvement d'un montant de 33 743 euros correspondant aux suppléments d'imposition procédant de la rectification résultant du refus de report d'imposition de la plus-value à court terme sur le fondement du 1. du IV de l'article 93 du code général des impôts. 4. En raison de l'octroi par l'administration fiscale en cours d'instance du report d'imposition de la plus-value et du dégrèvement consécutif prononcé, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à la décharge des rappels de prélèvement libératoire assignés à M. A... au titre de l'année 2013. Ce non-lieu à statuer s'étend nécessairement au litige relatif au montant de la plus-value imposable qui est l'assiette du prélèvement libératoire mis à la charge du requérant. Par voie de conséquence, il n'y a donc plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge de M. A... à hauteur du dégrèvement ainsi prononcé. Sur le surplus des conclusions de la requête en ce qui concerne la réintégration d'une fraction des loyers : 5. Il résulte des mentions de la proposition de rectification que la SCI Le Progrès a levé l'option d'achat le 21 mai 2010, pour un prix de 15 centimes d'euros, d'un bien immobilier situé sur la commune du Havre qui avait été pris en crédit-bail auprès de la société anonyme (SA) Finamur le 30 juin 1998, d'une valeur de 228 673,53 euros. L'administration a estimé qu'en application des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts, l'exercice de la levée d'option d'achat par la SCI Le Progrès aurait dû conduire celle-ci à réintégrer la fraction des loyers antérieurement déduits, soit en 2013 la différence entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat diminué du prix de la levée d'option et les amortissements techniques que le preneur aurait pu déduire s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. L'administration a donc calculé une réintégration de 91 469 euros qu'elle a rapportée aux bénéfices non commerciaux de l'année 2013 de la société. 6. Aux termes de l'article 239 sexies du code général des impôts : " I. Lorsque le prix d'acquisition, par le locataire, de l'immeuble pris en location par un contrat de crédit-bail conclu avec une société immobilière pour le commerce et l'industrie est inférieur à la différence existant entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat et le montant total des amortissements que le locataire aurait pu pratiquer s'il avait été propriétaire du bien depuis cette date, le locataire acquéreur est tenu de réintégrer, dans les résultats de son entreprise afférents à l'exercice en cours au moment de la cession, la fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat et correspondant à ladite différence diminuée du prix de cession de l'immeuble (...) ". Aux termes de l'article 239 sexies B du même code : " Les dispositions du premier alinéa du I et celles du paragraphe II de l'article 239 sexies sont applicables aux locataires qui acquièrent des immeubles qui leur sont donnés en crédit-bail par des sociétés ou organismes autres que des sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie ". 7. Il résulte des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts que la réintégration dans les résultats imposables d'une fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat intervient lors de l'exercice en cours au moment de la cession de l'immeuble. 8. En premier lieu, M. A... ne conteste pas le principe de la réintégration d'une fraction des loyers sur le fondement de l'article 239 sexies du code général des impôts mais soutient que cette réintégration devait être effectuée au titre l'année de levée de l'option d'achat du contrat de crédit-bail en 2010. Toutefois, il ressort des mentions du contrat de crédit-bail immobilier conclu le 30 juin 1998 que le paragraphe 302.3 stipulait que " la demande de réalisation de la vente n'emportera pas transfert de propriété, lequel s'opérera par l'acte de vente notarié ". Ainsi, si la société a levé l'option par courrier du 21 mai 2010, l'acte notarié de vente à titre de levée d'option n'a été signé que le 25 janvier 2013 et stipule dans le paragraphe " Propriété jouissance " que " l'acquéreur sera propriétaire du bien vendu à compter de ce jour ". Par suite, l'immeuble doit être regardé comme ayant été cédé en 2013 et c'est à bon droit que l'administration a réintégré la fraction des loyers dans les résultats de l'exercice clos en 2013. 9. En second lieu, pour calculer le montant des loyers à réintégrer de 91 469 euros, l'administration s'est fondée sur une période de douze ans pour calculer le montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. Cette période de douze ans s'étend de la signature de l'acte de crédit-bail le 30 juin 1998 jusqu'à la date de la levée d'option le 21 mai 2010. Le requérant fait valoir, à titre subsidiaire, que le calcul du montant de la réintégration est erroné et que la fraction des loyers à réintégrer doit être limitée à un montant total de 60 598 euros au lieu de 91 469 euros, correspondant à un montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant une période de 14,7 ans, soit au-delà de la date de levée de l'option jusqu'à la date de réalisation de la vente le 25 janvier 2013. 10. Toutefois, il résulte des dispositions de l'article 239 sexies du code général des impôts que la réintégration dans les résultats imposables d'une fraction des loyers versés s'entend de la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat du crédit-bail, c'est-à-dire de la période où il a versé les loyers de crédit-bail en exécution du contrat. Or il résulte des mentions de la proposition de rectification que la SCI Le Progrès a signé un contrat de crédit-bail pour un immeuble auprès de la société anonyme (SA) Finamur le 30 juin 1998 d'une valeur de 228 673,53 euros et d'une durée de douze ans. Par suite, le contrat de crédit-bail a pris fin le 30 juin 2010, la SCI Le Progrès ayant levé l'option d'achat le 21 mai 2010. En conséquence, à cette date, la SCI Le Progrès a cessé d'être tenue de verser des loyers en exécution du contrat de crédit-bail et, en tout état de cause, elle n'apporte pas la preuve ni que le bail a été prorogé ni qu'elle a continué de verser des loyers au-delà du 30 juin jusqu'à la signature de l'acte de vente le 25 janvier 2013. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que doit être prise en compte, pour le calcul du montant des amortissements techniques, la période courant du 30 juin 2010 au 25 janvier 2013. En conséquence, c'est à bon droit que, pour fixer le montant des loyers à réintégrer à la somme de 91 469 euros, l'administration s'est fondée sur une période de douze ans pour calculer le montant des amortissements techniques que le preneur aurait pratiqués s'il avait été propriétaire de l'immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat. 11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande aux fins de décharge des impositions supplémentaires en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante à l'instance pour l'essentiel, la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A... à concurrence de la somme de 33 743 euros correspondant au de rappel de prélèvement libératoire mis à sa charge au titre de l'année 2013. Article 2 : La somme de 1 000 (mille) euros est mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. B...La conseillère la plus ancienne Signé : D. Bureau La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Suzanne Pinto Carvalho N°20DA01120 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... E... et M. A... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 à 2015. Par un jugement n° 1709414, 1802783, 1903339, 1903341 du 10 août 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 10 octobre 2020, M. B... E... et M. A... C..., représentés par Me Guey, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1709414, 1802783, 1903339, 1903341 du tribunal administratif de Lille ; 2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - l'existence même des distributions est contestée ; - M. E... ne peut être regardé comme maitre de l'affaire dès lors que l'administration n'établit pas la confusion de patrimoine et le désintérêt des autres associés ; - la majoration appliquée de 40% est contestée. Par un mémoire en défense enregistré le 13 novembre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les autres moyens de la requête de M. E... et M. C... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 2 décembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 6 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Guey Balgairies, avocat de M. E... et M. C.... Considérant ce qui suit : 1. La SARL Ladenime, qui exercice une activité de restauration à Lille et dont M. E... est le gérant, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au cours de laquelle l'administration a mis en évidence des manipulations sur le système informatique de gestion des caisses enregistreuses qui a permis d'occulter des recettes payées en espèces. En conséquence, le vérificateur a dressé un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité et reconstitué et rehaussé le chiffre d'affaires de la société et les bénéfices pour les exercices clos de 2012 à 2014. En conséquence, l'administration a regardé ces suppléments de bénéfices comme des revenus distribués entre les mains du gérant de la société, M. E... et a assujetti M. E... et M. C..., imposés sous une cote commune, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2012 à 2014, assorties de la majoration de 40 %, pour un montant total de 102 284 euros. Par ailleurs, une autre société, la SARL Delanime, dont M. E... est également le gérant et qui exerce également une activité de restauration à Lille, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a rehaussé le chiffre d'affaires de la société pour les exercices clos de 2013 à 2015 et a regardé ces suppléments de bénéfices comme des revenus distribués entre les mains du gérant de la société, M. E... et a assujetti M. E... et M. C... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2013 à 2015, assorties de la majoration de 40 %, pour un montant total de 289 281 euros. M. E... et M. C..., imposés sous une cote commune, relèvent appel du jugement n° 1709414, 1802783, 1903339, 1903341 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté le surplus de leurs conclusions aux fins de décharge des impositions supplémentaires en litige. Sur l'existence des revenus distribués : 2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". 3. En cas de refus des propositions de rectifications par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire de sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle. 4. S'agissant de la SARL Ladenime, il résulte des mentions des propositions de rectification adressées aux requérants que l'administration a relevé des anomalies constatées de manière récurrente et massive sur l'ensemble de la période vérifiée dans la comptabilité de la SARL Ladenime, qui étaient la marque d'une modification a posteriori des données de caisse par l'utilisation du mode " maintenance " du logiciel pour éluder une partie des recettes. Ces manipulations constituent de graves irrégularités dans la tenue de la comptabilité de la SARL Ladenime qui ont amené le vérificateur à écarter cette comptabilité comme dépourvue de caractère probant et à reconstituer le chiffre d'affaires de la société. Pour reconstituer le chiffre d'affaires, l'administration a retenu, au titre des périodes pour lesquelles elles ont été fournies, les données de caisse contenues dans la table informatique intitulée " tireg " du logiciel de caisse, qui reprend de façon exhaustive et précise l'ensemble du chiffre d'affaires toutes taxes comprises encaissé et exempt de toute manipulation. Toutefois, l'absence de justificatifs sur la période du 1er avril 2011 au 31 août 2013 et du 7 janvier au 2 mars 2014 n'a pas permis à l'administration d'utiliser la même méthode pour ces périodes. L'administration a donc établi un rapport entre les recettes éludées, qui sont récurrentes sur toute la période vérifiée, et les recettes déclarées sur les périodes pour lesquelles le chiffrage était possible à l'aide de la table informatique intitulée " tireg " du logiciel de caisse. Puis elle a appliqué ce rapport de 5,78% aux recettes déclarées pour les périodes pour lesquelles aucun justificatif n'a été transmis et déterminé une minoration de chiffre d'affaires de 43 097 euros pour l'exercice clos en 2012, 42 031 euros pour l'exercice clos en 2013 et 44 404 euros pour l'exercice clos en 2014. 5. S'agissant de la SARL Delanime, il résulte des mentions des propositions de rectification adressées aux requérants que l'administration a relevé les mêmes anomalies dans la comptabilité de la SARL Delanime que dans la SARL Ladenime et qui étaient la marque d'une modification a posteriori des données de caisse par l'utilisation du mode " maintenance " du logiciel pour éluder une partie des recettes. Ces manipulations constituent de graves irrégularités dans la tenue de la comptabilité de la SARL Delanime, qui ont amené le vérificateur à écarter cette comptabilité comme dépourvue de caractère probant et à reconstituer le chiffre d'affaires de la société selon les mêmes modalités à partir de la table informatique intitulée " tireg " du logiciel de caisse. La reconstitution de chiffre d'affaires a ainsi pu mettre en évidence un pourcentage moyen de chiffre d'affaires éludé de 6,67%, qui a été appliqué au montant du chiffre d'affaires déclaré pour les périodes non couvertes par les sauvegardes des fichiers de caisse. Le vérificateur a ainsi pu déterminer une minoration de chiffre d'affaires de 82 099 euros pour l'exercice clos en 2013, de 90 881 euros pour l'exercice clos en 2014 et de 95 388 euros pour l'exercice clos en 2015. 6. En premier lieu, les requérants ne contestent pas sérieusement l'existence des manipulations volontaires affectant la comptabilité de la SARL Ladenime et de la SARL Delanime. Ils se bornent à indiquer que la suppression des tickets pouvait résulter d'erreurs ou être la conséquence de la formation d'un salarié à l'utilisation du logiciel de caisse. Toutefois, l'administration fait valoir que l'horodatage des tickets supprimés révèle que les manipulations du logiciel informatique permettant de supprimer des tickets de caisse intervenaient systématiquement les lundis, hors de la présence du personnel de l'établissement et une à deux semaines après la clôture de la caisse et portait quasi exclusivement sur des tickets de caisse réglés en espèces. Ainsi, une erreur de saisie ou la formation du personnel ne permet pas d'expliquer les suppressions qui intervenaient systématiquement en dehors des heures d'ouverture. Dès lors, le moyen doit être écarté. 7. En second lieu, si les requérants font valoir qu'une reconstitution conduisant à un pourcentage de redressement de moins de 6% ne peut être regardée comme suffisante pour justifier les rappels, l'administration fait valoir que le pourcentage moyen de chiffre d'affaires éludé a été déterminé d'après la comparaison entre les données de caisse effectivement fournies et le montant du chiffre d'affaires retracé dans la table informatique intitulée " tireg " du logiciel de caisse, exempt de toute manipulation. Dès lors, le moyen doit être écarté. 8. Il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'existence des suppléments de bénéfices de la SARL Ladenime et de la SARL Delanime. Par suite, c'est à bon droit qu'elle a regardé ces suppléments de bénéfices comme des revenus distribués imposables sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. Sur l'appréhension des revenus distribués par M. E... : 9. En premier lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la démonstration de l'appréhension de revenus distribués par le maitre de l'affaire ne présuppose pas la démonstration par l'administration fiscale d'une quelconque confusion de patrimoine entre la société distributrice et le bénéficiaire des revenus distribués mais, ainsi qu'il a été déjà dit, la preuve par l'administration que le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres, de sorte qu'il est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle. 10. L'administration fait valoir que M. E... détenait 25 % des parts sociales de la société Catzam, actionnaire à 95,20 % de la société Ladenime et à 95% de la société Delanime, qu'il était le seul gérant de ces deux sociétés qu'il était le seul à détenir une procuration sur les comptes bancaires de ces sociétés. Elle fait également valoir que ce dernier avait seul accès aux coffres contenant les valeurs résultant des recettes journalières de la société Delanime. 11. Pour contester la qualité de seul maître de l'affaire de M. E..., les requérants soutiennent que M. D..., associé et dirigeant de la société Catzam, de même que le directeur salarié de la société Delanime, bénéficient également d'une procuration sur les comptes bancaires de cette société, qu'en son absence, M. D... réalisait " les caisses " et les dépôts d'argent à la banque et enfin qu'ils disposaient ensemble du code du coffre-fort contenant les valeurs résultant des recettes journalières de la société Delanime. 12. D'une part, ces éléments concernent la SARL Delanime et sont donc sans influence sur les revenus distribués par la SARL Ladenime. D'autre part, si les requérants produisent, à l'appui de leur moyen, quelques fiches éparses récapitulant des recettes journalières réalisées en 2013, 2014 et 2015, des fiches correspondant à des dépôts d'argent sur un compte bancaire de la société Delanime et des fiches attestant du retrait d'une somme d'argent les 9 et 26 avril 2013 sur l'un des comptes bancaires de la société Delanime, ces éléments, qui ne permettent d'identifier ni le nom ni la qualité de la personne à l'origine de ces opérations, sont insuffisants pour établir que M. D... et le directeur salarié de la société Delanime disposaient d'un pouvoir de gestion de cette société équivalent à celui de M. E.... En outre, il résulte de l'instruction, notamment de la réponse aux observations du contribuable du 9 mai 2017, et il n'est au demeurant pas contesté, que M. E... est le représentant légal de la société Delanime depuis sa création le 17 mai 2007, qu'il préside l'assemblée des associés, que les droits des autres associés de la société Catzam et Delanime sont limités aux décisions portant sur la distribution de dividendes lors des assemblées générales et que M. E... dispose sans réserve des fonds de la société. Il résulte également de l'instruction que le vérificateur n'a identifié aucun autre associé partageant avec M. E... ces prérogatives. 13. Il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que M. E... était seul maître de l'affaire et qu'il est ainsi présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la SARL Ladenime et la SARL Delamine. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a imposé ces distributions entre les mains de M. E... en sa qualité de seul maître de l'affaire sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. Sur les pénalités : 14. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré / (...) c. 80% en cas de manœuvres frauduleuses (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du Livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. ". 15. L'administration a appliqué la majoration de 40% pour manquement délibéré aux revenus distribués de la SARL Ladenime et la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses aux revenus distribués de la SARL Delanime. 16. Pour justifier l'application de la majoration de la majoration de 80% pour manœuvres frauduleuses, l'administration fait valoir que M. E..., gérant de la SARL Delanime, a mis en place un système élaboré de minoration de recettes par une utilisation détournée des fonctionnalités du mode " maintenance " du logiciel de gestion de caisse, par la suppression une à trois semaines après la clôture de la journée sur des recettes encaissées en espèces et qui a eu pour conséquence de minorer la déclaration de revenus d'un montant de 82 100 euros pour l'année 2013, 90 881 pour l'année 2014 et 95 388 euros pour l'année 2015. Ce faisant, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'intention délibérée du contribuable d'égarer le pouvoir de contrôle de l'administration, justifiant ainsi l'application de la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses. 17. Pour justifier l'application de la majoration de la majoration de 40% pour manquement délibéré, l'administration fait valoir que M. E..., en tant que gérant et maitre de l'affaire de la SARL Ladenime, a fait usage d'une fonction permissive de la caisse enregistreuse, qu'il n'a pas conservé les données informatiques de caisse ni présenté les pièces justificatives de recettes au vérificateur. Ce faisant, l'administration doit être regardée comme apportant également la preuve de l'intention délibérée du contribuable d'éluder le paiement de l'impôt, justifiant l'application de la majoration de 40% pour manquements délibérés alors même que l'administration aurait été fondée à appliquer la majoration de 80% pour manœuvres frauduleuses sur ce chef de rectification. 18. Il résulte de ce qui précède que MM. E... et C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté leurs conclusions tendant à la décharge des impositions supplémentaires en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 19. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de MM. E... et C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de MM. E... et C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et M. A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. F...La conseillère la plus ancienne, Signé : D. Bureau La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Suzanne Pinto Carvalho N°20DA01582 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) Etablissement Barimar Agraf Métal a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 à 2017 dans les rôles de la commune de Pont-Audemer. Par un jugement n° 1804595 du 24 août 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 11 novembre 2020, et un mémoire, enregistré le 25 février 2021, la SAS Etablissement Barimar Agraf Métal, représentée par Me Roulin, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1804595 du tribunal administratif de Rouen ; 2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 à 2017 en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que le rôle prépondérant du facteur humain dans l'activité de la société lui enlève la qualification d'établissement industriel ; les moyens techniques utilisés ont un caractère accessoire. Par un mémoire en défense enregistré le 26 janvier 2021 et un mémoire du 23 mars 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet des conclusions de la requête. Il soutient que les moyens de la requête de la SAS Etablissement Barimar Agraf Métal ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 2 décembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 6 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La SAS Ets Barimar Agraf Métal, qui exerce une activité de réparation de pièces métalliques et de machines industrielles, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration l'a assujettie à la cotisation foncière des entreprises au titre des années 2014 à 2017 dans les rôles de la commune de Pont-Audemer, dont elle a vainement demandé la décharge au tribunal administratif de Rouen. Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires : 2. D'une part, aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11°, 12° et 13° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période. / (...) / La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. / Pour le calcul de l'impôt, la valeur locative des immobilisations industrielles définie à l'article 1499 est diminuée de 30 %. / (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". Revêtent un caractère industriel, au sens de cet article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant. 4. Il résulte de l'instruction, en premier lieu, que la société SAS Ets Barimar Agraf Métal, qui exerce une activité de réparation de pièces métalliques et de machines industrielles, n'exerce pas, ce faisant, une activité de fabrication ou de transformation de biens corporels mobiliers. Dès lors, pour qu'elle puisse recevoir la qualification d'établissement industriel au sens des dispositions précitées, le rôle des matériels et outillages qu'elle met en œuvre doit être prépondérant. 5. En second lieu, pour les besoins de son activité, la société SAS Ets Barimar Agraf Métal utilise des matériels d'usinage et de manutention de grandes capacités, de type aléseuses, tour horizontal, fraiseuses, qui permettent à la société de manutentionner et d'usiner des pièces pouvant peser jusqu'à trente tonnes. Ces outils figurent à l'actif de la société pour une valeur de 981 543 euros à la clôture de l'exercice 2014, de 1 009 174 euros à la clôture de l'exercice 2015 et de 1 053 758 euros à la clôture de l'exercice 2016. Si la société requérante fait valoir le rôle indispensable de ses ouvriers dans le processus de réparation, il résulte toutefois de l'instruction qu'elle ne pourrait procéder à ces réparations sans les importants moyens techniques dont elle dispose. Par suite, les installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre par la société SAS Ets Barimar Agraf Métal doivent être regardées comme jouant un rôle prépondérant dans l'activité exercée par cette société dans son établissement de Pont-Audemer. La circonstance, alléguée par la société requérante, que la valeur unitaire moyenne de chaque machine est faible reste sans incidence dès lors que c'est l'ensemble des matériels et outillages qu'elle met en œuvre qui doit être appréhendé pour que leur rôle puisse être qualifié ou non de prépondérant dans l'activité. Est également sans incidence la circonstance que le taux d'occupation des matériels et outillages est inférieur à 40 %. Dès lors, c'est à bon droit que le service a évalué la valeur locative de cet établissement sur le fondement des dispositions précitées de l'article 1499 du code général des impôts, applicables aux immobilisations industrielles pour le calcul de l'assiette de la taxe foncière au titre des années en litige. 6. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Ets Barimar Agraf Métal n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des impositions en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 7. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de la SAS Ets Barimar Agraf Métal tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de la SAS Ets Barimar Agraf Métal est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Etablissement Barimar Agraf Métal et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. A...La conseillère la plus ancienne Signé : D. Bureau La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Suzanne Pinto Carvalho N°20DA01760 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) Ladenime a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés pour la période d'avril 2011 à mars 2015. Par un jugement n° 1709414, 1802783, 1903339, 1903341 du 10 août 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 10 octobre 2020, la SARL Ladenime, représentée par Me Guey, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1709414, 1802783, 1903339, 1903341 du tribunal administratif de Lille ; 2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'avis de mise en recouvrement ne peut pas porter sur une période non visée par l'avis de vérification de comptabilité ; or l'avis de mise en recouvrement fait état au titre de la période incriminée du 04-2011 à 03-2015 et l'avis de vérification de comptabilité concernait la période du 1er avril 2011 au 28 février 2015 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; - la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas été saisie et la charge de la preuve incombe à l'administration, laquelle ne l'a pas apportée compte tenu de la faiblesse du pourcentage du redressement ; - une erreur de saisie ou la formation du personnel permet d'expliquer les suppressions constatées ; - une reconstitution conduisant à un pourcentage de moins de 6% de redressement ne peut être regardée comme suffisante pour justifier les rappels ; - les pénalités de 40% sont contestées au motif que la pratique d'annulations par le recours au mode maintenance n'a pas été établie sur les périodes en litige, les redressements n'étant consécutifs qu'à une extrapolation aux autres périodes du pourcentage déterminé sur la période du 3 mars 2014 au 31 mars 2014 et du 1er avril 2014 au 28 février 2015. En outre, les redressements évalués à moins de 6% du chiffre d'affaires, ne présentent pas donc le caractère d'importance requis pour l'application des pénalités pour manquement délibéré. Par un mémoire en défense enregistré le 20 novembre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les autres moyens de la requête de la SARL Ladenime ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 15 décembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 14 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Guey Balgairies, avocat de la SARL Ladenime. Considérant ce qui suit : 1. La SARL Ladenime, qui exerce une activité de restauration à Lille, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au cours de laquelle l'administration a mis en évidence des manipulations sur le système informatique de gestion des caisses enregistreuses qui a permis d'occulter une partie des recettes payées en espèces. En conséquence, le vérificateur a établi le 26 juin 2015 un procès-verbal de non-conservation des documents comptables par la société Ladenime en méconnaissance des articles 54 du code général des impôts, 13 et L. 102 B du livre des procédures fiscales. Le 8 décembre 2015, l'administration a également dressé un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité selon les modalités prévues au paragraphe II de l'article 47 A du livre des procédures fiscales, applicable en cas de tenue de comptabilité informatisée. Par suite, l'administration a reconstitué le chiffre d'affaires de la société pour les exercices clos de 2012 à 2014 et a rappelé des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er avril 2011 au 28 février 2015 en suivant la procédure de rectification contradictoire. Sur la charge de la preuve : 2. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " (...) Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ou du comité. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69. ". 3. En l'espèce, l'administration a relevé dans la proposition de rectification que des anomalies constatées de manière récurrente et massive sur l'ensemble de la période vérifiée étaient la marque d'une modification a posteriori des données de caisse par l'utilisation du mode " maintenance " du logiciel pour éluder une partie des recettes. Ces manipulations constituent de graves irrégularités dans la tenue de la comptabilité. La SARL Ladenime ne conteste pas sérieusement que sa comptabilité comportait ces graves irrégularités. Par suite, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve des graves irrégularités entachant la comptabilité de la SARL Ladenime. 4. En l'espèce, la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires n'ayant pas été saisie, l'administration supporte la charge de la preuve du bien-fondé des rectifications. Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires : 5. Pour reconstituer le chiffre d'affaires, l'administration a retenu, au titre des périodes pour lesquelles elles ont été fournies, les données de caisse contenues dans la table informatique intitulée " tireg " du logiciel de caisse, qui reprend de façon exhaustive et précise l'ensemble du chiffre d'affaires toutes taxes comprises encaissé et exempt de toute manipulation. Toutefois, l'absence de justificatifs sur la période du 1er avril 2011 au 31 août 2013 et du 7 janvier 2014 au 2 mars 2014 n'a pas permis à l'administration d'utiliser la même méthode pour ces périodes. L'administration a donc établi un rapport entre les recettes éludées, qui sont récurrentes sur toute la période vérifiée, et les recettes déclarées sur les périodes pour lesquelles le chiffrage était possible à l'aide de la table informatique intitulée " tireg " du logiciel de caisse. Puis elle a appliqué ce rapport aux recettes déclarées pour les périodes pour lesquelles aucun justificatif n'a été transmis et déterminé un chiffre d'affaires reconstitué de 788 720 euros pour l'exercice clos en 2012, de 769 215 euros pour l'exercice clos en 2013, 811 189 euros pour l'exercice clos en 2014 et de 793 673 euros pour l'exercice clos en 2014. 6. En premier lieu, la SARL Ladenime ne conteste pas sérieusement l'existence des manipulations volontaires affectant sa comptabilité. Elle se borne à indiquer que la suppression des tickets pouvait résulter d'erreurs ou être la conséquence de la formation d'un salarié à l'utilisation du logiciel de caisse. Toutefois, l'administration fait valoir que l'horodatage des tickets supprimés révèle que les manipulations du logiciel informatique permettant de supprimer des tickets de caisse intervenaient systématiquement les lundis, hors de la présence du personnel de l'établissement et une à deux semaines après la clôture de la caisse et portait quasi exclusivement sur des tickets de caisse réglés en espèces. Ainsi, une erreur de saisie ou la formation du personnel ne permet pas d'expliquer les suppressions qui intervenaient systématiquement en dehors des heures d'ouverture. Dès lors, le moyen doit être écarté. 7. En second lieu, si la société requérante fait valoir qu'une reconstitution conduisant à un pourcentage de redressement de moins de 6% ne peut être regardée comme suffisante pour justifier les rappels, l'administration fait valoir que le pourcentage moyen de chiffre d'affaires éludé est effectivement de 5,78% mais ce taux a été déterminé d'après la comparaison entre les données de caisse effectivement fournies et le montant du chiffre d'affaires retracé dans la table informatique intitulée " tireg " du logiciel de caisse, exempt de toute manipulation. Par suite, le moyen doit être également écarté. 8. Il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'existence du chiffre d'affaires reconstitué pour la période du 1er avril 2011 au 28 février 2015. Par suite, c'est à bon droit qu'elle a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée collectée sur le chiffre d'affaires ainsi reconstitué. Sur la régularité de l'avis de mise en recouvrement : 9. Aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la procédure en litige : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité. / Un avis de mise en recouvrement est également adressé par le comptable public pour la restitution des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature mentionnés au premier alinéa et indûment versés par l'État. (...) ". Aux termes de l'article R. 256-1 du même livre, dans sa rédaction alors applicable : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. / Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification contradictoire, il fait référence soit à la proposition de rectification prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications (...) ". Si, depuis l'entrée en vigueur du décret du 20 avril 2000 modifiant l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales définissant le contenu de l'avis de mise en recouvrement, la mention de la période d'imposition dans l'avis de mise en recouvrement consécutif à une procédure de rectification n'est plus prescrite, cet avis et la proposition de rectification à laquelle il doit continuer de faire référence ne sauraient induire en erreur le contribuable sur la période d'imposition en litige sans priver ce dernier d'une garantie. 10. Il ressort des mentions de l'avis de mise en recouvrement du 31 octobre 2016 que le rappel de taxe sur la valeur ajoutée concerne la période d'avril 2011 à mars 2015. Or si la vérification de comptabilité de la société n'a porté que sur la période du 1er avril 2011 au 28 février 2015, ce même avis fait également référence à la proposition de rectification du 18 décembre 2015, laquelle précise notamment en page 29 que les droits rappelés portent sur la période du 1er avril 2011 au 28 février 2015 ainsi que leur montant. Le montant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis en recouvrement est identique au montant mentionné dans la proposition de rectification. Cette discordance sur la période n'a pas été source de confusion pour la société Ladenime qui a pu identifier le montant et l'origine des droits, pénalités et intérêts de retard dont l'Etat poursuivait le recouvrement. En particulier, la société a correctement identifié dans sa réclamation du 18 décembre 2017 la période d'imposition courant du 1er avril 2011 au 28 février 2015, malgré la mention erronée de l'avis de mise en recouvrement. Ainsi, la mention erronée de la période concernée sur l'avis de mise en recouvrement constitue une erreur matérielle sans influence sur la régularité de cet avis. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement doit être écarté. Sur les pénalités : 11. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré / (...) c. 80% en cas de manœuvres frauduleuses (...) ". 12. L'administration a appliqué la majoration de 80 % sur le rappel de taxe sur la valeur ajoutée afférent à la période du 1er avril 2013 au 28 février 2015. Pour justifier l'application de cette majoration, l'administration fait valoir que le contrôle des données informatiques a permis de mettre en évidence une annulation de tickets de caisse tout au long de la période vérifiée et que cette suppression avait été rendue possible par la manipulation du système informatique de gestion de caisse en mode " maintenance ". En particulier, l'administration a établi que ces manipulations avaient lieu principalement les lundis avant l'ouverture du restaurant et une à deux semaines après la clôture de la caisse et qu'elles portaient quasi exclusivement sur des tickets de caisse réglés en espèces. Par suite, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'intention délibérée de la société d'égarer et restreindre le pouvoir de contrôle de l'administration par l'utilisation du mode " maintenance " du logiciel. 13. L'administration a appliqué la majoration de 40 % sur le rappel de taxe sur la valeur ajoutée afférent à la période du 1er avril 2011 au 31 mars 2013. Pour justifier l'application de cette majoration, l'administration fait valoir que la société a fait usage d'une fonction permissive de la caisse enregistreuse, qu'elle n'a présenté aucune donnée informatique du système de caisse pour la période du 1er avril 2011 au 31 août 2013 et du 7 janvier au 2 mars 2014, ni les bandes de contrôle papier. Par suite, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'intention délibérée de la société d'éluder le paiement de l'impôt dû. 14. Il résulte de ce qui précède que la SARL Ladenime n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à la décharge des impositions supplémentaires en litige. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de la SARL Ladenime est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Ladenime et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. A...La conseillère la plus ancienne, Signé : D. Bureau La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Suzanne Pinto Carvalho N°20DA01580 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société civile immobilière (SCI) AGC a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision de la commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels de la Seine-Maritime publiée le 6 décembre 2019, en tant qu'elle n'affecte pas d'un coefficient de localisation négatif les parcelles cadastrales de la section TK n° 9, n° 10, n° 12, n° 72, n° 114, n° 116, n° 117, n° 122, n° 151, n° 162, n° 165, n° 166, n° 169 et n° 172 situées dans la commune du Havre, et d'enjoindre à la commission d'appliquer un coefficient de localisation de 0,85 aux parcelles en cause. Par un jugement n° 2000462 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision de la commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels de la Seine-Maritime publiée le 6 décembre 2019, en tant qu'elle n'affecte pas d'un coefficient de localisation négatif les parcelles cadastrées section TK n° 9, n° 10, n° 12, n° 72, n° 114, n° 116, n° 117, n° 122, n° 151, n° 162, n° 165, n° 166, n° 169 et n° 172 situées dans la commune du Havre, et enjoint à la commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels de la Seine-Maritime de déterminer les coefficients de localisation négatifs applicables aux parcelles visées à l'article 1er du jugement, dans le délai de cinq mois à compter de la notification du présent jugement. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 2 septembre 2020 et des mémoires enregistrés les 8 janvier et 9 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour d'annuler le jugement n° 2000462 du 16 juin 2020 du tribunal administratif de Rouen et de rejeter les demandes de la SCI AGC. Il soutient que : - en jugeant que la baisse d'attractivité durable des magasins de la galerie commerciale du " Grand Cap " place les parcelles d'assise de ces locaux commerciaux dans une situation particulière au sens des dispositions du 2 du B du II de l'article 1498 du code général des impôts, justifiant l'application d'un coefficient de localisation négatif, le tribunal administratif de Rouen a entaché sa décision d'une erreur de droit au regard de ces dispositions ; en effet, la " situation particulière " des parcelles mentionnée à l'article 1498 précité ne renvoie aucunement à des considérations d'ordre économique, relatives notamment à la rentabilité des locaux commerciaux qui y sont implantés, et il résulte de la dénomination même du " coefficient de localisation " que celui-ci a pour objet de prendre en considération les particularités de configuration ou de situation géographique des parcelles d'assise des locaux à évaluer de nature à avoir une incidence sur leur valeur locative ; - le délai d'appel n'a commencé à courir que le 11 juillet 2020 date de la seconde notification du jugement pour expirer le 11 septembre 2020 de sorte que la requête d'appel enregistrée le 2 septembre 2020 est recevable. Par des mémoires en défense enregistrés le 17 novembre 2020, le 27 janvier 2021 et le 19 février 2021, la SCI AGC, représentée par Me Souyeaux, conclut au rejet de la requête du ministre et à la condamnation de l'Etat à payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la requête du ministre est irrecevable le ministre disposant d'un délai de droit commun de deux mois pour faire appel des jugements rendus en excès de pouvoir à compter de la notification du jugement le 16 juin 2020 ; - les parcelles sur lesquelles se situe la Galerie Commerciale de la société bénéficient d'une "situation particulière" au sein du secteur TK conformément aux dispositions du 2 du B du II de l'article 1498 du code général des impôts, justifiant l'application d'un coefficient de localisation négatif pour l'année 2020. Par une ordonnance du 2 décembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 6 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificatives pour 2010 ; - le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Aux fins de l'établissement des impôts directs locaux, la commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels de la Seine-Maritime a arrêté, après avis des commissions communales et intercommunales des impôts directs, la liste des parcelles affectées d'une modification des coefficients de localisation. Conformément aux articles 334 A et 371 ter S de l'annexe II au code général des impôts, cette liste a été publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Seine-Maritime n° 76-2019-210 du 6 décembre 2019. La SCI AGC a contesté cette décision en tant qu'elle n'affecte pas d'un coefficient de localisation négatif les parcelles situées sur le territoire de la commune du Havre, cadastrées TK n° 9, n° 10, n° 12, n° 72, n° 114, n° 116, n° 117, n° 122, n° 151, n° 162, n° 165, n° 166, n° 169 et n° 172, sur lesquelles est implantée la galerie commerciale dite du Grand Cap. Le ministre relève appel du jugement du tribunal administratif de Rouen qui a partiellement fait droit à la demande d'annulation pour excès de pouvoir formé par la société AGC. Sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la requête d'appel du ministre : 2. Il résulte des dispositions du XV de l'article 34 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificatives pour 2010 que le tribunal administratif se prononce sur les recours pour excès de pouvoir contre les décisions prises conformément aux VII et VIII du même article par la commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels. 3. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 à R. 751-4-1. " Aux termes de l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales : " A compter de la notification du jugement du tribunal administratif qui a été faite au directeur du service de la direction générale des finances publiques ou de la direction générale des douanes et droits indirects qui a suivi l'affaire, celui-ci dispose d'un délai de deux mois pour transmettre, s'il y a lieu, le jugement et le dossier au ministre chargé du budget./ Le délai imparti pour saisir la cour administrative d'appel court, pour le ministre, de la date à laquelle expire le délai de transmission prévu à l'alinéa précédent ou de la date de la signification faite au ministre. ". 4. Il résulte de ces dispositions que le délai dont dispose le ministre pour faire appel d'un jugement statuant sur une requête en excès de pouvoir est le délai de droit commun de deux mois fixé par les dispositions précitées de l'article R. 811-2 du code de justice administrative et non le délai prévu à l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales, lequel n'est applicable qu'à l'appel des jugements statuant sur une requête d'un contribuable tendant à la décharge ou la réduction d'une imposition. Il résulte également de ces dispositions que le jugement du tribunal administratif, même statuant en excès de pouvoir, doit être communiqué au directeur du service de la direction générale des finances publiques qui a suivi l'affaire. Le délai de deux mois de droit commun prévu à l'article R. 811-2 du code de justice administrative commence à courir à compter de cette notification au directeur du service de la direction générale des finances publiques. 5. Aux termes de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative : " Les parties ou leur mandataire sont réputés avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été ainsi adressé, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de huit jours à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties ou leur mandataire sont alertés de toute nouvelle communication ou notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par eux. ". L'envoi d'un message électronique aux parties et à leurs mandataires, en l'absence de demande contraire de leur part, n'est prévue par les dispositions de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative qu'à titre d'information et est sans incidence sur les conditions dans lesquelles les communications et notifications sont réputées reçues, conformément aux dispositions du même article. La circonstance qu'un tel message n'aurait pas été reçu est ainsi sans incidence sur la régularité de la procédure. 6. Aux termes de l'article R. 741-11 du code de justice administrative : " Lorsque le président du tribunal administratif constate que la minute d'un jugement ou d'une ordonnance est entachée d'une erreur ou d'une omission matérielle, il peut y apporter, par ordonnance rendue dans le délai d'un mois à compter de la notification aux parties de ce jugement ou de cette ordonnance, les corrections que la raison commande. La notification de l'ordonnance rectificative rouvre le délai d'appel contre le jugement ou l'ordonnance ainsi corrigés. ". La correction d'une erreur matérielle effectuée sur le fondement de ces dispositions ne conduit à différer le point de départ du délai d'appel que dans la mesure où cette correction, soit par elle-même, soit de façon indivisible avec d'autres parties du jugement ou de l'ordonnance qui en fait l'objet, a une incidence sur la portée qui était la leur initialement. 7. D'une part, il résulte de l'instruction que le jugement du 16 juin 2020 a été notifié au directeur régional des finances publiques de la région Normandie, qui a suivi l'affaire en première instance au nom de l'Etat, le 16 juin 2020 à travers l'application " Télérecours ". Par suite, la notification le 16 juin 2020 au directeur régional des finances publiques de la région Normandie a été de nature à faire courir le délai de droit commun de deux mois pour contester devant la cour d'appel le jugement du tribunal administratif. La circonstance que la juridiction aurait notifié à une adresse électronique erronée au moyen de l'application " Télérecours " reste sans incidence dès lors que, ainsi qu'il a été déjà dit, l'envoi d'un message électronique aux parties n'est prévu qu'à titre d'information et reste sans incidence sur les conditions dans lesquelles un jugement est réputé notifié par l'application " Télérecours ". 8. D'autre part, le tribunal administratif de Rouen a commis une erreur dans la rédaction de la formule exécutoire du jugement du 16 juin 2020 et a rectifié son erreur en notifiant un nouveau jugement le 9 juillet 2020 revêtu d'une formule exécutoire rectifiée. Cette correction d'une erreur matérielle touchant la formule exécutoire n'a pas conduit en l'espèce à différer le point de départ du délai d'appel dès lors que cette correction n'avait aucune incidence sur la portée du jugement initialement notifié. 9. Il résulte de ce qui précède que le délai d'appel courait jusqu'au 18 août 2020 au plus tard. La société AGC est, dès lors, fondée à soutenir que la requête d'appel du ministre enregistrée le 2 septembre 2020 est tardive et irrecevable de ce fait. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme quelconque en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par suite, les conclusions de la SCI AGC tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête du ministre est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la SCI AGC tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la SCI AGC. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, - Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. A...La conseillère la plus ancienne, Signé : D. Bureau La greffière, Signé : S. Pinto Carvalho La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Suzanne Pinto Carvalho N°20DA01364 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de la décision du 20 décembre 2018 du président du centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales, qu'il soit enjoint à l'administration de rétablir sa situation, la condamnation du centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales à lui reverser la somme de 5 618,76 euros indument retenue sur son salaire du mois de juillet 2018, et de mettre à sa charge la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. C... un jugement n°1901059 du 13 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande et l'a condamné à verser au centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : C... une requête, enregistrée le 14 juin 2021, sous le n°21MA02342 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL02342, M. B..., représenté C... la SELARL Accore Avocats, agissant C... Me Garcia, demande à la cour : 1°) d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 13 avril 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 20 décembre 2018 du président du centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales rejetant son recours gracieux ; 3°) d'enjoindre à ce centre de gestion de rétablir sa situation ; 4°) de condamner le centre de gestion à lui reverser la somme de 5 618,76 euros indûment retirée de son bulletin de salaire du mois de juillet 2018 ; 5°) de mettre à la charge du centre de gestion une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision du 20 décembre 2018 est insuffisamment motivée ; - au regard du nombre de jours sur son compte épargne-temps, qui était de 37 jours, le centre de gestion, qui a commis une erreur de fait conduisant à une erreur de droit, aurait dû faire droit à sa demande, alors que la délibération du 23 juin 2010 prévoyait la monétisation du compte épargne-temps ; - le centre de gestion ne pouvait rétroactivement supprimer sa bonification indiciaire ; ce retrait est entaché d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ; - c'est à tort qu'a été opérée sur son bulletin de salaire du mois de juillet 2018 une retenue d'un montant total de 5 618,76 euros, l'article 2 du décret du 26 août 2010 impliquant que les indemnités versées durant son congé de maladie lui demeurent acquises a été méconnu. C... un mémoire, enregistré le 13 juillet 2021, le centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales, représenté C... la SELARL Lysis Avocats, agissant C... Me Girard, demande à la cour : 1°) d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il n'a pas retenu l'irrecevabilité partielle de la requête initiale ; 2°) de constater l'irrecevabilité des demandes de M. B... ; 3°) de rejeter au fond sa requête et de confirmer pour le surplus en toutes ses dispositions la décision entreprise ; 4°) de mettre à la charge de M. B... les dépens ainsi qu'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu l'irrecevabilité de la requête initiale, que les demandes de M. B... relatives au compte épargne-temps et aux congés annuels sont irrecevables et, subsidiairement, infondées, que le jugement doit être confirmé sur la suspension du régime indemnitaire, l'absence de maintien de la nouvelle bonification indiciaire la répétition de la somme de 5 618,76 euros et qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé. C... une ordonnance du 8 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 9 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 93-863 du 18 juin 1993 ; - le décret n° 2004-878 du 26 août 2004 ; - le décret n° 2010-531 du 20 mai 2010 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller, - les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique, - les observations de Me Garcia, représentant M. B... et les observations de Me Girard, représentant le centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., attaché principal territorial auprès du centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales, a d'abord été placé en congé de maladie ordinaire avec le bénéfice de son plein traitement du 1er décembre 2016 au 28 février 2017 et à demi-traitement du 1er mars au 20 octobre 2017. Puis, à sa demande, après avis favorable du comité médical du 25 octobre 2017, il a été placé, C... un arrêté du 28 novembre 2017, en congé de longue maladie à plein traitement du 1er décembre 2016 au 30 novembre 2017 puis à demi-traitement du 1er décembre 2017 au 31 mai 2018. Enfin, C... un arrêté du 28 juin 2018, pris après avis favorable du comité médical du 27 juin 2018, il a été admis au bénéfice d'un congé de longue durée pour deux périodes de six mois allant du 25 octobre 2017 jusqu'au 24 octobre 2018. Ce congé de longue durée a été prolongé jusqu'au 24 avril 2020. C... lettre du 10 juillet 2018, M. B... a notamment sollicité le paiement des jours épargnés sur son compte épargne-temps. C... lettre du 2 août 2018, il a notamment demandé des explications quant à la suppression de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 25 octobre 2017 ainsi que la restitution du montant de 5 618,76 euros retenu C... le centre de gestion sur son bulletin de paye du mois de juillet 2018. Le président du centre de gestion a rejeté l'ensemble des demandes de M. B... C... des décisions des 11 septembre et 12 octobre 2018. Le recours gracieux de M. B... en date du 30 octobre 2018 a fait l'objet d'une décision de rejet du 20 décembre 2018. C... un jugement du 13 avril 2021, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant, notamment, à l'annulation de la décision du centre de gestion en date du 20 décembre 2018, à la condamnation de ce centre de gestion à lui reverser la somme de 5 618,76 euros retenue sur son salaire et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de rétablir sa situation. Sur la recevabilité de la demande de première instance : 2. Si le centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales fait valoir que c'est à tort que les premiers juges n'ont pas retenu l'irrecevabilité partielle de la requête initiale de M. B... en l'absence de lien suffisant entre ses différentes demandes, une telle irrecevabilité est régularisable et ne peut être retenue que dans le cas où le requérant, d'abord invité à régulariser son recours C... la présentation de requêtes distinctes, s'abstient de donner suite à cette invitation. En tout état de cause, le tribunal, qui a rejeté au fond les demandes du requérant, n'était pas tenu d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, dès lors qu'il lui est toujours loisible de statuer C... économie de moyens. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation : 3. En premier lieu, les vices propres dont une décision rejetant un recours gracieux contre un acte administratif serait entachée ne peuvent pas être utilement invoqués dès lors que ce recours n'a d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée, portant rejet du recours gracieux de M. B..., ne peut qu'être écarté comme inopérant. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1 du décret susvisé du 26 août 2004 susvisé relatif au compte épargne-temps dans la fonction publique territoriale : " Il est institué dans la fonction publique territoriale un compte épargne-temps. Ce compte est ouvert à la demande de l'agent, qui est informé annuellement des droits épargnés et consommés. Les droits à congé accumulés sur ce compte sont utilisés : (...) 2° En présence de délibération de la collectivité ou de l'établissement, prise en vertu du deuxième alinéa de l'article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, conformément aux dispositions des articles 4, 5, 6, 7 et 7-1. ". Aux termes de l'article 4 de ce décret : " Lorsqu'une collectivité ou un établissement a pris une délibération, en vertu du deuxième alinéa de l'article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, tendant à l'indemnisation ou à la prise en compte au sein du régime de retraite additionnelle de la fonction publique des droits ainsi épargnés sur le compte épargne-temps et dès lors qu'au terme de chaque année civile le nombre de jours inscrits sur le compte est inférieur ou égal à vingt, l'agent ne peut utiliser les droits ainsi épargnés que sous forme de congés, pris dans les conditions mentionnées à l'article 3 du décret du 26 novembre 1985 susvisé. ". 5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le conseil d'administration du centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales a adopté, le 23 juin 2010, un avenant à sa délibération du 13 juin 2005 instaurant le compte épargne-temps, prévoyant la possibilité de monétiser des jours épargnés sur ce compte. Au soutien de sa demande de paiement, M. B... expose qu'il disposait de 37 jours épargnés sur son compte. Pour en justifier, il produit un courriel du 3 juillet 2018 d'un agent du service des ressources humaines faisant état de ce solde ainsi qu'un document " compte épargne-temps " mentionnant un total de 37 jours, dont 16 jours épargnés au titre de l'année 2008, 15 jours épargnés au titre de l'année 2014 et 6 jours épargnés au titre de l'année 2015. Toutefois, le centre de gestion fait valoir que ledit document n'est pas revêtu du visa du directeur général des services et que le seul document présent dans son dossier ne mentionne qu'une épargne de 16 jours. En l'absence de toute justification de la réalisation C... M. B... d'une épargne globale de 21 jours au titre des années 2014 et 2015, l'intéressé n'établit pas l'existence d'une erreur de l'administration quant au nombre de jours épargnés sur son compte, ni qu'il aurait disposé de plus de vingt jours sur celui-ci. C... conséquent, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... pouvait prétendre à une monétisation de ses jours épargnés au-delà du vingtième. Dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à contester la légalité du refus de paiement qui lui a été opposé à ce titre. 6. En troisième lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...)". ". Aux termes de l'article 2 du décret du 18 juin 1993 relatif aux conditions de mise en œuvre de la nouvelle bonification indiciaire dans la fonction publique territoriale : " Le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire est maintenu aux fonctionnaires dans les mêmes proportions que le traitement pendant la durée des congés mentionnés aux 1°, 2° et 5° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée susvisée ainsi qu'au 3° de ce même article tant que l'agent n'est pas remplacé dans ses fonctions. ". 7. Le maintien indu du versement d'un avantage financier à un agent public, alors même que le bénéficiaire a informé l'ordonnateur qu'il ne remplit plus les conditions de l'octroi de cet avantage, n'a pas le caractère d'une décision accordant un avantage financier et constitue une simple erreur de liquidation. Dans ce cas, il appartient à l'administration de corriger cette erreur et de réclamer le reversement des sommes payées à tort, sans que l'agent intéressé puisse se prévaloir de droits acquis à l'encontre d'une telle demande de reversement. 8. Il ressort des pièces du dossier que, C... un arrêté du 28 juin 2018, pris après avis favorable du comité médical du 27 juin 2018, M. B... a été placé en congé de longue durée pour deux périodes de six mois allant du 25 octobre 2017 jusqu'au 24 octobre 2018. Il en résulte qu'en application des dispositions combinées précitées du 4° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et de l'article 2 du décret du 18 juin 1993, l'intéressé n'avait plus droit au maintien du bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 25 octobre 2017. Dès lors, le maintien indu du versement de cet avantage à compter de cette date, qui constitue une erreur de liquidation non créatrice de droits, a pu être légalement corrigé C... l'administration, C... le rappel qu'elle a effectué à ce titre. En ce qui concerne la demande restitution de la somme de 5 618,76 euros retenue sur salaire : 9. Il résulte des dispositions combinées de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 et des articles 57 et 88 de la loi du 26 janvier 1984 qu'un fonctionnaire territorial placé en congé de longue maladie ou de longue durée n'a pas droit au maintien des indemnités attachées à l'exercice des fonctions, au nombre desquelles figure l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise 10. En l'espèce, l'indemnité de fonctions de sujétions et d'expertise a été instaurée C... une délibération du 25 févier 2016 du conseil d'administration du centre de gestion prévoyant sa suspension en cas congé de longue maladie pendant toute la durée du congé. Il résulte de l'instruction que M. B... a fait l'objet d'une retenue sur son salaire du mois de juillet 2018 d'un montant de 5 618,76 euros. Il ressort du tableau récapitulatif présenté C... M. B... que ce montant correspond à celui de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise qui lui a été versée pour les mois de décembre 2016 à février 2017, lesquels sont compris dans la période au titre de laquelle il a été, en définitive, placé en congé de longue maladie. Du fait du placement de M. B... en congé de longue maladie sur la période considérée, il n'avait plus droit au maintien de cette indemnité qui lui a, dès lors, été indûment versée. C... suite, le centre de gestion a pu légalement retenir la somme correspondante sur son salaire du mois de juillet 2018. 11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées contre les conclusions d'appel, d'une part, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions à fin d'annulation et d'injonction et à se plaindre de ce que ce tribunal a rejeté ses conclusions à fin de restitution et, d'autre part, que la demande du centre de gestion tendant à la réformation du jugement attaqué ne peut qu'être rejetée. Sur les frais liés au litige : 12. En l'absence de dépens au sens des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative dans la présente instance, les conclusions présentées à ce titre C... le centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales doivent être rejetées. 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement au centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales d'une somme au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées C... le centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Orientales. Délibéré après l'audience du 24 mai 2022 à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public C... mise à disposition au greffe le 7 juin 2022. Le rapporteur, T. Teulière La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N°21TL02342
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Vu la procédure suivante : La SARL Aristo SLBR, la SARL Squadra SLBR, la SARL Graines et Pousses, la SARL Bao Time, la SAS Acetaria MSB, la Sarl Maison Fontaine et la SARL Brasserie Bourse du Travail ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lyon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, d'enjoindre à la métropole de Lyon de reporter au 1er octobre 2022 au plus tôt le lancement des travaux prévus à compter du 6 juin 2022 pour la réfection de la promenade Moncey-phase 2, Place Eugène Varlin, secteur Place Guichard et, le cas échéant, de remettre en état les lieux environnants et, d'autre part, de décider que l'ordonnance sera exécutoire aussitôt qu'elle aura été rendue, en application de l'article R. 522-13 du code de justice administrative. Par une ordonnance n° 2203942 du 28 mai 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 et 10 juin 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SARL Aristo SLBR, la SARL Squadra SLBR, la SARL Graines et Pousses, la SARL Bao Time, la SAS Acetaria MSB, la Sarl Maison Fontaine et la SARL Brasserie Bourse du Travail demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) d'enjoindre à la métropole de Lyon de reporter au 1er octobre 2022 au plus tôt le lancement des travaux prévus à compter du 6 juin 2022 pour la réfection de la promenade Moncey phase 2, Place Eugène Varlin, secteur Place Guichard et, le cas échéant, de remettre en état les lieux environnants ; 3°) de décider que l'ordonnance sera exécutoire aussitôt qu'elle aura été rendue, en application de l'article R. 522-13 du code de justice administrative ; 4°) de mettre à la charge de la métropole de Lyon la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, d'une part, la décision de débuter les travaux au mois de juin 2022 leur causera un préjudice économique grave et certain, résultant de la fermeture des terrasses et vérandas durant les 120 jours de la période estivale et, d'autre part, porte atteinte à la pérennité de leur activité, dans un contexte d'ores et déjà précaire au sortir de la crise sanitaire liée à la covid-19 ; - il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie ; - la décision litigieuse est disproportionnée et entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que ces travaux d'aménagement et d'agrément, n'étant pas justifiés par des considérations de sécurité ou de salubrité publiques, devraient être prévus à une période pendant laquelle l'activité des restaurants sur les terrasses est réduite ; - elle méconnaît les engagements pris par la métropole de débuter les travaux en période automnale ; - elle révèle une absence d'examen particulier des circonstances en ce qu'elle fait de nouveau subir une restriction à l'exploitation de leur commerce qu'ils ont déjà subie pendant la crise sanitaire ; - l'absence d'information sur la date effective de commencement des travaux et sur le calendrier a empêché de prendre les mesures nécessaires pour anticiper les préjudices subis. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule ; - le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. 2. Il résulte de l'instruction menée par le juge des référés du tribunal administratif de Lyon que la métropole de Lyon, maître d'ouvrage d'un projet de réaménagement de la rue Moncey, après avoir organisé les 14 juin 2021 une réunion de présentation de la phase 2 de ce projet aux commerçants, puis le 9 juillet 2021 une réunion d'information sur les travaux à l'intention des restaurateurs ayant installé des vérandas sur le domaine public, place Varley, a mis en demeure le 5 août 2021 plusieurs des sociétés requérantes afin qu'elles procèdent à la dépose de ces vérandas avant le 31 décembre 2021, pour permettre la réalisation de travaux sur les réseaux et sur les espaces publics à partir du mois de janvier 2022. Après avoir sollicité et obtenu le report de la démolition de ces vérandas au 15 février 2022, puis au 15 mai 2022, ces sociétés et plusieurs autres restaurateurs et commerçants ont demandé, par une lettre du 3 mai 2022, le report au 1er octobre 2022 de la date de commencement des travaux, qui avait entretemps été décalée au début du mois de juin 2022. Par une lettre du 10 mai 2022, la métropole de Lyon a rejeté cette demande et indiqué que les travaux débuteraient le 6 juin 2022. La Sarl Aristo SLBR et autres font appel de l'ordonnance du 28 mai 2022 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Lyon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté leur demande tendant à ce qu'il soit enjoint à la métropole de Lyon de reporter le lancement de ces travaux au plus tôt au 1er octobre 2022, et le cas échéant de remettre en état les lieux environnants. 3. A l'appui de leur appel, les requérantes se bornent à invoquer, s'agissant de l'existence d'atteintes graves et manifestement illégales à la liberté d'entreprendre, d'une part, l'erreur manifeste d'appréciation tenant à ce que la date des travaux aurait été fixée sans tenir compte de leurs contraintes d'exploitation, qui révèlerait une absence d'examen particulier des circonstances, et, d'autre part, la méconnaissance des engagements pris par la métropole Lyon à cet égard, qui résulteraient d'une part des dates indiquées sur son site internet, ainsi que du document présenté lors de la réunion du 14 juin. Il résulte de l'instruction menée par le juge des référés du tribunal administratif de Lyon que les requérantes ne peuvent se prévaloir d'aucun engagement de cette collectivité. Dans ces conditions, il est manifeste qu'elles ne peuvent être regardées comme justifiant d'une atteinte grave et manifestement illégale que l'imminence du commencement des travaux litigieux porterait à une liberté fondamentale. 4. Ainsi, la Sarl Aristo SLBR et autres ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par l'ordonnance dont elles relèvent appel, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon, statuant sur le fondement de l'art. L. 521-2, a rejeté leur demande. 5. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, la requête doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du même code. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête de la SARL Aristo SLBR et autres est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la SARL Aristo SLBR, représentante unique désignée, pour l'ensemble des requérants. Copie en sera adressée à la métropole de Lyon. Fait à Paris, le 16 juin 2022 Signé : Jean-Yves Ollier
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Vu les procédures suivantes : 1° Sous le n° 451852, par une requête, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 avril, 4 mai et 7 octobre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Association pour l'égal accès aux emplois publics et la défense de la méritocratie républicaine demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir : 1°) le décret n° 2021-239 du 3 mars 2021 instituant des modalités d'accès à certaines écoles de service public et relatif aux cycles de formation y préparant ; 2°) l'arrêté du 8 mars 2021 du président du Centre national de la fonction publique territoriale portant ouverture de concours (un concours externe, un concours externe spécial, un concours interne et un troisième concours) pour le recrutement des administrateurs territoriaux (session 2021), en ses dispositions relatives au concours externe spécial ; 3°) l'arrêté du 1er avril 2021 du président du Centre national de la fonction publique territoriale fixant le nombre de postes ouverts aux concours (un concours externe, un concours externe spécial, un concours interne et un troisième concours) pour le recrutement des administrateurs territoriaux (session 2021), en ses dispositions relatives au concours externe spécial ; 4°) l'arrêté du 25 mars 2021 de la ministre de la transformation et de la fonction publique autorisant l'ouverture du concours externe, du deuxième concours externe, du concours externe spécial, du concours interne et du troisième concours d'entrée à l'Ecole nationale d'administration pour l'année 2021, en ses dispositions relatives au concours externe spécial ; 5°) l'arrêté du 8 avril 2021 du ministre des solidarités et de la santé portant ouverture des concours d'admission au cycle de formation des élèves directeurs d'hôpital, en ses dispositions relatives au concours externe spécial ; 6°) l'arrêté du 8 avril 2021 du ministre des solidarités et de la santé portant ouverture des concours d'admission au cycle de formation des élèves directeurs d'établissement sanitaire, social et médico-social, en ses dispositions relatives au concours externe spécial. 2° Sous le n° 452060, par une requête et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 27 avril et 3 mai et 7 octobre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, l'Association pour l'égal accès aux emplois publics et la défense de la méritocratie républicaine demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir : -l'ordonnance n° 2021-238 du 3 mars 2021 favorisant l'égalité des chances pour l'accès à certaines écoles du service public ; - le décret n° 2021-239 du 3 mars 2021 instituant des modalités d'accès à certaines écoles de service public et relatif aux cycles de formation y préparant ; - l'arrêté du 8 mars 2021 du président du Centre national de la fonction publique territoriale portant ouverture de concours (un concours externe, un concours externe spécial, un concours interne et un troisième concours) pour le recrutement des administrateurs territoriaux (session 2021), en ses dispositions relatives au concours externe spécial ; - l'arrêté du 1er avril 2021 du président du Centre national de la fonction publique territoriale fixant le nombre de postes ouverts aux concours (un concours externe, un concours externe spécial, un concours interne et un troisième concours) pour le recrutement des administrateurs territoriaux (session 2021), en ses dispositions relatives au concours externe spécial ; - l'arrêté du 25 mars 2021 de la ministre de la transformation et de la fonction publique autorisant l'ouverture du concours externe, du deuxième concours externe, du concours externe spécial, du concours interne et du troisième concours d'entrée à l'École nationale d'administration pour l'année 2021, en ses dispositions relatives au concours externe spécial ; - l'arrêté du 8 avril 2021 du ministre des solidarités et de la santé portant ouverture des concours d'admission au cycle de formation des élèves directeurs d'hôpital, en ses dispositions relatives au concours externe spécial ; - l'arrêté du 8 avril 2021 du ministre des solidarités et de la santé portant ouverture des concours d'admission au cycle de formation des élèves directeurs d'établissement sanitaire, social et médico-social, en ses dispositions relatives au concours externe spécial ; 2°) de surseoir à statuer sur la requête dans l'attente de la décision à intervenir rendue sur le recours en rectification d'erreur matérielle, enregistré sous le n° 454961, dirigé contre la décision n° 450060 du Conseil d'État statuant au contentieux du 13 juillet 2021. .................................................................................... Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - la Constitution et notamment son préambule ; - le code de l'éducation ; - la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 ; - la décision n° 452060 du 13 juillet 2021 par laquelle le Conseil d'État, statuant au contentieux, n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'Association pour l'égal accès aux emplois publics et la défense de la méritocratie républicaine ; - l'ordonnance n° 454961 du 11 octobre 2021 par laquelle le Conseil d'État, statuant au contentieux, a rejeté le recours en rectification d'erreur matérielle formé par l'Association pour l'égal accès aux emplois publics et la défense de la méritocratie républicaine contre la décision n° 452060 du 13 juillet 2021 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Thalia Breton, auditrice, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Sous le n° 452060, l'Association pour l'égal accès aux emplois publics et la défense de la méritocratie républicaine (ADMR) demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 3 mars 2021 favorisant l'égalité des chances pour l'accès à certaines écoles de service public, le décret du 3 mars 2021 instituant des modalités d'accès à certaines écoles de service public et relatif aux cycles de formation y préparant, ainsi que cinq arrêtés pris en application de ce décret en tant que ces arrêtés ouvrent un concours externe spécial pour l'accès à différentes écoles de service public au titre de l'année 2021. Sous le n° 451852, la même association demande l'annulation du même décret du 3 mars 2021, et, dans la même mesure, des mêmes arrêtés. Ces requêtes sont dirigées pour partie contre les mêmes décisions et présentent à juger des questions communes. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision. Sur la demande de sursis à statuer : 2. Par une ordonnance n° 454961 du 11 octobre 2021, le conseiller d'État désigné par le président de la section du contentieux du Conseil d'État a rejeté le recours en rectification d'erreur matérielle formé par l'association requérante contre la décision n° 452060 du 13 juillet 2021 par laquelle le Conseil d'État a refusé de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée dans l'affaire n° 452060. Par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à statuer au fond sur cette requête ont perdu leur objet. Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée : 3. Aux termes de l'article 59 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique : " Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi visant à : / (...) 2° En garantissant le principe d'égal accès aux emplois publics, fondé notamment sur les capacités et le mérite, et dans le respect des spécificités des fonctions juridictionnelles, réformer les modalités de recrutement des corps et cadres d'emplois de catégorie A afin de diversifier leurs profils, harmoniser leur formation initiale, créer un tronc commun d'enseignements et développer leur formation continue afin d'accroître leur culture commune de l'action publique, aménager leur parcours de carrière en adaptant les modes de sélection et en favorisant les mobilités au sein de la fonction publique et vers le secteur privé ; (...) ". L'ordonnance du 3 mars 2021 favorisant l'égalité des chances pour l'accès à certaines écoles de service public, prise sur le fondement de ces dispositions, dispose en son article 1er que : " A titre expérimental, jusqu'au 31 décembre 2024, un concours externe spécial est organisé pour l'accès à certaines écoles ou certains organismes assurant la formation de fonctionnaires. / Peuvent se présenter à ce concours les personnes qui suivent, à la date de clôture des inscriptions, ou ont suivi, dans les quatre années civiles précédant l'année au cours de laquelle le concours est ouvert, un cycle de formation préparant à l'un ou plusieurs des concours externes ou assimilés donnant accès à ces écoles ou organismes, accessible au regard de critères sociaux et à l'issue d'une procédure de sélection. ". L'article 2 de la même ordonnance dispose que : " Les procédures de sélection pour être admis à suivre les cycles de formation tiennent compte des parcours de formation, des aptitudes et de la motivation des candidats. / Elles sont ouvertes aux candidats remplissant les conditions requises des candidats aux concours externes ou assimilés d'accès à l'école ou à l'organisme mentionné à l'article 1er ainsi que les critères sociaux mentionnés au second alinéa de l'article 1er ". L'article 3 de cette ordonnance prévoit que : " Pour l'accès aux écoles ou organismes mentionné à l'article 1er, les candidats au concours externe spécial sont sélectionnés par le jury du concours externe ou assimilé. Les programmes et les épreuves sont identiques à ceux du concours externe. / Le nombre de places offertes, au titre d'une année, aux lauréats de ce concours ne peut être supérieur à 15 % du nombre de places offertes au titre du concours externe ou assimilé d'accès à cette école ou cet organisme ". Aux termes de l'article 4 de cette ordonnance : " La liste des concours des écoles et organismes pour lesquels l'accès prévu à l'article 1er est ouvert, l'objet et la nature des cycles de formation y préparant ainsi que, par dérogation au VI de l'article L. 612-3 du code de l'éducation, les conditions d'admission à ces cycles sont fixés par décret en Conseil d'Etat. Ce décret détermine également l'objet et la nature des cycles de formation existant à la date de publication de la présente ordonnance dont les étudiants ou anciens étudiants sont admis à se présenter aux concours externes spéciaux ainsi que les conditions de ressources exigées d'eux ". A la date de la présente décision, le délai d'habilitation est expiré et l'ordonnance n'a pas été ratifiée. 4. Lorsque le délai d'habilitation à prendre une ordonnance est expiré, la contestation, au regard des droits et libertés que la Constitution garantit, des dispositions d'une ordonnance relevant du domaine de la loi n'est recevable qu'au travers d'une question prioritaire de constitutionnalité, qui doit être transmise au Conseil constitutionnel si les conditions fixées par les articles 23-2, 23-4 et 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel sont remplies. La circonstance qu'une question prioritaire de constitutionnalité puisse être soulevée ne saurait toutefois faire obstacle à ce que le juge annule l'ordonnance dont il est saisi par voie d'action ou écarte son application au litige dont il est saisi, si elle est illégale pour d'autres motifs, y compris du fait de sa contrariété avec d'autres règles de valeur constitutionnelle que les droits et libertés que la Constitution garantit. A ce titre, le requérant a le choix des moyens qu'il entend soulever, en particulier lorsque des principes voisins peuvent trouver leur source dans la Constitution, dans des engagements internationaux ou dans des principes généraux du droit. 5. En premier lieu, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'ordonnance attaquée, en tant que ses articles 1er à 4 instaurent une voie d'accès spécifique à des écoles de service public qui ne serait justifiée ni par les mérites des candidats, ni par les besoins du service public et qui reposerait sur des critères sociaux insuffisamment définis, méconnaîtraient, notamment, le principe d'égal accès aux emplois publics énoncé à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et le principe d'égalité devant la loi garanti par l'article 1er de la Constitution, a été écarté par la décision n° 452060 du 13 juillet 2021 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a refusé de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'Association pour l'égal accès aux emplois publics et la défense de la méritocratie républicaine. 6. En deuxième lieu, l'association requérante soutient que l'ordonnance méconnaît également le principe d'égalité en tant que principe général du droit. Ce principe ne s'oppose ni à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier. 7. Les dispositions des articles 1er à 4 de l'ordonnance du 3 mars 2021 autorisent, dans le cadre d'un dispositif expérimental se déroulant jusqu'en 2024, l'organisation, pour l'accès à certaines écoles ou certains organismes assurant la formation de fonctionnaires, d'un concours externe spécial, régi par les mêmes conditions de diplôme, comportant le même programme et les mêmes épreuves et faisant l'objet du même jury que le concours externe. Ce concours externe spécial, qui ne peut représenter une proportion supérieure à 15 % des recrutements opérés par la voie du concours externe, est ouvert aux personnes qui suivent ou ont suivi un cycle de formation préparant, notamment, à ce concours, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat. Ce cycle de formation est accessible au regard de critères sociaux à l'issue d'une procédure de sélection tenant compte des parcours de formation, des aptitudes et de la motivation des candidats. Si l'institution de concours externes spéciaux ouverts aux personnes ayant suivi un tel cycle de formation accessible notamment sur critères sociaux déroge à l'égalité, la différence de traitement qui en résulte est en rapport direct avec l'objet de l'ordonnance attaquée, qui est d'accroître la proportion d'élèves issus des catégories professionnelles les moins favorisées, en vue de diversifier les profils des personnes recrutées dans la fonction publique. Par ailleurs, ce concours externe spécial ne pouvant représenter une proportion supérieure à 15 % des recrutements opérés par la voie du concours externe, la différence de traitement entre les candidats aux concours n'est pas manifestement disproportionnée. Par suite, le moyen tiré de ce que l'ordonnance attaquée porterait atteinte au principe d'égalité en tant que principe général du droit ne peut qu'être écarté. 8. En troisième lieu, il résulte de ce qui est dit aux points 5 et 7 que le moyen tiré de ce que l'ordonnance attaquée méconnaîtrait l'habilitation sur le fondement de laquelle elle est prise, en ce qu'elle ne garantirait pas le respect du principe d'égal accès aux emplois publics, fondé notamment sur les capacités et le mérite, ne peut qu'être écarté. 9. Il résulte de ce qui précède que l'association requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée. Sur les conclusions tendant à l'annulation du décret attaqué : 10. En premier lieu, il résulte de ce qui est dit au point 9 que le moyen tiré de l'illégalité des dispositions du décret attaqué du 3 mars 2021 par voie de conséquence de celles de l'ordonnance attaquée du même jour, pour l'application de laquelle il a été pris, ne peut qu'être écarté. 11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1er du décret attaqué : " Les candidats au cycle de formation mentionné à l'article 1er de l'ordonnance du 3 mars 2021 susvisée doivent remplir : / (...) 2° Lors de l'admission, les conditions de ressources fixées pour bénéficier d'une bourse d'enseignement supérieur sur critères sociaux prévue en application de l'article L. 821-1 du code de l'éducation. ". 12. Il résulte de ces dispositions que les candidats au cycle de formation préparant aux concours externes spéciaux doivent remplir les conditions de ressources fixées pour bénéficier d'une bourse d'enseignement supérieur sur critères sociaux prévue en application de l'article L. 821-1 du code de l'éducation, lequel dispose que : " La collectivité nationale accorde aux étudiants, dans les conditions déterminées par voie réglementaire, des prestations qui sont dispensées notamment par le réseau des œuvres universitaires mentionné à l'article L. 822-1 où les étudiants élisent leurs représentants sans distinction de nationalité et où les collectivités territoriales sont représentées dans les conditions et selon des modalités fixées par décret. Elle privilégie l'aide servie à l'étudiant sous condition de ressources afin de réduire les inégalités sociales. ". Si l'association requérante soutient qu'il en résulterait une rupture d'égalité du fait de la prise en compte de critères étrangers au mérite, tels l'éloignement du domicile familial ou le nombre de frères et sœurs en études supérieures, les dispositions attaquées se bornent à renvoyer aux seules conditions de ressources fixées pour bénéficier d'une bourse de l'enseignement supérieur sur critères sociaux. Ce moyen ne peut, par suite, qu'être écarté. 13. En troisième lieu, aux termes de l'article 2 du décret attaqué : " Une commission d'admission procède à la sélection des candidats au regard notamment de la qualité de leur parcours de formation antérieur, de leurs aptitudes et de leur motivation. La sélection comprend l'examen des dossiers des candidats et un entretien. / Si, à l'issue de la sélection, des candidats sont placés à égalité, priorité est donnée, le cas échéant, aux candidats qui résident ou ont obtenu leur baccalauréat ou tout diplôme de niveau supérieur dans un quartier prioritaire de la politique de la ville, au sens de l'article 5 de la loi du 21 février 2014 susvisée, dans une zone de revitalisation rurale au sens de l'article 1465 A du code général des impôts ou dans l'une des collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution ". 14. En instituant au bénéfice de ceux des candidats à la formation sélective donnant accès aux concours externes spéciaux prévus par l'ordonnance du 3 mars 2021 qui soit résident, soit ont obtenu leur baccalauréat ou tout diplôme de niveau supérieur, dans un quartier prioritaire de la politique de la ville, une zone de revitalisation rurale ou une collectivité située outre-mer, une priorité d'accès aux formations sélectives, à seule fin de départager les candidats en cas d'égalité de mérite apprécié au regard de leurs aptitudes et de leur motivation, le pouvoir réglementaire s'est fondé sur des critères en rapport direct avec la finalité d'intérêt général s'attachant au dispositif instauré par l'ordonnance du 3 mars 2021. La différence de traitement qui en résulte, dès lors qu'il ne s'agit que d'un critère de départage à mérite égal, n'apparaît pas manifestement disproportionnée au regard de cette finalité. Par suite, le moyen tiré de ce que l'article 2 du décret attaqué méconnaîtrait le principe d'égalité ne peut qu'être écarté. 15. En quatrième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article 5 du décret attaqué : " Les candidats au concours externe spécial peuvent s'inscrire également au concours externe ou assimilé d'accès à la même école ou organisme. ". Aucun texte ni aucun principe ne s'oppose à ce que le pouvoir réglementaire prévoie qu'un candidat soit autorisé à se présenter à différents concours d'accès à une formation, pour autant qu'il remplisse les conditions d'admission à concourir dans chacune de ces voies d'accès et que seuls les candidats dont les mérites auront été jugés suffisants à l'issue des épreuves soient susceptibles d'être admis, dans la limite du nombre de places fixé pour chaque concours. De même, aucun texte ni aucun principe ne faisait obligation au pouvoir réglementaire de prévoir l'établissement d'une liste complémentaire. Par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que les dispositions du deuxième alinéa de l'article 5 du décret attaqué méconnaîtraient pour ces motifs le principe d'égalité. 16. En dernier lieu, aux termes de l'article 25 du décret attaqué : " Par dérogation aux dispositions du titre Ier et du 1° de l'article 4, peuvent s'inscrire aux concours externes spéciaux les personnes qui suivent, à la date de clôture des inscriptions à ces concours, ou ont suivi, au cours des quatre années civiles précédant l'année au cours de laquelle ces concours sont ouverts, une préparation aux concours externes ou assimilés mentionnés au 2° de l'article 4, organisée après une procédure de sélection par un établissement assurant la formation de fonctionnaires ou un établissement public d'enseignement supérieur, et qui remplissaient pendant cette préparation les conditions de ressources fixées pour l'attribution d'une bourse d'enseignement supérieur sur critères sociaux. La liste de ces préparations est fixée par arrêté du ministre chargé de la fonction publique. ". 17. Les dispositions de l'article 25 sont prises sur le fondement et pour l'application de l'article 4 de l'ordonnance du 3 mars 2021. Ce dernier article prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat fixe la liste des écoles et organismes pour l'accès auxquels est institué un concours externe spécial, l'objet et la nature des cycles de formation y préparant ainsi que les conditions d'admission à ces cycles, et que ce décret " détermine également l'objet et la nature des cycles de formation existant à la date de publication de la présente ordonnance dont les étudiants ou anciens étudiants sont admis à se présenter aux concours externes spéciaux ainsi que les conditions de ressources exigées d'eux. ". Dès lors, l'association requérante ne saurait utilement soutenir que les dispositions de l'article 25 du décret attaqué sont illégales en ce qu'elles ne permettent pas aux personnes qui remplissent les conditions de ressources mais n'ont pas suivi de préparation dans une formation sélective de se présenter aux concours externes spéciaux. Elle ne peut davantage utilement soutenir que la liste des préparations à ces formations sélectives, fixée par un arrêté qui n'est pas en litige, présenterait un caractère discriminatoire. 18. Il résulte de ce qui précède que l'association requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du décret attaqué. Sur les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés attaqués : 19. Les arrêtés attaqués ont été pris pour l'application du décret du 3 mars 2021. Il résulte de ce qui est dit au point 18 que le moyen tiré de l'illégalité des dispositions de ces arrêtés par voie de conséquence de celles du décret attaqué ne peut qu'être écarté. 20. Il résulte de tout ce qui précède que les requêtes de l'Association pour l'égal accès aux emplois publics et la défense de la méritocratie républicaine ne peuvent qu'être rejetées, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée, dans le n° 451852, par le Centre national de la fonction publique territoriale. D E C I D E : -------------- Article 1er : Les requêtes de l'Association pour l'égal accès aux emplois publics et la défense de la méritocratie républicaine sont rejetées. Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Association pour l'égal accès aux emplois publics et la défense de la méritocratie républicaine, à la Première ministre, au ministre de l'intérieur, au garde des sceaux, ministre de la justice, à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à la ministre de la santé et de la prévention, à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, au ministre de la transformation et de la fonction publiques et au Centre national de la fonction publique territoriale. Délibéré à l'issue de la séance du 25 mai 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Yves Doutriaux, Mme Carine Soulay, Mme Fabienne Lambolez, Mme Françoise Tomé, M. Damien Botteghi, conseillers d'Etat et Mme Thalia Breton, auditrice-rapporteure. Rendu le 20 juin 2022. Le président : Signé : M. Rémy Schwartz La rapporteure : Signé : Mme Thalia Breton La secrétaire : Signé : Mme Sylvie Alleil
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 avril 2019 par lequel la ministre des armées lui a infligé un blâme. Par un jugement n° 1913065 du 4 février 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er avril 2021 et 20 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Boukheloua, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 4 février 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 18 avril 2019 par lequel la ministre des armées lui a infligé un blâme ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué ne comporte pas les signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; - le tribunal a, à tort, écarté le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée ; - le jugement est lui-même entaché d'insuffisance de motivation ; - le tribunal a, à tort, écarté le moyen tiré du défaut de compétence de l'auteur de la décision attaquée en admettant le recours aux dispositions de l'article L. 861-1 du code de la sécurité intérieure et en méconnaissant, dès lors, le principe du caractère contradictoire de la procédure ; - le tribunal a, à tort, jugé qu'il ne contestait pas avoir procédé à la destruction de données professionnelles alors qu'il le contestait dans son mémoire en réplique ; - la matérialité des faits reprochés n'est pas établie ; - il n'a commis aucune faute et est victime de l'attitude de sa hiérarchie, désireuse de lui faire endosser la responsabilité de faits qui ne lui sont pas imputables. Par un mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2021, la ministre des armées demande à la Cour de rejeter la requête de M. A.... Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 3 janvier 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 28 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité intérieure ; - le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ; - le décret n° 2015-386 du 3 avril 2015 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - les conclusions de Mme Mach, rapporteure publique, - et les observations de Me Boukheloua pour M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., recruté en tant que contractuel par le ministère de la défense en 1991, a passé avec succès en 1994 un concours de catégorie A de la fonction publique de l'Etat et a poursuivi depuis lors sa carrière au sein de ce ministère. Par note du 27 septembre 2018, il a été informé qu'une procédure disciplinaire était ouverte à son encontre. Il a, à sa demande, consulté son dossier le 29 novembre 2018 et présenté des observations écrites, reçues le 5 décembre 2018, qui ont donné lieu à une réponse de l'administration le 14 janvier 2019. Le 18 avril suivant, l'administration a prononcé un blâme à son encontre. Il a alors saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande d'annulation de cette sanction, rejetée par un jugement du 4 février 2021 dont il relève appel. Sur la régularité du jugement : 2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé conformément aux prescriptions de cet article. Par ailleurs, la circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée à l'appelant ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement. 3. En deuxième lieu, si, en application de l'article L. 9 du code de justice administrative, les jugements doivent être motivés, les juges ne sont néanmoins tenus de répondre qu'aux moyens soulevés devant eux et non à l'ensemble des arguments présentés à l'appui de ces moyens. Or, il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que, pour écarter le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté en litige, le tribunal a relevé que celui-ci citait le code de la défense et le décret du 3 avril 2015, puis indiquait que cette sanction était motivée par la destruction de données professionnelles, préjudiciable au service, et qu'il comportait ainsi l'exposé des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fondait. Contrairement à ce que soutient M. A..., le tribunal a, ainsi, suffisamment répondu au moyen soulevé. 4. En troisième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 811-2 du code de la sécurité intérieure : " Les services spécialisés de renseignement sont désignés par décret en Conseil d'Etat (...) ". L'article R. 811-1 du même code précise que : " Les services spécialisés de renseignement sont la direction générale de la sécurité extérieure, la direction du renseignement et de la sécurité de la défense, la direction du renseignement militaire, la direction générale de la sécurité intérieure (...) ". D'autre part, l'article L. 861-1 du même code dispose que : " Les actes réglementaires et individuels concernant l'organisation, la gestion et le fonctionnement des services mentionnés à l'article L. 811-2 et de ceux désignés par le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 811-4 ainsi que la situation de leurs agents sont pris dans des conditions qui garantissent la préservation de l'anonymat des agents. / (...) / Par dérogation à l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions et les autres actes pris par les autorités administratives au sein des services mentionnés au premier alinéa du présent article peuvent comporter seulement, outre la signature, le numéro d'identification de leur auteur, attribué avec la délégation de signature et qui se substitue à la mention de ses prénom, nom et qualité. Le nombre de délégations de signature numérotées par service est fixé par arrêté du ministre compétent. / Lorsque, dans le cadre d'une procédure engagée devant une juridiction administrative ou judiciaire, la solution du litige dépend d'une question relative à un acte non publié en application du présent article ou faisant l'objet d'une signature numérotée, ce dernier est communiqué, à sa demande, à la juridiction ou au magistrat délégué par celle-ci, sans être versé au contradictoire (...) ". 5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... demande l'annulation d'un acte relatif à sa situation en qualité d'agent de l'un des services spécialisés de renseignement mentionnés aux articles L. 811-2 et R 811-1 du code de la sécurité intérieure. Pour répondre au moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision, identifié, outre sa signature, par le seul code DA 00, le ministre s'est prévalu devant les premiers juges des dispositions de l'article L. 861-1 du même code et de l'existence d'une décision de ses services du 27 février 2018, prise pour leur application et enregistrée le 12 mars suivant dans un recueil spécial au Secrétariat général du gouvernement. En demandant, dès lors, communication au ministre de cette décision et en prenant en compte les pièces produites à la suite de cette demande sans les soumettre au contradictoire, le tribunal s'est conformé à la procédure prévue par l'article L. 861-1 du code de la sécurité intérieure. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par le tribunal du principe du contradictoire doit être écarté. Sur la légalité de la sanction : 6. En premier lieu, si l'article L. 861-1 du code de la sécurité intérieure réserve aux services qu'il mentionne, dont les services spécialisés de renseignement, la possibilité de n'identifier le signataire d'une décision que par un numéro d'identification, il résulte des termes mêmes de cet article que cette faculté s'applique aux décisions relatives, notamment, à la situation des agents de ces services, catégorie à laquelle appartiennent les sanctions disciplinaires. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'administration n'aurait pu, sans illégalité, recourir à cette procédure pour prononcer un blâme à son encontre. En outre, ainsi qu'il a été rappelé au point 5, pour répondre au moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée, le tribunal a, ainsi que le prévoit cet article L. 861-1, demandé communication de pièces non soumises au contradictoire. Or, il ressort de ces pièces que l'auteur de l'arrêté en litige, identifié par le numéro DA 00, avait bien reçu ce numéro d'identification dans les conditions prévues par ces dispositions et bénéficiait par ailleurs d'une délégation de signature en application du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement. Par suite, le moyen tiré du défaut de compétence du signataire de la décision manque en fait. 7. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... a admis à plusieurs reprises avoir détruit des éléments figurant sur sa messagerie personnelle, qui lui avaient été transmis à des fins professionnelles. Ainsi, il indique notamment dans sa note d'observation transmise le 5 décembre 2018 que " puisque sur ordre, cette affaire ne le concernait pas, l'agent était libre de gérer sa propre messagerie et l'a, avec regrets, détruite ", ce qu'il a confirmé ensuite dans ses écritures devant la juridiction. Par ailleurs, dès lors qu'il ressort de ses propres propos que les documents en cause avaient directement trait à son activité professionnelle, la circonstance qu'ils aient figuré sur sa messagerie personnelle plutôt que sur sa messagerie professionnelle est sans incidence. Ainsi, la matérialité des faits doit être considérée comme établie en ce qui concerne la destruction de documents ayant trait au service. En revanche, alors que M. A... fait valoir que l'ensemble de ces éléments avaient été auparavant transférés à sa hiérarchie, qu'il avait été invité à ne plus s'occuper des questions correspondantes et qu'il n'est résulté aucun préjudice, pour l'administration, de la destruction des éléments demeurés sur sa messagerie personnelle, la ministre se borne à affirmer que la destruction de données professionnelles était préjudiciable au service, sans apporter aucune précision sur ces données non plus que sur les raisons pour lesquelles leur destruction aurait revêtu un caractère préjudiciable. Dans ces conditions, elle n'établit pas, ainsi qu'il lui appartient de le faire, l'incidence pour le service des faits reprochés au requérant. Le caractère fautif des faits reprochés n'est, par suite, pas davantage établi. 8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il est ainsi fondé à en demander l'annulation, ainsi que celle de l'arrêté du 18 avril 2019 par lequel la ministre des armées lui a infligé un blâme. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. A... au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1913065 du tribunal administratif de Paris du 4 février 2021 est annulé. Article 2 : L'arrêté de la ministre des armées du 18 avril 2019 infligeant un blâme à M. A... est annulé. Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 24 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Fombeur, présidente de la Cour, - M. Célérier, président de chambre, - Mme Labetoulle, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 juin 2022. La rapporteure, M-I. C...La présidente, P. FOMBEUR La greffière, K. PETIT La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA01691
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Vu la procédure suivante : Par une requête, un mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés le 2 octobre 2020 ainsi que les 12 novembre et 15 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Confédération paysanne demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de refus du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et du ministre de l'économie, des finances et de la relance de prendre un arrêté prohibant l'importation de certains produits agricoles originaires du Sahara occidental en application de l'article 23 bis du code des douanes ; 2°) d'enjoindre au ministre de l'économie, des finances et de la relance et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de prendre, en application de l'article 23 bis du code des douanes, dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir, un arrêté prohibant l'importation des tomates cerises et des melons originaires du Sahara occidental dans des conditions non conformes au droit de l'Union européenne ; 3°) à titre subsidiaire, de saisir, à titre préjudiciel, la Cour de justice de l'Union européenne des questions de savoir, en premier lieu, si, compte tenu du statut séparé et distinct du Sahara occidental, le droit de l'Union européenne, et en particulier les règlements n° 1308/2013, n° 543/2011 et n° 1169/2011, doit être interprété comme imposant au titre de l'obligation de mention de l'origine des fruits et légumes frais sur les colis et emballages, en lieu et place du Maroc, la mention de ce premier territoire, en deuxième lieu, si l'agrément délivré à ce titre aux autorités marocaines leur permet d'effectuer des contrôles de conformité des produits originaires de ce territoire et, en dernier lieu, si la décision 2019/217 du Conseil, du 28 janvier 2019, relative à la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres entre l'Union européenne et le Royaume du Maroc sur la modification des protocoles n° 1 et n° 4 de l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et le Royaume du Maroc, d'autre part, déroge aux règles applicables à la détermination de l'origine non préférentielle, telle que définie par le code des douanes de l'Union et, dans l'affirmative, si cette décision est conforme au droit primaire de l'Union. 4°) de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution ; - le traité sur l'Union européenne ; - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment son article 267 ; - l'accord euro-méditerranéen du 26 février 1996 établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et le Royaume du Maroc, d'autre part ; - la décision (UE) 2019/217 du Conseil, du 28 janvier 2019, relative à la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres entre l'Union européenne et le Royaume du Maroc sur la modification des protocoles no 1 et no 4 de l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et le Royaume du Maroc, d'autre part ; - le règlement (UE) n° 543/2011 de la Commission du 7 juin 2011 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne les secteurs des fruits et légumes et des fruits et légumes transformés ; - le règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires ; - le règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l'Union ; - le règlement n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles, qui a remplacé le règlement (CE) n° 1234/2007 ; - le règlement délégué (UE) n° 2015/2446 de la Commission du 28 juillet 2015 ; - le règlement d'exécution (UE) n° 2017/892 de la Commission du 13 mars 2017 portant modalités d'application du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les secteurs des fruits et légumes et des fruits et légumes transformés ; - le code de la consommation ; - le code des douanes ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Catherine Fischer-Hirtz, conseillère d'Etat, - les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ; Considérant ce qui suit : 1. La Confédération paysanne a demandé au ministre de l'économie, des finances et de la relance et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de prendre, en application de l'article 23 bis du code des douanes, un arrêté prohibant l'importation de tomates cerises et de melons charentais récoltés sur le territoire du Sahara occidental, au motif que ce territoire n'appartient pas au Royaume du Maroc et que, par suite, l'étiquetage présentant ces produits comme originaires du Maroc viole les dispositions du droit de l'Union relatives à l'information des consommateurs sur l'origine des fruits et légumes mis à la vente. Elle demande l'annulation pour excès de pouvoir du refus implicite opposé par ces deux ministres à sa demande. 2. Aux termes de l'article 23 bis du code des douanes : " Sous réserve de l'application des accords internationaux, l'importation des denrées, matières et produits de toute nature et de toutes origines, qui ne satisfont pas aux obligations législatives ou réglementaires imposées en matière de commercialisation ou de vente, aux denrées, matières ou produits similaires nationaux, peut être prohibée ou réglementée par des arrêtés conjoints du ministre de l'économie et des finances, du ministre responsable de la ressource et du ministre de l'agriculture chargé de la répression des fraudes. " Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'économie, des finances et de la relance : 3. Si le ministre de l'économie, des finances et de la relance fait valoir que la décision attaquée ne saurait être regardée comme un acte susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, il ne résulte toutefois d'aucune disposition expresse du droit de l'Union que la violation d'obligations en matière d'information des consommateurs sur des denrées alimentaires en provenance d'un pays ou territoire situé hors du territoire douanier de l'Union vaudrait par elle-même interdiction d'importation de ces denrées. Si les ministres compétents décident une telle interdiction sur le fondement de l'article 23 bis du code des douanes, que ce soit en raison de la violation de dispositions de droit de l'Union ou de dispositions de droit interne, leur décision, qui présente un caractère règlementaire, est susceptible de faire l'objet d'un recours contentieux. Il en va de même pour le refus de prendre une telle mesure. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'économie, des finances et de la relance ne peut qu'être écartée. Sur la légalité du refus du ministre de l'économie, des finances et de la relance et du ministre de l'agriculture et de l'alimentation d'interdire les importations de fruits et légumes en provenance du Sahara occidental : 4. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à la demande de la requérante de prendre, sur le fondement de l'article 23 bis du code des douanes en cas de non-respect de la législation applicable en matière d'importation de denrées alimentaires, les mesures d'interdiction demandées, réside dans l'obligation, que le juge administratif peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour les autorités compétentes, auxquelles il incombe à tout moment de prendre les mesures nécessaires si un produit ne satisfait pas aux obligations législatives ou règlementaires imposées en matière de commercialisation ou de vente, de prendre ces mesures. Il s'ensuit que, lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation d'un tel refus, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier son bien-fondé au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision. 5. En premier lieu, si la Confédération paysanne soutient que c'est à tort que les ministres concernés auraient considéré, pour refuser de faire usage de l'article 23 bis du code des douanes, qu'ils étaient incompétents pour édicter l'arrêté prohibant l'importation de certains produits agricoles en provenance du Sahara occidental, il ressort des pièces du dossier que les ministres, sans décliner leur compétence, se sont bornés à retenir qu'il n'y avait, en l'espèce, pas lieu de faire application des pouvoirs qu'ils tiennent de cet article. Par suite, le moyen soulevé doit être écarté. 6. En second lieu, la Confédération paysanne soutient que la décision attaquée méconnaît les articles 74 et 76 du règlement n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013, les articles 3§1, 3§2, 5§1 et 8 du règlement n° 543/2011 de la Commission du 7 juin 2011, l'article 26 du règlement n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011, l'article 60 du code des douanes de l'Union européenne, l'article 31 du règlement délégué n° 2015/2446 de la Commission du 28 juillet 2015 ainsi que la position de la Commission européenne, en tant que cette décision refuse de se référer, pour l'origine des denrées en cause, aux frontières internationalement reconnues, tant pour l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, notamment en matière d'étiquetage des fruits et légumes, que pour les contrôles de conformité et les certificats de conformité applicables aux tomates et aux melons en provenance du Sahara occidental. Elle soutient, en outre, que la décision attaquée méconnaît l'article 9 paragraphe 1, l'article 26 paragraphe 2, point A et l'article 7 paragraphe 1, lettre a) du règlement n° 1169/2011, tel qu'interprété par l'arrêt C-104/16 de la Cour de Justice de l'Union européenne concernant la mention du territoire de provenance des denrées alimentaires, alors que les " denrées nationales ", au sens de l'article 23 bis du code des douanes, relèvent du champ d'application de ce règlement, que les produits concernés sont récoltés au Sahara occidental et que la mention du Maroc comme origine est, par suite, erronée. 7. La Confédération paysanne soutient, en outre, que les dispositions de l'article L. 413-9 du code de la consommation qui interdisent, pour tous produits, de faire croire à une origine différente de leur véritable origine et celles des articles L. 121-1 et L. 121-2 du même code, prohibant plus généralement les pratiques commerciales déloyales et trompeuses, ont été méconnues. 8. Aux termes de l'article 9 du règlement n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires : " 1. Conformément aux articles 10 à 35, et sous réserve des exceptions prévues dans le présent chapitre, les mentions suivantes sont obligatoires: / (...) i) le pays d'origine ou le lieu de provenance lorsqu'il est prévu à l'article 26 ; (...) ". Aux termes de l'article 26 du même règlement : " (...) 2. L'indication du pays d'origine ou du lieu de provenance est obligatoire : / a) dans les cas où son omission serait susceptible d'induire en erreur les consommateurs sur le pays d'origine ou le lieu de provenance réel de la denrée alimentaire, en particulier si les informations jointes à la denrée ou l'étiquette dans son ensemble peuvent laisser penser que la denrée a un pays d'origine ou un lieu de provenance différent ; / (...) ". Aux termes de l'article 76 du règlement n° 1308/2013 du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles : " 1. En plus des normes de commercialisation visées à l'article 75 qui sont applicables, le cas échéant, aux produits du secteur des fruits et légumes destinés à être vendus frais au consommateur, ceux-ci ne peuvent être commercialisés que s'ils sont de qualité saine, loyale et marchande et si le pays d'origine est indiqué. / 2. Les normes de commercialisation visées au paragraphe 1 et toute norme de commercialisation applicable au secteur des fruits et légumes prévue conformément à la présente sous-section s'appliquent à tous les stades de commercialisation, y compris à l'importation (...). / 3. Le détenteur de produits du secteur des fruits et légumes couverts par les normes de commercialisation ne peut exposer ces produits, les mettre en vente, les livrer ou les commercialiser à l'intérieur de l'Union d'une manière qui ne soit pas conforme à ces normes et il est responsable du respect de cette conformité. / (...) ". Le règlement d'exécution n° 543/2011 de la Commission, qui précise par ses dispositions le contenu de la norme générale de commercialisation applicable aux fruits et légumes, dont le melon, et édicte une norme spécifique pour les tomates, fait figurer parmi les mentions impératives à apposer sur l'emballage, sur les factures et documents d'accompagnement et au moment de la vente au détail, d'une part, l'identification de l'adresse de l'emballeur et de l'expéditeur, et d'autre part, le nom complet du pays d'origine du produit auquel s'ajoute " éventuellement ", pour les tomates, la " zone de production ". L'article 134 du règlement n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil établissant le code des douanes de l'Union dispose : " 1. Les marchandises qui sont introduites sur le territoire douanier de l'Union sont, dès cette introduction, soumises à la surveillance douanière et peuvent faire l'objet de contrôles douaniers. Le cas échéant, elles peuvent faire l'objet de mesures de prohibition ou de restriction justifiées, entre autres, par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou de préservation des végétaux, de protection de l'environnement, de protection des trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique et la protection de la propriété industrielle ou commerciale, y compris le contrôle des précurseurs chimiques, des marchandises portant atteinte à certains droits de propriété intellectuelle et des sommes d'argent liquide, ainsi que la mise en œuvre de mesures de conservation et de gestion des ressources de pêche et de mesures de politique commerciale. / Elles restent sous cette surveillance aussi longtemps qu'il est nécessaire pour déterminer leur statut douanier et ne peuvent y être soustraites sans l'autorisation des autorités douanières. / Sans préjudice de l'article 254, les marchandises de l'Union ne font pas l'objet d'une surveillance douanière une fois leur statut douanier établi. / Les marchandises non Union restent sous surveillance douanière, soit jusqu'à ce qu'elles changent de statut douanier, soit jusqu'à ce qu'elles soient sorties du territoire douanier de l'Union ou détruites ". 9. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'exigence de la mention du pays ou territoire d'origine, qui a pour objet l'information du consommateur et revêt ainsi le caractère d'élément d'une norme de commercialisation, doit, en principe, être respectée dès l'importation. Toutefois, aucun de ces règlements ne confère expressément compétence aux Etats membres pour adopter des mesures, qu'elles soient individuelles ou générales, d'interdiction des importations des produits qui ne seraient pas conformes alors qu'une telle mesure, notamment dans l'hypothèse où la méconnaissance des conditions d'importation présente un caractère massif rendant difficile l'accomplissement de nombreux contrôles en aval une fois les produits disséminés sur le territoire de l'Union, pourrait justifier au niveau national l'adoption d'une interdiction des importations de fruits et légumes en provenance d'un pays déterminé. Ainsi, la réponse aux moyens soulevés par la requête de la Confédération paysanne dépend, en premier lieu, de la question de savoir si les dispositions du règlement n° 1169/2011, du règlement n° 1308/2013, du règlement n° 543/2011 et du règlement n° 952/2013 doivent être interprétées en ce sens qu'elles autorisent un Etat membre à adopter une mesure nationale d'interdiction des importations, en provenance d'un pays déterminé, de fruits et légumes qui méconnaissent les articles 26 du règlement n° 1169/2011 et 76 du règlement n° 1308/2013 faute de mentionner le pays ou territoire dont ils sont réellement originaires, notamment lorsque cette méconnaissance présente un caractère massif et qu'elle peut difficilement être contrôlée une fois les produits entrés sur le territoire de l'Union. 10. En outre, saisie de la question de savoir si s'appliquaient au Sahara occidental l'accord d'association conclu entre le Maroc et l'Union européenne ainsi que les accords qui lui sont subordonnés, la Cour de justice de l'Union européenne a, par ses arrêts du 21 décembre 2016, Conseil c/Front Polisario (aff. C 104/16 P) et du 27 février 2018, Western Sahara Campaign UK (aff. C 266/16), déduit des principes d'autodétermination et d'effet relatif des traités que le Sahara occidental ne pouvait être considéré comme faisant partie du Maroc au sens de ces stipulations. Toutefois, à la suite de ces arrêts, l'Union européenne et le Royaume du Maroc ont conclu un accord sous forme d'échange de lettres, approuvé par décision du Conseil du 28 janvier 2019, modifiant les protocoles n° 1 et 4 de l'accord d'association euro-méditerranéen relatifs au régime applicable à l'importation, dans l'Union européenne, des produits agricoles originaires du Maroc et à la définition de la notion de " produits originaires ", pour étendre aux produits originaires du Sahara occidental le bénéfice des préférences tarifaires octroyées aux produits d'origine marocaine exportés dans l'Union. Si cet accord a été annulé par un arrêt T-279/19 du 29 septembre 2021 du Tribunal de l'Union européenne, ses effets ont été maintenus afin de préserver l'action extérieure de l'Union et la sécurité juridique de ses engagements, notamment jusqu'au prononcé de l'arrêt de la Cour de justice statuant sur le pourvoi déposé par la Commission contre l'arrêt du Tribunal. Dans ces conditions, en cas de réponse positive à la question énoncée au point 9, la réponse aux moyens soulevés par la Confédération paysanne dépend, en deuxième lieu, de la question de savoir si cet accord sous forme d'échange de lettres doit être interprété en ce sens que, pour l'application des articles 9 et 26 du règlement (UE) n° 1669/2011 et de l'article 76 du règlement (UE) n° 1308/2011, d'une part, les fruits et légumes récoltés sur le territoire du Sahara occidental ont comme pays d'origine le Maroc et, d'autre part, les autorités marocaines sont compétentes pour délivrer les certificats de conformité prévus par le règlement n° 543/2011 aux fruits et légumes récoltés sur ce territoire. 11. En cas de réponse positive à la question énoncée au point 10, la réponse aux moyens de la requête dépend, en troisième lieu, de la question de savoir si la décision du Conseil du 28 janvier 2019 approuvant l'accord sous forme d'échange de lettres est conforme à l'article 3, paragraphe 5 du traité sur l'Union européenne, à l'article 21 du même traité et au principe coutumier d'autodétermination rappelé notamment à l'article 1er de la Charte des Nations-Unies. 12. Enfin, la réponse aux moyens de la requête dépend, en quatrième lieu, de la question de savoir si, compte tenu de l'analyse faite par la Cour de justice sur la situation de ce territoire dans ses arrêts du 21 décembre 2016, Conseil c/Front Polisario (aff. C 104/16 P) et du 27 février 2018, Western Sahara Campaign UK (aff. C 266/16) et des réponses apportées aux questions précédentes, les articles 9 et 26 du règlement (UE) n° 1669/2011 et l'article 76 du règlement (UE) n° 1308/2011 doivent être interprétés en ce sens qu'au stade de l'importation comme de la vente au consommateur, l'emballage des fruits et légumes récoltés sur le territoire du Sahara occidental ne peut mentionner le Maroc au titre du pays d'origine mais doit faire mention du territoire du Sahara occidental. 13. Ces questions, qui sont déterminantes pour la solution du litige que doit trancher le Conseil d'Etat, y compris pour répondre au moyen de la requête exposé au point 7, présentent une difficulté sérieuse. Il y a lieu, par suite, d'en saisir la Cour de justice de l'Union européenne en application de l'article 267 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et, jusqu'à ce que celle-ci se soit prononcée, de surseoir à statuer sur la requête de la Confédération paysanne. D E C I D E : -------------- Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête présentée par la Confédération paysanne jusqu'à ce que la Cour de justice de l'Union européenne se soit prononcée sur les questions suivantes : 1. Les dispositions du règlement n° 1169/2011, du règlement n° 1308/2013, du règlement n° 543/2011 et du règlement n° 952/2013 doivent-elles être interprétées en ce sens qu'elles autorisent un Etat membre à adopter une mesure nationale d'interdiction des importations, en provenance d'un pays déterminé, de fruits et légumes qui méconnaissent les articles 26 du règlement n° 1169/2011 et 76 du règlement n° 1308/2013 faute de mentionner le pays ou territoire dont ils sont réellement originaires, notamment lorsque cette méconnaissance présente un caractère massif et qu'elle peut difficilement être contrôlée une fois les produits entrés sur le territoire de l'Union ' 2. En cas de réponse positive à la première question, l'accord sous forme d'échange de lettres, approuvé par décision du Conseil du 28 janvier 2019, modifiant les protocoles n° 1 et 4 de l'accord d'association euro-méditerranéen du 26 février 1996 établissant une association entre l'Union européenne et ses Etats membres et le Maroc, doit-il être interprété en ce sens que, pour l'application des articles 9 et 26 du règlement (UE) n° 1669/2011 et de l'article 76 du règlement (UE) n° 1308/2011, d'une part, les fruits et légumes récoltés sur le territoire du Sahara occidental ont comme pays d'origine le Maroc et, d'autre part, les autorités marocaines sont compétentes pour délivrer les certificats de conformité prévus par le règlement 543/2011 aux fruits et légumes récoltés sur ce territoire ' 3. En cas de réponse positive à la deuxième question, la décision du Conseil du 28 janvier 2019 approuvant cet accord sous forme d'échange de lettres est-elle conforme à l'article 3, paragraphe 5 du traité sur l'Union européenne, à l'article 21 du même traité et au principe coutumier d'autodétermination rappelé notamment à l'article 1er de la Charte des Nations-Unies ' 4. Les articles 9 et 26 du règlement (UE) n° 1669/2011 et l'article 76 du règlement (UE) n° 1308/2011 doivent-ils être interprétés en ce sens qu'au stade de l'importation comme de la vente au consommateur, l'emballage des fruits et légumes récoltés sur le territoire du Sahara occidental ne peut mentionner le Maroc au titre du pays d'origine mais doit faire mention du territoire du Sahara occidental ' Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Confédération paysanne, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire et au président de la Cour de justice de l'Union européenne. Copie en sera adressée à la Première ministre et à la ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Délibéré à l'issue de la séance du 23 mai 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, M. Frédéric Aladjidi, présidents de chambre ; Mme Anne Egerszegi, M. Thomas Andrieu, Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. Alain Seban, conseillers d'Etat et Mme Catherine Fischer-Hirtz, conseillère d'Etat-rapporteure. Rendu le 9 juin 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Catherine Fischer-Hirtz La secrétaire : Signé : Mme Fehmida Ghulam
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Vu la procédure suivante : Le 11 octobre 2018, M. B... C... a saisi la cour d'une demande d'exécution de l'arrêt n° 16NT00481 du 29 mai 2017 rejetant la requête de l'Etat dirigée contre le jugement du 3 décembre 2015 par lequel tribunal administratif de Rennes a annulé la décision procédant à une retenue de 3 534,03 euros sur le salaire de l'intéressé du mois d'avril 2013, a enjoint au ministre chargé de l'agriculture de lui reverser cette somme assortie des intérêts à compter du 15 juillet 2013 et a mis la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par une ordonnance du 7 février 2020 du président de la cour, une procédure juridictionnelle a été ouverte. Par un courrier du 5 mars 2020, il a été demandé au ministre chargé de l'agriculture de justifier de la nature et de la date des mesures prises pour assurer l'exécution de cet arrêt. Par un arrêt n° 20NT00412 du 11 janvier 2022, la cour a enjoint au ministre chargé de l'agriculture de verser à M. C..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, la somme de 3 534,03 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2013, en assortissant cette injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai d'un mois. Cependant, par un mémoire enregistré le 25 mai 2022, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a informé la cour que la somme de 3 534,03 euros avait été versée à M. C... ainsi qu'en atteste son bulletin de paie du mois de juillet 2020. Il demande à la cour en conséquence de constater que le litige a perdu son objet. Un mémoire a été présenté par M. C... a été enregistré le 26 mai 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêt du 11 janvier 2022, la cour a enjoint au ministre chargé de l'agriculture de verser à M. C..., dans le délai d'un mois à compter de la notification de cet arrêt, la somme de 3 534,03 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2013. Cette injonction a été assortie d'une astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai d'un mois. Il a été demandé au ministre de communiquer à la cour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, copie des actes justifiant des mesures prises en exécution de l'arrêt. Par un courrier du 15 février 2022, le président de la cour a demandé une nouvelle fois au ministre chargé de l'agriculture de justifier dans un délai de 15 jours de la nature et de la date des mesures prises ou de faire connaître les raisons qui pourraient retarder cette exécution. Aucune réponse n'a été apportée à ce courrier. 2. Il résulte toutefois du mémoire produit par le ministre chargé de l'agriculture le 25 mai 2022, que la somme de 3 534,03 euros a été versée à M. C... ainsi qu'en atteste son bulletin de paie du mois de juillet 2020. En revanche, le ministre ne justifie pas du versement à l'intéressé des intérêts au taux légal dont cette somme était assortie à compter du 15 juillet 2013. 3. Aux termes de l'article L. 911- 6 du code de justice administrative : " L'astreinte est provisoire ou définitive. Elle doit être considérée comme provisoire à moins que la juridiction n'ait précisé son caractère définitif. Elle est indépendante des dommages et intérêts. ". Aux termes de l'article L. 911-7 de ce code : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / (...)Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée. ". Aux termes de l'article R. 921-7 du même code : " A compter de la date d'effet de l'astreinte prononcée, même à l'encontre d'une personne privée, par le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, le président de la juridiction ou le magistrat qu'il désigne, après avoir accompli le cas échéant de nouvelles diligences, fait part à la formation de jugement concernée de l'état d'avancement de l'exécution de la décision. La formation de jugement statue sur la liquidation de l'astreinte. / Lorsqu'il est procédé à la liquidation de l'astreinte, copie du jugement ou de l'arrêt prononçant l'astreinte et de la décision qui la liquide est adressée au ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière. ". L'astreinte a pour finalité de contraindre la personne qui s'y refuse à exécuter les obligations qui lui ont été assignées par une décision de justice. Sa liquidation a pour objet de tirer les conséquences du refus ou du retard mis à exécuter ces obligations. 4. Compte tenu de ce qui a été rappelé au point 2 et du délai de 108 jours écoulé entre l'expiration du délai d'un mois dont était assortie l'injonction prononcée à l'encontre du ministre chargé de l'agriculture et la date de la présente audience, il y a lieu de liquider provisoirement l'astreinte prononcée par l'arrêt du 11 janvier 2022. Toutefois, eu égard à la circonstance que seuls les intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2013 sur la somme de 3 534,03 euros restent dus à M. C..., et afin d'éviter un enrichissement indu de ce dernier, il y a lieu, en application des dispositions précitées de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, de modérer l'astreinte initialement prononcée et de fixer son montant à 6 000 euros pour la période du 12 février 2022 au 30 mai 2022. Cette somme provisoire, qui ne préjuge pas du montant des nouvelles liquidations susceptibles d'intervenir jusqu'à exécution complète de la chose jugée, sera versée dans son intégralité à M. C.... Elle ne constitue ni une avance sur les intérêts qui lui restent dus en exécution de l'arrêt du 11 janvier 2022, ni une indemnisation du préjudice subi par l'intéressé à raison de l'illégalité de la retenue opérée sur son salaire au titre du mois d'avril 2013. DÉCIDE : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. C... la somme de 6 000 euros, au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte prononcée par l'arrêt n° 20NT00412 du 11 janvier 2022, pour la période du 12 février 2022 au 30 mai 2022. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Copie en sera adressée au ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière. Délibéré après l'audience du 30 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 juin 2022. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20NT00412
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Vu la procédure suivante : La société d'études et de développement patrimonial de la Régie autonome des transports parisiens (RATP) a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge de la redevance pour création de bureaux, de locaux commerciaux et de locaux de stockage à laquelle elle a été assujettie à raison d'un centre de traitement de données qu'elle a été autorisée à bâtir à Bagneux (Hauts-de-Seine) en vertu d'un permis de construire qui lui a été accordé le 13 octobre 2014. Par un jugement n° 1704694 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif a fait droit à cette demande. Par une décision n° 441652 du 27 avril 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé ce jugement et renvoyé l'affaire au tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Par un jugement n° 2105668 du 11 février 2022, le tribunal administratif, statuant sur renvoi, a accordé la décharge sollicitée par la société RATP Real Estate, venue aux droits de la société d'études et de développement patrimonial de la RATP, au titre des locaux autres que de bureaux inclus dans les bâtiments du centre de traitement de données en litige, et rejeté le surplus de sa demande. Par un pourvoi, enregistré le 12 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre de la transition écologique demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de la société RATP Real Estate. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP de Nervo, Poupet, avocat de société RATP Real Estate ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société d'études et de développement patrimonial de la RATP, devenue ultérieurement la société RATP Real Estate, a été assujettie à la redevance pour création de bureaux, de locaux commerciaux et de locaux de stockage en Ile-de-France prévue par l'article L. 520-1 du code de l'urbanisme à raison d'un permis de construire qui lui a été délivré le 13 octobre 2014 pour la construction d'un centre de traitement des données, dit " data center ", sur le territoire de la commune de Bagneux. Par un jugement du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a fait droit à la demande de la société tendant à la décharge de cette redevance. Par une décision du 27 avril 2021, le Conseil d'État, statuant au contentieux a annulé ce jugement. La ministre de la transition écologique se pourvoit en cassation contre le jugement du 11 février 2022 par lequel le même tribunal, statuant sur renvoi, a prononcé la décharge partielle, à raison des locaux hébergeant des serveurs informatiques, de la redevance. 2. Aux termes de l'article L. 520-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date du fait générateur de l'imposition en litige : " En région d'Île-de-France, une redevance est perçue à l'occasion de la construction, de la reconstruction ou de l'agrandissement des locaux à usage de bureaux, des locaux commerciaux et des locaux de stockage définis au III de l'article 231 ter du code général des impôts ". Le III de l'article 231 ter du code général des impôts dispose que : " (...) III. - La taxe est due : (...) 3° Pour les locaux de stockage, qui s'entendent des locaux ou aires couvertes destinés à l'entreposage de produits, de marchandises ou de biens et qui ne sont pas intégrés topographiquement à un établissement de production ". 3. D'une part, les données numériques traitées dans les locaux en litige ne constituent ni des produits, ni des marchandises, ni des biens, au sens du 3° du III de l'article 231 ter du code général des impôts cité ci-dessus au point 2. D'autre part, et contrairement à ce que soutient la ministre, la circonstance, non contestée, que ces locaux abritent des matériels et infrastructures informatiques en fonctionnement ne saurait conduire à regarder ces locaux comme destinés à un entreposage au sens des mêmes dispositions. Dès lors, en jugeant que les locaux en cause ne constituaient pas des locaux de stockage au sens et pour l'application de ces dispositions, le tribunal, qui a suffisamment motivé son jugement, n'a pas commis d'erreur de droit ni donné aux faits de l'espèce une inexacte qualification juridique. 4. Il résulte de tout ce qui précède que la ministre de la transition écologique n'est pas fondée à demander l'annulation des articles 1er et 2 du jugement qu'elle attaque. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de la ministre de la transition écologique est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à la société RATP Real Estate une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société RATP Real Estate. Délibéré à l'issue de la séance du 21 septembre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, M. Jonathan Bosredon, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes-rapporteure. Rendu le 11 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé La rapporteure : Signé : Mme Ophélie Champeaux La secrétaire : Signé : Mme Magali Méaulle
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Vu la procédure suivante : Par un jugement n° 2202645 du 29 juin 2022, enregistré le 30 juin 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le tribunal administratif de Paris, avant de statuer sur la demande de Mme I... P... tendant à ce qu'il réforme la décision du 8 décembre 2021 par laquelle la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a approuvé, après réformation, le compte de campagne qu'elle a déposé au titre de l'élection régionale des 20 et 27 juin 2021 dans la circonscription de Normandie, et arrêté le montant du remboursement forfaitaire dû par l'Etat à la somme de 415 582 euros, en tant qu'elle a écarté du droit à remboursement la facture de la société France Affichage Plus d'un montant de 30 003 euros, a décidé, en application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat en soumettant à son examen les questions suivantes : 1°) Les dispositions de l'article R. 39 du code électoral doivent-elles être interprétées en ce sens que les dépenses d'affichage incluent nécessairement les dépenses liées au conditionnement, au transport et à la livraison des affiches ' 2°) En cas de réponse positive à la première question, dans l'hypothèse où, comme en l'espèce, ces dépenses excèderaient le montant maximum de remboursement fixé par ce même article R. 39 et ses arrêtés d'application, peuvent-elles être retracées dans le compte de campagne des candidats alors même qu'elles constitueraient des dépenses de la campagne officielle par nature ' Un mémoire en intervention a été présenté par M. de Rugy, M. X..., M. Z..., Mme N..., M. C..., M. V..., M. B..., M. U..., M. J... et l'association La République en Marche. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code électoral ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. François-René Burnod, auditeur, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 30 septembre 2022, présentée par la CNCCFP ; REND L'AVIS SUIVANT 1. En premier lieu, aux termes du second alinéa de l'article L. 355 du code électoral, relatif à l'élection des conseillers régionaux : " Sont remboursés aux listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés : le coût du papier, l'impression des bulletins de vote, affiches, circulaires et les frais d'affichage. Un décret en Conseil d'Etat détermine la nature et le nombre des bulletins, affiches et circulaires dont le coût est remboursé ; il détermine également le montant des frais d'affichage ". Aux termes de l'article R. 39 de ce code, applicable à l'élection des conseillers régionaux en application de l'article R. 182 du même code : " Lorsqu'il est prévu par la loi, le remboursement par l'Etat des frais d'impression ou de reproduction et d'affichage exposés avant chaque tour de scrutin par les candidats, les binômes de candidats ou les listes est effectué, sur présentation des pièces justificatives, pour les imprimés suivants : / a) Deux affiches identiques d'un format maximal de 594 mm × 841 mm, par emplacement prévu à l'article L. 51 ; / b) Deux affiches d'un format maximal de 297 mm × 420 mm pour annoncer la tenue des réunions électorales, par emplacement prévu à l'article L. 51 (...) Toutefois, la somme remboursée ne peut excéder celle résultant de l'application, au nombre des imprimés admis à remboursement, des tarifs d'impression et d'affichage fixés par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de l'économie. Les tarifs sont établis par référence à des documents imprimés sur papier blanc et conformes au grammage et au format fixés par les articles R. 29 et R. 30. Ils peuvent varier en fonction des quantités imprimées et du tour de scrutin ". 2. Les " frais d'impression et de reproduction ou d'affichage " mentionnés par les dispositions précitées de l'article R. 39 du code électoral, qui donnent lieu à remboursement par l'Etat, sous réserve que la liste concernée ait obtenu au moins 5% des suffrages exprimés, dans la limite du plafond que ces dispositions prévoient, incluent nécessairement les dépenses engagées par une liste pour le conditionnement des affiches, leur transport et leur livraison. 3. En second lieu, aux termes de l'article L. 52-4 du code électoral : " [Le mandataire] règle les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique ". Aux termes de l'article L. 52-11 du même code : " Pour les élections auxquelles l'article L. 52-4 est applicable, il est institué un plafond des dépenses électorales, autres que les dépenses de propagande directement prises en charge par l'Etat, exposées par chaque candidat ou chaque liste de candidats, ou pour leur compte, au cours de la période mentionnée au même article (...) ". Aux termes de l'article L. 52-11-1 du code électoral : " Les dépenses électorales des candidats aux élections auxquelles l'article L. 52-4 est applicable font l'objet d'un remboursement forfaitaire de la part de l'Etat égal à 47,5 % de leur plafond de dépenses. Ce remboursement ne peut excéder le montant des dépenses réglées sur l'apport personnel des candidats et retracées dans leur compte de campagne ". Aux termes, enfin, de l'article L. 52-12 du code électoral : " Le compte de campagne retrace, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection par le candidat ou le candidat tête de liste ou pour son compte, à l'exclusion des dépenses de la campagne officielle ". 4. Il résulte de ces dispositions que les dépenses de la campagne officielle constituent des dépenses engagées en vue de l'élection au sens de l'article L. 52-4 du code électoral et doivent, à ce titre, être réglées par le mandataire financier. Il en résulte également que celles de ces dépenses qui, par dérogation, ne doivent pas figurer dans le compte de campagne et ne peuvent faire l'objet du remboursement forfaitaire des dépenses électorales prévu à l'article L. 52-11-1 du code électoral, s'entendent des seules dépenses de cette nature ouvrant droit au remboursement prévu, de manière distincte, par les dispositions citées au point 1, relatives à la campagne officielle. 5. Par suite, les dépenses d'impression ou de reproduction et d'affichage qui ne peuvent donner lieu à remboursement au titre des articles L. 355 et R. 39 du code électoral parce qu'elles excèdent le plafond fixé en application de ces dispositions doivent être retracées dans le compte de campagne des candidats et peuvent faire l'objet du remboursement prévu à l'article L. 52-11-1 du code électoral. Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Paris, à Mme I... P..., à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Il sera publié au Journal officiel de la République française. Délibéré à l'issue de la séance du 21 septembre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. S... G..., M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. O... T..., M. A... W..., M. Q... L..., M. M... K..., M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et M. Y... D..., auditeur-rapporteur. Rendu le 11 octobre 2022 La présidente : Signé : Mme R... F... L'auditeur-rapporteur : Signé : M. Y... D... La secrétaire : Signé : Mme E... H...
JADE/CETATEXT000046420753.xml
Vu la procédure suivante : La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, de sa décision du 28 février 2022 par laquelle elle a rejeté le compte de campagne de Mme D... B... et de M. A... C..., binôme de candidats à l'élection départementale qui s'est tenue les 20 et 27 juin 2021 dans la circonscription de Sedan-3. Par un jugement no 2200554 du 17 juin 2022, ce tribunal, après avoir jugé que la commission avait rejeté à bon droit le compte de campagne de Mme B... et de M. C..., a déclaré ces derniers, à l'article 2 de son jugement, inéligibles à toutes élections pour une durée de six mois à compter de la date à laquelle ce jugement sera devenu définitif. Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... et M. C... demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la saisine de la CNCCFP ; 3°) de fixer le montant de leur remboursement forfaitaire à la somme de 350 euros portant intérêts à taux légal ; 4°) à titre subsidiaire, de dire qu'il n'y a pas lieu de les déclarer inéligibles ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code électoral ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ; Considérant ce qui suit : 1. Le binôme formé par Mme B... et M. C..., candidats dans le canton de Sedan-3 aux élections départementales qui se sont tenues les 20 et 27 juin 2021, a obtenu 24,24 % des voix au premier tour. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), ayant prononcé par une décision du 28 février 2022 le rejet de leur compte de campagne au motif qu'il ne comportait pas leurs signatures, a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en application de l'article L. 52-15 du même code. Par un jugement du 17 juin 2022, ce tribunal, après avoir jugé que le compte de campagne avait été à bon droit rejeté, a déclaré Mme B... et M. C... inéligibles à toutes élections pour une durée de six mois à compter de la date à laquelle ce jugement serait définitif. Ces derniers en relèvent appel. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. D'une part, il résulte des dispositions des articles L. 191, L. 210-1 et L. 221 du code électoral dans leur version issue de la loi du 16 janvier 2015 que le législateur a instauré un mode de scrutin majoritaire binominal à deux tours sans panachage ni vote préférentiel, afin d'assurer la parité au sein des conseils départementaux, et a retenu le principe de solidarité des candidats d'un même binôme. Cette solidarité conduit à ce que les membres d'un même binôme soient tous les deux déclarés inéligibles en cas de méconnaissance des règles relatives au financement des campagnes électorales. Par suite, elle impose que chaque membre soit mis en cause devant le juge de l'élection lorsque celui-ci se trouve saisi par la CNCCFP en application de l'article L. 52-15 du code électoral. 3. En l'espèce, ainsi qu'en attestent les accusés de réception versés au dossier dématérialisé de la procédure devant le tribunal, Mme B... et M. C..., qui avaient du reste tous deux la qualité de partie, se sont vu, contrairement à ce qu'ils soutiennent, notifier individuellement l'acte de saisine de la commission par pli recommandé avec accusé de réception le 17 mars 2022. 4. D'autre part, pour juger que la commission avait, à bon droit, prononcé le rejet du compte de campagne de Mme B... et M. C..., le tribunal a estimé que la seule production, en cours d'instance, d'une photographie du compte de campagne signé par les deux candidats était insuffisante pour apporter la preuve que le défaut de signature avait été régularisé devant la commission. En statuant ainsi, il a suffisamment motivé son jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : S'agissant du rejet du compte de campagne : 5. Aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : " I.- Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement des dépenses électorales prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne lorsqu'il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s'il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8 et selon les modalités prévues à l'article 200 du code général des impôts. / Pour la période mentionnée à l'article L. 52-4 du présent code, le compte de campagne retrace, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection par le candidat ou le candidat tête de liste ou pour son compte, à l'exclusion des dépenses de la campagne officielle. (...) / II.- Au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes accompagné des justificatifs de ses recettes, notamment d'une copie des contrats de prêts conclus en application de l'article L. 52-7-1 du présent code, ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte (...)". Aux termes de l'article L. 52-15 du même code : " La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne. (...) / Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l'élection. (...) ". Il découle nécessairement de ces dispositions que les candidats sont tenus de signer leur compte de campagne à la date de son dépôt afin de l'authentifier. Si un manquement à cette obligation, qui constitue une formalité substantielle, est susceptible d'être régularisé devant la commission jusqu'à ce que celle-ci se prononce sur le compte, il ne l'est pas devant le juge de l'élection. 6. Il résulte de l'instruction que Mme B... et M. C... ont déposé à la CNCCFP un compte de campagne non revêtu de leur signature. Dans le cadre de la procédure contradictoire menée devant elle, la commission a, par un courrier du 4 janvier 2022 complété par deux courriels, demandé aux candidats, outre certains éclaircissements et pièces justificatives, de procéder à la régularisation de ce dépôt en lui communiquant une nouvelle version, datée et signée, de leur compte de compagne. Dans un courrier répondant à ces demandes, lui-même ni daté ni signé, Mme B... a indiqué à la commission qu'elle entendait régulariser le défaut de signature et qu'un document figurait à cet effet en pièce jointe. La commission a néanmoins constaté que le pli par lequel ce courrier lui avait été adressé ne contenait pas la pièce prétendument jointe et a, en dépit des réponses satisfaisantes obtenues à ses autres demandes, rejeté le compte de campagne pour défaut de signature. 7. A l'appui de leur contestation de ce rejet, les appelants ne produisent aucun élément permettant d'établir qu'ils ont effectué la régularisation en cause. A cet égard, la simple mention d'une pièce jointe dans le courrier de Mme B... mentionné au point 6 ne saurait, à elle seule, en tenir lieu. Quant à la production, devant le tribunal administratif, d'une photographie non datée du compte signé par les deux membres du binôme, elle ne permet pas davantage d'établir qu'un document correspondant a été transmis à la commission avant la clôture de la phase contradictoire. 8. Par suite, Mme B... et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'ils attaquent, le tribunal a estimé que la CNCCFP avait, à bon droit, rejeté leur compte de campagne. Leurs conclusions tendant à ce que soit fixé le montant du remboursement forfaitaire ne peuvent qu'être rejetées par voie de conséquence. S'agissant de l'inéligibilité : 9. Aux termes de l'article L. 118-3 du code électoral, dans sa version issue de la loi du 2 décembre 2019 visant à clarifier certaines dispositions du droit électoral : " Lorsqu'il relève une volonté de fraude ou un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible : / 1° Le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12 ; / (...)/ 3° Le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit./ L'inéligibilité mentionnée au présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. Toutefois, elle n'a pas d'effet sur les mandats acquis antérieurement à la date de la décision. / En cas de scrutin binominal, l'inéligibilité s'applique aux deux candidats du binôme. (...) ". En dehors des cas de fraude, le juge de l'élection ne peut prononcer l'inéligibilité d'un candidat sur le fondement de ces dispositions que s'il constate un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales. Il lui incombe à cet effet de prendre en compte l'ensemble des circonstances de l'espèce et d'apprécier s'il s'agit d'un manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales et s'il présente un caractère délibéré. 10. Il résulte de l'instruction que Mme B... et M. C... ont procédé au dépôt de leur compte de campagne sans satisfaire à la formalité substantielle de signature de celui-ci. S'ils soutiennent que ce défaut de signature ne procède pas d'une intention délibérée, il résulte de l'instruction, ainsi qu'indiqué au point 6, qu'ils se sont abstenus de donner suite à l'invitation à régulariser ce manquement que leur avait adressée la CCNFP. Par ailleurs, ni la faiblesse des montants inscrits sur ce compte ni l'absence ou la régularisation d'autres irrégularités ne permettent, en l'espèce, de considérer que ce manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales ne revêtirait pas un caractère délibéré. Par suite, Mme B... et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a prononcé leur inéligibilité pour une durée de six mois. 11. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme B... et de M. C... doit être rejetée. Sur les frais de l'instance : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de Mme B... et M. C... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme D... B..., à M. A... C..., à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré à l'issue de la séance du 21 septembre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, M. Jonathan Bosredon, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes-rapporteure. Rendu le 11 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé La rapporteure : Signé : Mme Ophélie Champeaux La secrétaire : Signé : Mme Magali Méaulle [RJ1] Rappr., s’agissant de la formalité substantielle que constitue la présentation du compte par un expert-comptable, CE, 16 décembre 1992, Gaillard et CNCCFP, n°s 135834 139658, T. p. 997....[RJ2] Cf. CE, 9 juin 2021, Elections municipales et communautaires d’Apatou, n° 447336, 449019, T. pp. 493-695-696
JADE/CETATEXT000046420748.xml
Vu la procédure suivante : La société à responsabilité limitée (SARL) BH Concept a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014. Par un jugement n° 1705179 du 17 octobre 2019, ce tribunal a fait droit à sa demande Par un arrêt n° 20BX00181 du 7 avril 2022, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par le ministre de l'économie, des finances et de la relance contre ce jugement. Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 31 mai et 19 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. François-René Burnod, auditeur, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Duhamel - Rameix - Gury - Maître, avocat de la société BH Concept ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 21 septembre 2022, présentée par la société BH Concept ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société BH Concept, qui exerce une activité de marchand de biens, a procédé au cours des années 2012, 2013 et 2014 à des cessions de terrains à bâtir issus de la division parcellaire de terrains bâtis qu'elle a placées, pour leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, sous le régime de la marge prévu par l'article 268 du code général des impôts. A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration, estimant que ces terrains n'avaient pas été acquis par l'intéressée en qualité de terrains à bâtir, a remis en cause l'application de ce régime et a mis à la charge de la société des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 avril 2022 par lequel la cour administrative de Bordeaux a rejeté l'appel qu'il avait formé contre le jugement du 20 septembre 2019 du tribunal administratif de Bordeaux ayant, sur demande de la société BH Concept, prononcé la décharge de ces impositions. 2. En premier lieu, le I de l'article 257 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles, lesquelles comprennent les livraisons à titre onéreux de terrains à bâtir, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée. En vertu du 2 du b. de l'article 266 du même code, l'assiette de la taxe est en principe constituée par le prix de cession. L'article 392 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée dispose toutefois que : " Les États membres peuvent prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n'a pas eu droit à déduction à l'occasion de l'acquisition, la base d'imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d'achat ". L'article 268 du code général des impôts, pris pour la transposition de ces dispositions, prévoit, dans sa rédaction alors applicable, que : " S'agissant de la livraison d'un terrain à bâtir (...), si l'acquisition par le cédant n'a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, la base d'imposition est constituée par la différence entre : / 1° D'une part, le prix exprimé et les charges qui s'y ajoutent ; / 2° D'autre part, selon le cas : / - soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l'acquisition du terrain(...); / - soit la valeur nominale des actions ou parts reçues en contrepartie des apports en nature qu'il a effectués ". 3. Il résulte de ces dernières dispositions, lues à la lumière de celles de la directive dont elles ont pour objet d'assurer la transposition, que les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elles prévoient s'appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s'appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d'un terrain bâti, notamment quand le bâtiment qui y était édifié a fait l'objet d'une démolition de la part de l'acheteur-revendeur ou quand le bien acquis a fait l'objet d'une division parcellaire en vue d'en céder séparément des parties ne constituant pas le terrain d'assiette du bâtiment. 4. En se fondant, pour juger que les terrains à bâtir objets des cessions en litige avaient été acquis en cette même qualité par la société BH Concept auprès de leurs anciens propriétaires, sur la seule circonstance que la division parcellaire dont ces terrains procédaient avait été autorisée de façon suffisamment précise et détaillée préalablement à cette acquisition, sans rechercher s'il ressortait des actes de vente que ces terrains avaient été acquis par la société BH Concept comme terrains à bâtir, distinctement des terrains supportant des constructions, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit. 5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, que le ministre de l'économie et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 7 avril 2022 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Bordeaux. Article 3 : Les conclusions de la société BH Concept tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la société à responsabilité limitée BH Concept. Délibéré à l'issue de la séance du 21 septembre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, M. Jonathan Bosredon, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et M. François-René Burnod, auditeur-rapporteur. Rendu le 11 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé Le rapporteur : Signé : M. François-René Burnod La secrétaire : Signé : Mme Magali Méaulle [RJ1] Cf. CE, 27 mars 2020, Ministre de l'action et des comptes publics c/ Société Promialp, n° 428234, T. p. 719. Rappr. s’agissant, pour l’application du régime de la TVA sur la marge, de l’exigence d’une « identité juridique entre le bien acquis et le bien revendu », CJUE, 30 septembre 2021, Icade Promotion SAS aff. C-299/20.
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Vu la procédure suivante : La société par actions simplifiée (SAS) Malherbe Transports a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge du supplément de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auquel elle a été assujettie au titre de l'année 2012, ainsi que des intérêts de retard correspondants. Par un jugement n° 1801598 du 2 juillet 2020, ce tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 20NT02887 du 7 janvier 2022, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de la société Malherbe Transports, annulé ce jugement et prononcé la décharge des impositions en litige. Par un pourvoi enregistré le 10 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société Malherbe Transports. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code civil ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Lapierre, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond, d'une part, que la société Catylain détenait 100 % des parts de la société Malherbe Transports, laquelle détenait 100 % des parts de la société Jarlaud Transports, et, d'autre part, que la société Catylain détenait sur la société Jarlaud Transports, à l'ouverture de l'exercice correspondant à l'année 2010, une créance de 536 000 euros. La société Jarlaud Transports ayant rencontré des difficultés financières, la société Catylain lui a consenti le 30 décembre 2010 un abandon de créance assorti d'une clause de retour à meilleure fortune. Par un acte du 25 mai 2012, la société Malherbe Transports a procédé à la dissolution sans liquidation de la société Jarlaud Transports, ce qui a entraîné une transmission universelle du patrimoine de la seconde à la première en application des dispositions du troisième alinéa de l'article 1844-5 du code civil. Le 21 décembre 2012, la société Malherbe Transports, estimant réunies les conditions de mise en œuvre de la clause de retour à meilleure fortune, a remboursé à la société Catylain la somme de 536 000 euros et enregistré cette somme comme charge exceptionnelle dans ses écritures comptables. A la suite d'une vérification de comptabilité de la société Malherbe Transports, l'administration fiscale a estimé que cette charge ne devait pas venir en déduction du résultat imposable pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2012 et devait être extournée des charges prises en compte pour le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises due au titre de l'année 2012. Elle a en conséquence assujetti la société Malherbe Transports à un supplément de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre de l'année 2012. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 janvier 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du 2 juillet 2020 du tribunal administratif de Caen ayant rejeté la demande de la société Malherbe Transports tendant à la décharge de cette imposition supplémentaire ainsi que des intérêts de retard correspondants, et prononcé cette décharge. 2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Malherbe Transports, par l'effet de l'opération de dissolution-confusion avec transmission universelle de patrimoine du 25 mai 2012, est venue aux droits et obligations de la société Jarlaud Transports et s'est par suite substituée à cette dernière comme débitrice de la clause de retour à meilleure fortune dont était assorti l'abandon de créance consenti par la société Catylain au bénéfice de la société Jarlaud Transports. Par suite, la cour administrative d'appel, alors qu'il n'était pas contesté devant elle qu'était satisfaite, dans le chef de la société Malherbe Transport, la condition, tenant à la reconstitution des capitaux propres à la hauteur de la capacité financière nécessaire à l'exercice de l'activité de transport de la société Jarlaud Transports, déterminant l'activation de la clause de retour à meilleure fortune prévue par l'article 2 de la convention d'abandon de créance du 30 décembre 2010, n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le versement, le 21 décembre 2012, d'une somme de 536 000 euros par la société Malherbe Transports à la société Catylain trouvait sa cause dans la mise en œuvre de cette obligation. 3. En second lieu, aux termes du 4 du I de l'article 1586 sexies du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'article 17 de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 : " La valeur ajoutée est égale à la différence entre : / a) D'une part, le chiffre d'affaires tel qu'il est défini au 1, majoré : / (...) - des subventions d'exploitation et des abandons de créances à caractère financier à la hauteur du montant déductible des résultats imposables à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés de l'entreprise qui les consent ; (...) b) Et, d'autre part : / (...) - les abandons de créances à caractère financier, à la hauteur du montant déductible des résultats imposables à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés ". Les dispositions de cet article fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Il y a lieu, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à 1'une de ces catégories, de se reporter aux normes comptables dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt. 4. L'article 17 de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 a supprimé, pour les exercices clos à compter du 4 juillet 2012, la possibilité pour les entreprises de déduire de leur bénéfice imposable les abandons de créance à caractère financier et supprimé corrélativement leur prise en compte, pour celui qui les consent comme pour celui qui en bénéficie, pour le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. 5. Pour juger que l'administration avait à tort refusé qu'il soit tenu compte, pour le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises due au titre de l'année 2012, du remboursement, intervenu le 21 décembre 2012, de l'abandon de créance consenti par la société Catylain à la société Jarlaud Transports le 30 décembre 2010, la cour administrative d'appel s'est uniquement fondée sur ce que cette somme était déductible du résultat imposable à l'impôt sur les sociétés de la société Malherbe Transports au titre de l'exercice clos en 2012. En statuant ainsi, sans rechercher si le remboursement d'un abandon de créance précédemment consenti figurait au nombre des éléments comptables devant, aux termes des dispositions de l'article 1586 sexies du code général des impôts, être pris en compte pour le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit. 6. Toutefois, il résulte des dispositions rappelées aux points 3 et 4 que, lorsqu'un abandon de créance à caractère financier consenti au cours d'un exercice clos avant le 4 juillet 2012 a eu pour effet de majorer le montant de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises de la société ayant bénéficié de cet abandon, son remboursement en exécution d'une clause de retour à meilleure fortune par cette même société ou par une société qui se serait, le cas échéant, substituée à elle, a pour effet de minorer symétriquement l'assiette de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises due par cette société au titre de l'année au cours de laquelle le remboursement est intervenu. Il en va ainsi, en dépit des modifications résultant de l'article 17 de la loi de finances rectificative pour 2012, même lorsque le remboursement intervient au cours d'un exercice clos à compter du 4 juillet 2012. Il en résulte que le remboursement le 21 décembre 2012, par la société Malherbe Transports, en exécution de la clause de retour à meilleure fortune dont elle était devenue débitrice, de l'abandon de créance consenti par la société Catylain à la société Jarlaud Transports le 30 décembre 2010 devait, en application des dispositions de l'article 1586 sexies du code général des impôts, être pris en compte pour la détermination de la valeur ajoutée servant d'assiette à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises due par la société Malherbe Transports au titre de l'année 2012, à la hauteur du montant déductible des résultats imposables à l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice couvrant la même année. Ce motif, qui repose sur des faits constants n'appelant aucune appréciation, doit être substitué à ceux de l'arrêt attaqué, dont il justifie le dispositif. 7. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'économie, des finances et de la relance est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la société par actions simplifiée Malherbe Transports. Délibéré à l'issue de la séance du 5 octobre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, Mme Françoise Tomé, conseillers d'Etat et M. Alexandre Lapierre, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur. Rendu le 18 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl Le rapporteur : Signé : M. Alexandre Lapierre La secrétaire : Signé : Mme Magali Méaulle
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Vu la procédure suivante : M. D... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014, 2015 et 2016, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités correspondants. Par un jugement n° 1903810 du 29 juin 2020, ce tribunal a rejeté leur demande. Par un arrêt n° 20PA01989 du 26 janvier 2022, la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de M. et Mme B..., annulé ce jugement et prononcé la décharge des impositions en litige. Par un pourvoi enregistré le 21 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code civil ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Lapierre, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme B... sont associés de la société civile immobilière (SCI) Duc A..., qui relève de l'article 8 du code général des impôts et dont ils détiennent, depuis une donation consentie le 28 septembre 2005, 0,5 % chacun du capital social, 99 % de ce capital étant détenu par leurs cinq enfants. Il en ressort également que, par des délibérations d'assemblée générale extraordinaire des 30 décembre 2014, 28 décembre 2015 et 30 décembre 2016, la totalité des pertes enregistrées par la société Duc A... pour les exercices clos respectivement en 2014, 2015 et 2016 a été attribuée à M. et Mme B.... Ceux-ci ont déclaré, au titre de leurs revenus imposables des années 2014 à 2016, des déficits fonciers correspondant à la totalité des pertes enregistrées par la société au titre de ces mêmes années. Par des propositions de rectification des 9 mars et 11 septembre 2017, l'administration a estimé que la fraction des déficits fonciers de la société Duc A... attribuée aux intéressés pour les années d'imposition en litige devait être limitée à celle correspondant à leur part dans le capital social de la société, soit 1 %, et a rehaussé leurs revenus fonciers en conséquence. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 26 janvier 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a fait droit à l'appel formé par M. et Mme B... contre le jugement du 29 juin 2020 du tribunal administratif de Paris ayant rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2014, 2015 et 2016, ainsi que des pénalités correspondantes. 2. D'une part, aux termes de l'article 8 du code général des impôts : " (...) les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. (...) Il en est de même, sous les mêmes conditions : 1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées au 1 de l'article 206 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 (...) ". Les droits des associés auxquels cet article fait référence sont, sauf stipulation contraire, ceux qui résultent du pacte social. Par suite, les bases d'imposition de chaque associé doivent être déterminées par référence à une répartition des résultats sociaux présumée faite conformément au pacte social, sauf dans le cas où un acte ou une convention passé avant la clôture de l'exercice a pour effet de conférer aux associés des droits dans les bénéfices sociaux différents de ceux qui résulteraient de la seule application du pacte social, auquel cas les bases d'imposition des associés doivent correspondre à cette nouvelle répartition des résultats sociaux. 3. D'autre part, aux termes de l'article 1844-1 du code civil : " La part de chaque associé dans les bénéfices et sa contribution aux pertes se déterminent à proportion de sa part dans le capital social et la part de l'associé qui n'a apporté que son industrie est égale à celle de l'associé qui a le moins apporté, le tout sauf clause contraire. / Toutefois, la stipulation attribuant à un associé la totalité du profit procuré par la société ou l'exonérant de la totalité des pertes, celle excluant un associé totalement du profit ou mettant à sa charge la totalité des pertes sont réputées non écrites. " Il résulte de ces dispositions qu'est réputée non écrite une stipulation qui a pour effet d'attribuer à un unique associé la totalité des profits procurés par la société ou de mettre à sa charge la totalité des pertes ou qui a pour effet d'exclure un quelconque associé de tout profit ou de l'exonérer de toute participation aux pertes. 4. Pour juger que les décisions des assemblées générales extraordinaires des 30 décembre 2014, 28 décembre 2015 et 30 décembre 2016 attribuant à M. et Mme B... la totalité des pertes enregistrées par la société Duc A... pour les exercices clos respectivement en 2014, 2015 et 2016 ne pouvaient être regardées comme des stipulations réputées non écrites par l'effet des dispositions précitées du second alinéa de l'article 1844-1 du code civil, la cour administrative d'appel de Paris, qui a porté sur les faits de l'espèce une appréciation exempte de dénaturation, s'est fondée sur ce que ces décisions, qui concernaient tant les bénéfices que les pertes, ne dérogeaient que de manière ponctuelle au pacte social. En refusant ainsi de réputer non écrites de telles décisions qui se bornaient à déroger aux règles statutaires pour ce qui concerne la répartition des seules pertes constatées à la clôture des exercices concernés, et alors même que ces décisions ont eu pour effet d'exonérer certains associés de toute participation à ces pertes, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit. 5. Par ailleurs, si le ministre soutient que la cour a commis une erreur de droit en retenant que les décisions des assemblées générales extraordinaires des 30 décembre 2014, 28 décembre 2015 et 30 décembre 2016 ne pouvaient être réputées non écrites en vertu du second alinéa de l'article 1844-1 du code civil au motif qu'elles n'avaient pas été annulées par le juge compétent, ce moyen est dirigé contre un motif surabondant de l'arrêt attaqué et ne peut, par suite, qu'être écarté comme inopérant. 6. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'économie, des finances et de la relance est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. et Mme D... et C... B.... Délibéré à l'issue de la séance du 5 octobre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, Mme Françoise Tomé, conseillers d'Etat et M. Alexandre Lapierre, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur. Rendu le 18 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl Le rapporteur : Signé : M. Alexandre Lapierre La secrétaire : Signé : Mme Magali Méaulle
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Vu la procédure suivante : La société à responsabilité limitée (SARL) Dovre France a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er juillet 2010 au 30 novembre 2013. Par un jugement no 1706119 du 10 juillet 2019, le tribunal a rejeté ses demandes. Par un arrêt n° 19DA02129 du 2 décembre 2021, la cour administrative d'appel de Douai, faisant partiellement droit aux conclusions de l'appel formé par la société contre ce jugement, a prononcé, d'une part, la réduction de ses bases imposables à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2012, à hauteur de la somme de 74 150,80 euros correspondant à la reprise d'une provision, et, d'autre part, la décharge de la majoration pour manquement délibéré appliquée aux rectifications procédant de la réintégration au résultat imposable des pertes sur des créances irrécouvrables. Par un pourvoi, enregistré le 2 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande au Conseil d'Etat d'annuler les articles 1er à 5 de cet arrêt. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes, - les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la société Dovre France a, en 2011, inscrit dans sa comptabilité une dotation aux provisions pour dépréciation d'une créance douteuse pour un montant de 74 151 euros puis a, en 2012, estimant que cette créance était devenue irrécouvrable, constaté une perte du même montant après avoir repris la provision passée en 2011, devenue sans objet. A la suite d'une vérification de la comptabilité de cette société, l'administration a, notamment, estimé que la créance de 74 151 euros avait à tort été regardée comme irrécouvrable et réintégré la somme correspondante au résultat de l'exercice clos en 2012. Par un jugement du 10 juillet 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de la société tendant à la décharge des suppléments d'imposition procédant de cette réintégration et des pénalités correspondantes. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 2 décembre 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Douai, faisant partiellement droit à l'appel formé par la société Dovre France contre ce jugement, a réduit ses bases imposables à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2012 de la somme de 74 151 euros et prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés en résultant ainsi que des pénalités correspondantes. 2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les comptes de l'exercice (...) ". Lorsqu'une provision a été constituée dans les comptes de l'exercice, et sauf si les règles propres au droit fiscal y font obstacle, notamment les dispositions particulières du 5° du 1 de cet article limitant la déductibilité fiscale de certaines provisions, le résultat fiscal de ce même exercice doit, en principe, être diminué du montant de cette provision dont la reprise, lors d'un ou de plusieurs exercices ultérieurs, entraîne en revanche une augmentation de l'actif net du ou des bilans de clôture du ou des exercices correspondants. 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande ". Aux termes de l'article L. 205 du même livre : " Les compensations de droits prévues aux articles L. 203 et L. 204 sont opérées dans les mêmes conditions au profit du contribuable à l'encontre duquel l'administration effectue une rectification lorsque ce contribuable invoque une surtaxe commise à son préjudice ou lorsque la rectification fait apparaître une double imposition ". 4. Pour prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la société Dovre France avait été assujettie en conséquence de la réintégration à son résultat imposable, au titre de l'exercice clos en 2012, de la somme de 74 151 euros qu'elle avait regardée comme une perte sur créance irrécouvrable, la cour administrative d'appel s'est fondée sur ce que cette réintégration faisait apparaitre une double imposition au préjudice de cette société, dès lors que celle-ci avait, au cours du même exercice, procédé à la reprise de la provision précédemment constituée à raison du caractère douteux de cette même créance. Elle en a déduit que la société était fondée à demander le bénéfice de la compensation entre le rehaussement de ses bases imposables et le rétablissement de la provision, qu'elle avait reprise à tort dès lors que le caractère douteux de la créance demeurait. 5. Toutefois, il résulte des dispositions précitées du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts qu'une provision ne saurait être déduite du résultat de l'exercice si elle n'a pas été effectivement constatée dans les écritures comptables à la clôture de l'exercice. Le défaut de constitution d'une provision n'est ainsi pas susceptible de faire l'objet d'une correction demandée par voie de réclamation ou, après l'expiration du délai de réclamation, par voie de compensation à l'occasion d'un rehaussement. Dès lors que, ainsi que l'a relevé la cour, la provision qui avait été constituée par la société Dovre France en 2011 avait été reprise au cours de l'exercice clos en 2012 et ne figurait plus au bilan de clôture de cet exercice, l'absence de déduction du montant de la provision pour le calcul du résultat passible de l'impôt sur les sociétés au titre de cet exercice ne pouvait être regardée comme caractérisant une surtaxe commise au détriment de la société ou une double imposition de nature à ouvrir droit à une demande de compensation à l'occasion de la réintégration par l'administration de la perte sur créance irrécouvrable. Par suite, en faisant droit à la demande de compensation de la société Dovre France, la cour a commis une erreur de droit. 6. En second lieu, il ressort des pièces du dossiers soumis au juge du fond que si la proposition de rectification adressée à la société le 31 juin 2015 faisait état de l'application d'une majoration de 40 % pour manquement délibéré aux rehaussements procédant de la réintégration de la perte sur créance irrécouvrable d'un montant de 74 151 euros au titre de l'exercice clos en 2012, une telle pénalité n'a pas été mise à la charge de la société, seuls des intérêts de retard ayant été mis en recouvrement le 31 mars 2016. Il en résulte que les conclusions formées par la société et tendant à la décharge de la pénalité, qui étaient en réalité dépourvues d'objet dès l'introduction de la demande, étaient irrecevables. Le ministre est, par suite, fondé à soutenir que la cour administrative d'appel, en accueillant ces conclusions, a entaché son arrêt d'une erreur de droit. 7. Il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à demander l'annulation des articles 1er à 5 de l'arrêt qu'il attaque. D E C I D E : -------------- Article 1er : Les articles 1er à 5 de l'arrêt du 2 décembre 2021 de la cour administrative de Douai sont annulés. Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Douai. Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la société à responsabilité limitée Dovre France. Délibéré à l'issue de la séance du 5 octobre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, Mme Françoise Tomé, conseillers d'Etat et Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes-rapporteure. Rendu le 18 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Ophélie Champeaux La secrétaire : Signé : Mme Magali Méaulle
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Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3 novembre 2016 de la société Electricité de France (EDF), implicitement confirmée par le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, lui refusant l'accès au centre nucléaire de production d'électricité de Saint-Alban Saint-Maurice-l'Exil (Isère). Par un jugement n° 1606510 du 4 avril 2019, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer refusant l'accès à ce centre nucléaire de production d'électricité. Par un arrêt n° 19LY02162, 19LY02163, 19LY02164 du 12 mars 2020, la cour administrative d'appel de Lyon, faisant droit à l'appel formé par la société EDF et par le ministre de la transition écologique et solidaire, a annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par M. A.... Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'État les 23 septembre et 23 décembre 2020, M. A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société EDF et du ministre de la transition écologique et solidaire ; 3°) de mettre à la charge de l'État et de la société EDF le versement à la SCP Thouin-Palat, Boucard, son avocat, d'une somme de 5 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de la défense ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Pauline Hot, auditrice, - les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de M. A... et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat d'Electricité de France ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 3 novembre 2016, l'assistant préparateur de la section protection du site du centre nucléaire de production d'électricité de Saint-Alban Saint-Maurice-l'Exil (Isère) a refusé l'accès à ce centre à M. A..., ouvrier monteur dans la spécialité de logistique nucléaire. Par un arrêt du 12 mars 2020, contre lequel ce dernier se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le jugement du 4 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble avait annulé pour excès de pouvoir la décision implicite du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer ayant rejeté le recours gracieux formé par l'intéressé contre le refus d'accès qui lui avait été opposé. 2. En vertu de l'article L. 1332-1 du code de la défense : " Les opérateurs publics ou privés exploitant des établissements ou utilisant des installations et ouvrages, dont l'indisponibilité risquerait de diminuer d'une façon importante le potentiel de guerre ou économique, la sécurité ou la capacité de survie de la nation, sont tenus de coopérer à leurs frais dans les conditions définies au présent chapitre, à la protection desdits établissements, installations et ouvrages contre toute menace, notamment à caractère terroriste ". Aux termes de l'article L. 1332-2-1 du même code : " L'accès à tout ou partie des établissements, installations et ouvrages désignés en application du présent chapitre est autorisé par l'opérateur qui peut demander l'avis de l'autorité administrative compétente dans les conditions et selon les modalités définies par décret en Conseil d'Etat. / L'avis est rendu à la suite d'une enquête administrative (...) La personne concernée est informée de l'enquête administrative dont elle fait l'objet ". L'article R. 1332-22-1 du même code précise que : " Avant d'autoriser l'accès d'une personne physique ou morale à tout ou partie d'un point d'importance vitale qu'il gère ou utilise, l'opérateur d'importance vitale peut demander par écrit l'avis du préfet de département dans le ressort duquel se situe le point d'importance vitale (...). / Cette demande peut justifier que soit diligentée sous le contrôle de l'autorité concernée une enquête administrative destinée à vérifier que les caractéristiques de la personne physique ou morale intéressée ne sont pas incompatibles avec l'accès envisagé et pouvant donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978. (...) ". Aux termes de l'article R. 1332-22-3 du code de la défense: " L'opérateur d'importance vitale informe par écrit la personne concernée de la demande d'avis formulée auprès de l'autorité administrative et lui indique que, dans ce cadre, elle fait l'objet d'une enquête administrative conformément aux dispositions de l'article L. 1332-2-1 du présent code ". Enfin, l'article R. 1332-33 du même code dispose que : " Préalablement à l'introduction d'un recours contentieux contre tout acte administratif pris en application du présent chapitre (...), le requérant adresse un recours administratif au ministre coordonnateur du secteur d'activités dont il relève. Le ministre statue dans un délai de deux mois. En l'absence de décision à l'expiration de ce délai, le recours est réputé être rejeté ". 3. En vertu de ces dispositions, l'accès d'une personne à une installation d'importance vitale peut être refusé par l'exploitant de l'installation lorsque les caractéristiques de cette personne ne sont pas compatibles avec cet accès. L'exploitant peut solliciter par écrit l'avis du préfet de département, lequel peut demander à ce que soit diligentée une enquête administrative destinée à vérifier que les caractéristiques de la personne physique ou morale intéressée ne sont pas incompatibles avec l'accès envisagé. Lorsqu'il est saisi, par le recours administratif prévu à l'article R. 1332-33 à titre de préalable obligatoire, d'une décision de refus d'accès à une telle installation, il appartient au ministre compétent d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les caractéristiques de la personne concernée sont effectivement incompatibles avec l'accès à l'installation en cause. 4. Pour annuler, par l'arrêt attaqué, le jugement du tribunal administratif de Grenoble qui avait annulé la décision du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer ayant rejeté le recours gracieux formé par M. A... contre le refus d'accès au centre nucléaire de production d'électricité de Saint-Alban Saint-Maurice-l'Exil qui lui avait été opposé, la cour administrative d'appel s'est bornée à juger que ce refus n'était pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. M. A... est fondé à soutenir qu'en statuant ainsi, la cour a commis une erreur de droit et à demander, pour ce motif, l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 6. Il ressort des pièces du dossier et notamment des éléments mentionnés dans la note du 26 septembre 2016 du service départemental du renseignement territorial de la Loire, dans celle du 22 février 2019 du service central du renseignement territorial et dans la note de synthèse du 21 mai 2019 du service de défense, de sécurité et d'intelligence économique du ministère de la transition écologique et solidaire que M. A... revendique son appartenance à la mouvance salafiste, que son épouse a fait l'objet d'un signalement pour radicalisation et qu'il est en relation avec plusieurs personnes signalées pour radicalisation. En se fondant sur ces éléments, qui sont suffisamment étayés par les pièces versées au dossier, pour caractériser l'incompatibilité du comportement et des fréquentations de l'intéressé avec l'autorisation sollicitée et refuser pour ce motif l'accès sollicité, l'autorité administrative n'a pas fait une inexacte application des dispositions précédemment citées du code de la défense. C'est, par suite, à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur une erreur d'appréciation de l'autorité administrative pour annuler la décision du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer rejetant le recours de M. A... contre la décision lui refusant l'accès au centre nucléaire de production d'électricité de Saint-Alban Saint-Maurice-l'Exil. 7. Il appartient toutefois au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A.... 8. En premier lieu, la décision intervenue sur recours administratif préalable obligatoire devant le ministre s'est substituée à la décision initiale du 3 novembre 2016 par laquelle la société Electricité de France avait refusé au requérant l'accès au centre nucléaire de production d'électricité de Saint-Alban Saint-Maurice-l'Exil. Dès lors, M. A... ne peut utilement soutenir que la décision du 3 novembre 2016 serait entachée d'incompétence ou de défaut de motivation. 9. En second lieu, la décision du 3 novembre 2016 refusant à M. A... l'accès au centre nucléaire de production d'électricité de Saint-Alban Saint-Maurice-l'Exil a été prise à la suite d'une demande de renouvellement de cet accès présentée le 4 juillet 2016 par la société Nuvia Protection, employeur de M. A..., ce dernier y travaillant depuis la mi-février 2016. Il n'est pas contesté que, conformément à l'annexe 4 à la note établie en 2015 par le service d'accueil, de logistique et de protection de ce centre nucléaire, M. A... s'est vu remettre, à l'occasion de la délivrance de sa première autorisation d'accès, un courrier d'information relatif à la demande d'avis sur l'accès auprès de l'autorité administrative et à l'enquête administrative précédant cet avis. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il n'aurait pas été informé de cette demande d'avis et de cette enquête ne peut qu'être écarté. 10. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de la transition écologique et solidaire et la société Électricité de France sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'ils attaquent, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer refusant à M. A... l'accès au centre nucléaire de production d'électricité. 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat et de la société EDF qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : Les articles 1er et 2 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 12 mars 2020 et le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 4 avril 2019 sont annulés. Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée. Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... et par la société EDF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A..., au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société Electricité de France. Délibéré à l'issue de la séance du 19 septembre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Pauline Hot, auditrice-rapporteure. Rendu le 17 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Pauline Hot La secrétaire : Signé : Mme Marie-Adeline Allain [RJ1] Rappr., s’agissant de refus d’autorisation de commerce de matériels de guerre, CE, 3 mars 2010, Ministre de la défense n° 318716, T. pp. 667-925-928 ; s’agissant de l’interdiction de la détention d’armes, CE, 29 avril 2015, M. Faure, n° 372356, T. pp. 783-833.
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Vu la procédure suivante : Par une décision n° 394254 du 12 juillet 2017, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a, à la demande de l'association Les amis de la Terre France, d'une part, annulé pour excès de pouvoir les décisions implicites du Président de la République, du Premier ministre et des ministres chargés de l'environnement et de la santé, refusant de prendre toutes mesures utiles et d'élaborer des plans conformes à l'article 23 de la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l'air ambiant et un air pur pour l'Europe, permettant de ramener, sur l'ensemble du territoire national, les concentrations en dioxyde d'azote et en particules fines PM10 en-deçà des valeurs limites fixées à l'annexe XI de cette directive, d'autre part, enjoint au Premier ministre et au ministre chargé de l'environnement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que soit élaboré et mis en œuvre, pour chacune des zones énumérées au point 9 des motifs de cette décision, un plan relatif à la qualité de l'air permettant de ramener les concentrations en dioxyde d'azote et en particules fines PM10 sous les valeurs limites fixées par l'article R. 221-1 du code de l'environnement dans le délai le plus court possible et de le transmettre à la Commission européenne avant le 31 mars 2018. Par une décision n° 428409 du 10 juillet 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé une astreinte à l'encontre de l'Etat s'il ne justifiait pas, dans les six mois suivant la notification de cette décision, avoir exécuté la décision du 12 juillet 2017, pour chacune des zones énumérées au point 11 de sa nouvelle décision, et a fixé le montant de cette astreinte à 10 millions d'euros par semestre jusqu'à la date de cette exécution. Par une décision n° 428409 du 4 août 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a procédé à la liquidation provisoire de l'astreinte prononcée pour la période courant du 11 janvier au 11 juillet 2021 et condamné l'Etat à verser la somme de 10 millions d'euros, à répartir de la façon suivante : 100 000 euros à l'association Les amis de la Terre France, 3,3 millions d'euros à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), 2,5 millions d'euros au Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), 2 millions d'euros à l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), 1 million d'euros à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS), 350 000 euros aux associations agréées de surveillance de la qualité de l'air Air Parif et Atmo Auvergne Rhône-Alpes chacune, et 200 000 euros aux associations Atmo Occitanie et Atmo Sud chacune. Par un courrier du 10 février 2022, le délégué à l'exécution des décisions de justice de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat a demandé à la ministre de la transition écologique de porter à sa connaissance les mesures prise par les services de l'Etat pour assurer l'exécution des décisions. Par des observations, enregistrées le 22 mars 2022, la ministre de la transition écologique a précisé les mesures adoptées par l'Etat à cette fin. La section du rapport et des études du Conseil d'Etat a exécuté les diligences qui lui incombent en vertu du code de justice administrative. La note du 25 avril 2022 que la présidente de la section du rapport et des études a adressée au président de la 6ème chambre de la section du contentieux a été communiquée aux parties en application des dispositions de l'article R. 931-5 du code de justice administrative. Les parties ont été invitées à indiquer au Conseil d'Etat quelles personnes morales de droit public disposant d'une autonomie suffisante à l'égard de l'Etat et dont les missions sont en rapport avec l'objet du litige ou de droit privé à but non lucratif menant, conformément à leurs statuts, des actions d'intérêt général également en lien avec cet objet pourraient utilement être désignées affectataires de tout ou partie de la liquidation de cette astreinte dans l'hypothèse où il serait procédé à une telle liquidation. Par un mémoire, enregistré le 8 septembre 2022, l'association Les amis de la Terre France, l'association Les amis de la Terre Paris, l'Association de défense contre les nuisances aériennes (ADVOCNAR), l'association France nature environnement Ile-de-France, l'association Les amis de la Terre Val de Bièvre, l'association France nature environnement Provence-Alpes-Côte-d'Azur, l'association France nature environnement Bouches-du-Rhône, le Collectif anti nuisance L2, l'association Cap au nord, l'Association de défense du site du Réaltor et de son environnement, l'association RAMDAM, l'association CIRENA, l'association Autrement pour les aménagements des contournements (autoroutiers et ferroviaires) de l'habitat et de l'Est, l'association Défense des intérêts des riverains de l'aérodrome de Pontoise-Corneilles en Vexin, M. C... I..., l'association SOS Paris, M. F... L..., M. J... A..., l'association Champagne-Ardenne nature environnement (CANE), l'Association pour la sauvegarde du patrimoine et de l'environnement à Antony, l'association Greenpeace France, l'Association de défense de l'environnement et de la population de Toussieu (ADEPT), l'association Val de Seine vert, l'Association pour la Sauvegarde de Boulogne Nord-Ouest (ASBNO), l'Association inter village pour un environnement Sain (AIVES), l'association Marennes contre les nuisances, l'association COFIVER, M. G... O..., M. M... D..., l'association Respect environnement, la Fédération Fracture, l'association Union française contre les nuisances des aéronefs (UFCNA), l'association Forum sud francilien contre les nuisances aériennes, Mme H... K..., Mme E... N..., l'association Environnement 92, l'association Chaville Environnement, l'association Comité riverains Aéroport Saint-Exupéry (CORIAS), l'association Les amis de la Terre Nord, l'association Actions citoyennes pour une transition énergétique solidaire (ACTEnergieS), l'Association de concertation et de proposition pour l'aménagement et les transports (ACPAT), Mme B... P..., l'association Comité des intérêts de quartier (CIQ) Saint Jean de Tourette Protis, l'association Alertes nuisances aériennes (ANA), l'association Notre affaire à tous, l'Association de protection des collines peypinoises (APCP), l'association Respire, l'association Vivre et agir en Maurienne, l'association France nature environnement Paris, l'association Sommeil et santé, l'Association niçoise pour la qualité de l'air et l'environnement et de la vie, l'association Fédération Alsace nature, l'Association de défense de l'environnement de Chaponnay, l'association Défense des riverains de l'aéroport de Paris, l'association Union calanques littoral, l'association Collectif contre les nuisances aériennes de l'agglomération toulousaine et la commune de Marennes, demandent au Conseil d'Etat : 1°) de constater que les décisions n° 394254 du 12 juillet 2017 et n°428409 du 10 juillet 2020 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux n'ont pas été pleinement été exécutées au terme du délai laissé par la décision du 10 juillet 2020 ; 2°) de condamner l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, et au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte, au paiement de 20 millions d'euros pour la période du 11 juillet 2021 au 11 juillet 2022 ; 3°) de fixer la liste des bénéficiaires de cette condamnation ainsi que les modalités d'attribution des sommes à verser selon la convention d'assistance juridique conclue le 6 mai 2021 entre l'association Les amis de la Terre France et son avocat ; 4°) de majorer le montant de l'astreinte prononcée par la décision du 10 juillet 2020 pour la porter à un montant de 20 millions d'euros par semestre de retard dans l'exécution de cette décision ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier, y compris celles visées par les décisions du Conseil d'Etat des 10 juillet 2020 et 4 août 2021 ; Vu : - la directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 ; - le code de l'environnement ; - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 ; - la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 ; - le décret n° 2020-1138 du 16 septembre 2020 ; - le décret n° 2020-1526 du 7 décembre 2020 ; - le décret n° 2021-977 du 23 juillet 2021 ; - le décret n° 2022-8 du 5 janvier 2022 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Airelle Niepce, maître des requêtes, - les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 septembre 2022, présentée par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. (...) Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée ". 2. Afin d'assurer l'exécution de ses décisions, la juridiction administrative peut prononcer une astreinte à l'encontre d'une personne morale de droit public ou d'un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public, soit dans la décision statuant au fond sur les prétentions des parties sur le fondement de l'article L. 911-3 du code de justice administrative, soit ultérieurement en cas d'inexécution de la décision sur le fondement des articles L. 911-4 et L. 911-5 du même code. En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive de la décision, la juridiction procède, en vertu de l'article L. 911-7 de ce code, à la liquidation de l'astreinte. En vertu du premier alinéa de l'article L. 911-8 de ce code, la juridiction a la faculté de décider, afin d'éviter un enrichissement indu, qu'une fraction de l'astreinte liquidée ne sera pas versée au requérant, le second alinéa prévoyant que cette fraction est alors affectée au budget de l'État. Toutefois, l'astreinte ayant pour finalité de contraindre la personne morale de droit public ou l'organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public à exécuter les obligations qui lui ont été assignées par une décision de justice, ces dispositions ne trouvent pas à s'appliquer lorsque l'Etat est débiteur de l'astreinte en cause. Dans ce dernier cas, lorsque cela apparaît nécessaire à l'exécution effective de la décision juridictionnelle, la juridiction peut, même d'office, après avoir recueilli sur ce point les observations des parties ainsi que de la ou des personnes morales concernées, décider d'affecter cette fraction à une personne morale de droit public disposant d'une autonomie suffisante à l'égard de l'Etat et dont les missions sont en rapport avec l'objet du litige ou à une personne morale de droit privé, à but non lucratif, menant, conformément à ses statuts, des actions d'intérêt général également en lien avec cet objet. 3. Par une décision n° 394254 du 12 juillet 2017, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a, en premier lieu, annulé les décisions implicites du Président de la République, du Premier ministre et des ministres chargés de l'environnement et de la santé refusant de prendre toutes mesures utiles et d'élaborer des plans conformes à l'article 23 de la directive du 21 mai 2008 concernant la qualité de l'air ambiant et un air pur pour l'Europe permettant de ramener, sur l'ensemble du territoire national, les concentrations en dioxyde d'azote et en particules fines PM10 en-deçà des valeurs limites fixées à l'annexe XI de cette directive. Il a, en second lieu, enjoint au Premier ministre et au ministre chargé de l'environnement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que soit élaboré et mis en œuvre, pour chacune des zones administratives de surveillance (ZAS) énumérées au point 9 des motifs de cette décision, soit, s'agissant des taux de concentration en dioxyde d'azote, les zones urbaines régionales (ZUR) Rhône-Alpes, Paris Ile-de-France, Marseille Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Toulon Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Nice Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Saint-Etienne Rhône-Alpes, Grenoble Rhône-Alpes, Lyon Rhône-Alpes, Strasbourg Alsace, Montpellier Languedoc-Roussillon, Champagne-Ardenne et Toulouse Midi-Pyrénées et, s'agissant des taux de concentration en particules fines PM10, les ZUR Rhône-Alpes, Paris Ile-de-France et ZUR Martinique, un plan relatif à la qualité de l'air permettant de ramener les concentrations en dioxyde d'azote et en particules fines PM10 sous les valeurs limites fixées par l'article R. 221-1 du code de l'environnement dans le délai le plus court possible et de le transmettre à la Commission européenne avant le 31 mars 2018. Constatant que l'Etat ne pouvait être regardé comme ayant pris des mesures suffisantes propres à assurer l'exécution complète de cette décision, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, par une nouvelle décision n° 428409 du 10 juillet 2020, prononcé une astreinte de 10 millions d'euros par semestre de retard, à compter de l'expiration d'un délai de six mois suivant la notification de sa décision, si l'Etat ne justifiait pas avoir pris les mesures nécessaires permettant de ramener les concentrations en dioxyde d'azote et en particules fines PM10 sous les valeurs limites fixées par l'article R. 221-1 du code de l'environnement dans le délai le plus court possible, d'une part, s'agissant des taux de concentration en dioxyde d'azote, dans les zones à risque - agglomération (ZAG) de Paris, Marseille-Aix, Grenoble, Lyon, Strasbourg et Toulouse et dans la zone à risques - hors agglomération (ZAR) de Reims, d'autre part, s'agissant des taux de concentration en particules fines PM 10, dans la ZAG Paris et la ZAR Fort-de-France, compte tenu des nouvelles terminologies et du nouveau zonage issu de l'arrêté de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de le mer, en charge des relations internationales sur le climat du 26 décembre 2016 relatif au découpage des régions en zones administratives de surveillance de la qualité de l'air ambiant. 4. Par une nouvelle décision n° 428409 du 4 août 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, après avoir constaté que l'Etat n'avait pas entièrement exécuté les décisions des 12 juillet 2017 et 10 juillet 2020 mentionnées au point précédent, d'une part, pour les ZAG Paris, Marseille-Aix, Grenoble, Lyon et Toulouse s'agissant des taux de concentration en dioxyde d'azote, d'autre part, pour la ZAG Paris s'agissant des taux de concentration en PM10, a jugé qu'il y avait lieu de procéder à la liquidation provisoire de l'astreinte pour la période courant du 11 janvier au 11 juillet 2021 inclus. Ainsi, l'Etat a été condamné à verser la somme de 10 millions d'euros, répartie de la façon suivante : 100 000 euros à l'association Les amis de la Terre France, 3,3 millions d'euros à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), 2,5 millions d'euros au Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), 2 millions d'euros à l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), 1 million d'euros à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS), 350 000 euros aux associations agréées de surveillance de la qualité de l'air Air Parif et Atmo Auvergne Rhône-Alpes chacune, et 200 000 euros aux associations Atmo Occitanie et Atmo Sud chacune, associations agréées de surveillance de la qualité de l'air en vertu des dispositions des articles L. 221-3 et R. 221-9 du code de l'environnement, compétentes dans les zones administratives de surveillance de la qualité de l'air précédemment mentionnées. 5. En premier lieu, il convient d'abord, afin d'évaluer l'exécution des décisions du Conseil d'Etat, statuant au contentieux des 12 juillet 2017 et 10 juillet 2020, d'examiner l'évolution des concentrations en polluant relevées dans les zones concernées et d'apprécier s'il persiste des dépassements des valeurs limites fixées à l'article R. 221-1 du code de l'environnement à la date de la présente décision. 6. A cet égard, il résulte de l'instruction que, s'agissant des taux de concentration en dioxyde d'azote, sur les cinq zones administratives de surveillance de la qualité de l'air ambiant pour lesquelles les décisions du 12 juillet 2017 et du 10 juillet 2020 n'ont pas été regardées comme exécutées par la décision du 4 août 2021, la ZAG Grenoble et la ZAG Toulouse ne présentent plus de dépassement de la valeur limite fixée à l'article R. 221-1 du code de l'environnement en 2021. La zone de Toulouse comporte toutefois, au regard des données définitives pour l'année 2021 transmises par le ministre, une station de mesure pour laquelle la concentration moyenne annuelle est de 38 µg/m3, alors que la valeur limite de concentration de ce polluant fixée à l'article R. 221-1 du code de l'environnement est de 40 µg/m3 en moyenne annuelle civile, mettant en évidence une dégradation par rapport à la situation constatée en 2020. La situation de non-dépassement dans cette zone ne peut, dans ces conditions, être tenue comme suffisamment consolidée. Pour les trois autres zones concernées (ZAG Paris, Lyon et Aix-Marseille), si la moyenne annuelle de concentration en dioxyde d'azote constatée a globalement diminué dans toutes les stations de mesure en 2021 par rapport à 2019, la valeur limite de concentration de 40 µg/m3 a été dépassée pendant la période considérée dans sept stations de mesure de la ZAG Paris et dans une station de mesure des ZAG Lyon et Marseille. Par ailleurs, s'agissant des taux de concentration en particules fines PM10, la ZAG de Paris, seule zone pour laquelle les décisions du 12 juillet 2017 et du 10 juillet 2020 n'ont pas été regardées comme exécutées par la décision du 4 août 2021, aucun dépassement n'a été constaté en 2021, confirmant la situation déjà constatée en 2020. 7. Ainsi, il résulte de ce qui précède que, s'agissant des taux de concentration en dioxyde d'azote, les ZAG Lyon, Paris, Aix-Marseille et Toulouse soit présentent encore un dépassement de la valeur limite fixée à l'article R. 221-1 du code de l'environnement, soit ne peuvent être regardées, en l'état de l'instruction, comme présentant une situation de non-dépassement consolidée à la date de la présente décision. En revanche, la ZAG Paris ne présente plus de dépassement s'agissant des taux de concentration en particules fines PM 10. 8. En second lieu, dès lors que des dépassements des valeurs limites persistent pour le dioxyde d'azote, ainsi qu'il vient d'être dit, il convient d'apprécier si des mesures adoptées depuis l'intervention de la décision du 4 août 2021 sont de nature à ramener, dans le délai le plus court possible, les taux de concentration pour ce polluant en deçà de la valeur limite fixée à l'article R. 221-1 du code de l'environnement dans les zones présentant encore un dépassement de cette valeur limite ou dont la situation de non-dépassement ne peut être regardée comme consolidée. 9. D'une part, le ministre met en avant, s'agissant du secteur des transports, différentes mesures d'aide à l'acquisition de véhicules moins polluants, d'accompagnement du développement des mobilités dites douces et en faveur du déploiement de bornes de recharges électriques, et s'agissant du secteur du bâtiment, l'entrée en vigueur effective, à compter du 1er juillet 2022, de l'interdiction d'installation de nouvelles chaudières à fioul ou à charbon. Toutefois, s'il peut être raisonnablement attendu des effets positifs de telles mesures sur les niveaux de concentration en dioxyde d'azote dans l'air ambiant, les incidences concrètes de ces mesures générales, valables pour l'ensemble du territoire national, ne sont pas déterminées pour les zones présentant encore des dépassements des valeurs limites. Leur contribution à l'objectif de réduire dans ces zones la durée des dépassements des valeurs limites pour le dioxyde d'azote à la période la plus courte possible ne peut ainsi, en l'état, être tenue pour suffisamment établie. 10. D'autre part, le ministre fait valoir le développement et le renforcement des zones à faible émission mobilité (ZFE-m), notamment la modification des dispositions de l'article L. 2213-4-1 du code général des collectivités territoriales par l'article 119 de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, qui a étendu l'obligation d'instaurer de telles zones à toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants situées sur le territoire métropolitain avant le 31 décembre 2024 et fixé un calendrier contraignant de restriction progressive de la circulation des véhicules polluants dans les zones où les normes de qualité de l'air ne sont pas respectées de manière régulière. 11. Toutefois, si l'instauration de ces ZFE-m peut conduire à l'adoption de mesures visant à restreindre la circulation des véhicules les plus polluants avec en conséquence une baisse attendue des niveaux de concentration en dioxyde d'azote qui peut être significative, le calendrier de mise en œuvre obligatoire de ces restrictions de circulation demeure très étalé dans le temps et leur généralisation à toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants ne concerne pas les zones présentant des dépassements des valeurs limites. Pour celles de ces zones qui présentent les dépassements les plus marqués - à Lyon et à Paris -, des ZFE avaient déjà été instaurées en vertu des textes antérieurs, ainsi que cela avait été relevé dans la décision du 4 août 2021, de sorte qu'aucune mesure nouvelle n'y a en pratique été mise en œuvre depuis la précédente décision du Conseil d'Etat, le calendrier de mise en œuvre des restrictions à la circulation des véhicules les plus polluants ayant même été retardé dans la ZFE-m de Paris, en dépit de la situation avérée de dépassement des valeurs limites dans cette agglomération. Pour la ZAG Aix-Marseille, qui présente également des dépassements persistants, la ZFE, qui devait déjà être créée en vertu des dispositions de L. 2213-4-1 du code général des collectivités territoriales dans leur rédaction antérieure à l'intervention de la loi du 22 août 2021, n'a été mise en place qu'à partir du 1er septembre 2022 ainsi que l'indiquent les informations mises à disposition du public par la préfecture des Bouches-du-Rhône le 2 septembre 2022. Pour la ZAG Toulouse, la création de la ZFE, en vertu des dispositions de L. 2213-4-1 du code général des collectivités territoriales dans leur rédaction antérieure à l'intervention de la loi du 22 août 2021, n'est effective que depuis le mois de février 2022. 12. Enfin, s'il résulte de l'instruction que les procédures de révision de plusieurs plans de protection de l'atmosphère (PPA) ont été récemment engagées ou sont en voie de l'être, s'agissant des zones Paris, Lyon et Toulouse et que, s'agissant de la zone Aix-Marseille, le PPA des Bouches-du-Rhône révisé a été adopté le 2 mai 2022 selon les informations mises à la disposition du public sur le site de la DREAL Provence-Alpes-Côte d'Azur le 9 septembre 2022, l'objectif de respect des valeurs limites mis en avant demeure très éloigné, comme fixé à 2025 dans les zones de Lyon et Paris et dans les " meilleurs délais " dans la zone d'Aix-Marseille, sans que ne soient avancés d'éléments qui permettraient de considérer que ces délais pour revenir sous les valeurs limites fixées à l'article R. 221-1 du code de l'environnement correspondraient à la période de dépassement la plus courte possible. 13. Il résulte de ce qui précède que si les différentes mesures mises en avant par le ministre devraient permettre de poursuivre l'amélioration de la situation constatée à ce jour par rapport à 2019, les éléments produits ne permettent pas d'établir que les effets des différentes mesures adoptées permettront de ramener, dans le délai le plus court possible, les niveaux de concentration en dioxyde d'azote en deçà des valeurs limites fixées à l'article R. 221-1 du code de l'environnement pour les ZAG Aix-Marseille, Lyon, Paris et Toulouse. Par suite, l'Etat ne peut être regardé comme ayant pris des mesures suffisantes propres à assurer l'exécution complète des décisions du Conseil d'Etat des 12 juillet 2017 et 10 juillet 2020 dans ces zones. 14. La décision du Conseil d'Etat du 10 juillet 2020 ayant prononcé une astreinte à l'encontre de l'Etat s'il ne justifie pas avoir, dans les six mois suivant la notification de cette décision, pleinement exécuté la décision du 12 juillet 2017 et fixé le taux de cette astreinte à 10 millions d'euros par semestre de retard, a été notifiée aux parties le jour même. Eu égard, dans un sens, à la durée qui ne cesse de s'accroître de la période de dépassement des valeurs limites dans les zones concernées mais en prenant aussi en compte, dans l'autre sens, les améliorations constatées depuis l'intervention des décisions antérieures, il n'y a lieu ni de modérer, ni de majorer le taux de l'astreinte mais de procéder à une nouvelle liquidation provisoire de l'astreinte telle que prononcée par la décision du 10 juillet 2020, pour la période courant du 12 juillet 2021 au 12 juillet 2022. 15. Ainsi, en application des dispositions de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, il y a lieu de fixer le montant de la somme due à 20 millions d'euros au total pour les deux semestres concernés. Compte tenu du montant de cette astreinte et afin d'éviter un enrichissement indu, il convient dans les circonstances de l'espèce de n'allouer à l'association Les amis de la Terre France, seule requérante à l'instance initiale ayant conduit à la décision du 12 juillet 2017, qu'une fraction de la somme à liquider et, eu égard aux actions qu'ils conduisent en matière de lutte contre la pollution atmosphérique et d'amélioration de la qualité de l'air, de répartir le reste de l'astreinte au bénéfice de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) et des associations agréées de surveillance de la qualité de l'air compétentes dans les zones de Paris (Air Parif), Lyon (Atmo Auvergne Rhône-Alpes), Aix-Marseille (Atmo Sud) et Toulouse(Atmo Occitanie). 16. Dans ces conditions, l'Etat devra verser, au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte pour les deux semestres de la période du 12 juillet 2021 au 12 juillet 2022 : - la somme de 50 000 euros à l'association Les amis de la Terre France, - la somme de 5,95 millions d'euros à l'ADEME, - la somme de 5 millions d'euros au CEREMA, - la somme de 4 millions d'euros à l'ANSES, - la somme de 2 millions d'euros à l'INERIS, - la somme de 1 million d'euros à Air Parif et Atmo Auvergne Rhône-Alpes, chacune, - la somme de 500 000 euros à Atmo Occitanie et Atmo Sud, chacune. 17. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par l'association Les amis de la Terre France et autres au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'Etat est condamné à verser la somme de 20 millions d'euros, au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte prononcée par la décision du 10 juillet 2020, pour la période du 11 juillet 2021 au 11 juillet 2022, à répartir de la façon suivante : - 50 000 euros à l'association Les amis de la Terre France, - 5,95 millions d'euros à l'ADEME, - 5 millions d'euros au CEREMA, - 4 millions d'euros à l'ANSES, - 2 millions d'euros à l'INERIS, - 1 million d'euros à Air Parif et Atmo Auvergne Rhône-Alpes, chacune, - 500 000 euros à Atmo Occitanie et Atmo Sud, chacune. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de l'association Les amis de la Terre France et autres est rejeté. Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association Les Amis de la Terre France, à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, à l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail, au Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement, à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques, à Air Parif, Atmo Auvergne Rhône-Alpes, Atmo Occitanie et Atmo Sud ainsi qu'à la Première ministre, au ministre de l'économie, des finances et de la relance et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Copie en sera adressée à la présidente de la section du rapport et des études. Délibéré à l'issue de la séance du 19 septembre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Airelle Niepce, maître des requêtes-rapporteure ; Rendu le 17 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Airelle Niepce La secrétaire : Signé : Mme Marie-Adeline Allain [RJ1] Cf. CE, 12 juillet 2017, Association Les Amis de la Terre France, n° 394254, p. 229....[RJ2] Cf. CE, Assemblée, 10 juillet 2020, Association Les Amis de la Terre France et autres, n° 428409, p. 289. Rappr., pour le semestre du 11 janvier au 11 juillet 2021, CE, 4 août 2021, Association Les Amis de la Terre France et autres, n° 428409, A.
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Vu la procédure suivante : Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 26 janvier 2021, 26 avril 2021 et 4 octobre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société ... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler la décision n°11 du 25 novembre 2020 par laquelle la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers l'a condamnée au paiement d'une amende d'un montant d'un million d'euros et a ordonné la publication de cette décision sur son site internet pour une durée de cinq ans ; 2°) d'enjoindre à l'Autorité des marchés financiers de publier sur son site internet pendant une durée d'au moins cinq ans la décision à intervenir ; 3°) à titre subsidiaire, de réformer la décision attaquée en ramenant les sanctions prononcées à de plus justes proportions ; 4°) de mettre à la charge de l'Autorité des marchés financiers la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le règlement délégué (UE) 2017/565 de la Commission du 25 avril 2016 ; - le code monétaire et financier ; - le règlement général de l'Autorité des marchés financiers ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat, - les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de la société ... et à la SCP Richard, avocat de l'Autorité des marchés financiers ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 22 septembre 2022, présentée par la société ...; Considérant ce qui suit : 1. Il résulte de l'instruction que la société ..., établissement de crédit agréé pour la fourniture de services d'investissement, assure une activité de tenue de compte-conservation d'instruments financiers pour le compte de tiers. Elle a fait l'objet d'un contrôle diligenté par le secrétaire général de l'Autorité des marchés financiers le 11 décembre 2018 à la suite d'incidents survenus à l'occasion du traitement des instructions de vote de ses clients actionnaires au porteur lors d'assemblées générales. Le collège de l'Autorité des marchés financiers a, au terme de cette enquête, décidé d'engager une procédure de sanction à l'encontre de la société par une notification de griefs en date du 26 décembre 2019. Par une décision du 25 novembre 2020, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a estimé que la société ... avait manqué à ses obligations d'agir d'une manière professionnelle et au mieux de l'intérêt de ses clients s'agissant de l'exercice des droits de vote attachés aux titres financiers, à ses obligations d'utiliser des moyens humains et matériels adaptés et suffisants pour sauvegarder les informations relatives aux instructions de vote en assemblée générale de ses clients et à son obligation de disposer d'un système efficace de " reporting ". En conséquence, elle a prononcé à l'encontre de la société ... une sanction d'un montant de 1 000 000 euros et ordonné la publication de la décision sur le site internet de l'Autorité des marchés financiers de manière non anonyme pendant 5 ans. Sur la régularité de la décision attaquée : En ce qui concerne la compétence de l'Autorité des marchés financiers : 2. D'une part, aux termes de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier : " (...) II. - La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l'encontre des personnes suivantes: / a) Les personnes mentionnées aux 1° à 8° et 10° bis à 21° du II de l'article L. 621-9, au titre de tout manquement à leurs obligations professionnelles définies par les règlements européens, les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l'Autorité des marchés financiers en vigueur, sous réserve des dispositions des articles L. 612-39 et L. 612-40 (...) ". Aux termes de l'article L. 621-9 du code monétaire et financier : " (...) II. - L'Autorité des marchés financiers veille également au respect des obligations professionnelles auxquelles sont astreintes, en vertu des dispositions législatives et réglementaires, les entités ou personnes suivantes ainsi que les personnes physiques placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte : (...) / Les personnes autorisées à exercer l'activité de conservation ou d'administration d'instruments financiers mentionnées à l'article L. 542-1 (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 211-9 du même code : " Le teneur de compte-conservateur sauvegarde les droits des titulaires des comptes sur les titres financiers qui y sont inscrits. Il ne peut utiliser ces titres pour son propre compte que dans les conditions prévues au 4° du II de l'article L. 533-10 ". Aux termes de l'article 322-3 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers : " L'activité de tenue de compte-conservation consiste : (...) / 3. A traiter les événements intervenant dans la vie des titres financiers conservés ". Aux termes de l'article 322-7 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers : " (...) Le teneur de compte-conservateur respecte en toutes circonstances les obligations suivantes : (...) / 2. Il apporte tous ses soins à la conservation des titres financiers et veille à ce titre à la stricte comptabilisation de ces derniers et de leurs mouvements dans le respect des procédures en vigueur ; il apporte également tous ses soins pour faciliter l'exercice des droits attachés à ces titres financiers, dans le respect de la réglementation applicable auxdits titres (...) ". 4. Il résulte de ces dernières dispositions que les teneurs de compte-conservateurs sont tenus d'agir de telle manière qu'outre la bonne conservation des titres financiers qui leur sont confiés, ils facilitent l'exercice des droits qui sont attachés à ces titres. Lorsqu'ils proposent un service de transmission des instructions de vote, et alors même qu'un tel service ne relève pas obligatoirement de leurs missions, ils doivent, dès lors que ce service participe de l'exercice d'un droit attaché aux titres financiers qu'ils conservent, respecter les obligations professionnelles qui s'imposent à eux et relèvent, pour cette mission, du contrôle de l'Autorité des marchés financiers (AMF). 5. Ces dispositions du code monétaire et financier et du règlement général de l'AMF étaient applicables aux manquements reprochés en l'espèce à la société requérante. Ainsi, et en tout état de cause, la commission des sanctions n'a pas fait, par la décision attaquée, rétroactivement application de la directive (UE) 2017/828 du 17 mai 2017 modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l'engagement à long terme des actionnaires ou de son règlement d'exécution (UE) 2018/1212 du 3 septembre 2018. 6. C'est par suite à bon droit, et sans méconnaître le principe de légalité des délits et des peines, que la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a retenu sa compétence pour infliger une sanction à la société ... à raison de manquements constatés dans l'activité de transmission des instructions de vote de ses clients. En ce qui concerne la motivation de la décision : 7. Si l'obligation de motivation à laquelle sont assujetties les sanctions prononcées par la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers implique que celles-ci comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, elle n'impose pas qu'il soit répondu à l'intégralité des arguments invoqués devant la commission. Par ailleurs, aucun texte ni aucun principe ne requiert que la décision rendue par cette autorité administrative, qui n'est pas une juridiction au regard du droit interne, analyse expressément, dans ses visas ou dans ses motifs, l'ensemble des arguments présentés en défense. Il suit de là que contrairement à ce que soutient la société requérante, la décision de la commission des sanctions, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée. Sur le bien-fondé de la sanction : En ce qui concerne le grief relatif à l'absence de professionnalisme et de soins apportés par ... à son activité de traitement des instructions de vote : 8. Aux termes de l'article L. 533-1 du code monétaire et financier : " Les prestataires de services d'investissement agissent d'une manière honnête, loyale et professionnelle, qui favorise l'intégrité du marché ". Aux termes de l'article L. 533-11 du code monétaire et financier : " Lorsqu'ils fournissent des services d'investissement et des services connexes à des clients, les prestataires de services d'investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille agissent d'une manière honnête, loyale et professionnelle, servant au mieux les intérêts des clients ". Aux termes de l'article 314-3 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers : " Le prestataire de services d'investissement agit d'une manière honnête, loyale et professionnelle, avec la compétence, le soin et la diligence qui s'imposent, afin de servir au mieux l'intérêt des clients et de favoriser l'intégrité du marché (...) ". Enfin, l'article 322-7 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers, cité au point 3, fait obligation aux teneurs de compte-conservateurs d'apporter tous leurs soins pour faciliter l'exercice des droits attachés aux titres financiers qui leur sont confiés. 9. Il résulte de l'instruction que, entre le 9 avril et le 24 mai 2018, 44 assemblées générales ont été affectées par des erreurs dans la transmission, par la société ..., des instructions de vote de ses clients, résultant soit d'instructions de vote en nombre supérieur aux positions éligibles à un droit de vote, soit, au contraire, d'instructions de vote en nombre inférieur aux positions éligibles. Ces nombreux incidents traduisent le fait que la société requérante ne disposait pas alors d'un dispositif fiable, de nature à garantir à ses clients le service le plus conforme à leurs intérêts et de favoriser l'intégrité du marché. Dans ces conditions, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a pu à bon droit retenir que la société ... avait méconnu l'obligation d'agir d'une manière professionnelle et au mieux des intérêts de ses clients, découlant des dispositions citées au point 8. En ce qui concerne le grief relatif à l'insuffisance de moyens matériels et humains : 10. Le 1° de l'article 322-16 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers, tant dans sa version en vigueur de 2013 au 2 janvier 2018 que dans sa version applicable à compter du 3 janvier 2018, fait obligation au teneur de compte-conservateur d'utiliser " en permanence des moyens, notamment matériels, financiers et humains adaptés et suffisants (...) ". Cette obligation est applicable aux teneurs de compte-conservateurs dans leur activité de transmission des consignes de vote. 11. Si une sanction administrative reposant sur plusieurs manquements doit être conforme au principe de proportionnalité, le principe dit de non bis in idem découlant du principe de nécessité des délits et des peines garanti par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ne fait pas obstacle à ce que, dans le cadre d'une même poursuite conduisant à une même décision de sanction, plusieurs manquements distincts puissent résulter de mêmes faits. Ainsi, en retenant que l'absence de mise en œuvre de moyens suffisants caractérisait un manquement de la société ... à son obligation de mettre en œuvre des moyens suffisants, alors même que les erreurs en résultant constituaient également des manquements à d'autres dispositions du code monétaire et financier ou du règlement général de l'Autorité des marchés financiers, la commission des sanctions n'a pas méconnu le principe non bis in idem. 12. Il résulte de l'instruction que les moyens humains déployés par la société ... étaient insuffisants pour éviter les dysfonctionnements constatés et permettre leur correction rapide. Si la société requérante fait valoir que des moyens matériels ont été mis en œuvre après la survenance des incidents pour y mettre fin, cette circonstance est, par elle-même, dépourvue d'incidence sur la caractérisation du manquement reproché. En ce qui concerne le grief relatif au système de remontées hiérarchiques, au contrôle interne, à la conformité, à la gestion des risques et au dispositif d'audit interne : 13. En premier lieu, le 6° de l'article 322-16 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers impose au teneur de compte-conservateur d'établir et de maintenir " opérationnel " " un système efficace de remontées hiérarchiques et de communication des informations à tous les niveaux pertinents ". 14. Il résulte de l'instruction que la plupart des incidents ont été identifiés à la fin du mois d'avril 2018, et qu'à compter de cette date et jusqu'au 27 juin 2018, l'information n'a circulé qu'entre les membres de l'équipe en charge du traitement des instructions de vote. Ce n'est que le 27 juin 2018, soit deux mois après la première alerte, que les incidents ont été signalés au directeur général de société .... Une étude d'impact a été diligentée sur l'ensemble des assemblées générales en juillet 2018, puis un contrôle plus général a été conduit, donnant lieu à un rapport en date du 21 février 2019. Pour caractériser un défaut dans le processus de remontées hiérarchiques, la décision de la commission des sanctions retient que la transmission de l'information relative à cet incident a été effectuée sur une durée de près de dix mois, entre avril 2018 et février 2019. Il résulte cependant de ses propres constatations que la remontée hiérarchique est intervenue dans un délai qui n'est que de deux mois, suscitant des contrôles plus précis, lesquels se sont déployés jusqu'en février 2019. Si, comme le soutient la société requérante, le délai de dix mois ne peut effectivement pas être retenu, il n'en demeure pas moins qu'un délai de deux mois pour faire remonter des informations de cette nature révèle une méconnaissance des obligations découlant du 6° de l'article 322-16 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers. 15. En deuxième lieu, s'agissant du contrôle interne, de la conformité et de la gestion des risques et du dispositif d'audit interne, les dispositions du 5° de l'article 312-6, qui reprennent, à compter du 3 janvier 2018, les dispositions identiques du 5° de l'article 313-13, et le 4° de l'article 322-16 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers imposent aux prestataires de service d'investissement, d'une part, et aux teneurs de compte-conservateurs, d'autre part, de mettre en place et de maintenir opérationnels des mécanismes de contrôle interne adéquats. Aux termes de l'article 322-39 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers : " Les teneurs de compte-conservateurs s'assurent du respect des dispositions qui leur sont applicables ainsi que du respect par les personnes placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte des dispositions applicables aux teneurs de compte-conservateurs eux-mêmes et à ces personnes. / Ils désignent à cette fin un responsable du contrôle, qui, chez les teneurs de compte-conservateurs prestataires de services d'investissement, est un responsable de la conformité pour les services d'investissement. / Le responsable du contrôle dispose de l'autorité, des ressources et de l'expertise nécessaires et d'un accès à toutes les informations pertinentes. Il n'est pas impliqué dans l'exécution des opérations qu'il contrôle. / Il s'assure de la qualité des procédures spécifiques à l'activité de tenue de compte-conservation et de la fiabilité des outils de contrôle et de pilotage (...) ". Aux termes de l'article 322-40 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers : " Le responsable du contrôle organise le contrôle de l'activité de tenue de compte-conservation en distinguant : / 1. Les dispositifs qui assurent au quotidien le contrôle des opérations ; / 2. Les dispositifs qui, par des contrôles récurrents ou inopinés ainsi que par des audits détaillés des procédures opérationnelles, assurent la cohérence et l'efficacité du contrôle des opérations ". Enfin, le règlement délégué (UE) 2017/565 de la Commission du 25 avril 2016 complétant la directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les exigences organisationnelles et les conditions d'exercice applicables aux entreprises d'investissement et la définition de certains termes aux fins de ladite directive, applicable à compter du 3 janvier 2018, prévoit au a) du point 2 de son article 22 que : " (...) Les entreprises d'investissement établissent et gardent opérationnelle en permanence une fonction de vérification de la conformité efficace qui fonctionne de manière indépendante et est investie des missions suivantes:/ contrôler, en permanence, et évaluer, à intervalles réguliers, l'adéquation et l'efficacité des mesures, politiques et procédures mises en place en application du paragraphe 1, premier alinéa, ainsi que des actions entreprises pour remédier à d'éventuels manquements de l'entreprise à ses obligations (...) ". Il prévoit, au point 1 de son article 23, que : " Les entreprises d'investissement prennent les mesures suivantes relatives à la gestion des risques : / a) elles établissent, mettent en œuvre et gardent opérationnelles des politiques et des procédures efficaces de gestion des risques permettant de repérer les risques liés aux activités, aux processus et aux systèmes de l'entreprise, et, le cas échéant, de déterminer le niveau de risque toléré par l'entreprise ; / b) elles adoptent des dispositifs, des processus et des mécanismes permettant de gérer efficacement les risques liés aux activités, aux processus et aux systèmes de l'entreprise eu égard à son niveau de tolérance au risque ; / c) elles contrôlent : / i) l'adéquation et l'efficacité de leurs politiques et procédures de gestion des risques ; / ii) le degré avec lequel l'entreprise d'investissement et les personnes concernées se conforment aux dispositifs, aux processus et aux mécanismes adoptés en application du point b) ; et / iii) l'adéquation et l'efficacité des mesures prises pour remédier à toute déficience au niveau de ces dispositifs et procédures, y compris toute défaillance des personnes concernées dans le respect de ces dispositifs ou l'application de ces procédures ". Il prévoit, à son article 24, que : " Les entreprises d'investissement, lorsque cela est approprié et proportionné eu égard à la nature, à l'échelle et à la complexité de leur activité, ainsi qu'à la nature et à l'éventail des services et des activités d'investissement composant leur activité, établissent et gardent opérationnelle une fonction d'audit interne distincte et indépendante des autres fonctions et activités de l'entreprise d'investissement et dont les responsabilités sont les suivantes : / a) établir, mettre en œuvre et garder opérationnel un programme d'audit visant à examiner et à évaluer l'adéquation et l'efficacité des systèmes, des mécanismes de contrôle interne et des dispositifs de l'entreprise d'investissement (...) ". 16. Ces dispositions imposent aux teneurs de compte-conservateurs de mettre en place des dispositifs de contrôle permanents et efficaces permettant, à tous les niveaux, d'assurer la fiabilité des opérations. Dans le cadre du traitement par ... des instructions de vote, la fréquence et la récurrence des dysfonctionnements constatés sur les assemblées générales d'avril à mai 2018 établissent, comme l'a retenu à bon droit la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers, que le premier niveau de contrôle mis en place, dit contrôle " opérationnel ", n'a pas été en mesure d'assurer un contrôle efficace. Le deuxième niveau de contrôle, chargé du contrôle des risques, était organisé de telle manière qu'il n'opérait qu'un contrôle annuel des opérations et l'audit interne, assuré par l'inspection générale de ..., n'avait pas intégré à son programme le contrôle des procédures de traitement des instructions de vote en assemblées générales. Si la société requérante fait valoir qu'un contrôle plus fréquent n'aurait pas permis d'éviter les incidents de vote, qui se sont concentrés sur la période où ont lieu la plupart des assemblées générales, il n'en demeure pas moins que les textes imposent un contrôle permanent et efficace. Dès lors, c'est à bon droit que la commission des sanctions a retenu que les dispositifs de contrôle interne, de gestion des risques et d'audit interne ne répondaient pas aux obligations imposées par les dispositions visées au point 15. En ce qui concerne le grief supplémentaire tiré de l'absence de conservation d'un enregistrement du service de traitement des instructions de vote en assemblées générales faisant l'objet du recours incident du président de l'Autorité des marchés financiers : 17. Le président de l'Autorité des marchés financiers conteste la décision de la commission des sanctions en tant qu'elle n'a pas retenu le grief relatif à l'absence de conservation par la société ... d'un enregistrement du service de traitement des instructions de vote en assemblées générales pour les assemblées générales ayant eu lieu en 2016 et 2017. 18. Aux termes du 5° de l'article L. 533-10 du code monétaire et financier dans sa version alors applicable : " Les prestataires de services d'investissement doivent : (...) / 5. Conserver un enregistrement de tout service qu'ils fournissent et de toute transaction qu'ils effectuent, permettant à l'Autorité des marchés financiers de contrôler le respect des obligations du prestataire de services d'investissement et, en particulier, de toutes ses obligations à l'égard des clients, notamment des clients potentiels (...) ". 19. Une telle obligation s'impose, comme l'a rappelé la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers, pour tout service relevant du contrôle de cette autorité. Elle vaut ainsi pour les services de transmission des instructions de vote. Toutefois, si le président de l'Autorité des marchés financiers soutient que la société ... n'a pas apporté la preuve de la conservation des instructions de vote, il résulte de l'instruction, notamment des éléments fournis devant la commission des sanctions et complétant les échantillons des extractions produits en réponse à la notification des griefs, que les outils informatiques mis en place par la société requérante permettaient une conservation de l'historique des instructions de vote pour les années 2016 et 2017, comportant les données essentielles comme le nom de l'émetteur concerné, son code ISIN ou encore le nombre de droits de vote. C'est par suite à bon droit que la commission des sanctions a écarté le grief tiré de la méconnaissance de l'obligation de conservation des données relatives au service de traitement des instructions de vote en assemblées générales. En ce qui concerne la proportionnalité de la sanction : 20. En premier lieu, aux termes du III ter de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier : " Dans la mise en œuvre des sanctions mentionnées au III et III bis, il est tenu compte notamment : / - de la gravité et de la durée du manquement ; / - de la qualité et du degré d'implication de la personne en cause ; / - de la situation et de la capacité financières de la personne en cause, au vu notamment de son patrimoine et, s'agissant d'une personne physique de ses revenus annuels, s'agissant d'une personne morale de son chiffre d'affaires total ; / - de l'importance soit des gains ou avantages obtenus, soit des pertes ou coûts évités par la personne en cause, dans la mesure où ils peuvent être déterminés ; / - des pertes subies par des tiers du fait du manquement, dans la mesure où elles peuvent être déterminées ; / - du degré de coopération avec l'Autorité des marchés financiers dont a fait preuve la personne en cause, sans préjudice de la nécessité de veiller à la restitution de l'avantage retiré par cette personne ; / - des manquements commis précédemment par la personne en cause ; / - de toute circonstance propre à la personne en cause, notamment des mesures prises par elle pour remédier aux dysfonctionnements constatés, provoqués par le manquement qui lui est imputable et le cas échéant pour réparer les préjudices causés aux tiers, ainsi que pour éviter toute réitération du manquement ". 21. Il résulte de l'instruction que les dysfonctionnements ayant affecté les transmissions de vote opérées par ... constituent des manquements graves aux obligations s'imposant à un teneur de comptes-conservateurs pour garantir les intérêts de ses clients et l'intégrité des décisions prises en assemblées générales. Alors que ces manquements ont affecté un nombre important d'assemblées générales, la société ... n'a pas réagi avec la diligence nécessaire. Il apparaît toutefois qu'elle a, avec le retard et dans les limites relevées par la présente décision, pris des mesures pour analyser les dysfonctionnements qui ont été à l'origine des erreurs commises, et y mettre fin. Au regard de l'ensemble de ces éléments, en infligeant à la société ... une sanction pécuniaire d'un montant de 1 000 000 euros, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers n'a pas prononcé une sanction disproportionnée à la gravité des manquements commis et à la situation financière de la société requérante. 22. En second lieu, en application du V de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier, la décision de la commission des sanctions est rendue publique sauf lorsque celle-ci " risque de perturber gravement les marchés financiers ou de causer un préjudice disproportionné aux parties en cause ". Eu égard au comportement de la société ..., qui n'a jamais cherché à dissimuler les incidents ayant donné lieu à la sanction, et aux mesures qu'elle a prises pour remédier aux dysfonctionnements, la publication de la décision sur le site internet de l'Autorité des marchés financiers pour une durée de cinq ans est susceptible de lui porter un préjudice disproportionné. Il y a donc lieu de réduire cette durée de publication à deux ans. Sur les frais de l'instance : 23. Il n'y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, ni de faire droit aux conclusions de la société requérante au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ni à celles présentées par l'Autorité des marchés financiers au même titre. D E C I D E : -------------- Article 1er : La durée de publication de la sanction infligée à la société ... sur le site de l'Autorité des marchés financiers est ramenée à deux ans. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société ... est rejeté. Article 3 : Les conclusions du recours incident du président de l'Autorité des marchés financiers sont rejetées. Article 4 : La décision de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers est réformée en ce qu'elle a de contraire à la présente décision. Article 5 : La présente décision sera publiée sur le site internet de l'Autorité des marchés financiers, dans les mêmes conditions que la décision de la commission des sanctions. Article 6 : Les conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 7 : La présente décision sera notifiée à la société ... et à l'Autorité des marchés financiers. Délibéré à l'issue de la séance du 19 septembre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat-rapporteure. Rendu le 17 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Rozen Noguellou La secrétaire : Signé : Mme Marie-Adeline Allain
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Vu la procédure suivante : Par un mémoire, deux mémoires complémentaires et un mémoire en réplique enregistrés les 26 février et 26 mai 2021 et les 26 avril et 8 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, la société par actions simplifiée Compagnie Européenne des Emballages Robert Schisler, la société Huhtamaki, la société SEDA International Packaging Group SPA, et l'association EPPA (European Paper Packaging Alliance) demandent au Conseil d'État : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 5 du décret n° 2020-1724 du 28 décembre 2020 relatif à l'interdiction d'élimination des invendus non alimentaires et à diverses dispositions de lutte contre le gaspillage, en tant qu'il crée l'article D. 541-342 du code de l'environnement ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son article 61-1 ; - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment son article 36 ; - la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 ; - la directive 2015/1535/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 ; - la directive 2019/904/UE du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 ; - le code de l'environnement ; - la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 ; - la décision du 6 août 2021 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Compagnie Européenne des Emballages Robert Schisler et autres ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Pauline Hot, auditrice, - les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL cabinet Briard, avocat de la société Compagnie Européenne des Emballages Robert Schisler et autres ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 septembre 2022, présentée par la société Compagnie Européenne des Emballages Robert Schisler et autres ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes du 2° du III de l'article L. 541-15-10 du code de l'environnement, dans sa rédaction résultant notamment de l'article 77 de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire : " A compter du 1er janvier 2023, les établissements de restauration sont tenus de servir les repas et boissons consommés dans l'enceinte de l'établissement dans des gobelets, y compris leurs moyens de fermeture et couvercles, des assiettes et des récipients réemployables ainsi qu'avec des couverts réemployables. Les modalités de mise en œuvre du présent alinéa sont précisées par décret ". Les modalités d'application de ces dispositions sont précisées par l'article D. 541-342 du code de l'environnement, dans sa rédaction issus de l'article 5 du décret du 28 décembre 2020 relatif à l'interdiction d'élimination des invendus non alimentaires et à diverses dispositions de lutte contre le gaspillage, aux termes duquel : " Sont soumises à l'obligation de servir les repas et boissons dans de la vaisselle réemployable ainsi qu'avec des couverts réemployables, conformément au dix-huitième alinéa du III de l'article L. 541-15-10, les personnes ayant une activité professionnelle de restauration sur place, qu'elle soit leur activité principale ou non, qu'elle soit en intérieur ou en extérieur, dès lors qu'elle permet de restaurer simultanément au moins 20 personnes ". La société Compagnie Européenne des Emballages Robert Schisler et autres demandent au Conseil d'Etat l'annulation pour excès de pouvoir de l'article 5 du décret du 28 décembre 2020, en tant qu'il a ainsi modifié l'article D. 541-342 du code de l'environnement. Sur la légalité externe : 2. Aux termes du 1 de l'article 5 de la directive 2015/1535/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information : " Sous réserve de l'article 7, les États membres communiquent immédiatement à la Commission tout projet de règle technique, sauf s'il s'agit d'une simple transposition intégrale d'une norme internationale ou européenne, auquel cas une simple information quant à la norme concernée suffit ; ils adressent également à la Commission une notification concernant les raisons pour lesquelles l'établissement d'une telle règle technique est nécessaire, à moins que ces raisons ne ressortent déjà du projet (...) ". Le f) du 1 de l'article 1er de cette directive définit une règle technique comme : " une spécification technique ou autre exigence ou une règle relative aux services, y compris les dispositions administratives qui s'y appliquent, dont l'observation est obligatoire de jure ou de facto, pour la commercialisation, la prestation de services, l'établissement d'un opérateur de services ou l'utilisation dans un État membre ou dans une partie importante de cet État, de même que, sous réserve de celles visées à l'article 7, les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres interdisant la fabrication, l'importation, la commercialisation ou l'utilisation d'un produit ou interdisant de fournir ou d'utiliser un service ou de s'établir comme prestataire de services ". Le a) du 1 de l'article 7 exempte de notification les mesures par lesquelles les Etats membres " se conforment aux actes contraignants de l'Union qui ont pour effet l'adoption de spécifications techniques ou de règles relatives aux services ". 3. Lorsqu'une règle technique résulte, en droit interne, de la combinaison de dispositions de nature législative et de dispositions d'application de nature réglementaire, il n'y a pas lieu, en application du 1 de l'article 5 de la directive 2015/1535/CE, de communiquer à la Commission européenne les dispositions réglementaires d'application relatives à cette règle technique lorsque, d'une part le texte législatif détermine la règle technique en cause d'une manière suffisamment précise pour que ses effets puissent être évalués par la Commission européenne et les Etats membres de l'Union européenne, d'autre part, que la disposition législative a été communiquée conformément à la directive et, enfin, que les dispositions réglementaires d'application n'ajoutent pas d'autre règle technique relevant de cette obligation de communication. 4. En l'espèce, c'est la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, créant l'article L. 541-15-10 du code de l'environnement, qui a imposé, à compter du 1er janvier 2023, aux établissements de restauration l'obligation de servir les repas et boissons consommés dans l'enceinte de leur établissement dans des gobelets, des assiettes et des récipients réemployables ainsi qu'avec des couverts réemployables, ne laissant à un décret que le soin de préciser les modalités de mise en œuvre de cette obligation. Il ressort des pièces du dossier que les autorités françaises ont notifié à la Commission européenne le 11 février 2020 la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire. Alors que l'article L. 541-15-10 définit en termes suffisamment précis l'obligation pesant sur les établissements de restauration, les dispositions contestées du décret attaqué se bornent, pour leur part, à préciser que cette nouvelle obligation pèse sur les personnes ayant une activité professionnelle de restauration sur place, qu'elle soit leur activité principale ou non, qu'elle soit en intérieur ou en extérieur, dès lors qu'elle permet de restaurer simultanément au moins 20 personnes. Dans ces conditions, la communication de la règle technique telle que définie par les dispositions de la loi du 10 février 2020 suffisait à satisfaire l'obligation de communication à la Commission résultant de l'article 5 de la directive 2015/1535/CE. Il s'ensuit que, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, le moyen tiré du vice de procédure qui résulterait de l'absence de communication à la Commission européenne des dispositions du décret attaqué doit être écarté. Sur la légalité interne : En ce qui concerne la méconnaissance alléguée de la Constitution : 5. Par décision du 6 août 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité, soulevée par les sociétés et association requérantes, mettant en cause la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du seizième alinéa du 2° du III de l'article L. 541-15-10 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'article 77 de la loi du 10 février 2020. Les dispositions réglementaires attaquées, qui se bornent à préciser les modalités de mise en œuvre de ces dispositions législatives imposant le recours à la vaisselle réemployable, ne méconnaissent pas, par elles-mêmes, les articles 3 et 6 de la Charte de l'environnement, le principe d'égalité ou la liberté d'entreprendre. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont seraient entachées les dispositions réglementaires attaquées, compte tenu des risques pour l'hygiène qui résulteraient du réemploi de vaisselle réemployable, ne peut qu'être écarté. En ce qui concerne l'invocation du droit de l'Union : 6. En premier lieu, les articles 34 et 35 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne interdisent les restrictions quantitatives à l'importation et à l'exportation entre les États membres ainsi que toutes mesures d'effet équivalent. Aux termes de l'article 36 du traité, ces dispositions ne font cependant pas obstacle aux interdictions ou restrictions d'importation, d'exportation ou de transit " justifiées par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou de préservation des végétaux, de protection des trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique ou de protection de la propriété industrielle et commerciale. Toutefois, ces interdictions ou restrictions ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les États membres ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, d'une part, que la notion de " mesure d'effet équivalent " inclut toute réglementation commerciale des Etats membres susceptible d'entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intracommunautaire, et, d'autre part, qu'une réglementation nationale qui constitue une mesure d'effet équivalent à des restrictions quantitatives est autorisée lorsqu'elle est indistinctement applicable aux produits nationaux et importés et qu'elle est nécessaire pour satisfaire à l'une des raisons d'intérêt général citées ou à des exigences impératives, telle que la protection de l'environnement. Les dispositions en cause doivent être propres à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu'il soit atteint. 7. Les dispositions du 2° du III de l'article L. 541-15-10 du code de l'environnement, dont le décret attaqué précise les modalités d'application, en imposant aux établissements de restauration l'utilisation de vaisselle réemployable peuvent être regardées comme une restriction à la commercialisation des gobelets, assiettes, récipients ou couverts qui ne sont pas réemployables, et notamment les vaisselles et couverts à usage unique, en papier ou en carton, et donc comme une mesure d'effet équivalent à une restriction quantitative à l'importation au sens de l'article 34 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. 8. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les mesures contestées sont indistinctement applicables aux produits nationaux et importés et qu'en adoptant la mesure contestée, le législateur a poursuivi un objectif de protection de l'environnement tenant à la réduction des déchets résultant de l'activité des établissements de restauration. Si les sociétés et association requérantes font valoir que la mise en œuvre des mesures contestées pourrait se traduire par des pertes de chiffre d'affaires pour les industriels de la vaisselle jetable, des coûts supplémentaires pour les établissements de restauration et une augmentation des prix des repas et boissons servis pour les consommateurs, les dispositions litigieuses ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 34 et 35 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doit être écarté. 9. En second lieu, aux termes de l'article 4 de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets : " 1. La hiérarchie des déchets ci-après s'applique par ordre de priorité dans la législation et la politique en matière de prévention et de gestion des déchets : a) prévention ; b) préparation en vue du réemploi ; c) recyclage ; d) autre valorisation, notamment valorisation énergétique ; et e) élimination. 2. Lorsqu'ils appliquent la hiérarchie des déchets visée au paragraphe 1, les États membres prennent des mesures pour encourager les solutions produisant le meilleur résultat global sur le plan de l'environnement. Cela peut exiger que certains flux de déchets spécifiques s'écartent de la hiérarchie, lorsque cela se justifie par une réflexion fondée sur l'approche de cycle de vie concernant les effets globaux de la production et de la gestion de ces déchets ". L'article L. 541-1 du code de l'environnement, qui transpose les objectifs de l'article 4 de la directive du 19 novembre 2008, dispose que : " Les dispositions du présent chapitre et de l'article L. 125-1 ont pour objet : 1° En priorité, de prévenir et de réduire la production et la nocivité des déchets, notamment en agissant sur la conception, la fabrication et la distribution des substances et produits et en favorisant le réemploi, ainsi que de diminuer les incidences globales de l'utilisation des ressources et d'améliorer l'efficacité de leur utilisation ; 2° De mettre en œuvre une hiérarchie des modes de traitement des déchets consistant à privilégier, dans l'ordre : a) La préparation en vue de la réutilisation ; b) Le recyclage ; c) Toute autre valorisation, notamment la valorisation énergétique ; d) L'élimination (...) ". L'article L. 541-2-1 du code de l'environnement précise que : " I.- Les producteurs de déchets, outre les mesures de prévention des déchets qu'ils prennent, et les détenteurs de déchets en organisent la gestion en respectant le principe de proximité et la hiérarchie des modes de traitement définis au II de l'article L. 541-1. (...) Cet ordre de priorité peut également être modifié si cela se justifie compte tenu des effets sur l'environnement et la santé humaine, et des conditions techniques et économiques. La personne qui produit ou détient les déchets tient alors à la disposition de l'autorité compétente les justifications nécessaires. (...) ". 10. Les dispositions de l'article L. 541-15-10 du code de l'environnement instituant, dans le but de prévenir la production de déchets, l'obligation pour les établissements de restauration de servir les repas et boissons consommés dans l'établissement dans des gobelets, assiettes et récipients réemployables et avec des couverts réemployables, qui constituent la base légale du décret attaqué et n'ont pas été prises pour assurer la transposition de la directive 2008/98/CE, ne peuvent être regardées comme incompatibles avec les objectifs poursuivis en matière de prévention et de gestion des déchets par l'article 4 de cette directive, sans qu'il y ait lieu à cet égard de saisir la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel. Doit, de même, être écarté le moyen tiré de ce que les dispositions réglementaires attaquées auraient méconnu les articles L. 541-1 et L. 541-2-1 du code de l'environnement ayant transposé les objectifs de la directive. Sur la distorsion de concurrence alléguée : 11. Les dispositions réglementaires attaquées prévoient que les dispositions du 2° du III de l'article L. 541-15-10 du code de l'environnement s'appliquent aux personnes ayant une activité professionnelle de restauration sur place, dès lors que cette dernière permet de restaurer simultanément au moins vingt personnes. La différence de traitement qui en résulte avec les établissements accueillant moins de vingt personnes est en rapport direct avec l'objet de la norme en cause, qui est de limiter la production de déchets par les établissements de restauration, et n'est pas manifestement disproportionnée au regard de la différence de situation existant entre les différentes personnes exerçant une activité professionnelle de restauration. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions réglementaires attaquées porteraient atteinte au principe d'égalité ou créerait une distorsion de concurrence illégale ne peut qu'être écarté. 12. Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation des dispositions attaquées relatives aux modalités de mise en œuvre de l'obligation d'utilisation de vaisselle réemployable dans les établissements de restauration. Leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de la Compagnie Européenne des Emballages Robert Schisler et autres est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Société Compagnie Européenne des Emballages Robert Schisler, première dénommée pour l'ensemble des requérantes, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la Première ministre. Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances, et de la relance. Délibéré à l'issue de la séance du 19 septembre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Pauline Hot, auditrice-rapporteure. Rendu le 17 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Pauline Hot La secrétaire : Signé : Mme Marie-Adeline Allain [RJ1] Comp., lorsque l'application de la loi est manifestement impossible en l'absence de ces mesures réglementaires ou lorsque le texte législatif ne détermine pas la règle technique d'une manière suffisamment précise, CE, 19 décembre 2019, Société Betclic Enterprises Limited, n° 427639, T. pp. 530-620.
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Vu la procédure suivante : Par un arrêt du 3 mars 2022, enregistré le 21 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a sursis à statuer sur le litige opposant la société Green Go Aircraft à la société Air Tourisme Instruction Service et a saisi le Conseil d'Etat de la question de la légalité des dispositions de l'article R. 123-9 du code de l'aviation civile au regard des dispositions des articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, L. 721-7, 3° du code de commerce, L. 511-2 et L. 511-3 du code des procédures civiles d'exécution. Par un mémoire, enregistré le 22 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Air Tourisme Instruction Service conclut, à titre principal, à ce que le Conseil d'Etat constate que l'article R. 123-9 du code de l'aviation civile a été implicitement abrogé par la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution en tant qu'il prévoit la compétence du juge d'instance pour autoriser la saisie conservatoire d'un aéronef de nationalité étrangère ou appartenant à une personne domiciliée à l'étranger et, à titre subsidiaire, à ce qu'il déclare que l'article R. 123-9 du code de l'aviation civile est illégal dans cette mesure. Par deux mémoires, enregistrés le 25 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Green Go Aircraft conclut à ce que le Conseil d'Etat constate que l'article R. 123-9 du code de l'aviation civile, en tant qu'il prévoit la compétence du juge d'instance pour autoriser la saisie conservatoire d'un aéronef de nationalité étrangère ou appartenant à une personne domiciliée à l'étranger, n'a pas été abrogé par l'effet de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution et qu'il est légal dans cette mesure. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'aviation civile ; - le code de commerce ; - le code de l'organisation judiciaire ; - le code des procédures civiles d'exécution ; - le code des transports ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Clément Tonon, auditeur, - les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public, La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la société Green Go Aircraft, et à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la société Air Tourisme instruction service ; Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêt du 3 mars 2022, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a sursis à statuer sur le litige opposant la société Green Go Aircraft à la société Air Tourisme Instruction Service jusqu'à ce que le Conseil d'Etat ait statué sur la légalité des dispositions de l'article R. 123-9 du code de l'aviation civile au regard des dispositions de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, du 3° de l'article L. 721-7 du code de commerce et des articles L. 511-2 et L. 511-3 du code des procédures civiles d'exécution. 2. Aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, issus de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution, et modifiés par l'ordonnance du 8 juin 2006 portant refonte du code de l'organisation judiciaire : " Le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire. / Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestations relatives à leur mise en oeuvre. " L'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que : " Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement. / La mesure conservatoire prend la forme d'une saisie conservatoire ou d'une sûreté judiciaire. " Aux termes de l'article L. 511-3 du même code : " L'autorisation est donnée par le juge de l'exécution. Toutefois, elle peut être accordée par le président du tribunal de commerce lorsque, demandée avant tout procès, elle tend à la conservation d'une créance relevant de la compétence de la juridiction commerciale. " L'article L. 721-7 du code de commerce, issu de la loi du 22 décembre 2010 relative à l'exécution des décisions de justice, aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires, dispose quant à lui que : " Le président du tribunal de commerce peut connaître concurremment avec le juge de l'exécution, lorsqu'elles tendent à la conservation d'une créance relevant de la compétence de la juridiction commerciale et qu'elles sont demandées avant tout procès, des mesures conservatoires portant sur : (...) 3° Les aéronefs, dans les cas et conditions prévus par le code de l'aviation civile (...) ". 3. L'article L. 511-2 du code des procédures civiles d'exécution dispose que : " Une autorisation préalable du juge n'est pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut d'un titre exécutoire ou d'une décision de justice qui n'a pas encore force exécutoire. Il en est de même en cas de défaut de paiement d'une lettre de change acceptée, d'un billet à ordre, d'un chèque ou d'un loyer resté impayé dès lors qu'il résulte d'un contrat écrit de louage d'immeubles. " 4. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 123-9 du code de l'aviation civile, dont les dispositions sont issues de l'article 17 de la loi du 31 mai 1924 relative à la navigation aérienne, dans sa version applicable au litige : " Lorsque le propriétaire de l'aéronef n'est pas domicilié en France ou que l'aéronef est de nationalité étrangère, tout créancier a le droit de pratiquer une saisie conservatoire avec l'autorisation du juge d'instance du lieu où l'appareil a atterri. " 5. Les dispositions particulières précitées de l'article R. 123-9 du code de l'aviation civile, en tant qu'elles prévoient toujours une autorisation préalable du juge pour pratiquer une saisie conservatoire sur un aéronef étranger, ne sont pas incompatibles avec les dispositions citées au point 3 de l'article L. 511-2 du code des procédures civiles d'exécution, aux termes desquelles une autorisation préalable du juge n'est pas nécessaire, dans certaines circonstances, pour pratiquer une saisie conservatoire. Elles ne sont pas, par suite, entachées d'illégalité. 6. En revanche, il résulte de la combinaison des dispositions citées au point 2, ainsi que des travaux préparatoires des lois du 9 juillet 1991 et du 22 décembre 2010, que le législateur a conféré au juge de l'exécution une compétence exclusive en matière d'autorisation des saisies conservatoires, y compris en matière de saisie des aéronefs étrangers, sous réserve de la compétence concurrente du président du tribunal de commerce dans les conditions qu'elles énoncent. Par suite, les dispositions de l'article R. 123-9 du code de l'aviation civile, dans leur version applicable au litige, doivent être déclarées illégales en tant qu'elles désignent le juge d'instance du lieu où l'appareil a atterri comme juge compétent pour autoriser la saisie conservatoire des aéronefs de nationalité étrangère ou dont le propriétaire n'est pas domicilié en France. D E C I D E : -------------- Article 1er : Il est déclaré que les dispositions de l'article R. 123-9 du code de l'aviation civile sont illégales en tant qu'elles désignent le juge d'instance du lieu où l'appareil a atterri comme juge compétent pour autoriser la saisie conservatoire des aéronefs de nationalité étrangère ou dont le propriétaire n'est pas domicilié en France. Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Cour de cassation, à la société Green Go Aircraft, à la société Air Tourisme Instruction Service et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
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Vu la procédure suivante : M. et Mme C... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015. Par un jugement n° 1802554 du 30 juillet 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande. Par un arrêt n° 19BX03720 du 4 novembre 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par M. et Mme A... contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 janvier, 1er avril et 11 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme A... demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de la construction et de l'habitation ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Saby, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de M. et Mme A... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme A... ont déduit de leurs revenus fonciers, au titre de l'impôt sur le revenu des années 2014 et 2015, le prix des travaux réalisés sur un bien immobilier situé à Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), acquis le 28 novembre 2014 dans le cadre d'une vente d'immeuble à rénover. Ils se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 4 novembre 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté leur appel contre le jugement du 30 juillet 2019 du tribunal administratif de Toulouse ayant rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de ces années après remise en cause de cette déduction. 2. D'une part, aux termes de l'article 13 du code général des impôts : " Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu ". L'article 28 du même code dispose : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété ". Aux termes de l'article 31 du même code " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; / (...) / b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 262-1 du code de la construction et de l'habitation, relatif aux ventes d'immeubles à rénover : " Toute personne qui vend un immeuble bâti ou une partie d'immeuble bâti, à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation, ou destiné après travaux à l'un de ces usages, qui s'engage, dans un délai déterminé par le contrat, à réaliser, directement ou indirectement, des travaux sur cet immeuble ou cette partie d'immeuble et qui perçoit des sommes d'argent de l'acquéreur avant la livraison des travaux doit conclure avec l'acquéreur un contrat soumis aux dispositions du présent chapitre. / Le vendeur transfère immédiatement à l'acquéreur ses droits sur le sol ainsi que la propriété des constructions existantes. Les ouvrages à venir deviennent la propriété de l'acquéreur au fur et à mesure de leur exécution. L'acquéreur est tenu d'en payer le prix à mesure de l'avancement des travaux. / Les dispositions du présent chapitre ne s'appliquent pas aux travaux d'agrandissement ou de restructuration complète de l'immeuble, assimilables à une reconstruction (...) ". Le contrat mentionné doit, conformément à l'article L. 262-4 du même code, préciser " le prix de l'immeuble ", entendu, selon l'article R. 262-9 de ce code, comme " le prix payé par l'acquéreur incluant celui de l'existant au jour de la vente et celui des travaux devant être réalisés par le vendeur ". Aux termes de l'article L. 262-2 du même code : " Le vendeur d'un immeuble à rénover demeure maître d'ouvrage jusqu'à la réception des travaux ". 4. Il résulte de ces dispositions que, dans le cadre d'un contrat de vente d'immeuble à rénover régi par les articles L. 262-1 à L. 262-11 du code de la construction et de l'habitation, le prix des travaux devant être réalisés par le vendeur est un élément du prix d'acquisition de l'immeuble. Dès lors, le coût de ces travaux, qui ne sont pas des charges de propriété, ne peut, pour la détermination du revenu net défini à l'article 28 du code général des impôts, être déduit, sur le fondement de l'article 31 du même code, des revenus fonciers provenant de la location du bien ainsi acquis. 5. En premier lieu, il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour refuser à M. et Mme A... la déduction du prix des travaux effectués dans un immeuble récemment acquis de leurs revenus fonciers, la cour administrative d'appel de Bordeaux a relevé que ces travaux avaient été menés dans le cadre d'un contrat de vente d'un immeuble à rénover, souscrit le 28 novembre 2014, dont le prix d'acquisition, comprenant celui des travaux, constituait une dépense en capital qui ne pouvait être considérée comme une charge déductible des revenus fonciers des acquéreurs. La cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a ainsi ni commis d'erreur de droit, ni inexactement qualifié les faits de l'espèce. 6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que pour demander la décharge des droits et pénalités auxquels ils ont été assujettis, M. et Mme A... se sont prévalus, devant la cour administrative d'appel, sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, selon lesquels il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures " lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ", d'une réponse écrite du 25 mars 2013 du service des impôts des particuliers de Montpellier à la demande générale de leur notaire relative à la déduction du prix des travaux dans le cadre d'une vente d'immeuble à rénover, accompagnée d'un courrier du 4 juin 2012 du service des impôts de Bayonne portant sur la même question. Toutefois, il est constant que l'administration n'a pas été interrogée spécifiquement sur la vente d'immeuble à rénover conclue le 28 novembre 2014 par M. et Mme A.... Il suit de là qu'en jugeant que les requérants ne pouvaient se prévaloir des courriers des 4 juin 2012 et 25 mars 2013 sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales en l'absence de prise de position sur leur situation personnelle, la cour administrative d'appel de Bordeaux a fait une exacte application de ces dispositions. Le moyen tiré de l'erreur de droit et de l'inexacte qualification des faits doit dès lors être écarté. 7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué. Leur pourvoi doit en conséquence être rejeté, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme A... est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. C... et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré à l'issue de la séance du 3 octobre 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Thomas Andrieu, M. Nicolas Polge, Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. Vincent Mazauric, conseillers d'Etat et M. Olivier Saby, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 17 octobre 2022. Le président : Signé : M. Rémy Schwartz Le rapporteur : Signé : M. Olivier Saby La secrétaire : Signé : Mme Fehmida Ghulam
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Vu la procédure suivante : Par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 3 février, 24 juin et 23 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société E-Pango demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la délibération n° 2022-25 de la Commission de régulation de l'énergie du 20 janvier 2022 portant décision relative aux règles relatives à la programmation, au mécanisme d'ajustement et au dispositif de responsable d'équilibre ; 2°) de mettre à la charge de la Commission de régulation de l'énergie la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le règlement (UE) 2017/2195 de la Commission du 23 novembre 2017 concernant une ligne directrice sur l'équilibrage du système électrique ; - le code de l'énergie ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Vincent Mazauric, conseiller d'Etat, - les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Réseau de transport d'électricité ; Considérant ce qui suit : Sur le cadre juridique : 1. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du règlement du règlement (UE) 2017/2195 de la Commission du 27 novembre 2017 concernant une ligne directrice sur l'équilibrage du système électrique : " 1. Les GRT [gestionnaires du réseau de transport] définissent les modalités et conditions ou les méthodologies requises par le présent règlement et les soumettent pour approbation aux autorités de régulation compétentes conformément à l'article 37 de la directive 2009/72/CE dans les délais respectifs fixés par le présent règlement ". Aux termes de l'article 5 de ce règlement : " 1. Chaque autorité de régulation (...) approuve les modalités et conditions ou les méthodologies élaborées par les GRT, en application des paragraphes 2, 3 et 4. Avant d'approuver les modalités et conditions ou les méthodologies, (...) les autorités de régulation compétentes révisent les propositions si nécessaire, après avoir consulté les GRT respectifs, afin de s'assurer qu'elles sont conformes à la finalité du présent règlement et qu'elles contribuent à l'intégration du marché, à l'absence de discrimination, à une concurrence effective et au fonctionnement efficace du marché./ (...)/ 4. Les propositions de modalités et conditions ou de méthodologies suivantes et chacune de leurs modifications sont soumises à l'approbation de chaque autorité de régulation de chaque Etat membre concerné, au cas par cas: /(...) / c) les modalités et conditions relatives à l'équilibrage, en application de l'article 18; / (...)/ g) le cas échéant, le mécanisme supplémentaire de règlement distinct du règlement des déséquilibres, afin de régler les coûts d'acquisition de capacités d'équilibrage, les coûts administratifs et les autres coûts liés à l'équilibrage, avec les responsables d'équilibre, en application de l'article 44, paragraphe 3; / (...) ". Aux termes de l'article 6 de ce même règlement : " 1. Lorsque, conformément à l'article 37 de la directive 2009/72/CE, une ou plusieurs autorités de régulation demandent une modification avant d'approuver les modalités et conditions ou les méthodologies soumises en application de l'article 5, paragraphes 2, 3 et 4, les GRT concernés soumettent une proposition de version modifiée des modalités et conditions ou des méthodologies, pour approbation, dans un délai de deux mois à compter de la demande des autorités de régulation compétentes. Les autorités de régulation compétentes statuent sur la version modifiée dans un délai de deux mois à compter de sa soumission. / (...) / 3. Les GRT responsables de l'élaboration d'une proposition de modalités et conditions ou de méthodologies, ou les autorités de régulation responsables de leur adoption conformément à l'article 5, paragraphes 2, 3 et 4, peuvent demander des modifications de ces modalités et conditions ou méthodologies. Les propositions de modification des modalités et conditions ou des méthodologies font l'objet d'une consultation conformément à la procédure énoncée à l'article 10 et sont approuvées conformément à la procédure énoncée aux articles 4 et 5. / ( ...)". Aux termes de l'article 10 de ce règlement : " 1. Les GRT chargés de soumettre des propositions de modalités et conditions ou de méthodologies ou leurs modifications conformément au présent règlement consultent les parties intéressées, y compris les autorités compétentes de chaque Etat membre, sur les projets de propositions de modalités et conditions ou de méthodologies et sur d'autres mesures d'exécution pendant une période non inférieure à un mois. / (...) ". Aux termes de l'article 18 de ce règlement: " 1. Au plus tard six mois après l'entrée en vigueur du présent règlement et pour toutes les zones de programmation d'un Etat membre, les GRT [gestionnaires du réseau de transport] de cet Etat membre élaborent une proposition concernant : / (...) / a) les modalités et conditions applicables aux fournisseurs de service d'équilibrage ; /b) les modalités et les conditions applicables aux responsables d'équilibre ". Aux termes de l'article 44 de ce règlement : " (...) / 3. Chaque GRT peut élaborer une proposition concernant un mécanisme de règlement supplémentaire distinct du règlement des déséquilibres, en vue de régler les coûts d'acquisition des capacités d'équilibrage en application du chapitre 5 du présent titre, les coûts administratifs et les autres coûts liés à l'équilibrage. Le mécanisme de règlement supplémentaire s'applique aux responsables d'équilibre. Il est préférable pour ce faire d'instaurer une fonction de détermination du prix de la pénurie. Si les GRT optent pour un autre mécanisme, ils doivent motiver leur choix dans la proposition. Cette proposition est soumise à l'approbation de l'autorité de régulation compétente. / (...)" 2. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 321-10 du code de l'énergie : " Le gestionnaire du réseau public de transport d'électricité assure à tout instant l'équilibre des flux d'électricité sur le réseau ainsi que la sécurité, la sûreté et l'efficacité de ce réseau, en tenant compte des contraintes techniques pesant sur celui-ci ". En vertu de l'article L. 321-15 de ce code, chaque producteur d'électricité raccordé aux réseaux publics de transport ou de distribution et chaque consommateur d'électricité, pour les sites pour lesquels il a exercé son droit prévu à l'article L. 331-1, " est responsable des écarts entre les injections et les soutirages d'électricité auxquels il procède ". Dans ce cadre, il doit conclure un contrat avec le gestionnaire du réseau public de transport, afin de définir les modalités selon lesquelles lui sont financièrement imputés les écarts entre les injections et les soutirages d'électricité auxquels il procède sur le réseau. Il peut toutefois contracter à cette fin avec un " responsable d'équilibre ", qui prend alors en charge les écarts ou demander à l'un de ses fournisseurs de le faire. Ainsi, le responsable d'équilibre s'engage auprès du gestionnaire du réseau de transport à supporter le coût financier de tout écart négatif et, en cas d'écart positif, peut bénéficier d'une rémunération accordée par ce gestionnaire, conformément à l'article L. 321-14 de ce code, pour l'ensemble des sites de consommation qui, en vertu d'un contrat conclu avec lui, sont rattachés à son " périmètre d'équilibre ". L'article L. 321-10 du code de l'énergie dispose, en outre, que " les règles de présentation des programmes et des propositions d'ajustement et les critères de choix entre les propositions d'ajustement (...) sont approuvés par la Commission de régulation de l'énergie ". L'article L. 321-14 du même code prévoit, enfin, que les méthodes de calcul des écarts et des compensations financières sont approuvées par la Commission de régulation de l'énergie. 3. En troisième lieu, en application des dispositions précitées, par une délibération du 1er juillet 2021, la Commission de régulation de l'énergie a approuvé la dernière version des règles relatives à la programmation, au mécanisme d'ajustement et au dispositif de responsable d'équilibre, dites " règles MA-RE ", qui est entrée en vigueur le 1er septembre 2021. Cette délibération prévoit, au point B. 5 de sa section 2, des " modalités de révision " selon une procédure en neuf étapes: " 1. RTE [Réseau de transport d'électricité] établit sur son initiative ou suite à la demande d'un ou de plusieurs membres de la Commission Accès au Marché, un projet de révision de la Section 2 des Règles. / 2. Aux fins de l'élaboration du projet de révision de la Section 2 des Règles, RTE se coordonne avec les GRD [gestionnaires des réseaux de distribution] sur les sujets qui les concernent et associe l'ensemble des parties prenantes tout au long de l'élaboration de la proposition en tenant compte de leurs avis ; / 3. RTE notifie aux membres de la Commission Accès au Marché le projet de révision de la Section 2 des Règles ; / 4. Dans un délai indiqué dans cette notification, qui ne peut être inférieur à un (1) mois calendaire, les membres de la Commission Accès au Marché peuvent notifier à RTE leurs observations ou contre-propositions : c'est la phase de consultation; / 5. Après la date limite pour la Notification des observations ou contre-propositions précitée, RTE élabore un nouveau projet de révision de la Section 2 des Règles et le notifie aux membres de la Commission Accès au Marché. Lors de l'élaboration de ce nouveau projet, RTE tient compte des observations des parties intéressées, exprimées lors de la phase de consultation. RTE peut refuser de prendre en compte les observations ou contre-propositions faites qui lui ont été adressées sous réserve de le justifier ; / 6. RTE transmet à la CRE le nouveau projet, accompagné des résultats de la consultation, et justifie les observations ou contre-propositions non retenues ; / 7. La CRE, en application de l'article L.321-14 du Code de l'énergie approuve " les méthodes de calcul des écarts et des compensations financières. 8. La décision par laquelle la CRE approuve la Section 2 des Règles est publiée au Journal officiel de la République française ; 9. dans un délai de quinze (15) Jours Ouvrés à compter de la date de publication de la décision d'approbation de la CRE, RTE : / établit la version révisée définitive de la Section 2 des Règles ; / publie, sur le Site Internet de RTE, la version révisée définitive de la Section 2 des Règles ainsi que sa date d'entrée en vigueur. Les Règles SI stipulent des modalités de révision spécifiques qui dérogent à la procédure exposée ci-dessous ". Sur la demande de la société requérante : 4. Par une délibération du 20 janvier 2022 de la Commission de régulation de l'énergie visant à " réviser temporairement les règles MA-RE afin de mieux encadrer le cas où un responsable d'équilibre est défaillant ", de nouvelles règles ont été fixées pour permettre à la société RTE d'agir plus rapidement lorsque l'encours d'un responsable d'équilibre augmente : réduction de dix à cinq jours du délai entre le constat de la défaillance d'un responsable d'équilibre - c'est-à-dire le dépassement de son encours autorisé - et la résiliation du contrat de participation conclu avec celui-ci, réduction de quatre-vingt-dix à quarante-cinq jours du délai de validité du dépôt de liquidité avant réception d'une garantie bancaire, réduction de trente à cinq jours du délai de paiement des factures pour les responsables d'équilibre ayant dépassé leur encours autorisé et, enfin, faculté d'augmenter de 5 millions d'euros sous dix jours la garantie financière demandée à un responsable d'équilibre défaillant, le plafond de la garantie étant porté à 30 millions d'euros. La société E-Pango, fournisseur indépendant d'énergie et responsable d'équilibre, demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette délibération en soutenant qu'elle a été prise en méconnaissance des obligations en matière de consultation préalable mentionnées au point 3. 5. En premier lieu, si la Commission de régulation de l'énergie soutient que la délibération attaquée a été prise sur le fondement des dispositions de l'article 5 du règlement 2017/2195, citées au point 1, qui autorisent les autorités de régulation à réviser, si nécessaire avant de les approuver, les propositions élaborées par les gestionnaires de réseau de transport, sans obligation de consultation préalable des opérateurs concernés, il ressort des pièces du dossier que la proposition de modification des règles dites " MA-RE " que la société RTE lui avait transmise le 23 décembre 2021, se bornait, s'agissant des dispositions des paragraphes C.4, C. 7 et C. 21 auxquelles la délibération contestée se rattache, à renuméroter certains renvois d'articles. Par suite, eu égard à la teneur de la délibération attaquée qui institue, en réponse à la demande de la société RTE en date du 17 janvier 2022, des mesures d'urgence de sécurisation financière du dispositif de responsable d'équilibre aux fins de maîtriser l'impact financier de la crise observée sur le marché de l'électricité, cette délibération doit être regardée comme une modification au sens du point 3 de l'article 6 du règlement précité, qui aurait dû être précédée de la consultation des opérateurs intéressés. 6. En deuxième lieu, si la délibération attaquée invite la société RTE à saisir la Commission de régulation de l'énergie, avant le 1er juin 2022, d'évolutions visant à renforcer la sécurisation financière du dispositif de responsable d'équilibre, après avoir mené la consultation de la Commission d 'Accès au Marché exigée par les dispositions mentionnées au point 3 , il est constant qu'une telle consultation n'a pas eu lieu avant l'adoption de cette délibération alors même qu'elle constitue une garantie pour les opérateurs économiques représentés au sein de cette commission et aurait été, au surplus, susceptible d'exercer une influence sur son sens. 7. En troisième et dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que les prix de l'électricité sur le marché de gros ont enregistré une hausse importante, à l'automne 2021, liée notamment à la hausse des prix du gaz en Europe et à la dégradation de la disponibilité du parc nucléaire français, laquelle hausse a conduit à une très forte augmentation du prix de règlement des écarts et à une nette aggravation du risque de dépassement des encours autorisés des responsables d'équilibre dont une quinzaine ont fait l'objet de mises en demeure à compter de novembre 2021 et dont trois ont été placés en redressement judiciaire ou en liquidation en décembre 2021 et janvier 2022. En revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier que le délai dans lequel ces évolutions se sont produites et que l'ampleur des conséquences financières qu'elles étaient susceptibles d'entraîner notamment pour l'ensemble des utilisateurs des réseaux de distribution d'électricité appelés à financer les pertes occasionnées en la matière, ont été constitutives de circonstances exceptionnelles ou ont été revêtues d'un caractère d'urgence de nature à justifier qu'aucune consultation n'ait lieu avant que ne soit prise la délibération attaquée. 8. Il résulte de ce qui précède que la délibération attaquée a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière et que la société E-Pango est fondée à en demander, pour ce motif, l'annulation. 9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Commission de régulation de l'énergie la somme de 3 000 euros à verser à la société E-Pango, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : La délibération n° 2022-25 de la Commission de régulation de l'énergie du 20 janvier 2022 est annulée. Article 2 : La Commission de régulation de l'énergie versera à la société E-Pango la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société E-Pango, à la Commission de régulation de l'énergie, à la société Réseau de transport d'électricité et à la ministre de la transition énergétique. Délibéré à l'issue de la séance du 3 octobre 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Thomas Andrieu, M. Nicolas Polge, Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, conseillers d'Etat ; M. Olivier Saby, maître des requêtes et M. Vincent Mazauric, conseiller d'Etat-rapporteur. Rendu le 17 octobre 2022. Le président : Signé : M. Rémy Schwartz Le rapporteur : Signé : M. Vincent Mazauric La secrétaire : Signé : Mme Fehmida Ghulam [RJ1] Cf. CE, Ass., 23 décembre 2011, M. Danthony et autres, n° 335033, p. 649.
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Vu la procédure suivante : Les associations Collectif pour le Triangle de Gonesse, Val d'Oise environnement, France Nature Environnement Ile-de-France, les Amis de la Terre France, Les Amis de la Terre Val-d'Oise, Mouvement national de lutte pour l'environnement, les Amis de la Confédération paysanne, Vivre mieux Ensemble à Aulnay-sous-Bois, Réseau des associations pour le maintien d'une agriculture paysanne en Ile-de-France, la fédération Des Terres pas d'hypers !, la fédération Environnement 93 et la fédération Vivre mieux ensemble à Aulnay-sous-Bois ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation pour excès de pouvoir de la délibération adoptée le 10 septembre 2018 par le conseil municipal de Gonesse relative au bilan de la mise à disposition et à l'approbation de la modification simplifiée n° 1 du plan local d'urbanisme, ainsi que de la décision implicite par laquelle le maire de Gonesse a rejeté le recours gracieux formé le 8 novembre 2018 contre cette délibération. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'urbanisme ; - la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire, - les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la commune de Gonesse et à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de la société du Grand Paris ; Considérant ce qui suit : 1. Par une délibération du 10 septembre 2018, le conseil municipal de Gonesse, Val-d'Oise, a approuvé une modification simplifiée du plan local d'urbanisme de la commune afin de permettre les travaux concernant la création d'une gare au Triangle de Gonesse sur la ligne 17 Nord du réseau de transports du Grand Paris Express. L'association Collectif pour le Triangle de Gonesse et autres ont demandé l'annulation de cette délibération au tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Par une ordonnance du 14 mars 2022, le président de la première chambre de ce tribunal a transmis cette demande à la cour administrative d'appel de Paris. Par une ordonnance du 1er juin 2022, la présidente de la cour administrative d'appel de Paris a, à son tour, transmis la demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en application du deuxième alinéa de l'article R. 351-6 du code de justice administrative. 2. En vertu du 5° de l'article R. 311-2 du code de justice administrative, la cour administrative d'appel de Paris est compétente, à compter du 1er janvier 2019, pour connaître en premier et dernier ressort " des litiges, y compris pécuniaires, relatifs à l'ensemble des actes, autres que ceux prévus aux 1°, 2° et 6° de l'article R. 311-1, afférents : - aux opérations d'urbanisme et d'aménagement, aux opérations foncières et immobilières, aux infrastructures et équipements ainsi qu'aux voiries dès lors qu'ils sont, même pour partie seulement, nécessaires à la préparation, à l'organisation ou au déroulement des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ; / - aux documents de toute nature, notamment les documents d'urbanisme et d'aménagement, en tant qu'ils conditionnent la réalisation des opérations, infrastructures, équipements et voiries mentionnés à l'alinéa précédent ; / - aux constructions et opérations d'aménagement figurant sur la liste fixée par le décret prévu au dernier alinéa de l'article 12 de la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ". 3. Si, par l'effet de ces dispositions, la cour administrative d'appel de Paris est compétente en premier et dernier ressort pour connaître, par dérogation aux règles générales fixées par le code de justice administrative quant à la compétence de premier ressort des juridictions administratives de droit commun, de l'ensemble des litiges relatifs aux opérations d'urbanisme et d'aménagement, aux opérations foncières et immobilières et aux opérations de construction d'infrastructures, d'équipements et de voiries menées en vue des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, c'est à la condition que ces opérations puissent être regardées, au vu notamment du dossier de candidature de Paris pour ces Jeux, comme étant nécessaires, même pour partie, à la préparation, à l'organisation ou au déroulement de cet événement. 4. Il ne ressort ni du dossier de candidature de Paris aux Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris de 2024, ni des éléments propres au projet de création d'une gare au Triangle de Gonesse sur la ligne 17 Nord du réseau de transports en commun Grand Paris Express que cette opération serait nécessaire, même partiellement, à la préparation, à l'organisation ou au déroulement des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Par suite, la demande des associations requérantes, tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Gonesse modifiant le plan local d'urbanisme de la commune afin de prendre en compte la création sur la ligne 17 Nord d'une gare au Triangle de Gonesse, ne ressortit pas à la compétence en premier et dernier ressort de la cour administrative d'appel de Paris résultant du 5° de l'article R. 311-2 du code de justice administrative, mais relève de celle du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, compétent pour en connaître en vertu de l'article R. 312-7 du même code. Il y a lieu, par suite, d'attribuer le jugement de cette demande au tribunal administratif de Cergy-Pontoise. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement de la demande de l'association Collectif pour le Triangle de Gonesse et autres est attribué au tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association Collectif pour le Triangle de Gonesse, première dénommée pour l'ensemble des associations requérantes, à la commune de Gonesse, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à la société du Grand Paris à la présidente de la cour administrative d'appel de Paris et au président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Délibéré à l'issue de la séance du 19 septembre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire-rapporteure. Rendu le 17 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Catherine Moreau La secrétaire : Signé : Mme Marie-Adeline Allain [RJ1] Rappr. CE, décision du même jour, Association France Nature Environnement Ile-de-France et autres, n° 459219, à mentionner aux Tables.
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Vu la procédure suivante : La société La Lavandière a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1800972 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif d'Orléans l'a partiellement déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée déductible réclamés au titre de l'exercice clos en 2012 et a rejeté le surplus de sa demande. Par un arrêt n° 20NT01154 du 7 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de la société La Lavandière, prononcé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour les mois d'avril, mai, juillet, août, octobre et novembre 2013, ainsi que des pénalités correspondantes, réformé le jugement du tribunal administratif d'Orléans en ce qu'il avait de contraire et rejeté le surplus des conclusions de son appel. Par un pourvoi, enregistré le 25 novembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt en tant qu'il lui est défavorable. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. A... B... de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Le Bret-Desaché, avocat de la société La Lavandière ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société La Lavandière a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a rejeté sa comptabilité et lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014. Par un jugement du 28 janvier 2020, le tribunal administratif d'Orléans l'a partiellement déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée déductible qui lui ont été réclamés au titre de l'année 2012. Par un arrêt du 7 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a déchargé la société des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour les mois d'avril, mai, juillet, août, octobre et novembre 2013, réformé le jugement en tant qu'il était contraire à son arrêt et rejeté le surplus des conclusions de son appel. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation contre les articles 1er et 2 de cet arrêt. 2. Aux termes de l'article 287 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est tenu de remettre au service des impôts dont il dépend et dans le délai fixé par arrêté une déclaration conforme au modèle prescrit par l'administration. / 2. Les redevables soumis au régime réel normal d'imposition déposent mensuellement la déclaration visée au 1 indiquant, d'une part, le montant total des opérations réalisées, d'autre part, le détail des opérations taxables. La taxe exigible est acquittée tous les mois. / Ces redevables peuvent, sur leur demande, être autorisés, dans des conditions qui sont fixées par arrêté du ministre de l'économie et des finances, à disposer d'un délai supplémentaire d'un mois. / Lorsque la taxe exigible annuellement est inférieure à 4 000 euros, ils sont admis à déposer leurs déclarations par trimestre civil (...) ". 3. Il résulte de ces dispositions que le seuil de taxe exigible de 4 000 euros en dessous duquel un redevable est admis à déposer ses déclarations par trimestre civil, par exception à l'obligation de déclaration mensuelle, s'apprécie au début de chaque trimestre par rapport au montant total de la taxe exigible les quatre trimestres civils précédents. 4. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en jugeant que le seuil de 4 000 euros s'appréciait par rapport au montant total de la taxe exigible au cours de l'année civile immédiatement antérieure à l'année civile au titre de laquelle les déclarations devaient être effectuées, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, le ministre est fondé à demander l'annulation des articles 1er et 2 de l'arrêt qu'il attaque. 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat lequel n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : Les article 1er et 2 de l'arrêt du 7 octobre 2021 de la cour administrative d'appel de Nantes sont annulés. Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Nantes. Article 3 : Les conclusions de la société La Lavandière présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la société La Lavandière. Délibéré à l'issue de la séance du 3 octobre 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Thomas Andrieu, M. Nicolas Polge, Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. Vincent Mazauric, conseillers d'Etat et M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur. Rendu le 17 octobre 2022. Le président : Signé : M. Rémy Schwartz Le rapporteur : Signé : M. Cyril Martin de Lagarde La secrétaire : Signé : Mme Fehmida Ghulam
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Vu la procédure suivante : Les associations France Nature Environnement Ile-de-France, le Collectif pour le Triangle de Gonesse, les Amis de la Confédération paysanne, les Amis de la Terre Val-d'Oise, le Mouvement national de lutte pour l'environnement, Val-d'Oise environnement, la Fédération Des Terres pas d'hypers !, Environnement 93, le Réseau associations pour le maintien d'une agriculture paysanne en Ile-de-France et Vivre mieux ensemble à Aulnay-sous-Bois ont demandé au tribunal administratif de Montreuil l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté des préfets de la Seine-Saint-Denis, de la Seine-et-Marne et du Val-d'Oise du 24 octobre 2018 autorisant la création et l'exploitation de la ligne 17 Nord du réseau de transports du Grand Paris Express entre le Bourget et le Mesnil-Amelot. Par un jugement n° 1902037 du 15 novembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a sursis à statuer sur la demande jusqu'à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la notification du jugement pour permettre la régularisation de l'arrêté du 24 octobre 2018, suspendu partiellement l'exécution de cet arrêté, en tant qu'il autorise les travaux menés à proximité du périmètre de la ZAC du Triangle de Gonesse et ceux relatifs aux ouvrages 3503P et 3505P à Gonesse, à l'emprise extérieure autour de la gare du parc des expositions de Villepinte, à l'ouvrage 3701P à Tremblay-en-France, à l'emprise extérieure à Tremblay-en-France et à la gare du Mesnil-Amelot et réservé jusqu'à la fin de l'instance tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'avait pas été expressément statué par le jugement. Par un arrêt n° 20VE00338 du 19 novembre 2020, la cour administrative d'appel de Versailles, saisie d'un appel de la Société du Grand Paris, a annulé le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 15 novembre 2019 et a transmis l'affaire à la cour administrative d'appel de Paris. Par un arrêt n° 20PA03478 du 7 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté la demande de l'association France Nature Environnement et autres contre l'arrêté du 24 octobre 2018. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 décembre 2021 et 7 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les associations France Nature Environnement Ile-de-France et autres demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'environnement ; - le code de l'urbanisme ; - la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 ; - le décret n° 2017-186 du 14 février 2017 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire, - les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Zribi et Texier, avocat de l'association France Nature Environnement Ile-de-France et autres et à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de la société du Grand Paris ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 septembre 2022, présentée par l'association France Nature Environnement Ile-de-France et autres ; Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 24 octobre 2018, les préfets de la Seine-Saint-Denis, du Val-d'Oise et de la Seine-et-Marne ont accordé à la société du Grand Paris une autorisation environnementale pour la création et l'exploitation de la ligne 17 Nord du réseau de transports du Grand Paris Express entre le Bourget (Seine-Saint-Denis) et le Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne). Saisi par l'association France Nature Environnement Ile-de-France et plusieurs autres associations, le tribunal administratif de Montreuil a, par un jugement du 15 novembre 2019, jugé que cet arrêté était entaché d'un vice résultant de l'insuffisance de l'étude d'impact quant à l'analyse des incidences cumulées du projet avec celui de la zone d'aménagement concerté du Triangle de Gonesse et d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de la suffisance des mesures de compensation prévues pour permettre le maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces protégées auxquelles il est porté atteinte et a décidé de suspendre partiellement l'exécution de l'arrêté litigieux. Par un arrêt du 19 novembre 2020, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement du tribunal administratif de Montreuil en retenant que le litige relevait de la compétence de premier ressort de la cour administrative d'appel de Paris et a transmis l'affaire à cette cour. L'association France Nature Environnement Ile-de-France et autres se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 7 octobre 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2018 et de l'arrêté du 4 mars 2021 le complétant. Sur la compétence de la cour administrative d'appel de Paris : 2. En vertu du 5° de l'article R. 311-2 du code de justice administrative, la cour administrative d'appel de Paris est compétente, à compter du 1er janvier 2019, pour connaître en premier et dernier ressort " des litiges, y compris pécuniaires, relatifs à l'ensemble des actes, autres que ceux prévus aux 1°, 2° et 6° de l'article R. 311-1, afférents : - aux opérations d'urbanisme et d'aménagement, aux opérations foncières et immobilières, aux infrastructures et équipements ainsi qu'aux voiries dès lors qu'ils sont, même pour partie seulement, nécessaires à la préparation, à l'organisation ou au déroulement des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ; / - aux documents de toute nature, notamment les documents d'urbanisme et d'aménagement, en tant qu'ils conditionnent la réalisation des opérations, infrastructures, équipements et voiries mentionnés à l'alinéa précédent ; / - aux constructions et opérations d'aménagement figurant sur la liste fixée par le décret prévu au dernier alinéa de l'article 12 de la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ". 3. Si, par l'effet de ces dispositions, la cour administrative d'appel de Paris est compétente en premier et dernier ressort pour connaître, par dérogation aux règles générales fixées par le code de justice administrative quant à la compétence de premier ressort des juridictions administratives de droit commun, de l'ensemble des litiges relatifs aux opérations d'urbanisme et d'aménagement, aux opérations foncières et immobilières et aux opérations de construction d'infrastructures, d'équipements et de voiries menées en vue des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, c'est à la condition que ces opérations puissent être regardées, au vu notamment du dossier de candidature de Paris pour ces Jeux, comme étant nécessaires, même pour partie, à la préparation, à l'organisation ou au déroulement de cet événement. 4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le projet de création de la ligne 17 Nord, qui fait partie du projet d'ensemble du réseau de transports en commun Grand Paris Express, a été conçu afin de contribuer à l'aménagement du Nord de l'Ile-France, d'améliorer la couverture de territoires insuffisamment desservis, de permettre aux populations concernées d'accéder plus aisément aux bassins d'emploi et de réduire la circulation automobile dans la région. Il a été envisagé dès 2009 et a été déclaré d'utilité publique par décret du 14 février 2017, soit après la présentation officielle, le 23 juin 2015, de la candidature de la ville de Paris pour les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 mais avant que cette candidature ne soit retenue par le Comité international olympique le 13 septembre 2017. Ni les pièces du dossier d'instruction de la demande de déclaration d'utilité publique, dont la plupart sont postérieures à la présentation officielle de la candidature, ni l'arrêté litigieux du 24 octobre 2018 ne comportent de référence aux Jeux Olympiques et Paralympiques, ni n'établissent de lien entre le projet et la tenue de cet événement. Si l'existence du projet de la ligne 17 Nord a été mentionnée dans le dossier de candidature, au titre des éléments de contexte relatifs à l'attractivité de Paris, à l'instar d'autres projets d'infrastructures de transports publics, il ne ressort pas de ce dossier de candidature que les autorités françaises se seraient spécifiquement engagées à réaliser cette infrastructure pour les besoins de l'organisation des Jeux. Au surplus, si la livraison de la gare Le Bourget Aéroport aurait pu être utile à la desserte du secteur olympique du Bourget ou si la ligne 17 Nord aurait pu contribuer à la desserte de sites de compétitions sportives ou du village des médias des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, ces travaux ne seront pas achevés en 2024. Dans ces conditions, les opérations faisant l'objet des actes attaqués ne peuvent être regardées comme étant nécessaires, même partiellement, à la préparation, à l'organisation ou au déroulement des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. 5. Toutefois, aux termes du premier alinéa de l'article R. 351-3 du code de justice administrative : " Lorsqu'une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence d'une juridiction administrative autre que le Conseil d'État, son président, ou le magistrat qu'il délègue, transmet sans délai le dossier à la juridiction qu'il estime compétente ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 351-6 du même code : " Lorsque le président de la cour administrative d'appel ou du tribunal administratif, auquel un dossier a été transmis en application du premier alinéa ou de la seconde phrase du second alinéa" de l'article R. 351-3, estime que cette juridiction n'est pas compétente, il transmet le dossier, dans le délai de trois mois suivant la réception de celui-ci, au président de la section du contentieux du Conseil d'État, qui règle la question de compétence et attribue le jugement de tout ou partie de l'affaire à la juridiction qu'il déclare compétente ". Enfin, aux termes de l'article R. 351-9 de ce code : " Lorsqu'une juridiction à laquelle une affaire a été transmise en application du premier alinéa de l'article R. 351-3 n'a pas eu recours aux dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 351-6 ou lorsqu'elle a été déclarée compétente par le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, sa compétence ne peut plus être remise en cause ni par elle-même, ni par les parties, ni d'office par le juge d'appel ou de cassation, sauf à soulever l'incompétence de la juridiction administrative ". 6. En vertu des dispositions de l'article R. 351-9 du code de justice administrative qui viennent d'être citées, la compétence de la juridiction à laquelle une affaire a été transmise en application de l'article R. 351-3, dès lors que cette juridiction n'a pas mis en œuvre les dispositions de l'article R. 351-6 en renvoyant l'affaire au motif de son incompétence au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat dans un délai de trois mois, ne peut plus être remise en cause, sauf à opposer l'incompétence de la juridiction administrative. 7. En l'espèce, la cour administrative d'appel de Versailles a, par arrêt du 19 novembre 2020, transmis le dossier de l'affaire à la cour administrative d'appel de Paris en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, après avoir annulé pour incompétence le jugement rendu en premier ressort par le tribunal administratif de Montreuil. La cour administrative d'appel de Paris n'ayant pas eu recours aux dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 351-6, la compétence de cette cour pour statuer en qualité de juge de premier ressort sur la demande initialement présentée au tribunal administratif de Montreuil ne peut plus être remise en cause. Dès lors, ainsi que le fait valoir le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le moyen du pourvoi mettant en cause la compétence de la cour administrative d'appel de Paris ne peut qu'être écarté. Sur les autres moyens du pourvoi : 8. L'article L. 411-1 du code de l'environnement prévoit, lorsque les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation d'espèces animales non domestiques, l'interdiction de " 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat / 2° La destruction, la coupe, la mutilation, l'arrachage, la cueillette ou l'enlèvement de végétaux de ces espèces, de leurs fructifications ou de toute autre forme prise par ces espèces au cours de leur cycle biologique, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat, la détention de spécimens prélevés dans le milieu naturel ; / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces (...) ". Le I de l'article L. 411-2 du même code renvoie à un décret en Conseil d'Etat la détermination des conditions dans lesquelles sont fixées, notamment " 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : (...) / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; (...) ". 9. Il résulte de ces dispositions qu'un projet d'aménagement ou de construction d'une personne publique ou privée susceptible d'affecter la conservation d'espèces animales ou végétales protégées et de leurs habitats ne peut être autorisé, à titre dérogatoire, que s'il répond, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur. En présence d'un tel intérêt, le projet ne peut cependant être autorisé, eu égard aux atteintes portées aux espèces protégées appréciées en tenant compte des mesures de réduction et de compensation prévues, que si, d'une part, il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et, d'autre part, cette dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle. 10. Pour apprécier si le projet litigieux répondait à une raison impérative d'intérêt public majeur au sens des dispositions précédemment citées du code de l'environnement, la cour administrative d'appel a retenu, d'une part, que le projet de ligne 17 Nord, qui avait été déclaré d'utilité publique par un décret du 14 février 2017, fait partie du réseau du Grand Paris Express qui vise à présenter une alternative à la voiture pour les déplacements de banlieue à banlieue, décongestionner les lignes de transport en commun traversant la zone centrale de l'agglomération parisienne par le développement de l'offre de transport, favoriser l'égalité entre les territoires de la région, soutenir son développement économique, faciliter l'accès au réseau ferroviaire à grande vitesse et aux aéroports et contribuer à préserver l'environnement en favorisant l'utilisation des transports en commun et en limitant l'étalement urbain, d'autre part, que le projet de ligne 17 Nord a plus particulièrement vocation à améliorer l'attractivité de territoires défavorisés et faciliter l'accès à l'emploi de la population de territoires dans lesquels le taux de chômage est supérieur à la moyenne nationale, puis elle a estimé que les différentes circonstances de fait nouvelles et les incertitudes en résultant, invoquées par les associations requérantes, ne remettaient pas en cause l'intérêt du projet. En jugeant ainsi que le projet répondait à une raison impérative d'intérêt public majeur, la cour administrative d'appel a exactement qualifié les faits de l'espèce. 11. Pour juger, ensuite, qu'il n'existait pas d'autre solution satisfaisante, la cour a relevé que les choix réalisés au stade du dossier de déclaration d'utilité publique, lequel avait exposé les différents scénarios envisagés pour le tracé de la ligne 17 Nord, avaient tenu compte des principaux enjeux liés au milieu naturel et que cette prise en compte avait permis l'évitement total des sites Natura 2000 et des zones d'inventaire du milieu naturel. Elle a également relevé que, si le trajet est majoritairement souterrain, le choix d'un tracé aérien entre le Triangle de Gonesse et Tremblay-en-France s'explique par la volonté de limiter les pompages d'eaux souterraines susceptibles d'affecter la nappe souterraine. Elle a retenu enfin que le choix d'un positionnement déporté des emprises nécessaires au chantier au sein d'une zone naturelle à proximité de la commune du Mesnil-Amelot est dicté par la densité importante et les contraintes d'activité du site de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle qui ne permettent pas d'y installer ces emprises. En jugeant, au vu de ces éléments, que les auteurs des arrêtés litigieux n'avaient pas commis d'erreur d'appréciation en estimant qu'il n'existait pas d'autre solution satisfaisante, la cour administrative d'appel s'est livrée à une appréciation souveraine des faits de l'espèce qui est exempte de dénaturation. 12. Enfin, pour juger satisfaite la condition tenant à ce que le projet ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle, la cour a jugé suffisantes, d'une part, les mesures prévues d'évitement des zones abritant des espèces protégées concernant la friche industrielle située au sud-ouest du Triangle de Gonesse qui a été exclue de l'emprise des travaux, ainsi qu'une friche et une partie des fourrés situées respectivement à Gonesse et au Mesnil-Amelot qui ont été préservées par le choix, pour la première, d'un parcours souterrain, pour les secondes, d'une implantation plus au nord, d'autre part, les mesures de compensation prévues par l'arrêté du 24 octobre 2018 et consistant en l'amélioration de la gestion des prairies et en la mise en place de mesures de protection, de restauration et de gestion de plusieurs surfaces situées à proximité du tracé de la ligne 17 Nord, ainsi que par l'arrêté complémentaire du 4 mars 2021 et consistant notamment en la création d'un boisement de la plaine de Pierrelaye d'une superficie d'au moins 32,94 hectares. En statuant ainsi, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits de l'espèce, sans les dénaturer. 13. Il résulte de tout ce qui précède que l'association France Nature Environnement Ile-de-France et autres ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'arrêt qu'elles attaquent. 14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'association France Nature Environnement Ile-de-France et autres une somme à verser à la société du Grand Paris au titre des mêmes dispositions. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de l'association France Nature Environnement Ile-de-France et autres est rejeté. Article 2 : Les conclusions de la société du Grand Paris présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association France Nature Environnement Ile-de-France, première dénommée pour l'ensemble des associations requérantes, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société du Grand Paris. Délibéré à l'issue de la séance du 19 septembre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire-rapporteure. Rendu le 17 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Catherine Moreau La secrétaire : Signé : Mme Marie-Adeline Allain [RJ1] Rappr. CE, décision du même jour, Association Collectif pour le Triangle de Gonesse et autres, n° 464620, à mentionner aux Tables.
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Vu la procédure suivante : L'association Club des Piou-Piou de Valmorel Doucy a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014. Par une ordonnance n° 430232 du 6 avril 2019, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, transmis sa demande au tribunal administratif de Lyon. Par un jugement n° 1720682 du 26 novembre 2019, ce tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 20LY00346 du 1er avril 2021, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de l'association Club des Piou-Piou de Valmorel Doucy, annulé ce jugement et déchargé cette association des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige. Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 mai 2021 et 6 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. A... B... de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de l' association Club des Piou-Piou de Valmorel Doucy ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité dont l'association Club des Piou-Piou de Valmorel Doucy a fait l'objet, l'administration lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014. Par un jugement du 26 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 1er avril 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a annulé ce jugement et déchargé l'association des impositions en litige. 2. Aux termes du b du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts, sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée " les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des œuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient. (...) " 3. Une association qui entretient des relations privilégiées avec des organismes à but lucratif ou des professionnels qui en retirent un avantage concurrentiel leur permettant notamment de réaliser, de manière directe, un surcroît de recettes, ne saurait être regardée comme ayant une gestion désintéressée au sens des dispositions de l'article 261 du code général des impôts citées au point 2. 4. Par suite, en se fondant sur la seule circonstance que l'association Club des Piou-Piou de Valmorel Doucy n'entretenait pas de relations privilégiées avec l'Ecole du ski français (ESF) permettant à cette dernière d'en retirer un avantage concurrentiel, au motif non contesté qu'il s'agit d'un groupement de fait qui ne possède pas de personnalité juridique et qui n'est pas membre de l'association, sans rechercher s'il en allait de même, ainsi que le ministre l'y invitait en défense, à l'égard des moniteurs de ski de l'ESF dont il n'était également pas contesté devant les juges du fond qu'ils exerçaient leur activité à titre commercial et étaient membres de l'association, la cour a commis une erreur de droit. Dès lors, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 6. Il résulte de l'instruction que l'association Club des Piou-Piou de Valmorel Doucy exerce une activité de halte-garderie pour les enfants de 18 mois à 3 ans et d'initiation au ski pour les enfants à partir de 3 ans. Pour l'exercice de cette dernière activité, qui représente environ 70 % de ses recettes et constitue donc la principale activité de l'association, celle-ci fait appel à des moniteurs de ski dont il n'est pas contesté qu'ils exercent une activité commerciale pour laquelle ils sont soumis, notamment, à la taxe sur la valeur ajoutée, et qui sont membres de l'association. Dans ces conditions, dès lors qu'ils retirent un avantage concurrentiel des activités de l'association, celle-ci doit être regardée comme entretenant des relations privilégiées avec ses membres, moniteurs de ski exerçant à titre commercial, alors même que les cours de ski dispensés aux enfants dans le cadre de celle-ci seraient moins rémunérateurs en moyenne pour les moniteurs que leurs cours particuliers. C'est dès lors, à bon droit que l'administration a estimé que son activité devait être soumise à la taxe sur la valeur ajoutée. 7. Il résulte de tout ce qui précède que l'association Club des Piou-Piou de Valmorel Doucy n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat lequel n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 1er avril 2021 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé. Article 2 : La requête présentée par l'association Club des Piou-Piou de Valmorel Doucy devant la cour administrative d'appel de Lyon est rejetée. Article 3 : Les conclusions de l'association Club des Piou-Piou de Valmorel Doucy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à l'association Club des Piou-Piou de Valmorel Doucy. Délibéré à l'issue de la séance du 3 octobre 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Thomas Andrieu, M. Nicolas Polge, Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. Vincent Mazauric, conseillers d'Etat et M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur. Rendu le 17 octobre 2022. Le président : Signé : M. Rémy Schwartz Le rapporteur : Signé : M. Cyril Martin de Lagarde La secrétaire : Signé : Mme Fehmida Ghulam [RJ1] Cf. CE, Section, 1er octobre 1999, Association Jeune France, n° 170289, p. 285 ; CE, 7 décembre 2016, Association des utilisateurs et distributeurs de l'agrochimie européenne, n° 389299, T. pp. 728-744.
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Vu la procédure suivante : Par une ordonnance n° 22001184 du 3 février 2022, enregistrée 10 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Paris a, sur le fondement de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, transmis au Conseil d'Etat la requête présentée devant ce tribunal par le syndicat national de l'environnement. Par cette requête, enregistrée le 15 janvier 2022 au greffe du tribunal administratif de Paris, et un mémoire en réplique, enregistré le 8 juillet 2022 au secretariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national de l'environnement demande au Conseil d'Etat : 1°) d'abroger l'instruction n° 2021-DGDR-DF-03 du 14 décembre 2021 relative aux modalités de déplacement des agents de l'Office français de la biodiversité (OFB) ; 2°) d'annuler la décision implicite de rejet de son recours gracieux tendant à l'abrogation de cette instruction ; 3°) à titre subsidiaire, d'enjoindre à l'OFB, sur le fondement des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, d'une part, de produire une instruction conforme aux textes réglementaires, d'autre part, de tirer toutes les conséquences de droit découlant de la décision à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'OFB la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'environnement ; - la loi n° 2019-773 du 27 juillet 2019 ; - le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 ; - le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 ; - le décret n° 2019-1580 du 31 décembre 2019 ; - l'arrêté du 5 mai 2021 fixant la liste des pièces justificatives des dépenses des organismes soumis au titre III du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Mélanie Villiers, maître des requêtes, - les conclusions de M. A... B... de Vendeuil, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Le syndicat national de l'environnement demande l'abrogation de l'instruction n° 2021-DGDR-DF-03 du 14 décembre 2021 relative aux modalités de déplacement des agents de l'Office français de la biodiversité. Toutefois, eu égard aux moyens qu'il invoque, sa requête doit être regardée comme demandant son annulation pour excès de pouvoir. 2. Aux termes de l'article R. 311-1 du code de justice administrative : " Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort : / (...) 2° Des recours dirigés contre les actes réglementaires des ministres et des autres autorités à compétence nationale et contre leurs circulaires et instructions de portée générale ". Hormis le cas où il aurait été doté par un texte d'un pouvoir réglementaire, un établissement public national ne peut être regardé comme une autorité à compétence nationale, au sens de ces dispositions. 3. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la requête, dirigée contre une décision prise, dans l'exercice de son pouvoir d'organisation du service, par le directeur d'un établissement public national auquel aucun texte n'a attribué un pouvoir réglementaire, n'entre pas dans les prévisions du 2° de l'article R. 311-1 du code de justice administrative. Aucun autre texte ne donne compétence au Conseil d'Etat pour connaître en premier et dernier ressort de telles conclusions. Par suite, il y a lieu, en application de l'article R. 351-1 du code de justice administrative, d'en attribuer le jugement au tribunal administratif de Melun, compétent pour en connaître en vertu de l'article R. 312-1 du même code. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement de la requête du syndicat national de l'environnement est attribué au tribunal administratif de Melun. Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat national de l'environnement, à l'Office français de la biodiversité et au président du tribunal administratif de Melun. Délibéré à l'issue de la séance du 28 septembre 2022 où siégeaient : M. Olivier Japiot, président de chambre, présidant ; M. Gilles Pellissier, conseiller d'Etat et Mme Mélanie Villiers, maître des requêtes-rapporteure. Rendu le 14 octobre 2022. Le président : Signé : M. Olivier Japiot La rapporteure : Signé : Mme Mélanie Villiers La secrétaire : Signé : Mme Pierrette Kimfunia
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de l'arrêté du 2 juin 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement . Par un jugement n° 2103773 du 21 octobre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 24 janvier 2022, puis réenregistrée au greffe de la cour administrative de Toulouse, M .A..., représenté par Me Coupard, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 21 octobre 2021 du tribunal administratif de Montpellier ; 2°) d'annuler l'arrêté du 2 juin 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ; 3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, un titre de séjour portant la mention " salarié " ou, à défaut, " vie privée et familiale ", à défaut de lui enjoindre de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ; 4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à Me Coupard en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - c'est à tort que le tribunal a estimé qu'il ne justifiait pas d'une prise en charge par l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de 16 ans et celui de 18 ans, en se fondant sur le jugement du tribunal correctionnel du 21 août 2019 alors que l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'attache qu'aux constatations de fait et qu'en l'espèce le jugement correctionnel n'a pas remis en cause sa date de naissance, au 22 août 2001 ; - le tribunal a entaché son jugement d'une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences du refus de séjour sur sa situation personnelle, compte tenu de sa prise en charge par l'aide sociale à l'enfance à l'âge de 16 ans et 5 mois, qui s'est poursuivie à la majorité en qualité de jeune majeur, et de son inscription dans une formation de CAP " maçonnerie " dès l'année 2019-2020 ; - le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation au regard de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; par ailleurs, en ce qui concerne l'application de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet dans la décision attaquée indique à tort qu'il ne justifie pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ; le préfet n'a pas non plus apprécié sa situation sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à l'admission exceptionnelle au séjour, qui lui était pourtant applicable dans la mesure où il justifiait suivre depuis au moins six mois une formation professionnelle en certificat d'aptitude professionnelle " maçonnerie " ; - le refus de séjour est entaché d'une erreur de droit au regard de l'article L 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'entre pas dans les prévisions de cet article faute d'avoir été confié à l'aide sociale à l'enfance avant l'âge de 16 ans ; il est entaché également d'une erreur de droit en ce qui concerne l'application de l'article L. 422-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la mesure où cet article, à raison duquel il lui est opposé une absence de visa de long séjour, se rapporte à la situation de l'étudiant étranger qui relève d'un programme de l'Union européenne ; - la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des critères de l'article L. 425-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la circulaire ministérielle du 25 janvier 2016, compte tenu de sa prise en charge par l'aide sociale à l'enfance depuis le 5 décembre 2017, de façon ininterrompue et de la signature d'un contrat d'accueil provisoire en tant que jeune majeur et régulièrement renouvelé depuis, ainsi que du sérieux de sa formation ; - la décision de refus de séjour est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des critères de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, compte tenu de son intégration en France par sa formation, par la signature d'un contrat d'apprentissage, et de l'absence d'attaches familiales dans son pays d'origine, le centre de ses intérêts privés se trouvant désormais en France ; - la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi qu'à l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ; - la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée quant à l'indication du pays vers lequel il pourrait être éloigné ; cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation faute de prise en compte de sa situation personnelle, de mineur isolé pris en charge en France au titre de l'aide sociale à l'enfance. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2022, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête. Il fait valoir qu'aucun des moyens n'est fondé. Par une décision du 17 décembre 2021, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par ordonnance du 16 août 2022, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 15 septembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Pierre Bentolila, président-assesseur a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., ressortissant guinéen, qui déclare être né le 22 août 2001 et être entré en France en 2017, a présenté, le 21 septembre 2020, une demande de titre de séjour en qualité de " salarié " en se prévalant d'une promesse d'embauche en apprentissage auprès d'un employeur, en alternance avec sa formation en deuxième année de CAP maçonnerie. Par un arrêté du 2 juin 2021, le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. 2. M. A... relève appel du jugement du 21 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en annulation de cet arrêté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne le refus de séjour : S'agissant du moyen tiré de l'absence d'examen particulier de sa situation au regard du séjour : 3. Il ressort tout d'abord des pièces du dossier que, dans sa demande de titre de séjour présentée le 21 septembre 2020 dans laquelle il indiquait avoir 19 ans, M. A... ne spécifiait pas le fondement juridique de cette demande, l'intéressé se bornant à indiquer qu'il bénéficiait d'une offre en apprentissage par une société en alternance avec sa formation en CAP maçonnerie, au lycée Léonard de Vinci de Montpellier. 4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable à la date du refus de séjour attaqué : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". 5. Le préfet dans la décision de refus de séjour a estimé, sur le fondement de ces dispositions au regard desquelles il a examiné le droit au séjour de M. A..., que " (...) l'intéressé, entré récemment sur le territoire, déclarant être célibataire sans charge de famille, ne démontre pas que le centre de ses intérêts privés et familiaux est établi en France au sens des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni qu'il se trouve dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il ne démontre pas être isolé (...) ". L'appelant fait valoir que dès lors qu'il a toujours indiqué que ses parents étaient décédés en 2013 et qu'il n'avait plus aucune nouvelle de son frère, la décision de refus de séjour révèlerait un défaut d'examen réel et complet de sa demande. Toutefois, il ne ressort, en tout état de cause, d'aucune des pièces du dossier, et notamment pas de la demande de titre de séjour, qui n'est pas renseignée à cet égard, que M. A... aurait informé le préfet de sa situation familiale. Dans ces conditions, et dès lors que, par ailleurs, il ne résulte ni de la rédaction de l'arrêté ni des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas apprécié la situation de l'intéressé au regard de l'ensemble des éléments qui lui étaient soumis, tenant notamment aux éléments relatifs à l'intégration en France de M. A..., par sa formation et l'accomplissement de différents stages, le moyen invoqué par le requérant et tiré de l'absence d'examen particulier de sa situation au regard de l'article L 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 6. En second lieu, aux termes de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable à la date du refus de séjour attaqué : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française ". 7. Dès lors qu'il était loisible au préfet, comme il y a procédé, d'examiner le droit au séjour de M. A... au regard de cet article, alors même que, comme le fait valoir l'intéressé lui-même, il ne remplirait pas la condition posée par cet article tenant au fait d'avoir été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance avant l'âge de 16 ans, le moyen tiré de l'absence d'examen particulier de sa situation au regard de cet article est opérant. Toutefois, ce moyen doit être écarté dès lors que le préfet, pour en écarter l'application au profit de M. A..., s'est fondé sur le fait qu'il ne remplissait l'une des conditions posées par l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'intéressé n'avait pas " ...fait l'objet d'une ordonnance de placement par le juge... ". S'agissant du moyen tiré de l'erreur de droit : 8. Le moyen selon lequel le préfet aurait commis une erreur de droit en examinant la situation de l'appelant au regard des articles L. 423-22 et L. 422-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la mesure où il n'entre pas dans le champ de ces dispositions, ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté dès lors qu'il ressort des termes de l'arrêté de refus de séjour, d'une part, que le préfet a considéré que M. A... n'entrait pas dans le champ des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, d'autre part, que le préfet a refusé de faire application de l'article L. 422-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au profit du requérant. S'agissant du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation : 9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " À titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ". 10. Par un jugement devenu définitif du 21 août 2019, dont les constatations de fait s'imposent au juge administratif, M. A... a été condamné par le tribunal correctionnel de Montpellier pour des faits commis entre le 1er mars 2018 et le 20 août 2019, de détention d'un faux jugement supplétif d'acte de naissance indiquant une naissance au 22 août 2001, et sa transcription au registre des naissances. Dans ces conditions, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, le préfet a pu valablement considérer, faute pour d'autres pièces du dossier d'indiquer de façon certaine la date de naissance de l'intéressé, qu'il n'était pas établi que M. A... avait été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et celui de dix-huit ans. Il suit de là qu'en dépit des éléments produits par le requérant faisant état d'éléments favorables relatifs à sa scolarité et à son intégration en France notamment par l'accomplissement de différents stages, le préfet était fondé à ne pas faire application par l'arrêté de refus de séjour en litige, au profit de M. A... , des dispositions précitées de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 11. Par ailleurs, les énonciations de la circulaire interministérielle du 25 janvier 2016, relative à la mobilisation des services de l'État auprès des conseils départementaux concernant les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leurs familles et les personnes se présentant comme tels, ne constituent pas des lignes directrices dont M. A... pourrait utilement se prévaloir devant le juge administratif. S'agissant du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision de refus de séjour sur la situation personnelle du requérant : 12. En l'espèce, compte tenu de la qualité de célibataire sans charge de famille de M. A..., de son absence en France de liens familiaux ou personnels et de ce qu'il n'établit pas ne plus avoir d'attaches familiales et personnelles en Guinée, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste quant aux conséquences de sa décision de refus de séjour sur la situation personnelle de l'appelant. S'agissant des moyens invoqués sur le fondement des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne : 13. En vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". L'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne prévoit également que : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications ". 14. Il ressort des pièces du dossier que M. A... n'est entré en France qu'en décembre 2017 et s'il allègue, sans l'établir, n'avoir plus de famille dans son pays d'origine, il ne fait valoir l'existence en France d'aucun lien particulier tant familial que personnel. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté et le moyen invoqué sur le fondement de l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit, dès lors, en tout état de cause être également écarté. 15. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire : 16. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour. Par ailleurs et pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 14 du présent arrêt, le moyen invoqué à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée l'obligation de quitter le territoire quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ne peut qu'être écarté, ainsi que le moyen invoqué sur le fondement de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En ce qui concerne la décision de fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement : 17. La décision de fixation du pays de destination, en indiquant que M. A... pourrait à l'expiration du délai de départ volontaire qui lui est accordé, être éloigné " ...à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays pour lequel il établit être légalement admissible... ", est, contrairement à ce que soutient le requérant, suffisamment motivée. Par ailleurs, compte tenu de ce qui a été dit au point 14 du présent arrêt, cette décision n'est en tout état de cause pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle du requérant. 18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault. Délibéré après l'audience du 4 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Rey-Bèthbéder, président, M. Bentolila, président-assesseur, Mme Beltrami première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur, P. Bentolila Le président, É. Rey-Bèthbéder La greffière, C. Lanoux La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22TL00319 2
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 février et 16 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler la décision implicite de rejet née le 24 janvier 2022, ensemble la décision du 23 novembre 2021 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a, d'une part, rejeté la demande d'indemnisation du préjudice financier résultant de la perte de chance de faire utilement appel de la décision de la commission départementale d'aide sociale de Paris du 24 mars 2017 et, d'autre part, limité à 2 500 euros le montant de l'indemnisation du préjudice moral résultant de la durée excessive de jugement de sa contestation de la décision, prise le 22 avril 2009 par la caisse d'allocations familiales de Paris, de récupérer un indu de revenu minimum d'insertion d'un montant de 30 666,78 euros au titre de la période allant de mai 2002 à février 2009. 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 25 600 euros en réparation du préjudice moral résultant de la durée excessive de la procédure juridictionnelle ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 22 423,22 euros en réparation du déni de justice dont elle estime avoir été victime ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'action sociale et des familles ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Pierre Vaiss, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de Mme A... ; Considérant ce qui suit : 1. Il résulte de l'instruction que la Caisse d'allocations familiales (CAF) de Paris a adressé le 22 avril 2009 à Mme A... une demande de remboursement d'un trop-perçu, d'un montant de 30 866,75 euros, d'allocation de revenu minimum d'insertion (RMI) et de revenu de solidarité active (RSA) au titre de la période comprise entre mai 2002 et février 2009. Le 30 juillet 2009, Mme A... a formé un recours administratif préalable obligatoire contre cette décision devant le conseil général de Paris, devenu le conseil départemental de Paris. Son recours a été rejeté par une décision implicite du 30 septembre 2009. Par deux décisions successivement rendues le 18 juin 2012 et le 31 juillet 2012, le président du conseil général de Paris a confirmé le rejet du recours administratif de Mme A..., et a informé celle-ci de l'émission d'un titre exécutoire par la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris, afin de recouvrer la créance dont l'intéressée était débitrice. Par un courrier en date du 10 septembre 2012, Mme A... a contesté la décision du 31 juillet 2012 du président du conseil général devant la commission départementale d'aide sociale (CDAS) de Paris. Par un jugement du 24 mars 2017, la CDAS de Paris a annulé les décisions du conseil général de Paris des 18 juin 2012 et 31 juillet 2012 et enjoint au conseil départemental de Paris de procéder à un nouveau calcul de l'indu, réduit à la période de mars 2004 à février 2009, afin de tenir compte de la part prescrite de la dette de Mme A.... Le 16 février 2018, en exécution du jugement de la CDAS, le département de Paris a réduit l'indu de RMI à la somme de 22 423,22 euros. Par un arrêt du 25 septembre 2018, la commission centrale d'aide sociale (CCAS) a rejeté pour tardiveté l'appel formé le 26 février 2018 par Mme A... contre le jugement de la CDAS du 24 mars 2017. Par une ordonnance du 27 décembre 2019, la présidente de la 1ère chambre de la section du contentieux du Conseil d'État a prononcé la non-admission du pourvoi formé Mme A... contre cet arrêt. Par une réclamation préalable reçue le 16 avril 2021, Mme A... a sollicité auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, le versement d'une somme totale de 49 793,22 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait d'un délai excessif de jugement de son affaire devant les juridictions administratives. Par un courrier en date du 23 novembre 2021, le garde des sceaux, ministre de la justice, a proposé une indemnisation de 2 500 euros. Par un courrier du 24 novembre 2021, Mme A... a refusé l'indemnisation ainsi proposée. Par la présente requête, Mme A... demande la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des conditions de jugement de son affaire. Sur la responsabilité : 2. Il résulte des principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions administratives que les justiciables ont droit à ce que les requêtes soient jugées dans un délai raisonnable. Si la méconnaissance de cette obligation est sans incidence sur la validité de la décision juridictionnelle prise à l'issue de la procédure, les justiciables doivent néanmoins pouvoir en faire assurer le respect. Ainsi, lorsque la méconnaissance du droit à un délai raisonnable de jugement leur a causé un préjudice, ils peuvent obtenir la réparation de l'ensemble des dommages, tant matériels que moraux, directs et certains, ainsi causés par le fonctionnement défectueux du service public de la justice. Le caractère raisonnable du délai de jugement d'une affaire doit s'apprécier de manière à la fois globale, compte tenu, notamment, de l'exercice des voies de recours, particulières à chaque instance, et concrète, en prenant en compte sa complexité, les conditions de déroulement de la procédure et, en particulier, le comportement des parties tout au long de celle-ci, mais aussi, dans la mesure où la juridiction saisie a connaissance de tels éléments, l'intérêt qu'il peut y avoir, pour l'une ou l'autre, compte tenu de sa situation particulière, des circonstances propres au litige et, le cas échéant, de sa nature même, à ce qu'il soit tranché rapidement. Lorsque la durée globale du jugement n'a pas dépassé le délai raisonnable, la responsabilité de l'Etat est néanmoins susceptible d'être engagée si la durée de l'une des instances a, par elle-même, revêtu une durée excessive. 3. En l'espèce, d'une part, le recours préalable formé par Mme A... et reçu par le conseil général de Paris le 30 juillet 2009 a été rejeté implicitement le 30 septembre 2009, date à partir de laquelle elle pouvait contester cette décision. Or, ce n'est que le 10 septembre 2012, soit près de trois ans après, qu'elle a introduit un recours contentieux contre cette décision, ce qui traduit une carence dans le comportement de la requérante. D'autre part, Mme A... ayant déménagé sans avoir fait connaître à la CDAS son changement d'adresse alors même que cette obligation lui avait été spécifiée, elle doit être regardée comme ayant reçu la notification de la décision du 24 mars 2017 de la commission départementale d'aide sociale de Paris, au plus tard le 21 juin 2017, date à laquelle le pli est revenu à la CDAS avec la mention " inconnu à l'adresse indiquée ". Par suite, le délai écoulé entre le 21 août 2017 et le 26 février 2018, date à laquelle elle a interjeté appel, soit un délai supérieur à six mois, lui est imputable. Il résulte de ce qui précède que si, prise dans son ensemble, la procédure de jugement du recours de Mme A..., qui a duré sept années, ne peut être regardée comme ayant excédé le délai raisonnable, il n'en va pas de même de l'instance s'étant tenue devant la commission départementale d'aide sociale de Paris qui, durant quatre ans, six mois et quatorze jours, a excédé, dans les circonstances de l'affaire, le délai raisonnable de jugement, alors au surplus que l'affaire ne présentait pas une difficulté particulière. 4. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que son droit à un délai raisonnable de jugement a été méconnu à l'occasion de cette instance et, pour ce motif, à demander la réparation des préjudices qu'elle aurait subis. Sur les préjudices : 5. La méconnaissance du droit de Mme A... à un délai raisonnable de jugement de son recours en première instance a entraîné pour elle un préjudice moral consistant en des désagréments qui vont au-delà des préoccupations habituellement causées par un procès. Il en sera fait une juste appréciation en lui allouant une indemnité de 3 000 euros, tous intérêts compris. En revanche, compte tenu de ce qui a été dit au point 3 quant aux conditions de notification de la décision rendue en première instance, elle n'est pas fondée à faire valoir que celle-ci lui aurait causé les préjudices qu'elle allègue. 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'Etat est condamné à verser à Mme A... la somme de 3 000 euros. Article 2 : L'Etat versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
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Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 mars 2022, Mme B... A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 20 août 2021 par lequel le Premier ministre a rapporté le décret du 19 avril 2019 en ce qu'il lui avait accordé la nationalité française ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code civil ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, maître des requêtes, - les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article 27-2 du code civil : " Les décrets portant acquisition, naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai de deux ans à compter de leur publication au Journal officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales ; si la décision a été obtenue par mensonge ou fraude, ces décrets peuvent être rapportés dans le délai de deux ans à partir de la découverte de la fraude. " Selon les dispositions de l'article 21-27 du même code, nul ne peut acquérir la nationalité française si son séjour en France est irrégulier au regard des lois et conventions relatives au séjour des étrangers en France. 2. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., ressortissante congolaise, a déposé une demande d'acquisition de la nationalité française auprès de la sous-préfecture de Torcy le 12 octobre 2018, dans laquelle elle indiquait être mère de trois enfants de nationalité française, dont Anthony Harry Tsoumou Ngouaka, né français du fait de la reconnaissance de paternité effectuée par M. D... C..., lui-même français, à la naissance de l'enfant, le 19 juin 2009 à Villepinte (Seine-Saint-Denis). Au vu de ses déclarations, l'intéressée a été naturalisée par décret du 19 avril 2019, publié au Journal officiel de la République française le 21 avril 2019. Toutefois, par courrier reçu le 22 août 2019, le ministre chargé des naturalisations a été informé de ce que, par un jugement du 10 octobre 2014 du tribunal de grande instance de Meaux, la reconnaissance de paternité de M. C... envers l'enfant Anthony Harry a été annulée comme frauduleuse. Par décret du 20 août 2021, publié au Journal officiel du 21 août 2021, le Premier ministre a rapporté le décret du 19 avril 2019 naturalisant Mme A... au motif qu'il avait été pris à raison des manœuvres frauduleuses de l'intéressée. Mme A... demande l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret. 3. En premier lieu, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit la communication à l'intéressée de l'avis émis par le Conseil d'Etat sur le projet de décret rapportant le décret ayant procédé à sa naturalisation. 4. En deuxième lieu, le délai de deux ans imparti par l'article 27-2 du code civil pour rapporter le décret de Mme A... commence à courir à la date à laquelle la réalité de la situation familiale de l'intéressée est portée à la connaissance du ministre chargé des naturalisations. Il ressort des pièces du dossier que les services du ministre chargé des naturalisations n'ont été informés des éléments relatifs à la reconnaissance frauduleuse de l'enfant de l'intéressée transmis par courrier de la requérante que le 22 août 2019. Dans ces conditions, le décret attaqué, qui a été signé le 20 août 2021, a été pris avant l'expiration du délai de deux ans prévu par les dispositions de l'article 27-2 du code civil. 5. En troisième lieu, comme il a été dit au point 2, la reconnaissance de paternité souscrite par M. C... au profit de l'enfant Anthony Harry en juin 2009 a été jugée frauduleuse et annulée. Mme A... a volontairement bénéficié de cette reconnaissance de paternité qui lui a permis d'obtenir un premier titre de séjour, son renouvellement, puis une carte de résident. Dès lors, le Premier ministre, à qui il appartenait de faire échec à cette fraude et à ses conséquences, était légalement fondé à rapporter le décret de naturalisation de Mme A... dans le délai de deux ans à compter de la découverte de la fraude. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 27-2 du code civil doit, par suite, être écarté. 6. En dernier lieu, un décret qui rapporte un décret ayant conféré la nationalité française est, par lui-même dépourvu d'effet sur la présence sur le territoire français de celui qu'il vise, comme sur les liens avec les membres de sa famille. Ainsi, les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peuvent être utilement invoquées à l'appui des conclusions dirigées contre le décret attaqué. En revanche, un tel décret affecte un élément constitutif de l'identité de la personne concernée et est ainsi susceptible de porter atteinte au droit au respect de sa vie privée. En l'espèce, toutefois, eu égard à la date à laquelle il est intervenu et aux motifs qui le fondent, le décret attaqué ne peut être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de Mme A... garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 20 août 2021 par lequel le Premier ministre a rapporté le décret du 19 avril 2019. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B... E... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
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Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 8 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 3 décembre 2021 rapportant le décret du 6 octobre 2016 lui accordant la nationalité française ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code civil ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, maître des requêtes, - les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public, Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article 27-2 du code civil, dans leur rédaction applicable au présent litige : " Les décrets portant acquisition, naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai de deux ans à compter de leur publication au Journal officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales ; si la décision a été obtenue par mensonge ou fraude, ces décrets peuvent être rapportés dans le délai de deux ans à partir de la découverte de la fraude". 2. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., ressortissant mauritanien, a déposé une demande de naturalisation auprès de la sous-préfecture de Saint-Denis le 15 juin 2014, en indiquant être célibataire et sans enfant et s'est engagé sur l'honneur à signaler tout changement dans sa situation personnelle et familiale. Au vu de ses déclarations, il a été naturalisé par décret du 6 octobre 2016, publié au Journal officiel de la République française du 8 octobre suivant. Toutefois, par bordereau de la section consulaire de l'ambassade de France en Mauritanie du 30 octobre 2019, reçu le 3 décembre suivant, le ministre chargé des naturalisations a été informé de ce que M. A... a contracté un mariage le 23 janvier 2016 à Hassi Cheggar (Mauritanie), avec Mme C... A..., ressortissante mauritanienne résidant habituellement à l'étranger. Par décret du 3 décembre 2021, publié au Journal officiel du 7 décembre suivant, le Premier ministre a rapporté le décret du 6 octobre 2016 prononçant la naturalisation de M. A... au motif qu'il avait été pris au vu d'informations mensongères délivrées par l'intéressé quant à sa situation familiale. M. A... demande l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret. 3. L'article 21-16 du code civil dispose que : " Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation ". Il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière durable le centre de ses intérêts. Pour apprécier si cette condition est remplie, l'autorité administrative peut notamment prendre en compte, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la situation personnelle et familiale en France de l'intéressé à la date du décret lui accordant la nationalité française. 4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a contracté un mariage le 23 janvier 2016 à Hassi Cheggar avec Mme C... A..., ressortissante mauritanienne résidant habituellement à l'étranger. Ce mariage a constitué un changement de sa situation familiale qu'il aurait dû porter à la connaissance des services instruisant sa demande de naturalisation, comme il s'y était engagé en déposant sa demande de naturalisation, ce qu'il n'a pas fait avant que lui soit accordée la nationalité française. Si M. A... soutient qu'il était de bonne foi dès lors qu'il a informé de manière spontanée l'ambassade de France en Mauritanie de son mariage et qu'il ne savait pas qu'il devait en informer les services du ministre chargé des naturalisations, il ne fait état d'aucune circonstance qui l'aurait mis dans l'impossibilité de faire part de sa situation familiale au service chargé de l'instruction de son dossier avant l'intervention du décret lui accordant la nationalité française. L'intéressé, qui maîtrise la langue française, ainsi qu'il ressort du compte-rendu d'entretien d'assimilation du 15 juillet 2014, ne pouvait se méprendre ni sur la teneur des indications devant être portées à la connaissance de l'administration chargée d'instruire sa demande, ni sur la portée de la déclaration sur l'honneur qu'il a signée. Dans ces conditions, M. A... doit être regardé comme ayant volontairement dissimulé sa situation familiale. S'il fait valoir qu'il réside en France depuis ses seize ans, cette circonstance, ainsi que son insertion professionnelle et sa bonne intégration à la société française, sont sans incidence sur le caractère frauduleux des déclarations au vu desquelles la nationalité française lui avait été accordée. Par suite, en rapportant sa naturalisation dans le délai de deux ans à compter de la découverte de la fraude, le Premier ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 27-2 du code civil. 5. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 3 décembre 2021 par lequel le Premier ministre a rapporté le décret du 6 octobre 2016. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Le département de l'Hérault a demandé au tribunal administratif de Montpellier de constater que les infractions commises par Mme C... B..., veuve A..., constituaient des contraventions de grande voirie prévues et réprimées par l'article L. 2132-36 du code général de la propriété des personnes publiques, par les articles R. 5333-9 et L. 5337-2 du code des transports, de condamner cette dernière au paiement de trois amendes et de lui enjoindre de libérer et de vider les mas conchylicoles occupés sans droit ni titre, de les remettre dans leur état originel et de procéder à l'enlèvement de son bateau. Par un jugement n° 1805326 du 16 janvier 2020, le tribunal administratif de Montpellier a condamné Mme B..., veuve A..., à payer trois amendes de 1 000 euros ainsi que les frais d'établissement des procès-verbaux d'infraction et lui a enjoint de libérer les deux mas conchylicoles et leurs cours situés sur les parcelles BC 287 et BC 288 et de procéder au déplacement du bateau de pêche " Saint Claude " en dehors des limites administratives du port de Vendres dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 11 mars 2022, sous le n° 20MA01186, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL01186, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 18 février et 12 mars 2021, Mme B..., veuve A..., représentée par la SELARL ACTAH, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 16 janvier 2020 ; 2°) de mettre à la charge du département de l'Hérault une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : Sur la régularité du jugement : - le tribunal ne s'est pas prononcé sur les arguments soulevés concernant son incompétence, en particulier sur l'appartenance des biens en cause au domaine privé et sur l'existence de son droit d'occupation. Sur le bien-fondé du jugement : - le tribunal était incompétent pour connaître du litige dès lors que les deux mas à usage maritime en cause qui lui ont été vendus le 5 mai 2000 par une personne morale de droit privé ne font pas partie du domaine public d'une personne publique, que ce soit au regard de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques ou au regard de l'article L. 2111-6 de ce même code ; d'une part, ces mas n'appartiennent pas à une personne publique dès lors que le droit de propriété sur les bâtiments est entre ses mains, d'autre part, ils ne concourent pas au fonctionnement d'ensemble des ports maritimes ; enfin, il n'appartenait pas eu tribunal de déterminer si la résiliation d'un bail emphytéotique de droit privé est opposable aux sous-locataires titulaires de droits réels ; à tout le moins, le tribunal devait poser une question préjudicielle à la juridiction judiciaire ; dès lors qu'elle n'est qu'un tiers par rapport à la résiliation du bail emphytéotique principal, elle est demeurée titulaire de son bail emphytéotique ; en outre, les formes de la résiliation du bail emphytéotique n'ont pas été respectées ; un bail emphytéotique sur le domaine public ne peut qu'être qu'un bail emphytéotique administratif qui demeure hors du champ d'application de la contravention de grande voirie ; - les procès-verbaux de contravention de grande voirie n'ont pas été dressés par un fonctionnaire assermenté conformément à l'article L. 2132-23 du code général de la propriété des personnes publiques ; - les procès-verbaux de contravention de grande voirie doivent être annulés dès lors que les lieux litigieux ne sont pas susceptibles d'être qualifiés de biens appartenant au domaine public. Par des mémoires en défense, enregistrés le 10 juin 2020 et le 17 mars 2021, le département de l'Hérault, représenté par Me Rosier, conclut au rejet de la requête, à ce que l'administration soit autorisée, en cas d'inexécution par Mme B..., veuve A..., des injonctions prononcées par le tribunal administratif de Montpellier à son encontre, de procéder d'office à ses frais, risques et périls, au besoin avec le concours de la force publique, à son évacuation forcée des lieux et à leur remise en état et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B..., veuve A..., le paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : Sur la régularité du jugement : - le tribunal, qui n'est pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits les 21 novembre 2018 et 27 décembre 2019 par Mme B..., veuve A.... Sur le bien-fondé du jugement : - le juge administratif est seul compétent pour connaître des procès-verbaux de contravention de grande voirie ; la circonstance, à la supposer établie, que les parcelles objets des procès-verbaux litigieux, ne relèveraient pas du domaine public, si elle pourrait justifier une relaxe de l'appelante n'est toutefois pas de nature à exclure la compétence du juge administratif ; - en ce qui concerne l'appartenance des mas conchylicoles édifiés sur les parcelles cadastrées BC 287 et BC 288, le propriétaire du sol devient propriétaire des constructions à l'expiration du bail par l'effet de la théorie dite de l'accession ; par l'effet du bail emphytéotique, la propriété des constructions édifiées sur les parcelles par la commune de Vendres lui appartenait pendant toute la durée du bail mais elles sont devenues la propriété du bailleur en fin de bail ; à compter de la résiliation du bail du 13 décembre 1993, intervenue les 12 et 13 septembre 2013, le département de l'Hérault est devenu propriétaire de l'ensemble des constructions conchylicoles, en application du bail et par l'effet de la théorie de l'accession ; - les parcelles litigieuses appartiennent au domaine public portuaire ; d'une part, la propriété du sol des parcelles est celle du département de l'Hérault depuis le 14 septembre 2011 et la propriété des mas conchylicoles est également la sienne depuis la résolution du bail emphytéotique ; d'autre part, les parcelles litigieuses comme leurs constructions doivent être regardées comme étant affectées au service public du port conchylicole départemental " Le Chichoulet " et comme ayant été aménagées en vue de cette affectation ; lesdits biens se situent dans les limites administratives du port conchylicole départemental et en aval de la limite transversale de la mer ; - le signataire des procès-verbaux de contravention de grande voirie, surveillant de port du département de l'Hérault était assermenté conformément à la loi et a prêté serment devant le tribunal de grande instance de Montpellier. Par une ordonnance du 25 août 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 9 septembre 2022 à 12 heures. Un mémoire, enregistré le 26 août 2022, présenté pour Mme B..., veuve A..., n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de la propriété des personnes publiques ; - le code général des collectivités territoriales ; - le code rural et de la pêche maritime ; - le code des transports ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Karine Beltrami, première conseillère, - les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique - et les observations de Me Becquevort, représentant le département de l'Hérault. Considérant ce qui suit : 1. À la suite de deux procès-verbaux établis les 13 novembre 2017 et 26 mars 2018 par le surveillant du port départemental " Le Chichoulet " situé à Vendres (Hérault), le président du conseil départemental de l'Hérault a déféré au tribunal administratif de Montpellier, comme prévenue d'une contravention de grande voirie, Mme B..., et lui a demandé de la condamner au paiement de trois amendes ainsi que des frais d'établissement des procès-verbaux et de lui enjoindre de libérer et de vider les mas conchylicoles occupés sans droit ni titre et de les remettre dans leur état originel et de procéder à l'enlèvement de son bateau. Mme B..., veuve A..., relève appel du jugement du 16 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier l'a condamnée à payer trois amendes de 1 000 euros ainsi que les frais d'établissement des procès-verbaux d'infraction et lui a enjoint de libérer les deux mas conchylicoles et leurs cours situés sur les parcelles BC 287 et BC 288 et de procéder au déplacement du bateau de pêche " Saint Claude " en dehors des limites administratives du port de Vendres dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir. Sur la compétence de la juridiction administrative : 2. Aux termes de l'article L. 774-1 du code de justice administrative : " Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller statue sur les difficultés qui s'élèvent en matière de contravention de grande voirie, à défaut de règles établies par des dispositions spéciales ". Aux termes de l'article L. 5337-1 du code des transports : " Sans préjudice des sanctions pénales encourues, tout manquement aux dispositions du chapitre V du présent titre, à celles du présent chapitre et aux dispositions réglementant l'utilisation du domaine public, notamment celles relatives aux occupations sans titre, constitue une contravention de grande voirie réprimée dans les conditions prévues par les dispositions du présent chapitre. (...) ". 3. S'il appartient au juge administratif qui apprécie le bien-fondé d'une contravention de grande voirie, de déterminer la consistance du domaine public, la circonstance, à la supposer établie, que les biens en cause ne relèverait pas du domaine public de la personne publique, ce qui pourrait justifier le cas échéant la relaxe de la personne poursuivie, n'est toutefois pas de nature à exclure la compétence du juge administratif au profit de celle du juge judiciaire. 4. En l'espèce, la contestation des procès-verbaux de contravention de grande voirie établis à l'encontre de Mme B..., veuve A..., à raison de son occupation irrégulière de deux mas conchylicoles situés sur le port " Le Chichoulet " situé sur la commune de Vendres, relève de la compétence du juge administratif en application des dispositions précitées des articles L. 774-1 du code de justice administrative et L. 5337-1 du code des transports. À cet égard, la requérante ne peut utilement alléguer pour écarter cette compétence que les constructions conchylicoles litigieuses ne feraient pas partie du domaine public du département de l'Hérault. Par suite, l'exception d'incompétence de la juridiction administrative soulevée par Mme B..., veuve A..., ne peut qu'être écartée. Sur la régularité du jugement : 5. Le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments des parties énoncés au soutien de leurs moyens, n'a pas omis de répondre à l'exception d'incompétence de la juridiction administrative soulevée par Mme B..., veuve A..., dans ses mémoires en défense et tirée de ce que son expulsion des constructions conchylicoles litigieuses n'appartenant pas au domaine public de la personne publique relève de la compétence du juge judiciaire. Aux points 1 et 2 de leur jugement, les premiers juges ont en effet estimé qu'ils étaient saisis d'une requête par laquelle le président du conseil départemental de l'Hérault déférait Mme B... en tant que prévenue d'une contravention de grande voirie relevant de la compétence de la juridiction administrative en vertu de l'article L. 774-1 du code de justice administrative. De la sorte, ils ont implicitement écarté l'argument, au demeurant inopérant, pour exclure la compétence du juge administratif, présenté par Mme B..., veuve A..., et selon lequel les constructions conchylicoles édifiées sur les parcelles BC 287 et BC 288 ne font pas partie du domaine public départemental en ce qu'elles lui appartiennent et qu'elles ne concourent pas au fonctionnement du port maritime " Le Chichoulet " situé sur la commune de Vendres. Par suite, Mme B..., veuve A..., n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait, pour ce motif, irrégulier. Sur le bien-fondé du jugement : 6. En premier lieu, d'une part, il appartient au juge administratif de déterminer la consistance du domaine public, sous réserve des questions préjudicielles à poser au juge judiciaire lorsque, à l'appui de la contestation, sont invoqués des titres privés dont l'examen soulève une question sérieuse. En particulier, il appartient au juge administratif, saisi d'un procès-verbal de contravention de grande voirie de reconnaître les limites du domaine public et de dire si les terrains sur lesquels ont été commis les faits reprochés se trouvent ou non dans ces limites. 7. D'autre part, aux termes de l'article L. 2111-10 du code général de la propriété des personnes publiques : " Le domaine public fluvial artificiel est constitué : (...) 4° À l'intérieur des limites administratives des ports maritimes, des biens immobiliers situés en amont de la limite transversale de la mer, appartenant à l'une de ces personnes publiques et concourant au fonctionnement d'ensemble de ces ports, y compris le sol et le sous-sol des plans d'eau lorsqu'ils sont individualisables ". Aux termes de l'article L. 5337-1 du code des transports : " Sans préjudice des sanctions pénales encourues, tout manquement aux dispositions du chapitre V du présent titre, à celles du présent chapitre et aux dispositions réglementant l'utilisation du domaine public, notamment celles relatives aux occupations sans titre, constitue une contravention de grande voirie réprimée dans les conditions prévues par les dispositions du présent chapitre. (...) ". 8. Enfin, aux termes de l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales dans sa version applicable à la conclusion du bail emphytéotique litigieux : " Un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l'objet, en faveur d'une personne privée, d'un bail emphytéotique prévu à l'article L. 451-1 du code rural, en vue de l'accomplissement, pour le compte de la collectivité territoriale, d'une mission de service public ou en vue de la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant de sa compétence. / Un tel bail peut être conclu même si le bien sur lequel il porte, en raison notamment de l'affectation du bien résultant soit du bail ou d'une convention non détachable de ce bail, soit des conditions de la gestion du bien ou du contrôle par la personne publique de cette gestion, constitue une dépendance du domaine public, sous réserve que cette dépendance demeure hors du champ d'application de la contravention de voirie ". Aux termes de l'article L. 451-1 du code rural et de la pêche maritime : " Le bail emphytéotique de biens immeubles confère au preneur un droit réel susceptible d'hypothèque ; ce droit peut être cédé et saisi dans les formes prescrites pour la saisie immobilière. (...) ". Aux termes de l'article L. 451- 7 de ce code : " (...) Si le preneur fait des améliorations ou des constructions qui augmentent la valeur du fonds, il ne peut les détruire, ni réclamer à cet égard aucune indemnité ". Aux termes de l'article L. 451-10 du même code : " L'emphytéote profite du droit d'accession pendant la durée de l'emphytéose ". Il résulte de ces dispositions que si le preneur à bail emphytéotique obtient un droit réel immobilier de jouissance qu'il peut céder, sous-louer ou hypothéquer, la fin ou la résiliation du bail emphytéotique entraîne toutefois l'extinction automatique et immédiate des droits réels conférés par l'emphytéote. À l'issue du bail, l'emphytéote qui ne détient aucun droit au maintien dans les lieux, doit les libérer afin que le bailleur recouvre son bien libre de toute occupation. Par ailleurs, les constructions et améliorations réalisées par l'emphytéote dont il a détenu la propriété pendant toute la durée du bail, deviennent alors la propriété du bailleur. 9. Il résulte de l'instruction que, par un arrêté préfectoral du 24 juillet 1990, un port conchylicole départemental a été créé au lieu-dit " Le Chichoulet ", situé à Vendres. D'une part, les parcelles BC 287 et BC 288 sur lesquelles ont été édifiées les constructions conchylicoles litigieuses sont situées à l'intérieur des limites administratives du port maritime " Le Chichoulet " et en amont de la limite transversale de la mer. En outre, les mas conchylicoles litigieux concourent directement au fonctionnement de ce port, dont l'activité conchylicole demeure prioritaire par rapport à l'activité de plaisance et d'amarrage. 10. D'autre part, la propriété du sol de ces parcelles, qui appartenaient initialement au syndicat mixte pour l'aménagement et le développement de la basse vallée de l'Aude (SMADBVA) a été transférée au département de l'Hérault par un acte des 13 et 14 septembre 2011. À cet égard, la conclusion du bail emphytéotique du 13 décembre 1993 par le syndicat mixte au profit de la commune de Vendres n'a pas eu pour effet de transférer la propriété du sol des parcelles BC 287 et BC 288 au profit des emphytéotes successifs. Ainsi, depuis le 14 septembre 2011, la propriété du sol des parcelles litigieuses appartient au département de l'Hérault. 11. Enfin, il résulte de l'instruction et en particulier de l'acte de vente du 5 mai 2000 que la construction des mas conchylicoles implantés sur les parcelles BC 287 et BC 288 a été initiée par la commune de Vendres dans le cadre du bail emphytéotique consenti en sa faveur le 13 décembre 1993 par le syndicat mixte, puis poursuivie par la coopérative maritime et conchylicole de Vendres, expressément autorisée par la commune de Vendres en sa qualité de titulaire du bail emphytéotique. Profitant du droit d'accession pendant la durée de l'emphytéose, la commune de Vendres, en sa qualité d'emphytéote, puis les emphytéotes successifs, et en dernier lieu, Mme B... et M. A..., ont détenu la propriété de ces constructions pendant toute la durée du bail emphytéotique. La résiliation du bail emphytéotique intervenue les 12 et 13 septembre 2013, qui présente un caractère définitif, a cependant entraîné le transfert de la propriété de ces constructions conchylicoles au profit du bailleur emphytéotique, à savoir le département de l'Hérault qui a acquis du bailleur initial, le syndicat mixte, les 13 et 14 septembre 2011, les terrains d'assiette des parcelles BC 287 et BC 288. 12. Il résulte des points 10 et 11 que les constructions conchylicoles implantées sur les parcelles BC 287 et BC 288 doivent en principe être regardées comme appartenant au département de l'Hérault depuis la résiliation du bail emphytéotique. En outre, dès lors que, comme il a été dit au point 9, ces constructions sont situées à l'intérieur des limites administratives du port maritime " Le Chichoulet ", en amont de la limite transversale de la mer, et qu'elles concourent directement au fonctionnement de ce port, elles doivent également être présumées appartenir au domaine public fluvial du département de l'Hérault au sens de l'article L. 2111-10 du code général de la propriété des personnes publiques. 13. Toutefois, en l'état du dossier, la propriété des constructions conchylicoles par le département de l'Hérault est sérieusement contestée par Mme B..., veuve A..., qui justifie être titulaire d'un titre de propriété en date du 5 mai 2000 portant sur les mas conchylicoles litigieux, qui lui ont été vendus, ainsi qu'à son mari, par la société Méditerranée immobilier au prix de 350 000 francs (53 357,16 euros) et qui constituent sa résidence principale. L'appréciation du bien-fondé des procès-verbaux de contravention de grande voirie étant subordonnée à la détermination du propriétaire de ces constructions, la question de savoir si elles appartiennent au département de l'Hérault ou à Mme B..., veuve A..., soulève une difficulté sérieuse, de nature à justifier que soit posée une question préjudicielle au juge judiciaire. 14. Il résulte de ce qui vient d'être dit qu'il y lieu pour la cour, en application de l'article R. 771-2 du code de justice administrative, de saisir le tribunal judiciaire de Béziers de la question de la propriété précitée et de surseoir à statuer sur la requête de Mme B..., veuve A..., jusqu'à ce que la juridiction judiciaire compétente se soit prononcée sur cette question préjudicielle. Sur les frais : 15. Il y a lieu de réserver l'examen des conclusions relatives aux frais jusqu'en fin d'instance. DÉCIDE : Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de Mme B..., veuve A..., jusqu'à ce que le tribunal judiciaire de Béziers se soit prononcé sur la question de savoir qui du département de l'Hérault ou de Mme B..., veuve A... est propriétaire des constructions conchylicoles implantées sur les parcelles BC 287 et BC 288 situées sur le port maritime " Le Chichoulet ". Article 2 : La requête de Mme B..., veuve A... est, dans cette mesure, renvoyée au tribunal judiciaire de Béziers. Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin de l'instance. Article 4 : Les conclusions de la requête de Mme B..., veuve A... et celles du département de l'Hérault fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont réservées jusqu'en fin d'instance. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., veuve A..., au département de l'Hérault et au président du tribunal judiciaire de Béziers. Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault. Délibéré après l'audience du 4 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Rey-Bèthbéder, président de chambre, M. Bentolila, président assesseur, Mme Beltrami, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, K. Beltrami Le président, É. Rey-BèthbéderLa greffière, C. Lanoux La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20TL01186
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner l'État, sur le fondement de la responsabilité pour faute, à lui verser une indemnité de 75 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi du fait des manquements commis par l'administration pénitentiaire. Par un jugement n° 1805630 du 17 juin 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. B.... Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2022, sous le n° 20MA02310, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL02310, M. B..., représenté par Me Robert, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 2020 ; 2°) de condamner l'État, sur le fondement de la responsabilité pour faute, à l'indemniser à hauteur de 75 000 euros en raison du préjudice moral qu'il estime avoir subi du fait des manquements commis par l'administration pénitentiaire. 3°) de mettre à la charge du département de l'Hérault une somme de 2 500 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : Sur la régularité du jugement : - le tribunal a omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'acquiescement aux faits. Sur le bien-fondé du jugement : - l'administration pénitentiaire à laquelle la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 impose une obligation sécurité, de protection effective de l'intégrité physique et de respect de la dignité des personnes privées de liberté et les articles D. 266 et suivants du code de procédure pénale, a commis une illégalité fautive en manquant à son devoir de surveillance et de sécurité en sa qualité de détenu ; - l'administration pénitentiaire a également commis une illégalité fautive en méconnaissant son devoir de placement adapté des détenus garanti par les articles 717-2 et 716 du code de procédure pénale et par la circulaire du 14 avril 2011 relative à l'encellulement individuel des personnes détenues dès lors que bien qu'il soit primo délinquant et ne montrant aucun signe de dangerosité, il a partagé la même cellule de jour comme de nuit avec un détenu ayant déjà subi des incarcérations, ayant été condamné pour des faits de meurtre et présentant un comportement violent ; - le défaut de surveillance de la part de l'administration et son placement inadapté constitue une illégalité fautive au regard de son droit à la protection de sa vie, garanti par l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors que l'administration avait connaissance de la dangerosité de son codétenu ; - l'illégalité fautive de l'administration pénitentiaire est également constituée au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales lui imposant d'assurer l'intégrité physique et psychologique des détenus et de prévenir les cas de violence entre codétenus dans les prisons qu'elle aurait pu raisonnablement prévoir ; - il a subi un préjudice moral qu'il évalue à 75 000 euros ; il ne sollicite pas la réparation de son préjudice corporel dans la présente instance. Par une ordonnance du 22 août 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 5 septembre 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de procédure pénale ; - la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Karine Beltrami, première conseillère, - les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique - et les observations de Me Robert, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B..., écroué à la maison d'arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault) le 17 janvier 2014, a été victime le 22 février, vers 2h00 du matin, d'une agression de la part de son codétenu, lequel lui a infligé une blessure à la gorge à l'aide de lames de rasoir. Il relève appel du jugement du 17 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'État, sur le fondement de la responsabilité pour faute, à l'indemniser à hauteur de 75 000 euros en raison du préjudice moral qu'il estime avoir subi du fait des manquements commis par l'administration pénitentiaire. Sur la régularité du jugement : 2. D'un part, en vertu de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, lorsqu'une des parties appelées à produire un mémoire dans le cadre de l'instruction n'a pas respecté le délai qui lui a été imparti à cet effet, le président de la formation de jugement du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel peut lui adresser une mise en demeure. Aux termes de l'article R. 612-6 du même code : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant ". 3. D'autre part, devant les juridictions administratives et dans l'intérêt d'une bonne justice, le juge a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci. 4. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif qu'ayant été mis en demeure, le 21 mai 2019, de produire en application des dispositions de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, le garde des sceaux, ministre de la justice n'a transmis un mémoire en défense que le 17 janvier 2020, soit après la clôture de l'instruction intervenue le 30 septembre 2019. Toutefois, ce mémoire du 17 janvier 2020 ayant été communiqué, l'instruction a été rouverte et clôturée le 27 février 2020. 5. Dès lors, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en omettant de répondre au moyen tiré de l'acquiescement aux faits, qui était inopérant, le tribunal aurait entaché son jugement d'irrégularité. Sur la responsabilité pour faute de l'État : 6. Toute illégalité commise par l'administration constitue une faute de nature à engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice certain et que ce préjudice soit directement lié à la faute. 7. En premier lieu, M. B... se prévaut de la responsabilité pour faute de l'État du fait de manquements de l'administration pénitentiaire à ses obligations légalement garantis tant par le droit interne que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 8. D'une part, en vertu d'un principe rappelé par la première phrase de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. Par ailleurs, aux termes de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ". 9. D'autre part, aux termes de l'article 12 de la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Les personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire constituent, sous l'autorité des personnels de direction, l'une des forces dont dispose l'État pour assurer la sécurité intérieure. / Dans le cadre de leur mission de sécurité, ils veillent au respect de l'intégrité physique des personnes privées de liberté et participent à l'individualisation de leur peine ainsi qu'à leur réinsertion. (...) ". Aux termes de l'article 44 de cette loi, alors en vigueur : " L'administration pénitentiaire doit assurer à chaque personne détenue une protection effective de son intégrité physique en tous lieux collectifs et individuels. (...) ". 10. Eu égard à la vulnérabilité des détenus et à leur situation d'entière dépendance vis à vis de l'administration, il appartient à celle-ci, et notamment aux directeurs des établissements pénitentiaires, en leur qualité de chefs de service, de prendre les mesures propres à protéger leur vie ainsi qu'à leur éviter tout traitement inhumain ou dégradant afin de garantir le respect effectif des exigences découlant des principes rappelés par les articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que la loi du 24 novembre 2009. 11. Enfin, aux termes de l'article D. 272 du code de procédure pénale, alors en vigueur : " Des rondes sont faites après le coucher et au cours de la nuit, suivant un horaire fixé et quotidiennement modifié par le chef de détention, sous l'autorité du chef d'établissement ". Aux termes de l'article D. 273 de ce code, alors en vigueur : " Les détenus ne peuvent garder à leur disposition aucun objet, médicament ou substance pouvant permettre ou faciliter un suicide, une agression ou une évasion, non plus qu'aucun outil dangereux en dehors du temps de travail. Au surplus, et pendant la nuit, les objets laissés habituellement en leur possession, et notamment tout ou partie de leurs vêtements, peuvent leur être retirés pour des motifs de sécurité ". 12. L'État engage sa responsabilité pour faute simple du fait du manquement de l'administration à son obligation légale de surveillance et de sécurité des détenus. 13. Il résulte de l'instruction qu'au cours de la nuit du 22 février 2014, M. B..., qui était incarcéré à la maison d'arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone depuis le 17 janvier 2014, a subi des coups et blessures infligés par son codétenu au moyen de lames de rasoir alors qu'il était sous la surveillance des agents pénitentiaires. Il résulte également de l'instruction que l'intéressé partageait depuis le 28 janvier 2014 la même cellule que son agresseur conformément à la volonté exprimée par les deux protagonistes, sans qu'aucune tension particulière ait éclaté entre eux avant l'agression du 22 février 2014. En outre, il n'est pas allégué qu'elle aurait été précédée d'autres incidents perpétrés à son encontre par son codétenu ou d'informations données par l'intéressé à l'administration sur des menaces dont il aurait pu faire l'objet de la part de ce dernier. Par ailleurs, la circonstance que celui-ci avait précédemment manifesté un comportement violent à l'égard d'autres détenus et réfractaire à l'autorité, ne suffit pas à caractériser un risque certain et immédiat pour l'intégrité physique de M. B... justifiant la mise en œuvre de mesures de surveillance renforcée ou de déplacement dans une autre cellule. À cet égard, même si l'administration pénitentiaire n'ignorait pas, au vu de ses antécédents judiciaires et disciplinaires, le comportement potentiellement violent du codétenu de M. B..., elle ne pouvait cependant pas raisonnablement prévoir, compte tenu de l'absence de tensions préalables entre les deux codétenus et du caractère soudain de l'agression, que ce dernier présentait un risque d'être exposé à une atteinte portée à son intégrité physique de la part de son codétenu. 14. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que cette agression n'aurait pu être possible qu'en raison d'un défaut de surveillance des locaux concernés dès lors qu'il n'est pas même allégué que les rondes réglementaires prévues après le coucher des détenus n'auraient pas été effectuées par le personnel pénitentiaire la nuit de l'agression. En outre, l'allégation selon laquelle la première surveillante pénitentiaire aurait déclaré lors du procès de cour d'assises qui s'est tenu du 15 au 17 octobre 2018, qu'un " défaut de surveillance lui aurait été reproché par sa hiérarchie ", n'est pas établie. Enfin, la possession par l'auteur de l'agression de lames de rasoir, et le fait qu'il les a utilisées comme une arme contre M. B... ne révèle aucune faute du personnel de surveillance, y compris en ce qui concerne le respect des règles de fouille des détenus dès lors, notamment, ainsi que le préconise l'Ensemble des règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus, qu'il est d'usage que les hommes détenus aient à disposition des outils de rasage pour pouvoir entretenir leur barbe. 15. Il résulte de tout ce qui précède que compte tenu des informations dont elle disposait, qui ne pouvaient laisser présager une agression imminente, l'administration pénitentiaire n'a commis aucun manquement à son obligation légale de surveillance et de sécurité propre à assurer l'intégrité physique de M. B.... Par suite, ce dernier n'est pas fondé à rechercher la responsabilité de l'État pour faute à ce titre. 16. En second lieu, l'appelant se prévaut de la responsabilité pour faute de l'État du fait de son placement en cellule collective par l'administration pénitentiaire en méconnaissance des articles 717-2 et 716 du code de procédure pénale et de la circulaire du 14 avril 2011 relative à l'encellulement individuel des personnes détenues. 17. Aux termes de l'article 717-2 du code de procédure pénale, alors en vigueur : " Les condamnés sont soumis dans les maisons d'arrêt à l'emprisonnement individuel du jour et de nuit, et dans les établissements pour peines, à l'isolement de nuit seulement, après avoir subi éventuellement une période d'observation en cellule. Il ne peut être dérogé à ce principe que si les intéressés en font la demande ou si leur personnalité justifie que, dans leur intérêt, ils ne soient pas laissés seuls, ou en raison des nécessités d'organisation du travail ". Aux termes de l'article 716 de ce code : " Les personnes mises en examen, prévenus et accusés soumis à la détention provisoire sont placés en cellule individuelle. Il ne peut être dérogé à ce principe que dans les cas suivants : 1° Si les intéressés en font la demande ; (...) ". La circulaire du 14 avril 2011 relative à l'encellulement individuel des personnes détenues qui réaffirme pour les condamnés le principe énoncé à l'article 717-2 alinéa 1 du code de procédure pénale aux termes duquel les personnes condamnées sont soumises, dans les maisons d'arrêt, à l'emprisonnement individuel de jour et de nuit et prévoit qu'il peut être dérogé à ce principe pour les personnes détenues qui demandent à être placée en cellule collective, n'apporte pas d'interprétation de la loi pénale différente de celle dont fait application les articles 717-2 et 716 du code de procédure pénale. 18. Il résulte de l'instruction que M. B... partageait depuis le 28 janvier 2014 la même cellule que son agresseur conformément à la demande des deux protagonistes. Dès lors et en tout état de cause, sans méconnaître les dispositions des articles 717-2 et 716 du code de procédure pénale, il pouvait être dérogé au principe de l'emprisonnement individuel de jour et de nuit. Il en résulte que l'administration n'a commis aucune illégalité fautive du fait du placement de M. B... en cellule collective. Par suite, M. B... n'est pas fondé à rechercher la responsabilité de l'État pour faute à ce titre. 19. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander la condamnation de l'État, sur le fondement de la responsabilité pour faute, à l'indemniser à hauteur de 75 000 euros en raison du préjudice moral qu'il estime avoir subi du fait des manquements commis par l'administration pénitentiaire. Dès lors, sa requête doit être rejetée et il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1 : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice. Délibéré après l'audience du 4 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Rey-Bèthbéder, président de chambre, M. Bentolila, président assesseur, Mme Beltrami, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, K. Beltrami Le président, É. Rey-Bèthbéder La greffière, C. Lanoux La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20TL02310
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Vu les procédures suivantes : 1° Sous le n° 463588, par des mémoires enregistrés le 28 juillet et le 7 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ordre des avocats au barreau de Paris demande au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête tendant à l'annulation de la circulaire du garde des sceaux, ministre de la justice du 28 février 2022 présentant les dispositions de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 56-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 22 décembre 2021, ainsi que celle de l'article 56-1-2 du même code, créé par cette loi. 2° Sous le n° 463683, par un mémoire enregistré le 2 août 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine demande au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête tendant à l'annulation de la circulaire du garde des sceaux, ministre de la justice du 28 février 2022 présentant les dispositions de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des premier, deuxième et quatrième alinéas de l'article 56-1 du code de procédure pénale, dans leur rédaction issue de la loi du 22 décembre 2021, ainsi que celle de l'article 56-1-2 du même code. .................................................................................... Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code de procédure pénale ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat, - les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'ordre des avocats au barreau de Paris et au cabinet Briard, avocat de l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine ; Considérant ce qui suit : 1. Les mémoires enregistrés sous les nos 463588 et 463683 tendent à la transmission au Conseil constitutionnel de questions prioritaires de constitutionnalité mettant en cause les mêmes dispositions législatives. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision. 2. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux. 3. D'une part, aux termes de l'article 56-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire : " Les perquisitions dans le cabinet d'un avocat ou à son domicile ne peuvent être effectuées que par un magistrat et en présence du bâtonnier ou de son délégué, à la suite d'une décision écrite et motivée prise par le juge des libertés et de la détention saisi par ce magistrat, qui indique la nature de l'infraction ou des infractions sur lesquelles portent les investigations, les raisons justifiant la perquisition, l'objet de celle-ci et sa proportionnalité au regard de la nature et de la gravité des faits. Le contenu de cette décision est porté à la connaissance du bâtonnier ou de son délégué dès le début de la perquisition par le magistrat effectuant celle-ci. Celui-ci et le bâtonnier ou son délégué ont seuls le droit de consulter ou de prendre connaissance des documents ou des objets se trouvant sur les lieux préalablement à leur éventuelle saisie. Lorsque la perquisition est justifiée par la mise en cause de l'avocat, elle ne peut être autorisée que s'il existe des raisons plausibles de le soupçonner d'avoir commis ou tenté de commettre, en tant qu'auteur ou complice, l'infraction qui fait l'objet de la procédure ou une infraction connexe au sens de l'article 203. Aucune saisie ne peut concerner des documents ou des objets relatifs à d'autres infractions que celles mentionnées dans la décision précitée. Les dispositions du présent alinéa sont édictées à peine de nullité. / Le magistrat qui effectue la perquisition veille à ce que les investigations conduites ne portent pas atteinte au libre exercice de la profession d'avocat et à ce qu'aucun document relevant de l'exercice des droits de la défense et couvert par le secret professionnel de la défense et du conseil, prévu à l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, ne soit saisi et placé sous scellé. / Le bâtonnier ou son délégué peut s'opposer à la saisie d'un document ou d'un objet s'il estime que cette saisie serait irrégulière. Le document ou l'objet doit alors être placé sous scellé fermé. Ces opérations font l'objet d'un procès-verbal mentionnant les objections du bâtonnier ou de son délégué, qui n'est pas joint au dossier de la procédure. Si d'autres documents ou d'autres objets ont été saisis au cours de la perquisition sans soulever de contestation, ce procès-verbal est distinct de celui prévu par l'article 57. Ce procès-verbal ainsi que le document ou l'objet placé sous scellé fermé sont transmis sans délai au juge des libertés et de la détention, avec l'original ou une copie du dossier de la procédure. / Dans les cinq jours de la réception de ces pièces, le juge des libertés et de la détention statue sur la contestation par ordonnance motivée. / A cette fin, il entend le magistrat qui a procédé à la perquisition et, le cas échéant, le procureur de la République, ainsi que l'avocat au cabinet ou au domicile duquel elle a été effectuée et le bâtonnier ou son délégué. Il peut ouvrir le scellé en présence de ces personnes. / S'il estime qu'il n'y a pas lieu à saisir le document ou l'objet, le juge des libertés et de la détention ordonne sa restitution immédiate, ainsi que la destruction du procès-verbal des opérations et, le cas échéant, la cancellation de toute référence à ce document, à son contenu ou à cet objet qui figurerait dans le dossier de la procédure. / Dans le cas contraire, il ordonne le versement du scellé et du procès-verbal au dossier de la procédure. Cette décision n'exclut pas la possibilité ultérieure pour les parties de demander la nullité de la saisie devant, selon les cas, la juridiction de jugement ou la chambre de l'instruction. / La décision du juge des libertés et de la détention peut faire l'objet d'un recours suspensif dans un délai de vingt-quatre heures, formé par le procureur de la République, l'avocat ou le bâtonnier ou son délégué devant le président de la chambre de l'instruction. Celui-ci statue dans les cinq jours suivant sa saisine, selon la procédure prévue au cinquième alinéa du présent article. / Ce recours peut également être exercé par l'administration ou l'autorité administrative compétente. / Les dispositions du présent article sont également applicables aux perquisitions effectuées dans les locaux de l'ordre des avocats ou des caisses de règlement pécuniaire des avocats. Dans ce cas, les attributions confiées au juge des libertés et de la détention sont exercées par le président du tribunal judiciaire qui doit être préalablement avisé de la perquisition. Il en est de même en cas de perquisition au cabinet ou au domicile du bâtonnier. / Les dispositions du présent article sont également applicables aux perquisitions ou visites domiciliaires effectuées, sur le fondement d'autres codes ou de lois spéciales, dans le cabinet d'un avocat ou à son domicile ou dans les locaux mentionnés à l'avant-dernier alinéa ". 4. D'autre part, aux termes de l'article 56-1-2 du code de procédure pénale, créé par la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire : " Dans les cas prévus aux articles 56-1 et 56-1-1, sans préjudice des prérogatives du bâtonnier ou de son délégué prévues à l'article 56-1 et des droits de la personne perquisitionnée prévus à l'article 56-1-1, le secret professionnel du conseil n'est pas opposable aux mesures d'enquête ou d'instruction lorsque celles-ci sont relatives aux infractions mentionnées aux articles 1741 et 1743 du code général des impôts et aux articles 421-2-2, 433-1, 433-2 et 435-1 à 435-10 du code pénal ainsi qu'au blanchiment de ces délits, sous réserve que les consultations, correspondances ou pièces détenues ou transmises par l'avocat ou son client établissent la preuve de leur utilisation aux fins de commettre ou de faciliter la commission desdites infractions ". 5. Ces dispositions sont applicables au présent litige. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Le moyen tiré de ce qu'elles portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment aux droits de la défense protégés par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, soulève une question présentant un caractère sérieux. Ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité invoquées. D E C I D E : -------------- Article 1er : Les questions de la conformité à la Constitution des articles 56-1 et 56-1-2 du code de procédure pénale issus de la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire sont renvoyées au Conseil constitutionnel. Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de l'ordre des avocats au barreau de Paris et sur celle de l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché les questions de constitutionnalité ainsi soulevées. Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ordre des avocats au barreau de Paris, à l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine et au garde des sceaux, ministre de la justice. Copie en sera adressée à la Première ministre. Délibéré à l'issue de la séance du 6 octobre 2022 où siégeaient : Mme Suzanne von Coester, assesseure, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat-rapporteure. Rendu le 18 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Suzanne von Coester La rapporteure : Signé : Mme Rozen Noguellou La secrétaire : Signé : Mme Marie-Adeline Allain