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JADE/CETATEXT000047370729.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 21 août 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande regroupement familial au bénéfice de son épouse. Par un jugement n° 2012854 du 31 mars 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 6 mai 2022, le préfet du Val-d'Oise demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Il soutient qu'il n'a pas commis d'erreur d'appréciation quant à la situation de M. C..., dès lors que le caractère suffisant des ressources doit être apprécié sur la période de douze mois précédant la demande de regroupement familial. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 novembre 2022, M. C..., représenté par Me Cheron, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - la requête du préfet du Val-d'Oise est dépourvue d'objet dès lors qu'en application du jugement attaqué, le préfet a autorisé le regroupement familial ; - le moyen soulevé par le préfet du Val-d'Oise n'est pas fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. M. C..., ressortissant tunisien né le 6 février 1986, a sollicité le 28 novembre 2018 le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse et compatriote Mme D.... Cette demande a été refusée par une décision du préfet du Val-d'Oise en date du 21 août 2020. M. C... a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision, qui a été rejeté par décision du 5 novembre 2020. Par jugement n° 2012854 du 31 mars 2022, dont le préfet du Val-d'Oise relève régulièrement appel, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 21 août 2020 et lui a enjoint d'autoriser le regroupement familial sollicité par M. C.... Sur les conclusions à fin de non-lieu à statuer : 2. La circonstance que, en exécution du jugement attaqué, le préfet du Val-d'Oise a autorisé le regroupement familial sollicité par M. C... et que l'épouse de celui-ci s'est installée en France ne rend pas sans objet la requête d'appel. Les conclusions à fin de non-lieu à statuer présentées par M. C... doivent dès lors être rejetées. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. (...) ". Aux termes de l'article R. 411-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. (...) ". L'article R. 421-4 du même code dispose que : " A l'appui de sa demande de regroupement, le ressortissant étranger présente les copies intégrales des pièces suivantes : (...) 3° Les justificatifs des ressources du demandeur et, le cas échéant, de son conjoint, tels que le contrat de travail dont il est titulaire ou, à défaut, une attestation d'activité de son employeur, les bulletins de paie afférents à la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande, ainsi que le dernier avis d'imposition sur le revenu en sa possession, dès lors que sa durée de présence en France lui permet de produire un tel document, et sa dernière déclaration de revenus. La preuve des revenus non salariaux est établie par tous moyens ". Il résulte de la combinaison des dispositions des articles R. 411-4 et R. 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le caractère suffisant du niveau de ressources du demandeur est apprécié sur la période de douze mois précédant le dépôt de la demande de regroupement familial, par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum interprofessionnel de croissance au cours de cette même période. ". 4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le caractère suffisant du niveau de ressources de M. C... devait être apprécié sur la période de douze mois précédant le dépôt, le 28 novembre 2018, de sa demande de regroupement familial, soit du 28 novembre 2017 au 28 novembre 2018. Il est constant que l'intéressé ne remplissait pas cette condition de ressources au titre de cette période de référence. S'il a produit, à l'appui de son recours gracieux, des pièces permettant d'établir qu'il remplissait cette condition de ressources l'année précédant l'arrêté attaqué du 21 août 2020, le préfet du Val-d'Oise n'était pas pour autant obligé de prendre en compte ce changement de situation, intervenu postérieurement à la période de référence. Par suite, le préfet du Val-d'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour son arrêté du 21 août 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a accueilli le moyen tiré de l'erreur d'appréciation. 5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Sur les moyens invoqués par M. C..., dans le cadre de l'effet dévolutif : 6. Si M. C... soutient que la décision attaquée viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'assortit pas son moyen des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté. 7. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Val-d'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 21 août 2020. Sur les frais liés au litige : 8. L'Etat n'étant pas, en l'espèce, la partie perdante, les conclusions de M. C... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. D É C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2012854 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 31 mars 2022 est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... C.... Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente assesseure, Mme Pham, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. La rapporteure, C. B... Le président, P. BEAUJARDLa greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outrer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 22VE01097
JADE/CETATEXT000047370710.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C..., qui avait déposé une déclaration préalable en vue de la division d'une parcelle cadastrée ZA 28 située à Verneuil-sur-Seine en deux lots dont un à bâtir, a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2019 par lequel le maire de la commune de Verneuil-sur-Seine a retiré la décision tacite de non-opposition à cette déclaration préalable et a opposé un sursis à statuer sur cette déclaration, pendant une durée de deux ans, et de mettre à la charge de la commune de Verneuil-sur-Seine une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1908442 du 16 avril 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du maire de la commune de Verneuil-sur-Seine du 15 octobre 2019, a mis à la charge de la commune de Verneuil-sur-Seine une somme de 1 500 euros à verser à M. C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les conclusions de la commune de Verneuil-sur-Seine présentées sur ce même fondement. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 juin 2021 et le 29 décembre 2022, la commune de Verneuil-sur-Seine, représentée par Me Destarac, avocat, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande de M. C... ; 3°) de mettre à la charge de M. C... une somme de 3 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La commune de Verneuil-sur-Seine soutient, dans le dernier état de ses écritures, que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne s'est pas prononcé sur l'un des motifs ayant fondé le retrait de la décision tacite de non-opposition et le sursis à statuer ; - le projet de M. C... est de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme intercommunal ; - les dispositions de l'article L. 442-14 du code de l'urbanisme cristallisent les dispositions applicables à une future autorisation de construire à la date de la déclaration préalable ; - le respect des règles de constructibilité dans la bande de constructibilité secondaire et relatives au coefficient de pleine terre prévues par le règlement de la zone UDa du futur plan local d'urbanisme intercommunal aurait été compromis par la création d'un lot à bâtir sur la parcelle ZA 28 ; - la division projetée aurait dû faire l'objet d'une appréciation globale tenant compte des autres demandes déposées par M. C... ; - le maire aurait pu se fonder sur la circonstance que le projet de M. C... est de nature à compromettre les règles d'emprise au sol prévues par les dispositions du règlement de la zone UDa du projet de plan local d'urbanisme intercommunal ; - le maire aurait pu se fonder sur la circonstance que le projet de M. C... est de nature à compromettre le maintien des espaces collectifs végétalisés prévu par l'article 3.2.3.2 des dispositions générales du projet de plan local d'urbanisme intercommunal ; - le maire aurait pu se fonder sur la circonstance que le projet de M. C... est de nature à compromettre le maintien des arbres identifiés comme devant être protégés. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 novembre 2022, M. C..., représenté par Me Bernard, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Verneuil-sur-Seine une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Un mémoire, présenté pour M. C... le 2 février 2023, ne présentant pas d'éléments nouveaux, n'a pas été communiqué. Des pièces, présentées le 16 février 2023, pour la commune de Verneuil-sur-Seine, n'ont pas été communiquées. Par une ordonnance du 2 février 2023, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 17 février 2023, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme D..., - les conclusions de M. Frémont, rapporteur public, - et les observations de Me Gonnet, substituant Me Destarac, pour la commune de Verneuil-sur-Seine et de Me Mimoun, substituant Me Bernard, pour M. C.... Une note en délibéré, présentée pour M. C..., a été enregistrée le 10 mars 2023. Considérant ce qui suit : 1. La communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise " a, par une délibération du 14 avril 2016, prescrit l'élaboration d'un plan local d'urbanisme intercommunal applicable sur le territoire de la commune de Verneuil-sur-Seine. Le projet a été arrêté par une délibération du 11 décembre 2018, puis par une nouvelle délibération du 9 mai 2019. Le 12 juillet 2019, M. C... a déposé une déclaration préalable en vue de la division d'une parcelle cadastrée ZA 28, située à Verneuil-sur-Seine, en deux lots dont un à bâtir. La commune n'ayant pas répondu, une décision implicite de non-opposition est née le 12 août 2019. Toutefois, le 10 septembre 2019, la commune de Verneuil-sur-Seine a informé M. C... de son intention de retirer cette décision. Par un arrêté du 15 octobre 2019, le maire de Verneuil-sur-Seine a retiré la décision implicite de non-opposition prise sur la déclaration préalable déposée par M. C... et lui a opposé un sursis à statuer en raison de la procédure de révision du plan local d'urbanisme alors en cours. La commune de Verneuil-sur-Seine demande l'annulation du jugement n° 1908442 du 16 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté du 15 octobre 2019. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. L'article L. 9 du code de justice administrative dispose que : " Les jugements sont motivés ". Le juge doit se prononcer, par une motivation suffisante au regard de la teneur de l'argumentation qui lui est soumise, sur tous les moyens expressément soulevés par les parties, à l'exception de ceux qui, quel que soit leur bien-fondé, seraient insusceptibles de conduire à l'adoption d'une solution différente de celle qu'il retient. 3. La commune de Verneuil-sur-Seine soutient que les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement dès lors qu'ils n'ont pas examiné si le motif exposé au troisième considérant de l'arrêté litigieux était de nature à justifier, à lui seul, la décision de sursis à statuer. Toutefois, ce considérant se borne à indiquer que l'appréciation d'un futur permis de construire devra être réalisée lot par lot et ne pourra faire l'objet d'une appréciation globale à l'échelle de toute l'unité foncière. Or, cette énonciation ne constitue pas, par elle-même, l'un des motifs ayant fondé la décision de sursis à statuer mais contribue à étayer le raisonnement ayant conduit la commune à estimer que le projet était de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme intercommunal. Par suite, les premiers juges n'étaient pas tenus d'examiner si ce motif aurait pu à lui seul justifier la décision attaquée et, dès lors qu'aucun moyen n'était soulevé sur ce point, ils n'ont ainsi pas entaché leur jugement d'une insuffisance de motivation. Sur la légalité de l'arrêté du 15 octobre 2019 : 4. Pour retirer la décision tacite de non-opposition à la déclaration préalable déposée par M. C... et lui opposer un sursis à statuer, le maire de la commune de Verneuil-sur-Seine s'est fondé sur la circonstance que le projet de division de la parcelle cadastrée ZA 28 en deux lots, dont un à bâtir, était de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme intercommunal " Grand Paris Seine-et-Oise " en cours d'élaboration. 5. Aux termes de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable à la date de l'arrêté attaqué : " L'autorité compétente se prononce par arrêté sur la demande de permis ou, en cas d'opposition ou de prescriptions, sur la déclaration préalable. / Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus au 6° de l'article L. 102-13 et aux articles L. 153-11 et L. 311-2 du présent code et par l'article L. 331-6 du code de l'environnement (...) ". 6. Selon l'article L. 153-11 du même code : " (...) L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable ". Un sursis à statuer ne peut être opposé à une demande de permis de construire, sur le fondement de ces dispositions, postérieurement au débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable, qu'en vertu d'orientations ou de règles que le futur plan local d'urbanisme pourrait légalement prévoir et à la condition que la construction, l'installation ou l'opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution. 7. En outre, l'article L. 442-14 du code de l'urbanisme prévoit que : " Lorsque le lotissement a fait l'objet d'une déclaration préalable, le permis de construire ne peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme nouvelles intervenues depuis la date de non-opposition à la déclaration préalable, et ce pendant cinq ans à compter de cette même date. (...) ". 8. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée ZA 28, qui était classée, sous l'empire du précédent document d'urbanisme, en zone UM1 du règlement de ce document, comporte un vaste espace boisé classé et deux ilots constructibles d'une superficie de 1 885m² et 5 002m². Or, le projet de plan local d'urbanisme intercommunal arrêté prévoit de classer cette parcelle en zone UDa et d'y instituer un " espace collectif végétalisé " couvrant toute la parcelle à l'exception d'une zone située au Nord-Est de la parcelle correspondant à l'un des deux ilots constructibles sous l'empire du précédent document d'urbanisme. 9. En premier lieu, pour surseoir à statuer sur la déclaration préalable tendant à la division de cette parcelle en deux lots, dont un à bâtir, le maire de la commune de Verneuil-sur-Seine a estimé que le lot B à bâtir, situé sur la zone Nord-Est de la parcelle en partie à l'extérieur de l'espace collectif végétalisé, " se situe principalement dans la bande de constructibilité secondaire où la constructibilité est limitée ". 10. Aux termes du point 1.2.2 du chapitre 1er du règlement de la zone UDa du futur plan local d'urbanisme intercommunal " Grand Paris Seine-et-Oise " : " Conditions relatives à l'application des bandes de constructibilité principale et secondaire / 1. La profondeur de la bande de constructibilité principale* est fixée à 20 mètres. / Les dispositions du règlement peuvent être différentes selon que le projet est localisé sur un terrain ou une partie de terrain qui est compris(e) dans la bande de constructibilité principale* ou dans la bande de constructibilité secondaire*. / 2. Conditions de constructibilité dans la bande de constructibilité secondaire / Dans la bande de constructibilité secondaire*, seules sont admises : / - les constructions à destination d'équipements d'intérêt collectif et services publics ; / - la construction d'annexes* à condition que leur emprise au sol* cumulée sur le terrain* soit au plus égale à 20 m² ; / - un abri pour animaux d'une emprise au sol maximale de 20 m² ; / - l'extension* des constructions existantes à la date d'approbation du PLUi, autres que celles visées ci-dessus, qui peuvent être situées, en tout ou partie, dans la bande de constructibilité principale. L'emprise au sol* de l'extension est au plus égale à 20 m² ". 11. Il ressort des pièces du dossier que le projet d'aménagement et de développement durables du futur plan local d'urbanisme intercommunal fixe comme objectif de préserver " la ville paysage " en redonnant " sa place au paysage, protégé, valorisé et intégré à la vie urbaine ". Le règlement de la zone UDa rappelle que cette zone tend à " valoriser ces espaces urbains en favorisant une évolution du bâti, tout en respectant la volumétrie générale des constructions dans ce tissu et en préservant la dominante végétale, notamment en cœurs d'îlots ". Compte tenu tant de ces objectifs, que de l'objet de la déclaration préalable en litige, qui porte sur la création d'un lot à bâtir d'une superficie de 6 780 m² dont l'essentiel est situé dans la bande de constructibilité secondaire et dont le plan de division fait déjà apparaître la réalisation de quatre blocs distincts connectés à des voies de cheminement, et de ce que l'absence d'opposition aurait fait obstacle, en application de l'article L. 442-14 du code de l'urbanisme précité, à ce qu'un permis de construire soit refusé sur le fondement de dispositions d'urbanisme nouvelles intervenues dans le délai de cinq ans suivant cette absence d'opposition, le maire de la commune de Verneuil-sur-Seine a pu légalement estimer que l'opération en litige était de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme intercommunal, alors même que la nature de la construction envisagée n'était pas précisée dans les pièces du dossier de demande. 12. En deuxième lieu, le maire de la commune de Verneuil-sur-Seine s'est fondé sur la circonstance que " l'article UDa 3.2.1 du PLUI en projet impose un coefficient de pleine terre minimal représentant 40% de la surface du terrain alors que le PLU actuel n'impose pas de coefficient de pleine terre ". 13. Le règlement de la zone UDa prévoit que " le coefficient de pleine terre minimal est de 40% de la superficie du terrain ". Toutefois, si le dossier de demande fait apparaître que le lot B à bâtir sera réparti en quatre blocs reliés entre eux par des cheminements internes, la déclaration préalable ne porte que sur la division en vue de la création d'un lot à bâtir, sans que la configuration ou l'implantation précise des futures constructions ne soient indiquées. Par suite, dès lors que le respect de la règle énoncée ne peut être apprécié qu'au regard d'un projet de construction précis, c'est à tort que le maire de Verneuil-sur-Seine a estimé que le projet de division objet de la déclaration préalable déposée par M. C... était de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme intercommunal pour cette raison. 14. En troisième lieu, pour surseoir à statuer sur la déclaration préalable déposée par M. C..., le maire de la commune de Verneuil-sur-Seine s'est fondé sur les dispositions du règlement du futur plan local d'urbanisme intercommunal qui imposent, en cas de réalisation d'un programme d'habitation de plus de 12 logements, que 30% du nombre de logements ou d'hébergements créés soit financé par l'Etat par des prêts aidés. Toutefois, ainsi qu'il a été exposé au point précédent, la nature de la construction envisagée n'est pas précisée par le dossier de demande, sans que de précédentes demandes d'autorisation de construire ne puissent révéler l'intention du pétitionnaire dès lors qu'elles n'ont pas été accordées et que le comportement de ce dernier ne révèle aucune intention frauduleuse. Par suite, dès lors que le respect de la règle énoncée ne peut être apprécié qu'au regard d'un projet de construction précis, c'est à tort que le maire de Verneuil-sur-Seine a estimé que le projet de division objet de la déclaration préalable déposée par M. C... était de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme intercommunal pour cette raison. 15. Toutefois, il résulte de l'instruction que le maire de la commune de Verneuil-sur-Seine aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur le motif énoncé au point 11 du présent arrêt. 16. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les demandes de substitution de motifs soulevées en première instance et en appel par la commune de Verneuil-sur-Seine, que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la circonstance que la déclaration préalable n'était pas de nature à compromettre l'exécution du projet pour annuler l'arrêté du 15 octobre 2019. 17. Il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Versailles. 18. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé par M. A... B..., adjoint en charge de l'urbanisme et du patrimoine. Il ressort des pièces du dossier que ce dernier était, à la date de l'arrêté attaqué, titulaire d'une délégation de signature, conférée par arrêté n° 2014-77 du 31 mars 2014, aux termes de laquelle il était compétent pour " les missions relatives à l'instruction, à la délivrance et au suivi des autorisations d'urbanisme et d'occupation des sols ", notamment " les déclarations préalables ", et était ainsi autorisé à " prendre toute initiative utile pour l'instruction, la préparation, le suivi et le contrôle des dossiers relevant de son champ de compétence et à signer tout document nécessaire ". En outre, cette délégation a été régulièrement publiée au registre des arrêtés du maire de la commune de Verneuil-sur-Seine et transmise à la préfecture des Yvelines qui a procédé à son affichage le 18 avril 2014. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué doit être écarté. 19. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. (...) ". 20. Pour retirer l'autorisation accordée tacitement le 12 août 2019, le maire de la commune de Verneuil-sur-Seine s'est fondé sur la circonstance que cette dernière était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que le projet était de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme intercommunal et aurait donc dû faire l'objet d'un sursis à statuer sur le fondement des dispositions susmentionnées des articles L. 153-11 et L. 424-1 du code de l'urbanisme. Or, il résulte de ce qui a été exposé aux points 9 à 11 de cet arrêt que le projet était en effet de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme et, par conséquent, que le maire était fondé à procéder au retrait, pour ce motif, de la décision de non-opposition tacite à la déclaration préalable déposée par M. C.... 21. En dernier lieu, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Selon l'article L. 121-2 dudit code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ". En vertu de l'article L. 211-2 du même code : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) ". 22. Si M. C... soutient que la procédure contradictoire prévue par l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration n'a pas été respectée, il ressort des pièces du dossier qu'il a été informé, par courrier du 10 septembre 2019, de l'intention du maire de procéder au retrait de la décision tacite du 12 août 2019 au motif que celle-ci était entachée d'illégalité et a été invité à présenter des observations dans un délai de 15 jours assisté d'un conseil le cas échéant. Par un courrier du 19 septembre 2019, le conseil de M. C... a d'ailleurs transmis des observations à la commune de Verneuil-sur-Seine. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la procédure contradictoire n'a pas été respectée. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de retrait doit être écarté. 23. Il résulte de ce qui précède que la commune de Verneuil-sur-Seine est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 15 octobre 2019. Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Verneuil-sur-Seine qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. C... demande à ce titre. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... le versement de la somme que la commune de Verneuil-sur-Seine demande sur le fondement des mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 1908442 du 16 avril 2021 est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Versailles, ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées. Article 3 : Les conclusions de la commune de Verneuil-sur-Seine présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Verneuil-sur-Seine et à M. A... C.... Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Even, président de chambre, Mme Bonfils, première conseillère, Mme Houllier, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La rapporteure, S. D...Le président, B. EVENLa greffière, C. RICHARD La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE01750
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par une réclamation que le directeur national des enquêtes fiscales a soumis d'office, en application de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, au tribunal administratif de Versailles qui l'a enregistrée le 21 mai 2019, la société Now Promoplanète a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) mis à sa charge au titre de la période courant du 1er septembre 2013 au 30 novembre 2014, pour un montant global de 436 527 euros, ainsi que le bénéfice du sursis de paiement. Par un jugement n° 1903883 du 20 avril 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 20 juin 2021, la société Now Promoplanète, représentée par Me Naim, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que le faisceau d'indices retenu par l'administration et repris par le jugement attaqué ne permet en aucun cas de démontrer qu'elle savait ou aurait dû savoir que certains fournisseurs auxquels elle a eu recours entre septembre 2013 et octobre 2014 participaient à une fraude au carrousel de TVA ; qu'elle a procédé à un minimum de vérifications accessibles à son niveau alors qu'aucune obligation légale n'impose à une entreprise d'engager une quelconque procédure de vérification lorsqu'elle achète des produits en vue de les revendre. Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par la société Now Promoplanète ne sont pas fondés. Par ordonnance du 25 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 14 février 2023 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique, - et les observations de M. Touizer, président de la société Now Promoplanète. Considérant ce qui suit : 1. A l'issue d'une vérification de sa comptabilité portant sur la taxe sur le chiffre d'affaires au titre de la période du 1er juin 2012 au 30 novembre 2014, la SAS Now Promoplanète, qui exerce une activité d'achat et de revente en gros ou demi-gros de matériels informatiques et téléphoniques, s'est vu proposer des rectifications en matière de TVA portant sur les périodes du 1er septembre 2013 au 30 novembre 2014. L'administration a remis en cause l'exercice de son droit à déduction de la TVA sur l'achat de matériels téléphoniques et informatiques aux fournisseurs que sont la SARL Tizicom, la SARL Bware, la SARL DSI Informatique, l'EURL 2X Connection et la SASU Electron, qu'elle a regardés comme étant impliqués dans un circuit de fraude dite " au carrousel ". La société requérante demande au tribunal la décharge des rappels de TVA ainsi mis à sa charge au titre des périodes du 1er septembre 2013 au 30 novembre 2014. 2. Aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Aux termes des I et II de l'article 271 du même code : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) ". 3. Il résulte des dispositions de l'article 17 de la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977, reprises en substance à l'article 168 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 et dont les dispositions du I et du a) du 1 du II de l'article 271 du CGI citées au point 2 assurent la transposition, que le bénéfice du droit à déduction de taxe sur la valeur ajoutée doit être refusé à un assujetti lorsqu'il est établi, au vu d'éléments objectifs, que celui-ci savait ou aurait dû savoir que, par l'opération invoquée pour fonder ce droit, il participait à une fraude à la taxe sur la valeur ajoutée commise dans le cadre d'une chaîne de livraisons ou de prestations, ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne, notamment par son arrêt du 18 décembre 2014, Staatssecretaris van Financiën c/ Schoenimport " Italmoda " Mariano Previti vof et Turbu.com BV, Turbu.com Mobile Phone's BV (C-131/13, 163/13 et 164/13). 4. Si les opérateurs qui prennent toute mesure pouvant raisonnablement être exigée d'eux pour s'assurer que leurs opérations ne sont pas impliquées dans une fraude, qu'il s'agisse de la fraude à la taxe sur la valeur ajoutée ou d'autres fraudes, ne doivent pas perdre leur droit à déduire la taxe sur la valeur ajoutée acquittée en amont, en revanche, un assujetti qui savait ou aurait dû savoir que, par son acquisition, il participait à une opération impliquée dans une fraude à la taxe sur la valeur ajoutée, doit être considéré comme participant à cette fraude, indépendamment de la question de savoir s'il tire ou non un bénéfice de la revente des biens, dès lors que, dans une telle situation, l'assujetti devient complice de la fraude, comme l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt du 6 juillet 2006, Axel Kittel et Recolta Recycling SRPL (C-439/04 et C-440/04). 5. Si l'administration fiscale ne peut exiger de manière générale de l'assujetti souhaitant exercer le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, d'une part, qu'il vérifie que l'émetteur de la facture correspondant aux biens et aux services au titre desquels l'exercice de ce droit est demandé dispose de la qualité d'assujetti, qu'il disposait des biens en cause et était en mesure de les livrer et qu'il a rempli ses obligations de déclaration et de paiement de la taxe, afin de s'assurer qu'il n'existe pas d'irrégularités ou de fraude au niveau des opérateurs en amont, ou, d'autre part, qu'il dispose de documents à cet égard, un opérateur avisé peut, en revanche, lorsqu'il existe des indices permettant de soupçonner l'existence d'irrégularités ou de fraude, se voir contraint de prendre des renseignements sur un autre opérateur auprès duquel il envisage d'acheter des biens ou des services afin de s'assurer qu'il s'est acquitté de ses obligations fiscales, comme l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt du 21 juin 2012, Mahagében kft (C-80/11). Lorsque les indices permettent de soupçonner une méconnaissance, par un fournisseur de biens ou un prestataire de services, de ses obligations de déclaration ou de paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient ainsi à l'assujetti qui a acquis certains de ces biens ou services, pour les céder à son tour, de s'assurer qu'en ce qui concerne ces biens et services, son fournisseur ou son prestataire s'est acquitté de ses obligations. 6. Enfin, il incombe à l'administration fiscale d'établir les éléments objectifs permettant de conclure que l'assujetti savait ou aurait dû savoir que l'opération invoquée pour fonder le droit à déduction était impliquée dans une fraude. Lorsque sont en cause des opérations similaires réalisées par des sociétés différentes pendant une courte période, ces éléments doivent porter sur chacune de ces sociétés, qu'il s'agisse de l'existence de la fraude reprochée, des indices permettant à l'assujetti mis en cause de la soupçonner ou encore des mesures qui peuvent raisonnablement être exigées. 7. L'administration fiscale a produit les documents établissant que la SARL Tizicom, l'EURL 2 Hard, la SARL Bware, la SARL DSI Informatique, l'EURL 2X Connection et la SASU Electron étaient impliquées dans une fraude à la taxe sur la valeur ajoutée. La société requérante ne le conteste pas, mais soutient qu'elle ne pouvait soupçonner l'existence de ces fraudes et qu'elle a, en tout état de cause, accompli les diligences nécessaires pour s'assurer que ces fournisseurs s'acquittaient de leurs obligations fiscales. 8. Il résulte de l'instruction que la société Now Promoplanète s'est approvisionnée auprès de ces fournisseurs frauduleux pour la totalité de ses achats en 2013 et pour 95 % de ses achats en 2014. Ces fournisseurs se sont succédés dans le temps pendant toute la période d'imposition litigieuse. La société requérante a fait appel à chacun d'entre eux sur de brèves ou très brèves périodes, et pour des volumes souvent significatifs. Les marchandises étaient généralement payées quelques jours avant la livraison, ou le jour même de la livraison, alors que le règlement dans un délai de trente jours est l'usage. Par ailleurs, les factures de ces fournisseurs étaient entachées d'irrégularités que la société Now Promoplanète aurait dû remarquer, en ce qu'elles n'opèrent pas de distinction entre les frais de transport et d'assurance, contrairement à la législation en vigueur, et en ce qu'elles ne comportent pas certaines mentions obligatoires, comme le numéro IMEI ou le numéro de série des marchandises. Outre ces anomalies, qui concernent l'ensemble des fournisseurs précités, l'administration fiscale a relevé d'autres indices propres à chaque fournisseur qui auraient dû alerter la société requérante. 9. En ce qui concerne la société DSI Informatique, il résulte de l'instruction que cette société avait changé de gérant, de forme juridique et de dénomination sociale en 2013. Elle a pour siège social un local commercial de 43 m2 et n'embauche aucun salarié. Dépourvue de moyens humains et matériels, elle n'a pas livré les biens facturés par elle à la société Now Promoplanète mais a fait appel à un transporteur. Il ressort de l'annexe 1 à la proposition de rectification du 19 août 2015 que cette société pratiquait la vente à perte. Sur la période de facturation du 19 septembre au 25 octobre 2013, les versements identifiés s'élèvent à un montant global de 427 425,44 euros HT. Au vu des changements statutaires effectués en 2013, des prix pratiqués, de l'absence de livraison par son fournisseur lui-même, des irrégularités entachant les factures émises et du volume des transactions effectuées, la société Now Promoplanète aurait dû soupçonner l'existence d'une fraude et effectuer des démarches afin de s'assurer de la réalité de l'activité de ce fournisseur ainsi que de l'acquittement de ses obligations fiscales. Or, le dossier de ce fournisseur qu'elle a présenté à l'administration fiscale ne comportait qu'un document avec le nom et le numéro de téléphone du gérant, une copie de la carte nationale d'identité du gérant, un extrait K-Bis en date du 29 juillet 2013, une attestation fiscale en date du 19 septembre 2013 au titre de l'année 2012, dépourvue de valeur probante car ni cachetée, ni signée et ne mentionnant pas le nom de la personne qui l'aurait délivrée. 10. En ce qui concerne la société Tizicom, elle a été créée le 10 janvier 2007 et a changé de gérant en décembre 2013. Il résulte de l'instruction que l'adresse de son siège social est occupée par une autre société et qu'elle n'embauche aucun salarié. Dépourvue de moyens humains et matériels, elle n'a pas livré les biens facturés par elle à la société Now Promoplanète mais a fait appel à un transporteur. Il ressort de l'annexe 2 à la proposition de rectification du 19 août 2015 que cette société pratiquait la vente à perte. Au vu du changement récent de gérant, des prix pratiqués, de l'absence de livraison par son fournisseur lui-même ainsi que des irrégularités entachant les factures émises, la société Now Promoplanète aurait dû soupçonner l'existence d'une fraude et effectuer des démarches afin de s'assurer de la réalité de l'activité de ce fournisseur ainsi que de l'acquittement de ses obligations fiscales, notamment en demandant une attestation sociale ou en se rendant dans les locaux de son fournisseur, ce qu'elle n'a pas fait. 11. En ce qui concerne la société BWare, son siège social est situé à une adresse de domiciliation et elle n'embauche aucun salarié. Elle a émis une seule facture au nom de la société Now Promoplanète en date du 4 novembre 2013, mais pour un montant important de 58 125,55 euros HT. Elle n'a pas livré les biens facturés par elle à la société Now Promoplanète mais a fait appel à un transporteur. La société Now Promoplanète connaissait par ailleurs les liens unissant la société Bware et la société DSI Informatique, qui s'est révélée défaillante, dès lors que la société BWare a émis une facture identique en termes de prix et de produits à une ancienne facture de la société DSI Informatique qui avait été annulée par un avoir. Au vu des liens existant entre ces deux sociétés, de l'absence de livraison par son fournisseur lui-même ainsi que des irrégularités entachant les factures émises, la société Now Promoplanète aurait dû soupçonner l'existence d'une fraude et effectuer des démarches afin de s'assurer de la réalité de l'activité de ce fournisseur ainsi que de l'acquittement de ses obligations fiscales, ce qu'elle n'a manifestement pas fait puisqu'elle n'a pu présenter aucun dossier fournisseur à l'administration fiscale. 12. En ce qui concerne la société 2X Connection, créée le 24 février 2014, elle a son siège social situé à une adresse de domiciliation et n'embauche aucun salarié. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'annexe 3 à la proposition de rectification du 19 août 2015, qu'elle pratique la revente de produits informatiques sans appliquer aucune marge sur les prix. Elle a émis, du 15 juillet au 10 septembre 2014, des factures au nom de la société requérante pour un montant global de 333 856,80 euros HT. Elle n'a pas livré les biens facturés par elle à la société Now Promoplanète mais a fait appel à un transporteur. Un des deux comptes professionnels qu'elle possédait était situé en Pologne, le relevé d'identité bancaire afférent ayant été communiqué à la société Now Promoplanète. Au vu de la création récente de cette société, du compte bancaire qu'elle détenait à l'étranger, de l'absence de livraison par son fournisseur lui-même, des irrégularités entachant les factures émises et du volume des transactions réalisées, la société Now Promoplanète aurait dû soupçonner l'existence d'une fraude et effectuer des démarches afin de s'assurer de la réalité de l'activité de ce fournisseur ainsi que de l'acquittement de ses obligations fiscales, ce qu'elle n'a manifestement pas fait puisque le dossier fournisseur qu'elle a produit à l'administration fiscale ne comportait qu'une copie de la carte d'identité du gérant, un extrait K-Bis et deux relevés d'identité bancaire. 13. En ce qui concerne la société Electron, elle a été créée le 1er juillet 2014 et a pour objet social la réalisation de " travaux d'installation électriques dans tous locaux ", ce qui ne correspond pas à son activité de vente de matériel informatique. Son siège social se situe au domicile privé déclaré de la gérante et elle n'embauche aucun employé. Elle n'a pas livré les biens facturés par elle à la société Now Promoplanète mais a fait appel à un transporteur. Elle a émis, du 24 septembre au 26 novembre 2014, des factures au nom de la société requérante pour un montant global de 476 989,43 euros HT. Au vu de sa création récente, de son objet social, de l'absence de livraison par son fournisseur lui-même, des irrégularités entachant les factures émises et du volume des transactions réalisées, la société Now Promoplanète aurait dû soupçonner l'existence d'une fraude et effectuer des démarches afin de s'assurer de la réalité de l'activité de ce fournisseur ainsi que de l'acquittement de ses obligations fiscales, ce qu'elle n'a manifestement pas fait puisque le dossier fournisseur qu'elle a produit à l'administration fiscale ne comportait qu'une copie de la carte d'identité de la gérante, une vérification du numéro de TVAI en date du 12 septembre 2014 et un extrait K-Bis. 14. Il résulte de l'ensemble des éléments précités que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de ce que la requérante savait ou aurait dû savoir que, par l'acquisition de matériel informatique et de téléphonie auprès des fournisseurs en cause, elle participait à une opération de fraude à la TVA, alors même que ces sociétés se présentaient comme assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée et étaient régulièrement inscrites au registre du commerce et des sociétés. La circonstance, alléguée par la société Now Promoplanète, qu'un précédent contrôle fiscal n'avait donné lieu à aucune rectification n'est pas de nature à remettre en cause cette constatation. 15. Il résulte de tout ce qui précède que la société Now Promoplanète n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société Now Promoplanète est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Now Promoplanète et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente assesseure, Mme Pham, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. La rapporteure, C. A... Le président, P. BEAUJARDLa greffière, A. GAUTHIERLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 21VE01804
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) Mistral a demandé au tribunal administratif de Versailles : 1°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos au 31 mars 2014 ; 2°) de prononcer le report du déficit de 909 140 euros existant à la clôture de l'exercice clos le 31 mars 2013 en totalité ou, à défaut, dans la limite du bénéfice constaté au cours de l'exercice clos le 31 mars 2014 ; 3°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 ; 4°) de mettre à la charge de l'État le paiement d'une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1900421 du 9 avril 2021, le tribunal administratif de Versailles l'a déchargée de la majoration concernant la reprise du report sur l'exercice clos au 31 mars 2014 du déficit constaté le 31 mars 2013 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 8 juin 2021 et le 22 avril 2022, la société Mistral, représentée par Me Dugas, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en ce qu'il a refusé de prononcer le report du déficit de 909 140 euros existant à la clôture de l'exercice clos le 31 mars 2013 en totalité ; 2°) à titre subsidiaire, d'annuler ce jugement en ce qu'il a refusé de prononcer le report du déficit de 909 140 euros existant à la clôture de l'exercice clos le 31 mars 2013 dans la limite du bénéfice constaté au cours de l'exercice clos le 31 mars 2014 ; 3°) de prononcer le dégrèvement des impositions subséquentes ; 4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - son déficit est reportable, au moins sur l'exercice où la fusion avec la SAS Les Oliviers est intervenue, car cette fusion ne peut être regardée comme un changement de son activité réelle emportant cessation d'entreprise ; - elle se prévaut des doctrines référencées BOI-IS-CESS-30-20 du 10 juillet 2013, nos 270 et 280, et BOI-IS-CESS-10 du 2 août 2017, n° 490. Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - l'étendue du litige ne porte que sur la somme de 172 410 euros, dès lors que la société Mistral ne conteste plus que le bien-fondé de la rectification portant sur la reprise du report du déficit constaté le 31 mars 2013 sur les exercices suivants ; - les moyens soulevés par la société Mistral ne sont pas fondés. Par ordonnance du 10 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 10 juin 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique, - et les observations de Me Dugas, représentant la société Mistral. Considérant ce qui suit : 1. La SAS Mistral a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur ses exercices clos les 31 mars 2013, 31 mars 2014 et 31 décembre 2014 et, pour la taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er avril 2012 au 30 septembre 2015. Des rectifications lui ont été proposées par lettre du 14 décembre 2016, confirmées le 14 avril 2017 portant, d'une part, en matière de taxe sur la valeur ajoutée déductible et d'impôt sur les sociétés, sur des dépenses ne constituant pas, selon le vérificateur, des charges et ne permettant pas la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée et, d'autre part, sur le refus du report, sur les exercices suivants, du déficit constaté le 31 mars 2013, à la clôture de l'exercice. La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a proposé, le 17 mai 2018, de maintenir les rectifications proposées en matière d'impôt sur les sociétés. La société Mistral a saisi le tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces rectifications. Par un jugement n° 1900421 du 9 avril 2021, le tribunal administratif de Versailles l'a déchargée de la majoration concernant la reprise du report sur l'exercice clos au 31 mars 2014 du déficit constaté le 31 mars 2013 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. La société Mistral relève appel de ce jugement en ce qu'il a refusé de prononcer le report du déficit de 909 140 euros existant à la clôture de l'exercice clos le 31 mars 2013 en totalité ou en partie. Sur le report des déficits : En ce qui concerne la loi fiscale : 2. Si la société Mistral indique reprendre les moyens relatifs aux distributions développés dans l'instance introduite devant la cour administrative d'appel de Paris le 20 juillet 2020, de tels moyens doivent être écartés comme inopérants, dès lors que la société Mistral a seulement demandé la réformation du jugement en ce qu'il refuse le report de déficit. 3. Aux termes de l'article 221 du code général des impôts : " (...) 5. a) Le changement de l'objet social ou de l'activité réelle d'une société emporte cessation d'entreprise. Il en est de même en cas de disparition des moyens de production nécessaires à la poursuite de l'exploitation pendant une durée de plus de douze mois, sauf en cas de force majeure, ou lorsque cette disparition est suivie d'une cession de la majorité des droits sociaux. / Toutefois, dans les situations mentionnées au premier alinéa du présent a, l'article 221 bis est applicable, sauf en ce qui concerne les provisions dont la déduction est prévue par des dispositions légales particulières. / b) Le changement d'activité réelle d'une société s'entend notamment : / 1°) De l'adjonction d'une activité entraînant, au titre de l'exercice de sa survenance ou de l'exercice suivant, une augmentation de plus de 50 % par rapport à l'exercice précédant celui de l'adjonction : / soit du chiffre d'affaires de la société (...) ". L'article 221 bis de ce même code dispose que : " En l'absence de création d'une personne morale nouvelle, lorsqu'une société ou un autre organisme cesse totalement ou partiellement d'être soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal, les bénéfices en sursis d'imposition, les plus-values latentes incluses dans l'actif social et les profits non encore imposés sur les stocks ne font pas l'objet d'une imposition immédiate, à la double condition qu'aucune modification ne soit apportée aux écritures comptables et que l'imposition desdits bénéfices, plus-values et profits demeure possible sous le nouveau régime fiscal applicable à la société ou à l'organisme concerné. (...) ". 4. Il est constant que la société Mistral a absorbé la SAS Les Oliviers le 10 octobre 2013 avec effet rétroactif au 1er avril 2013. L'administration a considéré que cette fusion-absorption constituait une cessation d'entreprise au sens des dispositions précitées de l'article 221 du code général des impôts et a refusé le report, sur les exercices suivants, du déficit de 909 141 euros constaté à l'issue de l'exercice clos le 31 mars 2013, ce que la société Mistral conteste. 5. Il résulte de l'instruction que la société requérante, constituée en 1990, si elle avait un objet social très vaste, avait exercé entre 2004 et 2011 une activité de construction-vente d'un ensemble immobilier situé à La Fare-les-Oliviers (Bouches-du-Rhône). Au cours de l'exercice portant sur la période du 1er avril 2012 au 31 mars 2013, son activité s'était bornée à réaliser des prestations de services au profit des sociétés appartenant au même dirigeant. La SAS Les Oliviers, créée en 1990, avait pour objet la construction et l'exploitation d'un ensemble immobilier et l'acquisition de tout immeuble ainsi que la participation financière dans d'autres sociétés à des projets similaires. Elle possédait un immeuble à usage industriel et commercial à La Fare-les-Oliviers qu'elle donnait en location depuis 2004 et ses revenus déclarés en 2013 étaient exclusivement constitués par les loyers perçus par elle. Ainsi, la société Mistral n'exerçait pas d'activité de location immobilière avant la fusion-absorption de la société Les Oliviers, qui a eu pour effet de lui adjoindre une nouvelle activité. Contrairement à ce qu'elle soutient, la promotion immobilière, l'entretien et la rénovation de biens immobiliers, d'une part, et la location immobilière, d'autre part, sont des activités distinctes au sens de l'article 221 du code général des impôts. Est par ailleurs sans incidence la circonstance alléguée, mais au demeurant non démontrée, selon laquelle il y aurait identité des moyens d'exploitation mis en œuvre et de la clientèle cible. 6. Au titre de l'exercice clos le 31 mars 2014, le chiffre d'affaires réalisé par la SAS Mistral après la fusion absorption est réparti en prestations de services rendues à d'autres sociétés à hauteur de 293 486 euros, en activité de location d'immeuble à hauteur de 463 553,75 euros et en refacturations à la société SMEF Azur à hauteur de 40 735,20 euros. Les parts de ces mêmes activités sont respectivement de 103 200 euros, 248 886,60 euros et 106 008,35 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2014. Par suite, le chiffre d'affaires afférent à la location immobilière a entraîné une augmentation de plus de 50 % du chiffre d'affaires de la société Mistral par rapport à l'exercice précédant celui de l'adjonction. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a refusé le report du déficit reportable de la SAS Mistral sur le terrain de la loi fiscale. Sur l'interprétation de la doctrine : 7. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. (...) Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ". 8. D'une part, la société Mistral ne peut utilement se prévaloir de la doctrine administrative référencée BOI-IS-CESS-30-20 du 4 février 2015, nos 270 et 280, dès lors que celle-ci ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle faite par le présent arrêt. 9. D'autre part, la société Mistral invoque la doctrine administrative relative à l'application du 5 de l'article 221 du code général des impôts référencée BOI-IS-CESS-10 du 2 août 2017 n° 490 aux termes de laquelle " Les déficits subis antérieurement au changement d'objet social, à la disparition des moyens de production ou au changement d'activité réelle caractérisant une cessation d'entreprise, sont définitivement perdus et ne peuvent plus être imputés sur les éventuels bénéfices réalisés ultérieurement. Ils demeurent toutefois imputables sur les bénéfices d'exploitation non encore taxés, les bénéfices en sursis d'imposition et les plus-values latentes incluses dans l'actif social imposables au titre de l'exercice au titre duquel le changement d'activité est caractérisé, sous réserve de l'application de l'atténuation conditionnelle prévue à l'article 221 bis du CGI ". Toutefois, les dispositions dont la société Mistral se prévaut ne figurent que dans des instructions postérieures à la période d'imposition en cause. Il s'ensuit qu'il ne peut être considéré que la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal. 10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Mistral n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société Mistral est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Mistral et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente assesseure, Mme Pham, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. La rapporteure, C. A... Le président, P. BEAUJARDLa greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 21VE01669
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Versailles de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'annuler l'arrêté du 21 juin 2021 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou " visiteur " ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Yvelines de réexaminer sa situation, dans un délai de 15 jours à compter de la date de notification du jugement et, en tout état de cause, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au profit de son conseil sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 2106497 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Versailles a admis Mme C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2021, Mme C..., représentée par Me Gerin, avocat, demande à la cour : 1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ; 2°) d'annuler ce jugement ; 3°) d'annuler cet arrêté ; 4°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou de procéder au réexamen de sa situation ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros à verser à Me Gerin, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Mme C... soutient que : - sa requête est recevable ; - en jugeant que le moyen tiré du défaut du respect de la procédure contradictoire était inopérant les premiers juges ont commis une erreur de droit ; - la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'incompétence ; - elle aurait dû être précédée d'une procédure contradictoire ; - elle est insuffisamment motivée dès lors qu'elle n'indique pas le fondement juridique justifiant le refus de titre de séjour ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation à cet égard ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence ; - elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - elle méconnaît l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation à cet égard ; - elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ; - elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français. Par un mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2023, le préfet des Yvelines conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 janvier 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Houllier, première conseillère. Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., ressortissante algérienne, née le 27 mars 1956, est entrée en France le 19 décembre 2019 sous couvert d'un visa Schengen de court séjour. Elle a sollicité, le 9 février 2021, la délivrance d'un certificat de résidence en invoquant le bénéfice de l'article 6 alinéa 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Par un arrêté du 21 juin 2021, le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer le titre de demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite. Mme C... fait appel du jugement n° 2106497 du 9 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 juin 2021. Sur la demande d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire : 2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président. " 3. Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 janvier 2023 intervenue au cours de la présente instance. Par suite, ses conclusions à fin d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer. Sur la régularité du jugement attaqué : 4. Hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de procédure ou de forme qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée, dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, Mme C... ne peut utilement se prévaloir de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation commises par les premiers juges, qui sont sans incidence sur la régularité du jugement attaqué, pour demander l'annulation du jugement attaqué. Sur la légalité de l'arrêté attaqué : En ce qui concerne le moyen d'incompétence soulevé au soutien des conclusions dirigées contre les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français : 5. L'arrêté attaqué a été signé par Mme A... D..., directrice des migrations à la préfecture des Yvelines, qui a reçu délégation de signature à cet effet par un arrêté n° 78-2021-03-01-010 du 1er mars 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 78-2021-047 du même jour. Cet arrêté définit avec suffisamment de précision le champ des actes pouvant être signés par Mme D.... Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de ces deux décisions doit être écarté. En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance de motivation soulevé au soutien des conclusions dirigées contre les décisions portant refus de titre de séjour et fixant le pays de destination : 6. Ces décisions, qui visent les stipulations applicables de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, en mentionnant, notamment, la situation familiale de la requérante en France et en Algérie ainsi que son état de santé, sont suffisamment motivées. En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour : 7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". 8. Contrairement à ce que soutient la requérante, ces dispositions ne trouvent pas à s'appliquer dans le cas où la décision résulte d'une demande de l'intéressé, ainsi que c'est le cas en l'espèce. Par suite, ainsi que l'ont indiqué à bon droit les premiers juges, ce moyen doit être écarté comme inopérant. 9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 7° Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ". Aux termes de l'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui institue des dispositions de procédure relatives à la délivrance de titres de séjour aux étrangers malades applicables aux ressortissants algériens : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 425-12 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa du même article. (...) ". 10. Pour rejeter la demande de Mme C..., le préfet des Yvelines s'est fondée sur l'avis du 17 mai 2021, émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), indiquant que si l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Si Mme C... soutient qu'elle souffre de varices au niveau des membres inférieurs, de thromboses veineuses, de douleurs abdominales, de difficultés psychiatriques et d'arthrose, les certificats médicaux qu'elle produit ne sont pas de nature à remettre en cause cette appréciation du collège des médecins de l'OFII. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté. 11. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 12. Mme C... se prévaut de la présence en France de deux de ses filles et notamment de l'une d'elle, Sophie Arbane, née C..., résidant à Grenoble, qui souffre de troubles psychiatriques et élève un enfant autiste et nécessiterait la présence de sa mère à ses côtés. Toutefois, elle ne justifie pas résider auprès de sa fille à Grenoble, d'autant qu'elle a subi de très nombreux examens médicaux en région parisienne, où sa demande de titre de séjour a d'ailleurs été déposée. En outre, il ressort des pièces du dossier que l'époux de Mme C..., ainsi que quatre autres de ses enfants résident toujours en Algérie où elle a elle-même vécu jusqu'à l'âge de 63 ans. Dans ces conditions, le préfet des Yvelines n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme C... au regard des buts poursuivis. Il n'a dès lors pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. 13. Il résulte de ce qui précède que les conclusions dirigées contre la décision portant refus de titre de séjour doivent être écartées. En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : 14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté. 15. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges au point 17 du jugement attaqué. 16. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges aux points 19 et 20 du jugement attaqué. 17. En quatrième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés aux points 10 et 12 du présent arrêt. 18. Il résulte de ce qui précède que les conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français doivent être écartées. En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination : 19. Il résulte de ce qui précède que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne sont pas entachées d'illégalité. Par suite, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de destination doit être écarté. 20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet des Yvelines. Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Even, président de chambre, Mme Bonfils, première conseillère, Mme Houllier, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La rapporteure, S. HOULLIERLe président, B. EVEN La greffière, C. RICHARD La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE03292
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil : 1°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé son pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de 12 mois ou, à titre subsidiaire, d'annuler uniquement la décision lui faisant interdiction de retourner sur le territoire français pendant une durée de 12 mois ; 2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours ; 3°) et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance n° 2109216 du 22 juillet 2021, le président du tribunal administratif de Montreuil a transmis la requête de M. B... au tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Par un jugement n° 2109689 du 6 octobre 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé les décisions du 3 juillet 2021 par lesquelles le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé d'octroyer à M. B... un délai de départ volontaire et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an, a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Monconduit, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ; 2°) d'annuler la décision du 3 juillet 2021 lui faisant obligation de quitter le territoire français; 3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois, et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours ; 4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les premiers juges ont omis de répondre aux moyens, soulevés à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, tirés de l'existence d'une erreur de fait et du défaut d'application des dispositions de l'article R. 431-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'a pas bénéficié du droit d'être entendu ; - elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ; - elle est insuffisamment motivée dès lors que le préfet n'a pas visé le cas précis de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable à sa situation ; - elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les dispositions de l'article R. 431-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à ses conséquences sur sa situation personnelle. La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit d'observations. Des pièces, enregistrées pour M. B... le 23 janvier 2023, n'ont pas été communiquées. Par une ordonnance du 6 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 janvier 2023 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Houllier, première conseillère. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant tunisien né le 16 novembre 1989, déclare être entré en France le 20 décembre 2015. Il a sollicité, le 19 février 2021, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ". Par un arrêté du 3 juillet 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français, sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pendant une durée de douze mois. M. B... fait appel du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 2109689 du 6 octobre 2021 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que devant les premiers juges M. B... a soutenu que le préfet avait entaché son arrêté de plusieurs erreurs de fait révélant un défaut d'examen particulier de sa situation. Si le moyen tiré de l'existence de ces erreurs de fait n'est pas formellement visé par le jugement attaqué, ce dernier vise expressément celui tiré du défaut d'examen particulier et répond, au point 4, aux diverses critiques exprimées par M. B... sur ce sujet. Par suite, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments soulevés par le requérant, n'ont pas omis de répondre à ce moyen. 3. En second lieu, s'il ressort du dossier de première instance que M. B... a soulevé un moyen tiré de ce qu'il ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement dès lors qu'il avait déposé une demande de titre de séjour et aurait ainsi dû se voir délivrer un récépissé dans l'attente de son second rendez-vous, il ressort des termes mêmes du jugement attaqué, notamment de ses visas et de son point 4, que les premiers juges ont répondu à ce moyen. Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français : 4. En premier lieu, le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. 5. En l'espèce, il ressort des écritures mêmes du requérant que ce dernier a été entendu par les services de police lors de son interpellation et qu'il a notamment eu l'occasion de former des observations sur le pays à destination duquel il pourrait être reconduit. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie doit être écarté comme manquant en fait. 6. En deuxième lieu, il ressort de l'arrêté attaqué qu'il vise les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 611-1, et comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui ont fondé la décision portant obligation de quitter le territoire français, notamment la nature des liens personnels et familiaux du requérant en France et dans son pays d'origine, ainsi que l'absence de titre de séjour en cours de validité. Par suite, cet arrêté pris à l'issue d'un examen particulier de la situation de M. B... est suffisamment motivé. 7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° L'étranger, entré sur le territoire français sous couvert d'un visa désormais expiré ou, n'étant pas soumis à l'obligation du visa, entré en France plus de trois mois auparavant, s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour ou, le cas échéant, sans demander le renouvellement du titre de séjour temporaire ou pluriannuel qui lui a été délivré (...) ". Aux termes des dispositions de l'article R. 431-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version alors applicable : " L'étranger admis à souscrire une demande de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour se voit remettre un récépissé qui autorise sa présence sur le territoire pour la durée qu'il précise. Ce document est revêtu de la signature de l'agent compétent ainsi que du timbre du service chargé, en vertu de l'article R. 431-20, de l'instruction de la demande. / Le récépissé n'est pas remis au demandeur d'asile titulaire d'une attestation de demande d'asile ". 8. Pour obliger M. B... à quitter le territoire français, le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur la circonstance que ce dernier était entré irrégulièrement en France, sans être titulaire d'un visa, et qu'il n'était pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. 9. S'il ressort des pièces du dossier que M. B... est, contrairement à ce qu'indique l'arrêté attaqué, entré régulièrement en France sous couvert d'un visa de type C, il est constant qu'alors que son visa est expiré, il n'est pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Si M. B... avait par ailleurs initié des démarches pour se voir délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ", il ne disposait, à la date de la décision attaquée, que d'une convocation, fixée au 10 août 2021, pour déposer formellement sa demande. Ainsi, le premier rendez-vous en préfecture, le 19 février 2021, ne saurait être regardé comme ayant abouti au dépôt d'une demande formelle. Par suite, le préfet a légalement pu se fonder sur les dispositions du 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour obliger M. B... à quitter le territoire français, sans qu'y fasse obstacle les démarches entreprises dès lors qu'il n'avait pas encore été mis en possession d'un récépissé de demande sur le fondement de l'article R. 431-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 10. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 11. Si M. B... fait valoir qu'il est présent sur le territoire depuis le 20 décembre 2015 et qu'il y exerce une activité professionnelle comme boulanger depuis avril 2018, d'abord à temps partiel, puis, depuis le 8 octobre 2018, sous couvert d'un contrat de travail à durée indéterminée, il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans attaches familiales en France, à l'exception de son frère, alors que ses parents résident toujours en Tunisie où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 26 ans. Dans ces conditions, en l'absence de tout autre élément attestant d'une insertion dans la société française et de l'intensité de liens personnels et familiaux, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en adoptant à son encontre une obligation de quitter le territoire français, le préfet a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation personnelle du requérant. 12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis et au préfet du Val-d'Oise. Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Even, président de chambre, Mme Bonfils, première conseillère, Mme Houllier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La rapporteure, S. HOULLIERLe président, B. EVEN La greffière, C. RICHARDLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 3 N° 21VE02948 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu, des suppléments de prélèvements sociaux et des pénalités, auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2011. Par un jugement n° 1901927 du 29 mars 2021, le tribunal administratif d'Orléans a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance et rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 31 mai 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes et transmise à la cour administrative d'appel de Versailles par une ordonnance de renvoi du 3 juin 2021, et des mémoires enregistrés le 29 décembre 2021 et les 2 et 24 mars 2022, M. et Mme B..., représentés par Me Bondiguel-Schindler, avocate, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures : 1°) d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il rejette le surplus de leur demande ; 2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ; 3°) à titre subsidiaire, si la requalification en traitements et salaires était validée, de prononcer la décharge des cotisations primitives et supplémentaires de prélèvements sociaux ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - c'est à tort que l'administration fiscale a considéré qu'ils avaient été bénéficiaires d'un avantage occulte à raison de la plus-value réalisée le 24 février 2011 lors de l'achat et de la revente des actions de la SAS Soréal-Ilou, dont M. B... était directeur commercial, dès lors qu'il était de l'intérêt de la société Alone et Co de lui consentir la promesse de cession d'actions conclue le 14 mars 2009 ; la promesse de cession des actions au prix unitaire de 1 euro contractuellement prévue correspond à la valeur de l'action à la date de la promesse, et ne révèle aucune intention libérale ; la plus-value réalisée à la levée de la promesse est justifiée compte tenu de l'investissement de M. B... dans l'accroissement du chiffre d'affaires de la SAS Soréal-Ilou ; la promesse de cession d'actions, qui fait référence au pacte d'actionnaire par lequel M. B... s'est engagé de fait à poursuivre son activité, n'est pas dépourvue de contreparties ; l'acte anormal de gestion reproché par l'administration à la société Alone et Co n'étant pas constitué, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat dans son arrêt n° 453016 du 11 mars 2022, l'imposition dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers du revenu réputé leur avoir été distribué n'est pas fondée ; - pour accueillir la demande de substitution de base légale présentée en défense à titre subsidiaire, tendant à ce que l'imposition soit maintenue dans la catégorie des traitements et salaires sur le fondement de l'article 82 du code général des impôts, la cour devra rechercher si l'avantage trouve essentiellement sa source dans l'exercice par l'intéressé de ses fonctions de salarié, or M. B... n'était pas un cadre lambda, mais un membre fondateur et actionnaire de la société Comptoir provençal des sauces, qui correspond à la branche d'activité restauration hors domicile la plus importante de l'entité issue de la fusion Soréal-Ilou ; M. B... avait la possibilité de lever à tout moment l'option d'achat pendant cinq ans, sans condition tenant à l'atteinte d'objectifs de rentabilité ou de résultat ; - à titre subsidiaire, si la qualification de traitements et salaires était néanmoins retenue, ils sont fondés à demander la décharge intégrale des rappels de prélèvements sociaux et des prélèvements sociaux initialement acquittés sur la plus-value déclarée, soit 37 067 euros, dès lors que l'administration fiscale n'est pas compétente pour encaisser et contrôler les prélèvements sociaux afférents aux revenus d'activité. Par des mémoires en défense enregistrés les 30 novembre 2021 et 13 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête de M. et Mme B.... Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés et demande, à titre subsidiaire, le bénéfice d'une substitution de base légale afin que les impositions soient confirmées, dans la catégorie des traitements et salaires, sur le fondement de l'article 82 du code général des impôts. Par une ordonnance du 14 décembre 2022, l'instruction a été close au 16 janvier 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Les parties ont été informées le 23 janvier 2023, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées à titre subsidiaire par M. et Mme B... tendant à la décharge des cotisations primitives de prélèvements sociaux, qui n'ont pas fait l'objet d'une réclamation préalable et sont nouvelles en cause d'appel. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique, - et les observations de Me Delibes, substituant Me Bondiguel-Schindler, pour M. et Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B..., membre fondateur et directeur commercial de la société par actions simplifiée (SAS) Comptoir provençal des sauces (CPS), qui avait pour activité la fourniture de sauces à des acteurs de la restauration hors domicile sous la marque " Ilou ", puis associé de la SAS Soréal-Ilou issue de la fusion en 2008 de la SAS CPS et de la société Soréal ayant une activité similaire de vendeur de sauces et produits alimentaires intermédiaires destinés aux industriels de l'alimentaire, a bénéficié d'une promesse de cession d'actions conclue le 14 mars 2009 par laquelle la société Alone et Co, holding actionnaire majoritaire de la SAS Soréal-Ilou, s'est engagée à lui céder des actions de cette société au prix unitaire de 1 euro. En exécution de cette promesse de cession d'actions, la société Alone et Co a vendu à M. B... 100 270 parts qu'elle détenait dans le capital de la SAS Soreal-Ilou, le 24 février 2011, au prix unitaire de 1 euro et, le même jour, M. B... a revendu la totalité de ces actions à la société Fifty-Win, au prix de 3,838 euros par action, pour un montant global de 384 836 euros, réalisant ainsi une plus-value de 284 566 euros. A la suite de la vérification de comptabilité de la société Alone et Co, l'administration a estimé que la cession consentie par la société Alone et Co à M. B... était constitutive d'un acte anormal de gestion, réintégré la somme de 284 566 euros dans les bénéfices de la société Alone et Co au titre de l'exercice clos en 2011, et regardé cette somme comme un avantage occulte distribué à M. B.... Par une proposition de rectification du 29 juillet 2014, le service en a tiré les conséquences quant à l'imposition du foyer fiscal de M. B... en assujettissant celui-ci à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux résultant de la requalification en revenus de capitaux mobiliers de la plus-value de cession de valeurs mobilières de 284 566 euros déclarée par M. et Mme B..., assortis d'une pénalité de 40 % pour manquement délibéré. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 29 mars 2021 par lequel le tribunal administratif d'Orléans, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement correspondant à l'abandon de la majoration de 1,25 de la base des prélèvements sociaux, a rejeté le surplus de leur demande de décharge de ces impositions supplémentaires. Ils demandent en outre, à titre subsidiaire, pour le cas où la requalification en traitements et salaires serait accueillie, la décharge des prélèvements sociaux qu'ils ont acquittés sur la plus-value initialement déclarée. Sur les conclusions principales à fin de décharge des impositions supplémentaires : 2. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ". 3. Il résulte de l'instruction qu'en consentant à M. B..., le 14 mars 2009, une promesse de cession d'actions de la SAS Soréal-Ilou, la société Alone et Co poursuivait expressément le but " d'encourager économiquement ses cadres à participer au maximum de leurs possibilités au développement de la société ", que la promesse fait référence à un pacte d'actionnaires, auquel M. B... avait adhéré, le contraignant à céder ses titres en cas de rupture de son contrat de travail, et que le prix unitaire fixé à 1 euro correspondait à la valeur vénale de l'action au jour de cette promesse. Il était en effet de l'intérêt de la société holding Alone et Co, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat statuant au contentieux dans son arrêt du 11 mars 2022, d'inciter M. B..., en sa qualité de directeur commercial de la SAS Soréal-Ilou, à poursuivre sa collaboration au sein de cette société et à en développer le chiffre d'affaires, ce dont il résulterait pour la société Alone et Co une valorisation de sa propre participation. Il s'ensuit que, l'avantage retiré par M. B... le 24 février 2011 de la levée de l'option n'étant pas dépourvu de contrepartie, la société Alone et Co ne peut être regardée comme lui ayant distribué un revenu imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. 4. Toutefois, le ministre demande à la cour, à titre subsidiaire, que les impositions supplémentaires soient maintenues dans la catégorie des traitements et salaires sur le fondement des articles 79 et 82 du code général des impôts. L'administration est en droit, à tout moment de la procédure, de justifier l'imposition en substituant une base légale à une autre, sous réserve que le contribuable ne soit pas privé des garanties de procédure qui lui sont données par la loi. 5. Aux termes du 1 du I de l'article 150-0 A du code général des impôts : " (...) les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières (...) sont soumis à l'impôt sur le revenu. ". L'article 79 du même code dispose que : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu ". Aux termes de l'article 82 de ce code : " Pour la détermination des bases d'imposition, il est tenu compte du montant net des traitements, indemnités et émoluments, salaires, pensions et rentes viagères, ainsi que de tous les avantages en argent ou en nature accordés aux intéressés en sus des traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères proprement dits (...) ". 6. Les gains nets retirés par une personne physique de la cession à titre onéreux de valeurs mobilières sont en principe imposables suivant le régime des plus-values de cession de valeurs mobilières des particuliers institué par l'article 150-0 A du code général des impôts, y compris lorsque ces titres ont été acquis ou souscrits auprès d'une société dont le contribuable était alors dirigeant ou salarié, ou auprès d'une société du même groupe. Il en va toutefois autrement lorsque, eu égard aux conditions de réalisation du gain de cession, ce gain doit essentiellement être regardé comme acquis, non à raison de la qualité d'investisseur du cédant, mais en contrepartie de ses fonctions de salarié ou de dirigeant et constitue, ainsi, un revenu imposable dans la catégorie des traitements et salaires en application des articles 79 et 82 du code général des impôts, réalisé et disponible l'année de la cession de ces titres. 7. Il résulte de l'instruction, notamment des termes de la promesse de cession de titres du 14 mars 2009 et du pacte d'actionnaires du même jour, que le gain retiré par M. B... de la cession des actions de la société Soréal-Ilou résulte de l'avantage qui lui a été consenti par la société mère de celle-ci, la société Alone et Co, à titre d'intéressement, en contrepartie de son investissement dans ses fonctions de directeur commercial de la SAS Soréal-Ilou. En effet, la promesse stipule qu'elle " est consentie à titre strictement personnel au profit du bénéficiaire en considération de ses qualités et de ses attributions et fonctions au sein de la SAS Soréal-Ilou " et selon les termes même du pacte d'actionnaires, " l'objectif avoué " est de " stimuler la participation "des minoritaires" au-delà de la simple rémunération de leur travail afin de leur permettre, au jour de la revente des titres de la société au profit d'un investisseur extérieur, le cas échéant, d'en retirer une légitime plus-value ". En outre, ce pacte d'actionnaires contraignait l'intéressé à céder ses titres en cas de rupture de son contrat de travail. Dans ces conditions, l'avantage trouve essentiellement sa source dans l'exercice par l'intéressé de ses fonctions de dirigeant et de salarié, sans qu'y fasse obstacle les circonstances que M. B... était fondateur et actionnaire de la société Comptoir provençal des sauces, puis associé minoritaire de la SAS Soréal-Ilou, que la promesse n'était pas subordonnée à une condition d'objectifs de rentabilité ou de résultats et que l'avantage a été consenti, non par la société employeuse, mais par la société mère de celle-ci. Par suite, le revenu résultant de la levée de l'option et de la cession des titres le jour même de leur acquisition doit être regardé comme un complément de rémunération imposable dans la catégorie des traitements et salaires. 8. L'imposition du revenu en cause dans la catégorie des traitements et salaires au lieu des revenus de capitaux mobiliers ne prive les contribuables d'aucune garantie. L'imposition des sommes litigieuses peut par suite être maintenue, en droits et pénalités, sur le fondement de l'article 82 du code général des impôts. La cour n'étant pas tenue de rechercher, en l'absence de demande des requérants fondée sur cette base légale substituée, si celle-ci peut conduire à une réduction des bases d'imposition, la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu en litige doit être confirmée. 9. En revanche, aux termes de l'article 1600-0 C du code général des impôts : " La contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine est établie, contrôlée et recouvrée conformément aux dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale ". Aux termes de l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale : " Il est institué une contribution sociale sur les revenus d'activité (...) ". Aux termes de l'article L. 136-2 du même code : " I.- La contribution est assise sur le montant brut des traitements, indemnités, émoluments, salaires, (...) ". L'article L. 136-5 du même code prévoit que : " I. - (...), la contribution portant sur les revenus mentionnés aux articles L. 136-1 à L. 136-4 est recouvrée par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général de sécurité sociale selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations au régime général pour la même catégorie de revenus. (...) ". 10. Il résulte de ces dispositions qu'à la différence des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, qui sont assis, contrôlés et recouvrés par voie de rôle selon les mêmes règles que l'impôt sur le revenu, la contribution sociale généralisée, la contribution au remboursement de la dette sociale et le prélèvement social de 2 % sur les revenus d'activité sont recouvrés selon les règles applicables au recouvrement des cotisations du régime général de sécurité sociale. 11. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit, le gain de cession réalisé par M. B... à raison de ses fonctions doit être regardé comme un complément de ses revenus d'activité. Ce revenu, qui relève de la contribution sociale sur les revenus d'activité et de remplacement prévue par les articles L. 136-1 et L. 136-2 du code de la sécurité sociale, ne pouvait être assujetti, en application de l'article L. 136-6 de ce code, à la contribution sociale généralisée, à la contribution pour le remboursement de la dette sociale et au prélèvement social sur les revenus du patrimoine prévus par les articles 1600-0 C, 1600-0 F bis et 1600-0 G du code général des impôts. La base légale substituée ne permettant pas de justifier légalement ces impositions, les cotisations supplémentaires de contributions sociales doivent par suite être déchargées. Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire, à fin de décharge des cotisations primitives de prélèvements sociaux : 12. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial, selon le cas, de la direction générale des finances publiques ou de la direction générale des douanes et droits indirects dont dépend le lieu de l'imposition " et aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 200-2 du même livre : " Le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation à l'administration ". Il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut contester devant le tribunal administratif ou a fortiori pour la première fois en cause d'appel, des impositions dont il n'a pas demandé la décharge dans sa réclamation préalable. 13. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la réclamation préalable présentée le 14 novembre 2016 par M. et Mme B... tendait seulement à la charge des suppléments d'imposition sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre de l'année 2011 par l'avis d'imposition du 31 octobre 2016, mais ne portait pas sur les prélèvements sociaux qu'ils avaient spontanément acquittés, résultant de leur déclaration d'une plus-value de cession de valeurs mobilières. Par suite, les conclusions relatives à ces cotisations primitives de prélèvements sociaux sont irrecevables. 14. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande de décharge des suppléments de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2011. 15. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : M. et Mme B... sont déchargés des suppléments de prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine mis à leur charge au titre de l'année 2011. Article 2 : Le jugement n° 1901927 du 29 mars 2021 du tribunal administratif d'Orléans est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme B... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et Mme C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente assesseure, Mme Pham, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 mars 2023. La rapporteure, O. A... Le président, P. BEAUJARDLa greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 21VE01745
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... F... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2019 par lequel le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2001059 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 4 août 2021, Mme F..., représentée par Me Duplantier, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de résident en qualité d'ascendant de français, ou une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de reprendre l'instruction de son dossier et de l'admettre au séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, sous réserve qu'il renonce à percevoir le bénéfice de l'aide juridictionnelle, en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - la décision de refus de titre est entachée d'un vice de procédure dès lors que le préfet du Loiret n'a pas saisi la commission du titre de séjour ; - elle méconnaît les dispositions du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. - elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle est entachée d'une erreur manifeste de l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - l'obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale car entachée d'illégalité par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour. Par un mémoire en défense enregistré le 27 juillet 2022, le préfet du Loiret a conclu au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme F... ne sont pas fondés. Mme F... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 mai 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme F..., ressortissante camerounaise, née le 10 juillet 1953, est entrée sur le territoire français le 14 novembre 2011 munie d'un passeport revêtu d'un visa " ascendant non à charge ". Elle a fait l'objet d'un arrêté préfectoral refusant sa première demande de délivrance d'un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français le 26 juillet 2013. Par un arrêté du 28 novembre 2018, le préfet du Loiret a rejeté sa nouvelle demande de délivrance d'un titre de séjour, en assortissant cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et en fixant le pays de destination. Par un jugement n° 1900913 du 8 février 2019, le tribunal administratif d'Orléans a annulé cet arrêté au motif que le préfet du Loiret n'avait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme F... au regard de l'article L. 313-11 alinéa 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a enjoint au préfet de procéder au réexamen de celle-ci. Par un arrêté du 21 décembre 2019, le préfet du Loiret a de nouveau refusé de délivrer un titre de séjour à Mme F... et l'a obligée à quitter le territoire français. Mme F... fait appel du jugement n° 2001059 du 22 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour : 2. En premier lieu, le moyen tiré du vice de procédure résultant du défaut de saisine par le préfet du Loiret de la commission du titre de séjour, déjà soulevé en première instance et à l'appui duquel Mme F... ne présente en appel aucun élément de fait ou de droit nouveau, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit par les premiers juges au point 8 du jugement attaqué. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de dix-huit à vingt et un ans ou dans les conditions prévues à l'article L. 311-3 ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ". 4. Mme F... soutient que depuis son arrivée en France, le 14 novembre 2011, munie d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour d'une durée de trente jours portant la mention " ascendant non à charge ", elle est prise en charge par sa fille, Mme G... D... épouse C..., de nationalité française, ainsi que son gendre, parents de deux enfants scolarisés en France. Elle produit plusieurs mandats d'argent qui lui ont été adressés de 2001 à 2008 par sa fille, Mme C... ou son époux, dont deux ont été adressés à Mme C... par son époux alors qu'elle rendait visite à Mme F... au Cameroun le 15 février 2003 et le 10 avril 2007. Mme C... précise en outre que Mme F... apporte une aide dans les travaux de la maison, la garde et l'éducation des enfants car elle-même et son époux travaillent et sont propriétaires de leur logement. Toutefois, il est constant que Mme F... se maintient en situation irrégulière sur le territoire français depuis le 2 décembre 2011, date à laquelle son visa de court séjour arrivait à expiration, et ne dispose pas d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. Mme F... ne démontre pas avoir bénéficié d'un soutien financier continu de la part de sa fille entre 2001 et son arrivée en France en 2011. Au surplus, si les avis d'imposition sur les revenus des époux C... au titre des années 2016, 2017 et 2018, font apparaître divers montants correspondant à des pensions alimentaires, notamment " versée à enfants majeurs ", ils ne permettent pas seuls d'affirmer que Mme F... était la bénéficiaire de ces pensions. Par suite, le préfet a pu sans méconnaître les dispositions du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se fonder sur un tel motif pour refuser de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'" ascendant à charge " d'un ressortissant français. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". L'article 6 de l'accord-franco algérien du 27 décembre 1968 modifié stipule que : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". 6. Mme F..., qui est divorcée depuis 2006, soutient qu'elle est âgée de 68 ans, qu'elle est illettrée, qu'elle souffre d'hypertension artérielle, qu'elle serait totalement isolée en cas de retour dans son pays d'origine car ses deux parents et son fils sont décédés, son frère se trouve dans l'incapacité matérielle de la prendre en charge ou de l'accueillir à son domicile au Cameroun, qu'elle est sans nouvelles de sa fille Mme E... D... qui s'occupait d'elle et, enfin, qu'elle doit pouvoir compter sur le soutien affectif et financier de sa fille et de son gendre, qui l'entourent avec leurs deux enfants et lui permettent de vivre sereinement en France. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée n'est pas dépourvue de toute attache dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 58 ans, et où réside toujours son frère avec sa femme et ses enfants. En outre, les circonstances qu'elle allègue ne sauraient établir que sa présence en France serait nécessaire pour assister sa fille et son gendre dans leur foyer, ni que sa fille résidant en France ne serait plus en mesure de continuer à lui apporter un soutien financier alors qu'elle se trouverait au Cameroun, ni que ces derniers et leurs enfants se trouveraient dans l'impossibilité de lui rendre visite au Cameroun ou qu'elle ne pourrait leur rendre visite en France à l'occasion de courts séjours. Par suite, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni méconnu l'article L. 313-11 alinéa 7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne lui délivrant pas une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée. Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : 7. En dernier lieu, la décision refusant le renouvellement du titre de séjour dont disposait Mme F... n'étant pas illégale, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale comme étant dépourvue de base légale. 8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées à titre accessoire, à fin d'injonction et sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... F... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Loiret. Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Even, président de chambre, Mme Bonfils, première conseillère, Mme Houllier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le président-rapporteur, B. A... L'assesseure la plus ancienne, M-G. BONFILS La greffière, C. RICHARD La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 3 2 N° 21VE02384
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... E... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2200561 du 28 avril 2022, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 21 décembre 2021 par laquelle le préfet des Deux-Sèvres a obligé Mme B... à quitter le territoire français. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 23 mai 2022, le préfet des Deux-Sèvres demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Versailles. Il soutient que : - l'arrêté attaqué a été signé par une autorité compétente ; - cet arrêté est suffisamment motivé ; - le titre de séjour dont Mme B... demandait le renouvellement ne l'autorisait qu'à séjourner sur le territoire mahorais si bien que Mme B... aurait dû obtenir un visa pour se rendre en métropole, ce qu'elle n'a pas fait ; par suite, elle ne peut demander la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire dans les conditions de droit commun prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - Mme B... ne justifie pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant et cet entretien ne peut être présumé du seul fait qu'elle vive avec l'enfant ; Mme B... ne justifie pas non plus de ce que le père de son enfant contribue effectivement à son entretien et à son éducation ; - la décision de refus de titre de séjour ne viole pas les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni ne méconnaît l'intérêt supérieur de l'enfant ; - la décision obligeant Mme B... à quitter le territoire français ne méconnaît pas l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que celui-ci renvoie expressément à l'article 371-2 du code civil et que Mme B... ne remplit pas les conditions pour se voir attribuer un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français. La requête a été communiquée à Mme B..., qui n'a pas produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ressortissante comorienne née en 1991, est entrée en France métropolitaine le 2 août 2021 munie d'un titre de séjour l'autorisant à séjourner et à travailler à Mayotte. Elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français. Par arrêté du 21 décembre 2021, le préfet des Deux-Sèvres a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Sur demande de Mme B... et par un jugement n° 2200561 du 28 avril 2022, dont le préfet des Deux-Sèvres relève appel, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 21 décembre 2021 par laquelle le préfet des Deux-Sèvres a obligé Mme B... à quitter le territoire français. 2. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux termes duquel " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ". L'article 371-2 du code civil dispose : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse de plein droit ni lorsque l'autorité parentale ou son exercice est retiré, ni lorsque l'enfant est majeur. ". Si le bénéfice de ces dispositions protectrices est subordonné à la condition que l'étranger se prévalant de sa qualité de parent d'enfant français contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, cette condition, propre à l'étranger visé par les dispositions du 6° de l'article L. 511-4, n'implique pas que l'autre parent apporte également cette contribution. 3. A l'appui de sa demande, Mme B... n'a soulevé qu'un moyen tiré de ce que la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaissait l'article L. 611-3 5° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle est la mère d'un enfant français, dénommé Willamou Ali Boana, dont elle contribue à l'entretien et à l'éducation. Le préfet des Deux-Sèvres ne peut utilement lui opposer que le père de son enfant ne contribue pas à l'entretien de ce dernier. 4. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... vit avec son fils, la circonstance qu'elle serait hébergée chez des tiers, relevée par le préfet, n'étant pas incompatible avec la constatation de ce fait. Elle produit en outre des factures d'achat et de cantine ce qui suffit, étant donné cette résidence commune, à établir qu'elle contribue à l'entretien et à l'éducation de son fils qui, né en 2017, ne peut subvenir à ses besoins seul. Par suite, elle remplit les conditions énoncées au 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 5. Il résulte de ce qui précède que, alors même que Mme B... ne remplirait pas par ailleurs les conditions pour obtenir un titre de séjour, et que la décision attaquée ne méconnaitrait pas les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le préfet des Deux-Sèvres n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé sa décision du 21 décembre 2021 obligeant Mme B... à quitter le territoire français. D É C I D E : Article 1er : La requête du préfet des Deux-Sèvres est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Mme C... D.... Copie en sera adressée au préfet des Deux-Sèvres. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente assesseure, Mme Pham, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. La rapporteure, C. A... Le président, P. BEAUJARDLa greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 22VE01238
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande du 23 septembre 2019 d'assignation à résidence avec autorisation de travail et la décision explicite du 27 janvier 2020 du préfet du Val-d'Oise. Par un jugement n° 2004170 du 31 janvier 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 mars et 4 août 2022, M. A..., représenté par Me Liger, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement attaqué ; 2°) d'annuler la décision du 27 janvier 2020 du préfet du Val-d'Oise ; 3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise, à titre principal, de l'assigner à résidence, subsidiairement, de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - le jugement attaqué est entaché d'erreur d'appréciation et de dénaturation ; - la décision de refus d'assignation à résidence est entachée d'une erreur de droit en raison de l'illégalité de la décision portant expulsion qui la fonde ; - le préfet a commis une erreur de droit dans l'application des dispositions des articles L. 523-3 et L. 523-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - il n'a pas pris en compte l'intérêt supérieur de ses enfants mineurs en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; - le refus qui lui est opposé est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation. La requête a été communiquée au préfet du Val-d'Oise qui n'a pas produit de mémoire. Par une décision du 10 mai 2022, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - et les observations de Me Liger pour M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant ivoirien né le 7 août 1982, entré en France en 1993, plusieurs fois condamné et incarcéré de 2010 à 2013 et de 2014 à mars 2018, a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion le 19 avril 2018 qui n'a pas été contesté. M. A... a présenté au préfet du Val-d'Oise le 23 septembre 2019 une demande d'assignation à résidence avec autorisation de travail reçue le 14 octobre 2019. Par une décision explicite du 27 janvier 2020, qui s'est substituée à la décision implicite née le 14 décembre 2019, le préfet du Val-d'Oise a refusé de l'assigner à résidence. M. A... relève appel du jugement du 31 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de cette décision. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Si M. A... soutient que les premiers juges ont entaché leur décision d'une erreur d'appréciation et de dénaturation, ces moyens relèvent du bien-fondé du jugement attaqué et sont sans incidence sur sa régularité. Sur le bien-fondé du jugement et la légalité de la décision contestée : 3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 523-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa codification applicable à la date de la décision contestée : " L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion et qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français en établissant qu'il ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays peut faire l'objet d'une mesure d'assignation à résidence dans les conditions prévues à l'article L. 561-1. Les dispositions de l'article L. 624-4 sont applicables. ". Il appartient à l'étranger qui, à la suite d'un arrêté d'expulsion, demande à être assigné à résidence en application de ces dispositions, de justifier soit qu'il se trouve dans l'impossibilité matérielle ou juridique de quitter le territoire français soit que sa vie ou sa liberté sont menacées dans le pays de destination qui lui est assigné ou qu'il est exposé dans ce pays à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 4. En l'espèce, M. A... ne justifie pas, ni même n'allègue, d'impossibilités matérielles ou juridiques de quitter le territoire français, ni de menaces pour sa vie ou sa liberté en cas de retour en Côte d'Ivoire. En se prévalant de l'ancienneté de son séjour et de sa situation familiale en France, M. A... n'établit pas davantage être exposé à un risque de traitements inhumains et dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans son pays d'origine. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 523-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés. Le refus d'assignation à résidence contesté n'emportant aucune conséquence sur la situation personnelle et familiale du requérant, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant sont inopérants. Il en est de même du moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la mesure d'expulsion prise à son encontre le 19 avril 2018, dès lors que le refus d'assignation à résidence n'est pas pris pour l'exécution de l'arrêté d'expulsion et que cet arrêté ne constitue pas la base légale du refus d'assignation à résidence contesté. En outre, cet arrêté d'expulsion, dont l'intéressé indique qu'il en a eu connaissance le 28 juin 2009, est devenu définitif. M. A... n'invoque pas plus utilement les dispositions de l'article L. 523-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, dès lors que la mesure d'expulsion dont il a fait l'objet n'a pas été prononcée en application de l'article L. 521-2 de ce code. 5. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente-assesseure, M. Tar, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. La rapporteure, O. C... Le président, P. BEAUJARD La greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour exécution conforme La greffière, 2 N° 22VE00474
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 9 février 2022 par lequel le préfet du Loiret lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai et lui a interdit le retour sur le territoire français durant un an. Par un jugement n° 2200447 du 17 février 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 17 mars 2022, et un mémoire enregistré le 11 mars 2023 qui n'a pas été communiqué, M. C..., représenté par Me Duplantier, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement attaqué ; 2°) d'annuler l'arrêté contesté ; 3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de l'admettre au séjour le temps du réexamen de sa situation, dans le délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît la protection contre l'éloignement des parents d'enfant français prévue au 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle porte une atteinte excessive à sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - en lui notifiant une obligation de quitter le territoire à l'occasion de sa demande de reconnaissance de paternité, le préfet a entaché sa décision d'un détournement de pouvoir ou de procédure ; - le refus de délai de départ volontaire est entaché d'une erreur de fait, d'une erreur de droit et en toute hypothèse d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que le motif d'ordre public visé par l'arrêté contesté n'est pas constitué ; il justifie de garanties de représentation ; - la décision portant interdiction de retour sur le territoire français durant un an méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - elle ne prend pas en compte l'intérêt supérieur de son enfant à naître, en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Par un mémoire en défense enregistré le 4 août 2022, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale des droits de l'enfant ; - le code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative. Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique. Une note en délibéré, présentée pour M. C..., a été enregistrée le 16 mars 2023. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., ressortissant marocain né le 15 décembre 1987, entré en France le 11 mai 2017 avec un visa de court séjour, a fait l'objet le 9 février 2022 d'un arrêté du préfet du Loiret lui faisant obligation de quitter le territoire sans délai et lui interdisant le retour sur le territoire français durant un an. M. C... relève appel du jugement du 17 février 2022 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions. Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français : 2. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (...) ". 3. Si M. C... fait valoir que sa compagne est enceinte et qu'il a dès lors vocation à devenir le parent d'un enfant de nationalité française, cette circonstance ne lui permet pas de bénéficier de la protection contre l'éloignement prévue par les dispositions rappelées au point précédent dès lors que l'enfant dont il se dit le père n'était pas né à la date de l'arrêté contesté. 4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". 5. M. C... n'établit pas la continuité de sa présence en France depuis 2017. La réalité de sa relation avec Mme B... depuis septembre 2020 ne peut davantage être tenue pour établie au vu des seules attestations produites au dossier. En tout état de cause, cette relation était récente à la date de l'arrêté contesté et l'enfant porté par Mme B... n'était pas né. M. C... a par ailleurs fait l'objet de deux précédentes obligations de quitter le territoire prises à son encontre par le préfet du Loiret le 1er février 2021 et le 17 avril 2019. Il est dépourvu de ressources et ne justifie d'aucune insertion professionnelle. Dans ces conditions, la mesure d'éloignement contestée n'a pas porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive au regard des buts poursuivis. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. 6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision portant obligation de quitter le territoire français en raison de ses conséquences sur la situation de M. C... doit être écarté. 7. Enfin, M. C... fait valoir que le préfet ne pouvait, sans entacher sa décision d'un détournement de pouvoir ou de procédure, prendre la décision d'éloignement contestée à l'occasion de l'enquête pour suspicion de reconnaissance frauduleuse de paternité dont il faisait l'objet à la demande du procureur de la République. Toutefois, il ressort de la convocation qui lui a été adressée par les services de police que M. C... a été informé de ce qu'il serait également entendu sur sa situation irrégulière sur le territoire français. En lui notifiant l'arrêté contesté à l'occasion de cet entretien, le préfet du Loiret n'a, en tout état de cause, pas entaché sa décision du détournement de pouvoir ou de procédure allégué. Sur la légalité de la décision portant refus de délai de départ volontaire : 8. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / (...) / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. " Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / 2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa (...) ; / 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; / 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, (...) ". 9. Si l'arrêté contesté vise le 1° de l'article L. 612-2, il ressort des motifs de la décision de refus de départ volontaire que celle-ci est fondée sur le motif tiré du risque que l'intéressé se soustraie à son éloignement, en ce que M. C... s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire après l'expiration de son visa, n'a pu présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français et s'est soustrait à l'exécution de deux précédentes mesures d'éloignement. Le délai de départ volontaire n'ayant pas été refusé au requérant pour un motif d'ordre public, le moyen tiré de ce que le comportement de M. C... ne constituerait pas une menace pour l'ordre public est inopérant. 10. Alors même que M. C... justifierait de garanties de représentation, le préfet du Loiret était légalement fondé à lui refuser un délai de départ volontaire au seul motif qu'il a fait l'objet de deux précédentes mesures d'éloignement non exécutées. Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français : 11. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ". 12. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 5 du présent arrêt, M. C... ne justifie ni de l'ancienneté de sa présence en France, ni de sa relation avec une ressortissante française, et l'enfant dont celle-ci était enceinte n'était pas né à la date de l'arrêté contesté. Dans ces circonstances, alors que M. C... a fait l'objet de deux précédentes mesures d'éloignement et ne justifie pas de son insertion dans la société française, en assortissant l'obligation de quitter le territoire sans délai d'une interdiction de retour d'une durée d'un an, le préfet du Loiret n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs précédemment exposés, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant doivent être écartés. 13. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Loiret. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente-assesseure, Mme Pham, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. La rapporteure, O. A... Le président, P. BEAUJARD La greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour exécution conforme, La greffière, 2 N° 22VE00628
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 30 décembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai. Par un jugement n° 2101492 du 21 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 21 janvier 2022, Mme A..., représentée par Me Rochiccioli, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté en tant qu'il lui refuse la délivrance d'un titre de séjour et l'oblige à quitter le territoire français ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de saisir la commission du titre de séjour, dans le même délai, et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un vice de procédure en l'absence de consultation préalable de la commission du titre de séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ; - elle est entachée d'erreurs de fait quant à la date de son entrée en France, sa situation familiale et ses perspectives professionnelles ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle. La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas présenté de mémoire en défense. Par une ordonnance du 27 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 février 2023 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur, - et les observations de Me Sainte Fare Garnot, substituant Me Rochiccioli, avocate de Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., ressortissante tunisienne, née le 2 décembre 1972, a sollicité, le 12 mars 2020, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 décembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai. Mme A... fait appel du jugement du 21 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il lui refuse la délivrance d'un titre de séjour et l'oblige à quitter le territoire français. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ". 3. Il ressort des mentions de l'arrêté attaqué que, pour rejeter la demande de titre de séjour de Mme A..., le préfet de la Seine-Saint-Denis a notamment considéré que l'intéressée, qui a déclaré être entrée en France le 26 juin 2009, n'apporte pas d'éléments suffisamment probants propres à justifier de sa présence réelle et continue sur le territoire français depuis son arrivée, notamment pour les années 2011 à 2014 pour lesquelles elle ne produit que des extraits de compte, des ordonnances médicales et des courriers administratifs. Toutefois, il ressort des pièces versées au dossier, notamment en appel, que la requérante, en produisant des documents suffisamment nombreux, variés et probants, y compris s'agissant des années 2011 à 2014, notamment des documents d'ordre médical, des documents et relevés bancaires, des mandats de transfert d'argent, des cartes individuelles d'admission à l'aide médicale d'Etat, des titres de transport, des courriers d'administration, des avis d'imposition et des factures de téléphonie mobile, justifie qu'à la date de l'arrêté contesté, elle résidait en France habituellement depuis plus de dix ans. Ainsi, le préfet de la Seine-Saint-Denis a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables aux ressortissants tunisiens en tant qu'elles prévoient la possibilité de bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale, en ne faisant pas précéder la décision de refus de titre de séjour en litige de la saisine de la commission du titre de séjour, constitutive d'une garantie pour l'intéressée. Par suite, Mme A... est fondée à demander, pour ce motif, l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour ainsi que, par voie de conséquence, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. 4. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte : 5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si la décision portant obligation de quitter le territoire français est annulé, (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ". 6. Eu égard au motif d'annulation retenu au point 3, le présent arrêt n'implique pas nécessairement la délivrance à Mme A... d'un titre de séjour, mais seulement le réexamen de sa situation. Il y a donc lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation de Mme A... dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, après avoir saisi la commission du titre de séjour du cas de l'intéressée au titre de sa résidence habituelle en France, et de lui délivrer, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme A... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2101492 du 21 décembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 30 décembre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant de délivrer à Mme A... un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français, sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation de Mme A... et, au préalable, de saisir pour avis la commission du titre de séjour, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour. Article 3 : L'Etat versera à Mme A... la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de la Seine-Saint-Denis. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. d'Haëm, président, - M. Mantz, premier conseiller, - Mme d'Argenlieu, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. Le président-rapporteur, R. d'HAËML'assesseur le plus ancien, P. MANTZ La greffière, A. GASPARYAN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA00315
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... E... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 29 novembre 2019 par laquelle le directeur de la maison d'arrêt d'Amiens a refusé de lui délivrer un permis de visite au profit de M. D... A.... Par un jugement n° 2000287 du 30 septembre 2021, le tribunal administratif d'Amiens a annulé cette décision. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 1er décembre 2021, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande présentée par Mme E.... Il soutient que : - la peine à laquelle M. A... a été condamné était de nature à justifier la décision de refus en litige ; - les autres moyens doivent être écartés. La requête a été communiquée à Mme E... qui n'a pas produit de mémoire. Par ordonnance du 11 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 31 août 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de procédure pénale ; - la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Corinne Baes-Honoré présidente-assesseure, - les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme E... a saisi le tribunal administratif d'Amiens d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 29 novembre 2019 par laquelle le directeur de la maison d'arrêt d'Amiens lui a refusé la délivrance d'un permis de visite au profit de M. D... A..., détenu. Le garde des sceaux, ministre de la justice relève appel du jugement du 30 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé cette décision. 2. Aux termes de l'article 35 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 alors applicable : " Le droit des personnes détenues au maintien des relations avec les membres de leur famille s'exerce soit par les visites que ceux-ci leur rendent, soit, pour les condamnés et si leur situation pénale l'autorise, par les permissions de sortir des établissements pénitentiaires. Les prévenus peuvent être visités par les membres de leur famille ou d'autres personnes, au moins trois fois par semaine, et les condamnés au moins une fois par semaine. / L'autorité administrative ne peut refuser de délivrer un permis de visite aux membres de la famille d'un condamné, suspendre ou retirer ce permis que pour des motifs liés au maintien du bon ordre et de la sécurité ou à la prévention des infractions (...) ". 3. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les décisions tendant à restreindre, supprimer ou retirer les permis de visite relèvent du pouvoir de police des chefs d'établissements pénitentiaires. Ces décisions affectant directement le maintien des liens des détenus avec leurs proches sont susceptibles de porter atteinte à leur droit au respect de leur vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il appartient en conséquence à l'autorité compétente de prendre les mesures nécessaires, adaptées et proportionnées pour assurer le maintien du bon ordre et de la sécurité de l'établissement pénitentiaire ou, le cas échéant, la prévention des infractions sans porter d'atteinte excessive au droit des détenus au respect de leur vie privée et familiale. 4. Il ressort des pièces du dossier que pour refuser à Mme E... le permis de visite qu'elle demandait en faveur de M. A..., le directeur de la maison d'arrêt d'Amiens s'est fondé sur la circonstance que celui-ci avait été condamné par des jugements du tribunal de grande instance d'Amiens en date des 4 juillet 2016 et 31 juillet 2017, pour violences puis menaces de mort sur Mme E.... Il résulte également du premier de ces jugements que les violences ont consisté à asséner " des coups de poing, des coups de pied ainsi que des coups de ceinturon " à Mme E.... Le ministre se prévaut aussi de la peine complémentaire ayant assorti le sursis d'une interdiction d'entrer en relation avec la victime de l'infraction. Si ce sursis avait été révoqué à la date de la décision contestée, il n'en demeure pas moins que le prononcé de cette interdiction constituait un élément d'appréciation sur lequel l'administration pouvait se fonder. Dans ces circonstances, et alors même que Mme E... avait été autorisée à voir M. A... pendant plusieurs mois après cette condamnation, le garde des sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a jugé que la décision du 29 novembre 2019 du directeur de la maison d'arrêt d'Amiens était entachée d'erreur d'appréciation. 5. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme E... devant le tribunal administratif d'Amiens. 6. Si Mme E... se prévaut de sa qualité de concubine et fait valoir qu'elle est le seul soutien en détention de M. A..., il n'est pas sérieusement contesté que ce dernier reçoit régulièrement la visite de ses proches. Dans ces conditions, et au regard des circonstances rappelées au point 4, le directeur de la maison d'arrêt n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, la circonstance que M. A... s'est vu diagnostiquer un état dépressif majeur, ne suffit pas à caractériser une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur sa situation personnelle. 7. Il résulte de tout ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 30 septembre 2021, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 29 novembre 2019 du directeur de la maison d'arrêté d'Amiens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 30 septembre 2021 du tribunal administratif d'Amiens est annulé. Article 2 : La demande présentée par Mme E... devant le tribunal administratif d'Amiens est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice et à Mme C... E.... Délibéré après l'audience publique du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient : - M. Marc Heinis, président de chambre, - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, - M. Denis Perrin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La présidente-rapporteure, Signé: C. Baes-HonoréLe président de la 1ère chambre, Signé: M. B... La greffière, Signé: C. Sire La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N° 21DA02757 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2018 par lequel le maire de Quiberville-sur-Mer a accordé à M. G... B... un permis de construire modificatif n° PC 76515 17 D0005 M02, ainsi que la décision ayant rejeté leur recours gracieux. Par un jugement n°1902401 du 7 octobre 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 17 décembre 2021, et des mémoires enregistrés les 29 septembre 2022 et 9 décembre 2022, M. et Mme D..., représentés par Me Pierre-Xavier Boyer, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune du 10 décembre 2018, ainsi que la décision de rejet du recours gracieux ; 3°) de mettre à la charge de toute partie succombante la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - les écritures en défense de la commune de Quiberville-sur-mer ne sont pas recevables, le maire ne justifiant pas de son habilitation à la représenter en justice ; - ils ont intérêt à agir contre le permis attaqué ; - le dossier de permis modificatif est entaché d'incomplétudes qui ont été de nature à fausser l'appréciation de l'administration sur le projet ; - il existe une incohérence entre la hauteur indiquée dans le dossier et dans l'arrêté, et celle mentionnée sur le panneau d'affichage ; - le projet autorisé méconnaît l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme ; - les hauteurs de la construction sont supérieures à celles mentionnées dans le dossier ; la conformité de la construction au projet n'est pas établie. Par des mémoires en défense, enregistrés le 16 mars 2022, le 12 octobre 2022 et le 14 octobre 2022, la commune de Quiberville-sur-Mer, représentée par la SCPA Dulière, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme D... de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les requérants ne présentent pas d'intérêt à agir ; - les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 12 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Corinne Baes-Honoré présidente-assesseure, - les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public, - et les observations de Me Thierry Duliere, représentant la commune de Quiberville-sur-Mer. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 3 juillet 2017, le maire de Quiberville-sur-Mer a accordé à M. B... un permis de construire une maison individuelle d'une surface de plancher de 82 m2 sur la parcelle située 78 rue des Loriots. Le 25 septembre 2018, le maire de Quiberville-sur-Mer a accordé à M. B... un premier permis de construire modificatif en vue de créer une fenêtre et de changer la taille des menuiseries de la construction projetée. Le 10 décembre 2018, le maire lui a accordé un deuxième permis de construire modificatif en vue de rehausser le vide sanitaire de 0,50 mètre et de créer un escalier de huit marches afin d'accéder à la porte d'entrée de la maison. M. et Mme D... ont formé un recours gracieux contre les deux permis de construire modificatifs et ce recours a fait l'objet d'un rejet explicite le 23 avril 2019. Ils ont alors demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler le permis de construire modificatif du 10 décembre 2018 et le rejet du recours gracieux formé contre ce dernier. Ils relèvent appel du jugement du 7 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur requête. Sur la recevabilité de la requête : 2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation (...) ". 3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Lorsque le requérant, sans avoir contesté le permis initial, forme un recours contre un permis de construire modificatif, son intérêt pour agir doit être apprécié au regard de la portée des modifications apportées par le permis modificatif au projet de construction initialement autorisé. Il appartient dans tous les cas au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction. 4. M. et Mme D... établissent être propriétaires d'une parcelle immédiatement voisine du projet, laquelle est elle-même contiguë à une parcelle supportant déjà une habitation dont ils sont également propriétaires. Il ressort des pièces du dossier de la demande de permis modificatif de la façade Nord, complétée par la production de plans déposés en mairie le 6 novembre 2018, que la création d'un vide sanitaire d'une hauteur de 0,5 mètre a eu pour effet d'augmenter, dans la même mesure, la hauteur du faîtage qui est ainsi passée de 6,8 à 7.3 mètres. Si cette surélévation n'a pas aggravé la vue sur le terrain des requérants depuis le balcon de la façade Est du premier étage du bâtiment en cause, il résulte des photos versées au dossier que la vue depuis la terrasse du rez-de-chaussée de ce bâtiment sur le jardin de M. et Mme D... sera plus importante du fait du permis modificatif accordé. 5. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le tribunal administratif de Rouen a considéré qu'ils ne justifiaient pas d'un intérêt pour agir contre le permis modificatif. Il en résulte que ce jugement est entaché d'irrégularité et doit être annulé. 6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme D... devant le tribunal administratif de Rouen. Sur la recevabilité des mémoires en défense de la commune de Quiberville-sur-mer : 7. Aux termes de l'article L. 2122-23 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal (...) ". 8. Il ressort des pièces versées au dossier de première instance que par délibérations des 29 mars 2014 et 2 juin 2020, transmises respectivement les 16 avril 2014 et 12 juin 2020 à la sous-préfecture de Dieppe, le conseil municipal de Quiberville a chargé son maire " d'intenter au nom de la commune les actions en justice et de défendre la commune dans les actions intentées contre elle ", en vertu du 16° de l'article L. 2122-23 du code général des collectivités territoriales. Cette délibération dispose qu'elle fera l'objet " de toutes les mesures de publicité, notification et transmission légales et réglementaires " et les requérants n'apportent aucun élément de nature à contredire ces mentions. Il s'ensuit que le maire a bien qualité pour représenter la commune de Quiberville-sur-Mer en défense et que M. et Mme D... ne sont pas fondés à demander que les écritures de la commune soient écartées. Sur la légalité du permis de construire modificatif : 9. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. (...) ". Aux termes de l'article R. 431-10 de ce code : " Le projet architectural comprend également : / (...) b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; (...) ". 10. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. Par ailleurs, l'instruction d'une demande de permis de construire modificatif ne devant porter que sur les modifications envisagées, la régularité de la composition d'un dossier de demande de permis modificatif doit être appréciée en tenant compte de la nature et de l'ampleur de ces modifications. 11. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le permis modificatif n'a eu pour objet que de créer quelques marches, de modifier la hauteur de la construction et de la déplacer de 0,65 mètre, afin de respecter la règle de prospect. Si le dossier ne comportait pas de plan de masse coté dans les trois dimensions, il comportait un document déposé le 6 novembre 2018, intitulé " plan de coupe " matérialisant l'escalier, les différentes hauteurs des éléments de la construction, la hauteur totale au faîtage, la distance par rapport à la limite séparative et la hauteur de la construction par rapport au terrain. Il en résulte que l'ensemble des éléments joints à cette demande de permis modificatif ont permis à l'autorité administrative de porter une appréciation sur la conformité de ces modifications à la réglementation applicable. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté. 12. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme : " A moins que le bâtiment à construire ne jouxte la limite parcellaire, la distance comptée horizontalement de tout point de ce bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à trois mètres ". 13. Dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet nécessitait un remblai, la hauteur indiquée doit être regardée comme ayant été mesurée à partir du terrain naturel. Il ressort des plans que la hauteur de la construction s'élève à 7,3 mètres au-dessus du terrain naturel et que la distance avec la limite de propriété est de 3,65 mètres. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté. 14. En troisième lieu, la circonstance que le panneau d'affichage ait indiqué une hauteur au faîtage de 7,5 mètres, différente de la hauteur mentionnée sur les plans du 6 novembre 2018, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté. 15. En quatrième lieu, la circonstance que certaines hauteurs de la construction édifiée seraient supérieures à celles indiquées sur les plans, est également sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté, qui s'apprécie à la date à laquelle il a été adopté. 16. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du maire de la commune du 10 décembre 2018 et de la décision de rejet du recours gracieux. Sur les frais exposés et non compris dans les dépens : 17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Quiberville-sur-Mer, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la M. et Mme D... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. 18. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme D... une somme globale de 1 000 euros titre des frais exposés par la commune de Quiberville-sur-Mer et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 7 octobre 2021 du tribunal administratif de Rouen est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. et Mme D... devant le tribunal administratif de Rouen et leurs conclusions d'appel sont rejetées. Article 3 : M. et Mme D... verseront à la commune de Quiberville-sur-Mer une somme globale de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et Mme E... D..., à la commune de Quiberville-sur-Mer et à M. F... B.... Délibéré après l'audience publique du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient : - M. Marc Heinis, président de chambre, - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, - M. Denis Perrin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La présidente-rapporteure, Signé: C. Baes-HonoréLe président de la 1ère chambre, Signé: M. A... La greffière, Signé: C. Sire La République mande et ordonne au préfet de Seine-Maritime en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N° 21DA02888 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai. Par un jugement n° 2101273 du 2 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 15 janvier 2022 et le 15 février 2023, M. B..., représenté par Me Sidi-Aïssa, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté en tant qu'il lui refuse un titre de séjour et l'oblige à quitter le territoire français ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, dans l'attente de cette délivrance, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision portant refus de titre de séjour a été signée par une autorité incompétente ; - elle est entachée d'une insuffisance de motivation ; - elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de consultation préalable de la commission du titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de cet article L. 313-14 ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observations. Par une ordonnance du 27 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 février 2023 à 12h00. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 décembre 1990 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant égyptien, né le 1er octobre 1985 et entré en France, selon ses déclarations, en 2007, a sollicité, le 29 mai 2019, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable. Par un arrêté du 22 décembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai. M. B... fait appel du jugement du 2 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il lui refuse un titre de séjour et l'oblige à quitter le territoire français. 2. En premier lieu, si le requérant reprend en appel ses moyens de première instance soulevés à l'encontre de la décision attaquée portant refus de titre de séjour et tirés de l'incompétence de son signataire et de l'insuffisance de sa motivation, il ne développe, toutefois, au soutien de ces moyens aucun argument de droit ou de fait complémentaire et pertinent de nature à remettre en cause l'analyse et la motivation retenues par le tribunal administratif. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 2 et 3 de leur jugement. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ". 4. D'une part, si M. B... soutient qu'il réside en France depuis 2007, à une date qu'il ne précise d'ailleurs pas, il ne produit aucune pièce au titre des années 2007 à 2011. Dans ces conditions, le requérant ne peut être regardé comme établissant sa présence habituelle en France depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée du 22 décembre 2020 portant refus de titre de séjour. L'autorité préfectorale n'était donc pas tenue de soumettre sa demande d'admission exceptionnelle au séjour à la commission du titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de ce que, faute de consultation de cette commission, la décision attaquée aurait été édictée au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté. 5. D'autre part, M. B... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis 2007 et soutient qu'il vit en couple avec une ressortissante tunisienne, Mme A... F..., titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle en qualité de salariée, valable du 2 juillet 2019 au 1er juillet 2023, avec laquelle il a deux enfants nés en France, C... née le 18 avril 2014 et Malak née le 31 octobre 2020, et qu'il participe à l'entretien et à l'éducation de ses enfants. Il soutient également qu'il justifie d'une insertion sociale et professionnelle sur le territoire, notamment en occupant un emploi de " chef de chantier " auprès de la société " Arc Habitat ". Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 4, le requérant ne justifie pas de l'ancienneté et de la continuité de son séjour en France depuis 2007 et ne produit des pièces susceptibles d'établir sa présence sur le territoire que depuis l'année 2012. En tout état de cause, la circonstance qu'il justifierait d'une telle résidence habituelle depuis l'année 2007 ne constitue pas, à elle seule, un motif d'admission exceptionnelle au séjour en application des dispositions de l'article L. 313-14 précité. En outre, M. B... ne démontre pas, par les pièces qu'il produit, l'ancienneté et la stabilité de la vie maritale dont il se prévaut et a même indiqué, dans ses écritures de première instance, qu'il " ne résidait pas continuellement avec sa compagne ". A cet égard, si ces pièces, notamment des factures ou courriers EDF ou des relevés bancaires, sont susceptibles d'établir une vie commune avec celle-ci entre les mois de décembre 2013 et septembre 2015 à une adresse située à La Courneuve, le requérant ne fournit pour les années ultérieures, notamment pour la période entre l'année 2016 et le mois de juin 2020, aucun document attestant d'une telle vie commune ou d'une relation maritale. En particulier, les pièces fournies, notamment des récépissés de demande de titre de séjour, des quittances de loyers, des factures EDF, des relevés bancaires ou des documents d'ordre médical, font état d'un domicile de l'intéressé situé à Villemomble, puis à Noisy-le-Sec, sans que ces éléments ne puissent justifier de l'effectivité ou de la réalité d'une vie commune avec sa compagne au cours de cette période. De plus, à supposer même, par les quelques pièces qu'il produit pour la période postérieure au mois de juin 2020, notamment l'acte de naissance de sa seconde fille, une demande de réexpédition de courrier, quelques factures et un relevé de compte indiquant une adresse commune située à Asnières-sur-Seine, alors que d'autres pièces mentionnent toujours, de manière contradictoire, l'adresse de l'intéressé à Noisy-le-Sec, que M. B... puisse être regardé comme justifiant d'une reprise d'une vie commune avec la mère de ses enfants, l'intéressé, qui n'apporte aucun autre élément et, en particulier, aucune attestation ou témoignage de sa compagne, ne peut, en tout état de cause, se prévaloir à la date de la décision attaquée du 22 décembre 2020 portant refus de titre de séjour que d'une vie maritale de quelques mois avant l'intervention de cette décision. Par ailleurs, l'intéressé, qui ne démontre pas avoir contribué effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants, notamment de sa fille C..., n'allègue pas qu'il serait dépourvu de toute attache privée et familiale dans son pays d'origine où, ainsi que le relève le préfet de la Seine-Saint-Denis sans être sérieusement contesté sur ce point, résident notamment ses parents et où lui-même a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-et-un ans, ni, d'ailleurs, que sa compagne serait dans l'impossibilité de le rejoindre en Egypte, avec leurs enfants en bas âge, afin d'y poursuivre une vie familiale normale. Enfin, en se bornant à produire un certificat de travail du 22 juin 2017 de la société " Royal Renov " en qualité de " gérant ", au demeurant non signé, et un bulletin de salaire correspondant à cet emploi pour le mois de mai 2017 ainsi qu'un contrat de travail à durée indéterminée du 3 avril 2018 en qualité de " chef de chantier " auprès de la société " Arc Habitat ", des bulletins de salaire pour les mois d'avril 2018 à septembre 2019, de janvier à mars 2020 et de juillet à octobre 2020 ainsi qu'une demande d'autorisation de travail du 3 avril 2018 de cet employeur, le requérant ne justifie d'aucune insertion sociale ou professionnelle stable et ancienne en France, ni d'aucune qualification professionnelle particulière ou spécifique. Dans ces conditions, en estimant que M. B... ne pouvait, au titre de sa vie privée et familiale ou au titre d'une activité salariée, se prévaloir d'aucune considération humanitaire ni d'aucun motif exceptionnel permettant son admission exceptionnelle au séjour en application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas commis d'erreur manifeste dans son appréciation de la situation personnelle de l'intéressé au regard de ces dispositions. 6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (....). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". 7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 et dès lors, notamment, que M. B... n'établit pas, ni n'allègue sérieusement d'ailleurs, l'ancienneté et la stabilité de la relation dont il se prévaut avec une ressortissante tunisienne, ni avoir contribué effectivement à l'entretien et à l'éducation de leurs deux enfants, la décision attaquée portant obligation de quitter le territoire français, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions du séjour en France de l'intéressé, ne peut être regardée comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquelles cette mesure a été prise ou comme ayant méconnu l'intérêt supérieur de ses enfants nés en France le 18 avril 2014 et le 31 octobre 2020. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, la mesure d'éloignement en litige ne peut être regardée comme étant entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. d'Haëm, président, - M. Mantz, premier conseiller, - Mme d'Argenlieu, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. Le président-rapporteur, R. d'HAËML'assesseur le plus ancien, P. MANTZ La greffière, A. GASPARYAN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA00204
JADE/CETATEXT000047370742.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 mai 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai. Par un jugement n° 2120164 du 10 janvier 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 10 février 2022, Mme A..., représentée par Me Sidi-Aïssa, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet de police ou à tout préfet territorialement compétent de lui délivrer un certificat de résidence dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de deux mois à compter de cette notification, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le préfet s'est cru, à tort, lié par l'avis du 8 avril 2021 du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration ; - l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation de sa situation au regard des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 février 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., ressortissante algérienne, née le 18 août 1981 et entrée en France le 24 août 2015, s'est vue délivrer un certificat de résidence sur le fondement des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, valable du 3 avril 2018 au 2 avril 2019. Par un arrêté du 16 août 2019, le préfet de police a refusé de lui renouveler son titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français. Par un jugement n° 1919599 du 19 décembre 2019, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de délivrer à l'intéressée un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ". Mme A..., qui s'est vue délivrer un tel titre, valable du 25 février 2020 au 24 février 2021, en a sollicité, le 6 janvier 2021, le renouvellement. Par un arrêté du 19 mai 2021, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai. Mme A... fait appel du jugement du 10 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. 2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". 3. En premier lieu, contrairement à ce que soutient Mme A..., il ne ressort pas de la motivation de l'arrêté attaqué, qui reproduit les motifs, que le préfet de police s'est approprié, de l'avis du 8 avril 2021 du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) et qui fait état, par ailleurs, de ce " qu'après un examen approfondi de sa situation, il ressort que Mme A... ne remplit pas les conditions " prévues par les stipulations précitées, ni des autres pièces du dossier que l'autorité préfectorale se serait crue liée par cet avis et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa propre compétence. 4. En second lieu, pour refuser de renouveler le titre de séjour de Mme A..., le préfet de police s'est, notamment, fondé sur l'avis du 8 avril 2021 du collège de médecins de l'OFII, lequel a estimé, d'une part, que l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner, pour elle, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, d'autre part, qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle était originaire, elle pouvait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Il ressort également des pièces du dossier, notamment des certificats médicaux des 10 septembre 2019, 2 décembre 2020 et 9 décembre 2020 ainsi que du compte rendu de consultation du 15 mars 2021 produits en première instance, que Mme A..., atteinte d'un méningiome frontal, a été opérée en Algérie en 2013, puis en France en 2015 et 2019, à raison d'une récidive tumorale, et a bénéficié en France d'une radiothérapie du 27 novembre 2019 au 13 janvier 2020 ainsi que d'un suivi post-opératoire pour un panhypopituitarisme et un diabète. De plus, pour contester l'appréciation du collège de médecins de l'OFII, la requérante soutient que le suivi médical dont elle a besoin, n'est pas disponible en Algérie et produit, en appel, un certificat médical établi le 24 février 2022 par un oncologue radiothérapeute de l'institut Curie, qui indique qu'elle " présente un méningiome de haut grade avec un fort risque de reprise évolutive nécessitant un suivi très rapproché, tous les trois mois ", un certificat médical établi le 29 mai 2022 par un neurochirurgien du centre hospitalier universitaire de Mostaganem, qui mentionne que ce méningiome " nécessite une prise en charge à l'étranger dans un centre hospitalier hautement qualifié avec un suivi rapproché et régulier " et que " ce centre n'est pas disponible en Algérie ", ainsi qu'un certificat médical établi le 7 juin 2022 par un neurochirurgien de Blida, qui fait état de ce qu'eu égard au potentiel important de récidive et aux séquelles que présente l'intéressée, " les meilleures chances de traitement requièrent un protocole médical rigoureux et [une] prise en charge multidisciplinaire tels qu'ils sont prodigués actuellement en France par son équipe traitante ". Toutefois, les documents d'ordre médical produits par la requérante, tant en première instance qu'en appel, ne font pas état de ce que Mme A... ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement et d'un suivi médical appropriés en Algérie, où elle a d'ailleurs été prise en charge entre 2009 et 2015, ou, compte tenu des termes très généraux ou imprécis dans lesquels ils sont rédigés, notamment le certificat médical du 29 mai 2022, ne sauraient suffire à démontrer que ce traitement ou ce suivi médical ne serait pas effectivement disponible dans ce pays. Il en est de même des allégations très générales de la requérante sur le système de santé en Algérie, au demeurant non étayées de documents. Dans ces conditions et en l'absence de tout autre élément précis et objectif de nature à démontrer l'existence de circonstances faisant obstacle à ce que Mme A... bénéficie effectivement d'une prise en charge médicale appropriée à sa pathologie dans son pays d'origine, le préfet de police, en se fondant sur l'avis émis le 8 avril 2021 par le collège de médecins de l'OFII et en refusant de renouveler son titre de séjour pour raison de santé, n'a pas commis d'erreur d'appréciation de la situation de l'intéressée au regard des stipulations précitées du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. 5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de police. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. d'Haëm, président, - M. Mantz, premier conseiller, - Mme d'Argenlieu, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. Le président-rapporteur, R. d'HAËML'assesseur le plus ancien, P. MANTZLa greffière, A. GASPARYAN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA00611
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler les arrêtés des 28 décembre 2018 et 22 janvier 2019 par lesquels le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de déplacement d'office et l'affecté dans un lycée du Havre, d'annuler la décision du 18 février 2019 par laquelle le recteur de l'académie de Créteil a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1901759 du 14 septembre 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 12 novembre 2021, M. A... B..., représenté par Me Triboulet, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 28 décembre 2018 par lequel le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de déplacement d'office ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les premiers juges ont commis une erreur de droit en méconnaissant le caractère substantiel du délai de convocation par le président du conseil de discipline quinze jours au moins avant la date de réunion ; - la procédure de sanction est entachée d'irrégularité substantielle car la convocation lui a été remise moins de quinze jours avant la séance du conseil de discipline le privant ainsi d'une garantie substantielle ; - les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2022, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il fait valoir, en renvoyant à son mémoire de première instance, que les moyens ne sont pas fondés. Par ordonnance du 12 décembre 2022 la date de clôture de l'instruction a été fixée au 30 décembre 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur, - et les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., membre du corps des personnels de direction d'établissement d'enseignement ou de formation de 1ère classe, était affecté en qualité de principal du collège international de .... Par arrêté du 28 décembre 2018, le ministre chargé de l'éducation nationale lui a infligé la sanction disciplinaire de déplacement d'office et l'a affecté au lycée ... du Havre par arrêté du 22 janvier 2019. M. B... a, par ailleurs, sollicité le 25 septembre 2018 le bénéfice de la protection fonctionnelle que, par décision du 18 février 2019, le recteur de l'académie de Créteil a refusé de lui accorder. Par un jugement du 14 septembre 2021 le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces trois décisions. M. B... relève appel de ce jugement en limitant ses conclusions d'annulation à l'arrêté du 28 décembre 2018 précité. 2. L'article 70 de la loi du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit dispose que : " Lorsque l'autorité administrative, avant de prendre une décision, procède à la consultation d'un organisme, seules les irrégularités susceptibles d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision prise au vu de l'avis rendu peuvent, le cas échéant, être invoquées à l'encontre de la décision ". Ces dispositions énoncent, s'agissant des irrégularités commises lors de la consultation d'un organisme, une règle qui s'inspire du principe selon lequel, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie. 3. Aux termes de l'article 4 du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat : " Le fonctionnaire poursuivi est convoqué par le président du conseil de discipline quinze jours au moins avant la date de réunion, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. (...) ". 4. Le délai de quinze jours mentionné par ces dispositions constitue pour l'agent concerné une garantie visant à lui permettre de préparer utilement sa défense. Par suite, la méconnaissance de ce délai a pour effet de vicier la consultation du conseil de discipline, sauf s'il est établi que l'agent a été informé de la date du conseil de discipline au moins quinze jours à l'avance par d'autres voies. 5. Il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'éducation nationale a convoqué M. B... à la séance de la commission administrative paritaire nationale siégeant en formation disciplinaire du 16 octobre 2018 par lettre simple datée du 28 septembre 2018 portée à la connaissance de l'intéressé par remise en mains propres le 2 octobre 2018. L'administration n'a ainsi pas respecté le délai minimum de quinze jours prescrit par les dispositions précitées du décret du 18 septembre 1989. Elle n'allègue pas, par ailleurs, que M. B... aurait été informé de la date du conseil de discipline au moins quinze jours à l'avance par d'autres voies. Par suite, M. B..., qui n'a pas bénéficié d'un délai de quinze jours pour préparer sa défense, est fondé à soutenir que la décision en litige a été prise au terme d'une procédure irrégulière au regard des dispositions citées au point 3. 6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du14 septembre 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 décembre 2018 par lequel le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a prononcé, à son encontre, la sanction disciplinaire de déplacement d'office. Sur les frais de l'instance : 7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen n° 1901759 du 14 septembre 2021 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions d'annulation de l'arrêté du 28 décembre 2018 du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse ayant infligé à M. B... la sanction de déplacement d'office. Article 2 : L'arrêté du 28 décembre 2018 par lequel le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a prononcé, à l'encontre de M. B..., la sanction disciplinaire de déplacement d'office est annulé. Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Monsieur A... B... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Délibéré après l'audience publique du 7 mars 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - M. Frédéric Malfoy, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 mars 2023. Le président-rapporteur, Signé : M. C... La présidente de chambre, Signé : G. Borot La greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière C. Huls-Carlier 2 N° 21DA02633
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 19 février 2021 portant refus de renouveler son titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans les trente jours et fixation du pays de renvoi. Par une ordonnance n° 2102459 du 13 septembre 2021, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 16 octobre 2021, Mme A..., représentée par Me Caroline Inquimbert, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet de renouveler son titre de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la condamnation valant renonciation de l'avocat au versement de l'aide juridictionnelle. Elle soutient que l'autorité de la chose jugée ne pouvait pas lui être opposée et que le retrait de l'aide juridictionnelle a privé son conseil de sa rémunération. Par un mémoire enregistré le 8 février 2023, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et relatif à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat dans les procédures non juridictionnelles ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Marc Heinis, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : Sur l'autorité de la chose jugée opposée par l'ordonnance du 12 octobre 2021 : 1. Mme A... a fait l'objet le 19 février 2021 d'une obligation de quitter le territoire français qui a été contestée par une première requête déposée devant le tribunal administratif de Rouen par Me Trofimoff le 3 mars 2021 puis par une deuxième requête déposée devant le même tribunal par Me Inquimbert le 18 juin 2021. 2. La première requête, enregistrée sous le n° 2100832, a été rejetée par un jugement du tribunal administratif de Rouen du 22 juin 2021. Mme A..., désormais représentée par Me Inquimbert, a fait appel de ce jugement le 12 octobre 2021. Cet appel a été rejeté par un arrêt de la cour administrative d'appel de Douai n° 21DA02395 du 12 avril 2022. 3. La deuxième requête, enregistrée sous le n° 2102459, a été rejetée par l'ordonnance du 13 septembre 2021 contestée dans la présente instance, au motif que l'autorité de la chose jugée qui s'attachait au jugement du 22 juin 2021 ne permettait pas d'accueillir les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A.... 4. Il résulte toutefois des pièces du dossier que le jugement du 22 juin 2021 a été adressé à Mme A... par une lettre datée du 24 suivant et que l'intéressée a demandé l'aide juridictionnelle, le 23 juillet 2021, avant l'expiration du délai d'appel. A la date de l'ordonnance litigieuse, ce jugement n'était donc pas devenu définitif et n'avait dès lors pas l'autorité de la chose jugée. 5. Ainsi c'est à tort que le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Rouen a estimé que l'autorité de la chose jugée par le jugement du 22 juin 2021 ne permettait pas d'accueillir la demande de Mme A.... Sur les autres moyens invoqués par Mme A... : 6. Il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A... devant le tribunal administratif. En ce qui concerne la motivation : 7. Conformément à l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration et à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable, l'arrêté a énoncé, dans ses considérants ou son dispositif, les motifs de droit et de fait qui ont fondé ses différentes décisions. En ce qui concerne la procédure : 8. Mme A... n'entrant pas dans le champ du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comme on le verra, la consultation de la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 312-2 de ce code n'était pas requise. En ce qui concerne la vie privée et familiale : 9. D'une part, Mme A..., née en 1988, a vécu la majeure partie de sa vie au Nigéria où résident sa mère et sa fratrie. Elle a déclaré être entrée irrégulièrement en France en mars 2011. Sa demande d'asile, déposée en mai 2011, a été rejetée par la Cour nationale du droit d'asile en juillet 2012. Elle n'a pas exécuté une obligation de quitter le territoire français d'octobre 2012. Elle a été interpellée pour des faits de prostitution sur la voie publique le 12 décembre 2012. Sa demande de réexamen de sa demande d'asile a été rejetée en juin 2013. Pour avoir produit une fausse attestation de naissance et un faux passeport en novembre 2014, elle a été condamnée à six mois de prison avec sursis en janvier 2016. 10. D'autre part, si Mme A... a donné naissance à un fils en août 2013 qui a été reconnu par un ressortissant français ayant procédé à la reconnaissance d'un total de vingt enfants et a demandé un titre de séjour " parent d'enfant français " en décembre 2014, elle n'a pas exécuté une obligation de quitter le territoire français de décembre 2015 et il ne ressort pas des pièces du dossier que ce ressortissant français habitant Poitiers ait exercé le droit de visite de l'enfant qui lui a été conféré par une décision du juge aux affaires familiales d'avril 2016. 11. Enfin, Mme A... est sans emploi. Si elle a demandé un titre de séjour " étranger malade " en avril 2017, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé en janvier 2018 que l'intéressée pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié au Nigéria. 12. Dans ces conditions, même si Mme A... a obtenu un titre de séjour " vie privée et familiale " de janvier 2019 à janvier 2020 et même si elle a donné naissance en juillet 2020 à un autre enfant dont le père réside en région parisienne, l'arrêté n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, n'a pas violé les articles 3 du protocole additionnel n°4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 3, 8 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable et n'a pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale garantie par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 19 février 2021. Sur les conclusions à fin d'injonction : 14. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution pour l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Sur les frais exposés et non compris dans les dépens : En ce qui concerne la première instance : 15. Aux termes de l'article 50 de la loi du 20 décembre 2020 : " (...) le bénéfice de l'aide juridictionnelle (...) de l'avocat est retiré (...) 4° Lorsque la procédure engagée par le demandeur bénéficiant de l'aide juridictionnelle (...) a été jugée dilatoire, abusive, ou manifestement irrecevable (...) ". Aux termes de l'article 65 du décret du 28 décembre 2020 : " (...) Lorsque la procédure engagée par le bénéficiaire de l'aide a été jugée dilatoire, abusive ou manifestement irrecevable, le retrait est prononcé par la juridiction saisie qui en avise le bâtonnier et le bureau d'aide juridictionnelle (...) ". 16. Il résulte de ce qui précède que la requête déposée par Me Inquimbert le 18 juin 2021, avant même l'intervention du jugement du 22 juin 2021, ne présentait pas un caractère dilatoire, abusif ou manifestement irrecevable au sens des dispositions précitées. En ce qui concerne l'instance d'appel : 17. La demande présentée par le conseil de Mme A..., partie perdante, sur le fondement de l'article 37 de la loi du 19 décembre 1991 doit être rejetée. DECIDE : Article 1er : L'article 2 de l'ordonnance du 13 septembre 2021 portant retrait de l'aide juridictionnelle à Mme A... est annulé. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer, et à Me Caroline Inquimbert. Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime, au bâtonnier de l'ordre des avocats du Havre et au bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Rouen. Délibéré après l'audience publique du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient : M. Marc Heinis, président de chambre, Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, M. Denis Perrin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La présidente-assesseure, Signé: C. Baes-Honoré Le président-rapporteur, Signé: M. C... La greffière, Signé: C.Sire La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, C. Sire 2 N° 21DA02432
JADE/CETATEXT000047370743.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme G... C... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 3 novembre 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai. Par un jugement n° 2100652 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 17 février 2022, Mme C..., représentée par Me Loison, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ; 3°) d'enjoindre à la préfète du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise " ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le tribunal administratif, qui a omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'illégalité des dispositions de l'article R. 311-35 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenu l'article R. 313-11-1 du même code, qui avaient ajouté une condition de délai, non prévue par la loi, entre l'obtention du diplôme et la demande d'autorisation de séjour, a entaché le jugement attaqué d'irrégularité ; - la décision portant refus de titre de séjour est illégale car fondée sur les dispositions de l'article R. 311-35 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenu l'article R. 313-11-1 du même code, qui, en ajoutant une condition de délai, non prévue par la loi, entre l'obtention du diplôme et la demande d'autorisation de séjour, sont entachées d'illégalité ; - l'exposante remplit l'ensemble des conditions prévues par les dispositions de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenu l'article L. 313-8 du même code ; - la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur de droit, les dispositions sur lesquelles le préfet s'est fondé ayant été ultérieurement abrogées et l'arrêté attaqué étant, en conséquence, devenu illégal ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation ; - la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La requête de Mme C... a été communiquée à la préfète du Val-de-Marne qui n'a pas produit d'observations. Par une ordonnance du 27 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 février 2023 à 12h00. Par une décision du 29 novembre 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal administratif de Paris, Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 2018-78 du 10 septembre 2018 ; - le décret n° 2019-141 du 27 février 2019 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur, - et les observations de Me Loison, avocate de Mme C.... Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., ressortissante ivoirienne, née le 30 mai 1992, est entrée en France le 3 septembre 2010 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour valant titre de séjour en qualité d'étudiante, qui a été régulièrement renouvelé jusqu'au 25 avril 2019. Le 18 décembre 2018, elle a sollicité la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour afin de compléter sa formation par une première expérience professionnelle. Par un arrêté du 15 juillet 2019, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande et l'a obligée à quitter le territoire français. Par un jugement n° 1908572 du 23 juin 2020, le tribunal administratif a annulé cet arrêté au motif qu'il était entaché d'une erreur de droit, le préfet s'étant fondé sur les dispositions de l'article L. 313-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'étaient applicables qu'aux demandes présentées postérieurement à leur entrée en vigueur, soit le 1er mars 2019, et lui a enjoint de réexaminer la situation de l'intéressée. Par un arrêté du 3 novembre 2020, le préfet du Val-de-Marne a rejeté la demande d'autorisation de séjour présentée par Mme C..., l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai. Mme C... fait appel du jugement du 14 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Il ressort de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen soulevé par Mme C... et tiré de l'exception d'illégalité des dispositions de l'article R. 313-11-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prises pour l'application des dispositions de l'article L. 313-8 du même code, relatives à la carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise ", qui n'était pas inopérant, l'autorité préfectorale s'étant fondée sur ces dispositions pour prendre la décision attaquée portant refus de titre de séjour. Au surplus, pour répondre au moyen soulevé par la requérante et tiré de l'exception d'illégalité des dispositions de l'article R. 311-35 de ce code, relatives à l'autorisation provisoire de séjour prévue par les dispositions de l'article L. 311-11, alors applicables à la date de sa demande d'autorisation de séjour, lesquelles ajoutaient, selon elle, une condition de délai, non prévue par la loi, entre l'obtention du diplôme et la demande d'autorisation de séjour, le tribunal administratif s'est borné à relever, par une motivation insuffisante, que ce moyen " doit être écarté dès lors qu'il appartenait au pouvoir réglementaire de fixer les conditions d'application de la loi ". Par suite, ce jugement est entaché d'irrégularité et doit être annulé. 3. Il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif. Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour : 4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de la demande d'autorisation de séjour présentée par Mme C... : " Une autorisation provisoire de séjour d'une durée de validité de douze mois, non renouvelable, est délivrée à l'étranger ayant obtenu, dans un établissement d'enseignement supérieur habilité au plan national, un diplôme au moins équivalent au grade de master ou figurant sur une liste fixée par décret et qui : / 1° Soit entend compléter sa formation par une première expérience professionnelle, sans limitation à un seul emploi ou à un seul employeur. Pendant la durée de cette autorisation, son titulaire est autorisé à chercher et à exercer un emploi en relation avec sa formation et assorti d'une rémunération supérieure à un seuil fixé par décret et modulé, le cas échéant, selon le domaine professionnel concerné (...) ". Aux termes du I de l'article R. 311-35 du même, dans sa rédaction alors applicable : " Pour l'application de l'article L. 311-11, l'étranger, qui sollicite la délivrance de l'autorisation provisoire de séjour, présente à l'appui de sa demande, outre les pièces prévues aux articles R. 311-2-2 et R. 311-31 : / 1° La carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " en cours de validité dont il est titulaire ; / 2° Un diplôme, obtenu dans l'année, au moins équivalent au grade de master ou figurant sur une liste fixée par décret. La présentation de ce diplôme peut être différée au moment de la remise de l'autorisation provisoire de séjour. La liste des diplômes au moins équivalents au grade de master est établie par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche (...) ". 5. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 313-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " I. - Une carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise " d'une durée de validité de douze mois, non renouvelable, est délivrée à l'étranger qui justifie : / 1° Soit avoir été titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " délivrée sur le fondement des articles L. 313-7, L. 313-18 ou L. 313-27 et avoir obtenu dans un établissement d'enseignement supérieur habilité au plan national un diplôme au moins équivalent au grade de master ou figurant sur une liste fixée par décret ; / (...) II. - La carte de séjour temporaire prévue au I est délivrée à l'étranger qui justifie d'une assurance maladie et qui : / 1° Soit entend compléter sa formation par une première expérience professionnelle, sans limitation à un seul emploi ou à un seul employeur. Pendant la durée de la carte de séjour temporaire mentionnée au premier alinéa du I, son titulaire est autorisé à chercher et à exercer un emploi en relation avec sa formation ou ses recherches, assorti d'une rémunération supérieure à un seuil fixé par décret et modulé, le cas échéant, selon le niveau de diplôme concerné (...) ". Aux termes de l'article R. 313-11-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Pour l'application du 1° du I de l'article L. 313-8, l'étranger qui sollicite la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise " présente à l'appui de sa demande, outre les pièces prévues aux articles R. 311-2-2 et R. 313-1, les pièces suivantes : / 1° La carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant les mentions " étudiant " ou " étudiant-programme de mobilité " en cours de validité dont il est titulaire ; / 2° Un diplôme, obtenu dans l'année, au moins équivalent au grade de master ou figurant sur une liste fixée par décret. La présentation de ce diplôme peut être différée au moment de la remise de la carte de séjour temporaire. La liste des diplômes au moins équivalents au grade de master est établie par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche (...) ". 6. Par l'arrêté attaqué du 3 novembre 2020, le préfet du Val-de-Marne a rejeté la demande d'autorisation de séjour présentée par Mme C... aux motifs, notamment, que, l'intéressée ayant obtenu, au titre de l'année universitaire 2015-2016, un diplôme d'université " contentieux international des affaires " le 18 novembre 2016, elle ne peut prétendre ni au bénéfice des dispositions de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction en vigueur à la date de sa demande, soit le 18 décembre 2018, ni à la délivrance de la carte de séjour temporaire prévues par les dispositions de l'article L. 313-8 du même code, qui sont entrées en vigueur le 1er mars 2019. 7. D'une part, dès lors que les dispositions de l'article L. 311-11 précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables à la date de la demande d'autorisation de séjour présentée par Mme C..., ou celles de l'article L. 313-8 du même code, applicables à la date de la décision attaquée, ont prévu, notamment, qu'une autorisation provisoire de séjour ou une carte de séjour temporaire, d'une durée de validité de douze mois et non renouvelable, puisse être délivrée à un étudiant étranger titulaire d'un diplôme au moins équivalent au grade de master ou figurant sur une liste fixée par décret afin de compléter sa formation par une première expérience professionnelle, le pouvoir réglementaire, en prévoyant, par les dispositions de l'article R. 311-15 ou R. 313-11-1 dudit code, que cette autorisation ou ce titre de séjour pouvait être délivré à la condition que l'étudiant ait obtenu ce diplôme dans l'année, ne saurait être regardé comme ayant excédé le domaine de sa compétence. En outre, la seule circonstance que le législateur a prévu, par le IV de cet article L. 313-8, que l'étudiant étranger titulaire d'un tel diplôme et ayant quitté le territoire national, peut demander une carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise " dans un délai maximal de quatre ans à compter de l'obtention dudit diplôme en France, ne saurait davantage permettre de considérer que le pouvoir réglementaire, en prévoyant, par les dispositions de l'article R. 313-11-1 et pour l'étranger étudiant souhaitant prolonger son séjour en France, cette condition d'obtention du diplôme dans l'année, aurait méconnu le principe d'égalité. 8. D'autre part, si la requérante soutient qu'elle remplissait l'ensemble des conditions prévues par les dispositions précitées de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'article L. 313-8 du même code, il est constant que Mme C..., qui a obtenu, au titre de l'année universitaire 2015-2016, un diplôme d'université " contentieux international des affaires " le 18 novembre 2016, n'a présenté sa demande d'autorisation de séjour que le 18 décembre 2018. Par suite, en refusant de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou une carte de séjour portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise " au motif que sa demande d'autorisation de séjour n'avait pas été présentée l'année d'obtention de son diplôme, le préfet du Val-de-Marne a fait une exacte application des dispositions de l'article R. 311-35 ou de celles de l'article R. 311-11-1 précités. 9. Enfin, la seule circonstance que les dispositions précitées, prévoyant la condition selon laquelle l'étudiant étranger, sollicitant un titre de séjour afin de compléter sa formation par une première expérience professionnelle, doit présenter un diplôme " obtenu dans l'année ", ont été abrogées le décret n° 2020-1734 du 16 décembre 2020 portant partie réglementaire du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er mai 2021, est, en tout état de cause, sans influence sur la légalité de la décision en litige en date du 3 novembre 2020, qui s'apprécie à la date de son édiction. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision serait entachée de ce chef d'une erreur de droit ne peut qu'être écarté. 10. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". 11. Mme C... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis le mois de septembre 2010, soit un peu plus de dix ans à la date de la décision attaquée, et fait valoir qu'elle y a poursuivi, avec succès, ses études supérieures, qu'elle y a travaillé, en effectuant plusieurs stages ou sous couvert de contrats à durée déterminée, qu'elle a continué à rechercher activement un premier emploi et s'est vue proposer plusieurs postes correspondant à son profil, qu'elle bénéficie d'une promesse d'embauche auprès d'un cabinet d'avocats et qu'elle a ainsi noué des liens privés, notamment professionnels, sur le territoire. Elle fait valoir également qu'elle a résidé, depuis son arrivée en France, auprès de sa grande sœur, Mme E... C..., de nationalité française, et de la fille de celle-ci, née le 5 juin 2016 et également de nationalité française, qu'elle vit en couple depuis plus de cinq ans avec un compatriote, M. F... A..., titulaire d'une carte de séjour temporaire en qualité de salarié, d'abord au domicile de sa sœur, puis dans leur nouveau domicile, que ses deux autres sœurs résident et travaillent l'une au Canada, l'autre au Royaume-Uni et que seul son père réside en Côte d'Ivoire, sa mère étant décédée en 2021. Toutefois, si la requérante, admise à entrer et séjourner en France afin d'y poursuivre des études, a obtenu, en 2014, une licence " droit, économie, gestion, mention droit " et, en 2016, un diplôme d'université " contentieux international des affaires ", elle ne justifie pas avoir terminé, au titre de l'année universitaire 2016-2017, son LLM " contentieux international des affaires ", ni avoir réussi, au titre de l'année universitaire 2017-2018, l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats (CRFPA). De plus, si elle justifie avoir travaillé à plusieurs reprises entre 2017 et 2019, sous couvert de son titre de séjour en qualité d'étudiante, soit lors de stages auprès de cabinets d'avocats ou de la société " Aviva ", soit sous contrat à durée déterminée, à deux reprises, auprès de cette société, elle ne démontre pas, ni n'allègue d'ailleurs, avoir poursuivi ses études au titre de l'année 2018-2019. En outre, Mme C... ne justifie pas, par les quelques pièces qu'elle produit, de l'ancienneté de la vie maritale dont elle se prévaut avec un compatriote. A cet égard, ces pièces ne permettent d'attester d'une vie commune qu'à partir de la fin de l'année 2019. Par ailleurs, si ses trois sœurs résident en France, au Canada ou au Royaume-Uni, la requérante n'établit pas qu'elle serait dépourvue de toute attache personnelle et familiale dans son pays d'origine où réside, notamment, son père. Enfin, elle n'allègue pas qu'elle serait dans l'impossibilité de s'y réinsérer, ni ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'elle poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, dans son pays d'origine. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision attaquée portant refus de titre de séjour ne peut être regardée comme ayant porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette mesure a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations et dispositions précitées doivent être écartés. Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français : 12. D'une part, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, ne peut qu'être écarté. 13. D'autre part, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement en litige sur la situation personnelle de Mme C..., doivent être écartés. Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination : 14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté. 15. En second lieu, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes des stipulations de cet article 3 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". 16. Mme C... soutient qu'elle encourrait des risques en cas de retour dans son pays d'origine, du fait des fonctions politiques occupées par son père et à raison d'opinions politiques qui pourraient lui être imputées, et fait valoir que celui-ci, M. B... C..., ministre de la fonction publique sous la présidence de Laurent Gbagbo et contraint à l'exil en 2011, à la suite de la crise post-électorale, a été arrêté, à son retour, par les autorités ivoiriennes et condamné à vingt ans de réclusion criminelle pour complicité d'assassinat. Elle fait valoir également qu'il a cependant poursuivi son engagement politique en faveur du parti de l'ancien président et que, lors des élections présidentielles ivoiriennes d'octobre 2021, il a été la cible de menaces et son domicile a fait l'objet d'un blocus, faisant craindre une tentative d'enlèvement sur sa personne et les membres de sa famille. Toutefois, la requérante, qui n'a, au demeurant, jamais sollicité le bénéfice de l'asile en France, n'apporte aucun élément sérieux ou convaincant permettant de considérer qu'elle encourrait dans le cas d'un retour en Côte d'Ivoire, de manière suffisamment personnelle, certaine et actuelle, des menaces quant à sa vie ou sa personne ou des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors qu'au surplus, il ressort des sources d'information publiques et disponibles que M. B... C..., qui a été amnistié en 2018 et élu député en mars 2021, a poursuivi ses activités politiques et, en particulier, a été nommé président exécutif, en octobre 2021, du parti des peuples africains - Côte d'Ivoire, le nouveau parti fondé par Laurent Gbagbo après son retour d'exil. Par suite, en décidant que l'intéressée pourrait être éloignée à destination du pays dont elle a la nationalité, le préfet du Val-de-Marne n'a pas méconnu les stipulations et dispositions précitées. 17. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 3 novembre 2020 du préfet du Val-de-Marne. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles portant sur les frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2100652 du 14 octobre 2021 du tribunal administratif de Melun est annulée. Article 2 : La demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Melun et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète du Val-de-Marne. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. d'Haëm, président, - M. Mantz, premier conseiller, - Mme d'Argenlieu, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. Le président-rapporteur, R. d'HAËML'assesseur le plus ancien, P. MANTZ La greffière, A. GASPARYAN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA00745
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les décisions du 3 septembre 2021 par lesquelles le préfet de Seine-et-Marne lui a retiré sa carte de séjour pluriannuelle, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2108816 du 15 février 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 15 mars 2022, et des pièces non communiquées enregistrées le 4 mars 2023, M. B..., représenté par Me Keita, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2108816 du 15 février 2022 du tribunal administratif de Melun ; 2°) à titre principal, d'annuler la décision du 3 septembre 2021 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne lui a retiré son titre de séjour ; 3°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision du même jour portant obligation de quitter le territoire français ; 4°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer, pendant cet examen, une autorisation provisoire de séjour dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement est entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision lui retirant sa carte de séjour temporaire méconnaît les dispositions de l'article L. 432-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que d'une part la fraude alléguée par le préfet n'est pas établie et que d'autre part, il démontre avoir été privé volontairement de son emploi ; - l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'au regard de sa situation personnelle et professionnelle en France, il aurait dû bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour. Par un mémoire en défense, enregistré le 20 février 2023, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : Mme A... a présenté son rapport au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant malien né le 13 juillet 1978, est entré en France le 19 janvier 2014 selon ses déclarations. Le 10 mai 2019, une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " lui a été délivrée. Il a bénéficié, par la suite, d'une carte de séjour pluriannuelle portant la même mention, valable du 1er octobre 2020 au 30 septembre 2024. Par un arrêté du 3 septembre 2021, le préfet de Seine-et-Marne lui a retiré sa carte de séjour pluriannuelle, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par un jugement du 15 février 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de l'intéressé tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 septembre 2021 en tant qu'il prononce le retrait de sa carte de séjour pluriannuelle et lui fait obligation de quitter le territoire français. M. B... relève appel de ce jugement. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article L. 432-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'étranger cesse de remplir l'une des conditions exigées pour la délivrance de la carte de séjour dont il est titulaire, (...) la carte de séjour peut lui être retirée par une décision motivée. La décision de retrait ne peut intervenir qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter ses observations dans les conditions prévues aux articles L. 121-1 et L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration. / N'est pas regardé comme ayant cessé de remplir la condition d'activité prévue aux articles L. 421-1, L. 421-9 à L. 421-11 et L. 421-13 à L. 421-21 l'étranger involontairement privé d'emploi au sens de ces mêmes articles. ". 3. Il ressort des pièces du dossier que pour retirer le titre de séjour de M. B..., le préfet de Seine-et-Marne s'est fondé sur la circonstance que la société Entreprise générale de bâtiment et de menuiserie (EGBM) avait fourni des formulaires d'autorisation de travail et un contrat de travail pour le poste d'ouvrier contrefaits afin de favoriser la régularisation par le travail de l'intéressé. Pour établir la fraude alléguée, l'arrêté attaqué relève que le gérant de la société EGBM a fait l'objet d'un procès-verbal dressé le 10 mars 2020 par le service de la main d'œuvre étrangère de la direction générale des entreprises, de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France pour " fraude ou fausse déclaration pour faire obtenir ou tenter de faire obtenir un titre de travail ". Toutefois, le préfet de Seine-et-Marne n'apporte aucun élément quant aux suites judiciaires qui auraient été apportées à ce procès-verbal du 10 mars 2020 alors que M. B... conteste l'existence d'une fraude depuis la mise en œuvre de la procédure contradictoire et indique, sans être utilement contredit, avoir travaillé pour la société EGBM jusqu'au 25 novembre 2020. Dans ces conditions, le préfet de Seine-et-Marne, qui n'établit pas la fraude alléguée, ne pouvait légalement procéder au retrait du titre de séjour de l'intéressé pour ce motif. Par suite, la décision portant retrait de la carte de séjour pluriannuelle de M. B... doit être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il sera éloigné. 4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ni sur les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". Le juge de l'injonction, saisi de conclusions présentées au titre de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, est tenu de statuer sur ces conclusions en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de son arrêt. 6. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de Seine-et-Marne restitue à M. B... sa carte de séjour pluriannuelle portant la mention " salarié " valable du 1er octobre 2020 au 30 septembre 2024. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de restituer le titre de séjour à l'intéressé dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2108816 du 15 février 2022 du tribunal administratif de Melun et l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne en date du 3 septembre 2021 sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet de Seine-et-Marne de restituer à M. B... sa carte de séjour pluriannuelle, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de Seine-et-Marne. Délibéré après l'audience du 6 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente assesseure, - Mme Gaëlle Degardin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. La rapporteure, G. A...Le président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA01233
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : MM. Christian et Alexandre A... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nancy de prescrire une expertise portant sur les désordres affectant leur immeuble situé 3 rue du 8 mai 1945 à Frouard. Par une ordonnance n° 2201893 du 17 octobre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 31 octobre 2022 et deux mémoires complémentaires enregistrés les 5 et 31 décembre 2022, MM. A..., représentés par Me Olivier-Conti, demandent à la cour : 1°) d'annuler l'ordonnance du 17 octobre 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy ; 2°) de faire droit à leur demande d'expertise ; 3°) de mettre à la charge des parties défenderesses une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - ils sont propriétaires d'un bien immobilier situé 3, rue du 8 mai 1945 à Frouard (Meurthe-et-Moselle) ; - des travaux de réhabilitation de la voirie et des réseaux d'eau ont été entrepris en 2002 et 2009 et des désordres sont apparus à compter d'avril 2017 et se sont aggravés par la suite ; - ces désordres apparaissent en amant de leur compteur d'eau personnel ; - le premier juge a commis une erreur de droit dès lors que la motivation retenue ne fait pas référence à un problème de fond, mais à un problème de compétence ; - le litige touche à un ouvrage public ; - la société Véolia, qui est le gestionnaire de la distribution d'eau et de l'entretien du réseau, s'est toujours refusée à communiquer les rapports de ses interventions sur le site ; - c'est à tort que le premier juge a estimé qu'il n'existait aucun lieu de causalité entre les désordres et les travaux publics réalisés ; - la communauté de communes ne conteste pas le fait que les causes de l'écoulement ne sont pas toujours établies ; - les désordres sont de plus en plus importants et nécessitent l'intervention des pompiers, la dernière en date du 23 décembre 2022 ; - l'action n'est pas prescrite car ils ont interrompu les délais de garantie dès qu'ils ont eu connaissance des désordres ; - la mesure d'expertise sollicitée présente donc un caractère utile. Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2022, la communauté de communes du bassin de Pompey, représentée par Me Tadic, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête d'appel de MM. A... ; 2°) de mettre à la charge de MM. A... la somme de 1500 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'argument selon lequel les requérants seraient victimes d'une fuite provenant d'un ouvrage public est fallacieux et incohérent ; - le désordre observé trouve sa cause dans l'eau de pluie de leur propriété privée qui pénètre par une gaine de la cave, faute de drainage et d'étanchéité ; - plusieurs expertises amiables ont eu lieu qui concluent toutes à la même conclusion ; - l'humidité dans les murs de la cave demeure indéterminée selon l'expert de l'assureur des demandeurs ; - les causes infiltrations est exclusivement liée au défaut d'étanchéité de la maison ; - quatre experts se sont déjà prononcés sur l'absence de lien de causalité entre les travaux publics entrepris en 2005 et 2009 et les infiltrations observées dans la cave des requérants ; - aucun commencement de preuve tendant à démontrer que sa responsabilité est susceptible d'être engagée au fond n'est apportée, de sorte que la demande d'expertise sollicitée ne pourra qu'être rejetée ; - à toutes fins utiles, le fait générateur le plus récent invoqué par les requérants date de 2009 et toute action est donc prescrite à compter du 1er janvier 2014 ; Par un mémoire en défense enregistré le 19 décembre 2022, la société Veolia Eau - compagnie générale des eaux, représentée par Me Coissard, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête de MM. A... ; 2°) de mettre à leur charge la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La société Veolia Eau soutient que : - l'expertise sollicitée n'est pas utile : les contrôles opérés par elle depuis juillet 2017 et jusqu'en octobre 2022 ont permis de confirmer l'absence d'anomalie sur le réseau qu'elle exploite ; - l'absence de lien de causalité entre les travaux de 2005 et 2009 et l'apparition d'humidité a été confirmée par les 3 rapports d'expertise déjà réalisés ; - le lien entre pluviométrie et désordres montre bien qu'il ne s'agit pas d'une fuite qui, par définition, serait continue dans le temps ; - selon le règlement sanitaire départemental, c'est aux propriétaires d'entreprendre les travaux destinés à assurer l'étanchéité de leur propriété ; - la première réclamation date de 2017 et l'action était donc prescrite à la date de l'assignation devant la juridiction judiciaire. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative. Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple demande et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. (...) ". L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de ces dispositions doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d'expertise permettant d'engager la responsabilité d'une personne publique, en l'absence manifeste, en l'état de l'instruction, de fait générateur, de préjudice ou de lien de causalité entre celui-ci et le fait générateur. 2. Il résulte de l'instruction que MM. Christian et Alexandre A..., propriétaires d'un bien immobilier situé 3 rue du 8 mai 1945 à Frouard (Meurthe-et-Moselle), ont constaté, à compter d'avril 2017 des traces d'humidité de plus en plus importantes au niveau de l'arrivée d'eau dans leur cave. Ces désordres s'étant aggravés, et après avoir sollicité à plusieurs reprises la commune de Frouard et la société Veolia, exploitante du réseau d'eau et d'assainissement, ils ont saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Nancy d'une demande d'expertise afin d'obtenir une mesure d'expertise judiciaire visant à la constatation des désordres affectant leur maison. Estimant que ces désordres avaient pour origine des travaux de rénovation de la voirie et des réseaux d'eau réalisés au cours des années 2005 et 2009 par la commune de Frouard, ils ont appelé en la cause cette collectivité, la communauté de communes du bassin de Pompey, venant aux droits et obligations de la commune de Frouard, et la société Véolia Eau chargée de la distribution d'eau et de l'entretien du réseau. Par une ordonnance du 17 mai 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire s'est déclaré incompétent au profit du tribunal administratif de Nancy. MM. A... interjettent appel de l'ordonnance du 17 octobre 2022 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à prescrire une expertise aux mêmes fins. 3. Il ressort des pièces du dossier que la société Véolia a effectué des vérifications en 2017 et 2022 sur les canalisations arrivant au domicile des requérants, sur les canalisations internes du domicile ainsi que sur le système d'évacuation des eaux usées. Le compte-rendu établi le 24 avril 2018 par l'assureur des consorts A... a relevé que les fondations du bâtiment ne sont ni drainées, ni protégées. En outre, des expertises ont été réalisées, en janvier 2018, à la demande des assureurs de la société Véolia et de la commune de Frouard. Toutes deux concluent à l'absence de causalité entre les travaux mis en cause par les requérants et les désordres dont ils se plaignent. Enfin, ceux-ci ne contestent pas que leur maison est ancienne et ne bénéficie pas d'une étanchéité adaptée. Dans ces conditions, les requérants n'apportent pas d'élément suffisant au soutien de leur argumentation tendant à affirmer l'existence d'un lien de causalité entre les désordres dont ils font état et des travaux engagés par la personne publique en 2005 et 2009, ni même avec l'état du réseau d'eau en amont de leur branchement. Dès lors, et alors même que leur action ne serait pas prescrite compte tenu des demandes qu'ils ont adressées aux défendeurs, la mesure d'expertise qu'ils sollicitent ne présente pas le caractère d'utilité exigé par les dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, tel que défini au point 1. Par suite, leur requête ne peut qu'être rejetée. 4. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la communauté de communes de Pompey et de la société Veolia Eau Compagnie Générale des Eaux présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. ORDONNE : Article 1er : La requête de M.M. C... A... et Alexandre A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la communauté de communes du bassin de Pompey et de la société Veolia Eau Compagnie Générale des Eaux présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M.M. C... A... et Alexandre A..., à la communauté de communes du bassin de Pompey et à la société Véolia Eau. La présidente de la Cour Signé : Sylvie Favier La République mande et ordonne au préfet de Meurthe-et-Moselle, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance. N° 22NC02750 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée Total Raffinage France a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 8 avril 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Normandie a confirmé la décision du 29 février 2019 de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie lui enjoignant de prendre des mesures de sécurité et de prévention dans l'établissement qu'elle exploite route industrielle à Gonfreville-l'Orcher (Seine-Maritime). Par un jugement n° 1901711 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 10 août 2021, un mémoire complémentaire enregistré le 12 octobre 2021 et un mémoire enregistré le 17 juin 2022, la société par actions simplifiée Total Raffinages France, devenue la société par actions simplifiée Total Energies Raffinage France, représentée par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision contestée du 8 avril 2019 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la minute du jugement attaqué n'est pas régulièrement signée ; - le jugement attaqué a été rendu au terme d'une procédure non contradictoire ; - le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qui concerne les moyens tirés de l'absence de situation de co-activité entre les deux sociétés extérieures intervenant pour la livraison et le remplissage du filtre à sable FA 401 B., de l'existence d'un plan de prévention spécifique à cette opération et du caractère inadapté et irréalisable des mesures prescrites en matière de prévention des risques d'interférence en cas d'intervention d'entreprises extérieures ; - l'injonction confirmée par la décision du 8 mars 2019 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie est dépourvue de base légale, dès lors que les dispositions de l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale sont inapplicables en raison de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté ministériel du 9 décembre 2010 fixant les modalités de leur mise en œuvre ; - le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi n'était pas compétent pour prendre la décision contestée du 8 mars 2019 ; - l'injonction confirmée par la décision du 8 mars 2019 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie a été précédée d'une enquête insuffisante ; - la décision du 8 mars 2019 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi n'a pas été précédée d'une instruction suffisante ; - la décision du 8 mars 2019 est insuffisamment motivée en l'absence de mention précise des risques justifiant les mesures exigées, sur les infractions constatées et d'indication relative à la faisabilité technique des mesures exigées ; - l'intervention des sociétés extérieures au cours de laquelle est survenu l'accident mortel à la suite duquel une enquête a été diligentée par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail ne caractérisait pas une situation de co-activité susceptible de faire naître des risques liés aux interférences ; - la gestion des risques d'interférences susceptibles de résulter de l'intervention d'entreprises extérieures sur le site industriel est encadrée par des procédures spécifiques rigoureuses consignées dans un ensemble de documents équivalant au plan de prévention exigé par les dispositions du code du travail ; - les mesures prescrites en matière de gestion des risques d'interférences sont entachées d'une erreur de droit, dès lors qu'elles renvoient aux guides de bonnes pratiques rédigés par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie, qui ne revêtent aucun caractère obligatoire ; - les mesures prescrites en matière de gestion des risques d'interférences ne sont pas adaptées à l'activité du site et sont irréalisables ; - le délai imparti pour prendre les mesures prescrites en matière de gestion des risques d'interférences est insuffisant ; - les mesures prescrites en matière de prévention des risques de chute de hauteur ne sont pas justifiées ; - le délai imparti pour prendre les mesures prescrites en matière de prévention des risques de chute de hauteur est insuffisant. Par un mémoire, enregistré le 22 mars 2022, le ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la SAS Total Energies Raffinage France ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 20 juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 juillet 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive du conseil de la Communauté économique européenne 89/391/CEE du 26 juin 1989 ; - le code du travail ; - le code de la sécurité sociale ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère, - les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public, - et les observations de Me Lyon-Caen, représentant la société à responsabilité limitée Total Energies Raffinage France. Considérant ce qui suit : 1. Le 15 février 2019, une entreprise extérieure est intervenue sur le secteur de la raffinerie du site de Gonfreville-l'Orcher, exploité par la société par actions simplifiée Total Raffinage France, afin de réaliser des travaux de remplissage du filtre à sable FA 401 B. L'un des salariés de cette entreprise a fait une chute mortelle de dix mètres depuis un plan de travail en hauteur. A la suite d'une enquête réalisée sur les lieux le jour même, la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie a, par une décision du 28 février 2019, enjoint à la société Total Raffinage France de prendre diverses mesures relatives à la sécurisation des installations sur lesquelles s'est produit l'accident, à la mise en œuvre des dispositions prévues par le code du travail en matière de prévention des risques d'interférences en cas d'intervention réalisée par une ou plusieurs entreprises extérieures et à la prévention des risques de chute de hauteur. Par un courrier en date du 8 mars 2019, la société Total Raffinage France a formé devant le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie le recours administratif préalable prévu par les dispositions de l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale. Celui-ci a, par une décision du 8 avril 2019, confirmé les injonctions prononcées par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail le 29 février 2019. La société Total Raffinage France, devenue la société à responsabilité limitée Total Energies Raffinage France (TERF), relève appel du jugement du 10 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur du 8 avril 2019 régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 code de justice administrative : " (...) / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". 3. Il résulte du dossier de la procédure devant le tribunal administratif de Rouen que les deux mémoires en défense produits par l'administration les 15 juillet 2019 et 20 août 2020 ont été communiqués à la société Total Raffinage France, qui y a répliqué. Le moyen tiré du défaut du caractère contradictoire de la procédure suivie en première instance doit, par suite, être écarté. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". 5. Il ressort du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué a, contrairement à ce que soutient la société TERF, été signée conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué au regard de ces dispositions manque en fait. En outre, la circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée à la société Total Raffinage France ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement. 6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 7. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Rouen a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par la société Total Raffinage France. En particulier, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a, respectivement, aux points 12, 13 et 15 du jugement, énoncé les motifs pour lesquels il a écarté les moyens tirés de l'absence de situation de co-activité entre les deux sociétés extérieures intervenant pour la livraison et le remplissage du filtre à sable, de l'existence d'un plan de prévention spécifique à cette opération et du caractère inadapté et irréalisable des mesures prescrites en matière de prévention des risques d'interférences en cas d'intervention d'entreprises extérieures. Par suite, la société appelante n'est pas fondée à soutenir que le jugement est insuffisamment motivé. Sur la légalité de la décision contestée : En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de base légale de la décision du 8 avril 2019 : 8. Aux termes de l'article L. 422-4 du code du travail : " La caisse régionale peut : / 1°) inviter tout employeur à prendre toutes mesures justifiées de prévention, sauf recours de l'employeur à l'autorité compétente de l'Etat qui doit être saisie et doit se prononcer dans les délais qui sont fixés par voie réglementaire ; / (...) ". Aux termes de l'article R. 422-5 du même code : " L'autorité compétente pour l'exercice des pouvoirs prévus au 1° du premier alinéa de l'article L. 422-4 est le directeur régional du travail et de l'emploi ". Enfin, aux termes de l'article L. 482-5 de ce code : " Des dispositions réglementaires déterminent, en tant que de besoin, les modalités d'application du livre IV. Sauf disposition contraire, elles sont prises par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". 9. La société TERF soutient que la procédure d'injonction conduite à son égard par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie et la décision contestée du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie du 8 mars 2019 rejetant son recours administratif préalable, fondées sur les dispositions de l'article L. 422-4 du code du travail, sont dépourvues de base légale. Elle fait valoir que ces dernières dispositions sont inapplicables, dès lors que les modalités de leur mise en œuvre ont été édictées par l'arrêté du 9 décembre 2010 relatif à l'attribution de ristournes sur la cotisation ou d'avances ou de subventions ou à l'imposition de cotisations supplémentaires en matière d'accidents du travail ou de maladies professionnelles, pris par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé qui était incompétent à cet effet. 10. Il résulte des dispositions de l'article L. 482-5 du code de la sécurité sociale que des mesures réglementaires d'application de l'article L. 422-4 de ce code, relatives à la mise en œuvre de la procédure d'injonction et au recours administratif préalable prévus au 1° de ce dernier article, ne pouvaient, en l'absence de disposition contraire, être édictées que par décret en Conseil d'État. Par suite, les dispositions de l'arrêté du 9 décembre 2010 ont, dans cette mesure, été prises par une autorité incompétente, et sont par conséquent illégales. 11. Toutefois, d'une part, les dispositions, citées au point 8, du 1° de l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale prévoient la possibilité pour les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail d'inviter " tout employeur à prendre toutes mesures justifiées de prévention ". Ces dispositions constituent, ainsi, la base légale des injonctions adressées par ces caisses régionales aux employeurs en matière de prévention, sans que l'absence de mesures règlementaires légalement prises soumettant de telles injonction à un régime spécifique, d'ailleurs non prévu par la loi, fasse obstacle à leur mise en œuvre. Par ailleurs, les caisses régionales, qui ne peuvent prendre que des mesures d'injonction justifiées, ont la possibilité d'exercer à cet effet le pouvoir, qui leur est conféré par les dispositions de l'article L. 422-3 du code de la sécurité sociale, de faire procéder par les ingénieurs-conseils et les contrôleurs de sécurité à toutes enquêtes qu'elles jugent utiles en ce qui concerne les conditions d'hygiène et de sécurité. 12. D'autre part, les dispositions du 1° de l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale instituent un recours administratif préalable obligatoire contre les injonctions prononcées par les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail. Conformément aux dispositions de l'article L. 482-5 du code de la sécurité sociale, les dispositions de l'article R. 422-5 du code de la sécurité sociale, issues d'un décret en Conseil d'Etat, ont désigné le directeur régional du travail et de l'emploi comme étant l'autorité compétente pour se prononcer sur ce recours administratif. Par ailleurs, les dispositions du 1° de l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale renvoient expressément à un acte réglementaire le soin de fixer les délais dans lesquels cette autorité doit être saisie et doit se prononcer. Mais alors qu'en vertu de l'article L. 100-1 du code des relations entre le public et l'administration, les dispositions de son article L. 231-4 s'appliquent aux relations entre le public et l'administration en l'absence de dispositions spéciales applicables, à défaut de dispositions règlementaires contraires légalement applicables, il convient de faire application des dispositions de cet article L. 231-4 qui prévoient que, lorsqu'une demande présente le caractère d'un recours administratif, le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet. En outre, en l'absence d'indication par les dispositions légalement applicables du délai dans lequel doit être formé un recours administratif préalable obligatoire, ce délai est le délai de recours contentieux de droit commun de deux mois. 13. Il résulte de ce qui a été dit aux deux points précédents que l'absence de mesures réglementaires d'application édictées par une autorité compétente n'a pas rendu manifestement impossible l'application des dispositions du 1° de l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale. La société TERF n'est, par suite, pas fondée à soutenir que l'illégalité des dispositions de l'arrêté du 9 décembre 2010, prévoyant des modalités de mise en œuvre de ces dispositions, prive de base légale la procédure d'injonction suivie à son égard par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie ainsi que la décision attaquée du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie. En ce qui concerne le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée : 14. Ainsi qu'il a été dit au point 12, la compétence pour statuer sur le recours administratif préalable obligatoire prévu par l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale a été dévolue au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi par les dispositions de l'article R. 422-5 de ce code, issues d'un décret en conseil d'Etat. Le moyen tiré de ce que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie n'était pas compétent pour prendre la décision contestée doit donc être écarté. En ce qui concerne les moyens tirés de l'insuffisance de l'enquête sur place préalable à l'injonction et de l'instruction du recours administratif préalable obligatoire formé par la société TERF : 15. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, en particulier du document intitulé " rapport premiers constats " produit en défense et des précisions apportées par l'administration en première instance, que l'injonction du 28 février 2019, confirmée par la décision attaquée, a été précédée d'une enquête sur place menée le 15 février 2019 par un ingénieur-conseil et un contrôleur de sécurité de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie. Ceux-ci ont analysé les circonstances de l'accident mortel survenu le même jour, en particulier, les conditions dans lesquelles a cédé la rambarde de la passerelle permettant l'accès au filtre à sable FA 401 B sur laquelle se tenait la victime, au moment de l'accident, pour procéder à l'installation du chantier de remplissage de ce filtre à sable. Il n'est, par ailleurs, pas contesté par la société TERF qu'au cours de cette enquête sur place, l'ingénieur-conseil et le contrôleur de sécurité se sont fait remettre le " plan de prévention annuel - maintenance courante ", " l'autorisation de travail " et le " bon de validation " concernant l'intervention de cette entreprise. Si l'enquête ainsi réalisée n'a porté que sur un lieu particulier du site, alors que celui-ci s'étend sur cinq cent hectares, et n'a concerné que l'opération particulière de remplissage du filtre à sable FA 401 B, elle était néanmoins de nature à révéler l'insuffisance des mesures prises par la société TERF en matière tant d'établissement des plans de prévention prévus aux articles R. 4512-1 et suivants du code du travail ainsi que des plans de prévention des risques de chute de hauteur. L'injonction contestée prescrit à l'entreprise, pour y remédier, sur le premier point, de se conformer à la réglementation en vigueur avant toute intervention d'une entreprise extérieure et d'en rendre compte à la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail et, sur le second point, d'identifier les plans de travail du site pour lesquels les protections collectives contre les chutes présentent des insuffisances similaires à celles constatées lors de l'enquête sur place, d'interdire temporairement leur accès et d'élaborer un plan de mise en conformité ainsi qu'un calendrier de réalisation. Dans ces conditions, compte tenu de l'objet même des mesures prescrites par l'injonction contestée, la société TERF n'est pas fondée à soutenir que l'enquête sur place réalisée le 15 février 2019 était insuffisante. 16. En second lieu, la société TERF soutient également que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie a insuffisamment instruit son recours formé contre l'instruction du 29 février 2019. Il ressort toutefois des pièces du dossier, d'une part, que cette autorité a organisé une réunion sur site, le 3 avril 2019, au cours de laquelle les représentants de l'entreprise ont exposé le " processus sécurité travaux " qu'elle met en œuvre pour se conformer notamment aux dispositions des articles R. 4512-1 et suivants du code du travail, et notamment l'élaboration du " plan de prévention maintenance courante - Raffinerie ", dont relevait l'opération de remplissage du filtre à sable, complété pour chaque intervention d'une entreprise extérieure par une " autorisation de travail " et des " bons de validation ". Un courrier explicatif assorti d'une documentation a également été remis, à cette occasion, aux représentants de l'administation. En outre, celle-ci fait valoir, sans être sérieusement contredite, que les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi avaient connaissance du caractère récurrent de cette problématique, dès lors que la société TERF s'était déjà vu adresser, en octobre 2016, des recommandations relatives à l'organisation d'inspections préalables et à l'élaboration de plans de prévention, similaires à celles figurant dans l'injonction litigieuse. D'autre part, la société TERF ne conteste pas avoir confirmé, lors de la réunion du 3 avril 2019, l'existence sur le site de plans de travail comparables à celui depuis lequel a eu lieu la chute mortelle survenue le 15 février 2019. Le moyen tiré de l'insuffisance de l'instruction du recours préalable formé contre l'injonction du 29 février 2019 doit, par suite, être écarté. En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée : 17. La décision du 8 avril 2019, qui mentionne l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale, se substitue à l'injonction émise le 28 février 2019 par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie tout en se référant expressément aux constats qui y sont relevés. Cette injonction qui vise les " risques liés aux interférences induites par la sous-traitance " et le " risque de chute de hauteur ", indique ainsi, avec suffisamment de précision, en adéquation avec l'objet des mesures prescrites, les risques que ces mesures tendent à prévenir. 18. En outre, les mesures prescrites par la décision contestée ne sont pas des mesures de nature technique et dont la réalisation est subordonnée à des considérations de faisabilité technique, mais des mesures d'organisation visant à l'identification des risques auxquels sont exposés les travailleurs et à la mise en place de processus de prévention de ces risques. La société TERF n'est donc pas fondée à soutenir que le défaut d'indication des possibilités techniques de réalisation de ces mesures entache d'irrégularité la décision attaquée. 19. Le moyen tiré par la société TERF de l'insuffisante motivation de la décision contestée du 8 mars 2019 doit donc être écarté. En ce qui concerne les moyens de légalité interne propres à l'injonction prescrite en matière de prévention des risques liés à l'intervention des entreprises extérieures : 20. Le titre premier du livre V de la quatrième partie du code du travail, qui inclut notamment les articles R. 4511-1 à R. 4515-11, est consacré à la prévention des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs liés aux " travaux réalisés dans un établissement par une entreprise extérieure ". Aux termes de l'article R. 4511-1 de ce code : " Les dispositions du présent titre s'appliquent au chef de l'entreprise utilisatrice et au chef de l'entreprise extérieure lorsqu'une entreprise extérieure fait intervenir des travailleurs pour exécuter ou participer à l'exécution d'une opération, quelle que soit sa nature, dans un établissement d'une entreprise utilisatrice, y compris dans ses dépendances ou chantiers ". Aux termes de l'article R. 4511-4 de ce code : " On entend par opération au sens du présent titre, les travaux ou prestations de services réalisés par une ou plusieurs entreprises afin de concourir à un même objectif ". Aux termes de l'article R. 4511-5 de ce code : " Le chef de l'entreprise utilisatrice assure la coordination générale des mesures de prévention qu'il prend et de celles que prennent l'ensemble des chefs des entreprises extérieures intervenant dans son établissement ". 21. Les mesures préalables à l'exécution d'une opération, au sens de l'article R. 4511-1 du code du travail, sont définies aux articles R. 4512-1 à R. 4512-16 de ce code. En particulier, aux termes de l'article R. 4512-2 du code du travail : " Il est procédé, préalablement à l'exécution de l'opération réalisée par une entreprise extérieure, à une inspection commune des lieux de travail, des installations qui s'y trouvent et des matériels éventuellement mis à disposition des entreprises extérieures ". Aux termes de l'article R. 4112-4 de ce code : " On entend par opération, au sens du présent titre, les travaux ou prestations de services réalisés par une ou plusieurs entreprises afin de concourir à un même objectif ". Aux termes de l'article R. 4512-5 de ce code : " Les employeurs se communiquent toutes informations nécessaires à la prévention des risques, notamment la description des travaux à accomplir, des matériels utilisés et des modes opératoires dès lors qu'ils ont une incidence sur la santé et la sécurité ". Aux termes de l'article R. 4512-6 de ce code : " Au vu des informations et éléments recueillis au cours de l'inspection commune préalable, les chefs des entreprises utilisatrice et extérieures procèdent en commun à une analyse des risques pouvant résulter de l'interférence entre les activités, installations et matériels. / Lorsque ces risques existent, les employeurs arrêtent d'un commun accord, avant le début des travaux, un plan de prévention définissant les mesures prises par chaque entreprise en vue de prévenir ces risques ". Aux termes de l'article R. 4512-8 de ce code : " Les mesures prévues par le plan de prévention comportent au moins les dispositions suivantes : / 1° La définition des phases d'activité dangereuses et des moyens de prévention spécifiques correspondants ; / 2° L'adaptation des matériels, installations et dispositifs à la nature des opérations à réaliser ainsi que la définition de leurs conditions d'entretien ; / (...) ". 22. Enfin, en vertu des dispositions du 2° de l'article R. 4512-7 du travail et de l'article 1er de l'arrêté du 19 mars 1993 pris pour son application, doivent obligatoirement faire l'objet d'un plan de prévention écrit, arrêté avant le début des travaux et quelle qu'en soit la durée, ceux qui sont effectués sur une installation classée faisant l'objet d'un plan d'opération interne en application de l'article 17 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977, dont les dispositions sur ce point ont été reprises à l'article R. 181-54 du code de l'environnement. 23. Il ressort des termes mêmes de la décision attaquée du 8 avril 2019 que, pour confirmer les mesures initialement prescrites par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie le 29 février 2019, en matière de mise en place d'une inspection commune et d'élaboration d'un plan de prévention préalablement à chaque intervention d'une entreprise extérieure, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi s'est fondé sur l'existence de manquements par la société Total Raffinage France, constatés par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie, " aux règles relatives à l'établissement des plans de prévention conclus avec les entreprises extérieures chargées de la maintenance courante sur le site ". A cet égard, l'injonction initiale du 29 février 2019 relevait l'absence de plan de prévention spécifique à l'intervention sur le filtre à sable FA 401 B, couverte par le plan de prévention " maintenance courante département énergie et logistique ", l'absence d'analyse de risque lié à la co-activité des entreprises chargées respectivement du remplissage du filtre à sable et de la livraison des sables et gravelles, l'imprécision de la désignation des taches à effectuer sur l'autorisation de travail n° M-U66-19-00107 et par le bon de validation établis n° M-U66-19-00107-003 préalablement à l'intervention du 15 février 2019, et l'absence de mention sur ces documents, parmi les risques potentiels principaux, du risque de chute de hauteur. S'agissant de l'existence d'une situation de co-activité entre l'entreprise chargée du remplissage du filtre à sable et l'entreprise chargée de la livraison des sables et gravelles : 24. Aux termes de l'article 6 de la directive du Conseil 89/391/CEE du 12 juin 1989 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail : " (...) / Sans préjudice des autres dispositions de la présente directive, lorsque, dans un même lieu de travail, les travailleurs de plusieurs entreprises sont présents, les employeurs doivent coopérer à la mise en œuvre des dispositions relatives à la sécurité, à l'hygiène et à la santé et, compte tenu de la nature des activités, coordonner leurs activités en vue de la protection et de la prévention des risques professionnels, s'informer mutuellement de ces risques et en informer leurs travailleurs respectifs et/ ou leurs représentants / (...) ". Aux termes de l'article L. 4121-5 du code du travail : " Lorsque dans un même lieu de travail les travailleurs de plusieurs entreprises sont présents, les employeurs coopèrent à la mise en œuvre des dispositions relatives à la santé et à la sécurité au travail ". 25. En premier lieu, il résulte des dispositions combinées de l'article R. 4511-1 du code du travail et des articles R. 4512-1 et suivant de ce code, citées au point 21, qu'une opération constitue le cadre dans lequel l'entreprise utilisatrice et l'entreprise extérieure ou les entreprises extérieures appelées à intervenir doivent apprécier en commun s'il existe des risques d'interférences entre les activités, les installations et les matériels devant donner lieu à des mesures de prévention. En définissant la notion d'opération comme " les travaux ou prestations de services réalisés par une ou plusieurs entreprises afin de concourir à un même objectif ", sans limiter cette définition aux cas d'interventions simultanées, en un même lieu, de plusieurs entreprises, les dispositions de l'article R. 4512-4 du code du travail, cité au point 19, ne méconnaissent, par suite, ni les objectifs prévus à l'article 6 de la directive du 12 juin 1989, ni les dispositions de l'article L. 4121-5 du code du travail. Au demeurant, l'article premier de la directive du 12 juin 1989 ouvre aux Etats membres la possibilité de prévoir, par des dispositions nationales, des règles plus favorables à la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail. 26. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que, lorsque l'accident mortel est survenu le 15 février 2019, les deux salariés de l'entreprise chargée des travaux de remplissage du filtre à sable FA 401 B installaient le matériel nécessaire à cette intervention, en procédant à la fixation, au niveau de la passerelle permettant l'accès à ce filtre, du flexible qui venait d'être raccordé au camion de l'entreprise chargée de la livraison des sables et gravelles destinés au remplissage de ce filtre par un salarié de cette dernière. Ces deux entreprises se trouvaient ainsi dans une situation de co-activité susceptible de faire naître des risques d'interférences entre leurs activités et matériels, alors même que le raccordement au véhicule du flexible par un salarié de l'entreprise chargée de la livraison et l'installation du flexible au niveau de la passerelle par les salariés de l'entreprise chargée du remplissage du filtre étaient réalisées successivement et non concomitamment. Or, il est constant qu'aucune analyse des risques commune à la société TERF et à ces deux entreprises extérieures n'a eu lieu. C'est donc sans erreur de fait, erreur d'appréciation ni erreur de droit que, pour confirmer l'injonction litigieuse, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi s'est notamment fondé sur l'absence, constatée par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie, d'analyse de risques liés à la co-activité des entreprises chargées respectivement de la livraison des sables et gravelles et du remplissage du filtre à sable. S'agissant de l'absence de plan de prévention spécifique à l'opération portant sur le filtre à sable FA 401 B : 27. La société TERF soutient que le motif tiré de l'absence d'établissement d'un plan de prévention spécifique est erroné, dès lors que l'ensemble indissociable constitué par le plan de prévention " maintenance courante département énergie et logistique ", l'autorisation de travail et le bon de validation constituent un ensemble indissociable répondant aux exigences prévues, en matière d'établissement d'un plan de prévention préalable à toute intervention d'une entreprise extérieure, par les dispositions des articles R. 4512-1 et suivants du code du travail. 28. Il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre du " processus sécurité travaux " mis en œuvre par la société TERF sur le site de Gonfreville-l'Orcher, chacune des trente opérations dites " de maintenance courante ", parmi lesquelles figure l'opération de " maintenance courante du département d'énergie et de logistique de la raffinerie ", identifiée sous le n° IP-ELR-18, et dont relevait l'intervention du 8 avril 2019, est couverte par un " plan de prévention annuel ", dit aussi " plan de prévention permanent ". L'ensemble de ces opérations de maintenance courante, définies comme " l'ensemble de travaux et prestations élémentaires dans une zone géographique, répétitifs, ponctuels, isolés, limités dans le temps et contribuant à maintenir l'outil de production en son état de marche continue ", a donné lieu à l'identification par la TERF de vingt-et-une " phases d'activité ", telles par exemple que les " travaux de pompage et dépotage ", " travaux de levage et manutention ", " travaux à feu ", " travaux en atmosphère non respirable ", " travaux de fouille " ou encore " travaux exposant aux rayonnements ionisants ", chacune d'elle étant associée à une " fiche d'analyse de risques et de prescriptions de sécurité ". L'élaboration des plans de prévention annuels repose sur la constitution de " dossiers entreprise ", complétés par chaque entreprise extérieure qui précise la nature des travaux qu'elle doit exécuter, identifie l'opération ou les opérations dans le cadre desquelles elle intervient, désigne pour chaque opération les " phases d'activité et risques associés " auxquelles se rattache son intervention et s'engage à mettre en œuvre les moyens de de prévention spécifiques aux risques correspondants. L'élaboration de chaque plan de prévention annuel propre à une opération déterminée donne lieu à l'organisation d'une " inspection commune ", suivie d'une " réunion de coordination générale " auxquelles sont tenues de participer toutes les entreprises extérieures participant à une opération donnée. L'inspection commune, au cours de laquelle sont présentés, notamment, " les secteurs concernés par l'opération " et " les emplacements des équipements avec des risques particuliers ", est destinée à " identifier les risques dus à la localisation de l'opération ". Au cours de la réunion de coordination, la société TERF présente les risques et interférences liées à l'opération et recueille les observations émises par les entreprises extérieures. A l'issue de cette réunion est élaboré un document de " prescriptions de coordination " destiné à être intégré au plan de prévention annuel couvrant l'opération. 29. Le processus de sécurité travaux de la société TERF prévoit également que chaque intervention d'une entreprise extérieure sur le site est précédée d'une visite préalable menée avec l'un de ses donneurs d'ordre, devant permettre d'établir un diagnostic technique, de définir les moyens utilisés et d'évaluer les risques et, pour l'entreprise extérieure, d'élaborer ou de modifier son mode opératoire. A la suite de cette inspection commune, chaque entreprise extérieure émet une " autorisation de travail " à partir du système informatique de la société TERF, en indiquant, notamment, la référence à un plan de prévention, l'identification de l'intervention-type de référence, telle que, pour l'intervention du 15 février 2019, l'intervention-type " N-Nettoyage en espace clos ", et en précisant, dans la fenêtre intitulée " description précise du travail ", les conditions de réalisation de l'intervention ainsi que les références de son mode opératoire. L'autorisation de travail est ensuite instruite par le responsable du secteur d'exploitation concerné, qui procède à sa validation après avoir " consolidé " l'analyse des risques et défini les mesures de prévention. Cette autorisation de travail constitue un document unique devant présenter toutes les informations relatives à une intervention particulière et, en particulier, les risques potentiels principaux, ainsi que les mesures adaptées devant être adoptées par la société TERF et par l'entreprise extérieure. La réalisation quotidienne des travaux constitutifs de l'intervention est, en outre, précédée, la veille, d'une réunion de coordination conduite par le responsable de secteur et permettant notamment d'identifier les interférences entre les différentes interventions réalisées le même jour et relevant de plans de prévention différents. Elle est subordonnée à l'établissement au cours de cette réunion d'un " bon de validation " qui reprend les indications figurant dans l'autorisation de travail, complétées par d'ultimes informations sur les conditions de réalisation de l'intervention. 30. Il résulte de ce qui a été dit au point 28 que les plans de prévention annuels portent sur des opérations dont l'objet est défini de façon très extensive par la société TERF. Celle-ci ne conteste pas que l'inspection préalable à leur établissement se borne à une visite générale des lieux organisée pour un grand nombre d'entreprise appelées à réaliser des interventions diverses. Ces plans de prévention annuels ne sauraient, par suite, constituer à eux seuls, le plan de prévention arrêté d'un commun accord par l'entreprise utilisatrice et les entreprises extérieures, à la suite d'une inspection commune des lieux de travail, des installations et matériels mis à disposition et de l'analyse commune des risques d'interférences, prévu par les dispositions, citées au point 19, des articles R. 4512-2 et suivants du code du travail, ce que ne conteste d'ailleurs pas la société TERF. Par ailleurs, s'il est prévu que l'autorisation de travail doit être délivrée après une visite complémentaire du lieu d'exécution de l'intervention, les conditions d'élaboration de ce document, décrites au point 29 ne permettent pas de garantir qu'il est procédé, comme le prévoient les mêmes dispositions, à l'analyse en commun des risques par l'entreprise utilisatrice et les entreprises extérieures et à l'élaboration d'un commun accord des mesures de préventions. 31. Ces insuffisances sont corroborées par la circonstance que, si le mode opératoire de l'entreprise chargée du remplissage du filtre à sable FA 401 B mentionnait le mauvais état de la plateforme, relevait le risque de chute de personne et prévoyait sur ce point des mesures de prévention, telles que la vérification de l'état de la plateforme, le risque de chute de hauteur n'était pas visé dans l'autorisation de travail. En outre, aucun document n'atteste de la réalisation effective de la visite préalable à l'émission de l'autorisation de travail éditée le 8 février 2019, aucune indication sur ce point n'étant portée ni sur l'autorisation de travail elle-même, ni sur le bon de validation, la date de cette inspection n'étant pas non plus portée dans le champ prévu à cet effet sur le mode opératoire établi par l'entreprise. Enfin, l'autorisation de travail ne retraçait aucune analyse commune des risques d'interférences liées à la co-activité des entreprises chargées respectivement du remplissage du filtre à sable et de la livraison des sables et gravelles. 32. Dans ces conditions, la société TERF n'est pas fondée à soutenir que l'administration a retenu un motif erroné en relevant l'absence de présentation d'un " plan de prévention spécifique à l'intervention sur le filtre à sable FA 401 B ", lequel doit être entendu comme le plan spécifique à l'opération dans laquelle s'inscrit cette intervention, au sens des dispositions, citées aux points 18 et 19, des articles R. 4511-1 et R. 4512-4, du code du travail. S'agissant des mesures prescrites par l'administration : 33. En premier lieu, contrairement à ce que soutient la société TERF, la décision contestée, en l'invitant à se référer aux guides de bonnes pratiques rédigés par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie, ne confère aucun caractère obligatoire ou réglementaire à ces guides de bonnes pratiques. Le moyen ainsi tiré de l'erreur de droit ainsi commise par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi doit, par suite, être écarté. 34. En second lieu, il résulte des termes même de la décision contestée que les mesures prescrites reprennent la teneur des dispositions applicables, en vertu des dispositions, citées au point 19, des articles R. 4512-1 et suivants du code du travail, aux travaux réalisés dans un établissement par une entreprise extérieure. La société TERF ne saurait, par suite, sérieusement soutenir que ces mesures sont injustifiées en ce qu'elles sont inadaptées à son activité et qu'elles affectent, sans distinguer la nature et la particularité des nombreuses opérations réalisées, l'ensemble de son site de Gonfreville-l'Orcher. Elle ne saurait pas davantage utilement faire valoir que ces mesures sont entachées d'erreur d'appréciation dès lors que leur exécution entraînerait un bouleversement des procédures de gestion des travaux exécutés par les entreprises extérieures. S'agissant du délai imparti pour exécuter l'injonction : 35. La décision contestée impartit à la société TERF un délai d'un mois pour se conformer aux dispositions prévues aux articles R. 4512-1 du code du travail en matière de prévention des risques liés à l'intervention d'entreprises extérieures, et notamment en matière d'établissements de plans de prévention. Si la société TERF souligne le très grand nombre d'interventions réalisées par des entreprises extérieures sur le site de Gonfreville-l'Orcher, donnant lieu à l'émission d'un nombre moyen de deux cent quatre-vingts douze autorisations de travail par jour, elle ne précise pas suffisamment en quoi le délai imparti est insuffisant pour réaliser les adaptations de son processus de sécurité travaux qui lui permettraient de se conformer à ces dispositions, en particulier à l'édition, préalablement à chaque opération, au sens des dispositions, citées aux points 18 et 19, des articles R. 4511-1 et R. 4512-4 du code du travail, d'un document écrit dont les conditions d'élaboration et le contenu répondent aux règles relatives au plan de prévention. En ce qui concerne les moyens de légalité interne propres à l'injonction prescrite en matière de prévention des risques de chute de hauteur : 36. Aux termes de l'article R. 4323-59 du code du travail : " La prévention des chutes de hauteur à partir d'un plan de travail est assurée : / 1° Soit par des garde-corps intégrés ou fixés de manière sûre, rigides et d'une résistance appropriée, placés à une hauteur comprise entre un mètre et 1,10 m et comportant au moins : / a) Une plinthe de butée de 10 à 15 cm, en fonction de la hauteur retenue pour les garde-corps ; / b) Une main courante ; / c) Une lisse intermédiaire à mi-hauteur ; /2° Soit par tout autre moyen assurant une sécurité équivalente ". 37. En premier lieu, la société TERF conteste l'exactitude matérielle des constatations de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Normandie relatives à l'" absence de protection collective contre les risques de chutes de hauteur continue, fixée de manière sûre, et d'une résistance appropriée sur le plan de travail des filtres à sable ", à la " persistance de ce risque de chute de hauteur mortel sur les différents plans de travail des filtres à sable " et à l'" exposition de vos salariés et des salariés des entreprises extérieures à des risques exceptionnels de chute de hauteur ". 38. Toutefois, si la société TERF affirme que le plan de travail d'où a eu lieu la chute mortelle du 15 février 2019 était muni d'un garde-corps intégré qui, bien qu'amovible pour permettre le passage de charges lourdes, comportait un dispositif d'accroche approprié à son usage, elle n'apporte aucun commencement de preuve au soutien de cette allégation. Il ressort au contraire des premiers constats réalisés le 15 février 2019 par un ingénieur conseil et un contrôleur de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail que la rambarde de sécurité placée sur la passerelle où devaient intervenir les salariés de l'entreprise chargée du remplissage du filtre à sable qui a cédé était non seulement amovible, sans dispositif destiné à assurer la sureté de sa fixation, mais aussi vétuste. Par ailleurs, au cours du conseil social et économique extraordinaire qui s'est tenu le 21 février 2019, l'un des représentants de la société appelante a répondu par la négative à la question de savoir " s'il existait un dispositif de sécurité sur les gonds pour retenir la plate-forme amovible et éviter qu'elle ne se décroche de manière accidentelle ". Dans ces conditions, et alors même que, le 15 février 2019, la rambarde a cédé sous l'effet de l'arrimage du flexible destiné à l'acheminement du sable, alors qu'elle n'était pas destinée à cet usage, la société TERF n'est pas fondée à soutenir que cet équipement était conforme aux conditions de sécurité prévues par les dispositions de l'article R. 4323-59 du code du travail. 39. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que les " travaux en hauteur en dehors des protections collectives fixes " revêtent sur le site de Gonfreville-l'Orcher une importance suffisante pour constituer l'une des vingt-et-une phases d'activité identifiées par la société TERF pour l'élaboration des plans de prévention annuels. La réalisation de tels travaux, par leur nature même, expose les salariés qui les exécutent à un risque exceptionnel de chute de hauteur, indépendamment du caractère suffisant ou non des mesures mises en œuvre pour limiter ce risque. La société TERF n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la mesure prescrite était injustifiée en ce qu'elle ne se limitait pas au lieu précis de l'accident. 40. En troisième lieu, la société TERF a elle-même indiqué qu'antérieurement à la décision contestée, elle s'était déjà engagée dans une opération de recensement des installations susceptibles de générer des risques de chute de hauteur. Dans ces conditions, il ne résulte pas des pièces du dossier qu'en raison de l'étendue du site de Gonfreville-l'Orcher et du très grand nombre d'installations concernées, le délai d'un mois qui lui a été prescrit serait insuffisant pour lui permettre de réaliser les mesures de diagnostic et de programmation qui lui ont été prescrites. 41. Il résulte de tout ce qui précède que la société TERF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du 8 avril 2019. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la société par actions simplifiée Total Energies Raffinage France est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Total Energies Raffinage France et au ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion. Copie en sera adressée au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie et à la caisse régionale d'assurances maladie de Normandie. Délibéré après l'audience publique du 7 mars 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - Mme Dominique Bureau, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La rapporteure, Signé : D. Bureau La présidente de chambre, Signé : G. BorotLa greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière C. Huls-Carlier 2 No 21DA01928
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2017 par lequel le maire de La Madeleine s'est opposé à la déclaration préalable de travaux qu'il a présentée le 12 octobre 2017 pour la réalisation de travaux d'aménagement d'une maison d'habitation située 11 rue de Berkem dans cette commune. Par un jugement n° 1800398 du 30 juillet 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 14 septembre 2021 et un mémoire enregistré le 9 juin 2022, M. C... B..., représenté par Me Michel Gravé, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler cet arrêté ; 3°) de mettre à la charge de la commune de La Madeleine la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le maire ne pouvait se fonder sur les conditions d'occupation de l'habitation pour s'opposer à la déclaration préalable ; - l'article R.111-25 du code de l'urbanisme ne permet pas de s'opposer à une déclaration préalable ; - au surplus, le projet sera sans impact sur le stationnement dans la rue. Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2022, la commune de La Madeleine, représentée par Me Paul Jablonski, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B... de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - le maire peut s'opposer à une déclaration préalable en se fondant sur l'article R. 111-25 du code de l'urbanisme ; - les difficultés de stationnement dans le secteur et l'absence de dispositions à cet égard dans le projet justifiaient le refus ; - à titre subsidiaire, le motif tiré de la méconnaissance de l'article UBc 9 du plan local d'urbanisme est également fondé ; - à titre infiniment subsidiaire, la déclaration préalable présentait un caractère frauduleux. Par une ordonnance du 24 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée avec effet immédiat en application des articles R.611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller, - les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public, - et les observations de Me Paul Jablonski, représentant la commune de La Madeleine. Considérant ce qui suit : Sur l'objet du litige : 1. M. B..., propriétaire d'une maison d'habitation sur la parcelle AP 90 située 11 rue Berkem à La Madeleine, a entrepris des travaux sans déclaration qui ont été constatés par deux agents communaux le 26 septembre 2017. Pour régulariser sa situation, il a déposé une déclaration préalable, le 12 octobre 2017 pour changer les menuiseries et reconstruire l'extension arrière, pour la démolition de laquelle il a, par ailleurs, obtenu un permis de démolir le 11 décembre 2017. Le maire de La Madeleine s'est opposé à cette déclaration préalable par décision du 11 décembre 2017. M. B... relève appel du jugement du 30 juillet 2021 du tribunal administratif de Lille qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 décembre 2017 portant opposition à déclaration préalable. Sur la légalité de l'arrêté du 11 décembre 2017 : En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R. 111-25 du code de l'urbanisme : 2. Aux termes de l'article R. 111-25 du code de l'urbanisme : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable peut imposer la réalisation d'installations propres à assurer le stationnement hors des voies publiques des véhicules correspondant aux caractéristiques du projet. ". Cette disposition est applicable aux communes dotées de plan local d'urbanisme en application de l'article R. 111-1 du même code. 3. D'une part, il ressort de la notice du projet, jointe à la déclaration complémentaire du 30 octobre 2017, que le projet consiste en " l'aménagement d'une maison pouvant accueillir des colocataires " avec la création de cinq chambres aménagées. Ce projet est donc susceptible de permettre le logement d'au moins cinq locataires indépendants et pouvant disposer chacun d'un véhicule automobile. Si l'appelant soutient que les futurs locataires étudiants disposent rarement de véhicules, la commune produit une étude de l'observatoire de la vie étudiante qui indique que près des deux tiers des étudiants disposent d'une voiture individuelle et que c'est particulièrement le cas de ceux qui vivent en logement individuel. Si les données de cette étude datent de 2003, rien ne permet d'établir que cette tendance ait été profondément modifiée depuis cette date. 4. Le maire pouvait donc tenir compte des caractéristiques du projet analysées ci-dessus pour apprécier sa conformité aux règles d'urbanisme. La circonstance que le projet n'emporte aucun changement de destination au sens de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme n'impliquait pas que le maire ait été tenu de délivrer le permis, comme le prétend l'appelant, sans se livrer à une appréciation concrète de la conformité du projet à l'ensemble des règles d'urbanisme. 5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le stationnement dans la rue, qui est à sens unique, n'est autorisé que de manière unilatérale, compte tenu de son étroitesse. Il n'est pas sérieusement contesté que, dans ces conditions et compte tenu du fait que les maisons individuelles de la rue possèdent rarement un garage ou un emplacement de stationnement dédié, le stationnement est saturé dans cette rue et dans le secteur avoisinant, l'appelant reconnaissant même que " le stationnement y est impossible ". 6. Par courrier du 24 octobre 2017, le maire a écrit à M. B... pour lui demander de " rechercher des places de stationnement " pour la réalisation du projet. Aucune réponse n'a été apportée par le pétitionnaire à cette demande. Le maire a donc pu considérer que le pétitionnaire était dans l'impossibilité d'assurer le stationnement des occupants du projet hors de la voie publique. Aucune prescription ne permettait donc de régulariser le projet sur ce point, faute d'indications données à cet égard par le pétitionnaire. 7. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments et au vu de la configuration des lieux, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une décision de non-opposition à la déclaration assortie de prescriptions, et non pas une décision d'opposition, aurait pu être prise. Dans ces conditions, le maire de La Madeleine n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article R. 111-25 du code de l'urbanisme en considérant que la déclaration préalable de M. B... ne permettait pas le stationnement hors de la voie publique des occupants du projet. Ce seul motif suffisait à s'opposer à la déclaration préalable de M. B..., sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre motif de refus opposé par le maire de La Madeleine. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions d'annulation du 11 décembre 2017. Sur les frais exposés et non compris dans les dépens : 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de La Madeleine, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. 10. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de La Madeleine et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : M. B... versera à la commune de La Madeleine une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la commune de La Madeleine. Délibéré après l'audience publique du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient : - M. Marc Heinis, président de chambre, - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, - M. Denis Perrin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le rapporteur, signé: D. PerrinLe président de la 1ère chambre, Signé: M. A... La greffière, Signé: C. Sire La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N° 21DA02204 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 30 août 2022 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2213769 du 8 novembre 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, un mémoire et des pièces enregistrées les 8 décembre 2022, 17 décembre 2022, 4 janvier 2023, 9 janvier 2023, 13 février 2023 et 27 février 2023, M. A..., représenté par Me Hervet, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n°2213769 du 8 novembre 2022 du tribunal administratif de Montreuil ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 30 août 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail. Il soutient que : En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi : - elle est entachée d'un défaut de motivation ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Mme B... a présenté son rapport au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant algérien né le 4 novembre 1978, est entré en France le 25 février 2015 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa C valable du 18 novembre 2014 au 16 mai 2015. Le 27 juillet 2022, il a déposé une demande d'admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 30 août 2022, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par un jugement du 8 novembre 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. M. A... relève appel de ce jugement. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a déposé une demande d'admission exceptionnelle au séjour auprès des services de la sous-préfecture du Raincy le 27 juillet 2022. D'après le procès-verbal d'audition versé aux débats, l'intéressé a également indiqué, lors de son interpellation le 30 août 2022, avoir présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour le 27 juillet 2012 auprès de la sous-préfecture du Raincy en fournissant le numéro d'enregistrement de son dossier. Dans ces conditions, en prenant la mesure d'éloignement attaquée sans avoir fait état de cet élément alors que la demande de titre de séjour déposée par M. A... était toujours en cours d'instruction, le préfet de police a entaché sa décision d'un défaut d'examen particulier de la situation de l'intéressé. Par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée ainsi que, par voie de conséquence, la décision fixant le pays à destination duquel il sera éloigné. 3. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 4. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet de police délivre un titre de séjour à M. A.... En revanche, elle implique nécessairement que le préfet de police ou tout autre préfet territorialement compétent réexamine la situation de M. A.... Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police ou à tout autre préfet territorialement compétent de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. D E C I D E : Article 1 : Le jugement n° 2213769 du 8 novembre 2022 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 30 août 2022 du préfet de police sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet de police ou à tout autre préfet territorialement compétent de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de police. Délibéré après l'audience du 6 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président, - Mme Marianne Julliard, présidente assesseure, - Mme Gaëlle Dégardin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. La rapporteure, G. B...Le président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA05227
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai. Par un jugement n° 2008366 du 16 février 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 25 février 2022, Mme B..., représentée par Me Ormillien, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; - le tribunal administratif a commis des erreurs d'appréciation de sa situation, notamment au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ainsi que des dispositions des articles L. 423-7 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'arrêté attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation ; - il méconnaît les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - il méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - il méconnaît les stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. La requête a été communiquée à la préfète du Val-de-Marne qui n'a pas produit d'observations. Par une ordonnance du 27 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 février 2023 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 décembre 1990 ; - le code civil ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ressortissante ivoirienne, née le 27 mars 1981 et entrée en France, selon ses déclarations, le 21 septembre 2015, s'est vue délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de parent d'enfant français, valable du 18 juin 2018 au 17 juin 2019, sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable. Le 14 mai 2019, elle en a sollicité le renouvellement. Par un arrêté du 5 octobre 2020, le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai. Mme B... fait appel du jugement du 16 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. D'une part, il ressort de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif a écarté, par une motivation suffisante, tous les moyens soulevés par Mme B... en première instance. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement, à le supposer soulevé, manque en fait. 3. D'autre part, si Mme B... soutient que le tribunal administratif a entaché son jugement d'erreurs d'appréciation de sa situation, notamment au regard de stipulations de conventions internationales ou de dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou aurait dû examiner la légalité de l'arrêté attaqué en date du 5 octobre 2020 au regard des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à compter du 1er mai 2021, ces moyens, qui concernent le bien-fondé du jugement, ne sont pas de nature à mettre en cause sa régularité. Ils doivent, dès lors, être écartés. Sur la légalité de l'arrêté attaqué : 4. En premier lieu, Mme B... reprend en appel, sans faire valoir d'arguments de droit ou de fait nouveaux et pertinents, le moyen soulevé en première instance et tiré de ce que l'arrêté attaqué portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivé. Il y a lieu d'écarter ce moyen, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif aux points 4 et 5 de son jugement. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, dont la légalité s'apprécie à cette date : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant (...) ". 6. D'une part, il ressort des pièces du dossier que si Mme B... est mère d'un enfant français, Dogo Den Kenan A..., né le 16 mai 2017, et qui a été reconnu par anticipation, le 27 janvier 2017, par M. G... A..., né le 1er octobre 1977 et de nationalité française, elle n'établit pas que ce dernier contribuait effectivement, à la date de l'arrêté attaqué, soit le 5 octobre 2020, à l'entretien et à l'éducation de cet enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil. A cet égard, la requérante, qui ne verse aucune pièce susceptible de démontrer cette contribution pour les années 2017 et 2018, se borne à produire, au titre des années 2019 et 2020, outre une attestation de prise en charge en date du 17 décembre 2019 signée par M. G... A..., un contrat d'accueil dans une crèche, située à Bonneuil-sur-Marne, en date du 16 janvier 2019, qui ne mentionne ni l'adresse, ni le numéro de téléphone de celui-ci, des factures de cette crèche en date des 5 février, 6 mai, 27 mai et 4 juin 2019, établies aux noms des deux parents, ainsi que quatre reçus manuscrits de sommes d'argent établis par la directrice de cette crèche les 30 avril, 20 mai, 5 juillet et 3 octobre 2019, quelques tickets d'achat, qui ne mentionnent pas le nom de l'acheteur, et deux factures d'achat en date du 13 mars 2020 et 2 décembre 2020, mentionnant le nom de M. G... A..., pour une somme respectivement de 29,12 euros et 64,70 euros. Ces quelques documents épars, portant, de surcroît, sur des sommes très modestes, ne constituent pas des éléments suffisamment probants permettant d'établir, à la date de l'arrêté attaqué, la réalité de cette contribution effective de l'intéressé, compte tenu de ses ressources, sur lesquelles la requérante ne fournit aucune précision suffisante, à l'entretien et à l'éducation de l'enfant. Il en est de même des attestations établis les 18, 19, 20 et 22 janvier 2021 par la directrice de la crèche que fréquente l'enfant ou par des proches ou connaissances, qui sont rédigées en des termes particulièrement succincts ou très peu circonstanciés et qui, au surplus, ne sont pas de nature à infirmer les éléments contenus dans le rapport établi le 18 juin 2020 par un agent de police du commissariat de Créteil, lequel a relevé que Mme B... n'avait pas été en mesure d'apporter des précisions sur l'adresse de M. G... A..., ni sur les circonstances de leur rencontre et de leur relation. 7. D'autre part, il ressort également des pièces du dossier que si Mme B... est mère d'un enfant français, Aylon Gaël Dogo, né le 24 octobre 2019, et qui a été reconnue par anticipation, le 10 juillet 2019, par M. C... F..., né le 13 juin 1962 et de nationalité française, elle n'établit pas davantage que ce dernier contribuait effectivement, à la date de l'arrêté attaqué, à l'entretien et à l'éducation de cet enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil. A cet égard, elle se borne à produire deux relevés de son compte bancaire des 30 décembre 2019 et 30 mars 2020 mentionnant la remise de deux chèques de M. C... F... d'un montant de 50 euros chacun ainsi qu'une facture d'achat du 13 mars 2020 de nourriture pour enfant d'un montant de 89,59 euros, ces éléments étant insuffisants pour démontrer que ce dernier contribuait à l'entretien de l'enfant et participait à son éducation, compte tenu de ses ressources, sur lesquelles la requérante ne fournit pas davantage de précisions. 8. Enfin, la double circonstance que Mme B... se prévaut, par la production de relevés de son compte bancaire, de deux virements effectués par M. C... F... le 15 juillet 2021 et le 13 décembre 2021, pour l'enfant Aylon Gaël, d'un montant respectivement de 150 euros et de 50 euros, éléments, au demeurant, insuffisants pour démontrer que ce dernier contribuerait effectivement à l'entretien de l'enfant et participerait à son éducation, et que l'intéressée s'est mariée, le 23 juillet 2022, avec M. C... F..., sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté, qui s'apprécie à la date à laquelle il a été pris. 9. Il suit de là que Mme B..., qui ne justifie pas que les pères de ses deux enfants contribuaient effectivement à leur entretien et à leur éducation, n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Val-de-Marne aurait, sur ce point, entaché son arrêté du 5 octobre 2020 d'une erreur d'appréciation de sa situation au regard des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 10. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Enfin, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 décembre 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". 11. Mme B... se prévaut de la durée de son séjour en France et de son insertion professionnelle sur le territoire et fait valoir qu'elle est mère de deux enfants, nés en France, respectivement le 16 mai 2017 et le 24 octobre 2019, et qui sont de nationalité française. Toutefois, la requérante ne justifie pas de l'ancienneté et de la continuité de son séjour sur le territoire avant l'année 2017. En outre, si Mme B... a travaillé, à temps partiel, auprès de l'association " Domartis ", du 7 mai 2018 au 6 mai 2019, sous contrat à durée déterminée, en qualité d'aide à domicile et auprès de la société Novasol, du 7 mai 2018 au 27 juin 2019, sous contrat à durée indéterminée, en qualité d'agent de service et produit une promesse d'embauche de l'association " Domartis " en date du 12 janvier 2021, soit postérieur à l'arrêté attaqué, elle ne saurait être regardée comme justifiant d'une insertion professionnelle stable et ancienne sur le territoire. En outre, ainsi qu'il a été dit aux points 6 et 7, elle ne démontre pas que les pères de ses deux enfants auraient contribué effectivement, à la date de l'arrêté attaqué, à leur entretien et à leur éducation ou que ses enfants et elle-même auraient entretenu des liens effectifs avec ces personnes. Au surplus, si la requérante a produit, en dernier lieu, un acte de mariage avec M. C... F..., célébré le 23 juillet 2022, elle n'établit, ni n'allègue d'ailleurs, vivre avec lui. Par ailleurs, Mme B... ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'elle emmène avec elle ses deux enfants, en bas âge, et à ce qu'elle poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, en Côte d'Ivoire où résident deux autres de ses enfants et où elle-même a vécu au moins jusqu'à l'âge de trente-quatre ans. Enfin, l'intéressée n'établit, ni n'allègue d'ailleurs, qu'elle serait dans l'impossibilité de se réinsérer dans son pays d'origine, ni que ses enfants ne pourraient y bénéficier d'une scolarisation normale. Par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté en litige portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peut être regardé comme ayant porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts de ces deux mesures ou comme ayant été pris en méconnaissance de l'intérêt supérieur de ses deux enfants mineurs. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations et dispositions précitées doivent être écartés. 12. Enfin, les stipulations de l'article 9 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés. Mme B... ne peut donc utilement se prévaloir de ces stipulations pour demander l'annulation de l'arrêté attaqué. 13. Il résulte de ce tout qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète du Val-de-Marne. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. d'Haëm, président, - M. Mantz, premier conseiller, - Mme d'Argenlieu, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. Le président-rapporteur, R. d'HAËML'assesseur le plus ancien, P. MANTZ La greffière, A. GASPARYAN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA00919
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui renouveler son autorisation provisoire de séjour en qualité d'accompagnant d'enfant malade, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai. Par un jugement n° 2126303 du 24 février 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 1er juin 2022, M. B..., représenté par Me Boudjellal, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français sont entachées d'une insuffisance de motivation ; - elles sont entachées d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ; - elles sont entachées d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est cru, à tort, lié par l'avis du 17 septembre 2021 du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration, que l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas applicable aux ressortissants algériens, que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ne prévoit pas le cas d'un accompagnant de malade, qu'il appartenait au préfet d'apprécier s'il existait des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant son admission exceptionnelle au séjour et qu'il a méconnu le pouvoir discrétionnaire dont il dispose, quant à l'opportunité d'une mesure de régularisation ; - en raison de l'indisponibilité en Algérie de la prise en charge pluridisciplinaire que nécessite l'état de santé de son fils C... et de l'absence d'un traitement approprié à sa pathologie dans ce pays, elles sont entachées d'une erreur de droit au regard des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; - elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elles méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - elles sont entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 14 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 novembre 2022 à 12 heures. Par un courrier du 13 février 2023, une mesure d'instruction a été diligentée par la cour. Par un mémoire, enregistré le 22 février 2023, M. B... a répondu à cette mesure. Par un mémoire, enregistré le 27 février 2023, le préfet de police a répondu à cette mesure. Par une décision du 27 avril 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal administratif de Paris, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 décembre 1990 ; - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur, - et les observations de Me Boudjellal, avocat de M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant algérien, né le 1er avril 1975 et entré en France le 30 juillet 2019, a sollicité, le 15 avril 2021, le renouvellement de l'autorisation provisoire de séjour qui lui a été délivrée en tant qu'accompagnant d'enfant malade. Par un arrêté du 23 novembre 2021, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai. M. B... fait appel du jugement du 24 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il rejette sa demande et l'oblige à quitter le territoire français. 2. En premier lieu, si M. B... reprend en appel ses moyens de première instance tirés, s'agissant des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle, il ne développe, toutefois, au soutien de ces moyens aucun argument de droit ou de fait complémentaire et pertinent de nature à remettre en cause l'analyse et la motivation retenues par le tribunal administratif. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 2 et 3 du jugement attaqué. 3. En deuxième lieu, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Par ailleurs, les stipulations du 7 de l'article 6 de cet accord prévoient la délivrance d'un certificat de résidence au ressortissant algérien dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays, mais n'étendent pas le bénéfice de ce titre de séjour aux parents d'un enfant malade. Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que le préfet, dans le cadre de son pouvoir de régularisation, délivre à un ressortissant algérien une autorisation de séjour pour l'accompagnement d'un enfant malade. 4. En l'espèce, il ne ressort ni la motivation de l'arrêté attaqué, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de police, qui a examiné, à titre dérogatoire, la situation de M. B... au regard des dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aurait ainsi méconnu le pouvoir discrétionnaire dont il dispose, quant à l'opportunité d'une mesure de régularisation de l'intéressé, notamment à raison de sa situation personnelle et familiale, ou que, pour rejeter sa demande de renouvellement de son autorisation de séjour, il se serait cru, à tort, en situation de compétence liée par rapport à l'avis émis, le 17 septembre 2021, par le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), dont il s'est approprié les motifs. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont seraient entachées de ce chef les décisions en litige portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français doit être écarté. 5. En troisième lieu, pour prendre l'arrêté en litige, le préfet de police s'est notamment fondé sur cet avis du 17 septembre 2021 du collège de médecins de l'OFII, lequel a estimé, en particulier, que si l'état de santé du fils de M. B..., le jeune C... né le 22 mars 2011, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, y bénéficier d'un traitement approprié. Pour contester cette appréciation, M. B... fait valoir qu'il est entré en France au mois de juillet 2019 pour y rejoindre son épouse et leur enfant C..., qui souffre d'un diabète, et permettre à celui-ci de bénéficier d'une pompe à insuline de type " FreeStyle Libre ", qui est indisponible en Algérie. Toutefois, les différents documents d'ordre médical produits par le requérant, notamment les certificats médicaux et les comptes rendus d'hospitalisation ou de consultation des 9 décembre 2019, 4 mars 2020, 10 mai 2020, 28 juin 2020, 30 juillet 2020, 2 septembre 2020, 2 décembre 2020, 17 mars 2021, 23 mars 2021, 18 juin 2021, 3 septembre 2021 et 3 décembre 2021, s'ils font état de la pathologie de son enfant, soit un diabète de type 1 diagnostiqué en Algérie à l'âge de 18 ou 21 mois, d'une insulinothérapie, prescrite dans ce pays, par seringues, puis, à compter de 2016, par stylos ainsi que d'un même traitement par insuline en France, toujours aux stylos, et d'une surveillance par capteurs de glycémie, ne mentionnent, en revanche, ni la prescription d'une pompe à insuline à l'enfant, ni que celui-ci ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement et d'un suivi appropriés à sa pathologie en Algérie. A cet égard, seul un certificat médical établi par un médecin algérien, au demeurant non daté, mentionne l'éventualité d'une insulinothérapie par pompe, en se bornant à indiquer que l'enfant C... serait " un candidat idéal " pour bénéficier d'une pompe à insuline, qui ne serait pas disponible en Algérie. Par ailleurs, si M. B... produit un jugement n° 2114769 du 19 novembre 2021 du tribunal administratif de Paris, relatif à l'indisponibilité d'une pompe à insuline en Algérie, le requérant ne démontre pas, en tout état de cause, que ce dispositif serait indispensable à l'état de santé de son fils C.... Par suite, en refusant de lui renouveler son autorisation provisoire de séjour en tant qu'accompagnant d'enfant malade, le préfet de police n'a commis aucune erreur de droit, ni aucune erreur manifeste d'appréciation. 6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Enfin, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". 7. M. B... se prévaut de l'état de santé de son fils C... et de la nécessité de la poursuite de la prise en charge médicale de celui-ci en France et fait valoir qu'il y vit avec son épouse et leurs enfants, C..., né le 22 mars 2011 et qui est scolarisé, et Aylana, qui est née en France le 16 mai 2017. Il fait état également d'une activité professionnelle et d'une bonne intégration. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 5 qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que son fils C... ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement et d'un suivi appropriés à sa pathologie en Algérie. De plus, M. B..., qui est entré en France le 30 juillet 2019, ne peut se prévaloir à la date de l'arrêté attaqué, soit le 23 novembre 2021, que d'un séjour d'une durée relativement brève, soit un peu plus de deux ans. En outre, en produisant un bulletin de salaire du mois de mars 2021 pour une activité de " chauffeur-livreur " auprès de la société " R et M E... " ainsi qu'un contrat de travail à durée indéterminée du 14 juin 2021 en qualité d'" ouvrier d'exécution " auprès de la société " Sigma Bat " et des bulletins de salaire pour les mois de juin à décembre 2021, il ne justifie pas d'une insertion professionnelle stable et ancienne sur le territoire. Par ailleurs, le requérant ne justifie, à la date de l'arrêté attaqué, d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'il emmène son épouse, qui ne s'est vu délivrer, au demeurant postérieurement à l'intervention de cet arrêté, qu'une autorisation provisoire de séjour valable du 16 décembre 2021 au 15 mars 2022, non renouvelée par la suite, et leurs deux enfants et à ce qu'il poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, en Algérie où résident six de ses sept frères et sœurs et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de quarante-quatre ans. Enfin, l'intéressé n'établit, ni n'allègue sérieusement qu'il serait, ainsi que les membres de sa famille, dans l'impossibilité de se réinsérer dans son pays d'origine ou que ses enfants ne pourraient pas y bénéficier d'une scolarisation normale. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté attaqué portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peut être regardé comme ayant porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ces deux mesures ont été prises ou comme ayant méconnu l'intérêt supérieur de ses enfants. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, l'arrêté en litige n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles portant sur les frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de police. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. d'Haëm, président, - M. Mantz, premier conseiller, - Mme d'Argenlieu, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. Le président-rapporteur, R. d'HAËML'assesseur le plus ancien, P. MANTZ La greffière, A. GASPARYAN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA02515
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... F... épouse A... G... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 août 2021 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant un an. Par un jugement n° 2118477/2-3 du 20 janvier 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 février 2022 et 16 novembre 2022, Mme F... épouse A... G..., représentée par Me Lepeu, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 11 août 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation administrative, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ; 4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine est entaché d'incompétence ; - il est entaché d'un vice de procédure, dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été saisie, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision l'obligeant de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ; - elle est entachée d'un vice de procédure, dès lors qu'elle n'a pas été mise en mesure de présenter des observations préalables ; - elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement qui en constitue le fondement ; - la décision lui interdisant le retour sur le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement ; - elle est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle n'a pas été mise en mesure de présenter des observations préalables ; - elle est entachée d'une erreur de droit ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par un mémoire en défense enregistré le 4 janvier 2023, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme F... épouse A... G... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Mme E... a présenté son rapport au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme F... épouse A... G..., ressortissante algérienne née le 27 août 1976, est entrée pour la première fois en France le 26 octobre 2018, munie d'un visa de court séjour. Le 1er avril 2021, elle a sollicité le renouvellement de son certificat de résidence. Elle relève appel du jugement du 20 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 11 août 2021 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, fixant le pays de destination et lui interdisant le retour sur le territoire français pendant un an. En ce qui concerne le moyen commun aux décisions contestées : 2. M. H... D..., sous-préfet d'Antony et de Boulogne-Billancourt, a reçu, par arrêté n° 2021-039 du 14 juin 2021, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs, une délégation du préfet des Hauts-de-Seine à l'effet de signer notamment les refus de séjour, les obligations de quitter le territoire français assorties d'une interdiction de retour sur le territoire français et les décisions fixant le pays de renvoi. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait et doit être écarté. En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour : 3. En premier lieu, aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". 4. Pour refuser de délivrer un titre de séjour à Mme F... épouse A... G..., le préfet des Hauts-de-Seine s'est notamment fondé sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 17 juin 2021, qui indique que si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine et y voyager sans risque. 5. Il ressort des pièces du dossier que Mme F... épouse A... G..., atteinte d'un cancer du sein, a bénéficié d'interventions chirurgicales en septembre et octobre 2020, et qu'elle souffre d'un état dépressif. Pour contredire l'avis de l'OFII précité, la requérante produit notamment un certificat établi le 21 octobre 2020 par un médecin d'un service de pathologie mammaire, faisant état de ce qu'elle est suivie pour une pathologie relevant d'une affection de longue durée depuis le 29 octobre 2018 et de ce que sa pathologie nécessite des soins complexes pour une durée indéterminée d'au moins douze mois. Le certificat établi par le même médecin le 16 février 2022, postérieur à l'arrêté, indique que l'intéressée présente un risque de récidive important et que l'absence de suivi très régulier comme de la poursuite des traitements pourraient mettre le pronostic vital en danger. Ce certificat énonce que les traitements éventuels en cas de complications ne sont pas toujours disponibles dans son pays d'origine. Dans un troisième certificat médical du 7 mars 2022 ce médecin précise que son état relève d'une reconstruction par DIEP [Deep Inferior Epigastric Perforator] et que cette chirurgie ne se fait pas dans son pays d'origine. Enfin, la requérante produit un certificat médical du 29 mars 2022 d'un médecin du centre Pierre et Marie Curie d'Alger qui affirme que " pour éviter la rupture de la chaîne thérapeuthique de cette patiente, elle doit continuer sa prise en charge à l'IGR ". Néanmoins, ces documents n'établissent pas l'indisponibilité d'un traitement de reconstruction dont pourrait bénéficier Mme F... épouse A... G... ni l'indisponibilité du suivi dont elle a besoin. Ainsi, ils ne permettent pas de remettre en cause l'avis de l'OFII du 17 juin 2021. Il en va de même des articles de presse d'ordre général dont se prévaut la requérante, relatifs, d'une part, aux conséquences de la pandémie de Covid-19 sur la qualité de la prise en charge des malades en Algérie et, d'autre part, à des ruptures dans l'approvisionnement de médicaments. Dans ces conditions, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas méconnu les stipulations précitées du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien en refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme F... épouse A... G.... Il n'a pas davantage, pour les mêmes motifs, entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. 6. En deuxième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité administrative n'est tenue de saisir la commission instituée dans chaque département du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles visés par ces dispositions auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité. Il découle donc de ce qui a été dit au point précédent que le préfet des Hauts-de-Seine n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour en application de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que la requérante ne peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour de plein droit en application de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par suite, le moyen tiré d'un vice de procédure doit être écarté. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 7. En premier lieu, en l'absence d'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale. 8. En deuxième lieu, lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. À l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour. 9. En l'espèce, Mme F... épouse A... G... a été conduite, à l'occasion du dépôt de sa demande de titre de séjour, à préciser à l'administration les motifs pour lesquels elle présentait cette demande et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette dernière. Il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas allégué que la requérante aurait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux, ni qu'elle aurait été empêchée de présenter spontanément des observations complémentaires avant que ne soit pris l'arrêté litigieux. Le moyen tiré du vice de procédure doit, par suite, être écarté. 10. En troisième lieu, l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". 11. Il n'est pas établi, comme il a été dit au point 5 du présent arrêt, que Mme F... épouse A... G... ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 611-3 du code précité doit être écarté. 12. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 13. Mme F... épouse A... G... soutient qu'elle est présente sur le territoire français depuis l'année 2018, avec son compagnon et leurs quatre enfants, lesquels sont scolarisés. Elle fait valoir que la présence de son mari à ses côtés, lequel, ainsi que leur fils B..., fait également l'objet d'un suivi médical, est nécessaire et qu'elle a, par ailleurs, acquis un bien immobilier avec sa cousine, le 7 février 2020. Toutefois, à la date de l'arrêté contesté, la requérante, qui n'est entrée en France que pour y bénéficier de soins, ne résidait sur le territoire français que depuis moins de trois années. S'il ressort du certificat médical établi le 6 septembre 2021 par un médecin psychiatre que la présence de ses enfants lui apporte un soutien important, la décision contestée n'a ni pour objet ni pour effet de séparer Mme F... épouse A... G... de sa famille, et il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer dans son pays d'origine, ni que ses enfants ne pourraient y poursuivre leur scolarité. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale en l'obligeant à quitter le territoire français et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme F... épouse A... G.... En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire : 14. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision accordant à la requérante un délai de départ volontaire de trente jours serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Ce moyen doit, par suite, être écarté. En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination : 15. En l'absence d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, Mme F... épouse A... G... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait dépourvue de base légale. En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français : 16. En premier lieu, en l'absence d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an n'est pas dépourvue de base légale. 17. En deuxième lieu, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français mentionne les quatrième et huitième alinéas du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et expose les circonstances de fait propres à la situation personnelle de Mme F... épouse A... G..., dont les éléments sur lesquels le préfet s'est fondé pour arrêter, dans son principe et dans sa durée, ladite interdiction. Dès lors, cette décision comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et permet ainsi à la requérante d'en contester utilement le bien-fondé. 18. En troisième lieu, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision portant interdiction de retour sur le territoire français doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 8 et 9 du présent arrêt. 19. En quatrième lieu, l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...) ". 20. D'une part, les motifs de l'arrêté contesté attestent de la prise en compte, par l'autorité préfectorale, au vu de la situation de l'intéressée, des critères légaux mentionnés à l'article L. 612-10 du code précité. La requérante ne peut être regardée comme justifiant de circonstances humanitaires faisant obstacle au prononcé d'une décision d'interdiction de retour sur le territoire français. Par suite, c'est à bon droit que le préfet des Hauts-de-Seine a décidé d'assortir l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de Mme F... épouse A... G... d'une telle interdiction. 21. D'autre part, eu égard aux circonstances indiquées au point 13 du présent arrêt, et nonobstant l'absence de précédente mesure d'éloignement ou de menace pour l'ordre public, le préfet des Hauts-de-Seine, en fixant à une année la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français de la requérante, n'a pas méconnu le droit de celle-ci au respect de sa vie privée et familiale et n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. 22. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... épouse A... G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 11 août 2021. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme F... épouse A... G... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... F... épouse A... G... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine. Délibéré après l'audience du 6 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. La rapporteure, G. E...Le président, I. LUBEN Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA00789
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : France Nature Environnement (FNE) Normandie, et la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) Normandie ont demandé au tribunal de Lille d'annuler l'arrêté du préfet de l'Eure du 4 mai 2020 ayant autorisé la société Gemfi à exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement sur la commune de Criquebeuf-sur-Seine. Par un jugement n° 2003507 du 23 juillet 2021, le tribunal administratif de Rouen a donné acte du désistement de la LPO Normandie et a annulé l'arrêté du préfet de l'Eure du 4 mai 2020 en tant qu'il accorde à la société Gemfi une dérogation au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Procédure devant la cour : I - Par une requête, enregistrée le 22 septembre 2021sous le n°21DA02261 et des mémoires enregistrés le 27 septembre 2021, le 21 janvier 2022 et le 9 mai 2022, la SAS Gemfi, représentée par Me Michel Lévy, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande présentée par l'association France nature environnement Normandie ; 3°) à titre subsidiaire, de faire application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ; 4°) de mettre à la charge de l'association France Nature environnement, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire en ce que la note en délibéré produite par le préfet de l'Eure ne lui a pas été communiquée ; - ils ont insuffisamment motivé leur jugement, ce qui caractérise une violation de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le tribunal n'a pas procédé à une analyse impartiale ; - le tribunal a porté une atteinte disproportionnée et non justifiée au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie ; - l'avis du Conseil national de la protection de la nature est illégal en ce qu'il n'est pas suffisamment motivé et en ce qu'il est entaché de détournement de pouvoir ; - les conditions d'une raison impérative d'ordre public majeur sont remplies ; - il n'appartient pas à la société de démontrer l'absence de solution alternative, mais il appartient à l'administration d'évaluer les autres solutions satisfaisantes sur le site ; - les mesures de réduction, de compensation et de suivi réduisent de manière adéquate les impacts des projets sur la vie et l'habitat de l'Œdicnème criard ; - le projet n'emporte pas de destruction et de dégradation notable du Petit gravelot, de l'Engoulevent d'Europe et de l'Hirondelle de rivage ; en outre, eu égard aux mesures d'évitement, de réduction et de compensation, les incidences résiduelles du projet sur ces espèces sont faibles. Par un mémoire enregistré le 21 février 2022, l'association France nature environnement, représentée par Me Louis Cofflard, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 24 juin 2022, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative. II - Par une requête, enregistrée le 27 septembre 2021 sous le n°21DA02286 et un mémoire enregistré le 19 octobre 2021, la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires demande à la cour : 1°) d'annuler ce même jugement ; 2°) de rejeter la demande présentée par l'association France nature environnement (FNE) Normandie. La ministre soutient que : - la raison impérative d'intérêt public majeur, de nature sociale, économique et tenant à la continuité de l'approvisionnement alimentaire, doit être retenue dans le cadre du projet d'aménagement en litige ; - l'Hirondelle de rivage, l'Engoulevent d'Europe et le Petit gravelot n'utilisent pas l'aire d'étude immédiate comme zone d'alimentation, notamment en période de reproduction ; après les mesures d'évitement et de réduction adoptées pour l'avifaune, aucun impact significatif n'est constaté pour les oiseaux à l'exception de l'Oedicnème criard. Par des mémoires enregistrés les 19 janvier 2022 et 9 mai 2022, la SAS Gemfi, représentée par Me Michel Levy, conclut à l'annulation du jugement, au rejet de la demande présentée par l'association FNE Normandie, à titre subsidiaire à l'application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, et à la mise à la charge de l'association FNE Normandie de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un mémoire enregistré le 21 février 2022, l'association France nature environnement Normandie, représentée par Me Louis Cofflard, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - la requête d'appel du ministre est irrecevable ; - le jugement est régulier ; - les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 24 juin 2022, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'environnement ; - l'arrêté du 29 octobre 2009 du ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, et du ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Corinne Baes-Honoré présidente-assesseure, - les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public, - et les observations de Me Michel Lévy, représentant la société Gemfi. Considérant ce qui suit : 1. La zone d'activités du Bosc-Hêtrel 1, d'une superficie de 35 hectares, a été créée par la commune de Criquebeuf-sur-Seine en 2005. Par délibération du 15 décembre 2016, le conseil de la communauté d'agglomération Seine Eure a engagé une procédure de mise en compatibilité, par déclaration de projet, du plan d'occupation des sols de la commune de Criquebeuf-sur-Seine afin de permettre l'extension de la zone d'activité du Bosc-Hêtrel I, dénommée Bosc-Hêtrel II, portant sur une superficie de 17 hectares, son aménagement ayant été confié à la société Gemfi. A la suite de l'approbation de la déclaration de projet, la société GEMFI a déposé, le 16 avril 2019, une demande d'autorisation environnementale en vue de l'exploitation, au sein de la zone d'activités Bosc-Hêtrel II, d'un entrepôt de stockage d'une surface totale de plancher de 37 192 m² et d'un volume de stockage de 478 088 m3, soumis, à ce double titre, à autorisation au regard de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement. Cette demande était également assortie d'une demande de dérogation au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement en raison du risque de destruction par le projet de l'habitat d'espèces protégées. 2. Après enquête publique organisée du 16 décembre 2019 au 17 janvier 2020, et à l'issue de laquelle le commissaire enquêteur a rendu un avis favorable sans réserve, le préfet a délivré à la société Gemfi, par l'arrêté en litige du 4 mai 2020, l'autorisation environnementale sollicitée lui permettant d'exploiter l'entrepôt de stockage projeté, et lui a, dans ce cadre, accordé la dérogation sollicitée au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Cette dérogation, qui porte sur l'ensemble de la zone composée des parcelles cadastrées ZE 242 à 245, ZE 254 et 255, ZE 257 à 262, ZE 264, ZE 266, ZE 268 à 271, ZE 273 à 275, ZE 277 et 278, ZE 282 et 283, et ZE 285 et 286 pour une superficie totale d'environ 17 hectares, concerne une espèce d'oiseau, l'Oedicnème criard, et six espèces de chiroptères. Par un jugement n° 2003507 du 23 juillet 2021, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du préfet de l'Eure du 4 mai 2020 en tant qu'il accorde à la société Gemfi une dérogation au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. La société Gemfi et le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires relèvent appel de ce jugement. Sur la jonction : 3. Les deux requêtes de la société Gemfi et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt. Sur la régularité du jugement : En ce qui concerne la méconnaissance du principe du contradictoire : 4. En vertu de l'article R. 731-3 du code de justice administrative, toute partie à l'instance peut, à l'issue de l'audience, adresser au président de la formation de jugement une note en délibéré. Il appartient alors au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision et de mentionner cette production dans sa décision, en application de l'article R. 741-2 du même code. S'il a toujours également la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si cette note contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office. 5. Il résulte de l'examen de la note en délibéré produite le 9 juillet 2021 par le préfet de l'Eure après l'audience du tribunal administratif de Rouen, visée par le jugement attaqué, que celle-ci ne comportait aucun des éléments mentionnés au point précédent. Il n'apparaît pas que le tribunal se serait appuyé sur les éléments contenus dans cette note en délibéré pour rendre son jugement. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit, par suite, être écarté. En ce qui concerne l'insuffisante motivation du jugement : 6. Contrairement à ce qui est allégué, d'une part, la référence du jugement à la situation économique et à la situation de l'emploi local, d'autre part, l'appréciation portée par les premiers juges sur l'incidence du projet sur trois espèces protégées, enfin, leur analyse sur les conséquences du projet sur l'habitat de ces espèces, ne présentent pas un caractère abstrait s'apparentant à une insuffisante motivation. 7. Par ailleurs, en relevant que l'absence d'autres opportunités foncières adaptées n'était pas démontrée, le tribunal n'a pas insuffisamment motivé son jugement, dès lors qu'à titre principal, il a écarté le moyen tenant à l'absence de telles opportunités, comme inopérant. 8. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement et de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté. En ce qui concerne l'impartialité du tribunal : 9. Si la société Gemfi reproche aux premiers juges de ne pas avoir tenu compte des modifications apportées à son projet à la suite de l'avis du Conseil national de la protection de la nature, cette circonstance n'est pas de nature à révéler un défaut d'impartialité du tribunal. Le moyen ainsi soulevé doit donc être écarté. 10. Si la requérante soutient que la décision d'annulation des premiers juges porte une atteinte disproportionnée et non justifiée au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie, il n'appartient pas au juge d'appel d'examiner les conséquences de l'annulation d'un arrêté par un tribunal. Sur les moyens d'annulation retenus par le tribunal : 11. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : 1° La destruction ou l'enlèvement des oeufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; (...) 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces ; (...) ". 12. Aux termes de l'article L. 411-2 du code de l'environnement : " Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : (...) 4° La délivrance de dérogation aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : (...) c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; (...) ". 13. En ce qui concerne les espèces d'oiseaux concernées par le projet, la liste prévue au 1° du I de l'article L. 411-1 précité a été fixée par l'article 3 de l'arrêté du 29 octobre 2009 visé ci-dessus, et comporte notamment l'Oedicnème criard (Burhinus oedicnemus), le petit Gravelot (Charadrius dubius), l'Engoulevent d'Europe (Caprimulgus europaeus) et l'Hirondelle de rivage (Riparia riparia), pour lesquels le II de l'article 3 de cet arrêté dispose : " Sont interdites sur les parties du territoire métropolitain où l'espèce est présente ainsi que dans l'aire de déplacement naturel des noyaux de populations existants la destruction, l'altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos des animaux. Ces interdictions s'appliquent aux éléments physiques ou biologiques réputés nécessaires à la reproduction ou au repos de l'espèce considérée, aussi longtemps qu'ils sont effectivement utilisés ou utilisables au cours des cycles successifs de reproduction ou de repos de cette espèce et pour autant que la destruction, l'altération ou la dégradation remette en cause le bon accomplissement de ces cycles biologiques ". 14. Il résulte des dispositions citées au point précédent qu'un projet d'aménagement ou de construction d'une personne publique ou privée susceptible d'affecter la conservation d'espèces animales ou végétales protégées et de leurs habitats ne peut être autorisé, à titre dérogatoire, que s'il répond, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur. En présence d'un tel intérêt, le projet ne peut cependant être autorisé, eu égard aux atteintes portées aux espèces protégées appréciées en tenant compte des mesures de réduction et de compensation prévues, que si, d'une part, il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et, d'autre part, cette dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle. 15. Il résulte de l'instruction que le schéma de cohérence territoriale (SCoT) Seine-Eure Forêt de Bord a identifié le parc logistique de Bosc-Hêtrel comme une " grande unité économique ". Selon le rapport de présentation de la déclaration de projet emportant mise en compatibilité du plan d'occupation des sols, le projet d'extension en litige est envisagé pour répondre aux nouvelles demandes d'implantation d'entreprises. Par ailleurs, le site se trouve sur un territoire attractif et présente de nombreux avantages quant à son emplacement, notamment en ce qu'il permet l'extension et le maintien d'activités, alors que le bassin rouennais a peu de disponibilités foncières. Le ministre soutient également que ce projet permettra aux sociétés occupant l'entrepôt frigorifique de constituer des stocks de denrées alimentaires afin d'assurer un approvisionnement constant de Rouen, de son agglomération et des régions voisines. 16. Il résulte toutefois de ce qui précède que si le projet, qui permettrait de surcroît de créer 350 à 400 emplois, présente un caractère d'intérêt général, l'ensemble des éléments le justifiant ne permettent pas de le regarder, eu égard au caractère exceptionnel de la dérogation prévue par les dispositions précitées, comme caractérisant une raison impérative d'intérêt public majeur au sens du c) de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Par suite, la société Gemfi et le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu ce motif pour annuler la décision en litige. 17. En second lieu, si la société Gemfi soutient en appel que l'avis émis par le Conseil national de la protection de la nature était entaché d'irrégularité, il résulte du sens de cet avis, défavorable au projet, qu'il n'a exercé aucune influence sur la décision contraire prise par l'autorité compétente et le moyen ainsi invoqué doit donc être écarté. 18. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre motif d'annulation retenu par le tribunal, tiré de ce que trois espèces d'oiseaux protégées n'avaient pas été prévues par la dérogation, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la requête d'appel du ministre, que la société Gemfi et le ministre de la transition écologique ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé l'arrêté du préfet de l'Eure du 4 mai 2020 en tant qu'il accorde à la société Gemfi une dérogation au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Sur l'application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : 19. Il résulte de ce qui précède que le vice entraînant l'illégalité de la dérogation accordée n'est pas susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative et n'est pas de nature à n'affecter qu'une partie de la décision. Par suite, les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais exposés et non compris dans les dépens : 20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association FNE Normandie, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Gemfi demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. 21. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'association FNE Normandie et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête n° 21DA02261 de la société Gemfi et la requête n° 21DA02286 du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sont rejetées. Article 2 : L'Etat versera à l'association FNE Normandie une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Gemfi, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à l'association France nature environnement Normandie. Délibéré après l'audience publique du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient : - M. Marc Heinis, président de chambre, - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, - M. Denis Perrin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La présidente-rapporteure, Signé: C. Baes-HonoréLe président de la 1ère chambre, Signé: M. A... La greffière, Signé: C. Sire La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N° 21DA02261, 21DA02286 2
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Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 15 septembre 2021, et des mémoires, enregistrés le 7 mars et le 30 juin 2022, la société Supermarchés Match, représentée par Me Caroline Meillard, demande à la cour : 1°) d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2021 par lequel le maire de Wattrelos a accordé à la société Sartel 1 un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la construction d'un magasin à l'enseigne " Aldi " d'une surface de vente de 1 227,40 m² venant en extension d'un centre commercial de 1 100 m² situé rue Albert 1er ; 2°) de mettre à la charge des sociétés Immaldi et compagnie et Sartel 1, de la commune de Wattrelos et de l'Etat une somme de 5 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle présente un intérêt à agir ; - il n'est pas établi que l'acte a été signé par une autorité compétente ; - le dossier était incomplet en ce qui concerne la revitalisation du commerce ; - le projet contrevient à la limitation de l'implantation de commerce en dehors des centres-villes prévue dans le plan local d'urbanisme ; - le projet est incompatible avec les dispositions du document d'orientations générales du schéma de cohérence territoriale de Lille Métropole ; - le projet ne répond pas aux objectifs d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs, au regard de plusieurs des critères associés à ces objectifs, tels qu'ils sont fixés par les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce. Par deux mémoires en défense, enregistrés le 3 décembre 2021, la commune de Wattrelos conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Supermarchés Match d'une somme de 1 500 euros que le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la requête est irrecevable car la requérante n'a pas intérêt à agir ; - les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2022, et un mémoire, enregistré le 22 juillet 2022, les sociétés Immaldi et compagnie, Aldi Marché Bois-Grenier et Sartel 1, représentées par Me Isabelle Robert-Védie, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Supermarchés Match d'une somme de 8 000 euros à verser à la société Immaldi et compagnie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - la requête est irrecevable car la requérante n'a pas intérêt à agir ; - les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 4 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de commerce ; - le code général des collectivités territoriales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, - les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public, - et les observations de M. C... E... pour la Société Sartel 1 et M. D... A... pour les sociétés Immaldi et Compagnie et Aldi marché Bois-Grenier Considérant ce qui suit : 1. Les sociétés Immaldi et compagnie et Sartel 1 ont sollicité auprès de la commune de Wattrelos, un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la construction d'un magasin à l'enseigne " Aldi ", d'une surface de vente de 1 227,40 m², afin de leur permettre d'étendre un centre commercial de 1 100 m² présent sur un autre site de la commune. La commission départementale d'aménagement commercial du Nord a émis un avis favorable le 22 février 2021. Saisie d'un recours préalable obligatoire par les sociétés Supermarchés Match et Auchan Hypermarché, la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis favorable au projet le 10 juin 2021. Le 16 juillet 2021, le maire de Wattrelos a accordé le permis de construire sollicité. Sur la légalité de l'arrêté : En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'acte : 2. Aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal. / (...) ". 3. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 2 juin 2020 pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, le maire de Wattrelos a confié à Mme Zohra Reiffers, conseillère municipale et adjointe au maire, une délégation en matière d'urbanisme, notamment pour signer les autorisations du droit des sols. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de Mme F... pour signer la décision en litige doit être écarté. En ce qui concerne le caractère complet du dossier de demande : 4. Aux termes de l'article R. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable : " I. - La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments mentionnés ci-après ainsi que, en annexe, l'analyse d'impact définie au III de l'article L. 752-6. / (...) / II. - L'analyse d'impact comprend, après un rappel des éléments mentionnés au 1° du I, les éléments et informations suivants : / (...) / 2° Présentation de la contribution du projet à l'animation des principaux secteurs existants, notamment en matière de complémentarité des fonctions urbaines et d'équilibre territorial ; en particulier, contribution, y compris en termes d'emploi, à l'animation, la préservation ou la revitalisation du tissu commercial des centres-villes de la commune d'implantation et des communes limitrophes incluses dans la zone de chalandise définie pour le projet, avec mention, le cas échéant, des subventions, mesures et dispositifs de toutes natures mis en place sur les territoires de ces communes en faveur du développement économique ; / (...) ". 5. Le dossier de demande d'autorisation commerciale comprenait une analyse d'impact qui recensait les hypermarchés, supermarchés et superettes d'une surface de vente supérieure ou égale à 100 m² à Roubaix et à Wattrelos, qui répertoriait les commerces de proximité dans ces deux villes et qui comportait une carte de l'offre de proximité et l'analyse du tissu commercial de l'environnement proche du projet. La vacance commerciale des centres-villes de Wattrelos et de Roubaix y était également analysée. Dans sa partie consacrée à la contribution ou à la revitalisation du tissu commercial des centres-villes de la commune d'implantation et des communes limitrophes incluses dans la zone de chalandise, l'analyse d'impact présentait les éléments portant sur le dynamisme commercial du territoire et le caractère complémentaire du projet avec le petit commerce de Wattrelos. 6. Dans ces conditions, le dossier présenté à la Commission nationale d'aménagement commercial a permis à celle-ci de se prononcer de façon suffisamment éclairée sur le projet. La requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que le dossier de demande d'autorisation d'aménagement commercial était insuffisant au regard des prescriptions de l'article R. 752-6 du code de commerce. En ce qui concerne le respect des règles du plan local d'urbanisme : 7. A supposer même que la requérante ait entendu soulever le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du plan local d'urbanisme, ce moyen doit être écarté comme inopérant à l'encontre d'une décision valant autorisation d'exploitation commerciale. En ce qui concerne la compatibilité du projet avec le schéma de cohérence territoriale : 8. Aux termes du I de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige : " L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale (...) ". Il appartient aux commissions d'aménagement commercial non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. 9. En premier lieu, il ne résulte ni des dispositions ci-dessus reproduites du code de commerce ni d'aucune autre disposition qu'une autorisation d'exploitation commerciale doive être compatible avec le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) du schéma de cohérence territoriale (SCoT). La société Supermarchés Match, à supposer qu'elle ait entendu soulever de façon distincte un tel moyen, ne peut donc utilement soutenir que le projet en litige est incompatible avec le PADD du SCoT de Lille Métropole. 10. En deuxième lieu, d'une part, le document d'orientation et d'objectifs (DOO) du SCoT de Lille Métropole s'est notamment fixé pour objectifs de limiter l'étalement urbain, de maîtriser l'extension de la ville et d'optimiser la ressource foncière. Pour ce faire, il a prévu que l'impact foncier du développement économique et commercial doit être réduit en privilégiant une localisation dans le tissu urbain existant et une régénération du tissu urbain sur lui-même. Au titre des conditions d'implantation spécifiques, il a précisé que " Par principe, le commerce doit être implanté dans le tissu urbain existant ou futur (...) Hors des centralités commerciales urbaines et hors des sites spécifiquement identifiés par le SCOT que sont les pôles commerciaux monofonctionnels d'agglomération, les espaces situés dans le tissu urbain peuvent accueillir une offre commerciale plus diffuse. (...) Ces implantations doivent être ponctuelles et limitées. La création ou l'extension d'une cellule commerciale n'a pas vocation à dépasser un objectif de l'ordre de 400 m² de surfaces de plancher (...) ". 11. Il ressort des pièces du dossier que le projet est envisagé sur un terrain inoccupé au sein d'une zone d'activité existante, à l'intérieur de la tâche urbaine et à proximité de zones d'habitat. Contrairement à ce qui est soutenu, il ne prend pas place au sein d'un espace relevant de l'offre commerciale diffuse, pour lequel la création ou l'extension d'une cellule commerciale n'a pas vocation à dépasser un objectif de l'ordre de 400 m². 12. D'autre part, le DOO du SCoT de Lille Métropole a souligné la nécessité de limiter les surfaces imperméabilisées et de privilégier l'infiltration à la parcelle lorsque c'est possible et, dans le cas contraire, a préconisé de stocker et de restituer progressivement les eaux pluviales vers les milieux récepteurs ou en dernier recours vers les réseaux. 13. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet n'est pas à l'état naturel et qu'une partie est déjà imperméabilisée. Compte tenu du niveau de pollution des sols du site, celui-ci ayant supporté une décharge de matériaux de démolition et de déchets jusque dans les années 1970-1980, une étude menée en 2011 a préconisé d'éviter les solutions de gestion des eaux pluviales par infiltration de la parcelle. Le projet prévoit ainsi le confinement complet des sols et la récupération des eaux de pluie qui seront traitées par un séparateur à hydrocarbures, stockées dans un bassin de rétention et rejetées dans le réseau avec un débit de fuite limité. Par ailleurs, si la requérante fait valoir que le projet risque de créer une friche et entraînera une consommation d'espace supplémentaire, il ressort des pièces du dossier qu'une société a fait part de son intérêt pour l'espace libéré et que le projet prend place sur un délaissé d'un centre commercial. 14. Enfin, en se bornant à faire état d'un projet insatisfaisant pour l'amélioration de la qualité urbaine, la requérante, qui n'invoque aucune orientation du DOO du SCoT en ce sens, n'apporte pas les précisions permettant au juge d'apprécier la portée de son moyen. 15. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'incompatibilité du projet avec les orientations du DOO du SCoT doit être écarté. En ce qui concerne le respect des objectifs et des critères de l'article L. 752-6 du code de commerce : 16. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa version alors applicable : " I. - L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / (...) / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / (...) ; / e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ; / (...) ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / (...) / 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; (...) / d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / (...) " S'agissant de l'aménagement du territoire : 17. En premier lieu, le projet en litige consiste à déplacer d'environ deux kilomètres un magasin déjà implanté au nord de la commune. Si le projet se situe à environ 1,4 kilomètre du centre-ville de Wattrelos, il reste en secteur urbanisé, dans une zone commerciale déjà existante, et à proximité de plusieurs poches d'habitat existantes et en projet. Des liaisons piétonnes feront le lien avec le futur secteur d'habitat voisin et il ressort également du dossier de demande que le projet sera accessible par les modes doux ainsi que par les transports en commun. Ainsi, il n'apparaît pas que le projet serait de nature à porter atteinte à l'objectif d'intégration urbaine. 18. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le site se trouve respectivement à des distances de 1,4 kilomètre et 3,1 kilomètres par rapport aux cœurs des commues de Wattrelos et de Roubaix. Si le taux de vacance commerciale est de 19,2 % dans la commune de Roubaix, il n'est que de 1,4 % dans la commune d'implantation du projet. La requérante n'est par ailleurs pas fondée à soutenir que l'offre commerciale du territoire d'implantation est suffisante, dès lors qu'il n'appartient pas à la Commission nationale d'aménagement commercial d'apprécier la densité commerciale des surfaces soumises à autorisation commerciale dans le secteur. Dans ces conditions, même si la population a diminué de 2,1 % dans la zone de chalandise sur la période 2007/2017, il n'est pas établi que le projet aura un effet négatif sur l'animation de la vie urbaine et qu'il ne contribuera pas à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation et des communes limitrophes. 19. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'une société a confirmé par courrier du 22 janvier 2021 son intérêt pour la reprise du bâtiment laissé vacant par l'enseigne Aldi qui n'en est pas propriétaire, d'autre part, que le taux de vacance du centre-ville de Wattrelos est très faible. Dans ces conditions, et alors même qu'aucun autre élément ne vient établir la certitude d'une reprise du local, le moyen tiré du risque important de création d'une friche commerciale ne peut être accueilli. En ce qui concerne le développement durable : 20. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 13, les sols du terrain d'assiette de la construction sont pollués et l'infiltration des eaux est fortement déconseillée. Le projet prévoit ainsi la récupération des eaux pluviales, leur traitement par un séparateur à hydrocarbures, leur stockage dans un bassin de rétention et leur rejet dans le réseau avec un débit de fuite limité. Une partie des eaux pluviales récupérées sera utilisée pour les sanitaires et l'arrosage des espaces verts. Dans ces conditions, il n'apparaît pas que la qualité environnementale du projet serait insuffisante notamment au regard de la gestion des eaux pluviales et de l'imperméabilisation des sols. 21. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que le projet prend place dans une zone commerciale. Si les façades du projet sont composées de bardage métallique gris foncé, de baies vitrées en partie basse et de bardage aluminium clair en partie haute, il n'est pas établi que les matériaux et les couleurs choisis feraient obstacle à son insertion dans son environnement, les deux bâtiments existants présentant également une architecture contemporaine à toiture plate et bardage gris. Il ressort également des pièces du dossier que des enseignes limitées seront intégrées sur l'acrotère. Des haies arbustives seront plantées le long des limites nord et est. Si la requérante fait grief au projet de comporter un parking en front à rue, le projet prévoit la plantation d'arbres dans la zone de stationnement et en façade principale. Il n'est ainsi pas établi que le projet serait de nature à compromettre la réalisation de l'objectif de développement durable énoncé par l'article L. 752-6 du code de commerce en matière d'insertion architecturale et paysagère. En ce qui concerne la protection des consommateurs : 22. En premier lieu, en l'absence d'autres précisions que celles apportées à l'appui du moyen tiré de ce que l'objectif d'intégration urbaine n'est pas atteint, le moyen titré de l'absence de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 17. 23. En deuxième lieu, d'une part, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du plan local d'urbanisme ne peut être utilement invoqué à l'encontre d'une décision valant autorisation d'exploitation commerciale. D'autre part, si la requérante soutient que le secteur est " bordé par des secteurs à risque d'inondation " et fait grief au projet de ne pas avoir apprécié ce risque, le terrain d'assiette lui-même n'a pas été classé dans un secteur à risque et la seule circonstance qu'il ait été classé en zone à dominante humide ne permet pas d'établir un risque d'inondation. 24. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que la société Supermarchés Match n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 16 juillet 2021. Sur les frais exposés et non compris dans les dépens : 25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge des sociétés Immaldi et compagnie et Sartel 1, de la commune de Wattrelos et de l'Etat, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, les sommes que demande la société Supermarchés Match au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. 26. La commune, qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat, et n'a pas fait état précisément des frais qu'elle aurait exposés pour défendre à l'instance, n'est pas fondée à demander la mise à la charge de la société Supermarchés Match d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. 27. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Supermarchés Match une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés par la société Immaldi et compagnie et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la société Supermarchés Match est rejetée. Article 2 : La société Supermarchés Match versera la somme de 2 000 euros à la société Immaldi et compagnie. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Supermarchés Match, à la société Immaldi et compagnie, à la société Aldi Marché Bois-Grenier, à la société Sartel 1, à la commune de Wattrelos et à la Commission nationale d'aménagement commercial. Délibéré après l'audience publique du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient : - M. Marc Heinis, président de chambre, - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, - M. Denis Perrin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La présidente-rapporteure, Signé: C. Baes-HonoréLe président de la 1ère chambre, Signé: M. B... Le greffier, Signé: C. Sire La République mande et ordonne au préfet du Nord et au ministre de l'économie et des finances, chacun en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N°21DA02217 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... A... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 31 mars 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui renouveler sa carte de séjour pluriannuelle. Par un jugement n° 2106416 du 21 janvier 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 21 février 2022, M. A... C..., représenté par Me Nouel, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - il méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle. La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas présenté d'observations. Par une ordonnance du 27 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 février 2023 à 12h00. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 décembre 1990 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur, - et les observations de Me Nouel, avocat de M. A... C.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... C..., ressortissant équatorien, né le 31 mai 1989 et entré en France, selon ses déclarations, le 15 décembre 2007, a été admis au séjour en 2014 et s'est vu délivrer, en dernier lieu, une carte de séjour pluriannuelle, valable du 20 septembre 2018 au 19 septembre 2020. Le 26 octobre 2020, il en a sollicité le renouvellement. Au vu d'un avis défavorable de la commission du titre de séjour du 25 février 2021 et par un arrêté du 31 mars 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande au motif que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public. M. A... C... fait appel du jugement du 21 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. 2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Enfin, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". 3. Pour soutenir que l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance des stipulations et des dispositions précitées, M. A... C... fait valoir qu'il est entré en France le 15 décembre 2007 et y vit depuis lors avec une compatriote, titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle, valable du 17 juillet 2019 au 16 juillet 2021, et avec laquelle il s'est marié le 29 août 2009 et a eu trois enfants, un fils, né en Equateur le 13 avril 2006, et deux filles, nées en France le 2 juin 2011 et le 20 mai 2015, qui y sont scolarisés. Il fait valoir également qu'il travaille depuis le 12 janvier 2015 auprès de l'entreprise " Felix ", sous contrat à durée indéterminée, en qualité de peintre, afin de subvenir aux besoins de sa famille, son épouse ne travaillant pas, et qu'il n'a plus d'attaches familiales en Equateur, l'une de ses sœurs, de nationalité française, et son frère, titulaire d'une carte de résident, séjournant en France, ses parents et deux autres de ses sœurs, de nationalité espagnole, résidant en Espagne et une autre de ses sœurs, de nationalité suisse, résidant en Suisse. Toutefois, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que M. A... C... est connu des services de police pour des faits, commis le 15 août 2014, de violence sans incapacité par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité ainsi que pour des faits, commis le 30 septembre 2018, pour conduite de véhicule sous l'empire d'un état alcoolique : concentration d'alcool par litre d'au moins 0,80 grammes (sang) ou 0,40 milligrammes (air expiré). De plus, l'intéressé s'est rendu coupable, le 12 octobre 2019, de faits de violence sans incapacité, en présence d'un mineur, par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, en l'occurrence en mettant deux coups de poing à son épouse et en lui tirant les cheveux, en présence de son enfant, faits qui lui ont valu d'être condamné, par un jugement correctionnel du 12 février 2020 du tribunal judiciaire de Bobigny, à une peine de 4 mois d'emprisonnement avec sursis et mis à l'épreuve, avec l'obligation de se soumettre à des mesures d'examen, de contrôle, de traitement ou de soins médicaux, même sous le régime de l'hospitalisation (soins concernant son addiction à l'alcool) et d'accomplir à ses frais un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes. Par ailleurs, si le requérant fait valoir qu'il a respecté les obligations liées à son sursis probatoire et qu'il a pris conscience de la gravité des violences infligées à son épouse, il se borne à produire des certificats attestant de trois consultations chez un médecin généraliste alcoologue ainsi que de deux consultations auprès d'une psychologue, trois attestations de conseillères d'insertion et de probation des 7 mai 2021, 5 janvier 2022 et 23 septembre 2021, très peu circonstanciées, ainsi qu'une attestation d'exécution d'un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes accompli du 6 au 9 décembre 2021, soit postérieurement à la date de l'arrêté attaqué, sans apporter aucun autre élément et, notamment, aucun certificat médical ou aucune attestation ou témoignage, en particulier de son épouse, permettant de démontrer une prise de conscience réelle ou une distanciation avérée par rapport à la nature et à la gravité des faits commis ou qu'il se serait engagé dans un processus de soins pour son addiction à l'alcool. Enfin, M. A... C..., âgé de trente-et-un ans à la date de l'arrêté attaqué, qui ne séjourne en France de façon régulière que depuis 2014 et qui ne fournit aucune précision sur les liens qu'il entretiendrait avec les membres de sa famille y séjournant ou résidant en Espagne ou en Suisse, n'établit, ni n'allègue sérieusement aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'il emmène avec lui son épouse et leurs enfants et à ce qu'il poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, en Equateur, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de dix-huit ans, ni qu'il serait, ainsi que les membres de sa famille, dans l'impossibilité de se réinsérer dans son pays d'origine ou que ses enfants ne pourraient pas y bénéficier d'une scolarisation normale. Par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la nature, de la gravité ainsi que du caractère répété et récent des faits reprochés à M. A... C... qui ne justifie d'aucun obstacle à poursuivre sa vie privée et familiale dans son pays d'origine, le préfet de la Seine-Saint-Denis, en estimant que sa présence constituait une menace pour l'ordre public et, en conséquence, en refusant de lui renouveler son titre de séjour, n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts, notamment de préservation de l'ordre public, en vue desquels cette mesure a été prise, ni méconnu l'intérêt supérieur de ses trois enfants mineurs. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations ou dispositions précitées doivent être rejetés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste qu'aurait commise le préfet dans son appréciation de la situation personnelle de l'intéressé doit être également écarté. 4. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. d'Haëm, président, - M. Mantz, premier conseiller, - Mme d'Argenlieu, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. Le président-rapporteur, R. d'HAËML'assesseur le plus ancien, P. MANTZ La greffière, A. GASPARYAN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA00818
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 13 mai 2022 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2212738/8 du 7 juillet 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées le 8 août 2022 et le 8 novembre 2022, et un mémoire non communiqué enregistré le 2 mars 2023, M. A..., représenté par Me Gardes, demande à la cour : 1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ; 2°) d'annuler le jugement n° 2212738/8 du 7 juillet 2022 du tribunal administratif de Paris ; 3°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 13 mai 2022 ; 4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer l'attestation de demande d'asile prévue aux articles L. 521-7 et L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : - le jugement est irrégulier en l'absence de réponse aux moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 721-4 et du 9° de L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'arrêté attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il bénéficie de la protection subsidiaire en Italie ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; ses conséquences sont disproportionnées par rapport aux buts recherchés. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - et les observations de Me Benifla, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant afghan né en 1991, est entré en France le 24 juillet 2018 selon ses déclarations. Le 1er août 2018, il a déposé une demande d'asile qui a fait l'objet d'une décision de rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 11 juin 2021 confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 6 avril 2022. Par un arrêté du 13 mai 2022, le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné. Par un jugement du 7 juillet 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mai 2022. M. A... relève appel de ce jugement. Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire : 2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président (...) ". 3. M. A..., déjà représenté par un avocat, ne justifie pas, à ce jour, du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle, alors que le courrier par lequel lui a été notifié le jugement attaqué mentionnait expressément qu'il devait justifier du dépôt d'une telle demande. Aucune urgence ne justifie que soit prononcée, en application des dispositions citées au point précédent, son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Sur la régularité du jugement : 4. D'une part, il ressort de la demande de première instance que M. A... s'est prévalu d'une méconnaissance de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 621-1 du même code, en soutenant que la décision portant obligation de quitter le territoire français était illégale au motif qu'il ne pouvait faire l'objet que d'une décision de remise aux autorités italiennes. La magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris, au point 5 du jugement attaqué, a répondu à ce moyen en relevant que M. A... pouvait légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 5. D'autre part, M. A... soutient avoir soulevé lors de l'audience le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris n'a pas expressément cité ces dispositions dans le jugement attaqué, elle a en revanche relevé que le conseil de M. A... avait indiqué, au cours de l'audience, que son état de santé nécessitait son maintien en France et a suffisamment répondu à ce moyen au point de 7 de son jugement. Sur le bien-fondé du jugement : 6. En premier lieu, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué et du défaut d'examen de la situation personnelle de M. A... doivent être écartés par adoption des motifs retenus, à bon droit, par la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris. 7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ; (...) ". Aux termes de l'article L. 621-1 du même code : " Par dérogation au refus d'entrée à la frontière prévu à l'article L. 332-1, à la décision portant obligation de quitter le territoire français prévue à l'article L. 611-1 et à la mise en œuvre des décisions prises par un autre État prévue à l'article L. 615-1, l'étranger peut être remis, en application des conventions internationales ou du droit de l'Union européenne, aux autorités compétentes d'un autre État, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas prévus aux articles L. 621-2 à L. 621-7. / L'étranger est informé de cette remise par décision écrite et motivée prise par une autorité administrative définie par décret en Conseil d'État. Il est mis en mesure de présenter des observations et d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. ". Aux termes de l'article L. 621-2 du même code : " Peut faire l'objet d'une décision de remise aux autorités compétentes d'un État membre de l'Union européenne, de la République d'Islande, de la Principauté du Liechtenstein, du Royaume de Norvège ou de la Confédération suisse l'étranger qui, admis à entrer ou à séjourner sur le territoire de cet État, a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 311-1, L. 311-2 et L. 411-1, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec cet État, en vigueur au 13 janvier 2009. ". 8. Il résulte des dispositions des articles L. 611-1 et L. 611-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relative à l'obligation de quitter le territoire français, et des articles L. 621-1 et suivants du même code, relatives aux procédures de remise aux Etats membres de l'Union européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen, que le champ d'application des mesures obligeant un étranger à quitter le territoire français et celui des mesures de remise d'un étranger à un autre Etat ne sont pas exclusifs l'un de l'autre et que le législateur n'a pas donné à l'une de ces procédures un caractère prioritaire par rapport à l'autre. Il s'ensuit que, lorsque l'autorité administrative envisage une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger dont la situation entre dans le champ d'application des articles L. 621-2 à L. 621-7, elle peut légalement soit le remettre aux autorités compétentes de l'Etat membre de l'Union européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, sur le fondement des articles L. 621-1 et suivants, soit l'obliger à quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 611-1. Ces dispositions ne font pas non plus obstacle à ce que l'administration engage l'une de ces procédures alors qu'elle avait préalablement engagé l'autre. 9. Si M. A... soutient que le préfet de police aurait dû prendre à son encontre une décision de remise sur le fondement de l'article L. 621-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le préfet de police a pris une obligation de quitter le territoire français à l'encontre du requérant, les autorités italiennes s'étaient prononcées sur sa demande de protection internationale et lui avaient accordé le bénéfice de la protection subsidiaire. Dans ces conditions, M. A..., qui bénéficiait des droits conférés par le titre de séjour délivré par les autorités italiennes au titre de la protection subsidiaire, n'était pas insusceptible de faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Dès lors que sa demande d'asile en France avait été rejetée, sa situation relevait du champ d'application tant des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que de l'article L. 621-2 de ce code. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 621-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif qu'il était insusceptible de faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français mais pouvait seulement être remis aux autorités italiennes, doit être écarté. 10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". 11. M. A... produit deux certificats médicaux établis les 7 mars et 29 juin 2022 par un psychiatre du groupe hospitalier universitaire Paris Psychiatrie et Neurosciences indiquant qu'il est suivi depuis janvier 2022 pour des troubles psychiatriques sévères en lien avec un syndrome de stress post-traumatique nécessitant un traitement anxiolytique et antidépresseur. Toutefois, il ne ressort pas des documents médicaux produits que l'état de santé du requérant, qui n'a pas présenté de demande de titre de séjour pour raisons médicales, serait susceptible de le faire entrer dans la catégorie des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire alors qu'il n'est par ailleurs pas démontré que les traitements médicamenteux prescrits seraient indisponibles dans le pays de renvoi, en particulier en Italie où il bénéficie de la protection subsidiaire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 12. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ". Si le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui n'a ni pour objet ni pour effet de contraindre M. A... à retourner dans son pays d'origine, il peut, en revanche, être utilement invoqué à l'encontre de la décision fixant le pays de destination. 13. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en Italie. Dans ces conditions, le préfet de police ne pouvait renvoyer l'intéressé dans son pays d'origine sans prendre en compte la protection qui lui avait été attribuée par un Etat membre de l'Union Européenne, laquelle révèle l'existence de menaces graves en cas de retour en Afghanistan. Par suite, l'arrêté attaqué, en tant qu'il fixe le pays d'origine de M. A... comme pays de renvoi, méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 14. Il résulte tout de ce qui précède que M. A... est seulement fondé à demander l'annulation de la décision du 13 mai 2022 par laquelle le préfet de police a fixé comme pays de destination l'Afghanistan. Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 15. Le présent jugement, qui n'annule que la décision fixant le pays de renvoi, n'implique aucun mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées. Sur les frais liés à l'instance : 16. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : L'arrêté du 13 mai 2022 du préfet de police pris à l'encontre de M. A... est annulé en tant qu'il fixe l'Afghanistan comme pays de destination. Article 2 : Le jugement du 7 juillet 2022 du tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 6 mars 2023, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président, - Mme Marianne Julliard, présidente assesseure, - Mme Gaëlle Dégardin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. La rapporteure, G. B...Le président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA03699
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté de la préfète de l'Oise du 29 avril 2022 portant refus d'admission au séjour au titre de l'asile, obligation de quitter le territoire français dans les trente jours, fixation du pays de renvoi, interdiction de retour en France pendant un an et signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen pour la durée d'interdiction de retour. Par un jugement n° 2201789 du 8 juillet 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 23 novembre 2022, M. B..., représenté par Me Audrey Grisolle, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour temporaire l'autorisant à travailler à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser au conseil de M. B..., sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de ce conseil à la part contributive de l'État. Il soutient que : - le jugement est entaché d'un défaut de motivation en ce qu'il n'a ni visé, ni analysé les conclusions d'annulation de l'interdiction de retour ; - la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'une insuffisance de motivation ; - elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an n'a pas fait l'objet d'une motivation suffisante ; - elle a été prise sans qu'il ait été préalablement entendu. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2023, la préfète de l'Oise conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai du 20 octobre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller. Considérant ce qui suit : Sur la régularité du jugement : 1. Les conclusions de M. B... s'agissant de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français n'ont été ni analysées ni même visées par le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif d'Amiens, qui n'a pas d'avantage statué sur ces conclusions. Le jugement attaqué doit dès lors être annulé en tant qu'il comporte cette omission. 2. Il y a lieu de statuer par la voie de l'évocation sur ces conclusions relatives à l'interdiction de retour sur le territoire français et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées par M. B.... Sur l'obligation de quitter le territoire français : En ce qui concerne la motivation : 3. Conformément aux articles L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration et L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'arrêté a énoncé dans ses considérants ou son dispositif les motifs de droit et de fait qui ont fondé ses différentes décisions, même s'il n'a pas mentionné le fait que M. B... est le père d'un enfant né en France le 19 février 2022. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué doit être écarté. En ce qui concerne la vie privée et familiale : 4. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". 5. M. B..., né en 1979 au Nigéria et entré en France en 2017, ne justifie pas qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu la majeure partie de sa vie. Il n'établit non plus ni une intégration ancienne, intense et stable dans la société française ni encore un obstacle sérieux à la poursuite de sa vie privée et familiale en dehors de France. S'il a reconnu préalablement à la naissance de son enfant qu'il en était le père et s'il soutient que de graves conséquences découleront de sa séparation avec son enfant, né le 19 février 2022 à Paris, il n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien et l'éducation de cet enfant et ne fournit ainsi aucune information sur son implication parentale, ni sur la situation de la mère de l'enfant. Par suite, l'arrêté n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 6. En deuxième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". 7. M. B... n'établit ni qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils né en France, ni même l'intensité de ses relations avec celui-ci. Par suite, l'arrêté n'a pas méconnu le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. En ce qui concerne l'examen de la situation de M. B... : 8. Il ne ressort pas des termes de la décision, compte tenu de ce qui précède et au vu des pièces du dossier, que la préfète de l'Oise n'aurait pas examiné sérieusement la situation personnelle de M. B..., même si l'arrêté ne mentionne pas le fait que M. B... est le père d'un enfant né en France le 19 février 2022. Par suite, le moyen tiré d'un tel défaut d'examen doit être écarté. Sur la fixation du pays de renvoi : 9. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains et dégradants ". Aux termes de l'article L. 721-4, anciennement L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". 10. Si M. B... soutient qu'il est arrivé en France pour fuir le risque de condamnation pénale encouru dans son pays en raison de son homosexualité, il ne produit aucune pièce permettant d'établir la réalité des risques auxquels il serait exposé. Il ressort de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides intervenue le 29 janvier 2021 et notifiée le 16 février 2021 que ses déclarations à cet égard sont " peu suffisantes et convenues " ou encore " fluctuantes ", " vagues " et " peu substantielles " ne pouvant donc démontrer que l'intéressé encourt un risque avéré en cas de retour dans son pays natal. L'appelant n'apporte aucun élément nouveau par rapport à cette décision. Par suite, l'arrêté n'a pas méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Sur l'interdiction de retour sur le territoire français : 11. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". L'article L. 612-10 du même code précise que : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...) ". 12. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément. 13. Pour prononcer, sur le fondement de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui est visé dans la décision en litige, une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, la préfète de l'Oise s'est fondé sur le fait que M. B... est entré récemment en France. Par ailleurs, l'intéressé ne justifie pas de liens personnels et familiaux anciens, intenses et stables sur le territoire français. La décision litigieuse, qui mentionne les dispositions sur lesquelles elle se fonde et fait état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels la préfète l'a édictée, dans son principe et dans sa durée, est ainsi suffisamment motivée, même si elle ne mentionne pas qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public et n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement. 14. Par un arrêté du 21 décembre 2020, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, la préfète de l'Oise a donné délégation à M. Sébastien Lime, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer notamment toutes décisions prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée manque en fait et doit être écarté. 15. M. B... a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Il a donc été mis à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, et a également décidé d'une interdiction de retour sur le territoire français, tous les éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures. Il n'indique d'ailleurs pas quels éléments il n'aurait pas été en mesure de faire valoir préalablement à la décision contestée et qui aurait été susceptible d'en modifier le sens. Par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment consacrée par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, n'a pas été méconnue. 16. Il ne ressort ni des termes de la décision ni des autres pièces du dossier que la préfète de l'Oise ne se soit pas livrée à un examen sérieux de la situation de M. B... en lui interdisant son retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. 17. Pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment, les conclusions d'annulation du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, qui ne sont assorties d'aucune précision permettant d'en apprécier la portée, doivent être, en tout état de cause, rejetées. 18. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 29 avril 2022. 19. Le présent arrêt qui rejette les conclusions d'annulation n'implique aucune mesure d'exécution pour l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ni pour l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 8 juillet 2022 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif d'Amiens est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions portant sur l'interdiction de retour sur le territoire français. Article 2 : Le surplus des conclusions de M. B... devant le tribunal administratif d'Amiens et devant la cour est rejeté. Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. C... B..., à Me Audrey Grisolle et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera transmise, pour information, à la préfète de l'Oise. Délibéré après l'audience publique du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient : - M. Marc Heinis, président de chambre, - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, - M. Denis Perrin premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le rapporteur, Signé: D. Perrin Le président de la 1ère chambre, Signé: M. A... La greffière, Signé: C. Sire La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, Le greffier en chef, Par délégation, Le greffier, Christine Sire 2 N°22DA02450
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler les décisions du 29 mars 2022 par lesquelles le préfet du Pas-de-Calais l'a obligée à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, lui a interdit le retour sur le territoire français avant l'expiration du délai d'un an et l'a assignée à résidence. Par un jugement n° 2202399 du 25 mai 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté cette requête. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 21 octobre 2022, Mme A... B..., représentée par Me Héloïse Marseille, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler cet arrêté ; 3°) d'enjoindre à l'Etat de l'admettre provisoirement au séjour dans les quinze jours de la décision à intervenir et de procéder au réexamen de sa situation, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, en application des articles L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle et, en cas de rejet de sa demande d'aide juridictionnelle, à lui-même. Elle soutient que : En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle. En ce qui concerne la décision de refus de délai de départ volontaire : - elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; - elle est entachée d'une erreur de droit et viole les articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En ce qui concerne le pays de destination : - cette décision est entachée d'un défaut de motivation ; - elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; - elle viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français et l'inscription au fichier SIS : - elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; - elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux, d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, et viole l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En ce qui concerne l'assignation à résidence : - elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2022, le préfet du Pas-de-Calais conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Mme B... A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 septembre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Corinne Baes-Honoré présidente-assesseure, - et les observations de M. E... D..., représentant le préfet du Pas-de-Calais. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ressortissante tunisienne née le 5 avril 1993, a contesté, devant le tribunal administratif de Lille, les décisions du 29 mars 2022 par lesquelles le préfet du Pas-de-Calais l'a obligée à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, lui a interdit le retour sur le territoire français avant l'expiration du délai d'un an et l'a assignée à résidence. Par un jugement du 25 mai 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal a rejeté cette requête. Mme B... relève appel de ce jugement. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : S'agissant de l'examen de la situation : 2. Il ressort des pièces du dossier et des motifs de l'arrêté contesté que le préfet du Pas-de-Calais a pris en compte les éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de Mme B.... Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet du Pas-de-Calais aurait entaché sa décision d'un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de la requérante doit être écarté. S'agissant de la vie privée et familiale : 3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " 4. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., née en 1993, a vécu la majeure partie de sa vie en Tunisie. Elle est entrée régulièrement en France le 17 septembre 2017 à la suite de son mariage avec un ressortissant français le 7 juin 2017 et a bénéficié d'un titre de séjour en qualité de conjointe de ressortissant français. Après la séparation du couple en avril 2018, Mme B... a demandé le divorce en janvier 2019 et celui-ci a été prononcé en janvier 2020. Mme B... a alors fait l'objet, le 18 juin 2020, d'un refus de renouvellement de son titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français, et n'a ni contesté ni exécuté ces décisions. Hébergée au sein d'un centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) à partir d'avril 2018, Mme B... se prévaut de sa relation avec une ressortissante française, parent d'enfants mineurs, également résidente du centre. Si plusieurs attestations, établies par les intéressées, des membres de la famille de sa compagne et des personnes ayant été hébergées au CHRS, font état d'une relation amoureuse à partir de décembre 2018, l'intéressée reconnaît qu'elle n'en a pas fait état lors de sa demande de titre de séjour de juillet 2019 et n'a porté cette information à la connaissance de la préfecture que dans sa demande de titre de séjour d'août 2021. En outre, c'est seulement en octobre 2021, soit peu de temps avant l'arrêté, que la vie dans un même logement a débuté et qu'une déclaration de concubinage a été déposée. Cette relation présentait donc un caractère relativement récent à la date de la décision contestée. Si Mme B..., qui se prévaut d'une activité de bénévolat et d'une formation en qualité d'agent de propreté et d'hygiène, a travaillé d'octobre 2018 à janvier 2019 et à partir de janvier 2022 dans le cadre de contrats à durée déterminée, cette insertion professionnelle restait limitée à la date de l'arrêté. Par ailleurs, si Mme B... soutient avoir été reniée par sa famille en raison de son orientation sexuelle, elle n'a apporté à l'instance aucun élément suffisamment probant de nature à établir qu'elle n'aurait plus de lien avec son pays d'origine. 5. Il résulte de ce qui précède que dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de Mme B... en France, la décision attaquée n'a pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale garantie par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. S'agissant de l'erreur manifeste d'appréciation : 6. Les éléments rappelés aux points précédents ne sont pas de nature à établir que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de Mme B.... En ce qui concerne la décision portant refus de départ volontaire : 7. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré, par voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté. 8. En second lieu, aux terme de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 de ce code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) ". 9. Si Mme B... se prévaut de garanties de représentation telles qu'un domicile stable, une vie familiale, un passeport et un emploi, il ressort également des pièces du dossier que Mme B... s'est soustraite à une précédente décision portant obligation de quitter le territoire français. Elle entre donc dans le champ d'application du 5° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour ce motif, le préfet pouvait refuser de lui octroyer un délai de départ volontaire. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit résultant de la violation des articles L. 612-2 et L. 612-3 du même code doit être écarté. En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination : 10. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré, par voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté. 11. En deuxième lieu, la décision contestée mentionne avec suffisamment de précisions les circonstances de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de cette décision doit être écarté. 12. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : / 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; / 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". 13. Mme B... expose qu'en raison de sa rupture avec son époux et de son orientation sexuelle, elle risque d'être persécutée dans son pays d'origine. Elle précise que sa famille l'a reniée et a souhaité qu'elle subisse une forme d'exorcisation. Toutefois, ni les documents, à caractère général, sur la situation des homosexuels en Tunisie, ni les attestations d'une association, ni même ses propres déclarations ne sont de nature à établir les risques allégués en cas de retour en Tunisie. 14. Dans ces conditions, compte tenu des éléments produits à l'instance et alors au demeurant que Mme B... n'a pas présenté de demande d'asile depuis son arrivée en France, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an : 15. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. /Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11 ". 16. Pour fixer à un an l'interdiction de retour sur le territoire français litigieuse, le préfet du Pas-de-Calais s'est fondé sur les circonstances que l'intéressée a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement qu'elle n'a pas exécutée et qu'elle n'établit pas avoir transféré sur le sol national l'ensemble de ses attaches privées et familiales. 17. Il résulte toutefois de ce qui a été dit ci-dessus que Mme B... est entrée régulièrement sur le territoire français en septembre 2017 et que sa relation avec une ressortissante française a débuté avant la déclaration de concubinage en octobre 2021. Dans les circonstances particulières de l'espèce, et alors même que Mme B... s'est soustraite à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement, en fixant à la durée d'un an la durée de l'interdiction de retour, le préfet du Pas-de-Calais a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation. 18. Par suite, sans qu'il soit besoin s'examiner les autres moyens dirigés contre cette décision, Mme B... est fondée à demander l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français. Par ailleurs, l'annulation de cette décision entraîne automatiquement la suppression de toute mention dans le fichier des signalements aux fins de non-admission (SIS), sans qu'il soit besoin de l'ordonner. En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence : 19. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré, par voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté. 20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français. Sur les conclusions à fin d'injonction 21. L'annulation de la décision d'interdiction de retour sur le territoire n'implique pas que le préfet du Pas-de-Calais procède à un nouvel examen de la situation de Mme B.... Par suite, les conclusions à fin d'injonction de Mme B... doivent être rejetées. Sur les frais exposés et non compris dans les dépens : 22. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français. Article 2 : La décision du préfet du Pas-de-Calais du 29 mars 2022 prononçant une interdiction de retour sur le territoire français est annulée. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à Me Héloïse Marseille et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie pour information sera adressée au préfet du Pas-de-Calais. Délibéré après l'audience publique du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient : - M. Marc Heinis, président de chambre, - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, - M. Denis Perrin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La présidente-rapporteure, Signé: C. Baes-HonoréLe président de la 1ère chambre, Signé: M. C... La greffière, Signé: C. Sire La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N° 22DA02165 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2022 par lequel la préfète de l'Oise l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé l'Algérie comme pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un jugement n° 2203197 du 10 octobre 2022, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté les demandes de M. C.... Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2022, M. C..., représenté par Me Zineb Abdellatif, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2022 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il ne constitue pas une menace à l'ordre public ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ; - l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire enregistré le 24 janvier 2023, la préfète de l'Oise conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. La clôture de l'instruction a été fixée au 2 février 2023 à 12 heures par ordonnance du 13 janvier 2023. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 décembre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leur famille ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., ressortissant algérien, déclare être entré en France le 12 juin 2016. Il a demandé un titre de séjour à sa majorité. Par arrêté du 25 mars 2022, la préfète de la Somme a rejeté cette demande. Par arrêté du 29 septembre 2022, la préfète de l'Oise l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. M. C... relève appel du jugement du 10 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 septembre 2022. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2.Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; / ... ". 3. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a été condamné, le 15 avril 2022, par le tribunal correctionnel d'Amiens à dix mois d'emprisonnement pour détention non autorisée de stupéfiants en récidive, offre ou cession non autorisée de stupéfiants en récidive et acquisition non autorisée de stupéfiants en récidive. Le jugement fait état également de quatre mentions au casier judiciaire de l'intéressé, dont une condamnation par le tribunal pour enfants du 8 février 2021 pour détention de produits stupéfiants. La décision portant obligation de quitter le territoire français fait aussi état de ce que l'intéressé est connu des services de police notamment pour des faits de violence et de refus d'obtempérer, le plus récent ayant été constaté le 7 février 2022. L'intéressé n'apporte aucun élément venant contredire ces constatations. Par suite, la préfète de l'Oise était fondée à retenir que M. C... constituait une menace pour l'ordre public. 4. Si l'appelant soutient que la préfète ne pouvait pas prendre à son encontre une décision d'expulsion car il ne constitue pas une menace grave à l'ordre public, il est constant que la décision attaquée est une obligation de quitter le territoire français. Par ailleurs, la préfète pouvait se fonder sur la menace à l'ordre public pour prendre une telle mesure en application du 5° de l'article L. 611-1du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'intéressé dont la demande de titre avait été rejetée le 25 mars 2022, ne résidant plus régulièrement en France depuis plus de trois mois à la date de la décision contestée. 5. Si M. C... soutient aussi qu'il ne peut faire l'objet d'une expulsion, résidant habituellement en France depuis l'âge de treize ans, un tel moyen est également inopérant à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français. Au surplus, M. C... n'établit pas résider habituellement en France depuis l'âge de treize ans, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif d'Amiens dans le point 3 de son jugement. 6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". 7. Si M. C... soutient qu'il habite chez ses parents âgés et ne sachant ni lire, ni écrire dont il s'occupe, il ne l'établit pas en se bornant à produire des factures pour le logement et une attestation de la caisse d'allocations familiales au seul nom de son père. Par ailleurs, son père est décédé le 27 septembre 2022, deux jours avant la décision contestée. Si l'intéressé fait également état de la présence en France de sa fratrie, il n'établit ni le lien de parenté, ni l'intensité de ses relations avec celle-ci. S'il produit son visa de long séjour valable du 15 mai 2016 au 13 août 2016 avec un tampon d'entrée en France le 12 juin 2016, les pièces qu'il produit attestent de sorties du territoire français au moins à deux reprises le 11 juillet 2017 et le 27 août 2018. Dans ces conditions, il ne démontre pas la continuité de son séjour et son insertion sur le territoire français. Dans ces conditions et compte tenu de la menace à l'ordre public que constitue M. C..., la préfète n'a pas porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale en l'obligeant à quitter le territoire français. Le moyen de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit également être écarté. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par suite, sa requête est rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera transmise pour information à la préfète de l'Oise. Délibéré après l'audience publique du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient : - M. Marc Heinis, président de chambre, - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, - M. Denis Perrin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le rapporteur, Signé: D. Perrin Le président de la 1ère chambre, Signé: M. B... La greffière, Signé: C. Sire La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N° 22DA02346 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler l'arrêté du 22 avril 2022 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour " salarié " ou à défaut de réexaminer sa situation, et enfin de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 2201739 du 21 juillet 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 22 août 2022, M. A..., représenté par Me Tourbier, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler cet arrêté du 22 avril 2022 ; 3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour " salarié " ou, à défaut, de réexaminer sa situation ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros, à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, sous réserve que son conseil renonce à l'aide juridictionnelle. Il soutient que : - le tribunal n'a pas répondu au moyen soulevé dans son mémoire complémentaire à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, tiré de l'atteinte disproportionnée portée à sa vie privée et familiale ; cette omission entache le jugement d'irrégularité ; - la décision lui refusant un titre de séjour est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision prononçant son éloignement porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale, au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2023, la préfète de l'Oise conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 9 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 26 janvier 2023 à 12 heures. Par une décision du 20 septembre 2022, M. A... n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant malien né en 1994, est, selon ses déclarations, entré en France le 10 novembre 2018. Il a sollicité, le 19 janvier 2022, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 22 avril 2022, la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné en cas d'exécution d'office de cette mesure. M. A... relève appel du jugement du 21 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la régularité du jugement : 2. M. A... soutient que le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de l'atteinte à sa vie privée et familiale, portée par la décision l'obligeant à quitter le territoire. Il ressort du jugement attaqué que si les premiers juges ont visé le mémoire complémentaire produit par M. A... le 20 juin 2022, ils n'ont en revanche pas visé le moyen soulevé dans ce mémoire, tiré de l'atteinte alléguée à sa vie privée et familiale, qui n'était pas inopérant et n'y ont pas répondu. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'une omission de répondre à un moyen en tant qu'il porte sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français et est, pour ce motif et dans cette mesure, irrégulier. 3. Il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions de M. A... dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire et par la voie de l'effet dévolutif de l'appel en ce qui concerne les autres décisions. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour : 4. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. / Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat ". 5. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L.435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur, qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là même, de motifs exceptionnels exigés par la loi. 6. La circonstance mise en avant par M. A... qu'il dispose d'une promesse d'embauche en qualité de manutentionnaire dans une société basée à Pontault-Combault qui aurait selon l'appelant les plus grandes difficultés à recruter dans ce secteur d'activité, ne saurait, à elle seule, suffire à établir que la délivrance d'un titre de séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels. Cette circonstance n'est au demeurant pas de nature à justifier de son insertion professionnelle depuis son arrivée sur le territoire français. 7. En ce qui concerne son insertion en France, M. A... se borne, comme il l'avait fait devant le tribunal administratif, à se prévaloir de la présence en France, de son frère titulaire d'une carte de résident, dont il serait très proche et qui serait le seul membre de sa famille avec lequel il aurait gardé contact. Toutefois, il se prévaut pour cela d'une très brève attestation de ce dernier, indiquant, sans autre précision qu'il voit son frère depuis que ce dernier est en France. Par ailleurs, alors qu'il allègue une entrée sur le territoire français depuis le mois de novembre 2018, M. A... ne donne aucun élément précis sur les liens amicaux, sociaux, ou associatifs qu'il aurait noués en France, ni sur ses conditions d'existence depuis son arrivée. Enfin, alors qu'il est célibataire et sans charge de famille en France, M. A... ne fait état d'aucune circonstance particulière faisant obstacle à ce qu'il poursuive sa vie à l'étranger et, en particulier au Mali, son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans et où résident son père, le reste de sa fratrie ainsi que son fils, avec lequel il déclare qu'il aurait rompu tout lien. 8. Compte tenu de ces éléments, les pièces du dossier n'établissent pas l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels qui justifieraient le séjour en France de M. A... quand bien même il ne présenterait aucune menace pour l'ordre public. Le moyen tiré de ce que la préfète de l'Oise aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui délivrant pas un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut donc qu'être écarté. 9. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être également écarté. En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : 10. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points précédents, l'obligation faite à M. A... de quitter le territoire français n'est entachée ni d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé, ni d'une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 avril 2022 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination. 12. Par voie de conséquence, les conclusions de M. A... à fin d'annulation de cet arrêté, celles à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 21 juillet 2022 du tribunal administratif d'Amiens est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 avril 2022 de la préfète de l'Oise, ainsi que le surplus de ses conclusions d'appel, sont rejetés. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Antoine Tourbier. Copie en sera adressée pour information à la préfète de l'Oise. Délibéré après l'audience publique du 7 mars 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - M. Frédéric Malfoy, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le rapporteur, Signé : F. Malfoy La présidente de chambre, Signé : G. Borot La greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, C. Huls-Carlier N° 22DA01833 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler l'arrêté du 25 avril 2022 par lequel la préfète de l'Oise l'a obligé à quitter sans délai le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation, sous astreinte de 152,45 euros par jour de retard. Par un jugement n° 2201431 du 9 juin 2022, le vice-président désigné par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 25 juillet 2022, M. C..., représenté par Me Pereira, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler cet arrêté du 25 avril 2022 ; 3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros, à verser à son conseil, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle. Il soutient que : - l'arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation en raison de l'atteinte disproportionnée portée à sa vie privée et familiale, au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - il est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ; - il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Par un mémoire en défense, enregistré le 18 novembre 2022, la préfète de l'Oise conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 10 novembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 5 décembre 2022 à 12 heures. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 juillet 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la directive 2013/21/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., ressortissant albanais né en 1992, est, selon ses déclarations, entré en France au cours du mois de janvier 2019. Il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 5 octobre 2020, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 11 mai 2021. Par un arrêté du 25 avril 2022, la préfète de l'Oise l'a obligé à quitter sans délai le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné en cas d'exécution d'office de cette mesure. M. C... relève appel du jugement du 9 juin 2022 par lequel le vice-président désigné par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) ; 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, (...) ". Par ailleurs l'article L. 542-2 de ce code dispose que : " Par dérogation à l'article L. 542-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin : 1° Dès que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris les décisions suivantes : (...) d) une décision de rejet dans les cas prévus à l'article L. 531-24 et au 5° de l'article L. 531-27 ; (...) ". Aux termes de l'article L. 531-24 du même code : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides statue en procédure accélérée dans les cas suivants : 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr au sens de l'article L. 531-25 ; (...) ". Enfin, l'Albanie est considérée comme un pays d'origine sûr au sens de l'article 37 et de l'annexe de la directive 2013/21/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. 3. D'autre part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". En outre aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". 4. Il ressort des pièces du dossier que M. C... et sa compagne, Mme E... A..., également de nationalité albanaise, sont entrés sur le territoire français en janvier 2019 et qu'ayant chacun demandé l'asile, leurs demandes respectives ont été rejetées définitivement par la CNDA le 11 mai 2021. Il est par ailleurs constant que M. C... et Mme A... sont parents d'une enfant prénommée B..., née en France le 16 décembre 2019, au nom de laquelle une première demande d'asile avait également été présentée conjointement avec celle du père et rejetée par la décision précitée de la CNDA. Par ailleurs, il ressort du relevé Telemofpra communiqué en défense par la préfète de l'Oise et dont les mentions font foi jusqu'à preuve du contraire, que si, le 19 mars 2020, une seconde demande d'asile au nom de la fille du couple a été introduite auprès de l'OFPRA, elle a été rejetée par l'Office statuant en procédure accélérée par une décision en date du 11 janvier 2022. Cette décision ayant été notifiée le 11 février 2022, la jeune B... ne bénéficiait plus à cette date, du droit de se maintenir sur le territoire français, quand bien même une demande d'aide juridictionnelle aurait été enregistrée en son nom auprès du greffe de la CNDA le même jour, pour former un recours contre la décision du 11 janvier 2022. Ainsi, à la date de l'arrêté de la préfète de l'Oise attaqué, soit le 25 avril 2022, l'enfant mineure de M. C... ne disposait plus d'aucun droit à se maintenir sur le territoire au titre de l'asile de sorte que la situation de l'intéressé devait être appréciée au vu de cette circonstance. 5. En l'espèce, M. C... est entré en France en 2019 et lui-même ainsi que sa conjointe n'ont été autorisés à résider sur le territoire français qu'en raison de l'instruction et de l'examen de leurs demandes d'asile respectives, qui ont été définitivement rejetées. En outre, M. C... ne justifie d'aucun lien personnel ou familial sur le territoire français alors qu'il a déclaré avoir conservé des attaches familiales dans son pays d'origine, et notamment ses parents. S'il se prévaut d'un certificat de travail pour la période du 19 octobre 2020 au 15 avril 2021, cette circonstance ne démontre pas une insertion professionnelle durable pas plus que la promesse d'embauche en date du 6 janvier 2022. Dans ces conditions, dès lors qu'il n'apparaît pas que M. C... serait dépourvu de liens familiaux dans son pays d'origine et que le jeune âge de sa fille ne fait pas obstacle à la reconstitution de la cellule familiale en Albanie, la mesure d'éloignement en litige ne peut être regardée comme ayant des conséquences disproportionnées sur sa situation personnelle et familiale. Dans ces conditions, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale et ne méconnaît ainsi pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle, ni ne méconnait les stipulations précitées du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. 6. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le vice-président désigné par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2022 de la préfète de l'Oise portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination. 7. Il y a également lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions présentées aux fins d'injonction, d'astreinte et de versement d'une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Emmanuelle Pereira. Copie en sera adressée pour information à la préfète de l'Oise. Délibéré après l'audience publique du 7 mars 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - M. Frédéric Malfoy, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le rapporteur, Signé : F. Malfoy La présidente de chambre, Signé : G. BorotLa greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, C. Huls-Carlier N° 22DA01614 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2022 par lequel le préfet de l'Aisne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français avec un délai de départ volontaire de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation. Il a également demandé au tribunal administratif d'Amiens d'enjoindre au préfet de l'Aisne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ainsi qu'une carte de séjour temporaire ou à défaut, de réexaminer sa situation, le tout, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jours de retard Par un jugement n° 2200479 du 24 mars 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 22 avril 2022 et un mémoire en réplique enregistré le 15 juillet 2022, M. A... B..., représenté par Me Lefebvre, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 11 janvier 2022 du préfet de l'Aisne ; 3°) d'enjoindre au préfet de l'Aisne, à titre principal, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ainsi qu'une carte de séjour temporaire, dans un délai de deux mois suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 150 par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à son avocat au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat. Il soutient que : En ce qui concerne le refus de titre de séjour : - la pièce 13 versée en défense dans le mémoire de première instance est irrecevable et doit être écartée des débats car elle méconnaît le secret des correspondances entre l'avocat et son client ; - c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a soulevé d'office l'irrecevabilité d'un moyen sans le communiquer aux parties ; - la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 435-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la décision méconnaît l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire : - la décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ; - la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur la situation personnelle du requérant. En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi : - la décision méconnaît l'article L. 513-2 alinéa 5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2022 et un mémoire enregistré le 29 juillet 2022, le préfet de l'Aisne conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens ne sont pas fondés. Par un mémoire en intervention enregistré le 18 juillet 2022, le Groupe d'information et de soutien des immigré.es (GISTI) et l'association Emmaüs France, représentés par Me Crusoé, demandent que la cour fasse droit aux conclusions de la requête de M. B.... Ils font valoir que ni le préfet ni le tribunal n'avaient à exiger que la situation de M. B... présente des circonstances exceptionnelles et qu'elle satisfaisait aux conditions posées par l'article L. 435-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 24 mai 2022. Par une ordonnance du 18 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 août 2022, à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ; - le code de l'action sociale et des familles ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente-rapporteure, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. 1. M. A... B..., ressortissant arménien né le 25 décembre 1976, déclare être entré sur le territoire français le 27 mai 2012. Il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 13 septembre 2012. Son recours contre cette décision a été rejeté par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 21 mai 2013. Par un arrêté du 11 janvier 2022, le préfet de l'Aisne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit. M. B... relève appel du jugement du 24 mars 2022 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur l'intervention du GISTI et de l'association Emmaüs France : 2. Eu égard à l'objet de leurs statuts, le GISTI et l'association Emmaüs France justifient d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien des conclusions de M. B.... Leur intervention doit, par suite, être admise. Sur la régularité du jugement : 3. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques : " En toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention " officielle ", les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel ". Mais en l'absence de disposition le prévoyant expressément, les dispositions de l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 ne peuvent faire obstacle au pouvoir et au devoir qu'a le juge administratif de joindre au dossier, sur production spontanée d'une partie, des éléments d'information, et de statuer au vu de ces pièces après en avoir ordonné la communication pour en permettre la discussion contradictoire. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a refusé d'écarter des débats une pièce produite par le préfet qui serait couverte par le secret de la correspondance entre un avocat et son client. 4. En second lieu, aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la sous-section chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué (...) ". Ces dispositions, qui sont destinées à provoquer un débat contradictoire sur les moyens que le juge doit relever de sa propre initiative, font obligation à la formation de jugement, lorsqu'elle entend soulever d'office un moyen qui n'a pas été invoqué par les parties ni relevé par son président avant l'audience, de rayer l'affaire du rôle de ladite séance et de communiquer le moyen aux parties. 5. Toutefois, le tribunal administratif d'Amiens a considéré que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile était inopérant faute, pour l'intéressé, d'avoir sollicité un titre sur un tel fondement alors que le préfet n'avait pas entendu l'examiner d'office. Ce faisant, le tribunal n'a pas relevé d'office un moyen au sens des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative et M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement est entaché d'une irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Aux termes de l'article L. 423-9 du même code : " L'accès de l'enfant français à la majorité ne fait pas obstacle au renouvellement de la carte de séjour prévue à l'article L. 423-7 ". 7. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait sollicité un titre de séjour en qualité de parent d'enfants français. Le préfet de l'Aisne, qui n'y était pas tenu, n'a pas entendu examiner d'office si M. B... pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, M. B... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de ces dispositions. 8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger accueilli par les organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 265-1 du code de l'action sociale et des familles et justifiant de trois années d'activité ininterrompue au sein de ce dernier, du caractère réel et sérieux de cette activité et de ses perspectives d'intégration, peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat ". 9. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger justifie de trois années d'activité ininterrompue dans un organisme de travail solidaire, qu'un rapport soit établi par le responsable de l'organisme d'accueil, qu'il ne vive pas en état de polygamie et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux de cette activité et de ses perspectives d'intégration. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée. 10. Il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté par le préfet de l'Aisne que M. B... justifie de plus de trois années d'activité ininterrompue au sein de la communauté Emmaüs de Soissons. L'intéressé a suivi une formation renforcée dans l'apprentissage de la langue française et a certifié ne pas vivre en état de polygamie sur le territoire français. Il n'est ni établi ni même allégué que sa présence constituerait une menace pour l'ordre public. Toutefois, malgré la production d'une promesse d'embauche comme manutentionnaire, il ressort des pièces du dossier qu'il ne justifiait pas de réelles perspectives d'intégration malgré ses dix ans de présence sur le territoire. Le préfet de l'Aisne n'a pas commis ni d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste d'appréciation en refusant à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 11. En troisième lieu, M. B... est célibataire. S'il est père de deux enfants français, sa fille est majeure et ses enfants résident avec leur mère. Malgré les photographies versées au débat, le requérant n'apporte aucun élément permettant d'établir une participation régulière et effective à l'entretien de son enfant mineur. Ses droits de visite et d'hébergement ont été réservés par un jugement du 12 septembre 2019 du juge aux affaires familiales de Soissons, confirmé par la cour d'appel d'Amiens, dans l'intérêt du bien-être des enfants compte tenu de son comportement intrusif et violent à l'égard de ceux-ci et de leur mère. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et d'une erreur manifeste d'appréciation dans la situation personnelle de l'appelant doivent être écartés. 12. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 721-4, précédemment article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". 13. M. B... soutient qu'en cas de retour dans son pays d'origine, il serait exposé à des risques de peines ou traitements inhumains du fait de son témoignage contre son employeur dans le cadre d'un accident de travail. Toutefois, il ne produit aucun élément au soutien de ses allégations alors que, au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 13 septembre 2012 et par la Cour nationale du droit d'asile le 5 juin 2013. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Il en va de même, à le supposer soulevé, du moyen tiré de la méconnaissance du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 14. Compte-tenu de ce qui a été précédemment exposé, M. B... n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision de refus de séjour au soutien des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français. 15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif d'Amiens. Sa requête doit être rejetée y compris ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative DECIDE : Article 1er : L'intervention du Groupe d'information et de soutien des immigré.es (GISTI) et de l'association Emmaüs France est admise. Article 2 : La requête de M. B... est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Lefèvre, au Groupe d'information et de soutien des immigré.es (GISTI), à l'association Emmaüs France et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Aisne. Délibéré après l'audience publique du 7 mars 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - Mme Dominique Bureau, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le président-assesseur, Signé : M. C... La présidente de chambre, présidente-rapporteure, Signé : G. BorotLa greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, C. Huls-Carlier 2 N° 22DA00878
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle le président de l'université de Rouen Normandie a refusé de lui verser la somme de 3 908,14 euros bruts correspondant au rappel des sommes lui restant dues au titre des années universitaires 2017-2018 et 2018-2019, d'autre part, de condamner l'université de Rouen Normandie à lui verser la somme de 3 908,14 euros bruts et enfin de mettre à la charge de cette dernière une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 2001853 du 1er mars 2022, le tribunal administratif de Rouen a partiellement fait droit aux demandes de M. A... en condamnant l'université de Rouen Normandie à lui verser la somme de 2 648,17 euros et en rejetant le surplus de ses conclusions relatives à la prime d'enseignement supérieur. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés le 2 mai 2022, les 8 et 27 décembre 2022, l'université de Rouen Normandie, représentée par Me Pichon, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à verser à M. A... la somme de 2 648,17 euros au titre de la rémunération de son congé de formation professionnelle pour la période du 1er septembre 2018 au 31 décembre 2018 et a mis à sa charge la somme de 1 300 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 2°) de rejeter la requête initiale de M. A... ; 3°) de mettre à la charge de M. A... une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier compte tenu de son insuffisante motivation relativement au décompte des obligations de service retenues au titre du congé de formation professionnelle ; - pour la condamner à verser à M. A... une somme de 2 648,17 euros bruts correspondant aux heures de travaux dirigés qui n'avaient pas été rémunérées durant l'année universitaire 2018-2019, le tribunal a retenu la méthode de calcul proposée par M. A..., qui découle de la circulaire du 30 avril 2012 du ministre de l'enseignement et de la recherche, relative aux congés légaux des enseignants chercheurs et des autres enseignants exerçant dans l'enseignement supérieur ; - en s'abstenant de viser cette circulaire dont il a pourtant fait application, le tribunal a entaché son jugement d'erreur de droit ; - ce jugement méconnaît par ailleurs le principe d'autonomie administrative et financière dont bénéficient les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel en vertu des articles L. 711-1 et L. 712-8 du code de l'éducation nationale ; - la détermination des méthodologies de calcul des périodes écoulées à l'occasion du congé de formation professionnelle suivi par un agent astreint à une obligation particulière de service relève de l'autonomie de gestion de l'université ; ainsi, le tribunal aurait dû appliquer la méthode de l'université de Rouen qui implique que seules les obligations de service prévues pendant le congé sont considérées comme accomplies, méthode qui se révèle plus avantageuse pour l'agent ; - en application de cette méthode, le calcul des obligations de service de M. A... du fait de son congé de formation professionnelle doit être opéré par l'application de la formule " 384 heures de travaux dirigés (TD) / 26 semaines x 13 = 192 heures de TD réputées accomplies " ; - s'agissant de la prime d'enseignement supérieur, c'est à bon droit que le tribunal a confirmé la décision refusant de faire droit à la demande de M. A... dès lors que, compte tenu de son congé de formation professionnelle, l'intéressé n'a pas accompli l'intégralité de ses obligations statutaires de service tel que l'exige l'article 3 du décret n° 89-776 du 23 octobre 1989 relatif à la prime d'enseignement supérieur attribuée à certains personnels enseignants en fonctions dans l'enseignement supérieur. Par des mémoires en défense, enregistrés le 3 octobre 2022 et le 22 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Labetoule, demande à la cour : 1°) de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'université de Rouen Normandie à lui verser la somme de 2 648,17 euros au titre du rappel de service relatif à l'année universitaire 2018-2019 ; 2°) par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement en ce qu'il a rejeté ses conclusions tendant au versement de la prime d'enseignement supérieur au titre des années universitaires 2017-2018 et 2018-2019 et, en conséquence, de condamner l'université de Rouen Normandie à lui verser la somme de 1 259,97 euros bruts à ce titre ; 3°) de mettre à la charge de l'université de Rouen Normandie une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761 1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il revient à l'université de Rouen Normandie de démontrer que son conseil d'administration a autorisé son président à interjeter appel du jugement, sous peine d'irrecevabilité de la requête ; - le litige étant relatif à un contentieux indemnitaire n'excédant pas 10 000 euros, le jugement n'est pas susceptible d'appel ; - les moyens soulevés dans la requête d'appel ne sont pas fondés ; - la période du 1er septembre 2018 au 31 décembre 2018 au cours de laquelle il se trouvait en congé de formation professionnelle doit être décomptée de son obligation de service annuelle de 384 heures à hauteur de 255,95 heures, conformément à la méthode proportionnelle instituée par la circulaire du 30 avril 2012 du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche ; - par ailleurs, le congé de formation professionnelle étant une position d'activité, il doit être regardé comme ayant accompli l'intégralité de ses obligations statuaires de service au cours des deux années universitaires 2017-2018 et 2018-2019, ce qui lui ouvre droit au bénéfice de l'intégralité de la prime d'enseignement supérieur. Par une ordonnance du 28 décembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 19 janvier 2023 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'éducation ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 89-776 du 23 octobre 1989 ; - le décret n° 93-461 du 25 mars 1993 ; - le décret n° 2007-1470 du 15 octobre 2007 ; - le décret n° 2010-997 du 26 août 2010 ; - la circulaire du 30 avril 2012 du ministre de l'enseignement et de la recherche, relative aux congés légaux des enseignants chercheurs et des autres enseignants exerçant dans l'enseignement supérieur ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller, - les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public, - et les observations de M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., professeur certifié d'anglais affecté au sein de l'université de Rouen Normandie à l'UFR Sciences et Techniques, département langues et communication, a bénéficié, à sa demande, d'un congé de formation professionnelle du 1er septembre 2017 au 30 avril 2018, puis du 1er septembre 2018 au 31 décembre 2018. Durant ce congé, qui s'est étalé sur les années universitaires 2017-2018 et 2018-2019, il a perçu, conformément aux dispositions du I de l'article 25 du décret du 15 octobre 2007 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie, une indemnité mensuelle forfaitaire égale à 85 % du traitement brut et de l'indemnité de résidence afférents à l'indice qu'il détenait au moment de sa mise en congé. Par un courrier du 31 mars 2020, son conseil a adressé au président de l'université de Rouen Normandie, une demande sollicitant le versement d'une somme totale de 3 908,14 euros bruts, correspondant à des rappels de traitements et indemnités auxquels il estimait avoir droit. Il réclamait, d'une part, le versement d'une somme de 2 648,17 euros bruts correspondant à des heures de travaux dirigés (TD) qui n'avaient pas été rémunérées durant l'année universitaire 2018-2019 et, d'autre part, le versement d'une somme de 1 259,97 euros bruts correspondant à la prime d'enseignement supérieur dont il n'avait perçu qu'une partie au titre des deux années universitaires précitées. Sa demande ayant été implicitement rejetée, M. A... a demandé au tribunal administratif de Rouen l'annulation de la décision implicite de refus du président de l'université de Rouen Normandie de lui verser la somme de 3 908,14 euros bruts correspondant au rappel des sommes lui restant dues au titre des années universitaires 2017-2018 et 2018-2019 et de condamner cet établissement universitaire à lui verser cette somme. 2. L'université de Rouen Normandie relève appel du jugement du 1er mars 2022 du tribunal administratif de Rouen, en tant qu'il l'a condamnée à verser à M. A... la somme de 2 648,17 euros au titre de la rémunération de son congé de formation professionnelle pour la période du 1er septembre 2018 au 31 décembre 2018 et a mis à sa charge la somme de 1 300 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. A... demande à la cour, par la voie de l'appel incident, d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant au versement de la prime d'enseignement supérieur au titre des années universitaires 2017-2018 et 2018-2019 et, en conséquence, de condamner l'Université de Rouen à lui verser la somme de 1 259,97 euros bruts à ce titre Sur la compétence de la cour : 3. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction alors applicable : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée (...) peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. / Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : / (...) 8° Sauf en matière de contrat de la commande publique sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ; / (...) / Par dérogation aux dispositions qui précèdent, en cas de connexité avec un litige susceptible d'appel, les décisions portant sur les actions mentionnées au 8° peuvent elles-mêmes faire l'objet d'un appel (...) ". En vertu de l'article R. 222-14 de ce code, le montant des indemnités visées par le 8° de l'article R. 811-1, déterminé conformément à ce que prévoit l'article R. 222-15, est fixé à 10 000 euros. 4. La demande d'un fonctionnaire ou d'un agent public tendant seulement au versement de traitements, rémunérations, indemnités, avantages ou soldes impayés, sans chercher la réparation d'un préjudice distinct du préjudice matériel objet de cette demande pécuniaire, ne revêt pas le caractère d'une action indemnitaire au sens du 8° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Par suite, une telle demande n'entre pas, quelle que soit l'étendue des obligations qui pèseraient sur l'administration au cas où il y serait fait droit, dans le champ de l'exception, prévue à ce 8°, en vertu de laquelle le tribunal administratif statue en dernier ressort. 5. Il résulte des pièces du dossier soumis au tribunal administratif de Rouen que M. A... n'invoquait pas d'autre préjudice que l'insuffisance des sommes qui lui ont été versées, d'une part, au titre de la rémunération des heures de travaux dirigés durant l'année universitaire 2018-2019 et, d'autre part, en application du décret du 23 octobre 1989 relatif à la prime d'enseignement supérieur attribuée à certains personnels enseignants en fonction dans l'enseignement supérieur. Par suite, la demande qu'il a présentée au tribunal administratif ne peut être regardée comme une action indemnitaire au sens du 8° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Il s'ensuit que le jugement du tribunal administratif de Rouen n'a pas été rendu en dernier ressort et que la requête de l'université de Rouen Normandie, formée contre ce jugement, ne présente pas le caractère d'un pourvoi en cassation mais d'un appel, qui ressortit à la compétence de la cour administrative d'appel de Douai. Sur la fin de non-recevoir opposée par M. A... : 6. Aux termes du IV de l'article L. 712-3 du code de l'éducation : " (...) Le conseil d'administration détermine la politique de l'établissement. A ce titre : (...) 6° Il autorise le président à engager toute action en justice (...) ". 7. Il ressort des pièces du dossier que par une délibération du 29 janvier 2021, le conseil d'administration de l'université de Rouen Normandie a autorisé son président à engager toute action en justice. Dès lors, la fin de non-recevoir tirée de ce que le président de l'université de Rouen Normandie ne justifie pas d'une autorisation du conseil d'administration de celle-ci l'habilitant à agir en justice doit être écartée. Sur la régularité du jugement : 8. D'une part, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il ressort des énonciations du jugement attaqué, et notamment de ses points 2 à 4, que les premiers juges ont répondu, par une motivation qui rappelle tant les textes applicables que les faits de l'espèce, à l'ensemble des conclusions et des moyens opérants qui ont été soulevés en première instance, en particulier à celui tiré du décompte des obligations de service durant le congé de formation professionnelle dont a bénéficié M. A.... Ils n'étaient pas tenus de faire référence à l'ensemble des arguments que l'université de Rouen Normandie avait développés devant eux. Ils ont ainsi suffisamment motivé leur jugement au regard des exigences posées par les dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé ne peut être accueilli. 9. D'autre part, selon l'article R. 741-2 du code de justice administrative la décision rendue par une juridiction administrative " contient (...) les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application ". Si les visas du jugement attaqué ne font pas mention de la circulaire du 30 avril 2012 du ministre de l'enseignement et de la recherche, relative aux congés légaux des enseignants chercheurs et des autres enseignants exerçant dans l'enseignement supérieur, il ressort des motifs de ce jugement que le tribunal n'a reproduit aucune disposition de cette circulaire, ni fait une application expresse de ses dispositions. Par suite, le jugement attaqué ne méconnaît pas les dispositions précitées. Sur le bien-fondé du jugement : 10. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 6° Au congé de formation professionnelle (...) ". Aux termes de l'article 24 du décret du 15 octobre 2007 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie des fonctionnaires de l'État : " Les fonctionnaires peuvent bénéficier, en vue d'étendre ou de parfaire leur formation personnelle : 1° Du congé de formation professionnelle mentionné au 6° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, pour une durée maximale de trois ans sur l'ensemble de la carrière, et dans la limite des crédits prévus à cet effet ; (...) ". Aux termes de l'article 25 du même décret : " I. - Le congé prévu au 1° de l'article 24 ne peut être accordé qu'à la condition que le fonctionnaire ait accompli au moins l'équivalent de trois années à temps plein de services effectifs dans l'administration. Ce congé peut être utilisé en une seule fois ou réparti au long de la carrière en stages qui peuvent être fractionnés en semaines, journées ou demi-journées. Durant le congé de formation professionnelle, le fonctionnaire perçoit une indemnité mensuelle forfaitaire égale à 85 % du traitement brut et de l'indemnité de résidence afférents à l'indice qu'il détenait au moment de sa mise en congé. Le montant de cette indemnité ne peut toutefois excéder le traitement et l'indemnité de résidence afférents à l'indice brut 650 d'un agent en fonctions à Paris. Elle est versée pendant une durée limitée à douze mois. Cette indemnité est à la charge de l'administration dont relève l'intéressé. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 2 du décret du 25 mars 1993 relatif aux obligations de service des personnels enseignants du second degré affectés dans les établissements d'enseignement supérieur : " Les enseignants titulaires ou stagiaires du second degré auxquels s'appliquent les dispositions du présent décret sont tenus d'accomplir, dans le cadre de l'année universitaire, un service d'enseignement en présence des étudiants de 384 heures de travaux dirigés ou de travaux pratiques. (...) ". 11. Il ressort des pièces du dossier que durant l'année universitaire 2018-2019, M. A... a bénéficié d'un congé de formation professionnelle pour la période courant du 1er septembre au 31 décembre 2018. Par son recours gracieux formé le 31 mars 2020 demandant la régularisation de sa rémunération à hauteur de la somme de 2 648,17 euros bruts, M. A... a contesté les modalités de décompte des heures de service tenant compte de son congé, retenues à hauteur de 192 heures par l'université de Rouen Normandie pour la détermination du temps de service d'enseignement qu'il devait effectuer au titre de l'année universitaire 2018-2019. Pour faire droit à la demande de M. A..., le tribunal administratif de Rouen a retenu que son service statutaire lui imposant d'accomplir 384 heures et l'année universitaire en vigueur au sein de l'université de Rouen Normandie au cours de l'année 2018-2019 comportant 26 semaines, l'intéressé devait, au regard de la durée de son congé de formation, être regardé comme ayant effectué 255,95 heures à ce titre. 12. Aux termes de l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Font l'objet d'une publication les instructions, les circulaires ainsi que les notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives. Les instructions et circulaires sont réputées abrogées si elles n'ont pas été publiées, dans des conditions et selon des modalités fixées par décret. / (...) ". Aux termes de l'article L. 312-3 du même code : " Toute personne peut se prévaloir des documents administratifs mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-2, émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'Etat et publiés sur des sites internet désignés par décret. / Toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par ces documents pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée. (...) ". 13. Les dispositions de l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration instituent une garantie au profit de l'usager en vertu de laquelle toute personne qui l'invoque est fondée à se prévaloir, à condition d'en respecter les termes, de l'interprétation, même illégale, d'une règle contenue dans un document que son auteur a souhaité rendre opposable, en le publiant dans les conditions prévues aux articles R. 312-10 et D. 312-11 du même code, tant qu'elle n'a pas été modifiée. En outre, l'usager ne peut bénéficier de cette garantie qu'à la condition que l'application d'une telle interprétation de la règle n'affecte pas la situation de tiers et qu'elle ne fasse pas obstacle à la mise en œuvre des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement. Les mentions accompagnant la publication de ce document ont pour objet de permettre de s'assurer du caractère opposable de l'interprétation qu'il contient. 14. Par ailleurs, dans le cas où un texte prévoit l'attribution d'un avantage sans avoir défini l'ensemble des conditions permettant de déterminer à qui l'attribuer parmi ceux qui sont en droit d'y prétendre ou de fixer le montant à leur attribuer individuellement, l'autorité compétente peut, qu'elle dispose ou non en la matière du pouvoir réglementaire, encadrer l'action de l'administration, dans le but d'en assurer la cohérence, en déterminant, par la voie de lignes directrices, sans édicter aucune condition nouvelle, des critères permettant de mettre en œuvre le texte en cause, sous réserve de motifs d'intérêt général conduisant à y déroger et de l'appréciation particulière de chaque situation. Dans ce cas, la personne en droit de prétendre à l'avantage en cause peut se prévaloir, devant le juge administratif, de telles lignes directrices si elles ont été publiées. En revanche, il en va autrement dans le cas où l'administration peut légalement accorder une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l'intéressé ne peut faire valoir aucun droit. S'il est loisible, dans ce dernier cas, à l'autorité compétente de définir des orientations générales pour l'octroi de ce type de mesures, l'intéressé ne saurait se prévaloir de telles orientations à l'appui d'un recours formé devant le juge administratif. 15. Il ressort des énonciations de la circulaire du 30 avril 2012 du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche relative aux congés légaux des enseignants-chercheurs et des autres enseignants exerçant dans l'enseignement supérieur, que son objet est de rappeler le cadre réglementaire applicable aux congés de toute nature et leurs incidences sur les obligations de service alors que la direction générale des ressources humaines est sollicitée régulièrement sur les incidences du bénéfice d'un congé sur le volume annuel d'enseignement et sur les autres obligations de service dont sont redevables les personnels enseignants exerçant dans les établissements publics d'enseignement supérieur. A cet égard, la circulaire rappelle que les enseignants du second degré affectés dans les établissements publics d'enseignement supérieur voient leurs obligations de service fixées par le décret du 25 mars 1993 et que ne bénéficiant pas des dispositions relatives à la modulation, leurs obligations de service après un congé doivent être calculées systématiquement sur la base de 384 heures annuelles de travaux dirigés ou pratiques. Elle indique ensuite que les enseignants, comme tous les autres fonctionnaires, ont droit aux congés énumérés à l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat et notamment le congé de formation professionnelle et que les établissements doivent s'assurer que ce droit à congé soit respecté en tenant compte des particularités des obligations de service diversifiées et annualisées des enseignants. 16. Pour la prise en compte des conséquences des congés des enseignants chercheurs sur les obligations de service d'enseignement durant l'année universitaire, la circulaire propose plusieurs méthodes de prise en compte des congés statuaires, à savoir soit la " méthode du tableau de service " pour le cas où il en existe un au sein de l'établissement, soit la méthode proportionnelle, s'il n'existe pas un tel tableau ou si son application désavantage l'enseignant. Compte tenu de leur rédaction, ces dernières dispositions, qui fixent des lignes directrices, ne sauraient être considérées comme constitutives de simples orientations générales. 17. Par ailleurs, si, en application des dispositions de l'article L. 954-1 du code de l'éducation, la circulaire rappelle que les établissements publics d'enseignement supérieur bénéficiant des responsabilités et compétences élargies peuvent adopter des règles plus avantageuses pour leurs enseignants tenant compte des besoins propres d'organisation des services dans l'établissement et notamment du nombre de semaines entre lesquelles sont réparties les activités d'enseignement et les autres activités, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le conseil d'administration de l'université de Rouen Normandie aurait adopté une délibération prévoyant des règles différentes en ce qui concerne les modalités d'appréciation des conséquences des congés statutaires sur les obligations de service de ses enseignants chercheurs, applicable à l'année universitaire 2018-2019 en litige. 18. Dans ces conditions, et dès lors que la circulaire du 30 avril 2012 a été publiée au bulletin officiel du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche n° 23 du 7 juin 2012 et mise en ligne le 12 juin 2012 sur le site Internet circulaires.legifrance.gouv.fr, M. A... peut utilement se prévaloir de cette circulaire, l'administration ne faisant valoir aucun motif d'intérêt général qui l'aurait conduite à déroger à cette circulaire ou de circonstances particulières propres à la situation de l'intéressé. 19. En l'espèce, il n'est pas contesté qu'au titre de l'année universitaire 2018-2019, aucun tableau de service n'a été établi par l'université de Rouen Normandie pour définir les obligations de service de M. A... et que la durée de cette année universitaire était fixée à 26 semaines. 20. Lorsqu'il n'existe pas de tableau de service, la circulaire du 30 avril 2012 prévoit, pour la prise en compte des congés statutaires, de recourir à la méthode dite " proportionnelle ", qui repose sur l'application de la formule suivante : " (service statutaire après modulation éventuelle / durée de l'année universitaire) X durée du congé = nombre d'heures d'enseignement réputées effectuées du fait du congé ". 21. Contrairement à ce que soutient l'appelante, il résulte de cette formule de calcul que la durée totale du congé de formation professionnelle doit être prise en compte sans qu'il y ait lieu de décompter les périodes durant lesquelles, indépendamment de ce congé, M. A... n'aurait été tenu à aucune obligation de service. A cet égard, l'université de Rouen Normandie ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de la note de service du 7 novembre 2001 sur l'application du droit à congés pour les enseignants et enseignants-chercheurs, prévoyant que " si le congé intervient en partie sur l'année universitaire, il convient d'appliquer la même règle de proportionnalité en effectuant cependant, un prorata au regard de la période de congé qui est imputable sur la période d'enseignement ", ces dispositions ayant été abrogées par la circulaire du 30 avril 2012. 22. Par conséquent, dans la mesure où, pour la période courant du 1er septembre au 31 décembre 2018 qui équivaut à 17,33 semaines, M. A... a bénéficié d'un congé de formation professionnelle durant les 26 semaines de l'année universitaire 2018-2019 au titre de laquelle il devait en principe accomplir 384 heures d'obligations de services statutaires, il y a lieu d'appliquer la formule basée sur la méthode proportionnelle suivante : " 384/26 x 17,33 = 255,95 heures équivalent TD ". 23. Dès lors que l'université de Rouen n'a retenu que 192 heures équivalent TD au titre de cette même période, M. A... est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le président de l'université de Rouen Normandie a refusé de lui accorder le versement d'une somme de 2 648,17 euros bruts correspondant à des heures de travaux dirigés qui n'avaient pas été rémunérées durant l'année universitaire 2018-2019 et dont il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'elle reviendrait à verser à l'intéressé une rémunération d'heures complémentaires qui n'ont pas été véritablement effectuées. 24. Il s'ensuit que l'université de Rouen Normandie n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rouen, en tant que celui-ci l'a condamnée à verser à M. A... la somme de 2 648,17 euros. Sur les conclusions d'appel incident : 25. D'une part, aux termes de l'article 1er du décret du 23 octobre 1989 relatif à la prime d'enseignement supérieur attribuée à certains personnels enseignants en fonctions dans l'enseignement supérieur : " Une prime d'enseignement supérieur est attribuée aux personnels enseignants titulaires du premier ou du second degré en fonctions dans les établissements d'enseignement supérieur relevant du ministre chargé de l'enseignement supérieur, aux personnels relevant des statuts particuliers de l'Ecole nationale supérieure d'arts et métiers (...) / Cette prime est exclusive de la prime de recherche et d'enseignement supérieur prévue par le décret n° 89-775 du 23 octobre 1989 susvisé ".Aux termes de l'article 3 de ce décret : " La prime d'enseignement supérieur ne peut être attribuée qu'aux enseignants accomplissant l'intégralité de leurs obligations statutaires de service. Cette prime est attribuée au même taux aux personnels qui bénéficient de décharges de service. / Les agents qui perçoivent des rémunérations complémentaires au titre d'un cumul d'emplois ou de l'exercice d'une profession libérale ne peuvent bénéficier de la prime d'enseignement supérieur ". 26. D'autre part, aux termes du I de l'article 1er du décret du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l'État et des magistrats de l'ordre judiciaire dans certaines situations de congés : " 1° Le bénéfice des primes et indemnités versées aux fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée (...) est maintenu dans les mêmes proportions que le traitement (...) en cas de congés pris en application de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, des 1°, 2° et 5° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et des articles 10, 12, 14 et 15 du décret du 17 janvier 1986 susvisé ; 2° Les dispositions des régimes indemnitaires qui prévoient leur modulation en fonction des résultats et de la manière de servir de l'agent demeurent applicables ; 3° Les dispositions qui prévoient, pour certains régimes indemnitaires spécifiques rétribuant des sujétions particulières, leur suspension à compter du remplacement de l'agent dans ses fonctions demeurent applicables. (...) ". 27. Les dispositions du décret du 26 août 2010 citées ci-dessus fixent limitativement les situations de congés dans lesquelles les fonctionnaires de l'Etat placés dans une telle position ont droit au maintien du bénéfice, dans les mêmes proportions que leur traitement, des primes et indemnités qui leur sont versées. Or, il est constant que le congé de formation professionnelle prévu par le 6° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 ne figure pas parmi les congés énumérés à l'article 1er de ce décret. Au surplus, les dispositions du I de l'article 25 du décret du 15 octobre 2007 fixant la rémunération mensuelle forfaitaire allouée aux fonctionnaires durant le congé de formation professionnelle, prévoient le versement d'une indemnité forfaitaire égale à 85 % du traitement brut et de l'indemnité de résidence, à l'exclusion de toute autre indemnité. En outre, contrairement à ce que soutient M. A..., la circulaire du 30 avril 2012 se limite à rappeler que la prime d'enseignement supérieur est régie par les dispositions du décret précité du 26 août 2010. 28. Enfin, en tout état de cause, dès lors que l'article 3 du décret du 23 octobre 1989 conditionne l'octroi de la prime d'enseignement supérieur à l'accomplissement de l'intégralité des obligations statutaires de service, le placement de M. A... en congé de formation professionnelle durant une partie des années universitaires 2017-2018 et 2018-2019 fait nécessairement obstacle à son versement au titre de la période durant laquelle il était placé dans cette position. A cet égard, si la circulaire du 30 avril 2012 prévoit un décompte fictif des heures de service durant le congé de formation professionnelle permettant de déterminer les obligations de service restant dues par l'enseignant au retour de ce congé en cours d'année universitaire, pour autant, cet agent ne peut en aucun cas être regardé comme ayant accompli l'intégralité de ses obligations statutaires de service dont il est redevable au titre de l'année universitaire, fixées à 384 heures conformément aux dispositions de l'article 2 du décret du 25 mars 1993 cité au point 10. 29. Compte tenu des dispositions réglementaires applicables à la situation de M. A..., ce dernier n'est par suite pas fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le président de l'Université de Rouen Normandie a refusé de lui verser une somme de 1 259,97 euros bruts, correspondant à la prime d'enseignement supérieur au titre des années universitaires 2017-2018 et 2018-2019. Sur les frais de l'instance : 30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'université de Rouen Normandie demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce et sur le fondement de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de l'université de Rouen Normandie, la somme de 1 500 euros à verser à M. A.... DÉCIDE : Article 1er : La requête de l'université de Rouen Normandie est rejetée. Article 2 : Les conclusions d'appel incident présentées par M. A... sont rejetées. Article 3 : L'université de Rouen Normandie versera la somme de 1 500 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'université de Rouen Normandie. Délibéré après l'audience publique du 7 mars 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - M. Frédéric Malfoy, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le rapporteur, Signé : F. MalfoyLa présidente de chambre, Signé : G. Borot La greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, C. Huls-Carlier N° 22DA00942 2
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 et 22 mars 2023, M. B... A..., représenté par Me Ghameol Sabahy, demande au juge des référés : 1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension des effets de l'arrêté du 19 octobre 2022 par lequel la préfète de Vaucluse lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de renvoi ; 3°) d'ordonner à la préfète de Vaucluse de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler le temps nécessaire à ce réexamen ; 4°) de mettre à la charge de l'État le paiement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - sa demande de première instance tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux a été présentée dans le délai de recours contentieux ; en effet, il a déposé une demande d'aide juridictionnelle le 4 novembre 2022 et a saisi le tribunal administratif huit jours après la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle ; - la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative est remplie dès lors qu'il encourt le risque d'être persécuté par les autorités syriennes en cas de renvoi dans son pays d'origine ; - il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; - ainsi, l'arrêté litigieux est signé d'une personne dont il n'est pas démontré qu'elle aurait reçu délégation de signature pour ce faire ; - de plus, son droit à être entendu a été méconnu ; - par ailleurs, tant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que la Cour nationale du droit d'asile lui ont reconnu la qualité, sinon le statut, de réfugié au sens du A de l'article 1er de la convention de Genève ; or, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne un État-membre ne peut renvoyer dans son pays d'origine une personne qui a perdu son statut de réfugié mais qui justifie l'existence de motifs sérieux et avérés de croire qu'il y serait exposé à subir des traitements prohibés par les articles 4 et 19 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; la jurisprudence du Conseil d'État est dans le même sens ; - étant déserteur de l'armée syrienne il est exposé à subir de tels traitements et l'arrêté attaqué méconnaît également, de ce fait, les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Vu la requête enregistrée le 16 février 2023 sous le n° 23TL00412 par laquelle M. A... a demandé l'annulation de l'ordonnance du 8 février 2023 par laquelle le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 octobre 2022 par lequel la préfète de Vaucluse lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de renvoi. Vu la décision par laquelle le président de la cour a désigné M. Rey-Bèthbéder, président de la 3ème chambre, pour statuer sur les demandes de référés, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique du 27 mars 2023: - le rapport de M. Rey-Bèthbéder, juge des référés, - les observations de Me Ghaemol Sabahy, représentant M. A.... La clôture de l'instruction a été prononcée, à l'issue de l'audience. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., de nationalité syrienne, est entré en France, en provenance des Émirats arabes unis, au mois de janvier 2016. Il y a ensuite demandé l'asile politique, qui lui a été refusé par décision du 27 septembre 2017 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 9 octobre 2018. Sa demande de réexamen a été également rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 21 avril 2021. 2. Par la présente requête, il sollicite du juge des référés de la cour, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension des effets de l'arrêté du 19 octobre 2022 par lequel la préfète de Vaucluse lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de renvoi. Sur les conclusions aux fins de suspension : 3. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets (...) ". Aux termes de l'article L. 522-1 dudit code : " Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique (...) ". Enfin aux termes du premier alinéa de l'article R. 522-1 dudit code : " La requête visant au prononcé de mesures d'urgence doit (...) justifier de l'urgence de l'affaire ". 4. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande de suspension d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour, d'apprécier et de motiver l'urgence compte tenu de l'incidence immédiate du refus de titre de séjour sur la situation concrète de l'intéressé. Cette condition d'urgence sera en principe constatée dans les cas de retrait ou de refus de renouvellement d'un titre de séjour. Dans les autres cas, il appartient au requérant d'établir la réalité de circonstances particulières qui justifient que la condition d'urgence soit regardée comme remplie. 5. Eu égard à la perspective de mise en œuvre à tout moment de la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. A... et au rejet de sa demande d'annulation de cette décision par le président du tribunal administratif de Nîmes, la condition d'urgence doit être regardée comme satisfaite. 6. En l'état de l'instruction, les moyens tirés de ce que le droit de l'intéressé à être entendu avant l'intervention de l'arrêté litigieux, droit proclamé notamment par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, a été méconnu et de ce qu'il est susceptible d'être exposé à subir des traitements inhumains et dégradants en cas de renvoi en Syrie, en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sont de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux. En conséquence, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'ordonner la suspension de l'exécution de cet arrêté. Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte : 7. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ". Aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ". 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre à la préfète de Vaucluse de délivrer à M. A... une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler jusqu'à la date à laquelle il sera statué sur la requête d'appel enregistrée sous le n° 23TL00412, dans un délai de huit jours à compter de la notification de la présente ordonnance. En revanche, l'exécution de la présente ordonnance n'implique pas que la préfète réexamine la situation de l'intéressé d'ici à ce qu'il soit statué sur la requête d'appel précitée. Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros à verser à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. ORDONNE : Article 1er : L'exécution de l'arrêté du 19 octobre 2022 de la préfète de Vaucluse est suspendue au plus tard jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête d'appel enregistrée sous le n° 23TL00412. Article 2 : Il est enjoint à la préfète de Vaucluse de délivrer à M. A... une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête d'appel enregistrée sous le n° 23TL00412 dans un délai de huit jours à compter de la notification de la présente ordonnance. Article 3 : L'État versera à M. A..., une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A..., et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète de Vaucluse Fait à Toulouse, le 28 mars 2023. Le juge des référés, Éric Rey-Bèthbéder La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance. 2 N°23TL00562
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La SCI Méru La Nacre Domaines a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2019 par lequel le préfet de l'Oise s'est opposé à la déclaration qu'elle avait présentée au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par un jugement n° 2002681 du 19 mai 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 20 juillet 2022 et un mémoire enregistré le 10 janvier 2023 et non communiqué, la SCI Méru La Nacre Domaines, représentée par Me Patrick Durand, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2019 du préfet de l'Oise et le rejet implicite de son recours gracieux ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier car insuffisamment motivé ; - ce jugement est également entaché d'une erreur de droit ; - les règles d'urbanisme ne pouvaient s'appliquer à un projet relevant de la loi sur l'eau et non des installations classées ; - le préfet a méconnu l'article L. 214-3 du code de l'environnement en s'opposant à la déclaration ; - l'arrêté du 17 février 1992 était caduc ; - le préfet a opéré un contrôle de conformité alors que l'article L. 214-3 impose seulement une compatibilité avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ; - le préfet a également commis une erreur d'appréciation. Par un mémoire en défense enregistré le 9 décembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête. Il soutient que l'arrêté du 17 février 1992 n'était pas caduc en ce qui concerne les servitudes d'utilité publique dans les périmètres de protection du captage et était opposable à la déclaration de la pétitionnaire. Il reprend pour le reste les observations produites en première instance par le préfet de l'Oise. Par une ordonnance du 9 décembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 janvier 2023 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - le code de la santé publique ; - le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller, - les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public, - et les observations de Me Charlotte Pignet, représentant la SCI Méru La Nacre Domaines. Considérant ce qui suit : Sur l'objet du litige : 1. La société civile immobilière (SCI) Méru La Nacre Domaines a obtenu un permis de construire 97 maisons individuelles, 105 logements collectifs et 4 commerces sur la commune de Méru dans l'Oise. Le 9 août 2019, elle a déposé pour la réalisation de ce projet une déclaration au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement à raison de la création de deux bassins de rétention et d'un bassin d'infiltration. Par arrêté du 1er octobre 2019, le préfet de l'Oise s'est opposé à cette déclaration au motif que le bassin d'infiltration n'était pas conforme à l'arrêté du 17 février 1992 de déclaration d'utilité publique du captage d'eau potable de Méru. Le 27 novembre 2019, la société a formé un recours gracieux contre cette opposition qui a été rejeté implicitement puis par une décision expresse du 7 août 2020. Elle a saisi le tribunal administratif d'Amiens qui a rejeté sa demande d'annulation du rejet de son recours gracieux par un jugement du 19 mai 2022. La société civile Méru La Nacre Domaines relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, le jugement attaqué vise les textes dont il fait application, en particulier l'article L. 212-1 du code de l'environnement dont il cite les dispositions applicables au litige, et comporte les considérations de fait qui le fondent, en particulier celles relatives à la déclaration d'utilité publique et aux périmètres de protection relatifs au captage du lieu-dit " rue Mimaut " et celles relatives aux orientations du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux. Par suite le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté. 3. En deuxième lieu, si la société appelante soutient que le tribunal administratif n'a pas répondu à son moyen tiré de la caducité de la déclaration d'utilité publique, le jugement a précisément écarté ce moyen, dans son point 9, comme inopérant car ne concernant que les opérations de maîtrise foncière. 4. En troisième lieu, si la société appelante fait valoir que le jugement s'est prononcé sur la compatibilité du projet avec le schéma d'aménagement et de gestion des eaux sans prendre en compte les mesures qu'elle envisageait pour éviter tout risque de pollution, le tribunal a considéré dans son point 10 que le projet était directement contraire à l'orientation n°13 du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux et en a ainsi implicitement déduit que les mesures proposées par la société pour les travaux étaient sans effet. 5. En quatrième lieu, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entaché le jugement a trait au bien-fondé du jugement et non à sa régularité. 6. Il résulte de ce qui précède que la société civile immobilière Méru la Nacre Domaines n'est pas fondée à soutenir que le jugement du tribunal administratif d'Amiens doit être annulé pour irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne le cadre juridique : 7. D'une part, aux termes de l'article L. 214-3 du code de l'environnement : " I. - Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles. / Cette autorisation est l'autorisation environnementale régie par les dispositions du chapitre unique du titre VIII du livre Ier, sans préjudice de l'application des dispositions du présent titre. / II. - Sont soumis à déclaration les installations, ouvrages, travaux et activités qui, n'étant pas susceptibles de présenter de tels dangers, doivent néanmoins respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3. / Dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, l'autorité administrative peut s'opposer à l'opération projetée s'il apparaît qu'elle est incompatible avec les dispositions du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ou du schéma d'aménagement et de gestion des eaux, ou porte aux intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 une atteinte d'une gravité telle qu'aucune prescription ne permettrait d'y remédier. Les travaux ne peuvent commencer avant l'expiration de ce délai. ". Aux termes du II de l'article L. 211-1 du même code : " La gestion équilibrée doit permettre de satisfaire ou concilier, lors des différents usages, activités ou travaux, les exigences : / 1° De la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile et de l'alimentation en eau potable de la population ; / (...) ". 8. D'autre part, aux termes de l'article L. 215-13 du code de l'environnement : " La dérivation des eaux d'un cours d'eau non domanial, d'une source ou d'eaux souterraines, entreprise dans un but d'intérêt général par une collectivité publique ou son concessionnaire, par une association syndicale ou par tout autre établissement public, est autorisée par un acte déclarant d'utilité publique les travaux. " et aux termes de l'article L. 1321-2 du code de la santé publique : " " En vue d'assurer la protection de la qualité des eaux, l'acte portant déclaration d'utilité publique des travaux de prélèvement d'eau destinée à la consommation humaine mentionné à l'article L. 215-13 du code de l'environnement détermine autour du point de prélèvement un périmètre de protection immédiate dont les terrains sont à acquérir en pleine propriété et un périmètre de protection rapprochée à l'intérieur duquel peuvent être interdits ou réglementés toutes sortes d'installations, travaux, activités, dépôts, ouvrages, aménagement ou occupation des sols de nature à nuire directement ou indirectement à la qualité des eaux. (...) ". 9. Enfin, aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 214-36 du code de l'environnement : " Le déclarant qui entend contester une décision d'opposition doit, préalablement à tout recours contentieux, saisir le préfet d'un recours gracieux. Le préfet soumet ce recours à l'avis du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques et informe le déclarant, au moins huit jours à l'avance, de la date et du lieu de la réunion et de la possibilité qui lui est offerte d'être entendu. ". En ce qui concerne l'objet du litige : 10. Il résulte des dispositions citées ci-dessus que le recours gracieux formé par la société Méru La Nacre Domaines le 27 novembre 2019 constituait un recours administratif préalable obligatoire, en application de l'article R. 214-36 précité. Le rejet explicite de ce recours gracieux intervenu le 7 août 2020 s'est ainsi substitué à la décision initiale, comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif d'Amiens au point 3 de son jugement. 11. Cette décision du 7 août 2020 a été motivée par la méconnaissance de l'arrêté du 17 février 1992 et par l'incompatibilité avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux En ce qui concerne les moyens tirés d'erreurs de droit : 12. En premier lieu, pour s'opposer à la déclaration déposée par la société appelante, le préfet de l'Oise s'est fondé sur le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux et sur l'arrêté de déclaration d'utilité publique du captage d'eau potable de Méru du 17 février 1992. Cet arrêté vise les dispositions précitées du code de la santé publique et fait application de ces dispositions. Le préfet n'a donc pas fait application des règles d'urbanisme, contrairement à ce que soutient la société appelante, que ce soit dans son arrêté du 17 février 1992, dans celui du 1er octobre 2019 ou dans la décision du 7 août 2020 qui ne vise d'ailleurs pas le code de l'urbanisme. Le moyen tiré d'une erreur de droit à ce titre doit donc être écarté. 13. En deuxième lieu, l'arrêté du 17 février 1992, pris en application de l'article L. 20 devenu l'article L. 1321-2 du code de la santé publique, a institué des périmètres de protection immédiate, rapprochée et éloignée autour du captage du lieu-dit " Rue Mimaut " sur le territoire de la commune de Méru. A l'intérieur des périmètres de protection rapprochée et éloignée, l'arrêté impose le raccordement des habitations au réseau d'assainissement collectif et interdit la réinjection des eaux de ruissellement dans le sous-sol. Par suite, le préfet a pu s'opposer à la déclaration en considérant que l'ouvrage d'infiltration, dénommé bassin C, ne respectait pas les servitudes d'utilité publique prévues par l'arrêté du 17 février 1992 et, étant ainsi de nature à nuire à la qualité des eaux, portait une atteinte grave à l'exigence de santé publique mentionnée à l'article L. 211-1 du code de l'environnement. Le moyen tiré de l'erreur de droit ayant consisté à opposer l'arrêté du 17 février 1992 à la déclaration de la société appelante doit donc être écarté. 14. En troisième lieu, l'arrêté du 17 février 1992 comporte, ainsi que le mentionne son titre, plusieurs objets. L'article 1er déclare d'utilité publique, d'une part, les travaux de dérivation des eaux et, d'autre part, l'acquisition des parcelles constituant le périmètre de protection immédiate du captage. Les articles 2 et suivants fixent les servitudes d'utilité publique s'appliquant dans les différents périmètres de protection autour du captage. Il résulte de l'économie générale de ces dispositions que si l'article 11 de cet arrêté prévoit qu'il est " nul et non avenu si les opérations ne sont pas accomplies dans un délai de cinq ans ", cette disposition, qui reprend le premier alinéa de l'article L. 121-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ne s'applique qu'aux seuls travaux et acquisitions foncières nécessaires pour l'établissement du périmètre de protection rapprochée et ne concerne donc pas les servitudes d'utilité publique grevant les périmètres de protection rapprochée et éloignée qui, de nature réglementaire, ont vocation à être permanentes en application de l'article L. 1321-2 du code de santé publique précité. Le moyen tiré de la caducité de la base légale de l'opposition à déclaration doit donc être écarté. En ce qui concerne l'erreur d'appréciation : 15. En premier lieu, si, comme le soutient la société appelante, l'arrêté du 17 février 1992 ne mentionne pas les bassins de rétention parmi les ouvrages interdits ou réglementés, il interdit la réinjection des eaux de ruissellement. Or le bassin d'infiltration dénommé C du projet a pour objet et pour effet d'infiltrer une partie des eaux de ruissellement du lotissement. Par suite, le préfet n'a commis aucune erreur d'appréciation en considérant que la déclaration était contraire sur ce point à l'arrêté du 17 février 1992. 16. En deuxième lieu, si la société appelante fait valoir que seulement 13,63 % des eaux pluviales du lotissement seront infiltrées et qu'elles feront l'objet préalablement d'un traitement par un décanteur-déshuileur, le préfet soutenait en défense en première instance sans être contredit que la nappe de Méru n'est pas protégée par une formation argileuse et était de ce fait plus sensible aux infiltrations. Or, le projet prévoit la construction de 97 maisons individuelles, 105 logements collectifs et 4 commerces. Si la société soutient que l'usage des produits phytosanitaires sera limité, elle ne peut imposer une telle contrainte aux habitants du lotissement et ne peut donc pas garantir l'absence de tout déversement. Enfin, comme le soulignait le préfet dans ses écritures de première instance, la nappe en question dessert 15 000 habitants et nécessite en conséquence une protection à la hauteur de cet enjeu. 17. Dans ces conditions, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation en s'opposant à la déclaration de la société civile immobilière Méru La Nacre Domaines qui méconnaît l'arrêté du 17 février 1992 de protection du captage de la " Rue Mimaut ". Ce motif suffisait à lui seul à fonder l'opposition à la déclaration de la société civile immobilière Méru La Nacre Domaines. En ce qui concerne la compatibilité avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux du bassin Seine-Normandie : 18. Les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs, ces derniers pouvant être, en partie, exprimés sous forme quantitative. Les autorisations délivrées au titre de la législation de l'eau sont soumises à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Pour apprécier cette compatibilité, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert, si l'autorisation ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation de l'autorisation au regard de chaque disposition ou objectif particulier. 19. L'arrêté du 1er octobre 2019 n'est pas fondé sur l'incompatibilité de la déclaration avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux mais, ainsi qu'il a été exposé, sur l'atteinte portée à la santé publique d'une gravité telle qu'aucune prescription ne permet d'y remédier. Toutefois, dans son courrier du 7 août 2020, le préfet a confirmé le rejet implicite du recours gracieux de la société pétitionnaire au motif que la déclaration présentait une absence manifeste de compatibilité avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux du bassin Seine-Normandie. 20. Ce schéma directeur a pour orientation fondamentale de protéger la santé et l'environnement et d'améliorer la qualité de l'eau et des milieux aquatiques. Il mentionne un " défi " consistant à " protéger les captages d'eau pour l'alimentation en eau potable actuelle et future " qui comprend notamment une orientation n°13, intitulée " protéger les aires d'alimentation de captage d'eau souterraine destinée à la consommation humaine contre les pollutions diffuses ". Le schéma précise pour cet objectif que " La protection de la ressource en eau souterraine destinée à l'alimentation en eau potable se fait actuellement par la définition des périmètres de protection règlementaires et de l'application de la règlementation sur les rejets qui s'y rapporte. ". 21. La déclaration de la société appelante, en prévoyant un rejet interdit par l'arrêté de protection du captage de la " rue Mimaut ", contrarie directement l'orientation précitée et plus globalement l'orientation fondamentale du schéma directeur consistant à protéger la santé en améliorant la qualité des eaux. Si l'orientation n°7 du schéma directeur recommande l'infiltration des eaux de pluie à la parcelle, elle ne saurait prévaloir sur la protection de la ressource en eau souterraine destinée à l'alimentation en eau potable. Dans ces conditions, le préfet de l'Oise était également fondé, en tout état de cause, à considérer que cette déclaration n'était pas compatible avec ce schéma directeur. 22. Il résulte de tout ce qui précède que la société civile immobilière Méru La Nacre Domaines n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er octobre 2019 du préfet de l'Oise. Sur les frais liés à l'instance : 23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par la société civile immobilière Méru La Nacre Domaines et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la société civile immobilière Méru La Nacre Domaines est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Méru La Nacre Domaines et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Copie en sera transmise pour information à la préfète de l'Oise. Délibéré après l'audience publique du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient : - M. Marc Heinis, président de chambre, - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, - M. Denis Perrin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le rapporteur, Signé: D. Perrin Le président de la 1ère chambre, Signé: M. A... La greffière, Signé: C. Sire La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N° 22DA01557 2
JADE/CETATEXT000047370802.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens : Sous le n° 2002586, d'annuler l'avis du 1er juillet 2020 par lequel la rectrice de l'académie d'Amiens l'a informé qu'elle envisageait d'émettre un avis défavorable au renouvellement de son détachement, de condamner l'Etat au versement d'une somme en réparation des préjudices subis, d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports de l'intégrer dans le corps des professeurs certifiés dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard et enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sous le n° 2002852, d'annuler l'arrêté du 26 août 2020 par lequel le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a mis fin à son détachement dans le corps des professeurs certifiés en sciences de la vie et de la terre ensemble la décision du 15 septembre 2020 rejetant son recours gracieux, de condamner l'Etat au versement d'une somme en réparation des préjudices subis, d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale de la jeunesse et des sports de l'intégrer dans le corps des professeurs certifiés dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard et enfin de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 2002586 et 2002852 du 31 mars 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 31 mai 2022, M. A..., représenté par Me Jamais, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 août 2020 par lequel le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a mis fin à son détachement dans le corps des professeurs certifiés en sciences de la vie et de la terre, ensemble la décision du 15 septembre 2020 rejetant son recours gracieux et à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intégrer dans le corps des professeurs certifiés dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 2°) d'annuler la décision du 26 août 2020 refusant son intégration dans le corps des professeurs certifiés et prononçant la fin de son détachement, ensemble la décision du 15 septembre 2020 rejetant explicitement son recours gracieux ; 3°) d'enjoindre à l'administration, de l'intégrer dans le corps des professeurs certifiés, dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les décisions des 26 août et 15 septembre 2020 ont été adoptées sans consultation de la commission administrative paritaire, en méconnaissance de l'article 25 du décret n° 82-451 du 28 mai 1982 modifié par l'article 28 du décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 ; - elles sont entachées d'un vice de procédure dès lors que l'évaluation a été réalisée sur la base de la note de service n° 2019-169 du 27 novembre 2019 portant sur le détachement de fonctionnaires de catégorie A dans les corps des personnels enseignants des premier et second degrés, des personnels d'éducation et des psychologues de l'éducation nationale relevant du ministère chargé de l'éducation nationale qui n'a aucune valeur juridique ; - dès lors qu'il était détaché dans le corps des professeurs certifiés pour une durée de deux ans, la procédure applicable au détachement de longue durée devait lui être appliquée ; à ce titre, l'article 27 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 rend applicables les dispositions de l'article 55 de la loi du 11 janvier 1984 selon lesquelles le fonctionnaire en position de détachement de longue durée bénéficie d'un entretien professionnel conduit par le supérieur hiérarchique direct ; contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, ces dispositions ne sont pas rendues inapplicables par l'article 30-1 du décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs certifiés ; - les deux décisions mettant un terme anticipé à son détachement abrogent une décision créatrice de droit et auraient dû être motivées en droit et en fait, conformément aux dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; - ces décisions sont entachées d'erreur de fait, dès lors qu'elles sont intervenues au terme d'une procédure d'évaluation incomplète et irrégulière ; elles reposent sur l'avis de l'inspecteur d'académie qui ne l'a jamais rencontré, n'a assisté à aucun de ses cours, ni établi aucune constatation directe de sa valeur professionnelle et n'a au surplus pas tenu compte de son autre affectation au sein du collège Amiral C... ; il n'a été évalué que sur une courte durée, en début d'activité au collège d'Ailly-sur-Noye et il n'a pas été tenu compte de ce que l'année scolaire 2019-2020 a été particulière du fait de la crise liée au Covid ; - elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses insuffisances pédagogiques et son manque d'implication ; - durant son détachement, il a souffert d'un manque d'accompagnement et d'encadrement, et aurait notamment dû bénéficier d'une procédure d'alerte par ses tuteurs ; - les décisions sont entachées d'un détournement de procédure et de pouvoir ; - elles sont constitutives d'une discrimination en raison de son état de santé. Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2022, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 27 décembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 24 janvier 2023 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 ; - le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ; - le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ; - le décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 ; - la note de service n° 2019-169 du 27 novembre 2019 relative au détachement de fonctionnaires de catégorie A dans les corps des personnels enseignants des premier et second degrés, des personnels d'éducation et des psychologues de l'éducation nationale relevant du ministère chargé de l'éducation nationale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller, - les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public, - et les observations de Me Jamais pour M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... A... est professeur des écoles titulaire depuis 2017. A sa demande, par un arrêté du 26 juin 2019, le ministre chargé de l'éducation nationale l'a détaché dans le corps des professeurs certifiés dans la discipline sciences de la vie et de la terre (SVT) pour une durée de deux ans, à compter du 1er septembre 2019. Bénéficiant d'un mi-temps thérapeutique, il a été affecté dans un collège d'Ailly-sur-Noye à raison de six heures d'enseignement hebdomadaire et dans un collège d'Amiens pour dispenser trois heures d'enseignement. Par un courrier du 25 janvier 2020, M. A... a sollicité son intégration dans le corps des professeurs certifiés. Par un arrêté du 26 août 2020 prenant effet à compter du 31 août suivant, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a mis fin à son détachement après avoir recueilli l'avis de la rectrice de l'académie d'Amiens le 1er juillet 2020. M. A... a formé, le 9 septembre 2020, un recours gracieux que le ministre a rejeté par une décision du 15 septembre 2020. M. A... relève appel du jugement du 31 mars 2022 du tribunal administratif d'Amiens, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 août 2020 par lequel le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a mis fin à son détachement dans le corps des professeurs certifiés en sciences de la vie et de la terre, ensemble la décision du 15 septembre 2020 rejetant son recours gracieux et à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intégrer dans le corps des professeurs certifiés. Sur la régularité du jugement : 2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il ressort du point 29 du jugement attaqué que pour écarter le moyen tiré du détournement de pouvoir et de procédure, les premiers juges ont estimé qu'un tel détournement de pouvoir et de procédure n'était pas établi. Contrairement à ce que soutient l'appelant, une telle motivation est suffisante dès lors qu'elle résulte nécessairement de l'analyse de l'ensemble des pièces du dossier sur lesquels les premiers juges se sont fondés pour répondre, de manière circonstanciée, aux autres moyens soulevés dans la requête. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué est insuffisamment motivé sur ce point ne peut être accueilli. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne la légalité de la décision du 26 août 2020 : 3. Aux termes de l'article 13 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, applicable au litige : " Tous les corps et cadres d'emplois sont accessibles aux fonctionnaires civils régis par le présent titre par la voie du détachement suivi, le cas échéant, d'une intégration, ou par la voie de l'intégration directe, nonobstant l'absence de disposition ou toute disposition contraire prévue par leurs statuts particuliers. / Le détachement ou l'intégration directe s'effectue entre corps et cadres d'emplois appartenant à la même catégorie et de niveau comparable, apprécié au regard des conditions de recrutement ou du niveau des missions prévues par les statuts particuliers. Le présent alinéa s'applique sans préjudice des dispositions plus favorables prévues par les statuts particuliers. / (...) / Le fonctionnaire détaché dans un corps ou cadre d'emplois qui est admis à poursuivre son détachement au-delà d'une période de cinq ans se voit proposer une intégration dans ce corps ou cadre d'emplois ". Aux termes de l'article 45 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat alors en vigueur : " Le détachement est la position du fonctionnaire placé hors de son corps d'origine mais continuant à bénéficier, dans ce corps, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / Il est prononcé sur la demande du fonctionnaire. / Le détachement est de courte ou de longue durée. / Il est révocable. / (...) / A l'expiration de son détachement, le fonctionnaire est, sauf intégration dans le corps ou cadre d'emplois de détachement, réintégré dans son corps d'origine. / (...) ". Aux termes de l'article 48 de cette loi : " Un décret en Conseil d'Etat détermine les cas, les conditions, les modalités et la durée du détachement, les modalités d'intégration dans le corps de détachement et de réintégration dans le corps d'origine. (...) ". Aux termes de l'article 15 du décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions : " Tout détachement de fonctionnaire est prononcé par arrêté du ministre dont il relève et, le cas échéant, du ministre auprès duquel il est détaché ". Et aux termes de l'article 24 du même décret : " Il peut être mis fin au détachement avant le terme fixé par l'arrêté le prononçant soit à la demande de l'administration ou de l'organisme d'accueil, soit de l'administration d'origine ". 4. Aux termes de l'article 42 du décret du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs certifiés : " (...) / Les fonctionnaires dont le détachement dans le corps des professeurs certifiés a été accepté peuvent être tenus de suivre une formation organisée dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 24 du présent décret. / Les fonctionnaires admis à poursuivre leur détachement au-delà d'une période de deux ans se voient proposer l'intégration dans le corps des professeurs certifiés. L'intégration peut intervenir avant cette échéance sur demande de l'intéressé et après accord de l'administration ". 5. En premier lieu, dans sa rédaction issue de la modification opérée par l'article 28 du décret du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l'évolution des attributions des commissions administratives paritaires, l'article 25 du décret du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives, en vigueur à la date de la décision du 26 août 2020 énonce : " I. Les commissions administratives paritaires connaissent : / (...) 3° Des décisions refusant le bénéfice des congés prévus aux 7° et 7° bis de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 mentionnée ci-dessus. / (...) III. -Elles sont saisies, à la demande du fonctionnaire intéressé : / 1° Des décisions individuelles mentionnées à l'article 51 de la même loi ; / (...) ". 6. Il résulte de ces dispositions, dans leur rédaction applicable à la situation de M. A..., qu'il n'appartient plus aux commissions administratives paritaires de connaître des questions d'ordre individuel résultant notamment de l'application des articles 45 et 48 de la loi du 11 janvier 1984 citées au point 3, qui concernent le détachement et l'intégration des fonctionnaires de l'Etat. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de ce que l'avis de la commission administrative paritaire aurait dû être recueilli avant l'édiction de la décision du 26 août 2020 mettant fin au détachement de M. A... dans le corps des professeurs certifiés. 7. En deuxième lieu, pour contester la légalité de l'arrêté mettant fin à son détachement initialement prévu pour une durée de deux ans, M. A... soutient que, dès lors qu'il bénéficiait d'un détachement de longue durée au sens des dispositions des articles 20 et 21 du décret précité du 16 septembre 1985, cette décision a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 27 de ce même décret aux termes desquelles : " Le fonctionnaire bénéficiant d'un détachement de longue durée est évalué dans les conditions prévues à l'article 55 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et bénéficie d'un entretien professionnel conduit par le supérieur hiérarchique direct dont il dépend dans son organisme d'accueil ". 8. Le détachement de M. A... est régi par les dispositions particulières du décret du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs certifiés qui fixent des modalités particulières d'évaluation de leur valeur professionnelle. A cet égard, en vertu de l'article 30-1 de ce décret : " Les dispositions du décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat ne sont pas applicables aux professeurs certifiés. ". Il en résulte que M. A... n'est pas fondé à se prévaloir de l'article 27 du décret du 16 septembre 1985 et de ce que la décision mettant fin à son détachement ne pouvait être prise sans qu'il bénéficie d'un entretien d'évaluation professionnel conduit par le supérieur hiérarchique direct des établissements scolaires dans lesquels il était affecté. Au demeurant, les dispositions qu'il invoque, qui concernent l'évaluation annuelle des fonctionnaires, sont sans rapport avec l'évaluation dont il a fait l'objet, qui porte sur son aptitude à poursuivre les fonctions de professeur certifié dans lesquelles il avait été détaché. Il s'agit d'une procédure distincte de l'évaluation mentionnée par l'article 55 de la loi du 11 janvier 1984 auquel renvoie l'article 27 du décret du 16 septembre 1985. 9. Par ailleurs, M. A... conteste la régularité de l'évaluation de ses compétences professionnelles menée selon les modalités fixées par la note de service n° 2019-169 du 27 novembre 2019 relative au détachement de fonctionnaires de catégorie A dans les corps des personnels enseignants des premier et second degrés, des personnels d'éducation et des psychologues de l'éducation nationale relevant du ministère chargé de l'éducation nationale. Mais il revient au ministre de l'éducation nationale, dans l'exercice de ses prérogatives d'organisation des services placés sous son autorité, d'établir, dans le respect des règles fixées par les articles 45 et 48 de la loi du 11 janvier 1984 et le décret du 4 juillet 1972, la réglementation applicable au détachement dans le corps des professeurs certifiés. La note du 27 novembre 2019, qui a été publiée au bulletin officiel de l'éducation nationale n° 45 du 5 décembre 2019, fixe les règles et procédures applicables à l'accueil en détachement dans les corps des personnels enseignants des premier et second degrés et les conditions du maintien du fonctionnaire en détachement et de son éventuel renouvellement ou intégration. Son point 2.3 prévoit qu'" à l'issue de la première année scolaire, un avis de l'IA-Dasen ou du recteur d'académie est recueilli sur le maintien en détachement de l'agent la deuxième année et qu'en cas d'avis défavorable, il est mis fin au détachement ". Son point 2.4 prévoit que le recteur se prononce sur le renouvellement du détachement, l'intégration dans le corps d'accueil ou la fin du détachement en se fondant sur l'avis et le rapport du corps d'inspection compétent selon le corps et la discipline d'accueil (IEN ou IA-IPR). Par suite, c'est à bon droit que le tribunal a retenu que les modalités fixées par la note du 27 novembre 2019 régulièrement publiée et qui n'excède pas les pouvoirs de gestion confiés au ministre de l'éducation nationale, étaient opposables à la situation de M. A... et avaient pu légalement permettre au recteur de l'académie d'Amiens de proposer le non-renouvellement de son détachement dans le corps des professeurs certifiés, en s'appuyant sur le rapport de l'inspecteur compétent dans son corps et sa discipline d'accueil. 10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) / 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; / (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". 11. La décision attaquée vise les lois du 13 juillet 1983 et du 11 janvier 1984 ainsi que les décrets du 4 juillet 1972 et du 16 septembre 1985. En outre, après avoir visé l'avis défavorable de l'inspecteur d'académie puis celui du recteur, elle fait état des insuffisances pédagogiques et didactiques constatées par le corps d'inspection malgré l'accompagnement dont M. A... a bénéficié et de son manque d'implication dans l'exercice de ses fonctions et dans le suivi de sa formation. Ces mentions permettent à M. A... de connaître les motifs de droit et de fait qui fondent la décision de mettre fin à son détachement initialement prévu pour une durée de deux ans. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ne peut qu'être écarté. 12. En quatrième lieu, M. A... soutient que la décision attaquée, qui se fonde principalement sur les constatations erronées du rapport de l'inspecteur académique régional de sciences de la vie et de la terre, est entachée d'erreur de fait, d'erreur de qualification juridique des faits et d'erreur manifeste appréciation. 13. M. A... se prévaut d'abord de ce que l'inspecteur d'académie ne l'a jamais personnellement rencontré, ni jamais assisté à l'un de ses cours et qu'il s'est appuyé sur des témoignages indirects. Toutefois, il ne résulte d'aucun texte législatif ou réglementaire, et pas davantage de la note de service citée plus haut, que l'inspecteur pédagogique régional soit tenu d'effectuer une visite sur place avant d'émettre son avis, ni qu'il ne pourrait le formuler au vu d'appréciations rapportées par d'autres inspecteurs ou par les équipes de direction ou les enseignants exerçant des fonctions de formateur ou de tuteur du fonctionnaire détaché. Au demeurant, il est constant que compte tenu de la crise sanitaire liée au Covid 19, à compter de la mi-mars 2020 les cours ont été dispensés en visio-conférence et que M. A... n'a, par la suite, pas repris ses fonctions en présentiel. 14. M. A... fait valoir ensuite que l'inspecteur n'a pas porté son appréciation sur l'ensemble de l'année scolaire 2019-2020 mais sur une partie seulement de son activité. Il est constant que, durant son détachement, M. A... s'est vu confier l'enseignement des sciences de la vie et de la terre (SVT) dans une classe de 5ème d'un collège d'Ailly-sur-Noye et, dans cette même discipline, dans une classe de 6ème d'un collège d'Amiens. Cette double affectation n'a pas été ignorée par l'inspecteur dès lors que son rapport l'indique expressément, en précisant qu'il s'agit d'un temps partiel et qu'il effectue six heures dans le premier collège et trois heures dans le second. Si, dans ce même rapport, l'inspecteur mentionne plus loin que M. A... a " en charge l'ensemble du niveau 5ème et que ce niveau, première année du cycle 4, est pédagogiquement le moins complexe du collège ", l'ensemble des autres considérations contenues ensuite dans son avis, notamment s'agissant des cahiers des élèves, des tâches et des activités pratiques réalisées ou encore des appréciations portées sur les bulletins des élèves, ne permettent pas d'affirmer qu'il n'aurait pas tenu compte des heures d'activité d'enseignement dans la classe de 6ème du collège. Il n'apparaît pas davantage que l'inspecteur aurait exclusivement porté son appréciation sur les deux premiers trimestres de l'année scolaire. 15. Pour contester la décision qui se fonde sur le motif de ses insuffisances pédagogiques et didactiques, M. A... réitère l'invocation du caractère partiel de l'évaluation portée par l'inspecteur académique qui s'appuie notamment sur le rapport établi à la suite de l'unique visite d'inspection effectuée le 11 octobre 2019 par une autre inspectrice, un mois seulement après sa prise de fonctions au collège d'Ailly-sur-Noye. S'il ressort du rapport établi par cette dernière, que l'inspecteur a partiellement repris des éléments relevés par sa collègue, en ce qui concerne l'insuffisante autonomie laissée par M. A... à ses élèves dans l'acquisition des savoirs et le développement du raisonnement et sa tendance à leur confier trop peu de tâches complexes, ces reproches ont également pu être mis en évidence par la consultation des cahiers des élèves et des cahiers de textes. Par ailleurs, des lacunes ont pu être relevées en ce qui concerne ses méthodes d'évaluation des élèves. Si, pour remettre en cause ces appréciations, M. A... a produit des passages favorables du rapport de l'inspectrice ainsi que les témoignages de son ancienne tutrice pour le passage de son CAPES de SVT, d'un collègue du collège d'Amiens et enfin celui d'une accompagnante d'élèves en situation de handicap, tous ne font qu'évoquer sa bonne intégration dans l'équipe pédagogique et son écoute bienveillante des élèves. Par ailleurs, aucun élément tangible n'est apporté par M. A... au soutien de son affirmation selon laquelle il aurait été confronté à des conseils diamétralement opposés de la part de sa tutrice au collège d'Ailly-sur-Noye et de l'inspectrice quant à l'autonomie devant être laissée aux élèves dans l'acquisition des savoirs et du développement du raisonnement. M. A... ne contredit pas utilement le constat dressé dans le rapport sur ses insuffisances en ce qui concerne l'évaluation des acquis des élèves. En outre, la circonstance que l'inspecteur a reconnu que M. A... avait assuré la continuité pédagogique en poursuivant le programme prévu durant la période de confinement n'est pas de nature à invalider son appréciation en ce qui concerne l'écart constaté entre la pratique de son enseignement et les qualités de pédagogue attendues d'un professeur certifié. De même si M. A... fait valoir qu'il n'a pas bénéficié d'un accompagnement adapté dans la mesure où sa tutrice aurait rapidement cessé de répondre à ses sollicitations et que ses tuteurs ne prenaient aucune initiative, ni le temps de lui expliquer ses fonctions, il ne fonde ses allégations sur aucun élément probant. Enfin, en sa qualité de professeur des écoles titulaire, il ne saurait se prévaloir de ce que la plupart des reproches n'entrent pas dans le tableau d'évaluation relatif au référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l'éducation qui concerne les candidats à la titularisation. Dans ces conditions, le ministre chargé de l'éducation nationale n'a pas procédé à une qualification erronée des faits ni commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant insuffisantes ses capacités pédagogiques et didactiques. 16. Pour mettre fin au détachement de M. A..., la décision du 26 août 2020 du ministre de l'éducation nationale se fonde sur un second motif, tiré de son manque d'implication dans l'exercice de ses fonctions et dans le suivi de sa formation. A cet égard, si dans son rapport l'inspecteur a pu écrire que " M. A... n'a que très peu participé à la vie de l'établissement, peu communicatif il ne s'est pas intégré à l'équipe pédagogique ", cette affirmation, qui ne s'appuie sur aucun élément concret, est contredite par les attestations de deux professeurs du collège d'Ailly-sur-Noye et celle d'une assistante de vie scolaire, qui ne sont pas utilement remises en cause par le ministre en défense. Pour autant, il est également reproché à M. A... de n'avoir assisté qu'à la moitié des conseils de ses classes et si l'intéressé fait valoir qu'il a été absent uniquement lors de la première session de conseils de classe en raison d'une opération chirurgicale qu'il venait de subir, il ne justifie pas ses absences aux autres conseils auxquels il devait assister. Enfin, s'agissant de ses obligations de formation, il est constant qu'en sa qualité de professeur des écoles titulaire d'un master MEEF SVT, M. A... disposait d'un programme réduit à vingt-sept heures de formation consistant en des ateliers d'analyse des pratiques professionnelles dispensés à l'Institut national du professorat et de l'éducation (INSPE). Or, l'inspecteur a constaté dans son rapport que M. A... n'a assisté qu'à deux séances à l'INSPE et à un entretien bilan, soit neuf heures sur les vingt-sept heures programmées. S'il ressort des pièces du dossier que ce n'est que par un courrier du 23 septembre 2019, que le rectorat d'Amiens l'a informé officiellement de la consistance et du calendrier de son plan de formation adapté, pouvant ainsi expliquer son absence aux premiers ateliers, M. A... ne justifie pas pour autant son manque d'assiduité à la plupart des autres ateliers. Par ailleurs, alors que sa formation comprenait également des séances de travail collaboratif avec sa " professeure tutrice " au collège d'Ailly-sur-Noye, et que, selon l'inspecteur académique, la visite formative réalisée par l'inspectrice le 11 octobre 2019 révélait la nécessité de suivre cette formation compte tenu des points de difficultés relevés, M. A... ne conteste pas avoir uniquement suivi trois de ses séances au cours des deux premiers trimestres. Si les problèmes de santé rencontrés par M. A... pourraient expliquer son absence à certaines de ces formations ou séances, il n'en justifie pas. Par conséquent, c'est sans commettre d'erreur de fait, ni erreur manifeste d'appréciation, que le ministre chargé de l'éducation nationale a également fondé sa décision sur le manque d'implication dans sa formation et ses fonctions. 17. En cinquième lieu, la circonstance que, par un courrier adressé dès le 13 janvier 2020, le rectorat d'Amiens a demandé à M. A... de lui faire connaître, avant le 7 février, son souhait de demander le renouvellement de son détachement ou son intégration dans le corps des professeurs certifiés à compter du 1er septembre 2020, ne saurait être regardée comme révélant une manœuvre visant à le forcer à écourter son détachement ou à favoriser les conditions de son non-renouvellement. De même, la circonstance, au demeurant non établie, que l'inspecteur d'académie aurait sciemment omis de tenir compte de son activité ne saurait être regardée comme visant à écourter son détachement. Le moyen tiré du détournement de pouvoir et de procédure ne peut dès lors qu'être écarté. 18. En dernier lieu, M. A... soutient avoir fait l'objet d'une discrimination en raison de son état de santé, en se prévalant des propos contenus dans le rapport de l'inspecteur d'académie lui reprochant de n'être pas revenu en classe en présentiel après la période de confinement, de n'avoir assisté qu'à la moitié des conseils de classe alors qu'il n'avait à effectuer qu'un demi-service et de n'avoir assisté qu'à trois séances de formation au cours des deux premiers trimestres. Ces éléments de fait avancés par M. A... ne permettent pas de faire présumer que dans le cadre de l'appréciation de ses compétences et aptitudes professionnelles, il aurait été victime, à raison de son état de santé, de mesures discriminatoires telles que celles prohibées par les dispositions précitées de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983. C'est donc à bon droit que le tribunal a également écarté ce moyen. En ce qui concerne la légalité de la décision du 15 septembre 2020 : 19. Il est toujours loisible à la personne intéressée, sauf à ce que des dispositions spéciales en disposent autrement, de former à l'encontre d'une décision administrative un recours gracieux devant l'auteur de cet acte et de ne former un recours contentieux que lorsque le recours gracieux a été rejeté. L'exercice du recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative. S'il appartient au juge administratif, saisi d'un recours contre ces deux décisions, d'annuler, le cas échéant, celle rendue sur recours gracieux par voie de conséquence de l'annulation de la décision initiale, des moyens critiquant les vices propres dont serait entachée la décision de rejet du recours gracieux ne peuvent être utilement invoqués au soutien des conclusions dirigées contre cette décision. Par suite, les moyens que soulève M. A..., dirigés contre la décision du 15 septembre 2020 par laquelle le ministre en charge de l'éducation nationale a rejeté son recours gracieux formé contre la décision du 26 août 2020, doivent être écartés comme inopérants. 20. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 août 2020 par lequel le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a mis fin à son détachement dans le corps des professeurs certifiés en sciences de la vie et de la terre, ensemble la décision du 15 septembre 2020 rejetant son recours gracieux. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction. Sur les frais liés au litige : 21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. A..., au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Délibéré après l'audience publique du 7 mars 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - M. Frédéric Malfoy, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le rapporteur, Signé : F. Malfoy La présidente de chambre, Signé : G. BorotLa greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, C. Huls-Carlier N° 22DA01140 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) France Container Trading a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2013, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 et des amendes qui lui ont été infligées au titre des années 2013, 2014 et 2015 sur le fondement du 4 de l'article 1788 A du code général des impôts. Par un jugement n° 1902414 du 26 mars 2021, le tribunal administratif de Versailles a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance en matière de taxe sur la valeur ajoutée, déchargé partiellement la SARL France Container Trading des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2013, et rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 28 mai et 4 juin 2021, la SARL France Container Trading, représentée par Me Devillières, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement attaqué ; 2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige. Elle soutient que : - le tribunal n'a pas donné les raisons pour lesquelles elle ne pouvait bénéficier d'une modulation des amendes pour non-déclaration des acquisitions intra-communautaires qui lui ont été infligées ; - le rappel de taxe relatif aux prestations de services de la société de droit allemand Magellan n'est pas fondé dès lors que cette société est assujettie en Allemagne ; - les documents produits établissent la sortie du territoire métropolitain des biens vendus à la société WCT et le caractère intra-communautaire de ses livraisons aux sociétés Transcovi, Global Supply Chain, Damco et Fiona Ridley Jones ; les deux conteneurs vendus à la société CHS, société de droit allemand et revendus à une autre société allemande en vue d'être installés sur un navire étaient nécessairement destinés à sortir du territoire ; la TVA ne pouvait dès lors être due en France ; - le tribunal a commis une erreur sur le montant de la TVA dont il a admis la décharge du chef de la facture de 7 825 euros adressée à la société SCI Houet ; - le tribunal ayant admis que la déduction de la provision de 88 753,14 euros constituée en 2009 était bien justifiée à la clôture de l'exercice 2013, elle est fondée à demander la décharge complémentaire de l'impôt sur les sociétés en résultant au titre des exercices 2014 et 2015 ; - les amendes doivent être modulées à la baisse eu égard à sa bonne foi et à l'absence de préjudice subi par le Trésor. Par un mémoire en défense enregistré le 15 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement de 5 724 euros prononcé en cours d'instance en matière de TVA au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2013 et au rejet du surplus de la requête de la SARL France Container Trading. Le ministre fait valoir que le rappel de TVA est abandonné en ce qui concerne la facture de la société Magellan et que le surplus des moyens de la requête n'est pas fondé. Par une ordonnance du 14 décembre 2022, l'instruction a été close au 16 janvier 2023, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. La société à responsabilité limitée (SARL) France Container Trading, qui exerce une activité de location et de transformation de conteneurs pour les professionnels et les particuliers, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur ses opérations et déclarations au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, à l'issue de laquelle lui ont été notifiés des suppléments d'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), et des pénalités pour non-déclaration des acquisitions intra-communautaires, au motif qu'elle n'avait pas justifié de l'intégralité de ses livraisons intra-communautaires et exportations, ainsi que de provisions pour dépréciation de créances douteuses. Des dégrèvements sont intervenus en cours de procédure. La SARL France Container Trading relève appel du jugement du 26 mars 2021 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il n'a pas intégralement fait droit à sa demande de décharge. Sur l'étendue du litige : 2. En premier lieu, l'administration fiscale ayant prononcé le dégrèvement, par un avis du 25 mai 2021 antérieur à la requête d'appel, de la totalité de l'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société requérante au titre de la période 2013-2015 pour un montant de 18 488 euros en principal et 1 542 euros en pénalités, celle-ci s'est, par son mémoire enregistré le 4 juin 2021, désistée de sa demande de décharge relative à l'impôt sur les sociétés. Il y a lieu de lui en donner acte. 3. En second lieu, par un avis de dégrèvement du 15 octobre 2021, postérieur à l'introduction de la requête d'appel, l'administration fiscale a prononcé un dégrèvement partiel de TVA, d'un montant de 5 724 euros, au titre de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2013, relatif à des prestations de services de la société de droit allemand Magellan Maritime Services GmbH. Les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer. Sur la régularité du jugement attaqué : 4. A supposer soulevé le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué en ce qui concerne la demande de décharge des amendes pour non déclaration des acquisitions intracommunautaires, les premiers juges ayant exposé les motifs pour lesquels il ne leur appartenait pas de moduler ces amendes, le moyen doit être écarté comme manquant en fait. Sur le bien-fondé des rappels de TVA restant en litige : 5. En premier lieu, aux termes de l'article 258 du code général des impôts : " I. Le lieu de livraison de biens meubles corporels est réputé se situer en France lorsque le bien se trouve en France : (...) c. lors de la mise à disposition de l'acquéreur en l'absence d'expédition ou de transport (...) ". Aux termes de l'article 262 du code général des impôts : " I. - Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : / 1° les livraisons de biens expédiés ou transportés par le vendeur ou pour son compte, en dehors de la Communauté européenne ainsi que les prestations de services directement liées à l'exportation ; (...) ". Aux termes de l'article 262 ter du même code : " I. - Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : / 1° Les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie. (...) ". 6. Il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention de l'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération. S'agissant de la réalité de la livraison d'une marchandise sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, pour l'application des dispositions précitées de l'article 262 ter du code général des impôts, seul le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est en mesure de produire les documents relatifs au transport de la marchandise, lorsqu'il l'a lui-même assuré, ou tout document de nature à justifier la livraison effective de la marchandise, lorsque le transport a été assuré par l'acquéreur. 7. Pour justifier de sa livraison à la société Transcovi, société établie à La Réunion, qui ne fait pas partie du territoire fiscal de l'Union européenne, la société requérante produit la facture, un échange de courriers et un document douanier. Si la déclaration de douane est signée du déclarant Réunion Transit, elle n'est pas visée par les douanes. Dans ces conditions, les documents produits ne sont pas de nature à établir le caractère effectif de la livraison en cause. S'agissant des ventes aux sociétés établies en Allemagne (WCT), au Portugal (Damco), en Irlande (JCB Global Supply Chain), la société requérante se borne à soutenir que la nature même des biens vendus, à savoir des conteneurs destinés au transport international, implique nécessairement une sortie du territoire français. Ce faisant, elle n'établit pas la réalité de l'expédition ou du transport des biens hors de France, alors que le ministre relève sans être contredit, concernant le client allemand WCT, que selon les clauses de livraison figurant au bas de la facture, la marchandise devait être acheminée au Havre, concernant la société portugaise Damco, que selon la facture produite devant le tribunal, le bien devait être livré au port de Brest, concernant le client Fiona Ridley-Jones, que la facture ne mentionne aucun numéro de TVA intracommunautaire et le lieu de livraison situé en France, et concernant le client JCB Global Supply Chain, que le bien devait être livré au " Port autonome de Strasbourg ". Enfin, la société requérante ne fournit aucun justificatif de la sortie du territoire des biens vendus au client WTC, alors que la facture mentionne expressément que la livraison doit avoir lieu à Fos-sur-Mer. Il en résulte que les conditions de l'exonération revendiquée ne peuvent être regardées comme établies. 8. En second lieu, la société requérante soutient que le tribunal a commis une erreur sur le montant de la TVA dont elle l'a déchargée à raison d'une facture de 7 825 euros adressée à la société SCI Houet. Toutefois, il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 5 décembre 2016, que ladite facture n'a été enregistrée en comptabilité qu'à hauteur de 988,65 euros et que le montant du rappel de TVA a été calculé sur cette base. Il s'ensuit que seule la décharge d'un rappel de TVA de 162,02 euros est justifiée et que la SARL France Container Trading n'est pas fondée à demander un complément de décharge à ce titre. Sur les pénalités : 9. Aux termes du premier alinéa du 4 de l'article 1788 A du code général des impôts : " Lorsqu'au titre d'une opération donnée le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est autorisé à la déduire, le défaut de mention de la taxe exigible sur la déclaration prévue au 1 de l'article 287, qui doit être déposée au titre de la période concernée, entraîne l'application d'une amende égale à 5 % de la somme déductible. ". 10. Le juge de l'impôt, saisi de conclusions dirigées contre des amendes appliquées sur le fondement de ces dispositions exerce un plein contrôle sur les faits et la qualification retenue par l'administration et décide, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir l'amende effectivement encourue pour son montant prévu par la loi, soit d'en prononcer la décharge et de ne laisser à la charge du contribuable que les intérêts de retard, sans pouvoir moduler celui-ci pour tenir compte de la gravité de la faute commise par le contribuable. 11. En l'espèce, la société requérante ne conteste pas la réalité des manquements à raison desquels lui a été infligée l'amende prévue au 4 de l'article 1788 A du code général des impôts. Pour l'appréciation du bien-fondé de cette sanction, il n'appartient pas au juge de l'impôt de tenir compte de la bonne foi du redevable. En outre, en l'espèce, les acquisitions intracommunautaires de la SARL France Container Trading, pour des montants de 1 769 817 euros en 2013, 692 431 euros en 2014 et 915 229 euros en 2015, n'ont été portées sur ses déclarations mensuelles de TVA qu'à hauteur de 316 007 euros en 2013, 228 399 euros en 2014 et 422 696 euros en 2015. Dans ces conditions, les amendes prononcées par l'administration fiscale ne présentent, en tout état de cause, pas un caractère disproportionné. 12. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL France Container Trading n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté le surplus de sa demande. DECIDE : Article 1er : Il est donné acte à la SARL France Container Trading du désistement de ses conclusions à fin de décharge de cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés. Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête à hauteur du dégrèvement de 5 724 euros de droits de TVA et 550 euros de pénalités prononcé en cours d'instance. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL France Container Trading est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL France Container Trading et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente assesseure, Mme Pham, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 mars 2023. La rapporteure, O. A... Le président, P. BEAUJARDLa greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21VE01538
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) PAJA a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des exercices clos au cours des années 2011 et 2012 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012. Par un jugement n° 1606308 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a déchargé la SARL PAJA des rappels de TVA à hauteur d'une augmentation du montant de la TVA déductible au titre de la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 jusqu'à la somme de 4 477,53 euros et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 16 avril 2021, la SARL PAJA, représentée par Me Harroch, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge des impositions en litige. Elle soutient que : c'est à tort qu'elle a fait l'objet d'une taxation d'office, les correspondances de l'administration fiscale ayant été envoyées à Mme B..., l'épouse du gérant, M. B..., malgré un jugement de divorce ; - que c'est à tort que l'administration fiscale a retenu un pourcentage de charges correspondant à des considérations de réalisme économique, alors que la prise en compte des charges dont il justifie conduit à la décharge des impositions litigieuses, tant s'agissant de l'impôt sur les sociétés que de la taxe sur la valeur ajoutée. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 août 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - s'agissant de l'impôt sur les sociétés, la prise en compte de l'intégralité des factures présentées ne conduirait pas à un taux de charges supérieur à celui retenu par l'administration fiscale, alors que de nombreuses factures présentées ne peuvent être retenues en charges ; - s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, il n'y a pas lieu de déduire la TVA figurant sur les factures qui n'ont pas été admises en déduction dans le cadre du jugement de première instance. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. La SARL PAJA, qui exerce une activité de travaux de maçonnerie générale et gros œuvre de bâtiment, s'est vue notifier plusieurs avis de vérification de comptabilité par l'administration fiscale à plusieurs adresses différentes. L'administration fiscale a dressé un procès-verbal d'opposition à contrôle fiscal le 17 juin 2014 et a procédé, en application des dispositions de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, à l'évaluation d'office des bases imposables à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos au cours des années 2011 et 2012 à partir des déclarations fiscales de la société, rapprochées des éléments obtenus par l'exercice du droit de communication. Par une proposition de rectification du 31 octobre 2014, l'administration fiscale a proposé de mettre à la charge de la SARL PAJA un rappel de TVA au titre de la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2011 et 2012, des intérêts de retard, la majoration de 10 % pour défaut ou retard de déclaration ainsi qu'une majoration de 100 % pour opposition à contrôle fiscal sur le fondement de l'article 1732 du code général des impôts. Par un jugement n° 1606308 du 15 avril 2021, dont la SARL PAJA relève appel, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a réduit les rappels de TVA mis à sa charge et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de cette société tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions supplémentaires. Sur la régularité de la procédure d'imposition : 2. Aux termes de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers ". 3. Par adoption des motifs retenus par les premiers juges, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que, n'ayant pas reçu les différents plis envoyés par l'administration fiscale du fait d'un jugement de divorce, la SARL PAJA ne pouvait pas légalement se voir appliquer les dispositions précitées. Sur le bien-fondé des impositions : En ce qui concerne la charge de la preuve : 4. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". 5. Les bases d'imposition de la SARL PAJA ayant été régulièrement évaluées d'office, ainsi qu'il a été dit au point 3, la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions en litige lui incombe. En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés : 6. La SARL PAJA se borne à produire 144 factures et à revendiquer des montants de charges déductibles de 452 887 euros au titre de l'année 2011 et de 552 225 euros au titre de l'année 2012. Toutefois, il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté que le montant total des charges déductibles figurant sur les factures se rapportant à l'exercice clos au cours des années 2011 et 2012 n'excède pas les sommes de 257 360 euros et 395 816 euros hors taxes, respectivement. Dans ces conditions, en produisant ces factures, la SARL PAJA n'établit pas, comme elle en a la charge, qu'en fixant forfaitairement le montant de ses charges déductibles au titre de ces deux exercices à des montants de 370 696 euros et 581 952 euros hors taxes respectivement, l'administration fiscale aurait surévalué ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés pour les exercices en litige. 7. S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, la SARL PAJA se borne à produire les mêmes factures et à revendiquer la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui y figure, sans distinguer celles qui ont été admises en déduction par les premiers juges et sans contester les motifs de rejet de ces factures présentées, facture par facture, par l'administration fiscale. Dans ces conditions, la SARL PAJA, en produisant ces factures, n'établit pas, comme elle en a la charge, qu'en n'admettant en déduction que la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur les factures admises par les premiers juges, l'administration fiscale aurait surévalué le montant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle lui a réclamé. 8. Il résulte de ce qui précède que la SARL PAJA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté le surplus de sa demande. Sa requête doit par suite être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la SARL PAJA est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL PAJA et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président, Mme Dorion, présidente assesseure, M. Tar, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. Le rapporteur, G. A... Le président, P. BEAUJARDLa greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 21VE01129
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... D..., veuve C..., a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 mai 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ". Par un jugement n° 1806416 du 28 mai 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 20VE01214 du 21 juillet 2021, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et cet arrêté, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à Mme D... un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de trois mois à compter de la notification de cet arrêt, a assorti cette injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure d'exécution devant la cour : Le greffe de la Cour a, par une mesure d'instruction diligentée le 18 janvier 2023, demandé au préfet de la Seine-Saint-Denis de produire, dans un délai de 15 jours à compter de la réception de cette lettre, tous éléments justifiant de l'exécution de l'arrêt du 21 juillet 2021. Par deux courriers, enregistrés les 19 janvier et 13 février 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis affirme avoir délivré à Mme D..., veuve C..., un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " le 7 février 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Frémont, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. (...) ". Aux termes de l'article L. 911-8 du même code : " La juridiction peut décider qu'une part de l'astreinte ne sera pas versée au requérant. / Cette part est affectée au budget de l'Etat. ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 751-4-1 du même code : " Par dérogation aux articles R. 751-2, R. 751-3 et R. 751-4, la décision peut être notifiée par le moyen de l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1 aux parties qui sont inscrites dans cette application ou du téléservice mentionné à l'article R. 414-2 aux parties qui en ont accepté l'usage pour l'instance considérée. / Ces parties sont réputées avoir reçu la notification à la date de première consultation de la décision, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition de la décision dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties sont alertées de la notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par elles ". 2. La Cour a, par un arrêt n° 20VE01214 du 21 juillet 2021, dont le dispositif et les motifs qui en constituent le soutien nécessaire sont revêtus de l'autorité absolue de la chose jugée en l'absence d'introduction d'un pourvoi en cassation, annulé l'arrêté du 14 mai 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de délivrer à Mme D..., veuve C..., un certificat de résidence, au motif que l'autorité préfectorale avait porté une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale que l'intéressée tient des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle a également, par ce même arrêt, prononcé une astreinte à l'encontre de l'Etat si le préfet ne justifie pas avoir délivré un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de trois mois suivant sa notification. Le taux de cette astreinte a été fixé à 100 euros par jour de retard. 3. Il résulte de l'instruction que l'arrêt n° 20VE01214 précité a été régulièrement notifié au moyen de l'application Télérecours au préfet de la Seine-Saint-Denis le 23 juillet 2021. En outre, le préfet n'a pas consulté cet arrêt dans les deux jours ouvrés qui ont suivi la date de sa mise à disposition. Le samedi 24 et le dimanche 25 juillet 2021 n'étant pas des jours ouvrés, le préfet est donc réputé avoir reçu la notification de l'arrêt le 27 juillet 2021. Dans ces conditions, le délai d'exécution de trois mois accordé par la Cour au préfet de la Seine-Saint-Denis pour délivrer à Mme D... un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " a pris fin le 27 octobre 2021. Par ailleurs, il résulte également de l'instruction que le préfet a délivré un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " à Mme D... le 7 février 2023. Dès lors, il y a lieu de liquider définitivement l'astreinte de 100 euros par jour de retard prononcée par la Cour en la fixant pour la période allant du 27 octobre 2021 au 7 février 2023, soit 468 jours, à la somme totale de 46 800 euros. En application des dispositions précitées de l'article L. 911-8 du code de justice administrative, il y a lieu de condamner l'Etat à verser la somme de 25 000 euros à Mme D..., veuve C... et le solde, soit 21 800 euros au budget de l'Etat (ministère chargé du budget). DÉCIDE : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à Mme D..., veuve C..., la somme de 25 000 euros au titre de la liquidation définitive de l'astreinte prononcée par l'arrêt n° 20VE01214 du 21 juillet 2021, pour la période allant du 27 octobre 2021 au 7 février 2023. Article 2 : Le solde, soit 21 800 euros, sera versé au budget de l'Etat (ministre chargé du budget). Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., veuve C..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au ministère public près la Cour des comptes. Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Even, président de chambre, Mme Bonfils, première conseillère, Mme Houllier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. Le président-rapporteur, B. A... L'assesseure la plus ancienne, M-G. BONFILS La greffière, C. RICHARD La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 20VE01214
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1712246 du 16 février 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a réduit leurs bases d'imposition au titre de l'année 2008 de 35 000 euros, les a déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à leur charge au titre de l'année 2008, ainsi que des pénalités correspondantes, à hauteur de cette réduction des bases d'imposition et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande aux fins de décharge. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 16 avril 2021, M. et Mme C..., représentés par Me Naïm, avocat, demandent à la cour : 1°) de réformer le jugement attaqué en tant qu'il ne fait pas intégralement droit à leur demande ; 2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009 et qui n'ont pas été déchargés par les premiers juges, ainsi que les pénalités ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'ils avaient gardé les originaux des relevés bancaires et que de ce fait, la circonstance que ces relevés ne leur aient pas été restitués ne devait pas conduire à la décharge des impositions fondées sur les sommes portées au crédit de ces relevés bancaires ; - c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la présomption de prêts familiaux ne devait pas s'appliquer aux sommes qui leur ont été versées par M. E... C... ; Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête de M. et Mme C..., et, par la voie de l'appel incident, demande la réforme du jugement attaqué en ce qu'il a déchargé les requérants des cotisations supplémentaires mises à leur charge au titre de l'année 2008 à hauteur d'une réduction de bases d'imposition de 35 000 euros et de les rétablir au rôle supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à hauteur de cette décharge. Il fait valoir que : s'agissant des cotisations maintenues à la charge des requérants : - d'une part, l'absence de restitution des relevés bancaires est sans incidence, dès lors que les requérants étaient nécessairement en possession des originaux et que leur absence de restitution ne les a privés d'aucune garantie ; - d'autre part, compte tenu des relations d'affaires entre M. B... C... et M. E... C..., la présomption de prêts familiaux ne peut s'appliquer aux sommes versées par M. E... C... aux requérants. S'agissant des cotisations déchargées par les premiers juges : - les chèques dont il s'agit qui n'ont pas été restitués ne présentaient pas d'utilité pour les requérants en vue de la préparation de leur réponse, tandis qu'au vu de la relation d'affaires entre M. B... C... et M. F..., il n'y a pas lieu de faire application de la présomption de prêt familial. Un mémoire présenté pour M. et Mme C... a été enregistré le 3 mars 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique, Considérant ce qui suit : 1. A la suite de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et Mme C... au titre des années 2007, 2008 et 2009, l'administration fiscale a procédé, en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, à leur taxation d'office, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, pour le montant de diverses sommes portées au crédit de leurs comptes bancaires et demeurées injustifiées. Par le jugement attaqué du 16 février 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a déchargé partiellement M. et Mme C... de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et a rejeté le surplus de leur demande. M. et Mme C... font appel de ce jugement en ce qu'il a validé les impositions qui étaient sans rapport avec les deux chèques établis par M. F..., oncle de M. C..., encaissés les 6 et 11 octobre 2008. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance forme appel incident du jugement, en ce qu'il a réduit le montant des revenus d'origine indéterminée des sommes pouvant correspondre aux montants de ces deux chèques. Sur l'appel principal de M. et Mme C... : En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition : 2. Aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. (...) ". Selon l'article 16 A du même livre : " (...) Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite ". Enfin, l'article L. 69 du livre des procédures fiscales dispose que : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. ". 3. L'administration fiscale demeure en droit, après avoir procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable, de lui demander, au vu des renseignements qu'elle a obtenus à la suite de cet examen, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, des justifications relatives à ses revenus d'origine indéterminée et, en cas de réponse insuffisante de l'intéressé, de recourir à la procédure de taxation d'office en application des dispositions de l'article L. 69 du même livre. Toutefois, le contribuable ne peut être en mesure de formuler utilement ses observations que si l'administration a, préalablement à la notification de la proposition de rectification, restitué à l'intéressé les documents utiles pour répondre à la demande de justifications, que celui-ci lui a remis à l'occasion de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle. Par ailleurs, la portée d'un défaut de restitution de documents et pièces saisis auprès de tiers dépend des effets concrets que celui-ci a pu avoir sur les droits de la défense et sur le caractère contradictoire de la procédure. De ce fait, dès lors que l'intéressé n'a, en dépit du défaut de restitution des documents et pièces saisis auprès de tiers, pas été privé de la possibilité d'accéder à ceux-ci ni de s'assurer que ceux utilisés par l'administration étaient identiques à ceux dont il a pu disposer, et qu'ainsi la possibilité de contester les redressements opérés n'a pas été affectée par le défaut de restitution des documents et pièces, ce dernier ne saurait à elle seule et par elle-même entraîner la décharge des impositions contestées. Dans pareil cas, l'omission de restitution de documents originaux n'est pas de nature à priver l'intéressé d'une garantie résultant du caractère contradictoire de la procédure d'imposition. 4. Il est constant que, par des courriers du 5 avril 2011 et des 27 et 30 mai 2011, établis en réponse à la demande d'éclaircissements ou de justifications du 7 février 2011 et à la mise en demeure du 22 avril 2011, M. et Mme C... ont transmis à l'administration fiscale des documents qui ne leur ont pas été restitués avant l'envoi de la proposition de rectification du 15 juin 2011. M. et Mme C... soutiennent que les relevés bancaires qui ne leur ont pas été restitués avaient le caractère de documents utiles pour faire valoir leurs droits au vu des rectifications portant sur la réintégration à leur revenu imposable de revenus d'origine indéterminée correspondant à des crédits figurant sur ces relevés bancaires. Toutefois, M. et Mme C... n'établissent pas qu'ils auraient remis à l'administration fiscale des originaux de ces relevés bancaires, alors qu'ils reconnaissent que certains documents remis étaient des copies. En outre, M. et Mme C... n'expliquent pas pourquoi ils se seraient trouvés dans l'impossibilité de faire valoir leurs droits en obtenant de nouvelles copies de ces relevés bancaires auprès de leurs établissements bancaires. Ils ne peuvent dès lors pas être regardés comme ayant été privés de la possibilité d'accéder aux documents dont il s'agit, alors qu'il n'y avait pas de doute sur le fait que les relevés bancaires utilisés par l'administration seraient identiques à ceux dont ils auraient pu obtenir à nouveau copie auprès de leurs établissements bancaires. Dans ces conditions, l'omission de restitution de ces relevés bancaires n'a pas privé M. et Mme C... d'une garantie résultant du caractère contradictoire de la procédure d'imposition et ceux-ci ne sont pas fondés à soutenir qu'ils doivent être déchargés des rectifications correspondant aux crédits figurant sur ces relevés bancaires du fait de leur non-restitution. En ce qui concerne le bien-fondé des impositions : 5. Il appartient à l'administration fiscale, lorsqu'elle entend remettre en cause, même par voie d'imposition d'office, le caractère non imposable de sommes perçues par un contribuable, d'établir que les sommes en cause ne revêtent pas le caractère d'un prêt familial mais celui de revenus professionnels, à moins que l'administration démontre l'existence d'une relation d'affaires entre les bénéficiaires et l'auteur des versements. 6. Par adoption des motifs retenus par les premiers juges, il y a lieu de considérer que l'administration fiscale démontre l'existence d'une relation d'affaires entre M. B... C... et son père, M. E... C... et que M. et Mme B... C... ne peuvent ainsi se prévaloir de la présomption de prêt familial dont ils se prévalent pour justifier les sommes de 30 000, 10 000 et 45 000 euros virés sur leurs comptes bancaires par M. E... C... les 25 janvier, 11 mars et 5 avril 2008. 7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté le surplus des conclusions de leur requête. Sur l'appel incident du ministre de l'économie, des finances et de la relance : 8. Comme il a déjà été rappelé au point 3 ci-dessus, la portée d'un défaut de restitution de documents et pièces saisis auprès de tiers dépend des effets concrets que celui-ci a pu avoir sur les droits de la défense et sur le caractère contradictoire de la procédure. De ce fait, dès lors que l'intéressé n'a, en dépit du défaut de restitution des documents et pièces saisis auprès de tiers, pas été privé de la possibilité d'accéder à ceux-ci ni de s'assurer que ceux utilisés par l'administration étaient identiques à ceux dont il a pu disposer, et qu'ainsi la possibilité de contester les redressements opérés n'a pas été affectée par le défaut de restitution des documents et pièces, ce dernier ne saurait à lui seul et par lui-même entraîner la décharge des impositions contestées. En pareil cas, l'omission de restitution de documents originaux n'est pas de nature à priver l'intéressé d'une garantie résultant du caractère contradictoire de la procédure d'imposition. 9. Il résulte de l'instruction que ni l'identité de l'émetteur, ni celle du bénéficiaire, ni le montant des chèques n'étaient en l'espèce contestés, le litige portant seulement sur na nature de prêt familial de la somme en litige, d'un montant de 35 000 euro. Par suite, la copie des deux chèques en cause, de 23 000 euros et 12 000 euros, n'aurait été d'aucune utilité à M. et Mme C.... Dans ces conditions, le défaut de restitution des documents dont il s'agit ne saurait à lui seul et par lui-même entraîner la décharge des impositions contestées. 10. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a déchargé partiellement les impositions en litige au motif d'une méconnaissance de l'obligation de restitution des documents pour les rehaussements consécutifs à l'intégration de la somme de 35 000 euros correspondant aux deux chèques établis par M. F.... 11. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme C.... En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition : 12. Par adoption des motifs retenus par les premiers juges, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la proposition de rectification serait insuffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. En ce qui concerne le bien-fondé des impositions : 13. Comme il a déjà été rappelé au point 5 ci-dessus, il appartient à l'administration fiscale, lorsqu'elle entend remettre en cause, même par voie d'imposition d'office, le caractère non imposable de sommes perçues par un contribuable, d'établir que les sommes en cause ne revêtent pas le caractère d'un prêt familial mais celui de revenus professionnels, à moins que l'administration démontre l'existence d'une relation d'affaires entre les bénéficiaires et l'auteur des versements. 14. Il n'est pas contesté qu'un parking a été vendu par M. F... à une SCI dont M. C... est associé et gérant. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme établissant, comme elle en a la charge, l'existence d'une relation d'affaires entre M. B... C... et M. D... F.... De ce fait, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que les sommes qui ont été versées à M. B... C... par M. D... F... par deux chèques établis par M. F..., oncle de M. C..., pour des sommes de 23 000 euros et 12 000 euros encaissés les 6 et 11 octobre bénéficient de la présomption de prêts familiaux. Par ailleurs, ils n'établissent pas l'existence d'un tel prêt. Ainsi, l'administration fiscale pouvait à bon droit réintégrer ces sommes dans les revenus imposables de M. C... comme revenus d'origine indéterminée. 15. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 à concurrence de la réduction en bases de 35 000 euros, ainsi que des pénalités correspondantes. Sur les frais liés au litige : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. et Mme C... demandent sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée. Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme C... ont été assujetties au titre de l'année 2008 dont le tribunal a prononcé la décharge, sont remises à leur charge, ainsi que les pénalités correspondantes. Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. ou à Mme B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente assesseure, M. Tar, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 mars 2023. Le rapporteur, G. A... Le président, P. BEAUJARDLa greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21VE01134
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 à 2014 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1711318 du 2 février 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 1er avril 2021 et un mémoire enregistré le 4 janvier 2022 et non communiqué, M. et Mme B..., représentés par Me Dumont, avocat, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement attaqué ; 2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 à 2014, ainsi que des pénalités correspondantes ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - le jugement attaqué est irrégulier car sa motivation se fonde sur une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il a validé le recours par l'administration fiscale à une étude générale pour définir le loyer qu'il convenait de retenir, sans se référer à des biens comparables dans le même ressort géographique ; - le jugement attaqué est irrégulier car il est entaché d'une contradiction de motifs et d'une insuffisance de motivation en ce qu'il ne comporte aucune réponse au moyen, pourtant soulevé notamment en page 3 du mémoire en réplique n° 2 en date du 11 janvier 2021, tiré de ce que les circonstances du contrôle caractérisaient une mise en œuvre d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle ; - le jugement attaqué est irrégulier, faute pour les premiers juges de respecter les droits de la défense, du fait du délai insuffisant qui leur a été laissé pour répondre ; - la procédure d'imposition est entachée d'une irrégularité substantielle, dès lors que l'administration fiscale a engagé un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle sans mettre en œuvre les garanties qui s'attachent à cette procédure, notamment dans la mesure où ils ont été privés du délai légal minimum de deux mois pour répondre aux demandes de justifications qui leur ont été adressées ; - le chef de rectification relatif aux dépenses de la SCI d'Industrie mises à la charge des locataires est insuffisamment motivé au vu des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, faute pour l'administration fiscale d'indiquer les motifs de fait de la rectification ainsi que ses modalités de calcul, sans que la circonstance, à la supposer avérée, que la SCI d'Industrie aurait accepté initialement la rectification litigieuse n'ait d'incidence sur l'irrégularité de procédure en résultant ; - le chef de rectification relatif à la réévaluation du loyer du local commercial sis 69 avenue Aristide Briand à Antony est insuffisamment motivé au vu des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, faute pour l'administration fiscale d'indiquer les éléments de comparaison qui l'ont conduit à fixer le montant imposable des loyers à 2 % du chiffre d'affaires de l'année 2012 puis 1,5 % du chiffre d'affaires des années 2013 et 2014 ; - c'est à tort que l'administration fiscale a ventilé forfaitairement les charges mises par convention à la charge des locataires pour l'année 2013 entre les locataires, au lieu de répartir ces charges selon leur incidence réelle ; - c'est à tort que les taxes d'enlèvement des ordures ménagères déduites au titre des revenus fonciers provenant du bien situé à Wissous ont été réintégrées dans leur revenu imposable, dès lors que M. et Mme B... ont neutralisé les montants correspondants, ce qu'ils établissent par la production de factures probantes ; - en se bornant à se référer à une étude nationale diligentée par le cabinet KPMG, l'administration fiscale n'établit pas, comme elle en a la charge, que le loyer du local commercial sis 69 avenue Aristide Briand à Antony aurait été sous-évalué ; - l'application qui leur a été faite de l'intérêt de retard est insuffisamment motivé, alors que cette application a le caractère d'une sanction ; - c'est à tort que leur ont été appliqué la majoration de 10 % prévue par les dispositions de l'article 1758 du code général des impôts, faute pour l'administration fiscale de les avoir invité à régulariser leur situation au regard de leur obligation déclarative ; - la mise en recouvrement est irrégulière, dès lors qu'ils n'ont pas été préalablement mis à même de contrôler et de comprendre les montants réclamés, du fait d'une présentation différente des sommes à payer dans les avis d'imposition et dans les propositions de rectification. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête de M. et Mme B.... Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 11 janvier 2022, l'instruction a été close au 31 janvier 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le décret n° 87-713 du 26 août 1987 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique, - et les observations de Me Dumont pour M. et Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. La société civile immobilière SCI d'Industrie, soumise au régime fiscal des sociétés de personnes et dont M. B... détient l'usufruit de la totalité des parts sociales, a fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel l'administration fiscale a procédé à la rectification de ses revenus fonciers déclarés au titre des années 2013 et 2014. Concomitamment, l'administration fiscale a procédé au contrôle sur pièces du dossier fiscal de M. et Mme B... portant sur les années 2012 à 2014, à l'issue duquel elle leur a notifié, suivant la procédure de rectification contradictoire, des rectifications en matière de revenus de capitaux mobiliers et de revenus fonciers. Elle les a subséquemment assujettis, au titre des années contrôlées, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales, assorties des intérêts de retard et de la majoration prévue à l'article 1758 A du code général des impôts. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 2 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 3. En premier lieu, la circonstance que le jugement attaqué aurait une motivation basée sur une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation est en tout état de cause sans effet sur la régularité du jugement. Il en va de même de la prétendue contradiction de motifs, qui relève du fond, et non de la régularité du jugement attaqué. 4. En deuxième lieu, M. et Mme B... ne peuvent utilement reprocher au jugement attaqué de ne pas statuer sur le moyen tiré de ce qu'ils auraient fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle sans avoir bénéficié des garanties propres à cette procédure, alors que ce moyen n'a été soulevé que dans un mémoire enregistré au greffe du tribunal le 13 janvier 2021, postérieurement à la clôture de l'instruction. Le jugement attaqué est suffisamment motivé et n'est entaché d'aucune contradiction de motifs. 5. En dernier lieu, par une ordonnance du 13 novembre 2020, la clôture de l'instruction en première instance a été fixée au 17 décembre 2020. Si un mémoire présenté par la directrice départementale des finances publiques du Val-d'Oise le 9 décembre 2020 n'a été communiqué à M. et Mme B... que le 11 décembre 2020, d'une part, ce mémoire ne contenait l'exposé d'aucune circonstance de fait ni d'aucun élément de droit susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire et d'autre part, le délai compris entre le 11 et le 17 décembre doit être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant été suffisant pour que M. et Mme B... puissent y répondre. Dans ces conditions, le caractère contradictoire de la procédure et les droits de la défense n'ont pas été méconnus. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la régularité de la procédure : 1. En premier lieu, aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix ". 2. Il résulte de l'instruction que les rectifications notifiées à M. et Mme B... résultent d'un contrôle sur pièces de leur dossier fiscal. Les circonstances que l'administration fiscale ait également exercé, sur le fondement des articles L. 10 du livre des procédures fiscales, son droit de demander au contribuable tous renseignements relatifs aux déclarations souscrites ne saurait suffire à démontrer l'existence d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle lequel suppose, en vertu des dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, un contrôle de cohérence entre, d'une part, les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments de train de vie du contribuable. M. et Mme B... ne sont ainsi pas fondés à soutenir que les garanties fondamentales du contribuable auraient été méconnues du fait de l'engagement d'un tel examen. 3. En deuxième lieu, en se bornant à rappeler que l'administration fiscale devait leur accorder un délai minimum de deux mois pour répondre à la demande de justifications qui leur a été adressée, en vertu des dispositions de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales et à affirmer que " Tel n'a pas été le cas ", M. et Mme B... n'assortissent pas leur moyen des précisions qui auraient permis d'en apprécier le bien-fondé. 4. En troisième lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la proposition de rectifications du 8 février 2016 adressée à la SCI d'Industrie serait insuffisamment motivée en ce qu'elle n'indiquerait ni les motifs, ni les modalités de calcul du rehaussement des recettes déclarées par la SCI au titre des dépenses déductibles lui incombant et mises par convention à la charge des locataires. 5. En quatrième lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que les propositions de rectification qui leur ont été adressées les 8 décembre 2015 et 11 février 2016 seraient insuffisamment motivées en ce que, s'agissant des rehaussements du loyer perçu au titre de leur local commercial à usage de pharmacie situé à Antony (Hauts-de-Seine), l'administration fiscale n'aurait pas indiqué les termes de comparaison utilisés pour fonder cette rectification. 6. En dernier lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 253 du livre des procédures fiscales : " L'avis d'imposition mentionne le total par nature d'impôt des sommes à acquitter, les conditions d'exigibilité, la date de mise en recouvrement et la date limite de paiement ". Dans le cadre d'un contentieux d'assiette, les irrégularités dont sont, le cas échéant, entachés les avis relatifs aux impositions recouvrées par voie de rôle sont sans incidence sur la régularité et le bien-fondé de l'impôt. Le moyen tiré de l'irrégularité des avis d'imposition édités le 30 septembre 2016 est ainsi inopérant et doit être écarté. En ce qui concerne le bien-fondé des impositions : 7. En premier lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que l'administration fiscale ne pouvait pas légalement ventiler forfaitairement les charges mises par convention à la charge des locataires pour l'année 2013 entre les locataires, au lieu de répartir ces charges selon leur incidence réelle. 8. En deuxième lieu, lorsque, en l'absence de toute circonstance indépendante de la volonté du propriétaire, le loyer d'un immeuble est notablement inférieur à sa valeur locative réelle, l'administration fiscale est en droit de retenir cette dernière pour le calcul du revenu foncier imposé en vue de tenir compte de la somme dont le contribuable a disposé en renonçant à la percevoir. 9. Aucune disposition d'aucun texte ni aucun principe de droit n'impose à l'administration fiscale de recourir, dans ce cadre, à l'évaluation de la valeur locative réelle d'un immeuble par comparaison à des locaux déterminés, de même nature, situés dans des zones similaires. En se bornant à critiquer le principe retenu par l'administration fiscale de l'évaluation sur des données statistiques établis par des organismes privés et à relever l'absence de comparaison avec d'autres locaux similaires situés à Antony ou dans les communes avoisinantes, alors que ces données sont concordantes et ne présentent aucun défaut de conception apparent, M. et Mme B... ne présentent aucun argument faisant obstacle à ce que l'administration fiscale leur oppose ces données statistiques. Par ailleurs, en se bornant à évoquer des circonstances très générales susceptibles d'expliquer que la valeur locative du local dont il s'agit serait plus bas que d'autres locaux comparables mieux situés, M. et Mme B... n'exposent aucune circonstance indépendante de la volonté de Mme B... qui expliquerait le niveau du loyer. L'administration fiscale produit des données statistiques, qui font état d'un ratio loyer/chiffre d'affaires qui se situe entre 3 et 5 % à Paris et dans les grandes métropoles au cours des années 2012 et 2013 et une étude statistique réalisée au cours de l'année 2010 suivant laquelle le ratio loyer/chiffre d'affaires des pharmacies urbaines réalisant un chiffre d'affaires supérieur à un million d'euros se situe entre 2,5 et 3% de ce chiffre d'affaires. L'administration fiscale a ensuite estimé que la valeur locative réelle du local dont il s'agit, qui se situe dans une commune urbaine des Hauts-de-Seine proche de Paris devait être fixée à 1,5 % de son chiffre d'affaires de l'année 2011. En constatant que cette valeur était supérieure de 50 % au loyer fixé par le bail commercial de neuf ans conclu le 30 octobre 2010 relatif au local dont il s'agit, l'administration fiscale doit être regardée comme établissant, comme elle en a la charge, que ce loyer était notablement inférieur à sa valeur locative réelle et qu'elle pouvait légalement retenir cette somme pour le calcul du revenu foncier de M. et Mme B.... 10. En troisième lieu, aux termes de l'article 31 du code général des impôts : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : (...) / c) Les impositions, autres que celles incombant normalement à l'occupant, perçues à raison desdites propriétés, au profit des collectivités territoriales, de certains établissements publics ou d'organismes divers ". L'article 1523 du même code relatif à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères précise que : " La taxe est imposée au nom des propriétaires ou usufruitiers et exigible contre eux et leurs principaux locataires ". Aux termes de l'article 1er du décret du 26 août 1987 susvisé fixant la liste des charges récupérables : " La liste des charges récupérables prévue à l'article 18 de la loi du 23 décembre 1986 susvisée figure en annexe au présent décret. " et l'alinéa 2 du VIII de cette annexe inclut dans les impositions et redevances récupérables la taxe ou redevance d'enlèvement des ordures ménagères. 11. Il résulte des dispositions précitées que la taxe ou la redevance d'enlèvement des ordures ménagères est au nombre des impositions et redevances récupérables de plein droit par les propriétaires sur leurs locataires et, par conséquent, est exclue des charges de propriété déductibles des revenus fonciers. Sa déduction n'est admise que dans le cas où le propriétaire n'a pu récupérer les montants correspondants sur ses locataires. 12. L'administration fiscale a remis en cause la déduction du montant afférent aux taxes d'enlèvement des ordures ménagères des revenus fonciers de M. et Mme B... au motif que cette charge incombait normalement au locataire. M. et Mme B... n'établissent ni même n'allèguent qu'ils auraient été dans l'impossibilité de récupérer cette taxe auprès de leurs locataires. C'est, par suite, à bon droit que l'administration fiscale a remis en cause la déductibilité de cette charge. 13. M. et Mme B... expliquent également que les sommes correspondant à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, récupérées auprès de leurs locataires, auraient été intégrées à tort dans le montant de leurs revenus fonciers. Toutefois, ils ne l'établissent pas en se bornant à produire des factures faisant apparaître des acomptes de taxes foncière. Dès lors, M. et Mme B... ne sont pas fondés à se prévaloir du caractère déductible de leurs revenus fonciers des sommes correspondant à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères récupérées auprès de leurs locataires au motif qu'elles auraient été intégrées à tort dans le montant de leurs revenus fonciers. En ce qui concerne les pénalités : 14. L'intérêt de retard prévu par l'article 1727 du code général des impôts vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leur obligation de payer l'impôt. Dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les préteurs privés pour un découvert non négocié, il n'a pas le caractère d'une sanction. Par suite, M. et Mme B... ne peuvent pas se prévaloir utilement de l'absence de motivation des intérêts de retard qui ont été mis à leur charge, dont les modalités de calcul sont d'ailleurs suffisamment explicitées par la proposition de rectification. 15. Aux termes de l'article 1758 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits supplémentaires ou de la créance indue. / II. - Cette majoration n'est pas applicable : / a) En cas de régularisation spontanée ou lorsque le contribuable a corrigé sa déclaration dans un délai de trente jours à la suite d'une demande de l'administration (...) ". Aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. / (...) ". 16. D'une part, les propositions de rectification du 8 décembre 2015 et 11 février 2016 ont indiqué que les rappels d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2012 à 2014 sont assortis de la majoration de 10 % codifiée à l'article 1758 A du code général des impôts. Dès lors qu'elles ont précisé le taux de la majoration appliquée, son assiette, ainsi que son fondement juridique, indiqué, au titre des conséquences financières, annexées à cette proposition le montant des droits supplémentaires sur lequel elle est assise et spécifié les montants auxquels la majoration s'élève, et enfin repris, en annexe, les termes de l'article en cause, cette pièce de la procédure doit être regardée comme ayant répondu aux exigences posées par les dispositions précitées de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la majoration en cause doit donc être écarté. 17. D'autre part, si le a) du II de l'article 1758 A du code général des impôts exclut l'application de la majoration de 10 %, due en cas de retard ou de défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi qu'en cas d'inexactitudes ou d'omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, " En cas de régularisation spontanée ou lorsque le contribuable a corrigé sa déclaration dans un délai de trente jours à la suite d'une demande de l'administration ", ni ces dispositions, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire, ni, en tout état de cause, aucun principe général n'impose à l'administration d'inviter le contribuable à corriger sa déclaration. A ce titre, M. et Mme B... ne sont pas fondés à invoquer l'instruction administrative référencée 13 N-1-08 en date du 14 février 2008, transférée au BOFiP à la date du 12 septembre 2012 par l'instruction n° 13 A-2-12 du 7 septembre 2012 relative à la création de la base documentaire " Bulletin officiel des finances publiques - Impôts ". En effet, si l'instruction en cause avait prévu que la majoration en litige ne s'appliquait pas en cas de déclaration spontanée souscrite avant l'engagement par l'administration d'une procédure contraignante, cette même instruction prévoyait que l'engagement d'une telle procédure était constituée, entre autres, par la réception par le contribuable d'une proposition de rectification portant sur l'impôt sur le revenu. Dès lors que de telles pièces ont été adressées à M. et Mme B... les 8 décembre 2015 et 11 février 2016, l'administration fiscale était en toute hypothèse fondée à lui infliger la majoration contestée. 18. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande. Par suite, leur requête doit être rejetée, y compris leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. ou à Mme C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente assesseure, M. Tar, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 mars 2023. Le rapporteur, G. A... Le président, P. BEAUJARDLa greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 21VE00952
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise " à lui verser la somme de 1 163 833,39 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait du changement de zonage applicable aux parcelles AI 94 et AI 96, après l'adoption du nouveau plan local d'urbanisme de la commune de Guerville par la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise ", et de mettre à la charge de la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise " une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1909882 du 14 décembre 2020, le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande et les conclusions présentées par la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise " sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 janvier 2021 et le 14 février 2022, M. B..., représenté par Me Taron, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de condamner la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise " à lui verser la somme de 1 163 833,39 euros augmentée des intérêts ; 3°) de mettre à la charge de la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise " une somme de 4 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. B... soutient que : - il justifie de sa qualité à agir au nom de l'indivision ; - l'indivision est propriétaire des parcelles en cause ; - sa requête d'appel, ne se bornant pas à reprendre ses écritures de première instance, est suffisamment motivée ; - le jugement attaqué est insuffisamment motivé sur le caractère exorbitant de la charge que la servitude d'urbanisme fait peser sur l'indivision qu'il représente ; - il a droit à une indemnisation sur le fondement de l'article L. 105-1 du code de l'urbanisme ; - le maintien du même zonage pendant plus de 37 ans a créé un droit acquis au sens du premier protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le changement de zonage a modifié l'état antérieur des lieux ; - il a droit à une indemnisation dès lors que le nouveau zonage fait peser sur lui une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec le but d'intérêt général poursuivi ; - le changement de zonage des deux parcelles lui appartenant lui cause un préjudice financier lié à la perte de valeur vénale de la propriété et l'impossibilité de valoriser le bien à hauteur de 1 153 833,39 euros ; - le changement de zonage lui cause des troubles dans les conditions d'existence à hauteur de 10 000 euros. Par des mémoires en défense, enregistrés le 8 novembre 2021 et le 17 octobre 2022, la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise ", représentée par Me Férignac, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - M. B... n'a pas qualité pour représenter l'indivision devant la justice ; - il n'est pas établi que l'indivision représentée par M. B... serait propriétaire des parcelles en cause ; - la requête d'appel, ne soulevant aucun moyen à l'encontre du jugement de première instance, est insuffisamment motivée ; - c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande d'indemnisation présentée sur le fondement de l'article L. 105-1 du code de l'urbanisme ; - la responsabilité sans faute de la communauté urbaine ne peut être engagée dès lors que ni le caractère spécial, ni le caractère exorbitant de la servitude ne sont démontrés et que la servitude est proportionnée avec l'objectif d'intérêt général poursuivi ; - les préjudices invoqués ne peuvent être indemnisés. Par une ordonnance du 7 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 novembre 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment l'article 1er du protocole additionnel ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - les conclusions de M. Frémont, rapporteur public, - et les observations de Me Taron pour M. B... et de Me Baillet, substituant Me Férignac, pour la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise ". Considérant ce qui suit : 1. Le tribunal administratif de Versailles a, par un jugement passé en force de chose jugée du 25 juin 2019, rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation du plan local d'urbanisme de la commune de Guerville approuvé par la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise " le 29 mars 2018, en relevant, notamment, que le classement en zone N des parcelles AI 94 et AI 96 n'était pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. 2. Par la présente requête, M. B..., agissant au nom de l'indivision B..., demande l'annulation du jugement n° 1909882 du 14 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Versailles a refusé de condamner la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise " à lui verser la somme de 1 163 833,39 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait du changement de zonage applicable aux parcelles précitées. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. L'article L. 9 du code de justice administrative dispose que : " Les jugements sont motivés ". Le juge doit ainsi se prononcer, par une motivation suffisante au regard de la teneur de l'argumentation qui lui est soumise, sur tous les moyens expressément soulevés par les parties, à l'exception de ceux qui, quel que soit leur bien-fondé, seraient insusceptibles de conduire à l'adoption d'une solution différente de celle qu'il retient. 4. Les premiers juges ont, contrairement à ce que soutient le requérant, suffisamment motivé, au point 7 du jugement attaqué, leur réponse au moyen tiré de ce que le changement de zonage en litige ferait peser sur lui une charge spéciale et exorbitante. Sur la demande indemnitaire : 5. Aux termes de l'article L. 105-1 du code de l'urbanisme : " N'ouvrent droit à aucune indemnité les servitudes instituées par application du présent code en matière de voirie, d'hygiène et d'esthétique ou pour d'autres objets et concernant, notamment, l'utilisation du sol, la hauteur des constructions, la proportion des surfaces bâties et non bâties dans chaque propriété, l'interdiction de construire dans certaines zones et en bordure de certaines voies, la répartition des immeubles entre diverses zones. / Toutefois, une indemnité est due s'il résulte de ces servitudes une atteinte à des droits acquis ou une modification à l'état antérieur des lieux déterminant un dommage direct, matériel et certain ; cette indemnité, à défaut d'accord amiable, est fixée par le tribunal administratif, qui doit tenir compte de la plus-value donnée aux immeubles par la réalisation du plan d'occupation des sols rendu public ou du plan local d'urbanisme approuvé ou du document qui en tient lieu ". 6. L'article L. 105-1 du code de l'urbanisme, d'une part, subordonne le principe de non-indemnisation des servitudes d'urbanisme qu'il édicte à la condition que celles-ci aient été instituées légalement, aux fins de mener une politique d'urbanisme conforme à l'intérêt général et dans le respect des règles de compétence, de procédure et de forme prévues par la loi, d'autre part, ne pose pas un principe général et absolu mais l'assortit expressément de deux exceptions touchant aux droits acquis par les propriétaires et à la modification de l'état antérieur des lieux et, enfin, ne fait pas obstacle à ce que le propriétaire dont le bien est frappé d'une servitude prétende à une indemnisation dans le cas exceptionnel où il résulte de l'ensemble des conditions et circonstances dans lesquelles la servitude a été instituée et mise en œuvre, ainsi que de son contenu, que ce propriétaire supporte une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif général poursuivi. 7. En premier lieu, si M. B... soutient que ces dispositions doivent être interprétées à la lumière de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, il ressort de cette jurisprudence, notamment issue de l'arrêt du 6 octobre 2016, Malfatto et Mieille c. France, n° 40886/06 et 51946/07, para. 65-66, que cette Cour estime que le mécanisme rappelé au point 6 permet de mettre en balance les intérêts de l'intéressé et ceux de la communauté. Par suite, ces dispositions ne méconnaissent pas l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 8. En deuxième lieu, si M. B... fait valoir que la révision du plan local d'urbanisme a porté atteinte à son droit de propriété, le classement, avant révision, des parcelles cadastrées AI 94 et AI 96 en zone urbaine constructible n'a pas créé, par lui-même, un droit acquis à la délivrance d'une autorisation de construire. L'écoulement du temps n'est pas, à cet égard, de nature à créer, à lui seul, un droit au maintien de la constructibilité d'une parcelle au profit de son propriétaire. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le classement desdites parcelles en zone naturelle porterait atteinte à ses droits acquis. 9. En troisième lieu, le classement en zone inconstructible des parcelles cadastrées AI 94 et AI 96 n'a entraîné, en lui-même, aucune modification de l'état antérieur des lieux dès lors que ce changement concerne une partie non bâtie de la propriété du requérant. 10. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que le projet d'aménagement et de développement durables fixe comme objectif de préserver " le caractère naturel et paysager de Guerville " ce qui se traduit, notamment, par la volonté de " maîtriser les franges urbaines en contact avec les espaces boisés et agricoles ". Le sud du hameau de Senneville, où se situent les parcelles cadastrées AI 94 et AI 96, est à cet égard précisément identifié par le projet d'aménagement et de développement durables. Par suite, la servitude instituée n'est pas hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi. En outre, il résulte de l'instruction que la révision du plan local d'urbanisme de Guerville a procédé au classement en zone naturelle de plusieurs parcelles appartenant à d'autres propriétaires, y compris des parcelles immédiatement voisines, de telle sorte que la charge supportée par M. B... ne saurait être regardée comme spéciale. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que le nouveau zonage applicable aux parcelles cadastrées AI 94 et AI 96 fasse peser sur le requérant une charge exorbitante alors même qu'un promoteur avait fait une offre de prix pour l'achat des terrains en cause avant le changement de zonage. Par suite, la responsabilité sans faute de la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise ", au motif que la servitude d'urbanisme instituée sur les parcelles AI 94 et AI 96 ferait peser sur M. B... une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi, doit être écartée. 11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir soulevées en première instance, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise ", qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande à ce titre. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme que communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise " demande sur le fondement des mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise " présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la communauté urbaine " Grand Paris Seine-et-Oise ". Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Even, président de chambre, Mme Bonfils, première conseillère, Mme Houllier, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023. La rapporteure, S. C...Le président, B. EVENLa greffière, C. RICHARD La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE00248
JADE/CETATEXT000047370691.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1807715 du 11 février 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 1er avril 2021, M. et Mme C..., représentés par Me Boudriot, avocat, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement attaqué ; 2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, ainsi que les pénalités correspondantes ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - les frais de déplacement de M. E... C... ont été engagés dans l'intérêt de la SARL Hôtel Elysées Paris, dont il était le directeur général et pour le compte duquel il effectuait des missions de prospection commerciale à l'étranger ; - les frais de déplacement de Mme F... C... ont été engagés dans l'intérêt de la société Groupe Déesses Finances puis de la SARL Hôtel Elysées Paris, dont elle était administratrice ; - le cadeau d'une valeur de 8 835 euros ne pouvait être imposé comme revenu distribué à M. C..., dès lors que le bénéficiaire désigné de ce cadeau était un tiers et que l'administration fiscale n'a pas démontré que M. C... était le maître de l'affaire. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 août 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête de M. et Mme C.... Il fait valoir que les moyens qu'ils soulèvent ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 16 février 2023, l'instruction a été close au 3 mars 2023, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique, Considérant ce qui suit : 1. La société à responsabilité limitée (SARL) Hôtel Elysées Paris, dont M. C... est le gérant et l'actionnaire unique, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant sur la période comprise entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2013, au cours de laquelle le service vérificateur a notamment remis en cause la déduction du résultat imposable de certaines charges au titre des frais généraux. A la suite d'un contrôle sur pièces des déclarations fiscales de M. et Mme C..., l'administration fiscale a, par une proposition de rectification du 14 décembre 2015, regardé une partie de ces charges non justifiées comme des revenus distribués au profit de ces contribuables et imposables entre leurs mains sur le fondement des dispositions du c) de l'article 111 du code général des impôts. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 11 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à leur charge au titre des années 2012 et 2013. 2. D'une part, aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charge, celles-ci comprenant ... 1° les frais généraux de toute nature (...) 5. Sont également déductibles les dépenses suivantes : (...) / e. Les cadeaux de toute nature, à l'exception des objets de faible nature à l'exception des objets de faible valeur conçus spécialement pour la publicité ; (...) / Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise. (...) ". Et aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 11 du livre des procédures fiscales : " A moins qu'un délai ne soit prévu par le présent livre, le délai accordé aux contribuables pour répondre aux demandes de renseignements, de justifications ou d'éclaircissements et, d'une manière générale, à toute notification émanant d'un agent de l'administration des impôts est fixé à trente jours à compter de la réception de cette notification. ". Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) ". M. et Mme C... s'étant abstenus, à la suite de la réception du courrier leur notifiant les rectifications en litige, de contester ces rectifications dans le délai de trente jours prévu par les dispositions précitées de l'article L. 11 du livre des procédures fiscales, ils supportent la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions qu'ils contestent. 4. En premier lieu, M. et Mme C... affirment que les sommes comptabilisées en charge dans les comptes de la société Elysée Paris, de 19 403 euros en 2012 et 17 846 en 2013 correspondent à des déplacements professionnels qu'il aurait entrepris en qualité de gérant de cette société en vue de la prospection de clientèle afin de compenser la perte de clientèle engendrée par la cessation de l'exploitation de l'hôtel de cette société sous l'enseigne Best Western. Toutefois, il se borne à produire des factures d'agence de voyages correspondant à des séjours en Chine, à Hong-Kong, à New York, Porto, Rome et Bucarest et une attestation d'un établissement hôtelier chinois mentionnant que M. C... s'y est rendu plusieurs fois pour établir une collaboration avec l'hôtel Elysée Paris et à affirmer que le taux de remplissage de 80 % de l'hôtel constituerait la contrepartie de ses déplacements, sans apporter la moindre pièce attestant l'existence de relations contractuelles ou d'accords de collaboration avec des réseaux de clientèle. Dans ces conditions, M. et Mme C... n'établissent pas, comme ils en ont la charge, que c'est à tort que l'administration a considéré que ces déplacements avaient un caractère personnel et les a réintégré dans le revenu imposable de M. C... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. 5. En deuxième lieu, M. et Mme C... affirment que les sommes comptabilisées en charge dans les comptes de la société Elysée Paris de 24 000 euros en 2012 et 24 000 euros en 2013 correspondent à une prise en charge forfaitaire des frais exposés par Mme C... dans le cadre de ses fonctions d'administratrice de la société Groupe Déesses Finances, fonctions qui se seraient poursuivies pour le compte de la société Elysées Paris après que cette dernière société en 2012 ait absorbé la société Groupe Déesses Finances à la suite d'une transmission universelle de patrimoine. Toutefois, ils se bornent à produire une décision de l'assemblée générale de la SARL Groupe Déesses Finances du 1er septembre 2011 fixant les missions de Mme C... et le montant du défraiement forfaitaire de ses déplacements professionnels, alors qu'il n'est pas contesté que celle-ci n'est ni administratrice ni salariée de la société Elysées Paris et qu'aucune pièce n'établit la réalité des missions que Mme C... aurait effectuées au cours des années en litige. Dans ces conditions, M. et Mme C... n'établissent pas, comme ils en ont la charge, le caractère infondé de la réintégration de ces sommes dans le revenu imposable de Mme C... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. 6. En dernier lieu, s'agissant de la somme de 8 835 euros correspondant à l'achat d'une montre de luxe, M. et Mme C... affirment qu'il s'agit d'un cadeau qui a permis à la SARL Elysées Paris d'obtenir, grâce à l'entremise de M. B... D..., qui a été désigné comme bénéficiaire de ce cadeau, un prix pour des travaux de rénovation inférieur de 30 % à celui d'une autre entreprise. 7. En cas de refus des propositions de rectifications par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire de sommes ou valeurs regardées comme distribuées par une société, il incombe à l'administration fiscale d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé, sauf à démontrer qu'il peut être regardé comme le maître de l'affaire. 8. D'une part, comme il a déjà été dit, M. et Mme C... ne peuvent être regardés comme ayant refusé la rectification correspondant à l'achat de la montre dont il s'agit. D'autre part, en tout état de cause, en faisant valoir que M. C... est l'unique gérant et l'unique actionnaire de la SARL Hôtel Elysées Paris, qu'il détient 100 % des parts sociales de la société et qu'il en est le représentant légal, l'administration fiscale doit être regardée comme établissant que M. C... peut être regardé comme le maître de l'affaire, sans qu'il soit besoin d'établir explicitement qu'il disposait de la signature sur les comptes bancaires de la société. Par ailleurs, M. et Mme C... ne produisent pas la moindre pièce à l'appui de la déclaration de la SARL Hôtel Elysées Paris selon laquelle la montre aurait été appréhendée par M. D..., ni la moindre pièce attestant de l'existence d'une contrepartie pour la SARL Hôtel Elysées Paris. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration fiscale a considéré que M. C... avait bénéficié de ce cadeau et a réintégré la somme correspondante dans ses revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. 9. Il résulte ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande. Par suite, leur requête doit être rejetée, y compris leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. ou à Mme E... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient : M. Beaujard, président de chambre, Mme Dorion, présidente assesseure, M. Tar, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 mars 2023. Le rapporteur, G. A... Le président, P. BEAUJARDLa greffière, A. GAUTHIER La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 21VE00995
JADE/CETATEXT000045931711.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Sous le n° 1500940, le département de la Seine-Maritime a demandé au tribunal administratif de Rouen, à titre principal, d'une part, d'annuler les marchés n°s 99-673, 99-677, 99-678, 99-682, 99-685, 99-687, 99 689, 99-690, 99-692 et 99-694 conclus avec le groupement composé de la société Lacroix Signalisation et de la société Normandie Signalisation et, d'autre part, de condamner la société Lacroix Signalisation à lui restituer la somme de 2 630 016,11 euros et à lui verser celle de 407 070,14 euros au titre de l'indisponibilité de la somme précédente ou, à titre subsidiaire, de la condamner à lui verser la somme de 1 932 479,48 euros au titre du surcoût des marchés qu'a entraîné le comportement dolosif de cette société, la condamnation étant assortie dans tous les cas des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la demande et de leur capitalisation. Par un jugement n° 1500940 du 31 janvier 2017, le tribunal administratif de Rouen a fait droit aux conclusions principales du département, à l'exception de la somme demandée au titre de l'indisponibilité de la somme correspondant à la restitution des marchés. Sous le n° 1500943, le département de la Seine-Maritime a demandé au tribunal administratif de Rouen, à titre principal, d'une part, d'annuler le marché n° 2006-311 conclu avec la société Lacroix Signalisation, et, d'autre part, de condamner cette dernière à lui restituer la somme de 1 741 563,49 euros et à lui verser celle de 136 251,10 euros au titre de l'indisponibilité de la somme précédente ou, à titre subsidiaire, à lui verser la somme de 954 785,94 euros au titre du surcoût des marchés qu'a entraîné le comportement dolosif de cette société, la condamnation étant assortie dans tous les cas des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la demande et de leur capitalisation. Par un jugement n° 1500943 du 31 janvier 2017, le tribunal administratif de Rouen a fait droit aux conclusions principales du département, à l'exception de la somme demandée au titre de l'indisponibilité de la somme correspondant à la restitution des marchés. Sous le n° 1500944, le département de la Seine-Maritime a demandé au tribunal administratif de Rouen, à titre principal, d'une part, d'annuler le marché n° 2003-257 conclu avec la société Lacroix Signalisation et, d'autre part, de condamner cette dernière à lui restituer, à titre principal, la somme de 862 209,41 euros et à lui verser celle de 40 958,69 euros au titre de l'indisponibilité de la somme précédente ou, à titre subsidiaire, à lui verser la somme de 247 888,95 euros au titre du surcoût des marchés qu'a entraîné le comportement dolosif de cette société, la condamnation étant assortie dans tous les cas des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la demande et de leur capitalisation. Par un jugement n° 1500944 du 31 janvier 2017, le tribunal administratif de Rouen a fait droit aux conclusions principales du département, à l'exception de la somme demandée au titre de l'indisponibilité de la somme correspondant à la restitution des marchés. Par un arrêt n°s 17DA00561, 17DA00562, 17DA00563 du 22 février 2018, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel de la société Lacroix Signalisation, réformé ces trois jugements en ne faisant droit qu'aux conclusions subsidiaires du département de la Seine-Maritime, à hauteur respectivement des sommes de 1 525 409,34 euros, 206 930,26 euros et 818 534,84 euros et en rejetant le surplus des conclusions des parties. Par une décision n° 420045 du 10 juillet 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi par la société Lacroix Signalisation, a annulé cet arrêt en tant qu'il statue sur les conséquences financières de l'annulation des marchés conclus entre le département de la Seine-Maritime et la société Lacroix Signalisation et renvoyé l'affaire dans cette mesure devant la cour administrative d'appel de Douai. Par un arrêt n° 20DA01021 du 7 mai 2021, la cour administrative d'appel de Douai a condamné la société Lacroix City Saint Herblain, venant aux droits de la société Lacroix Signalisation, à verser au département de la Seine-Maritime la somme de 1 608 254,85 euros au titre des marchés annulés de 1999, celle de 256 076,20 euros au titre du marché annulé de 2003, la somme de 887 761,99 euros au titre du marché annulé de 2006 et la somme de 425 616 euros en réparation des autres préjudices du département, ces sommes étant assorties des intérêts et de leur capitalisation. Procédure devant le Conseil d'Etat Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 juillet et 4 octobre 2021 et le 16 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Lacroix City Saint-Herblain demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ; 3°) de mettre à la charge du département de la Seine-Maritime une somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexis Goin, auditeur, - les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Lacroix City Saint-Herblain et à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat du département de la Seine-Maritime ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 avril 2022, présentée par le département de la Seine-Maritime ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 avril 2022, présentée par la société Lacroix City Saint-Herblain ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le département de la Seine-Maritime a conclu avec la société Lacroix Signalisation le 2 novembre 1999, le 11 avril 2003 et le 15 mars 2006 des marchés portant sur la fourniture et l'installation de panneaux de signalisation routière verticale. Par une décision n° 10-D-39 du 22 décembre 2010, l'Autorité de la concurrence a condamné huit entreprises, dont la société Lacroix Signalisation, pour s'être entendues entre 1997 et 2006 sur la répartition et le prix des marchés ayant un tel objet. Par trois jugements du 31 janvier 2017, le tribunal administratif de Rouen, saisi par le département de la Seine-Maritime, a annulé les marchés que ce dernier avait conclus avec la société Lacroix Signalisation en 1999, 2003 et 2006 et a condamné cette société à restituer au département l'intégralité des sommes versées dans le cadre de ces marchés, soit respectivement 2 630 016,11 euros, 862 209,41 euros et 1 741 563,49 euros. Par un arrêt du 22 février 2018, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel de la société Lacroix Signalisation, réformé ces trois jugements en ne faisant droit qu'aux conclusions subsidiaires du département de la Seine-Maritime tendant à obtenir une indemnité pour réparer le surcoût lié aux pratiques anticoncurrentielles de la société Lacroix Signalisation, et elle a condamné cette dernière à verser au département les sommes de 1 525 409,34 euros, 206 930,26 euros et 818 534,84 euros, tout en rejetant le surplus des conclusions des parties. Le Conseil d'Etat statuant au contentieux, par une décision du 10 juillet 2020, a annulé cet arrêt en tant qu'il avait statué sur les conséquences financières de l'annulation des marchés conclus entre le département de la Seine-Maritime et la société Lacroix Signalisation. Par l'arrêt attaqué du 7 mai 2021, la cour administrative d'appel de Douai a condamné la société Lacroix City Saint-Herblain, venant aux droits de la société Lacroix Signalisation, à verser au département les sommes de 1 608 254,85 euros, 256 076,20 euros et 887 761,99 euros au titre des marchés de 1999, 2003 et 2006, ainsi que la somme de 425 616 euros en réparation du préjudice du département lié à l'indisponibilité des sommes correspondant au surprix des contrats annulés pour la période antérieure au 26 mars 2015. La société Lacroix City Saint-Herblain doit être regardée comme ne contestant l'arrêt qu'en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à son appel s'agissant des conséquences financières de l'annulation des marchés et en tant qu'il a partiellement fait droit à l'appel incident du département de la Seine-Maritime. Sur le cadre juridique du litige : 2. Lorsqu'une personne publique est victime, de la part de son cocontractant, de pratiques anticoncurrentielles constitutives d'un dol ayant vicié son consentement, elle peut saisir le juge administratif, alternativement ou cumulativement, d'une part, de conclusions tendant à ce que celui-ci prononce l'annulation du marché litigieux et tire les conséquences financières de sa disparition rétroactive, et, d'autre part, de conclusions tendant à la condamnation du cocontractant, au titre de sa responsabilité quasi-délictuelle, à réparer les préjudices subis en raison de son comportement fautif. 3. En cas d'annulation du contrat en raison d'une pratique anticoncurrentielle imputable au cocontractant, ce dernier doit restituer les sommes que lui a versées la personne publique mais peut prétendre en contrepartie, sur un terrain quasi-contractuel, au remboursement des dépenses qu'il a engagées et qui ont été utiles à celle-ci. Si, en cas d'annulation du contrat, la personne publique ne saurait obtenir, sur le terrain quasi-délictuel, la réparation du préjudice lié au surcoût qu'ont impliqué les pratiques anticoncurrentielles dont elle a été victime, dès lors que cette annulation entraîne par elle-même l'obligation pour le cocontractant de restituer à la personne publique toutes les dépenses qui ne lui ont pas été utiles, elle peut, en revanche, demander la réparation des autres préjudices que lui aurait causés le comportement du cocontractant. 4. Il appartient par suite au juge administratif, en cas d'annulation du contrat, d'évaluer, au besoin en ordonnant une expertise sur ce point, les dépenses du titulaire du contrat qui ont été utiles à la personne publique. Les dépenses utiles comprennent, à l'exclusion de toute marge bénéficiaire, les dépenses qui ont été directement engagées par le cocontractant pour la réalisation des fournitures, travaux ou prestations destinés à l'administration. Ne peut être prise en compte que la quote-part des frais généraux qui contribue à l'exécution du marché et est à ce titre utile à la personne publique. Ne peuvent pas être regardés comme utilement exposés pour l'exécution du marché les frais de communication ainsi que, dans le cas où le contrat en cause est un marché public et sauf s'il s'agit d'un marché de partenariat, les frais financiers engagés par le cocontractant. Sur le pourvoi de la société Lacroix City Saint-Herblain : En ce qui concerne le montant des dépenses utiles : 5. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour fixer le montant des dépenses au remboursement desquelles la société Lacroix City Saint-Herblain avait droit en application des principes mentionnés aux points 3 et 4, la cour administrative d'appel de Douai s'est fondée sur la méthode proposée par le département, consistant à déduire du prix du marché le surcoût imputable aux pratiques anticoncurrentielles de cette société puis un taux de marge normal appliqué au reliquat résultant de cette première opération. Elle a évalué ce surcoût à un taux moyen de 58 % des montants versés au titulaire des marchés de 1999, de 24 % pour le marché de 2003 et de 47 % pour le marché de 2006, selon la méthode comparative utilisée par le département. En se fondant, pour déterminer les taux de surcoût mentionnés ci-dessus, sur la seule comparaison entre les prix pratiqués par cette société dans les marchés conclus entre 1999 et 2006 et ceux d'un unique marché conclu en 2010 par le département avec une autre société, ce sans tenir compte d'aucun facteur exogène susceptible d'avoir influencé la formation du prix, et alors qu'il ressortait des pièces du dossier qui lui étaient soumis que l'Autorité de la concurrence, dans sa décision du 22 décembre 2010, évaluait à 5 à 10 % le surcroît moyen de prix imputable à cette entente, la cour administrative d'appel de Douai a dénaturé les faits de l'espèce. En ce qui concerne le préjudice lié à l'indisponibilité des sommes : 6. Pour déterminer le préjudice qu'elle a estimé que le département de la Seine-Maritime avait subi en raison de l'indisponibilité des sommes payées indûment par celui-ci au titre du surprix des marchés annulés durant la période antérieure à la demande d'intérêts devant le tribunal administratif de Rouen, le 26 mars 2015, la cour administrative d'appel de Douai a jugé qu'il y avait lieu de condamner la société Lacroix City Saint-Herblain au paiement de la somme de 425 616 euros correspondant, pour chacun des marchés, à l'application du taux d'intérêt légal aux sommes indisponibles depuis la fin de l'exécution des marchés. En statuant ainsi, sans indiquer les bases ni les modalités du calcul de ce montant, alors qu'elle s'écartait de la méthode proposée par le département de la Seine-Maritime, la cour administrative d'appel de Douai a insuffisamment motivé son arrêt. 7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, les articles 1er, 2 et 3 de l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Douai doivent être annulés en tant qu'ils ne font que partiellement droit à l'appel principal de la société Lacroix City Saint-Herblain s'agissant des conséquences financières de l'annulation du contrat, ainsi que les articles 4 et 5 du même arrêt et enfin son article 6, en tant qu'il rejette les conclusions présentées par la société Lacroix City Saint-Herblain au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les conclusions d'appel incident du département de la Seine-Maritime tendant à l'indemnisation du préjudice qu'il allègue avoir subi du fait de l'indisponibilité des sommes correspondant au surcoût des marchés. 8. Aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire ". Le Conseil d'Etat étant saisi, en l'espèce, d'un second pourvoi en cassation, il lui incombe de régler l'affaire au fond dans la mesure de la cassation prononcée. Sur l'appel de la société Lacroix City Saint-Herblain et l'appel incident du département de la Seine-Maritime : En ce qui concerne la recevabilité de la demande du département de la Seine-Maritime : 9. Une collectivité publique est irrecevable à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu'elle a le pouvoir de prendre. En particulier, les collectivités territoriales, qui peuvent émettre des titres exécutoires à l'encontre de leurs débiteurs, ne peuvent saisir directement le juge administratif d'une demande tendant au recouvrement de leur créance. Toutefois, lorsque la créance trouve son origine dans un contrat, la faculté d'émettre un titre exécutoire dont dispose une personne publique ne fait pas obstacle à ce que celle-ci saisisse le juge administratif d'une demande tendant à son recouvrement. 10. Les conclusions d'une collectivité publique tendant à la réparation des préjudices causés par les pratiques anticoncurrentielles de son cocontractant doivent être regardées comme portant sur une créance qui trouve son origine dans un contrat, pour l'application des règles mentionnées au point précédent. Par suite, la société Lacroix City Saint-Herblain n'est pas fondée à soutenir que les conclusions indemnitaires présentées par le département de la Seine-Maritime devant le tribunal administratif de Rouen seraient irrecevables. En ce qui concerne l'appel principal de la société Lacroix City Saint-Herblain portant sur les restitutions consécutives à l'annulation du marché : 11. Par des jugements du 31 janvier 2017, devenus définitifs sur ce point, le tribunal administratif de Rouen a annulé les marchés conclus par le département de la Seine-Maritime avec la société Lacroix Signalisation le 2 novembre 1999, le 11 avril 2003 et le 15 mars 2006. En application des principes mentionnés au point 3 de cette décision, l'annulation de ces contrats emporte, pour la société Lacroix City Saint-Herblain, l'obligation de restituer les sommes qu'elle a perçues pour l'exécution de ces marchés. 12. Pour établir le montant des dépenses qui ont été utiles à la personne publique, au remboursement desquelles la société Lacroix City Saint-Herblain a droit en application des mêmes principes, le département de la Seine-Maritime et la société ont, chacun, proposé une méthode de calcul devant la cour administrative d'appel de Douai. 13. La méthode proposée par le département de la Seine-Maritime, fondée sur la déduction du prix des prestations à la fois du surcoût supporté par la personne publique à la suite de l'entente anticoncurrentielle et de la marge bénéficiaire de l'entreprise, ne saurait être en l'espèce retenue dès lors, d'une part, qu'une telle méthode conduit à intégrer dans l'assiette des dépenses utiles une partie de frais correspondant à des frais généraux non liés à l'exécution des prestations, qui ne sauraient être regardés comme étant utiles à la personne publique, et que, d'autre part, l'évaluation du surcoût supporté par le département, fondée sur la seule comparaison avec un unique marché conclu par le département en 2010, sans prise en compte d'éventuels facteurs exogènes, conduit à retenir un taux excessif de surcoût pour la personne publique. 14. La méthode proposée par la société Lacroix City Saint-Herblain, fondée sur les résultats d'une étude économique qu'elle a commandée, consiste, pour les marchés de 2003 et 2006, à estimer les coûts de production de certains articles et de certaines prestations pour l'exercice fiscal 2016-2017. Eu égard à l'évolution historique des coûts moyens de la société, elle a reconstitué l'évolution des principaux postes de coûts contribuant à la formation du coût complet de ces articles, tels que le film adhésif, l'aluminium et l'acier, la main d'œuvre et les frais de structure, jusqu'en 2003. Sur le fondement des données de facturation dont elle dispose, elle a enfin reconstitué le coût total des fournitures et prestations vendues au département dans le cadre de ces deux marchés. Pour les marchés de 1999, la société Lacroix City Saint-Herblain, qui soutient ne pas disposer des données nécessaires pour appliquer la même méthode que pour les marchés postérieurs, fait valoir que l'analyse de ses liasses fiscales pour cette période laisse apparaître que ses charges d'exploitation pour la période considérée représentaient 86,9 % de ses produits d'exploitation, et propose d'appliquer ce taux au montant facturé au département dans le cadre des marchés. 15. Toutefois, la méthode proposée par la société Lacroix City Saint-Herblain, s'agissant des marchés signés en 1999, ne peut être retenue pour établir les dépenses utiles relatives à cette période, en l'absence de tout élément tendant à démontrer que le rapport entre les charges d'exploitation et les produits d'exploitation de la société, pris dans leur ensemble, serait représentatif de l'activité ayant fait l'objet des marchés litigieux, et alors que l'activité de signalisation routière représentait seulement 44 % du chiffre d'affaires de la société Lacroix Signalisation en 2009 selon l'Autorité de la concurrence. En outre, une telle méthode ne permet pas d'exclure ceux des frais de la société qui n'ont pas été utiles à la personne publique, tels que les frais financiers. S'agissant des marchés de 2003 et de 2006, les documents produits par la société Lacroix Signalisation à l'appui de l'étude économique réalisée à sa demande ne permettent pas de s'assurer de l'exactitude de la reconstitution qu'elle propose. 16. Dès lors, l'état du dossier ne permet pas au Conseil d'Etat d'apprécier le montant des dépenses engagées par la société pour l'exécution de ces marchés et qui ont été utiles au département de la Seine-Maritime, pas davantage que les effets de l'érosion monétaire jusqu'à la date du 26 mars 2015, à laquelle la demande du département a été enregistrée devant le tribunal administratif de Rouen, sur les prix payés par le département au titre des marchés annulés et les dépenses utiles exposées par la société Lacroix City Saint-Herblain. Il y a donc lieu, avant de statuer sur la requête d'appel de la société Lacroix City Saint Herblain, d'ordonner une expertise sur ces deux points appréciés selon les principes rappelés au point 4. Il y a lieu de donner également mission à l'expert de concilier les parties si faire se peut à l'issue des opérations d'expertise. En ce qui concerne l'appel incident du département de la Seine-Maritime portant sur le préjudice lié à l'indisponibilité des sommes correspondant au surcoût des marchés : 17. Si le département de la Seine-Maritime soutient que le comportement dolosif de la société Lacroix City Saint-Herblain lui a causé un préjudice lié à l'indisponibilité des sommes correspondant au surcoût des marchés jusqu'à la date de sa demande d'intérêts, le seul préjudice qu'il allègue avoir subi tient à l'impossibilité de se désendetter du montant correspondant. Ce préjudice n'étant pas indemnisable, le département de la Seine-Maritime n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté ses conclusions relatives à l'indemnisation du préjudice qu'il alléguait avoir subi du fait de l'indisponibilité des sommes d'argent correspondant au surcoût des marchés. D E C I D E : -------------- Article 1er : Les articles 1er, 2 et 3 de l'arrêt du 7 mai 2021 de la cour administrative d'appel de Douai sont annulés en tant qu'ils ne font que partiellement droit à l'appel principal de la société Lacroix City Saint-Herblain s'agissant des conséquences financières de l'annulation du contrat, ainsi que ses articles 4 et 5, et enfin son article 6 en tant qu'il rejette les conclusions présentées par la société Lacroix City Saint-Herblain au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les conclusions d'appel incident du département de la Seine-Maritime tendant à l'indemnisation du préjudice qu'il allègue avoir subi du fait de l'indisponibilité des sommes correspondant au surcoût des marchés. Article 2 : Les conclusions d'appel incident du département de la Seine-Maritime tendant à l'indemnisation du préjudice qu'il allègue avoir subi du fait de l'indisponibilité des sommes correspondant au surcoût des marchés sont rejetées. Article 3 : Il sera, avant de statuer sur les autres conclusions de la requête d'appel de la société Lacroix City Saint-Herblain, procédé par un expert, désigné par le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, à une expertise avec mission : - de déterminer le montant des dépenses engagées par cette société dans le cadre des marchés n°s 99-673, 99-677, 99-678, 99-682, 99-685, 99-687, 99-689, 99-690, 99-692 et 99-694, n° 2003-257 et n° 2006-311 et qui ont été utiles au département de la Seine-Maritime ; - d'actualiser, jusqu'à la date du 26 mars 2015, tant les sommes versées par le département de la Seine-Maritime que les dépenses engagées par la société dans le cadre de ces différents marchés et qui ont été utiles au département, pour tenir compte de l'érosion monétaire. Article 4 : Il est donné mission à l'expert de concilier les parties si faire se peut à l'issue de ses opérations d'expertise. Article 5 : L'expert prêtera serment par écrit ou devant la secrétaire du contentieux du Conseil d'Etat ; le rapport d'expertise sera déposé au secrétariat du contentieux dans le délai de six mois suivant la prestation de serment. Article 6 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance. Article 7 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par la présente décision, sont réservés jusqu'en fin d'instance. Article 8 : La présente décision sera notifiée à la société Lacroix City Saint-Herblain et au département de la Seine-Maritime. Délibéré à l'issue de la séance du 13 avril 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; M. Olivier Rousselle, Mme Anne Courrèges, M. Benoît Bohnert, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat et M. Alexis Goin, auditeur-rapporteur. Rendu le 17 juin 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé Le rapporteur : Signé : M. Alexis Goin La secrétaire : Signé : Mme Nadine Pelat [RJ1] Cf., s’agissant de la règle générale, CE, Section, 10 avril 2008, Decaux et département des Alpes-Maritimes, n°s 244950 284439 248607, p. 151 ; s’agissant d’un contrat annulé en raison de pratiques anticoncurrentielles constitutives d’un vice du consentement, CE, 10 juillet 2020, Société Lacroix Signalisation, n° 420045, p. 276. ...[RJ2] Cf. CE, Section, 10 avril 2008, Decaux et département des Alpes-Maritimes, n°s 244950 284439 248607, p. 151....[RJ3] Cf. CE, 9 juin 2020, Société Espace Habitat Construction, n° 420282, T. pp. 831-835-980.
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Vu la procédure suivante : La société Henri Berruer, venant aux droits de la société Benichou Legrain Berruer, a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de la décision du 26 août 2010 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale de Paris l'a autorisée à licencier M. B... A.... Par un jugement n° 1519414/3-2 du 25 janvier 2017, le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser une somme de 32 052,66 euros, assortie des intérêts au taux légal. Par un arrêt n° 17PA01038 du 20 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Paris a, sur les appels de la société Henri Berruer et de la ministre du travail, condamné l'Etat à verser à la société Henri Berruer une somme de 96 232,82 euros, assortie des intérêts au taux légal. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 février et 28 juillet 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Henri Berruer demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il n'a pas intégralement fait droit à ses conclusions d'appel ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code du travail ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Laurent Cabrera, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de la société Henri Berruer ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 mai 2022, présentée par la société Henri Berruer ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 26 août 2010, confirmée sur recours hiérarchique par la ministre chargée du travail, l'inspecteur du travail du secteur Nord-Est de Paris a autorisé la société Benichou Legrain Berruer à licencier M. A.... Ces décisions ont été annulées par un jugement du 4 avril 2013 du tribunal administratif de Paris devenu définitif, au motif que la lettre par laquelle l'employeur avait convoqué le salarié à un entretien préalable mentionnait uniquement la possibilité pour l'intéressé de se faire assister, lors de l'entretien, par une personne de son choix appartenant obligatoirement au personnel de l'entreprise, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1232-4 du code du travail. Par un arrêt du 1er mars 2018, la cour d'appel de Paris a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M. A... et condamné la société Henri Berruer, venant aux droits de la société Benichou Legrain Berruer, à indemniser le salarié. La société Henri Berruer a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser une somme de 346 568,45 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à raison de l'illégalité des décisions ayant autorisé le licenciement de M. A.... Par un jugement du 25 janvier 2017, le tribunal administratif a condamné l'Etat à verser à la société la somme de 32 052,66 euros. Par un arrêt du 20 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Paris, sur appel de la société Henri Berruer et appel incident de la ministre du travail, a porté à la somme de 96 232,82 euros l'indemnité mise à la charge de l'État. La société Henri Berruer se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il n'a pas intégralement fait droit à ses conclusions d'appel. 2. En application des dispositions du code du travail, le licenciement d'un salarié protégé ne peut intervenir que sur autorisation de l'autorité administrative. L'illégalité de la décision autorisant un tel licenciement constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique à l'égard de l'employeur, pour autant qu'il en soit résulté pour celui-ci un préjudice direct et certain. Sur le partage de responsabilité : 3. En application des principes généraux de la responsabilité de la puissance publique, il peut le cas échéant être tenu compte, pour déterminer l'étendue de la responsabilité de l'Etat à l'égard de l'employeur à raison de la délivrance d'une autorisation de licenciement entachée d'illégalité, au titre notamment du versement au salarié des indemnités mises à la charge de l'employeur par le juge judiciaire, de la faute également commise par l'employeur en sollicitant la délivrance d'une telle autorisation. 4. Aux termes de l'article L. 1232-2 du code du travail : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. (...) ". Aux termes de l'article L. 1232-4 du même code : " Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. / Lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative. / La lettre de convocation à l'entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller du salarié et précise l'adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition. " L'article R. 1232-1 de ce code dispose enfin que : " La lettre de convocation prévue à l'article L. 1232-2 (...) rappelle que le salarié peut se faire assister pour cet entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, en l'absence d'institutions représentatives dans l'entreprise, par un conseiller du salarié ". Il résulte de ces dispositions que, en l'absence d'institution représentative du personnel au sein d'une entreprise, la lettre de l'employeur convoquant le salarié à l'entretien préalable au licenciement doit mentionner la possibilité pour le salarié convoqué de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou par un conseiller du salarié. Lorsque ces mentions ne figurent pas dans la lettre, la procédure est, en principe, entachée d'irrégularité. 5. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Paris a retenu que la lettre de convocation à l'entretien préalable, adressée par la SCP Benichou Legrain Berruer à M. A..., ne comportait pas la mention de la possibilité, pour l'intéressé, de se faire assister par un conseiller du salarié lors de son entretien préalable alors que cette société ne comportait pas d'institution représentative du personnel. En jugeant qu'une telle convocation entachait la procédure de licenciement de M. A... d'irrégularité et en déduisant, d'une part, que l'autorité administrative avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité en autorisant le licenciement de M. A... et que, d'autre part, la SCP Benichou Legrain Berruer, qui avait rédigé cette lettre, avait elle-même commis une faute de nature à exonérer partiellement celle de l'Etat, la cour administrative d'appel n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce. Sur les préjudices : En ce qui concerne l'indemnité versée au titre de l'article L. 2422-4 du code du travail : 6. Aux termes de l'article L. 2422-4 du code du travail : " Lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L. 2422-1 a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision. / L'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois s'il n'a pas demandé sa réintégration. (...) " . 7. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Paris a limité l'indemnité accordée à la société Henri Berruer au titre du préjudice né du versement au salarié, par cette société, de l'indemnité due au titre de l'article L. 2422-4 du code du travail, à la période comprise entre la date du licenciement et le 9 octobre 2014, date à laquelle la cour d'appel de Paris statuant en référé a ordonné à l'employeur la réintégration sous astreinte du salarié dans son emploi de clerc principal ou un emploi équivalent. Elle a ainsi exclu du préjudice indemnisable l'indemnité versée au titre de la période comprise entre la date de l'arrêt de la cour d'appel et, en l'absence de réintégration effective, celle de la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail. En estimant que cette partie du préjudice trouvait sa cause directe et exclusive dans la faute commise par l'employeur, elle n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce. 8. Il résulte de ce qui est dit au point précédent que le moyen tiré, par la société Berruer, de ce que les dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers faisaient obstacle à la réintégration du salarié était inopérant, s'agissant de la part d'indemnité mentionnée au point 7. Par suite, la société Berruer ne peut utilement soutenir que l'arrêt serait entaché d'insuffisance de motivation et d'erreur de droit en ce qu'il juge par un motif surabondant, pour refuser d'indemniser cet élément de préjudice, que ces dispositions ne faisaient pas en l'espèce obstacle à la réintégration du salarié. Est également inopérant, pour le même motif, le moyen tiré de ce que la cour administrative d'appel de Paris aurait commis une erreur de droit en se fondant sur une décision de la cour d'appel de Paris rendue en référé et dépourvue, par suite, d'autorité de chose jugée. En ce qui concerne les frais mis à la charge de la société Henri Berruer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 9. Les frais de justice exposés devant le juge administratif en conséquence directe d'une faute de l'administration sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de la faute imputable à celle-ci, dans les conditions suivantes. Lorsqu'une partie avait la qualité de demanderesse à une instance à l'issue de laquelle le juge annule pour excès de pouvoir une décision administrative illégale, la part de son préjudice correspondant à des frais exposés et non compris dans les dépens est réputée intégralement réparée par la décision que prend le juge dans l'instance en cause sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Lorsqu'en revanche une partie autre que l'administration ayant pris la décision illégale avait la qualité de défenderesse à une telle instance ou relève appel du jugement rendu à l'issue de l'instance ayant annulé cette décision, les frais de justice utilement exposés par elle, ainsi que, le cas échéant, les frais mis à sa charge par le juge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de la faute imputable à l'administration. 10. La société Benichou Legrain Berruer était appelante du jugement du 4 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la décision administrative l'ayant autorisée à licencier M. A.... En jugeant que les frais mis à la charge de cette société au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par l'arrêt du 9 décembre 2013 ayant rejeté l'appel de la société, ne constituaient pas un élément de préjudice indemnisable, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit. 11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Henri Berruer n'est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué qu'en tant qu'il a statué sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice consistant dans les frais mis à la charge de société Benichou Legrain Berruer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par l'arrêt du 9 décembre 2013 rejetant son appel contre le jugement du 4 avril 2013 du tribunal administratif de Paris. 12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, dans la mesure de la cassation prononcée, et de statuer sur l'appel incident de la ministre du travail dans cette même mesure. 13. La somme de 1 500 euros mise à la charge de la société Benichou Legrain Berruer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, partie perdante à l'instance d'appel contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 25 janvier 2017 ayant annulé la décision du 26 août 2010 ayant autorisé le licenciement de M. A..., constitue pour cette société un préjudice direct et certain, dont elle est fondée à obtenir réparation. Il y a cependant lieu, compte tenu du partage de responsabilité retenu par la cour administrative d'appel de Paris, dont l'arrêt n'est pas remis en cause sur ce point, de ne condamner l'Etat à indemniser la société Henri Berruer que de la moitié du préjudice subi à ce titre par l'employeur, soit la somme de 750 euros. 14. Il résulte de ce qui est dit au point 13 que la ministre du travail est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros, au lieu de 750 euros, à la société Benichou Legrain Berruer. Il y a lieu, par voie de conséquence, de réformer en ce sens le jugement du 25 janvier 2017. Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 20 décembre 2019 est annulé en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice consistant dans les frais mis à la charge de la société Benichou Legrain Berruer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par son arrêt du 9 décembre 2013. Article 2 : A l'article 1er de cet arrêt, la somme de 96 232,82 euros que l'Etat est condamné à verser à la société Berruer est portée à la somme de 96 982,82 euros. Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 25 janvier 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision. Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté. Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Henri Berruer et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. [RJ1] Cf., en l’étendant, CE, 4 novembre 2020, Société financière Mag, venant aux droits de la Société Novopac, n° 428741, T. pp. 992-1038-1039. ...[RJ2] Rappr. CE, 15 octobre 2021, Société 2AB et Commune de Pézenas, n°s 436725 436746, à mentionner aux Tables.
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Vu la procédure suivante : Le comité d'entreprise de l'unité économique et sociale (UES) Hop !, le Syndicat CGT Hop !, la CFDT Groupe Air France SPASAF, l'Union de l'encadrement Hop ! CFE-CGC FNEMA, le syndicat UNSA Aérien et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 5 février 2019 par laquelle la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Hop !. Par un jugement n° 1903205 du 5 juillet 2019, le tribunal administratif a annulé cette décision. Par un arrêt n° 19PA02896, 19PA02901 du 19 novembre 2019 la cour administrative d'appel de Paris a, sur appels de la société Hop ! et de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, annulé ce jugement et rejeté la demande présentée devant le tribunal administratif de Melun. Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 20 janvier et 6 août 2020 et les 3 mai et 30 juin 2021, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Comité social et économique de l'UES Hop !, le Syndicat CGT Hop !, l'Union de l'encadrement Hop ! CFE-CGC FNEMA et M. B... demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les requêtes d'appel ; 3°) de mettre à la charge de l'État et de la société Hop ! la somme de 5 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code du travail ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Thalia Breton, auditrice, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat du comité social et économique de l'Union économique et sociale Hop !, du syndicat CGT Hop ! confédération générale du travail de la société Hop !, de la société CFE-CGC/FNEMA - syndicat Union de l'encadrement Hop ! et de M. A... B... et à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la société Hop ! ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que, par une décision du 5 février 2019, la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Hop !. Par un jugement du 5 juillet 2019, le tribunal administratif de Melun a, sur demande du comité d'entreprise de l'unité économique et sociale (UES) Hop !, des syndicats CGT Hop !, CFDT Groupe Air France SPASAF, Union de l'encadrement Hop ! CFE-CGC FNEMA, UNSA Aérien et de M. A... B..., salarié de la société Hop !, annulé cette décision. Le comité social et économique de l'UES Hop ! et autres se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 19 novembre 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, sur appels de la société Hop ! et de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, annulé le jugement et rejeté leur demande. Sur les moyens tirés de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi : 2. En premier lieu, d'une part, s'agissant du plan de sauvegarde de l'emploi devant précéder les licenciements pour motif économique de plus de dix salariés, aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement sur le territoire national des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile. " Aux termes de l'article L. 1233-62 du même code : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des mesures telles que : / 1° Des actions en vue du reclassement interne sur le territoire national, des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-24-4 du même code : " A défaut d'accord (...), un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité social et économique fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur. ". Aux termes de l'article L. 1233-57-3 du même code : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique, le respect, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 ". 3. Il résulte de l'ensemble des dispositions citées ci-dessus que, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier la conformité de ce document et du plan de sauvegarde de l'emploi dont il fixe le contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles applicables, en s'assurant notamment du respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du même code. A ce titre, elle doit, au regard de l'importance du projet de licenciement, apprécier si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si, à raison, pour chacune, de sa contribution aux objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à ces objectifs compte tenu, d'une part, des efforts de formation et d'adaptation déjà réalisés par l'employeur et, d'autre part, des moyens dont disposent l'entreprise et, le cas échéant, l'unité économique et sociale et le groupe. 4. D'autre part, concernant le licenciement pour motif économique d'un salarié, qu'il soit ou non précédé d'un plan de sauvegarde de l'emploi, aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. / (...) L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ". 5. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'au stade du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi d'une entreprise, il revient notamment à l'autorité administrative de s'assurer qu'en application des articles L. 1233-61 et suivants du code du travail, le plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi est de nature à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, que l'employeur a identifié dans le plan l'ensemble des possibilités de reclassement des salariés dans l'entreprise et, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, que l'employeur, seul débiteur de l'obligation de reclassement, a procédé à une recherche sérieuse des postes disponibles pour un reclassement sur le territoire national dans les autres entreprises du groupe, quelle que soit la durée des contrats susceptibles d'être proposés pour pourvoir à ces postes, en indiquant dans le plan, pour l'ensemble des postes de reclassement ainsi identifiés, leur nombre, leur nature et leur localisation. En revanche, à ce stade de la procédure, il ne lui appartient pas de contrôler le respect de l'obligation qui, en application de l'article L. 1233-4 du code du travail, incombe à l'employeur qui projette de licencier un salarié pour motif économique, consistant à procéder, préalablement à son licenciement, à une recherche sérieuse des postes disponibles pour le reclassement de ce salarié, qu'ils soient ou non prévus au plan de sauvegarde de l'emploi, en vue d'éviter autant que de possible ce licenciement. Il en va ainsi même lorsque le document unilatéral arrêtant le plan de sauvegarde d'emploi comporte des garanties relatives à la mise en œuvre de l'obligation, prévue à l'article L. 1233-4 du code du travail, de recherche sérieuse de reclassement individuel. Au demeurant, de telles garanties, dont les salariés pourront, le cas échéant, se prévaloir, pour contester leur licenciement, ne sont pas de nature à dispenser l'employeur de respecter, dans toute son étendue, l'obligation qui lui incombe en vertu de l'article L. 1233-4 du code du travail. 6. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Hop ! comporte une liste de postes de reclassement disponibles au sein de la société Hop ! et au sein du groupe AF-KLM assortie des précisions quant aux postes en cause, des garanties quant au calendrier de transmission aux salariés de propositions de reclassement indiquant qu'une offre d'emploi personnalisée sera faite aux salariés concernés par écrit à compter du 21 février 2019, de même que des éléments relatifs à des dispositifs d'accompagnement du reclassement externe. En jugeant que l'autorité administrative avait pu légalement retenir que ce plan de sauvegarde de l'emploi arrêté par le document unilatéral qui lui était soumis était suffisant, au regard des moyens de l'entreprise Hop ! et du groupe auquel elle appartient et compte tenu de l'ensemble des mesures qu'il comporte, dont celles figurant à son plan de reclassement, la cour administrative d'appel de Paris, qui a suffisamment motivé son arrêt, n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis, ni commis d'erreur de droit, eu égard au contrôle qui lui incombe, en particulier quant au plan de reclassement ainsi qu'il a été dit aux points 3, 4 et 6. A cet égard, les circonstances, d'une part, que le plan de reclassement ne mentionne dans ses développements consacrés aux éléments de calendrier la diffusion aux salariés que d'une seule offre de reclassement, d'autre part, que la liste de postes de reclassement annexée à ce plan ne prévoit pas de critères de départage en cas de candidatures multiples sur un même poste, sont en tout état de cause sans influence sur l'étendue de l'obligation qui pèse sur l'employeur au stade du licenciement en application de l'article L. 1233-4 du code du travail. Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise : 7. D'une part, aux termes de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, dans sa version applicable au litige : " En l'absence d'accord collectif (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise (...) ". 8. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 1233-28 du code du travail que l'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours doit réunir et consulter, selon le cas, le comité d'entreprise ou les délégués du personnel. A ce titre, le I de l'article L. 1233-30 du même code, dans sa version applicable au litige, dispose, s'agissant des entreprises ou établissements qui emploient habituellement au moins cinquante salariés, que : " (...) l'employeur réunit et consulte le comité d'entreprise sur : / 1° L'opération projetée et ses modalités d'application, conformément à l'article L. 2323-15 ; / 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d'emploi, les catégories professionnelles concernées, les critères d'ordre et le calendrier prévisionnel des licenciements, les mesures sociales d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi. (...) Le comité d'entreprise tient au moins deux réunions espacées d'au moins quinze jours ". Aux termes de l'article L. 1233-31 du même code, dans sa version applicable : " L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la première réunion, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif. / Il indique : / 1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ; / 2° Le nombre de licenciements envisagé ; / 3° Les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l'ordre des licenciements ; / 4° Le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l'établissement ; / 5° Le calendrier prévisionnel des licenciements ; / 6° Les mesures de nature économique envisagées. " 9. Il résulte des dispositions citées ci-dessus que, lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise a été régulière. Elle ne peut légalement accorder l'homologation demandée que si le comité a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part sur l'opération projetée et ses modalités d'application et, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi. Il appartient à ce titre à l'administration de s'assurer que l'employeur a adressé au comité d'entreprise, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité, tous les éléments utiles pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause. Lorsque l'entreprise appartient à un groupe et que l'employeur est, par suite, amené à justifier son projet au regard de la situation économique du secteur d'activité dont relève l'entreprise au sein de ce groupe, les éléments d'information adressés par l'employeur au comité d'entreprise doivent porter non seulement sur la situation économique du secteur d'activité qu'il a lui-même pris en considération, mais aussi sur les raisons qui l'ont conduit à faire reposer son analyse sur ce secteur d'activité. 10. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour a estimé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que le comité d'entreprise a pu se prononcer lors de sa réunion du 18 janvier 2019 sur l'opération projetée et le plan de sauvegarde de l'emploi et que le secteur économique au regard duquel l'employeur devait justifier son projet et son motif économique était clairement identifié comme celui de l'activité court-courrier du groupe Air France dans le livre 2 du projet de réorganisation. En en déduisant que les informations transmises au comité d'entreprise quant au secteur d'activité retenu n'étaient pas insuffisantes et que le comité d'entreprise avait pu émettre ses avis en toute connaissance de cause, contrairement à ce qui était soutenu, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit. Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions du travail : 11. Aux termes de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, dans sa version applicable au litige : " En l'absence d'accord collectif (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) la régularité de la procédure d'information et de consultation (...), le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (...) ". Aux termes de l'article L. 4612-8-1 du même code, dans sa version applicable au litige : " Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est consulté avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et, notamment, avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l'outillage, d'un changement de produit ou de l'organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail. " Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que lorsque l'autorité administrative est saisie d'une demande de validation d'un accord collectif ou d'homologation d'un document unilatéral fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi pour une opération qui, parce qu'elle modifie de manière importante les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des salariés de l'entreprise, requiert la consultation du ou des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) concernés, elle ne peut légalement accorder la validation ou l'homologation demandée que si cette consultation a été régulière. 12. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 4614-9 du même code, dans sa version applicable au litige : " Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail reçoit de l'employeur les informations qui lui sont nécessaires pour l'exercice de ses missions, ainsi que les moyens nécessaires à la préparation et à l'organisation des réunions et aux déplacements imposés par les enquêtes ou inspections. " Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'administration, saisie dans les conditions mentionnées au point précédent, de s'assurer, en tenant compte des conditions dans lesquelles l'expert le cas échéant désigné a pu exercer sa mission, que le ou les CHSCT concernés ont pu, lorsque leur consultation est requise, se prononcer sur l'opération projetée en toute connaissance de cause. 13. D'une part, il résulte des termes mêmes de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel a estimé que l'analyse de l'expert mandaté par le CHSCT de la société Hop ! était suffisamment précise et détaillée pour que le CHSCT ait pu se prononcer en toute connaissance de cause. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêt attaqué est entaché d'erreur de droit en ce qu'il omet de rechercher si les informations dont disposait le CHSCT correspondaient aux informations utiles à l'exercice de sa mission. 14. D'autre part, en estimant que dès lors que des informations relatives à l'impact des suppressions de postes sur les missions au sein de l'entreprise ont été transmises par l'employeur à l'expert désigné par le CHSCT, qui a présenté dans son rapport, remis au CHSCT avant que ce dernier, conformément aux dispositions de l'article L. 4612-8-1 du code du travail, prenne position sur l'opération projetée, les conséquences de la réorganisation envisagée sur la gouvernance de chaque direction, la charge de travail, le recours à l'intérim et aux contrats à durée déterminée et les risques psycho-sociaux, et que par suite, les informations transmises au CHSCT n'étaient pas insuffisantes, la cour a porté sur les pièces du dossier qui lui était soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation. Sur le moyen tiré de l'illégalité des catégories professionnelles définies par le plan de sauvegarde de l'emploi : 15. Aux termes de l'article L. 1233-24-2 du code du travail : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233 63. / Il peut également porter sur : (...) 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées (...) ". L'article L. 1233-57-3 du même code prévoit qu'en l'absence d'accord collectif, ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 (...) ". 16. En vertu de ces dispositions, il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document qui fixe les catégories professionnelles mentionnées au 4° de l'article L. 1233-24-2 cité ci-dessus, de s'assurer, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d'information et de consultation ainsi que des justifications qu'il appartient à l'employeur de fournir, que ces catégories regroupent, en tenant compte des acquis de l'expérience professionnelle qui excèdent l'obligation d'adaptation qui incombe à l'employeur, l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Au terme de cet examen, l'administration refuse l'homologation demandée s'il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations, telles que l'organisation de l'entreprise ou l'ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s'il apparaît qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée. 17. Il résulte des termes mêmes de la décision attaquée que la cour administrative d'appel a estimé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que, si le document unilatéral de la société Hop ! distinguait trente-trois catégories professionnelles, dont certaines présentaient des intitulés proches, il ne ressortait pas des pièces du dossier qui lui était soumis qu'elles auraient été déterminées sur le fondement de considérations étrangères à celles qui permettent de regrouper les salariés par fonctions de même nature ou sans tenir compte des acquis de l'expérience professionnelle qui excèdent l'obligation d'adaptation incombant à l'employeur, ni que le choix des catégories professionnelles aurait eu pour but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression était recherchée. Par suite, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la cour administrative d'appel a pu sans erreur de droit retenir que la définition des catégories professionnelles par le plan litigieux ne faisait pas obstacle à ce que l'administration procède à son homologation. 18. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt du 19 novembre 2019 de la cour administrative d'appel de Paris qu'ils attaquent. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme mise à ce titre à la charge de la société Hop ! et de l'État qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du Comité social et économique de l'UES Hop !, du Syndicat CGT Hop !, de l'Union de l'encadrement Hop ! CFE-CGC FNEMA et de M. B... est rejeté. Article 2 : Les conclusions présentées par la société Hop ! au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente décision sera notifiée au Comité social et économique de l'Union économique et sociale Hop !, au Syndicat CGT Hop !, à l'Union de l'encadrement Hop ! CFE-CGC FNEMA, à M. A... B..., à la société Hop ! et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Délibéré à l'issue de la séance du 25 mai 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Yves Doutriaux, Mme Carine Soulay, Mme Fabienne Lambolez, M. Jean-Luc Nevache, M. Damien Botteghi, conseillers d'Etat et Mme Thalia Breton, auditrice-rapporteure. Rendu le 20 juin 2022. Le président : Signé : M. Rémy Schwartz La rapporteure : Signé : Mme Thalia Breton La secrétaire : Signé : Mme Sylvie Alleil [RJ1] Cf. CE, Assemblée, 22 juillet 2015, Syndicat CGT de l’union locale de Calais et environs, n° 383481, p. 265 ; CE, 30 mai 2016, Me Deltour et autres, n°s 383928 et autres, T. pp. 909-976. Rappr., s’agissant de l’obligation de recherche sérieuse des possibilités de reclassement d’un salarié protégé, CE, 12 avril 2022, Société ACM, n° 443229, à mentionner aux Tables.
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La société Laury-Chalonges Dis a demandé à la cour d'appel administrative de Nantes d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 20 décembre 2018 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a refusé de lui délivrer une autorisation d'exploitation commerciale en vue de l'extension de 1 450 m2 du magasin qu'elle exploite sous l'enseigne " Espace culturel E. Leclerc " dans l'ensemble commercial " Pôle Sud " à Basse-Goulaine (Loire-Atlantique). Par un arrêt n° 19NT00846 du 13 mai 2020, la cour administrative d'appel a annulé cette décision. Par un pourvoi enregistré le 9 juillet 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la relance et la Commission nationale d'aménagement commercial demandent au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de commerce ; - le code de l'urbanisme ; - la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Laury-chalonges dis ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par une décision du 13 septembre 2018, la commission départementale d'aménagement commercial de la Loire-Atlantique a accordé à la société Laury-Chalonges Dis une autorisation d'exploitation commerciale en vue de l'extension de 1 450 m2 du magasin de 800 m2 qu'elle exploite sous l'enseigne " Espace culturel E. Leclerc " dans l'ensemble commercial " Pôle Sud ", dont la surface totale est de 40 630 m2, situé sur le territoire de la commune de Basse-Goulaine. La Commission nationale d'aménagement commercial s'est saisie du projet sur le fondement des dispositions du V de l'article L. 752-1 du code de commerce et, par une décision du 20 décembre 2018, a refusé d'accorder l'autorisation sollicitée. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance et la Commission nationale d'aménagement commercial se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 13 mai 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé la décision du 20 décembre 2018. 2. Aux termes de l'article L 752-1 du code de commerce: " Sont soumis à une autorisation d'exploitation commerciale les projets ayant pour objet : (...) / 5° L'extension de la surface de vente d'un ensemble commercial ayant déjà atteint le seuil des 1 000 mètres carrés ou devant le dépasser par la réalisation du projet ; (...)". Aux termes de l'article L 752-17 du même code : "(...) / II.-Lorsque la réalisation du projet ne nécessite pas de permis de construire, les personnes mentionnées au premier alinéa du I peuvent, dans un délai d'un mois, introduire un recours contre la décision de la commission départementale d'aménagement commercial./. (...). / III.-La commission départementale d'aménagement commercial informe la Commission nationale d'aménagement commercial de tout projet mentionné à l'article L. 752-1 dont la surface de vente atteint au moins 20 000 mètres carrés, dès son dépôt. / IV. La commission départementale d'aménagement commercial doit, dès le dépôt du dossier de demande, informer la Commission nationale d'aménagement commercial de tout projet mentionné à l'article L. 752-1 dont la surface de vente est supérieure à 20 000 mètres carrés ou ayant déjà atteint le seuil de 20 000 mètres carrés ou devant le dépasser par la réalisation du projet. / V. La Commission nationale d'aménagement commercial peut se saisir de tout projet mentionné à l'article L. 752-1 dont la surface de vente atteint au moins 20 000 mètres carrés dans le délai d'un mois suivant l'avis émis par la commission départementale d'aménagement commercial conformément au I du présent article ou suivant la décision rendue conformément au II. Elle émet un avis ou rend une décision sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L. 752-6. Cet avis ou cette décision se substitue à celui de la commission départementale. (...). ". 3. Il résulte des dispositions combinées des III, IV et V de l'article L. 752-17 du code de commerce, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises dont elles sont issues, que le législateur a entendu, en prévoyant que la Commission nationale d'aménagement commercial est systématiquement informée des projets dont la surface de vente est supérieure ou égale à 20 000 mètres carrés et de ceux ayant déjà atteint ce seuil ou devant le dépasser par la réalisation du projet, que la Commission nationale puisse s'autosaisir de l'ensemble de ces projets, et non seulement de ceux dont la surface de vente devant être autorisée est supérieure ou égale à 20 000 m2. 4. Ainsi qu'il est dit au point 1, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le projet litigieux consiste en une extension de 1 450 m2, ne nécessitant pas la délivrance d'un nouveau permis de construire, d'un magasin d'une surface de vente de 800 m2, situé dans un ensemble commercial dont la surface de vente totale est de 40 630 m². Il résulte de ce qui est dit au point 2 qu'en jugeant que la Commission nationale d'aménagement commercial ne pouvait légalement se saisir de ce projet au motif que sa surface de vente propre est inférieure à 20 000 m2, la cour administrative d'appel de Nantes a entaché son arrêt d'erreur de droit. Par suite, le ministre de l'économie, des finances et de la relance et la Commission nationale d'aménagement commercial sont fondés à en demander l'annulation. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, agissant tant en son nom propre qu'en sa qualité de personne morale au nom de laquelle agit la Commission nationale d'aménagement commercial, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 13 mai 2020 est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes. Article 3 : Les conclusions présentées par la société Laury-Chalonges Dis au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la société Laury-Chalonges Dis. Délibéré à l'issue de la séance du 25 mai 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Yves Doutriaux, Mme Carine Soulay, Mme Fabienne Lambolez, M. Jean-Luc Nevache, conseillers d'Etat ; Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat-rapporteure et M. Damien Botteghi, conseiller d'Etat. Rendu le 20 juin 2022. Le président : Signé : M. Rémy Schwartz La rapporteure : Signé : Mme Françoise Tomé La secrétaire : Signé : Mme Sylvie Alleil
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Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 28 mai 2015 par laquelle la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a, d'une part, retiré sa décision implicite née le 22 avril 2015 et annulé la décision du 17 novembre 2014 de l'inspecteur du travail de la 16ème section de l'unité territoriale Nord-Lille refusant d'autoriser l'établissement public industriel et commercial Société Nationale des Chemins de fer français Mobilités (SNCF Mobilités) à procéder à son licenciement pour faute et, d'autre part, accordé l'autorisation de licenciement sollicitée. Par un jugement n° 1505972 du 14 décembre 2016, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 17DA00295 du 13 juin 2019, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté son appel contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 octobre 2019 et 10 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de la société SNCF Mobilités la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, son avocat, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code du travail ; - la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 50-637 du 1er juin 1950 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Laurent Cabrera, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de M. A... et au cabinet Rousseau, Tapie, avocat de la société SNCF Mobilités ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... a été recruté en 1983 par la Société Nationale des Chemins de fer Français (SNCF). Assistant de gestion au Campus Lille, organisme de formation interne rattaché à la direction régionale SNCF de Lille, il exerçait le mandat de représentant syndical depuis avril 2014. Par une décision du 17 novembre 2014, l'inspecteur du travail a refusé d'accorder l'autorisation de licencier M. A... pour faute, sollicitée par l'établissement public industriel et commercial SNCF Mobilités. Sur recours de cet établissement, la ministre du travail, par décision du 20 mai 2015, après avoir retiré sa décision implicite née le 22 avril 2015, a annulé la décision de l'inspecteur du travail et autorisé le licenciement de M. A.... Le tribunal administratif de Lille, par un jugement du 14 décembre 2016, a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision. M. A... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 13 juin 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté son appel contre ce jugement. 2. De première part, en vertu de l'article L. 2111-1 du code du travail, les dispositions du livre Ier de la deuxième partie de ce code, relatif aux syndicats professionnels, telles celles relatives au délégué syndical ou au représentant de section syndicale, ainsi que, par suite, celles de son livre IV de la même partie, notamment relatives à leur protection, s'appliquaient, à la date de la décision attaquée, au personnel des entreprises publiques soumises à un statut règlementaire, tel que le personnel de la SNCF, sous réserve des dispositions particulières ayant le même objet résultant du statut qui régit ce personnel. 3. De deuxième part, aux termes de l'article 10.1 du statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel prévu par l'article 1er du décret n° 50-637 du 1er juin 1950 modifiant les attributions du conseil d'administration de la Société Nationale des Chemins de fer Français en matière de personnel, alors en vigueur : " Chaque syndicat qui satisfait aux critères de l'article L. 2142-1 du Code du Travail peut constituer une section syndicale et désigner, s'il n'est pas représentatif, un représentant de la section syndicale. Celui-ci bénéficie des dispositions légales le concernant prévues aux articles L. 142-1 et suivants du code du travail et des mêmes prérogatives que le délégué syndical, à l'exception du pouvoir de négocier des accords collectifs ". Aux termes de l'article L. 2142-1-1 du code du travail : " chaque syndicat qui constitue, conformément à l'article L. 2142-1, une section syndicale au sein de l'entreprise (...) peut, s'il n'est pas représentatif dans l'entreprise (...), désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l'entreprise (...) " et " le représentant de la section syndicale (...) bénéficie des mêmes prérogatives que le délégué syndical, à l'exception du pouvoir de négocier des accords collectifs ". En raison, tant de son mode de désignation que des fonctions qui lui sont attribuées, le représentant d'une section syndicale au sein de la SNCF doit être regardé comme relevant d'une catégorie de même nature que le représentant de la section syndicale prévu par le code du travail, et, à ce titre, bénéficie, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'il représente, de la protection allouée aux délégués syndicaux par les dispositions du code du travail. 4. De troisième part, aux termes de l'article R. 2421-6 du code du travail : " En cas de faute grave, l'employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l'intéressé jusqu'à la décision de l'inspecteur du travail. / Lorsque le délégué syndical bénéficie de la protection prévue à l'article L. 2421-3, la consultation du comité social et économique a lieu dans un délai de dix jours à compter de la date de la mise à pied. La demande d'autorisation de licenciement est présentée au plus tard dans les quarante-huit heures suivant la délibération du comité social et économique. Si l'avis du comité social et économique n'est pas requis, cette demande est présentée dans un délai de huit jours à compter de la date de la mise à pied. / La mesure de mise à pied est privée d'effet lorsque le licenciement est refusé par l'inspecteur du travail ou, en cas de recours hiérarchique, par le ministre ". 5. Si les dispositions du statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel prévoient pour les agents faisant l'objet d'une mesure de suspension à titre conservatoire, qui s'apparente à une mesure de mise à pied sans suspension du salaire, suivie de l'engagement d'une procédure disciplinaire, des règles particulières comportant notamment en fin de procédure l'intervention du conseil de discipline, aucune d'entre elles ne fixe de délai pour la saisine de l'inspecteur du travail lorsque, s'agissant d'un salarié protégé, sa radiation ou son licenciement est envisagé. Elles ne peuvent ainsi être interprétées comme ayant fixé une règle particulière dérogeant aux dispositions du code du travail figurant au deuxième alinéa de l'article R. 2421-6, dont il résulte que la demande de licenciement doit être adressée dans les huit jours à compter de la consultation du conseil de discipline, au cas où un agent de la SNCF ayant la qualité de représentant d'une section syndicale est susceptible d'être radié à l'issue d'une période de suspension conservatoire. 6. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Paris a jugé que les dispositions précitées de l'article R. 2421-6 du code du travail ne s'appliquaient pas aux agents de la SCNF ayant la qualité de salarié protégé, dès lors qu'aucune disposition législative ne le prévoit et qu'elles ne sont pas plus favorables que celles résultant de leur statut, en particulier, en ce qui concerne la procédure disciplinaire. En statuant ainsi, elle a entaché son arrêt, compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, d'erreur de droit. Il s'ensuit que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, M. A... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 8. Toutefois, pour permettre aux parties de compléter les éléments qu'elles avaient produits devant les juges du fond, notamment quant au bien-fondé de l'appréciation portée par l'autorité administrative sur l'applicabilité à M. A... des dispositions des articles L. 1161-1 et L. 1132-3-3 du code du travail relatives à la protection des lanceurs d'alerte, dans leur rédaction applicable à la date de la décision attaquée, il y a lieu de surseoir à statuer et de rouvrir l'instruction afin de permettre un débat contradictoire. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 13 juin 2019 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé. Article 2 : Il est sursis à statuer sur l'appel de M. A... et sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A..., à la société SNCF Voyageurs, venant aux droits de l'établissement public industriel et commercial SNCF Mobilités, et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Délibéré à l'issue de la séance du 25 mai 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Yves Doutriaux, Mme Carine Soulay, Mme Fabienne Lambolez, M. Jean-Luc Nevache, conseillers d'Etat ; M. Laurent Cabrera, conseiller d'Etat-rapporteur et M. Damien Botteghi, conseiller d'Etat. Rendu le 20 juin 2022. Le président : Signé : M. Rémy Schwartz Le rapporteur : Signé : M. Laurent Cabrera La secrétaire : Signé : Mme Sylvie Alleil
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Vu la procédure suivante : Mme A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir le rapport d'inspection du 3 décembre 2015, la décision du 18 décembre 2015 par laquelle le proviseur du lycée du Parc a modifié ses enseignements à compter du 4 janvier 2016 et les décisions des 12 février et 18 mars 2016 par lesquelles la rectrice de l'académie de Lyon a rejeté ses recours hiérarchiques, d'autre part, de condamner l'Etat au versement de la somme de 8 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de ces décisions. Par un jugement n° 1602263 du 21 mars 2018, le tribunal administratif a rejeté ses demandes. Par un arrêt n° 18LY01882 du 30 janvier 2020, la cour administrative d'appel de Lyon, annulant partiellement ce jugement, a annulé la décision du 18 décembre 2015 ainsi que les décisions des 12 février et 18 mars 2016 et rejeté le surplus des conclusions de l'appel de Mme A.... Par un pourvoi, enregistré le 22 mai 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler les articles 1er à 3 de cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de rejeter l'appel de Mme A.... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'éducation ; - le décret n° 50-581 du 25 mai 1950 ; - le décret n° 68-503 du 30 mai 1968 ; - l'arrêté du 9 août 2004 portant délégation de pouvoirs du ministre chargé de l'éducation aux recteurs d'académie en matière de gestion des personnels enseignants, d'éducation, d'information et d'orientation de l'enseignement du second degré ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de Mme B... A... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A..., professeure agrégée de sciences industrielles de l'ingénieur, devenue professeure de chaire supérieure le 1er octobre 2015, a été affectée au lycée du Parc à Lyon à compter du 1er septembre 2015 par un arrêté du 10 septembre 2015 de la rectrice de l'académie de Lyon afin d'assurer un service d'enseignement en classe préparatoire. Au vu notamment des conclusions d'un rapport d'inspection relatif aux enseignements dispensés par Mme A..., le proviseur du lycée du Parc a, par une décision du 18 décembre 2015, modifié le service d'enseignement assuré par l'intéressée à compter du 4 janvier 2016, en lui attribuant des enseignements de sa discipline en classe préparatoire de première année de physique et sciences de l'ingénieur (PSI) et en lui retirant certains des enseignements qu'elle assurait en classe de 2PSI " étoile ". Cette décision a eu pour effet de réduire les heures d'enseignement accomplies par Mme A... au-delà de ses obligations statutaires et ainsi sa rémunération effective. Par un jugement du 21 mars 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de Mme A... tendant à l'annulation du rapport d'inspection, de la décision du 18 décembre 2015 et des décisions des 12 février et 18 mars 2016 par lesquelles la rectrice de l'académie de Lyon a rejeté ses recours hiérarchiques ainsi que ses conclusions indemnitaires tendant à la réparation des préjudices qu'elle estimait avoir subis. Toutefois, par un arrêt du 30 janvier 2020, la cour administrative d'appel de Lyon, annulant partiellement ce jugement, sauf en ce qu'il portait sur le rapport d'inspection précité, a annulé les décisions litigieuses. Le ministre de l'éducation et de la jeunesse se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il a partiellement fait droit aux conclusions de l'appel de Mme A.... 2. D'une part, aux termes de l'article 1er du décret du décret du 30 mai 1968 portant statut particulier des professeurs de chaires supérieures des établissements classiques, modernes et techniques : " Il est constitué un corps de professeurs de chaires supérieures. Ses membres ont vocation à être affectés, pour y assurer les enseignements prévus, dans les chaires supérieures créées, dans la limite des emplois figurant au budget, dans les classes préparatoires aux grandes écoles des établissements de second degré. / Un arrêté conjoint du ministre chargé de l'éducation nationale, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget fixe la liste des disciplines pour lesquelles peuvent être créées des chaires supérieures ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Les professeurs de chaire supérieure sont nommés par arrêté du ministre de l'éducation parmi les candidats inscrits sur une liste d'aptitude. / Il est établi une liste d'aptitude pour chacune des disciplines auxquelles sont réservées des chaires supérieures. (...) . ". Aux termes de l'article 6 du même décret : " Les professeurs de chaires supérieures sont soumis, en matière d'obligations de service, aux décrets n° 50-581 et n° 50-582 du 25 mai 1950. (...) ". Aux termes de l'arrêté du 24 octobre 1994 du ministre de l'éducation nationale, du ministre du budget, porte-parole du Gouvernement et du ministre de la fonction publique fixant la liste des disciplines pour lesquelles peuvent être créées des chaires supérieures instituées par le décret n° 68-503 du 30 mai 1968 modifié portant statut particulier des professeurs de chaires supérieures des établissements classiques, modernes et techniques : " Des chaires supérieures peuvent être créées pour les disciplines suivantes : arts plastiques, biochimie, biologie, chimie, économie et gestion, français, géographie, géologie, histoire, informatique, langues anciennes, langues vivantes étrangères, mathématiques, musique, philosophie, physique, sciences économiques et sociales, sciences et technologies industrielles ". 3. D'autre part, aux termes de l'article R. 421-10 du code de l'éducation : " En qualité de représentant de l'Etat au sein de l'établissement, le chef d'établissement : / 1° A autorité sur l'ensemble des personnels affectés ou mis à disposition de l'établissement. Il désigne à toutes les fonctions au sein de l'établissement pour lesquelles aucune autre autorité administrative n'a reçu de pouvoir de nomination. Il fixe le service des personnels dans le respect du statut de ces derniers ; (...) ". 4. Il résulte de la combinaison des dispositions citées au point 2 et de celles de l'article R. 421-10 du code de l'éducation que le proviseur du lycée du Parc était compétent pour fixer et, le cas échéant, modifier le service d'enseignement assuré dans sa discipline par Mme A... au lycée du Parc à Lyon, dans le respect de son statut de professeure de chaire supérieure. En jugeant qu'en retirant à l'intéressée les enseignements magistraux qu'assurait celle-ci dans la classe 2PSI " étoile " en physique et sciences de l'ingénieur et en lui attribuant, toujours en classe préparatoire, des enseignements en première année de physique et sciences de l'ingénieur, le proviseur avait " modifié la chaire " sur laquelle l'intéressée avait été affectée et ainsi incompétemment modifié son affectation, alors qu'il s'était borné à lui attribuer un nouveau service d'enseignement dans sa discipline, la cour administrative d'appel de Lyon a commis une erreur de droit. 5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque en tant qu'il a annulé la décision du 18 décembre 2015 du proviseur du lycée du Parc ainsi que, par voie de conséquence, les décisions des 12 février et 18 mars 2016 de la rectrice de l'académie de Lyon. 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : Les articles 1er à 3 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 30 janvier 2020 sont annulés. Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Lyon. Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et à Mme B... A.... Délibéré à l'issue de la séance du 25 mai 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Yves Doutriaux, Mme Carine Soulay, Mme Fabienne Lambolez, M. Jean-Luc Nevache, conseillers d'Etat ; Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat-rapporteure et M. Damien Botteghi, conseiller d'Etat. Rendu le 20 juin 2022. Le président : Signé : M. Rémy Schwartz La rapporteure : Signé : Mme Françoise Tomé La secrétaire : Signé : Mme Sylvie Alleil
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Vu la procédure suivante : La société Vivalto Santé a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la réduction, à hauteur de 484 160 euros, de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2015. Par un jugement n° 1719920 du 21 février 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 19PA01382 du 31 juillet 2020, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société Vivalto Santé contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er octobre 2020 et 4 janvier 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Vivalto Santé demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Saby, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Briard, avocat de la société Vivalto Santé ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Cligale était, jusqu'à la clôture de l'exercice clos en 2013, à la tête d'un groupe fiscalement intégré composé, notamment, de la société Clinique de l'Espérance et de sa filiale, la société civile immobilière (SCI) du Chevran. La société Clinique de l'Espérance avait comptabilisé, en 2011, une provision pour dépréciation des titres de la SCI du Chevran, dont la société Cligale avait neutralisé le montant, sur le fondement de l'article 223 B du code général des impôts, pour la détermination du résultat d'ensemble du groupe au titre de l'exercice clos en 2011. La société Vivalto Santé, société mère d'un autre groupe fiscalement intégré, a acquis, au cours de l'année 2013, plus de 95 % des parts de la société Cligale, laquelle a, alors, rejoint ce groupe, ce qui n'a, en revanche pas été le cas de la société Clinique de l'Espérance et de la SCI du Chevran. Par un jugement du 21 février 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société Vivalto Santé tendant à la réduction de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2015, fondée sur la " déneutralisation ", au titre du dernier résultat d'ensemble du groupe fiscalement intégré formé par la société Cligale clos le 31 décembre 2013, de la provision, mentionnée ci-dessus, constituée en 2011 par la société Clinique de l'Espérance. La société Vivalto Santé se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 31 juillet 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement. 2. Aux termes de l'article 223 A du code général des impôts : " Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés ou d'établissements stables membres du groupe (...) ". Aux termes de l'article 223 B de ce code : " Le résultat d'ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun ou selon les modalités prévues à l'article 214. / (...) Le résultat d'ensemble est majoré du montant des dotations complémentaires aux provisions constituées par une société après son entrée dans le groupe, à raison (...) des titres détenus dans d'autres sociétés du groupe et exclus du régime des plus-values ou moins-values à long terme conformément à l'article 219 ou des risques qu'elle encourt du fait de telles sociétés (...) ". Aux termes de l'article 223 D du même code : " Le montant des dotations complémentaires aux provisions constituées par une société après son entrée dans le groupe à raison des participations détenues dans d'autres sociétés du groupe est ajouté à la plus-value nette à long terme d'ensemble ou déduit de la moins-value nette à long terme d'ensemble. (...) Le montant des provisions rapportées en application de la première phrase du seizième alinéa du 5° du 1 de l'article 39 qui correspondent aux dotations complémentaires non retenues en application du présent alinéa est déduit de la plus-value nette à long terme d'ensemble ou ajouté à la moins-value nette à long terme d'ensemble si les sociétés citées aux première et troisième phrases de cet alinéa (...) sont membres du groupe ou, s'agissant des provisions mentionnées aux première et deuxième phrases, d'un même groupe créé ou élargi dans les conditions prévues aux c, d, e, f, g, h, i ou j du 6 de l'article 223 L au titre de l'exercice au cours duquel les provisions sont rapportées ". Aux termes du 6 de l'article 223 L du code général des impôts : " d. Si, au cours d'un exercice, le capital d'une société mère définie aux premier, deuxième ou troisième alinéas de l'article 223 A vient à être détenu, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun ou selon les modalités prévues à l'article 214, à 95 % au moins par une autre personne morale passible de l'impôt sur les sociétés, ce capital est réputé avoir été détenu selon les modalités prévues à la troisième phrase du premier alinéa de cet article si le pourcentage de 95 % n'est plus atteint à la clôture de l'exercice à la condition que les sociétés concernées indiquent à l'administration les modalités de l'opération et ses justifications juridiques, économiques ou sociales./ Si ce pourcentage est encore atteint à cette date, la société mère demeure seule redevable de l'impôt dû sur le résultat d'ensemble du groupe afférent à cet exercice, selon les modalités prévues aux articles 223 A à 223 U, par exception aux dispositions de la présente section./ Dans cette situation, si la personne morale mentionnée au premier alinéa souhaite constituer un groupe avec les sociétés qui composaient celui qui avait été formé par la société mère visée au même alinéa, ou faire entrer celles-ci dans le groupe dont elle est déjà membre, l'option prévue aux premier, deuxième ou troisième alinéas de l'article 223 A est exercée au plus tard à l'expiration du délai prévu au septième alinéa du même article, décompté de la date de clôture de l'exercice considéré. Cette option est accompagnée du document mentionné au premier alinéa du c ". 3. Par ces dispositions, le législateur a instauré un principe général de neutralisation des opérations internes à un groupe fiscalement intégré, visant à éviter une double prise en compte, dans le résultat d'ensemble, du résultat des sociétés intégrées. A cet égard, la neutralisation des provisions pour dépréciation de titres de participation et des reprises de provisions portant sur ces titres ne se justifie que si les sociétés concernées demeurent membres du groupe intégré. 4. Il résulte ainsi des dispositions des articles 223 B et 223 D du code général des impôts que le résultat d'ensemble d'un groupe fiscalement intégré est majoré du montant des dotations complémentaires aux provisions constituées par une société après son entrée dans le groupe, à raison de la dépréciation des titres de participation, soumis au régime des plus et moins-values à long terme, qu'elle détient sur une autre société du groupe. Lors de la reprise ultérieure de tout ou partie de la provision par la société du groupe qui l'avait initialement constituée, la fraction correspondante de cette provision est déduite du résultat d'ensemble. En cas de dissolution du groupe fiscal intégré avant la reprise de la provision par la société qui l'avait initialement constituée, il n'y a pas lieu de déduire du dernier résultat d'ensemble du groupe la fraction de la provision non encore reprise, sauf dispositions expresses en ce sens. 5. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant, dès lors que la société Vivalto Santé ne se trouvait dans aucun des cas dérogatoires prévus par le d du 6 de l'article 223 L du code général des impôts, que, faute pour la société Clinique de l'Espérance et la SCI du Chevran d'avoir rejoint, à la clôture de l'exercice clos en 2013, le groupe fiscalement intégré constitué par la société Vivalto Santé, cette société ne pouvait se prévaloir de ces dispositions et que, par suite, il n'y avait pas lieu de déduire du dernier résultat d'ensemble du groupe fiscalement intégré formé par la société Cligale, clos le 31 décembre 2013, la fraction de la provision comptabilisée en 2011 par la société Clinique de l'Espérance à raison de la dépréciation des titres de la SCI du Chevran et qui avait majoré le résultat d'ensemble du groupe en 2011. 6. En deuxième lieu, le motif de l'arrêt relatif à l'application des articles 145 et 216 du code général des impôts est surabondant. Par suite, le moyen dirigé contre ce motif ne peut qu'être écarté. 7. En troisième lieu, la société Vivalto Santé soutenait en appel que l'absence de déduction de la provision en litige du dernier résultat d'ensemble du groupe fiscal intégré formé par la société Cligale la plaçait dans une situation de double imposition, moins favorable que celle dans laquelle elle se serait trouvée si l'intégration fiscale n'avait pas été réalisée, en méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques. Ce moyen, qui revient à mettre en cause la conformité à la Constitution des dispositions législatives citées au point 2, était irrecevable faute d'avoir fait l'objet du mémoire distinct prévu par l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958. Ce motif, qui n'emporte l'appréciation d'aucune circonstance de fait et justifie le dispositif de l'arrêt attaqué, doit être substitué à celui retenu par la cour. Il s'en suit que le moyen dirigé contre le motif initialement retenu par la cour ne peut qu'être écarté. 8. Il résulte de tout ce qui précède que la société Vivalto Santé n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent par suite qu'être écartées. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de la société Vivalto Santé est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Vivalto Santé et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré à l'issue de la séance du 23 mai 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, M. Frédéric Aladjidi, présidents de chambre ; Mme Anne Egerszegi, M. Thomas Andrieu, Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. Alain Seban, conseillers d'Etat et M. Olivier Saby, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 9 juin 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl Le rapporteur : Signé : M. Olivier Saby La secrétaire : Signé : Mme Fehmida Ghulam
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juin et 23 septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat : l°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 juin 2019 par laquelle le Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte, a prononcé une nouvelle suspension de son droit d'exercer la médecine pour une durée de trois ans, subordonnant la reprise de son activité professionnelle aux résultats d'une nouvelle expertise ; 2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins la somme de 3 500 euros à verser à son conseil, la SCP Hélène Didier et François Pinet, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Didier-Pinet, avocat de M. A... et à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du Conseil national de l'ordre des médecins ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article R. 4124-3 du code de la santé publique : " I. - Dans le cas d'infirmité ou d'état pathologique rendant dangereux l'exercice de la profession, la suspension temporaire du droit d'exercer est prononcée par le conseil régional ou interrégional pour une période déterminée, qui peut, s'il y a lieu, être renouvelée. / Le conseil est saisi à cet effet soit par le directeur général de l'agence régionale de santé soit par une délibération du conseil départemental ou du conseil national. Ces saisines ne sont pas susceptibles de recours. / II. - La suspension ne peut être ordonnée que sur un rapport motivé établi à la demande du conseil régional ou interrégional par trois médecins désignés comme experts, le premier par l'intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. / (...) / VII. - La notification de la décision de suspension mentionne que la reprise de l'exercice professionnel par le praticien ne pourra avoir lieu sans qu'au préalable ait été diligentée une nouvelle expertise médicale, dont il lui incombe de demander l'organisation au conseil régional ou interrégional au plus tard deux mois avant l'expiration de la période de suspension ". Aux termes de l'article R. 4124-3-1 du même code : " (...) Le praticien intéressé, le conseil départemental et, le cas échéant, le conseil national sont convoqués par lettre recommandée avec demande d'avis de réception huit jours au moins avant la séance du conseil régional ou interrégional. Ils sont informés des dates auxquelles ils peuvent consulter le dossier au siège du conseil régional ou interrégional. Le rapport des experts leur est communiqué. La convocation indique que le praticien peut se faire assister ou représenter par toute personne de son choix, le conseil départemental ou le conseil national par un de leurs membres ou par un avocat ". Aux termes de l'article R. 4124-3-2 du même code dans sa version alors applicable : " La décision du conseil régional ou interrégional est notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au praticien intéressé, au conseil départemental, au conseil national et au directeur général de l'agence régionale de santé. / La notification mentionne que la décision est susceptible de recours devant le conseil national, dans le délai de dix jours, sur la requête du praticien intéressé, du conseil départemental ou du directeur général de l'agence régionale de santé et que le recours n'a pas d'effet suspensif. (...) ". Aux termes de l'article R. 4124-3-3 du même code : " Les dispositions des articles R. 4124-3-1 et R. 4124-3-2 sont applicables devant le conseil national. Sa décision est, en outre, notifiée au conseil régional ou interrégional. La notification mentionne que la décision est susceptible d'un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat dans le délai de deux mois ". 2. Il ressort des pièces du dossier qu'en application des dispositions de l'article R. 4124-3 du code de la santé publique citées au point 1, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins, par décision du 13 mars 2018, a suspendu M. A..., médecin spécialiste, qualifié en médecine générale, du droit d'exercer la médecine pendant une durée d'un an. Après que M. A... a sollicité l'organisation d'une nouvelle expertise en vue de reprendre son activité professionnelle à l'issue de cette période de suspension, le Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte, a, à la suite de cette expertise, suspendu l'intéressé du droit d'exercer la médecine pendant une durée de trois ans, par une décision du 11 juin 2019. M. A... demande, en application des dispositions de l'article R. 4124-3-3 du code de la santé publique, l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision. 3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée comporte la signature du président de la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision du Conseil national de l'ordre des médecins du 11 juin 2019 ne comporterait pas cette signature manque en fait. 4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, que la lettre de convocation du 21 mai 2019 adressée à M. A... par le président de la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins et reçue le 22 mai par l'intéressé, lui a indiqué que son recours serait examiné le 11 juin 2019 à 14h20 au siège du Conseil national, l'a invité à présenter ses observations éventuelles, lui a précisé qu'il pourrait se faire assister par un " défenseur ou avocat " et lui a indiqué que le dossier serait mis à sa disposition et à celle de son défenseur au secrétariat du Conseil national à partir du 27 mai 2019. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière au regard des dispositions de l'article R. 4124-3-1 du code de la santé publique, citées au point 1, doit être écarté. 5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport de l'expertise réalisée le 12 mars 2019 qu'en estimant que " du fait de la conjonction de troubles sensitifs importants et d'un état de santé physique très dégradé empêchant la régularité et la disponibilité nécessaires à un médecin ", l'état de santé de M. A..., né en 1936, rendait dangereux l'exercice de la médecine et justifiait une mesure de suspension d'une durée de trois ans, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins, qui a suffisamment motivé sa décision, a fait une exacte application des dispositions de l'article R. 4124-3 du code de la santé publique. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque. 7. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la SCP Hélène Didier et François Pinet, avocat de M. A..., à l'encontre du Conseil national de l'ordre des médecins qui, dans la présente instance, n'est pas la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... et au Conseil national de l'ordre des médecins. Délibéré à l'issue de la séance du 12 mai 2022 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; Mme Carine Soulay, conseillère d'Etat et M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 15 juin 2022. La présidente : Signé : Mme Maud Vialettes Le rapporteur : Signé : M. Sylvain Monteillet La secrétaire : Signé : Mme Romy Raquil
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de 15 jours suivant la notification du jugement à intervenir, et entre-temps, un récépissé de demande de titre de séjour avec autorisation de travailler ou une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler et à défaut de procéder au réexamen de sa situation avec remise d'une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 2008375 du 11 mars 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés sous le n° 21NC02881 les 5 novembre 2021 et 09 mai 2022, M. A... D..., représenté par Me Mengus, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 mars 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; 3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, et entre temps, un récépissé de demande de titre de séjour avec autorisation de travailler ou une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - sa requête, introduite dans le délai d'appel, est recevable ; s'agissant du refus de titre de séjour : - la signataire de cette décision n'était pas compétente, dès lors qu'il n'est pas établi que l'arrêté l'ayant nommée dans un emploi fonctionnel pour occuper les fonctions de directrice des migrations et de l'intégration à compter du 17 avril 2019 lui aurait été notifié et dès lors que cet arrêté n'a pas été publié ; - le préfet n'a pas saisi la commission du titre de séjour ; - c'est à tort que le préfet a estimé qu'il ne remplissait pas la condition de détention d'un visa de long séjour posée par l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la préfète a commis une erreur de fait en estimant qu'il ne vivait pas au domicile conjugal ; - le refus de titre de séjour méconnait le 7° de l'article 313-11 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français : - cette décision est entachée d'un défaut de motivation ; - elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ; - il pouvait se voir délivrer de plein droit un titre de séjour au regard de ses attaches personnelles et familiales en France ; s'agissant de la décision fixant le pays de renvoi : - cette décision est illégale compte tenu des éléments développés ci-dessus et de l'illégalité du refus de titre de séjour. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2022, la préfète du Bas-Rhin, conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. M. A... D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 4 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, - le code des relations entre le public et l'administration, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller, - et les observations de M. A... D.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... D..., ressortissant marocain, est entré en France le 15 juin 2017 sous couvert d'un visa D, valable du 14 juin au 12 septembre 2017. Son titre de séjour en qualité de travailleur saisonnier a été renouvelé jusqu'au 1er août 2020. Le 19 août 2020, le requérant a sollicité de la préfète du Bas-Rhin la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en faisant valoir son mariage avec une ressortissante française le 11 juillet 2020. Par un arrêté du 8 décembre 2020, la préfète du Bas-Rhin a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... D... relève appel du jugement du 11 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la légalité de l'arrêté du 8 décembre 2020 : En ce qui concerne le refus de titre de séjour : 2. En premier lieu, l'arrêté du 8 décembre 2020 est signé de Mme C... B..., faisant fonction de directrice des migrations et de l'intégration, à qui la préfète du Bas-Rhin a donné délégation, par un arrêté du 17 novembre 2020, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 17 novembre 2020, à l'effet de signer tous actes et décisions dans le cadre de ses attributions, à l'exception de certaines catégories d'actes au nombre desquelles ne figurent pas les décisions prises en réponse aux demandes de titre de séjour. Si l'entrée en vigueur de l'arrêté n° U14761870011397 portant nomination de Mme B... dans un emploi fonctionnel de conseiller d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer en qualité de directrice des migrations et de l'intégration à compter du 17 avril 2019, qui présente le caractère d'un acte individuel, était en principe subordonnée à la notification de cet arrêté de nomination à l'intéressée, l'exercice effectif par Mme B... des fonctions de directrice des migrations et de l'intégration permet à lui seul d'établir la connaissance que l'intéressée avait de cet arrêté et par conséquent l'entrée en vigueur de ce dernier. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté du 8 décembre 2020 manque en fait. 3. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. ". Ainsi, le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile et auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité. 4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 4o A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ". Aux termes de l'article L. 313-2 du même code : " sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23, L. 313-24, L. 313-27 et L. 313-29 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1 (...) ". L'article R. 311-2 de ce code précise que " La demande est présentée par l'intéressé dans les deux mois de son entrée en France. S'il y séjournait déjà, il présente sa demande : (...) 4° (...) dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire, sauf s'il est titulaire du statut de résident de longue durée-UE accordé par la France en application des articles L. 314-8, L. 314-8-1 et L. 314-8-2. / A l'échéance de ce délai et en l'absence de présentation de demande de renouvellement de sa carte de séjour, il justifie à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance de la carte de séjour (...) ". 5. Les dispositions de l'article L. 313-2, citées ci-dessus, subordonnent la première délivrance d'une carte de séjour au conjoint de ressortissant français à la présentation d'un visa de long séjour. Si M. A... D... est entré en France sous couvert d'un visa de type D, qui n'était valable au demeurant que du 14 juin au 12 septembre 2017, et s'est vu délivrer par la suite une carte pluriannuelle en qualité de travailleur saisonnier sur le fondement de l'article L. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est constant, en tout état de cause, que les durées de validité de ce visa et de cette carte pluriannuelle de travailleur saisonnier étaient expirées à la date du 19 août 2020, à laquelle l'intéressé a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de conjoint de français et, a fortiori, à la date à laquelle la préfète du Bas-Rhin a statué sur cette demande. Ainsi, la délivrance à M. A... D... de la carte de séjour temporaire en qualité de conjoint de français était légalement subordonnée à la présentation d'un nouveau visa de long séjour, sans que la délivrance antérieure d'un visa de type D ou celle d'une carte pluriannuelle en qualité de travailleur saisonnier, désormais expirés, soit de nature à dispenser l'intéressé d'une telle obligation. Par suite, en lui opposant l'absence de visa de long séjour pour lui refuser le bénéfice de cette carte de séjour temporaire, la préfète du Bas-Rhin n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-2 et du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées au point précédent. 6. En outre, si M. A... D... soutient que c'est à tort que la préfète du Bas-Rhin lui a opposé la cessation de la vie commune avec son épouse et a indiqué qu'il ne vivait pas au domicile conjugal, le refus de délivrance de la carte de séjour temporaire en qualité de conjoint de français pouvait être légalement justifié sur le seul motif tiré de l'absence de visa de long séjour. Il résulte de l'instruction que la préfète du Bas-Rhin aurait pris la même décision en se fondant sur ce seul motif. 7. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'il y a lieu d'écarter tant le moyen tiré du défaut de consultation de la commission du titre de séjour que celui tiré de la violation de l'article L. 313-2 et du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile 8. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... D... est entré en France en 2017, alors âgé de 29 ans. S'il se prévaut de son mariage avec une ressortissante française le 11 juillet 2020, il ressort des pièces du dossier que la durée de sa relation avec cette ressortissante française était récente à la date à laquelle la préfète du Bas-Rhin a statué sur la demande de carte de séjour temporaire. La délivrance de cette carte est en outre subordonnée à l'octroi d'un visa de long séjour qu'il appartient à l'intéressé de solliciter auprès des autorités consulaires françaises présentes au Maroc en faisant valoir son mariage avec une ressortissante française. Ainsi, eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment à la durée et aux conditions de séjour en France du requérant, la décision lui refusant le bénéfice de la carte de séjour en qualité de conjoint de français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a dès lors été prise ni en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne constituait pas au demeurant le fondement de la demande, et n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'exercice, par la préfète, de son pouvoir discrétionnaire de régularisation. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 9. En premier lieu, l'arrêté du 8 décembre 2020 énonce les considérations de droit et de fait servant de fondement à l'obligation faite à M. A... D... de quitter le territoire français. Il satisfait dès lors sur ce point à l'obligation de motivation. 10. En deuxième lieu, le refus de titre de séjour n'étant pas illégal, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français. 11. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au points 5 et 8, il y a lieu d'écarter le moyen tiré, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de ce que M. A... D... pouvait prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour. En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi : 12. En premier lieu, le refus de titre de séjour n'étant pas illégal, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi. 13. En second lieu, en se bornant à se prévaloir contre cette dernière décision de " l'ensemble des éléments développés ci-dessus " au sujet du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français, le requérant n'assortit pas son moyen des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. 14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 15. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A... D.... Sur les frais liés à l'instance : 16. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 17. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A... D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - M. Goujon-Fischer, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. Goujon-FischerLa présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 21NC02881
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013. Par un jugement n° 1801047 du 24 mai 2019, le tribunal administratif de Marseille, après avoir prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des cotisations de contributions sociales ainsi que des pénalités afférentes auxquelles M. C... a été assujetti au titre des années 2012 et 2013 à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance, a rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 août 2019 et 11 février 2020, M. C..., représenté par la AARPI Steering Legal agissant par Me Bette, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du 24 mai 2019 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions demeurant en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat, outre les dépens, la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la notification de la proposition de rectification du 27 juillet 2015 est irrégulière ; - le comptable signataire de l'avis de mise en recouvrement n'était pas territorialement compétent en méconnaissance de l'article R. 256-8 du livre des procédures fiscales ; - la proposition de rectification n'est pas suffisamment motivée ; à ce titre, il se prévaut de la doctrine référencée BOI-CF-IOR-10-40 n° 40 et n° 80 ; - il n'a pas été correctement informé de la teneur et l'origine des renseignements obtenus par l'administration dans le cadre de son droit de communication en violation de l'article L. 76 B du code général des impôts ; il entend se prévaloir également de la doctrine référencée BOI-CF-PGR-30-10, n° 210 ; - il est résident fiscal de la collectivité de Saint-Martin en application de l'article 4 de la convention conclue le 21 décembre 2010 entre l'Etat et la collectivité de Saint-Martin ; - en ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée, les crédits bancaires injustifiés relevés par l'administration fiscale correspondent à des remboursements de frais qu'il a avancés pour le compte de la société La E... en vue d'installer un restaurant " le Shamballa " à Saint-Martin ; ces impositions relèvent de la compétence de Saint-Martin ; - s'agissant des revenus distribués résultant de la réintégration de charges non déductibles dans le bénéfice imposable de la SARL A..., certaines de ces dépenses sont justifiées ou engagées dans l'intérêt de l'exploitation de la société ; en outre, l'administration ne rapporte pas la preuve du désinvestissement des sommes en litige à son profit du fait de la seule réintégration dans la comptabilité de la SARL A... des charges qu'elle a estimées injustifiées ; - s'agissant des revenus distribués résultant de la réintégration de charges non déductibles à hauteur de 9 192 euros au titre de l'année 2012 et de 3 397 euros au titre de l'année 2013 dans le bénéfice imposable de la SC B..., l'administration ne rapporte pas la preuve du désinvestissement des sommes en litige du fait de leur seule réintégration dans la comptabilité de la SC B... ; - les sommes portées au crédit de son compte courant d'associé au sein de la comptabilité de la SC B... correspondent pour partie à des remboursements de frais avancés pour le compte de cette société ; - les pénalités doivent être déchargées en conséquence de la décharge des impositions en litige. Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 novembre 2019 et 24 février 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention conclue le 21 décembre 2010 entre l'Etat et la collectivité de Saint-Martin en vue de prévenir les doubles impositions et de lutter contre la fraude et l'évasion fiscale ; - le code général des collectivités territoriales ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Bernabeu, présidente assesseure, - et les conclusions de Mme Courbon, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. A l'issue d'un examen de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2012 et 2013, M. C... s'est vu notifier des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales au titre des années 2012 et 2013, à raison de crédits injustifiés sur ses comptes bancaires personnels et de revenus distribués entre ses mains par la SARL A... et la SC B..., selon la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, en l'absence de dépôt de déclarations fiscales au titre de ces années. M. C... relève appel du jugement du 24 mai 2019 par lequel, après avoir prononcé la décharge de la part des cotisations supplémentaires de prélèvements sociaux ayant résulté de la majoration de 25 % de la base imposable au titre des années 2012 et 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de sa demande. Sur la régularité de la procédure d'imposition : 2. En premier lieu, M. C... soutient qu'il n'a pu avoir connaissance de la demande de justification de crédits formulée par courrier du 15 juin 2015 et envoyée à son adresse à Velaux qu'en août 2015, après l'envoi de la proposition de rectification du 27 juillet 2015, alors qu'il avait indiqué à l'administration fiscale son changement de domicile à Saint-Martin par courrier du 19 février 2015. Cependant, il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification, que la lettre datée du 15 juin 2015 adressée au requérant consistait non pas en une demande d'éclaircissements et de justifications modèle 2172 mais en une simple lettre modèle 751 de demande d'informations. En toute hypothèse, le contribuable a fait l'objet d'une procédure de taxation d'office sur le fondement du 1° de l'article L. 66 et de l'article L. 67 du livre des procédures fiscales, pour défaut de déclaration dans le délai de trente jours à compter de la notification d'une mise en demeure, dont il ne conteste pas avoir reçu notification pour chacune des années d'imposition, et non d'une procédure de taxation d'office pour défaut de réponse à une demande d'éclaircissements et de justifications sur le fondement de l'article L. 69 du même livre. Par suite, le moyen du requérant tiré de l'irrégularité de la procédure de taxation d'office suivie ne peut qu'être écarté. 3. En deuxième lieu, M. C... soutient que l'administration fiscale lui a adressé la proposition de rectification du 27 juillet 2015 à une adresse ne correspondant pas à celle de son domicile à Saint-Martin, ni à celle de son principal établissement professionnel, en invoquant les dispositions de l'article 45 à l'annexe III au code général des impôts, qui ne concernent nullement les modalités de notification de la proposition de rectification mais les modalités selon lesquelles les déclarations sont remises ou adressées par les contribuables au service des impôts. Cependant, l'intéressé, dont les rectifications en litige ont fait l'objet d'une procédure de taxation d'office, doit être regardé comme ayant entendu se prévaloir des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, aux termes desquelles : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. (...) ". En l'espèce, il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 27 juillet 2015, envoyée à M. C... et adressée chemin de Roquepertuse à Velaux, a été retirée le 14 août 2015, sans que celui-ci ne fasse valoir qu'elle aurait été distribuée à une personne non habilitée. Au contraire, le requérant reconnaît lui-même, dans sa requête d'appel, avoir pris connaissance de cette proposition de rectification au mois d'août 2015, alors que les impositions en litige ont été mises en recouvrement par voie de rôle le 31 octobre 2015. Par suite, l'intéressé ne pouvant se prévaloir en l'espèce de la privation d'aucune garantie que lui assure la procédure d'imposition, le moyen tiré de l'irrégularité de la notification des bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office doit être écarté. 4. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales qu'au titre des exigences prévues à cet article, relatif à la procédure de taxation d'office, figure celle de porter à la connaissance du contribuable non seulement les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office mais aussi leurs modalités de détermination. Si l'intéressé soutient, pour la première fois en appel, qu'il n'a pas été informé des motifs de droit et de fait justifiant les rectifications mises à sa charge, il résulte cependant de la proposition de rectification du 27 juillet 2015 qu'elle comporte avec suffisamment de précision les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office mais aussi leurs modalités de détermination. A cet égard, l'administration y mentionne l'ensemble des crédits bancaires dont elle précise le montant et qu'elle identifie par année, par compte bancaire, par date et par libellé, et que M. C... n'a pas justifié. Par ailleurs, elle explicite également les rectifications effectuées en matière de traitements et salaires ainsi qu'en matière de revenus de capitaux mobiliers, en donnant des indications très précises sur leurs modalités de détermination. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office mises à la charge de M. C... au titre des années 2012 et 2013 doit être écarté comme manquant en fait. 5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les rectifications, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les seuls renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications. 6. M. C... fait valoir, pour la première fois en appel, qu'il n'a pas été correctement informé de la teneur et l'origine des renseignements obtenus par l'administration dans le cadre de son droit de communication en violation de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. Il se plaint à cet égard de ce que l'administration n'a pas précisé, s'agissant des crédits bancaires injustifiés, la teneur ni l'origine des renseignements obtenus de tiers. Cependant la proposition de rectification du 27 juillet 2015 mentionne clairement, en page 3, que le vérificateur a fait usage de son droit de communication pour obtenir les relevés bancaires non fournis par M. C..., auprès du Crédit du Nord (Agence Joliette à Marseille) le 27 mars 2015, de sorte que l'intéressé a pu aisément en demander la communication, ce qu'il s'est abstenu de faire. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. 7. En cinquième lieu, M. C... ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article R. 256-8 du livre des procédures fiscales, qui concernent les règles relatives au comptable public territorialement compétent pour établir l'avis de mise en recouvrement et qui ne sauraient s'appliquer à des impositions recouvrées par voie de rôle. A supposer qu'il ait entendu contester le lieu d'imposition des rectifications en litige, il résulte des dispositions de l'article L. 206 du livre des procédures fiscales qu' " En ce qui concerne l'impôt sur le revenu (...), les contestations relatives au lieu d'imposition ne peuvent, en aucun cas, entraîner l'annulation de l'imposition. ". Ainsi, le moyen tiré de ce que c'est le centre des impôts de Saint-Martin (97150) qui, au regard de sa résidence, aurait dû établir et rendre exécutoires les avis d'imposition litigieux, et non celui d'Aix-en-Provence, dans les Bouches-du-Rhône, est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition. 8. En dernier lieu, les énonciations des doctrines référencées BOI-CF-IOR-10-40, n° 40 et n° 80, ainsi que BOI-CF-PGR-30-10, n° 210, sont relatives à la procédure d'imposition et ne constituent donc pas une interprétation d'un texte fiscal dont M. C... pourrait se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales. Sur le bien-fondé des impositions : En ce qui concerne la résidence fiscale de M. C... : 9. En vertu du premier alinéa de l'article LO. 6313-1 du code général des collectivités territoriales : " Les dispositions législatives et réglementaires sont applicables de plein droit à Saint-Martin, à l'exception de celles intervenant dans les matières qui relèvent (...) de la compétence de la collectivité en application de l'article LO. 6314-3 ". Aux termes du 1° du I de l'article LO. 6314-3 du même code, la collectivité de Saint-Martin fixe les règles applicables en matière d'impôts, droits et taxes, dans les conditions prévues à l'article LO. 6314-4 du même code. Aux termes de cet article LO. 6314-4 : " I. - La collectivité de Saint-Martin exerce les compétences qu'elle tient du 1° du I de l'article LO. 6314-3 en matière d'impôts, droits et taxes dans le respect des dispositions suivantes : / 1° Les personnes physiques dont le domicile fiscal est établi dans un département de métropole ou d'outre-mer ne peuvent être considérées comme ayant leur domicile fiscal à Saint-Martin qu'après y avoir résidé pendant cinq ans au moins. (...) / I bis. - Les modalités d'application du I sont précisées par une convention conclue entre l'Etat et la collectivité de Saint-Martin en vue de prévenir les doubles impositions et de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales (...) ". 10. L'article 4 de la convention fiscale du 21 décembre 2010 conclue entre l'Etat et la collectivité d'outre-mer de Saint-Martin stipule en outre que : " 1. Au sens de la présente Convention, l'expression " résident d'une partie contractante " désigne : a) En ce qui concerne l'Etat, toute personne qui, en vertu de la législation nationale est assujettie à l'impôt de l'Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction, ou de tout autre critère de nature analogue. Cette expression s'applique aussi aux personnes qui sont assujetties à l'impôt de l'Etat en vertu des conditions de résidence issues de l'article LO. 6314-4 du code général des collectivités territoriales. Cette expression s'applique en outre à l'Etat ainsi qu'aux collectivités territoriales et aux autres personnes morales de droit public. / b) En ce qui concerne Saint-Martin, toute personne qui, en vertu de la réglementation de cette collectivité est assujettie à l'impôt sur ce territoire, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. Cette expression s'applique en outre à la collectivité de Saint-Martin et à ses personnes morales de droit public (...) ". 11. Il résulte des dispositions et stipulations précitées qu'à supposer même que M. C... aurait établi son domicile à Saint-Martin en 2013, il ne pouvait, compte tenu de sa date d'installation, justifier y avoir résidé cinq ans au moins, et, par suite, être regardé comme étant résident fiscal à Saint-Martin au titre de l'année précitée. En outre et en tout état de cause, les pièces produites à l'instance, consistant en une facture pour une place de port pour la période du 28 janvier 2013 au 28 janvier 2014, une lettre de bienvenue d'EDF Archipel Guadeloupe datée du 3 avril 2013, une facture de téléphone du 5 mai 2013, ainsi qu'un récépissé de dépôt d'une demande de permis de construire du 9 août 2013, ne suffisent pas à établir qu'il aurait établi son domicile à Saint-Martin dès 2013. Enfin, M. C... n'indique pas les stipulations spécifiques de la convention, en dehors de celles relatives au champ d'application de cette dernière, dont il entend se prévaloir pour faire échec à l'imposition. Par suite, le moyen tiré de ce que M. C... était résident fiscal de Saint-Martin au titre de l'année 2013 et qu'il aurait dû se voir appliquer les stipulations de la convention fiscale du 21 décembre 2010 conclue entre l'Etat et la collectivité d'outre-mer de Saint-Martin doit être écarté. En ce qui concerne les revenus non dénommés : 12. A titre liminaire, aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Selon l'article R. 193-1 du même code : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ". Les impositions contestées ayant régulièrement fait l'objet d'une procédure de taxation d'office, il appartient à M. C... de rapporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition. 13. Il résulte de l'instruction qu'au cours de l'examen de situation fiscale personnelle dont M. C... a fait l'objet, l'administration fiscale a relevé que des comptes bancaires détenus par le requérant auprès du Crédit Agricole, du Crédit du Nord, du Crédit Mutuel et de la Société Générale avaient été crédités à hauteur de 168 975 euros au titre de l'année 2012 et de 267 784 euros au titre de l'année 2013. En l'absence d'explication sur l'origine des fonds, l'administration a considéré que les sommes en litige devaient être regardées comme des revenus non dénommés. 14. S'agissant de l'année 2012, le requérant dresse un tableau des dépenses qu'il aurait effectuées pour le compte de la société La E..., correspondant à des travaux d'installation et de rénovation d'un restaurant qu'il comptait installer à Saint-Martin, en ne fournissant aucun justificatif de la nature exacte de ces dépenses et en se bornant à produire des extraits de son compte bancaire à la Société Générale au titre des mois de mars, juin, juillet, août et octobre 2012. Ces documents ne permettent toutefois pas de justifier que M. C... aurait engagé des dépenses pour le compte de la société La E... qui l'aurait ensuite remboursé à hauteur des crédits constatés sur son compte personnel. De plus, aucune correspondance ne peut être établie entre les dépenses figurant sur le compte de M. C... et les supposés remboursements que constituent les crédits bancaires considérés comme injustifiés par le vérificateur. 15. S'agissant de l'année 2013, M. C... dresse un tableau des frais engagés, selon lui, pour le compte de la société La E... en mentionnant pour chacune des dépenses, la date, le mode de paiement, le bénéficiaire et l'objet. Cependant, il résulte de l'instruction que les justificatifs produits à l'instance constitués de messages électroniques adressés à des destinataires non identifiables, et au contenu parfois illisible, de documents relatifs à l'achat d'un fonds de commerce, d'un constat d'huissier, d'un arrêté interruptif de travaux, d'un récépissé de dépôt d'un permis de construire, de diverses factures ou tickets de caisse, la plupart non nominatifs, et concernant parfois des dépenses de repas, de téléphone, de location de voiture ou de cigares, des relevés bancaires du compte à la Société Générale de M. C... d'avril à juillet 2013 et de septembre 2013, ainsi que de quelques factures de travaux ne faisant figurer que l'adresse de facturation et non celle du lieu des travaux, ne permettent pas d'établir que ces sommes débitées du compte bancaire de M. C... constitueraient des avances consenties à la société La E... en vue de la réalisation des travaux invoqués et que cette dernière lui aurait remboursées. Aucune correspondance ne peut à cet égard être établie entre les crédits figurant sur les différents comptes bancaires de M. C... et les dépenses qu'il a effectuées en 2013. 16. Par suite, dès lors que le contribuable, en situation de taxation d'office, ne produit pas, au sujet de crédits bancaires non déclarés, d'éléments probants permettant de justifier leur origine et de rattacher ces revenus à une catégorie de revenus, et que ni cette origine ni la nature du revenu ne ressortent des documents ou d'informations versées au dossier, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a taxé d'office les sommes de 168 975 euros au titre de l'année 2012 et de 267 784 euros au titre de l'année 2013. L'intéressé, qui n'est pas résident fiscal de Saint-Martin, ainsi qu'il a été déjà exposé au point 11, n'est pas davantage fondé à soutenir que les impositions afférentes à ces rectifications relèveraient de la seule compétence de la collectivité de Saint-Martin. En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers résultant de la réintégration de charges non déductibles dans le bénéfice imposable de la SARL A... : 17. Aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". Le contribuable, qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle. 18. Il résulte de l'instruction que la SARL A..., dont M. C... est le gérant, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a réintégré dans le bénéfice imposable de la société, des sommes correspondant à des charges qu'elle a considérées comme non déductibles. 19. Si M. C... entend contester la qualification de charges injustifiées retenue par le service pour des frais extérieurs à l'entreprise, des honoraires de consulting et des frais de déplacement et mission pour des montants respectifs de 37 500 euros, 47 250 euros et 10 086 euros, il résulte de l'instruction, notamment des mentions de la proposition de rectification, que ces dépenses concernent l'année 2011 et non 2012, ainsi que l'indique de manière erronée le requérant, et que l'administration n'a procédé à aucune rectification à l'encontre de l'intéressé au titre de 2011. S'agissant des dépenses d'honoraires de 8 500 euros et de 8 508,32 euros au titre de l'année 2012, et non 2013 comme mentionné à tort par M. C..., ces dernières ne sont toujours pas justifiées par l'intéressé en appel. Si ce dernier soutient que, s'agissant de l'exercice clos en 2012, les dépenses de 37 500 euros et 47 250 euros HT correspondent en réalité à des honoraires versés notamment à un cabinet d'avocat espagnol et de détective privé pour retrouver du matériel volé à la société en Espagne ainsi qu'au cabinet Syrec d'expertise-comptable, ces dépenses concernent en réalité l'exercice clos en 2011, et n'ont pas donné lieu à rectification. S'agissant de l'exercice clos en 2013, M. C... fait valoir que le service a rejeté à tort la provision d'un montant de 372 650 euros constituée à la suite d'une procédure de redressement judiciaire de la société Dueto dont la SARL A... s'est portée caution. Cependant, il résulte de l'instruction, et il n'est pas contesté, que le montant de la provision concernée ayant donné lieu à rectification est en réalité de 262 282,94 euros et que la rectification correspondante a fait l'objet, après présentation par l'intéressé de justificatifs, d'un dégrèvement par la décision d'admission partielle du 20 septembre 2017. 20. Si le requérant soutient que la réintégration de l'ensemble de ces charges ne justifie pas que les sommes correspondantes, à l'exception de celles relatives aux dépenses de déplacement et de frais de mission, soient regardées comme des revenus distribués, dès lors qu'elles n'ont pas été désinvesties de la SARL A... à son profit, les bénéfices de cette dernière, tels que reconstitués par l'administration à l'issue des opérations de contrôle, n'ayant été ni mis en réserve, ni incorporés au capital, sont toutefois présumés avoir été distribués en application des dispositions précitées du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts. En outre, M. C..., qui est gérant de droit de l'entreprise et seul détenteur de la procuration sur les comptes bancaires de la société, doit être regardé comme le seul maître de l'affaire qui a effectivement appréhendé les sommes qui correspondent aux bénéfices reconstitués de la SARL A.... En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers résultant de la réintégration de charges non déductibles dans le bénéfice imposable de la SC B... : 21. Si M. C... reprend en appel, sans l'assortir d'éléments de fait ou de droit nouveaux, le moyen tiré de ce que la réintégration des charges injustifiées dans le bénéfice imposable de la société B... ne justifie pas que les sommes correspondantes soient regardées comme des revenus distribués à son profit, il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif au point 14 du jugement attaqué. En ce qui concerne les sommes portées au crédit du compte courant d'associé de M. C... au sein de la comptabilité de la SC B... : 22. Aux termes du 1. de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. 23. M. C... persiste à soutenir que les sommes portées au crédit de son compte courant d'associé de la SC B... correspondent pour partie à des remboursements de frais avancés pour le compte de cette société. Cependant, en se bornant à produire un chèque de 2 691 euros établi à l'ordre de Me R., ainsi que divers relevés bancaires faisant mention de chèques ou de virements, l'intéressé n'établit pas que les sommes inscrites en compte courant d'associé de montants respectifs de 90 000 euros au titre de 2012 et de 25 000 euros au titre de 2013 seraient en lien avec des avances faites par M. C... pour le compte de la SC B.... L'intéressé ne justifie ainsi pas que ces sommes ne correspondraient pas à la mise à disposition d'un revenu mais constitueraient la transcription comptable d'une opération impliquant une contrepartie pour la société. En outre, le requérant n'établit davantage ni même n'allègue avoir été dans l'impossibilité de procéder, en droit ou en fait, au prélèvement de ces sommes créditées sur son compte. Par suite, en l'absence d'une telle démonstration par l'appelant, c'est à bon droit que ces dernières ont été imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en application du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts. Sur les pénalités : 24. La contestation des majorations pour dépôt tardif des déclarations de revenus après mise en demeure prévue au b du 1 de l'article 1728 du code général des impôts doit être rejetée par voie de conséquence du rejet des conclusions aux fins de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à la charge de M. C... qui ne soulève à cet égard aucun moyen propre. 25. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de sa demande. Ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées, ainsi qu'en tout état de cause, celles afférentes aux entiers dépens. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022, où siégeaient : - Mme Paix, présidente, - Mme Bernabeu, présidente assesseure, - Mme Carotenuto, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 juin 2022. 2 N° 19MA03861 nc
JADE/CETATEXT000045931600.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 17 août 2020 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Par un mémoire distinct du 23 octobre 2020, il a également demandé à ce que le tribunal transmette au Conseil d'Etat une question prioritaire de constitutionnalité. Par un jugement n° 2002148 du 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande et a refusé de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 27 octobre 2021, M. A..., représenté par Me Miravete demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 18 décembre 2020 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 17 août 2020 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - la commission du titre de séjour aurait dû être saisie conformément à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. A..., âgé de quarante-un ans, est présent sur le territoire français depuis l'âge de onze ans et que l'absence de menace à l'ordre public n'est pas une condition de saisine de cette commission ; - la décision méconnait les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle méconnait les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - depuis les condamnations dont il a fait l'objet, il a démontré sa volonté de s'insérer dans la société française. Par un mémoire en défense enregistré le 16 mai 2022, le préfet de la Marne conclut au rejet de la requête. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 4 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant sénégalais, né le 5 juin 1979, est entré sur le territoire français le 11 septembre 1990 et y a séjourné régulièrement de 1997 à 2007 au titre du regroupement familial, ses parents y résidant, puis il a sollicité le renouvellement de sa carte de résident. Il a ensuite obtenu une carte temporaire de séjour " vie privée et familiale " le 24 mars 2010 puis le 3 novembre 2011. Le 15 novembre 2019, il a demandé la régularisation de sa situation sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code que le préfet de la Marne lui a refusée par arrêté du 17 août 2020. Par la présente requête, M. A... fait appel du jugement du 18 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. 2. D'une part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur: " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ". Si le préfet n'est tenu de saisir la commission que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par ces textes auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent, la circonstance que la présence de l'étranger constituerait une menace à l'ordre public ne le dispense pas de son obligation de saisine de la commission. 4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a vécu régulièrement en France sous couvert d'un certificat de résidence puis d'un titre de séjour de 1997 à 2007 et que la grande majorité de sa famille et en particulier ses parents y résident également de façon régulière. Dès lors qu'il justifiait remplir les conditions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Marne ne pouvait s'abstenir de saisir la commission du titre de séjour au seul motif que M. A... constituait une menace à l'ordre public en raison notamment de ses vingt-huit condamnations de 2001 à 2019 pour des faits d'agression sexuelle avec usage ou menace d'une arme, vol avec violence et menace de mort sur personne dépositaire de l'autorité publique et alors même que cela démontre un comportement grave et répété sur une longue durée et qu'il n'établit pas être en voie de réinsertion. La décision lui refusant le titre de séjour du 17 août 2020 doit par suite être annulée. 5. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 : 6. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Miravete, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Miravete de la somme de 1 500 euros. D É C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2002148 du 18 décembre 2020 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et l'arrêté en date du 17 août 2020 par lequel le préfet de la Marne a rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. A... sont annulés. Article 2 : L'Etat versera à Me Miravete, avocat de M. A..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Miravete renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Marne. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - Mme Barrois, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La rapporteure, Signé : M. C...La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. RobinetLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 21NC02811
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 3 juin 2021 par lequel le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une période d'un an, d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour et, à défaut, de réexaminer sa situation, au besoin sous astreinte et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 2103987 du 1er octobre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée sous le n° 21NC02843 le 1er novembre 2021, M. A..., représenté par Me Blanvillain, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 1er octobre 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 3 juin 2021 par lequel le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une période d'un an ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour et, à défaut, de réexaminer sa situation, au besoin sous astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français : - cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation ; - elle méconnaît les 1° et 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il est entré régulièrement sur le territoire français et ne représente pas une menace pour l'ordre public ; - elle est entachée d'erreurs de fait ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ; s'agissant de l'interdiction de retour : - cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation ; - elle est entachée d'une erreur de fait ; - elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ; - elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense enregistré le 14 décembre 2021, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 23 mai 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant algérien, est entré en France le 19 juillet 2017 sous couvert d'un visa de court séjour valable du 10 juillet au 24 août 2017 et a déclaré y être entré à nouveau en septembre 2018. Par un arrêté du 28 juin 2020, le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé son pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un arrêté du 3 juin 2021, faisant suite à un contrôle d'identité et à un placement en rétention administrative, le préfet de la Moselle de nouveau l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. A... relève appel du jugement du 1er octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la légalité de l'arrêté du 3 juin 2021 : En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de motivation : 2. L'arrêté du 3 juin 2021 énonce les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement des décisions qu'il comporte, notamment l'obligation faite à M. A... de quitter sans délai le territoire français et l'interdiction de retour sur le territoire pour une durée de deux ans, et est ainsi suffisamment motivé. L'arrêté n'avait pas à citer l'accord franco-algérien, qui ne constitue pas, au demeurant, le fondement des mesures prononcées. En outre, si l'intéressé soutient que cet arrêté mentionne des faits matériellement inexacts et comporte une appréciation inexacte de sa situation, cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur le respect de l'obligation de motivation. En ce qui concerne les autres moyens : S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français : 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° L'étranger, entré sur le territoire français sous couvert d'un visa désormais expiré (...) s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour ou, le cas échéant, sans demander le renouvellement du titre de séjour temporaire ou pluriannuel qui lui a été délivré ; / 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public (...) ". 4. Comme l'ont relevé les premiers juges, M. A... a été relaxé, par un jugement du tribunal correctionnel du 29 juin 2020, du chef de vol avec violence n'ayant pas entraîné une incapacité totale de travail, faits supposés avoir été commis le 21 juin 2020 et sur lesquels le préfet de la Moselle s'est fondé à titre exclusif pour considérer que le comportement de l'intéressé constituait une menace pour l'ordre public. Dans ces conditions, l'obligation faite à M. A... de quitter sans délai le territoire français ne pouvait trouver de fondement légal dans les dispositions, citées au point précédent, du 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 5. En revanche, lors de son audition par les services de police le 2 juin 2021, M. A... a déclaré être entré en France en dernier lieu en septembre 2018, de manière irrégulière. S'il soutient désormais que ces déclarations étaient mensongères, il ne l'établit pas, de sorte qu'il a pu faire légalement l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, en admettant le caractère mensonger de ces déclarations, le préfet de la Moselle fait valoir dans ses écritures, communiquées au requérant, que M. A... entrait alors dans le cas, prévu par le 2° de cet article, où un étranger peut faire l'objet d'une telle mesure, dès lors qu'entré sur le territoire français sous couvert d'un visa désormais expiré, il s'y serait maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour. Ainsi, l'obligation de quitter le territoire français était susceptible d'être légalement fondée sur cet alinéa. Par suite, en obligeant le requérant à quitter le territoire français, le préfet n'a pas méconnu l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 6. En deuxième lieu, lors de son audition par les services de police le 2 juin 2021, M. A... a non seulement déclaré être entré en France en dernier lieu en septembre 2018, après avoir d'abord rejoint l'Italie en bateau, mais a également indiqué que sa mère et sa femme résidaient en Algérie. S'il soutient avoir menti sur ces différents points et être célibataire, il ne l'établit pas. En tout état de cause, les erreurs de fait dont l'arrêté du préfet, qui a repris les déclarations de l'intéressé, serait entaché n'ont, en l'espèce, aucune incidence sur la légalité de la décision contestée, dès lors qu'ils ne fondent pas légalement la mesure d'éloignement litigieuse. 7. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré pour la première fois en France au plus tôt en 2017. Après avoir déclaré que son épouse résidait encore en Algérie, il se prétend désormais célibataire et n'apporte pas de précisions sur les liens qu'il entretient en France avec des membres de sa famille, notamment son oncle, seule personne dont il justifie de la présence régulière sur le territoire français. Il n'est en tout état de cause pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie où réside, à tout le moins, sa mère. En outre, la formation qu'il a suivie en France n'implique pas son maintien sur le territoire français. Dans ces conditions, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue des desquels elle a été prise et n'a dès lors pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle n'est pas non plus entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé. S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français : 8. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ". 9. En premier lieu, M. A..., à qui le préfet n'a accordé aucun délai de départ volontaire, ne justifie pas de circonstances humanitaires pouvant justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. 10. En deuxième lieu, s'il résulte des dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité compétente doit, pour fixer la durée d'une interdiction de retour à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux, il résulte, d'une part de ce qui a été dit au point 7 du présent arrêt au sujet de la nature et de l'ancienneté des liens de M. A... avec la France, d'autre part de la circonstance que celui-ci s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement que le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 612-10 en fixant à deux ans la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français. 11. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 7 du présent arrêt, il y a lieu d'écarter les moyens tirés, à l'encontre de l'interdiction de retour sur le territoire français, de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle et familiale du requérant. 12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 13. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A.... Sur les frais liés à l'instance : 14. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 15. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Moselle. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - M. Goujon-Fischer, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. Goujon-FischerLa présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 21NC02843
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Soludec a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, de condamner la commune de Metz à lui verser diverses sommes au titre du règlement définitif de son marché de travaux dans le cadre de la construction de la salle de musiques actuelles dite " BAM ", d'autre part d'annuler les huit titres exécutoires émis à son encontre par le maire de la même commune le 16 décembre 2015, pour un montant total de 1 127 209,40 euros. Par un jugement nos 1504187-1602389 du 7 février 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a d'une part, annulé les huit titres exécutoires et, d'autre part, condamné la société Soludec à verser à la commune de Metz la somme de 647 158,64 euros hors taxes et enfin, rejeté le surplus des conclusions des parties. Procédure devant la cour : Avant cassation : Par un arrêt n° 18NC01101 du 22 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé le jugement nos 1504187-1602389 du 7 février 2018, du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a condamné la société Soludec à verser à la commune de Metz la somme de 647 158,64 euros, rejeté le surplus des conclusions de la société et dit qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur l'appel incident de la commune. Par une décision n° 449395 du 10 novembre 2021, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour. Après cassation : Par un mémoire enregistré le 28 janvier 2022, la commune de Metz, représentée par Me Olszak, demande à la cour : 1°) à titre principal, de rejeter la requête comme étant irrecevable ; 2°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a jugé recevable la demande présentée devant le tribunal et de rejeter cette demande comme étant irrecevable ; 3°) à titre infiniment subsidiaire, de rejeter la requête, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il l'a condamnée à verser à la société Soludec la somme de 24 487,49 euros HT en lieu et place de 4 662,14 euros HT au titre de la modification des ratios d'acier et qu'il a rejeté ses demandes à hauteur de 100 000 euros HT et de 13 965 euros HT au titre de la réparation des préjudices causés par les fautes de la société Soludec, et de fixer le solde du marché à la somme de 778 948,99 euros HT à la charge de la société Soludec ; 4°) en toute hypothèse, de mettre à la charge de la société Soludec la somme de 15 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la demande présentée devant le tribunal était irrecevable en raison du caractère prématuré de la mise en demeure d'établir le décompte général, lequel résulte de ce que, alors que la réception a été prononcée, en application de l'article 41.5 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, sous réserve de la réalisation de certains travaux, cette mise en demeure lui a été transmise avant la date du procès-verbal constatant l'exécution de ces travaux. Par un mémoire, enregistré le 17 février 2022, la société Soludec, représentée par la SCP Piwnica et Molinié, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 février 2018 en ce qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes au titre du règlement du marché ; 2°) de condamner la commune de Metz à lui payer la somme de 916 965,16 euros HT au titre des travaux supplémentaires, la somme de 1 843 026,39 euros HT au titre de l'indemnisation de la prolongation du délai contractuel, la somme de 74 400,27 euros HT au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de la résiliation partielle du marché, la somme de 243 850,44 euros au titre des intérêts moratoires, et la somme de 4 452 192,37 euros HT au titre du solde du marché, assortie des intérêts moratoires à compter du 2 mars 2015 ; 3°) de rejeter les conclusions d'appel incident de la commune de Metz ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Metz la somme de 6 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens de la commune tirés de ce que sa demande de première instance était irrecevable sont irrecevables, car ils sont nouveaux en appel, et ils soulèvent un litige distinct puisqu'ils reposent sur une cause juridique, la régularité du jugement, qu'elle n'invoque pas dans son appel principal ; - les moyens tirés de ce que sa demande de première instance était irrecevable en raison du caractère prématuré de la transmission de son projet de décompte final et de sa mise en demeure d'établir le décompte général ne sont pas fondés, dès lors que les réserves assortissant la réception prononcée avant cette transmission sont sans incidence, que la réception ne peut être regardée comme ayant été prononcée sous réserve, au sens de l'article 41.5 du CCAG, au-delà du 15 novembre 2014, et que la commune n'a pas sursis à l'établissement du décompte général, et ne pouvait d'ailleurs pas le faire ; - elle est fondée à demander que soient prises en compte, dans le cadre du règlement financier de son marché, l'ensemble des conséquences des fautes des divers intervenants à l'opération de construction sur les travaux supplémentaires qu'elle a dû réaliser et sur l'allongement de la durée du chantier, et non des seules conséquences des fautes du maître de l'ouvrage, à charge pour ce dernier de se retourner, s'il le souhaite, contre le ou les constructeurs fautifs ; - la commune a commis une faute en s'abstenant de prendre les mesures qui s'imposaient pour remédier à la défaillance du sous-traitant de la maîtrise d'œuvre ; - ses prétentions au titre des travaux supplémentaires sont justifiées ; - les conclusions d'appel incident de la commune ne sont pas fondées. L'instruction a été close le 10 mars 2022 à midi. Le 10 mars 2022 à 17 heures 38, postérieurement à la clôture de l'instruction, la commune de Metz a déposé un mémoire, qui n'a pas été communiqué. Par un courrier du 22 avril 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que, la commune ayant fait valoir devant elle que le décompte général du marché est devenu définitif en cours de première instance, la cour est susceptible de relever d'office l'irrégularité du jugement résultant de l'omission à prononcer le non-lieu à statuer sur les conclusions indemnitaires de la société Soludec dans le cadre de sa demande enregistrée sous le n° 1504187, ainsi que l'irrecevabilité des conclusions reconventionnelles et incidentes de la commune. Le 18 mai 2022, la société Soludec a présenté des observations en réponse à ce courrier. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Rees, président, - les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public, - et les observations de Me Molinie pour la société Soludec, ainsi que celles de Me Serra pour la ville de Metz. Considérant ce qui suit : 1. Dans le cadre d'une opération de construction d'une salle de musiques actuelles dénommée " La Boîte à Musique ", la commune de Metz a attribué lot n° 1 " clos couverts et lots architecturaux " à la société Soludec. Le 15 décembre 2014, la société Soludec a transmis son projet de décompte final à la commune. Le 27 janvier 2015, elle l'a mise en demeure de lui notifier le décompte général du marché. La commune n'ayant pas donné suite à cette mise en demeure, la société Soludec a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande, enregistrée sous le n° 1504187, tendant à ce qu'elle soit condamnée à lui verser diverses sommes au titre du règlement définitif de son marché. Le 16 décembre 2015, le maire de la commune de Metz a émis à l'encontre de la société Soludec huit titres exécutoires en vue du recouvrement de sommes dues, selon elle, au titre de l'exécution de ce marché. La société Soludec a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une seconde demande, enregistrée sous le n° 1602389, tendant à l'annulation de ces titres exécutoires. 2. Par un jugement nos 1504187, 1602389 du 7 février 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé ces titres exécutoires, condamné la société Soludec à verser à la commune de Metz la somme de 647 158,64 euros hors taxes au titre du solde du marché et rejeté le surplus de ses conclusions. Par un arrêt n° 18NC01101 du 22 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Nancy a, sur appel de la société Soludec et appel incident de la commune de Metz, annulé ce jugement en tant qu'il condamnait la société Soludec à verser à la commune de Metz la somme de 647 158,64 euros, rejeté le surplus des conclusions de la société et dit qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur l'appel incident de la commune. Par une décision n° 449395 du 10 novembre 2021, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour. Sur la recevabilité de la requête d'appel : 3. En premier lieu, si la requérante a, dans sa requête introductive, mentionné une adresse erronée pour la domiciliation de son siège social, elle a corrigé cette erreur en cours d'instance. 4. En second lieu, il ne résulte pas de l'instruction que la requérante n'aurait plus d'existence juridique et serait dépourvue de la personnalité morale. Sur la recevabilité de la demande de première instance : 5. Aux termes de l'article 13.3.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 8 septembre 2009, auquel renvoie l'article 2 du cahier les clauses administratives particulières du marché en litige : " Après l'achèvement des travaux, le titulaire établit le projet de décompte final (...) ". Selon l'article 13.3.2 du cahier des clauses administratives générales : " Le titulaire transmet son projet de décompte final, simultanément au maître d'œuvre et au représentant du pouvoir adjudicateur, par tout moyen permettant de donner une date certaine, dans un délai de trente jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux telle qu'elle est prévue à l'article 41.3 ou, en l'absence d'une telle notification, à la fin de l'un des délais de trente jours fixés aux articles 41.1.3 et 41.3. / Toutefois, s'il est fait application des dispositions de l'article 41.5, la date du procès-verbal constatant l'exécution des travaux visés à cet article est substituée à la date de notification de la décision de réception des travaux comme point de départ des délais ci-dessus. / S'il est fait application des dispositions de l'article 41.6, la date de notification de la décision de réception des travaux est la date retenue comme point de départ des délais ci-dessus ". Aux termes de son article 41.5 : " S'il apparaît que certaines prestations prévues par les documents particuliers du marché et devant encore donner lieu à règlement n'ont pas été exécutées, le maître de l'ouvrage peut décider de prononcer la réception, sous réserve que le titulaire s'engage à exécuter ces prestations dans un délai qui n'excède pas trois mois. La constatation de l'exécution de ces prestations doit donner lieu à un procès-verbal dressé dans les mêmes conditions que le procès-verbal des opérations préalables à la réception prévu à l'article 41.2 ". Enfin, selon son article 41.6 : " Lorsque la réception est assortie de réserves, le titulaire doit remédier aux imperfections et malfaçons correspondantes dans le délai fixé par le représentant du pouvoir adjudicateur ou, en l'absence d'un tel délai, trois mois avant l'expiration du délai de garantie défini à l'article 44.1[RP1] (...) ". 6. La commune de Metz fait valoir que, la réception des travaux ayant été prononcée en application de l'article 41.5 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, sous réserve de l'exécution de travaux non réalisés, la mise en demeure d'établir le décompte général du marché, qui lui a été transmise avant la date du procès-verbal constatant l'exécution de ces travaux, est prématurée et n'a pas pu produire d'effet. 7. Lorsque le défendeur en première instance a la qualité d'intimé, il est recevable à invoquer tout moyen pour la première fois, en défense comme à l'appui de conclusions d'appel incident, lesquelles ne doivent pas présenter à juger un litige distinct de l'appel principal. Le moyen rappelé au point précédent constitue un moyen soulevé en défense, et non à l'appui de conclusions d'appel incident. Par suite, et alors même qu'il n'a été soulevé pour la première fois qu'en appel, ce moyen est, contrairement à ce que soutient la société Soludec, recevable. [RP2] 8. Il résulte des stipulations mentionnées au point 5 que le point de départ des délais d'établissement du décompte final est la date de notification de la décision de réception des travaux lorsque le maître d'ouvrage entend prononcer la réception en faisant application de l'article 41.6 précité, relatif à la réception avec réserves des travaux, quelle que soit l'importance de ces réserves, et la date du procès-verbal constatant l'exécution des travaux lorsqu'il entend prononcer la réception en faisant application de l'article 41.5 précité, relatif à la réception sous réserves. 9. Toutefois, l'ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution d'un marché public est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde arrêté lors de l'établissement du décompte général et définitif détermine les droits et obligations définitifs des parties. Par ailleurs, la procédure d'établissement du décompte ne peut, en vertu de l'article 13.3.1 précité, démarrer qu'après l'achèvement des travaux. Il en résulte que lorsque la réception a été prononcée, même pour partie seulement, sur le fondement de l'article 41.5, lequel concerne les travaux qui n'ont pas été achevés, le point de départ des délais d'établissement du décompte final est la date du procès-verbal constatant l'exécution des travaux mentionné à l'article 41.5. 10. Par ailleurs, aux termes de l'article 13.4.2 : " Le représentant du pouvoir adjudicateur notifie au titulaire le décompte général avant la plus tardive des deux dates ci-après : / - quarante jours après la date de remise au maître d'œuvre du projet de décompte final par le titulaire ; / - douze jours après la publication de l'index de référence permettant la révision du solde. / Si le représentant du pouvoir adjudicateur ne notifie pas au titulaire, dans les délais stipulés ci-dessus, le décompte général signé, celui-ci lui adresse une mise en demeure d'y procéder. L'absence de notification au titulaire du décompte général signé par le représentant du pouvoir adjudicateur, dans un délai de trente jours à compter de la réception de la mise en demeure, autorise le titulaire à saisir le tribunal administratif compétent en cas de désaccord. / Si le décompte général est notifié au titulaire postérieurement à la saisine du tribunal administratif, le titulaire n'est pas tenu, en cas de désaccord, de présenter le mémoire en réclamation mentionné à l'article 50. 1. 1 ". 11. Il résulte de ces stipulations que lorsque le pouvoir adjudicateur, mis en demeure de notifier le décompte général, s'abstient d'y procéder dans le délai de trente jours qui lui est imparti, le titulaire du marché peut saisir le tribunal administratif d'une demande visant à obtenir le paiement des sommes qu'il estime lui être dues au titre du solde du marché. Dans l'hypothèse où la personne publique notifie le décompte général postérieurement à la saisine du tribunal, le litige conserve son objet et il y a lieu pour le juge de le trancher au vu de l'ensemble des éléments à sa disposition, sans que le titulaire du marché soit tenu de présenter de mémoire de réclamation contre ce décompte. 12. Toutefois, il ne peut en aller ainsi qu'à la condition que le délai de trente jours prévu par l'article 13.4.2 précité ait couru. La mise en demeure prévue à l'article 13.4.2 ne peut pas faire courir ce délai lorsqu'elle est transmise de manière prématurée. La mise en demeure doit être regardée comme étant prématurée lorsqu'elle intervient avant l'expiration du délai de quarante jours stipulé par l'article 13.4.2, ou si la remise au maître d'œuvre du projet de décompte final par le titulaire, qui constitue le point de départ de ce délai, est elle-même intervenue avant la notification de la décision de réception des travaux prononcée en application des articles 41.3 ou 41.6 précités, ou avant la date du procès-verbal constatant l'exécution des travaux dans le cas d'une réception prononcée en application de l'article 41.5 précité, ou encore, ainsi qu'il a été dit au point 9, lorsqu'elle est prononcée à la fois avec réserves pour une partie des travaux, en application de l'article 41.6 précité, et sous réserve pour une autre partie des travaux, en application de l'article 41.5 précité. Lorsqu'elle fait suite à une mise en demeure prématurée, qui n'a pas fait courir le délai de trente jours prévu par l'article 13.4.2, la demande du titulaire visant à obtenir le paiement des sommes qu'il estime lui être dues au titre du solde du marché n'est pas recevable. 13. Il ressort des énonciations de la décision de réception des travaux de la société Soludec que celle-ci a été prononcée, le 21 octobre 2014, à la fois sous réserve de l'exécution concluante de diverses épreuves et de l'exécution de différents travaux et prestations qui n'avaient pas encore été exécutés à cette date, et avec des réserves pour certains travaux déjà exécutés, mais affectés d'imperfections et de malfaçons. La décision fixe la date du 15 novembre 2014 pour la réalisation de ces différents travaux et prestations. Selon la requérante, la circonstance que le maître d'ouvrage a fixé cette échéance imposerait de considérer qu'à partir de cette date, la réception était définitivement intervenue pour les travaux et prestations réservés en application de l'article 41.5 précité, alors même qu'ils n'auraient pas été exécutés. Toutefois, en fixant une échéance pour la réalisation de ces travaux, le maître d'ouvrage s'est borné à se conformer aux stipulations de cet article qui prescrivent qu'un délai maximal de trois mois soit imparti au titulaire pour réaliser les prestations concernées, et qui subordonnent la levée des réserves émises sur son fondement non pas à l'expiration de ce délai, mais à la réalisation effective des travaux concernés. 14. Il est constant qu'à la date du 15 décembre 2014, à laquelle le maître d'œuvre et la commune ont réceptionné le projet de décompte final transmis par la société Soludec, aucun procès-verbal constatant l'exécution des travaux ayant fait l'objet de réserves en application de l'article 41.5 précité n'avait été établi. C'est donc de manière prématurée que la société Soludec a transmis ce projet et, par voie de conséquence, adressé sa mise en demeure à la commune le 27 janvier 2015. Dès lors, la commune de Metz est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a admis la recevabilité de la demande de la société Soludec, enregistrée sous le n° 1504187, et tendant à obtenir le paiement des sommes qu'elle estimait lui être dues au titre du règlement définitif de son marché. 15. Par suite, la commune de Metz est fondée à demander l'annulation de l'article 1er du jugement attaqué, par lequel le tribunal a statué sur la demande enregistrée au tribunal sous le n° 1504187, ainsi que le rejet de cette demande. Par voie de conséquence, les conclusions indemnitaires présentées par la société Soludec devant la cour ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais de l'instance : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune de Metz, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre une somme à la charge de la société Soludec en application de ces mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1 : L'article 1er du jugement du 7 février 2018 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé. Article 2 : La requête de la société Soludec est rejetée. Article 3 : Les conclusions de la commune de Metz tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Soludec et à la commune de Metz. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - Mme Barrois, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : P. Rees La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet [RP1]NB : à la réflexion, citer l'article 41.3 ne me paraît pas opportun : " Au vu du procès-verbal des opérations préalables à la réception et des propositions du maître d'œuvre, le maître de l'ouvrage décide si la réception est ou non prononcée ou si elle est prononcée avec réserves. S'il prononce la réception, il fixe la date qu'il retient pour l'achèvement des travaux. La décision ainsi prise est notifiée au titulaire dans les trente jours suivant la date du procès-verbal. / La réception prend effet à la date fixée pour l'achèvement des travaux (...) ". Cet article concerne la réception avec réserves. Or, notre solution est fondée sur la primauté de la réception sous réserve. Nous n'avons donc pas besoin de 41.3, dont la citation risque, de surcroît, de troubler notre " message ". [RP2]J'ai modifié la réponse initiale, qui se plaçait sur le terrain du litige distinct. Ce critère ne joue que lorsque le moyen est soulevé à l'appui de conclusions incidentes. Pour un pur moyen de défense, le défendeur peut faire feu de tout bois. Donc, si on qualifie ainsi le moyen, il est inutile, et même erroné, d'aller chercher la question du litige distinct. Et une FNR est clairement un moyen de pure défense. N° 21NC02958 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui renouveler son attestation de demande d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, ou à défaut de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 2105308 du 7 septembre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée sous le n° 21NC02868 le 3 novembre 2021 et un mémoire enregistré le 25 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Berry, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 septembre 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui renouveler son attestation de demande d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ; 3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français : - cette décision est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ; - elle ne pouvait pas être légalement édictée, dès lors qu'il justifie pouvoir bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en application de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; s'agissant du pays de renvoi : - cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; s'agissant de la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement : - il fait valoir des éléments sérieux de nature à justifier son maintien sur le territoire au titre de sa demande d'asile ; - le tribunal a omis de statuer sur ce moyen. La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de de ce que, la CNDA ayant statué sur le recours formé contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 avril 2021, les conclusions de M. B... tendant à obtenir la suspension de la mesure d'éloignement jusqu'au prononcé de la décision de la Cour nationale du droit d'asile sont devenues sans objet, de sorte qu'il n'y a plus lieu, pour la cour administrative d'appel, d'y statuer. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 4 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant géorgien, est entré en France, selon ses déclarations, le 30 août 2020. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, statuant selon la procédure prioritaire, le 26 avril 2021. Par un arrêté du 8 juillet 2021, la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer une attestation de demande d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 7 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la légalité de l'arrêté du 8 juillet 2021 : En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 2. En premier lieu, M. B... reprend en appel, sans les assortir d'éléments nouveaux, les moyens tirés, à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, du défaut de motivation et du défaut d'examen particulier de sa situation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge. 3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France le 30 août 2020, alors âgé de 38 ans. S'il soutient avoir alors rejoint son épouse et leurs quatre filles nées en 2004, 2010, 2013 et 2014, entrées en France à la fin de l'année 2018, il est constant qu'il est séparé de son épouse depuis une date non précisée et n'établit, ni même n'allègue avoir résidé en France en compagnie de ses filles. Les attestations rédigées par deux de ses filles, indiquant en termes généraux, qu'il est présent auprès d'elles ne permettent pas, à elles seules, d'établir la réalité et la fréquence des liens qu'il entretient avec celles-ci, qui ne sont par ailleurs établies par aucune pièce. S'il produit, d'une part, un avis émis le 7 décembre 2020 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration selon lequel l'état de santé de sa fille A..., née en 2013, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et implique un traitement dont celle-ci ne pourra pas bénéficier en Géorgie, et, d'autre part, une copie de l'autorisation provisoire de séjour délivrée à la mère de ses filles en qualité de parent accompagnant et valable jusqu'au 29 décembre 2021, il n'apporte aucun élément complémentaire permettant d'apprécier son éventuelle implication auprès de sa fille malade, non plus que la durée prévisible des traitements qu'elle est appelée à recevoir en France. Ainsi, eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment à la durée et aux conditions de séjour en France du requérant, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale ou à celui de ses filles une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a dès lors été prise en méconnaissance ni de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. 4. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, notamment en l'absence d'élément de nature à démontrer la réalité et la fréquence des liens entre le requérant et ses filles ou son implication auprès de sa fille A... dans le cadre des soins qu'elle reçoit en France, l'obligation de quitter le territoire français ne méconnait pas l'intérêt supérieur de l'enfant protégé par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi : 5. Pas plus en appel qu'en première instance M. B... n'apporte d'élément de nature à étayer ses allégations concernant sa crainte d'être l'objet, en cas de retour en Géorgie, de traitement inhumains ou dégradants prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 721-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Sur la demande de suspension de la mesure d'éloignement : 7. Il ressort du complément d'instruction diligenté par la cour que le recours formé par M. B... contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 avril 2021 a été rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 22 octobre 2021. Par suite, la demande du requérant tendant à ce que le juge suspende l'exécution de la demande d'éloignement jusqu'au prononcé de la décision de la Cour nationale du droit d'asile est devenu sans objet, de sorte qu'il n'y a plus lieu d'y statuer. Sur les conclusions à fin d'injonction : 8. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B.... Sur les frais liés à l'instance : 9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - M. Goujon-Fischer, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. Goujon-FischerLa présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 21NC02868
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Vu la procédure suivante : Procédures contentieuses antérieures : Par une requête n° 2007818, Mme C... E..., épouse B..., a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement. Par une requête n° 2007816, M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement. Par un jugement commun n° 2007816-2007818 du 11 mars 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes. Procédures devant la cour : I - Par une requête enregistrée le 13 octobre 2021, Mme B..., représentée par Me Chebbale demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 mars 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement ; 3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de cent euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour est entachée d'erreur de droit au regard de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de la gravité de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ; - elle ne peut faire l'objet d'une mesure d'éloignement dès lors qu'elle devrait bénéficier d'un titre de séjour de plein droit en application de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision méconnait les stipulations de l'article 8 la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de la gravité de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français. Un mémoire en défense du préfet du Bas-Rhin a été enregistré le 23 mai 2022 postérieurement à la clôture de l'instruction et n'a pas été communiqué. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 6 septembre 2021. II- Par une requête enregistrée le 13 octobre 2021, M. B..., représenté par Me Chebbale, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 mars 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement ; 3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de cent euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - le refus de titre de séjour méconnait les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision méconnait également les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de la gravité de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ; - il ne peut faire l'objet d'une mesure d'éloignement dès lors qu'il devrait bénéficier d'un titre de séjour de plein droit en application de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision méconnait les dispositions de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile devenu l'article L. 611-3-9° de ce même code ; - la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de la gravité de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français. Un mémoire en défense du préfet du Bas-Rhin a été enregistré le 19 mai 2022 postérieurement à la clôture d'instruction et[VS1] n'a pas été communiqué. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 6 septembre 2021. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. et Mme B..., ressortissants géorgiens nés respectivement les 18 novembre 1972 et 1er janvier 1974, sont entrés en France les 15 novembre 2014 et 8 octobre 2017 afin de demander l'asile. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions de l'OFPRA du 24 août 2018 et confirmées par des décisions de la CNDA du 28 février 2019. Par la suite, M. B... a été admis au séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile jusqu'au 25 novembre 2019. Le 13 novembre 2019, M. B... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-11-7° et L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme B... a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par des décisions du 23 octobre 2020, la préfète du Bas-Rhin a rejeté leur demande d'admission au séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de leur éloignement. Par des requêtes qu'il convient de joindre, les époux B... font appel du jugement du 11 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés. Sur les décisions leur refusant le titre de séjour : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable à la date de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé ". La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de faits susceptible de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tout élément permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie de la délivrance d'un titre de séjour se détermine au vue de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile. 3. Pour refuser le renouvellement de la demande de titre de séjour de M. B..., la préfète du Bas-Rhin s'est notamment fondée sur l'avis du 16 juin 2020 du collège des médecins de l'OFII qui considère que bien que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et peut voyager sans risque. Si M. B... produit différentes pièces médicales attestant qu'il a besoin d'un suivi régulier dans les suites de la greffe hépatique qu'il a subie en 2015, qu'il aurait besoin d'une thrombectomie portale et qu'il verse en appel un courrier du 18 juin 2021 du ministre de la santé géorgien indiquant que la transplantation d'organes cadavériques est interdite en Géorgie, il n'établit pas pour autant qu'il n'existerait pas, dans son pays d'origine, un traitement approprié à son état de santé actuel. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 4. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable à la date de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " et aux termes des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il n peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... réside en France depuis six ans, qu'il s'est vu délivrer un titre de séjour en raison de son état de santé, entre avril 2016 et novembre 2019, que son épouse l'y a rejoint le 8 octobre 2017 et qu'ils ne seraient pas dépourvus d'attaches familiales dans leur pays d'origine où ils ont vécu jusqu'à l'âge de quarante-trois et quarante-deux ans et où résident encore leurs deux enfants ainsi que des membres de leur famille respective. En outre, ils n'établissent pas la réalité et l'intensité de leurs liens privés et familiaux en France. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des arrêtes du 23 octobre 2020 sur leurs situations personnelles doivent être écartés. Sur les décisions les obligeant à quitter le territoire français : 6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que les décisions portant refus de titre de séjour n'étant pas illégales, le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français seraient dépourvues de base légale doit être écarté. 7. En deuxième lieu, pour les raisons énoncées aux points 3 et 5, M. et Mme B... ne peuvent en tout état de cause prétendre à la délivrance d'un titre de séjour de plein droit en application des articles L. 313-11-7° et L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et dès lors, peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement. 8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable à la date de la décision attaquée : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Il résulte de ce qui est exposé au point 3 que M. B... n'établit pas ne pas pouvoir bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 9. En quatrième lieu, pour les raisons énoncées aux points 3 et 5, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur leurs situations personnelles doivent être écartés. Sur les décisions fixant le pays de leur destination : 10. Il résulte de ce qui précède que les décisions leur refusant un titre de séjour et les obligeant à quitter le territoire français n'étant pas illégales, le moyen tiré de ce que les décisions fixant le pays de destination seraient dépourvues de base légale doit être écarté. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. D É C I D E : Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... sont rejetées. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - Mme Barrois, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La rapporteure, Signé : M. A...La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet [VS1]A vérifier , sinon on aurait du le communiquer 2 N° 21NC02703-21NC02704
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... épouse E..., Mme D... E... et M. A... E... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du 7 septembre 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Vry a approuvé le plan local d'urbanisme et de mettre à la charge de la commune de Vry la somme de 3 000 euros à chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1704691 du 29 mai 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande, a mis solidairement à leur charge le versement à la commune de Vry de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la requête de la commune de Vry. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 6 juillet 2019, sous le n° 19NC02159, M. E... F..., représentée par Me Guillon, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 29 mai 2019 ; 2°) d'annuler la délibération du 7 septembre 2017 par laquelle la commune de Vry a approuvé son plan local d'urbanisme ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Vry la somme de 3 000 euros à chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la délibération en litige a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière, puisqu'il n'est pas établi que les conseillers municipaux auraient été convoqués au moins trois jours francs avant la séance du conseil municipal et auraient reçu le projet de plan local d'urbanisme, conformément à l'article L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales ; - le classement des parcelles cadastrées section 24 n° 39, 41, 42, 43 et 44 en zone Nj méconnait l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; - le classement de l'intégralité de la parcelle 145 en zone UC est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; cette parcelle, propriété du maire, a fait l'objet d'un traitement privilégié ; - le classement de la totalité de la parcelle cadastrée section 23 numéro 97 en zone A et Aa est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; - la création d'une zone N au milieu de l'enveloppe urbaine est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; - la création de deux zones à urbaniser 1Aua et 1AUe est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; - le classement en zone à urbaniser des parcelles appartenant au maire de Vry cadastrées section 22 numéros 57 à 59 procède d'un détournement de pouvoir. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2020, la commune de Vry, représentée par Me Olszak, conclut : 1°) au rejet de la requête et à titre subsidiaire qu'il soit fait application des dispositions de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme ; 2°) à ce qu'il soit mis à la charge de M. E... F... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller, - les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique, - et les observations de Me Serra, pour la commune de Vry. Considérant ce qui suit : 1. Par une délibération du 7 septembre 2017, le conseil municipal de la commune de Vry a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. M. E... F... relèvent appel du jugement du 29 mai 2019, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette délibération. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la légalité externe : 2. Aux termes de l'article L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de moins de 3 500 habitants, la convocation est adressée trois jours francs au moins avant celui de la réunion. En cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire, sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. Le maire en rend compte dès l'ouverture de la séance au conseil municipal qui se prononce sur l'urgence et peut décider le renvoi de la discussion, pour tout ou partie, à l'ordre du jour d'une séance ultérieure ". Aux termes de l'article L. 2541-1 du même code : " Les dispositions de la première partie sont applicables aux communes des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin. Les dispositions des titres Ier et II du livre Ier de la présente partie sont applicables aux communes des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, à l'exception de celles des articles (...) L. 2121-11 (...) ". Aux termes de l'article L. 2541-2 du même code, quant à lui applicable aux communes des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin : " Le maire convoque le conseil municipal aussi souvent que les affaires l'exigent (...). La convocation indique les questions à l'ordre du jour ; elle est faite trois jours au moins avant la séance et, en cas d'urgence, la veille (...) ". 3. D'une part, les requérants ne sauraient se prévaloir utilement de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121 -11 du code général des collectivités territoriales, rendues inapplicables par l'article L. 2541-1 du même code aux communes des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, dont le délai de convocation des réunions du conseil municipal sont fixées par les seules dispositions de l'article L. 2541-2 de ce code. 4. D'autre part, il ressort des mentions du registre des délibérations, qui font foi jusqu'à preuve du contraire, que les convocations à la séance du conseil municipal du 7 septembre 2017 ont été établies le 31 août 2017. Comme l'ont relevé les premiers juges, il ressort de deux attestations établies par le maire et le premier adjoint de la commune de Vry que ces convocations ont été portées dans les boîtes à lettres de l'ensemble des conseillers municipaux le 1er septembre 2017, soit plus de trois jours avant la tenue de la réunion du conseil municipal, sans que les requérants apportent d'éléments précis ni probant de nature à mettre en doute la réalité ou la date de cette remise administrative. Les dispositions de l'article L. 2541-2 du code général des collectivités territoriales n'ont dès lors pas été méconnues. Enfin, aucune disposition, ni aucun principe n'imposait la transmission du projet de plan local d'urbanisme aux conseillers municipaux dans le délai de trois jours avant la tenue du conseil municipal. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les conseillers municipaux n'auraient pas disposé de ce document en temps utile pour se prononcer en connaissance de cause sur son approbation. En ce qui concerne la légalité interne : 5. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts. S'agissant du classement des parcelles cadastrées section 24 n °39, 41, 42, 43 et 44 en zone Nj : 6. Aux termes de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ;5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues ". 7. Le règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Vry a classé la partie arrière de diverses parcelles du territoire communal, constituées de jardins, en zones naturelles dénommées Nj, sur lesquelles l'autorisation de construire est limitée aux terrasses, vérandas, garages, abris de jardin, serres, piscines ou autres constructions de faible volumétrie. Selon le rapport de présentation de ce plan, un tel classement vise à éviter des constructions en seconde ligne pouvant créer une rupture paysagère et doit ainsi permettre de conserver l'aspect rural du village avec la morphologie " usoirs - bâtis - jardin - zone agricoles ", de préserver la vocation de jardins de ces espaces, d'éviter l'extension incontrôlée du bâti et de participer à la préservation de la structure urbaine locale mêlant habitat, jardins, vergers et sentiers. Les objectifs du PADD mentionnent également une attention particulière portée à la préservation des vergers et des jardins, qui confèrent au village sa qualité paysagère et assurent une transition harmonieuse avec les milieux agricoles ou naturels environnants. 8. Au nombre des parcelles ainsi classées en zone Nj, figurent le fond des parcelles cadastrées section 24 n° 39, 41, 42, 43 et 44, propriétés des requérants, dont les premières lignes sont en revanche classées en zone UD. Il n'est pas discuté que les parties de ces parcelles classées en zone Nj, dépourvues de constructions, présentent le caractère d'espaces naturels, dont la qualité et l'intérêt sont susceptibles de justifier leur classement comme zone naturelle Il n'est pas non plus contesté qu'elles sont bordées à l'Est et au Nord de constructions et au Sud et à l'Ouest de zones agricoles et naturelles. Elles répondent ainsi au parti d'urbanisme de la commune, consistant à conserver l'aspect rural du village, à préserver la vocation de jardins de ces espaces, à éviter l'extension incontrôlée du bâti, à préserver la structure urbaine locale, ainsi qu'à assurer une transition harmonieuse avec les milieux agricoles ou naturels environnants. Si les requérants font valoir que les parties constructibles de ces parcelles ne sont pas bâties, que la parcelle au Sud de la parcelle n° 39 accueille un hangar agricole, que les parcelles concernées sont situées dans l'enveloppe urbaine et desservies par les voies et réseaux ou trop éloignées du centre-bourg pour avoir un impact visuel, ces circonstances, qui ne remettent notamment pas en cause l'objectif de transition harmonieuse entre les espaces urbanisés ou susceptibles de l'être et les milieux agricoles ou naturels environnants, ne permettent pas d'établir une incohérence entre le parti d'urbanisme rappelé précédemment et le classement retenu. Ce classement n'est pas non plus incohérent avec les objectifs de densification de l'aire urbaine existante et de remplissage des dents creuses du PADD, qu'il appartenait à la commune de concilier avec les objectifs qui sous-tendent la création de zone Nj, dès lors que les premières lignes des parcelles en cause, répondant à la définition des dents creuses visées dans le PADD, sont classées en zone constructibles. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant le classement en zone Nj du fond des parcelles cadastrées section 24 n° 39, 41, 42, 43 et 44. S'agissant du classement de la parcelle cadastrée section 24 n°145 en zone Uc : 9. Aux termes de l'article R. 151-18 du code de l'urbanisme : " Les zones urbaines sont dites " zones U ". Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter ". 10. Il est constant que la parcelle cadastrée section 24 n° 145, desservie par les réseaux et équipements publics, est de celles qui, en application des dispositions rappelées au point précédent, pouvaient pour ce motif être classées en zone urbaine. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, cette parcelle diffère des leurs, classées en zone Nj, en ce que sa partie arrière ne jouxte pas des espaces naturels ou agricoles, mais une parcelle bâtie. Dès lors, son classement en zone Uc n'est pas incohérent avec le parti d'urbanisme retenu par la commune consistant à éviter les constructions en seconde ligne pouvant créer une rupture paysagère et à permettre, par cette précaution concernant uniquement les parties de parcelles donnant sur une perspective paysagère, de conserver l'aspect rural du village, de préserver la vocation de jardins de ces espaces, d'éviter l'extension incontrôlée du bâti, de participer à la préservation de la structure urbaine locale et enfin à assurer une transition harmonieuse avec les milieux agricoles ou naturels environnants. Ainsi, le classement de la parcelle cadastrée section 24 n° 145 en zone Uc n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation. La circonstance que cette parcelle, propriété du maire de la commune de Vry, aurait fait l'objet d'un traitement privilégié au travers de ce classement en zone Uc, n'est pas établie. S'agissant du classement de la parcelle cadastrée section 23 numéro 97 en zone A et Aa : 11. Aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme: " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. 12. Les requérants n'établissent, ni même n'allèguent que la parcelle cadastrée section 23 numéro 97, qui est au demeurant le siège d'une exploitation agricole, n'appartiendrait pas à un secteur à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. A supposer même que cette parcelle doive être regardée, d'une part, comme desservie par les voies et réseaux publics et susceptible ainsi d'être classée en zone urbaine et, d'autre part, comme constituant, dans sa partie Est, une " dent creuse " au sens du PADD, qui préconise de densifier le village de Vry-Gondreville en privilégiant la construction des nombreuses dents creuses présentes sur le territoire communal, cet objectif du PADD devait être concilié avec un autre objectif de ce même document, de limitation de la consommation de l'espace agricole, auquel la densification de l'aire urbaine doit d'ailleurs contribuer. Il ressort du rapport de présentation du plan local d'urbanisme que l'objectif de préservation de l'espace agricole concerne en particulier le secteur situé au Sud du Clos des Vignes sur le territoire de la commune de Vry, qualifié par ce rapport de secteur " à enjeu " et dans lequel se trouve la parcelle cadastrée section 23 numéro 97. Par suite, le classement de la parcelle cadastrée section 23 numéro 97 en zone A et Aa n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation. S'agissant du classement des parcelles cadastrées section 21 n° 53, 54, 55, 139, 61, 141, 142, 222, 223, 229 et 258 et section 23, n° 27 à 30 en zone N ou Nj : 13. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées section 21 n° 53, 54, 55, 139, 61, 141, 142, 222, 223, 229 et 258 et les parcelles cadastrées section 23 n° 27 à 30 constituent des terrains non bâtis et présentent le caractère d'espaces naturels susceptibles de recevoir protection, au sens et pour l'application de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme, déjà cité au point 10, qui définit les zones naturelles. La seule circonstance qu'elles soient entourées de parcelles bâties ou situées dans l'enveloppe urbaine de la commune ne suffit pas à imposer leur classement en zone urbaine ou en zone à urbaniser ou à entacher d'erreur manifeste d'appréciation leur classement en zone naturelle N ou Nj. Par ailleurs, le PADD met en avant la volonté de la commune de développer une urbanisation respectueuse de l'environnement et du cadre de vie du village, tout en favorisant une plus grande mixité urbaine et sociale et identifie parmi les principaux enjeux urbanistiques la nécessité de gérer la consommation de l'espace en développant une urbanisation maîtrisée et réfléchie, à travers une réduction importante de la vitesse d'artificialisation des espaces naturels, agricoles ou forestiers et une densification du village de Vry-Gondreville et la priorité donnée à la construction des dents creuses. Le PADD impliquait ainsi la réalisation et la conciliation de ces deux objectifs de préservation des espaces naturels, agricoles ou forestiers et de construction prioritaires dans les dents creuses. A cet égard, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des éléments cartographiques ou photographiques produits par les parties, que les parcelles section 21 n° 53, 54 et 55 et les parcelles section 23 n° 27 à 30, intégralement classées en zone N, non ou mal desservies par les voies et réseaux publics et proches de vastes espaces agricoles, présenteraient manifestement plus le caractère d'une dent creuse devant servir l'objectif de densification du village que celui d'un espace naturel à préserver. Par leur caractéristiques propres et leur voisinage, les parcelles cadastrées section 21 n° 61, 141, 142, 222, 223 et 258, partiellement classées, quant à elles en zone Nj, répondent au parti d'urbanisme qui préside à la création de cette zone, tel qu'il a été décrit au point 11 du présent arrêt. Enfin, la parcelle cadastrée section 21 n° 229, comme l'indique la commune, est entièrement classée en zone Ud et non en zone N ou Nj. Il suit de là que le classement en zone N ou Nj des parcelles en cause des sections 21 et 23 n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation. S'agissant du classement des parcelles cadastrées section 24 n° 181 à 188, et section 22 n° 54 à 59 en zone 1Aua et de la parcelle cadastrée section 22 n° 191 en zone AUe : 14. Aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement (...) ". 15. En premier lieu, le plan local d'urbanisme de la commune de Vry approuvé par la délibération du 7 septembre 2017 instaure une zone à urbaniser 1AUa, destinée à l'habitat, d'une superficie de 1,12 ha, située route de Hayes. Le rapport de présentation et le PADD justifient l'instauration de cette zone à la fois par le constat d'une demande importante de foncier et par l'émergence de constructions réalisées au coup par coup sous l'empire du précédent document d'urbanisme, qui menacent de s'étendre sur cette zone, y compris sur des parcelles d'une superficie importante, favorisant l'étalement urbain le long des routes et chemins ruraux, la création de dents creuses et l'apparition de paysages urbains chaotiques. Il s'agit, selon le PADD, d'accompagner ce développement de l'habitat pour permettre une maîtrise de l'urbanisation de ce secteur tout en répondant aux objectifs de production de logements fixés par le SCoTAM entre 19 et 24 logements sur 20 ans. Il est précisé sur ce dernier point que la rétention foncière étant élevée, les dents creuses ne permettraient probablement pas d'apporter une réponse suffisante en termes d'offre de logements, alors que les demandes de terrains constructibles sont fréquentes et que les biens immobiliers à vendre trouvent très rapidement acquéreur. Cet objectif de création de logements est à mettre en rapport avec la perspective annoncée dans le rapport de présentation d'une augmentation de la population communale d'environ 100 habitants à l'horizon de 2025 et de la nécessité, pour répondre à cet essor démographique, de fournir une offre de logements pour un nombre d'habitants compris entre 62 et 78, en plus de l'offre attendue du renouvellement urbain de logements vacants et/ou vétustes et des dents creuses situées au sein de l'enveloppe urbaine et de l'instauration d'une autre zone 1AU en entrée Ouest de Gondreville. Au regard de ces éléments chiffrés, les requérants n'apportent aucun élément précis de nature à mettre en doute la réalité de l'essor démographique attendu, le nombre de logements nécessaires ou l'insuffisance des dents creuses de l'actuelle enveloppe urbaine pour répondre à ce besoin de logements. S'ils font en revanche valoir l'objectif de préservation des espaces agricoles, déjà évoqué, cet objectif doit être concilié avec l'objectif de création de logements et d'accueil de nouvelles populations. A cet égard, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en instaurant une zone à urbaniser sur des espaces agricoles d'une superficie limitée à 1,12 ha, la commune ait procédé à une conciliation manière manifestement erronée entre ces deux objectifs. 16. En deuxième lieu, si les requérants soutiennent que le classement en zone AUa des parcelles cadastrées section 22 n° 57 à 59, propriétés du maire de Vry, est entaché de détournement de pouvoir dès lors que ce classement est susceptible d'accroître la valeur vénale de ces parcelles et ainsi, de servir les intérêts personnels du maire, ce détournement de pouvoir n'est pas établi dès lors que la création de la zone AUa est justifiée, ainsi qu'il a été dit au point précédent, par la nécessité de permettre la création de logements nécessaires à l'accueil de nouveaux habitants et qu'il ne ressort d'aucun élément du dossier que les parcelles cadastrées section 22 n° 57 à 59 auraient été incluses dans la zone AUa pour des motifs étrangers à cet objectif. 17. En dernier lieu, le plan local d'urbanisme de Vry instaure également une zone 1AUe, destinée à accueillir des équipements publics à l'entrée du village, d'une superficie de 1,08 ha. Le rapport de présentation et le PADD justifient l'instauration de cette zone par l'insuffisance de la densité, de la qualité et de la dimension des équipements publics actuels et la volonté de la commune de développer, des équipements nécessaires au développement du tissu économique ainsi que des équipements de loisir, en particulier une aire de jeux. Les requérants n'apportent aucun élément de nature à remettre en cause la réalité de ces besoins et n'établissent pas qu'en créant une zone 1AUe d'une surface de 1,08 ha sur une parcelle de type agricole, la commune aurait procédé à une conciliation manifestement erronée entre l'intérêt de la création d'équipement public et la préservation des espaces agricoles. 18. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande. Sur les frais liés à l'instance : 19. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 20. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Vry, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, la somme demandée par les requérants au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. E... F... le versement à la commune de Vry d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. E... F... est rejetée. Article 2 : M. E... F... verseront à la commune de Vry la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... épouse E..., Mme D... E..., M. A... E... et à la commune de Vry. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - M. Goujon-Fischer, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. Goujon-FischerLa présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 19NC02159
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2021 du préfet du Morbihan l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par un jugement n° 2106528 du 15 février 2022, le président du tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté en tant qu'il fixe le pays de renvoi, a enjoint au préfet du Morbihan de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au bénéfice de son conseil et rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 février et 20 avril 2022, le préfet du Morbihan demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du président du tribunal administratif de Rennes du 15 février 2022 en tant qu'il annule partiellement son arrêté du 1er décembre 2021 ; 2°) de rejeter la demande de Mme A.... Il soutient que : - contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, les éléments produits par l'intéressée postérieurement à l'arrêté litigieux ne permettent pas d'établir la réalité des craintes invoquées en cas de retour dans son pays d'origine ; - l'arrêté contesté a été pris postérieurement à la notification, le 29 septembre 2021, de l'ordonnance de la Cour nationale du droit d'asile. Par un mémoire en défense enregistré le 5 avril 2022, Mme A..., représentée par Me Berthet-Le Floch, demande à la cour : 1°) de rejeter cette requête ; 2°) par la voie de l'appel incident, d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2021 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français ; 3°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - le préfet n'est pas fondé à contester le motif d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi retenu par le premier juge ; - en l'absence de notification de l'ordonnance de la Cour nationale du droit d'asile préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement, cette dernière est dépourvue de base légale ; - elle entend se référer, en ce qui concerne les autres moyens qu'elle avait soulevés devant le tribunal administratif au soutien de ses conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, aux termes de ses écritures de première instance. Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : -la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., ressortissante haïtienne née le 19 août 1989, est entrée irrégulièrement en France le 23 décembre 2019, selon ses déclarations. Le bénéfice de l'asile lui a été refusé par une décision du 27 avril 2021 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 22 septembre 2021 de la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 1er décembre 2021, le préfet du Morbihan a obligé l'intéressée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai. Le préfet du Morbihan relève appel du jugement du 15 février 2022 par lequel le président du tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté en tant qu'il fixe le pays de renvoi. Par la voie de l'appel incident, Mme A... demande l'annulation de ce même jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Sur l'appel principal : En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi : S'agissant du motif d'annulation retenu par le premier juge : 2. Aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) /Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". 3. Pour annuler la décision litigieuse par laquelle le préfet du Morbihan a fixé le pays à destination duquel Mme A..., ressortissante haïtienne, pourrait être reconduite, le président du tribunal administratif de Rennes a estimé que cette décision avait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Mme A... fait valoir qu'elle a quitté Haïti après avoir été rejetée par sa famille et subi des violences et persécutions en raison de son orientation sexuelle et qu'un retour dans son pays d'origine l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les instances en charge de l'asile ont, par leurs décisions respectives des 27 avril 2021 et 22 septembre 2021, estimé que ni ses déclarations, convenues et insuffisamment circonstanciées, ni les documents produits, notamment ceux à caractère médical, ne permettaient de tenir pour avérés les faits allégués et les craintes énoncées en cas de retour en Haïti. L'intéressée n'établit pas, par les justificatifs insuffisamment probants, et notamment par les documents présentés comme des courriels échangés avec un ami résidant en Haïti qui aurait repris contact avec elle postérieurement à l'arrêté contesté et qui lui aurait transmis une lettre datée du 15 novembre 2021 que lui aurait destinée son père, le caractère réel, actuel et personnel des risques qu'elle invoque en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, c'est à tort que, pour annuler la décision fixant le pays de renvoi contenue dans l'arrêté du 1er décembre 2021 du préfet du Morbihan, le président du tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance des stipulations précitées. 4. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A... en première instance et en appel. S'agissant des autres moyens invoqués par Mme A... à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi : 5. A l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, l'intimée invoque, par voie d'exception, l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. 6. En premier lieu, par un arrêté du 7 juin 2021, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Morbihan a donné délégation à M. D... C..., attaché d'administration, adjoint à la cheffe de bureau des étrangers et de la nationalité de la préfecture du Morbihan, à l'effet de signer, en cas d'absence ou d'empêchement du directeur de la citoyenneté et de la légalité et de la cheffe du bureau précitée, notamment les décisions relatives à l'éloignement des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté. 7. En deuxième lieu, Mme A... se prévaut de son entrée en France en 2019, des relations sociales qu'elle y a nouées et de son investissement dans le secteur associatif. Il ressort toutefois des pièces du dossier que sa présence sur le territoire français, où elle ne justifie pas être entrée régulièrement, est récente et qu'elle n'a été admise à y séjourner qu'en qualité de demandeur d'asile le temps de l'instruction de sa demande. L'intéressée, célibataire et sans enfant, qui ne dispose ni d'un logement et de ressources autonomes, ni d'une perspective professionnelle précise, ne justifie pas d'une particulière intégration. Elle n'établit pas davantage avoir tissé des liens d'une particulière intensité en France ou être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente ans et où résident plusieurs membres de sa famille. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions d'entrée et de séjour en France de Mme A..., la décision contestée l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet du Morbihan n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entachée sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée. 8. Enfin, Mme A... soutient que l'ordonnance du 22 septembre 2021 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté le recours qu'elle a formé contre la décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides lui refusant le bénéfice de l'asile ne lui a pas été notifiée préalablement à l'édiction, le 1er décembre 2021, de la décision l'obligeant à quitter le territoire français Toutefois, le préfet du Morbihan établit, par la fiche " TelemOfpra " qu'il produit devant le juge d'appel que cette ordonnance a été notifiée à l'intéressée le 29 septembre 2021. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise avant cette notification, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 542-1 et du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté. 9. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à se prévaloir, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi. Compte tenu de ce qui précède, le préfet du Morbihan est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision du 1er décembre 2021 fixant le pays à destination duquel l'intimée était susceptible d'être reconduite d'office. Sur les conclusions de Mme A... dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français : 10. Les moyens invoqués par Mme A... à l'appui de ses conclusions aux fins d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 6 à 8 du présent arrêt. 11. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que le préfet du Morbihan est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 1er décembre 2021 en tant qu'ils fixe le pays de renvoi et, d'autre part, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par ce même jugement, le premier juge a rejeté sa demande tendant à l'annulation du même arrêté en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par voie de conséquence, les conclusions présentées en première instance par Mme A... à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées. D E C I D E Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement n° 2106528 du 15 février 2022 du président du tribunal administratif de Rennes sont annulés. Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Rennes et ses conclusions présentées par voie d'appel incident sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme E... A.... Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Morbihan. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition du greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, C. B... Le président, D. Salvi La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22NT006032
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2021 du préfet du Morbihan lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par un jugement n° 2200130 du 17 février 2022, le président du tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet du Morbihan de réexaminer la situation de Mme D... dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 2 mars 2022, le préfet du Morbihan demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du président du tribunal administratif de Rennes du 17 février 2022 ; 2°) de rejeter la demande de Mme D.... Il soutient que le premier juge a estimé à tort que la décision portant obligation de quitter le territoire français avait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense enregistré le 31 mars 2022, Mme D..., représentée par Me Le Verger, conclut au rejet de la requête et demande en outre à la cour d'enjoindre au préfet du Morbihan, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir et de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle fait valoir que : - le préfet n'est pas fondé à contester le motif d'annulation de l'arrêté du 8 décembre 2021 retenu par le premier juge ; - compte tenu de son état de santé, la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur d'appréciation au regard des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision fixant le pays de renvoi a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Mme B... D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 mai 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme D..., ressortissante de la République démocratique du Congo, née le 13 août 1988, est entrée irrégulièrement en France le 2 janvier 2020, selon ses déclarations. Le bénéfice de l'asile lui a été refusé par une décision du 30 juin 2021 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 26 novembre 2021 de la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 8 décembre 2021, le préfet du Morbihan a obligé Mme B... D... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. le préfet du Morbihan relève appel du jugement du 17 février 2022 par lequel le président du tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté. Sur le motif d'annulation retenu par le premier juge : 2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 3. Il ressort des pièces du dossier que Mme D..., ressortissante de la République démocratique du Congo entrée irrégulièrement en France le 2 janvier 2020, est mariée depuis le 7 décembre 2019 avec un compatriote avec lequel elle aurait eu six enfants, nés entre 2005 et 2015 en République démocratique du Congo, dont l'un est décédé en 2021. Il ressort des pièces du dossier que l'époux de Mme D..., né en 1974, a été admis à entrer et à séjourner en France à compter de 2016 en qualité d'étudiant, a sollicité le renouvellement de son dernier titre de séjour le 3 mars 2021 et bénéficié d'un récépissé dont la dernière prolongation a expiré le 24 novembre 2021. Dans ces conditions, à supposer même que les époux puissent être regardés comme partageant une communauté de vie et d'intérêt à la date de l'arrêté litigieux, ce qu'ils n'établissent pas, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à cette même date, l'époux de Mme D..., se trouvait en situation régulière ou avait vocation à rester sur le territoire français, M. A... E... ayant d'ailleurs fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français par un arrêté du 24 février 2022 du préfet du Morbihan. En outre, Mme D..., qui ne justifie ni de liens particuliers en France, ni d'une particulière intégration n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, où elle a vécu l'essentiel de son existence et où résident notamment ses cinq enfants survivants. Dans ces conditions, la décision contestée obligeant Mme D... à quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le préfet du Morbihan est fondé à soutenir que c'est à tort que le président du tribunal administratif de Rennes a annulé, pour ce motif, la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ainsi que, par voie de conséquence, la décision fixant le pays de renvoi. 4. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme D... en première instance et en appel. Sur les autres moyens invoqués par la requérante : 5. Pour les mêmes motifs que ceux exposés, au point 3, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 6. Si Mme D... soutient qu'elle a sollicité le 28 décembre 2021 auprès du préfet du Morbihan la délivrance d'un titre de séjour pour raisons médicales, cette demande est postérieure à l'arrêté contesté. Par suite, l'intéressée ne peut utilement se prévaloir de que ce dernier arrêté aurait été pris en méconnaissance des règles de procédure applicables aux demandes présentées à raison de l'état de santé. 7. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". 8. Si Mme D... se prévaut de son état de santé, les certificats médicaux produits tant en première instance qu'en appel, qui se bornent à évoquer, pour l'un, établi en mars 2020, un état de stress post-traumatique et, pour les autres, à faire état d'entretiens dans le cadre d'un suivi médico-psychologique depuis l'été 2020, ne permettent d'établir, eu égard aux termes insuffisamment circonstanciés dans lesquels ils sont rédigés, ni que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'elle ne pourrait bénéficier d'une prise en charge appropriée dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 3 et 8, en obligeant Mme D... à quitter le territoire français, le préfet du Morbihan n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. 10. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". 11. Mme D... soutient qu'elle serait en danger en cas de retour en République démocratique du Congo, où elle a subi des persécutions et où l'un de ses enfants a perdu la vie. Toutefois, l'intéressée, dont la demande d'asile a été rejetée par des décisions des 30 juin 2021 et 26 novembre 2021 des instances en charge de l'asile, qui ont estimé que ses déclarations imprécises et fluctuantes ne permettaient de tenir pour avérés les faits invoqués et les craintes énoncées, n'apporte à l'appui de ses allégations aucun élément probant et circonstancié permettant d'établir la réalité du risque invoqué. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté. 12. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Morbihan est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 8 décembre 2021. Par voie de conséquence, les conclusions présentées tant en première instance qu'en appel par Mme D... à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées. D E C I D E Article 1er : Le jugement n° 2200130 du 17 février 2022 du président du tribunal administratif de Rennes est annulé. Article 2 : La demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Rennes et ses conclusions présentées par voie d'appel incident sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B... D.... Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Morbihan. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition du greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, C. C... Le président, D. Salvi La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22NT006512
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 5 juin 2018 par laquelle le président du conseil départemental de la Loire-Atlantique lui a retiré son agrément d'assistante maternelle et la décision du 13 août 2018 rejetant son recours gracieux formé contre cette décision. Par un jugement n° 1809518 du 28 décembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé ces décisions du 5 juin 2018 et du 3 août 2018 et a enjoint au président du conseil départemental de la Loire-Atlantique de procéder au réexamen de la situation de Mme B... dans le délai de deux mois à compter de ce jugement. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 25 février 2022, le département de la Loire-Atlantique, représenté par Me Plateaux, demande à la cour : 1°) de prononcer le sursis à exécution de ce jugement du 28 décembre 2021 du tribunal administratif de Nantes ; 2°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le sursis sera prononcé sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative ; les faits fondant la décision contestée par Mme B... sont établis notamment au regard du caractère inadapté de son comportement à l'égard d'un enfant puni et de la persistante de l'accueil d'enfants malgré la suspension de son agrément ; le premier motif de la décision tenant en la fréquentation quotidienne d'un café, avec de très jeunes enfants, sans accord des parents est de nature à fonder à lui seul la décision contestée; la punition infligée à un enfant est en l'espèce inadaptée; le cumul de ces faits justifiait également ce retrait d'agrément et ils attestent d'un comportement inadapté au regard des obligations de sécurité et de bien-être des enfants accueillis ; - aucun des autres moyens soulevés n'est de nature à confirmer la décision d'annulation qu'il s'agisse de l'incompétence de l'auteur de la décision, de sa motivation, de la procédure suivie devant la commission départementale, de l'erreur de fait et de l'erreur d'appréciation. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mai 2022, Mme C... B..., représentée par Me Bardoul, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge du département de la Loire-Atlantique une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par le département de la Loire-Atlantique ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'action sociale et des familles ; - le code du travail ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Pons, rapporteur public, - et les observations de Me Delaunay, représentant le département de la Loire-Atlantique, et de Me Lavenant, représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme C... B... a bénéficié, à compter du 19 avril 2010, d'un agrément en qualité d'assistante maternelle délivré par le département de la Loire-Atlantique, lequel a été étendu par décision du 9 juin 2011 afin de lui permettre d'accueillir simultanément deux enfants de 0 à 10 ans et un enfant de 2 à 10 ans. Par une décision du 9 février 2018, le président du conseil départemental a suspendu son agrément pour une durée de quatre mois à compter de la notification de cette décision. Par une décision du 5 juin 2018 cette même autorité a prononcé le retrait de l'agrément, confirmé par une décision du 13 août 2018 rejetant le recours gracieux formé par Mme B.... Par un jugement du 28 décembre 2021, dont le département de la Loire-Atlantique demande le sursis à exécution, le tribunal administratif de Nantes a annulé les décisions des 5 juin et 3 août 2018 du président du conseil départemental de la Loire-Atlantique et a enjoint à celui-ci de procéder au réexamen de la situation de Mme B... dans le délai de deux mois à compter du jugement. 2. L'article R. 811-15 du code de justice administrative dispose que : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit suris à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. ". 3. La décision du président du conseil départemental de la Loire-Atlantique décidant le retrait de l'agrément délivré à Mme B... est fondée sur le fait que l'intéressée se rendait régulièrement avec les enfants qui lui étaient confiés dans un café associatif, lieu inadapté pour les enfants, sans que leurs parents en soient informés. Il lui est également reproché d'avoir adopté, le 1er février 2018, dans ce même café, une attitude inappropriée et brutale envers un des enfants qui lui étaient confiés, son absence de transparence quant à l'exercice de son activité, et la circonstance qu'elle a continué à accueillir des enfants en dépit de la suspension de son agrément. Cette décision a été annulée par le jugement attaqué en considérant que seul était établi le motif tenant au défaut de transparence en ce qui concerne les sorties au café associatif mais qu'il ne pouvait fonder à lui seul la décision de retrait d'agrément et, qu'en conséquence, celle-ci était entachée d'une erreur d'appréciation. 4. Le département de la Loire-Atlantique soutient notamment que le tribunal administratif de Nantes a retenu à tort une erreur d'appréciation compte tenu de ce que les faits tenant au comportement inapproprié de Mme B... à l'égard d'un enfant le 1er février 2018, à la fréquentation régulière d'un café constituant un lieu inapproprié pour les jeunes enfants confiés et à l'accueil d'un enfant en qualité d'assistante maternelle après la suspension de son agrément sont établis et de nature à fonder sans erreur d'appréciation la décision du 5 juin 2018 retirant l'agrément de Mme B... en qualité d'assistante maternelle. Ces moyens paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué du tribunal administratif de Nantes, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. 5. Dans ces conditions, il y a lieu d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1809518 du 28 décembre 2021 du tribunal administratif de Nantes prononçant l'annulation des décisions des 5 juin et 13 août 2018 du président du conseil départemental de la Loire-Atlantique décidant le retrait de l'agrément de Mme B... en qualité d'assistante maternelle et rejetant son recours gracieux. 6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande du département de la Loire-Atlantique tendant, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à la condamnation de Mme B... lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais de l'instance. Ces mêmes dispositions font obstacle à la demande présentée par Mme B..., partie perdante, sur le même fondement. D E C I D E : Article 1er : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête du département de la Loire-Atlantique tendant à l'annulation du jugement n° 1809518 du 28 décembre 2021 du tribunal administratif de Nantes prononçant l'annulation des décisions des 5 juin et 13 août 2018 du président du conseil départemental de la Loire-Atlantique décidant le retrait de l'agrément de Mme B... et rejetant son recours gracieux, il sera sursis à l'exécution de ce jugement. Article 2 : Les conclusions présentées par le département de la Loire-Atlantique et par Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au département de la Loire-Atlantique et à Mme C... B.... Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, C. A... Le président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00581
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 18 mars 2019 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation. Par un jugement n° 2004400 du 6 juillet 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 18 février 2022, M. C... A..., représenté par Me Neraudau, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2004400 du tribunal administratif de Nantes du 6 juillet 2021 ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 18 mars 2019 par lesquelles le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique à titre principal de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour le temps de cet examen ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de deux mille euros à verser à son avocate au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat. Il soutient que : - le jugement est irrégulier en méconnaissance des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ; les premiers juges ne lui ont pas communiqué le mémoire du préfet de la Loire-Atlantique enregistré le 10 novembre 2020 avant la clôture de l'instruction ; les juges se sont fondés sur des éléments présents dans ce mémoire, pour écarter le moyen tiré de l'incompétence du médecin rapporteur ; - les premiers juges n'ont pas répondu à la branche du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tiré de ce que son état de santé se dégraderait en cas de retour en Guinée et qu'il serait ainsi exposé à des traitements inhumains et dégradants ; . en ce qui concerne le refus de séjour : - la décision est entachée d'un vice de procédure : o il n'est pas établi que le Dr B..., médecin rapporteur, était compétent ; la décision du directeur de l'OFII du 17 janvier 2017, modifiée le 24 septembre 2018, prévoit la liste des médecins désignés pour participer au collège à compétence nationale de l'OFII et non les médecins ayant compétence pour établir le rapport médical ; o le caractère collégial de la délibération n'est pas établi, l'avis médical ayant notamment été rendu un dimanche ; les extraits correspondant de l'application Themis doivent être produits par l'administration ; - la décision méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : o il conteste la validité du rapport médical et l'avis du collège de médecins de l'OFII, qui ne saurait constituer une présomption faisant foi jusqu'à preuve contraire ; o il ne pourra avoir effectivement accès à son traitement en Guinée ; - la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; . en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : - la décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ; - la décision méconnait les dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; . en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination ; - la décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ; - la décision méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 § 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; ses craintes en cas de retour en Guinée sont réelles et toujours actuelles. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2022, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 19 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère, - et les observations de Me Neraudau, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. C... A..., ressortissant guinéen né en mars 1988, est entré en France en janvier 2016. Il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 22 décembre 2016. Son recours contre cette décision a été rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 2 novembre 2017. A la suite de cette décision, le préfet de la Loire-Atlantique a pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français le 25 janvier 2018, laquelle a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 avril 2018. M. A... a déposé, en mars 2018, une demande de titre de séjour en raison de son état de santé. Par un arrêté du 18 mars 2019 le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation. M. A... relève appel du jugement du 6 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 18 mars 2019. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, l'article R. 611-1 du code de justice administrative dispose que : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". 3. Il ressort des pièces du dossier que le second mémoire en défense produit par le préfet de la Loire-Atlantique auprès des premiers juges, enregistré au greffe du tribunal administratif de Nantes le 13 novembre 2020, avant la clôture de l'instruction fixée le 16 novembre suivant, n'a pas été communiqué à M. A.... Néanmoins, ce mémoire ne comportait aucune nouvelle pièce, et notamment ne communiquait pas de pièce concernant la désignation du docteur D... B... en qualité de médecin rapporteur à l'Office français de l'immigration et de l'intégration, alors que la compétence de cette dernière avait été mise en doute par l'intéressé dans son mémoire en réplique enregistré le 6 novembre 2020. Il ressort en outre de la motivation du jugement attaqué, à son point 8, que ce nouveau moyen a été écarté par les premiers juges au vu d'éléments publiés au bulletin officiel du ministère de l'intérieur. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif de Nantes a méconnu le principe du contradictoire et les dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative et que le jugement attaqué serait, pour ce motif, irrégulier. 4. En second lieu, le tribunal administratif qui n'avait pas à répondre à l'ensemble des arguments invoqués par le requérant a répondu aux points 28 et 29 de son jugement au moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, il avait relevé au point 15 de son jugement que le traitement nécessité par l'état de santé de M. A... était disponible dans son pays d'origine. Il suit de là que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé et pour ce motif, irrégulier. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne le refus de séjour : 5. L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, dispose que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. (...) ". Par ailleurs, l'article R. 313-22 du même code, alors en vigueur, dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code alors en vigueur : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. /Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission du certificat médical. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate. / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ". L'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 dispose que : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical, conformément au modèle figurant à l'annexe B du présent arrêté ". Enfin l'article 5 de ce même arrêté dispose que : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport (...) ". Il appartient au préfet, lorsqu'il statue sur une demande de carte de séjour, de s'assurer que l'avis a été rendu par le collège de médecins conformément aux règles procédurales fixées par ces textes. 6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment du bordereau de transmission de l'OFII produit par le préfet de la Loire-Atlantique à l'appui de ses écritures en première instance, que le rapport médical prévu par les dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été établi le 19 juin 2018 par le docteur D... B..., médecin du service de l'OFII. Le collège de médecins de l'OFII, constitué de trois autres praticiens, a émis son avis le 9 décembre 2018. En outre, il ne résulte ni des dispositions de l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ni d'aucune autre disposition législative ou réglementaire que le médecin chargé du rapport médical visé à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne serait compétent à cet effet qu'à la condition de figurer sur la liste des médecins désignés pour participer au collège à compétence nationale de l'OFII. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à soutenir que le rapport médical sur sa demande aurait été rédigé par un médecin non habilité à cet effet au motif que son nom ne figure pas sur cette liste de médecins figurant en annexe de la décision du directeur de l'OFII du 24 septembre 2018. Par ailleurs, il ressort des termes mêmes de l'avis en cause, signé des trois médecins composant le collège, qu'il est intervenu au terme d'une délibération. Cette mention fait foi jusqu'à preuve du contraire, alors qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier, notamment pas de la circonstance que l'avis porte la date d'un dimanche, que cet avis n'aurait pas été rendu au terme d'un débat collégial. Par suite, et sans qu'il soit besoin de solliciter l'administration pour que soient communiqués les extraits du logiciel de traitement informatique Themis, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé de la garantie tirée du débat collégial du collège de médecins de l'OFII exigé par les dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de la méconnaissance des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit donc être écarté. 7. En deuxième lieu, il ressort de l'avis du collège de médecins de l'OFII du 9 décembre 2018 que l'état de santé de M. A..., qui souffre d'une pathologie métabolique, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il peut voyager sans risque à destination de la Guinée et qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques de santé dans ce pays, il peut y bénéficier d'un traitement approprié. Si l'appelant conteste ce dernier fait, le préfet de la Loire-Atlantique établit, par la production de la liste des médicaments essentiels en Guinée de 2012 et par des fiches " Medical Country of Origin Information " (MEDcoi), concordantes, de 2015, 2017 et 2018 que les personnes atteintes de cette pathologie métabolique peuvent consulter un endocrinologue et accéder aux deux molécules prescrites à M. A..., la metformine et la gliclazide. La production d'un certificat peu circonstancié établi par un médecin généraliste français soulignant que " on sait que dans son pays, la Guinée, le système de soins ne permet pas une prise en charge du traitement, n'assure pas un approvisionnement régulier des médicaments qui parfois sont venus du marché et dont on ne connait pas la qualité " ne permet pas d'établir l'absence d'accès effectif en Guinée au traitement nécessité par l'état de santé de M. A.... Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions, alors en vigueur, du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 8. En dernier lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dispose que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. 9. M. A... est entré en France en janvier 2016 à l'âge de vingt-sept ans après avoir passé la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine, où il n'est pas contesté que demeurent encore son épouse et ses deux enfants. Il n'a résidé régulièrement en France qu'en qualité de demandeur d'asile, alors que sa demande d'asile a été définitivement rejetée par une décision de la CNDA du 2 novembre 2017. Il ne fait état d'aucune attache privée ou familiale particulière en France. Par suite, la décision de refus de séjour contestée ne porte pas, eu égard aux objectifs qu'elle poursuit, une atteinte disproportionnée au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale, garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle emporte sur sa situation. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 10. En premier lieu, eu égard à ce qui est exposé aux points 5 à 9, l'illégalité du refus de titre de séjour n'est pas établie. Par suite, le moyen soulevé par la voie de l'exception tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français en conséquence de celle de la décision de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté. 11. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-4 alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ". 12. Pour les motifs exposés aux points 5 à 9, les moyens tirés de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés. En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination : 13. En premier lieu, eu égard à ce qui a été exposé aux points 5 à 12, ni l'illégalité du refus de séjour, ni celle de l'obligation de quitter le territoire français ne sont établies. Par suite, le moyen soulevé par la voie de l'exception tiré de l'illégalité de la décision portant fixation du pays d'éloignement en conséquence de celles des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté. 14. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-2 alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays que s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Ces dispositions font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée. 15. En se bornant à évoquer les craintes du fait de sa conversion au christianisme, et alors que sa demande d'asile a été définitivement rejetée par la CNDA en novembre 2017, M. A... n'établit pas qu'il serait exposé à des risques actuels et réels de subir des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Par ailleurs, ainsi qu'il a été rappelé au point 7, il n'est pas établi qu'il ne pourrait bénéficier en Guinée du traitement nécessité par sa pathologie. 16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 mars 2019 du préfet de la Loire-Atlantique. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Me Neraudau et au ministre de l'intérieur. Une copie sera adressée pour information au préfet de la Loire-Atlantique. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, M. BÉRIA-GUILLAUMIELe président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00526
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, subsidiairement de réexaminer sa situation et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Par un jugement n° 2007386 du 28 décembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée sous le n° 21NC01638 le 5 juin 2021, M. B..., représenté par Me Pialat, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 28 décembre 2020 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an ; 3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, subsidiairement de réexaminer sa situation ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français : - cette décision est entachée d'incompétence, la délégation de signature ayant un champ trop large ; - elle méconnaît le principe des droits de la défense ; - elle n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; s'agissant du refus de délai de départ volontaire : - cette décision est illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; - elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - elle est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'il bénéficie d'une adresse en France et justifie ainsi des garanties de représentation nécessaires ; s'agissant de la décision fixant le pays de renvoi : - cette décision est illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; s'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français : - cette décision est illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi ; - elle méconnait le III l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne s'est pas soustrait à une mesure d'éloignement. Par un mémoire en défense enregistré le 16 mai 2022, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par décision du 3 mai 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant guinéen, est entré sur le territoire français, selon ses déclarations, en février 2017, alors mineur. Il a été confié à la garde du service départemental de l'aide sociale à l'enfance du Bas-Rhin. Devenu majeur, il a obtenu un titre de séjour en qualité de jeune majeur, valable jusqu'au 24 octobre 2020, et n'en a pas sollicité le renouvellement. Par arrêté du 24 novembre 2020, faisant suite à l'interpellation de l'intéressé par les services de police pour violences en état d'ivresse, la préfète du Bas-Rhin l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. B... relève appel du jugement du 28 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la légalité de l'arrêté du 24 novembre 2020 : En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 2. En premier lieu, l'arrêté du 24 novembre 2020 est signé de Mme C... A..., directrice des migrations et de l'intégration, à qui la préfète du Bas-Rhin a donné délégation, par un arrêté du 17 novembre 2020 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, à l'effet de signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions dévolues à cette direction, à l'exception de certaines catégories d'actes au nombre desquelles ne figurent pas les décisions portant obligation de quitter le territoire français. Le champ de la délégation consentie à Mme A... n'excède pas celui des matières relevant des attributions du ministre de l'intérieur pouvant donner lieu à une délégation de signature du préfet aux agents en fonction dans les préfectures en vertu du 7° de l'article 43 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté, signé par Mme A..., serait entaché d'incompétence de son auteur doit être écarté. 3. En deuxième lieu, M. B... reprend en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, le moyen tiré de ce que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé n'aurait pas été précédé d'un examen particulier de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon doit par le premier juge. 4. En troisième lieu, lorsqu'elle oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 511 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont issues de la transposition en droit national de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, la préfète doit appliquer les principes généraux du droit de l'Union européenne, dont celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Ce droit implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger intéressé à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité de son séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Il n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité de son séjour ou la perspective de son éloignement. 5. Il ressort des pièces du dossier, comme l'a relevé le premier juge, que, lors de son audition par les services de police, à la suite de son interpellation, le 24 novembre 2020, M. B... a fait état des conditions de son arrivée et de son séjour en France. Contrairement à ce que soutient le requérant, la nature et la formulation des questions qui lui ont été posées par les services de police l'ont mis à même de présenter utilement ses observations sur l'irrégularité de son séjour ou la perspective de son éloignement et ne l'ont pas privé de la possibilité de porter à la connaissance de l'administration des éléments pertinents relatifs à sa situation, avant l'intervention de la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet. Il n'a dès lors pas été privé du droit d'être entendu résultant du principe général du droit de l'Union européenne. 6. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré irrégulièrement en France en 2017, à l'âge de 16 ans. Il est célibataire et sans enfants et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident ses parents et sa sœur. Comme l'a relevé le premier juge, il n'a obtenu depuis son entrée en France aucun diplôme ni aucune formation qualifiante malgré ses différentes inscriptions à des formations financées par la collectivité, tandis qu'il doit son interpellation du 20 novembre 2020 à des violences commises en état d'ivresse. Dans ces circonstances, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de l'intéressé, et malgré les liens personnels qu'il indique, en termes généraux, avoir tissés en France, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a dès lors pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale du requérant. En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire : 7. En premier lieu, l'obligation faite à M. B... de quitter le territoire français n'étant pas illégale, celui-ci n'est pas fondé à se prévaloir, par la voie de l'exception, de cette illégalité à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision lui refusant le bénéfice d'un délai de départ volontaire. 8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. ' L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au deuxième alinéa de l'article L. 611-3, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 513-4, L. 513-5, L. 552-4, L. 561-1, L. 561-2 et L. 742-2 (...) ". 9. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., entré irrégulièrement sur le territoire français alors qu'il était mineur n'a pas déposé de demande de délivrance d'un titre de séjour une fois devenu majeur. S'il fait valoir que la régularisation de son séjour s'est heurtée à ses difficultés à obtenir le renouvellement de sa carte consulaire auprès des autorités guinéennes en l'absence de passeport, il n'a déposé de demande de renouvellement de carte consulaire que le 23 novembre 2020, veille de l'arrêté contesté, et n'établit pas avoir parallèlement sollicité son admission au séjour, ni même informé les services préfectoraux de ses diligences pour obtenir les pièces nécessaires à l'instruction d'une demande de titre de séjour. En outre, s'il produit une attestation d'hébergement et de domiciliation de l'Accueil Koenigshoffen à Strasbourg datée du 25 novembre 2020, soit du lendemain de l'arrêté contesté, indiquant qu'il réside dans les locaux de cette structure depuis le 26 février 2020, il n'établit pas avoir précédemment porté à la connaissance de l'administration le lieu de sa résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale. En déduisant de ces éléments qu'il existait un risque que l'intéressé se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre et en lui refusant pour ce motif le bénéfice d'un délai de départ volontaire, la préfète du Bas-Rhin, en l'absence de circonstance particulière de nature à écarter ce risque, n'a pas fait une inexacte application des dispositions, citées au point 8, du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 10. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 refusant le bénéfice d'un délai de départ volontaire du présent arrêt, il y a lieu d'écarter les moyens tirés, à l'encontre de la décision refusant le bénéfice d'un délai de départ volontaire, de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle et familiale du requérant. S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi : 11. L'obligation faite à M. B... de quitter le territoire français n'étant pas illégale, celui-ci n'est pas fondé à se prévaloir, par la voie de l'exception, de cette illégalité à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant son pays de renvoi. S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français : 12. En premier lieu, l'obligation faite à M. B... de quitter le territoire français n'étant pas illégale, celui-ci n'est pas fondé à se prévaloir, par la voie de l'exception, de cette illégalité à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'interdiction de retour sur le territoire français. 13. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. ' L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ". 14. Ainsi qu'il a été dit, M. B... s'est vu refuser le bénéfice d'un délai de départ volontaire. Par suite, et alors qu'il ne justifie pas de circonstances humanitaires de nature à s'y opposer, il pouvait légalement faire l'objet d'une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français. S'il n'a pas fait obstacle à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'au regard de la durée de sa présence sur le territoire français et de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, la préfète aurait fait une inexacte application des dispositions, citées au point 13, du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en décidant de lui interdire le retour sur le territoire français pour une durée d'un an. 15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 16. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B.... Sur les frais liés à l'instance : 17. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 18. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président assesseur, - M. Goujon-Fischer, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. Goujon-FischerLa présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 21NC01638
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 11 janvier 2022 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités néerlandaises pour l'examen de sa demande d'asile et la décision du même jour par laquelle ce préfet l'a assigné à résidence. Par un jugement n° 2200738 du 26 janvier 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 23 mars 2022, M. B... A..., représenté par Me Neraudau, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2200738 du tribunal administratif de Nantes du 26 janvier 2022 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 janvier 2022 portant transfert auprès des autorités néerlandaises ; 2°) d'annuler la décision du préfet de Maine-et-Loire du 11 janvier 2022 portant transfert auprès des autorités néerlandaises ; 3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de lui remettre une attestation de demande d'asile en procédure normale, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les meilleurs délais ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme 2 000 euros à verser à son avocate au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat. Il soutient que : - le jugement a omis de statuer sur le moyen tiré du défaut d'examen de sa vulnérabilité et du caractère prématuré de la décision compte tenu de son état de santé ; - la décision est insuffisamment motivée et ne fait pas de référence exacte à sa situation et à sa vulnérabilité notamment au regard de sa qualité de demandeur d'asile, des persécutions subies dans son pays d'origine, et de son parcours d'exil difficile ; - les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues, ainsi que les dispositions de l'article 13 du règlement général sur la protection des données ; la remise de l'information n'est pas intervenue en temps utile ; - les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues : o il n'est pas établi que l'exigence de confidentialité de l'entretien a été respectée ; o il n'est pas établi que l'entretien a été mené par une personne qualifiée ; - il n'y a pas eu d'examen de sa vulnérabilité, en méconnaissance de l'article L. 571-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet ne peut limiter la vulnérabilité au seul état de santé ; il est une personne vulnérable au sens de l'article L. 522-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la décision de transfert a été prise de manière prématurée compte tenu des rendez-vous médicaux dont il devait bénéficier ultérieurement ; - la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : o il est vulnérable en raison de son statut de demandeur d'asile, des persécutions subies dans son pays d'origine, de son parcours d'exil et des problèmes médicaux et psychologiques dont il souffre ; o sa demande d'asile a été définitivement rejetée et il fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire néerlandais ; il n'existe aucune garantie de prise en charge et d'hébergement en cas de transfert aux Pays-Bas. Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 avril 2022 et le 9 mai 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - le délai de transfert de M. A... vers les Pays-Bas est reporté au 26 juillet 2022 ; - les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 21 février 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ; - le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; - la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ; - le règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère, - et les observations de Me Neraudau, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., ressortissant guinéen né en juillet 1995, est entré en France en novembre 2021, après avoir séjourné en Italie puis aux Pays-Bas où il avait déposé une première demande de protection internationale. Il a déposé une demande d'asile qui a été enregistrée le 6 décembre 2021. Par une décision du 11 juillet 2022, le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités néerlandaises et, par une décision du même jour, a également prononcé son assignation à résidence. M. A... relève appel du jugement du 26 janvier 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de transfert auprès des autorités néerlandaises. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Le premier juge, qui n'avait pas à répondre à l'ensemble des arguments soulevés par M. A..., a suffisamment répondu au point 4 de son jugement au moyen tiré de l'insuffisant examen de sa situation personnelle par le préfet de Maine-et-Loire, le caractère prématuré de cette décision au regard des examens médicaux alors programmés constituant un simple argument à l'appui de ce moyen. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué du tribunal administratif de Nantes serait insuffisamment motivé et, pour ce motif, irrégulier. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. En premier lieu, l'article L. 571-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Lorsque l'autorité administrative estime que l'examen d'une demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat qu'elle entend requérir, en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, il est procédé à l'enregistrement de la demande selon les modalités prévues au chapitre I du titre II. / Une attestation de demande d'asile est délivrée au demandeur selon les modalités prévues à l'article L. 521-7. Elle mentionne la procédure dont il fait l'objet. Elle est renouvelable durant la procédure de détermination de l'Etat responsable et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. / Le présent article ne fait pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 572-1 du même code : " Sous réserve du troisième alinéa de l'article L. 571-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative (...) ". 4. L'arrêté du 11 janvier 2022 portant transfert de M. A... auprès des autorités néerlandaises comporte l'exposé détaillé des considérations de droit et de fait qui le fondent et qui en sont le support nécessaire. Dans ces conditions, et alors que l'arrêté litigieux n'avait pas à retracer l'intégralité de la situation de M. A..., ce dernier n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du 11 janvier 2022 serait insuffisamment motivé en méconnaissance des dispositions de l'article L. 572-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. (...) ". 6. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre l'ensemble des éléments d'information prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. La remise de ces éléments doit intervenir en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations. Eu égard à leur nature, la remise par l'autorité administrative de ces informations prévues par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie. 7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est vu remettre, le 6 décembre 2021, le jour même de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, et à l'occasion de l'entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées, en langue française, qu'il a déclaré comprendre. Par ailleurs, M. A... a attesté, sur le compte-rendu de l'entretien mené le jour même, que les informations contenues dans le guide du demandeur d'asile ainsi que dans les brochures A et B lui ont été communiquées oralement et qu'il reconnaissait les avoir comprises. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) du 26 juin 2013 n'est pas fondé et doit être écarté. 8. En troisième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. (...) ". 9. Il ressort des mentions figurant sur le compte-rendu signé par M. A... qu'il a bénéficié le 6 décembre 2021, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. Cet entretien s'est tenu en langue soussou, que l'intéressé a déclaré comprendre, avec le concours par téléphone d'un interprète, dont l'identité est portée sur le compte rendu d'entretien, intervenant pour le compte de la société ISM Interprétariat, agréée par le ministère de l'intérieur. Il n'est pas établi que M. A... n'aurait pas été en capacité de comprendre les informations qui lui ont été délivrées et de faire valoir toutes observations utiles relatives à sa situation au cours de l'entretien, ainsi que cela ressort du compte-rendu qui en a été établi qui expose de manière détaillée son parcours migratoire, les conditions de sa prise en charge en Italie et aux Pays-Bas ainsi que les problèmes de santé exposés par l'intéressé. Par ailleurs, aucun élément du dossier n'établit que cet entretien n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national et dans des conditions qui n'en auraient pas garanti la confidentialité. En outre, l'absence d'indication de l'identité et de la qualité de l'agent ayant conduit l'entretien n'a pas privé le requérant de la garantie que constitue le bénéfice de cet entretien individuel. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 n'est pas fondé et doit être écarté. 10. En quatrième lieu, à la différence de l'obligation d'information instituée par le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, celle prévue par les dispositions de l'article 29, paragraphe 1 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, laquelle est garantie par l'ensemble des Etats membres relevant du régime européen d'asile commun. La méconnaissance de cette obligation d'information dans une langue comprise par l'intéressé ne peut être utilement invoquée à l'encontre des décisions par lesquelles la France transfère un demandeur d'asile aux autorités compétentes pour examiner sa demande. Il en va de même de la méconnaissance de l'obligation d'information résultant des dispositions de l'article 13 du règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données. Dans ces conditions, la circonstance que M. A... n'aurait pas reçu l'information prévue par ces dispositions avant le relevé de ses empreintes est sans incidence sur la légalité de la décision portant transfert auprès des autorités espagnoles. Il suit de là que ce moyen doit être écarté. 11. En cinquième lieu, M. A... ne peut utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision de transfert en litige, d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 571-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile selon lesquelles : " Il est procédé à une évaluation de la vulnérabilité des demandeurs mentionnés à l'article L. 571-1, selon les modalités prévues au chapitre II du titre II, afin de déterminer leurs besoins particuliers en matière d'accueil. " qui ont pour seul objet de déterminer les besoins d'accueil des personnes dont la demande d'asile relève de la compétence d'un autre État que l'autorité administrative entend requérir, en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, dans l'attente d'une éventuelle décision de transfert, et dont la méconnaissance demeure sans incidence sur la légalité de la décision en litige. 12. En sixième lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté du 11 janvier 2022, qui comporte l'exposé détaillé des considérations relatives à la situation personnelle et à l'état de santé de M. A..., ni des autres pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen de la situation personnelle de l'intéressé. La circonstance que M. A... devait honorer des rendez-vous médicaux dans les jours suivant l'édiction de l'arrêté du 11 janvier 2022 ne permet pas d'établir, en l'absence de doute quant à la nature de ses pathologies qu'il avait précisées lors de l'entretien du 6 janvier 2021, que le préfet de Maine-et-Loire aurait adopté la décision litigieuse prématurément. 13. En dernier lieu, aux termes du 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Aux termes de l'article 17 du même règlement : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'Etat membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'Etat membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". 14. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations. 15. D'une part, si M. A... fait valoir que sa demande d'asile ayant été rejetée par les autorités néerlandaises, il fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire de cet Etat et ne serait pas pris en charge en cas de transfert aux Pays-Bas, en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans ce pays des défaillances systémiques dans le traitement des demandeurs d'asile et alors que l'intéressé ne fait état d'aucun élément particulier susceptible d'établir qu'il serait soumis aux Pays-Bas à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ce moyen doit être écarté. 16. D'autre part, M. A... ne produit pas de documents médicaux qui permettent de démontrer la gravité de son état de santé. S'il ressort des documents produits qu'il souffre de douleurs, d'hypertension artérielle et de problèmes psychiatriques nécessitant un traitement et la consultation de psychologues, aucune pièce du dossier ne permet d'établir que M. A... ne pourrait bénéficier du suivi exigé par ses pathologies aux Pays-Bas où il a déjà été pris en charge médicalement. De même, la circonstance selon laquelle ses conditions de vie ont été particulièrement éprouvantes tout au long de son parcours migratoire, en Lybie puis en Italie, ne suffisent pas davantage à démontrer qu'il se trouverait dans une situation de vulnérabilité exceptionnelle imposant d'instruire sa demande d'asile en France. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement précité. 17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 11 janvier 2022. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Neraudau et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, M. BÉRIA-GUILLAUMIELe président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00883
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 février 2021 et 2 mars 2022, la société Centrale éolienne de Lollieux, représentée par Me Versini-Campinchi, demande à la cour : 1°) d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2020 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté sa demande d'autorisation environnementale pour l'exploitation d'un parc éolien sur le territoire de la commune d'Allondrelle-la-Maison, ainsi que la décision du 20 janvier 2021 rejetant son recours gracieux ; 2°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de reprendre l'instruction de sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'arrêté contesté est insuffisamment motivé, dès lors qu'il n'indique pas en quoi les pièces complémentaires transmises ne répondent pas à la demande de compléments du 8 novembre 2019 et ne permet pas de comprendre quels compléments auraient dû être fournis ; - contrairement à ce qu'a estimé le préfet, les éléments qui lui ont été fournis lui permettent de se prononcer sur les impacts paysagers du projet ; - le préfet n'a pas sérieusement instruit sa demande ; - en se fondant tout à la fois sur l'insuffisance des éléments du dossier pour apprécier l'impact paysager du projet, et sur une appréciation de cet impact, le préfet a entaché sa décision d'une contradiction de motifs. Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2022, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête. Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Rees, président, - les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique, - et les observations de Me Cambus, substituant Me Versini-Campinchi, pour la société Centrale éolienne de Lollieux. Une note en délibéré présentée par la société centrale éolienne de Lollieux a été enregistrée le 10 juin 2022. Considérant ce qui suit : 1. La société Centrale éolienne de Lollieux demande à la cour d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2020 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a, au motif que le dossier de demande était demeuré incomplet en dépit d'une invitation à le régulariser, rejeté sa demande d'autorisation environnementale pour l'exploitation d'un parc éolien de cinq aérogénérateurs sur le territoire de la commune d'Allondrelle-la-Maison, à proximité immédiate de la frontière entre la France et la Belgique, ainsi que la décision du 20 janvier 2021 rejetant son recours gracieux. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article R. 181-34 du code de l'environnement : " Le préfet est tenu de rejeter la demande d'autorisation environnementale dans les cas suivants : / 1° Lorsque, malgré la ou les demandes de régularisation qui ont été adressées au pétitionnaire, le dossier est demeuré incomplet ou irrégulier ; (...) / La décision de rejet est motivée ". 3. En premier lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du courrier d'accompagnement de la notification de l'arrêté contesté, que cette notification comprenait une copie du rapport de l'inspection de l'environnement du 7 octobre 2020 sur lequel le préfet s'est fondé. Ce rapport décrit de manière détaillée et circonstanciée chacune des insuffisances du dossier de demande d'autorisation, notamment en ce qui concerne le volet paysager. Dans ces conditions, et alors même que les énonciations de l'arrêté contesté se limitent à relever ces insuffisances sans les préciser, la requérante a été suffisamment informée des motifs de la décision. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision doit être écarté. 4. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport de l'inspection de l'environnement du 7 octobre 2020, que l'administration a procédé à un examen concret et particulier de la demande d'autorisation de la requérante. La circonstance qu'elle ait limité cet examen aux insuffisances du dossier de demande et qu'elle n'ait, de son propre aveu, pas pu procéder à un examen sérieux des autres aspects de ce dossier, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée, dès lors que celle-ci est fondée sur lesdites insuffisances. 5. En troisième lieu, en indiquant que " les compléments au dossier du 9 juillet 2020 susvisés n'apportent pas de réponse satisfaisante notamment en ce qui concerne l'intégration du projet dans le paysage, que ce soit en France ou en Belgique ", le préfet n'a pas, contrairement à ce que soutient la requérante, porté une appréciation sur l'intégration du projet dans le paysage, mais s'est borné à relever l'insuffisance des compléments apportés à ce sujet. Le moyen tiré de ce que la décision contestée reposerait sur des motifs contradictoires manque ainsi en fait et doit être écarté. 6. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que la zone d'implantation du projet comporte déjà trois parcs éoliens existants, composés de dix-sept éoliennes au total, situés en surplomb et le long de la frontière belge. Les éoliennes projetées, d'une hauteur de 150 mètres en bout de pales, seraient implantées sur le plateau du Pays-Haut, à une altitude de plus de 400 mètres, en surplomb du territoire belge et des localités belges proches de la frontière qui se situent à une altitude de 200 mètres. En outre, dans un courrier du 28 août 2020, les autorités belges, consultées par le préfet, avaient émis un avis défavorable au projet en raison de son impact paysager du côté belge de la frontière. La requérante ne peut pas utilement faire valoir que cet impact serait, en réalité, minime, ni que l'administration aurait, à tort, postulé qu'il serait significatif, dès lors qu'il lui appartenait, pour compléter son dossier, de fournir à l'administration les éléments lui permettant d'en vérifier elle-même l'importance. Or, les huit photomontages réalisés à partir de points de vue situés en Belgique figurant dans le dossier de demande d'autorisation, dont trois dans l'aire d'étude éloignée, quatre dans l'aire d'étude rapprochée et un seul dans l'aire d'étude immédiate, ne permettent pas d'apprécier l'impact paysager du projet depuis la Belgique. En réponse à la demande de compléments du 8 novembre 2019, la pétitionnaire s'est bornée à ajouter deux pages dans le volet paysager de l'étude d'impact, dont une partie reprenant des éléments dupliqués de l'étude initiale, et sans élément visuel nouveau permettant d'apprécier l'impact paysager du projet depuis la Belgique. Dans ces conditions, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions du 1° de l'article R. 181-34 du code de l'environnement précité en estimant que le dossier de demande d'autorisation était insuffisant sur ce point. 7. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la société Centrale éolienne de Lollieux, ainsi que, par voie de conséquence ses conclusions aux fins d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de la société Centrale éolienne de Lollieux est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Centrale éolienne de Lollieux et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - M. Goujon-Fischer, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022 Le rapporteur, Signé : P. Rees La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet N° 21NC00537 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 18 janvier 2022 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités allemandes pour l'examen de sa demande d'asile et la décision du même jour par laquelle le préfet l'a assigné à résidence. Par un jugement n° 2201102 du 11 février 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 1er avril 2022, M. B... A..., représenté par Me Neraudau, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2201102 du tribunal administratif de Nantes du 11 février 2022 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 janvier 2022 portant transfert auprès des autorités allemandes ; 2°) d'annuler la décision du préfet de Maine-et-Loire du 18 janvier 2022 portant transfert auprès des autorités allemandes ; 3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de lui remettre une attestation de demande d'asile en procédure normale, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les meilleurs délais ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocate au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat. Il soutient que : - la décision est insuffisamment motivée et ne fait pas de référence notamment au suivi spécialisé dont il fait l'objet et à son traitement médicamenteux ; la motivation ne prouve pas un examen sérieux de sa situation notamment de santé ; - les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues : o il n'est pas établi que l'exigence de confidentialité de l'entretien a été respectée ; o il n'est pas établi que l'entretien a été mené par une personne qualifiée ; - la décision est entachée d'erreurs de fait o une erreur de fait quant à l'absence de traitement médicamenteux démontrant un défaut d'examen sérieux de son état de santé ; o une erreur de fait quant à la situation sanitaire en Allemagne alors que compte tenu de ses problèmes cardiaques, il rentre dans les critères de vulnérabilité au Covid définis par l'article 1er du décret n° 2021-1162 du 8 septembre 2021 ; - la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : o il est vulnérable en raison de ses problèmes de santé et du risque d'interruption de son suivi médical lors de se son renvoi en Allemagne ; o sa demande d'asile a été définitivement rejetée et il fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire allemand ; il n'existe aucune garantie de prise en charge médicale en cas de transfert en Allemagne. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - le délai de transfert de M. A... vers l'Allemagne est reporté au 11 août 2022 ; - les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 2 mars 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ; - le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; - la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ; - le règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère, - et les observations de Me Neraudau, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. C... A..., ressortissant guinéen né en juillet 1983, est entré en France en janvier 2021, après avoir séjourné en Italie puis en Allemagne où il avait déposé une demande de protection internationale. Il a déposé une première demande d'asile en France en janvier 2021 et par une décision du 24 février 2021, le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités allemandes. Cette décision a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Nantes du 16 mars 2021, enjoignant au préfet de réexaminer la situation de M. A.... A l'issue de ce réexamen, le préfet de Maine-et-Loire a de nouveau décidé le transfert de M. A... en Allemagne le 23 avril 2021. Le recours de M. A... contre cette nouvelle décision a été rejeté par un jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 mai 2021. Le transfert de M. A... auprès des autorités allemandes a été exécuté le 30 septembre 2021. M. A... est entré à nouveau en France en novembre 2021. Il a déposé une nouvelle demande d'asile qui a été enregistrée le 8 décembre 2021. Par une décision du 18 janvier 2022, le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités allemandes et, par une décision du même jour, a également prononcé son assignation à résidence. M. A... relève appel du jugement du 11 février 2022 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de transfert auprès des autorités allemandes. 2. En premier lieu, l'article L. 571-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Lorsque l'autorité administrative estime que l'examen d'une demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat qu'elle entend requérir, en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, il est procédé à l'enregistrement de la demande selon les modalités prévues au chapitre I du titre II. / Une attestation de demande d'asile est délivrée au demandeur selon les modalités prévues à l'article L. 521-7. Elle mentionne la procédure dont il fait l'objet. Elle est renouvelable durant la procédure de détermination de l'Etat responsable et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. / Le présent article ne fait pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 572-1 du même code : " Sous réserve du troisième alinéa de l'article L. 571-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative (...) ". 3. L'arrêté du 18 janvier 2022 portant transfert de M. A... auprès des autorités allemandes comporte l'exposé détaillé des considérations de droit et de fait qui le fondent. Par ailleurs, les éventuelles erreurs de fait dont serait entachée cette décision sont sans incidence sur le caractère suffisant de cette motivation mais relèveraient de la légalité interne de la décision. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du 18 janvier 2022 serait insuffisamment motivé en méconnaissance des dispositions de l'article L. 572-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. (...) ". 5. Il ressort des mentions figurant sur le compte-rendu signé par M. A... qu'il a bénéficié le 14 décembre 2021, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. Cet entretien s'est tenu en langue française, que l'intéressé a déclaré comprendre. Il n'est pas établi que M. A... n'aurait pas été en capacité de comprendre les informations qui lui ont été délivrées et de faire valoir toutes observations utiles relatives à sa situation au cours de l'entretien, ainsi que cela ressort du compte-rendu qui en a été établi qui expose de manière détaillée son parcours migratoire, les conditions de sa prise en charge en Allemagne, les motifs de sa demande d'asile en France, les conditions de son premier transfert auprès des autorités allemandes, ses problèmes de santé, et le fait qu'il bénéficie d'un traitement au moins jusqu'au mois de décembre 2021. Par ailleurs, aucun élément du dossier n'établit que cet entretien n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national et dans des conditions qui n'en auraient pas garanti la confidentialité. En outre, l'absence d'indication de l'identité et de la qualité de l'agent ayant conduit l'entretien n'a pas privé le requérant de la garantie que constitue le bénéfice de cet entretien individuel. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 n'est pas fondé et doit être écarté. 6. En troisième lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté du 18 janvier 2012, qui comporte l'exposé détaillé des considérations relatives à la situation personnelle et à l'état de santé de M. A..., telles que portées à la connaissance du préfet à travers les éléments indiqués par l'intéressé au cours de l'entretien du 14 décembre 2021, ni des autres pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen de la situation personnelle du requérant. 7. En quatrième lieu, aux termes du 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Aux termes de l'article 17 du même règlement : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'Etat membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'Etat membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". 8. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 9. Par ailleurs, eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations. 10. D'une part, si M. A... fait valoir que sa demande d'asile ayant été rejetée par les autorités allemandes, il fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire de cet Etat et ne serait pas pris en charge médicalement en cas de transfert en Allemagne, en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans ce pays des défaillances systémiques dans le traitement des demandeurs d'asile et alors que l'intéressé ne fait état d'aucun élément particulier susceptible d'établir qu'il serait soumis en Allemagne à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ce moyen doit être écarté. 11. D'autre part, s'il ressort des pièces du dossier que M. A... est atteint de troubles cardiaques en conséquence d'une hypertension artérielle non maitrisée, troubles pour lesquels une indication de chirurgie de pontage est posée sans néanmoins qu'aucune urgence ne soit établie, aucune pièce du dossier ne permet d'établir qu'il ne pourrait bénéficier du suivi exigé par ses pathologies en Allemagne où il a déjà été pris en charge médicalement et hospitalisé. Dans ces conditions, la circonstance que la décision serait entachée d'erreur de fait quant à l'arrêt de sa prise en charge médicale postérieurement au mois de décembre 2021 est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté. Il suit de là que le préfet de Maine-et-Loire n'a pas entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. 12. En dernier lieu, les considérations relatives au contexte de pandémie du fait du virus de la Covid-19 sont, contrairement à ce que soutient M. A..., sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté mais relèvent de son exécution, le préfet disposant en tout état de cause, selon les cas, d'un délai de six à dix-huit mois pour ce faire. Dans ces conditions, la circonstance que la situation épidémique en Allemagne ne serait pas stable et comparable à celle de la France à la date de l'arrêté contesté est sans incidence sur la légalité de l'arrêté portant transfert. 13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 18 janvier 2022. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Neraudau et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, M. BÉRIA-GUILLAUMIELe président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT01021
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 26 mars 2020 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a prononcé son expulsion. Par un jugement n° 2000948 du 20 avril 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire respectivement enregistrés le 21 juin 2021 et le 13 août 2021, et un mémoire enregistré le 20 avril 2022 et non communiqué, M. A..., représenté par Me Nunge demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 20 avril 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 26 mars 2020 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a prononcé son expulsion ; 3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en ne tenant pas compte de ses efforts de réinsertion professionnelle et en se focalisant uniquement sur ses condamnations pénales ; - la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mars 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., ressortissant marocain né le 28 décembre 1984, est entré en France en 2012 et a obtenu en 2014, en raison de son mariage avec une ressortissante française, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " qui a été renouvelé jusqu'en 2016. De leur union, sont nés à Nancy deux enfants le 23 octobre 2013 et le 22 décembre 2018. Le 6 avril 2018, M. A... a été condamné par le tribunal correctionnel de Nancy a une peine de cinq ans d'emprisonnement pour des faits de trafic de stupéfiants et a été incarcéré du 12 juin 2016 au 27 mars 2020. Par un arrêté en date du 26 mars 2020, après avis favorable de la commission départementale d'expulsion du 28 janvier 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle a prononcé l'expulsion du territoire français de M. A..., sur le fondement des articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif que sa présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public. Par la présente requête, M. A... demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nancy du 20 avril 2021 rejetant sa demande d'annulation de cet arrêté. 2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public " et de l'article L. 521-2 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion que si cette mesure constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que les dispositions de l'article L. 521-3 n'y fassent pas obstacle : 1° L'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ; 2° L'étranger marié depuis au moins deux ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé et que le conjoint ait conservé la nationalité française (...). Par dérogation aux dispositions du présent article, l'étranger peut faire l'objet d'un arrêté d'expulsion en application de l'article L. 521-1 s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans ". 3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été condamné une première fois à cinq mois d'emprisonnement pour trafic de stupéfiant par un jugement du 12 juin 2016 puis une seconde fois, par jugement du 6 avril 2018 à une peine d'emprisonnement ferme de cinq ans pour des faits de trafic de stupéfiants, commis en état de récidive. Si M. A... est entré en France en 2012 et a obtenu en 2014, en raison de son mariage avec une ressortissante française, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " qui a été renouvelé jusqu'en 2016 et que de leur union, sont nés à Nancy deux enfants le 23 octobre 2013 et le 22 décembre 2018, et une dernière enfant née pendant qu'il exécutait sa peine d'emprisonnement, il ne justifie pas par les documents qu'il produits et notamment par l'historique des parloirs dont il résulte qu'un nombre important des visites initialement prévues ont été annulées et en soutenant sans l'établir avoir réintégré le domicile familial à sa sortie de prison, que la communauté de vie avec son épouse n'ait pas cessé. Il ne justifie pas plus contribuer à l'entretien et à l'éducation de ses enfants français. Par suite, le préfet de Meurthe et Moselle qui a tenu compte du comportement global de l'intéressé n'a entaché son arrêté ni d'une erreur de droit ni d'une erreur d'appréciation en considérant que la présence de M. A... constituait une menace grave à l'ordre public. 4. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées, de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". 5. Comme il a été dit ci-dessus, si M. A... est marié avec une ressortissante française dont il a eu trois enfants, il ne justifie ni avoir entretenu des liens intenses et stables avec eux lorsqu'il était incarcéré, ni d'une reprise de la vie commune depuis sa libération. S'il fait valoir avoir entrepris des efforts de réinsertion professionnelle en produisant notamment une promesse d'embauche du 16 avril 2019 pour un poste d'ouvrier en contrat à durée indéterminée à temps partiel, des attestations de suivi de cours au centre d'enseignement ainsi qu'un suivi psychiatrique en addictologie pendant sa détention, ces éléments ne sont pas de nature à établir une insertion professionnelle stable et continue depuis la fin de son emprisonnement. Enfin, il ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales au Maroc, où réside encore sa mère, même s'il produit le certificat du décès de son père. 6. Par suite, eu égard à la particulière gravité des faits pour lesquels l'intéressé a été pénalement condamné et à leur caractère répété, la décision attaquée ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte manifestement disproportionnée aux buts en vue desquels la mesure contestée a été prise. Pour les raisons indiquées ci-dessus, la décision en litige ne méconnaît pas plus les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - Mme Barrois, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La rapporteure, Signé : M. C...La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet [VS1]Je suis OK pour le rejet ; mais je pense qu'il faut modifier la rédaction ; car en réalité, ce qui compte c'est que sa VPFn'est pas vraiment établie : voir historique des parloirs ... On en parle en SI 4 N° 21NC01787
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Vu la procédure suivante : Procédures contentieuses antérieures : Par une requête n° 1702545, Me. Bogelmann, en qualité de liquidateur de la SARL Laroche a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2017 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a mis en demeure de sécuriser et de remettre en état le site de l'ancienne station-service exploitée par la SARL Laroche située 38, rue des jardiniers à Nancy. Par une requête n° 1800987, Me. Bogelmann en qualité de liquidateur de la SARL Laroche a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 2 février 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a ordonné de consigner la somme de 680 000 euros nécessaire à la sécurisation et à la remise en état du site de l'ancienne station-service exploitée par la SARL Laroche située 38, rue des jardiniers à Nancy. Par un jugement commun n° 1702545 et n° 1800987 du 19 mars 2019, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 23 mai 2019, et un mémoire enregistré le 1er avril 2022 et non communiqué, Me Bogelmann, en qualité de liquidateur de la SARL Laroche, représenté par Me Rémy demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 19 mars 2019 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2017 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a mis en demeure de sécuriser et de remettre en état le site de l'ancienne station-service exploitée par la SARL Laroche située 38, rue des jardiniers à Nancy et l'arrêté du 2 février 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a ordonné de consigner la somme de 680 000 euros nécessaire à la sécurisation et à la remise en état du site de l'ancienne station-service exploitée par la SARL Laroche située 38, rue des jardiniers à Nancy ; 3°) de mettre à la charge de la ministre de la transition écologique le versement d'une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : Concernant l'arrêté du 21 juillet 2017 : - le préfet a méconnu le principe du contradictoire prévu par les articles L. 514-5 et L. 171-6 du code de l'environnement en ne communiquant pas suffisamment en amont de son arrêté de mise en demeure attaqué, le rapport de l'inspection des installations classées sur lequel il se fonde et en ne laissant qu'un délai de cinq jours pour y répondre alors qu'aucune urgence ne le justifiait, l'exploitation ayant cessé depuis 2009 ; - le délai imposé par la mise en demeure d'une durée de deux mois en vue de la réalisation des travaux préconisés est disproportionné par rapport à la date de fermeture de l'exploitation, aux enjeux du site, au fait que le site est désormais occupé par une autre société dont l'accord est requis pour procéder aux travaux et que la situation de la société en liquidation judiciaire nécessite une procédure particulière pour engager des fonds non prévus initialement et qui en outre, sont insuffisants pour réaliser l'intégralité des mesures. Concernant l'arrêté du 2 février 2018 : - le préfet a méconnu le principe du contradictoire prévu par l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration dès lors que le rapport de diagnostic de la société EODD ingénieurs conseils pour le compte de l'aménageur Linkcity de 2017 qui a servi au calcul du montant de la consignation ne lui a pas été communiqué ; - l'arrêté est insuffisamment motivé en fait en méconnaissance des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, quant au montant de la consignation ce qui ne l'a pas mis en mesure d'apprécier si celui-ci était excessif par rapport au montant des travaux à réaliser ; - l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors d'une part, que le préfet lui a infligé une sanction sans attendre l'intervention du jugement du tribunal saisi de la légalité de l'arrêté de mise en demeure du 21 juillet 2017, d'autre part, en fixant le montant de la consignation à 680 000 euros alors que les fonds dont elle disposait étaient insuffisants et que le montant des travaux réalisés s'est au final élevé à 44 185 euros, enfin, en ne lui laissant que 45 jours pour procéder à cette consignation. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 février 2022, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Barrois, première conseillère, - les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique, - et les observations de Me Goudemez substituant Me Remy, pour Me Bogelmann, liquidateur de la SARL Laroche. Considérant ce qui suit : 1. La SARL Laroche qui exploitait une station-service située 38, rue des jardiniers à Nancy, a cessé ses activités en 2009 puis a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Nancy du 30 mars 2010 et Me Bogelmann a été désigné comme mandataire liquidateur. Dans le cadre d'un projet de réhabilitation de ce quartier porté par l'établissement public foncier de Lorraine, le préfet de Meurthe-et-Moselle a constaté en 2012 que la cessation définitive de l'activité de cette installation classée n'avait fait l'objet d'aucune déclaration et que le diagnostic de la pollution du site établi le 26 novembre 2012 par le bureau d'études mandaté par l'établissement public foncier de Lorraine mettait en évidence des pollutions d'hydrocarbures. Par un courrier du 15 mars 2012, le préfet a invité Me Bogelmann à déposer un dossier de déclaration définitive d'activité et à remettre le site en l'état. Un premier rapport de l'inspection des installations classées du 19 mai 2015 a été remis à Me Bogelmann lors d'une réunion à la préfecture le 27 mai 2015. Par un courrier du 19 juin 2017, le rapport de l'inspection des installations classées du 8 juin 2017 ainsi que le projet d'arrêté de mise en demeure ont été transmis à Me Bogelmann avec un délai maximal de 5 jours pour formuler d'éventuelles observations. Le préfet de Meurthe-et-Moselle a, par arrêté du 21 juillet 2017, mis en demeure Me Bogelmann avant le 30 septembre 2017 de sécuriser le site et de procéder à sa remise dans un état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement et qu'il en permette un usage futur comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation classée définitivement arrêtée. A la suite d'une visite de contrôle de l'inspecteur des installations classées du 2 octobre 2017 qui constatait l'absence de réalisation des travaux de remise en état, son rapport du 26 octobre a été adressé le 30 octobre suivant, reçu le 2 novembre 2017, avec le projet d'arrêté préfectoral de consignation d'une somme de 680 000 euros. Me Bogelmann a communiqué par un courrier du 10 novembre 2017 un plan d'intervention avec devis de la société TTM environnement du 15 septembre 2017 pour un montant de 44 186 euros hors taxes avec une date prévisionnelle de réalisation entre le 30 décembre 2017 et le 7 janvier 2018. A la suite d'un nouveau rapport de l'inspection des installations classées du 16 janvier 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle a ordonné, par arrêté du 2 février 2018, la consignation entre les mains d'un comptable public de la somme de 680 000 euros dans un délai de quarante-cinq jours. Le 7 mars 2018, Me Bogelmann a informé le préfet que des travaux de dégazage des cuves étaient intervenus. Par la présente requête, Me Bogelmann fait appel du jugement du tribunal administratif de Nancy du 19 mars 2019 rejetant ses demandes d'annulation des arrêtés du 21 juillet 2017 et 2 février 2018. Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté de mise en demeure du 21 juillet 2017 : 2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ". Aux termes de l'article L. 171-6 de ce code : " Lorsqu'un agent chargé du contrôle établit à l'adresse de l'autorité administrative compétente un rapport faisant état de faits contraires aux prescriptions applicables, en vertu du présent code, à une installation, un ouvrage, des travaux, un aménagement, une opération, un objet, un dispositif ou une activité, il en remet une copie à l'intéressé qui peut faire part de ses observations à l'autorité administrative ". Aux termes du I de l'article L. 171-8 du même code : " I. - Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, en cas d'inobservation des prescriptions applicables en vertu du présent code aux installations, ouvrages, travaux, aménagements, opérations, objets, dispositifs et activités, l'autorité administrative compétente met en demeure la personne à laquelle incombe l'obligation d'y satisfaire dans un délai qu'elle détermine. En cas d'urgence, elle fixe les mesures nécessaires pour prévenir les dangers graves et imminents pour la santé, la sécurité publique ou l'environnement. (...) ". Il résulte de ces dispositions que lorsque l'inspecteur des installations classées a constaté, selon la procédure requise par le code de l'environnement, l'inobservation de conditions légalement imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet, sans procéder à une nouvelle appréciation de la violation constatée, est tenu d'édicter une mise en demeure de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Toutefois, alors même que le préfet a compétence liée, lorsque l'inspecteur des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) a constaté l'inobservation de conditions légalement imposées à l'exploitant d'une installation classée, pour édicter une mise en demeure de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé, la circonstance que le rapport de l'inspecteur constatant les manquements n'ait pas été préalablement porté à la connaissance de l'exploitant dans les conditions prescrites par l'article L. 171-6 du code de l'environnement est de nature à entacher d'irrégularité la mise en demeure prononcée. 3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que Me Bogelmann a été destinataire le 19 juin 2017 du rapport de l'inspection des installations classées du 8 juin 2017 sur lequel se fonde l'arrêté attaqué ainsi que du projet d'arrêté de mise en demeure et a été invité à présenter ses observations dans un délai de cinq jours. Il est constant que ce dernier n'a formulé aucune observation dans ce délai, ni même après, alors que l'arrêté attaqué a été pris plus d'un mois après la communication de ce rapport. Ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que ces modalités de transmission l'auraient privé d'une garantie, ou auraient été de nature à influer sur la décision prise, alors, au surplus, qu'il avait précédemment été informé des obligations mises à sa charge par un courrier du 5 mars 2012, puis lors d'une réunion du 27 mai 2015 et enfin par un courrier du 29 juin 2015. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire doit être écarté. 4. En deuxième lieu, lorsqu'un manquement à l'application des conditions prescrites à une installation classée a été constaté, la mise en demeure prévue par les dispositions de l'article L. 514-1 du code de l'environnement a pour objet, en tenant compte des intérêts qui s'attachent à la fois à la protection de l'environnement et à la continuité de l'exploitation, de permettre à l'exploitant de régulariser sa situation dans un délai déterminé. Il incombe donc à l'administration, pour donner un effet utile à ces dispositions, de prescrire dans la mise en demeure un délai en rapport avec les mesures à prendre par l'exploitant. 5. En l'espèce, Me Bogelmann soutient que le délai de mise en œuvre des mesures prescrites dans l'arrêté attaqué est insuffisant compte-tenu de la date de cessation d'activité de l'exploitation, de l'occupation du site depuis lors par une autre société en activité et de la situation de liquidation judiciaire de la société qui nécessite l'accord préalable du juge commissaire afin d'engager les derniers fonds disponibles et de payer les travaux. Toutefois, il résulte de l'instruction que le requérant a été informé dès 2012 de la nécessité de réaliser des travaux de remise en état du site et a eu connaissance dès le 19 juin 2017 qu'une mise en demeure de réaliser ces travaux était susceptible d'intervenir. De plus, il n'est pas contesté qu'avaient été constatées sur le site des pollutions significatives en composés organiques, notamment des hydrocarbures et métaux, affectant le sol de l'ancienne station-service et qu'au droit du site, les eaux souterraines contenaient des matières flottantes à l'emplacement des anciennes cuves et présentaient des concentrations, notamment en composés organiques et métaux, nettement supérieures aux valeurs de gestion couramment utilisées. Il résulte par ailleurs de l'instruction qu'un prestataire sollicité par le requérant lui-même, a estimé le 15 septembre 2017 que le temps d'intervention s'élevait à une dizaine de jours. Enfin, le requérant ne démontre pas plus à hauteur d'appel que l'intervention nécessaire ainsi envisagée n'était pas possible en raison de la présence sur le site d'une entreprise de réparation de véhicules. Par ailleurs, le requérant ne peut pas utilement se prévaloir de la circonstance qu'en sa qualité de liquidateur, il n'aurait pas les moyens financiers de réaliser les mesures nécessaires, en complément de celles déjà réalisées, ou qu'il devait attendre l'autorisation de déblocage des fonds nécessaires aux travaux par le commissaire enquêteur, au regard de l'objet de l'arrêté en litige. 6. Par suite, le délai de deux mois qui lui était imparti n'est pas disproportionné au regard du délai de sept ans écoulé entre la cessation d'activités de la station-service et l'arrêté en litige. Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 2 février 2018 ordonnant la consignation : 7. D'une part, aux termes du II de l'article L. 171-8 du code de l'environnement : " II. - Si, à l'expiration du délai imparti, il n'a pas été déféré à la mise en demeure, l'autorité administrative compétente peut arrêter une ou plusieurs des sanctions administratives suivantes : / 1° L'obliger à consigner entre les mains d'un comptable public avant une date qu'elle détermine une somme correspondant au montant des travaux ou opérations à réaliser. La somme consignée est restituée au fur et à mesure de l'exécution des travaux ou opérations. / (...) Les mesures prévues aux 1°, 2° 3° et 4° ci-dessus sont prises après avoir informé l'intéressé de la possibilité de présenter ses observations dans un délai déterminé ". D'autre part, aux termes de l'article L. 171-11 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date du présent arrêt, " Les décisions prises en application des articles L. 171-7, L. 171-8 et L. 171-10 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction ". 8. En premier lieu, il résulte de l'instruction que Me Bogelmann a été destinataire le 29 mai 2015 du rapport Burgead, le 2 novembre 2017 du rapport de l'inspecteur des installations classées du 26 octobre 2017 auquel était joint le projet d'arrêté ordonnant la consignation de la somme de 680 000 euros et qu'il a été invité à présenter ses observations dans un délai de quinze jours. Ainsi, le liquidateur a été mis en mesure de présenter ses observations avant l'édiction de l'arrêté en litige conformément au dernier alinéa de l'article L. 178-1 précité du code de l'environnement, ce qu'il a d'ailleurs fait le 10 novembre 2017. Par suite, et nonobstant la circonstance que Me Bogelmann n'aurait pas eu connaissance du rapport du bureau d'études Eodd ingénieurs conseils proposant un plan de gestion, et alors qu'il lui appartenait d'en demander la communication à l'administration s'il l'estimait utile dès lors qu'aucune disposition n'en imposait la communication d'office, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait méconnu le principe du contradictoire et que les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 178-1 du code de l'environnement auraient été méconnues. 9. En deuxième lieu, alors qu'il ne ressort pas des dispositions citées au point 7 qu'un tel arrêté doive nécessairement indiquer les bases de calcul ayant conduit à fixer la somme faisant l'objet de la consignation, il résulte de l'instruction que l'arrêté attaqué après avoir visé les textes applicables a ensuite rappelé les éléments sur lesquels s'est fondé le préfet pour engager la procédure de consignation et notamment, les rapports de l'inspection des installations classées en date des 19 mai 2015, 8 juin 2017, 26 octobre 2017 et 16 janvier 2018, l'arrêté de mise en demeure du 21 juillet 2017, les observations de Me Bogelmann du 10 novembre 2017 et la circonstance que les mesures prescrites pour la mise en sécurité du site et sa remise en état n'avaient pas été respectées. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation dont serait entaché cet arrêté doit être écarté. 10. En troisième lieu, l'introduction de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté de mise en demeure du 21 juillet 2017 n'a aucun effet suspensif et n'était ainsi pas de nature, contrairement à ce que soutient Me Bogelmann, à s'opposer à ce que le préfet prenne l'arrêté de consignation attaqué. 11. En quatrième lieu, les mesures énumérées à l'article L. 171-8 du code de l'environnement ont été instituées pour contraindre les exploitants à prendre les dispositions nécessaires à la sauvegarde des intérêts visés à l'article L. 511-1 du même code. Aussi longtemps que subsiste l'un des dangers ou inconvénients mentionnés à cet article, le préfet peut mettre en œuvre, indifféremment et, le cas échéant, successivement, les mesures prévues par cet article. Ainsi, le préfet de Meurthe-et-Moselle a pu, sans que Me Bogelmann puisse utilement se prévaloir de ce que l'actif de la liquidation ne disposerait pas des sommes nécessaires, recourir à la procédure de consignation. Par ailleurs, Me Bogelmann se bornant à contester le montant de la somme consignée sans apporter d'éléments ou de précisions autres que les fonds disponibles dans le cadre de la liquidation et notamment en s'abstenant de produire des devis de réalisation des mesures prescrites, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit, par suite, être écarté. 12. En dernier lieu, le moyen selon lequel le délai de quarante-cinq jours imparti pour procéder à la consignation de la somme de 680 000 euros est incompatible avec la situation économique de la société est inopérant. Est également sans incidence le délai écoulé entre le prononcé de la liquidation de la société SARL Laroche et la décision de consignation critiquée. 13. Il résulte de tout ce qui précède que Me Bogelmann n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 21 juillet 2017 et du 2 février 2018. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de Me Bogelmann est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me Eric Bogelmann et à la ministre de la transition écologique. Copie en sera adressée au préfet de Meurthe et Moselle. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - Mme Barrois, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La rapporteure, Signé : M. A...La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. Robinet La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 19NC01549
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté en date du 27 mai 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui accorder un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et d'annuler l'arrêté du 31 août 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a assigné à résidence. Par un jugement n° 2102319 du 10 septembre 2021, la magistrate désignée par le tribunal administratif de Nancy a renvoyé les conclusions dirigées contre l'arrêté en date du 27 mai 2021 en tant qu'il refuse d'admettre M. B... au séjour à une formation collégiale de jugement et a annulé les décisions du 27 mai 2021 portant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ainsi que l'arrêté en date du 31 août 2021 portant assignation à résidence. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement le 5 octobre 2021 et le 5 avril 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 10 septembre 2021 ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nancy. Il soutient que la juge de première instance a commis une erreur d'appréciation en considérant que sa décision était entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B.... Par un mémoire en défense enregistré le 31 mars 2022, M. A... B..., représenté par Me Jeannot, conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement du 10 septembre 2021, à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et à ce qu'une somme de 1 800 euros soit mise à la charge du préfet de Meurthe-et-Moselle sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 3 mars 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la charte des droits fondamentaux de l'union européenne ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Barrois, première conseillère, - et les observations de Me Jeannot, pour M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... B... né le 1er janvier 2002 au Mali, est entré sur le territoire français selon ses déclarations le 30 juillet 2018 et a été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance par jugement du 3 octobre 2018. Le 17 juillet 2019, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Le 31 décembre 2019, le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a demandé de bien vouloir transmettre à l'appui de sa demande des documents établissant sa nationalité et son identité. M. B... a présenté le 8 janvier 2020 une carte d'identité malienne, un extrait d'acte de naissance et un acte de naissance qui ont été considérés comme frauduleux par la police aux frontières. Le centre de coopération policière et douanière espagnol a indiqué que les empreintes correspondaient à un ressortissant ivoirien né le 1er janvier 1997. Un nouveau rapport d'expertise documentaire du 21 avril 2021 a conclu au caractère frauduleux des nouveaux documents d'état civil produits le 7 avril 2021. Par un arrêté du 27 mai 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. Le 30 août 2021, il a été interpellé par les services de la police aux frontières de Villers-lès-Nancy et placé en garde-à-vue dans le cadre d'une affaire de faux documents. Par un arrêté en date du 31 août 2021, le préfet l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par un jugement n° 2102319 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté les conclusions à fin d'annulation de M. B... dirigées contre le refus de titre de séjour du 27 mai 2021. Par la présente requête, le préfet de Meurthe-et-Moselle fait appel du jugement du 10 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nancy a annulé les décisions du 27 mai 2021 portant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ainsi que l'arrêté en date du 31 août 2021 portant assignation à résidence. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B... est célibataire et sans enfant, ne justifie d'aucun lien privé ou familial en France même s'il se prévaut d'une relation avec une ressortissante française, ni d'aucune insertion sociale particulière même s'il a obtenu son CAP en juillet 2021 et qu'il dispose d'une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée, qu'il ne démontre pas être dépourvu d'attache dans son pays d'origine où résideraient toujours sa mère et sa fratrie et qu'il n'apporte aucune précision sur l'ancienneté, l'intensité et la stabilité de la relation sentimentale qu'il a déclaré avoir engagée. En outre, la circonstance que son contrat de jeune majeur ait été reconduit est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que M. B... n'a pas été en mesure d'établir son identité et sa nationalité, comme cela résulte notamment du jugement du 23 novembre 2021 du tribunal administratif de Nancy devenu définitif. Par suite, le préfet de Meurthe-et-Moselle est fondé à demander l'annulation du jugement du 10 septembre 2021. 3. Il appartient à la cour administrative d'appel, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les conclusions présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Nancy et dirigées contre les décisions du 27 mai 2021 portant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ainsi que l'arrêté en date du 31 août 2021 portant assignation à résidence. Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 27 mai 2021 portant obligation de quitter le territoire français : 4. En premier lieu, il résulte du jugement du 23 novembre 2021 du tribunal administratif de Nancy devenu définitif que le refus de titre de séjour du 27 mai 2021 est légal. Par suite, les moyens tirés de son illégalité ne peuvent être soulevés par la voie de l'exception à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français. 5. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient M. B..., il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que le préfet de Meurthe-et-Moselle ne s'est pas cru tenu d'assortir le refus de titre de séjour d'une mesure d'éloignement mais qu'il a prononcé cette dernière après avoir pris en considération l'ensemble des éléments relatifs à sa situation. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut qu'être écarté. 6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. / (...) " et aux termes de l'article R. 611-1 de ce même code, " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Toutefois, lorsque l'étranger est assigné à résidence aux fins d'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français ou placé ou maintenu en rétention administrative en application du titre IV du livre VII, l'avis est émis par un médecin de l'office et transmis sans délai au préfet territorialement compétent ". 7. M. B... soutient que la procédure d'édiction de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est entachée d'irrégularité, au regard des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, faute pour le préfet de Meurthe-et-Moselle d'avoir procédé à la saisine pour avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Toutefois, il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet à la date de sa décision, n'avait pas été saisi d'une demande de titre de séjour pour raisons de santé et que l'intéressé n'avait présenté aucun élément justifiant que sa situation soit examinée au regard de son état de santé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 611-3-9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'absence d'un avis du collège des médecins de l'OFII doit être écarté. 8. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour les mêmes raisons que celles indiquées au point 2, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ni que sa décision aurait porté atteinte à sa vie privée et familiale. 9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 27 mai 2021 portant obligation de quitter le territoire français. Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 31 août 2021 l'assignant à résidence : 10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté. 11. En deuxième lieu, si aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant. 12. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause. 13. En l'espèce, il ressort du procès-verbal d'audition du 6 juillet 2021 à 10h05 que l'intéressé a été informé que l'autorité préfectorale était susceptible de prononcer à son encontre une mesure d'éloignement assortie d'une assignation à résidence, ce qui lui a été de nouveau indiqué lors de l'audition du 31 août 2021 à 14h40. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire doit être écarté. 14. En troisième lieu, la décision contestée vise les dispositions légales, mentionne notamment les différentes procédures concernant la vérification de son identité et de sa nationalité, ainsi que ses deux demandes de titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation est écarté comme manquant en fait. 15. En quatrième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté comme dépourvu de précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. En tout état de cause, la mesure d'assignation ne l'empêche pas sur sa demande de se rendre aux audiences juridictionnelles auxquelles il serait convoqué. 16. En dernier lieu, la mesure est justifiée par l'obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet et par son absence aux convocations de la police aux frontières du 19 juillet 2021 et de la préfecture du 9 août 2021. En tout état de cause, cette mesure ayant pour objet de favoriser la mise en œuvre de la mesure d'éloignement, la circonstance qu'elle l'empêche de poursuivre sa scolarité et de travailler alors qu'il a vocation à quitter le territoire est sans incidence sur la légalité de l'assignation à résidence. 17. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 31 août 2021 l'assignant à résidence. 18. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Nancy ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. D É C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2102319 du 10 septembre 2021 du tribunal administratif de Nancy est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nancy ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle. Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Vidal, présidente de chambre, - M. Rees, président-assesseur, - Mme Barrois, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2022. La rapporteure, Signé : M. C...La présidente, Signé : S. Vidal La greffière, Signé : S. RobinetLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, S. Robinet 2 N° 21NC02655
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'Office public de l'habitat Néotoa a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner in solidum les sociétés DFC, Atelier architecture Georges Le Garzic, Construction générale rennaise (CGR), Bureau Véritas Construction et Ouest Structures à lui verser une somme de 453 640 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts et capitalisation des intérêts échus, en réparation du préjudice matériel résultant des dommages affectant l'ensemble immobilier réalisé à Noyal-sur-Vilaine, de condamner in solidum les sociétés DFC, Atelier architecture Georges Le Garzic, Construction générale rennaise, Bureau Véritas Construction et Ouest Structures à lui verser une somme provisionnelle de 6 720 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts et de leur capitalisation, en réparation du préjudice de jouissance résultant des conséquences des travaux de reprise pour les occupants des logements, de rejeter les conclusions présentées par les sociétés DFC, Atelier architecture Georges Le Garzic, Construction générale rennaise et Bureau Véritas à son encontre, ainsi que l'exception d'incompétence de la juridiction administrative formulée par la société Ouest Structures, de mettre à la charge in solidum des sociétés DFC, Atelier architecture Georges Le Garzic, Construction générale rennaise, Bureau Véritas Construction et Ouest Structures le paiement d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, assortie des intérêts et de la capitalisation des intérêts, et enfin de condamner in solidum les sociétés DFC, Atelier architecture Georges Le Garzic, Construction générale rennaise, Bureau Véritas Construction et Ouest Structure aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise. Par un jugement n° 1704383 du 18 novembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a, en premier lieu, condamné in solidum la société CGR et la société Georges Le Garzic à verser à l'établissement public Néotoa une somme de 193 408,15 euros TTC au titre des désordres affectant l'ensemble immobilier situé à Noyal-sur-Vilaine, avec intérêts à compter du 28 septembre 2017 et capitalisation des intérêts échus à la date du 28 septembre 2018 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, en deuxième lieu, condamné in solidum la société CGR et la société Georges Le Garzic à verser à la société DFC, d'une part, et à l'établissement Néotoa, d'autre part, la somme de 11 970 euros au titre des frais d'expertise judiciaire, en troisième lieu, condamné la société CGR et la société Georges Le Garzic à verser à la société DFC, respectivement, une somme de 7 200 euros et une somme de 2 400 euros en remboursement des frais d'étude technique exposés par cette société, en quatrième lieu, condamné la société CGR à garantir la société Atelier Architecture Georges Le Garzic à hauteur de 75 % des condamnations prononcées à son encontre, en cinquième lieu, condamné la société Atelier Architecture Georges Le Garzic à garantir la société CGR à hauteur de 25 % des condamnations prononcées à son encontre, en sixième lieu, rejeté le surplus des conclusions à fin d'appel en garantie présentées par les sociétés défenderesses, en septième lieu, condamné l'établissement Néotoa à verser à la société DFC une somme de 13 905,38 euros TTC en règlement du solde du marché, sous déduction de la provision accordée par le juge des référés, avec intérêts moratoires au taux de 7,75 % à compter du 18 juillet 2013 et capitalisation des intérêts échus à la date du 18 juillet 2014 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 janvier et 12 avril 2022, la SARL Construction Générale Rennaise, représentée par Me Rieffel, demande à la cour : 1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1704383 du tribunal administratif de Rennes du 18 novembre 2021, en tant que : - il l'a condamnée à verser à l'établissement public Néotoa la somme de 193 408, 15 euros TTC avec intérêts à compter du 28 septembre 2017 et capitalisation des intérêts, la somme de 11 970 euros au titre des frais d'expertise judiciaire et la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; - il l'a condamnée à verser à la société DFC la somme de 7 200 euros et la somme de 2 400 euros en remboursement des frais d'étude technique, la somme de 11 970 euros au titre des frais d'expertise judiciaire et la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 2°) de rejeter toute conclusion de la société DFC à son encontre ; 3°) de mettre à la charge de l'établissement public Néotoa, in solidum avec la société DFC, ou toute autre partie perdante, la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle sollicite le sursis à exécution du jugement contre lequel elle a fait appel sur le fondement des dispositions des articles R. 811-16 et R. 811-17 du code de justice administrative ; - elle justifie de moyens sérieux de nature à justifier l'annulation du jugement : o sa responsabilité contractuelle ne peut être engagée : * dès lors que les réserves figurant dans les procès-verbaux de réception, concernant des fissures ou des décollements d'enduit sur les façades de certains logements, avaient uniquement été portées sur le lot de la société DFC et notifiées à cette dernière ; il ne pouvait donc être considéré que ces réserves concernaient également ses travaux ; seule la société DFC a été mise en demeure de reprendre les désordres ; * les fissures en attique n'avaient fait l'objet d'aucune réserve ; * par ailleurs, il ne pouvait être considéré que l'établissement Néotoa lui avait notifié des réserves correspondant à l'ensemble des désordres dont il a demandé réparation devant le tribunal administratif de Rennes ; * en l'absence de mise en demeure de reprise à son égard dans le délai de la garantie de parfait achèvement prévue par l'article 44 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) Travaux, elle est dégagée de ses obligations contractuelles à compter du 2 juillet 2013 pour les bâtiments D, E et F de l'îlot 2 et du 6 novembre 2013 pour les bâtiments A, B et C de l'îlot 1 ; o sa responsabilité contractuelle ne peut être engagée dès lors également qu'elle a reçu du maître d'ouvrage la notification de son décompte général définitif sans aucune réserve ni mention de sommes qu'elle aurait pu devoir pour la réalisation des travaux nécessaires afin de remédier à des réserves ou des désordres ; le décompte général définitif a été intégralement réglé par l'établissement Néotoa ; o il n'est pas établi que les dommages allégués, au surplus dans leur ensemble et sans aucune distinction, étaient imputables à une faute qu'elle aurait commise ; en particulier, les fissures de pleine surface ne lui étaient pas imputables, mais uniquement à des défauts d'exécution de l'entreprise en charge du lot ravalement-enduits et à l'architecte en charge du suivi des travaux ; les désordres sous forme de décollements d'enduits ne lui sont aucunement imputables mais sont uniquement imputables à la société DFC (20%) et au maître d'œuvre (80%) ; - conformément à l'article R. 811-17 du code de justice administrative, l'exécution du jugement du tribunal administratif de Rennes risque d'entrainer pour elle des conséquences difficilement réparables : o elle doit assumer seule des condamnations très conséquentes alors que compte tenu de la séparation des ordres de juridiction, elle n'a pu mettre en cause ses assureurs devant le tribunal administratif de Rennes ; les condamnations risquent d'entrainer pour elle un endettement dépassant ses capacités financières et la mettant en péril alors même qu'elle a été impactée par les conséquences de la crise sanitaire et par le conflit en Ukraine qui entraine une hausse et un risque de pénurie des matériaux ; o une exécution immédiate du jugement créerait un risque de non remboursement des sommes qu'elle serait condamnée à régler puisque, d'une part, on ignore la situation financière de l'établissement public industriel et commercial Néotoa et, d'autre part, les comptes de la société DFC ne sont pas révélables, cette dernière société devant également être impactée par les conséquences de la crise sanitaire ; les quelques éléments produits par la société révèlent un résultat déficitaire pour 2020. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 février 2022, l'EURL DFC, représentée par la SELARL Kovalex, conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la SARL Construction Générale Rennaise en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les conditions de l'article R. 811-16 du code de justice administrative ne sont pas remplies, puisque compte tenu du montant de la somme en cause (23 070 euros in solidum avec la société Atelier Le Garzic) et de sa situation, il n'existe aucun risque de perte définitive pour la SARL Construction Générale Rennaise. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2022, la société agence Georges Le Garzic et la SARL Ouest Structures, représentées par Me Groleau, demandent, en cas de prononcé du sursis demandé par la SARL Construction Générale Rennaise, à ce qu'il soit sursis à l'exécution de l'ensemble des dispositions du jugement n° 1704383 du tribunal administratif de Rennes du 18 novembre 2021. Elles soutiennent que pour une bonne administration de la justice, s'il devait être fait droit à la demande de sursis à exécution des dispositions du jugement contestées par la SARL Construction Générale Rennaise, la cour devrait surseoir à l'exécution de l'ensemble des dispositions du jugement. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mars 2022, la SAS Bureau Véritas Construction, représentée par Me Draghi-Alonso, s'en remet à la sagesse de la cour quant à la demande de sursis à exécution du jugement n° 1704383 du tribunal administratif de Rennes du 18 novembre 2021. Elle soutient qu'aucune condamnation n'a été prononcée à son encontre par le jugement attaqué du tribunal administratif de Rennes. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de la construction et de l'habitation ; - l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère, - les conclusions de M. Pons, rapporteur public, - et les observations de Me Degroote, représentant la SARL Construction Générale Rennaise. Considérant ce qui suit : 1. L'Office public de l'habitat d'Ille-Vilaine, devenu depuis lors l'établissement Néotoa, a décidé en 2009 la construction, sur le territoire de la commune de Noyal-sur-Vilaine, d'un ensemble de trente-six logements collectifs dans six bâtiments distincts, répartis en deux îlots. La maîtrise d'œuvre de l'opération a été confiée par un marché signé les 12 et 14 mai 2009 à un groupement constitué par la SARL Atelier d'architecture Le Garzic, mandataire, la SARL Thalem, et la SARL SCLP. Une mission de contrôle technique a été confiée par un marché signé les 10 et 21 février 2009 à la société Bureau Véritas. Les travaux de construction des logements ont été divisés en quinze lots. Le lot n° 011 " gros œuvre " a été attribué, par un marché signé les 25 octobre et 18 novembre 2010, à la SARL Construction Générale Rennaise pour un montant total, toutes taxes comprises, de 938 860 euros. Le lot n° 012 " ravalement - enduits " a, quant à lui, été confié par un marché des 29 octobre et 18 novembre 2010 à la société DFC. L'entreprise titulaire du lot " gros œuvre " a été invitée à commencer les travaux de viabilisation et de voirie au mois de février 2011. Par une décision du 6 août 2012, l'Office public de l'habitat a prononcé la réception des bâtiments D, E et F constituant l'ilot 2 avec effet au 2 juillet 2012 et avec réserves. Par ailleurs, par une décision du 18 février 2013, le maître d'ouvrage a prononcé la réception des bâtiments A, B et C de l'ilot 1 avec effet au 7 décembre 2012 et également avec réserves. Des fissures étant apparues dans l'enduit des bâtiments, l'Office public de l'habitat a mis en demeure la société DFC, titulaire du lot n° 012, de remédier à ces désordres en mars 2013. Cette société a contesté l'imputabilité à ses travaux de l'apparition des fissures et a, le 11 avril 2013, saisi le juge des référés du tribunal administratif de Rennes pour obtenir la désignation d'un expert. Il a été fait droit à cette demande par une ordonnance du 7 mai 2013. L'expert désigné a rendu son rapport le 31 mars 2016. 2. En septembre 2017, l'établissement public Néotoa a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à la condamnation in solidum des sociétés Atelier d'architecture Le Garzic, Ouest Structures, Bureau Véritas Construction, Construction Générale Rennaise et DFC à l'indemniser des préjudices matériels résultant des dommages affectant l'ensemble immobilier de Noyal-sur-Vilaine. Par un jugement du 18 novembre 2021, le tribunal administratif de Rennes, en premier lieu, a condamné in solidum la société CGR et la société Georges Le Garzic à verser à l'établissement public Néotoa une somme de 193 408,15 euros TTC au titre des désordres affectant l'ensemble immobilier situé à Noyal-sur-Vilaine, avec intérêts à compter du 28 septembre 2017 et capitalisation des intérêts échus à la date du 28 septembre 2018 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, en deuxième lieu, a condamné in solidum la société CGR et la société Georges Le Garzic à verser à la société DFC, d'une part, et à l'établissement Néotoa, d'autre part, la somme de 11 970 euros au titre des frais d'expertise judiciaire, en troisième lieu, a condamné la société CGR et la société Georges Le Garzic à verser à la société DFC, respectivement, une somme de 7 200 euros et une somme de 2 400 euros en remboursement des frais d'étude technique exposés par cette société, en troisième lieu, a condamné la société CGR à garantir la société Atelier Architecture Georges Le Garzic à hauteur de 75 % des condamnations prononcées à son encontre, en quatrième lieu, a condamné la société Atelier Architecture Georges Le Garzic à garantir la société CGR à hauteur de 25 % des condamnations prononcées à son encontre, en cinquième lieu, a rejeté le surplus des conclusions à fin d'appel en garantie présentées par les sociétés défenderesses, en sixième lieu, a condamné l'établissement Néotoa à verser à la société DFC une somme de 13 905,38 euros TTC en règlement du solde du marché, sous déduction de la provision accordée par le juge des référés, avec intérêts moratoires au taux de 7,75 % à compter du 18 juillet 2013 et capitalisation des intérêts échus à la date du 18 juillet 2014 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date. 3. La SARL Construction Générale Rennaise demande le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 novembre 2021 en ce qui concerne les condamnations prononcées à son encontre. Par ailleurs, la société Agence d'architecture Le Garzic et la société Ouest Structures demandent le sursis à exécution de l'ensemble du dispositif du jugement du tribunal administratif de Rennes. Sur les conclusions de la SARL Construction Générale Rennaise à fin de sursis à exécution du jugement attaqué : 4. L'article R. 811-16 du code de justice administrative dispose que : " Lorsqu'il est fait appel par une personne autre que le demandeur en première instance, la juridiction peut, à la demande de l'appelant, ordonner sous réserve des dispositions des articles R. 533-2 et R. 541-6 qu'il soit sursis à l'exécution du jugement déféré si cette exécution risque d'exposer l'appelant à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où ses conclusions d'appel seraient accueillies ". Par ailleurs, l'article R. 811-17 du même code dispose que : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction " 5. En premier lieu, lorsqu'il est fait appel d'un jugement prononçant une condamnation pécuniaire et lorsqu'il se prononce sur une demande de sursis à exécution d'un tel jugement sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-16 du code de justice administrative, le juge d'appel doit, dans les circonstances de l'espèce et compte tenu notamment du montant de la somme en cause, de la situation du bénéficiaire de ladite condamnation et de celle de ses créanciers, apprécier le risque de perte définitive de la somme que l'appelant a été condamné à payer. 6. La SARL Construction Générale Rennaise, si elle invoque pour fonder sa demande de sursis à exécution les dispositions de l'article R. 811-16 du code de justice administrative, n'établit pas l'existence de circonstances de nature à établir le risque que les sommes versées en exécution du jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 novembre 2021 ne pourraient être récupérées. Les sommes principales mises à sa charge par ce jugement, soit 193 408, 15 euros TTC au titre des préjudices matériels et 11 970 euros de frais d'expertise, le sont au profit de l'Office public de l'habitat alors que les ressources financières de cet établissement public sont par leur nature et par leur montant de nature à exclure tout risque d'exposer la SARL Construction Générale Rennaise à la perte définitive de cette somme dans le cas où ses conclusions d'appel seraient accueillies. Par ailleurs, les sommes mises à sa charge par le jugement au profit de la société de droit privé DFC, titulaire du lot n° 012, s'élèvent, in solidum avec le maître d'œuvre, aux sommes respectives de 11 970 euros au titre des frais d'expertise et 7 200 euros au titre de frais d'étude technique et présentent donc un caractère relativement modeste. Par ailleurs, la seule circonstance, invoquée par la société appelante, que le résultat de la société DFC a été négatif en 2020 alors qu'il n'est établi ni même invoqué que cette société connaitrait des difficultés importantes ou serait placée en liquidation ou en redressement, ne permet pas d'établir que la SARL Construction Générale Rennaise serait exposée à un risque de perte définitive des sommes en cause dans le cas où ses conclusions d'appel seraient accueillies. Il suit de là que la demande de la SARL Construction Générale Rennaise présentée sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-16 du code de justice administrative doit être rejetée. 7. En second lieu, le sursis à exécution ne peut être ordonné sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative qu'à la double condition que l'exécution de la décision juridictionnelle attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et que les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction. 8. A supposer que la SARL Construction Générale Rennaise ait entendu, en invoquant l'existence de moyens sérieux dans sa requête d'appel, fonder sa demande de sursis à exécution sur les dispositions de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, en se bornant à évoquer des circonstances générales sur les conséquences de la crise liée au Covid-19 et à la guerre en Ukraine, avec ses impacts sur l'approvisionnement en matière première, et à mentionner qu'elle a conclu un prêt garanti par l'Etat, sans apporter aucun autre document de nature à justifier de la réalité de sa situation économique et financière, elle n'établit pas l'existence de conséquences difficilement réparables que serait susceptible d'entrainer l'exécution du jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 novembre 2021. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un moyen sérieux en l'état de l'instruction, les conclusions de la SARL Construction Générale Rennaise tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 18 novembre 2021 en application de l'article R. 811-17 du code de justice administrative doivent être également rejetées. Sur les conclusions de la société Atelier d'architecture Le Garzic et la société Structures Ouest à fin de sursis à exécution du jugement attaqué 9. Si la société Atelier d'architecture Le Garzic et la société Structures Ouest demandent le sursis à exécution de l'ensemble du dispositif du jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 novembre 2021, lequel n'a au demeurant prononcé aucune condamnation à l'encontre de la société Structures Ouest, elles n'articulent aucune argumentation à l'appui de cette demande, qui ne peut dès lors qu'être rejetée. Sur les frais du litige : 10. En premier lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'établissement public Néotoa et de la société DFC, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SARL Construction Générale Rennaise demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. 11. En second lieu, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Construction Générale Rennaise la somme que la société DFC demande en application de ces mêmes dispositions. DECIDE : Article 1er : La requête de la SARL Construction Générale Rennaise est rejetée. Article 2 : Les conclusions à fin de sursis à exécution de la société Atelier d'architecture Le Garzic et de la société Ouest Structures et les conclusions de la société DFC tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Construction Générale Rennaise, la société DFC, la société Atelier d'architecture Le Garzic, la société Ouest Structures, la SAS Bureau Véritas Construction, et l'Office public de l'habitat d'Ille-et-Vilaine Néotoa. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, M. BÉRIA-GUILLAUMIELe président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00189
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 24 septembre 2019 par laquelle la ministre des armées a retiré son habilitation d'accès aux informations et supports classifiés au niveau confidentiel défense. Par un jugement n° 1902888 du 9 juillet 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés le 9 septembre 2021, le 31 mars 2022 et le 13 mai 2022, Mme B... C..., représentée par Me Gandin, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1902888 du tribunal administratif de Caen du 9 juillet 2021 ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 24 septembre 2019 par laquelle la ministre des armées a retiré son habilitation d'accès aux informations et supports classifiés au niveau confidentiel défense ; 3°) d'enjoindre à la ministre des armées de lui restituer cette habilitation sous astreinte de cent euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de trois mille cinq cents euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'a pas répondu à l'ensemble de ses conclusions et n'a pas procédé à l'analyse de l'ensemble des éléments qu'elle avait présentés en méconnaissance des articles L. 9 et R. 741-2 du code de justice administrative ; le tribunal administratif n'a notamment pas pris en considération les autorisations qu'elle avait obtenues pour effectuer la visite ; - la décision est insuffisamment motivée en fait et en droit en méconnaissance des articles L. 211-1 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; s'agissant d'une décision retirant une décision créatrice de droits, elle doit être motivée ; l'article L. 311-5 du code n'est pas applicable puisque visant la communication de documents administratifs ; la ministre ne démontre pas qu'elle ne pouvait pas motiver sa décision par des éléments ne portant pas atteinte au secret défense ; - les dispositions des articles L. 121-1, L. 122-1 et L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration ont été méconnues en l'absence de procédure contradictoire préalable ; - la décision est entachée d'erreur de fait et méconnait l'article 31 de l'arrêté du 30 novembre 2011 portant approbation de l'instruction générale interministérielle n° 1300 ; elle n'a pas accédé à une zone interdite sans autorisation ou en dehors de son habilitation : o elle a obtenu l'autorisation d'accéder au bâtiment Hugues House sans restriction à l'intérieur du bâtiment ; o elle est précisément habilitée à accéder à des informations et supports " confidentiel Défense " ; o elle effectuait la visite dans le cadre de l'exercice de son mandat d'élue au CHSCT et de déléguée du personnel, et a donc accédé au site dans l'exercice de sa fonction ; - la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; elle exerce ses fonctions sans que ses compétences ou son professionnalisme n'aient jamais été remis en cause ; aucun élément de sa vie personnelle, sociale ou professionnelle n'est de nature à faire obstacle au maintien de son habilitation ; son comportement ne révèle aucun risque pour la défense et la sécurité nationale, ce que renforce le délai entre les faits et la décision ; - la décision est entachée de détournement de pouvoir et repose sur la volonté de restreindre l'activité des membres du syndicat A... sur les sites Naval Group. Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code pénal ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code du travail ; - l'arrêté du 30 novembre 2011 portant approbation de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère, - les conclusions de M. Pons, rapporteur public, - et les observations de Me Gandin, représentant Mme C.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B... C... exerce les fonctions de technicienne d'études au sein de la société Naval Group sur le site de Cherbourg depuis l'année 2010 et bénéficie dans ce cadre d'une habilitation " confidentiel défense ". Depuis l'année 2012, elle exerce des fonctions syndicales sous étiquette de la A..., en qualité de déléguée du personnel et membre du CHSCT. Par une décision du 24 septembre 2019, la ministre des armées a prononcé le retrait de son habilitation. Mme C... relève appel du jugement du 9 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 septembre 2019. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 3. Les premiers juges, qui n'avaient pas à répondre à l'ensemble des arguments de l'intéressée, ont répondu au point 7 du jugement aux moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur manifeste d'appréciation qui entacheraient la décision contestée du 24 septembre 2019. Il suit de là que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé pour avoir omis de répondre, notamment, à son argument relatif à l'autorisation qu'elle aurait obtenue pour accéder au bâtiment abritant des zones sensibles. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 4. Aux termes de l'article L. 2311-1 du code de la défense : " Les règles relatives à la définition des informations concernées par les dispositions du présent chapitre sont définies par l'article 413-9 du code pénal ". Par ailleurs, aux termes de l'article 413-9 du code pénal : " Présentent un caractère de secret de la défense nationale au sens de la présente section les procédés, objets, documents, informations, réseaux informatiques, données informatisées ou fichiers intéressant la défense nationale qui ont fait l'objet de mesures de classification destinées à restreindre leur diffusion ou leur accès. / Peuvent faire l'objet de telles mesures les procédés, objets, documents, informations, réseaux informatiques, données informatisées ou fichiers dont la divulgation ou auxquels l'accès est de nature à nuire à la défense nationale ou pourrait conduire à la découverte d'un secret de la défense nationale. / Les niveaux de classification des procédés, objets, documents, informations, réseaux informatiques, données informatisées ou fichiers présentant un caractère de secret de la défense nationale et les autorités chargées de définir les modalités selon lesquelles est organisée leur protection sont déterminés par décret en Conseil d'Etat ". L'article R. 2311-2 du code de la défense, dans sa rédaction applicable, dispose que : " Les informations et supports classifiés font l'objet d'une classification comprenant trois niveaux : / 1° Très Secret-Défense ; / 2° Secret-Défense ; /3° Confidentiel-Défense ". Par ailleurs, l'article R. 2311-3 du même code, dans sa rédaction applicable, dispose que : " (...) Le niveau Confidentiel-Défense est réservé aux informations et supports dont la divulgation est de nature à nuire à la défense nationale ou pourrait conduire à la découverte d'un secret de la défense nationale classifié au niveau Très Secret-Défense ou Secret-Défense ". 5. Aux termes de l'article 31 " Fin de l'habilitation " de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale, approuvée par l'arrêté du 30 novembre 2011 alors en vigueur : " (...) 3. Retrait d'habilitation : / La décision d'habilitation ne confère pas à son bénéficiaire de droit acquis à son maintien. L'habilitation peut être retirée en cours de validité ou à l'occasion d'une demande de renouvellement si l'intéressé ne remplit plus les conditions nécessaires à sa délivrance, ce qui peut être le cas lorsque des éléments de vulnérabilité apparaissent, signalés par exemple par : / -le service enquêteur ; / -le supérieur hiérarchique ou l'officier de sécurité concerné, à la suite d'un changement de situation ou de comportement révélant un risque pour la défense et la sécurité nationale. / La décision de retrait est notifiée à l'intéressé dans les mêmes formes que le refus d'habilitation, décrites à l'article 26 de la présente instruction, sans que les motifs lui soient communiqués s'ils sont classifiés. L'intéressé est informé des voies de recours et des délais qui lui sont ouverts pour contester cette décision ". 6. En premier lieu, l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 (...) ". Aux termes de l'article L. 311-5 du même code : " Ne sont pas communicables : (...) / 2° Les autres documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte : / b) Au secret de la défense nationale (...) ". Par ailleurs, l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300 dispose que : " (...) La décision d'habilitation ne confère pas à son bénéficiaire de droit acquis à son maintien (...) ". 7. La décision par laquelle le ministre en charge de la défense avait conféré à Mme C... une habilitation " confidentiel défense " n'étant pas une décision créatrice de droits, ainsi que le rappelle l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la décision du 24 septembre 2019 portant retrait de cette habilitation devait être motivée en application du 4° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par ailleurs, il résulte de la combinaison des dispositions du 7° de l'article L. 211-2 et de l'article L. 311-5 de ce code que les décisions qui refusent ou retirent l'habilitation " confidentiel défense " sont au nombre de celles dont la communication des motifs est de nature à porter atteinte au secret de la défense nationale. Il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision du 24 septembre 2019 doit être écarté. 8. En deuxième lieu, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (...) ". Enfin aux termes de l'article L. 122-2 du même code : " Les mesures mentionnées à l'article L. 121-1 à caractère de sanction ne peuvent intervenir qu'après que la personne en cause a été informée des griefs formulés à son encontre et a été mise à même de demander la communication du dossier la concernant ". 9. Ainsi qu'il a été indiqué au point 7, la décision par laquelle la ministre des armées a retiré à Mme C... le bénéfice de l'habilitation " confidentiel défense " n'est pas une décision devant être motivée en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Il suit de là que Mme C... n'est pas fondée à invoquer la méconnaissance des dispositions des articles L. 121-1, L. 122-1 et L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire, notamment aucune disposition de l'instruction interministérielle n° 1300, ni aucun principe général du droit n'imposaient à l'administration d'inviter Mme C... à s'expliquer ou à prendre connaissance de son dossier avant de prendre la décision contestée. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de la procédure contradictoire doit être écarté. 10. En troisième lieu, l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300 dispose que : " 3. Retrait d'habilitation : (...) L'habilitation peut être retirée en cours de validité ou à l'occasion d'une demande de renouvellement si l'intéressé ne remplit plus les conditions nécessaires à sa délivrance, ce qui peut être le cas lorsque des éléments de vulnérabilité apparaissent (...) ". Aux termes de l'article 24 de la même instruction : " (...) L'enquête administrative est fondée sur des critères objectifs permettant de déterminer si l'intéressé, par son comportement ou par son environnement proche, présente une vulnérabilité, soit parce qu'il constitue lui-même une menace pour le secret, soit parce qu'il se trouve exposé à un risque de chantage ou de pressions pouvant mettre en péril les intérêts de l'Etat, chantage ou pressions exercés par un service étranger de renseignement, un groupe terroriste, une organisation ou une personne se livrant à des activités subversives (...) ". 11. Par ailleurs, l'article R. 2311-7 du code de la défense, dans sa rédaction applicable, dispose que : " Nul n'est qualifié pour connaître des informations et supports classifiés s'il n'a fait au préalable l'objet d'une décision d'habilitation et s'il n'a besoin, selon l'appréciation de l'autorité d'emploi sous laquelle il est placé, au regard notamment du catalogue des emplois justifiant une habilitation établi par cette autorité, de les connaître pour l'exercice de sa fonction ou l'accomplissement de sa mission ". L'article 21 de l'instruction interministérielle n° 1300 précise que : " L'habilitation ne permet pas d'accéder sans limite à toute information ou à tout support classifié au niveau correspondant. Une personne habilitée n'accède à une information ou à un support classifié que si son autorité hiérarchique estime que cet accès est nécessaire à l'exercice de sa fonction ou à l'accomplissement de sa mission. / L'autorité hiérarchique apprécie de façon rigoureuse et mesurée le besoin de connaître des informations classifiées ". 12. Enfin, l'article 413-7 du code pénal dispose que : " Est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende le fait, dans les services, établissements ou entreprises, publics ou privés, intéressant la défense nationale, de s'introduire, sans autorisation, à l'intérieur des locaux et terrains clos dans lesquels la libre circulation est interdite et qui sont délimités pour assurer la protection des installations, du matériel ou du secret des recherches, études ou fabrications (...) ". L'article 7 de l'instruction interministérielle n° 1300 dispose que : " Les lieux abritant des éléments couverts par le secret de défense nationale sont les locaux dans lesquels sont détenus des informations ou supports classifiés, quel qu'en soit le niveau, par des personnes par ailleurs habilitées au niveau requis. / L'accès à ces lieux, pour motif de service, est encadré par les dispositions relatives au droit du travail, aux contrats de prestation de service, au droit pénal, à la procédure pénale ou issues de conventions internationales ". Enfin, l'article 6 de l'instruction précise que : " Seules des personnes qualifiées peuvent accéder aux secrets de la défense nationale. La qualification exige la réunion de deux conditions cumulatives : / -le besoin de connaître ou d'accéder à une information classifiée, attesté par l'autorité d'emploi : l'appréciation du besoin d'en connaître est fondée sur le principe selon lequel une personne ne peut avoir connaissance d'informations classifiées que dans la mesure où l'exercice de sa fonction ou l'accomplissement de sa mission l'exige. Elle est effectuée dans les conditions prévues par l'article 20 de la présente instruction ; / -la délivrance de l'habilitation correspondant au degré de classification de l'information considérée : la décision d'habilitation est une autorisation explicite, délivrée à l'issue d'une procédure spécifique définie dans la présente instruction, permettant à une personne, sous réserve du besoin d'en connaître, d'avoir accès aux informations ou supports classifiés au niveau précisé dans la décision ainsi qu'au (x) niveau (x) inférieur (s). La décision d'habilitation est assortie d'un engagement de respecter, après en avoir dûment pris connaissance, les obligations et les responsabilités liées à la protection des informations ou supports classifiés ". 13. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il statue sur une demande d'annulation d'une décision portant retrait d'une habilitation " confidentiel défense ", de contrôler, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, la légalité des motifs sur lesquels l'administration s'est fondée. Il lui est loisible de prendre, dans l'exercice de ses pouvoirs généraux de direction de l'instruction, toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, sans porter atteinte au secret de la défense nationale. Il lui revient, au vu des pièces du dossier, de s'assurer que la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur de fait ou d'une erreur manifeste d'appréciation. 14. Il ressort des explications apportées par la ministre des armées que la décision de retrait de l'habilitation " confidentiel défense " de Mme C... est fondée sur la circonstance qu'en compagnie d'autres personnes, l'intéressée a pénétré le 3 avril 2018 sans autorisation dans plusieurs zones sécurisées d'un bâtiment dont une zone " abritant des informations " confidentiel défense " où est hébergé un programme très sensible constituant un défi important pour Naval Group en termes de transfert de technologies ". Il ressort effectivement des pièces du dossier, notamment de l'attestation de l'officier de sécurité de la société Naval Group qui a analysé la vidéosurveillance du bâtiment, que Mme C... est entrée à 9h35 dans le bâtiment en cause en compagnie de trois autres agents. Après être demeurée avec ces personnes dans le local de sécurité des gardiens du bâtiment, Mme C... a pénétré à 10h09 dans une première zone sensible du bâtiment, à 10 h11 dans une seconde de ces zones, et à 10h19 dans une troisième de ces zones pour laquelle elle ne bénéficiait pas d'un droit d'accès. Mme C... ne peut utilement invoquer le fait qu'elle disposait en règle générale d'une habilitation " confidentiel défense " pour justifier son entrée dans les différentes zones sensibles du bâtiment dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article R. 2311-7 du code de la défense et de l'article 21 de l'instruction interministérielle n° 1300 que la seule possession d'une habilitation ne permet pas d'accéder à des informations classifiées dès lors que l'accès doit être par ailleurs nécessité par l'exercice de la fonction ou l'accomplissement de la mission, aucune mission spécifique dans ces zones sensibles ne lui ayant été attribuée ce jour. Par ailleurs, si l'intéressée soutient qu'elle avait bénéficié d'une autorisation spéciale pour visiter le bâtiment en cause dans le cadre de ses activités syndicales, il ressort des pièces du dossier que l'officier de sécurité avait accordé une autorisation aux membres du CHSCT du site de Cherbourg de la société Naval Group pour visiter le local des agents de sécurité de la société Fiducial Private Security, situé au rez-de-chaussée de l'immeuble. Néanmoins, les membres du groupe au sein duquel se trouvait MmeTruffaut ne se sont pas bornés à demeurer dans le local des agents de sécurité de la société Fiducial Private Security et ont pénétré au sein de trois zones sensibles du bâtiment, pour lesquelles il est constant que Mme C... ne disposait pas de droit d'accès. Le fait qu'elle entendait visiter les locaux dans le cadre de ses activités syndicales ne la dispensait pas de solliciter l'autorisation d'accéder aux zones sensibles du bâtiment, dont elle ne saurait soutenir qu'elle ne les connaissait pas compte tenu des précautions d'accès à ces zones, ni ne lui permettait de s'affranchir des règles relatives au respect du secret défense. Par ailleurs, il résulte de ces mêmes constatations que Mme C... a ouvert l'accès de la zone du local des agents de sécurité, pour laquelle elle avait obtenu une autorisation d'accès, à un agent de l'agence Fiducial Private Security ne disposant pas de tels droits d'accès. Compte tenu des risques de compromission des secrets protégés engendrés par l'attitude de l'intéressée, la ministre des armées n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision du 24 septembre 2019 portant retrait de son habilitation " confidentiel défense " repose sur des faits matériellement inexacts et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. 15. En dernier lieu, si Mme C... soutient que le but véritable de l'auteur de l'acte serait de restreindre l'action du syndicat A... au sein de la société Naval Group, elle ne l'établit pas. Le moyen tiré du détournement de pouvoir doit donc être écarté. 16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 24 septembre 2019. Sur les frais du litige : 17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre des armées et à la société Naval Group. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, M. BÉRIA-GUILLAUMIELe président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT02545
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) du Domaine Peignon a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 8 novembre 2019 par laquelle le préfet de la région Normandie a rejeté sa demande d'autorisation d'exploiter 14 hectares et 30 ares de terres situées au Teilleul et à Husson dans la Manche. Par un jugement n°2000121 du 9 juillet 2021, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 8 novembre 2019. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 9 septembre 2021, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande à la cour d'annuler ce jugement du 9 juillet 2021 du tribunal administratif de Caen et de rejeter la demande de l'EARL du Domaine Peignon devant ce tribunal administratif de Caen. Il soutient que : - la demande de l'EARL du Domaine Peignon devant le tribunal était irrecevable, dès lors que la décision contestée présentait un caractère confirmatif, le préfet de la région Normandie ayant déjà, par une décision du 24 mai 2018, refusé à cette société l'autorisation d'exploiter les terres - l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif de Caen dans sa décision n° 1802628 du 4 juillet 2019 fait obstacle à ce que la demande de l'EARL soit accueillie ; - les moyens présentés en première instance par l'EARL doivent être écartés pour les motifs exposés par le préfet dans son mémoire en défense dans cette instance. Par un mémoire en défense enregistré le 28 janvier 2022, l'EARL du Domaine Peignon, représentée par Me Meschin, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que les moyens soulevés par le ministre de l'agriculture et de l'alimentation ne sont pas fondés. La requête a été communiquée au groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) du Marignon qui n'a pas produit d'observations. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code rural et de la pêche maritime ; - l'arrêté du préfet de la région Basse Normandie du 23 décembre 2015, portant schéma directeur des structures agricoles de la Région Basse-Normandie ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - et les observations de Me Trebous, représentant l'EARL du Domaine Peignon. Considérant ce qui suit : 1. L'EARL du Domaine Peignon, spécialisée dans l'élevage de bovins et la production laitière, a déposé auprès des services de la direction départementale des territoires et de la mer de la Manche (DDTM) une demande d'autorisation d'exploiter des terres d'une surface totale de 16 hectares et 87 ares, dont 2 hectares et 57 ares de terres situées sur le territoire de la commune de Sainte-Marie-du-Bois et 14 hectares et 30 ares de terres situées sur le territoire des communes de Husson et du Teilleul. Une demande concurrente a été simultanément déposée par le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) du Marignon. Par une décision du 24 mai 2018, le préfet de la région Normandie a autorisé l'EARL du Domaine Peignon à exploiter les terres situées sur le territoire de la commune de Sainte-Marie-du-Bois et rejeté sa demande concernant les 14 hectares et 30 ares de terres situées sur le territoire des communes de Husson et du Teilleul et, par une décision du même jour, a autorisé le GAEC du Marignon à exploiter ces dernières terres. Le recours contre cette décision a été rejeté par un jugement du tribunal administratif de Caen du 4 juillet 2019. L'EARL du Domaine Peignon a déposé le 11 septembre 2019 une nouvelle demande d'autorisation d'exploiter les 14 hectares et 30 ares situés au Teilleul et à Husson. Par une décision du 8 novembre 2019, le préfet de la région Normandie a rejeté cette demande. Par un jugement du 9 juillet 2021, dont le ministre de l'agriculture et de l'alimentation relève appel, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 8 novembre 2019. Sur la recevabilité de la demande de l'EARL du Domaine Peignon devant le tribunal : 2. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit, que le 24 mai 2018, le préfet de la région Normandie avait déjà refusé d'autoriser l'EARL du Domaine Peignon à exploiter les terres en litige, d'une surface totale de 14 hectares et 30 ares, situées sur le territoire des communes de Husson et du Teilleul. Si la décision contestée du 8 novembre 2019 a été prise à la suite d'une nouvelle demande déposée le 11 septembre 2019 par l'EARL du Domaine Peignon, qui ne sollicitait plus l'autorisation d'exploiter les terres situées sur le territoire de la commune de Sainte-Marie-du-Bois que lui avait octroyée le préfet dans sa décision du 24 mai 2018, une telle circonstance de fait ne suffit pas à ôter à la décision du 8 novembre 2019 son caractère confirmatif au regard de la décision du 24 mai 2018 en tant qu'elle portait refus d'autorisation d'exploiter les terres en litige. 3. En outre, si l'EARL se prévaut de l'attestation établie le 25 janvier 2020 par le propriétaire de ces terres aux termes de laquelle il ne les donnera pas à bail au GAEC du Marignon, cet élément, postérieur à la décision en litige, ne peut être utilement invoqué au soutien d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre cet acte et est donc sans incidence au regard du caractère confirmatif de la décision contestée. Il ne saurait donc constituer un fait nouveau, alors qu'au demeurant, l'avis favorable du bailleur figurait déjà dans le dossier de demande d'autorisation déposé en 2018 à l'appui de la première demande d'autorisation d'exploiter. Par ailleurs, la circonstance que le propriétaire des terres en litige ne souhaitait pas les louer au groupement n'aurait pas eu d'incidence sur la légalité du refus d'autorisation en litige, dès lors que la législation des baux ruraux est indépendante de celle du contrôle des structures agricoles. 4. Enfin, si le tribunal avait dans son jugement du 4 juillet 2019 relevé que le critère de la dimension économique ne pouvait pas permettre de départager les candidatures concurrentes de l'EARL et du GAEC, cela ne constitue pas une circonstance de droit nouvelle, dès lors que les premiers juges ont rejeté la demande d'annulation de la décision du 24 mai 2018, au motif que ces candidatures pouvaient néanmoins être légalement départagées sur le critère tenant à la structuration foncière. Dans ces conditions, la décision contestée présente un caractère purement confirmatif de celle du 24 mai 2018. Il s'ensuit que la demande présentée par l'EARL du Domaine Peignon devant le tribunal était irrecevable. 5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen a, par le jugement attaqué, annulé la décision du 8 novembre 2019. Sur les frais d'instance : 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à L'EARL du Domaine Peignon une somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 9 juillet 2021 du tribunal administratif de Caen est annulé. Article 2 : La demande de l'EARL du Domaine Peignon devant le tribunal administratif de Caen est rejetée. Article 3 : Les conclusions de L'EARL du Domaine Peignon au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) du Domaine Peignon et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la région Normandie. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Brisson, présidente, - M. L'hirondel, premier conseiller, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, X. A...La présidente, C. BRISSON La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT02538
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A..., a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 28 juin 2021 du préfet du Calvados lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par un jugement n° 2101635 du 3 décembre 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 4 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Blache, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 3 décembre 2021 ; 2°) d'annuler cet arrêté du 28 juin 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Calvados, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, le tout dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ; 4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 800 euros, à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - la décision portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - cette décision a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article . 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Un mémoire en défense présenté par le préfet du Calvados a été enregistré 16 juin 2022, après la clôture de l'instruction. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant kosovar né le 4 mars 1986, est entré irrégulièrement en France le 14 décembre 2010, selon ses déclarations. Le bénéfice de l'asile lui a été refusé par deux décisions des 28 décembre 2011 et 14 mai 2014 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmées respectivement par décisions des 29 août 2012 et 2 février 2015 de la Cour nationale du droit d'asile. Sa demande de réexamen a également été rejetée par une décision du 26 mai 2015 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. L'intéressé a sollicité son admission au séjour pour raisons médicales en 2015. Par un arrêté du 29 octobre 2018, confirmé par un jugement du 13 mars 2019, le préfet du Calvados a rejeté sa demande et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A... a présenté une nouvelle demande de titre de séjour le 5 juin 2020, sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 28 juin 2021, le préfet du Calvados a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. L'intéressé relève appel du jugement du 3 décembre 2021 du tribunal administratif de Caen rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine (...) ". 3. M. A... fait valoir qu'il réside en France depuis 2010 avec son épouse, de même nationalité, et leurs quatre enfants nés en 2009, 2011, 2016 et 2018, les trois derniers étant nés en France et les trois premiers scolarisés. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant, qui a, au demeurant, déclaré à l'occasion de sa seconde demande d'asile être entré en France en 2013, n'a été admis à séjourner sur le territoire français que le temps nécessaire à l'examen de ses demandes d'asile et sous couvert de récépissés de demandes de titre de séjour et qu'il s'y est maintenu irrégulièrement en dépit notamment d'une précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet en 2018. S'il se prévaut d'une implication personnelle dans le secteur associatif et de sa participation à des cours d'apprentissage de la langue française, l'intéressé, qui ne dispose ni d'un logement et de ressources autonomes ni d'une perspective professionnelle précise, ne justifie pas d'une particulière intégration. En outre, alors que son épouse se trouve également en situation irrégulière en France, M. A... ne justifie d'une impossibilité ni de reconstituer la cellule familiale dans un autre pays, ni, eu égard notamment au jeune âge de ses enfants, d'y poursuivre la scolarité de ces derniers. Le requérant n'établit pas davantage avoir tissé des liens d'une particulière intensité en France, ni être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans et où résident notamment ses parents et deux de ses frères. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions de séjour en France de M. A... et de sa famille, la décision contestée lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet du Calvados n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant. 4. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". 5. En se prévalant de sa situation telle qu'exposée au point 3, M. A... n'établit pas que le préfet du Calvados aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que son admission au séjour ne répondait pas à des considérations humanitaires et ne se justifiait pas au regard de motifs exceptionnels, au sens de l'article L. 435-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 et sans qu'il soit besoin d'examiner sur la recevabilité de ces moyens qui se rattachent à une demande nouvelle en appel, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de ce qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant doivent être écartés. 7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées. D E C I D E Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Calvados. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition du greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, C. C... Le président, D. Salvi La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22NT000032
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Vu la procédure suivante : Procédures contentieuses antérieures : I. Par une demande enregistrée sous le n°2009522, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 21 août 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai. II. Par une demande enregistrée sous le n°2010700, Mme B... a demandé au même tribunal d'annuler la décision du 9 octobre 2020 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a rejeté le recours gracieux formé contre l'arrêté du 21 août 2020. Par un jugement n°s 2009522, 2010700 du 29 septembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 8 octobre 2021, Mme A... B..., représentée par Me Berahya-Lazarus, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 29 septembre 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 21 août 2021 du préfet de Maine-et-Loire ; 3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique. Elle soutient que : ­ la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour porte une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale compte tenu de la durée de son séjour en France et de la présence dans ce pays de ses deux enfants de nationalité française et de ses petits-enfants et de son insertion dans la société française ; ­ la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité dont est entachée la décision portant refus de titre de séjour et porte une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale compte tenu de ce qu'elle a pour effet de la séparer de ses enfants et petits-enfants. Par un mémoire en défense enregistré le 16 mai 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 février 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ­ le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; ­ le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. L'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B..., ressortissante congolaise née le 18 mars 1956, est entrée en France le 5 janvier 2018, sous couvert d'un visa de court séjour. Elle s'est maintenue sur le territoire au-delà de la date de validité de son visa et a, par la suite, sollicité du préfet du Maine-et-Loire son admission exceptionnelle au séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 28 mai 2019, le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français. Le 16 mars 2020, l'intéressée a présenté une nouvelle demande de titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 21 août 2020, le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai. Par deux requêtes distinctes, Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cet arrêté ainsi que la décision du 9 octobre 2020 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a rejeté le recours gracieux qu'elle a formé le 21 août 2020 contre cet arrêté. Mme B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Nantes du 29 septembre 2021 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté. En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour : 2. Mme B... soutient que la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour porte une attente disproportionnée à sa vie privée et familiale en faisant valoir la présence en France de ses deux filles majeures, de nationalité française, ainsi que de ses petits-enfants à qui elle apporte des aides régulières, notamment lors de la sortie de l'école, sa parfaite intégration dans la société française pour parler couramment le français étant originaire d'un pays francophone et avoir résidé pendant plus de cinq ans en France dans les années 1980 et avoir noué des relations avec " d'autres personnes ". 3. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme B... est entrée récemment en France le 5 janvier 2018, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Elle s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français après avoir fait l'objet, le 28 mai 2019, d'un arrêté portant refus de délivrance d'un titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français auquel elle n'a pas déféré. Par ailleurs, elle n'apporte au soutien de ses allégations aucun élément de nature à permettre à la cour d'apprécier l'intensité des liens qui l'unissent à sa famille résidant en France, s'agissant notamment des aides qu'elle donnerait pour s'occuper de l'entretien ou de l'éducation de ses petits-enfants. De même, elle n'apporte aucun élément permettant d'apprécier son insertion sociale en France. L'intéressée n'établit pas, enfin, ne plus avoir d'attaches dans son pays d'origine qu'elle a quitté alors qu'elle était âgée de près de 62 ans. Les attestations produites pour la première fois en appel par ses deux filles, qui sont insuffisamment circonstanciées, ne sauraient apporter ces preuves. Dès lors, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, la décision contestée n'a pas porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, à le supposer soulevé, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché d'une erreur manifeste son appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de la requérante. En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : 4. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, Mme B... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour pour demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français. 5. En second lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée portée à son droit au respect de mener une vie privée et familiale normale par la décision portant obligation de quitter le territoire français qui reprend ce qui été précédemment développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, doit être écarté pour les mêmes motifs que précédemment. 6. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée, pour son information, au préfet de Maine-et-Loire. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, M. L'HIRONDEL Le président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 2 N° 21NT02823
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler notamment l'arrêté du 25 août 2021 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant un retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Par un jugement n° 2104366 du 7 septembre 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 24 janvier 2022, Mme C..., représentée par Me Cabioch, demande à la cour : 1°) de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle suivante : " La charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et plus particulièrement les termes de son préambule mais également ceux de ses articles 7 et 8 qui disposent que " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications " et que " 1 - Toute personne a droit à la protection des données à caractère personnel la concernant. 2 - Ces données doivent être traitées loyalement, à des fins déterminées et sur la base du consentement de la personne concernée ou en vertu d'un autre fondement légitime prévu par la loi. Toute personne a le droit d'accéder aux données collectées la concernant et d'en obtenir la rectification. 3 - Le respect de ces règles est soumis au contrôle d'une autorité indépendante. ", s'opposent-ils à la jurisprudence administrative française appliquant les articles R. 142-4 et R. 142-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui retient qu'en l'absence de d'élément objectif transmis par le requérant le moyen tiré de l'absence d'habilitation de l'agent ayant consulté les fichiers doit être écarté ' " ; 2°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes du 7 septembre 2021 ; 3°) d'annuler cet arrêté du 25 août 2021 ; 4°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de procéder au retrait de son signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen dans le délai de quatre jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 5°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation, le tout dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 6°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ; - l'absence de justification de la désignation et de l'habilitation de l'agent ayant procédé à la consultation des traitements automatisés " VISABIO " et " AGDREF2 ", entache la décision contestée d'un vice de procédure ; - les juridictions administratives font peser sur l'administré la charge de la preuve de l'irrégularité de la consultation de ces fichiers, en violation du droit de l'Union européenne ; la Cour de justice l'Union européenne doit être saisie d'une question préjudicielle sur ce point ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur de fait ; - cette décision est illégale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - compte tenu de la relation de couple qu'elle entretient avec un ressortissant communautaire, elle bénéficie du droit au séjour applicable aux personnes mentionnées à l'article 3 de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 ; - la décision portant refus de délai de départ volontaire est entachée d'une insuffisance de motivation ; - en prenant cette décision le préfet a commis une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation ; - la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'une insuffisance de motivation ; - cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an est entachée d'une insuffisance de motivation ; - cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; - la décision de signalement aux fins de non-admission dans l'espace Schengen est illégale du fait de l'illégalité de la décision lui interdisant le retour sur le territoire français. La requête a été communiquée le 24 février 2022 au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas présenté de mémoire en défense. Mme C... été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les observations de Me Renaud représentant Mme C.... Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., ressortissante béninoise, née le 22 mars 1989, déclare être entrée en France en 2014. A la suite d'une retenue administrative dont elle a fait l'objet le 25 août 2021, le préfet d'Ille-et-Vilaine a, par arrêté du même jour, obligé l'intéressée à quitter le territoire français sans délai, fixé le pays de renvoi et prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Mme C... relève appel du jugement du 7 septembre 2021 du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français : 2. La décision portant obligation de quitter le territoire français que comporte l'arrêté contesté, qui énonce les considérations de droit et les circonstances de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet d'Ille-et-Vilaine, qui a fait état des principaux éléments de la situation administrative, personnelle et familiale de Mme C..., n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation préalablement à l'édiction de la décision contestée. 3. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". 4. S'il ressort des pièces du dossier et notamment de la copie de son passeport que Mme C... est entrée en Allemagne le 24 décembre 2014 sous couvert d'un visa Schengen valable jusqu'au 11 janvier 2015 pour un séjour d'une durée de vingt-et-un jours, l'intéressée ne justifie ni de la date ni des conditions de son entrée en France et, par suite, n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce qu'elle serait entrée régulièrement sur le territoire français. Elle ne justifie pas davantage de la régularité de son séjour. Dans ces conditions, le préfet d'Ille-et-Vilaine étant fondé pour ces seuls motifs à constater que la requérante entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, Mme C... ne peut utilement se prévaloir de l'irrégularité qui entacherait selon elle les conditions dans lesquelles il aurait été procédé à la consultation des fichiers " VISABIO " et " AGDREF2 " aux fins de vérification des conditions de son entrée en France. 5. Contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée, notamment en ce qu'elle fait état de l'absence de remise de son passeport aux services de police, serait entachée d'erreur de fait. 6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine (...) ". 7. Mme C... fait valoir qu'elle réside en France depuis 2014 et qu'elle entretient depuis le mois de mai 2021 une relation de couple avec un ressortissant portugais établi en France sous le statut de travailleur. Toutefois l'intéressée, ne justifie ni de la date de son entrée sur le territoire français, ainsi qu'il a été dit précédemment, ni de l'ancienneté, de l'intensité et, par suite, de la stabilité de la relation qu'elle invoque. La requérante, célibataire et sans enfant, qui ne dispose pas d'un logement stable et ne se prévaut d'aucune perspective d'insertion professionnelle, n'établit pas davantage avoir tissé des liens d'une particulière intensité en France, ni être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de Mme C..., la décision contestée l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 8. Si tout justiciable peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive, lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires, Mme C... ne saurait se prévaloir de la méconnaissance de l'article 3 de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 susvisée, aux termes duquel l'État membre d'accueil favorise, conformément à sa législation nationale, l'entrée et le séjour du partenaire avec lequel le citoyen de l'Union a une relation durable dûment attestée, dès lors que les dispositions de cette directive ont fait l'objet d'une transposition dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 et par le décret n° 2007-371 du 21 mars 2007. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance de la directive précitée doit être écarté. Sur la légalité de la décision portant refus de délai de départ volontaire : 9. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) / 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; (...) / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5 ". 10. Pour refuser d'assortir la décision obligeant Mme C... à quitter le territoire français d'un délai de départ volontaire, le préfet d'Ille-et-Vilaine s'est fondé sur les circonstances que l'intéressée ne justifiait ni d'une entrée régulière, ni de la présentation d'une demande de régularisation, qu'elle avait déclaré ne pas vouloir se soumettre à la mesure d'éloignement prise à son encontre, qu'elle ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes, en raison notamment de l'absence de domicile stable établi et de remise de l'original de son passeport aux services de police et qu'elle entrait, par suite dans le champ d'application des dispositions précitées des 1°, 4° et 8° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 11. En premier lieu, cette décision portant refus de délai de départ volontaire comporte les considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement. Elle est, par suite, suffisamment motivée. 12. En deuxième lieu, si Mme C... soutient que la mention d'une intention de ne pas se soumettre à la mesure d'éloignement est erronée, cette inexactitude, à la supposer même établie, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet d'Ille-et-Vilaine aurait pris la même décision en se fondant sur les seules dispositions précitées des 1° et 8° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 13. Enfin, en se bornant à invoquer en des termes généraux le contexte de crise sanitaire, la requérante ne justifie pas de circonstances particulières telles qu'en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, le préfet d'Ille-et-Vilaine aurait fait une inexacte application de ces mêmes dispositions. Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi : 14. La décision fixant le pays de renvoi qui, contrairement à ce que soutient la requérante, mentionne notamment sa nationalité béninoise, comporte les considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement. Elle est, par suite, suffisamment motivée. 15. Compte tenu de l'absence d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, Mme C... ne saurait exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de sa contestation de la décision fixant le pays de renvoi. Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an : 16. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ". 17. Pour prononcer à l'encontre de Mme C... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, le préfet d'Ille-et-Vilaine, qui a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, s'est fondé sur la présence relativement récente de l'intéressée et l'absence de liens intenses et stables en France, sur l'existence d'attaches dans son pays d'origine, ainsi que sur l'absence de menace à l'ordre public, de précédente mesure d'éloignement et de circonstances humanitaires. 18. En premier lieu, cette décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an comporte les considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement. Elle est, par suite, suffisamment motivée. 19. En second lieu, Mme C... n'établit, ainsi qu'il a été dit au point 7, ni l'ancienneté alléguée de sa présence en France, ni l'intensité et la stabilité de la relation de couple dont elle se prévaut. Par suite en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an pour les motifs exposés au point 17, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a ni porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni fait une inexacte application des dispositions citées au point 16. En ce qui concerne le signalement aux fins de non-admission dans l'espace Schengen : 20. Aux termes de l'article L. 613-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel est notifiée une interdiction de retour sur le territoire français est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 24 du règlement (UE) n° 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen et modifiant et abrogeant le règlement (CE) n° 1987/2006. / Les modalités de suppression du signalement de l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. ". Aux termes de l'article R. 613-7 du même code : " Les modalités de suppression du signalement d'un étranger effectué au titre d'une décision d'interdiction de retour sont celles qui s'appliquent, en vertu de l'article 7 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées, aux cas d'extinction du motif d'inscription dans ce traitement ". 21. Lorsqu'elle prend à l'égard d'un étranger une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français, l'autorité administrative se borne à informer l'intéressé de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Une telle information ne constitue pas une décision distincte de la mesure d'interdiction de retour et n'est, dès lors, pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Par suite, les conclusions tendant à l'annulation du signalement de Mme C... aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées. 22. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer pour poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées. D E C I D E Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition du greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, C. A... Le président, D. Salvi La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22NT002082
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 novembre 2021 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile et la décision du même jour par laquelle le préfet l'a assignée à résidence. Par un jugement n° 2113742 du 13 décembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 10 février 2022, 31 mars 2022, 12 avril 2022 et 9 mai 2022, Mme B... A..., représentée par Me Perrot, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2113742 du tribunal administratif de Nantes du 13 décembre 2021 ; 2°) d'annuler les décisions par lesquelles le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes et l'a assignée à résidence ; 3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale dans un délai de sept jours, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les meilleurs délais ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocate au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues ; elle n'a pas bénéficié d'une information complète et effective dans la langue malinke qu'elle comprend puisqu'elle a reçu les guides et les brochures en langue française ; la traduction des brochures à l'oral n'a pas d'incidence sur le vice de procédure ; l'information n'a pas été fournie de manière effective compte tenu de la durée de l'entretien ; - la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; elle est dans une situation de particulière vulnérabilité : o du fait de sa qualité de demandeur d'asile ; o du fait de son parcours migratoire ; o elle s'est vu diagnostiquer une maladie grave ; les demandeurs d'asile souffrant de problèmes de santé ont difficilement accès aux soins en Italie ; - le préfet n'a pas procédé à un examen circonstancié et actualisé des risques médicaux en cas de transfert ; le préfet n'a pas examiné le risque de violation des articles 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et 3 § 2 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; - elle justifie d'un risque personnel constituant une atteinte grave au droit d'asile : o il existe des raisons de croire à l'existence de défaillances systémiques au sens de l'article 3 § 2 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; o il existe des raisons de croire à un risque de mauvais traitement contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, même en l'absence de défaillances systémiques. - le préfet n'a pas pris en compte des circonstances postérieures, indiquant qu'elle était prise en charge médicalement pour une pathologie grave. Par des mémoires en défense, enregistrés le 31 mars 2022 et le 27 avril 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - le délai de transfert de Mme A... vers l'Italie est reporté au 13 juin 2022 ; - les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 11 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ; - le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; - la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ; - le règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique. Une note en délibéré, présentée pour le préfet de Maine-et-Loire, a été enregistrée le 13 juin 2022. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... A..., ressortissante ivoirienne née en mai 1983, est entrée en France en septembre 2021. Elle a déposé une demande d'asile qui a été enregistrée le 27 septembre 2021. Par une décision du 30 novembre 2021, le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile et, par une décision du même jour, a également prononcé son assignation à résidence. Mme A... relève appel du jugement du 13 décembre 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 30 novembre 2021. 2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. (...) ". 3. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre l'ensemble des éléments d'information prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. La remise de ces éléments doit intervenir en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations. Eu égard à leur nature, la remise par l'autorité administrative de ces informations prévues par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie. 4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... s'est vu remettre, le 27 septembre 2021, le jour même de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, et à l'occasion de l'entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées, en langue française. Si Mme A... soutient qu'elle ne comprend que le malinke, il ressort des pièces du dossier qu'elle a apposé sa signature sur le recueil d'information du même jour indiquant qu'elle comprend la langue française. Par ailleurs, elle a reconnu, en apposant sa signature sous le compte rendu de l'entretien qui a été réalisé le même jour, d'une part que le guide du demandeur d'asile et l'information sur les règlements communautaires lui avaient été remis dans une langue qu'elle déclarait comprendre, et d'autre part, que ces mêmes informations lui ont été communiquées oralement et qu'elle les a comprises. Dans ces conditions, et alors qu'il ressort des pièces du dossier que la prestation d'interprétariat concernant Mme A... a duré 33 minutes, ce qui n'exclut pas la communication orale des principales informations, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2. (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable (...) ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". 6. Par ailleurs, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité (...) ". 7. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme A... et des conséquences de son transfert en Italie, au regard notamment des garanties exigées par le respect du droit d'asile et de son état de santé, alors qu'il résulte de la motivation de l'arrêté contesté que le préfet a souligné que Mme A... avait, avant la décision, déclaré ne pas avoir de problème de santé, et a relevé la stabilité de la situation sanitaire italienne en l'estimant comparable avec la situation sur le territoire français. 8. D'autre part, Mme A... fait état de l'existence de défaillances affectant les conditions d'accueil et de prise en charge des demandeurs d'asile en Italie, mais les documents qu'elle produit à l'appui de ces affirmations ne permettent pas de tenir pour établi que sa propre demande d'asile serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que l'Italie est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, et alors qu'elle a indiqué, au cours de l'entretien du 27 septembre 2021, avoir été hébergée en Italie tout d'abord dans un camp de réfugiés puis au sein d'un foyer, elle ne démontre pas davantage qu'elle serait exposée au risque de subir en Italie des traitements contraires aux dispositions des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et que la décision de transfert méconnaîtrait ainsi l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013. 9. Enfin, Mme A... établit, par un certificat du 11 avril 2022, qu'elle est suivie par le service des maladies infectieuses et tropicales du centre hospitalier universitaire de Nantes pour une infection par le virus de l'immunodéficience humaine et qu'elle s'est vue prescrire un traitement par trithérapie, lequel ne doit pas être interrompu pour éviter des conséquences d'une exceptionnelle gravité à court terme. Néanmoins, il ressort de ce même document que la charge virale de l'intéressée en janvier 2022 était indétectable. En outre, il n'est ni établi ni même soutenu que la surveillance nécessitée par l'état de santé de Mme A... et le traitement ne seraient pas disponibles en Italie, alors ainsi qu'il a été dit ci-dessus que Mme A... a déclaré y avoir bénéficié d'un accueil dans un foyer. De même, la circonstance selon laquelle ses conditions de vie ont été éprouvantes tout au long de son parcours migratoire, notamment en Lybie, ne suffit pas à démontrer qu'elle se trouve dans une situation de vulnérabilité exceptionnelle imposant d'instruire sa demande d'asile en France. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement précité, les documents produits n'établissant en tout état de cause pas de dégradation de son état de santé postérieure à l'arrêté contesté. 10. En dernier lieu, si Mme A... demande l'annulation de la décision du 30 novembre 2021 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son assignation à résidence dans le département de la Loire-Atlantique, elle ne soulève, en appel, aucun moyen à l'encontre de cette décision. 11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de Maine-et-Loire du 30 novembre 2021. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à Me Perrot et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, M. BÉRIA-GUILLAUMIELe président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00388
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du préfet du Finistère du 7 juillet 2021 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par un jugement no 2104085 du 21 octobre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 22 novembre 2021 et le 15 avril 2022, Mme D..., représentée par Me Jeanneteau, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 21 octobre 2021 du tribunal administratif de Rennes ; 2°) d'annuler cet arrêté du 7 juillet 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Finistère, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de cinq jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir; 4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : Sur le jugement attaqué : - il est insuffisamment motivé ; Sur la décision portant refus de titre de séjour : - elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination : - elles méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense enregistré le 25 mars 2021, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés. Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 janvier 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C..., - et les observations de Me Jeanneteau, représentant Mme D.... Considérant ce qui suit : 1. Mme D..., ressortissante nigériane née le 13 février 2003, est entrée en France le 23 avril 2019 selon ses déclarations. Par une ordonnance de placement provisoire du 10 septembre 2019 puis par jugement du tribunal des enfants de A... du 12 novembre 2019, elle a été confiée à l'aide sociale à l'enfance. A compter du 11 mars 2020, elle a été placée sous tutelle de l'Etat avant de bénéficier d'un contrat jeune majeur valable du 13 février au 31 mai 2021, renouvelé du 1er juin au 30 novembre 2021. Le 26 janvier 2021, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-15, L. 316-1 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 7 juillet 2021, le préfet du Finistère a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination Par un jugement du 21 octobre 2021, dont Mme D... relève appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juillet 2021. Sur la légalité de l'arrêté du 7 juillet 2021 : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ". 3. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressée, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée. Les dispositions de l'article précité n'exigent pas que le demandeur soit isolé dans son pays d'origine et, d'autre part, que la délivrance du titre doit procéder d'une appréciation globale sur la situation de la personne concernée au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française. 4. Pour prendre l'arrêté contesté, le préfet s'est fondé en particulier sur la circonstance selon laquelle Mme D... n'établit pas l'absence de lien avec sa famille dans son pays d'origine. Il a relevé, à cet égard, que l'intéressée a dissimulé le fait qu'elle avait obtenu un visa de court séjour délivré par les autorités italiennes, le 26 février 2019. Il ressortait, en effet, de la consultation des données biométriques de la base de données Visabio que ses deux parents ont donné leur accord pour l'obtention d'un tel visa, qu'ils ont fourni des certificats de naissance, leurs passeports, des attestations de prise en charge financières de leur fille, ainsi qu'un document les engageant à un retour au Nigéria à l'issue du séjour. 5. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier que Mme D..., qui a été prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance à l'âge de seize ans et huit mois, a poursuivi, avec sérieux, durant l'année scolaire 2020-2021, une formation en CAP " métiers de la mode ", après une année de seconde dans un lycée général. La structure qui l'a accueilli a, de plus, émis un avis favorable concernant son intégration dans la société française. En faisant du critère de l'isolement familial un critère prépondérant sans porter une appréciation globale sur la situation de Mme D..., alors qu'au demeurant, cette dernière soutient qu'elle a eu recours à un passeur pour entrer en France et qu'elle n'a pas connu ses parents, en étayant ses allégations de témoignages, dont l'administration ne remet pas en cause la valeur probante, le préfet du Finistère a commis une erreur de droit au regard des dispositions précitées. 6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens soulevés, que Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour du 7 juillet 2021 ainsi que, par voie de conséquence de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de celle fixant le pays de destination. Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte : 7. Le présent arrêt implique nécessairement, mais seulement, eu égard au motif qui le fonde, que le préfet du Finistère réexamine la demande de Mme D.... Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et de munir l'intéressée dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 8. Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Ainsi, son avocate peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 200 euros à Me Jeanneteau, avocate de Mme D..., dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement no 2104085 du 21 octobre 2021 du tribunal administratif de Rennes et l'arrêté du préfet du Finistère du 7 juillet 2021 pris à l'encontre de Mme D... sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet du Finistère de réexaminer la demande de titre de séjour de Mme D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de la munir dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour. Article 3 : L'État versera à Me Jeanneteau une somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet du Finistère. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Brisson, présidente, - M. L'hirondel, premier conseiller, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, X. C... La présidente, C. Brisson La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 21NT032762
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen : 1°) de constater l'irrégularité de l'emprise résultant de la présence d'un poteau électrique sur le terrain dont il est propriétaire ; 2°) de résilier la convention d'octobre 1967 dont se prévaut la SA Enedis concernant cette emprise ; 3°) d'enjoindre à la SA Enedis de procéder, d'une part, à l'enfouissement des réseaux sur la commune de Sainte-Croix-sur-Mer ou sur la rue Bout Cain ainsi qu'au démontage, dans un délai de six mois, du poteau électrique et à la remise en état de sa propriété, et d'autre part, de faire procéder par constat d'huissier à l'avancée des travaux ; 4°) de condamner la SA Enedis à lui verser la somme de 35 000 euros pour manœuvre dilatoire et en réparation de ses préjudices, ainsi qu'aux dépens. Par un jugement n° 1902016 du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté les conclusions de la demande tendant à la résiliation de la convention de 1967 comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître et a rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 décembre 2021 et 20 avril 2022, M. A... B..., représenté par la cabinet SCM AetE avocats conseils, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 15 octobre 2021 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ; 2°) de constater l'irrégularité de l'emprise résultant de la présence d'un poteau électrique sur le terrain dont il est propriétaire ; 3°) d'enjoindre à la SA Enedis, d'une part, et sous astreinte, de procéder dans un délai de six mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir au démontage du poteau électrique et à la remise en état de sa propriété, et d'autre part, de procéder à l'enfouissement des réseaux au droit de sa propriété le long de la rue Bout Cain ; 4°) de mettre à la charge de la SA Enedis une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : ­ c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté comme irrecevable sa demande pour ne pas avoir respecté les dispositions alors applicables de l'article R. 414-3 du code de justice administrative concernant la présentation des pièces jointes ; ­ la présence du poteau électrique sur le terrain dont il est propriétaire est constitutive d'une emprise irrégulière ; ­ la convention dont se prévaut la SA Enedis ne saurait lui être opposée dès lors qu'elle a été conclue avec une personne qui n'a jamais été le propriétaire du terrain et qu'au surplus, elle n'a pas été publiée aux services de la publicité foncière ; ­ compte-tenu de cette emprise irrégulière, il doit être enjoint à la SA Enedis de procéder au démontage du poteau électrique et à l'enfouissement du réseau électrique. Par des mémoires en défense, enregistrés les 10 mars et 9 mai 2022, la SA Enedis, représentée par la l'AARPI Adaltys, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : ­ la demande de M. B... était bien irrecevable, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, pour méconnaissance des dispositions de l'article R. 414-3 du code de justice administrative ; ­ le poteau électrique litigieux ayant été implanté il y a plus de trente ans, M. B... n'est pas fondé à en demander son enlèvement dès lors que la prescription trentenaire prévue à l'article 2227 du code civil lui est opposable ; ­ l'implantation du poteau électrique en litige est régulière dès lors que l'ancien propriétaire de la parcelle avait bien signé une convention avec EDF pour autoriser cette implantation et que le requérant en avait connaissance au moment où il envisageait d'acquérir la parcelle ; ­ la demande de déplacement de ce poteau électrique est mal fondée. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : ­ le rapport de M. L'hirondel, premier conseiller, ­ les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, ­ et les observations de Me Eveno, représentant M. B... et de Me Dubroca représentant la SA Enedis. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B... a acquis, le 19 juin 2019, une maison sur le territoire de la commune de Sainte-Croix-sur-Mer. Par un courriel du 3 août 2019, il a sollicité les services de la SA Enedis afin de signer une convention relative à l'implantation du poteau électrique situé sur sa propriété. En l'absence de réponse de cette société, M. B... a saisi, le 3 septembre 2019, le tribunal administratif de Caen d'une demande tendant notamment à obtenir la résiliation de la convention d'octobre 1967 dont se prévaut la SA Enedis relative à l'implantation du poteau électrique en litige et à la constatation de l'irrégularité de l'emprise. Par un jugement du 15 octobre 2021, le tribunal a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la résiliation de cette convention pour être portées devant une juridiction incompétente pour en connaître et le surplus des conclusions comme irrecevables pour méconnaissance des dispositions des articles R. 414-1 et R. 414-3 du code de justice administrative. M. B... doit être regardé comme demandant l'annulation de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. 2. D'une part, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l'acte attaqué ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation. (...) ". Aux termes de l'article R. 412-2 du même code : " Lorsque les parties joignent des pièces à l'appui de leurs requêtes et mémoires, elles en établissent simultanément un inventaire détaillé. Sauf lorsque leur nombre, leur volume ou leurs caractéristiques y font obstacle, ces pièces sont accompagnées d'une copie. Ces obligations sont prescrites aux parties sous peine de voir leurs pièces écartées des débats après invitation à régulariser non suivie d'effet. / L'inventaire détaillé présente, de manière exhaustive, les pièces par un intitulé comprenant, pour chacune d'elles, un numéro dans un ordre continu et croissant ainsi qu'un libellé suffisamment explicite ". 3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Caen, et qui comportait la liste des pièces communiquées, a été adressée, non par le biais de l'application Télérecours-citoyens mais par lettre recommandée avec accusé de réception qui a été enregistrée par le greffe de ce tribunal le 3 septembre 2019. Dans ces conditions, le tribunal administratif ne pouvait se fonder, pour déclarer la requête irrecevable, sur les dispositions des articles R. 412-2 et R. 412-3 du code de justice administrative qui concernent les transmissions des requêtes et des pièces qui y sont jointes par voie électronique et qui n'étaient pas applicables en l'espèce. En outre, les dispositions précitées de l'article R. 412-2 du code de justice administrative ont seulement pour effet, lorsque l'inventaire détaillé se révèle insuffisant, et après mise en demeure au requérant de régulariser restée infructueuse, d'écarter du débat les pièces transmises et non pas de rendre la demande irrecevable. 4. D'autre part, et au surplus, aux termes de l'article R. 414-6 du code de justice administrative dans sa rédaction alors applicable : " les personnes physiques et morales de droit privé non représentées par un avocat, autres que celles chargées de la gestion permanente d'un service public, peuvent adresser leur requête à la juridiction par voie électronique au moyen d'un téléservice accessible par le réseau internet. (...) ". Aux termes de l'article R. 414-9 du même code : " Par dérogation aux dispositions des articles R. 411-3, R. 411-4, R. 412-1, R. 412-2 et R. 611-1-1, les requérants sont dispensés de produire des copies de leur requête, de leurs mémoires complémentaires et des pièces qui y sont jointes, ainsi qu'un inventaire détaillé de ces pièces. / Chacune des pièces transmises par le requérant doit l'être par un fichier distinct à peine d'irrecevabilité de la requête. Toutes les pièces doivent porter un intitulé décrivant leur contenu de manière suffisamment explicite sous peine, après invitation à régulariser non suivie d'effet, d'être écartées des débats. / Les mêmes obligations sont applicables aux autres mémoires du requérant, sous peine pour celui-ci, après invitation à régulariser non suivie d'effet, de voir ses écritures écartées des débats. (...) ". 5. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'une demande est présentée par voie électronique par une personne physique qui n'est pas chargée de la gestion permanente d'un service public, le requérant est dispensé de produire un inventaire détaillé des pièces produites. Il doit seulement, dans l'intitulé de chaque pièce transmise par fichier distinct, décrire de manière suffisamment explicite le contenu de cette pièce. Le respect de ces dispositions s'apprécie pour chaque mémoire présenté. Il ressort des pièces du dossier de première instance que si les mémoires complémentaires, y compris le mémoire récapitulatif, ont été présentés par voie électronique, les éventuelles irrégularités touchant l'inventaire détaillé ne saurait remettre en cause la recevabilité de la demande. En outre, pour rejeter le surplus de la requête de M. B..., le tribunal administratif ne pouvait se fonder sur les dispositions des articles R. 414-1 et R. 414-3 du code de justice administrative qui sont inclus à la section 1 qui concerne les " Dispositions applicables aux personnes publiques, aux avocats et aux organismes de droit privé chargés de la gestion permanente d'un service public ". 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que le jugement attaqué du tribunal administratif de Caen, en tant qu'il a rejeté comme irrecevable le surplus de sa demande pour méconnaissance des dispositions des articles R. 414-1 et R. 414-3 du code de justice administrative, est irrégulier et à en obtenir, dans cette mesure, son annulation. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer M. B... devant le tribunal administratif de Caen pour qu'il soit à nouveau statué sur sa demande dans cette mesure. 7. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B... qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SA Enedis demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SA Enedis une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Caen du 15 octobre 2021 est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure au tribunal administratif de Caen. Article 3 : La SA Enedis versera à M. B... la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Les conclusions de la SA Enedis tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la SA Enedis. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, M. L'HIRONDELLe président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne à la ministre de la transition énergétique, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 1 N°21NT03618 2 1
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par un jugement n° 1601142 du 13 avril 2018, le tribunal administratif de Caen, après avoir reconnu la responsabilité fautive du centre hospitalier de Falaise, a condamné celui-ci à verser à M. et Mme F..., en leur qualité de responsables légaux de C... F..., la somme de 55 286,90 euros, ainsi que la somme de 204 835 euros au titre de l'assistance par tierce personne, sous déduction des prestations perçues en rapport avec le handicap de l'enfant, et jusqu'au 11ème anniversaire de C..., une rente annuelle de 12 646 euros sous la même déduction. Le tribunal a également condamné l'établissement hospitalier à verser la somme de 28 500 euros à chacun des deux parents, la somme de 12 000 euros à la jeune H... F..., sœur de C..., et celle de 8 000 euros à Mme D... F..., sa grand-mère. Il a partiellement fait droit à la demande de la CPAM de l'Orne en mettant à la charge du centre hospitalier la somme de 133 273,88 euros. Enfin la société hospitalière d'assurances mutuelles (la SHAM) a été condamnée à garantir le centre hospitalier de Falaise des condamnations ainsi prononcées à son encontre. Par un arrêt nos 18NT02285, 18NT02316, 18NT02318 du 17 juillet 2020, la cour a annulé ce jugement en tant qu'il a omis de statuer sur la rente annuelle de 1 000 euros accordée pour les dépenses de santé à venir ainsi que sur les conclusions concernant la rente relative aux dépenses devant être exposées pour les consultations à venir de médecins spécialistes, porté à 260 121,90 euros la somme que le centre hospitalier de Falaise a été condamné par le tribunal administratif de Caen à verser à M. F... et Mme A..., condamné l'établissement à verser à M. F... et Mme A..., en leur qualité de représentants légaux de C... F..., une rente annuelle de 2 360 euros ainsi qu'une rente au titre des frais d'assistance de ce dernier par tierce personne, condamné solidairement la SHAM avec le centre hospitalier au versement de ces indemnités et rentes et rejeté les requêtes de la CPAM de l'Orne et de la SHAM ainsi que les autres conclusions. Par une décision nos 444541, 444594 du 15 décembre 2021, le Conseil d'État, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt de la cour du 17 juillet 2010 en tant qu'il a statué sur la rente d'assistance pour tierce personne entre sa date de lecture et le 18ème anniversaire de C... F... et qu'il a omis de se prononcer sur les demandes des requérants présentées au titre des frais d'architecte ainsi que des intérêts moratoires et de leur capitalisation. Procédure devant la cour : I- S'agissant de l'instance enregistrée sous le n° 21NT03547 : Par un courrier enregistré le 20 décembre 2021, la société Newline Underwriting management LTD indique que seule la garantie de la SHAM est due au centre hospitalier de Falaise de sorte qu'elle n'entend pas intervenir dans le cadre de l'instance postérieure à la décision du Conseil d'État. Par un mémoire enregistré le 17 janvier 2022, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) représentée par Me Le Prado, demande à la cour : 1°) de rejeter la demande des consorts F... au titre des frais d'architecte ; 2°) de n'allouer les intérêts de droit qu'en ce qui concerne les intérêts exposés à la date de la demande préalable et de ne prévoir leur capitalisation qu'à compter du 9 septembre 2020. Elle soutient que : - le préjudice lié aux frais d'architecte n'est pas établi ; - les intérêts ne peuvent être dus qu'à compter de la demande préalable à l'exclusion des frais non encore engagés à cette date. II- S'agissant de l'instance enregistrée sous le n° 21NT03555 : Par un courrier enregistré le 22 décembre 2021, la société hospitalière d'assurance mutuelles, représentée par Me Le Prado, a déclaré se constituer devant la cour. Par une lettre enregistrée le 3 janvier 2022, la société hospitalière d'assurance mutuelles et le centre hospitalier de Falaise, représentés par Me Le Prado, indiquent ne pas maintenir leur constitution dans cette instance. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme E..., - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - les observations de Me Demailly représentant le centre hospitalier de Falaise et la SHAM. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... a été prise en charge le 15 décembre 2009 par le centre hospitalier de Falaise en vue de son accouchement. Elle a donné naissance le 16 décembre à 0 heure, après une césarienne réalisée en urgence, à un garçon, C... F.... Cet enfant, ayant souffert d'une anoxie sévère en période périnatale, a été pris en charge immédiatement par un pédiatre puis transféré au service de néonatalogie de Caen à la suite de crises de convulsions. Une IRM réalisée dès les premiers jours a mis en évidence des lésions très sévères du cerveau. M. F... et Mme A... ont adressé le 9 décembre 2015 au centre hospitalier de Falaise une demande tendant à la réparation des préjudices subis par eux et leur enfant. Une seconde réclamation préalable a également été présentée le 6 juin 2016 pour la jeune H... F..., sœur du jeune C... et Mme D... F..., sa grand-mère. Ces demandes ayant été rejetées, ils ont saisi le tribunal administratif de Caen d'un recours indemnitaire. 2. Par un jugement du 13 avril 2018, le tribunal administratif de Caen, après avoir reconnu la responsabilité pour faute du centre hospitalier de Falaise, l'a condamné à verser à M. F... et Mme A..., en leur qualité de responsables légaux de C... F..., la somme de 55 286,90 euros outre la somme de 204 835 euros au titre spécifique du besoin d'assistance par tierce personne, sous déduction des prestations perçues en rapport avec le handicap de l'enfant, ainsi que, jusqu'au 11ème anniversaire de C..., une rente annuelle de 12 646 euros sous la même déduction. Il a également condamné l'établissement hospitalier à verser la somme de 28 500 euros à chacun des deux parents, la somme de 12 000 euros à Cassandre F..., sœur de C..., et celle de 8 000 euros à Mme D... F..., sa grand-mère. Il a partiellement fait droit à la demande de la CPAM de l'Orne en mettant à la charge du centre hospitalier la somme de 133 273,88 euros au titre des débours exposés par elle. Enfin, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) a été condamnée à garantir le centre hospitalier de Falaise des condamnations prononcées à son encontre. 3. Par un arrêt nos 18NT02285, 18NT02316, 18NT02318 du 17 juillet 2020, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appels de la CPAM de l'Orne, de la SHAM et de M. F... et Mme A..., annulé ce jugement en tant qu'il a omis de statuer sur la rente annuelle de 1 000 euros accordée pour les dépenses de santé à venir ainsi que sur les conclusions concernant la rente relative aux dépenses devant être exposées pour les consultations à venir de médecins spécialistes, porté à 260 121,90 euros la somme que le centre hospitalier de Falaise a été condamné par le tribunal administratif de Caen à verser à M. F... et Mme A..., condamné l'établissement à leur verser, en leur qualité de représentants légaux de C... F..., une rente annuelle de 2 360 euros ainsi qu'une rente au titre des frais d'assistance de ce dernier par tierce personne, condamné solidairement la SHAM et le centre hospitalier au versement de ces indemnités et rentes et rejeté les requêtes de la CPAM de l'Orne et de la SHAM ainsi que les autres conclusions présentées devant elle par le centre hospitalier de Falaise, les consorts F... et la CPAM de l'Orne. 4. Par une décision nos 444541,444594 du 2 décembre 2021, le Conseil d'État, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt en tant qu'il statue sur la rente d'assistance pour tierce personne entre sa date de lecture et le 18ème anniversaire de C... et qu'il omet de se prononcer sur les demandes des requérants au titre des frais d'architecte ainsi que des intérêts moratoires et de leur capitalisation et a, dans cette mesure renvoyé devant la cour l'affaire qui porte désormais les nos 21NT03547 et 21NT03555. 5. Les requêtes nos 21NT03547 et n° 21NT03555 présentées respectivement d'une part, par M. G... F... et Mme B... A..., agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité de représentants légaux de leur fils C... F..., et d'autre part, par la société hospitalière d'assurances mutuelles et le centre hospitalier de Falaise sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt. 6. Par son mémoire enregistré le 3 janvier 2022, la SHAM et le centre hospitalier de Falaise, en indiquant ne pas maintenir leur constitution, doivent être regardés comme se désistant purement et simplement de l'instance présentée sous le n° 21NT03555. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte. Sur les honoraires d'architecte : 7. Si M. F... et Mme A... produisent un courriel du 26 février 2015 d'un architecte mentionnant qu'il est disponible " pour évaluer les besoins d'adaptation et d'accessibilité " du logement dans lequel réside le jeune C..., qu' " un déplacement sur place me semble indispensable " et que le coût de son intervention est de l'ordre de 2 000 / 2 500 euros, les intéressés, ne justifient ni s'être acquittés de tout ou partie de ces honoraires d'architecte, ni même avoir pris contact avec ce professionnel en vue d'examiner les conditions dans lesquelles le logement familial devrait être aménagé afin de le rendre plus adapté aux besoins de leur fils. 8. Dans ces conditions, et alors au demeurant que les intéressés avaient " réservé " le poste de préjudice futur et éventuel lié à l'adaptation du logement, le préjudice lié aux honoraires d'architecte ne peut être regardé comme établi. Les conclusions présentées à ce titre par M. F... et Mme A... ne peuvent qu'être rejetées. Sur les intérêts et leur capitalisation : 9. Les intérêts moratoires, dus en application de l'article 1153 du code civil, lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue à l'administration ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine. D'autre part, pour l'application des dispositions de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière, sans qu'il soit toutefois besoin d'une nouvelle demande à l'expiration de ce délai. De même, la capitalisation s'accomplit à nouveau, le cas échéant, à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande. 10. Il résulte de l'instruction que le centre hospitalier de Falaise a été saisi, le 9 décembre 2015, d'une réclamation indemnitaire préalable présentée par M. F... et Mme A... aux fins de réparation des préjudices subis tant par le jeune C... que par eux-mêmes. 11. Il s'ensuit que les sommes que le centre hospitalier de Falaise a été condamné à verser à M. F... et à Mme A... doivent être assorties des intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2015, date de réception par le centre hospitalier de la demande relative aux préjudices subis par M. C... F..., M. G... F... et Mme B... A.... 12. La capitalisation des intérêts a été demandée dans le mémoire présenté le 10 mars 2020. A cette date il était dû au moins une année d'intérêts. Par suite, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter de cette dernière date puis à chaque échéance annuelle intervenue depuis lors. DECIDE : Article 1er : Il est donné acte du désistement d'instance du centre hospitalier de Falaise et de la SHAM dans l'instance n° 21NT03547. Article 2 : Les sommes mises à la charge du centre hospitalier de Falaise et de la SHAM à l'égard de M. F... et de Mme A... porteront intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2015 et seront capitalisés à compter du 10 mars 2020 puis à chaque échéance annuelle. Article 3 : Le surplus des conclusions des consorts F... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... F..., à Mme B... A..., au centre hospitalier de Falaise, à la société hospitalière d'assurances mutuelles, à la société Newline Underwriting management ltd et à la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, C. E... Le président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de la prévention, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 Nos 21NT03547, 21NT03555
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 9 mars 2020 par laquelle le directeur des ressources humaines du centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen Normandie lui a infligé un blâme. Par un jugement n° 2000883 du 9 septembre 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 9 novembre 2021, Mme A... B..., représentée par Me Launay, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 9 septembre 2021 ; 2°) d'annuler la décision du directeur des ressources humaines du CHU de Caen Normandie du 9 mars 2020 ; 3°) de mettre à la charge du CHU de Caen Normandie le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : * la règle non bis in idem a été méconnue dès lors que la mesure de changement d'affectation prise à son égard avant le prononcé du blâme présente le caractère d'une sanction et repose sur les mêmes faits ; elle a ainsi été sanctionnée à deux reprises pour les mêmes faits ; * la matérialité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie ; l'enquête administrative a présenté un caractère partiel et partial ; les difficultés d'organisation du service des urgences sont à l'origine d'un climat de tension dans les relations professionnelles ; aucun manquement à son obligation de dignité et de respect n'a été commis ; * la procédure suivie a méconnu l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 et l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 dès lors que toutes les fiches d'entretien d'agents ne figuraient pas à son dossier administratif. Par un mémoire en défense enregistré le 23 février 2022, le centre hospitalier universitaire de Caen Normandie, représenté par Me Lacroix, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le moyen tiré du vice de procédure est irrecevable, faute d'avoir été soulevé devant le tribunal ; - aucun autre moyen n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi du 22 avril 1905 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - et les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B... est employée au sein du centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen Normandie en qualité d'infirmière et affectée au service des urgences. A la suite de rapports d'incidents avec ses collègues, l'intéressée a été reçue par le directeur des ressources humaines de l'hôpital en entretien disciplinaire le 21 août 2019. Par un courriel du 6 septembre 2019, le directeur des ressources humaines a décidé d'affecter Mme B... au sein de l'équipe de suppléants institutionnels à compter du 23 septembre 2019. Par une décision du 15 mars 2020, la même autorité lui a infligé un blâme. Mme B... relève appel du jugement n° 2000883 du 9 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par le CHU de Caen Normandie au moyen tiré d'un vice de procédure : 2. Mme B... n'a invoqué devant le tribunal administratif que des moyens relevant de la légalité interne de la décision contestée du 15 mars 2020. Si, devant le juge d'appel, la requérante fait valoir qu'en prenant cette décision, le directeur du centre hospitalier universitaire de Caen Normandie aurait commis un vice de procédure à raison des conditions dans lesquelles l'enquête administrative préalable au prononcé du blâme s'est déroulée, cette prétention, fondée sur une cause juridique distincte et qui n'est pas d'ordre public, constitue une demande nouvelle irrecevable en appel. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision prononçant un blâme à l'encontre de Mme B... doit, ainsi que le relève le CHU, être écarté comme irrecevable. En ce qui concerne la légalité interne : 3. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet de 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. ". Aux termes de l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / L'avertissement, le blâme, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours (...) ". 4. Il appartient au juge administratif, saisi d'une sanction disciplinaire prononcée à l'encontre d'un agent public, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. 5. Une décision d'affectation d'un agent dans l'intérêt du service constitue une sanction déguisée dès lors qu'il est établi que l'auteur de cet acte a eu l'intention de sanctionner l'agent et que cette décision a porté atteinte à la situation professionnelle de ce dernier. En l'espèce, la décision de changement d'affectation dans l'intérêt du service prise le 20 novembre 2019, qui ne revêt pas le caractère d'une sanction déguisée, ainsi que l'a jugé la cour dans son arrêt n° 21NT02093 du 29 avril 2022, ne faisait pas, par elle-même, obstacle à ce que l'employeur de Mme B... pût prononcer à son encontre une sanction disciplinaire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de la règle non bis in idem ne peut qu'être écarté. 6. Pour décider d'infliger un blâme à Mme B..., le directeur des ressources humaines du CHU de Caen Normandie s'est fondé sur la circonstance que la requérante a eu, à plusieurs reprises, un comportement inadapté et tenu des propos inacceptables envers ses collègues, générant ainsi un climat conflictuel au sein du service, ces propos constituant un manquement à l'obligation de dignité et entravant le bon fonctionnement du service. 7. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des rapports établis les 30 avril, 29 et 30 juillet 2019 par la cadre de santé du CHU à la suite de signalements effectués par des agents hospitaliers, exerçant des fonctions diverses, appelés à devoir coopérer avec Mme B... lors de la prise en charge des patients, que le comportement de Mme B... se caractérise par d'importantes difficultés relationnelles avec les agents notamment par l'expression de propos virulents, irrespectueux et vexatoires à l'égard des membres des équipes médicales. La teneur des mentions figurant dans ces rapports est corroborée par les termes des entretiens individuels que le CHU a réalisés, au cours de l'été 2019, avec plusieurs agents directement concernés par les faits en cause. Cette attitude s'est révélée gravement déstabilisante pour les agents concernés, pouvant d'ailleurs aller jusqu'à un refus de travailler avec l'intéressée et créant un climat de tension. 8. Dans ces conditions, à supposer même que le SAMU connaissait des problèmes d'organisation ou que Mme B... disposait d'importantes qualités professionnelles et qu'elle était investie dans l'accomplissement de sa mission, ainsi qu'il ressort notamment de la teneur des attestations de soutiens émanant de certains de ses collègues, au demeurant rédigées en termes très généraux sans se référer aux évènements particuliers évoqués dans les rapports et compte rendus d'entretien susmentionnés, les faits sur lesquels s'est fondé le CHU de Caen pour prononcer la sanction en litige sont établis et étaient de nature, eu égard à leur caractère fautif, à justifier la sanction du blâme qui lui a été infligée. 9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 10. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du CHU de Caen Normandie qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme B... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le CHU de Caen Normandie et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Mme B... versera au CHU de Caen Normandie la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au centre hospitalier universitaire de Caen Normandie. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, C. C... Le président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne à la ministre santé et de la prévention, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03127
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Vu la procédure suivante : Procédures contentieuses antérieures : M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 9 février 2021 par lequel le préfet du Morbihan a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, et l'a obligé à remettre son passeport ainsi que de se présenter deux fois par semaine au commissariat de police de Vannes. Par un jugement n° 2102136 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 10 décembre 2021, M. B... C..., représenté par Me Roilette, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 8 juillet 2021 du tribunal administratif de Rennes ; 2°) d'annuler l'arrêté du 21 août 2021 du préfet du Morbihan ; 3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Morbihan de lui délivrer un titre de séjour dès la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire et sous la même condition d'astreinte, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique. Il soutient que : * En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour : ­ la décision contestée, qui ne mentionne pas dans ses visas la délégation de signature consentie, a été prise par une autorité incompétente ; ­ elle est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ; ­ en l'absence de consultation de la commission du titre de séjour, cette décision est entachée d'un vice de procédure ; ­ elle est entachée d'une erreur de fait et a été prise en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, compte tenu de la durée de ses séjours en France et de la présence dans ce pays de sa fille de nationalité française ; ­ elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale ; * En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : ­ la décision contestée, qui ne mentionne pas dans ses visas la délégation de signature consentie, a été prise par une autorité incompétente ; ­ elle est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ; ­ elle méconnaît les dispositions du 4° et du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; ­ elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale ; * En ce qui concerne la décision le soumettant à des mesures de contrôle : ­ elle est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ; ­ elle est illégale du fait de l'illégalité dont est entachée la décision portant obligation de quitter le territoire français ; ­ elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation faute pour l'autorité administrative d'avoir pris en compte sa situation personnelle ; ­ elle est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'il doit se rendre au commissariat de Vannes et non à la gendarmerie de Questembert. Par un mémoire, enregistré le 29 avril 2022, le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des autres moyens de la requête n'est fondé. M. C... été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 décembre 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu ­ la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ­ le code civil ; ­ le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; ­ le code des relations entre le public et l'administration ; ­ le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. L'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 4. M. B... C..., ressortissant turc né le 3 février 1965, est entré en France, selon ses déclarations, en janvier 2004. De sa relation avec Mme G..., est née le 20 juillet 2004, une enfant de nationalité française. De ce fait, un titre de séjour en sa qualité de parent d'enfant français lui a été délivré le 11 août 2004. Par un arrêté du 20 décembre 2007, devenu définitif, le préfet du Morbihan a refusé de lui renouveler son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. M. C... a quitté le territoire français en 2008 et est revenu en France, selon ses déclarations, le 26 mai 2010. Sa situation administrative a été régularisée le 18 septembre 2012 puis le requérant a bénéficié de titres de séjour valables en 2012, 2013 et 2016, puis d'une carte de séjour pluriannuelle de 2017 à 2019, dont il a demandé le renouvellement le 14 novembre 2019. Par un arrêté du 9 février 2021, le préfet du Morbihan a refusé de renouveler ce titre de séjour, a obligé M. C... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, l'obligeant également à remettre l'original de son passeport et à se présenter deux fois par semaine au commissariat de police de Vannes. M. C... relève appel du jugement du tribunal administratif de Rennes du 8 juillet 2021 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne le moyen commun de l'incompétence du signataire des décisions attaquées : 5. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 31 janvier 2020, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Morbihan a donné délégation à Mme F... E..., cheffe du bureau des étrangers et de la nationalité, à l'effet de signer les décisions relevant de son bureau, lesquelles comprennent notamment les refus de carte de séjour, les obligations de quitter le territoire avec ou sans délai de départ volontaire et les décisions fixant le pays de renvoi. Par suite, et alors même que l'arrêté contesté ne vise pas l'arrêté de délégation de signature, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français doit être écarté. En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de titre de séjour : 6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent [...] ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation [...] doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". 7. La décision contestée vise notamment les 6° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement desquels le requérant a sollicité le renouvellement de son titre de séjour ainsi que les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant. Elle précise, par ailleurs, la situation de M. C... en France, en particulier la durée de ses séjours ainsi que les liens que l'intéressé a pu garder avec sa famille présente en France, notamment son fils A..., né le 15 septembre 1982, titulaire d'une carte de résident, et sa fille D..., de nationalité française, née le 20 juillet 2004. La décision contestée indique, en outre, alors que l'intéressé avait été invité à fournir des justificatifs, que M. C... n'a pas été en mesure de justifier de sa participation à l'éducation et à l'entretien de sa fille. Le préfet a également pris en compte la circonstance que l'intéressé ne justifiait pas de ses conditions d'existence, qu'il ne maîtrisait pas la langue française, qu'il avait été condamné pour conduite d'un véhicule à moteur et qu'il n'établissait pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où il se rend régulièrement. Par suite, cette décision, qui comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée. 8. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à ce qui a été dit au point précédent, que le préfet du Morbihan n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. C.... 9. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". L'article R. 313-21 du même code précise que : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. ". 10. M. C..., soutient que la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour est entachée d'une erreur de fait pour ne pas avoir tenu compte de la durée de son séjour en France avant 2010, et méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie de liens intenses, stables et personnels en France, du fait notamment de la présence de sa fille D..., de nationalité française, et celles des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de la durée de son séjour en France et de la présence, outre de sa fille D... et de la mère de celle-ci, de son fils A... et d'une nièce. 11. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que si M. C... a effectué un premier séjour en France, de 2004 à 2008, il a fait l'objet d'un arrêté de refus de séjour portant obligation de quitter le territoire français, notifié le 20 décembre 2007. En raison de cette mesure, il est retourné en Turquie où il y a séjourné entre 2008 et 2010. S'il est, de nouveau, entré en France en mai 2010, sa situation administrative n'a été régularisée qu'à compter du 18 septembre 2012. S'il a obtenu des cartes de séjour temporaire en 2012 et 2013, il est retourné en Turquie à compter du 27 janvier 2015, ainsi qu'il résulte du courriel du consulat général de France à Istanbul du 29 décembre 2015. C'est dans ces conditions, qu'après avoir obtenu du service consulaire un visa de retour, que M. C... a été mis en possession en 2016 d'un titre de séjour puis d'une carte de séjour pluriannuelle valable de 2017 à 2019. Par ailleurs, il résulte des attestations de la mère de Mme D... C... du 10 juillet 2016 et du 14 novembre 2019, que sa fille voit l'intéressé tous les ans lorsque ce dernier est en Turquie et un week-end sur deux lorsqu'il est en France (attestation du 10 juillet 2016) ou quand il le souhaite (attestation du 14 novembre 2019). Il résulte également de ces mêmes attestations, alors que M. C... ne justifie d'aucun emploi, ni d'aucune ressource, qu'il ne participe pas à l'entretien et à l'éducation de sa fille, l'intéressé n'ayant au demeurant pas donné de suite à la demande qui lui avait été faite le 14 février 2020 par le service des étrangers de la préfecture du Morbihan de présenter les justificatifs établissant cette contribution. L'attestation non datée de Mme D... C..., qui se borne seulement à préciser qu'elle est hébergée chez son frère en même temps que son père le temps de sa formation à Vannes, n'établit pas cette participation. Par suite, le requérant n'établit pas l'intensité des liens qui l'unit à sa fille et à la mère de cette dernière, ni au demeurant à sa nièce, ni l'impossibilité qu'ils puissent rencontrer sa famille en Turquie où il retourne régulièrement. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de fait et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être qu'écarté. 12. En dernier lieu, M. C... reprend en appel le moyen, déjà invoqué en première instance, tiré du vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour. Il y a lieu d'écarter ce moyen, à l'appui duquel il n'apporte aucune argumentation ni élément nouveaux, par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 10 et 11 de leur décision. En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire : 13. En premier lieu, en application du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, la décision par laquelle le préfet a obligé M. C... à quitter le territoire français, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte, dès lors qu'elle a été prise concomitamment à la décision de refus de titre de séjour, laquelle est, tel qu'il a été dit au point 4 du présent arrêt, suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ladite décision et de l'absence d'examen particulier de la situation du requérant ne peut qu'être écarté. 14. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ; / (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (...) ". Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. " 15. D'une part, il est constant, ainsi qu'il a été dit au point 1, que si M. C... est entré en France en 2010, sa situation n'a été régularisée qu'en septembre 2012. De plus, l'intéressé a quitté le territoire français en 2015 et a présenté, au consulat général de France à Istanbul, ainsi qu'il résulte du courriel précité de ce service du 29 décembre 2015, un récépissé de demande de titre de séjour dont la validité était expirée depuis le 20 décembre 2014. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'à la date de la décision contestée, il justifiait, pour l'application du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une présence régulière en France d'au moins dix ans. 16. D'autre part, il résulte des énonciations de la décision en litige, qui ne sont pas utilement contestées par le requérant, que M. C... est tenu, selon un jugement du 3 mai 2006 du tribunal de grande instance de Lorient, de verser à la mère de Mme D... C... une pension alimentaire d'un montant de 200 euros. Il n'établit cependant pas, ainsi qu'il a été dit au point 8, participer à l'entretien et à l'éducation de sa fille de nationalité française en versant régulièrement cette pension alimentaire, ni, au surplus, qu'il y contribuerait autrement que par le versement de cette pension. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être qu'écarté. 17. En troisième et dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 8 ci-dessus. En ce qui concerne la décision portant obligation de remise du passeport et de présentation aux services de police : 18. Aux termes de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé en application du II de l'article L. 511-1 peut, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français, être astreint à se présenter à l'autorité administrative ou aux services de police ou aux unités de gendarmerie pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ (...) ". Aux termes de l'article R. 513-3 du même code : " L'autorité administrative désigne le service auprès duquel l'étranger doit effectuer les présentations prescrites et fixe leur fréquence qui ne peut excéder trois présentations par semaine ". Aux termes de l'article R. 513-4 du même code : " L'étranger qui bénéficie d'un délai de départ volontaire en application du II de l'article L. 511-1 ou du sixième alinéa de l'article L. 511-3-1 peut être tenu de remettre à l'autorité administrative qui lui a accordé ce délai l'original de son passeport ou de tout autre document d'identité ou de voyage en sa possession en échange d'un récépissé valant justification d'identité sur lequel est portée la mention du délai accordé pour son départ ". 19. En premier lieu, si la remise du passeport ou de tout autre document d'identité ou de voyage, qui peut être demandée lors de la présentation, aux autorités de police notamment, à laquelle un étranger est susceptible d'être astreint sur le fondement de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a le caractère d'une décision distincte de l'obligation de quitter le territoire français, cette décision, qui tend à assurer que l'étranger accomplit les diligences nécessaires à son départ dans le délai qui lui est imparti, concourt à la mise en œuvre de l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, si le code des relations entre le public et l'administration impose que cette décision soit motivée au titre des mesures de police, cette motivation peut, outre la référence à l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se confondre avec celle de l'obligation de quitter le territoire français assortie d'un délai de départ volontaire. En l'espèce, la décision contestée vise les dispositions de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la décision portant obligation de quitter le territoire français est, ainsi qu'il a été dit au point 10, suffisamment motivée. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision par laquelle il lui a été fait obligation de remettre son passeport et de se présenter aux services de police et de l'absence d'examen particulier de la situation du requérant ne peut qu'être écarté. 20. En deuxième lieu, eu égard à ce qui vient d'être dit, l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, soulevée à l'appui de la contestation de la décision portant obligation de remise du passeport et obligation de présentation devant les services de police, ne peut qu'être écartée. 21. En troisième lieu, il résulte des dispositions précitées au point 15 que la décision par laquelle le préfet astreint l'étranger à une obligation de présentation et de remise de son passeport tend à garantir qu'il accomplira les diligences nécessaires à son départ dans le délai qui lui a été imparti en vue de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, en se bornant à faire valoir que le préfet n'aurait pas pris en compte sa situation personnelle, M. C... n'établit pas que le préfet du Morbihan aurait, en lui imposant de remettre l'original de son passeport et de se présenter deux fois par semaine au commissariat de police de Vannes, entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à l'objet de cette mesure. De même, M. C..., qui déclare résider chez son fils A... à Vannes, n'est pas fondé à soutenir que la décision serait entachée d'une erreur de fait en désignant le commissariat situé dans cette commune. 22. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par le requérant à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée, pour son information, au préfet du Morbihan. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, M. L'HIRONDEL Le président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 2 N° 21NT03472
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Vu la procédure suivante : I. Procédure contentieuse antérieure : M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 23 octobre 2019 par laquelle la cheffe du service de la sécurité de défense et des systèmes d'informations de la direction générale de l'armement du ministère des armées a retiré son habilitation d'accès aux informations et supports classifiés au niveau confidentiel défense et d'enjoindre à la ministre des armées de lui restituer cette habilitation. Par un jugement n° 1902889 du 9 juillet 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2021, M. B... A..., représenté par Me Teyssier, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1902889 du tribunal administratif de Caen du 9 juillet 2021 ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 23 octobre 2019 par laquelle la cheffe du service de la sécurité de défense et des systèmes d'informations de la direction générale de l'armement du ministère des armées a retiré son habilitation d'accès aux informations et supports classifiés au niveau confidentiel défense ; 3°) d'enjoindre à la ministre des armées de lui restituer cette habilitation ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de deux mille cinq cents euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision de retrait de l'habilitation n'a pas été notifiée conformément aux articles 26 et 31 de l'arrêté du 30 novembre 2011 portant approbation de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale ; la décision ne lui pas été notifiée ; - la décision de retrait n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire en méconnaissance des dispositions des articles L. 121-1, L. 122-1 et L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration ; s'agissant d'une décision individuelle prise en considération de sa personne, l'administration devait au minimum procéder à une enquête contradictoire pour l'entendre sur les faits reprochés ; il n'est pas démontré que la mise en œuvre d'une procédure contradictoire aurait porté atteinte au secret de la défense nationale ; il n'y a eu aucune demande de retrait de son habilitation ; - la décision n'est pas motivée en méconnaissance des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration alors qu'il s'agit du retrait d'une décision créatrice de droits ; l'exception résultant de l'article L. 311-5 du code des relations entre le public et l'administration est seulement visée au 7° de l'article L. 211-2 du code et non au 4° de l'article, relatif au retrait d'une décision créatrice de droits ; l'article L. 311-5 du code des relations entre le public et l'administration ne vise que la communication de documents administratifs ; il n'est pas établi que la décision ne pouvait être motivée par des éléments ne portant pas atteinte au secret défense ; - les dispositions de l'article 31 de l'arrêté du 30 novembre 2011 ont été méconnues ; la décision repose sur des faits erronés puisqu'il conteste avoir accédé à une zone interdite sans autorisation et en dehors de son habilitation : o il a l'autorisation d'accéder au bâtiment Hugues House sans aucune restriction à l'intérieur du bâtiment en compagnie d'une délégation de représentants du personnel sur autorisation du 22 mars 2018, demandée par un membre de cette délégation ; o à supposer qu'il n'ait pas obtenu l'autorisation le 22 mars 2018, il a obtenu les autorisations en temps réel pour chacune des zones ; les officiers de sécurité, sous la direction de la société Naval Group, ont systématiquement autorisé ses accès en les validant à distance ; o il ne peut lui être reproché d'avoir accédé à des zones abritant des informations " confidentiel défense " puisqu'il est habilité " confidentiel défense " ; dès lors qu'il accomplissait sa mission en tant que représentant du personnel, l'accès au site s'est fait dans l'exercice de sa fonction ; l'article 6 de l'instruction ne vise que l'accès à une information classifiée et non l'autorisation d'accès à une zone ; - la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation compte tenu de ses compétences, de son professionnalisme et de ce qu'aucun élément de sa vie personnelle, sociale ou professionnelle ne fait obstacle au maintien de son habilitation ; l'administration ne démontre pas qu'il ne remplit plus les conditions nécessaires à la délivrance de l'habilitation en raison de l'apparition d'éléments de vulnérabilité ; son comportement ne révèle aucun risque pour la défense et la sécurité nationale, ce que démontre en outre le délai entre les faits et la décision contestée ; il a usé de ses prérogatives en qualité de représentant du personnel, alors que l'article L. 2315-14 du code du travail lui garantit une liberté de circulation ; - la décision est entachée de détournement de pouvoir et vise à limiter l'activité des membres du syndicat CGT sur les sites de la société Naval Group. Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. II. Procédure contentieuse antérieure : M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 28 août 2020 par laquelle la société Naval Group a procédé au retrait de ses autorisations d'accès à son site de Cherbourg et d'enjoindre à la société Naval Group de lui restituer ses autorisations d'accès. Par un jugement n° 2001928 du 9 juillet 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2021, M. B... A..., représenté par Me Teyssier, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2001928 du tribunal administratif de Caen du 9 juillet 2021 ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 28 août 2020 par laquelle la société Naval Group a procédé au retrait de ses autorisations d'accès à son site de Cherbourg ; 3°) d'enjoindre à la société Naval Group de lui restituer ses autorisations d'accès dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de la société Naval Group la somme de deux mille euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, organisant une procédure contradictoire préalable, ont été méconnues ; la société Naval Group n'a pas fait droit à sa demande du 12 août 2020 de connaitre les documents fondant le retrait de ses droits d'accès ; - le délai d'injonction de deux mois prononcé par le tribunal administratif de Caen dans son jugement du 18 juin 2020 n'a pas été respecté en méconnaissance de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ; - la société Naval Group n'a aucune autorité à son égard puisqu'il intervient en qualité de préposé de la société C..., à l'encontre de laquelle seule la société Naval Group pouvait intervenir en application des articles 95 à 114 de l'arrêté du 30 novembre 2011 ; la décision est entachée d'erreur de droit ; - la décision est entachée de détournement de pouvoir et ne repose sur aucun motif sérieux et réel : o la société Naval Group, qui a entendu se fonder sur les articles 23 et suivants de l'arrêté du 30 novembre 2011, ne mentionne aucun élément de vulnérabilité ; o la procédure prévue par l'arrêté du 30 novembre 2011 n'a pas été respectée puisque ni le service enquêteur, ni l'officier de sécurité n'ont indiqué qu'il ne remplissait plus les conditions nécessaires pour la délivrance de l'habilitation en méconnaissance des articles 31, 33 et 103 de l'arrêté ; la société a donc contourné les garanties prévues par la loi en cas de retrait d'agrément ou d'habilitation ; o aucune faute ni aucun motif réel et sérieux ne sont établis ; il avait sollicité une autorisation à la direction de la société Naval Group via sa hiérarchie ; les représentants du personnel ont eu l'autorisation d'accéder au site, l'autorisation valant pour l'ensemble du personnel de la délégation sans distinction ; il était en outre habilité " confidentiel défense " ; il se trouvait sur le site pour l'exercice de ses fonctions de représentant du personnel, avec la liberté de déplacement garantie par les dispositions des articles L. 2143-20, L. 2315-5 et L. 2325-11 du code du travail ; à supposer qu'il n'ait pas obtenu l'autorisation le 22 mars 2018, il a obtenu les autorisations en temps réel pour chacune des zones ; il n'est pas établi qu'il serait entré dans une zone où il n'était pas habilité ; aucune consigne ne lui a été donnée délimitant précisément les zones, à l'intérieur du bâtiment, où il n'aurait pas eu le droit d'accéder ; le délai entre les faits et le retrait des droits d'accès démontre l'absence de motif réel et sérieux ; o la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; o la décision a pour objet de sanctionner les élus du syndicat CGT ; - la décision de retrait de l'habilitation " confidentiel défense " sur laquelle la société Naval Group fonde sa décision est contestée devant la juridiction administrative et a été adoptée plus de dix mois avant la décision de la société Naval Group ; le retrait de l'habilitation n'est pas une des causes possibles de retrait des droits d'accès fixées par l'article 33 de l'arrêté du 30 novembre 2011 ; l'ensemble du site ne nécessite en outre pas une telle habilitation. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2022, la société Naval Group, représentée par Me Boivin, conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle ne pouvait que constater que M. A... était dépourvu d'habilitation depuis la décision de la ministre des armées du 23 octobre 2019 ; - les moyens tirés du dépassement du délai d'exécution laissé par le jugement du tribunal administratif de Caen du 18 juin 2020 et la méconnaissance des articles 95 à 114 de l'instruction générale n° 1300, ou de l'article 67 de la même instruction, sont inopérants ; - les autres moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 10 février 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er mars 2022. Par une lettre, enregistrée le 14 mars 2022, la ministre des armées a demandé la mise hors de cause de l'Etat. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - le code de la défense ; - le code pénal ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code du travail ; - l'arrêté du 30 novembre 2011 portant approbation de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère, - et les conclusions de M. Pons, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Les requêtes n° 21NT02520 et 21NT02532, présentées pour M. A..., présentent à juger des questions connexes et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par un arrêt commun. 2. M. A... exerce les fonctions d'agent de sécurité au sein de la société C...depuis le mois de novembre 2004 et est affecté sur le site de la société Naval Group situé à Cherbourg (Manche), affectation pour laquelle il bénéficiait d'une habilitation " confidentiel-défense ". Par une décision du 23 octobre 2019, la cheffe du service de la sécurité de défense et des systèmes d'informations de la direction générale de l'armement du ministère des armées a retiré son habilitation d'accès aux informations et supports classifiés au niveau confidentiel défense. M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler cette décision et d'enjoindre à la ministre des armées de lui restituer son habilitation. 3. Par ailleurs, par une décision du 23 octobre 2018, l'officier de sécurité adjoint du site de Cherbourg, au nom de la société Naval Group, a retiré à M. A... ses droits d'accès sur le site de Cherbourg. Par un jugement du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Caen a annulé cette décision au motif de l'incompétence de son auteur et a enjoint à la société Naval Group de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois. Par une décision du 28 août 2020, la société Naval Group a, de nouveau, retiré les droits d'accès de M. A... au site de Cherbourg. M. A... a saisi le tribunal administratif de Caen d'une seconde demande tendant à l'annulation de la décision du 28 août 2020. Il relève appel des jugements du 9 juillet 2021 par lesquels le tribunal administratif de Caen a rejeté ses demandes dirigées contre les décisions du 23 octobre 2019 et du 28 août 2020. Sur le bien-fondé des jugements attaqués : En ce qui concerne le retrait d'habilitation du 23 octobre 2019 : 4. Aux termes de l'article L. 2311-1 du code de la défense : " Les règles relatives à la définition des informations concernées par les dispositions du présent chapitre sont définies par l'article 413-9 du code pénal ". Par ailleurs, aux termes de l'article 413-9 du code pénal : " Présentent un caractère de secret de la défense nationale au sens de la présente section les procédés, objets, documents, informations, réseaux informatiques, données informatisées ou fichiers intéressant la défense nationale qui ont fait l'objet de mesures de classification destinées à restreindre leur diffusion ou leur accès. / Peuvent faire l'objet de telles mesures les procédés, objets, documents, informations, réseaux informatiques, données informatisées ou fichiers dont la divulgation ou auxquels l'accès est de nature à nuire à la défense nationale ou pourrait conduire à la découverte d'un secret de la défense nationale. / Les niveaux de classification des procédés, objets, documents, informations, réseaux informatiques, données informatisées ou fichiers présentant un caractère de secret de la défense nationale et les autorités chargées de définir les modalités selon lesquelles est organisée leur protection sont déterminés par décret en Conseil d'Etat ". L'article R. 2311-2 du code de la défense, dans sa rédaction applicable, dispose que : " Les informations et supports classifiés font l'objet d'une classification comprenant trois niveaux : / 1° Très Secret-Défense ; / 2° Secret-Défense ; /3° Confidentiel-Défense ". Par ailleurs, l'article R. 2311-3 du même code, dans sa rédaction applicable, dispose que : " (...) Le niveau Confidentiel-Défense est réservé aux informations et supports dont la divulgation est de nature à nuire à la défense nationale ou pourrait conduire à la découverte d'un secret de la défense nationale classifié au niveau Très Secret-Défense ou Secret-Défense ". 5. Aux termes de l'article 31 " Fin de l'habilitation " de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale, approuvée par l'arrêté du 30 novembre 2011 alors en vigueur : " (...) 3. Retrait d'habilitation : / La décision d'habilitation ne confère pas à son bénéficiaire de droit acquis à son maintien. L'habilitation peut être retirée en cours de validité ou à l'occasion d'une demande de renouvellement si l'intéressé ne remplit plus les conditions nécessaires à sa délivrance, ce qui peut être le cas lorsque des éléments de vulnérabilité apparaissent, signalés par exemple par : / -le service enquêteur ; / -le supérieur hiérarchique ou l'officier de sécurité concerné, à la suite d'un changement de situation ou de comportement révélant un risque pour la défense et la sécurité nationale. / La décision de retrait est notifiée à l'intéressé dans les mêmes formes que le refus d'habilitation, décrites à l'article 26 de la présente instruction, sans que les motifs lui soient communiqués s'ils sont classifiés. L'intéressé est informé des voies de recours et des délais qui lui sont ouverts pour contester cette décision ". 6. En premier lieu, les conditions de notification d'une décision administrative sont sans incidence sur sa légalité. Par suite, le moyen tiré de l'absence de notification du retrait de l'habilitation de M. A... conformément aux articles 26 et 31 de l'instruction interministérielle n° 1300 doit être écarté comme inopérant. 7. En deuxième lieu, l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 (...) ". Aux termes de l'article L. 311-5 du même code : " Ne sont pas communicables : (...) / 2° Les autres documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte : / b) Au secret de la défense nationale (...) ". Par ailleurs, l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300 dispose que : " (...) La décision d'habilitation ne confère pas à son bénéficiaire de droit acquis à son maintien (...) ". 8. La décision par laquelle le ministre en charge de la défense avait conféré à M. A... une habilitation " confidentiel défense " n'étant pas une décision créatrice de droits, ainsi que le rappelle l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que la décision du 23 octobre 2019 portant retrait de cette habilitation devait être motivée en application du 4° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par ailleurs, il résulte de la combinaison des dispositions du 7° de l'article L. 211-2 et de l'article L. 311-5 de ce code que les décisions qui refusent ou retirent l'habilitation " confidentiel défense " sont au nombre de celles dont la communication des motifs est de nature à porter atteinte au secret de la défense nationale. Il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision du 23 octobre 2019 doit être écarté. 9. En troisième lieu, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (...) ". Enfin aux termes de l'article L. 122-2 du même code : " Les mesures mentionnées à l'article L. 121-1 à caractère de sanction ne peuvent intervenir qu'après que la personne en cause a été informée des griefs formulés à son encontre et a été mise à même de demander la communication du dossier la concernant ". 10. Ainsi qu'il a été indiqué au point 8, la décision par laquelle la ministre des armées a retiré à M. A... le bénéfice de l'habilitation " confidentiel défense " n'est pas une décision devant être motivée en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à invoquer la méconnaissance des dispositions des articles L. 121-1, L. 122-1 et L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire, notamment aucune disposition de l'instruction interministérielle n° 1300, ni aucun principe général du droit n'imposaient à l'administration d'inviter M. A... à s'expliquer ou à prendre connaissance de son dossier avant de prendre la décision contestée. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de la procédure contradictoire doit être écarté. 11. En quatrième lieu, l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300 dispose que : " 3. Retrait d'habilitation : (...) L'habilitation peut être retirée en cours de validité ou à l'occasion d'une demande de renouvellement si l'intéressé ne remplit plus les conditions nécessaires à sa délivrance, ce qui peut être le cas lorsque des éléments de vulnérabilité apparaissent (...) ". Aux termes de l'article 24 de la même instruction : " (...) L'enquête administrative est fondée sur des critères objectifs permettant de déterminer si l'intéressé, par son comportement ou par son environnement proche, présente une vulnérabilité, soit parce qu'il constitue lui-même une menace pour le secret, soit parce qu'il se trouve exposé à un risque de chantage ou de pressions pouvant mettre en péril les intérêts de l'Etat, chantage ou pressions exercés par un service étranger de renseignement, un groupe terroriste, une organisation ou une personne se livrant à des activités subversives (...) ". 12. Par ailleurs, l'article R. 2311-7 du code de la défense, dans sa rédaction applicable, dispose que : " Nul n'est qualifié pour connaître des informations et supports classifiés s'il n'a fait au préalable l'objet d'une décision d'habilitation et s'il n'a besoin, selon l'appréciation de l'autorité d'emploi sous laquelle il est placé, au regard notamment du catalogue des emplois justifiant une habilitation établi par cette autorité, de les connaître pour l'exercice de sa fonction ou l'accomplissement de sa mission ". L'article 21 de l'instruction interministérielle n° 1300 précise que : " L'habilitation ne permet pas d'accéder sans limite à toute information ou à tout support classifié au niveau correspondant. Une personne habilitée n'accède à une information ou à un support classifié que si son autorité hiérarchique estime que cet accès est nécessaire à l'exercice de sa fonction ou à l'accomplissement de sa mission. / L'autorité hiérarchique apprécie de façon rigoureuse et mesurée le besoin de connaître des informations classifiées ". 13. Enfin, l'article 413-7 du code pénal dispose que : " Est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende le fait, dans les services, établissements ou entreprises, publics ou privés, intéressant la défense nationale, de s'introduire, sans autorisation, à l'intérieur des locaux et terrains clos dans lesquels la libre circulation est interdite et qui sont délimités pour assurer la protection des installations, du matériel ou du secret des recherches, études ou fabrications (...) ". L'article 7 de l'instruction interministérielle n° 1300 dispose que : " Les lieux abritant des éléments couverts par le secret de défense nationale sont les locaux dans lesquels sont détenus des informations ou supports classifiés, quel qu'en soit le niveau, par des personnes par ailleurs habilitées au niveau requis. / L'accès à ces lieux, pour motif de service, est encadré par les dispositions relatives au droit du travail, aux contrats de prestation de service, au droit pénal, à la procédure pénale ou issues de conventions internationales ". Enfin, l'article 6 de l'instruction précise que : " Seules des personnes qualifiées peuvent accéder aux secrets de la défense nationale. La qualification exige la réunion de deux conditions cumulatives : / -le besoin de connaître ou d'accéder à une information classifiée, attesté par l'autorité d'emploi : l'appréciation du besoin d'en connaître est fondée sur le principe selon lequel une personne ne peut avoir connaissance d'informations classifiées que dans la mesure où l'exercice de sa fonction ou l'accomplissement de sa mission l'exige. Elle est effectuée dans les conditions prévues par l'article 20 de la présente instruction ; / -la délivrance de l'habilitation correspondant au degré de classification de l'information considérée : la décision d'habilitation est une autorisation explicite, délivrée à l'issue d'une procédure spécifique définie dans la présente instruction, permettant à une personne, sous réserve du besoin d'en connaître, d'avoir accès aux informations ou supports classifiés au niveau précisé dans la décision ainsi qu'au (x) niveau (x) inférieur (s). La décision d'habilitation est assortie d'un engagement de respecter, après en avoir dûment pris connaissance, les obligations et les responsabilités liées à la protection des informations ou supports classifiés ". 14. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il statue sur une demande d'annulation d'une décision portant retrait d'une habilitation " confidentiel défense ", de contrôler, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, la légalité des motifs sur lesquels l'administration s'est fondée. Il lui est loisible de prendre, dans l'exercice de ses pouvoirs généraux de direction de l'instruction, toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, sans porter atteinte au secret de la défense nationale. Il lui revient, au vu des pièces du dossier, de s'assurer que la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur de fait ou d'une erreur manifeste d'appréciation. 15. Il ressort des explications apportées par la ministre des armées que la décision de retrait de l'habilitation " confidentiel défense " de M. A... est fondée sur la circonstance qu'en compagnie d'autres personnes, l'intéressé a pénétré le 3 avril 2018 sans autorisation dans plusieurs zones sécurisées d'un bâtiment dont une zone " abritant des informations " confidentiel défense " où est hébergé un programme très sensible constituant un défi important pour Naval Group en termes de transfert de technologies ". Il ressort effectivement des pièces du dossier, notamment de l'attestation de l'officier de sécurité de la société Naval Group qui a analysé la vidéosurveillance du bâtiment, que M. A... y est entré à 9h35, sans présenter de badge, par l'accès pour les personnes à mobilité réduite. Après être demeuré avec d'autres personnes dans le local de sécurité des gardiens du bâtiment, M. A... a pénétré à 10h09 du matin dans une première zone sensible du bâtiment, à 10h11 dans une seconde de ces zones, et à 10h19 dans une troisième de ces zones pour lesquelles il ne bénéficiait pas de droits d'accès, l'ouverture ayant été systématiquement opérée grâce aux badges d'autres personnes du groupe. M. A... ne peut utilement invoquer le fait qu'il disposait de manière générale d'une habilitation " confidentiel défense " pour justifier son entrée dans les différentes zones sensibles du bâtiment, dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article R. 2311-7 du code de la défense et de l'article 21 de l'instruction interministérielle n° 1300 que la seule possession d'une habilitation ne permet pas d'accéder à des informations classifiées dès lors que l'accès doit être par ailleurs nécessité par l'exercice de la fonction ou l'accomplissement de la mission de l'agent. Par ailleurs, si l'intéressé soutient qu'il avait bénéficié d'une autorisation spéciale pour visiter le bâtiment en cause dans le cadre de ses activités syndicales, il ressort des pièces du dossier que l'officier de sécurité avait accordé une autorisation aux membres du CHSCT du site de Cherbourg de la société Naval Group pour visiter le local des agents de sécurité de la société C..., situé au rez-de-chaussée de l'immeuble. Néanmoins, il est constant que M. A..., délégué du personnel au sein de la société C..., n'était pas membre du CHSCT de la société Naval Group et n'était dès lors pas visé par l'autorisation accordée par la société. Par ailleurs, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, les membres du groupe au sein duquel se trouvait M. A... ne se sont pas bornés à demeurer dans le local des agents de sécurité mais ont pénétré au sein de trois zones sensibles du bâtiment. Le fait qu'il entendait visiter les locaux dans le cadre de ses activités syndicales ne le dispensait pas de solliciter l'autorisation d'accéder aux zones sensibles du bâtiment, dont il ne saurait soutenir qu'il ne les connaissait pas compte tenu de ses fonctions et compte tenu des précautions d'accès à ces zones, ni ne lui permettait de s'affranchir des règles relatives au respect du secret défense. Compte tenu des fonctions de l'intéressé, et des risques engendrés par son attitude, la ministre des armées n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision du 23 octobre 2019 portant retrait de son habilitation " confidentiel défense " repose sur des faits matériellement inexacts et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. 16. En dernier lieu, si M. A... soutient que le but véritable de l'auteur de l'acte serait de restreindre l'action du syndicat CGT au sein de la société Naval Group, il ne l'établit pas. Le moyen tiré du détournement de pouvoir doit donc être écarté. 17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 23 octobre 2019. En ce qui concerne la décision de retrait d'accès au site de la société Naval Group du 28 août 2020 : 18. L'article 73 de l'instruction interministérielle n° 1300, insérée dans le chapitre II " Les zones protégées ", dispose que : " L'objet de la zone protégée est d'assurer aux lieux intéressant la défense nationale, qu'il s'agisse de services, d'établissements ou d'entreprises, publiques ou privées, une protection juridique contre les intrusions, complémentaire de la protection physique évoquée précédemment. Elles sont érigées en fonction du besoin de protection déterminé par le ministre compétent. / La zone protégée est définie à l'article 413-7 du code pénal. Elle consiste en tout local ou terrain clos délimité, où la libre circulation est interdite et l'accès soumis à autorisation afin de protéger les installations, les matériels, le secret des recherches, des études ou des fabrications ou les informations ou supports classifiés qui s'y trouvent. Les limites sont visibles et ne peuvent être franchies par inadvertance. / Les modalités de création de la zone protégée sont définies aux articles R. 413-1 à R. 413-5 du code pénal. / Des mesures d'interdiction d'accès sont prises par l'autorité responsable. L'ensemble des accès doit être contrôlé en permanence afin que toute pénétration à l'intérieur d'une zone protégée ne puisse être exécutée par ignorance. A cet effet, des pancartes sont disposées en nombre suffisant aux endroits appropriés. / L'autorisation de pénétrer dans une zone est donnée par le chef du service, de l'établissement ou de l'entreprise, selon les directives et sous le contrôle de l'autorité ayant décidé de la création de la zone protégée ". 19. En premier lieu, ainsi qu'il a été rappelé au point précédent, les autorisations ou interdictions d'accès au sein des zones protégées en application des dispositions des articles R. 413-1 à R. 413-5 du code pénal sont édictées par le chef du service, de l'établissement ou de l'entreprise, sous les directives et sous le contrôle de l'autorité ayant décidé de la création de la zone protégée. M. A... n'est dès lors pas fondé à soutenir que la société Naval Group n'avait pas compétence pour lui interdire l'accès au site de Cherbourg au motif qu'il est un salarié de la société C... et non un salarié de la société Naval Group. 20. En deuxième lieu, la circonstance, à la supposer établie, que la société Naval Group n'a pas respecté le délai de deux mois fixé par l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Caen du 18 juin 2020 pour réexaminer la situation de M. A... à la suite de l'annulation de la décision du 25 octobre 2018, si elle est susceptible d'engager la responsabilité de la société au regard des préjudices éventuellement causés, est sans incidence sur la légalité de la décision du 28 août 2020 adoptée à l'issue de ce réexamen. 21. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que par un courrier du 20 juillet 2020, envoyé par lettre recommandée avec accusé de réception, la société Naval Group a invité M. A... à se présenter le 17 août suivant pour un entretien pour lui exposer les motifs de la décision envisagée et lui permettre d'exposer ses observations. Il est constant que M. A... ne s'est pas rendu à cet entretien ni n'a demandé un report de celui-ci. Dans ces conditions, malgré la circonstance que la société Naval Group n'a pas répondu au courrier de M. A... daté du 12 août 2020 demandant la communication par écrit des " documents fondant la décision de retrait d'accès ", le moyen tiré de l'absence de procédure contradictoire préalable doit être écarté. 22. En quatrième lieu, la décision litigieuse du 28 août 2020 a pour objet unique de retirer l'autorisation d'accès de M. A... au site de Cherbourg de la société Naval Group conformément à l'article 73 de l'instruction interministérielle n° 1300 et non de lui retirer son habilitation " confidentiel défense ", objet de la décision de la ministre des armées du 23 octobre 2019. M. A... ne peut donc utilement invoquer, à l'encontre de la décision du 28 août 2020, la méconnaissance de la procédure et des conditions de retrait d'habilitation prévues par les articles 23, 31, 33 et 103 de l'instruction interministérielle. 23. En cinquième lieu, l'article 7 de l'instruction interministérielle n ° 1300 dispose que : " Les lieux abritant des éléments couverts par le secret de défense nationale sont les locaux dans lesquels sont détenus des informations ou supports classifiés, quel qu'en soit le niveau, par des personnes par ailleurs habilitées au niveau requis. / L'accès à ces lieux, pour motif de service, est encadré par les dispositions relatives au droit du travail, aux contrats de prestation de service, au droit pénal, à la procédure pénale (13) ou issues de conventions internationales ". 24. Il est constant que, par une décision du 23 octobre 2019, la ministre des armées avait retiré l'habilitation " confidentiel défense " dont bénéficiait M. A.... Contrairement à ce que soutient celui-ci, la société Naval Group pouvait légalement lui interdire pour ce motif l'accès au site de Cherbourg dont il est constant qu'au moins une partie comporte des locaux dans lesquels sont détenus des informations ou supports classifiés, nécessitant une habilitation. Par ailleurs, si M. A... soutient que l'ensemble du site n'est pas soumis à une obligation d'habilitation, compte tenu des faits relatés au point 15 et des motifs exposés à ce même point, la société Naval Group n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en interdisant à l'intéressé l'ensemble du site faisant l'objet d'une protection. Enfin, alors en outre qu'il ressort des pièces du dossier que dès le 25 octobre 2018 la société Naval Group avait, par une décision annulée pour incompétence par la juridiction administrative, retiré à M. A... ses droits d'accès au site de Cherbourg, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le délai séparant les faits de la décision contestée serait de nature à entacher cette dernière d'illégalité. 24. En dernier lieu, si M. A... soutient que le but véritable de l'auteur de l'acte serait de restreindre l'action du syndicat CGT au sein de la société Naval Group, il ne l'établit pas. Le moyen tiré du détournement de pouvoir doit donc être écarté. 25. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la décision de la société Naval Group du 28 août 2020. Sur les frais du litige : 26. En premier lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de la société A..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, les sommes que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. 27. En second lieu, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme que la société Naval Group demande en application de ces mêmes dispositions. DECIDE : Article 1er : Les requêtes de M. A... sont rejetées. Article 2 : Les conclusions de la société Naval Group tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la société Naval Group et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, M. BÉRIA-GUILLAUMIELe président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT02520, 21NT02532
JADE/CETATEXT000045931519.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 21 octobre 2019 par laquelle la ministre des armées a retiré son habilitation d'accès aux informations et supports classifiés au niveau confidentiel défense et d'enjoindre à la ministre des armées de lui restituer cette habilitation. Par un jugement n° 2000436 du 9 juillet 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2021, M. B... C..., représenté par Me Teyssier, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2000436 du tribunal administratif de Caen du 9 juillet 2021 ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 21 octobre 2019 par laquelle la ministre des armées a retiré son habilitation d'accès aux informations et supports classifiés au niveau confidentiel défense ; 3°) d'enjoindre à la ministre des armées de lui restituer cette habilitation ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de deux mille cinq cents euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen tiré de l'absence de procédure contradictoire préalable ; - la décision est insuffisamment motivée en fait et en droit en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; l'exception du 7° de l'article L. 211-2 du code ne s'applique et ne concerne que les refus d'autorisation alors qu'il s'agissait du retrait d'une décision créatrice de droits ; le 4° de l'article ne prévoit pas d'exception à l'obligation de motivation ; l'exception résultant de l'article L. 311-5 du code des relations entre le public et l'administration est seulement visée au 7° de l'article L. 211-2 du code et non au 4° de l'article, relatif au retrait d'une décision créatrice de droits ; l'article L. 311-5 du code des relations entre le public et l'administration ne vise que la communication de documents administratifs ; il n'est pas établi que la décision ne pouvait être motivée par des éléments ne portant pas atteinte au secret défense ; - la décision de retrait n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire en méconnaissance des dispositions des articles L. 121-1, L. 122-1 et L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration ; s'agissant d'une décision individuelle prise en considération de sa personne, elle ne pouvait intervenir qu'après qu'il ait été mis à même de présenter des observations écrites ou orales ; - les dispositions de l'article 31 de l'arrêté du 30 novembre 2011 ont été méconnues ; la décision repose sur des faits erronés puisqu'il conteste avoir accédé à toute zone interdite sans autorisation et en dehors de son habilitation et d'avoir fait entrer dans cette zone des personnes n'y ayant pas accès : o il avait une autorisation d'accès au poste de surveillance situé dans le bâtiment Hugues House ; l'autorisation avait été obtenue à la suite d'une demande du 22 mars 2018 pour l'ensemble des membres du CHSCT dont il fait partie, l'autorisation permettant l'accès à l'ensemble du bâtiment ; il a obtenu les autorisations en temps réel pour chacune des zones ; il ne peut lui être reproché d'avoir accédé à des zones abritant des informations " confidentiel défense " puisqu'il est habilité " confidentiel défense " ; il accomplissait sa mission en tant que représentant du personnel, l'accès au site s'est fait dans l'exercice de sa fonction ; l'article 6 de l'instruction ne vise que l'accès à une information classifiée et non l'autorisation d'accès à une zone ; o il n'est pas établi qu'il aurait ouvert l'accès aux autres représentants du personnel puisque c'est une autre personne qui a ouvert les zones d'accès ; - la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation compte tenu de ses compétences, de son professionnalisme et de ce qu'aucun élément de sa vie personnelle, sociale ou professionnelle ne fait obstacle au maintien de son habilitation ; l'administration ne démontre pas qu'il ne remplit plus les conditions nécessaires à la délivrance de l'habilitation en raison de l'apparition d'éléments de vulnérabilité conformément à l'article 31 de l'arrêté du 30 novembre 2011 ; son comportement ne révèle aucun risque pour la défense et la sécurité nationale ce que démontre en outre le délai entre les faits et la décision contestée ; - la décision est entachée de détournement de pouvoir et vise à limiter l'activité des membres du syndicat A... sur les sites de la société Naval Group. Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 10 février 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er mars 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code pénal ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code du travail ; - l'arrêté du 30 novembre 2011 portant approbation de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère, - les conclusions de M. Pons, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B... C... occupe la fonction d'ouvrier frigoriste pour la société Naval Group depuis janvier 1995 et est affecté sur le site de Cherbourg (Manche) de cette société. Il exerce par ailleurs des fonctions syndicales, est élu au sein du comité social et économique sous l'étiquette de la A... et est membre de la commission santé, sécurité et conditions de travail. Il bénéficiait à cet effet d'une habilitation " confidentiel défense ". Par une décision du 21 octobre 2019, qui a été portée à sa connaissance le 20 novembre suivant, la cheffe du service de la sécurité de défense et des systèmes d'information de la direction générale de l'armement, au nom de la ministre des armées, lui a retiré l'habilitation " confidentiel défense ". Le recours gracieux de M. C... du 13 décembre 2019 contre cette décision a été implicitement rejeté. M. C... relève appel du jugement du 9 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 21 octobre 2019. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 3. Par ailleurs, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". 4. Le tribunal administratif de Caen a relevé, aux points 3 et 4 de son jugement, que la décision contestée procédant au retrait de l'habilitation " confidentiel défense " de M. C... n'avait pas à être motivée en application des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Dès lors, le tribunal administratif a pu, sans irrégularité, s'abstenir de répondre au moyen, inopérant, relatif à la méconnaissance de la procédure contradictoire. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 5. Aux termes de l'article L. 2311-1 du code de la défense : " Les règles relatives à la définition des informations concernées par les dispositions du présent chapitre sont définies par l'article 413-9 du code pénal ". Par ailleurs, aux termes de l'article 413-9 du code pénal : " Présentent un caractère de secret de la défense nationale au sens de la présente section les procédés, objets, documents, informations, réseaux informatiques, données informatisées ou fichiers intéressant la défense nationale qui ont fait l'objet de mesures de classification destinées à restreindre leur diffusion ou leur accès. / Peuvent faire l'objet de telles mesures les procédés, objets, documents, informations, réseaux informatiques, données informatisées ou fichiers dont la divulgation ou auxquels l'accès est de nature à nuire à la défense nationale ou pourrait conduire à la découverte d'un secret de la défense nationale. / Les niveaux de classification des procédés, objets, documents, informations, réseaux informatiques, données informatisées ou fichiers présentant un caractère de secret de la défense nationale et les autorités chargées de définir les modalités selon lesquelles est organisée leur protection sont déterminés par décret en Conseil d'Etat ". L'article R. 2311-2 du code de la défense, dans sa rédaction applicable, dispose que : " Les informations et supports classifiés font l'objet d'une classification comprenant trois niveaux : / 1° Très Secret-Défense ; / 2° Secret-Défense ; /3° Confidentiel-Défense ". Par ailleurs, l'article R. 2311-3 du même code, dans sa rédaction applicable, dispose que : " (...) Le niveau Confidentiel-Défense est réservé aux informations et supports dont la divulgation est de nature à nuire à la défense nationale ou pourrait conduire à la découverte d'un secret de la défense nationale classifié au niveau Très Secret-Défense ou Secret-Défense ". 6. Aux termes de l'article 31 " Fin de l'habilitation " de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale, approuvée par l'arrêté du 30 novembre 2011 alors en vigueur : " (...) 3. Retrait d'habilitation : / La décision d'habilitation ne confère pas à son bénéficiaire de droit acquis à son maintien. L'habilitation peut être retirée en cours de validité ou à l'occasion d'une demande de renouvellement si l'intéressé ne remplit plus les conditions nécessaires à sa délivrance, ce qui peut être le cas lorsque des éléments de vulnérabilité apparaissent, signalés par exemple par : / -le service enquêteur ; / -le supérieur hiérarchique ou l'officier de sécurité concerné, à la suite d'un changement de situation ou de comportement révélant un risque pour la défense et la sécurité nationale. / La décision de retrait est notifiée à l'intéressé dans les mêmes formes que le refus d'habilitation, décrites à l'article 26 de la présente instruction, sans que les motifs lui soient communiqués s'ils sont classifiés. L'intéressé est informé des voies de recours et des délais qui lui sont ouverts pour contester cette décision ". 7. En premier lieu, l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 (...) ". Aux termes de l'article L. 311-5 du même code : " Ne sont pas communicables : (...) / 2° Les autres documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte : / b) Au secret de la défense nationale (...) ". Par ailleurs, l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300 dispose que : " (...) La décision d'habilitation ne confère pas à son bénéficiaire de droit acquis à son maintien (...) ". 8. La décision par laquelle le ministre en charge de la défense avait conféré à M. C... une habilitation " confidentiel défense " n'étant pas une décision créatrice de droits, ainsi que le rappelle l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que la décision du 21 octobre 2019 portant retrait de cette habilitation devait être motivée en application du 4° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par ailleurs, il résulte de la combinaison des dispositions du 7° de l'article L. 211-2 et de l'article L. 311-5 de ce code que les décisions qui refusent ou retirent l'habilitation " confidentiel défense " sont au nombre de celles dont la communication des motifs est de nature à porter atteinte au secret de la défense nationale. Il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision du 21 octobre 2019 doit être écarté. 9. En deuxième lieu, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (...) ". Enfin aux termes de l'article L. 122-2 du même code : " Les mesures mentionnées à l'article L. 121-1 à caractère de sanction ne peuvent intervenir qu'après que la personne en cause a été informée des griefs formulés à son encontre et a été mise à même de demander la communication du dossier la concernant ". 10. Ainsi qu'il a été indiqué au point 8, la décision par laquelle la ministre des armées a retiré à M. C... le bénéfice de l'habilitation " confidentiel défense " n'est pas une décision devant être motivée en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Il suit de là que M. C... n'est pas fondé à invoquer la méconnaissance des dispositions des articles L. 121-1, L. 122-1 et L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire, notamment aucune disposition de l'instruction interministérielle n° 1300, ni aucun principe général du droit n'imposaient à l'administration d'inviter M. C... à s'expliquer ou à prendre connaissance de son dossier avant de prendre la décision contestée. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de la procédure contradictoire doit être écarté. 11. En troisième lieu, l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300 dispose que : " 3. Retrait d'habilitation : (...) L'habilitation peut être retirée en cours de validité ou à l'occasion d'une demande de renouvellement si l'intéressé ne remplit plus les conditions nécessaires à sa délivrance, ce qui peut être le cas lorsque des éléments de vulnérabilité apparaissent (...) ". Aux termes de l'article 24 de la même instruction : " (...) L'enquête administrative est fondée sur des critères objectifs permettant de déterminer si l'intéressé, par son comportement ou par son environnement proche, présente une vulnérabilité, soit parce qu'il constitue lui-même une menace pour le secret, soit parce qu'il se trouve exposé à un risque de chantage ou de pressions pouvant mettre en péril les intérêts de l'Etat, chantage ou pressions exercés par un service étranger de renseignement, un groupe terroriste, une organisation ou une personne se livrant à des activités subversives (...) ". 12. Par ailleurs, l'article R. 2311-7 du code de la défense, dans sa rédaction applicable, dispose que : " Nul n'est qualifié pour connaître des informations et supports classifiés s'il n'a fait au préalable l'objet d'une décision d'habilitation et s'il n'a besoin, selon l'appréciation de l'autorité d'emploi sous laquelle il est placé, au regard notamment du catalogue des emplois justifiant une habilitation établi par cette autorité, de les connaître pour l'exercice de sa fonction ou l'accomplissement de sa mission ". L'article 21 de l'instruction interministérielle n° 1300 précise que : " L'habilitation ne permet pas d'accéder sans limite à toute information ou à tout support classifié au niveau correspondant. Une personne habilitée n'accède à une information ou à un support classifié que si son autorité hiérarchique estime que cet accès est nécessaire à l'exercice de sa fonction ou à l'accomplissement de sa mission. / L'autorité hiérarchique apprécie de façon rigoureuse et mesurée le besoin de connaître des informations classifiées ". 13. Enfin, l'article 413-7 du code pénal dispose que : " Est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende le fait, dans les services, établissements ou entreprises, publics ou privés, intéressant la défense nationale, de s'introduire, sans autorisation, à l'intérieur des locaux et terrains clos dans lesquels la libre circulation est interdite et qui sont délimités pour assurer la protection des installations, du matériel ou du secret des recherches, études ou fabrications (...) ". L'article 7 de l'instruction interministérielle n° 1300 dispose que : " Les lieux abritant des éléments couverts par le secret de défense nationale sont les locaux dans lesquels sont détenus des informations ou supports classifiés, quel qu'en soit le niveau, par des personnes par ailleurs habilitées au niveau requis. / L'accès à ces lieux, pour motif de service, est encadré par les dispositions relatives au droit du travail, aux contrats de prestation de service, au droit pénal, à la procédure pénale ou issues de conventions internationales ". Enfin, l'article 6 de l'instruction précise que : " Seules des personnes qualifiées peuvent accéder aux secrets de la défense nationale. La qualification exige la réunion de deux conditions cumulatives : / -le besoin de connaître ou d'accéder à une information classifiée, attesté par l'autorité d'emploi : l'appréciation du besoin d'en connaître est fondée sur le principe selon lequel une personne ne peut avoir connaissance d'informations classifiées que dans la mesure où l'exercice de sa fonction ou l'accomplissement de sa mission l'exige. Elle est effectuée dans les conditions prévues par l'article 20 de la présente instruction ; / -la délivrance de l'habilitation correspondant au degré de classification de l'information considérée : la décision d'habilitation est une autorisation explicite, délivrée à l'issue d'une procédure spécifique définie dans la présente instruction, permettant à une personne, sous réserve du besoin d'en connaître, d'avoir accès aux informations ou supports classifiés au niveau précisé dans la décision ainsi qu'au (x) niveau (x) inférieur (s). La décision d'habilitation est assortie d'un engagement de respecter, après en avoir dûment pris connaissance, les obligations et les responsabilités liées à la protection des informations ou supports classifiés ". 14. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il statue sur une demande d'annulation d'une décision portant retrait d'une habilitation " confidentiel défense ", de contrôler, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, la légalité des motifs sur lesquels l'administration s'est fondée. Il lui est loisible de prendre, dans l'exercice de ses pouvoirs généraux de direction de l'instruction, toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, sans porter atteinte au secret de la défense nationale. Il lui revient, au vu des pièces du dossier, de s'assurer que la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur de fait ou d'une erreur manifeste d'appréciation. 15. Il ressort des explications apportées par la ministre des armées que la décision de retrait de l'habilitation " confidentiel défense " de M. C... est fondée sur la circonstance qu'en compagnie d'autres personnes, l'intéressé a pénétré le 3 mars 2018 sans autorisation dans plusieurs zones sécurisées d'un bâtiment dont une zone " abritant des informations " confidentiel défense " où est hébergé un programme très sensible constituant un défi important pour Naval Group en termes de transfert de technologies ". Il ressort effectivement des pièces du dossier, notamment de l'attestation de l'officier de sécurité de la société Naval Group qui a analysé la vidéosurveillance du bâtiment, que M. C... est entré à 9h35 dans le bâtiment en cause en compagnie de trois autres agents. Après être demeuré avec ces personnes dans le local de sécurité des gardiens du bâtiment, M. C... a pénétré à 10h09 dans une première zone sensible du bâtiment, à 10 h11 dans une seconde de ces zones, et à 10h19 dans une troisième de ces zones pour laquelle il ne bénéficiait d'un droit d'accès que dans le cadre d'une intervention relevant de ses fonctions de frigoriste et sur autorisation. M. C... ne peut utilement invoquer le fait qu'il disposait de manière générale d'une habilitation " confidentiel défense " pour justifier son entrée dans les différentes zones sensibles du bâtiment dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article R. 2311-7 du code de la défense et de l'article 21 de l'instruction interministérielle n° 1300 que la seule possession d'une habilitation ne permet pas d'accéder à des informations classifiées et que l'accès doit être par ailleurs nécessité par l'exercice de la fonction ou l'accomplissement de la mission, aucune mission spécifique dans ces zones sensibles ne lui ayant été attribuée ce jour. Par ailleurs, si l'intéressé soutient qu'il avait bénéficié d'une autorisation spéciale pour visiter le bâtiment en cause dans le cadre de ses activités syndicales, il ressort des pièces du dossier que l'officier de sécurité avait accordé une autorisation aux membres du CHSCT du site de Cherbourg de la société Naval Group pour visiter le local des agents de sécurité de la société Fiducial Private Security, située au rez-de-chaussée de l'immeuble. Néanmoins, les membres du groupe au sein duquel se trouvait M. C... ne se sont pas bornés à demeurer dans le local des agents de sécurité mais ont pénétré au sein de trois zones sensibles du bâtiment. Le fait qu'il entendait visiter les locaux dans le cadre de ses activités syndicales ne le dispensait pas de solliciter l'autorisation d'accéder aux zones sensibles du bâtiment, dont il ne saurait soutenir qu'il ne les connaissait pas compte tenu de ses fonctions et des précautions d'accès à ces zones, ni ne lui permettait de s'affranchir des règles relatives au respect du secret défense. Par ailleurs, il résulte de ces mêmes constatations que M. C..., dont le badge pouvait, en cas de mission spécifique, ouvrir ces zones sensibles, a ouvert l'accès à ces mêmes zones à un agent de l'agence Fiducial Private Security ne disposant pas de tels droits d'accès. Compte tenu des risques de compromission du secret protégé engendrés par l'attitude de l'intéressé, la ministre des armées n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 31 de l'instruction interministérielle n° 1300. Il en résulte que M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision du 21 octobre 2019 portant retrait de son habilitation " confidentiel défense " repose sur des faits matériellement inexacts et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. 16. En dernier lieu, si M. C... soutient que le but véritable de l'auteur de l'acte serait de restreindre l'action du syndicat A... au sein de la société Naval Group, il ne l'établit pas. Le moyen tiré du détournement de pouvoir doit donc être écarté. 17. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 21 octobre 2019. Sur les frais du litige : 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., au ministre des armées et à la société Naval Group. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, M. BÉRIA-GUILLAUMIELe président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT02537
JADE/CETATEXT000045931525.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Le Syndicat de traitement des déchets ménagers du sud-est du Morbihan (SYSEM) a demandé au tribunal administratif de Rennes d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, une expertise relative aux désordres affectant le digesteur et le réseau de chauffage installés au sein de l'unité de valorisation organique à Vannes. Par une ordonnance n° 2104612 du 22 octobre 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a fait droit à cette demande en désignant un expert. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 novembre 2021 et 20 mai 2022, la SAS Vinci environnement, représentée par Me Claudon, demande à la cour : 1°) d'annuler l'ordonnance du 22 octobre 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Rennes ; 2°) de mettre à la charge du Syndicat de traitement des déchets ménagers du sud-est du Morbihan la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la mesure d'expertise décidée est inutile, au regard de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, dès lors que les éléments affectés par des désordres, le digesteur, l'agitateur, les cannes de réchauffage, les réseaux de chauffage, participent à la valorisation énergétique de la matière organique et constituent des éléments d'équipement industriel dont la fonction exclusive est de concourir au process de l'usine ; en application de l'article 1792-7 du code civil ces éléments d'équipement échappent à la garantie décennale des constructeurs et à la garantie biennale de bon fonctionnement ; la seule garantie applicable au matériel, prévue à l'article 15.5.3 du CCAP, étant de deux ans et ayant expiré à compter du 1er juillet 2015, toute action sur ce fondement contractuel est prescrite ; le digesteur n'est pas un élément d'équipement indispensable au fonctionnement de l'ouvrage constitué par l'unité de valorisation organique. Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 décembre 2021, 1er avril 2022 et 24 mai 2022, le Syndicat de traitement des déchets ménagers du sud-est du Morbihan (SYSEM), représenté par Me Jacq-Moreau, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de la société Vinci environnement une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par la société Vinci environnement et la société SOGEA Bretagne BTP ne sont pas fondés. Par un mémoire enregistré le 20 décembre 2021, la société SOGEA Bretagne BTP, représentée par Me Massip, demande à la cour : 1°) d'annuler l'ordonnance du 22 octobre 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Rennes ; 2°) de mettre à la charge du Syndicat de traitement des déchets ménagers du sud-est du Morbihan la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que pour les motifs exposés par la société Vinci environnement, la mesure d'expertise contestée ne présente pas d'utilité au sens de l'article R. 532-1 du code de justice administrative dès lors que les désordres affectent des éléments d'équipement industriel ; le réseau de chauffage peut être déposé sans atteinte à la viabilité, l'ossature ou le clos et couvert du digesteur ; l'arrêt du digesteur a pour seule conséquence de plus permettre la production d'énergie sans atteinte au fonctionnement global de l'UVO ; le SYSEM ne peut se prévaloir utilement des articles 15.5.5 et 15.5.7 du CCAP. Par un mémoire, enregistré le 20 mai 2022, la société Arcau, représentée par Me Stalla, indique s'en rapporter à la décision à intervenir de la cour et demande de mettre à la charge de la société Vinci environnement, ou de toute partie succombante, la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Pons, rapporteur public, - et les observations de Me Bonnet-Cerisier, représentant la société Vinci environnement, de Me Jacq-Moreau, représentant le Syndicat de traitement des déchets ménagers du sud-est du Morbihan, et de Me Degroote, représentant la société SOGEA Bretagne BTP. Considérant ce qui suit : 1. Le Syndicat de traitement des déchets ménagers du sud-est du Morbihan (SYSEM) a saisi le tribunal administratif de Rennes, sur le fondement de l'art R. 532-1 du code de justice administrative, d'une demande d'expertise portant sur des désordres affectant le réseau de chauffage installé en toiture du digesteur compris au sein de son unité de valorisation organique (UVO) située à Vannes. Par une ordonnance du 22 octobre 2021 le juge des référés de ce tribunal a désigné M. B..., expert en assainissement, afin notamment de " procéder à la constatation et au relevé précis des désordres affectant cet ouvrage mentionnés dans la requête, ainsi que dans le procès-verbal de constat d'huissier du 20 avril 2021 et dans son rapport de constat du 23 août 2021, en indiquant leur date d'apparition ". La SAS Vinci Environnement relève appel de cette ordonnance. Sur les conclusions de la société Vinci Environnement et de la société SOGEA Bretagne BTP : 2. En vertu de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. 3. L'unité de valorisation organique de Vannes, exploitée par la société SAS Générale de Valorisation, est destinée à la valorisation de la fraction fermentescible des ordures ménagères résiduelles collectées. Il y est procédé notamment au tri et à la méthanisation de ces ordures ménagères résiduelles. L'unité a été édifiée dans le cadre d'un marché de conception-réalisation confié à un groupement composé des sociétés SAS Vinci Environnement, SAS SOGEA Bretagne TP et SAS Atelier Arcau Architectes, son digesteur étant conçu par la société Hitachi Zosen Inova France. La réception de l'ouvrage a été prononcée le 25 novembre 2013 avec une date d'effet au 1er juillet 2013 et des réserves sans lien avec les présents désordres. Après l'arrêt de deux des réseaux de chauffage intégrés dans la dalle de béton du toit-terrasse du bâtiment constituant le digesteur en 2018 et 2019 en raison de fuites d'eau, et à l'occasion de travaux préparatoires à la modernisation de cette installation réalisée en avril 2021, il a été constaté l'apparition de fuites sur le troisième et dernier réseau de chauffage justifiant son arrêt. En conséquence l'activité du digesteur a dû être réduite significativement. Lors du démontage de la toiture du digesteur, une oxydation de la palplanche en toiture a également été constatée. Au vu de ces désordres qui affectent le système de chauffage du digesteur de l'UVO, le SYSEM s'est interrogé sur l'état des cannes de réchauffage, du moteur, du réducteur, de l'arbre et des pales de l'agitateur et sur l'état intérieur du digesteur. Pour le SYSEM ces désordres compromettent le fonctionnement du digesteur et sont ainsi de nature à rendre cet ouvrage définitivement impropre à sa destination, tout comme les désordres portant sur la structure porteuse du toit de l'ouvrage. 4. Aux termes de l'article 1792-7 du code civil : " Ne sont pas considérés comme des éléments d'équipement d'un ouvrage au sens des articles 1792, 1792-2, 1792-3 et 1792-4 les éléments d'équipement, y compris leurs accessoires, dont la fonction exclusive est de permettre l'exercice d'une activité professionnelle dans l'ouvrage. ". 5. Le digesteur, compris au sein de l'UVO de Vannes, constitue un bâtiment particulier constitué d'une vaste cuve dont la vocation est, dans le cadre d'un processus de méthanisation des résidus fermentescibles d'ordures ménagères recueillies, qui sont alors privées d'oxygène, de produire du digestat, sous forme de compost, et du biogaz. Ce processus de méthanisation est subordonné à un malaxage continu des ordures déversées, qui est assuré par le mouvement régulier de pales fixées sur un axe longitudinal sur toute la longueur du bâtiment, et à une température constante de 55° nécessaire à l'action des bactéries. Cette chaleur est assurée, outre le processus biologique en cours au sein de la cuve, par le passage d'eau chaude dans des tubes répartis au sein de la cuve. Ces tubes sont eux-mêmes alimentés par des vannes et des canalisations insérées dans la structure même du toit du bâtiment, composé d'une couche bitumée supérieure, d'une couche isolante en polystyrène, d'une dalle de béton dans laquelle les canalisations sont installées et d'une couche de gravier répartie sur la partie supérieure du toit en acier constituant la partie supérieure interne de la cuve. Il se déduit tant de la structure même de cette construction que de son affectation unique à un processus de méthanisation que les canalisations insérées dans sa toiture font partie intégrante de l'ouvrage lui-même. Elles ne peuvent ainsi s'analyser comme des éléments d'équipement d'un ouvrage au sens de l'article 1792-7 du code civil. La circonstance que cet ouvrage dans son ensemble participe à une activité professionnelle est à cet égard sans incidence. Il en va de même pour les désordres relevés affectant la structure même du toit. L'expertise décidée par le juge des référés du tribunal administratif de Rennes n'est ainsi pas dépourvue d'utilité dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher et qui consisterait, si les désordres présentent les caractères le permettant, à rechercher la responsabilité décennale des constructeurs de l'ouvrage. 6. Il s'en déduit que la société Vinci Environnement, ainsi qu'en tout état de cause la société SOGEA Bretagne TP, ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a fait droit à la demande d'expertise présentée par le Syndicat de traitement des déchets ménagers du sud-est du Morbihan. Sur les frais d'instance : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par les sociétés Vinci Environnement et SOGEA Bretagne BTP. En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Vinci Environnement, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le syndicat de traitement des déchets ménagers du sud-est du Morbihan. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société Arcau au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de la société Vinci Environnement, les conclusions de la société SOGEA Bretagne BTP et les conclusions de la société Arcau au titre des frais d'instance sont rejetées. Article 2 : La société Vinci Environnement versera au Syndicat de traitement des déchets ménagers du sud-est du Morbihan une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Vinci Environnement, au Syndicat de traitement des déchets ménagers du sud-est du Morbihan, à la société SOGEA Bretagne BTP, à la société Arcau, à la société générale de valorisation, à la société Hitachi Zosen Inova France et à M. C... B..., expert. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, C. A... Le président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03126
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 juillet 2017 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé la société Elior Restauration à procéder à son licenciement ainsi que la décision implicite de la ministre du travail rejetant son recours hiérarchique présenté le 26 septembre 2017. Par un jugement n° 1802121 du 15 février 2019, le tribunal a fait droit à sa demande. Par un arrêt n° 19NT01459 du 1er décembre 2020, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de la société Elres, venue aux droits de la société Elior Restauration, annulé ce jugement et rejeté la demande de Mme A.... Par une décision n° 449243 du 14 décembre 2021 le Conseil d'État, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et renvoyé devant la cour l'affaire, qui porte désormais le n° 21NT03533. Procédure après cassation : Par un mémoire enregistré le 29 décembre 2021, Mme A..., représentée par Me Robert, demande à la cour par la voie de l'appel incident : 1°) d'annuler le jugement du tribunal du 15 février 2019 en tant qu'il a rejeté d'une part ses demandes tendant au versement par la société Elres de rappels de salaires entre son licenciement et sa réintégration et d'autre part, de versement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ; 2°) de mettre à la charge de la société Elres le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative Elle soutient que : * l'inspecteur du travail était territorialement incompétent pour prendre la décision du 28 juillet 2017 ; * le principe du contradictoire n'a pas été respecté par l'inspecteur du travail et le ministre du travail ; * la lettre de convocation à l'entretien préalable méconnaît l'article L 1232-4 du code du travail ; * l'employeur a méconnu son obligation de réintégration ; * la procédure de licenciement est irrégulière en ce que le comité d'établissement n'a pas été loyalement consulté ; ce comité n'a pas délibéré régulièrement ; * le licenciement ne repose sur aucun motif valable ; * l'accord sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences n'a pas été respecté ; * le licenciement est discriminatoire en méconnaissance de l'article L 1132-1 du code du travail ; * il n'a pas été procédé à une recherche sérieuse de reclassement ; * elle doit être réintégrée dans son emploi et bénéficier d'un rappel de salaires. Par un mémoire enregistré le 27 avril 2022 la société Elior Restauration, représentée par Me Bouchez, conclut : 1°) à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 février 2019 ; 2°) au rejet de la demande présentée par Mme A... ; 3°) à ce qu'il soit enjoint à l'autorité administrative de procéder au réexamen de la situation de Mme A... ; 4°) à ce que soit mis à la charge de Mme A... le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que le tribunal a estimé que les postes de reclassement proposés à Mme A... en vue de sa réintégration étaient équivalents aux fonctions qu'elle exerçait antérieurement ; - aucun des moyens soulevés par Mme A... n'est fondé. Vu : - le code du travail - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - et les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - les observations de Me Chafai, représentant la SAS Elres. Considérant ce qui suit : 1. Par une décision du 28 juillet 2017, l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle n° 2 au sein de l'unité départementale de Loire-Atlantique à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) des Pays de la Loire a autorisé la société Elior Restauration, devenue la société Elres, à procéder au licenciement de Mme C... A..., salariée protégée au motif que son contrat de travail ne pouvait se poursuivre à la suite de son refus d'accepter l'un des postes proposés par la société en vue de sa réintégration, lesquels étaient équivalents au poste précédemment occupé par l'intéressée. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par la ministre du travail sur le recours hiérarchique formée par Mme A... contre cette autorisation. Par un jugement du 15 février 2019, le tribunal administratif de Nantes, sur demande de Mme A..., a annulé ces deux décisions. 2. Par un arrêt n° 19NT01459 du 1er décembre 2020, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé ce jugement du 15 février 2019 en ce qu'il a annulé les décisions de l'inspectrice du travail et de la ministre du travail autorisant le licenciement de Mme A... et a également rejeté la demande indemnitaire présentée devant le tribunal par Mme A... ainsi que ses conclusions d'appel. Par une décision n° 449243 du 14 décembre 2021, le Conseil d'État, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt de la cour du 1er décembre 2020 et a renvoyé devant la cour l'affaire, qui porte désormais le n° 21NT03553. Sur la légalité des décisions autorisant le licenciement de Mme A... : 3. Aux termes de l'article L. 1232-2 du code du travail : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable ". Aux termes de l'article L. 1232-4 du même code : " Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. / Lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative. / La lettre de convocation à l'entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller du salarié et précise l'adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition. ". Et aux termes de l'article R. 1232-1 du même code : " La lettre de convocation prévue à l'article L. 1232-2 indique l'objet de l'entretien entre le salarié et l'employeur. / Elle précise la date, l'heure et le lieu de cet entretien. / Elle rappelle que le salarié peut se faire assister pour cet entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, en l'absence d'institutions représentatives dans l'entreprise, par un conseiller du salarié. ". 4. Il résulte de ces dispositions que la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement doit mentionner les modalités d'assistance du salarié applicables en fonction de la situation de l'entreprise. A ce titre, lorsque l'entreprise appartient à une unité économique et sociale (UES) dotée d'institutions représentatives du personnel, elle doit mentionner la possibilité pour le salarié convoqué de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou d'une autre entreprise appartenant à l'UES. Toutefois, la procédure n'est pas entachée d'irrégularité s'il est établi que le salarié a été pleinement informé, en temps utile, des modalités d'assistance auxquelles il avait droit, en fonction de la situation de l'entreprise, pour son entretien préalable. 5. En l'espèce, il est constant que la société Elres qui employait Mme A... fait partie d'une unité économique et sociale dotée d'institutions représentatives du personnel. La lettre adressée le 25 avril 2017 à Mme A... par son employeur pour la convoquer à un entretien préalable à son licenciement ne mentionnait pas la possibilité pour l'intéressée de se faire assister par un salarié d'une des sociétés de cette unité économique et sociale. Il n'est en outre pas établi que l'intéressée, qui a été assistée par une salariée de l'entreprise qui l'employait, aurait été informée, en temps utile, des modalités d'assistance auxquelles elle avait droit pour son entretien préalable. Ainsi, la procédure suivie par l'entreprise est entachée d'une irrégularité faisant obstacle à la délivrance d'une autorisation de licenciement. L'autorité administrative était tenue, pour ce seul motif, de refuser l'autorisation sollicitée. 6. Il résulte de ce qui précède que la société Elres n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de l'inspectrice du travail de l'unité de contrôle n° 2 de Loire-Atlantique du 28 juillet 2017 ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre du travail a rejeté son recours hiérarchique formé le 26 septembre 2017 contre cette décision. Sur les conclusions d'appel incident : 7. Mme A... demande la condamnation de la société Elres à lui verser d'une part, un rappel de rémunération correspondant à la période comprise entre son licenciement et sa réintégration et d'autre part, des dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail. Toutefois, l'obligation de verser de telles sommes ne relevant pas de la compétence du juge administratif, de telles conclusions ne peuvent qu'être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître. Sur les frais liés au litige : 8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Elres la somme de 1 200 euros qui sera versée à Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La requête de la société Elres est rejetée. Article 2 : Les conclusions d'appel incident de Mme A... sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître. Article 3 : La société Elres versera à Mme A... la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la sociétés Elres, à Mme C... A... et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. La rapporteure, C. B... Le président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03533
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... D..., M. F... et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner solidairement la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire et son assureur Paris Nord Assurances Services et / ou la compagnie Areas Dommages à verser à M. A... D... une somme de 500 000 euros à valoir sur l'indemnisation définitive des dommages qu'il a subis à la suite de l'accident de la circulation dont il a été victime le 20 juillet 2013 et de prescrire une nouvelle expertise en vue de déterminer les préjudices susmentionnés, après la date de consolidation de M. A... D..., afin de pouvoir solliciter une indemnisation définitive. Par un jugement avant dire droit n° 1602033 du 19 novembre 2019, le tribunal, après avoir mis hors de cause la société PNAS, a déclaré la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE) responsable des préjudices subis par M. D..., a condamné la CARENE à verser la somme de 58 965 euros à M. D... au titre de deux chefs de préjudice liquidés à la date du 29 août 2017, a rejeté les conclusions à fin d'appel en garantie présentées par la CARENE, a dit qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions d'appel en garantie de la société Promotion de l'Erdre et de la société Charier TP et a, enfin, ordonné une expertise à fin de déterminer l'étendue des préjudices. Le rapport d'expertise du docteur B..., désigné par une ordonnance du vice- président du Tribunal du 21 novembre 2019, a été déposé au greffe du tribunal le 12 mai 2020 et communiqué aux parties. M. A... D..., M. F... et Mme C... D... ont ensuite demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner solidairement la CARENE et son assureur, la société Areas Dommages, à verser la somme totale de 16 121 161,85 euros à M. A... D... et une somme de 20 000 euros chacun à M. F... et Mme C... D..., ses parents, en réparation de divers préjudices subis à la suite de l'accident de la circulation dont M. A... D... a été victime le 20 juillet 2013. Par un jugement n° 1602033 du 5 octobre 2021, le tribunal administratif de Nantes a condamné la CARENE à verser : - à M. A... D... en son nom personnel et en sa qualité d'ayant-droit de son père décédé, la somme de 924 819,93 euros ainsi qu'une rente annuelle d'un montant de 14 581 euros, à verser à compter du mois de novembre 2021 et dont le montant sera revalorisé chaque année par application du coefficient prévu à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale ; - à Mme C... D... la somme de 20 000 euros ; - à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Loire-Atlantique une somme de 185 650,42 euros en remboursement de ses débours, cette somme portant intérêt au taux légal et capitalisation de ces intérêts et une somme de 1 098 euros en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. Par ce même jugement, le tribunal administratif a condamné la CARENE à rembourser à la CPAM de la Loire-Atlantique, d'une part, les débours correspondant aux dépenses de santé futures de M. A... D... dans la limite du montant de 641 948,22 euros et sur présentation des justificatifs, d'autre part, les arrérages de pension d'invalidité à échoir à compter de ce jugement dans la limite du montant de 594 546,92 euros et également sur présentation des justificatifs. Enfin, il a mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme totale de 4 200 euros, à la charge de la CARENE. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 6 décembre 2021 et 13 et 19 avril 2022, la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE) et la Compagnie Areas Dommages, représentées par la Selurl Phelip, demandent à la cour : 1°) d'annuler ces jugements du tribunal administratif de Nantes des 19 novembre 2019 et 5 octobre 2021 ; 2°) de rejeter les demandes présentées par les consorts D... devant le tribunal administratif de Nantes ; 3°) à titre subsidiaire, de réduire les condamnations prononcées à leur encontre à de plus justes proportions ; 4°) de mettre à la charge des consorts D... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa responsabilité ne saurait être engagée à l'occasion de l'accident dont a été victime M. D... dès lors qu'elle ne détient pas la compétence voirie ; - un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ne peut être retenu ; - seule la faute de la victime, qui roulait à une vitesse excessive et avait une parfaite connaissance des lieux, est à l'origine de cet accident, de sorte qu'elle doit être exonérée de toute responsabilité ; - subsidiairement, les sommes mises à sa charge par le jugement attaqué devront être réduites à de plus justes proportions. Par des mémoires, enregistrés les 1er février et 6 avril 2022, la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique, représentée par la SELARL Lexcap, conclut au rejet de la requête, à ce que la CARENE lui verse la somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et à ce qu'il soit mis à la charge de la CARENE la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la responsabilité de la CARENE dans l'accident dont a été victime M. D..., usager de la voirie publique, est engagée en qualité de propriétaire de l'ouvrage public litigieux en raison d'un défaut d'entretien normal de cet ouvrage dès lors que le lien de causalité entre la déformation de la chaussée et l'accident est établi et qu'il ne peut être opposé une faute à la victime ; - la CARENE ne conteste pas le montant que lui a alloué le tribunal administratif au titre de l'indemnisation des prestations servies et de ses débours futurs, de sorte que le jugement attaqué devra être confirmé sur ce point. Par un mémoire, enregistrés les 23 février, M. A... D... et Mme C... D..., agissant en leur nom propre et en qualité d'ayants droit de F..., représentés par la SELAS Avici, concluent au rejet de la requête et par la voie de l'appel incident, à ce que le montant de la condamnation de la CARENE et de son assureur la Compagnie Areas Dommages à indemniser les préjudices propres de M. A... D... soit porté à la somme totale de 16 481 881,73 euros et à ce qu'il soit mis à la charge de la CARENE et son assureur la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : * la responsabilité de la CARENE est engagée pour défaut d'entretien normal d'un ouvrage public, en l'occurrence la chaussée, du fait de la présence d'un " nid de poule " alors qu'aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de la victime ; * les préjudices subis par M. A... D... s'élèvent aux sommes suivantes : - 1 346,99 euros au titre des frais divers avant consolidation restés à sa charge, ce qui comprend les frais d'acquisition de son fauteuil roulant électrique (600 euros) et le forfait annuel pour les réparations à effectuer sur le fauteuil roulant (746,99 euros) ; - 637 307 euros au titre de l'assistance par tierce personne avant consolidation, après déduction de la majoration tierce personne perçue durant cette période sur la base d'une assistance active de 5 heures 30 par jour et une assistance passive de 18 heures 30 par jour et d'un forfait horaire de 22 euros ; - 75 241,16 euros au titre de la perte de gains professionnels actuelle dès lors qu'à la date de l'accident, il percevait un salaire en étant en formation en 2ème année de CAP Boulangerie et qu'il aurait pu poursuivre sa formation jusqu'à la date de consolidation de son état de santé ; - 15,90 euros représentant le coût du tourne-clé qu'il a acquis ainsi que les frais d'acquisition (17 870,44 euros) et de remplacement (177 242,69 euros) du fauteuil roulant électrique restant à charge au titre des dépenses de santé futures ; - 13 585 941,09 euros au titre de l'assistance par tierce personne future ; - 906 495,46 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs dès lors qu'eu égard à son handicap, l'accès au monde du travail lui sera compliqué ; - 200 000 euros au titre de l'incidence professionnelle définitive compte tenu de la nécessité d'abandonner son projet professionnel et de sa dévalorisation sur le marché du travail ; - 14 195,25 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence évalués en tenant compte d'un déficit fonctionnel total pendant 1 089 jours, un déficit fonctionnel temporaire de 85% pendant 1 112 jours et un taux journalier de 27 euros ; - 50 000 euros au titre des souffrances endurées évaluées à 6 sur une échelle de 7 par l'expert ; - 25 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire évalué à 5 sur une échelle de 7 par l'expert; - 518 500 euros au titre du déficit fonctionnel permanent évalué par l'expert à 85 % du fait de la tétraplégie dont il reste atteint ; - 35 000 euros au titre du préjudice esthétique définitif évalué à 5 sur une échelle de 7 ; - 30 000 euros au titre du préjudice d'agrément spécifique dès lors que l'accès aux activités sportives et de loisirs lui est très retreint ; - 170 000 euros au titre du préjudice sexuel et d'établissement, l'expert concluant que le préjudice sexuel était constitué dans sa triple composante et qu'il aura des difficultés à fonder une vie familiale dans des conditions identiques à sa situation antérieure ; - les frais d'adaptation du véhicule sont mis en réserve jusqu'à l'obtention du permis de conduire et l'acquisition dudit véhicule ; * le jugement sera confirmé en tant qu'il alloue aux parents de M. A... E... une indemnité de 20 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. L'hirondel, - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - et les observations de Me Duneme représentant la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE), de Me Renaud représentant les consorts D... et de Me Meunier représentant la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique. Considérant ce qui suit : 1. Le 20 juillet 2013 aux environs de quinze heures, M. A... D..., alors âgé de 16 ans, a été victime d'un accident de motocyclette sur le territoire de la commune de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), à l'angle de l'avenue de Saint-Nazaire et du pont d'Y. Par un jugement avant dire droit du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Nantes a retenu la responsabilité de la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE), en sa qualité de gestionnaire de cette voie, l'a condamnée à verser la somme de 36 465 euros à M. D... au titre de l'assistance par tierce personne et la somme de 22 500 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, tels que ces deux préjudices avaient été évalués au 29 août 2017, date du premier rapport d'expertise. Par ce même jugement, le tribunal administratif a ordonné avant dire droit une seconde expertise aux fins de déterminer l'étendue des préjudices subis par M. D... après consolidation de son état de santé. L'expert, désigné par le tribunal le 21 novembre 2019, a rendu son rapport le 12 mai 2020. Par un second jugement du 5 octobre 2021, le tribunal administratif de Nantes a condamné la CARENE à verser, d'une part, à M. A... D... en son nom personnel et en sa qualité d'ayant-droit de son père décédé la somme totale de 924 819,93 euros ainsi qu'une rente annuelle d'un montant de 14 581 euros, à verser à compter du mois de novembre 2021, d'autre part, à Mme C... D... la somme de 20 000 euros et enfin, à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Loire-Atlantique une somme de 185 650,42 euros en remboursement de ses débours, cette somme portant intérêts au taux légal et capitalisation de ces intérêts et une somme de 1 098 euros en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. Par ce même jugement, le tribunal a condamné la CARENE à rembourser à la CPAM de la Loire-Atlantique, d'une part, les débours correspondant aux dépenses de santé futures de M. A... D... dans la limite du montant de 641 948,22 euros et sur présentation des justificatifs, d'autre part, les arrérages de pension d'invalidité à échoir à compter de ce jugement dans la limite du montant de 594 546,92 euros, également sur présentation des justificatifs. Il a enfin mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme totale de 4 200 euros, à la charge de la CARENE. Cette dernière et son assureur, la Compagnie Areas Dommages, relèvent appel des jugements du tribunal administratif de Nantes des 19 novembre 2019 et 5 octobre 2021. 2. Il appartient à l'usager d'un ouvrage public qui demande réparation d'un préjudice qu'il estime imputable à cet ouvrage de rapporter la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre le préjudice invoqué et l'ouvrage. Le maître de l'ouvrage ne peut être exonéré de l'obligation d'indemniser la victime qu'en rapportant, à son tour, la preuve soit de l'absence de défaut d'entretien normal, soit que le dommage est imputable à une faute de la victime ou à un cas de force majeure. 3. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'enquête des services de la police nationale du commissariat de Saint-Nazaire et du schéma que ces services ont réalisé, que l'accident dont M. A... D... a été victime, le 20 juillet 2013 est dû à une perte de contrôle de sa moto cross en raison " d'une déformation de la chaussée entraînant une perte d'adhérence des pneumatiques ". Selon le schéma réalisé par les services de police, cette portion de la chaussée présentait notamment sur l'axe central de la voie de circulation empruntée par M. D..., une malformation formée par un " nid de poule " avec en son centre, trois bouches du service des eaux, dites bouches à clé. Selon le rapport d'accident établi le 22 août 2013 par le service " Eau et assainissement " de la CARENE, des travaux d'assainissement ont été réalisés sur les lieux de l'accident dans le courant du deuxième trimestre 2012 consistant en une dépose et une repose de bouches à clé. 4. L'accident de M. D... trouve ainsi son origine dans la défectuosité de la chaussée formée par une excavation survenue à l'occasion de travaux d'assainissement réalisés au niveau des bouches à clé durant le deuxième trimestre 2012, soit près d'un an avant cet accident. Toutefois, ces bouches à clé situées sur la chaussée, si elles permettent d'accéder à la canalisation du réseau d'assainissement de la commune de Saint-Nazaire, constituent des ouvrages publics incorporés à la voie publique et ont la nature d'une dépendance nécessaire de celle-ci. Dans ces conditions, alors qu'elle n'est ni chargée de l'entretien de la voie publique, ni tenue de la maintenir avec tous ses accessoires dans un état conforme à sa destination, la CARENE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a engagé sa responsabilité à l'égard des intimés et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique en raison de l'accident dont a été victime M. D.... Par voie de conséquence, les conclusions incidentes présentées par les consorts D... tendant à la condamnation de la CARENE à les indemniser des préjudices qu'ils ont subis du fait de cet accident ne peuvent être que rejetées comme étant mal dirigées, de même que les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique tendant à ce que la CARENE lui verse la somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. 5. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. ". 6. Il y a lieu, dans circonstances très particulières de l'espèce, de laisser à la charge de la CARENE les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme totale de 4 200 euros. 7. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la CARENE, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme que les consorts D... et la CPAM de la Loire-Atlantique demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu, de mettre à la charge des consorts D... la somme demandée au même titre par la CARENE et la Compagnie Areas Dommages. DÉCIDE : Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Nantes des 19 novembre 2019 et 5 octobre 2021 sont annulés. Article 2 : La demande présentée par les consorts D... devant le tribunal administratif de Nantes et leurs conclusions présentées par voie d'appel incident sont rejetées. Article 3 : La demande présentée par la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique devant le tribunal administratif de Nantes et ses conclusions présentées par voie d'appel incident sont rejetées. Article 4 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme totale de 4 200 euros, sont mis à la charge définitive de la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire. Article 5 : Les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 6 : Le présent jugement sera notifié à la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire, à la Compagnie Areas Dommages, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique, à M. A... D... et à Mme C... D.... Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller, Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, M. L'hirondelLe président, D. Salvi La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03394
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2021 par lequel la préfète de l'Orne a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit d'office à l'expiration de ce délai. Par un jugement n° 2100254 du 27 mai 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 25 juin 2021, M. B... A..., représenté par Me Abdou-Saleye, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 27 mai 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2021 de la préfète de l'Orne ; 3°) d'enjoindre, sous astreinte, à la préfète de l'Orne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut, et dans les mêmes conditions d'astreinte, de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois en le mettant en possession d'un récépissé de demande de titre de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'État au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative la somme de 1 200 euros. Il soutient que : En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour : ­ elle a été prise sans qu'il soit procédé à un examen sérieux de sa situation dès lors que sa demande n'a pas été examinée sur le fondement de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ; ­ elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de cet accord compte tenu de la durée de son séjour en France et de sa situation financière stable alors qu'elle porte également atteinte à toute la communauté musulmane d'Alençon ; En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : ­ cette décision est illégale du fait de l'illégalité dont est entachée la décision portant refus de titre de séjour ; ­ elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination : ­ cette décision est illégale du fait de l'illégalité dont sont entachées les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français. Par un mémoire, enregistré le 6 avril 2022, la préfète de l'Orne conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : ­ le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation du requérant pour ne pas avoir apprécié cette situation au regard des stipulations de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 sera écarté dès lors qu'il est demandé une substitution de base légale qui ne prive pas l'intéressé d'une garantie ; ­ aucun des autres moyens de la requête n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier ; Vu ­ la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ­ l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ; ­ le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; ­ le code des relations entre le public et l'administration ; ­ le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. L'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., ressortissant marocain né le 1er juillet 1985, est entré en France le 16 juin 2015, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour délivré par les autorités espagnoles. Le 3 juillet 2019, il a sollicité de la préfète de l'Orne son admission exceptionnelle au séjour, qui a été implicitement rejetée. Il a déposé une nouvelle demande d'admission exceptionnelle au séjour le 21 août 2020. Par un arrêté du 8 janvier 2021, la préfète de l'Orne lui a refusé la délivrance de ce titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Caen du 27 mai 2021 rejetant sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté. Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour : 2. Il ressort des pièces du dossier, notamment de son courrier du 17 août 2020 et du formulaire CERFA qu'il a renseigné que M. A... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur afin que lui soit délivrée une carte de séjour mention " salarié ". En ce qui concerne la régularisation exceptionnelle au titre de la vie privée et familiale : 3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué mentionne les textes applicables à la situation du requérant, en particulier l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cet arrêté mentionne également les circonstances de fait propres à la situation personnelle et familiale de M. A..., en particulier qu'il n'a pas justifié dans sa demande de considérations humanitaires alors qu'il est célibataire et sans enfant à charge. Ce faisant, le préfet n'a pas méconnu l'office de l'administration quant à l'examen d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, en examinant la demande au titre de la vie privée et familiale. Le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la demande de régularisation doit, dès lors, être écarté. En ce qui concerne la régularisation exceptionnelle au titre d'une activité salariée : 4. En premier lieu, l'arrêté attaqué mentionne les textes applicables à la situation du requérant, en particulier l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cet arrêté mentionne également les conditions d'entrée et de séjour en France de M. A... et la circonstance que la production d'un contrat de travail, si elle crée une présomption favorable, est cependant insuffisante, en l'absence d'invocation d'autres motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires, pour justifier une admission exceptionnelle au séjour. Il suit de là que le requérant n'est pas fondé à soutenir que sa demande, en tant qu'elle tendait à obtenir la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " n'aurait pas fait l'objet d'un examen particulier. 5. En second lieu, en vertu des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles ". Aux termes de l'article 9 de ce même accord : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord ". 6. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation de la situation d'un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié. 7. Par ailleurs, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. En l'espèce, le refus de titre de séjour opposé à M. A... trouve son fondement légal dans l'exercice par le préfet du pouvoir de régularisation discrétionnaire dont il dispose, qui peut être substitué aux dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que cette substitution de base légale, demandée par le préfet de l'Orne et sur laquelle le requérant a pu présenter des observations devant la cour, n'a privé l'intéressé d'aucune garantie. Par suite, il y a lieu d'accueillir la demande de substitution de base légale demandée par le préfet. 8. Si M. A... soutient résider habituellement en France depuis 2015 et avoir exercé une activité professionnelle de juillet 2015 à décembre 2018 au sein de l'Association socio-culturelle Maghrébine à la Mosquée Attaqwa dans le département de l'Essonne, cette association, ainsi qu'il le précise, n'a pas été en mesure de lui proposer un contrat de travail. S'il a exercé une activité professionnelle au sein de l'association Mahabba d'Alençon d'abord sous contrat à durée déterminée puis sous contrat à durée indéterminée à compter de janvier 2019, cette activité est récente à la date de l'arrêté en litige et ne saurait établir, ainsi que l'a retenu l'autorité préfectorale, une insertion socioprofessionnelle dans la société française. Au surplus, ainsi qu'il ressort de son avis de situation déclarative 2020, l'intéressé n'a déclaré aucun revenu au titre de l'année 2019. Il suit de là, et à supposer même que l'association Mahabba d'Alençon rencontrerait des difficultés de recrutement, que compte tenu de la situation professionnelle et personnelle de M. A..., célibataire et sans charge de famille sur le territoire français et non dépourvu d'attaches familiales au Maroc, le rejet de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour n'était entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation à la date de l'arrêté attaqué. Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français : 9. En premier lieu, il résulte des motifs qui précèdent que M. A... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour. 10. En second lieu, M. A... reprend en appel le moyen déjà invoqué en première instance tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sans apporter aucune argumentation ni éléments nouveaux concernant sa situation personnelle. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 8 de leur décision. Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination : 11. Compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, M. A... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français pour demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination. 12. Il résulte de tout ce qui précède, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée, pour son information, à la préfète de l'Orne. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, M. L'HIRONDEL Le président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 2 N° 21NT01699
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Brest à lui verser la somme de 149 286,42 euros en réparation des préjudices résultant de sa prise en charge par cet établissement le 26 janvier 2011. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Finistère a demandé au tribunal de condamner le centre hospitalier universitaire de Brest à lui verser la somme de 160 176,80 euros ou, à défaut la somme de 64 070,72 euros, au titre de ses débours. Par un jugement n°1805567 du 8 octobre 2021, le tribunal administratif de Rennes a condamné le centre hospitalier universitaire de Brest à verser à M. C... la somme de 34 221,68 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère la somme de 63 057,93 euros au titre de ses débours. Procédure devant la cour : I. Par une requête enregistrée le 8 décembre 2021 sous le numéro 21NT03440 et un mémoire enregistré le 29 décembre 2021, le centre hospitalier universitaire de Brest, représenté par Me Le Prado, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ; 2°) de rejeter les demandes de M. C... et de la CPAM du Finistère devant le tribunal ; 3°) de rejeter les conclusions présentées par la voie de l'appel incident par M. C.... Il soutient que : - le jugement est insuffisamment motivé au regard des conclusions dont le tribunal a été saisi ; - c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a jugé qu'il avait commis une faute dans la prise en charge de M. C..., dès lors qu'aucune maladresse chirurgicale fautive dans cette prise en charge n'est établie ; - en tout état de cause, l'évaluation par le tribunal de certains préjudices invoqués doit être réduite : * l'indemnité allouée, sur la base d'un montant de 537 euros par mois, au titre du déficit fonctionnel temporaire est excessive ; * les indemnités allouées au titre des souffrances endurées et du déficit fonctionnel permanent doivent être ramenées à de plus justes proportions ; - c'est à tort que le tribunal administratif a jugé qu'il devait être condamné à verser à la CPAM du Finistère la somme correspondant à la différence entre la pension de catégorie 1 et la pension de catégorie 2 que M. C... perçoit depuis 31 août 2013, dès lors que l'invalidité de ce dernier est lié à une fragilité des membres supérieurs et n'a donc pas de lien direct avec la faute en litige ; - les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. Par des mémoires en défense enregistrés les 10 décembre 2021 et 27 janvier 2022, M. C..., représenté par Me Cartron, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête du centre hospitalier universitaire de Brest ; 2°) par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement du 8 octobre 2021 en ce qu'il a limité la somme que le centre hospitalier est condamné à lui verser à un montant de 34 221,68 euros et de la porter à un montant global de 151 898,38 euros, assorti des intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2018 et de leur capitalisation ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire ou, à titre subsidiaire de l'ONIAM, la somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - le centre hospitalier universitaire a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, dès lors que plusieurs maladresses techniques ont été commises lors de sa prise en charge, qui sont en lien direct avec les dommages subis découlant d'une plaie urétérale et d'une fistule urétro-colique ; - si la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Brest pour faute n'était pas retenue, l'indemnisation des préjudices subis incomberait à l'ONIAM au titre de la solidarité nationale en application des dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dès lors que les dommages subis sont imputables à un acte de soin et ont entraîné un déficit fonctionnel temporaire supérieur à 50% pendant une durée de deux ans et demi sans interruption ; - le taux de perte de chance d'éviter le dommage retenu ne saurait être inférieur à 40% ; - il a subi des préjudices qui doivent être évalués aux sommes de : * 3 967,66 euros au titre des frais divers, * 5 255,76 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels, * 15 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, * 11 063 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire, * 35 000 euros au titre des souffrances endurées, * 20 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, * 37 800 euros au titre de son déficit fonctionnel permanent, * 8 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, * 15 000 euros au titre du préjudice sexuel. Par un mémoire en défense enregistré le 5 janvier 2022, la CPAM du Finistère, représentée par Me Paublan, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête du CHU de Brest ; 2°) de mettre à la charge du centre hospitalier somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et celle de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens soulevés par le centre hospitalier universitaire de Brest ne sont pas fondés. II. Par une requête enregistrée sous le numéro 21NT03771 le 10 décembre 2021, M. C..., représenté par Me Cartron, demande à la cour : 1°) de réformer le jugement du 8 octobre 2021 en ce qu'il a limité la somme que le centre hospitalier est condamné à lui verser à un montant de 34 221,68 euros et de la porter à un montant global de 151 898,38 euros, assorti des intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2018 et de leur capitalisation ; 2°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire ou, à titre subsidiaire de l'ONIAM, la somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le centre hospitalier universitaire a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, dès lors que plusieurs maladresses techniques ont été commises lors de sa prise en charge, qui sont en lien direct avec les dommages subis découlant d'une plaie urétérale et d'une fistule urétro-colique ; - si la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Brest pour faute n'était pas retenue, l'indemnisation des préjudices subis incomberait à l'ONIAM au titre de la solidarité nationale en application des dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dès lors que les dommages subis sont imputables à un acte de soin et ont entraîné un déficit fonctionnel temporaire supérieur à 50% pendant une durée de deux ans et demi sans interruption ; - le taux de perte de chance d'éviter le dommage retenu ne saurait être inférieur à 40% ; - il a subi des préjudices qui doivent être évalués aux sommes de : * 3 967,66 euros au titre des frais divers, * 5 255,76 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels, * 15 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, * 11 063 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire, * 35 000 euros au titre des souffrances endurées, * 20 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, * 37 800 euros au titre de son déficit fonctionnel permanent, * 8 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, * 15 000 euros au titre du préjudice sexuel. Par un mémoire en défense enregistré le 8 mars 2022, le centre hospitalier universitaire de Brest, représenté par Me Le Prado, conclut au rejet de la requête par les mêmes moyens que ceux exposés dans l'affaire n° 21NT03771. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - l'arrêté du 14 décembre 2021 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour l'année 2022 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - et les observations de Me Demailly, représentant le CHU de Brest, et de Me Cartron, représentant M. C.... Considérant ce qui suit : 1. Au mois de mars 2010, il a été diagnostiqué chez M. C..., né le 3 mai 1958, un cancer du tiers inférieur du rectum. Il a été pris en charge au CHU de Brest pour cette affection, qui a donné lieu à un traitement par radio-chimiothérapie, ainsi que, le 26 janvier 2011, à une intervention chirurgicale par colo-proctectomie gauche avec résection inter sphinctérienne et anastomose colo-anale en losange, et iléostomie temporaire de décharge. A la suite de cette intervention, une plaie de l'uretère gauche et une fistule urétrale ont été découvertes. Le 4 mars 2011, les sondes de néphrostomie gauche et droite de M. C... ont été remplacées et une sonde urétérale droite a été rajoutée. Ces sondes ont été changées à plusieurs reprises durant des interventions au cours desquelles une persistance des lésions a été constatée. Le 11 juin 2013, M. C... a été opéré au CHU Saint Antoine à Paris par laparotomie d'un abaissement trans-mésentrique du côlon extériorisé à l'anus, sous couvert d'une iléostomie latérale. Lors de cette intervention, une nécrose de l'uretère gauche a été constatée. A la suite de celle-ci, une insuffisance rénale aigüe associée a justifié le transfert de M. C... en service de réanimation du 17 au 21 juin 2013. M. C... a de nouveau été opéré les 3 et 23 juillet 2013 puis enfin le 3 mars 2014 pour une ablation de la sonde gauche. Restant atteint de séquelles importantes, l'intéressé a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI). Après la réalisation d'une expertise par un chirurgien urologue et un chirurgien viscéral, qui ont adressé le 29 novembre 2015 leur rapport à CCI, celle-ci a, par un avis du 25 février 2016, rejeté la demande indemnitaire de M. C.... Le 17 juillet 2018, M. C... a adressé au CHU de Brest une réclamation indemnitaire préalable qui a été rejetée par une décision du 24 octobre 2018. Par un jugement du 10 juin 2020, dont le centre hospitalier universitaire de Brest relève appel par la requête n° 21NT03440, le tribunal administratif de Rennes l'a condamné à verser à M. C... la somme de 34 221,68 euros et à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère la somme de 63 057,93 euros au titre de ses débours. Par la voie de l'appel incident dans l'affaire n° 21NT03440 et par la requête n° 21NT03771, M. C... demande que la somme que le centre hospitalier a été condamné à lui verser soit portée à un montant global de 151 898,38 euros. 2. Les requêtes n° 21NT03440 et n° 21NT03771 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par un même arrêt. Sur la responsabilité du CHU de Brest : 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ". 4. Il résulte de l'instruction, compte tenu notamment des conclusions du rapport de l'expertise diligentée par la CCI, que le dommage dont a été victime M. C... résulte d'une plaie urétérale et d'une fistule urétro-colique. Les experts désignés par la CCI ont estimé que le risque de survenance, dans le type d'opération subie, d'une plaie urétérale demeurait faible, de 1 à 6%, et celui de survenance d'une fistule urétro-colique restait exceptionnel. Il résulte également de l'instruction que la plaie urétérale est survenue lors de la dissection du rectum au cours de l'intervention chirurgicale du 26 janvier 2011 et a entraîné une anomalie de drainage des urines du rein homolatéral, une hyperpression dans les cavités excrétrices, conduisant à la destruction du rein adjacent. Toutefois, M. C... avait subi un traitement par radio-chimiothérapie avant d'être opéré le 26 janvier 2011, qui a eu pour effet de fragiliser les tissus et les conditions de réalisation de l'opération chirurgicale, qui impliquait d'opérer sur une zone à proximité de l'uretère, augmentait le risque de plaie de cet organe. De plus, la radiothérapie favorise la survenance d'une nécrose localisée et donc d'une fistule. Dans ces circonstances, la cour ne dispose pas d'éléments d'appréciation suffisants pour statuer sur le présent litige et en particulier pour déterminer si la survenance d'une plaie urétérale au cours de l'intervention en cause, et d'une fistule urétro-colique, au cours ou au décours de cette intervention, est de nature à établir l'existence d'une maladresse fautive dans l'exécution de celle-ci, de nature à engager la responsabilité du CHU de Brest. 5. Il s'ensuit, dès lors, que d'une part, il y a lieu d'ordonner, avant dire droit, une nouvelle expertise médicale et que, d'autre part, la responsabilité de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) étant susceptible d'être engagée au titre de la solidarité nationale, dans le cas où l'accident médical subi par M. C... présenterait un caractère non fautif, il y a lieu d'appeler cet office à la cause. DÉCIDE : Article 1er : L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales est appelé à la cause. Article 2 : Il est ordonné, avant de statuer sur les conclusions de la requête, une expertise confiée à un chirurgien viscéral et à un chirurgien urologue. Ces experts auront pour mission : - de se faire communiquer tous documents utiles à l'accomplissement de leur mission et notamment ceux qui sont relatifs aux suivi médical, interventions, soins et traitements dont M. C... a fait l'objet au CHU de Brest ; - de déterminer si l'intervention chirurgicale du 26 janvier 2011, pratiquée sur M. C..., a été réalisée en conformité avec les règles de l'art médical et, en particulier, si la plaie urétérale et la fistule urétro-colique subies découlent de maladresses chirurgicales, compte tenu de l'état de santé de l'intéressé ; - de donner à la cour toute information ou appréciation utile sur les degrés de fréquence respectifs des plaies urétérales et des fistules urétro-coliques survenant à l'occasion du type d'opération chirurgicale subie par M. C.... Article 2 : L'expertise sera menée contradictoirement entre le CHU de Brest, la CPAM du Finistère, M. C... et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales. Article 3 : Les experts seront désignés par le président de la cour. Ils accompliront leur mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Le rapport d'expertise sera déposé en deux exemplaires dans un délai de trois mois à compter de la date de notification du présent arrêt. L'expert en notifiera des copies aux parties intéressées. Article 4 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin de l'instance. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au centre hospitalier universitaire régional de Brest, à la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Brisson, présidente, - M. L'hirondel, premier conseiller, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe 17 juin 2022. Le rapporteur, X. B...La présidente, C. BRISSON La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 Nos 21NT03440, 21NT03471
JADE/CETATEXT000045931517.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La communauté de communes de l'Oust à Brocéliande communauté a demandé au tribunal administratif de Rennes : - à titre principal, de condamner in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, les sociétés Amlin et Assurances Pilliot à lui verser la somme de 1 204 215,12 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprises résultant des désordres affectant la piscine couverte de Malestroit, la somme de 420 614,67 euros toutes taxes comprises au titre des préjudices consécutifs subis et la somme de 25 425,22 euros au titre des frais d'expertise judiciaire ; - à titre subsidiaire, de condamner in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, les sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes, AEMCO et la société Archibald, prise en la personne de Me Virginie Faure, en sa qualité de liquidateur de la société Allouche, à lui verser la somme de 1 204 215,12 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprises résultant des désordres affectant la piscine couverte de Malestroit, la somme de 420 614,67 euros toutes taxes comprises au titre des préjudices consécutifs subis, la somme de 25 425,22 euros au titre des frais d'expertise judiciaire ; - à titre très subsidiaire, de condamner in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, les sociétés Amlin et Assurances Pilliot à lui verser, la somme de 1 003 512,60 euros hors taxe au titre des travaux de reprises résultant des désordres affectant la piscine couverte de Malestroit, la somme de 350 512,23 euros hors taxe au titre des préjudices consécutifs subis, la somme de 220 226,96 euros au titre des préjudices résultant du montant de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) non déductible supportée au titre des travaux de reprise et des préjudices consécutifs subis, la somme de 25 425,22 euros au titre des frais d'expertise judiciaire ; - à titre encore plus subsidiaire, de condamner in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, les sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes, AEMCO et la société Archibald, prise en la personne de Me Virginie Faure, en sa qualité de liquidateur de la société Allouche, à lui verser la somme de 1 003 512,60 euros hors taxe au titre des travaux de reprise résultant des désordres affectant la piscine couverte de Malestroit, la somme de 350 512,23 euros hors taxe au titre des préjudices consécutifs subis, la somme de 220 226,96 euros au titre des préjudices résultant du montant de la TVA non déductible supportée au titre des travaux de reprise et des préjudices consécutifs subis, la somme de 25 425,22 euros au titre des frais d'expertise judiciaire ; - à titre extrêmement subsidiaire, de condamner in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, les sociétés Amlin et Assurances Pilliot à lui verser la somme de 1 003 512,60 euros hors taxe au titre des travaux de reprises résultant des désordres affectant la piscine couverte de Malestroit, la somme de 350 512,23 euros hors taxe comprises au titre des préjudices consécutifs subis, la somme de 25 425,22 euros au titre des frais d'expertise judiciaire ; - à titre infiniment subsidiaire, de condamner in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, les sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes, AEMCO et la société Archibald, prise en la personne de Me Virginie Faure, en sa qualité de liquidateur de la société Allouche, à lui verser la somme de 1 003 512,60 euros hors taxe au titre des travaux de reprise résultant des désordres affectant la piscine couverte de Malestroit, la somme de 350 512,23 euros hors taxe au titre des préjudices consécutifs subis, la somme de 25 425,22 euros au titre des frais d'expertise judiciaire ; - de décider que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de l'enregistrement de la requête et que ces intérêts seront capitalisés chaque année à la date anniversaire de l'enregistrement ; - de mettre à la charge, in solidum ou à défaut chacun pour son fait ou sa faute, des sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes, AEMCO, de la société Archibald, prise en la personne de Me Virginie Laure, en sa qualité de liquidateur de la société Allouche et des sociétés Amlin et Assurances Pilliot, le paiement d'une somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1704158 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Rennes a jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions présentées par la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté tendant à la condamnation des sociétés Amlin Insurance SE et Assurances Pilliot à lui verser une somme de 498 598,70 euros hors taxe au titre des travaux de reprises résultant des désordres affectant la piscine couverte de Malestroit (article 1er), a condamné la société Amlin Insurance SE à verser à la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté une somme de 99 719,74 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux travaux de reprise garantis (article 2), a condamné la société Allouche à verser à la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté une somme de 264 294 euros TTC au titre des préjudices consécutifs et dommages collatéraux résultant de l'arrêt des travaux de construction de la piscine couverte de Malestroit (article 3), a condamné la société Allouche à verser à la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté une somme de 25 425,22 euros au titre des dépens de l'instance (article 4), a jugé que la somme mentionnée à l'article 4 du jugement portera intérêts à compter du 19 septembre 2017 et que les intérêts échus à la date du 19 septembre 2018 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés (article 5), a condamné la société Allouche à verser une somme de 1 000 euros à la communauté de communes et une somme globale de 1 000 euros aux sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes et BTP Consultants au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 6), a rejeté le surplus des conclusions de la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté (article 7), a condamné la société Allouche à verser une somme de 498 598,70 euros à la société Amlin Insurance SE au titre des travaux de reprise que celle-ci a garantis (article 8), a rejeté le surplus des conclusions reconventionnelles de la société Amlin Insurance SE (article 9), a rejeté les conclusions présentées à fin d'appel en garantie par la société Amlin Insurance SE ainsi que par les sociétés Octant Architecture et Bleher Architectes, par la société Allianz Iard et par la société Sebat (article 10), a rejeté les conclusions présentées par les sociétés Assurances Pilliot et Amlin Insurance SE, par la société AEMCO, par la société Allianz Iard et par la société Sebat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 11). Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 3 septembre 2021, la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté, représentée par Me Fekri, demande à la cour : 1°) de réformer ce jugement du 8 juillet 2021 du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; 2°) de condamner in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, les sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes et la société Archibald, prise en la personne de Me Virginie Faure en sa qualité de liquidateur de la société Allouche, à lui verser la somme de 5 694 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprise résultant des désordres affectant la piscine couverte de Malestroit et la somme de 600 202,68 euros toutes taxes comprises au titre des dommages collatéraux résultant des désordres affectant ladite piscine, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de la requête et capitalisation annuelle de ces intérêts ; 3°) de condamner in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, les sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes, la société Archibald, prise en la personne de Me Virginie Faure en sa qualité de liquidateur de la société Allouche, et la société AEMCO à lui verser la somme de 420 614,67 euros toutes taxes comprises au titre des préjudices consécutifs subis et la somme de 25 425,22 euros au titre des frais d'expertise judiciaire, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de la présente requête et capitalisation annuelle ; 4°) de mettre à la charge, in solidum ou à défaut chacun pour son fait ou sa faute, des sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes et Archibald, prise en la personne de Me Virginie Laure en sa qualité de liquidateur de la société Allouche, le paiement d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la responsabilité de la maitrise d'œuvre est engagée ; les sociétés Octant Architecture et Bleher Architecte ont manqué à leurs obligations au titre de leurs missions de direction et de suivi de l'exécution des travaux et de conseil du maitre d'ouvrage ; elles n'ont jamais décidé ou conseillé au maitre d'ouvrage de suspendre l'exécution des travaux du fait des désordres et non-conformités des travaux réalisés par la société Allouche, aisément observables, après avoir tardé à les relever ; elles n'ont pas tout fait pour faire cesser l'apparition de désordres ; l'expert a relevé ces manquements dans la surveillance du chantier ; leur condamnation in solidum avec la société Allouche sera alors prononcée ; - ses préjudices au titre des dommages collatéraux seront indemnisés selon les conclusions de l'expert pour un total de 594 982,68 euros TTC complétée par les coûts de remise en eau des bassins et de chauffage pour 5 220 euros TTC ; la somme de 600 202,68 euros TTC sera mise à la charge des sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes et Archibald ès qualités de liquidateur de la société Allouche ; - ses préjudices au titre des préjudices consécutifs seront indemnisés selon les conclusions de l'expert pour un total de 344 398,69 € auxquelles il faut ajouter 9 931,58 euros au titre de frais de consommation électrique, d'eau et de surveillance ; la somme de 420 614,67 euros TTC sera mise à la charge des sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes et Archibald ès qualités de liquidateur de la société Allouche. Par des mémoires enregistrés les 2 décembre 2021 et 6 avril 2022, les société MS Amlin Insurance SE, venant aux droits de la société Amlin Europe NV, et Assurances Pilliot, représentées par Me Houle, demandent à la cour : 1°) de réformer le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses demandes de condamnation des sociétés Allouche, représentée par son liquidateur, Octant Architecture, Bleher Architectes, Soja Ingénierie, Sebat et AEMCO, à garantir la compagnie MS Amlin Insurance SE de toutes condamnations prononcées à son encontre ; 2°) de condamner in solidum les sociétés Allouche, représentée par son liquidateur judiciaire, AEMCO, Octant Architecture, Bleher Architectes, Soja Ingénierie et Sebat ainsi que les sociétés Allianz Iard et MAF à verser à la compagnie MS Amlin Insurance SE la somme de 598 317,84 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter de la notification de son mémoire en date du 8 janvier 2021 devant le tribunal administratif avec capitalisation ; 3°) de condamner in solidum les sociétés Allouche, représentée par son liquidateur judiciaire, AEMCO, Octant Architecture, Bleher Architectes, Soja Ingénierie et Sebat à garantir et relever indemne la compagnie MS Amlin Insurance SE de toutes condamnations prononcées à son encontre ; 4°) de limiter la garantie de la compagnie MS Amlin Insurance SE à l'égard de la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande communauté au montant des seuls préjudices garantis, dont doivent être déduits le montant des dommages correspondant à la part de responsabilité de la société AEMCO et de condamner en conséquence la communauté de communes à lui restituer l'indemnité versée par cet assureur à hauteur de la part de responsabilité de la société AEMCO ; 5°) de rejeter les demandes présentées par les sociétés Allianz et AEMCO ; 6°) de condamner in solidum les sociétés Allouche, représentée par son liquidateur, Octant Architecture, Bleher Architecte, AEMCO, MAF et Allianz IARD aux dépens ; 7°) de mettre à la charge in solidum des sociétés Allouche, représentée par son liquidateur, Octant Architecture, Bleher Architecte, AEMCO, MAF et Allianz IARD une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - le cabinet Pilliot, simple intermédiaire sans qualité d'assureur, sera mis hors de cause ; - ses conclusions d'appel sont recevables compte-tenu du recours subrogatoire dont elle peut se prévaloir sur le fondement de l'article L. 121-12 du code des assurances, et qui a été rejeté à tort par le tribunal administratif ; elle est également subrogée conventionnellement sur le fondement de l'article 346-1 du code civil ; - elle sera également garantie en cas de condamnation complémentaire décidée par la cour par les sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes et BTP Consultants ; - il sera fait droit à ses demandes indemnitaires présentées en qualité de subrogée dans les droits de son assurée, la communauté de communes, pour un montant de 598 317,84 euros TTC tel qu'il résulte du rapport d'expertise ; elle ne conteste pas sa garantie pour ce montant et cette somme a été versée, ainsi que la TVA correspondante ; - son recours subrogatoire et en garantie est dirigé contre les constructeurs responsables des désordres et leurs assureurs ; - la responsabilité de la société Allouche et celle de son assureur sont engagées eu égard aux conclusions de l'expert ; celle des membres de la maitrise d'œuvre et de leurs assureurs est également engagée eu égard aux conclusions de l'expert s'agissant de l'étanchéité et pour manquement dans le suivi et le contrôle des travaux ainsi dans que sa surveillance ; la responsabilité de la société AEMCO sera engagée pour défaut de surveillance dans l'exécution du chantier et manquement à son obligation de conseil en raison de l'absence de préconisation de l'arrêt du chantier ; - les condamnations seront prononcée in solidum eu égard aux responsabilités en présence, notamment de la maitrise d'œuvre, dans la survenance d'un même dommage. Par des mémoires enregistrés les 23 décembre 2021 et 8 avril 2022, la société Allianz IARD, représentée par Me Stricot, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures : 1°) de rejeter toute demande présentée à son encontre ; 2°) de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a écarté la responsabilité contractuelle de la société AEMCO et des sociétés Octant Architecture, Bleher Architecte, Soja Ingénierie et Sebat et de condamner en conséquence ces sociétés à indemniser la communauté de communes des préjudices matériels, dégâts collatéraux et préjudices consécutifs subis sur la base des imputabilités retenues par l'expert judiciaire ; 3°) de condamner la société MS Amlin Insurance SE, ou toute autre partie perdante, aux dépens ; 4°) de mettre à la charge des sociétés MS Amlin Insurance SE, ou de toute autre partie perdante, une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative Elle soutient que : - la juridiction administrative est incompétente pour connaitre des conclusions présentées par la société MS Amlin Insurance SE à son encontre, présentées par un assureur à l'encontre de l'assureur d'un constructeur sur le fondement d'une police d'assurance de droit privé ; subsidiairement, aucune garantie n'est en l'espèce mobilisable au regard des polices souscrites par la société Allouche auprès de l'exposante (police de responsabilité civile des entrepreneurs et artisans de construction / police réalisateurs d'ouvrages de construction ) ; - eu égard notamment aux conclusions de l'expert, il y a lieu de reconnaitre la responsabilité des sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes et AEMCO dans les désordres constatés, à hauteur des imputabilités fixées par l'expert ; les demandes indemnitaires complémentaires présentées par la communauté de communes seront rejetées comme injustifiées ou non établies. Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2022, la société Atelier Périnet-Marquet et Associés, venant au droit de la société Octant architecture, et la société Bleher Architectes, représentées par Me Caron, demandent à la cour : 1°) de rejeter la requête de la communauté de commune de L'Oust à Brocéliande Communauté ; 2°) de rejeter les conclusions d'appel provoqué des sociétés MS Amlin Insurance SE et Allianz IARD ; 3°) subsidiairement, par la voie de l'appel provoqué : * de condamner les sociétés Soja Ingénierie et Sebat à les garantir des condamnations qui seraient mises à leur charge à hauteur de 25 % et à défaut d'arrêter un partage de responsabilité entre les membres du groupement de maîtrise d'œuvre à hauteur des manquements qui leur seraient éventuellement imputés ; * de condamner les sociétés Allouche, en la personne de son liquidateur la société Archibald représentée par Me Virginie Laure, et AEMCO à les garantir des condamnations mises à leur charge à hauteur respectivement de 100 % (ou à défaut 80 %) et de 5 % au minimum ; * de limiter le montant des condamnations aux sommes de 5 694 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres qui ne sont pas de nature décennale, 258 600 euros TTC au titre des dégâts collatéraux ainsi que des préjudices consécutifs du maître d'ouvrage et 25 425,22 euros TTC au titre des frais de l'expertise judiciaire ; 4°) de mettre à la charge de la communauté de communes de L'Oust à Brocéliande Communauté et des sociétés MS Amlin Insurance SE et Allianz IARD une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - les conclusions de la communauté de communes les concernant sont irrecevables dès lors qu'elle n'est pas lésée par l'absence de condamnation des exposantes et que son assureur dommages ouvrages a été condamné à verser les sommes dues au titre des travaux de reprise des désordres à caractère décennal ; si besoin elle peut solliciter la garantie de l'assureur de la société Allouche ; - en tout état de cause les moyens soulevés par la communauté de communes ne sont pas fondés ; - les conclusions des sociétés Amlin Insurance SE et Allianz IARD seront rejetées pour irrecevabilité ; la communauté de communes n'a pas présenté de conclusions à leur encontre et leurs situations ne seront pas aggravées par l'arrêt à intervenir ; en tout état de cause les moyens soulevés par ces sociétés ne sont pas fondés ; - subsidiairement, si les demandes de condamnation présentées contre les exposantes étaient accueillies, elles seront garanties par leurs cotraitantes, les sociétés Soja Ingénierie et Sebat à hauteur de 25 % chacune ; le défaut de surveillance des travaux vise, en l'absence de répartition des tâches et compte-tenu de la grille de répartition du forfait, l'ensemble du groupement de maîtrise d'oeuvre ; les sociétés Allouche, en la personne de son liquidateur, et AEMCO garantiront les requérantes à hauteur de 100 %, ou à défaut de 80 % pour la première, et de 5 % pour la seconde par référence aux conclusions de l'expert et aux réalités établies de déroulement du chantier ; le montant des condamnations sera limité aux sommes de 5 694 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres qui ne sont pas de nature décennale, 258 600 euros TTC au titre des dégâts collatéraux ainsi que des préjudices consécutifs du maître d'ouvrage et 25 425,22 euros TTC au titre des frais de l'expertise judiciaire. Par un mémoire enregistré le 1er mars 2022, la société AEMCO, représentée par Me Constantini, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête de la communauté de commune de L'Oust à Brocéliande Communauté ; 2°) de rejeter toutes les demandes présentées à son encontre ; 3°) de mettre à la charge de la communauté de communes de L'Oust à Brocéliande Communauté une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par la communauté de communes ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 11 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 8 avril 2022. Un mémoire présenté pour la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté par Me Fekri a été enregistré le 14 avril 2022, soit après la clôture de l'instruction. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des assurances ; - le code civil ; - le code des marchés publics ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Pons, rapporteur public, - et les observations de Me Geffroy, représentant la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté, de Me Roussarie, représentant les sociétés Atelier Périnet-Marquet et Associés et Bleher Architectes et de Me Frej, représentant les sociétés MS Amlin Insurance SE et Assurances Pilliot. Considérant ce qui suit : 1. La communauté de communes du Val d'Oust et de Lanvaux, devenue le 1er janvier 2017 de l'Oust à Brocéliande Communauté, a décidé en 2010 de se doter à Malestroit d'une piscine couverte comprenant un bassin de natation, une zone ludique et une pataugeoire. Elle a chargé, le 10 juin 2010, la société AEMCO d'un marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage. La maîtrise d'œuvre de cette opération a été confiée, par acte d'engagement du 21 janvier 2014, à un groupement composé de la société Octant Architecture, mandataire, de la société Bleher Architectes, de la société Soja Ingénierie et de la société Sebat. La société BTP Consultants a été chargée d'assurer la mission de contrôle technique. Le chantier de construction de cette piscine a débuté le 16 septembre 2015 après la souscription le 27 août 2015 par la communauté de communes d'un contrat d'assurance dommages-ouvrage auprès d'un groupement composé des sociétés Assurances Pilliot, courtier et mandataire, et Amlin Insurance, assureur. Selon le calendrier des travaux, les prestations de la société Allouche, attributaire par un acte d'engagement du 18 août 2015 du lot n° 8 " Étanchéité liquide - Revêtements des sols et muraux carrelés ", devaient être exécutées entre le 10 juin 2016 et le 23 janvier 2017. Toutefois, les visites de chantiers effectuées ont révélé, dès le 28 juillet 2016, des malfaçons sur les chapes et revêtements mis en œuvre et ont conduit le contrôleur technique à émettre, à deux reprises, des avis défavorables. La demande adressée, par ordre de service du 22 décembre 2016, par la société Bleher Architectes à la société Allouche, de reprendre les travaux et de lever l'avis défavorable du contrôleur technique étant restée vaine, la société Ginger CEBTP a été mandatée pour réaliser des sondages contradictoires en présence d'un huissier et procéder à des investigations techniques. Son rapport remis le 27 janvier 2017 a confirmé une faible résistance à la traction et une absence de cohésion minimale de la chape en mortier. Malgré les demandes réitérées qui lui ont été adressées, la société Allouche a refusé de procéder à la dépose des chapes de scellement et des revêtements associés et à la reprise des ouvrages. Par courrier du 3 mars 2017, le maître d'ouvrage a mis en demeure l'entrepreneur de se conformer à l'ordre de service du 8 février 2017 par lequel le maître d'œuvre lui enjoignait de reprendre les ouvrages. L'abandon du chantier par la société Allouche, qui a fait l'objet d'une mise en liquidation judiciaire par jugement du 16 mai 2017, a été constaté le 4 avril 2017. La communauté de communes a effectué une première déclaration de sinistre, le 22 juin 2017, auprès du courtier d'assurances Pilliot, concernant des malfaçons sur carrelages " pieds nus " et l'abandon de chantier, puis une seconde déclaration, le 11 juin 2018, concernant un défaut d'étanchéité constaté au niveau des goulottes. A deux reprises, et après expertise sur place, l'assureur a fait valoir que la garantie dommages-ouvrage n'était pas acquise pour de tels dommages. Le 4 septembre 2019, l'expert désigné en référé par le président du tribunal administratif de Rennes a remis un rapport constatant, sur le chantier à l'arrêt de la piscine, l'existence de désordres consistant en des défauts de cohésion de la chape en mortier et de résistance à l'arrachement des revêtements carrelage sur les zones des plages des bassins, des douches et sanitaires, des vestiaires individuels et collectifs et des casiers, des défauts d'étanchéité au droit des goulottes de bassin et, plus généralement, des défauts sur l'ensemble des travaux effectués par la société Allouche. 2. Par un jugement du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Rennes a jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions présentées par la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté tendant à la condamnation des sociétés Amlin Insurance et Assurances Pilliot à lui verser une somme de 498 598,70 euros hors taxe au titre des travaux de reprises résultant des désordres affectant la piscine couverte de Malestroit (article 1er), a condamné la société Amlin Insurance à verser à la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté une somme de 99 719,74 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux travaux de reprise garantis (article 2), a condamné la société Allouche à verser à la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté une somme de 264 294 euros TTC au titre des préjudices consécutifs et dommages collatéraux résultant de l'arrêt des travaux de construction de la piscine couverte de Malestroit (article 3), a condamné la société Allouche à verser à la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté une somme de 25 425,22 euros au titre des dépens de l'instance (article 4), a jugé que la somme mentionnée à l'article 4 du jugement portera intérêts à compter du 19 septembre 2017 et que les intérêts échus à la date du 19 septembre 2018 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés (article 5), a condamné la société Allouche à verser une somme de 1 000 euros à la communauté de communes et une somme globale de 1 000 euros aux sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes et BTP Consultants au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 6), a rejeté le surplus des conclusions de la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté (article 7), a condamné la société Allouche à verser une somme de 498 598,70 euros à la société Amlin Insurance au titre des travaux de reprise que celle-ci a garantis (article 8), a rejeté le surplus des conclusions reconventionnelles de la société Amlin Insurance (article 9), a rejeté les conclusions présentées à fin d'appel en garantie par la société Amlin Insurance ainsi que par les sociétés Octant Architecture et Bleher Architectes, par la société Allianz Iard et par la société Sebat (article 10), a rejeté les conclusions présentées par les sociétés Assurances Pilliot et Amlin Insurance, par la société AEMCO, par la société Allianz Iard et par la société Sebat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 11). 3. La communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de ses demandes présentées à l'encontre des constructeurs, de la maitrise d'œuvre et de la société en charge de l'assistance à la maitrise d'ouvrage. La société MS Amlin Insurance SE, assureur de la communauté de communes, demande principalement pour sa part la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin de condamnation des sociétés Allouche, représentée par son liquidateur, Octant Architecture, Bleher Architectes, Soja Ingénierie, Sebat et AEMCO, à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre, la condamnation in solidum des sociétés Allouche, représentée par son liquidateur judiciaire, AEMCO, Octant Architecture, Bleher Architectes, Soja Ingénierie et Sebat ainsi que les sociétés Allianz Iard et MAF à lui verser la somme de 598 317,84 euros TTC avec les intérêts et leur capitalisation, la condamnation in solidum des sociétés Allouche, représentée par son liquidateur judiciaire, AEMCO, Octant Architecture, Bleher Architectes, Soja Ingénierie, Sebat à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre et la condamnation de la communauté de communes à lui restituer une partie de la somme qu'elle lui a versée en sa qualité d'assureur dommage-ouvrage . Par des conclusions d'appel provoqué, la société Allianz IARD demande de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a écarté la responsabilité contractuelle de la société AEMCO et des sociétés Octant Architecture, Bleher Architectes, Soja Ingénierie et Sebat et de condamner en conséquence ces sociétés à indemniser la communauté de communes des préjudices matériels, dégâts collatéraux et préjudices consécutifs subis sur la base des imputabilités retenues par l'expert judiciaire. Sur les conclusions d'appel principal de la communauté de communes : 4. La communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté a obtenu du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, la condamnation de la société Allouche à lui verser la somme de 5 694 euros TTC à titre d'indemnisation de ses préjudices liés aux travaux propres à remédier aux désordres et non-conformités affectant les travaux réalisés par cette société titulaire du lot n° 8 " Étanchéité liquide - Revêtements des sols et muraux carrelés ", ainsi que la somme de 264 294 euros TTC au terme d'une juste appréciation, au titre de sa demande d'indemnisation de " dégâts collatéraux " et de " préjudices consécutifs " à ces travaux. 5. En premier lieu, la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté sollicite la réformation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas reconnu la responsabilité des sociétés Octant Architecture et Bleher Architectes, membres du groupement de maitrise d'œuvre. Alors même que les premiers juges ont donné satisfaction à la communauté de communes requérante en lui accordant la somme susmentionnée à titre indemnitaire, celle-ci est néanmoins recevable à demander en appel, ainsi qu'elle l'avait fait en première instance, une condamnation solidaire au titre de ce même préjudice. Toutefois, en l'espèce, il résulte de l'instruction, notamment du calendrier d'exécution des travaux de la piscine et des compte- rendus de chantier, qu'alors que la réception des supports à la suite desquels la société Allouche devait réaliser les prestations lui incombant est intervenue entre le 17 février et le 15 avril 2016, les premiers travaux de cette société consistant en la réalisation de deux dalles ont débuté respectivement à compter des 10 juin et 23 juin 2016. Un temps a ensuite été accordé pour le séchage afin de vérifier l'étanchéité de ces ouvrages. Puis, la réalisation des chapes ayant débuté le 25 juillet 2016, dès le 28 juillet suivant la maitrise d'œuvre a indiqué à la société Allouche que la chape ciment réalisée dans les vestiaires était refusée et lui a demandé de reprendre son travail. Les comptes-rendus de chantier ultérieurs attestent également d'un suivi rigoureux du chantier par la maitrise d'œuvre avec des interpellations régulières et claires de la société Allouche sur les défauts constatés dans la réalisation des travaux effectués, et plus largement sur la qualité de ceux-ci, accompagnées de demandes de reprise. Le 21 novembre 2016 la maitrise d'œuvre a ainsi adressé à l'entreprise un courrier explicite demandant la réalisation de diverses tâches pour le 24 novembre suivant. Le 8 février 2017, face à l'inertie de la société Allouche, le maître d'œuvre a signé un ordre de service exigeant la reprise des travaux de carrelage et de chape de diverses zones précisément définies de l'équipement en cours de construction. Plus largement, plusieurs malfaçons relevées par l'expert ont fait l'objet de demandes d'intervention par la maitrise d'œuvre auprès de la société Allouche. Par ailleurs n'est établi aucun défaut de conseil à la maitrise d'ouvrage par les sociétés Octant Architecture et Bléher Architectes, étant relevé qu'il n'y a pas eu d'opération de réception en l'espèce des travaux du lot n° 8 en raison de l'abandon du chantier par l'entreprise. Dans ces conditions, alors même que l'expert avait proposé de reconnaitre la responsabilité des deux sociétés en retenant un défaut de surveillance des travaux, il ne résulte pas de l'instruction que leur serait imputable un manquement susceptible de fonder l'engagement de la responsabilité contractuelle des maitres d'œuvre, en particulier au titre de leur mission de direction de l'exécution des travaux (DET). Enfin, si dans ses conclusions la communauté de communes demande également la condamnation solidaire de la société AEMCO, titulaire d'un marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage, au titre des seuls préjudices dits " consécutifs " elle n'expose pas les motifs pour lesquels une telle condamnation devrait être prononcée et ne présente de moyens qu'à l'encontre des sociétés Octant Architecture et Bleher Architectes. Par suite, la communauté de communes n'est pas fondée à demander la condamnation solidaire des sociétés Octant Architecture et Bleher Architectes avec la société Allouche à l'indemniser des préjudices nés de l'exécution particulièrement défaillante des travaux réalisés par cette dernière, ni celle de la société AEMCO au titre des préjudices dits consécutifs. 6. En deuxième lieu, la communauté de communes de l'Oust à Brocéliande Communauté demande la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a limité à la somme de 215 500 euros HT, soit 264 294 euros TTC, au terme d'une juste appréciation, son indemnisation au titre de ses " préjudices collatéraux " et de ses " préjudices consécutifs ". D'une part, il ne peut être fait droit aux demandes de réévaluation de cette indemnisation présentées par la communauté de communes qui ne sont pas établies par la production de factures, s'agissant essentiellement des dommages dits collatéraux. D'autre part, en l'absence persistante d'explication sur les conditions de reprise de certains des équipements et matériaux déposés après les travaux réalisés par la société Allouche, avant leur remplacement, dont la requérante demande la prise en charge financière, il n'est pas établi de montant précis de la créance de la communauté de communes, en particulier au titre du changement de matériel neuf pour les postes " chauffage ventilation plomberie " et " traitement d'eau et animations aquatiques ". Plus largement, les éléments présentés ne permettent pas de déterminer précisément les sommes exposées du seul fait des fautes commises par la société Allouche dans l'exécution du lot qui lui avait été attribué, qui sont distinctes des conséquences de son placement ultérieur en liquidation judiciaire à la suite de son abandon du chantier. De même, l'imputabilité de certains postes de préjudice aux seuls manquements de l'entreprise n'apparaît pas clairement établie, y compris en appel, s'agissant par exemple des frais de consommation d'électricité. En revanche, afin de prendre en compte plus précisément les sommes exposées par la communauté de communes au titre des frais des " préjudices consécutifs ", qui couvrent pour partie des sommes exposées et justifiées en lien avec les fautes de la société Allouche, et par référence au rapport d'expertise, il y a lieu, au terme d'une juste appréciation, de porter la somme globale due par la société Allouche au titre des préjudices collatéraux et consécutifs subis par la communauté de communes à la somme de 300 000 euros TTC. La somme complémentaire de 35 706 euros ainsi allouée portera intérêts à compter du 3 septembre 2021, date d'enregistrement de la requête de la communauté de communes, sans qu'il y ait lieu en l'espèce à capitalisation de ces intérêts. 7. Il résulte de tout ce qui précède que la communauté de communes est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a limité à 264 294 euros TTC le montant dû par la société Allouche au titre de ses préjudices consécutifs et dommages collatéraux résultant des fautes commises par cette société dans l'exécution du lot n° 8 " Etanchéité liquide - Revêtements des sols et muraux carrelés " lors de la construction de la piscine de Malestroit. Sur les conclusions d'appel provoqué de la société Allianz IARD : 8. La société Allianz IARD, assureur de la société Allouche, demande à titre principal la condamnation des sociétés AEMCO, Octant Architecture, Bleher Architectes, Soja Ingénierie et Sebat à indemniser la communauté de communes des préjudices matériels, dégâts collatéraux et préjudices consécutifs subis, sur la base des imputabilités retenues par l'expert judiciaire. Ces conclusions sont dirigées non contre l'appelante mais contre d'autres intimés et s'analysent ainsi comme des conclusions d'appel provoqué. Or, ce qui est jugé sur l'appel principal n'aggrave pas la situation de la société Allianz IARD. Par suite, ses conclusions d'appel provoqué, au surplus nouvelles en appel, ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables. Sur les conclusions de la société MS Amlin Insurance SE : 9. La société MS Amlin Insurance SE, assureur dommages ouvrage de la communauté de communes au titre de l'opération de construction de la piscine, demande la réformation du jugement attaqué en tant qu'il l'a déboutée de sa demande de condamnation solidaire des sociétés Allouche, Octant Architecture, Bleher Architectes, Soja Ingénierie, Sebat, AEMCO, et de leurs assureurs, à lui verser la somme de 598 317,84 euros TTC et à la garantir intégralement de toute condamnation prononcée à son encontre. Ces conclusions sont dirigées non contre l'appelante mais contre d'autres intimés et s'analysent ainsi comme des conclusions d'appel provoqué. Or, ce qui est jugé sur l'appel principal n'aggrave pas la situation de la société MS Amlin Insurance SE. Par suite, ces conclusions d'appel provoqué ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables. 10. D'autre part, la société MS Amlin Insurance SE demande la condamnation de la communauté de communes à lui restituer la part de la somme qu'elle lui a versée en sa qualité d'assureur dommages ouvrage correspondant à celle qui aurait pu être versée à la communauté de communes par la société AEMCO si la responsabilité de cette société avait été reconnue. Toutefois, même si la responsabilité de cette société avait été reconnue par les premiers juges et qu'une indemnité avait été mise en conséquence à sa charge, cette somme aurait été versée à la société MS Amlin Insurance SE, ainsi qu'il a été décidé à l'article 8 du jugement attaqué pour la société Allouche, dès lors qu'elle aurait correspondu à des dommages entrant dans le champ de la garantie prévue par le contrat liant cette compagnie d'assurance et la communauté de communes. Inversement, si cette somme avait correspondu à des dommages exclus de ce contrat, aucune somme n'aurait due être restituée par la communauté de communes à son assureur qui n'aurait pu alors se prévaloir de sa qualité de subrogé dans les droits de son assurée. Par suite, et en tout état de cause, les conclusions de la société MS Amlin Insurance SE tendant à la restitution par la communauté de communes d'une somme à ce titre ne peuvent qu'être rejetées. Sur les dépens : 11. Le jugement attaqué met à la charge de la société Allouche la somme de 25 425,22 euros correspondant aux dépens de l'instance tels qu'ils résultent de l'ordonnance de taxation du 28 octobre 2019 du président du tribunal administratif de Rennes au titre des frais et honoraires de l'expert désigné et qui avaient été avancés par la seule communauté de communes. Eu égard à ce qui précède sur la responsabilité de la seule société Allouche, les conclusions présentées par la société MS Amlin Insurance SE tendant à la condamnation in solidum des sociétés Allouche, Octant Architecture, Bleher Architectes et AEMCO ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais d'instance : 12. Aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". 13. Il convient, dans les circonstances de l'espèce, sur le fondement de ces dispositions, de mettre à la charge de la société Allouche la somme de 1 500 euros au bénéfice de la communauté de communes de L'Oust à Brocéliande Communauté. Dès lors que seule la société Allouche est tenue aux dépens, les demandes présentées sur le même fondement par les sociétés Atelier Périnet-Marquet et associés, Bleher Architectes et AEMCO à l'égard d'autres parties ne peuvent qu'être rejetées. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par les sociétés MS Amlin Insurance SE et Allianz IARD. D E C I D E : Article 1er : La somme de 264 294 euros TTC que la société Allouche a été condamnée à payer à la communauté de communes de L'Oust à Brocéliande Communauté par l'article 3 du jugement attaqué est portée à 300 000 euros TTC. La somme supplémentaire de 35 706 euros ainsi mise à la charge de la société Allouche portera intérêts à compter du 3 septembre 2021. Article 2 : L'article 3 du jugement n° 1704158 du 8 juillet 2021 du tribunal administratif de Rennes est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt. Article 3 : La société Allouche versera à la communauté de communes de L'Oust à Brocéliande Communauté la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes de L'Oust à Brocéliande Communauté, à la société Atelier Périnet-Marquet et Associés venant aux droits de la société Octant architecture, à la société Bleher Architectes, à la société Allouche représentée par la société Archibald prise en la personne de Me Laure, liquidateur judiciaire, à la société MS Amlin Insurance SE, à la société Assurances Pilliot, à la société BTP consultants, à la société AEMCO, à la société MAF Assurances, à la société Allianz IARD, à la société Soja Ingénierie et à la société d'études du bâtiment et des travaux publics. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, C. A... Le président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT02507
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 29 octobre 2019 par lequel le préfet du Morbihan lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours hiérarchique. Par un jugement no 2101836 du 5 juillet 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 21 juillet 2021 et un mémoire du 24 mai 2022, M. A..., représenté par Me Degiovanni, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 5 juillet 2021 ; 2°) d'annuler la décision du préfet du Morbihan du 29 octobre 2019 et la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours hiérarchique ; 3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " avec autorisation de travail ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros. Il soutient que : - la décision contestée est insuffisamment motivée ; - le préfet n'a pas respecté la procédure contradictoire ; - la décision méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision méconnait les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle. Par des mémoires en défense enregistré les 31 mars et 25 mai 2022, non communiqué, le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête. Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. A... n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant comorien, est entré irrégulièrement en France en avril 2012 selon ses déclarations. Il a sollicité le 27 novembre 2017 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 29 octobre 2019, le préfet du Morbihan a rejeté sa demande. Le 23 décembre suivant, M. A... a formé un recours hiérarchique contre cette décision. Ce dernier relève appel du jugement du 5 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de la décision du préfet du Morbihan du 29 octobre 2019 et de la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours hiérarchique. 2. En premier lieu, le requérant reprend en appel les moyens invoqués en première instance, tirés de ce que la décision contestée est insuffisamment motivée et n'a pas été précédée de la procédure contradictoire prévue à l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...). ". 4. Il est constant que M. A... a des liens familiaux en France où résident ses enfants, dont deux sont nés antérieurement à l'édiction de la décision contestée, ainsi que la mère de ces derniers, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 9 février 2027, avec laquelle il est pacsé depuis le 29 janvier 2018. Toutefois, le préfet du Morbihan, tout en relevant ces éléments, a rejeté la demande de titre de séjour présentée par l'intéressé en se fondant sur la circonstance que le comportement de ce dernier témoignait d'un défaut d'insertion dans la société française. Cette dernière circonstance ressort des pièces du dossier, dès lors que M. A... a été condamné, le 3 juillet 2019, à 3 mois d'emprisonnement avec sursis par le tribunal correctionnel de Lorient pour fraude à l'identité, cette condamnation, très récente à la date de la décision contestée, manifestant un défaut de connaissance des valeurs de la République. De plus, si M. A... a pu exercer une activité salariée en France, ses conditions d'existence n'étaient pas stables, dès lors que cet emploi a été obtenu par le biais de documents entachés de fraude. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... serait dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Par suite, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en regardant le requérant comme ne remplissant pas les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur leur fondement. 5. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, et alors qu'au demeurant la décision refusant de délivrer un titre de séjour au requérant n'a pas pour effet par elle-même de séparer ce dernier des membres de sa famille, cette décision n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise et n'est pas entachée une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation de l'intéressé. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise, pour information, au préfet du Morbihan. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Brisson, présidente - M. L'hirondel, premier conseiller, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, X. B...La présidente, C. Brisson La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N°21NT01990
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 10 septembre 2019 par laquelle le ministre des solidarités et de la santé a rejeté sa demande d'autorisation d'exercer la profession de chirurgien-dentiste en France et d'enjoindre au ministre des solidarités et de la santé de lui délivrer cette autorisation ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande, dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir. Par un jugement n° 1902578 du 21 décembre 2020, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 février et 29 octobre 2021, M. C... A..., représenté par Me Thomas, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 21 décembre 2020 du tribunal administratif de Caen ; 2°) d'annuler la décision du 10 septembre 2019 par laquelle le ministre des solidarités et de la santé a refusé de lui attribuer l'autorisation d'exercer la profession de chirurgien-dentiste en France ; 3°) d'enjoindre au ministre des solidarités et de la santé de lui délivrer l'autorisation d'exercer la profession de chirurgien-dentiste dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - alors même qu'il est de nationalité syrienne, dès lors qu'il est titulaire d'un titre de long séjour en France, il bénéficie des droits conférés par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; il ne peut donc lui être opposé qu'il ne pourrait se prévaloir des articles 49 et 53 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et des droits que lui confère ce traité ; en l'espèce la Roumanie a reconnu son diplôme dans les conditions prévues par la directive 2005/36/CE ; - la décision ministérielle est irrégulière en ce qu'il n'a pas été procédé à un examen complet de sa demande d'exercice, dans le respect de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE 14 septembre 2000 n° C-238/98 et CJUE 8 juillet 2021 n° C-166/20) alors qu'il lui a été opposé un défaut d'exercice de sa profession pendant trois ans en Roumanie ; la directive 2005/36/CE, telle que transposée en droit français à l'article L. 4111-2 du code de la santé publique, ne régit pas sa situation dès lors qu'il ne justifie pas de trois ans d'exercice dans l'Etat membre qui a reconnu son titre étranger ; sa situation ne doit donc être examinée qu'au regard de l'arrêt Hocsman ; en conséquence il sera fait droit à sa demande dans le respect des conditions minimales de formation fixées par la directive citée ou à tout le moins après appréciation du fait qu'il a acquis les connaissances et qualifications non attestées en prenant en compte ses qualifications obtenues en Syrie et en France ; - la décision est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'en tout état de cause il justifie de formations et pratiques en chirurgie dentaire validées en France et d'une expérience professionnelle ancienne. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 septembre 2021, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; - la directive n° 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 ; - la directive n° 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 ; - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de M. Pons, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. C... A..., ressortissant syrien et détenteur à la date de la décision contestée d'une carte de résident en France valable jusqu'au 2 novembre 2025 en qualité de réfugié, est titulaire d'un diplôme de docteur en médecine dentaire, spécialité " médecin stomatologue ", délivré en juin 2004 par l'université de Louhansk (Ukraine). Le 29 décembre 2016 il a obtenu un certificat de reconnaissance de ces années d'études délivré par le ministère de l'éducation nationale et de la recherche scientifique de la Roumanie, complété par une reconnaissance du ministère roumain de la santé du 28 février 2017 de son droit à " pratiquer la profession de médecin dentiste sous condition de respect de toutes les dispositions en vigueur ". L'intéressé a ensuite obtenu, en France, un diplôme d'études approfondies en stomatologie pédiatrique, délivré conjointement le 21 juillet 2017 par le groupe d'étude et de recherche en stomatologie pédiatrique, le collège de médecine des hôpitaux de Paris et le collège des stomatologistes et chirurgiens maxillo-faciaux de France. En 2017, M. A... a formulé une demande d'autorisation d'exercer la profession de chirurgien-dentiste en France. Par une décision du 14 septembre 2018, le centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière a refusé d'instruire sa demande en raison de l'incomplétude de son dossier. Le dossier du requérant a néanmoins ensuite été inscrit à l'ordre du jour de la commission d'autorisation d'exercice compétente. Après avis, le 28 juin 2019, de cette commission, le ministre des solidarités et de la santé a refusé à l'intéressé la délivrance de l'autorisation sollicitée par une décision du 10 septembre 2019. Par un jugement du 21 décembre 2020, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de cette décision. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique : " I. Le ministre chargé de la santé ou, sur délégation, le directeur général du Centre national de gestion peut, après avis d'une commission comprenant notamment des délégués des conseils nationaux des ordres et des organisations nationales des professions intéressées, choisis par ces organismes, autoriser individuellement à exercer les personnes titulaires d'un diplôme, certificat ou autre titre permettant l'exercice, dans le pays d'obtention de ce diplôme, certificat ou titre, de la profession de médecin, dans la spécialité correspondant à la demande d'autorisation, chirurgien-dentiste, le cas échéant dans la spécialité correspondant à la demande d'autorisation, ou de sage-femme. / Ces personnes doivent avoir satisfait à des épreuves anonymes de vérification des connaissances, organisées par profession et, le cas échéant, par spécialité, et justifier d'un niveau suffisant de maîtrise de la langue française. (....) / Le nombre maximum mentionné à l'alinéa précédent n'est pas opposable aux réfugiés, apatrides, bénéficiaires de l'asile territorial et bénéficiaires de la protection subsidiaire (...). / II. L'autorité compétente peut également, après avis d'une commission composée notamment de professionnels, autoriser individuellement à exercer la profession de médecin dans la spécialité concernée, de chirurgien-dentiste, le cas échéant dans la spécialité, ou de sage-femme les ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, titulaires de titres de formation délivrés par un Etat tiers, et reconnus dans un Etat, membre ou partie, autre que la France, permettant d'y exercer légalement la profession. S'agissant des médecins et, le cas échéant, des chirurgiens-dentistes, la reconnaissance porte à la fois sur le titre de base et sur le titre de spécialité. / L'intéressé justifie avoir exercé la profession, le cas échéant dans la spécialité, pendant trois ans à temps plein ou à temps partiel pendant une durée totale équivalente dans cet Etat, membre ou partie./ Dans le cas où l'examen des qualifications professionnelles attestées par l'ensemble des titres de formation initiale, de l'expérience professionnelle pertinente et de la formation tout au long de la vie ayant fait l'objet d'une validation par un organisme compétent fait apparaître des différences substantielles au regard des qualifications requises pour l'accès à la profession et son exercice en France, l'autorité compétente exige que l'intéressé se soumette à une mesure de compensation dans la spécialité ou le domaine concerné./ Selon le niveau de qualification exigé en France et celui détenu par l'intéressé, l'autorité compétente peut soit proposer au demandeur de choisir entre un stage d'adaptation ou une épreuve d'aptitude, soit imposer un stage d'adaptation ou une épreuve d'aptitude, soit imposer un stage d'adaptation et une épreuve d'aptitude. (...) ". 3. Par ailleurs, aux termes de l'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. La libre circulation des travailleurs est assurée à l'intérieur de l'Union. / 2. Elle implique l'abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail. (...) " et aux termes de l'article 49 du même Traité : " Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un État membre dans le territoire d'un autre État membre sont interdites. (...) ". 4. En vertu de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment, en dernier lieu, de son arrêt C-166/20 du 8 juillet 2021, il découle des articles 45 et 49 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, que, lorsque les autorités d'un Etat membre sont saisies par un ressortissant de l'Union d'une demande d'autorisation d'exercer une profession dont l'accès est, selon la législation nationale, subordonné à la possession d'un diplôme, d'une qualification professionnelle ou encore à des périodes d'expérience pratique, et que, faute pour le demandeur d'avoir obtenu un titre de formation le qualifiant, dans l'Etat membre d'origine, pour y exercer une profession réglementée, sa situation n'entre pas dans le champ d'application de la directive 2005/36 modifiée, elles sont tenues de prendre en considération l'ensemble des diplômes, certificats et autres titres, ainsi que l'expérience pertinente de l'intéressé, en rapport avec cette profession, acquis tant dans l'Etat membre d'origine que dans l'Etat membre d'accueil, en procédant à une comparaison entre d'une part les compétences attestées par ces titres et cette expérience et, d'autre part, les connaissances et qualifications exigées par la législation nationale. 5. Il est constant qu'à la date de la décision ministérielle contestée M. A... était de nationalité syrienne, bénéficiant de la qualité de réfugié reconnue par la France et disposant en conséquence d'une carte de résident délivrée le 3 novembre 2015 pour dix ans. Si la directive 2003/109/CE du Conseil relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée précise en son article 11 que le résident de longue durée bénéficie de l'égalité de traitement avec les nationaux en ce qui concerne la reconnaissance des diplômes, certificats et autres titres professionnels, la décision contestée porte non sur une telle reconnaissance mais sur le refus opposé par le ministre chargé de la santé à M. A... d'exercer la profession de chirurgien-dentiste en France. Dans ces conditions, eu égard à sa nationalité syrienne, les moyens soulevés par M. A... tirés de la méconnaissance des articles 45 et 49 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et, plus largement, de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne citée au point précédent sont inopérants. 6. Pour le même motif tenant à sa nationalité, M. A... ne peut utilement se prévaloir des dispositions du II de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique qui régit la situation des seuls ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, étant observé que le I de ce même article régit la situation des autres demandeurs d'une autorisation individuelle d'exercice de la profession de chirurgien-dentiste, dont, explicitement, ceux bénéficiant de la qualité de réfugié. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit au regard des dispositions du II de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique et de l'erreur manifeste d'appréciation ne peuvent qu'être écartés. 7. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais d'instance : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par M. A.... D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et à la ministre de la santé et de la prévention. Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, C. B... Le président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de la prévention en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00501
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... D... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2021 par lequel le préfet du Morbihan lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai. Par un jugement no 2100723 du 20 mai 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 15 juin 2021, Mme D..., représentée par Me Fleck, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 20 mai 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Morbihan du 14 janvier 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan de réexaminer sa situation ; 4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - le refus de séjour contesté est entaché d'une erreur de fait, dès lors qu'elle est entrée de façon irrégulière sur le territoire français, munie d'un visa délivré par les autorités allemandes ; - il méconnaît les dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa vie de famille et personnelle. Par un mémoire en défense enregistré le 20 avril 2022, le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête. Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par Mme D... n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme D..., ressortissante camerounaise née le 15 octobre 1973, est entrée en France en 2015, puis une nouvelle fois en décembre 2018 et, enfin, le 18 juin 2019 en bus, après être passée par l'Allemagne, qui lui avait délivré un visa d'entrée sur son territoire. Après s'être mariée avec M. C..., ressortissant français, le 9 novembre 2019, elle a sollicité, le 22 septembre 2020, la délivrance d'un titre de séjour en se prévalant de ce mariage. Par un arrêté du 14 janvier 2021, notamment fondé sur les 4° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que sur l'article L. 313-14 de ce code, le préfet du Morbihan a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle était susceptible d'être reconduite d'office. Mme D... relève appel du jugement du 20 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté. 2. En premier lieu, d'une part, l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990, stipule que : " I- Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. / Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie contractante sur lequel ils pénètrent (...) ". Aux termes de l'article R. 211-33 alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La déclaration d'entrée sur le territoire français est souscrite auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale. / A cette occasion, un récépissé est remis à l'étranger. Il peut être délivré par apposition d'une mention sur le document de voyage. / L'étranger assujetti à l'obligation de déclaration doit être en mesure de justifier, à toute réquisition des agents de l'autorité, qu'il a satisfait à cette obligation, par la production de ce récépissé. (...) ". De plus, lorsqu'un étranger entre ou séjourne sur le territoire métropolitain sans souscrire à la formalité de déclaration s'il y est astreint, il peut, en vertu des dispositions de l'article L. 531-2 du même code, être remis aux autorités compétentes de l'État membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire ou dont il provient directement. La souscription de la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et dont l'obligation figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un État partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. ". 4. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D... aurait souscrit la déclaration prévue à l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, qui constitue une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention l'ayant admis à entrer ou à séjourner sur son territoire. Dans ces conditions, et alors même qu'elle était munie d'un visa court séjour délivré par les autorités allemandes, son entrée en France était irrégulière, ainsi que l'a relevé l'administration. Les moyens tirés de ce que le préfet du Morbihan aurait commis une erreur de fait, aurait méconnu les dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou aurait commis une erreur de droit au regard de ces dispositions ne peuvent donc qu'être écartés. 5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". 6. Si Mme D... est mariée avec M. C..., un ressortissant français, ce mariage, dont aucun enfant n'était issu, était récent, à la date de l'arrêté contesté, puisqu'il datait d'un peu plus d'un an. De plus, la requérante n'était pas, malgré ses activités bénévoles, particulièrement insérée dans la société française, où elle était, en particulier, dépourvue d'emploi. En outre, il demeure loisible à Mme D..., ainsi que l'a relevé le préfet, dans son arrêté, de solliciter la délivrance d'un visa de long séjour en sa qualité de conjoint de ressortissant français auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises à l'étranger et notamment au Cameroun, où l'intéressée a vécu l'essentiel de son existence. Dans ces conditions, l'obligation de quitter le territoire français en litige ne porte pas au respect de la vie privée et familiale de la requérante, garanti par les stipulations citées au point précédent, une atteinte disproportionnée au regard des buts dans lesquels cette décision a été prise et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation de l'intéressée. 7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... épouse C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise, pour information, au préfet du Morbihan. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Brisson, présidente ; - M. Catroux, premier conseiller ; - M. L'hirondel, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, X. A...La présidente, C. Brisson La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N°21NT01610
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... B..., M. H... F... et Mme C... F... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'ordonner une expertise médicale et de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers à leur verser la somme de 11 328 789,20 euros en réparation du préjudice subi par Adeline F... à l'occasion de sa prise en charge par cet établissement et à Mme B... et M. F... la somme globale de 389 858,72 euros en réparation des préjudices que ces derniers estiment avoir subis. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire-Atlantique a demandé au tribunal de condamner le centre hospitalier universitaire d'Angers à lui verser la somme provisoire de 1 103 495 euros au titre de ses débours. Par un jugement n°1605980 du 31 octobre 2018, le tribunal administratif de Nantes a ordonné avant-dire droit une expertise médicale. Par un jugement n°1605980 du 13 janvier 2021, il a condamné le centre hospitalier universitaire d'Angers à verser à Mme C... F... une indemnité d'un montant de 1 023 143,22 euros et une indemnité d'un montant de 39 585,68 euros, sous déduction des aides financières ayant le même objet déjà perçues, ainsi qu'une rente trimestrielle viagère d'un montant de 22 102,50 euros ou de 34 608 euros, selon qu'elle bénéficie ou non d'une AESH, et à Mme E... B... et M. F... une somme de 404 942,51 euros en réparation des préjudices subis par leur fille et des sommes respectives de 45 289 euros et de 26 530,44 euros en réparation de leurs préjudices propres. Par ce même jugement, le tribunal a condamné le CHU d'Angers à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique la somme de 1 103 495 euros au titre de ses débours. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 12 mars, 12 avril 2021, 24 août 2021 et 21 février 2022, le centre hospitalier universitaire d'Angers, représenté par Me Le Prado, demande à la cour : 1°) d'annuler les jugements du tribunal administratif de Nantes des 31 octobre 2018 et 13 janvier 2021 ; 2°) de rejeter les demandes de Mmes B..., de M. F... et de la CPAM de la Loire-Atlantique devant le tribunal. Il soutient que : - le jugement est insuffisamment motivé au regard des conclusions dont le tribunal a été saisi ; - c'est donc à tort que le tribunal a jugé que l'intervention chirurgicale réalisée sur Mme B..., le 7 décembre 2000, au CHU d'Angers devait être regardée comme directement à l'origine de l'infection dont elle a été victime et que cette infection, présentant, en l'absence d'une cause endogène, un caractère nosocomial, révélait une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier ; - l'absence alléguée de délivrance, le 23 décembre 2000, à Mme B... de l'information relative à la présence de l'infection nosocomiale au niveau du site opératoire et à la possibilité que cette infection passe dans le liquide amniotique et entraîne un accouchement prématuré ne constitue pas une faute de nature à engager sa responsabilité, dès lors que la prise en charge de l'infection n'aurait pas été différente si Mme B... avait été correctement informée ; - la mise sous antibiotique n'a pas été tardive ; - il n'est pas établi que Mme B... ait été atteinte d'une chorioamniotite ; - le lien direct de causalité entre l'infection en cause et l'accouchement prématuré n'est pas établi, dès lors que cette prématurité peut découler de plusieurs autres facteurs ; - il n'est pas établi que les séquelles subies par Adeline F..., dont l'origine est particulière complexe à déterminer, étaient directement et uniquement liées à l'intervention de cholécystectomie de Mme B... du 7 décembre 2000 ; - à titre subsidiaire, il est utile d'ordonner une expertise complémentaire ; - en tout état de cause, l'évaluation par le tribunal de certains préjudices invoqués doit être réduite : * la somme allouée au titre des besoins en assistance par tierce personne est excessive, compte tenu du montant du salaire de référence des personnes employées augmenté des charges sociales pour les périodes considérées ; la rente trimestrielle viagère allouée doit être versée au prorata du temps effectivement passé à domicile ; les justificatifs fournis concernant les prestations dont bénéficie Adeline F... sont insuffisamment probants ; * les sommes allouées aux titres de l'incidence du préjudice scolaire et des souffrances endurées devront être ramenées respectivement à des montants de 80 000 euros, 10 000 euros et 25 000 euros ; * la somme allouée au titre du préjudice sexuel et du préjudice d'établissement devra être ramenée à un montant global de 50 000 euros. * c'est à tort que le tribunal a réservé l'évaluation des pertes de gains professionnels futurs, la perte de chance d'obtenir une promotion et la perte de l'épanouissement personnel et social au travail en considérant qu'ils revêtaient un caractère futur, dès lors que la demande au titre des pertes de gains professionnels qui ne sont qu'éventuelles, devait être rejetée et que la perte de chance d'obtenir une promotion et la perte de l'épanouissement personnel et social au travail sont réparée par la somme allouée au titre de l'incidence professionnelle ; - la demande au titre du préjudice d'impréparation doit être rejetée et en tout état de cause, la somme allouée à ce titre doit être ramenée à de plus justes proportions ; - les nombreuses hospitalisations que faisait valoir la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique dans le remboursement de ses débours n'ont pas été mentionnées dans le rapport d'expertise et doivent être rejetées ; - les sommes demandées au titre des frais d'appareillages sont excessives ; - le centre hospitalier universitaire d'Angers s'étant opposé à la capitalisation des frais futurs devant les premiers juges, le tribunal ne pouvait pas y faire droit. Par des mémoires en défense enregistrés les 24 novembre et 22 décembre 2021 Mme E... B..., M. H... F... et Mme C... F..., représentés par la Selarl Asfar Pineau, demandent à la cour : 1°) de rejeter la requête du centre hospitalier universitaire d'Angers ; 2°) par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement du 13 janvier 2021 et de porter l a somme que le centre hospitalier doit être condamné à verser à Mme C... F... au titre des pertes de gains professionnels futurs et de l'incidence professionnelle à 1 061 310,47 euros ; ces sommes devant être assorties des intérêts au taux légal et de leur capitalisation ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire des sommes de 5 000 euros à verser à chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils font valoir que : - Mme B... a été victime d'une infection nosocomiale, par staphylocoque doré, suite à la cholécystectomie qu'elle a subie, qui s'est transmise par voie intra-utérine à Mme C... F... ; - l'infection nosocomiale de Mme B... a provoqué la naissance prématurée de Mme C... F..., cette prématurité ayant été à l'origine, avec l'infection nosocomiale dont a aussi été victime l'enfant, de la leucomalacie périventriculaire et de l'infirmité motrice cérébrale dont cette dernière souffre depuis sa naissance ; - en tout état de cause, le CHU d'Angers n'apporte pas la preuve, dont la charge lui incombe, du caractère endogène de la bactérie à l'origine de l'infection en litige ; - la responsabilité du CHU d'Angers pour faute est aussi engagée en raison d'un retard de diagnostic et de traitement de cette infection profonde du site opératoire compte tenu de l'état de grossesse qui aurait dû rendre les médecins plus vigilants ; - le CHU d'Angers a manqué à son obligation en matière d'information ; - une expertise complémentaire serait inutile ; - les sommes allouées aux titres des besoins d'assistance par tierce personne, de l'incidence du préjudice scolaire, des souffrances endurées, du préjudice sexuel et du préjudice d'établissement ne sont pas excessives ; - l'indemnisation des pertes de gains professionnels futurs et de l'incidence professionnelle subies par Mme C... F... devra être portée à la somme de 1 061 310,47 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 25 novembre 2021, la CPAM de la Loire-Atlantique, représentée par Me Simon, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête du CHU d'Angers ; 2°) de porter l'indemnité forfaitaire de gestion mise à sa charge à 1 098 euros ; 3°) d'assortir la somme que le CHU d'Angers a été condamné à lui verser de la capitalisation des intérêts à compter du 25 novembre 2021, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ; 4°) de mettre à la charge du centre hospitalier la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - la responsabilité du centre hospitalier universitaire d'Angers est engagée, dès lors que Mme B... a été victime d'une infection nosocomiale à la suite de sa cholécystectomie, qui a provoqué la naissance prématurée de Mme C... F..., cette prématurité ayant été à l'origine, avec l'infection nosocomiale dont a aussi été victime l'enfant, de la leucomalacie périventriculaire et de l'infirmité motrice cérébrale dont cette dernière souffre depuis sa naissance ; - il existe un lien de causalité exclusif entre l'infection nosocomiale et l'accouchement prématuré, dès lors que le 8 décembre 2000, Mme B... n'avait pas de contractions, mais surtout des douleurs et que l'examen obstétrical réalisé le 21 décembre 2000 faisait état d'une absence de menace d'accouchement prématuré ; - à titre subsidiaire, et à supposer que Mme B... était porteuse du germe responsable de l'infection ou que l'infection n'ait pas été la cause exclusive du handicap de Mme F..., la responsabilité du CHU devrait être engagée à raison du retard dans la prise en charge médicale de l'infection présentée par Mme B... ayant conduit à son accouchement prématuré dans un contexte de chorio-amniotite et d'infection materno-fœtale à staphylocoque aureus secondaire à la cholécystectomie qui a eu lieu le 7 décembre 2000 ; - l'attestation du médecin-conseil du 19 mai 2020 suffit pour justifier de l'imputabilité des frais d'hospitalisation à compter du 26 décembre 2000, des frais médicaux, des frais pharmaceutiques, des frais d'appareillage, des frais de transport ainsi que des frais futurs exposés par elle à la suite du dommage en litige ; - le CHU d'Angers n'avait pas fait connaître en premier instance son désaccord pour le versement immédiat d'un capital représentatif des arrérages à échoir. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - l'arrêté du 14 décembre 2021 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour l'année 2022 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. D..., - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - et les observations de Me Demailly, représentant le CHU d'Angers, et de Me Simon, représentant la CPAM de la Loire-Atlantique. Considérant ce qui suit : 1. Le 4 décembre 2000, Mme B..., alors enceinte, a été hospitalisée au centre hospitalier universitaire d'Angers pour une cholécystite aigüe lithiasique. Elle a été opérée sous cœlioscopie le 7 décembre 2000 pour ablation de la vésicule biliaire et de la lithiase du bas cholédoque. Elle est sortie du centre hospitalier universitaire d'Angers le 18 décembre puis à nouveau hospitalisée le lendemain. Le 23 décembre 2000, Mme B... est à nouveau sortie du centre hospitalier universitaire d'Angers avant d'être hospitalisée une troisième fois le 24 décembre 2000 en raison de douleurs importantes. Sa fille, C... F..., est née prématurément le 26 décembre 2000 et a été hospitalisée en service de néonatologie du 26 décembre 2000 au 14 mars 2001 pour prématurité et infection materno-fœtale. Elle présente depuis sa naissance une leucomalacie péri-ventriculaire compliquée d'une infirmité motrice cérébrale. Mme B... et M. F... ont alors adressé une réclamation au centre hospitalier universitaire d'Angers le 4 avril 2016 tendant à l'indemnisation des préjudices subis par leur fille et par eux-mêmes, qui a fait l'objet le 20 juillet 2016 d'une décision de rejet. Ils ont alors demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner le centre hospitalier universitaire d'Angers à les indemniser des préjudices subis par leur fille. Par un jugement avant-dire droit du 31 octobre 2018, le tribunal a ordonné une expertise médicale afin de déterminer l'origine de l'état de santé d'Adeline F... et d'apprécier la nature et l'étendue de ses préjudices. L'expert ayant déposé son rapport le 30 octobre 2019, M. F..., Mme B..., et Mme C... G...-A..., devenue majeure au cours de l'instance devant le tribunal, lui ont demandé de condamner le centre hospitalier universitaire d'Angers à leur verser la somme totale de 12 108 498,60 euros en réparation des préjudices subis. La caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique a demandé au tribunal de condamner le centre hospitalier universitaire d'Angers à lui verser la somme de 1 103 495 euros au titre de ses débours. Par un jugement du 13 janvier 2021, dont le centre hospitalier relève appel, le tribunal administratif de Nantes a condamné le centre hospitalier universitaire d'Angers à verser à Mme C... F... une indemnité d'un montant de 1 023 143,22 euros ainsi qu'une indemnité d'un montant de 39 585,68 euros, sous déduction des aides financières ayant le même objet déjà perçues, et une rente trimestrielle viagère d'un montant de 22 102,50 euros ou de 34 608 euros, selon qu'elle bénéficie ou non d'une AESH, et à Mme E... B... et M. F... une somme de 404 942,51 euros en réparation des préjudices subis par leur fille et des sommes respectives de 45 289 euros et de 26 530,44 euros en réparation de leurs préjudices propres. Par ce même jugement, le tribunal a condamné le CHU d'Angers à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique la somme de 1 103 495 euros au titre de ses débours. Par la voie de l'appel incident, M. F..., Mme B..., et Mme C... G...-A... demandent à la cour de porter la somme que le CHU d'Angers est condamné à verser à Mme F... au titre de ses pertes de gains professionnels futurs et de l'incidence professionnelle à un montant 1 061 310,47 euros. Sur la responsabilité du CHU d'Angers : 2. D'une part, l'introduction accidentelle d'un germe microbien dans l'organisme d'un patient lors d'une hospitalisation antérieure à l'entrée en vigueur des dispositions relatives à la réparation des infections nosocomiales issues de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé révèle une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier et engage la responsabilité de celui-ci. Il en va toutefois autrement lorsqu'il est certain que l'infection, si elle s'est déclarée à la suite d'une intervention chirurgicale, a été causée par des germes déjà présents dans l'organisme du patient avant l'hospitalisation, ou encore lorsque la preuve d'une cause étrangère est rapportée par l'établissement de santé. D'autre part, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé. Si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité, ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation. 3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que dans les suites de la cholécystectomie subie par Mme B... le 7 décembre 2000 au centre hospitalier universitaire d'Angers, celle-ci a présenté des douleurs importantes et de la fièvre qui ont entraîné une nouvelle hospitalisation le 19 décembre 2000. Une infection s'est déclarée le même jour. Un staphylocoque doré, qui est un germe pathogène présent sur la peau, les muqueuses et dans l'environnement, a été trouvé le 22 décembre 2000 au niveau du liquide de ponction et le 23 décembre 2000 au niveau du système de drainage posé au cours de l'intervention chirurgicale. Ce staphylocoque doré était également présent dans le lit vésiculaire. Si le centre hospitalier universitaire d'Angers soutient notamment, en s'appuyant sur une note technique du 6 avril 2021, que Mme B... pouvait être porteuse de cette bactérie, qui pouvait en particulier provenir de la vésicule biliaire infectée, que cette bactérie a pu également être introduite de l'extérieur dans l'organisme via le drainage mis en place, que cette bactérie, très virulente, n'aurait pas attendu 12 jours, après l'intervention chirurgicale du 7 décembre 2000, pour se manifester, de tels éléments ne suffisent pas à prouver qu'il est certain que l'infection en litige présentait un caractère endogène ou qu'elle aurait une cause étrangère à la prise en charge de la patiente le 7 décembre 2000. Dès lors, l'intervention chirurgicale réalisée le 7 décembre 2000 au centre hospitalier universitaire d'Angers doit être regardée comme directement à l'origine de l'infection dont Mme B... a été victime, qui présente dès lors un caractère nosocomial. Par suite, cette infection révèle une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier qui est de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire d'Angers à l'égard de Mme B... et de Mme et M. F... à raison des préjudices que cette faute leur a directement causé. 4. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que Mme B... n'a pas été informée, le 23 décembre 2000, de la présence de l'infection nosocomiale au niveau du site opératoire, ni du fait que cette infection pouvait passer dans le liquide amniotique entourant le bébé et entraîner un accouchement prématuré, compte tenu des conclusions sur ce point du rapport d'expertise du 30 octobre 2019 établi par le gynécologue-obstétricien désigné par le tribunal et de l'absence de preuve par l'établissement public d'une délivrance de cette information. Par suite, le centre hospitalier universitaire d'Angers a commis une autre faute de nature à engager sa responsabilité en n'informant pas Mme B... des risques liés à l'infection nosocomiale au cours de la grossesse. Sur le lien de causalité entre les fautes du CHU d'Angers et les préjudices : 5. S'il est constant que le staphylocoque doré en cause a contaminé le placenta avant l'accouchement, qui est intervenu le 26 décembre 2000, la cour ne dispose pas des éléments d'appréciation suffisants pour déterminer si la prématurité et les séquelles subies par Mme C... F... sont directement et uniquement liées, par le biais d'une chorioamniotite notamment, à l'infection nosocomiale contractée par sa mère au cours de l'intervention chirurgicale du 7 décembre 2000. 6. Il s'ensuit, dès lors, qu'il y a lieu d'ordonner, avant dire droit, une expertise médicale complémentaire. DÉCIDE : Article 1er : Il est ordonné, avant de statuer sur les conclusions de la requête, une expertise confiée à un collège d'experts composé d'un médecin gynécologue-obstétricien, d'un médecin spécialisé en néonatologie, d'un médecin infectiologue et d'un médecin spécialisé en chirurgie viscérale et digestive. Ces experts auront pour mission : - de se faire communiquer tous documents utiles à l'accomplissement de leur mission et notamment ceux qui sont relatifs au suivi médical, interventions, soins et traitements dont Mme B... et Mme C... F... ont fait l'objet au CHU d'Angers ; - de déterminer en particulier si Mme B... a souffert d'une chorioamniotite à la suite de son intervention chirurgicale du 7 décembre 2000 et, plus généralement, si l'infection nosocomiale a été la cause concurremment ou non avec d'autres causes, qu'il conviendra de préciser le cas échéant, la prématurité de l'enfant ainsi que les lésions de leucomalacie périventriculaire qu'elle a présentées ; - dans le cas où l'infection nosocomiale ne serait pas l'unique cause de la prématurité de l'enfant et des lésions ci-dessus mentionnées, d'indiquer si cette infection a fait perdre à la jeune C... F... une chance d'échapper à l'aggravation de son état de santé et de donner toute appréciation utile, le cas échéant, sur le taux de perte de chance imputable à cette infection ; - d'une manière générale, de donner à la cour toute information ou appréciation utile de nature à lui permettre de déterminer les effets éventuels de l'infection nosocomiale sur les séquelles présentées par Mme C... F.... Article 2 : L'expertise sera menée contradictoirement entre le CHU d'Angers, la CPAM de la Loire-Atlantique, Mme B... et M. F.... Article 3 : Les experts seront désignés par le président de la cour. Ils accompliront leur mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Le rapport d'expertise sera déposé en deux exemplaires dans un délai de trois mois à compter de la date de notification du présent arrêt. L'expert en notifiera des copies aux parties intéressées. Article 4 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin de l'instance. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B..., à M. H... F..., à Mme C... F..., au centre hospitalier universitaire régional d'Angers et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique. Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Brisson, présidente, - M. L'hirondel, premier conseiller, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe 17 juin 2022. Le rapporteur, X. D...La présidente, C. BRISSON La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de la prévention en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00693
JADE/CETATEXT000045931539.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai. Par un jugement n° 2013141 du 8 décembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 14 février 2022, Mme C... A..., représentée par Me Smati, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 8 décembre 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2020 du préfet de Maine-et-Loire refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai ; 3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai et, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : en ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour : - elle n'est pas suffisamment motivée ; - elle est intervenue en violation de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile eu égard à sa situation personnelle et familiale ; - elle est intervenue en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à sa situation personnelle et familiale ; en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - elle est intervenue en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; en ce qui concerne la décision portant fixation du délai de départ volontaire : - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; en ce qui concerne la décision portant fixation du pays de renvoi : - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 février 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... D... A..., ressortissante malienne née le 22 décembre 2001 à Sèvres (Hauts-de-Seine), est entrée régulièrement en France le 17 septembre 2019 sous couvert d'un document de circulation pour étranger mineur valable du 8 avril 2015 au 7 avril 2020. Elle a sollicité du préfet de Maine-et-Loire, le 21 juin 2020, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté du 20 novembre 2020, portant également obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai. Mme A... relève appel du jugement du 8 décembre 2021 du tribunal administratif de Nantes rejetant sa demande d'annulation de cet arrêté. Sur la décision de refus de titre de séjour : 2. En premier lieu, l'arrêté contesté vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont ses articles L. 313-11, L. 313-14 et L. 511-1 alors en vigueur qui lui sont opposés. Il retrace également le parcours de vie et de formation de Mme A... et mentionne sa situation familiale, dont la présence en situation régulière de sa mère en France. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour, qui expose les considérations de fait et de droit justifiant ce refus, serait insuffisamment motivée. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ". 4. Mme A... expose qu'elle est née sur le territoire français en 2001, qu'elle y a séjourné fréquemment dans sa jeunesse auprès de sa tante en région parisienne et qu'elle y a été scolarisée en CE 1 et en 5ème. Elle indique également que sa mère est établie régulièrement en France, que son père ne l'a pas élevée, et qu'elle résidait au Mali chez un oncle qui est depuis lors parti s'établir aux États-Unis. Elle fait valoir qu'à son arrivée en France en septembre 2019 elle a entamé avec succès des études en sciences à l'université d'Angers où elle a été attributaire d'une bourse et d'un logement où sa mère l'a rejointe. Ces seuls éléments, notamment au regard du fait que Mme A... n'était en France que depuis un peu plus d'un an à la date de la décision contestée alors qu'elle a vécu l'essentiel de sa vie au Mali où elle a été scolarisée jusqu'au baccalauréat, ne sont pas de nature à établir une violation par le préfet de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". 6. Ainsi qu'il a été exposé Mme A... a vécu l'essentiel de sa vie au Mali, où elle a été scolarisée jusqu'à l'âge de dix-huit ans dans des conditions lui ayant permis d'intégrer avec succès une université française. Il n'est par ailleurs pas établi que, devenue majeure, elle serait désormais dépourvue de tout lien familial ou amical dans ce pays alors même que sa mère séjourne régulièrement sur le territoire français et que l'une de ses tantes, de nationalité française, et la famille de cette dernière entretiennent de bonnes relations avec elle. Elle ne résidait par ailleurs en France que depuis un peu plus d'un an à la date de la décision contestée. Dans ces conditions, nonobstant la bonne insertion universitaire de Mme A..., celle-ci n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée est intervenue en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation. Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : 7. Pour les motifs exposés au point précédent Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée est intervenue en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 8. Il résulte par ailleurs de ce qui a été dit aux points 2 à 6 que le moyen tiré du défaut de base légale de la mesure d'éloignement, en raison de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour, doit être écarté. Sur les décisions portant fixation du délai de départ et du pays de destination : 9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 et 8 que les moyens tirés du défaut de base légale des décisions portant fixation du délai de départ et du pays de destination, en raison de l'illégalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire français, doivent être écartés. 10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 20 novembre 2020. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... A..., à Me Smati et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - Mme Béria-Guillaumie, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2022. Le rapporteur, C. B... Le président, L. LAINÉ La greffière, S. LEVANT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00442