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JADE/CETATEXT000046446503.xml
Vu la procédure suivante : M. C... A... B... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 14 septembre 2020 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin à la protection subsidiaire dont il bénéficiait. Par une décision n° 20034390 du 8 décembre 2021, la Cour nationale du droit d'asile a annulé cette décision et accordé à M. A... B... la qualité de réfugié. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 février et 9 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFPRA demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cette décision ; 2°) de renvoyer l'affaire à la Cour nationale du droit d'asile. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Paul Bernard, maître des requêtes, - les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public, La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'OFPRA, et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. A... B... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... B..., de nationalité afghane, s'est vu reconnaître le bénéfice de la protection subsidiaire par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 20 avril 2016. Par une décision du 14 décembre 2020, prise sur le fondement des dispositions du 3° de l'article L. 712-3 et du b) et du c) de l'article L. 712-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, reprises au 3° de l'article L. 512-3 et aux 2° et 4° de l'article L. 512-2 du même code, l'OFPRA a mis fin à la protection dont bénéficiait M. A... B..., aux motifs que l'intéressé avait commis un crime grave et que son activité sur le territoire constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat. Par une décision du 8 décembre 2021, contre laquelle l'OFPRA se pourvoit en cassation, la Cour nationale du droit d'asile a annulé cette décision et reconnu à M. A... B... la qualité de réfugié. 2. Aux termes de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La protection subsidiaire n'est pas accordée à une personne s'il existe des raisons sérieuses de penser : / (...) / 2° Qu'elle a commis un crime grave ; / (...) 4° Que son activité sur le territoire constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat ; (...) ". Aux termes de l'article L. 512-3 du code : " (...) L'office met également fin à tout moment, de sa propre initiative ou à la demande de l'autorité administrative, au bénéfice de la protection subsidiaire dans les cas suivants : / ( ...) 3° Le bénéficiaire de la protection subsidiaire doit, à raison de faits commis après l'octroi de la protection, en être exclu pour l'un des motifs prévus à l'article L. 512-2 ". 3. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que par un jugement du tribunal correctionnel de Paris du 7 février 2019, M. A... B... a été condamné à une peine de trois ans d'emprisonnement pour des faits d'aide à l'entrée et à la circulation ou au séjour irrégulier d'un étranger en France, commis en bande organisée. S'il n'a pas été condamné à la peine maximale encourue, il ressort des énonciations de ce jugement correctionnel que l'intéressé avait un rôle prépondérant dans l'organisation d'une filière de passages de migrants à destination de l'Angleterre, contre rémunération, selon un mode opératoire bien établi et impliquant de nombreuses personnes. Par ailleurs, pour éviter tout renouvellement des faits, le juge pénal a estimé devoir assortir sa condamnation d'une peine complémentaire d'interdiction définitive du territoire français. Dans ces conditions, la Cour, qui n'est pas liée dans son appréciation par la qualification donnée aux faits par le droit français et alors qu'elle relevait, dans les motifs de sa décision, la gravité des faits commis a entaché sa décision d'erreur de qualification juridique des faits en jugeant qu'il n'existait pas de raisons sérieuses de penser que M. A... B... se serait rendu coupable d'un crime grave de droit commun au sens du 2° de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 4. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, l'OFPRA est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque. Les conclusions présentées par M. A... B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées. D E C I D E : -------------- Article 1er : La décision du 8 décembre 2021 de la Cour nationale du droit d'asile est annulée. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile. Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. C... A... B....
JADE/CETATEXT000046446516.xml
Vu la procédure suivante : La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi, en application de l'article L. 52-15 du code électoral, le tribunal administratif de Toulouse, sur le fondement de sa décision du 16 décembre 2021 rejetant le compte de campagne de Mme D... B... et de M. C... A..., candidats aux élections départementales qui se sont déroulées les 20 et 27 juin 2021 dans le canton de Tarn-et-Causses (Aveyron). Par un jugement n° 2107429 du 16 mars 2022, le tribunal administratif de Toulouse a déclaré Mme B... et M. A... inéligibles pour une durée de douze mois et démissionnaires d'office. Par une requête, enregistrée le 13 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... et M. A... demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il prononce leur inéligibilité pour douze mois et leur démission d'office ; 2°) de décider qu'il n'y a pas lieu de les déclarer inéligibles et démissionnaires d'office ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code électoral ; - la loi n° 2019-1269 du 2 décembre 2019 ; - la loi n° 2021-191 du 22 février 2021 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, maître des requêtes, - les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public, Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 52-15 du code électoral : " (...) Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l'élection (...) ". Aux termes de l'article L. 118-3 du même code, dans sa rédaction issue des dispositions de la loi du 2 décembre 2019 visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral : " Lorsqu'il relève une volonté de fraude ou un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible : / 1° Le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12 (...). / L'inéligibilité mentionnée au présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans (...). / En cas de scrutin binominal, l'inéligibilité s'applique aux deux candidats du binôme. / Si le juge de l'élection a prononcé l'inéligibilité d'un candidat ou des membres d'un binôme proclamé élu, il annule son élection ou, si l'élection n'a pas été contestée, déclare le candidat ou les membres du binôme démissionnaires d'office ". 2. En application des dispositions précitées de l'article L. 118-3 du code électoral, juge de l'élection ne peut prononcer l'inéligibilité d'un candidat sur le fondement de ces dispositions que s'il constate un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales. Il lui incombe à cet effet de prendre en compte l'ensemble des circonstances de l'espèce et d'apprécier s'il s'agit d'un manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales et s'il présente un caractère délibéré. 3. Aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : " I.- Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement des dépenses électorales prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne lorsqu'il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés (...). / II.- Au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes accompagné des justificatifs de ses recettes, notamment d'une copie des contrats de prêts conclus en application de l'article L. 52-7-1 du présent code, ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte. / III.- Le compte de campagne est présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables. Ce dernier met le compte de campagne en état d'examen et s'assure de la présence des pièces justificatives requises. / Cette présentation n'est pas obligatoire : / 1° Lorsque le candidat ou le candidat tête de liste n'est pas tenu d'établir un compte de campagne, en application du I du présent article ; / 2° Ou lorsque le candidat ou le candidat tête de liste a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n'excèdent pas un montant fixé par décret. (...) / VI.- Pour l'application du présent article, en cas de scrutin binominal, le candidat s'entend du binôme de candidats ". En application de l'article 11 de la loi du 22 février 2021, portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique, la date limite pour déposer le compte de campagne a été fixée, par dérogation aux dispositions de l'article L. 52-12 du code électoral, au 17 septembre 2021 à 18 heures pour les élections départementales de juin 2021. 4. Par une décision du 16 décembre 2021, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a constaté le dépôt hors délai du compte de campagne de Mme B... et M. A..., binôme de candidats élu aux élections départementales qui se sont déroulées les 20 et 27 juin 2021 dans le canton de Tarn-et-Causses dans le département de l'Aveyron, et a saisi le tribunal administratif de Toulouse en application de l'article L. 52-15 du code électoral cité au point 1. Par un jugement en date du 16 mars 2022, le tribunal administratif a estimé que c'était à bon droit que la Commission l'avait saisi au vu des irrégularités constatées et a déclaré Mme B... et M. A... inéligibles pour une durée de douze mois et démissionnaires d'office de leur mandat de conseiller départemental. Ceux-ci, qui ne contestent pas avoir déposé postérieurement au délai imparti un compte de campagne non présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés, doivent être regardés comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il se prononce sur leur inéligibilité et leur démission d'office. 5. Il résulte de l'instruction que, même si le délai légal imparti n'a pas été respecté, Mme B... et M. A... se sont employés à transmettre rapidement leur compte de campagne à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dès que l'ensemble des opérations bancaires relatives à la campagne ont été effectuées et le compte bancaire clôturé. Par ailleurs, ils ont depuis produit une version de leur compte de campagne certifiée par un membre de l'ordre des experts comptables et des comptables agréés, laquelle ne comporte aucune différence avec celle établie par leur mandataire financier et présentée à la Commission, accompagnée de l'ensemble des justificatifs des recettes et des dépenses y figurant. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques n'a relevé aucune autre irrégularité dans le compte de campagne ainsi transmis. Eu égard au faible montant des dépenses du compte et au caractère non délibéré du manquement en cause, celui-ci ne justifie pas que Mme B... et M. A... soient déclarés inéligibles et, par suite, démissionnaires d'office en application des dispositions de l'article L. 118-3 du code électoral. 6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de la requête, que Mme B... et M. A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif les a déclarés inéligibles pour une durée de douze mois et démissionnaires d'office de leur mandat de conseiller départemental. 7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Mme B... et M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 16 mars 2022 du tribunal administratif de Toulouse est annulé en tant qu'il déclare Mme B... et M. A... inéligibles pour douze mois et démissionnaires d'office. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... et M. A... est rejeté. Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme D... B..., à M. C... A... et à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements publics. Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... et Mme C... B..., sa sœur, ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 22 juillet 2019 du maire d'Escales de péril imminent affectant l'immeuble dit " D... " situé dans cette commune en tant qu'il concerne la parcelle A 220. Par un jugement n° 1905003-1905004 du 29 juin 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 28 août 2020, sous le n° 20MA03227, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL03227, et des mémoires en réplique, enregistrés les 28 mai et 7 juillet 2021, ce dernier n'ayant pas été communiqué, les consorts B..., représentés par la Selarl Schneider associés, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 29 juin 2020 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 22 juillet 2019 du maire d'Escales ; 3°) de mettre à la charge de la commune d'Escales une somme de 2 000 euros à verser à leur profit sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : Sur le bien-fondé du jugement : - l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé s'agissant de la nature et de la gravité du péril qui fonde la procédure prévue par l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ; - il méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, qui ne trouvent à s'appliquer que lorsque le danger provient à titre prépondérant de causes qui lui sont propres ; il ressort de l'expertise judiciaire que la dégradation du terrain rocheux sur lequel sont directement implantées les constructions constitue la cause prépondérante du risque identifié par l'expert ; dès lors que le danger provient à titre prépondérant de cette cause étrangère à l'immeuble, la procédure tirée de l'article L. 511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation ne pouvait être mise en œuvre ; - il est entaché d'un détournement de procédure dès lors que le maire aurait dû faire application de ses pouvoirs de police générale qu'il tient des articles L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales et ne pas user de ses pouvoirs de police spéciale prévus à l'article L. 511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation ; - il est entaché d'un détournement de pouvoir dès lors que l'intention réelle du maire d'Escales est de les dissuader de poursuivre leur procédure contentieuse les opposant à la commune ; ils pâtissent d'une différence de traitement par rapport aux propriétaires des autres parcelles concernées par l'arrêté en litige. Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 avril, 22 juin et 8 septembre 2021, la commune d'Escales, représentée par la SCP Cabee-Biver-Spanghero, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis solidairement à la charge des consorts B... le paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : Sur le bien-fondé du jugement : - l'arrêté du 22 juillet 2019 est suffisamment motivé ce que les premiers juges ont parfaitement estimé ; - en ce qui concerne la méconnaissance alléguée de l'article L. 511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, le péril grave et imminent constitué par le talus composé de blocs rocheux soutenus par un mur de pierres maçonnées est inhérent au bâtiment des consorts B... dont il constitue le fondement ou l'assise ; au surplus, les murs en pierres maçonnées qui constituent la base du talus servant d'assise au bâtiment ne constituent pas un ouvrage naturel ; le péril imminent est inhérent à l'édifice appartenant aux requérants, notamment du fait de l'absence de collecte des eaux de toiture qui favorise l'altération du rocher et du fait de la dégradation du mur en pierres maçonnées situé sous l'éperon rocheux ; - en ce qui concerne le détournement de procédure allégué, ce moyen reprend en fait le moyen relatif à l'erreur de droit ; les fondations de l'immeuble des requérants sont constituées par un talus rocheux soutenu par le mur en maçonnerie qui constituent des éléments indissociables ; - la commune apporte la preuve de l'absence de détournement de pouvoir dès lors que les requérants n'ont jamais saisi le juge judiciaire pour poursuivre leurs réclamations, et que l'arrêté de main levée du péril imminent du 12 mars 2020 a été pris au vu d'une part, des travaux réalisés par les consorts E..., en attendant la réalisation des travaux d'enfouissement des réseaux par l'opérateur public et d'autre part, des conclusions de l'expert judiciaire du 2 mars 2020. Par une ordonnance du 8 septembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 29 septembre 2021 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la construction et de l'habitation ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Karine Beltrami, première conseillère, - les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique, - les observations de Me Schneider, représentant les requérants et celles de Me Bidois représentant la commune d'Escales. Considérant ce qui suit : 1. M. B... et Mme B..., sa sœur, qui sont propriétaires de la parcelle A 220 située à Escales (Aude), ont demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de l'arrêté de péril imminent du 22 juillet 2019 pris par son maire leur enjoignant de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser ledit péril. Ils relèvent appel du jugement du 29 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes. Sur les conclusions en annulation : 2. Aux termes de l'article L. 511- 1 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version alors applicable : " Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques lorsqu'ils menacent ruine et qu'ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque, d'une façon générale, ils n'offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique, dans les conditions prévues à l'article L. 511-2. Toutefois, si leur état fait courir un péril imminent, le maire ordonne préalablement les mesures provisoires indispensables pour écarter ce péril, dans les conditions prévues à l'article L. 511-3 ". Aux termes de l'article L. 511-3 de ce code, dans sa version alors applicable : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble. Dans le cas où ces mesures n'auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. Si les mesures ont à la fois conjuré l'imminence du danger et mis fin durablement au péril, le maire, sur le rapport d'un homme de l'art, prend acte de leur réalisation et de leur date d'achèvement. Si elles n'ont pas mis fin durablement au péril, le maire poursuit la procédure dans les conditions prévues à l'article L. 511-2 ". 3. Les procédures de péril ou de péril imminent régies par les articles L. 511-1 à L. 511-4 du code de la construction et de l'habitation auxquels renvoie l'article L. 2213-24 du code général des collectivités territoriales, doivent être mises en œuvre lorsque le danger provoqué par un immeuble provient à titre prépondérant de causes qui lui sont propres. Elles se distinguent en cela des pouvoirs reconnus au maire par l'article L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales, qui s'appliquent dans l'hypothèse où le danger menaçant un immeuble résulte d'une cause qui lui est extérieure. Il n'y a pas lieu, pour déterminer les champs respectifs de ces deux procédures, d'avoir recours à un critère tiré de l'origine naturelle ou artificielle du danger. En revanche, la conception et l'exécution d'une construction inadaptée au terrain d'assise, doit faire regarder comme établie l'existence d'une cause propre à l'immeuble, prépondérante du péril justifiant l'intervention d'un arrêté de péril imminent sur le fondement des dispositions précitées. 4. Il ressort des conclusions du rapport d'expertise du 22 juillet 2019 que le talus sur lequel est implantée la construction de deux étages dont les consorts B... sont propriétaires, est composé en partie basse de murs en pierres maçonnés venant se bloquer sous les blocs massifs de rocher constituant l'assise des murs des bâtiments. Il ne résulte ni de ses conclusions ni d'aucune autre pièce versée au dossier que le talus rocheux serait soutenu par le mur de pierres maçonnées ni que le talus et l'immeuble des intéressés constitueraient un tout indissociable. Il résulte, en revanche, de ses conclusions que le péril imminent sur le fondement duquel le maire d'Escales a pris son arrêté, a pour origine les désordres graves affectant le talus servant de terrain d'assise à la construction des appelants. À cet égard, la commune ne peut utilement faire valoir en défense la circonstance que le diagnostic géotechnique de l'éperon rocheux réalisé le 19 novembre 2019 relève que l'absence de collecte des eaux des toitures des constructions qui surmontent l'éperon rocheux favorise son altération et le développement de la végétation, dès lors que l'arrêté de péril imminent du 22 juillet 2019 n'a pas été pris par le maire au vu de cet élément. Dès lors qu'il n'est ni établi ni même allégué que la conception et l'exécution de la construction des appelants serait inadaptée au terrain rocheux d'assise, le péril grave et imminent ne pouvait être regardé comme provenant à titre prépondérant des causes propres de leur immeuble. Par suite, le maire d'Escales ne pouvait légalement faire usage des pouvoirs qu'il tire de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation pour prendre l'arrêté du 22 juillet 2019 et cet arrêté doit être annulé. 5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que les consorts B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune d'Escales sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, les consorts B... n'étant pas la partie perdante à l'instance. 8. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune d'Escales une somme de 1 500 euros au titre des conclusions présentées sur le même fondement par les consorts B.... DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 29 juin 2020 et l'arrêté du maire d'Escales du 22 juillet 2019 sont annulés. Article 2 : La commune d'Escales versera aux consorts B... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Mme C... B... et à la commune d'Escales. Délibéré après l'audience du 4 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Rey-Bèthbéder, président de chambre, M. Bentolila, président assesseur, Mme Beltrami, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, K. Beltrami Le président, É. Rey-Bèthbéder La greffière, C. Lanoux La République mande et ordonne au préfet de l'Aude en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20TL03227
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Vu la procédure suivante : M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, en deuxième lieu, de suspendre les effets de la décision du préfet de la Haute-Garonne portant refus de renouvellement de son attestation de demande d'asile et, en dernier lieu, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de renouveler l'attestation de demande d'asile dans un délai de 48 heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2204029 du 20 juillet 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse l'a admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et a rejeté le surplus de sa demande. Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : 1°) d'appeler dans la cause l'association " Adelphité par CVH " en qualité d'observatrice ; 2°) l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ; 3°) de suspendre les effets de la décision par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de renouveler l'attestation de demande d'asile de M. B... ; 4°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne d'enregistrer la demande d'asile de M. B... en procédure normale et lui remettre l'attestation de demande d'asile afférente, dans un délai de 24 heures suivant la notification de l'ordonnance à intervenir et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 5°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de procéder au renouvellement de l'attestation de demande d'asile de M. B..., dans un délai de 24 heures suivant la notification de l'ordonnance à intervenir et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 6°) à titre infiniment subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer la situation de M. B..., dans un délai de 24 heures suivant la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 7°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et, dans l'hypothèse où M. B... ne serait pas admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle, sur le seul fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, en premier lieu, il fait l'objet d'une décision de transfert vers les autorités allemandes, laquelle est susceptible d'être exécutée d'office à tout moment, en deuxième lieu, il ne bénéficie plus des conditions matérielles d'accueil, l'Office français de l'immigration et de l'intégration ayant mis fin à ce bénéfice et, en dernier lieu, son état de santé présente une fragilité extrême ; - il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à sa liberté d'aller et venir, à son droit constitutionnel de demander l'asile, à son droit d'être provisoirement autorisé à se maintenir sur le territoire français et à son droit de bénéficier des conditions matérielles d'accueil ; - le préfet de la Haute-Garonne a commis une erreur quant à l'exactitude matérielle des faits en refusant de renouveler l'attestation de demande d'asile au motif qu'il serait en fuite alors qu'il ne peut être regardé comme tel dès lors que, en premier lieu, la déclaration de domiciliation qui lui a été remise ne comporte aucun numéro permettant de l'identifier, ce qui témoigne d'un dysfonctionnement dans la distribution de son courrier, en deuxième lieu, la carte de domiciliation qui lui a été attribuée comporte le nom et le numéro d'une autre personne et, en dernier lieu, le document qui lui a été remis pour lui permettre de consulter son courrier en ligne comporte des explications peu compréhensibles qui ne lui ont jamais été traduites. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2022, le ministre de l'intérieur et des Outre-Mer conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite, et que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Par un mémoire en intervention, enregistré le 6 octobre 2022, l'association La Cimade demande au juge des référés du Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance attaquée et de faire droit aux conclusions du requérant. Par un mémoire en intervention, enregistré le 10 octobre 2022, l'Association des avocat-e-s pour la défense des étranger-e-s et l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE) demandent au juge des référés du Conseil d'Etat de faire droit aux conclusions du requérant. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative ; Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. B..., et d'autre part, le ministre de l'intérieur et des Outre-Mer, l'association La Cimade, l'Association des avocat-e-s pour la défense des étranger-e-s et l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE) ; Ont été entendus lors de l'audience publique du 12 octobre 2022, à 14 heures : - Me Zribi, avocate au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocate de M. B... ; - la représentante de M. B... ; - les représentants du ministre de l'intérieur et des Outre-Mer ; - le représentant de l'association La Cimade ; - le représentant de l'Association des avocat-e-s pour la défense des étranger-e-s et de l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE) ; à l'issue de laquelle le juge des référés a clôturé l'instruction ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". 2. Eu égard à leur objet, l'association La Cimade, l'Association des avocat-e-s pour la défense des étranger-e-s et l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE) justifient d'un intérêt pour intervenir au soutien de la requête. Leurs interventions sont admises. 3. M. A... B..., ressortissant Sierra-Léonais, est entré en France en septembre 2021 et y a demandé l'asile. Le préfet de la Haute-Garonne a enregistré sa demande, a constaté qu'il relevait des accords de Dublin et lui a notifié que l'Allemagne était responsable de l'examen de sa demande. Le 13 janvier 2022, le préfet lui a fait part de sa décision d'opérer son transfert en Allemagne, et l'a assigné à résidence pour quarante-cinq jours, décision qu'il a ultérieurement renouvelée pour la même durée. Les recours de M. B... contre ces décisions ont été rejetés. Par deux courriers recommandés adressés par le préfet à M. B... le 27 mai 2022, il a été convoqué en préfecture les 13 et 14 juin 2022. Il ne s'est pas rendu à ces convocations et a par suite été déclaré " en fuite " au sens et pour l'application du règlement Dublin II, motif pour lequel, après qu'il s'est rendu une première fois en préfecture le 22 juin 2022 afin d'obtenir le renouvellement de son titre de séjour comme demandeur d'asile, on lui a, le 19 juin 2022, lorsqu'il s'est à nouveau présenté en préfecture, refusé ce renouvellement, et, le 12 juillet 2022, l'OFII lui a suspendu le bénéfice des conditions matérielles d'accueil. Par une ordonnance du 20 juillet 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, rejeté sa requête tendant, d'une part, à la suspension du refus de délivrance du titre de séjour qu'il demandait et, d'autre part, à enjoindre au préfet de lui délivrer ledit titre. M. B... relève appel de cette ordonnance. 4. Aux termes de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers : " 1. Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. (...) ; / 2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté (...) à dix-huit-mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. (...) ". 5. Le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié. S'il implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit, en principe, autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, ce droit s'exerce dans les conditions définies par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'article L. 742-3 de ce code prévoit que l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat qui est responsable de cet examen en application des dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination par l'Etat membre responsable d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride. Ce transfert peut avoir lieu pendant une période de six mois à compter de l'acceptation de la demande de prise en charge, susceptible d'être portée à dix-huit mois dans les conditions prévues à l'article 29 de ce règlement si l'intéressé " prend la fuite ". Il résulte clairement des dispositions de l'article 29, que la notion de fuite doit s'entendre comme visant notamment le cas où un ressortissant étranger se serait soustrait de façon intentionnelle et systématique au contrôle de l'autorité administrative en vue de faire obstacle à une mesure d'éloignement le concernant. 6. Pour rejeter sa demande, le premier juge des référés a observé que si M. B... soutenait qu'il n'avait pas déféré aux convocations des 13 et 14 juin 2022, c'était pour un motif indépendant de sa volonté, de sorte qu'il ne pouvait être regardé comme " en fuite ". M. B... alléguait que, domicilié auprès du service de premier accueil des demandeurs d'asile confié à la structure " Adelphité par CVH ", il s'y était régulièrement rendu pour solliciter la délivrance de son courrier, ce qu'il entendait établir par diverses attestations, sans obtenir la remise de celui qui lui était destiné, et dont il n'avait pas plus pu constater l'existence sur la plateforme informatique lui permettant de s'en informer, faute de parvenir à y accéder. Les éléments produits devant le juge des référés en première instance n'avaient cependant pu permettre à celui-ci de regarder ces circonstances comme établies. 7. En appel, M. B... produit pour la première fois une carte de domiciliation dont il affirme qu'elle lui a été remise lors de sa domiciliation auprès de la structure " Adelphité par CVH " en janvier 2022, alors que cette structure, à la suite d'un appel d'offre, reprenait le service public de premier accueil. Cette carte porte un autre nom que le sien, dont il affirme avoir cru qu'il s'agissait du code permettant l'accès au service informatique d'information sur le courrier. Il assure l'avoir présentée lors de tous ses passages réguliers au service de premier accueil, où, de ce fait, aucun courrier à son nom ne lui a été remis. Le ministre de l'intérieur, lors des débats à l'audience, a estimé impossible que l'erreur qui aurait été ainsi commise n'ait pas été décelée lors des cinq mois où M. B... a cherché par ce moyen à se procurer les courriers à son nom, assurant que la remise du courrier ne peut intervenir que par présentation simultanée de cette carte de domiciliation et du titre de séjour. L'existence de cette règle ne résulte cependant d'aucun document et n'est pas établie. Il n'a pas été contesté par le ministère lors des débats, que le cahier des charges de la structure d'accueil lui faisait pourtant obligation d'informer les demandeurs de la mise en instance de courrier par l'envoi d'un SMS ou d'un mail, ce qu'elle n'a jamais fait. Si elle a créé une plateforme d'information présentée comme une alternative à ses obligations, l'accès n'y était possible qu'en prenant connaissance de consignes d'emploi dont les parties ont reconnu à l'audience qu'elles étaient incompréhensibles, ou par l'usage d'un " code à réponse rapide " dont la structure ne s'est pas assurée qu'il pouvait être utilisé par les moyens à la disposition des utilisateurs du service. Il résulte de l'instruction en appel qu'aucune indication, ni aucun document n'établit les modalités selon lesquelles les personnes domiciliées doivent retirer les courriers si elles n'en connaissent pas l'existence. M. B... soutient s'être régulièrement rendu auprès de la structure sans pouvoir y retirer aucun courrier, y compris ceux comportant des documents utiles pour lui, et n'avoir accédé aux plis en instance encore disponibles qu'après avoir découvert l'interversion de cartes dont il avait été l'objet à la fin du mois de juin 2022. Au regard de l'ensemble de ces circonstances, corroborées par le comportement du requérant qui ne s'est auparavant soustrait à aucune mesure prises à son encontre, et s'est, après les rendez-vous qu'il n'a pu honorer, rendu à deux reprises en préfecture, il est désormais établi que son absence aux rendez-vous des 13 et 14 juin 2022 résultait de ce qu'il n'avait pas été informé de ces rendez-vous, et ne pouvait, faute de s'être intentionnellement abstenu de s'y rendre, être regardé de ce fait comme en fuite. Il est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, ses conclusions ont été rejetées. 8. Il appartient au juge des référés du Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par M. B... au soutien de ses conclusions. 9. D'une part, M. B..., faute de disposer du titre de séjour qu'il sollicite en tant que demandeur d'asile, est privé de la possibilité de bénéficier des conditions matérielles d'accueil et de l'ensemble des droits qui y sont associés, depuis plus de trois mois, alors que le délai pour opérer son transfert en Allemagne est désormais expiré et que l'examen de sa demande incombe à la France. Cette situation, qui méconnaît le droit fondamental à voir sa demande examinée conformément aux principes ci-dessus rappelés porte une atteinte grave à une liberté fondamentale constitutive d'une situation d'urgence au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. 10. D'autre part, le refus du titre demandé, précédemment accordé et renouvelé, ne reposait que sur le motif tiré de ce que M. B... était en fuite. Dès lors que, comme il a été dit ci-dessus, aucune circonstance ne permet de caractériser le comportement de M. B... de cette manière, la situation ainsi créée apparaît comme manifestement illégale. 11. Il y a donc lieu d'ordonner au préfet de la Haute-Garonne de procéder au renouvellement du titre demandé, dans un délai de sept jours, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée. 12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à Me Zribi au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : Les interventions de l'association La Cimade, l'Association des avocat-e-s pour la défense des étranger-e-s et l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE) sont admises. Article 2 : L'ordonnance n° 2204029 du 20 juillet 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est annulée. Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Haute Garonne de procéder au renouvellement du titre demandé, dans un délai de sept jours. Article 4 : L'Etat versera à Me Isabelle Zribi, avocate de M. B..., la somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 5 : Le surplus de la requête est rejeté. Article 6 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des Outre-Mer. Copie en sera adressée à l'association " Adelphité par CVH ", l'association La Cimade, l'Association des avocat-e-s pour la défense des étranger-e-s et l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE). Fait à Paris, le 17 octobre 2022 Signé : Thierry Tuot
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 2 août et 28 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société de droit luxembourgeois Brufinol S.A. demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir les commentaires administratifs publiés le 29 juin 2022 au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) - impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-30-30-10-90 ; 2°) à titre subsidiaire, de saisir à titre préjudiciel la Cour de justice de l'Union européenne de la question de savoir si les dispositions prévues par le 2° du I de l'article 235 quater du code général des impôts constituent une restriction au principe de libre circulation des capitaux garanti par les articles 63 et 65 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne en ce qu'elles subordonnent l'application du mécanisme de restitution de la retenue à la source supportée sur des dividendes de source française à la réalisation par une société non-résidente d'un résultat fiscal strictement inférieur à zéro ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. François-René Burnod, auditeur, - les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lesourd, avocat de la société Brufinol ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 octobre 2022, présentée par la société Brufinol ; Considérant ce qui suit : 1. La société de droit luxembourgeois Brufinol S.A. doit être regardée comme demandant l'annulation du paragraphe n° 30 des commentaires administratifs publiés le 29 juin 2022 au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) - impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-30-30-10-90, en tant qu'il réitère, dans sa première phrase, les dispositions du premier alinéa du 2° du I de l'article 235 quater du code général des impôts prévoyant que peuvent seuls bénéficier d'une restitution des retenues ou prélèvements à la source mentionnés au premier alinéa du même I les personnes morales, établies dans un autre Etat membre de l'Union européenne ou dans les autres pays mentionnés au 1° du même I, dont le résultat fiscal est déficitaire, ce qui exclurait, selon elle, du bénéfice d'une telle restitution les personnes dont le résultat fiscal est nul, notamment dans les cas où la législation du pays dans lequel elles sont établies autorise le report de déficits antérieurs. 2. Aux termes du I de l'article 235 quater du code général des impôts, résultant de la loi du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 : " Le bénéficiaire des revenus et profits soumis aux retenues ou prélèvements à la source mentionnés aux articles 119 bis, 182 A bis, 182 B, 244 bis, 244 bis A et 244 bis B peut demander que l'imposition versée en application de ces articles lui soit restituée lorsque les conditions suivantes sont réunies: (...) / 2° Son résultat fiscal, calculé selon les règles applicables dans l'Etat ou le territoire où est situé son siège ou son établissement stable, est déficitaire au titre de l'exercice au cours duquel les revenus et profits mentionnés au premier alinéa du présent I sont, selon le cas, perçus ou réalisés. Le résultat déficitaire est calculé en tenant compte des revenus et profits dont l'imposition fait l'objet d'une demande de restitution au titre de cet exercice et des revenus et profits mentionnés au même premier alinéa ayant ouvert droit à une restitution au titre d'exercices antérieurs, lorsque le report d'imposition mentionné au II est toujours en cours ". 3. En vertu de ces dispositions du 2° du I de l'article 235 quater, le résultat fiscal d'une société non-résidente est déterminé en tenant compte des revenus et profits ayant supporté une retenue ou un prélèvement à la source, que la législation du pays dans lequel cette société est établie inclue ou non ces revenus ou profits dans l'assiette de l'impôt, à hauteur des seuls montants dont l'intégration conduit à constater chez cette société un résultat négatif ou nul, après déduction d'éventuels déficits antérieurs effectivement imputés si la législation du pays l'autorise et après prise en compte des éventuels revenus ou profits ayant ouvert droit, au cours de la même période de report d'imposition, à une restitution de retenue ou de prélèvement à la source au titre d'exercices antérieurs. La société non résidente dont le résultat, ainsi déterminé, est négatif ou nul est fondée à demander la restitution de la retenue ou du prélèvement à la source à concurrence des sommes retenues ou prélevées sur les revenus ou profits devant être réintégrés. 4. Il en résulte que la société Brufinol n'est pas fondée à soutenir que les dispositions du 2° du I de l'article 235 quater du code général des impôts excluraient la restitution des retenues ou prélèvements à la source prélevés sur les revenus ou profits perçus par une société non-résidente dont les résultats fiscaux sont nuls et constitueraient, pour ce motif, une restriction à la libre circulation des capitaux garantie par les articles 63 et 65 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Par suite, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel, la société requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du paragraphe n° 30 des commentaires administratifs publiés le 29 juin 2022 sous la référence BOI-RPPM-RCM-30-30-10-90 réitérant ces dispositions. 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de la société Brufinol est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société de droit luxembourgeois Brufinol S.A. et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré à l'issue de la séance du 5 octobre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, Mme Françoise Tomé, conseillers d'Etat et M. François-René Burnod, auditeur-rapporteur. Rendu le 18 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl Le rapporteur : Signé : M. François-René Burnod La secrétaire : Signé : Mme Magali Méaulle
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a notamment demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du conseil municipal d'Argeliers du 6 mai 2017 ainsi que l'arrêté du maire de cette commune du 11 décembre 2017 portant péril ordinaire. Par un jugement n° 1800603 du 21 janvier 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2020, sous le n° 20MA02595, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, et un mémoire en transmission de pièces enregistré le 1er octobre 2020, requête et mémoire enregistrés ensuite, le 11 avril 2022, au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL02595, et un mémoire en réplique, enregistré le 24 juin 2022, M. A..., représenté par la Selarl Lysis, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 janvier 2020 ; 2°) d'annuler la délibération du conseil municipal d'Argeliers du 16 mai 2017 ; 3°) d'annuler l'arrêté portant péril ordinaire du 11 décembre 2017 du maire d'Argeliers ; 4°) de mettre à la charge de la commune d'Argeliers une somme de 4 500 euros à verser à son profit sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Il soutient que : Sur le bien-fondé du jugement : - il justifie d'un intérêt à agir dès lors qu'il est directement concerné par la décision attaquée devant les premiers juges ; - en ce qui concerne l'illégalité de la délibération du 16 mai 2017, elle est entachée d'un détournement de procédure en raison de ce que la commune aurait dû mettre en œuvre la procédure prévue à l'article L. 511-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique pour acquérir les parcelles appartenant aux consorts A... dès lors qu'ils étaient opposés à une telle vente ; il n'est pas propriétaire de la parcelle A 1805 et il est devenu, avec ses sœurs, propriétaire indivis de la parcelle A 1806 ; - en ce qui concerne l'illégalité de l'arrêté portant péril ordinaire du 11 décembre 2017, il est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il n'a pas été informé de la mise en œuvre de la procédure de péril ordinaire et qu'il n'a pas bénéficié du délai prévu par l'article R. 511-1 du code de la construction et de l'habitation pour présenter ses observations ; - cet arrêté est entaché d'une erreur de fait dès lors qu'il ressort du rapport d'expertise du 1er novembre 2015 que les deux immeubles se trouvent dans un état de péril justifiant leur démolition. Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 février et 20 septembre 2022, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la commune d'Argeliers, représentée par Me Garcia, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... le paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : Sur le bien-fondé du jugement : - la requête est irrecevable dès lors qu'il n'a ni intérêt ni qualité à agir puisqu'il n'est pas le seul propriétaire de l'immeuble litigieux qui appartient à une indivision ; il aurait dû préciser qu'il représentait, par son action, l'indivision ; - la commune a respecté les conclusions de l'expert judiciaire du 1er novembre 2015 en prenant toutes les mesures utiles pour sécuriser les lieux ; - en ce qui concerne la délibération du conseil municipal du 16 mai 2017, elle n'est pas entachée d'un détournement de procédure dès lors qu'elle ne vise pas à contourner la mise en place d'une procédure d'expropriation ou à dévaluer le prix du bien ; - en ce qui concerne l'arrêté du 11 décembre 2017, il n'est pas entaché du vice de procédure allégué dès lors qu'il vise les mises en demeure adressées à l'ensemble des propriétaires indivis ; - cet arrêté n'est entaché d'aucune erreur de fait dès lors que l'expert judiciaire est formel sur la situation de péril des immeubles justifiant leur démolition. Par une ordonnance du 6 septembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 20 septembre 2021 à 12 heures. Les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de la méconnaissance par l'arrêté du maire d'Argeliers du 11 décembre 2017 du champ d'application de la loi dès lors que cet arrêté se fonde sur les dispositions de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - - le code de la construction et de l'habitation ; - le code général des collectivités territoriales ; - le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Karine Beltrami, première conseillère, - les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique, - et les observations de Me Montepini, représentant M. A... et celles de Me Garcia représentant la commune d'Argeliers. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., qui est propriétaire indivis des immeubles cadastrés A 1805 et A 1806, situés à Argeliers (Aude), a notamment demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de la délibération du conseil municipal d'Argeliers du 6 mai 2017 ainsi que celle de l'arrêté du maire de cette commune du 11 décembre 2017 portant péril ordinaire. Il relève appel du jugement du 21 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Sur la fin de non-recevoir opposée en défense : 2. En premier lieu, il résulte des dispositions, alors applicables, de l'article L. 511-1-1 du code de la construction et de l'habitation que : " Tout arrêté de péril pris en application de l'article L. 511-1 est notifié aux propriétaires et aux titulaires de droits réels immobiliers sur les locaux, tels qu'ils figurent au fichier immobilier. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la seule qualité de propriétaire en indivision transcrite au fichier immobilier donne intérêt et qualité à agir à l'encontre d'une mesure de police spéciale du maire prise sur le fondement de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation auquel l'article L. 511-1 de ce code renvoie expressément. 3. Dès lors qu'il est constant que M. A..., qui figure parmi les propriétaires indivis des immeubles litigieux, s'est vu notifier l'arrêté de péril du 11 décembre 2017, ce dernier, qui n'agit pas au nom de l'ensemble des co-indivisaires mais en son nom propre, justifie suffisamment de son intérêt et de sa qualité pour demander personnellement l'annulation cet acte. 4. En second lieu, il ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier et notamment pas d'un acte notarié venant contredire les mentions portées au fichier immobilier, que M. A... ne serait pas propriétaire des immeubles litigieux. Par suite, ce dernier justifie également de son intérêt et de sa qualité pour demander l'annulation de la délibération du 16 mai 2017. 5. Par suite, la fin de non-recevoir opposée en défense ne peut qu'être écartée. Sur les conclusions en annulation : En ce qui concerne la délibération du 16 mai 2017 : 6. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Peut être poursuivie, dans les conditions prévues aux articles L. 511-2 à L. 511-9, au profit de l'État, d'une société de construction dans laquelle l'État détient la majorité du capital, d'une collectivité territoriale, d'un organisme y ayant vocation ou d'un concessionnaire d'une opération d'aménagement mentionné à l'article L. 300-4 du code de l'urbanisme, l'expropriation : 1° Des immeubles déclarés insalubres à titre irrémédiable en application de l'article L. 1331-28 du code de la santé publique ; 2° Des immeubles à usage total ou partiel d'habitation, ayant fait l'objet d'un arrêté de péril pris en application de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation et assorti d'une ordonnance de démolition ou d'interdiction définitive d'habiter ; 3° À titre exceptionnel, des immeubles qui ne sont eux-mêmes ni insalubres, ni impropres à l'habitation, lorsque leur expropriation est indispensable à la démolition d'immeubles insalubres ou d'immeubles menaçant ruine, ainsi que des terrains où sont situés les immeubles déclarés insalubres ou menaçant ruine lorsque leur acquisition est nécessaire à la résorption de l'habitat insalubre, alors même qu'y seraient également implantés des bâtiments non insalubres ou ne menaçant pas ruine ". 7. La délibération du 16 mai 2017 du conseil municipal d'Argeliers se borne à approuver l'acquisition pour le montant d'un euro des immeubles situés sur cette commune, cadastrés A 1805 et A 1806, appartenant aux consorts A... en contrepartie de la prise en charge par la commune de leurs frais de démolition et à autoriser son maire à signer tous actes et tous documents relatifs à cet objet et notamment l'acte correspondant à intervenir. Par l'autorisation ainsi donnée à son maire, le conseil municipal envisageait ainsi d'acquérir contractuellement les biens considérés ce qui supposait l'accord de leurs propriétaires. Cette délibération n'avait donc, par elle-même, ni pour objet ni pour effet d'éviter la négociation avec les consorts A..., ni de contourner la procédure d'expropriation qui constitue un mode de cession forcée des biens devant être mis en œuvre, le cas échéant, en cas d'opposition des particuliers à céder leurs biens. Par suite, le moyen tiré de ce que la délibération du 16 mai 2017 serait entachée d'un détournement de la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique prévue à l'article L. 511-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ne peut qu'être écarté. En ce qui concerne l'arrêté du 11 décembre 2017 : 8. D'une part, aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (...) 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement, l'éclairage, l'enlèvement des encombrements, la démolition ou la réparation des édifices et monuments funéraires menaçant ruine (...) " L'article L. 2212-4 dispose : " En cas de danger grave ou imminent, (...), le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances (...) ". 9. D'autre part, aux termes de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version alors applicable : " Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques lorsqu'ils menacent ruine et qu'ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque, d'une façon générale, ils n'offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique, dans les conditions prévues à l'article L. 511-2. Toutefois, si leur état fait courir un péril imminent, le maire ordonne préalablement les mesures provisoires indispensables pour écarter ce péril, dans les conditions prévues à l'article L. 511-3 ". Aux termes de l'article L. 511-2 de ce code, dans sa version alors applicable : " I. ' Le maire, par un arrêté de péril pris à l'issue d'une procédure contradictoire dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'État, met le propriétaire de l'immeuble menaçant ruine, et le cas échéant les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 511-1-1, en demeure de faire dans un délai déterminé, selon le cas, les réparations nécessaires pour mettre fin durablement au péril ou les travaux de démolition, ainsi que, s'il y a lieu, de prendre les mesures indispensables pour préserver les bâtiments contigus ". 10. Il résulte de ces dispositions que, les pouvoirs de police générale reconnus au maire par les dispositions précitées des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales, qui s'exercent dans l'hypothèse où le danger menaçant un immeuble résulte d'une cause qui lui est extérieure, sont distincts des pouvoirs qui lui sont conférés dans le cadre des procédures de péril ou de péril imminent régies par les articles L. 511-1 à L. 511-4 du code de la construction et de l'habitation, auxquels renvoie l'article L. 2213-24 du code général des collectivités territoriales, qui doivent être mis en œuvre lorsque le danger provoqué par un immeuble provient à titre prépondérant de causes qui lui sont propres. Toutefois, en présence d'une situation d'extrême urgence créant un péril particulièrement grave et imminent, le maire peut, quelle que soit la cause du danger, faire légalement usage de ses pouvoirs de police générale, et notamment prescrire l'exécution des mesures de sécurité qui sont nécessaires et appropriée. 11 À ce titre, si le maire peut, en cas de péril ordinaire, ordonner la démolition d'un immeuble en application des dispositions de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation, en revanche en présence d'une situation d'extrême urgence créant un péril particulièrement grave et imminent qui exige la mise en œuvre immédiate d'une mesure de démolition, le maire ne peut l'ordonner que sur le fondement des pouvoirs de police générale qu'il tient des dispositions des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales. Un arrêté ordonnant en pareil cas la démolition d'un immeuble sur le fondement de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation est entaché d'une illégalité qui touche au champ d'application de la loi et doit, par suite, si elle n'a pas été invoquée par le requérant, être relevée d'office par le juge saisi d'un recours contre l'arrêté. 12. Il ressort des pièces du dossier que se fondant sur les conclusions du 1er novembre 2015 d'un expert désigné par le tribunal administratif de Montpellier, le maire d'Argeliers a pris, le 11 décembre 2017, sur le fondement des dispositions de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation, un arrêté de péril ordinaire par lequel il ordonnait notamment à M. A... de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit arrêté, aux travaux de démolition des deux immeubles lui appartenant sur la commune d'Argeliers. Toutefois, le rapport d'expertise du 1er novembre 2015 qui concluait à l'existence d'un péril grave et imminent pour la sécurité publique des personnes imposant des travaux de première urgence consistant à la réalisation, sans délai et sans discontinuité, de travaux de démolition complète devant être terminés au plus tard en 120 jours calendaires, caractérisait, non pas l'existence d'un péril ordinaire relevant des dispositions de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation, mais une situation d'extrême urgence créant un péril particulièrement grave et imminent qui exigeait la mise en œuvre immédiate d'une mesure de démolition. Dans ces conditions le maire ne pouvait ordonner la démolition des immeubles litigieux que sur le fondement des pouvoirs de police générale qu'il tient des dispositions des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales. Par suite, l'arrêté du 11 décembre 2017 est entaché d'illégalité, en tant qu'il ordonne la démolition de l'immeuble en cause sur le fondement de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation et il y a lieu d'annuler ledit arrêté. 13. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 juillet 2017. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 14. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune d'Argeliers sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, M. A... n'étant pas la partie perdante à l'instance. 16. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune d'Argeliers une somme de 1 500 euros au titre des conclusions présentées sur le même fondement par M. A.... DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 21 janvier 2020 est annulé en tant qu'il rejette la demande de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du maire d'Argeliers du 11 décembre 2017. Article 2 : L'arrêté du maire d'Argeliers du 11 décembre 2017 est annulé. Article 3 : La commune d'Argeliers versera à M. A... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune d'Argeliers. Délibéré après l'audience du 4 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Rey-Bèthbéder, président de chambre, M. Bentolila, président assesseur, Mme Beltrami, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, K. Beltrami Le président, É. Rey-Bèthbéder La greffière, C. Lanoux La République mande et ordonne au préfet de l'Aude en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20TL02595
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Vu les procédures suivantes : M. D... C... a porté plainte contre M. E... A... B... devant la chambre disciplinaire de première instance d'Occitanie de l'ordre des chirurgiens-dentistes. Le conseil départemental de Haute-Garonne de l'ordre des chirurgiens-dentistes s'est associé à la plainte. Par une décision du 12 février 2021, la chambre disciplinaire de première instance a infligé à M. A... B... la sanction de l'interdiction d'exercer la profession de chirurgien-dentiste pendant une période de six mois, dont cinq mois assortis du sursis. Par une décision du 2 mai 2022, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes a rejeté l'appel formé par M. A... B... contre cette décision et dit que la partie ferme de la sanction d'interdiction serait exécutée du 1er au 30 septembre 2022. 1° Sous le numéro 465306, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 juin et 23 août 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cette décision ; 2°) de mettre solidairement à la charge de M. C... et du conseil départemental de Haute-Garonne de l'ordre des chirurgiens-dentistes la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. 2° Sous le numéro 465995, par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 22 juillet et 29 août 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la même décision de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes. M. A... B... soutient que l'exécution de cette décision risque d'entraîner pour lui des conséquences difficilement réparables et que les moyens de son pourvoi-à l'exception du moyen d'erreur de droit et du moyen d'insuffisance de motivation qui ne figurent pas dans sa requête- sont de nature à justifier la cassation et l'infirmation de la solution retenue par les juges du fond. La requête a été communiquée à M. C... qui n'a pas produit de mémoire. .................................................................................... Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Catherine Brouard-Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Richard, avocat de M. A... B... ; Considérant ce qui suit : 1. Le pourvoi par lequel M. A... B... demande l'annulation de la décision du 2 mai 2022 de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes et sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cette même décision présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par une même décision. 2. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ". 3. Pour demander l'annulation de la décision de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes qu'il attaque, M. A... B... soutient qu'elle est entachée : - d'erreur de droit, en ce qu'elle juge que M. C... a pu régulièrement produire au soutien de sa plainte, des documents confidentiels soumis au secret médical ; - de dénaturation des pièces du dossier, en ce qu'elle estime qu'il a tiré des rémunérations de la prescription à ses patients, de produits commercialisés par la société " Natura4Ever " dans le cadre de l'exercice de sa profession de chirurgien-dentiste ; - de dénaturation des pièces du dossier, en ce qu'elle retient que le contrat qui le liait à la société " Myobrace " lui garantissait l'exclusivité des produits de cette société dans un rayon de quinze kilomètres autour de son cabinet médical, alors que ce contrat prévoyait le bénéfice de tarifs préférentiels, la remise de documents d'information à destination des patients, et la dispense de formations pour les praticiens et leurs assistantes ; - de dénaturation des pièces du dossier, en ce qu'elle retient le grief tiré de la réalisation d'actes ne relevant pas de l'art dentaire. M. A... B... soutient également que cette décision prononce une sanction hors de proportion avec les fautes qui lui sont reprochées. 4. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi. 5. Le pourvoi formé par M. A... B... contre la décision du 2 mai 2022 de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes n'étant pas admis, les conclusions qu'il présente aux fins de sursis à exécution de cette décision sont devenues sans objet. Il n'y a donc pas lieu d'y statuer. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de M. A... B... n'est pas admis. Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête aux fins de sursis à exécution de la décision du 2 mai 2022 de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. E... A... B... et à M. D... C.... Copie en sera adressée au Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes et au conseil départemental de Haute-Garonne de l'ordre des chirurgiens-dentistes. Délibéré à l'issue de la séance du 8 septembre 2022 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; Mme Sophie-Justine Lieber, conseillère d'Etat et Mme Catherine Brouard-Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire-rapporteure. Rendu le 7 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Maud Vialettes La rapporteure : Signé : Mme Catherine Brouard-Gallet La secrétaire : Signé : Mme Romy Raquil
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, par trois demandes distinctes, l'annulation de la décision du 15 mai 2018 par laquelle l'inspecteur du travail de la deuxième unité de contrôle de la Haute-Garonne a autorisé son licenciement pour faute, l'annulation de la décision implicite de rejet par le ministre chargé du travail de son recours hiérarchique formé le 6 juillet 2018 contre la décision du 15 mai 2018 et l'annulation de la décision du 6 mars 2019 par laquelle le ministre chargé du travail a de façon expresse rejeté son recours hiérarchique et a confirmé la décision du 15 mai 2018. Par un jugement n°s 1803191-1900191-1902201 du 11 juin 2020 le tribunal administratif de Toulouse a rejeté les demandes de M. A... . Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 7 août 2020 et les 27 décembre 2021 et 9 mars 2022, M. A..., représenté par Me Denjean, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du 11 juin 2020 du tribunal administratif de Toulouse ; 2°) d'annuler la décision du 15 mai 2018 par laquelle l'inspecteur du travail de la deuxième unité de contrôle de la Haute-Garonne a autorisé son licenciement pour faute, ensemble la décision du 6 mars 2019 par laquelle le ministre chargé du travail a rejeté de façon expresse son recours hiérarchique formé le 6 juillet 2018 contre la décision du 15 mai 2018 de l'inspecteur du travail ; 3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - en premier lieu, les décisions dont il demande l'annulation, autorisant son licenciement, sont entachées d'une insuffisance de motivation ; - en deuxième lieu, la procédure de licenciement est entachée d'irrégularité dès lors que le Crédit agricole n'a pas consulté le comité d'entreprise dans le délai de dix jours suivant la notification de la mise à pied , le comité d'entreprise n'ayant été consulté que le 7 février 2018, soit plus d'un mois et demi après la notification de la mise à pied ; - le Crédit agricole n'a pas accompagné la demande d'autorisation du licenciement du procès-verbal de la réunion de comité d'entreprise mais seulement d'un projet de compte rendu de réunion non validé par ses membres ; - il n'est pas établi l'existence d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement ; - le licenciement est en lien avec le mandat, dès lors que son élection en qualité de conseiller des prud'hommes est à l'origine de la demande d'autorisation de licenciement présentée par le Crédit agricole. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2021, la ministre du travail conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés. Par deux mémoires en défense, enregistrés les 26 janvier et 8 juin 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la caisse régionale de crédit agricole mutuel Toulouse 31, représentée par Me Dubourdieu, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 26 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 16 août 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code du travail ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B... C..., - les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique, - et les observations de Me Lopez pour la caisse régionale de crédit agricole mutuel Toulouse 31. Considérant ce qui suit : 1 .M. A... a été recruté au sein du Crédit agricole le 4 janvier 1993 en qualité de technicien " gestion financière ". Il occupait depuis le 15 janvier 2017 les fonctions de directeur d'agence à Cazères (Haute-Garonne) et exerçait par ailleurs les mandats de représentant syndical au comité d'entreprise et de conseiller prud'homal. La caisse régionale de crédit agricole Mutuel Toulouse 31 a sollicité, le 19 mars 2018, de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier M. A... pour faute, laquelle lui a été accordée par une décision du 15 mai 2018. Le ministre chargé du travail a implicitement rejeté le recours hiérarchique formé par M. A... le 6 juillet 2018 contre la décision du 15 mai 2018 et, par une décision du 6 mars 2019, a rejeté de façon expresse ce recours hiérarchique. 2. Par un jugement du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a joint les trois demandes présentées par M. A... contre ces trois décisions, a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande dirigée contre la décision implicite de rejet du recours hiérarchique formé contre l'autorisation de licenciement du 15 mai 2018 et a rejeté le surplus des demandes. 3. M. A... relève appel du jugement du 11 juin 2020 en tant qu'il rejette ses demandes dirigées contre la décision du 15 mai 2018 de l'inspecteur du travail et contre la décision expresse de rejet du 6 mars 2019 de son recours hiérarchique par le ministre chargé du travail. Sur le bien-fondé du jugement et des décisions attaquées : 4. En vertu des dispositions de l'article L. 2411-3 du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives, bénéficient, dans l'intérêt des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, et ne peuvent être licenciés qu'avec l'autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution du mandat dont il est investi. 5. La décision de l'inspecteur du travail se fonde sur " le comportement managérial anxiogène " de M. A... se rapportant à l'instauration de sa part des comptes rendus d'activité (CRAC), la tenue de " propos dévalorisants ou blessants ", des " remarques d'ordre sexiste ou sexuel " à l'adresse de salariées, se rapportant à leur physique et à leurs tenues vestimentaires, et des propos à caractère sexuel. 6. En premier lieu, en vertu de l'article R. 2421-5 du code du travail applicable en l'espèce compte tenu des mandats détenus par M. A...: " La décision de l'inspecteur du travail est motivée ". 7. Contrairement à ce que soutient l'appelant, la décision du 15 mai 2018 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement pour faute, est précisément motivée dès lors qu'elle mentionne les textes, et notamment les articles du code du travail sur lesquels elle se fonde, et, de façon détaillée, l'ensemble des nombreux faits qui lui sont reprochés. Cette décision indique par ailleurs, en tout état de cause, les éléments de la procédure interne à l'entreprise qui a été suivie et notamment la mise à pied du 6 février 2018, l'entretien préalable au licenciement qui a eu lieu le 14 février 2018, la tenue du conseil de discipline, le 2 mars 2018, et la consultation du comité d'entreprise qui s'est réuni le 14 mars 2018. La décision autorisant son licenciement en estimant par ailleurs que l'enquête contradictoire réalisée par l'inspecteur du travail n'a pas mis en évidence l'existence d'un lien entre l'existence et l'exercice des mandats détenus par M. A... est suffisamment motivée dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'inspecteur du travail aurait été saisi d'éléments particuliers à cet égard. 8. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 2421-6 du code du travail, applicable à la situation de M. A..., compte tenu des mandats détenus : " En cas de faute grave, l'employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l'intéressé jusqu'à la décision de l'inspecteur du travail. / Lorsque le délégué syndical bénéficie de la protection prévue à l'article L. 2421-3, la consultation du comité social et économique a lieu dans un délai de dix jours à compter de la date de la mise à pied. La demande d'autorisation de licenciement est présentée au plus tard dans les quarante-huit heures suivant la délibération du comité social et économique. (...) ". 9. Il résulte de l'instruction que le comité d'entreprise a été consulté le 14 mars 2018, soit au-delà du délai de dix jours prévu par les dispositions précitées de l'article R. 2421-6 du code du travail et courant à compter de la date de mise à pied de M. A..., intervenue le 6 février 2018. Cependant, ce dernier avait été convoqué à l'entretien préalable, qui a eu lieu le 7 février 2018, et a été convoqué, le 19 février 2018, conformément à l'article 13 de la convention collective nationale applicable, au conseil de discipline qui s'est tenu le 2 mars 2018, lequel a été suivi par la convocation, dès le 8 mars 2018, des membres du comité d'entreprise. Dans ces conditions, l'intéressé ne peut utilement soutenir, eu égard à l'existence de la procédure disciplinaire interne engagée parallèlement à son encontre, qui impliquait de réunir le conseil de discipline avant de convoquer le comité d'entreprise, que le dépassement du délai de dix jours précité est de nature à entacher d'illégalité la décision d'autorisation de licenciement. 10. En troisième lieu, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, aucune disposition législative ou règlementaire n'impose que l'employeur dans sa demande d'autorisation de licenciement adressée à l'inspecteur du travail transmette le compte rendu de la réunion du comité d'entreprise validé par les membres dudit comité. Dès lors, la circonstance que l'inspecteur du travail n'ait été destinataire que d'un projet de compte rendu de la réunion du comité d'entreprise et non d'un procès-verbal validé par ses membres, est sans incidence sur la validité de la procédure de licenciement. 11. En quatrième lieu, M. A... conteste la matérialité des faits qui lui sont reprochés . Tout d'abord, il ne ressort pas des pièces du dossier que la mise en place des comptes rendus d'activité puisse être considérée, alors même qu'elle n'aurait pas été à l'initiative de la hiérarchie de M. A..., comme constituant en elle-même une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement. En effet, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette mise en place se serait accompagnée de mesures coercitives ou punitives pour les salariés n'ayant pas établi ces comptes rendus ou ayant eu des résultats inférieurs à ceux escomptés. De même, n'est pas suffisamment établie la réalité des propos " dévalorisants et blessants " qu'aurait tenu l'appelant à l'égard de certains salariés. Tel n'est pas le cas en revanche des remarques et propos de nature déplacée et à connotation sexuelle et/ou sexiste à destination de salariées qui lui sont reprochés par la décision de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement, qui sont établis par des attestations précises et circonstanciées émanant de salariées placées sous les ordres de M. A..., lequel, du reste, ne conteste pas ces faits, relevés par les premiers juges, et notamment les remarques sur leur physique, les exigences vestimentaires, et les propos déplacés à caractère sexuel. 12. En cinquième lieu, si M. A... produit un certain nombre de pièces, constituées notamment de courriels qui lui ont été adressés par des salariées, mais dans un contexte très différent de celui dans lequel les propos ou remarques d'ordre sexuel ou sexiste fautifs ont été prononcés, le contenu de ces documents n'est pas de nature à retirer à ces faits leur caractère fautif. De même, s'il soutient, d'une part, que l'administration s'est fondée sur le plan médical sur l'unique rapport établi par un psychologue, alors qu'il n'y aurait eu aucun arrêt de travail, ni de signalement à la médecine du travail avant le déclenchement de la procédure disciplinaire et, d'autre part, que les représentants du personnel n'ont pas non plus constaté un tel climat dégradé, ces circonstances ne sont de nature ni à ôter ni à atténuer le caractère fautif des faits reprochés et établis à l'encontre de M. A.... 13. En cinquième lieu, M. A... invoque l'existence d'un lien entre la demande d'autorisation de licenciement et ses mandats, en faisant valoir que son élection en qualité de conseiller des prud'hommes est à l'origine de la demande d'autorisation de licenciement présentée par le Crédit agricole, qu'il n'a plus bénéficié d'une d'évolution au sein de la société depuis sa désignation comme représentant syndical Force Ouvrière au comité d'entreprise le 24 novembre 2015, et ce malgré ses résultats professionnels, et qu'à la fin de l'année 2017, des tensions sont apparues entre ce syndicat et la direction du Crédit agricole, la société s'opposant à la diffusion d'un tract relatif aux groupes de travail sur le projet d'entreprise. Toutefois, les allégations de l'appelant ne sont pas établies par les pièces du dossier, eu égard notamment aux explications données en défense selon lesquelles, d'une part, seulement 21 postes de directeur de groupe d'agences existaient pour 107 salariés occupant des fonctions de directeur et de directeur adjoint et, d'autre part, M. A... a été nommé directeur de l'agence de Cazères, soit la plus importante du secteur. Dans ces conditions, l'existence d'un lien entre la décision autorisant son licenciement et l'exercice de ses mandats n'est pas établi. 14. Il résulte de ce qui précède, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions en annulation de la décision du 15 mai 2018 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement ainsi que celles dirigées à l'encontre de la décision du 6 mars 2019 du ministre chargé du travail rejetant de façon expresse son recours hiérarchique. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 15. La caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Toulouse, n'étant pas dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions présentées par M. A... à son encontre sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Toulouse . DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Toulouse sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Toulouse et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Délibéré après l'audience du 4 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Rey-Bèthbéder, président, M.C..., président-assesseur, Mme El Gani-Laclautre, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur P. C... Le président, É. Rey-Bèthbéder La greffière C. Lanoux La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N° 20TL22578 2
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Vu la procédure suivante : M. et Mme C... A... B... ont demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la réduction, à concurrence d'une diminution de leurs revenus de capitaux mobiliers de 170 500 euros pour l'année 2015 et 687 057 euros pour l'année 2016, des cotisations primitives d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de ces années. Par un jugement n° 1709453 du 8 juillet 2020, ce tribunal a rejeté leur demande. Par un arrêt n° 20PA02599 du 23 décembre 2021, la cour administrative d'appel de Paris a annulé ce jugement et fait droit aux demandes de M. et Mme A... B.... Par un pourvoi, enregistré le 18 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel formé par M. et Mme A... B.... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes, - les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL cabinet Briard, avocat de M. et Mme A... B... ; Considérant ce qui suit : 1. Il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme A... B... ont, entre 2013 et 2017, conclu avec la société de droit espagnol Publiolimpia SL plusieurs contrats de prêt participatif. Au titre de la rémunération prévue par certains de ces contrats de prêts, consentis entre 2014 et 2016, ils ont perçu en 2015 et 2016 des intérêts qu'ils ont déclarés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers à hauteur, respectivement, de 192 104 euros et 692 069 euros. Les 26 juillet et 22 août 2017, à la suite de l'ouverture d'une enquête pénale à l'encontre du gérant de la société Publiolimpia SL, portant sur une fraude d'ampleur consistant à utiliser les fonds prêtés par une partie des investisseurs afin de rémunérer et de rembourser les prêts consentis par d'autres, les époux A... B... ont saisi l'administration fiscale de réclamations tendant à la réduction des revenus de capitaux mobiliers qu'ils avaient ainsi déclarés. L'administration a rejeté ces réclamations. Par un jugement du 8 juillet 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de M. et Mme A... B... tendant à la réduction de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2015 et 2016. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 23 décembre 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a fait droit à l'appel formé par les contribuables contre ce jugement. 2. Aux termes de l'article 124 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus au sens du présent article, lorsqu'ils ne figurent pas dans les recettes provenant de l'exercice d'une profession industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, ou d'une exploitation minière, les intérêts, arrérages, primes de remboursement et tous autres produits : 1° Des créances hypothécaires, privilégiées et chirographaires, à l'exclusion de celles représentées par des obligations, effets publics et autres titres d'emprunts négociables entrant dans les prévisions des articles 118 à 123 (...) ". L'article 125 du même code dispose que : " Le revenu est déterminé par le montant brut des intérêts, arrérages, primes de remboursement ou tous autres produits des valeurs désignées à l'article 124. / L'impôt est dû par le seul fait, soit du paiement des intérêts, de quelque manière qu'il soit effectué, soit de leur inscription au débit ou au crédit d'un compte ". 3. La cour administrative d'appel a relevé, par une appréciation souveraine non arguée de dénaturation, que M. et Mme A... B... avaient conclu, entre 2013 et 2017, plusieurs contrats de prêt participatif, authentifiés par un notaire établi à Barcelone, avec la société de droit espagnol Publiolimpia SL, destinés à financer des campagnes publicitaires télévisuelles, et que chacun de ces contrats avait fait l'objet d'une police d'assurance souscrite avec une compagnie d'assurance et avait donné lieu à l'édition de plusieurs billets à ordre qui leur avaient été remis le jour de la signature du contrat, portant l'un sur le remboursement du capital emprunté et les autres sur le paiement des intérêts dus en rémunération du prêt, et comportant chacun la date de leur encaissement. 4. En jugeant que les intérêts perçus par M. et Mme A... B... en 2015 et 2016 devaient, au seul motif qu'ils s'étaient avérés en 2017 provenir non des bénéfices de l'activité de la société Publiolimpia SL mais de la souscription par celle-ci de nouveaux emprunts, être regardés comme fictifs et requalifiés en remboursements en capital à concurrence, pour chacune des années en litige, du montant n'excédant pas celui investi par les intéressés au cours de cette même année, alors que, d'une part, ainsi qu'elle l'avait relevé, les prêts participatifs consentis entre 2013 et 2017 étaient indépendants les uns des autres et que, d'autre part, il était constant devant elle que les intérêts en litige avaient effectivement été payés aux contribuables en rémunération de prêts, échus avant la découverte de la dimension frauduleuse de l'activité de la société emprunteuse et dont le capital leur avait été également intégralement remboursé en 2015 et en 2016, la cour administrative d'appel a inexactement qualifié les faits de l'espèce. 5. Il s'ensuit, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que le ministre est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 23 décembre 2021 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris. Article 3 : Les conclusions présentées par M. et Mme A... B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. et Mme C... A... B.... Délibéré à l'issue de la séance du 5 octobre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, Mme Françoise Tomé, conseillers d'Etat et Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes-rapporteure. Rendu le 18 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Ophélie Champeaux La secrétaire : Signé : Mme Magali Méaulle
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 février et 31 août 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Conseil national de l'ordre des médecins demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 septembre 2021 du ministre de l'économie, des finances et de la relance et du ministre des solidarités et de la santé portant approbation de l'avenant n° 9 à la convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l'assurance maladie signée le 25 août 2016 ; 2°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande de retrait de cet arrêté ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la directive 2011/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2011 ; - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Agnès Pic, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Arnaud Skzryerbak, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du Conseil national de l'ordre des médecins, et à la SCP Duhamel, Rameix, Gury, Maître, avocat de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie ; Considérant ce qui suit : 1. En vertu de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les médecins sont définis par des conventions nationales conclues entre l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et une ou plusieurs organisations syndicales les plus représentatives, selon le cas, des médecins généralistes ou des médecins spécialistes. Ces conventions et leurs avenants sont, en vertu du deuxième alinéa de l'article L. 162-15 du même code, approuvés par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. 2. Le Conseil national de l'ordre des médecins demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 22 septembre 2021 par lequel le ministre de l'économie, des finances et de la relance et le ministre des solidarités et de la santé ont approuvé l'avenant n° 9 à la convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l'assurance maladie signée le 25 août 2016 ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Eu égard aux moyens qu'il invoque, sa requête doit être regardée comme tendant à l'annulation de l'approbation de l'avenant n° 9 en tant que celui-ci supprime l'exigence que le médecin effectuant un acte de téléconsultation connaisse préalablement le patient, qu'il permet à un professionnel de santé non médecin de solliciter une téléexpertise et qu'il instaure un dispositif d'" intéressement " à la prescription de médicaments biosimilaires. Sur la téléconsultation : 3. En vertu du 1° du I de l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale, les conventions prévues à l'article L. 162-5 du même code définissent notamment, le cas échéant, le tarif et les modalités de réalisation des actes de télémédecine, définie à l'article L. 6316-1 du code de la santé publique. Selon le 1° de l'article R. 6316-1 du même code, pris pour l'application de l'article L. 6316-1, la téléconsultation, qui est un acte relevant de la télémédecine, a pour objet de permettre à un professionnel médical de donner une consultation à distance à un patient. 4. L'article 2-1 de l'avenant n° 9 modifie les stipulations de l'article 28.6.1.1 de la convention intitulé " Champ d'application de la téléconsultation ", en prévoyant que " pour assurer la qualité des soins en téléconsultation, le suivi régulier du patient s'effectue à la fois par des consultations en présentiel et en téléconsultations au regard des besoins du patient et de l'appréciation du médecin, et ce afin que ce dernier puisse disposer des informations nécessaires à la réalisation d'un suivi médical de qualité " et en supprimant l'exigence, auparavant prévue, que les patients bénéficiant d'une téléconsultation soient connus du médecin consultant, c'est-à-dire qu'ils aient bénéficié d'au moins une consultation " en présentiel " dans les douze mois précédents sauf pour les patients qui ne disposent pas d'un médecin traitant désigné ou lorsque le médecin traitant n'est pas disponible dans le délai compatible avec leur état de santé. 5. Si la consultation peut ainsi désormais, en vertu des stipulations en litige, être réalisée à distance y compris lorsque le patient en bénéficiant n'est pas encore connu du médecin consultant, c'est sous réserve, comme le prévoit également l'article 28-6-1-1, que le parcours de soins coordonné soit respecté, que le médecin traitant et le médecin correspondant aient apprécié l'opportunité du recours à cette modalité de consultation, que le patient, informé des conditions de réalisation de l'acte, ait donné son consentement préalable à celui-ci et que son suivi régulier s'effectue à la fois par des consultations " en présentiel " et des téléconsultations. Ces stipulations n'ont ni pour objet ni pour effet de déroger aux obligations déontologiques qui s'imposent au médecin, notamment celles, mentionnées aux articles R. 4127-32, R. 4127-33 et R. 41227-47 du code de la santé publique, d'assurer personnellement au patient des soins consciencieux et dévoués, en faisant appel, s'il y a lieu, à l'aide de tiers compétents, d'élaborer son diagnostic avec le plus grand soin, en y consacrant le temps nécessaire, et d'assurer la continuité des soins aux malades. Le Conseil national de l'ordre des médecins n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'elles les méconnaîtraient. Il ne peut pas plus utilement se prévaloir de l'atteinte qu'elles porteraient au premier des principes élaborés par le réseau " E-Health-Network ", créé par la directive 2011/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2011 relative à l'application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers, qui, se bornant à prévoir que " le numérique en santé complète et optimise les pratiques de santé effectuées en présentiel ", n'impose pas par lui-même la connaissance préalable du patient. Sur la télé-expertise : 6. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 6316-1 du code de la santé publique : " La télémédecine est une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l'information et de la communication. Elle met en rapport un professionnel médical avec un ou plusieurs professionnels de santé, entre eux ou avec le patient et, le cas échéant, d'autres professionnels apportant leurs soins au patient. ". Le 2° de l'article R. 6316-1 du même code précise, dans sa rédaction issue de l'article 1er du décret du 3 juin 2021 relatif à la télésanté, que la télé-expertise " a pour objet de permettre à un professionnel de santé de solliciter à distance l'avis d'un ou de plusieurs professionnels médicaux en raison de leurs formations ou de leurs compétences particulières, sur la base des informations de santé liées à la prise en charge d'un patient ". 7. L'article 2-3 de l'avenant approuvé par l'arrêté attaqué modifie les articles 28.6.2.1 et 28.6.2.2 de la convention médicale du 25 août 2016 pour prévoir désormais, d'une part, que la télé-expertise est entendue comme une expertise sollicitée, non plus par un " médecin requérant ", mais par un "professionnel de santé requérant " et donnée par un " médecin requis ", en raison de sa formation ou de sa compétence particulière, sur la base d'informations ou d'éléments médicaux liés à la prise en charge d'un patient, et ce, hors de la présence de ce dernier et, d'autre part, que l'acte de télé-expertise doit faire l'objet d'un compte rendu établi par le médecin requis qui doit être transmis au professionnel de santé requérant. 8. En premier lieu, il ne résulte pas des termes de l'article L. 6316-1 du code de la santé publique, cités au point 6, que la télémédecine ne pourrait être réalisée qu'à la demande du seul professionnel médical. Le Conseil national de l'ordre des médecins n'est donc pas fondé à soutenir, par la voie de l'exception, que le 2° de l'article R. 6316-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de l'article 1er du décret du 3 juin 2021, méconnaîtrait ces dispositions en tant qu'il permet à un professionnel de santé de solliciter un professionnel médical pour une télé-expertise. 9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 4130-1 du code de la santé publique : " Les missions du médecin généraliste de premier recours sont notamment les suivantes : / (...) 2° Orienter ses patients selon leurs besoins dans le système de soins et le secteur médico-social / 3° S'assurer de la coordination des soins nécessaire à ses patients ; / 4° Veiller à l'application individualisée des protocoles et recommandations pour les affections nécessitant des soins prolongés et contribuer au suivi des maladies chroniques, en coopération avec les autres professionnels qui participent à la prise en charge du patient (...) ". 10. Les dispositions du 2° de l'article R. 6316-1 du code de la santé publique n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre à un professionnel de santé non médecin de se substituer au médecin généraliste de premier recours dans sa mission de coordination des soins et d'orientation des patients dans un système de soins. Par suite, le Conseil national de l'ordre des médecins n'est pas davantage fondé à soutenir, par la voie de l'exception, qu'elles seraient contraires au dispositif de parcours de soins coordonné tel que prévu à l'article L. 4130-1 du même code. 11. En troisième lieu, les stipulations de l'article 2-3 de l'avenant approuvé par l'arrêté attaqué mentionnées au point 7 se bornent à fixer les conditions dans lesquelles un professionnel de santé sollicite à distance l'avis d'un ou de plusieurs professionnels médicaux. Elles n'ont ni pour objet ni pour effet de modifier les compétences des professionnels de santé non médecins fixées par les textes applicables à chacune de ces professions. En particulier, elles ne permettent pas à un professionnel de santé non médecin d'exercer la médecine ou de se substituer au médecin traitant. Le moyen tiré de ce que ces stipulations seraient, à ce titre, contraires aux principes fondamentaux de l'organisation des soins et permettraient l'exercice illégal de la médecine ne peut, par suite, qu'être écarté. Sur le dispositif d'" intéressement " à la prescription de médicaments biosimilaires : 12. En vertu de 1° du I de l'article L.162-14-1 du code de la sécurité sociale, les conventions prévues par l'article L. 162-5 du même code définissent notamment les tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires dus aux professionnels par les assurés sociaux. 13. D'une part, aux termes de l'article L. 162-2 du code de la sécurité sociale : " Dans l'intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, le respect de la liberté d'exercice et de l'indépendance professionnelle et morale des médecins est assuré conformément aux principes déontologiques fondamentaux que sont le libre choix du médecin par le malade, la liberté de prescription du médecin (...) ". Aux termes de l'article L. 162-1 du même code : " Les médecins sont tenus, dans tous leurs actes et prescriptions, d'observer, dans le cadre de la législation et de la réglementation en vigueur, la plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l'efficacité des soins. " 14. D'autre part, aux termes de l'article R. 4127-24 du code de la santé publique : " Sont interdits au médecin : / - tout acte de nature à procurer au patient un avantage matériel injustifié ou illicite ; / - toute ristourne en argent ou en nature, toute commission à quelque personne que ce soit ; / - la sollicitation ou l'acceptation d'un avantage en nature ou en espèces sous quelque forme que ce soit, d'une façon directe ou indirecte, pour une prescription ou un acte médical quelconque " et aux termes de l'article R. 4127-9 du même code : " La médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce ". Ces dispositions ne s'opposent pas, par elles-mêmes, à ce que les conventions médicales prises sur le fondement de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale prévoient des éléments de rémunération tenant compte, dans le respect tant des principes déontologiques fondamentaux que de l'intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, de leur observation de la plus stricte économie compatible, dans le cadre de la législation et de la réglementation en vigueur, avec la qualité, la sécurité et l'efficacité des soins. 15. L'avenant n° 9 approuvé par l'arrêté attaqué crée dans la convention nationale un article 27 bis proposant un mécanisme d'intéressement, dont il fixe les modalités de calcul, valorisant l'augmentation par un médecin libéral du nombre de ses patients auxquels des médicaments biosimilaires sont prescrits, s'agissant de molécules répondant à des critères qu'il définit et conformément aux recommandations de bonne pratiques. Ce même article précise que le dispositif n'a pas de caractère obligatoire, en permettant aux médecins qui ne souhaitent pas en bénéficier de faire connaître leur choix à l'assurance maladie, et qu'il doit respecter, dans tous les cas, le libre choix du patient. 16. Ces stipulations régissent les seuls rapports entre les médecins libéraux et l'assurance maladie. Elles n'ont ni pour objet ni pour effet de dispenser les médecins qui participent à ce dispositif du respect des principes et règles déontologiques qui s'imposent à eux parmi lesquels, comme il a été dit, la liberté de prescription. Le Conseil national de l'ordre des médecins n'est, dans ces conditions, pas fondé à soutenir que ces stipulations seraient contraires aux règles de la déontologie médicale figurant aux articles R. 4127-24 et R. 4127-9 du code de la santé publique et rappelées au point 14. 17. Il résulte de tout ce qui précède que le Conseil national de l'ordre des médecins n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 22 septembre 2021 et du rejet de son recours gracieux. Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins une somme de 3 000 euros à verser à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, au titre des mêmes dispositions. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête du Conseil national de l'ordre des médecins est rejetée. Article 2 : Le Conseil national de l'ordre des médecins versera à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée au Conseil national de l'ordre des médecins, au ministre de la santé et de la prévention et à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie. Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, à la Fédération française des médecins généralistes, à l'Union syndicale Avenir-Spé-Le Bloc et à la Confédération des syndicats médicaux français. Délibéré à l'issue de la séance du 15 septembre 2022 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Damien Botteghi, conseiller d'Etat et Mme Agnès Pic, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure. Rendu le 14 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Gaëlle Dumortier La rapporteure : Signé : Mme Agnès Pic Le secrétaire : Signé : M. Hervé Herber
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée Enduits Couserans a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner l'office public de l'habitat Tarn Habitat à lui verser la somme de 11 750 euros au titre du solde de son marché de ravalement de façade et d'isolation portant sur l'immeuble sis 6/8 boulevard Rajol à Carmaux. Par un jugement n° 1900596 du 24 septembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux le 25 novembre 2020, puis réenregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la société Enduits Couserans, représentée par Me Croels, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 24 septembre 2020 du tribunal administratif de Toulouse ; 2°) de condamner l'office public de l'habitat Tarn Habitat à lui verser la somme de 11 750 euros au titre du solde de son marché de ravalement de façade et d'isolation portant sur l'immeuble sis 6/8 boulevard du Rajol à Carmaux ; 3° ) de mettre à la charge de l'office public de l'habitat Tarn Habitat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La société Enduits Couserans soutient que : - le jugement de première instance est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'il se fonde à tort sur le fait qu'elle n'avait pas sollicité la prolongation du délai de chantier ; or, les pièces du dossier établissent que Tarn Habitat était informé des difficultés rencontrées par la société, ainsi qu'il est démontré par de nouvelles pièces produites en appel ; elle doit donc être regardée comme ayant nécessairement demandé une prolongation du délai d'exécution des prestations ; - le marché consiste en la pose d'une isolation thermique par l'extérieur sous enduits ; la réalisation de ces prestations implique des conditions climatiques optimales ; le chantier, dont la réception est intervenue le 12 mars 2018, a connu quatre-vingt-huit jours d'intempéries ; sur l'ensemble des jours de retard qui ont été retenus à son encontre elle reconnaît que quatorze jours de retard lui sont imputables ; à raison de 50 euros par jour de retard, le maître de l'ouvrage était donc seulement fondé à lui infliger des pénalités de retard à hauteur de 700 euros ; elle est donc en droit d'obtenir le paiement de 11 750 euros sur la somme de 12 450 euros qui a été retenue au titre des pénalités de retard dans le cadre du décompte général de son marché. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2022, l'office public de l'habitat Tarn Habitat représenté par Me Courrech, conclut au rejet de la requête de la SARL Enduits Couserans, et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la société au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Tarn Habitat soutient que les moyens invoqués par la SARL Enduits Couserans ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 16 août 2022, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 5 septembre 2022 . Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics ; - l'arrêté du 3 mars 2014 modifiant l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux dans sa rédaction issue de l'arrêté du 3 mars 2014 : - le code de justice administrative Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Pierre Bentolila, président-assesseur, - les conclusions de Mme Françoise Perrin rapporteure publique, - les observations de Me Billa pour la société Enduits Couserans et de Me Courrech pour Tarn Habitat. Considérant ce qui suit : 1. Par acte d'engagement signé le 14 août 2017, l'office public de l'habitat Tarn Habitat, ci-après Tarn Habitat, a attribué à la société Enduits Couserans un marché public de travaux portant sur le ravalement de façade et l'isolation par l'extérieur des immeubles sis 6/8 boulevard du Rajol à Carmaux (Tarn). Par un ordre de service n° 1, notifié le 31 août 2017, le maître d'ouvrage a prescrit au titulaire du marché de commencer les travaux le 11 septembre 2017 tout en prévoyant une durée de chantier de trois mois. 2. Tarn Habitat a notifié à la société Enduits Couserans le décompte général de son marché établi le 31 mai 2018 avec une retenue d'un montant de 12 450 euros sur le solde de son marché au titre des pénalités de retard, pour un retard d'exécution de 93 jours. Par une lettre du 23 juillet 2018, la société Enduits Couserans a contesté l'application de ces pénalités de retard en faisant valoir que l'allongement de la durée du chantier était dû aux mauvaises conditions climatiques. Tarn Habitat a refusé de revenir sur l'application de ces pénalités de retard, dans une lettre du 16 août 2018, au motif que la société Enduits Couserans ne justifiait pas avoir déclaré les interruptions de chantier auprès de la caisse des congés intempéries. Par la présente requête, la société Enduits Couserans demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 24 septembre 2020 qui a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de Tarn Habitat à lui verser la somme de 11 750 euros en remboursement des pénalités de retard qui lui auraient été infligées à tort dans le cadre du décompte général de son marché et demande la condamnation de Tarn Habitat à lui verser cette somme. Sur les pénalités de retard : 3. Les pénalités de retard prévues par les clauses d'un marché public ont pour objet de réparer forfaitairement le préjudice qu'est susceptible de causer au pouvoir adjudicateur le non-respect, par le titulaire du marché, des délais d'exécution contractuellement prévus. Elles sont applicables au seul motif qu'un retard dans l'exécution du marché est constaté et alors même que le pouvoir adjudicateur n'aurait subi aucun préjudice ou que le montant des pénalités mises à la charge du titulaire du marché qui résulte de leur application serait supérieur au préjudice subi. Il s'ensuit que le maître d'ouvrage peut appliquer les pénalités de retard contractuellement prévues sans avoir à établir l'existence d'un préjudice. 4. Aux termes de l'article 19 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 3 mars 2014 : " (...) 19.2.3. Dans le cas d'intempéries au sens des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, entraînant un arrêt de travail sur les chantiers, les délais d'exécution des travaux sont prolongés. Cette prolongation est notifiée au titulaire par un ordre de service qui en précise la durée. Cette durée est égale au nombre de journées réellement constaté au cours desquelles le travail a été arrêté du fait des intempéries conformément auxdites dispositions, en défalquant, s'il y a lieu, le nombre de journées d'intempéries prévisibles indiqué dans les documents particuliers du marché. / Les samedis, dimanches et jours fériés ou chômés compris dans la période d'intempéries sont ajoutés pour le calcul de la prolongation du délai d'exécution. / Dans le cas d'intempéries non visées par une disposition légale ou réglementaire ainsi que dans le cas d'autres phénomènes naturels entravant l'exécution des travaux, si les documents particuliers du marché prévoient la prolongation du délai d'exécution en fonction de critères qu'il définit, cette prolongation de délai est notifiée au titulaire en récapitulant les constatations faites ". Il résulte de ces stipulations que la prolongation du délai d'exécution qu'elles prévoient est subordonnée, non seulement à la satisfaction des critères prévus à cet effet par le cahier des clauses administratives particulières, mais aussi à la condition que les intempéries et autres phénomènes naturels qu'elles visent aient effectivement entravé l'exécution des travaux. Il appartient ainsi à l'entrepreneur, lorsqu'il entend se prévaloir de ces stipulations, de solliciter auprès du maître de l'ouvrage, en vue de l'édiction par ce dernier des ordres de service prévus par les mêmes stipulations, la constatation contradictoire, à l'occasion notamment des réunions de chantier, des difficultés rencontrées dans l'exécution des travaux. 5. Aux termes de l'article 20 du même cahier : " 20.1. En cas de retard imputable au titulaire dans l'exécution des travaux, qu'il s'agisse de l'ensemble du marché ou d'une tranche pour laquelle un délai d'exécution partiel ou une date limite a été fixé, il est appliqué une pénalité journalière de 1/3 000 du montant hors taxes de l'ensemble du marché, de la tranche considérée ou du bon de commande. Ce montant est celui qui résulte des prévisions du marché, c'est-à-dire du marché initial éventuellement modifié ou complété par les avenants intervenus ; il est évalué à partir des prix initiaux du marché hors TVA définis à l'article 13.1.1. / 20.1.1. Les pénalités sont encourues du simple fait de la constatation du retard par le maître d'œuvre. / 20.4. Le montant des pénalités et des primes n'est pas plafonné. / Le titulaire est exonéré des pénalités dont le montant total ne dépasse pas 1 000 euros HT pour l'ensemble du marché ". Aux termes de l'article 4 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché en litige : " 4-1 Durée du contrat - Délai d'exécution - La durée du marché est fixée à 3 mois à compter de l'ordre de service de démarrage. / Le délai d'exécution des prestations est fixé par le pouvoir adjudicateur dans les conditions ci-après. Il court à compter de l'ordre de service de démarrage et est fixé comme suit : 3 mois. / 4 - 2 Pénalités de retard - Par dérogation à l'article 20.1 du CCAG Travaux, lorsque le délai contractuel est dépassé, le titulaire encourt, sans mise en demeure préalable, une pénalité journalière de retard de 50 euros par jour calendaire de retard pendant 15 jour (s) puis de 150 euros au-delà. Par dérogation à l'article 20.4 du CCAG, les pénalités sont applicables dès le premier euro ". 6. Il résulte de l'instruction que le maître d'ouvrage a retenu dans le décompte général du marché en litige 93 jours de retard à l'encontre de la société requérante pour la période comprise du 12 décembre 2017 au 15 mars 2018, à raison de 50 euros par jour de retard les 15 premiers jours de cette période, puis à raison de 150 euros au titre des jours suivants, soit un total de pénalités égal à 12 450 euros. 7. La société Enduits Couserans, qui admet 14 jours de retard d'exécution des travaux, soutient en revanche, tant en appel qu'en première instance, que le chantier a connu 88 jours d'intempéries entre le mois de novembre 2017 et le 15 mars 2018, ce qui l'a empêchée de procéder à la pose de l'isolation par l'extérieur, dès lors qu'il s'agit d'une prestation qui doit être réalisée dans des conditions météorologiques optimales afin d'éviter toute malfaçon ultérieure. Toutefois, elle n'établit, pas plus en appel qu'en première instance, avoir averti le maître d'ouvrage des difficultés d'exécution du chantier et avoir sollicité auprès du maître d'ouvrage, à l'occasion notamment des réunions de chantier, la constatation contradictoire des difficultés rencontrées dans l'exécution des travaux, en vue de l'édiction par ce dernier des ordres de service prévus par les stipulations précitées. Dans ces conditions, la société appelante ne peut être regardée ni comme ayant demandé en temps utile la constatation des difficultés alléguées ni comme justifiant de ce que les travaux litigieux ont été effectivement entravés par les phénomènes météorologiques invoqués. Par suite, elle ne pouvait prétendre à une prolongation du délai d'exécution sur le fondement des stipulations de l'article 19.2.3 du cahier des clauses administratives générales. 8. Il résulte de tout ce qui précède que la société Enduits Couserans n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande de condamnation de Tarn Habitat à lui verser la somme de 11 750 euros. Sur les frais liés au litige : 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Tarn Habitat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Enduits Couserans demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par Tarn Habitat . DÉCIDE : Article 1er : La requête de la société à responsabilité limitée Enduits Couserans est rejetée. Article 2: Les conclusions présentées par Tarn Habitat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3: Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Enduits Couserans et à l'office public de l'habitat Tarn Habitat Délibéré après l'audience du 4 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Rey-Bèthbéder, président, M. Bentolila, président-assesseur, Mme El Gani-Laclautre, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur P. Bentolila Le président, É. Rey-Bèthbéder La greffière, C. Lanoux La République mande et ordonne au préfet du Tarn en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20TL23848
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme F... A... E... et M. G... C... D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision du 13 février 2020 de l'autorité consulaire française à Khartoum (République du Soudan) refusant de délivrer à Mme A... E... un visa d'entrée et de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié. Par un jugement n° 2010737 du 28 avril 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme A... E... le visa sollicité, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 25 juin 2021, le ministre de l'intérieur demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 28 avril 2021 du tribunal administratif de Nantes ; 2°) de rejeter la demande présentée par Mme A... E... et M. C... D... devant le tribunal administratif de Nantes. Il soutient que les actes d'état-civil produits ne sont pas probants et ne permettent d'établir ni l'identité du demandeur de visa ni le lien familial avec M. C... D... ; le lien familial n'est pas mieux démontré par les éléments de possession d'état. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 août 2021, Mme A... E... et M. C... D..., représentés par Me Bachet, concluent au rejet de la requête et ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, en cas de refus d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle, sur le seul fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés. M. C... D... a été maintenu de plein droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 septembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code civil ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. G... C... D..., ressortissant soudanais né le 22 janvier 1990, s'est vu reconnaître en France la qualité de réfugié en 2016. Son épouse alléguée, Mme F... A... E..., née le 1er janvier 1997, a sollicité le 24 octobre 2019 la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié. Par une décision du 13 février 2020, l'autorité consulaire française à Khartoum (République du Soudan) a refusé de lui délivrer le visa sollicité. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision consulaire. Par un jugement du 28 avril 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme A... E..., le visa sollicité, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Le ministre de l'intérieur relève appel de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " " I.- Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / 1° Par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est antérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile ; (...) Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / Pour l'application du troisième alinéa du présent II, ils produisent les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 721-3 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux. (...) ". La circonstance qu'une demande de visa de long séjour ait pour objet le rapprochement familial d'un conjoint d'une personne réfugiée en France ne fait pas obstacle à ce que l'autorité administrative refuse la délivrance du visa sollicité en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur un motif d'ordre public. Figure au nombre de ces motifs le défaut de valeur probante des documents destinés à établir l'identité du demandeur ou la réalité du lien matrimonial entre les époux. 3. L'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, prévoit par ailleurs, en son premier alinéa, que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. L'article 47 du code civil dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. 4. Il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le jugement produit aurait un caractère frauduleux. 5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté la demande de visa au motif que l'identité de l'intéressée et son lien familial à l'égard de M. C... D... n'étaient pas établis. 6. Pour établir l'identité de la demanderesse de visa et son lien familial avec M. C... D..., ont été produits à l'appui de la demande de visa, la copie d'un acte de naissance n°A0644433 dressé le 22 février 2018 par l'officier d'état civil de la direction générale du registre civil soudanaise, le passeport de l'intéressée, l'acte soudanais du 6 janvier 2019 portant légalisation du certificat de mariage n°124784 attestant de l'union de M. G... C... D... et de Mme F... A... E... le 4 janvier 2014 au Soudan, ainsi que le livret de famille de M. C... D... délivré par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Pour remettre en cause le caractère probant de ces documents, le ministre de l'intérieur relève que l'acte de naissance de Mme A... E... n'est pas intervenu dans le délai légal de déclaration de naissance prévu par les article 20.1, 20.5 et 28 du " Civil Registry Act for the year 2011 " soudanais, qu'il a été délivré par une autorité territorialement incompétente, qu'un passeport n'est qu'un document de voyage, et qu'aucun élément de possession d'état ne permet d'établir le lien familial. Toutefois, et alors que l'acte d'état civil produit mentionne les prénom et nom de l'intéressée, sa date et lieu de naissance et les noms et prénoms du père et de la mère, et permettent ainsi de déterminer l'identité des personnes qui y figurent et le lien de filiation, ces anomalies ne suffisent pas, à elles seules, à démontrer que les actes produits par les requérants, qui émanent des autorités soudanaises, seraient irréguliers, falsifiés ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondraient pas à la réalité. Le ministre ne conteste l'authenticité ni de l'acte de légalisation du 6 janvier 2019, ni du livret de famille délivré par l'OFPRA. Par ailleurs les énonciations contenues dans les actes produits sont conformes aux différentes déclarations faites par M. C... D... devant l'OFPRA, qui a présenté Mme A... E... comme son épouse, ainsi qu'aux mentions figurant sur le passeport de l'intéressée. Dans ces conditions, en estimant que l'identité de la demanderesse de visa, et partant son lien familial à l'égard de M. C... D..., n'étaient pas établis, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a fait une inexacte application des dispositions précitées. 7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur et des outre-mer n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de Mme A... E... et M. C... D..., la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision du 13 février 2020 de l'autorité consulaire française à Khartoum (République du Soudan) refusant de délivrer à Mme A... E... la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour, en qualité de membre de famille de réfugié. Sur les frais liés au litige : 8. M. C... D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à Me Bachet dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur est rejetée. Article 2 : L'Etat versera à Me Bachet une somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... A... E..., M. G... C... D..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Bachet. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 octobre 2022. Le rapporteur, A. B...Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 21NT01694
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Vu la procédure suivante : Par une requête et deux mémoires enregistrés les 9 juillet 2021, 28 septembre 2021 et 23 mai 2022, la société Naboo, représentée par Me Weigel, demande à la cour : 1°) d'annuler la décision du 19 mai 2021 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a autorisé, pour la zone de Chalon-sur-Saône, la société Lyon Média Plus à exploiter un service de radio, ainsi que la décision du même jour par laquelle CSA a rejeté sa candidature dans la même zone ; 2°) d'enjoindre à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) de réexaminer sa candidature dans le délai de deux mois ; 3°) de mettre à la charge de l'ARCOM la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la mise en demeure qui lui a été adressée ne précisant pas les modalités de computation du délai de deux mois qui lui était accordé pour produire son mémoire complémentaire, elle ne peut être réputée s'être désistée de sa requête, alors en outre que son mémoire produit le 28 septembre 2021 a été communiqué au défendeur ; - la décision d'autorisation a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que ni l'avis du comité territorial de Dijon ni l'avis de l'Agence nationale des fréquences (ANFR) n'ont été préalablement recueillis par le CSA ; - la décision rejetant sa candidature n'est pas suffisamment motivée ; - les décisions attaquées sont entachées d'erreur d'appréciation en ce que l'offre sportive locale n'est pas suffisante pour justifier l'attribution de la fréquence au service Radio Tonic au motif qu'elle diffuserait des évènements régionaux ; - elles sont encore entachées d'erreur d'appréciation dès lors que la programmation locale du service qu'elle exploite n'est pas d'une durée notablement inférieure à celle du service retenu. Par un mémoire en défense enregistré le 21 décembre 2021, l'ARCOM conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - la société requérante doit être réputée s'être désistée de sa requête dès lors qu'elle n'a produit son mémoire complémentaire qu'après expiration du délai qui lui a été laissé à cet effet, en application des articles R. 612-5 et R. 611-8-6 du code de justice administrative ; - les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. La clôture de l'instruction est intervenue le 24 juin 2022. Vu : - la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique, - et les observations de Me Weigel, représentant la société Naboo. Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article R. 612-5 du code de justice administrative : " Devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, si le demandeur, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée, n'a pas produit le mémoire complémentaire dont il avait expressément annoncé l'envoi ou, dans les cas mentionnés au second alinéa de l'article R. 611-6, n'a pas rétabli le dossier, il est réputé s'être désisté. ". Et aux termes de l'article R. 611-8-6 du même code : " Les parties sont réputées avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été adressé par voie électronique, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties sont alertées de toute nouvelle communication ou notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par elles. / Lorsque le juge est tenu, en application d'une disposition législative ou réglementaire, de statuer dans un délai inférieur ou égal à un mois, la communication ou la notification est réputée reçue dès sa mise à disposition dans l'application ou le téléservice. ". 2. Par un courrier mis à disposition le mercredi 21 juillet 2021 par la voie de l'application informatique Télérecours auprès du conseil de la société Naboo et réputé reçu, à défaut de consultation dans le délai franc de deux jours ouvrés à compter de cette date de mise à disposition, le lundi 26 juillet 2021, la société requérante a été mise en demeure de produire, dans le délai de deux mois, le mémoire complémentaire qu'elle avait expressément annoncé dans sa requête. Toutefois, elle n'a produit son mémoire complémentaire que le 28 septembre 2021, soit après l'expiration du délai imparti. Par suite, en application des dispositions précitées, elle est réputée s'être désistée, sans qu'aient d'incidence à cet égard l'absence de mention dans le courrier de mise en demeure des modalités de computation des délais ni la circonstance que son mémoire complémentaire a été communiqué au défendeur. Il y a lieu, dans ces conditions, de donner acte du désistement de la requête de la société Naboo. D É C I D E : Article 1er : Il est donné acte du désistement de la requête de la société Naboo. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Naboo, à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique et à la société Lyon Média Plus. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. A...Le président, I. LUBENLe greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA03845
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Rungis Stocks a demandé au tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler ou, à défaut, de résilier la convention d'occupation du domaine public conclue le 11 juillet 2016 entre la société d'économie mixte d'aménagement et de gestion du marché d'intérêt national de la région parisienne (Semmaris) et la société Immostef et, d'autre part, de condamner la Semmaris à lui verser la somme de 710 251 euros au titre du préjudice qu'elle estimait avoir subi du fait de la conclusion de cette convention, ou de désigner un expert en vue de permettre l'évaluation de ce préjudice. Par un jugement n° 1704491-1709224 du 12 avril 2019, le tribunal administratif de Melun a rejeté ces demandes. Par un arrêt nos 19PA01904 du 11 mai 2020, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société Rungis Stocks contre ce jugement. Par une décision n° 441799 du 16 juin 2021, le Conseil d'État, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire à la cour. Procédure devant la cour : Par une requête et cinq mémoires enregistrés les 11 juin 2019, 28 novembre 2019, 17 avril 2020, 29 juin 2021, 16 décembre 2021 et 8 février 2022, la société Rungis Stocks, représentée par Me Loubeyre, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun du 12 avril 2019 ; 2°) d'annuler, ou à défaut de résilier, la convention d'occupation du domaine public conclue le 11 juillet 2016 entre la Semmaris et la société Immostef ; 3°) de condamner la Semmaris à lui verser la somme de 710 251 euros au titre du préjudice qu'elle a subi du fait de la conclusion de cette convention ; 4°) de mettre à la charge de la Semmaris la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que le tribunal a estimé que les parties avaient manifesté leur volonté de rompre toute relation contractuelle, comme en témoignent sa diligence quant à la réalisation des travaux prévus par la seconde convention, et son acquittement régulier de la redevance d'occupation due au titre de la première convention ; la destruction d'un bâtiment n'emportait pas de remise en cause de la première convention conclue le 6 juin 1999 avec la Semmaris, mais seulement son éventuelle révision ; la conclusion d'une seconde convention le 17 août 2010, qui n'est jamais entrée en vigueur, n'a pas davantage eu pour effet de résilier la première convention ; - la conclusion d'une convention le 11 juillet 2016 entre la Semmaris et la société Immostef méconnaît ses droits de jouissance, de préférence et de priorité sur les parcelles qu'elle concerne, dès lors que la convention qu'elle a elle-même conclue avec la Semmaris le 6 juin 1999 n'a jamais été résiliée et n'a donc pris fin que le 23 février 2017 ; - la conclusion de la convention du 11 juillet 2016 entre la Semmaris et la société Immostef n'a pas été précédée d'une procédure de publicité appropriée, en méconnaissance de l'article R. 761-22 du code de commerce ; ce vice, qui a nécessairement favorisé la société Immostef et l'a empêchée de présenter une offre, est en lien direct avec son éviction ; - les illégalités entachant la convention conclue avec la société Immostef sont d'une gravité telles qu'elles en justifient l'annulation ; à défaut, aucun motif d'intérêt général ne s'oppose à la résiliation de cette convention, à laquelle ne font pas obstacle les circonstances que la société Immostef a achevé les travaux prévus sur l'emplacement objet de la concession et qu'elle occupe les lieux ; - la Semmaris a eu un comportement fautif en concluant un traité de concession avec la société Immostef en méconnaissance des droits qu'elle détenait ; - elle a subi, au titre de la période allant du 29 juin 2016 au 23 février 2017, un préjudice financier qui doit être évalué à la somme de 66 042 euros, correspondant aux pertes liées au maintien de son personnel et de sa présence sur le site, et aux bénéfices dont elle a été privée ; - ses diligences administratives et financières en vue de l'édification d'un nouveau bâtiment, ainsi que le règlement scrupuleux de ses redevances, lui conféraient une chance sérieuse d'obtenir le renouvellement de sa convention ; par suite, sa perte de gains pour la période allant du 23 février 2017 à l'expiration d'une nouvelle convention d'occupation d'une durée de dix-huit ans doit être indemnisée à hauteur de 644 209 euros. Par cinq mémoires en défense, enregistrés les 4 novembre 2019, 6 décembre 2019, 3 décembre 2021, 20 janvier 2022 et 24 février 2022, la Semmaris, représentée par Me Souchon, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Rungis Stocks sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Par trois mémoires en défense, enregistrés les 5 novembre 2019, 6 décembre 2019 et 29 décembre 2021, la société Immostef, représentée par Me Cloëz, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société Rungis Stocks sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. La clôture de l'instruction a été fixée au 11 mars 2022. Vu : - le code général de la propriété des personnes publiques ; - le code de commerce ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique, - les observations de Me Loubeyre, représentant la société Rungis Stocks, - les observations de Me Souchon, représentant la Semmaris, - et les observations de Me Sechi, représentant la société Immostef. Considérant ce qui suit : 1. La société Rungis Stocks, qui exerce une activité de stockage frigorifique et d'entreposage de fruits et légumes, a conclu le 6 juin 1999 avec la Semmaris, gestionnaire du domaine public du marché d'intérêt national de Rungis, une convention d'occupation du domaine public d'une durée de dix-huit ans, portant sur un terrain d'une superficie de 1 624 mètres carrés sur lequel était bâti un entrepôt. Un incendie ayant détruit ce bâtiment le 13 mars 2009, la société Rungis Stocks et la Semmaris ont conclu, le 17 août 2010, une nouvelle convention d'occupation du domaine public d'une durée de vingt-quatre ans, portant sur les surfaces initialement attribuées ainsi que sur des terrains complémentaires, pour une superficie totale de 3 565 mètres carrés. Cette convention prévoyait notamment la construction par la société Rungis Stocks d'un nouvel entrepôt et le règlement d'un droit de première accession. Par une décision du 13 décembre 2013, la Semmaris a résilié cette convention avec effet au 31 janvier 2014. Le 11 juillet 2016, la Semmaris a conclu avec la société Immostef une convention d'occupation du domaine public portant sur les parcelles anciennement attribuées à la société Rungis Stocks. La société requérante relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation ou, à défaut, à la résiliation de cette convention et, d'autre part, à la condamnation de la Semmaris à lui verser la somme de 710 251 euros au titre des préjudices subis. 2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi. Les tiers autres que le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. 3. Saisi ainsi par un tiers, dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que l'auteur du recours autre que le représentant de l'Etat dans le département ou qu'un membre de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné se prévaut d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine et que les irrégularités qu'il critique sont de celles qu'il peut utilement invoquer, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences. Ainsi, il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, soit d'inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu'il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat. En présence d'irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l'exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s'il se trouve affecté d'un vice de consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d'office, l'annulation totale ou partielle de celui-ci. Il peut enfin, s'il en est saisi, faire droit, y compris lorsqu'il invite les parties à prendre des mesures de régularisation, à des conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice découlant de l'atteinte à des droits lésés. Sur la validité du contrat : En ce qui concerne l'objet du contrat : 4. La société Rungis Stocks soutient que la Semmaris ne pouvait conclure la convention litigieuse sans méconnaître les droits de jouissance, de priorité et de préférence dont elle estime être toujours titulaire en vertu de la convention conclue le 6 juin 1999 sur une partie des terrains objets du contrat, qui selon elle n'aurait jamais été résiliée. Il résulte toutefois de l'instruction que l'article 17 de cette convention prévoyait qu'en cas de destruction totale ou partielle des bâtiments à la suite d'un sinistre, le concessionnaire devrait soit reconstruire ceux-ci, les conditions de la convention pouvant, le cas échéant, faire l'objet d'une " révision ", soit la résilier. En raison de l'incendie ayant détruit le 13 mars 2009 l'entrepôt situé sur la parcelle, la société requérante et la société Semmaris ont conclu, le 17 août 2010, en application de ces stipulations, une nouvelle convention d'occupation temporaire du domaine public portant sur la même parcelle ainsi que sur des surfaces complémentaires. Dans ces conditions, lorsqu'à défaut d'exécution par la société Rungis Stocks des obligations mises à sa charge par la convention du 17 août 2010, la Semmaris a décidé de résilier cette dernière à compter du 31 janvier 2014, elle a nécessairement mis un terme à l'ensemble des relations contractuelles entre les parties, quelle qu'en soit la source et alors même que la seconde convention prévoyait une prise d'effet de ses clauses à la date de démarrage de travaux qui ne sont jamais intervenus. La société requérante ne s'est d'ailleurs pas méprise sur cette rupture de l'ensemble des relations contractuelles avec la Semmaris, comme le révèlent notamment les circonstances qu'elle a cessé en 2014 de verser les redevances dues au titre des parcelles litigieuses, et qu'elle a indiqué à un huissier, venu constater le 29 juin 2016 l'inaccessibilité du terrain, qu'elle était titulaire d'une concession en vertu d'un contrat signé le 17 août 2010. Or la résiliation intervenue à compter du 31 janvier 2014 a acquis un caractère définitif, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Melun par un jugement du 11 avril 2016, que la cour administrative d'appel de Paris a confirmé par un arrêt du 26 septembre 2017. Par suite, la société Rungis Stocks ne disposait plus, à la date de signature de la convention conclue entre la Semmaris et la société Immostef, le 11 juillet 2016, d'aucun droit sur les parcelles objets de cette convention. Elle ne peut utilement soutenir à cet égard que les motifs de la résiliation ne lui seraient pas imputables. Il suit de là que la convention attaquée n'a méconnu, par son objet, aucun droit dont aurait disposé la société requérante. En ce qui concerne la passation du contrat : 5. Aux termes de l'article R. 761-22 du code de commerce : " L'autorisation de s'établir sur le marché d'intérêt national est donnée par son gestionnaire. Elle est précédée d'une publicité appropriée. (...) ". 6. La société Rungis Stocks soutient que la passation de la convention litigieuse n'a pas fait l'objet de la publication d'un avis préalable d'attribution, en méconnaissance de ces dispositions. Il résulte de l'instruction que la Semmaris s'est bornée, avant de conclure le 11 juillet 2016 une convention d'occupation domaniale avec la société Immostef, à échanger par courriels en 2014 et 2015 avec deux entreprises susceptibles d'être intéressées, et à évoquer de manière générale ses perspectives d'investissement dans le cadre de la présentation du plan " Rungis 2025 " à l'automne 2015, ce qui ne saurait tenir lieu de la publicité appropriée exigée par l'article R. 761-22 du code de commerce. Toutefois, d'une part, la société requérante ne pouvait ignorer la disponibilité du terrain qu'elle a elle-même occupé régulièrement entre juin 1999 et janvier 2014, avant d'être mise en demeure de le libérer en 2015, et il est constant que les circonstances, quelles qu'en soient les causes, dans lesquelles est intervenue la résiliation de son titre d'occupation à la fin de l'année 2013 ne lui conféraient en tout état de cause aucune chance de se voir attribuer l'emplacement objet de la convention litigieuse. Par suite, le manquement imputable à la Semmaris n'est pas en rapport direct avec l'éviction de la société Rungis Stocks. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que le vice entachant la passation du contrat soit, dans les circonstances de l'espèce, qui ne révèlent pas de manquement au principe d'impartialité ni de volonté de favoriser l'un des attributaires potentiels, avec lesquels la Semmaris a échangé durant les deux années précédant la signature de la convention litigieuse, d'une gravité telle que le juge devrait le relever d'office. Par suite, la société Rungis Stocks ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 761-22 du code de commerce pour contester la validité du contrat. 7. Il résulte de ce qui précède que la société Rungis Stocks n'est pas fondée à demander l'annulation ou, à défaut, la résiliation de la convention d'occupation temporaire du domaine public conclue le 11 juillet 2016 entre la Semmaris et la société Immostef. Sur les conclusions indemnitaires : 8. Il résulte de ce qui a été exposé ci-dessus que la société Rungis Stocks n'est pas fondée à soutenir que la Semmaris aurait conclu le 11 juillet 2016 avec la société Immostef un traité de concession en méconnaissance des droits qu'elle détenait et aurait ainsi eu un comportement fautif. Par suite, ses demandes indemnitaires ne peuvent qu'être rejetées. 9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Rungis Stocks n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes. Sur les frais liés au litige : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Semmaris, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la société Rungis Stocks et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement des sommes de 1 500 euros à la Semmaris et de 1 500 euros à la société Immostef, sur le fondement des mêmes dispositions. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société Rungis Stocks est rejetée. Article 2 : La société Rungis Stocks versera des sommes de 1 500 euros à la Semmaris et de 1 500 euros à la société Immostef au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Rungis Stocks, à la société d'économie mixte d'aménagement et de gestion du marché d'intérêt national de la région parisienne (Semmaris) et à la société Immostef. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Pascale Fombeur, présidente de la cour, - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. A...La présidente, P. FOMBEUR Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne à la préfète du Val-de-Marne, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA03415
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. F... A... et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 12 novembre 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 20 juillet 2020 de l'autorité consulaire française à Conakry (Guinée) refusant de délivrer à Mme D... B... et aux enfants E... A... et G... A... des visas de long séjour en qualité de membres de famille d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire. Par un jugement n° 2012948 du 14 juin 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme D... B... et aux enfants E... A... et G... A... les visas sollicités, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 22 juin 2021, le ministre de l'intérieur demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 14 juin 2021 du tribunal administratif de Nantes ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. F... A... et Mme D... B... devant le tribunal administratif de Nantes. Il soutient que : - les actes d'état-civil produits ne sont pas probants et ne permettent d'établir ni l'identité des demandeurs de visa, ni le lien familial avec M. A... ; le lien familial n'est pas mieux démontré par les éléments de possession d'état ; - la décision contestée ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2021, M. F... A... et Mme D... B..., représentés par Me Séguin, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Ils soutiennent que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés. M. A... a été maintenu de plein droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 septembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code civil ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. F... A..., ressortissant guinéen, né le 15 février 1991, s'est vu reconnaître le bénéfice de la protection subsidiaire. Son épouse alléguée, Mme D... B..., née le 1er janvier 1993, et leurs enfants allégués E... A... et G... A..., respectivement nés les 1er janvier 2010 et 1er janvier 2014, ont sollicité le 10 janvier 2020 la délivrance de visas de long séjour en qualité de membres de famille de bénéficiaire de la protection subsidiaire. Par une décision du 20 juillet 2020, l'autorité consulaire française à Conakry (Guinée) a refusé de leur délivrer les visas sollicités. Par une décision du 12 novembre, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision consulaire. Par un jugement du 14 juin 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme D... B..., et aux enfants E... A... et G... A... les visas sollicités, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Le ministre de l'intérieur relève appel de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " I. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger (...) qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / 1° Par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est antérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile (...) / 3° Par les enfants non mariés du couple, âgés au plus de dix-neuf ans. / (...) L'âge des enfants est apprécié à la date à laquelle la demande de réunification familiale a été introduite. / II. - Les articles L. 411-2 à L. 411-4 (...) sont applicables. / (...) / Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / Pour l'application du troisième alinéa du présent II, ils produisent les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 721-3 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux ". La circonstance qu'une demande de visa de long séjour ait pour objet le rapprochement familial d'un conjoint ou des enfants d'une personne bénéficiaire de la protection subsidiaire ne fait pas obstacle à ce que l'autorité administrative refuse la délivrance du visa sollicité en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur un motif d'ordre public. Figure au nombre de ces motifs le défaut de valeur probante des documents destinés à établir la réalité du lien matrimonial entre les époux ou du lien de filiation produits à l'appui des demandes de visa. 3. L'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, prévoit par ailleurs, en son premier alinéa, que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. L'article 47 du code civil dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. A la condition que l'acte d'état civil étranger soumis à l'obligation de légalisation et produit à titre de preuve devant l'autorité administrative ou devant le juge présente des garanties suffisantes d'authenticité, l'absence ou l'irrégularité de sa légalisation ne fait pas obstacle à ce que puissent être prises en considération les énonciations qu'il contient. 4. Il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le jugement produit aurait un caractère frauduleux. 5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté les demandes de visa au motif que l'identité des intéressés et leur lien familial à l'égard de M. A... n'étaient pas établis. 6. S'agissant des enfants E... A... et G... A..., ont été produits, pour établir leur identité et le lien familial avec M. A..., les volets n°1 d'extraits des actes de naissance n°030 et 040 dressés par l'officier d'état civil de Gaoual (Guinée) le 7 juin 2019, ainsi que leurs passeports. S'agissant de Mme D... B..., ont été produits un acte de naissance n°292 CU/GAL, dressé par l'officier d'état civil de Gaoual (Guinée) le 30 mai 2019 en transcription d'un jugement supplétif n°574 du 15 mai 2019 du tribunal de paix de Gaoual, ainsi qu'un passeport. Pour remettre en cause le caractère probant de ces documents, le ministre de l'intérieur relève que les extraits d'actes de naissance des enfants mentionnent le domicile du père des intéressés de manière imprécise et comportent des dates en chiffres, en méconnaissance des articles 170 et 79 du code civil guinéen, que les âges du père et de la mère sont incohérents compte tenu de la date de déclaration, et que les témoins n'étaient pas âgés de 21 ans à la date de la naissance, en méconnaissance de l'article 173 du code civil guinéen. Le ministre fait en outre valoir que ces documents n'ont pas été légalisés et que le prénom de la mère mentionné sur les actes de naissance des enfants (" D... "), n'est pas identique à celui figurant sur le jugement supplétif du 15 mai 2019 (" Mariam "). Par ailleurs, le ministre soutient que ce jugement supplétif a été rendu tardivement, plusieurs années après l'évènement qu'il relate, et ne comporte pas les dates, heures et lieux de naissance des parents, en méconnaissance des articles 183 et 196 du code civil guinéen. Toutefois, et alors que les documents d'état civil et les jugements produits mentionnent chacun les prénom et nom de l'enfant, leurs date et lieu de naissance et les noms et prénoms du père et de la mère, et permettent ainsi de déterminer l'identité des personnes qui y figurent et le lien de filiation, ces anomalies ne sont pas suffisantes pour établir que les actes produits ne présenteraient pas des garanties suffisantes d'authenticité ou que le jugement supplétif présenterait un caractère frauduleux. Contrairement à ce que soutient le ministre, qui n'apporte aucune démonstration sur ce point, il ne ressort pas des pièces du dossier que les tampons apposés sur les actes de naissance produits présenteraient un caractère inauthentique. La circonstance que le jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance de Mme B... mentionne une retranscription dans le registre d'état civil de l'année de naissance, ce qui n'est pas conforme aux dispositions de l'article 180 du code civil guinéen qui prévoit que les registres sont clos et arrêtés à la fin de chaque année, ne suffit pas à établir le caractère frauduleux de ce jugement. Par ailleurs les énonciations contenues dans les actes de naissance sont conformes aux différentes déclarations faites par M. A... devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui a par ailleurs présenté Mme B... comme étant sa concubine et la mère de ses enfants, ainsi qu'aux mentions figurant sur les passeports des intéressés. Dans ces conditions, en estimant que l'identité des demandeurs de visa, et partant leur lien familial à l'égard de M. F... A..., n'étaient pas établis, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a fait une inexacte application des dispositions précitées. 7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. F... A... et Mme D... B..., la décision du 12 novembre 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 20 juillet 2020 de l'autorité consulaire française à Conakry (Guinée) refusant de délivrer à Mme D... B... et aux enfants E... A... et G... A... des visas de long séjour en qualité de membres de bénéficiaire de la protection subsidiaire. Sur les frais liés au litige : 8. M. A... et Mme B..., qui ont obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, ne justifient pas des frais qu'ils auraient engagés pour l'instance. Les conclusions qu'ils ont présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A..., à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 octobre 2022. Le rapporteur, A. C...Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 21NT01664
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Publicis Conseil a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 18 décembre 2018 par laquelle la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France a prononcé à son encontre une amende administrative de 165 000 euros pour manquement aux dispositions du 9e alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce relatives aux délais de paiement, et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois, ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique. Par un jugement n° 1913625/2-1 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 9 août 2021 et 5 février 2022, la société Publicis Conseil représentée par Me Tricot, demande à la cour : 1°) de joindre les requêtes des sociétés Publicis Media France, Publicis Conseil, Publicis Groupe S.A., Publicis Sapient France et Re:Sources France ; 2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 juin 2021 ; 3°) d'annuler la décision du 18 décembre 2018 de la DIRECCTE d'Île-de-France ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique ; 4°) d'enjoindre à l'administration de lui restituer le montant de l'amende versée ; 5°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de cette amende ; 6°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la sanction a été prise au terme d'une procédure irrégulière, le principe du contradictoire ayant été méconnu à son égard faute de sollicitation par les services de la DIRECCTE durant les opérations de contrôle ; elle n'a pas été informée de la possibilité d'exercer un recours gracieux ou hiérarchique, en méconnaissance de l'article R. 470-2 du code de commerce ; le courrier de notification de la sanction ne vise pas les dispositions de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, ce qui l'a privée d'une information sur l'étendue de ses droits, en méconnaissance du principe d'égalité ; elle a été privée de son droit à un procès équitable ; - le montant total des amendes administratives prononcées excède le plafond légal, en méconnaissance des dispositions alors en vigueur du VII de l'article L. 465-2 du code de commerce, dès lors que la société Re:Sources France, qui assure la gestion administrative et financière des cinq sociétés sanctionnées, est l'unique auteur des manquements ; - la publication de la sanction est dépourvue de base légale dès lors qu'elle n'était prévue par aucun texte au moment des faits reprochés, et viole donc les principes de légalité des délits et des peines et de non-rétroactivité de la loi pénale ; les dispositions de l'article L. 465-2 du code de commerce ne permettaient pas de connaître les modalités de publication, qui n'ont été précisées que le 2 octobre 2014 par voie réglementaire, alors que certains faits reprochés sont antérieurs à cette dernière date ; - la sanction est partiellement fondée sur des éléments erronés ou arbitraires, dans la mesure où les cent onze factures ne comportant pas de numéro de bon de commande n'ont pas été exclues ; de même, les factures payées dans les quinze jours suivant leur réception n'ont pas été retirées du périmètre du contrôle ; d'autres factures mentionnées dans le procès-verbal de contrôle comportent des irrégularités ; - la décision portant sanction est entachée d'incohérences au regard du procès-verbal de contrôle, la privant de la possibilité de présenter utilement des observations quant au principe de proportionnalité ; le procès-verbal contient également des erreurs matérielles s'agissant de la société concernée ; - une part importante des retards de paiement résulte de causes qui lui sont étrangères, et l'avantage de trésorerie calculé par la DIRECCTE ne lui a pas profité ; sa bonne foi doit donc être prise en compte, dès lors notamment qu'elle a mis en œuvre des mesures en vue de faire cesser les manquements ; les dispositions de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration doivent lui être appliquées. Par un mémoire enregistré le 5 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. La clôture de l'instruction est intervenue le 14 mars 2022. Vu : - le code de commerce, - le code général des impôts, - le code des relations entre le public et l'administration, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique, - et les observations de Mmes B... et Aubert, représentant le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Considérant ce qui suit : 1. La direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France a mené, entre décembre 2015 et le début de l'année 2018, une procédure de contrôle du respect des délais de paiement interentreprises par cinq sociétés filiales du groupe Publicis, portant sur la période allant du 1er janvier au 30 novembre 2015. Par courrier du 14 juin 2018, les services de la DIRECCTE ont adressé à la société Publicis Conseil le procès-verbal établi à l'issue de ce contrôle, faisant état de manquements aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, l'informant de l'intention de l'administration de lui infliger une sanction administrative, et l'invitant à formuler ses observations dans le délai de soixante jours. La société requérante a présenté des observations les 12 juillet, 28 septembre et 7 décembre 2018. Par une décision du 18 décembre 2018, la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Île-de-France a prononcé à son encontre une amende administrative de 165 000 euros et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois sur le site internet de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Par un courrier du 19 février 2019, la société Publicis Conseil a formé un recours hiérarchique auprès du ministre de l'économie et des finances, qui a été implicitement rejeté. Elle demande à la cour d'annuler le jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 et de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique. Sur la régularité de la procédure de sanction : 2. En matière d'édiction de sanctions administratives, sont seuls punissables les faits constitutifs d'un manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis et les sanctions susceptibles d'être infligées sont celles définies par les textes en vigueur à cette même date, sous réserve de l'intervention ultérieure de dispositions répressives plus douces. En revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s'appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure à suivre, alors même qu'ils conduisent à réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur. N'ont toutefois pas à être réitérés des actes de procédure régulièrement intervenus. 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 470-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la procédure ayant conduit à la sanction en litige : " (...) III. - Les manquements passibles d'une amende administrative sont constatés par procès-verbal, selon les modalités prévues à l'article L. 450-2. / IV. - Avant toute décision, l'administration informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée à son encontre, en lui indiquant qu'elle peut prendre connaissance des pièces du dossier et se faire assister par le conseil de son choix et en l'invitant à présenter, dans le délai de soixante jours, ses observations écrites et, le cas échéant, ses observations orales. / Passé ce délai, l'autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l'amende. (...) ". 4. Il résulte de l'instruction que la société Publicis Conseil a été précisément informée, par un courrier de la DIRECCTE du 14 juin 2018 auquel étaient joints un cédérom comportant les cotes du dossier et le procès-verbal de seize pages retraçant les constats effectués lors du contrôle, des manquements qui lui étaient reprochés. Ce courrier mentionnait en outre l'intention de l'administration de lui infliger une amende administrative de 165 000 euros et d'ordonner la publication de cette sanction. Dans le cadre de la procédure contradictoire préalable ainsi initiée, la société requérante a présenté ses observations oralement le 12 juillet 2018 et par des courriers des 28 septembre et 7 décembre 2018, adressés pour son compte par son conseil. Si l'administration a eu pour seul interlocuteur, durant les opérations de contrôle, la société Re:Sources France, autre filiale du groupe Publicis, chargée de la gestion administrative et financière des sociétés du groupe et détentrice en cette qualité des factures et éléments matériels contrôlés, cette circonstance est sans incidence sur le respect par la DIRECCTE de la procédure contradictoire. La circonstance que l'administration a retenu, dans sa décision du 18 décembre 2018, un montant facturé payé en retard de 6 988 942,25 euros et un montant de rétention de trésorerie de 822 266,23 euros, inférieurs aux montants de 7 023 913,78 et 877 052,45 euros mentionnés dans le procès-verbal adressé à la société le 14 juin 2018, sans pour autant modifier le montant envisagé de la sanction, n'a pas privé la société requérante, eu égard aux montants en cause, de la possibilité de critiquer utilement la proportionnalité de la sanction qui lui était infligée. Enfin, contrairement à ce que soutient la société requérante, le procès-verbal décrit clairement les manquements qui lui sont reprochés, et non ceux reprochés à la société Publicis Sapient France. Dans ces conditions, la société Publicis Conseil n'est pas fondée à soutenir que la DIRECCTE aurait méconnu les droits de la défense en prenant la sanction en litige à son encontre. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 470-2 du code de commerce : " (...) II. - La décision mentionnée à l'article L. 470-2 peut être contestée par la personne qui en fait l'objet devant le ministre chargé de l'économie. Ce recours est exclusif de tout autre recours hiérarchique. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision administrative peut faire l'objet, dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux, d'un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai. / Lorsque dans le délai initial du recours contentieux ouvert à l'encontre de la décision, sont exercés contre cette décision un recours gracieux et un recours hiérarchique, le délai du recours contentieux, prorogé par l'exercice de ces recours administratifs, ne recommence à courir à l'égard de la décision initiale que lorsqu'ils ont été l'un et l'autre rejetés ". Aux termes de l'article L. 412-3 du même code : " La décision soumise à recours administratif préalable obligatoire est notifiée avec l'indication de cette obligation ainsi que des voies et délais selon lesquels ce recours peut être exercé. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". 6. La société Publicis Conseil soutient que le défaut de mention, dans la notification de la décision du 18 décembre 2018, de la possibilité pour elle d'exercer un recours gracieux ou hiérarchique, ainsi que l'absence de visa des dispositions précitées de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, l'ont privée d'une information sur l'étendue de ses droits, en méconnaissance du principe d'égalité, et ont porté atteinte à son droit à un procès équitable. Toutefois, l'administration n'est tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions que les délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais et voies des recours administratifs préalables obligatoires. Il lui est loisible d'y ajouter la mention des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs, à la condition toutefois qu'il n'en résulte pas des ambiguïtés de nature à induire en erreur les intéressés dans des conditions telles qu'ils pourraient se trouver privés du droit à un recours contentieux effectif. Par suite, alors en tout état de cause que les conditions de notification d'une décision sont sans incidence sur sa légalité, en ne mentionnant dans la décision litigieuse que les voie et délai de recours contentieux, la DIRECCTE n'a porté atteinte ni au principe d'égalité, ni au droit ultérieur de la société requérante à un recours contentieux effectif ou à un procès équitable. 7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Publicis Conseil n'est pas fondée à soutenir que la sanction litigieuse lui a été infligée au terme d'une procédure irrégulière. Sur le bien-fondé de la sanction : 8. Aux termes de l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits sanctionnés : " I. - Tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour une activité professionnelle. Elles comprennent : / - les conditions de vente ; / - le barème des prix unitaires ; / - les réductions de prix ; / - les conditions de règlement. / (...) / (...) / Sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties, le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation demandée. / Le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours à compter de la date d'émission de la facture. En cas de facture périodique, au sens du 3 du I de l'article 289 du code général des impôts, ce délai ne peut dépasser quarante-cinq jours à compter de la date d'émission de la facture. / (...) / VI. - Sont passibles d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés aux huitième, neuvième et onzième alinéas du I du présent article, le fait de ne pas indiquer dans les conditions de règlement les mentions figurant à la première phrase du douzième alinéa du même I, le fait de fixer un taux ou des conditions d'exigibilité des pénalités de retard selon des modalités non conformes à ce même alinéa ainsi que le fait de ne pas respecter les modalités de computation des délais de paiement convenues entre les parties conformément au neuvième alinéa dudit I. L'amende est prononcée dans les conditions prévues à l'article L. 465-2. Le montant de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. / Sous les mêmes sanctions, sont interdites toutes clauses ou pratiques ayant pour effet de retarder abusivement le point de départ des délais de paiement mentionnés au présent article ". 9. D'autre part, aux termes de l'article L. 465-2 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits sanctionnés : " (...) V. ' La décision prononcée par l'autorité administrative peut être publiée. / (...) / VII. ' Lorsque, à l'occasion d'une même procédure ou de procédures séparées, plusieurs sanctions administratives ont été prononcées à l'encontre d'un même auteur pour des manquements en concours, ces sanctions s'exécutent cumulativement, dans la limite du maximum légal le plus élevé. / (...) X. ' Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". 10. En premier lieu, la société Publicis Conseil soutient que les manquements qui lui sont reprochés, comme ceux qui sont imputés aux quatre autres filiales contrôlées appartenant au groupe Publicis, ont été commis par une seule d'entre elles, la société Re:Sources France, chargée de leur gestion administrative et financière en vertu d'un contrat de service lui conférant une mission de " centre de services partagés ", et que par suite le montant total des sanctions infligées aux cinq sociétés du groupe excède illégalement le maximum de 375 000 euros prévu au VI de l'article L. 441-6 du code de commerce. Il résulte cependant de l'instruction que si la réception, la gestion et le paiement des factures de ces sociétés étaient confiés, au cours de la période contrôlée, à une seule d'entre elles, chacune des sociétés sanctionnées restait juridiquement la partie avec laquelle le fournisseur avait contracté, au sens des dispositions précitées du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, et sur l'identité de laquelle ce dernier ne pouvait au demeurant se méprendre. Il était ainsi notamment demandé au fournisseur transmettant sa facture d'indiquer, avant l'adresse de la société Re:Sources France, " l'entité facturée ", et les conditions générales d'achat de la société Publicis Conseil ne mentionnaient, comme l'ont relevé les premiers juges, que le nom de cette dernière. Chaque société restait tenue, quelle que soit l'organisation choisie, de veiller au respect des délais de règlement des sommes dues mentionnés au I de l'article L. 441-6. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que des manquements relatifs à une même facture auraient été concurremment imputés par les services de la DIRECCTE à deux ou plusieurs sociétés du groupe Publicis. Dans ces conditions, l'administration a pu, sans méconnaître les dispositions du VII de l'article L. 465-2 du code de commerce ni violer le principe de personnalité des peines, regarder chaque société contrôlée, s'agissant des factures émises par ses fournisseurs, comme l'auteur des manquements aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du même code relatives au respect des délais de paiement convenus. 11. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées du V de l'article L. 465-2 du code de commerce, en vigueur à la date des faits reprochés à la société requérante, que la sanction de publication de l'amende infligée par la DIRECCTE était légalement prévue. Par suite, - alors au surplus que la décision attaquée ne sanctionne que des manquements qui se sont poursuivis au-delà de cette date - si les modalités de cette publication n'ont été précisées par voie réglementaire qu'à compter du 3 octobre 2014, à l'article R. 465-2 du même code, il n'en résulte pas que la mesure litigieuse serait dépourvue de base légale. 12. En troisième lieu, il résulte des termes mêmes du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, précité, appliqué aux factures contrôlées, que le délai de paiement court " à compter de la date d'émission de la facture ", celle-ci correspondant à la date apposée sur la facture en application du 6° du I de l'article 242 nonies A de l'annexe II au code général des impôts, et non à compter de la date de réception de la facture par le débiteur qui en est destinataire. Le 3 du I de l'article 289 de ce code prévoit en outre que " La facture est, en principe, émise dès la réalisation de la livraison ou de la prestation de services " et l'article L. 441-3 du code de commerce dispose que le vendeur est tenu de délivrer la facture dès la réalisation de la vente ou la prestation du service et qu'à défaut, l'acheteur doit la réclamer. La DIRECCTE a donc fait une exacte application des textes en appréciant les retards de paiement à partir de la date d'émission des factures et en n'excluant pas, au titre des manquements retenus, les factures payées dans les quinze jours suivant leur réception, ou reçues tardivement en raison de l'indication par le fournisseur d'une adresse erronée, que la société Publicis Conseil n'établit pas avoir réclamées en temps utile. À cet égard, la société ne peut utilement invoquer la circonstance qu'une autre entreprise aurait bénéficié de l'exclusion de telles factures. Par ailleurs, la société requérante, à laquelle il appartenait de solliciter ses fournisseurs afin d'obtenir les informations ou validations nécessaires au règlement de ses factures dans le respect des délais de paiement impartis par le code de commerce, ne peut utilement se prévaloir, pour justifier certains retards de paiement, de l'absence d'indication d'un numéro de bon de commande par le créancier, ou de la mention d'un numéro erroné ou non valide. La société Publicis Conseil n'est par suite pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait en partie motivée par des faits inexacts ou procéderait d'une application arbitraire de la loi. 13. En quatrième lieu, la société Publicis Conseil se prévaut de sa bonne foi, dès lors qu'une part importante des retards de paiement résulte selon elle de causes qui lui sont étrangères, et que l'avantage de trésorerie calculé par la DIRECCTE ne lui a pas profité ; elle fait en outre valoir qu'elle a mis en œuvre, après l'édiction de la sanction litigieuse, des mesures correctives de traitement des factures en vue de faire cesser les manquements. Toutefois, il résulte tout d'abord de ce qui a été dit au point 12 du présent arrêt qu'elle ne peut utilement se prévaloir de la réception tardive de certaines factures ou des erreurs affectant leurs mentions, alors que les dispositions précitées de l'article L. 441-6 du code de commerce ne prévoient aucune exonération du respect des délais de paiement pour de tels motifs. Ensuite, la mise en place de mesures correctives est sans incidence sur le bien-fondé de la sanction, infligée en raison du constat objectif de manquements par les services de la DIRECCTE. Enfin, la circonstance qu'elle n'aurait tiré aucun profit de l'avantage de trésorerie généré par les retards de paiement n'est pas de nature à justifier, au regard des agissements sanctionnés et de l'exigence de répression effective des infractions, une réduction du montant de la sanction. 14. En dernier lieu, la société requérante estime qu'elle doit bénéficier du " droit à l'erreur " institué par les dispositions de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration, aux termes desquelles : " Une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne peut faire l'objet, de la part de l'administration, d'une sanction, pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d'une prestation due, si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l'administration dans le délai que celle-ci lui a indiqué. / La sanction peut toutefois être prononcée, sans que la personne en cause ne soit invitée à régulariser sa situation, en cas de mauvaise foi ou de fraude. / Les premier et deuxième alinéas ne sont pas applicables : / 1° Aux sanctions requises pour la mise en œuvre du droit de l'Union européenne ; / 2° Aux sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement ; / 3° Aux sanctions prévues par un contrat ; / 4° Aux sanctions prononcées par les autorités de régulation à l'égard des professionnels soumis à leur contrôle ". Toutefois, la méconnaissance des délais de paiement, prévue par les dispositions de l'article L. 441-6 du code de commerce, n'est pas au nombre des manquements dont la régularisation est envisagée par l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration, ainsi d'ailleurs qu'il résulte de l'exposé des motifs de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance, dont sont issues ces dispositions. Par suite, la société Publicis Conseil ne peut utilement se prévaloir du " droit à l'erreur " instauré par l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration. 15. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de procéder à la jonction dmandée, que la société Publicis Conseil n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 par laquelle la DIRECCTE d'Île-de-France lui a infligé une amende administrative de 165 000 euros pour manquement aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce relatives aux délais de paiement et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois, ainsi que de la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique. Il résulte également de tout ce qui précède que les conclusions de la société requérante tendant à la réduction du montant de la sanction infligée doivent, en l'absence d'erreur matérielle ou de disproportion, être rejetées, de même que ses conclusions à fin d'injonction. Sur les frais liés au litige : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Publicis Conseil au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société Publicis Conseil est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Publicis Conseil et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Pascale Fombeur, présidente de la cour, - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. A...La présidente, P. FOMBEUR Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA04583
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 février 2021 et 15 juin 2021, la société Sud A..., représentée par Me Cerf, demande à la cour : 1°) d'annuler la décision du 10 novembre 2020 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rejeté sa candidature pour l'exploitation d'un service de A... dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Rennes, dans la zone de Vannes. 2°) de mettre à la charge du CSA la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision attaquée est entachée d'incompétence et de vice de forme dès lors que la décision collégiale de rejet de sa candidature prise lors de la réunion du collège plénier du 10 novembre 2020 ne comporte aucune signature identifiable permettant d'attester que le procès-verbal est conforme à la réalité des débats, en méconnaissances des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ; - cette décision méconnaît les dispositions de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, étant entachée d'erreur d'appréciation au regard du principe de sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socio-culturels qu'elles énoncent ; son service propose ainsi une ligne éditoriale originale, notamment en ce qu'elle est orientée vers l'actualité rugbystique et les cultures du " sud ", et est donc susceptible de répondre de manière pertinente à l'intérêt du public de la zone ; - la décision est entachée d'erreur d'appréciation au regard de l'impératif prioritaire de diversification des opérateurs et de la nécessité d'éviter les abus de position dominante, dès lors que sept radios étaient déjà autorisées en catégorie D avant l'appel à candidatures, l'autorisation d'émettre accordée à A... Classique portant ce nombre à huit, alors qu'en catégorie E, seules trois radios sont autorisées à émettre. Par un mémoire enregistré le 9 avril 2021, la société A... Classique, représentée par la SCP Piwnica et Molinié, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la société requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Par un mémoire enregistré le 6 mai 2021, le CSA conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. La clôture de l'instruction a été fixée au 4 octobre 2021. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique, - et les observations de Me Aubert, représentant la société Sud A..., Considérant ce qui suit : 1. Par une décision du 12 décembre 2018, publiée au Journal officiel de la République française le 23 décembre 2018, le CSA a lancé un appel aux candidatures pour l'exploitation de services de A... par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Rennes, notamment pour la zone de Vannes. Par une décision du 10 novembre 2020, notifiée à la société Sud A... par courrier du 17 décembre 2020, le CSA a rejeté la candidature présentée par l'intéressée pour cette zone. La société requérante demande à la cour d'annuler cette décision. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dans sa rédaction applicable à la date des décisions attaquées : " Sous réserve des dispositions de l'article 26 de la présente loi, l'usage des fréquences pour la diffusion de services de A... par voie hertzienne terrestre est autorisé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel dans les conditions prévues au présent article. / Pour les zones géographiques et les catégories de services qu'il a préalablement déterminées, le conseil publie une liste de fréquences disponibles ainsi qu'un appel à candidatures. (...) / Le conseil accorde les autorisations en appréciant l'intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socio-culturels, la diversification des opérateurs, et la nécessité d'éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence. / Il tient également compte : / 1° De l'expérience acquise par le candidat dans les activités de communication ; / 2° Du financement et des perspectives d'exploitation du service notamment en fonction des possibilités de partage des ressources publicitaires entre les entreprises de presse écrite et les services de communication audiovisuelle ; / 3° Des participations, directes ou indirectes, détenues par le candidat dans le capital d'une ou plusieurs régies publicitaires ou dans le capital d'une ou plusieurs entreprises éditrices de publications de presse ; / 4° Pour les services dont les programmes comportent des émissions d'information politique et générale, des dispositions envisagées en vue de garantir le caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion, l'honnêteté de l'information et son indépendance à l'égard des intérêts économiques des actionnaires, en particulier lorsque ceux-ci sont titulaires de marchés publics ou de délégations de service public ; / 5° De la contribution à la production de programmes réalisés localement ; / 6° Pour les services dont les programmes musicaux constituent une proportion importante de la programmation, des dispositions envisagées en faveur de la diversité musicale au regard, notamment, de la variété des œuvres, des interprètes, des nouveaux talents programmés et de leurs conditions de programmation ; / 7° S'il s'agit de la délivrance d'une nouvelle autorisation après que l'autorisation précédente est arrivée à son terme, du respect des principes mentionnés au troisième alinéa de l'article 3-1. / Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille, sur l'ensemble du territoire, à ce qu'une part suffisante des ressources en fréquences soit attribuée aux services édités par une association et accomplissant une mission de communication sociale de proximité, entendue comme le fait de favoriser les échanges entre les groupes sociaux et culturels, l'expression des différents courants socioculturels, le soutien au développement local, la protection de l'environnement ou la lutte contre l'exclusion. / Le conseil veille également au juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d'une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d'autre part. / Il s'assure que le public bénéficie de services dont les programmes contribuent à l'information politique et générale. (...) ". 3. D'une part, aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. (...) ". Lorsqu'une décision est prise par une autorité à caractère collégial, il est satisfait aux exigences découlant de ces prescriptions dès lors que la décision comporte la signature du président de cette autorité, accompagnée des mentions, en caractères lisibles, prévues par cet article. En l'espèce, la décision attaquée, qui a été prise par le CSA lors de sa séance plénière du 10 novembre 2020, a été notifiée à la société Sud A... par un courrier du 17 décembre 2020 signé par Roch-Olivier Maistre, président de cette autorité, dont le prénom, le nom et la qualité étaient indiqués, et accompagné d'un extrait du procès-verbal de la séance. Ni la loi du 30 septembre 1986, ni aucun autre texte n'imposent au président du CSA de signer également le procès-verbal de la réunion du collège plénier. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée d'incompétence ou de vice de forme doit être écarté. 4. D'autre part, dans la zone de Vannes, où étaient autorisés les services A... Bro Gwened et RCF Sud-Bretagne Vannes en catégorie A, Alouette, Hit West et A... Caroline en catégorie B, Virgin A... Vannes en catégorie C, Chérie FM, M A..., NRJ, RFM, Rire et Chansons, RTL2 et Skyrock en catégorie D, Europe 1, RMC et RTL en catégorie E, ainsi que les radios de service public France Bleu Armorique, France Culture, France Info, France Inter et France Musique, et où une fréquence était disponible, le CSA a retenu la candidature de A... Classique. Il a écarté la candidature de la société requérante au titre de la catégorie E aux motifs que le public de la zone bénéficiant déjà, avec Europe 1, RTL, RMC, France Inter, France Info et, dans une moindre mesure, France Culture et France Bleu Armorique, de sept services contribuant à l'information politique et générale, Sud A... contribuerait dans une moindre mesure à la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels et répondraient dans une moindre mesure à l'intérêt du public de la zone que A... Classique, retenue en catégorie D. Il a, au surplus, relevé que ce dernier service était déjà présent dans la zone de Vannes et que sa disparition serait de nature à mécontenter l'auditoire. Si la société requérante soutient que son service, favorisant notamment l'actualité rugbystique et les cultures du sud de la France, la rendait plus pertinente dans la zone concernée, qui se situe au sud de la Bretagne, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu des particularités de cette zone et du service retenu au regard des services déjà autorisés, qui proposent déjà de l'information générale et de l'actualité sportive, mais ne comportaient qu'une A..., France Musique, ne diffusant pas exclusivement de la musique classique, le CSA aurait entaché les motifs sus rappelés d'erreur d'appréciation. Enfin, si la société Sud A... estime que le CSA a méconnu l'impératif prioritaire de diversification des opérateurs et la nécessité d'éviter les abus de position dominante, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu du plus grand intérêt que le projet retenu présentait pour le public, que le CSA ait fait une inexacte application des critères d'octroi des autorisations prévus à l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986. 5. Il résulte de tout ce qui précède que la société Sud A... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 10 novembre 2020 par laquelle le CSA a rejeté sa candidature pour l'exploitation d'un service de A... dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Rennes, dans la zone de Vannes. Sur les frais liés aux litiges : 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la société Sud A... et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement d'une somme à la société A... Classique sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société Sud A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la société A... Classique tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Sud A..., à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique et à la société A... Classique. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. B...Le président, I. LUBENLe greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne à la ministre de la culture, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA00553
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Agence française pour la transition énergétique (AFTE) a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 11 mars 2019 par laquelle le directeur départemental de la cohésion sociale et de la protection des populations de la Mayenne a prononcé à son encontre une amende administrative d'un montant de 2 400 euros en application de l'article L. 522-1 du code de la consommation. Par un jugement n° 1907923/2-1 du 30 décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 3 mars 2021, la société AFTE, représentée par Me Aouizerate, demande à la cour : 1°) de réformer ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du 11 mars 2019 en tant qu'elle sanctionne un défaut d'information quant au délai de rétractation et une clause présumée abusive ; 3°) de " faire preuve de clémence " en ce qui concerne les manquements liés au défaut de communication au consommateur des coordonnées du médiateur et au non-respect d'une injonction administrative. Elle soutient que : - la décision du 11 mars 2019 est entachée d'erreur de droit au regard des dispositions des articles L. 221-1 II et L. 221-18 du code de la consommation relatives au point de départ du délai de rétractation ; ce délai court à compter de la signature du contrat pour les prestations de service, et non à compter de la livraison ; - la clause litigieuse de l'article 2 de son contrat ne peut être regardée comme abusive ; - elle était dans l'impossibilité de mentionner dans ses contrats les coordonnées du médiateur dont chaque consommateur relevait ; la rédaction de l'article 14 desdits contrats ne prive pas les consommateurs de moyens de recours ; elle a rectifié la clause relative aux coordonnées du médiateur dans ses nouveaux contrats, ce qui doit susciter la clémence de la cour ; - l'administration a inexactement qualifié les faits en retenant à son égard le non-respect d'une injonction administrative, dès lors qu'elle a activement collaboré avec celle-ci pour faire évoluer ses contrats. Par un mémoire en défense enregistré le 15 mars 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. La clôture de l'instruction est intervenue le 18 avril 2022. Vu : - le code de la consommation ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. La société AFTE exerce une activité de vente et d'installation de pompes à chaleur, chauffe-eaux, matériel d'isolation de l'habitat, panneaux photovoltaïques et systèmes aérovoltaïques. Elle a fait l'objet le 28 juillet 2018 d'un contrôle effectué par les services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de la Mayenne. Un procès-verbal du 9 août 2018 lui a ensuite été communiqué, constatant des manquements au 6° de l'article L. 111-1, au 2° de l'article L. 221-5 et aux articles L. 212-1 et L. 521-1 du code de la consommation. Par courrier du 18 janvier 2019, la direction départementale de l'emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations de la Mayenne a informé la société AFTE de son intention de lui infliger une sanction administrative d'un montant de 2 400 euros. La société AFTE a fait valoir ses observations par courriel du 15 février 2019. Par une décision du 11 mars 2019, le directeur départemental de la cohésion sociale et de la protection des populations de la Mayenne a infligé une amende de 2 400 euros à la société requérante pour défaut de communication au consommateur des coordonnées du médiateur, défaut d'information sur le délai de rétractation, présence dans son contrat d'une clause présumée abusive de manière irréfragable et non-respect d'une injonction administrative. La société AFTE relève appel du jugement du 30 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 mars 2020. 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 221-5 du code de la consommation : " Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes : / 1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ; / 2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat ; (...) ". Aux termes de l'article L. 221-1 du même code : " (...) II - Les dispositions du présent titre s'appliquent aux contrats portant sur la vente d'un ou plusieurs biens, au sens de l'article 528 du code civil, et au contrat en vertu duquel le professionnel fournit ou s'engage à fournir un service au consommateur en contrepartie duquel le consommateur en paie ou s'engage à en payer le prix. Le contrat ayant pour objet à la fois la fourniture de prestation de services et la livraison de biens est assimilé à un contrat de vente. ". Enfin, aux termes de l'article L. 221-18 dudit code : " Le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25. Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour : / 1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l'article L. 221-4 ; / 2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat (...). ". 3. La société AFTE soutient qu'elle propose des contrats de prestation de service relevant du 1° de l'article L. 221-18 précité, et non des contrats de vente de biens relevant du 2° du même article, dès lors qu'elle ne se borne pas à livrer des biens mais fournit aussi diverses prestations. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ses contrats, ayant pour objet la vente de matériel et l'exécution de prestations de service, présentent un caractère mixte ; leur objet principal est la vente de biens dans la mesure notamment où le consommateur, s'il peut renoncer à une prestation d'installation accompagnant l'acquisition d'un matériel, ne peut en revanche solliciter de la société requérante une prestation de service portant sur un matériel acquis auprès d'une autre société. Ces contrats doivent donc être qualifiés, conformément au II de l'article L. 221-1 du code de la consommation, de contrats de vente par assimilation. Ainsi, en application des dispositions combinées des articles L. 221-1 et L. 221-18 2°, le point de départ du délai de rétractation dont bénéficient les consommateurs court à compter de la date de réception du bien, et non de la date de conclusion du contrat. Par suite, l'autorité administrative n'a pas commis d'erreur de droit en reprochant à la société AFTE d'avoir manqué à ses obligations en matière d'information du consommateur quant au délai de rétractation applicable. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 212-1 du code de la consommation : " Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. (...) le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. (...) ". Aux termes de l'article R. 212-1 de ce code : " Dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l'article L. 212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de : (...) 6° Supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations ; (...) ". Et aux termes de l'article L. 312-52 dudit code : " Le contrat de vente ou de prestation de services est résolu de plein droit, sans indemnité : / 1° Si le prêteur n'a pas, dans un délai de sept jours à compter de l'acceptation du contrat de crédit par l'emprunteur, informé le vendeur de l'attribution du crédit ; / 2° Ou si l'emprunteur a exercé son droit de rétractation dans le délai prévu à l'article L. 312-19. / Toutefois, lorsque l'emprunteur, par une demande expresse, sollicite la livraison ou la fourniture immédiate du bien ou de la prestation de services, l'exercice du droit de rétractation du contrat de crédit n'emporte résolution de plein droit du contrat de vente ou de prestation de services que s'il intervient dans un délai de trois jours à compter de l'acceptation du contrat de crédit par l'emprunteur. / Le contrat n'est pas résolu si, avant l'expiration des délais mentionnés au présent article, l'acquéreur paie comptant. ". 5. L'article 2 du contrat proposé par la société AFTE stipule : " La livraison des produits et matériels, dans la mise des stocks disponibles, est déterminée avec le distributeur qui fixe avec le client une date de distribution/installation respectant obligatoirement les dispositions du code de la consommation en matière de vente à domicile et dans la limita de quatre mois maximum à compter de la date de signature du présent contrat pour l'étude et l'acceptation du dossier de financement choisi par le client, le cas échéant. Le rejet du dossier de financement des produits et matériels entraînera la résolution du présent contrat. À expiration du délai maximum de 4 mois à compter de la signature du bon de commande, l'absence de livraison/installation vaudra notification implicite au client du rejet du dossier de financement des matériels vendus par le distributeur. La présente commande sera de pleins droits nuls d'effets et ne pourra servir de fondement à une quelconque obligation ou responsabilité à la charge de l'une ou l'autre des parties. (...) ". Contrairement à ce que soutient la société requérante, ces stipulations, lui réservant la possibilité d'annuler le contrat sans indemnité ni engagement de responsabilité dans le délai de quatre mois, qui excède le délai de refus de crédit mentionné par les dispositions précitées de l'article L. 312-52 du code de la consommation, créent un déséquilibre significatif à son profit et présentent ainsi un caractère abusif au sens de l'article L. 212-1 du même code. Dans ces conditions, le directeur départemental de la cohésion sociale et de la protection des populations de la Mayenne n'a pas commis d'erreur d'appréciation en lui infligeant une amende administrative sur ce fondement. 6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 111-1 6° du code de la consommation : " Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes : / (...) 6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'État. (...) ". Aux termes de l'article R. 111-1 du même code : " Pour l'application des 4°, 5° et 6° de l'article L. 111-1, le professionnel communique au consommateur les informations suivantes : (...) 6° Les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation compétente dont il relève en application de l'article L. 616-1. ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 616-1 dudit code : " Tout professionnel communique au consommateur, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État, les coordonnées du ou des médiateurs compétents dont il relève. (...). ". Enfin, aux termes de l'article R. 616-1 de ce code : " En application de l'article L. 616-1, le professionnel communique au consommateur les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation dont il relève, en inscrivant ces informations de manière visible et lisible sur son site internet, sur ses conditions générales de vente ou de service, sur ses bons de commande ou, en l'absence de tels supports, par tout autre moyen approprié. Il y mentionne également l'adresse du site internet du ou de ces médiateurs. ". 7. Il ressort des pièces du dossier que le contrat proposé par la société AFTE renvoie, en son article 14, au site internet du ministère de l'économie, invitant le consommateur à rechercher lui-même, le cas échéant, le médiateur de la consommation territorialement compétent " par secteur professionnel ". Ces stipulations, qui ne contiennent pas les coordonnées du ou des médiateurs dont relève la société requérante, méconnaissent les dispositions de l'article L. 616-1 du code de la consommation. L'autorité administrative était en conséquence bien fondée à infliger une amende à cette dernière pour manquement auxdites dispositions, la circonstance que ses nouveaux contrats ont été rectifiés après édiction de la sanction étant à cet égard sans incidence. 8. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 521-1 du code de la consommation : " Lorsque les agents habilités constatent un manquement ou une infraction avec les pouvoirs prévus au présent livre, ils peuvent, après une procédure contradictoire, enjoindre à un professionnel, en lui impartissant un délai raisonnable qu'ils fixent, de se conformer à ses obligations. ". Et aux termes de l'article L. 532-1 dudit code : " Le fait de ne pas déférer dans le délai imparti à une injonction relative aux infractions ou aux manquements constatés avec les pouvoirs mentionnés aux articles L. 511-5, L. 511-6 et L. 511-7, est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder : / 1° Pour une personne physique : 1 500 euros et pour une personne morale : 7 500 euros, lorsque l'infraction ou le manquement ayant justifié la mesure d'injonction est sanctionné par une amende au plus égale à celle prévue pour une contravention de la cinquième classe ou par une amende administrative dont le montant est au plus égal à 3 000 euros pour une personne physique et à 15 000 euros pour une personne morale ; / 2° Pour une personne physique : 3 000 euros et pour une personne morale : 15 000 euros, lorsque l'infraction ou le manquement ayant justifié la mesure d'injonction est sanctionné par une peine délictuelle ou une amende administrative dont le montant excède pour une personne physique 3 000 euros et 15 000 euros pour une personne morale. (...) ". 9. La société AFTE, se bornant à soutenir qu'elle a " activement collaboré " avec l'administration pour faire évoluer son contrat, et que " la qualification de non-respect d'une injonction administrative apparait disproportionnée sous prétexte d'un débat juridique complexe ", n'établit pas avoir déféré à l'injonction qui lui a été adressée par l'autorité administrative par courrier du 12 juin 2008, laquelle lui donnait un délai d'un mois pour se conformer aux prescriptions de l'article L. 616-1 précité du code de la consommation. La société requérante n'est donc pas fondée à demander l'annulation de la décision du 11 mars 2019 lui infligeant une amende administrative à ce titre. 10. Il résulte de tout ce qui précède que la société AFTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société AFTE est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Agence française pour la transition énergétique (AFTE) et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. A...Le président, I. LUBEN Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA01108
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Publicis Groupe a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 18 décembre 2018 par laquelle la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France a prononcé à son encontre une amende administrative de 65 000 euros pour manquement aux dispositions du 9e alinéa du I l'article L. 441-6 du code de commerce relatives aux délais de paiement, et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois, ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique. Par un jugement n° 1913626/2-1 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 9 août 2021 et 5 février 2022, la société Publicis Groupe, représentée par Me Tricot, demande à la cour : 1°) de joindre les requêtes des sociétés Publicis Media France, Publicis Conseil, Publicis Groupe, Publicis Sapient France et Re:Sources France ; 2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 juin 2021 ; 3°) d'annuler la décision du 18 décembre 2018 de la DIRECCTE d'Île-de-France ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique ; 4°) d'enjoindre à l'administration de lui restituer le montant de l'amende versée ; 5°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de cette amende ; 6°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la sanction a été prise au terme d'une procédure irrégulière, le principe du contradictoire ayant été méconnu à son égard faute de sollicitation par les services de la DIRECCTE durant les opérations de contrôle ; elle n'a pas été informée de la possibilité d'exercer un recours gracieux ou hiérarchique, en méconnaissance de l'article R. 470-2 du code de commerce ; le courrier de notification de la sanction ne vise pas les dispositions de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, ce qui l'a privée d'une information sur l'étendue de ses droits, en méconnaissance du principe d'égalité ; elle a été privée de son droit à un procès équitable ; - le montant total des amendes administratives prononcées excède le plafond légal, en méconnaissance des dispositions alors en vigueur du VII de l'article L. 465-2 du code de commerce, dès lors que la société Re:Sources France, qui assure la gestion administrative et financière des cinq sociétés sanctionnées, est l'unique auteur des manquements ; - la publication de la sanction est dépourvue de base légale dès lors qu'elle n'était prévue par aucun texte au moment des faits reprochés, et viole donc les principes de légalité des délits et des peines et de non-rétroactivité de la loi pénale ; les dispositions de l'article L. 465-2 du code de commerce ne permettaient pas de connaître les modalités de publication, qui n'ont été précisées que le 2 octobre 2014 par voie réglementaire, alors que certains faits reprochés sont antérieurs à cette dernière date ; - la sanction est partiellement fondée sur des éléments erronés ou arbitraires, dans la mesure où des factures ne comportant pas de numéro de bon de commande n'ont pas été exclues ; de même, les factures payées dans les quinze jours suivant leur réception n'ont pas été retirées du périmètre du contrôle ; d'autres factures mentionnées dans le procès-verbal de contrôle comportent des irrégularités ; - la décision portant sanction est entachée d'incohérences au regard du procès-verbal de contrôle, la privant de la possibilité de présenter utilement des observations quant au principe de proportionnalité ; - une part importante des retards de paiement résulte de causes qui lui sont étrangères, et l'avantage de trésorerie calculé par la DIRECCTE ne lui a pas profité ; sa bonne foi doit donc être prise en compte, dès lors notamment qu'elle a mis en œuvre des mesures en vue de faire cesser les manquements ; les dispositions de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration doivent lui être appliquées. Par un mémoire enregistré le 5 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. La clôture de l'instruction est intervenue le 14 mars 2022. Vu : - le code de commerce, - le code général des impôts, - le code des relations entre le public et l'administration, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique, - et les observations de Mmes B... et Aubert, représentant le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Considérant ce qui suit : 1. La direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France a mené, entre décembre 2015 et le début de l'année 2018, une procédure de contrôle du respect des délais de paiement interentreprises par cinq sociétés filiales du groupe Publicis, portant sur la période allant du 1er janvier au 30 novembre 2015. Par courrier du 14 juin 2018, les services de la DIRECCTE ont adressé à la société Publicis Groupe le procès-verbal établi à l'issue de ce contrôle, faisant état de manquements aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, l'informant de l'intention de l'administration de lui infliger une sanction administrative, et l'invitant à formuler ses observations dans le délai de soixante jours. La société requérante a présenté des observations les 12 juillet, 28 septembre et 7 décembre 2018. Par une décision du 18 décembre 2018, la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Île-de-France a prononcé à son encontre une amende administrative de 65 000 euros et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois sur le site internet de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Par un courrier du 19 février 2019, la société Publicis Groupe a formé un recours hiérarchique auprès du ministre de l'économie et des finances, qui a été implicitement rejeté. Elle demande à la cour d'annuler le jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 et de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique. Sur la régularité de la procédure de sanction : 2. En matière d'édiction de sanctions administratives, sont seuls punissables les faits constitutifs d'un manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis et les sanctions susceptibles d'être infligées sont celles définies par les textes en vigueur à cette même date, sous réserve de l'intervention ultérieure de dispositions répressives plus douces. En revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s'appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure à suivre, alors même qu'ils conduisent à réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur. N'ont toutefois pas à être réitérés des actes de procédure régulièrement intervenus. 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 470-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la procédure ayant conduit à la sanction en litige : " (...) III. - Les manquements passibles d'une amende administrative sont constatés par procès-verbal, selon les modalités prévues à l'article L. 450-2. / IV. - Avant toute décision, l'administration informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée à son encontre, en lui indiquant qu'elle peut prendre connaissance des pièces du dossier et se faire assister par le conseil de son choix et en l'invitant à présenter, dans le délai de soixante jours, ses observations écrites et, le cas échéant, ses observations orales. / Passé ce délai, l'autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l'amende. (...) ". 4. Il résulte de l'instruction que la société Publicis Groupe a été précisément informée, par un courrier de la DIRECCTE du 14 juin 2018 auquel étaient joints un cédérom comportant les cotes des dossiers et le procès-verbal de seize pages retraçant les constats effectués lors du contrôle, des manquements qui lui étaient reprochés. Ce courrier mentionnait en outre l'intention de l'administration de lui infliger une amende administrative de 65 000 euros et d'ordonner la publication de cette sanction. Dans le cadre de la procédure contradictoire préalable ainsi initiée, la société requérante a présenté ses observations oralement le 12 juillet 2018 et par des courriers des 28 septembre et 7 décembre 2018, adressés pour son compte par son conseil. Si l'administration a eu pour seul interlocuteur, durant les opérations de contrôle, la société Re:Sources France, autre filiale du groupe Publicis, chargée de la gestion administrative et financière des sociétés du groupe et détentrice en cette qualité des factures et éléments matériels contrôlés, cette circonstance est sans incidence sur le respect par la DIRECCTE de la procédure contradictoire. La circonstance que l'administration a retenu, dans sa décision du 18 décembre 2018, un montant facturé payé en retard de 2 561 276,13 euros et un montant de rétention de trésorerie de 320 553,32 euros, inférieurs aux montants de 2 573 313,87 et 332 501,69 euros mentionnés dans le procès-verbal adressé à la société le 14 juin 2018, sans pour autant modifier le montant envisagé de la sanction, n'a pas privé la société requérante, eu égard aux montants en cause, de la possibilité de critiquer utilement la proportionnalité de la sanction qui lui était infligée. Dans ces conditions, la société Publicis Groupe n'est pas fondée à soutenir que la DIRECCTE aurait méconnu les droits de la défense en prenant la sanction en litige à son encontre. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 470-2 du code de commerce : " (...) II. - La décision mentionnée à l'article L. 470-2 peut être contestée par la personne qui en fait l'objet devant le ministre chargé de l'économie. Ce recours est exclusif de tout autre recours hiérarchique. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision administrative peut faire l'objet, dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux, d'un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai. / Lorsque dans le délai initial du recours contentieux ouvert à l'encontre de la décision, sont exercés contre cette décision un recours gracieux et un recours hiérarchique, le délai du recours contentieux, prorogé par l'exercice de ces recours administratifs, ne recommence à courir à l'égard de la décision initiale que lorsqu'ils ont été l'un et l'autre rejetés ". Aux termes de l'article L. 412-3 du même code : " La décision soumise à recours administratif préalable obligatoire est notifiée avec l'indication de cette obligation ainsi que des voies et délais selon lesquels ce recours peut être exercé. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". 6. La société Publicis Groupe soutient que le défaut de mention, dans la notification de la décision du 18 décembre 2018, de la possibilité pour elle d'exercer un recours gracieux ou hiérarchique, ainsi que l'absence de visa des dispositions précitées de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, l'ont privée d'une information sur l'étendue de ses droits, en méconnaissance du principe d'égalité, et ont porté atteinte à son droit à un procès équitable. Toutefois, l'administration n'est tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions que les délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais et voies des recours administratifs préalables obligatoires. Il lui est loisible d'y ajouter la mention des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs, à la condition toutefois qu'il n'en résulte pas des ambiguïtés de nature à induire en erreur les intéressés dans des conditions telles qu'ils pourraient se trouver privés du droit à un recours contentieux effectif. Par suite, alors en tout état de cause que les conditions de notification d'une décision sont sans incidence sur sa légalité, en ne mentionnant dans la décision litigieuse que les voie et délai de recours contentieux, la DIRECCTE n'a porté atteinte ni au principe d'égalité ni au droit ultérieur de la société requérante à un recours contentieux effectif ou à un procès équitable. 7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Publicis Groupe n'est pas fondée à soutenir que la sanction litigieuse lui a été infligée au terme d'une procédure irrégulière. Sur le bien-fondé de la sanction : 8. Aux termes de l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits sanctionnés : " I. - Tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour une activité professionnelle. Elles comprennent : / - les conditions de vente ; / - le barème des prix unitaires ; / - les réductions de prix ; / - les conditions de règlement. / (...) / (...) / Sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties, le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation demandée. / Le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours à compter de la date d'émission de la facture. En cas de facture périodique, au sens du 3 du I de l'article 289 du code général des impôts, ce délai ne peut dépasser quarante-cinq jours à compter de la date d'émission de la facture. / (...) / VI. - Sont passibles d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés aux huitième, neuvième et onzième alinéas du I du présent article, le fait de ne pas indiquer dans les conditions de règlement les mentions figurant à la première phrase du douzième alinéa du même I, le fait de fixer un taux ou des conditions d'exigibilité des pénalités de retard selon des modalités non conformes à ce même alinéa ainsi que le fait de ne pas respecter les modalités de computation des délais de paiement convenues entre les parties conformément au neuvième alinéa dudit I. L'amende est prononcée dans les conditions prévues à l'article L. 465-2. Le montant de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. / Sous les mêmes sanctions, sont interdites toutes clauses ou pratiques ayant pour effet de retarder abusivement le point de départ des délais de paiement mentionnés au présent article ". 9. D'autre part, aux termes de l'article L. 465-2 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits sanctionnés : " (...) V. ' La décision prononcée par l'autorité administrative peut être publiée. / (...) / VII. ' Lorsque, à l'occasion d'une même procédure ou de procédures séparées, plusieurs sanctions administratives ont été prononcées à l'encontre d'un même auteur pour des manquements en concours, ces sanctions s'exécutent cumulativement, dans la limite du maximum légal le plus élevé. / (...) X. ' Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". 10. En premier lieu, la société Publicis Groupe soutient que les manquements qui lui sont reprochés, comme ceux qui sont imputés aux quatre autres filiales contrôlées appartenant au groupe Publicis, ont été commis par une seule d'entre elles, la société Re:Sources France, chargée de leur gestion administrative et financière en vertu d'un contrat de service lui conférant une mission de " centre de services partagés ", et que par suite le montant total des sanctions infligées aux cinq sociétés du groupe excède illégalement le maximum de 375 000 euros prévu au VI de l'article L. 441-6 du code de commerce. Il résulte cependant de l'instruction que si la réception, la gestion et le paiement des factures de ces sociétés étaient confiés, au cours de la période contrôlée, à une seule d'entre elles, chacune des sociétés sanctionnées restait juridiquement la partie avec laquelle le fournisseur avait contracté, au sens des dispositions précitées du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, et sur l'identité de laquelle ce dernier ne pouvait au demeurant se méprendre. Il était ainsi notamment demandé au fournisseur transmettant sa facture d'indiquer, avant l'adresse de la société Re:Sources France, " l'entité facturée ", et les conditions générales d'achat de la société Publicis Groupe ne mentionnaient, comme l'ont relevé les premiers juges, que le nom de cette dernière. Chaque société restait tenue, quelle que soit l'organisation choisie, de veiller au respect des délais de règlement des sommes dues mentionnés au I de l'article L. 441-6. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que des manquements relatifs à une même facture auraient été concurremment imputés par les services de la DIRECCTE à deux ou plusieurs sociétés du groupe Publicis. Dans ces conditions, l'administration a pu, sans méconnaître les dispositions du VII de l'article L. 465-2 du code de commerce ni violer le principe de personnalité des peines, regarder chaque société contrôlée, s'agissant des factures émises par ses fournisseurs, comme l'auteur des manquements aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du même code relatives au respect des délais de paiement convenus. 11. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées du V de l'article L. 465-2 du code de commerce, en vigueur à la date des faits reprochés à la société requérante, que la sanction de publication de l'amende infligée par la DIRECCTE était légalement prévue. Par suite, - alors au surplus que la décision attaquée ne sanctionne que des manquements qui se sont poursuivis au-delà de cette date - si que les modalités de cette publication n'ont été précisées par voie réglementaire qu'à compter du 3 octobre 2014, à l'article R. 465-2 du même code, il n'en résulte pas que la mesure litigieuse serait dépourvue de base légale. 12. En troisième lieu, il résulte des termes mêmes du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, précité, appliqué aux factures contrôlées, que le délai de paiement court " à compter de la date d'émission de la facture ", celle-ci correspondant à la date apposée sur la facture en application du 6° du I de l'article 242 nonies A de l'annexe II au code général des impôts, et non à compter de la date de réception de la facture par le débiteur qui en est destinataire. Le 3 du I de l'article 289 de ce code prévoit en outre que " La facture est, en principe, émise dès la réalisation de la livraison ou de la prestation de services " et l'article L. 441-3 du code de commerce dispose que le vendeur est tenu de délivrer la facture dès la réalisation de la vente ou la prestation du service et qu'à défaut, l'acheteur doit la réclamer. La DIRECCTE a donc fait une exacte application des textes en appréciant les retards de paiement à partir de la date d'émission des factures et en n'excluant pas, au titre des manquements retenus, les factures payées dans les quinze jours suivant leur réception, ou reçues tardivement en raison de l'indication par le fournisseur d'une adresse erronée, que la société Publicis Groupe n'établit pas avoir réclamées en temps utile. À cet égard, la société ne peut utilement invoquer la circonstance qu'une autre entreprise aurait bénéficié de l'exclusion de telles factures. Par ailleurs, la société requérante, à laquelle il appartenait de solliciter ses fournisseurs afin d'obtenir les informations ou validations nécessaires au règlement de ses factures dans le respect des délais de paiements impartis par le code de commerce, ne peut utilement se prévaloir, pour justifier certains retards de paiement, de l'absence d'indication d'un numéro de bon de commande par le créancier, ou de la mention d'un numéro erroné ou non valide. La société Publicis Groupe n'est par suite pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait en partie motivée par des faits inexacts ou procéderait d'une application arbitraire de la loi. 13. En quatrième lieu, la société Publicis Groupe se prévaut de sa bonne foi, dès lors qu'une part importante des retards de paiement résulte selon elle de causes qui lui sont étrangères, et que l'avantage de trésorerie calculé par la DIRECCTE ne lui a pas profité ; elle fait en outre valoir qu'elle a mis en œuvre, après l'édiction de la sanction litigieuse, des mesures correctives de traitement des factures en vue de faire cesser les manquements. Toutefois, il résulte tout d'abord de ce qui a été dit au point 12 du présent arrêt qu'elle ne peut utilement se prévaloir de la réception tardive de certaines factures ou des erreurs affectant leurs mentions, alors que les dispositions précitées de l'article L. 441-6 du code de commerce ne prévoient aucune exonération du respect des délais de paiement pour de tels motifs. Ensuite, la mise en place de mesures correctives est sans incidence sur le bien-fondé de la sanction infligée en raison du constat objectif de manquements par les services de la DIRECCTE. Enfin, la circonstance qu'elle n'aurait tiré aucun profit de l'avantage de trésorerie généré par les retards de paiement n'est pas de nature à justifier, au regard des agissements sanctionnés et de l'exigence de répression effective des infractions, une réduction du montant de la sanction. 14. En dernier lieu, la société requérante estime qu'elle doit bénéficier du " droit à l'erreur " institué par les dispositions de de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration, aux termes desquelles :" Une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne peut faire l'objet, de la part de l'administration, d'une sanction, pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d'une prestation due, si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l'administration dans le délai que celle-ci lui a indiqué. / La sanction peut toutefois être prononcée, sans que la personne en cause ne soit invitée à régulariser sa situation, en cas de mauvaise foi ou de fraude. / Les premier et deuxième alinéas ne sont pas applicables : / 1° Aux sanctions requises pour la mise en œuvre du droit de l'Union européenne ; / 2° Aux sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement ; / 3° Aux sanctions prévues par un contrat ; / 4° Aux sanctions prononcées par les autorités de régulation à l'égard des professionnels soumis à leur contrôle ". Toutefois, la méconnaissance des délais de paiement prévue par les dispositions précitées de l'article L. 441-6 du code de commerce, n'est pas au nombre des manquements dont la régularisation est envisagée par l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration, ainsi d'ailleurs qu'il résulte de l'exposé des motifs de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance, dont sont issues ces dispositions. Par suite, la société Publicis Groupe ne peut utilement se prévaloir du " droit à l'erreur " instauré par l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration. 15. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de procéder à la jonction demandée, que la société Publicis Groupe n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 par laquelle la DIRECCTE d'Île-de-France lui a infligé une amende administrative de 65 000 euros pour manquement aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce relatives aux délais de paiement et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois, ainsi que de la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique. Il résulte également de tout ce qui précède que les conclusions de la société requérante tendant à la réduction du montant de la sanction infligée doivent, en l'absence d'erreur matérielle ou de disproportion, être rejetées, de même que ses conclusions à fin d'injonction. Sur les frais liés au litige : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Publicis Groupe au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société Publicis Groupe est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Publicis Groupe et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Pascale Fombeur, présidente de la cour, - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. A...La présidente, P. FOMBEUR Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA04584
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 décembre 2020 par lequel le ministre de l'intérieur a prononcé son expulsion du territoire français. Par un jugement n° 2022197/4-3 du 1er octobre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 2 décembre 2021, M. D..., représenté par Me Cesse, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 1er octobre 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'intérieur du 4 décembre 2020 ; 3°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'intérieur du 11 mai 2021 fixant le pays de renvoi ; 4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué n'a pas répondu au moyen tiré de l'incompétence du ministre et du signataire de l'arrêté d'expulsion ; - cet arrêté a été signé par une autorité incompétente ; - il est entaché d'un vice forme en l'absence de toute précision sur le signataire de la décision ; - il est insuffisamment motivé et est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation ; - il est entaché d'un vice de procédure, faute de saisine par le ministre de l'intérieur de la commission d'expulsion prévue à l'article L. 522-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que son expulsion ne revêt pas un caractère d'urgence absolue ; - il est entaché d'erreur de droit, de fait et d'appréciation dès lors que sa présence n'est pas susceptible de porter atteinte à l'ordre public, que la durée de son séjour sur le territoire français, son âge, son état de santé, sa situation familiale et son intégration n'ont pas été pris en compte et que le caractère d'urgence absolue de l'expulsion n'est pas caractérisé ; - il viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - il viole l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire enregistré le 31 août 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - et les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C... D..., ressortissant russe né le 16 octobre 1982, est entré irrégulièrement en France le 4 février 2008. Le 19 juin 2009, il s'est vu reconnaître la qualité de réfugié. Le 30 novembre 2016, le tribunal correctionnel de Paris l'a condamné à une peine de cinq ans d'emprisonnement pour participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme. Par une décision du 30 mars 2018, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) lui a retiré le statut de réfugié pour des motifs d'ordre public. Cette décision a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 6 février 2020. Le 4 décembre 2020, il a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion pris par le ministre de l'intérieur. M. D... relève appel du jugement du 1er octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la régularité du jugement : 2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Contrairement à ce que soutient M. D..., les premiers juges ont examiné, au point 4 du jugement, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur et du signataire de l'arrêté attaqué. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement : 3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 522-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente pour prononcer l'expulsion d'un étranger en application des articles L. 521-2 ou L. 521-3 ainsi qu'en cas d'urgence absolue est le ministre de l'intérieur ". Aux termes de l'article L. 212-1 du même code : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. Toutefois, les décisions fondées sur des motifs en lien avec la prévention d'actes de terrorisme sont prises dans des conditions qui préservent l'anonymat de leur signataire. Seule une ampliation de cette décision peut être notifiée à la personne concernée ou communiquée à des tiers, l'original signé, qui seul fait apparaître les nom, prénom et qualité du signataire, étant conservé par l'administration. ". Aux termes enfin de l'article L. 773-9 du code de justice administrative : " Les exigences de la contradiction mentionnées à l'article L. 5 sont adaptées à celles de la protection de la sécurité des auteurs des décisions mentionnées au second alinéa de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration. Lorsque dans le cadre d'un recours contre l'une de ces décisions, le moyen tiré de la méconnaissance des formalités prescrites par le même article L. 212-1 ou de l'incompétence de l'auteur de l'acte est invoqué par le requérant ou si le juge entend relever d'office ce dernier moyen, l'original de la décision ainsi que la justification de la compétence du signataire sont communiqués par l'administration à la juridiction qui statue sans soumettre les éléments qui lui ont été communiqués au débat contradictoire ni indiquer l'identité du signataire dans sa décision ". 4. Contrairement à ce que soutient M. D... et, comme l'ont rappelé les premiers juges, l'arrêté attaqué a été pris selon la procédure prévue en cas d'urgence absolue, relevant de la compétence du ministre de l'intérieur en application de l'article R. 522-2 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, l'arrêté attaqué ayant été pris pour des motifs liés à la prévention des actes de terrorisme, il est au nombre de ceux qui, en application des dispositions citées au point précédent, ne peuvent être notifiés que sous la forme d'une ampliation anonyme. Dans ces conditions, le requérant ne peut utilement contester sa régularité au motif que l'ampliation qui lui a été notifiée ne comportait pas les mentions visées par les dispositions précitées du premier alinéa de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration. Enfin, le ministre a produit devant le tribunal et à nouveau devant la cour, dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article L. 773-9 du code de justice administrative, l'original de l'arrêté attaqué, dont il ressort qu'il comportait lesdites mentions. Par suite, les moyens tirés de l'incompétence et du vice de forme manquent en fait et doivent, dès lors, être écartés. 5. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué, qui vise notamment l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur le fondement duquel a été prise la mesure d'expulsion, ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, précise l'âge et la date d'entrée en France de M. D..., ainsi que les éléments relatifs à sa situation administrative. Il fait en outre état de ce qu'il s'est vu reconnaître le statut de réfugié en 2009, lequel lui a été retiré en 2018, et qu'il a fait l'objet, le 30 novembre 2016, d'une condamnation par le tribunal correctionnel à une peine d'emprisonnement de cinq ans pour participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme. Cet arrêté mentionne également le caractère inquiétant des agissements récents de l'intéressé et énonce que M. D..., eu égard au contexte de menace terroriste particulièrement élevé, " apparaît susceptible de contribuer à radicaliser de jeunes musulmans issus de sa communauté et de les inciter à commette des actions violentes sur le sol français, voire de perpétrer lui-même un attentat terroriste ", que " son expulsion présente en conséquence un caractère d'urgence absolue " et qu'" eu égard à la nature des faits commis et à la gravité de la menace qu'il représente pour l'ordre et la sécurité publics, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. C... D... au respect d'une vie privée et familiale normale, au sens de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ". Contrairement à ce que soutient le requérant, la motivation de l'arrêté attaqué révèle un examen particulier de sa situation au regard notamment de sa vie privée et familiale. Dès lors, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué et du défaut d'examen complet de la situation de l'intéressé doivent être écartés. 6. En troisième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 521-1 alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. ". D'autre part, aux termes de l'article L. 522-1 du même code de : " I. - Sauf en cas d'urgence absolue, l'expulsion ne peut être prononcée que dans les conditions suivantes : / 1° L'étranger doit être préalablement avisé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ; / 2° L'étranger est convoqué pour être entendu par une commission qui se réunit à la demande de l'autorité administrative et qui est composée : / a) Du président du tribunal de grande instance du chef-lieu du département, ou d'un juge délégué par lui, président ; / b) D'un magistrat désigné par l'assemblée générale du tribunal de grande instance du chef-lieu du département ; / c) d'un conseiller de tribunal administratif ". 7. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a été condamné par un jugement du tribunal correctionnel de Paris du 30 novembre 2016 à une peine de cinq ans d'emprisonnement pour des faits d'association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme commis peu de temps après son arrivée en France. Le 12 septembre 2017, la cour d'appel de Paris a confirmé la culpabilité de M. D... pour l'aide logistique apportée à l'un des combattants de l'organisation terroriste Émirat islamique du Caucase dans le cadre d'un projet criminel et pour les nombreux rapports entretenus avec des responsables ou des membres actifs de cette organisation. Il a en outre été condamné le 15 juin 2018 à deux mois d'emprisonnement à la suite d'une fouille de cellule pour détention d'un téléphone portable et d'un couteau aiguisé. Il ressort des motifs du premier jugement précité que l'intéressé a apporté un soutien matériel et financier ainsi qu'une assistance logistique à des individus connus pour leurs liens avec l'Émirat islamique du Caucase, en connaissance de leur intention de mener des actes criminels. Le jugement indique que M. D... avait parfaitement conscience de participer aux faits qui lui sont reprochés et que son " attitude consistant à nier les faits en fournissant des explications fantaisistes (...) marque sa dangerosité et en conséquence un risque de réitération. ". En outre, il ressort des pièces du dossier, notamment d'une note blanche des services de renseignement soumise au débat contradictoire, que M. D... a régulièrement consulté des sites islamistes ainsi que des vidéos qui font référence aux moudjahidines, à la guerre, au terrorisme, aux armes ou aux combats en Tchétchénie, en Afghanistan et en Irak. A également été trouvée chez lui une vidéo intitulée " les martyrs " avec " des images de personnes décédées et horriblement mutilées ". M. D..., lors de son incarcération à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis, a par ailleurs fréquenté plusieurs détenus condamnés pour des faits de terrorisme, y compris lorsqu'il a été transféré vers le centre pénitentiaire de Rennes-Vezin. Enfin, s'il ressort des pièces du dossier que M. D... a bénéficié d'une greffe rénale le 6 septembre 2019, le ministre de l'intérieur a produit en première instance l'avis rendu le 22 avril 2021 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), lequel a estimé que si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le certificat médical du docteur A... du 11 décembre 2020, produit par l'intéressé, n'est pas suffisamment circonstancié pour remettre en cause l'avis de l'OFII. 8. Dans ces conditions et eu égard à la nature des faits commis par M. D... ainsi que de la situation résultant des actes de terrorisme perpétrés sur le territoire national au cours des mois de septembre et octobre 2020, le ministre de l'intérieur, dans le contexte d'un risque élevé d'attentats en France, n'a commis ni erreur de droit, ni erreur de fait ou d'appréciation en estimant, à la date à laquelle cette mesure a été prononcée, que son expulsion revêtait un caractère d'urgence absolue au sens du I de l'article L. 522-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, M. D... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance du 2° du I de l'article L. 522-1, qui prévoit l'audition de l'intéressé par une commission chargée de donner un avis à l'autorité administrative, dès lors que cette disposition n'est pas applicable en cas d'urgence absolue. 9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion que si cette mesure constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que les dispositions de l'article L. 521-3 n'y fassent pas obstacle : (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans (...) ". 10. Comme il a été dit précédemment, M. D... a été condamné par un jugement du tribunal correctionnel de Paris du 30 novembre 2016 à une peine de cinq ans d'emprisonnement. Dans ces conditions, et dès lors que les années passées en détention au titre d'une peine de privation de liberté ne peuvent s'imputer dans le calcul des dix ans mentionnés par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. D... n'est pas fondé à soutenir qu'en application des dispositions alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile il ne pouvait pas être expulsé en raison de la durée de son séjour en France. Le ministre n'a pas non plus entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions. 11. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 12. Le requérant soutient qu'il est entré en France en 2008, qu'il est marié à une ressortissante russe et père de quatre enfants mineurs russes, et que les faits pour lesquels il a été condamné sont anciens. Toutefois, eu égard à la gravité des faits reprochés à l'intéressé, le ministre de l'intérieur, en décidant son expulsion, n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette mesure a été prise. Par suite, les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché l'arrêté attaqué au regard de ces stipulations doivent être écartés. 13. En sixième lieu, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant stipule que : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". 14. Rien ne s'oppose à ce que l'ensemble de la cellule familiale formée par l'intéressé, son épouse russe et leurs quatre enfants russes s'établissent en Russie. Eu égard à l'ensemble de ces circonstances et à la gravité des faits reprochés à l'intéressé, le ministre de l'intérieur n'a, en décidant son expulsion, pas méconnu l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant garantissant la prise en compte de l'intérêt supérieur de ses enfants. 15. Si M. D... soutient qu'il encourt en Russie des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison de son appartenance à une organisation terroriste, il ne l'établit pas en se bornant à évoquer le contenu d'informations à caractère général sur la façon dont est géré le terrorisme international en Russie. Ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en décidant qu'il serait expulsé à destination du pays dont il a la nationalité, le ministre de l'intérieur aurait méconnu ces stipulations. 16. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de M. D... doivent être rejetées ainsi, par voie de conséquence, que la demande présentée sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Cesse. Délibéré après l'audience publique du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. B...Le président, I. LUBEN Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 21PA06146 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Re:Sources France a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 18 décembre 2018 par laquelle la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France a prononcé à son encontre une amende administrative de 40 000 euros pour manquement aux dispositions du 9e alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce relatives aux délais de paiement, ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique. Par un jugement n° 1913621/2-1 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 9 août 2021 et 4 février 2022, la société Re:Sources France, représentée par Me Tricot, demande à la cour : 1°) de joindre les requêtes des sociétés Publicis Media France, Publicis Conseil, Publicis Groupe, Publicis Sapient France et Re:Sources France ; 2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 juin 2021 ; 3°) d'annuler la décision du 18 décembre 2018 de la DIRECCTE d'Île-de-France ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique ; 4°) d'enjoindre à l'administration de lui restituer le montant de l'amende versée ; 5°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de cette amende ; 6°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la sanction a été prise au terme d'une procédure irrégulière ; elle n'a pas été informée de la possibilité d'exercer un recours gracieux ou hiérarchique, en méconnaissance de l'article R. 470-2 du code de commerce ; le courrier de notification de la sanction ne vise pas les dispositions de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, ce qui l'a privée d'une information sur l'étendue de ses droits, en méconnaissance du principe d'égalité ; elle a été privée de son droit à un procès équitable ; - le montant total des amendes administratives prononcées excède le plafond légal, en méconnaissance des dispositions alors en vigueur du VII de l'article L. 465-2 du code de commerce, dès lors qu'elle assure la gestion administrative et financière des cinq sociétés sanctionnées et est l'unique auteur des manquements ; - la sanction est partiellement fondée sur des éléments erronés ou arbitraires, dans la mesure où des factures ne comportant pas de numéro de bon de commande n'ont pas été exclues ; de même, les factures payées dans les quinze jours suivant leur réception n'ont pas été retirées du périmètre du contrôle ; d'autres factures mentionnées dans le procès-verbal de contrôle comportent des irrégularités ; - la décision portant sanction est entachée d'incohérences au regard du procès-verbal de contrôle, la privant de la possibilité de présenter utilement des observations quant au principe de proportionnalité ; - une part importante des retards de paiement résulte de causes qui lui sont étrangères, et l'avantage de trésorerie calculé par la DIRECCTE ne lui a pas profité ; sa bonne foi doit donc être prise en compte, dès lors notamment qu'elle a mis en œuvre des mesures en vue de faire cesser les manquements ; les dispositions de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration doivent lui être appliquées. Par un mémoire enregistré le 5 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. La clôture de l'instruction est intervenue le 14 mars 2022. Vu : - le code de commerce, - le code des relations entre le public et l'administration, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique, - et les observations de Mmes B... et Aubert, représentant le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Considérant ce qui suit : 1. La direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France a mené, entre décembre 2015 et le début de l'année 2018, une procédure de contrôle du respect des délais de paiement interentreprises par cinq sociétés filiales du groupe Publicis, portant sur la période allant du 1er janvier au 30 novembre 2015. Par courrier du 14 juin 2018, les services de la DIRECCTE ont adressé à la société Re:Sources France le procès-verbal établi à l'issue de ce contrôle, faisant état de manquements aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, l'informant de l'intention de l'administration de lui infliger une sanction administrative, et l'invitant à formuler ses observations dans le délai de soixante jours. La société requérante a présenté des observations les 12 juillet, 28 septembre et 7 décembre 2018. Par une décision du 18 décembre 2018, la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Île-de-France a prononcé à son encontre une amende administrative de 40 000 euros. Par un courrier du 19 février 2019, la société Re:Sources France a formé un recours hiérarchique auprès du ministre de l'économie et des finances, qui a été implicitement rejeté. Elle demande à la cour d'annuler le jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 et de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique. Sur la régularité de la procédure de sanction : 2. En matière d'édiction de sanctions administratives sont seuls punissables les faits constitutifs d'un manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis et les sanctions susceptibles d'être infligées sont celles définies par les textes en vigueur à cette même date, sous réserve de l'intervention ultérieure de dispositions répressives plus douces. En revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s'appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure à suivre, alors même qu'ils conduisent à réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur. N'ont toutefois pas à être réitérés des actes de procédure régulièrement intervenus. 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 470-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la procédure ayant conduit à la sanction en litige : " (...) III. - Les manquements passibles d'une amende administrative sont constatés par procès-verbal, selon les modalités prévues à l'article L. 450-2. / IV. - Avant toute décision, l'administration informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée à son encontre, en lui indiquant qu'elle peut prendre connaissance des pièces du dossier et se faire assister par le conseil de son choix et en l'invitant à présenter, dans le délai de soixante jours, ses observations écrites et, le cas échéant, ses observations orales. / Passé ce délai, l'autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l'amende. (...) ". 4. Il résulte de l'instruction que la société Re:Sources France a été précisément informée, par un courrier de la DIRECCTE du 14 juin 2018 auquel étaient joints un cédérom comportant les cotes du dossier et le procès-verbal retraçant les constats effectués lors du contrôle, des manquements qui lui étaient reprochés. Ce courrier mentionnait en outre l'intention de l'administration de lui infliger une amende administrative de 40 000 euros. Dans le cadre de la procédure contradictoire préalable ainsi initiée, la société requérante a présenté ses observations oralement le 12 juillet 2018, et par courriers des 28 septembre et 7 décembre 2018. La circonstance que l'administration a retenu, dans sa décision du 18 décembre 2018, un montant facturé payé en retard de 5 365 051,13 euros et un montant de rétention de trésorerie de 285 646,79 euros, inférieurs aux montants de 5 382 447,29 et 304 224,76 euros mentionnés dans le procès-verbal adressé à la société le 14 juin 2018, sans pour autant modifier le montant envisagé de la sanction, n'a pas privé la société requérante, eu égard aux montants en cause, de la possibilité de critiquer utilement la proportionnalité de la sanction qui lui était infligée. Dans ces conditions, la société Re:Sources France n'est pas fondée à soutenir que la DIRECCTE aurait méconnu les droits de la défense en prenant la sanction en litige à son encontre. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 470-2 du code de commerce : " (...) II. - La décision mentionnée à l'article L. 470-2 peut être contestée par la personne qui en fait l'objet devant le ministre chargé de l'économie. Ce recours est exclusif de tout autre recours hiérarchique. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision administrative peut faire l'objet, dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux, d'un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai. / Lorsque dans le délai initial du recours contentieux ouvert à l'encontre de la décision, sont exercés contre cette décision un recours gracieux et un recours hiérarchique, le délai du recours contentieux, prorogé par l'exercice de ces recours administratifs, ne recommence à courir à l'égard de la décision initiale que lorsqu'ils ont été l'un et l'autre rejetés ". Aux termes de l'article L. 412-3 du même code : " La décision soumise à recours administratif préalable obligatoire est notifiée avec l'indication de cette obligation ainsi que des voies et délais selon lesquels ce recours peut être exercé. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". 6. La société Re:Sources France soutient que le défaut de mention, dans la notification de la décision du 18 décembre 2018, de la possibilité pour elle d'exercer un recours gracieux ou hiérarchique, ainsi que l'absence de visa des dispositions précitées de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, l'ont privée d'une information sur l'étendue de ses droits, en méconnaissance du principe d'égalité, et ont porté atteinte à son droit à un procès équitable. Toutefois, l'administration n'est tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions que les délais et voies de recours contentieux ainsi que les voies et délais des recours administratifs préalables obligatoires. Il lui est loisible d'y ajouter la mention des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs, à la condition toutefois qu'il n'en résulte pas des ambiguïtés de nature à induire en erreur les intéressés dans des conditions telles qu'ils pourraient se trouver privés du droit à un recours contentieux effectif. Par suite, alors en tout état de cause que les conditions de notification d'une décision sont sans incidence sur sa légalité, en ne mentionnant dans la décision litigieuse que les voie et délai de recours contentieux, la DIRECCTE n'a porté atteinte ni au principe d'égalité ni au droit ultérieur de la société requérante à un recours contentieux effectif ou à un procès équitable. 7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Re:Sources France n'est pas fondée à soutenir que la sanction litigieuse lui a été infligée au terme d'une procédure irrégulière. Sur le bien-fondé de la sanction : 8. Aux termes de l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits sanctionnés : " I. - Tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour une activité professionnelle. Elles comprennent : / - les conditions de vente ; / - le barème des prix unitaires ; / - les réductions de prix ; / - les conditions de règlement. / (...) / (...) / Sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties, le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation demandée. / Le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours à compter de la date d'émission de la facture. En cas de facture périodique, au sens du 3 du I de l'article 289 du code général des impôts, ce délai ne peut dépasser quarante-cinq jours à compter de la date d'émission de la facture. / (...) / VI. - Sont passibles d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés aux huitième, neuvième et onzième alinéas du I du présent article, le fait de ne pas indiquer dans les conditions de règlement les mentions figurant à la première phrase du douzième alinéa du même I, le fait de fixer un taux ou des conditions d'exigibilité des pénalités de retard selon des modalités non conformes à ce même alinéa ainsi que le fait de ne pas respecter les modalités de computation des délais de paiement convenues entre les parties conformément au neuvième alinéa dudit I. L'amende est prononcée dans les conditions prévues à l'article L. 465-2. Le montant de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. / Sous les mêmes sanctions, sont interdites toutes clauses ou pratiques ayant pour effet de retarder abusivement le point de départ des délais de paiement mentionnés au présent article ". 9. D'autre part, aux termes de l'article L. 465-2 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits sanctionnés : " (...) V. ' La décision prononcée par l'autorité administrative peut être publiée. / (...) / VII. ' Lorsque, à l'occasion d'une même procédure ou de procédures séparées, plusieurs sanctions administratives ont été prononcées à l'encontre d'un même auteur pour des manquements en concours, ces sanctions s'exécutent cumulativement, dans la limite du maximum légal le plus élevé. / (...) X. ' Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". 10. En premier lieu, la société Re:Sources France soutient que les manquements qui lui sont reprochés et ceux qui sont imputés aux quatre autres filiales contrôlées appartenant au groupe Publicis ont été commis par elle seule, dès lors qu'elle est chargée de la gestion administrative et financière de l'ensemble des sociétés en vertu d'un contrat de service lui conférant une mission de " centre de services partagés ", et que par suite le montant total des sanctions infligées aux cinq sociétés du groupe excède illégalement le maximum de 375 000 euros prévu au VI de l'article L. 441-6 du code de commerce. Il résulte cependant de l'instruction que si la réception, la gestion et le paiement des factures desdites sociétés étaient confiés, au cours de la période contrôlée, à la seule société Re:Sources France, chacune des sociétés sanctionnées restait juridiquement la partie avec laquelle le fournisseur avait contracté, au sens des dispositions précitées du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, et sur l'identité de laquelle ce dernier ne pouvait au demeurant se méprendre. Il était ainsi notamment demandé au fournisseur transmettant sa facture d'indiquer, avant l'adresse de la société Re:Sources France, " l'entité facturée ", et les conditions générales d'achat de chacune des quatre autres sociétés, Publicis Conseil, Publicis Groupe, Publicis Media France et Publicis Sapient France ne mentionnaient, comme l'ont relevé les premiers juges, que le nom de ces dernières. Chaque société restait tenue, quelle que soit l'organisation choisie, de veiller au respect des délais de règlement des sommes dues mentionnés au I de l'article L. 441-6. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que des manquements relatifs à une même facture auraient été concurremment imputés par les services de la DIRECCTE à deux ou plusieurs sociétés du groupe Publicis. Dans ces conditions, l'administration a pu, sans méconnaître les dispositions du VII de l'article L. 465-2 du code de commerce ni violer le principe de personnalité des peines, regarder chaque société contrôlée, s'agissant des factures émises par ses fournisseurs, comme l'auteur des manquements aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du même code relatives au respect des délais de paiement convenus. 11. En deuxième lieu, il résulte des termes mêmes du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, précité, que le délai de paiement court " à compter de la date d'émission de la facture ", celle-ci correspondant à la date apposée sur la facture en application du 6° du I de l'article 242 nonies A de l'annexe II au code général des impôts, et non à compter de la date de réception de la facture par le débiteur qui en est destinataire. Le 3 du I de l'article 289 de ce code prévoit en outre que " La facture est, en principe, émise dès la réalisation de la livraison ou de la prestation de services " et l'article L. 441-3 du code de commerce dispose que le vendeur est tenu de délivrer la facture dès la réalisation de la vente ou la prestation du service et qu'à défaut, l'acheteur doit la réclamer. La DIRECCTE a donc fait une exacte application des textes en appréciant les retards de paiement à partir de la date d'émission des factures et en n'excluant pas, au titre des manquements retenus, les factures payées dans les quinze jours suivant leur réception, ou reçues tardivement en raison de l'indication par le fournisseur d'une adresse erronée, que la société Re:Sources France n'établit pas avoir réclamées en temps utile. À cet égard, la société ne peut utilement invoquer la circonstance qu'une autre entreprise aurait bénéficié de l'exclusion de telles factures. Par ailleurs, la société requérante, à laquelle il appartenait de solliciter ses fournisseurs afin d'obtenir les informations ou validations nécessaires au règlement de ses factures dans le respect des délais de paiement impartis par le code de commerce, ne peut utilement se prévaloir, pour justifier certains retards de paiement, de l'absence d'indication d'un numéro de bon de commande par le créancier, ou de la mention d'un numéro erroné ou non valide. Enfin, si la société invoque l'irrégularité de deux autres factures, il résulte de l'instruction que, pour l'une, la société n'en a pas justifié et que l'autre n'a pas été retenue par l'administration. La société Re:Sources France n'est par suite pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait en partie motivée par des faits inexacts ou procéderait d'une application arbitraire de la loi. 12. En troisième lieu, la société Re:Sources France se prévaut de sa bonne foi, dès lors qu'une part importante des retards de paiement résulte selon elle de causes qui lui sont étrangères, et que l'avantage de trésorerie calculé par la DIRECCTE ne lui a pas profité ; elle fait en outre valoir qu'elle a mis en œuvre, après l'édiction de la sanction litigieuse, des mesures correctives de traitement des factures en vue de faire cesser les manquements. Toutefois, il résulte tout d'abord de ce qui a été dit au point 11 du présent arrêt qu'elle ne peut utilement se prévaloir de la réception tardive de certaines factures ou des erreurs affectant leurs mentions, alors que les dispositions précitées de l'article L. 441-6 du code de commerce ne prévoient aucune exonération du respect des délais de paiement pour de tels motifs. Ensuite, la mise en place de mesures correctives est sans incidence sur le bien-fondé de la sanction, infligée en raison du constat objectif de manquements par les services de la DIRECCTE. Enfin, la circonstance qu'elle n'aurait tiré aucun profit de l'avantage de trésorerie généré par les retards de paiement n'est pas de nature à justifier, au regard des agissements sanctionnés et de l'exigence de répression effective des infractions, une réduction du montant de la sanction. 13. En dernier lieu, la société requérante estime qu'elle doit bénéficier du " droit à l'erreur " institué par les dispositions de de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration, aux termes desquelles " Une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne peut faire l'objet, de la part de l'administration, d'une sanction, pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d'une prestation due, si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l'administration dans le délai que celle-ci lui a indiqué. / La sanction peut toutefois être prononcée, sans que la personne en cause ne soit invitée à régulariser sa situation, en cas de mauvaise foi ou de fraude. / Les premier et deuxième alinéas ne sont pas applicables : / 1° Aux sanctions requises pour la mise en œuvre du droit de l'Union européenne ; / 2° Aux sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement ; / 3° Aux sanctions prévues par un contrat ; / 4° Aux sanctions prononcées par les autorités de régulation à l'égard des professionnels soumis à leur contrôle ". Toutefois, la méconnaissance des délais de paiement, prévue par les dispositions précitées de l'article L. 441-6 du code de commerce, n'est pas au nombre des manquements dont la régularisation est envisagée par l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration, ainsi d'ailleurs qu'il résulte de l'exposé des motifs de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance, dont sont issues ces dispositions. Par suite, la société Re:Sources France ne peut utilement se prévaloir du " droit à l'erreur " instauré par l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration. 14. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de procéder à la jonction demandée, que la société Re:Sources France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 par laquelle la DIRECCTE d'Île-de-France lui a infligé une amende administrative de 40 000 euros pour manquement aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce relatives aux délais de paiement, ainsi que de la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique. Il résulte également de tout ce qui précède que les conclusions de la société requérante tendant à la réduction du montant de la sanction infligée doivent, en l'absence d'erreur matérielle ou de disproportion, être rejetées, de même que ses conclusions à fin d'injonction. Sur les frais liés au litige : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Re:Sources France au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société Re:Sources France est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Re:Sources France et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Pascale Fombeur, présidente de la cour, - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. A...La présidente, P. FOMBEUR Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA04587
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Publicis Media France a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 18 décembre 2018 par laquelle la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France a prononcé à son encontre une amende administrative de 75 000 euros pour manquement aux dispositions du 9e alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce relatives aux délais de paiement, et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois, ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique. Par un jugement n° 1913624/2-1 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 9 août 2021 et 5 février 2022, la société Publicis Media France représentée par Me Tricot, demande à la cour : 1°) de joindre les requêtes des sociétés Publicis Media France, Publicis Conseil, Publicis Groupe, Publicis Sapient France et Re:Sources France ; 2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 juin 2021 ; 3°) d'annuler la décision du 18 décembre 2018 de la DIRECCTE d'Île-de-France ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique ; 4°) d'enjoindre à l'administration de lui restituer le montant de l'amende versée ; 5°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de cette amende ; 6°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la sanction a été prise au terme d'une procédure irrégulière, le principe du contradictoire ayant été méconnu à son égard faute de sollicitation par les services de la DIRECCTE durant les opérations de contrôle ; elle n'a pas été informée de la possibilité d'exercer un recours gracieux ou hiérarchique, en méconnaissance de l'article R. 470-2 du code de commerce ; le courrier de notification de la sanction ne vise pas les dispositions de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, ce qui l'a privée d'une information sur l'étendue de ses droits, en méconnaissance du principe d'égalité ; elle a été privée de son droit à un procès équitable ; - le montant total des amendes administratives prononcées excède le plafond légal, en méconnaissance des dispositions alors en vigueur du VII de l'article L. 465-2 du code de commerce, dès lors que la société Re:Sources France, qui assure la gestion administrative et financière des cinq sociétés sanctionnées, est l'unique auteur des manquements ; - la publication de la sanction est dépourvue de base légale dès lors qu'elle n'était prévue par aucun texte au moment des faits reprochés, et viole donc les principes de légalité des délits et des peines et de non rétroactivité de la loi pénale ; les dispositions de l'article L. 465-2 du code de commerce ne permettaient pas de connaître les modalités de publication, qui n'ont été précisées que le 2 octobre 2014 par voie réglementaire, alors que certains faits reprochés sont antérieurs à cette dernière date ; - la sanction est partiellement fondée sur des éléments erronés ou arbitraires, dans la mesure où des factures ne comportant pas de numéro de bon de commande n'ont pas été exclues ; de même, les factures payées dans les quinze jours suivant leur réception n'ont pas été retirées du périmètre du contrôle ; d'autres factures mentionnées dans le procès-verbal de contrôle comportent des irrégularités ; - la décision portant sanction est entachée d'incohérences au regard du procès-verbal de contrôle, la privant de la possibilité de présenter utilement des observations quant au principe de proportionnalité ; - une part importante des retards de paiement résulte de causes qui lui sont étrangères, et l'avantage de trésorerie calculé par la DIRECCTE ne lui a pas profité ; sa bonne foi doit donc être prise en compte, dès lors notamment qu'elle a mis en œuvre des mesures en vue de faire cesser les manquements ; les dispositions de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration doivent lui être appliquées. Par un mémoire enregistré le 5 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. La clôture de l'instruction est intervenue le 14 mars 2022. Vu : - le code de commerce, - le code général des impôts, - le code des relations entre le public et l'administration, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique, - et les observations de Mmes B... et Aubert, représentant le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Considérant ce qui suit : 1. La direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France a mené, entre décembre 2015 et le début de l'année 2018, une procédure de contrôle du respect des délais de paiement interentreprises par cinq sociétés filiales du groupe Publicis, portant sur la période allant du 1er janvier au 30 novembre 2015. Par courrier du 14 juin 2018, les services de la DIRECCTE ont adressé à la société Publicis Media France le procès-verbal établi à l'issue de ce contrôle, faisant état de manquements aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, l'informant de l'intention de l'administration de lui infliger une sanction administrative, et l'invitant à formuler ses observations dans le délai de soixante jours. La société requérante a présenté des observations les 12 juillet, 28 septembre et 7 décembre 2018. Par une décision du 18 décembre 2018, la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Île-de-France a prononcé à son encontre une amende administrative de 75 000 euros et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois sur le site internet de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Par un courrier du 19 février 2019, la société Publicis Media France a formé un recours hiérarchique auprès du ministre de l'économie et des finances, qui a été implicitement rejeté. Elle demande à la cour d'annuler le jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 et de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique. Sur la régularité de la procédure de sanction : 2. En matière d'édiction de sanctions administratives sont seuls punissables les faits constitutifs d'un manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis et les sanctions susceptibles d'être infligées sont celles définies par les textes en vigueur à cette même date, sous réserve de l'intervention ultérieure de dispositions répressives plus douces. En revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s'appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure à suivre, alors même qu'ils conduisent à réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur. N'ont toutefois pas à être réitérés des actes de procédure régulièrement intervenus. 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 470-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la procédure ayant conduit à la sanction en litige : " (...) III. - Les manquements passibles d'une amende administrative sont constatés par procès-verbal, selon les modalités prévues à l'article L. 450-2. / IV. - Avant toute décision, l'administration informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée à son encontre, en lui indiquant qu'elle peut prendre connaissance des pièces du dossier et se faire assister par le conseil de son choix et en l'invitant à présenter, dans le délai de soixante jours, ses observations écrites et, le cas échéant, ses observations orales. / Passé ce délai, l'autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l'amende. (...) ". 4. Il résulte de l'instruction que la société Publicis Media France a été précisément informée, par un courrier de la DIRECCTE du 14 juin 2018 auquel étaient joints un cédérom comportant les cotes du dossier et le procès-verbal de seize pages retraçant les constats effectués lors du contrôle, des manquements qui lui étaient reprochés. Ce courrier mentionnait en outre l'intention de l'administration de lui infliger une amende administrative de 75 000 euros et d'ordonner la publication de cette sanction. Dans le cadre de la procédure contradictoire préalable ainsi initiée, la société requérante a présenté ses observations oralement le 12 juillet 2018 et par des courriers des 28 septembre et 7 décembre 2018, adressés pour son compte par son conseil. Si l'administration a eu pour seul interlocuteur, durant les opérations de contrôle, la société Re:Sources France, autre filiale du groupe Publicis, chargée de la gestion administrative et financière des sociétés du groupe et détentrice en cette qualité des factures et éléments matériels contrôlés, cette circonstance est sans incidence sur le respect par la DIRECCTE de la procédure contradictoire. La circonstance que l'administration a retenu, dans sa décision du 18 décembre 2018, un montant facturé payé en retard de 3 315 108,18 euros et un montant de rétention de trésorerie de 507 267,17 euros, inférieurs aux montants de 3 344 264,03 et 559 849,95 euros mentionnés dans le procès-verbal adressé à la société le 14 juin 2018, sans pour autant modifier le montant envisagé de la sanction, n'a pas privé la société requérante, eu égard aux montants en cause, de la possibilité de critiquer utilement la proportionnalité de la sanction qui lui était infligée. Dans ces conditions, la société Publicis Media France n'est pas fondée à soutenir que la DIRECCTE aurait méconnu les droits de la défense en prenant la sanction en litige à son encontre. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 470-2 du code de commerce : " (...) II. - La décision mentionnée à l'article L. 470-2 peut être contestée par la personne qui en fait l'objet devant le ministre chargé de l'économie. Ce recours est exclusif de tout autre recours hiérarchique. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision administrative peut faire l'objet, dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux, d'un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai. / Lorsque dans le délai initial du recours contentieux ouvert à l'encontre de la décision, sont exercés contre cette décision un recours gracieux et un recours hiérarchique, le délai du recours contentieux, prorogé par l'exercice de ces recours administratifs, ne recommence à courir à l'égard de la décision initiale que lorsqu'ils ont été l'un et l'autre rejetés ". Aux termes de l'article L. 412-3 du même code : " La décision soumise à recours administratif préalable obligatoire est notifiée avec l'indication de cette obligation ainsi que des voies et délais selon lesquels ce recours peut être exercé. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". 6. La société Publicis Media France soutient que le défaut de mention, dans la notification de la décision du 18 décembre 2018, de la possibilité pour elle d'exercer un recours gracieux ou hiérarchique, ainsi que l'absence de visa des dispositions précitées de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, l'ont privée d'une information sur l'étendue de ses droits, en méconnaissance du principe d'égalité, et ont porté atteinte à son droit à un procès équitable. Toutefois, l'administration n'est tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions que les délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais et voies des recours administratifs préalables obligatoires. Il lui est loisible d'y ajouter la mention des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs, à la condition toutefois qu'il n'en résulte pas des ambiguïtés de nature à induire en erreur les intéressés dans des conditions telles qu'ils pourraient se trouver privés du droit à un recours contentieux effectif. Par suite, alors en tout état de cause que les conditions de notification d'une décision sont sans incidence sur sa légalité, en ne mentionnant dans la décision litigieuse que les voie et délai de recours contentieux, la DIRECCTE n'a porté atteinte ni au principe d'égalité ni au droit ultérieur de la société requérante à un recours contentieux effectif ou à un procès équitable. 7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Publicis Media France n'est pas fondée à soutenir que la sanction litigieuse lui a été infligée au terme d'une procédure irrégulière. Sur le bien-fondé de la sanction : 8. Aux termes de l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits sanctionnés : " I. - Tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour une activité professionnelle. Elles comprennent : / - les conditions de vente ; / - le barème des prix unitaires ; / - les réductions de prix ; / - les conditions de règlement. / (...) / (...) / Sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties, le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation demandée. / Le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours à compter de la date d'émission de la facture. En cas de facture périodique, au sens du 3 du I de l'article 289 du code général des impôts, ce délai ne peut dépasser quarante-cinq jours à compter de la date d'émission de la facture. / (...) / VI. - Sont passibles d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés aux huitième, neuvième et onzième alinéas du I du présent article, le fait de ne pas indiquer dans les conditions de règlement les mentions figurant à la première phrase du douzième alinéa du même I, le fait de fixer un taux ou des conditions d'exigibilité des pénalités de retard selon des modalités non conformes à ce même alinéa ainsi que le fait de ne pas respecter les modalités de computation des délais de paiement convenues entre les parties conformément au neuvième alinéa dudit I. L'amende est prononcée dans les conditions prévues à l'article L. 465-2. Le montant de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. / Sous les mêmes sanctions, sont interdites toutes clauses ou pratiques ayant pour effet de retarder abusivement le point de départ des délais de paiement mentionnés au présent article ". 9. D'autre part, aux termes de l'article L. 465-2 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits sanctionnés : " (...) V. ' La décision prononcée par l'autorité administrative peut être publiée. / (...) / VII. ' Lorsque, à l'occasion d'une même procédure ou de procédures séparées, plusieurs sanctions administratives ont été prononcées à l'encontre d'un même auteur pour des manquements en concours, ces sanctions s'exécutent cumulativement, dans la limite du maximum légal le plus élevé. / (...) X. ' Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". 10. En premier lieu, la société Publicis Media France soutient que les manquements qui lui sont reprochés, comme ceux qui sont imputés aux quatre autres filiales contrôlées appartenant au groupe Publicis, ont été commis par une seule d'entre elles, la société Re:Sources France, chargée de leur gestion administrative et financière en vertu d'un contrat de service lui conférant une mission de " centre de services partagés ", et que par suite le montant total des sanctions infligées aux cinq sociétés du groupe excède illégalement le maximum de 375 000 euros prévu au VI de l'article L. 441-6 du code de commerce. Il résulte cependant de l'instruction que si la réception, la gestion et le paiement des factures de ces sociétés étaient confiés, au cours de la période contrôlée, à une seule d'entre elles, chacune des sociétés sanctionnées restait juridiquement la partie avec laquelle le fournisseur avait contracté, au sens des dispositions précitées du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, et sur l'identité de laquelle ce dernier ne pouvait au demeurant se méprendre. Il était ainsi notamment demandé au fournisseur transmettant sa facture d'indiquer, avant l'adresse de la société Re:Sources France, " l'entité facturée ", et les conditions générales d'achat de la société Publicis Media France ne mentionnaient, comme l'ont relevé les premiers juges, que le nom de cette dernière. Chaque société restait tenue, quelle que soit l'organisation choisie, de veiller au respect des délais de règlement des sommes dues mentionnés au I de l'article L. 441-6. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que des manquements relatifs à une même facture auraient été concurremment imputés par les services de la DIRECCTE à deux ou plusieurs sociétés du groupe Publicis. Dans ces conditions, l'administration a pu, sans méconnaître les dispositions du VII de l'article L. 465-2 du code de commerce ni violer le principe de personnalité des peines, regarder chaque société contrôlée, s'agissant des factures émises par ses fournisseurs, comme l'auteur des manquements aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du même code relatives au respect des délais de paiement convenus. 11. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées du V de l'article L. 465-2 du code de commerce, en vigueur à la date des faits reprochés à la société requérante, que la sanction de publication de l'amende infligée par la DIRECCTE était légalement prévue. Par suite, - alors au surplus que la décision attaquée ne sanctionne que des manquements qui se sont poursuivis au-delà de cette date - si les modalités de cette publication n'ont été précisées par voie réglementaire qu'à compter du 3 octobre 2014, à l'article R. 465-2 du même code, il n'en résulte pas que la mesure litigieuse serait dépourvue de base légale. 12. En troisième lieu, il résulte des termes mêmes du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, précité, appliqué aux factures contrôlées, que le délai de paiement court " à compter de la date d'émission de la facture ", celle-ci correspondant à la date apposée sur la facture en application du 6° du I de l'article 242 nonies A de l'annexe II au code général des impôts, et non à compter de la date de réception de la facture par le débiteur qui en est destinataire. Le 3 du I de l'article 289 de ce code prévoit en outre que " La facture est, en principe, émise dès la réalisation de la livraison ou de la prestation de services " et l'article L. 441-3 du code de commerce dispose que le vendeur est tenu de délivrer la facture dès la réalisation de la vente ou la prestation du service et qu'à défaut, l'acheteur doit la réclamer. La DIRECCTE a donc fait une exacte application des textes en appréciant les retards de paiement à partir de la date d'émission des factures et en n'excluant pas, au titre des manquements retenus, les factures payées dans les quinze jours suivant leur réception, ou reçues tardivement en raison de l'indication par le fournisseur d'une adresse erronée, que la société Publicis Media France n'établit pas avoir réclamées en temps utile. À cet égard, la société ne peut utilement invoquer la circonstance qu'une autre entreprise aurait bénéficié de l'exclusion de telles factures. Par ailleurs, la société requérante, à laquelle il appartenait de solliciter ses fournisseurs afin d'obtenir les informations ou validations nécessaires au règlement de ses factures dans le respect des délais de paiement impartis par le code de commerce, ne peut utilement se prévaloir, pour justifier certains retards de paiement, de l'absence d'indication d'un numéro de bon de commande par le créancier, ou de la mention d'un numéro erroné ou non valide. La société Publicis Media France n'est par suite pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait en partie motivée par des faits inexacts ou procéderait d'une application arbitraire de la loi. 13. En quatrième lieu, la société Publicis Media France se prévaut de sa bonne foi, dès lors qu'une part importante des retards de paiement résulte selon elle de causes qui lui sont étrangères, et que l'avantage de trésorerie calculé par la DIRECCTE ne lui a pas profité ; elle fait en outre valoir qu'elle a mis en œuvre, après l'édiction de la sanction litigieuse, des mesures correctives de traitement des factures en vue de faire cesser les manquements. Toutefois, il résulte tout d'abord de ce qui a été dit au point 12 du présent arrêt qu'elle ne peut utilement se prévaloir de la réception tardive de certaines factures ou des erreurs affectant leurs mentions, alors que les dispositions précitées de l'article L. 441-6 du code de commerce ne prévoient aucune exonération du respect des délais de paiement pour de tels motifs. Ensuite, la mise en place de mesures correctives est sans incidence sur le bien-fondé de la sanction, infligée en raison du constat objectif de manquements par les services de la DIRECCTE. Enfin, la circonstance qu'elle n'aurait tiré aucun profit de l'avantage de trésorerie généré par les retards de paiement n'est pas de nature à justifier, au regard des agissements sanctionnés et de l'exigence de répression effective des infractions, une réduction du montant de la sanction. 14. En dernier lieu, la société requérante estime qu'elle doit bénéficier du " droit à l'erreur " institué par les dispositions de de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration, aux termes desquelles " Une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne peut faire l'objet, de la part de l'administration, d'une sanction, pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d'une prestation due, si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l'administration dans le délai que celle-ci lui a indiqué. / La sanction peut toutefois être prononcée, sans que la personne en cause ne soit invitée à régulariser sa situation, en cas de mauvaise foi ou de fraude. / Les premier et deuxième alinéas ne sont pas applicables : / 1° Aux sanctions requises pour la mise en œuvre du droit de l'Union européenne ; / 2° Aux sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement ; / 3° Aux sanctions prévues par un contrat ; / 4° Aux sanctions prononcées par les autorités de régulation à l'égard des professionnels soumis à leur contrôle ". Toutefois, la méconnaissance des délais de paiement, prévue par les dispositions précitées de l'article L. 441-6 du code de commerce, n'est pas au nombre des manquements dont la régularisation est envisagée par l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration, ainsi d'ailleurs qu'il résulte de l'exposé des motifs de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance, dont sont issues ces dispositions. Par suite, la société Publicis Media France ne peut utilement se prévaloir du " droit à l'erreur " instauré par l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration. 15. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de procéder à la jonction demandée, que la société Publicis Media France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 par laquelle la DIRECCTE d'Île-de-France lui a infligé une amende administrative de 75 000 euros pour manquement aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce relatives aux délais de paiement, et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois, ainsi que de la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique. Il résulte également de tout ce qui précède que les conclusions de la société requérante tendant à la réduction du montant de la sanction infligée doivent, en l'absence d'erreur matérielle ou de disproportion, être rejetées, de même que ses conclusions à fin d'injonction. Sur les frais liés au litige : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Publicis Media France au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société Publicis Media France est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Publicis Media France et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Pascale Fombeur, présidente de la cour, - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. A...La présidente, P. FOMBEUR Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA04585
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 12 août 2021 par laquelle la préfète du Val-de-Marne lui a refusé le regroupement familial qu'il sollicitait pour son épouse, Mme E.... Par un jugement n° 2109234 du 10 mai 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire de communication de pièce, enregistrés les 17 mai et 23 juin 2022, M. E..., représenté par Me Reynolds, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2109234 du 10 mai 2022 du tribunal administratif de Melun ; 2°) d'annuler la décision du 12 août 2021 de la préfète du Val-de-Marne ; 3°) d'enjoindre à la préfète du Val-de-Marne d'autoriser le regroupement familial sollicité et d'autoriser l'admission au séjour de son épouse dans un délai quinze jour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard en application des dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision attaquée n'est pas motivée en fait ; - la préfète du Val-de-Marne a commis une erreur de droit en s'estimant en situation de compétence liée ; - la décision attaquée est entachée d'erreur de fait ; - cette décision méconnait les dispositions des articles L. 411-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations des articles 7 et 7 bis de l'accord bilatéral franco-tunisien du 17 mars 1988 ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La requête a été communiquée à la préfète du Val-de-Marne qui n'a pas produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains ; - le décret n° 2018-1173 du 19 décembre 2018 portant relèvement du salaire minimum de croissance ; - le décret n° 2019-1387 du 18 décembre 2019 portant relèvement du salaire minimum de croissance ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. E..., ressortissant tunisien né le 9 août 1989, a sollicité le 8 juillet 2020 un regroupement familial au bénéfice de son épouse, Mme D... E... née A.... Par une décision du 12 août 2021, la préfète du Val-de-Marne a rejeté sa demande. M. E... relève appel du jugement du 10 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de cette décision. Sur le bien-fondé du jugement : 2. D'une part, aux termes de l'article L. 434-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial :/ 1° Par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans (...) ". En vertu de l'article L. 434-7 du même code : " L'étranger qui en fait la demande est autorisé à être rejoint au titre du regroupement familial s'il remplit les conditions suivantes :/ 1° Il justifie de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille ;/ 2° Il dispose ou disposera à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique (...) ". Selon l'article L.434-8 dudit code : " Pour l'appréciation des ressources mentionnées au 1° de l'article L. 434-7 toutes les ressources du demandeur et de son conjoint sont prises en compte, indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail./ Ces ressources doivent atteindre un montant, fixé par décret en Conseil d'Etat, qui tient compte de la taille de la famille du demandeur et doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième./ (...) ". L'article R. 434-4 du même code dispose également que : " Pour l'application du 1° de l'article L. 434-7, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : 1° Cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes ; (...) ". Enfin, son article R. 434-5 prévoit que : " Pour l'application du 2° de l'article L. 434-7, est considéré comme normal un logement qui (...) 2° Satisfait aux conditions de salubrité et d'équipement fixées aux articles 2 et 3 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 (...) ". 3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le caractère suffisant du niveau de ressources du demandeur est apprécié sur la période de douze mois précédant le dépôt de la demande de regroupement familial, par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum interprofessionnel de croissance au cours de cette même période, même si, lorsque ce seuil n'est pas atteint au cours de la période considérée, il est toujours possible, pour le préfet, de prendre une décision favorable en tenant compte de l'évolution des ressources du demandeur, y compris après le dépôt de la demande. En outre, en application du décret du 18 décembre 2018 portant relèvement du salaire minimum de croissance, le montant mensuel brut du salaire minimum interprofessionnel de croissance était de 1 521,22 euros pour l'année 2019. Ce montant a été porté à 1 539,42 euros pour l'année 2020 par décret du 18 décembre 2019. 4. Il ressort des termes de la décision contestée que, pour rejeter la demande de regroupement familial présentée par M. E..., la préfète du Val-de-Marne s'est d'abord fondée sur la circonstance que l'intéressé ne justifiait pas de ressources suffisantes pour la période des douze mois précédant la date du dépôt de sa demande. Il ressort des pièces du dossier que le salaire brut mensuel de M. E..., employé en contrat de travail à durée indéterminée comme ouvrier depuis juin 2019, a été de 1 521,25 euros en 2019 et de 1 539,45 euros de janvier à juin 2020, l'intéressé percevant, en outre, une indemnité de repas. S'il est constant que cette rémunération a pu être diminuée certains mois du fait d'absences non rémunérées, à la suite d'un accident du travail ou de congés sans solde, le requérant, recruté en contrat à durée indéterminée le 28 juin 2019, est toutefois fondé à soutenir, eu égard à la stabilité de ses revenus, que la préfète du Val-de-Marne a commis une erreur d'appréciation en lui refusant le bénéfice du regroupement familial en application des dispositions précitées. 5. Par ailleurs, si pour rejeter la demande de regroupement familial du requérant, la préfète du Val-de-Marne a estimé que le logement de ce dernier ne remplissait pas les conditions minimales de confort et de sécurité, au motif qu'il ne comprenait pas de détecteur de fumée, il ne ressort toutefois d'aucune disposition législative ou réglementaire que l'installation d'un détecteur de fumée serait obligatoire pour justifier des conditions de logement au sens de l'article L. 434-7 précité. 6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la préfète du Val-de-Marne du 12 août 2021. Sur les conclusions à fin d'injonction : 7. Compte tenu du motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint à la préfète du Val-de-Marne, dans un délai qu'il y a lieu de fixer à deux mois, d'admettre M. E... au bénéfice du regroupement familial. Sur les frais du litige : 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 12 février 2021 du tribunal administratif de Melun et la décision du 12 août 2021 de la préfète du Val-de-Marne sont annulés. Article 2 : Il est enjoint à la préfète du Val-de-Marne d'admettre M. E... au bénéfice du regroupement familial dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à M. E... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E..., à la préfète du Val-de-Marne et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président, - Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M-D B...Le président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA02281
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2022 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par un jugement n°2204273 du 28 avril 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 30 mai 2022, M. B..., représenté par Me Tchiakpe, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 22204273 du 28 avril 2022 du tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2022 du préfet de police ; 3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 70 euros par jour de retard ; à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer en l'attente une autorisation provisoire de séjour dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant nigérian né le 30 mars 1977, qui serait entré en France le 7 janvier 2015 selon ses déclarations, a sollicité le 17 août 2021 son admission au séjour dans le cadre des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 20 janvier 2022, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 28 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ". 3. En présence d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifie d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si cette promesse d'embauche ou ce contrat de travail, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour. 4. M. B... établit, par la production de nombreux documents probants, qu'il réside de manière permanente en France depuis 2015. Il a bénéficié d'un titre de séjour pour soins à compter de 2017, titre qui a été prorogé par récépissé jusqu'en avril 2019. Depuis le 23 octobre 2017, il justifie d'une intégration professionnelle stable sur le territoire français. Il ressort en effet des pièces du dossier que, bénéficiant du statut de travailleur handicapé, il est employé depuis cette date par contrat à durée indéterminée en qualité de valet de chambre à temps partiel (119,17 heures) par la société Rolse Nettoyage. Son salaire s'élève à 1 258 euros par mois et il a déclaré à l'administration fiscale 11 972 euros de revenus pour l'année 2018, 12 189 euros pour 2019 et 11 224 euros en 2020. Son employeur le soutient. Il suit de là que, dans les circonstances particulières de l'espèce, en ne procédant pas à la régularisation de sa situation dans le cadre du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, le préfet de police a entaché d'une erreur manifeste d'appréciation sa décision portant refus de titre de séjour contestée, qui doit être annulée. 5. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 6. Eu égard au motif d'annulation ci-dessus retenu, et sous réserve d'un changement substantiel dans la situation de droit ou de fait de l'intéressé, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance à M. B... d'une carte de séjour temporaire. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de délivrer ce titre, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les frais liés à l'instance : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat (ministre de l'intérieur et des outre-mer) le paiement à M. B... de la somme de 1 000 euros au titre des frais liés à l'instance en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2204273 du 28 avril 2022 du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 20 janvier 2022 du préfet de police sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer un titre de séjour à M. B... dans le délai maximum de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat (ministre de l'intérieur et des outre-mer) versera à M. B... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... E..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président, - Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M-D A...Le président, I. LUBENLe greffier, E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA02478
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Publicis Sapient France a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 18 décembre 2018 par laquelle la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France a prononcé à son encontre une amende administrative de 160 000 euros pour manquement aux dispositions du 9e alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce relatives aux délais de paiement, et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois, ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique. Par un jugement n° 1913623/2-1 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 9 août 2021 et 4 février 2022, la société Publicis Sapient France, représentée par Me Tricot, demande à la cour : 1°) de joindre les requêtes des sociétés Publicis Media France, Publicis Conseil, Publicis Groupe, Publicis Sapient France et Re:Sources France ; 2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 juin 2021 ; 3°) d'annuler la décision du 18 décembre 2018 de la DIRECCTE d'Île-de-France ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique ; 4°) d'enjoindre à l'administration de lui restituer le montant de l'amende versée ; 5°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de cette amende ; 6°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la sanction a été prise au terme d'une procédure irrégulière, le principe du contradictoire ayant été méconnu à son égard faute de sollicitation par les services de la DIRECCTE durant les opérations de contrôle ; elle n'a pas été informée de la possibilité d'exercer un recours gracieux ou hiérarchique, en méconnaissance de l'article R. 470-2 du code de commerce ; le courrier de notification de la sanction ne vise pas les dispositions de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, ce qui l'a privée d'une information sur l'étendue de ses droits, en méconnaissance du principe d'égalité ; elle a été privée de son droit à un procès équitable ; - le montant total des amendes administratives prononcées excède le plafond légal, en méconnaissance des dispositions alors en vigueur du VII de l'article L. 465-2 du code de commerce, dès lors que la société Re:Sources France, qui assure la gestion administrative et financière des cinq sociétés sanctionnées, est l'unique auteur des manquements; - la publication de la sanction est dépourvue de base légale dès lors qu'elle n'était prévue par aucun texte au moment des faits reprochés et viole donc les principes de légalité des délits et des peines et de non rétroactivité de la loi pénale ; les dispositions de l'article L. 465-2 du code de commerce ne permettaient pas de connaître les modalités de la publication, qui n'ont été précisées que le 2 octobre 2014 par voie réglementaire, alors que certains faits reprochés sont antérieurs à cette dernière date ; - la sanction est partiellement fondée sur des éléments erronés ou arbitraires, dans la mesure où des factures ne comportant pas de numéro de bon de commande n'ont pas été exclues ; d'autres factures mentionnées dans le procès-verbal de contrôle ont été mal adressées ; - la décision portant sanction est entachée d'incohérences au regard du procès-verbal de contrôle, la privant de la possibilité de présenter utilement des observations quant au principe de proportionnalité ; - une part importante des retards de paiement résulte de causes qui lui sont étrangères, et l'avantage de trésorerie calculé par la DIRECCTE ne lui a pas profité ; sa bonne foi doit donc être prise en compte, dès lors notamment qu'elle a mis en œuvre des mesures en vue de faire cesser les manquements ; les dispositions de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration doivent lui être appliquées. Par un mémoire enregistré le 5 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. La clôture de l'instruction est intervenue le 14 mars 2022. Vu : - le code de commerce, - le code général des impôts, - le code des relations entre le public et l'administration, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique, - et les observations de Mmes B... et Aubert, représentant le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Considérant ce qui suit : 1. La direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Île-de-France a mené, entre décembre 2015 et le début de l'année 2018, une procédure de contrôle du respect des délais de paiement interentreprises par cinq sociétés filiales du groupe Publicis, portant sur la période allant du 1er janvier au 30 novembre 2015. Par courrier du 14 juin 2018, les services de la DIRECCTE ont adressé à la société Publicis Sapient France le procès-verbal établi à l'issue de ce contrôle, faisant état de manquements aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, l'informant de l'intention de l'administration de lui infliger une sanction administrative, et l'invitant à formuler ses observations dans le délai de soixante jours. La société requérante a présenté des observations les 12 juillet, 28 septembre et 7 décembre 2018. Par une décision du 18 décembre 2018, la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Île-de-France a prononcé à son encontre une amende administrative de 160 000 euros et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois sur le site internet de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Par un courrier du 19 février 2019, la société Publicis Sapient France a formé un recours hiérarchique auprès du ministre de l'économie et des finances, qui a été implicitement rejeté. Elle demande à la cour d'annuler le jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 et de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique. Sur la régularité de la procédure de sanction : 2. En matière d'édiction de sanctions administratives sont seuls punissables les faits constitutifs d'un manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis et les sanctions susceptibles d'être infligées sont celles définies par les textes en vigueur à cette même date, sous réserve de l'intervention ultérieure de dispositions répressives plus douces. En revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s'appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure à suivre, alors même qu'ils conduisent à réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur. N'ont toutefois pas à être réitérés des actes de procédure régulièrement intervenus. 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 470-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la procédure ayant conduit à la sanction en litige : " (...) III. - Les manquements passibles d'une amende administrative sont constatés par procès-verbal, selon les modalités prévues à l'article L. 450-2. / IV. - Avant toute décision, l'administration informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée à son encontre, en lui indiquant qu'elle peut prendre connaissance des pièces du dossier et se faire assister par le conseil de son choix et en l'invitant à présenter, dans le délai de soixante jours, ses observations écrites et, le cas échéant, ses observations orales. / Passé ce délai, l'autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l'amende. (...) ". 4. Il résulte de l'instruction que la société Publicis Sapient France a été précisément informée, par un courrier de la DIRECCTE du 14 juin 2018 auquel étaient joints un cédérom comportant les cotes du dossier et le procès-verbal retraçant les constats effectués lors du contrôle, des manquements qui lui étaient reprochés. Ce courrier mentionnait en outre l'intention de l'administration de lui infliger une amende administrative de 160 000 euros et d'ordonner la publication de cette sanction. Dans le cadre de la procédure contradictoire préalable ainsi initiée, la société requérante a présenté ses observations oralement le 12 juillet 2018 et par des courriers des 28 septembre et 7 décembre 2018, adressés pour son compte par son conseil. Si l'administration a eu pour seul interlocuteur, durant les opérations de contrôle, la société Re:Sources France, autre filiale du groupe Publicis, chargée de la gestion administrative et financière des sociétés du groupe et détentrice en cette qualité des factures et éléments matériels contrôlés, cette circonstance est sans incidence sur le respect par la DIRECCTE de la procédure contradictoire. La circonstance que l'administration a retenu, dans sa décision du 18 décembre 2018, un montant facturé payé en retard de 5 742 606,58 euros et un montant de rétention de trésorerie de 732 629,99 euros, inférieurs aux montants de 5 816 081,88 et 821 014,22 euros mentionnés dans le procès-verbal adressé à la société le 14 juin 2018, sans pour autant modifier le montant envisagé de la sanction, n'a pas privé la société requérante, eu égard aux montants en cause, de la possibilité de critiquer utilement la proportionnalité de la sanction qui lui était infligée. Dans ces conditions, la société Publicis Sapient France n'est pas fondée à soutenir que la DIRECCTE aurait méconnu les droits de la défense en prenant la sanction en litige à son encontre. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 470-2 du code de commerce : " (...) II. - La décision mentionnée à l'article L. 470-2 peut être contestée par la personne qui en fait l'objet devant le ministre chargé de l'économie. Ce recours est exclusif de tout autre recours hiérarchique. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision administrative peut faire l'objet, dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux, d'un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai. / Lorsque dans le délai initial du recours contentieux ouvert à l'encontre de la décision, sont exercés contre cette décision un recours gracieux et un recours hiérarchique, le délai du recours contentieux, prorogé par l'exercice de ces recours administratifs, ne recommence à courir à l'égard de la décision initiale que lorsqu'ils ont été l'un et l'autre rejetés ". Aux termes de l'article L. 412-3 du même code : " La décision soumise à recours administratif préalable obligatoire est notifiée avec l'indication de cette obligation ainsi que des voies et délais selon lesquels ce recours peut être exercé. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". 6. La société Publicis Sapient France soutient que le défaut de mention, dans la notification de la décision du 18 décembre 2018, de la possibilité pour elle d'exercer un recours gracieux ou hiérarchique, ainsi que l'absence de visa des dispositions précitées de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, l'ont privée d'une information sur l'étendue de ses droits, en méconnaissance du principe d'égalité, et ont porté atteinte à son droit à un procès équitable. Toutefois, l'administration n'est tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions que les délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais et voies des recours administratifs préalables obligatoires. Il lui est loisible d'y ajouter la mention des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs, à la condition toutefois qu'il n'en résulte pas des ambiguïtés de nature à induire en erreur les intéressés dans des conditions telles qu'ils pourraient se trouver privés du droit à un recours contentieux effectif. Par suite, alors en tout état de cause que les conditions de notification d'une décision sont sans incidence sur sa légalité, en ne mentionnant dans la décision litigieuse que les voie et délai de recours contentieux, la DIRECCTE n'a porté atteinte ni au principe d'égalité ni au droit ultérieur de la société requérante à un recours contentieux effectif ou à un procès équitable. 7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Publicis Sapient France n'est pas fondée à soutenir que la sanction litigieuse lui a été infligée au terme d'une procédure irrégulière. Sur le bien-fondé de la sanction : 8. Aux termes de l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits sanctionnés : " I. - Tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour une activité professionnelle. Elles comprennent : / - les conditions de vente ; / - le barème des prix unitaires ; / - les réductions de prix ; / - les conditions de règlement. / (...) / (...) / Sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties, le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation demandée. / Le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours à compter de la date d'émission de la facture. En cas de facture périodique, au sens du 3 du I de l'article 289 du code général des impôts, ce délai ne peut dépasser quarante-cinq jours à compter de la date d'émission de la facture. / (...) / VI. - Sont passibles d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés aux huitième, neuvième et onzième alinéas du I du présent article, le fait de ne pas indiquer dans les conditions de règlement les mentions figurant à la première phrase du douzième alinéa du même I, le fait de fixer un taux ou des conditions d'exigibilité des pénalités de retard selon des modalités non conformes à ce même alinéa ainsi que le fait de ne pas respecter les modalités de computation des délais de paiement convenues entre les parties conformément au neuvième alinéa dudit I. L'amende est prononcée dans les conditions prévues à l'article L. 465-2. Le montant de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. / Sous les mêmes sanctions, sont interdites toutes clauses ou pratiques ayant pour effet de retarder abusivement le point de départ des délais de paiement mentionnés au présent article ". 9. D'autre part, aux termes de l'article L. 465-2 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits sanctionnés : " (...) V. ' La décision prononcée par l'autorité administrative peut être publiée. / (...) / VII. ' Lorsque, à l'occasion d'une même procédure ou de procédures séparées, plusieurs sanctions administratives ont été prononcées à l'encontre d'un même auteur pour des manquements en concours, ces sanctions s'exécutent cumulativement, dans la limite du maximum légal le plus élevé. / (...) X. ' Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". 10. En premier lieu, la société Publicis Sapient France soutient que les manquements qui lui sont reprochés, comme ceux qui sont imputés aux quatre autres filiales contrôlées appartenant au groupe Publicis, ont été commis par une seule d'entre elles, la société Re:Sources France, chargée de leur gestion administrative et financière en vertu d'un contrat de service lui conférant une mission de " centre de services partagés ", et que par suite le montant total des sanctions infligées aux cinq sociétés du groupe excède illégalement le maximum de 375 000 euros prévu au VI de l'article L. 441-6 du code de commerce. Il résulte cependant de l'instruction que si la réception, la gestion et le paiement des factures de ces sociétés étaient confiés, au cours de la période contrôlée, à une seule d'entre elles, chacune des sociétés sanctionnées restait juridiquement la partie avec laquelle le fournisseur avait contracté, au sens des dispositions précitées du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, et sur l'identité de laquelle ce dernier ne pouvait au demeurant se méprendre. Il était ainsi notamment demandé au fournisseur transmettant sa facture d'indiquer, avant l'adresse de la société Re:Sources France, " l'entité facturée ", et les conditions générales d'achat de la société Publicis Sapient France ne mentionnaient, comme l'ont relevé les premiers juges, que le nom de cette dernière. Chaque société restait tenue, quelle que soit l'organisation choisie, de veiller au respect des délais de règlement des sommes dues mentionnés au I de l'article L. 441-6. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que des manquements relatifs à une même facture auraient été concurremment imputés par les services de la DIRECCTE à deux ou plusieurs sociétés du groupe Publicis. Dans ces conditions, l'administration a pu, sans méconnaître les dispositions du VII de l'article L. 465-2 du code de commerce ni violer le principe de personnalité des peines, regarder chaque société contrôlée, s'agissant des factures émises par ses fournisseurs, comme l'auteur des manquements aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du même code relatives au respect des délais de paiement convenus. 11. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées du V de l'article L. 465-2 du code de commerce, en vigueur à la date des faits reprochés à la société requérante, que la sanction de publication de l'amende infligée par la DIRECCTE était légalement prévue. Par suite, - alors au surplus que la décision attaquée ne sanctionne que des manquements qui se sont poursuivis au-delà de cette date - si les modalités de cette publication n'ont été précisées par voie réglementaire qu'à compter du 3 octobre 2014, à l'article R. 465-2 du même code, il n'en résulte pas que la mesure litigieuse serait dépourvue de base légale. 12. En troisième lieu, il résulte des termes mêmes du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, précité, appliqué aux factures contrôlées, que le délai de paiement court " à compter de la date d'émission de la facture ", celle-ci correspondant à la date apposée sur la facture en application du 6° du I de l'article 242 nonies A de l'annexe II au code général des impôts, et non à compter de la date de réception de la facture par le débiteur qui en est destinataire. Le 3 du I de l'article 289 de ce code prévoit en outre que " La facture est, en principe, émise dès la réalisation de la livraison ou de la prestation de services " et l'article L. 441-3 du code de commerce dispose que le vendeur est tenu de délivrer la facture dès la réalisation de la vente ou la prestation du service et qu'à défaut, l'acheteur doit la réclamer. La DIRECCTE a donc fait une exacte application des textes en appréciant les retards de paiement à partir de la date d'émission des factures et en n'excluant pas, au titre des manquements retenus, les factures reçues tardivement en raison de l'indication par le fournisseur d'une adresse erronée, que la société Publicis Sapient France n'établit pas avoir réclamées en temps utile. Par ailleurs, la société requérante, à laquelle il appartenait de solliciter ses fournisseurs afin d'obtenir les informations ou validations nécessaires au règlement de ses factures dans le respect des délais de paiement impartis par le code de commerce, ne peut utilement se prévaloir, pour justifier certains retards de paiement, de l'absence d'indication d'un numéro de bon de commande par le créancier, ou de la mention d'un numéro erroné ou non valide, ou encore de mentions incomplètes. La société Publicis Sapient France n'est par suite pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait en partie motivée par des faits inexacts ou procéderait d'une application arbitraire de la loi. 13. En quatrième lieu, la société Publicis Sapient France se prévaut de sa bonne foi, dès lors qu'une part importante des retards de paiement résulte selon elle de causes qui lui sont étrangères, et que l'avantage de trésorerie calculé par la DIRECCTE ne lui a pas profité ; elle fait en outre valoir qu'elle a mis en œuvre, après l'édiction de la sanction litigieuse, des mesures correctives de traitement des factures en vue de faire cesser les manquements. Toutefois, il résulte tout d'abord de ce qui a été dit au point 12 du présent arrêt qu'elle ne peut utilement se prévaloir de la réception tardive de certaines factures ou des erreurs affectant leurs mentions, alors que les dispositions précitées de l'article L. 441-6 du code de commerce ne prévoient aucune exonération du respect des délais de paiement pour de tels motifs. Ensuite, la mise en place de mesures correctives est sans incidence sur le bien-fondé de la sanction, infligée en raison du constat objectif de manquements par les services de la DIRECCTE. Enfin, la circonstance qu'elle n'aurait tiré aucun profit de l'avantage de trésorerie généré par les retards de paiement n'est pas de nature à justifier, au regard des agissements sanctionnés et de l'exigence de répression effective des infractions, une réduction du montant de la sanction. 14. En dernier lieu, la société requérante estime qu'elle doit bénéficier du " droit à l'erreur " institué par les dispositions de de l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration, aux termes desquelles : " Une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne peut faire l'objet, de la part de l'administration, d'une sanction, pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d'une prestation due, si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l'administration dans le délai que celle-ci lui a indiqué. / La sanction peut toutefois être prononcée, sans que la personne en cause ne soit invitée à régulariser sa situation, en cas de mauvaise foi ou de fraude. / Les premier et deuxième alinéas ne sont pas applicables : / 1° Aux sanctions requises pour la mise en œuvre du droit de l'Union européenne ; / 2° Aux sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement ; / 3° Aux sanctions prévues par un contrat ; / 4° Aux sanctions prononcées par les autorités de régulation à l'égard des professionnels soumis à leur contrôle ". Toutefois, la méconnaissance des délais de paiement, prévue par les dispositions précitées de l'article L. 441-6 du code de commerce, n'est pas au nombre des manquements dont la régularisation est envisagée par l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration, ainsi d'ailleurs qu'il résulte de l'exposé des motifs de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance, dont sont issues ces dispositions. Par suite, la société Publicis Sapient France ne peut utilement se prévaloir du " droit à l'erreur " instauré par l'article L. 123-1 du code des relations entre le public et l'administration. 15. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de procéder à la jonction demandée, que la société Publicis Sapient France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2018 par laquelle la DIRECCTE d'Île-de-France lui a infligé une amende administrative de 160 000 euros pour manquement aux dispositions du neuvième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce relatives aux délais de paiement, et a ordonné la publication de cette sanction durant six mois, ainsi que de la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie et des finances a rejeté son recours hiérarchique. Il résulte également de tout ce qui précède que les conclusions de la société requérante tendant à la réduction du montant de la sanction infligée doivent, en l'absence d'erreur matérielle ou de disproportion, être rejetées, de même que ses conclusions à fin d'injonction. Sur les frais liés au litige : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Publicis Sapient France au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société Publicis Sapient France est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Publicis Sapient France et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Pascale Fombeur, présidente de la cour, - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. A...La présidente, P. FOMBEUR Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA04586
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Vu la procédure suivante : Par une ordonnance n° 2101974 du 25 janvier 2022, enregistré le 27 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Nîmes a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête de M. C... B.... Par une requête, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés le 18 juin 2021 au greffe du tribunal administratif de Nîmes et les 28 mars et 27 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 19 mars 2021 rapportant le décret du 28 mai 2017 lui accordant la nationalité française ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code civil ; - le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ; - le code justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, maître des requêtes, - les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public, La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article 27-2 du code civil, dans leur rédaction applicable au présent litige : " Les décrets portant acquisition, naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai de deux ans à compter de leur publication au Journal officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales ; si la décision a été obtenue par mensonge ou fraude, ces décrets peuvent être rapportés dans le délai de deux ans à partir de la découverte de la fraude". 2. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., ressortissant tunisien, a déposé une demande de naturalisation le 4 avril 2016, par laquelle il a indiqué être divorcé et père d'un enfant né en France en 2017. Au vu de ses déclarations, il a été naturalisé par décret du 28 mai 2017, publié au Journal officiel de la République française du 30 mai 2017. Toutefois, par bordereau reçu le 20 mars 2019, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a informé le ministre chargé des naturalisations de ce que M. B... avait épousé à Souassi (Tunisie), le 16 janvier 2016, Mme D... A..., ressortissante tunisienne, et de ce que de leur union étaient issus deux enfants, nés en Tunisie, en 2016 et 2018, résidant habituellement en Tunisie avec leur mère. Par décret du 19 mars 2021, publié au Journal officiel de la République française du 23 mars 2021, le Premier ministre a rapporté le décret du 28 mai 2017 prononçant la naturalisation de M. B... au motif qu'il avait été pris au vu d'informations mensongères délivrées par l'intéressé quant à sa situation familiale. M. B... demande l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret. 3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur a indiqué à M. B... les motifs justifiant le retrait du décret ayant prononcé sa naturalisation par une lettre recommandée présentée à son domicile le 30 septembre 2020 mais qui n'a pas été réclamée par l'intéressé aux services postaux, qui ont retourné le pli au ministre après l'expiration du délai de mise en instance postale. Cette notification doit donc être regardée, faute pour l'intéressé d'avoir pris toutes les dispositions utiles pour retirer le pli qui lui avait été régulièrement adressé, comme étant intervenue à la date de première présentation du pli par les services postaux, soit le 30 septembre 2020. Il convient donc de considérer que les motifs fondant la décision du ministre ont été portés à la connaissance du requérant qui doit, dans le même temps, être regardé comme ayant été mis à même de présenter ses observations en défense. Par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté. 4. En deuxième lieu, l'article 21-16 du code civil dispose que : " Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation ". Il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière durable le centre de ses intérêts. Pour apprécier si cette condition est remplie, l'autorité administrative prend notamment en compte, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la situation personnelle et familiale en France de l'intéressé à la date du décret lui accordant la nationalité française. Par suite, alors même qu'il remplirait les autres conditions requises pour l'obtention de la nationalité française, la circonstance que l'intéressé ait conclu une union religieuse à l'étranger avec une ressortissante tunisienne dont sont issus deux enfants résidant habituellement en Tunisie, avant l'instruction de sa demande de naturalisation, était de nature à modifier l'appréciation qui a été portée par l'autorité administrative sur la fixation du centre de ses intérêts. 5. En troisième lieu, si M. B..., qui s'était engagé à porter à la connaissance des services instruisant sa demande de naturalisation toute modification de sa situation familiale, soutient que son union religieuse avec Mme A... ne pouvait être regardée comme un mariage avant son enregistrement par l'état civil tunisien en 2018, postérieurement à sa naturalisation, la circonstance qu'une union ne pourrait être qualifiée de mariage en vertu de la loi qui lui est applicable n'interdit pas à l'autorité compétente de prendre en compte son existence pour apprécier si la condition de résidence posée par l'article 21-16 du code civil est remplie. 6. L'intéressé, qui maîtrise la langue française, ainsi qu'il ressort du compte- rendu d'entretien d'assimilation du 21 décembre 2016, ne pouvait se méprendre ni sur la teneur des indications devant être portées à la connaissance de l'administration chargée d'instruire sa demande, ni sur la portée de la déclaration sur l'honneur qu'il a signée. Dans ces conditions, M. B... doit être regardé comme ayant volontairement dissimulé sa situation familiale. Par suite, en rapportant sa naturalisation dans le délai de deux ans à compter de la découverte de la fraude, le Premier ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 27-2 du code civil et n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. B.... 7. En quatrième lieu, la définition des conditions d'acquisition et de perte de la nationalité relève de la compétence de chaque État membre de l'Union européenne. Toutefois, dans la mesure où la perte de la nationalité d'un Etat membre a pour conséquence la perte du statut de citoyen de l'Union, la perte de la nationalité d'un Etat membre doit, pour être conforme au droit de l'Union, répondre à des motifs d'intérêt général et être proportionnée à la gravité des faits qui la fondent, au délai écoulé depuis l'acquisition de la nationalité et à la possibilité pour l'intéressé de recouvrer une autre nationalité. L'article 27-2 du code civil permet de rapporter, dans un délai de deux ans à compter de la découverte de la fraude, un décret qui a conféré la nationalité française au motif que l'intéressé a obtenu la nationalité française par mensonge ou fraude. Ces dispositions, qui ne sont pas incompatibles avec les exigences résultant du droit de l'Union, permettaient en l'espèce, eu égard à la date à laquelle il est intervenu et aux motifs qui le fondent, de rapporter légalement le décret accordant à M. B... la nationalité française, dont il n'est ni soutenu, ni a fortiori établi qu'il aurait perdu la nationalité tunisienne. 8. En dernier lieu, un décret qui rapporte un décret ayant conféré la nationalité française est, par lui-même, dépourvu d'effet sur la présence sur le territoire français de celui qu'il vise, comme sur ses liens avec les membres de sa famille, et n'affecte pas, dès lors, le droit au respect de sa vie familiale. En revanche, un tel décret affecte un élément constitutif de l'identité de la personne concernée et est ainsi susceptible de porter atteinte au droit au respect de sa vie privée. En l'espèce, toutefois, eu égard à la date à laquelle il est intervenu et aux motifs qui le fondent, le décret attaqué ne peut être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de M. B... garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 19 mars 2021 par lequel le Premier ministre a rapporté le décret du 28 mai 2017. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
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Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 31 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande en date du 2 juillet 2020 tendant à l'abrogation du décret n° 2015-557 du 20 mai 2015 relatif à la redevance de stationnement et, d'autre part, d'annuler ce même décret. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, et notamment son Préambule ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ; - la décision n° 443526 du 1er décembre 2020 par laquelle Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B... ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Hortense Naudascher, auditrice. - les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B... demande l'annulation du décret du 20 mai 2015 relatif à la redevance de stationnement ainsi que de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande en date du 2 juillet 2020 tendant à l'abrogation de ce décret. Sur les conclusions tendant à l'annulation du décret : 2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " 3. Le décret du 20 mai 2015 ayant été publié au Journal officiel de la République française le 22 mai 2015, M. B... n'est pas recevable, par sa requête enregistrée le 31 août 2020, soit après l'expiration du délai de recours contentieux de deux mois prévu par les dispositions citées ci-dessus, à en demander l'annulation. Sur les conclusions tendant à l'annulation du refus d'abrogation du décret : 4. Le décret du 20 mai 2015 a été pris pour l'application de l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales, créé par l'article 63 de la loi du 27 janvier 2014 et ensuite modifié par l'ordonnance du 9 avril 2015 sur la gestion, le recouvrement et la contestation du forfait de post-stationnement, puis par la loi du 7 août 2015 sur la nouvelle organisation territoriale de la République. Dans sa rédaction en vigueur à la date de la présente décision, cet article dispose que : " IV.- Le forfait de post-stationnement doit être réglé en totalité dans les trois mois suivant la notification de l'avis de paiement prévu au II du présent article. / A défaut, le forfait de post-stationnement est considéré impayé et fait l'objet d'une majoration dont le produit est affecté à l'Etat. (...)/ VI.- (...) Les recours contentieux visant à contester l'avis de paiement du montant du forfait de post-stationnement dû font l'objet d'un recours administratif préalable obligatoire auprès de la commune, de l'établissement public de coopération intercommunale, du syndicat mixte ou du tiers contractant dont relève l'agent assermenté ayant établi ledit avis.(...)/ La décision rendue à l'issue du recours administratif préalable contre l'avis de paiement du forfait de post-stationnement peut faire l'objet d'un recours devant la commission du contentieux du stationnement payant. Le titre exécutoire émis en cas d'impayé peut également faire l'objet d'un recours devant cette commission. Il se substitue alors à l'avis de paiement du forfait de post-stationnement impayé. " 5. En premier lieu, si, dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision refusant d'abroger un acte réglementaire, la légalité des règles fixées par celui-ci, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées, il n'en va pas de même des conditions d'édiction de cet acte, les vices de forme et de procédure dont il serait entaché ne pouvant être utilement invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux. Il s'ensuit que M. B... ne peut utilement invoquer, à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation du refus d'abroger le décret du 20 mai 2015, un moyen pris de l'absence de consultation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés en méconnaissance du a) du 4° de l'article 11 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. 6. En deuxième lieu, M. B..., dont la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales n'a pas été renvoyée au Conseil constitutionnel, ne peut utilement soutenir que le décret du 20 mai 2015 ne serait pas conforme à la Constitution. 7. En troisième lieu, d'une part, le forfait de post-stationnement, qui ne vise pas à réprimer un manquement du titulaire du certificat d'immatriculation à une obligation légale ou contractuelle, ne revêt pas le caractère d'une sanction. M. B... ne peut donc utilement soutenir que les dispositions de l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales méconnaissent les stipulations du paragraphe 3 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui ne sont applicables qu'aux accusations en matière pénale au sens du paragraphe 1 du même article. 8. D'autre part, l'avis de paiement du forfait de post-stationnement étant susceptible de faire l'objet, de la part de son destinataire, d'un recours administratif préalable sur lequel l'autorité administrative doit statuer dans un délai d'un mois, M. B... n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que les conditions dans lesquelles un forfait de post-stationnement majoré peut, trois mois après la notification de l'avis de paiement, être mis à la charge de cette même personne méconnaissent, faute d'une procédure contradictoire, ces mêmes stipulations du paragraphe 3 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 9. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le garde des Sceaux, ministre de la justice, M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation du décret et de la décision qu'il attaque. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., au Premier ministre et au garde des Sceaux, ministre de la justice. Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré à l'issue de la séance du 22 septembre 2022 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et Mme Hortense Naudascher, auditrice-rapporteure. Rendu le 10 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jean-Philippe Mochon La rapporteure : Signé : Mme Hortense Naudascher Le secrétaire : Signé : M. Bernard Longieras
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013. Par un jugement n° 1708297 du 26 novembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 janvier 2021 et le 23 février 2022, M. et Mme C..., représentés E..., demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - l'administration n'a pas apporté la preuve du désinvestissement ni de l'appréhension des revenus distribués ; - si les commissions sont non déductibles faute de déclaration, elles ne constituent cependant pas des revenus distribués ; - les charges fictives de location de matériel correspondent à des rémunérations versées en espèces aux salariés en paiement d'heures supplémentaires qui ne constituent pas des revenus distribués ; - l'application aux droits en litige des pénalités pour manquement délibéré ou pour manœuvres frauduleuses n'est pas justifiée. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mars 2021, et un mémoire, enregistré le 4 mars 2022, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme C... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 3 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Roumazeille, représentant M. et Mme C.... Une note en délibéré, présentée pour M. et Mme C..., E..., a été enregistrée le 15 septembre 2022. Considérant ce qui suit : 1. La société F..., dont M. C... était le gérant et l'actionnaire principal, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service a réintégré à ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés diverses charges considérées comme non déductibles. A la suite d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, l'administration a regardé ces suppléments de bénéfices comme des revenus distribués imposables entre les mains de M. C... sur le fondement des dispositions du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. En conséquence, l'administration a assujetti M. et Mme C..., en suivant la proposition de rectification contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties des majorations de 40 % et de 80 % sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 26 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions. Sur les impositions en litige : 2. Aux termes du 1. de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. / (...) " Aux termes de l'article 47 de l'annexe II au même code : " Toute rectification du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre d'une période sera prise en compte au titre de la même période pour le calcul des sommes distribuées ". 3. La procédure suivie à l'égard des contribuables étant la procédure de rectification contradictoire et ceux-ci ayant refusé les rectifications proposées par l'administration, celle-ci supporte la charge de la preuve de l'existence et de l'appréhension des revenus distribués par la société F.... En ce qui concerne les commissions : 4. Il résulte des mentions de la proposition de rectification adressée à M. et Mme C... que le compte 622 " intermédiaires et honoraires " dans la comptabilité de la société F... a enregistré des commissions pendant l'exercice clos en 2011 d'un montant de 18 200 euros sans justification et sans indentification des bénéficiaires de ces commissions. De surcroit, la contrepartie comptable était directement une écriture de crédit de compte banque, corroborée par l'examen des relevés de comptes bancaires de la société qui portaient la trace de retraits en espèces aux mêmes dates. La déclaration des données sociales (DADS 2) présentée par la société en cours de contrôle, n'ayant pas été déposée en réalité auprès des organismes sociaux, l'administration a réintégré ces commissions, d'un montant de 18 200 euros, dans la base imposable de la société F... à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011 et a regardé cette somme de 18 200 euros comme un revenu distribué imposable entre les mains de M. et Mme C.... 5. D'une part, si M. et Mme C... soutiennent qu'une déclaration DADS 2 a été envoyée en son temps au service des impôts, l'administration fait valoir que seule une copie de cette déclaration a été remise au vérificateur en cours de contrôle et que la société F... avait également admis que la déclaration n'avait pas été déposée en temps utile au cours de l'année 2011. Les requérants, à qui incombe la charge de la preuve sur ce point, n'apportent pas d'élément contraire. Ils n'apportent pas davantage la preuve que le versement de ces commissions était nécessaire pour obtenir des marchés en Belgique. Il n'est pas non plus établi par eux que l'augmentation du chiffre d'affaires réalisé avec certains clients belges serait due au versement de ces commissions. De surcroit, il est constant que la contrepartie comptable de l'enregistrement de ces commissions était directement une écriture de crédit de compte banque, corroborée par l'examen des relevés de comptes bancaires de la société qui portaient la trace de retraits en espèces aux mêmes dates. Dès lors, le moyen doit être écarté et l'administration doit être regardée comme apportant la preuve tant de l'existence du supplément de chiffre d'affaires en conséquence de la réintégration de la somme de 18 200 euros dans la base imposable de la société F... à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011, que du désinvestissement de cette somme. 6. D'autre part, s'agissant de la preuve de l'appréhension, l'administration fait valoir, sans être contredite par les requérants, que le vérificateur a pu établir que M. C... était la seule personne à avoir effectué des retraits en espèces sur le compte bancaire de la société F... après de la Banque populaire du Nord et qu'il était le seul maître de l'affaire, en sa qualité d'associé majoritaire à 70 % en 2011, de gérant de droit et ayant seul accès aux comptes bancaires de la société, et qu'il détenait la carte bancaire au nom de la société pour effectuer les retraits en espèces aux distributeurs automatiques de billets. La circonstance que l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et Mme C... n'a démontré aucun enrichissement reste sans incidence sur la preuve de l'appréhension. Dès lors, l'administration doit également être regardée comme apportant la preuve de l'appréhension de cette somme par M. C... en sa qualité de seul maître de l'affaire. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a imposé la somme de 18 200 euros entre les mains de M. et Mme C... sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. En ce qui concerne les charges fictives comptabilisées par la société : 7. Il résulte des mentions de la proposition de rectification que le compte 613511 " location matériel en Belgique " dans la comptabilité de la société F... présentait un solde débiteur de 83 300 euros en 2011, de 44 850 euros en 2012 et de 120 320 euros en 2013, ce solde débiteur correspondant à des factures de la société belge ADF TIB d'un montant supérieur à 1 000 euros qui étaient systématiquement payées en espèces en fin d'année. Ces factures n'étaient accompagnées d'aucun bon de commande ni d'indication précise sur le matériel loué. M. C... a admis, au cours de la vérification de comptabilité, que ces factures de plus de 1 000 euros étaient des factures fictives établies en fin d'année pour justifier des sorties d'espèces des comptes bancaires de la société. En conséquence, l'administration a réintégré ces dépenses dans la base imposable de la société F... à l'impôt sur les sociétés pour les exercices 2011 à 2013 et les a regardées comme un revenu distribué imposable entre les mains de M. et Mme C... sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. 8. S'agissant de la preuve de l'existence des revenus distribués, M. et Mme C... ne contestent pas le caractère fictif des factures de la société belge ADF TIB qui donnaient lieu à des retraits en espèce des comptes bancaires de la société mais ils soutiennent à présent que ces sommes, soustraites des caisses sociales par le biais de factures fictives, permettaient de rémunérer en espèces des salariés de la société F.... Toutefois, il est constant que les sommes prétendument versées à certains salariés de la société ne figuraient pas sur les bulletins de paye et n'ont été ni déclarées ni comptabilisées en tant que rémunération d'un contrat de travail. Dès lors, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve tant de l'existence du supplément de chiffre d'affaires en conséquence de la réintégration des sommes de 83 300 euros en 2011, 44 850 euros en 2012 et 120 320 euros en 2013 dans la base imposable de la société F... à l'impôt sur les sociétés, que du désinvestissement de ces sommes. Ainsi qu'il a été déjà dit au point 6, l'administration doit également être regardée comme apportant la preuve de l'appréhension de ces sommes par M. C... en sa qualité de seul maître de l'affaire. Par suite, le moyen doit être écarté et c'est à bon droit que l'administration a imposé les sommes de 83 300 euros en 2011, 44 850 euros en 2012 et 120 320 euros en 2013 entre les mains de M. et Mme C... sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. Sur les pénalités : 9. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) / c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses (...) ". L'administration a appliqué la majoration de 40 % aux rehaussements afférents aux revenus distribués en conséquence de la rectification relative aux commissions comptabilisées et la majoration de 80 % aux rehaussements afférents aux revenus distribués en conséquence de la rectification relative aux factures fictives. 10. Pour justifier l'application de la majoration de 40 % procédant des distributions au titre des commissions non justifiées, l'administration fait valoir que M. C... a appréhendé une somme de 18 200 euros par des retraits en espèces sous couvert de commissions comptabilisées, sans aucune pièce justificative, par la société dont il était le gérant. Dès lors, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée, qui a été celle de M. C..., d'éluder le paiement de l'impôt dû, justifiant l'application de cette majoration. 11. Pour justifier l'application de la majoration de 80 % procédant des distributions au titre des factures fictives, l'administration fait valoir que M. C... a appréhendé les sommes de 83 300 euros en 2011, 44 850 euros en 2012 et 120 320 euros en 2013 par des retraits en espèces sous couvert de factures fictives de location d'une société qui était un fournisseur régulier de la société F... et facturait régulièrement, par ailleurs, certaines prestations de manière à donner une vraisemblance aux factures fictives. Dès lors, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'existence d'agissements délibérés, commis par M. C... en vue d'égarer le pouvoir de contrôle de l'administration, justifiant l'application de cette majoration. 12. Il résulte de toute de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 13. L'Etat n'étant pas partie perdante, les conclusions de M. et Mme C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 15 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, - M. D... A..., premier-conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 septembre 2022. Le président, rapporteur, M. SauveplaneLe président de chambre, C. Heu La greffière, N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Nathalie Roméro N°21DA00151 2
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 janvier et 3 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 9 novembre 2021 par laquelle le Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte, l'a suspendu du droit d'exercer la médecine pour une durée de deux ans et a subordonné la reprise de son activité à la justification du respect d'obligations de formation ; 2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de procédure pénale ; - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Pierre Vaiss, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du Conseil national de l'ordre des médecins ; Vu la note en délibéré, présentée par M. B..., enregistrée le 13 juillet 2022 ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique : " I. - En cas d'insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession, la suspension temporaire, totale ou partielle, du droit d'exercer est prononcée par le conseil régional ou interrégional pour une période déterminée qui peut, s'il y a lieu, être renouvelée. / Le conseil régional ou interrégional est saisi à cet effet soit par le directeur général de l'agence régionale de santé, soit par une délibération du conseil départemental ou du conseil national. Ces saisines ne sont pas susceptibles de recours. / II. - La suspension ne peut être ordonnée que sur un rapport motivé établi à la demande du conseil régional ou interrégional dans les conditions suivantes : / 1° Pour les médecins, le rapport est établi par trois médecins qualifiés dans la même spécialité que celle du praticien concerné désignés comme experts, le premier par l'intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. Ce dernier est choisi parmi les personnels enseignants et hospitaliers titulaires de la spécialité. Pour la médecine générale, le troisième expert est choisi parmi les personnels enseignants titulaires ou les professeurs associés ou maîtres de conférences associés des universités (...) / III. En cas de carence de l'intéressé lors de la désignation du premier expert ou de désaccord des deux experts lors de la désignation du troisième, la désignation est faite à la demande du conseil par ordonnance du président du tribunal judiciaire dans le ressort duquel se trouve la résidence professionnelle de l'intéressé. Cette demande est dispensée de ministère d'avocat. / IV. - Les experts procèdent ensemble, sauf impossibilité manifeste, à l'examen des connaissances théoriques et pratiques du praticien. Le rapport d'expertise est déposé au plus tard dans le délai de six semaines à compter de la saisine du conseil. Il indique les insuffisances relevées au cours de l'expertise, leur dangerosité et préconise les moyens de les pallier par une formation théorique et, si nécessaire, pratique (...) / Si l'intéressé ne se présente pas à la convocation fixée par les experts, une seconde convocation lui est adressée. En cas d'absence de l'intéressé aux deux convocations, les experts établissent un rapport de carence à l'intention du conseil régional ou interrégional, qui peut alors suspendre le praticien pour présomption d'insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession (...) / VI. - Si le conseil régional ou interrégional n'a pas statué dans le délai de deux mois à compter de la réception de la demande dont il est saisi, l'affaire est portée devant le Conseil national de l'ordre. / VII. - La décision de suspension temporaire du droit d'exercer pour insuffisance professionnelle définit les obligations de formation du praticien (...) ". 2. Il ressort des pièces du dossier que le conseil régional des Pays de la Loire de l'ordre des médecins a été saisi par le conseil départemental de la Sarthe de l'ordre des médecins, sur le fondement des dispositions de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique citées ci-dessus, de la situation de M. A... B..., médecin spécialiste, qualifié en pédiatrie. Par une décision prise en application du VI du même article, sur renvoi du conseil régional des Pays de la Loire de l'ordre des médecins, le Conseil national de l'ordre des médecins a, par la décision attaquée du 9 novembre 2021, suspendu pour insuffisance professionnelle M. B... du droit d'exercer la médecine pendant une durée de deux ans et subordonné la reprise de son activité au suivi d'une formation de remise à niveau dans le cadre de deux stages de six mois chacun, au sein d'un ou de deux centres hospitaliers universitaires, dans des services qualifiants en pédiatrie et à l'obtention de deux diplômes universitaires de pédiatrie, l'un avec une orientation en pédopsychiatrie et l'autre avec une orientation médico-sociale. Sur la légalité externe : 3. En premier lieu, si l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique cité au point 1 prévoit que le rapport des experts doit être déposé dans le délai de six semaines à compter de la saisine de l'instance ordinale compétente, ce délai n'est pas prescrit à peine de nullité. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la procédure a été entachée d'irrégularité au motif que le rapport des experts a, en l'espèce, été remis au-delà du délai prévu par ce texte. 4. En deuxième lieu, il résulte des dispositions du IV de l'article R. 4124-3 du code de la santé publique cité au point 1 que, pour établir leur rapport, les experts doivent, sauf impossibilité manifeste, procéder ensemble et simultanément à l'examen du praticien concerné. Dès lors que tel est le cas, aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obstacle à ce que l'un ou plusieurs des experts mentionnés à l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique cité au point 1 ait recours à la visio-conférence pour participer à l'expertise en cause. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la seule circonstance que l'un des trois experts devant lesquels M. B... s'est présenté ait procédé à l'expertise par voie de visio-conférence, alors qu'il est constant que les trois experts ont procédé ensemble et simultanément à l'expertise en cause, a entaché la procédure d'irrégularité. 5. En troisième lieu, il résulte des termes mêmes de l'expertise que les experts ont procédé à l'examen des connaissances théoriques et pratiques du praticien des compétences professionnelles de M. B... de sorte que le moyen tiré de ce que ce n'aurait pas été le cas, en méconnaissance des dispositions citées au point 1, manque en fait. 6. En quatrième lieu, la décision attaquée, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée. 7. En cinquième lieu, les conditions de notification d'une décision administrative sont sans incidence sur sa légalité. Par suite, M. B... ne saurait utilement soutenir la décision qu'il attaque est irrégulière pour des motifs tenant aux termes du courrier procédant à sa notification. Sur la légalité interne : 8. En premier lieu, la décision attaquée ne mentionnant pas l'absence de lien du requérant avec des réseaux de pédiatres, il ne peut utilement soutenir qu'elle est entachée sur ce point d'inexactitude matérielle. 9. En deuxième lieu, M. B... n'est, en tout état de cause, pas fondé à se prévaloir, pour soutenir que la décision attaquée est entachée d'illégalité, qu'il ne pourra pas réaliser certaines des formations que lui impose la décision attaquée, en raison du contrôle judiciaire prononcé à son encontre par ordonnance du 21 janvier 2021 du vice-président chargé de l'instruction du tribunal judiciaire du Mans qui lui interdit, notamment, de se trouver en présence d'enfants, dès lors qu'une telle ordonnance, à caractère provisoire, est susceptible d'être modifiée à tout moment. 10. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport d'expertise qui a relevé, d'une part, l'existence de carences sur les connaissances minimales requises en termes de développement de l'enfant ayant pour conséquence une pratique inadaptée des soins ou des actes de prévention à destination des enfants, faute notamment de prendre en compte le ressenti des enfants, d'autre part, des lacunes sur le plan des connaissances scientifiques dans plusieurs disciplines de la pédiatrie et sur la protection de l'enfance, qu'en estimant que ces éléments étaient constitutifs d'une insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de sa profession par M. B..., et en prononçant à son encontre, par la décision attaquée, une mesure de suspension du droit de l'exercer pour une durée de deux ans et en subordonnant la reprise de son activité à la justification du respect d'obligations de formation, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins a fait une exacte application des dispositions de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique citées au point 1. 11. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. B... ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros à verser au même titre au Conseil national de l'ordre des médecins. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : M. B... versera une somme de 3 000 euros au Conseil national de l'ordre des médecins au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au Conseil national de l'ordre des médecins.
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Vu la procédure suivante : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 3 mai 2017 par laquelle le directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) l'a placée en congé de longue maladie du 22 octobre 2016 au 21 juillet 2017 ainsi que la décision du 11 janvier 2018 par laquelle la même autorité a rejeté son recours gracieux à l'encontre de la décision estimant que son état de santé n'était pas, à compter du 21 octobre 2016, en relation directe et certaine avec l'accident de trajet dont elle a été victime le 18 février 2016 et d'enjoindre au directeur général de l'AP-HP, d'une part, de réexaminer sa situation et de lui accorder un congé pour accident de service à compter du 22 octobre 2016 jusqu'au 21 juillet 2017 et d'autre part, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, de reconnaître que son état de santé actuel est en relation directe et certaine avec l'accident de trajet du 18 février 2016. Par un jugement n° 1711034, 1803722 du 24 septembre 2018, le tribunal administratif a annulé la décision du directeur général de l'AP-HP du 11 janvier 2018, enjoint au directeur général de l'AP-HP de procéder au réexamen de la situation de Mme B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et rejeté le surplus des conclusions de Mme B.... Par un arrêt n° 18PA03639 du 23 juin 2020, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par Mme B... contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juillet et 29 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de l'AP-HP la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ; - le code de justice administrative. Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. François Charmont, maître des requêtes, - les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public. La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Rousseau, Tapie, avocat de Mme B... et à la SARL Didier-Pinet, avocat de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris. Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B..., aide-soignante à l'hôpital Bichat-Claude Bernard de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), a été placée en arrêt de travail après avoir été victime d'un accident de trajet le 18 février 2016 entre son lieu de travail et son domicile. A l'issue d'une expertise réalisée le 24 avril 2017, le médecin du service de médecine statutaire de l'AP-HP a considéré que les symptômes dont elle souffrait n'avaient, à compter du 22 octobre 2016, plus de lien direct et certain avec l'accident de trajet dont elle avait été victime. Par un arrêté du 3 mai 2017, le directeur général de l'AP-HP a placé l'intéressée en congé de longue maladie à compter du 22 octobre 2016. Par une décision du 11 janvier 2018, il a rejeté le recours gracieux de l'intéressée. Par un jugement du 24 septembre 2018, le tribunal administratif de Paris a annulé cette décision, enjoint au directeur général de l'AP-HP de procéder au réexamen de la situation de Mme B... et rejeté le surplus des conclusions dont il était saisi. Mme B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 23 juin 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel formé contre ce jugement. 2. En vertu de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et à la sécurité au travail dans la fonction publique, le fonctionnaire en activité dont la maladie provient d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, y compris un accident de trajet, a droit à un congé de maladie et conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a également droit au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. 3. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et à la sécurité au travail dans la fonction publique a modifié ces dispositions pour prévoir que le fonctionnaire en activité victime d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions a droit, au lieu du congé de maladie, à un congé pour invalidité temporaire imputable au service, prévu par l'article 21 bis inséré dans la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Ce congé lui ouvre droit au maintien de l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite ainsi qu'au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. Aux termes du VI de cet article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 : " Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités du congé pour invalidité temporaire imputable au service mentionné au premier alinéa et détermine ses effets sur la situation administrative des fonctionnaires. Il fixe également les obligations auxquelles les fonctionnaires demandant le bénéfice de ce congé sont tenus de se soumettre en vue, d'une part, de l'octroi ou du maintien du congé et, d'autre part, du rétablissement de leur santé, sous peine de voir réduire ou supprimer le traitement qui leur avait été conservé. " 5. En premier lieu, en faisant application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 issues de l'ordonnance du 19 janvier 2017, alors que ces dispositions ne sont entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique hospitalière, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 16 mai 2020, du décret du 13 mai 2020 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique hospitalière, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique, la cour a commis une erreur de droit. 6. En second lieu, en jugeant que le moyen tiré par Mme B... de l'imputabilité de l'affection dont elle souffrait à l'accident de service qu'elle avait subi était inopérant contre les décisions attaquées la plaçant en congé de longue maladie, alors que ces décisions avait eu pour effet non seulement de placer la requérante en congé maladie mais aussi de rejeter sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de l'affection dont elle souffrait, la cour administrative d'appel a commis une seconde erreur de droit. 7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, Mme B... est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris la somme de 3 000 euros à verser à Mme B..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge Mme B... qui n'est pas, dans la présence instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 23 juin 2020 est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris. Article 3 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris versera à Mme B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Les conclusions présentées par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Délibéré à l'issue de la séance du 22 septembre 2022 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et M. François Charmont, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 10 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jean-Philippe Mochon Le rapporteur : Signé : M. François Charmont Le secrétaire : Signé : M. Bernard Longieras
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Vu la procédure suivante : Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler le titre de pension du 18 juin 2018 lui concédant une pension civile de retraite en tant qu'il ne prend pas en compte la majoration pour enfants prévue par l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite ainsi que la décision du 27 juillet 2018 par laquelle le directeur du service des retraites de l'Etat a rejeté son recours gracieux contre cette décision, d'autre part, d'ordonner qu'il soit enjoint au service des retraites de l'Etat de modifier les bases de liquidation de sa pension de retraite. Par un jugement n° 1817130/5-3 du 3 juin 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 juillet et 9 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme D... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de la sécurité sociale ; - le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de Mme D... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme C... D..., titulaire d'une pension civile de retraite concédée par un arrêté du 18 juin 2018, a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, l'annulation de ce titre de pension en tant qu'il ne prend pas en compte la majoration pour enfants prévue par l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite, qu'elle sollicitait en soutenant qu'elle avait également élevé pendant plus de neuf ans, conjointement avec son époux, les deux enfants issus du premier mariage de ce dernier, et d'autre part, celle de la décision du 27 juillet 2018 par laquelle le directeur du service des retraites de l'Etat a rejeté son recours gracieux contre cet acte. Elle se pourvoit en cassation contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 3 juin 2020 qui a rejeté sa demande. 2. Aux termes de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " I. Une majoration de pension est accordée aux titulaires ayant élevé au moins trois enfants. / II. Ouvrent droit à cette majoration : / Les enfants légitimes, les enfants naturels dont la filiation est établie et les enfants adoptifs du titulaire de la pension ; / Les enfants du conjoint issus d'un mariage précédent (...) / Les enfants recueillis à son foyer par le titulaire de la pension ou son conjoint, qui justifie, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, en avoir assumé la charge effective et permanente. / III. A l'exception des enfants décédés par faits de guerre, les enfants devront avoir été élevés pendant au moins neuf ans, soit avant leur seizième anniversaire soit avant l'âge où ils ont cessé d'être à charge au sens des articles L. 512-3 et R. 512-2 et R. 512-3 du code de la sécurité sociale (...) ". Aux termes de l'article R. 32 bis du même code, pris pour l'application du dernier alinéa du II de l'article L. 18 : " En vue d'obtenir au titre des enfants recueillis l'attribution de la majoration de pension prévue à l'article L. 18, le titulaire de la pension ou son conjoint doit justifier avoir assumé la charge effective et permanente de ces enfants par la production de tout document administratif établissant qu'ils ont été retenus pour l'octroi des prestations familiales ou du supplément familial de traitement ou pour le calcul de l'impôt sur le revenu ". 3. Il résulte des dispositions du deuxième alinéa du II de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite citées au point 2 que, pour bénéficier de la majoration que cet article prévoit, le pensionné doit justifier d'un période d'au moins neuf ans pendant laquelle il a effectivement élevé les enfants de son conjoint issus d'un mariage précédent, quelle que soit la date à laquelle le pensionné a épousé ce conjoint. En revanche, les dispositions du dernier alinéa du II de cet article L. 18 relatives aux enfants recueillis à son foyer par le titulaire de la pension et, par suite, celles de l'article R. 32 bis du même code prises pour son application, ne sont pas applicables aux enfants du conjoint du pensionné, y compris pour la période qui précède le mariage. Il suit de là que le tribunal administratif de Paris, en jugeant qu'il incombait à Mme D... de justifier d'avoir assumé la charge effective et permanente des enfants issus du précédent mariage de son conjoint en produisant les justificatifs exigés par l'article R. 32 bis du même code, alors que les dispositions de cet article ne sont pas applicables aux enfants du conjoint du pensionné, a commis une erreur de droit. 4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, que Mme D... est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 6. En premier lieu, le titre de pension en date du 18 juin 2018 et la décision du 27 juillet 2018 sont signés par M. B... A..., ingénieur général des mines, directeur du service des retraites de l'Etat, nommé par arrêté du 28 juillet 2016, publié au Journal officiel de la République française du 30 juillet suivant. En outre, M. A... était habilité à signer au nom du ministre et, par délégation, les actes relatifs aux affaires du service placé sous son autorité, en application du 2° de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions attaquées manque en fait. 7. En second lieu, il résulte des dispositions du troisième alinéa du II de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite citées au point 2 qu'il appartient au titulaire de la pension civile de retraite qui soutient avoir élevé les enfants de son conjoint issus d'un mariage précédent d'établir qu'il a eu la charge effective et permanente de ceux-ci pendant la durée prévue au premier alinéa du III de ce même article. La circonstance qu'il a contribué au paiement de la pension alimentaire au parent ayant la garde de l'enfant ne suffit pas à établir une telle prise en charge. 8. D'une part, il résulte de l'instruction que les enfants de son conjoint issus d'un précédent mariage avaient pour résidence principale le domicile de leur mère. D'autre part, si la requérante produit des bulletins de paye de son mari attestant du versement à ce dernier du supplément familial de traitement pour quatre enfants entre février 1994 et mars 2002 et un décompte de rappel de juin 1999, il n'en résulte pas qu'elle a eu la charge effective et permanente de ces deux enfants pendant au moins neuf ans, soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l'âge où ils ont cessé d'être à charge au sens des articles L. 512-3 et R. 512-2 et R. 512-3 du code de la sécurité sociale. Par suite, le service des retraites de l'Etat a pu légalement, au regard des dispositions de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite citées au point 2, rejeter la demande formée par Mme D... tendant à la majoration de sa pension. 9. Il résulte de ce qui précède que la demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Paris doit être rejetée, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative devant le tribunal administratif de Paris et devant le Conseil d'Etat. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 3 juin 2020 est annulé. Article 2 : La demande de Mme D... présentée devant le tribunal administratif de Paris est rejetée. Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de Mme D... est rejeté. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme C... D... et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Délibéré à l'issue de la séance du 12 juillet 2022 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; Mme Carine Soulay, conseillère d'Etat et Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat-rapporteure. Rendu le 10 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Maud Vialettes La rapporteure : Signé : Mme Françoise Tomé La secrétaire : Signé : Mme Romy Raquil
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Vu la procédure suivante : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Versailles a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit rémunéré sur la base de l'indice brut 500 dès son recrutement à compter du 26 septembre 2012, d'enjoindre au recteur de l'académie de Versailles de fixer sa rémunération à cet indice à compter du 26 septembre 2012 ou, à titre subsidiaire, de réexaminer son dossier, sous astreinte de 200 euros par jour de retard. Par un jugement n° 1604409 du 2 juillet 2018, le tribunal administratif a fait droit à cette demande. Par un arrêt n° 18VE03062 du 31 août 2020, la cour administrative d'appel de Versailles, sur appel du ministre de l'éducation nationale, a annulé ce jugement et rejeté la demande de M. B.... Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés le 2 novembre 2020, le 2 février 2021 et le 31 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'éducation ; - le décret n° 81-535 du 12 mai 1981 ; - l'arrêté du 29 août 1989 fixant la rémunération des professeurs contractuels ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la rémunération de M. B..., professeur contractuel de technologie affecté au sein de l'académie de Versailles à compter du 26 septembre 2012, a été fixée lors de son recrutement par référence à l'indice nouveau majoré 410, correspondant à un indice brut 469. M. B... ayant sollicité l'augmentation de cette rémunération en faisant valoir qu'il disposait du diplôme de master " technologie et santé ", sa rémunération a été portée, à compter du 1er janvier 2016, à un montant correspondant à l'indice net majoré 431, soit à l'indice brut 500. Par un jugement du 2 juillet 2018, le tribunal administratif de Versailles a, sur la demande de M. B..., annulé la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Versailles avait rejeté sa demande tendant à bénéficier rétroactivement à compter de son recrutement d'une rémunération correspondant à l'indice brut 500. L'intéressé se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 31 août 2020 qui, sur appel du ministre chargé de l'éducation nationale, a annulé ce jugement et rejeté sa demande. 2. Aux termes de l'article 1er du décret du 12 mai 1981 relatif au recrutement de professeurs contractuels : " Lorsque dans les établissements publics locaux d'enseignement et les établissements de formation relevant du ministre chargé de l'éducation nationale des emplois de professeur n'ont pu être pourvus par des maîtres titulaires de l'enseignement du second degré, les recteurs d'académie peuvent recruter des professeurs contractuels ". Aux termes de l'article 4 de ce même décret du 12 mai 1981 : " Pour l'établissement des contrats, les candidats sont classés, par l'autorité qui procède à leur engagement en fonction des titres universitaires qu'ils détiennent ou de leur qualification professionnelle antérieure, dans l'une des quatre catégories suivantes ; hors catégorie, première catégorie, deuxième catégorie, troisième catégorie (...) ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " Il est créé quatre catégories de rémunération de professeurs contractuels dotés chacune d'un indice minimum, moyen et maximum. Les indices bruts servant à la détermination de la rémunération selon les catégories sont fixés par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'éducation nationale, du budget et de la fonction publique. / L'indice attribué à chaque agent est déterminé par l'autorité qui le recrute ". En application de cette disposition, un arrêté du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, du ministre de la fonction publique et des réformes administratives et du ministre délégué chargé du budget du 29 août 1989 a fixé les indices servant à la détermination de la rémunération des professeurs contractuels, sur la base des quatre catégories mentionnées à l'article 4 du décret. 3. Il résulte de ces dispositions que le classement d'un professeur contractuel dans l'une des quatre catégories mentionnées au point précédent est opéré par l'autorité administrative sur la base exclusive des titres universitaires détenus et de la qualification professionnelle antérieure. Il appartient ensuite à l'autorité administrative de déterminer la rémunération de l'agent en tenant compte, au sein de la catégorie retenue, des indices minimum, moyen et maximum prévus par l'arrêté du 29 août 1989, en fonction notamment de l'expérience de cet agent dans l'enseignement et des caractéristiques particulières du poste pour lequel il est recruté. Il incombe au juge, saisi d'une contestation en ce sens, de vérifier qu'en déterminant, d'une part, la classe de rattachement de l'agent et, d'autre part, sa rémunération, l'administration n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation. 4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour a relevé que les lauréats du concours de professeur certifié sont classés lors de leur nomination à l'indice brut 379 et que les lauréats du concours de professeur de lycée professionnel sont pour leur part classés, lors de leur nomination, à l'indice brut 340, et que M. B... avait été rémunéré depuis le 26 septembre 2012, date de son recrutement initial comme professeur contractuel, à l'indice brut 469, lequel se situe dans la fourchette indiciaire de la deuxième catégorie mentionnée à l'article premier de l'arrêté du 29 août 1989. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en en déduisant que le recteur de l'académie de Versailles avait pu, sans méconnaître les dispositions précitées du décret du 12 mai 1981 et de l'arrêté du 29 août 1989, rejeter la demande de M. B... tendant à ce qu'il soit rémunéré à un indice net majoré 431, correspondant à un indice brut 500, dès le 26 septembre 2012, au seul motif du classement indiciaire des lauréats du concours de professeur certifié et des lauréats du concours de professeur de lycée professionnel lors de leur nomination, sans rechercher si ce classement indiciaire dans la fourchette des indices minimum, moyen et maximum prévus à l'intérieur de cette deuxième catégorie n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard notamment de son expérience professionnelle antérieure, la cour a commis une erreur de droit. 5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, que M. B... est fondé à demander, pour ce motif, l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles qu'il attaque. 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 31 août 2020 est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles. Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente décision sera notifiée M. A... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
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Vu les procédures suivantes : Le ministre des solidarités et de la santé et la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation ont porté plainte contre M. C... B... devant la juridiction disciplinaire compétente à l'égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires et des personnels enseignants de médecine générale. Par une décision du 7 septembre 2020, cette juridiction a infligé à M. B... la sanction du blâme. 1° Sous le numéro 447976, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 18 décembre 2020 et le 17 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des solidarités et de la santé demande au Conseil d'Etat d'annuler cette décision. 2° Sous le numéro 448016, par un pourvoi enregistré le 21 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation demande au Conseil d'Etat d'annuler la même décision. .................................................................................... 3° Sous le numéro 449042, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 25 janvier et 19 avril 2021 et les 30 juin et 4 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler la même décision ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. .................................................................................... Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - le code de l'éducation ; - le code de la santé publique ; - le code de la recherche ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - le décret n° 84-135 du 24 février 1984 ; - le décret n° 86-1043 du 18 septembre 1986 ; - le décret n° 2007-658 du 2 mai 2007 ; - le décret n° 2017-105 du 27 janvier 2017 ; - le décret n° 2020-1068 du 17 août 2020 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Edouard Solier, maître des requêtes, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. C... B... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par un courrier du 26 août 2019, le ministre des solidarités et de la santé et la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation ont saisi, en application des dispositions de l'article L. 952-22 du code de l'éducation, la juridiction disciplinaire compétente à l'égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires et des personnels enseignants de médecine générale à l'encontre de M. C... B..., professeur des universités-praticien hospitalier en génétique à l'université Paris-Diderot, devenue université Paris-Cité, et au service ... de l'hôpital A..., au centre hospitalier régional et universitaire de Paris. Par une décision du 7 septembre 2020, la juridiction disciplinaire instituée par l'article L. 952-22 du code de l'éducation pour les membres du personnel enseignant et hospitalier lui a infligé la sanction du blâme. Par trois pourvois qu'il y a lieu de joindre, le ministre des solidarités et de la santé, la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et M. B... demandent au Conseil d'Etat d'annuler cette décision. 2. Aux termes de l'article L. 952-21 du code de l'éducation, dans sa version applicable au litige : " les membres du personnel enseignant et hospitalier des centres hospitaliers et universitaires créés en application de l'article L. 6142-3 du code de la santé publique, cité à l'article L. 713-5 du présent code, exercent conjointement les fonctions universitaire et hospitalière. L'accès à leur double fonction est assuré par un recrutement commun. / Ils sont nommés par les ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé ou sur le rapport de ces ministres. / Ils consacrent à leurs fonctions hospitalières, à l'enseignement et à la recherche la totalité de leur activité professionnelle, sous réserve des dérogations qui peuvent être prévues par leur statut. / Les effectifs du personnel faisant l'objet du présent article sont fixés, pour chaque centre et pour chaque catégorie, par décision commune des ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé ". Aux termes de l'article L. 952-22 du même code : " Les membres du personnel enseignant et hospitalier sont soumis, pour leur activité hospitalière comme pour leur activité universitaire, à une juridiction disciplinaire unique instituée sur le plan national. Cette juridiction est présidée soit par un conseiller d'Etat, soit par un professeur d'enseignement supérieur, désigné conjointement par les ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé ; elle est composée de membres pour moitié élus par les personnels intéressés et pour moitié nommés à parts égales par les mêmes ministres ". Aux termes de l'article 24-1 du décret du 24 février 1984 portant statut des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires, alors en vigueur : " La compétence dévolue à la juridiction disciplinaire et les sanctions éventuellement prononcées par celle-ci à l'encontre d'un personnel enseignant et hospitalier ne font pas obstacle à l'exercice de l'action disciplinaire, en raison des mêmes faits, devant la chambre de discipline du conseil de l'ordre professionnel dont il relève ". Il résulte de ces dispositions que l'activité universitaire et l'activité hospitalière des professeurs des universités - praticiens hospitaliers sont indissociables. Il résulte également de ces dispositions, interprétées au regard du principe fondamental reconnu par les lois de République de l'indépendance des enseignants-chercheurs, que si les professeurs des universités-praticiens hospitaliers ou les maîtres de conférence des universités-praticiens hospitaliers sont susceptibles de faire l'objet de poursuites devant les juridictions de l'ordre dont ils relèvent pour tout fait lié à l'exercice de leurs fonctions, il n'en va toutefois pas de même pour ceux de ces faits qui seraient indétachables de leur activité universitaire, lesquels ne sont susceptibles de fonder régulièrement des poursuites que devant la juridiction spécialisée instaurée par l'article L. 952-22 du code de l'éducation cité ci-dessus. 3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le ministre des solidarités et de la santé et la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation ont saisi la juridiction disciplinaire compétente à l'égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires et des personnels enseignants de médecine générale sur le fondement du rapport définitif remis le 26 mars 2018 par la mission d'inspection de la direction de l'inspection et de l'audit de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) et qui formulait à l'encontre de M. B..., des griefs tirés notamment de la méconnaissance par ce dernier, des dispositions de l'article L. 1131-3 du code de la santé publique, imposant aux praticiens souhaitant procéder à des examens des caractéristiques d'une personne ou à son identification par empreintes génétiques à des fins médicales d'en obtenir l'agrément préalable auprès de l'agence de biomédecine, de l'article L. 5223-1 du code de la santé publique interdisant le recours à la publicité pour les dispositifs médicaux in vitro, de l'article L. 6154-2 du code de la santé publique qui prévoit que la durée de l'activité libérale d'un praticien hospitalier ne doit pas excéder 20% de la durée de son service hospitalier hebdomadaire et que cette activité est organisée de manière à garantir l'information des patients et la neutralité de leur orientation entre activité libérale et activité publique. En s'abstenant de se prononcer notamment sur ces griefs, alors que les faits en cause relevaient de ses attributions, la juridiction disciplinaire compétente à l'égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires et des personnels enseignants de médecine générale a méconnu son office et insuffisamment motivé sa décision. 4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leurs pourvois, que le ministre des solidarités et de la santé et la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, sont fondés à demander l'annulation de la décision de la juridiction disciplinaire compétente à l'égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires et des personnels enseignants de médecine générale qu'ils attaquent. 5. Par la présente décision est annulée la décision du 7 septembre 2020 de la juridiction disciplinaire compétente à l'égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires et des personnels enseignants de médecine générale. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi n° 449042 de M. B..., tendant à l'annulation de cette même décision. 6. Il n'y a, en tout état de cause, pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : La décision du 7 septembre 2020 de la juridiction disciplinaire compétente à l'égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires et des personnels enseignants de médecine générale, est annulée. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la juridiction disciplinaire compétente à l'égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires et des personnels enseignants de médecine générale. Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi n° 449042 tendant à l'annulation de la décision du 7 septembre 2020 de la juridiction disciplinaire compétente à l'égard des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires des personnels enseignants de médecine générale. Article 4 : Les conclusions de M. B... présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : La présente décision sera notifiée au ministre de la santé et de la prévention, à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et à M. C... B....
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Vu la procédure suivante : Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés le 30 août et le 3 novembre 2021 et le 14 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union des entreprises de transport et de logistique, la Fédération nationale des transports routiers, la Fédération nationale du bois, le Syndicat français de l'industrie cimentière, l'Union nationale des industries de l'impression et de la communication, l'Union inter-secteurs papiers cartons pour le dialogue et l'ingénierie sociale, l'Union des transformateurs de polymères POLYVIA, l'Association nationale des industries alimentaires et la Fédération organisation des transports routiers européens demandent au Conseil d'État : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 juin 2021 relatif aux secteurs d'activité et aux employeurs entrant dans le champ d'application du bonus-malus ; 2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 600 euros à verser à chacun d'entre eux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code du travail ; - le décret n° 2007-1888 du 26 décembre 2007 ; - le décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019 ; - le décret n° 2021-346 du 30 mars 2021 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Eric Buge, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de l'Union des entreprises de transport et de logistique, de la Fédération nationale des transports routiers, de la Fédération nationale du bois, du Syndicat français de l'industrie cimentière, de l'Union nationale des industries de l'impression et de la communication, de l'Union inter-secteurs papiers cartons pour le dialogue et l'ingénierie sociale, de l'Union des transformateurs de polymères POLYVIA, de l'Association nationale des industries alimentaires et de la Fédération organisation des transports routiers européens ; Considérant ce qui suit : 1. L'article L. 5422-9 du code du travail dispose que l'assurance chômage est notamment financée par des contributions des employeurs. Le taux de contribution de chaque employeur peut, en vertu de l'article L. 5422-12 du même code, être minoré ou majoré en fonction notamment " 1° Du nombre de fins de contrat de travail et de contrats de mise à disposition mentionnés au 1° de l'article L. 1251-1, à l'exclusion des démissions, des contrats de travail et des contrats de mise à disposition conclus avec une structure d'insertion par l'activité économique mentionnée à l'article L. 5132-4 et des contrats de mission mentionnés au 2° de l'article L. 1251-1, et sous réserve de l'inscription des personnes concernées par ces fins de contrat sur la liste des demandeurs d'emploi mentionnée à l'article L. 5411-1 ; (...) / 5° Du secteur d'activité de l'entreprise ". Le règlement d'assurance chômage figurant en annexe A du décret du 26 juillet 2019 relatif au régime d'assurance chômage prévoit, à ses articles 50-2 à 50-15, les modalités de mise en œuvre de cette modulation. A ce titre, le premier alinéa du I de l'article 50-3 réserve la modulation des contributions d'assurance chômage aux entreprises relevant de secteurs d'activité dans lesquels le taux de séparation moyen est supérieur à un seuil de 150 %, en renvoyant à un arrêté du ministre chargé de l'emploi le soin de préciser, pour une période de trois ans, les secteurs d'activité concernés par référence à la nomenclature des secteurs d'activité figurant à l'article 50-3-1. Le même arrêté doit également préciser, en vertu du 2° du II du même article, quels sont les secteurs d'activité pour lesquels il est fait application du taux majoré ou minoré, dit " bonus-malus ", au cours de la première période d'emploi, qui fait l'objet de règles dérogatoires, c'est-à-dire pour les rémunérations dues au titre des périodes d'emploi courant du 1er septembre au 31 octobre 2022. Les requérants demandent l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 28 juin 2021 relatif aux secteurs d'activité et aux employeurs entrant dans le champ d'application du bonus-malus, qui détermine les secteurs d'activité et les entreprises entrant dans le champ de cette modulation. 2. En premier lieu, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation du décret du 30 mars 2021 portant diverses mesures relatives au régime d'assurance chômage, dont sont issus les articles 50-2 à 50-15 du règlement d'assurance chômage, ne peut qu'être écarté dès lors que le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a rejeté, par sa décision nos 452209, 452783, 452796, 452831, 452836, 452842, 453181, 455121 du 15 décembre 2021, les conclusions des requêtes tendant à l'annulation de ce décret. 3. En deuxième lieu, l'annexe 1 de l'arrêté attaqué fixe la liste des secteurs d'activité auxquels s'applique la modulation, sous la forme d'un tableau mentionnant en face de chacun des secteurs d'activité retenu son taux de séparation moyen pour la période de référence, assorti de la mention de la source des données et de la méthodologie. D'une part, aucun texte ni aucun principe n'imposait que l'arrêté, qui revêt un caractère règlementaire et n'avait donc pas à être motivé, précise les modalités et éléments de calcul de ces taux. Au demeurant, comme il a été dit, outre que les modalités selon lesquelles doit être calculé ce taux de séparation moyen sont précisées par l'article 50-3 du règlement d'assurance chômage, l'annexe 1 de l'arrêté comporte la mention des sources de données utilisées et détaille la méthodologie employée pour calculer les taux de séparation moyens figurant à cette annexe. D'autre part, si les requérants soutiennent que ces taux ne correspondent pas aux chiffres dont eux-mêmes disposeraient et à la situation réelle des différents secteurs d'activité concernés, ils n'apportent aucun élément de nature à remettre en cause les taux de séparation moyens figurant à cette annexe. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué serait pour ces motifs entaché d'erreur manifeste d'appréciation. 4. En troisième lieu, les articles 2 et 4 de l'arrêté contesté retiennent, pour affecter une entreprise au sein d'un secteur d'activité, en vue de déterminer si elle entre dans le champ d'application du bonus-malus, deux critères cumulatifs : la convention collective dont relève leur activité principale ou à laquelle elle adhère ou qu'elle applique de manière volontaire (code IDCC) et le code caractérisant l'activité principale exercée (APE). Si l'employeur n'applique aucune convention collective ou si la majorité des contrats de travail au sein de l'entreprise n'est associée à aucune convention collective, seul le code APE est pris en considération pour l'affecter dans un secteur d'activité. 5. D'une part, le neuvième alinéa du I de l'article 50-3 du règlement d'assurance chômage dispose que l'affectation d'un employeur dans l'un des secteurs d'activité soumis à bonus-malus " est effectuée en fonction de l'activité économique principale qu'il exerce ou, le cas échéant, de son objet social, et de la convention collective à laquelle il est rattaché, selon des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de l'emploi. " En retenant comme critère d'affectation la convention collective dont relève l'activité principale de l'employeur ou à laquelle il adhère ou qu'il applique de manière volontaire, l'arrêté contesté n'a méconnu ni ces dispositions, ni celles de l'article L. 5422-12 du code du travail. En outre, si l'arrêté retient aussi le code APE à titre de critère supplémentaire, il ressort des pièces du dossier que ce code, attribué par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), caractérise, comme l'indique l'article 5 du décret du 26 décembre 2007 portant approbation des nomenclatures d'activités et de produits françaises, l'activité principale exercée par l'employeur, que les cas dans lesquels, faute de convention collective applicable, le code APE est seul appliqué pour rattacher un employeur à un secteur d'activité sont limités à 1 % des entreprises concernées et qu'il est possible à l'employeur de demander à l'INSEE la modification de ce code s'il ne correspond pas à l'activité principale de l'entreprise, voire d'invoquer cette circonstance dans le cadre de la contestation du montant de la contribution mise à sa charge. Dans ces conditions, en prévoyant que ce critère s'ajoute à celui découlant de la convention collective tout en ne pouvant, hormis en l'absence de convention collective applicable, conduire qu'à exclure l'entreprise du champ d'application du bonus-malus, l'arrêté attaqué n'a nullement méconnu les dispositions de l'article L. 5422-12 du code du travail ou celles du règlement d'assurance chômage et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation. 6. D'autre part, l'arrêté contesté traitant de la même manière l'ensemble des entreprises de onze salariés et plus, quelle que soit leur taille ou leur appartenance à un groupe de sociétés, pour les affecter dans un secteur d'activité, conformément à l'article L. 5422-12 du code du travail qui prévoit que le taux de contribution est calculé pour chaque employeur, le moyen tiré de ce que cet arrêté méconnaîtrait le principe d'égalité selon la taille de l'entreprise ou son appartenance à un groupe de sociétés ne peut qu'être écarté. 7. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté qu'ils attaquent. 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de l'Union des entreprises de transport et de logistique et autres est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Union des entreprises de transport et de logistique, première dénommée, pour l'ensemble des requérants, et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Délibéré à l'issue de la séance du 26 septembre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Yves Doutriaux, M. Jean-Luc Nevache, M. Damien Botteghi, M. Alban de Nervaux, conseillers d'Etat ; Mme Agnès Pic, maître des requêtes en service extraordinaire et M. Eric Buge, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur. Rendu le 10 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl Le rapporteur : Signé : M. Eric Buge Le secrétaire : Signé : M. Hervé Herber
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 31 518 euros en réparation des préjudices résultant des conditions dans lesquelles la perquisition de son domicile a été réalisée le 9 août 2016. Par un jugement n° 1905538 du 26 avril 2021, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser à M. A... B... une somme de 1 000 euros en réparation du préjudice matériel subi. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 25 juin et 15 novembre 2021, M. D... A... B..., représenté par Me Durival, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du 26 avril 2021 en tant qu'il a limité l'indemnisation qui lui a été accordée à la somme de 1 000 euros ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 31 518 euros dont 1 518 euros au titre du préjudice matériel et 30 000 euros au titre du préjudice moral ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - les conditions fautives de mise en œuvre de la perquisition effectuée à son domicile le 9 août 2016 engagent la responsabilité de l'Etat ; le caractère nocturne de cette perquisition n'était pas justifié, non plus que l'ouverture forcée de la porte de son appartement ; les moyens policiers et militaires déployés étaient disproportionnés ; - il est fondé à solliciter la réparation du préjudice matériel lié à la fracturation injustifiée de sa porte d'entrée à hauteur de 1 518 euros ainsi que celle de son préjudice moral, lié au stress post-traumatique et à l'atteinte à sa réputation que le déploiement de moyens disproportionnés a entraîné, à hauteur de 30 000 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 18 octobre 2021, le ministre de l'intérieur conclut, à titre principal, à l'annulation des articles 1er et 2 du jugement du 26 avril 2021 et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête. Il soutient que : - l'ouverture forcée du domicile de M. A... B..., en l'absence de réponse de ce dernier, n'est pas constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; - le caractère nocturne de la perquisition n'est pas fautif ; - les conditions de déploiement des forces de l'ordre étaient proportionnées à la finalité de l'opération ; - les préjudices allégués ne sont pas établis ; le devis fourni pour la porte d'entrée ne correspond pas à une réparation à l'identique ; le choc psychologique allégué n'est pas établi par les documents produits, postérieurs de plus de huit mois aux faits en cause. Par une ordonnance du 5 juillet 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 août 2022. Un mémoire en réplique, présenté pour M. A... B... le 18 septembre 2022, postérieurement à la clôture de l'instruction, n'a pas été communiqué. Par une décision du 3 septembre 2021, M. A... B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2015-1501 du 20 novembre 2015 ; - la loi n° 2016-987 du 21 juillet 2016 ; - la loi n° 2016-1767 du 19 décembre 2016 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience au cours de laquelle ont été entendus : - le rapport de Mme C... ; - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par une décision du 8 août 2016, le préfet de police des Bouches-du-Rhône a ordonné la perquisition nocturne du domicile de M. A... B..., situé à Gardanne (13). Cette perquisition a été réalisée le 9 août 2016 entre 5h15 et 6h45. M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 31 518 euros en réparation des préjudices résultant des conditions de mise en œuvre de cette perquisition. Par un jugement du 26 avril 2021, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser à M. A... B... une somme de 1 000 euros en réparation du préjudice matériel subi. M. A... B... relève appel de ce jugement en tant qu'il a limité la condamnation de l'Etat au versement de la somme de 1 000 euros. Par la voie de l'appel incident, le ministre de l'intérieur relève également appel de ce jugement en tant qu'il a condamné l'Etat au versement de cette somme. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne l'engagement de la responsabilité de l'Etat : 2. Les conditions matérielles d'exécution des perquisitions sont susceptibles d'engager la responsabilité de l'Etat à l'égard des personnes concernées par les perquisitions. Ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2016-536 QPC du 19 février 2016, les conditions de mise en œuvre des perquisitions ordonnées sur le fondement de l'article 11 de la loi du 3 avril 1955 doivent être justifiées et proportionnées aux raisons ayant motivé la mesure, dans les circonstances particulières ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence. En particulier, la perquisition d'un domicile de nuit doit être justifiée par l'urgence ou l'impossibilité de l'effectuer de jour. Sauf s'il existe des raisons sérieuses de penser que le ou les occupants du lieu sont susceptibles de réagir à la perquisition par un comportement dangereux ou de détruire ou dissimuler des éléments matériels, l'ouverture volontaire du lieu faisant l'objet de la perquisition doit être recherchée et il ne peut être fait usage de la force pour pénétrer dans le lieu qu'à défaut d'autre possibilité. Lors de la perquisition, il importe de veiller au respect de la dignité des personnes et de prêter une attention toute particulière à la situation des enfants mineurs qui seraient présents. L'usage de la force ou de la contrainte doit être strictement limité à ce qui est nécessaire au déroulement de l'opération et à la protection des personnes. Lors de la perquisition, les atteintes aux biens doivent être strictement proportionnées à la finalité de l'opération ; aucune dégradation ne doit être commise qui ne serait justifiée par la recherche d'éléments en rapport avec l'objet de la perquisition. Toute faute commise dans l'exécution des perquisitions ordonnées sur le fondement de la loi du 3 avril 1955 est susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat. 3. Il appartient au juge administratif, saisi d'une demande en ce sens, d'apprécier si une faute a été commise dans l'exécution d'une perquisition, au vu de l'ensemble des éléments débattus devant lui, en tenant compte du comportement des personnes présentes au moment de la perquisition et des difficultés de l'action administrative dans les circonstances particulières ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence. Les résultats de la perquisition sont par eux-mêmes dépourvus d'incidence sur la caractérisation d'une faute. En cas de faute, il appartient au juge administratif d'accorder réparation des préjudices de toute nature, directs et certains, qui en résultent (cf. CE avis, 6 juillet 2016, n° 398234, 399135). S'agissant du caractère nocturne de la perquisition : 4. Il résulte de l'instruction, en particulier du procès-verbal établi à la suite de la perquisition litigieuse, que celle-ci s'est déroulée entre 5h15 et 6h45 du matin. Pour justifier la nécessité du caractère nocturne de cette perquisition, le ministre fait notamment valoir que la présence de l'intéressé était nécessaire au déroulement de l'opération et que, compte-tenu de la pratique assidue de sa religion par M. A... B..., il existait une forte probabilité qu'il soit absent de son domicile au moment de la prière du matin ainsi qu'à d'autres moments de la journée pour participer aux diverses prières quotidiennes et qu'en outre, du fait de sa profession de conducteur de bus au moment des faits, l'intéressé était susceptible d'être absent de son domicile une grande partie de la journée. M. A... B... ne conteste pas sérieusement le fait qu'il s'absentait de son domicile pour participer aux prières quotidiennes, dont la première se déroule avant l'aube, soit avant 6h du matin en été. S'il fait valoir qu'il a été licencié en septembre 2016, il est constant qu'il exerçait à la date de la perquisition litigieuse la profession de chauffeur de bus, laquelle l'amenait à être absent de son domicile une grande partie de la journée. Contrairement à ce qu'il soutient, il n'appartenait pas au préfet de se rapprocher de son employeur pour obtenir ses horaires précis de travail. Dans ces conditions, le caractère nocturne de la perquisition menée au domicile de M. A... B... était justifié par l'impossibilité de l'effectuer en plein jour. S'agissant de l'usage de la force pour pénétrer dans les lieux : 5. Il résulte de l'instruction, en particulier de la photographie produite par le requérant ainsi que du courriel émanant des services de la gendarmerie des Bouches-du-Rhône du 10 octobre 2019, que pour pénétrer dans le domicile de M. A... B..., les forces de l'ordres ont forcé la porte d'entrée de son appartement. Le ministre fait valoir, en produisant le courriel précité, relatant le témoignage d'un des gendarmes présents au moment de la perquisition, que cette ouverture forcée du domicile était justifiée par le fait que M. A... B... aurait " tardé " sans justification à ouvrir aux forces de l'ordre. Toutefois, cette circonstance, relatée sans autre précision plus de trois ans après les faits, n'est pas mentionnée dans le procès-verbal établi à la suite de la perquisition litigieuse. Dans ces conditions, en l'absence d'élément de nature à établir qu'il existait des raisons sérieuses de penser que M. A... B... était susceptible de réagir à la perquisition par un comportement dangereux ou de détruire ou dissimuler des éléments matériels, ce dernier est fondé à soutenir que l'ouverture forcée de la porte d'entrée de son appartement est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat. S'agissant des moyens policiers et militaires déployés : 6. M. A... B... soutient que la présence lors de la perquisition de son domicile de deux officiers de police judiciaire et de huits gendarmes était disproportionnée et donc fautive. Toutefois, le requérant, qui ne conteste pas le bien-fondé de la décision de perquisition prise le 8 août 2016 par le préfet de police des Bouches-du-Rhône, n'établit ni même n'allègue que d'autres atteintes à sa personne ou à ses biens que celles mentionnées au point précédent auraient été occasionnées par la présence à son domicile de ces dix membres des forces de l'ordre. Dans ces conditions, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que la disproportion des moyens humains déployés pour cette perquisition, qui n'est en tout état de cause pas établie, serait constitutive d'une faute. En ce qui concerne les préjudices : S'agissant du préjudice matériel : 7. Il résulte de ce qui précède que M. A... B... est fondé à demander réparation du préjudice matériel que lui a causé la fracturation de sa porte d'entrée. Si le requérant soutient que le devis établi le 21 novembre 2017 pour un montant de 1 518 euros correspond à un remplacement à l'identique de cette porte, il résulte toutefois de l'instruction, en particulier de la comparaison entre ce devis et la photographie de la porte fracturée, que le devis qu'il produit correspond à la pose d'une porte de qualité nettement supérieure. Dans ces conditions, ainsi que l'a jugé le tribunal, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par M. A... B... en lui octroyant à ce titre la somme de 1 000 euros. S'agissant du préjudice moral : 8. M. A... B... demande également réparation du préjudice moral qu'aurait entraîné les conditions d'exécution de la perquisition litigieuse. Pour justifier ce préjudice, il produit un certificat médical établi le 17 mars 2017 par un médecin généraliste attestant qu'il souffre de troubles du sommeil à la suite de la perquisition et de son licenciement ainsi que l'attestation d'une psychologue du 22 mai 2017 faisant état d'un stress post-traumatique à la suite de la perquisition. Toutefois, ces éléments ne permettent pas d'établir l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre la faute retenue par le présent arrêt dans l'exécution de cette perquisition, à savoir l'ouverture forcée de la porte du domicile de M. A... B..., et les troubles du sommeil et d'anxiété soufferts plus de huit mois après les faits par ce dernier, alors en outre qu'il résulte de l'instruction qu'il avait entre-temps été licencié pour faute grave par la Régie des transports marseillais qui l'employait depuis plus de dix-sept ans. Dans ces conditions, les conclusions présentées par M. A... B... tendant à l'indemnisation d'un tel préjudice moral doivent être rejetées. 9. Il résulte de ce qui précède que, d'une part, le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a condamné l'Etat à verser à M. A... B... une somme de 1 000 euros et, d'autre part, que ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a limité la condamnation de l'Etat au versement à de cette somme. Sur les frais de l'instance : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par l'avocat de M. A... B... en application de ces dispositions combinées avec celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : La requête présentée par M. A... B... est rejetée. Article 2 : L'appel incident du ministre de l'intérieur est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... B..., à Me Durival et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée pour information au préfet des Bouches-du-Rhône. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente-assesseure, - Mme Balaresque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N°21MA02478 2
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Vu les procédures suivantes : 1° Sous le numéro 457303, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 7 octobre 2021 et le 20 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2021-1251 du 29 septembre 2021 fixant la date d'entrée en vigueur de certaines dispositions du régime d'assurance chômage ; 2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. 2° Sous le numéro 457309, par une requête, enregistrée le 7 octobre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Confédération générale du travail (CGT), l'Union syndicale Solidaires et la Fédération syndicale unitaire (FSU) demandent au Conseil d'État : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2021-1251 du 29 septembre 2021 fixant la date d'entrée en vigueur de certaines dispositions du régime d'assurance chômage ; 2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. .................................................................................... 3° Sous le numéro 457336, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 octobre 2021 et 24 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC) demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2021-1251 du 29 septembre 2021 fixant la date d'entrée en vigueur de certaines dispositions du régime d'assurance chômage ; 2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. .................................................................................... 4° Sous le numéro 457341, par une requête, enregistrée le 8 octobre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération nationale des guides interprètes et conférenciers (FNGIC), le Syndicat professionnel des guides interprètes conférenciers (SPGIC), l'Association nationale des guides-conférenciers des villes et pays d'art et d'histoire (ANCOVART) et le Syndicat national des guides conférenciers (SNGC) demandent au Conseil d'État : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2021-1251 du 29 septembre 2021 fixant la date d'entrée en vigueur de certaines dispositions du régime d'assurance chômage ; 2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. .................................................................................... 5° Sous le numéro 457344, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 8 octobre 2021 et le 31 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Confédération française démocratique du travail et la Confédération française des travailleurs chrétiens demandent au Conseil d'État : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2021-1251 du 29 septembre 2021 fixant la date d'entrée en vigueur de certaines dispositions du régime d'assurance chômage ; 2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. .................................................................................... Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ; - le code du travail ; - la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 ; - le décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019 ; - le décret n° 2021-346 du 30 mars 2021 ; - le décret n° 2021-843 du 29 juin 2021 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Eric Buge, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de l'Union nationale des syndicats autonomes, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la Confédération générale du travail, de l'Union syndicale Solidaires, de la Fédération syndicale unitaire, de la Fédération nationale des guides interprètes et conférenciers, du Syndicat professionnel des guides interprètes conférenciers, de l'Association nationale des guides-conférenciers des villes et pays d'art et d'histoire et du Syndicat national des guides conférenciers, à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres et à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de la Confédération française démocratique du travail et de la Confédération française des travailleurs chrétiens ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces des dossiers qu'à la suite de l'échec des négociations entre organisations représentatives de salariés et d'employeurs, engagées sur le fondement des articles 57 de la loi du 5 septembre 2018 relative à la liberté de choisir son avenir professionnel et L. 5422-20 du code du travail, en vue de conclure un accord déterminant les mesures d'application des dispositions de ce code relatives à l'assurance chômage, le Premier ministre a pris le décret du 26 juillet 2019 relatif au régime d'assurance chômage, sur le fondement du dernier alinéa de l'article L. 5422-20 du code du travail qui prévoit qu'en l'absence d'accord, ces mesures d'application sont déterminées par décret en Conseil d'État. Ce décret, d'une part, abroge les arrêtés portant agrément de la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage, de ses textes associés et de ses avenants et, d'autre part, fixe, dans ses annexes, les mesures d'application du régime d'assurance chômage. Par une décision du 25 novembre 2020, le Conseil d'État, statuant au contentieux, a notamment annulé les dispositions de l'article 13 du règlement d'assurance chômage annexé à ce décret relatives au salaire journalier de référence, au motif que ses modalités de calcul portaient atteinte au principe d'égalité, ainsi que les dispositions qui en étaient indivisibles. 2. À la suite de cette annulation, le Premier ministre a pris le décret du 30 mars 2021 insérant dans le décret du 26 juillet 2019 de nouvelles dispositions relatives notamment au calcul du salaire journalier de référence. Le 22 juin 2021, le juge des référés du Conseil d'État a suspendu l'exécution de la date d'entrée en vigueur, fixée au 1er juillet 2021 par le décret du 30 mars 2021, des dispositions de ce décret relatives à la détermination du salaire journalier de référence. Par un décret du 29 juin 2021, le Premier ministre a abrogé les dispositions du décret du 30 mars 2021 relatives à cette date d'entrée en vigueur, prévu qu'une nouvelle date d'entrée en vigueur serait fixée par un décret en Conseil d'Etat et que les dispositions relatives au salaire journalier de référence de la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage seraient maintenues jusqu'au 30 septembre 2021. Enfin, par un décret du 29 septembre 2021, le Premier ministre a rendu applicable les dispositions du décret du 26 juillet 2019 relatives aux modalités de calcul du salaire journalier de référence, telles que modifiées par le décret du 30 mars 2021, aux travailleurs privées d'emploi dont la fin de contrat de travail intervient à compter du 1er octobre 2021, à l'exception de ceux d'entre eux ayant fait l'objet d'une procédure de licenciement engagée avant cette date. Les cinq requêtes visées ci-dessus tendent à l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret du 29 septembre 2021. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision. Sur la légalité externe du décret attaqué : 3. En premier lieu, en vertu de l'article L. 5422-20 du code du travail, les mesures d'application des dispositions de ce code relatives au régime d'assurance chômage font l'objet d'accords conclus entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés et agréés dans les conditions définies aux articles L. 5422-20-1 à L. 5422-24 du code, le dernier alinéa de l'article L. 5422-20 prévoyant qu'" en l'absence d'accord ou d'agrément de celui-ci, les mesures d'application sont déterminées par décret en Conseil d'Etat ". L'article L. 5422-20-1, inséré dans ce code par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, dispose que, préalablement à la négociation de ces accords et après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, le Premier ministre transmet à ces organisations un document de cadrage qui " précise les objectifs de la négociation en ce qui concerne la trajectoire financière, le délai dans lequel cette négociation doit aboutir et, le cas échéant, les objectifs d'évolution des règles du régime d'assurance chômage. / Il détaille les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles se fonde la trajectoire financière, ainsi que le montant prévisionnel, pour les trois exercices à venir, du produit des impositions de toute nature mentionnées au 5° de l'article L. 5422-9 [c'est-à-dire celles qui sont affectées en tout ou partie à l'organisme chargé de la gestion du régime d'assurance chômage, notamment pour le financement de l'allocation des travailleurs indépendants], sans préjudice des dispositions des prochaines lois de finances et lois de financement de la sécurité sociale (...) ". En vertu du second alinéa de l'article L. 5422-22 du même code, l'agrément de l'accord est subordonné, d'une part, à sa conformité aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur et, d'autre part, à sa compatibilité avec la trajectoire financière et, le cas échéant, les objectifs d'évolution des règles du régime d'assurance chômage définis dans le document de cadrage. L'article L. 5422-25 du code, dans sa rédaction résultant de la loi du 5 septembre 2018, prévoit que, dans certaines hypothèses, le Premier ministre peut demander aux partenaires sociaux de prendre les mesures nécessaires pour corriger un écart significatif entre la trajectoire financière du régime d'assurance chômage et la trajectoire prévue, ou celle que décide le législateur, en modifiant l'accord précédemment agréé et qu'à défaut, le Premier ministre peut mettre fin à l'agrément de l'accord dont il avait demandé la modification et mettre en œuvre le dernier alinéa de l'article L. 5422-20 de ce code pour déterminer ces mesures par décret en Conseil d'Etat. 4. Il résulte de ces dispositions que les organisations représentatives d'employeurs et de salariés sont en principe compétentes pour déterminer, par voie d'accord, les mesures d'application des dispositions du code du travail relatives au régime d'assurance chômage et que le Premier ministre ne peut se substituer aux partenaires sociaux qu'en cas d'échec de la négociation ou d'impossibilité, pour l'un des motifs prévus à l'article L. 5422-22 de ce code, d'agréer leur accord. Par suite, les mesures qu'il adopte doivent rester compatibles avec les objectifs impartis aux partenaires sociaux pour cette négociation en ce qui concerne la trajectoire financière et, le cas échéant, les objectifs d'évolution des règles du régime d'assurance chômage, définis dans le document de cadrage mentionné à l'article L. 5422-20-1 du même code. Il ne peut adopter ou modifier de telles mesures, pendant la période que l'accord devait couvrir, si les objectifs et la trajectoire financière ainsi fixés par le document de cadrage pour la négociation ne s'appliquent plus ou ne sont plus susceptibles d'être mis en œuvre. 5. En l'espèce, les objectifs impartis par le document de cadrage communiqué le 25 septembre 2018 aux partenaires sociaux en ce qui concerne l'évolution des règles du régime d'assurance chômage et la trajectoire financière, qui avaient été définis par ce document pour être appliqués pendant une période de trois ans, avaient commencé à être mis en œuvre par le décret du 26 juillet 2019, aux illégalités duquel le décret du 30 mars 2021 a entendu remédier, à la suite de son annulation partielle, pour sa période d'application restant à courir. En application de l'article 57 de la loi du 5 septembre 2018, ces objectifs incluaient notamment, en ce qui concerne l'évolution des règles de l'assurance chômage, la modification de la formule de calcul du salaire journalier de référence et des règles de cumul de l'allocation d'aide au retour à l'emploi avec les revenus issus de la reprise d'une activité réduite, et la trajectoire financière consistait à réaliser entre 1 et 1,3 milliard d'euros d'économies en moyenne annuelle pendant une période de trois ans. Il ne ressort pas des pièces des dossiers que ces objectifs n'étaient plus susceptibles d'être mis en œuvre à la date du décret contesté, lequel se borne à déterminer la date d'entrée en vigueur des nouvelles modalités de calcul du salaire journalier de référence, sans les modifier. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que, faute que les partenaires sociaux aient été préalablement saisis d'un document de cadrage mis à jour pour tenir compte des conséquences sur l'activité économique de la crise sanitaire ou appelés à négocier sur le fondement d'un nouveau document de cadrage, le décret serait entaché d'incompétence ou aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière. 6. En deuxième lieu, il ressort de la copie de la minute de la section sociale du Conseil d'Etat, versée aux dossiers par la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, que le texte publié ne comporte pas de dispositions qui différeraient à la fois du projet initial du Gouvernement et du texte adopté par le Conseil d'État. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des règles qui gouvernent l'examen par le Conseil d'Etat des projets de décret ne peut qu'être écarté. 7. En troisième lieu, la Commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle est chargée, en application du 2° de l'article L. 2271-1 du code du travail, " d'émettre un avis sur les projets de (...) décret relatifs aux règles générales portant sur les relations individuelles et collectives du travail (...) ainsi que dans le domaine de la politique de l'emploi, de l'orientation et de la formation professionnelle initiale et continue " et, en application du 10° de cet article, " d'émettre un avis sur : / (...) b) l'agrément des accords d'assurance chômage mentionnés à l'article L. 5422-20 ". S'il résulte de ces dispositions que cette commission devait être consultée, comme elle l'a été, préalablement à l'adoption du décret en litige, ni ces dispositions ni aucune autre n'imposaient qu'elle rende son avis au vu d'une étude d'impact. Il ne ressort pas des pièces des dossiers que la circonstance qu'elle n'aurait été saisie que du projet de décret, sans qu'il soit accompagné de tels éléments, aurait fait obstacle à ce qu'elle soit mise à même d'émettre son avis en toute connaissance de cause, étant au demeurant précisé qu'il ressort en l'espèce des pièces des dossiers que le Gouvernement a accompagné le projet de décret soumis à la Commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle d'une note explicitant les raisons du choix de la date retenue. Par suite, cette circonstance n'entache pas d'irrégularité l'avis qu'elle a émis le 21 septembre 2021. Sur la légalité interne du décret attaqué : 8. En premier lieu, en application de l'article L. 511-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais. " Aux termes de l'article L. 521-1 du même code : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. / Lorsque la suspension est prononcée, il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision dans les meilleurs délais. La suspension prend fin au plus tard lorsqu'il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision. " En vertu de l'article L. 521-4 du même code : " Saisi par toute personne intéressée, le juge des référés peut, à tout moment, au vu d'un élément nouveau, modifier les mesures qu'il avait ordonnées ou y mettre fin. " 9. Si, eu égard à leur caractère provisoire, les décisions du juge des référés n'ont pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, elles sont néanmoins, conformément au principe rappelé à l'article L. 11 du code de justice administrative, exécutoires et, en vertu de l'autorité qui s'attache aux décisions de justice, obligatoires. Il en résulte notamment que, lorsque le juge des référés a prononcé la suspension d'une décision administrative et qu'il n'a pas été mis fin à cette suspension - soit par l'aboutissement d'une voie de recours, soit dans les conditions prévues à l'article L. 521-4 du code de justice administrative, soit par l'intervention d'une décision au fond -, l'administration ne saurait légalement reprendre une même décision sans qu'il ait été remédié au vice que le juge des référés avait pris en considération pour prononcer la suspension. 10. D'une part, il en résulte que les requérants ne peuvent utilement soutenir que le décret contesté ne respecterait pas l'autorité de la chose jugée par l'ordonnance du juge des référés du Conseil d'Etat du 22 juin 2021, cette ordonnance ne revêtant pas une telle autorité. D'autre part, cette ordonnance a suspendu l'exécution des dispositions du règlement d'assurance chômage relatives au salaire journalier de référence figurant à l'annexe A du décret du 26 juillet 2019, dans leur rédaction résultant du décret du 30 mars 2021, ainsi que celles de l'article 1er du décret du 30 mars 2021 en tant seulement qu'il fixe dès le 1er juillet 2021 l'entrée en vigueur de ces dispositions. Le décret contesté fixe au 1er octobre 2021 l'entrée en vigueur de ces dispositions. Par suite, les requérants ne sont fondés à soutenir ni qu'il reprendrait la même décision que celle suspendue par le juge des référés et, à ce titre, serait entaché d'un détournement de pouvoir ou de procédure, ni qu'il méconnaîtrait, pour ce motif, l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 11. En deuxième lieu, il ressort des pièces des dossiers, notamment des estimations publiées par l'UNEDIC en avril 2021, dans le document intitulé " Réforme de l'assurance chômage. Effets au 1er juillet 2021 du décret du 30 mars 2021 portant diverses mesures relatives au régime d'assurance chômage ", que la réforme du calcul du salaire journalier de référence est susceptible de conduire à des économies pour l'assurance chômage de l'ordre de 940 millions d'euros en 2022, le montant total des économies produites la même année par la réforme étant estimé entre 1,19 et 1,93 milliard d'euros. Il ressort par ailleurs du document de l'UNEDIC intitulé " Analyse du projet de décret relatif à la réforme d'assurance chômage du 1er octobre 2021 " que l'étude réalisée en avril 2021 demeurait valable et que " l'amélioration conjoncturelle constatée ces derniers mois, un peu plus rapide qu'anticipée au printemps, ne modifie pas les ordres de grandeur de l'étude d'impact en matière d'économies générées ou de personnes concernées ". Dans ces conditions, le pouvoir réglementaire ne peut être regardé comme ayant, en fixant la date d'entrée en vigueur des nouvelles modalités de calcul du salaire journalier de référence au 1er octobre 2021, adopté des dispositions incompatibles avec la trajectoire financière et les objectifs d'évolution des règles du régime d'assurance chômage qui avaient été fixés par le document de cadrage communiqué le 25 septembre 2018, lesquels, contrairement à ce qui est soutenu, ne portaient pas uniquement sur l'alternance de périodes de chômage avec des contrats très courts. 12. En troisième lieu, il ressort des pièces des dossiers que le marché du travail a connu une amélioration conjoncturelle au premier semestre 2021, caractérisée par une forte augmentation des déclarations d'embauche à compter de la fin du mois d'avril 2021, par un plus faible nombre de défaillances d'entreprises et par une progression de l'emploi salarié, les déclarations préalables à l'embauche en contrat à durée déterminée de plus d'un mois et en contrat à durée indéterminée étant à un niveau supérieur à leur niveau d'avant la crise sanitaire liée à l'épidémie de covid-19. Par ailleurs, le nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A a connu une baisse au second semestre 2020 et au premier semestre 2021, même s'il demeurait à un niveau supérieur à celui de l'année 2019. Enfin, à la date du décret attaqué, la reprise de l'activité des entreprises se confirmait, y compris dans les secteurs les plus touchés par la crise sanitaire, et les difficultés liées au manque de personnel s'intensifiaient dans plusieurs secteurs. Dans ces conditions, et alors même que les modalités de mise en œuvre de la réforme diffèrent entre les salariés et les employeurs, il ne ressort pas des pièces des dossiers que le choix du 1er octobre 2021 comme date d'entrée en vigueur des nouvelles modalités de calcul du salaire journalier de référence serait, eu égard à la teneur de ces règles, entaché d'erreur manifeste d'appréciation. 13. En dernier lieu, ainsi qu'il a été dit, le décret attaqué a pour seul objet de modifier le décret du 26 juillet 2019 pour fixer la date d'entrée en vigueur des dispositions de ce dernier, qu'il laisse inchangées, relatives au salaire journalier de référence. Par suite, les autres moyens des requêtes, qui se rapportent, non au choix de la date ainsi fixée, mais à la teneur même de ces dispositions laissées inchangées par le décret attaqué, sont inopérants. 14. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret qu'elles attaquent. Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans les présentes instances, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : Les requêtes de l'Union nationale des syndicats autonomes, de la Confédération générale du travail et autres, de la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres, de la Fédération nationale des guides interprètes et conférenciers et autres, et de la Confédération française démocratique du travail et autre sont rejetées. Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Union nationale des syndicats autonomes, à la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres, à la Confédération générale du travail, représentant unique désigné pour l'ensemble des requérants sous le numéro 457309, à la Fédération nationale des guides interprètes et conférenciers, représentant unique désigné pour l'ensemble des requérants sous le numéro 457341, à la Confédération française démocratique du travail, première dénommée, pour l'ensemble des requérants sous le numéro 457344, à la Première ministre et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Délibéré à l'issue de la séance du 26 septembre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Yves Doutriaux, M. Jean-Luc Nevache, M. Damien Botteghi, M. Alban de Nervaux, conseillers d'Etat ; Mme Agnès Pic, maître des requêtes en service extraordinaire et M. Eric Buge, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur. Rendu le 10 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl Le rapporteur : Signé : M. Eric Buge Le secrétaire : Signé : M. Hervé Herber
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Vu la procédure suivante : Par une ordonnance n° 2121633 du 2 novembre 2021, enregistrée 8 novembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Paris a, sur le fondement de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, transmis au Conseil d'Etat la requête présentée devant ce tribunal par le syndicat national de l'environnement. Par cette requête, enregistrée le 12 octobre 2021 au greffe du tribunal administratif de Paris, le syndicat national de l'environnement demande au Conseil d'Etat : 1°) d'abroger l'instruction n° 2021-DG-01 du 12 avril 2021 relative à l'armement des agents de l'Office français de la biodiversité (OFB) ; 2°) à titre subsidiaire, d'enjoindre à l'OFB, sur le fondement des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, d'une part, d'engager de nouvelles négociations avec les organisations syndicales représentatives en vue de la révision de cette instruction, d'autre part, de tirer toutes les conséquences de droit découlant de la décision à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de l'OFB la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'environnement ; - le code général de la propriété des personnes publiques ; - le code de la sécurité intérieure ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 2019-773 du 27 juillet 2019 ; - le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ; - le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 ; - le décret n° 2019-1580 du 31 décembre 2019 ; - l'arrêté du ministre de l'environnement du 27 février 2004 modifié portant autorisation de port d'arme pour les fonctionnaires et agents assermentés en fonction dans les parcs nationaux, à l'office national de la chasse et de la faune sauvage et à l'office national de l'eau et des milieux aquatiques ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Mélanie Villiers, maître des requêtes, - les conclusions de M. A... B... de Vendeuil, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Le syndicat national de l'environnement demande l'abrogation de l'instruction n° 2021-DG-01 du 12 avril 2021 relative à l'armement des agents de l'Office français de la biodiversité. Toutefois, eu égard aux moyens qu'il invoque, sa requête doit être regardée comme demandant son annulation pour excès de pouvoir. 2. Aux termes de l'article R. 311-1 du code de justice administrative : " Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort : / (...) 2° Des recours dirigés contre les actes réglementaires des ministres et des autres autorités à compétence nationale et contre leurs circulaires et instructions de portée générale ". Hormis le cas où il aurait été doté par un texte d'un pouvoir réglementaire, un établissement public national ne peut être regardé comme une autorité à compétence nationale, au sens de ces dispositions. 3. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la requête, dirigée contre une décision prise, dans l'exercice de son pouvoir d'organisation du service, par le directeur d'un établissement public national auquel aucun texte n'a attribué un pouvoir réglementaire, n'entre pas dans les prévisions du 2° de l'article R. 311-1 du code de justice administrative. Aucun autre texte ne donne compétence au Conseil d'Etat pour connaître en premier et dernier ressort de telles conclusions. Par suite, il y a lieu, en application de l'article R. 351-1 du code de justice administrative, d'en attribuer le jugement au tribunal administratif de Melun, compétent pour en connaître en vertu de l'article R. 312-1 du même code. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement de la requête du syndicat national de l'environnement est attribué au tribunal administratif de Melun. Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat national de l'environnement, à l'Office français de la biodiversité et au président du tribunal administratif de Melun. Copie en sera adressée au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré à l'issue de la séance du 28 septembre 2022 où siégeaient : M. Olivier Japiot, président de chambre, présidant ; M. Gilles Pellissier, conseiller d'Etat et Mme Mélanie Villiers, maître des requêtes-rapporteure. Rendu le 14 octobre 2022. Le président : Signé : M. Olivier Japiot La rapporteure : Signé : Mme Mélanie Villiers La secrétaire : Signé : Mme Pierrette Kimfunia
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Vu la procédure suivante : Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 novembre 2021, 23 février 2022 et 24 août 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler la décision n° CS 2021-19 du 7 juillet 2021 par laquelle la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), d'une part, lui a interdit, pendant une durée de quatre ans, en premier lieu, de participer directement ou indirectement à l'organisation et au déroulement de toute manifestation sportive donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature, et des manifestations sportives autorisées par une fédération délégataire ou organisées par une fédération agréée ou par une ligue professionnelle ou l'un des membres de celles-ci, en deuxième lieu, de prendre part à toute autre activité organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle ou l'un de leurs membres, ou le comité national olympique et sportif français, ainsi qu'aux activités sportives impliquant des sportifs de niveau national ou international et financées par une personne publique, à moins que ces activités ne s'inscrivent dans des programmes ayant pour objet la prévention du dopage, et enfin, d'exercer les fonctions définies à l'article L. 212-1 du code du sport, ainsi que toute fonction d'encadrement ou toute activité administrative au sein d'une fédération agréée ou d'une ligue professionnelle, ou d'un de leurs membres, et, d'autre part, a décidé la publication sur le site internet de l'Agence d'un résumé de la décision ; 2°) de mettre à la charge de l'Agence française de lutte contre le dopage la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code du sport ; - le décret n° 2018-1283 du 27 décembre 2018 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Paul Bernard, maître des requêtes, - les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public, La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. A..., et à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de l'Agence française de lutte contre le dopage ; Considérant ce qui suit : 1. Il résulte de l'instruction que M. A..., joueur professionnel de rugby, a fait l'objet d'un contrôle antidopage, le 19 mai 2019, à l'occasion d'un match du championnat de France de rugby professionnel de 1ère division, dénommé Top 14. L'analyse effectuée a fait ressortir la présence dans ses urines de testostérone et de ses métabolites, d'origine exogène, substances non spécifiées de la classe S1 des agents anabolisants figurant sur la liste des substances interdites en permanence annexée au décret du 27 décembre 2018 portant publication de l'amendement à l'annexe I de la convention internationale contre le dopage dans le sport. Par une première décision du 10 juillet 2019, la présidente de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) a pris à l'encontre de M. A... une mesure de suspension provisoire à titre conservatoire. Puis, par une décision du 7 juillet 2021, la commission des sanctions de l'AFLD a prononcé une sanction comportant notamment l'interdiction pour l'intéressé de pratiquer diverses activités dans le domaine sportif pendant une durée de quatre ans, l'article 2 de la décision précisant qu'il y a lieu de déduire de cette durée la période pendant laquelle la suspension provisoire a produit ses effets, et a ordonné la publication du résumé de cette décision sur le site internet de l'AFLD pendant toute la durée de l'interdiction. M. A... demande l'annulation de cette seconde décision. Sur la régularité de la procédure disciplinaire et de la décision : 2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 232-12-1 du code du sport : " (...) Le président de la commission des sanctions convoque les séances de la commission et de ses sections. Il fixe leur ordre du jour. / La commission des sanctions établit son règlement intérieur (...) ". Selon le premier alinéa de l'article 4 de la délibération n° 2018-01 du 17 septembre 2018 portant règlement intérieur de la commission des sanctions de l'AFLD, prise pour l'application de ces dispositions : " La convocation est adressée par tout moyen aux membres de la commission cinq jours au moins avant la séance, sauf cas d'urgence. Elle est accompagnée de l'ordre du jour ". 3. Il résulte de l'instruction que la convocation à la séance du 7 juillet 2021 a été adressée, par voie électronique, à l'ensemble des membres de la commission des sanctions de l'Agence le 1er juillet 2021, soit dans les délais impartis, et était accompagnée de l'ordre du jour. Par suite, le moyen tiré de ce que les membres de la commission n'auraient pas été régulièrement convoqués manque en fait. 4. En deuxième lieu, aux termes du II de l'article L. 232-22 du code du sport : " (...) La personne concernée est convoquée à l'audience. Elle peut y présenter ses observations. Un représentant du collège peut également présenter des observations pour le compte de celui-ci. / La commission délibère hors la présence des parties et du représentant du collège ". Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 232-11 du code du sport : " Le collège peut désigner un de ses membres ou un agent de l'agence pour le représenter devant la commission des sanctions ". En vertu de l'article R. 232-95 de ce code : " Le membre du collège ou l'agent de l'agence désigné en application du dernier alinéa de l'article R. 232-11 peut assister à l'audience et présenter des observations. Le cas échéant, le membre du collège peut être assisté par un agent de l'agence ". 5. Il résulte de l'instruction que Mme B..., directrice adjointe des affaires juridiques et institutionnelles de l'Agence française de lutte contre le dopage, a été désignée, le 17 juin 2021, par le collège de l'Agence pour le représenter lors de la séance de la commission des sanctions du 7 juillet 2021. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de sa désignation doit être écarté comme manquant en fait. Sur les procédures de contrôle et d'analyse : 6. En premier lieu, les stipulations du code mondial antidopage, qui constitue le premier appendice de la convention internationale contre le dopage dans le sport, ne produisent pas d'effets entre les Etats ni, par voie de conséquence, à l'égard des particuliers et ne peuvent donc pas être utilement invoquées, à défaut de tout renvoi du code du sport, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation d'une décision individuelle ou réglementaire. Ainsi que l'a rappelé la commission des sanctions de l'AFLD, M. A... ne peut dès lors utilement se prévaloir des stipulations du code mondial antidopage pour contester la régularité des opérations de contrôle et d'analyse des prélèvements. 7. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 232-11 du code du sport, alors en vigueur : " (...) sont habilités à procéder aux contrôles diligentés par l'Agence française de lutte contre le dopage ou demandés par les personnes mentionnées à l'article L. 232-13 et à rechercher et constater les infractions aux dispositions prévues aux articles L. 232-9 et L. 232-10 les agents relevant du ministre chargé des sports et les personnes agréées par l'agence et assermentés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 232-68 du même code : " L'agrément des personnes chargées du contrôle au titre de l'article L. 232-11 est accordé par l'Agence française de lutte contre le dopage dans les conditions qu'elle définit. (...) / L'agrément est donné pour une durée de deux ans renouvelable ". Le moyen selon lequel la procédure serait irrégulière faute pour l'agent préleveur d'être dûment agréé et assermenté ne peut qu'être écarté dès lors qu'il résulte de l'instruction que le médecin chargé du prélèvement a été agréé pour une durée de deux ans par une décision de l'AFLD en date du 4 mai 2018 et que celui-ci a prêté serment devant le tribunal de grande instance de Tarascon le 28 février 2012. 8. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 232-49 du code du sport, alors en vigueur : " Chaque contrôle comprend : / 1° Le cas échéant, l'information de la personne en charge du contrôle de l'utilisation par le sportif des produits de santé définis à l'article L. 5311-1 du code de la santé publique, en particulier de médicaments, qu'ils aient fait ou non l'objet d'une prescription ; / (...) 3° Un ou plusieurs des prélèvements et opérations de dépistage (...) ; / 4° La rédaction et la signature du procès-verbal (...) ". En vertu de l'article R. 232-51 du même code : " Les prélèvements et opérations de dépistage énumérés à l'article R. 232-50 se font sous la surveillance directe de la personne chargée du contrôle. Ils sont effectués dans les conditions suivantes : / 1° Le récipient destiné à recevoir chaque échantillon est adapté à la nature de celui-ci et à celle des analyses. Il est conçu pour éviter tout risque de contamination et de pollution ; / (...) 5° A l'exception de l'échantillon sanguin qui est réparti par la personne chargée du contrôle, chaque échantillon est réparti, soit par l'intéressé sous la surveillance de la personne chargée du contrôle, soit par cette dernière, en deux flacons scellés qui comportent un étiquetage d'identification portant un numéro de code ; chaque flacon contient une quantité suffisante pour permettre la réalisation d'une première analyse et, si nécessaire, d'une seconde (...) ". Enfin, selon l'article R. 232-58 de ce code : " La personne contrôlée doit assister à l'ensemble des opérations de contrôle. / La personne chargée du contrôle dresse sans délai procès-verbal des conditions dans lesquelles elle a procédé aux prélèvements et opérations de dépistage. / Les observations que la personne chargée du contrôle ou le sportif contrôlé souhaite présenter sur les conditions de déroulement du contrôle sont consignées dans le procès-verbal. / Le sportif contrôlé vérifie l'identité entre les numéros de code des échantillons mentionnés au 5°de l'article R. 232-51 et ceux qui sont inscrits sur le procès-verbal. Cette vérification est consignée au procès-verbal ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le sportif contrôlé, qui assiste à l'intégralité des opérations de contrôle jusqu'à la signature du procès-verbal, est mis à même de s'assurer de la régularité des opérations de contrôle et de procéder, à l'issue du prélèvement, à la vérification de l'identité entre les numéros indiqués sur les flacons d'échantillons et ceux retranscrits sur le procès-verbal établi par l'agent chargé du prélèvement. Cette vérification doit être contresignée sur le procès-verbal par le sportif, lequel peut éventuellement y mentionner toute observation relative au déroulement de l'opération de contrôle qu'il estimerait utile. 9. Il résulte de l'instruction que M. A... a signé le formulaire de contrôle du dopage, sans faire d'observation ni exprimer aucune réserve sur l'attribution des échantillons, sur les conditions dans lesquelles ils ont été scellés, ni sur le fait qu'il n'aurait pas assisté à l'ensemble des opérations de contrôle. Ni les allégations du requérant selon lesquelles il aurait laissé hors de sa surveillance les échantillons urinaires prélevés avant qu'ils soient scellés, par les contradictions qu'elles comportent au regard d'autres déclarations de l'intéressé, ce que la commission des sanctions pouvait à bon droit relever pour porter son appréciation, ni les témoignages produits, par leur imprécision, ne sont de nature à remettre en cause les mentions du procès-verbal relatives à la régularité des opérations de recueil et de conservation des échantillons prélevés. 10. En troisième lieu, si M. A... se prévaut de la quantité importante de médicaments qu'il avait prise peu avant le contrôle et des effets secondaires susceptibles d'y être associés, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction, notamment du formulaire de contrôle, des informations que l'intéressé a lui-même été en mesure de fournir à cette occasion sur les produits absorbés, des témoignages produits et des constatations faites par l'agent de contrôle assermenté, que le discernement de l'intéressé en aurait été affecté, ainsi qu'au demeurant l'a estimé à bon droit la commission des sanctions de l'AFLD. 11. En quatrième et dernier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 232-18 du code du sport, dans sa rédaction applicable au litige : " Les analyses des prélèvements effectués par l'Agence française de lutte contre le dopage sont réalisées, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, par tout laboratoire désigné à cette fin par l'agence et accrédité par l'Agence mondiale antidopage ". Selon l'article R. 232-43 du même code : " (...) Ces analyses sont effectuées conformément aux normes internationales (...) ". 12. Il résulte de l'instruction qu'en se bornant à faire état de contradictions, incohérences et erreurs dans les résultats de l'analyse effectuée à la suite du contrôle antidopage dont il fait l'objet, notamment en invoquant les avis des experts qu'il a consultés, M. A... n'apporte pas d'élément permettant de caractériser une absence de conformité des conditions de réalisation de l'analyse aux exigences techniques définies par l'Agence mondiale antidopage ni de remettre en cause l'origine exogène des substances révélées par l'analyse. Par suite, le moyen tiré de ce que les analyses effectuées sur les échantillons prélevés étaient irrégulières et que la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage ne pouvait s'y référer pour prononcer une sanction à son encontre ne peut qu'être écarté. Sur la sanction : 13. Aux termes du I de l'article L. 232-9 du code du sport, dans sa rédaction applicable au litige : " Est interdite la présence, dans l'échantillon d'un sportif, des substances figurant sur la liste mentionnée au dernier alinéa du présent article, de leurs métabolites ou de leurs marqueurs. Il incombe à chaque sportif de s'assurer qu'aucune substance interdite ne pénètre dans son organisme. / L'infraction au présent I est établie par la présence, dans un échantillon fourni par le sportif, d'une substance interdite, de ses métabolites ou de ses marqueurs, sans qu'il y ait lieu de rechercher si l'usage de cette substance a revêtu un caractère intentionnel ". Selon le I de l'article L. 232-23 du même code : " La commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage peut prononcer à l'encontre des personnes ayant enfreint les dispositions des articles L. 232-9, L. 232-9-1, L. 232-9-2, L. 232-9-3, L. 232-10, L. 232-14-5 ou L. 232-17 : (...) 2° Une interdiction temporaire ou définitive : / a) De participer directement ou indirectement à l'organisation et au déroulement de toute manifestation sportive donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature, et des manifestations sportives autorisées par une fédération délégataire ou organisées par une fédération agréée ou par une ligue sportive professionnelle ainsi qu'aux entraînements y préparant organisés par une fédération agréée ou une ligue professionnelle ou l'un des membres de celles-ci ; / b) D'exercer les fonctions définies à l'article L. 212-1 ; / c) D'exercer les fonctions de personnel d'encadrement ou toute activité administrative au sein d'une fédération agréée ou d'une ligue professionnelle, ou de l'un de leurs membres ; / d) Et de prendre part à toute autre activité organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle ou l'un de leurs membres, ou le comité national olympique et sportif français, ainsi qu'aux activités sportives impliquant des sportifs de niveau national ou international et financées par une personne publique, à moins que ces activités ne s'inscrivent dans des programmes ayant pour objet la prévention du dopage (...) ". En vertu du I de l'article L. 232-23-3-3 du même code : " La durée des mesures d'interdiction mentionnées au 2° du I de l'article L. 232-23 à raison d'un manquement à l'article L. 232-9 ou au 2° de l'article L. 232-10 : / 1° Est de quatre ans lorsque ce manquement implique une substance non spécifiée. Cette durée est ramenée à deux ans lorsque le sportif démontre qu'il n'a pas eu l'intention de commettre ce manquement (...) ". Aux termes du dernier alinéa du II de l'article L. 232-23-3-10 du même code : " La durée des mesures d'interdiction prévues aux articles L. 232-23-3-3 à L. 232-23-3-8 peut être réduite par une décision spécialement motivée lorsque les circonstances particulières de l'affaire le justifient au regard du principe de proportionnalité ". 14. Il résulte de l'instruction que l'analyse effectuée à la suite du contrôle auquel le requérant a été soumis le 19 mai 2019 a fait ressortir la présence dans ses urines de testostérone et de ses métabolites, d'origine exogène. Si l'intéressé fait valoir les conséquences d'un arrêt brutal du rugby à son jeune âge, le caractère irréprochable jusqu'ici de sa pratique sportive, l'absence de contrôle positif antérieur ainsi que ses difficultés liées à son absence de maîtrise de la langue française et à son isolement, la durée de quatre ans des interdictions prononcées par la commission des sanctions de l'AFLD n'apparaît pas disproportionnée eu égard à la nature des substances détectées, à la gravité du manquement constaté et en l'absence d'élément de nature à justifier son prétendu manque de vigilance quant aux produits consommés, alors qu'il pratique son sport à titre professionnel. 15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque, qui est suffisamment motivée. 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Agence française de lutte contre le dopage qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme de 3 000 euros à verser à l'Agence au même titre. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : M. A... versera à l'Agence française de lutte contre le dopage une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. C... A... et à l'Agence française de lutte contre le dopage.
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Vu la procédure suivante : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nice, en premier lieu, d'annuler l'arrêté du 8 août 2017 par lequel le maire de La Roquette-sur-Siagne a prononcé à son encontre la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours, ainsi que celle de l'arrêté du 24 août 2017 reportant l'exécution de cette sanction au terme de son congé maladie, en deuxième lieu, d'annuler l'arrêté du 28 mai 2018 par lequel le maire a prononcé à son encontre la sanction d'abaissement d'échelon du 6ème au 1er échelon de son grade, en troisième lieu, d'annuler la décision du 20 juillet 2018 par laquelle le maire l'a affecté à compter du 24 juillet 2018 sur le poste de responsable de service chargé de la police municipale, en dernier lieu, d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018 par lequel le maire lui a retiré le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) attaché à ses fonctions d'encadrement, à compter du 1er août 2018. Par trois jugements n° 1704729, n° 1803193 et n°s 1804076, 1804248 du 16 janvier 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes. Par un arrêt n°s 20MA01256, 20MA01257, 20MA01258 du 15 avril 2021, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de M. B..., annulé les jugements n° 1704729 et n° 1803193 ainsi que les arrêtés des 8 et 24 août 2017 et 28 mai 2018. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 juin et 13 septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de La Roquette-sur-Siagne demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il a annulé l'arrêté du 28 mai 2018 infligeant à M. B... la sanction d'abaissement d'échelon ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions d'appel de M. B... ; 3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général de la fonction publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Mélanie Villiers, maître des requêtes, - les conclusions de M. A... D... de Vendeuil, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la commune de la Roquette-sur-Siagne et à la SCP Doumic-Seiller, avocat de M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., chef de service de police municipale de 1ère classe exerçant au sein de la commune de La Roquette-sur-Siagne, a relevé appel des jugements du 16 janvier 2020 par lesquels le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du maire du 28 mai 2018 lui infligeant la sanction de l'abaissement du 6ème au 1er échelon de son grade, des arrêtés du maire des 8 et 24 août 2017 lui infligeant la sanction de l'exclusion temporaire de fonction pour une durée de trois jours à compter de sa reprise de fonctions et de la décision du 20 juillet 2018 ainsi que de l'arrêté du même jour par lesquels le maire, d'une part, l'a affecté à compter du 24 juillet 2018 sur le poste de responsable de service chargé de la police municipale d'autre part, lui a retiré le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire. Par un arrêt du 15 avril 2021, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé les jugements n° 1704729 et n° 1803193 du 16 janvier 2020 du tribunal administratif de Nice ainsi que les arrêtés en litige des 8 et 24 août 2017 et du 28 mai 2018. La commune de La Roquette-sur-Siagne se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il a annulé l'arrêté du 28 mai 2018 lui infligeant la sanction d'abaissement d'échelon. Sur le cadre juridique applicable : 2. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, applicable au litige, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 530-1 du code général de la fonction publique : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire (...) ". 3. D'autre part, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. La constatation et la caractérisation des faits reprochés à l'agent relèvent, dès lors qu'elles sont exemptes de dénaturation, du pouvoir souverain des juges du fond. Le caractère fautif de ces faits est susceptible de faire l'objet d'un contrôle de qualification juridique de la part du juge de cassation. L'appréciation du caractère proportionné de la sanction au regard de la gravité des fautes commises relève, pour sa part, de l'appréciation des juges du fond et n'est susceptible d'être remise en cause par le juge de cassation que dans le cas où la solution qu'ils ont retenue quant au choix, par l'administration, de la sanction est hors de proportion avec les fautes commises. Sur le pourvoi : 4. En premier lieu, en jugeant que si M. B... avait, le 13 octobre 2017, laissé en apparence dans son bureau la clef du coffre dans lequel se trouvait celle de la cassette renfermant les armes de service, cette circonstance n'était pas de nature à caractériser une faute dès lors que la porte de son bureau était verrouillée chaque fois qu'il ne s'y trouvait pas et que seul un agent possédait un double des clefs permettant d'y accéder, la cour, qui n'a pas dénaturé les faits, ne les a pas inexactement qualifiés. 5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... a usé de sa position de supérieur hiérarchique afin d'obtenir de trois agents de son service qu'ils rédigent des attestations en sa faveur contre sa hiérarchie et qu'il a chargé la secrétaire du poste de police municipale de rappeler aux agents les règles de sécurité auxquelles ils sont tenus, contribuant ainsi à instaurer un climat de tension au sein du service. En outre, il a omis à plusieurs reprises de transmettre au maire certaines informations qui lui étaient demandées ou lui a communiqué des informations erronées et n'a pas été joignable pendant deux heures après avoir pris l'initiative, sans en avertir sa hiérarchie, de fermer au public le poste de police municipale pendant ses horaires d'ouverture. En estimant qu'eu égard à leur gravité mesurée, les fautes ainsi commises par M. B... ne justifiaient pas que la sanction de l'abaissement du 6ème au 1er échelon de son grade lui soit infligée, compte tenu notamment de ses répercussions particulièrement lourdes sur la carrière et la rémunération de l'agent, la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas retenue une solution hors de proportion avec les fautes commises. 6. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la commune de La Roquette-sur-Siagne doit être rejeté, y compris ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune le versement à M. B... d'une somme de 3 000 euros au titre de ces dispositions. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de commune de La Roquette-sur-Siagne est rejeté. Article 2 : La commune de La Roquette-sur-Siagne versera à M. B... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée à la commune de la Roquette-sur-Siagne et à M. C... B.... Délibéré à l'issue de la séance du 28 septembre 2022 où siégeaient : M. Olivier Japiot, président de chambre, présidant ; M. Gilles Pellissier, conseiller d'Etat et Mme Mélanie Villiers, maître des requêtes-rapporteure. Rendu le 18 octobre 2022. Le président : Signé : M. Olivier Japiot La rapporteure : Signé : Mme Mélanie Villiers La secrétaire : Signé : Mme Pierrette Kimfunia
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Vu la procédure suivante : Par une décision du 26 mars 2018, la section disciplinaire du conseil académique de l'université Grenoble Alpes a, sur la plainte de cet établissement, infligé à M. B... A... la sanction de l'exclusion de l'établissement pour une durée d'un an assortie de quatre mois de sursis. Par une décision du 16 juin 2021, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, statuant en matière disciplinaire, a infligé à M. A... la même sanction. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 6 décembre 2021 et le 17 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cette décision ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de l'université Grenoble Alpes le versement à son conseil, la SCP Marlange, de la Burgade, de la somme de 3 000 euros, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution ; - le code de l'éducation ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Pierre Vaiss, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de M. A... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 26 mars 2018, la section disciplinaire du conseil académique de l'université Grenoble Alpes a infligé à M. A..., étudiant en première année de licence, la sanction de l'exclusion de cet établissement pour une durée d'un an assortie de quatre mois de sursis. Par une décision du 16 juin 2021, contre laquelle M. A... se pourvoit en cassation, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), statuant en matière disciplinaire, a infligé à M. A... la même sanction. 2. Aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " L'aide juridictionnelle peut être demandée avant ou pendant l'instance ". Aux termes de l'article 51 du décret du 28 décembre 2020 : " I. - En cas de demande d'aide juridictionnelle formée en cours d'instance, le secrétaire du bureau d'aide juridictionnelle ou de la section du bureau en avise le président de la juridiction saisie. / Dans le cas où la demande est faite en vue d'exercer une voie de recours, l'avis est adressé au président de la juridiction devant laquelle le recours doit être porté. / Le greffier ou le secrétaire de la juridiction saisie classe sans délai, dans tous les cas, au dossier de procédure, l'avis transmis par le bureau ou la section. / II. - Sans préjudice de l'application des dispositions relatives à l'admission provisoire, la juridiction avisée du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle sursoit à statuer dans l'attente de la décision relative à cette demande (...) ". Il résulte en outre du droit constitutionnellement garanti à toute personne à un recours effectif devant une juridiction que, lorsqu'un requérant a formé une demande d'aide juridictionnelle, l'obligation de surseoir à statuer s'impose à la juridiction, que cette dernière ait ou non été avisée de cette demande dans les conditions fixées par le décret du 28 décembre 2020. 3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de la procédure suivie devant le CNESER, statuant en matière disciplinaire, que, dans le cadre de son appel formé le 25 mai 2018 contre la décision de la section disciplinaire du conseil académique de l'université Grenoble Alpes du 26 mars 2018, M. A... a présenté, en cours d'instance, une demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau compétent du tribunal judiciaire de Paris et que, sans attendre que le bureau d'aide juridictionnelle ne se soit prononcé sur cette demande, le CNESER a statué sur la requête d'appel de M. A.... Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que, ce faisant, le CNESER, statuant en matière disciplinaire, a entaché sa décision d'irrégularité. 4. Au surplus, il résulte des énonciations mêmes de la décision attaquée que, pour rejeter l'appel de M. A..., le CNESER, statuant en matière disciplinaire, s'est borné à relever que " M. B... A... a nié les faits qui lui [étaient] reprochés, qu'au vu des pièces du dossier et des explications fournies par [l'intéressé], les juges d'appel n'ont pas été convaincus [et que], en conséquence, il conv[enait] de sanctionner M. B... A... pour ses agissements ". En statuant ainsi, sans préciser les faits reprochés à M. A..., ni se prononcer sur leur matérialité et les manquements qui pouvaient, le cas échéant, être par suite retenus à l'encontre de M. A..., le CNESER a entaché sa décision d'insuffisance de motivation. 5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que M. A... est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque. 6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'université Grenoble Alpes la somme de 3 000 euros que M. A... demande au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : La décision du 16 juin 2021 du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, statuant en matière disciplinaire, est annulée. Article 2 : L'affaire est renvoyée au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, statuant en matière disciplinaire. Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A..., à l'université Grenoble Alpes et à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
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Vu la procédure suivante : M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler, d'une part, la décision du 16 avril 2018 par laquelle la ministre de la culture a prononcé son licenciement, d'autre part, la décision implicite par laquelle la ministre de la culture a rejeté le recours administratif préalable qu'il a formé le 12 juillet 2018 et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 49 730 euros, assortie des intérêts légaux, en réparation des préjudices résultant de l'illégalité de la décision du 16 avril 2018 prononçant son licenciement. Par un jugement n°s 1810839, 1820562 du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 16 avril 2018 et a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes. Par un arrêt n° 20PA02074 du 25 juin 2021, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. D... contre ce jugement en tant que celui-ci a rejeté le surplus de ses conclusions. Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 25 août et 25 novembre 2021 et 21 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Mélanie Villiers, maître des requêtes, - les conclusions de M. A... C... de Vendeuil, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M. D... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. D... a été recruté par le ministère de la culture comme agent contractuel à compter du 1er février 2018. Par un arrêté du 16 avril 2018, la ministre de la culture a prononcé son licenciement à compter du 1er mai 2018. Par un jugement du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis. M. D... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 25 juin 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel contre ce jugement. 2. Aux termes de l'article 9 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le contrat ou l'engagement peut comporter une période d'essai qui permet à l'administration d'évaluer les compétences de l'agent dans son travail et à ce dernier d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent. / (...) La période d'essai et la possibilité de la renouveler sont expressément stipulées dans le contrat ou l'engagement. : (...) Le licenciement en cours ou au terme de la période d'essai ne peut intervenir qu'à l'issue d'un entretien préalable. La décision de licenciement est notifiée à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. / (...) Aucune durée de préavis n'est requise lorsque la décision de mettre fin au contrat intervient en cours ou à l'expiration d'une période d'essai. / (...) Le licenciement au cours d'une période d'essai doit être motivé. (...) ". 3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 16 avril 2018, la ministre de la culture a mis fin au contrat de M. D... à compter du 1er mai 2018, soit à une date antérieure à l'expiration de la période d'essai. Il suit de là qu'en jugeant que la ministre de la culture avait pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, procéder au licenciement de l'intéressé à la date précitée, alors qu'il lui appartenait d'exercer un plein contrôle sur la décision de licenciement de M. D... dès lors qu'elle est intervenue avant l'expiration de la période d'essai, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit. 4. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. D... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 25 juin 2021 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Paris. Article 3 : L'Etat versera à M. D... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... D... et à la ministre de la culture. Délibéré à l'issue de la séance du 28 septembre 2022 où siégeaient : M. Olivier Japiot, président de chambre, présidant ; M. Gilles Pellissier, conseiller d'Etat et Mme Mélanie Villiers, maître des requêtes-rapporteure. Rendu le 18 octobre 2022. Le président : Signé : M. Olivier Japiot La rapporteure : Signé : Mme Mélanie Villiers La secrétaire : Signé : Mme Pierrette Kimfunia
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 19 février 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours, formé contre la décision implicite des autorités consulaires françaises à Bamako (Mali) refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Par un jugement n° 2109026 du 14 mars 2022, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 19 février 2021 et a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à M. E... le visa de long séjour sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 13 mai 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer, demande à la cour d'annuler ce jugement du 14 mars 2022 du tribunal administratif de Nantes et de rejeter la demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Nantes. Il soutient que : - un motif d'ordre public fonde la décision de rejet ; l'intéressé a commis une usurpation d'identité lui permettant de faire transcrire à l'état-civil neuf fausses déclarations de naissance de tiers ; il a ignoré les jugements prononcés à son encontre en se prévalant d'une fausse identité au moins jusqu'en 2018 et en continuant d'utiliser des documents obtenus frauduleusement ; il a effectué de fausses déclarations fiscales ; - le mariage de M. E... avec Mme F... a été contracté à des fins étrangères à l'institution matrimoniale ; il devrait être frappé de nullité et est inopposable aux tiers eu égard aux informations frauduleuses y figurant ; la reconnaissance de l'enfant de Mme F... est intervenue à des fins frauduleuses. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2022, M. D... E..., représenté par Me Amsellem, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête du ministre de l'intérieur et des outre-mer ; 2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de lui délivrer le visa sollicité dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur et des outre-mer ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale des droits de l'enfant ; - le code civil ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. E..., ressortissant malien né le 8 mars 1970, s'est marié à Paris le 19 octobre 2020 avec Mme F..., ressortissante française. Il a alors sollicité la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française auprès de l'autorité consulaire française à Bamako (Mali), laquelle a rejeté sa demande par une décision du 19 février 2021. Le recours formé contre cette décision devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a été rejeté par une décision implicite née le 15 juin 2021. Par un jugement du 14 mars 2022, dont le ministre de l'intérieur et des outre-mer relève appel, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et a enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer à M. E... le visa de long séjour sollicité. Par un arrêt du 24 juin 2022 de la cour administrative d'appel de Nantes il a été sursis à l'exécution de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 211-2-1, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le visa de long séjour ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de Français qui remplit les conditions prévues au présent article ". 3. D'une part, il résulte de ces dispositions qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire afin que les époux puissent mener une vie familiale normale. Pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir, par des éléments précis et concordants, que le mariage est entaché d'une telle fraude de nature à légalement justifier le refus de visa. La seule circonstance que l'intention matrimoniale d'un seul des deux époux ne soit pas contestée ne fait pas obstacle à ce qu'une telle fraude soit établie. D'autre part, des circonstances particulières tenant à des motifs tirés de la nécessité de préserver l'ordre public peuvent être de nature à justifier légalement un refus de visa. 4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la requête présentée par le ministre de l'intérieur et des outre-mer devant la cour, que pour refuser le visa sollicité par M. E... le ministre s'est fondé sur la menace pour l'ordre public que constituerait sa présence en France et sur le caractère frauduleux de son mariage le 19 octobre 2020 avec Mme F..., ressortissante française, eu égard à l'absence d'intention matrimoniale. 5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, pour certaines produites pour la première fois devant la cour, que M. E... a obtenu frauduleusement en 2002 une carte d'identité française en usurpant l'identité d'un tiers, et qu'il a usé de cette fausse identité pendant dix ans. Par un arrêt devenu définitif du 30 mai 2016, la cour d'appel de Rennes a ainsi confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Nantes du 7 mai 2015 condamnant M. E... à indemniser ce tiers du fait de cette usurpation d'identité identifiée et prononçant pour ce motif l'annulation de l'acte de mariage de M. E... avec Mme A... B..., de neuf actes de naissance et de quatre actes de reconnaissance d'enfants. Il est également établi que malgré cette condamnation, l'intéressé a continué à se prévaloir de cette fausse identité auprès des autorités françaises, notamment auprès de la préfecture de police de Paris en 2018, et à nier toute usurpation d'identité. La même année, l'intéressé s'est également prévalu de sa fausse identité en produisant auprès des services des impôts une copie de sa carte d'identité de 2002 et de " cartes vitales " de 2002 et 2017, établies sous le même nom et avec le même numéro que celle dont bénéficie la personne dont il a usurpé l'identité. Dans ces conditions marquées par le fait que M. E... a persisté, malgré sa condamnation définitive en 2016, à se prévaloir d'une identité usurpée et a communiqué à l'administration française des documents frauduleux, c'est par une exacte application de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la commission a rejeté sa demande de visa en raison de la menace qu'il constitue pour l'ordre public. 6. En deuxième lieu, il est justifié par un acte de naissance établi par la mairie de Paris que M. E... est le père d'une enfant née le 24 septembre 2019 de sa relation avec Mme F..., ressortissante française avec laquelle il s'est marié 19 octobre 2020, ainsi qu'il ressort de l'acte de mariage établi le même jour par la mairie de Paris. Néanmoins aucune pièce au dossier n'établit la vie commune du couple ni les relations entretenues par M. E... avec sa fille. La seule production de quelques factures établies en 2019 et 2020 pour l'achat de produits pour enfant est insuffisante à cet égard. De même l'envoi d'argent par mandat de M. E... à Mme F... en mars et en août 2020, alors surtout que tous les deux résidaient en France, n'établit pas davantage une vie commune du couple. Les seules attestations du 18 juin 2020 d'une infirmière puéricultrice indiquant que M. E... a accompagné l'enfant lors d'une visite médicale le 18 juin 2020, et du 31 janvier 2020 d'un médecin indiquant qu'il accompagnait son épouse, également lors d'une visite médicale, sont insuffisantes pour établir la vie commune alléguée. Enfin aucun élément n'atteste d'un maintien de relations entre Mme F..., M. E... et leur enfant depuis le départ de l'intéressé au Mali. Par suite, c'est également par une exacte appréciation des dispositions précitées de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la commission de recours a rejeté le recours formé devant elle au motif de l'absence d'intention matrimoniale de M. E.... 7. Ainsi c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur les moyens mentionnés aux points 5 et 6 pour annuler la décision attaquée du 19 février 2021. 8. Il appartient, toutefois, à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. E... devant le tribunal administratif de Nantes et devant la cour. 9. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un jugement du 17 novembre 2020 devenu définitif, le tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé un arrêté du 24 février 2020 du préfet de police de Paris refusant de délivrer à l'intéressé un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination et, d'autre part, a enjoint à l'administration de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour de M. E... dans un délai de trois mois. Cette circonstance ne donne toutefois à l'intéressé aucun droit au séjour sur le territoire français. Elle est, par suite, sans incidence sur la légalité de la décision de refus de visa contestée. 10. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 11. Si M. E... établit avoir vécu et travaillé depuis plus de vingt ans en France à la date de la décision contestée, il est constant qu'il l'a fait au bénéfice d'une usurpation d'identité. Par ailleurs, ainsi qu'il a été exposé, il n'est pas établi de vie de famille entre M. E..., Mme F... et l'enfant née en 2019. Par suite, et alors que l'intéressé n'établit pas l'existence d'autres liens tissés sur le territoire français, il n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée serait intervenue en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 12. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". 13. Si M. E... se prévaut de la présence en France de son épouse ainsi que de sa fille, née le 24 septembre 2019, il n'établit pas, ainsi qu'il a été exposé au point 6, la réalité et la densité des liens qu'il entretiendrait avec elles. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut qu'être écarté. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours présenté par M. E... contre la décision de l'autorité consulaire française à Bamako lui refusant un visa d'entrée et de long séjour en qualité de conjoint étranger d'une ressortissante française. Sur les conclusions à fin d'injonction : 15. Il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. E... ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais d'instance : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par M. E.... D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2109026 du 14 mars 2022 du tribunal administratif de Nantes est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Nantes et ses conclusions d'appel présentées aux fins d'injonction et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. D... E.... Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - M. Franck, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur, C. C... Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT01466
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Vu la procédure suivante : A... une requête enregistrée le 23 septembre 2022, M. D... B..., représenté A... Me Dravigny, demande à la cour : 1°) de suspendre l'exécution de l'arrêté du 2 juillet 2021 A... lequel le préfet du Doubs a rejeté sa demande de titre de séjour ; 2°) à ce qu'il soit enjoint au préfet du Doubs de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler et de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'ordonnance ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son avocat, Me Dravigny, qui renonce dans cette hypothèse à percevoir le montant de l'aide juridictionnelle sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : s'agissant de la condition d'urgence : - sa situation est très précaire, il est dépourvu de ressource et doit compter sur la solidarité nationale pour être hébergé ; il est vulnérable d'autant plus qu'il a des problèmes de santé ; s'agissant du doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée : - elle est entachée d'une erreur de fait quant à sa minorité ; - elle méconnaît l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ; - elle est entachée d'erreur de droit en l'absence A... le préfet de l'examen globale de sa situation au regard de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A... un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2022, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête. Il soutient que les conditions du référé suspension ne sont pas remplies. Vu : - la requête n° 22NC02317 A... laquelle M. D... B... fait appel du jugement du tribunal administratif de Besançon n° 2101189 du 30 août 2022 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2021 A... lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays de renvoi ; - la demande d'aide juridictionnelle du 22 septembre 2022 ; - les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - le code de justice administrative. La présidente de la cour a, A... une ordonnance du 1er septembre 2022 désigné Mme C... E... comme juge des référés en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Ghisu-Deparis, juge des référés ; - les observations de M. D... B.... Considérant ce qui suit : Sur l'aide juridictionnelle provisoire : 1. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit A... le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit A... la juridiction compétente ou son président ". Aux termes de l'article 61 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et relatif à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat dans les procédures non juridictionnelles : " (...) L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence ( ...) L'admission provisoire est accordée A... le président du bureau ou de la section ou le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme A... l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle ou d'aide à l'intervention de l'avocat sur laquelle il n'a pas encore été statué ". 2. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'admettre M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire. Sur les conclusions à fin de suspension de l'exécution de l'arrêté du 2 juillet 2021 portant refus de titre de séjour : 3. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ". 4. M. B..., ressortissant guinéen, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, en février 2019. A... deux ordonnances de placement provisoire, il a été confié, compte tenu de sa minorité, aux services de l'aide sociale à l'enfance du département du Doubs à compter du 15 mai 2019. Le 11 mai 2020, il a présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenu l'article L. 435-3 du même code. A... un arrêté du 2 juillet 2021, le préfet du Doubs lui a opposé un refus, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. B... a contesté ces décisions. A... un jugement avant dire droit du 14 octobre 2021 le tribunal administratif de Besançon a sursis à statuer à cette demande d'annulation dans l'attente de l'avis du Conseil d'Etat qu'il a saisi. Cet avis n° 457494 a été rendu le 21 juin 2022. A... un jugement du 30 août 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande de M. B.... Un appel contre ce jugement, enregistré sous le n° 22NC02317, est actuellement pendant devant la cour. A... la présente requête, M. B... demande la suspension de l'exécution de cet arrêté en tant qu'il porte refus de titre de séjour. En ce qui concerne l'urgence : 5. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande de suspension d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour, d'apprécier et de motiver l'urgence compte tenu de l'incidence immédiate du refus de titre de séjour sur la situation concrète de l'intéressé. Cette condition d'urgence sera en principe constatée dans le cas d'un refus de renouvellement du titre de séjour, comme d'ailleurs d'un retrait de celui-ci. Dans les autres cas, il appartient au requérant de justifier de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure provisoire dans l'attente d'une décision juridictionnelle statuant sur la légalité de la décision litigieuse. 6. Il résulte de l'instruction et n'est au demeurant pas contesté que M. B..., qui avait été, du fait de sa minorité, pris en charge A... le département du Doubs, est démuni de toute ressource et hébergement. A... suite, l'exécution du refus de titre en litige porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à la situation du requérant. La condition d'urgence est A... suite remplie. En ce qui concerne le doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée : 7. Aux termes de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur son insertion dans la société française ". Pour refuser à M. B... la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Doubs s'est fondé sur le fait que l'intéressé, A... les documents justifiant son état civil, jugés frauduleux, n'établissait pas son identité et A... suite avoir été confié au service de l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans. 8. Il résulte de l'instruction et plus particulièrement du passeport de l'intéressé, produit devant le tribunal administratif, que le moyen tiré de l'erreur de fait quant à l'âge de M. B... lorsqu'il a été confié au service de l'aide social à l'enfance paraît, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du refus de titre de séjour du 2 juillet 2021. 9. Il y a en conséquence lieu, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 2 juillet 2021 portant refus de titre de séjour. Sur les conclusions à fin d'injonction : 10. Lorsque le juge ordonne, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution d'une décision ayant rejeté une demande de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour émanant d'un ressortissant étranger, ce dernier ne peut, en raison même de la suspension de la décision, être regardé comme se trouvant dans une situation irrégulière sur le territoire français. En conséquence, l'autorité administrative a l'obligation, aussi longtemps que la suspension ordonnée produit effet, de le munir d'un récépissé de demande de carte de séjour valant autorisation provisoire de séjour. Indépendamment de la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, il appartient à l'autorité administrative, au vu du ou des moyens servant de fondement à la mesure de suspension, de procéder à un nouvel examen de la situation du requérant sans attendre la décision du juge saisi au principal, en fonction de l'ensemble des circonstances de droit et de fait au jour de ce réexamen. 11. La présente ordonnance implique ainsi qu'il soit enjoint au préfet du Doubs de procéder au réexamen de la demande de M. B..., dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'ordonnance, et de lui délivrer, sans délai, un récépissé de demande de carte de séjour valant autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans l'attente de l'arrêt au fond. Sur les frais liés à l'instance : 12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre la somme de 1 200 euros à la charge de l'Etat à verser à Me Dravigny au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à la double condition que M. B... se voit accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre définitif, et que Me Dravigny renonce à percevoir l'aide contributive de l'Etat. ORDONNE : Article 1er : M. B... est admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire. Article 2 : L'exécution de l'arrêté du 2 juillet 2021 portant refus de titre de séjour est suspendue. Article 3 : Il est enjoint au préfet du Doubs de procéder au réexamen de la demande de M. B..., dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'ordonnance, et de lui délivrer sans délai un récépissé de demande de carte de séjour valant une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler valable jusqu'à ce réexamen ou à défaut jusqu'à ce qu'il ait été statué A... la cour administrative d'appel sur sa demande en annulation de la décision de refus de séjour attaquée. Article 4 : Sous réserve de l'admission définitive de M. B... à l'aide juridictionnelle et sous réserve que Me Dravigny renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, ce dernier versera à Me Dravigny une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Dans le cas où l'aide juridictionnelle ne serait pas accordée à M. B... A... le bureau d'aide juridictionnelle, la somme de 1 200 euros lui sera directement versée. Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à M. D... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Doubs. Fait à Nancy, le 17 octobre 2022. Le juge des référés, Signé : V. E... La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 22NC02415
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Vu la procédure suivante : Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 mars, 15 juin et 20 juillet 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Créer son école d'autres associations et établissements d'enseignement privés, ainsi que des particuliers en leur nom propre ou au nom de leur enfant demandent au Conseil d'Etat, dans le dernier état de leurs écritures : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, le décret n° 2021-209 du 25 février 2021 relatif à l'organisation de l'examen du baccalauréat général et technologique de la session 2021 pour l'année scolaire 2020-2021, dans sa rédaction issue des décrets n° 2021-557 du 7 mai 2021 et n° 2021-737 du 9 juin 2021, d'autre part l'arrêté du même jour du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports dans sa rédaction issue de l'arrêté du 9 juin 2021, et, enfin, la note de service du 23 février 2021 relative au calendrier 2021 du baccalauréat dans le contexte de l'épidémie de la covid-19 modifiée par la note de service du 9 juin 2021, en tant que ces textes prévoient le maintien des épreuves terminales de spécialité pour les seuls candidats à la session 2021 du baccalauréat qui sont scolarisés dans les établissements privés hors contrat ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule ; - le code de l'éducation ; - l'ordonnance n° 2020-1694 du 24 décembre 2020 ; - le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ; - le décret n° 2021-209 du 25 février 2021 ; - le décret n° 2021-557 du 7 mai 2021 ; - le décret n° 2021-737 du 9 juin 2021 ; - l'arrêté du 25 février 2021 relatif aux modalités d'organisation de l'examen du baccalauréat général et technologique pour la session 2021 pour l'année scolaire 2020-2021 ; - l'arrêté du 9 juin 2021 modifiant l'arrêté du 25 février 2021 relatif aux modalités d'organisation de l'examen du baccalauréat général et technologique pour la session 2021 pour l'année scolaire 2020-2021 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Thalia Breton, auditrice, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. L'association Créer son école et d'autres requérants demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, le décret du 25 février 2021 et l'arrêté du même jour du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, relatifs à l'organisation de l'examen du baccalauréat général et technologique de la session 2021 pour l'année scolaire 2020-2021 et, d'autre part, la note de service du 23 février 2021 relative au calendrier 2021 du baccalauréat dans le contexte de l'épidémie de covid-19. Dans le dernier état de leurs écritures, les requérants doivent être regardés comme demandant l'annulation de ces trois textes dans leur rédaction issue d'un décret, d'un arrêté et d'une note de service du 9 juin 2021, en tant que ces textes prévoient le maintien des épreuves terminales de spécialité de la session 2021 du baccalauréat pour les seuls candidats scolarisés dans les établissements privés hors contrat. 2. Aux termes de l'article 3 de l'ordonnance du 24 décembre 2020 relative à l'organisation des examens et concours pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19 : " Nonobstant toute disposition législative ou réglementaire contraire, les autorités compétentes pour la détermination des modalités d'accès aux formations de l'enseignement supérieur dispensées par les établissements relevant des livres IV et VII du code de l'éducation ainsi que pour la détermination des modalités de délivrance des diplômes de l'enseignement supérieur, y compris le baccalauréat, peuvent apporter à ces modalités les adaptations nécessaires à leur mise en œuvre. / S'agissant des épreuves des examens ou concours, ces adaptations peuvent porter, dans le respect du principe d'égalité de traitement des candidats, sur leur nature, leur nombre, leur contenu, leur coefficient ou leurs conditions d'organisation, qui peut notamment s'effectuer de manière dématérialisée. / Les adaptations apportées en application du présent article sont portées à la connaissance des candidats par tout moyen dans un délai qui ne peut être inférieur à deux semaines avant le début des épreuves ". L'article 1er de cette même ordonnance prévoit que ses dispositions " ne sont mises en œuvre que dans la mesure où elles sont nécessaires pour faire face aux conséquences de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation ". 3. Il résulte des dispositions de l'article 2 du décret du 25 février 2021 relatif à l'organisation de l'examen du baccalauréat général et technologique de la session 2021 pour l'année scolaire 2020-2021, pris en application des dispositions citées au point 2, et de celles de l'article 2 de l'arrêté du 25 février 2021 relatif aux modalités d'organisation de l'examen du baccalauréat général et technologique pour la session 2021 pour l'année scolaire 2020-2021 que, pour les candidats au baccalauréat scolarisés dans les établissements public et privés sous contrat, l'évaluation des épreuves terminales de spécialité a été remplacée par la prise en compte des moyennes annuelles figurant dans leurs livrets scolaires, alors que ces épreuves ont été maintenues pour les candidats scolarisés dans les établissements privés hors contrat, qui sont au nombre de 4 000 environ. Enfin, par note de service du 23 février 2021, modifiée le 9 juin 2021, la cheffe de service de l'instruction publique et de l'action pédagogique a fixé les dates des épreuves écrites de spécialité pour ces candidats. Sur la légalité du décret et de l'arrêté attaqués : 4. Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier. 5. Aux termes du I de l'article L. 442-2 du code de l'éducation : " Mis en œuvre sous l'autorité conjointe du représentant de l'Etat dans le département et de l'autorité compétente en matière d'éducation, le contrôle de l'Etat sur les établissements d'enseignement privés qui ne sont pas liés à l'Etat par contrat se limite aux titres exigés des directeurs et des enseignants, à l'obligation scolaire, à l'instruction obligatoire, au respect de l'ordre public, à la prévention sanitaire et sociale et à la protection de l'enfance et de la jeunesse ". Compte tenu de la liberté ainsi reconnue à ces établissements en matière de programmes d'enseignement et de déroulement de la scolarité pour l'enseignement du second degré, la différence de traitement consistant, eu égard à l'évolution du contexte sanitaire de l'épidémie de covid-19 au printemps 2021, à maintenir les épreuves terminales de spécialités pour les seuls élèves qui y sont scolarisés, au lieu de remplacer ces épreuves par la prise en compte des moyennes annuelles figurant dans leurs relevés de notes tenant lieu de livret scolaire, est justifiée par une différence de situation entre ces élèves et ceux inscrits dans les établissements publics ou les établissements privés sous contrat. 6. D'une part, cette différence de traitement est en rapport direct avec l'objet des dispositions qui l'établissent, et n'est pas manifestement disproportionnée au regard de l'objectif de contrôle des connaissances requises pour l'obtention du diplôme du baccalauréat, sans que les requérants puissent utilement se prévaloir, pour contester la légalité des dispositions attaquées, relatives aux conditions d'obtention du baccalauréat, de ce que les notes figurant sur les relevés de notes tenant lieu de livret scolaire des élèves des établissements privés hors contrat sont susceptibles d'être prises en compte dans le cadre de la procédure nationale de préinscription dans les établissements d'enseignement supérieur, dite " Parcoursup ", prévue à l'article L. 612-3 du code de l'éducation, qui a un autre objet. 7. D'autre part, si les conditions sanitaires du printemps 2020 avaient conduit le Gouvernement à supprimer les épreuves terminales de la session 2020 du baccalauréat pour l'ensemble des élèves, le Premier ministre et le ministre chargé de l'éducation nationale ont pu, compte tenu du niveau de circulation de l'épidémie de covid-19 au printemps 2021 et de l'impossibilité de déployer à grande échelle un protocole sanitaire garantissant des conditions sanitaires d'examen satisfaisantes, décider de supprimer les épreuves terminales de spécialité pour les candidats de l'enseignement public et de l'enseignement privé sous contrat et de maintenir ces épreuves pour les seuls élèves des établissements hors contrat, sans porter atteinte au principe d'égalité entre les candidats au baccalauréat. 8. Enfin, dès lors que les dispositions que les requérants contestent n'ont pas adapté les modalités des épreuves terminales de spécialité subies par les candidats des établissements privés hors contrat, les requérants ne peuvent utilement soutenir que les décisions contestées, en ce qu'elles n'étaient pas nécessaires pour faire face aux conséquences de la propagation de l'épidémie de covid-19, ont été prises en méconnaissance des dispositions de l'ordonnance du 24 décembre 2020. 9. Il résulte de ce qui est dit aux points 5 à 8 que le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement entre les candidats au baccalauréat ne peut qu'être écarté en ses différentes branches. Sur la légalité de la note de service attaquée : 10. Aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : (...) 2° Les chefs de service (...) ". En vertu de ces dispositions, Mme A... B..., nommée, par arrêté du 21 novembre 2018 publié au Journal officiel du 23 novembre 2018, cheffe de service de l'instruction publique et de l'action pédagogique, avait qualité pour signer la note de service du 23 février 2021 attaquée au nom du ministre chargé de l'éducation nationale. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteure de cette note de service ne peut qu'être écarté. 11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, que la requête de l'association Créer son école et autres doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de l'association Créer son école et autres est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association Créer son école, première dénommée, pour l'ensemble des requérants, à la Première ministre, au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
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Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme D... B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 17 avril 2015 rapportant le décret du 28 janvier 2013 lui accordant la nationalité française ; 2°) d'enjoindre à l'administration, à titre principal, de les rétablir, elle et ses trois enfants, dans la nationalité française dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de leur délivrer de nouveaux passeports et cartes nationales d'identité dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de leur délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu : - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code civil ; - le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Paul Bernard, maître des requêtes, - les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article 27-2 du code civil : " Les décrets portant acquisition, naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai de deux ans à compter de leur publication au Journal officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales ; si la décision a été obtenue par mensonge ou fraude, ces décrets peuvent être rapportés dans le délai de deux ans à partir de la découverte de la fraude ". 2. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., ressortissante sénégalaise, a déposé une demande de naturalisation, le 7 juin 2012, par laquelle elle a indiqué être célibataire et s'est engagée sur l'honneur à signaler tout changement qui surviendrait dans sa situation personnelle et familiale. Au vu de ses déclarations, elle a été naturalisée par décret du 28 janvier 2013, publié au Journal officiel de la République française du 30 janvier 2013. Toutefois, par bordereau reçu le 2 septembre 2013, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a informé le ministre chargé des naturalisations de ce que Mme B... avait épousé à Dakar (Sénégal), le 2 août 2012, M. A... C..., ressortissant sénégalais résidant irrégulièrement en France. Par décret du 17 avril 2015, publié au Journal officiel de la République française du 19 avril 2015, le Premier ministre a rapporté le décret de naturalisation de Mme B... au motif qu'il avait été pris au vu d'informations mensongères délivrées par l'intéressée quant à sa situation maritale. Mme B... demande l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret. 3. En premier lieu, il ressort des mentions de l'ampliation du décret attaqué, certifié conforme par le secrétaire général du Gouvernement, que celui-ci a été signé par le Premier ministre et contresigné par le ministre de l'intérieur. Par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué ne serait pas revêtu des signatures requises ne peut qu'être écarté. 4. En deuxième lieu, le décret attaqué comporte l'indication des éléments de droit et de fait sur lesquels il se fonde et est ainsi suffisamment motivé. 5. En troisième lieu, l'article 21-16 du code civil dispose que : " Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation ". Il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière durable le centre de ses intérêts. Pour apprécier si cette condition est remplie, l'autorité administrative peut notamment prendre en compte, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la situation personnelle et familiale en France de l'intéressé à la date du décret lui accordant la nationalité française. 6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a contracté mariage le 2 août 2012 à Dakar avec M. C..., ressortissant sénégalais résidant irrégulièrement en France. Ce mariage a constitué un changement de sa situation familiale que l'intéressée aurait dû porter à la connaissance des services instruisant sa demande de naturalisation, comme elle s'y était engagée lors du dépôt de sa demande. Si Mme B... soutient que cette union ne constitue pas un mariage qui devait être porté à la connaissance des autorités françaises, la circonstance que son union avec M. C... ne pourrait être qualifiée de mariage en vertu de la loi qui lui est applicable n'interdit pas à l'autorité compétente de prendre en compte son existence pour apprécier la condition de résidence posée par l'article 21-16 du code civil. Ainsi, elle ne fait état d'aucune circonstance qui l'aurait mise dans l'impossibilité de faire part de sa situation familiale aux services chargés de l'instruction de son dossier avant l'intervention du décret lui accordant la nationalité française. L'intéressée, qui maîtrise la langue française ainsi qu'il ressort du compte rendu de l'entretien d'assimilation du 7 juin 2012, ne pouvait se méprendre ni sur la teneur des indications devant être portées à la connaissance de l'administration chargée d'instruire sa demande, ni sur la portée de la déclaration sur l'honneur qu'elle a signée. Dans ces conditions, Mme B... doit être regardée comme ayant sciemment dissimulé sa situation familiale. Par suite, en rapportant sa naturalisation dans le délai de deux ans à compter de la découverte de la fraude, le Premier ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 27-2 du code civil. 7. En dernier lieu, un décret qui rapporte pour fraude un décret de naturalisation est, par lui-même, dépourvu d'effet sur la présence sur le territoire français de celui qu'il vise, comme sur ses liens avec les membres de sa famille. Ainsi, les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peuvent être utilement invoquées à l'appui des conclusions dirigées contre le décret attaqué. En revanche, un tel décret affecte un élément constitutif de l'identité de la personne concernée et est ainsi susceptible de porter atteinte au droit au respect de sa vie privée. En l'espèce, toutefois, eu égard à la date à laquelle il est intervenu et aux motifs qui le fondent, le décret attaqué ne peut être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de Mme B... et à celle de ses enfants, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 17 avril 2015 par lequel le Premier ministre a rapporté le décret du 28 janvier 2013. Ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
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Vu la procédure suivante : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 4 juillet 2019 par laquelle la ministre du travail a autorisé la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " à la licencier pour inaptitude. Par un jugement n° 1901228 du 10 mai 2021, le tribunal administratif de La Réunion a annulé cette décision. Par une ordonnance n° 21BX03090 du 8 novembre 2021, le président de la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la requête de la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 novembre et 9 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) de faire droit à sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de La Réunion du 10 mai 2021 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat et de Mme B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code du travail ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Pierre Vaiss, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " et à la SCP Ohl, Vexliard, avocat de Mme B... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme A... B..., recrutée par la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " en qualité d'aide-soignante, bénéficiait de la protection attachée aux anciens représentants du personnel. Par une décision du 15 février 2016, l'inspecteur du travail a autorisé son employeur à la licencier pour inaptitude. Par décision du 23 août 2016, la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, saisie d'un recours hiérarchique par Mme B..., a annulé la décision de l'inspecteur du travail puis considéré qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur la demande d'autorisation de licenciement. Par jugement du 17 décembre 2018, devenu définitif, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision de la ministre du travail en ce qu'elle avait dit qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur la demande d'autorisation de licenciement de Mme B.... La ministre du travail a ensuite autorisé le licenciement de Mme B... par décision du 4 juillet 2019. Par un jugement du 10 mai 2021, le tribunal administratif de La Réunion, sur la demande de Mme B..., a annulé cette décision. La société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 8 novembre 2021 par laquelle le président de la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative. 2. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes. ". L'article R. 222-1 du même code dispose que : " Les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours, ainsi que les autres magistrats ayant le grade de président désignés à cet effet par le président de la cour peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter les conclusions à fin de sursis à exécution d'une décision juridictionnelle frappée d'appel (...) ". 3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme B... a produit le 4 novembre 2021 un mémoire en défense dans le cadre de l'instance introduite par la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " le 26 juillet 2021 devant la cour administrative d'appel de Bordeaux aux fins qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 10 mai 2021 du tribunal administratif de La Réunion. Par lettre du 4 novembre 2021, le greffe de cette cour a communiqué le mémoire en défense de Mme B... à la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux ", qui l'a reçu le 9 novembre 2021, en lui impartissant un délai de quinze jours pour présenter ses observations. Par suite, en statuant sur la demande de sursis à exécution présentée par la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " par une ordonnance du 8 novembre 2021, le président de la sixième chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux, a méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure et a entaché sa décision d'irrégularité. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, cette ordonnance doit être annulée. 4. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme demandée par la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise sur ce fondement à la charge de l'Etat qui n'est pas partie à la présente instance. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'ordonnance du 8 novembre 2021 du président de la sixième chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulée. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux. Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " est rejeté. Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société " centre d'hémodialyse - MG Durieux " et à Mme A... B.... Copie en sera adressée au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Délibéré à l'issue de la séance du 12 juillet 2022 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; Mme Carine Soulay, conseillère d'Etat et M. Pierre Vaiss, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur. Rendu le 10 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Maud Vialettes Le rapporteur : Signé : M. Pierre Vaiss La secrétaire : Signé : Mme Romy Raquil
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Vu la procédure suivante : Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 décembre 2021, 28 mars et 1er septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Cabinet C... et associés et M. A... C... demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la fiche pratique intitulée " Règles relatives à la sous-traitance de la formation des élus " et publiée sur le site internet du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, en tant qu'elle interdit à un organisme de formation agréé de sous-traiter des prestations de formation à une personne physique exerçant au sein d'une structure d'exercice collectif ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexis Goin, auditeur, - les conclusions de M. B... D... de Vendeuil, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat du Cabinet C... et associés et de M. C... ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 1221-3 du code général des collectivités territoriales : " Tout organisme public ou privé désirant dispenser une formation liée à l'exercice du mandat des élus locaux est tenu d'obtenir un agrément préalable délivré par le ministre chargé des collectivités territoriales après avis motivé du conseil national de la formation des élus locaux. / (...) /L'organisme public ou privé titulaire d'un agrément qui entend exécuter un contrat ou un marché de formation dont peuvent bénéficier les élus locaux ne peut, sous sa responsabilité, sous-traiter l'exécution des prestations de son contrat ou marché qu'à un organisme également titulaire d'un agrément, dans la limite d'un plafond exprimé en pourcentage du montant total des frais pédagogiques de formation, fixé par arrêté du ministre chargé des collectivités territoriales. Les prestations de son contrat ou marché peuvent toutefois être réalisées, en tout ou partie, par une personne physique non titulaire d'un agrément qui exerce à titre individuel une activité de formation. Les modalités de mise en œuvre de la sous-traitance par les organismes de formation agrées sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. / L'exécution des formations liées à l'exercice du mandat des élus locaux ne peut être confiée par un organisme titulaire d'un agrément qu'à des sous-traitants de premier rang. / (...) ". L'article R. 1221-21-1 du même code dispose : " Un organisme de formation titulaire de l'agrément ne peut sous-traiter, en tout ou partie, à un organisme qui n'est pas titulaire de l'agrément, l'organisation ou la réalisation d'une formation liée à l'exercice du mandat d'élu local. / Il peut cependant recourir à un formateur extérieur à l'organisme pour dispenser une formation .Le formateur est alors seul cosignataire du contrat qui est lié à l'organisme de formation pour cette intervention./ L'organisme agrée peut sous-traiter l'organisation ou la réalisation d'une formation liée à l'exercice du mandat à un organisme de formation également titulaire de l'agrément, dans la limite d'un plafond exprimé en pourcentage du montant total des frais pédagogiques de la formation fixé par arrêté du ministre chargé des collectivités territoriales. / Aucune formation liée à l'exercice du mandat d'élu local ne peut faire l'objet d'une sous-traitance de second rang ". 2. Pour la mise en œuvre de ces dispositions, le ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales a publié sur son site internet, le 28 octobre 2021, une fiche pratique intitulée " Règles relatives à la sous-traitance de la formation des élus ". Le cabinet d'avocats C... et associés et Me C... demandent l'annulation pour excès de pouvoir de cette fiche pratique en tant qu'elle interdit à un organisme de formation agréé de sous-traiter des prestations de formation à une personne physique exerçant au sein d'une structure d'exercice collectif. 3. La fiche pratique attaquée énonce : " Afin de garantir la possibilité de bénéficier d'interventions à haut niveau d'expertise au profit des élus locaux, la loi a introduit la possibilité de recourir à un formateur intervenant en tant que personne physique. Cette notion de formateur indépendant implique toutefois le respect de trois conditions cumulatives : / - Le formateur extérieur, signataire du contrat, sera la personne qui interviendra personnellement dans le cadre de la formation. / - S'il a créé une entreprise ou toute autre forme de personne morale pour porter le contrat, quelle que soit la forme juridique (entreprise individuelle, société anonyme, etc.), il doit en être l'associé unique. / - Il doit également en être l'unique salarié, le cas échéant ". 4. Les documents de portée générale émanant d'autorités publiques, matérialisés ou non, tels que les circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif peuvent être déférés au juge de l'excès de pouvoir lorsqu'ils sont susceptibles d'avoir des effets notables sur les droits ou la situation d'autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en œuvre. Ont notamment de tels effets ceux de ces documents qui ont un caractère impératif ou présentant le caractère de lignes directrices. 5. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir d'examiner les vices susceptibles d'affecter la légalité du document en tenant compte de la nature et des caractéristiques de celui-ci ainsi que du pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité dont il émane. Le recours formé à son encontre doit être accueilli notamment s'il fixe une règle nouvelle entachée d'incompétence, si l'interprétation du droit positif qu'il comporte en méconnaît le sens et la portée ou s'il est pris en vue de la mise en œuvre d'une règle contraire à une norme juridique supérieure. Sur la légalité externe de l'acte attaqué : 6. En premier lieu, il résulte des dispositions du code général des collectivités territoriales citées au point 1 qu'une activité de formation des élus locaux ne peut être sous-traitée à une personne physique non titulaire d'un agrément qu'à la condition que celle-ci exerce elle-même cette activité de formation et qu'elle signe le contrat la liant à l'organisme de formation agréé soit en son nom propre, soit au nom d'une personne morale dont elle est l'unique associé et, le cas échéant, l'unique salarié. Ces conditions font obstacle à ce qu'un organisme de formation agréé recoure, au titre de la sous-traitance, à une personne physique non agréée exerçant au sein d'une structure d'exercice collectif non agréée. Il s'ensuit qu'en indiquant ce qui est cité au point 3, la fiche pratique attaquée se borne à expliciter la portée des dispositions législatives et réglementaires applicables sans ajouter de condition supplémentaire pour la sous-traitance à une personne physique d'une activité de formation des élus. Les requérants ne sont par suite pas fondés à soutenir que les modalités de mise en œuvre de la sous-traitance énoncées dans cette fiche pratique seraient entachées d'incompétence faute d'avoir été prises, conformément à l'article L. 1221-3 du code général des collectivités territoriales, par décret en Conseil d'Etat. 7. En second lieu, en vertu de l'article 53 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judicaires et juridiques, des décrets en Conseil d'Etat fixent, dans le respect de l'indépendance de l'avocat, de l'autonomie des conseils de l'ordre et du caractère libéral de la profession, les conditions d'application du titre Ier de cette loi relative à l'organisation de la profession d'avocat. 8. Les dispositions critiquées de la fiche pratique n'ont ni pour objet ni pour effet de réglementer la profession d'avocat. Par suite et en tout état de cause, les requérants ne peuvent utilement soutenir que ces dispositions seraient entachées d'incompétence faute d'avoir été prises, conformément à l'article 53 de la loi du 31 décembre 1971, par décret en Conseil d'Etat. Sur la légalité interne de l'acte attaqué : 9. Il résulte de l'ensemble ce qui a été dit au point 6 que le moyen tiré de ce que la fiche pratique attaquée méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 1221-3 du code général des collectivités territoriales n'est pas fondé. 10. Pour le même motif, le moyen tiré de ce que les énonciations contestées de la fiche pratique créeraient une rupture d'égalité injustifiée et disproportionnée entre les structures d'exercice collectif de la profession d'avocat et celles d'exercice individuel de cette profession ne peut qu'être écarté. 11. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la fiche pratique qu'ils attaquent. Leur requête doit, par suite, être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête du Cabinet C... et associés et de M. C... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée au Cabinet C... et associés, premier requérant dénommé, au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré à l'issue de la séance du 28 septembre 2022 où siégeaient : M. Olivier Japiot, président de chambre, présidant ; M. Gilles Pellissier, conseiller d'Etat et M. Alexis Goin, auditeur-rapporteur. Rendu le 18 octobre 2022. Le président : Signé : M. Olivier Japiot Le rapporteur : Signé : M. Alexis Goin La secrétaire : Signé : Mme Pierrette Kimfunia
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'association Bereven et ses riverains a demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, d'annuler la délibération du 21 mars 2018 par laquelle le conseil municipal de la commune de Combrit a approuvé le plan local d'urbanisme communal, ainsi que les décisions implicite et expresse du maire rejetant son recours gracieux et, à titre subsidiaire, d'annuler cette même délibération du 21 mars 2018 en ce qui concerne l'orientation d'aménagement et de programmation n° 11 portant sur le secteur de Bereven en ce qu'elle classe les parcelles de ce secteur en zone 1AUhc et n'identifie pas les talus ou haies à préserver sur la façade est de ce secteur, ainsi que les décisions implicite et expresse du maire portant rejet de son recours gracieux. Par un jugement n°s 1804471, 2001360 du 11 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 7 août 2021, 26 janvier 2022 et 6 février 2022, l'association Bereven et ses riverains, représentée par Me Josselin, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 11 juin 2021 du tribunal administratif de Rennes ; 2°) à titre principal, d'annuler la délibération du 21 mars 2018 par laquelle le conseil municipal de la commune de Combrit (Finistère) a approuvé le plan local d'urbanisme communal, la décision implicite et la décision expresse du maire du 20 juillet 2018 portant rejet de son recours gracieux, en tant que de besoin après expertise ; 3°) à titre subsidiaire, d'annuler cette même délibération du 21 mars 2018 en ce que le plan local d'urbanisme comprend l'orientation d'aménagement et de programmation n° 11 portant sur le secteur de Bereven en ce qu'elle classe les parcelles de ce secteur en zone 1AUhc et en ce qu'elle n'identifie pas les talus ou haies à préserver sur la façade est de ce secteur, ainsi que les décisions implicite et expresse du maire portant rejet de son recours gracieux ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Combrit la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier ; le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'illégalité du classement en zone 1AUhc du secteur de Bereven au regard des dispositions de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme ; à tout le moins, pour le même motif, il est insuffisamment motivé ; - le classement en zone 1AUhc du secteur de Bereven et l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) correspondante méconnaissent les dispositions des articles L. 151-1, L. 101-2 et R. 151-20 du code de l'urbanisme eu égard aux dimensions inadaptées de la voie actuelle, qu'une expertise pourra confirmer en tant que de besoin, et au risque d'accident. Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 décembre 2021 et 15 février 2022 (ce dernier non communiqué), la commune de Combrit, représentée par Me Prieur et Me Guil, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'association Bereven et ses riverains une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par l'association appelante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Mas, rapporteur public, - et les observations de Me Nadan, représentant l'association Bereven et ses riverains, et de Me Voisin, représentant la commune de Combrit. Considérant ce qui suit : 1. Par délibération du 25 janvier 2012, la commune de Combrit (Finistère) a prescrit la transformation de son plan d'occupation des sols en plan local d'urbanisme (PLU). Le projet de plan local d'urbanisme arrêté par délibération du 23 novembre 2016 a été soumis à enquête publique du 17 juillet au 25 août 2017. Par délibération du 23 mars 2018, le conseil municipal de Combrit a approuvé le plan local d'urbanisme communal. L'association Bereven et ses riverains ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler cette délibération, à titre principal dans son intégralité et à titre subsidiaire en ce qu'elle comporte l'orientation d'aménagement et de programmation n° 11 portant sur le secteur de Bereven, en ce que cette orientation classe les parcelles de ce secteur en zone 1 AUhc et n'identifie pas les talus ou haies à préserver sur la façade est de ce secteur, ainsi que les décisions implicite et expresse du maire portant rejet de son recours gracieux . Par un jugement du 11 juin 2021 le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. L'association Bereven et ses riverains relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. L'association Bereven et ses riverains a soulevé en première instance le moyen tiré de l'irrégularité du classement de la zone de Bereven en zone 1 AUhc au regard de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme en raison de " l'insuffisance de la capacité de desserte de la voie ouverte à la circulation du public ". Le jugement attaqué répond explicitement à ce moyen, au terme d'une motivation suffisante, en ses points 8 à 12, alors même qu'il ne cite pas l'article R. 151-20. Par ailleurs la circonstance qu'en son point 7 il citerait de manière erronée l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme a trait, non à la régularité du jugement, mais à son bien-fondé. Ainsi les moyens tirés de l'omission de réponse à un moyen et de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué ne peuvent qu'être rejetés. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article L. 151-1 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme respecte les principes énoncés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. (...). ". Aux termes de l'article L. 101-2 du même code : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : 1° L'équilibre entre : (...) / 4° La sécurité et la salubrité publiques ; (...). ". 4. Par ailleurs aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies ouvertes au public (...) existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. (...) ". 5. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts. 6. Le plan local d'urbanisme adopté par la délibération contestée du 23 mars 2018 créée une zone 1AUhc dite de Bereven, d'une superficie de 3,25 hectares, située aux abords du bourg de Sainte-Marine, et destinée à accueillir de l'habitat et des activités compatibles avec un habitat de densité moyenne. Ce même secteur fait l'objet au plan local d'urbanisme d'une orientation d'aménagement et de programmation qui précise qu'il y sera respecté une densité de 18 logements par hectare, soit au minimum 58 logements à réaliser. Au titre de la desserte automobile il est indiqué que la zone sera desservie par un accès unique situé rue de Bereven et que, compte-tenu de l'accroissement sensible prévisible de la circulation, " il sera nécessaire de réaliser une sécurisation de la circulation automobile, cycliste et piétonne sur cette voie ". A cet effet " Pourra y être aménagé un alternat de circulation pour les automobilistes, un cheminement sécurisé pour les piétons et cyclistes. Cet aménagement devra se réaliser dès la première autorisation d'urbanisme sur ce secteur. ". 7. Il ressort des pièces du dossier que la zone 1AUhc de Bereven sera desservie par un accès unique, donnant sur la route de Bereven, situé à environ 500 mètres de la rue de l'Odet. La rue de Bereven, qui se finit en impasse pour les véhicules, est dédiée pour l'essentiel à la circulation automobile, afin de desservir les nombreuses maisons d'habitations qui la borde et celles situées sur les voies adjacentes. La commune soutient sans être sérieusement démentie qu'elle supporte un trafic de 90 véhicules par jour avec une vitesse limitée à 30 km/heure. Cette voie d'une largueur variable est étroite à certains endroits, notamment à l'approche immédiate de l'accès projeté de la zone à urbaniser. Selon un relevé topographique effectué par un expert foncier la largeur de la voierie, qui est rectiligne, entre l'accès à la future zone et la rue de l'Odet, présente une largeur variant de 4 à 8 mètres en comptant les accotements. Des aménagements préexistent puisque sur un court tronçon de la rue une circulation en alternance a été instituée. Ainsi, qu'il a été exposé au point 6 les auteurs du plan local d'urbanisme ont subordonné la délivrance de la première autorisation d'urbanisme dans cette zone à la réalisation de nouveaux aménagements de sécurisation de la rue. Il ressort des pièces du dossier, y compris au regard du procès-verbal de constat du 20 janvier 2022 produit par la partie appelante, que ces aménagements sont techniquement réalisables afin de permettre, par la modération de la vitesse de circulation sur les 500 mètres de voie concernés, la coexistence des véhicules et des piétons et cyclistes et d'assurer ainsi la sécurité de tous. Les pièces au dossier ne permettent pas d'établir que l'installation de nouveaux occupants dans les 58 logements serait incompatible avec la configuration de la voirie réorganisée, alors surtout que la rue de Bereven, en impasse, ne sert que de voie de desserte des habitations proches. Il n'est pas davantage établi par les pièces produites que la sécurité incendie ne pourrait être assurée dans ce cadre d'une voie réorganisée et alors que le guide technique " accessibilité des engins de secours " produit du service départemental d'incendie et de secours du Finistère n'a pas de valeur prescriptive. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il existerait un risque particulier d'accident au débouché de la rue de Bereven sur la rue de l'Odet, où la vitesse de circulation est également réduite du fait de la présence de ralentisseurs servant de passage piéton. En conséquence doit être écarté le moyen tiré de ce que la délibération contestée ainsi que le rejet de son recours gracieux seraient entachés d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des articles L. 151-1 et R. 151-20 du code de l'urbanisme. 8. Par ailleurs, si l'association présente également des conclusions dirigées contre le plan local d'urbanisme en tant que l'orientation d'aménagement et de programmation n° 11 portant sur le secteur de Bereven n'identifie pas les talus ou haies à préserver sur la façade est de ce secteur, cette demande n'est assortie d'aucun moyen propre et ne peut qu'être rejetée. 9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit utile de procéder à une expertise, que l'association Bereven et ses riverains n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Sur les frais d'instance : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par l'association Bereven et ses riverains. En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette association, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Combrit. D E C I D E : Article 1er : La requête de l'association Bereven et ses riverains est rejetée. Article 2 : L'association Bereven et ses riverains versera à la commune de Combrit une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Bereven et ses riverains et à la commune de Combrit. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur, C. A... Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT02280
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... B... épouse D... et M. C... D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours dirigé contre la décision du 7 janvier 2020 des autorités consulaires françaises à Alger refusant un visa d'entrée et de long séjour à l'enfant F.... Par un jugement n° 2011378 du 10 mai 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à l'enfant F... le visa sollicité, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 8 juillet 2021, le ministre de l'intérieur demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 10 mai 2021 du tribunal administratif de Nantes ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme D... devant le tribunal administratif de Nantes. Il soutient que : - le juge algérien ne s'est pas prononcé en fonction de l'intérêt de l'enfant ; l'administration n'est pas tenue de délivrer le visa sollicité et n'est pas dessaisie de son pouvoir d'appréciation ; il n'est pas dans l'intérêt de l'enfant de venir en France ; - la décision contestée peut être également fondée sur les motifs tirés de ce que la décision judiciaire de kafala est périmée et de ce que la procédure de recueil légal a fait l'objet d'un détournement. Par un mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2022, Mme E... B... épouse D... et M. C... D..., représentés par Me Louafi Ryndina, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. A... a été entendus au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C... D..., titulaire en France d'un certificat de résidence algérien, et Mme E... B... épouse D..., de nationalité française, ont obtenu, par un acte de kafala dressé le 18 juin 2019, le droit de recueillir légalement leur nièce, F..., née le 28 mai 2019. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre le refus opposé par l'autorité consulaire française à Alger à la demande de délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour à F.... Par un jugement du 10 mai 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité, dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement. Le ministre de l'intérieur relève appel de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du mémoire en défense du ministre présenté en première instance, que pour refuser de délivrer le visa sollicité, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur l'absence de ressources financières suffisantes de M. et Mme D... pour garantir des conditions de vie satisfaisantes à leur nièce, F..., qu'ils entendaient accueillir, ainsi que sur leur absence de relations affectives avec l'enfant. 3. L'intérêt d'un enfant est en principe de vivre auprès de la personne qui, en vertu d'une décision de justice qui produit des effets juridiques en France, est titulaire à son égard de l'autorité parentale. Ainsi, dans le cas où un visa d'entrée et de long séjour en France est sollicité en vue de permettre à un enfant de rejoindre un ressortissant français ou étranger qui a reçu délégation de l'autorité parentale dans les conditions qui viennent d'être indiquées, ce visa ne peut en règle générale, eu égard notamment aux stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant, être refusé pour un motif tiré de ce que l'intérêt de l'enfant serait au contraire de demeurer auprès de ses parents ou d'autres membres de sa famille. En revanche et sous réserve de ne pas porter une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, l'autorité chargée de la délivrance des visas peut se fonder, pour rejeter la demande dont elle est saisie, non seulement sur l'atteinte à l'ordre public qui pourrait résulter de l'accès de l'enfant au territoire national, mais aussi sur le motif tiré de ce que les conditions d'accueil de celui-ci en France seraient, compte tenu notamment des ressources et des conditions de logement du titulaire de l'autorité parentale, contraires à son intérêt. 4. Il ressort des pièces du dossier que l'acte de recueil légal, édicté par le juge aux affaires de famille du tribunal de M'Sila le 18 juin 2019, a délégué à M. et Mme D... l'autorité parentale sur l'enfant F..., notamment pour prendre à son égard toutes mesures utiles de prise en charge, d'entretien et d'éducation. M. et Mme D..., qui n'ont pas d'autre enfant à charge, justifient vivre dans un appartement de type T4 d'une surface de 82 m2 comportant trois chambres, ainsi que de revenus mensuels nets de plus de 2 000 euros au titre de l'activité professionnelle de Mme D..., agent public, et de M. D..., peintre en bâtiment. Par ailleurs, le ministre de l'intérieur et des outre-mer ne peut utilement soutenir qu'il n'existerait pas de liens affectifs entre les kafils et l'enfant, celui-ci étant en tout état de cause âgé de quelques mois à la date de la décision contestée. Dans ces conditions, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pu légalement estimer que l'intérêt de l'enfant était de demeurer dans son pays d'origine, eu égard aux ressources de M. et Mme D.... 5. L'administration peut toutefois, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué. 6. Pour établir que la décision contestée était légale, le ministre a invoqué, dans sa requête d'appel, communiquée par la cour à M. et Mme D..., deux autres motifs tirés, d'une part, de ce que l'acte de recueil légal avait cessé, à la date de la décision contestée, de produire des effets en Algérie et donc en France et, d'autre part, de ce que M. et Mme D... ont détourné la procédure de délégation de l'autorité parentale. 7. D'une part, si le ministre de l'intérieur fait valoir qu'en application des articles 310 et 311 du code de procédure civile et administrative algérien, l'acte de kafala était " périmé " à la date de la demande de visa, faute pour les kafils de justifier avoir pris les mesures propres à son exécution dans les trois mois qui ont suivi son prononcé, il ne démontre pas que les dispositions qu'il invoque, qui concernent uniquement les ordonnances rendues sur requête, lesquelles revêtent un caractère provisoire, seraient applicables aux ordonnances gracieuses rendues en matière de kafala, dont il ressort des pièces du dossier que la procédure est régie par les articles 493 et suivants du même code. 8. D'autre part, si le ministre soutient que la procédure de recueil légal de l'enfant a fait l'objet d'un détournement, en ce que l'évaluation sociale effectuée par l'assistante sociale et l'éducatrice spécialisée de la direction des solidarités du département du Doubs a notamment relevé que M. et Mme D... ne peuvent avoir d'enfants, il n'établit pas la réalité de ses allégations par les seules pièces qu'il produit, alors qu'il n'est pas contesté que F... a été prise en charge par sa grand-mère paternelle puis par M. D... en Algérie en raison de ce que ses parents biologiques ne souhaitaient ou ne pouvaient pas subvenir à ses besoins. 9. Il suit de ce qui précède que la demande de substitution de motifs sollicitée par le ministre ne peut être accueillie. 10. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. et Mme D..., la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours dirigé contre la décision du 7 janvier 2020 des autorités consulaires françaises à Alger refusant un visa d'entrée et de long séjour à l'enfant F.... Sur les frais liés au litige : 11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme globale de 1 200 euros à verser M. et Mme D... d'au titre des frais liés à l'instance. DÉCIDE : Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur est rejetée. Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme D... une somme globale de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B... épouse D..., à M. C... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 octobre 2022. Le rapporteur, A. A...Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 21NT01864
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Vu la procédure suivante : M. F... A... B..., Mme G... A... B... et M. D... A... B... ont demandé au tribunal administratif de Caen de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen à leur verser, en leur qualité d'ayants-droits de Mme E... A... B..., la somme de 25 000 euros, à réparer leurs préjudices propres et à prendre en charge les dépens. Par un jugement n° 1900915 du 3 juin 2020, le tribunal administratif a rejeté leur demande et mis à leur charge les frais d'expertise. Par un arrêt n° 20NT02408 du 5 novembre 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du tribunal administratif de Caen en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices résultant des fautes qu'aurait commises le CHU de Caen en n'informant pas la patiente et sa famille sur l'état de santé réel de Mme A... B... et en adressant tardivement le dossier médical à sa famille et rejeté la demande de première instance sur ce point et le surplus de leurs conclusions d'appel. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 janvier et 7 avril 2022, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les consorts A... B... demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ; 3°) de mettre à la charge du CHU de Caen la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative. Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Hortense Naudascher, auditrice, - les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public. La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de M. A... B... et autres. Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux. " 2. Pour demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes qu'ils attaquent, les consorts A... B... soutiennent qu'il est entaché : - d'erreur de droit en ce qu'il juge que Mme A... B... n'a perdu aucune perte de chance de survie au-delà du 3 octobre 2016 ; - d'erreur de droit en ce qu'il se borne à rechercher l'existence d'un lien de causalité entre le décès de Mme A... B... et chacun des manquements pris isolément sans vérifier si leurs effets conjugués n'ont pas été de nature à précipiter cet événement ; - d'erreur de droit en ce qu'il se fonde sur deux circonstances inopérantes pour écarter la perte de chance d'un meilleur confort de fin de vie ; - d'erreur de droit en ce qu'il écarte tout manquement du centre hospitalier universitaire de Caen à son devoir d'information quant à l'état avancé de la maladie de Mme A... B... ; - d'omission de réponse aux conclusions par lesquelles M. F... A... B... a demandé réparation de son propre préjudice à raison de la prise en charge dont il s'est indûment trouvé investi du 6 au 28 septembre 2016 ; - de dénaturation de leurs écritures en ce qu'il estime qu'ils n'expliquent pas en quoi le dossier médical de la patiente était insuffisant ; - d'inexacte qualification juridique des faits et d'insuffisante motivation en ce qu'il juge que le retard mis par le CHU à communiquer les éléments du dossier médical n'a pu leur causer de préjudice, faute pour eux d'expliquer en quoi consiste ce préjudice. 3. Eu égard aux moyens soulevés, il y a lieu d'admettre les conclusions du pourvoi qui sont dirigés contre l'arrêt attaqué d'une part, en tant qu'il statue sur l'indemnisation des préjudices résultant des fautes commises par le CHU de Caen en raison du non-respect du protocole de gestion des régurgitations et du retard dans la communication du dossier médical à la famille, d'autre part en tant qu'il omet de statuer sur les conclusions par lesquelles M. C... demande réparation de son propre préjudice pour la période du 6 au 28 septembre 2016, et enfin en tant qu'il rejette le surplus des conclusions tendant à l'indemnisation de la perte de confort de fin de vie due au retard de l'hospitalisation de Mme A... B.... En revanche, s'agissant du surplus des conclusions du pourvoi, aucun des moyens soulevés n'est de nature à en permettre l'admission. D E C I D E : -------------- Article 1er : Les conclusions du pourvoi des consorts A... B... dirigées contre l'arrêt attaqué en tant qu'il statue d'une part sur l'indemnisation des préjudices résultant des fautes commises par le CHU de Caen en raison du non-respect du protocole de gestion des régurgitations et au retard dans la communication du dossier médical à la famille, d'autre part en tant qu'il omet de statuer sur les conclusions par lesquelles M. A... B... demande réparation de son propre préjudice pour la période du 6 au 28 septembre 2016, et enfin en tant qu'il rejette le surplus des conclusions tendant à l'indemnisation de la perte de confort de fin de vie due au retard de l'hospitalisation de Mme A... B... sont admises. Article 2 : Le surplus des conclusions des consorts A... B... n'est pas admis. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. F... A... B..., premier requérant dénommé. Copie en sera adressée au centre hospitalier universitaire de Caen. Délibéré à l'issue de la séance du 22 septembre 2022 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et Mme Hortense Naudascher, auditrice-rapporteure. Rendu le 10 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jean-Philippe Mochon La rapporteure : Signé : Mme Hortense Naudascher Le secrétaire : Signé : M. Bernard Longieras
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... D... et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté leur recours, formé contre la décision du 21 novembre 2019 des autorités consulaires françaises à Kinshasa refusant de délivrer à Mme E... C... et à G... D... un visa de long séjour en qualité de membres de famille de réfugié. Par un jugement n° 2008227 du 8 mars 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en tant qu'elle concerne Mme C... et a rejeté la demande concernant G... D.... Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 31 août 2021, M. B... D... et Mme E... C..., représentés par Me Prudhon, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 8 mars 2021 du tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a rejeté leur demande présentée pour G... D... ; 2°) d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours formé contre la décision implicite des autorités consulaires françaises à Kinshasa refusant de délivrer un visa à G... D... ; 3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer le visa sollicité dans un délai quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État le versement à leur conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Ils soutiennent que la décision, entachée d'une erreur d'appréciation, est intervenue en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, eu égard aux nouveaux élément produits relatifs à l'identité et la filiation de leur enfant ainsi qu'aux éléments de possession d'état communiqués. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. D... et Mme C... ne sont pas fondés. M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 juillet 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale des droits de l'enfant ; - le code civil ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A... ; - et les observations de Me Dahani substituant Me Prudhon, représentant M. D... et Mme C.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... D..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 10 janvier 1984, s'est vu reconnaître la qualité de réfugié le 12 novembre 2014. Le 13 février 2019, Mme E... C..., née le 20 mars 1986, présentée comme sa concubine et G... D..., né le 21 février 2004, présenté comme son fils, ont sollicité la délivrance de visas au titre de la réunification familiale. Par une décision du 21 novembre 2019, les autorités consulaires françaises en République démocratique du Congo ont rejeté leurs demandes. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours dirigé contre cette décision. Par un jugement du 8 mars 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision implicite de la commission de recours en tant qu'elle concerne Mme C... et a rejeté la demande concernant G... D.... M. B... D... et Mme C... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il rejette leur demande d'annulation de la décision de la commission s'agissant de G... D.... Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser la délivrance d'un visa à G... D..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur l'impossibilité de déterminer l'identité de ce dernier et ses liens familiaux avec M. B... D... en raison de la non-conformité au droit local des actes produits. 3. Il appartient au juge de tenir compte des justifications apportées devant lui, dès lors qu'elles attestent de faits antérieurs à la décision critiquée, même si ces éléments n'ont pas été portés à la connaissance de l'administration avant qu'elle se prononce. 4. Pour la première fois en appel, M. D... et Mme C... produisent un jugement du 15 mars 2021 du tribunal de paix de F..., saisi par Mme C..., ordonnant l'annulation de l'acte de naissance examiné en première instance et de sa copie du 26 août 2017. Ils produisent également un jugement supplétif du 24 avril 2021 par lequel le tribunal pour enfants de F..., saisi également par Mme C..., juge que G... D... est né le 21 février 2004 et qu'il a pour parents M. B... D... et Mme E... C.... Il est également produit le volet n° 1 de l'acte de naissance de G... D... extrait des registres d'état-civil de la commune de Lingwala, dressé le 27 mai 2021 en exécution de ce jugement. Par suite, dès lors que les éléments produits attestent de l'identité de G... D... et de son lien de filiation avec M. B... D..., et sans qu'il soit besoin d'examiner les éléments de possession d'état également communiqués, M. D... et Mme C... sont fondés à soutenir que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a inexactement apprécié les faits de l'espèce en fondant sa décision sur l'absence de preuve de filiation. 5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D... et Mme C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande d'annulation de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France rejetant la demande de visa présentée pour G... D.... Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 6. Le présent arrêt implique, eu égard aux motifs qui le fondent, que le ministre de l'intérieur et des outre-mer fasse droit à la demande de visa de G... D.... Par suite, il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer le visa de long séjour sollicité par G... D... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais d'instance : 7. M. B... D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Prudhon de la somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. D E C I D E : Article 1er : Sont annulés l'article 4 du jugement n° 2008227 du 8 mars 2021 du tribunal administratif de Nantes en tant qu'il rejette la demande d'annulation du rejet implicite opposé par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France à G... D... et, dans cette même mesure, cette décision de rejet de la commission de recours. Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer un visa de long séjour à G... D..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à Me Prudhon une somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C..., à M. B... D..., M. G... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur, C. A... Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT02476
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté son recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises à Tunis refusant de lui délivrer un visa long séjour, en qualité de travailleur salarié. Par un jugement n° 2104087 du 25 octobre 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et a enjoint au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de sa demande dans un délai d'un mois. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 26 octobre 2021, le ministre de l'intérieur demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 25 octobre 2021 du tribunal administratif de Nantes ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif Nantes. Il soutient que : - il y a inadéquation entre l'expérience professionnelle du requérant et l'emploi proposé ; la formation et l'expérience dont il se prévaut sont attestées par des documents frauduleux ; - il s'agit d'un recrutement familial de complaisance ; il y a un risque d'utilisation abusive ou frauduleuse du visa sollicité ; l'extrait de casier judiciaire produit par le requérant est falsifié et les baux produits pour attester du logement futur du requérant en France sont frauduleux. Par deux mémoires en défense, enregistrés les 14 juillet et 13 septembre 2022, M. A... B..., représenté par Me Blandin, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête du ministre de l'intérieur ; 2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de lui délivrer le visa sollicité, ou à défaut de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois suivant la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés ; - la décision de l'autorité consulaire est dépourvue de motivation et celle implicite de la commission ne l'est pas davantage. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code du travail ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant tunisien né le 1er janvier 1989, a sollicité de l'autorité consulaire française à Tunis la délivrance d'un visa de long séjour aux fins d'exercer en France une activité salariée. Un refus lui a été opposé. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, saisie le 11 décembre 2020 par M. B... d'un recours administratif préalable obligatoire, a rejeté ce recours par une décision implicite. Par un jugement du 25 octobre 2021, dont le ministre de l'intérieur et de l'outre-mer relève appel, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision implicite et a enjoint à ce ministre de procéder au réexamen de la demande de M. B.... Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni (...) 3° Des documents nécessaires à l'exercice d'une activité professionnelle s'il se propose d'en exercer une. ". Aux termes de l'article L. 211-2-1 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour. La durée de validité de ce visa ne peut être supérieure à un an. (...) ". Et aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ". 3. La circonstance qu'un travailleur étranger dispose d'un contrat de travail visé par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) ou d'une autorisation de travail, ne fait pas obstacle à ce que l'autorité administrative refuse son entrée en France en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur tout motif d'intérêt général. Constitue un tel motif l'inadéquation entre l'expérience professionnelle et l'emploi sollicité et, par suite, le risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires. 4. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du mémoire en défense présenté par le ministre de l'intérieur et des outre-mer, que pour rejeter la demande de visa long séjour aux fins d'exercer une activité professionnelle de pâtissier présentée par M. B... la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur l'inadéquation de l'expérience professionnelle de l'intéressé avec l'emploi proposé, le caractère complaisant du recrutement et le risque sérieux d'utilisation frauduleuse du visa sollicité. 5. M. B..., se prévalant d'une formation qualifiante de pâtissier acquise en Tunisie, a souhaité rejoindre la France afin de travailler aux côtés de son frère, installé en qualité de boulanger pâtissier à Argenteuil (Val-d'Oise). Toutefois, les pièces produites ne permettent pas même d'établir l'existence du " centre académique de formation de Tataouine " où M. B... se serait formé. Par voie de conséquence, l'authenticité du diplôme qui lui aurait été délivré le 25 septembre 2018 par ce centre, après avoir été " admis à l'épreuve en spécialité pâtissière orientale ", n'est pas établie. Il en va de même du " diplôme de confirmation d'aptitude professionnelle " qui lui aurait été délivré le 19 janvier 2022 par le directeur régional de l'emploi et de la formation professionnelle de Tataouine au terme d'un " procès de l'examen du 19 janvier 2022 ", dont ne sont établis ni les modalités ni la finalité au regard du document déjà produit. Les quelques bulletins de salaire qu'il a également versés au dossier au titre d'une activité de pâtissier qu'il aurait exercée en Tunisie après l'obtention de son diplôme ne présentent pas de caractère probant, notamment au regard du fait qu'ils comportent, sur leur partie pré remplie, une même faute d'orthographe alors qu'ils sont censés émaner d'entreprises différentes. " L'attestation d'expérience " du 19 juillet 2020 signée par l'un de ces employeurs allégués est également, dans ce contexte, insuffisante pour établir les dires de l'intéressé. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. B..., âgé de 32 ans à la date de la décision contestée, dispose en dernier lieu d'une autorisation de travail du 4 août 2020, signée de la DIRECCTE du Val-d'Oise, pour un emploi de pâtissier oriental chez son frère, lequel indiquait dans sa demande d'autorisation souhaiter recruter un salarié disposant d'une ancienneté de douze mois, alors qu'il résulte de ce qui précède que ni la qualification ni l'expérience en la matière de M. B... ne sont établis. Dans ces conditions, en refusant de délivrer le visa sollicité, la commission n'a pas porté une inexacte appréciation sur l'adéquation de la qualification et de l'expérience professionnelle de l'intéressé à l'emploi proposé et, par suite, sur le risque de détournement de l'objet du visa sollicité. Dès lors, c'est à tort que, pour annuler la décision contestée, le tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur ce qu'elle était entachée d'une erreur d'appréciation. 6. Il appartient, toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Nantes et devant la cour. 7. En premier lieu, en vertu des dispositions de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prise sur recours préalable obligatoire se substitue à la décision initiale de refus prise par les autorités consulaires. Il suit de là que les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B... doivent être regardées comme exclusivement dirigées contre la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de l'autorité consulaire, qui est inopérant à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours, doit, dès lors, être écarté. 8. En second lieu, aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ". 9. Il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est pas même allégué que M. B... aurait demandé la communication des motifs de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté sa demande. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'absence de motivation de cette décision implicite ne peut qu'être écarté. 10. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours présenté par M. B... contre la décision de l'autorité consulaire française à Tunis refusant à celui-ci un visa d'entrée et de long séjour en qualité de travailleur salarié. Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte : 11. Il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. B... ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais d'instance : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par M. B.... D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2104087 du tribunal administratif de Nantes du 25 octobre 2021 est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nantes et ses conclusions d'appel présentées aux fins d'injonction sous astreinte et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B.... Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur, C. C... Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03006
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement. Par un jugement n° 2012828 du 30 novembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 30 décembre 2021 à la cour administrative de Versailles, et transmise à la cour administrative de Paris par ordonnance du président de la 4ème chambre du 4 janvier 2022, Mme C..., représentée par Me Behloul, doit être regardée comme demandant à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2012828 du 30 novembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil ; 2°) d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'arrêté méconnaît les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; - cet arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., ressortissante algérienne née le 31 mars 1957 et entrée en France le 10 mai 2018 sous couvert d'un visa de court séjour Schengen, a sollicité le 21 octobre 2019 son admission au séjour dans le cadre des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié. Par un arrêté du 21 octobre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme C... relève appel du jugement du 30 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ". 3. Dans son avis du 4 mars 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que l'état de santé de Mme C... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays, elle peut effectivement y bénéficier d'un traitement approprié. 4. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer à Mme C... le titre de séjour sollicité en raison de son état de santé, le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est notamment fondé sur l'avis précité. L'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 4 mars 2020 permet de présumer que l'état de santé de Mme C... ne justifie pas qu'elle soit admise au séjour en France sur le fondement des stipulations précitées. Afin de le contester, la requérante verse au dossier des ordonnances et des compte rendus d'hospitalisation dont il ressort qu'elle est atteinte d'une grave pathologie cardiaque pour laquelle elle a été suivie et opérée en Algérie en 1997 aux fins de remplacement d'une valve mitrale, ainsi qu'en France du 8 février au 7 mars 2019 pour un épisode d'insuffisance cardiaque global aux fins de remplacement des valves mitrale et tricuspide, puis en avril 2019 aux fins de pose d'une prothèse aortique et d'un pacemaker. Toutefois, ces seuls éléments ne sont pas de nature à établir que, contrairement à ce qu'a retenu le collège médical de l'OFII, un traitement approprié à sa pathologie - notamment à base de " Revasio " - ne serait pas effectivement disponible en Algérie. Il en va de même de la circonstance que les soins susceptibles de lui être apportés en Algérie ne seraient pas équivalents à ceux offerts en France. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 doit être écarté. 5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4 ci-dessus, l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme ayant porté au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme C... une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, alors que cette dernière, entrée en France deux ans et demi avant la décision attaquée à l'âge de 61 ans, n'invoque ni l'intensité de ses liens personnels et familiaux en France, ni la réalité de son intégration. Par suite, l'arrêté contesté ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président, - Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M-D B...Le président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA00020
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 11 mars 2021 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse. Par un jugement n° 2106518 du 21 janvier 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 25 mars 2022, M. B..., représenté par Me Paulhac, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 21 janvier 2022 ; 2°) d'annuler la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 11 mars 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet de Seine-Saint-Denis de lui délivrer une autorisation de regroupement familial au bénéfice de son épouse dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 15 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Il soutient que : - c'est à tort que les premiers juges ont estimé que sa cellule familiale pouvait se reconstituer dans son pays d'origine, écartant ainsi toute atteinte à sa vie privée et familiale alors qu'il est de nationalité tunisienne et que son épouse est de nationalité algérienne ; - le préfet de Seine-Saint-Denis s'est estimé en compétence liée pour rejeter sa demande à raison de la seule présence en France de son épouse ; - la décision litigieuse est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation personnelle dès lors que ni son âge avancé, ni son état de santé n'ont été pris en compte ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. La requête a été communiquée au préfet de Seine-Saint-Denis qui n'a pas présenté de mémoire en défense. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 mai 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B... , ressortissant tunisien né le 3 avril 1937, titulaire d'une carte de résident, a épousé en France le 10 septembre 2018 Mme C... D..., ressortissante algérienne. Le 27 décembre 2019, il a déposé une demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse entrée sur le territoire français le 10 avril 2018. Par une décision du 11 mars 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de faire droit à sa demande. M. B... relève appel du jugement en date du 21 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. Sur la légalité de la décision rejetant sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse : 2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins un an, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans ". Aux termes de l'article L. 411-6 du même code alors en vigueur : " Peut être exclu du regroupement familial : (...) 3° Un membre de la famille résidant en France ". Aux termes de l'article R. 411-6 du même code : " Le bénéfice du regroupement familial ne peut être refusé à un ou plusieurs membres de la famille résidant sur le territoire français dans le cas où l'étranger qui réside régulièrement en France dans les conditions prévues aux articles R. 411-1 et R. 411-2 contracte mariage avec une personne de nationalité étrangère régulièrement autorisée à séjourner sur le territoire national sous couvert d'une carte de séjour temporaire d'une durée de validité d'un an. Le bénéfice du droit au regroupement familial est alors accordé sans recours à la procédure d'introduction. Peuvent en bénéficier le conjoint et, le cas échéant, les enfants de moins de dix-huit ans de celui-ci résidant en France, sauf si l'un des motifs de refus ou d'exclusion mentionnés aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-5 leur est opposé ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, lorsqu'il se prononce sur une demande de regroupement familial, le préfet est en droit de rejeter la demande dans le cas où l'intéressé ne justifierait pas remplir l'une ou l'autre des conditions légalement requises notamment, comme en l'espèce, en cas de présence illégale sur le territoire français du membre de la famille bénéficiaire de la demande. Il dispose toutefois d'un pouvoir d'appréciation et n'est pas tenu par les dispositions précitées, notamment dans le cas où il est porté une atteinte excessive au droit de mener une vie familiale normale tel qu'il est protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 5. Il ressort de la décision contestée que pour refuser à M. B... le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse, le préfet de Seine-Saint-Denis ne s'est pas exclusivement fondé sur la circonstance que son épouse réside de manière irrégulière en France mais a également procédé à l'examen de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des incidences de son refus sur la situation de l'intéressé au regard de son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il suit de là que le préfet de Seine-Saint-Denis ne s'est pas estimé lié, en prenant la décision litigieuse, par la seule circonstance que l'épouse de M. B... était en situation irrégulière en France. 6. La décision en litige comporte l'exposé des motifs de droit et de fait sur lesquels s'est fondé le préfet de Seine-Saint-Denis pour rejeter la demande de regroupement familial présentée par M. B.... Par suite, cette décision est suffisamment motivée au regard des exigences des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. 7. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation personnelle du requérant n'aurait pas été examinée par le préfet de Seine-Saint-Denis. Le moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa demande ne peut qu'être écarté. 8. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme C... D... est entrée en France le 10 avril 2018 et qu'elle s'est mariée le 10 septembre 2018 avec M. B.... Si ce dernier fait valoir que la présence de son épouse à ses côtés est indispensable en raison des pathologies, notamment cardiaque, dont il est atteint et mentionne qu'il est titulaire d'une carte d'invalidité, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des certificats médicaux assez sommaires et tous postérieurs à la décision en litige, que l'aide dont M. B... a besoin dans les actes de sa vie quotidienne ne pourrait lui être apportée que par son épouse. Dans ces conditions, eu égard au caractère récent du mariage, et nonobstant les nationalités différentes des époux, rien ne s'oppose à ce que Mme D... puisse temporairement retourner en Algérie le temps de l'examen d'une nouvelle demande de regroupement familial présentée par son époux. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le tribunal a pu à bon droit estimer que l'intéressé n'était pas fondé à soutenir que la décision en litige porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ce refus de regroupement familial sur la situation personnelle de M. B.... 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 mars 2021 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M. JULLIARDLe président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22PA01416 2
JADE/CETATEXT000046446430.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'association " Eau et rivières de Bretagne " a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté en date du 6 novembre 2017 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a autorisé la SCEA de Kerfos à exploiter un élevage porcin d'une capacité maximale de 7 170 animaux équivalents sur le territoire de la commune de Minihy-Tréguier. Par un jugement n° 1802232 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 septembre 2020 et 18 mars 2022, l'association " Eau et rivières de Bretagne ", représentée par Me Delalande, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 10 juillet 2020 du tribunal administratif de Rennes ; 2°) d'annuler l'arrêté en date du 6 novembre 2017 du préfet des Côtes d'Armor ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa requête est recevable eu égard à la date de notification du jugement ; elle dispose d'un intérêt à agir eu égard à son objet statutaire, à la portée de l'arrêté contesté, et à son agrément délivré au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement ; son président dispose d'un mandat régulier ; sa demande de première instance n'était pas tardive eu égard au courrier du préfet des Côtes d'Armor lui accordant un délai supplémentaire de deux mois à compter de son recours gracieux du 31 janvier 2018 ; - le jugement est irrégulier en l'absence de réponse aux moyens tirés du caractère insuffisant de l'étude d'impact au regard de l'article R. 122-5 du code de l'environnement et, au regard du plan d'épandage, de la violation de l'arrêté du 19 décembre 2011 relatif au programme d'action national à mettre en œuvre dans les zones vulnérables afin de réduire la pollution des eaux par les nitrates d'origine agricole ; - les dispositions de l'article 6 de la directive 2011/92/UE ont été méconnues dès lors que l'autorité environnementale qui s'est prononcée est le préfet de région, après instruction par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement du territoire et du logement, laquelle dépend directement du préfet de région ; ce vice est insusceptible d'être régularisé ; - la demande n'a pas été instruite par l'autorité environnementale alors que cela s'imposait au regard des articles L. 122-11 et R. 122-7 du code de l'environnement ; - en méconnaissance de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, le contenu de l'étude d'impact, inadapté, est insuffisant concernant la présentation de l'état initial du site ; l'information de la population a été incomplète et cela a influé sur la décision préfectorale ; - la décision méconnait les dispositions des articles L. 1321-2 et R. 1321-13 du code de la santé publique en l'absence de réalisation de la note prévue à l'article 4.1.A de l'arrêté préfectoral du 26 avril 1990 déclarant d'utilité publique l'instauration de périmètres de protection autour de la prise d'eau du Guindy de Pont Scoul et de disposition recensant les mesures prises pour éviter les pollutions de l'eau dans les études d'impact et de dangers ; l'étude de dangers n'examine pas le risque de débordement des fosses ni le risque de fuite accidentelle ; - la décision est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que le projet contrevient aux dispositions de l'article 27-1 de l'arrêté ministériel du 27 décembre 2013 relatif aux prescriptions d'exploitation ; le plan d'épandage ne respecte pas l'équilibre de la fertilisation des sols agricoles ; les bilans sont excédentaires pour l'azote pour les cinq exploitations et pour les apports de potasse ; le plan méconnait l'arrêté du 19 décembre 2011 relatif au programme d'actions national à mettre en œuvre dans les zones vulnérables afin de réduire la pollution des eaux par les nitrates d'origine agricole dès lors que l'équilibre de fertilisation n'est pas respecté ; alors que le respect de la limitation d'azote se fait pour chaque exploitation, le pétitionnaire ne démontre pas le respect de cet équilibre à l'échelle de la parcelle ou de l'ilot d'épandage ; trois exploitations sur cinq du plan d'épandage présentent des pressions azotées dépassant les 170 kg/ha fixés par l'arrêté du 19 décembre 2011. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par l'association " Eau et rivières de Bretagne " ne sont pas fondés. Par des mémoires enregistrés les 5 février et 29 octobre 2021 et le 4 avril 2022, la SCEA de Kerfos, représentée par Me Barbier, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête ; 2°) subsidiairement, en tant que de besoin, s'agissant de la consultation de l'autorité environnementale, de faire procéder à la régularisation de l'arrêté dans les conditions fixées par l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sans qu'il y ait lieu de suspendre tout ou partie de l'autorisation ; 3°) de mettre à la charge de l'association " Eau et rivières de Bretagne " la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la demande de première instance était irrecevable ; l'auteur de la demande ne pouvait être identifié ; elle était tardive dès lors que le recours gracieux de l'association, signé par une personne dont le mandat n'est pas établi, n'a pas conservé les délais de recours contentieux puisqu'il a été reçu en préfecture plus de deux mois après que la décision contestée avait fait l'objet de la mesure de publicité requise ; - le moyen d'appel relatif à l'insuffisance de l'étude d'impact est irrecevable en l'absence de motivation ; - le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 1321-1 et R. 1321-3 du code de la santé publique est inopérant s'agissant d'une législation distincte ; - les moyens soulevés par l'association " Eau et rivières de Bretagne " ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. 91/676 Vu : - la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ; - le code de l'environnement ; - le code de la santé publique ; - l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ; - l'arrêté du 19 décembre 2011 relatif au programme d'actions national à mettre en œuvre dans les zones vulnérables afin de réduire la pollution des eaux par les nitrates d'origine agricole ; - l'arrêté du 27 décembre 2013 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations relevant du régime de l'autorisation au titre des rubriques n° 2101, n° 2102, n° 2111 et n° 3660 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement ; - les arrêtés du préfet de la région Bretagne des 14 mars 2014 et 2 août 2018 établissant le programme d'actions régional en vue de la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d'origine agricole ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Mas, rapporteur public, - et les observations de Me Barbier, représentant la SCEA de Kerfos. Une note en délibéré présentée pour la SCEA de Kerfos a été enregistrée le 7 octobre 2022. Considérant ce qui suit : 1. La SCEA de Kerfos, qui exploite au lieu-dit " Kerfos " sur le territoire de la commune de Minihy-Tréguier (Côtes d'Armor) un élevage porcin, a déposé le 17 août 2016 auprès des services préfectoraux une demande afin d'être autorisée à porter son cheptel de 3 701 à 7 170 animaux équivalents. Par arrêté du 6 novembre 2017 le préfet des Côtes d'Armor a autorisé la SCEA de Kerfos à procéder à cette extension. L'association " Eau et rivières de Bretagne " relève appel du jugement du 10 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne le cadre juridique applicable au litige : 2. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de la délivrance de l'autorisation, et celui des règles de fond relatives à la protection de l'environnement régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce. 3. Aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : (...) / 2° Les demandes d'autorisation au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable ; / (...). ". 4. Il résulte de ces dispositions que les demandes d'autorisation au titre du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, régulièrement déposées avant le 1er mars 2017, sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017, intervenue le 1er mars 2017. 5. En l'espèce, il est constant que la demande d'autorisation à l'origine de l'arrêté contesté a été déposée par la SCEA de Kerfos le 17 août 2016 et complétée le 2 novembre suivant. Dès lors, en application des dispositions précitées du 2° de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017, les règles de procédure régissant la demande d'autorisation sont constituées par les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, intervenue le 1er mars 2017. En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance : 6. Aux termes de l'article R. 181-50 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable au présent litige, par application des principes rappelés au point 2 : " Les décisions mentionnées aux articles L. 181-12 à L. 181-15 peuvent être déférées à la juridiction administrative (...) 2° Par les tiers intéressés en raison des inconvénients ou des dangers pour les intérêts mentionnés à l'article L. 181-3, dans un délai de quatre mois à compter de :/ a) L'affichage en mairie dans les conditions prévues au 2° de l'article R. 181-44 ; / b) La publication de la décision sur le site internet de la préfecture prévue au 4° du même article. / Le délai court à compter de la dernière formalité accomplie. Si l'affichage constitue cette dernière formalité, le délai court à compter du premier jour d'affichage de la décision. / Les décisions mentionnées au premier alinéa peuvent faire l'objet d'un recours gracieux ou hiérarchique dans le délai de deux mois. Ce recours administratif prolonge de deux mois les délais mentionnés aux 1° et 2°. ". 7. Lorsque les mentions relatives au délai de recours contre une décision administrative figurant dans la notification de cette décision sont erronées, elles doivent être regardées comme seules opposables au destinataire de la décision lorsqu'elles conduisent à indiquer un délai plus long que celui qui résulterait des dispositions normalement applicables. Par conséquent, une erreur sur le délai de naissance d'une décision implicite a pour effet de prolonger le délai de recours contentieux, mais sans faire obstacle à ce que ce délai coure. 8. Il résulte de l'instruction que l'arrêté contesté du préfet des Côtes d'Armor du 6 novembre 2017, portant mention des voies et délais de recours, a fait l'objet d'un affichage en mairie de Minihy-Tréguier du 16 novembre au 17 décembre 2017 et a été publié sur le site internet de la préfecture de ce département le 29 novembre 2017. Cette dernière date constituant la dernière mesure de publicité requise par les dispositions précitées de l'article R. 181-50 du code de l'environnement, elle constituait le point de départ des délais de recours prévus par ce même article. Or l'association " Eau et rivières de Bretagne " n'a formé un recours gracieux contre cet arrêté que le 31 janvier 2018, reçu en préfecture le 5 février suivant, soit après le terme des deux mois requis par le dernier alinéa de l'article R. 181-50 précité, mais dans le délai de quatre mois lui permettant d'introduire un recours contentieux. Toutefois, avant l'issue de ce dernier terme, et par un courrier du 12 mars 2018, le préfet des Côtes d'Armor a rejeté le recours gracieux de l'association, en lui indiquant qu'elle pouvait " introduire une requête contentieuse près le tribunal administratif de Rennes dans un délai de 4 mois " et que son " recours gracieux du 31 janvier 2018, reçu en préfecture le 5 février suivant, prolonge de deux mois les délais mentionnés ". Dès lors le recours formé devant le tribunal administratif de Rennes par l'association " Eau et rivières de Bretagne " contre l'arrêté du 6 novembre 2017, présenté le 12 mai 2018 dans les délais ainsi indiqués, n'était pas tardif. 9. Il résulte par ailleurs de l'instruction que la requête de première instance, tout comme le recours gracieux, ont été signés par " le chargé de mission juridique " de l'association " Eau et rivières de Bretagne ", alors même qu'en première page de la requête il avait été indiqué " l'association " Eau et rivières de Bretagne " agissant sous la signature de son président en exercice ". A cette requête avaient été joints une copie de ses statuts et un extrait des délibérations de son conseil d'administration du 10 janvier 2018 donnant notamment mandat et pouvoir, dans le respect des statuts, à son chargé de mission juridique pour engager un recours contre l'arrêté préfectoral du 6 novembre 2017 et représenter l'association. 10. Par suite, la SCEA de Kerfos n'est pas fondée à soutenir que la demande de première instance de l'association " Eau et rivières de Bretagne " serait irrecevable en raison de sa tardiveté et du défaut d'identification et de mandat, pour représenter l'association, du signataire du recours gracieux et de la requête. En ce qui concerne la légalité de l'autorisation contestée : 11. Il résulte de l'instruction que l'accroissement de 3 701 à 7 170 animaux du cheptel de le SCEA de Kerfos entrainera une augmentation significative de l'azote produit. Le rapport du 10 octobre 2017 de l'inspecteur des installations classées présenté au Conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) des Côtes d'Armor mentionne ainsi une hausse de cette production de 25 508 uN à 49 603 uN. L'exploitant a prévu en conséquence un enlèvement par une coopérative, un épandage chez quatre exploitants tiers des lisiers correspondants et une gestion directe d'une partie des effluents, sous forme notamment d'épandage, l'ensemble donnant lieu à la production d'un plan d'épandage dont la régularité conditionne la légalité de l'autorisation ici en cause. 12. D'une part, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. ". Et aux termes de l'article 26 de l'arrêté ministériel du 27 décembre 2013 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations relevant du régime de l'autorisation au titre des rubriques n° 2101, n° 2102, n° 2111 et n° 3660 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement, l'autorisation en débat relevant de la rubrique 3660 : " (...) L'épandage sur des terres agricoles des effluents d'élevage, bruts ou traités, est soumis à la production d'un plan d'épandage, dans les conditions prévues aux articles 27-1 à 27-5. (...) ". Aux termes de l'article 27-1 du même arrêté : " Les effluents d'élevage bruts ou traités peuvent être épandus afin d'être soumis à une épuration naturelle par le sol et d'être valorisés par le couvert végétal. / Les quantités épandues d'effluents d'élevage bruts ou traités sont adaptées de manière à assurer l'apport des éléments utiles aux sols et aux cultures sans excéder leurs besoins et leurs capacités exportatrices compte tenu des apports de toute nature qu'ils peuvent recevoir par ailleurs. / En zone vulnérable aux pollutions par les nitrates, la dose d'azote épandue est déterminée conformément aux règles définies par les programmes d'actions nitrates en matière notamment d'équilibre prévisionnel de la fertilisation azotée. / Les quantités épandues et les périodes d'épandage des effluents d'élevage et des matières issues de leur traitement sont adaptées de manière à prévenir : / - la stagnation prolongée sur les sols ;/ - le ruissellement en dehors des parcelles d'épandage ;/ - une percolation rapide vers les nappes souterraines. ". Et aux termes de l'article 27-4 du même arrêté : " La superficie du plan d'épandage est réputée suffisante lorsque la quantité d'azote épandable issue des animaux de l'installation et destinée à être épandue mécaniquement ou par les animaux eux-mêmes n'excède pas les capacités d'exportation en azote des cultures et des prairies exploitées en propre et/ou mises à disposition. La superficie est calculée sur la base des informations figurant dans les conventions d'épandage compte tenu des quantités d'azote épandable produites ou reçues par ailleurs par le prêteur de terres (...). " 13. D'autre part, aux termes de l'article R. 211-80 du code de l'environnement : " I. L'utilisation des fertilisants organiques et minéraux, naturels et de synthèse contenant des composés azotés, ci-après dénommés fertilisants azotés, ainsi que les pratiques agricoles associées font l'objet de programmes d'actions dans les zones vulnérables délimitées conformément aux dispositions de l'article R. 211-77. / II. - Ces programmes comportent les mesures et actions nécessaires à une bonne maîtrise des fertilisants azotés et à une gestion adaptée des terres agricoles dans ces zones, en vue de limiter les fuites de nitrates à un niveau compatible avec les objectifs de restauration et de préservation de la qualité des eaux souterraines, des eaux douces superficielles et des eaux des estuaires, des eaux côtières et marines. / (...) IV.- Ces programmes d'actions comprennent : / 1° Un programme d'actions national constitué de mesures nationales communes à l'ensemble des zones vulnérables ; / 2° Des programmes d'actions régionaux constitués de mesures spécifiques à chaque zone ou partie de zone vulnérable. (...) ". Aux termes de l'article R. 211-81 du même code : " I.- Les mesures du programme d'actions national comprennent : / (...) 3° Les modalités de limitation de l'épandage des fertilisants azotés fondée sur un équilibre, pour chaque parcelle, entre les besoins prévisibles en azote des cultures et les apports en azote de toute nature, y compris l'azote de l'eau d'irrigation ;/ (...) 5° La limitation de la quantité maximale d'azote contenu dans les effluents d'élevage pouvant être épandue annuellement par chaque exploitation, y compris les déjections des animaux eux-mêmes, ainsi que les modalités de calcul associées ; cette quantité ne peut être supérieure à 170 kg d'azote par hectare de surface agricole utile. (...). ". 14. Il résulte des dispositions de l'article 27-1 de l'arrêté ministériel du 27 décembre 2013 citées au point 12, qu'indépendamment de la réglementation applicable en zone vulnérable aux pollutions par les nitrates telle qu'elle résulte des dispositions précitées des articles R. 211-80 et suivants du code de l'environnement, lorsqu'une demande d'autorisation relative à un élevage de porcs comporte un plan d'épandage, les quantités épandues d'effluents d'élevage ne peuvent excéder les besoins et les capacités exportatrices des sols et des plantes les recevant, compte tenu des apports de toute nature qu'ils peuvent recevoir par ailleurs. 15. Or, la SCEA de Kerfos a produit, dans l'étude d'impact réalisée à l'appui de sa demande d'autorisation, un bilan de fertilisation par exploitation intégrée au plan d'épandage, dont il résulte que chacune de ces exploitations présentera un solde excédentaire variant de 8 à 37 kg d'azote par hectare de surface agricole utile (SAU), contraire à l'obligation d'équilibre rappelée au point précédent. 16. La circonstance que ce solde excédentaire soit inférieur à celui préexistant au projet d'extension de l'installation classée, ainsi que le relève le commissaire enquêteur dans son rapport, est sans incidence sur l'appréciation de la situation au regard de la réglementation citée au point 12. 17. La SCEA fait par ailleurs valoir que son plan d'épandage a été modifié par des avenants des 2 et 18 août 2017, conduisant alors l'inspecteur des installations classées rapporteur auprès du CODERST à conclure au fait que la gestion proposée répondait " aux consignes et exigences réglementaires ". Toutefois, ces avenants ne sont pas mentionnés par l'arrêté préfectoral contesté, qui se borne à viser la demande d'autorisation du 17 août 2016 complétée le 2 novembre 2016, alors que cet arrêté fixe le cadre réglementaire autorisant l'exploitation de l'élevage, dont les conditions d'épandage sont un élément substantiel soumis à enquête publique. Aussi ces avenants, dont il n'est au demeurant pas même soutenu qu'ils répondraient à l'objectif d'équilibre entre les apports et les besoins des sols et des plantes, sont sans incidence sur l'autorisation en litige. 18. La SCEA et le ministre de la transition écologique font également valoir que le plan d'épandage entériné respecte le maximum de 170 kg d'apport de nitrate par hectare de surface utile tel que fixé au 5° de l'article R. 211-81 du code de l'environnement. Une telle limite est bien applicable dès lors que la région Bretagne est classée en totalité en zone vulnérable aux pollutions par les nitrates au sens de l'article R. 211-80 du code de l'environnement, et a donné lieu à des arrêtés du préfet de la région Bretagne des 14 mars 2014 et 2 août 2018 établissant respectivement le 5ème et le 6ème programme d'actions régional en vue de la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d'origine agricole, pris en application de l'article R. 211-80 du code de l'environnement. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 14 du présent arrêt, le respect de ce plafond de 170 kg/ha ne dispense pas du respect du principe d'équilibre entre les apports et les besoins des sols et des plantes posées par l'article 27-1 de l'arrêté ministériel du 27 décembre 2013. 19. La SCEA de Kerfos fait enfin valoir que les éléments chiffrés qu'elle a présentés à l'appui de sa demande d'autorisation ne seraient pas pertinents en ce qu'ils ont été calculés afin d'assurer la conformité de son plan d'épandage global aux dispositions de l'arrêté préfectoral du 14 mars 2014 mentionné ci-dessus, ce qui nécessitait d'intégrer aux calculs, outre les apports d'azote organique épandus, ceux d'azote minéral. Cependant, outre que cet arrêté préfectoral n'est plus en vigueur, il ne résulte pas de l'instruction que, pour apprécier l'adaptation des quantités épandues d'effluents aux besoins et capacités des sols et des cultures en application de l'article 27-1 de l'arrêté ministériel du 27 décembre 2013 cité au point 12, il n'y aurait pas lieu de prendre en compte les apports d'azote minéral épandu ou présent dans le sol. Au surplus, la SCEA n'établit pas qu'un calcul alternatif permettrait de satisfaire au respect des obligations d'équilibre lui incombant en matière d'apport d'azote. 20. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêté du 6 novembre 2017 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a autorisé la SCEA de Kerfos à exploiter un élevage porcin d'une capacité maximale de 7 170 animaux équivalents est intervenu en méconnaissance des dispositions de l'article 27-1 de l'arrêté ministériel du 27 décembre 2013. Sur l'application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : 21. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : (...) 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / II. - En cas d'annulation ou de sursis à statuer affectant une partie seulement de l'autorisation environnementale, le juge détermine s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties de l'autorisation non viciées. ". 22. Le vice relevé au point 20, tiré de l'irrégularité du plan d'épandage présenté, lequel constitue un élément substantiel de la demande, implique que le projet soit revu dans des conditions à définir par l'exploitant, avant de faire l'objet d'une nouvelle instruction. La décision contestée est par suite insusceptible d'être régularisée par une autorisation modificative. 23. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué ni les autres moyens de la requête, que l'association " Eau et rivières de Bretagne " est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Sur les frais d'instance : 24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par la SCEA de Kerfos. En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement des mêmes dispositions, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance par l'association " Eau et rivières de Bretagne ". D E C I D E : Article 1er : L'arrêté du 6 novembre 2017 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a autorisé la SCEA de Kerfos à exploiter un élevage porcin d'une capacité maximale de 7 170 animaux équivalents sur le territoire de la commune de Minihy-Tréguier est annulé. Article 2 : l'Etat versera à l'association " Eau et rivières de Bretagne " la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Les conclusions présentées par la SCEA de Kerfos sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " Eau et rivières de Bretagne ", au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la SCEA de Kerfos. Copie en sera adressée, pour information, au préfet des Côtes d'Armor. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur, C. A... Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20NT02853
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 septembre 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2127392/1-3 du 23 mars 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 27 avril 2022 et 19 août 2022, M. C..., représenté par Me Toloudi, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 23 mars 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 3 septembre 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans cette attente un récépissé de demande de titre de séjour, dans le délai de quinze jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - l'arrêté attaqué est entaché d'incompétence de son signataire ; - cet arrêté n'est pas suffisamment motivé ; - il a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'est pas établi que le préfet a saisi le médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ; l'avis de ce dernier n'a pas été produit ; - le préfet de police a méconnu les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; l'interruption de son traitement aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; le traitement approprié à sa pathologie n'est pas disponible en Algérie ; - l'arrêté du préfet porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour ; - cette mesure d'éloignement est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle est susceptible d'entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; - la décision fixant le pays de destination viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des risques pour son état de santé ; - la décision interdisant son retour sur le territoire français durant vingt-quatre mois n'est pas suffisamment motivée ; - elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - en se fondant à tort sur l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a commis une erreur de droit ; - cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle viole les stipulations de l'article 42 du règlement (CE) n°1987/2006 du 20 décembre 2006, s'agissant du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Par un mémoire enregistré le 19 juillet 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris du 13 juin 2022. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., ressortissant algérien né le 30 septembre 1977, déclare être entré en France le 11 janvier 2016. Par un arrêté du 3 septembre 2021, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt-quatre mois et a procédé à son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. M. C... demande à la cour d'annuler le jugement du 23 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur le moyen commun à l'ensemble des décisions contestées : 2. L'arrêté en litige a été signé le 3 septembre 2021 par Mme Catherine Kergonou, conseillère d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, cheffe du neuvième bureau du service de l'administration des étrangers à la délégation à l'immigration de la préfecture de police, qui a reçu une délégation de signature à cette fin consentie par le préfet de police par un arrêté n° 2021-00861 du 24 août 2021, publié au recueil des actes administratifs spécial du 25 août 2021. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cet arrêté doit donc être écarté. Sur la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour : 3. En premier lieu, la décision attaquée, prise notamment sur le fondement des stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, mentionne les éléments de droit dont elle fait application ainsi que les considérations de fait relatives à la situation personnelle, familiale et médicale de M. C.... Elle est par suite suffisamment motivée. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux demandes de titre de séjour formées par les ressortissants algériens sur le fondement des stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco- algérien : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". M. C... soutient que le collège de médecins mentionné par ces dispositions n'aurait pas été saisi avant édiction de la décision de refus de titre de séjour. Toutefois, il ressort des pièces produites par le préfet de police devant le tribunal que ce collège s'est réuni et a émis un avis le 19 juillet 2021. Le requérant n'apporte par ailleurs aucun élément permettant de présumer que cet avis, qui comporte les noms et signatures des membres du collège ainsi que le nom du médecin auteur du rapport médical, n'aurait pas été régulièrement émis. Enfin, aucun texte n'imposait la transmission dudit avis, produit en première instance, à l'intéressé préalablement à l'édiction de l'arrêté attaqué. Le moyen tiré du vice de procédure doit donc être écarté. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 visé précédemment : " Le certificat de résidence d'un an portant " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ". 6. M. C..., qui souffre d'un épisode dépressif et de stress post-traumatique, bénéficie d'un suivi et de traitements psychiatriques en France. Il produit des documents médicaux qui mentionnent sa pathologie et les médicaments qui lui sont prescrits, notamment deux certificats des 16 mars 2018 et 11 janvier 2022 rédigés par des psychiatres. Toutefois, ces éléments ne permettent pas de contredire utilement l'appréciation du préfet de police qui s'est appuyé sur l'avis du collège de médecins pour estimer que si l'intéressé souffre d'une pathologie qui nécessite une prise en charge médicale, son défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, dès lors qu'ils sont rédigés dans des termes dépourvus de précision quant aux risques encourus en cas d'absence de traitement. Ainsi, alors au surplus que l'un d'entre eux est postérieur à l'arrêté litigieux, ils n'indiquent pas quelles seraient les conséquences d'un défaut de traitement. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien doit ainsi être écarté. 7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". 8. M. C... soutient qu'il est entré en France le 11 janvier 2016, qu'il a noué depuis des liens personnels sur le territoire français et que son père, qui résidait en Algérie, est décédé. Il ressort cependant des pièces du dossier que le requérant est célibataire, sans charge de famille, et que ses frères et sœurs ainsi que sa mère résident toujours dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant la décision contestée. Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : 9. D'une part, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 8 du présent arrêt que la décision par laquelle le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à M. C... n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'est pas dépourvue de base légale. 10. D'autre part, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation en raison de ses conséquences exceptionnelles sur son état de santé. Sur la décision fixant le pays de destination : 11. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". M. C... fait valoir que ces stipulations ont été méconnues dès lors qu'il ne pourrait bénéficier d'une prise en charge médicale en Algérie. Toutefois, comme il a été dit au point 6 du présent arrêt, il n'établit pas qu'une absence de traitement aurait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le moyen ne peut par suite qu'être écarté. Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français : 12. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Les décisions les décisions d'interdiction de retour et de prolongation d'interdiction de retour prévues aux articles L. 612-6, L. 612-7, L. 612-8 et L. 612-11 sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées ". 13. La décision portant interdiction de retour sur le territoire français mentionne l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elle fait application, et indique que M. C... s'est soustrait à l'exécution d'une précédente obligation de quitter le territoire français du 15 octobre 2018, notifiée le 18 octobre 2018. Par suite, cette décision est suffisamment motivée. 14. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que les décisions par lesquelles le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à M. C... et l'a obligé à quitter le territoire français ne sont pas entachées d'illégalité. Par suite, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français durant vingt-quatre mois n'est pas dépourvue de base légale. 15. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Il ressort des pièces du dossier que le requérant, qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français assortie d'un délai de départ volontaire, entre dans le champ des dispositions précitées de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet de police n'a pas commis d'erreur de droit en faisant application de ces dispositions et non de celles de l'article L. 612-7 du même code, qui régissent le cas dans lequel un étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français au-delà du délai de départ volontaire et que M. C... ne peut par suite utilement soulever. 16. En dernier lieu, si le requérant soutient que l'article 42 du règlement (CE) n° 1987/2006 du 20 décembre 2006 a été méconnu en ce qu'il n'aurait pas reçu d'information complète quant à son enregistrement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, cet article ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant interdiction de retour sur le territoire français. En tout état de cause, il ressort de l'article 6 de l'arrêté attaqué que M. C... a été informé qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. 17. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 septembre 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de vingt-quatre mois. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1990 doivent également être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera transmise au préfet de police. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. B...Le président, I. LUBENLe greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22PA01935 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 27 août 2021 en tant que par cet arrêté, le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de son droit au séjour dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer un récépissé dès la notification du jugement sous la même astreinte. Par un jugement n° 2120686 du 23 décembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 23 janvier 2022 et un mémoire en réplique enregistré le 13 septembre 2022, M. A..., représenté par Me Guirassy, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du 23 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler l'arrêté du 27 août 2021 du préfet de police ; 3°) d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de son droit au séjour dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer un récépissé dès la notification de l'arrêt, sous la même astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - l'arrêté litigieux est entaché d'incompétence ; - il est insuffisamment motivé ; - la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'accès effectif au Sénégal au traitement médical que son état de santé requiert n'est pas établi par le préfet de police ; il est issu d'une famille pauvre de Casamance habitant à plus de 500 kms de Dakar ; - pour les mêmes motifs, elle est entachée d'une méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un mémoire en défense enregistré le 30 août 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. M. A... a communiqué de nouvelles pièces enregistrées le 26 septembre 2022 ; Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Mme B... a présenté son rapport au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 5 février 1985 et entré en France le 26 août 2017 sous couvert d'un visa Schengen, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, devenu l'article L. 425-9 du même code, et a obtenu un titre de séjour en qualité d'étranger malade, renouvelé sur ce fondement. Toutefois, lors de la demande de renouvellement de ce titre le 2 mars 2021, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFFI) consulté a estimé, par un avis du 28 juin 2021, qu'il pouvait bénéficier du traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine et, par un arrêté du 27 août 2021, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné passé ce délai. Il relève appel du jugement du 23 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. En premier lieu, il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'auteur de l'arrêté litigieux et de son insuffisante motivation. 3. En second lieu, aux termes de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. ". 4. Il ressort des pièces du dossier que pour refuser à M. A... de renouveler son titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées, le préfet de police s'est notamment fondé sur l'avis du collège de médecins de l'OFII du 28 juin 2021, selon lequel si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier d'un suivi adapté au Sénégal. Pour contester cet avis, M. A... soutient que l'accès effectif au Sénégal au traitement médical que son état de santé requiert n'est pas établi par le préfet de police et qu'il est issu d'une famille pauvre de Casamance établie à plus de 500 kms de Dakar. Il ressort, d'une part, des pièces du dossier que M. A... souffre d'une forme inactive du virus de l'hépatite B ne nécessitant qu'une surveillance régulière et que le préfet de police a produit en première instance une liste des médicaments disponibles au Sénégal en 2018 qui comporte des traitements oraux contre le diabète de type 2 dont souffre également M. A..., la liste des médecins de la clinique Medickane à Dakar parmi lesquels figure un diabétologue et celle de l'hôpital principal de cette ville. Si M. A... allègue, d'autre part, ne pouvoir bénéficier d'un accès effectif aux traitements médicaux qui lui sont nécessaires, il ne produit aucune pièce justifiant du coût au Sénégal de ces traitements ou de son état d'impécuniosité faisant obstacle à un accès effectif auxdits traitements et aux structures de santé disponibles, nonobstant leur éloignement de son lieu d'habitation habituel dans son pays d'origine ni de l'impossibilité pour sa famille, en particulier sa mère, de lui apporter une aide financière, alors que le préfet fait valoir que pour l'obtention d'un visa de court séjour il a dû justifier de ressources suffisantes et de garanties de rapatriement. 5. Il n'est par suite pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux serait entaché d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions d'appel à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées par voie de conséquence. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M. JULLIARDLe président I. LUBEN Le greffier, E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 22PA00345 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2018 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a autorisé les agents de l'Etat, dans le cadre de la mise en œuvre de la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Saint-Briac-sur-Mer, à pénétrer sur les propriétés privées situées dans un secteur compris entre le Yacht Club jusqu'aux Essarts d'une part, et le secteur de la pointe de la Haye d'autre part. Par un jugement n°1806018 du 30 novembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 16 octobre 2018 en tant qu'il n'a pas indiqué la durée de l'occupation pour l'exécution des travaux, et rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er février et 1er mars 2021, M. C... B..., représenté par la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 30 novembre 2020 du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il n'a pas annulé en totalité l'arrêté du 16 octobre 2018 du préfet d'Ille-et-Vilaine ; 2°) d'annuler dans son intégralité l'arrêté du 16 octobre 2018 du préfet d'Ille-et-Vilaine ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement est irrégulier en ce qu'il n'est pas établi qu'il comporterait l'ensemble des signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; - l'arrêté contesté est entaché d'un vice de forme en ce qu'il doit comporter l'ensemble des mentions prévues par la loi du 29 décembre 1892 relative aux dommages causés à la propriété privée par l'exécution des travaux publics ; - l'arrêté est entaché d'une erreur de droit du fait de l'illégalité de l'arrêté du 4 février 2015 portant modification de la servitude de passage des piétons en bordure du littoral instituée à Saint Briac dont il fait application. Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête. Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par les requérantes n'est fondé. Par un courrier du 23 septembre 2022, la cour a informé les parties qu'elle était susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrégularité du jugement attaqué, qui prononce l'annulation partielle d'un acte indivisible. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi du 29 décembre 1892 relative aux dommages causés à la propriété privée par l'exécution des travaux publics ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Mas, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 4 février 2015, le préfet de la région Bretagne, préfet d'Ille-et-Vilaine, a approuvé l'établissement de la servitude de passage longitudinale instituée au bénéfice des piétons le long du littoral dans la commune de Saint-Briac-sur-Mer. M. B... est propriétaire sur le territoire de cette commune d'une parcelle, cadastrée section BA n° 89, qui, en raison de sa situation géographique, est grevée de cette servitude de passage des piétons le long du domaine public maritime. Dans le cadre de la mise en œuvre de cette servitude, le préfet d'Ille-et-Vilaine a, par un arrêté du 16 octobre 2018, autorisé les agents de l'Etat à pénétrer sur les propriétés privées situées dans un secteur compris entre le Yacht Club jusqu'aux Essarts d'une part, et le secteur de la pointe de la Haye d'autre part. Par un jugement du 30 novembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a, à la demande de M. B..., annulé l'arrêté du 16 octobre 2018 en tant qu'il n'a pas indiqué la durée de l'occupation autorisée pour l'exécution des travaux et a rejeté le surplus de la demande. M. B... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas annulé en totalité cet arrêté du 16 octobre 2018. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Le tribunal administratif de Rennes, après avoir retenu que l'arrêté contesté du 16 octobre 2018, et l'arrêté du 4 février 2015 qu'il vise, ne précisaient pas la durée de l'occupation autorisée, en méconnaissance de l'article 3 de la loi du 29 décembre 1892, a estimé que cette illégalité n'affectait qu'une partie de l'arrêté contesté, et a annulé celui-ci en tant seulement " qu'il n'a pas indiqué la durée de l'occupation pour l'exécution des travaux ", rejetant le surplus de la demande. Toutefois, en prononçant l'annulation partielle de l'autorisation litigieuse, qui présentait un caractère indivisible, le tribunal administratif de Rennes a commis une irrégularité dans l'exercice de ses attributions juridictionnelles. Dès lors, le jugement attaqué doit, ainsi que le demande le requérant, être annulé comme irrégulier en tant qu'il n'a pas annulé en totalité cet arrêté du 16 octobre 2018. 3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement dans cette mesure sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Rennes. Sur les conclusions tendant à l'annulation totale de l'arrêté du 16 octobre 2018 du préfet d'Ille-et-Vilaine : 4. Aux termes de l'article 3 de la loi du 29 décembre 1892 : " Lorsqu'il y a lieu d'occuper temporairement un terrain (...) pour tout objet relatif à l'exécution de projets de travaux publics, civils ou militaires, cette occupation est autorisée par un arrêté du préfet, indiquant le nom de la commune où le territoire est situé, les numéros que les parcelles dont il se compose portent sur le plan cadastral, et le nom du propriétaire tel qu'il est inscrit sur la matrice des rôles. / Cet arrêté indique d'une façon précise les travaux à raison desquels l'occupation est ordonnée, les surfaces sur lesquelles elle doit porter, la nature et la durée de l'occupation et la voie d'accès. / Un plan parcellaire désignant par une teinte les terrains à occuper est annexé à l'arrêté, à moins que l'occupation n'ait pour but exclusif le ramassage des matériaux. ". 5. L'arrêté du 16 octobre 2018 mentionne qu'il a pour objet, dans le cadre de la mise en œuvre de la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Saint-Briac-sur-Mer, d'autoriser les agents de la direction départementale des territoires et de la mer, ainsi que les techniciens et personnels du département d'Ille-et-Vilaine, chargés de l'exécution des travaux, de pénétrer dans les propriétés privées situées dans un secteur compris entre le Yacht Club jusqu'aux Essarts d'une part, et le secteur de la pointe de la Haye, d'autre part. Il mentionne le nom de la commune concernée, et vise l'arrêté préfectoral du 4 février 2015 approuvant la modification du tracé de la servitude de passage. L'arrêté du 4 février 2015 contient lui-même une notice explicative avec un volet parcellaire comportant les numéros de parcelle et la liste des propriétaires, avec leur adresse, au nombre desquels figure M. B.... L'arrêté contesté, ainsi que le volet " travaux " de la notice explicative de l'arrêté du 4 février 2015, précisent en outre la nature des travaux d'aménagement, soit l'implantation de repères et piquets, le décapage de la terre pour le passage du sentier, ainsi que le débroussaillage et l'installation de clôtures. Le même volet comporte des plans et vues aériennes des chemins existants et de ceux à créer. Les surfaces concernées par ces travaux se déduisent à la fois de ces plans et du rapport de l'enquête publique, à laquelle M. B... a participé, et qui mentionnent la largeur du passage sur la parcelle du requérant. Toutefois, il ressort de cet arrêté du 16 octobre 2018 que l'autorisation ainsi délivrée ne précise pas la durée de l'occupation, en méconnaissance des dispositions citées au point 4. Dans ces conditions, doit être accueilli le moyen tiré par M. B... de ce que l'arrêté contesté ne comporte pas l'ensemble des informations prévues par les dispositions prévues par l'article 3 de la loi du 29 décembre 1892. 6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à demander l'annulation totale de l'arrêté du 16 octobre 2018 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a autorisé les agents de l'Etat, dans le cadre de la mise en œuvre de la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Saint-Briac-sur-Mer, à pénétrer sur les propriétés privées situées dans un secteur compris entre le Yacht Club jusqu'aux Essarts et le secteur de la pointe de la Haye. Sur les frais liés au litige : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 30 novembre 2020 du tribunal administratif de Rennes est annulé en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions à fin d'annulation présentées dans la demande de M. B.... Article 2 : L'arrêté du 16 octobre 2018 du préfet d'Ille-et-Vilaine est annulé en toutes ses dispositions. Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur, A. A...Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N°21NT00281
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 février 2022 par lequel le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités bulgares, responsables de sa demande d'asile. Par un jugement n° 2203785/8 du 8 avril 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 2 février 2022, a enjoint au préfet de police de délivrer à M. B... une attestation de demande d'asile en procédure normale dans le délai de dix jours à compter de la date de notification du jugement, a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à Me Pafundi, avocat de M. B..., sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 6 mai 2022, le préfet de police, demande à la Cour : 1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 du jugement du tribunal administratif de Paris ; 2 ) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris. Il soutient que : - c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a fait droit aux moyens tirés d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, et d'une violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - c'est également à tort qu'il lui a enjoint de délivrer à M. B... un dossier de demande d'asile en procédure normale, alors que ce dernier ne pouvait en tout état de cause relever que de la procédure accélérée ; - les autres moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés. La requête a été communiquée à M. B... qui n'a pas présenté de mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 ; - le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Mme C... a présenté son rapport au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. E... B..., ressortissant afghan né le 30 août 2002, est entré irrégulièrement en France et y a sollicité, le 16 décembre 2021, son admission au séjour au titre de l'asile. Par un arrêté du 2 février 2022, le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités bulgares. Par un jugement du 8 avril 2022 dont ce dernier relève appel, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint à l'autorité précitée de délivrer à M. B... une attestation de demande d'asile en procédure normale dans un délai de dix jours à compter de la date de notification du jugement. Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal : 2. Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". 3. Pour annuler l'arrêté en litige comme étant entaché d'une méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondée sur la circonstance que le transfert de M. B... en Bulgarie était susceptible d'entraîner un risque qu'il y subisse des traitements inhumains et dégradants. 4. Eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations. 5. Il ressort des pièces du dossier qu'en se bornant à se prévaloir, d'une part, des circonstances que la Commission européenne a adressé aux autorités bulgares, le 8 novembre 2018, une lettre de mise en demeure sur le fondement de l'article 258 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et d'autre part, d'articles de presse et de rapports émanant d'organisations non gouvernementales internationales sur la situation des réfugiés en Bulgarie, M. B..., n'établit pas qu'il existait, à la date de l'arrêté attaqué, un non-respect des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans ce pays, alors que, ainsi que le fait valoir le préfet de police, la Commission européenne n'a pas recommandé de suspendre les transferts des demandeurs d'asile vers cet Etat. Par ailleurs, si M. B... soutient qu'il a subi des violences de la part des autorités en Bulgarie, il ne l'établit pas par la seule production d'un certificat médical qui constate seulement qu'il est porteur de cicatrices compatibles avec son récit de ces violences. Par suite, il ne ressort donc pas des pièces du dossier que le transfert de M. B... en Bulgarie entraînerait un risque avéré que l'intéressé subisse des traitements inhumains ou dégradants, au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 6. Le préfet de police est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a jugé que l'arrêté du 2 février 2022 portant transfert de M. B... aux autorités bulgares méconnaissait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et l'a annulé pour ce motif. 7. Toutefois, il y a lieu pour la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Paris. Sur les autres moyens soulevés en première instance par M. B... : 8. En premier lieu, par un arrêté n° 2021-00991 du 27 septembre 2021 régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial, le préfet de police a donné délégation à M. A... D..., attaché d'administration de l'Etat, signataire de l'arrêté attaqué, pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure la police des étrangers, en cas d'absence ou d'empêchements d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'auraient pas été absentes ou empêchées lors de la signature de l'acte contesté. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige aurait été signé par une autorité incompétente doit être écarté comme manquant en fait. 9. En deuxième lieu, en application des dispositions alors codifiées à l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. 10. L'arrêté du 2 février 2022, par lequel le préfet de police a décidé le transfert de M. B... aux autorités bulgares, regardées comme responsables de l'examen de sa demande d'asile, vise notamment le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Il indique qu'" il ressort de la comparaison des empreintes digitales de M. B... au moyen du système Eurodac, effectuée conformément au règlement n° 603/2013 [...], que l'intéressé a sollicité l'asile auprès des autorités bulgares le 15 octobre 2021 [...], que les autorités bulgares ont été saisies le 3 janvier 2022 d'une demande de reprise en charge en application de l'article 18 (1) b du règlement UE n° 604/2013, [...], que les autorités bulgares ont fait connaître leur accord le 14 janvier 2022 en application de l'article 18 (1) b du règlement susvisé [...] ". Enfin, le préfet de police a précisé que " l'ensemble des éléments de fait et de droit caractérisant la situation de M. B... ne relève pas des dérogations prévues par les articles 3-2 ou 17 du règlement (UE) n° 604/2013 ", que " la présente décision ne porte pas une atteinte disproportionnée au respect du droit à la vie privée et familiale " et que " M. B... n'établit pas de risque personnel constituant une atteinte grave au droit d'asile en cas de remise aux autorités de l'Etat responsable de sa demande d'asile ". Ainsi, cet arrêté comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Cette motivation, qui était de nature à permettre à l'intéressé de comprendre le critère retenu pour la détermination de l'Etat responsable de sa demande d'asile, était suffisante. 11. En troisième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5 (...) ". Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et en tout état de cause en temps utile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie. 12. Il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est vu remettre contre signature, le 14 décembre 2021, la brochure intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " (brochure A) et le 16 décembre 2021, la brochure intitulée " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " (brochure B). Ces documents ont été remis en langue pachto, langue officielle de l'Afghanistan, et M. B... en a signé la première page sans émettre aucune réserve, ainsi que cela ressort des mentions apposées. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que les brochures remises à M. B... auraient été incomplètes, alors que l'étiquette qui a été apposée sur la première page de celles-ci, signées par l'intéressé, mentionne leur nombre de pages. Si M. B... fait valoir que les brochures devaient être remises dans une langue qu'il comprend, l'intéressé a signé le résumé de l'entretien individuel, réalisé à l'aide d'un traducteur en pachtou, et a déclaré " avoir compris l'ensemble des termes de cet entretien ". Enfin, si le préfet de police ne produit pas la notice d'information relative au choix de langue, dont la remise n'est pas obligatoire, cette circonstance n'emporte pas violation du règlement (UE) n°604/2013 et en tout état de cause, il ne ressort pas du dossier que l'intéressé aurait choisi une langue autre que celle qu'il comprend. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé de la garantie tenant au droit à l'information tel que garanti par les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013. 13. En quatrième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / [...] 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national [...] ". 14. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a bénéficié d'un entretien individuel, le 16 décembre 2021, qui a été effectué par un agent préfectoral, au cours duquel il a été informé que la consultation du système " Eurodac " a fait apparaître que ses empreintes avaient été relevées le 15 octobre 2021 par la Bulgarie. Lors de cet entretien, il a pu présenter des observations orales sur la procédure de transfert avec le concours d'un interprète qualifié de l'agence ISM interprétariat dont le nom, le prénom sont indiqués. Le compte rendu de l'entretien, dont M. B... a pris connaissance comme l'atteste l'apposition de sa signature et qui s'est déroulé en pachto, ne révèle aucune difficulté de compréhension des questions qui ont été posées et auxquelles M. B... a apporté des réponses précises et substantielles. Il a ainsi eu la possibilité de faire part notamment de toute information pertinente relative à la détermination de l'Etat responsable. Par ailleurs, M. B... n'apporte aucun élément circonstancié de nature à faire douter de la qualité de l'agent ayant procédé à cet entretien ni du caractère confidentiel de ce dernier. Les services de la préfecture, et en particulier les agents recevant les étrangers au sein du guichet unique des demandeurs d'asile, doivent être regardés comme ayant la qualité, au sens de l'article 5 précité du règlement n° 604/2013, de " personne qualifiée en vertu du droit national " pour mener l'entretien prévu à cet article. L'absence de mention, sur le compte-rendu de l'entretien individuel, de l'identité et de la qualité de l'agent qui a mené l'entretien, n'a pas privé l'intéressé d'une garantie. L'agent ayant mené l'entretien, contrairement à ce que soutient son conseil, n'avait pas à bénéficier d'une délégation de signature dès lors que l'entretien individuel constitue un acte préparatoire. En outre, son conseil fait valoir que le relevé Eurodac n'a pas été remis à M. B.... Cependant, il n'établit pas que ce dernier aurait été privé d'une garantie pour ce motif alors même qu'il ne conteste pas les informations contenues dans ce relevé qui lui a été communiqué dans le cadre de la présente instance. En outre, aucune disposition n'impose de mentionner dans ce résumé la durée de l'entretien, la possibilité de procéder à une relecture dudit résumé ou la possibilité pour le conseil de l'intéressé d'en solliciter la communication. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait méconnu les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté. 15. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier, et ainsi qu'il a été dit au point 14 du présent arrêt, qu'un entretien individuel a été accordé à M. B..., à l'occasion duquel l'intéressé a pu faire part de sa situation personnelle et de ses conditions d'entrée. M. B..., qui a signé le procès-verbal de son audition sur lequel a été apposée la mention " Observations : l'administré n'a pas d'autre déclaration ", n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'il aurait été empêché de présenter des observations écrites ou aurait été privé d'une procédure contradictoire ou du droit d'être entendu. Le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux aurait été pris en méconnaissance des dispositions citées par M. B..., qui d'ailleurs figurent à l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration et non à l'article L. 211-5 de ce code ainsi qu'il le soutient, doit dès lors en tout état de cause être écarté. 16. En sixième lieu, contrairement à ce que soutient M. B..., la preuve de la demande de reprise en charge adressée par la préfecture de police aux autorités bulgares ainsi que celle de la réponse de ces autorités est rapportée par le préfet de police, qui a produit en première instance la copie d'un courrier électronique daté du 3 janvier 2022 accusant réception d'une demande formulée au moyen de l'application " Dublinet ", ainsi que la réponse explicite des autorités bulgares à cette demande, datée du 14 janvier 2022. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 24 et 25 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté. 17. En septième lieu, aux termes de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 : " (...) / 2. La décision visée au paragraphe 1 contient des informations sur les voies de recours disponibles, y compris sur le droit de demander un effet suspensif, le cas échéant, et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours et à la mise œuvre du transfert et comporte, si nécessaire, des informations relatives au lieu et à la date auxquels la personne concernée doit se présenter si cette personne se rend par ses propres moyens dans l'État membre responsable. (...)". 18. M. B... soutient que le préfet de police a méconnu les dispositions précitées de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 au motif qu'il n'est pas établi qu'il aurait porté à sa connaissance les informations relatives à la mise en œuvre du transfert, notamment s'agissant des informations relatives à l'hypothèse où il souhaiterait exécuter le transfert par ses propres moyens, ni que ces informations lui auraient été délivrées au moyen d'un laissez-passer. Mais, d'une part, si les conditions de notification de l'arrêté litigieux peuvent avoir une incidence sur l'opposabilité des voies et délai de recours, elles sont sans incidence sur sa légalité ; d'autre part, les dispositions citées au point précédent n'imposent pas la mention systématique des informations relatives au lieu et à la date auxquels le demandeur doit se présenter mais précisent uniquement que ces informations sont indiquées " si nécessaire ". Dans ces conditions, et alors que l'intéressé n'allègue pas avoir avisé les autorités françaises de son intention de se rendre par ses propres moyens dans l'Etat responsable du traitement de sa demande d'asile, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait méconnu l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013. 19. En dernier lieu, comme dit précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande d'asile de M. B... ne serait pas traitée par les autorités bulgares dans des conditions permettant la mise en œuvre des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Dans ces conditions, le requérant, qui ne fait pas état de circonstances particulières susceptibles de faire obstacle à son transfert vers la Bulgarie, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait dû faire usage de la faculté laissée à chaque État, en vertu de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et décider de faire examiner par la France sa demande de protection internationale, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans ce règlement. Le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ne peut également qu'être écarté. 20. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 2 février 2022, lui a enjoint de délivrer à M. B... un dossier de demande d'asile en procédure normale, dans le délai de dix jours à compter de la notification du jugement, et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais liés à l'instance. Il est dès lors fondé à demander l'annulation des articles 2 à 4 de ce jugement et le rejet des conclusions de la demande de M. B... devant le tribunal administratif de Paris auxquelles ce jugement a fait droit. DÉCIDE : Article 1er : Les articles 2 à 4 du jugement n° 2203785/8 du 8 avril 2022 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris sont annulés. Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à M. E... B... et à Me Pafundi. Copie en sera adressée au préfet de police. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M. JULLIARDLe président I. LUBEN Le greffier, E. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°22PA02095 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés du 9 février 2022 par lesquels le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de 24 mois. Par un jugement n° 2203470/8-2 du 8 avril 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés du 9 février 2022, a enjoint au préfet de police de procéder à un nouvel examen de la situation administrative de M. B... dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement, de le munir dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 6 mai 2022, le préfet de police, demande à la Cour : 1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 2203470/8-2 du 8 avril 2022 du tribunal administratif de Paris ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris. Il soutient que : - c'est à tort que le tribunal a considéré qu'en édictant les arrêtés litigieux, il avait méconnu les dispositions du 1° de l'article L. 611-3 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - s'agissant des autres moyens soulevés par M. B..., il s'en remet à ses écritures de première instance. La requête a été communiquée à M. B... qui n'a pas présenté de mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Mme D... a présenté son rapport au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant algérien, est entré en France à la fin de l'année 2021 selon ses déclarations. Il a été interpellé le 8 février 2022 pour recel de vol et n'a pas été en mesure de justifier de son entrée régulière sur le territoire français ou de son droit au séjour. Par deux arrêtés du 9 février 2022, le préfet de police l'a, d'une part, obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination, et d'autre part, a interdit son retour sur le territoire français pour une période de vingt-quatre mois. Par jugement du 8 avril 2022, le tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés susmentionnés. Le préfet de police relève appel de ce jugement. Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal : 2. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté en litige : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans (...) ". 3. Pour annuler l'arrêté en litige comme méconnaissant le 1° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a relevé qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que la majorité de M. B... à la date de la décision contestée pouvait être regardée comme acquise dès lors qu'aucune pièce du dossier ne permet d'en justifier. 4. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le préfet de police établit, pour la première fois en appel, que sur réquisition du parquet, une expertise osseuse de M. B... a été réalisée le 8 février 2022 par un médecin expert judiciaire, avec le consentement de l'intéressé. Il ressort de cette expertise que le médecin a conclu que compte tenu du développement morphologique et du degré de maturation osseuse et dentaire du sujet examiné, son âge physiologique était supérieur à 18 ans. Le préfet de police doit donc, en l'absence de présentation d'un document d'identité par M. B..., être regardé comme établissant que ce dernier était majeur à la date de la décision attaquée. 5. Il est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a jugé que la décision portant obligation de quitter le territoire du 9 février 2022 méconnaissait le 1° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et devait être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les décisions du même jour par lesquelles le préfet a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retourner sur le territoire national d'une durée de 24 mois. 6. Toutefois, il y a lieu pour la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Paris. Sur les moyens communs à toutes les décisions attaquées : 7. Par un arrêté n° 2021-00991 du 27 septembre 2021 accordant délégation de la signature préfectorale au préfet délégué à l'immigration et aux agents affectés au sein de la délégation à l'immigration, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 75-2021-505 du même jour, Mme C... E..., attachée d'administration de l'État, compétente notamment en matière d'éloignement, a reçu délégation pour signer les décisions contenues dans l'arrêté attaqué. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté. 8. En second lieu, M. B... n'assortit pas les moyens tirés de la méconnaissance des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé. Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : 9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...). ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". 10. La décision attaquée vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment l'article L. 611-1 1°, et mentionne, outre le fait que M. B... ne peut justifier d'un titre de séjour pour se maintenir sur le territoire français, qu'il est dépourvu de document de voyage et ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, et qu'il ne peut présenter de documents d'identité en cours de validité, que son comportement a été signalé par les services de police le 8 février 2022 pour recel de vol, qu'il est célibataire et sans enfant à charge et qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne des droits de l'homme en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, cette décision qui mentionne les considérations de fait et de droit, propres à la situation de M. B..., sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée. 11. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que la situation personnelle du requérant a été examinée par le préfet de police. Le moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa demande ne peut qu'être écarté. 12. En troisième lieu, compte tenu de ce qui précède, la décision attaquée n'est ni entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de l'intéressé, ni entachée d'une erreur de droit. Sur la décision refusant un délai de départ volontaire : 13. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". 14. La décision contestée vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en particulier son article 8, et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment les articles L. 612-2 et L. 612-3. Elle mentionne que M. B... ne peut justifier être entré régulièrement en France, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour et ne présente pas de garanties de représentation suffisante en ne présentant notamment pas un passeport en cours de validité ni en ne justifiant de lieu de résidence permanent. Elle mentionne également que le comportement de l'intéressé a été signalé par les services de police le 8 février 2022 pour recel de vol et que ces faits constituent une menace pour l'ordre public. Cette décision est ainsi suffisamment motivée en fait et en droit. 15. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment des déclarations de l'intéressé lors de son audition par les services de police qu'il est entré irrégulièrement en France à la fin de l'année 2021, et s'est maintenu sur le territoire sans chercher à régulariser sa situation en déposant une demande d'asile ou de titre de séjour, et a été interpellé dans le cadre d'un contrôle de police diligenté le 8 février 2022. C'est donc sans entacher sa décision d'une erreur de fait que le préfet l'a obligé à quitter le territoire français sans délai. Pour les mêmes motifs, la décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. 16. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) ". 17. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision de refus de délai de départ volontaire n'est, contrairement à ce que soutient M. B..., entachée d'aucune erreur d'appréciation quant au risque de fuite. Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français : 18. Il ressort de la motivation de la décision contestée que le préfet de police a relevé que M. B..., qui constituait une menace pour l'ordre public, n'avait pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, était en France depuis un mois et demi sans y avoir été autorisé, ne justifiait pas de considérations exceptionnelles ou de motifs exceptionnels ni de liens forts, anciens et caractérisés avec la France, ni d'une vie privée et familiale sur le territoire. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit par conséquent être écarté. 19. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtés du 9 février 2022. Dès lors, il y a lieu d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement et de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris. DÉCIDE : Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement n° 2203470/8-2 du 8 avril 2022 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris sont annulés. Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B.... Copie en sera adressée au préfet de police. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M. JULLIARD Le président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22PA02087 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... et Mme E... A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 22 octobre 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé devant elle contre la décision du 2 juillet 2015 par laquelle l'ambassadeur de France en Guinée et Sierra-Leone a rejeté les demandes de visas de long séjour pour ses enfants, E..., C... et D... A.... Par un jugement n° 1509195 du 10 novembre 2017, le tribunal administratif de Nantes a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande relatives aux demandes de visa d'Aminata et Lanciné A... et rejeté le surplus des conclusions de la requête. Mme B... A... et Mme E... A... ont demandé à la cour administrative d'appel de Nantes d'annuler ce jugement du 10 novembre 2017 en tant qu'il a rejeté leurs conclusions dirigées contre la décision de la commission de recours rejetant la demande de visa présentée pour Mme E... A..., d'annuler la décision du 22 octobre 2015 de la commission de recours en tant qu'elle concerne Mme E... A..., et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer à cette dernière le visa sollicité, à défaut de réexaminer cette demande de visa dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt de la cour. Par un arrêt n° 18NT00018 du 5 février 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du 10 novembre 2017 du tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre la décision du 22 octobre 2015 de la commission de recours en ce qu'elle concerne Mme E... A..., a annulé, dans cette mesure, cette décision (article 1er) et a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer un visa de long séjour à Mme E... A... dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt de la cour (article 2). Procédure d'exécution devant la cour : Par un arrêt n°21NT00851 du 5 avril 2022, la Cour, saisie par Mme A..., a constaté l'inexécution de l'injonction de délivrance du visa et prononcé une astreinte à l'encontre de l'État s'il ne justifiait pas, dans le délai d'un mois, de l'exécution de l'article 2 de cet arrêt du 5 février 2019 de la cour, et ce jusqu'à la date de cette exécution, en fixant le taux de cette astreinte à 50 euros par jour à compter de l'expiration du délai ainsi imparti. Par un mémoire enregistré le 16 mai 2022 le ministre de l'intérieur a informé la Cour de ce que Mme A... avait déposé en France une demande de carte de séjour temporaire et s'était vu délivrer un récépissé valable du 29 avril au 28 octobre 2022. Par un mémoire enregistré le 9 juin 2022 Mmes B... et E... A..., représentées par Me Morosoli, soutiennent que l'arrêt du 5 février 2019 n'a toujours pas reçu exécution. Elles indiquent que Mme E... A... s'est vu refuser la délivrance d'une carte de résidence au motif de l'absence de visa de long séjour régulier et qu'elle n'a aucune assurance quant à sa régularisation. En application d'une ordonnance prise le 20 juin 2022, l'instruction a été close au 22 juillet 2022. Un mémoire enregistré le 26 septembre 2022, présenté par le ministre de l'intérieur et des outre-mer, n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Francfort, président, - et les conclusions de M. Mas, rapporteur public, Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. ". Aux termes de l'article L. 911-6 du même code : " L'astreinte est provisoire ou définitive. Elle doit être considérée comme provisoire à moins que la juridiction n'ait précisé son caractère définitif. Elle est indépendante des dommages et intérêts. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 911-7 : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée ". Enfin aux termes de l'article L. 911-8 : " La juridiction peut décider qu'une part de l'astreinte ne sera pas versée au requérant. / Cette part est affectée au budget de l'Etat. " 2. Par un arrêt du 5 avril 2022, notifié le même jour, la cour a décidé qu'une astreinte serait prononcée à l'encontre de l'Etat si le ministre de l'intérieur ne justifiait pas avoir, dans le mois suivant la notification de cet arrêt, exécuté l'article 2 de l'arrêt n° 18NT00018 du 5 février 2019 en délivrant à Mme E... A... un visa de long séjour, Par le même arrêt, le taux de cette astreinte a été fixé à 50 euros par jour de retard, jusqu'à la date de cette exécution. 3. A la date du 30 septembre 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer s'est borné à indiquer à la Cour que Mme A... avait été reçue par les services préfectoraux pour l'examen de sa situation au regard du séjour, et qu'elle avait été munie d'un récépissé de demande de carte de séjour temporaire, valable du 29 avril au 28 octobre 2022. Sans autre explication, et alors que Mme A... a rapporté à la Cour, sans être contredite, qu'il lui avait été indiqué au guichet que, malgré sa qualité de membre de famille de réfugiée, elle ne pouvait prétendre à une carte de résident " dès lors qu'elle ne disposait pas d'un visa de long séjour valable ", le ministre de l'intérieur et des outre-mer ne peut être regardé comme ayant exécuté cet arrêt. 4. Compte tenu du délai de 148 jours écoulé depuis l'expiration du délai d'un mois imparti au ministre de l'intérieur par l'arrêt du 5 avril 2022 pour procéder, sous peine d'astreinte, à l'injonction prévue par l'article 2 de l'arrêt du 5 février 2019, il y a lieu de liquider provisoirement l'astreinte prononcée par cet arrêt en la fixant à la somme de 7 400 euros, l'astreinte ordonnée continuant de courir au même taux jusqu'à parfaite exécution de cette injonction. En application des dispositions précitées de l'article L. 911-8 du code de justice administrative, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à Mme A... la somme de 3 000 euros. DECIDE : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à Mme E... A... la somme de 3 000 euros au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte prononcée par l'arrêt n°21NT00851 du 5 avril 2022, pour la période allant du 6 mai au 30 septembre 2022. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mmes B... et E... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au parquet général près la Cour des comptes. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le président-rapporteur, J. FRANCFORT Le président-assesseur, C. RIVAS Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00851
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour. Par un jugement n°2014767 du 22 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 24 mars 2022, Mme B..., représentée par Me Langlois, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n°2014767 du 22 octobre 2021 du tribunal administratif de Montreuil ; 2°) d'annuler la décision de refus de renouvellement d'un titre de séjour du 24 novembre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour pluriannuel, et à défaut temporaire, portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de cent euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour valant autorisation de travail pendant la durée de fabrication du titre de séjour ; à défaut, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de cent euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire l'autorisant à travailler durant cet examen ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée en droit ; - cette décision n'a pas été précédée d'un examen complet de sa situation ; - elle est entachée d'erreur de fait ; - elle méconnait les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas été produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - et les observations de Me Langlois, avocate de Mme B.... Une note en délibéré et des pièces jointes ont été enregistrées le 29 septembre 2022 pour Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ressortissante sénégalaise née le 10 octobre 1983, qui serait entrée en France le 30 juin 2017, a sollicité le 17 juin 2020 le renouvellement de son titre de séjour obtenu sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valable jusqu'au 21 juillet 2020. Par un arrêté du 24 novembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour. Mme B... relève appel du jugement du 22 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 55 de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, dont les dispositions sont reprises aux articles L. 423-7 et L. 423-8 de ce code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant (...) ". Il résulte des dispositions combinées du IV de l'article 71 de la loi du 10 septembre 2018 et du I de l'article 52 du décret du 27 février 2019 pris pour son application que les dispositions citées ci-dessus s'appliquent aux demandes postérieures au 1er mars 2019 et antérieures au 1er mai 2021. 3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a donné naissance le 18 mars 2018 à un fils qui a été reconnu par un ressortissant français. Elle était titulaire d'une carte de séjour temporaire délivrée par le préfet de la Seine-Saint-Denis en sa qualité de mère d'enfant français sur le fondement des dispositions alors applicables du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en a demandé le renouvellement. Il résulte des dispositions précitées de cet article qu'il appartenait au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui ne remettait pas en cause la filiation de l'enfant de nationalité française de Mme B..., d'apprécier le droit au séjour de celle-ci au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant. Or, il ne ressort ni des termes de l'arrêté contesté, ni des pièces du dossier que le préfet aurait examiné le droit au séjour de la requérante au regard de l'intérêt supérieur de son fils de nationalité française avant de prendre l'arrêté contesté. Dans ces conditions, l'arrêté du 24 novembre 2020 est entaché d'illégalité et doit, par suite, être annulé. 4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 5. Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ". 6. Compte tenu de ses motifs, l'annulation prononcée par le présent arrêt n'implique pas que soit délivré à Mme B... un titre de séjour. En revanche, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant la durée de ce réexamen. Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 000 euros à Mme B... au titre des frais qu'elle a exposés. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2014767 du 22 octobre 2021 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 24 novembre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la situation de Mme B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour. Article 3 : L'État versera à Mme B... une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président, - Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M-D C...Le président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA01389
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er juin 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2124306/4-2 du 7 février 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 25 mars 2022 et des pièces complémentaires enregistrées le 19 septembre 2022, M. A..., représenté par Me Ivanova, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 1er juin 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 300 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L.761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : Concernant la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour : - cette décision est entachée d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant ; - il justifie d'une intégration en France ; - il réside en France depuis plus de dix ans et remplit les conditions posées par les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; Concernant la décision portant refus d'obligation de quitter le territoire français : - il a des liens personnels et familiaux en France stables et intenses ; ainsi, cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Concernant la décision fixant le pays de destination : - elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 avril 2022 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Mme B... a présenté son rapport au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C... A..., ressortissant béninois né le 5 juillet 1966, est entré en France en 2008 selon ses déclarations. Il a bénéficié d'un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale, valable du 6 juillet 2019 au 3 juillet 2020 dont il a sollicité le renouvellement le 8 juillet 2020. Par un arrêté du 1er juin 2021, le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 7 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté. En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de titre de séjour : 2. Aux termes des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". 3. M. A... soutient être entré en France en 2008 et s'occuper de son fils mineur né en France en 2010. Toutefois, pas plus qu'en première instance, il n'établit être en France depuis 2008 ni contribuer à l'éducation et à l'entretien de son fils. Il ne justifie pas davantage d'une intégration particulière, par les pièces produites, qui sont peu nombreuses et qui ne retracent une présence en France qu'à compter de 2019. En outre, il déclare être célibataire et n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de quarante-deux ans. Par conséquent, le refus de renouvellement de titre contesté ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 4. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". 5. L'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité permet la délivrance de deux titres de séjour de nature différente que sont, d'une part, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et, d'autre part, la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " mentionnée au 1° de l'article L. 313-10. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour. 6. M. A... invoque les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'une part, s'il se prévaut d'une ancienneté de séjour en France depuis l'année 2008, il ne l'établit pas par les pièces qu'il produit qui ne retracent, comme il a déjà été dit, une présence en France que depuis 2019. D'autre part, M. A... ne justifie d'aucune activité professionnelle en France. Enfin, il est célibataire et s'il déclare contribuer à l'entretien et à l'éducation de son fils mineur, il ne l'établit pas. Par suite, l'intéressé ne justifie pas de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires au sens des dispositions précitées. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait méconnu l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français : 7. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 3 et 6 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que de la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination : 8. Il ressort du point 7 du présent arrêt, que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, M. A... ne saurait se prévaloir par voie d'exception, de l'illégalité de cette décision, pour demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juin 2021 du préfet de police. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de police. Délibéré après l'audience publique du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M. JULLIARDLe président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22PA01405 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... A... C... et M. F... A... D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision du 21 juillet 2020 par laquelle les autorités consulaires françaises à Djibouti ont refusé de délivrer à G... A... D..., Mohamed A... D... et Mustafa A... D... des visas de long séjour sollicités au titre de la réunification familiale. Par un jugement n° 2010155 du 13 avril 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 9 juin 2021, Mme E... A... C... et M. F... A... D..., représentés par Me Roulleau, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 13 avril 2021 du tribunal administratif de Nantes ; 2°) d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours formé contre la décision du 21 juillet 2020 par laquelle les autorités consulaires françaises à Djibouti ont refusé de délivrer à G... A... D..., Mohamed A... D... et Mustafa A... D... les visas long séjour sollicités au titre de la réunification familiale ; 3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer les visas sollicités dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'État le versement à leur conseil de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Ils soutiennent que la décision de la commission, entachée d'une erreur d'appréciation, est intervenue en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le décès du père des enfants est établi ; il y a lieu d'écarter les allégations du conjoint de Mme A... C... dont elle est en cours de divorce conflictuel ; la filiation des trois enfants est établie par les éléments d'état-civil et de possession d'état produits ; aucune fraude n'est établie ; la famille est séparée. Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juin 2021, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme E... A... C... et M. F... A... D... ne sont pas fondés. Mme A... C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 septembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code civil ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - et les observations de Me Roulleau, représentant Mme E... A... C... et M. F... A... D.... Considérant ce qui suit : 1. Mme A... C..., ressortissante somalienne née le 31 décembre 1984, est entrée régulièrement en France le 4 octobre 2014 et a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 3 décembre 2018. Mohamed A... D..., G... A... D... et Mustafa A... D... ont ensuite sollicité des visas de long séjour à fin de réunification familiale, auprès des autorités consulaires françaises à Djibouti, en qualité d'enfants de Mme A... C.... Ces demandes ont été rejetées par une décision du 21 juillet 2020. Le recours formé le 7 août 2020 contre cette décision devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a été implicitement rejeté. Par un jugement du 13 avril 2021, dont Mme A... C... et M. F... A... D... relèvent appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande d'annulation de cette décision. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du mémoire en défense présenté par le ministre de l'intérieur et des outre-mer, que la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est fondée d'une part sur le fait que l'identité des enfants demandeurs de visa et leur lien de filiation avec Mme A... C... n'étaient pas établis et, d'autre part, sur ce que le père des enfants, qui ne pouvait être regardé comme étant décédé, n'avait pas donné son accord pour le déplacement des enfants en France. 3. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " I. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale (..) 3° Par les enfants non mariés du couple, âgés au plus de dix-neuf ans. / (...) / L'âge des enfants est apprécié à la date à laquelle la demande de réunification familiale a été introduite. (...) / II. - Les articles L. 411-2 à L. 411-4 et le premier alinéa de l'article L. 411-7 sont applicables. (...) / Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / Pour l'application du troisième alinéa du présent II, ils produisent les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 721-3 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. (...) ". 4. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. (...) ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. 5. Pour justifier de l'identité et du lien de filiation de ses trois enfants, F... A... D..., né le 18 mai 2001, G... A... D..., née le 20 avril 2003 et Mustafa A... D..., né le 15 novembre 2005, Mme A... C... a produit deux séries de certificats de naissance établis le 7 septembre 2011 puis le 10 janvier 2017 par les autorités d'état-civil somaliennes de Mogadiscio. Ces documents concordent sur les dates de naissance des intéressés et le nom de leurs parents, ainsi qu'avec la demande de protection internationale et le récit présentés par Mme A... C... dès son entrée en France en 2014. Les demandes de visas ont en outre été complétées par la production de passeports délivrés en 2018 par les autorités somaliennes, qui ont permis aux intéressés de rejoindre régulièrement Djibouti la même année. Si le ministre de l'intérieur et des outre-mer fait valoir que ces certificats de naissance n'ont pas de force probante dès lors qu'ils ne mentionnent pas diverses informations, comme, en dernier lieu, au vu des certificats de 2017, l'heure des naissances, l'heure de leur déclaration et l'identité de leur déclarant ainsi que la filiation paternelle, il ne précise toutefois pas les règles de droit ou usage somalien qui auraient été méconnus en l'espèce, alors que les deux séries de certificat mentionnent pour chaque enfant, outre le nom de leur mère, celui de leur père, dont ils portent le nom. Dans ces conditions, l'identité des trois enfants et leur lien de filiation avec Mme A... C... doivent être regardés comme établis. 6. Par ailleurs, afin d'établir le décès de son premier conjoint, père de ses trois premiers enfants, Mme A... C... a produit un certificat de décès de celui-ci établi le 15 avril 2018 par un directeur d'hôpital de Mogadiscio, ainsi qu'un second certificat établi le 22 avril 2021 par le maire de cette commune. Ces certificats sont cohérents entre eux ainsi qu'avec le récit fait par Mme A... C... à l'appui de sa demande de protection internationale en 2014, en ce qui concerne l'année et les circonstances du décès de son conjoint. Par ailleurs, si en première instance, par un courrier du 24 juin 2019, le second conjoint de Mme A... C... indiquait que le père des trois enfants était vivant et qu'il s'opposait à leur arrivée en France, ces déclarations étaient contraires à ce qu'il avait exposé à l'appui de sa propre demande de protection internationale. De plus, par un courrier du 30 août 2021 produit pour la première fois devant la cour, il indique à nouveau que le père des trois enfants est bien décédé et qu'en 2019 il a agi par colère à l'égard de Mme A... C... dont il venait de se séparer, avant d'en divorcer. 7. En conséquence, c'est par une inexacte application des dispositions citées aux points 3 et 4 que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté les demandes de visa de Mohamed, G... et Mustafa A... D... au motif que leurs identités, leurs liens de filiation et l'accord de leur père pour leur départ vers la France n'étaient pas établis. 8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... C... et M. F... A... D... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle la commission de recours a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises à Djibouti rejetant les demandes de visa de long séjour sollicitées pour Mohamed, G... et Mustafa A... D... au titre de la réunification familiale. Sur les conclusions à fin d'injonction : 9. L'exécution du présent arrêt implique nécessairement que des visas de long séjour soient délivrés à Mohamed, G... et Mustafa A... D.... Il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer de tels visas aux intéressés dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les frais d'instance : 10. Mme A... C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à Me Roulleau dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2010155 du 13 avril 2021 du tribunal administratif de Nantes est annulé. Article 2 : Est annulée la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 21 juillet 2020 des autorités consulaires françaises à Djibouti refusant de délivrer à G... A... D..., Mohamed A... D... et Mustafa A... D... des visas long séjour. Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer à G... A... D..., Mohamed A... D... et Mustafa A... D... des visas de long séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 4 : L'Etat versera à Me Roulleau la somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... A... C..., à M. F... A... D..., M. G... A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur, C. B... Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT01559
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler les arrêtés du 1er décembre 2021 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il est légalement admissible comme pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un jugement n° 2116720 du 8 février 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé les arrêtés du 1er décembre 2021 du préfet de police. Par une requête, enregistrée le 15 mars 2022, le préfet de police demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2116720 du 8 février 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil ; 2°) de rejeter la demande de M. A... devant le tribunal administratif de Montreuil. Il soutient que : - M. A... n'est pas entré en France muni d'un titre de séjour italien en cours de validité et relevait dès lors des dispositions du 1) de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il est constant que, par son comportement, l'intéressé représente une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour l'ordre public et l'intérêt fondamental de la société française ; - aucun des moyens développés par M. A... devant le premier juge n'est fondé. La requête a été communiquée à M. A... qui n'a pas été produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant burkinabé né le 9 mai 1979, serait entré en France en 2019 selon ses déclarations. A la suite de son interpellation par les services de police, par deux arrêtés du 1er décembre 2021, le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 24 mois. Le préfet de police relève appel du jugement du 8 février 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé ses deux arrêtés. Sur les moyens d'annulation retenus par le magistrat désigné : En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". 3. Pour obliger M. A... à quitter le territoire français, le préfet de police s'est fondé sur les dispositions précitées du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et plus particulièrement sur le motif tiré de ce que l'intéressé était entré sur le territoire français sous couvert d'un document de voyage non revêtu du visa prévu aux articles L. 311-1, L. 311-2, L. 312-1 à L. 312-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si le premier juge a considéré qu'il ressortait des pièces du dossier que l'intéressé était entré en France muni d'un titre de séjour italien alors en cours de validité, il est toutefois constant que la pièce intitulée " carta d'identita ", qui lui a été délivrée par les autorités italiennes de la commune de Palazzo San Gervasio, valable jusqu'au 9 mai 2027, n'est pas un document établissant la nationalité italienne du requérant et ne constitue pas davantage un titre de séjour italien, mais seulement un document délivré par les autorités italiennes à un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne permettant à son détenteur de circuler en Italie et d'y accomplir certaines démarches administratives, sans toutefois l'autoriser à voyager dans les autres pays de l'Union européenne. Ainsi ce document, qui mentionne d'ailleurs que M. A... est de nationalité burkinabée, ne permettait pas à celui-ci d'entrer régulièrement en France. Par ailleurs, si le requérant se prévaut d'un " permesso di soggiorno " valable jusqu'au 1er février 2020, faute d'établir la réalité de la date de sa dernière entrée en France alors qu'il résulte des pièces du dossier qu'il est connu sous des alias et a déclaré aux services de police avoir fait de nombreux allers-retours entre l'Italie et la France, il ne peut se prévaloir d'une entrée régulière sur le territoire national, pas plus que du maintien en situation régulière sur celui-ci à la date d'échéance de son titre de séjour italien et de la décision attaquée. En ce qui concerne le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire : 4. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. (...) ". En vertu de l'article L. 612-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Selon l'article L. 612-3 dudit code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) ". 5. Pour refuser à M. A... un délai de départ volontaire, le préfet de police s'est fondé sur les dispositions précitées de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et plus particulièrement sur les motifs tirés, d'une part, de ce que le comportement de l'intéressé signalé par les services de police pour des faits de recels de vol commis de façon habituelle constituaient une menace pour l'ordre public, d'autre part, sur l'entrée irrégulière de M. A... sur le territoire français et l'absence de demande de délivrance d'un titre de séjour. Le premier juge a considéré, d'une part, que le préfet de police - en dépit de sa demande - n'avait pas produit les pièces établissant le caractère répété du recel annoncées dans son mémoire en défense, et que le requérant n'avait fait l'objet d'aucune condamnation à la date du jugement dès lors qu'il ne devait être jugé par le tribunal correctionnel de Bobigny que le 4 avril 2022 et, d'autre part, que M. A... ne pouvait être regardé comme présentant un risque de soustraction à la mesure d'éloignement dès lors qu'il avait fait l'objet d'une assignation à résidence à l'issue d'un premier jugement du tribunal correctionnel de Bobigny du 3 décembre 2021 à l'adresse qu'il a donnée lors de la présente procédure et qui figure également sur les documents établissant la durée de son séjour en France. Toutefois, le préfet pouvait, pour le seul motif de l'entrée irrégulière de l'intéressé en France, sans demande consécutive de délivrance d'un titre de séjour en vue de la régularisation de sa situation au sens du 1° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, considérer qu'il existait un risque que celui-ci se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français, et refuser pour ce motif de lui octroyer un délai de départ volontaire. 6. Le préfet de police est par conséquent fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a accueilli les moyens tirés de l'absence de base légale de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de l'erreur manifeste d'appréciation entachant la décision de refus de délai de départ volontaire pour annuler l'ensemble de ses décisions. 7. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil. Sur les autres moyens invoqués à l'encontre des arrêtés attaqués : En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 8. En premier lieu, si M. A... soutient que l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée, cette décision mentionne, en droit, les dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement desquelles elle a été prise, l'intéressé étant considéré comme ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français et s'y étant maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité et, en fait, les circonstances tenant à sa situation personnelle et familiale. Par ailleurs, l'arrêté contesté mentionne qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale tel qu'établi par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté. 9. En second lieu, cette motivation révèle un examen réel et sérieux de la situation de l'intéressé. 10. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ". En vertu de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ". Il découle de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union, et se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Ce droit implique ainsi que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales. Une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie. 11. Il ressort du procès-verbal de l'audition menée le 1er décembre 2021 par les services de police à la suite de l'interpellation de M. A..., que celui-ci a été interrogé sur sa situation administrative, sur les conditions et la date de son entrée sur le territoire français, les raisons de sa venue ainsi que sur les démarches entreprises pour obtenir la régularisation de sa situation et les conditions de son séjour en France. S'il ressort de ce procès-verbal que l'intéressé n'a pas été informé de la mesure d'éloignement envisagée, M. A... ne justifie toutefois pas qu'il a été privé, du fait de l'absence de cette information, de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision en litige, les circonstances qu'il ait été en possession d'un passeport en cours de validité, qu'il justifie d'un hébergement stable alors même qu'il n'établit pas être entré régulièrement sur le territoire français ou qu'aucune précédente mesure d'éloignement ne soit intervenue, étant sans incidence. En outre, il ne soutient pas avoir sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ni avoir été empêché de s'exprimer avant que ne soit prise la mesure d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait les dispositions et stipulations précitées ne peut qu'être écarté. 12. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". 13. Si M. A... soutient que la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens des stipulations précitées, il ressort des procès-verbaux de ses interpellations qu'il s'est déclaré sans charge de famille en France, celle-ci résidant au Burkina Faso, pays où il a vécu, selon ses propres déclarations, jusqu'à l'âge de 34 ans. Sans profession et sans ressources, il a par ailleurs fait précédemment l'objet de mesures d'éloignement les 17 mars et 19 mai 2015 ainsi que le 16 octobre 2019. Sans attaches familiales en France, connu des services de police pour des faits de recel de vol, compte-tenu des conditions de sa présence et de son séjour sur le territoire national, le préfet de police n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés et n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle. En ce qui concerne le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire : 14. En premier lieu, la décision attaquée du préfet de police, après avoir mentionné les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se fonde sur les circonstances précisées au point 5 du présent arrêt. Dès lors le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision ou d'examen de la situation personnelle de l'intéressé, doit être écarté. 15. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu doit être écarté. 16. En dernier lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant la décision attaquée doit être écarté pour les motifs indiqués au point 5. En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français : 17. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ", et aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ". 18. La décision attaquée du préfet de police, après avoir visé les articles L. 612-6 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se fonde sur la menace que représente M. A... pour l'ordre public en raison de son comportement réitéré pour des faits de recel de vol, sur la date alléguée de son entrée en France ainsi que sur ses déclarations relatives à sa vie privée et familiale, sans mentionner que l'intéressé a déjà fait l'objet de précédentes mesures d'éloignement. Elle prend ainsi en compte les critères énoncés par l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour fixer à deux ans la durée de l'interdiction de retour et précise qu'aucune circonstance humanitaire ne justifie qu'une interdiction de retour ne soit pas prononcée. Dès lors le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision doit être écarté. 19. Dès lors que M. A... se maintient en situation irrégulière sur le territoire français dans les conditions précitées et qu'il y est dépourvu d'attaches familiales, le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en fixant à deux ans l'interdiction de retour de l'intéressée sur le territoire français. 20. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation des arrêtés du 1er décembre 2021 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Ses conclusions présentées en première instance aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent par voie de conséquence être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2116720 du 8 février 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil est annulé. Article 2 : Les demandes présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Montreuil sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... A.... Copie en sera adressée au préfet de police. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président, - Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M-D B...Le président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA01237
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... Capitaine, Mme L... Q..., M. N... H..., Mme K... O..., M. G... J..., Mme F... J..., M. I... E... et Mme M... E... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2018 par lequel le maire de Saint-Gildas-de-Rhuys (Morbihan) a accordé un permis de construire à M. et Mme P... pour la construction d'une maison d'habitation au lieudit Gouëzan, impasse du Tor. Par un jugement n°1801651 du 29 janvier 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 17 mars, 8 juin et 13 août 2021, M. A... Capitaine et Mme L... Q..., représentés par Me Derveaux, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 janvier 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2018 du maire de Saint-Gildas-de-Rhuys ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Gildas-de-Rhuys et de M. et Mme P... la somme globale de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - l'arrêté contesté méconnaît les dispositions des articles R. 431-4 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ; les documents figurant dans le dossier de demande de permis de construire n'ont pas permis aux services instructeurs d'appréhender de manière complète le projet et l'insertion de celui-ci dans le site et par rapport aux constructions avoisinantes, et notamment le respect de l'article Ub 9 du règlement du plan local d'urbanisme ; - l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme. Par un mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2021, M. C... P... et Mme B... P..., représentés par Me Matel, concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 500 euros soit mise à la charge de M. Capitaine et Mme Q... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2021, la commune de Saint-Gildas-de-Rhuys, représentée par Me Coudray, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. Capitaine et Mme Q... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la demande était irrecevable ; M. et Mme P... n'ont pas intérêt à agir à l'encontre du permis litigieux ; - les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. D..., - les conclusions de M. Mas, rapporteur public, - et les observations de Me Derveaux, représentant M. Capitaine et Mme Q..., et de Me Hauuy, représentant la commune de Saint-Gildas-de-Rhuys. Considérant ce qui suit : 1. Par un jugement du 29 janvier 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. A... Capitaine, Mme L... Q..., M. N... H..., Mme K... O..., M. G... J..., Mme F... J..., M. I... E... et Mme M... E... tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 janvier 2018 par lequel le maire de la commune de Saint-Gildas-de-Rhuys (Morbihan) a accordé un permis de construire à M. et Mme P... pour la construction d'une maison d'habitation au lieudit Gouëzan, impasse du Tor. M. Capitaine et Mme Q... relèvent appel de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire comprend : / a) Les informations mentionnées aux articles R. 431-5 à R. 431-12 ; / b) Les pièces complémentaires mentionnées aux articles R. 431-13 à R. 431-33-1 ; / c) Les informations prévues aux articles R. 431-34 et R. 431-34-1. (...) Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente ". Aux termes de l'article R. 431-10 de ce même code : " Le projet architectural comprend également : / a) Le plan des façades et des toitures (...) ; / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse ". La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par ces dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. 2. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire présente l'état initial du site ainsi que l'environnement du projet. Elle comporte des plans de situation du projet, des vues satellitaires et cadastrales du lieu d'implantation, ainsi que des photographies permettant de visualiser les abords et alentours du terrain. Par ailleurs, la notice de présentation du projet, figurant dans le dossier de demande, expose le traitement de la construction projetée, ses caractéristiques ainsi que les matériaux et couleurs utilisés. 3. D'autre part, aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe relatif à la composition des dossiers de permis de construire n'impose au pétitionnaire de produire un document d'un géomètre expert délimitant précisément, au regard du document graphique du plan local d'urbanisme, la surface de chaque zonage au sein d'une même parcelle pour en déterminer l'emprise au sol. En tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence de production d'un document établi et certifié par un géomètre, aurait été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable, et notamment à la règle d'emprise figurant à l'article Ub 9 du règlement du plan local d'urbanisme. 4. Il résulte des développements qui précèdent que le moyen tiré du caractère incomplet, insuffisant, imprécis, incohérent ou inexact du dossier de demande de permis de construire doit être écarté. 5. En second lieu, aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ". Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. 6. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans et des photographies produites, que le lieu-dit " Gouëzan ", où est localisé le terrain d'assiette du projet, comporte environ cinquante constructions organisées autour de deux axes routiers principaux, dont une vingtaine sont implantées en mitoyenneté au nord, et sur de plus grandes parcelles au sud. La zone forme un ensemble urbanisé et cohérent caractérisé par un nombre et une densité significatifs de constructions. La parcelle d'assiette du projet est située au sud-ouest de cet ensemble urbanisé et est entourée de constructions au nord, à l'est, au sud-est et se trouve ainsi en continuité de l'enveloppe bâtie existante. La circonstance que le plan local d'urbanisme n'aurait pas qualifié le lieu-dit " Gouëzan ", d'agglomération, de village ou de hameau n'est pas de nature à établir qu'il ne formerait pas un ensemble urbanisé. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en délivrant le permis de construire litigieux, le maire de Saint-Gildas-de-Rhuys aurait fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme. 7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non- recevoir opposée à la demande de première instance, que M. Capitaine et Mme Q... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Gildas-de-Rhuys et de M. et Mme P..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement de la somme demandée par les requérants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. Capitaine et Mme Q... une somme globale de 750 euros à verser à la commune de Saint-Gildas-de-Rhuys et une somme globale de 750 euros à verser à M. et Mme P.... DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. Capitaine et Mme Q... est rejetée. Article 2 : M. Capitaine et Mme Q... verseront une somme globale de 750 euros à la commune de Saint Gildas de Rhuys et une somme globale de 750 euros à M. et Mme P... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... Capitaine, à Mme L... Q..., à M. C... P..., à Mme B... P... et à la commune de Saint-Gildas-de-Rhuys. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur, A. D...Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au préfet du Morbihan, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N°21NT00776
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Polyagro a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française de condamner la Polynésie française à lui verser la somme de 36 321 270 francs CFP en réparation du préjudice subi à raison de l'irrégularité du rejet de ses offres présentées dans des procédures de sélection des importateurs exclusifs de farine panifiable en 2017 et 2018. Par un jugement n° 2000375 du 23 février 2021, le tribunal administratif de la Polynésie française a condamné la Polynésie française à verser à la société Polyagro la somme de 1 618 110 francs CFP avec intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2020 et rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 10 mai 2021 et des mémoires en réplique enregistrés les 5 et 22 avril 2022, la société Polyagro, représentée par Me Descombes, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du 23 février 2021 du tribunal administratif de la Polynésie française en tant qu'il a rejeté une partie de ses demandes indemnitaires ; 2°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa réclamation préalable ; 3°) de condamner la Polynésie française à lui verser, en sus de la somme de 1 618 110 francs CFP accordée par le tribunal, la somme de 34 703 160 francs CFP, assortie des intérêts légaux à compter du 14 avril 2020 et de la capitalisation des intérêts ou, subsidiairement avant-dire droit, d'ordonner une expertise portant sur l'évaluation de son préjudice ; 4°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle est fondée à demander l'indemnisation des préjudices causés par l'illégalité des décisions relatives à l'appel d'offres de 2017 et au lot n° 2 de l'appel d'offres de 2018, à savoir son manque à gagner et ses pertes financières, dès lors que toute illégalité est fautive et doit donner lieu à réparation intégrale du préjudice qui en découle ; - en ce qui concerne l'appel d'offres de 2017, jugé illégal du fait de l'incompétence du ministre chargé de l'économie pour fixer les dispositions réglementaires du cahier des clauses générales, l'appréciation des offres soumises par les candidats aurait été différente si des critères réguliers avaient été prévus au lieu des critères illégalement fixés par ce cahier, laissant une totale liberté de choix à la commission ; - le défaut de motivation de la décision du 19 mars 2018 de rejet de son offre au regard de l'application de l'article 16 de l'arrêté n°252 CM du 23 février 2018 lui ouvre droit à indemnisation dès lors que, sur le plan technique, son offre était la meilleure et qu'il n'est pas établi que la même décision aurait été rendue après une exacte application de ce texte ; - l'indemnisation de son manque à gagner s'élève au montant de la marge nette dont elle a été privée, soit, s'agissant du premier semestre 2017, 10 300 000 francs CFP au titre de la licence d'importation en sacs de 25 kilogrammes (lot n°1) et 10 100 000 francs CFP au titre de la licence d'importation en sacs de 50 kilogrammes (lot n°2) et, s'agissant du premier trimestre 2018, 10 700 000 francs CFP au titre de la licence d'importation de 25 kilogrammes ; - la Cour pourrait ordonner une expertise avant-dire droit afin de comparer le préjudice démontré avec le bénéfice réalisé par ses concurrentes à l'occasion de l'exploitation des licences illégales ; - elle a droit à une indemnisation au titre de ses frais de justice ; - l'annulation partielle du jugement attaqué entraînera nécessairement l'annulation intégrale de la décision de rejet de sa réclamation préalable ; - les moyens soulevés par la Polynésie française à l'appui de son appel incident ne sont pas fondés. Par deux mémoires en défense et d'appel incident enregistrés les 1er octobre 2021 et 20 mai 2022, la Polynésie française, en la personne de son président et représentée par Me Neuffer, conclut au rejet de la requête, à l'annulation du jugement attaqué en ce qu'il l'a condamnée à verser à la société Polyagro la somme de 1 618 110 francs CFP et à ce que soit mise à la charge de cette dernière la somme de 700 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés ; - en ce qui concerne le lot n° 1 des quotas attribués au 1er semestre 2018, l'offre de la société Polyagro étant significativement plus chère que celle de la société Coutimex et la commission d'appel d'offres ayant la possibilité de proposer au président de la Polynésie française de déclarer l'appel d'offres infructueux en ce qui concerne ce lot, l'appelante n'apporte pas la preuve qu'elle avait une chance sérieuse de se voir attribuer ce lot ; - la société n'établit pas la réalité de son préjudice et le lien de causalité directe avec les fautes commises ; - le montant réclamé de 31 100 000 F CFP au titre de la perte de marge subie à raison des fautes commises n'est pas valablement établi par la société Polyagro, par les éléments comptables qu'elle produit, et n'est pas en lien direct avec la faute commise ; si la Cour faisait droit à la demande indemnitaire de l'appelante, elle ne devrait être que de 1 618 110 F CFP ; - la demande subsidiaire d'expertise est dépourvue d'utilité. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la Constitution, notamment son Préambule ; - la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ; - l'arrêté n° 252 CM du 23 février 2018 instituant une procédure d'appel d'offres à l'importation des farines de froment relevant du numéro de nomenclature douanière 11.01.00.90, conditionnées en emballage de plus de deux kilogrammes ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique, - et les observations de Me Chaudhry Shouq, représentant la société Polyagro. Considérant ce qui suit : 1. Par une décision du 7 février 2017, la Polynésie française a lancé un appel d'offres qui a fait l'objet d'un avis aux importateurs publié les 8 et 9 février 2017 pour l'attribution, en deux lots, de quotas d'importation de farine de froment panifiable pour le premier semestre 2017. Les sociétés Polyagro, Coutimex et Wing Chong ont présenté leurs offres. Par décisions des 23 et 24 février 2017, le ministre chargé de l'économie a, en sa qualité de président de la commission de répartition des contingents des produits de première nécessité, attribué aux sociétés Wing Chong et Coutimex des quotas d'importation de 3 300 tonnes chacune. Par deux jugements du 27 février 2018, confirmés par un arrêt du 4 juillet 2019 de la cour administrative d'appel de Paris, le tribunal administratif de la Polynésie française a annulé les décisions des 23 et 24 février 2017. Par arrêté du 23 février 2018, la Polynésie française a institué une nouvelle procédure d'appel d'offres à l'importation des farines de froment et a publié, le 2 mars 2018, un avis aux importateurs pour deux lots de farine panifiable correspondant à des quotas d'importation de respectivement 3 000 et 3 600 tonnes pour la période du 15 mai au 15 novembre 2018. Les sociétés Polyagro, Coutimex et Wing Chong ont présenté leurs offres. Par arrêtés du 19 mars 2018, le ministre de l'économie et des finances a attribué le lot n° 1 à la société Coutimex et le lot n° 2 à la société Wing Chong. Par deux jugements du 19 février 2019, le tribunal administratif de la Polynésie française a annulé l'arrêté du 19 mars 2018 attribuant le lot n°1 à la société Coutimex et a rejeté la requête de la société Polyagro tendant à l'annulation de l'attribution du lot n° 2 à la société Wing Chong. Par un arrêt du 30 janvier 2020, la cour administrative d'appel de Paris a annulé la décision du 19 mars 2018 rejetant les offres déposées par la société Polyagro en vue de l'attribution des deux lots. Cette dernière a présenté le 14 avril 2020 une réclamation préalable indemnitaire à la Polynésie française, qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet. Elle a en conséquence demandé au tribunal administratif de la Polynésie française la condamnation de la Polynésie française à lui verser une somme de 36 321 270 francs CFP à titre de réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des illégalités entachant les deux procédures d'attribution des lots de farine panifiable de février 2017 et de mars 2018. Elle relève appel du jugement du 23 février 2021 en tant que, par ce jugement, le tribunal a limité le montant de son indemnisation à la somme de 1 618 110 francs CFP avec intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2020. Par la voie de l'appel incident, la Polynésie française demande l'annulation de ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à verser cette somme à la société Polyagro et le rejet de la demande présentée par cette dernière devant le tribunal. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. La décision implicite ou expresse par laquelle l'administration rejette la réclamation préalable indemnitaire dont elle est saisie, qui a pour seul objet de lier le contentieux en application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, ne peut faire l'objet de conclusions distinctes tendant à son annulation. Il s'ensuit que les conclusions par lesquelles la société Polyagro demande à la Cour d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par la Polynésie française sur sa réclamation indemnitaire préalable ne peuvent qu'être rejetées. Sur les conclusions indemnitaires : En ce qui concerne les préjudices causés par l'illégalité des décisions relatives à l'appel d'offres de 2017 : 3. Lorsqu'un candidat à un appel d'offres demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière et qu'il existe un lien direct de causalité entre la faute résultant de l'irrégularité et les préjudices invoqués par le requérant à cause de son éviction, il appartient au juge de vérifier s'il était ou non dépourvu de toute chance d'être retenu dans le cadre de l'appel d'offres. En l'absence de toute chance, il n'a droit à aucune indemnité. Dans le cas contraire, il a droit en principe au remboursement des frais qu'il a engagés pour présenter son offre. Il convient en outre de rechercher si le candidat irrégulièrement évincé avait des chances sérieuses d'emporter l'appel d'offres. Si tel est le cas, il a droit à être indemnisé de son manque à gagner. 4. Par deux jugements du 27 février 2018, confirmés par un arrêt du 4 juillet 2019 de la cour administrative d'appel de Paris, le tribunal administratif de la Polynésie française a annulé les décisions des 23 et 24 février 2017 par lesquelles le ministre de l'économie de la Polynésie française a attribué des quotas d'importation aux sociétés Wing Chong et Coutimex et rejeté l'offre de la société Polyagro, au motif que ces décisions avaient été prises sur le fondement des dispositions réglementaires du cahier des clauses générales édictées par une autorité incompétente. 5. En premier lieu, il ressort du compte rendu de la réunion du 20 février 2017 que la commission de répartition des contingents des produits de première nécessité a retenu les offres des sociétés Wing Chong et Coutimex au motif qu'elles étaient les moins-disantes à la fois pour les sacs de 25 et de 50 kilogrammes de farine. Par suite, le préjudice dont se prévaut la société Polyagro résultant de son éviction ne peut être regardé comme la conséquence directe du vice d'incompétence qui entachait le cahier des clauses générales sur le fondement duquel ont été prises les décisions annulées par le juge administratif. 6. En second lieu, aux termes de l'article 9 du cahier des clauses générales de l'appel d'offres : " La commission choisit librement l'offre précise qu'elle juge la plus intéressante, en tenant compte non seulement du prix, mais également de la qualité, de la source d'approvisionnement, des garanties professionnelles et financières présentées par chacun des concurrents ainsi que de leur expérience acquise en Polynésie française. Son choix peut aussi être guidé par le souci de ne pas placer dans une position de dépendance les professionnels ainsi que par toute autre considération relative à un intérêt de portée générale pour la Polynésie française ". 7. La société Polyagro, qui fait valoir que le cahier des clauses générales fixe irrégulièrement des critères en laissant une liberté totale de choix à la commission de répartition, doit être regardée comme se prévalant ainsi du principe de transparence des procédures d'appel d'offres, qui découle des articles 6 et 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et est applicable à la procédure d'attribution de quotas d'importation de farine panifiable instaurée en Polynésie française. En vertu de ce principe, l'information appropriée des candidats sur les critères d'attribution des quotas et sur les conditions de leur mise en œuvre est nécessaire. Or il ressort des dispositions précitées du cahier des clauses générales qu'elles ne permettaient pas aux candidats de connaître les conditions de mise en œuvre des critères énumérés dans l'appréciation des offres soumises à la commission. Par suite, de telles dispositions sont entachées d'irrégularité et la société Polyagro est fondée à demander réparation du préjudice résultant de son éviction en lien direct avec cette irrégularité. Il résulte de l'instruction que l'offre de cette société satisfaisait aux critères de l'appel d'offres et que la marge brute de la société restait modérée, de sorte qu'elle n'était pas dépourvue de toute chance d'être retenue. Il résulte toutefois de l'instruction que son offre était moins avantageuse que celle des sociétés Wing Chong et Coutimex, sans qu'elle fasse valoir d'autre caractéristique de cette offre de nature à la faire regarder comme supérieure à celles des concurrents retenus. Par suite, elle ne peut être regardée comme ayant eu des chances sérieuses d'emporter l'appel d'offres en l'absence de cette irrégularité. Il y a lieu, en conséquence, de limiter l'indemnisation des préjudices résultant de son éviction au remboursement des frais qu'elle a engagés pour la présentation de son offre, soit à la somme non contestée en défense de 87 397 francs CFP. En ce qui concerne les préjudices causés par l'illégalité des décisions relatives à l'appel d'offres de 2018 : 8. Aux termes de l'article 16 de l'arrêté n° 252 CM du 23 février 2018 instituant une procédure d'appel d'offres à l'importation des farines de froment : " Les offres sont classées en fonction du prix, mais également des conditions d'entreposage, de la capacité de stockage, des moyens logistiques (transport, manutention), de la source d'approvisionnement et des garanties professionnelles et financières présentées par chacun des concurrents ainsi que de leur expérience acquise en Polynésie française. Ce classement peut aussi être guidé par le souci de ne pas placer dans une position de dépendance les professionnels ainsi que par toute autre considération relative à un intérêt de portée générale pour la Polynésie française ". Quant au lot n° 2 : 9. Par un arrêt du 30 janvier 2020, la cour administrative d'appel de Paris a annulé la décision du 19 mars 2018 par laquelle le vice-président, ministre de l'économie et des finances, a rejeté les offres de la société Polyagro relatives à l'importation et à la distribution au stade de gros de farine panifiable présentée en emballage de plus de 2 kilogrammes pour la période du 15 mai au 15 novembre 2018, au motif qu'elle était insuffisamment motivée. Si la société Polyagro soutient, s'agissant du lot n° 2, que son offre était la meilleure sur le plan technique, il n'en résulte pas qu'existerait un lien direct de causalité entre la faute résultant de l'insuffisante motivation de la décision rejetant cette offre et les préjudices qu'elle invoque du fait de son éviction. Ainsi, ses conclusions indemnitaires ne peuvent qu'être rejetées. Quant au lot n°1 : 10. Par jugement du 19 février 2019, le tribunal administratif de la Polynésie française a annulé l'arrêté du 19 mars 2018 par lequel le ministre de l'économie et des finances a attribué à la société Coutimex le lot n° 1 de l'appel d'offres de farine panifiable présentée en emballage de plus de 2 kilogrammes pour la période du 15 mai au 15 novembre 2018, aux motifs, d'une part, que l'offre de cette société était incomplète faute qu'y soit jointe l'annexe décrivant les moyens d'entreposage et les moyens logistiques prévus par les dispositions précitées de l'article 16 de l'arrêté du 23 février 2018 et, d'autre part, qu'il n'était pas établi que l'attribution du lot n° 1 à la société Coutimex aurait résulté d'un examen des mérites comparatifs des offres au regard de l'ensemble des critères fixés par ces dispositions. Il résulte de l'instruction que le prix proposé par la société Polyagro pour le lot n° 1, de 59,93 francs CFP par kilogramme, était plus élevé de 12,2% que celui de la société Coutimex, de 53,411 francs CFP au kilogramme, et que l'offre de cette dernière société répondait aux exigences de qualité, de disponibilité et d'expérience de l'appel d'offres. En conséquence, eu égard, d'une part, à la faculté pour la commission d'appel d'offres de la farine de déclarer l'appel d'offres infructueux avant que soit lancé un nouvel appel d'offres dans des conditions régulières et, d'autre part, à l'écart de prix entre les deux offres qui lui étaient soumises, qui, selon la commission, générait une économie de près de 20 millions de francs CFP, la société Polyagro doit être regardée seulement comme n'étant pas dépourvue de toute chance de se voir attribuer le lot n° 1. Il y a lieu, en conséquence, de limiter l'indemnisation des préjudices résultant de son éviction au remboursement des frais qu'elle a engagés pour la présentation de son offre, soit à la somme non contestée en défense de 87 397 francs CFP. 11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que la société Polyagro est seulement fondée à demander la somme de 174 794 francs CFP, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2020 et de la capitalisation des intérêts au 14 avril 2021 et au 14 avril 2022, en réparation de ses préjudices résultant du rejet de ses offres présentées dans les procédures de sélection des importateurs exclusifs de farine panifiable en 2017 et 2018. En ce qui concerne les préjudices liés aux frais de procédure : 12. Si la société Polyagro demande l'indemnisation des frais qu'elle a exposés pour faire valoir ses droits dans les différentes procédures qui l'ont opposée à la Polynésie française et qui s'élèvent selon elle à la somme de 5 221 270 francs CFP, il y lieu de rejeter cette demande par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 8 du jugement attaqué. Sur les frais liés au litige : 13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions des parties présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La somme que la Polynésie française a été condamnée à verser à la société Polyagro par le jugement du 23 février 2021 du tribunal administratif de la Polynésie française est ramenée à 174 794 francs CFP, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2020 et de la capitalisation des intérêts. Article 2 : Le jugement du 23 février 2021 du tribunal administratif de la Polynésie française est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Polyagro est rejeté. Article 4 : Le surplus des conclusions de la Polynésie française présentées par la voie de l'appel incident et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice sont rejetés. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Polyagro et la Polynésie française. Copie en sera transmise au haut-commissaire de la République en Polynésie française. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Fombeur, présidente de la Cour, - M. Luben, président de chambre, - Mme Julliard, présidente assesseure. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M. A...La présidente, P. FOMBEUR Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 21PA02524 2
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire enregistrés les 5 mai 2021 et 12 mai 2022, le syndicat des radios indépendantes, représenté par Me Weigel, demande à la cour : 1°) d'annuler la décision du comité territorial de l'audiovisuel de Dijon du 7 octobre 2020 autorisant l'association Radio Fox à diffuser un service de radio par voie hertzienne terrestre dénommé Radio Fox pour la période allant du 1er novembre 2020 au 6 juillet 2021, ainsi que la décision implicite née le 6 mars 2021 du silence gardé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel sur son recours administratif préalable obligatoire ; 2°) de mettre à la charge de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'irrégularité de la convention conclue entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel et l'association Radio Fox entache la décision d'autorisation d'illégalité ; ladite convention est irrégulière dès lors qu'elle mentionne que l'autorité administrative était représentée par le président du comité territorial de l'audiovisuel de Lyon et non par celui de Dijon, dans le ressort duquel se trouve la fréquence attribuée ; cette circonstance entache d'irrégularité la procédure suivie préalablement à l'édiction de la délibération litigieuse du comité territorial de l'audiovisuel de Dijon, notamment en ce qui concerne les règles de quorum ; la convention est en outre irrégulière en ce que son annexe II ne précise pas en quoi la programmation du titulaire de l'autorisation présente un caractère temporaire ; - l'autorisation attaquée est entachée d'erreur de droit, dès lors que le service édité par l'association Radio Fox n'est ni une radio destinée à couvrir un événement exceptionnel ou saisonnier de grande ampleur, ni une radio lycéenne ou universitaire qui émet le temps de l'année scolaire ; ce service n'entre donc pas dans le champ d'application des dispositions de l'article 28-3 de la loi du 30 septembre 1986 relatives à la délivrance d'autorisations sans appel à candidatures ; - l'autorisation litigieuse a été accordée en méconnaissance de l'interdiction de renouvellement immédiat issue de la réserve d'interprétation formulée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 21 janvier 1994. Par deux mémoires en défense enregistrés les 22 mars 2022 et 24 juin 2022, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par le syndicat des radios indépendantes ne sont pas fondés. Par un mémoire enregistré le 23 septembre 2022, l'association Radio Fox, représentée par Me Gaschignard, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge du syndicat des radios indépendantes. Elle soutient que : - l'intérêt à agir du syndicat requérant n'est pas certain ; - les moyens soulevés par le syndicat des radios indépendantes ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique, - les observations de Me Weigel, représentant le syndicat des radios indépendantes, - et les observations de Me Gaschignard, représentant l'association Radio Fox. Considérant ce qui suit : 1. Par une délibération du 7 octobre 2020, publiée au Journal officiel de la République française le 7 novembre 2020, le comité territorial de l'audiovisuel de Dijon a autorisé l'association Radio Fox à diffuser par voie hertzienne terrestre le service Radio Fox, pour la période de neuf mois allant du 1er novembre 2020 au 6 juillet 2021, sur la fréquence 97,9 MHz à Auxonne (Côte-d'Or). L'association Radio Fox avait déjà bénéficié d'une autorisation temporaire de diffusion pour la période allant du 18 octobre 2019 au 30 juin 2020. Le syndicat des radios indépendantes a formé auprès du Conseil supérieur de l'audiovisuel, par courrier du 4 janvier 2021 reçu le 6 janvier suivant, un recours administratif préalable obligatoire à l'encontre de la décision du comité territorial de l'audiovisuel de Dijon du 7 octobre 2020. Ce recours a été implicitement rejeté le 6 mars 2021. Le syndicat des radios indépendantes demande à la cour d'annuler les décisions du 7 octobre 2020 et du 6 mars 2021. Sur les conclusions dirigées contre la décision du 7 octobre 2020 du comité territorial de l'audiovisuel de Dijon : 2. Les conclusions du syndicat requérant dirigées contre cette décision, à laquelle s'est substituée la décision implicite née le 6 mars 2021 du silence gardé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel sur son recours administratif préalable obligatoire, doivent être regardées comme dirigées contre cette dernière décision. Sur la fin de non recevoir opposée par l'association Radio Fox : 3. Le syndicat des radios indépendantes a notamment pour objet de défendre les intérêts professionnels de ses adhérents du secteur de la radiodiffusion indépendante. Il a ainsi pour objet la défense des intérêts collectifs d'une partie des opérateurs de radio concurrents de l'association Radio Fox. Dès lors, contrairement à ce que soutient cette dernière, le syndicat des radios indépendantes justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de la décision attaquée. Sur les conclusions à fin d'annulation : 4. Aux termes de l'article 28-3 de la loi du 30 septembre 1986, dans sa version alors applicable : " Le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut, sans être tenu de procéder aux appels aux candidatures prévus par les articles 29,29-1,30 ou 30-1, délivrer à toute société, fondation, association déclarée selon la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, association à but non lucratif régie par la loi locale dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, des autorisations relatives à un service de radio ou de télévision par voie hertzienne terrestre pour une durée n'excédant pas neuf mois. / Ces autorisations peuvent notamment être attribuées à l'occasion de manifestations, d'événements exceptionnels ou pendant les périodes de fréquentation touristique. ". Ces dispositions, qui dérogent aux articles 29 et 30 de la même loi, sont destinées à permettre que soient autorisées de manière temporaire et selon une procédure adaptée des expériences occasionnelles ou saisonnières, et sans que ces autorisations permettent un renouvellement immédiat au regard des règles fixées par les articles 29 et 30. 5. L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique et l'association Radio Fox soutiennent que, si le service Radio Fox n'est pas destiné à couvrir une manifestation, un évènement exceptionnel ou une fréquentation touristique saisonnière, il revêt le caractère d'une radio collégienne et lycéenne émettant le temps de l'année scolaire, justifiant la délivrance de l'autorisation contestée. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette radio se présente elle-même comme un service indépendant local, ayant notamment pour vocation " d'être un outil à disposition des commerçants et associations locales ", dont les créateurs et animateurs sont des professionnels. La circonstance que Radio Fox bénéficie de locaux mis à disposition par le lycée Prieur de Côte d'Or et qu'elle diffuse, en partenariat avec celui-ci ainsi qu'avec le collège La Croix des Sarrasins et une école primaire, dans le cadre de projets pédagogiques menés en collaboration avec ces établissements en vertu de conventions conclues après la délivrance de l'autorisation, de brèves chroniques quotidiennes réalisées par un public scolaire, comme le met en valeur un rapport d'activités établi le 5 juillet 2021 postérieurement à la décision attaquée et à l'introduction de la requête du syndicat des radios indépendantes, ne saurait suffire à lui conférer le caractère d'une radio proprement collégienne ou lycéenne. Dans ces conditions, le syndicat requérant est fondé à soutenir que le service autorisé ne présentait pas les caractéristiques susceptibles de permettre, au titre des dispositions précitées de l'article 28-3 de la loi du 30 septembre 1986, qu'il soit dérogé au principe de l'appel aux candidatures posé par l'article 29 de la même loi, et par suite à demander l'annulation de l'autorisation litigieuse pour erreur de droit. 6. Il résulte de ce qui précède que la décision implicite née le 6 mars 2021 du silence gardé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel sur le recours administratif préalable obligatoire du syndicat des radios indépendantes contre la décision du comité territorial de l'audiovisuel de Dijon du 7 octobre 2020 doit être annulée. Sur les frais liés au litige : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique le versement de la somme de 1 500 euros au syndicat des radios indépendantes, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font en revanche obstacle à ce que soit mis à la charge de ce dernier, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par l'association Radio Fox et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La décision implicite née le 6 mars 2021 du silence gardé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel sur le recours administratif préalable obligatoire du syndicat des radios indépendantes contre la décision du comité territorial de l'audiovisuel de Dijon du 7 octobre 2020 est annulée. Article 2 : L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique versera la somme de 1 500 euros au syndicat des radios indépendantes en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des radios indépendantes, à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique et à l'association Radio Fox. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président de chambre, - Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, G. A...Le président, I. LUBEN Le greffier, É. MOULIN La République mande et ordonne à la ministre de la culture, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA02430
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2017 par lequel le maire de la commune de La Forest-Landerneau a délivré à l'élevage des Lutins de Cornouaille un permis de construire pour une construction à destination agricole et d'habitat. Par un jugement n° 1705497 du 15 janvier 2021, le tribunal administratif de Rennes a annulé ce permis de construire. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 mars 2021 et 4 janvier 2022, la commune de La Forest-Landerneau, représentée par Me Gourvennec et Me Voisin, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 15 janvier 2021 du tribunal administratif de Rennes ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. C... B... devant le tribunal administratif de Rennes ; 3°) de mettre à la charge de M. C... B... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la demande de première instance de M. B... était irrecevable en l'absence d'intérêt lui donnant qualité pour agir ; - subsidiairement, c'est à tort que les premiers juges ont annulé le permis de construire : . les dispositions des articles A1 et A2 du règlement du plan local d'urbanisme ont été respectées ; le fait que le pétitionnaire loue une partie de sa propriété proche où il réside est sans incidence sur la légalité de la décision ; en tout état de cause ce lieu est insuffisant pour accueillir son projet ; . les dispositions de l'article 153-2 du règlement sanitaire départemental ont été respectées ; son élevage de yorkshire n'entre pas dans le champ de ces dispositions qui ne visent pas les élevages canins ; subsidiairement, ces dispositions ne trouvent pas à s'appliquer à un élevage de dix chiens ; il n'entend pas développer une activité d'élevage de chevaux ; . les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ne sont pas méconnues ; le projet est en continuité immédiate de l'agglomération de La Forest-Landerneau ; - la cour étant saisie par l'effet dévolutif de l'appel, les autres moyens présentés par M. B... seront écartés pour les motifs développés devant le tribunal. Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 décembre 2021 et 20 janvier 2022, M. C... B..., représenté par Me Saout, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de la commune de La Forest-Landerneau une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par la commune de La Forest-Landerneau ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Mas, rapporteur public, - et les observations de Me Voisin, représentant la commune de La Forest-Landerneau, et de Me Nadan substituant Me Saout, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. L'élevage des Lutins de Cornouaille a présenté, le 20 septembre 2017, une demande de permis de construire pour la réalisation au lieu-dit " La Grande Palud " à La Forest-Landerneau (Finistère) d'une construction destinée à abriter une carrière et des boxes pour chevaux en rez-de-chaussée, ainsi qu'un logement à l'étage, abritant également une nurserie canine, l'ensemble présentant une surface de plancher de 464 m², dont 229 m² destinés à l'habitation et 235 m² à l'exploitation agricole. Par un arrêté du 6 octobre 2017, le maire de la commune de La Forest-Landerneau a délivré le permis de construire sollicité. Par un jugement du 15 janvier 2021, dont la commune de La Forest-Landerneau relève appel, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 6 octobre 2017 délivrant le permis de construire contesté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance : 2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ". 3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. 4. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction. 5. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté autorise l'édification d'une vaste construction, se présentant pour l'essentiel comme un hangar largement ouvert abritant une carrière équestre, d'une surface de plancher de 464 m², d'une longueur de 71,80 mètres et d'une hauteur de près de 10 mètres, édifiée à environ 40 mètres de la propriété sur laquelle M. B... exploite un centre hippique. Cette construction massive, en surplomb, limitrophe de la propriété de M. B..., se substitue à un espace naturel, classé au moins partiellement en zone Natura 2000, et sera visible depuis l'entrée du club hippique de M. B... et depuis son manège, alors même que la construction de M. B... est aveugle en direction du projet en litige. Cette situation est de nature à affecter directement les conditions de jouissance de sa propriété par M. B.... Par suite, la commune de La Forest-Landerneau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont reconnu un intérêt donnant qualité à agir à M. B... contre l'arrêté du 6 octobre 2017 en litige. En ce qui concerne le motif d'annulation tiré de la méconnaissance des articles A1 et A2 du règlement du plan local d'urbanisme : 6. Aux termes de l'article A 1 du règlement du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de La Forest-Landerneau : " (...) Sont interdites : les occupations et utilisations du sol non mentionnées à l'article A2 et notamment : / (...) 2. Les habitations non nécessaires et non directement liées aux besoins des exploitations agricoles (...) ". Aux termes de l'article A2 de ce règlement : " A. Ne sont admises dans cette zone, que les occupations et utilisations du sol ci-après : / 1. Les constructions et installations nouvelles ou les extensions, adaptations et réfections de bâtiments existants liés et nécessaires aux activités agricoles (serres, silos, locaux de transformation et de conditionnement de produits venant de l'exploitation, bâtiments complémentaires et nécessaires à l'activité agricole et à l'élevage, hangars, garages, abris exclusivement réservés aux logements des animaux ...). / (...) 3. La construction à usage d'habitation dès lors qu'elle est destinée au logement des personnes dont la présence permanente est nécessaire compte tenu de la nature et de l'importance ou de l'organisation de l'exploitation agricole et qu'elle est implantée en continuité du siège d'exploitation concerné. (...) ". 7. Il ressort des pièces du dossier du permis de construire que le logement prévu au sein de la construction autorisée, également à usage d'abri et de dressage pour chevaux, est justifié par le fait que le pétitionnaire entend y poursuivre son activité de reproduction de chiens de race yorkshire terrier, qui nécessiterait la présence à tout moment de leur éleveur lors de la mise bas et les jours suivant. Toutefois d'une part, cette activité est réduite dès lors que le pétitionnaire fait état de la présence de cinq chiennes femelles et de deux males et ne prévoit à ce titre, au sein du logement projeté, que la réalisation d'une pièce, aux dimensions modestes, destinée à servir de nurserie. D'autre part, il est constant que le pétitionnaire est également propriétaire d'une vaste maison située à moins de 50 mètres de son projet de construction, où il occupe un logement de 72 m² dans lequel il élevait déjà ses chiens, et dont les quatre autres logements sont loués à des tiers. En conséquence, la construction d'un nouveau logement, si elle peut faciliter le confort de vie du pétitionnaire, ne s'avère pas indispensable à la poursuite de son activité d'éleveur canin, dès lors que celle-ci se poursuivrait avec la nouvelle construction dans des conditions similaires, au sein d'une unique pièce de faibles dimensions, dédiée à la nursery des chiens, sans nouvel aménagement. De plus, il résulte d'un choix personnel de l'intéressé, même s'il peut s'expliquer par des considérations financières, que tout ou partie des locaux existants au sein de la maison dont il est propriétaire soient loués et non pas dédiés à son activité d'élevage de chiens. Enfin, la commune ne peut sérieusement faire valoir qu'en occupant la totalité de la maison qu'il habite et qu'il loue partiellement l'intéressé ne pourrait " accueillir une carrière, une écurie et un chenil ", alors que le premier motif d'annulation de l'arrêté contesté par le jugement attaqué ne porte, au regard des dispositions citées au point précédent, que sur la réalisation d'un logement en lien avec une activité d'élevage canin. Au demeurant alors que la commune soutient par ailleurs que l'intéressé ne souhaite pas abriter un élevage de chevaux mais des activités de dressage et d'entrainement équestres, le pétitionnaire n'a jamais soutenu que ses activités équestres nécessitaient la réalisation d'un nouveau logement. Dans ces conditions, l'arrêté contesté est intervenu en violation des articles A1 et A2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de La Forest-Landerneau qui interdisent la création de logements non nécessaires aux besoins des exploitations agricoles. En ce qui concerne le motif d'annulation tiré de la méconnaissance de l'article 153-2 du règlement sanitaire départemental : 8. Aux termes de l'article 153-2 " Règles d'implantation des bâtiments d'élevage ou d'engraissement " du règlement sanitaire départemental du Finistère : " Sans préjudice des dispositions réglementaires applicables par ailleurs, les bâtiments d'élevage ou d'engraissement ne doivent pas être implantés : / - à moins de 50 m de tout immeuble habité par des tiers et de tout local à usage professionnel, autre que ceux liés à l'agriculture. (...) ". 9. Il ressort des pièces du dossier que le pétitionnaire développe une activité d'élevage de yorkshires terriers, ainsi qu'il l'explique dans un courrier de " présentation du projet " annexé à sa demande de permis de construire, où il fait état de la présence de cinq femelles et de deux étalons, et d'une " production annuelle (...) aléatoire [qui] varie de 4 à 20 chiots " qui sont ensuite vendus. Par suite, nonobstant la modestie de cet élevage, et eu égard à la rédaction du règlement sanitaire départemental du Finistère, qui ne fixe pas de seuil pour l'application des règles prévues à son article 153-2 pour les élevages canins, ces dispositions trouvent à s'appliquer en l'espèce. Par ailleurs, si au titre de son activité équestre le pétitionnaire entend développer pour l'essentiel dans la nouvelle construction une activité de dressage et d'entrainement de chevaux, il résulte néanmoins du même courrier annexé à sa demande de permis de construire qu'il y envisage également la reproduction de chevaux. La notice paysagère du dossier présente le projet comme la " création d'un hangar agricole d'élevage " et indique que les juments accueillies sont destinées au sport et au poulinage. Dans ces conditions, les dispositions de l'article 153-2 du règlement sanitaire départemental trouvent à s'appliquer au regard de la totalité de la construction autorisée par le permis en litige. Or il est constant que cette construction se trouve à moins de 50 mètres de la maison préexistante du pétitionnaire, laquelle est habitée puisque y sont loués quatre appartements. Dans ces conditions, l'autorisation contestée est intervenue en violation des dispositions précitées de l'article 153-2 du règlement sanitaire départemental du Finistère. En ce qui concerne le motif d'annulation tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme : 10. Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ". Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. 11. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet appartient à une zone limitée sur ses parties nord et ouest par un espace naturel boisé, lequel se poursuit à l'est, de l'autre côté de la route départementale qui longe ce même compartiment de terrain. Au sud elle est limitée par une voie ferrée que la route départementale franchit par un tunnel. Au sein de cette zone, outre la maison du pétitionnaire et le club hippique de M. B..., seules quelques maisons d'habitation sont implantées de manière diffuse. Dans ces conditions le projet de construction en litige ne se situe pas en continuité d'une agglomération existante, si bien qu'en délivrant le permis de construire en litige le maire de la commune de La Forest-Landerneau a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme. 12. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de La Forest-Landerneau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 6 octobre 2017 par lequel le maire de La Forest-Landerneau a délivré à l'élevage des lutins de Cornouaille un permis de construire. Sur les frais d'instance : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par la commune de La Forest-Landerneau. En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B.... D E C I D E : Article 1er : La requête de la commune de La Forest-Landerneau est rejetée. Article 2 : La commune de La Forest-Landerneau versera à M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Forest-Landerneau, à M. C... B... et à l'élevage des lutins de Cornouaille. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. Le rapporteur, C. A... Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00706
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... et Mme D... B... ont respectivement demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés du 5 février 2021 par lesquels le préfet de police leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 21155456/5-3 et 2115458/5-3 du 2 décembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 15 mars 2022, M. et Mme B..., représentés par Me Millot, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 21155456/5-3 et 2115458/5-3 du 2 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler les arrêtés du 5 février 2021 du préfet de police ; 3°) d'enjoindre au préfet de police de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Millot, leur avocat, de la somme de 2 400 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Ils soutiennent que : - les décisions de refus de titre de séjour n'ont pas été précédées d'un examen préalable et particulier de leurs situations ; - ces décisions méconnaissent les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leur situation personnelle ; - elle méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle méconnaissent les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale de New York relative aux droits de l'enfant ; - elle méconnaissent l'article 2 du protocole n° 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - les décisions les obligeant à quitter le territoire sont illégales en raison de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour. Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés. M. et Mme B... ont respectivement a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 9 février 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale de New York relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les observations de Me Chatel, avocat de M. et Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. M. et Mme B..., ressortissants ivoiriens respectivement nés le 12 avril 1983 et le 30 décembre 1989, qui seraient successivement entrés en France le 23 septembre 2012 et le 30 mai 2015, ont sollicité le 30 décembre 2020 leur admission au séjour dans le cadre des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur. Par des arrêtés du 5 février 2021, le préfet de police a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 2 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes d'annulation de ces arrêtés. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police se serait abstenu de se livrer à un examen de la situation particulière des requérants. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation personnelle des intéressés doit être écarté. 3. En deuxième lieu, aux termes du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie (...) dont les liens personnels et familiaux en France appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". 4. Au soutien des moyens tirés de la méconnaissance des articles précités, M. et Mme B... déclarent être entrés sur le territoire national, respectivement en 2012 et 2015 et qu'y sont nés leurs deux enfants, F... et E... les 1er mars 2016 et 14 janvier 2019. Ils font également valoir que leur fils aîné est scolarisé en France et que M. B... est inséré professionnellement. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ce dernier a fait l'objet d'un premier arrêté portant refus de titre et obligation de quitter le territoire français le 21 avril 2015 à la suite du rejet de sa demande d'asile et qu'il n'a depuis lors travaillé que ponctuellement en France en qualité d'agent de propreté en 2016, puis à compter de 2019, moyennant une faible rémunération. M. B..., puis son épouse et leurs deux enfants, ont toujours été hébergés dans des structures d'accueil pour étrangers sans disposer de leur propre logement. Les requérants n'établissent par ailleurs pas être dépourvus d'attaches personnelles et familiales en Côte d'Ivoire où ils ont vécu respectivement jusqu'à l'âge de 29 et 26 ans et où la cellule familiale est susceptible de se reconstruire, notamment au regard de la circonstance qu'ils sont parents de deux autres enfants, mineurs à la date des décisions attaquées, résidant dans leur pays d'origine. La durée de leur présence sur le territoire français étant encore brève et la scolarisation de l'aîné de leurs enfants, en classe de maternelle, récente, en adoptant les décisions de refus de séjour attaquées, le préfet de police n'a pas méconnu les articles précités, ni porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. et Mme B... une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises. Le préfet de police ne peut davantage être regardé comme ayant méconnu l'intérêt supérieur des enfants des requérants en refusant leur admission au séjour. Enfin, pour les mêmes motifs, les décisions attaquées ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation. 5. En troisième lieu, en se bornant à soutenir que les décisions méconnaissent le droit à l'instruction de leurs enfants tel qu'il résulte des stipulations de l'article 2 du protocole n° 1 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les requérants n'assortissent pas leur moyen des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé. 6. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, tiré de l'illégalité par voie d'exception de la décision de refus de séjour, ne peut être accueilli. 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leur requête d'appel ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de police. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Ivan Luben, président, - Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère, - Mme Gaëlle Mornet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022. La rapporteure, M-D A...Le président, I. LUBEN Le greffier, E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA01229
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'EURL Bianchinnocenti a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 26 avril 2018 par laquelle le maire de Marseille a refusé de lui verser une subvention de 10 000 euros, et de condamner la ville de Marseille à lui verser la même somme. Par un jugement n° 1805352 du 16 septembre 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 5 novembre 2020, l'EURL Bianchinnocenti, représentée par Me Righi, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 16 septembre 2020 du tribunal administratif de Marseille ; 2°) d'annuler la décision du 26 avril 2018 du maire de Marseille ; 3°) de condamner la ville de Marseille à lui verser la somme de 10 000 euros ; 4°) de mettre la somme de 2 000 euros à la charge de la ville de Marseille en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle a respecté les critères d'attribution de la subvention portés à sa connaissance ; - le maire ne pouvait subordonner le versement d'une subvention votée par le conseil municipal à des conditions nouvelles ; - la subvention n'était pas subordonnée à l'absence d'engagement des travaux avant la notification de la décision d'octroi de la subvention ; - elle n'était pas davantage subordonnée à la production des autorisations d'urbanisme nécessaires à la réalisation des travaux ; - il en va de même de la validation des devis par l'atelier du patrimoine de la ville ; - elle n'a pas signé l'acte d'engagement communiqué par la ville. Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2021, la ville de Marseille, représentée par Me Bouteiller, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête présentée par l'EURL Bianchinnocenti ; 2°) de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par l'EURL Bianchinnocenti ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code de justice administrative. Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Beaupuy, substituant Me Righi, avocat de l'EURL Bianchinnocenti, et de Me Seisson, substituant Me Bouteiller, avocat de la ville de Marseille. Considérant ce qui suit : 1. L'EURL Bianchinnocenti exploite un commerce de glaces et de sorbets sous l'enseigne " le Glacier du roi " dans le 2ème arrondissement de Marseille. Par une délibération du 20 juin 2014, le conseil municipal de Marseille lui a attribué une subvention de 10 000 euros pour la rénovation de son commerce. Par une décision du 26 avril 2018, qui s'est substituée à la décision implicite de refus née du silence conservé sur la demande de l'EURL Bianchinnocenti, le maire de Marseille a refusé de lui verser la subvention en question. L'EURL Bianchinnocenti fait appel du jugement du 16 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation de la ville de Marseille à lui verser la somme de 10 000 euros. 2. Une décision qui a pour objet l'attribution d'une subvention constitue un acte unilatéral qui crée des droits au profit de son bénéficiaire. De tels droits ne sont ainsi créés que dans la mesure où le bénéficiaire de la subvention respecte les conditions mises à son octroi, que ces conditions découlent des normes qui la régissent, qu'elles aient été fixées par la personne publique dans sa décision d'octroi, qu'elles aient fait l'objet d'une convention signée avec le bénéficiaire, ou encore qu'elles découlent implicitement mais nécessairement de l'objet même de la subvention (cf. CE, 5 juil. 2010, n° 308615). 3. Il ressort de la délibération du 30 juin 2014, qui s'inscrit dans le programme du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC) centre-ville ZUS / Euroméditerranée phase 2, que la subvention en cause a pour objet d'inciter les commerçants à réaliser des travaux de rénovation des devantures commerciales et de l'intérieur des commerces. Elle doit ainsi être nécessairement regardée comme visant à permettre la réalisation de travaux que les commerçants n'auraient pu spontanément effectuer et ne saurait, en conséquence, avoir pour objet de rembourser des travaux effectués antérieurement à son attribution. A l'exception d'une facture d'un montant moindre dont les prestations, qui ne portent pas sur la devanture et l'intérieur du commerce, n'entrent pas dans le champ de la subvention, l'EURL Bianchinnocenti s'est bornée à produire les factures de travaux réalisés antérieurement à la demande de subvention, dont il est constant que la ville n'avait pas été informée. Il suit de là que l'EURL Bianchinnocenti n'a pas respecté l'objet de cette subvention. Ce motif pouvait donc justifier de lui refuser le versement de la subvention qui lui avait été attribuée. 4. Il résulte de l'instruction que le maire de Marseille aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur ce seul motif. Il n'est dès lors pas nécessaire d'examiner les moyens par lesquels l'EURL Bianchinnocenti conteste la légalité des autres motifs de la décision du 26 avril 2018. 5. Il résulte de ce qui précède que l'EURL Bianchinnocenti n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. 6. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'EURL Bianchinnocenti le versement de la somme de 1 500 euros à la ville de Marseille au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. En revanche, les dispositions du même article font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par l'EURL Bianchonnicenti au même titre. D É C I D E : Article 1er : La requête de l'EURL Bianchinnocenti est rejetée. Article 2 : L'EURL Bianchinnocenti versera la somme de 1 500 euros à la ville de Marseille en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL Bianchinnocenti et à la ville de Marseille. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente de la cour, - Mme Vincent, présidente assesseure, - M. Mérenne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. , 2 No 20MA04061
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler la décision du 4 juillet 2017, par laquelle le président du conseil départemental de l'Hérault a refusé de le placer en congé de longue maladie et l'a placé en congé de maladie ordinaire, d'autre part, d'enjoindre au président du conseil départemental de l'Hérault de le placer en congé de longue maladie et, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale. Par un jugement n° 1704263 du 4 octobre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 décembre 2019 et 29 juin 2020, M. A... B..., représenté par Me Mezouar, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du 4 juillet 2017 ; 3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de l'Hérault de le placer en congé de longue maladie ; 4°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale ; 5°) de mettre à la charge du département de l'Hérault la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué est entaché d'une erreur dans l'analyse des pièces du dossier et d'une erreur de droit ; - le tribunal n'a pas tenu compte des pièces qu'il a produites pour motiver sa décision et s'est appuyé uniquement sur l'argumentation présentée par la partie adverse ; en s'abstenant de prescrire une expertise médicale, les premiers juges ont manqué de rigueur et ont porté atteinte au caractère contradictoire de la procédure ; - la décision du 4 juillet 2017, par laquelle le président du conseil départemental de l'Hérault a refusé de le placer en congé de longue maladie, est insuffisamment motivée ; - elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors qu'il n'a pas pu défendre son dossier lors de la convocation du 27 septembre 2016 et a ainsi été privé de son droit de présenter ses observations ou d'être examiné ; - en s'estimant lié par l'avis du comité médical, le président du conseil départemental de l'Hérault a entaché sa décision d'une erreur de droit ; - cette décision méconnaît l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, l'article 18 du décret du 30 juillet 1987 et l'arrêté du 14 mars 1986, dès lors que l'affection dont il souffre lui ouvre droit au congé longue maladie ; - elle est entachée d'erreur dans la qualification juridique des faits ; il s'agit d'une affection invalidante, nonobstant la circonstance qu'il ait été contraint à la reprise du travail pour des raisons économiques ; - cette décision s'inscrit dans un contexte de harcèlement moral à son encontre par le département de l'Hérault ; les refus systématiques qui ont été opposés à toutes ses demandes s'expliquent en raison de la relation conflictuelle avec sa hiérarchie. Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 mai et 14 octobre 2020, le département de l'Hérault, représenté par la SCP CGCB et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les moyens de légalité interne sont irrecevables ; - les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - l'arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l'octroi de congés de longue maladie ; - l'arrêté du 30 juillet 1987 relatif à la liste indicative des maladies pouvant ouvrir droit à un congé de longue maladie (régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux) ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Balaresque, rapporteure, - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Mezouar représentant M. B... ainsi que celles de Me Germe représentant le département de l'Hérault. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., rédacteur principal de 1ère classe en fonction au département de l'Hérault, a été placé en congé de maladie ordinaire à compter du 10 février 2016. Le 21 avril 2016, il a présenté une demande de congé de longue maladie. Par une première décision du 11 octobre 2016, le président du conseil départemental de l'Hérault a décidé de maintenir M. B... en congé de maladie ordinaire. Par une nouvelle décision du 4 juillet 2017, le président du conseil départemental de l'Hérault a indiqué à l'intéressé qu'à la suite de l'avis du comité médical supérieur rendu le 16 mai 2017, il maintenait sa décision de le placer en congé de maladie ordinaire, rejetant ainsi sa demande de congé de longue maladie. M. B... relève appel du jugement du 4 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président du conseil départemental de l'Hérault du 4 juillet 2017. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, il appartient au juge administratif, dans l'exercice de ses pouvoirs généraux de direction de la procédure, d'ordonner toutes les mesures d'instruction qu'il estime nécessaires à la solution des litiges qui lui sont soumis. Les premiers juges, s'estimant suffisamment éclairés sur les données du litige, ont pu, sans entacher le jugement attaqué d'irrégularité, ne pas ordonner d'expertise judiciaire avant de statuer sur la demande de M. B.... 3. En deuxième lieu, si M. B... estime que les premiers juges n'ont pas tenu compte de son argumentaire et des pièces dont il s'est prévalu devant lui, ces circonstances, dès lors que l'intéressé n'invoque ni une omission à statuer sur des conclusions ni un défaut de réponse à un moyen, relèvent du bien-fondé du jugement attaqué et non de sa régularité. Le moyen tiré du caractère non contradictoire de la procédure doit, par suite, être écarté. 4. En dernier lieu, la régularité du jugement ne dépendant pas de son bien-fondé, M. B... ne peut utilement soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une erreur de fait ou d'une erreur de droit. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... a reçu simultanément notification de la décision contestée du 4 juillet 2017 et de l'avis du comité médical supérieur du 16 mai 2017 auquel cette décision se référait. Cet avis, défavorable à l'octroi d'un congé de longue maladie, indiquait, outre la référence à la loi du 26 janvier 1984, que " l'état de santé de l'agent ne rentre pas dans les critères médicaux indiqués dans l'arrêté du 14 mars 1986 donnant droit à ce type de congés ". Il est, dès lors, suffisamment motivé en droit et en fait. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée, qui fait expressément référence à cet avis notifié simultanément à l'intéressé, doit être écarté. 6. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier et en particulier de la décision contestée, qui a procédé à un examen de la situation de M. B... au vu des avis concordants du comité médical départemental et du comité médical supérieur, que le président du conseil départemental de l'Hérault se serait cru lié par l'avis du comité médical supérieur et aurait ainsi entaché sa décision d'une erreur de droit. 7. En troisième lieu, aux termes de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Le comité médical est chargé de donner à l'autorité compétente, dans les conditions fixées par le présent décret, un avis sur les questions médicales soulevées par l'admission des candidats aux emplois publics, l'octroi et le renouvellement des congés de maladie et la réintégration à l'issue de ces congés, lorsqu'il y a contestation. (...) Le secrétariat du comité médical informe le fonctionnaire : / - de la date à laquelle le comité médical examinera son dossier ; / - de ses droits concernant la communication de son dossier et de la possibilité de faire entendre le médecin de son choix ; /- des voies de recours possibles devant le comité médical supérieur (...) ". 8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été informé, par un courrier du 12 septembre 2016, que le comité médical se réunirait le 27 septembre 2016 pour examiner sa demande de congé de longue maladie. Ce courrier mentionnait la possibilité de consulter son dossier et de faire entendre le médecin de son choix par ce comité. Si M. B... produit des échanges de courriels avec le service de médecine préventive du département de l'Hérault desquels il ressort qu'il souhaitait être examiné préalablement au comité médical par le médecin de prévention du département puis représenté par lui lors de la séance du comité médical du 27 septembre 2016, il ressort de ces mêmes échanges que le service de médecine préventive l'a informé dès le 13 septembre 2016 de l'indisponibilité du médecin de prévention durant cette période. Dans ces conditions, M. B..., qui disposait du temps nécessaire pour solliciter un autre médecin de son choix, n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé du droit de se défendre ou de présenter des observations sur sa situation médicale. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure suivie devant le comité médical doit être écarté. 9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa version applicable à la date de la décision attaquée : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée (...) ". Aux termes de l'article 18 du décret du 30 juillet 1987 précité : " Le fonctionnaire qui est dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions par suite d'une maladie grave et invalidante nécessitant un traitement et des soins prolongés est mis en congé de longue maladie, selon la procédure définie à l'article 25 ci-dessous. (...) ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l'octroi de congés de longue maladie, rendu applicable aux fonctionnaires territoriaux par l'article 1er de l'arrêté du 30 juillet 1987 relatif à la liste indicative des maladies pouvant ouvrir droit à un congé de longue maladie (régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux) : " Un fonctionnaire est mis en congé de longue maladie lorsqu'il est dûment constaté qu'il est dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions au cours d'une des affections suivantes lorsqu'elle est devenue invalidante : (...) 2. Insuffisance respiratoire chronique grave. (...) 5. Maladies cardiaques et vasculaires : - angine de poitrine invalidante ; - infarctus myocardique ; - suites immédiates de la chirurgie cardio-vasculaire ; - complications invalidantes des artériopathies chroniques ; - troubles du rythme et de la conduction invalidante ; - cœur pulmonaire post embolique ; - insuffisance cardiaque sévère (cardiomyopathies notamment). (...) 7. Affections évolutives de l'appareil oculaire avec menace de cécité (...) ". 10. Il ressort des pièces versées au dossier que le refus d'octroyer un congé de longue maladie à M. B... repose sur les avis concordants du comité médical départemental du 27 septembre 2016 et du comité médical supérieur du 16 mai 2017, qui ont estimé, au vu notamment des conclusions du rapport remis le 29 juin 2016 par le médecin cardiologue expert agréé qui indiquent que " sa maladie coronarienne et rythmique sont peu sévères et ne justifie pas la prolongation de son arrêt maladie ", que les critères requis pour l'obtention d'un tel congé n'étaient pas remplis. Si la réalité de la maladie coronarienne chronique et de l'affection oculaire en lien avec cette pathologie cardiaque dont souffre M. B... n'est pas contestable et, du reste, n'est pas contestée, les analyses et certificats médicaux produits par le requérant, en particulier le rapport établi le 18 mai 2018 par un médecin généraliste à sa demande et celle de son conseil, ne remettent pas sérieusement en cause les conclusions du rapport de l'expert agréé selon lesquelles ces pathologies ne le placent pas dans l'impossibilité permanente d'exercer ses fonctions et ne présentent pas un caractère invalidant et de gravité confirmée, au sens de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984. Son médecin traitant a d'ailleurs conclu, le 10 octobre 2016, à son aptitude à la reprise du travail à temps plein. Dans ces conditions, le président du conseil départemental de l'Hérault n'a pas commis d'erreur de droit et a fait une exacte application des dispositions précitées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, de l'article 18 du décret du 30 juillet 1987 et de l'arrêté du 14 mars 1986 en refusant d'octroyer à M. B... un congé de longue maladie. 11. En cinquième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que fait valoir M. B..., que le refus opposé à sa demande de congé de longue maladie serait consécutif à la situation de harcèlement moral dont il a été victime de 1996 à 2006 et résulterait d'une situation de conflit avec sa hiérarchie ainsi que d'un acharnement de la direction des ressources humaines du département de l'Hérault à son encontre visant à l'empêcher de faire valoir ses droits. 12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense ni d'ordonner l'expertise médicale sollicitée, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Sur les conclusions aux fins d'injonction : 13. Le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision contestée du 4 juillet 2017, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées. Sur les frais du litige : 14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de l'Hérault, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. 15. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme que le département de l'Hérault demande à ce même titre. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions du département de l'Hérault tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêté sera notifié à M. A... B... et au département de l'Hérault. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente assesseure, - Mme Balaresque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N° 19MA05324 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner La Poste au paiement d'une somme de 10 632 euros, avec capitalisation des intérêts à compter du 4 août 2017. Par un jugement n° 1705324 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2020, Mme A... B..., représentée par la SCP Dillenschneider, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du 22 novembre 2019 ; 2°) de condamner La Poste au paiement d'une somme de 10 632 euros, avec capitalisation des intérêts à compter du 4 août 2017 ; 3°) de mettre à la charge de La Poste les entiers dépens, si exposés, ainsi qu'une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que le tribunal lui a opposé l'autorité de la chose jugée par le jugement n° 1401779, par lequel il ne s'est prononcé que sur la réparation des préjudices subis du fait du versement incomplet de la part variable et du complément de poste pour la période de janvier 2010 à décembre 2013 alors que sa demande indemnitaire porte sur les années 2014 et 2015 ; - c'est à tort que le tribunal a considéré que, pour la période comprise entre le 13 novembre 2015 et le 1er septembre 2017, les montants du complément de poste et de la part variable lui ont été versés ; elle aurait dû percevoir une somme de 390,20 euros au titre du complément de poste pour la période allant du 1er janvier au 30 juin 2015 ; elle n'a perçu aucune part variable au titre des années 2014 et 2015 et n'a perçu qu'une somme de 742 euros pour la part variable au titre de l'année 2016 ; elle est fondée à solliciter a minima la somme de 3 514,27 euros au titre de la part variable pour les années 2014 à 2017 ; - elle est fondée à solliciter la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral lié aux multiples fautes commises par La Poste et sanctionnées par le jugement n° 1401779 et à la persistance des fautes dans la gestion de son dossier depuis lors. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2021, la société anonyme La Poste, représentée par Me Bellanger de la société HMS Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme B... une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience au cours de laquelle ont été entendus : - le rapport de Mme C... ; - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... a intégré le service des postes et télécommunications comme agent d'exploitation en 1978 puis a été titularisée à ce grade le 1er avril 1979. Elle a été promue contrôleur le 22 février 1985 puis inspecteur le 30 décembre 2009. Par un jugement n° 1401779 du 13 novembre 2015, le tribunal administratif de Montpellier a condamné La Poste à lui verser la somme demandée de 9 097,20 euros au titre de la part variable et du complément de poste qui ne lui avaient été que partiellement versés depuis 2010. Par un jugement n° 1705324 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la nouvelle demande présentée par Mme B... tendant à la condamnation de La Poste à lui verser une somme globale de 10 632 euros, avec capitalisation des intérêts à compter du 4 août 2017. Mme B... relève appel de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : S'agissant du préjudice lié au versement incomplet de la part variable au titre des années 2014 à 2017 : 2. En premier lieu, par le jugement du 13 novembre 2015, devenu définitif, le tribunal administratif de Montpellier a condamné La Poste à verser à Mme B... la somme demandée de 9 097,20 euros en réparation des préjudices subis par cette dernière du fait de l'absence d'affectation sur un poste correspondant à son grade à la suite de sa promotion au grade d'inspecteur le 30 décembre 2009. Il résulte du dispositif de ce jugement et des motifs qui en constituent le soutien nécessaire que Mme B... a obtenu réparation du préjudice lié à la perte de chance sérieuse de bénéficier de la part variable au taux affecté au grade d'inspecteur, " pour la période allant du 1er janvier 2010, à la date de notification du présent jugement ", soit au 13 novembre 2015. Dans ces conditions, ainsi que le fait valoir La Poste, l'autorité de chose jugée qui s'attache au jugement du 13 novembre 2015 fait obstacle à ce que Mme B... sollicite de nouveau le versement d'une quelconque somme en réparation du préjudice lié au versement incomplet de la part variable au titre des années 2014 et 2015 du fait de l'absence d'affectation sur un poste correspondant à son grade. 3. En second lieu, il résulte de l'instruction que Mme B... a été affectée à compter du 4 mai 2016 sur un poste correspondant à son grade d'inspecteur. Elle a perçu en mai 2017 un montant de 742 euros de part variable au titre de l'année 2016 et en mai 2018 un montant de 1 000 euros de part variable au titre de l'année 2017. Si Mme B... soutient que ces montants sont insuffisants, elle ne l'établit pas, en se référant au seul montant de part variable qui lui avait été accordée au titre de l'année 2013 sans apporter aucun élément relatif à sa manière de servir, alors qu'ainsi qu'il a été dit, son affectation à compter du 4 mai 2016 étant conforme à son grade, elle n'est pas fondée à se prévaloir d'un quelconque préjudice lié à la perte de chance sérieuse de bénéficier de la part variable au taux affecté au grade d'inspecteur au titre des années 2016 et 2017. S'agissant du préjudice lié au versement incomplet de la prime " complément de poste " entre janvier et juin 2015 : 4. Il résulte du dispositif du jugement du 13 novembre 2015 et des motifs qui en constituent le soutien nécessaire que, par ce jugement, Mme B... a obtenu réparation du préjudice lié à la perte de chance sérieuse de bénéficier de la prime " complément de poste " au taux affecté au grade d'inspecteur entre janvier 2010 et décembre 2014. Mme B... sollicite désormais le versement d'une somme de 390,20 euros en réparation du même préjudice, pour la période allant du 1er janvier au 30 juin 2015. Il résulte toutefois de l'instruction que, concomitamment à l'affectation de l'intéressée sur un poste correspondant à son grade, La Poste a opéré au mois de mai 2016 une régularisation correspondante du versement au titre de l'année 2015 de l'indemnité " complément de rémunération ", qui s'est substituée à compter du 1er juillet 2015 à la prime " complément de poste ". Si Mme B... conteste le montant du versement effectué dans le cadre de cette régularisation, elle n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il serait erroné. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à solliciter la somme de 390,20 euros demandée à ce titre, dont il est au demeurant constant qu'elle a obtenu au moins une partie en mai 2016. S'agissant du préjudice moral : 5. Mme B... soutient que la faute de La Poste consistant à ne pas l'avoir affectée sur un emploi correspondant à son grade s'est poursuivie après le jugement du 13 novembre 2015 et qu'elle ne perçoit toujours pas les primes correspondantes. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il résulte toutefois de l'instruction qu'elle a été affectée à compter du 4 mai 2016 à un poste correspondant à son grade et que La Poste a concomitamment procédé à une régularisation correspondante du versement de l'indemnité " complément de rémunération " au titre de l'année 2015. Contrairement à ce que soutient la requérante, la persistance de fautes commises par La Poste dans la gestion de son dossier, postérieurement au jugement du 13 novembre 2015, n'est, dès lors, pas établie. Mme B... n'apporte, en outre, aucun élément de nature à établir qu'elle aurait subi un préjudice moral distinct des préjudices dont elle a obtenu réparation par le jugement précité du 13 novembre 2015, du fait des fautes commises par La Poste antérieurement à ce jugement. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à solliciter la réparation du préjudice moral dont elle se prévaut. 6. Il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a refusé de faire droit à sa demande. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de La Poste, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... le versement à La Poste de la somme de 800 euros en application des mêmes dispositions. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Mme B... versera à la société La Poste la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à La Poste. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente-assesseure, - Mme Balaresque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N°20MA00213 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia, par une requête enregistrée sous le n° 1900192, d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2018 par lequel elle a été placée en congé de longue maladie à demi-traitement à compter du 23 décembre 2018 pour une durée de six mois, par une requête enregistrée sous le n° 1900591, d'annuler la décision de refus d'imputabilité au service de sa maladie révélée par ses bulletins de paye des mois de mars et avril 2019 et, par une requête enregistrée sous le n° 1901266, d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 par lequel le président de la communauté de communes de Calvi Balagne a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie. Par un jugement n°s 1900192, 1900591 et 1901266 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté précité du 18 décembre 2018, rejeté le surplus des conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme A... et mis à la charge de la communauté de communes Calvi-Balagne la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la Cour : Par une requête, des pièces et mémoires complémentaires enregistrés les 2 décembre 2020, 5 décembre 2020, 20 décembre 2021, 24 août 2022 et 8 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Peres, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 1er octobre 2020 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation, d'une part, de la décision de refus d'imputabilité au service révélée par ses bulletins de salaires des mois de mars et avril 2019 et, d'autre part, de la décision du 23 juillet 2019 refusant expressément l'imputabilité au service de sa maladie et d'annuler lesdites décisions ; 2°) d'enjoindre à la communauté de communes Calvi Balagne de la placer en congé de maladie imputable au service à compter du 23 décembre 2017 jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité ; 3°) de mettre à la charge de la communauté de communes Calvi Balagne la somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance exposés en appel ainsi que celle de 3 000 euros au titre des frais exposés en première instance. Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que : - il est improbable que la communauté de communes Calvi Balagne ait été en mesure, avant l'établissement de la paye de mars 2019, de prendre connaissance de l'avis de la commission de réforme du 12 mars 2019 ; - sa maladie présente un lien de causalité direct et certain avec le service. Par deux mémoires en défense enregistrés le 17 janvier 2022 et le 23 septembre 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté de communes Calvi Balagne, représentée par Me Léron, demande à la Cour : 1°) de rejeter la requête de Mme A... ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... le paiement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés. Par lettre du 8 septembre 2022, les parties ont été informées qu'en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la Cour était susceptible de soulever d'office le caractère inapplicable des dispositions issues de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 et de procéder à une substitution de base légale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Vincent, présidente assesseure, - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Léron pour la communauté de communes Calvi Balagne. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., adjoint administratif territorial principal de 2ème classe, exerçait ses fonctions au sein de la communauté de communes Calvi Balagne. A la suite d'une chute dans les escaliers le 2 octobre 2017, elle a été placée en arrêt de travail pour accident de service jusqu'au 22 décembre 2017. A compter du 23 décembre 2017, Mme A... a été de nouveau placée en congé de maladie en raison d'un état dépressif. Par décision en date du 22 mars 2018, elle a été placée en congé de longue maladie à compter du 23 décembre 2017. Par un arrêté du 18 décembre 2018, Mme A... a été placée en congé de longue maladie à demi-traitement à compter du 23 décembre 2018 pour une durée de six mois. Par lettre datée du 27 décembre 2018, réceptionnée le 3 janvier 2019, Mme A... a présenté une demande tendant à ce que sa pathologie dépressive soit reconnue comme imputable au service. Mme A... interjette appel du jugement susvisé du tribunal administratif de Bastia en tant seulement qu'il a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation, d'une part, d'une décision de refus d'imputabilité au service qui aurait été révélée par ses bulletins de paye des mois de mars et avril 2019 lui octroyant un demi-traitement, et, d'autre part, de l'arrêté du 23 juillet 2019 refusant explicitement l'imputabilité au service de sa maladie. Sur l'étendue du litige : 2. Les conclusions présentées par Mme A... doivent être regardées comme dirigées uniquement contre l'arrêté du président de la communauté de communes Calvi Balagne du 23 juillet 2019 par lequel sa demande d'imputabilité au service de sa maladie a été explicitement rejetée, cette décision s'étant, en tout état de cause, substituée à la décision qui aurait été révélée par les bulletins de paye de mars et avril 2019. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation : S'agissant du fondement légal : 3. Lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressée ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point. 4. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable avant sa modification par le II de l'article 10 de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 : " Le fonctionnaire en activité a droit : [...] / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. [...] / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite [...] ". 5. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, créé par le I de l'article 10 de l'ordonnance précitée du 19 janvier 2017, en vigueur depuis le 21 janvier 2017, et désormais codifié à l'article L. 822-20 du code général de la fonction publique : " I. Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article (...) / IV. -Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. (...) / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat./ (...) VI. -Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités du congé pour invalidité temporaire imputable au service mentionné au premier alinéa et détermine ses effets sur la situation administrative des fonctionnaires (...) ". 6. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 étant manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, ces dispositions ne sont donc applicables, s'agissant de la fonction publique territoriale, que depuis l'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019, décret dont l'intervention était, au demeurant, prévue, par le VI de cet article 21 bis. Il en résulte que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017, sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019, soit le 12 avril 2019. 7. Dès lors que les droits des agents en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée, la situation de Mme A..., dont l'état dépressif a été diagnostiqué avant le 12 avril 2019 et dont la demande de reconnaissance d'imputabilité au service a été présentée le 27 décembre 2018, était exclusivement régie par les conditions de forme et de fond prévues avant l'entrée en vigueur des dispositions législatives et réglementaires relatives au nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. 8. Il ressort notamment des motifs de l'arrêté du 23 juillet 2019 que la communauté de communes Calvi Balagne s'est fondée sur l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 pour refuser de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie invoquée par Mme A.... Il résulte de ce qui vient d'être dit que la décision attaquée ne pouvait trouver son fondement dans ces dispositions auxquelles elle se réfère. Toutefois, le pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité administrative en vertu des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 est le même que celui dont l'investissent les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. Les garanties dont sont assortis ces textes sont similaires, Mme A... ayant au demeurant bénéficié de la consultation de la commission de réforme qui a émis un avis le 12 mars 2019. Dans ces conditions, et ainsi qu'en ont été informées les parties, il y a lieu de substituer ces dispositions à la base légale retenue par la communauté de communes intimée. S'agissant de l'appréciation du caractère imputable au service : 9. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 10. Il ressort du dossier établi par le médecin du travail que Mme A... a consulté les 5 novembre 2013, 7 novembre 2014, 23 septembre 2015 et 17 octobre 2017, lequel, par sa mission même, acquiert une connaissance précise des conditions de travail d'un agent, que l'intéressée a été victime de troubles dépressifs, d'un stress important, d'une angoisse et d'une grande fatigue consécutifs à un contexte professionnel pathogène résultant de difficultés relationnelles avec sa hiérarchie. Ces troubles et le contexte professionnel dans lequel ils s'inscrivent ont été également constatés par le médecin généraliste et le psychiatre de l'intéressée à compter de 2015 ainsi que cela ressort de certificats en date du 22 décembre 2017. Il résulte également des différentes expertises réalisées en 2018 par les psychiatres consultés dans le cadre des demandes de congés de longue maladie, longue durée et congé imputable au service déposées par Mme A..., que celle-ci a présenté une décompensation psychiatrique dans un contexte d'épuisement professionnel sous la forme d'un syndrome dépressif sévère. Par ailleurs, s'il ressort également des pièces du dossier que la requérante présentait auparavant une personnalité fragile, il résulte cependant desdites expertises et notamment de celle du chef de pôle psychiatrique de l'APHM que l'intéressée ne présentait aucun état antérieur dépressif. En outre, si la communauté de communes Calvi Balagne fait état de problèmes d'ordre personnel qui pourraient être à l'origine de la dépression de l'intéressée, elle n'assortit ces dires d'aucun commencement de preuve. Enfin, la commission de réforme a également, le 12 mars 2019, émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie. Au regard de l'ensemble de ces éléments et en l'absence de tout fait personnel de l'agent ou de toute autre circonstance conduisant à détacher la maladie du service, Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2019 portant refus d'imputabilité au service de sa pathologie dépressive. 11. Il résulte de tout ce qui précède que le jugement du tribunal administratif de Bastia doit être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du président de la communauté de communes Calvi Balagne du 23 juillet 2019. Il y a lieu, par suite, d'annuler ledit arrêté. En ce qui concerne les conclusions aux fins d'injonction : 12. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " 13. L'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2019 ainsi prononcé implique nécessairement qu'il soit enjoint à la communauté de communes Calvi Balagne de placer la requérante en position de congé de maladie imputable au service à compter du 23 décembre 2017 jusqu'à la date à laquelle elle sera mise à la retraite pour invalidité, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les frais d'instance : 14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme A..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la communauté de communes Calvi Balagne la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté de communes Calvi Balagne la somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance exposés en appel. En revanche, les conclusions présentées au titre des frais exposés en première instance doivent être rejetées, les premiers juges ayant fait une juste appréciation de ceux-ci en les évaluant à la somme de 1 000 euros. DECIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 1er octobre 2020 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du président de la communauté de communes Calvi Balagne du 23 juillet 2019. Article 2 : L'arrêté du président de la communauté de communes Calvi Balagne du 23 juillet 2019 est annulé. Article 3 : Il est enjoint au président de la communauté de communes Calvi Balagne de placer Mme A... en position de congé de maladie imputable au service à compter du 23 décembre 2017, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 4 : La communauté de communes Calvi Balagne versera à Mme A... la somme de 2 000 euros (deux mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la communauté de communes Calvi Balagne. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente-assesseure, - M. Mérenne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N° 20MA04475 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La commune de La Turbie, M. B... F... et M. A... E... ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 30 mars 2015 du préfet des Alpes-Maritimes autorisant l'indivision D... à défricher une superficie de 0,11 hectare sur les parcelles cadastrées section D n°s 236 et 237, à La Turbie. Par une ordonnance n° 2001882 du 7 juillet 2020, le président de la deuxième chambre du tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 31 août 2020, le 12 octobre et le 27 octobre 2021, la commune de La Turbie, M. F... et M. E..., représentés par Me Plenot, demandent à la cour : 1°) d'annuler l'ordonnance du 7 juillet 2020 du président de la deuxième chambre du tribunal administratif de Nice ; 2°) d'annuler l'arrêté du 30 mars 2015 du préfet des Alpes-Maritimes ; 3°) de leur accorder la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - l'ordonnance attaquée méconnaît le principe du contradictoire ; - l'un des moyens soulevés était assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; - leur demande n'était pas forclose ; - ils ont intérêt à agir ; - l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ; - il n'a pas été précédé de l'avis du comité de suivi ; - il méconnaît les articles 5, 6 et 8 de l'arrêté préfectoral du 20 juin 2012 portant création d'une zone de protection du biotope dénommée " Falaise de la Riviera " sur les communes de La Turbie, Èze, Villefranche-sur-Mer, Beaulieu-sur-Mer et Cap-d'Ail. Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2021, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - leur demande est irrecevable, dès lors que la décision était devenue caduque avant l'enregistrement de l'acte introductif d'instance ; - les moyens soulevés la commune de la Turbie et les autres requérants ne sont pas fondés. Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des moyens de légalité externe invoqués après l'expiration du délai de recours. Un mémoire a été enregistré en réponse à cette mesure d'information le 27 juillet 2022 pour la commune de La Turbie et les autres requérants. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - le code forestier ; - le code de justice administrative. Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. C..., - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Gadd, substituant Me Plenot, avocat de la commune de La Turbie et autres. Une note en délibéré a été enregistrée le 4 octobre 2022 pour la commune de La Turbie et les autres requérants. Considérant ce qui suit : 1. La commune de La Turbie, M. F... et M. E... font appel de l'ordonnance du 7 juillet 2020 par laquelle le président de la deuxième chambre du tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mars 2015 du préfet des Alpes-Maritimes autorisant l'indivision D... à défricher une superficie de 0,11 hectare sur les parcelles cadastrées section D n°s 236 et 237, à La Turbie. Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : 2. En premier lieu, l'ordonnance attaquée, prise sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, n'a pas préjudicié à l'État. Elle pouvait dès lors régulièrement intervenir sans que la procédure ait été préalablement communiquée au préfet. Le moyen tiré de l'absence de procédure contradictoire devant le tribunal administratif doit être écarté. 3. En deuxième lieu, les conclusions présentées par la commune étaient tardives pour les motifs figurant aux points 2 et 3 de l'ordonnance attaquée, qu'il y a lieu d'adopter en appel. La contestation par la commune des conditions d'affichage de l'arrêté contesté n'a pas d'incidence sur l'irrecevabilité qui lui a ainsi été opposée, tenant à la connaissance qu'elle a eu de cet acte au cours d'un litige antérieur. 4. En troisième lieu, les requérants se sont bornés à faire valoir en première instance qu'un arrêté de protection du biotope était intervenu le 20 juin 2012, que l'autorisation de défrichement avait été délivrée le 30 mars 2015 et qu'en conséquence, cet acte était entaché d'erreur de droit. L'auteur de l'ordonnance attaquée a considéré à juste titre qu'ainsi énoncé, ce moyen n'était pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé. 5. Il suit de là que l'ordonnance attaquée n'est pas entachée d'irrégularité. Sur la légalité de l'arrêté du 30 mars 2015 : 6. En premier lieu, à supposer que les requérants aient entendu soulever des moyens de légalité externe tirés, d'une part, de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 30 mars 2015 et, d'autre part, de l'absence de respect d'une procédure consultative, ces moyens relèvent d'une cause juridique nouvelle invoquée pour la première fois en appel, après l'expiration du délai de recours. Ils sont donc irrecevables. 7. En deuxième lieu, ainsi que l'a retenu l'ordonnance attaquée, l'éventuelle caducité de l'arrêté du 30 mars 2015 est sans incidence sur sa légalité. 8. En troisième lieu, les requérants soutiennent que le préfet a commis une erreur de droit en prenant l'autorisation de défrichement litigieuse, au regard de l'arrêté préfectoral du 20 juin 2012 portant création d'une zone de protection du biotope dénommée " Falaise de la Riviera ". Contrairement à ce que fait valoir le ministre en défense, cet arrêté, édicté sur le fondement de l'article R. 411-15 du code de l'environnement, comporte des dispositions réglementaires interdisant l'enlèvement et l'arrachage de la végétation dont la méconnaissance peut être utilement invoquée à l'encontre d'une autorisation individuelle de défrichement. Toutefois, l'article 9 du même arrêté prévoit que le préfet peut accorder des dérogations. Dès lors, la seule circonstance que les parcelles en cause sont situées dans le périmètre de l'arrêté préfectoral du 20 juin 2012 ne saurait permettre d'établir que le préfet a commis une erreur de droit en autorisant leur défrichement. Ce moyen doit donc être écarté. 9. Il résulte de ce qui précède que la commune de La Turbie et les autres requérants ne sont pas fondés à soutenir c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la deuxième chambre du tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande. 10. Il n'est dès lors pas nécessaire de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre en défense. Sur les frais liés au litige : 11. L'État n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font donc obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la commune de La Turbie et les autres requérants au titre des frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de la commune de La Turbie et des autres requérants est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Turbie, à M. B... F..., à M. A... E... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente de la cour, - Mme Vincent, présidente assesseure, - M. Mérenne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. 2 No 20MA03265
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par une requête, enregistrée sous le n° 1705612, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les décisions du 15 novembre 2017 par lesquelles le président du conseil départemental de l'Hérault l'a affectée à la direction des agences culturelles territoriales à compter du 1er décembre 2017. Par une requête, enregistrée sous le n° 1705724, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2017 et la décision du même jour par lesquels le président du conseil départemental de l'Hérault l'a affectée à la médiathèque de Béziers à compter du 1er décembre 2017. Par un jugement n° 1705612 et 1705724 du 18 octobre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé un non-lieu à statuer s'agissant des conclusions dirigées contre les décisions du 15 novembre 2017 et rejeté le surplus des conclusions de Mme A.... Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 22 novembre 2019, Mme B... A..., représentée par Me Ottan, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du 28 novembre 2017 par laquelle le président du conseil départemental de l'Hérault l'a affectée à la médiathèque de Béziers à compter du 1er décembre 2017 ; 3°) d'enjoindre au département de l'Hérault, à titre principal, de procéder à sa réintégration dans son précédent poste de secrétaire comptable au sein de l'agence des bâtiments Ouest Héraultais avec deux jours de télétravail par semaine dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder à sa réintégration ainsi qu'à un nouvel examen de sa demande de télétravail, dans le même délai et sous la même astreinte ; 4°) de condamner le département de l'Hérault à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il a rejeté comme irrecevables ses conclusions aux fins d'annulation de la décision du 28 novembre 2017 au motif qu'elle constituerait une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours alors que cette décision de mutation d'office a entrainé une diminution de ses responsabilités et constitue une mesure discriminatoire en raison de son état de santé ; - la décision du 28 novembre 2017 constitue une sanction disciplinaire déguisée, prise à l'issue d'une procédure irrégulière ; - elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de consultation préalable du comité médical sur les conditions d'aménagement de son nouveau poste de travail ; - la vacance du poste n'a pas fait l'objet d'une publication préalable ; - la décision contestée méconnaît le principe de non-rétroactivité des actes administratifs ; - elle est entachée de détournement de pouvoir ; - elle méconnaît l'article 6 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 qui prohibe les discriminations liées notamment à l'état de santé ; - elle est entachée d'une erreur de droit en l'absence d'aménagement de son poste de travail ; - elle est également entachée d'erreur de droit, en ce qu'elle tient compte de faits qui se seraient produits en 2008 et qui ont donné lieu à une sanction du premier groupe normalement effacée du dossier ; - elle est entachée d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation médicale. Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2020, le département de l'Hérault, représenté par la SCP d'avocats CGCB et Associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme A... d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les premiers juges ont considéré à bon droit que l'arrêté en date du 28 novembre 2017 constitue une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours ; - les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Balaresque, rapporteure, - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Germe représentant le département de l'Hérault. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... est rédactrice territoriale de 1ère classe, en fonction au département de l'Hérault. Depuis 2008, elle était affectée à Béziers au sein de l'agence départementale des bâtiment Ouest Héraultais où elle exerçait les fonctions de secrétaire comptable. Par une décision du 15 novembre 2017, le président du conseil départemental de l'Hérault l'a affectée à la direction des agences culturelles territoriales à compter du 1er décembre 2017. Par un arrêté du même jour, le président du conseil départemental a précisé la nouvelle affectation de l'intéressée au 1er décembre 2017 à l'agence culturelle Ouest Héraultais à Béziers. Le 28 novembre 2017, le président du conseil départemental de l'Hérault a pris une nouvelle décision d'affectation de Mme A... à la direction de la médiathèque départementale à Béziers à compter du 1er décembre 2017. Par deux requêtes, enregistrées au greffe du tribunal administratif de Montpellier sous les n° 1705612 et 1705724, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler respectivement les décisions des 15 novembre 2017 et 28 novembre 2017. Par un jugement du 18 octobre 2019, le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer s'agissant des conclusions dirigées contre les décisions du 15 novembre 2017 et rejeté le surplus des conclusions de la requérante. Mme A... relève appel de ce jugement en tant que le tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 28 novembre 2017. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou de leur contrat ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent de perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination ou une sanction, est irrecevable. 3. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'arrêté contesté du 28 novembre 2017 que le président du conseil départemental de l'Hérault a affecté Mme A... à la direction de la médiathèque départementale à Béziers à compter du 1er décembre 2017, sans préciser la nature de ses fonctions. Par un courriel du même jour, la directrice des effectifs, des compétences et des parcours du département a communiqué à l'intéressée le " profil des missions " de sa nouvelle affectation. Il ressort du document annexé à ce courriel que l'emploi correspondant à la nouvelle affectation de Mme A... est un poste " d'agent de bibliothèque ", exerçant à titre principal des fonctions " d'accueil et de secrétariat ", lesquelles relèvent des cadres d'emplois de catégorie C d'adjoints territoriaux du patrimoine ou d'adjoints administratifs, lorsqu'elles sont exercées à titre principal. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier, notamment de la fiche du poste précédemment occupé par Mme A... ainsi que de ses évaluations annuelles, que la requérante exerçait auparavant des fonctions de secrétaire-comptable, avec pour principales attributions des tâches de gestion administrative et de suivi comptable et budgétaire des opérations concernant le service dans lequel elle était affectée. De telles fonctions, qui concernent l'engagement et la liquidation des dépenses du service, comportent l'exercice de responsabilités particulières et correspondent à celles qui peuvent être confiées aux agents relevant du cadre d'emploi de catégorie B des rédacteurs territoriaux. Dès lors, si l'arrêté du 28 novembre 2017 affectant Mme A... à la direction de la médiathèque départementale à Béziers à compter du 1er décembre 2017 n'a emporté ni diminution de sa rémunération ni atteinte à l'un de ses droits et libertés fondamentaux, il impliquait toutefois une diminution sensible de ses responsabilités au regard de sa précédente affectation. La légalité d'une décision administrative s'appréciant en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle elle a été prise, le département ne peut utilement faire valoir que Mme A... n'a jamais exercé l'emploi correspondant au changement d'affectation décidé par l'arrêté attaqué du 28 novembre 2017, puisqu'elle a été placée en congé de longue maladie pour la période du 2 janvier 2017 au 24 septembre 2018 et qu'à compter du 25 septembre 2018, elle a été affectée sur un poste de " gestionnaire administrative - assistante bibliothécaire " correspondant à un emploi de catégorie B. Il résulte de ce qui précède que la décision de mutation contestée, qui entraîne une perte sensible de responsabilités pour l'intéressée, constitue une décision lui faisant grief. Dans ces conditions, Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a jugé que les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2017 étaient dirigées contre une simple mesure d'ordre intérieur et étaient, par suite, irrecevables. 4. Il y a donc lieu d'annuler le jugement attaqué et, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer l'affaire. Sur les conclusions à fin d'annulation : 5. En premier lieu, la mutation dans l'intérêt du service constitue une sanction déguisée dès lors qu'il est établi que l'auteur de l'acte a eu l'intention de sanctionner l'agent et que la décision a porté atteinte à la situation professionnelle de ce dernier. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des termes du courrier du 21 août 2017 de la directrice générale adjointe des ressources humaines informant Mme A... de la décision d'engager à son " encontre une procédure de mutation d'office dans l'intérêt du service avec un possible changement de métier et de résidence administrative ", que la décision contestée est intervenue à la suite des difficultés relationnelles rencontrées depuis plusieurs années par Mme A... au sein du service dans lequel elle était affectée. Ces difficultés relationnelles, qui ne sont pas sérieusement contestées, nuisaient au fonctionnement et à la continuité du service, en particulier dans un contexte de réorganisation impliquant une mutualisation accrue des tâches et une uniformisation des pratiques. Dans ces conditions, la décision de mutation contestée, justifiée par les nécessités du service, ne constitue pas une sanction disciplinaire déguisée. Par suite, le moyen tiré de ce que Mme A... aurait été privée des garanties attachées à la procédure disciplinaire ne peut qu'être écarté. 6. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne résulte ni de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987 relatif à l'organisation des comités médicaux, ni d'aucun autre texte ni principe, qu'une mutation prise dans l'intérêt du service doive être précédée d'une consultation préalable du comité médical. Le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée de ce fait la décision contestée doit, dès lors, être écarté. 7. En troisième lieu, les dispositions de l'article 41 de la loi du 26 janvier 1984, aux termes desquelles " lorsqu'un emploi permanent est créé ou devient vacant, l'autorité territoriale en informe le centre de gestion compétent qui assure la publicité de cette création ou de cette vacance, à l'exception des emplois susceptibles d'être pourvus exclusivement par voie d'avancement de grade ", ne s'appliquent pas à l'administration dans le cas où elle prononce une mutation dans l'intérêt du service. Par suite, ce moyen tiré de l'absence de publication d'un avis de vacance d'emploi doit être écarté comme inopérant. 8. En quatrième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 5, la décision de mutation contestée, justifiée par les nécessités du service, ne constitue pas une sanction disciplinaire déguisée. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ait été prise pour des motifs autres, tirés de l'état de santé de Mme A..., ni qu'elle emporterait quelque conséquence que ce soit sur ce dernier. Par suite, les moyens tirés de ce que l'arrêté en litige serait entaché d'un détournement de pouvoir, méconnaîtrait l'article 6 bis de la loi du 13 juillet 1983 et serait entaché d'une erreur de fait et d'appréciation au regard de son état de santé, doivent être écartés. 9. En cinquième lieu, si Mme A... soutient que l'absence d'aménagement de son poste prévu par la décision de mutation contestée entache cette dernière d'illégalité, la décision de mutation contestée n'exclut pas la mise en œuvre des aménagements nécessaires à son état de santé. Ainsi que le fait valoir le département de l'Hérault, ces aménagements ont d'ailleurs été mis en place lors de la prise de poste effective de Mme A... en septembre 2018. Le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée la décision contestée en l'absence d'aménagement de son poste de travail doit, dès lors, être écarté. 10. En sixième lieu, le moyen tiré de ce que le courrier du 21 août 2017 cité au point 5 mentionne une sanction du premier groupe normalement effacée du dossier manque en fait. 11. Enfin, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas des termes de l'arrêté en litige que celui-ci prendrait effet à une date antérieure à celle de sa notification, de sorte qu'il ne méconnaît pas le principe de non-rétroactivité des actes administratifs. 12. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2017 du président du conseil départemental de l'Hérault affectant Mme A... à la direction de la médiathèque départementale à Béziers à compter du 1er décembre 2017 doivent être rejetées. Il en va de même, par voie de conséquence, des conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par la requérante. Sur les frais du litige : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de département de l'Hérault, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme A... la somme de 1 000 euros à verser au département de l'Hérault au même titre. D É C I D E : Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 octobre 2019 est annulé. Article 2 : La demande enregistrée sous le n° 1705724, présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Montpellier, est rejetée. Article 3 : Mme A... versera au département de l'Hérault la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au département de l'Hérault. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente assesseure, - Mme Balaresque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N°19MA05024 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par trois requêtes distinctes, M. B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler les décisions implicites du ministre de l'économie et des finances et de la société Orange France ainsi que la décision du 30 octobre 2017 du ministre de l'action et des comptes publics rejetant sa demande tendant à la révision de sa pension de retraite et de condamner in solidum l'Etat et la société Orange France à lui verser la somme totale de 123 480 euros en réparation des préjudices subis. Par un jugement n°1800029, 1800030, 1800031 du 6 mars 2020, le tribunal administratif de Nice a condamné la société Orange France et l'Etat à verser la somme globale de 2 000 euros à M. B... et rejeté le surplus de ses conclusions. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 5 mai 2020, 6 et 24 mai 2022, M. A... B..., représenté par Me Suid-Vanhemelryck, demande à la Cour : 1°) de réformer le jugement du 6 mars 2020 en tant qu'il a limité le montant des réparations dues in solidum par la société Orange France et l'Etat à la somme de 2 000 euros ; 2°) de condamner in solidum la société Orange France et l'Etat à lui verser la somme totale de 123 480 euros en réparation des préjudices subis ; 3°) de mettre à la charge solidaire de la société Orange France et de l'Etat une somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - c'est à tort que le tribunal administratif a considéré qu'il n'établissait pas sa perte de chance sérieuse de bénéficier d'une promotion dès 1993 ; - il a été victime de harcèlement moral et d'une mise au placard ; - l'échelon de consolidation de sa pension de retraite doit être révisé ; il est fondé à obtenir à ce titre la somme de 54 000 euros ; - il est également fondé à obtenir la somme de 60 480 euros en réparation du préjudice de carrière subi depuis 1993 ainsi que la somme de 9 000 euros en réparation de son préjudice moral. Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 avril et 9 juin 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société Orange, représentée par Me Bost, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la requête n'est pas fondée dans les moyens qu'elle soulève. La requête a été communiquée au ministre de l'économie et des finances, qui n'a pas produit d'observations en défense. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience au cours de laquelle ont été entendus : - le rapport de Mme C... ; - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public ; - les observations de Me Suid-Vanhemelryck, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B..., fonctionnaire de l'Etat, agent des postes et télécommunications depuis 1977, employé par France Télécom devenue société Orange France, n'a pas souhaité intégrer les nouveaux corps dits de " reclassification " et a opté en faveur de la conservation de son grade dans son corps, dit de " reclassement ", lors de l'application de la réforme issue des décrets n° 93-514 à 93-519 du 25 mars 1993 pris en application de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et France Télécom. Il est devenu titulaire d'une pension du code des pensions civiles et militaires de retraite concédée par arrêté du 7 août 2017. Le 12 octobre 2017, il a saisi la société Orange France, le ministre de l'économie et des finances et le ministre de l'action et des comptes publics d'une demande préalable tendant à la correction du grade de consolidation retenu pour sa retraite ou le versement d'une somme de 54 000 euros correspondant à 18 mois de traitement et au versement d'une somme de 60 480 euros au titre du préjudice subi dans son déroulement de carrière et de 9 000 euros au titre de son préjudice moral. M. B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler les décisions implicites du ministre de l'économie et des finances et de la société Orange France ainsi que la décision du 30 octobre 2017 du ministre de l'action et des comptes publics rejetant ses demandes ainsi que la condamnation solidaire de l'Etat et de la société Orange France à lui verser la somme totale de 123 480 euros en réparation des préjudices qu'il allègue avoir subis. Par un jugement du 6 mars 2020, le tribunal administratif de Nice a condamné la société Orange France et l'Etat à verser la somme globale de 2 000 euros à M. B... et rejeté le surplus de ses conclusions. M. B... relève appel de ce jugement en tant qu'il a limité le montant des réparations dues in solidum par la société Orange France et l'Etat à la somme de 2 000 euros. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne le préjudice lié à la perte de chance de bénéficier d'une promotion : 2. Il est constant qu'en ne permettant pas aux fonctionnaires demeurés dans les corps dits " de reclassement " de bénéficier de mesures de promotion interne dans le cadre de ces corps, l'Etat et la société France Télécom ont commis des fautes de nature à engager leur responsabilité. 3. Toutefois, si M. B... affirme que le déroulement de sa carrière fut exemplaire et qu'il fut supérieurement bien noté, il ne produit au soutien de ses allégations qu'un unique compte-rendu d'entretien professionnel daté de mars 2000, lequel juge sa manière de servir " satisfaisante ". Dans ces conditions, M. B... n'établit pas qu'il aurait été privé, du fait des fautes commises par l'Etat et France Télécom, d'une chance sérieuse de bénéficier d'une promotion. Il n'est, dès lors, pas fondé à demander la réparation des préjudices de carrière et de retraite qu'il invoque à ce titre. En ce qui concerne le préjudice moral lié au harcèlement allégué : 4. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Dès lors qu'elle n'excède pas ces limites, une simple diminution des attributions justifiée par l'intérêt du service, en raison d'une manière de servir inadéquate ou de difficultés relationnelles, n'est pas constitutive de harcèlement moral. 5. M. B... soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de la part de la société France Télécom devenue Orange, depuis son refus en 1993 d'intégrer les nouveaux corps dits de " reclassification " et son choix en faveur de la conservation de son grade dans son corps, dit de " reclassement ". Il produit au soutien de ses allégations un tableau de répartition des effectifs préalable à la création de la direction de l'exploitation réseaux et services d'Orange France en 2014 mettant en évidence qu'il était le seul agent de ce réseau à être encore en poste à Nice à cette date, trois courriers électroniques envoyés à l'été 2004 par l'un de ses supérieurs hiérarchiques qui, après avoir affirmé que M. B... est sans véritable activité professionnelle depuis des années, l'incite à postuler sur d'autres emplois au sein de France Télécom ou de la fonction publique en précisant qu'il ne pourra se voir confier des responsabilités de cadre ainsi que deux attestations rédigées en avril 2022 par d'anciens responsables syndicaux, évoquant des " conditions de travail éloignées des standards établis dans le reste de la direction des réseaux collectif, accès à la formation etc) ", son " isolement " et ses " missions de courte durée ". Il ressort toutefois des termes mêmes de l'une de ces deux attestations que l'isolement professionnel de M. B..., seul membre de la direction des réseaux à travailler à Nice, résulte des " réorganisations opérationnelles incessantes [qui] se sont faites en respectant son choix géographique de vivre à Nice ". Si l'autre de ces attestations, rédigée pour les besoins de la cause en avril 2022, cinq ans après l'admission de M. B... à la retraite, mentionne " un local insalubre lui servant de bureau ", cette affirmation, contestée en défense, est également contredite par les photographies de son bureau produites par le requérant, dont il ressort qu'il était installé dans une pièce de taille conséquente disposant d'une grande fenêtre donnant sur les toits, équipée d'un meuble de bureau, de plusieurs rangements et d'un ordinateur avec un grand écran. Si le ton comme le contenu des trois courriers électroniques envoyés par son supérieur hiérarchique à l'été 2004, qui expriment la ferme volonté de ce dernier de voir M. B... postuler au sein d'une autre unité, y compris en dehors de France Télécom, peuvent apparaître comme agressifs, le caractère isolé de ces faits ne peut à eux seuls les faire regarder comme constitutifs d'un harcèlement moral. Enfin, si M. B... fait valoir que la société France Télécom a été condamnée le 20 décembre 2019 par le tribunal correctionnel de Paris pour harcèlement moral pour la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, le requérant, qui ne s'est pas porté partie civile dans ce cadre, n'apporte aucun élément susceptible de faire présumer qu'il aurait été victime d'un tel harcèlement durant cette période. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à demander réparation d'un quelconque préjudice moral à ce titre. 6. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a limité la condamnation solidaire de l'Etat et de la société Orange au versement de la somme de 2 000 euros. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Orange et de l'Etat, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme de 1 000 euros à la société Orange, en application des mêmes dispositions. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : M. B... versera à la société Orange la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la société Orange et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente-assesseure, - Mme Balaresque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N°20MA01760 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2017 par lequel le président du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Hérault a résilié son engagement en qualité de sapeur-pompier volontaire à compter de la date de sa notification et d'enjoindre au SDIS de l'Hérault de le réintégrer à la date de son éviction, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de procéder au rétablissement de ses droits. Par jugement n° 1800201 du 20 décembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 13 novembre 2017 et enjoint au président du service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault de procéder à la réintégration juridique de M. A... dans son emploi de sapeur-pompier volontaire de 2ème classe en période probatoire et à la reconstitution de ses droits sociaux, à compter de son éviction. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 17 février 2020, le SDIS de l'Hérault, représenté par Me Constans, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ; 2°) de rejeter les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction présentées par M. A... ; 3°) de mettre à la charge de M. A... le paiement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - c'est à tort que le jugement attaqué a retenu le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 dès lors que M. A... n'était pas fonctionnaire, qu'il ne s'agissait pas d'une sanction disciplinaire et qu'en tout état de cause, il a été reçu plusieurs fois en entretien et a donc été mis à même de solliciter la communication de son dossier ; - les autres moyens soulevés en première instance par M. A... sont infondés. La requête a été communiquée à M. C... A... qui n'a pas produit d'observations en défense. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité intérieure ; - la loi du 22 avril 1905 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Constans pour le SDIS de l'Hérault. Considérant ce qui suit : 1. M. A... a été engagé le 6 décembre 2016 par le président du service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault en qualité de sapeur-pompier volontaire de 2ème classe et affecté au centre d'incendie et de secours d'Assas, pour une durée de 5 ans. Par un arrêté du 13 novembre 2017, le président du conseil d'administration de ce service départemental a prononcé la résiliation de son engagement pour insuffisance dans la manière de servir durant la période probatoire. Par ce même arrêté, le président du SDIS a retiré un précédent arrêté du 18 juillet 2017 ayant le même objet. Le SDIS de l'Hérault interjette appel du jugement en date du 20 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 13 novembre 2017 et enjoint au président du service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault de procéder à la réintégration juridique de M. A... dans son emploi de sapeur-pompier volontaire de 2ème classe en période probatoire et à la reconstitution de ses droits sociaux, à compter de son éviction. 2. Aux termes des dispositions de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 : " Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardé dans leur avancement à l'ancienneté. ". Il résulte de ces dispositions qu'un agent public faisant l'objet d'une mesure prise en considération de sa personne, qu'elle soit ou non justifiée par l'intérêt du service, doit être mis à même de demander la communication de son dossier. 3. Aux termes de l'article R. 723-15 du code de la sécurité intérieure : " Le premier engagement comprend une période probatoire, permettant l'acquisition de la formation initiale, qui ne peut être inférieure à un an ni supérieure à trois ans. / L'autorité de gestion peut, après avis du comité consultatif des sapeurs-pompiers volontaires compétent, résilier d'office l'engagement du sapeur-pompier volontaire en cas d'insuffisance dans l'aptitude ou la manière de servir de l'intéressé durant l'accomplissement de sa période probatoire. (...) ". 4. Alors même que les sapeurs-pompiers volontaires ne sont pas des fonctionnaires et quelles que soient les particularités de l'engagement dont ils bénéficient, la rupture de leur engagement avant le terme de la période probatoire dont ils bénéficient en vue notamment d'acquérir leur formation, a le caractère d'une décision retirant ou abrogeant une décision créatrice de droits. Lorsqu'une telle décision, eu égard à ses motifs, doit être regardée comme ayant été prise en considération de la personne, l'intéressé doit être préalablement mis à même de prendre connaissance de son dossier en vertu de l'article 65 précité de la loi susvisée du 22 avril 1905. 5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... se trouvait encore en période probatoire à la date de la résiliation d'office de son engagement par l'arrêté du 13 novembre 2017. Par ailleurs, l'arrêté du 13 novembre 2017, pris au motif de l'insuffisance professionnelle de l'intéressé et de son comportement, constitue une mesure prise en considération de la personne. M. A..., quand bien même il n'était pas fonctionnaire et ne faisait pas l'objet d'une sanction disciplinaire, devait, dès lors, être mis à même de demander la communication de son dossier ainsi que l'ont, à bon droit, estimé les premiers juges. 6. Si le SDIS de l'Hérault fait valoir que M. A... avait été mis en mesure de demander la communication de son dossier dès lors qu'il avait été entendu à plusieurs reprises, dans le cadre d'entretiens avec ses supérieurs hiérarchiques, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment du compte-rendu de l'entretien qui s'est déroulé le 11 juin 2017, que l'intéressé, bien qu'alerté sur les faits qui lui étaient reprochés, aurait été informé de l'intention de l'administration de mettre un terme, au cours de la période probatoire, à son engagement. Par ailleurs, la circonstance qu'un premier arrêté en date du 18 juillet 2017 soit intervenu pour résilier l'engagement, lequel a ensuite été retiré par l'arrêté en litige, ne peut suppléer à la nécessité de mettre à même l'intéressé de solliciter la communication de son dossier. Par suite, quand bien même M. A... aurait pris l'attache d'un avocat, celui-ci ne saurait être regardé comme ayant été mis à même de demander la communication de son dossier et a ainsi été privé d'une garantie. 7. Il résulte de ce qui précède que le SDIS de l'Hérault n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 13 novembre 2017. Par ailleurs, une telle annulation impliquait nécessairement, ainsi que l'a jugé le tribunal, qu'il soit enjoint au service départemental d'incendie et de secours de réintégrer juridiquement M. A... dans ses fonctions à compter de la date de prise d'effet de son éviction et qu'il soit procédé à une reconstitution de ses droits sociaux, sans préjudice de la faculté pour le SDIS de reprendre, s'il l'estime fondé, une nouvelle décision de résiliation de l'engagement de l'intéressé, après avoir respecté les exigences de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. A..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à l'appelant la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La requête présentée par le service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault et à M. C... A.... Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente-assesseure, - M. Mérenne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N° 20MA00672 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... A... et Mme F... A... ont demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 9 juillet 2018 par lequel le maire de Feliceto n'a pas fait opposition à la déclaration de travaux présentée le 28 juin 2018 par M. B... E..., ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux. Par un jugement n° 1801392 du 9 juin 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 août 2020 et le 16 février 2022, M. et Mme A..., représentés par Me Franceschini, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 9 juin 2020 du tribunal administratif de Bastia ; 2°) d'annuler l'arrêté du 9 juillet 2018 du maire de Feliceto ; 3°) de mettre la somme de 2 000 euros à la charge de la commune de Feliceto en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - ils ont intérêt à agir à l'encontre des décisions contestées ; - le jugement attaqué a omis de se prononcer sur un moyen, tiré de l'impact esthétique du projet ; - le dossier de déclaration ne comporte pas de photographie permettant d'apprécier le projet dans son environnement lointain, ni de notice explicative ; - le projet méconnaît l'article R. 421-7 du code de l'urbanisme, notamment du fait d'une carte communale ; - il aurait nécessité un permis de construire ; - le pétitionnaire aurait dû avoir recours à un architecte ; - le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-27 du cde de l'urbanisme ; - la demande est entachée de fraude. Par des observations en défense, enregistrées le 23 février 2022, M. E..., représenté par Me Vaillant, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête présentée par M. et Mme A... ; 2°) de mettre à leur charge la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 431-3 du code de l'urbanisme est irrecevable en application de l'article R. 600-5 du même code ; - les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2022, la commune de Feliceto, représentée par Me Desideri, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête présentée par M. et Mme A... ; 2°) de mettre à leur charge la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 431-3 du code de l'urbanisme est irrecevable en application de l'article R. 600-5 du même code ; - les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. C..., - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Vergnoux, substituant Me Franceschini, représentant M. et Mme A..., et G..., représentant Me E.... Deux notes en délibéré ont été enregistrées les 3 et 4 octobre 2022 pour M. et Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Le 28 juin 2018, M. E... a déposé une déclaration préalable de travaux pour un ravalement des façades, l'aménagement d'une toiture en toiture-terrasse et la pose d'une pergola pour un immeuble situé sur une parcelle cadastrée section D nos 297 et 298, à Feliceto. Par un arrêté du 9 juillet 2018, le maire de Feliceto n'a pas fait opposition à la déclaration. Par un courrier du 5 septembre 2018, M. et Mme A... ont formé un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté, qui a été implicitement rejeté. M. et Mme A... font appel du jugement du 9 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 juillet 2018 et de la décision implicite rejetant leur recours gracieux. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Le tribunal administratif a écarté le moyen fondé sur la méconnaissance de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme par des motifs circonstanciés, figurant aux points 11 et 12 du jugement attaqué. La " question de l'impact esthétique du projet " ne constituait pas un moyen distinct auquel les premiers juges auraient dû spécifiquement répondre. Le jugement attaqué est donc suffisamment motivé. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. En premier lieu, la circonstance que le dossier de déclaration préalable ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité la décision de non-opposition que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. 4. Ainsi que l'a déjà retenu le tribunal administratif, le dossier de la déclaration préalable déposée par M. E... comportait bien le document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, prévu au c) de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme, auquel renvoie le dernier alinéa de l'article R. 431-36 du même code. Ces mêmes textes n'exigent pas la production d'une notice explicative. Enfin, la photographie permettant de situer le projet dans le paysage lointain, que les requérants produisent afin de prouver qu'une telle prise de vue était possible, ne révèle rien de notable vis-à-vis de la conformité du projet à la réglementation applicable. Son absence n'a pas été de nature à fausser l'appréciation de l'autorité administrative. Le moyen tiré du caractère incomplet doit donc être écarté. 5. En deuxième lieu, il résulte du a) de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme que les demandes de permis de construire et les déclarations préalables sont adressées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés, notamment, " par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ". L'article R. 431-35 du même code prévoit que : " La déclaration comporte également l'attestation du ou des déclarants qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une déclaration préalable ". 6. Il résulte de ces dispositions que les déclarations préalables doivent seulement comporter, comme les demandes de permis de construire en vertu de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme, l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 précité. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une déclaration ou d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Les tiers ne sauraient donc utilement, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, faire grief à l'administration de ne pas en avoir vérifié l'exactitude. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle déclaration vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de s'opposer à la déclaration ou de refuser la demande de permis pour ce motif (cf. CE, 23 mars 2015, n° 348261). 7. Il ressort des pièces du dossier que la propriété de la terrasse formant toiture partielle des parcelles cadastrées D 297 et D 298, assiette des travaux projetés, fait l'objet d'un litige entre l'indivision E..., propriétaire de l'immeuble bâti sur ces parcelles, et M. et Mme A..., propriétaires de la parcelle voisine cadastrée D n° 302 qui jouxte cette terrasse. Aux termes du jugement du 11 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Bastia, saisi par M. et Mme A... postérieurement à la décision litigieuse, a jugé que ces derniers ne disposaient pas d'un titre de propriété sur cette terrasse mais leur a reconnu le bénéfice de la prescription trentenaire, en se fondant notamment sur les témoignages d'anciens du village. Ce jugement n'est pas définitif, l'indivision E... en ayant interjeté appel. Eu égard à cette contestation sérieuse et alors que l'indivision E... avait conclu en 2006 avec M. et Mme A... une convention portant sur cette terrasse, par laquelle les parties avaient reconnu l'indivision comme la propriétaire de cette dernière, M. E... ne peut être regardé comme ayant sciemment effectué une déclaration erronée à la date à laquelle il a déposé la déclaration préalable de travaux. Dans ces conditions, il ne peut être reproché au maire de Feliceto alors, au demeurant, que les requérants ne s'étaient pas prévalus d'un tel moyen en première instance, de ne pas avoir arbitré ce litige de droit privé à l'occasion de l'instruction de la déclaration préalable, la décision de non-opposition édictée, ainsi qu'il a été dit, sous réserve des droits des tiers, ayant pour seul objet d'assurer la conformité des travaux avec la réglementation d'urbanisme. 8. En quatrième lieu, il n'est pas utilement contesté que le conseil municipal de Feliceto n'a pas institué le permis de démolir sur le territoire de la commune sur le fondement de l'article R. 421-27 du code de l'urbanisme. Le moyen tiré de ce que le projet nécessitait un permis de démolir doit donc être écarté. 9. En cinquième lieu, à supposer qu'une telle assistance ait été obligatoire, le moyen tiré de ce que le pétitionnaire n'a pas eu recours à un architecte manque en fait. 10. En dernier lieu, M. et Mme A... reprennent les moyens tirés, d'une part, de la circonstance que les travaux projetés devaient être autorisés par un permis de construire, et d'autre part, de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le maire au regard des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme tels qu'invoqués en première instance, sans apporter d'élément nouveau. Le tribunal administratif a écarté ces moyens par des motifs appropriés, figurant respectivement aux points 7 et 8 et 11 et 12 du jugement attaqué, qu'il convient d'adopter en appel. 11. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande. Sur les frais de l'instance : 12. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de M. et Mme A... le versement de la somme de 2 000 euros respectivement à la commune de Feliceto et à M. E... au titre des frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens. 13. Les dispositions de cet article font en revanche obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par les requérants sur le même fondement. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée. Article 2 : M. et Mme A... verseront la somme de 2 000 euros respectivement à la commune de Feliceto et à M. E... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Mme F... A..., à la commune de Feliceto et à M. B... E.... Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente de la cour, - Mme Vincent, présidente assesseure, - M. Mérenne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. 2 N° 20MA02893
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par une requête, enregistrée le 1er octobre 2021, M. E... C..., agissant en son nom personnel et au nom de ses enfants mineurs A.... Mathis et Mathieu C..., et Mme B... F..., ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, sur le fondement des dispositions des articles R. 532-1 et R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris à verser une provision d'un montant de 197 030 euros, ou le montant correspondant à la fraction de la perte de chance retenue, à valoir sur l'indemnisation des préjudices subis à raison du décès de l'enfant Mathis C..., assortie des intérêts au taux légal, de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à verser une provision d'un montant de 40 000 euros au titre du préjudice permanent subi du fait du deuil pathologique de M. E... C..., assortie des intérêts au taux légal et d'ordonner une expertise médicale complémentaire aux fins d'évaluer l'étendue du préjudice professionnel subi en raison du deuil pathologique dont souffre M. E... C... et une expertise médicale complémentaire aux fins de faire déterminer par un accidentologue ou un spécialiste des chutes en hauteur s'il est exclu que l'enfant Mathis C... ait pu mourir d'un hématome sous-dural non détecté, s'il est exclu que la dégradation de son état général constaté après la chute soit dû à une réaction au stress provoqué par la chute ou à un étouffement avec le contenu de l'estomac ou la sonde gastrique, enfin si, en l'absence de chute, l'enfant serait nécessairement décédé le 23 juin 2020. Par une ordonnance n°2120890/6 du 22 juillet 2022 le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté ces demandes. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 3 août 2022 sous le n° 22PA03625 présentée par Me Roncucci, M. E... C..., agissant en son nom personnel et au nom de ses enfants mineurs A.... Mathis et Mathieu C... et Mme B... F... demandent à la Cour de réformer l'ordonnance susvisée et de condamner l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris au versement d'une provision de 265 821,12 euros, en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris au versement d'une provision supplémentaire de 40 000 euros au titre du préjudice permanent du fait du deuil pathologique souffert, d'ordonner une expertise complémentaire aux fins d'évaluer l'étendue du préjudice professionnel en raison du deuil pathologique dont souffre Monsieur C..., à titre subsidiaire et si le juge s'estimait insuffisamment informé sur l'étendue du préjudice du fait de la chute et du retard dans la prise en charge d'ordonner une expertise complémentaire aux fins d'apprécier les conséquences de la chute et la désignation d'un accidentologue et/ou d'un spécialiste en chutes de hauteurs aux fins de déterminer les conséquences de la chute dont l'enfant a été victime, d'admettre M. C... à l'aide juridictionnelle provisoire. Il soutient que c'est à tort, en raison d'erreurs de droit et manifestes d'appréciation, que sa demande a été rejetée, que les expertises sollicitées sont utiles et que les demande de provision sont fondées dès lors que sont incontestables tant la faute de l'hôpital que les préjudices en ayant résulté. Un mémoire en intervention a été déposé le 31 août 2022 par la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn. Le président de la Cour a désigné M. Bouleau, président honoraire, pour statuer sur les appels formés devant la Cour contre les ordonnances des juges des référés. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. En ce qui concerne les demandes d'expertise : 1. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. (...) ". 2. C'est à bon droit que le juge des référés du tribunal administratif de Paris a pu estimer que compte tenu de la mission relative aux conditions de la mort de l'enfant Mathis C... déjà impartie à un expert et de l'absence d'éléments pertinents apportés au soutien de la demande d'une expertise en référé portant elle-aussi sur les conditions de cette mort, cette dernière ne remplissait pas la condition d'utilité impérativement requise aux termes des dispositions précitées. Il en est de même, alors au surplus qu'elle n'aurait de justification que dans l'hypothèse où le préjudice professionnel invoqué par M. E... C... pourrait trouver sa cause dans une faute imputable à l'hôpital public, de la demande de diligenter une expertise en référé afin de déterminer l'ampleur dudit préjudice. En ce qui concerne les demandes de provision : 3. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". 4. Les incertitudes qui règnent, en l'état, tant sur les causes du décès de l'enfant que sur les effets de la chute dont il a été victime sont telles qu'elles ont pour conséquence d'exclure radicalement la possibilité de l'octroi d'une quelconque provision en raison de préjudices dont la cause tiendrait à cette mort et à cette chute, toute obligation de réparer qui pourrait être mise à la charge de l'hôpital public ne pouvant en effet être tenue que comme non insusceptible d'une contestation sérieuse au sens des dispositions précitées. C'est par suite à bon droit que le premier juge a rejeté les demandes présentées à ce titre. 5. Il résulte de ce qui précède, et alors qu'il n'y pas lieu, en l'absence d'urgence au sens de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, de faire droit à la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle, que la requête de M. C... et autres doit être rejetée dans toutes ses conclusions. O R D O N N E : Article 1er : les requérants ne sont pas admis à titre provisoire à l'aide juridictionnelle. Article 2er : La requête de M. C... et autres est rejetée. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. E... C..., à Mme B... F..., à la caisse primaire d'assurance maladie des Hautes-Pyrénées, à la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn et à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris. Fait à Paris, le 17 octobre 2022. Le juge des référés M. D... La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 22PA03625 2
JADE/CETATEXT000046441326.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Le comité social et économique et central Virgin Radio et RFM (CSEC) et le comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions (CSER) ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 8 décembre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France (DRIEETS) a rejeté la demande d'injonction du 19 novembre 2021 du CSEC, l'annulation de la décision du 9 décembre 2021 par laquelle le DRIEETS n'a que partiellement droit à la demande d'injonction du 7 décembre 2021 du CSER, l'annulation de la décision du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 15 décembre 2021 du CSEC et la décision du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale Virgin Radio Régions. Par un jugement n° 2205725/3-1 du 7 juin 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande du comité social et économique Virgin Radio et RFM et du comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions tendant à l'annulation de la décision du 8 décembre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France (DRIEETS) a rejeté la demande d'injonction du 19 novembre 2021 du CSEC, l'annulation de la décision du 9 décembre 2021 par laquelle le DRIEETS n'a que partiellement droit à la demande d'injonction du 7 décembre 2021 du CSER, l'annulation de la décision du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 15 décembre 2021 du CSEC et l'annulation de la décision du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale Virgin Radio Régions. Procédure devant la Cour : Par une requête et deux mémoires enregistrés les 21 juillet, 15 et 22 septembre 2022, le comité social et économique central Virgin Radio et RFM et le comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions, représentés par la SCP Borie et associés, demandent à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2205725/3-1 du 7 juin 2022 du Tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler la décision du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale Virgin Radio Régions ; 3°) d'annuler les décisions du 8 décembre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France (DRIEETS) a rejeté la demande d'injonction du 19 novembre 2021 du CSEC, du 9 décembre 2021 par laquelle le DRIEETS n'a que partiellement droit à la demande d'injonction du 7 décembre 2021 du CSER et du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 15 décembre 2021 du CSEC ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Ils soutiennent que : Sur la régularité du jugement : - le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'absence de mesure de prévention pendant la période d'attente de l'avis de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) ; - il n'a pas répondu au moyen tiré de l'incompétence du DRIEETS et au caractère illicite de la décision de rejet de la demande d'injonction du 10 janvier 2022 ; - il a estimé à tort que conclusions tendant à l'annulation des décisions prises sur les demandes d'injonction étaient irrecevables ; Sur la procédure d'information et de consultation : - les élus du personnel n'ont pas été associés à la détermination des mesures de prévention en ce qui concerne la sécurité, la santé et les conditions de travail au cours de la procédure d'information et de consultation en violation des dispositions des articles L. 4121-3, L. 2312-9, L. 2312-40 et L. 2312-15 du code du travail ; - les décisions prises sur les demandes d'injonction vicient la décision d'homologation du document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ; - les moyens soulevés en première instance s'agissant de ces décisions sont repris : - en saisissant d'une demande d'autorisation préalable le Conseil supérieur de l'audiovisuel, l'UES Virgin Radio Régions a privé d'effet utile la procédure d'information et de consultation ; - la procédure est irrégulière faute de report de son délai ; - elle est irrégulière en l'absence de remise du rapport de l'expert désigné sur le volet santé, sécurité et conditions de travail ; - les conditions de réalisation l'expertise n'ont pas permis aux représentants du personnel de disposer de l'ensemble des éléments leur permettant de rendre un avis éclairé ; - l'employeur n'a pas apporté de réponse motivée au projet alternatif présenté par le CSEC ; Sur le contenu du plan de sauvegarde et de l'emploi : - l'employeur a méconnu l'intention du législateur en neutralisant l'application des critères d'ordre des licenciements préalablement définis en retenant comme périmètre de mise en œuvre des critères d'ordre les zones d'emploi comprenant une seule cabine News ; - le périmètre des critères d'ordre des licenciements a été défini en vue de choisir nominativement les salariés dont le licenciement est envisagé ; - les catégories professionnelles ont été déterminées avec la volonté de cibler des salariés détenant un mandat de représentation ; - les mesures de reclassement sont dérisoires au regard des moyens du groupe Lagardère Active Broadcast ; - elles sont insuffisantes ; - les mesures de prévention en matière de santé, sécurité et conditions de travail sont insuffisantes. Par un mémoire en défense enregistré le 25 août 2022, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés. Par deux mémoires en défense enregistrés les 8 et 20 septembre 2022, la société par actions simplifiée unipersonnelle Europe 2 Entreprises, la société par actions simplifiée unipersonnelle RFM Entreprises, la société par actions simplifiée unipersonnelle Virgin Radio Régions, la société par actions simplifiée unipersonnelle RFM Régions, la société à responsabilité limitée RFM Est, représentées par Me Angotti, concluent au rejet de la requête. Elles soutiennent que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code du travail ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique, - et les observations de Me Borie, avocat du comité social et économique central Virgin Radio et RFM et du comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions, de Me Angotti, avocat des sociétés défenderesses. Considérant ce qui suit : 1. L'unité économique et sociale Virgin Radios Régions est constituée de cinq sociétés, qui appartiennent au groupe Lagardère et exercent leur activité dans le secteur d'activité des radios à caractère musical. Les sociétés par actions simplifiée unipersonnelle Europe 2 Entreprises, RFM Entreprises, Virgin Radio Régions et RFM Régions ainsi que la société à responsabilité limitée RFM Est composent l'unité économique et sociale. Elle dirige deux radios, Virgin Radio et RFM, et exerce son activité sur tout le territoire. Au 31 août 2021, le réseau Virgin Radio disposait de 118 autorisations d'émettre par voie hertzienne du Conseil supérieur de l'audiovisuel en catégorie D (services de radio thématiques à vocation nationale) et de 121 autorisations (hors Europe Ajaccio) en catégorie C (services de radio locaux ou régionaux diffusant le programme d'un réseau thématique à vocation nationale, dont le programme national est complété par un programme d'intérêt local et le réseau RFM disposait de 155 autorisations en catégorie D et 50 autorisations (hors RFM Est et RFM Ajaccio) en catégorie C. Le réseau national est constitué d'une tête de réseau et d'émetteurs autorisés en catégorie D. Les réseaux locaux de Virgin Radio et de RFM Régions et RFM Est, pour lesquels travaillaient respectivement, au 30 juin 2021, 102 et 31 salariés sont constitués, pour Virgin Radio, de 27 studios principaux auxquels sont rattachées 27 cabines News, celles-ci étant destinées à la réalisation et à la mise en onde des informations locales, et pour RFM de 11 studios principaux auxquels sont rattachées 6 cabines News, toutes les cabines News ne comprenant qu'un journaliste, seul salarié. En raison d'une érosion de l'audience des radios, d'une baisse des revenus publicitaires et de la concurrence de nouveaux médias, le groupe Lagardère a élaboré un plan de restructuration et annoncé ce plan le 18 octobre 2021 au comité social et économique central Virgin Radio et RFM (CSEC) et au comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions (CSER), lequel doit aboutir à mutualiser les coûts et implique la suppression d'emploi de 34 salariés, dont 30 dans la société Virgin Radio et 4 dans la société RFM Régions. Ces deux sociétés comptaient respectivement au 30 juin 2021 133 et 61 salariés en contrat à durée indéterminée. Lors de la première réunion du CSEC, le 18 octobre 2021, qui s'est ensuite réuni les 29 octobre, 24 et 29 novembre, 2, 9, 14 et 16 décembre 2021, le cabinet d'expertise Progexa a été désigné tandis qu'après la première réunion du 18 octobre 2021, le CSER s'est réuni les 28 octobre, 17, 25, 29 et 30 novembre 2021. Le cabinet Progexa a remis un rapport lors de la réunion du CSEC du 24 novembre 2021, un rapport lors de la réunion pour avis du CSER du 9 décembre 2021 et un point d'étape sur la sécurité, la santé et les conditions de travail lors des réunions du CSEC et du CSER du 14 décembre 2021. Le CSER et le CSEC ont refusé de rendre leurs avis sur le projet respectivement les 9 et 17 décembre 2021. Pendant la procédure d'information et de consultation, le CSEC a adressé le 19 novembre 2021 une première demande d'injonction, complétée le 23 novembre 2021 au directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France (DRIEETS). Le CSER lui a adressé le 7 décembre 2021 une demande d'injonction et le 15 décembre 2021, le CSEC lui a adressé une nouvelle demande d'injonction. La DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 19 novembre 2021, a partiellement fait droit à la demande adressée le 7 décembre 2021 et a rejeté la dernière demande d'injonction. A l'issue de la procédure d'information et de consultation, la direction de l'unité économique et sociale Virgin Radios Régions a adressé le 21 décembre 2021 la demande d'homologation du document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l'emploi à la DRIEETS. Par décision du 10 janvier 2022, le DRIEETS l'a homologué. Par jugement du 7 juin 2022, dont relèvent appel le CSEC et le CSER, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande d'annuler la décision du 10 janvier 2022 ainsi que les décisions du 8 décembre 2021 par laquelle le DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 19 novembre 2021 du CSEC, du 9 décembre 2021 par laquelle il n'a que partiellement droit à la demande d'injonction du 7 décembre 2021 du CSER et du 10 janvier 2022 par laquelle il a rejeté la demande d'injonction du 15 décembre 2021 du CSEC. Sur la régularité du jugement : En ce qui concerne la recevabilité des conclusions dirigées contre les décisions prises sur les demandes d'injonction formées par les comités sociaux et économiques : 2. Selon l'article L. 1233-57-5 du code du travail : " Toute demande tendant, avant transmission de la demande de validation ou d'homologation, à ce qu'il soit enjoint à l'employeur de fournir les éléments d'information relatifs à la procédure en cours ou de se conformer à une règle de procédure prévue par les textes législatifs, les conventions collectives ou un accord collectif est adressée à l'autorité administrative. Celle-ci se prononce dans un délai de cinq jours ". Aux termes de l'article D. 1233-12 du même code : " La demande mentionnée à l'article L. 1233-57-5 est adressée par le comité social et économique, ou, à défaut, les délégués du personnel, ou, en cas de négociation d'un accord mentionné à l'article L. 1233-24-1 par les organisations syndicales représentatives de l'entreprise, au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi compétent en application des articles R. 1233-3-4 et R. 1233-3-5, par tout moyen permettant de conférer une date certaine. / La demande est motivée. Elle précise les éléments demandés et leur pertinence. / Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi se prononce après instruction dans un délai de cinq jours à compter de la réception de la demande. / S'il décide de faire droit à la demande, le directeur régional adresse une injonction à l'employeur par tout moyen permettant de lui conférer une date certaine. Il adresse simultanément une copie de cette injonction à l'auteur de la demande, au comité d'entreprise et aux organisations syndicales représentatives en cas de négociation d'un accord mentionné à l'article L. 1233-24-1 ". 3. Ces dispositions n'imposent pas, par elles-mêmes, à l'administration de faire droit à toute demande tendant à ce qu'il soit enjoint à l'employeur de communiquer des pièces au comité d'entreprise ou à l'expert-comptable désigné dans le cadre de la procédure de consultation du comité d'entreprise en cas de licenciements collectifs pour motif économique. Cependant il appartient à l'administration, dans le cadre du contrôle global de la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise qui lui incombe en vertu des dispositions citées au point 5 lorsque le plan de sauvegarde de l'emploi résulte d'un accord collectif, de vérifier, sous le contrôle du juge, que le comité d'entreprise, et le cas échéant, l'expert-comptable qu'il a désigné lors de sa première réunion, ont été mis à même de rendre leurs avis en toute connaissance de cause. 4. Aux termes de l'article L. 1235-7-1 du code du travail : " (...) les décisions prises par l'administration au titre de l'article L. 1233-57-5 et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4. / Ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux ". Si l'administration prend une décision en statuant sur une demande d'injonction, cette décision ne peut faire l'objet d'un recours distinct de celui relatif à la décision administrative prise sur le projet de plan de sauvegarde de l'emploi, mais sa contestation entre dans le cadre du contrôle global de la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique. Dès lors, c'est à bon droit que le tribunal a considéré que ne pouvait être demandée l'annulation des décisions prises sur les demandes d'injonction adressées à l'administration, mais que les demandeurs devaient être regardés comme soutenant que les refus opposés aux demandes d'injonction entachaient d'irrégularité la procédure d'information et de consultation. En ce qui concerne les moyens tirés de l'omission à statuer sur des moyens : 5. Devant les premiers juges, les requérants avaient expressément soutenu que la procédure d'information et de consultation était irrégulière dans la mesure où elle a été lancée de manière concomitante à la saisine du Conseil supérieur de l'audiovisuel, devenu l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), alors que les comités sociaux et économiques de l'unité économique et sociale auraient dû être préalablement consultés sur le projet de réorganisation. Il ressort des points 22 et 23 du jugement que celui-ci a, après avoir rappelé les termes de l'article 42-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, considéré, d'une part, " qu'en procédant ainsi, l'employeur n'a pas privé d'effet utile la procédure d'information-consultation dont l'objet est distinct de la demande de modification d'autorisation présentée devant l'ARCOM et, d'autre part, " qu'il n'appartient pas au juge administratif de contrôler les conditions dans lesquelles s'effectue la consultation du comité social et économique, hors le cas de la préparation du plan de sauvegarde de l'emploi ". Dès lors que les motifs de droit et de fait conduisant à écarter le moyen ont été précisés de manière à répondre au moyen ainsi soulevé en première instance, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'un défaut de réponse au moyen en cause, la critique de l'appréciation à laquelle il s'est livré relevant du bien-fondé de son jugement et, dès lors, échappant à l'office du juge d'appel, qui, eu égard à l'effet dévolutif de l'appel, se prononce sur les motifs de la décision attaquée et non sur les motifs du jugement. 6. Devant la Cour, les requérants soutiennent que le tribunal n'a pas répondu aux moyens qui auraient été tirés de ce qu'aucune mesure de prévention n'a été prise pour faire face à l'incertitude liée à l'attente de l'avis de l'ARCOM. Cette argumentation n'a pas de lien avec le moyen lié à l'ARCOM formé par les requérants, lequel concernait la procédure d'information et de consultation. Par ailleurs, s'il apparaît que, dans le cadre d'un moyen soulevé en première instance sur l'insuffisance des mesures de prévention, les requérants avaient développé une argumentation relative au fait que la réalisation du plan de sauvegarde de l'emploi dépendait d'une décision à venir de l'ARCOM, il ne s'agissait que d'un argument au soutien du moyen relatif à l'insuffisance des mesures de prévention, moyen auquel le tribunal, qui n'était pas tenu d'entrer dans le détail de l'argumentation soulevée devant lui, a répondu aux points 17 et 18 du jugement. 7. Selon les requérants, le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'incompétence du DRIEETS et au caractère illicite de la décision de rejet du 10 janvier 2022 de la demande d'injonction. Cependant, s'agissant du DRIEETS, ils se réfèrent à leur mémoire en réplique devant le tribunal dont l'argumentation est précisément celle à laquelle, comme il a été dit au point 4 du présent arrêt, il a été répondu par les premiers juges. S'agissant de la demande d'injonction du 15 décembre 2021, le tribunal a, à bon droit, considéré que celle-ci a été présentée deux jours seulement avant la date à laquelle le CSEC devait rendre son avis, qu'il n'appartenait à l'administration ni d'ordonner à l'employeur de suspendre la procédure, ni de contrôler le déroulement de la saisine de l'ARCOM. Il suit de là que, contrairement à ce qui est soutenu, il a été répondu au moyen tiré du caractère illicite de la décision de rejet du 10 janvier 2022 de la demande d'injonction. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne la procédure d'information et de consultation : 8. Aux termes de l'article L. 1233-28 du code du travail : " L'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours réunit et consulte le comité social et économique dans les conditions prévues par le présent paragraphe ". L'article L. 1233-30 de ce code dispose que : " I.- Dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins cinquante salariés, l'employeur réunit et consulte le comité social et économique sur : / 1° L'opération projetée et ses modalités d'application, conformément à l'article L. 2323-31 ; / 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d'emploi, les catégories professionnelles concernées (...), les mesures sociales d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi et, le cas échéant, les conséquences des licenciements projetés en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-31 du même code : " L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la première réunion, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif. / Il indique : / 1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement (...) / 3° Les catégories professionnelles concernées (...) / 4° Le nombre de salariés (...) dans l'établissement / (...) / 6° Les mesures de nature économique envisagées ; / 7° Le cas échéant, les conséquences de la réorganisation en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail ". 9. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que la procédure d'information et de consultation du comité social et économique a été régulière. Elle ne peut légalement accorder l'homologation demandée que si le comité a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part sur l'opération projetée et ses modalités d'application et, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi. À ce titre, il appartient à l'administration de s'assurer que l'employeur a adressé au comité tous les éléments utiles pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause, dans des conditions qui ne sont pas susceptibles d'avoir faussé sa consultation. 10. Devant le juge d'appel, les requérants critiquent la procédure en remettant en cause la consultation des comités sociaux et économiques et les décisions prises sur les demandes d'injonction. S'agissant de la consultation des comités sociaux et économiques : 11. Le CSEC et le le CSER font valoir en appel que les élus du personnel n'ont pas été associés à la détermination des mesures de prévention en ce qui concerne la sécurité, la santé et les conditions de travail au cours de la procédure d'information et de consultation en violation des dispositions des articles L. 4121-3, L. 2312-9, L. 2312-40 et L. 2312-15 du code du travail. 12. L'article L. 2312-40 du code du travail dispose que : " Lorsque l'employeur envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique, le comité social et économique est consulté dans les conditions prévues par le titre III du livre II de la première partie du présent code ". Dès lors que l'article L. 1233-28 du code du travail qui figure dans les dispositions visées par cet article prévoit les conditions dans lesquelles le comité social et économique doit être consulté, le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article L. 2312-40 du code du travail ne peut qu'être écarté. 13. L'article L. 1233-31 du code du travail relatif à l'obligation pour l'employeur de donner aux représentants du personnel, dès le début de la procédure, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif prévoit qu'il doit indiquer, le cas échéant, les conséquences de la réorganisation en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'article L. 4121-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, qui prévoyait les conditions dans lesquelles il appartient à l'employeur d'évaluer les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, n'imposait pas de consultation en cas de projet de licenciement collectif pour motif économique. 14. Les articles L. 2312-9 et L. 2312-15 se trouvent dans la section 3 du chapitre II du titre 1er du livre III du code du travail qui définit les attributions du comité social et économique dans les entreprises d'au moins cinquante salariés. Ils n'ont ni pour objet ni pour effet de créer une obligation de consulter le comité social et économique lorsqu'un employeur envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours. 15. Il suit de là que les requérants ne peuvent utilement invoquer les dispositions des articles L. 2312-9, L. 2312-15 et L. 4121-3 du code de travail pour soutenir que les élus du personnel devaient, au-delà de la consultation prévue à l'article L. 1233-31 du même code, être associés à la détermination des mesures de prévention des risques professionnels. S'agissant des demandes d'injonction formées par les comités sociaux et économiques : 16. Par sa lettre du 19 novembre 2021, le secrétaire du CSEC demandait à l'administration d'enjoindre à l'UES Virgin Radio Régions de cesser d'entraver le bon déroulement de l'expertise et la procédure d'information et de consultation, de reporter la date de remise du report complet de l'expert et de reporter la date de la fin de la procédure d'information et de consultation, d'organiser des visites et des entretiens et de communiquer diverses informations. Les trois premiers points de la demande n'entrent pas dans le champ des injonctions que l'administration est susceptible de prononcer en application de l'article L. 1233-57-5 du code du travail. S'agissant des informations dont la communication était demandée, l'administration a constaté qu'elles avaient été entretemps communiquées, ce que ne contestent pas les requérants. Dans ces conditions, le comité social et économique central a disposé de tous les éléments utiles pour se prononcer en toute connaissance de cause sans que la réponse de l'administration à la demande d'injonction au-delà du délai de cinq jours fixé par l'article L. 1233-57-5 du code du travail n'ait eu d'effet. 17. Par sa décision du 9 décembre 2021, le DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 7 décembre 2021 adressée par le CSER en tant qu'elle demandait d'enjoindre à l'UES Virgin Radio Régions de reporter la date de la remise de l'avis du comité social et économique d'établissement. Dès lors qu'une telle demande n'entre pas dans le champ des injonctions que l'administration est susceptible de prononcer, cette décision de rejet a été prise à bon droit. En outre, en l'absence de toute disposition prescrivant de leur transmettre les observations formulées par l'employeur sur la demande d'injonction, les requérants ne peuvent reprocher à l'administration de ne pas avoir les avoir transmises au CSER. 18. Le 15 décembre 2021, le DRIEETS a été saisi d'une demande d'injonction du secrétaire du CSEC lui demandant d'enjoindre à l'UES Virgin Radio Régions, d'une part, de se déclarer incompétente pour connaître du projet dont elle est saisie en raison de la nécessité d'une autorisation préalable du Conseil supérieur de l'audiovisuel, du caractère hypothétique du projet de suppression de postes et parce qu'il constitue un détournement de la procédure de licenciement pour motif économique et, d'autre part, d'informer et consulter les élus du personnel d'un projet du groupe Lagardère Active Broadcast et de leur présenter un plan global et unique de réduction d'effectifs prenant en compte l'ensemble du secteur d'activité des radios. En tant qu'elle demandait à l'administration de se déclarer incompétente, la saisine ne peut s'analyser en une demande d'injonction à adresser à l'employeur. S'agissant de l'information demandée au sujet d'un plan d'ensemble des activités de radio du groupe Lagardère Active Broadcast, elle ne concerne pas le plan de sauvegarde de l'emploi de l'UES Virgin Radio Régions. Dès lors, c'est à bon droit que le DRIEETS a, en tout état de cause, rejeté cette demande. 19. En première instance, les requérants ont soutenu que la procédure de consultation et d'information était irrégulière et reprennent à cet égard les moyens qu'ils ont développés. S'agissant de la saisine du Conseil supérieur de l'audiovisuel 20. Aux termes du premier alinéa de l'article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : " L'autorisation peut être retirée, sans mise en demeure préalable, en cas de modification substantielle des données au vu desquelles l'autorisation avait été délivrée, notamment des changements intervenus dans la composition du capital social ou des organes de direction et dans les modalités de financement ". 21. En application de ces dispositions, toute modification substantielle des données au vu desquelles l'autorisation avait été délivrée est soumise à un accord préalable du Conseil supérieur de l'audiovisuel, devenu l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM). Dès lors, la réalisation effective d'un tel projet suppose la saisine préalable de cette autorité indépendante et une décision favorable. Cette saisine a trait à la mise en œuvre d'un projet pour lequel l'autorité de régulation est compétente et n'a pas de lien avec les consultations qui peuvent être prescrites par des dispositions législatives ou réglementaires ne relevant pas de la législation en matière de communication audiovisuelle. 22. Le moyen tiré de ce que le comité social et économique doit être saisi dans le cadre des dispositions de l'article L. 2312-8 du code du travail avant toute saisine de l'autorité de régulation audiovisuelle ne peut, pour les mêmes motifs qu'au point précédent, avoir d'incidence sur la régularité de la procédure d'information et de consultation. 23. Les sociétés Virgin Radio et RFM sont titulaires de deux types d'autorisation d'émettre délivrées par l'autorité de régulation audiovisuelle qui leur permettent de diffuser, outre un programme national identique sur tout le territoire, des programmes d'intérêt local élaborés localement. Le projet qui repose sur la suppression de plusieurs studios principaux et cabines News, nécessite une autorisation préalable de l'ARCOM, laquelle a été demandée par l'UES Virgin Radio Régions. Cette autorisation constitue la condition nécessaire pour la mise en œuvre du projet de réorganisation, mais elle n'a pas d'incidence sur les obligations que le titulaire d'une autorisation d'émettre doit respecter dans le cadre des dispositions s'appliquant aux plans de sauvegarde de l'emploi. Il suit de là que l'employeur n'a pas privé d'effet utile la procédure d'information et de consultation dont l'objet est distinct de la demande de modification d'autorisation présentée devant l'autorité de régulation audiovisuelle. S'agissant de l'absence de report du délai de la procédure d'information et de consultation : 24. En l'absence d'accord collectif en disposant autrement, le délai de la procédure d'information et de consultation est resté fixé à deux mois à compter de la première réunion du comité social et économique central, en application de l'article L. 1233-30 du code du travail. L'employeur n'était pas tenu de faire droit à la demande formulée par le CSER de reporter cette consultation et n'a en tout état de cause pas entaché la procédure d'illégalité en proposant de convenir, dans le cadre d'un accord de méthode conclu avec les organisations syndicales, des conditions de report du délai de la procédure. S'agissant de l'expertise ordonnée par le comité social et économique d'établissement " Régions " : 25. Il ressort des pièces du dossier que lors de la réunion du 17 novembre 2021, le CSER a, en application de l'article L. 2315-96 du code du travail, décidé de nommer un expert pour l'éclairer sur les enjeux et les conséquences du projet de réorganisation sur la santé, la sécurité et les conditions de travail. Les requérants reprochent à l'autorité administrative d'avoir homologué le document unilatéral sans attendre les conclusions de l'expertise et l'avis du comité social et économique d'établissement " Régions " sur ce point. Toutefois, la désignation d'un expert dans le cadre de la procédure d'information et de consultation mentionnée à l'article L. 1233-30 précité du code du travail est expressément prévue par les dispositions de l'article L. 1233-34 de ce code selon lesquelles cette expertise est décidée lors de la première réunion. En outre, en application du dernier alinéa de l'article L. 1233-36 du même code, il appartenait au comité social et économique central de désigner un expert, ce qu'il a fait dès la première réunion du 18 octobre 2021. Dans ces conditions, et alors qu'il n'appartient pas à l'autorité administrative de contrôler les conditions dans lesquelles ont pu se dérouler d'autres expertises ordonnées en parallèle de la procédure d'information et de consultation, la circonstance que l'expert désigné par le CSER n'avait pas remis de rapport au moment où la décision d'homologation est intervenue ne peut avoir d'incidence sur la régularité de la procédure. S'agissant des conditions de réalisation de l'expertise : 26. Il ressort des pièces du dossier que lors de la première réunion du 18 octobre 2021, le CSEC a décidé de procéder à la désignation comme expert du cabinet Progexa. Ce dernier s'est plaint de manœuvres dilatoires de la part de la direction de l'UES qui aurait refusé de communiquer certains documents et retardé l'organisation des entretiens avec les salariés. Si dans la demande d'injonction du 19 novembre 2021, le CSEC avait demandé à la DRIEETS d'enjoindre à la direction de l'UES de communiquer un certain nombre d'éléments, il n'y avait plus lieu, dès lors que les documents demandés avaient été communiqués par l'employeur, d'enjoindre leur communication. Au demeurant, les requérants ne précisent pas quels documents auraient manqué ni en quoi cela les aurait empêchés de rendre un avis éclairé. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier, au regard notamment des échanges de courriels entre la direction de l'UES et le cabinet Progexa et des comptes rendus de réunions, que celle-ci aurait volontairement entravé la réalisation des entretiens. De plus, si l'expert a estimé ne pas être en mesure de rendre un rapport définitif, il a successivement remis un rapport d'étape le 19 novembre, un rapport transitoire le 3 décembre et un point d'étape Volet santé de la mission d'assistance le 14 décembre 2021. Dans ces conditions, à supposer même que certains documents n'aient pas été communiqués à l'expert, il n'est pas établi que cela l'aurait empêché d'exercer sa mission et que les représentants du personnel ne disposaient pas de l'ensemble des éléments leur permettant de rendre un avis éclairé. S'agissant du projet alternatif du CSEC : 27. L'article 1233-33 du code du travail dispose que : " L'employeur met à l'étude, dans le délai prévu à l'article L. 1233-30, les suggestions relatives aux mesures sociales envisagées et les propositions alternatives au projet de restructuration mentionné à l'article L. 2323-31 formulées par le comité social et économique. Il leur donne une réponse motivée ". 28. Selon les requérants, l'employeur n'a pas apporté de réponse motivée au projet alternatif que le CSEC a présenté le 9 décembre 2021. Or une réponse écrite et motivée lui a été adressée le 16 décembre suivant. Par suite, le moyen manque en fait. En ce qui concerne le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi : 29. En application de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, l'autorité administrative homologue le document unilatéral mentionné à l'article L. 1233-24-4 du même code après avoir vérifié le contenu du plan qui doit comporter les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, à savoir : " 1° Les modalités d'information et de consultation du comité social et économique, en particulier les conditions dans lesquelles ces modalités peuvent être aménagées en cas de projet de transfert d'une ou de plusieurs entités économiques prévu à l'article L. 1233-61, nécessaire à la sauvegarde d'une partie des emplois ; / 2° La pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements mentionnés à l'article L. 1233-5 ; / 3° Le calendrier des licenciements ; / 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées ; / 5° Les modalités de mise en œuvre des mesures de formation, d'adaptation et de reclassement prévues à l'article L. 1233-4 ". S'agissant du périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements : 30. Aux termes des trois derniers alinéas de l'article L. 1233-5 du code du travail dans sa version applicable : " (...) Le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements peut être fixé par un accord collectif. / En l'absence d'un tel accord, ce périmètre ne peut être inférieur à celui de chaque zone d'emplois dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernés par les suppressions d'emplois. / Les conditions d'application de l'avant-dernier alinéa du présent article sont définies par décret ". L'article D. 1233-2 du même code dispose que : " Les zones d'emploi mentionnées à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 1233-5 sont celles référencées dans l'atlas des zones d'emploi établi par l'Institut national de la statistique et des études économiques et les services statistiques du ministre chargé de l'emploi ". 31. Selon les requérants, l'employeur a, en retenant les zones d'emploi comprenant une seule cabine News comme périmètre de mise en œuvre des critères d'ordre, méconnu l'intention du législateur en neutralisant l'application des critères d'ordre des licenciements préalablement définis. 32. Les sociétés Virgin Radio et RFM disposent d'un réseau local composé de studios principaux qui assurent notamment la mise en ondes des programmes d'intérêt local et de cabines News rattachées à un studio principal et chargées de réaliser et de mettre sur les ondes des informations locales. Le document unilatéral fixe des critères d'ordre et précise qu'ils seront mis en œuvre au niveau de zones d'emploi. D'une part, il est constant qu'aucun accord collectif ne détermine le périmètre d'application des critères d'ordre, d'autre part, le projet de restructuration prévoit la suppression de postes au sein de trois studios principaux situés à Avranches, Bar-le-Duc et Bonnières-sur-Seine et de vingt-sept cabines News. Il ressort des pièces du dossier que les zones d'emploi mentionnées dans le document unilatéral correspondent aux zones d'emploi définis par l'INSEE et qu'au sein de ces zones se trouvait au moins un site concerné par les suppressions d'emploi, à savoir une cabine News ou un studio principal. Chacun de ces sites doit, pour l'application des dispositions de l'article L. 1233-5 du code du travail, être regardé comme un établissement compte tenu de la répartition de l'activité sur l'ensemble du territoire des deux sociétés de l'unité économique et sociale, de leur organisation pouvant reposer sur des sites ne comportant qu'un seul salarié et du nombre total des salariés en contrat à durée indéterminée qui était, au 30 juin 2021, de 194 personnes des deux sociétés concernées par le plan de sauvegarde de l'emploi, soit 133 dans la société Virgin Radio et 61 dans la société RFM Régions. Dans ces conditions, dès lors que l'employeur a respecté le périmètre d'application des critères d'ordre tel que prévu par le législateur, il n'appartenait pas à l'autorité administrative de se prononcer sur l'opportunité de ce choix. Enfin, les contrats de travail des salariés de l'entreprise ne peuvent avoir d'incidence sur la définition du périmètre des critères d'ordre des licenciements résultant de l'article L. 1233-5 du code du travail. S'agissant du caractère discriminatoire allégué des modalités de mise en œuvre prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi : 33. Les requérants soutiennent que le périmètre des critères d'ordre des licenciements a été défini en vue de choisir nominativement les salariés dont le licenciement est envisagé, que les catégories professionnelles ont été déterminées avec la volonté de cibler des salariés détenant un mandat de représentation et que la proportion de représentants du personnel occupant les postes dont la suppression est envisagée laissent supposer l'existence d'une discrimination. 34. Le périmètre des critères d'ordre des licenciements a été défini en conformité avec les dispositions de l'article L. 1233-5 du code du travail au niveau le plus petit qu'elles prévoient. Il n'est pas établi que ce choix aurait eu pour objet de permettre un choix nominatif des salariés susceptibles de faire partie des personnes dont la suppression d'emploi serait envisagée. 35. Aux termes de l'article L. 1233-24-2 du code du travail : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233 63. / Il peut également porter sur : (...) 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées (...) ". L'article L. 1233-57-3 du même code prévoit qu'en l'absence d'accord collectif, ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 (...) ". 36. En vertu de ces dispositions, il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document qui fixe les catégories professionnelles mentionnées au 4° de l'article L. 1233-24-2, de s'assurer, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d'information et de consultation ainsi que des justifications qu'il appartient à l'employeur de fournir, que ces catégories regroupent, en tenant compte des acquis de l'expérience professionnelle qui excèdent l'obligation d'adaptation qui incombe à l'employeur, l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Au terme de cet examen, l'administration refuse l'homologation demandée s'il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations, telles que l'organisation de l'entreprise ou l'ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s'il apparaît qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée. 37. Il ressort des pièces du dossier que la notion de catégorie professionnelle a été définie comme l'ensemble des salariés exécutant le même type d'activité au sein de l'entreprise qui sont capables de changer de postes au sein de la même catégorie professionnelle, à condition qu'ils n'aient besoin pour ce faire d'aucune formation complémentaire autre qu'une simple formation d'adaptation. Ainsi les catégories professionnelles retenues sont celles des journalistes, des animateurs et des titulaires de postes d'ordre technique ou administratif, soit pour les salariés en contrat à durée indéterminée, dans la société RFM Régions, 23 journalistes, 15 animateurs et 23 autres postes, dans la société Virgin Radio, 64 journalistes, 26 animateurs et 43 autres postes. La méthodologie, qui ne fait pas l'objet d'une critique précise, renvoie, ainsi que l'a vérifié le DRIEETS, à une logique de compétences professionnelles. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cette distinction aurait été établie dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne et notamment en raison de leurs fonctions de représentant du personnel. Au demeurant, aucune précision portant sur une discrimination précise concernant un ou plusieurs salariés n'est apportée à l'appui de l'argumentation des requérants. 38. Si la suppression de certains postes serait susceptible de conduire au licenciement de représentants du personnel, il ressort du document unilatéral que les postes d'élus concernés appartiennent tous à des sites appelés cabines News ne comptant qu'un seul journaliste, soit, pour RFM Régions, l'un des quatre journalistes et, pour Virgin Radio, cinq des vingt-six journalistes dont la suppression de poste est envisagée. Le projet prévoit au sein des sociétés Virgin Radio et RFM Régions respectivement 30 et 4 suppressions de postes. Il ressort des pièces du dossier que si les suppressions de postes envisagées concernent 11,4 % des salariés et 40 % des représentants du personnel, ainsi que l'a relevé le tribunal, seuls 17,4 % des emplois supprimés sont occupés par des représentants du personnel. Deux circonstances liées à la restructuration et à la catégorie professionnelle des élus contribuent à cette proportion plus élevée des postes occupés par des salariés exerçant un mandat de représentant du personnel. Tout d'abord, le projet de réorganisation prévoit, s'agissant de Virgin Radio, la suppression de trois studios principaux à Avranches, employant deux animateurs et un journaliste, et à Bar-le-Duc et Bonnières-sur-Seine, employant chacun un animateur et un journaliste, et de vingt-trois cabines News rattachées à un studio maintenu, qui emploient chacune un journaliste, et, s'agissant de RFM Régions, la suppression de quatre cabines News employant chacune un journaliste. Pour les zones concernées de Virgin Radio, il s'agit, dans dix d'entre elles, de la totalité des cabines News rattachées à des studios principaux et pour les zones de programme d'intérêt local de Marseille et de Pau, d'une cabine News sur les deux qu'elles comptent. Pour les deux zones concernées de RFM Régions, il s'agit de la totalité des cabines News de la zone de programme d'intérêt local de Toulouse et de l'une des deux de la zone de programme d'intérêt local de Marseille. Ainsi, il s'agit bien d'un plan de restructuration de ces deux sociétés. Ensuite, les six représentants du personnel, soit cinq pour la société Virgin Radio et un pour la société RFM Régions, dont est envisagée la suppression de poste, sans qu'un licenciement en soit nécessairement induit, sont tous, ainsi qu'il ressort des pièces du dossier, des journalistes exerçant leur activité dans les cabines News faisant partie des zones dans lesquelles la totalité des cabines News est supprimée. Il suit de là, d'une part, que si six représentants du personnel sur seize élus sont concernés, soit 40 % d'entre eux, cette circonstance résulte de la forte proportion de journalistes parmi les élus, d'autre part, qu'il s'agit d'une conséquence de la restructuration visant principalement les cabines News conduisant au nombre respectif de trente emplois et d'un emploi de journalistes dont la suppression est envisagée pour Virgin Radio et RFM Régions. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les suppressions de cabines News aient un lien avec les fonctions d'élu des journalistes qui sont concernés ou qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée. Dès lors, le moyen tiré du caractère discriminatoire qu'auraient les modalités de mise en œuvre prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi doit être écarté, sans, par ailleurs, que puisse être utilement invoquée la violation alléguée des dispositions de l'article L. 1134-1 du code du travail, qui ne s'applique qu'aux candidats à un stage ou un emploi. S'agissant des mesures d'accompagnement : 39. Aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement sur le territoire national des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile ". Aux termes de l'article L. 1233-62 du même code : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des mesures telles que : / 1° Des actions en vue du reclassement interne sur le territoire national, des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-24-4 du même code : " A défaut d'accord (...), un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité social et économique fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur ". Aux termes de l'article L. 1233-57-3 du même code : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique, le respect, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 ". 40. Il résulte de l'ensemble des dispositions citées ci-dessus que, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier la conformité de ce document et du plan de sauvegarde de l'emploi dont il fixe le contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles applicables, en s'assurant notamment du respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du même code. A ce titre, elle doit, au regard de l'importance du projet de licenciement, apprécier si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si, à raison, pour chacune, de sa contribution aux objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à ces objectifs compte tenu, d'une part, des efforts de formation et d'adaptation déjà réalisés par l'employeur et, d'autre part, des moyens dont disposent l'entreprise et, le cas échéant, l'unité économique et sociale et le groupe. 41. Les requérants reprennent l'argumentation développée en première instance selon laquelle les mesures de reclassement sont dérisoires au regard des moyens du groupe et font état du résultat net de la société mère Lagardère Active Broadcast en 2020 et de sa trésorerie nette. Cependant celle-ci est une filiale de la société Lagardère Media SAS, elle-même filiale de la société Lagardère SA, de telle sorte que le " groupe Lagardère Active Broadcast " n'est qu'une partie du groupe Lagardère. Au demeurant, le contrôle opéré par la DRIEETS au regard du groupe Lagardère a montré que celui-ci a connu en 2020 un recul de son chiffre d'affaires et une chute de 63 % de son résultat net consolidé et que les pertes du groupe se poursuivaient en 2021. Ainsi les mesures ont été analysées par l'autorité administrative par rapport aux moyens du groupe. 42. Le document unilatéral homologué par l'administration comporte, en annexe 4, une liste de postes de reclassement en France au sein du groupe Lagardère. Il prévoit que cette liste sera mise à jour tous les quinze jours. Si cette liste de postes est susceptible d'évoluer, en fonction notamment de la décision de l'autorité de régulation audiovisuelle, cette circonstance n'entache pas d'illégalité le document unilatéral. Celui-ci prévoit, en matière de reclassement interne, quatorze mesures d'accompagnement et le même nombre en matière de reclassement externe, dont l'administration a contrôlé le caractère suffisant et proportionné comme le précise la décision d'homologation du 10 janvier 2022. Le document unilatéral prévoit, outre des modalités spécifiques d'accompagnement en cas de reclassement interne et une priorité de réembauche, un dispositif d'accompagnement pour les reclassements externes qui comporte un congé de reclassement, des aides financières pour la formation ou la création et la reprise d'entreprise, des aides financières pour la mobilité géographique, une prime à la reprise d'emploi, une allocation différentielle de salaire. Il ressort des pièces du dossier que ces mesures ont pour la plupart été réévaluées à la hausse par rapport à la proposition initiale, de façon notamment à tenir compte de la fragilité particulière de certaines catégories de salariés. Ainsi, la prise en charge d'une formation d'adaptation en externe a été revalorisée à 5 000 euros et à 7 000 euros pour les salariés dont la réinsertion professionnelle serait particulièrement difficile, contre 3 000 euros initialement, et le montant des aides à la reconversion a été rehaussé à 12 000 euros contre 10 000 euros initialement pour les salariés dont la réinsertion professionnelle serait particulièrement difficile. Il ressort des pièces du dossier que le budget du plan de sauvegarde de l'emploi, hors mesures transactionnelles, s'élève à 4 179 805,15 euros soit un montant de 122 935,44 euros par salarié. Par ailleurs, la définition de l'offre valable d'emploi retenue dans le document unilatéral, qui inclut notamment les contrats à durée déterminée et les contrats d'intérim et qui prévoit une base de rémunération de 70 % du salaire antérieur, ne permet pas non plus de caractériser une insuffisance du plan. Il suit de là que le moyen tiré de ce que les mesures prévues dans le plan seraient insuffisantes doit être écarté. S'agissant des mesures de prévention : 43. Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. / Ces mesures comprennent : / 1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ; / 2° Des actions d'information et de formation ; / 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. / L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". En vertu des articles L. 1233-57-2 et L. 1233-57-3 du même code, le contrôle de la régularité de la procédure d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel ainsi que des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi incombe à l'autorité administrative, lors de sa décision de validation ou d'homologation. Dans le cadre d'une réorganisation qui donne lieu à élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'autorité administrative de vérifier le respect, par l'employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. À cette fin, elle doit contrôler tant la régularité de l'information et de la consultation des institutions représentatives du personnel que les mesures auxquelles l'employeur est tenu en application de l'article L. 4121-1 du code du travail au titre des modalités d'application de l'opération projetée. 44. Il ressort des pièces du dossier, notamment des procès-verbaux des réunions, que dès la première réunion du CSEC, ont été évoquées la mise en place une cellule d'écoute et de soutien psychologique et la mobilisation spécifique des services de santé au travail. Dès le 16 novembre 2021, une note sur la santé, la sécurité et les conditions de travail a été communiquée aux représentants du personnel. Une note consacrée aux risques psycho-sociaux a également été élaborée au début du mois de décembre. Dans ces conditions, bien que ces documents n'aient fait l'objet d'une présentation formelle que lors des réunions du 9 et des 14 et 16 décembre, les représentants du personnel ont disposé d'une information suffisante dans le cadre de la procédure d'information et de consultation. Par ailleurs, il ressort de ces documents que l'employeur avait précisément identifié trois facteurs de risque, soit l'éloignement géographique, l'incertitude quant à l'avenir liée à l'attente de l'autorisation du Conseil supérieur de l'audiovisuel et l'usure des salariés et la perte de sens, liées au chômage partiel en 2020 et 2021 et à la répétition des plans de sauvegarde de l'emploi et qu'il avait prévu des dispositifs d'accompagnement spécifiques à destination des salariés. En outre, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les conséquences de la réorganisation sur la charge de travail des salariés restants ont fait l'objet d'une évaluation. Le document d'information en vue de la consultation du CSEC et du CSER sur les conséquences du projet de réorganisation des radios musicales en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail et de prévention des risques psycho-sociaux étudie l'impact du projet de réorganisation sur l'organisation du travail et la charge de travail et prévoit l'accompagnement de la restructuration et la prévention des risques psycho-sociaux avec des mesures mettant en place un dispositif d'écoute et d'accompagnement, un dispositif d'assistance et d'intervention sociale et la mobilisation des services de santé au travail. Si les représentants du personnel ne partagent pas l'analyse de l'employeur selon laquelle la réorganisation n'aura pas d'effet sur la charge de travail, cette différence d'appréciation n'est pas par elle-même de nature à caractériser une insuffisance des mesures. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance des mesures de prévention en matière de santé, sécurité et conditions de travail doit être écarté. Sur les frais liés à l'instance : 45. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, les parties perdantes, au titre des frais exposés par le comité social et économique et central Virgin Radio et RFM et le comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête du comité social et économique et central Virgin Radio et RFM et du comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au comité social et économique et central Virgin Radio et RFM, au comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions, à la société par actions simplifiée unipersonnelle Europe 2 Entreprises, à la société par actions simplifiée unipersonnelle RFM Entreprises, à la société par actions simplifiée unipersonnelle Virgin Radio Régions, à la société par actions simplifiée unipersonnelle RFM Régions, à la société à responsabilité limitée RFM Est et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Copie en sera adressée au directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France. Délibéré après l'audience publique du 26 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Le Goff, président de chambre, - M. Ho Si Fat, président assesseur, - Mme Collet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2022. Le président assesseur, F. HO SI FAT Le président-rapporteur, R. A...La greffière, E. VERGNOL La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA03371
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La compagnie nationale Royal Air Maroc a demandé au tribunal administratif de Paris à titre principal, d'annuler la décision R/19-0407 du 23 octobre 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a infligé une amende de 10 000 euros sur le fondement des articles L. 625-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la décharger du paiement de l'amende ou, à titre subsidiaire, de réduire le montant à 1 000 euros ; Par un jugement n°1927707/3-3 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé cette décision. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2020, le ministre de l'intérieur demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande de la compagnie nationale Royal Air Maroc devant le tribunal administratif de Paris ; 3°) à titre subsidiaire, de moduler l'amende. Il soutient que : - le jugement est entaché d'une contradiction de motifs ; - le tribunal a commis une erreur d'appréciation dès lors qu'il ressort des photos produites que le passager s'étant présenté à l'embarquement n'avait pas de ressemblance suffisante avec le véritable titulaire du passeport, de sorte que le passager n'était manifestement pas muni des documents de voyage requis pour entrer sur le territoire français, ce qui aurait dû être décelé par un contrôle normalement attentif des agents de la compagnie aérienne. Par un mémoire en défense enregistré le 13 juillet 2022, la compagnie nationale Royal Air Maroc, représentée par Me Pradon, demande à la Cour : 1°) de rejeter le recours ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des transports ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; -le règlement (UE) 2016/399 du 9 mars 2016 ; - le règlement (CE) 539/2001 du 15 mars 2001 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Briançon, rapporteure, - et les conclusions de Mme Lipsos, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Par une décision R/19-0407 du 23 octobre 2019, le ministre de l'intérieur a infligé à la compagnie nationale Royal Air Maroc, sur le fondement des articles L. 625-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une amende de 10 000 euros pour avoir, le 24 janvier 2019, débarqué sur le territoire français un passager de nationalité indéterminée en provenance de Casablanca, arrivé à Nice Cote d'Azur, démuni de document de voyage revêtu du visa requis, le passeport n° A02077858 présenté étant manifestement un faux. La compagnie nationale Royal Air Maroc ayant saisi le tribunal administratif, celui-ci a annulé cette décision par un jugement du 15 décembre 2020 dont le ministre relève appel. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. D'une part, aux termes de l'article L. 6421-2 du code des transports : " Le transporteur ne peut embarquer les passagers pour un transport international qu'après justification qu'ils sont régulièrement autorisés à atterrir au point d'arrivée et aux escales prévues ". Aux termes de l'article L. 625-1 devenu L. 821-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Est punie d'une amende d'un montant maximum de 10 000 € l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque sur le territoire français, en provenance d'un État avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen, un étranger non ressortissant d'un État de l'Union européenne et démuni du document de voyage et, le cas échéant, du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable en raison de sa nationalité (...) ". Aux termes de l'article L. 625-5 devenu L. 821-6 du même code : " Les amendes prévues aux articles L. 625-1 et L. 625-4 ne sont pas infligées : (...) 2° Lorsque l'entreprise de transport établit que les documents requis lui ont été présentés au moment de l'embarquement et qu'ils ne comportaient pas d'élément d'irrégularité manifeste ". 3. Ces dispositions font obligation aux transporteurs aériens de s'assurer, au moment des formalités d'embarquement, que les voyageurs ressortissants d'Etats non membres de l'Union européenne sont en possession de documents de voyage leur appartenant, le cas échéant revêtus des visas exigés par les textes, non falsifiés et valides. Si ces dispositions n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de conférer au transporteur un pouvoir de police aux lieu et place de la puissance publique, elles lui imposent de vérifier que l'étranger est muni des documents de voyage et des visas éventuellement requis et que ceux-ci ne comportent pas d'éléments d'irrégularité manifeste, décelables par un examen normalement attentif des agents de l'entreprise de transport. En l'absence d'une telle vérification, à laquelle le transporteur est d'ailleurs tenu de procéder en vertu de l'article L. 6421-2 du code des transports, le transporteur encourt l'amende administrative prévue par les dispositions précitées. 4. D'autre part, aux termes du 1 de l'article 6 du règlement (UE) 2016/399 du 9 mars 2016 : " Pour un séjour prévu sur le territoire des États membres, d'une durée n'excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours, ce qui implique d'examiner la période de 180 jours précédant chaque jour de séjour, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes : (...) b) être en possession d'un visa en cours de validité si celui-ci est requis en vertu du règlement (CE) no 539/2001 du Conseil, sauf s'ils sont titulaires d'un titre de séjour ou d'un visa de long séjour en cours de validité (...) ". Aux termes de l'article 1er du règlement (CE) 539/2001 du 15 mars 2001 : " 1. Les ressortissants des pays tiers figurant sur la liste de l'annexe I doivent être munis d'un visa lors du franchissement des frontières extérieures des États membres (...) ". Le Maroc est au nombre des pays tiers énumérés dans cette liste. 5. Il appartient au juge administratif, saisi d'un recours de pleine juridiction contre la décision infligeant une amende à une entreprise de transport aérien sur le fondement des dispositions législatives précitées, de statuer sur le bien-fondé de la décision attaquée et de réduire, le cas échéant, le montant de l'amende infligée, en tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce. 6. Il résulte de l'instruction que la compagnie Royal Air Maroc a laissé débarquer, le 24 janvier 2019, du vol n° RAM 714 en provenance de Casablanca, à l'aéroport de Nice un ressortissant étranger muni d'un passeport sénégalais usurpé. Les dissemblances physiques ressortant de la comparaison entre la photographie figurant sur le passeport et celle de la personne débarquée sont suffisamment importantes pour que l'irrégularité du passeport soit considérée comme manifeste et décelable par un examen normalement attentif de l'agent d'embarquement et, partant, susceptible de justifier le prononcé d'une amende sur le fondement des articles L. 625-1 et L. 625-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans qu'ait d'incidence sur ce point la circonstance que cette irrégularité aurait échappé au service de police marocain. Par ailleurs, aucune circonstance particulière ne justifie une minoration du montant de l'amende prévue par les dispositions de l'article L. 625-1 devenu L. 821-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen tiré d'une contradiction de motifs, que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé sa décision R/19-0407 du 23 octobre 2019 et, par suite, à demander l'annulation de ce jugement ainsi que le rejet de la demande de première instance de la compagnie nationale Royal Air Maroc. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la compagnie nationale Royal Air Maroc demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n°1927707/3-3 du 15 décembre 2020 est annulé. Article 2 : La demande présentée par la compagnie nationale Royal Air Maroc devant le tribunal administratif de Paris est rejetée. Article 3 : Les conclusions de la compagnie nationale Royal Air Maroc présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à la Compagnie nationale Royal Air Maroc. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Heers, présidente de chambre, - Mme Briançon, présidente assesseure, - Mme Saint-Macary, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2022. La rapporteure, C. BRIANÇON La présidente, M. A... La greffière, V. BREME La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20PA04186
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 avril 2021 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement n° 2111975/1-3 du 19 octobre 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 18 novembre 2021 et 19 mai 2022, M. A..., représenté par Me Pierrot, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du 19 octobre 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 29 avril 2021 ; 3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions des articles L. 423-1 et L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour : - elle est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ; - est entachée d'une erreur de droit en ce que les stipulations de l'article 22 de la convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990, ne sont pas applicables à sa situation ; - elle méconnaît les dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ; S'agissant de la décision portant obligation à quitter le territoire français : - elle est, par voie d'exception, illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ; - elle méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par des mémoires en défense, enregistrés respectivement les 28 avril 2022 et 23 mai 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 29 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 mai 2022 à 12 heures. Par une ordonnance du 28 avril 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 20 mai 2022 à 12 heures. Par une ordonnance du 20 mai 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 3 juin 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant camerounais, né en 1989, a sollicité le 28 janvier 2021 la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en tant que conjoint d'une ressortissante française. Par un arrêté du 29 avril 2021, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... fait appel du jugement du 19 octobre 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui a épousé en France une ressortissante française le 5 septembre 2019, justifie de l'existence d'une vie commune avec sa compagne depuis le 22 juin 2018, date à laquelle ils ont déposé un dossier de mariage, soit depuis près de trois ans à la date de l'arrêté attaqué. Par ailleurs, le requérant établit que son épouse et lui-même sont engagés depuis le mois de novembre 2020 dans le cadre d'un protocole de procréation médicalement assisté. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, l'arrêté par lequel le préfet de police a refusé de délivrer au requérant un titre de séjour a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, cette décision a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'illégalité de cette décision entraîne, par voie de conséquence, celle des décisions du 29 avril 2021 par lesquelles le préfet de police a obligé M. A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. 4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte : 5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution / (...) ". Aux termes de l'article L. 911-3 de ce code : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ". 6. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans la situation de droit ou de fait de M. A..., que le préfet de police délivre à celui-ci une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par M. A.... Sur les frais liés au litige : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens, en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2111975 du Tribunal administratif de Paris du 19 octobre 2021 et l'arrêté du préfet de police du 29 avril 2021 pris à l'encontre de M. A... sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'État versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Jardin, président de chambre, - Mme Hamon, présidente assesseure, - M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller, Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2022. Le rapporteur, M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président, C. JARDIN La greffière, C. BUOT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 21PA05895 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 11 octobre 2017 par laquelle le directeur régional du réseau La Poste de Provence-Marseille l'a placée en disponibilité d'office pour raison de santé pour une durée de six mois à compter du 12 novembre 2017 afin de permettre l'instruction de son dossier de retraite pour invalidité. Par un jugement n° 1703533 du 21 octobre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 19 novembre 2019, 11 février 2020 et 21 août 2020, Mme A... B..., représentée par Me Heulin de la SELARL Goldmann et associés, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 21 octobre 2019 ; 2°) d'annuler la décision du 11 octobre 2017 ; 3°) de mettre à la charge de La Poste une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance des articles 13, 27 et 42 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - la décision contestée a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, en l'absence de saisine préalable de la commission de réforme ; - La Poste ne pouvait prendre cette décision sans attendre l'issue de la procédure devant le comité médical supérieur, dès lors qu'elle n'avait pas épuisé ses droits à congé ; - la commission " retour et maintien dans l'emploi " aurait dû être saisie avant la notification de la décision contestée ; - La Poste aurait dû engager un processus de reclassement, en application de la note d'information n° 958-1 paragraphe IV ; - l'avis médical du 6 octobre 2017 lui a été transmis tardivement ; - la décision contestée et l'avis du comité médical du 11 octobre 2017 sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation ; une reprise à temps partiel thérapeutique aurait dû lui être proposée ; - elle ne pouvait être placée en disponibilité d'office alors qu'elle n'avait pas épuisé ses droits à congé. Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 mars et 7 septembre 2020, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société La Poste, représentée par la SELARL Freichet AMG, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme B... une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience au cours de laquelle ont été entendus : - le rapport de Mme C... ; - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public ; - les observations de Me Dutard de la SELARL Goldmann et associés représentant Mme B... et de Me Freichet représentant La Poste. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... relève appel du jugement du 21 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 11 octobre 2017 du directeur régional du réseau La Poste de Provence-Marseille la plaçant en disponibilité d'office pour raison de santé pour une durée de six mois à compter du 12 novembre 2017 afin de permettre l'instruction de son dossier de retraite pour invalidité. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Contrairement à ce que soutient la requérante, le tribunal a suffisamment répondu, au point 4 du jugement attaqué, après avoir cité aux points 2 et 3 les textes applicables à sa situation, au moyen tiré d'un vice de procédure du fait de l'absence de saisine de la commission de réforme. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle Mme B... a été placée en congé de longue durée : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. (...) / Si la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les périodes fixées ci-dessus sont respectivement portées à cinq ans et trois ans (...) ". L'article 51 de la loi du 11 janvier 1984 prévoit que : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux (...) 4° de l'article 34 ". 4. D'autre part, aux termes de l'article 7 du décret du 14 mars 1986, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les comités médicaux sont chargés de donner à l'autorité compétente, dans les conditions fixées par le présent décret, un avis sur les contestations d'ordre médical qui peuvent s'élever à propos (...) de l'octroi et du renouvellement des congés de maladie et de la réintégration à l'issue de ces congés. Ils sont consultés obligatoirement en ce qui concerne : (...) / 4. La réintégration (...) à l'issue d'un congé de longue (...) durée ; / (...) 6. La mise en disponibilité d'office pour raison de santé et son renouvellement ; (...) ". Aux termes de l'article 13 de ce décret : " La commission de réforme est consultée notamment sur : (...) / 7. L'application, s'il y a lieu, des dispositions réglementaires relatives à la mise en disponibilité d'office pour raison de santé. (...) ". Aux termes de l'article 41 de ce décret : " Le bénéficiaire d'un congé (...) de longue durée ne peut reprendre ses fonctions à l'expiration (...) dudit congé que s'il est reconnu apte, après examen par un spécialiste agréé et avis favorable du comité médical compétent ". Aux termes de l'article 42 de ce décret : " (...) Si, au vu du ou des avis prévus ci-dessus, le fonctionnaire est reconnu inapte à exercer ses fonctions, le congé continue à courir ou est renouvelé. Il en est ainsi jusqu'au moment où le fonctionnaire sollicite l'octroi de l'ultime période de congé rétribué à laquelle il peut prétendre. / Le comité médical doit alors, en même temps qu'il se prononce sur la prolongation du congé, donner son avis sur l'aptitude ou l'inaptitude présumée du fonctionnaire à reprendre ses fonctions à l'issue de cette prolongation. / (...) S'il est présumé définitivement inapte, son cas est soumis à la commission de réforme qui se prononce, à l'expiration de la période de congé rémunéré, sur l'application de l'article 47 ci-dessous ". L'article 47 de ce décret dispose que : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé (...) de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi, (...), soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 48 du même décret : " La mise en disponibilité prévue aux articles (...) 47 du présent décret est prononcée après avis du comité médical ou de la commission de réforme sur l'inaptitude du fonctionnaire à reprendre ses fonctions. (...) / L'avis est donné par la commission de réforme lorsque le congé antérieur a été accordé en vertu du deuxième alinéa de l'article 34 (4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. / Le renouvellement de la mise en disponibilité est prononcé après avis du comité médical. Toutefois, lors du dernier renouvellement de la mise en disponibilité, l'avis est donné par la commission de réforme ". 5. Il résulte de ces dispositions que la décision plaçant un agent en disponibilité d'office à l'expiration de son congé de longue durée est soumis au seul avis du comité médical, si le congé ne lui avait pas été accordé pour une maladie contractée dans l'exercice des fonctions, en application du deuxième alinéa du 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, la consultation de la commission de réforme n'étant requise, en application de l'article 48 du décret du 14 mars 1986, que préalablement à la décision renouvelant pour la troisième et dernière période d'un an sa mise en disponibilité d'office ou, en application de l'article 47, préalablement à la décision admettant d'office à la retraite l'agent. 6. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue du congé de longue durée accordé à Mme B..., La Poste a saisi le comité médical départemental afin que ce dernier, conformément aux dispositions précitées de l'article 7 du décret du 14 mars 1986, se prononce sur son éventuelle réintégration. Par la décision contestée du 11 octobre 2017, La Poste n'a pas prononcé la mise à la retraite d'office de l'intéressée mais son placement en disponibilité d'office à l'issue de son congé de longue durée, dont Mme B... n'établit ni même n'allègue qu'il lui aurait été accordé pour une maladie contractée dans l'exercice des fonctions. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la requérante, son placement en disponibilité d'office pour une première période de six mois à l'issue de son congé de longue durée ne requérait pas l'avis préalable de la commission de réforme en application des dispositions précitées. Dès lors, le moyen tiré d'un vice de procédure du fait de l'absence de saisine de la commission de réforme doit être écarté. 7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 9 du décret du 14 mars 1986, dans sa rédaction applicable : " Le comité médical supérieur, saisi par l'autorité administrative compétente, soit de son initiative, soit à la demande du fonctionnaire, peut être consulté sur les cas dans lesquels l'avis donné en premier ressort par le comité médical compétent est contesté. (...) " 8. Si l'agent a épuisé ses droits à congé de longue durée et ne peut reprendre le service en raison de l'avis défavorable du comité médical, la circonstance que l'administration, à son initiative ou à celle de l'agent, ait saisi le comité médical supérieur ne fait pas obstacle à ce que l'intéressé soit placé, par une décision à caractère provisoire et sous réserve de régularisation ultérieure par une décision définitive statuant sur sa situation y compris pendant la période couverte par la décision provisoire, en disponibilité d'office. 9. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, en particulier des nombreux courriers adressés à son administration faisant état de la date du 12 novembre 2017, et il n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté par la requérante, que Mme B... avait épuisé ses droits à congé de longue durée à compter de cette date. Dès lors, La Poste était tenue de la placer à compter de cette date dans une position statutaire régulière et pouvait ainsi, compte tenu de l'avis d'inaptitude à tout emploi émis par le comité médical, prononcer sa mise en disponibilité d'office, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le comité médical supérieur, dont Mme B... n'a au demeurant demandé la saisine que le 4 novembre 2017, postérieurement à la notification de la décision attaquée, ne se soit pas encore prononcé. 10. En troisième lieu, le tribunal administratif a écarté les autres moyens de légalité externe invoqués par Mme B..., par des motifs appropriés figurant aux points 7 et 8 du jugement attaqué, qu'il y a lieu d'adopter en appel. 11. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par la décision contestée du 11 octobre 2017, Mme B... a été placée en disponibilité pour raison de santé dans l'attente de l'instruction de son dossier de retraite pour invalidité à la suite de l'avis émis le 6 octobre 2017 par le comité médical départemental, qui a conclu à l'inaptitude totale et définitive de l'intéressée à toutes fonctions. Cet avis, qui confirme un précédent avis émis par la même instance le 15 septembre 2017, se fonde notamment sur l'expertise réalisée le 12 juin 2017 par un médecin psychiatre des hôpitaux qui indique qu'en raison du conflit existant depuis plusieurs années au sein de son milieu professionnel, une tentative de reprise n'est pas opportune et pourrait s'avérer dangereuse pour l'équilibre actuel de Mme B..., avant de conclure à l'inaptitude totale et définitive de l'intéressée à toutes fonctions. Cet avis a été confirmé par le comité médical supérieur, saisi à la demande de Mme B..., dans sa séance du 16 octobre 2018. Les certificats rédigés à la demande de la requérante par un autre médecin psychiatre des hôpitaux en avril et novembre 2017, s'ils minimisent les risques encourus en cas de reprise à temps partiel thérapeutique et préconisent cette dernière, ne sont pas de nature à remettre en cause ces avis du comité médical et du comité médical supérieur. Il en va de même des certificats rédigés en termes généraux par un médecin généraliste en novembre 2017 et février 2019, qui se bornent à indiquer que l'intéressée " semble apte à reprendre son activité professionnelle à mi-temps thérapeutique " ainsi que de celui établi le 1er septembre 2016 par le psychiatre qui la suit, attestant que l'état de santé de Mme B... lui permet de reprendre son activité professionnelle en mi-temps thérapeutique pour une durée de trois mois à compter du 26 septembre 2016 tout en précisant qu'elle doit poursuivre ses soins dans le cadre d'une prise en charge régulière. Enfin, si Mme B... verse aux débats les avis d'aptitude émis en 2015 et 2016 par le médecin du travail, le dernier avis émis le 13 novembre 2017 par le médecin du travail confirme son inaptitude. Dans ces conditions, en se fondant sur l'avis émis par le comité médical de La Poste du 6 octobre 2017 retenant l'inaptitude totale et définitive de Mme B... à l'exercice de toutes fonctions pour placer d'office cette dernière en disponibilité pour raison de santé dans l'attente de l'instruction de son dossier de retraite pour invalidité, le directeur régional de La Poste de Provence-Marseille n'a pas commis d'erreur dans l'appréciation de la situation de l'intéressée. 12. Il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a refusé de faire droit à sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 11 octobre 2017 par laquelle le directeur régional du réseau La Poste de Provence-Marseille l'a placée en disponibilité d'office pour raison de santé pour une durée de six mois à compter du 12 novembre 2017 afin de permettre l'instruction de son dossier de retraite pour invalidité. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de La Poste, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme demandée par La Poste, au même titre. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de La Poste présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à La Poste. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente-assesseure, - Mme Balaresque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N°19MA04940 2
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Vu la procédure suivante Procédure contentieuse antérieure : M. C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite par laquelle La Poste a rejeté sa demande du 26 avril 2018 de compensation financière pour les jours de congés annuels non pris du 1er janvier 2015 au 31 janvier 2018, d'enjoindre à La Poste de procéder à la liquidation et au versement de la somme due au titre de ces congés annuels, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de condamner La Poste à lui verser la somme de 6 000 euros au titre d'un préjudice moral et de mettre à la charge de La Poste la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par jugement n° 1806391 du 1er avril 2020, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision implicite par laquelle La Poste a rejeté la demande du 26 avril 2018 en tant qu'elle refusait le versement d'une compensation financière pour 21,5 jours de congés annuels non pris, enjoint à La Poste de verser à M. C... une compensation financière correspondant à 21,5 jours de congés annuels dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et mis à la charge de La Poste le paiement d'une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 2 juin 2020, M. A... C..., représenté par Me Semeriva, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du 1er avril 2020 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande de versement d'une indemnité compensatrice au titre de congés annuels non pris pour l'année 2016, qu'il a limité à 20 jours cette indemnité au titre de l'année 2017 et à 1,5 jours au titre de l'année 2018 ; 2°) de condamner La Poste à lui verser une compensation financière équivalente à 30 jours au titre des années 2016 et 2017 et 2,5 jours au titre de 2018 ; 3°) de mettre à la charge de La Poste le paiement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la durée de droit au report de quinze mois ne lui est pas opposable dès lors, d'une part, qu'il a été mis à la retraite à compter du 1er février 2018 et n'a pu, par suite, reprendre son service et, d'autre part, qu'elle doit être reportée à l'expiration des droits à congés de maladie ; - il a subi un préjudice moral. Par un mémoire en défense enregistré le 31 décembre 2020, La Poste, représentée par Me Freichet, demande à la Cour : 1°) de rejeter la requête d'appel de M. C... ; 2°) de mettre à la charge de M. C... le paiement d'une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 84-972 du 26 octobre 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Semeriva pour M. C... et de Me Freichet pour La Poste. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., cadre professionnel au sein de La Poste, a été placé en congé de maladie du 21 janvier 2015 au 31 janvier 2018 puis admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er février 2018. Par une lettre du 26 avril 2018, réceptionnée le 30 avril 2018, il a présenté une demande tendant au versement d'une indemnité compensatrice correspondant à 92,5 jours au titre des congés payés non pris de 2015 au 31 janvier 2018. Sa demande a été implicitement rejetée. M. C... interjette appel du jugement n° 1806391 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision implicite par laquelle La Poste a rejeté la demande du 26 avril 2018 et enjoint à La Poste de verser à M. C... une compensation financière correspondant à 21,5 jours de congés annuels, en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande de versement d'une indemnité compensatrice au titre de congés annuels non pris pour l'année 2016, qu'il a limité à 20 jours cette indemnité au titre de l'année 2017 et à 1,5 jours au titre de l'année 2018. 2. En premier lieu, aux termes de l'article 5 du décret du 26 octobre 1984 relatif aux congés annuels des fonctionnaires de l'Etat : " Le congé dû pour une année de service accompli ne peut se reporter sur l'année suivante, sauf autorisation exceptionnelle donnée par le chef de service. / Un congé non pris ne donne lieu à aucune indemnité compensatrice ". 3. Aux termes de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 relative à certains aspects de l'aménagement du temps de travail : " 1. Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'au moins quatre semaines, conformément aux conditions d'obtention et d'octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales. 2. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail. ". En application de la partie B de l'annexe I de cette directive, le délai de transposition de l'article 7 était fixé au 23 mars 2005. 4. Selon une jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans son arrêt du 6 novembre 2018 " Stadt Wuppertal " et " Volker Willmeroth " (C-569/16 et C-570/16), lorsque la relation de travail prend fin, la prise effective du congé annuel payé n'est plus possible. Afin de prévenir que, du fait de cette impossibilité, toute jouissance par le travailleur de ce droit, même sous forme pécuniaire, soit exclue, l'article 7, paragraphe 2, de la directive 2003/88/CE prévoit que le travailleur a droit à une indemnité financière, qui n'est soumise à aucune autre condition que celle tenant au fait, d'une part, que la relation de travail a pris fin, et, d'autre part, que le travailleur n'a pas pris tous les congés annuels auxquels il avait droit à la date où cette relation a pris fin. Ce droit est conféré directement par cette directive et ne saurait dépendre de conditions autres que celles qui y sont explicitement prévues. Les dispositions de l'article 7, paragraphe 2, de la directive 2003/88/CE remplissent ainsi les conditions requises pour produire un effet direct. En outre, dans son arrêt rendu le 6 novembre 2018 " Kreuziger " (C-619/16), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 7, paragraphe 2, de la directive 2003/88/CE s'oppose à des législations ou réglementations nationales qui prévoient que, lors de la fin de la relation de travail, aucune indemnité financière au titre de congés annuels payés non pris n'est versée au travailleur qui n'a pas été en mesure de prendre tous les congés annuels auxquels il avait droit avant la fin de cette relation de travail. Par suite, les dispositions de l'article 5 du décret du 26 octobre 1984, qui ne prévoient le report des congés non pris au cours d'une année de service qu'à titre exceptionnel, sans réserver le cas des agents qui ont été dans l'impossibilité de prendre leurs congés annuels en raison d'un congé de maladie, et s'opposent à l'indemnisation de ces congés lorsqu'il est mis fin à la relation de travail, sont incompatibles dans cette mesure avec les dispositions de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003. 5. En l'absence de dispositions législatives ou réglementaires fixant ainsi une période de report des congés payés qu'un agent s'est trouvé, du fait d'un congé maladie, dans l'impossibilité de prendre au cours d'une année civile donnée, le juge peut en principe considérer, afin d'assurer le respect des dispositions de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003, que ces congés peuvent être pris au cours d'une période de quinze mois après le terme de cette année. La CJUE a en effet jugé, dans son arrêt C-214/10 du 22 novembre 2011, qu'une telle durée de quinze mois, substantiellement supérieure à la durée de la période annuelle au cours de laquelle le droit peut être exercé, est compatible avec les dispositions de l'article 7 de la directive. Toutefois ce droit au report s'exerce, en l'absence de dispositions, sur ce point également, dans le droit national, dans la limite de quatre semaines prévue par cet article 7. 6. Si le droit à indemnisation financière au titre des congés payés non pris pendant un congé de maladie d'un agent dont la relation de travail a pris fin est conditionné par la circonstance que la cessation de la relation de travail soit intervenue dans le délai de 15 mois à compter du terme de l'année civile au cours de laquelle les congés sont dus, il n'est, en revanche, pas subordonné à la présentation d'une demande d'indemnisation dans lesdits 15 mois, cette demande restant régie par les seules règles de prescription des créances. 7. Il résulte de l'instruction qu'à la date de la fin de la relation de travail, soit le 1er février 2018, date de mise à la retraite, le droit au report des congés annuels de M. C... au titre des années 2016 à 2018 n'était, en application de ce qui a été dit précédemment, pas expiré. Par suite, M. C..., quand bien même il n'aurait présenté sa demande indemnitaire que le 26 avril 2018, pouvait prétendre au bénéfice d'une indemnisation maximale de 20 jours par année civile, soit 20 jours au titre de l'année 2016, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, 20 jours en 2017 et 1,5 jours du 1er au 31 janvier 2018 comme ces derniers l'ont, en revanche, à juste titre retenu. 8. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a limité son droit à indemnisation à 21,5 jours au lieu de 41,5 jours. Il suit de là que le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions présentées par M. C... au titre de l'année 2016 et que La Poste doit, en conséquence, verser au requérant, outre la compensation financière équivalent à 21,5 jours de congés annuels portant sur la période du 1er janvier 2017 au 31 janvier 2018, une compensation financière équivalant à 20 jours de congés annuels au titre de l'année 2016, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. 9. En second lieu, si M. C... sollicite une indemnisation au titre d'un préjudice moral, il n'assortit ses conclusions d'aucune précision permettant d'apprécier le bien-fondé d'un tel chef de préjudice. Par suite, cette demande ne peut être que rejetée. Sur les frais liés au litige : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. C..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à La Poste la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de La Poste le versement à M. C... de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions précitées. DECIDE : Article 1er : La décision implicite par laquelle La Poste a rejeté la demande du 26 avril 2018 de M. C... est annulée en tant qu'elle lui refuse le versement d'une compensation financière pour 41,5 jours de congés annuels non pris. Article 2 : Il est enjoint à La Poste de verser à M. C... une compensation financière correspondant à 41,5 jours de congés annuels. Pour la fraction de cette somme non versée à M. C... en exécution du jugement n° 1806391 du tribunal administratif de Marseille du 1er avril 2020, La Poste devra s'en acquitter dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : Le jugement n° 1806391 du tribunal administratif de Marseille du 1er avril 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 4 : La Poste versera à M. C... la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à La Poste. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente assesseure, - M. Mérenne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N° 20MA01949 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, par une requête enregistrée sous le n° 1701487, d'annuler la décision implicite de refus de protection fonctionnelle opposée à sa demande du 3 décembre 2016 et, d'autre part, par une requête enregistrée sous le n° 1703124, de condamner La Poste à lui verser la somme globale de 63 587,10 euros en réparation des préjudices financiers et moral qu'elle estime avoir subis. Par un jugement n° 1701487 et 1703124 du 21 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté les requêtes de Mme A.... Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 9 août 2019, Mme A..., représentée par Me Constans, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 juin 2019 ; 2°) d'annuler la décision implicite par laquelle sa demande de protection fonctionnelle en date du 3 décembre 2016 a été rejetée ; 3°) de condamner La Poste à lui verser la somme globale de 63 587,10 euros au titre des préjudices moral et financier qu'elle estime avoir subis ; 4°) de mettre à la charge de La Poste le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le tribunal a omis de statuer sur les moyens tirés, d'une part, de l'absence d'exécution spontanée du jugement rendu le 29 novembre 2013, d'autre part, du défaut d'affectation sur un emploi correspondant à son grade et enfin, sur le refus de prise en charge de son dossier par la médiatrice de la vie au travail ; - elle a été victime d'un harcèlement moral de 2009 à 2017 et d'un manquement de La Poste à son obligation de sécurité et devait, dès lors, bénéficier de la protection fonctionnelle ; - elle a subi un préjudice financier tenant à la perte d'une indemnité de fonctions pendant six trimestres, à une perte de rémunération du fait d'un refus de travail à temps plein à compter des trois ans de sa fille et à la perte de part variable, ainsi qu'un préjudice moral lié au harcèlement moral dont elle a été victime. Par un mémoire en défense enregistré le 14 décembre 2020, La Poste, représentée par Me Moretto, demande à la Cour : 1°) de rejeter la requête de Mme A... ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... le paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Constans pour Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme A... est fonctionnaire de La Poste depuis le 28 mai 1998. Estimant avoir fait l'objet, entre 2009 et 2017, d'un harcèlement moral, elle a adressé à son employeur, le 3 décembre 2016, une demande d'octroi de la protection fonctionnelle. Elle a, en parallèle, présenté, le 31 mars 2017, une demande tendant à l'indemnisation des préjudices matériel et moral qu'elle estime avoir subis du fait de la gestion de sa carrière et d'un harcèlement moral. Ces demandes ont été implicitement rejetées. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler la décision implicite de refus de protection fonctionnelle opposée à sa demande du 3 décembre 2016 et, d'autre part, de condamner La Poste à lui verser la somme globale de 63 587,10 € en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis. Mme A... demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 21 juin 2019 par lequel ledit tribunal a rejeté ses requêtes. Sur la régularité du jugement : 2. Si Mme A... fait valoir que le tribunal aurait omis de répondre à certains de ses moyens tels que celui tiré de l'absence d'exécution spontanée du jugement rendu le 29 novembre 2013 par le tribunal administratif de Montpellier, lequel a annulé la délibération du jury du 11 octobre 2010 ayant refusé à l'intéressée la validation de ses acquis professionnels, celui tenant à son défaut d'affectation sur un emploi correspondant à son grade ou celui tenant à ce que la médiatrice de la vie au travail avait refusé d'examiner son dossier au motif de l'engagement concomitant d'une procédure contentieuse, il ne s'agissait en réalité que d'arguments à l'appui de son moyen tendant à démontrer qu'elle avait fait l'objet d'un harcèlement moral justifiant, d'une part, l'octroi de la protection fonctionnelle et, d'autre part, l'engagement de la responsabilité de l'administration à son égard. Le tribunal a répondu de manière suffisamment motivée à ce moyen. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation du refus de protection fonctionnelle : 3. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 alors applicable : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. ". Aux termes de l'article 11 de la même loi, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " La collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire contre les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu'une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté ". Ces dispositions établissent à la charge de l'administration une obligation de protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d'intérêt général. Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé, mais aussi d'assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu'il a subis. La mise en œuvre de cette obligation peut notamment conduire l'administration à assister son agent dans l'exercice des poursuites judiciaires qu'il entreprendrait pour se défendre. Il appartient dans chaque cas à l'autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce. 4. D'autre part, il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. 5. Mme A... fait valoir qu'elle a été victime de harcèlement moral entre 2009 et 2017 et plus précisément, que de janvier 2009 à décembre 2010, son supérieur hiérarchique, ne souhaitant pas qu'elle exerce ses fonctions à temps partiel, a exercé des pressions pour qu'elle sollicite un travail à temps plein, faisait preuve à son égard de critiques, dénigrait son travail, l'accablait par une charge de travail correspondant en réalité à un temps plein et a fait en sorte qu'elle soit évincée du service à la suite d'une part, de l'absence de validation de ses acquis professionnels et, d'autre part, de la suppression de l'un des trois postes de chef de produit. Elle soutient également que, de janvier 2011 à mai 2011, on lui a fait des propositions de postes qu'elle a acceptées mais qui n'ont été suivies d'aucun effet, qu'alors qu'elle aurait dû, le jour des trois ans de sa fille, reprendre son travail à temps plein, sa demande a été refusée, que son bureau était petit et qu'elle ne disposait pas de matériel informatique récent et adapté. Elle soutient également que de septembre 2014 à septembre 2016, elle a été affectée sur des emplois non pérennes et s'est vue confier des tâches inférieures à celles normalement dévolues aux agents de son grade, et qu'enfin, de septembre 2016 à janvier 2017, elle n'a été affectée sur aucun poste et a été contrainte de rester à son domicile. 6. S'agissant, en premier lieu, de la période de janvier 2009 à décembre 2010 au cours de laquelle la requérante exerçait ses fonctions en qualité de chef de produit marketing direct à Montpellier à la direction commerciale du golfe du Lion, Mme A... ne produit aucune pièce susceptible de faire présumer que son supérieur hiérarchique aurait adopté une attitude négative à son égard en raison de l'exercice de ses fonctions à temps partiel ni qu'il aurait exercé une pression pour qu'elle sollicite un temps plein. Elle ne verse, par ailleurs, aucun témoignage permettant de faire présumer les critiques et le dénigrement dont elle allègue avoir fait l'objet, pas plus qu'une charge de travail excessive au regard de sa quotité de travail. Par ailleurs, s'il est constant qu'à la suite d'un avis du comité technique paritaire du 22 novembre 2010, un poste de chef de produit sur les trois alors pourvus a été supprimé, il n'est pas contesté que cette réorganisation est intervenue dans l'intérêt du service et qu'après appel à candidatures auquel Mme A... a été invitée à participer, les deux agents retenus pour exercer ces fonctions bénéficiaient du grade 3.3 correspondant au poste au lieu du grade 3.2 alors détenu par l'appelante. En outre, s'il est constant que, par une délibération du 11 octobre 2010, le jury appelé à se prononcer sur la candidature de Mme A... au titre de la validation des acquis de son expérience professionnelle était, en méconnaissance du principe d'impartialité, présidé par le supérieur hiérarchique de la requérante, lequel avait émis un avis défavorable à sa demande, cette seule circonstance, retenue par jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 29 novembre 2013, n'est, au titre de la période considérée, pas de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à l'égard de la requérante. Enfin, si l'intéressée a, au titre de cette période, saisi la médiatrice de la vie au travail, laquelle a refusé de se prononcer sur son dossier au motif qu'une procédure contentieuse était pendante devant le tribunal administratif de Montpellier, cette circonstance objective, n'est pas non plus de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement de La Poste à l'égard de Mme A.... 7. S'agissant, en deuxième lieu, de la période de janvier 2011 à fin août 2014, il résulte de l'instruction que l'intéressée a été placée en congé de maladie pendant plus de 3 ans du 13 mai 2011 à la fin du mois d'août 2014, période au cours de laquelle elle ne saurait donc prétendre avoir été victime d'un harcèlement moral. Pendant les mois de l'année 2011 au cours desquels la requérante n'était pas placée en congé de maladie, si cette dernière a été invitée à se positionner sur plusieurs postes vacants et en a accepté certains, il résulte de l'instruction que ces propositions n'étaient, ainsi que l'ont à bon droit estimé les premiers juges, pas constitutives d'offres fermes, la circonstance que la requérante n'ait finalement pas été retenue sur ces postes n'étant pas de nature à faire présumer à son encontre l'existence d'un harcèlement moral. Par ailleurs, si la requérante soutient que sa demande de retour à l'exercice d'un temps plein a été refusée alors qu'elle aurait dû être automatiquement satisfaite dès les trois ans de sa fille, soit le 14 mars 2011, il résulte de l'instruction, d'une part, que celle-ci n'a pas été refusée mais simplement reportée au 1er juin 2011, après accomplissement, dans l'intérêt du service et conformément aux usages en vigueur au sein de La Poste, d'une durée de préavis de deux mois et, d'autre part, que sa demande de placement en temps partiel avait été acceptée en raison, d'une part, du fait qu'elle élevait un enfant de moins de trois ans et, d'autre part, et quand bien même n'auraient pas été produits les certificats médicaux y afférents, du fait qu'elle devait s'occuper d'un ascendant à charge. Enfin, si Mme A... soutient qu'au cours de cette période, elle aurait eu des missions d'un niveau inférieur à celles normalement confiées à un agent de son grade et se serait vue octroyer un petit bureau sans matériel informatique récent et sans téléphone, les pièces produites à cet égard, soit une photo d'un poste de travail contestée par La Poste, sont également insuffisantes pour présumer l'existence d'un harcèlement moral. 8. S'agissant, en troisième lieu, de la période de septembre 2014 à septembre 2016, il résulte de l'instruction que l'intéressée a été affectée, alors qu'il n'est pas établi ni même d'ailleurs allégué par la requérante que des postes vacants correspondant à ses aptitudes professionnelles et médicales auraient été vacants, sur deux postes en " immersion ". Au titre de la première de ces deux périodes, Mme A..., alors chargée d'études contrôle de gestion à Béziers-Vendres, se borne à produire en cause d'appel l'attestation d'un ancien collègue de travail faisant état de ce qu'elle était chargée notamment de traiter et contrôler les ordres de réexpédition ainsi que les réclamations des clients. Toutefois, il ne résulte d'aucune pièce telle qu'un document interne de La Poste, que ces tâches seraient habituellement confiées à des agents d'un grade inférieur au sien. Par ailleurs, au titre de la seconde de ces périodes, il résulte de l'instruction que la requérante, alors affectée sur un poste au sein de l'établissement de Narbonne, s'est vue confier essentiellement une mission de gestion du déploiement FACTEO ainsi que des missions, qu'elle n'a au demeurant que partiellement accomplies ainsi que cela résulte du bilan réalisé en fin de période, dans le domaine des ressources humaines et de la communication. S'il apparaît que Mme A... a, alors que le médecin du travail avait relevé, à l'issue de son congé de longue durée, une inaptitude sur un emploi de chef de produit ou, plus généralement, sur un emploi de type commercial, accompli quelques missions de découverte des activités commerciales, celles-ci, de nature principalement administrative, ne présentaient pas un caractère prépondérant. 9. S'agissant, en dernier lieu, de la période de septembre 2016 à janvier 2017, il est constant que Mme A... n'a été affectée sur aucun poste. Il résulte toutefois de l'instruction que cette circonstance s'explique par le processus de réévaluation par le médecin du travail, au cours des mois d'octobre et novembre 2016, de l'aptitude professionnelle de l'intéressée à l'exercice des fonctions précédemment exercées en qualité de chef de produit et de toutes fonctions. Par ailleurs, s'il n'est pas contesté qu'un poste avait été proposé à Mme A... à la suite d'une entrevue qui s'est déroulée le 14 novembre 2016, la circonstance qu'elle n'ait finalement pas été retenue pour ce poste n'est, et alors qu'il résulte de l'instruction que la requérante a été accompagnée dans sa démarche de reclassement professionnel et de réorientation au sein de l'éducation nationale, pas de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. 10. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a estimé qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que la requérante avait été victime d'agissements répétés caractérisant un harcèlement moral ou d'un manquement de La Poste à son obligation de sécurité et a, par suite, rejeté les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de refus de protection fonctionnelle. En ce qui concerne les conclusions indemnitaires : 11. En premier lieu, si Mme A... sollicite une indemnisation au titre, d'une part, de la perte d'une indemnité de chargée de fonctions pendant six trimestres entre 2009 et la fin de l'année 2010, d'autre part, de la perte de rémunération du fait du refus de passage à temps plein à compter du 14 mars 2011 et, enfin, d'une perte de part variable entre 2009 et 2017, elle n'assortit ces conclusions d'aucun élément permettant d'en apprécier le bien-fondé et le montant. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont écarté les conclusions indemnitaires présentées à ce titre. 12. En second lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 10, que Mme A... n'est pas fondée à prétendre à une indemnisation au titre du préjudice moral qu'elle estime avoir subi en conséquence d'un harcèlement moral. Sur les frais liés au litige : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que La Poste, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Mme A... la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme A... le versement à La Poste d'une quelconque somme sur le fondement des dispositions précitées. DECIDE : Article 1er : La requête présentée par Mme A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par La Poste en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à La Poste. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente-assesseure, - M. Mérenne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N° 19MA03793 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société CSA Vence a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 11 avril 2018 du préfet des Alpes-Maritimes refusant de lui délivrer l'autorisation de défricher une superficie de 41 ares et 13 centiares sur les parcelles cadastrées section BW nos 10, 11, 12, 20, 21, 25, 28 et 55, à Vence, et la décision du 9 juillet 2018 rejetant son recours gracieux. Par un jugement n° 1803856 du 20 octobre 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 19 décembre 2020, le 3 janvier et le 14 avril 2022, la société CSA Vence, représentée par la SELAS Lawtec, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 20 octobre 2020 du tribunal administratif de Nice ; 2°) à titre principal, d'annuler les décisions du 11 avril et du 9 juillet 2018 du préfet des Alpes-Maritimes ; 3°) à titre subsidiaire, d'abroger partiellement ces décisions, en tant qu'elles portent sur la création d'une piste de 148 mètres de long ; 4°) de mettre la somme de 5 000 euros à la charge de l'État en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé, dès lors que le raisonnement retenu par le tribunal est inexact ; - le préfet a fait une inexacte application du 8° de l'article L. 341-5 du code forestier ; - il a commis une erreur de fait en retenant que le terrain d'assiette du projet de défrichement comprenait une falaise ; - il n'existe pas d'activités récréatives pouvant constituer un motif de refus. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2022, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société CSA Vence ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code forestier ; - le code de justice administrative. Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Zago, représentant la société CSA Vence. Considérant ce qui suit : 1. La société CSA Vence fait appel du jugement du 20 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 avril 2018 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer l'autorisation de défricher une superficie de 41 ares et 13 centiares sur les parcelles cadastrées section BW nos 10, 11, 12, 20, 21, 25, 28 et 55, à Vence, ainsi que le rejet de son recours gracieux en date du 9 juillet 2018. Sur la régularité du jugement : 2. D'une part, la critique du bien-fondé du jugement attaqué est sans incidence sur sa régularité. 3. D'autre part, la décision contestée ne retient pas qu'une falaise située à proximité aurait été comprise dans l'assiette du projet de défrichement. A supposer que la société CSA Vence, par des écritures confuses, ait entendu invoquer un moyen tiré de l'erreur de fait qu'aurait commise le préfet en retenant le contraire, ce moyen était inopérant. Le tribunal n'était pas tenu d'y répondre. Sur la régularité du jugement : 4. L'article L. 341-5 du code forestier prévoit que : " L'autorisation de défrichement peut être refusée lorsque la conservation des bois et forêts ou des massifs qu'ils complètent, ou le maintien de la destination forestière des sols, est reconnu nécessaire à une ou plusieurs des fonctions suivantes : / (...) / A l'équilibre biologique d'une région ou d'un territoire présentant un intérêt remarquable et motivé du point de vue de la préservation des espèces animales ou végétales et de l'écosystème ou au bien-être de la population ". 5. En premier lieu, il résulte des termes mêmes de cet article que le respect de ces conditions s'apprécie à l'échelle du bois ou de la forêt auquel appartiennent les parcelles d'assiette du projet de défrichement, et non au regard du seul projet pour lequel l'autorisation a été demandée comme le soutient la société requérante. 6. En deuxième lieu, ainsi que l'a retenu le tribunal administratif, les parcelles d'assiette du projet sont situées en bordure d'un espace boisé classé, dans un corridor à préserver identifié par le schéma régional de cohérence écologique, dans un espace naturel identifié par la directive territoriale d'aménagement, et dans une zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique (ZNIEFF) de type 1. Contrairement à ce que soutient la société CSA Vence, l'appartenance à une ZNIEFF de type 1 est un élément important à prendre en compte, dès lors que ces zones identifient des secteurs d'intérêt écologique particulièrement remarquables, appelant une protection renforcée. 7. En troisième lieu, le diagnostic environnemental précédemment établi pour un projet de collège, constamment invoqué par la société CSA Vence elle-même, indique que " les inventaires faunistiques ont mis en évidence un cortège d'espèces relativement varié, classique pour ce type d'habitat forestier et essentiellement composé d'espèces communes. Plusieurs espèces d'intérêt ont cependant été mises en évidence. Ces espèces sont liées à la continuité écologique du site avec la vallée de la Cagnes. Le site constitue une zone propice aux reptiles, aux rapaces (diurnes et nocturnes) et aux chauves-souris. Ces espèces au bout de la chaîne alimentaire démontrent la qualité écologique des milieux naturels du périmètre d'étude ". Le même diagnostic indique plus loin que : " les impacts potentiels du projet [de collège] sur les espèces sont forts sur une espèce végétale (Spéculaire en faux), assez forts pour un rapace diurne (Circaète Jean-le-Blanc) et une espèce de chauve-souris (Petit rhinolophe), moyens pour un reptile (Couleuvre d'Esculape) et un rapace nocturne (Grand-duc d'Europe), et faibles pour dix autres espèces animales ", confirmant ainsi la présence de ces espèces sur les parcelles en question. La société CSA Vence ne peut utilement se prévaloir, à l'appui d'une demande d'autorisation de défrichement, de mesures de compensation envisagées à l'appui d'une demande d'autorisation d'urbanisme pour un projet abandonné portant sur la construction d'un collège. Le procès-verbal réalisé par la direction départementale des territoires et de la mer confirme le diagnostic environnement produit par la société CSA Vence en concluant que la zone concernée présente différents types de milieux remarquables du point de vue de la biodiversité, susceptibles d'offrir un habitat privilégié pour plusieurs espèces protégées. La falaise de la Cagne, située à proximité, héberge de multiples espèces d'oiseaux et de chauves-souris, dont le domaine vital ne se limite pas à la falaise où se situent leurs habitats, et qui doivent également être prises en compte. 8. Les éléments examinés aux points 6 et 7 suffisent par eux-mêmes pour retenir que le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas fait une inexacte application du 8° de l'article L. 341-5 du code forestier en refusant l'autorisation demandée, indépendamment de l'existence ou non, au sein de ces espaces naturels, d'activités récréatives susceptibles de concourir au bien-être de la population. 9. En quatrième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 3, l'auteur de la décision contestée n'a pas considéré que l'emprise de l'autorisation de défrichement comprendrait une falaise. Le moyen tiré de ce qu'il aurait commis une erreur de fait sur ce point est donc inopérant. 10. Enfin, la circonstance qu'une entreprise tierce ait pu réaliser une piste temporaire sur les mêmes parcelles sans demander d'autorisation de défrichement est sans incidence sur la légalité de la décision contestée, tant à la date à laquelle elle a été prise qu'en tout état de cause, à la date du présent arrêt. 11. Il résulte de ce qui précède que la société CSA Vence n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 avril 2018 du préfet des Alpes-Maritimes. Elle n'est pas davantage fondée à demander, à titre subsidiaire, à la Cour d'en prononcer l'abrogation. Sur les frais liés au litige : 12. L'État n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la société CSA Vence au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de la société CSA Vence est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société CSA Vence et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente de la cour, - Mme Vincent, présidente assesseure, - M. Mérenne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. 2 No 20MA04712
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Sauvian à lui verser la somme globale de 133 380,25 euros en réparation des préjudices matériel et moral causés par son éviction illégale du service par décision du 6 mars 2014. Par jugement n° 1703293 du 19 juillet 2019, le tribunal administratif de Montpellier a condamné la commune de Sauvian à verser à Mme B... la somme de 6 749 euros au titre de la perte de congés payés et du préjudice moral et a rejeté le surplus des conclusions de la requête. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 11 septembre 2019, un mémoire en réplique et des pièces complémentaires enregistrés les 9 juillet 2020 et 9 juin 2022, Mme B..., représentée par Me Dillenschneider, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 juillet 2019 en tant qu'il a rejeté les conclusions présentées au titre des troubles dans les conditions d'existence ; 2°) de condamner la commune de Sauvian à lui verser la somme de 87 037,50 euros au titre de ses troubles dans les conditions d'existence ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Sauvian le paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que : - l'appel incident de la commune de Sauvian est irrecevable dès lors qu'il constitue un litige distinct de l'appel principal ; - elle a engagé, du fait de la décision d'éviction du 6 mars 2014, des frais de double résidence ainsi que des frais de déplacement et justifie avoir fait, en vain, toutes les démarches pour tenter de vendre ou de louer son appartement sis à Béziers et pour trouver un emploi à proximité de cette ville ; - son préjudice moral a fait l'objet d'une juste appréciation en première instance. Par un mémoire en défense et des pièces enregistrés les 24 avril 2020 et 27 avril 2020, la commune de Sauvian, représentée par Me Caudrelier, demande à la Cour : 1°) de réformer ce jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à Mme B... une indemnité de 6 749 euros ; 2°) de rejeter les conclusions indemnitaires présentées par Mme B... ; 3°) de mettre à la charge de Mme B... le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens soulevés au titre de l'appel principal ne sont pas fondés ; - elle présente un appel incident au titre de l'indemnité compensatrice pour congés payés dès lors que la demande présentée à ce titre par Mme B... était tardive et au titre du préjudice moral qui a fait l'objet d'une évaluation excessive par le Tribunal. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 85-1250 du 26 novembre 1985 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Caudrelier pour la commune de Sauvian. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ingénieur principal, a exercé les fonctions de directeur général des services au sein de la commune de Sauvian à compter du 1er novembre 2005. Par arrêtés en date du 6 mars 2014, le maire de ladite commune a, d'une part, décidé de mettre fin au détachement de l'intéressée dans les fonctions de directeur général de services au motif d'une perte de confiance et, d'autre part, procédé au retrait de la nouvelle bonification indiciaire ainsi que de la prime de responsabilité des emplois administratifs de direction. Par un arrêt du 7 février 2017 devenu définitif, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé lesdits arrêtés du 6 mars 2014 au motif de l'inexactitude matérielle des faits reprochés à Mme B.... Cette dernière a adressé à la commune de Sauvian, par lettre du 30 mars 2017, une demande tendant à l'indemnisation des préjudices qu'elle estimait avoir subis. Cette demande a été partiellement acceptée, au titre des pertes du régime indemnitaire, par décision du 24 mai 2017. Par un jugement du 19 juillet 2019, le tribunal administratif de Montpellier, après avoir donné acte du désistement de Mme B... au titre des pertes afférentes au régime indemnitaire, a condamné la commune de Sauvian à verser à cette dernière la somme de 6 749 euros au titre d'une indemnité compensatrice de congés payés non pris et d'un préjudice moral et rejeté le surplus des conclusions de la requête. Mme B... interjette appel de ce jugement en tant qu'il a refusé de faire droit aux conclusions indemnitaires présentées au titre des troubles dans les conditions d'existence. La commune de Sauvian forme un appel incident au titre des congés payés et du préjudice moral qu'elle a été condamnée à indemniser. Sur l'appel principal présenté par Mme B... : 2. Mme B... soutient qu'elle a subi, du fait de la décision d'éviction illégale dont elle a fait l'objet, des troubles dans ses conditions d'existence au titre, d'une part, de frais de double résidence dès lors qu'elle a été contrainte, alors qu'elle a conservé l'appartement qu'elle avait acquis à Béziers (Hérault), de louer d'autres appartements à proximité de ses lieux d'affectation à Sainte-Tulle (Alpes de Haute-Provence) du 15 septembre 2014 au 31 janvier 2016 et à Aramon (Gard) du 1er février 2016 au 31 décembre 2019, d'autre part, de frais de déplacement, deux week-ends par mois entre Béziers et chacune de ces villes et, enfin, de frais de déménagement. 3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que lorsque Mme B... a été recrutée à Sainte-Tulle puis à Aramon, son mari, dont il n'est pas contesté qu'il était alors retraité et dont le nom apparaît sur les contrats de location, a pu la suivre. Par ailleurs, la requérante n'allègue aucune circonstance de nature notamment familiale qui aurait pu justifier qu'elle conserve l'appartement acquis à Béziers. Si la requérante établit, par les pièces nouvellement produites en appel, avoir accompli des diligences pour vendre ou louer cet appartement, la circonstance que celui-ci n'ait pas été vendu ou loué entre 2014 et 2018, en dépit de ces diligences, ne présente pas de lien de causalité direct et certain avec la décision d'éviction illégale du 6 mars 2014. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Montpellier a, sans avoir ordonné de mesures d'instruction supplémentaires, rejeté ses conclusions indemnitaires présentées au titre de ses frais de double résidence. 4. En deuxième lieu, si Mme B... fait valoir qu'elle a dû exposer des frais de déplacement pour retourner un week-end sur deux à Béziers, elle n'établit, par aucune pièce du dossier, la réalité desdits déplacements. Par suite, elle n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a également rejeté les conclusions présentées à ce titre. 5. En troisième lieu, si la requérante sollicite une indemnisation au titre des frais de déménagement qu'elle aurait exposés le 21 janvier 2016, dans le cadre de son changement de poste de Sainte-Tulle à Aramon, ceux-ci ne présentent aucun lien de causalité avec la décision du 6 mars 2014 et ne sont, en tout état de cause, pas justifiés. Sur l'appel incident présenté par la commune de Sauvian : En ce qui concerne la recevabilité de l'appel incident : 6. Alors même que l'appel incident interjeté par la commune de Sauvian par un mémoire du 24 avril 2020 postérieur à la date de l'expiration du délai d'appel, porte sur des chefs de préjudices distincts de ceux faisant l'objet de l'appel principal interjeté par Mme B..., l'appel incident a pour cause le même fait générateur, concerne la même personne et, par suite, se rattache au même litige que celui soulevé par l'appel principal. Il est, par suite, et contrairement à ce que soutient la requérante, recevable. En ce qui concerne le bien-fondé de l'appel incident : S'agissant de l'indemnité compensatrice au titre de congés payés : 7. Aux termes de l'article 5 du décret du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux : " Sous réserve des dispositions de l'article précédent, le congé dû pour une année de service accompli ne peut se reporter sur l'année suivante, sauf autorisation exceptionnelle donnée par l'autorité territoriale. / Un congé non pris ne donne lieu à aucune indemnité compensatrice ". 8. Aux termes de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 relative à certains aspects de l'aménagement du temps de travail : " 1. Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'au moins quatre semaines, conformément aux conditions d'obtention et d'octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales. 2. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail. ". En application de la partie B de l'annexe I de cette directive, le délai de transposition de l'article 7 était fixé au 23 mars 2005. 9. Selon une jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans son arrêt du 6 novembre 2018 " Stadt Wuppertal " et " Volker Willmeroth " (C-569/16 et C-570/16), lorsque la relation de travail prend fin, la prise effective du congé annuel payé n'est plus possible. Afin de prévenir que, du fait de cette impossibilité, toute jouissance par le travailleur de ce droit, même sous forme pécuniaire, soit exclue, l'article 7, paragraphe 2, de la directive 2003/88/CE prévoit que le travailleur a droit à une indemnité financière, qui n'est soumise à aucune autre condition que celle tenant au fait, d'une part, que la relation de travail a pris fin, et, d'autre part, que le travailleur n'a pas pris tous les congés annuels auxquels il avait droit à la date où cette relation a pris fin. Ce droit est conféré directement par cette directive et ne saurait dépendre de conditions autres que celles qui y sont explicitement prévues. Les dispositions de l'article 7, paragraphe 2, de la directive 2003/88/CE remplissent ainsi les conditions requises pour produire un effet direct. En outre, dans son arrêt rendu le 6 novembre 2018 " Kreuziger " (C-619/16), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 7, paragraphe 2, de la directive 2003/88/CE s'oppose à des législations ou réglementations nationales qui prévoient que, lors de la fin de la relation de travail, aucune indemnité financière au titre de congés annuels payés non pris n'est versée au travailleur qui n'a pas été en mesure de prendre tous les congés annuels auxquels il avait droit avant la fin de cette relation de travail. Par suite, les dispositions de l'article 5 du décret du 26 novembre 1985, qui ne prévoient le report des congés non pris au cours d'une année de service qu'à titre exceptionnel, sans réserver le cas des agents qui ont été dans l'impossibilité de prendre leurs congés annuels en raison d'un congé de maladie, et s'opposent à l'indemnisation de ces congés lorsqu'il est mis fin à la relation de travail, sont incompatibles dans cette mesure avec les dispositions de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003. 10. En l'absence de dispositions législatives ou réglementaires fixant ainsi une période de report des congés payés qu'un agent s'est trouvé, du fait d'un congé maladie, dans l'impossibilité de prendre au cours d'une année civile donnée, le juge peut en principe considérer, afin d'assurer le respect des dispositions de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003, que ces congés peuvent être pris au cours d'une période de quinze mois après le terme de cette année. La CJUE a en effet jugé, dans son arrêt C-214/10 du 22 novembre 2011, qu'une telle durée de quinze mois, substantiellement supérieure à la durée de la période annuelle au cours de laquelle le droit peut être exercé, est compatible avec les dispositions de l'article 7 de la directive. Toutefois ce droit au report s'exerce, en l'absence de dispositions, sur ce point également, dans le droit national, dans la limite de quatre semaines prévue par cet article 7. 11. Si le droit à indemnisation financière au titre des congés payés non pris pendant un congé de maladie d'un agent dont la relation de travail a pris fin est conditionné par la circonstance que la cessation de la relation de travail soit intervenue dans le délai de 15 mois à compter du terme de l'année civile au cours de laquelle les congés sont dus, il n'est, en revanche, pas subordonné à la présentation d'une demande d'indemnisation dans ce délai, cette demande restant régie par les seules règles de prescription des créances. 12. Il résulte de l'instruction qu'à la date de son éviction du service, soit le 6 mars 2014, le droit au report des congés annuels de Mme B... au titre des années 2013 et 2014 n'était, en application de ce qui a été dit précédemment, pas expiré. Par suite, Mme B..., quand bien même elle n'aurait présenté sa demande indemnitaire que le 30 mars 2017, pouvait prétendre au bénéfice d'une indemnisation. Il suit de là que la commune de Sauvian n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à la demande d'indemnisation présentée par Mme B.... S'agissant du préjudice moral : 13. Les premiers juges, en évaluant à la somme de 4 000 euros le préjudice moral subi par la requérante du fait de la décision du 6 mars 2014 ont fait une juste appréciation de ce chef de préjudice au regard du motif d'illégalité de cette décision, de la période depuis laquelle cette dernière était directrice générale des services et du temps mis pour retrouver un emploi. 14. Il résulte de tout ce qui précède que tant l'appel principal formé par Mme B... que l'appel incident de la commune de Sauvian doivent être rejetés. Sur les frais liés au litige : 15. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par chacune des parties. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions incidentes présentées par la commune de Sauvian sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et à la commune de Sauvian. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente-assesseure, - M. Merenne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N° 19MA04297 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2022 par lequel le préfet du Nord a prononcé son transfert aux autorités allemandes, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Nord de procéder à l'enregistrement de sa demande d'asile ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir. Par un jugement n° 2200558 du 28 février 2022, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 28 mars 2022, M. B..., représenté par Me Tourbier, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2200558 du tribunal administratif d'Amiens ; 2°) d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2021 par lequel le préfet du Nord a ordonné son transfert aux autorités Allemandes ; 3°) d'enjoindre au préfet du Nord de prendre en charge l'instruction de sa demande d'asile ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1500 euros à verser à son conseil au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : - l'arrêté contesté est entachée d'un défaut d'examen particulier et sérieux de sa situation ; - il méconnaît les dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Par une ordonnance du 2 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 juin 2022. Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 28 avril 2022 refusant à M. B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C... B..., ressortissant ivoirien né en décembre 2003, est entré irrégulièrement sur le territoire français en 2016 selon ses déclarations. Il a déposé le 3 janvier 2022 une demande d'admission au séjour au titre de l'asile. Toutefois, la consultation par l'administration du fichier " Eurodac " a permis d'établir que M. B... était connu, en tant que demandeur d'asile, des autorités autrichiennes et allemandes qui avaient prélevé ses empreintes digitales les 17 novembre 2017 et 25 février 2018. Par un arrêté du 31 janvier 2022, le préfet du Nord a prononcé le transfert de M. B... aux autorités allemandes. M. B... relève appel du jugement du 28 février 2022 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. En premier lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet du Nord, pour prononcer le transfert de M. B... aux autorités allemandes a procédé à un examen particulier et attentif de la situation de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de M. B... doit être écarté. 3. En second lieu, aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / (...) ". 4. D'une part, la faculté laissée à chaque Etat membre, par l'article 17 du règlement du 26 juin 2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. 5. D'autre part, l'Allemagne étant membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet Etat membre est conforme aux exigences de la convention de Genève ainsi qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette présomption n'est toutefois pas irréfragable lorsqu'il y a lieu de craindre qu'il existe des défaillances systématiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant. Dans cette hypothèse, il appartient à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités allemandes répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. 6. M. B... déclare avoir quitté son pays en 2015 et être entré en France en 2016 après être passé par l'Italie. Il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance le 28 mars 2019 puis a bénéficié d'un contrat jeune majeur en décembre 2021. Toutefois, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet du Nord, pour prononcer le transfert de M. B... vers les autorités allemandes, a relevé que l'intéressé n'établit pas être exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Allemagne, qu'il ne peut se prévaloir d'une vie privée et familiale en France stable dès lors qu'il est entré récemment sur le territoire français. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'Allemagne ne procédera pas à l'examen de sa demande d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que cet Etat est membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En outre, la circonstance que M. B... a conclu un contrat jeune majeur le 20 décembre 2021 ne permet pas par elle-même de regarder l'arrêté ordonnant son transfert aux autorités allemandes comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste d'appréciation, au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, en ne faisant pas usage de la faculté qu'elles ouvrent de procéder à l'examen de sa demande d'asile. 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions de M. B... à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ne peuvent qu'être également être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera transmise au préfet du Nord. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. E... D..., premier-conseiller, - M. G... A..., premier-conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. F... Le conseiller le plus ancien, Signé : B. D... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Nathalie Roméro N°22DA00706 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme G... A... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 mars 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Nord, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation. Par un jugement n° 2104688 du 18 janvier 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 29 mars 2022, Mme A..., représentée par Me Danset-Vergoten, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2104688 du tribunal administratif de Lille ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Nord du 19 mars 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Nord, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " passeport talent ", ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation. Elle soutient que : S'agissant de l'arrêté pris dans son ensemble : - il est entaché d'une insuffisance de motivation ; - il est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ; S'agissant de la décision portant refus de séjour : - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle méconnaît les dispositions du 10. de l'article L. 511-4 et des articles R. 511-1 et R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, faute de saisine préalable du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ; - elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; S'agissant de la décision fixant le pays de destination : - elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense enregistré le 3 juin 2022, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens de la requête de Mme A... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 2 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 juin 2022. Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 10 mars 2022 accordant à Mme A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme G... A..., ressortissante ivoirienne née en 1995, est entrée en France le 23 janvier 2020, sous couvert d'un passeport national revêtu d'un visa court séjour, accompagnée de son époux. Le 31 juillet 2020, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " passeport talent ". Par un arrêté du 19 mars 2021, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Sur les moyens communs à l'ensemble des décisions contestées : 2. En premier lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté qu'il comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles les mesures ainsi édictées par le préfet du Nord se fondent, et satisfait ainsi à l'exigence de motivation posée par les dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, et alors que le préfet n'avait pas à reprendre expressément et de manière exhaustive l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle, familiale ou professionnelle de l'intéressée, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté est entaché d'une insuffisance de motivation manque en fait et doit, dès lors, être écarté. 3. En second lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet du Nord a procédé à un examen particulier et attentif de la situation de l'intéressée. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de Mme A... doit être écarté. Sur la décision portant refus de titre de séjour : 4. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 5. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, Mme A... n'était présente sur ce territoire que depuis treize mois et son époux est également en situation irrégulière sur le territoire français. En outre, Mme A... n'établit pas, ni même n'allègue, qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales en Côte d'Ivoire, où elle a vécu de manière habituelle jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans et où elle a célébré son mariage. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard notamment aux conditions et à la durée de son séjour en France, le préfet du Nord, pour refuser de délivrer un titre de séjour à Mme A..., n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision de refus de titre de séjour n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : 6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ". L'article R. 511-1 du même code prévoit que : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement l'étranger ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Toutefois, lorsque l'étranger est retenu en application de l'article L. 551-1, le certificat est établi par un médecin intervenant dans le lieu de rétention conformément à l'article R. 553-8. (...) ". 7. Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative, lorsqu'elle dispose d'éléments d'informations suffisamment précis et circonstanciés établissant qu'un étranger résidant habituellement sur le territoire français est susceptible de bénéficier des dispositions protectrices du 10 de l'article L. 511-4 cité ci-dessus, doit, avant de prononcer une mesure d'éloignement à l'encontre de celui-ci, saisir pour avis le collège des médecins mentionné à l'article R. 511-4 du même code. 8. Mme A... fait valoir qu'elle souffre d'une Hépatite B pour laquelle elle suit un traitement et est enceinte de cinq mois à la date de l'arrêté attaqué. Toutefois, Mme A... n'a pas sollicité son admission au séjour en qualité d'étranger malade ; elle n'a pas davantage informé le préfet de son état de santé. Par suite, il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir saisi l'OFII. De surcroit, il ne résulte pas de l'instruction que l'état de santé ferait obstacle à une mesure d'éloignement ni que les soins prodigués à Mme A... ne pourraient pas être poursuivis dans son pays d'origine et les seuls certificats, attestation de consultations et compte-rendu qu'elle produit ne permettent pas de conclure à l'absence d'un traitement et d'un suivi appropriés dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 10 de l'article L. 511-4 et de l'article R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 9. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". 10. Mme A... n'a pas sollicité son admission au séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement du 11 de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France. Par suite, le moyen est inopérant. 11. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 que Mme A... n'est pas fondée à invoquer, par voie de conséquence, l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. 12. En dernier lieu, les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5. Sur la décision fixant le pays de destination : 13. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 que Mme A... n'est pas fondé à invoquer, par voie de conséquence, l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour, à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination. 14. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". 15. Dans les circonstances analysées au point 8, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A... ne pourrait bénéficier dans son pays d'une prise en charge adaptée à son état de santé et qu'elle serait ainsi placée dans une situation équivalant à des traitements inhumains ou dégradants proscrits par les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 16. En troisième et dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de ce qui a été dit au point 5, que le préfet du Nord, en fixant le pays de renvoi en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement, aurait entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision. 17. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2021 du préfet du Nord. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Danset-Vergoten. Copie en sera transmise au préfet du Nord. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. D... C..., premier-conseiller, - M. F... B..., premier-conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. E... Le conseiller le plus ancien, Signé : B. C... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Nathalie Roméro N°22DA00711 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... E... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2021 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir. Par un jugement n° 2104007 du 3 février 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 3 mai 2022 et un mémoire du 13 septembre 2022, qui n'a pas été communiqué, M. E..., représenté par Me Chartrelle, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2104007 du tribunal administratif d'Amiens ; 2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de l'Oise du 18 octobre 2021 ; 3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir. Il soutient que : - l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense enregistré le 19 août 2022, la préfète de l'Oise conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens de la requête de M. E... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 19 août 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 16 septembre 2022. Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 14 avril 2022 accordant à M. E... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... E..., ressortissant arménien né en 1990, est entré irrégulièrement en France le 27 juin 2018 selon ses déclarations. Il a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par une décision du 16 novembre 2018 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 21 octobre 2019. Par un arrêté du 14 février 2020, le préfet de l'Oise a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. E..., qui n'a pas déféré à cette mesure d'éloignement, a ultérieurement sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Un titre de séjour lui a alors été délivré au titre de la période du 10 mars 2020 au 9 mars 2021. M. E... a présenté, le 21 janvier 2021, une demande de renouvellement de son titre de séjour. Par un avis du 9 août 2021, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que l'état de santé de M. E... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine. Par un arrêté du 18 octobre 2021, la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". 3. Il ressort des dispositions précitées qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII, que cette décision ne peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque ce défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'intéressé fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou en l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. 4. M. E... fait valoir qu'il est atteint d'un pectus excavatum, et qu'il a subi deux interventions chirurgicales en avril 2019 et en juillet 2020 et fait valoir, au soutien de son argumentation, un certificat médical, établi le 10 janvier 2021, selon lequel l'état de santé de l'intéressé " va nécessiter une nouvelle prise en charge chirurgicale dans les deux ans à venir " et un certificat médical, établi le 10 novembre 2021, par un chirurgien thoracique, indiquant qu'il " est donc nécessaire qu'il reste sur le territoire français jusqu'à l'ablation de cette barre ". 5. Toutefois, ainsi qu'il a été déjà dit, le collège de médecins de l'OFII a estimé, dans son avis émis le 9 août 2021, que si l'état de santé de M. E... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge médicale ne devrait toutefois pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine. Et les certificats médicaux produits par M. E... ne sont pas de nature à établir, par eux-mêmes, que celui-ci ne pourrait bénéficier d'une prise en charge appropriée à son état de santé dans son pays d'origine. Par ailleurs, le requérant n'établit pas davantage que le suivi médical dont il fait l'objet en France ne pourrait y être assuré. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ne peut qu'être écarté. 6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 7. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est entré en France récemment en juin 2018 selon ses déclarations, qu'il est célibataire et sans charge de famille. Si M. E... fait valoir qu'il a suivi une formation pour apprendre la langue française, une formation civique et qu'il a conclu un contrat à durée déterminée du 1er juillet au 31 décembre 2021, il ne fait état d'aucune insertion particulière en France et ne justifie pas de liens personnels ou familiaux sur le territoire français alors qu'il a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de vingt-sept ans. Dans ces conditions, la préfète de l'Oise, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2021 de la préfète de l'Oise. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. E... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera transmise à la préfète de l'Oise. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. D... C..., premier-conseiller, - M. G... B..., premier-conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. F... Le conseiller le plus ancien, Signé : Bertrand C... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Nathalie Roméro N°22DA00947 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) Lekapverre a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des suppléments d'imposition des cotisations foncières des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 à 2015 dans les rôles de la commune de Beaurainville. Par un jugement no 1807212 du 16 septembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 novembre 2020, 23 avril 2021, 9 juillet 2021 et 21 septembre 2021, la SAS Lekapverre, représentée par la société d'avocats Fidal, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises à hauteur de la somme de 11 967 euros ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement en litige est insuffisamment motivé s'agissant de l'appréciation de l'importance des installations techniques ; - les locaux occupés ne peuvent être qualifiés d'établissement industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts compte-tenu, d'une part, de l'absence d'importance de l'outillage, du matériel et des installations techniques, d'autre part, du rôle prépondérant du facteur humain dans l'activité de la société, et, enfin, de la place prépondérante des autres activités de la société ; - la valeur locative des locaux qu'elle occupe doit être évaluée selon les règles applicables aux locaux commerciaux en application des paragraphes n°s 490 et 500 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-IF-TFP-20-10-10-30 du 10 décembre 2012 ; - dès lors que l'administration admet l'application de la méthode par comparaison pour l'évaluation de la valeur locative des locaux qu'elle occupe et propriété d'une société civile immobilière, la méthode comptable d'évaluation de la partie des locaux dont elle est propriétaire méconnaît la notion d'unicité d'évaluation ; - l'évaluation de la valeur locative des locaux selon deux méthodes différentes peut entraîner une double imposition. Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2021, des mémoires enregistrés les 12 mai et 24 août 2021 et un mémoire non-communiqué enregistré le 14 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 21 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société par actions simplifiée (SAS) Lekapverre a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2014, à l'issue de laquelle l'administration a modifié la valeur locative des locaux qu'elle occupait sur le territoire de la commune de Beaurainville. En conséquence, l'administration a rehaussé la cotisation foncière des entreprises due par la société au titre des années 2012 à 2015, pour des montants respectifs, en droits, de 14 217 euros, de 14 335 euros, de 14 542 et de 14 375 euros. Après le rejet de sa réclamation, la SAS Lekapverre a demandé au tribunal administratif de Lille la décharge de ces impositions. Toutefois, par un jugement du 16 septembre 2020, le tribunal a rejeté cette demande. La société relève appel de ce jugement et demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures, de la décharger des impositions supplémentaires demeurées à sa charge suite au dégrèvement d'un montant total de 45 502 euros accordé le 8 février 2021. Sur la régularité du jugement : 2. Contrairement à ce que soutient la SAS Lekapverre, les premiers juges ont suffisamment motivé les raisons pour lesquelles ils ont estimé que l'activité de l'établissement nécessitait d'importants moyens techniques de telle sorte qu'il avait un caractère industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé de ce fait. Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires : 3. D'une part, aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11°, 12° et 13° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période. / (...) / La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. / Pour le calcul de l'impôt, la valeur locative des immobilisations industrielles définie à l'article 1499 est diminuée de 30 %. / (...) ". 4. D'autre part, aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". Revêtent un caractère industriel, au sens de cet article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant. 5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la SAS Lekapverre exerce l'activité de fabrication de miroiterie et de façonnage de verre plat consistant, selon ses propres écritures, à découper, polir, teinter, sabler et décorer des éléments en verre et pour laquelle elle dispose d'un atelier et d'installations techniques conséquentes comme une commande numérique, un four de trempe, un bilatéral façonneuse, des ponts roulants, des tables de coupe et une machine bovone rectiligne. Ces installations techniques, matériels et outillages couvrant l'ensemble de la surface de l'atelier et leur valeur comptable a varié, entre 2012 et 2014, de plus de 400 000 euros à plus de 800 000 euros. Dès lors, compte-tenu de ces éléments, et quel que soit la part de cette valeur comptable dans l'actif total de la société, ces moyens techniques doivent être regardés comme importants. 6. En deuxième lieu, quand bien-même l'activité décrite au point précédent ne serait pas regardée comme consistant en la transformation de biens corporels mobiliers, il résulte également de l'instruction, qu'elle exerce également des activités de conception, et de pose des produits auprès de ses clients. En application des principes rappelés au point 4, son établissement ne peut ainsi être regardé comme revêtant un caractère industriel, au sens et pour l'application de l'article 1499 du code général des impôts, que si le rôle des importantes installations techniques, ainsi que des matériels et outillages qu'elle met en œuvre, peut être regardé comme prépondérant dans la conduite de son exploitation prise dans son ensemble. Si la SAS Lekapverre soutient que ses activités de conception et de pose sont prépondérantes dans la conduite de son exploitation, elle n'apporte aucune donnée chiffrée ni précision suffisante au soutien de ses allégations. Par ailleurs, si celle-ci soutient que toutes les opérations mécanisées sont réalisables manuellement, l'outil technique ne servant qu'à réduire la pénibilité du travail des opérateurs et les risques d'accident du travail, il résulte de l'instruction que la société investit régulièrement dans de nouvelles machines de telle sorte que la valeur du poste comptable relatif au matériel et à l'outillage a constamment augmenté entre 2011 et 2014. Aussi, l'utilisation des importantes installations techniques, ainsi que des matériels et outillages doit être regardée comme prépondérante dans l'exploitation de l'entreprise dans son ensemble. 7. En troisième lieu, aux termes de l'article 1494 du code général des impôts : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe d'habitation ou d'une taxe annexe établie sur les mêmes bases est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte ". Aux termes de l'article 324 A de l'annexe III au code général des impôts : " Pour l'application de l'article 1494 du code général des impôts on entend : / 1° Par propriété normalement destinée à une utilisation distincte : (...) b. En ce qui concerne les établissements industriels l'ensemble des sols terrains bâtiments et installations qui concourent à une même exploitation et font partie du même groupement topographique ". Il résulte de ces dispositions qu'en principe, la définition des propriétés à prendre en compte pour la détermination de la méthode d'évaluation applicable est fonction du seul critère de leur utilisation distincte, sans que la circonstance que ces propriétés appartiennent à des propriétaires différents ait une incidence. 8. Toutefois, aux termes de l'article 1500 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " Les bâtiments et terrains industriels sont évalués :- 1° selon les règles fixées à l'article 1499 lorsqu'ils figurent à l'actif du bilan de leur propriétaire ou de leur exploitant, et que celui-ci est soumis aux obligations définies à l'article 53 A ;- 2° selon les règles fixées à l'article 1498 lorsque les conditions prévues au 1° ne sont pas satisfaites.". Si, en application de ce dernier article, les locaux d'un établissement industriel appartenant à une entreprise qui n'est pas astreinte aux obligations de tenir une comptabilité, conformément aux dispositions de l'article 53 A du code général des impôts, sont évalués dans les conditions prévues à l'article 1498 du même code, les autres bâtiments et installations de l'établissement, s'ils appartiennent à une entreprise astreinte aux obligations définies à l'article 53 A, doivent être évalués selon la méthode comptable prévue à l'article 1499, alors même qu'ils forment avec les locaux une propriété destinée à une même utilisation, au sens des articles 1494 du même code et 324 A de son annexe III. 9. Il résulte de l'instruction que, en cours d'instance d'appel, l'administration a admis que, s'agissant des locaux propriété de la société civile immobilière (SCI) Côte d'Opale 1, leur imposition ne pouvaient être évaluées au moyen de la méthode comptable prévue à l'article 1499 du code général des impôts mais selon la méthode applicable aux locaux commerciaux résultant de l'article 1498 du même code, et a accordé en conséquence à la société Lekapverre un dégrèvement des suppléments de cotisation foncière des entreprises à hauteur de la somme de 45 502 euros. Toutefois, si les bâtiments propriétés de la SCI Côte d'Opale 1 ne faisaient pas l'objet d'une utilisation distincte et concouraient à la même exploitation que les biens propriété de la société requérante, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que la valeur locative de ces derniers soit évaluée selon la méthode prévue à l'article 1499 du code général des impôts en application de l'article 1500 du même code. Dès lors, le moyen tiré de l'atteinte au principe d'unicité de la méthode d'évaluation doit être écarté. 10. En dernier lieu, en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que l'application de méthodes d'évaluation de la valeur locative différentes a entraîné une double imposition à l'égard de la société Lekapverre. 11. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Lekapverre n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de la SAS Lekapverre tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la SAS Lekapverre est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à SAS Lekapverre et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : B. BaillardLe président de la formation de jugement, Signé : M. A... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA01796 1 3 N°"Numéro"
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 1er février 2021 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui accorder le renouvellement de sa carte de séjour temporaire, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office, d'autre part, d'enjoindre, sous astreinte de 155 euros par jour de retard à compter de la date de notification du jugement, au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer de procéder le titre de séjour sollicité ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation après l'avoir mis en possession d'une autorisation provisoire de séjour, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Par un jugement n° 2103903 du 13 janvier 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 4 avril 2022, M. B..., représenté par Me Navy, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 1er février 2021 du préfet du Pas-de-Calais ; 3°) d'enjoindre, sous astreinte de 155 euros par jour de retard à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation après l'avoir mis en possession d'une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : En ce qui concerne la décision de refus de séjour : - cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Pas-de-Calais ayant omis de consulter la commission départementale du titre de séjour avant de prendre cette décision ; - elle méconnaît les dispositions des 6° et 7° de l'article L. 313-11 de ce code, dans une situation dans laquelle il justifie contribuer à l'entretien et à l'éducation de ses trois enfants français, avec lesquels il vivait habituellement à la date de l'arrêté contesté ; le préfet ne pouvait notamment pas retenir, sans méconnaître ces dispositions, que les faits de violences commises à l'égard de la mère de ses enfants faisaient obstacle au renouvellement de son titre de séjour, alors qu'il appartenait à cette autorité, qui n'était pas en situation de compétence liée, de se livrer à une appréciation de sa situation, prise dans son ensemble ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - pour refuser de lui accorder le renouvellement qu'il sollicitait, le préfet du Pas-de-Calais n'a pas porté une attention suffisante à l'intérêt supérieur de ses enfants, en méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; En ce qui concerne la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français : - cette décision est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - il figurait, à la date de l'arrêté attaqué, parmi les ressortissants étrangers visés au 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne peuvent légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; - cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle méconnaît aussi les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2022, le préfet du Pas-de-Calais conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. B..., dont l'administration conteste qu'il soit entré régulièrement en France, ne sont pas fondés. Par une décision du 3 mars 2022, M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 1er décembre 1997 à Kinshasa, est entré sur le territoire français le 5 octobre 2013, selon ses déclarations, alors qu'il était âgé de seize ans et a été pris en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance du département du Pas-de-Calais. A sa majorité il s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dont il a sollicité le renouvellement le 22 août 2020. Par un arrêté du 1er février 2021, le préfet du Pas-de-Calais a refusé de faire droit à cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. B... relève appel du jugement du 13 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer le titre de séjour qu'il sollicitait ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes l'article L. 313-11, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...) ". 3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est le père de trois enfants de nationalité française, à savoir de jumelles nées le 7 février 2017 et d'un garçon né le 30 octobre 2020 de son union avec une ressortissante française. Il est constant que M. B... a fait l'objet, le 12 juin 2018 et le 16 juin 2020, à des dates antérieures à celle à laquelle l'arrêté contesté a été pris, de condamnations par le tribunal correctionnel de Saint-Omer à raison de faits de violences aggravées commis sur la personne de sa compagne, la mère de ses trois enfants, le tribunal lui ayant, par son second jugement, fait interdiction d'entrer en relation avec sa compagne, sauf pour ce qui concerne l'exercice des prérogatives de l'autorité parentale. Dans ce contexte, il ne peut être tenu pour établi que M. B... aurait continué à vivre avec ses enfants à la date de l'arrêté contesté. Toutefois, l'intéressé produit plusieurs attestations concordantes et dont le caractère probant n'est pas contesté, par lesquelles des proches indiquent, dans des termes circonstanciés, que M. B... entretient, en dépit de cette séparation d'avec leur mère, des liens étroits et très réguliers, depuis leur naissance, avec ses enfants, qu'il emmène à l'école ou à la crèche, qu'il accompagne systématiquement chez leur pédiatre, comme celui-ci en atteste, et qu'il vient chercher le week-end chez leur mère, en ayant recours à un tiers de confiance, dès lors qu'il lui est, en principe, interdit d'entrer en contact avec celle-ci. Cette dernière atteste d'ailleurs elle-même, dans une situation dans laquelle elle n'a aucun intérêt personnel à ce que M. B... demeure sur le territoire français, de la régularité et de l'intensité des liens noués par l'intéressé avec ses enfants, depuis leur naissance, en insistant sur l'attachement de ces derniers pour leur père. Dans ces conditions particulières, eu égard à la durée du séjour de M. B..., qui résidait habituellement en France depuis plus de sept années à la date de l'arrêté contesté et au fait qu'il a constamment été en possession d'un titre de séjour depuis sa majorité, la décision refusant de renouveler le titre de séjour de M. B... doit être regardée comme ayant porté au droit au respect de la vie privée de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en refusant de faire droit à la demande de renouvellement de titre de séjour, le préfet du Pas-de-Calais doit être regardé, dans les circonstances particulières de l'espèce, comme ayant méconnu les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, M. B... est fondé à demander l'annulation de la décision lui refusant le renouvellement de sa carte de séjour temporaire et, par voie de conséquence, l'annulation des autres décisions contenues dans l'arrêté contesté. 4. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte : 5. Eu égard au motif qui la fonde, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement que le préfet du Pas-de-Calais délivre à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 6. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Navy, son avocat, d'une somme de 1 500 euros, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2103903 du 13 janvier 2022 du tribunal administratif de Lille est annulé. Article 2 : L'arrêté du 1er février 2021 du préfet du Pas-de-Calais portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français avec un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi de M. B... est annulé. Article 3 : Il est enjoint au préfet du Pas-de-Calais de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt. Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Me Navy en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Navy, au ministre de l'intérieur et au préfet du Pas-de-Calais. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ; - M. Bertrand Baillard, premier conseiller ; - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de la formation de jugement, Signé : M. C... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°22DA00759 1 3 N°"Numéro"
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... H... C... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 mars 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Nord, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation. Par un jugement n° 2104687 du 18 janvier 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 29 mars 2022, M. C..., représenté par Me Danset-Vergoten, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2104687 du tribunal administratif de Lille ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Nord du 19 mars 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Nord, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " passeport talent ", ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : S'agissant de l'arrêté pris dans son ensemble : - il est entaché d'une insuffisance de motivation ; - il est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ; S'agissant de la décision portant refus de séjour : - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; S'agissant de la décision fixant le pays de destination : - elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense enregistré le 3 juin 2022, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens de la requête de M. C... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 2 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 juin 2022. Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 10 mars 2022 accordant à M. C... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B... H... C..., ressortissant ivoirien né en 1995, est entré en France le 23 janvier 2020 sous couvert d'un passeport national revêtu d'un visa court séjour, accompagné de son épouse. Le 31 juillet 2020, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " passeport talent ". Par un arrêté du 19 mars 2021, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Sur les moyens communs à l'ensemble des décisions contestées : 2. En premier lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté qu'il comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles les mesures ainsi édictées par le préfet du Nord se fondent, et satisfait ainsi à l'exigence de motivation posée par les dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, et alors que le préfet n'avait pas à reprendre expressément et de manière exhaustive l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle, familiale ou professionnelle de l'intéressé, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté est entaché d'une insuffisance de motivation manque en fait et doit, dès lors, être écarté. 3. En second lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet du Nord a procédé à un examen particulier et attentif de la situation de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de M. C... doit être écarté. Sur la décision portant refus de titre de séjour : 4. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 5. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, M. C... n'était présent sur le territoire national que depuis treize mois et que son épouse est également en situation irrégulière en France. En outre, M. C... n'établit pas, ni même n'allègue qu'il serait dépourvu d'attaches familiales en Côte d'Ivoire, où il a vécu de manière habituelle jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans et où son mariage a été célébré. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard notamment aux conditions et à la durée de son séjour en France, le préfet du Nord n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Le préfet n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision de refus de titre de séjour n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : 6. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 que M. C... n'est pas fondé à invoquer, par voie de conséquence, l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. 7. En second lieu, les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5. Sur la décision fixant le pays de destination : 8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 que M. C... n'est pas fondé à invoquer, par voie de conséquence, l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2021 du préfet du Nord. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles de son conseil tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. DECIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de Me Danset-Vergoten tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... H... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Danset-Vergoten. Copie en sera transmise au préfet du Nord. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. E... D..., premier-conseiller, - M. G... A..., premier-conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. F... Le conseiller le plus ancien, Signé : B. D... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Nathalie Roméro N°22DA00712 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) Lekapverre Dunkerque a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des suppléments d'imposition des cotisations foncières des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 à 2016 dans les rôles de la commune de Dunkerque. Par un jugement no 1807206 du 16 septembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 novembre 2020, 23 avril 2021, 9 juillet 2021 et 21 septembre 2021, la SAS Lekapverre Dunkerque, représentée par la société d'avocats Fidal, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises à hauteur de la somme de 13 517 euros ; 3°) à titre subsidiaire, de déduire de l'évaluation de la valeur locative, d'une part, les biens et installations de chauffage, d'électricité générale, de circuit d'air desservant les machines, les fondations et le pont roulant et les installations électriques servant pour le stock en application de l'article 1382 du code général des impôts, et, d'autre part, les biens ne constituant pas des accessoires immobiliers au sens de la doctrine administrative BOI-IF-TFB-10-10-10 du 12 septembre 2012 ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement en litige est insuffisamment motivé s'agissant de l'appréciation de l'importance des installations techniques ; - les locaux occupés ne peuvent être qualifiés d'établissement industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts compte-tenu, d'une part, de l'absence d'importance de l'outillage, du matériel et des installations techniques, d'autre part, du rôle prépondérant du facteur humain dans l'activité de la société, et, enfin, de la place prépondérante des autres activités de la société ; - la valeur locative des locaux qu'elle occupe doit être évaluée selon les règles applicables aux locaux commerciaux en application des paragraphes nos 490 et 500 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-IF-TFP-20-10-10-30 du 10 décembre 2012 ; - dès lors que l'administration admet l'application de la méthode par comparaison pour l'évaluation de la valeur locative des locaux qu'elle occupe et propriété d'une société civile immobilière, la méthode comptable d'évaluation des locaux dont elle est propriétaire méconnaît la notion d'unicité d'évaluation ; - l'évaluation de la valeur locative des locaux selon deux méthodes différentes peut entraîner une double imposition ; - certains biens pris en compte pour déterminer les bases assujetties à la cotisation foncière des entreprises relèvent du 11° de l'article 1382 du code général des impôts et auraient dû, en conséquence, bénéficier de l'exonération applicable aux outillages et moyens d'exploitation des établissements industriels ; - les immobilisations figurant dans les comptes 2131 et 2181 n'auraient pas dû être pris en considération dans l'évaluation de la valeur locative dès lors qu'elles ne constituent pas des accessoires immobiliers au sens de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-IF-TFB-10-10-10 du 12 septembre 2012. Par des mémoires, enregistrés le 8 février 2021, le 5 mai 2021 et le 24 août 2021, et un mémoire non-communiqué enregistré le 14 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 21 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 octobre 2021. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société par actions simplifiée (SAS) Lekapverre Dunkerque a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2014, à l'issue de laquelle l'administration a modifié la valeur locative des locaux qu'elle occupait sur le territoire de la commune de Dunkerque. En conséquence, l'administration a rehaussé la cotisation foncière des entreprises due par la société au titre des années 2014 à 2016, pour des montants respectifs, en droits, de 14 060 euros, de 8 634 euros et de 9 034 euros. Après le rejet de sa réclamation, la SAS Lekapverre Dunkerque a demandé au tribunal administratif de Lille la décharge de ces impositions. Toutefois, par un jugement du 16 septembre 2020, le tribunal a rejeté cette demande. La société relève appel de ce jugement et demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures, de la décharger des impositions supplémentaires demeurées à sa charge suite au dégrèvement d'un montant total de 18 211 euros accordé le 8 février 2021. Sur la régularité du jugement : 2. Contrairement à ce que soutient la société Lekapverre Dunkerque, les premiers juges ont suffisamment motivé les raisons pour lesquelles ils ont estimé que l'activité de l'établissement nécessitait d'importants moyens techniques de telle sorte qu'il avait un caractère industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé de ce fait. Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires : 3. D'une part, aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11°, 12° et 13° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période. / (...) / La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. / Pour le calcul de l'impôt, la valeur locative des immobilisations industrielles définie à l'article 1499 est diminuée de 30 %. / (...) ". 4. D'autre part, aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". Revêtent un caractère industriel, au sens de cet article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant. 5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la SAS Lekapverre Dunkerque exerce notamment l'activité de négoce, de façonnage et de transformation du verre consistant, selon ses propres écritures, à découper, polir, teinter, sabler et décorer des éléments en verre et pour laquelle elle dispose d'un atelier de plus de 1 000 m2 et d'installations techniques conséquentes comme un pont roulant cinq tonnes qui couvre l'ensemble de la surface de l'atelier et qui est utilisé pour l'ensemble des activités y compris le négoce, une table de découpe à commande numérique sur chemin de roulement avec pupitre comprenant une table mobile électrique équipée de moteurs, une façonneuse rectiligne motorisée, une machine à bande abrasive équipée de moteurs, un sécheur de profilés, une scie à deux têtes, une meuleuse sur banc, une perceuse deux têtes, un palonnier motorisé à ventouses orientables et un palonnier à ventouses de sept-cent kilogrammes. Dès lors, compte-tenu de ces éléments, et quel que soit la part de cette valeur comptable dans l'actif total de la société, ces moyens techniques doivent être regardés comme importants. 6. En deuxième lieu, quand bien-même l'activité décrite au point précédent ne serait pas regardée comme consistant en la transformation de biens corporels mobiliers, dès lors qu'elle exerce également des activités de conception, et de pose des produits auprès de ses clients, en application des principes rappelés au point 4, son établissement ne peut être regardé comme revêtant un caractère industriel, au sens et pour l'application de l'article 1499 du code général des impôts, que si le rôle des importantes installations techniques, ainsi que des matériels et outillages qu'elle met en œuvre, peut être regardé comme prépondérant dans la conduite de son exploitation prise dans son ensemble. A cet égard, si la société Lekapverre Dunkerque soutient que ses activités de conception et de pose sont prépondérantes dans la conduite de son exploitation, elle n'apporte aucune donnée chiffrée ni précision suffisante au soutien de ses allégations. Par ailleurs, si celle-ci soutient que toutes les opérations mécanisées sont réalisables manuellement, l'outil technique ne servant qu'à réduire la pénibilité du travail des opérateurs et les risques d'accident du travail, cette circonstance reste sans incidence alors qu'il résulte de l'instruction que la société investit régulièrement dans de nouvelles machines de telle sorte que la valeur du poste comptable relatif au matériel et à l'outillage a constamment augmenté entre 2011 et 2014. Aussi, l'utilisation des importantes installations techniques, ainsi que des matériels et outillages doit être regardée comme prépondérante dans l'exploitation de l'entreprise dans son ensemble. 7. En troisième lieu, aux termes de l'article 1494 du code général des impôts : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe d'habitation ou d'une taxe annexe établie sur les mêmes bases est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte ". Aux termes de l'article 324 A de l'annexe III au code général des impôts : " Pour l'application de l'article 1494 du code général des impôts on entend : / 1° Par propriété normalement destinée à une utilisation distincte : (...) b. En ce qui concerne les établissements industriels l'ensemble des sols terrains bâtiments et installations qui concourent à une même exploitation et font partie du même groupement topographique ". Il résulte de ces dispositions qu'en principe, la définition des propriétés à prendre en compte pour la détermination de la méthode d'évaluation applicable est fonction du seul critère de leur utilisation distincte, sans que la circonstance que ces propriétés appartiennent à des propriétaires différents ait une incidence. 8. Toutefois, aux termes de l'article 1500 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " Les bâtiments et terrains industriels sont évalués :- 1° selon les règles fixées à l'article 1499 lorsqu'ils figurent à l'actif du bilan de leur propriétaire ou de leur exploitant, et que celui-ci est soumis aux obligations définies à l'article 53 A ;- 2° selon les règles fixées à l'article 1498 lorsque les conditions prévues au 1° ne sont pas satisfaites.". Si, en application de ce dernier article, les locaux d'un établissement industriel appartenant à une entreprise qui n'est pas astreinte aux obligations de tenir une comptabilité, conformément aux dispositions de l'article 53 A du code général des impôts, sont évalués dans les conditions prévues à l'article 1498 du même code, les autres bâtiments et installations de l'établissement, s'ils appartiennent à une entreprise astreinte aux obligations définies à l'article 53 A, doivent être évalués selon la méthode comptable prévue à l'article 1499, alors même qu'ils forment avec les locaux une propriété destinée à une même utilisation, au sens des articles 1494 du même code et 324 A de son annexe III. 9. Il résulte de l'instruction que, en cours d'instance d'appel, l'administration a admis que, s'agissant des locaux propriété de la société civile immobilière (SCI) Dunkerque 1, leur imposition ne pouvait être évaluée au moyen de la méthode comptable prévue à l'article 1499 du code général des impôts mais selon la méthode applicable aux locaux commerciaux résultant de l'article 1498 du même code, et a accordé en conséquence à la société Lekapverre Dunkerque un dégrèvement des suppléments de cotisation foncière des entreprises à hauteur de la somme de 18 211 euros. Toutefois, si les bâtiments propriétés de la SCI Dunkerque 1 ne faisaient pas l'objet d'une utilisation distincte et concouraient à la même exploitation que les biens propriété de la société requérante, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que la valeur locative de ces derniers soit évaluée selon la méthode prévue à l'article 1499 du code général des impôts en application de l'article 1500 du même code. Dès lors, le moyen tiré de l'atteinte au principe d'unicité de la méthode d'évaluation doit être écarté. 10. En quatrième lieu, en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que l'application de méthodes d'évaluation de la valeur locative différentes a entraîné une double imposition à l'égard de la société Lekapverre Dunkerque. 11. En cinquième lieu, l'article 1382 du code général des impôts dispose que : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : / (...) / 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 ; / (...) ". Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties, en application des dispositions précitées du 11º de l'article 1382 du code général des impôts, et doivent, par suite, être exclus des bases imposables à la cotisation foncière des entreprises, les biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499 de ce code, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1º et 2º de l'article 1381 du même code, c'est-à-dire qu'ils ne constituent ni des installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits, ni des ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation, ces éléments étant mentionnés au 1° de l'article 1381, ni des ouvrages d'art et des voies de communication, mentionnés au 2° de cet article. En revanche, peu importe que ces biens soient ou non dissociables des immeubles. 12. D'une part, si la SAS Lekapverre Dunkerque soutient que les installations de chauffage, d'électricité générale, les installations électrique dans le stock et celles de circuit d'air desservant les machines équipant l'établissement industriel qu'elle exploite sont au nombre des ouvrages ou équipements devant bénéficier de l'exonération prévue au 11° de l'article 1382 du code général des impôts, elle ne démontre aucunement que ces dernières seraient spécifiques à l'activité susceptible d'être exercée dans un établissement industriel. 13. D'autre part, il résulte de l'instruction que le pont-roulant 5 tonnes, qui couvre l'ensemble de la surface de l'atelier et est utilisé pour l'ensemble des activités de l'établissement, est maintenu au sol par des fondations. Compte-tenu de ses caractéristiques techniques, de ses modalités d'implantation, de son importance et de son usage, cette structure n'est pas destinée à être déplacée. Dès lors, elle doit être assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties en application du 1° de l'article 1381 du code général des impôts. 14. En dernier lieu, le prix de revient des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière, évalué selon la méthode comptable en application de l'article 1499 du code général des impôts, est celui qui est inscrit à l'actif du bilan. L'administration peut se fonder sur les énonciations comptables opposables à la société pour inclure dans la valeur locative des immobilisations le montant des travaux inscrits en tant qu'immobilisations, sauf pour la société à démontrer que ces travaux constitueraient en réalité des charges déductibles ou qu'elle aurait inscrit en tant qu'immobilisations des biens exclus par nature des bases imposables à la taxe foncière pour les propriétés bâties ou exonérés de celles-ci. 15. Si la SAS Lekapverre Dunkerque soutient que l'administration a pris en compte à tort des travaux inscrits aux comptes d'immobilisation nos 2131 et 2181, à hauteur de 6 905 euros pour l'année 2014 et de 8 324,94 euros pour l'année 2015, elle n'apporte pas le moindre élément de nature à démontrer que ces immobilisations ne constitueraient pas des accessoires immobiliers imposables. Dès lors, la société requérante n'est pas fondée à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le paragraphe 120 du BOI-IF-TFB-10-10-10 du 12 septembre 2012, qui distingue les accessoires immobiliers de la construction faisant corps avec les bâtiments, qui ne comporte pas une interprétation différente de la loi fiscale de celle dont il est fait application par le présent arrêt. 16. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Lekapverre Dunkerque n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 17. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de la SAS Lekapverre Dunkerque tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la SAS Lekapverre Dunkerque est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à SAS Lekapverre Dunkerque et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : B. BaillardLe président de la formation de jugement, Signé : M. A... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA01795 1 3 N°"Numéro"
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Vu la procédure suivante : Par un déféré, le préfet des Yvelines a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler l'élection de M. A... B... en qualité de deuxième adjoint au maire de la commune de Buchelay (Yvelines) en remplacement de Mme C..., démissionnaire, d'autre part, d'enjoindre au conseil municipal de procéder à une nouvelle élection afin d'élire une femme. Par un jugement n° 2203121 du 17 juin 2021, ce tribunal a annulé l'élection de M. B... et rejeté le surplus du déféré préfectoral. Par une requête, enregistrée le 15 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter le déféré préfectoral ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ses protocoles additionnels ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code général des collectivités territoriales ; - le code électoral ; - le code de justice administrative, notamment son article R. 321-1 ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. Mme C... ayant démissionné de ses fonctions de deuxième adjointe au maire et de conseillère municipale de Buchelay (Yvelines), le conseil municipal de cette commune a, le 7 avril 2022, élu deuxième adjoint M. B..., seul candidat. Celui-ci relève appel du jugement du 17 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Versailles, saisi sur déféré préfectoral, a annulé son élection sur le fondement du quatrième alinéa de l'article L. 2122-7-2 du code général des collectivités territoriales. Sur la question prioritaire de constitutionnalité : 2. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux. 3. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 2122-7-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de l'article 29 de la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, relatif à l'élection des adjoints dans les communes de 1 000 habitants et plus : " Quand il y a lieu, en cas de vacance, de désigner un ou plusieurs adjoints, ceux-ci sont choisis parmi les conseillers de même sexe que ceux auxquels ils sont appelés à succéder. Le conseil municipal peut décider qu'ils occuperont, dans l'ordre du tableau, le même rang que les élus qui occupaient précédemment les postes devenus vacants ". 4. M. B... soutient qu'en adoptant ces dispositions sans prévoir aucune exception, le législateur a méconnu les principes d'égalité devant la loi et le suffrage protégés par les articles 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ainsi que 2 et 3 de la Constitution, de pluralisme des courants d'idées et d'opinions consacré à l'article 4 de la Constitution, de libre administration des collectivités territoriales garanti par l'article 72 de la Constitution, ainsi que le principe de valeur constitutionnelle de continuité du service public. 5. Aux termes du premier aliéna de l'article 1er de la Constitution : " La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives (...) ". Si le constituant a entendu, par cet article, permettre au législateur d'instaurer tout dispositif tendant à rendre effectif l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, et à cette fin d'adopter des dispositions à caractère incitatif ou contraignant, il lui appartient toutefois d'assurer la conciliation entre l'objectif de parité et les autres règles et principes de valeur constitutionnelle auxquels le pouvoir constituant n'a pas entendu déroger. 6. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 2122-7-2 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 1 000 habitants et plus, les adjoints sont élus au scrutin de liste à la majorité absolue, sans panachage ni vote préférentiel. La liste est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe ". Ainsi, le quatrième alinéa, critiqué par M. B..., de cet article vise seulement à maintenir les effets, en cas de nécessité de pourvoir à un poste vacant d'adjoint, de l'obligation de parité des listes de candidats à ces fonctions prévue au premier alinéa. Les dispositions contestées, qui en elles-mêmes ne traitent pas différemment les conseillers municipaux susceptibles d'être candidats selon leur sexe mais tirent uniquement les conséquences de la règle fixée au premier alinéa, ne méconnaissent pas le principe d'égalité devant la loi. Ces dispositions, qui ont pour objet d'assurer en toute circonstance le respect d'une règle de parité découlant directement de la mise en œuvre du premier alinéa de l'article 1er de la Constitution, ne méconnaissent pas davantage le principe d'égalité devant le suffrage. 7. En deuxième lieu, contrairement à ce que relève M. B..., les dispositions contestées ne sauraient avoir pour effet de contraindre le conseil municipal à élire un membre de l'opposition à un poste d'adjoint. Par suite, le grief tiré de ce que, pour ce motif, ces dispositions porteraient atteinte au principe de pluralisme des courants d'idées et d'opinions ne peut qu'être écarté. 8. M. B... soutient, en troisième lieu, que, dans une situation où, à la suite de démissions collectives, le conseil municipal ne comprendrait plus aucun conseiller du sexe recherché, l'application des dispositions critiquées priverait la commune de la possibilité de pourvoir à un poste vacant d'adjoint au maire, affectant ainsi son fonctionnement normal au point de méconnaître le principe de libre administration des collectivités territoriales. Compte tenu de ce que les listes de candidats aux élections municipales sont composées alternativement d'une personne de chaque sexe en vertu de l'article L. 264 du code électoral, la configuration invoquée par M. B... ne saurait revêtir qu'un caractère tout à fait exceptionnel. Dans ces conditions, les dispositions en cause ne sauraient être regardées, du seul fait qu'elles ne réservent pas cette hypothèse, comme assurant une insuffisante conciliation entre l'objectif du maintien de la parité parmi les adjoints et le principe de libre administration des collectivités territoriales. 9. En quatrième lieu, le grief tiré de ce que les dispositions en cause seraient contraires au principe de valeur constitutionnelle de continuité du service public en ce qu'elles pourraient conduire le conseil municipal à ne plus assurer les missions confiées à un adjoint non remplacé, à supposer que ce principe soit invocable à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité, repose sur la même hypothèse que le grief précédent et n'est dès lors pas davantage sérieux. 10. En dernier lieu, le législateur ne saurait avoir méconnu sa compétence au seul motif qu'il n'a pas prévu d'exceptions pour l'application des dispositions contestées. 11. Par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas de caractère sérieux. Sur la régularité du jugement attaqué : 12. Il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué que le moyen tiré de ce qu'elle ne serait pas revêtue des signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque en fait. 13. En s'abstenant de viser l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 relatives à la présentation d'une question prioritaire de constitutionnalité au moyen d'un mémoire distinct devant les juridictions de première instance, le tribunal administratif, qui a explicitement reproduit dans les motifs de sa décision la substance de cette règle, au demeurant reprise en substance à l'article R*. 771-3 du code de justice administrative, code qu'il a visé, n'a pas entaché son jugement d'irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 14. M. B... ne saurait utilement soutenir que l'annulation de son élection méconnaîtrait le droit d'éligibilité, garanti par l'article 3 du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dont les stipulations ne sont applicables qu'aux élections du corps législatif. 15. M. B... soutient, par ailleurs, que cette annulation méconnaîtrait l'article 14 de cette convention, en combinaison avec l'article 1er de son protocole n° 12, garantissant le principe de non-discrimination. Toutefois, le protocole n° 12 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas été ratifié par la France. Il ne saurait ainsi être utilement invoqué devant le Conseil d'Etat, ni en lui-même, ni en combinaison avec les stipulations de l'article 14 de la convention. 16. Ne peut davantage être accueilli le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait méconnu l'article 10 de la même convention, protégeant le droit à la liberté d'expression, dès lors que l'impossibilité légale d'élire un adjoint de sexe différent de celui de la personne remplacée n'a, par elle-même, aucune incidence sur la liberté d'expression. 17. Enfin, eu égard à l'absence d'exceptions prévues par les dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 2122-7-2 du code général des collectivités territoriales à la règle qu'elles fixent, M. B... ne saurait utilement se prévaloir, pour contester leur mise en œuvre, ni de qu'il a été désigné au terme d'un vote unanime du conseil municipal, ni de ce que la charge de travail des autres adjoints établiraient une situation exceptionnelle ou urgente. 18. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. B... doit être rejetée. Sur les frais de l'instance : 19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B.... Article 2 : La requête présentée par M. B... est rejetée. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., au préfet des Yvelines et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et à la Première ministre. Délibéré à l'issue de la séance du 21 septembre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, M. Jonathan Bosredon, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes-rapporteure. Rendu le 11 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé La rapporteure : Signé : Mme Ophélie Champeaux La secrétaire : Signé : Mme Magali Méaulle
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler les décisions en date du 6 juin 2021 par lesquelles le préfet du Nord l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, lui a interdit le retour sur le territoire français avant l'expiration du délai de deux ans. Par un jugement n° 2104440 du 30 juillet 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 6 juin 2021 par laquelle le préfet du Nord a interdit à M. B... le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et a rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 10 septembre 2021, et un mémoire du 16 septembre 2022, qui n'a pas été communiqué, M. B..., représenté par Me Olivier Cardon, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler les décisions du 6 juin 2021 portant obligation de quitter le territoire français, refusant un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 2 ans ; 3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de 15 jours suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ; 4°) d'enjoindre au préfet du Nord de procéder à l'effacement de son signalement au fichier SIS et au fichier FPR, en application de l'article 24 du règlement 1977/2006 du 20 décembre 2006 ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement est entaché d'irrégularité, les premiers juges n'ayant pas répondu aux moyens tirés de la méconnaissance du droit d'être entendu préalablement aux décisions défavorables, de l'absence de prise en considération de l'intérêt supérieur de l'enfant et de l'insuffisante motivation en droit de l'arrêté ; En ce qui concerne la légalité externe de l'ensemble des décisions : - elles sont insuffisamment motivées ; - elles sont entachées d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ; - le droit d'être entendu préalablement à la décision a été méconnu ; En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des 5°) et 9°) de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les dispositions de l'article R. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; En ce qui concerne la décision refusant un délai de départ volontaire : - elle est illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ont été méconnues ; En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement : - elle est illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français : - elle est illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un mémoire en défense, enregistré le19 juillet 2022, le préfet du Nord, représenté par Me Xavier Termeau, conclut au rejet de la requête, et par la voie de l'appel incident, à l'annulation de l'article 1er du jugement du 30 juillet 2021 et au rejet de la demande de M. B... tendant à l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, présentée devant le tribunal administratif de Lille. Il soutient que : - les moyens de la requête ne sont pas fondés. - en ce qui concerne le bien-fondé de l'interdiction de retour d'une durée de deux ans, l'intéressé représente une menace pour l'ordre public au vu des faits de menaces réitérées de destruction dangereuse et des faits de violence sans incapacité, il s'est maintenu sur le territoire national plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour sans en avoir demandé le renouvellement et ne justifie d'aucune circonstance humanitaire particulière s'opposant à cette interdiction ; la durée de deux ans est proportionnée à sa situation. Par ordonnance du 8 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 26 août 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ; - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le règlement (UE) n° 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. D... A..., magistrat administratif honoraire, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C... B..., ressortissant marocain, relève appel du jugement du 30 juillet 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille, en tant qu'elle a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 6 juin 2021 par lesquelles le préfet du Nord l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Il demande également de procéder à l'effacement de son signalement au fichier SIS et au fichier FPR. Par la voie de l'appel incident, le préfet du Nord demande l'annulation du jugement, en tant qu'il a annulé sa décision du 6 juin 2021 par laquelle il a interdit à M. B... le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Sur la régularité du jugement : 2. Il ressort des points 3 à 5 du jugement en litige que la magistrate désignée a répondu au moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu préalablement aux décisions défavorables et du point 12 qu'elle a répondu au moyen tiré de la prise en considération de l'intérêt supérieur de l'enfant de l'intéressé. La magistrate désignée n'était en outre pas tenue de répondre à tous les arguments développés à l'appui du moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne les moyens communs aux décisions attaquées : S'agissant de l'insuffisance de motivation : 3. Les décisions attaquées mentionnent avec suffisamment de précisions les circonstances de fait et de droit sur lesquelles elles se fondent. Le préfet a mentionné notamment la présence de la fille de l'intéressé sur le territoire national en indiquant qu'elle n'était pas à sa charge et que celui-ci ne justifiait pas contribuer à son entretien et à son éducation, prenant ainsi en considération l'intérêt supérieur de l'enfant, sans que puisse lui être reproché l'absence de visa de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. En outre, l'erreur de plume commise par le préfet sur la citation de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est sans incidence sur la légalité de l'arrêté. 4. Les considérations de fait et de droit sont donc suffisamment développées pour mettre utilement M. B... en mesure de discuter les motifs de ces décisions. Par suite, alors que le préfet du Nord n'avait pas à reprendre expressément et de manière exhaustive l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle, familiale ou professionnelle de l'intéressé, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions doit être écarté. S'agissant du défaut d'examen particulier de la situation de l'intéressé : 5. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet du Nord, pour prendre ses décisions, a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé au regard de ses droits. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de M. B... doit être écarté. S'agissant de la méconnaissance du droit d'être entendu préalablement aux décisions : 6. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Enfin, aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union. (...) ". 7. Le droit d'être entendu, principe général du droit de l'Union européenne, se définit comme celui de toute personne à faire connaître, de manière utile et effective, ses observations écrites ou orales au cours d'une procédure administrative, avant l'adoption de toute décision susceptible de lui faire grief. Toutefois, ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales. Enfin, une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie. 8. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de son audition par les services de police le 6 juin 2021 à 11 heures 50, que M. B... a été informé de ce qu'il était susceptible de faire l'objet d'une décision l'obligeant à quitter le territoire à destination de son pays d'origine ou de tout autre pays où il serait légalement admissible, éventuellement assortie d'une assignation à résidence, d'un placement en centre de rétention administrative ou d'une interdiction de retour sur le territoire français. Il a été invité à présenter des observations sur ces points et a donc été mis en mesure de faire part de tout élément relatif à sa situation personnelle. Par suite, et malgré la brièveté de cette audition, le moyen tiré de ce que le préfet du Nord a méconnu le droit de M. B... d'être entendu doit être écarté. En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français : 9. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " 10. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui a bénéficié d'un titre de séjour à compter du 23 septembre 2006, renouvelé jusqu'au 22 septembre 2010, est à nouveau entré en France le 7 octobre 2015 avec un visa valable pour une durée de 30 jours. Un titre de séjour d'une durée d'un an à compter du 6 novembre 2018 lui a ensuite été délivré. L'intéressé fait valoir qu'il est le père d'une fille de nationalité française, née le 2 février 2006. Toutefois, il a divorcé de la mère de cette enfant par un jugement du 6 janvier 2009 du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nice, lequel a notamment prévu l'exercice exclusif de l'autorité parentale par la mère, la fixation de la résidence de l'enfant au domicile de cette dernière et des droits de visite au bénéfice du requérant, une fois par mois, dans le cadre d'un espace de rencontre. Dans un jugement du 22 mai 2017, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny a défini des modalités d'exercice de l'autorité parentale identiques et renouvelé les droits de visite de M. B... dans un espace de rencontre en en fixant les modalités précises. S'il ressort des pièces du dossier que la mère de l'enfant s'est opposée à plusieurs reprises à l'organisation de rencontres entre le père et sa fille, l'intéressé ne démontre pas avoir entrepris, en dehors d'une déclaration de main courante effectuée le 18 avril 2018, des démarches tendant à faire respecter son droit de visite. En outre, il ne verse à l'instance aucun élément tendant à établir qu'il contribue, dans la mesure de ses moyens, à l'entretien et à l'éducation de sa fille ou qu'il entretient avec elle des liens affectifs, à l'exception d'une attestation de la mère de son enfant en ce sens et d'un billet de train au nom de sa fille entre Paris et Lille, postérieurs à la décision attaquée et dont il n'est pas établi que les faits attestés portent sur une période antérieure. Si M. B... s'est marié à une ressortissante française le 5 octobre 2019, il est constant qu'il est séparé de son épouse et n'a d'ailleurs pas sollicité le renouvellement de la carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dont il bénéficiait depuis le 6 novembre 2018. Enfin, les membres de la famille de M. B... résident dans son pays d'origine, selon ses propres déclarations, et son passeport mentionne plusieurs allers-retours entre la France et le Maroc en 2018 et 2019. Il n'établit donc pas avoir transféré en France le centre de ses intérêts personnels et familiaux. Dans ces conditions, la décision en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et, par suite, ne méconnaît pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 11. En deuxième lieu, aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Dans la mesure où, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. B... ne vit pas avec sa fille, n'exerce pas l'autorité parentale, ne cherche pas à faire respecter son droit de visite auprès de celle-ci dans un espace tiers et ne participe pas à son entretien et à son éducation et dès lors que rien ne s'oppose à ce qu'une rencontre avec sa fille puisse être organisée lors de ses courts séjours en France, son éloignement ne porte pas aux intérêts de celle-ci une atteinte incompatible avec ces stipulations au regard desquelles la décision en litige n'est en outre pas entachée de l'erreur manifeste d'appréciation invoquée par l'appelant. 12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 5° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; /.../ 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ". 13. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux qui sont exposés au point 10, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions précitées du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 14. En cinquième lieu, M. B... réitère devant la cour le moyen, déjà soulevé devant les premiers juges, tiré de ce que la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 9°) de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, il ne produit en appel aucun élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur ce moyen. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges, au point 10 du jugement attaqué. 15. En sixième lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / Toutefois, lorsque l'étranger est assigné à résidence aux fins d'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français ou placé ou maintenu en rétention administrative en application du titre IV du livre VII, l'avis est émis par un médecin de l'office et transmis sans délai au préfet territorialement compétent ". Il résulte des pièces du dossier que l'intéressé n'a pas fait valoir, lors de son audition par les services de police ni devant le médecin qui l'a examiné lors de sa retenue administrative, que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dès lors, la décision en litige n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile. En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la décision refusant un délai de départ volontaire : 16. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 15 que M. B..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant un délai de départ volontaire, n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. 17. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". L'article L. 612-3 de ce code précise que : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; / 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; (...) / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. " 18. Il ressort des termes de l'arrêté du 6 juin 2021 que le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire est notamment fondé sur l'absence d'une résidence stable sur le territoire et la circonstance que l'intéressé est démuni de tout document de voyage. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. B... justifie d'un domicile stable et d'un document d'identité en cours de validité. La décision en litige ne pouvait donc pas être légalement fondée sur ces motifs. 19. Il est cependant constant que M. B... s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour sans en avoir demandé le renouvellement. Dans ces conditions, le préfet pouvait légalement se fonder sur ce motif pour refuser d'accorder un délai de départ volontaire. Il résulte de l'instruction que le préfet du Nord aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que ce motif. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées des articles L 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'intéressé au regard de ces dispositions doivent être écartés. En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement : 20. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 15 que M. B..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination, n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. 21. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumaines ou dégradants ". 22. En se bornant à soutenir que le centre de ses intérêts personnels et familiaux se situe dorénavant en France et que son éloignement au Maroc constitue un traitement inhumain ou dégradant, M. B... n'établit pas être personnellement et actuellement exposé au risque de subir dans son pays d'origine des traitements prohibés par les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, la décision en litige n'a pas méconnu ces stipulations. Par suite, ce moyen doit être écarté. En ce qui concerne les conclusions d'appel incident du préfet du Nord : 23. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". En outre, aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ". 24. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. 25. Il ressort des pièces du dossier que la décision d'interdiction de retour pendant une durée de deux ans est fondée sur les conditions de l'entrée et du séjour de l'intéressé en France, sur la circonstance qu'il n'a jamais fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, sur l'absence de liens familiaux stables et anciens sur le territoire national et sur l'appréciation qu'il représente une menace pour l'ordre public au vu des faits pour lesquels il est connu au fichier " FAED ". 26. Même si l'intéressé n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, il s'est maintenu depuis le 5 novembre 2019 sur le territoire national sans avoir demandé le renouvellement de son titre de séjour. La réalité de ses liens privés et familiaux stables et anciens en France n'est pas établie, ainsi qu'il a été dit ci-dessus. Il ne ressort en revanche d'aucune pièce du dossier que les faits de violences signalés en novembre 2019 et reprochés à l'intéressé, faits qu'il ne conteste pas, aient fait l'objet d'une condamnation pénale, ni même d'une information judiciaire, ni qu'ils aient été renouvelés. Ainsi, les motifs retenus par le préfet du Nord ne permettent pas de justifier légalement la durée de la décision d'interdiction de retour en France au regard des critères posés par les dispositions précitées de l'article L. 612-10. En outre, dès lors que l'interdiction de retour sur le territoire français rend impossible l'exercice du droit de visite de M. B... auprès de sa fille mineure selon les modalités et le lieu fixés par le juge aux affaires familiales, la décision en litige porte une atteinte disproportionnée au droit de l'appelant au respect de sa vie familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 27. Il résulte de tout ce qui précède d'une part, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 30 juillet 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 6 juin 2021 par lesquelles le préfet du Nord l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et d'autre part, que le préfet du Nord n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le même jugement, la magistrate désignée a annulé la décision du 6 juin 2021 prononçant une interdiction de retour de M. B... sur le territoire français pour une durée de deux ans. Sur les conclusions à fin d'injonction : 28. Aux termes de l'article L. 613-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel est notifiée une interdiction de retour sur le territoire français est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 24 du règlement (UE) n° 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen et modifiant et abrogeant le règlement (CE) n° 1987/2006. Les modalités de suppression du signalement de l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. " et aux termes de l'article R. 613-7 du même code : " Les modalités de suppression du signalement d'un étranger effectué au titre d'une décision d'interdiction de retour sont celles qui s'appliquent, en vertu de l'article 7 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées, aux cas d'extinction du motif d'inscription dans ce traitement. ". Aux termes du IV de l'article 2 du décret du 28 mai 2010 : " IV. - Peuvent également être inscrits dans le fichier à l'initiative des autorités administratives compétentes : ... / 5° Les étrangers faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français non exécutée, en application du I de l'article L. 511-1 ou de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; / 6° Les étrangers faisant l'objet d'une interdiction de retour en application du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pendant sa période de validité ; (...) ". 29. L'exécution du présent arrêt, qui confirme notamment l'annulation de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans prise à l'encontre de M. B..., implique seulement la rectification du fichier du système d'information Schengen et celle du fichier des personnes recherchées, en tant que l'intéressé est inscrit dans ces fichiers au titre de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français. Il y a donc lieu d'enjoindre au préfet du Nord ou au préfet territorialement compétent de procéder à cette rectification dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions d'appel incident présentées par le préfet du Nord sont rejetées. Article 3 : Il est enjoint au préfet du Nord ou au préfet territorialement compétent de rectifier le signalement de M. B... dans le fichier du système d'information Schengen et dans le fichier des personnes recherchées, en tant qu'il est inscrit dans ces fichiers au titre de l'interdiction de retour sur le territoire français, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 4 : Les conclusions de M. B... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B..., au préfet du Nord et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience publique du 22 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. D... A..., magistrat administratif honoraire ; - M. Stéphane Eustache, premier conseiller. . Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : J.-P. A... La présidente de la formation de jugement, Signé : C. Baes-Honoré La greffière, Signé : S. Cardot La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N°21DA02190 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge de son obligation solidaire de payer l'amende de 100% infligée, sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, à la SARL MC Carre, dont elle était la gérante, au titre des années 2010 à 2012 et, en outre, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1800641 du 11 juin 2020, le tribunal administratif d'Amiens a déchargé Mme A... de l'obligation solidaire de payer l'amende infligée à la SARL MC Carre et a mis à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le requérant et non compris dans les dépens. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 8 juillet 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de remettre l'obligation solidaire de payer cette amende à la charge de Mme A... ; 3°) de prescrire le reversement de la somme de 1 500 euros mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le tribunal administratif a estimé à tort, pour prononcer la décharge de l'obligation de payer l'amende en litige, que le service avait omis, en méconnaissance de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, d'informer la SARL MC Carre de ce qu'elle avait la possibilité de présenter, dans un délai de trente jours, des observations sur cette sanction qu'il était envisagé de lui infliger ; en effet, dans la réponse apportée, le 21 février 2014, aux observations présentées le 12 février 2014 par la SARL MC Carre, le service a non seulement rappelé à cette société les motifs l'ayant conduit à envisager de proposer l'amende visée à l'article 1759 du code général des impôts, mais l'a aussi informée de ce qu'elle disposait d'un délai de trente jours pour formuler des observations sur cette amende ; ainsi, les dispositions de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales n'ont pas été méconnues en l'espèce, peu important que cette information n'était pas contenue dans la lettre adressée le 17 janvier 2014 à la SARL MC Carre pour lui faire initialement connaître qu'elle encourait cette amende ; - les autres moyens présentés par Mme A... devant le tribunal administratif et sur lesquels il appartiendrait à la cour de se prononcer par l'effet dévolutif de l'appel ne sont pas fondés ; en effet, le paragraphe n°160 de la doctrine administrative publiée au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-CF-INF-30-20 ne comportait pas, dans sa version applicable, une interprétation du texte fiscal qui soit différente de celle dont il est demandé à la cour de faire application ; enfin, dès lors que la procédure d'imposition mise en œuvre en l'espèce n'est pas entachée d'irrégularité, le moyen tiré de l'application de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté. Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juillet 2022, Mme A..., représentée par Me Philippe, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - contrairement à ce que soutient le ministre, de la lettre même de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, le seul document qui doit mentionner le délai de 30 jours imparti au contribuable pour présenter d'éventuelles observations, à peine d'irrégularité, est celui qui contient la décision d'appliquer l'amende, c'est-à-dire, en l'espèce, la lettre adressée le 17 janvier 2014 à la SARL MC Carre pour l'informer que l'amende égale à 100% des sommes distribuées, prévue à l'article 1759 du code général des impôts, serait mise à sa charge ; en outre, aucune pièce ultérieurement adressée au contribuable n'est susceptible de remédier à ce vice de procédure ; - compte tenu de la prorogation de délais dont bénéficiait la SARL MC Carre pour répondre aux rectifications proposées en matière d'impôt sur les sociétés selon la procédure contradictoire, la société disposait également, ainsi que le prévoit le paragraphe n°240 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-CF-IOR-10-50, du même délai de réponse prorogé concernant la demande de désignation des bénéficiaires des sommes regardées comme distribuées, qui constituaient l'un des chefs de rectifications proposées ; or, la lettre qui a été adressée à cette société le 17 janvier 2014, avant l'expiration du délai prorogé, est irrégulière ; - l'avis de mise en recouvrement qui a été émis à son encontre pour obtenir le paiement de la somme correspondant à l'amende infligée à la SARL MC Carre est irrégulier, au regard des dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, en ce qu'il ne fait aucune référence à la lettre du 17 janvier 2014, qui contient la décision d'infliger cette amende à cette société ; la doctrine administrative publiée au bulletin officiel des finances publiques sous la référence BOI-REC-PREA-10-10-20 conforte sa position sur ce point ; Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la requête du ministre de l'action et des comptes publics tendant à ce que la cour prescrive la restitution de la somme de 1 500 euros mise à la charge de l'Etat par le jugement frappé d'appel, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société à responsabilité limitée (SARL) MC Carre, dont le siège est situé à Creil et dont Mme B... A... est la gérante, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er avril 2010 au 31 décembre 2012. Ce contrôle a conduit le service vérificateur à estimer que cette société avait opéré des distributions de revenus. Dans la proposition de rectification qu'il a adressée le 13 décembre 2013 à la SARL MC Carre, le service lui a demandé, en application de l'article 117 du code général des impôts, de désigner, dans un délai de trente jours, les bénéficiaires de ces revenus réputés distribués. La société n'ayant pas apporté de réponse à cette demande dans le délai imparti, l'administration lui a fait connaître, par une lettre qu'elle lui a adressée le 17 janvier 2014, que l'amende égale à 100% des sommes distribuées, prévue à l'article 1759 du code général des impôts, serait, en conséquence, mise à sa charge. L'amende ainsi infligée à la SARL MC Carre a été mise en recouvrement, le 23 septembre 2014, à hauteur d'une somme totale de 79 290 euros. L'administration a recherché le paiement de cette amende auprès de Mme A..., en sa qualité de débitrice solidaire de la SARL MC Carre, sur le fondement du 3 du V de l'article 1754 du code général des impôts. Mme A... a présenté une réclamation tendant à être déchargée de son obligation solidaire, en contestant la régularité de la procédure à l'issue de laquelle l'amende en cause a été mise en recouvrement. Cette réclamation ayant été rejetée, Mme A... a porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens en lui demandant de prononcer la décharge de son obligation solidaire de payer l'amende de 100% infligée, sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, à la SARL MC Carre. 2. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel du jugement du 11 juin 2020 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a déchargé Mme A... de son obligation solidaire de payer l'amende infligée à la SARL MC Carre et a mis à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros. Sur le motif de décharge retenu par le tribunal administratif : 3. En vertu du second alinéa de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations. 4. Pour décharger Mme A... de son obligation solidaire de payer l'amende infligée à la SARL MC Carre, le tribunal administratif a estimé que l'administration avait, en méconnaissance de ces dispositions de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, omis d'informer la SARL MC Carre, dans la lettre qu'elle lui avait adressée le 17 janvier 2014 pour lui faire connaître qu'elle entendait lui infliger l'amende prévue à l'article 1759 du code général des impôts en cas d'absence de réponse à une demande de désignation des bénéficiaires de revenus distribués, de la possibilité de présenter des observations, dans un délai de trente jours à compter de la réception de cette lettre, en ce qui concerne cette sanction fiscale et que cette omission avait privé la société d'une garantie substantielle. 5. Toutefois, l'obligation posée par les dispositions, rappelées au point 3, du second alinéa de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales n'implique pas nécessairement que l'administration informe le contribuable, dans la lettre par laquelle elle lui fait connaître qu'elle se propose de lui infliger une sanction fiscale, du délai de trente jours qui lui est ouvert pour présenter d'éventuelles observations sur la sanction ainsi envisagée, mais seulement qu'elle le mette à même de pouvoir présenter de telles observations, dans ce délai de trente jours, avant la mise en recouvrement de l'amende. 6. Or, comme le soutient le ministre, la SARL MC Carre a présenté, le 12 février 2014, des observations portant sur les rehaussements qui lui avaient été notifiées et, dans le courrier qu'il lui a adressé, le 21 février 2014, en réponse à ces observations, laquelle réponse fait mention de l'amende de l'article 1759 du code général des impôts, le service a fait connaître à celle-ci qu'elle disposait d'un délai de trente jours pour formuler d'éventuelles observations sur les sanctions fiscales qui y sont mentionnées. Enfin, il n'est pas contesté que la SARL MC Carre a reçu cette réponse le 27 février 2014, soit plus de trente jours avant la mise en recouvrement, le 23 septembre 2014, de l'amende en cause. Il suit de là que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que le tribunal administratif a retenu à tort, pour décharger Mme A... de son obligation solidaire de payer cette amende, que celle-ci avait été établie à l'issue d'une procédure irrégulière au regard des dispositions du second alinéa de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales et qui avait privé la SARL MC Carre d'une garantie substantielle offerte par la loi au contribuable. 7. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A... devant le tribunal administratif d'Amiens, de même que ceux qu'elle invoque en cause d'appel. Sur les autres moyens : 8. Mme A... n'est pas fondée à invoquer, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le paragraphe n°240 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-CF-IOR-10-50, pour critiquer la régularité du délai imparti à la SARL MC Carre afin qu'elle désigne les bénéficiaires des revenus regardés comme distribués par elle, dès lors que cet extrait de doctrine ne peut, s'agissant d'une question intéressant la régularité de la procédure d'imposition mise en œuvre à l'égard de cette société, être regardé comme comportant une interprétation formelle de la loi fiscale au sens de ces dispositions. Mme A... n'est pas davantage fondée à se prévaloir, sur le fondement des mêmes dispositions, des énonciations des paragraphes n°60 et n°160 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-CF-INF-30-20, qui ne comportent pas, en tout état de cause, une interprétation du texte fiscal qui soit différente de celle dont le présent arrêt application. 9. Ainsi qu'il a été dit au point 6, l'amende dont Mme A... demande à être déchargée de l'obligation solidaire de paiement n'a pas été établie à l'issue d'une procédure entachée d'une irrégularité substantielle de procédure au sens des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à invoquer le bénéfice de ces dispositions. 10. Enfin, il ressort des mentions de l'avis de mise en recouvrement adressé le 4 février 2015 à Mme A... que celles-ci font référence, conformément aux prescriptions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales en ce qui concerne les mentions que doivent contenir un tel avis, au principal document adressé à la SARL MC Carre dans le cadre de la procédure d'établissement de l'amende qu'il a pour objet de recouvrer, à savoir à la proposition de rectification du 13 décembre 2013, document qui comporte les éléments de fait et de droit sur lesquels l'administration s'est fondée pour établir cette amende. En outre, l'avis de mise en recouvrement du 4 février 2015 vise l'article 1759 du code général des impôts, qui constitue le fondement de cette amende, et comporte une mention selon laquelle le paiement de cette amende est demandé à Mme A... en tant que débitrice solidaire en vertu du II de l'article 1754 du code général des impôts, ainsi que du 3 du V du même article. Dans ces conditions, si l'avis de mise en recouvrement du 4 février 2015 ne fait pas référence à la lettre du 17 janvier 2014 par laquelle l'administration a fait connaître à la SARL MC Carre qu'elle entendait, compte-tenu de son absence de réponse à la demande de désignation des bénéficiaires des revenus réputés distribués, lui infliger l'amende prévue à l'article 1759 du code général des impôts, cette omission n'a pas fait obstacle à ce que Mme A... soit mise à même de connaître la nature de la somme dont il lui était demandé le paiement, ainsi que les considérations de droit et de fait justifiant l'infliction de l'amende en cause à la SARL MC Carre, dont elle était la gérante, et qu'elle soit recherchée, en tant que débitrice solidaire, en paiement de cette amende. Mme A... n'est, à cet égard, pas fondée à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les prévisions de la doctrine publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-REC-PREA-10-10-20, qui rappellent les mentions que doivent comporter les avis de mise en recouvrement et qui ne font pas, sur ce point, une interprétation de la loi fiscale qui soit différente de celle dont le présent arrêt fait application. 11. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a déchargé Mme A... de l'obligation solidaire de payer l'amende infligée à la SARL MC Carre sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts. Dans ces conditions, le ministre est également fondé à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement, le tribunal administratif d'Amiens a mis, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au titre des frais non compris dans les dépens exposés par Mme A... en première instance, après avoir estimé qu'il était la partie perdante. En revanche, dès lors que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique tient de l'article 11 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique le pouvoir d'émettre un ordre de recouvrement à l'effet d'obtenir le reversement de sommes dont une personne serait redevable envers l'Etat, ses conclusions tendant à ce que la cour prescrive le reversement de cette somme de 1 500 euros sont irrecevables et doivent être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1800641 du 11 juin 2020 du tribunal administratif d'Amiens est annulé en tant qu'il décharge Mme A... de l'obligation solidaire de payer l'amende infligée à la SARL MC Carre sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts et qu'il met la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 2 : L'obligation solidaire de payer l'amende mentionnée à l'article 1er ci-dessus est remise à la charge de Mme A.... Article 3 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif d'Amiens, ainsi que le surplus des conclusions de la requête du ministre sont rejetés. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, ainsi qu'à Mme B... A.... Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ; - M. Bertrand Baillard, premier conseiller ; - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de la formation de jugement, Signé : M. C... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA00962 1 3 N°"Numéro"
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société civile immobilière (SCI) CMH a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle été assujettie au titre l'année 2011, et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013. Par un jugement no 1709188 du 13 janvier 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 17 mars 2020, la SCI CMH, représentée par Me Van Den Schrieck, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge des suppléments d'imposition sur les sociétés mis à sa charge au titre des exercices 2012 et 2013 à hauteur de 45 086 euros ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la taxe sur la valeur ajoutée relative aux prestations de mise à disposition de personnel fournies par la société à responsabilité limitée (SARL) Prince B... en 2012 et 2013 est entièrement déductible ; - l'administration fiscale ne pouvait mettre en cause le montant et la nature des prestations de gardiennage réalisées en 2011 et 2013 par M. D... A..., lesquelles étaient justifiées, la taxe sur la valeur ajoutée afférente étant en conséquence déductible ; - ces frais de gardiennage sont des charges déductibles en application de l'article 39 du code général des impôts ; - elle n'a pas été de mauvaise foi de telle sorte que la pénalité prévue à l'article 1729 du même code ne pouvait être appliquée. Par un mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 16 juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 juillet 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société civile immobilière (SCI) CMH, qui exerce une activité d'acquisition, d'administration et de gestion par location de biens immobiliers, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2011 au 28 février 2014. Par une proposition de rectification du 18 septembre 2014, l'administration fiscale a assujetti la SCI CMH à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2011 et 2012 et rappelé des droits de taxe sur la valeur ajoutée pour la période allant du 1er janvier 2011 au 28 février 2014, assortis de la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts. Ses réclamations ayant été rejetées, la SCI CMH a saisi le tribunal administratif de Lille d'une requête tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011, et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013. Par un jugement du 13 janvier 2020, le tribunal a rejeté cette demande. La SCI CMH demande à la cour d'annuler ce jugement et de prononcer la décharge uniquement des suppléments d'imposition sur les sociétés mis à sa charge au titre des années 2012 et 2013 à hauteur de la somme de 45 086 euros. Sur le bien-fondé des impositions : En ce qui concerne la charge de la preuve : 2. La SCI CMH, qui n'a pas présenté d'observations sur la proposition de rectification dans le délai de trente jours suivant la notification de la proposition de rectification du 18 septembre 2014, doit être regardée comme ayant tacitement accepté les rehaussements en cause. Dès lors, en application des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, il lui incombe d'apporter la preuve de l'exagération des impositions supplémentaires mises à sa charge. En ce qui concerne le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée : 3. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, devant la cour, la SCI CMH demande la décharge uniquement des suppléments d'imposition sur les sociétés mis à sa charge. Dès lors, les moyens invoqués relatifs au bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a fait l'objet doivent être écartés comme inopérants. En ce qui concerne le bien-fondé des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés : 4. En vertu du 1. de l'article 39 du code général des impôts, le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant notamment les frais généraux de toute nature. 5. La SCI CMH soutient que les frais de gardiennage de l'ensemble immobilier à usage commercial dont elle est propriétaire situé à Coulogne dont elle s'est acquittée pour un montant total de 165 000 euros hors taxe au titre de l'exercice 2011, constituent des frais généraux déductibles de son bénéfice net en application du 1. de l'article 39 du code général des impôts. Pour écarter le caractère déductible de cette charge, le service vérificateur a mis en avant le coût anormalement élevé des prestations, ainsi que le fait que les factures avaient été émises par M. D... A..., par ailleurs associé de la SCI CMH, qui n'avait déclaré cette activité de gardiennage pour aucune de ses sociétés et ne disposait pas d'un agrément préfectoral à cette fin. Or, la SCI CMH, qui se borne à soutenir que cette prestation n'était pas fictive et qu'il appartenait au service vérificateur de constater sur place la nécessité des opérations de gardiennage, ne justifie ni du montant de ces prestations au regard de leur coût anormalement élevé relevé par le service vérificateur ni de leur réalité. Dès lors, la SCI CMH n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère déductible de cette charge et du caractère exagéré de l'imposition à laquelle elle a été soumise. Sur les pénalités : 6. La SCI CMH reprend en appel le moyen tiré de ce que les pénalités qui lui ont été infligées sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts n'étaient pas fondées, en l'absence de mauvaise foi. Toutefois, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 22 à 25 du jugement attaqué. 7. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI CMH n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 8. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de la SCI CMH tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la SCI CMH est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI CMH et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : B. BaillardLe président de la formation de jugement, Signé : M. C... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA00505 1 3 N°"Numéro"
JADE/CETATEXT000046441406.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011, 2012 et 2013, à hauteur d'un montant total de 53 659 euros. A... un jugement n° 1901239 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a substitué la majoration de 40% en cas de manquement délibéré prévue A... le a. de l'article 1729 du code général des impôts à celle de 80% prévue A... le c. du même article, en cas de manœuvres frauduleuses, que l'administration avait appliquée à l'un des chefs de rectification contestés et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande. Procédure devant la cour : A... une requête et un mémoire, enregistrés le 28 août 2020 et le 8 janvier 2021, M. C..., représenté A... la SELARL Horrie et Associés, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il ne lui donne pas entière satisfaction ; 2°) de prononcer la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux restant en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la comptabilité de la société A... actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Amaroche, dont il était, jusqu'au 1er octobre 2013, l'associé et le dirigeant, a été regardée à tort comme non-probante en tant qu'elle se rapportait aux exercices clos en 2012 et en 2013, alors qu'elle n'était affectée que d'irrégularités mineures et portant sur des montants dérisoires au regard du chiffre d'affaires réalisé au titre de chacun des exercices considérés ; - les factures regardées comme fictives A... l'administration correspondent, en réalité, à des factures " pro-forma " qui ont été délivrées, au cours de l'exercice clos en 2013, à la SASU Amaroche, A... des fournisseurs, à partir de devis établis A... eux et qui concernaient l'organisation d'une réception en prévision de son départ prochain, qui n'a finalement pas eu lieu en raison de difficultés de santé qui ont justifié son hospitalisation ; il conteste formellement avoir établi lui-même des factures fictives, ce que l'administration, qui n'a pas appliqué l'amende spécifique prévue A... l'article 1737 du code général des impôts, n'a pas établi A... les seuls indices qu'elle a fait valoir ; - il a été regardé à tort comme le seul maître de l'affaire, alors qu'il n'avait, juridiquement et financièrement, plus aucun pouvoir sur la société dès sa sortie de l'hôpital, le 23 septembre 2013, de sorte qu'il ne peut lui être reproché de n'avoir pas régularisé ces écritures avant la clôture de l'exercice 2013 ; - la remise en cause de la déductibilité, en tant que charge de l'exercice concerné, d'une dépense exposée A... une société n'implique pas nécessairement l'imposition de la somme correspondante en tant que revenu distribué, entre les mains de son dirigeant sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ; - les charges qualifiées A... l'administration d'étrangères à l'intérêt de la SASU Amaroche correspondent, en réalité, à des dépenses à caractère publicitaire, tels des achats de cadeaux destinés à la clientèle ainsi qu'au personnel, ou des actions de sponsoring, cette politique commerciale ayant directement concouru à l'augmentation du chiffre d'affaires du restaurant sur la période couvrant les années 2006 à 2013, de sorte que ces dépenses, qui sont dérisoires au regard du chiffre d'affaires réalisé chaque année, ont été exposées dans l'intérêt de l'entreprise ; A... ailleurs, les achats de vêtements dont l'intérêt pour l'entreprise a également été remis en cause ont été effectués pour des raisons de visibilité à l'égard de la clientèle, afin qu'il puisse être distingué du personnel de l'établissement, et afin de pouvoir remplacer des vêtements tachés en cours de service ; or, ces sommes ne sauraient constituer pour lui un revenu susceptible d'être imposé sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, dans une situation dans laquelle aucune utilisation privative de ces vêtements n'a été démontrée ; le paragraphe n°210 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-10 conforte sa position sur ce point ; - dans une situation dans laquelle il n'a pu avoir aucun accès aux documents comptables de la SASU Amaroche, compte tenu de dissensions avec le dirigeant qui lui a succédé, les emplois du temps qu'il a fournis, à partir de son agenda électronique, sont de nature à justifier de ce que les dépenses d'hébergement et de restauration prises en charge A... la société au cours des années d'imposition en litige ont été exposées dans l'intérêt de l'entreprise, sans que les douze discordances mineures relevées A... le service, entre ces emplois du temps et les tickets bancaires fournis, soient suffisantes à justifier que le caractère probant de ces emplois du temps soit remis en cause ; en outre, le fait que des conjoints ou des enfants des convives aient pu être présents ou que tous ces repas d'affaires n'aient pas abouti à la conclusion de contrats ne peut suffire à leur ôter leur caractère de repas professionnels ; - ces emplois du temps permettent d'établir aussi que le véhicule appartenant à la SASU Amaroche a été utilisé A... lui dans l'intérêt de l'activité de celle-ci ; lorsqu'il lui est arrivé d'utiliser ce véhicule à des fins personnelles, l'expert-comptable intégrait cette quote-part en tant qu'avantages en nature sur ses déclarations de revenus ; - quand bien même les factures de téléphone prises en charge A... la société, et dont les éditions versées à l'instruction ne sont pas incomplètes, correspondaient à un abonnement souscrit en son nom, il utilisait habituellement cette ligne pour les besoins de ses fonctions et dans l'intérêt de l'entreprise ; - la dépense d'achat de logiciels dont le caractère de charge a également été remis en cause a, elle aussi, été exposée pour les besoins de l'exploitation ; - la décharge des suppléments de prélèvements sociaux en litige devra être prononcée A... voie de conséquence de celle des suppléments d'impôt ; - la majoration de 40% pour manquement délibéré dont sont assortis, après le jugement attaqué, les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige n'est pas fondée, dès lors que l'administration n'a pas rapporté la preuve, qui lui incombe, d'une intention délibérée de sa part d'éluder l'impôt. A... un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2020, et A... un mémoire, enregistré le 23 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut, d'une part, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à la substitution de la majoration de 10% prévue, en cas de retard, A... l'article 1758 A du code général des impôts à celle de 40% prévue, en cas de manquement délibéré, A... le a. de l'article 1729 de ce code, d'autre part, A... la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement attaqué, en tant qu'il substitue la majoration de 40% prévue, en cas de manquement délibéré, A... le a. de l'article 1729 du code général des impôts à celle de 80% prévue, en cas de manœuvres frauduleuses, A... le c. du même article, que l'administration avait appliquée à l'un des chefs de rectification contestés et à la remise à la charge de M. C... de la majoration initialement appliquée. Il soutient que : - les moyens soulevés A... M. C... ne concernent pas l'ensemble des chefs de rectification qui lui ont été notifiés ; - l'administration est fondée à se prévaloir, pour établir, ainsi qu'il lui incombe, l'appréhension, A... M. C..., des sommes réputées distribuées A... la SASU Amaroche et dont le bénéficiaire n'a pu être identifié, de la présomption d'appréhension liée à la qualité de seul maître de l'affaire ; or, M. C... était, au cours des années 2011 et 2012 et jusqu'en septembre 2013, l'associé unique et le dirigeant de cette société et le seul titulaire du pouvoir de mouvementer le compte bancaire de celle-ci ; - la comptabilité tenue A... la SASU Amaroche au titre des exercices clos en 2012 et 2013 a été regardée à juste titre et à bon droit comme non probante, dès lors que la permanence de son chemin de révision, permettant d'assurer la correspondance entre les pièces justificatives et les écritures, n'était pas assurée ; le montant des opérations concernées A... les anomalies relevées est sans incidence à cet égard ; - l'exercice, A... le service, de son droit de communication auprès des fournisseurs de la SASU Amaroche qui lui ont adressé, au cours de la période allant du 5 août 2013 au 30 septembre 2013, quatorze factures représentant un montant total de 27 274,21 euros, qu'elle a portées en charges, a permis d'établir le caractère fictif de ces factures, et de mettre en évidence des flux financiers vers le compte d'une tierce personne, de même que l'absence de reversement de ces sommes à la SASU Amaroche ; le fait que le service n'a pas infligé l'amende prévue A... le 2° du I de l'article 1737 du code général des impôts, qui réprime la délivrance de factures ne correspondant à aucune prestation ou livraison réelle, est sans incidence sur le caractère fictif de ces factures ; le caractère de charges de ces dépenses a, pour ces motifs, été remis en cause et les sommes correspondantes ont été regardées comme ayant la nature de revenus distribués ; dans ces conditions et dès lors qu'il n'est pas contesté que ces factures n'ont donné lieu à aucune prestation ni à aucune livraison, le service était fondé à estimer qu'à concurrence de la somme de 6 570 euros, correspondant aux règlements effectués en espèces, ces revenus distribués devaient être réputés avoir bénéficié à M. C..., seul maître de l'affaire, et imposés entre ses mains sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ; dès lors que ces factures ont été comptabilisées avant le départ de M. C... et qu'elle n'ont donné lieu à aucune régularisation, laquelle aurait d'ailleurs pu intervenir, moyennant un remboursement des sommes en cause, après ce départ, la circonstance que l'intéressé n'a plus disposé d'aucun pouvoir de décision dans la société à compter du 23 septembre 2013 demeure sans incidence à cet égard ; - les dépenses d'achats de vêtements dont le service a remis en cause le caractère de charges pour la SASU Amaroche portent sur des effets courants non spécifiques à l'activité de restauration et n'ont ainsi pas été regardées comme exposées dans l'intérêt de l'entreprise ; compte-tenu de la qualité de seul maître de l'affaire qui était celle de M. C... au cours des années d'imposition en litige, les sommes correspondantes ont été imposées à bon droit entre ses mains sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ; M. C... n'est pas fondé à invoquer, à cet égard, le paragraphe n°210 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-10, dès lors que les dépenses en cause ne correspondent pas à la définition qui y est donnée ; - l'administration était fondée à considérer que les dépenses d'hébergement et de restauration, ainsi que celles liées à l'utilisation du véhicule de la société, dont l'engagement dans l'intérêt de l'entreprise n'est pas établi A... les extraits d'agenda électronique versés à l'instruction, correspondaient à des revenus distribués imposables entre les mains de M. C..., seul maître de l'affaire, sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ; - les dépenses de téléphone ont été regardées à bon droit comme ayant le même caractère de revenus distribués, alors d'ailleurs que les factures correspondantes sont établies au nom de M. C... ; - la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SASU Amaroche a permis d'établir que l'achat de logiciels, qui a d'ailleurs été effectué à distance A... un salarié en son nom propre, n'a pas été exposé dans l'intérêt de l'entreprise, laquelle disposait déjà de logiciels adaptés à son activité et n'a pas utilisé ceux ayant fait l'objet de cette acquisition ; la somme correspondante constitue ainsi un revenu distribué imposables entre les mains de M. C... sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ; - dès lors qu'en sa qualité de dirigeant de la SASU Amaroche, M. C... ne pouvait ignorer que cette société avait comptabilisé, sans justification, de nombreuses dépenses non engagées dans l'intérêt de l'exploitation et qui lui procuraient des revenus distribués en franchise d'impôt, l'administration était fondée à appliquer aux suppléments d'impôt correspondants la majoration de 40% prévue, en cas de manquement délibéré, A... le a. de l'article 1729 du code général des impôts ; ces suppléments d'impôt sont, à tout le moins, passibles de la majoration de 10% pour retard prévue A... l'article 1758 A de ce code, qu'il est demandé à la cour de substituer, le cas échéant, à la majoration de 40% du a. de l'article 1729 ; - contrairement à ce qu'a retenu, à tort, le tribunal administratif, l'administration était fondée à appliquer la majoration de 80% prévue, en cas de manœuvres frauduleuses, A... le c. de l'article 1729 du code général des impôts aux suppléments d'impôts résultant du chef de rectification afférent à l'émission de factures fictives, qui ont été enregistrées comptablement A... la SASU Amaroche alors que M. C... était encore son dirigeant ; ces suppléments d'impôt sont, à tout le moins, passibles de la majoration de 40% prévue, en cas de manquement délibéré, A... le a. de l'article 1729. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B... C... était, jusqu'au 1er octobre 2013, l'associé unique et le dirigeant de la société A... actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Amaroche, qui exploite, à Rouen, un fonds de commerce de restaurant, sous l'enseigne " La Walsheim ". Cette société a fait l'objet, du 11 décembre 2014 au 1er juillet 2015, d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013. A l'issue de ce contrôle, au cours duquel la comptabilité de la SASU Amaroche portant sur les exercices clos en 2012 et 2013 a été regardée A... le service comme dépourvue de caractère probant, l'administration a remis en cause la réalité de certaines prestations ou livraisons facturées A... des fournisseurs, de même que le caractère déductible, en tant que charges des exercices concernés, de dépenses présentées comme relevant des frais généraux de l'entreprise. L'administration a fait connaître sa position, sur ces points, à la SASU Amaroche, A... deux propositions de rectification qu'elle lui a successivement adressées le 22 décembre 2014, en ce qui concerne l'exercice clos en 2011, et le 2 juillet 2015, en ce qui concerne les exercices clos en 2012 et en 2013. A... ces mêmes propositions de rectification, le service précisait qu'il regardait l'ensemble des sommes concernées A... les rehaussements notifiés comme ayant été désinvesties et comme ayant la nature de revenus distribués à son dirigeant et associé unique. Parallèlement, A... deux propositions de rectification, datées du 22 décembre 2014 et du 9 juillet 2015, l'administration a fait connaître à M. C... qu'elle entendait imposer entre ses mains, sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, après l'avoir considéré comme le seul maître de l'affaire, les revenus qu'il devait être réputé avoir reçus, au cours des années 2011, 2012 et 2013, de la SASU Amaroche. Cette dernière a présenté, en ce qui concerne les rectifications qui lui ont été notifiées, des observations, au vu desquelles le service a finalement admis la déductibilité en tant que charges de certaines des dépenses initialement mises en cause. En conséquence, les observations présentées, sur les rehaussements notifiés en ce qui concerne ses propres revenus imposables, A... M. C... ont fait également l'objet d'une admission partielle. Dans ces conditions, les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant des rectifications des revenus imposables de M. C... qui ont été maintenues ont été mis en recouvrement le 30 avril 2017 pour un montant total, en droits et pénalités, de 56 053 euros. 2. M. C... ayant contesté ces impositions, sa réclamation a fait l'objet d'une admission très partielle, liée à l'abandon, A... l'administration, de la majoration d'assiette de 25%, prévue au 2° du 7. de l'article 158 du code général des impôts, que le service avait initialement appliquée aux prélèvements sociaux. M. C... a porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, en lui demandant de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti, à hauteur d'un montant total de 53 659 euros, au titre des années 2011, 2012 et 2013. A... un jugement du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a substitué la majoration de 40% prévue, en cas de manquement délibéré, A... le a. de l'article 1729 du code général des impôts à celle de 80% prévue, en cas de manœuvres frauduleuses, A... le c. du même article, que l'administration avait appliquée au chef de rectification afférent aux revenus réputés distribués correspondant à des écritures de charges justifiées, A... la SASU Amaroche, au moyen de factures regardées comme fictives et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande. M. C... relève appel de ce jugement en tant qu'il ne lui donne pas entière satisfaction. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel incident du même jugement, en tant qu'il donne partiellement satisfaction à M. C... et demande que la majoration de 80% prévue en cas de manœuvres frauduleuses soit rétablie à la charge de l'intéressé. Sur le bien-fondé des impositions en litige : En ce qui concerne la qualité de seul maître de l'affaire : 3. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / (...) ". Il incombe, en principe, à l'administration d'apporter la preuve que le contribuable a effectivement disposé des sommes regardées A... elle comme distribuées A... une société. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées A... la société qu'il contrôle. Cependant, l'invocation de cette présomption pour établir l'appréhension des sommes en cause ne dispense pas l'administration d'établir, au préalable, que ces sommes correspondent, pour la société versante, à un désinvestissement. 4. Les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales en litige procèdent, ainsi qu'il a été dit au point 1, de l'inclusion dans les revenus imposables de M. C..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions précitées du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, de sommes correspondant à un rehaussement des bénéfices de la SASU Amaroche au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, et regardées comme des revenus distribués A... cette société à M. C..., que l'administration a considéré comme le seul maître de l'affaire. 5. D'une part, l'administration était fondée à retenir, dès lors que les rehaussements des résultats de la SASU Amaroche procédaient de la remise en cause d'écritures de charges et en l'absence d'allégations précises ou de tout élément contraires, que les bénéfices réalisés A... cette société au titre des exercices clos en 2011 à 2013 n'avaient pas, fût-ce pour partie, été gardés en réserve ou n'étaient pas restés investis. 6. D'autre part, l'administration a entendu, en ce qui concerne une partie de ces bénéfices de la SASU Amaroche, se prévaloir, pour fonder les suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux en litige, de la présomption d'appréhension attachée à la qualité de seul maître de l'affaire, après avoir estimé, à partir d'un faisceau d'indices, que cette qualité devait être attribuée à M. C.... Au nombre de ces indices figure le fait que l'intéressé était l'unique associé et le dirigeant de la SASU Amaroche, au cours des années 2011 et 2012 et de la majeure partie de l'année 2013, puisqu'il a cédé ses parts et quitté ses fonctions dirigeantes le 1er octobre 2013. L'administration a retenu, en outre, le fait que M. C... était, durant la période au cours de laquelle il exerçait ses fonctions dirigeantes, le seul représentant de la SASU Amaraoche à l'égard des tiers et qu'il disposait seul, durant la même période, du pouvoir de mouvementer le compte bancaire de la société. Si M. C... soutient qu'il n'était plus, en droit, le dirigeant de la SASU Amaroche à compter du 1er octobre 2013, date à laquelle l'acquéreur de ses parts sociales lui a succédé dans l'exploitation du fonds de commerce de la société, et qu'il ne l'était déjà plus en fait dès le 23 septembre 2013, date à compter de laquelle son successeur lui a refusé, dans un contexte conflictuel, tout accès aux locaux et aux documents de la société, cette double circonstance n'est pas de nature à remettre en cause les indices ainsi avancés A... l'administration, qui doivent être regardés comme établissant que M. C... était le seul maître de l'affaire au cours des années d'imposition 2011 et 2012 en litige, de même que pendant la majeure partie de l'année 2013, au cours de laquelle ont été enregistrées A... la SASU Amaroche les écritures de charges se rapportant à l'exercice correspondant et qui ont été remises en cause A... l'administration. En ce qui concerne le caractère probant de la comptabilité de la société : 7. Il est constant que, si l'administration a regardé la comptabilité de la SASU Amaroche comme insuffisamment probante en tant qu'elle concernait les exercices clos en 2012 et 2013, elle n'a cependant tiré aucune conséquence de ce constat, dès lors qu'elle n'a pas procédé à une reconstitution des recettes de l'établissement, ce qu'elle n'était pas tenue de faire, mais qu'elle s'est limitée à remettre en cause la déductibilité, en tant que charges, de dépenses dont l'intérêt pour l'entreprise ne lui apparaissait pas établi ou qui avaient été portées en déduction au vu de factures qu'elle a regardées comme fictives. A... suite et en tout état de cause, le moyen tiré A... M. C... de ce que la comptabilité de la SASU Amaroche n'était pas affectée d'irrégularités de nature à justifier qu'elle soit regardée comme non probante doit être écarté. En ce qui concerne les dépenses dont l'intérêt pour l'entreprise a été remis en cause : 8. L'administration a remis en cause la déductibilité du résultat de chacun des exercices concernés, de dépenses que la SASU Amaroche avait comptabilisées en charges, au motif que l'engagement de ces dépenses dans l'intérêt de l'entreprise ne lui apparaissait pas établi. Sauf lorsqu'elle a pu, s'agissant de certaines de ces dépenses, identifier un autre bénéficiaire, l'administration a estimé que les dépenses dont la déductibilité avait ainsi été remise en cause correspondaient à un revenu distribué dont le bénéficiaire était réputé être M. C..., seul maître de l'affaire. L'intéressé conteste cette analyse en soutenant que ces dépenses répondaient à un intérêt pour l'exploitation de la SASU Amaroche. S'agissant des dépenses vestimentaires : 9. L'administration a remis en cause la déductibilité, en tant que charges, d'achats de vêtements destinés à M. C... et aux membres du personnel de la SASU Amaroche. M. C... soutient que ces achats ont porté, d'une part, sur des polos destinés à permettre à la clientèle d'identifier, en salle, le personnel du restaurant, d'autre part, sur des vêtements destinés à son propre usage, permettant aussi à la clientèle de l'identifier et de le différencier des membres du personnel. Il ajoute que l'activité de restauration implique de pouvoir se changer en cours de service afin de remplacer un vêtement taché. Il soutient, enfin, que ces dépenses s'inscrivent dans le cadre d'une politique commerciale active, que la SASU Amaroche a mise en œuvre pour son établissement et qui n'a pas été étrangère à l'accroissement de son chiffre d'affaire depuis l'ouverture de celui-ci. Toutefois, le ministre fait valoir, sans être sérieusement contredit, que les vêtements ayant fait l'objet, au cours des années d'imposition en litige, des achats dont le caractère de charges a ainsi été remis en cause étaient des vêtements de marque destinés aux particuliers et qu'ils n'étaient pas spécifiques à l'exercice de l'activité de restauration. Dans ces conditions et en l'absence d'élément de nature à permettre à M. C... de justifier d'une utilisation de ces effets, A... lui-même et A... les membres du personnel du restaurant, pour les besoins de l'activité de celui-ci, ce que les photographies de polos comportant le nom de l'établissement et produites en première instance ne sauraient suffire à démontrer, ni d'un rattachement effectif de ces dépenses à la politique commerciale mise en œuvre A... la SARL Amaroche, ces achats ont été regardés à bon droit comme ne répondant pas à l'intérêt de l'entreprise. Dès lors que les bénéficiaires de ces achats n'ont pu être identifiés avec certitude, le service était fondé à estimer que ces achats correspondaient, pour M. C..., seul maître de l'affaire, à des revenus distribués imposables sur le fondement des dispositions précitées du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. M. C... n'est pas fondé à invoquer, à cet égard, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations du paragraphe n°210 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-10, selon lesquelles le bénéficiaire des sommes distribuées échappe à toute imposition lorsque lesdites sommes ne présentent pas à son égard le caractère d'un revenu, tel étant le cas, A... exemple, des dons, subventions ou libéralités qui seraient exceptionnellement consentis A... la société dans un but charitable, éducatif ou social, dès lors qu'il ne démontre pas que les dépenses en cause entraient dans l'une des catégories visées A... cet extrait de doctrine. S'agissant des dépenses de restauration, d'hébergement et de déplacement : 10. L'administration a remis en cause, au motif que leur intérêt pour l'entreprise n'était pas davantage établi, la déduction en tant que charges de factures de restaurant et d'hôtel, ainsi que de frais liés à l'utilisation de la voiture de société appartenant à la SASU Amaroche, pour lesquels des tickets de péage et d'achat de carburant avaient été produits. Pour justifier du caractère inhérent de ces dépenses aux fonctions dirigeantes qu'il a exercées au sein de cette société, M. C... produit trois listes de repas et de déplacements qu'il a élaborées à partir des données figurant sur un agenda électronique, dont il produit aussi des photographies d'écran. Toutefois, ces listes, établies de mémoire A... le contribuable à partir des seules données peu explicites figurant sur son agenda électronique, dans une situation dans laquelle M. C... indique n'avoir pu bénéficier d'un accès aux données de l'entreprise, ne peuvent être regardées, dès lors qu'elles ne sont appuyées d'aucun justificatif, comme de nature à établir que les dépenses correspondantes ont été exposées dans l'intérêt de l'exploitation de la SASU Amaroche. A... suite, l'administration était fondée à remettre en cause le caractère de charge que cette dernière avait attribué à ces dépenses et à regarder les sommes correspondantes comme des revenus distribués réputés avoir bénéficié à M. C..., seul maître de l'affaire. S'agissant des dépenses de téléphonie : 11. La SASU Amaroche a porté en charges les dépenses liées à la souscription d'un abonnement et à l'utilisation, A... M. C..., d'un téléphone portable. L'administration a remis en cause le bien-fondé de cette imputation comptable, au motif que l'intérêt de cette dépense pour l'activité de l'entreprise n'apparaissait pas établi. Si M. C... soutient avoir habituellement utilisé ce téléphone pour les besoins de l'exercice de ses fonctions au sein de la SASU Amaroche, il ne l'établit pas A... les seules factures produites, dont les mentions révèlent d'ailleurs que cet abonnement téléphonique a été souscrit à son nom et non à celui de la société, et il n'allègue même pas que cet abonnement aurait été contracté à des fins exclusivement professionnelles. A... suite et en l'absence de tout autre élément, l'administration était fondée à regarder cette dépense comme lui ayant bénéficié personnellement. S'agissant de l'achat de logiciels : 12. L'administration a remis en cause la déduction, A... la SASU Amaroche, de son résultat de l'exercice clos en 2013, d'une dépense consistant en l'achat, pour un montant de 120,87 euros, de logiciels de bureautique. M. C... soutient que cet achat avait pour objet de doter les ordinateurs équipant l'établissement de la société de la dernière version des logiciels d'usage courant. Il ressort toutefois des éléments avancés A... le ministre et non contestés, qu'au cours de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SASU Amaroche, le vérificateur a pu constater que les ordinateurs utilisés dans le restaurant exploité A... cette société n'étaient pas équipés des logiciels litigieux, mais de versions plus anciennes, tandis que l'achat dont il s'agit a été effectué à distance et en son nom propre A... un salarié de la société. A... suite, l'administration était fondée à remettre en cause le caractère de charge que la SASU Amaroche avait attribué à cette dépense et, à défaut d'avoir pu identifier avec certitude son bénéficiaire, à regarder la somme correspondante comme ayant la nature d'un revenu distribué réputé avoir bénéficié à M. C..., seul maître de l'affaire. En ce qui concerne les dépenses portées en déduction au vu de factures regardées comme fictives : 13. Au cours du contrôle dont la SASU Amaroche a fait l'objet, le vérificateur a constaté que cette société avait porté en charges, dans sa comptabilité de l'exercice clos en 2013, durant une période allant du 5 août au 30 septembre 2013, des dépenses représentant un montant total de 27 274,21 euros, lesquelles écritures comptables étaient appuyées A... quatorze factures. Dans le cadre de l'exercice, auprès des fournisseurs mentionnés sur ces factures, le service a été amené à constater que ces fournisseurs n'avaient pas eux-mêmes enregistré ces facturations dans leur propre comptabilité et qu'ils n'étaient en mesure de produire aucun double de ces factures. En outre, le service n'a pu mettre en évidence aucun flux financier cohérent avec les mentions de ces factures, mais seulement des règlements effectués sur un compte bancaire détenu A... un tiers. Dans ces conditions, le service a remis en cause la déductibilité des sommes ainsi portées en charges A... la SASU Amaroche, au motif que ces écritures comptables avaient été appuyées A... des factures fictives. 14. M. C..., qui conteste formellement être l'auteur de ces factures, soutient que celles-ci sont, en réalité, des factures " pro-forma " que des fournisseurs de la SASU Amaroche ont délivrées à cette dernière dans le cadre de l'organisation d'une réception qui était prévue à la fin de l'année 2013, à l'occasion de son départ, consécutif à la cession de ses parts sociales. Il ajoute que ces factures, établies à partir des devis relatifs aux prestations et aux achats envisagés pour cet événement, constituent des documents provisoires et que la réception projetée n'a finalement pu avoir lieu en raison d'une difficulté d'ordre médical qui a justifié son hospitalisation en urgence à compter du 8 septembre 2013. Enfin, il précise que cette hospitalisation, qui s'est poursuivie durant quinze jours jusqu'au 23 septembre 2013, a fait obstacle à ce qu'il puisse régulariser ces écritures et que son successeur, avec lequel il a entretenu des relations difficiles, ne lui a autorisé aucun accès aux documents comptables de la société. 15. Toutefois, à supposer même qu'il n'ait pas été l'auteur de ces factures, M. C... ne conteste pas que celles-ci n'ont donné lieu à aucune prestation, ni à aucune livraison de biens, de sorte que l'administration était fondée à les regarder comme fictives, sans qu'ait d'incidence, à cet égard, le fait que l'administration n'a pas prononcé, à l'égard de la SASU Amaroche, l'amende prévue, en cas de délivrance d'une facture fictive, A... le 2. du I de l'article 1737 du code général des impôts. En outre, Il n'est pas contesté que ces factures relatives à un évènement n'ayant pas eu lieu ont néanmoins fait l'objet d'un paiement sur le compte bancaire d'un tiers non identifié. M. C... n'explique pas davantage les raisons pour lesquelles ces factures, qu'il qualifie lui-même de documents provisoires, ont pu, dans ces conditions, être utilisées pour justifier l'enregistrement, à des dates antérieures à son départ officiel de la SASU Amaroche, d'écritures comptables ayant pour effet de réduire le bénéfice imposable de celle-ci. Dans ces conditions, l'administration était fondée à remettre en cause la déductibilité, en tant que charges d'exploitation, des montants portés sur ces factures et à regarder les règlements en espèces enregistrés en contrepartie de ces factures comme correspondant à des revenus distribués entre les mains de M. C..., seul maître de l'affaire. Sur les pénalités : 16. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) / c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat ou en cas d'application de l'article 792 bis. ". En ce qui concerne la majoration pour manœuvres frauduleuses : 17. L'administration a appliqué la majoration de 80% prévue A... les dispositions précitées du c. de l'article 1729 du code général des impôts, en cas de manœuvres frauduleuses, aux suppléments d'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux résultant du rehaussement relatif aux revenus distribués en conséquence de l'enregistrement de factures fictives. 18. Pour justifier l'application de cette majoration aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant de ce chef de rectification, l'administration a retenu, selon les termes de la proposition de rectification adressée le 9 juillet 2015, que s'approprie le ministre en appel, que M. C... avait mis en place un procédé de fraude faisant intervenir des factures fictives et qui lui a permis d'appréhender les sommes correspondantes en franchise d'impôt. D'une part, M. C..., qui était encore le dirigeant et l'associé unique de la SASU Amaroch, aux dates auxquelles ont été passées les écritures comptables justifiées A... ces factures fictives, c'est-à-dire auxquelles ne correspond aucune prestation ni aucune livraison réelle, ce qui est constant, est réputé, en l'absence de tout élément probant contraire, avoir pris une part active à l'enregistrement de ces écritures. D'autre part, la justification d'écritures comptables au moyen de factures fictives, quand bien même le responsable d'entreprise qui procède à ces enregistrements ne serait pas l'auteur de ces factures, constitue nécessairement l'utilisation d'un procédé destiné à égarer l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle. A... suite, le ministre est fondé à soutenir que le tribunal administratif a estimé à tort que des manœuvres frauduleuses ne pouvaient être imputées à M. C... et qu'il a substitué à tort, à la majoration de 80% prévue, en présence de telles manœuvres, A... les dispositions précitées du c. de l'article 1729 du code général des impôts, la majoration de 40% prévue, en cas de manquement délibéré A... le a. de ce même article. Dès lors, le ministre est également fondé, A... la voie de l'appel incident, à demander que la majoration de 80% prévue au c. de l'article 1729 du code général des impôts soit remise à la charge de M. C.... En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré : 19. L'administration a appliqué la majoration de 40% prévue A... les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts, en cas de manquement délibéré, aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvement sociaux résultant de la remise en cause de la déductibilité, en tant que charges, A... la SASU Amaroche, de dépenses dont l'intérêt pour l'exploitation de cette dernière n'a pas été démontré. 20. En faisant valoir, dans les propositions de rectification adressées le 22 décembre 2014 et le 9 juillet 2015, dont le ministre s'approprie les termes sur ce point, que M. C... ne pouvait ignorer, en sa qualité de dirigeant effectif de la SASU Amaroche, que cette société avait, de manière répétée, comptabilisé, en tant que charges, de nombreuses dépenses non appuyées de justificatifs et non engagées dans l'intérêt de l'exploitation, ce qui lui avait permis de bénéficier de la distribution de revenus en franchise d'impôt, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée d'éluder l'impôt qui a animé M. C... et, A... suite, du bien-fondé de la majoration de 40% prévue, en cas de manquement délibéré, A... les dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts, dont elle a majoré les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant de ce chef de rectification. 21. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, A... le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen n'a fait que partiellement droit à sa demande et que, d'autre part, le ministre est fondé à demander que la majoration de 80% pour manœuvres frauduleuses, dont ont été assorties les impositions supplémentaires relatives au chef de rectification mentionné au point 17, à laquelle ce même jugement a substitué la majoration de 40% pour manquement délibéré, soit remise à la charge de M. C.... Enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés A... M. C... et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1901239 du 16 juin 2020 du tribunal administratif de Rouen est annulé en tant qu'il substitue la majoration de 40% pour manquement délibéré à celle de 80% pour manœuvres frauduleuses, que l'administration avait appliquée aux suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux relatifs au chef de rectification mentionné au point 17 des motifs du présent arrêt. Article 2 : La majoration de 80% pour manœuvres frauduleuses, à laquelle le jugement attaqué a substitué la majoration de 40% pour manquement délibéré, est remise à la charge de M. C.... Article 3 : La requête de M. C..., ainsi que les conclusions de sa demande tendant à la décharge de la majoration de 80% pour manœuvres frauduleuses, sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ; - M. Bertrand Baillard, premier conseiller ; - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public A... mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de la formation de jugement, Signé : M. D... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA01325 1 3 N°"Numéro"