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JADE/CETATEXT000047720706.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 13 avril 2021 par lequel le maire de Fontenay-sur-Mer a retiré la décision tacite par laquelle il ne s'était pas opposé à la déclaration préalable déposée le 4 novembre 2020 relative à une division foncière en vue de construire un ou plusieurs logements sur un terrain situé au lieu-dit " C... ". Par un jugement no 2101260 du 20 mai 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 19 juillet 2022, M. A..., représenté par la SELARL Juriadis, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 13 avril 2021 du maire de Fontenay-sur-Mer ; 3°) d'enjoindre au maire de Fontenay-sur-Mer de lui délivrer une décision de non-opposition à déclaration préalable ou, à défaut, de réexaminer la déclaration préalable, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Fontenay-sur-Mer une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ; - elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors que la parcelle d'assiette du projet se trouve en continuité avec une zone urbanisée de la commune. Une mise en demeure a été adressée le 16 décembre 2022 à la commune de Fontenay-sur-Mer. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Bréchot, - les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique, - et les observations de Me Gutton, substituant Me Gorand, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... A... a déposé, le 4 ou le 10 novembre 2020, une déclaration préalable relative à une division foncière en vue de construire un ou plusieurs logements sur le lot no 1 d'un terrain situé au lieu-dit " C... " à Fontenay-sur-Mer, cadastré section B no 241. Par un courrier du 30 novembre 2020, le maire de Fontenay-sur-Mer a adressé à M. A... une demande de communication de pièce manquante. Par un courrier du 3 décembre 2020, reçu le 15 décembre 2020 suivant, M. A... a transmis au service instructeur la pièce manquante. En application de l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme, une décision tacite de non-opposition préalable est née le 15 janvier 2021 à défaut de notification d'une décision expresse par la commune dans le délai d'instruction d'un mois. Par arrêté du 13 avril 2021, le maire de Fontenay-sur-Mer a retiré cette décision. M. A... relève appel du jugement du 20 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté du 13 avril 2021. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. " Aux termes de l'article R. 424-1 du même code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction (...), le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : / a) Décision de non-opposition à la déclaration préalable (...) ". Selon l'article R. 423-23 du même code : " Le délai d'instruction de droit commun est de : / a) Un mois pour les déclarations préalables ; (...) ". En vertu de l'article R. 423-19 du même code, " le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet ". Aux termes de l'article R. 423-22 du même code : " Pour l'application de la présente section, le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur ou au déclarant la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41. " L'article R. 423-38 du même code énonce que : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse (...) à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...) indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes. " Aux termes de l'article R. 423-39 du même code : " L'envoi prévu à l'article R. 423-38 précise : / a) Que les pièces manquantes doivent être adressées à la mairie dans le délai de trois mois à compter de sa réception ; / b) Qu'à défaut de production de l'ensemble des pièces manquantes dans ce délai, la demande fera l'objet (...) d'une décision tacite d'opposition en cas de déclaration ; / c) Que le délai d'instruction commencera à courir à compter de la réception des pièces manquantes par la mairie. " 3. Compte tenu de l'objectif de sécurité juridique poursuivi par le législateur lorsqu'il a adopté les dispositions de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme, l'autorité compétente ne peut rapporter une décision de non-opposition à déclaration préalable, tacite ou explicite, que si la décision de retrait est notifiée au bénéficiaire de la décision de non-opposition avant l'expiration du délai de trois mois suivant la date à laquelle cette décision a été acquise. 4. Aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant ". 5. À l'appui de sa requête, et pour la première fois en appel, M. A... soutient que l'arrêté du 13 avril 2021, par lequel le maire de Fontenay-sur-Mer a retiré la décision tacite de non-opposition à déclaration préalable née le 15 janvier 2021, ne lui a pas été notifié dans le délai de trois mois suivant la naissance de cette dernière décision. Une copie de la requête a été communiquée le 25 juillet 2022 à la commune de Fontenay-sur-Mer, qui a été mis en demeure le 16 décembre 2022, par un courrier reçu le 21 décembre suivant, de produire un mémoire en défense. Cette mise en demeure est demeurée sans effet. L'inexactitude des faits allégués par M. A... ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier. Dans ces conditions, la commune de Fontenay-sur-Mer doit être réputée avoir admis leur exactitude matérielle conformément aux dispositions précitées de l'article R. 612-6 du code de justice administrative. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme doit être accueilli. 6. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, l'autre moyen invoqué par M. A... n'est pas susceptible, en l'état du dossier, de fonder cette annulation. 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 13 avril 2021 du maire de Fontenay-sur-Mer. Sur les conclusions à fin d'injonction : 8. Le présent arrêt, qui annule l'arrêté du 13 avril 2021 par lequel le maire de Fontenay-sur-Mer a retiré la décision tacite de non opposition à la déclaration préalable déposée par M. A..., a pour effet de rétablir dans l'ordonnancement juridique cette décision tacite de non-opposition. Dès lors, il n'y a pas lieu d'enjoindre au maire de Fontenay-sur-Mer de délivrer à M. A... une décision de non-opposition à sa déclaration préalable ni de réexaminer cette déclaration préalable. Sur les frais liés au litige : 9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen du 20 mai 2022 et l'arrêté du 13 avril 2021 du maire de Fontenay-sur-Mer sont annulés. Article 2 : Le surplus des conclusions présentées par M. A... est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Fontenay-sur-Mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Manche. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Buffet, présidente de chambre, - Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure, - M. Bréchot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. Le rapporteur, F.-X. BréchotLa présidente, C. Buffet La greffière, A. Lemée La République mande et ordonne au préfet de la Manche en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 22NT02294
JADE/CETATEXT000047720712.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 25 février 2022 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit. Par un jugement n° 2203030 du 22 septembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 25 février 2022. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 21 octobre 2022, le préfet d'Ille-et-Vilaine demande à la cour d'annuler ce jugement du 22 septembre 2022 du tribunal administratif de Rennes et de rejeter la demande de M. B.... Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que l'arrêté contesté était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé. Par un mémoire en défense, enregistré le 28 novembre 2022, M. A... B..., représenté par Me Le Verger, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'État sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il fait valoir que le moyen soulevé par le préfet d'Ille-et-Vilaine n'est pas fondé. M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 novembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Catroux a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant arménien né le 17 septembre 1984, est entré en France le 17 avril 2013, sous couvert d'un visa de court séjour. Il a sollicité l'asile auprès de la préfecture d'Ille-et-Vilaine le 5 juin 2013. Par un arrêté du 29 novembre 2013, le préfet d'Ille-et-Vilaine a prononcé sa réadmission vers l'Italie. L'intéressé a sollicité, le 13 mars 2014 son admission au séjour pour raisons de santé. Cette demande, qui a donné lieu à un avis défavorable du médecin inspecteur de l'agence régionale de santé, n'a pas été accueillie par l'administration. Le requérant a sollicité à nouveau le 9 août 2017 son admission au séjour pour raisons de santé. Il a alors fait l'objet, le 14 mai 2018, d'un arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français à l'encontre duquel il a exercé un recours rejeté par des jugements du tribunal administratif de Rennes des 30 octobre et 20 décembre 2018. Le 5 août 2019, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour ou son admission au séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 25 février 2022, le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, et a fixé le pays de destination. M. B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler cet arrêté. Par un jugement du 22 septembre 2022, dont le préfet d'Ille-et-Vilaine relève appel, le tribunal a fait droit à cette demande. Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal : 2. Si M. B... séjournait en France depuis près de neuf ans à la date de l'arrêté contesté, c'est en raison de son maintien sur ce territoire en situation irrégulière en dépit d'une décision de réadmission et d'une précédente obligation de quitter le territoire français prises à son encontre en 2013 et 2018. Ses activités bénévoles au sein notamment de l'école où est scolarisée sa fille et ses bonnes relations avec des personnes habitant dans la même commune, dont un nombre important a signé une pétition en faveur de sa régularisation, quelques louables qu'elles soient ne permettent pas d'établir qu'il serait particulièrement intégré, notamment au plan professionnel en France, pays dont il ne maîtrise pas la langue, où il ne bénéficiait d'aucune ressource tirée de son travail et où il vivait d'aides sociales, en particulier celle versée par le département d'Ille-et-Vilaine pour la prise en charge de sa fille. La seule circonstance que celle-ci soit scolarisée sur le territoire français ne démontre pas qu'elle ne pourrait poursuivre sa scolarité qu'en France. Dans ces conditions, et alors même que l'intéressé bénéficie d'un suivi médical en France, l'arrêté contesté n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. 3. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur ce moyen pour annuler l'arrêté contesté. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif. Sur les autres moyens soulevés contre l'arrêté contesté : 4. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui la fonde. Elle est, par suite, suffisamment motivée, comme, en conséquence des dispositions du second alinéa de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français. 5. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ont été prises après un examen particulier de la situation de l'intéressé. 6. En troisième lieu, le requérant ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration, des orientations générales, contenues dans la circulaire du 28 novembre 2012, adressées par le ministre de l'intérieur aux préfets pour les éclairer dans la mise en œuvre de leur pouvoir de régularisation, dès lors qu'il ne détient aucun droit à l'exercice de ce pouvoir. 7. En quatrième lieu, d'une part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". En outre, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". 8. D'autre part, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version en vigueur à la date de la décision contestée : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. /L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de plus : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ". Ce dernier article ne prescrit pas la délivrance d'un titre de plein droit mais laisse à l'administration un large pouvoir pour apprécier si l'admission au séjour d'un étranger répond à des considérations humanitaires ou si elle se justifie au regard des motifs exceptionnels dont l'intéressé se prévaut. 9. En l'espèce, il ne ressort pas des éléments produits par le requérant sur sa participation à des activités bénévoles ou ses bonnes relations avec des habitants de la commune où il vit, non plus que du formulaire de demande d'autorisation de travail pour des missions d'intérim en préparation de commande, que l'intéressé serait particulièrement intégré, notamment au plan professionnel en France ou qu'il y aurait noué des liens personnels d'une particulière intensité ou ancienneté. Si son épouse vit également sur le territoire français, elle faisait également à la date de l'arrêté contesté l'objet d'un refus de titre de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français. En revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant serait dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 28 ans Ainsi, et compte tenu également des conditions d'existence de l'intéressé en France, exposées au point 2, la décision refusant d'admettre au séjour M. B... et celle l'obligeant à quitter le territoire français ne portent pas au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle poursuit et ne méconnaît dès lors pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le refus de titre de séjour ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. De même, les éléments que fait valoir le requérant, tant sur la durée de son séjour en France que sa vie familiale et ses perspectives professionnelles ne constituant ni des considérations humanitaires, ni des motifs exceptionnels justifiant son admission exceptionnelle au séjour, la décision attaquée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Enfin, les décisions contestées n'ont pas pour conséquence de séparer le requérant de sa fille et d'empêcher que celle-ci poursuive une scolarité. Elles n'ont donc pas été prises en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. 10. Il résulte de ce qui précède que le préfet d'Ille-et-Vilaine est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 25 février 2022. Sur les frais d'instance : 11. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise, sur leur fondement, à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 22 septembre 2022 du tribunal administratif de Rennes est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée. Article 3 : Les conclusions de l'avocat de M. B..., présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Une copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le rapporteur X. Catroux Le président D. Salvi La greffière A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT033312
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... E... et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes, par deux recours distincts, d'annuler les arrêtés du préfet de la Loire-Atlantique du 22 décembre 2020 concernant chacun d'eux portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination et leur interdisant de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an. Par un jugement nos 2110078, 2110084 du 30 septembre 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes. Procédure devant la cour : I. Sous n°22NT03607, par une requête enregistrée le 25 novembre 2022, M. E..., représenté par Me Leudet, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2020 du préfet de la Loire-Atlantique ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans les deux mois à compter de cette notification sous la même astreinte et de lui remettre dans l'attente une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour : - elle est entachée d'un défaut d'examen complet et sérieux de sa situation personnelle ; - elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - elle méconnaît l'article 3, paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle est entachée d'un défaut d'examen complet et sérieux de sa situation personnelle ; - elle méconnaît les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; S'agissant de la décision fixant le pays de destination : - elle est illégale du fait de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; S'agissant de la décision portant interdiction de retour pour une durée d'un an : - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3, paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. Par un mémoire en défense enregistré le 8 mars 2023 le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'il s'en remet à ses écritures de première instance et il demande la confirmation du jugement du 30 septembre 2022. M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 octobre 2022. II. Sous n°22NT04074, par une requête enregistrée le 22 décembre 2022, Mme D..., représentée par Me Leudet, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2020 du préfet de la Loire-Atlantique ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans les deux mois à compter de cette notification sous la même astreinte et de lui remettre dans l'attente une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle invoque les mêmes moyens que dans l'instance visée ci-dessus. Par un mémoire en défense enregistré le 8 mars 2023 le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'il s'en remet à ses écritures de première instance et il demande la confirmation du jugement du 30 septembre 2022. Par une décision du 25 novembre 2022, le président du bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme D.... Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Penhoat, premier conseiller - et les observations de Me Dahani, substituant Me Leudet, représentant M. E... et assistant Mme D.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... E..., ressortissant arménien né le 8 janvier 1978 et sa compagne, Mme C... D..., ressortissante arménienne née le 22 décembre 1984, déclarent s'être installés en Russie en 1995 et être entrés en France le 12 juin 2015. Leur demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 18 décembre 2015, confirmées par des arrêts de la Cour nationale du droit d'asile du 24 novembre 2016. Les intéressés s'étant maintenus sur le territoire français et ayant demandé en vain, à plusieurs reprises, la régularisation de leur droit au séjour, ils ont sollicité en dernier lieu du préfet de la Loire-Atlantique, le 26 mai 2020, la délivrance de titres de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sur le fondement du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L.313-14 du même code, dans leur rédaction alors applicable. Par deux requêtes, enregistrées sous les numéros 22NT03697 et 22NT04074 et qu'il y a lieu de joindre, dès lors qu'elles sont dirigées contre le même jugement, ils relèvent appel du jugement du 30 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes respectives tendant à l'annulation des arrêtés du 22 décembre 2020 par lesquels le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de leur délivrer des titres de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et leur a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an. Sur la légalité des arrêtés contestés : En ce qui concerne les décisions portant refus de titre de séjour : 2. En premier lieu, contrairement à ce que soutiennent M. E... et Mme D..., il ne ressort pas des termes des décisions contestées que le préfet de la Loire-Atlantique n'aurait pas procédé à un examen particulier de leur situation personnelle et familiale avant de prendre à leur encontre les décisions portant refus de titre de séjour. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". 4. M. E... et Mme D... font valoir leur présence en France depuis 2015, la scolarisation de leurs deux enfants nés en 2015 et 2017, leurs efforts d'intégration, et invoquent le suivi psychiatrique et médicamenteux de Mme D... ainsi que le trouble anxieux d'intensité sévère associé à un retard sévère de langage oral dont souffre une de leurs filles. Toutefois, la durée de séjour de M. E... et Mme D... en France n'est due essentiellement qu'au fait qu'ils n'ont pas déféré aux précédentes mesures d'éloignements dont ils ont fait l'objet. Ils peuvent poursuive normalement leur vie privée et familiale avec leurs deux enfants à l'étranger et en particulier en Arménie alors même qu'ils n'y ont plus aucun membre de leur famille et dès lors qu'ils ne démontrent pas que leurs enfants ne pourraient pas y poursuivre leur scolarité et que Mme D... ou la jeune A... ne pourraient y bénéficier d'un traitement approprié à leur état de santé respectif. M. E... étant âgé de plus de quarante ans, la circonstance que sa mère ainsi qu'un de ses frères résident régulièrement en France ne saurait caractériser une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale. Enfin, les intéressés ne justifient pas d'une particulière insertion sur le territoire français. Ainsi, les décisions contestées n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences des décisions contestées sur leur situation personnelle doivent être écartés. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ". 6. Au regard des éléments mentionnés au point 4, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que la situation des requérants ne répondait pas à des considérations humanitaires ou ne relevait pas de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile cité ci-dessus doit être écarté. 7. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4 du présent arrêt, et alors que les décisions contestées ne font nullement obstacle au maintien de la cellule familiale, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions contestées méconnaissent les stipulations de l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale des droits de l'enfant. En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français : 8. En premier lieu, il ne ressort pas des termes des décisions contestées que le préfet de la Loire-Atlantique n'aurait pas procédé à un examen particulier de leur situation personnelle et familiale avant de prendre à leur encontre les décisions portant obligation de quitter le territoire français. 9. En deuxième lieu, les décisions portant refus de titre de séjour n'étant pas annulées, le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour doit être écarté. 10. En troisième et dernier lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit que le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les stipulations de l'article 3, paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, en prenant à l'encontre des intéressés les décisions portant éloignement contestées. Pour les mêmes motifs, les décisions ne sont pas davantage entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des intéressés. En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination : 11. Les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulées, M. E... et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que les décisions fixant le pays de destination doivent être annulées par voie de conséquence. En ce qui concerne les décisions portant interdiction de retour sur le territoire pour une durée d'un an : 12. En premier lieu, les décisions portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulées, M. E... et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que les décisions portant interdiction de retour sur le territoire pour une durée d'un an doivent être annulées par voie de conséquence. 13. En deuxième lieu, il convient d'écarter, par adoption de motifs retenus par les premiers juges, le moyen tiré de ce que le préfet de la Loire-Atlantique a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, moyen que M. E... et Mme D... réitèrent en appel sans apporter d'élément nouveau. 14. En troisième et dernier lieu, il résulte de ce qui a été démontré précédemment que M. E... et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que le préfet, en leur interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an, aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Pour les mêmes motifs, les décisions ne sont pas davantage entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle et familiale des requérants. 15. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées. DECIDE : Article 1er : Les requêtes n° 22NT03697 et n° 22NT04074 de M. E... et Mme D... sont rejetées. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Mme C... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, présidente de chambre, - M. Geffray, président-assesseur, - M. Penhoat, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le rapporteur A. PenhoatLa présidente I. Perrot La greffière S. Pierodé La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 1 Nos 22NT03697, 22NT04074 2 1
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la réduction à hauteur de 5 799 euros des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017 et la réduction en conséquence des pénalités correspondantes, ainsi que la décharge de la majoration de 40 % affectant la contribution à l'audiovisuel public qui lui a été réclamée au titre des années 2016 et 2017. Par un jugement n° 2002233 du 20 mai 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 13 juillet 2022, 8 et 28 mars, 7 et 14 avril 2023 M. B..., représenté par Me Douet, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il porte, en droits et pénalités, sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; 2°) de prononcer la réduction sollicitée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017 et la réduction en conséquence des pénalités correspondantes ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que l'activité de gîtes qu'il exploite n'entre pas dans les prévisions du b. du 4° de l'article 261 D du code général des impôts. Par des mémoires en défense enregistrés les 18 janvier, 24 mars, 6 et 17 avril 2023 le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il soutient que le moyen soulevé par M. B... n'est pas fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picquet, - et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017, au titre de son activité de location de gîtes et de chambres d'hôtes. L'administration, ayant estimé que l'activité de location de gîtes n'entrait pas dans le champ de l'exonération prévue au 4° de l'article 261 D du code général des impôts, a mis à la charge de M. B... les rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017 résultant de la remise en cause de l'exonération de cette activité. Le requérant a demandé au tribunal administratif de Caen la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités correspondantes résultant de cette remise en cause. Par ailleurs, au terme de la vérification de comptabilité, l'administration a également mis à la charge de M. B... des contributions à l'audiovisuel public au titre des années 2016 et 2017. Le requérant a demandé au tribunal la décharge de la majoration de 40 % affectant ces contributions. Par un jugement du 20 mai 2022, le tribunal a rejeté sa demande. M. B... fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les pénalités correspondantes. Sur la charge de la preuve : 2. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". Il résulte de l'instruction que les impositions litigieuses ont été établies selon la procédure de taxation d'office prévue au 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales dès lors que M. B... s'est abstenu, après mise en demeure, de souscrire les déclarations de recettes prévues en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Par suite, la preuve du caractère exagéré des impositions incombe au requérant. Sur le bien-fondé des impositions : 3. D'une part, aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. - Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ". Aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention (...). / Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien meuble corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence. ". 4. D'autre part, aux termes de l'article 261 D du code général des impôts : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) / 4° Les locations occasionnelles, permanentes ou saisonnières de logements meublés ou garnis à usage d'habitation. / Toutefois, l'exonération ne s'applique pas : (...) / b. Aux prestations de mise à disposition d'un local meublé ou garni effectuées à titre onéreux et de manière habituelle, comportant en sus de l'hébergement au moins trois des prestations suivantes, rendues dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d'hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle : le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle. (...) ". 5. Les dispositions citées au point précédent doivent être interprétées, pour le respect des objectifs énoncés par les dispositions de l'article 135 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (sixième directive) tels qu'interprétés par la Cour de justice de l'Union européenne, de manière à garantir que ne soient exonérés du paiement de la taxe que les assujettis dont l'activité ne remplit pas la ou les fonctions essentielles d'une entreprise hôtelière et qui ne sont donc pas en concurrence potentielle avec ces dernières entreprises. 6. Les critères utiles à la distinction entre la location d'un logement meublé susceptible d'être exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des dispositions précitées et la mise à disposition d'un tel logement dans des conditions l'apparentant à un hébergement hôtelier, tels que définis par la loi et précisés par la jurisprudence, n'exigent pas que les prestations para-hôtelières soient effectivement rendues, mais seulement que le loueur en meublé propose de telles prestations à ses clients et dispose des moyens nécessaires pour répondre à leurs éventuelles demandes. 7. M. B... exerce au " Manoir de Condé " une activité de location de chambres d'hôtes et de location de gîtes, seule cette dernière activité étant en litige. Il est constant qu'il assurait auprès des clients des gîtes la fourniture de linge de maison et la réception. Il est également constant qu'il fournissait aux clients de ses chambres d'hôtes les petits déjeuners. Le point de contestation porte toutefois sur la fourniture ou la possibilité de fournir des petits déjeuners s'agissant des gîtes. 8. Il résulte de l'instruction, en particulier des photographies produites, que ni la configuration des lieux, en particulier la distance d'une trentaine de mètres seulement entre le manoir et les deux gîtes en litige, ni la disposition de la cuisine du manoir ne permettent d'établir que la préparation de petits déjeuners qui seraient ensuite apportés aux clients des gîtes serait impossible. Le facturier produit n'est pas davantage probant dès lors que le requérant admet lui-même qu'il ne fait jamais apparaitre de manière distincte les petits déjeuners, même pour les chambres d'hôtes. De plus, si M. B... produit des attestations de clients des gîtes, dont au demeurant l'une seulement indique un séjour en 2017 et précise qu'il ne leur a pas été proposé de petits déjeuners et qu'ils ne les ont pas demandés, ces attestations ne permettent pas d'établir que l'intéressé ne disposait pas des moyens nécessaires pour proposer ce service. Enfin, l'attestation de l'expert-comptable du 31 mars 2023 porte sur une période postérieure à la période vérifiée et n'est pas suffisamment précise sur les éléments en litige. Ainsi, alors même que les gîtes disposent de leur propre cuisine, l'activité de location de gîtes du requérant doit être regardée comme comportant, en plus de l'hébergement et au moins de manière potentielle, trois des prestations mentionnées à l'article 261 D du code général des impôts, en particulier celle de la fourniture des petits déjeuners. Par conséquent, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'administration ne pouvait remettre en cause l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée dont il bénéficiait. 9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, présidente de chambre, - M. Geffray, président-assesseur, - Mme Picquet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. La rapporteure P. PicquetLa présidente I. Perrot La greffière S. Pierodé La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 1 2 N° 22NT02242 1
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société civile immobilière (SCI) Edcla a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 30 août 2021 par laquelle le maire de Caen a rejeté sa demande tendant au retrait du permis de construire initial du 9 mars 2017, d'un permis de construire modificatif tacite né le 31 janvier 2018 et des permis de construire modificatifs du 25 septembre 2019 et du 10 mars 2020 qu'il a accordés à la société Bouygues Immobilier en vue de la construction, après démolition des bâtiments existants, de deux bâtiments collectifs d'habitation sur un terrain situé 75, boulevard Yves Guillou à Caen. Par une ordonnance n° 2102405 du 19 mai 2022, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés le 15 juillet 2022, le 16 septembre 2022, le 13 décembre 2022 et le 30 janvier 2023, la société Edcla, représentée par Me Gorand, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance du 19 mai 2022 du président du tribunal administratif de Caen ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 30 août 2021 du maire de Caen ; 3°) d'enjoindre au maire de Caen de retirer les permis de construire qu'il a accordés à la société Bouygues Immobilier, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte, passé ce délai, de 300 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa demande de retrait, dans les mêmes conditions ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Caen la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le président du tribunal administratif ne pouvait pas valablement lui opposer l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt n° 18NT02434 du 2 avril 2020 de la cour, une demande tendant au retrait, pour fraude, d'autorisations d'urbanisme n'ayant pas le même objet qu'une demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, d'autorisations d'urbanisme ; - elle dispose d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le refus opposé à sa demande de retrait pour fraude des permis accordés à la société Bouygues Immobilier ; - sa demande de première instance n'était pas tardive, la décision contestée n'étant pas confirmative des décisions du maire de Caen ayant rejeté les recours gracieux qu'elle avait précédemment formés contre les permis de construire accordés à la société Bouygues Immobilier ; - la décision contestée est entachée d'illégalité dès lors que les permis de construire accordés à la société Bouygues Immobilier ont été obtenus par fraude : la société pétitionnaire a volontairement inclus, sans le faire apparaître clairement, une partie du domaine public dans l'emprise de son projet en vue d'assurer la conformité de celui-ci aux dispositions de l'article UB 6 et des points 12.3 et 12.5 de l'article UB 12 du règlement du plan local d'urbanisme, mais aussi de réaliser une plus-value financière d'un montant de 330 000 euros ; - la demande de la commune de Caen tendant à ce que la SCI Edcla soit condamnée à verser une amende pour recours abusif d'un montant de 10 000 euros est irrecevable. Par des mémoires en défense, enregistrés le 10 novembre 2022 et le 13 janvier 2023, la société Bouygues Immobilier, représentée par Me Marais, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la SCI Edcla au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - le président du tribunal administratif a pu valablement opposer l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt n° 18NT02434 du 2 avril 2020 de la cour à la demande de la SCI Edcla, l'objet et la cause de celle-ci étant, en réalité, identiques à celle ayant donné lieu à l'instance close par cet arrêt de la cour ; - la demande de première instance était entachée d'irrecevabilité pour défaut d'intérêt à agir de la SCI Edcla, cette demande n'étant pas motivée par des considérations urbanistiques ; - si le plan de masse du projet produit à l'appui de la demande du permis de construire initial était inexact quant à la limite de propriété, celle-ci ne correspondant pas à la limite cadastrale, cette inexactitude ne saurait, en tout état de cause, caractériser une fraude. Par des mémoires en défense, enregistrés le 15 janvier 2023 et le 10 février 2023, le second n'ayant pas été communiqué, la commune de Caen, représentée par Me Bouthors-Neveu, conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la SCI Edcla au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 3°) à la condamnation de la SCI Edcla au versement d'une amende pour recours abusif d'un montant de 10 000 euros. Elle fait valoir que : - le président du tribunal administratif a pu valablement opposer l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt n° 18NT02434 du 2 avril 2020 de la cour à la demande de la SCI Edcla, l'objet de celle-ci étant, en réalité, identique à celle ayant donné lieu à l'instance close par cet arrêt de la cour ; - la demande de première instance était également entachée d'irrecevabilité en raison de sa tardiveté, la décision du 30 août 2021 du maire de Caen rejetant la demande de retrait, pour fraude, des permis accordés à la société Bouygues Immobilier étant, en réalité, purement confirmative des décisions, devenues définitives, par lesquelles il avait auparavant rejeté les recours gracieux formés par la SCI Edcla contre ces permis ; - la demande de première instance était entachée d'irrecevabilité pour défaut d'intérêt à agir de la SCI Edcla, cette demande n'étant pas motivée par des considérations urbanistiques ; - les permis de construire n'ont pas été obtenus par fraude ; - la décision contestée n'est, en tout état de cause, pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - la demande de la SCI Edcla présente un caractère abusif dès lors qu'elle n'a pour objet que de retarder encore la réalisation d'un projet immobilier. Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que le président du tribunal administratif ne pouvait pas rejeter par ordonnance prise sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, la demande présentée par la SCI Edcla pour le motif tiré du non-respect de l'autorité de la chose jugée, un tel motif se rattachant, non pas à la recevabilité de la demande de première instance, mais à son bien-fondé. Une note en délibéré, présentée par la société Edcla, a été enregistrée le 18 avril 2023. Une note en délibéré, présentée par la société Bouygues Immobilier, a été enregistrée le 22 avril 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Bréchot, - les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique, - et les observations de Me Gorand, représentant la SCI Edcla, et les observations de Me Marais, représentant la société Bouygues Immobilier. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 9 mars 2017, le maire de Caen a délivré à la société Bouygues Immobilier un permis de construire en vue de la construction, après démolition des bâtiments existants, de deux bâtiments collectifs d'habitation sur un terrain situé 75, boulevard Yves Guillou à Caen. La société civile immobilière (SCI) Edcla a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler cet arrêté. Par un jugement n° 1701484 du 3 mai 2018, le tribunal a rejeté sa demande. Entre-temps, le maire de Caen avait tacitement délivré à la société Bouygues Immobilier, le 31 janvier 2018, un permis modificatif portant sur divers aspects du projet. La SCI Edcla a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler ce permis modificatif. Par une ordonnance du 18 mars 2019, le président de ce tribunal a transmis cette demande à la cour administrative d'appel de Nantes, en application de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme, dès lors que la SCI Edcla avait relevé appel du jugement rendu le 3 mai 2018 par le même tribunal ayant rejeté ses conclusions d'annulation du permis de construire initial du 9 mars 2017. Par un arrêté du 25 septembre 2019, le maire de Caen a délivré à la société Bouygues Immobilier un deuxième permis modificatif portant sur les clôtures et l'emplacement des balcons du projet de construction. La SCI Edcla a demandé l'annulation de cet arrêté dans le cadre de l'instance d'appel alors pendante contre le jugement du 3 mai 2018 du tribunal administratif de Caen. Par un arrêt no 18NT02434 du 2 avril 2020, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'ensemble des conclusions à fin d'annulation présentées par la SCI Edcla. Par une décision no 443242 du 7 juillet 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, n'a pas admis le pourvoi en cassation formé contre cet arrêt. Par un courrier du 8 juillet 2021, la SCI Edcla a demandé au maire de Caen de retirer, pour fraude, le permis de construire initial du 9 mars 2017 et les trois permis modificatifs accordés, les 31 janvier 2018, 25 septembre 2019 et 10 mars 2020, à la société Bouygues Immobilier en vue de la réalisation de son projet de construction sur le terrain situé 75, boulevard Yves Guillou à Caen. Cette demande a été rejetée par une décision du 30 août 2021 du maire de Caen. La SCI Edcla relève appel de l'ordonnance du 19 mai 2022 par laquelle le président du tribunal administratif de Caen a rejeté, sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, sa demande tendant à l'annulation de cette décision de refus de retrait. Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : 2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : / (...) / 4º Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; / (...). " 3. Pour rejeter par ordonnance, sur le fondement de ces dispositions, la demande de la SCI Edcla tendant à l'annulation de la décision du 30 août 2021 par laquelle le maire de Caen a refusé de retirer, pour fraude, les permis de construire accordés à la société Bouygues Immobilier, le président du tribunal administratif de Caen a relevé que la nouvelle demande de la SCI Edcla avait le même objet que celles ayant donné lieu à l'arrêt no 18NT02434 du 2 avril 2020 de la cour administrative d'appel de Nantes, s'appuyait sur le même moyen, tiré de l'existence d'une prétendue fraude, qui avait déjà été expressément écarté par la cour dans cet arrêt, et, enfin, mettait en cause les mêmes parties. Il en a déduit que l'autorité de la chose jugée qui s'attachait à cet arrêt du 2 avril 2020 de la cour, devenu définitif, entachait la demande de la SCI Edcla d'irrecevabilité manifeste. Toutefois, l'exception de chose jugée ne relève pas de la recevabilité de la requête soumise à la juridiction administrative mais de son bien-fondé. Dès lors, le président du tribunal administratif de Caen ne pouvait pas se fonder sur l'exception de chose jugée pour rejeter comme étant manifestement irrecevable, par une ordonnance prise sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, la demande présentée par la SCI Edcla devant ce tribunal. 4. Par ailleurs, d'une part, la SCI Edcla, voisine immédiate du projet, justifiait, eu égard à la nature des constructions en cause consistant en deux bâtiments collectifs d'habitation dont l'édification est de nature à porter atteinte à ses conditions d'occupation et de jouissance de son bien, d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le refus de retirer les autorisations d'urbanisme accordées à la société Bouygues Immobilier. D'autre part, la décision contestée, rejetant la demande de la SCI Edcla tendant au retrait du permis de construire initial du 9 mars 2017 et des permis de construire modificatifs accordés à la société Bouygues Immobilier pour le motif qu'ils auraient été obtenu par fraude, n'est pas confirmative des précédentes décisions de rejet des recours gracieux formés par la SCI Edcla contre ces permis. Le recours dirigé contre la décision contestée du 30 août 2021 du maire de Caen n'est donc pas entaché de tardiveté. 5. Par suite, la requête de la SCI Edcla n'étant entachée d'aucune irrecevabilité manifeste, elle ne pouvait faire l'objet d'un rejet par ordonnance sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. L'ordonnance attaquée est, par suite, entachée d'incompétence et doit, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen d'irrégularité invoqué par la société requérante, être annulée. 6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SCI Edcla devant le tribunal administratif de Caen. Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 30 août 2021 du maire de Caen : 7. D'une part, un tiers justifiant d'un intérêt à agir est recevable à demander, dans le délai du recours contentieux, l'annulation de la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé de faire usage de son pouvoir d'abroger ou de retirer un acte administratif obtenu par fraude, quelle que soit la date à laquelle il l'a saisie d'une demande à cette fin. Dans un tel cas, il incombe au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, d'une part, de vérifier la réalité de la fraude alléguée et, d'autre part, de contrôler que l'appréciation de l'administration sur l'opportunité de procéder ou non à l'abrogation ou au retrait n'est pas entachée d'erreur manifeste, compte tenu notamment de la gravité de la fraude et des atteintes aux divers intérêts publics ou privés en présence susceptibles de résulter soit du maintien de l'acte litigieux soit de son abrogation ou de son retrait. 8. D'autre part, l'autorité administrative saisie d'une demande de permis de construire peut relever les inexactitudes entachant les éléments du dossier de demande relatifs au terrain d'assiette du projet, notamment sa surface ou l'emplacement de ses limites séparatives, et, de façon plus générale, relatifs à l'environnement du projet de construction, pour apprécier si ce dernier respecte les règles d'urbanisme qui s'imposent à lui. En revanche, le permis de construire n'ayant d'autre objet que d'autoriser la construction conforme aux plans et indications fournis par le pétitionnaire, elle n'a à vérifier ni l'exactitude des déclarations du demandeur relatives à la consistance du projet à moins qu'elles ne soient contredites par les autres éléments du dossier joint à la demande tels que limitativement définis par les articles R. 431-4 et suivants du code de l'urbanisme, ni l'intention du demandeur de les respecter, sauf en présence d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date à laquelle l'administration se prononce sur la demande d'autorisation. 9. La SCI Edcla soutient que la société pétitionnaire a volontairement inclus dans l'assiette foncière du projet, telle que figurant sur le plan de masse du dossier de permis de construire initial, une bande de terrain, d'une superficie de quinze mètres carrés, qui se situe à l'extérieur des limites cadastrales de la parcelle cadastrée section NS n° 106 et qui appartiendrait, selon elle, au domaine public, en vue d'induire en erreur le service instructeur sur la conformité du projet aux dispositions de l'article UB 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Caen, relatif au respect d'une marge de recul de 3 mètres par rapport à l'alignement, et aux dispositions des points 12.3 et 12.5 de l'article UB 12 du même règlement, relatifs respectivement à la surface minimale exigée pour les locaux destinés au stationnement des deux roues et à la possibilité de réaliser au sein de la marge de recul une seule place de stationnement des véhicules motorisés à condition d'être " située sur l'accès automobile du terrain ". Cependant, à supposer même que la délimitation de l'assiette foncière soit, à l'endroit litigieux, en totalité ou en partie inexacte, une telle inexactitude n'aurait pas été, en l'espèce, de nature à fausser l'appréciation portée par l'administration sur la conformité du projet à la marge de recul minimale de trois mètres identifiée par le document graphique du plan local d'urbanisme, dont le respect est imposé par l'article UB 6 du règlement du plan, dès lors que la délimitation de cette marge de recul est fixée au regard de l'alignement figurant sur le document graphique et non au regard de l'emplacement exact de la limite de propriété. L'inexactitude alléguée est également restée sans incidence sur le respect des dispositions des points 12.3 et 12.5 de l'article UB 12 du règlement du plan local d'urbanisme, dès lors qu'elle n'a, en tout état de cause, pas eu pour effet d'inclure dans la marge de recul une quelconque surface du local destiné au stationnement des deux roues ou des places de stationnement. En outre, et contrairement à ce qui est soutenu par la SCI Edcla, l'éventuelle inclusion, à tort, de la bande de terrain en cause dans l'assiette foncière du projet n'a pas eu pour effet d'en transférer la propriété à la société pétitionnaire et, partant, de permettre à celle-ci de réaliser une plus-value financière indue, les autorisations d'urbanisme étant délivrées sous réserve du droit des tiers. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'erreur alléguée relative à la délimitation de l'assiette foncière aurait été commise sciemment. Ainsi, eu égard à l'absence d'incidences des inexactitudes alléguées et d'intention frauduleuse, le moyen tiré de ce que les permis de construire accordés à la société Bouygues Immobilier auraient été obtenus par fraude ne peut qu'être écarté. 10. Il résulte de ce qui précède que la SCI Edcla n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 30 août 2021 du maire de Caen. Sur les conclusions à fin d'injonction : 11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par la SCI Edcla, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées. Sur l'amende pour recours abusif : 12. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros. ". 13. La faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de la commune de Caen tendant à ce que la société requérante soit condamnée à une telle amende ne sont pas recevables. 14. En l'espèce, la demande présentée par la SCI Edcla devant le tribunal administratif de Caen présente un caractère abusif. Il y a lieu, par suite, de la condamner à payer une amende de 3 000 euros. Sur les frais liés à l'instance : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Caen, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la SCI Edcla au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. 16. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Edcla le versement d'une somme de 1 500 euros à la commune de Caen et d'une somme de 1 500 euros à la société Bouygues Immobilier au titre des mêmes dispositions. D É C I D E : Article 1er : L'ordonnance du 19 mai 2022 du président du tribunal administratif de Caen est annulée. Article 2 : La demande présentée par la SCI Edcla devant le tribunal administratif de Caen est rejetée. Article 3 : La SCI Edcla est condamnée à payer une amende de 3 000 euros. Article 4 : La SCI Edcla versera une somme de 1 500 euros à la commune de Caen et une somme de 1 500 euros à la société Bouygues Immobilier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par les parties est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Edcla, à la commune de Caen, à la société Bouygues Immobilier et au directeur départemental des finances publiques du Calvados. Délibéré après l'audience du 11 avril 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Buffet, présidente de chambre, - Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure, - M. Bréchot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. Le rapporteur, F.-X. BRÉCHOT La présidente, C. BUFFET La greffière, A. LEMEE La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22NT02265 [RJ1]Cf. CE, Sect., 6 décembre 1957, Malet, Rec. p. 659......[RJ2]Cf. sol. contr. CAA Lyon, 25 février 1991, Derriano, n°89LY01959, T., p. 1158.
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 10 mars 2021 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque ce délai sera expiré et lui a interdit de revenir sur le territoire français durant dix-huit mois. Par un jugement n° 2104309 du 19 avril 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 25 novembre 2022 M. A..., représenté par Me Renard, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 10 mars 2021 du préfet de Maine-et-Loire ; 3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de lui accorder un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans le même délai et sous la même astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros au profit de son avocat, Me Renard, en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : sur la régularité du jugement attaqué : - le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé s'agissant de la réponse apportée au moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa situation et de la réponse apportée au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile soulevés à l'encontre du refus de titre de séjour, de la réponse apportée au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle, soulevés à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, et de la réponse apportée aux moyens dirigés contre l'interdiction de retour en France ; - les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire sur sa situation personnelle ; sur la décision portant refus de titre de séjour : - la décision n'est pas suffisamment motivée ; - la décision n'a pas été précédée de l'examen de sa situation personnelle ; - la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision méconnaît l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences portées à la situation personnelle de l'intéressé ; sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : - l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ; - la décision n'a pas été précédée de l'examen de sa situation personnelle et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle ; - la décision méconnaît l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la décision méconnaît le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; sur la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire : - l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français la prive de base légale ; - la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle ; sur la décision fixant le pays de destination : - la décision est insuffisamment motivée ; - l'illégalité des refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français prive de base légale la décision fixant le pays de destination ; - la décision n'a pas été précédée de l'examen particulier de sa situation ; sur la décision lui interdisant de retourner sur le territoire français durant dix-huit mois : - la décision est insuffisamment motivée ; - l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision lui refusant un délai de départ volontaire prive de base légale la décision d'interdiction de retour en France ; - la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation de l'intéressé. Par un mémoire en défense enregistré le 7 mars 2023, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Par une décision du 25 octobre 2022, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale des droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de Mme Picquet a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant azerbaidjanais né le 22 mai 1963, déclare être entré en France le 26 mai 2015. Sa demande d'asile et ses deux demandes de réexamen de demande d'asile ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile. Le 12 septembre 2017, M. A... a fait l'objet d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, puis, le 11 juillet 2018, d'une nouvelle décision de refus de séjour. Le 4 septembre 2018, après que M. A... a sollicité une troisième fois le réexamen de sa demande d'asile, le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Le 7 septembre 2020, M. A... a sollicité auprès du préfet de Maine-et-Loire son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 10 mars 2021 dont M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation, le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination vers lequel il pourra être reconduit d'office et lui a fait interdiction de revenir sur le territoire français durant dix-huit mois. Par un jugement du 19 avril 2022, le tribunal a rejeté sa demande. M. A... fait appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Les premiers juges ont répondu de manière suffisante, respectivement aux points 4 et 5 du jugement attaqué, au moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation du requérant et au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile soulevés à l'encontre du refus de titre de séjour. Les premiers juges ont également répondu, de manière suffisamment motivée, au point 11 du jugement attaqué, au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de l'intéressé, soulevés à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français. Enfin, le jugement est suffisamment motivé, dans ses points 15 à 18, s'agissant de la réponse apportée aux moyens dirigés contre l'interdiction de retour en France. Ce jugement est, dès lors, conforme aux dispositions précitées de l'article L. 9 du code de justice administrative. 3. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... a soulevé en première instance le moyen, qui n'est pas inopérant, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire sur sa situation personnelle. Les premiers juges n'ont pas visé ce moyen dans le jugement attaqué et n'y ont pas répondu. Dès lors, M. A... est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité en raison d'un défaut de réponse à un moyen. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il se prononce sur la légalité de la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire opposée par l'arrêté contesté du 10 mars 2021. 4. Il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire opposée par l'arrêté contesté du 10 mars 2021 et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées par M. A... devant la cour. Sur le refus de titre de séjour : 5. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, les moyens tirés de ce que la décision n'est pas suffisamment motivée et de ce qu'elle n'a pas été précédée de l'examen de sa situation personnelle, que M. A... réitère en appel sans apporter d'éléments nouveaux. 6. En second lieu, Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / (...). ". 7. M. A... déclare être entré en France le 26 mai 2015, soit depuis plus de cinq ans à la date de l'arrêté contesté. Il se prévaut de la présence en France de sa fille, de son gendre, de ses petits-enfants, tous de nationalité française, chez qui il réside et qui lui apportent un soutien financier, et de son fils. S'il soutient que son fils est titulaire d'un titre de séjour et s'est marié avec une ressortissante française, ces circonstances sont postérieures à la décision contestée. Il a produit une promesse d'embauche en contrat de travail à durée indéterminée et à temps complet pour un emploi de boucher, emploi qu'il occupait déjà dans son pays d'origine et alors que ce secteur connaît des difficultés de recrutement. Toutefois, alors que son épouse fait également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et qu'une de ses filles réside en Azerbaïdjan, aucun des faits dont se prévaut le requérant ne peut être regardé, à la date de l'arrêté contesté, comme constituant des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En particulier, le certificat d'un médecin généraliste daté du 23 juin 2022 indiquant que l'état de santé de M. A... exige un important suivi médical nécessitant qu'il reste en France est insuffisamment étayé. Au vu de tous ces éléments, les moyens tirés de ce que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de ce qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés. Sur l'obligation de quitter le territoire français : 8. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, le moyen tiré de ce que la décision en cause n'a pas été précédée de l'examen de la situation de l'intéressé, que M. A... réitère en appel sans apporter d'éléments nouveaux. 9. En deuxième lieu, il résulte des points 5 à 7 que le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté. 10. En troisième et dernier lieu, les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de la mesure sur la situation personnelle du requérant, de ce qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 7. Sur la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire : 11. En premier lieu, il résulte des points 5 à 10 que le moyen tiré de ce que la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté. 12. En second lieu, si le requérant se prévaut des circonstances indiquées au point 7, elles ne sont pas de nature à entacher la décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle. Sur la décision fixant le pays de destination : 13. En premier lieu, la décision fixant le pays de destination mentionne la nationalité du requérant, vise notamment l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle indique en particulier que M. A... n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Une telle motivation, alors que l'intéressé n'établit ni même n'allègue avoir communiqué à l'administration des éléments particuliers de sa situation qui n'auraient pas été pris en considération ou qui auraient pu conduire le préfet à en faire état dans la décision, est suffisante. Ainsi, le moyen tiré de ce que la décision contestée n'est pas suffisamment motivée doit être écarté. Au vu de cette motivation, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de M. A... doit également être écarté. 14. En second lieu, il résulte des points 5 à 10 que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté. Sur l'interdiction de retour en France pendant une durée de dix-huit mois : 15. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, le moyen tiré de ce que la décision en cause n'était pas suffisamment motivée, que M. A... réitère en appel sans apporter d'éléments nouveaux. 16. En deuxième lieu, il résulte des points 5 à 12 que le moyen tiré de ce que l'interdiction de retour en France doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision lui refusant un délai de départ volontaire doit être écarté. 17. En troisième et dernier lieu, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. 18. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que les moyens tirés de ce que la décision en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant doivent être écartés. 19. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 10 mars 2021 du préfet de Maine-et-Loire en tant qu'il porte refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de titre de séjour, de l'obligation de quitter le territoire français, de la décision fixant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour en France pendant une durée de dix-huit mois. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application combinée des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2104309 du 19 avril 2022 du tribunal administratif de Nantes est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 10 mars 2021 en tant qu'il porte refus d'octroi d'un délai de départ volontaire. Article 2 : Les conclusions de M. A... présentées devant le tribunal administratif de Nantes et tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 10 mars 2021 en tant qu'il porte refus d'octroi d'un délai de départ volontaire ainsi que le surplus de ses conclusions présentées en appel sont rejetés. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet de Maine-et-Loire. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, présidente de chambre, - M. Geffray, président-assesseur, - Mme Picquet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. La rapporteure P. Picquet La présidente I. PerrotLa greffière S. Pierodé La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT03700
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Brest à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi du fait de la prise en charge de D..., sa mère, par cet établissement où elle est décédée le 21 août 2017. Par un jugement n°1905344 du 1er avril 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 juin et 12 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Tosi, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 1er avril 2022 ; 2°) à titre principal, de condamner le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Brest à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi à la suite du décès de D... ; 3°) à titre subsidiaire, d'ordonner avant dire droit une expertise médicale afin notamment de déterminer si des fautes ont été commises dans la prise en charge de D... et de déterminer si ces fautes lui ont fait perdre une chance sérieuse de guérison des lésions dont elle était atteinte et d'évaluer l'ampleur de cette perte de chance ; 4°) de mettre à la charge du CHRU de Brest la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier, dès lors que le tribunal lui a fait supporter à tort la charge de preuve et qu'il lui appartenait d'ordonner, le cas échant, une expertise médicale ou une autre mesure d'instruction pour établir une éventuelle responsabilité du centre hospitalier et le lien de causalité avec le préjudice invoqué ; - le CHRU de Brest a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité, dès lors que : * aucun diagnostic n'a été établi et aucun examen médical répondant à la gravité et à l'urgence de la situation n'a été réalisé préalablement à la décision d'arrêt des soins ; * la décision de ne pas mettre en œuvre de protocole de soins médicaux n'était pas justifiée, dès lors qu'il n'est pas établi que cette mise en œuvre aurait constitué une obstination déraisonnable au sens de l'article L. 1110-5-1 du code de la santé publique, * la décision d'arrêt des soins a méconnu ces dispositions et celles de l'article R. 4127-37-2 du code de la santé publique, dès lors que la procédure collégiale n'a pas été mise en œuvre et que l'avis du tuteur de D...n'a pas été recueilli ; - les fautes commises par l'établissement public ont été la cause directe et certaine de l'entier dommage subi par D... ou, à tout le moins, d'une perte de chance d'éviter ce dommage ; - à titre subsidiaire, il conviendra d'ordonner une expertise médicale avant dire droit pour déterminer notamment si des fautes ont été commises dans la prise en charge de (PSEUDO)D...(PSEUDO) et de déterminer si ces fautes lui ont fait perdre une chance sérieuse de guérison des lésions dont elle était atteinte et d'évaluer l'ampleur de cette perte de chance, dès lors qu'il est très probable qu'elle soit décédée d'une autre pathologie que l'accident vasculaire cérébral (AVC) suspecté et notamment du diabète dont elle souffrait et qu'à supposer même qu'elle soit décédée d'un AVC, il est probable qu'elle aurait pu être soignée avec succès de cette dernière affection ; - à la suite du décès de sa mère, il a subi un préjudice moral qui doit être évalué à la somme de 50 000 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 23 septembre 2022, le centre hospitalier régional universitaire de Brest, représenté par Me Le Prado, conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - le moyen tiré de ce que le jugement attaqué est irrégulier en ce que le tribunal a fait porter sur le seul requérant la charge de la preuve est inopérant, dès lors ces critiques relèvent en réalité de son bien-fondé, et non de sa régularité et, au demeurant, manquent en fait ; - une expertise médicale ne serait pas utile ; - à supposer même que la décision d'arrêt de soins n'ait pas respecté les dispositions du code de la santé publique, à défaut notamment de l'appel d'un médecin extérieur en qualité de consultant, il n'est pas sérieusement discutable que cette décision aurait pu néanmoins être légalement prise, en l'absence de ce vice de procédure, dès lors que l'intéressée ainsi que les membres de sa famille avait fait préalablement connaître leur opposition à toute réanimation en cas d'aggravation de l'état de santé ; - il n'est pas établi, compte tenu des nombreuses pathologies dont souffrait D..., qui s'aggravaient, qu'un défaut d'établissement du diagnostic et l'absence de consentement à l'arrêt des soins auraient été directement et certainement à l'origine du décès de celle-ci : - à titre subsidiaire, si la cour retenait l'existence d'un lien de causalité entre le décès de D... et la faute du service public hospitalier, celle-ci ne pourrait être qu'à l'origine d'une perte de chance, qui, compte tenu de l'état de santé de la victime, ne pourrait être évaluée à plus de 10 % ; - la demande au titre du préjudice moral est excessive. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Catroux, - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - et les observations de Me Tosi, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. D..., née le 13 août 1951, qui souffrait notamment d'une démence d'origine toxique et faisait l'objet d'un placement sous tutelle avec représentation relative à la personne prononcée par un jugement du 18 juin 2013 du tribunal d'instance de Brest, a été hébergée à compter du 10 juin 2013 au sein de centre René Fortin, établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) dépendant du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Brest. Les infirmières de l'EHPAD ont constaté le matin du 19 août 2017 qu'elle se trouvait aréactive dans son lit. A la suite d'un examen médical clinique effectué le même jour et faisant suspecter un accident vasculaire cérébral (AVC) avec engagement du pronostic vital, il a été décidé de ne pas la transférer pour des explorations complémentaires ou une éventuelle réanimation. Elle est décédée le 21 août 2017 dans cet établissement. Le 3 avril 2019, M. A..., fils de la défunte, a saisi le CHRU d'une réclamation indemnitaire afin d'obtenir réparation du préjudice moral consécutif au décès de sa mère qu'il estime avoir subi du fait des fautes commises par cet établissement dans la prise en charge de celle-ci. Cette demande a été implicitement rejetée. Par un jugement du 1er avril 2022, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation du CHRU de Brest à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi à la suite du décès de sa mère. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision. (...). ". Il appartient au demandeur qui engage une action en responsabilité à l'encontre de l'administration d'apporter tous éléments de nature à établir devant le juge l'existence d'une faute et la réalité du préjudice subi. Il incombe alors, en principe, au juge de statuer au vu des pièces du dossier, le cas échéant après avoir demandé aux parties les éléments complémentaires qu'il juge nécessaires à son appréciation. Il ne lui revient d'ordonner une expertise que lorsqu'il n'est pas en mesure de se prononcer au vu des pièces et éléments qu'il a recueillis et que l'expertise présente ainsi un caractère utile. 3. Si le requérant soutient que le tribunal lui a fait supporter à tort la charge de la preuve d'un lien de causalité entre les fautes de l'établissement public et le préjudice dont il se prévalait et qu'il lui revenait, le cas échéant, d'ordonner une expertise médicale pour disposer d'éléments suffisants pour juger si ce lien existait, de telles critiques, seulement susceptibles d'affecter le bien-fondé du jugement attaqué, sont sans incidence sur sa régularité. Sur la responsabilité du CHRU de Brest : 4. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ". 5. En premier lieu, le requérant reprend en appel ses moyens invoqués en première instance tiré de ce que le traitement de l'affection qu'a subi D... le 19 août 2017 par l'établissement public aurait été entaché de fautes en raison d'un retard de prise en charge et d'un défaut de surveillance consécutifs à une chute qu'aurait subi sa mère, sans étayer ces moyens d'aucune précision ni d'aucun élément nouveau. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges. 6. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction et notamment des constations résultant de l'examen clinique de D... effectué le 19 août 2017, dont le caractère complet n'est pas contesté, qu'un diagnostic d'accident vasculaire cérébral avec un pronostic vital engagé a été alors retenu, compte tenu d'une hémiplégie droite, d'une aréactivité et d'un encombrement broncho-pulmonaire majeur. Toutefois, il résulte aussi des conclusions du Dr B..., diplômé de médecine générale, produites pour la première fois en appel et non utilement contestées par le CHRU de Brest, que le diagnostic dont a fait alors l'objet D... aurait dû, afin d'être certain, recevoir une confirmation notamment par un autre examen par scanner afin d'éliminer l'hypothèse d'autres pathologies, dont les effets étaient réversibles et qui étaient susceptibles d'entraîner la même symptomatologie que celle alors observée, telle que l'hypoglycémie, le coma acido-cétosique, l'accident ischémique transitoire ou l'hypoxie chronique. Dans ces conditions, l'absence d'examens diagnostiques complémentaires constitue une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'établissement public. 7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 1110-5 du code de la santé publique : " Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l'urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir, sur l'ensemble du territoire, les traitements et les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l'efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire et le meilleur apaisement possible de la souffrance au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d'investigation ou de traitements et de soins ne doivent pas, en l'état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. ". Aux termes de son article L. 1110-5-1 : " Les actes mentionnés à l'article L. 1110-5 ne doivent pas être mis en œuvre ou poursuivis lorsqu'ils résultent d'une obstination déraisonnable. Lorsqu'ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu'ils n'ont d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris, conformément à la volonté du patient et, si ce dernier est hors d'état d'exprimer sa volonté, à l'issue d'une procédure collégiale définie par voie réglementaire. (...) " . Aux termes de son article L. 1111-4 : " (...) / Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, la limitation ou l'arrêt de traitement susceptible d'entraîner son décès ne peut être réalisé sans avoir respecté la procédure collégiale mentionnée à l'article L. 1110-5-1 et les directives anticipées ou, à défaut, sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6 ou, à défaut la famille ou les proches, aient été consultés. La décision motivée de limitation ou d'arrêt de traitement est inscrite dans le dossier médical. (...) ". Aux termes de l'article L. 1111-11 du même code : " Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Ces directives anticipées expriment la volonté de la personne relative à sa fin de vie en ce qui concerne les conditions de la poursuite, de la limitation, de l'arrêt ou du refus de traitement ou d'acte médicaux. (...). " et aux termes de son article R. 1111-17 : " Les directives anticipées mentionnées à l'article L. 1111-11 s'entendent d'un document écrit, daté et signé par leur auteur, majeur, dûment identifié par l'indication de ses nom, prénom, date et lieu de naissance. La personne majeure faisant l'objet d'une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne peut rédiger des directives anticipées avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué. (...) ". Aux termes de son article L. 1111-12 : " Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, est hors d'état d'exprimer sa volonté, le médecin a l'obligation de s'enquérir de l'expression de la volonté exprimée par le patient. En l'absence de directives anticipées mentionnées à l'article L. 1111-11, il recueille le témoignage de la personne de confiance ou, à défaut, tout autre témoignage de la famille ou des proches. ". Aux termes de son article R. 4127-37 : " En toutes circonstances, le médecin doit s'efforcer de soulager les souffrances du malade par des moyens appropriés à son état et l'assister moralement. Il doit s'abstenir de toute obstination déraisonnable et peut renoncer à entreprendre ou poursuivre des traitements qui apparaissent inutiles, disproportionnés ou qui n'ont d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie. ". Aux termes de son article R. 4127-37-2, dans sa rédaction applicable: " I.- (...) Lorsque le patient est hors d'état d'exprimer sa volonté et en l'absence de directives anticipées, la décision de limiter ou d'arrêter les traitements dispensés, au titre du refus d'une obstination déraisonnable, ne peut être prise qu'à l'issue de la procédure collégiale prévue à l'article L. 1110-5-1 et après qu'a été recueilli auprès de la personne de confiance ou, à défaut, auprès de la famille ou de l'un des proches le témoignage de la volonté exprimée par le patient. (...). / III.-La décision de limitation ou d'arrêt de traitement est prise par le médecin en charge du patient à l'issue de la procédure collégiale. Cette procédure collégiale prend la forme d'une concertation avec les membres présents de l'équipe de soins, si elle existe, et de l'avis motivé d'au moins un médecin, appelé en qualité de consultant. Il ne doit exister aucun lien de nature hiérarchique entre le médecin en charge du patient et le consultant. L'avis motivé d'un deuxième consultant est recueilli par ces médecins si l'un d'eux l'estime utile. / Lorsque la décision de limitation ou d'arrêt de traitement concerne un mineur ou un majeur protégé, le médecin recueille en outre l'avis des titulaires de l'autorité parentale ou du tuteur, selon les cas, hormis les situations où l'urgence rend impossible cette consultation. / IV. -La décision de limitation ou d'arrêt de traitement est motivée. La personne de confiance, ou, à défaut, la famille, ou l'un des proches du patient est informé de la nature et des motifs de la décision de limitation ou d'arrêt de traitement. La volonté de limitation ou d'arrêt de traitement exprimée dans les directives anticipées ou, à défaut, le témoignage de la personne de confiance, ou de la famille ou de l'un des proches de la volonté exprimée par le patient, les avis recueillis et les motifs de la décision sont inscrits dans le dossier du patient. ". 8. Il résulte des dispositions législatives précitées, ainsi que de l'interprétation que le Conseil constitutionnel en a donnée dans sa décision n° 2017-632 QPC du 2 juin 2017, qu'il appartient au médecin ayant pris en charge un patient, lorsque celui-ci est hors d'état d'exprimer sa volonté, d'arrêter ou de ne pas mettre en œuvre, au titre du refus de l'obstination déraisonnable, les traitements qui apparaissent inutiles, disproportionnés ou sans autre effet que le seul maintien artificiel de la vie. En pareille hypothèse, le médecin ne peut prendre une telle décision qu'à l'issue d'une procédure collégiale, destinée à l'éclairer sur le respect des conditions légales et médicales d'un arrêt du traitement et, sauf dans les cas mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 1111-11 du code de la santé publique, dans le respect des directives anticipées du patient ou, à défaut de telles directives, après consultation de la personne de confiance désignée par le patient ou, à défaut, de sa famille ou de ses proches, ainsi que, le cas échéant, de son ou ses tuteurs. Si le médecin décide de prendre une telle décision en fonction de son appréciation de la situation, il lui appartient de sauvegarder en tout état de cause la dignité du patient et de lui dispenser des soins palliatifs. Il ne peut mettre en œuvre cette décision avant que les personnes qu'il a consultées et qui pourraient vouloir saisir la juridiction compétente d'un recours n'aient pu le faire et obtenir une décision de sa part. 9. En l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction, contrairement à ce que fait valoir l'établissement public, que D..., qui faisait l'objet d'une mesure de protection, aurait rédigé des directives anticipées dans les conditions prévues par les dispositions précitées des articles L. 1111-11 et R. 1111-17 du code de la santé publique. Compte tenu de l'absence de telles directives, le personnel de l'établissement public a recherché avant de prendre la décision de limitation ou d'arrêt des soins en litige, tant la volonté de cette dernière, qui avait exprimé à plusieurs reprises son opposition à une réanimation, que celle d'un membre de sa famille. Toutefois, cette décision, qui était susceptible d'entraîner le décès de D..., et ne pouvait intervenir qu'à l'issue de la procédure collégiale mentionnée à l'article L. 1110-5-1 du code de la santé publique, n'a pas été précédée de la mise en œuvre de cette procédure. En effet, il n'est pas établi que cette décision ait pris la forme d'une concertation avec les membres présents de l'équipe de soins, ni que l'avis motivé d'au moins un médecin, appelé en qualité de consultant ait été recherché. Enfin, et en l'absence de directives anticipées, l'avis du tuteur de D... aurait dû être recueilli. Dans ces conditions, le CHRU de Brest a commis une faute, qui est de nature à engager la responsabilité de cet établissement. Sur le préjudice moral de M. A... : 10. Il résulte de l'instruction que D..., dont l'état de santé s'était aggravé depuis son admission au sein de l'établissement public en 2013, avait des antécédents de démence d'origine toxique avec des troubles du comportement associés et de polypathologies au nombre desquelles un diabète de type 2 insulinodépendant, une artériopathie oblitérante des membres inférieurs, une insuffisance respiratoire chronique sévère et un syndrome anxiodépressif ayant conduit à de multiples tentatives de suicide médicamenteuses. Vers midi, le 19 août 2017, ainsi qu'il a été dit, elle a été retrouvée aréactive dans son lit par les infirmières. L'examen clinique alors effectué par le médecin de l'EHPAD a mis en évidence, comme il a été déjà exposé, une hémiplégie droite, une aréactivité et un encombrement bronchopulmonaire majeur et, sur la base de ces éléments, ce médecin a diagnostiqué un accident vasculaire cérébral de pronostic sombre. Si ce diagnostic ne revêt pas un caractère certain, en l'absence d'élimination de toute autre hypothèse théorique, il résulte néanmoins de l'instruction que compte tenu des lourds antécédents de la victime et de l'examen médical pratiqué que le décès de la victime est selon toute probabilité imputable aux suites de l'AVC ainsi diagnostiqué. Les fautes de l'établissement consistant dans l'absence de recherche d'une confirmation du diagnostic notamment par un scanner et l'absence de respect de la procédure collégiale mentionnée à l'article L. 1110-5-1 du code de santé publique et du recueil de l'avis du tuteur ne peuvent être regardées comme les causes directes du décès de l'intéressée, ni, dans les circonstances de l'espèce, comme celles d'une perte de chance d'éviter ce décès. Ces fautes ne sont pas, dès lors, en lien direct avec le préjudice d'affection consécutif au décès de sa mère dont le requérant demande la réparation. 11. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner avant dire droit une expertise dont l'utilité ne résulte pas de l'instruction, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'indemnisation de son préjudice moral. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au centre hospitalier régional universitaire de Brest. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe 23 juin 2023. Le rapporteur, X. CATROUXLe président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT01694
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2021 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. Par un jugement no 2200354 du 15 avril 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 25 octobre 2022, M. B..., représenté par Me Le Strat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 15 avril 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ; 4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - le tribunal n'a pas répondu aux moyens tirés de la méconnaissance de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 en l'absence d'identification des trois signataires de l'avis du collège des médecins et du vice de procédure au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le jugement attaqué est insuffisamment motivé dans la réponse aux moyens tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté et du défaut d'examen de sa situation personnelle ; - l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ; - le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ; - l'arrêté contesté méconnaît les dispositions l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il est privé de base légale dès lors que l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 méconnaît l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les articles 3 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qu'il n'impose pas au collège médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), dont l'autorité préfectorale se borne à reprendre l'avis, de préciser les éléments médicaux sur lesquels se fondent son avis ; - il méconnaît le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La requête a été communiquée au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas produit d'observations. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Catroux, - et les observations de Me Le Strat, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant djiboutien né le 1er janvier 1947, est entré en France le 25 décembre 2016 et y a bénéficié de titres de séjour en raison de sa situation médicale. Il en a sollicité le renouvellement. Par arrêté du 27 octobre 2021, le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 15 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". 3. Le tribunal a relevé au point 3 de son jugement que l'arrêté comportait l'ensemble des considérations de droit et de faits sur lesquelles le préfet s'était fondé. Au point 4 de ce jugement, il a relevé qu'il ressortait des pièces du dossier que le préfet avait procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé. Le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a, par suite, suffisamment motivé son jugement, s'agissant de la réponse aux moyens ainsi soulevés. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". En ne répondant pas au moyen qu'avait soulevé le requérant et qui était tiré, au regard de ces stipulations, d'un vice de procédure, tenant à n'avoir pas vérifié que l'intéressé serait exposé à des risques notamment de traitements inhumains ou dégradants, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'une irrégularité, dès lors qu'un tel moyen était inopérant, les stipulations en cause n'imposant pas aux Etats parties de la convention d'obligations procédurales en la matière. 5. En dernier lieu, toutefois, il ressort des pièces du dossier que, dans sa demande présentée devant le tribunal, M. B... a invoqué un moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'irrégularité de l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII tenant au fait qu'il ne comporte pas la signature des trois médecins composant le collège. Le tribunal administratif de Rennes n'a pas visé le moyen ainsi soulevé et n'y a pas répondu. Son jugement a, dès lors, été rendu dans des conditions irrégulières et doit, par suite être annulé, en tant seulement qu'il statue sur la demande de M. B... tendant à l'annulation du refus de titre de séjour. 6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Rennes tendant à l'annulation du refus de titre de séjour du 27 octobre 2021 et de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur le surplus de sa demande. Sur la légalité de l'arrêté du 27 octobre 2021 : 7. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour énonce, avec une précision suffisante, les textes qu'elle applique, en particulier les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle mentionne en outre les circonstances de fait déterminantes propres à la situation personnelle de M. B.... Ainsi, et alors que le préfet d'Ille-et-Vilaine n'avait pas à faire état de l'ensemble des éléments relatifs à sa situation, et notamment le fait qu'il ait sollicité sa réintégration dans la nationalité française qui est, en soi, sans incidence sur la légalité de la décision en cause à la date à laquelle elle est intervenue, celle-ci satisfait à l'obligation de motivation qui incombe à l'administration, en vertu de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration. Cette décision étant ainsi suffisamment motivée, il s'ensuit que l'obligation de quitter le territoire français est également motivée en conséquence des dispositions du second alinéa de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Enfin, cet arrêté, qui vise notamment les articles L. 612-12 et L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, constate qu'il est fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français, qu'il est de nationalité djiboutienne et que compte tenu des éléments portés à la connaissance de l'administration, l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, la décision fixant le pays de destination est, de ce seul fait, suffisamment motivée. 8. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté et de l'ensemble des pièces du dossier que le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas omis de procéder à un examen particulier de la situation de l'intéressé avant de prendre cet arrêté. 9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". 10. L'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis (...) au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". De plus, aux termes de l'article R. 425-12 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa du même article. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-13 de ce code : " (...) Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) ". Enfin, l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application des dispositions précitées prévoit que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ". 11. D'une part, le préfet d'Ille-et-Vilaine a produit, en première instance, l'avis émis le 7 septembre 2021 par le collège des médecins de l'OFII. Cet avis se prononce sur l'état de santé de M. B..., la gravité des conséquences qu'aurait un éventuel défaut de prise en charge médicale de sa pathologie, la possibilité d'un traitement approprié dans le pays d'origine ainsi que sur la capacité de l'intéressé à voyager sans risque. Il comporte donc l'ensemble des mentions prévues par l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, sans que les médecins aient eu à se prononcer sur la durée des soins en France puisqu'ils sont disponibles dans le pays d'origine de M. B.... Il ressort, de plus, de cet avis qu'il permet d'identifier les trois médecins qui l'ont rendu et qu'il a été signé par eux. Le moyen tiré de l'irrégularité de cet avis doit donc être écarté, dans ses deux branches. 12. En quatrième lieu, M. B... soutient, pour la première fois en appel, que l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 méconnaît l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, en ce qu'il prévoit le droit d'accès de toute personne au dossier qui la concerne, dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité et du secret professionnel et des affaires et l'obligation pour l'administration de motiver ses décisions ainsi que les articles 3 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, la motivation de l'avis du collège médical de l'OFII, telle qu'elle est prévue par l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 cité ci-dessus, assure une conciliation, qui n'est pas déséquilibrée, entre l'obligation pour l'administration de motiver ses décisions et donner accès aux intéressés à leur dossier administratif, et le respect des intérêts légitimes de la confidentialité et, en particulier, du secret médical. Il n'a, de plus, pas pour objet, ni pour effet de faire obstacle au droit des intéressés de connaître les motifs des décisions ou d'accéder aux dossiers qui les concernent. Il n'empêche pas, en effet, les demandeurs d'une admission au séjour pour raisons de santé de lever le secret médical les concernant, de verser au débat contradictoire tous les éléments pertinents concernant leur état de santé et d'obtenir la communication, après l'avoir sollicitée, du dossier médical de l'OFII les concernant. Le moyen tiré, par voie d'exception, de ce que l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 méconnaîtrait l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les articles 3 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou le principe d'égalité des armes ne peut donc qu'être écarté. 13. En cinquième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance du titre de séjour qu'elles prévoient, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'étranger, et en particulier d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'étranger, l'autorité administrative ne peut également refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptées, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si cet étranger peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. 14. Il ressort de l'avis du collège médical de l'OFII qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, M. B... peut y bénéficier d'un traitement approprié. En se bornant à faire valoir des éléments, non datés et n'indiquant pas leurs sources, selon lesquels le nombre de personnel soignant et notamment de cardiologues est insuffisant à Djibouti, l'intéressé, dont la cardiopathie ischémique stable et bien compensée fait l'objet d'une surveillance annuelle, ne remet pas en cause cette appréciation et n'apporte pas d'éléments sur l'impossibilité qu'il y aurait pour lui de bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine. Dans ces conditions, sans qu'il soit besoin d'ordonner à l'OFII et au préfet la communication de tous les éléments sur la base desquels ils se sont fondés pour estimer que les soins étaient disponibles dans le pays d'origine de l'intéressé, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 15. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". 16. Eu égard à ce qui a été dit au point 14, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 17. En septième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". 18. Si un fils du requérant réside en France, ce dernier a le centre des attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine où résident son épouse et cinq de ses enfants et où il a vécu jusqu'à l'âge de soixante-dix ans. Dans ces conditions, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision attaquée et n'a donc pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 19. En dernier lieu, dans son arrêt n° 41738/10 rendu en grande chambre le 13 décembre 2016, la Cour européenne des droits de l'homme a dit pour droit que pouvait constituer un traitement contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales le fait de procéder à l'éloignement d'une personne gravement malade pour laquelle existent des motifs sérieux de croire que, bien que ne courant pas de risque imminent de mourir, celle-ci ferait face, en raison de l'absence de traitement adéquat dans le pays de destination ou du défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie. 20. M. B... soutient que l'administration ne s'est pas assurée de ce qu'il pourrait continuer son suivi médical dans son pays d'origine. Eu égard à ce qui a été dit précédemment, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'administration a examiné si l'intéressé pouvait être soigné à Djibouti et si le traitement qu'il serait amené à suivre dans son pays d'origine l'exposerait inéluctablement à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou une réduction significative de son espérance de vie. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté. 21. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est fondé ni à demander l'annulation de l'arrêté du 27 octobre 2021 en tant qu'il refuse de l'admettre au séjour, ni à soutenir que c'est à tort que le tribunal a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande à fin d'annulation de cet arrêté en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français et fixe le pays de destination. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 15 avril 2022 est annulé en tant qu'il statue sur la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour du 27 octobre 2021. Article 2 : La demande de M. B... devant le tribunal tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour du 27 octobre 2021 est rejetée. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le rapporteur X. CatrouxLe président D. Salvi La greffière A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N°22NT03364
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Granger a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le département de la Marne à lui verser la somme de 1 721 795,46 euros en réparation des préjudices subis en raison du rejet de son offre tendant à l'attribution d'un marché de transport scolaire des élèves et étudiants handicapés dans le département de la Marne. Par un jugement n° 1900650 du 9 juin 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 5 août 2020 et le 5 avril 2022, la société Granger, représentée par la Selarl Niango, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler le jugement n° 1900650 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 9 juin 2020 ; 2°) d'annuler la décision du 24 janvier 2019 par laquelle le département de la Marne a rejeté sa demande d'indemnisation ; 3°) de condamner le département de la Marne à lui verser la somme de 2 295 727,28 euros en réparation des préjudices subis en raison du rejet de son offre tendant à l'attribution d'un marché de transport scolaire des élèves et étudiants handicapés ; 4°) de mettre à la charge du département de la Marne la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa requête est recevable contrairement aux allégations du département ; si la demande d'annulation du jugement ne figure pas dans le dispositif de sa requête introductive d'appel, il ne s'agit que d'une erreur de plume ; il n'y a aucune ambiguïté quant à sa requête et aux moyens articulés contre le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ; - le département de la Marne a commis une faute en écartant son offre au motif de ce qu'elle était irrégulière : . la fixation du prix au kilomètre à zéro n'est pas interdite explicitement par l'article 9 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) ; il s'agit d'un choix commercial et non interdit dans le règlement ; . ce choix permettait au département d'analyser le critère du prix ; . alors que la société Drive U You a également indiqué un prix égal à zéro euro, elle n'a pas été évincée pour ce motif ; elle a subi un traitement de défaveur constitutif d'une rupture d'égalité, et ce, en méconnaissance de l'article L. 3 du code de la commande publique ; . la seule prohibition est l'absence totale de rémunération ; en l'espèce, elle était bien rémunérée car la part fixe correspondant au coût d'immobilisation des véhicules était supérieure à zéro euro ; - cette faute lui a causé un préjudice ; - elle avait des chances réelles et sérieuses de se voir attribuer le marché : . en terme de prix, si son offre n'avait pas été à tort écartée, elle aurait nécessairement obtenu une meilleure note que les autres concurrents ; . en terme de valeur technique, elle était également très bien placée au regard de son parc automobile et de ses conducteurs formés et expérimentés; - elle a subi un préjudice financier certain, constitué de la perte de marge nette pour la durée totale de chaque marché qui est de 1 721 795,46 euros entre le 1er septembre 2017 et le 31 août 2020 ; le préjudice sera réévalué à 2 295 727,28 euros du fait de la prolongation de ce marché litigieux d'une année du fait de la crise sanitaire. Par un mémoire enregistré le 11 décembre 2020, le département de la Marne, représenté par Me Schidlowsky, conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à ce que soit mise à la charge de la société Granger la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la requête de la société Granger est irrecevable car elle ne sollicite pas l'annulation du jugement et formule les mêmes demandes que devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ; - l'offre de la société Granger était une offre irrégulière : . elle n'a pas respecté les exigences formulées dans les documents de consultation au regard du I de l'article 59 du décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics car la société a violé les dispositions de l'article 9 du CCAP qui précisait que " les prestations sont rémunérées par application aux nombres de jours d'immobilisation et de la quantité de kilomètres à charges réellement exécutées " ; le bordereau des prix n'était donc pas conforme au cahier des charges en tant qu'il faisait apparaitre un prix kilométrique de zéro euro ; . selon l'article 5-3-1 du règlement de consultation le prix kilométrique était pondéré de 20 points ; en fixant ce prix à zéro, la société ne lui a pas permis d'analyser le critère prix en fonction de la pondération retenue ; . la société a utilisé un subterfuge de prix kilomètre zéro ayant pour but d'éliminer automatiquement tous les autres candidats sur le critère du prix tout en amortissant les kilomètres parcourus ; - n'ayant pas été irrégulièrement évincée, la société était dépourvue de toute chance sérieuse de remporter le marché et elle n'a donc droit à aucune indemnisation d'un quelconque manque à gagner ; - dans l'hypothèse où la cour considérerait que l'éviction de la société Granger serait irrégulière, cette dernière ne démontre pas la primauté de son offre, de même que la preuve du préjudice allégué et de son évaluation ; elle aurait été en effet mal classée ( 6ème sur 10 ) selon le système de pondération applicable au marché ; - le montant sollicité n'est pas justifié. Par une ordonnance du 6 avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2022 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ; - le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 ; - le code de justice administrative. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, rapporteure, - les conclusions de M. Michel, rapporteur public, - et les observations de Me Niango, représentant la Société Granger et de Me Opyrchal, représentant le département de la Marne. Une note en délibéré, produite pour la société Granger a été enregistrée le 2 juin 2023. Considérant ce qui suit : 1. Le département de la Marne a lancé début 2017 une procédure d'appel d'offres en vue de renouveler l'accord cadre relatif au transport scolaire des élèves handicapés. Cet accord comprenait douze lots définis géographiquement et portait sur la période du 1er septembre 2017 au 31 août 2020. La société Granger a soumissionné au titre des lots 2 à 11. Par une lettre du 26 juin 2017, ses offres ont été rejetées au motif de leur irrégularité. La société Granger a fait une demande préalable indemnitaire le 28 décembre 2018 auprès du département de la Marne afin d'obtenir réparation du préjudice qu'elle soutient avoir subi en raison de son éviction irrégulière. Le département lui a opposé un refus le 24 janvier 2019. La société Granger a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le département de la Marne à lui verser la somme de 1 721 795,46 euros en réparation des préjudices qu'elle soutient avoir subis en raison du rejet de son offre tendant à l'attribution de ce marché de transport scolaire des élèves et étudiants handicapés dans le département. Par un jugement du 9 juin 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande de la requérante. La société Granger relève appel de ce jugement et demande l'annulation de la décision de rejet de sa demande indemnitaire et la condamnation du département de la Marne à lui verser la somme actualisée de 2 295 727,28 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison du rejet irrégulier de son offre tendant à l'attribution d'un marché de transport scolaire des élèves et étudiants handicapés. En demandant la condamnation du département de la Marne à l'indemniser de son préjudice, la société Granger a donné à l'ensemble de sa requête le caractère de plein contentieux. Sur les conclusions indemnitaires : 2. Lorsqu'un candidat à l'attribution d'un contrat public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce contrat et qu'il existe un lien direct de causalité entre la faute résultant de l'irrégularité et les préjudices invoqués par le requérant à cause de son éviction, il appartient au juge de vérifier si le candidat était ou non dépourvu de toute chance de remporter le contrat. En l'absence de toute chance, il n'a droit à aucune indemnité. Dans le cas contraire, il a droit en principe au remboursement des frais qu'il a engagés pour présenter son offre. Il convient en outre de rechercher si le candidat irrégulièrement évincé avait des chances sérieuses d'emporter le contrat conclu avec un autre candidat. Si tel est le cas, il a droit à être indemnisé de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu'ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l'offre, lesquels n'ont donc pas à faire l'objet, sauf stipulation contraire du contrat, d'une indemnisation spécifique. En ce qui concerne la faute commise par le département de la Marne à avoir écarté son offre au motif de son irrégularité : 3. Aux termes de l'article 59 du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, alors applicable : " Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation notamment parce qu'elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale / (...) / II. - Dans les procédures d'appel d'offres et les procédures adaptées sans négociation, les offres irrégulières, inappropriées ou inacceptables sont éliminées. Toutefois, l'acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires concernés à régulariser les offres irrégulières dans un délai approprié, à condition qu'elles ne soient pas anormalement basses. / (...) / IV. - La régularisation des offres irrégulières ne peut avoir pour effet de modifier des caractéristiques substantielles des offres ". 4. Il résulte du règlement de consultation du marché en litige que les offres des lots 2 à 11, étaient évaluées sur un critère de prix des prestations, noté sur un maximum de 40 points et sur un critère portant sur la valeur technique de l'offre représentant un total de 60 points. L'article 5.3.1 du règlement précité prévoyait deux sous-critères, notés chacun sur 20 points, à savoir le prix total des forfaits journaliers et le prix kilométrique total sur une base de 90 kms / jour / véhicule et indiquait que le calcul de ces prix serait effectué sur la base des éléments déclarés dans le bordereau des prix. Ce bordereau qui indiquait qu'aucune modification ne devait lui être apportée, comportait pour trois types de véhicules, deux colonnes : dans la première et pour chacune des trois catégories précitées, le candidat devait proposer un forfait journalier d'immobilisation du véhicule. Ce forfait correspondait selon l'article 4.5 du cahier des clauses techniques particulière (CCTP) au prix que proposait le candidat pour compenser le coût que représentait pour lui l'obligation d'assurer la disponibilité des véhicules aux jours fixés par le marché, alors même qu'aucune prestation de transport ne serait commandée. Le second sous-critère correspondait au prix exprimé en kilomètre / jour/ véhicule que proposait d'appliquer le candidat. Un astérisque renvoyant à une note en bas du bordereau indique que ce prix doit intégrer les " charges variables ". Enfin, l'article 9 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) précisait que " les prestations sont rémunérées par application aux nombres de jours d'immobilisation et de la quantité de kilomètres à charges réellement exécutées ". 5. Il résulte de la rédaction de ces documents que la seule interdiction expressément prévue résultait de la mention suivante : " aucune modification ne doit être apportée au bordereau des prix ". En proposant dans le bordereau de prix, un prix de zéro euro au sous-critère prix kilométrique total sur une base de 90 kms/ jour /véhicule, la société Granger n'a pas modifié ce bordereau et a fait le choix, comme elle le fait valoir dans ses écritures, de faire un geste commercial en indiquant dans la colonne du bordereau un montant zéro. Ainsi, et alors qu'aucun principe ou règle n'interdit une offre à prix zéro et que le département n'a pas dans les documents de la consultation interdit expressément une proposition d'un prix nul l'offre de la société Granger ne pouvait pas être qualifiée d'offre irrégulière. La société requérante est donc fondée à soutenir que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, c'est à tort que le département de la Marne a rejeté son offre pour ce motif. Le département de la Marne a donc commis une faute de nature à engager sa responsabilité. En ce qui concerne la perte de chance sérieuse de la société Granger à se voir attribuer le marché : 6. Il résulte de l'instruction que la méthode de notation des offres retenu par le département consiste pour chacun des sous-critères de prix à diviser l'offre la plus basse par l'offre du candidat et de multiplier le chiffre obtenu par le nombre de points. 7. D'une part, l'application de cette méthode de notation aurait conduit nécessairement à attribuer la note de 0 à tous les concurrents de la société Granger mais également à ses offres. Ainsi, par la prise en compte de ses offres, le sous-critère " prix du kilomètres " se serait trouvé neutralisé. 8. D'autre part, la société Granger a proposé le prix des forfaits journaliers le plus élevé pour chacune de ses offres avec un prix minimum de 141 euros, ce qui aurait conduit le département à lui attribuer à ce sous-critère la note la plus basse. 9. Enfin, s'agissant du critère technique d'une valeur de 60 points, le règlement de consultation prévoyait qu'il serait apprécié au regard des moyens matériels spécifiquement affectés au lot pour 30 points, des moyens et des procédures mis en place pour l'exécution des prestations pour 25 points et de la politique de recrutement, de formation et de sécurité mise en place au sein de l'entreprise pour 5 points. En se bornant à produire son mémoire justificatif et à exposer qu'au regard de son classement sur la valeur technique, elle aurait dû remporter le marché, la société Granger n'établit pas qu'elle était en capacité d'obtenir au moins 56 points, note attribuée aux meilleures offres, alors que le département oppose, sans être contesté, que les véhicules proposés dans ses offres ne comportaient pas tous d'équipement pour les personnes à mobilité réduite ou que la rubrique n'était pas renseignée alors que ses concurrents avaient proposé des véhicules neufs ou mieux équipés. 10. Par suite, au regard du sous-critère du prix relatif au coût du forfait journalier et du critère de la valeur technique, il ne résulte pas de l'instruction que la société Granger a perdu une chance sérieuse d'obtenir les marchés en litige. Elle ne peut ainsi prétendre à l'indemnisation de son manque à gagner. 11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le département de la Marne, que la société Granger n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Sur les frais liés à l'instance : 12. Dans les circonstances de l'espèce, il n'apparait pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais d'instance qu'elles ont exposés. Leurs conclusions à ce titre doivent dès lors être rejetées. D E C I D E : Article 1er : la requête de la société Granger est rejetée. Article 2 : Les conclusions département de la Marne sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Granger et au département de la Marne. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - M. Denizot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. La rapporteure, Signé : S. RoussauxLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet de la Marne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 20NC02252
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La SA de droit italien Goppion a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, de désigner un expert pour examiner les réserves alléguées par la commune de Colmar, les décrire, dire si elles ressortent de ses obligations contractuelles, au besoin les chiffrer, et plus généralement donner son avis technique sur ces réserves, comme sur le décompte final du marché, au regard de sa réclamation, d'autre part, de condamner la commune de Colmar à lui verser la somme totale de 564 758,64 euros augmentée des intérêts moratoires sur la somme de 85 265,02 euros à compter du 15 mai 2016 et sur la somme de 479 313,62 euros à compter du 1er mars 2017. Par un jugement n° 1703892 du 29 mai 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande et a mis à la charge de la société Goppion une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 29 juillet 2020, 23 octobre 2020 et 3 février 2021, la société Goppion, représentée par Me Pinna et Me Scanvic, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1703892 du 29 mai 2020 ; 2°) à titre principal, de condamner la commune de Colmar à lui verser la somme de 556 297,20 euros ainsi que les intérêts à compter du 15 mai 2016 pour la somme de 85 265,02 euros et du 1er mars 2017 pour la somme 471 032,58 euros et la capitalisation de ces intérêts ; 3°) à titre subsidiaire, de désigner un expert avec notamment pour mission de déterminer si les prestations de la facture n° 16111 et les travaux supplémentaires ont été effectivement réalisés, si la conception du lot n° 18 du marché était conforme aux règles de l'art, de déterminer l'imputabilité et le coût des préjudices subis durant l'exécution du marché, de déterminer si les observations émises par le maître d'œuvre et les réserves émises par le maître d'ouvrage sont justifiées et enfin de chiffrer le coût lié aux travaux supplémentaires et au bouleversement des conditions d'exécution ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Colmar la somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : s'agissant du solde du marché : - dans la mesure où elle apporte la preuve d'avoir réalisé effectivement l'ensemble des prestations prévues au marché et que les réserves émises ne peuvent faire obstacle au paiement, elle a droit au règlement de la facture n° 16111 du 15 avril 2016 d'un montant de 85 265,02 euros, correspondant au solde du marché ; s'agissant des travaux supplémentaires : - elle est fondée à demander l'indemnisation des travaux supplémentaires, qui n'ont pas fait l'objet d'un avenant, relatifs aux mobiliers muséographiques et scénographiques pour un montant total de 125 549,79 euros ; - elle est fondée à demander l'indemnisation des travaux relatifs à la modification et au renforcement des structures pour l'accrochage et la stabilisation des panneaux suspendus de type B pour un montant de 45 428,72 euros ; - à la suite du double sinistre survenu dans la cave à vin, elle est fondée à demander l'indemnisation de la prestation d'un expert tonnelier, pour un montant de 3 216 euros ; s'agissant de la responsabilité de la commune de Colmar : - elle a subi des préjudices résultant de sujétions techniques imprévues ; - la commune de Colmar a commis une faute dans la conception du marché de nature à engager sa responsabilité ; son préjudice, résultant de surcoût d'ingénierie, imputable à cette faute s'élève à la somme de 54 015 euros ; - la commune de Colmar a commis des fautes dans la mise en œuvre du marché en phase d'études et de préassemblage de nature à engager sa responsabilité ; son préjudice subi à ce titre, résultant notamment de l'augmentation des prix d'achat, du volume des matières transportées et des effectifs, imputable à cette faute, s'élève à la somme de 51 647,20 euros ; - la commune de Colmar a commis des fautes en phase de chantier de nature à engager sa responsabilité ; son préjudice subi à ce titre, résultant notamment de l'inactivité partielle de ses équipes et de l'augmentation des effectifs, s'élève à la somme de 28 258 euros ; - l'allongement de 14 mois de la durée du chantier lui a causé des préjudices relatifs à la mobilisation pendant 420 jours d'un chef d'équipe, de frais déplacement entre Milan et Colmar, de frais généraux et de frais additionnels de cautionnement bancaire, qui s'élèvent respectivement à 58 800 euros, 73 200 euros, 116 180,40 euros et 4 979 euros. Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er décembre 2020 et 16 juin 2021, la commune de Colmar, représentée par Me Rouquet, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société Goppion le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les prétentions indemnitaires de la société Goppion ne sont pas fondées. Par un mémoire, enregistré le 15 juillet 2021, la société Goppion, conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens. Ce mémoire n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ; - le code civil ; - l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Denizot, - les conclusions de M. A..., - et les observations de Me Scanvic pour la société Goppion ainsi que celles de Me Bajn pour la commune de Colmar. Deux notes en délibéré présentées pour la commune de Colmar et la société Goppion ont été respectivement enregistrées les 1er et 6 juin 2023. Considérant ce qui suit : 1. Pour les travaux d'extension et de réaménagement du musée Unterlinden, la commune de Colmar, maître d'ouvrage, a confié, dans le cadre d'une procédure adaptée, à la société Goppion, par un acte d'engagement du 23 août 2012, le lot n° 18 " équipements muséographiques et scénographiques ". Par deux avenants des 8 juillet 2014 et 22 mars 2016, le montant du marché, initialement prévu pour un montant global et forfaitaire de 907 543,76 euros HT, a été porté à la somme de 1 041 990,06 euros HT. Le 17 mars 2016, les travaux ont fait l'objet, par le maître d'œuvre, d'opérations préalables à la réception. Le 8 février 2017, la société Goppion a adressé à la commune de Colmar un projet de décompte final et un mémoire en réclamation. Le 15 juin 2017, la société Goppion a mis en demeure la commune de Colmar, qui n'a pas répondu, de procéder à l'établissement du décompte général du marché. Par un jugement du 29 mai 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les demandes de la société Goppion tendant, d'une part, à la désignation d'un expert, et d'autre part, à la condamnation de la commune de Colmar à lui verser une somme de 564 758,64 euros. La société Goppion relève appel de ce jugement. Sur les conclusions indemnitaires : En ce qui concerne le règlement de la facture n° 16111 du 15 avril 2016 : 2. Aux termes d'une part de l'article 13.3.1 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de travaux dans sa rédaction applicable issue de l'arrêté du 8 septembre 2009, auquel renvoie l'article 2.2 du cahier les clauses administratives particulières (CCAP) du marché en litige : " Après l'achèvement des travaux, un projet de décompte final est établi concurremment avec le projet de décompte mensuel afférent au dernier mois d'exécution des prestations ou à la place de ce dernier (...) ". Aux termes de son article 13.3.2 : " Le titulaire transmet son projet de décompte final au maître d'œuvre, par tout moyen permettant de donner une date certaine, dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux telle qu'elle est prévue à l'article 41.3 (...)./ Toutefois, s'il est fait application des dispositions de l'article 41.5, la date du procès-verbal constatant l'exécution des travaux visés à cet article est substituée à la date de notification de la décision de réception des travaux comme point de départ des délais ci-dessus./ S'il est fait application des dispositions de l'article 41. 6, la date de notification de la décision de réception des travaux est la date retenue comme point de départ des délais ci-dessus. / (...) ". Selon l'article 13.4.2 du même cahier : " Le projet de décompte général est signé par le représentant du pouvoir adjudicateur et devient alors le décompte général./ Le représentant du pouvoir adjudicateur notifie au titulaire le décompte général avant la plus tardive des deux dates ci-après :/ - quarante jours après la date de remise au maître d'œuvre du projet de décompte final par le titulaire ;/ (...)/ Si le représentant du pouvoir adjudicateur ne notifie pas au titulaire, dans les délais stipulés ci-dessus, le décompte général signé, celui-ci lui adresse une mise en demeure d'y procéder. L'absence de notification au titulaire du décompte général signé par le représentant du pouvoir adjudicateur, dans un délai de trente jours à compter de la réception de la mise en demeure, autorise le titulaire à saisir le tribunal administratif compétent en cas de désaccord./ Si le décompte général est notifié au titulaire postérieurement à la saisine du tribunal administratif, le titulaire n'est pas tenu, en cas de désaccord, de présenter le mémoire en réclamation mentionné à l'article 50.1.1. ". 3. Aux termes d'autre part de l'article 41.3 du même cahier : " Au vu du procès-verbal des opérations préalables à la réception et des propositions du maître d'œuvre, le maître de l'ouvrage décide si la réception est ou non prononcée ou si elle est prononcée avec réserves. S'il prononce la réception, il fixe la date qu'il retient pour l'achèvement des travaux. La décision ainsi prise est notifiée au titulaire dans les trente jours suivant la date du procès-verbal. / La réception prend effet à la date fixée pour l'achèvement des travaux. / Sauf le cas prévu à l'article 41. 1. 3, à défaut de décision du maître de l'ouvrage notifiée dans le délai précisé ci-dessus, les propositions du maître d'œuvre s'imposent au maître de l'ouvrage et au titulaire ". Aux termes de son article 41.5 : " S'il apparaît que certaines prestations prévues par les documents particuliers du marché et devant encore donner lieu à règlement n'ont pas été exécutées, le maître de l'ouvrage peut décider de prononcer la réception, sous réserve que le titulaire s'engage à exécuter ces prestations dans un délai qui n'excède pas trois mois. La constatation de l'exécution de ces prestations doit donner lieu à un procès-verbal dressé dans les mêmes conditions que le procès-verbal des opérations préalables à la réception prévu à l'article 41.2 ". Enfin, aux termes de son article 41.6 : " Lorsque la réception est assortie de réserves, le titulaire doit remédier aux imperfections et malfaçons correspondantes dans le délai fixé par le représentant du pouvoir adjudicateur ou, en l'absence d'un tel délai, trois mois avant l'expiration du délai de garantie défini à l'article 44.1./ Au cas où ces travaux ne seraient pas faits dans le délai prescrit, le maître de l'ouvrage peut les faire exécuter aux frais et risques du titulaire, après mise en demeure demeurée infructueuse ". 4. Par un courrier du 8 février 2017, la société Goppion a adressé au maître d'œuvre, la SARL d'architecture Herzog et de Meuron, un projet de décompte final, faisant état d'une facture n° 16111 du 15 avril 2016 d'un montant de 85 265,02 euros qui n'aurait pas été acquittée, assorti d'une réclamation portant sur d'autres chefs de préjudice. Le 26 avril 2017, la société Goppion a mis en demeure la commune de Colmar de régler la facture n° 16111 du 15 avril 2016 d'un montant de 85 265,02 euros. 5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le montant du marché, après la conclusion de deux avenants, s'élève à la somme, non contestée, de 1 041 990,06 euros HT. Il est également constant que, au titre du règlement du marché, la commune de Colmar a procédé à neuf paiements. La différence entre le montant total de ces neuf paiements et le montant total du marché correspond au montant de la facture n° 16111 du 15 avril 2016. En outre, au cours du mois de juillet 2017, le maître d'œuvre a procédé à une analyse, adressée à la commune de Colmar, du projet de décompte final et de la réclamation de la société Goppion. Il résulte de ce document, qui correspond au projet de décompte général du marché, que le maître d'œuvre a considéré, sans équivoque, que la facture du 15 avril 2016 correspondait au règlement du solde du marché. Par suite, dans la mesure où la société Goppion se référait sans ambiguïté à cette facture dans son projet de décompte final et compte tenu de l'analyse du maître d'œuvre, la facture n° 16111 du 15 avril 2016 doit être regardée comme la demande de paiement du dernier décompte mensuel et comme se rapportant au règlement du solde général du marché en litige. 6. En second lieu, la réception ne met fin aux obligations contractuelles des constructeurs que dans cette seule mesure et demeure ainsi, par elle-même, sans effet sur les droits et obligations financiers nés de l'exécution du marché, à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires, dont la détermination intervient définitivement lors de l'établissement du solde du décompte définitif. Seule l'intervention du décompte général et définitif du marché a pour conséquence d'interdire au maître de l'ouvrage toute réclamation à cet égard. En outre, il résulte des articles 13.3.1, 13.3.2, 41.3 et 41.5 du CCAG Travaux, dans sa rédaction antérieure à l'arrêté du 3 mars 2014 modifiant l'arrêté du 8 septembre 2009, que, lorsque le maître de l'ouvrage ne notifie au titulaire aucune décision expresse de réception ou de refus de réception dans les quarante-cinq jours suivant la date du procès-verbal des opérations préalables à la réception, les propositions du maître d'œuvre s'imposent au maître de l'ouvrage et au titulaire. 7. Il résulte de l'instruction que, le 15 février 2016, après avoir dressé le procès-verbal des opérations préalables à la réception, le maître d'œuvre a formulé, à l'endroit de la commune de Colmar, des propositions relatives au procès-verbal des opérations préalables des ouvrages. A ce titre, le maître d'œuvre a proposé dans un formulaire EXE 5, expressément, de prononcer la réception avec réserves des travaux du lot n° 18 et de retenir la date du 9 mars 2016 comme date d'achèvement des travaux de l'ensemble du bâtiment. De plus, ce même document indiquait que la société Goppion devait remédier, avant le 9 mars 2016, aux imperfections et malfaçons indiquées en annexe. En l'absence de décision expresse de réception du maître d'ouvrage, les propositions du maître d'œuvre, qui révélaient que les travaux exécutés n'étaient affectés d'aucune non-façon, s'imposaient, en application des stipulations précitées, à la société Goppion et à la commune de Colmar. Il résulte, par ailleurs, du projet de décompte général, que le maître d'œuvre a estimé, par l'indication du pourcentage de 100 % à côté de la ligne correspondant au montant restant dû, que la société Goppion avait bien réalisé l'intégralité des prestations demandées même si celles-ci restaient affectées de nombreuses malfaçons. Dans la mesure où le maître d'œuvre n'a pas proposé de réception sous réserve et que les travaux exécutés n'étaient pas affectés de non-façon, la seule circonstance que les opérations préalables à la réception des travaux aient donné lieu à de nombreuses réserves ne remettait pas en cause la réalité des prestations réalisées et ne pouvait être de nature à faire obstacle au paiement de la facture n° 16111 du 15 avril 2016. 8. Dès lors, la société Goppion est fondée à soutenir que la commune de Colmar doit être condamnée à payer le montant correspondant à la facture n° 16111 du 15 avril 2016, d'un montant de 85 265,02 euros, correspondant au règlement du solde général du marché en litige. En ce qui concerne les travaux supplémentaires : 9. L'entreprise titulaire d'un marché a droit au paiement des travaux non prévus au marché initial qui lui ont été commandés par ordre de service (OS) régulier. S'agissant de travaux commandés dans des conditions irrégulières, l'entreprise peut prétendre au remboursement des dépenses utiles à la collectivité, après déduction de son bénéfice. L'entreprise a également droit, y compris dans le cadre d'un marché à prix global et forfaitaire, au paiement des travaux supplémentaires qui, bien qu'ils aient été réalisés sans ordre écrit ou verbal du maître d'ouvrage, ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art sauf dans le cas où la personne publique s'est préalablement opposée, de manière précise, à leur réalisation. Les demandes tendant à l'exécution conforme des travaux prévus ne peuvent être regardées comme des commandes de travaux supplémentaires. 10. L'article 3.3.3 " travaux supplémentaires ou modificatifs " du CCAP du marché en litige stipule : " Sont concernées les prestations supplémentaires ou modificatives dont la réalisation est nécessaire au bon achèvement de l'ouvrage, qui ont été notifiées par ordre de service et pour lesquelles le marché n'a pas prévu de prix. Au cours de l'exécution du marché, des demandes de devis pour travaux modificatifs pourront être émises par le maître d'œuvre. Elles le seront de manière expresse. Elles mentionneront la définition des travaux non prévus. Les entreprises concernées devront fournir au maître d'œuvre le devis de travaux (...). Une fois le devis validé par le maître d'œuvre, celui-ci établira un ordre de service pour travaux supplémentaires ou modificatifs qui sera notifiés au titulaire en recommandé avec accusé-réception ". S'agissant de la demande de paiement des travaux supplémentaires qui ont été demandés par le maître d'œuvre sans ordre de service régulier : 11. En premier lieu, l'article 4.1.6 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du lot n° 18 relatif aux fixations du vitrail type F prévoit " un éclairage de type pofa 70WAH (...) avec douille en porcelaine (...) ". Il résulte de l'instruction, et notamment du projet de décompte général ainsi que d'un courrier électronique du maître d'œuvre du 12 août 2015, que ce dernier a demandé à la société Goppion de modifier l'éclairage des vitraux de type F par un système de LED. Pour obtenir la rémunération de ces travaux supplémentaires la société Goppion se prévaut de deux devis, des 11 février 2016 et 15 décembre 2016, de montants respectifs de 2 564,20 euros et 17 640,80 euros. Il résulte du mémoire en réclamation de la société Goppion, dont les allégations ne sont pas contestées par la commune de Colmar, ainsi que du courrier électronique précité que, après une première installation correspondant au premier devis, la maîtrise d'œuvre, qui n'a pas été satisfaite par l'installation du système de LED, a demandé à la société Goppion d'étudier une nouvelle solution. Par suite, il résulte de l'instruction que, au regard des correctifs demandés par la maîtrise d'œuvre, seules les prestations figurant dans le second devis d'un montant de 17 640,80 euros ont pu présenter un caractère utile. S'agissant de travaux utiles exécutés sans ordre de service mais sur ordre irrégulier du maître d'œuvre, la société Goppion peut prétendre au remboursement des dépenses utiles exposées déduction faite de son bénéfice, évalué forfaitairement à 10 %. Par suite, la société Goppion est fondée à demander la rémunération de ces travaux à hauteur de la somme de 15 876,72 euros. 12. En second lieu, il résulte du projet de décompte général et des observations faites sur les plans le 3 mai 2015, que le maître d'œuvre doit être regardé comme ayant demandé, sans ordre de service, à la société Goppion la suppression d'un présentoir et la modification du dimensionnement de 4 socles présentoirs avec cloches de type H2. De tels travaux ont donc été demandés de manière irrégulière par le maître d'œuvre. Il ne résulte d'ailleurs pas de l'instruction, et n'est au demeurant pas allégué par la commune de Colmar, qu'une telle modification aurait été nécessaire par la mise en conformité de ces éléments de muséographie. Une telle dépense, d'un montant de 8 722,79 € a donc présenté un caractère utile pour la commune de Colmar. S'agissant de travaux utiles exécutés sans ordre de service mais sur ordre irrégulier du maître d'œuvre, la société Goppion peut prétendre au remboursement des dépenses utiles exposées déduction faite de son bénéfice, évalué forfaitairement à 10 %. Par suite, la société Goppion est fondée à demander la rémunération de ces travaux à hauteur de la somme de 7 850,51 euros. S'agissant de la demande de paiement des autres travaux supplémentaires : 13. En premier lieu, le CCTP du marché en litige prévoit que concernant " le prototype des panneaux suspendus de type B, il s'agira de réaliser un prototype complet inclus tout le système d'ossature et de suspension (y compris la partie en plénum des plafonds et ces interfaces), ainsi que la démonstration au maître d'ouvrage et musée de la mise en œuvre et les modifications éventuelles de ces panneaux ". L'article 1.1.1.2 de ce CCTP prévoit que les panneaux suspendus de type B comprend un " système de plusieurs suspentes métalliques en plénum de faux plafonds (...) un rail aluminium (...) tiges hautes de fixation en tête du panneau, en aluminium (...) tiges basses de fixation en bas du panneau en aluminium (...) ". Ce même article stipule que sont " à charge du titulaire du présent l'établissement de la note de calcul et dimensionnement de ces panneaux en fonction des contraintes de charge des œuvres et de réalisation, qui devra être approuvée par l'architecte avant réalisation (...) ". L'article 6.4.2 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché en litige stipule que " le coût des prototypes est réputé inclus dans le montant du prix global et forfaitaire du marché concerné ". L'article 8.2.1 du même cahier stipule que : " (...) Si à la suite de la transmission de plans d'exécution au visa du maître d'œuvre, ce dernier est conduit après contrôle à faire des observations et/ou des réserves nécessitant une reprise du et des plans par l'entrepreneur, en aucune manière cette reprise ou mise à jour des plans ne doit remettre en cause le planning des études et ne doit engendrer une rémunération supplémentaire pour reprise d'études ". 14. La société Goppion n'établit pas que les demandes multiples de modification par la maîtrise d'œuvre des études et des plans de rigidification des panneaux suspendus de type B excéderaient les mises au point nécessaire des travaux afin de les rendre conformes aux stipulations contractuelles. A ce titre, ainsi que l'indique le maître d'œuvre dans son projet de décompte général, la société Goppion ne justifie pas, notamment au regard de la seule existence de modifications apportées sur les plans, que ces travaux ne correspondraient pas à une reprise d'études, qui ne constitue pas des travaux supplémentaires. Dès lors, la société Goppion n'est pas fondée à demander une rémunération supplémentaire à ce titre. 15. En deuxième lieu, il résulte du projet de décompte général, non contesté sur ce point, que, par erreur, la société Goppion a fourni une quantité supplémentaire de podiums de type G1 par rapport au nombre qui était prévu dans l'avenant n° 2 du 22 mars 2016. Par ailleurs, en l'état de l'instruction, il ne résulte pas des seules indications figurant dans le projet de décompte général ou de la seule existence d'annotations ou d'observations sur les plans, que les fournitures supplémentaires des podiums de type G2, des socles présentoirs à cloche ouvrage de type H3, des retables complexes de type O et la facture du 15 septembre 2015 d'un expert tonnelier auraient été commandés, même irrégulièrement, par la commune de Colmar ou la SARL d'architecture Herzog et de Meuron. Par ailleurs, la société Goppion n'établit pas que ces travaux auraient présenté un caractère indispensable à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art. Dès lors, la société Goppion n'est pas fondée à demander une rémunération complémentaire de ces travaux. 16. En dernier lieu, la société Goppion n'établit aucunement la nature et la consistance des travaux relatifs à sa demande la rémunération de fournitures supplémentaires de podiums de type G3 et des travaux supplémentaires résultant de changements de couleurs sur des mobiliers déjà peints, de l'utilisation de présentoir comme prototype pour étude de modifications sur les joints et de l'ajout d'un système d'alarme pour la vitrine de la salle 05. Par suite, pour ces travaux, la demande de rémunération supplémentaire n'est, en tout état de cause, pas assortie de précisions et justifications suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. 17. Dès lors, il résulte de ce qui précède que la société Goppion ne peut prétendre à une rémunération supplémentaire que d'un montant de 23 727,23 euros, correspondant aux dépenses utiles qui ont été engagées pour les socles présentoirs avec cloche de type H2 et l'éclairage des vitraux de type F. En ce qui concerne les difficultés rencontrées au cours d'exécution du marché : 18. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en œuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics. S'agissant des sujétions techniques imprévues : 19. Sont regardées comme des sujétions techniques imprévues des difficultés matérielles rencontrées lors de l'exécution d'un marché, présentant un caractère exceptionnel, imprévisibles lors de la conclusion du contrat et dont la cause est extérieure aux parties. 20. A supposer même la société Goppion soit regardée comme se prévalant, à hauteur d'appel, de conclusions indemnitaires reposant sur le fondement des sujétions techniques imprévues, il ne résulte pas de l'instruction que le sinistre survenu dans la cave à vin, qui a fait l'objet d'un avenant, aurait bouleversé l'économie du contrat. Par ailleurs, aucun des autres évènements dont se prévaut la société Goppion ne présente le caractère de difficultés matérielles. Dès lors, la société Goppion n'est pas fondée à demander l'indemnisation de ses préjudices sur le fondement des sujétions techniques imprévues. S'agissant des fautes reprochées à la commune de Colmar : 21. En premier lieu, aux termes de l'article 2 de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée, alors applicable au marché en litige : " I. Le maître de l'ouvrage est la personne morale, mentionnée à l'article premier, pour laquelle l'ouvrage est construit. Responsable principal de l'ouvrage, il remplit dans ce rôle une fonction d'intérêt général dont il ne peut se démettre. / Il lui appartient, après s'être assuré de la faisabilité et de l'opportunité de l'opération envisagée, d'en déterminer la localisation, d'en définir le programme, d'en arrêter l'enveloppe financière prévisionnelle, d'en assurer le financement, de choisir le processus selon lequel l'ouvrage sera réalisé et de conclure, avec les maîtres d'oeuvre et entrepreneurs qu'il choisit, les contrats ayant pour objet les études et l'exécution des travaux. / Lorsqu'une telle procédure n'est pas déjà prévue par d'autres dispositions législatives ou réglementaires, il appartient au maître de l'ouvrage de déterminer, eu égard à la nature de l'ouvrage et aux personnes concernées, les modalités de consultation qui lui paraissent nécessaires. / Le maître de l'ouvrage définit dans le programme les objectifs de l'opération et les besoins qu'elle doit satisfaire ainsi que les contraintes et exigences de qualité sociale, urbanistique, architecturale, fonctionnelle, technique et économique, d'insertion dans le paysage et de protection de l'environnement, relatives à la réalisation et à l'utilisation de l'ouvrage (...) ". 22. Il résulte de l'instruction que, en cours d'exécution du marché, plusieurs modifications supplémentaires ont été demandées par la maîtrise d'œuvre afin de mettre au point des études EXE ou pour prendre en compte les prescriptions de la direction des musées de France. 23. La description détaillée des spécifications techniques ne relève pas des obligations incombant au maître d'ouvrage et de la définition d'une exigence technique à laquelle se réfère l'article 2 de la loi précitée. Par ailleurs, la contractualisation le 22 mars 2016, soit quelques jours après les opérations préalables à la réception, de la rémunération des difficultés rencontrées par la société Goppion en raison des demandes de la direction des musées de France ne saurait révéler, en tant que telle, une définition insuffisante des besoins ou l'absence de définition des contraintes et exigences techniques de l'ouvrage par la commune de Colmar dans son programme. 24. En deuxième lieu, l'article 3.3.1 du CCAP applicable au marché prévoit que le prix forfaitaire comprend notamment les sujétions relatives aux " frais d'études nécessaires à l'exécution des travaux à soumettre au maître d'œuvre ". L'article 8.2.1 du même cahier stipule que " chaque entrepreneur élabore les plans d'exécution et les cas échéant les plans d'atelier et de chantier de ses propres ouvrages avec indication des interfaces vis-à-vis des ouvrages adjacents des autres lots (...) Si à la suite de la transmission de plans d'exécution au visa du maître d'œuvre, ce dernier est conduit après contrôle à faire des observations et/ou des réserves nécessitant une reprise du et des plans par l'entrepreneur, en aucune manière cette reprise ou mise à jour des plans ne doit remettre en cause le planning des études et ne doit engendrer une rémunération supplémentaire pour reprise d'études ". 25. D'une part, il ne résulte pas de l'instruction que, à supposer même que ces agissements puissent caractériser une faute de la maîtrise d'œuvre, la société Goppion aurait alerté la commune de Colmar, maître d'ouvrage, sur les changements de planning, la pratique de la maîtrise d'œuvre de ne pas apposer de visa sans observation sur les premiers plans d'exécution, les demandes d'achèvement des travaux au plus tôt et de la fin anticipée des missions de la société en charge de l'ordonnancement pilotage et coordination (OPC) du chantier. 26. D'autre part, il résulte de l'instruction que, par un courrier électronique du 23 juillet 2014, la société Goppion, a alerté la maîtrise d'ouvrage sur le fait que les travaux étaient suspendus dans l'attente de plusieurs informations de la maîtrise d'œuvre et que depuis janvier 2013 un seul des trente-deux plans adressés à la maîtrise d'œuvre avaient été validés. Compte tenu de la date à laquelle il a été émis, de son caractère isolé et de l'absence d'autres courriers postérieurs relatifs à une éventuelle négligence de la maîtrise d'œuvre, ce seul courrier électronique, à supposer même la carence du maître d'œuvre soit avérée, ne permet pas d'établir que le maître d'ouvrage aurait été informé de cette carence, de façon à le mettre en mesure de prendre les décisions qui s'imposaient au titre de sa mission de direction et de contrôle du marché. 27. En troisième lieu, l'article 3.3.1 du CCAP stipule que les prix indiqués dans le marché comprennent notamment les sujétions " susceptibles d'entraîner l'exécution simultanée des ouvrages d'autres corps d'Etat ". L'article 4.2 du CCAP prévoit que le délai global assigné au lot n° 18 était de 26 mois à compter de l'ordre de service prescrivant le démarrage des travaux. L'ordre de service n° 1 a prescrit un début des travaux à compter du 27 août 2012. Par un ordre de service n° 13 l'achèvement des travaux a été décalé au 9 mars 2016. 28. Il résulte de l'instruction que, par un courrier du 20 novembre 2015, la société Goppion a informé la commune de Colmar de la possibilité de procéder à une réception partielle de ses travaux et alerté la commune que, en raison de l'absence d'achèvement des travaux par les autres lots, les éléments de scénographie et de muséographies qui ont été posés risqueraient d'être dégradés. Toutefois, compte tenu de ses termes, de son caractère isolé et de la date à laquelle il a été émis, ce seul courrier ne saurait révéler l'existence d'une faute du maître d'ouvrage dans le cadre de ses pouvoirs de direction et de contrôle du chantier. Par ailleurs, la commune de Colmar a confié les missions d'OPC à une autre société. 29. En dernier lieu, le maître d'ouvrage ne peut être tenu pour responsable de fautes commises par d'autres intervenants. Ainsi qu'il a été dit précédemment, compte tenu des difficultés liées à l'organisation du marché en litige, de sa nature et du nombre d'intervenants, de l'existence d'une mission OPC confiée à une autre société, la société Goppion n'établit pas que l'allongement de la durée du chantier serait imputable à une faute de la commune de Colmar. 30. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que la société Goppion, est uniquement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Colmar à lui verser la somme de 108 992,25 euros. Sur les intérêts : 31. La société Goppion a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 85 265,02 euros à compter du 12 mai 2017, date attestée de réception de sa demande de paiement de la facture n° 16111 du 15 avril 2016 par la commune de Colmar. La société Goppion a également droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 23 727,23 euros à compter du 22 juin 2017, date attestée de réception de sa demande de paiement des travaux supplémentaires par la commune de Colmar. Sur les intérêts des intérêts : 32. La capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois en appel le 29 juillet 2020. A cette date, il était dû au moins une année d'intérêts. Dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande. Les intérêts seront, par suite, capitalisés à cette date puis à chaque échéance annuelle ultérieure, pour produire eux-mêmes intérêts. Sur les frais liés à l'instance : 33. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Goppion, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Colmar demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune de Colmar le versement de la somme de 2 000 euros à la société Goppion sur le fondement des mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 1703892 du 29 mai 2020 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé. Article 2 : La commune de Colmar est condamnée à verser à la société Goppion la somme de 108 992,25 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 mai 2017 pour la somme de 85 265,02 euros et du 22 juin 2017 pour la somme de 23 727,23 euros. Les intérêts échus à la date du 29 juillet 2020 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 3 : La commune de Colmar versera à la société Goppion une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SA de droit italien Goppion et à la commune de Colmar. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - M. Denizot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, Signé : A. DenizotLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet du Haut-Rhin en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 20NC02159
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 11 décembre 2020 par laquelle le préfet d'Ille-et-Vilaine a rejeté sa demande de carte de résident. Par un jugement no 2100699 du 25 août 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée les 25 octobre 2022, M. A..., représenté par Me Baudet, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 25 août 2022 ; 2°) d'annuler la décision du 11 décembre 2020 ; 3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard dans un délai d'un mois ; 4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros. Il soutient que : - la décision contestée est entachée d'un vice de procédure au regard de l'article L. 314-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'absence d'un avis du maire de la commune où il réside ; - elle est entachée d'insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ; - elle méconnaît les dispositions de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision méconnaît des dispositions de l'article L. 313-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La requête a été communiquée au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas produit d'observations. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de M. Catroux a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant turc né le 7 janvier 1987, s'est marié le 26 août 2015 en Turquie avec une ressortissante française. Il a demandé la délivrance d'une carte de résident ou d'une carte de séjour pluriannuelle. Par une décision du 19 juillet 2018, le préfet d'Ille-et-Vilaine a rejeté cette demande au motif qu'il représente une menace pour l'ordre public. Par jugement du 12 octobre 2020, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 19 juillet 2018 au motif de son défaut de motivation et a enjoint au préfet d'Ille-et-Vilaine de réexaminer la situation de l'intéressé. Après avoir procédé à ce réexamen, le préfet a de nouveau rejeté sa demande, par une décision du 11 décembre 2020. M. A... a demandé au tribunal l'annulation de la décision portant rejet de sa demande de carte de résident. M. A... relève appel du jugement du 25 août 2022 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " La carte de résident est délivrée de plein droit : (...) / 3° A l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition qu'il séjourne régulièrement en France, que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. (...) ". Aux termes de l'article L. 314-3 du même code alors applicable : " La carte de résident peut être refusée à tout étranger dont la présence constitue une menace pour l'ordre public. " et aux termes de son article L. 314-2 du même code : " Lorsque des dispositions législatives du présent code le prévoient, la délivrance d'une première carte de résident est subordonnée à l'intégration républicaine de l'étranger dans la société française (...). ". Enfin, aux termes de l'article L. 313-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " I. - Au terme d'une première année de séjour régulier en France accompli au titre de l'un des documents mentionnés aux 2° et 3° de l'article L. 311-1, l'étranger bénéficie, à sa demande, d'une carte de séjour pluriannuelle dès lors que : / 1° Il justifie de son assiduité, sous réserve de circonstances exceptionnelles, et du sérieux de sa participation aux formations prescrites par l'Etat dans le cadre du contrat d'intégration républicaine conclu en application de l'article L. 311-9 et n'a pas manifesté de rejet des valeurs essentielles de la société française et de la République ;(...). ". 3. Le préfet s'est fondé en l'espèce pour rejeter la demande présentée par M. A... sur la circonstance que sa présence sur le territoire français comportait une menace pour l'ordre public et que son comportement témoignait d'un non-respect des valeurs essentielles de la société et de la République françaises, dès lors qu'il avait commis, le 16 juin 2005, un acte grave à l'encontre d'une personne de sexe féminin qui était mineure au moment des faits, crime pour lequel il avait été condamné à une peine d'emprisonnement de sept ans par la cour d'assises du Morbihan le 12 février 2008 et qu'il est inscrit au fichier des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAIS) afin de prévenir une récidive. 4. Si le requérant fait valoir la stabilité de son couple, son insertion professionnelle en France et l'ancienneté du fait sur lequel s'est fondé l'administration, il ressort toutefois des pièces du dossier que ce fait était d'une particulière gravité, s'agissant d'un crime entraînant une inscription au FIJAIS pour une durée de trente ans, et justifiait, malgré sa relative ancienneté, que la présence de l'intéressé puisse encore être regardée à la date de la décision contestée comme présentant une menace pour l'ordre public et son comportement comme témoignant d'un défaut de respect des valeurs de la République française. Dans ces conditions, les dispositions citées au point 2 n'ont pas été méconnues. 5. En second lieu, le requérant reprend en appel les moyens tirés de ce que la décision contestée est entachée d'un vice de procédure en l'absence d'un avis du maire de la commune où il réside sur son intégration, d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation et qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le rapporteur X. CatrouxLe président D. Salvi La greffière A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N°22NT03357
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner le centre hospitalier de ... à lui verser la somme de 13 112,77 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison des décisions des 3 août 2018 et 5 février 2019 portant changement affectation et du 5 février 2019 portant exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quinze jours. Par un jugement n°2001467 du 25 février 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 22 avril, 30 septembre et 28 octobre 2022, Mme A... C..., représentée par Me Colliou, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 25 février 2022 du tribunal administratif de Caen ; 2°) de condamner le centre hospitalier de ... à lui verser la somme de 16 752,77 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa réclamation préalable et de la capitalisation des intérêts ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de ... la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier, dès lors qu'il ne comporte pas les visas des dispositions législatives et réglementaires dont il fait application ; - la décision de changement d'affectation du 3 août 2018, qui constitue une sanction déguisée, en ce qu'elle n'a pas été prise dans l'intérêt du service et qu'elle comporte une atteinte à sa situation professionnelle et une intention de punir est illégale, dès lors que : * elle est irrégulière en raison d'une méconnaissance de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, * elle est entachée d'un détournement de pouvoir, dès lors qu'elle était déjà suspendue de ses fonctions, * elle méconnaît le principe selon lequel on ne peut être sanctionné deux fois pour les mêmes faits, * elle est entachée d'une erreur de droit, aucune sanction de déplacement d'office n'étant prévue par le statut de la fonction publique hospitalière, - la décision du 5 février 2019 prononçant à son encontre une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quinze jours est illégale, dès lors que : * elle est entachée de plusieurs vices de procédure dès lors que des membres du conseil de discipline ont manqué d'impartialité, une représentante de l'administration récusée n'ayant pas immédiatement quitté le conseil que les représentants de l'administration étaient plus nombreux que les représentants des agents lors de ce même conseil de discipline et qu'il y a été fait état de pièces non communiquées à l'agent ; * elle est insuffisamment motivée ; * elle repose sur des faits non établis par l'autorité chargée du pouvoir de discipline. - la décision de changement d'affectation du 5 février 2019 est également illégale, dès lors que: * elle est irrégulière en raison d'une méconnaissance de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, * elle n'est pas justifiée par l'intérêt du service, dès lors qu'elle était en congé pour maladie, * dès lors qu'elle constitue une sanction déguisée, puisqu'elle la prive de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) et qu'elle comporte une intention de punir, elle est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article 81 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 qui ne prévoit pas une telle sanction ; - les illégalités des trois décisions des 3 août 2018 et 5 février 2019 constituent des fautes, qui lui ont causé directement un préjudice financier, qui s'élève à la somme de 14 252,77 euros, compte tenu de la perte de la prime de travail de nuit à laquelle elle avait droit dans sa précédente affectation, de la réduction de la NBI subie, et des frais d'avocat exposés pour assurer sa défense lors de la procédure disciplinaire, ainsi qu'un préjudice moral qui s'élève à la somme de 2 500 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 15 juillet 2022, le centre hospitalier de ..., représenté par Me Lacroix, conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme C... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - la demande de remboursement des frais d'avocat est irrecevable, car elle n'avait pas fait l'objet d'une réclamation indemnitaire préalable ; - les autres moyens ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le décret n°2003-655 du 18 juillet 2003 ; - le décret n°89-822 du 7 novembre 1989 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Catroux, - et les conclusions de M. Berthon, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... a été recrutée le 6 avril 1998 par le centre hospitalier de ..., par un contrat emploi solidarité, puis, à compter du 6 avril 2000, en qualité d'agent des services hospitaliers (ASH) contractuel, et enfin, à compter du 1er juillet 2002 en qualité de stagiaire puis à compter du 1er juillet 2003, de titulaire dans le grade d'ASH. Elle a été promue, enfin, le 1er janvier 2008, au grade d'aide médico-psychologique (AMP). Jusqu'alors employée sur un poste de jour au sein de l'EHPAD de ..., dépendant du centre hospitalier de ..., elle a été affectée, à sa demande, sur un poste de nuit, le 13 juin 2016 au sein du même EHPAD. A la suite de signalements sur le comportement de l'intéressée à l'égard de résidents, elle a fait l'objet, par une décision du 3 août 2018, avec effet au 1er septembre 2018, d'une affectation d'office à l'EHPAD d'..., un autre établissement dépendant du centre hospitalier de .... Cette décision a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Caen du 22 août 2019 au motif que l'agent n'avait pas été mis à même de consulter son dossier avant l'édiction de la décision en litige, en méconnaissance des dispositions de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905. 2. Le directeur du centre hospitalier de ... a, par une décision du 23 octobre 2018, suspendu Mme C... de ses fonctions pour une durée de quatre mois. Après un avis du conseil de discipline, qui s'est réuni 1er février 2019, favorable à une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de quinze jours assortie d'un sursis total, la requérante a fait l'objet d'une telle sanction par une décision du directeur du centre hospitalier de ... du 5 février 2019. Par une décision du même jour, elle a été affectée d'office sur un poste situé au sein du service de médecine gériatrique du site de ... dépendant du centre hospitalier de .... Mme C... a contesté la décision portant sanction disciplinaire, à son encontre, par un recours gracieux, puis par un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif de Caen. Elle a également formé un recours gracieux puis un recours contentieux contre la décision du 5 février 2019 la changeant d'affectation. Par une décision du 21 février 2020, le directeur du centre hospitalier de ... a retiré les deux décisions du 5 février 2019. Mme C... a présenté, le 6 mai 2020, une réclamation indemnitaire préalable, reçu le 14 mai 2020 afin d'être indemnisée des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison des trois décisions des 3 août 2018 et 5 février 2019. Du silence gardé par l'administration sur cette réclamation est née une décision implicite de rejet. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner le centre hospitalier de ... à lui verser la somme de 13 112,77 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis. Par un jugement du 25 février 2022, dont Mme C... relève appel, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient (...) les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. (...) ". En l'espèce, le jugement attaqué comporte notamment parmi ses visas la loi du 22 avril 1905 et la loi du 9 janvier 1986, portant statut général des fonctionnaires hospitaliers dont le tribunal a fait application. Par suite, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient fait application d'autres textes législatifs ou réglementaires, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de justice administrative doit, en tout état de cause, être écarté. La requérante n'est ainsi pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la responsabilité pour faute de l'établissement public : S'agissant des décisions des 3 août 2018 et 5 février 2019 portant changement affectation : 4. En premier lieu, aux termes de l'article 80 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, alors en vigueur : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : /Premier groupe : / L'avertissement, le blâme, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; / Deuxième groupe : / La radiation du tableau d'avancement, l'abaissement d'échelon à l'échelon immédiatement inférieur à celui détenu par l'agent, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ; / Troisième groupe : / La rétrogradation au grade immédiatement inférieur et à l'échelon correspondant à un indice égal ou, à défaut, immédiatement inférieur à celui afférent à l'échelon détenu par l'agent, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; / Quatrième groupe : / La mise à la retraite d'office, la révocation. (...) / L'exclusion temporaire de fonctions, qui est privative de toute rémunération, peut être assortie d'un sursis total ou partiel. (...) " Par ailleurs, une mutation dans l'intérêt du service constitue une sanction déguisée dès lors qu'il est établi que l'auteur de l'acte a eu l'intention de sanctionner l'agent et que la décision a porté atteinte à la situation professionnelle de ce dernier. 5. D'une part, le centre hospitalier fait valoir que le changement d'affectation du 3 août 2018 avait pour objet de ramener la sérénité dans le service dans l'intérêt des résidents et de la qualité de leur prise en charge. Il résulte de l'instruction et notamment des témoignages recueillis par l'établissement public à la suite de signalements portant sur le comportement de la requérante, qu'il existait alors une ambiance délétère entre l'équipe de nuit de l'EHPAD à laquelle celle-ci appartenait et l'équipe de jour. Des membres de cette dernière équipe ayant effectué des remplacements de nuit ont ainsi vécu très négativement cette expérience, étant notamment laissés seuls pour réaliser des changes et les soins, pendant un long temps de repos pris au cours de nuit par Mme C... et un autre membre de l'équipe de nuit. Il résulte également de l'instruction que l'intéressée a fait preuve d'un comportement intimidant et même menaçant envers des collègues de travail pour les décourager de rapporter à leur hiérarchie certains de ses agissements. Dans ces conditions, et alors même qu'une des cadres de santé avait déclaré qu'une sanction devait être envisagée pour les actes ainsi reprochés à Mme C... et que celle-ci a fait preuve par ailleurs dans sa carrière de professionnalisme et de qualités dans la prise en charge des résidents de l'EHPAD, la décision de changement d'affectation du 3 août 2018 était justifiée par l'intérêt du service et ne constituait pas une sanction déguisée. Elle n'a donc pas été prise en méconnaissance du principe selon lequel on ne peut être sanctionné deux fois pour les mêmes faits, et n'est pas entachée d'une erreur de droit au regard du statut de la fonction publique hospitalière en ce qu'il ne prévoit pas de sanction de déplacement d'office. Enfin, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi, alors même que Mme C... a été quelques semaines plus tard suspendue de ses fonctions, cette dernière mesure n'ayant qu'un objet conservatoire. 6. D'autre part, il résulte de l'instruction que le changement d'affectation du 5 février 2019 est fondé sur la circonstance que Mme C... se trouvait depuis juin 2018 en congé pour maladie, puis, à compter du 23 octobre 2018 suspendue de ses fonctions et qu'il était nécessaire pour le bon fonctionnement du service de pourvoir sans délai le poste situé à ... sur lequel la requérante avait été affectée à compter du 1er septembre 2018 par la décision du 3 août 2018. Ce poste a d'ailleurs été pourvu par un autre agent dès le 10 septembre suivant. De plus, ainsi qu'il a été dit au point précédent, le fait de mettre un terme aux fonctions de Mme C... exercée jusqu'alors au sein de l'EHPAD de (ANOTrouville-sur-Mer(/ANO) était justifié pour le bon fonctionnement du service. Dans ces conditions, et alors même qu'à la date de la décision en litige, Mme C... se trouvait en congé pour maladie, le directeur du centre hospitalier n'a pas commis d'erreur d'appréciation en prononçant ce nouveau changement d'affectation dans l'intérêt du service et n'a pas pris à l'encontre de l'intéressée une sanction disciplinaire déguisée. Le moyen tiré de l'erreur de droit au regard de l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 qui ne prévoit pas de sanction de mutation d'office ne peut, dès lors, également qu'être écarté. 7. En dernier lieu, aux termes de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, dans sa rédaction applicable au litige : " Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardé dans leur avancement à l'ancienneté. ". En vertu de cet article, un agent public faisant l'objet d'une mesure prise en considération de sa personne, qu'elle soit ou non justifiée par l'intérêt du service, doit être mis à même de demander la communication de son dossier, en étant averti en temps utile de l'intention de l'autorité administrative de prendre la mesure en cause. 8. Ainsi que le soutient Mme C..., il résulte du jugement du tribunal administratif de Caen du 22 août 2019, devenu définitif, que la décision du 3 août 2018 a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 et est, dès lors, illégale. De même, il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté par l'établissement public intimé que la requérante n'a pas été mise à même de consulter son dossier avant l'édiction de la décision du 5 février 2019, qui a été prise, ainsi qu'il résulte de ce qui précède, en considération de sa personne. Cette décision est, dès lors, également entachée d'illégalité, la méconnaissance des dispositions citées au point précédent, ayant privé l'intéressée, dans les circonstances de l'espèce, d'une garantie. S'agissant de la décision du 5 février 2019 portant exclusion temporaire de fonction : 9. En premier lieu, d'une part, il résulte de l'instruction que la décision de sanction en litige est fondée notamment sur la circonstance que Mme C... a eu un comportement intimidant voire menaçant envers des collègues. Eu égard, à ce qui a été dit au point 5, un tel motif n'est pas entaché d'une erreur de fait. D'autre part, l'administration s'est également fondée pour prendre cette décision sur les circonstances que la requérante avait manqué à certaines obligations, en allant dormir pendant le service de nuit entre 2 heures et 5 heures environ ou en refusant de faire des transmissions à l'équipe de jour et avait commis des négligences ou des manquements à l'obligation de bien-traitance envers les résidents de l'EHPAD, en ne faisant pas de tournée à certaines heures de la nuit ou en n'effectuant pas des changes de résidents au cours de ces heures. Si la requérante produit plusieurs témoignages aux termes desquels elle ne dormait pas la nuit durant le service et avait un comportement irréprochable avec les résidents, et verse au débat des documents comportant des informations pouvant donner lieu à transmission, les éléments qu'a recueillis l'administration auprès de plusieurs personnes ayant travaillé avec la requérante pour établir les faits en cause sont nombreux, précis et concordants. Il ne résulte pas de l'instruction qu'ils s'expliqueraient par une " cabale fomentée " par des membres de l'équipe de jour. Ainsi, le moyen tiré de ce que l'administration se serait fondée sur des faits non établis pour prendre la sanction en litige doit être écarté. 10. En deuxième lieu, aux termes de l'article 80 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, alors en vigueur : " L'autorité investie du pouvoir de nomination exerce le pouvoir disciplinaire après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline et dans les conditions prévues à l'article 19 du titre 1er du statut général. ". Aux termes de l'article 4 du décret du 18 juillet 2003 visé ci-dessus, de plus : " Les commissions administratives paritaires comprennent en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants du personnel. Elles sont composées de membres titulaires et suppléants. " Enfin, aux termes de l'article 1er du décret du 7 novembre 1989 visé ci-dessus dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire contre lequel est engagée une procédure disciplinaire doit être informé qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel et de se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix. Il doit être invité à prendre connaissance du rapport mentionné à l'article 83 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. " et aux termes de son article 4 : " Le fonctionnaire poursuivi peut récuser l'un des membres du conseil de discipline, et le même droit appartient à l'autorité ayant le pouvoir disciplinaire. ". 11. Ni les dispositions régissant les commissions administratives paritaires (CAP), ni aucune autre règle, ni enfin aucun principe ne subordonnent la régularité des délibérations des CAP à la présence en nombre égal de représentants de l'administration et de représentants du personnel. La circonstance que le conseil de discipline n'aurait pas siégé dans une formation paritaire est donc sans incidence sur la légalité de la sanction en litige. 12. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qu'allègue Mme C..., l'ensemble des pièces soumises à l'examen du conseil de discipline lui ont bien été transmises par un courrier avec accusé de réception daté du 1er octobre 2018, y compris le témoignage de Mme B.... La décision en litige n'est donc pas entachée d'une irrégularité à cet égard. 13. En quatrième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que le directeur du centre hospitalier, auteur de la sanction en litige, aurait manqué au principe d'impartialité en prenant cette sanction. 14. En cinquième lieu, toutefois, il est constant qu'un membre du conseil de discipline, représentant l'administration, qui avait été récusé en début de séance par Mme C... n'a pas quitté immédiatement la séance, mais a présenté le dossier et a fait valoir son opinion à plusieurs reprises sur les éléments de ce dossier. Bien que cette personne n'ait pas participé au vote, la sanction en litige est, dès lors, entachée d'une irrégularité qui a, dans les circonstances de l'espèce, privé l'intéressée d'une garantie. 15. En dernier lieu, ainsi que le soutient la requérante, la sanction du 5 février 2019 prise à son encontre ne comporte aucune motivation en fait, le visa du rapport de saisine du conseil de discipline ne pouvant tenir lieu d'une telle motivation alors même que ce rapport comporte l'énoncé des faits reprochés à la requérante. 16. Il résulte de ce qui précède que les trois décisions des 3 octobre 2018 et 5 février 2019 sont entachées d'illégalités. En ce qui concerne les préjudices : 17. Si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de la collectivité publique, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise. Lorsqu'en particulier, une personne sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité, pour un vice de procédure, de la décision lui infligeant une sanction, il appartient au juge de plein contentieux, saisi de moyens en ce sens, de déterminer, en premier lieu, la nature de cette irrégularité procédurale puis, en second lieu, de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si, compte tenu de la nature et de la gravité de cette irrégularité procédurale, la même décision aurait pu être légalement prise, s'agissant tant du principe même de la sanction que de son quantum, dans le cadre d'une procédure régulière. 18. La procédure d'édiction des deux décisions de changement d'affectation prises à l'encontre de la requérante est, eu égard à ce qui précède, entachée d'une irrégularité tenant à ce que l'intéressée n'a pas été préalablement mise à même de consulter son dossier administratif. Toutefois, il résulte de l'instruction, compte tenu notamment de l'intérêt du service qui s'attachait à changer l'affectation de Mme C... au sein de l'établissement public, que ces deux décisions auraient pu être légalement prises à l'issue d'une procédure régulière. 19. Ainsi qu'il a été précédemment exposé, la sanction du 5 février 2019 était entachée d'un défaut de motivation et d'une irrégularité tendant à la méconnaissance du droit de récusation garanti à l'intéressée par les dispositions régissant la procédure devant le conseil de discipline. Toutefois, compte tenu des faits reprochés à Mme C..., de leur degré de gravité, de leur impact sur le fonctionnement du service ainsi que de la nature de la sanction prononcée, celle-ci aurait pu être légalement prononcée par l'administration, à l'issue d'une procédure régulière et par une décision suffisamment motivée. 20. Il suit de là que les décisions en litige, bien qu'illégales, n'ouvrent pas droit à l'indemnisation des préjudices financiers et moral invoqués par la requérante. 21. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier de ..., que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Sur les frais de l'instance : 22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de ..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. 23. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... la somme que demande le centre hospitalier de ... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier de (ANOla Côte Fleurie(/ANO) présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au centre hospitalier de .... Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe 23 juin 2023. Le rapporteur, X. CATROUXLe président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT01228
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 7 juin 2022 par lequel le préfet du Finistère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement d'office. Par un jugement n° 2203519 du 7 octobre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 9 décembre 2022, M. B... A..., représenté par Me Maony, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 7 octobre 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 7 juin 2022 du préfet du Finistère ; 3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " travailleur temporaire ", ou à tout le moins de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour en le munissant dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il a omis de répondre aux moyens invoqués, notamment celui tiré de la méconnaissance par l'obligation de quitter le territoire français de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le refus de titre de séjour est entaché d'une inexacte application de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mars 2023, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 novembre 2022. Vu les pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Lellouch, - et les observations de Me Clairay, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., ressortissant malien né le 20 janvier 2002, déclare être entré en France le 1er juin 2018. Le département du Finistère, qui l'avait mis provisoirement à l'abri, a mis fin à sa prise en charge dès le 5 septembre 2018. En septembre 2021, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour et la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " travailleur temporaire ". Par arrêté du 7 juin 2022, le préfet du Finistère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement d'office. M. A... relève appel du jugement du 7 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2022. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Il ressort des pièces du dossier que, dans sa requête, M. A... a invoqué le moyen opérant tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au soutien de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français. Le tribunal administratif de Rennes, qui a pourtant visé le moyen ainsi présenté, a omis d'y répondre. Son jugement est, par suite, insuffisamment motivé et doit être annulé dans cette mesure pour irrégularité en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre la mesure d'éloignement. 3. Il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions de M. A... dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français et par la voie de l'effet dévolutif de l'appel en ce qui concerne les autres décisions contenues dans l'arrêté litigieux. Sur la légalité de l'arrêté du 7 juin 2022 : En ce qui concerne le refus de titre de séjour : 4. Pour refuser à M. A... la délivrance d'un titre de séjour, le préfet du Finistère s'est fondé, d'une part, sur ce qu'il ne remplit pas la condition de recevabilité posée par l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, imposant de justifier de son identité et de son état civil, d'autre part, sur ce qu'il ne justifie ni d'une entrée régulière en France ni d'une autorisation de travail ou d'un contrat signé par l'autorité compétente pour pouvoir prétendre à un titre de séjour en qualité de salarié et enfin, sur ce que sa situation ne répond ni à des considérations humanitaires ni à des motifs exceptionnels justifiant son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 5. D'une part, aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente les documents justifiant de son état civil et de sa nationalité (...) ". 6. D'autre part, aux termes de l'article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". L'article 47 du code civil dispose : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Par ailleurs, il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le jugement produit aurait un caractère frauduleux. 7. Afin de justifier de son identité et de son état civil, M. A... produit un extrait conforme de jugement supplétif d'acte de naissance, la copie du volet n° 3 de l'acte de naissance dressé suivant ce jugement, ainsi qu'une carte consulaire. Les éléments avancés par le préfet, tenant aux circonstances que le jugement supplétif a été transcrit avant l'expiration du délai d'appel, que les dates d'établissement de l'acte de naissance et de l'évènement qu'il relate sont mentionnées en chiffres et non en lettres, contrairement à ce que prévoit l'article 126 du code civil malien, et que l'acte de naissance dressé suivant le jugement ne comportait pas de numéro d'identification " Nina " figurant sur la carte consulaire ne suffisent pas à établir le caractère frauduleux du jugement supplétif, ni à remettre en cause la régularité des actes d'état civil et des documents présentés. Il en va de même de la circonstance que le département a mis fin à sa prise en charge en remettant en cause sa minorité. Il s'ensuit que le préfet du Finistère a fait une inexacte application de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en estimant que M. A... ne justifiait pas de son état civil. 8. Toutefois, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1." 9. Il ressort des pièces du dossier qu'entré en France en juin 2018, le département du Finistère a mis fin à sa prise en charge en tant que mineur non accompagné à compter de septembre 2018 au regard des doutes émis sur sa minorité. M. A... est néanmoins demeuré en France et y a obtenu un diplôme d'études en langue française en septembre 2019 puis un certificat d'aptitude professionnelle d'ébéniste en juillet 2021. S'il a ensuite effectué un stage de plusieurs mois comme charpentier au sein d'une entreprise qui lui avait proposer de le former et de le recruter en contrat d'apprentissage en qualité de charpentier, ce contrat devait débuter le 1er septembre 2022, soit postérieurement à l'arrêté litigieux. En outre, célibataire et sans enfant à charge, M. A... ne fait valoir aucune attache particulière en France et sa mère réside toujours dans son pays d'origine. Au regard de l'ensemble de ces éléments, et sans remettre en cause les efforts d'insertion déployés par le requérant, le préfet du Finistère n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que sa promesse d'embauche dans le cadre d'un contrat d'apprentissage ne caractérisait pas de considération humanitaire ou de motif exceptionnel justifiant la délivrance d'un titre de séjour " salarié " ou " travailleur temporaire " sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il résulte de l'instruction que le préfet du Finistère aurait pris la même décision en ne se fondant que sur ce seul motif. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 10. Entré en France en janvier 2018, soit quatre ans avant l'intervention de l'arrêté litigieux, M. A... est célibataire et sans enfant à charge. Il ne revendique pas d'attaches familiales en France et déclare que sa mère, avec laquelle il est en contact téléphonique de temps en temps, réside toujours au Mali. Les relations qu'il a tissées avec les familles qui l'ont accueilli ou avec ses éducateurs ne sont pas suffisamment intenses, anciennes et stables pour considérer que l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été opposée porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts au vu desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que la demande présentée au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Une copie en sera adressée, pour information, au préfet du Finistère. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. La rapporteure, J. Lellouch Le président, D. Salvi La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT03853
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 16 mai 2022 du préfet du Morbihan lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par une ordonnance n° 2209414 du 1er août 2022, le président du tribunal administratif de Nantes a transmis au tribunal administratif de Rennes le dossier de la requête de M. B.... Par un jugement n° 2203982 du 10 octobre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 20 février 2023, M. C..., représenté par Me Bourgeois, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 10 octobre 2022 ; 2°) d'annuler cet arrêté du 16 mai 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 75 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - en omettant de se prononcer sur le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision de refus de titre de séjour sur sa situation personnelle, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ; - la décision portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Par un mémoire enregistré le 31 mars 2023, le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête. Il s'en rapporte à ses écritures de première instance. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 janvier 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Salvi a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., ressortissant de la République du Congo né le 30 août 1991, est entré irrégulièrement en France le 30 mai 2014, selon ses déclarations. Le bénéfice de l'asile lui a été refusé par décision du 25 juin 2015 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par décision du 10 mars 2016 de la Cour nationale du droit d'asile. L'intéressé a fait l'objet de mesures d'éloignement par deux arrêtés du 1er juin 2016 puis du 17 juin 2020, respectivement des préfets du Val-d'Oise et du Morbihan. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 27 septembre 2021 sur le fondement des dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 16 mai 2022, le préfet du Morbihan a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai. L'intéressé relève appel du jugement du 10 octobre 2022 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Il ressort des termes mêmes du jugement attaqué et notamment de son point 7, que les premiers juges ont, contrairement à ce que soutient M. C..., expressément et suffisamment répondu au moyen invoqué devant eux et tiré de l'erreur manifeste dont serait entachée la décision litigieuse portant refus de tire de séjour dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité au motif que le tribunal aurait omis de se prononcer sur ce moyen doit être écarté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour : 3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. (...) ". 4. M. C... fait valoir qu'il réside depuis 2012 sur le territoire français où se trouve le centre de ses intérêts, qu'il vit en couple avec une compatriote titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle valable jusqu'en janvier 2024, avec laquelle il a souscrit un pacte civil de solidarité le 11 juin 2021 et que deux enfants sont nés de leur union en 2018 et 2020. Toutefois, si le requérant justifie notamment de la souscription commune d'un contrat de fourniture d'énergie en octobre 2019 et du versement au couple de prestations de la caisse d'allocations familiales depuis le mois d'octobre 2020, il ne justifie pas, par les documents qu'il produit et alors qu'il ressort des pièces du dossier que M. C... dispose d'un autre domicile non loin de celui de sa compagne et de leurs enfants, d'une communauté de vie présentant des caractéristiques significatives d'ancienneté, d'intensité et de stabilité. Pour les mêmes motifs, il n'établit pas davantage, par les quelques attestations laconiques établies postérieurement à la décision contestée et les photographies non datées qu'il produit, participer à l'entretien et à l'éducation ses enfants ou entretenir avec ces derniers des liens d'une particulière intensité. Le requérant, qui n'invoque pas d'autre lien particulier en France, n'établit, ni n'allègue, être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, où il a vécu la majeure partie de son existence, ni même être dans l'impossibilité, le cas échéant, d'y reconstituer sa cellule familiale. En outre, il ressort des pièces du dossier que M. C..., qui n'a été admis au séjour en France qu'au titre de l'instruction de sa demande d'asile et s'y est ensuite maintenu irrégulièrement en dépit des deux mesures d'éloignement dont il a fait l'objet en 2016 et en 2018, ne dispose ni de ressources personnelles, ni d'une perspective professionnelle et ne justifie pas d'une particulière insertion dans la société française. Dans ces conditions, la décision contestée lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet du Morbihan n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle du requérant. 5. En vertu des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, tirés de l'absence de lien intense entre le requérant et ses enfants mineurs résidant en France, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour aurait été prise en méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté. 6. En se prévalant de sa situation telle qu'exposée au point 4, M. C... n'établit pas que le préfet du Morbihan aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que son admission au séjour ne répondait pas à des considérations humanitaires et ne se justifiait pas au regard de motifs exceptionnels, au sens de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : 7. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision. 8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 4 et 5, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant. En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi : 9. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision. 10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées. D E C I D E Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Morbihan. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le président-rapporteur, D. Salvi L'assesseure la plus ancienne, J. Lellouch La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 23NT004582
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La SAS Schaeffer et Cie a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner la région Grand Est à lui verser, d'une part, la somme de 11 505,31 euros TTC au titre du solde du marché avec intérêts moratoires au taux légal majoré de 8 points, d'autre part, la somme de 42 300 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi en raison de l'allongement de la durée du chantier. Par un jugement n° 1903821 du 30 juillet 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 30 septembre 2020, la SAS Schaeffer et Cie, représentée par Me Deleau, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1903821 du 30 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant la condamnation de la région Grand Est ; 2°) à titre principal, au titre du solde du marché, de condamner la région Grand Est à lui verser la somme de 11 505,31 euros TTC ainsi que les intérêts au taux légal majoré de 8 points à compter de la présente requête et la capitalisation de ces intérêts ; 3°) à titre principal de condamner la région Grand Est à lui verser la somme de 42 300 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi en raison de l'allongement de la durée du chantier ; 4°) à titre subsidiaire, de diligenter une expertise aux fins notamment de se prononcer sur l'origine et la cause des retards d'exécution qui lui sont imputés ainsi que de la durée de l'allongement de la durée du chantier ; 5°) de mettre à la charge de la région Grand Est la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les pénalités de retard dans l'exécution des travaux ne sont pas fondées dans la mesure où aucune stipulation contractuelle ne prévoit un délai partiel d'exécution ; les retards sont imputables à une modification de la consistance des travaux par le maître d'œuvre et au retard de l'entreprise titulaire du lot plâtrerie ; - les pénalités de retard dans la remise des plans d'atelier et de chantier ne sont pas fondées dans la mesure où le retard est imputable au maître d'œuvre et à l'entreprise du lot plâtrerie ; - le solde du marché s'élève à la somme de 11 505,31 euros TTC ; - la région Grand Est, qui est responsable de son mandataire, a commis une faute en n'intervenant pas alors qu'elle avait été alertée à de nombreuses reprises sur une interruption du chantier du 9 février au 13 juin 2016 ; - son préjudice résultant de la faute du maître de l'ouvrage s'élève à la somme de 42 300 euros ; - à titre subsidiaire, une expertise doit être diligentée pour déterminer l'origine et les causes des retards et de l'allongement de la durée du chantier. Par un mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2021, la région Grand Est, représentée par Me Palmier, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Schaeffer et Cie la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - à titre principal, la demande présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg plus de six mois après la décision rejetant implicitement le mémoire en réclamation est irrecevable car tardive ; - à titre principal également, la société appelante est irrecevable à contester l'application des pénalités de retard pour la remise des documents dans la mesure où ces pénalités n'ont pas été contestées dans le mémoire en réclamation ; - à titre subsidiaire, les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des marchés publics, alors en vigueur ; - le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Denizot, - les conclusions de M. A..., - et les observations de Me Papin pour la société Schaeffer et Cie ainsi que celles de Me Monaji pour la région Grand Est. Considérant ce qui suit : 1. Par un acte d'engagement du 10 décembre 2015, la région Alsace, aux droits de laquelle est venue la région Grand Est, représentée par la SERS agissant en qualité de maître d'ouvrage délégué, a attribué à la société Schaeffer et Cie le lot n° 404 " génie climatique - installations sanitaires " relatif à l'opération de restructuration et d'extension du lycée Le Corbusier. Par un courrier du 4 avril 2018, la société Schaeffer et Cie a adressé un premier projet de décompte final au maître d'œuvre. Par un deuxième courrier du 14 avril 2018, la société Schaeffer et Cie a adressé au maître d'œuvre un projet de décompte final rectificatif dans lequel figurait, outre le montant total des travaux exécutés fixé à 265 207,80 euros TTC, la somme de 42 300 euros au titre du préjudice qu'elle estimait avoir subi en raison de l'allongement des délais du chantier. Par un ordre de service du 25 juin 2018, le maître d'ouvrage délégué a notifié à la société Schaeffer et Cie un décompte général mentionnant, outre le montant des travaux exécutés, des pénalités d'un montant de 52 198,04 euros. Par un jugement du 30 juillet 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la société Schaeffer tendant à la condamnation de la région Grand Est à lui verser la somme de 11 505,31 euros au titre de l'exécution du marché, ainsi que la somme de 42 300 euros au titre de l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi. La société Schaeffer et Cie relève appel de ce jugement. Sur les le bien-fondé des pénalités de retard infligées à la société Schaeffer et Cie : En ce qui concerne les pénalités pour retard dans l'exécution des travaux : 2. Aux termes de l'article 4.1 " délai d'exécution des travaux " du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) : " Les stipulations correspondantes figurent dans l'acte d'engagement et éventuellement dans le calendrier prévisionnel annexé ". Aux termes de son article 4.3 : " Sauf stipulations différentes dans l'additif au CCAP, les stipulations du CCAG sont seules applicables ". Aux termes de l'article 4.1 de l'additif au CCAP : " Les termes de l'article 4.1 du CCAP sont complétés par les dispositions suivantes : / Les stipulations correspondantes figurent dans l'acte d'engagement et dans le calendrier prévisionnel. / La date de démarrage des travaux sera fixée par ordre de service. Conformément à l'article 28.1 du CCAG travaux, la période de préparation d'un mois (minimum) est comprise dans le délai d'exécution / (...) / Le délai d'exécution propre à chaque lot commence à partir de la date de démarrage des travaux fixée par ordre de service. ". Aux termes de l'article 4.3.1 de l'additif au CCAP : " a) Retards dans l'exécution des travaux / Le montant des pénalités sera déterminé par l'application d'une formule unique pour l'ensemble des lots : / Pénalité journalière = racine carrée du montant HT du marché initial et des avenants en plus ou en moins pour le lot considéré, avec un montant minimum de 150 €/ jour calendaire de retard. / Dans l'hypothèse de la notification de pénalités auxquelles le Maître d'ouvrage aura décidé de conférer un caractère provisoire, les pénalités pourront être transformées en pénalités définitives si l'une des deux conditions suivantes est remplie : / ou l'entrepreneur n'a pas achevé les travaux lui incombant dans le délai d'exécution propre à son lot / ou l'entrepreneur, bien qu'ayant terminé ses travaux dans ce délai, a perturbé la marche du chantier (...) ". 3. Il résulte du planning prévisionnel annexé à l'ordre de service du 26 janvier 2016 que la société Schaeffer et Cie disposait d'un délai de 205 jours à compter du 9 février 2016, soit jusqu'au 17 octobre 2016, pour exécuter les travaux sur consigne de la maîtrise d'œuvre en charge de l'ordonnancement, pilotage et coordination (OPC). Ce même planning prévoyait que les travaux devaient être finalisés, après une période de cinq semaines d'essais de mise en service, soit le 21 novembre 2016. Le maître d'ouvrage, sur le fondement de l'article 4.3.1 de l'additif au CCAP, a appliqué, pour un montant de 31 498,04 euros, des pénalités pour 67 jours de retard dans l'exécution des travaux, au titre de la période du 17 octobre 2016 au 23 décembre 2016. S'agissant de la possibilité d'infliger des pénalités définitives pour un retard partiel dans l'exécution des travaux : 4. Il résulte des stipulations précitées de l'article 4.3.1 de l'additif au CCAP que le contrat en litige prévoyait la possibilité de transformer des pénalités provisoires en pénalités définitives lorsque l'entrepreneur a perturbé la marche du chantier ou n'a pas achevé les travaux lui incombant dans le délai d'exécution propre à son lot. Il résulte de l'instruction, et plus particulièrement des courriers du bureau d'études du 1er juin 2016 et de l'architecte du 5 septembre 2016 que le retard de la société Schaeffer dans la commande de panneaux rayonnant a eu des conséquences négatives sur l'avancement du chantier. En outre, il résulte de l'instruction que la société Schaeffer et Cie n'avait pas achevé les travaux propres à son lot le 21 novembre 2016. Par suite, pour ce double motif, la région Grand Est pouvait transformer les pénalités provisoires en pénalités définitives. Dès lors, la société Schaeffer et Cie n'est pas fondée à soutenir que les pénalités infligées ne seraient pas justifiées au motif qu'aucune stipulation contractuelle ne prévoyait un délai partiel d'exécution. S'agissant de l'imputabilité des retards à la société Schaeffer et Cie : 5. En premier lieu, il résulte d'un courrier du 12 octobre 2015 et d'un extrait de la décomposition des prix globale et forfaitaire de l'offre de la société Schaeffer que celle-ci, dans le cadre de la procédure de passation, a proposé, après régularisation de son offre, des panneaux rayonnant de marque Zehnder de type Flatline, comportant différentes dimensions. Il résulte, par ailleurs, de l'instruction, et plus particulièrement du courrier émanant de la maîtrise d'œuvre du 25 août 2016 que le choix d'enlever les cornières visibles sur les faux-plafonds ne modifiait pas les détails indiqués par l'architecte pendant la phase de passation du marché. Par suite, la société Schaeffer et Cie n'établit pas que la modification de la longueur des panneaux rayonnant commandés résulterait du choix de la maîtrise d'œuvre d'ôter les cornières apparentes des faux-plafonds. 6. En second lieu, il résulte du compte-rendu de chantier n° 29 du 2 août 2016 que, contrairement à ce qu'allègue la société requérante, la société Sari, titulaire du lot plâtrerie, a transmis ses plans d'atelier et de chantier le 17 juin 2016 au maître d'œuvre qui les a adressés, le même jour, à la société Schaeffer. En outre, contrairement à ce qu'allègue la société Schaeffer et Cie, il ne résulte aucunement de l'instruction que le chantier aurait été interrompu au cours de la période de février à juin 2016. Par ailleurs, il résulte du compte-rendu de chantier du 7 juin 2016 que la société titulaire du lot n° 420 " couverture étanchéité " a mis hors d'eau définitivement le chantier le 6 juin 2016 soit à une date antérieure à celle qui était prévue par le planning contractuel adossé à l'ordre de service du 26 janvier 2016. Enfin, il résulte d'un courrier du 16 septembre 2016 que le retard mis par la société Schaeffer à commander les panneaux rayonnants initialement prévus dans son offre résulte exclusivement de raisons économiques liées aux prix de son fournisseur. Ainsi, la société Schaeffer n'établit pas que les panneaux rayonnant de marque Zhender de type Flatline ne pouvait pas être commandée avant le 7 octobre 2016, en raison de contraintes techniques liées à la tardiveté d'une mise hors d'eau définitive du chantier ou de la mise à disposition des plans d'atelier et de chantier par la société Sari. 7. Dès lors, la société Schaeffer et Cie n'est pas fondée à soutenir que le retard dans la commande des panneaux rayonnants ne lui serait pas imputable et que les pénalités qui lui ont été infligées à ce titre pour un montant de 31 498,04 euros ne seraient pas justifiées. En ce qui concerne le retard dans la remise des plans d'atelier et de chantier : 8. Aux termes du b de l'article 4.3.1 de l'additif au CCAP : " Une pénalité de 150 euros par jour de retard sera appliquée pour sanctionner les retards dans la production de tous documents (...) Il s'agit notamment de : / - la production des plans d'atelier et de chantier des ouvrages pour approbation des Maîtres d'Œuvre et du Contrôle Technique (...) ". Aux termes de l'article 8.2 de l'additif au CCAP : " Conformément aux dispositions de l'article 8.2 du CCAP, il est précisé que le maître d'œuvre est chargé de l'établissement des plans d'exécution des ouvrages. / Le maître d'œuvre n'étant pas chargé des plans d'atelier et de chantier (PAC) et de détail de fabrication, ceux-ci seront établis par les entreprises et soumis au visa du maître d'œuvre et à l'approbation du contrôleur technique avant l'exécution des travaux correspondants ". 9. La région Grand Est a infligé à la société Schaeffer et Cie une pénalité de 20 700 euros pour un retard de 138 jours dans la remise de plans d'atelier et de chantier (PAC), au titre de la période du 25 mai au 10 octobre 2016. Il résulte de l'instruction que, par un courrier électronique du 11 mai 2016, la maîtrise d'œuvre avait mis en demeure la société Schaeffer et Cie d'achever la synthèse des PAC à compter du 25 mai 2016. Si la société Schaeffer et Cie a déposé des plans le 19 juillet 2016, il résulte également de l'instruction que ces plans n'ont été définitivement validés par la maîtrise d'œuvre que le 10 octobre 2016. 10. D'une part, il résulte de l'instruction, et plus particulièrement du compte-rendu de chantier n° 29 du 2 août 2016, que la société Sari, titulaire du lot plâtrerie avait remis ses PAC le 17 juin 2016. Par suite, la société Schaeffer, n'établit pas que le retard dans la remise de ses PAC serait imputable à la société Sari. 11. D'autre part, ainsi qu'il a été dit précédemment, dans la mesure où le retard dans la commande des panneaux rayonnant résulte exclusivement de motifs économiques, la société Schaeffer et Cie n'est pas fondée à soutenir que la remise tardive des PAC serait imputable aux modifications techniques engagées en cours d'exécution du chantier. 12. Enfin, la société Schaeffer n'établit pas que la remise des documents le 19 juillet 2016, qui ont fait l'objet d'un visa de l'architecte, correspondrait à la remise de l'ensemble des PAC demandés par l'OPC dans sa mise en demeure du 11 mai 2016. En se bornant à soutenir qu'elle ignorait les dimensions exactes des panneaux rayonnants alors que cette incertitude résultait de ses propres hésitations sur le choix de panneaux sur mesure, la société Schaeffer et Cie ne justifie pas que les pénalités ne pouvaient lui être infligées en raison de l'impossibilité de connaître la dimension exacte des panneaux. 13. Dès lors, la société Schaeffer et Cie n'est pas fondée à soutenir que les pénalités de 20 700 euros pour retard dans la remise des PAC ne seraient pas justifiées. Sur la responsabilité du maître d'ouvrage : 14. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en œuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics. 15. Ainsi qu'il a été dit précédemment, il ne résulte aucunement de l'instruction que le chantier aurait été interrompu au titre de la période de février à juin 2016. En outre, ainsi qu'il a été dit précédemment, l'ouvrage a été définitivement mis hors d'eau le 6 juin 2016 alors que le planning prévisionnel contractuel prévoyait que l'ouvrage devait être mis hors d'eau le 10 juin 2016. Par suite, dans la mesure où le chantier n'a pas connu un allongement en raison d'un retard dans la mise hors d'eau du bâtiment, il ne résulte pas de l'instruction que le maître d'ouvrage aurait, à ce titre, commis une faute dans la direction ou le contrôle du chantier. Au demeurant, le préjudice dont se prévaut la société Schaeffer et Cie n'est pas établi. 16. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de diligenter la mesure d'expertise sollicitée et d'examiner les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance, que la société Schaeffer et Cie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Sur les frais liés à l'instance : 17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la région Grand Est, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Schaeffer et Cie demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société Schaeffer et Cie le versement de la somme de 1 500 euros à la région Grand Est sur le fondement des mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : La requête de la société Schaeffer et Cie est rejetée. Article 2 : La société Schaeffer et Cie versera à la région Grand Est une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Schaeffer et Cie et à la région Grand Est. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - M. Denizot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, Signé : A. DenizotLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne à la préfète du Bas-Rhin, préfète de la région Grand Est, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 20NC02864
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, avant dire droit, de déclarer la communauté urbaine du Grand Reims entièrement responsable de l'accident dont elle a été victime le 7 décembre 2017, de désigner un expert chargé de déterminer l'ensemble des préjudices qu'elle a subi en raison de cet accident et de condamner solidairement la communauté urbaine du Grand Reims et la société SMACL Assurances à lui verser une provision de 5 000 euros à valoir sur l'indemnisation définitive de son préjudice corporel. Par un jugement n° 1901119 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 septembre 2020 et le 18 mars 2021, Mme A..., représentée par Me El Khaim, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 17 juillet 2020 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ; 2°) avant dire droit, de déclarer la communauté urbaine du Grand Reims entièrement responsable de l'accident dont elle a été victime le 7 décembre 2017 ; 3°) avant dire droit, d'ordonner une expertise afin de déterminer l'ensemble des préjudices qu'elle a subis du fait de cet accident ; 4°) avant dire droit, de condamner solidairement la communauté urbaine du Grand Reims et la société SMACL Assurances à lui verser une provision de 5 000 euros à valoir sur l'indemnisation définitive de son préjudice corporel ; 5°) de mettre solidairement à la charge de la communauté urbaine du Grand Reims et de la société SMACL Assurances les entiers dépens et la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la matérialité des faits de l'accident dont elle a été victime le 7 décembre 2017 est établie ; - la communauté urbaine du Grand Reims ne démontre pas le bon entretien de l'ouvrage responsable de l'accident ; la plaque métallique recouvrant l'armoire électrique dépasse d'environ 5 à 7 cm le trottoir ; - la responsabilité de la communauté urbaine du Grand Reims est dès lors engagée ; - elle a été normalement prudente et n'a commis aucune faute de nature à exonérer la communauté urbaine du Grand Reims de sa responsabilité ; - il y a lieu de désigner un expert spécialisé en chirurgie orthopédique et traumatologique en vue de déterminer et de chiffrer les préjudices résultant de cet accident. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2021, la communauté urbaine du Grand Reims et la société SMACL Assurances, représentées par la SELAS Devarenne Associés Grand-Est concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 27 juillet 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 septembre 2021 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, - les conclusions de M. Michel, rapporteur public, - les observations de Me Fettane, substituant Me El Khaim représentant Mme A... et de Me Keyser substituant Me Devarenne représentant la communauté urbaine du Grand Reims. Une note en délibéré pour Mme A... a été enregistrée le 30 mai 2023. Considérant ce qui suit : 1. Le 7 décembre 2017, vers 17h30, Mme A... a chuté sur le trottoir à proximité de son domicile, au niveau d'un parking longeant la rue Roger Aubry à Reims. Elle impute cette chute à une plaque métallique recouvrant une armoire électrique incorporée au trottoir dont un des côtés est saillant. Conservant des séquelles de cette chute, Mme A... a, par courrier du 16 avril 2018, demandé à la société SMACL Assurances, assureur de la communauté urbaine du Grand Reims (CUGR), de reconnaître sa responsabilité, de désigner un médecin pour l'examiner, de chiffrer ses préjudices et de lui verser un acompte sur indemnité d'un montant de 5 000 euros. Par un courrier du 21 septembre 2018, la SMACL Assurances a refusé de faire droit à la demande de l'intéressée. Par un courrier du 5 mars 2019, Mme A... a formulé une demande préalable indemnitaire auprès de la CUGR. Le silence gardé par la collectivité pendant les deux mois suivant la réception de cette demande a fait naître une décision implicite de rejet. La requérante a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne la réalisation d'une mesure d'expertise médicale et la condamnation solidaire de la CUGR et de la société SMACL Assurances à lui verser une provision de 5 000 euros à valoir sur l'indemnisation définitive de son préjudice corporel. Par un jugement du 17 juillet 2020, le tribunal a rejeté sa demande. L'intéressée relève appel de ce jugement. 2. Pour obtenir réparation, par le maître de l'ouvrage, des dommages qu'il a subis à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public, l'usager doit démontrer, d'une part, la matérialité des faits qu'il invoque et la réalité de son préjudice et, d'autre part, l'existence d'un lien de causalité direct entre l'ouvrage et le dommage. Pour s'exonérer de la responsabilité qui pèse ainsi sur elle, il incombe à la collectivité maître d'ouvrage soit d'établir qu'elle a normalement entretenu l'ouvrage, soit de démontrer la faute de la victime ou l'existence d'un événement de force majeure. 3. Mme A... impute la chute dont elle a été victime le 7 décembre 2017 à un défaut d'entretien normal de la plaque métallique incorporée dans le trottoir longeant la rue Roger Aubry à Reims, celle-ci dépassant de quelques centimètres. Pour établir la matérialité des faits qu'elle décrit, la requérante produit une attestation d'une de ses amies, qui l'a raccompagnée jusqu'à son domicile le soir de l'accident, une attestation d'un voisin, le compte-rendu des urgences où elle s'est rendue le soir du 7 décembre 2017 et des photographies du lieu de l'accident. Toutefois, d'une part, il est constant que les deux personnes ayant témoigné en faveur de Mme A... n'ont pas été témoins directs de son accident. La première précise en effet avoir déposé la requérante à proximité de son immeuble, et être revenue lorsque Mme A... l'a appelée, après l'accident, afin qu'elle la transporte jusqu'à l'hôpital. La seconde précise quant à elle avoir contacté " plusieurs personnes de la ville, EDF et France Télécom (...) à plusieurs reprises " afin de les informer " du danger que cette plaque sur le trottoir présentait pour les piétons ". Il résulte donc de l'instruction que Mme A... a chuté seule, sans témoin direct et sans intervention sur les lieux des services de secours. Si la requérante produit des photographies de la plaque métallique contre laquelle elle soutient avoir buté, elle ne fournit que très peu d'éléments sur la localisation précise du lieu de sa chute et du parcours qu'elle a emprunté pour regagner son domicile après avoir été déposée par son amie. Enfin, selon les propres déclarations de l'intéressée lors de son admission aux urgences, sa chute résulterait du fait qu'elle a glissé sur des feuilles et non qu'elle a buté sur un obstacle saillant. Dans ces conditions, en l'état de l'instruction, les éléments versés au débat ne suffisent pas, par eux-mêmes, à établir que la chute de Mme A... aurait pour origine directe et certaine cette plaque métallique. La responsabilité de la CUGR ne peut donc pas être retenue en l'absence d'un lien de causalité direct entre l'ouvrage et le dommage subi par Mme A.... 4. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Sur les frais de l'instance : 5. En premier lieu, la présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, la requérante ne peut demander qu'ils soient mis à la charge de la communauté urbaine du Grand Reims et de la société SMACL Assurances. 6. En second lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté urbaine du Grand Reims et de la société SMACL Assurances, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la requérante et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... le versement d'une somme à la communauté urbaine du Grand Reims et à la SMACL Assurances sur le fondement de ces mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la communauté urbaine du Grand Reims et de la société SMACL Assurances sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à la communauté urbaine du Grand Reims et à la société SMACL Assurances. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - M. Denizot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. La rapporteure, Signé : S.RoussauxLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet de la Marne en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 20NC02811
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler notamment l'arrêté du 30 mai 2022 du préfet du Morbihan lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par un jugement n° 2204861 du 29 décembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 13 février 2023, M. B..., représenté par Me Lietavova, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 décembre 2022 ; 2°) d'annuler cet arrêté du 30 mai 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, le tout dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 800 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ; - cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français. Par un mémoire enregistré le 31 mars 2023, le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête. Il valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 janvier 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Salvi ; - et les observations de Me Lietavova, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant comorien né le 18 mars 1994, est entré en France le 28 septembre 2017 sous couvert d'un visa de type D valable du 18 septembre 2017 au 18 septembre 2018. Il s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" valable du 21 novembre 2019 au 20 novembre 2020. L'intéressé s'est ensuite maintenu irrégulièrement sur le territoire français, avant de solliciter, le 18 mai 2022, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de la vie privée et familiale. Par un arrêté du 30 mai 2022, le préfet du Morbihan a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai. M. B... relève appel du jugement du 29 décembre 2022 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour : 2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. (...) ". 3. M. B..., qui est entré en France en 2017, fait valoir qu'il entretient une relation de couple avec une ressortissante française, née à Mayotte, qu'il a rencontrée en 2018 et avec laquelle il a célébré un mariage coutumier en novembre 2021 et conclu un pacte civil de solidarité (PACS) le 8 mars 2022, puis contracté un mariage civil en septembre 2022, soit postérieurement à l'arrêté contesté, et entamé à la même époque un suivi pour des problèmes de fertilité. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la communauté de vie invoquée, qui n'est pas établie avant la fin du mois de mai 2021, présente un caractère récent à la date de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour à l'intéressé. Si le requérant se prévaut en outre de la présence en France d'une tante et de l'époux de cette dernière, il n'établit ni n'allègue être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, où il a vécu la majeure partie de son existence, et ne démontre pas avoir tissé en France des liens d'une particulière intensité. M. B..., qui a été admis à séjourner en qualité d'étudiant en France avant de s'y maintenir irrégulièrement, ne justifie pas davantage d'une perspective professionnelle précise ou d'une particulière intégration. Dans ces conditions, la décision contestée lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet du Morbihan n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle du requérant. 4. Il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, les moyens tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour serait entachée d'un défaut d'examen particulier de la situation du requérant et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français : 5. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision. 6 Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant. Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi : 7. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de ces décisions. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées. D E C I D E Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Morbihan. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le président-rapporteur, D. Salvi L'assesseure la plus ancienne, J. Lellouch La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 23NT004072
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2022 par lequel le préfet du Finistère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement d'office. Par un jugement n° 2204130 du 9 novembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2022, Mme A... B..., représentée par Me Clairay, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 9 novembre 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Finistère du 7 juillet 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Finistère, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 4°) d'enjoindre au préfet du Finistère, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard. Elle soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative, en ce qui concerne sa réponse au moyen tiré de l'inexacte application des dispositions des articles L. 423-1 et L. 423-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'arrêté litigieux méconnaît les articles L. 423-1 et L. 423-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation ; - il est entaché d'erreur de droit et a ajouté une condition à l'article L. 423-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en opposant qu'elle n'avait pas contesté la décision de classement sans suite ; - la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour ; - l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mars 2023, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Lellouch, - et les observations de Me Clairay, représentant Mme B..., en présence de l'intéressée. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B..., ressortissante brésilienne née le 5 avril 1975, est entrée en France le 28 mai 2018 sous couvert d'un visa de court séjour. Elle a épousé en France, le 16 juin 2018, un ressortissant français. Elle a sollicité le 30 juillet 2020 un titre de séjour en faisant valoir qu'elle avait été victime de violences conjugales de la part de son époux. Par arrêté du 7 juillet 2022, le préfet du Finistère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ou de tout autre pays dans lequel elle serait légalement admissible en cas d'éloignement d'office. Mme B... relève appel du jugement du 9 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Il ressort de ses termes mêmes que le jugement attaqué répond aux exigences de motivation de l'article L. 9 du code de justice administrative, s'agissant de sa réponse au moyen tiré de l'inexacte application des dispositions combinées des articles L. 423-1 et L. 423-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la motivation de son arrêté, que le préfet du Finistère a procédé à un examen particulier de la situation de Mme B... avant de prendre l'arrêté litigieux. 4. Aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : / 1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; / 2° Le conjoint a conservé la nationalité française ; (...) ". Aux termes de l'article L. 423-5 du même code : " La rupture de la vie commune n'est pas opposable lorsqu'elle est imputable à des violences familiales ou conjugales ou lorsque l'étranger a subi une situation de polygamie. / En cas de rupture de la vie commune imputable à des violences familiales ou conjugales subies après l'arrivée en France du conjoint étranger, mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer la carte de séjour prévue à l'article L. 423-1 sous réserve que les autres conditions de cet article soient remplies. " 5. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a déposé le 21 février 2019 une main courante pour signaler l'abandon du domicile conjugal en exposant que son départ était lié aux violences dont elle se déclarait victime de la part de son conjoint. Elle a adressé en novembre 2019 une plainte pour des faits de violences par conjoint au Procureur de la République, lequel a décidé de procéder au classement sans suite de l'affaire après rappel à la loi par officier de police judiciaire pour des infractions de violences habituelles n'ayant pas entraîné d'incapacité supérieure à huit jours par conjoint du 1er octobre 2018 au 1er mars 2019 et de menaces de mort réitérées par conjoint commises au cours de la même période. Au regard de ces éléments et alors même que l'affaire a été classée sans suite à la suite de cette mesure alternative aux poursuites, la rupture de la vie commune entre Mme B... et le ressortissant français avec lequel elle était mariée doit être regardée comme étant imputable à des violences conjugales. En estimant le contraire, le préfet du Finistère a commis une erreur d'appréciation. 6. Toutefois, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué. 7. Pour établir que le refus de titre de séjour litigieux était légal, le préfet du Finistère invoque, dans son mémoire en défense de première instance auquel il renvoie la cour, et qui a été communiqué à Mme B..., un autre motif, tiré de ce que ce que le lien conjugal était rompu puisque le juge aux affaires familiales avait prononcé le divorce des époux par jugement du 14 mars 2022. 8. Il ressort des termes mêmes des dispositions de l'article L. 423-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées ci-dessus que lorsque la rupture de la vie commune est imputable à des violences conjugales subies après l'arrivée en France et avant la délivrance d'un premier titre de séjour, le titre de séjour prévu par l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est délivré sous réserve que les autres conditions soient remplies, et notamment celle d'être marié avec un ressortissant français. Il s'ensuit que le motif tiré de ce que le lien conjugal était rompu à la date de l'arrêté litigieux est de nature à fonder légalement le refus de titre de séjour au regard des articles L. 423-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et il résulte de l'instruction que le préfet du Finistère aurait pris la même décision s'il s'était initialement fondé sur ce motif. Dès lors qu'elle ne prive pas la requérante d'une garantie liée au motif substitué, il y a lieu de procéder à la substitution de motifs ainsi sollicitée. 9. L'illégalité du refus de titre de séjour n'étant pas établie, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour. 10. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., divorcée de son époux de nationalité française depuis mars 2022, est entrée en France en mai 2018, soit un peu plus de quatre ans avant l'intervention de l'arrêté litigieux. La requérante fait valoir sa vie de couple avec un autre ressortissant français depuis juillet 2020. Toutefois, les attestations peu circonstanciées produites pour établir cette relation et le caractère encore récent de celle-ci à la date de l'arrêté litigieux ne permettent pas de considérer qu'à cette date, l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'égard de Mme B..., qui n'est pas dépourvue d'attaches au Brésil où résident ses trois enfants majeurs, porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts au vu desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté. 11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 7 juillet 2022. Ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Une copie en sera adressée, pour information, au préfet du Finistère. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. La rapporteure, J. Lellouch Le président, D. Salvi La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT03834
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Grenke Location a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Etat, d'une part, à lui verser une somme de 12 930,57 euros sur le fondement de l'indemnité contractuelle de résiliation du contrat n° 166-01909 du 21 novembre 2016, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2018 et de leur capitalisation, d'autre part, à lui restituer à ses frais et risques le matériel objet du contrat de location, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1902168 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'Etat à verser à la société Grenke Location la somme de 4 880,57 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 mars 2019 et de leur capitalisation et rejeté le surplus de ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoire enregistrés les 29 octobre 2020, 20 juillet 2021 et 10 janvier 2022 la société Grenke Location, représentée par Me Thiery, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il rejette sa demande tendant la condamnation de l'Etat à lui verser à titre d'indemnité de résiliation une somme de 8 010 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2018 ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le versement d'une somme correspondant au montant total des loyers à échoir à la date de la résiliation ne constituerait pas une indemnité manifestement disproportionnée par rapport au montant du préjudice subi. Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 mai et 17 décembre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 400 euros soit mise à la charge de la société requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient, dans le dernier état des écritures, que : - l'indemnisation sollicitée n'est pas justifiée ; - l'indemnisation sollicitée est manifestement disproportionnée par rapport au montant du préjudice subi ; - la perte du bénéfice escompté doit être calculée non sur l'intégralité de la durée du contrat mais sur celle restant à courir ; il y a lieu de déduire le prix de revente du matériel pour un montant total de 3 600 euros hors taxe et la marge bénéficiaire déjà réalisée sur les loyers payés ; l'indemnisation ne saurait dès lors excéder 2 696,84 euros. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picque, première conseillère, - et les conclusions de M. Michel, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société Direct Lease Group et l'hôpital d'instruction des armées (HIA) Laveran ont conclu le 21 novembre 2016 un contrat de location de longue durée portant sur du matériel de cuisine pour une durée de 12 trimestres moyennant le règlement d'un loyer trimestriel de 2 022,51 euros hors taxe (HT). Le contrat a été cédé à la société Grenke Location à compter du 4 décembre 2016. Le 19 novembre 2018, en raison de la cessation du paiement des loyers par l'HIA Laveran, la société Grenke Location, en application de l'article 9.2 du contrat, a procédé à la résiliation du contrat et mis en demeure l'établissement de lui régler les loyers échus impayés et une indemnité de résiliation correspondant aux loyers à échoir. Par un jugement du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'Etat à verser à la société Grenke Location une somme de 4 880,57 euros, correspondant au montant toutes taxes comprises (TTC) des loyers échus impayés et aux intérêts au taux légal majoré de cinq points sur ces loyers, assortie des intérêts et de leur capitalisation et a rejeté le surplus de ces demandes. La société Grenke Location relève appel de ce jugement en tant qu'il rejette sa demande tendant au versement du surplus de l'indemnité de résiliation correspondant au montant des loyers à échoir. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Les parties à un contrat conclu par une personne publique peuvent déterminer l'étendue et les modalités des droits à indemnité du cocontractant, sous réserve qu'il n'en résulte pas, au détriment de la personne publique, l'allocation au cocontractant d'une indemnisation excédant le montant du préjudice qu'il a subi résultant du gain dont il a été privé ainsi que des dépenses qu'il a normalement exposées et qui n'ont pas été couvertes en raison de la résiliation du contrat. 3. Aux termes du deuxième alinéa de l'article 9.2 des conditions générales de location du contrat en litige : " Dès résiliation du contrat, le locataire doit mettre immédiatement le matériel à la disposition du loueur et devra verser la totalité des loyers restant à courir. Le locataire devra également au loueur les loyers échus impayés TTC et leurs accessoires ". 4. En application de ces stipulations, la société Grenke Location a demandé le versement d'une indemnité de résiliation de 12 890,57 euros, qui correspond au montant TTC des loyers échus impayés (4 806 euros), aux intérêts au taux légal majoré de cinq points sur ces loyers (74,57 euros) et au montant HT des loyers à échoir (4 080 euros). Il résulte cependant de l'instruction que le matériel loué a été restitué à la société Grenke location qui l'a revendu pour un montant total de 3 600 euros HT. Ainsi, l'indemnité de résiliation (loyers restant à courir + loyers échus et leurs intérêts) excède d'un peu moins de 28 % le préjudice réellement subi par la société Grenke du fait de la résiliation, résultant du gain dont elle a été privée ainsi que de la dépense exposée pour l'acquisition du matériel de cuisine non couverte par les loyers non perçus, diminués de la somme résultant de la revente. La clause d'indemnisation n'est par suite pas valide et doit être écartée. Par conséquent, la société Grenke Location, dont la situation ne peut être aggravée sur son seul appel, n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif a écarté l'application des stipulations du deuxième alinéa de l'article 9.2 des conditions générales de location du contrat, limitées aux loyers à échoir, et a rejeté sa demande à ce titre. Sur les frais liés à l'instance : 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société Grenke Location le versement de la somme demandée par l'Etat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E: Article 1er : La requête de la société Grenke Location est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Grenke Location et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Picque, première conseillère, - Mme Roussaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023 La rapporteure, Signé : A.-S. PicqueLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso. 2 N° 20NC03152
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Grenke Location a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, à titre principal, de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) " Les Oiseaux " à lui verser une somme de 39 244,48 euros, sur le fondement de l'indemnité contractuelle de résiliation du contrat n° 100-14565 du 29 mai 2015, augmentée des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 18 août 2017 et de leur capitalisation ou, à titre subsidiaire, de condamner l'EHPAD " Les Oiseaux ", sur le fondement de sa responsabilité contractuelle, à lui verser une somme 8 999,97 euros au titre des dépenses utiles et une somme de 35 999,52 euros au titre de l'indemnisation du gain manqué et de la perte subie, et de mettre à sa charge une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1801294 du 21 novembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'EHPAD " Les Oiseaux " à verser à la société Grenke Location une somme de 39 244,48 euros, assortie des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 21 août 2017 et de leur capitalisation et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 21 janvier et 27 juillet 2020, l'EHPAD " Les Oiseaux ", représenté par Me Lapisardi, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter les demandes présentées par la société Grenke Location devant le tribunal administratif de Strasbourg ; 3°) de condamner la société Grenke Location à lui verser la somme de 16 092 euros TTC ; 4°) de mettre à la charge de la société Grenke Location le versement d'une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce que le tribunal ne pouvait pas statuer sans disposer de la copie de l'intégralité du contrat en litige ; - contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il y a lieu d'écarter l'application du contrat comme nul en raison des nombreuses irrégularités dont il est entaché : - le contrat a été conclu en méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence ; - la clause de prix constitue une libéralité ; - son consentement a été vicié par des manœuvres dolosives ; - le contrat est rétroactif ; - la clause de tacite reconduction est nulle ; - la clause d'indemnité de résiliation est nulle ; - le versement de frais de recouvrement n'est pas justifié ; - le tribunal a accordé une double indemnisation des intérêts moratoires ; - le montant de la cotisation d'assurance ne peut être inclus dans l'indemnité ; - l'indemnisation accordée en première instance n'est pas justifiée ; - l'indemnisation demandée n'est pas justifiée et ne correspond pas à des dépenses utiles ; - la taxe sur la valeur ajoutée doit en tout état de cause être déduite de l'indemnisation ; - la faute commise par la société Grenke Location, en passant un contrat nul, est de nature à entraîner sa responsabilité quasi délictuelle ; - elle a droit au versement de la somme de 16 092 euros en indemnisation de son préjudice financier. Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 février et 18 septembre 2020, la société Grenke Location, représentée par Me Thiery, conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à la condamnation de l'EHPAD " Les Oiseaux " à lui verser la somme de 37 499,99 euros sur le fondement de sa responsabilité extracontractuelle ainsi qu'à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à sa charge sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens soulevés par l'EHPAD " Les Oiseaux " à l'appui de la contestation de la validité du contrat ne sont pas fondés ; - les moyens tirés de la nullité des clauses de résiliation anticipée et d'indemnité de résiliation ne sont pas fondés ; - le moyen tiré de la nullité de la clause de tacite de reconduction est inopérant ; - elle a le droit, sur le fondement de l'article 11 du contrat, à une indemnité correspondant au montant des loyers échus impayés, augmenté des intérêts au taux légal majoré de cinq points en application de l'article 4.3 du contrat, des loyers à échoir et des frais de recouvrement ; - si la cour écartait le contrat pour nullité, elle a le droit à être indemnisée de sa dépense utile (perte subie) et de son manque à gagner sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle de l'EHPAD "Les Oiseaux". Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des marchés publics ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picque, première conseillère, - les conclusions de M. Michel, rapporteur public, - et les observations de Me Obrero, substituant Me Lapisardi, pour l'EHPAD "Les Oiseaux". Considérant ce qui suit : 1. La société Grenke Location et l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) " Les Oiseaux " ont conclu le 29 mai 2015 un contrat portant sur la location d'un photocopieur en contrepartie du versement d'un loyer trimestriel de 2 500 euros hors taxe (HT) durant vingt-et-un trimestres. Par un courrier du 18 août 2017, reçu le 21 août 2017 par l'EHPAD " Les Oiseaux ", la société Grenke Location a résilié le contrat en raison de loyers impayés et a demandé à l'établissement d'une part de lui restituer le matériel et d'autre part de lui verser le paiement de l'indemnité de résiliation prévue par les conditions générales du contrat. L'EHPAD " Les Oiseaux " demande l'annulation du jugement du 21 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg l'a condamné à verser à la société Grenke Location une somme de 39 244,48 euros, assortie des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 21 août 2017 et de leur capitalisation et rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Il ressort des pièces du dossier que, devant le tribunal administratif de Strasbourg, la société Grenke Location s'est prévalue, au soutien de ses conclusions indemnitaires, des articles 10 et 11 des conditions générales de location, figurant aux pages 8 et 9 du contrat, versées au débat contradictoire. Contrairement à ce qui est soutenu, les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à l'argument de l'EHPAD " Les Oiseaux " tiré de l'absence de production des pages 2 à 5 du contrat, sur lesquelles ils ne se sont au demeurant pas fondés. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit être écarté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la validité du contrat : 3. Lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel. Ainsi, lorsque le juge est saisi d'un litige relatif à l'exécution d'un contrat, les parties à ce contrat ne peuvent invoquer un manquement aux règles de passation, ni le juge le relever d'office, aux fins d'écarter le contrat pour le règlement du litige. Par exception, il en va autrement lorsque, eu égard, d'une part, à la gravité de l'illégalité et, d'autre part, aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat. Ces circonstances doivent ainsi être directement liées au vice de passation retenu. 4. En premier lieu, aux termes du II de l'article 26 du code des marchés publics alors en vigueur : " Les marchés et accords-cadres peuvent aussi être passés selon une procédure adaptée, dans les conditions définies par l'article 28, lorsque le montant estimé du besoin est inférieur aux seuils suivants : (...) 2° 207 000 euros HT pour les marchés de fournitures et de services des collectivités territoriales, des établissements publics de santé ". Aux termes du I de l'article 28 du même code : " Lorsque leur valeur estimée est inférieure aux seuils de procédure formalisée définis à l'article 26, les marchés de fournitures, de services ou de travaux peuvent être passés selon une procédure adaptée, dont les modalités sont librement fixées par le pouvoir adjudicateur en fonction de la nature et des caractéristiques du besoin à satisfaire, du nombre ou de la localisation des opérateurs économiques susceptibles d'y répondre ainsi que des circonstances de l'achat ". Enfin, selon l'article 3 des conditions générales de location de longue durée : " 1. Le contrat de location entre le bailleur et le locataire prend effet lors de la confirmation par ce dernier de la livraison des produits ". 5. Si l'EHPAD " Les Oiseaux " fait valoir, d'une part, qu'eu égard à son montant total de 52 500 euros hors taxes, le contrat litigieux aurait été passé en méconnaissance de la procédure adaptée prévue à l'article 28 du code des marchés publics et, d'autre part, que l'exécution du contrat de location en litige a commencé le 27 mai 2015 alors que celui-ci n'a été signé que le 29 mai 2015, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction que ces irrégularités auraient été commises dans des circonstances qui seraient susceptibles de conduire à écarter, au regard des principes rappelés au point 3, l'application du contrat. 6. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, et en particulier de la facture produite par la société Grenke Location, que celle-ci a fait l'acquisition d'un photocopieur auprès de la société Digital Innov afin de le donner en location à l'EHPAD " Les Oiseaux ". Si l'appelante soutient que la société Grenke Location a acheté ce matériel à un prix sept fois supérieur à celui du marché, cette circonstance est sans incidence sur l'appréciation de la licéité du prix du contrat de location en litige au regard de l'interdiction faite aux personnes publiques de consentir des libéralités dès lors qu'il résulte de l'instruction que le montant des loyers à la charge de l'EHPAD " Les Oiseaux " en application du contrat n'était pas excessif au regard du coût d'achat du bien supporté par le bailleur, dont la réalité n'est pas sérieusement contestée. 7. En troisième lieu, l'EHPAD " Les Oiseaux " soutient qu'il a conclu le contrat de location en litige à des conditions de prix désavantageuses compte tenu de la valeur réelle du photocopieur loué. Il ne résulte cependant pas de l'instruction que les conditions dans lesquelles le contrat a été conclu aurait conduit l'établissement public à être induit en erreur sur le prix du photocopieur, sur la base duquel les loyers ont été fixés en fonction du prix dont s'est acquittée la société Grenke Location. 8. En quatrième lieu, le requérant soutient que la livraison du matériel avant la signature du contrat de location financière conclu avec la société Grenke Location l'a empêché de donner un consentement éclairé. Toutefois, il résulte de l'instruction que le président de l'établissement en signant le contrat a pris connaissance et a accepté " les conditions générales de location figurant en pages 6 à 9 de la liasse contractuelle ". Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que le signataire, dont il n'est pas établi, ni même allégué qu'il n'aurait pas eu la capacité d'engager l'établissement, a été contraint de les signer dans des conditions ne lui permettant pas d'en prendre connaissance dans leur intégralité et d'en apprécier leur portée. Dans ces conditions, dès lors qu'il n'est pas établi que le consentement de la personne publique a été vicié au moment de la conclusion du contrat litigieux, cette dernière n'est pas fondée à demander que le contrat soit écarté et que le litige ne soit pas réglé sur le terrain contractuel. 9. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que le contrat en litige, signé le 29 mai 2015, n'a pas été conclu en application de la clause de tacite de reconduction prévue par l'article 13 des conditions générales de location de longue durée. Par conséquent, contrairement à ce que soutient l'EHPAD, la nullité de cette clause ne fait pas obstacle à ce que le litige soit réglé sur le terrain contractuel. Par suite, l'exception de nullité du contrat opposée en défense doit être écartée. 10. Il résulte de tout ce qui précède que l'EHPAD " Les Oiseaux " n'est pas fondé à demander que le contrat soit écarté et que le litige soit réglé sur un terrain non contractuel. Par voie de conséquence et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, les conclusions nouvelles en appel présentées par l'EHPAD tendant à la condamnation de la société Grenke Location sur un fondement extracontractuel doivent être rejetées. En ce qui concerne l'indemnité de résiliation : 11. Les parties à un contrat conclu par une personne publique peuvent déterminer l'étendue et les modalités des droits à indemnité du cocontractant, sous réserve qu'il n'en résulte pas, au détriment de la personne publique, l'allocation au cocontractant d'une indemnisation excédant le montant du préjudice qu'il a subi résultant du gain dont il a été privé ainsi que des dépenses qu'il a normalement exposées et qui n'ont pas été couvertes en raison de la résiliation du contrat. 12. Aux termes de l'article 10.5 des conditions générales du contrat de location longue durée en litige : " Le locataire peut mettre fin de façon anticipée au contrat s'il le souhaite. Toutefois, cette résiliation ne pourra se faire qu'avec l'accord du Bailleur et sous réserves du paiement des sommes visées à l'article 11 ". Selon cet article 11 : " 1. En cas de résiliation anticipée dans les conditions définies à l'article précédent (...) le Locataire restera tenu de payer au Bailleur, en compensation du préjudice subi, les loyers échus, les intérêts de retard de paiement éventuels restant dus, et les loyers à échoir jusqu'au terme initialement prévu du Contrat pour la période contractuelle en cours majorés de 10 % à titre de sanction. Les intérêts commenceront à courir à compter de la première présentation au Locataire de la lettre de résiliation (...) ". 13. En application de ces stipulations, la société Grenke, qui renonce à la majoration de 10%, a demandé le versement d'une indemnité de résiliation d'un montant de 39 204,48 euros, qui correspond au montant TTC des loyers échus impayés (8 999,97 euros), aux intérêts au taux légal majoré de cinq points sur ces loyers (204,53 euros) et au montant HT des loyers à échoir (29 999, 98 euros). Cette somme n'est pas excessive au regard du préjudice que la société Grenke a subi résultant du gain dont elle a été privée ainsi que de la dépense exposée pour l'acquisition du photocopieur non couverte par les loyers non perçus. Par ailleurs, ni les intérêts (204,53 euros) sur les loyers échus, inclus dans l'indemnité, ni la somme perçue par Grenke Location lors de la revente du matériel récupéré au prix de 250 euros hors taxe ne saurait suffire à écarter l'application de cette clause au motif qu'il en résulterait une indemnisation excessive par rapport au préjudice réellement subi du fait de la résiliation du contrat. 14. Il en résulte que la clause d'indemnisation n'étant pas illicite, il y a lieu d'en faire application. En ce qui concerne les frais de recouvrement : 15. Aux termes de l'article 17 des conditions générales du contrat en litige : " (...) Seront notamment facturés les frais suivants : (...) indemnité forfaitaire de recouvrement : 40 euros TTC ". 16. Il résulte de ces stipulations que, contrairement à ce que soutient la requérante, la société Grenke Location pouvait mettre à sa charge une somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement de l'indemnité de résiliation. 17. Il résulte de tout ce qui précède que l'EHPAD " Les Oiseaux " n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg l'a condamné à verser à la société Grenke Location une somme de 39 244,48 (39 204,48 + 40) euros. En ce qui concerne la cotisation d'assurance : 18. Il ne résulte pas de l'instruction que la société Grenke Location ait mis à la charge du requérant une quelconque somme au titre d'une cotisation d'assurance. En ce qui concerne les intérêts : 19. Il résulte de l'instruction que si, en application de l'article 4.3 des conditions générales de location, en cas de retard de paiement des échéances de loyer, la société Grenke Location peut prétendre au paiement d'intérêts au taux légal majoré de cinq point, l'article 11 des mêmes conditions générales ne fixe pas de taux d'intérêt contractuel en ce qui concerne les intérêts de l'indemnité de résiliation. 20. Par conséquent, la société Grenke Location a droit aux intérêts au taux légal de la somme de 39 204,48 euros, à compter du 21 août 2017, date de réception par l'EHPAD " Les Oiseaux " de la lettre portant résiliation du contrat et demande de paiement des sommes dues. En revanche, elle n'est pas fondée à demander que l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement à laquelle elle a droit, soit assortie des intérêts au taux légal compte tenu du caractère forfaitaire de cette indemnité. Il en résulte que l'EHPAD " Les Oiseaux " est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont appliqué le taux d'intérêt contractuel sur l'indemnité contractuelle de résiliation et sur les frais de recouvrement. Sur les frais liés à l'instance : 21. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : Seule la somme de 39 204,48 euros (39 244,48 euros - 40 euros) portera intérêts à compter du 21 août 2017 au taux légal. Article 2 : L'article 1er du jugement n° 1801294 du 21 novembre 2019 du tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes " Les Oiseaux " et à la société Grenke Location. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - Mme Picque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. La rapporteure, Signé : A.-S. PicqueLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet des Yvelines concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 20NC00180
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Grenke Location a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner le collège Guillaume Budé à lui verser une somme de 24 725,89 euros, sur le fondement du contrat signé le 20 septembre 2007, augmentée des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 4 septembre 2014 et de mettre à sa charge une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1801621 du 21 novembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande et mis à sa charge une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 24 janvier et 6 juillet 2020, la société Grenke Location, représentée par Me Thiery, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 21 novembre 2019 ; 2°) à titre principal, de condamner le collège Guillaume Budé à lui verser une somme de 26 981,88 euros TTC, au titre des loyers échus impayés, augmentée des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 4 septembre 2014 ; 3°) à titre subsidiaire, de condamner le collège Guillaume Budé à lui verser une somme de 26 981,88 euros TTC, au titre de l'enrichissement sans cause ; 4°) à titre très subsidiaire, de condamner le collège Guillaume Budé à lui verser une somme de 26 981,88 euros TTC, au titre de l'indemnisation de la perte subie et du manque à gagner ; 5°) de mettre à la charge du collège Guillaume Budé le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le contrat de location longue durée en litige ne peut être regardé comme ayant été résilié dès lors que la résiliation unilatérale du 20 octobre 2019 a été jugée illégale ; - par conséquent, elle a droit au paiement des loyers échus impayés qui lui sont dus en exécution du contrat ; - subsidiairement, si la cour juge que le contrat a été résilié, elle a le droit à l'indemnisation de son préjudice sur le fondement de l'enrichissement sans cause ; - très subsidiairement, si la cour juge que le matériel n'a pas été livré, elle a droit à l'indemnisation de son préjudice sur le fondement de la responsabilité pour faute de la personne publique qui a signé un bon de livraison sans avoir reçu le matériel. Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2020, le collège Guillaume Budé, représenté par Me Bensimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société Grenke Location le versement d'une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les demandes présentées par la société Grenke Location sont irrecevables en raison de l'autorité de la chose jugée du jugement n° 1000839 du tribunal administratif de Strasbourg du 7 mai 2014 ; - subsidiairement, les demandes présentées par la société Grenke Location sont infondées en raison de l'inexécution du contrat par cette dernière en l'absence de livraison du matériel. Par ordonnance du 26 octobre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 10 novembre 2022. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions présentées par la société Grenke Location pour la première fois en appel et postérieurement à l'expiration du délai d'appel sur un fondement quasi-contractuel sont irrecevables dès lors qu'elles ne se rattachent pas à la cause juridique exclusivement contractuelle soulevée en première instance. Par un mémoire enregistré le 27 avril 2023, la société Grenke Location, représentée par Me Thiery, a présenté ses observations sur le moyen relevé d'office. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picque, première conseillère, - et les conclusions de M. Michel, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société Grenke Location et le collège Guillaume Budé ont conclu le 20 septembre 2007 un contrat de location de longue durée portant sur un photocopieur pour une durée de 21 trimestres moyennant le règlement d'un loyer trimestriel de 2 248,48 euros toutes taxes comprises (TTC). En raison de la cessation du paiement des loyers par l'établissement scolaire à compter du 1er avril 2009, la société Grenke Location a procédé, en application des stipulations de l'article 13 du contrat, à la résiliation de celui-ci le 20 octobre 2009 et a mis en demeure l'établissement scolaire de lui régler les loyers impayés ainsi que l'indemnité de résiliation prévue à l'article 15 du contrat. Par un jugement n° 1000839 du 7 mai 2014, devenu définitif, le tribunal administratif de Strasbourg, saisi par la société Grenke Location d'une demande tendant à la condamnation du collège Guillaume Budé à lui verser les loyers échus impayés et l'indemnité contractuelle de résiliation, a condamné l'établissement scolaire à verser à la société Grenke Location une somme de 2 248,47 euros correspondant aux loyers impayés jusqu'à la date de résiliation du contrat et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de la société. La société Grenke Location a saisi ensuite le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à la condamnation de l'établissement scolaire à lui verser une provision d'un montant de 24 725,89 euros correspondant aux loyers demeurés impayés du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012. S'il a été fait droit à cette demande par une ordonnance du 30 novembre 2016, par une décision n° 409064 du 31 octobre 2017, le Conseil d'Etat a annulé l'ordonnance du 3 mars 2017 de la juge des référés de la cour administrative d'appel de Nancy rejetant l'appel contre l'ordonnance du 30 novembre 2016 et rejeté la demande de provision présentée par la société Grenke au motif qu'elle ne présentait pas un caractère non sérieusement contestable. Enfin, le 9 mars 2018, la société Grenke Location a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner le collège Guillaume Budé à lui verser une somme de 24 725,89 euros, sur le fondement de sa responsabilité contractuelle. Elle relève appel du jugement n° 1801621 du 21 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Sur le paiement contractuel des loyers à échoir : 2. Le constat de l'illégalité de la clause de résiliation prévue au profit du bailleur par l'article 13 des conditions générales de location par le jugement du 7 mai 2014 du tribunal administratif de Strasbourg ne saurait, par lui-même, faire obstacle à ce que le contrat soit regardé comme résilié dès lors que cette résiliation n'a pas été contestée. L'exécution du contrat entre les parties ayant cessé à la suite de la résiliation anticipée du contrat, intervenue le 20 octobre 2009, aucune obligation contractuelle de paiement des loyers ne pesait sur le collège à compter de cette date. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'exception tirée de l'autorité relative de la chose jugée opposée par le collège Guillaume Budé, la société Grenke Location n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande, présentée sur un fondement contractuel, tendant au paiement des loyers à échoir. Sur la responsabilité pour faute du collège Guillaume Budé : 3. La société Grenke Location demande, pour la première fois en appel, l'indemnisation du gain dont elle a été privée et des dépenses qu'elle a exposées et qui, selon elle, résulterait d'une faute contractuelle du collège à avoir signé le bon de livraison, générant son achat, sans avoir réceptionné le matériel. Toutefois, alors qu'il résulte de l'instruction que le collège a signé le certificat de livraison et payé les loyers pendant près d'un an et demi, l'appelante n'apporte aucun élément sérieux permettant d'établir la réalité de la faute de la personne publique. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité, de telles conclusions, ne peuvent qu'être rejetées. Sur l'enrichissement sans cause : 4. La société Grenke Location demande, sur le fondement de l'enrichissement sans cause, l'indemnisation du préjudice qu'elle prétend avoir subi, postérieurement à la résiliation intervenue le 20 octobre 2009, du fait de l'immobilisation du matériel au profit du collège qui aurait continué d'en jouir sans contrepartie. Toutefois, de telles conclusions se rattachent à une cause juridique différente de celle soulevée en première instance. Par conséquent, ainsi qu'en ont été informées les parties, la société Grenke Location n'est pas recevable à les présenter pour la première fois, dans son mémoire du 6 juillet 2020, postérieurement à l'expiration du délai d'appel. Sur les frais liés à l'instance : 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du collège Guillaume Budé, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Grenke Location demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de l'appelante le versement de la somme de 1 500 euros à verser au collège Guillaume Budé sur le fondement des mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : La requête de la société Grenke Location est rejetée. Article 2 : La société Grenke Location versera au collège Guillaume Budé une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Grenke Location et au collège Guillaume Budé. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Picque, première conseillère, - Mme Roussaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. La rapporteure, Signé : A.-S. PicqueLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso. 2 N° 20NC00224
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy, d'une part, d'annuler l'arrêté du 9 juillet 2018 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (ci-après SDIS) de Meurthe-et-Moselle a prononcé la sanction de rétrogradation du grade de sergent au grade de caporal ainsi que la décision du 13 avril 2018 prononçant sa suspension à titre conservatoire et, d'autre part, d'enjoindre au SDIS de le réintégrer dans le grade de sergent-chef dans un délai de huit jours à compter de la notification du jugement. Par un jugement n° 1802525 du 30 septembre 2020, le tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté du 9 juillet 2018, a enjoint au SDIS de Meurthe-et-Moselle de réintégrer l'agent dans le grade de sergent et de prendre les mesures nécessaires à la reconstitution de sa carrière et de ses droits sociaux à compter du 1er août 2018, a mis à sa charge 1 500 euros au titre des frais de l'instance et a, enfin, rejeté le surplus des conclusions de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistré le 20 novembre 2020, le service départemental d'incendie et de secours (ci-après SDIS) de Meurthe-et-Moselle, représenté par Me Poput de la Selarl Bazin et Cazelles avocats associés, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 30 septembre 2020 en tant qu'il annule l'arrêté du 9 juillet 2018 et porte injonction ; 2°) de rejeter la demande de première instance de M. A... ; 3°) de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les faits reprochés à M. A... d'avoir, sans autorisation préalable de sa hiérarchie, modifié la disposition du standard du centre de secours de Neuves-Maisons sont fautifs, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ; - les faits reprochés à M. A... lors de la diffusion des calendriers des pompiers de l'année 2018 sont également fautifs ; - les autres manquements, dont la matérialité et le caractère fautif ont été retenus par les premiers juges, ne pouvaient être regardés comme présentant seulement un " caractère modeste " ; - la sanction prononcée est proportionnée au comportement de l'agent, compte tenu de la gravité des faits reprochés, de leur réitération, de leurs conséquences sur le fonctionnement du service, de la manière de servir de l'agent et de son refus d'amender son comportement en dépit de plusieurs rappels à l'ordre et sanctions déjà prononcées à son encontre. Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mai 2021, M. A..., représenté par Me Corsiglia, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du SDIS une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par le SDIS de Meurthe-et-Moselle ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité intérieure ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Brodier, - les conclusions de Mme B..., - les observations de Me Corsiglia, avocate de M. A.... Considérant ce qui suit : 1. Engagé comme sapeur-pompier volontaire au sein du SDIS de Meurthe-et-Moselle depuis le 1er janvier 2005, M. A... est titulaire du grade de sergent-chef depuis le 1er avril 2016. Par un arrêté du 13 avril 2018, le président du conseil d'administration du SDIS l'a suspendu de ses fonctions à titre conservatoire pour une durée de quatre mois. Puis, sur avis favorable du conseil de discipline réuni le 4 juillet 2018, il a, par un arrêté du 9 juillet 2018, prononcé la sanction de rétrogradation de M. A... au grade de caporal à compter du 1er août 2018. Le SDIS de Meurthe-et-Moselle relève appel du jugement du tribunal administratif de Nancy du 30 septembre 2020 en tant qu'il a annulé l'arrêté du 9 juillet 2018 et lui a fait injonction. Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif : 2. Aux termes de l'article R. 723-6 du code de la sécurité intérieure : " L'engagement de sapeur-pompier volontaire est subordonné aux conditions suivantes : (...) ; 4° S'engager à exercer son activité de sapeur-pompier volontaire avec obéissance, discrétion et responsabilité, dans le respect des dispositions législatives et réglementaires, et notamment de la charte nationale du sapeur-pompier volontaire ; (...) ". Aux termes de l'article R. 723-35 du même code : " Tout sapeur-pompier volontaire doit obéissance à ses supérieurs ". Aux termes de l'article R. 723-40 du code de la sécurité intérieure : " L'autorité de gestion peut, après avis du conseil de discipline départemental, prononcer contre tout sapeur-pompier volontaire : 1° L'exclusion temporaire de fonctions pour six mois au maximum ; 2° La rétrogradation ; 3° La résiliation de l'engagement ". 3. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. 4. Il ressort du jugement attaqué qu'après avoir considéré que deux des quatre motifs retenus par le président du conseil d'administration du SDIS pour sanctionner M. A... n'étaient pas fautifs, les premiers juges ont estimé que le caractère modeste des deux manquements de nature à justifier une sanction ne permettait pas, en dépit du grade de l'intéressé et de ses antécédents disciplinaires, de justifier une sanction de rétrogradation du grade de sergent au grade de caporal. 5. D'une part, il ressort des pièces du dossier, notamment des témoignages du chef d'agrès de l'engin parti en intervention le 26 août 2017 et de la standardiste présente ce jour-là, non contredits par les témoignages produits par M. A..., que ce dernier, qui se trouvait à la caserne au moment où l'alerte a été donnée pour un départ de feu, a demandé à la standardiste de faire appeler un sapeur qui avait été " bipé " à cette fin, puis, et alors qu'il savait que la standardiste n'avait pas pu joindre le sapeur au téléphone, l'a remplacé au sein de l'équipage en laissant entendre au chef d'agrès que le sapeur avait été appelé à cet effet et consentait à cet échange. Compte tenu de l'information erronée dont il disposait, le chef d'agrès n'a pas pu faire le choix d'attendre le sapeur, dont il est établi qu'il est arrivé au centre de secours au moment où le véhicule d'intervention partait. Le comportement de M. A... a en outre privé le sapeur concerné d'une intervention sur un feu, qui lui incombait. Ces faits, qui ne sauraient être justifiés par la volonté alléguée par l'intéressé de renforcer un équipage " peu expérimenté ", caractérisent un manquement aux obligations de sincérité et de franchise et témoignent d'un manque de respect pour les autres sapeurs-pompiers. 6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment du témoignage du sergent-chef qui a pris sa garde le 7 novembre 2017 au matin, que les outils informatiques " initialement agencés dans le projet de centre " avaient changé de place, M. A... reconnaissant les avoir déplacés au motif qu'il n'était pas possible de positionner ses jambes sous le poste de travail et répondant à son interlocuteur que " c'était mieux comme cela ". Il n'est toutefois pas contesté que le chef du centre de secours avait confié, en septembre 2017, à un adjudant-chef, en collaboration avec son adjoint, un projet de réaménagement du standard, projet qui avait impliqué la consultation d'agents représentatifs de la caserne et qu'il ne restait plus que la planche présente sous le plan de travail à découper pour que la mise en œuvre du projet soit finalisée. Dans ces conditions, la seule circonstance que cette planche n'avait pas encore été découpée lors de la garde du 6 novembre 2017 n'autorisait pas M. A... à modifier l'agencement du standard, pour des motifs de convenance personnelle, sans remettre les outils à leur place à l'issue de sa garde. Dans ce contexte, l'initiative prise par M. A... constitue un manquement à son obligation d'obéissance aux consignes données par le chef du centre de secours. 7. Par ailleurs, s'il n'est pas établi, ainsi que M. A... le soutient, qu'il soit à l'initiative de la diffusion de musique militaire allemande le 10 novembre 2017 au sein de la caserne, il ressort du témoignage de l'adjudant-chef que l'intéressé et un autre sapeur-pompier ont marché au pas sur cette musique et qu'il leur a demandé, à plusieurs reprises, sans résultat, de s'arrêter. Ce témoignage n'est pas sérieusement remis en cause par les témoignages produits par M. A.... Il ressort d'ailleurs du compte-rendu de l'entretien que ce dernier a eu le 5 janvier 2018 avec le chef du groupement de Nancy qu'il s'est excusé de son attitude et de la mauvaise interprétation des faits reprochés lors de cette garde. Ces faits caractérisent un manquement au devoir de discrétion et au devoir d'obéissance. 8. Ces trois griefs, qui sont établis et fautifs, sont de nature à justifier une sanction, sans qu'il soit besoin d'examiner la matérialité du quatrième grief fondant la décision en litige. Compte tenu du grade de sergent que M. A... détenait, de l'accumulation de ces fautes sur une courte période de temps ainsi que de la persistance d'un comportement de méconnaissance délibérée de ses obligations de sapeur-pompier volontaire, alors que l'intéressé, qui avait fait l'objet d'entretiens en vue de recadrer son comportement à trois reprises entre 2011 et 2014 pour des faits de nature similaire, et avait déjà été sanctionné disciplinairement à deux reprises, le 15 novembre 2015 d'un blâme, le 18 août 2017, d'une exclusion temporaire d'un mois, le président du conseil d'administration du SDIS de Meurthe-et-Moselle a pu, sans entacher sa décision d'erreur d'appréciation, prononcer la sanction de rétrogradation du grade de sergent au grade de caporal. 9. Par suite, le SDIS de la Moselle est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy a, pour annuler l'arrêté du 9 juillet 2018, retenu le moyen tiré du caractère disproportionné de la sanction à la gravité des fautes commises. 10. Il appartient alors à la cour d'examiner, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Nancy. Sur les autres moyens soulevés par M. A... : En ce qui concerne la procédure disciplinaire : 11. Aux termes de l'article R. 723-42 du code de la sécurité intérieure : " Le sapeur-pompier à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes. / (...) / Il peut présenter devant le conseil de discipline départemental des observations écrites ou verbales, citer des témoins et se faire assister d'un défenseur de son choix. / Le droit de citer des témoins appartient également à l'autorité de gestion ainsi que, dans le cas prévu au deuxième alinéa de l'article R. 723-41, au représentant de l'Etat dans le département ". 12. Il ressort de la convocation adressée le 7 juin 2018 à M. A... qu'elle lui rappelait son droit de citer des témoins, conformément aux dispositions précitées, et précisait qu'il appartenait à l'intéressé d'aviser ses témoins de la date et du lieu de la réunion du conseil de discipline. Si l'intéressé soutient avoir demandé à ce que soient cités " des témoins à décharge ", il n'allègue ni n'établit que des témoins qu'il aurait souhaité faire entendre se sont présentés lors du conseil de discipline du 4 juillet 2018 et n'ont pas été entendus. Dans ces conditions, la circonstance que, ainsi qu'il ressort du procès-verbal de la séance, seuls des témoins cités par le SDIS de Meurthe-et-Moselle ont été entendus n'a pas porté atteinte aux droits et garanties de l'agent. Par suite, le moyen de M. A... tiré de la méconnaissance de ses droits de la défense doit être écarté. En ce qui concerne la matérialité et le caractère fautif des griefs retenus par le SDIS : 13. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit aux points 5, 6 et 7 du présent arrêt, M. A... n'est pas fondé à soutenir que les griefs relatifs respectivement à la " fausse information " donnée au chef d'agrès avant le départ en intervention le 26 août 2017, au déplacement intempestif des outils informatiques du standard du centre de secours et à son comportement inapproprié lors de la diffusion de musique militaire allemande à la caserne le 10 novembre 2017 ne sont pas matériellement établis et n'ont pas de caractère fautif. 14. En second lieu, le comportement d'un sapeur-pompier volontaire en dehors du service peut constituer une faute de nature à justifier une sanction s'il a pour effet de perturber le bon déroulement du service ou de jeter le discrédit sur l'administration. 15. Le SDIS fait également grief à M. A... d'avoir validé les bons à tirer des calendriers annuels sans prévoir l'encart traditionnellement réservé au message du chef de centre. Toutefois, la seule qualité de secrétaire de l'amicale des sapeurs-pompiers et l'hostilité notoire que l'intéressé nourrirait pour le chef de centre, à la supposer avérée, ne permettent pas d'établir que M. A... aurait fait en sorte, de manière active ou passive, que le calendrier 2018 ne comporte pas l'encart habituellement réservé au chef de centre. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 8 du présent arrêt, le président du conseil d'administration du SDIS aurait pris la même décision à son encontre s'il n'avait pas retenu ce grief. En ce qui concerne le détournement de pouvoir allégué : 16. Contrairement à ce que M. A... soutient, les pièces du dossier disciplinaire ne permettent pas d'établir l'existence de manœuvres orchestrées par l'autorité gestionnaire ni d'acharnement manifesté à son encontre. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le président du SDIS de Meurthe-et-Moselle aurait fait usage de son pouvoir de sanction dans un autre but que celui en vertu duquel il en dispose. Par suite, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté. 17. Il résulte de tout ce qui précède que le SDIS de Meurthe-et-Moselle est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté du 9 juillet 2018 et lui a enjoint de réintégrer M. A... dans son grade et de prendre rétroactivement les mesures nécessaires pour reconstituer sa carrière à compter du 1er août 2018. Sur les frais de l'instance : 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du SDIS de Meurthe-et-Moselle, qui n'est pas la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. 19. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme demandée par le SDIS de Meurthe-et-Moselle au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 30 septembre 2020 est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du 9 juillet 2018 et a prononcé une injonction à l'encontre du SDIS de Meurthe-et-Moselle. Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nancy et dirigée contre l'arrêté du 9 juillet 2018 est rejetée. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du SDIS de Meurthe-et-Moselle est rejeté. Article 4 : Les conclusions présentées par M. A... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au service départemental d'incendie et de secours de Meurthe-et-Moselle et à M. C... A.... Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président, M. Agnel, président-assesseur, Mme Brodier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, Signé : H. Brodier Le président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au préfet de Meurthe-et-Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 N° 20NC03369
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, d'une part, de désigner un expert afin d'évaluer le préjudice corporel qu'il a subi en raison de l'accident dont il a été victime le 1er septembre 2015 dans un parking souterrain appartenant à la commune de Troyes, d'autre part, de condamner la commune de Troyes à lui verser, à titre de provision, la somme de 50 000 euros. Par un jugement n° 2000201 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 janvier et 23 juin 2021, M. A..., représenté par Me Lebois, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2000201 du 8 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la désignation d'un expert et à la condamnation de la commune de Troyes ; 2°) de condamner la commune de Troyes à lui verser, à titre de provision, la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi en raison de l'accident dont il a été victime le 1er septembre 2015 ; 3°) de désigner un expert pour procéder à l'évaluation de son préjudice corporel ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Troyes la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - en ne respectant pas les dispositions de l'article R. 4224-5 du code du travail relatives à la sécurisation des passerelles et plate-forme, la commune de Troyes a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; - le rapport de l'inspection du travail a rappelé que les conditions d'intervention des entreprises extérieures n'ont pas été respectées tant par l'entreprise extérieure SOGEA que par l'entreprise utilisatrice, Mairie de Troyes - Parc Auto ; - dans la mesure où il n'est intervenu que pour exécuter les instructions d'un agent de la commune de Troyes, le lien de causalité entre son dommage et la faute est établi ; - il n'a commis aucune faute de nature à exonérer la commune de Troyes de sa responsabilité ; - il y a lieu de désigner un expert pour procéder à l'évaluation de son préjudice corporel et, dans l'attente, de lui allouer une provision de 30 000 euros. Par des mémoires en défense, enregistrés les 21 mai 2021 et 12 mai 2023, la commune de Troyes, représentée par Me Phelip, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que, dans l'hypothèse d'une condamnation, la somme qu'elle doit payer soit minorée et que la société SOGEA Est BTP la garantisse de cette condamnation et, enfin, à ce que soit mis à la charge de M. A... le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les conditions pour engager sa responsabilité ne sont pas remplies ; - M. A... a commis des fautes de nature à l'exonérer de toute responsabilité ; - la demande de provision est excessive et injustifiée ; - en raison des fautes commises par la société SOGEA, et notamment l'absence d'un autre agent de cette société le jour de l'accident, elle est fondée, dans l'hypothèse d'une condamnation, à appeler en garantie cette société. Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2021, la société SOGEA Est BTP, représentée par Me Rozec, conclut au rejet de l'appel en garantie formé par la commune de Troyes à son encontre et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune de Troyes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'elle n'a commis aucune faute qui aurait pu être à l'origine de l'accident subi par M. A.... La procédure a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Aube qui n'a pas présenté de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Denizot, - les conclusions de M. B..., - et les observations de Me Lebois pour M. A... ainsi que celles de Me Duneme pour la commune de Troyes. Considérant ce qui suit : 1. M. A... exerçait les fonctions de chauffeur poids-lourd comme salarié de la société SOGEA Est BTP. Cette société était titulaire d'un marché conclu avec la ville de Troyes portant sur le lot n° 11 " assainissement " du marché relatif à la maintenance courante des bâtiments communaux. Le 1er septembre 2015, à la suite d'inondations affectant le parking souterrain des halles, propriété de la commune de Troyes, M. A... a été appelé pour intervenir. Lors de son intervention, M. A... a chuté lourdement depuis une plateforme, dans une gaine d'aération haute d'une quinzaine de mètres. Par un jugement du 21 juin 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociales de l'Aube a débouté la demande de M. A... tendant à condamner la société SOGEA Est BTP. Le 6 septembre 2019, la cour d'appel de Nancy a rejeté l'appel de M. A... formé à l'encontre de ce jugement. Parallèlement, le 9 novembre 2018, M. A... a été licencié par la société SOGEA Est BTP pour inaptitude physique totale à l'emploi salarié. Par un jugement du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande de M. A... tendant, d'une part, à ce qu'une expertise soit diligentée pour évaluer ses préjudices, d'autre part, à ce que la commune de Troyes soit condamnée à lui allouer une provision. M. A... relève appel de ce jugement. Sur la responsabilité de la commune de Troyes : 2. Les dommages résultant de l'exécution de travaux publics ne peuvent engager, envers les personnes qui y participent, la responsabilité du maître de l'ouvrage ou de l'entrepreneur que s'il est établi qu'ils sont imputables à la faute de ces derniers. En dehors du cas de force majeure, cette responsabilité ne peut être réduite en règle générale, que dans la mesure où le dommage est imputable à la faute de la victime. Enfin, si dans le domaine des dommages de travaux publics, les fautes commises par des tiers sont en principe sans influence sur les obligations du maître de l'ouvrage à l'égard de la victime ou de ses ayants droit, il en va différemment lorsque le tiers co-auteur du dommage est l'employeur de la victime, contre lequel le maître de l'ouvrage ne peut exercer d'action en garantie. Par suite, lorsqu'un dommage de travaux publics a le caractère d'un accident du travail, la faute de l'entrepreneur, employeur de la victime, dans la mesure où elle a contribué à produire le dommage, a pour effet d'atténuer dans la même mesure la responsabilité encourue par le maître de l'ouvrage. 3. Le dommage dont M. A... demande réparation est survenu à l'occasion d'une opération de travaux publics à laquelle il participait. Pour engager la responsabilité de la commune de Troyes, M. A... doit donc établir que cette dernière a commis une faute, ainsi que l'existence d'un lien de causalité entre cette faute et ses préjudices. 4. Il résulte du procès-verbal d'audition de M. A..., du 30 septembre 2016, par les services de police que le 1er septembre 2015, afin de déboucher les rigoles qui empêchaient l'eau de s'écouler, M. A... a emprunté une échelle à crinoline haute de plusieurs mètres, située dans un local à ventilation, pour accéder à une plateforme puis s'est accroupi sur l'acrotère la bordant. C'est de cet endroit qu'il a chuté d'une dizaine de mètres le long d'une gaine à ventilation perforant les pièges à son qui s'y situaient. Ainsi que l'intéressé l'a indiqué lors de son audition, M. A..., qui connaissait les lieux, s'est cru sur l'acrotère en sécurité en estimant qu'en cas de chute les pièges à son pouvaient supporter son poids. 5. D'une part, par un ordre de service du 1er septembre 2015, la commune de Troyes a sollicité, après la survenance d'orages particulièrement intenses le 30 août 2015, l'intervention de la société SOGEA Est BTP afin de pomper l'eau au niveau - 1 du parking souterrain des halles. M. D..., chef de M. A..., a également précisé lors de son audition le 8 novembre 2016, que l'intervention initiale était considérée comme sans risque dans la mesure où elle consistait à pomper de l'eau de plein pied. Par ailleurs, ainsi que l'ont jugé le tribunal des affaires sociales de l'Aube et la cour d'appel de Nancy, il ne résulte aucunement de l'instruction, et notamment du procès-verbal d'audition de M. D..., que la société SOGEA Est BTP ait ordonné à M. A... d'intervenir sur la plateforme située dans le local à ventilation. De plus, la seule circonstance que les portes de l'armoire à ventilation aient été ouvertes ne permet pas, à elle seule, de révéler qu'un employé de la société Troyes Parc Auto ou un agent de la commune de Troyes, aurait donné l'ordre à M. A... d'intervenir spécifiquement sur la plateforme située à l'intérieur du local à ventilation. A ce titre, il ressort des propres déclarations de l'intéressé que M. A... a, de sa propre initiative, décidé de se diriger vers cette plateforme où il pressentait, du fait de précédentes interventions, que l'évacuation des eaux était bouchée à ce niveau. 6. D'autre part, il résulte de l'article 33 de la délégation de service public conclue entre la commune de Troyes et la société Troyes Parc Auto, que, le 1er septembre 2015, la société SOGEA Est BTP n'avait plus en charge l'entretien de la plateforme située dans le local à ventilation du niveau -1 du parking des halles. En outre, il ressort des propres déclarations de l'intéressé aux services de police que M. A... avait connaissance du fait qu'il n'était pas habilité pour intervenir dans le local électrique et à ventilation. 7. Enfin, au cours de son audition, M. D... a indiqué que, dans une situation où les conditions initiales d'intervention avaient été modifiées, M. A... aurait dû, conformément aux consignes données au sein de l'entreprise, soit s'en tenir à l'intervention initiale soit signaler à son supérieur l'existence d'une nouvelle situation. Il résulte également des déclarations de M. D... que l'intervention commandée par la commune de Troyes présentait le caractère d'une relative urgence dans la mesure où la prestation devait être réalisée dans la journée. 8. Par conséquent, il résulte de l'instruction que, alors qu'aucune urgence impérieuse ne l'imposait, M. A... s'est engagé, de sa propre initiative, après avoir monté l'échelle à crinoline, sur une plateforme, fortement inondée, située à l'intérieur d'un local à ventilation, sur laquelle il n'était pas habilité à intervenir. Alors que cette plateforme était inondée à hauteur de 20 centimètres, il a décidé seul, sans en référer à son chef, de déboucher les évacuations en se mettant accroupi en équilibre sur l'acrotère longeant la plateforme duquel il a chuté sans que les pièges à son ne puissent le retenir. Dans ces conditions et alors même que M. A... n'est intervenu que parce qu'il pensait pouvoir mettre fin rapidement aux inondations, sa chute résulte de sa propre imprudence à se positionner en équilibre sur un acrotère tout en surestimant la solidité des pièges à son. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, l'accident subi par M. A... le 1er septembre 2015 ne peut être regardé comme imputable à la commune de Troyes mais résulte exclusivement du comportement de l'intéressé et des conditions dans lesquelles il est intervenu. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Sur les frais liés à l'instance : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Troyes qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement des sommes que M. A... et la société SOGEA Est BTP demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement de la somme que la commune de Troyes demande sur le fondement des mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la commune de Troyes et de la société SOGEA Est BTP présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à la commune de Troyes, à la société SOGEA Est BTP et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Aube. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - M. Denizot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, Signé : A. DenizotLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet de l'Aube en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 21NC00076
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'union départementale des associations familiales (UDAF) du Finistère, agissant en qualité de tuteur de M. A... B..., a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 3 février 2022 du préfet du Finistère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. Par un jugement n° 2203356 du 30 janvier 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 13 février 2023, l'UDAF du Finistère, agissant en qualité de tuteur de M. B..., représentée par Me Buors, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 30 janvier 2023 ; 2°) d'annuler cette décision du 3 février 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de délivrer à M. B... une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Elle soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé et, par suite, irrégulier ; - la décision contestée portant refus de titre de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ; - le préfet ne pouvait légalement se fonder sur l'existence d'une menace à l'ordre public pour prendre cette décision ; - la décision litigieuse méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - cette décision est entachée d'erreur de droit, de fait et d'erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense enregistré le 27 mars 2023, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et de l'Irlande du Nord de l'Union européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique du 17 octobre 2019 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le décret n° 2020-1417 du 19 novembre 2020 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Salvi a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant britannique né le 16 octobre 1974, est entré en France en 2005 accompagné de ses parents. Ces derniers, avec lesquels il vivait, étant décédés, il a été placé sous la tutelle de l'association tutélaire du Ponant puis, par une décision du 8 février 2016 du juge des tutelles du tribunal d'instance de Morlaix, de l'union départementale des associations familiales (UDAF) du Finistère. L'intéressé a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 26 juin 2021 sur le fondement de l'accord de retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne. Par une décision du 3 février 2022, le préfet du Finistère a rejeté sa demande. L'UDAF relève appel du jugement du 30 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Il ressort des motifs du jugement attaqué, notamment des points 3 et 5 à 7 de ce jugement, que les premiers juges ont suffisamment motivé la réponse qu'ils ont apportée aux moyens de légalité, qui étaient invoqués par l'UDAF du Finistère, tirés de l'insuffisante motivation de la décision litigieuse et de la méconnaissance par le préfet des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des " dispositions spécifiques au Brexit ". Le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement doit dès lors être écarté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article 3 du décret du 19 novembre 2020 concernant l'entrée, le séjour, l'activité professionnelle et les droits sociaux des ressortissants étrangers bénéficiaires de l'accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne et de la communauté européenne de l'énergie atomique : " Les articles 5 à 33 du présent décret s'appliquent aux ressortissants étrangers relevant des situations suivantes : / 1° Le ressortissant britannique qui a exercé le droit de résider en France dans les conditions prévues par les dispositions du titre II du livre Ier du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avant le 1er janvier 2021 et continue à y résider par la suite (...) ". Aux termes de l'article 28 du même décret : " L'entrée sur le territoire français et la délivrance des titres de séjour et documents de circulation prévus par le présent décret peuvent être refusées si la présence du demandeur constitue une menace pour l'ordre public. / Si le comportement à l'origine de cette menace s'est produit avant le 1er janvier 2021, l'entrée et la délivrance du titre de séjour ou du document de circulation peuvent être refusées à la condition que ce comportement représente une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. ". 4. Il ressort des pièces du dossier et notamment du bulletin n° 2 de son casier judiciaire que M. B... s'est rendu coupable en 2016 de faits de conduite d'un véhicule en état d'ivresse manifeste et de vol pour lesquels il a été condamné le 1er avril 2016 par le tribunal correctionnel de Brest à une amende de 600 euros et une interdiction de conduire un véhicule à moteur pendant dix mois. L'intéressé a de nouveau été condamné le 8 septembre 2020 par un jugement du même tribunal à une peine de quinze mois d'emprisonnement pour des faits de vol par escalade dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt, commis en récidive les 2 et 3 août 2019, ainsi que des faits de même nature commis en récidive de tentative le 7 décembre suivant, avec violence sur autrui ayant entraîné une incapacité n'excédant pas huit jours et destruction, dégradation ou détérioration. Dans ces conditions, eu égard à la nature, la gravité de certains des faits commis par M. B..., ainsi qu'à la persistance jusqu'à une période récente de son comportement délictueux, et alors que l'intéressé, célibataire et sans enfant, ne justifie, en dépit de l'ancienneté de sa présence sur le territoire français, ni d'une insertion socio-professionnelle, ni de l'existence d'attaches d'une particulière intensité en France, le préfet du Finistère a pu, sans faire une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce, estimer que son comportement représentait une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française et qu'il n'y avait pas lieu, pour cette raison, de lui délivrer le titre de séjour sollicité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait été prise en méconnaissance des dispositions citées au point 3 doit être écarté. 5. Les moyens tirés de l'existence d'une " erreur de droit, sinon de fait, ou du moins d'une erreur manifeste d'appréciation " ne sont pas assortis des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. 6. Enfin, l'UDAF se borne à invoquer devant le juge d'appel, sans les assortir d'éléments nouveaux, les mêmes moyens que ceux développés en première instance et tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour serait entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation et de ce qu'elle aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges. 7. Il résulte de tout ce qui précède que l'UDAF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. D E C I D E Article 1er : La requête de l'UDAF du Finistère est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'union départementale des associations familiales du Finistère, en qualité de tuteur de M. A... B..., et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Finistère. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le président-rapporteur, D. Salvi L'assesseure la plus ancienne, J. Lellouch La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 23NT003862
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 30 juillet 2021 du préfet du Finistère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ou la décision implicite de rejet née le 24 novembre 2021. Par un jugement n°s 2106043 du 12 décembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 10 février 2023, M. B..., représenté par Me Mouanga Diatantou, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 12 décembre 2022 ; 2°) d'annuler cette décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; 3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil. Il soutient que : - le préfet ne pouvait légalement se fonder sur l'existence d'une menace à l'ordre public pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour ; - la décision contestée de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions des articles L. 423-1 et L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Par un mémoire en défense enregistré le 28 mars 2023, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Salvi a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant tunisien né le 12 juin 1981, est entré en France le 6 mai 2012 sous couvert d'un visa Schengen de court séjour, valable jusqu'au 26 juin 2012 et s'y est maintenu irrégulièrement à l'expiration de ce visa. Il a fait l'objet, par deux arrêtés des 23 août 2013 et 26 juin 2017, respectivement des préfets du Morbihan et du Finistère, de refus de titre de séjour assortis de mesures d'éloignement. Par un nouvel arrêté du 23 juin 2021, le préfet du Finistère a rejeté la demande de délivrance d'un titre de séjour présentée par l'intéressé le 12 octobre 2020, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. M. B... a présenté une nouvelle demande de titre de séjour le 22 juillet 2021. Par une décision du 30 juillet 2021, le préfet du Finistère a rejeté sa demande. M. B... relève appel du jugement du 12 décembre 2022 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation cette dernière décision. 2. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet du Finistère n'a pas davantage examiné d'office sa demande sur ce fondement. Par suite, l'intéressé ne peut utilement se prévaloir de ce que la décision contestée aurait été prise en méconnaissance de ces dispositions. Au demeurant, le requérant, qui est entré en France sous couvert d'un visa de court séjour, ne justifie pas remplir la condition de visa de long séjour prévue par les dispositions de l'article L. 412-1 du même code et applicable pour la première délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 423-1 de ce code. 3. Aux termes de l'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, entré régulièrement et marié en France avec un ressortissant français avec lequel il justifie d'une vie commune et effective de six mois en France, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ". Aux termes de l'article L. 412-5 du même code : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire (...) ". Aux termes de l'article L. 432-1 de ce code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ". 4. Il ressort des pièces du dossier et notamment du bulletin n° 2 de son casier judiciaire que M. B... s'est rendu coupable en mai 2014 de faits de vol avec destruction ou dégradation et en octobre 2015, de faits de vol dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt pour lesquels il a été condamné le 6 mai 2016 par le tribunal correctionnel de Brest à une peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis. L'intéressé a de nouveau été condamné le 17 juin 2016 par un jugement du même tribunal à une peine d'amende avec sursis pour des faits de dégradation ou détérioration d'un bien appartenant à autrui commis le 11 décembre 2015. Il a encore été condamné le 21 juin suivant à une peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de vol, de contrefaçon ou falsification de chèque, et d'usage de chèque contrefait ou falsifié commis au cours des années 2015 et 2016. Une nouvelle peine de deux mois d'emprisonnement a été prononcée à son encontre le 5 mars 2019 pour des faits de vol et d'escroquerie commis en mars 2018. Le requérant a également été mis en cause pour des faits, dont il ne conteste pas la matérialité, de dégradation ou détérioration du bien d'autrui en décembre 2016 et de menace de mort réitérée au cours de l'année 2017. Dans ces conditions, eu égard à la nature des faits commis par M. B..., ainsi qu'à la persistance jusqu'à une période relativement récente de son comportement délictueux, et alors que l'intéressé, marié depuis le 12 juin 2021 à une ressortissante française, ne justifie pas d'une communauté de vie antérieure au mois de juillet 2020, le préfet du Finistère a pu légalement, sans faire une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce, estimer que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public et qu'il n'y avait pas lieu, pour cette raison, de lui délivrer le titre de séjour sollicité. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision contestée aurait été prise en méconnaissance des dispositions citées au point 3 doit être écarté. 5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " 6. M. B..., qui est entré en France en 2012, se prévaut d'une relation de couple qui aurait débuté en 2014 avec une ressortissante française qu'il a épousée le 12 juin 2021 et de sa participation à l'entretien et à l'éducation de l'enfant mineur de cette dernière. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la communauté de vie invoquée qui, ainsi qu'il a été dit au point 4, n'est pas établie avant le mois de juillet 2020, présente un caractère relativement récent et que l'intéressé ne justifie pas de l'intensité des liens qu'il entretient avec l'enfant de son épouse. Le requérant ne justifie pas davantage de l'existence de tels liens avec sa propre fille, née en 2012 et sur laquelle il n'exerce pas l'autorité parentale. En outre, s'il a noué des relations sociales sur le territoire français, y a occupé des emplois dans le secteur de la restauration jusqu'en 2017 et a participé à des activités bénévoles dans sa commune, il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui a fait l'objet de trois mesures d'éloignement en 2013, 2017 et juin 2021, ne justifie pas, eu égard notamment à ce qui a été dit au point 4, d'une particulière intégration. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, de la menace pour l'ordre public que constitue la présence en France de M. B... et en dépit de la durée supposée de sa présence sur le territoire français, la décision contestée lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, eu égard à son objet et à ses effets, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet du Finistère n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 7. En vertu des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le moyen tiré de ce que la décision contestée portant refus de titre de séjour qui n'a, par elle-même, ni pour objet ni pour effet de séparer le requérant de sa fille et de l'enfant de son épouse, aurait été pris en méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté. 8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. D E C I D E Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Finistère. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le président-rapporteur, D. Salvi L'assesseure la plus ancienne, J. Lellouch Le greffier, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 23NT003602
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'établissement public SNCF Réseau a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le département de la Haute-Marne à lui verser la somme de 392 518,61 euros au titre de la réparation du préjudice subi en raison des désordres affectant le pont-route du Grenant. Par un jugement n° 1802002 du 16 octobre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné le département de la Haute-Marne à verser à l'établissement SNCF Réseau la somme de 392 518,61 euros et a mis à sa charge la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 9 décembre 2020, le département de la Haute-Marne, représenté par Me Claisse, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1802002 du 16 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamné à verser à SNCF Réseau la somme de 392 518,61 euros ; 2°) de rejeter la demande présentée par SNCF Réseau devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ; 3°) de mettre à la charge de SNCF Réseau la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, le jugement attaqué n'a pas été régulièrement signé ; - en l'absence de documents établis de manière contradictoire ou rédigé par des experts, la société SNCF Réseau ne justifie pas que le sinistre serait imputable à la présence, au fonctionnement ou mauvais état de l'ouvrage public que constitue le pont-route du Grenant ; - la carence de la société SNCF Réseau, qui s'est comportée comme un véritable maître d'ouvrage, à intervenir pour procéder à l'entretien et à la réparation du pont-route ainsi que la transmission tardive d'informations sur l'état du pont-route sont de nature à l'exonérer intégralement de sa responsabilité ; - la réalité du préjudice subi par la société SNCF Réseau n'est pas établi. Par des mémoires en défense, enregistrés les 10 février 2021 et 4 mai 2023, la SA SNCF Réseau, représentée par Me Le Flohic, conclut au rejet de la requête, à ce que la somme de 392 518,61 euros à laquelle le département de la Haute-Saône a été condamné à lui verser soit assortie des intérêts et de la capitalisation de ces intérêts et à ce que soit mise à la charge du département de la Haute-Marne la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Par un mémoire, enregistré le 26 mai 2023, le département de la Haute-Marne conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens. Il n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code général de la propriété des personnes publiques ; - le code de la voirie routière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Denizot, premier conseiller, - les conclusions de M. Michel, rapporteur public, - et les observations de Me Camo pour le département de la Haute-Marne. Considérant ce qui suit : 1. Le 13 janvier 2011 les agents de la SNCF ont constaté, sous le pont-route du Grenant qui relie les deux parties de la route départementale D 136 séparées par la ligne ferroviaire Is-sur-Tille - Chalindrey, une déformation du talus recouvert d'un perré jointoyé et du fossé en béton ainsi que leur effondrement sur la palée de l'ouvrage menaçant la stabilité de la voie et la sécurité de la circulation. Dans le dernier état de la procédure, par un jugement du 16 octobre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné le département de la Haute-Marne à verser à la société SNCF Réseau la somme de 392 518,61 euros. Le département de la Haute-Marne relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". 3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifié au département de la Haute-Marne ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement. 4. Dès lors, le département de la Haute-Marne n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier. Sur la responsabilité du département de la Haute-Marne : 5. Le maître de l'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage présente un caractère accidentel. En ce qui concerne la propriété du pont-route du Grenant : 6. Les ponts ne constituent pas des éléments accessoires des cours d'eau ou des voies ferrées qu'ils traversent mais sont au nombre des éléments constitutifs des voies dont ils relient les parties séparées de façon à assurer la continuité du passage. Par suite, un pont supportant une route départementale appartient à la voirie départementale. 7. Il résulte de l'instruction que le pont-route du Grenant permet le franchissement des lignes ferroviaires qui séparent les deux parties de la route départementale D136. Par suite, si le département de la Haute-Marne fait valoir qu'il n'aurait pas construit, rénové ou entretenu ce pont-route, une telle circonstance, à la supposer même établie, est sans incidence sur sa qualité de propriétaire du pont-route du Grenant. En ce qui concerne l'imputabilité du dommage subi par la société SNCF Réseau au pont-route du Grenant : 8. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et plus particulièrement du rapport d'expertise du 22 juin 2011, que le perré maçonné situé sur le talus sous le pont-route du Grenant s'est fracturé et s'est déplacé d'une vingtaine de centimètres vers le bas. Ce glissement a provoqué la fracturation du fossé en béton qui s'est déplacé également d'une vingtaine de centimètres. Ce déplacement a généré un soulèvement d'une dizaine de centimètres sur huit mètres de long de la piste longeant la voie ferroviaire. Il résulte des constatations concordantes du rapport d'expertise du 22 juin 2011 et du procès-verbal d'huissier du 9 février 2011, que, en raison d'une disjonction des bordures piéton du pont-route du Grenant, les eaux pluviales se déversent directement dans le haut du talus. Alors que l'étude de géothermie du 7 janvier 2014 exclut toute infiltration du talus par remontée de nappe, il résulte suffisamment de l'instruction que ce sont ces infiltrations d'eau qui ont entraîné la descente du perré maçonné. Par suite, en se bornant uniquement à contester le caractère non contradictoire de ces documents et la compétence technique de leurs rédacteurs, le département de la Haute-Marne ne saurait être regardé comme remettant valablement en cause les éléments précis et concordants apportés par la société SNCF Réseau qui établissent que les infiltrations d'eau, au niveau du perré maçonné, provoquant le déplacement de la piste qui longe la ligne ferroviaire, résultent d'une disjonction des bordures piéton du pont-route du Grenant. 9. En second lieu, il résulte de l'instruction que la société SNCF Réseau a réalisé à la fin de l'année 2008 un rapport d'inspection permettant d'identifier un certain nombre d'anomalies du pont-route du Grenant et notamment des dégradations sur raccord de chaussée avec les bordures. Il est constant que ce rapport n'a pas été transmis au département de la Haute-Marne avant que le dommage ne survienne. Toutefois, dans la mesure où, ainsi qu'il a été dit précédemment, il appartenait au seul département de la Haute-Marne d'être en charge de l'entretien du pont-route et d'en assurer les éventuelles réparations, la seule absence de transmission de ce rapport au département de la Haute-Marne ne saurait être la cause du désordre en litige. Par suite, il ne résulte pas de l'instruction que le comportement de SNCF Réseau, alors même qu'il se serait apparenté à celui d'un maître d'ouvrage, soit constitutif d'une faute de nature à exonérer partiellement ou totalement le département de la Haute-Marne de sa responsabilité. 10. Par suite, la société SNCF Réseau doit être regardée comme apportant la preuve que son dommage résultant du déplacement de la piste ferroviaire est exclusivement imputable au département de la Haute-Marne. Dès lors, la société SNCF Réseau, tiers par rapport au pont-route du Grenant, ouvrage public, est fondée à rechercher sa responsabilité. Sur l'évaluation des préjudices : 11. Il résulte de nombreuses pièces produites par la société SCNF Réseau, et notamment du décompte détaillé des dépenses et des documents relatifs au phasage des travaux et d'étude du choix des travaux de confortement pour sécuriser le site, que la société SNCF Réseau justifie de la nécessité des travaux pour mettre fin au désordre dont elle a été victime et établit que son préjudice, imputable aux infiltrations du pont-route du Grenant, s'élève à la somme de 392 518,61 euros. Le département de la Haute-Marne n'apporte aucun élément sérieux remettant en cause le montant de ce préjudice. 12. Il résulte de ce qui précède que le département de la Haute-Marne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamné à verser à la société SNCF Réseau la somme de 392 518,61 euros. Sur les intérêts : 13. Les intérêts moratoires peuvent être demandés pour la première fois en appel dans la requête ou dans un mémoire ultérieur. La SNCF Réseau a droit aux intérêts au taux légal afférents à la somme de 392 518,61 euros que le département de la Haute-Marne a été condamné à lui verser par les premiers juges, à compter de la réception de sa demande indemnitaire préalable par le département, soit le 16 juillet 2018, jusqu'à la date de l'exécution effective du jugement de première instance. Sur les intérêts des intérêts : 14. La capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois en appel le 4 mai 2023. A cette date il était dû au moins une année d'intérêts. Dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation à compter de cette date. Sur les frais liés à l'instance : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société SNCF Réseau, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le département de la Haute-Marne demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge du département de la Haute-Marne le versement de la somme de 1 500 euros à la société SNCF Réseau sur le fondement des mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : La requête du département de la Haute-Marne est rejetée. Article 2 : La somme de 392 518,61 euros que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné le département de la Haute-Marne à verser à la SA SNCF Réseau sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2018 jusqu'à la date d'exécution effective du jugement de première instance. Ces intérêts seront capitalisés à compter du 4 mai 2023. Article 3 : Le département de la Haute-Marne versera à la SA SNCF Réseau une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au département de la Haute-Marne et à la SA SNCF Réseau. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - M. Denizot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, Signé : A. DenizotLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Marne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 20NC03564
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 9 avril 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. Par un jugement n° 2114435 du 19 octobre 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 14 décembre 2022 M. D..., représenté par Me Neraudau, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 9 avril 2021 du préfet de la Loire-Atlantique ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer un récépissé dans l'attente de ce réexamen ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement de première instance est entaché d'irrégularité dès lors que sa note en délibéré, qui a été enregistrée au greffe du tribunal le 18 juin 2020, n'a pas été visée ; - les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour : - elle n'est pas suffisamment motivée et n'a pas été précédée d'un examen sérieux de sa situation personnelle ; - elle méconnaît l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; S'agissant de la décision fixant le pays de destination : - elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle méconnaît les articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense enregistré le 2 mars 2023 le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés. M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 novembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Le rapport de M. Penhoat a été entendu au cours de l'audience publique. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Penhoat ; - et les observations de Me Lachaux, substituant Me Neraudau, représentant M. D.... Considérant ce qui suit : 1. M. D..., ressortissant guinéen né le 12 septembre 1996, déclare être entré irrégulièrement en France le 19 juillet 2018. Sa demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par une décision du 31 janvier 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 29 décembre 2020. Il a sollicité du préfet de la Loire-Atlantique la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté du 9 avril 2021, portant en outre obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. D... relève appel du jugement du 19 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique (...). Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. (...) Mention est également faite de la production d'une note en délibéré. ". 3. Il résulte de ces dispositions que seuls les mémoires et, le cas échéant, la note en délibéré, doivent faire l'objet d'un visa propre. S'agissant d'une production de pièces qui n'est assortie d'aucun commentaire ni d'aucune argumentation, elle ne constitue pas un mémoire ou une note en délibéré au sens des dispositions précitées, de sorte qu'elle n'a pas à faire l'objet d'un visa distinct et peut être globalement visée par la mention " vu les autres pièces du dossier " qui figure sur le jugement. 4. Il ressort des pièces du dossier que les pièces produites par M. D... le 6 octobre 2022 après l'audience étaient accompagnées d'un bordereau de transmission de pièces complémentaires. Ce bordereau, dès lors qu'il comportait des commentaires et arguments sur l'état de santé du requérant, ne pouvait qu'être regardé comme une note en délibéré. Le jugement attaqué, dont les visas ne font pas mention de cette pièce, est entaché pour ce motif d'une irrégularité. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen d'irrégularité de ce jugement, M. D... est fondée à en demander l'annulation. 5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Nantes. Sur la légalité de l'arrêté contesté : En ce qui concerne le moyen commun aux décisions contestées : 6. L'arrêté contesté du 21 avril 2021 a été signé par Mme C... A..., directrice des migrations et de l'intégration à la préfecture de la Loire-Atlantique. Par un arrêté du 17 mars 2021, publié le 18 mars 2021 au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de la Loire-Atlantique lui a donné délégation à l'effet de signer, notamment, les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait. En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour : 7. La décision portant refus de titre de séjour vise notamment l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et mentionne les éléments relatifs à situation personnelle, familiale et professionnelle du requérant qui ont conduit le préfet à estimer qu'il ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Le refus de séjour, qui n'avait pas à reprendre l'ensemble des éléments relatifs à sa situation personnelle, comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Il ne résulte pas de cette motivation, ni d'aucun autre élément du dossier, que le préfet de la Loire-Atlantique n'aurait pas procédé à un examen particulier du dossier de M. D.... 8. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". En vertu de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet délivre le titre de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Aux termes de l'article R. 313-23 de ce code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22 (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions : " (...) Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ". 9. Il ressort des pièces du dossier que l'avis du collège des médecins de l'OFII du 22 décembre 2020, qui mentionne l'identité du médecin rapporteur, comporte également l'identité et la signature des trois médecins composant le collège, parmi lesquels ne figure pas le médecin rapporteur. La mention portée sur ce document selon laquelle le collège de médecins a émis cet avis " après en avoir délibéré ", faisant foi jusqu'à preuve du contraire, suffit en outre à établir le caractère collégial de la délibération du collège de médecins. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les signatures des médecins du collège de l'OFII ne seraient pas authentiques et les tampons apposés permettent d'identifier les signataires. Le moyen tiré de l'irrégularité de cet avis doit, par suite, être écarté. 10. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un certificat de résidence. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'accès effectif ou non à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un certificat de résidence dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. 11. Dans son avis du 22 décembre 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que si l'état de santé de M. D... nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Le requérant indique souffrir de problèmes à la hanche, aux yeux, de céphalées et des rhinorrhée chroniques en raison d'une déformation du nez et d'un syndrome de stress réactionnel. Toutefois, alors même que M. D... a subi une intervention chirurgicale en mai 2019 au niveau des yeux, les ordonnances et les certificats attestant d'un suivi médical de l'intéressé n'établissent pas que le défaut de prise en charge entraînerait pour lui, à la date de l'arrêté contesté, des conséquences d'une exceptionnelle gravité. En outre, M. D... n'établit pas par les pièces versées au dossier l'existence d'un lien entre son état de stress réactionnel allégué et des événements vécus dans son pays d'origine. Eu égard au motif de la décision de refus de séjour contestée, M. D... ne peut utilement soutenir qu'un traitement approprié à sa pathologie n'est pas disponible dans son pays d'origine. Par suite, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. D..., le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 12. M. D... séjournait en France depuis moins de trois ans à la date de l'arrêté contesté. Il ne dispose en France d'aucun attache familiale sérieuse et n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Cameroun, où résident son épouse et ses trois enfants mineurs. Même si, pour invoquer ses efforts d'intégration dans la société française, M. D... se prévaut du suivi de cours de français, de son adhésion à un club de football depuis le 1er janvier 2019 et de ses activités bénévoles au sein d'une association caritative depuis le 15 mars 2019, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport au but poursuivi par cette mesure. Si M. D... soutient encourir des craintes de mauvais traitements de la part de sa belle-mère et de sa famille en cas de retour en Guinée, il n'apporte en tout état de cause, notamment par la production d'un avis de recherche, aucun élément probant au soutien de ses allégations, alors que sa demande d'asile fondée sur ces mêmes faits a été définitivement rejetée. Dès lors, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 13. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... aurait sollicité un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne saurait donc utilement s'en prévaloir pour contester le refus de séjour qui lui a été opposé. En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : 14. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) ". Ainsi qu'il a été dit au point 6 du présent arrêt, l'arrêté contesté fait mention des dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des circonstances de fait propres à la situation personnelle de M. D.... La décision portant obligation de quitter le territoire français est par suite suffisamment motivée. 15. La décision portant refus de titre de séjour n'étant pas annulée, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour doit être écarté. 16. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". 17. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, M. D... n'est pas fondé à soutenir que son état de santé ferait obstacle à son éloignement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 18. Il ressort de ce qui a été dit au point 12 que M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision d'éloignement contestée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination : 19. La décision fixant le pays de destination mentionne la nationalité de M. D..., vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et précise qu'il ne justifie pas être exposé personnellement à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Cette décision comporte ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, un énoncé suffisant des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement. 20. La décision portant refus de titre de séjour n'étant pas annulée, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour doit être écarté. 21. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; (...) 3° Ou, avec son accord, à destination du pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". 22. M. D... se prévaut des risques encourus en cas de retour en Guinée du fait de persécutions de la part de membres de sa famille à la suite d'un héritage de terres et de la dégradation de son état de santé qui en résulterait. D'une part, il n'apporte notamment par la production d'un avis de recherche aucun élément probant permettant d'établir qu'il encourrait, en cas de retour dans son pays, des risques pour sa vie ou sa liberté ou qu'il y serait exposé à des traitement inhumains ou dégradants, alors que sa demande d'admission au statut de réfugié a été définitivement rejetée. D'autre part, compte tenu de ce qui a été dit au point 12, il est établi que si l'état de santé de M. D... nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 23. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux adoptés au point 12 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. 24. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 9 avril 2021. Sur les conclusions à fin d'injonction : 25. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. D... doivent être rejetées. Sur les frais liés à l'instance : 26. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme à verser au conseil de M. D... au titre de frais exposés et non compris dans les dépens DECIDE : Article 1er : Le jugement n° 2114435 du 19 octobre 2022 du tribunal administratif de Nantes est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Nantes ainsi que le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, présidente de chambre, - M. Geffray président-assesseur, - M. Penhoat, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le rapporteur A. PenhoatLa présidente I. Perrot La greffière S. Piérodé La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22NT039082 1
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la créance détenue par la communauté d'agglomération Ardenne Métropole relative aux frais de raccordement au réseau d'adduction d'eau communautaire de la parcelle ZC n° 68 située à Bosseval-et-Briancourt. Par un jugement n° 1901407 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 20 novembre 2020, M. C..., représenté par Me Dombek, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 22 septembre 2020 ; 2°) d'annuler la créance détenue par la communauté d'agglomération Ardenne Métropole relative aux frais de raccordement au réseau d'adduction d'eau communautaire de la parcelle ZC n° 68 située à Bosseval-et-Briancourt ayant donné lieu à la mise en demeure de payer la somme de 1 586,64 euros ; 3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Ardenne Métropole la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que, à la date de la signature du devis avec la communauté d'agglomération, il n'était plus propriétaire de la parcelle ZC n° 68 et qu'il avait déjà réalisé les travaux au cours du mois d'août 2014. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2021, la communauté d'agglomération Ardenne Métropole, représentée par Me Grzelczyk, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. C... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la demande de première instance est irrecevable car tardive ; - les conclusions tendant à l'annulation de la mise en demeure adressée le 8 août 2018, qui ne constitue pas un acte susceptible de recours contentieux, sont irrecevables ; - les autres moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Denizot, - et les conclusions de M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. C... a présenté, au cours du mois de juin 2015, une demande de raccordement au réseau de distribution d'eau potable pour une parcelle lui appartenant, cadastrée section ZC n° 68 et située sur le territoire de la commune Bosseval-et-Briancourt. Dans le cadre de ces travaux de raccordement et dans le prolongement de la facturation de la société Véolia, la communauté d'agglomération Ardenne Métropole a, le 6 mars 2018, émis un titre de recettes d'un montant de 1 586,64 euros à l'encontre de M. C.... Par un jugement du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de ce titre de recettes. M. C... relève appel de ce jugement. Sur la créance détenue par Ardennes Métropole : 2. En premier lieu, il est constant que M. C... a sollicité, au cours du mois de juin 2015, auprès de la communauté d'agglomération Ardenne Métropole le raccordement à l'eau potable de la parcelle cadastrée section ZC n° 68. Par ailleurs, M. C... indique, dans ses écritures, que ce terrain n'avait été vendu qu'à la condition suspensive qu'il soit raccordé au réseau d'eau. A ce titre, M. C... a, le 2 juillet 2015, signé le devis de raccordement de cette parcelle. Dès lors, en raison de l'engagement de l'intéressé à s'acquitter des frais de raccordement, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la circonstance qu'il ne serait plus propriétaire de la parcelle cadastrée section ZC n° 68 au moment de la réalisation effective du branchement ferait obstacle à ce que les frais de raccordement soient mis à sa charge. 3. En second lieu, il résulte de l'instruction que la société Véolia, en charge des travaux de raccordement au réseau d'eau, a établi le 14 août 2015 un plan de recollement de la parcelle cadastrée section ZC n° 68 sans que ce document ne mentionne des travaux de raccordement préexistants. Par ailleurs, selon la facture vérifiée le 3 février 2018 par Ardennes Métropole, la société Véolia a établi le coût des travaux de raccordement. Pour contester la réalité de cette facture, M. C... se prévaut, pour la première fois en appel, d'une facture du 25 août 2014 indiquant que la SAS Durbecq BTP aurait réalisé des travaux de raccordement des parcelles cadastrées section ZC nos 68 et 69. Toutefois, cette facture, émanant d'une société qui n'a pas été mandatée par la société Véolia et n'indiquant pas qu'un compteur aurait été posé, ne saurait être regardée comme remettant en cause la réalité des travaux commandés par M. C... auprès d'Ardenne Métropole et réalisés par la société Véolia. Dès lors, M. C... n'établit pas que les travaux, qui ont donné lieu à l'émission d'un titre de recettes par la communauté d'agglomération Ardenne Métropole, n'auraient pas été réalisés. 4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées à la recevabilité de la demande de première instance et de la requête d'appel, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Sur les frais liés à l'instance : 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté d'agglomération Ardenne Métropole, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de M. C... le versement de la somme de 1 500 euros à la communauté d'agglomération Ardenne Métropole sur le fondement des mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : M. C... versera à la communauté d'agglomération Ardenne Métropole la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à la communauté d'agglomération Ardenne Métropole. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - M. Denizot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, Signé : A. DenizotLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet des Ardennes en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 20NC03372
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) ARF a demandé au tribunal administratif de Caen la décharge, en droits et pénalités, des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices de 2015 à 2017 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2014 au 30 septembre 2017 ainsi que de prononcer le remboursement des sommes versées à titre de garanties dans le cadre de sa demande de sursis de paiement. M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2015 à 2017. Par un jugement nos 2100241 et 2100612 du 15 juin 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté leurs demandes. Procédure devant la cour : I. Par une requête et des mémoires enregistrés, sous le n° 22NT02678, les 15 août 2022 et 17 mars 2023 la SAS ARF, représentée par Me Cazals, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge sollicitée ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - ses prestations de recherche de fuites d'eau doivent se voir appliquer le taux de taxe sur la valeur ajoutée de 10 % prévu à l'article 279-0 bis du code général des impôts dès lors qu'elles ne constituent pas des prestations distinctes des travaux prévus à cet article au sens du droit communautaire ; - elle n'avait pas à acquitter la taxe sur la valeur ajoutée sur les prestations de recherche de fuites d'eau réalisées en qualité de sous-traitante, en application du 2 nonies de l'article 283 du code général des impôts ; - elle a justifié la réalité des frais professionnels de M. A... et elle est fondée à se prévaloir de l'instruction administrative publiée sous la référence BOI-BIC-CHG-10-20-20, n°50 ; - l'application de la majoration pour manquement délibéré sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés consécutives à la réintégration des frais de déplacements de M. A... n'est pas justifiée. Par des mémoires en défense enregistrés les 16 février et 11 avril 2023 le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - doivent être exclues des conclusions de la requête de la SAS ARF les impositions afférentes aux rectifications relatives aux factures Leroy et Boula, qui ne sont pas contestées par elle ; - pour le surplus, les moyens soulevés par la SAS ARF ne sont pas fondés. II. Par une requête enregistrée sous le n° 22NT02679 le 15 août 2022 M. B... A..., représenté par Me Cazals, demande à la cour : 1°) d'annuler le même jugement ; 2°) de prononcer la décharge sollicitée ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les sommes imposées au titre de l'impôt sur le revenu correspondent à des remboursements de frais professionnels non imposables et il est fondé à se prévaloir de l'instruction administrative publiée sous la référence BOI-BIC-CHG-10-20-20, n°50 ; - l'application de la majoration pour manquement délibéré n'est pas justifiée. Par un mémoire en défense enregistré le 16 février 2023 le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - doivent être exclues des conclusions de M. A... les impositions afférentes aux rectifications relatives aux factures Leroy et Boula, qui ne sont pas contestées par lui ; - pour le surplus, les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ; - la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picquet, - les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public, - et les observations de Me Tassel, représentant la SAS ARF et assisant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. La société par actions simplifiée (SAS) ARF a pour activité la recherche de fuites d'eau ainsi que la réalisation de travaux d'assèchement de locaux. Elle travaille avec des compagnies d'assurance qui mandatent plusieurs professionnels lors de dégâts des eaux chez leurs clients aux fins de recherche, le cas échéant d'assèchement, et de réparation des fuites d'eau. A la suite d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er octobre 2014 au 30 septembre 2017, la SAS ARF a fait l'objet, le 11 décembre 2018, d'une proposition de rectification portant sur des rehaussements de taxe sur la valeur ajoutée et d'impôt sur les sociétés. A la suite d'un examen de sa situation fiscale personnelle, M. A..., dirigeant associé de la SAS ARF, a fait l'objet, le même jour, d'une proposition de rectification portant sur des rehaussements de son impôt sur le revenu au titre des années 2015, 2016 et 2017. La SAS ARF a demandé au tribunal administratif de Caen la décharge, en droits et pénalités, des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices de 2015 à 2017 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2014 au 30 septembre 2017 et de prononcer le remboursement des sommes versées à titre de garanties dans le cadre de sa demande de sursis de paiement. M. A... a, quant à lui, demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2015 à 2017. Par un jugement du 15 juin 2022, le tribunal a rejeté leurs demandes. La SAS ARF d'une part et M. A... d'autre part font, par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre, appel de ce jugement. Sur le bien-fondé des impositions mises à la charge de la SAS ARF : 2. Il résulte de l'instruction que la SAS ARF n'a soulevé aucun moyen à l'encontre des impositions afférentes aux rectifications relatives aux factures Leroy et Boula en tant que charges non déductibles, devant le tribunal administratif ou la cour. Dès lors, comme le soutient le ministre en défense, les conclusions à fin de décharge de la SAS ARF, en tant qu'elles portent sur ces impositions, doivent être rejetées. En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée : S'agissant du bénéfice du taux réduit de 10% de taxe sur la valeur ajoutée : 3. Il résulte des dispositions de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, que, lorsqu'une opération économique soumise à la taxe sur la valeur ajoutée est constituée par un faisceau d'éléments et d'actes, il y a lieu de prendre en compte toutes les circonstances dans lesquelles elle se déroule aux fins de déterminer si l'on se trouve en présence de plusieurs prestations ou livraisons distinctes ou d'une prestation ou d'une livraison complexe unique. Chaque prestation ou livraison doit en principe être regardée comme distincte et indépendante. Toutefois, l'opération constituée d'une seule prestation sur le plan économique ne doit pas être artificiellement décomposée pour ne pas altérer la fonctionnalité du système de la taxe sur la valeur ajoutée. De même, dans certaines circonstances, plusieurs opérations formellement distinctes, qui pourraient être fournies et taxées séparément, doivent être regardées comme une opération unique lorsqu'elles ne sont pas indépendantes. Tel est le cas lorsque, au sein des éléments caractéristiques de l'opération en cause, certains éléments constituent la prestation principale, tandis que les autres, dès lors qu'ils ne constituent pas pour les clients, compte-tenu notamment de la valeur respective de chacune des prestations composant l'opération, une fin en soi mais le moyen de bénéficier dans de meilleures conditions de la prestation principale, doivent être regardés comme des prestations accessoires partageant le sort fiscal de celle-ci. Tel est le cas, également, lorsque plusieurs éléments fournis par l'assujetti au consommateur, envisagé comme un consommateur moyen, sont si étroitement liés qu'ils forment, objectivement, une seule opération économique indissociable, le sort fiscal de celle-ci étant alors déterminé par celui de la prestation prédominante au sein de cette opération. 4. Aux termes de l'article 279-0 bis du code général des impôts : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 10 % sur les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien autres que ceux mentionnés à l'article 278-0 bis A portant sur des locaux à usage d'habitation, achevés depuis plus de deux ans, à l'exception de la part correspondant à la fourniture d'équipements ménagers ou mobiliers ou à l'acquisition de gros équipements fournis dans le cadre de travaux d'installation ou de remplacement du système de chauffage, des ascenseurs, de l'installation sanitaire ou de système de climatisation dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé du budget (...) ". 5. Il résulte de l'instruction que la prestation de recherche de fuites d'eau réalisée par la SAS ARF a une finalité propre, qui se distingue des travaux de réparation des dégâts causés par ces fuites, même si elle en est un préalable indispensable. En outre, la prestation de recherche de fuites ne présente pas un caractère marginal par rapport à la réparation, puisqu'elle représente 20% en moyenne du coût total du sinistre. De même, en l'espèce, la SAS ARF se borne à réaliser les prestations de recherche sans effectuer les travaux de réparation. Dans ces conditions, la prestation de recherche réalisée par la société requérante ne peut être regardée comme une prestation accessoire à la prestation de réparation du local concerné. En outre, les prestations de recherche et de réparation étant la plupart du temps dissociées, faisant l'objet d'une facturation distincte et étant réalisées par des prestataires distincts, elles ne peuvent être regardées comme constituant une prestation complexe unique. Par conséquent, c'est à bon droit que l'administration a refusé de faire application du taux de taxe sur la valeur ajoutée de 10 % prévu par l'article 279-0 bis du code général des impôts aux prestations de recherche de fuites d'eau rendues par la SAS ARF. S'agissant de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée pour les travaux sous-traités : 6. Aux termes du 2 nonies de l'article 283 du code général des impôts : " Pour les travaux de construction, y compris ceux de réparation, de nettoyage, d'entretien, de transformation et de démolition effectués en relation avec un bien immobilier par une entreprise sous-traitante, au sens de l'article 1er de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, pour le compte d'un preneur assujetti, la taxe est acquittée par le preneur. ". Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance : " Au sens de la présente loi, la sous-traitance est l'opération par laquelle un entrepreneur confie par un sous-traité, et sous sa responsabilité, à une autre personne appelée sous-traitant l'exécution de tout ou partie du contrat d'entreprise ou d'une partie du marché public conclu avec le maître de l'ouvrage. ". 7. Il résulte de l'instruction que la SAS ARF sous-traite, à la demande de différentes compagnies d'assurances, des prestations de recherche de fuites d'eau, qui sont soumises au dispositif d'auto liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée, la taxe étant acquittée par les preneurs. Toutefois, les recherches de fuites d'eau, notamment avec le passage d'une caméra dans les canalisations, ne peuvent pas être assimilées à des travaux immobiliers et la taxe sur la valeur ajoutée afférente à ces prestations ne peut donc pas donner lieu à l'application du dispositif d'auto-liquidation. Par suite, la SAS ARF n'est pas fondée à revendiquer le bénéfice du 2 nonies de l'article 283 du code général des impôts. La circonstance que les compagnies d'assurance se sont acquittées de la taxe sur la valeur ajoutée est par ailleurs sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition en litige. 8. La requérante sollicite, à titre subsidiaire, l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée de 10% sur les prestations de recherche de fuites d'eau qu'elle a sous-traitées. Il y a lieu de rejeter sa demande pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 5. En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés : S'agissant de l'application de la loi fiscale : 9. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment / : 1° Les frais généraux de toute nature (...) / 5. Sont également déductibles les dépenses suivantes : a. Les rémunérations directes et indirectes, y compris les remboursements de frais versés aux personnes les mieux rémunérées ; b. Les frais de voyage et de déplacements exposés par ces personnes ; (...) ". En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions de l'article 39 du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. En ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive. 10. Les frais de transport, hôtellerie et restauration exposés par une société pour les besoins des déplacements effectués par un salarié ou par un dirigeant dans l'exercice de leurs fonctions constituent en principe des charges déductibles de son bénéfice. Il en va de même des charges exposées pour le remboursement au salarié ou au dirigeant de telles dépenses, qui ont la nature de frais professionnels, lorsque celui-ci en a fait l'avance. Dans un tel cas, ces sommes ne sont pas taxables entre les mains de l'intéressé. 11. M. A... a été salarié de la SAS ARF de l'année 2009 à mars 2014. Ce n'est ensuite qu'en mars 2016 qu'il en est devenu le dirigeant et l' associé quasi unique, en détenant 99,90 % du capital de la société. L'administration fiscale a réintégré, pour chacun des exercices clos du 30 septembre 2014 au 30 septembre 2017, des frais de déplacement de M. A... comptabilisés en charges par la société pour des montants avoisinant les 30 000 euros par exercice au motif qu'au vu des éléments justificatifs présentés ces frais n'apparaissaient ni effectifs, ni engagés dans l'intérêt de la société. Une plaquette publicitaire de la SAS ARF mentionnant son périmètre géographique d'intervention, l'organigramme de la société, les attestations fournies par des salariés, dont au demeurant certains n'ont été engagés que postérieurement aux exercices vérifiés, indiquant que M. A... accompagnait régulièrement les techniciens au cours de leurs interventions afin de les former, tous documents qui n'étaient accompagnés d'aucune précision sur les dates des interventions, de même que les relevés de comptes bancaires de M. A... pour les années 2016 et 2017 et des factures d'entretien de ses deux véhicules personnels ne permettent pas d'établir un lien entre les déplacements litigieux et l'activité de la société, alors au surplus qu'ainsi qu'il a été précisé ci-dessus M. A... n'a exercé aucune fonction au sein de la société entre avril 2014 et mars 2016. De même, le tableau récapitulatif produit ne mentionne ni l'objet du déplacement, ni le nom des clients concernés. Par suite, en l'absence de documents suffisamment précis permettant d'attester du caractère professionnel des déplacements effectués, les frais afférents à ces déplacements ne constituent pas des charges déductibles pour la société requérante. S'agissant de l'interprétation administrative de la loi fiscale : 12. L'instruction administrative référencée BOIBIC-CHG-10-20-20 n° 50 aux termes de laquelle : " la déduction des frais de voyage, de réception et de représentation des chefs d'entreprise ne doit pas être refusée systématiquement pour le seul motif que le montant de ces frais n'est pas justifié par la production de documents formant preuve certaine lorsque les sommes comptabilisées au titre de ces frais correspondent effectivement à des dépenses d'ordre professionnel et ne sont pas excessives eu égard à l'importance de l'exploitation ainsi qu'à toutes autres circonstances propres à chaque cas particulier " ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il a été fait application au point précédent, M. A... n'étant, au demeurant, devenu le dirigeant de la SAS ARF qu'à compter de mars 2016. En ce qui concerne les pénalités pour manquement délibéré : 13. Aux termes de l'article 1729 code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ". 14. Pour justifier l'application des pénalités prévues au a. de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fiscale soutient qu'en déduisant de ses résultats imposables des charges non justifiées et non engagées dans son propre intérêt, de manière répétée et pour des montants importants, la SAS ARF a sciemment diminué ces résultats dans des proportions conséquentes. Ainsi et au vu des éléments mentionnés au point 11, l'administration fiscale établit le caractère délibéré du manquement et par suite le bien-fondé de la pénalité infligée à la SAS ARF. Par suite, il n'y a pas lieu d'accorder à cette dernière la décharge de la majoration pour manquement délibéré. Sur le bien-fondé des impositions mises à la charge de M. A... : 15. Il résulte de l'instruction que M. A... n'a soulevé aucun moyen à l'encontre des impositions afférentes aux rectifications relatives aux factures Leroy et Boula, devant le tribunal administratif ou la cour. Dès lors, comme le soutient le ministre en défense, les conclusions à fin de décharge de M. A..., en tant qu'elles portent sur ces impositions, doivent être rejetées. 16. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ". Pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 11, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, de ce que le remboursement des frais de déplacement de M. A... correspondait à des avantages occultes imposables sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts. 17. L'instruction administrative référencée BOIBIC-CHG-10-20-20 n° 50 ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il a été fait application au point précédent. 18. Pour justifier l'application des pénalités prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts cité au point 13, l'administration fiscale soutient qu'en se faisant rembourser par la SAS ARF des charges non justifiées et non engagées dans l'intérêt de celle-ci, de manière répétée et pour des montants importants, et en ne déclarant pas ces remboursements, M. A... ne pouvait pas ignorer qu'il éludait l'impôt dans des proportions conséquentes. Ainsi et au vu des éléments mentionnés au point 11, l'administration fiscale établit le caractère délibéré du manquement et par suite le bien-fondé de la pénalité infligée à M. A.... Par suite, il n'y a pas lieu d'accorder à ce dernier la décharge de la majoration pour manquement délibéré. 19. Il résulte de ce qui précède que la SAS ARF et M. A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Caen a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs demandes relatives aux frais liés au litige doivent être écartées. DECIDE : Article 1er : La requête de la SAS ARF et la requête de M. A... sont rejetées. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée ARF, à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, présidente de chambre, - M. Geffray, président-assesseur, - Mme Picquet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. La rapporteure P. PicquetLa présidente I. Perrot La greffière S. Pierodé La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 1 2 Nos 22NT02678, 22NT02679 1
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré. Par un jugement n° 2103550 du 22 juillet 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 9 septembre 2022 Mme C..., représentée par Me Cabioch, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 du préfet de la Loire-Atlantique ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique à titre principal, de lui accorder un titre de séjour dans un délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sous la même astreinte et, dans cette dernière hypothèse, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 7 jours suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros au profit de son avocat, Me Cabioch, en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : sur la décision portant refus de titre de séjour : - elle n'est pas suffisamment motivée, ce qui révèle qu'elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ; - l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne lui a pas été transmis avec la décision contestée ; - elle est entachée d'erreur de droit, le préfet s'étant estimé lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ; - elle méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article R. 313-22 du même code ; - elle méconnaît le principe à valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement ou de dégradation, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les articles 3, 6 et 11 de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle n'est pas suffisamment motivée ; - elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle ; - elle est entachée du même vice de procédure que le refus de titre de séjour ; - elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire en méconnaissance des dispositions du code des relations entre le public et l'administration faute pour l'intéressée d'avoir été entendue ou mise en mesure de faire valoir ses arguments ; - l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour la prive de base légale ; - elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît le principe à valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement ou de dégradation, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les articles 3, 6 et 11 de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ; sur la décision fixant le pays de destination : - elle n'est pas suffisamment motivée ; - elle est entachée du même vice de procédure que le refus de titre de séjour ; - l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour la prive de base légale. Par un mémoire en défense enregistré le 15 mars 2023, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés. Par une décision du 11 août 2022, Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées ; - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picquet, - et les observations de Me Power, substituant Me Cabioch, représentant Mme C.... Considérant ce qui suit : 1. Mme D..., ressortissante comorienne née le 25 avril 1987 déclarant être entrée en France en 2015, a sollicité du préfet de la Loire-Atlantique la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11, alors applicable, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté du 5 juin 2020 portant en outre obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel l'intéressée pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cet arrêté. Par un jugement du 22 juillet 2022, le tribunal a rejeté sa demande. Mme C... fait appel de ce jugement. Sur le refus de titre de séjour : 2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté mentionne, en particulier, la teneur de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 27 mars 2020 et indique qu'en tout état de cause, il n'est pas établi que l'intéressée ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il mentionne également, avec une précision suffisante et dépourvue de caractère stéréotypé, les considérations de fait relatives à sa situation personnelle, notamment sa relation avec M. B.... Ainsi, alors même que la décision en cause ne mentionne pas les pathologies de la requérante, les moyens tirés de ce que la décision contestée n'est pas suffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle doivent être écartés. En outre, il ne ressort pas de cette motivation que le préfet se serait estimé lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. 3. En deuxième lieu, si la requérante soutient que l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne lui a jamais été communiqué, cette circonstance est sans influence sur la légalité de l'arrêté contesté, alors d'ailleurs que cet avis lui a été communiqué dans le cadre de la procédure de première instance. En outre, il ressort des pièces du dossier que le médecin qui a établi le rapport médical préalable n'a pas siégé au sein du collège de médecins qui a rendu l'avis. Dès lors, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté. 4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". 5. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un certificat de résidence. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'accès effectif ou non à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un certificat de résidence dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. 6. Dans son avis du 27 mars 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que si l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle peut voyager sans risque vers son pays d'origine. 7. Il ressort des pièces du dossier que la requérante souffre de surdité sévère à gauche et légère à droite, qui nécessite un appareillage, et de lombalgies. L'attestation médicale qu'elle produit, du 3 août 2020, ne se fonde que sur les explications de l'intéressée pour en conclure que " un suivi médical aux Comores semble incompatible avec les besoins de Mme C... ". Le certificat médical du 15 novembre 2018 indiquant que son opération de myomectomie par laparotomie en octobre 2018 nécessite un suivi médical régulier pour une durée indéterminée n'établit pas que l'absence de ce suivi entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Enfin, des rapports généraux sur la surdité, d'autres sur la situation des enfants handicapés aux Comores et des attestations de proches ne sont pas de nature à infirmer l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 313-22 du même code doit être écarté. Pour les mêmes motifs, les moyens tirés de ce que la décision contestée méconnaît le principe à valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement ou de dégradation, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les articles 3, 6 et 11 de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées doivent être écartés. 8. En troisième lieu, si Mme C... soutient être entrée en France dès 2015, elle ne l'établit pas. Ses parents résident aux Comores, ainsi que l'un de ses frères et l'une de ses sœurs, et elle y a elle-même vécu jusqu'à l'âge de vingt-huit ans. Les attestations dont elle se prévaut, peu circonstanciées, ne suffisent pas à établir qu'elle entretient en France des liens stables et d'une particulière intensité. Si elle se prévaut de son état de santé, en tout état de cause, le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, pour les motifs indiqués au point 7. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Sur l'obligation de quitter le territoire français : 9. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) ". Le 3° du I de l'article précité est relatif à l'hypothèse où l'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour. Ainsi qu'il a été dit au point 2, la décision portant refus de titre de séjour est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté. Il ne ressort par ailleurs ni des pièces du dossier ni de la motivation de cette décision que son édiction n'aurait pas été précédée de l'examen particulier de la situation personnelle de Mme C.... 10. En deuxième lieu, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée l'obligation de quitter le territoire français manque en tout état de cause en fait, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3. 11. En troisième lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire en méconnaissance des dispositions du code des relations entre le public et l'administration faute pour l'intéressée d'avoir été entendue ou mise en mesure de faire valoir ses arguments, que la requérante reprend en appel sans apporter d'éléments nouveaux. 12. En quatrième lieu, il résulte des points 2 à 8 que le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté. 13. En cinquième lieu, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 7. Il en est de même des moyens tirés de ce que la décision contestée méconnaît le principe à valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement ou de dégradation, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les articles 3, 6 et 11 de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées. 14. En sixième et dernier lieu, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux indiqués aux points 7 et 8. Sur la décision fixant le pays de destination : 15. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination, que la requérante reprend en appel sans apporter d'éléments nouveaux. 16. En deuxième lieu, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision fixant le pays de destination manque en tout état de cause en fait, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3. 17. En troisième et dernier lieu, il résulte des points 2 à 8 que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté. 18. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles relatives aux frais liés au litige. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, présidente de chambre, - M. Geffray, président-assesseur, - Mme Picquet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. La rapporteure P. Picquet La présidente I. PerrotLa greffière S. Pierodé La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT02951
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société S-PASS a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler, d'une part, le titre de recette n° 135 émis le 2 juin 2017 et rendu exécutoire par le président de la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois (CCPSV), ensemble l'opposition à tiers détenteur du 6 mars 2018 et de prononcer la décharge de l'obligation de paiement en résultant, et d'autre part, le titre exécutoire n° 65 du 20 avril 2018, ensemble la lettre de relance du 2 juillet 2018 et de prononcer la décharge de l'obligation de paiement en résultant. Par un jugement n° 1801082, 1802230 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 26 novembre 2020 et le 23 mai 2023, la société S-PASS, représentée par Me Cabanes, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement n° 1801082-1802230 du 29 septembre 2020 du tribunal administratif de Nancy ; 2°) d'annuler le titre de recettes n° 135 et de prononcer la décharge de l'obligation de paiement en résultant, soit une décharge de 36 826,82 euros ; 3°) d'annuler le titre de recettes n° 65 et de prononcer la décharge de l'obligation de paiement en résultant, soit une décharge de 20 545,41 euros ; 4°) de mettre à la charge de la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois la somme de 4 000 euros en applications des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est entaché d'une omission à statuer : les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que la collectivité, alors qu'elle avait déjà perçu, au moyen d'avoirs, l'intégralité du différentiel entre le budget prévisionnel et réalisé par la société ENGIE-COFELY, lui a réclamé cette même somme ; - les titres de recettes ne précisent pas les bases de la liquidation ; ils sont insuffisamment motivés ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les courriers transmis avant l'émission des titres de recettes litigieux, à savoir le courrier du 16 mai 2017 pour le titre de recettes n° 135 et le courrier du 27 mars 2018 pour le titre de recettes n° 65, ne lui indiquent pas les bases de la liquidation des créances et elle n'était donc pas en mesure de comprendre le montant indiqué sur les titres ; - la créance n'est pas fondée : la communauté de communes n'a pas respecté l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) : . elle lui a réclamé plus que ce qui lui était dû ; elle devait déduire ce qui lui avait déjà été versé au moyen d'avoirs par la société ENGIE-COFELY ; . en considérant que le paiement direct n'avait pas d'incidence sur les modalités de calcul de la somme à reverser, les juges du fond ont donc commis une erreur dans l'analyse des stipulations contractuelles, que la collectivité a elle-même mal appliquées ; - en ce qui concerne le titre de perception n° 135 : elle ne doit que la somme de 78 002,07 euros sur les 85 344,06 euros réclamés au titre de l'exploitation 2015/2016 et est donc fondée à solliciter la décharge de la somme de 36 826,82 euros ; - en ce qui concerne le titre de perception n° 65 : elle ne doit que la somme de 68 200,978 euros sur les 72 310,06 euros réclamés au titre de l'exploitation du deuxième semestre 2016/2017 et est donc fondée à solliciter la décharge de la somme de 20 545,41 euros ; - il appartient à la communauté de communes d'apporter la preuve que les avoirs de la société ENGIE-COFELY ne donneront pas lieu à un versement à son profit. Par un mémoire en défense enregistré le 5 mai 2023, la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois, représentée par Me Le Chatelier, conclut au rejet de la requête et à ce que la société S-PASS soit condamnée à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le tribunal administratif n'a commis aucune omission à statuer ; - les bases de la liquidation des titres exécutoires étaient parfaitement connues par la requérante ; - l'article 11 du CCAP n'établit aucune distinction entre les dépenses prévisionnelles et réelles du titulaire du marché et de son sous-traitant ; - elle n'a jamais perçu la somme de 36 856,81 euros HT correspondant à l'avoir émis par la société ENGIE-COFELY ; les avoirs de la société ENGIE-COFELY ont donné lieu, le cas échéant, à une révision de la facturation pour la période postérieure en application de l'article 7-3 du CCAP. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, - les conclusions de M. Michel, rapporteur public, - et les observations de Me Couette, représentant la société S-PASS et de Me Dubroca, représentant la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois. Considérant ce qui suit : 1. Par acte d'engagement signé le 8 juin 2012, la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois (CCPSV) a confié à la société S-PASS (anciennement Carilis) la gestion du centre aquatique de loisirs et de remise en forme " l'Atrium " situé à Dombasle-sur-Meurthe. La société S-PASS a conclu un contrat de sous-traitance avec la société ENGIE-COFELY pour les prestations de gaz, d'électricité, d'eau, de produits de traitement et de maintenance des installations. Le 2 juin 2017, le président de la communauté de communes a émis un titre exécutoire n° 135, d'un montant de 143 684,23 euros, correspondant au différentiel entre les dépenses prévisionnelles et réelles du compte d'exploitation de l'exercice 2015-2016 qu'elle estimait lui être dû en application de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) de ce marché. La communauté de communes a corrigé une erreur matérielle en faveur de la société S-PASS en août 2017 en retranchant du montant de ce titre exécutoire un montant de 28 854,71 euros correspondant aux acomptes versés. L'opposition à tiers détenteur délivrée le 6 mars 2018 par le comptable public de la trésorerie de Saint-Nicolas-de-Port fait ainsi état d'une somme à recouvrer de 114 829,52 euros. Le 20 avril 2018, le président de la communauté de communes a émis un second titre de recette n° 65, d'un montant de 88 746,39 euros, correspondant au différentiel entre les dépenses prévisionnelles et réelles du compte d'exploitation de l'exercice 2016-2017 qu'elle estimait lui être dû en application des mêmes stipulations du CCAP de ce même contrat. Le 2 juillet 2018, la société S-PASS a reçu une lettre de relance de la part du comptable public de la trésorerie de Saint-Nicolas-de-Port concernant cette somme. Par des demandes enregistrées sous les n° 1801082 et 1802230, la société S-PASS a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les titres de recettes n° 135 et n° 65, ensemble la notification de l'opposition à tiers détenteur délivrée le 6 mars 2018 et la lettre de relance du 2 juillet 2018. Par un jugement du 29 septembre 2020 n° 1801082, 1802230 le tribunal administratif de Nancy a rejeté ces demandes. La société S-PASS relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de ces deux titres de perception et à la décharge partielle des sommes réclamées par ces titres pour un montant s'agissant du titre de perception n° 135 d'une somme de 36 826,82 euros et s'agissant du titre n° 65, d'une somme de 20 545,41 euros. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. La requérante fait valoir que les premiers juges n'auraient pas répondu au moyen tiré de ce que la collectivité, alors qu'elle avait déjà perçu l'intégralité du différentiel entre le budget prévisionnel et réalisé par la société ENGIE-COFELY au travers d'avoirs, lui a à nouveau réclamé cette somme. Toutefois, il ressort des motifs du jugement attaqué que les premiers juges y ont répondu au point 14 lorsqu'il est précisé que la requérante se borne à soutenir que la créance litigieuse intègre des sommes ayant fait l'objet d'un paiement direct par la société ENGIE-COFELY à la CCPSV sans néanmoins se prévaloir de la méconnaissance d'une stipulation contractuelle du CCAP. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la régularité des titres exécutoires en litige : 3. Aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation ". 4. Pour satisfaire à ces dispositions, un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur. 5. D'une part, il résulte de l'instruction que le titre exécutoire n° 135 du 2 juin 2017 a pour objet " reversement cpte exploitation 2015-2016 ". Si le titre ne comporte pas les bases de calcul de la créance, il résulte toutefois de ses mentions que lui était joint un document intitulé " courrier + cpte exploitation approuvé ". Il est constant que préalablement à l'émission du titre litigieux, la société S-PASS a été destinataire de ce courrier du 16 mai 2017, lequel indique avec précision les bases de la liquidation de la créance et mentionne qu'elle doit rembourser à la collectivité 80 % du différentiel à la collectivité en vertu de l'article 11 du CCAP. 6. D'autre part, il résulte de l'instruction que le titre exécutoire n° 65 du 20 avril 2018 a pour objet " reversement cpte exploitation 2016-2017 ". Il est également constant que la société S-PASS a reçu le 3 avril 2018, soit préalablement à l'émission du titre litigieux, un courrier du 27 mars 2018 de la CCPSV lui indiquant les éléments constitutifs de la créance. Ce courrier indique avec précision les bases de la liquidation et le montant dû en application de l'article 11 du CCAP. Enfin, ce courrier annonçait également qu'un " titre de recette de ce montant vous sera transmis dans les plus brefs délais ". 7. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les bases de la liquidation de ces titres de perception n'étaient pas suffisamment précises doit être écarté. En ce qui concerne le bien-fondé des créances en en litige : 8. Aux termes de l'article 7 du CCAP : " la collectivité en assure la trésorerie nécessaire d'équilibre par des versements mensuels faits avant la fin de chaque mois et à titre d'avances, la régularisation de ces avances s'effectuant après la présentation des résultats définitifs de l'exercice considéré (...) ". Aux termes de l'article 11 du CCAP : " A la clôture de l'exercice, si le montant des dépenses réellement effectuées est inférieur au montant des dépenses prévues au budget prévisionnel, le Titulaire versera à la collectivité, dans un délai de trois mois, 80% du différentiel entre les dépenses prévisionnelles et les dépenses réelles (...) ". Aux termes de l'article 13 du CCAP : " la collectivité verse mensuellement au Titulaire un douzième du prix des prestations indiqué dans le budget prévisionnel pour une année pleine d'exécution (...) Les sommes dues au(x) titulaire(s) et au(x) sous-traitant(s) de premier rang éventuel(s) seront payées dans un délai global de 30 jours à compter de la date de réception des factures ou des demandes de paiement équivalentes ". 9. Il résulte de ces stipulations que le douzième du prix des prestations indiqué dans le budget prévisionnel est versé d'une part au titulaire et d'autre part au sous-traitant, en l'occurrence la société ENGIE-COFELY qui bénéficiait d'un paiement direct. En revanche l'article 11 du CCAP, qui prévoit qu'en cas de dépenses inférieures à celles prévues aux sommes inscrites au budget prévisionnel et avancées par la communauté de communes, le titulaire doit rembourser 80 % du différentiel, ne prévoit aucun remboursement par le sous-traitant. Aucune autre stipulation contractuelle ne prévoit de reversement à la charge du sous-traitant. 10. Il résulte de ce qui précède qu'en réclamant au seul titulaire du contrat le différentiel total entre les sommes perçues et celles exposées par le titulaire et le sous-traitant, la CCPSV n'a méconnu aucune stipulation du contrat. La circonstance que cette dernière a bénéficié, alors qu'aucune clause du contrat ne le prévoit, des avoirs du sous-traitant la conduisant à percevoir deux fois le différentiel entre les sommes versées en paiement direct et les dépenses à ce titre réellement exposées, n'a pas d'incidence sur le droit de la communauté de communes à percevoir, en application de l'article 11 du contrat, les 80 % du différentiel auprès du seul titulaire. 11. Dans ces conditions, le moyen selon lequel les créances ne seraient pas dues au motif qu'elles résulteraient d'une application inexacte de l'article 11 du CCAP doit être écarté. 12. Il résulte de tout ce qui précède que la société S-PASS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Sur les frais liés à l'instance : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par la société S-PASS soit mise à la charge de la CCPSV qui n'a pas la qualité de partie perdante. 14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de la société S-PASS la somme demandée par la CCPSV, au même titre. D E C I D E : Article 1er : La requête de la société S-PASS est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la communauté de communes du pays du Sel et du Vermois présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société S-PASS et à la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Samson-Dye, présidente assesseure, - Mme Roussaux, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 juin 2023. La rapporteure, Signé : S. RoussauxLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet Meurthe-et-Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 20NC03432
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 17 mars 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quarante-cinq jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque ce délai sera expiré. Par un jugement n° 2204203 du 15 novembre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 17 janvier 2023 Mme A... C..., représentée par Me Bearnais, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 17 mars 2022 du préfet de la Loire-Atlantique ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les autorités danoises lui ayant accordé le statut de réfugié, la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale au regard de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale de droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision fixant le pays de destination a été prise sans un examen particulier de sa situation personnelle et méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un mémoire en défense enregistré le 4 avril 2023 le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... C... ne sont pas fondés. Mme A... C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 décembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale des droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Geffray a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Après le rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 16 février 2021, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 18 août 2021, Mme A... C..., ressortissante soudanaise, née le 1er janvier 1990, a fait l'objet d'un arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 17 mars 2022 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de quarante-cinq jours, en application des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai. Par un jugement du 15 novembre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de l'intéressée tendant à l'annulation de cet arrêté. Mme A... C... relève appel de ce jugement. Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français : 2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ; ". Les autorités françaises n'ayant pas accordé le statut de réfugié à Mme A... C..., le préfet de la Loire-Atlantique a pu valablement édicter une obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 précité. Le préfet n'a pas en conséquence entaché sa décision d'un défaut de base légale. 3. Depuis son entrée en France le 27 octobre 2018 selon ses déclarations, soit à peine depuis trois ans et demi à la date de l'arrêté contesté, Mme A... C... ne justifie d'aucune intégration professionnelle stable ni de liens privés d'une particulière intensité en France. Compte tenu des conditions de séjour en France de l'intéressée, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que cette décision méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale de droits de l'enfant doit être écarté alors même que les quatre enfants de la requérante, âgés de 16, 13, 11 et 7 ans à la date de l'arrêté, sont scolarisés en France depuis 2019. 4. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de Mme A... C.... Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination : 5. Le préfet de la Loire-Atlantique mentionne dans ses écritures que les autorités danoises ont accordé l'asile à Mme A... C..., comme celle-ci le soutient dans ses dernières écritures après l'avoir précédemment nié. Dans ces conditions, s'il a pu légalement fixer comme pays de destination tout pays où l'intéressée serait légalement admissible, dont fait partie le Danemark, il n'a pu, sans méconnaître les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, également fixer comme pays de destination le Soudan, pays dont Mme A... C... a la nationalité et où elle ne peut pas retourner. La décision fixant le pays de destination doit, par suite, être annulée en tant qu'elle fixe le Soudan comme pays de destination. 6. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination que Mme A... C... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté contesté en tant qu'il fixe comme pays de renvoi celui dont elle a la nationalité. 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions de Mme A... C... à fin d'injonction et celles relatives aux frais liés au litige. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2204203 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes du 15 novembre 2022 en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme A... C... dirigées contre l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 17 mars 2022 en tant qu'il fixe le pays dont elle a la nationalité comme pays de destination ainsi que cette dernière décision, dans cette même mesure, sont annulés. Article 2 : Le surplus de la requête de Mme A... C... est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, présidente de chambre, - M. Geffray, président-assesseur, - M. Penhoat, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le rapporteur J.E. GeffrayLa présidente I. PerrotLa greffière S. Pierodé La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 23NT00154
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) EFS France a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 30 septembre 2011, le 30 septembre 2012 et le 30 septembre 2013 et des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1807093 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 août 2021 et le 24 janvier 2022, l'EURL EFS France, représentée par Me Heckel, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2021 ; 2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Elle soutient que : - la procédure d'imposition est irrégulière dans la mesure où la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ne s'est pas prononcée sur le litige en méconnaissance du 2° du I. de l'article L. 59A du livre des procédures fiscales ; - elle entre dans le champ de l'article 44 octies A du code général des impôts dans la mesure où elle exerce une activité sédentaire et dispose d'un local professionnel qu'elle exploite dans une zone franche urbaine. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par l'EURL EFS France ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Mosser, - les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. L'EURL EFS France, dont M. A... est l'associé unique et le gérant, a été créée le 25 janvier 2010. Ses locaux ont été situés à deux adresses successives situées en zone franche urbaine d'abord à Mulhouse du 1er octobre 2010 au 29 février 2012 puis à Didenheim (Haut-Rhin) à compter du 1er mars 2012. L' EURL EFS France a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2011, 2012 et 2013 à l'issue de laquelle, en suivant la procédure de rectification contradictoire, le service a remis en cause le régime d'exonération d'impôt sur les sociétés en faveur des entreprises implanté en zone franche urbaine sous lequel s'était placée la société. Ainsi, par propositions de rectification du 18 décembre 2014 pour l'année 2011 et du 25 mars 2015 pour les années 2012 et 2013, l'administration lui a notifié des rappels d'impôt sur les sociétés pour un montant total de 97 826 euros. L'EURL EFS France relève appel du jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes. Sur la procédure d'imposition : 2. Aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts, (...) ". Aux termes de l'article L. 59 A du même livre: " I. - La commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : / (...) 2o Sur les conditions d'application des régimes d'exonération ou d'allégements fiscaux en faveur des entreprises nouvelles, à l'exception de la qualification des dépenses de recherche mentionnées au II de l'article 244 quater B du code général des impôts ; (...) ". Aux termes de l'article L. 192 de ce livre : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. ". 3. Le sens de l'avis émis par la commission départementale des impôts à laquelle le désaccord opposant le contribuable à l'administration est soumis ne peut avoir d'autre effet que de modifier, le cas échéant, la dévolution de la charge de la preuve dans les termes prévus par ce même article L. 192. Ainsi lorsque la commission, régulièrement saisie par l'administration, se déclare incompétente et se méprend de la sorte sur l'étendue du domaine d'intervention que lui attribuent notamment les dispositions de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales, cette erreur n'affecte pas la régularité de la procédure d'imposition et n'est, par suite, pas de nature à entraîner la décharge de l'imposition établie à la suite des rectifications ou redressements soumis à l'examen de la commission. Il suit de là que le moyen relatif à la régularité de la procédure d'imposition et tiré de ce que la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires s'est déclarée à tort incompétente doit être écarté comme inopérant. Sur le bien-fondé de l'imposition : 4. Aux termes de l'article 44 octies A du code général des impôts dans sa version applicable aux années en litige : " I.- Les contribuables qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2014, créent des activités dans les zones franches urbaines (...) sont exonérés d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu'au 31 décembre 2010 pour les contribuables qui y exercent déjà une activité au 1er janvier 2006 ou, dans le cas contraire, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui du début de leur activité dans l'une de ces zones. (...) / Lorsque l'activité non sédentaire d'un contribuable est implantée dans une zone franche urbaine mais est exercée en tout ou partie en dehors d'une telle zone, l'exonération s'applique si ce contribuable emploie au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent, exerçant ses fonctions dans les locaux affectés à l'activité, ou si ce contribuable réalise au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans les zones franches urbaines. ". 5. En adoptant le premier alinéa, cité au point 2, de l'article L 192 du livre des procédures fiscales, selon lequel lorsque la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a été saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis de la commission, le législateur n'a pas entendu déroger aux principes généraux gouvernant l'attribution de la charge de la preuve. Par suite, il n'y a pas lieu, contrairement à ce que soutient l'EURL EFS France, pour l'application de l'article 44 A octies du code général des impôts et sans qu'y fasse obstacle l'avis du 15 avril 2016 de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui s'est déclarée incompétente s'agissant du bénéfice de l'exonération, de faire peser la charge de la preuve sur l'administration. 6. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt contesté ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération. L'implantation d'une activité en zone franche urbaine s'apprécie, pour le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 44 octies A du code général des impôts, au regard de tous éléments pertinents, notamment de la situation des locaux et des moyens d'exploitation utiles à cette activité et de son lieu d'exercice effectif. 7. En l'espèce, l'EURL EFS France soutient que son activité d'expertise comptable et de commissaire aux comptes est majoritairement sédentaire et qu'elle réalise cette activité avec l'aide d'une employée dans un local professionnel situé en zone franche urbaine. 8. D'une part, s'agissant du local professionnel, l'EURL EFS France soutient avoir bénéficié à titre gracieux entre le 7 décembre 2009 et le 29 février 2012 d'un local en zone franche urbaine à Mulhouse avant de disposer d'un bail pour un local à Didenheim également en zone franche urbaine à compter du 1er mars 2012. S'il résulte de l'instruction et notamment d'un constat d'huissier établi le 11 septembre 2017, soit postérieurement aux opérations de contrôle, que le local à Didenheim est meublé et dispose d'une imprimante gros volume acquise le 21 mai 2010 et deux ordinateurs fixes acquis le 5 février 2011, il n'en demeure pas moins que l'EURL EFS France ne dispose pas de factures d'électricité pour le local sis à Mulhouse pour l'exercice clos en 2011 et pour les exercices suivants, les factures sont établies au prorata de la surface du local loué à Didenheim et non en fonction de la consommation réelle de la société. De la même manière, l'abonnement téléphonique de la société, dont elle ne dispose que pour le local sis à Didenheim pour les exercices clos en 2012 et 2013, ne permet pas d'établir la réalité de son activité dès lors qu'il s'agit d'un abonnement illimité et que le détail des appels émis depuis le local professionnel n'a pas été communiqué. Par ailleurs, les factures dont se prévaut l'EURL EFS France relatives notamment à des fournitures de bureau et à de la documentation professionnelle ont été majoritairement établies au nom de M. A..., gérant et associé unique de la société et ont pu être également utilisées par lui dans le cadre de son activité indépendante de commissaire aux comptes qu'il effectuait à son domicile depuis le 15 janvier 2010 dans la mesure où il disposait également de matériel numérique nomade, à savoir un ordinateur portable. Elles ne permettent donc pas d'établir la réalité d'une activité au sein du local professionnel. De même, l'achat d'un logiciel de comptabilité ne permet pas d'établir l'existence d'une activité dans ces locaux dès lors qu'un tel logiciel pouvait également être utilisé par M. A... à son domicile avec son ordinateur portable. En outre, l'administration souligne que le local professionnel de l'EURL EFS France à Didenheim est partagé avec un cabinet comptable qui dispose d'un accueil permanent aux heures du bureau et peut ainsi réceptionner le courrier en l'absence de M. A... dans ses locaux. Enfin, la circonstance que l'EURL ait réglée la cotisation foncière des entreprises au titre des années 2012 et 2013 n'est pas non plus de nature à prouver la réalité d'une activité dans ce local. Dans ces conditions, le caractère effectif d'une activité au sein d'un local professionnel à Mulhouse au titre de l'exercice 2011 et jusqu'au 29 février 2012 et à Didenheim pour les exercices 2012 et 2013 en zone franche urbaine n'est pas démontré. 9. D'autre part, en ce qui concerne la nature de l'activité exercée, l'EURL EFS France soutient que son activité d'expertise comptable est réalisée entièrement dans son local professionnel tandis que son activité de commissaire aux comptes, effectuée par son gérant, M. A..., dans le cadre d'un contrat de sous-traitance, s'y déroule majoritairement s'agissant de la préparation de la mission et de la rédaction du rapport. Toutefois, il résulte de l'instruction que M. A... qui exerce, ainsi qu'il a été dit, une activité indépendante de commissaire aux comptes dispose bien, contrairement aux allégations de la société requérante, d'un local professionnel à son domicile et il n'est pas démontré qu'il ne pourrait pas également y réaliser son activité de commissaire aux comptes en sous-traitance pour l'EURL EFS France. En outre, pour l'exercice clos en 2011, il résulte de l'instruction que 70 % de son temps de travail était consacré à des temps de déplacement hors zone franche urbaine, tandis que pour les exercices clos en 2012 et 2013, les charges déduites en raison des déplacements étaient en forte augmentation, 94 % des clients de l'EURL EFS France se situant hors zone franche urbaine. S'il est produit en première instance un certain nombre d'attestations de clients justifiant que M. A... ne se rend qu'épisodiquement dans leurs locaux et que ces derniers se déplacent également dans les locaux de l'EURL EFS France, ces attestations établies postérieurement à la période vérifiée et pour les besoins de la cause ne sont pas exhaustives et ne permettent pas à elles seules de démontrer le caractère sédentaire de l'activité. De plus, si M. A... allègue que ses déplacements ne duraient que quelques heures et qu'il continuait ensuite sa journée de travail dans le local professionnel de l'EURL EFS France, les pièces versées au dossier en première instance ne permettent pas de l'établir. Ainsi, la présence physique de M. A... dans le local professionnel de l'EURL EFS France n'est pas établie à une fréquence et pour des durées caractérisant une activité sédentaire. Dans ces conditions, le caractère sédentaire de l'activité n'est pas non plus établi. 10. A titre subsidiaire, à supposer même que son activité ne soit pas sédentaire, l'EURL EFS France soutient avoir employé pendant la période contrôlée une salariée via une société de travail temporaire du 17 janvier au 29 février 2012 à Mulhouse et du 1er mars 2012 au 24 mars 2016 à Didenheim. Toutefois, il résulte de l'instruction que cette employée n'a pas travaillé à temps plein pour la société durant cette période. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit, 94 % de la clientèle de l'EUR EFS France se situait hors de la zone franche urbaine. Par suite, il n'est pas démontré que l'EURL EFS France ait réalisé 25 % de son chiffre annuel total dans la zone franche urbaine. Dans la mesure où ni la condition d'emploi d'au moins un salarié sédentaire à temps plein, ou équivalent, exerçant ses fonctions dans les locaux affectés à l'activité, ni celle de la réalisation d'au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans les zones franches urbaines n'est remplie, l'EURL EFS France ne peut bénéficier du droit à exonération ouvert aux contribuables, dont l'activité, non sédentaire, est implantée dans une zone franche urbaine mais exercée en tout ou partie en dehors des zones franches urbaines. 11. Il résulte de l'ensemble de ces éléments, et sans que la société requérante puisse utilement invoquer dans le cadre du présent litige relative à l'imposition des bénéfices sa situation au regard de la cotisation foncière des entreprises, imposition distincte, que les bénéfices réalisés par l'EURL EFS France, au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, ne pouvaient être regardés comme provenant d'une activité implantée en zone franche urbaine, au sens des dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts. 12. Il résulte de tout ce qui précède que l'EURL EFS France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite ses conclusions à fin d'annulation ainsi que par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de l'EURL EFS France est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL EFS France et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. . Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président de chambre, M. Agnel, président assesseur, Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, Signé : C. Mosser Le président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 N° 21NC02299
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société S-PASS a demandé au tribunal administratif de Nancy d'une part, d'annuler la décision du 10 décembre 2019 par laquelle la communauté de communes des pays du sel et du Vermois a rejeté sa réclamation préalable et d'autre part, d'ordonner à la communauté de communes des pays du sel et du Vermois de lui rembourser une somme de 66 297,6 euros HT correspondant au trop perçu de la collectivité pour les périodes d'exploitation 2013-2014 et 2014-2015. Par un jugement n°2000353 du 14 avril 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 15 juin 2022 et le 9 mai 2023, la société S-PASS, représentée par Me Cabanes, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement n° 2000353 du 14 avril 2022 du tribunal administratif de Nancy ; 2°) de condamner la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois à lui rembourser la somme de 66 297,6 euros HT correspondant au trop-perçu par la collectivité au titre des périodes d'exploitation 2013-2014 et 2014-2015 ; 3°) de mettre à la charge de la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois la somme de 4 000 euros en applications des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les stipulations contractuelles de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) l'obligeaient à reverser à la collectivité une somme correspondant à 80 % du montant du différentiel d'exploitation ; - la communauté de communes des pays du sel et du Vermois (CCPSV) a méconnu les stipulations des articles 7, 11 et 13 du CCAP : la collectivité ne pouvait pas à la fois lui réclamer la totalité du différentiel et percevoir une partie de ce différentiel sous forme d'un avoir auprès de la société ENGIE-COFELY, sous-traitant ; - au titre de l'exploitation 2013-2014, elle est fondée à solliciter la somme de 61 603,57 euros ; - au titre de l'exploitation 2014-2015, elle est fondée à solliciter la somme de 4 694,03 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 17 août 2022, la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois représentée par Me Le Chatelier, conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - aucune faute contractuelle ne saurait lui être reprochée : elle a appliqué les stipulations du contrat sans erreur, ni dénaturation ; l'article 11 du CCAP obligeait uniquement la société S-PASS à reverser à la communauté de communes une somme correspondant à 80 % du montant du différentiel d'exploitation ; - aucune méconnaissance des stipulations du marché n'est démontrée par la circonstance, non étayée par la requérante, qu'elle aurait perçu des avoirs du sous-traitant du titulaire du marché ; - les avoirs de la société ENGIE-COFELY n'ont pas donné lieu à des versements mais uniquement à une révision de la facturation pour la période postérieure en application de l'article 7.3 du CCAP ; - quand bien même la société ENGIE-COFELY lui aurait reversé des sommes indues, cela ne démontrerait aucune faute contractuelle. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, - les conclusions de M. Michel, rapporteur public, - et les observations de Me Couette, représentant la société S-PASS et Me Dubroca, représentant la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois. Considérant ce qui suit : 1. Par un acte d'engagement du 8 juin 2012, la communauté de communes des pays du sel et du Vermois (CCPSV) a confié à la société S-PASS la gestion d'un centre aquatique de loisirs et remise en forme, " l'Atrium ", situé à Dombasle-sur-Meurthe. La société S-PASS a conclu un contrat de sous-traitance avec la société ENGIE-COFELY pour les prestations de gaz, d'électricité, d'eau, de produits de traitement et de maintenance des installations. Par un courrier du 19 novembre 2019, la société S-PASS a demandé à la CCPSV de lui rembourser les trop perçus au titre du montant du différentiel entre le budget prévisionnel et les dépenses réelles pour les périodes d'exploitation 2013/2014 et 2014/2015. Par un courrier du 10 décembre 2019, la communauté de communes a rejeté sa demande. La société S-PASS a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler cette décision du 10 décembre 2019 et de condamner la CCPSV à lui verser une somme de 66 297,6 euros HT au titre des périodes 2013-2014 et 2014-2015. En présentant devant ce tribunal tant des conclusions à fin d'annulation du rejet de sa demande indemnitaire préalable que des conclusions indemnitaires, la société S-PASS doit être regardée comme ayant donné à sa demande un caractère de plein contentieux tendant exclusivement à la condamnation de la CCPSV à l'indemniser de ses préjudices. Par un jugement du 14 avril 2022, n° 2000353, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. La société S-PASS relève appel de ce jugement. Sur les conclusions indemnitaires : 2. Aux termes de l'article 7 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du contrat en litige : " la collectivité assure la trésorerie nécessaire d'équilibre par des versements mensuels faits avant la fin de chaque mois et à titre d'avances, la régularisation de ces avances s'effectuant après la présentation des résultats définitifs de l'exercice considéré (...°) ". Aux termes de l'article 11 du CCAP : " A la clôture de l'exercice, si le montant des dépenses réellement effectuées est inférieur au montant des dépenses prévues au budget prévisionnel, le Titulaire versera à la collectivité, dans un délai de trois mois, 80% du différentiel entre les dépenses prévisionnelles et les dépenses réelles ". Aux termes de l'article 13 du CCAP : " la collectivité verse mensuellement au Titulaire un douzième du prix des prestations indiqué dans le budget prévisionnel pour une année pleine d'exécution (...) Les sommes dues au(x) titulaire(s) et au(x) sous-traitant(s) de premier rang éventuel(s) seront payées dans un délai global de 30 jours à compter de la date de réception des factures ou des demandes de paiement équivalentes ". 3. Il résulte de ces stipulations que le douzième du prix des prestations indiqué dans le budget prévisionnel est versé d'une part au titulaire et d'autre part au sous-traitant, en l'occurrence la société ENGIE-COFELY qui bénéficiait d'un paiement direct. En revanche l'article 11 du CCAP, qui prévoit qu'en cas de dépenses inférieures à celles prévues aux sommes inscrites au budget prévisionnel et avancées par la communauté de communes, le titulaire doit rembourser 80 % du différentiel, ne prévoit aucun remboursement par le sous-traitant. Aucune autre stipulation contractuelle ne prévoit de reversement à la charge du sous-traitant. 4. Il résulte de ce qui précède qu'en réclamant au seul titulaire du contrat le différentiel total entre les sommes perçues et celles exposées par le titulaire et le sous-traitant, la CCPSV n'a méconnu aucune stipulation du contrat. La circonstance que cette dernière a bénéficié, alors qu'aucune clause du contrat ne le prévoit, des avoirs du sous-traitant la conduisant à percevoir deux fois le différentiel entre les sommes versées en paiement direct et les dépenses à ce titre réellement exposées, n'a pas d'incidence sur le droit de la communauté de communes à percevoir, en application de l'article 11 du contrat, les 80 % du différentiel auprès du seul titulaire. 5. Dans ces conditions, c'est sans méconnaître les stipulations du contrat et notamment pas l'article 11 du CCAP que la CCPSV a refusé de rembourser à la société S-PASS la part du différentiel relatives aux sommes versées au sous-traitant pour les périodes d'exploitation 2013/2014 et 2014/2015. 6. Il résulte de tout ce qui précède que la société S-PASS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Sur les frais liés à l'instance : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par la société S-PASS soit mise à la charge de la CCPSV qui n'a pas la qualité de partie perdante. 8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de la société S-PASS la somme demandée par la CCPSV au même titre. D E C I D E : Article 1er : La requête de la société S-PASS est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la communauté de communes du pays du Sel et du Vermois présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société S-PASS et à la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis , présidente, - Mme Samson-Dye, présidente assesseure, - Mme Roussaux, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 juin 2023. La rapporteure, Signé : S. RoussauxLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au préfet de Meurthe-et-Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 22NC01529
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 5 août 2021 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2101762 du 6 janvier 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 28 juin 2022, M. A..., représenté par Me Dravigny, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 6 janvier 2022 ; 2°) d'annuler cet arrêté du 5 août 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et dans l'attente de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ou à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Doubs de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et dans l'attente de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur de droit en raison de l'absence d'examen global de la situation du requérant au regard des critères fixés par l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision portant refus de séjour est entachée d'un vice de procédure dans la mesure où il n'est pas justifié que le préfet a saisi les services compétents en application du 5° de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale pour connaître des suites judiciaires de l'infraction qui lui est reprochée ; - elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où nonobstant ses faibles résultats, il suit sa formation de manière sérieuse et donne entière satisfaction à son employeur ; l'absence de preuve qu'il serait dépourvu d'attache dans son pays d'origine est sans incidence sur l'application de cet article ; la circonstance qu'il serait connu de manière défavorable par les services de police ne saurait justifier qu'il constitue une menace pour l'ordre public ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut de base légale, en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour. Par un mémoire en défense, enregistré le 4 août 2022, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 septembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme Mosser a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., de nationalité ivoirienne, déclare être né le 20 décembre 2002 et être entré irrégulièrement en France le 1er mars 2018. Il a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance du département du Doubs à compter du 10 avril 2019. Le 22 novembre 2020, M. A... a sollicité un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15, désormais l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet du Doubs a refusé de l'admettre au séjour par un arrêté du 5 août 2021 et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois. M. A... relève appel du jugement du 6 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 5 août 2021. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. M. A... soutient que le tribunal administratif n'a pas statué sur le moyen tiré de l'erreur de droit en l'absence d'examen global de la situation du requérant au regard des critères fixés par l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Or, au point 10 du jugement, les premiers juges qui ne sont pas tenus de répondre à tous les arguments de la requête ont indiqué qu'en se fondant sur l'absence de caractère réel ou sérieux du suivi de sa formation et en tenant également compte de la nature de ses liens avec sa famille restée en Côte-d'Ivoire et de son insertion en France, le préfet du Doubs n'a pas commis d'erreur de droit. Par cette motivation, les premiers juges ont répondu au moyen soulevé par le requérant. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. ". 4. Lorsqu'il examine une demande d'admission au séjour en qualité de " salarié " ou de " travailleur temporaire ", sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 421-35 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Il lui revient ensuite de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée. 5. Pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. A..., le préfet s'est fondé sur la faiblesse de ses résultats scolaires justifiant de l'absence de caractère réel et sérieux du suivi de sa formation et sur l'absence de preuve de la circonstance que n'ait plus de lien avec sa famille demeurée dans son pays d'origine pour refuser de lui délivrer le titre de séjour sollicité. S'il ressort des bilans semestriels que ces résultats scolaires en première année de certificat d'aptitude professionnelle (CAP) " jardinier paysagiste " sont très faibles, ses enseignants soulignent toutefois les efforts réalisés par M. A..., son sérieux et sa motivation. Le directeur du centre de formation des apprentis atteste quant à lui l'assiduité et l'engagement de l'intéressé notamment dans le suivi d'heures de remédiation et d'accompagnement assurés au sein du centre de formation des apprentis. En outre, M. A... qui bénéficie d'un contrat d'apprentissage donne entière satisfaction à son employeur qui envisage de le recruter à l'issue de sa formation. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il entretiendrait des liens tels avec sa famille demeurée dans son pays d'origine qu'ils feraient obstacle à la délivrance d'un titre de séjour. 6. Si le préfet s'est également fondé, pour rejeter la demande présentée par M. A..., sur la circonstance qu'il a été mis en cause le 16 août 2018 pour déclaration fausse ou incomplète pour obtenir d'un organisme de protection sociale une allocation ou prestation indue à St Lo, il n'apporte cependant aucun élément quant aux suites judiciaires des faits qui lui sont reprochés. Dans ces conditions, une telle mise en cause ne constitue pas un motif d'ordre public justifiant le refus du titre de séjour. 7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 août 2021 par lequel le préfet du Doubs a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il devait être renvoyé. Sur les conclusions à fin d'injonction : 8. L'annulation ci-dessus prononcée implique nécessairement que le préfet du Doubs délivre à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ". Il y a lieu par suite, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui enjoindre de délivrer ce titre dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les frais liés à l'instance : 9. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Dravigny, avocate de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Dravigny de la somme de 1 500 euros. D E C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 6 janvier 2022 et l'arrêté du préfet du Doubs du 5 août 2021 sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet du Doubs de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à Me Dravigny une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Dravigny renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Doubs. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Martinez, président, - M. Agnel, président-assesseur, - Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, Signé : C. MosserLe président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 N° 22NC01658
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, et des pénalités correspondantes, auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2016 et demeurant à sa charge après la décision d'admission partielle du 5 novembre 2018. Par un jugement n° 1900044 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2021, M. A..., représenté par Me Lachaize demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 8 juillet 2021 ; 2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la procédure d'imposition est irrégulière dans la mesure où la proposition de rectification est irrégulièrement motivée en droit en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; - il peut déduire des frais réels sur le fondement du 3° de l'article 83 du code général des impôts dans la mesure où il a justifié de la distance parcourue qu'il a déclarée et avait utilisé pour cela un véhicule mis à sa disposition par un tiers. Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Mosser, - les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. A l'issue du contrôle sur pièces de son dossier au titre de l'année 2016, l'administration a, dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire, substitué au montant de 26 178 euros déduit par le contribuable au titre des frais réels dans la catégorie des traitements et salaires (TS) celui de 3 554 euros résultant de l'application de la déduction forfaitaire de 10%. L'imposition supplémentaire a été mise en recouvrement le 30 septembre 2018 pour un montant, s'agissant de l'impôt sur le revenu, de 5 534 euros. A la suite d'une réclamation contentieuse du 5 novembre 2018, un montant de 5 270 euros a été pris en compte au titre des frais réels ce qui a conduit à un dégrèvement d'impôt sur le revenu d'un montant de 582 euros par la déclaration d'admission partielle du 7 novembre 2018. M. A... relève appel du jugement du 8 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande tendant à la décharge des impositions et pénalités, laissées à sa charge. Sur la procédure d'imposition : 2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. ". L'article R. -1 du même livre dispose : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs. 3. La proposition de rectification du 21 mars 2018 adressée à M. A... mentionne l'impôt concerné, l'année d'imposition, le montant des rectifications opérées et leur fondement juridique. Elle énonce également que, pour remettre en cause les frais réels déduit au titre des frais professionnels, l'administration s'est fondée sur l'absence de justificatifs relatifs aux frais déclarés. Ces motifs étaient suffisamment précis pour permettre à l'intéressé de formuler des observations, ce qu'il a d'ailleurs fait. Si l'administration a indiqué par ailleurs que dans le cas d'un véhicule prêté, il ne peut être fait application du prix de revient kilométrique global, cette mention erronée est ici sans incidence dès lors que la proposition de rectification se fonde explicitement et essentiellement sur l'absence de preuve apportée par le contribuable quant aux frais professionnels déclarés et n'a pas induit en erreur le contribuable. Le contribuable ne conteste pas avoir ainsi été mis en mesure de faire valoir utilement ses observations sur les motifs du redressement litigieux. En tout état de cause, ainsi qu'il a été dit, la régularité de la motivation ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification litigieuse doit être écarté. Sur le bien-fondé de l'imposition : 4. Aux termes de l'article 83 du code général des impôts : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : (...) / 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. (...) / Les frais de déplacement de moins de quarante kilomètres entre le domicile et le lieu de travail sont admis, sur justificatifs, au titre des frais professionnels réels. Lorsque la distance est supérieure, la déduction admise porte sur les quarante premiers kilomètres, sauf circonstances particulières notamment liées à l'emploi justifiant une prise en compte complète. / Lorsque les bénéficiaires de traitements et salaires optent pour le régime des frais réels, l'évaluation des frais de déplacement, autres que les frais de péage, de garage ou de parking et d'intérêts annuels afférents à l'achat à crédit du véhicule utilisé, peut s'effectuer sur le fondement d'un barème forfaitaire fixé par arrêté du ministre chargé du budget en fonction de la puissance administrative du véhicule, retenue dans la limite maximale de sept chevaux, et de la distance annuelle parcourue. / Lorsque les bénéficiaires mentionnés au huitième alinéa ne font pas application dudit barème, les frais réels déductibles, autres que les frais de péage, de garage ou de parking et d'intérêts annuels afférents à l'achat à crédit du véhicule utilisé, ne peuvent excéder le montant qui serait admis en déduction en application du barème précité, à distance parcourue identique, pour un véhicule de la puissance administrative maximale retenue par le barème. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour pouvoir déduire de son revenu imposable ses frais professionnels, le contribuable doit fournir des justifications suffisamment précises pour permettre d'en apprécier le montant et de vérifier qu'ils ont été effectivement exposés par lui à l'occasion de l'exercice de sa profession. Ainsi, il ne peut ni se borner à présenter un calcul théorique de ses frais ni faire état de dépenses sans établir qu'elles constituent une charge de sa fonction ou de son emploi et il doit également établir qu'il justifie de circonstances particulières. 5. Si les contribuables peuvent avoir recours, pour calculer leurs frais de déplacement, au barème kilométrique forfaitaire établi par l'administration, ils ne sont fondés à le faire que s'ils déterminent avec une exactitude suffisante le nombre, l'importance et la nature professionnelle des déplacements correspondants. 6. S'il est constant que l'administration a accepté, au titre des frais professionnels, la déduction des frais de scolarité au collège ostéopathique européen de Cergy-Pontoise, elle n'a pas, ce faisant et contrairement à ce que soutient M. A..., reconnu, ni explicitement, ni implicitement, la réalité de la distance que le requérant soutient avoir parcouru au titre de cette formation professionnelle. Si M. A... verse au dossier une attestation non datée de ce collège indiquant que l'établissement était ouvert du lundi au vendredi et certains samedis, il ne justifie pas de sa présence chaque semaine au sein de cet établissement. Le requérant ne justifie pas non plus, par le tableau manuscrit qu'il produit, récapitulant la distance qu'il aurait parcourue, de la réalité de cette distance qui correspond à un voire trois allers/retours par semaine entre son domicile et le collège. Par ailleurs, il n'établit pas l'utilisation d'un véhicule prêté par son frère pour se rendre dans cet établissement par la production d'un avenant à un contrat d'assurance datant de 2014, délivré par l'assurance de son frère qui ne mentionne que ce dernier et son épouse comme conducteurs de ce véhicule et l'attestation manuscrite établie par son frère qui est dépourvue de précisions et établie postérieurement à la proposition de rectification. En outre, il ne démontre pas non plus, par la seule production d'une seconde attestation de son frère, avoir pris à sa charge les frais, couverts par le barème, relatifs notamment à l'entretien, l'assurance ou au carburant à concurrence de son utilisation du véhicule. Enfin, si l'administration fait valoir de manière erronée, ainsi qu'il a été dit plus haut, qu'en cas de véhicule prêté, il ne peut être fait application du prix de revient kilométrique global, il ressort de la proposition de rectification que c'est l'absence de justificatifs qui fonde le redressement contesté. Par suite, cette mention est sans incidence, par elle-même, sur le bien-fondé des impositions. Dans ces conditions, et dès lors que le requérant ne justifie ni de la réalité de la distance parcourue, ni de l'utilisation d'un véhicule prêté, ni enfin de la prise en charge d'une partie des frais relatifs à l'utilisation de ce véhicule, c'est à bon droit que l'administration a refusé d'admettre la totalité des frais de déplacements exposée par M. A.... 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par suite ses conclusions à fin de décharge ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de la M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président de chambre, M. Agnel, président assesseur, Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, Signé : C. Mosser Le président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 N° 21NC02467
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 14 avril 2022 par lequel le préfet de la Marne l'a obligé à quitter le territoire français en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. Par un jugement n° 2200895 du 22 avril 2022, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 20 mai 2022, M. C..., représenté par Me Boia, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 22 avril 2022 ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 14 avril 2022 pris à son encontre par le préfet de la Marne ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de réexaminer sa situation administrative dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Boia, avocat de M. C..., de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - dans la mesure où il avait déposé une demande de titre de séjour complète et aurait dû bénéficier d'un récépissé l'autorisant à travailler, il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; - en méconnaissance du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la mesure où il est le père d'un enfant français, il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; - dans la mesure où il pouvait obtenir la délivrance d'un titre de séjour de plein droit, il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; - en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la décision porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ; - en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, la décision méconnaît l'intérêt supérieur de ses enfants. Par un mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2023, le préfet de la Marne conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Denizot, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., ressortissant ivoirien né le 25 janvier 1987, a déclaré être entré en France le 9 mai 2016 en vue de solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. La consultation du fichier Eurodac ayant permis d'établir que ses empreintes avaient été enregistrées antérieurement par les autorités italiennes, celles-ci ont été saisies d'une demande de reprise en charge de l'intéressé. Les autorités italiennes ont donné leur accord de réadmission le 20 juillet 2016, mais l'intéressé n'a pas été reconduit en Italie. Par un arrêté en date du 21 octobre 2019, le préfet de la Marne a obligé M. C... à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. Le 23 février 2022, M. C... a déposé une demande de régularisation en tant que parent d'enfant français. Par un arrêté du 14 avril 2022, le préfet de la Marne a obligé M. C... à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. M. C... relève appel du jugement du 22 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur l'arrêté du 14 avril 2022 : 2. Lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à un étranger, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français. 3. Aux termes d'une part, de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". En vertu de l'article 371-2 du code civil, chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. 4. Aux termes d'autre part, de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) ". 5. Il ressort de l'acte de naissance délivré par la commune de Reims que M. C..., père d'un fils né le 11 avril 2017 d'une mère ivoirienne, a reconnu être le père d'un enfant, B... C..., née le 26 février 2022 de Mme A..., de nationalité française. Pour justifier de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de sa fille, M. C... se prévalait en première instance d'une attestation de paiement en espèces à Mme A... en mars et avril 2022. Pour la première fois en appel, M. C... se prévaut également d'une attestation rédigée par la mère de la fille de M. C..., qui justifie par ailleurs de l'achat de matériel de petite enfance pour sa fille, certifiant que l'intéressé contribue effectivement à l'entretien et éducation de sa fille depuis sa naissance. Par suite, et alors que l'existence d'une communauté de vie entre l'étranger et le parent de l'enfant français est sans incidence sur l'application des dispositions précitées, M. C... doit être regardé comme établissant contribuer, à la date de la décision attaquée, à l'entretien de sa fille, B..., alors âgée de quelques mois. Par conséquent, M. C... est fondé à soutenir que, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et compte tenu de la circonstance qu'il pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article L. 423-7 du même code, il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire français du 14 avril 2022, ainsi que, par voie de conséquence, celles refusant d'accorder un délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi, encourent toutes l'annulation. 6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Sur l'injonction : 7. Aux termes de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à compter du 1er mai 2021 : " Si la décision portant obligation de quitter le territoire français est annulée (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ". 8. L'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire implique que M. C... soit immédiatement muni d'une autorisation provisoire de séjour en application de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de la Marne de délivrer immédiatement cette autorisation et, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, compte tenu des motifs du présent arrêt, de réexaminer la situation administrative de M. C... pour la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sur les frais liés à l'instance : 9. M. C... n'a formulé aucune demande d'aide juridictionnelle. Par un courrier du 23 mai 2022, la cour administrative d'appel de Nancy a invité Me Boia, conseil de M. C..., à déposer une demande d'aide juridictionnelle au nom de son client. Me Boia n'a pas répondu à cette demande. Par suite, Me Boia, avocat de M. C..., ne peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2200895 du 22 avril 2022 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et l'arrêté en date du 14 avril 2022 par lequel le préfet de la Marne a fait obligation à M. C... de quitter le territoire français en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et fixant son pays de destination sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Marne de délivrer immédiatement à M. C... une autorisation provisoire de séjour, sur le fondement de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de réexaminer, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, la situation administrative de M. C... pour la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à Me Boia et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Marne. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - M. Denizot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, Signé : A. DenizotLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 22NC01308
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les décisions du 16 décembre 2019 par lesquelles le recteur de l'académie de Besançon, d'une part, a expressément rejeté sa demande de reclassement et, d'autre part, a rejeté son recours gracieux exercé contre la décision du 1er octobre 2019 engageant la procédure de sa mise à la retraite d'office et l'informant de la prise en charge financière de la moitié de son traitement. Par un jugement n° 2000084 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 7 juin 2021, Mme A..., représentée par Me Devevey, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 8 avril 2021 ; 2°) d'annuler ces décisions du 16 décembre 2019 ; 3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Besançon de réexaminer sa demande de reclassement. 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le refus de reclassement méconnaît l'article 2-1 du décret du 30 novembre 1984 qui prévoit la possibilité pour un fonctionnaire d'être reclassé en dehors de son administration d'affectation ; - l'administration n'a pas satisfait à son obligation de reclassement en lui proposant le même emploi dans deux lieux différents ; - la décision engageant la procédure de mise à la retraite d'office est illégale dans la mesure où elle n'a pas été déclarée inapte à toutes fonctions ; - son demi-traitement est illégal dans la mesure où il appartenait au recteur de prendre une décision concernant sa situation professionnelle dans un délai raisonnable. Par deux mémoires en défense, enregistrés le 2 septembre 2021 et 16 novembre 2022, le recteur de l'académie de Besançon conclut au rejet de la requête. Il soutient que les autres moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Mosser, - les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., institutrice puis professeure des écoles à compter du 1er septembre 2007, a été placée en congé de longue maladie du 2 janvier 2015 au 1er janvier 2016 et a été déclarée définitivement inapte à l'exercice de ses fonctions le 10 décembre 2015. Elle a été reclassée, par voie de détachement, au sein du corps des adjoints administratifs pour exercer des fonctions de secrétariat au lycée Victor Hugo de Besançon durant les années scolaires 2016-2017 et 2017-2018 puis au lycée Pierre Adrien Pâris de Besançon au titre de l'année scolaire 2018-2019. Le 18 juillet 2019, le recteur de l'académie de Besançon a mis fin à son reclassement professionnel par voie de détachement et prononcé sa réintégration dans son corps d'origine à compter du 1er septembre 2019. Par courrier du 30 septembre 2019, Mme A... a demandé au directeur académique des services de l'éducation nationale de lui faire part de nouvelles propositions de reclassement. Par un courrier du 1er octobre 2019, elle a été informée de l'engagement d'une procédure de mise à la retraite d'office ainsi que de la prise en charge financière de la moitié de son traitement pendant l'instruction de son dossier auprès du service gestionnaire de sa pension. Par des décisions du 16 décembre 2019, le recteur de l'académie de Besançon, d'une part, a rejeté le recours gracieux formé par Mme A... le 21 octobre 2019 contre ce courrier du 1er octobre 2019 et, d'autre part, a expressément rejeté sa nouvelle demande de reclassement. Mme A... relève appel du jugement du 8 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du 16 décembre 2019. 2. Il est toujours loisible à la personne intéressée, sauf à ce que des dispositions spéciales en disposent autrement, de former à l'encontre d'une décision administrative un recours gracieux devant l'auteur de cet acte et de ne former un recours contentieux que lorsque le recours gracieux a été rejeté. L'exercice du recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative. Il appartient, en conséquence, au juge administratif, s'il est saisi dans le délai de recours contentieux qui a recommencé de courir à compter de la notification du rejet du recours gracieux, de conclusions dirigées formellement contre le seul rejet du recours gracieux, d'interpréter les conclusions qui lui sont soumises comme étant aussi dirigées contre la décision administrative initiale. 3. Mme A... doit ainsi être regardée comme demandant à la cour d'annuler la décision du 1er octobre 2019 rejetant implicitement sa nouvelle demande de reclassement, engageant la procédure de mise à la retraite d'office et décidant de maintenir son demi traitement pendant l'instruction de son dossier et la décision du 16 décembre 2019 en tant qu'elle rejette expressément sa nouvelle demande de reclassement. Sur les décisions du 1er octobre 2019 et du 16 décembre 2019 en ce qu'elles portent rejet de la nouvelle demande de reclassement formée par l'agent : 4. Aux termes du premier alinéa de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. ". L'article 2-1 du décret du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 et qui prévoit la possibilité pour un fonctionnaire d'être reclassé en dehors de son administration d'affectation dispose : " La période de préparation au reclassement a pour objet de préparer et, le cas échéant, de qualifier son bénéficiaire pour l'occupation de nouveaux emplois compatibles avec son état de santé, s'il y a lieu en dehors de son administration d'affectation. Elle vise à accompagner la transition professionnelle du fonctionnaire vers le reclassement. (...) ". L'article 3 de ce décret prévoit que : " Le fonctionnaire qui a présenté une demande de reclassement dans un autre corps doit se voir proposer par l'administration plusieurs emplois pouvant être pourvus par la voie du détachement. L'impossibilité, pour l'administration, de proposer de tels emplois doit faire l'objet d'une décision motivée. (...) ". 5. Il résulte des dispositions précitées d'une part que, lorsqu'un fonctionnaire est reconnu, par suite de l'altération de son état physique, inapte à l'exercice de ses fonctions, il incombe à l'administration de rechercher si le poste occupé par ce fonctionnaire ne peut être adapté à son état physique ou, à défaut, de lui proposer une affectation dans un autre emploi de son grade compatible avec son état de santé et que si le poste ne peut être adapté ou si l'agent ne peut être affecté dans un autre emploi de son grade, il incombe à l'administration de l'inviter à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps et d'autre part, que l'obligation pesant sur l'administration de reclasser son agent ne consiste pas en une obligation de résultat mais nécessite d'entreprendre avec diligence toutes les démarches nécessaires afin de reclasser, dans la mesure du possible, cet agent. 6. Il ressort des pièces du dossier que, le 10 décembre 2015, Mme A... a été reconnue définitivement inapte à l'exercice de ses fonctions d'enseignement. Elle a été reclassée, par voie de détachement, au sein du corps des adjoints administratifs pour exercer des fonctions de secrétariat au lycée Victor Hugo de Besançon en surnombre durant l'année scolaire 2016-2017 puis sur une suppléance durant l'année scolaire 2017-2018 et enfin sur un poste définitif vacant de secrétariat de proviseur adjoint au lycée Pierre Adrien Pâris de Besançon durant l'année scolaire 2018-2019. Le 18 juillet 2019, le recteur de l'académie de Besançon a mis fin à son reclassement professionnel par voie de détachement en raison de difficultés rencontrées dans la réalisation des fonctions attachées à son emploi de secrétaire de chef d'établissement. Mme A..., réintégrée dans son corps d'origine à compter du 1er septembre 2019, a sollicité à nouveau, le 30 septembre suivant, son reclassement. D'une part, l'administration relève sans être contredite que Mme A... n'était pas en mesure d'assumer des fonctions de catégorie C relevant du corps des adjoints administratifs comme l'atteste l'échec des différentes tentatives de reclassement énoncées ci-dessus. D'autre part, l'administration fait valoir, sans davantage être contestée, qu'elle ne pouvait proposer à Mme A... un reclassement sur des postes de secrétaire administratif de catégorie B ou d'attaché d'administration de l'Etat, de catégorie A, seuls autres postes de la filière administrative, ces fonctions comportant des missions nécessitant des responsabilités supérieures à celles confiées aux adjoints administratifs. Dans ces conditions, pour satisfaire à son obligation de reclassement, le recteur de l'académie de Besançon n'était pas tenu de lui proposer d'autres emplois, notamment hors de son administration d'origine. Par suite, la requérante qui ne se trouve pas en période de préparation au reclassement, n'est en tout état de cause pas fondée à soutenir que l'administration aurait méconnu les dispositions précitées de l'article 2-1 du décret du 30 novembre 1984 et n'est pas davantage fondée à soutenir que l'administration aurait méconnu l'obligation de reclassement prévue par les dispositions mentionnées au point 5 ci-dessus. Sur la décision du 1er octobre 2019 en ce qu'elle engage la procédure de mise à la retraite pour invalidité et place la requérante à demi-traitement : 7. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 47 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi, en application du décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat en vue de faciliter le reclassement des fonctionnaires de l'Etat reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme. ". 8. S'il est constant que Mme A... n'a pas été reconnue inapte à toute fonction, ce qui a été confirmé par l'avis du comité médical du 6 janvier 2020, postérieur aux décisions en litige, il n'en demeure pas moins que, ainsi qu'il vient d'être dit, l'administration doit être regardée comme ayant satisfait à son obligation de reclassement. Par suite, en l'absence de possibilité de reclassement dans un autre emploi, la circonstance que l'administration ait décidé d'engager la procédure de mise à la retraite d'office ne méconnaît pas les dispositions précitées. 9. En deuxième lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article 3 du décret du 30 novembre 1984 : " La procédure de reclassement telle qu'elle résulte du présent article doit être conduite au cours d'une période d'une durée maximum de trois mois à compter de la demande de l'agent. ". Le second alinéa de l'article 47 du décret du 14 mars 1986 prévoit que : " Pendant toute la durée de la procédure requérant soit l'avis du comité médical, soit l'avis de la commission de réforme, soit l'avis de ces deux instances, le paiement du demi-traitement est maintenu jusqu'à la date de la décision de reprise de service ou de réintégration, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite ". 10. Si l'administration est tenue de procéder au reclassement d'un agent dans un délai de trois mois, il ressort des pièces du dossier que Mme A... s'est vu opposer expressément un refus à sa demande de reclassement dans ce délai par la décision du 16 décembre 2019. En revanche, il ne ressort ni des dispositions précitées, ni d'aucune autre disposition législative ou règlementaire, qu'un délai enserrerait la procédure tendant à ce que l'agent soit admis à la retraite en application de l'article 47 du décret du 14 mars 1986 précité. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision de la placer en demi-traitement serait illégale en raison du dépassement d'un délai " raisonnable ". 11. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation ainsi que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président, M. Agnel, président-assesseur, Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, Signé : C. MosserLe président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 N° 21NC01665
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 90 104 euros qui lui a été réclamée au terme d'un avis à tiers détenteur du 13 mai 2019. Par un jugement n° 2000390 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a fait droit à cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 31 mai 2021 et un mémoire enregistré le 10 mai 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rétablir la saisie à tiers détenteur du 16 mai 2019 et de remettre à la charge de M. B... la somme de 90 104 euros. Il soutient que : - le contribuable ayant réclamé le 14 mai 2009 contre les impositions mises en recouvrement le 29 octobre 2008 et le 31 décembre 2008, et ayant sollicité le sursis de paiement de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, le recouvrement s'en est trouvé suspendu de plein droit à cette date alors même que les garanties présentées par M. B... en réponse à la demande du comptable ont été refusées ; l'exigibilité de la créance et en conséquence la prescription de l'action en recouvrement s'en sont également trouvées suspendues ; cette suspension n'a pris fin que le 2 mai 2012 lorsque le tribunal administratif de Nancy a rejeté la requête de M. B... tendant à la décharge des impositions ; - les poursuites ont repris à compter du 2 mai 2012 par la notification d'une mise en demeure de payer le 11 janvier 2013, d'un avis à tiers détenteur du 18 avril 2013, d'un procès-verbal de carence du 14 juin 2016, d'une mise en demeure de payer du 14 décembre 2018 et d'une saisie à tiers détenteur du 13 mai 2019 ; - il en résulte que l'action en recouvrement n'était pas prescrite à la date de l'acte de saisie du 13 mai 2019. Par un mémoire enregistré le 10 avril 2022, M. A... B..., représenté par Me Cuitot, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat le versement à son avocate d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par l'administration n'est fondé. M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par décision du 17 janvier 2022. Vu : - les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique. Ont été entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Agnel ; - et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique. Me Cuitot a adressé à la cour une note en délibéré, enregistrée le 7 juin 2023, non communiquée. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B... a formé opposition le 17 juillet 2019 à un acte de saisie à tiers détenteurs émis le 13 mai 2019, notifié le 16 mai 2019 par le pôle recouvrement spécialisé de la Haute-Marne, afin d'avoir paiement d'une somme de 90 104,04 euros pour solde de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales établies au titre de l'année 2005. Le directeur départemental des finances publiques de la Haute-Marne a rejeté cette réclamation le 19 septembre 2019. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique relève appel du jugement du 15 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé cet acte de saisie et a déchargé M. B... de l'obligation de payer la somme qui lui avait été réclamée. 2. Aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. / Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription ". Aux termes de l'article L. 275 du même livre : " La notification d'un avis de mise en recouvrement interrompt la prescription courant contre l'administration et y substitue la prescription quadriennale. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa est interrompu dans les conditions indiquées à l'article L. 274 ". Le délai de prescription est également interrompu dans les conditions de droit commun fixées par le code civil. L'article 2244 de ce code prévoit que le délai de prescription est interrompu par une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d'exécution ou un acte d'exécution forcée. 3. L'article L. 277 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable au litige, dispose que : " Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. L'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l'administration, soit par le tribunal compétent./Lorsque la réclamation mentionnée au premier alinéa porte sur un montant de droits supérieur à celui fixé par décret, le débiteur doit constituer des garanties portant sur le montant des droits contestés./A défaut de constitution de garanties ou si les garanties offertes sont estimées insuffisantes, le comptable peut prendre des mesures conservatoires pour les impôts contestés ". Il résulte de ces dispositions et de celles, citées au point précédent, que le sursis de paiement, en ce qu'il entraîne la suspension de l'exigibilité des impositions en litige, fait obstacle à ce que ces dernières soient recouvrées. Il s'ensuit que ce sursis de paiement entraîne la suspension du délai de prescription de l'action en recouvrement pour tous les débiteurs de l'imposition jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation afférente soit par l'administration, soit par le tribunal compétent. La circonstance que le contribuable n'a pas constitué les garanties demandées par le comptable chargé du recouvrement ou qu'elles ont été refusée par lui n'a pas pour effet de rendre à nouveau exigibles les impositions contestées mais a seulement pour effet d'autoriser l'administration à prendre des mesures conservatoires. 4. L'administration justifie, pour la première fois en appel, que la réclamation d'assiette du 14 mai 2009 par laquelle M. B... a demandé le dégrèvement des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui lui avaient été assignés au titre de l'année 2005 comportait une demande de sursis de paiement. En vertu des règles ci-dessus rappelées, l'exigibilité des impositions litigieuses s'est trouvée suspendue et elle l'est restée jusqu'au 2 mai 2012, date à laquelle le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande de M. B... tendant à leur décharge. A compter de cette date, l'administration justifie avoir notifié à M. B..., qui en a à chaque fois accusé personnellement réception, un avis à tiers détenteurs du 18 avril 2013, un procès-verbal de carence du 14 juin 2016, une mise en demeure de payer du 14 décembre 2018 et enfin la saisie à tiers détenteur du 13 mai 2019. La circonstance que certains de ces actes auraient été expédiés à une adresse erronée demeure sans incidence sur leur caractère interruptif du délai de prescription dès lors que M. B... en a accusé réception en personne. La circonstance que l'administration ne justifie pas que la mise en demeure du 11 janvier 2013 a bien été réceptionnée par M. B... est sans incidence sur la prescription de l'action en recouvrement compte tenu des autres actes de poursuites régulièrement notifiés. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'action en recouvrement forcé de l'impôt engagée par l'administration était prescrite lorsque l'acte de saisie du 13 mai 2019 lui a été notifié le 16 mai suivant. 5. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre chargé des finances publiques est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a fait droit à la demande de M. B... et à en demander l'annulation. L'annulation du jugement ainsi prononcée a nécessairement pour effet de rétablir l'obligation de payer la somme mentionnée dans l'acte de saisie à tiers détenteur du 16 mai 2019. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de M. B... tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées. D E C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne n° 2000390 du 15 avril 2021 est annulé. Article 2 : L'obligation de payer la somme de 90 104,04 euros mentionnée dans l'acte de saisie à tiers détenteur du 16 mai 2019 est remise à la charge de M. B.... Article 3 : Les conclusions de M. B... tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., Me Cuitot et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président de chambre, M. Agnel, président assesseur, Mme Brodier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé : M. AgnelLe président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm N° 21NC01551 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de B... d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. Par un jugement n° 2103066 du 29 mars 2022, le tribunal administratif de B..., d'une part, a annulé cet arrêté, d'autre part, a enjoint au préfet de Meurthe-et-Moselle de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente, de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail et, enfin, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser au conseil du demandeur sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 12 avril 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de B... ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de B.... Il soutient que : - c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les documents présentés par le demandeur pour justifier de son état civil étaient authentiques ; - les premiers juges ont procédé à une appréciation erronée de la situation du demandeur au regard des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2022, M. A..., représenté par Me Jeannot, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des articles L. 761-1 et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que les moyens soulevés par le préfet de Meurthe-et-Moselle ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Picque, première conseillère, - et les observations de Me Jeannot, représentant M. A.... Une note en délibéré présentée pour M. A... a été enregistrée le 1er juin 2023. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant ivoirien né le 11 mai 2001, est entré en France en 2018. Alors mineur isolé étranger, il a été confié à l'aide sociale à l'enfance du département de Meurthe-et-Moselle par une ordonnance de placement provisoire du procureur de la République de Verdun du 21 mars 2018 puis par un jugement du juge des enfants de B... du 11 mai 2018. Il a été scolarisé au lycée Bertrand Schwartz à Pompey en CAP " employé de vente spécialisé option B " qu'il a obtenu en juin 2020. Il a ensuite intégré une formation en menuiserie auprès du centre de formation d'apprentis des compagnons du devoir et a conclu un contrat d'apprentissage à compter du 1er septembre 2020. Par un arrêté du 29 juillet 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle, en réponse à la demande de titre de séjour présentée par l'intéressé le 12 décembre 2018, a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. Le préfet de Meurthe-et-Moselle relève appel du jugement du 29 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de B... a annulé cet arrêté et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. A.... Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal : 2. Aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. ". 3. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée. 4. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier des termes de l'arrêté du 29 juillet 2021 que, pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. A... en application des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de Meurthe-et-Moselle s'est fondé, d'une part, sur l'absence de justification de sa date de naissance et, d'autre part, sur l'appréciation globale de sa situation compte tenu du caractère sérieux de ses études, des liens conservés en Côte d'Ivoire et de son insertion dans la société française. 5. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : / 1° Les documents justifiants de son état civil ; (...) ". Selon l'article L. 811-2 de ce code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies à l'article 47 du code civil ". L'article 47 du code civil dispose que : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". 6. Ces dispositions posent une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère. Cependant, la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents. 7. A l'appui de sa demande de titre de séjour, M. A... a présenté un extrait du registre des actes de l'état civil de la commune d'Abobo, district d'Abidjan, délivré le 21 décembre 2017 et transcrivant un jugement supplétif n° 5408 du 15 mai 2001 du tribunal de première instance d'Abidjan-Plateau ainsi qu'une carte d'immatriculation consulaire délivrée le 7 mai 2019 et un passeport électronique délivré le 5 octobre 2019. Ces documents énoncent que M. A... est né le 11 mai 2001 à Abobo. 8. Pour contester la date de naissance de M. A..., le préfet de Meurthe-et-Moselle, sans remettre en cause l'authenticité de la carte d'immatriculation consulaire et du passeport de l'intéressé, s'est fondé sur le rapport d'examen technique documentaire réalisé le 19 février 2019 par la police aux frontières. Pour conclure au caractère apocryphe de l'extrait du registre des actes de l'état civil présenté par M. A..., ce rapport se fonde sur sa qualité d'impression très limitée, l'absence de production du jugement supplétif et la circonstance que ce dernier a été établi seulement quatre jours après la naissance de l'intéressé. 9. Toutefois, ces seuls éléments ne pouvaient suffire à regarder l'extrait du registre des actes de l'état civil présenté par M. A... comme ne présentant pas des garanties d'authenticité suffisantes. De plus, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a produit, postérieurement à la décision attaquée, une copie intégrale d'acte de naissance et dont aucune des observations faites par la police aux frontières dans le rapport d'examen technique documentaire réalisé le 8 avril 2022 ne permet d'établir qu'elle serait contrefaite ou aurait été obtenue frauduleusement. Par conséquent, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que M. A... apportait la preuve de sa naissance le 11 mai 2001. 10. En second lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit que M. A... établit avoir été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance alors qu'il était âgé de seize ans et dix mois. Il a présenté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans l'année suivant son dix-huitième anniversaire. A la date de la décision attaquée, il suivait depuis plus de six mois une formation en menuiserie auprès du centre de formation d'apprentis des compagnons du devoir. Le caractère réel et sérieux de la formation en alternance ainsi suivie par M. A... depuis le 1er septembre 2020 ressort des attestations élogieuses de son maître d'apprentissage et de ses collègues et ne saurait au demeurant être remis en cause par le préfet en raison des problèmes d'assiduité rencontrés par l'intéressé dans le cadre d'une précédente formation et de la seule faiblesse de sa moyenne générale. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présence en France de M. A... représenterait une menace pour l'ordre public et l'avis de sa structure d'accueil est favorable quant à son intégration. Enfin, il est constant que les parents de M. A... sont décédés et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait conservé des liens familiaux en Côte d'Ivoire. Par conséquent, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il avait apprécié de façon manifestement erronée la situation de M. A... en refusant de l'admettre exceptionnellement au séjour en application de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 11. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de Meurthe-et-Moselle n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 29 mars 2022, le tribunal administratif de B... a annulé son arrêté du 29 juillet 2021. Sur les frais liés à l'instance : 12. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Jeannot, conseil de M. A... , renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cet avocat d'une somme de 1 200 euros. D E C I D E : Article 1er : La requête du préfet de Meurthe-et-Moselle est rejetée. Article 2 : L'Etat versera à Me Jeannot, avocate de M. A..., une somme de 1 200 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Jeannot renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle. Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - Mme Picque, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. La rapporteure, Signé : A.-S. PicqueLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 22NC00914
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... D... et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le certificat d'urbanisme n° CU 13 023 18 A 0020 du 15 juin 2018 par lequel le maire de Ceyreste a indiqué que le projet de création d'un lotissement d'un lot à construire et d'une maison d'habitation sur les parcelles cadastrées section AV 0009, 0027, 0028 et 0029 sises 2215 voie Romaine sur le territoire communal n'était pas réalisable, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux formé à l'encontre de ce certificat. Par un jugement n° 1810436 du 6 avril 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 4 juin 2021et le 13 avril 2023, M. et Mme D..., représentés par Me Michel, demandent à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 avril 2021 ; 2°) d'annuler le certificat d'urbanisme du 15 juin 2018 et la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ; 3°) d'enjoindre au maire de Ceyreste, à titre principal, de leur délivrer un certificat d'urbanisme positif, et, à titre subsidiaire, de leur délivrer un certificat d'urbanisme positif assorti de prescriptions ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Ceyreste la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - l'auteur de l'arrêté attaqué ne disposait pas d'une délégation de signature régulièrement consentie ; - le certificat attaqué comporte une erreur relative à la nature de l'opération qui porte sur la construction d'une maison individuelle sur une seule parcelle ; - l'arrêté est entaché d'erreur d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; - la voie d'accès au projet présente des caractéristiques suffisantes pour le passage des véhicules de secours ; - le maire ne pouvait légalement opposer l'absence de servitude de passage pour l'accès à la parcelle depuis la parcelle AV 0030 ; - des travaux d'élargissement de la voie et de création d'une aire de retournement sont possibles pour répondre aux préconisations du porté à connaissance. Par un mémoire en défense enregistré le 4 avril 2022, la commune de Ceyreste, représentée par Me Xoual, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. d'Izarn de Villefort, - les conclusions de M. Roux, rapporteur public, - et les observations de Me Ravenstein, représentant M. et Mme D..., et F..., substituant Me Xoual, représentant la commune de Ceyreste. Considérant ce qui suit : 1. Le 15 juin 2018, le maire de Ceyreste a délivré à et Mme M. D... un certificat d'urbanisme indiquant que l'opération qu'ils projetaient de réaliser sur les parcelles cadastrées section AV 0009, 0027, 0028 et 0029, sises 2215 voie Romaine sur le territoire communal, n'était pas réalisable. Les intéressés relèvent appel du jugement du 6 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ce certificat et de la décision implicite de rejet du recours gracieux formé à l'encontre de celui-ci. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 18 septembre 2014, le maire de Ceyreste a accordé à M. A... B..., premier adjoint, une délégation de fonctions relative à l'instruction et à la délivrance des autorisations d'urbanisme, et notamment les certificats d'urbanisme notamment. Le maire de Ceyreste a certifié le 19 septembre 2017 que cet arrêté a été affiché en mairie du 18 septembre 2014 au 24 octobre 2014, transmis en préfecture pour contrôle de légalité le 18 septembre 2014, notifié à l'intéressé le même jour et publié au recueil des actes administratifs de l'année 2014. Par suite, le moyen tiré de ce que le certificat d'urbanisme du 15 juin 2018 aurait été signé par une autorité incompétente doit être écarté. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date du certificat attaqué : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. (...). ". Aux termes de l'article L. 442-1 du même code : " Constitue un lotissement la division en propriété ou en jouissance d'une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis ". Aux termes de l'article L. 442-1-1 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Un décret en Conseil d'Etat énumère les divisions en vue de construire qui, en fonction de leur objet particulier ou par suite de leur contrôle au titre d'une autre procédure, ne sont pas constitutives d'un lotissement au sens de l'article L. 442-1. ". Aux termes de l'article L. 442-2 du même code : " Un décret en Conseil d'Etat précise, en fonction de la localisation de l'opération ou du fait que l'opération comprend ou non la création de voies, d'espaces ou d'équipements communs, les cas dans lesquels la réalisation d'un lotissement doit être précédée d'un permis d'aménager. ". Aux termes de l'article L. 442-3 du même code : " Les lotissements qui ne sont pas soumis à la délivrance d'un permis d'aménager doivent faire l'objet d'une déclaration préalable ". L'article R. 442-1 de ce code dispose : " Ne constituent pas des lotissements au sens du présent titre et ne sont soumis ni à déclaration préalable ni à permis d'aménager : / a) Les divisions en propriété ou en jouissance effectuées par un propriétaire au profit de personnes qui ont obtenu un permis de construire ou d'aménager portant sur la création d'un groupe de bâtiments ou d'un immeuble autre qu'une maison individuelle au sens de l'article L. 231-1 du code de la construction et de l'habitation ; / b) Les divisions effectuées dans le cadre d'une opération de remembrement réalisée par une association foncière urbaine autorisée ou constituée d'office régie par le chapitre II du titre II du livre III ; (...) d) Les divisions de terrains effectuées conformément à un permis de construire prévu à l'article R. 431-24 ; / e) Les détachements de terrains supportant des bâtiments qui ne sont pas destinés à être démolis ; / f) Les détachements de terrain d'une propriété en vue d'un rattachement à une propriété contiguë ; (...). ". Aux termes de l'article R. 421-19 : " Doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager : / a) Les lotissements : / -qui prévoient la création ou l'aménagement de voies, d'espaces ou d'équipements communs à plusieurs lots destinés à être bâtis et propres au lotissement. Les équipements pris en compte sont les équipements dont la réalisation est à la charge du lotisseur ; / -ou qui sont situés dans un secteur sauvegardé, dans un site classé ou en instance de classement ; (...). ". 4. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme D... ont précisé dans leur demande de certificat d'urbanisme que l'opération envisagée consistait en la construction d'une maison individuelle sur un terrain présentant une superficie totale de 5445 m² et composé des parcelles cadastrées section AV n° 09, 27, 28 et 29. Ils ont cependant joint à leur demande un extrait cadastral répartissant ces parcelles en trois lots dénommés A, B et C ainsi qu'un projet de division élaboré en 2015 procédant à la même répartition. Si la note descriptive succincte jointe à la demande expose que les requérants sont sortis de l'indivision existant à l'origine par le rachat de l'une des parcelles, elle confirme que le projet consiste à faire construire une seconde maison sur la base du document élaboré en 2015. Dans ces conditions, en considérant que l'opération envisagée par M. et Mme D... portait sur la création d'un lotissement d'un lot à construire et d'une maison d'habitation sur les parcelles précitées, le maire de Ceyreste ne s'est pas mépris sur la portée de la demande de certificat d'urbanisme dont il était saisi. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article NB3 du règlement du plan d'occupation des sols de Ceyreste, relatif à l'accès et à la voirie : " Les accès et voiries doivent présenter des caractéristiques permettant de satisfaire aux exigences de sécurité, de défense contre l'incendie, de sécurité civile et de ramassage des ordures ménagères. / Les accès et voiries publiques ou privées doivent présenter les caractéristiques techniques adaptées aux usages des opérations qu'ils desservent. / Lorsqu'un terrain et riverain de deux ou plusieurs voies publiques, l'accès sur celle de ces voies qui présenterait une gêne ou un risque pour la circulation est interdit. / Les voies en impasse doivent être aménagées avec une plateforme de retournement à leur extrémité. / Dans le secteur NBrf, les caractéristiques des voies, des accès et des portails doivent être suffisantes pour permettre l'accès des véhicules incendie jusqu'aux abords même des constructions. ". 6. Il ressort du plan de division cité au point 4, joint à la demande de certificat d'urbanisme, que le projet prévoit que l'accès à la parcelle AV n° 29 s'effectue par une servitude de passage à établir, sur une longueur de 60 mètres, sur une voie en impasse existante cadastrée AV n° 30 débouchant sur un chemin ouvert à la circulation publique, menant lui-même à la Voie romaine, une aire de retournement devant être aménagée sur la parcelle AV n° 29. Ce plan prévoit de porter la largeur de cette voie à 4 m, par l'élargissement de la servitude de passage sur la parcelle AV 55 qu'elle longe à l'ouest. Le projet prévoit en outre la constitution d'une servitude de passage à l'angle sud-ouest de la parcelle AV n° 28, permettant d'élargir la voie au niveau du croisement avec le chemin précité. 7. Il est constant que la largeur actuelle de la voie existante sur la parcelle AV n° 30 est de 3 m au maximum, insuffisante pour permettre le croisement de véhicules automobiles et l'accès des engins de lutte contre l'incendie. Si les requérants font valoir qu'elle pourrait être une propriété communale, ils ne l'établissent pas, en tout état de cause. Ils ne justifient pas davantage de l'existence d'une servitude de passage au profit de leur fonds et qui grèverait la parcelle AV 55 selon les modalités décrites au point 6 de façon à élargir cette voie, l'élargissement de la voie en cause ne constituant d'ailleurs qu'un projet. Il en est de même de l'accès envisagé le long de l'habitation existante sur la parcelle AV 28, dont la largeur serait au demeurant de 3 m et dont le tracé est obéré par la distance entre cette habitation et la limite parcellaire et par le faible rayon de deux virages rendus nécessaires par la configuration de la limite nord de cette parcelle. S'agissant de la création envisagée d'une aire de retournement au sud de la parcelle cadastrée AV 19, la largeur de 8 m qu'elle pourrait présenter est inférieure à la largeur minimale de 11 m préconisée par le porter à connaissance du préfet des Bouches-du-Rhône relatif au risque de feu de forêt, communiqué le 10 juin 2014 et complété le 4 janvier 2017, lequel, s'il ne présente pas de valeur règlementaire, a été pris à bon droit en compte par le maire comme élément d'information. Ainsi, la création de ces deux aménagements sur le terrain d'assiette ne permettrait pas d'assurer la conformité de l'accès prévu sur la parcelle AV 30 dispositions de l'article NB3 du règlement du plan d'occupation des sols. 8. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". 9. Le maire de Ceyreste a opposé dans le certificat d'urbanisme attaqué les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en se référant à la localisation du terrain d'assiette de l'opération litigieuse dans une zone soumise, selon le porter à connaissance du préfet des Bouches-du-Rhône relatif au risque de feu de forêt, communiqué le 10 juin 2014 et complété le 4 janvier 2017, à un aléa subi majoritairement exceptionnel et en aléa induit très fort, dans un quartier caractérisé par un habitat diffus, en interface avec le massif forestier. Il ressort des pièces du dossier que, si les cartes de risque annexées à ce porter à connaissance ont été élaborées à l'échelle 1/25000ème et qu'elles ne sont pas destinées à indiquer en principe un niveau d'aléa à la parcelle, elles localisent les parcelles cadastrées section AV n° 09, 27, 28 et 29 dans une zone exposée à un niveau d'aléa subi exceptionnel, les terrains construits contigus à l'est et à l'ouest étant exposés à un niveau d'aléa subi fort, seuls les terrains plus éloignés à l'est, à l'ouest et au sud, directement desservis par les voies publiques, ayant été identifiés comme exposés à un aléa subi moyen. Ces parcelles se situent dans la continuité au nord du massif forestier classé en aléa subi exceptionnel. En soutenant que ce classement est incohérent par rapport aux terrains voisins et à d'autres terrains isolés, qui se trouvent dans des situations différentes du leur, les requérants ne remettent pas utilement en cause la réalité et l'importance du risque auquel leur terrain est exposé. De même, l'argumentation qu'ils développent quant au classement en zone F1 dans laquelle le porter à connaissance préconise de limiter fortement les possibilités de construire est sans incidence sur la légalité du certificat d'urbanisme attaqué, qui ne se réfère pas à ce classement. Par suite, au vu de l'intensité du risque de feu de forêt auquel le terrain litigieux, qui est effectivement localisé dans un secteur d'urbanisation diffuse autour de la Voie romaine et des voies adjacentes et compte tenu des modalités d'accès au terrain d'assiette insuffisantes relevées au point 7, le maire de Ceyreste a pu légalement se fonder sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme pour déclarer non réalisable l'opération projetée par M. et Mme D.... 10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Ceyreste qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. et Mme D... demandent au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme D... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Ceyreste et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée. Article 2 : M. et Mme D... pris ensemble verseront à la commune de Ceyreste une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D..., à Mme C... D... et à la commune de Ceyreste. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé P. D'IZARN DE VILLEFORTLe président, Signé P. PORTAILLa greffière, Signé N. JUAREZLa République mande et ordonne au préfet des Bouches-du-Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N° 21MA02141 2 nb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 13 septembre 2021 par lesquels la préfète du Bas-Rhin lui a interdit de revenir sur le territoire français pendant une durée d'un an et l'a assignée à résidence. Par un jugement n° 2106364 du 1er octobre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 30 juin 2022, Mme A..., représentée par Me Berry, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 1er octobre 2021 ; 2°) d'annuler les arrêtés du 13 septembre 2021 ; 3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - l'arrêté portant interdiction de retour sur le territoire français pendant un an méconnait le droit d'être entendu ; - il est insuffisamment motivé et est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ; - il méconnaît l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où elle justifie des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine, est soignée en France où elle dispose de lien familiaux ; - il est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - l'arrêté portant assignation à résidence est privé de base légale du fait de l'illégalité de l'arrêté porté interdiction de retour sur le territoire français. La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin qui n'a pas produit de mémoire en défense. Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juin 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme Mosser a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., née le 21 mars 1986 à Tetaj Tropoje (Albanie), de nationalité albanaise, déclare être entrée en France le 19 juin 2017 afin d'y solliciter l'asile. Sa demande a toutefois été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile. Par courrier du 28 juin 2018, la requérante a sollicité un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur. Elle a été munie d'une autorisation provisoire de séjour valable du 13 septembre au 12 décembre 2019. Par un arrêté du 2 septembre 2020, la préfète du Bas-Rhin a toutefois refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. La légalité de cet arrêté a été confirmée en dernier lieu par une ordonnance du 2 mars 2022 de la cour administrative de Nancy. Par deux arrêtés du 13 septembre 2021, la préfète du Bas-Rhin lui a interdit de revenir sur le territoire français dans un délai d'un an et l'a assignée à résidence. Mme A... relève appel du jugement du 1er octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés du 13 septembre 2021. Sur la légalité de l'arrêté du 13 septembre 2021 portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an : 2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative édicte une interdiction de retour. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ". 3. En premier lieu, l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Ainsi, la préfète du Bas-Rhin, qui n'avait pas à viser toutes les circonstances de fait de la situation de Mme A..., précise que cette dernière s'est maintenue sur le territoire français au-delà du délai de départ volontaire qui lui a été octroyée et ne justifie pas de circonstances humanitaires justifiant qu'une interdiction de retour sur le territoire français ne soit pas prononcée à son encontre. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté. 4. En deuxième lieu, il ne résulte ni de la motivation de l'arrêté en litige, ni d'aucune autre pièce du dossier, que la préfète du Bas-Rhin n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme A... avant de prendre la décision contestée. Dès lors, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation particulière de l'intéressée doit être écarté. 5. En troisième lieu, si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu. Ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a notamment jugé dans ses arrêts C-166/13 et C-249/13 des 5 novembre et 11 décembre 2014, le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour dans son pays ou d'une interdiction de retour sur le territoire français implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour dans son pays ou une interdiction de retour sur le territoire français. 6. Si ce principe n'implique pas que l'administration mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français lorsque celle-ci est prise concomitamment à une mesure d'éloignement, tel n'est pas le cas en l'espèce, les décisions portant interdiction de retour ayant été édictées près d'un an après la décision portant obligation de quitter le territoire français prises à l'encontre de la requérante. Par suite, la préfète aurait dû mettre à même l'intéressée de présenter ses observations de façon spécifique sur l'interdiction de retour qu'elle envisageait de prendre. Il n'est pas contesté qu'une telle procédure n'a pas été mise en œuvre en l'espèce. Toutefois, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision. En l'espèce, si Mme A... soutient qu'elle disposait d'informations nouvelles relatives à la présence régulière de sa sœur en France, elle ne démontre pas, par cette seule allégation, que la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté en litige méconnait le principe du droit d'être entendu consacré par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. 7. En quatrième lieu, si Mme A... soutient que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ainsi qu'il a été dit au point 1, sa demande de titre sur ce fondement a été rejetée par un arrêté du 2 septembre 2020 dont la légalité a été confirmée en dernier lieu par une ordonnance du 2 mars 2022 de la cour administrative de Nancy. Si l'intéressée soutient qu'elle bénéficie d'un traitement en France pour ses troubles psychiatriques, elle n'établit ni que son état de santé serait aggravé par un retour dans son pays d'origine, ni qu'elle ne pourrait y bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée. En outre, elle ne démontre pas, par les pièces versées au dossier, les violences qu'elle aurait subies dans son pays d'origine, alors qu'au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée tant par l'OFPRA que par la CNDA. Par ailleurs, si elle se prévaut de sa maîtrise de la langue française, d'une proposition de contrat à durée déterminée du 26 octobre 2020, de la scolarité de sa fille et de la présence de sa sœur qui bénéficie de la protection subsidiaire en France, ces circonstances ne constituent pas des circonstances humanitaires de nature à justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. Dans ces conditions, l'arrêté en litige ne méconnaît pas les dispositions précitées de l'article L. 612-7. 8. Pour les mêmes raisons que celles qui viennent d'être exposées, la préfète du Bas-Rhin n'a pas entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. Sur la légalité de l'arrêté du 13 septembre 2021 portant assignation à résidence : 9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de l'interdiction de retour sur le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'assignation à résidence. 10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... épouse A... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer. Une copie du présent arrêt sera adressée à la préfète du Bas-Rhin. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président, M. Agnel, président assesseur, Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, Signé : C. MosserLe président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 N° 22NC01679
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 27 août 2018 par laquelle le chef d'établissement support du groupe d'établissement (GRETA) Lorraine Sud a prononcé son licenciement et de condamner le GRETA à l'indemniser du préjudice qu'elle a subi du fait de la perte de son salaire entre la date de son licenciement et sa réintégration. Par un jugement n° 1900068 du 2 mars 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 1er avril 2021, Mme A..., représentée par Me Gasse, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 2 mars 2021 ; 2°) d'annuler cette décision du 27 août 2018 ; 3°) d'enjoindre au GRETA Lorraine Sud de la réintégrer sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de condamner le GRETA à l'indemniser du préjudice qu'elle a subi du fait de la perte de son salaire entre la date de son licenciement et sa réintégration ; 5°) de mettre à la charge du GRETA Lorraine Sud les entiers dépens et la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision de licenciement est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne justifie pas les raisons pour lesquelles le licenciement s'est porté sur son poste ; - le GRETA Lorraine Sud a manqué à son obligation de reclassement. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2022, le GRETA Lorraine Sud, représenté par Me Soler-Couteaux, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les conclusions à fin d'annulation sont irrecevables, la demande de première instance étant tardive ; - les conclusions indemnitaires sont irrecevables en l'absence de liaison du contentieux ; - à titre subsidiaire, les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'éducation ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Mosser, - les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique, - et les observations de Me Bedet, substituant Me Gasse, représentant Mme A..., et de Me Koromyslov, substituant Me Soler-Couteaux, représentant le GRETA Lorraine Sud. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... a été recrutée en qualité d'agent contractuel administratif de catégorie A par le groupement d'établissement (GRETA) Lorraine Sud. Par un courrier du 11 mai 2018, le chef d'établissement support du GRETA Lorraine Sud a convoqué l'intéressée à un entretien préalable à son licenciement au motif de la " transformation / suppression " du besoin lié à son emploi. Par un courrier du 27 août 2018, notifié le 1er septembre 2018, le GRETA Lorraine Sud a prononcé le licenciement de la requérante, à effet du 14 novembre 2018. Par un courrier du 26 septembre 2018, l'intéressée a sollicité son reclassement. L'administration a placé Mme A... en congé sans traitement avec suspension de son contrat de travail du 14 novembre 2018 au 13 février 2019. Le 14 février 2019, l'administration a communiqué à l'intéressée son certificat de travail correspondant à sa période d'emploi sous contrats au GRETA. Mme A... relève appel du jugement du 2 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision de licenciement du 27 août 2018 et à la condamnation du GRETA à l'indemniser du préjudice subi. 2. En premier lieu, aux termes de l'article 47-1 du décret du 17 janvier 1986 applicable aux agents contractuels recrutés pour exercer leur fonction dans les groupements d'établissement en application de l'article L. 937-1 du code de l'éducation : " Lorsqu'à l'issue de la consultation de la commission consultative paritaire prévue à l'article 1er-2 et de l'entretien préalable prévu à l'article 47, l'administration décide de licencier un agent, elle lui notifie sa décision par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement, ainsi que la date à laquelle celui-ci doit intervenir compte tenu des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis ". 3. La décision du 27 août 2018 par laquelle le chef d'établissement support du GRETA Lorraine Sud a licencié Mme A... précise qu'en raison du déséquilibre financier que connaît le GRETA depuis plusieurs années, une restructuration des services a été engagée qui a conduit à une réduction du nombre de personnels de catégorie A ayant des fonctions administratives. Ce faisant, le chef d'établissement a cité les éléments pertinents qui fondent sa décision. La circonstance que la décision n'indique ni l'origine, ni l'ampleur des déficits financiers, ni les raisons pour lesquelles le poste de Mme A... a été supprimé et non celui d'un autre agent de catégorie A n'est pas de nature à faire regarder la motivation comme étant insuffisante. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté comme manquant en fait. 4. En second lieu, aux termes de l'article 45-3 du décret du 17 janvier 1986 dans sa rédaction applicable au litige : " Sans préjudice des dispositions relatives au licenciement pour faute disciplinaire, pour insuffisance professionnelle ou pour inaptitude physique, le licenciement d'un agent contractuel recruté pour répondre à un besoin permanent doit être justifié par l'un des motifs suivants : / 1° La suppression du besoin ou de l'emploi qui a justifié le recrutement de l'agent ; (...) ". Aux termes de l'article 45-5 du même décret : " I.- Le licenciement pour un des motifs prévus aux 1° à 4° de l'article 45-3 ne peut être prononcé que lorsque le reclassement de l'agent, dans un autre emploi que le code général de la fonction publique autorise à pourvoir par un agent contractuel et dans le respect des dispositions légales régissant le recrutement des agents contractuels, n'est pas possible. (...) / Il s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie hiérarchique ou à défaut, et sous réserve de l'accord exprès de l'agent, d'un emploi relevant d'une catégorie inférieure. / L'offre de reclassement concerne les emplois des services relevant de l'autorité ayant recruté l'agent. L'offre de reclassement proposée à l'agent est écrite et précise. L'emploi proposé est compatible avec ses compétences professionnelles ". 5. Il ressort de la décision du 27 août 2018 prononçant le licenciement de Mme A... que son emploi a été supprimé en raison des difficultés financières du GRETA, ce que cette dernière ne conteste pas. Cette décision qui informe par ailleurs l'intéressée de la possibilité de solliciter son reclassement en application des dispositions précitées ne constitue pas, par elle-même, un refus de reclassement. Par suite, Mme A... ne peut utilement soutenir à l'encontre de cette décision que le GRETA aurait méconnu son obligation de reclassement. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier et en particulier des procès-verbaux de l'assemblée générale du 9 novembre 2017 et des commissions du personnel des 13 décembre 2017 et 12 avril 2018 que le GRETA Lorraine Sud a subi une baisse de son chiffre d'affaires entre 2013 et 2017 alors que parallèlement le nombre de postes a augmenté de 4,9 ETP. En 2017, le GRETA accusait un déficit de près de 800 000 euros. Pour le résorber, le chef d'établissement support du GRETA s'est engagé à compter du 1er janvier 2018 et pour une durée de deux ans dans une restructuration et une réduction des effectifs des personnels enseignants et des agents administratifs et techniques, en particulier des agents de catégorie A. Ainsi, au 31 décembre 2018, le GRETA dénombrait, après six départs d'agent administratifs dont quatre non renouvellement de contrat à durée déterminée, une démission et un départ à la retraite, quatorze agents dont trois agents de catégorie A occupant 12,7 équivalent temps plein (ETP). Au 1er septembre 2019, après le licenciement de Mme A... et le départ d'un autre agent de catégorie A en tant que formatrice à temps complet, il demeurait douze agents dont un seul de catégorie A pour 10,7 ETP. Aucun recrutement n'est venu compenser ces départs, les services ayant été réorganisés pour absorber l'activité. Dans ces conditions, le GRETA justifie qu'il ne disposait d'aucun emploi vacant susceptible d'être proposé à Mme A... pendant la période de reclassement. Ainsi, en l'absence de tout poste disponible, la circonstance qu'aucun poste dans une catégorie hiérarchique inférieure n'ait été proposé à Mme A... est sans incidence. Dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que le GRETA Lorraine Sud aurait méconnu son obligation de reclassement au regard des dispositions précitées. 6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans même qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par l'intimé à l'encontre de la demande en annulation présentée devant le tribunal, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté cette demande. 7. Ainsi qu'il vient d'être dit, la décision de licenciement de Mme A... n'est pas entachée d'illégalité et n'est donc pas constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration. Dans ces conditions, et en tout état de cause, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande indemnitaire. 8. Par suite, outre ses conclusions indemnitaires, les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A..., ainsi que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par le GRETA Loraine Sud au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La présente instance n'ayant par ailleurs donné lieu à aucun dépens, les conclusions présentées à ce titre sont sans objet et ne peuvent être que rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par le GRETA Lorraine Sud au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au GRETA Lorraine Sud. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président, M. Agnel, président-assesseur, Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, Signé : C. MosserLe président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 N° 21NC00979
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) KC Distribution a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2011 et 2012 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013. Par un jugement n° 1802631 du 16 février 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui leur ont été assignés au titre des années 2011 et 2012 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Par un jugement n° 1904136 du 16 février 2021, le tribunal administratif de Strasbourg, après avoir constaté un non-lieu partiel à statuer dans la mesure d'un dégrèvement partiel prononcé en cours d'instance en matière de contributions sociales, a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Procédure devant la cour : I) Par une requête enregistrée le 16 avril 2021, sous le numéro 21NC01099, la SARL KC Distribution, représentée par Me Lachaize, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1802631 ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions contestées ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que le service, suivi par le jugement attaqué, a estimé que sa comptabilité était affectée de graves irrégularités alors que, conformément à l'article 420-4 du plan comptable général les recettes ont été comptabilisées mensuellement à partir des tickets Z mensuels de caisse et que les tickets Z journaliers ont été remis à la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, qui ne pouvait les écarter, que les menues anomalies de comptabilisation de factures d'achats ne revêtent pas la nature de graves irrégularités et que les discordances alléguées entre les achats revendus et les ventes comptabilisées ne sont pas établies ; en l'absence de graves irrégularités et alors que le service n'a pas mis en lumière les présomptions visées par la doctrine administrative BOI-CF-IOR-10-20 au 12 septembre 2012, la charge de la preuve du mal-fondé des impositions ne saurait lui incomber ; - la reconstitution effectuée par le service omet de tenir compte des réductions de 15 % accordées sur les bouteilles et 50 % sur les boissons accordées aux titulaires de la carte VIP qui étaient au nombre de 1 663 au 21 mars 2013, omet de tenir compte des réductions ponctuelles accordées aux titulaires de cette carte VIP, omet enfin de tenir compte de la formule happy hour du Rock Café de 19h00 à 22h00 en 2013 ; - les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées en ce que, contrairement à ce que soutient l'administration, elle a bien présenté les tickets Z journaliers et que sa comptabilité est régulière et probante et que l'existence d'un manquement délibéré ne saurait résulter de la seule constatation de l'importance de redressements. Par un mémoire enregistré le 9 août 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. II) Par une requête enregistrée le 16 avril 2021, sous le numéro 21NC01113, M. et Mme A..., représentés par Me Lachaize, demandent à la cour : 1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 1904136 du 16 février 2021 ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions laissées à leur charge ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la procédure de rectification est irrégulière en ce que le service n'a pas répondu à leurs observations concernant le caractère régulier et probant de la comptabilité de la SARL KC Distribution, dont découle les rectifications litigieuses, en violation de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; - c'est à tort que le service, suivi par le jugement attaqué, a estimé que la comptabilité de la société KC Distribution était affectée de graves irrégularités alors que, conformément à l'article 420-4 du plan comptable général les recettes ont été comptabilisées mensuellement à partir des tickets Z mensuels de caisse et que les tickets Z journaliers ont été remis à la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, qui ne pouvait les écarter, que les menues anomalies de comptabilisation de factures d'achats ne revêtent pas la nature de graves irrégularités et que les discordances alléguées entre les achats revendus et les ventes comptabilisées ne sont pas établies ; en l'absence de graves irrégularités et alors que le service n'a pas mis en lumière les présomptions visées par la doctrine administrative BOI-CF-IOR-10-20 au 12 septembre 2012, la charge de la preuve du mal-fondé des impositions ne saurait lui incomber ; - la reconstitution des bénéfices de la SARL KC Distribution effectuée par le service : omet de tenir compte des réductions de 15 % accordées sur les bouteilles et 50 % sur les boissons accordées aux titulaires de la carte VIP qui étaient au nombre de 1 663 au 21 mars 2013, omet de tenir compte des réductions ponctuelles accordées aux titulaires de cette carte VIP, et enfin omet de tenir compte de la formule happy hour du Rock Café de 19h00 à 22h00 en 2013 ; - l'administration n'établissant pas que M. A... était le maître de l'affaire, elle ne rapporte pas la preuve qu'il aurait appréhendé de quelconques revenus prétendument distribués par la société KC Distribution ; - le service ne rapporte pas la preuve des manquements délibérés en imputant à M. A... le comportement de mauvaise foi prêté à la société KC Distribution et en se prévalant de l'importance des redressements. Par un mémoire enregistré le 9 août 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Vu : - les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique. Ont été entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Agnel ; - et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. La SARL KC Distribution exploite une discothèque à l'enseigne " Le Vip " puis, à compter du 1er février 2013, un bar-discothèque à l'enseigne " Rock Café ". Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013. Par une proposition de rectification du 20 octobre 2014, notifiée selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale a porté à la connaissance de la société qu'elle envisageait des rehaussements de ses bénéfices et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée. Ces rectifications ont été maintenues par lettre du 21 janvier 2015 et à la suite d'un entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, en réponse aux observations de la société du 19 décembre 2014. Les suppléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée correspondant à ces rectifications ont été mis en recouvrement au cours de l'année 2017 conformément aux bases proposées par un avis de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 27 décembre 2016. La réclamation préalable de la société du 20 mars 2017 a été rejetée le 6 mars 2018. L'administration a regardé M. A..., gérant et associé unique de la SARL KC Distribution, comme le bénéficiaire de revenus réputés distribués, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, à raison des rehaussements des bénéfices sociaux. L'intéressé, à la suite de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, a été rendu destinataire, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, de propositions de rectification du 17 décembre 2014 et du 30 janvier 2015 l'informant des rectifications envisagées en conséquence au titre des années 2011 et 2012. Ces rectifications ont été maintenues par lettres des 30 mars et 13 avril 2015 en réponse aux observations de M. et Mme A.... Les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été mis en recouvrement au cours de l'année 2017. La réclamation préalable de M. et Mme A... du 29 juin 2017 a été rejetée le 8 avril 2019. Par les deux requêtes ci-dessus visées, qu'il y a lieu de joindre afin de statuer par un seul arrêt, la SARL KC Distribution et M. et Mme A... relèvent respectivement appel des jugements du 16 février 2021 en tant que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions supplémentaires. Sur les bénéfices imposables et le chiffre d'affaires taxable de la SARL KC Distribution et les pénalités qui lui ont été infligées : En ce qui concerne la charge de la preuve : 2. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions (...) visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission (...). Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...). La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge ". 3. Aux termes de l'article L. 123-12 du code de commerce : " Toute personne physique ou morale ayant la qualité de commerçant doit procéder à l'enregistrement comptable des mouvements affectant le patrimoine de son entreprise. Ces mouvements sont enregistrés chronologiquement. Elle doit contrôler par inventaire, au moins une fois tous les douze mois, l'existence et la valeur des éléments actifs et passifs du patrimoine de l'entreprise. Elle doit établir des comptes annuels à la clôture de l'exercice au vu des enregistrements comptables et de l'inventaire. Ces comptes annuels comprennent le bilan, le compte de résultat et une annexe, qui forment un tout indissociable. ". Aux termes de l'article L. 123-14 de ce code : " Les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise ". Aux termes de l'article R. 123-174 du même code : " Les mouvements affectant le patrimoine de l'entreprise sont enregistrés opération par opération et jour par jour pour le livre-journal. Tout enregistrement comptable précise l'origine, le contenu et l'imputation de chaque donnée ainsi que les références de la pièce justificative qui l'appuie. Les opérations de même nature, réalisées en un même lieu et au cours d'une même journée, peuvent être récapitulées sur une pièce justificative unique ". Aux termes de l'article 420-4 du plan comptable général, alors applicable : " Les mouvements affectant le patrimoine de l'entité sont enregistrés sur le livre-journal : soit jour par jour, opération par opération, soit par récapitulation au moins mensuelle des totaux des opérations, à la condition de conserver tous les documents permettant de vérifier ces opérations jour par jour, opération par opération. Les pièces justificatives sont classées dans un ordre défini ". Aux termes de l'article 54 du code général des impôts : " Les contribuables (...) sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration ". 4. Il résulte de l'instruction, en particulier de la proposition de rectification, que la société requérante, bien qu'ayant remis le fichier des écritures comptables, n'a pas été en mesure de produire les tickets journaliers de caisse au titre des trois années vérifiées et s'est bornée à présenter des bandes de caisses mensuelles pour l'année 2011, les mois de janvier à avril 2012, de juin à décembre 2012, de janvier et de février 2013, les bandes de caisse de mai 2012 et de mars à décembre 2013 ne comportant que la répartition des chiffres d'affaires selon les taux de taxe sur la valeur ajoutée sans aucun détail des produits vendus. Si la société requérante soutient avoir produit les bandes journalières de caisse devant la commission, elle s'abstient de les produire devant cette cour. En tout état de cause, de telles pièces présentées devant la commission près de deux ans après la fin du contrôle ne sauraient être regardées comme probantes. Par suite, l'administration établit que les recettes de l'entreprise ne sont pas justifiées, en méconnaissance des dispositions ci-dessus reproduites du plan comptable général lesquelles imposent, contrairement à ce que soutient la société requérante, la conservation des documents permettant de justifier des opérations jour par jour. Il résulte également de l'instruction, en particulier de la proposition de rectification, que la société requérante a omis de comptabiliser les achats du fournisseur Métro Allemagne pour la somme significative de 21 311 euros tandis que la comptabilité matière de nombreuses références de boissons est affectée d'anomalies répétées. Abstraction faite d'erreurs minimes de comptabilisation de certaines factures d'achats, ces anomalies significatives concernant les achats, les stocks et les achats revendus, sont constitutives de graves irrégularités. Il résulte de ce qui précède que l'administration a établi que la comptabilité de la SARL KC Distribution est entachée de graves irrégularités en dépit de l'apparente régularité du fichier des écritures comptables. Si la société requérante soutient avoir présenté les tickets journaliers de caisse enregistreuse le jour même de la séance de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, qu'elle avait saisie, c'est sans entacher d'irrégularité son avis que cet organisme a estimé ne pas pouvoir en tenir compte dès lors que l'administration avait vainement demandé ces éléments à plusieurs reprises et qu'il a fondé son avis sur les données de la comptabilité. Les impositions litigieuses ayant été mises en recouvrement sur les bases proposées par la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires dans son avis du 27 décembre 2016, la charge de la preuve de leur caractère mal-fondé incombe à la société requérante. En ce qui concerne la reconstitution des bénéfices : 5. Pour reconstituer les recettes des trois années vérifiées, la vérificatrice, de manière détaillée et exhaustive, a distingué les recettes des boissons alcoolisées de celles des boissons non alcoolisées. A l'intérieur de chacune de ces deux catégories, elle a calculé les recettes par type de boisson, en tenant compte des données d'exploitation disponibles, des dosages, notamment ceux précisés par la SARL KC Distribution, et des prix figurant sur les cartes proposées aux clients. Elle a également tenu compte d'un taux de pertes, d'offerts et de prélèvements sur les boissons de 10 % qui a été porté à 15 % à la suite de l'avis de la commission du 27 décembre 2016. La SARL KC Distribution, afin de rapporter la preuve du caractère sommaire ou viciée dans son principe de cette méthode, se borne à reprendre en appel, sans précision nouvelle, le moyen tiré de ce qu'elle appliquait des réductions s'élevant à 50 % sur les boissons et à 15 % sur les bouteilles aux titulaires de la carte " VIP ", qui étaient au nombre de 1 663 à la date du 21 mars 2013, qu'elle accordait des promotions certains jours à ces mêmes personnes, qu'à compter de 2013 elle pratiquait la formule " happy hour " de 19 heures à 22 heures. Il y a lieu d'écarter ce moyen par les mêmes motifs que ceux retenus à juste titre par les premiers juges. En ce qui concerne les pénalités : 6. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuse ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ". Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, afin de justifier l'application de la pénalité pour manœuvres frauduleuses, de rapporter la preuve de l'existence de procédés ayant pour but d'égarer l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle destinés à masquer des omissions déclaratives délibérées. 7. Afin de justifier l'application de la pénalité pour manquement délibéré, l'administration s'est fondée sur la circonstance que la société requérante, ayant omis de tenir une comptabilité régulière ainsi qu'il a été établi ci-dessus, avait dissimulé de manière systématique au cours des trois années vérifiées d'importantes recettes imposables. Ce faisant, l'administration apporte la preuve que c'est sciemment, dans le but d'éluder l'impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée, que la société KC Distribution s'est abstenue de déclarer ces chiffres d'affaires et produits imposables. Sur les revenus de capitaux mobiliers de M. et Mme A... et les pénalités qui leur ont été assignées : 8. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dans sa version applicable au litige : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ". L'exigence de motivation qui s'impose à l'administration dans ses relations avec le contribuable vérifié en application du dernier alinéa de cet article s'apprécie au regard de l'argumentation de celui-ci. En revanche, la régularité de la réponse aux observations du contribuable ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs. 9. Il ressort des observations adressées par M. A... à la suite des propositions de rectification du 17 décembre 2014 et 30 janvier 2015, qu'il entendait contester le montant des bénéfices regardés distribués par la société KC Distribution à la suite de la vérification de sa comptabilité, notamment, par les mêmes moyens que cette dernière avait invoqués dans le cadre de sa propre procédure et dont il rappelait de façon circonstanciée la teneur. En réponse à cette contestation, le service s'est borné à indiquer dans ses lettres des 30 mars et 13 avril 2015 que " les arguments présentés, relatifs à la contestation de la reconstitution du chiffre d'affaires de la société KC Distribution, ne peuvent être pris en compte dans le cadre de la présente procédure, qui est indépendante ". Alors que la personne désignée comme la bénéficiaire des revenus réputés distribués par une société soumise à l'impôt sur les sociétés à raison des rehaussements de ses résultats imposables est en droit de contester le montant de ces bénéfices, le service, en refusant de répondre aux observations de M. A... relatives aux montants des bénéfices de la société KC Distribution, résultant de la reconstitution de ses recettes, a privé l'intéressé de la garantie prévue par les dispositions ci-dessus reproduites de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. Contrairement à ce que soutient le ministre, la circonstance qu'en sa qualité de dirigeant de la société KC Distribution, l'intéressé était informé des résultats de la vérification de comptabilité ne dispensait pas le service, en vertu du principe même d'indépendance des procédures, de respecter les garanties propres à la procédure de rectification des revenus imposables de M. et Mme A.... Par suite, M. A... est fondé à soutenir, pour la première fois en appel, que les suppléments d'impôt sur les revenus et de contributions sociales qui lui ont été assignés au titre des années 2011 et 2012, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, à raison des revenus réputés distribués par la société KC Distribution, ont été établis à la suite d'une procédure irrégulière et à en demander la décharge ainsi que des pénalités correspondantes. 10. Il résulte de tout ce qui précède que la société KC Distribution n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué n°1802631, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué n°1904136, la même juridiction a rejeté le surplus de leur demande en décharge. Sur les conclusions de M. et Mme A... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. et Mme A... de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par eux dans la présente instance. D E C I D E : Article 1er : La requête de la SARL KC Distribution est rejetée. Article 2 : L'article 2 du jugement n°1904136 du 16 février 2021 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé. Article 3 : M. et Mme A... sont déchargés des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales laissées à leur charge au titre des années 2011 et 2012 ainsi que des pénalités correspondantes. Article 4 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à SARL KC Distribution, à M. et Mme A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président de chambre, M. Agnel, président assesseur, Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé : M. AgnelLe président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm N°s 21NC01099 et 21NC01113 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français et lui a fait obligation de remettre son passeport ou une pièce d'identité et de présenter une fois par semaine. Par un jugement n° 2202016 du 2 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement les 15 juillet, 25 novembre et 13 décembre 2022, Mme B..., représentée par Me Qnia, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler cet arrêté du 29 janvier 2020 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salariée ", subsidiairement de réexaminer sa situation dans le délai de trente jours et dans l'attente de lui remettre un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : S'agissant de la décision de refus de titre de séjour : - elle est entachée d'erreur de droit, l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 faisant obstacle à ce que le préfet lui oppose l'article R. 311-2, 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle est entachée d'erreur de droit dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain fait obstacle à ce que le préfet lui oppose la procédure d'autorisation de travail pour une première demande de titre de séjour ; - elle est entachée d'une erreur de fait quant à l'emploi qu'elle occupe ; - elle est entachée d'une erreur de fait quant à la date du dépôt de sa demande ; - elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de l'adéquation du poste avec ses études ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; S'agissant de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français : - elle est illégale compte tenu de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour. Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 septembre et 23 décembre 2022, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Par une lettre du 22 mai 2023, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de ce que les articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en tant qu'ils sont relatifs aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée, ne sont pas applicables aux ressortissants marocains et de ce qu'il y a lieu de substituer à cette base légale, d'une part les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain et, d'autre part, celle tirée du pouvoir discrétionnaire de régularisation dont dispose l'autorité préfectorale. Par un mémoire, enregistré le 26 mai 2023, des observations en réponse à ce moyen d'ordre public ont été présentées pour Mme B.... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code du travail ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Brodier, - les observations de Me Qnia, avocat de Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ressortissante marocaine née en 1988, est entrée régulièrement en France le 2 mars 2017 sous couvert d'un visa de long séjour en qualité d'étudiante valable du 20 février au 20 octobre 2017. Elle a bénéficié d'un titre de séjour " étudiant " valable jusqu'au 20 novembre 2018. Par un arrêté du 13 mai 2019, le préfet des Yvelines a refusé de lui accorder le renouvellement de son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Sur recours gracieux présenté par l'intéressé, il a toutefois, par une décision du 3 juin 2019, procédé à l'abrogation de cet arrêté du 13 mai 2019. Par une demande du 11 septembre 2019, elle a sollicité un changement de statut en vue d'obtenir un titre de séjour portant la mention " salarié ". Par un arrêté du 29 janvier 2020, le préfet a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Mme B... relève appel du jugement du 2 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Sur la légalité du refus de titre de séjour : En ce qui concerne le refus d'un titre de séjour " salarié " de plein droit : S'agissant de la base légale de la décision en litige : 2. Aux termes de l'article 3 de l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable portant la mention " salarié " éventuellement assorties de restrictions géographiques ou professionnelles. / Après trois ans de séjour en continu en France, les ressortissants marocains visés à l'alinéa précédent pourront obtenir un titre de séjour de dix ans (...) ". L'article 9 du même accord stipule que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord ". Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de la décision en litige : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". / (...) / L'étranger se voit délivrer l'une des cartes prévues aux 1° ou 2° du présent article sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement de l'article L. 5221-2 du code du travail lorsque sa demande concerne un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives. / (...) ". 3. Il ressort des pièces du dossier que, alors même que la situation des ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France est régie par les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain, le préfet du Haut-Rhin doit être regardé, compte tenu des visas et des motifs de la décision en litige, comme ayant fondé sa décision sur les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ayant ainsi méconnu le champ d'application de la loi. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. En l'espèce, le refus de titre de séjour opposé à Mme B... trouve son fondement légal dans les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain, qui peuvent être substituées aux dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que cette substitution de base légale, sur laquelle la requérante a pu présenter des observations, ne prive l'intéressée d'aucune garantie. S'agissant de la légalité des motifs du refus : 4. Il résulte des stipulations de l'accord franco-marocain citées au point 2, que celui-ci renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code du travail nécessaires à sa mise en œuvre, pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord. Il en va notamment ainsi, pour le titre de séjour " salarié " mentionné à l'article 3 cité ci-dessus délivré sur présentation d'un contrat de travail " visé par les autorités compétentes ", des dispositions des articles R. 5221-17 et suivants du code du travail, qui précisent les modalités selon lesquelles et les éléments d'appréciation en vertu desquels le préfet se prononce, au vu notamment du contrat de travail, pour accorder ou refuser une autorisation de travail. 5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; (...) ". 6. Pour rejeter la demande de titre de séjour " salarié " présentée par Mme B..., le préfet du Haut-Rhin a tenu compte de l'avis défavorable émis par la direction régionale des entreprises, de la consommation, du travail et de l'emploi sur sa demande d'autorisation de travail au motif que le métier pour lequel elle avait présenté sa demande ne rencontrait aucune difficulté de recrutement et ne figurait pas dans la liste des trente métiers en tension figurant dans l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non-européens. Le préfet du Haut-Rhin doit ainsi être regardé comme ayant opposé à l'intéressée les conditions prévues par les dispositions précitées du 1° de l'article R. 5221-20 du code du travail, qui sont applicables à une première demande de titre de séjour formée par un ressortissant marocain sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain, ainsi qu'il ressort du point 3 du présent arrêt. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige serait entachée d'erreur de droit au regard des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain. 7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B... a produit, au soutien de sa demande de titre de séjour, une promesse d'embauche des 10 et 11 septembre 2019 pour un poste d'" adjoint au directeur administratif et financier " en contrat à durée indéterminée dans une société dont l'activité n'est pas précisée. Le directeur a souligné que le code ROME M1205 était le plus approchant du profil recherché, tandis qu'il indiquait sur le formulaire CERFA de demande d'autorisation de travail qu'il s'agissait de remplir des fonctions de " chef de projet financement ". Dans ces conditions, la requérante ne saurait sérieusement faire grief au préfet du Haut-Rhin d'avoir procédé à l'examen de sa demande au regard du métier de " chef de projet finance développement ", conformément aux éléments dont il était fait état dans la demande. Le moyen tiré d'une erreur de fait ne peut qu'être écarté. 8. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / Si [l'intéressé] séjournait déjà (en France), il présente sa demande : " (...) ; 4° Soit dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire, sauf s'il est titulaire du statut de résident de longue durée-UE accordé par la France en application des articles L. 314-8, L. 314-8-1 et L. 314-8-2. (...) ". 9. D'une part, contrairement à ce que soutient Mme B..., l'accord franco-marocain ne régit pas de manière exclusive la situation des ressortissants marocains sollicitant la délivrance d'un titre de séjour " salarié " en France. Les dispositions de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives à la procédure de présentation des demandes de titre de séjour, point qui n'est pas déjà traité par l'accord franco-marocain, ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'article 3 de ce même accord. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., qui était titulaire d'un titre de séjour " étudiant " valable jusqu'au 20 novembre 2018, a sollicité son changement de statut pour obtenir un titre de séjour " salarié " par une demande présentée le 12 septembre 2019, soit au-delà de la date d'expiration de sa carte de séjour " étudiant ". La circonstance qu'elle a bénéficié de récépissés de demande de renouvellement de son titre de séjour " étudiant " jusqu'à l'intervention de la décision du 13 mai 2019 par laquelle le préfet des Yvelines a refusé de faire droit à sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire, avant certes d'abroger cet arrêté par une décision du 3 juin 2019, et à nouveau après cette date, est sans incidence sur l'appréciation de la condition fixée au 4° de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur de fait dont le préfet du Haut-Rhin aurait entaché sa décision en opposant à la requérante le caractère tardif de sa demande de titre de séjour " salarié " au regard des dispositions précitées. En ce qui concerne le refus d'un titre de séjour " salarié " à titre exceptionnel : 10. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié. 11. Il ressort des pièces du dossier que, alors que la situation des ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France est régie par les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain, le préfet du Haut-Rhin a également fondé sa décision sur les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ainsi méconnu le champ d'application de la loi. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. En l'espèce, le refus de titre de séjour opposé à Mme B... trouve son fondement légal dans la mise en œuvre du pouvoir discrétionnaire du préfet, qui peut être substituée aux dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que cette substitution de base légale, sur laquelle la requérante a pu présenter des observations, ne prive l'intéressée d'aucune garantie. 12. Il ressort de la décision en litige que le préfet du Haut-Rhin a considéré, outre les éléments déjà évoqués, qu'il n'apparaissait pas que l'expérience et les diplômes de Mme B... constitueraient un motif exceptionnel de nature à permettre la délivrance d'une carte de séjour temporaire " salarié ". Si la requérante soutient que l'emploi pour lequel elle avait postulé était en parfaite adéquation avec les études qu'elle avait entreprises, elle n'en justifie pas. Dans ces conditions, la requérante, qui ne fait état d'aucun élément précis quant à son projet professionnel, n'est pas fondée à soutenir que le refus de lui délivrer un titre de séjour " salarié " serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation. En ce qui concerne sa vie privée et familiale : 13. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, il doit être écarté. Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français : 14. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait illégale compte tenu de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour. 15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2020. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Haut-Rhin. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président, M. Agnel, président-assesseur, Mme Brodier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, Signé : H. Brodier Le président, Signé : M. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 No 22NC01898
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui leur ont été assignés au titre des années 2015, 2016 et 2017. Par un jugement n° 1909677 du 2 mars 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande. La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2015, 2016 et 2017 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017. Par un jugement n° 1909676 du 2 mars 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : I) Par une requête enregistrée le 29 avril 2021, sous le numéro 21NC01248, M. et Mme A..., représentés par Me Hoarau, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1909677 ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions contestées ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la proposition de rectification est insuffisamment motivée en violation de l'article L. 57 du livre des procédures en ce que la citation de la proposition de rectification adressée à la société Pharmacie du Breckelberg est elle-même insuffisamment motivée eu égard à la confusion qui règne dans la présentation des résultats chiffrés de la reconstitution ; le principe d'indépendance des procédures ne saurait dispenser le service de motiver les redressements qu'il notifie au bénéficiaire des revenus distribués sur le fondement de l'article 109 du code général des impôts ; - l'administration ne rapporte pas la preuve de recettes dissimulées au niveau de la société par une reconstitution inintelligible qui est l'œuvre d'un informaticien, de sorte qu'elle ne rapporte pas la preuve de l'existence de revenus distribués entre ses mains ; - l'administration n'a pas rapporté la preuve qu'il était le maître de l'affaire, qualité qui ne saurait résulter de la seule détention d'une partie du capital ou de la gérance de droit, de sorte qu'il ne saurait être présumé avoir appréhendé de quelconque revenus distribués ; - la preuve de l'existence de manœuvres frauduleuses n'est pas rapportée. Par un mémoire enregistré le 29 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. II) Par une requête enregistrée le 29 avril 2021, sous le numéro 21NC01250, et des mémoires enregistrés le 29 mars 2022 et le 11 juillet 2022, la C..., représentée par Me Hoarau, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1909676 ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions contestées ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la vérification de comptabilité et les redressements ont pour origine des renseignements obtenus de tiers que l'administration ne lui a jamais indiqués en violation de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; - le vérificateur l'a privée de la garantie d'un débat oral et contradictoire au cours de la vérification ; - l'administration a méconnu la garantie du III de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales ; - la proposition de rectification est insuffisamment motivée en violation de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, eu égard à la confusion qui règne dans la présentation des résultats chiffrés de la reconstitution ; - l'administration a méconnu l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, en ce qu'elle n'a pas adressé la réponse à ses observations à son mandataire, se bornant à envoyer une copie à son avocat, la privant de la possibilité de saisir la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; - l'avis de mise en recouvrement n'a pas été régulièrement notifié à son avocat en violation des articles L. 256 et R. 256-3 du livre des procédures fiscales ; - la preuve de l'existence de manœuvres frauduleuses n'est pas rapportée. Par des mémoires enregistrés le 28 octobre 2021 et le 25 mai 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Vu : - les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique. Ont été entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Agnel ; - et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. La C... exploite une pharmacie à Creutzwald (Moselle). Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017. Par une proposition de rectification du 13 décembre 2018, notifiée selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale a porté à la connaissance de la société qu'elle envisageait des rehaussements de ses bénéfices et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée. Ces rectifications ont été maintenues par lettre du 4 mars 2019 en réponse aux observations de la société. Les suppléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée correspondant à ces rectifications ont été mis en recouvrement au cours de l'année 2019. La réclamation préalable de la société du 2 juillet 2019 a été rejetée le 29 octobre 2019. L'administration a regardé M. A..., gérant et associé majoritaire de la C..., comme le bénéficiaire de revenus réputés distribués, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, à raison des rehaussements des bénéfices sociaux. L'intéressé, à la suite d'un contrôle sur pièces, a été rendu destinataire, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, de propositions de rectification du 13 décembre 2018 l'informant des rectifications envisagées en conséquence au titre des années 2015, 2016 et 2017. Ces rectifications ont été maintenues par lettre du 4 mars 2019 en réponse aux observations de M. et Mme A.... Les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été mis en recouvrement au cours de l'année 2019. La réclamation préalable de M. et Mme A... du 15 juillet 2019 a été rejetée le 29 octobre 2019. Par les deux requêtes ci-dessus visées, qu'il y a lieu de joindre afin de statuer par un seul arrêt, la C... et M. et Mme A... relèvent appel des jugements du 2 mars 2021 par lesquels le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions supplémentaires au titre des années 2015, 2016 et 2017. Sur les bénéfices imposables et le chiffre d'affaires taxable de la C... et les pénalités qui lui ont été infligées : En ce qui concerne la régularité de la procédure : S'agissant de la vérification de comptabilité : 2. En premier lieu, dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat. Il résulte de l'instruction qu'hormis la première intervention inopinée du 24 juillet 2018, la vérification de comptabilité de la société requérante s'est déroulée à sa demande dans les locaux de l'expert-comptable chez qui le vérificateur s'est rendu à trois reprises. La société requérante ne rapporte pas la preuve qu'à ces occasions, le vérificateur se serait refusé à tout échange de vues avec ses représentants. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée de la garantie liée à un débat oral et contradictoire avec le vérificateur. 3. En second lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables, l'avis de vérification de comptabilité et la charte des droits et obligations du contribuable vérifié sont remis au contribuable au début des opérations de constatations matérielles. L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil ". Aux termes du III de l'article L. 47 A du même livre : " a. - Dans le cadre du contrôle inopiné mentionné au dernier alinéa de l'article L. 47, lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, les agents de l'administration peuvent réaliser deux copies des fichiers relatifs aux informations, données et traitements informatiques ainsi que de la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l'exécution des traitements mentionnés au IV de l'article L. 13./Ces copies sont scellées selon des modalités définies par arrêté du ministre chargé du budget. Une copie est remise au contribuable ou à son représentant, l'autre copie est conservée par l'administration./A l'issue du délai raisonnable mentionné au dernier alinéa de l'article L. 47, les deux copies sont confrontées ". 4. D'une part, il résulte de ces dispositions que si les agents de l'administration peuvent réaliser deux copies des fichiers visés au a) du III de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, ils n'y sont pas tenus. Par suite, la circonstance que les agents de l'administration se sont bornés à apposer un marquage numérique dans le disque dur de sauvegarde des données numériques de la Pharmacie du Breckelberg lors du contrôle inopiné du 24 juillet 2018, sans prendre de copie, est sans incidence sur la régularité de la vérification de comptabilité. 5. D'autre part, en ayant apposé ce marquage numérique sur la liste des fichiers, afin d'en garantir l'intégrité, le service s'est borné à effectuer la constatation de l'état de la comptabilité et des moyens d'exploitation, conformément à l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, et n'a procédé ni à un traitement informatique et pas davantage à un emport irrégulier de documents ou de données comptables. S'agissant de la procédure de rectification : 6. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Aux termes de l'article R. 57-1 du livre des procédures fiscales : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs. 7. La société requérante reprend en appel, sans précision nouvelle, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges. 8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ". Pour l'application de ces dispositions, lorsque le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour l'assister dans ses relations avec l'administration ne contient aucune mention expresse habilitant le mandataire à recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition, ce mandat n'emporte pas élection de domicile auprès de ce mandataire. Dans ce cas, l'administration n'entache pas la procédure d'imposition d'irrégularité en notifiant l'ensemble des actes de la procédure au contribuable, alors même que le mandat confie au mandataire le soin de répondre à toute notification de redressements, d'accepter ou de refuser tout redressement. 9. Il résulte de l'instruction que l'administration a notifié sa réponse aux observations de la société requérante du 15 février 2019 par une lettre modèle 3926 du 4 mars 2019 adressée par pli recommandé, avec accusé de réception, au siège social de la société, ce pli lui ayant été présenté par les services postaux le 8 mars 2019 qui l'en a avisée. En l'absence de retrait, le pli a été retourné à l'administration par les services postaux le 25 mars 2019 avec la mention " pli avisé et non réclamé ". Il résulte également de l'instruction que le service a adressé une copie de cette lettre de réponse à l'avocat de la société requérante, Me Hoarau, dont il a accusé réception le 11 mars 2019. Si dans ses observations du 15 février 2019 la société requérante a indiqué que Me Hoarau, avocat, la représentait " pour l'ensemble des procédures de rectification et de recouvrement ", il ne résulte pas de cette indication que ce mandataire était ainsi habilité à recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition de sorte que ce mandat n'a pas emporté élection de domicile au titre de cette procédure. Par suite, c'est sans irrégularité que l'administration, laquelle a au demeurant également notifié ce document au mandataire, a notifié sa réponse à la société requérante à son siège social. 10. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée. 11. La société requérante reprend en appel, sans précision nouvelle, le moyen tiré de la violation par l'administration de la garantie découlant de ces dispositions. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges. En ce qui concerne la prescription : 12. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ". Aux termes de l'article L. 256 du même livre : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public compétent à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité ". Aux termes de l'article R. 256-6 du même livre : " La notification de l'avis de mise en recouvrement comporte l'envoi au redevable, soit au lieu de son domicile, de sa résidence ou de son siège, soit à l'adresse qu'il a lui-même fait connaître au service compétent de la direction générale des finances publiques ou au service des douanes et droits indirects compétent, de l'" ampliation " prévue à l'article R. * 256-3./Au cas où la lettre recommandée ne pourrait, pour quelque cause que ce soit, être remise au redevable destinataire ou à son fondé de pouvoir, il doit être demandé à la Poste de renvoyer au service compétent de la direction générale des finances publiques ou au service des douanes et droits indirects expéditeur, le pli non distribué annoté :/a) D'une part, de la date de sa première présentation à l'adresse indiquée à la souscription ou, s'il y a lieu, à la nouvelle adresse connue de La Poste ;/b) D'autre part, du motif de sa non-délivrance./Dans cette éventualité, l'" ampliation " renvoyée reste déposée au service compétent de la direction générale des finances publiques ou à la recette des douanes et droits indirects chargé du recouvrement où il peut en être délivré copie, à tout moment et sans frais, au redevable lui-même ou à son fondé de pouvoir ". 13. Il résulte de ce qui a été dit au point 8 ci-dessus que c'est sans irrégularité que l'administration a notifiée au siège de la société requérante, et non pas à son avocat, l'avis de mise en recouvrement du 30 avril 2019 par pli recommandé avec accusé de réception retourné avec la mention " plis avisé non réclamé " le 4 juin 2019. Par suite, la C... n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait méconnu les dispositions ci-dessus reproduites. En ce qui concerne la charge de la preuve : 14. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions (...) visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission (...). Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...). La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge ". 15. Il résulte de l'instruction que les impositions contestées ont été établies suivant la procédure de redressement contradictoire et n'ont pas été acceptées par le contribuable. Dans ces conditions, il incombe à l'administration d'établir, d'une part, la preuve des irrégularités entachant la comptabilité de la société, l'autorisant à reconstituer les résultats de celle-ci, d'autre part, le bien-fondé de cette reconstitution. En ce qui concerne la comptabilité : 16. Pour rejeter la comptabilité de l'officine de pharmacie de la société requérante comme non probante au titre des années vérifiées, le vérificateur a constaté qu'elle utilisait un logiciel de gestion dénommé LGPI lui ayant permis d'utiliser de manière délibérée une fonction de suppression des recettes mettant en lumière des écarts significatifs entre les quantités vendues de produits et les quantités facturées. Le service a également constaté que 20 % des numéros de factures avaient été supprimés dans la séquence des numéros de factures. Ces anomalies établissent que la comptabilité présentée non seulement n'est pas appuyée de justificatifs de recettes fiables, en l'absence de numérotation continue des factures, mais encore qu'elle ne retrace pas la totalité des ventes réalisées. Par suite, l'administration rapporte la preuve que la comptabilité de la société requérante est affectée de graves irrégularités. En ce qui concerne la reconstitution des bénéfices : 17. Il résulte de l'instruction, en particulier de la proposition de rectification, que pour procéder à la reconstitution des recettes de l'officine de la société requérante, l'administration a déterminé les recettes supprimées à partir des discordances constatées, d'une part en ce qui concerne l'année 2015, lors de la comparaison des données de ventes et des données du fichier " statistique t_historique_vente " et le chiffrage a été effectué en s'appuyant sur le prix de vente moyen du produit déterminé d'après les ventes de la période, d'autre part en ce qui concerne les années 2016 et 2017 à partir des données dénommées " typeligne=17 " qui correspondent aux ventes supprimées apparaissant sous la mention " purge de données par le menu cession officine ". Les dissimulations toutes taxes comprises de chiffre d'affaires mises ainsi en lumière par le vérificateur s'élèvent à 24 064 euros au titre de l'année 2015, 18 414 euros au titre de l'année 2016 et 17 754 euros au titre de l'année 2017. Si la société requérante soutient que ces écarts sont faibles, une telle circonstance est sans incidence sur le bien-fondé de la reconstitution dès lors que les ventes dissimulées ressortent de son propre logiciel de gestion. Si la société requérante soutient enfin que le service n'a pas justifié la manière de valoriser chaque vente omise, il ressort de la proposition de rectification qu'au titre des années 2016 et 2017 cette indication ressort directement de son logiciel de gestion, tandis que pour l'année 2015, le service a déterminé un prix de vente moyen du produit considéré sur la période. Il résulte de ces éléments que la méthode utilisée ne saurait être regardée comme viciée dans son principe ou sommaire tandis que la société requérante ne se prévaut pas d'une méthode plus complète ou fiable. Par suite, l'administration rapporte la preuve du bien-fondé des impositions litigieuses. En ce qui concerne les pénalités : 18. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuse ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ". Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, afin de justifier l'application de la pénalité pour manœuvres frauduleuses, de rapporter la preuve de l'existence de procédés ayant pour but d'égarer l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle destinés à masquer des omissions déclaratives délibérées. 19. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la C... n'est pas fondée à soutenir que les pénalités devraient être déchargées en conséquence de la décharge des droits en principal. 20. Pour appliquer des pénalités pour manœuvres frauduleuses sur le fondement des dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration a relevé que l'utilisation, sur l'ensemble de la période vérifiée, par la société requérante, du logiciel permissif LGPI permettant la suppression de factures ainsi que les minorations de recettes correspondants, constitue un comportement visant à égarer l'administration fiscale dans l'exercice de son pouvoir de contrôle. Le gérant de la société a utilisé le logiciel permissif à de multiples reprises, au cours de la période vérifiée, pour occulter une partie du chiffre d'affaires de l'officine tout en donnant l'apparence de la sincérité à une comptabilité en réalité inexacte. L'accès à cet outil informatique a supposé la saisine d'un mot de passe réservé au seul usage du gérant et un parcours dans les menus informatiques. Ces éléments établissent que la société requérante a eu recours à des procédés destinés à égarer l'administration ou à restreindre son pouvoir de contrôle, justifiant que les impositions contestées soient assorties de pénalités pour manœuvres frauduleuses. L'administration fiscale doit, par suite, être regardée comme ayant suffisamment établi les manœuvres frauduleuses justifiant la majoration de 80 % contestée. Sur les revenus de capitaux mobiliers de M. et Mme A... et les pénalités qui leur ont été assignées : En ce qui concerne la régularité de la procédure : 21. Il ressort de la proposition de rectification du 13 décembre 2018 adressée à M. A... qu'afin de déterminer les bases d'imposition des revenus de capitaux mobiliers découlant des recettes dissimulées par la C..., le service s'est appuyé sur la proposition de rectification adressée à cette société et qui était jointe dans les annexes 16 à 50. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, que la proposition de rectification adressée à la société Pharmacie du Breckelberg était suffisamment motivée. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la proposition de rectification qui lui a été adressée serait insuffisamment motivée, en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, en ce qu'elle cite la proposition de rectification adressée à la société Pharmacie du Breckelberg. En ce qui concerne le bien-fondé des impositions : 22. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". En cas de refus des propositions de rectification par le contribuable qu'elle entend imposer en tant que bénéficiaire de sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle, la circonstance qu'il n'aurait pas effectivement appréhendé les sommes correspondantes ou qu'elles auraient été versées à des tiers étant sans incidence à cet égard. 23. La vérification de comptabilité de la C... a mis en lumière la dissimulation par cette dernière de recettes provenant de son exploitation qui ont été réintégrées dans son bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés des années 2015, 2016 et 2017. Le bien-fondé de ces réintégrations a été reconnu ci-dessus et il y a lieu d'écarter les moyens identiques soulevés de ce chef par M. A... par les mêmes motifs. Ces bénéfices non déclarés n'ayant pas été comptabilisés, ils n'ont été ni mis en réserve, ni incorporés au capital social. Ils constituent, par suite, en application des dispositions ci-dessus reproduites de l'article 109 du code général des impôts, des revenus distribués imposables entre les mains de leurs bénéficiaires dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. 24. Afin de regarder M. A... comme le maître de l'affaire, l'administration a relevé que l'intéressé était l'associé unique et le gérant de la société Pharmacie du Breckelberg. Dans ces conditions, M. A..., qui détient la majorité du capital social, qui en outre assurait seul la marche des affaires, en particulier la maîtrise du logiciel LGPI, et disposait seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société Pharmacie du Breckelberg, doit être regardé comme le seul maître de l'affaire et doit, en conséquence, être présumé avoir appréhendé les sommes désinvesties par la société. M. A..., en se bornant à contester sa qualité de maître de l'affaire, n'apporte pas la preuve de ce qu'il n'a pas été le bénéficiaire de ces revenus. En ce qui concerne les pénalités : 25. En premier lieu, il résulte de ce qui a été exposé ci-dessus que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que les pénalités devraient être déchargées en conséquence de la décharge des droits en principal. 26. En second lieu, pour assortir les impositions en litige de la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses, l'administration a relevé que M. A..., seul maître de l'affaire, était le seul à disposer, au sein de la C..., de l'habilitation délivrée par l'éditeur du logiciel, pour utiliser la fonction de purge des factures. Par ailleurs, elle a constaté que lors des absences de M. A..., aucune utilisation de cette fonction permissive n'avait eu lieu. Enfin, elle a estimé que l'utilisation, sur l'ensemble de la période vérifiée, de la fonction de purge des factures au moyen de laquelle avaient été supprimées des factures constituait un comportement visant, d'une part, à délibérément minorer les recettes de l'officine dont il assurait la gérance tout en conservant l'apparence d'une comptabilité régulière, et, visant, d'autre part, à égarer l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle. Dès lors, eu égard à ces constatations, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de la réalité des manœuvres frauduleuses de M. A.... Il s'ensuit que c'est à bon droit que l'administration a infligé aux contribuables les pénalités en litige. 27. Il résulte de tout ce qui précède que la C... et M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes. Par suite, leurs requêtes doivent être rejetées en toutes leurs conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : Les requêtes ci-dessus visées de la C... et de M. et Mme A... sont rejetées. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à C..., à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président de chambre, M. Agnel, président assesseur, Mme Brodier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé : M. AgnelLe président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm N°s 21NC01248 et 21NC01250 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 27 avril 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2105045 du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Sultan, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 12 octobre 2021 ; 2°) d'annuler cet arrêté du 27 avril 2021 ; 3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt ou subsidiairement de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de la première instance et une somme de 2 000 euros au titre de l'appel, à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - la décision portant refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle dans la mesure où il est parfaitement intégré en France, notamment par le travail ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où il justifie de sa présence en France à compter de 2012, des liens qu'il entretient avec ses sœurs résidant sur le territoire français et de son activité professionnelle ; - les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont privées de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour. La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin qui n'a pas produit de mémoire en défense. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 juillet 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme Mosser a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant marocain né le 5 juin 1972, aurait quitté le Maroc en 1998 pour s'installer en Espagne où il aurait obtenu un titre de séjour à partir de 2000 et aurait vécu jusqu'en 2012. Il serait ensuite entré en France pour y rejoindre sa famille. En avril 2018, il a formé une demande d'admission exceptionnelle au séjour qui a été explicitement rejetée par un arrêté de la préfète du Bas-Rhin du 27 avril 2021. M. B... relève appel du jugement du 12 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 27 avril 2021. 2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 3. Les stipulations précitées de l'article 8 ne garantissent pas le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer une vie privée et familiale. En outre, pour apprécier l'atteinte à la vie privée et familiale, il y a lieu de prendre en considération la durée et l'intensité des liens familiaux dont la personne se prévaut. En l'espèce, M. B... fait valoir qu'il vit depuis 2012 en France où résident également ses deux sœurs et où il établit par la production de bulletins de paie avoir travaillé sans autorisation en qualité d'employé carrossier entre le 1er février et le 31 juillet 2012 et à temps partiel entre le 4 janvier et le 30 juin 2016 et le 1er août 2016 et le 30 septembre 2018. S'il verse au dossier plusieurs témoignages d'amis et de connaissances, beaucoup sont peu circonstanciés et ne permettent pas d'établir qu'il aurait noué des relations stables et intenses sur le territoire français. Ainsi, ni ces périodes d'emploi, ni ces témoignages ne sont à eux seuls de nature à justifier qu'il a fixé en France le centre de ses intérêts personnels et professionnels. S'il se prévaut de la présence de ses deux sœurs sur le territoire français, il est constant que ces dernières ont constitué leur propre cellule familiale et que la présence du requérant à leur côté n'est pas indispensable, les intéressés ayant vécu séparément pendant plus de quatorze ans. Célibataire et sans enfant, M. B... n'est pas dépourvu d'attaches familiale au Maroc où il a vécu près de 26 ans et où demeurent toujours sa mère et les autres membres de sa fratrie. Dans ses conditions, la préfète du Bas-Rhin n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels la décision contestée a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. 4. Aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) ". L'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention ''salarié'' (...) ". Aux termes du premier paragraphe de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2.". 5. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié. 6. Si M. B... justifie de sa présence en France depuis 2012, il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français et n'a sollicité sa régularisation qu'à compter d'avril 2018. Son activité professionnelle, au demeurant non autorisée en 2012 et entre 2016 et 2018, ne permet pas à elle seule de justifier d'une réelle intégration au sein de la société française alors qu'il est démuni de ressources à la date de la décision contestée et ne dispose pas d'un logement autonome. De plus, ainsi qu'il a été dit au point 3, célibataire et sans enfant, il n'est pas dépourvu d'attache dans son pays d'origine. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la préfète du Bas-Rhin aurait entaché da décision portant refus de séjour d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. 7. Enfin il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation ainsi que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Une copie du présent arrêt sera adressée à la préfète du Bas-Rhin. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président, M. Agnel, président-assesseur, Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, Signé : C. MosserLe président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 N° 22NC02048
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 4 juin 2022, par lequel le préfet de la Moselle l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de revenir sur le territoire français pendant un délai d'un an. Par un jugement n° 2201575, 2201608 du 22 juin 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 19 juillet 2022, M. A..., représenté par Me Blanvillain, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 22 juin 2022 ; 2°) d'annuler cet arrêté du 4 juin 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de réexaminer sa situation dans un délai déterminé, au besoin sous astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros, à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - les décisions contestées sont entachées d'incompétence ; - elles sont insuffisamment motivées ; - l'obligation de quitter le territoire français est entachée de plusieurs erreurs de fait ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision lui refusant un délai de départ volontaire est illégale dès lors qu'il dispose de garanties de représentation et qu'il ne présente pas de risque de fuite ; - la décision fixant le pays de destination méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'interdiction de retour sur le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur d'appréciation quant à sa durée. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2022, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 novembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme Mosser a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant turc né le 18 mai 1999, serait entré irrégulièrement en France le 19 novembre 2012 accompagné de sa mère. La demande d'asile qu'il a présentée à sa majorité a été rejetée par une décision du 19 octobre 2017 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée le 18 décembre 2018 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Le 17 juin 2019, M. A... a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français assortie d'une interdiction de retour sur ce territoire. Le recours contentieux formé contre ces décisions a été rejeté en dernier lieu par la cour administrative d'appel de Nancy le 19 novembre 2019. Le 9 mars 2020, M. A... a fait l'objet d'une interdiction de retour sur le territoire français dont la légalité a été confirmée en dernier lieu par la cour administrative d'appel de Nancy le 14 janvier 2021. A la suite d'un contrôle d'identité, le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Postérieurement à cet arrêté, M. A... a sollicité le réexamen de sa demande d'asile, demande qui a été rejetée par l'OFPRA le 14 juin suivant. Le 15 juillet 2022, le requérant a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. M. A... relève appel du jugement du 22 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 4 juin 2022. Sur l'arrêté pris dans son ensemble : 2. Le requérant reprenant en appel, sans apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à juste titre par le tribunal administratif de Nancy dans son jugement du 22 juin 2022. 3. L'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Ainsi, le préfet de la Moselle, qui n'avait pas à viser toutes les circonstances de fait de la situation de M. A..., a cité les éléments pertinents dont il avait connaissance et qui fondent ses décisions. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en fait doit être écarté. Sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français : 4. En premier lieu, le préfet de la Moselle n'a pas commis d'erreur de fait, à la date de décision contestée, en indiquant que M. A... serait entré en France en 2012 et que son identité serait présumée. Si par ailleurs, le préfet ne mentionne ni l'adresse du requérant, ni la relation sentimentale que l'intéressé entretiendrait avec une ressortissante française et qu'il aurait mentionné dans ses déclarations, il n'est pas établi qu'il aurait eu une appréciation différente de la situation de M. A... dès lors notamment que le caractère stable ou intense de cette relation n'est pas établi. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 6. Si M. A... justifie de sa présence en France à compter de la rentrée scolaire 2013, il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français postérieurement au rejet de sa demande d'asile le 18 novembre 2018. Les deux témoignages d'amis ainsi que la promesse d'embauche postérieure à la décision en litige et l'attestation de bénévolat non datée ne sont pas de nature à établir que le requérant a fixé le centre de ses intérêts personnels et professionnels en France. De même, la circonstance qu'il est titulaire d'un diplôme de langue française, niveau A2 et a été scolarisé en France ne justifie pas de son intégration au sein de la société française alors qu'il est démuni de ressources propres et d'un logement autonome. S'il se prévaut de la présence en France de sa mère, ni la régularité de son séjour, ni le fait que la présence à ses côtés serait indispensable ne sont démontrés. La réalité et l'intensité de sa relation avec une ressortissante française ne sont pas justifiées par la seule production d'un témoignage de cette dernière alors que cette relation n'est corroborée par aucune des autres pièces du dossier et qu'il ressort des quittances de loyer produites que le requérant vit avec sa mère. En outre, M. A... n'établit pas être dépourvu d'attaches familiale en Turquie ou sa mère pourrait le cas échéant l'accompagner. Dans ses conditions, le préfet de la Moselle n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels la décision contestée a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. 7. En troisième et dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français litigieuse serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. Sur la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire : 8. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) ". 9. M. A... qui n'a pas déféré à la précédente mesure d'éloignement prise à son encontre les 17 juin 2019 doit être regardé comme s'étant soustrait à cette mesure. Il se trouve ainsi dans le cas, prévu par les dispositions citées ci-dessus, où, en l'absence de circonstance particulière, le risque qu'il se soustraie à la nouvelle mesure d'éloignement prononcée à son encontre pouvait être regardé comme établi. La circonstance qu'il justifie de son identité et dispose d'une résidence stable n'est pas de nature à permettre de regarder l'existence d'un tel risque comme non avéré. Par suite, le préfet de la Moselle a pu légalement décider de ne pas lui accorder de délai de départ volontaire. Sur la décision fixant le pays de renvoi : 10. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 11. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains ou dégradants ". 12. M. A... n'établit pas être exposé personnellement et gravement à des risques de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine alors que sa demande d'asile a été rejetée en dernier lieu par la CNDA le 18 décembre 2018 et que sa demande de réexamen a été rejetée pour irrecevabilité par l'OFPRA le 14 juin 2022. Par suite, ce moyen doit être écarté comme manquant en fait. Sur la décision portant interdiction de retour sur le le territoire français : 13. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ". Il résulte de ces dispositions que lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, le préfet assortit, en principe et sauf circonstances humanitaires, l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour. La durée de cette interdiction doit être déterminée en tenant compte des critères tenant à la durée de présence en France, à la nature et l'ancienneté des liens de l'intéressé avec la France, à l'existence de précédentes mesures d'éloignement et à la menace pour l'ordre public représentée par la présence en France de l'intéressé. 14. Pour fixer à un an la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée à l'encontre de M. A..., le préfet de la Moselle a retenu que si ce dernier est entré sur le territoire français en 2012 et ne constitue pas une menace à l'ordre public, il ne justifie pas de l'intensité et de la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France et a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement. Ainsi qu'il a été dit au point 6, M. A... ne justifie pas de la réalité et de l'intensité de sa relation avec une ressortissante française tandis qu'il n'est pas établi que sa mère, résidant également irrégulièrement en France, ne pourrait pas l'accompagner en Turquie. Par ailleurs, il ne démontre pas d'une insertion particulière au sein de la société française. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en fixant à un an la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français faite au requérant, le préfet de la Moselle aurait commis une erreur dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de M. A.... 15. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 6 et 14, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de retour sur le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation ainsi que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Moselle. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président, M. Agnel, président assesseur, Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, Signé : C. MosserLe président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 N° 22NC01930
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société anonyme (SA) Paradigm France a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés, de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés et de retenue à la source qui lui ont été assignés au titre de l'année 2012. Par un jugement n° 1900103 du 18 février 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 16 avril 2021 et un mémoire enregistré le 13 avril 2022, la SA Paradigm France, représentée par Me Bonny-Grandil, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions contestées ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les " stocks options " litigieuses ont été attribuées aux bénéficiaires, sur le fondement d'un engagement juridique pris à leur égard, en considération de leur qualité de salariés et ces indemnités constituent un élément de motivation afin de les fidéliser et les récompenser ; en conséquence, l'indemnité versée au titre de l'annulation du plan de stock-options constitue une charge déductible sur le fondement de l'article 39 du code général des impôts en tant que salaire conformément à la jurisprudence du Conseil d'Etat et à la doctrine administrative BOI-RSA-ES-20-20-20, n° 220 ; le versement de cette indemnité est conforme à son intérêt s'agissant d'un complément de rémunération accordé à ses salariés en contrepartie de leur travail ; - subsidiairement, le rehaussement ne saurait inclure les sommes refacturées au titre de cette indemnité aux autres sociétés du groupe, à hauteur de 1 060 554 euros, et qui sont comprises dans les produits de l'exercice. Par un mémoire enregistré le 29 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Vu : - les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique. Ont été entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Agnel ; - les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique ; - et les observations de Me Bonny-Grandil représentant la société requérante. Considérant ce qui suit : 1. La SA Paradigm France a pour activité la conception de logiciels destinés à l'exploration pétrolière. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er janvier 2011 au 30 juin 2014 à l'issue de laquelle, le service a porté à sa connaissance, par une proposition de rectification du 18 décembre 2015, qu'il envisageait, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, notamment la réintégration dans le bénéfice imposable de l'année 2012 d'une somme de 1 887 143 euros correspondant à l'indemnisation de certains de ses salariés à la suite de l'annulation d'un plan d'achats d'actions émis par une société Paradigm Ltd. Cette rectification a été maintenue le 6 juin 2016 en réponse aux observations de la société, ainsi qu'à la suite d'un entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur le 10 août 2016 et avec l'interlocuteur interrégional le 27 avril 2017. La commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a émis un avis défavorable au redressement le 18 mai 2016. Les impositions supplémentaires, assorties de la majoration pour manquement délibéré, ont été mises en recouvrement au cours de l'année 2017. La réclamation préalable de la société a fait l'objet d'une décision de rejet du 12 novembre 2018. La SA Paradigm France, dont la contestation se limite au bien-fondé du rehaussement opéré en matière d'impôt sur les sociétés au titre de l'acte anormal de gestion, relève appel du jugement du 18 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires. 2. D'une part aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre (...) Toutefois, les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais ". Aux termes de l'article 217 quinquies du même code : " I. - Pour la détermination de leurs résultats fiscaux, les sociétés peuvent déduire les charges exposées du fait de la levée des options de souscription ou d'achat d'actions consenties à leurs salariés en application des articles L. 225-177 à L. 225-184 et L. 22-10-56 du code de commerce ainsi que du fait de l'attribution gratuite d'actions ". L'article L. 225-177 du code de commerce auquel renvoie cet article, dans sa rédaction en vigueur, précise que : " L'assemblée générale extraordinaire, sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire, selon le cas, et sur le rapport spécial des commissaires aux comptes, peut autoriser le conseil d'administration ou le directoire à consentir, au bénéfice des membres du personnel salarié de la société ou de certains d'entre eux, des options donnant droit à la souscription d'actions. L'assemblée générale extraordinaire fixe le délai pendant lequel cette autorisation peut être utilisée par le conseil d'administration ou par le directoire, ce délai ne pouvant être supérieur à trente-huit mois ". 3. D'autre part, en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Il appartient, en règle générale, à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal. 4. Il résulte de l'instruction que la société mère Paradigm Ltd a décidé, à la majorité de ses actionnaires, d'un plan de levée d'options effectif à compter du 24 novembre 2003, au bénéfice notamment des salariés de ses filiales, au nombre desquelles, à compter de l'année 2006, figure la société requérante, permettant l'acquisition d'actions de la société Paradigm Ltd au prix unitaire de 0,0001 dollar. A la suite de l'acquisition le 8 juin 2012 du groupe Paradigm par le fonds d'investissement Apax, ce plan a été annulé. Suivant le traité de fusion du 8 juin 2012, le fonds Apax a stipulé avec la société Paradigm Ltd qu'en contrepartie de cette annulation, les salariés concernés seraient indemnisés pour un montant correspondant à la différence entre la valeur d'acquisition des actions et la valeur de celles-ci au cours du jour. Il ressort de la proposition de rectification que la société Paradigm France a décidé de prendre à sa charge le versement de cette indemnité au profit de ceux de ses salariés qui étaient bénéficiaires du plan d'option d'actions et qu'elle leur a versé à ce titre la somme de 1 887 143 euros. Il ressort de la proposition de rectification que cette somme a été déduite de son bénéfice imposable de l'année 2012 par le débit du compte 64101000 " bonus et commissions ". 5. En premier lieu, il est constant que la société Paradigm France n'a pas adopté de plan d'option d'actions dans les conditions prévues par les dispositions ci-dessus reproduites du code de commerce. Par suite, il n'est pas contesté qu'elle ne peut prétendre déduire les sommes litigieuses, liées à l'annulation d'un tel plan souscrit par une autre société, de son bénéfice imposable sur le fondement de l'article 217 quinquies du code général des impôts. 6. En second lieu, il résulte du traité de fusion du 8 juin 2012 qu'il incombait à la société Paradigm Ltd d'indemniser les bénéficiaires du plan d'option d'actions qu'elle avait initialement mis en place. S'il était loisible à la société Paradigm Ltd de conclure avec sa filiale, la société Paradigm France, une convention au terme de laquelle elle lui aurait confié le soin d'avancer à ses salariés, pour son compte, les sommes dues au titre de cette indemnisation, il est constant qu'aucune convention de ce type n'a été conclue. En particulier, il ne ressort pas du " standard employee undertaking " et du " stock option agreement " qu'une quelconque obligation aurait été mise à la charge de la société requérante, en vertu d'une stipulation pour autrui, sur le fondement du plan de stock option de la société Paradigm Ltd et à la suite de son annulation. Dans ces conditions, en prenant à sa charge sans aucune contrepartie le paiement d'une dette qui ne lui incombait pas, la société Paradigm France s'est appauvrie au profit de sa société mère dans des conditions ne relevant pas d'une gestion commerciale normale. Si la société requérante, qui ne saurait utilement invoquer l'intérêt du groupe auquel elle appartient, justifie que les sommes litigieuses ont bien été versées à ses salariés, qui ont été imposés dessus dans la catégorie des traitements et salaires conformément à leurs déclarations, et s'il peut être admis que ce versement a contribué à les fidéliser, de telles circonstances ne sont pas de nature à faire regarder la prise en charge de ces sommes comme répondant à une gestion commerciale normale en l'absence de contrepartie de la part de Paradigm Ltd. 7. Il est vrai que la société requérante justifie, en dernier lieu, avoir facturé au cours de l'exercice 2012, à hauteur de 1 060 554 euros, une partie de cette indemnité dans le cadre de la facturation des prestations de recherche et développement réalisées par elle au profit de diverses sociétés du groupe Paradigm. Il résulte toutefois de l'instruction que la société Paradigm France a facturé ces sommes à des sociétés du groupe dénommées Paradigm Geophysical Israel et Paradigm Sciences et non pas à la société Paradigm Ltd. Il n'est pas contesté que cette facturation est intervenue dans le cadre des conventions de prestations de services conclues avec ces sociétés au terme desquelles la société Paradigm France, dans le cadre de sa politique de prix de transfert, facture aux bénéficiaires ses prestations de recherche et développement pour leur coût réel, notamment de main d'œuvre, augmenté d'une marge. Il en résulte que la facturation de ces sommes ne trouve pas sa cause dans une contrepartie à l'avantage accordée par la société Paradigm France à la société Paradigm Ltd, dans les conditions ci-dessus analysées. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la somme de 1 060 554 euros doit venir en déduction du rehaussement litigieux. 8. Il résulte de tout ce qui précède que la société Paradigm France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de la SA Paradigm France est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Paradigm France et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président de chambre, M. Agnel, président assesseur, Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé : M. AgnelLe président, Signé : J. Martinez La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm N° 21NC01116 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'association France Nature Environnement Bouches-du-Rhône a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 2 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de Grans a approuvé la révision n° 1 du plan local d'urbanisme de la commune ainsi que la décision du 1er février 2018 par laquelle le président de la métropole Aix-Marseille-Provence a rejeté le recours gracieux formé à l'encontre de cette délibération. Par un jugement n° 1802636 du 6 avril 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 3 juin 2021 et le 26 janvier 2023, l'association France Nature Environnement Bouches-du-Rhône, représentée par Me Victoria, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 avril 2021 ; 2°) d'annuler la délibération du 2 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de Grans a approuvé la révision n° 1 du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune ainsi que la décision du 1er février 2018 par laquelle le président de la métropole Aix-Marseille-Provence a rejeté le recours gracieux formé à l'encontre de cette délibération ; 3°) de mettre à la charge de la métropole Aix-Marseille-Provence la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la délibération attaquée est fondée sur un rapport de présentation insuffisant en méconnaissance des dispositions des articles R. 151-1 et suivants du code de l'urbanisme ; - elle méconnaît les dispositions de l'article L. 414-4 du Code de l'environnement ; - la révision n° 1 du plan local d'urbanisme est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale Ouest Etang de Berre ; - le classement des zones Clésud et des Arènes en zone constructible est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Par des mémoires en défense enregistrés le 16 mars 2022 et le 7 mars 2023, la métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par Me Susini, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de l'association requérante au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - le code de l'urbanisme ; - le décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 ; - le code de justice administrative. La présidente de la Cour a désigné M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Quenette, - les conclusions de M. Roux, rapporteur public, - et les observations de Me Susini pour la Métropole Aix-Marseille-Provence et Me Victoria pour l'association France Nature Environnement Bouches-du-Rhône. Une note en délibéré présentée par Me Susini pour la métropole Aix-Marseille-Provence a été enregistrée le 22 juin 2022 à 12h45. Considérant ce qui suit : 1. Par une délibération du 5 octobre 2015, le conseil municipal de Grans a prescrit la révision générale du plan local d'urbanisme de la commune. Par une délibération du 6 février 2017, il a tiré le bilan de la concertation et a arrêté le projet de plan. Le projet a ensuite été soumis à enquête publique du 17 juin 2017 au 21 juillet 2017 et a reçu un avis favorable du commissaire enquêteur, assorti de réserves. Par une délibération du 2 octobre 2017, le conseil municipal de Grans a approuvé la révision n° 1 de son plan local d'urbanisme de la commune. Par un courrier du 29 novembre 2017 l'association France Nature Environnement Bouches-du-Rhône a formé un recours gracieux tendant au retrait de cette délibération qui a été rejeté par le président de la métropole Aix-Marseille-Provence le 1er février 2018. Cette même association relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération du 2 octobre 2017 ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux. Sur l'existence d'un désistement d'office en première instance : 2. Aux termes de l'article R. 612-5 du code de justice administrative : " Devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, si le demandeur, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée, n'a pas produit le mémoire complémentaire dont il avait expressément annoncé l'envoi ou, dans les cas mentionnés au second alinéa de l'article R. 611-6, n'a pas rétabli le dossier, il est réputé s'être désisté. ". 3. Si la demande présentée par l'association France Nature Environnement Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif de Marseille est intitulée " requête sommaire ", elle est régulièrement motivée et n'annonce pas l'envoi d'un mémoire complémentaire, aucune mise en demeure de présenter un tel mémoire n'ayant par ailleurs été adressée à la requérante. Par suite, celle-ci ne peut être regardée comme s'étant désistée d'office en première instance par application des dispositions de l'article R. 612-5 du code de justice administrative, comme l'a exposé la commune de Grans devant le tribunal administratif. Sur les conclusions à fin d'annulation : 4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 414-4 du code de l'environnement : " I. -Lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après " Evaluation des incidences Natura 2000 " : / 1° Les documents de planification qui, sans autoriser par eux-mêmes la réalisation d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations, sont applicables à leur réalisation (...) ; / VI. - L'autorité chargée d'autoriser, d'approuver ou de recevoir la déclaration s'oppose à tout document de planification, programme, projet, manifestation ou intervention si l'évaluation des incidences requise en application des III, IV et IV bis n'a pas été réalisée, si elle se révèle insuffisante ou s'il en résulte que leur réalisation porterait atteinte aux objectifs de conservation d'un site Natura 2000. (...) / VII. - Lorsqu'une évaluation conclut à une atteinte aux objectifs de conservation d'un site Natura 2000 et en l'absence de solutions alternatives, l'autorité compétente peut donner son accord pour des raisons impératives d'intérêt public majeur. Dans ce cas, elle s'assure que des mesures compensatoires sont prises pour maintenir la cohérence globale du réseau Natura 2000. Ces mesures compensatoires sont à la charge de l'autorité qui a approuvé le document de planification ou du bénéficiaire du programme ou projet d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations, de la manifestation ou de l'intervention. La Commission européenne en est tenue informée. (...) ". 5. D'une part, il ressort du rapport de présentation du PLU que ce dernier prévoit, dans le cadre d'une orientation d'aménagement programmée (OAP), l'extension de la zone d'activité de Clésud pour une superficie de 55 hectares supplémentaire. Cette extension se fera vers l'ouest, sur une zone composée de verger et vers le nord, sur une zone de 28 hectares composée de prairie irriguée. L'ensemble de cette extension jouxte la zone spéciale de conservation du site Natura 2000 FR9301595 "Crau centrale - Crau sèche", constituée d'une vaste plaine alternant prairie sèche naturelle présentant une végétation steppique unique en France et prairie irriguée, qui forment ensemble 9 habitats élémentaires d'intérêt communautaire dont 3 prioritaires. Elle jouxte également la zone spéciale de protection du site Natura 2000 FR9310064 "Crau", qui, par son avifaune exceptionnelle tant d'un point de vue qualitatif que quantitatif, figure parmi les sites européens à préserver en priorité au titre de la directive " Oiseaux ". Au regard de la proximité immédiate des deux sites Natura 2000, de l'étendue du projet qui fait 55 hectares et de la circonstance que le terrain d'extension se présente comme une zone tampon entre la zone d'activité actuelle et les zones protégées alors même qu'il n'est pas localisé à l'intérieur d'un périmètre de protection, le plan local d'urbanisme doit être regardé comme susceptible d'affecter de manière significative ces sites au sens des dispositions de l'article L. 414-4 du code de l'environnement. Or, il ressort du rapport de présentation que l'évaluation de l'impact du projet sur les sites Natura 2000, s'agissant de la zone de vergers, a des impacts faibles sur les objectifs préservés par les sites Natura 2000. Il ressort en revanche du même rapport que le projet aura des impacts bruts forts sur la faune aviaire inventoriée en 2016 au titre du site Natura 2000 " Crau ", en particulier sur la Outarde canepetière qui présente un enjeu patrimonial très fort et l'Œdicnème criard et le Rollier d'Europe, qui présentent un enjeu patrimonial fort, en tant que le projet réduit d'environ 28 hectares des superficies de prairies bocagères servant d'habitat d'alimentation ou d'hivernage et de zone de chasse ou de nidification potentielle, et dérangera les espèces en phases tant de travaux que d'exploitation, dès lors que le terrain d'assiette sert de zone tampon entre la zone Clésud existante et la prairie steppique appelée coussoul située au nord. Il aura également des impacts bruts qualifiés de moyen par l'étude sur la faune d'intérêt communautaire au titre du site Natura 2000 "Crau centrale - Crau sèche", notamment sur les chiroptères à forte valeur patrimoniale, en réduisant de 28 hectares le périmètre de chasse, en détruisant des gîtes potentiels et des corridors écologiques, en perturbant des routes de vols du fait de pollutions lumineuses et en modifiant les comportements de chasse entrainant une vulnérabilité des espèces du fait de l'augmentation de la ressource alimentaire au niveau des zones éclairées au détriment des zones d'ombre. Or, les mesures de réduction des impacts, consistant en une mise en défense stricte des milieux sensibles en phase travaux, la création d'une haie bocagère en remplacement des haies détruites, des mesures calendaires pour les travaux d'aménagement hors période de reproduction et d'hivernage, des mesures en phase chantier, des mesures d'abattages spécifiques des arbres gîtes, la limitation des nuisances lumineuses, la gestion différenciées des espaces verts, la gestion des eaux pluviales, la limitation de la prolifération des espèces végétales invasives et des mesures de suivi et d'accompagnement, ne permettent pas de réduire suffisamment les incidences potentielles sur le site Natura 2000 de protection des oiseaux qui restent, après application de ces mesures, à un niveau d'incidence qualifié de moyen dans le rapport. Par suite, s'agissant spécifiquement de l'extension du projet Clésud sur les 28 hectares de prairie irriguée en bordure de zone Natura 2000, l'association requérante est fondée à soutenir que sa réalisation porterait atteinte aux objectifs de conservation des deux sites Natura 2000 adjacents. 6. Or, si la commune de Grans prévoit deux mesures compensatoires précisées dans l'OAP Clésud 2 consistant d'abord à compenser la perte de la superficie actuellement occupée par la prairie irriguée au niveau de Clésud 2 grâce à la remise à l'irrigation d'une surface équivalente d'un secteur hydrogéologiquement propice et au sein ou au contact direct avec les habitats et espèces des sites Natura 2000 R9310064 " Crau " et FR9301595 " Crau centrale - Crau sèche " et ensuite à créer ou renforcer les haies plurispécifiques d'un linéaire au minimum équivalent à celui qui ne pourra être compensé sur le site de projet de Clésud 2, elle n'établit ni même n'allègue que l'extension du site Clésud sur les 28 hectares de prairies irriguées pour implanter des bâtiments logistiques constitués d'entrepôts ou de bureaux serait justifiée par des raisons impératives d'intérêt public majeur en l'absence de solution alternative, étant précisé que l'extension du chantier de transport combiné dont il est fait état dans le rapport de présentation est circonscrite dans l'OAP à la zone de verger. Par suite, la commune n'établit pas que l'extension de la zone d'activité de Clésud relève des dérogations prévues par les dispositions précitées de l'article L. 414-4 du code de l'environnement lui permettant de porter atteinte aux objectifs de conservation des deux sites Natura 2000 adjacents. Le plan local d'urbanisme doit dès lors être annulé en tant qu'il prévoit l'extension de la zone Clésud 2 sur 28 hectares de prairie irriguée. 7. D'autre part, il ressort du rapport de présentation du PLU que ce dernier prévoit, dans le cadre d'une autre OAP, le développement de l'habitat à court et moyen terme du quartier des Arènes sur une emprise de 7 hectares. Ce quartier empiète sur le périmètre du site Natura 2000 " Crau centrale - Crau sèche " et son urbanisation aura, aux termes du rapport, des incidences sur ce site et portera des atteintes aux objectifs de conservation des espèces et de leur habitat du fait de l'emprise de 7 hectares sur les prairies de fauche considérées comme un habitat d'intérêt communautaire justifiant le classement en site Natura 2000, lequel sera partiellement imperméabilisé. Le rapport souligne aussi l'emprise du site sur les habitats de l'Agrion de Mercure, la réduction des superficies de territoire de chasse et de corridor écologique pour les chiroptères, la réduction des zones de nidification potentielle du Rollier d'Europe et la réduction des superficies de territoire de chasse de l'avifaune. L'incidence brute globale du projet avant mesure de réduction ou évitement, est considérée comme moyenne, voire même forte pour ce qui concerne les enjeux de conservation de la faune. Les mesures envisagées ne permettent pas de neutraliser cet impact qui est encore qualifié de faible après ces mesures. L'autorité environnementale consultée sur le projet a d'ailleurs émis des réserves quant à l'opportunité d'ouvrir ce secteur à l'urbanisation. Elle indique dans son avis du 7 juin 2017 qu': " une analyse globale en amont (...) aurait permis de requestionner certaines orientations susceptible d'impacts sur l'environnement et d'argumenter les choix de développement de la commune. C'est en particulier le cas pour la zone à vocation d'habitat des Arènes, prévue en site Natura 2000, avec de fortes incidences sur la biodiversité, le paysage et la consommation de surfaces irriguées contribuant au rechargement de la nappe de la Crau, et de nature à favoriser les déplacements automobiles au des détriments des modes actifs " et précise que " le niveau d'incidence faible retenu dans l'évaluation des incidences Natura 2000 parait sous-estimé compte tenu de l'enjeu local de conservation des prairies de foin de Crau. Le pourcentage de surface d'un habitat détruit par rapport à sa surface totale sur un site Natura 2000 n'est pas un indicateur pertinent " avant d'ajouter que les mesures de compensation ne sont pas suffisantes. Par suite, et alors même que le projet en litige concerne une zone limitée à 7 hectares du site Natura 2000 " Crau centrale - Crau sèche ", l'association requérante est fondée à soutenir que le développement de l'urbanisation du quartier des Arènes porterait atteinte aux objectifs de conservation du site Natura 2000. 8. Par ailleurs, la commune de Grans n'établit ni même n'allègue que le maintien de l'urbanisation du site des Arènes à l'urbanisation serait justifié par des raisons impératives d'intérêt public majeur en l'absence de solution alternative. Par suite, la commune n'établit pas que le développement de l'habitat à court et moyen terme du quartier des Arènes relève des dérogations prévues par les dispositions de l'article L. 414-4 du code de l'environnement lui permettant de porter atteinte aux objectifs de conservation du site Natura 2000. Le plan local d'urbanisme doit dès lors être annulé en tant qu'il prévoit l'urbanisation de 7 hectares de prairie irriguée sur la zone des Arènes en la classant en zone IAU. 9. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 123-2-1 du code de l'urbanisme applicable au litige en vertu du premier alinéa du VI de l'article 12 du décret du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme, l'élaboration du plan local d'urbanisme ayant été prescrite avant le 1er janvier 2016 et en l'absence de délibération expresse intervenue avant l'arrêt du projet de plan : " Lorsque le plan local d'urbanisme doit faire l'objet d'une évaluation environnementale conformément aux articles L. 121-10 et suivants, le rapport de présentation : / 1° Expose le diagnostic prévu au deuxième alinéa de l'article L. 123-1-2 et décrit l'articulation du plan avec les autres documents d'urbanisme et les plans ou programmes mentionnés à l'article L. 122-4 du code de l'environnement avec lesquels il doit être compatible ou qu'il doit prendre en considération ; / 2° Analyse l'état initial de l'environnement et les perspectives de son évolution en exposant, notamment, les caractéristiques des zones susceptibles d'être touchées de manière notable par la mise en œuvre du plan ; / 3° Analyse les incidences notables prévisibles de la mise en œuvre du plan sur l'environnement et expose les conséquences éventuelles de l'adoption du plan sur la protection des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement, en particulier l'évaluation des incidences Natura 2000 mentionnée à l'article L. 414-4 du code de l'environnement ; / 4° Explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, au regard notamment des objectifs de protection de l'environnement établis au niveau international, communautaire ou national, et, le cas échéant, les raisons qui justifient le choix opéré au regard des solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d'application géographique du plan. Il expose les motifs de la délimitation des zones, des règles qui y sont applicables et des orientations d'aménagement. Il justifie l'institution des secteurs des zones urbaines où les constructions ou installations d'une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement sont interdites en application du a de l'article L. 123-2 ; / 5° Présente les mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser, s'il y a lieu, les conséquences dommageables de la mise en œuvre du plan sur l'environnement ; / 6° Définit les critères, indicateurs et modalités retenus pour l'analyse des résultats de l'application du plan prévue par l'article L. 123-12-2. Ils doivent permettre notamment de suivre les effets du plan sur l'environnement afin d'identifier, le cas échéant, à un stade précoce, les impacts négatifs imprévus et envisager, si nécessaire, les mesures appropriées ; / 7° Comprend un résumé non technique des éléments précédents et une description de la manière dont l'évaluation a été effectuée. / Le rapport de présentation est proportionné à l'importance du plan local d'urbanisme, aux effets de sa mise en œuvre ainsi qu'aux enjeux environnementaux de la zone considérée (...) ". 10. A l'appui du moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation, l'association requérante soutient que le rapport de présentation n'expose aucune analyse des besoins fonciers en activité et services à l'échelle de la zone d'activités de Clésud dans son ensemble, partagée avec la Commune de Miramas, et ne repositionne pas le projet dans un contexte géographique et temporel plus large, à l'échelle intercommunale ou métropolitaine, n'étudiant aucune alternative à cette extension d'urbanisation. Il ressort au contraire des pages 35 et suivantes que le rapport souligne " l'emplacement géostratégique du site au cœur du pôle économique du Sud de la France ", dans lequel " seuls 8 hectares résiduels, développés sur deux parcelles localisées sur la commune de Miramas, pourraient éventuellement accueillir une à deux nouvelles activités ". Le rapport précise que " le transport combiné de marchandises, dimensionné pour accueillir 39 000 caisses, en accueille aujourd'hui 48 000 ", nécessite un doublement capacitaire, et que les perspectives laissent entrevoir " l'extension ou la création d'un nouveau centre multimodal d'ici 2030 ". Le rapport fait également état, à une échelle territoriale plus large, d'un déficit de foncier disponible sur la métropole Aix-Marseille. Il précise que " sur l'Ouest de l'Etang de Berre, les besoins sont en effet estimés à 440 ha sur 15 ans dont 260 hectares pour les plateformes logistiques. La demande de logistique est tirée par le projet de triplement du trafic de conteneurs du GPMM à l'horizon 2030. Face à une demande estimée de foncier logistique de 260 ha sur les quinze prochaines années, seule une centaine d'hectares (dont Clésud) est aujourd'hui identifiée en dehors du territoire de compétence du Grand Port Maritime de Marseille (GPMM) ". Elle doit dès lors être regardée comme justifiant de son choix d'ouverture à l'urbanisation du site Clésud 2 à défaut de foncier disponible, étant précisé que le rapport détaille les mesures afin d'éviter, réduire et compenser cette extension d'urbanisation en page 398 et suivantes relatives à l'analyse des incidences au titre de Natura 2000. Le même chapitre indique que l'extension d'urbanisation des secteurs des Arènes et du Camp Jouven, après mesures de réduction, ont un impact faible voire nul sur les objectifs de protection de sites Natura 2000. Si l'association requérante soutient, s'agissant de secteur des Arènes, que l'évaluation des incidences Natura 2000 est insuffisante, en se prévalant de l'avis du 7 juin 2017 de la Mission régionale d'autorité environnementale de Provence-Alpes-Côte-d'Azur sur le plan local d'urbanisme de Grans, notamment en ce qu'il ne permet pas d'appréhender les enjeux écologiques et les incidences potentielles du projet, avec la destruction de 7 hectares de prairies fauchées méso hygrophiles méditerranéennes et destruction de l'habitat de l'Agrion Mercure, le rapport de présentation présente toutefois de manière détaillée les atteintes à ces milieux et habitats évalués comme moyennes et présente les mesures de réduction pour diminuer l'atteinte. Si l'association soutient également que l'évaluation est insuffisante en ce qu'elle ne procède pas à l'analyse cumulée des incidences des extensions d'urbanisation prévues au PLU notamment au niveau des zones logistiques en cours de développement sur la Commune de Saint-Martin-de-Crau, la Cour administrative de Marseille a, par un arrêt n° 14MA04062 du 29 octobre 2015, jugé illégal le classement en zone 1AUe du secteur n° 15 pôle logistique de Saint Martin de Crau, sur laquelle la SCI Boussard Sud avait un projet, situé à proximité de la ZSC Crau sèche-Crau centrale et la ZPS Crau, et annulé dans cette mesure la délibération du 5 juillet 2011 approuvant le PLU initial, en sorte qu'aucun impact cumulé entre cette zone et le PLU de Grans ne devait être examiné. Le rapport de présentation permet en revanche d'appréhender l'effet cumulé de la disparation des prairies irriguée de la zone Clésud et des Arènes, l'impact sur chacune des zones ayant été étudié. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation doit être écarté. 11. En troisième lieu, pour apprécier la compatibilité d'un PLU avec un SCOT, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier. 12. Si le SCOT Ouest Etang de Berre prévoit que " les PLU délimitent les espaces naturels identifiés comme réservoir de biodiversité et assurent la stricte protection de leur fonctionnalité écologique " et que, dans les zones agricoles de la Crau, " les PLU devront garantir la vocation agricole pérenne tout en assurant le respect des paysages et des milieux ", il identifie également dans son document d'orientations et d'objectifs (DOO) la zone Clésud comme une zone logistique créatrice d'emploi et précise que ce secteur représente un enjeu majeur pour l'affirmation du territoire au sein d'un espace économique élargi. Le plan d'aménagement et de développement durable (PADD) identifie de même la zone Clésud comme un secteur portuaire / transport / logistique permettant de développer la bimodalité. Ainsi, le plan local communal en prévoyant l'extension de la zone Clésud sur une surface de terre agricole limitée à 55 hectares, en dehors des zones Natura 2000 et de la réserve naturelle régionale tout en prévoyant des mesures d'atténuation et de compensation pour assurer leur fonctionnalité écologique ne peut être regardé comme étant incompatible avec le SCOT Ouest Etang de Berre. 13. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement définissent les conditions d'aménagement et d'équipement de la zone. Les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation peut être subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme. ". 14. Il ressort du rapport de présentation que les auteurs du plan local d'urbanisme ont entendu, s'agissant de l'extension de la zone Clésud, prolonger la zone industrielle existante sur une surface de terre agricole limitée à 55 hectares en dehors des zones Natura 2000 et, s'agissant de la zone des Arènes, conforter une zone déjà ouverte à l'urbanisation dans le prolongement du village existant. Si l'urbanisation de ces secteurs porte atteinte à l'environnement ainsi qu'il a été dit aux points 5 à 8, l'impact résiduel est faible après mesure d'évitement, de réduction et de compensation. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté s'agissant du classement tendant au maintien de l'urbanisation du secteur des Arènes et de l'extension de la zone Clésud. 15. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que l'association France Nature Environnement Bouches-du-Rhône est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation la délibération du 2 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Grans a approuvé la révision n° 1 de son plan local d'urbanisme en tant seulement qu'elle classe en zone 1AUEb la prairie irriguée au nord de la zone Clésud et en zone 1AU le quartier des Arènes ainsi que, dans cette mesure, la décision du 1er février 2018 par laquelle le président de la métropole Aix-Marseille-Provence a rejeté le recours gracieux formé à l'encontre de cette délibération. Sur les frais liés au litige : 16. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". 17. Ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par la commune de Grans soit mise à la charge de l'association France Nature Environnement Bouches-du-Rhône qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, et sur le fondement de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Grans une somme de 2 000 euros à verser à l'association France Nature Environnement Bouches-du-Rhône. D É C I D E : Article 1er : La délibération du 2 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Grans a approuvé la révision n° 1 de son plan local d'urbanisme est annulée en ce qu'elle classe la zone nord de Clésud en secteur 1AUEb et la zone des Arènes en secteur 1AU, ainsi que, dans cette mesure, la décision du 1er février 2018 par laquelle le président de la métropole Aix-Marseille-Provence a rejeté le recours gracieux formé à l'encontre de cette délibération. Article 2 : Le jugement n° 1802636 du 6 avril 2021 du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il est contraire à l'article 1er. Article 3 : La commune de Grans versera la somme de 2 000 euros à l'association France Nature Environnement Bouches-du-Rhône en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Grans, à la Métropole Aix Marseille Provence et à l'association France Nature Environnement Bouches-du-Rhône. Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Quenette, premier conseiller, - M. Mouret, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé M-A. QUENETTELe président, Signé P. d'IZARN de VILLEFORTLa greffière, Signé N. JUAREZ La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoiresen ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 No 21MA02103
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Le jardin d'Emilie a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 ainsi que le remboursement d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des mêmes années. Par un jugement n° 1803844 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé la restitution à l'établissement Le jardin d'Emilie des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 à concurrence respectivement de 202 071 euros, 206 969 euros et 213 155 euros, et rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 27 avril 2020, le 22 juin 2020 et le 24 septembre 2021 sous le n° 20BX01437 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux et ensuite sous le n° 20TL21437 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire enregistré le 20 avril 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour : 1°) d'annuler l'article 1er de ce jugement ; 2°) d'ordonner le remboursement des cotisations de taxe sur les salaires restituées à l'établissement Le jardin d'Emilie au titre des années 2014, 2015 et 2016, pour des montants de 202 071 euros, 206 969 euros et 213 155 euros. Il soutient que l'activité de cet établissement n'est pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors, d'une part, qu'il exerce son activité en agissant en tant qu'autorité publique et, d'autre part, que ce non-assujettissement ne crée pas de distorsion de concurrence d'une certaine importance, de sorte qu'il est assujetti à la taxe sur les salaires. Par deux mémoires, enregistrés le 20 septembre 2021 et le 15 mai 2023, l'établissement Le jardin d'Emilie, représenté par Me Nassiet, conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'il n'exerce pas son activité en agissant en tant qu'autorité publique et que son non-assujettissement crée une distorsion de concurrence d'une certaine importance. Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance. Par ordonnance du 18 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 16 mai 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ; - le code de l'action sociale et des familles ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Restino, - les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique, - et les observations de Me Nassiet, représentant l'établissement Le jardin d'Emilie. Considérant ce qui suit : 1. L'établissement public d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Le jardin d'Emilie, établissement public situé à Caussade (Tarn-et-Garonne), a sollicité la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 ainsi que le remboursement d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des mêmes années. Après le rejet de sa réclamation, l'établissement a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer cette restitution et ce remboursement. Par un jugement du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a fait droit à sa demande de restitution partielle des cotisations de taxe sur les salaires, à hauteur respectivement de de 202 071 euros, 206 969 euros et 213 155 euros, et rejeté le surplus de sa demande. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement en tant qu'il a accordé à l'établissement Le jardin d'Emilie la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires acquittées au titre de des années 2014, 2015 et 2016. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne le moyen de décharge retenu par le tribunal administratif de Toulouse : 2. D'une part, aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés (...) sont soumises à une taxe au taux de 4,25 % de leur montant évalué selon les règles prévues à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale (...). Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes qui emploient ces salariés, (...), qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 13 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée : " 1. Les États, les régions, les départements, les communes et les autres organismes de droit public ne sont pas considérés comme des assujettis pour les activités ou opérations qu'ils accomplissent en tant qu'autorités publiques, même lorsque, à l'occasion de ces activités ou opérations, ils perçoivent des droits, redevances, cotisations ou rétributions. / Toutefois, lorsqu'ils effectuent de telles activités ou opérations, ils doivent être considérés comme des assujettis pour ces activités ou opérations dans la mesure où leur non-assujettissement conduirait à des distorsions de concurrence d'une certaine importance. (...) / 2. Les États membres peuvent considérer comme activités de l'autorité publique les activités des organismes de droit public, lorsqu'elles sont exonérées en vertu des articles 132 (...) ". Aux termes du g du 1 de l'article 132 de cette directive, les États membres exonèrent de la taxe sur la valeur ajoutée " les prestations de services et les livraisons de biens étroitement liées à l'aide et à la sécurité sociales, y compris celles fournies par les maisons de retraite, effectuées par des organismes de droit public ou par d'autres organismes reconnus comme ayant un caractère social par l'État membre concerné (...) ". 4. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ". Aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au troisième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. / (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 256 B du même code : " Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services (...) sociaux (...) lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence ". Aux termes du b du 1° du 7 de l'article 261 du même code, sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée " les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des œuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient (...) ". 5. Il résulte des dispositions citées au point 3, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans son arrêt du 29 octobre 2015 (C-174/14) Saudaçor - Sociedade Gestora de Recursos e Equipamentos da Saúde dos Açores SA, que le non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée prévu en faveur des personnes morales de droit public énumérées au paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006, qui déroge à la règle générale de l'assujettissement de toute activité de nature économique, est subordonné à deux conditions cumulatives tenant, d'une part, à ce que l'activité soit exercée par un organisme agissant en tant qu'autorité publique et, d'autre part, à ce que le non-assujettissement ne conduise pas à des distorsions de concurrence d'une certaine importance. 6. La condition selon laquelle l'activité économique est réalisée par l'organisme public en tant qu'autorité publique est remplie, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, lorsque l'activité en cause est exercée dans le cadre du régime juridique particulier aux personnes morales de droit public. Ainsi, l'activité en cause doit être exercée dans des conditions juridiques différentes de celles des opérateurs économiques privés, notamment, lorsque sont mises en œuvre des prérogatives de puissance publique, lorsque l'activité est accomplie en raison d'une obligation légale ou dans le cadre d'un monopole ou encore lorsqu'elle relève par nature des attributions d'une personne publique. Cette condition peut également, si la législation de l'Etat membre le prévoit, être regardée comme remplie lorsque l'activité exercée est exonérée en application, notamment, de l'article 132 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006. Si cette condition n'est pas remplie, la personne morale de droit public est nécessairement assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée à raison de cette activité économique, sans préjudice des éventuelles exonérations applicables. 7. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles : " I.- Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens du présent code, les établissements et les services, dotés ou non d'une personnalité morale propre, énumérés ci-après : (...) 6° Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées (...) ". Aux termes de l'article L. 314-2 du même code, les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées mentionnées au 6° du I de l'article L. 312-1 du même code " sont financés par : (...) 3° Des tarifs journaliers afférents aux prestations relatives à l'hébergement, fixés par le président du conseil général, dans des conditions précisées par décret et opposables aux bénéficiaires de l'aide sociale accueillis dans des établissements habilités totalement ou partiellement à l'aide sociale à l'hébergement des personnes âgées (...) ". 8. Par les dispositions de l'article 256 B du code général des impôts citées au point 4, la France a fait usage de la possibilité ouverte par le 2 de l'article 13 de la directive du 28 novembre 2006 citée au point 3 lu en combinaison avec le g du 1 de l'article 132 de cette même directive, de regarder comme une activité effectuée en tant qu'autorité publique le service social d'hébergement des personnes âgées dans des structures publiques. 9. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que les premiers juges ont, pour prononcer la restitution des cotisations de taxe sur les salaires en litige, estimé que les prestations fournies par l'établissement Le jardin d'Emilie n'étaient pas exercées par un organisme agissant en tant qu'autorité publique. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par cet établissement devant le tribunal administratif et devant la cour. En ce qui concerne l'autre moyen soulevé par l'établissement Le jardin d'Emilie : 10. Par un arrêt du 16 septembre 2008 (C-288/07) Commissioners of Her Majesty's Revenue et Customs contre Isle of Wight Council et autres, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les distorsions de concurrence d'une certaine importance auxquelles conduirait le non-assujettissement des organismes de droit public agissant en tant qu'autorités publiques doivent être évaluées par rapport à l'activité en cause, en tant que telle, indépendamment de la question de savoir si ces organismes font face ou non à une concurrence au niveau du marché local sur lequel ils accomplissent cette activité, ainsi que par rapport non seulement à la concurrence actuelle, mais également à la concurrence potentielle, pour autant que la possibilité pour un opérateur privé d'entrer sur le marché pertinent soit réelle, et non purement hypothétique. Par un arrêt du 19 janvier 2017 (C- 344/15) National Roads Authority, la même juridiction a précisé que les distorsions de concurrence d'une certaine importance doivent être évaluées en tenant compte des circonstances économiques et que la seule présence d'opérateurs privés sur un marché, sans la prise en compte des éléments de fait, des indices objectifs et de l'analyse de ce marché, ne saurait démontrer ni l'existence d'une concurrence actuelle ou potentielle ni celle d'une distorsion de concurrence d'une certaine importance. Les distorsions de concurrence mentionnées au paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 s'apprécient à la fois au regard de l'activité en cause et des conditions d'exploitation de cette activité. L'existence de telles distorsions ne saurait, dès lors, résulter de la seule constatation que des prestations réalisées par un organisme de droit public sont identiques à celles réalisées par un opérateur privé, sans examen de l'état de la concurrence réelle, ou à défaut potentielle, sur le marché en cause. 11. Eu égard au caractère social des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes publics qui sont habilités à accueillir entièrement ou principalement des personnes âgées à faibles ressources et qui, par suite, sont soumis en principe à une tarification administrée de leurs prestations relatives à l'hébergement de celles-ci, un opérateur privé exerçant cette activité à titre lucratif, libre de choisir sa clientèle et, par suite, de fixer ses tarifs en conséquence, ne saurait être empêché d'entrer sur le marché en cause ou y subir un désavantage du seul fait de son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée qui lui permet, à la différence d'un opérateur public placé hors du champ de celle-ci, d'obtenir le remboursement de l'excédent de la taxe ayant grevé ses charges sur celle dont il est redevable à raison de ses recettes. Par ailleurs, cette même activité exercée sans but lucratif par un opérateur privé est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu du b du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts cité au point 4. 12. Il est constant que l'établissement Le jardin d'Emilie est habilité à accueillir des bénéficiaires de l'aide sociale à l'hébergement pour la totalité des places qu'il offre. Par suite, et sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance qu'il s'en trouverait lui-même désavantagé, son non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ne conduit pas à une distorsion de concurrence au sens et pour l'application de l'article 256 B du code général des impôts, lu à la lumière des dispositions de la directive du 28 novembre 2006 qu'il a pour objet de transposer. 13. Il résulte des points 2 à 12 que les prestations fournies par l'établissement Le jardin d'Emilie ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée. En conséquence, cet établissement est redevable de la taxe instituée à l'article 231 du code général des impôts. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires acquittées par l'établissement Le jardin d'Emilie au titre des années 2014, 2015 et 2016. Sur les frais liés au litige : 15. L'Etat n'étant pas partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par l'établissement Le jardin d'Emilie au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1803844 du tribunal administratif de Toulouse est annulé. Article 2 : La demande présentée par l'établissement Le jardin d'Emilie devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014, 2015 et 2016 est rejetée. Article 3 : Les cotisations primitives de taxe sur les salaires restituées à l'établissement Le jardin d'Emilie au titre des années 2014, 2015 et 2016 sont remises à sa charge. Article 4 : Les conclusions présentées par l'établissement Le jardin d'Emilie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Le jardin d'Emilie. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. Barthez, président, - M. Lafon, président assesseur, - Mme Restino, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, V. RestinoLe président, A. Barthez Le greffier, F. Kinach La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 20TL21437 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Résidence de l'abbaye a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 ainsi que le remboursement d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des mêmes années. Par un jugement n° 1803843 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé la restitution à l'établissement Résidence de l'abbaye des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 à concurrence respectivement de 57 773 euros, 56 604 euros et 61 921 euros, et rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 27 avril 2020, le 22 juin 2020 et le 25 octobre 2021 sous le n° 20BX01438 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux et ensuite sous le n° 20TL21438 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire enregistré le 20 avril 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour : 1°) d'annuler l'article 1er de ce jugement ; 2°) d'ordonner le remboursement des cotisations de taxe sur les salaires restituées à l'établissement Résidence de l'abbaye au titre des années 2014, 2015 et 2016, pour des montants de 57 773 euros, 56 604 euros et 61 921 euros. Il soutient que l'activité de cet établissement n'est pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors, d'une part, qu'il exerce son activité en agissant en tant qu'autorité publique et, d'autre part, que ce non-assujettissement ne crée pas de distorsion de concurrence d'une certaine importance, de sorte qu'il est assujetti à la taxe sur les salaires. Par deux mémoires, enregistrés le 23 septembre 2021 et le 15 mai 2023, l'établissement Résidence de l'abbaye, représenté par Me Nassiet, conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'il n'exerce pas son activité en agissant en tant qu'autorité publique et que son non-assujettissement crée une distorsion de concurrence d'une certaine importance. Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance. Par ordonnance du 18 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 16 mai 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ; - le code de l'action sociale et des familles ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Restino, - les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique, - et les observations de Me Nassiet, représentant l'établissement Résidence de l'abbaye. Considérant ce qui suit : 1. L'établissement public d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Résidence de l'abbaye, établissement public situé à Saint-Antonin-Noble-Val (Tarn-et-Garonne), a sollicité la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 ainsi que le remboursement d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des mêmes années. Après le rejet de sa réclamation, l'établissement a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer cette restitution et ce remboursement. Par un jugement du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a fait droit à sa demande de restitution partielle des cotisations de taxe sur les salaires, à hauteur respectivement de de 57 773 euros, 56 604 euros et 61 921 euros, et rejeté le surplus de sa demande. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement en tant qu'il a accordé à l'établissement Résidence de l'abbaye la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires acquittées au titre de des années 2014, 2015 et 2016. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne le moyen de décharge retenu par le tribunal administratif de Toulouse : 2. D'une part, aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés (...) sont soumises à une taxe au taux de 4,25 % de leur montant évalué selon les règles prévues à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale (...). Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes qui emploient ces salariés, (...), qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 13 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée : " 1. Les États, les régions, les départements, les communes et les autres organismes de droit public ne sont pas considérés comme des assujettis pour les activités ou opérations qu'ils accomplissent en tant qu'autorités publiques, même lorsque, à l'occasion de ces activités ou opérations, ils perçoivent des droits, redevances, cotisations ou rétributions. / Toutefois, lorsqu'ils effectuent de telles activités ou opérations, ils doivent être considérés comme des assujettis pour ces activités ou opérations dans la mesure où leur non-assujettissement conduirait à des distorsions de concurrence d'une certaine importance. (...) / 2. Les États membres peuvent considérer comme activités de l'autorité publique les activités des organismes de droit public, lorsqu'elles sont exonérées en vertu des articles 132 (...) ". Aux termes du g du 1 de l'article 132 de cette directive, les États membres exonèrent de la taxe sur la valeur ajoutée " les prestations de services et les livraisons de biens étroitement liées à l'aide et à la sécurité sociales, y compris celles fournies par les maisons de retraite, effectuées par des organismes de droit public ou par d'autres organismes reconnus comme ayant un caractère social par l'État membre concerné (...) ". 4. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ". Aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au troisième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. / (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 256 B du même code : " Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services (...) sociaux (...) lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence ". Aux termes du b du 1° du 7 de l'article 261 du même code, sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée " les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des œuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient (...) ". 5. Il résulte des dispositions citées au point 3, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans son arrêt du 29 octobre 2015 (C-174/14) Saudaçor - Sociedade Gestora de Recursos e Equipamentos da Saúde dos Açores SA, que le non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée prévu en faveur des personnes morales de droit public énumérées au paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006, qui déroge à la règle générale de l'assujettissement de toute activité de nature économique, est subordonné à deux conditions cumulatives tenant, d'une part, à ce que l'activité soit exercée par un organisme agissant en tant qu'autorité publique et, d'autre part, à ce que le non-assujettissement ne conduise pas à des distorsions de concurrence d'une certaine importance. 6. La condition selon laquelle l'activité économique est réalisée par l'organisme public en tant qu'autorité publique est remplie, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, lorsque l'activité en cause est exercée dans le cadre du régime juridique particulier aux personnes morales de droit public. Ainsi, l'activité en cause doit être exercée dans des conditions juridiques différentes de celles des opérateurs économiques privés, notamment, lorsque sont mises en œuvre des prérogatives de puissance publique, lorsque l'activité est accomplie en raison d'une obligation légale ou dans le cadre d'un monopole ou encore lorsqu'elle relève par nature des attributions d'une personne publique. Cette condition peut également, si la législation de l'Etat membre le prévoit, être regardée comme remplie lorsque l'activité exercée est exonérée en application, notamment, de l'article 132 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006. Si cette condition n'est pas remplie, la personne morale de droit public est nécessairement assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée à raison de cette activité économique, sans préjudice des éventuelles exonérations applicables. 7. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles : " I.- Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens du présent code, les établissements et les services, dotés ou non d'une personnalité morale propre, énumérés ci-après : (...) 6° Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées (...) ". Aux termes de l'article L. 314-2 du même code, les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées mentionnées au 6° du I de l'article L. 312-1 du même code " sont financés par : (...) 3° Des tarifs journaliers afférents aux prestations relatives à l'hébergement, fixés par le président du conseil général, dans des conditions précisées par décret et opposables aux bénéficiaires de l'aide sociale accueillis dans des établissements habilités totalement ou partiellement à l'aide sociale à l'hébergement des personnes âgées (...) ". 8. Par les dispositions de l'article 256 B du code général des impôts citées au point 4, la France a fait usage de la possibilité ouverte par le 2 de l'article 13 de la directive du 28 novembre 2006 citée au point 3 lu en combinaison avec le g du 1 de l'article 132 de cette même directive, de regarder comme une activité effectuée en tant qu'autorité publique le service social d'hébergement des personnes âgées dans des structures publiques. 9. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que les premiers juges ont, pour prononcer la restitution des cotisations de taxe sur les salaires en litige, estimé que les prestations fournies par l'établissement Résidence de l'abbaye n'étaient pas exercées par un organisme agissant en tant qu'autorité publique. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par cet établissement devant le tribunal administratif et devant la cour. En ce qui concerne l'autre moyen soulevé par l'établissement Résidence de l'abbaye : 10. Par un arrêt du 16 septembre 2008 (C-288/07) Commissioners of Her Majesty's Revenue et Customs contre Isle of Wight Council et autres, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les distorsions de concurrence d'une certaine importance auxquelles conduirait le non-assujettissement des organismes de droit public agissant en tant qu'autorités publiques doivent être évaluées par rapport à l'activité en cause, en tant que telle, indépendamment de la question de savoir si ces organismes font face ou non à une concurrence au niveau du marché local sur lequel ils accomplissent cette activité, ainsi que par rapport non seulement à la concurrence actuelle, mais également à la concurrence potentielle, pour autant que la possibilité pour un opérateur privé d'entrer sur le marché pertinent soit réelle, et non purement hypothétique. Par un arrêt du 19 janvier 2017 (C- 344/15) National Roads Authority, la même juridiction a précisé que les distorsions de concurrence d'une certaine importance doivent être évaluées en tenant compte des circonstances économiques et que la seule présence d'opérateurs privés sur un marché, sans la prise en compte des éléments de fait, des indices objectifs et de l'analyse de ce marché, ne saurait démontrer ni l'existence d'une concurrence actuelle ou potentielle ni celle d'une distorsion de concurrence d'une certaine importance. Les distorsions de concurrence mentionnées au paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 s'apprécient à la fois au regard de l'activité en cause et des conditions d'exploitation de cette activité. L'existence de telles distorsions ne saurait, dès lors, résulter de la seule constatation que des prestations réalisées par un organisme de droit public sont identiques à celles réalisées par un opérateur privé, sans examen de l'état de la concurrence réelle, ou à défaut potentielle, sur le marché en cause. 11. Eu égard au caractère social des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes publics qui sont habilités à accueillir entièrement ou principalement des personnes âgées à faibles ressources et qui, par suite, sont soumis en principe à une tarification administrée de leurs prestations relatives à l'hébergement de celles-ci, un opérateur privé exerçant cette activité à titre lucratif, libre de choisir sa clientèle et, par suite, de fixer ses tarifs en conséquence, ne saurait être empêché d'entrer sur le marché en cause ou y subir un désavantage du seul fait de son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée qui lui permet, à la différence d'un opérateur public placé hors du champ de celle-ci, d'obtenir le remboursement de l'excédent de la taxe ayant grevé ses charges sur celle dont il est redevable à raison de ses recettes. Par ailleurs, cette même activité exercée sans but lucratif par un opérateur privé est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu du b du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts cité au point 4. 12. Il est constant que l'établissement Résidence de l'abbaye est habilité à accueillir des bénéficiaires de l'aide sociale à l'hébergement pour la totalité des places qu'il offre. Par suite, et sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance qu'il s'en trouverait lui-même désavantagé, son non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ne conduit pas à une distorsion de concurrence au sens et pour l'application de l'article 256 B du code général des impôts, lu à la lumière des dispositions de la directive du 28 novembre 2006 qu'il a pour objet de transposer. 13. Il résulte des points 2 à 12 que les prestations fournies par l'établissement Résidence de l'abbaye ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée. En conséquence, cet établissement est redevable de la taxe instituée à l'article 231 du code général des impôts. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires acquittées par l'établissement Résidence de l'abbaye au titre des années 2014, 2015 et 2016. Sur les frais liés au litige : 15. L'Etat n'étant pas partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par l'établissement Résidence de l'abbaye au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1803843 du tribunal administratif de Toulouse est annulé. Article 2 : La demande présentée par l'établissement Résidence de l'abbaye devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014, 2015 et 2016 est rejetée. Article 3 : Les cotisations primitives de taxe sur les salaires restituées à l'établissement Résidence de l'abbaye au titre des années 2014, 2015 et 2016 sont remises à sa charge. Article 4 : Les conclusions présentées par l'établissement Résidence de l'abbaye au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Résidence de l'abbaye. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. Barthez, président, - M. Lafon, président assesseur, - Mme Restino, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, V. RestinoLe président, A. Barthez Le greffier, F. Kinach La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 20TL21438 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Résidence du parc de la Corette a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 ainsi que le remboursement d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des mêmes années. Par un jugement n° 1802342 du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé la restitution à l'établissement Résidence du parc de la Corette des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 à concurrence respectivement de 71 549 euros, 78 990 euros et 86 046 euros, et rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 28 février 2020, le 22 juin 2020 et le 25 octobre 2021 sous le n° 20BX00722 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux et ensuite sous le n° 20TL20722 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire enregistré le 20 avril 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour : 1°) d'annuler l'article 1er de ce jugement ; 2°) d'ordonner le remboursement des cotisations de taxe sur les salaires restituées à l'établissement Résidence du parc de la Corette au titre des années 2014, 2015 et 2016, pour des montants de 71 549 euros, 78 990 euros et 86 046 euros. Il soutient que l'activité de cet établissement n'est pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors, d'une part, que cet établissement exerce son activité en agissant en tant qu'autorité publique et, d'autre part, que ce non-assujettissement ne crée pas de distorsion de concurrence d'une certaine importance, de sorte qu'il est assujetti à la taxe sur les salaires. Par deux mémoires, enregistrés le 14 septembre 2021 et le 15 mai 2023, l'établissement Résidence du parc de la Corette, représenté par Me Nassiet, conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'il n'exerce pas son activité en agissant en tant qu'autorité publique et que son non-assujettissement crée une distorsion de concurrence d'une certaine importance. Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance. Par ordonnance du 18 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 16 mai 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ; - le code de l'action sociale et des familles ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Restino, - les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique, - et les observations de Me Nassiet, représentant l'établissement Résidence du parc de la Corette. Considérant ce qui suit : 1. L'établissement public d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Résidence du parc de la Corette, établissement public situé à Mur-de-Barrez (Aveyron), a sollicité la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 ainsi que le remboursement d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des mêmes années. Après le rejet de sa réclamation, l'établissement a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer cette restitution et ce remboursement. Par un jugement du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a fait droit à sa demande de restitution partielle des cotisations de taxe sur les salaires, à hauteur respectivement de 71 549 euros, 78 990 euros et 86 046 euros, et rejeté le surplus de sa demande. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement en tant qu'il a accordé à l'établissement Résidence du parc de la Corette la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires acquittées au titre de des années 2014, 2015 et 2016. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne le moyen de décharge retenu par le tribunal administratif de Toulouse : 2. D'une part, aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés (...) sont soumises à une taxe au taux de 4,25 % de leur montant évalué selon les règles prévues à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale (...). Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes qui emploient ces salariés, (...), qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 13 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée : " 1. Les États, les régions, les départements, les communes et les autres organismes de droit public ne sont pas considérés comme des assujettis pour les activités ou opérations qu'ils accomplissent en tant qu'autorités publiques, même lorsque, à l'occasion de ces activités ou opérations, ils perçoivent des droits, redevances, cotisations ou rétributions. / Toutefois, lorsqu'ils effectuent de telles activités ou opérations, ils doivent être considérés comme des assujettis pour ces activités ou opérations dans la mesure où leur non-assujettissement conduirait à des distorsions de concurrence d'une certaine importance. (...) / 2. Les États membres peuvent considérer comme activités de l'autorité publique les activités des organismes de droit public, lorsqu'elles sont exonérées en vertu des articles 132 (...) ". Aux termes du g du 1 de l'article 132 de cette directive, les États membres exonèrent de la taxe sur la valeur ajoutée " les prestations de services et les livraisons de biens étroitement liées à l'aide et à la sécurité sociales, y compris celles fournies par les maisons de retraite, effectuées par des organismes de droit public ou par d'autres organismes reconnus comme ayant un caractère social par l'État membre concerné (...) ". 4. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ". Aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au troisième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. / (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 256 B du même code : " Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services (...) sociaux (...) lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence ". Aux termes du b du 1° du 7 de l'article 261 du même code, sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée " les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des œuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient (...) ". 5. Il résulte des dispositions citées au point 3, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans son arrêt du 29 octobre 2015 (C-174/14) Saudaçor - Sociedade Gestora de Recursos e Equipamentos da Saúde dos Açores SA, que le non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée prévu en faveur des personnes morales de droit public énumérées au paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006, qui déroge à la règle générale de l'assujettissement de toute activité de nature économique, est subordonné à deux conditions cumulatives tenant, d'une part, à ce que l'activité soit exercée par un organisme agissant en tant qu'autorité publique et, d'autre part, à ce que le non-assujettissement ne conduise pas à des distorsions de concurrence d'une certaine importance. 6. La condition selon laquelle l'activité économique est réalisée par l'organisme public en tant qu'autorité publique est remplie, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, lorsque l'activité en cause est exercée dans le cadre du régime juridique particulier aux personnes morales de droit public. Ainsi, l'activité en cause doit être exercée dans des conditions juridiques différentes de celles des opérateurs économiques privés, notamment, lorsque sont mises en œuvre des prérogatives de puissance publique, lorsque l'activité est accomplie en raison d'une obligation légale ou dans le cadre d'un monopole ou encore lorsqu'elle relève par nature des attributions d'une personne publique. Cette condition peut également, si la législation de l'Etat membre le prévoit, être regardée comme remplie lorsque l'activité exercée est exonérée en application, notamment, de l'article 132 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006. Si cette condition n'est pas remplie, la personne morale de droit public est nécessairement assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée à raison de cette activité économique, sans préjudice des éventuelles exonérations applicables. 7. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles : " I.- Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens du présent code, les établissements et les services, dotés ou non d'une personnalité morale propre, énumérés ci-après : (...) 6° Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées (...) ". Aux termes de l'article L. 314-2 du même code, les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées mentionnées au 6° du I de l'article L. 312-1 du même code " sont financés par : (...) 3° Des tarifs journaliers afférents aux prestations relatives à l'hébergement, fixés par le président du conseil général, dans des conditions précisées par décret et opposables aux bénéficiaires de l'aide sociale accueillis dans des établissements habilités totalement ou partiellement à l'aide sociale à l'hébergement des personnes âgées (...) ". 8. Par les dispositions de l'article 256 B du code général des impôts citées au point 4, la France a fait usage de la possibilité ouverte par le 2 de l'article 13 de la directive du 28 novembre 2006 citée au point 3 lu en combinaison avec le g du 1 de l'article 132 de cette même directive, de regarder comme une activité effectuée en tant qu'autorité publique le service social d'hébergement des personnes âgées dans des structures publiques. 9. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que les premiers juges ont, pour prononcer la restitution des cotisations de taxe sur les salaires en litige, estimé que les prestations fournies par l'établissement Résidence du parc de la Corette n'étaient pas exercées par un organisme agissant en tant qu'autorité publique. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par cet établissement devant le tribunal administratif et devant la cour. En ce qui concerne l'autre moyen soulevé par l'établissement Résidence du parc de la Corette : 10. Par un arrêt du 16 septembre 2008 (C-288/07) Commissioners of Her Majesty's Revenue et Customs contre Isle of Wight Council et autres, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les distorsions de concurrence d'une certaine importance auxquelles conduirait le non-assujettissement des organismes de droit public agissant en tant qu'autorités publiques doivent être évaluées par rapport à l'activité en cause, en tant que telle, indépendamment de la question de savoir si ces organismes font face ou non à une concurrence au niveau du marché local sur lequel ils accomplissent cette activité, ainsi que par rapport non seulement à la concurrence actuelle, mais également à la concurrence potentielle, pour autant que la possibilité pour un opérateur privé d'entrer sur le marché pertinent soit réelle, et non purement hypothétique. Par un arrêt du 19 janvier 2017 (C- 344/15) National Roads Authority, la même juridiction a précisé que les distorsions de concurrence d'une certaine importance doivent être évaluées en tenant compte des circonstances économiques et que la seule présence d'opérateurs privés sur un marché, sans la prise en compte des éléments de fait, des indices objectifs et de l'analyse de ce marché, ne saurait démontrer ni l'existence d'une concurrence actuelle ou potentielle ni celle d'une distorsion de concurrence d'une certaine importance. Les distorsions de concurrence mentionnées au paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 s'apprécient à la fois au regard de l'activité en cause et des conditions d'exploitation de cette activité. L'existence de telles distorsions ne saurait, dès lors, résulter de la seule constatation que des prestations réalisées par un organisme de droit public sont identiques à celles réalisées par un opérateur privé, sans examen de l'état de la concurrence réelle, ou à défaut potentielle, sur le marché en cause. 11. Eu égard au caractère social des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes publics qui sont habilités à accueillir entièrement ou principalement des personnes âgées à faibles ressources et qui, par suite, sont soumis en principe à une tarification administrée de leurs prestations relatives à l'hébergement de celles-ci, un opérateur privé exerçant cette activité à titre lucratif, libre de choisir sa clientèle et, par suite, de fixer ses tarifs en conséquence, ne saurait être empêché d'entrer sur le marché en cause ou y subir un désavantage du seul fait de son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée qui lui permet, à la différence d'un opérateur public placé hors du champ de celle-ci, d'obtenir le remboursement de l'excédent de la taxe ayant grevé ses charges sur celle dont il est redevable à raison de ses recettes. Par ailleurs, cette même activité exercée sans but lucratif par un opérateur privé est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu du b du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts cité au point 4. 12. Il est constant que l'établissement Résidence du parc de la Corette est habilité à accueillir des bénéficiaires de l'aide sociale à l'hébergement pour la totalité des places qu'il offre. Par suite, et sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance qu'il s'en trouverait lui-même désavantagé, son non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ne conduit pas à une distorsion de concurrence au sens et pour l'application de l'article 256 B du code général des impôts, lu à la lumière des dispositions de la directive du 28 novembre 2006 qu'il a pour objet de transposer. 13. Il résulte des points 2 à 12 que les prestations fournies par l'établissement Résidence du parc de la Corette ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée. En conséquence, cet établissement est redevable de la taxe instituée à l'article 231 du code général des impôts. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires acquittées par l'établissement Résidence du parc de la Corette au titre des années 2014, 2015 et 2016. Sur les frais liés au litige : 15. L'Etat n'étant pas partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par l'établissement Résidence du parc de la Corette au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1802342 du tribunal administratif de Toulouse est annulé. Article 2 : La demande présentée par l'établissement Résidence du parc de la Corette devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014, 2015 et 2016 est rejetée. Article 3 : Les cotisations primitives de taxe sur les salaires restituées à l'établissement Résidence du parc de la Corette au titre des années 2014, 2015 et 2016 sont remises à sa charge. Article 4 : Les conclusions présentées par l'établissement Résidence du Parc de la Corette au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Résidence du parc de la Corette. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. Barthez, président, - M. Lafon, président assesseur, - Mme Restino, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, V. RestinoLe président, A. Barthez Le greffier, F. Kinach La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 20TL20722 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 3 novembre 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. Par un jugement n° 2206495 du 14 novembre 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté. Procédure devant la cour : I. Par une requête enregistrée le 16 décembre 2022 sous le n° 22TL22575, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Toulouse. Il soutient que : - la requête est recevable ; - la méconnaissance du droit d'être entendu ne saurait entacher sa décision d'illégalité car M. A... constitue une menace grave à l'ordre public dès lors que celui-ci ne fait état d'aucun élément suffisamment pertinent pour être susceptible d'influer sur le contenu de la décision prise le 3 novembre 2022. Par une ordonnance du 14 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 mai 2023. II. Par une requête enregistrée le 16 décembre 2022 sous le n° 22TL22576, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement n°2206495 rendu le 14 novembre 2022 par le tribunal administratif de Toulouse. Il soutient que le moyen d'annulation sur lequel est fondée sa requête au fond présente un caractère sérieux. Par une ordonnance du 14 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 mai 2023. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Barthez a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant roumain né le 9 juillet 1982, déclare être entré en France en 2011. Il a été condamné plusieurs fois, notamment en 2021, pour des faits de vol. A la levée d'écrou de M. A..., le 3 novembre 2022, le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre un arrêté l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et l'interdisant de retour sur le territoire pour une durée de trois ans. Par la requête n° 22TL22575, le préfet de la Haute-Garonne fait appel du jugement du 14 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté au motif qu'il avait méconnu le droit d'être entendu de M. A.... Par la requête n° 22TL22576, il demande à la cour d'en prononcer le sursis à exécution. 2. Les requêtes n° 22TL22575 et n° 22TL22576 présentées par le préfet de la Haute-Garonne étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt. Sur la requête n° 22TL22575 : 3. Pour prononcer l'annulation de l'arrêté du 3 novembre 2022 du préfet de la Haute-Garonne, pris à l'encontre de M. A..., portant obligation de quitter le territoire français sans un délai et l'interdisant de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a estimé qu'en adoptant la décision attaquée, le préfet avait méconnu son droit d'être entendu. 4. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait être interprété en ce sens que l'autorité compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause. Une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision est prise que si l'intéressé a été privé de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction. 5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... n'a été entendu pour la dernière fois que le 2 avril 2019 et n'a pu présenter des informations au plus tard à l'autorité préfectorale que le 6 octobre 2021 par une fiche de renseignements. Depuis cette date, M. A... n'a été ni entendu, ni invité à faire des observations. Il n'a pu ainsi informer le préfet que sa dernière peine de prison a été effectuée sous le régime de la semi-liberté à partir du 30 mars 2022, qu'il a conclu un contrat à durée indéterminée le 28 janvier 2022 pour un emploi à temps plein et, surtout, que sa compagne a accouché de leur second enfant vingt jours avant la décision du préfet de la Haute-Garonne. Ces éléments pertinents relatifs à sa situation personnelle, dont l'exactitude matérielle est admise par le préfet, auraient pu influer, ainsi que l'a considéré le premier juge, sur la décision d'éloignement en litige, quand bien même il présentait une menace à l'ordre public. Le préfet de la Haute-Garonne n'est donc pas fondé à soutenir que le droit d'être entendu de M. A... n'aurait pas été méconnu. 6. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 3 novembre 2022 et a mis à la charge de l'Etat le versement au conseil de M. A... de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Sur la requête n° 22TL22576 : 7. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation du jugement n° 2206495 du 14 novembre 2022 du tribunal administratif de Toulouse, les conclusions de la requête n° 22TL22576 tendant au sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet. D E C I D E : Article 1er : La requête n° 22TL22575 du préfet de la Haute-Garonne est rejetée. Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 22TL22576 tendant au sursis à exécution du jugement. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. B... A.... Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Barthez, président, M. Lafon, président assesseur, Mme Restino, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le président-rapporteur, A. Barthez L'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau, N. Lafon Le greffier, F. Kinach Le République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N° 22TL22575, 22TL22576 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 3 décembre 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement n° 2102309 du 25 octobre 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté. Procédure devant la cour : I. Par une requête enregistrée le 21 novembre 2022 sous le n° 22TL22326, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Toulouse. Il soutient que l'arrêté du 3 décembre 2020 ne méconnaît pas le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant car les enfants de Mme B... peuvent être pris en charge dans leur pays d'origine et cet arrêté n'a pas vocation à séparer la famille. Par un mémoire en défense enregistré le 13 janvier 2023, Mme B..., représentée par Me Chmani, demande à la cour de l'admettre provisoirement à l'aide juridictionnelle, de rejeter la requête d'appel du préfet de la Haute-Garonne et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - le moyen soulevé par le préfet de la Haute-Garonne n'est pas fondé ; - la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet de la Haute-Garonne s'est estimé lié par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - elle est entachée d'un défaut de motivation ; - elle méconnaît la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision accordant un délai de trente jours pour exécuter l'obligation de quitter le territoire français est privée de base légale ; - elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ; - elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet de la Haute-Garonne s'étant estimé en situation de compétence liée pour lui accorder un délai limité à trente jours ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - le décision fixant le pays de renvoi est entachée d'un défaut de motivation. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 février 2023. Par une ordonnance du 18 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 mai 2023. II. Par une requête enregistrée le 21 novembre 2022 sous le n° 22TL22327, le préfet de la Haute-Garonne demande le sursis à exécution du jugement n° 2102309 du 25 octobre 2022 du tribunal administratif de Toulouse. Il soutient que les moyens d'annulation sur lesquels est fondée sa requête au fond présentent un caractère sérieux. Par un mémoire en défense enregistré le 13 janvier 2023, Mme B..., représentée par Me Chmani conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - les moyens soulevés par le préfet de la Haute-Garonne ne sont pas fondés ; - la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet de la Haute-Garonne s'est estimé lié par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - elle est entachée d'un défaut de motivation ; - elle méconnaît la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision accordant un délai de trente jours pour exécuter l'obligation de quitter le territoire français est privée de base légale ; - elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ; - elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet de la Haute-Garonne s'étant estimé en situation de compétence liée pour lui accorder un délai limité à trente jours ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - le décision fixant le pays de renvoi est entachée d'un défaut de motivation. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 février 2023. Par une ordonnance du 18 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 mai 2023. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ; - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Barthez a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ressortissante algérienne née le 6 juin 1985, est entrée en France le 19 mai 2018 sous couvert d'un visa de quatre-vingt-dix jours, avec ses trois enfants mineurs. Elle a sollicité le 12 mars 2019 la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'accompagnante de deux de ses enfants, en raison de leur état de santé. Le 30 juillet 2020, elle a demandé son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale. Par un arrêté du 3 décembre 2020, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. Par la requête n° 22TL22326, le préfet de la Haute-Garonne fait appel du jugement du 25 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté au motif qu'il méconnaissait le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Par la requête n° 22TL22327, il demande à la cour d'en prononcer le sursis à exécution. 2. Les requêtes n° 22TL22326 et n° 22TL22327 présentées par le préfet de la Haute-Garonne étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt. Sur les conclusions de Mme B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire : 3. Aux termes de l'article 8 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Toute personne admise à l'aide juridictionnelle en conserve de plein droit le bénéfice pour se défendre en cas d'exercice d'une voie de recours ". L'article 20 de la même loi dispose que : " Dans les cas d'urgence, (...) l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président (...) ". 4. Il résulte de ces dispositions que Mme B..., qui a bénéficié de l'aide juridictionnelle pour l'instance qu'elle a introduite devant le tribunal administratif de Toulouse, en conserve de plein droit le bénéfice, ainsi que l'a constaté le bureau d'aide juridictionnelle dans ses décisions du 8 février 2023. Les conclusions tendant à l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont donc devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer. Sur la requête n° 22TL22326 : En ce qui concerne le bien-fondé du moyen retenu par le tribunal administratif : 5. Pour prononcer l'annulation de l'arrêté du 3 décembre 2020 du préfet de la Haute-Garonne, pris à l'encontre de la requérante, le tribunal administratif de Toulouse a estimé qu'en rejetant sa demande de titre de séjour, le préfet de la Haute-Garonne avait méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, notamment du fait que l'interruption des soins dont deux des enfants de Mme B... bénéficient en France porterait atteinte à leur intérêt supérieur. 6. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". 7. D'une part, Mme B... a demandé un certificat de résidence afin de rester auprès de ses fils F..., né le 3 février 2009, et C..., né le 1er novembre 2012, pendant que ceux-ci sont soignés en France. Par deux avis du 20 mai 2019 et du 17 février 2020, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a indiqué, d'une part, que les fils de Mme B... nécessitent un traitement médical dont le défaut est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et, d'autre part, qu'ils peuvent toutefois bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie. Il ressort des pièces du dossier que l'enfant E... D... est atteint d'autisme grave et a été reconnu handicapé avec un taux d'incapacité supérieur ou égal 80 %, ce qui a entraîné une prise en charge par une structure multidisciplinaire, et que l'enfant C... a été hospitalisé du 27 juillet au 14 août 2020 et bénéficie aussi d'un accompagnement multidisciplinaire. Ces enfants, dont l'état de santé nécessite une surveillance constante, sont accueillis à plein temps dans des instituts médico-éducatifs où ils bénéficient d'un accompagnement spécifique. Toutefois, afin d'établir que l'autisme n'est pas correctement pris en charge en Algérie, Mme B... produit principalement des articles de presse mentionnant notamment une carence des moyens et des retards dans la prise en charge, et des certificats médicaux de deux médecins algériens se bornant à indiquer qu'un dispositif médico-social pluridimensionnel est nécessaire pour les deux enfants, alors que le préfet de la Haute-Garonne produit également des articles de presse de 2017 et 2019 mentionnant de nouveaux outils de diagnostics de l'autisme, l'ouverture de dix-sept services de pédopsychiatrie, d'un centre national pour enfants autistes à Oran ainsi que d'une école pour enfants autistes à Tizi-Ouzou. En outre, en 2016, un programme national de prise en charge de l'autisme a été lancé en Algérie. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que les enfants de Mme B... ne pourraient bénéficier d'une prise en charge médicale adaptée en cas de retour dans leur pays d'origine. 8. D'autre part, Mme B... est entrée en France le 19 mai 2018, accompagnée de ses trois enfants mineurs. Elle a vécu en Algérie jusqu'à l'âge de trente-trois ans et il n'est pas établi qu'elle n'y aurait plus d'attaches personnelles et familiales. La décision portant refus de titre de séjour contestée n'a pas pour objet de séparer Mme B... de ses enfants dès lors qu'il n'est ni établi ni même allégué que ses enfants ne pourraient pas y poursuivre leur scolarité et que, comme il a été dit au point précédent, les enfants E... D... et C... pourront également bénéficier effectivement d'une prise en charge appropriée en Algérie. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté. Le préfet de la Haute-Garonne est donc fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur un tel moyen pour annuler l'arrêté contesté. 9. Il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... tant en première instance qu'en appel à l'encontre des décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi. En ce qui concerne les autres moyens soulevés par Mme B... : S'agissant des moyens communs : 10. En premier lieu, l'arrêté en litige vise les textes dont il fait application, mentionne les faits relatifs à la situation personnelle et administrative de Mme B... et indique les raisons pour lesquelles le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Il mentionne notamment que l'état de santé des enfants de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins disponible en Algérie, ils pourraient effectivement y bénéficier d'un traitement approprié. Il indique par ailleurs que les liens personnels et familiaux en France de l'intéressée n'étant pas anciens, intenses et stables et compte tenu du fait qu'elle a vécu dans son pays d'origine, où elle n'établit pas être dépourvue de toute attache, jusqu'à une date récente, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à sa situation personnelle et à sa vie familiale. Il a ajouté que Mme B... n'établissait pas qu'elle risquerait de subir, en cas de retour dans son pays, des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces indications ont permis à l'intéressée de comprendre et de contester les décisions prises à son encontre. Le préfet de la Haute-Garonne a donc suffisamment motivé ses décisions. En tout état de cause, en l'absence de demande en ce sens, il n'avait pas à indiquer les motifs pour lesquels il n'avait pas accordé un délai supérieur au délai de droit commun de trente jours pour exécuter volontairement la mesure d'éloignement. Il s'ensuit que le moyen tiré du défaut de motivation des décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination doit être écarté. S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour : 11. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de la motivation précédemment rappelée de l'arrêté contesté, que le préfet de la Haute-Garonne se serait cru lié par les avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration concernant les enfants de Mme B.... 12. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien (...) dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". 13. D'autre part, les dispositions de l'article L. 313-11, ainsi que celles de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au bénéfice des parents d'enfants dont l'état de santé répond aux conditions prévues par le 11° de l'article L. 313-11 du même code, ne sont pas applicables aux ressortissants algériens, dont la situation est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Toutefois, si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation. 14. Eu égard aux circonstances de fait précédemment mentionnées, notamment aux points 7 et 8, le préfet de la Haute-Garonne n'a ni méconnu les stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire de régularisation, commis aucune erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer à Mme B... un titre de séjour. S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français : 15. En premier lieu, les moyens tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour étant écartés, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale. 16. En deuxième lieu, il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédures administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Dès lors, les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, notamment celles des articles L. 121-1 et L. 122-1, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées, ne sauraient être utilement invoquées à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions du code des relations entre le public et l'administration, relative à la procédure contradictoire préalable, doit donc être écarté. 17. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment, en particulier des circonstances de fait mentionnées aux points 7 et 8, que les moyens tirés, d'une part, de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation de l'intéressée et, d'autre part, de la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent également être écartés S'agissant de la décision fixant le délai de départ volontaire : 18. En premier lieu, les moyens tendant à l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français étant écartés, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le délai de départ à une durée de trente jours pour exécuter cette obligation serait dépourvue de base légale. 19. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des termes de l'arrêté contesté, que le préfet de la Haute-Garonne n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de la situation de Mme B... en lui accordant un délai de trente jours pour exécuter la mesure d'éloignement. Pour les mêmes motifs, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Haute-Garonne se serait cru en situation de compétence liée pour fixer le délai de départ volontaire à une durée de trente jours. 20. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment, en particulier des circonstances de fait mentionnées aux points 7 et 8, que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation de l'intéressée doit être écarté. S'agissant de la décision fixant le pays de destination : 21. Il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des termes de l'arrêté contesté, que le préfet de la Haute-Garonne n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de la situation de Mme B... en fixant l'Algérie comme pays de destination. Sur la requête n° 22TL22327 : 22. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation du jugement n° 2102309 du 25 octobre 2022 du tribunal administratif de Toulouse, les conclusions de la requête n° 22TL22327 tendant au sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet. 23. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 3 décembre 2020 par lequel il a rejeté la demande de titre de séjour de Mme B..., l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Sur les frais liés au litige : 24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser au conseil de Mme B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme B... tendant à l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Article 2 : Le jugement n° 2102309 du 25 octobre 2022 du tribunal administratif de Toulouse est annulé. Article 3 : Les conclusions présentées par Mme B... devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 décembre 2020 et les conclusions d'appel sont rejetées. Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 22TL22327 tendant au sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à Mme A... B... et à Me Malika Chmani. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Barthez, président, M. Lafon, président assesseur, Mme Restino, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le président-rapporteur, A. Barthez L'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau, N. LafonLe greffier, F. Kinach Le République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N° 22TL22326, 22TL22327 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Le parc et l'ostal de Garona a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 ainsi que le remboursement d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des mêmes années. Par un jugement n° 1803845 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé la restitution à l'établissement Le parc et l'ostal de Garona des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 à concurrence respectivement de 189 158 euros, 195 865 euros et 199 250 euros, et rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 29 avril 2020, le 22 juin 2020 et le 25 octobre 2021 sous le n° 20BX01475 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux et ensuite sous le n° 20TL21475 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire enregistré le 20 avril 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour : 1°) d'annuler l'article 1er de ce jugement ; 2°) d'ordonner le remboursement des cotisations de taxe sur les salaires restituées à l'établissement Le parc et l'ostal de Garona au titre des années 2014, 2015 et 2016, pour des montants de 189 158 euros, 195 865 euros et 199 250 euros. Il soutient que l'activité de cet établissement n'est pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors, d'une part, qu'il exerce son activité en agissant en tant qu'autorité publique et, d'autre part, que ce non-assujettissement ne crée pas de distorsion de concurrence d'une certaine importance, de sorte qu'il est assujetti à la taxe sur les salaires. Par deux mémoires, enregistrés le 5 octobre 2021 et le 15 mai 2023, l'établissement Le parc et l'ostal de Garona, représenté par Me Nassiet, conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'il n'exerce pas son activité en agissant en tant qu'autorité publique et que son non-assujettissement crée une distorsion de concurrence d'une certaine importance. Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance. Par ordonnance du 18 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 16 mai 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ; - le code de l'action sociale et des familles ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Restino, - les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique, - et les observations de Me Nassiet, représentant l'établissement Le parc et l'ostal de Garona. Considérant ce qui suit : 1. L'établissement public d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Le parc et l'ostal de Garona, établissement public situé à Montech (Tarn-et-Garonne), a sollicité la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2014, 2015 et 2016 ainsi que le remboursement d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des mêmes années. Après le rejet de sa réclamation, l'établissement a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer cette restitution et ce remboursement. Par un jugement du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a fait droit à sa demande de restitution partielle des cotisations de taxe sur les salaires, à hauteur respectivement de 189 158 euros, 195 865 euros et 199 250 euros, et rejeté le surplus de sa demande. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement en tant qu'il a accordé à l'établissement Le parc et l'ostal de Garona la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires acquittées au titre de des années 2014, 2015 et 2016. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne le moyen de décharge retenu par le tribunal administratif de Toulouse : 2. D'une part, aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés (...) sont soumises à une taxe au taux de 4,25 % de leur montant évalué selon les règles prévues à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale (...). Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes qui emploient ces salariés, (...), qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 13 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée : " 1. Les États, les régions, les départements, les communes et les autres organismes de droit public ne sont pas considérés comme des assujettis pour les activités ou opérations qu'ils accomplissent en tant qu'autorités publiques, même lorsque, à l'occasion de ces activités ou opérations, ils perçoivent des droits, redevances, cotisations ou rétributions. / Toutefois, lorsqu'ils effectuent de telles activités ou opérations, ils doivent être considérés comme des assujettis pour ces activités ou opérations dans la mesure où leur non-assujettissement conduirait à des distorsions de concurrence d'une certaine importance. (...) / 2. Les États membres peuvent considérer comme activités de l'autorité publique les activités des organismes de droit public, lorsqu'elles sont exonérées en vertu des articles 132 (...) ". Aux termes du g du 1 de l'article 132 de cette directive, les États membres exonèrent de la taxe sur la valeur ajoutée " les prestations de services et les livraisons de biens étroitement liées à l'aide et à la sécurité sociales, y compris celles fournies par les maisons de retraite, effectuées par des organismes de droit public ou par d'autres organismes reconnus comme ayant un caractère social par l'État membre concerné (...) ". 4. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ". Aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au troisième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. / (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 256 B du même code : " Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services (...) sociaux (...) lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence ". Aux termes du b du 1° du 7 de l'article 261 du même code, sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée " les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des œuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient (...) ". 5. Il résulte des dispositions citées au point 3, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans son arrêt du 29 octobre 2015 (C-174/14) Saudaçor - Sociedade Gestora de Recursos e Equipamentos da Saúde dos Açores SA, que le non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée prévu en faveur des personnes morales de droit public énumérées au paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006, qui déroge à la règle générale de l'assujettissement de toute activité de nature économique, est subordonné à deux conditions cumulatives tenant, d'une part, à ce que l'activité soit exercée par un organisme agissant en tant qu'autorité publique et, d'autre part, à ce que le non-assujettissement ne conduise pas à des distorsions de concurrence d'une certaine importance. 6. La condition selon laquelle l'activité économique est réalisée par l'organisme public en tant qu'autorité publique est remplie, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, lorsque l'activité en cause est exercée dans le cadre du régime juridique particulier aux personnes morales de droit public. Ainsi, l'activité en cause doit être exercée dans des conditions juridiques différentes de celles des opérateurs économiques privés, notamment, lorsque sont mises en œuvre des prérogatives de puissance publique, lorsque l'activité est accomplie en raison d'une obligation légale ou dans le cadre d'un monopole ou encore lorsqu'elle relève par nature des attributions d'une personne publique. Cette condition peut également, si la législation de l'Etat membre le prévoit, être regardée comme remplie lorsque l'activité exercée est exonérée en application, notamment, de l'article 132 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006. Si cette condition n'est pas remplie, la personne morale de droit public est nécessairement assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée à raison de cette activité économique, sans préjudice des éventuelles exonérations applicables. 7. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles : " I.- Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens du présent code, les établissements et les services, dotés ou non d'une personnalité morale propre, énumérés ci-après : (...) 6° Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées (...) ". Aux termes de l'article L. 314-2 du même code, les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées mentionnées au 6° du I de l'article L. 312-1 du même code " sont financés par : (...) 3° Des tarifs journaliers afférents aux prestations relatives à l'hébergement, fixés par le président du conseil général, dans des conditions précisées par décret et opposables aux bénéficiaires de l'aide sociale accueillis dans des établissements habilités totalement ou partiellement à l'aide sociale à l'hébergement des personnes âgées (...) ". 8. Par les dispositions de l'article 256 B du code général des impôts citées au point 4, la France a fait usage de la possibilité ouverte par le 2 de l'article 13 de la directive du 28 novembre 2006 citée au point 3 lu en combinaison avec le g du 1 de l'article 132 de cette même directive, de regarder comme une activité effectuée en tant qu'autorité publique le service social d'hébergement des personnes âgées dans des structures publiques. 9. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que les premiers juges ont, pour prononcer la restitution des cotisations de taxe sur les salaires en litige, estimé que les prestations fournies par l'établissement Le parc et l'ostal de Garona n'étaient pas exercées par un organisme agissant en tant qu'autorité publique. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par cet établissement devant le tribunal administratif et devant la cour. En ce qui concerne l'autre moyen soulevé par l'établissement Le parc et l'ostal de Garona : 10. Par un arrêt du 16 septembre 2008 (C-288/07) Commissioners of Her Majesty's Revenue et Customs contre Isle of Wight Council et autres, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les distorsions de concurrence d'une certaine importance auxquelles conduirait le non-assujettissement des organismes de droit public agissant en tant qu'autorités publiques doivent être évaluées par rapport à l'activité en cause, en tant que telle, indépendamment de la question de savoir si ces organismes font face ou non à une concurrence au niveau du marché local sur lequel ils accomplissent cette activité, ainsi que par rapport non seulement à la concurrence actuelle, mais également à la concurrence potentielle, pour autant que la possibilité pour un opérateur privé d'entrer sur le marché pertinent soit réelle, et non purement hypothétique. Par un arrêt du 19 janvier 2017 (C- 344/15) National Roads Authority, la même juridiction a précisé que les distorsions de concurrence d'une certaine importance doivent être évaluées en tenant compte des circonstances économiques et que la seule présence d'opérateurs privés sur un marché, sans la prise en compte des éléments de fait, des indices objectifs et de l'analyse de ce marché, ne saurait démontrer ni l'existence d'une concurrence actuelle ou potentielle ni celle d'une distorsion de concurrence d'une certaine importance. Les distorsions de concurrence mentionnées au paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 s'apprécient à la fois au regard de l'activité en cause et des conditions d'exploitation de cette activité. L'existence de telles distorsions ne saurait, dès lors, résulter de la seule constatation que des prestations réalisées par un organisme de droit public sont identiques à celles réalisées par un opérateur privé, sans examen de l'état de la concurrence réelle, ou à défaut potentielle, sur le marché en cause. 11. Eu égard au caractère social des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes publics qui sont habilités à accueillir entièrement ou principalement des personnes âgées à faibles ressources et qui, par suite, sont soumis en principe à une tarification administrée de leurs prestations relatives à l'hébergement de celles-ci, un opérateur privé exerçant cette activité à titre lucratif, libre de choisir sa clientèle et, par suite, de fixer ses tarifs en conséquence, ne saurait être empêché d'entrer sur le marché en cause ou y subir un désavantage du seul fait de son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée qui lui permet, à la différence d'un opérateur public placé hors du champ de celle-ci, d'obtenir le remboursement de l'excédent de la taxe ayant grevé ses charges sur celle dont il est redevable à raison de ses recettes. Par ailleurs, cette même activité exercée sans but lucratif par un opérateur privé est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu du b du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts cité au point 4. 12. Il est constant que l'établissement Le parc et l'ostal de Garona est habilité à accueillir des bénéficiaires de l'aide sociale à l'hébergement pour la totalité des places qu'il offre. Par suite, et sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance qu'il s'en trouverait lui-même désavantagé, son non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ne conduit pas à une distorsion de concurrence au sens et pour l'application de l'article 256 B du code général des impôts, lu à la lumière des dispositions de la directive du 28 novembre 2006 qu'il a pour objet de transposer. 13. Il résulte des points 2 à 12 que les prestations fournies par l'établissement Le parc et l'ostal de Garona ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée. En conséquence, cet établissement est redevable de la taxe instituée à l'article 231 du code général des impôts. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires acquittées par l'établissement Le parc et l'ostal de Garona au titre des années 2014, 2015 et 2016. Sur les frais liés au litige : 15. L'Etat n'étant pas partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par l'établissement Le parc et l'ostal de Garona au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1803845 du tribunal administratif de Toulouse est annulé. Article 2 : La demande présentée par l'établissement Le parc et l'ostal de Garona devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014, 2015 et 2016 est rejetée. Article 3 : Les cotisations primitives de taxe sur les salaires restituées à l'établissement Le parc et l'ostal de Garona au titre des années 2014, 2015 et 2016 sont remises à sa charge. Article 4 : Les conclusions présentées par l'établissement Le parc et l'ostal de Garona au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Le parc et l'ostal de Garona. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. Barthez, président, - M. Lafon, président assesseur, - Mme Restino, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, V. RestinoLe président, A. Barthez Le greffier, F. Kinach La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 20TL21475 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Résidence du pays capdenacois a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2015, 2016 et 2017 ainsi que le remboursement d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des mêmes années. Par un jugement n° 1805557 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé la restitution à l'établissement Résidence du pays capdenacois des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2015, 2016 et 2017 à concurrence respectivement de 132 478 euros, 119 130 euros et 122 999 euros, et rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 27 avril 2020, le 22 juin 2020 et le 25 octobre 2021 sous le n° 20BX01439 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux et ensuite sous le n° 20TL21439 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire enregistré le 20 avril 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour : 1°) d'annuler l'article 1er de ce jugement ; 2°) d'ordonner le remboursement des cotisations de taxe sur les salaires restituées à l'établissement Résidence du pays capdenacois au titre des années 2015, 2016 et 2017, pour des montants de 132 478 euros, 119 130 euros et 122 999 euros. Il soutient que l'activité de cet établissement n'est pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors, d'une part, qu'il exerce son activité en agissant en tant qu'autorité publique et, d'autre part, que ce non-assujettissement ne crée pas de distorsion de concurrence d'une certaine importance, de sorte qu'il est assujetti à la taxe sur les salaires. Par deux mémoires, enregistrés le 5 octobre 2021 et le 15 mai 2023, l'établissement Résidence du pays capdenacois, représenté par Me Nassiet, conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'il n'exerce pas son activité en agissant en tant qu'autorité publique et que son non-assujettissement crée une distorsion de concurrence d'une certaine importance. Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance. Par ordonnance du 18 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 16 mai 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ; - le code de l'action sociale et des familles ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Restino, - les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique, - et les observations de Me Nassiet, représentant l'établissement Résidence du pays capdenacois. Considérant ce qui suit : 1. L'établissement public d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Résidence du pays capdenacois, établissement public situé à Capdenac-Gare (Aveyron), a sollicité la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires qu'il a acquittées au titre des années 2015, 2016 et 2017 ainsi que le remboursement d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre des mêmes années. Après le rejet de sa réclamation, l'établissement a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer cette restitution et ce remboursement. Par un jugement du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a fait droit à sa demande de restitution partielle des cotisations de taxe sur les salaires, à hauteur respectivement de 132 478 euros, 119 130 euros et 122 999 euros, et rejeté le surplus de sa demande. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement en tant qu'il a accordé à l'établissement Résidence du pays capdenacois la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires acquittées au titre de des années 2015, 2016 et 2017. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne le moyen de décharge retenu par le tribunal administratif de Toulouse : 2. D'une part, aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés (...) sont soumises à une taxe au taux de 4,25 % de leur montant évalué selon les règles prévues à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale (...). Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes qui emploient ces salariés, (...), qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 13 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée : " 1. Les États, les régions, les départements, les communes et les autres organismes de droit public ne sont pas considérés comme des assujettis pour les activités ou opérations qu'ils accomplissent en tant qu'autorités publiques, même lorsque, à l'occasion de ces activités ou opérations, ils perçoivent des droits, redevances, cotisations ou rétributions. / Toutefois, lorsqu'ils effectuent de telles activités ou opérations, ils doivent être considérés comme des assujettis pour ces activités ou opérations dans la mesure où leur non-assujettissement conduirait à des distorsions de concurrence d'une certaine importance. (...) / 2. Les États membres peuvent considérer comme activités de l'autorité publique les activités des organismes de droit public, lorsqu'elles sont exonérées en vertu des articles 132 (...) ". Aux termes du g du 1 de l'article 132 de cette directive, les États membres exonèrent de la taxe sur la valeur ajoutée " les prestations de services et les livraisons de biens étroitement liées à l'aide et à la sécurité sociales, y compris celles fournies par les maisons de retraite, effectuées par des organismes de droit public ou par d'autres organismes reconnus comme ayant un caractère social par l'État membre concerné (...) ". 4. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ". Aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au troisième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. / (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 256 B du même code : " Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services (...) sociaux (...) lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence ". Aux termes du b du 1° du 7 de l'article 261 du même code, sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée " les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des œuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient (...) ". 5. Il résulte des dispositions citées au point 3, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans son arrêt du 29 octobre 2015 (C-174/14) Saudaçor - Sociedade Gestora de Recursos e Equipamentos da Saúde dos Açores SA, que le non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée prévu en faveur des personnes morales de droit public énumérées au paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006, qui déroge à la règle générale de l'assujettissement de toute activité de nature économique, est subordonné à deux conditions cumulatives tenant, d'une part, à ce que l'activité soit exercée par un organisme agissant en tant qu'autorité publique et, d'autre part, à ce que le non-assujettissement ne conduise pas à des distorsions de concurrence d'une certaine importance. 6. La condition selon laquelle l'activité économique est réalisée par l'organisme public en tant qu'autorité publique est remplie, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, lorsque l'activité en cause est exercée dans le cadre du régime juridique particulier aux personnes morales de droit public. Ainsi, l'activité en cause doit être exercée dans des conditions juridiques différentes de celles des opérateurs économiques privés, notamment, lorsque sont mises en œuvre des prérogatives de puissance publique, lorsque l'activité est accomplie en raison d'une obligation légale ou dans le cadre d'un monopole ou encore lorsqu'elle relève par nature des attributions d'une personne publique. Cette condition peut également, si la législation de l'Etat membre le prévoit, être regardée comme remplie lorsque l'activité exercée est exonérée en application, notamment, de l'article 132 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006. Si cette condition n'est pas remplie, la personne morale de droit public est nécessairement assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée à raison de cette activité économique, sans préjudice des éventuelles exonérations applicables. 7. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles : " I.- Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens du présent code, les établissements et les services, dotés ou non d'une personnalité morale propre, énumérés ci-après : (...) 6° Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées (...) ". Aux termes de l'article L. 314-2 du même code, les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées mentionnées au 6° du I de l'article L. 312-1 du même code " sont financés par : (...) 3° Des tarifs journaliers afférents aux prestations relatives à l'hébergement, fixés par le président du conseil général, dans des conditions précisées par décret et opposables aux bénéficiaires de l'aide sociale accueillis dans des établissements habilités totalement ou partiellement à l'aide sociale à l'hébergement des personnes âgées (...) ". 8. Par les dispositions de l'article 256 B du code général des impôts citées au point 4, la France a fait usage de la possibilité ouverte par le 2 de l'article 13 de la directive du 28 novembre 2006 citée au point 3 lu en combinaison avec le g du 1 de l'article 132 de cette même directive, de regarder comme une activité effectuée en tant qu'autorité publique le service social d'hébergement des personnes âgées dans des structures publiques. 9. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que les premiers juges ont, pour prononcer la restitution des cotisations de taxe sur les salaires en litige, estimé que les prestations fournies par l'établissement Résidence du pays capdenacois n'étaient pas exercées par un organisme agissant en tant qu'autorité publique. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par cet établissement devant le tribunal administratif et devant la cour. En ce qui concerne l'autre moyen soulevé par l'établissement Résidence du pays capdenacois : 10. Par un arrêt du 16 septembre 2008 (C-288/07) Commissioners of Her Majesty's Revenue et Customs contre Isle of Wight Council et autres, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les distorsions de concurrence d'une certaine importance auxquelles conduirait le non-assujettissement des organismes de droit public agissant en tant qu'autorités publiques doivent être évaluées par rapport à l'activité en cause, en tant que telle, indépendamment de la question de savoir si ces organismes font face ou non à une concurrence au niveau du marché local sur lequel ils accomplissent cette activité, ainsi que par rapport non seulement à la concurrence actuelle, mais également à la concurrence potentielle, pour autant que la possibilité pour un opérateur privé d'entrer sur le marché pertinent soit réelle, et non purement hypothétique. Par un arrêt du 19 janvier 2017 (C- 344/15) National Roads Authority, la même juridiction a précisé que les distorsions de concurrence d'une certaine importance doivent être évaluées en tenant compte des circonstances économiques et que la seule présence d'opérateurs privés sur un marché, sans la prise en compte des éléments de fait, des indices objectifs et de l'analyse de ce marché, ne saurait démontrer ni l'existence d'une concurrence actuelle ou potentielle ni celle d'une distorsion de concurrence d'une certaine importance. Les distorsions de concurrence mentionnées au paragraphe 1 de l'article 13 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 s'apprécient à la fois au regard de l'activité en cause et des conditions d'exploitation de cette activité. L'existence de telles distorsions ne saurait, dès lors, résulter de la seule constatation que des prestations réalisées par un organisme de droit public sont identiques à celles réalisées par un opérateur privé, sans examen de l'état de la concurrence réelle, ou à défaut potentielle, sur le marché en cause. 11. Eu égard au caractère social des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes publics qui sont habilités à accueillir entièrement ou principalement des personnes âgées à faibles ressources et qui, par suite, sont soumis en principe à une tarification administrée de leurs prestations relatives à l'hébergement de celles-ci, un opérateur privé exerçant cette activité à titre lucratif, libre de choisir sa clientèle et, par suite, de fixer ses tarifs en conséquence, ne saurait être empêché d'entrer sur le marché en cause ou y subir un désavantage du seul fait de son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée qui lui permet, à la différence d'un opérateur public placé hors du champ de celle-ci, d'obtenir le remboursement de l'excédent de la taxe ayant grevé ses charges sur celle dont il est redevable à raison de ses recettes. Par ailleurs, cette même activité exercée sans but lucratif par un opérateur privé est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu du b du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts cité au point 4. 12. Il est constant que l'établissement Résidence du pays capdenacois est habilité à accueillir des bénéficiaires de l'aide sociale à l'hébergement pour la totalité des places qu'il offre. Par suite, et sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance qu'il s'en trouverait lui-même désavantagé, son non-assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ne conduit pas à une distorsion de concurrence au sens et pour l'application de l'article 256 B du code général des impôts, lu à la lumière des dispositions de la directive du 28 novembre 2006 qu'il a pour objet de transposer. 13. Il résulte des points 2 à 12 que les prestations fournies par l'établissement Résidence du pays capdenacois ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée. En conséquence, cet établissement est redevable de la taxe instituée à l'article 231 du code général des impôts. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé la restitution partielle des cotisations primitives de taxe sur les salaires acquittées par l'établissement Résidence du pays capdenacois au titre des années 2015, 2016 et 2017. Sur les frais liés au litige : 15. L'Etat n'étant pas partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par l'établissement Résidence du pays capdenacois au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1805557 du tribunal administratif de Toulouse est annulé. Article 2 : La demande présentée par l'établissement Résidence du pays capdenacois devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à la restitution des cotisations primitives de taxe sur les salaires auxquelles il a été assujetti au titre des années 2015, 2016 et 2017 est rejetée. Article 3 : Les cotisations primitives de taxe sur les salaires restituées à l'établissement Résidence du pays capdenacois au titre des années 2015, 2016 et 2017 sont remises à sa charge. Article 4 : Les conclusions présentées par l'établissement Résidence du pays capdenacois au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Résidence du pays capdenacois. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. Barthez, président, - M. Lafon, président assesseur, - Mme Restino, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, V. RestinoLe président, A. Barthez Le greffier, F. Kinach La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 20TL21439 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'établissement Français du Sang de Provence-Alpes-Côte d'Azur-Corse (EFS PACA-Corse) a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 23 septembre 2019 par laquelle l'inspecteur du travail a rejeté sa demande d'autorisation de licenciement de M. B... C... pour faute, ainsi que la décision du 27 mai 2020 de la ministre du travail rejetant cette demande d'autorisation de licenciement. Par un jugement n° 2001819 du 27 mai 2022, le tribunal administratif de Toulon a annulé les décisions des 23 septembre 2019 et 27 mai 2020. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2022, sous le n° 22MA01926, M. B... C..., représenté par Me Salord, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 27 mai 2022 ; 2°) de rejeter la demande de l'EFS PACA-Corse ; 3°) de mettre à la charge de l'EFS PACA-Corse la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'employeur n'a pas consulté le comité social et économique (CSE) du projet de licenciement en litige, ce qui entache la procédure de nullité ; - il a fait l'objet de discriminations de la part de l'EFS PACA-Corse lequel a instauré un climat de recherche de fautes ; - la matérialité des faits reprochés n'est pas établie dès lors que l'allégation de douleur thoracique de la donneuse est totalement infondée ; - il a commis l'erreur de remplir une fiche d'effet indésirable grave du donneur (EIGD) et cette fiche a permis un suivi médical de la donneuse ne caractérisant pas un comportement fautif ; - la fiche de liaison a été renseignée et signée conjointement par l'association des donneurs de sang bénévoles et par lui, les signataires de la fiche de liaison ont jugé l'incident de la deuxième donneuse mineur ne nécessitant pas de remontée d'information, ainsi cette rédaction est établie et ne caractérise pas un comportement fautif ; - il n'a pas manqué à ses obligations médicales dès lors qu'il était présent, positionné à proximité de la zone de prélèvement et les consignes médicales ont été appliquées par l'équipe de prélèvement ; - la persistance des comportements fautifs mentionnés par l'employeur est prescrite ; - l'ensemble de ces griefs n'était pas d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement en litige. Par un mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 2023, l'établissement Français du Sang de Provence-Alpes-Côte d'Azur-Corse (EFS PACA-Corse), représenté par Me Coriatt, conclut au rejet de la requête de M. C... et demande à la Cour de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. La requête a été communiquée au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, qui n'a pas produit d'observation. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code du travail ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marchessaux, - les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public, - et les observations de Me Coriatt, représentant l'établissement français du sang Provence-Alpes-Côte d'Azur-Corse. Considérant ce qui suit : 1. M. C... a été recruté par l'établissement français du sang Provence-Alpes-Côte d'Azur-Corse par contrat à durée indéterminée conclu le 5 décembre 2000 en qualité de médecin de collecte sur le site de Toulon. Il détient le mandat de délégué syndical FO de site depuis le 6 mars 2019 et a présenté sa candidature aux élections du comité social et économique qui se sont tenues du 13 au 20 novembre 2018 mais n'a pas été élu. Par une lettre du 2 juillet 2019, l'EFS PACA-Corse l'a convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement qui s'est tenu le 12 juillet 2019. Par un courrier du 26 juillet 2019, l'EFS PACA-Corse a sollicité de l'inspection du travail l'autorisation de le licencier. Par une décision du 23 septembre 2019, l'inspecteur du travail a refusé d'accorder à l'EFS PACA-Corse l'autorisation de licencier M. C.... L'EFS PACA-Corse a formé un recours hiérarchique à l'encontre de cette décision. Par une décision du 27 mai 2020, la ministre du travail a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 23 septembre 2019 mais refusé d'autoriser le licenciement de M. C.... Ce dernier relève appel du jugement du 27 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé les décisions des 23 septembre 2019 et 27 mai 2020. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne l'absence de consultation du comité social et économique (CSE) : 2. Aux termes de l'article L. 2411-7 du code du travail : " L'autorisation de licenciement est requise pendant six mois pour le candidat, au premier ou au deuxième tour, aux fonctions de membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique, à partir de la publication des candidatures. La durée de six mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur. (...) ". 3. Il ressort des pièces du dossier que M. C... s'est présenté comme candidat titulaire et suppléant sur la liste du syndicat FO, le lundi 22 octobre 2018, date du dépôt de la liste par ce syndicat, en vue du premier tour des élections du 3ème collège du CSE. Le 1er tour de cette élection s'est déroulé du 13 au 20 novembre 2018 et le 2ème tour du 3 au 10 décembre 2018. M. C... n'a pas été élu, le 3ème collège ayant été pourvu totalement dès le 1er tour. En outre, par lettre du 2 juillet 2019, l'EFS PACA-Corse a convoqué le salarié à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement. Ainsi, à cette date, le délai de six mois prévu par les dispositions de l'article L. 2411-7 du code du travail était écoulé et M. C... ne bénéficiait plus de la protection de candidat aux élections du CSE. Par ailleurs, le mandat de délégué syndical FO de site qu'il détenait, n'obligeait pas son employeur a saisir le comité social et économique de son projet de licenciement. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'EFS PACA-Corse aurait dû soumettre au CSE, le projet de licenciement le concernant. En ce qui concerne la matérialité des faits reprochés : 4. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec leur appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi. 5. Il ressort des pièces du dossier que par lettre du 26 juillet 2019, l'EFS PACA-Corse a demandé à l'inspecteur du travail de licencier M. C... aux motifs que, d'une part, lors d'une collecte du 18 juin 2019, ce dernier ne s'est pas jamais déplacé pour consulter une donneuse ayant signalé une douleur à la poitrine, en méconnaissance des protocoles relatifs à la conduite à tenir devant une telle douleur et à l'organisation de la prise en charge d'un évènement indésirable grave du donneur survenant en collecte et, d'autre part, le salarié n'a pas renseigné complètement la fiche de liaison de la collecte entre l'EFS et l'association des donneurs de sang bénévoles du 18 juin 2019 en signalant le malaise du premier donneur et en occultant le second évènement concernant Mme A... alors que deux fiches EIGD ont été établies. S'agissant du premier grief tiré de l'absence de déplacement de M. C... auprès de la donneuse et le non-respect des protocoles : 6. Selon les mentions du document national cadre de procédure EFS : " Organisation de la prise en charge d'un événement indésirable grave donneur survenant en collecte " que lors de l'apparition d'un effet indésirable, " le médecin de prélèvement se rend dans l'instant auprès du donneur (...), définit aussitôt la conduite à tenir pour l'ensemble de l'équipe en fonction du caractère résolutif et/ou du type d'incident, notamment la prise en charge médicale du donneur conformément aux fiches nationales de conduite à tenir (...). Une fois l'incident géré (...) le médecin de prélèvement doit lui faire des recommandations pour lui-même et pour les dons suivants éventuels, organiser si besoin le retour du donneur à son domicile, l'adresser, si besoin, à son médecin traitant, s'enquérir de l'état de santé du donneur obligatoirement le lendemain du don et les jours suivants si nécessaire. ". La fiche " Conduite à tenir devant une douleur thoracique ", diffusée le 28 mai 2018 et dont M. C... a pris connaissance ainsi qu'il ressort de la copie d'écran produite par l'EFS, précise qu'à défaut d'appeler le centre 15 pour une prise en charge spécialisée, il convient, après avoir interrompu le don et mis le donneur au repos, de poser une voie veineuse périphérique avec du chlorure de sodium à 0,9 % et éventuellement (mais non systématiquement) d'administrer un dérivé nitré de manière sublinguale. 7. En l'espèce, l'impression d'écran du logiciel médico-technique concernant Mme A... portent les mentions " douleur précordiales subites au cours du don. Interruption ". De même, M. C... a inscrit dans la fiche du 18 juin 2019 de signalement des effets indésirables graves de donneur (EIGD) concernant cette donneuse " douleur thoracique pendant le prélèvement ". La douleur thoracique est aussi inscrite dans la fiche de prélèvement de la donneuse laquelle décrit, dans un courriel du 24 juillet 2019, une douleur lui compressant la poitrine avec une sensation de chaleur qui l'envahit. Il apparaît ainsi que la donneuse a bien présenté une douleur thoracique, contrairement à ce que soutient M. C.... 8. Il ressort des pièces du dossier et des propres écritures de M. C... ainsi que des déclarations de Mme A... que, alors qu'elle signalait une douleur thoracique poussant l'infirmière à interrompre le don, M. C... s'est borné à observer l'état de la donneuse en passant la tête par-dessus le paravent le séparant d'elle, manquant ainsi à son devoir de se " rendre dans l'instant auprès d'elle " contrairement aux protocoles décrits au point 6. Ainsi, cette faute est matériellement établie. S'agissant du second grief tiré du renseignement incomplet de la fiche de liaison : 9. La fiche relative à la procédure " modalité de réalisation d'une collecte mobile " concernant le débriefing avec l'association des donneurs de sang bénévoles (ADSB) mentionne qu'il doit être réalisé par le médecin responsable de la collecte. Au titre des points devant être systématiquement être abordés figure l'information voire l'explication sur les éventuels incidents survenus sur la collecte. Cette fiche précise que le médecin responsable de la collecte remplit la partie " après la collecte " de la fiche de liaison de la collecte entre l'EFS et l'ADSB. Toutefois, Il ressort des pièces du dossier que si M. C... a indiqué dans la fiche de liaison de la collecte du 18 juin 2019, au titre des autres commentaires éventuels, un malaise important ayant contraint de réduire la collecte pendant la 1ère moitié de la matinée, il n'a pas fait état du cas de la seconde donneuse. Par suite, le requérant n'a pas respecté ce protocole et commis une faute dont la matérialité est établie. S'agissant du caractère de gravité suffisant de ces deux fautes : 10. Les deux manquements mentionnés aux points 8 et 9 pris dans leur ensemble constituent, dans les circonstances de l'espèce, des fautes suffisamment graves pour justifier à eux seuls le licenciement de M. C... lequel ne peut, dès lors, utilement soutenir que la persistance des comportements fautifs mentionnés par l'employeur est prescrite. Si ce dernier soutient que la donneuse aurait présenté à l'entretien une forte anxiété, un profil difficile, une personnalité peu fiable et peu crédible au niveau de ses déclaration médicales avec éventuellement une tendance hypocondriaque et qu'elle ait été prise en charge ultérieurement par le service des urgences de l'hôpital de Sainte-Musse, sans qu'il en ait résulté pour elle un préjudice, ces circonstances ne sont pas de nature à atténuer ce caractère de gravité dès lors que M. C... a fait preuve d'une grande légèreté dans la prise en charge de Mme A... et que, comme l'a estimé à juste titre le tribunal, une faute de ce type pourrait avoir des implications médicales graves sur les personnes qui viennent bénévolement donner leur sang, et qui s'en remettent à la garantie que représente le médecin de collecte pour assurer leur sécurité. Il en va de même du fait que M. C... exercerait ces fonctions depuis 18 ans au service de la transfusion et que la collecte aurait débuté dans des conditions difficiles en raison d'un premier malaise gr ave d'un donneur survenu en début de matinée. Par suite, la ministre du travail a commis une erreur d'appréciation en refusant d'autoriser le licenciement de M. C.... En ce qui concerne les discriminations subies par M. C... : 11. Le requérant soutient que dès les premiers dossiers, l'EFS PACA-Corse a instauré un climat de recherche de fautes pour lesquelles il a dû régulièrement se défendre et faire valoir ses droits. Il invoque plusieurs affaires survenues en 2006 concernant des collectes, deux procédures de sanction disciplinaire intervenues les 17 juillet 2015 et 12 janvier 2016, l'EFS lui reprochant un manque de coopération et d'implication lors d'une collecte avec une " EPDI " et d'être l'auteur de musique trop forte au cours d'une collecte à Cotignac, ainsi que d'un arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 6 mai 2022 jugeant que l'avertissement du 13 avril 2016 était justifié mais relevant l'existence d'une discrimination exercée par l'EFS à son encontre en raison de ses activités syndicales et de son mandat. Toutefois, ces faits ne concernent pas la procédure de licenciement en litige et ne sont pas de nature à établir que cette dernière serait en lien avec le mandat syndical du requérant. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... aurait fait l'objet d'une différence de traitement ou d'une quelconque discrimination. 12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé les décisions du 27 mai 2020 de la ministre du travail et, en tout état de cause, celle du 23 septembre 2019 de l'inspecteur du travail. Sur les frais liés au litige : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'EFS PACA-Corse qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. C... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'EFS PACA-Corse et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : M. C... versera à l'établissement Français du Sang de Provence-Alpes-Côte d'Azur-Corse une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à l'établissement Français du Sang de Provence-Alpes-Côte d'Azur-Corse (EFS Paca-Corse) et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - M. Prieto, premier conseiller, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. 2 N° 22MA01926 bb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 mai 2022 par lequel la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2206282 du 17 novembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 28 mars 2023, M. B..., représenté par Me Kissambou-M'Bamby, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 17 novembre 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 11 mai 2022 ; 3°) d'enjoindre à la préfète des Alpes-de-Haute-Provence de lui délivrer une carte de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil. Il soutient que : - la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ; - la décision fixant le pays de destination méconnaît les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et du décret du 28 novembre 1983 lesquelles imposent la mise en œuvre d'une procédure contradictoire ; - cette décision méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 3 mars 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. d'Izarn de Villefort a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant tunisien, a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 mai 2022 par lequel la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Il relève appel du jugement du 17 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. 2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". 3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a été pris au vu, notamment de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), lequel a estimé, le 30 mars 2022, que l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et pouvait par ailleurs lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. Le requérant est atteint, d'une part, d'une scoliose sinistro-convexe ayant évolué vers une hernie discale qui nécessite à court terme un traitement neurochirurgical, d'autre part, de désordres psychotiques nécessitant des soins et un suivi psychiatrique spécialisé au long cours. Il fait valoir que ce traitement neurochirurgical n'est pas accessible en Tunisie et que son état de santé psychique nécessite des soins médicaux spécialisés sous surveillance constante. Les pièces médicales produites, si elles confirment la gravité des pathologies dont il est atteint, ne démontrent pas pour autant que le défaut éventuel de leur prise en charge médicale entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité au sens de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a méconnu les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 4. M. B... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance et tirés de ce que la décision portant refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, que l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée et que la décision fixant le pays de destination méconnaît les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et du décret du 28 novembre 1983 ainsi que les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Marseille. 5. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Kissambou-M'Bamby Copie en sera adressée au préfet des Alpes-de-Haute-Provence. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé P. D'IZARN DE VILLEFORTLe président, Signé P. PORTAILLa greffière, Signé N. JUAREZ La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N° 23MA00761 2 nb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 8 février 2023 par lequel le préfet du Var lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par un jugement n° 2300416 du 14 février 2023, la présidente du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 30 mars 2023, M. A... B..., représenté par Me Ben Hassine, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Var du 8 février 2023 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à venir, ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa situation, sous la même astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le principe du contradictoire a été méconnu dès lors que le jugement attaqué vise un mémoire en défense du préfet qui a été produit après l'audience publique ; - le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ; - les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ; - les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ont été méconnues ; - la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît le 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision de refus de délai de départ volontaire méconnaît l'article L. 612-2 du même code. La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Mouret a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant tunisien, relève appel du jugement du 14 février 2023 par lequel la présidente du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Var du 8 février 2023 portant obligation de quitter le territoire français, lui refusant un délai de départ volontaire et fixant le pays à destination duquel il pourra être éloigné. 2. Il ressort des pièces produites pour la première fois en appel que M. B... a entrepris, au cours des mois d'octobre et de novembre 2022, diverses démarches auprès des services du préfet du Var en vue de l'obtention d'un titre de séjour. Au vu du procès-verbal de son audition par les services de police le 8 février 2023, l'intéressé a expressément indiqué avoir déposé une demande de titre de séjour et précisé que celle-ci était en cours d'examen. Dans ces conditions, en s'abstenant de tenir compte des démarches ainsi accomplies par M. B..., le préfet du Var ne s'est pas livré à un examen particulier de la situation de l'intéressé avant de l'obliger à quitter le territoire français. Par suite, la mesure d'éloignement en litige doit être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les autres décisions contenues dans l'arrêté du préfet du Var du 8 février 2023. 3. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la présidente du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Par suite, il y a lieu d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté contesté. 4. Aux termes de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si la décision portant obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 721-6, L. 721-7, L. 731-1, L. 731-3, L. 741-1 et L. 743-13, et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ". 5. L'exécution du présent arrêt, qui prononce l'annulation de la mesure d'éloignement ainsi que des autres décisions contenues dans l'arrêté contesté, n'implique pas nécessairement que le préfet du Var délivre un titre de séjour à M. B.... En revanche, il incombe à cette autorité, en application des dispositions citées au point précédent, de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Var de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, de délivrer à M. B... une autorisation provisoire de séjour. 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : Le jugement de la présidente du tribunal administratif de Toulon du 14 février 2023 est annulé. Article 2 : L'arrêté du préfet du Var du 8 février 2023 est annulé. Article 3 : Il est enjoint au préfet du Var de procéder au réexamen de la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour. Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 200 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Var et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Toulon. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Mouret, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé R. MOURETLe président, Signé P. PORTAIL La greffière, Signé N. JUAREZ La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 23MA00778
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'association syndicale libre (ASL) Le Hameau de Provence a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 6 février 2020 par lequel le maire de Lambesc a délivré à la société par actions simplifiée (SAS) Hectare un permis d'aménager un lotissement de sept lots à bâtir sur des terrains situés route de Charleval sur le territoire communal, ensemble l'arrêté rectificatif du 25 février 2020 et la décision rejetant son recours gracieux, et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 11 février 2021 par lequel le maire de Lambesc a délivré à la SAS Hectare un permis d'aménager modificatif. Par un jugement n° 2007561 du 10 novembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 8 janvier 2023, l'association syndicale libre (ASL) Le Hameau de Provence, représentée par Me Boulisset, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du 10 novembre 2022 du tribunal administratif de Marseille ; 2°) d'annuler les arrêtés des 6 et 25 février 2020 du maire de Lambesc, ensemble la décision rejetant son recours gracieux ; 3°) d'annuler l'arrêté du 11 février 2021 du maire de Lambesc ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Lambesc et de la société par actions simplifiée (SAS) Hectare la somme de 4 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa demande de première instance était recevable, notamment au regard de sa qualité à agir ; - elle a intérêt à agir ; - les arrêtés des 6 et 25 février 2020 méconnaissent les dispositions de l'article A. 424-10 du code de l'urbanisme, en l'absence de mention de la répartition de la surface entre les différents lots ; - le dossier de demande de permis est incomplet au regard des dispositions de l'article R. 441-3 du code de l'urbanisme, quant à l'impact du projet dans le site ; - il est incomplet au regard des dispositions des articles L. 414-4 et R. 441-6 du code de l'urbanisme, quant à la proximité du projet avec un site Natura 2000 ; - il méconnaît les dispositions de l'article R. 442-5 du code de l'urbanisme, en l'absence de volet paysager ; - il méconnaît les dispositions de l'article R. 441-7 du code de l'urbanisme, en l'absence d'autorisation de défrichement ; une autorisation de défrichement était nécessaire en vertu des dispositions des articles L. 341-3 et L. 214-13 du code de l'urbanisme ; - le projet contesté méconnaît les dispositions des articles UCr3 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de Lambesc et R. 111-2 du code de l'urbanisme, au regard de l'accès au terrain d'assiette, du stockage et du ruissellement des eaux pluviales et des conditions de gestion des ordures ménagères et des eaux usées ; - il méconnaît les dispositions des articles L. 101-2, L. 300-1, L. 121-3 et R. 111-27 du code de l'urbanisme, au regard des espaces naturels avoisinants et notamment la Garrigue de Lançon et le Plateau de Vernègues et de Roquerousse ; - il méconnaît les dispositions de l'article UCr4.1 du règlement du PLU de Lambesc, au regard de l'assainissement et du raccordement aux réseaux d'eau potable et d'eaux usées ; - il méconnaît les dispositions de l'article UCr4.2 du règlement du PLU de Lambesc, au regard de la gestion des eaux pluviales ; - il méconnaît les dispositions de l'article UCr4.3 du règlement du PLU de Lambesc, au regard du local de stockage des déchets ; - il méconnaît les dispositions de l'article UCr13 du règlement du PLU de Lambesc, au regard des espaces verts. Par un mémoire en défense enregistré le 15 mars 2023, la SAS Hectare, représentée par Me Bonnet, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'ASL Le Hameau de Provence la somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient, à titre principal, que l'ASL Le Hameau de Provence n'a ni intérêt ni qualité à agir, et, à titre subsidiaire, que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense enregistré le 20 mars 2023, la commune de Lambesc, représentée par Me Parracone, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'ASL Le Hameau de Provence la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles et non compris dans les dépens. Elle soutient, à titre principal, que l'ASL Le Hameau de Provence n'a ni intérêt ni qualité à agir, à titre subsidiaire, que les moyens de la requête ne sont pas fondés, et, à défaut, que les éventuels vices sont régularisables en application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme. Par ordonnance du 16 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 avril 2023. Un mémoire enregistré le 9 avril 2023 pour l'ASL Le Hameau de Provence n'a pas été communiqué, en application des dispositions de l'article R. 611-11 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - l'ordonnance n° 2004-632 du 1 juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ; - le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 portant application de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires. - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Portail, président ; - les conclusions de M. Roux, rapporteur public ; - et les observations de Me Boulisset, représentant l'ASL Le Hameau de Provence, et de Me Bonnet, représentant la SAS Hectare. Considérant ce qui suit : 1. L'association syndicale libre (ASL) Le Hameau de Provence demande l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée, d'une part, contre l'arrêté du 6 février 2020 par lequel le maire de Lambesc a délivré à la société par actions simplifiée (SAS) Hectare un permis d'aménager un lotissement de sept lots à bâtir sur des terrains situés route de Charleval sur le territoire communal, ensemble l'arrêté rectificatif du 25 février 2020 et la décision rejetant son recours gracieux, et, d'autre part, l'arrêté du 11 février 2021 par lequel le maire de Lambesc a délivré à la SAS Hectare un permis d'aménager modificatif Sur la recevabilité de la demande de première instance : 2. L'article 7 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires dispose : " Les statuts de l'association définissent son nom, son objet, son siège et ses règles de fonctionnement... ". Aux termes de l'article 3 de décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 portant application de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires : " Outre ce qui est mentionné à l'article 7 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 susvisée, les statuts de l'association syndicale libre fixent les modalités de sa représentation à l'égard des tiers, de distraction d'un de ses immeubles, de modification de son statut ainsi que de sa dissolution. ". 3. Une association syndicale libre est régulièrement engagée par l'organe tenant de ses statuts le pouvoir de la représenter en justice, sauf stipulation de ces statuts réservant expressément à un autre organe la capacité de décider de former une action devant le juge administratif. Il appartient à la juridiction administrative saisie, qui en a toujours la faculté, de s'assurer, le cas échéant, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour agir au nom de cette partie. Tel est le cas lorsque cette qualité est contestée sérieusement par l'autre partie ou qu'au premier examen l'absence de qualité du représentant de la personne morale semble ressortir des pièces du dossier. A ce titre, si le juge doit s'assurer de la réalité de l'habilitation du représentant de l'association qui l'a saisi, lorsque celle-ci est requise par les statuts, il ne lui appartient pas, en revanche, de vérifier la régularité des conditions dans lesquelles une telle habilitation a été adoptée. 4. Aux termes de l'article 3.4 des statuts de l'ASL Le Hameau de Provence : " Le Comité Syndical a les pouvoirs les plus étendus dans le cadre et pour la réalisation de l'objet de l'Association ci-dessus définie. / Il a notamment, sans que cette énumération soit limitative, les pouvoirs suivants (...) - Il représente l'Association en justice, tant en demande qu'en défense, il transige, compromet, acquiesce et désiste sur toutes actions. / - Il confère les pouvoirs à telle personne que bon lui semble et, par mandat spécial, pour un objet déterminé, avec ou sans faculté de substituer. (...) ". Selon l'article 3.5 de ces mêmes statuts : " Le Comité Syndical peut consentir une délégation au Président pour permettre à celui-ci de le représenter et de représenter l'Association à l'égard des tiers. Cette délégation peut être consentie sans limitation de durée et peut être générale. (...) ". 5. Il résulte des stipulations précitées des statuts de l'ASL Le Hameau de Provence qu'il ressort de la compétence exclusive du Comité Syndical de cette association de la représenter en justice ou d'autoriser une personne physique, notamment le président de l'ASL, à la représenter en justice. Ainsi, quand bien même l'Assemblée Générale a autorisé le président à ester en justice dans le cadre du présent litige par une délibération du 25 septembre 2020, il n'appartenait pas à cet organe, qui ne dispose pas de cette compétence en vertu des stipulations précitées des statuts de l'ASL Le Hameau de Provence, de délivrer une telle autorisation. 6. D'autre part, pour rejeter la demande de l'association requérante comme irrecevable pour défaut de qualité à agir, le tribunal administratif de Marseille a relevé que le président n'avait pas justifié d'une délibération l'y habilitant émanant du Comité Syndical susmentionné. Cette irrecevabilité de la requête avait été opposée notamment dans le mémoire en défense produit par la SAS Hectare le 21 décembre 2020 et dont l'avocat de l'ASL Le Hameau de Provence a pris connaissance le 30 décembre courant via l'application " Télérecours ". La production par l'association, pour la première fois en appel, du compte-rendu de la " réunion du Conseil Syndical (...) du 2 septembre 2020 " n'est pas de nature, alors même que cette délibération est antérieure au jugement attaqué, à régulariser la demande de première instance et à entacher d'irrégularité le jugement attaqué. Dans ces conditions, l'association requérante n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif a rejeté sa demande comme irrecevable pour défaut de qualité à agir du président. 7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur le second motif d'irrecevabilité retenu par les juges de première instance, que l'ASL Le Hameau de Provence n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du 10 novembre 2022 du tribunal administratif de Marseille et des arrêtés des 6 et 25 février 2020 et 11 février 2021 du maire de Lambesc. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lambesc et de la SAS Hectare, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme demandée par l'ASL Le Hameau de Provence au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ASL Le Hameau de Provence une somme de 1 000 euros au titre des frais engagés par la commune de Lambesc et non compris dans les dépens et une somme de 1 000 euros au titre des frais de même nature engagés par la SAS Hectare. D É C I D E : Article 1er : La requête de l'ASL Le Hameau de Provence est rejetée. Article 2 : L'ASL Le Hameau de Provence versera à la commune de Lambesc une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : L'ASL Le Hameau de Provence versera à la SAS Hectare une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association syndicale libre (ASL) Le Hameau de Provence, à la commune de Lambesc et à la société par actions simplifiée (SAS) Hectare. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. Portail, président - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller, Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le président rapporteur Signé P. PORTAILLe président assesseur Signé P. D'IZARN DE VILLEFORTLa greffière, Signé N. JUAREZ La République mande et ordonne au préfet des Bouches-du-Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 23MA00039 nb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... B... épouse A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 1er mars 2022 du préfet des Bouches-du-Rhône lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de destination. Par une ordonnance n° 2202863 du 29 juin 2022, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2022, Mme B... épouse A... C..., représentée par Me Bal, demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 2202863 du 29 juin 2022 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 1er mars 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour et à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande et dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler ; 4°) de prendre acte de sa demande d'aide juridictionnelle et de la transmettre au bureau d'aide juridictionnelle compétent ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros, à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Elle soutient que : - l'ordonnance en litige est entachée d'irrégularité dès lors que ni les faits ni les moyens de légalité interne qu'elle a invoqués n'ont été suffisamment étudiés ; ses moyens étaient assortis de précisions suffisantes ; - l'arrêté est entaché d'une insuffisance de motivation, notamment s'agissant du refus de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au regard de la durée de son séjour en France et de ses liens familiaux en France. Le préfet des Bouches-du-Rhône, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire. Le 5 juin 2023, Mme B... épouse A... C... a demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ; - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020. - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Chenal-Peter, - et les observations de Me Bal, représentant Mme B... épouse A... C.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B... épouse A... C..., de nationalité marocaine, demande l'annulation de l'ordonnance du 29 juin 2022 par laquelle le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 1er mars 2022 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de destination. Sur la demande d'aide juridictionnelle : 2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président (...) ". Aux termes de l'article 61 du décret du 28 décembre 2020 pris pour l'application de cette loi : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence (...). / L'admission provisoire est accordée par le président du bureau ou de la section ou le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle (...) sur laquelle il n'a pas encore été statué ". 3. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer l'admission provisoire de la requérante au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : 4. L'article R. 222-1 du code de justice administrative dispose que : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. (...) ". 5. A l'appui de sa demande présentée par ministère d'avocat devant le tribunal administratif de Marseille, Mme B... épouse A... C... a notamment invoqué, pour contester l'arrêté préfectoral en litige, les moyens tirés du vice de compétence, de l'insuffisante motivation de cet acte, la méconnaissance des stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, des articles L. 421-2 et L. 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et enfin des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ces moyens, qui étaient assortis de faits susceptibles de venir à leur soutien et n'étaient pas dépourvus des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé, n'étaient ni inopérants, ni irrecevables. Les termes dans lesquels ils étaient exprimés, qui permettaient d'en saisir le sens et la portée, les rendaient suffisamment intelligibles pour que le juge exerçât son office en appréciant leur bien-fondé, alors même que l'ensemble des pièces annoncées n'étaient pas jointe à la requête introductive d'instance. Dès lors, il n'appartenait qu'au tribunal administratif statuant en formation collégiale, après avoir communiqué cette demande de première instance et recueilli, le cas échéant, les observations du préfet et les pièces que ce dernier verserait aux débats, de statuer sur celle-ci. Par suite, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille ne pouvait, sans excéder sa compétence, se fonder sur les dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative pour rejeter la demande présentée par Mme B... épouse A... C.... Son ordonnance attaquée du 29 juin 2022 est ainsi entachée d'irrégularité et, pour ce motif, elle doit être annulée. 6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, pour la Cour, de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée devant le tribunal administratif de Marseille par Mme B... épouse A... C.... Sur la légalité de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône : En ce qui concerne les moyens communs aux décisions contestées : 7. En premier lieu, par un arrêté n° 13-2021-03-31-00001 du 31 mars 2021, publié au recueil des actes administratifs spécial n° 13-2021-089 du même jour de la préfecture des Bouches-du-Rhône, le préfet de ce département a donné délégation de signature à M. F... D..., chef du bureau de l'éloignement, du contentieux et de l'asile, à l'effet de signer tout document relevant des attributions de son bureau au nombre desquelles figurent les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ainsi que celles relatives au délai de départ volontaire et fixant les pays de destination des mesures d'éloignement. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté préfectoral contesté du 1er mars 2022 doit être écarté. 8. En deuxième lieu, l'arrêté préfectoral contesté du 1er mars 2022, pris en l'ensemble de ses décisions, mentionne les éléments de faits propres à la situation personnelle et familiale de Mme B... épouse A... C... et énonce l'ensemble des considérations de droit sur lesquelles il est fondé. Il est ainsi suffisamment motivé au regard des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Il suit de là que ce moyen doit également être écarté. 9. En troisième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté préfectoral contesté du 1er mars 2022 ni des autres pièces versées au dossier que le préfet des Bouches-du-Rhône n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation personnelle de Mme B... épouse A... C.... 10. En quatrième lieu, la requérante se prévaut de l'irrégularité de la notification de l'arrêté attaqué, en ce qu'elle ne précisait pas l'adresse exacte du tribunal, la possibilité de bénéficier de l'aide juridictionnelle ni celle d'être informée dans une langue qu'elle comprend, en violation du droit à un procès équitable et du droit à un recours effectif reconnus aux termes des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 613-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, l'ensemble de ces circonstances, relatives aux conditions de notification de l'arrêté, sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté en litige. En ce qui concerne la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour : 11.En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le présent code régit, sous réserve du droit de l'Union européenne et des conventions internationales, l'entrée, le séjour et l'éloignement des étrangers en France ainsi que le droit d'asile. ". L'article L. 421-2 de ce code dispose : " Par dérogation à l'article L. 433-6, l'étranger qui sollicite la délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " salarié " et qui est titulaire d'une carte de séjour délivrée pour un autre motif bénéficie d'une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an portant la mention demandée lorsque les conditions de délivrance de cette carte sont remplies. A l'expiration de la durée de validité de cette carte, s'il continue à en remplir les conditions de délivrance, il bénéficie, à sa demande, d'une carte de séjour pluriannuelle portant la même mention. Lorsque l'étranger sollicite la délivrance d'une première carte de séjour pluriannuelle dans les conditions prévues au présent article, il doit en outre justifier du respect des conditions prévues au 1° de l'article L. 433-4. Et aux termes de l'article L 421-4 du même code : " Conformément à l'article L. 414-13, lorsque la demande de l'étranger concerne un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement, les cartes de séjour prévues aux articles L. 421-1 et L. 421-3 lui sont délivrées sans que lui soit opposable la situation de l'emploi. Il en va de même de l'étudiant étranger qui, ayant obtenu un diplôme au moins équivalent au grade de master ou figurant sur une liste fixée par décret dans un établissement d'enseignement supérieur habilité au plan national, souhaite exercer un emploi salarié et présente un contrat de travail, à durée indéterminée ou à durée déterminée, en relation avec sa formation et assorti d'une rémunération supérieure à un seuil déterminé par décret et modulé, le cas échéant, selon le niveau de diplôme concerné. ". 12. D'autre part, aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention "salarié" éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles (...) ". L'article 9 de cet accord stipule : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord (...) ". Et aux termes de l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° pu 2° de l'article L. 411-1. ". 13. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, les dispositions précitées des articles L. 421-2 et L 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui fixent les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée, sont inapplicables aux ressortissants marocains, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain, au sens de l'article 9 de cet accord. Il en résulte que Mme B... épouse A... C... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de ces dispositions. 14. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...)° ". 15. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié. 16. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... épouse A... C... est entrée régulièrement en France le 6 septembre 2017, munie d'un visa de long séjour, puis a été titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " travailleur saisonnier ", valable jusqu'au 5 septembre 2020. Elle a ensuite présenté une demande d'admission au séjour le 30 juillet 2021, réceptionnée le 5 août suivant, sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain et des dispositions des articles L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, laquelle a été rejetée par l'arrêté contesté. 17. D'une part, il résulte d'une lecture combinée des dispositions de l'accord franco-marocain mentionnées au point 12 que la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " à un ressortissant marocain est subordonnée à la présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité administrative et à la production d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. En l'espèce, s'il est constant que Mme B... épouse A... C... est entrée régulièrement en France le 6 septembre 2017, elle s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français depuis le 6 septembre 2020, date d'expiration de son dernier titre de séjour, et par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône a pu à bon droit lui opposer l'absence de visa de long séjour pour refuser de lui délivrer un titre de séjour " salarié ". 18. D'autre part, la requérante fait valoir qu'elle est entrée régulièrement en France en 2017, qu'elle a bénéficié de plusieurs contrats à durée déterminée avant d'obtenir la signature d'un contrat à durée déterminée avec la société Agri Service 13, exploitée par son époux, en qualité d'ouvrier agricole, le 29 novembre 2019. Toutefois, ces éléments ne suffisent pas à eux seuls à caractériser une intégration professionnelle suffisamment durable et stable. En outre, Mme B... épouse A... C... est entrée et a résidé sur le territoire national en qualité de travailleur saisonnier, et ses contrats de travail en cette qualité ne l'autorisaient à séjourner en France que pour six mois maximum par an, la délivrance d'une carte de séjour en qualité de saisonnier étant subordonnée au maintien d'une résidence habituelle hors du territoire français. La requérante se prévaut également de la présence en France de son époux, titulaire d'une carte de résident, qui résiderait en France depuis 1989, de sa sœur, de nationalité française, ainsi que de sa mère, qui vit essentiellement sur le territoire français. Toutefois, elle ne démontre pas la communauté de vie avec son époux depuis 2017, alors que par ailleurs, les époux ont vécu séparément durant de nombreuses années. Dans ces conditions, les éléments exposés ci-dessus, relatifs à la vie personnelle et familiale de Mme B... épouse A... C... ne peuvent être regardés comme présentant le caractère de motifs exceptionnels qui auraient justifié que le préfet des Bouches-du-Rhône, dans le cadre du pouvoir de régularisation générale qu'il détient, lui délivre un titre de séjour. 19. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". 20. Ainsi qu'il a été dit au point 18, Mme B... épouse A... C..., entrée en France en 2017, ne justifie pas d'une intégration professionnelle suffisamment durable et stable sur le territoire français comme elle le soutient. En outre, elle fait valoir qu'elle est entrée en France en 2017 pour rejoindre M. A... C..., un compatriote qu'elle a épousé le 24 mai 2005 au Maroc, titulaire d'une carte de résident, qui serait arrivé en France en 1989. Toutefois, elle n'établit pas la communauté de vie avec son époux depuis 2017, par les seules pièces qu'elle produit, alors que les époux ont vécu séparément durant de nombreuses années et que, selon ses propres déclarations, M. A... C... s'était marié une première fois en France. Par ailleurs, si elle se prévaut également de la présence de sa sœur, de nationalité française, ainsi que de sa mère, qui vivrait essentiellement sur le territoire français, elle a vécu jusqu'à l'âge de 31 ans au moins, soit la majorité de sa vie, au Maroc où elle n'établit pas être isolée. Elle ne justifie pas ainsi avoir fixé en France le centre de ses intérêts privés et familiaux. Dans ses conditions, eu égard aux conditions de son séjour en France, la décision contestée n'a pas porté une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni violé les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 21. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre... ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union... ". 22. Le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, comme en l'espèce, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de ce titre. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le préfet des Bouches-du-Rhône aurait méconnu le droit de Mme B... épouse A... C... d'être entendue ne peut être accueilli. 23. Par ailleurs, Mme B... épouse A... C... ne peut utilement se prévaloir directement de la méconnaissance des dispositions de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, à l'encontre de l'a décision contestée, dès lors que ces dispositions ont été régulièrement transposées en droit interne par la loi la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité. 24. Mme B... épouse A... C... n'établit pas l'illégalité de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône refusant son admission au séjour. Ainsi, elle n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre de celle l'obligeant à quitter le territoire français. 25. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 20, la mesure d'éloignement de Mme B... épouse A... C... n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Cette décision n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 26. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par Mme B... épouse A... C... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 1er mars 2022 doivent être rejetées. Sur les conclusions aux fins d'injonction : 27. Le présent arrêt, qui rejette l'ensemble des conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B... épouse A... C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par conséquent, ses conclusions aux fins d'injonction doivent également être rejetées. Sur les frais liés au litige : 28. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions de Mme B... épouse A... C... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : Mme B... épouse A... C... est admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire. Article 2 : L'ordonnance du 29 juin 2022 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille est annulée. Article 3 : La demande présentée par Mme B... épouse A... C... devant le tribunal administratif de Marseille et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B... épouse A... C..., à Me Camille Bal et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer. Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône. Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - M. Prieto, premier conseiller, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. 2 N° 22MA02157 bb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 9 juillet 2020 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé son licenciement pour motif économique. Par un jugement n° 2006905 du 1er juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de Mme B.... Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2022, sous le n° 22MA02087, Mme B..., représentée par Me Zaoui, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2006905 du 1er juin 2022 du tribunal administratif de Marseille ; 2°) d'annuler la décision du 9 juillet 2020 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé son licenciement pour motif économique ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat et de Me Simon Laure en sa qualité de liquidateur de la société Nouvelle Scala la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision attaquée est insuffisamment motivée ; - elle contient des mentions erronées qui ne permettent pas de s'assurer du contrôle opéré par l'administration sur le respect de l'obligation de reclassement ; - elle est intervenue en méconnaissance de la procédure contradictoire en l'absence de transmission par l'inspection du travail du courrier complet de l'employeur concernant les recherches de reclassement et faute de justifier de ce que l'entretien téléphonique qui s'est tenu le 8 juillet 2020 ne pouvait avoir lieu en présentiel ; - elle est intervenue aux termes d'une procédure irrégulière faute pour l'employeur d'avoir transmis à l'administration l'ensemble des procès-verbaux du comité social et économique (CSE) ainsi que les courriers complets de recherches de reclassement ; - l'entretien préalable qui s'est tenu le 18 juin 2020 était trop court ; - le délai entre la fin des entretiens préalables et la réunion du CSE était insuffisant pour permettre au comité de se prononcer en toute connaissance de cause ; - l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, les recherches ayant été insuffisantes et tardives ; - l'entreprise ne lui a pas transmis de liste des postes disponibles et n'a pas attendu les réponses des entreprises sollicitées avant de lui notifier son licenciement. Par un mémoire en défense enregistré le 28 septembre 2022, Me Simon Laure mandataire judiciaire, en qualité de liquidateur de la société Nouvelle Scala, représenté par Me Notebaert-Cornet, conclut au rejet de la requête de Mme B... et qu'il soit mis à sa charge la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par Mme B... n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code du travail ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Prieto, - les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public, - et les observations de Me Stephan représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B... était employée depuis 2017 par la société Nouvelle Scala, implantée à Marseille et intervenant dans le domaine du numérique et du digital, en qualité de développeur 3D. Elle détenait le mandat de membre du comité économique et social depuis 2019. A la suite d'une procédure de liquidation judiciaire, la société Nouvelle Scala a élaboré un plan de sauvegarde de l'emploi qui a été validé par une décision de l'autorité administrative du 5 juin 2020. Par un courrier du 18 juin 2020, l'employeur a sollicité auprès de l'inspectrice du travail de l'unité départementale des Bouches-du-Rhône l'autorisation de licencier Mme B... pour motif économique. Par une décision du 9 juillet 2020, l'inspectrice du travail a accordé l'autorisation de la licencier. Mme B... relève appel du jugement n° 2006905 du 1er juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cette décision. Sur le bien-fondé du jugement : 2. En premier lieu, Mme B... reprend, en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance, et sans critiquer la réponse apportée par le tribunal, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée. Dès lors, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 3 du jugement attaqué. 3. En deuxième lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, les erreurs quant à la date d'audition de la salariée par l'inspectrice du travail et à la date des courriers de recherches de reclassement adressés par le liquidateur constituent de simples erreurs matérielles sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. 4. En troisième lieu, en vertu des articles R. 2421-4 et R. 2421-11 du code du travail, l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé doit, quel que soit le motif de la demande, procéder à une enquête contradictoire. 5. Ces dispositions impliquent, pour le salarié dont le licenciement est envisagé, le droit d'être entendu personnellement et individuellement par l'inspecteur du travail, sauf s'il s'abstient, sans motif légitime, de donner suite à la convocation. En outre, le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément aux dispositions précitées implique que le salarié protégé soit mis à même de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, dans des conditions et des délais lui permettant de présenter utilement sa défense, sans que la circonstance que le salarié soit susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces puisse exonérer l'inspecteur du travail de cette obligation. 6. Il ressort des pièces du dossier que, par courrier du 30 juin 2020, Mme B... a été destinataire de l'ensemble des pièces jointes à la demande d'autorisation de licenciement adressée par l'employeur à l'administration et a été convoquée à un entretien téléphonique le 8 juillet 2020 avec l'inspectrice du travail. Il ressort de deux instructions du directeur général du travail des 17 mars 2020 et 17 avril 2020, que la période de crise sanitaire, qui avait débuté le 12 mars 2020, a conduit l'administration à privilégier les observations écrites et les échanges par courriels avec les parties jusqu'à la fin de l'état d'urgence sanitaire, prorogé jusqu'au 10 juillet 2020 et justifiaient qu'un entretien téléphonique soit organisé en lieu et place d'une entrevue. Mme B... soutient également que la copie des courriers adressés par le liquidateur judiciaire à la holding du groupe et à la filiale tunisienne de la société Nouvelle Scala concernant les possibilités de reclassement des salariés de l'entreprise, que lui a transmise l'inspectrice du travail, était incomplète faute de comprendre l'annexe relative à la liste des salariés concernés par le reclassement. Toutefois, la communication de cette annexe à la requérante, qui ne conteste ni qu'elle figurait sur cette liste ni avoir pu présenter utilement sa défense, ne présentait pas un caractère déterminant. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le caractère contradictoire de l'enquête a été méconnu. 7. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 2421-2 du code du travail : " Lorsqu'un licenciement pour motif économique de dix salariés ou plus dans une même période de trente jours concerne un ou plusieurs salariés mentionnés à l'article L. 2421-1, l'employeur joint à la demande d'autorisation de licenciement la copie de la notification du projet de licenciement adressée à l'autorité administrative en application de l'article L. 1233-46 ". Aux termes de l'article R. 2421-10 de ce code : " La demande d'autorisation de licenciement d'un membre de la délégation du personnel au comité social et économique ou d'un représentant de proximité est adressée à l'inspecteur du travail dans les conditions définies à l'article L. 2421-3. Elle est accompagnée du procès-verbal de la réunion du comité social et économique. Excepté dans le cas de mise à pied, la demande est transmise dans les quinze jours suivant la date à laquelle a été émis l'avis du comité social et économique. La demande énonce les motifs du licenciement envisagé. Elle est transmise par lettre recommandée avec avis de réception. ". Aux termes de l'article L. 2421-3 du même code : " Le licenciement envisagé par l'employeur d'un membre élu à la délégation du personnel au comité social et économique titulaire ou suppléant ou d'un représentant syndical au comité social et économique ou d'un représentant de proximité est soumis au comité social et économique, qui donne un avis sur le projet de licenciement dans les conditions prévues à la section 3 du chapitre II du titre Ier du livre III. (...) ". 8. Il ressort des pièces du dossier que le comité d'entreprise a donné son avis le 4 juin 2020 à 11 heures sur le projet de licenciement collectif de l'ensemble des salariés de la société Nouvelle Scala pour motif économique à la suite de la liquidation judiciaire de l'entreprise prononcée par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 27 mai 2020. Il est constant que, en application des dispositions précitées, ce procès-verbal était joint à la demande d'autorisation adressée par le liquidateur judiciaire à l'inspectrice du travail le 18 juin 2020. Contrairement à ce que soutient la requérante, la société Nouvelle Scala n'était pas tenue de transmettre à l'autorité administrative les procès-verbaux antérieurs du comité social et économique. Par suite, le moyen tiré de l'absence de transmission de l'ensemble des procès-verbaux du comité social et économique en méconnaissance de l'article R. 2421-10 du code du travail doit être écarté. 9. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 1233-11 du code du travail : " L'employeur qui envisage de procéder à un licenciement pour motif économique, qu'il s'agisse d'un licenciement individuel ou inclus dans un licenciement collectif de moins de dix salariés dans une même période de trente jours, convoque, avant toute décision, le ou les intéressés à un entretien préalable. / La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. (...) ". Et aux termes des dispositions de l'article L. 1233-12 du même code : " Au cours de l'entretien préalable, l'employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié ". 10. Mme B... soutient que l'entretien préalable auquel elle a été convoquée le 18 juin 2020 était trop bref, et que, les salariés ayant été convoqués entre 10h et 10h45, la durée moyenne de chaque entretien était de sept minutes. Toutefois, et alors que les dispositions précitées n'imposent pas à l'employeur le respect d'une durée minimum pour cet entretien mais seulement d'informer le salarié sur les motifs du licenciement et de recueillir ses explications, l'employeur indique, sans être contesté, que la conduite des entretiens a été répartie entre trois personnes, de sorte que la durée de chaque entretien a été nécessairement plus longue. Il ressort en outre des pièces du dossier et n'est pas contesté qu'au cours de cet entretien, le liquidateur judiciaire a exposé à Mme B... le motif économique conduisant à son licenciement et que la salariée s'est vue remettre une note explicative ainsi que le contrat de sécurisation professionnelle. Mme B... n'établit ni même n'allègue qu'elle aurait été empêchée de présenter ses observations sur ces points et que l'employeur aurait refusé de lui fournir des explications. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité dans le déroulement de l'entretien préalable au licenciement doit être écarté. 11. En sixième lieu, aux termes de l'article R. 2421-8 du code du travail : " L'entretien préalable au licenciement a lieu avant la consultation du comité d'entreprise faite en application de l'article L. 2421-3. (...) ". 12. Mme B... soutient que la consultation du comité social et économique est irrégulière dès lors que la réunion de ce dernier a eu lieu seulement quinze minutes après le terme des entretiens préalables. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le comité social et économique a été convoqué à une première réunion le 15 mai 2020 portant sur le projet de restructuration de l'entreprise puis, le 30 mai 2020, à une autre réunion relative à l'information et la consultation sur le projet de licenciement collectif de l'ensemble du personnel à la suite de la liquidation judiciaire prononcée le 27 mai 2020 ainsi que sur le projet de plan de sauvegarde de l'emploi puis, le 4 juin 2020, à deux réunions portant à nouveau sur le même objet. Il ressort encore des pièces du dossier que le contexte économique de l'opération projetée ainsi que les conséquences sociales en découlant et la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l'emploi ont été abordés tout au long de la procédure, ainsi qu'en attestent le contenu des procès-verbaux des réunions du comité et les notes que l'employeur a adressées aux membres de cette instance, notamment en date du 11 mai et du 4 juin 2020. Dans ces conditions, d'une part, si l'avis du 18 juin 2020 sur le projet de licenciement de l'ensemble des salariés protégés de la société Nouvelle Scala a été émis par le comité d'entreprise à la suite des entretiens préalables au licenciement de ces salariés qui se sont déroulés de 10h à 10h45, cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la consultation de ce comité, dès lors qu'aucune circonstance particulière ne rendait nécessaire un échange entre les salariés protégés et les membres du comité pour parfaire l'information de ce dernier. D'autre part, il ne ressort d'aucun élément du dossier, alors que le comité d'entreprise a été informé, par la note qui lui a été remise, des identités et mandats détenus par tous les salariés protégés dont le licenciement était envisagé ainsi que du motif des licenciements, que ce comité n'aurait pas été mis à même d'émettre son avis en toute connaissance de cause. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de consultation du comité économique et social doit en tout état de cause être écarté. 13. En septième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce. Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ". 14. Il résulte de ces dispositions que, pour apprécier si l'employeur ou le liquidateur judiciaire a satisfait à son obligation en matière de reclassement, l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique d'un salarié protégé doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel. Toutefois, lorsque le licenciement projeté est inclus dans un licenciement collectif qui requiert l'élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi, lequel comprend, en application de l'article L. 1233-61 du code du travail, un plan de reclassement, et que ce plan est adopté par un document unilatéral, l'autorité administrative, si elle doit s'assurer de l'existence, à la date à laquelle elle statue sur cette demande, d'une décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi, à défaut de laquelle l'autorisation de licenciement ne peut légalement être accordée, ne peut ni apprécier la validité du plan de sauvegarde de l'emploi ni, plus généralement, procéder aux contrôles mentionnés à l'article L. 1233-57-3 du code du travail qui n'incombent qu'au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi compétemment saisi de la demande d'homologation du plan. Il ne lui appartient pas davantage, dans cette hypothèse, de remettre en cause le périmètre du groupe de reclassement qui a été déterminé par le plan de sauvegarde de l'emploi pour apprécier s'il a été procédé à une recherche sérieuse de reclassement du salarié protégé. 15. En outre, lorsque le motif de licenciement invoqué par l'employeur fait obligation à l'administration d'apprécier le sérieux des recherches préalables de reclassement effectuées par celui-ci, l'inspecteur du travail doit apprécier les possibilités de reclassement du salarié à compter du moment où le licenciement est envisagé et jusqu'à la date à laquelle il statue sur la demande de l'employeur. 16. Mme B... soutient que la société Nouvelle Scala a engagé les recherches de possibilités de reclassement des salariés seulement à compter du 30 mai 2020 alors qu'elles auraient dû, selon elle, débuter dès le 15 mai 2020, à l'issue de la réunion du comité économique et social portant sur le projet de restructuration de l'entreprise. La liquidation judiciaire de la société a été prononcée par jugement du tribunal de commerce du 27 mai 2020, de sorte que le licenciement de l'ensemble des salariés de l'entreprise ne pouvait être envisagé, de manière certaine, avant cette date. En conséquence, les possibilités de reclassement n'avaient pas à être appréciées antérieurement à cette date et les recherches entreprises à compter du 30 mai 2020 par le liquidateur judiciaire n'étaient pas tardives. Si la requérante soutient également que ces recherches étaient insuffisantes, il ressort du document unilatéral du plan de sauvegarde de l'emploi élaboré le 4 juin 2020, homologué par une décision de l'administration du 5 juin 2020, elle-même validée par une décision du Conseil d'Etat n° 452898 du 27 décembre 2022, que le reclassement des salariés était impossible au sein de l'entreprise compte tenu de sa liquidation avec cessation immédiate et qu'il convenait d'apprécier la possibilité de reclassement au sein du groupe auquel elle appartient. Il ressort des pièces du dossier que le liquidateur judiciaire a sollicité, le 30 mai 2020, la société holding située à Paris, la Holding Quanteam, qui n'a pas répondu, ainsi que la seule filiale de la société Nouvelle Scala, Elypsia, située en Tunisie, intervenant dans le même secteur d'activité, qui a répondu le 2 juin 2020 en indiquant qu'elle ne pouvait y donner suite, allant elle-même faire l'objet d'une liquidation judiciaire. Me Laure a également recherché, par courriers du 30 mai 2020, alors qu'il n'y était pas tenu, des postes disponibles auprès des autres sociétés du groupe relevant d'autres secteurs d'activités, Quanteam et Asigma. La circonstance, à la supposer établie, que l'inspection du travail n'aurait pas disposé de l'annexe jointe aux courriers de recherches de reclassement et comprenant la liste des personnels concernés par le reclassement est sans influence sur l'appréciation portée par l'administration sur le respect de l'obligation de reclassement de Mme B..., dès lors qu'il n'est pas contesté que les recherches effectuées par le liquidateur judiciaire concernaient bien l'ensemble des salariés de l'entreprise. Si la requérante soutient que son licenciement est intervenu sans attendre les réponses des entreprises sollicitées, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit, que les entreprises du groupe ont été sollicitées le 30 mai 2020 avec la consigne de répondre dans les plus brefs délais et que, à la date à laquelle la demande d'autorisation a été adressée à l'inspectrice du travail, le 18 juin 2020, soit plus d'un mois et demi après, ni davantage à la date à laquelle l'autorité administrative a statué, ces entreprises n'avaient répondu, à l'exception de la filiale Elypsia, et devaient ainsi être regardées comme ayant émis des réponses négatives implicites. La requérante soutient encore qu'aucune liste de postes ne lui a été transmise et produit des copies d'écran du site internet du groupe Quanteam listant les offres d'emploi disponibles entre février et juin 2020. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ces postes se trouvaient au sein d'entreprises du groupe relevant d'autres secteurs d'activités, de sorte que la permutation du personnel n'était pas possible et qu'ils n'avaient donc pas à être proposés à la requérante. S'agissant des offres d'emploi de la Holding Quanteam, la requérante ne produit aucun élément pour démontrer que de tels postes, à les supposer disponibles, étaient compatibles avec ses capacités et qualifications. Dans ces conditions, l'inspectrice du travail a pu légalement considérer que l'employeur avait effectué une recherche loyale et sérieuse des possibilités de reclassement de l'intéressée. 17. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 juillet 2020 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé son licenciement pour motif économique. Sur les frais liés au litige : 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de Me Laure, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la requérante la somme que Me Laure demande sur le fondement des mêmes dispositions. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par Me Laure sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié Mme A... B..., au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et à Me Simon Laure en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Nouvelle Scala. Copie en sera adressée à la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - M. Prieto, premier conseiller, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. N° 22MA02087 2 bb
JADE/CETATEXT000047720878.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... A... D... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 1er juin 2022 par lequel la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée. Par un jugement n° 2209561 du 21 février 2023, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à la demande E... A... D... B... et a enjoint à la préfète des Alpes-de-Haute-Provence de délivrer à l'intéressée une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Procédures devant la cour : I. Par une requête enregistrée le 17 mars 2023 sous le n° 23MA00664, le préfet des Alpes-de-Haute-Provence demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 février 2023. Il soutient que les conditions fixées par l'article R. 811-15 du code de justice administrative sont remplies pour les raisons exposées dans sa requête au fond visée ci-dessous. La requête a été communiquée à Mme A... D... B... qui n'a pas produit de mémoire en défense. II. Par une requête enregistrée le 17 mars 2023 sous le n° 23MA00665, le préfet des Alpes-de-Haute-Provence demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 février 2023. Il soutient que : - le tribunal a méconnu son office et commis une erreur de droit en faisant peser sur lui la charge de la preuve de la disponibilité du traitement requis dans le pays d'origine de l'intéressée ; - les premiers juges ont méconnu leur office et le jugement attaqué est entaché d'un vice de procédure ainsi que d'une erreur de droit dès lors qu'il appartenait au tribunal, s'il entendait remettre en cause l'avis du collège de médecins, de demander à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de produire l'entier dossier du rapport médical et d'inviter cet office à présenter ses observations ; - le tribunal a méconnu son office et a commis une erreur de droit en lui enjoignant de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " alors que la requérante avait sollicité un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; - c'est à tort que les premiers juges ont retenu le motif d'annulation fondé sur l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - aucun des autres moyens invoqués en première instance n'est fondé. Par un mémoire en défense enregistré le 26 mai 2023, Mme A... D... B..., représentée par Me Rudloff, conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - les moyens soulevés par le préfet sont inopérants ou infondés ; - l'arrêté litigieux a été signé par une autorité incompétente ; - la décision de refus de renouvellement de titre de séjour est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - elle méconnaît le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour ; - cette mesure d'éloignement méconnaît le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - cette décision ne pouvait être légalement édictée dès lors qu'elle remplit les conditions pour obtenir la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 425-9 et L. 423-23 du même code ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ; - elle ne respecte pas le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - la décision lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours est illégale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement ; - cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'un délai supérieur à trente jours aurait dû lui être accordé ; - la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement ; - cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme A... D... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 avril 2023. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Mouret, - et les observations de Me Rudloff, représentant Mme A... D... B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme A... D... B..., ressortissante angolaise née en 1975 et déclarant être entrée sur le territoire français au cours de l'année 2017, a sollicité en vain l'asile. Elle s'est vu délivrer, le 12 avril 2021, une carte de séjour temporaire pour raisons de santé valable jusqu'au 11 avril 2022. Par un arrêté du 1er juin suivant, la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée. Par un jugement du 21 février 2023, le tribunal administratif de Marseille, faisant droit à la demande E... A... D... B..., a annulé cet arrêté et a enjoint à l'autorité préfectorale de délivrer à l'intéressée une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Par ses requêtes visées ci-dessus, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un même arrêt, le préfet des Alpes-de-Haute-Provence demande à la cour, respectivement, de prononcer le sursis à exécution de ce jugement et de l'annuler. Sur la requête n° 23MA00665 : 2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé ". Selon le dernier alinéa de l'article R. 425-11 du même code : " Les orientations générales mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 425-9 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Le dernier alinéa de l'article 3 de l'arrêté visé ci-dessus du ministre chargé de la santé du 5 janvier 2017 dispose que : " Afin de contribuer à l'harmonisation des pratiques suivies au plan national, des outils d'aide à l'émission des avis et des références documentaires présentés en annexe II et III sont mis à disposition des médecins de l'office ". 3. D'une part, s'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, il appartient au juge administratif, lorsque le demandeur lève le secret relatif aux informations médicales qui le concernent en faisant état de la pathologie qui l'affecte, de se prononcer sur ce moyen au vu de l'ensemble des éléments produits dans le cadre du débat contradictoire et en tenant compte, le cas échéant, des orientations générales fixées par l'arrêté du 5 janvier 2017. 4. D'autre part, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. 5. Enfin, pour déterminer si un étranger peut bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire d'un traitement médical approprié, au sens des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il convient de s'assurer, eu égard à la pathologie de l'intéressé, de l'existence d'un traitement approprié et de sa disponibilité dans des conditions permettant d'y avoir accès, et non de rechercher si les soins dans le pays d'origine sont équivalents à ceux offerts en France ou en Europe. 6. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... D... B..., qui souffre de troubles psychiatriques ainsi que d'une hépatite B chronique, bénéficie d'un traitement médicamenteux et d'un suivi médical. Dans son avis émis le 19 mai 2022 dans le cadre de la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par l'intéressée, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que, si l'état de santé E... A... D... B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pourra néanmoins bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de ce pays vers lequel son état de santé lui permet de voyager sans risque. Pour contester cette appréciation, sur laquelle la préfète des Alpes-de-Haute-Provence s'est notamment fondée pour refuser de renouveler son titre de séjour, Mme A... D... B... soutient que, compte tenu des carences du système de santé angolais et du risque de pénurie de médicaments ainsi que du coût élevé de ceux-ci dans son pays d'origine, elle ne pourra notamment pas y bénéficier d'une prise en charge appropriée de l'hépatite B chronique dont elle est atteinte. Toutefois, le certificat médical établi le 22 octobre 2020 par un praticien du centre hospitalier d'Avignon, s'il fait état de l'indisponibilité en Angola du " traitement par analogue nucléosidique de type Ténofovir " administré à la requérante, ne saurait suffire à démontrer l'absence de tout traitement adapté dans ce pays et à remettre en cause l'appréciation portée sur ce point plus d'un an et demi plus tard par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Il en va de même des indications d'ordre général contenues dans le certificat médical établi le 13 juin 2022 par un médecin généraliste et concernant l'état de santé d'un ressortissant angolais souffrant, à l'instar E... A... D... B..., d'une hépatite B chronique, ce certificat se bornant, pour l'essentiel, à comparer les systèmes de santé français et angolais avant de renvoyer, outre à des instructions datant de 2010 et 2011, au c) du C de l'annexe II à l'arrêté du 5 janvier 2017 qui indique, sans d'ailleurs se référer spécifiquement à l'Angola, que le rapport d'experts de 2014 intitulé " Prise en charge des personnes infectées par les virus de l'hépatite B ou de l'hépatite C " a " rappelé que les moyens nécessaires à un suivi efficace et adapté de ces pathologies ne sont habituellement pas accessibles dans l'ensemble des pays en développement ". Dans ces conditions, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les éléments produits par Mme A... D... B..., et en particulier les deux certificats médicaux évoqués ci-dessus, n'étaient pas, en raison de leur caractère insuffisamment circonstancié, de nature à remettre en cause l'appréciation de l'administration en ce qui concerne la disponibilité du traitement administré à l'intéressée, ou d'un traitement équivalent, dans son pays d'origine. A cet égard, la circonstance que l'avis émis le 19 mai 2022 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration diffère, en ce qui concerne la question de la disponibilité du traitement requis en Angola, de celui émis le 1er février 2021 par cette même instance collégiale, ne saurait suffire à démontrer l'absence d'un traitement approprié dans ce pays à la date de l'arrêté attaqué. Enfin, et de façon plus générale, les seules pièces versées aux débats par Mme A... D... B... ne permettent pas d'établir qu'elle ne pourrait pas effectivement bénéficier dans son pays d'origine, notamment en raison de sa situation financière, d'une prise en charge appropriée de ses différentes pathologies mentionnées ci-dessus, ni que son état de santé ne lui permettrait pas d'y voyager sans risque. 7. Par suite, le préfet des Alpes-de-Haute-Provence est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler la décision de refus de renouvellement de titre de séjour en litige ainsi que, par voie de conséquence, les autres décisions contenues dans l'arrêté du 1er juin 2022. 8. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme A... D... B... devant le tribunal administratif ainsi que devant la cour. 9. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 14 février 2022 régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs, la préfète des Alpes-de-Haute-Provence a donné délégation à M. Paul-François Schira, secrétaire général de la préfecture et signataire de l'arrêté contesté, à l'effet de signer notamment toutes les décisions relevant de la " police des étrangers ". Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté. 10. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. 11. Mme A... D... B..., qui déclare être entrée sur le territoire français au cours du mois de septembre 2017, n'y justifie d'aucune attache familiale, hormis ses trois enfants nés en Angola respectivement en 2001, 2005 et 2011. Il ressort des pièces du dossier que son fils aîné s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par un arrêté du 6 décembre 2021, comportant notamment une mesure d'éloignement, dont la légalité a d'ailleurs été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Marseille. La requérante ne justifie pas, en dépit de ses efforts d'insertion professionnelle, d'une intégration particulière en France. Il n'apparaît pas qu'elle serait dépourvue d'attaches dans son pays d'origine dans lequel elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-deux ans. Il n'est en outre pas établi que Mme A... D... B... serait dans l'impossibilité de reconstituer sa cellule familiale en dehors du territoire français, en particulier avec ses deux filles mineures, ni que ces enfants, qui poursuivent avec succès leur scolarité en France depuis plusieurs années, ne pourraient être scolarisés dans un autre pays. Dans ces conditions, la décision de refus de renouvellement de titre de séjour en litige n'a pas porté au droit E... A... D... B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Il suit de là que le moyen tiré de ce que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes raisons, et alors qu'il est constant que la requérante n'a pas sollicité, dans le cadre de sa demande de renouvellement de titre de séjour, la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne saurait, en tout état de cause, être accueilli. Il en va de même, eu égard à tout ce qui a été dit précédemment, du moyen - au soutien duquel la requérante ne peut utilement se prévaloir des orientations générales de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 - tiré de ce que la préfète des Alpes-de-Haute-Provence aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de cette décision sur la situation E... A... D... B.... 12. En troisième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation. 13. La décision de refus de renouvellement de titre de séjour en litige n'a ni pour objet ni pour effet de séparer Mme A... D... B... de ses deux filles mineures. Il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit, que ces dernières seraient dans l'impossibilité de poursuivre leur scolarité dans un autre pays, notamment dans celui dont elles ont la nationalité. Dans ces conditions, il n'apparaît pas que la préfète des Alpes-de-Haute-Provence aurait, en édictant cette décision de refus, porté atteinte à l'intérêt supérieur des enfants mineurs E... Mme A... D... B.... Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne saurait être accueilli. 14. En quatrième lieu, eu égard à ce qui a été dit précédemment, Mme A... D... B... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français. 15. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ". 16. Le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement en litige méconnaît les dispositions citées au point précédent doit être écarté pour les mêmes raisons que celles exposées au point 6. 17. En sixième lieu, Mme A... D... B... ne pouvant, ainsi qu'il a été dit aux points 6 et 11, prétendre à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions des articles L. 425-9 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle n'est pas fondée à soutenir que la préfète des Alpes-de-Haute-Provence ne pouvait légalement l'obliger à quitter le territoire français. 18. En septième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 11 et 13, la mesure d'éloignement en litige ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation E... A... D... B.... 19. En huitième lieu, eu égard à ce qui précède, Mme A... D... B... n'est pas fondée à soutenir que la décision lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la mesure d'éloignement prise à son encontre. 20. En neuvième lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas (...) ". 21. Eu égard notamment à la date d'édiction de l'arrêté attaqué, la circonstance que les enfants E... A... D... B... étaient alors scolarisés ne saurait suffire à établir, alors au demeurant que l'intéressée ne justifie pas avoir sollicité un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, que la préfète des Alpes-de-Haute-Provence aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de lui accorder un délai supérieur à celui de droit commun fixé par les dispositions citées au point précédent. 22. En dixième lieu, Mme A... D... B... n'est pas fondée à soutenir, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, que la décision fixant le pays de destination serait illégale du fait de l'illégalité de la mesure d'éloignement dont elle découle. 23. En onzième et dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Selon le dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". 24. Mme A... D... B... n'établit pas, par les seules pièces qu'elle produit, que sa vie ou sa liberté seraient effectivement menacées en cas de retour dans son pays d'origine, ni que ses deux plus jeunes filles y seraient personnellement et directement exposées à un risque d'excision. La demande d'asile de l'intéressée et celles présentées pour le compte de ses filles mineures ont d'ailleurs été rejetées par des décisions du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dont la légalité a été confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 5 octobre 2020. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations et dispositions citées au point précédent ne saurait être accueilli. 25. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué, le préfet des Alpes-de-Haute-Provence est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté du 1er juin 2022, lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à Mme A... D... B... et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros au conseil de l'intéressée au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Dès lors, il y a lieu d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de première instance E... A... D... B.... Par voie de conséquence, les conclusions présentées par cette dernière au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées. Sur la requête n° 23MA00664 : 26. Le présent arrêt statuant sur la requête du préfet des Alpes-de-Haute-Provence tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 février 2023, il n'y a plus lieu de statuer sur sa requête n° 23MA00664 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement. D É C I D E : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 23MA00664 du préfet des Alpes-de-Haute-Provence. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 février 2023 est annulé. Article 3 : La demande présentée par Mme A... D... B... devant le tribunal administratif de Marseille et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à Mme C... A... D... B... et à Me Rudloff. Copie en sera adressée au préfet des Alpes-de-Haute-Provence et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Digne-les-Bains. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Mouret, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. 2 Nos 23MA00664, 23MA00665 nb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. F... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 14 mai 2022 du préfet des Alpes-Maritimes lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de destination. Par un jugement n° 2202659 du 11 juillet 2022, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 12 août 2022, M. B..., représenté par Me Soubie-Ninet, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nice n° 2202659 du 11 juillet 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 14 mai 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard en lui délivrant, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Soubie-Ninet renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Il soutient que : La décision de refus de titre de séjour : - est entachée d'incompétence ; - est insuffisamment motivée ; - est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation par le préfet ; - est entachée d'erreur de droit au regard de l'article L. 424-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation au regard des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - méconnaît les articles 3 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; La décision portant obligation de quitter le territoire : - est entachée d'incompétence ; - est insuffisamment motivée ; - est entachée d'erreur de droit au regard de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation en l'absence d'admission au séjour pour motifs humanitaires ou au titre de la vie privée et familiale ; - méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - méconnaît les articles 3 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; La décision fixant le pays de destination : - est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité des décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire ; - est entachée d'incompétence ; - est insuffisamment motivée ; - méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - méconnaît les articles 3 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Le préfet des Alpes-Maritimes, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la requête de M. B... tendant à l'annulation du refus de titre de séjour qui lui aurait été opposé dès lors que l'arrêté préfectoral attaqué, pris sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne comporte pas un tel refus de titre de séjour. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 octobre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme Chenal-Peter a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., de nationalité nigériane, demande l'annulation du jugement du 11 juillet 2022 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 14 mai 2022 l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de destination. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet des Alpes-Maritimes n'avait été saisi d'aucune demande de titre de séjour sur un autre fondement que celui du droit d'asile ou du bénéfice de la protection subsidiaire. Le requérant s'est en effet vu refuser le statut de réfugié et le bénéfice de cette protection, par une décision du 19 octobre 2021 de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 28 mars 2022. Il pouvait, dès lors, faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français au titre du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En conséquence, quand bien même l'arrêté attaqué mentionne de manière superfétatoire que la demande de titre de séjour en qualité de protégé international présentée par le requérant est rejetée, le préfet s'est borné à constater que l'intéressé ne bénéficiait plus du droit de se maintenir sur le territoire français. Il n'a donc pas, ce faisant, pris de décision susceptible de recours pour excès de pouvoir distincte de l'obligation de quitter le territoire français qui a procédé de cette constatation. Par suite, les conclusions dirigées contre une telle constatation, mentionnées à l'article 1er de l'arrêté attaqué sont irrecevables et doivent être rejetées. 3. En deuxième lieu, les moyens invoqués par M. B... et tirés de ce que l'arrêté préfectoral contesté du 14 mai 2022, pris en l'ensemble de ses décisions, serait entaché d'incompétence, d'insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen sérieux de sa situation, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Nice. 4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ;(...) ". 5. Il est constant que M. B... a présenté, contrairement à ce qu'il soutient, une demande d'asile enregistrée le 15 janvier 2020 devant l'OFPRA. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, le requérant aurait justifié d'une admission au séjour pour motifs humanitaires ou au titre de la vie privée et familiale. En tout état de cause, le requérant ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ces dispositions ne prévoyant pas la délivrance de plein droit d'un titre de séjour. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation en l'absence d'admission au séjour de l'intéressé pour un tel motif, ne peuvent qu'être écartés. 6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". 7. M. B... soutient qu'il réside en France depuis près de quatre ans à la date de l'arrêté contesté, qu'il vit avec son épouse, de nationalité nigériane, et leurs deux filles, nées à Nice les 27 août 2019 et 5 octobre 2020, dans le village de Breil-sur-Roya où la famille est bien intégrée. Le requérant fait également valoir que ses deux filles sont suivies par les services de la protection maternelle et infantile (PMI) et que l'aînée est scolarisée depuis le mois de septembre 2022. Toutefois, à la date de l'arrêté attaqué, son épouse, Mme A..., résidait également de manière irrégulière sur le territoire français, sa demande d'asile ayant également été rejetée par la CNDA le 28 mars 2022, et elle faisait l'objet d'une mesure d'éloignement concomitante. S'il ressort des pièces du dossier que le préfet des Alpes-Maritimes a procédé à un réexamen de la situation administrative de Mme A..., en sa qualité de victime de traite et de proxénétisme ayant déposé plainte en vertu de l'article L. 425-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'elle s'est vue délivrer, le 26 avril 2023, une carte de séjour temporaire, cette circonstance, qui est postérieure à la décision obligeant M. B... à quitter le territoire français, est sans incidence sur cette décision dont la légalité s'apprécie à la date où elle a été prise. Dans ces conditions, et alors que la durée de séjour du requérant sur le territoire français est relativement brève à la date de l'arrêté contesté, celui-ci ne peut être regardé comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Le préfet n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. ni violé, en tout état de cause, les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 8. En cinquième lieu, aux termes des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. 9. L'arrêté attaqué n'a pas pour effet de contraindre M. B... à se séparer de ses enfants et le requérant n'établit pas que la cellule familiale qu'il forme avec son épouse également ressortissante nigériane, ne pourrait pas se reconstituer dans leur pays d'origine. Si le requérant fait valoir que ses filles seraient soumises à un risque d'excision au E..., il ne justifie pas de la réalité de ses allégations, alors que, dans sa décision du 28 mars 2022 rejetant les demandes d'asile présentées au nom des filles de M. B..., la CNDA a estimé qu'un tel risque ne pouvait être regardé comme établi. Il n'est pas plus démontré que ses filles ne pourraient poursuivre leur scolarité au Nigéria. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté. 10. En sixième lieu, aux termes de l'article 9 de la même convention : " Les Etats parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Une décision en ce sens peut être nécessaire dans certains cas particuliers, par exemple lorsque les parents maltraitent ou négligent l'enfant, ou lorsqu'ils vivent séparément et qu'une décision doit être prise au sujet du lieu de résidence de l'enfant. (...) ". 11. M. B... ne peut utilement se prévaloir de ces stipulations, dès lors qu'elles créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droit aux personnes physiques. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de cet article doit être écarté comme inopérant. 12. En septième lieu, M. B... n'établit pas l'illégalité de la décision du préfet des Alpes-Maritimes portant obligation de quitter le territoire français. Ainsi, il n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre de celle fixant le pays de destination. 13. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger a l'obligation de s'assurer, au vu du dossier dont elle dispose et sous le contrôle du juge, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle est en droit de prendre en considération à cet effet les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou de la Cour nationale du droit d'asile ayant statué sur la demande d'asile du requérant, sans pour autant être liée par ces éléments. 14. M. B... soutient qu'il encourt des risques en cas de retour au E... en raison de son ancienne orientation sexuelle et au motif que ses filles seraient soumises à un risque d'excision au E... où il est originaire de l'Etat de Delta. Toutefois, les demandes d'asile de M.B..., de son épouse, Mme A..., et de leurs deux filles, D... et C..., ont été rejetées par des décisions du 19 octobre 2021 de l'OFPRA, confirmées par des décisions du 28 mars 2022 de la CNDA. Par ces décisions, la CNDA a estimé que les déclarations imprécises des époux B... tout au long de la procédure n'ont pas permis d'établir le risque d'excision allégué en cas de retour de leurs filles au E.... Elle a estimé également que M. B... avait livré des déclarations peu convaincantes, ne permettant pas de tenir pour établis ni l'orientation sexuelle alléguée ni les autres faits et persécutions qu'il invoquait. De même, si la Cour a reconnu que les déclarations écrites et orales, ainsi que les pièces du dossier de Mme A..., son épouse, permettaient de tenir pour établis son recrutement par un réseau de prostitution et les circonstances dans lesquelles elle a été contrainte, par les membres de ce réseau, de pratiquer la prostitution en Europe, elle a relevé que l'intéressée n'a pas été en mesure d'apporter des explications concrètes et cohérentes sur les conditions dans lesquelles elle aurait pu se soustraire au réseau. De plus, Mme A... n'a pas non plus apporté d'explications tangibles s'agissant des menaces dont elle ferait actuellement l'objet et des menaces dont seraient victime les membres de sa famille restés au E... de la part de sa proxénète. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que M. B... et les membres de sa famille seraient exposés à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour au Nigéria. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut qu'être écarté. 15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 mai 2022. Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte : 16. Le présent arrêt, qui rejette l'ensemble des conclusions à fin d'annulation présentées par M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par conséquent, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent également être rejetées. Sur les frais liés au litige : 17. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de M. B... tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B..., à Me Soubie-Ninet et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer. Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes. Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - M. Prieto, premier conseiller, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. 2 N° 22MA02274 bb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 9 juillet 2020 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé son licenciement pour motif économique. Par un jugement n° 2006987 du 1er juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de M. A.... Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2022, sous le n° 22MA02088, M. A..., représenté par Me Zaoui, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2006987 du 1er juin 2022 du tribunal administratif de Marseille ; 2°) d'annuler la décision du 9 juillet 2020 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé son licenciement pour motif économique ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat et de Me Simon Laure en sa qualité de liquidateur de la société Nouvelle Scala la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision attaquée est insuffisamment motivée ; - elle contient des mentions erronées qui ne permettent pas de s'assurer du contrôle opéré par l'administration sur le respect de l'obligation de reclassement ; - elle est intervenue en méconnaissance de la procédure contradictoire en l'absence de transmission par l'inspection du travail du courrier complet de l'employeur concernant les recherches de reclassement et faute de justifier de ce que l'entretien téléphonique qui s'est tenu le 8 juillet 2020 ne pouvait avoir lieu en présentiel ; - elle est intervenue aux termes d'une procédure irrégulière faute pour l'employeur d'avoir transmis à l'administration l'ensemble des procès-verbaux du comité social et économique (CSE) ainsi que les courriers complets de recherches de reclassement ; - l'entretien préalable qui s'est tenu le 18 juin 2020 était trop court ; - le délai entre la fin des entretiens préalables et la réunion du CSE était insuffisant pour permettre au comité de se prononcer en toute connaissance de cause ; - l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, les recherches ayant été insuffisantes et tardives ; - l'entreprise ne lui a pas transmis de liste des postes disponibles et n'a pas attendu les réponses des entreprises sollicitées avant de lui notifier son licenciement. Par un mémoire en défense enregistré le 28 septembre 2022, Me Simon Laure, mandataire judiciaire, en qualité de liquidateur de la société Nouvelle Scala, représenté par Me Notebaert-Cornet, conclut au rejet de la requête de M. A... et qu'il soit mis à sa charge la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. A... n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code du travail ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Prieto, - les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public, - et les observations de Me Stephan représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... était employé depuis 2008 par la société Nouvelle Scala, implantée à Marseille et intervenant dans le domaine du numérique et du digital, en qualité d'ingénieur systèmes et réseaux. Il détenait le mandat de membre du comité économique et social depuis 2019. A la suite d'une procédure de liquidation judiciaire, la société Nouvelle Scala a élaboré un plan de sauvegarde de l'emploi qui a été validé par une décision de l'autorité administrative du 5 juin 2020. Par un courrier du 18 juin 2020, l'employeur a sollicité auprès de l'inspectrice du travail de l'unité départementale des Bouches-du-Rhône l'autorisation de licencier M. A... pour motif économique. Par une décision du 9 juillet 2020, l'inspectrice du travail a accordé l'autorisation de le licencier. M. A... relève appel du jugement n° 2006987 du 1er juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cette décision. Sur le bien-fondé du jugement : 2. En premier lieu, M. A... reprend, en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance, et sans critiquer la réponse apportée par le tribunal, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée. Dès lors, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 3 du jugement attaqué. 3. En deuxième lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, les erreurs quant à la date d'audition du salarié par l'inspectrice du travail et à la date des courriers de recherches de reclassement adressés par le liquidateur constituent de simples erreurs matérielles sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. 4. En troisième lieu, en vertu des articles R. 2421-4 et R. 2421-11 du code du travail, l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé doit, quel que soit le motif de la demande, procéder à une enquête contradictoire. 5. Ces dispositions impliquent, pour le salarié dont le licenciement est envisagé, le droit d'être entendu personnellement et individuellement par l'inspecteur du travail, sauf s'il s'abstient, sans motif légitime, de donner suite à la convocation. En outre, le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément aux dispositions précitées implique que le salarié protégé soit mis à même de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, dans des conditions et des délais lui permettant de présenter utilement sa défense, sans que la circonstance que le salarié soit susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces puisse exonérer l'inspecteur du travail de cette obligation. 6. Il ressort des pièces du dossier que, par courrier du 30 juin 2020, M. A... a été destinataire de l'ensemble des pièces jointes à la demande d'autorisation de licenciement adressée par l'employeur à l'administration et a été convoqué à un entretien téléphonique le 8 juillet 2020 avec l'inspectrice du travail. Il ressort de deux instructions du directeur général du travail des 17 mars 2020 et 17 avril 2020, que la période de crise sanitaire, qui avait débuté le 12 mars 2020, a conduit l'administration à privilégier les observations écrites et les échanges par courriels avec les parties jusqu'à la fin de l'état d'urgence sanitaire, prorogé jusqu'au 10 juillet 2020 et justifiaient qu'un entretien téléphonique soit organisé en lieu et place d'une entrevue. M. A... soutient également que la copie des courriers adressés par le liquidateur judiciaire à la holding du groupe et à la filiale tunisienne de la société Nouvelle Scala concernant les possibilités de reclassement des salariés de l'entreprise, que lui a transmise l'inspectrice du travail, était incomplète faute de comprendre l'annexe relative à la liste des salariés concernés par le reclassement. Toutefois, la communication de cette annexe au requérant, qui ne conteste ni qu'elle figurait sur cette liste ni avoir pu présenter utilement sa défense, ne présentait pas un caractère déterminant. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le caractère contradictoire de l'enquête a été méconnu. 7. En quatrième lieu, aux termes de l'article R 2421-2 du code du travail : " Lorsqu'un licenciement pour motif économique de dix salariés ou plus dans une même période de trente jours concerne un ou plusieurs salariés mentionnés à l'article L. 2421-1, l'employeur joint à la demande d'autorisation de licenciement la copie de la notification du projet de licenciement adressée à l'autorité administrative en application de l'article L. 1233-46 ". Aux termes de l'article R. 2421-10 de ce code : " La demande d'autorisation de licenciement d'un membre de la délégation du personnel au comité social et économique ou d'un représentant de proximité est adressée à l'inspecteur du travail dans les conditions définies à l'article L. 2421-3. Elle est accompagnée du procès-verbal de la réunion du comité social et économique. Excepté dans le cas de mise à pied, la demande est transmise dans les quinze jours suivant la date à laquelle a été émis l'avis du comité social et économique. La demande énonce les motifs du licenciement envisagé. Elle est transmise par lettre recommandée avec avis de réception. ". Aux termes de l'article L. 2421-3 du même code : " Le licenciement envisagé par l'employeur d'un membre élu à la délégation du personnel au comité social et économique titulaire ou suppléant ou d'un représentant syndical au comité social et économique ou d'un représentant de proximité est soumis au comité social et économique, qui donne un avis sur le projet de licenciement dans les conditions prévues à la section 3 du chapitre II du titre Ier du livre III. (...) ". 8. Il ressort des pièces du dossier que le comité d'entreprise a donné son avis le 4 juin 2020 à 11 heures sur le projet de licenciement collectif de l'ensemble des salariés de la société Nouvelle Scala pour motif économique à la suite de la liquidation judiciaire de l'entreprise prononcée par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 27 mai 2020. Il est constant que, en application des dispositions précitées, ce procès-verbal était joint à la demande d'autorisation adressée par le liquidateur judiciaire à l'inspectrice du travail le 18 juin 2020. Contrairement à ce que soutient le requérant, la société Nouvelle Scala n'était pas tenue de transmettre à l'autorité administrative les procès-verbaux antérieurs du comité social et économique. Par suite, le moyen tiré de l'absence de transmission de l'ensemble des procès-verbaux du comité social et économique en méconnaissance de l'article R. 2421-10 du code du travail doit être écarté. 9. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 1233-11 du code du travail : " L'employeur qui envisage de procéder à un licenciement pour motif économique, qu'il s'agisse d'un licenciement individuel ou inclus dans un licenciement collectif de moins de dix salariés dans une même période de trente jours, convoque, avant toute décision, le ou les intéressés à un entretien préalable. / La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. (...) ". Et aux termes des dispositions de l'article L. 1233-12 du même code : " Au cours de l'entretien préalable, l'employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié ". 10. M. A... soutient que l'entretien préalable auquel il a été convoqué le 18 juin 2020 était trop bref et que, les salariés ayant été convoqués entre 10h et 10h45, la durée moyenne de chaque entretien était de sept minutes. Toutefois, et alors que les dispositions précitées n'imposent pas à l'employeur le respect d'une durée minimum pour cet entretien mais seulement d'informer le salarié sur les motifs du licenciement et de recueillir ses explications, l'employeur indique, sans être contesté, que la conduite des entretiens a été répartie entre trois personnes, de sorte que la durée de chaque entretien a été nécessairement plus longue. Il ressort en outre des pièces du dossier et n'est pas contesté qu'au cours de cet entretien, le liquidateur judiciaire a exposé à M. A... le motif économique conduisant à son licenciement et que le salarié s'est vu remettre une note explicative ainsi que le contrat de sécurisation professionnelle. M. A... n'établit ni même n'allègue qu'il aurait été empêché de présenter ses observations sur ces points et que l'employeur aurait refusé de lui fournir des explications. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité dans le déroulement de l'entretien préalable au licenciement doit être écarté. 11. En sixième lieu, aux termes de l'article R. 2421-8 du code du travail : " L'entretien préalable au licenciement a lieu avant la consultation du comité d'entreprise faite en application de l'article L. 2421-3. (...) ". 12. M. A... soutient que la consultation du comité social et économique est irrégulière dès lors que la réunion de ce dernier a eu lieu seulement quinze minutes après le terme des entretiens préalables. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le comité social et économique a été convoqué à une première réunion le 15 mai 2020 portant sur le projet de restructuration de l'entreprise puis, le 30 mai 2020, à une autre réunion relative à l'information et la consultation sur le projet de licenciement collectif de l'ensemble du personnel à la suite de la liquidation judiciaire prononcée le 27 mai 2020 ainsi que sur le projet de plan de sauvegarde de l'emploi puis, le 4 juin 2020, à deux réunions portant à nouveau sur le même objet. Il ressort encore des pièces du dossier que le contexte économique de l'opération projetée ainsi que les conséquences sociales en découlant et la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l'emploi ont été abordés tout au long de la procédure, ainsi qu'en attestent le contenu des procès-verbaux des réunions du comité et les notes que l'employeur a adressées aux membres de cette instance, notamment en date du 11 mai et du 4 juin 2020. Dans ces conditions, d'une part, si l'avis du 18 juin 2020 sur le projet de licenciement de l'ensemble des salariés protégés de la société Nouvelle Scala a été émis par le comité d'entreprise à la suite des entretiens préalables au licenciement de ces salariés qui se sont déroulés de 10h à 10h45, cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la consultation de ce comité, dès lors qu'aucune circonstance particulière ne rendait nécessaire un échange entre les salariés protégés et les membres du comité pour parfaire l'information de ce dernier. D'autre part, il ne ressort d'aucun élément du dossier, alors que le comité d'entreprise a été informé, par la note qui lui a été remise, des identités et mandats détenus par tous les salariés protégés dont le licenciement était envisagé ainsi que du motif des licenciements, que ce comité n'aurait pas été mis à même d'émettre son avis en toute connaissance de cause. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de consultation du comité économique et social doit en tout état de cause être écarté. 13. En septième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce. Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ". 14. Il résulte de ces dispositions que, pour apprécier si l'employeur ou le liquidateur judiciaire a satisfait à son obligation en matière de reclassement, l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique d'un salarié protégé doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel. Toutefois, lorsque le licenciement projeté est inclus dans un licenciement collectif qui requiert l'élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi, lequel comprend, en application de l'article L. 1233-61 du code du travail, un plan de reclassement, et que ce plan est adopté par un document unilatéral, l'autorité administrative, si elle doit s'assurer de l'existence, à la date à laquelle elle statue sur cette demande, d'une décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi, à défaut de laquelle l'autorisation de licenciement ne peut légalement être accordée, ne peut ni apprécier la validité du plan de sauvegarde de l'emploi ni, plus généralement, procéder aux contrôles mentionnés à l'article L. 1233-57-3 du code du travail qui n'incombent qu'au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi compétemment saisi de la demande d'homologation du plan. Il ne lui appartient pas davantage, dans cette hypothèse, de remettre en cause le périmètre du groupe de reclassement qui a été déterminé par le plan de sauvegarde de l'emploi pour apprécier s'il a été procédé à une recherche sérieuse de reclassement du salarié protégé. 15. En outre, lorsque le motif de licenciement invoqué par l'employeur fait obligation à l'administration d'apprécier le sérieux des recherches préalables de reclassement effectuées par celui-ci, l'inspecteur du travail doit apprécier les possibilités de reclassement du salarié à compter du moment où le licenciement est envisagé et jusqu'à la date à laquelle il statue sur la demande de l'employeur. 16. M. A... soutient que la société Nouvelle Scala a engagé les recherches de possibilités de reclassement des salariés seulement à compter du 30 mai 2020 alors qu'elles auraient dû, selon lui, débuter dès le 15 mai 2020, à l'issue de la réunion du comité économique et social portant sur le projet de restructuration de l'entreprise. La liquidation judiciaire de la société a été prononcée par jugement du tribunal de commerce du 27 mai 2020, de sorte que le licenciement de l'ensemble des salariés de l'entreprise ne pouvait être envisagé, de manière certaine, avant cette date. En conséquence, les possibilités de reclassement n'avaient pas à être appréciées antérieurement à cette date et les recherches entreprises à compter du 30 mai 2020 par le liquidateur judiciaire n'étaient pas tardives. Si le requérant soutient également que ces recherches étaient insuffisantes, il ressort du document unilatéral du plan de sauvegarde de l'emploi élaboré le 4 juin 2020, homologué par une décision de l'administration du 5 juin 2020, elle-même validée par une décision du Conseil d'Etat n° 452898 du 27 décembre 2022, que le reclassement des salariés était impossible au sein de l'entreprise compte tenu de sa liquidation avec cessation immédiate et qu'il convenait d'apprécier la possibilité de reclassement au sein du groupe auquel elle appartient. Il ressort des pièces du dossier que le liquidateur judiciaire a sollicité, le 30 mai 2020, la société holding située à Paris, la Holding Quanteam, qui n'a pas répondu, ainsi que la seule filiale de la société Nouvelle Scala, Elypsia, située en Tunisie, intervenant dans le même secteur d'activité, qui a répondu le 2 juin 2020 en indiquant qu'elle ne pouvait y donner suite, allant elle-même faire l'objet d'une liquidation judiciaire. Me Laure a également recherché, par courriers du 30 mai 2020, alors qu'il n'y était pas tenu, des postes disponibles auprès des autres sociétés du groupe relevant d'autres secteurs d'activités, Quanteam et Asigma. La circonstance, à la supposer établie, que l'inspection du travail n'aurait pas disposé de l'annexe jointe aux courriers de recherches de reclassement et comprenant la liste des personnels concernés par le reclassement est sans influence sur l'appréciation portée par l'administration sur le respect de l'obligation de reclassement de M. A..., dès lors qu'il n'est pas contesté que les recherches effectuées par le liquidateur judiciaire concernaient bien l'ensemble des salariés de l'entreprise. Si le requérant soutient que son licenciement est intervenu sans attendre les réponses des entreprises sollicitées, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit, que les entreprises du groupe ont été sollicitées le 30 mai 2020 avec la consigne de répondre dans les plus brefs délais et que, à la date à laquelle la demande d'autorisation a été adressée à l'inspectrice du travail, le 18 juin 2020, soit plus d'un mois et demi après, ni davantage à la date à laquelle l'autorité administrative a statué, ces entreprises n'avaient répondu, à l'exception de la filiale Elypsia, et devaient ainsi être regardées comme ayant émis des réponses négatives implicites. Le requérant soutient encore qu'aucune liste de postes ne lui a été transmise et produit des copies d'écran du site internet du groupe Quanteam listant les offres d'emploi disponibles entre février et juin 2020. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ces postes se trouvaient au sein d'entreprises du groupe relevant d'autres secteurs d'activités, de sorte que la permutation du personnel n'était pas possible et qu'ils n'avaient donc pas à être proposés au requérant. S'agissant des offres d'emploi de la Holding Quanteam, le requérant ne produit aucun élément pour démontrer que de tels postes, à les supposer disponibles, étaient compatibles avec ses capacités et qualifications. Dans ces conditions, l'inspectrice du travail a pu légalement considérer que l'employeur avait effectué une recherche loyale et sérieuse des possibilités de reclassement de l'intéressé. 17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 juillet 2020 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé son licenciement pour motif économique. Sur les frais liés au litige : 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de Me Laure, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du requérant la somme que Me Laure demande sur le fondement des mêmes dispositions. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par Me Laure sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et à Me Simon Laure en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Nouvelle Scala. Copie en sera adressée à la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, où siégeaient : - Mme Chenal Peter, présidente de chambre, - M. Prieto, premier conseiller, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. N° 22MA02088 2 bb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 31 mai 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2205598 du 4 novembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 1er mars 2023, Mme B..., représentée par Me Chartier, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 4 novembre 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 31 mai 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil, lequel s'engage dans cette hypothèse à renoncer à percevoir la part contributive de l'État. Elle soutient que : - le préfet a omis de procéder à un examen particulier de sa situation personnelle ; - le préfet a méconnu les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 27 janvier 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. d'Izarn de Villefort a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ressortissante marocaine, a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 31 mai 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Elle relève appel du jugement du 4 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...) ". 3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., née le 20 septembre 1964, a déclaré être entrée en France le 1er juin 2012 pour rejoindre un compatriote avec lequel elle avait contracté mariage au Maroc en mai 1995. Son époux réside régulièrement en France depuis 1992 sous couvert d'une carte de résident. Leur fils né au Maroc le 22 mars 2000, a été scolarisé en France de septembre 2012 à juin 2016 et s'y maintient depuis sa majorité. La requérante produit copie de nombreuses pièces justifiant de soins reçus en France depuis le mois de juin 2012 et d'attestations certifiant sa présence en France depuis cette date. Elle occupe avec son époux, depuis le mois d'août 2013, un appartement de type T4 dont le bail a été conclu au nom des deux époux. Elle a participé de 2013 à 2016 à des ateliers d'accompagnement à l'intégration. Ne s'exprimant pas en langue française à son arrivée en France, elle a suivi des cours et a atteint un niveau suffisant pour que lui soit délivré le 22 avril 2015 un diplôme de compétence en langue en français professionnel niveau A2-1. Si elle a fait l'objet, le 16 septembre 2020, d'un arrêté préfectoral refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire qu'elle n'a pas exécuté, son fils est actuellement en situation irrégulière et elle n'établit pas être dépourvue d'autres attaches au Maroc, eu égard tant à la durée qu'aux conditions de son séjour en France, le préfet a porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Par suite, alors même que Mme B... entre dans les catégories d'étrangers qui ouvrent droit au regroupement familial, il a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et à demander l'annulation de ce jugement et de l'arrêté attaqué. Sur les conclusions à fin d'injonction : 5. Eu égard à ses motifs, et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un changement dans les circonstances de droit ou de fait y ferait obstacle, l'exécution du présent arrêt implique pour le préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à Mme B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu de lui adresser une injonction en ce sens en fixant le délai d'exécution à un mois à compter de la notification de cet arrêt, sans qu'il soit besoin, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette mesure d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Chartier, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 4 novembre 2022 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 31 mai 2022 sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à Mme B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Me Chartier en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...,au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Chartier Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au Procureur près le tribunal judiciaire de Marseille Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé P. D'IZARN DE VILLEFORTLe président, Signé P. PORTAILLa greffière, Signé N. JUAREZ La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N° 23MA00522 2 nb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 16 février 2022 du préfet des Alpes-Maritimes lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de destination. Par un jugement n° 2201229 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2022, et un mémoire, enregistré le 30 mai 2023, M. A... B..., représenté par Me Hmad, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice n° 2201229 du 16 juin 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 16 février 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " étudiant " dans le délai de deux mois, et dans l'attente, lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler ; à défaut, lui enjoindre de réexaminer son droit au séjour et lui délivrer, dans l'attente, un récépissé l'autorisant à travailler ou une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'arrêté attaqué est entaché d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation par le préfet ; - il remplit les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; - l'obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions du 2°) de l'article L 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - cette décision est également illégale dès lors qu'il pouvait prétendre à un titre de séjour de plein droit sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Le préfet des Alpes-Maritimes, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Chenal-Peter, - et les observations de Me Hmad, représentant M. A... B.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... B..., de nationalité tunisienne, demande l'annulation du jugement du 16 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 16 février 2022 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de destination. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an. / En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sous réserve d'une entrée régulière en France et sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...) ". Aux termes de l'article L. 412-1 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1. ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative peut accorder une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " sans que la condition de visa de long séjour soit exigée, en cas de nécessité liée au déroulement des études, ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures. 3. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. A... B..., né le 29 septembre 2003, est entré régulièrement en France à l'âge de 12 ans, le 4 août 2016, sous couvert d'un visa court séjour valable 90 jours. Le 5 septembre 2021, alors qu'il était en classe de terminale, il a sollicité un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il résulte de la lecture de l'arrêté préfectoral contesté, que le préfet, pour justifier son refus de lui délivrer un tel titre, s'est borné à constater que ses parents, ainsi que son frère et sa sœur, étaient dépourvus de titre de séjour sur le territoire français, que l'intéressé ne justifiait pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, et que par conséquent, il n'entrait dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce faisant, le préfet des Alpes-Maritimes, qui ne s'est pas prononcé sur les conditions d'octroi du titre de séjour sollicité, telles qu'elles sont précisées à l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas procédé à l'examen particulier de la situation de l'intéressé au regard de ces dispositions. 4. D'autre part, il est constant que M. A... B... réside en France depuis l'âge de douze ans. Il établit également suivre une scolarité régulière depuis environ six ans à la date de l'arrêté attaqué, lequel a été pris durant son année de terminale, avant qu'il passe les épreuves du baccalauréat, qu'il a obtenu le 5 juillet 2022. Dans ces conditions, et dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de M. A... B... en France, le préfet des Alpes-Maritimes, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle. Compte tenu de l'illégalité entachant la décision de refus de titre de séjour, M. A... B... est fondé à demander l'annulation, par voie de conséquence, des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination, privées de base légale. 5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Sur les conclusions aux fins d'injonction : 6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ". 7. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit et de fait, que le préfet des Alpes-Maritimes délivre à M. A... B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, le munisse d'une autorisation provisoire de séjour. Sur les frais liés au litige : 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... B... de la somme de 1 500 euros. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du 16 juin 2022 du tribunal administratif de Nice et l'arrêté du 16 février 2022 du préfet des Alpes-Maritimes sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A... B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de le munir dans cette attente d'une autorisation provisoire de séjour. Article 3 : L'Etat versera à M. A... B... une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer. Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Grasse. Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - M. Prieto, premier conseiller, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. 2 N° 22MA02119 bb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 12 août 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé l'interdiction de territoire. Par un jugement n° 2206944 du 15 septembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 20 octobre 2022, M. B..., représenté par Me Gonidec, demande à la Cour : 1°) de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire ; 2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 15 septembre 2022 ; 3°) d'annuler l'arrêté du 12 août 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé l'interdiction de territoire ; 4°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de sept jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous les mêmes conditions d'astreinte ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve pour son conseil de renoncer au bénéfice de la part contributive de l'Etat. A défaut d'admission à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la même somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que l'arrêté attaqué : S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire : - il méconnait les dispositions de l'article R. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; - il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire : - il est illégal en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ; - il méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense. Par une décision du 27 janvier 2023, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. B.... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Quenette a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant marocain né le 6 novembre 2001, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 12 août 2022 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et prononçant une interdiction de retour sur le territoire d'une durée de deux ans. Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle : 2. Par la décision susvisée du 27 janvier 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille a constaté la caducité de la demande de M. B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Dès lors, ses conclusions présentées devant la Cour tendant à ce que soit prononcée son admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont en tout état de cause devenues sans objet. Sur le bien-fondé du jugement : 3. Aux termes de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990, stipule que : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ". 4. M. B... établit être père d'une enfant française née de le 2 juin 2021 alors qu'il était encore incarcéré et qu'il a reconnue le 23 août 2022 le lendemain de sa libération. L'enquête sociale menée le 10 mars 2021 menée par l'AGAVIP, association agréée par le ministère de la justice, précise que le requérant vivait avec une ressortissante française, ce que cette dernière atteste, et que l'enfant à naître était attendue par le couple avant l'incarcération du requérant. Il ressort des pièces du dossier que le requérant a exercé différentes démarches pour la reconnaissance de sa paternité pendant son incarcération. Il établit par une attestation non contredite par le préfet, qui n'a pas produit de mémoire en appel, qu'il a reçu des visites de sa concubine et de son enfant pendant cette incarcération. Si le préfet des Bouches-du-Rhône relève que le requérant a été condamné pour trafic de stupéfiant à deux reprises le 22 septembre 2020 et le 10 juin 2021 à 8 et 18 mois de prisons par le tribunal correctionnel de Nîmes en sorte qu'il constituerait une menace à l'ordre public, la décision d'obligation à quitter le territoire de M. B..., dans les circonstances particulière de l'espèce tenant à l'absence d'un parcours de délinquant inscrit dans la durée et à la séparation de l'enfant qu'engendrerait la décision attaquée alors même qu'il démontre depuis la naissance de sa fille les marques de son attachement, doit être regardée comme portant une atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant en méconnaissance de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant. Le requérant est fondé à demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire et, par voie de conséquence, l'interdiction prononcée à son encontre de retour sur le territoire pour une durée de deux ans. 5. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué. Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 6. Le présent arrêt n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour à M. B..., mais seulement le réexamen de sa situation en application des dispositions de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a donc lieu de prescrire au préfet des Bouches-du-Rhône de se prononcer, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sur la situation de l'intéressé et de le munir, dans l'attente de ce réexamen, d'une autorisation provisoire de séjour. Sur les frais liés au litige : 7. M. B... n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle en sorte que les conclusions tendant au versement d'une somme au profit de son conseil ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat au profit de M. B... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle présentée par M. B.... Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 2206944 du 15 septembre 2022 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 12 août 2022 édicté à l'encontre de M. B... sont annulés. Article 3 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer la situation de M. B... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente de ce réexamen, de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. B..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Gonidec. Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Marseille. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. 2 N° 22MA02617 nb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) Cabriès Invest a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 30 juin 2022 par lequel la maire de Cabriès a délivré à M. A... un permis de construire relatif à la surélévation avec modification de façades d'une maison individuelle existante sur un terrain cadastré section AP n° 115 sur le territoire communal. Par une ordonnance n° 2207336 du 14 décembre 2022, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a donné acte du désistement de la requête de la SARL Cabriès Invest. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 14 février 2023, la commune de Cabriès, représentée par Me Giudicelli, demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance du 14 décembre 2022 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille en tant qu'elle a donné acte du désistement de ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 2°) de mettre à la charge de la SARL Cabriès Invest la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité dans la mesure où elle a donné acte de son désistement de ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; - elle est entachée d'irrégularité au regard notamment des dispositions de l'article R. 636-1 du code de justice administrative ; - la requête de première instance était manifestement irrecevable pour cause de défaut d'intérêt à agir. Par un mémoire en défense enregistré le 28 avril 2023, la SARL Cabriès Invest, représentée par Me Chalavon, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, au rejet des demandes de la commune de Cabriès, et, en tout état de cause, à ce que soit mise à la charge de la commune de Cabriès la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Portail, président ; - les conclusions de M. Roux, rapporteur public ; - les observations de Me Marjary, représentant de la commune de Cabriès. Considérant ce qui suit : 1. La société à responsabilité limitée (SARL) Cabriès Invest a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 30 juin 2022 par lequel la maire de Cabriès a délivré à M. A... un permis de construire relatif à la surélévation avec modification de façades d'une maison individuelle existante sur un terrain cadastré section AP n° 115, situé 446 chemin de l'Oratoire sur le territoire communal. La commune de Cabriès relève appel de l'ordonnance par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a donné acte du désistement de la requête de la SARL Invest, en tant qu'elle a donné acte du désistement des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par la commune. Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : 2. Le mémoire en acceptation de désistement produit devant le juge de première instance par la commune de Cabriès le 9 décembre 2022, dans lequel il était expressément précisé que la commune persistait dans ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peut être regardé comme tendant au désistement de ces conclusions. Ainsi, l'ordonnance attaquée donnant acte du désistement de la commune de Cabriès de ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 susmentionné est irrégulière et doit être annulée dans cette mesure. 3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par la commune de Cabriès devant le tribunal administratif de Marseille et la Cour. Sur les frais liés à la demande de première instance : 4. Dans les circonstances de l'espèce, il y lieu de mettre à la charge de la SARL Cabriès Invest la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Cabriès et non compris dans les dépens. Sur les frais liés au litige : 5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Cabriès Invest la somme demandée par la commune de Cabriès au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens au titre de la procédure d'appel. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font par ailleurs obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cabriès, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée à ce titre par la SARL Cabriès Invest. D É C I D E : Article 1er : L'article 2 de l'ordonnance n° 2207336 du 14 décembre 2022 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille est annulé. Article 2 : la société à responsabilité limitée (SARL) Cabriès Invest versera la somme de 1 500 euros à la commune de Cabriès en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de la procédure suivie devant le tribunal administratif de Marseille. Article 3 : Les conclusions présentées par les parties sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de la procédure d'appel sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cabriès et à la société à responsabilité limitée (SARL) Cabriès Invest. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller, Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le président rapporteur, Signé P. PORTAILLe président assesseur, Signé P. D'IZARN DE VILLEFORT La greffière, Signé N. JUAREZ La République mande et ordonne au préfet des Bouches-du-Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 23MA00367 nb
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Vu les procédures suivantes : Procédures contentieuses antérieures : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour. M. A... a également demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 12 mai 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par un jugement nos 2201630, 2202862 du 30 janvier 2023, le tribunal administratif de Nice a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation présentées dans l'instance n° 2201630 et a rejeté la demande enregistrée sous le n° 2202862. Procédures devant la cour : I. Par une requête enregistrée le 1er mars 2023 sous le n° 23MA00520, M. A..., représenté par Me Oloumi, demande à la cour : 1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ; 2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 30 janvier 2023 ; 3°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 ; 4°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à venir et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler dans un délai de huit jours suivant cette notification ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer une telle autorisation provisoire de séjour dès cette notification ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les premiers juges ont dénaturé les faits de l'espèce ; - ils ont commis une erreur de droit ; - la décision de refus de titre de séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ; - cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour. La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense. Par une ordonnance du 28 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 avril 2023. En réponse à la mesure d'instruction diligentée par la cour le 19 avril 2023, le préfet des Alpes-Maritimes a produit, le 2 mai suivant, une pièce qui a été communiquée à M. A... en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative. Le mémoire présenté pour M. A... et enregistré le 15 mai 2023, soit postérieurement à la clôture de l'instruction, n'a pas été communiqué. II. Par une requête enregistrée le 1er mars 2023 sous le n° 23MA00521, M. A..., représenté par Me Oloumi, demande à la cour : 1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Nice du 30 janvier 2023 ; 2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 ; 3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler dès la notification de l'arrêt à venir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'exécution du jugement attaqué aurait des conséquences difficilement réparables ; - les moyens, visés ci-dessus, invoqués dans sa requête au fond présentent un caractère sérieux. La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Mouret a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant guinéen né le 3 avril 2003, a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance des Alpes-Maritimes au cours du mois de janvier 2019. Il a sollicité, le 16 mars 2021, la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Après avoir implicitement rejeté cette demande, le préfet des Alpes-Maritimes a, par un arrêté du 12 mai 2022, refusé de délivrer un titre de séjour à M. A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par un jugement du 30 janvier 2023, le tribunal administratif de Nice a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de cette décision implicite de refus et a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mai 2022. Par ses requêtes visées ci-dessus, qui sont dirigées contre ce jugement et qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un même arrêt, M. A... doit être regardé comme demandant à la cour, respectivement, d'annuler et de prononcer le sursis à exécution de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mai 2022. Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle : 2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, (...) l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président (...) ". 3. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de ces dispositions, d'admettre M. A... à l'aide juridictionnelle à titre provisoire. Sur les conclusions à fin d'annulation : 4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré sur le territoire français à l'âge de quinze ans et qu'il a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance des Alpes-Maritimes durant le mois de janvier 2019. L'intéressé, qui a intégré un centre de formation au cours de l'année scolaire 2019-2020, a obtenu, à la fin de l'année scolaire suivante, le diplôme du certificat d'aptitude professionnelle de cuisine. Il a ensuite été embauché en qualité de commis de cuisine à compter du 1er septembre 2021 en vertu d'un contrat à durée indéterminée à temps complet et a donné entière satisfaction à son employeur au vu des attestations versées aux débats. Si le préfet des Alpes-Maritimes a notamment relevé, dans l'arrêté contesté, que M. A... est défavorablement connu des services de police, en raison de faits commis le 27 mai 2020, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard au caractère isolé des faits en cause commis près de deux ans avant l'arrêté contesté et consistant en une altercation entre l'intéressé et plusieurs contrôleurs du tramway de Nice selon le rapport produit en appel par le préfet, que M. A... représenterait une menace pour l'ordre public. Par ailleurs, il ressort de ce rapport établi par la structure d'accueil de M. A... que ce dernier a su tenir compte des conseils de l'équipe éducative afin d'améliorer son comportement et de mener à bien son projet d'insertion sociale et professionnelle et qu'il est en mesure de " s'intégrer durablement en France ". Au regard de l'ensemble de ces éléments, et alors même que M. A... n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet des Alpes-Maritimes a, dans les circonstances particulières de l'espèce, commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé. M. A... est, dès lors, fondé à demander l'annulation de la décision de refus de titre de séjour en litige ainsi que, par voie de conséquence, celle des autres décisions contenues dans l'arrêté contesté. 5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022. Sur les conclusions à fin de sursis à exécution : 6. Le présent arrêt statuant sur les conclusions de la requête n° 23MA00520 tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice du 30 janvier 2023, les conclusions de la requête n° 23MA00521 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement sont devenues sans objet. Sur les conclusions à fin d'injonction : 7. Eu égard au motif d'annulation retenu, et en l'absence de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le préfet des Alpes-Maritimes délivre à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de sa notification. Sur les frais d'instance : 8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : M. A... est admis provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle dans l'instance n° 23MA00520. Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 23MA00521 à fin de sursis à exécution. Article 3 : L'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 est annulé. Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 30 janvier 2023 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 5 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 6 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer ainsi qu'à Me Oloumi. Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nice. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Mouret, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé R. MOURETLe président, Signé P. PORTAIL La greffière, Signé N. JUAREZ La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 Nos 23MA00520, 23MA00521
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligée à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de son éloignement, et a prononcé une interdiction de circulation sur le territoire pour une durée de trois ans. Par un jugement n° 2209699 du 28 novembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 27 décembre 2022, Mme C..., représentée par Me Habert, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 novembre 2022 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligée à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de son éloignement, et lui a prononcé une interdiction de circulation sur le territoire pour une durée de trois ans ; 3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au réexamen de sa demande ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que l'arrêté attaqué : - est insuffisamment motivé et entaché d'un défaut d'examen ; S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire sans délai : - elle méconnait les dispositions de l'article R. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; S'agissant de la décision portant interdiction de circulation sur le territoire : - elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ; - elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense. Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 mars 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Quenette. Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., ressortissante belge née le 27 mai 1985, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 17 novembre 2022 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et prononçant une interdiction de circulation sur le territoire pour une durée de trois ans. Sur la régularité du jugement 2. Le jugement précise que Mme C... est en état de récidive pour des faits graves de violence sur conjoint Il est suffisamment motivé quant à l'existence d'une menace pour l'ordre public. Sur le bienfondé du jugement 3.Contrairement à ce que soutient la requérante, l'arrêté attaqué, qui précise qu'elle est en état de récidive pour des faits de violence sur conjointe est suffisamment motivé quant au fait qu'elle constitue une menace à l'ordre publique. 4. Si elle soutient que " le préfet n'a pas procédé à un examen approfondi de la situation personnelle de M. D... ", cette circonstance est étrangère au litige en cause. 5. Aux termes de l'article L. 251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable aux citoyens de l'Union Européenne et aux membres de leur famille : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger les étrangers dont la situation est régie par le présent livre, à quitter le territoire français lorsqu'elle constate les situations suivantes : / 1° Ils ne justifient plus d'aucun droit au séjour tel que prévu par les articles L. 232-1, L. 233-1, L. 233-2 ou L. 233-3 ; / 2° Leur comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société ; / 3° Leur séjour est constitutif d'un abus de droit ". 6. Aux termes de l'article L. 251-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les étrangers dont la situation est régie par le présent livre disposent, pour satisfaire à l'obligation qui leur a été faite de quitter le territoire français, d'un délai de départ volontaire d'un mois à compter de la notification de la décision. / L'autorité administrative ne peut réduire le délai prévu au premier alinéa qu'en cas d'urgence et ne peut l'allonger qu'à titre exceptionnel ". 7. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... a été condamnée le 24 août 2022 à 6 mois de prison pour notamment destruction de bien appartenant à autrui par moyen dangereux et violence sans incapacité par une personne étant ou ayant été conjoint, après avoir déjà été condamnée à 6 mois d'emprisonnement avec sursis le 5 avril 2022 pour violence aggravée par trois circonstances suivie d'incapacité n'excédant pas 8 jours. Le comportement personnel de Mme C..., représente, du point de vue de l'ordre public, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société justifiant l'urgence à l'éloigner. La circonstance, au demeurant peu étayée, qu'elle garderait des contacts avec sa concubine dont la relation est récente n'est pas de nature à faire échec à l'urgence de cet éloignement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent de l'article L. 251-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être accueilli. 8. Aux termes de l'article L. 251-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par décision motivée, assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français édictée sur le fondement des 2° ou 3° de l'article L. 251-1 d'une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée maximale de trois ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, (...). Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". 9. Si Mme C... fait valoir qu'elle est sur le territoire depuis un an et demi et qu'elle y a créé des liens personnels très forts puisqu'elle vit en concubinage avec sa compagne, la durée de son séjour sur le territoire est récente, ainsi que celui du concubinage dont elle se prévaut alors même qu'elle a été condamnée pour violence à l'encontre de cette dernière et constitue, ainsi qu'il a été dit au point 7, une menace à l'ordre public. Par suite, elle n'est ni fondée à soutenir que les décisions en litige seraient entachées d'erreur d'appréciation au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni que la durée de trois ans d'interdiction de circulation sur le territoire serait disproportionnée à la gravité de la menace que représente l'intéressée pour l'ordre public. Elle n'établit pas d'avantage que les décisions attaquées seraient entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur sa situation personnelle. 10. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué. Ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Habert. Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, Signé M-A. QUENETTELe président, Signé P. PORTAILLa greffière, Signé Mme A... La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 22MA03157
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... et la société à responsabilité limitée (SARL) A... ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 27 juillet 2017 ordonnant la suppression d'ouvrages, de remblais et la remise en état du vallon du Curraud, infligeant une amende administrative et une astreinte journalière, ainsi que les décisions des 13 mars 2018, 19 février 2019, 10 juillet 2019 et la décision implicite rejetant leur recours gracieux, de désigner avant dire droit un expert, de les décharger de l'obligation de payer les sommes mises à leur charge par les titres de perception émis les 6 et 11 décembre 2017, 22 février 2018, 25 juin 2018, 11, 12 et 13 décembre 2018, 6 février 2019, 1er mars 2019 et 15 mai 2019, de suspendre l'exécution de ces titres exécutoires et de sursoir à statuer sur leurs requêtes. Par un jugement n° 1802141, 1900255, 1901799, 1904358, 1906061 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté ces demandes. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2021, sous le n° 21MA04725, M. A... et la SARL A..., représentés par Me Germani, demandent à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 14 octobre 2021 ; 2°) d'annuler les arrêtés préfectoraux des 21 février 2017 et 27 juillet 2017 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - l'ouvrage a été construit avant la loi sur l'eau et M. A... a été autorisé par la commune de Mougins à réaliser les travaux en cause ; - une expertise démontre que cet ouvrage respecte la continuité hydraulique et que l'inondation des propriétés riveraines en rive gauche ne résulte pas de sa propriété ; - l'agent de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) des Alpes-Maritimes a montré, par des visites régulières, une certaine proximité avec ses voisins et rendu un avis très subjectif ; - l'établissement des manquements aux prescriptions s'appuie sur des constatations de faits erronés ; - l'arrêté contesté est entaché d'une inexactitude matérielle des faits ; - cette erreur laisse supposer un détournement de pouvoir ; - l'exception d'illégalité de l'arrêté du 27 juillet 2017 est recevable et fondée. Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2022, le directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur conclut au rejet de la requête de M. A... et autre. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... et autre ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête de M. A... et autre. Il fait valoir que : - les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés des 21 février 2017 et 27 juillet 2017 sont irrecevables ; - les moyens soulevés par M. A... et autre ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 ; - le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marchessaux, - et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La SARL A... et M. A..., son gérant, ont fait l'objet, le 21 février 2017, d'un arrêté du préfet des Alpes-Maritimes les mettant en demeure de régulariser leur situation administrative, après constat par la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) des Alpes-Maritimes de la présence d'ouvrages et de remblais dans le lit mineur du cours d'eau du vallon de Curraud réalisés sans autorisation au droit des parcelles cadastrées section CM n° 81, 83 et 82 et AC n° 54, par le dépôt, avant le 31 mai 2017, d'un dossier de demande d'autorisation en application de l'article R. 214-6 du code de l'environnement. Par arrêté du 27 juillet 2017, le préfet des Alpes-Maritimes a, d'une part, mis en demeure la société et M. A... de procéder, avant le 30 avril 2018, à la suppression du lit bétonné de 60 mètres, de l'ouvrage cadre de 60 mètres surmonté d'enrochements et remblais et du remblai situé en rive droite du vallon de Curraud ainsi qu'à la remise à l'état originel du vallon au droit des parcelles précitées, d'autre part, informé les requérants que seront infligées une amende administrative pour non-respect de cette mise en demeure, d'un montant de 5 000 euros ainsi qu'une astreinte journalière de 500 euros jusqu'à la remise en état du cours d'eau après la suppression totale des ouvrages et remblais. Un titre de recettes d'un montant de 4 000 euros au titre de l'amende administrative a été émis à l'encontre de la SARL A..., le 6 décembre 2017. Par des titres de recettes émis les 11 décembre 2017, 22 février 2018, 25 juin 2018, 11 décembre 2018, 12 décembre 2018, 13 décembre 2018, 6 février 2019, 1er mars 2019, et 15 mai 2019, la direction régionale des finances publiques a mis à la charge des requérants une somme globale de 270 120 euros, au titre de la liquidation de l'astreinte administrative journalière prononcée par l'arrêté du 27 juillet 2017. M. A... et autre ont formé, contre chacun des titres de perception, des recours gracieux auprès de la direction départementale des finances publiques, lesquels ont été rejetés. M. A... et autre relèvent appel du jugement du 14 octobre 2021 du tribunal administratif de Nice qui a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2017, des décisions des 13 mars 2018, 19 février 2019, 10 juillet 2019 et de la décision implicite rejetant leurs recours gracieux, à la décharge de l'obligation de payer les sommes mises à leur charge par les titres de perception émis les 6 et 11 décembre 2017, 22 février 2018, 25 juin 2018, 11, 12 et 13 décembre 2018, 6 février 2019, 1er mars 2019 et 15 mai 2019, de suspendre l'exécution de ces titres exécutoires et de surseoir à statuer sur leurs requêtes. Par la présente requête, M. A... et autre doivent être regardés comme demandant également à être déchargés des sommes mises à leur charge par les titres de perception précités. Sur l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 février 2017 : 2. Les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 février 2017, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont, par suite, irrecevables. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2017 : 3. M. A... et autre ne contestent pas l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2017 retenue par les premiers juges en raison de leur tardiveté dès lors que cet arrêté notifié le 2 août 2017 qui comportait la mention des voies et délais de recours, était devenu définitif à la date à laquelle les requérants ont formé, le 5 août 2018, un recours gracieux lequel n'a donc pu avoir pour effet de proroger le délai de recours contentieux ouvert à l'encontre de l'arrêté contesté. Par suite, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées. En ce qui concerne les conclusions à fin de décharge de l'obligation de payer les sommes mises à la charge de M. A... et autre par les titres de perception émis les 6 et 11 décembre 2017, 22 février, 25 juin, 11, 12 et 13 décembre 2018, 6 février, 1er mars et 15 mai 2019 : 4. Aux termes de l'article L. 214-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions des articles L. 214-2 à L. 214-6 les installations, les ouvrages, travaux et activités réalisés à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, une modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux, la destruction de frayères, de zones de croissance ou d'alimentation de la faune piscicole ou des déversements, écoulements, rejets ou dépôts directs ou indirects, chroniques ou épisodiques, même non polluants. " L'article L. 214-2 du même code dispose que : " Les installations, ouvrages, travaux et activités visés à l'article L. 214-1 sont définis dans une nomenclature, établie par décret en Conseil d'Etat après avis du Comité national de l'eau, et soumis à autorisation ou à déclaration suivant les dangers qu'ils présentent et la gravité de leurs effets sur la ressource en eau et les écosystèmes aquatiques compte tenu notamment de l'existence des zones et périmètres institués pour la protection de l'eau et des milieux aquatiques. / (...) ". Selon l'article L. 214-6 du code précité : " I.- Dans tous les cas, les droits des tiers sont et demeurent réservés. / II.-Les installations, ouvrages et activités déclarés ou autorisés en application d'une législation ou réglementation relative à l'eau antérieure au 4 janvier 1992 sont réputés déclarés ou autorisés en application des dispositions de la présente section. Il en est de même des installations et ouvrages fondés en titre. / III.-Les installations, ouvrages et activités qui, n'entrant pas dans le champ d'application du II, ont été soumis à compter du 4 janvier 1992, en vertu de la nomenclature prévue par l'article L. 214-2, à une obligation de déclaration ou d'autorisation à laquelle il n'a pas été satisfait, peuvent continuer à fonctionner ou se poursuivre si l'exploitant, ou, à défaut le propriétaire, a fourni à l'autorité administrative les informations prévues par l'article 41 du décret n° 93-742 du 29 mars 1993, au plus tard le 31 décembre 2006. / Toutefois, s'il apparaît que le fonctionnement de ces installations et ouvrages ou la poursuite de ces activités présente un risque d'atteinte grave aux intérêts mentionnés à l'article L. 211-1, l'autorité administrative peut exiger le dépôt d'une déclaration ou d'une demande d'autorisation. (...) ". 5. Le destinataire d'un ordre de versement est recevable à contester, à l'appui de son recours contre cet ordre de versement, et dans un délai de deux mois suivant la notification de ce dernier, le bien-fondé de la créance correspondante, alors même que la décision initiale constatant et liquidant cette créance est devenue définitive, comme le prévoient au demeurant, pour les dépenses de l'Etat, les articles 117 et 118 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique. 6. Il résulte de ce qui a été dit au point 5, que M. A... et autre peuvent utilement exciper, à l'appui des conclusions dirigées contre les titres de perception en litige, de l'illégalité de l'arrêté du 27 juillet 2017 du préfet des Alpes-Maritimes, portant mise en demeure de supprimer l'ouvrage en cause, de remettre en l'état originel le vallon de Curraud et informant les requérants qu'il leur sera infligé une amende administrative pour non-respect de cette mise en demeure, d'un montant de 5 000 euros ainsi qu'une astreinte journalière de 500 euros jusqu'à la remise en état du cours d'eau après la suppression totale des ouvrages et remblais. 7. Si M. A... et autre soutiennent que l'ouvrage en béton recouvrant le cours d'eau du vallon de Curraud sur 60 mètres, d'une largeur de 3 mètres et d'une hauteur de 2,30 mètres aurait été réalisé en 1986 soit antérieurement à la loi sur l'eau, il résulte de l'instruction que convoqué à un entretien par la DDTM des Alpes-Maritimes, le 26 août 2016, M. A... a déclaré avoir réalisé cet ouvrage en 2015. Ce dernier a, en outre, signé le rapport mentionnant ses déclarations. Les autres pièces versées au dossier et notamment les expertises non contradictoires établies à la demande de M. A... et autre ne suffisent pas à établir une date de réalisation de l'ouvrage bétonné en cause d'une longueur de 60 mètres antérieure à 2015. Par suite, l'arrêté du 27 juillet 2017 n'est pas entaché d'une erreur de fait. 8. A supposer même que certains aménagements existaient avant l'entrée en vigueur de la " loi sur l'eau " de 1992, il résulte de ce qui précède que l'ouvrage bétonné de 60 mètres a été réalisé en 2015 par M. A.... Il ne peut donc utilement invoquer le bénéfice du mécanisme d'antériorité prévu à l'article L. 214-6 du code de l'environnement. 9. M. A... et autre ne peuvent utilement soutenir que les services de l'Etat sont intervenus à la demande de voisins avec qui ils sont en conflit et de ce qu'ils ne seraient pas à l'origine de l'inondation des voisins. La circonstance que la maison de ces derniers serait non conforme du fait de la construction illégale d'un sous-sol est sans incidence. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que le contrôleur de la DDTM des Alpes-Maritimes aurait manqué d'impartialité en étant proche de ses voisins ou aurait commis un détournement de pouvoir par la production d'un faux. 10. Compte tenu de ses caractéristiques et notamment de ses dimensions, l'ouvrage en litige, entraîne une " modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux " au sens de l'article L. 214-1 du code de l'environnement. Il devait donc faire l'objet d'une autorisation ou d'une déclaration en application de l'article L. 214-2 du même code. Par suite, le préfet des Alpes-Maritimes était tenu, par l'arrêté du 27 juillet 2017, de mettre en demeure les requérants de supprimer l'ouvrage en cause. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... et autre ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2017, des décisions des 13 mars 2018, 19 février 2019, 10 juillet 2019 et de la décision implicite rejetant leur recours gracieux, à la décharge de l'obligation de payer les sommes mises à leur charge par les titres de perception émis les 6 et 11 décembre 2017, 22 février 2018, 25 juin 2018, 11, 12 et 13 décembre 2018, 6 février 2019, 1er mars 2019 et 15 mai 2019. Sur les frais liés au litige : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. A... et autre au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... et de la SARL A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la SARL A..., à la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - M. Prieto, Premier conseiller, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. 2 N° 21MA04725 bb
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Vu la procédure suivante : Procédure devant la cour Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 juin et 31 octobre 2022, ainsi que les 16 janvier 2023 et 17 avril 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, l'association sauvegarde Sud Morvan et autres, représentées par Me Monamy, demandent à la cour : 1°) d'annuler la décision du 14 avril 2022 par laquelle le préfet de Saône-et-Loire a refusé d'enjoindre la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans de déposer une demande de dérogation " espèces protégées " et de compenser les destructions occasionnées par son parc éolien ; 2°) d'ordonner à la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans de déposer cette demande dans un délai à définir ; 3°) à titre de conservatoire, et dans l'attente de la dérogation, de prescrire à la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans de réaliser de 2023 à 2025 un suivi environnemental (suivi de mortalité) conforme aux obligations réglementaires du protocole de suivi environnemental des parcs éoliens terrestres - révision 2018 ainsi qu'un bridage diurne pour l'avifaune du 1er février au 30 novembre et un bridage nocturne pour les chiroptères jusqu'à 10 m/s de vent, du 15 mars au 31 octobre, quelle que soit la température, de 30 minutes avant le coucher du soleil à 30 minutes après le lever du soleil et, en toute hypothèse, la compensation des atteintes à la biodiversité qu'il a occasionnées ; 4°) de mettre à la charge de l'État et de la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - leur requête est recevable ; - la décision méconnaît les articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement en ce qui concerne le milan royal et les chiroptères ; - la décision méconnaît les articles L. 171-7, L. 181-14, L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement en raison de ce que le préfet aurait dû exiger de l'exploitant l'obtention d'une dérogation ; - la décision méconnaît les articles L. 110-1, L. 122-1-1, L. 163-1 et L. 511-1 du code de l'environnement faute pour l'administration d'avoir ordonnée la compensation des atteintes aux chauves-souris et aux oiseaux. Par des mémoires enregistrés les 30 août et 7 novembre 2022 ainsi que les 12 janvier et 28 mars 2023, l'avant dernier n'ayant pas été communiqué, la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans, représentée par Me Elfassi, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge des associations une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Par un mémoire enregistré le 5 septembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête. Il soutient que la requête est irrecevable car tardive et qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Par une ordonnance du 3 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 17 avril 2023. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'environnement ; - l'arrêté du 26 août 2011 modifié relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ; - et les observations de Me Monamy pour l'association sauvegarde Sud Morvan et autres, ainsi que celles de Me Durand substituant Me Elfassi, pour la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 juin 2023, présentée pour la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans ; Considérant ce qui suit : 1. Par des arrêtés des 17 décembre 2015 et 23 décembre 2016, le préfet de Saône et-Loire a respectivement délivré à la société VSB Énergies Nouvelles, à laquelle a succédé la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans, l'autorisation de construire sur le territoire de la commune de La Chapelle-au-Mans (Saône-et-Loire) et d'exploiter, au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, quatre aérogénérateurs d'une hauteur maximale de 180 mètres en bout de pâles et un poste de livraison. Ce parc éolien a été mis en service et fonctionne depuis le 1er mai 2019. L'association sauvegarde Sud Morvan et autres demandent l'annulation de la décision du 14 avril 2022 par laquelle le préfet de Saône-et-Loire a refusé d'ordonner à la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans de déposer une demande de dérogation " espèces protégées " et de prévoir une mesure de compensation pour les destructions occasionnées par son parc éolien. 2. En premier lieu, et d'une part, aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : (...) 1° Les autorisations délivrées au titre (...) du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance (...) sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; (...) ". Aux termes de l'article L. 181-16 du code de l'environnement, qui figure au chapitre unique du titre VIII du livre 1er de ce code : " I. - Pour l'application du présent chapitre, les contrôles administratifs sont exercés et les mesures de police administratives sont prises dans les conditions fixées au chapitre Ier du titre VII du présent livre et par les législations auxquelles ces contrôles et ces mesures se rapportent. (...) ". 3. D'autre part, l'article L. 171-7 du code de l'environnement, qui figure au chapitre Ier du titre VII du livre Ier de ce code, prévoit que : " I.- Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation, de l'enregistrement, de l'agrément, de l'homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine, et qui ne peut excéder une durée d'un an. Elle peut, par le même acte ou par un acte distinct, suspendre le fonctionnement des installations ou ouvrages, l'utilisation des objets et dispositifs ou la poursuite des travaux, opérations, activités ou aménagements jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification, à moins que des motifs d'intérêt général et en particulier la préservation des intérêts protégés par le présent code ne s'y opposent. L'autorité administrative peut, en toute hypothèse, édicter des mesures conservatoires aux frais de la personne mise en demeure. (...) ". 4. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 181-2 du code de l'environnement : " I. -L'autorisation environnementale tient lieu, y compris pour l'application des autres législations, des autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments suivants, lorsque le projet d'activités, installations, ouvrages et travaux relevant de l'article L. 181-1 y est soumis ou les nécessite : (...) 5° Dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats en application du 4° de l'article L. 411-2 ; (...) ". L'article L. 181-3 de ce code prévoit que : " (...) II.- L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent également : (...) 4° Le respect des conditions, fixées au 4° du I de l'article L. 411-2, de délivrance de la dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, lorsque l'autorisation environnementale tient lieu de cette dérogation ; (...) ". 5. Enfin, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; (...) / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces (...) ". Le I de l'article L. 411-2 du même code renvoie à un décret en Conseil d'État la détermination des conditions dans lesquelles sont fixées, notamment " 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : (...) c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; (...) ". 6. Il apparaît, en l'espèce, que l'autorisation d'exploitation du 23 décembre 2016, qui s'analyse aujourd'hui comme une autorisation environnementale, n'a jamais donné lieu à une dérogation " espèces protégées " au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement sans laquelle, lorsqu'elle s'impose, une activité autorisée ne peut normalement se poursuivre. L'étude d'impact initiale avait relevé, sur le site d'implantation du parc, plusieurs espèces d'oiseaux, notamment de rapaces (par exemple milan noir) et de passereaux (par exemple roitelet à triple bandeau), et de chiroptères, avec un statut de conservation et une vulnérabilité variables. Pour en tenir compte, l'arrêté d'autorisation, en ses articles 6-1 et 7 en particulier, a mis en place des mesures d'évitement et de réduction, destinées à éloigner les animaux vulnérables (sol en gravier, bouchage des cavités, balisage nocturne non permanent, aucun balisage nocturne à l'exception du balisage aéronautique réglementaire), avec un plan de bridage pour les chiroptères et des modalités d'exécution particulières du chantier ainsi qu'un suivi environnemental. Plus spécialement, l'article 6-1 renvoie au suivi post-implantation visé à l'article 12 de l'arrêté du 26 août 2011 qui précise, notamment, que " l'exploitant met en place un suivi environnemental permettant notamment d'estimer la mortalité de l'avifaune et des chiroptères " et que ce suivi est conforme au protocole de suivi environnemental tel qu'il a été reconnu le 5 avril 2018 dans sa dernière version par le ministre de la transition écologique et solidaire. Ce protocole indique, s'agissant de la " surface échantillon à prospecter ", " un carré de 100 mètres de côté (ou deux fois la longueur des pales pour les éoliennes présentant des pales de longueur supérieure à 50 mètres) ou un cercle de rayon égal à la longueur des pales avec un minimum de 50 mètres " et préconise d'utiliser, pour estimer la mortalité et permettre des comparaisons objectives, " au moins 3 formules de calcul des estimateurs standardisés à l'échelle internationale pour faciliter les comparaisons : - la formule de Huso (2010) ; - deux formules aux choix parmi : Erickson, 2000 ; Jones, 2009 ; Korner-Nievergelt, 2015 ; Limpens et al, 2013 ; Bastos et al, 2013, Dalthorp et Al 2017, etc. ", de " Préciser l'incertitude de l'estimation de la mortalité " et de " Comparer lorsque c'est possible avec des notions de populations (effets cumulés) et dynamiques de populations en fonction des connaissances disponibles. ". Dans le cadre du suivi du fonctionnement de cette installation, a été constatée la destruction, en 2020, d'un milan noir, de deux " roitelets à triple bandeau " et de quatre chauves-souris, dont trois pipistrelles communes, et en 2021, d'un " roitelet à triple bandeau " et de trois chauve-souris dont deux pipistrelles, d'un grand cormoran, d'une buse variable et d'une alouette lulu mais d'aucun milan noir. L'association estime que la mortalité d'oiseaux ou de chiroptères protégés serait significativement sous-évaluée, compte tenu, en particulier, de phénomènes de prédation des cadavres et de la surface limitée des zones de prospection utilisées pour leur recherche, ainsi que du choix de la formule statistique retenue pour l'estimation du taux de mortalité de la faune volante, et spécialement de la formule de Huso qui serait moins pertinente, notamment, que celle de Jones. Cependant, outre que rien ne permet d'affirmer que la méthodologie mise en œuvre par l'exploitant ne respecterait pas les préconisations du protocole évoqué ci-dessus, l'insuffisance du carré de 100 mètres retenu pour les prospections n'étant à cet égard pas sérieusement justifiée, il résulte de l'instruction que, quelles que soient les estimations et projections statistiques versées au dossier, qui varient et demeurent incertaines, les cas réels de mortalité de spécimens protégés relevés en 2020 et 2021, compte tenu de la faune sous protection fréquentant le site éolien et des mesures d'évitement comme de réduction mises en œuvre par l'exploitant, restent limités. Aucune des circonstances dont se prévalent les associations requérantes, à défaut d'éléments précis, concrets et actualisés remettant effectivement en cause ces constatations, ne saurait, en l'état, suffire à révéler l'existence de risques suffisamment caractérisés pour des espèces protégées ou leurs habitats, qu'ils aient été sous-estimés au stade de l'instruction de la demande d'autorisation ou qu'ils soient nouvellement apparus en phase d'exploitation. Dans ces conditions, en refusant d'ordonner à la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans, en application de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, de déposer une demande de dérogation " espèces protégées " conformément aux prescriptions combinées des articles L. 411-1 et L. 411-2 du même code, le préfet de Saône-et-Loire n'a ici commis aucune illégalité. 7. En second lieu, aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement : " I. - Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sons et odeurs qui les caractérisent, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l'air, la qualité de l'eau, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. (...) II. - Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : (...) 2° Le principe d'action préventive et de correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement, en utilisant les meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable. Ce principe implique d'éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu'elle fournit ; à défaut, d'en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes qui n'ont pu être évitées ni réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées (...) ". 8. Les associations requérantes soutiennent que, compte tenu de la destruction probable d'une vingtaine de chauves-souris et d'une soixantaine d'oiseaux et des destructions à venir, le préfet aurait dû exiger de l'exploitant qu'il compense ces destructions. Outre les mesures de réduction, en particulier, qu'il a prescrites, l'arrêté d'autorisation a imposé à l'exploitant, en son titre 8, des mesures de compensation comprenant notamment la mise en place de cinq gites artificiels sur des secteurs éloignés des éoliennes, sous la surveillance d'un écologue pendant quatre ans et, en compensation du linéaire de haies qui ne serait pas replanté en totalité, d'une opération paysagère et écologique en collaboration avec la commune de La Chapelle-au-Mans, et sous le contrôle préalable de l'inspection des installations classées. Rien dans les développements que les associations requérantes consacrent à ce point, alors que les atteintes réellement constatées à la faune protégée sont demeurées limitées et qu'aucune mesure de bridage complémentaire pour les chiroptères mais également pour les oiseaux, en particulier le milan noir, n'est apparue à ce jour indispensable, ne permet de justifier du caractère notoirement insuffisant des mesures de compensation ainsi prévues. Par suite, le moyen doit être écarté. 9. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de leur requête, l'association sauvegarde Sud Morvan et autres ne sont pas fondées à demander l'annulation du refus que le préfet de Saône-et-Loire a opposé à leur demande le 14 avril 2022. Leur requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée. 10. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des associations requérantes la somme demandée par la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de l'association sauvegarde Sud Morvan et autres est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association sauvegarde Sud Morvan, représentante unique des requérantes en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice, au ministre de la transition écologique et de la cohésion de territoires et à la société Éoliennes de La Chapelle-au-Mans. Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire et à la ministre de la transition énergétique. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, C. DjebiriLe président, V.-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 22LY01790 2 al
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure La SELARL Pharmacie de Barby a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2015 et 2016, des suppléments de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des mêmes exercices, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er avril 2014 au 31 mars 2016, des majorations correspondantes ainsi que des amendes qui lui ont été infligées sur le fondement des articles 1734 et 1734 II du code général des impôts. Par un jugement n° 1906182 du 31 mars 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 mai 2022 et 30 janvier 2023, la SELARL Pharmacie de Barby, représenté par Mes Quévreux et Giroux, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des pénalités correspondantes ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi qu'une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que sa comptabilité a été écartée comme non probante, dès lors qu'elle a expliqué les raisons de l'absence de numérotation de certaines factures et les anomalies relevées dans la séquentialité, qu'à défaut d'inventaire des stocks, elle a produit pour chaque exercice des fichiers comportant des éléments d'inventaire détaillés et probants, que l'existence d'une date de validation unique en fin d'exercice n'implique pas que la comptabilité soit insincère, qu'il y a bien une permanence du chemin de révision comptable et que les écritures globalisées permettent néanmoins d'identifier les opérations correspondantes ; - s'agissant du chiffre d'affaires sur factures manquantes, le vérificateur n'a pas pris en compte les factures sans numéro figurant dans le logiciel Caduciel et intégrées dans la comptabilité, ce qui aboutit à redresser deux fois le même chiffre d'affaires ; - s'agissant de la minoration des recettes déclarées, le vérificateur n'a pas pris en compte les particularités de gestion de la pharmacie qui lui ont pourtant été exposées, notamment les régularisations d'avances de vignettes, les régularisations de mises en crédit et les factures recyclées ; - la proposition de rectification est, s'agissant de la reconstitution, insuffisamment motivée, en l'absence de prise en compte des traitements détaillés sur ventes journalières par produit et des rapprochements avec les stocks ; - elle justifie d'un nombre de factures en doublon supérieur à celui pris en compte par l'administration ; - les erreurs commises par l'administration dans la reconstitution sont de nature à entraîner le dégrèvement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée correspondants ; - la provision pour dépréciation de son fonds de commerce, constituée en 2016, est justifiée, en raison, d'une part, de la baisse de son chiffre d'affaires, consécutif à l'installation, en 2010, d'une pharmacie concurrente dans une localité voisine, mais située à moins d'un km, baisse confirmée par l'ouverture d'une procédure de sauvegarde puis sa mise en redressement judiciaire en 2019, et, d'autre, que sa valeur actuelle était inférieure à sa valeur nette comptable, conformément à la jurisprudence récente du conseil d'Etat et aux règles fixées par le plan comptable général ; - elle est fondée, sur ce point, à se prévaloir de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-PROV-40-10-10 du 8 juin 2022 § 1 et 50. Par des mémoires, enregistrés les 5 décembre 2022 et 17 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par ordonnance du 20 avril 2023, la clôture d'instruction a été reportée au 11 mai 2023. La SELARL Pharmacie de Barby a produit un nouveau mémoire le 2 mai 2023, qui n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure, - et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ; Considérant ce qui suit : 1. La SELARL Pharmacie de Barby, qui exploite une officine de pharmacie à Barby (Savoie), et dont Mme A... est la gérante et l'unique associée, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 1er avril 2014 au 31 mars 2016. A l'issue de ce contrôle, et après avoir rejeté la comptabilité présentée comme non probante et procédé à la reconstitution de ses chiffres d'affaires et de ses résultats, l'administration l'a assujettie, selon la procédure contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des suppléments de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre des exercices clos en 2015 et 2016, ainsi qu'à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er avril 2014 au 31 mars 2016, assortis d'intérêts de retard et de la majoration de 40 % prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts. Elle lui a également appliqué les amendes prévues à l'article 1734 et à l'article 1734 II du code général des impôts. La SELARL Pharmacie de Barby ayant fait l'objet d'une procédure collective, l'administration a procédé, le 6 juin 2019, à la remise des intérêts de retard et des amendes mises à sa charge. Elle relève appel du jugement du 31 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions et majorations auxquelles elle a été assujettie. Sur la régularité de la procédure d'imposition : 2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rehaussements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs. 3. La proposition de rectification du 11 juillet 2018 adressée à la SELARL Pharmacie de Barby mentionne les impôts concernés, les années d'imposition, les bases d'imposition retenues ainsi que le fondement légal des différentes rectifications. S'agissant des motifs de fait, après avoir fait des différentes anomalies sur lesquelles le vérificateur s'est fondé pour rejeter la comptabilité présentée, elle énonce, de manière précise et circonstanciée, les modalités selon lesquelles le chiffre d'affaire omis a été reconstitué. Elle est ainsi suffisamment motivée au sens des dispositions précitées. Si la SELARL Pharmacie de Barby fait valoir que le vérificateur s'est limité à une analyse critique des traitements informatiques sans prendre en compte les traitements détaillés sur les ventes journalières par produit et les rapprochements avec les stocks, cette critique a trait au bien-fondé des impositions en litige et est, en elle-même, sans incidence sur la motivation de la proposition de rectification. Sur le bien-fondé des impositions : En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés : S'agissant du rejet de la comptabilité : 4. Aux termes de l'article 54 du code général des impôts : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration (...) ". Aux termes de l'article L. 102 B du livre des procédures fiscales : " I. - Les livres, registres, documents ou pièces sur lesquels peuvent s'exercer les droits de communication, d'enquête et de contrôle de l'administration doivent être conservés pendant un délai de six ans à compter de la date de la dernière opération mentionnée sur les livres ou registres ou de la date à laquelle les documents ou pièces ont été établis. Sans préjudice des dispositions du premier alinéa, lorsque les livres, registres, documents ou pièces mentionnés au premier alinéa sont établis ou reçus sur support informatique, ils doivent être conservés sous cette forme pendant une durée au moins égale au délai prévu au premier alinéa de l'article L. 169. (...) ". 5. Il résulte de l'instruction que la SELARL Pharmacie de Barby, qui dispose d'une comptabilité informatisée, utilise un système de caisses centralisées sur un serveur central fonctionnant avec le logiciel Caduciel. A partir des données de ce logiciel, la gérante procède mensuellement à un récapitulatif sous format papier, envoyé au comptable qui procède alors à la saisie manuelle dans le logiciel Coala. A la suite de la demande du vérificateur de procéder, sur le fondement du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, à des retraitements informatiques sur les données du logiciel de caisse, la SELARL a choisi de réaliser elle-même ces retraitements. 6. Il est constant, en premier lieu, que la société n'a pas produit l'inventaire des stocks au 1er avril 2014 et au 1er avril 2015. Si elle indique avoir présenté, dans le cadre des traitements informatiques, des fichiers détaillés incluant pour chaque jour le code article, le libellé produit, la journée, la quantité initiale en début de journée, les approvisionnements, la quantité finale en fin de journée et les mouvements de stock hors approvisionnements, ces fichiers ne peuvent pallier l'absence de l'inventaire physique prévu à l'article L. 123-12 du code de commerce, qui seul permet le contrôle de l'existence et de la valeur de tous les éléments d'actif et de passif à la date de clôture et qui doit être produit en cas de contrôle. Le vérificateur a constaté, en deuxième lieu, l'existence, dans les fichiers transmis, de factures non numérotées représentant 42 % du nombre total de factures pour l'exercice 2015 et 41 % pour l'exercice 2016, élément non contesté par la SELARL, qui se borne, à cet égard, à faire valoir que seules les factures concernant des produits délivrés sur ordonnance se voient attribuer un numéro de facture. Le vérificateur a relevé, en troisième lieu, des ruptures dans la séquentialité des numéros des factures avec ordonnance, aboutissant au constat de près de 500 factures manquantes par exercice, circonstance que la société requérante explique par les modalités de fonctionnement du logiciel Caduciel, lequel réserve un numéro dès la réalisation d'une vente et ne permet pas sa réaffectation en cas d'annulation de l'opération, explication peu convaincante dans la mesure où une facture annulée doit être libellée comme telle dans la liste des factures issues du retraitement, ce qui est d'ailleurs le cas pour un certain nombre d'entre elles. Le vérificateur a noté, en quatrième lieu, que les écritures étaient validées une seule fois par an, en fin d'exercice, ce qui était matériellement impossible en raison de l'heure de la fermeture de la pharmacie les 31 mars 2015 et 2016, que cette validation annuelle contrevenait à l'article 921-2 du plan comptable général selon lequel les écritures des journaux doivent être récapitulés au livre journal au jour le jour ou, à défaut, mensuellement et qu'elle avait pour conséquence de permettre la modification des écritures pendant tout l'exercice. A cet égard, la SELARL Pharmacie de Barby ne peut soutenir utilement que l'administration ne démontre pas l'existence de corrections postérieures au dépôt des déclarations fiscales. Le vérificateur a relevé, en cinquième lieu, que dans la colonne " numéro pièce " du grand livre, de nombreuses lignes (3 419 lignes sur 11 576 en 2015 et 2 489 lignes sur 11 677 en 2016) ne comportaient aucune référence à une pièce justificative (mention " NS ") et que, par conséquence, la permanence du chemin de révision comptable n'était pas assurée. En se bornant à faire valoir que cet état de fait résulte du logiciel, qui renseigne " NS " par défaut et qu'il ne lui a pas été reproché de ne pas produire des justificatifs, la SELARL ne conteste pas utilement ce constat. En sixième lieu, le vérificateur a constaté l'existence d'écritures globalisées, retracées dans l'annexe 2 à la proposition de rectification, sans qu'il soit possible d'identifier chaque opération en l'absence de journal auxiliaire ou de référence à une pièce justificative, constat non contesté par la société requérante, qui admet également qu'il existe des ruptures dans la séquentialité des numéros d'écritures comptables. Ces nombreuses anomalies sont de nature à ôter à la comptabilité de la SELARL Pharmacie de Barby son caractère probant. Par suite, l'administration a pu, à bon droit, l'écarter et procéder à la reconstitution extracomptable de ses chiffres d'affaires et de ses résultats. S'agissant de la reconstitution de recettes : 7. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge (...) ". 8. Les rectifications en litige, établies selon la procédure contradictoire, n'ont pas été soumises à la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Par suite, c'est l'administration qui supporte la charge de la preuve. 9. Le chiffre d'affaires de la société requérante a été reconstitué à partir des retraitements informatiques réalisés par cette dernière, et notamment ceux détaillant l'ensemble de la facturation des exercices 2015 et 2016. Le vérificateur a, d'une part, déterminé le chiffre d'affaires omis correspondant à des factures numérotées manquantes, identifiées à partir des ruptures constatées dans la séquentialité des numéros de facture, auxquelles il a appliqué le prix moyen par facture ressortant des factures numérotées, soit 45,80 euros HT en 2015 et 44,30 euros HT en 2016, aboutissant à un chiffre d'affaires omis de 22 241 euros en 2015 et de 22 066 euros en 2016. Il a ensuite identifié une minoration de recettes déclarées en comparant le résultat déclaré par la société à celui ressortant du détail de la facturation, après prise en compte des pratiques particulières de la pharmacie, explicitées au cours du contrôle, à savoir les factures doublons non comptabilisés, les factures annulées, les régularisations des " avances de vignettes ", les régularisations des " mises en crédit " et les factures dites " recyclées ", examen qui a fait ressortir une insuffisance de 38 865 euros en 2015 et de 135 463 euros en 2016. 10. S'agissant des factures manquantes, la SELARL Pharmacie de Barby fait valoir que la rectification a conduit à un double redressement sur le même chiffre d'affaires, dans la mesure où le chiffre d'affaires est également recalculé à partir du chiffre d'affaires global issu du logiciel, qui comprend à la fois des ventes avec un numéro de dossier et d'autres ventes sans numéro de dossier. Toutefois, et alors que le chiffre d'affaires global ressortant du logiciel de caisse comprend toutes les factures enregistrées dans ce dernier, qu'elles soient ou non numérotées, selon qu'elles correspondent, selon la société requérante, à des ventes sur ordonnance ou des ventes sans ordonnance, les factures manquantes correspondent uniquement à des factures numérotées, mais qui ne figurent pas dans la liste détaillée des factures issue des retraitements, utilisée pour déterminer le chiffre d'affaires réalisé. Ces factures manquantes, en l'absence de tout élément tendant à démontrer qu'elles correspondraient, de fait, à des factures non numérotées, ne sont donc pas incluses dans le chiffre d'affaires global ressortant du logiciel de caisse et ne peuvent, dès lors, être regardées comme ayant été comptabilisées deux fois par le service. 11. Les " doublons ", qui sont des factures portant le même numéro mais qui ont des dates et des heures de création différentes, ont été prises en compte par le vérificateur, lequel, selon les termes de la proposition de rectification, n'a pas remis en cause la comptabilisation opérée à ce titre par la SELARL et a retenu, sans le corriger, le retraitement réalisé par cette dernière dans le fichier intitulé (CDT-2*TRT-4) pour justifier de la comptabilisation ou non des factures doublons. Les factures doublons non comptabilisées ont, par conséquent, été valorisées et extournées de la liste des factures ayant servi à déterminer le chiffre d'affaires de chaque exercice. La société requérante soutient qu'elle justifie d'un montant supérieur à retrancher du chiffre d'affaires et produit, à l'appui de cette allégation, pour chaque exercice, un fichier Excel intitulé " détail des doublons ", qui ferait ressortir, selon elle, un total de chiffre d'affaires en doublon de 36 946 euros en 2015 et de 42 445 euros en 2016. Toutefois, ces fichiers, qui ne sont assortis d'aucun justificatif, ni d'aucun détail permettant d'expliquer le mode de calcul du chiffre d'affaires global censé en résulter, et qui, au surplus, contredisent les éléments comptabilisés par la société elle-même, sont insuffisants, à eux seuls, et alors que le vérificateur a déjà pris en compte les explications apportées par la société au cours du contrôle, pour remettre en cause les montants retenus à ce titre et déjà retranché des chiffres d'affaires reconstitués. 12. Les " avances de vignette ", qui correspondent à l'hypothèse où le pharmacien délivre un médicament sans facturation immédiate, laquelle intervient ultérieurement, une fois l'ordonnance présentée, et les " mises en crédit ", qui recouvrent les cas où le patient ne règle pas immédiatement alors que la remise du médicament implique le constat d'une vente dans le logiciel de caisse, ont été prises en compte par le vérificateur, qui a retranché des chiffres d'affaires reconstitués les factures ayant une taxe sur la valeur ajoutée nulle ou négative. Il en va de même des factures " recyclées ", qui concernent des ventes de produits bénéficiant du tiers-payant, dans le cas où le paiement est rejeté par la sécurité sociale ou la mutuelle, le vérificateur ayant retiré les factures ayant un numéro inférieur à celui de la première facture de l'exercice. Si la SELARL Pharmacie de Barby fait valoir que ces corrections sont insuffisantes, elle se borne à indiquer que le vérificateur aurait dû procéder à une comparaison avec les fichiers détaillés des ventes et de variation des stocks produits au cours du contrôle, et ce alors que ces fichiers, qui ne sont pas des inventaires, ainsi qu'il a été dit au point 6, sont, en eux-mêmes, dénués de valeur probante. 13. Il résulte de ce qui précède que l'administration justifie du bien-fondé de la méthode de reconstitution des chiffres d'affaires et résultats des exercices 2015 et 2016 qu'elle a mise en œuvre et, par suite, des rectifications qui en résultent. S'agissant de la provision pour dépréciation du fonds de commerce : 14. D'une part, aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient effectivement été constatées dans les écritures de l'exercice (...) ". Aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III à ce code : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt ". Aux termes de l'article 38 sexies de la même annexe dans sa rédaction applicable au litige : " La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de matière irréversible, notamment (...) les fonds de commerce, (...) donne lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts ". 15. Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par l'entreprise, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent en outre comme probables eu égard aux circonstances de fait constatées à la date de clôture de l'exercice, et qu'enfin, elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise. Il appartient au contribuable, indépendamment des règles qui régissent la charge de la preuve pour des raisons de procédure, d'établir le bien fondé et de justifier du montant d'une telle provision au regard des caractéristiques de l'exploitation au cours de la période en litige. 16. D'autre part, aux termes de l'article L. 123-14 du code de commerce : " Les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise. / Lorsque l'application d'une prescription comptable ne suffit pas pour donner l'image fidèle mentionnée au présent article, des informations complémentaires doivent être fournies dans l'annexe. / Si, dans un cas exceptionnel, l'application d'une prescription comptable se révèle impropre à donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière ou du résultat, il doit y être dérogé. Cette dérogation est mentionnée à l'annexe et dûment motivée, avec l'indication de son influence sur le patrimoine, la situation financière et le résultat de l'entreprise ". Aux termes de l'article 322-1 du plan comptable général, dont les dispositions ont été reprises pour les exercices ouverts après le 1er janvier 2014 à l'article 214-6 : " (...) 4 - La dépréciation d'un actif est la constatation que sa valeur actuelle est devenue inférieure à sa valeur nette comptable. / 5 - La valeur brute d'un actif est sa valeur d'entrée dans le patrimoine (...). / 7 - La valeur nette comptable d'un actif correspond à sa valeur brute diminuée des amortissements cumulés et des dépréciations. / 8 - La valeur actuelle est la valeur la plus élevée de la valeur vénale ou de la valeur d'usage (...). / 10 - La valeur vénale est le montant qui pourrait être obtenu, à la date de clôture, de la vente d'un actif lors d'une transaction conclue à des conditions normales de marché, net des coûts de sortie. (...) / 11 - La valeur d'usage d'un actif est la valeur des avantages économiques futurs attendus de son utilisation et de sa sortie. Elle est calculée à partir des estimations des avantages économiques futurs attendus. Dans la généralité des cas, elle est déterminée en fonction des flux nets de trésorerie attendus. (...)." 17. La déductibilité fiscale d'une provision est subordonnée, en application des dispositions du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts et de l'article 38 quater de l'annexe II à ce code, outre aux conditions relatives à la dépréciation elle-même, à ce que la provision en cause ait été constatée dans les écritures de l'exercice conformément, en principe, aux prescriptions comptables. S'agissant de la dépréciation d'un élément d'actif, il résulte des dispositions du plan comptable général citées au point 16 que la passation de l'écriture comptable correspondante est subordonnée au constat selon lequel la valeur actuelle de cet élément d'actif, valeur la plus élevée de la valeur vénale ou de la valeur d'usage, est devenue notablement inférieure à sa valeur nette comptable. Par suite, la seule circonstance que la valeur vénale d'un élément d'actif soit devenue inférieure à sa valeur nette comptable ne saurait, en principe, justifier la déductibilité fiscale d'une provision s'il apparaît que la valeur d'usage reste supérieure à cette valeur nette comptable, faisant ainsi obstacle à la comptabilisation d'une dépréciation. 18. A la clôture de l'exercice clos en 2016, la SELARL Pharmacie de Barby a comptabilisé une provision de 180 000 euros pour dépréciation de la valeur de son fonds de commerce, inscrit à son actif pour un montant de 1 580 000 euros. Pour justifier de cette provision, la société a invoqué, au cours du contrôle, le contexte économique défavorable du secteur d'activité et l'évolution du prix de vente des officines. Elle soutient désormais avoir subi une baisse de son activité liée à l'installation, en 2010, d'une autre officine de pharmacie à moins d'un km de son établissement, baisse ayant entraîné l'ouverture d'une procédure collective en 2019. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des données transcrites dans la proposition de rectification du 11 juillet 2018, qui prennent en compte les rectifications précédemment évoquées pour 2015 et 2016, que sur la période 2012 à 2016, le chiffre d'affaires, l'excédent brut d'exploitation et le résultat comptable de la SELARL ont été systématiquement supérieurs à ceux de l'exercice 2008, qui est le premier exercice faisant suite au rachat de la pharmacie par Mme A... et qu'ils ont augmenté entre 2014 et 2016. Les données chiffrées des exercices 2009 à 2011, présentées dans les écritures de la requérante, font également apparaitre une croissance continue du chiffre d'affaires et du résultat comptable en dépit de l'ouverture de l'officine concurrente en 2010. Seul l'exercice 2013 est marqué par un léger recul du chiffre d'affaires et une baisse de l'excédent brut d'exploitation et du résultat fiscal, qui s'expliquent par le coût du licenciement économique d'une préparatrice en pharmacie. A cet égard, si la SELARL indique que les chiffres réalisés en 2014 sont plus élevés du fait de l'absence d'embauche au cours de cette année, elle précise néanmoins que cette embauche est intervenue au cours de l'exercice 2015. Dans ces conditions, la SELARL Pharmacie de Barby qui se borne à produire un " mémo " non daté, établi par le cabinet Veama Groupe, procédant à la valorisation de son fonds de commerce à la clôture de l'exercice 2016, d'une part, selon un pourcentage (86 %) de la moyenne des chiffres d'affaires des exercices 2015 et 2016, soit 1 356 612 euros et, d'autre part, par application d'un coefficient de 6,50 à l'excédent brut d'exploitation retraité, soit 1 298 286 euros, en faisant valoir que la première de ces valorisations correspond à la valeur vénale du fonds de commerce et la seconde à sa valeur d'usage, alors même qu'elle ne comporte aucun élément prospectif, n'établit ni que la valeur vénale, ni que la valeur d'usage du fonds serait inférieure à la valeur comptable de celui-ci. Il s'ensuit qu'en l'absence de dépréciation effective de son fonds de commerce se rattachant à des événements en cours à la clôture de l'exercice 2016, l'administration était fondée à remettre en cause la provision de 180 000 euros constituée au titre de cet exercice. En ce qui concerne la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises : 19. Aux termes de l'article 1586 ter du code général des impôts : " II. - 1. La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises est égale à une fraction de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie à l'article 1586 sexies. " Selon l'article 1586 sexies du même code : " I. - Pour la généralité des entreprises, à l'exception des entreprises visées aux II bis à VI : / 1. Le chiffre d'affaires est égal à la somme : / - des ventes de produits fabriqués, prestations de services et marchandises ; (...) ". 20. Les rectifications opérées s'agissant des factures manquantes et des minorations de recettes ont entraîné, à due proportion, un rehaussement du chiffres d'affaires réalisé par la SELARL Pharmacie de Barby et de ses bases imposables à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Ces rectifications étant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, bien fondées, la société requérante ne peut prétendre, par voie de conséquence, à la décharge des rappels de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises correspondants. En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée : 21. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. - Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. ". Aux termes de l'article 269 du même code : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : / a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; (...) / 2. La taxe est exigible : / a) Pour les livraisons mentionnées aux a et a ter du 1, lors de la réalisation du fait générateur. (...) ". 22. Il résulte de l'instruction que le service vérificateur a, d'une part, soumis à la taxe sur la valeur ajoutée les recettes correspondant aux factures manquantes de la SELARL Pharmacie de Barby, sur la base du montant moyen de taxe collectée constaté sur les factures numérotées comptabilisées et, d'autre part, rectifié la taxe sur la valeur ajoutée non déclarée en se fondant, pour chaque exercice, sur le fichier retraçant l'ensemble de la facturation, qui comportait une colonne mentionnant la taxe collectée afférente à chaque facture. 23. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 ci-dessus que l'administration a, à bon droit, inclus dans les recettes de la société requérante les factures numérotées manquantes. Par suite, c'est également à bon droit qu'elle a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée afférentes à ces factures. Si la SELARL conteste les rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant des minorations de recettes, il résulte de ce qui a été dit au point 22 ci-dessus que l'administration s'est bornée, sur ce point, à reprendre les montants annuels de taxe collectée ressortant des retraitements de son logiciel de caisse, montants qu'elle ne conteste d'ailleurs pas. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge sont infondés. 24. Il résulte de tout ce qui précède, que la SELARL Pharmacie de Barby n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi, en tout état de cause, que celles tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens, doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la SELARL Pharmacie de Barby est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Pharmacie de Barby et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Pruvost, président de chambre, Mme Courbon, présidente-assesseure, M. Pin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 juin 2023. La rapporteure, A. Courbon Le président, D. Pruvost La greffière, N. Lecouey La République mande et ordonne au de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 22LY01645
JADE/CETATEXT000047720605.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2015. Par un jugement n° 2001677 du 31 mars 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 mai 2022 et 30 janvier 2023, Mme B..., représentée par Mes Quévreux et Giroud, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement du tribunal administratif est insuffisamment motivé, faute de répondre à tous les moyens soulevés, en particulier celui tiré de l'incohérence du nombre de factures sans numéro retenu par l'administration et de se prononcer sur le caractère sérieux du montant du chiffre d'affaires reconstitué par le service ; - les rectifications la concernant doivent être abandonnées en conséquence de celles notifiées à la SELARL Pharmacie de Barby, qui font l'objet d'une requête actuellement pendante devant la cour, et dont elle s'approprie les moyens ; - l'administration s'étant fondée sur le 2° de l'article 109-1 du code général des impôts, elle ne peut faire état de sa qualité de maître de l'affaire pour déclencher la présomption d'appréhension des revenus distribués correspondant au rehaussement du résultat imposable de la SELARL Pharmacie de Barby, mais doit démontrer cette appréhension, ce qu'elle ne fait pas ; - les rectifications mises à sa charge, qui correspondent au bénéfice non déclaré par la SELARL Pharmacie de Barby, ne constituent pas des rémunérations occultes imposables entre les mains du maître de l'affaire sur le fondement du c de l'article 111 du même code, ainsi que l'a jugé la cour administrative d'appel de Nancy dans un arrêt n° 09NC02597 du 18 février 2021 ; - la pénalité de 40 % pour manquement délibéré qui lui a été appliquée n'est pas justifiée, en l'absence de démonstration de son intention d'éluder l'impôt ; - cette pénalité a été établie en méconnaissance de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et plus généralement, du principe du respect des droits de la défense, en l'absence d'information sur l'intention de l'administration d'appliquer cette pénalité avant la notification de la proposition de rectification, qui constitue, à cet égard, la décision infligeant cette pénalité ; la Cour de justice de l'Union européenne peut être saisie, en tant que de besoin, d'une question préjudicielle sur ce sujet ; - la pénalité de 40 % appliquée aux impositions mises à la charge de la SELARL Pharmacie de Barby est également contestée. Par des mémoires, enregistrés les 5 décembre 2022 et 17 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - il convient de substituer aux bases légales initialement retenues, à savoir le 2° de l'article 109-1 du code général des impôts et le c de l'article 111 du même code, les dispositions du 1° de l'article 109-1 de ce code, Mme B... étant le maître de l'affaire et présumée, en cette qualité, avoir appréhendé les revenus distribués par la SELARL Pharmacie de Barby ; - les autres moyens de la requête ne sont pas fondés. Mme B... a produit un mémoire le 2 mai 2023, qui n'a pas été communiqué. Par un mémoire distinct enregistré le 2 février 2023, Mme B... demande à la Cour, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts. Elle soutient que : - ces dispositions, qui constituent la nouvelle base légale de l'imposition revendiquée par l'administration, sont applicables au litige ; - ces dispositions n'ont pas déjà été déclarées conformes à la constitution par le Conseil constitutionnel ; - elles méconnaissent les articles 6, 13 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui garantissent, respectivement, l'égalité devant la loi, l'égalité devant les charges publiques et le droit à un recours effectif. Par un mémoire, enregistré le 17 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut à la non transmission de la question prioritaire de constitutionnalité. Il soutient que la question présentée est dépourvue de caractère sérieux. Mme B... a produit un mémoire le 2 mai 2023, qui n'a pas été communiqué. Par ordonnance du 20 avril 2023, la clôture d'instruction a été reportée au 11 mai 2023. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Charte des Droits fondamentaux de l'Union européenne ; - la Constitution, notamment son Préambule ainsi que son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique, Considérant ce qui suit : 1. La SELARL Pharmacie de Barby, qui exploite une officine de pharmacie à Barby (Savoie) et dont Mme B... était la gérante et l'unique associée, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 1er avril 2014 au 31 mars 2016. A l'issue de ce contrôle, qui a notamment donné lieu à la réintégration, dans ses bases imposables à l'impôt sur les sociétés des exercices clos en 2015 et 2016, de recettes omises, l'administration a, dans le cadre d'un contrôle sur pièces, imposé entre les mains de Mme B... les revenus distribués correspondants à ces minorations de recettes dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le double fondement du 2° de l'article 109-1 et du c de l'article 111 du code général des impôts et l'a, en conséquence, assujettie, selon la procédure contradictoire, à des suppléments d'impôt sur le revenu et à des cotisations de contributions sociales au titre de l'année 2015. Mme B... relève appel du jugement du 31 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des majorations correspondantes. Sur la question prioritaire de constitutionnalité : 2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; ". Mme B... conteste la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de ces dispositions que le ministre demande à la cour de substituer à celles du 2° du 1 du même article et du c de l'article 111 du code général des impôts retenues dans la proposition de rectification comme fondement légal de l'imposition à l'impôt sur le revenu mise à sa charge. 3. Mme B... soutient, d'une part, qu'en soumettant le maître de l'affaire à la présomption irréfragable qu'il a disposé des revenus distribués par une société, ces dispositions, telles qu'interprétées par la jurisprudence, permettent à l'administration, lorsqu'elle est en présence d'un bénéficiaire identifié en la personne du gérant et unique associé d'une société, de choisir le mode de preuve applicable selon qu'elle décide de recourir, ou non, à la qualification de maître de l'affaire, aboutissant à un traitement différencié des contribuables qui se trouvent dans une même situation objective, en méconnaissance des principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques consacrés par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Elle fait valoir, d'autre part, que la substitution de base légale demandée par le ministre en appel, qui ne peut être discutée qu'au cours de la procédure juridictionnelle devant la cour administrative d'appel, la place dans une situation défavorable par rapport à l'administration et l'empêche de présenter tous les éléments utiles à sa défense, en méconnaissance des droits de la défense garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. 4. Il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que la cour administrative d'appel, saisie d'un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un mémoire distinct et motivé, statue par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux. 5. En premier lieu, est qualifiée de maître de l'affaire une personne qui exerce la responsabilité effective de l'ensemble de la gestion administrative, commerciale et financière de la société et dispose sans contrôle de ses fonds. Si l'administration fiscale entend imposer des revenus réputés distribués sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts au nom du maître de l'affaire, elle doit justifier de cette qualification, qui nécessite une analyse des circonstances propres à l'affaire et notamment du fonctionnement spécifique de l'entreprise. Le contribuable peut établir que les éléments apportés par l'administration sont insuffisants pour justifier de cette qualification. S'il est reconnu maître de l'affaire, il est réputé avoir appréhendé la totalité des revenus distribués par la société. Alors que la qualité de gérant et unique associé d'une personne ne suffit à établir ni qu'elle était la bénéficiaire effective des revenus distribués par la société, ni qu'elle en était le maître de l'affaire, le choix de l'administration de recourir, ou non, à la présomption du maître de l'affaire dans une telle hypothèse, ne peut être regardé comme entrainant, au regard du mode de preuve applicable, un traitement différent de contribuables placés dans une même situation objective, une personne ayant la qualité d'associée unique et gérante reconnue comme étant le seul maître de l'affaire n'étant pas placée dans la même situation qu'un autre associé unique et gérant qui n'est pas reconnu comme tel. Il s'ensuit que la présomption du maître de l'affaire à laquelle l'administration peut recourir lorsqu'elle fonde l'imposition de revenus distribués sur les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général d'impôt ne méconnaît ni le principe d'égalité devant la loi, garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ni le principe d'égalité devant les charges publiques, protégé par l'article 13 de la même Déclaration. 6. En second lieu, le principe des droits de la défense, qui résulte de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ne trouve à s'appliquer qu'aux peines et aux sanctions ayant le caractère d'une punition, notamment aux sanctions fiscales. La substitution de base légale demandée par le ministre, qui permet à l'administration, qui ne peut renoncer à l'application de la loi fiscale, d'invoquer, à tout moment de la procédure contentieuse, une base légale différente de celle initialement retenue pour fonder l'imposition, porte sur des dispositions, celles du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ayant pour seul objet de fonder l'imposition des droits supplémentaires d'impôt sur le revenu mis à la charge de Mme B..., à l'exclusion des sanctions dont elles ont été assorties, et notamment de la majoration pour manquement délibéré de 40 %, laquelle a été appliquée sur le fondement du a. de l'article 1729 du code général des impôts. Par suite, et en tout état de cause, Mme B... ne peut utilement soutenir que cette substitution de base légale porte atteinte à la garantie des droits de la défense qui découle de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. 7. Il suit de là que la condition tenant au caractère sérieux de la question soulevée n'est pas satisfaite. Ainsi, et sans qu'il soit besoin de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité, le moyen tiré de ce que ces dispositions portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté. Sur la régularité du jugement : 8. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". 9. Contrairement à ce que soutient Mme B..., le tribunal administratif a répondu, de manière suffisamment circonstanciée, au point 4 du jugement contesté, au moyen de première instance tiré de ce que l'administration n'était pas fondée à rejeter la comptabilité de la SELARL Pharmacie de Barby, en évoquant, pour les valider, chacun des motifs de rejet retenu par le service, notamment celui résultant du nombre de factures sans numéro, étant précisé, à cet égard, que les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à chacun des arguments exposés par Mme B... à l'appui de son moyen. Le tribunal a par ailleurs répondu, au point 5 du jugement, au moyen tiré de ce que la reconstitution du chiffre d'affaires de la SELARL Pharmacie de Barby aboutissait à un résultat largement surestimé, par une motivation, certes succincte, mais en adéquation avec l'argumentation développée devant lui sur ce point dans les écritures de Mme B.... Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement contesté doit être écarté. Sur le bien-fondé des impositions : 10. L'administration a imposé entre les mains de Mme B... les revenus réputés distribués correspondant au rehaussement du résultat imposable de la SELARL Pharmacie de Barby au titre de l'exercice clos en 2015 résultant de minorations de recettes de 63 280 euros, majorés de 25 % en application du 7° de l'article 158 du code général des impôts, sur le double fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et du c de l'article 111 du même code. Le ministre demande en appel qu'à ces dispositions soient substituées celles du 1° du 1 de l'article 109 de ce code. 11. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". En cas de refus des propositions de rectifications par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire de sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle. En ce qui concerne l'existence et le montant des revenus distribués : 12. Il résulte de l'instruction que la SELARL Pharmacie de Barby, qui dispose d'une comptabilité informatisée, utilise un système de caisses centralisées sur un serveur central fonctionnant avec le logiciel Caduciel. A partir des données de ce logiciel, la gérante, Mme B... procède mensuellement à un récapitulatif sous format papier, envoyé au comptable qui procède alors à la saisie manuelle dans le logiciel Coala. A la suite de la demande du vérificateur de procéder, sur le fondement du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, à des retraitements informatiques sur les données du logiciel de caisse, la SELARL a choisi de réaliser elle-même ces retraitements. 13. Il est constant, en premier lieu, que la société n'a pas produit l'inventaire des stocks au 1er avril 2014 et au 1er avril 2015. Si Mme B... indique avoir présenté, dans le cadre des traitements informatiques, des fichiers détaillés incluant pour chaque jour le code article, le libellé produit, la journée, la quantité initiale en début de journée, les approvisionnements, la quantité finale en fin de journée et les mouvements de stock hors approvisionnements, ces fichiers ne peuvent pallier l'absence de l'inventaire physique prévu à l'article L. 123-12 du code de commerce, qui seul permet le contrôle de l'existence et de la valeur de tous les éléments d'actif et de passif à la date de clôture et qui doit être produit en cas de contrôle. Le vérificateur a constaté, en deuxième lieu, l'existence, dans les fichiers transmis, de factures non numérotées, représentant 42 % du nombre total de factures pour l'exercice 2015 et 41 % pour l'exercice 2016, élément non contesté par Mme B..., qui se borne, à cet égard, à faire valoir que seules les factures concernant des produits délivrés sur ordonnance se voient attribuer un numéro de facture. Le vérificateur a relevé, en troisième lieu, des ruptures dans la séquentialité des numéros des factures avec ordonnance, aboutissant au constat de près de 500 factures manquantes par exercice, que la requérante explique par les modalités de fonctionnement du logiciel Caduciel, lequel réserve un numéro dès la réalisation d'une vente et ne permet pas sa réaffectation en cas d'annulation de l'opération, explication peu convaincante dans la mesure où une facture annulée doit être libellée comme telle dans la liste des factures issues du retraitement, ce qui est d'ailleurs le cas pour un certain nombre d'entre elles. Le vérificateur a noté, en quatrième lieu, que les écritures étaient validées une seule fois par an, en fin d'exercice, ce qui était matériellement impossible en raison de l'heure de la fermeture de la pharmacie les 31 mars 2015 et 2016, que cette validation annuelle contrevenait à l'article 921-2 du plan comptable général selon lequel les écritures des journaux doivent être récapitulés au livre journal au jour le jour ou, à défaut, mensuellement et qu'elle avait pour conséquence de permettre la modification des écritures pendant tout l'exercice. A cet égard, Mme B... ne peut soutenir utilement que l'administration ne démontre pas l'existence de corrections postérieures au dépôt des déclarations fiscales. Le vérificateur a relevé, en cinquième lieu, que dans la colonne " numéro pièce " du grand livre, de nombreuses lignes (3 419 lignes sur 11 576 en 2015 et 2 489 lignes sur 11 677 en 2016) ne comportaient aucune référence à une pièce justificative (mention " NS ") et que, par conséquence, la permanence du chemin de révision comptable n'était pas assurée. En se bornant à faire valoir que cet état de fait résulte du logiciel, qui renseigne " NS " par défaut et qu'il ne lui a pas été reproché de ne pas produire des justificatifs, Mme B... ne conteste pas utilement ce constat. En sixième lieu, le vérificateur a constaté l'existence d'écritures globalisées, retracées dans l'annexe 2 à la proposition de rectification, sans qu'il soit possible d'identifier chaque opération en l'absence de journal auxiliaire ou de référence à une pièce justificative, constat non contesté par la requérante, qui admet également qu'il existe des ruptures dans la séquentialité des numéros d'écritures comptables. Ces nombreuses anomalies sont de nature à ôter à la comptabilité de la SELARL Pharmacie de Barby son caractère probant. Par suite, l'administration a pu, à bon droit, l'écarter et procéder à la reconstitution extracomptable de ses chiffres d'affaires et de ses résultats. 14. Le chiffre d'affaires de la SELARL Pharmacie de Barby a été reconstitué à partir des retraitements informatiques réalisés par cette dernière, et notamment ceux détaillant l'ensemble de la facturation des exercices 2015 et 2016. Le vérificateur a, d'une part, déterminé le chiffre d'affaires omis correspondant à des factures numérotées manquantes, identifiées à partir des ruptures constatées dans la séquentialité des numéros de facture, auxquelles il a appliqué le prix moyen par facture ressortant des factures numérotées, soit 45,80 euros HT en 2015 et 44,30 euros HT en 2016, aboutissant à un chiffre d'affaires omis de 22 241 euros en 2015 et de 22 066 euros en 2016. Il a ensuite identifié une minoration de recettes déclarées en comparant le résultat déclaré par la société à celui ressortant du détail de la facturation, après prise en compte des pratiques particulières de la pharmacie, explicitées au cours du contrôle, à savoir les factures doublons non comptabilisés, les factures annulées, les régularisations des " avances de vignettes ", les régularisations des " mises en crédit " et les factures dites " recyclées ", examen qui a fait ressortir une insuffisance de 38 865 euros en 2015 et de 135 463 euros en 2016. 15. S'agissant des factures manquantes, Mme B... fait valoir que la rectification conduit à un double redressement sur le même chiffre d'affaires de sa société, dans la mesure où le chiffre d'affaires est également recalculé à partir du chiffre d'affaires global issu du logiciel, qui comprend à la fois des ventes avec un numéro de dossier et d'autres ventes sans numéro de dossier. Toutefois, et alors que le chiffre d'affaires global ressortant du logiciel de caisse comprend toutes les factures enregistrées dans ce dernier, qu'elles soient ou non numérotées, selon qu'elles correspondent, selon la requérante, à des ventes sur ordonnance ou des ventes sans ordonnance, les factures manquantes correspondent uniquement à des factures numérotées mais qui ne figurent pas dans la liste détaillée des factures issue des retraitements, utilisée pour déterminer le chiffre d'affaires réalisé. Ces factures manquantes, en l'absence de tout élément tendant à démontrer qu'elles correspondraient, de fait, à des factures non numérotées, ne sont donc pas incluses dans le chiffre d'affaires global ressortant du logiciel de caisse et ne peuvent, dès lors, être regardées comme ayant été comptabilisées deux fois par le service. 16. Les " doublons ", qui sont des factures portant le même numéro mais qui ont des dates et des heures de création différentes, ont été prises en compte par le vérificateur, lequel, selon les termes de la proposition de rectification, n'a pas remis en cause la comptabilisation opérée à ce titre par la SELARL Pharmacie de Barby et a retenu, sans le corriger, le retraitement réalisé par la société dans le fichier intitulé (CDT-2*TRT-4) pour justifier de la comptabilisation ou non des factures doublons. Les factures doublons non comptabilisées ont, par conséquent, été valorisées et extournées de la liste des factures ayant servi à déterminer le chiffre d'affaires de chaque exercice. Mme B... soutient qu'elle justifie d'un montant supérieur à retrancher du chiffre d'affaires et produit, à l'appui de cette allégation, pour chaque exercice, un fichier Excel intitulé " détail des doublons ", qui ferait ressortir, selon elle, un total de chiffre d'affaires en doublon de 36 946 euros en 2015 et de 42 445 en 2016. Toutefois, ces fichiers, qui ne sont assortis d'aucun justificatif, ni d'aucun détail permettant d'expliquer le mode de calcul du chiffre d'affaires global censé en résulter, et qui, au surplus, contredisent les éléments comptabilisés par la société elle-même, sont insuffisants, à eux seuls, et alors que le vérificateur a déjà pris en compte les explications apportées par la société au cours du contrôle, pour remettre en cause les montants retenus à ce titre et déjà retranchés des chiffres d'affaires reconstitués. 17. Les " avances de vignette ", qui correspondent à l'hypothèse où le pharmacien délivre un médicament sans facturation immédiate, laquelle intervient ultérieurement, une fois l'ordonnance présentée, et les " mises en crédit ", qui recouvrent les cas où le patient ne règle pas immédiatement alors que la remise du médicament implique le constat d'une vente dans le logiciel de caisse, ont été prises en compte par le vérificateur, qui a retranché des chiffres d'affaires reconstitués les factures ayant une taxe sur la valeur ajoutée nulle ou négative. Il en va de même des factures " recyclées ", qui concernent des ventes de produits bénéficiant du tiers-payant, dans le cas où le paiement est rejeté par la sécurité sociale ou la mutuelle, le vérificateur ayant retiré les factures ayant un numéro inférieur à celui de la première facture de l'exercice. Si Mme B... fait valoir que ces corrections sont insuffisantes, elle se borne à indiquer que le vérificateur aurait dû procéder à une comparaison avec les fichiers détaillés des ventes et de variation des stocks produits au cours du contrôle, et ce alors que ces fichiers, qui ne sont pas des inventaires, ainsi qu'il a été dit au point 13, sont, en eux-mêmes, dénués de valeur probante. 18. Il résulte de ce qui précède que l'administration justifie du bien-fondé de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de la SARL Pharmacie de Barby au titre de l'exercice clos en 2015, et par suite, de l'existence et du montant des minorations de recettes qui correspondent à des revenus réputés distribués par cette société. En ce qui concerne la demande de substitution de base légale et l'appréhension des revenus réputés distribués : 19. L'administration, qui a relevé que Mme B..., associée unique et gérante de la SELARL Pharmacie de Barby, était seule en charge de l'intégralité de la gestion administrative et financière de la société, qu'elle fournissait les données à intégrer en comptabilité au cabinet comptable et qu'elle avait choisi le logiciel permettant le suivi du fonctionnement de sa pharmacie et la restitution des données à intégrer en comptabilité, a considéré qu'elle était le seul maître de l'affaire et imposé entre ses mains la totalité des revenus distribués par la société au titre de l'exercice clos en 2015. 20. Mme B... ne contestant pas être le seul maître de l'affaire, l'administration établit l'appréhension par celle-ci des revenus distribués correspondant aux minorations de recettes de la SELARL Pharmacie de Barby. Par suite, la substitution de base légale demandée par le ministre, qui n'a privé Mme B..., imposée selon la procédure contradictoire, d'aucune garantie, doit être accueillie. Sur les majorations : 21. L'administration a appliqué aux impositions à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales mises à la charge de Mme B... au titre de l'année 2015 la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts. 22. En premier lieu, aux termes de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, d'une part : " Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l'Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter. Une aide juridictionnelle est accordée à ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes, dans la mesure où cette aide serait nécessaire pour assurer l'effectivité de l'accès à la justice ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt C-199/11 Europese Gemeenschap c/ Otis NV et autres du 6 novembre 2012, que le principe de protection juridictionnelle effective figurant à cet article 47 est constitué de divers éléments, lesquels comprennent, notamment, les droits de la défense, le principe d'égalité des armes, le droit d'accès aux tribunaux ainsi que le droit de se faire conseiller, défendre et représenter. Le respect des droits de la défense constitue un principe général du droit communautaire qui trouve à s'appliquer dès lors que l'administration se propose de prendre à l'encontre d'une personne un acte qui lui fait grief (CJCE, 18 décembre 2008, Sopropé, C-349/07). Il implique un droit d'accès au dossier au cours de la procédure préalable à l'adoption d'une décision, dont la violation n'est pas régularisée du simple fait que l'accès a été rendu possible au cours de la procédure juridictionnelle (CJUE, 25 octobre 2011, Grande chambre, Solvay SA c/ Commission européenne, C-110/10 P) arrêt Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, précité, point 318). 23. D'autre part, aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens des articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. / Les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations. ". Aux termes de l'article L. 80 E du même livre : " La décision d'appliquer les majorations et amendes prévues aux articles 1729, 1732 et 1735 ter du code général des impôts est prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités. ". 24. Il résulte des termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales que la décision d'infliger une pénalité fiscale à un contribuable ne peut intervenir qu'après l'expiration d'un délai minimum de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration lui fait connaître la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations. En l'espèce, la motivation de la pénalité de 40 % infligée à Mme B... figure dans la proposition de rectification du 11 juillet 2018, qui lui a accordé un délai de réponse de trente jours. Contrairement à ce que soutient la requérante, ce document, qui se borne à motiver, en droit et en fait, la pénalité envisagée, ne se confond avec la décision d'appliquer ladite pénalité, qui intervient ultérieurement et est matérialisée par la mise en recouvrement de celle-ci, laquelle est intervenue le 30 avril 2019. Il s'en déduit, d'une part, que l'administration fiscale n'était pas tenue d'informer Mme B... de son intention de lui infliger une sanction fiscale préalablement à l'envoi de la proposition de rectification, et, d'autre part, que l'intéressée a été mise à même de contester l'application de cette sanction, ce qu'elle s'est, au demeurant, abstenue de faire, son courrier du 10 septembre 2018 en réponse à la proposition de rectification ne comportant aucune observation sur ce point. Dans ces conditions, le moyen tiré de violation des stipulations de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit, en tout état de cause, être écarté. 25. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". 26. En faisant état de la qualité d'associé unique et de gérante de Mme B..., qui assurait la gestion de la SELARL Pharmacie de Barby, de la circonstance qu'elle ne pouvait ignorer les minorations de recettes de sa société, qui ont été constatées sur l'ensemble de la période vérifiée et qui trouvent leur origine dans des pratiques comptables irrégulières, ainsi que de l'importance des revenus distribués correspondants dans le revenu imposable rectifié de l'intéressée, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe en application de l'article L. 195 du livre des procédures fiscales, de l'intention délibérée de Mme B... d'éluder l'impôt, et par suite, du bien-fondé de la pénalité de 40 % qui lui a été appliquée sur le fondement des dispositions précitées. 27. En troisième lieu, si Mme B... soutient que la majoration de 40 % appliquée aux impositions supplémentaires mises à la charge de la SELARL Pharmacie de Barby n'est pas justifiée, un tel moyen est inopérant, s'agissant d'une pénalité appliquée à un contribuable distinct. 28. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme B... relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Article 2 : La requête de Mme B... est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Pruvost, président de chambre, Mme Courbon, présidente-assesseure, M. Pin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 juin 2023. La rapporteure, A. Courbon Le président, D. Pruvost La greffière, N. Lecouey La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 22LY01637
JADE/CETATEXT000047720601.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2016. Par un jugement n° 1907142 du 31 mars 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 mai 2022 et 30 janvier 2023, Mme B..., représentée par Mes Quévreux et Giroux, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est insuffisamment motivé faute de répondre à tous les moyens soulevés, en particulier celui tiré de l'incohérence du nombre de factures sans numéro retenu par l'administration et de se prononcer sur le caractère sérieux du montant du chiffre d'affaires reconstitué par le service ; - les rectifications la concernant doivent être abandonnées en conséquence de celles notifiées à la SELARL Pharmacie de Barby, qui font l'objet d'une requête actuellement pendante devant la cour, et dont elle s'approprie les moyens ; - l'administration s'étant fondée sur le 2° de l'article 109-1 du code général des impôts, elle ne peut faire état de sa qualité de maître de l'affaire pour déclencher la présomption d'appréhension des revenus distribués correspondant au rehaussement du résultat imposable de la SELARL Pharmacie de Barby, mais doit démontrer cette appréhension, ce qu'elle ne fait pas ; - les rectifications mises à sa charge, qui correspondent au bénéfice non déclaré par la SELARL Pharmacie de Barby, ne constituent pas des rémunérations occultes imposables entre les mains du maître de l'affaire sur le fondement du c de l'article 111 du même code, ainsi que l'a jugé la cour administrative d'appel de Nancy dans un arrêt n° 09NC02597 du 18 février 2021 ; - la substitution de base légale sollicitée par l'administration sur le fondement du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts ne peut concerner que la fraction du rehaussement aboutissant à un résultat bénéficiaire soumis à l'impôt sur les sociétés, soit 58 676 euros, le somme de 103 363 euros, qui a effacé le déficit déclaré, n'étant, quant à elle taxable que sur le fondement du 2° du même article, qui implique la démonstration de sa mise à la disposition de l'associé ; la rectification devra par conséquence, en tout état de cause, être limitée à la somme de 73 345 euros en base, correspondant à la somme de 58 676 euros majorée de 25 % en application du 7° de l'article 158 du code général des impôts ; - la pénalité de 40 % pour manquement délibéré qui lui a été appliquée n'est pas justifiée en l'absence de démonstration de son intention d'éluder l'impôt ; - cette pénalité a été établie en méconnaissance de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et plus généralement, du principe du respect des droits de la défense, en l'absence d'information sur l'intention de l'administration d'appliquer cette pénalité avant la notification de la proposition de rectification, qui constitue, à cet égard, la décision infligeant cette pénalité ; la Cour de justice de l'Union européenne peut être saisie, en tant que de besoin, d'une question préjudicielle sur ce sujet ; - la pénalité de 40 % appliquée aux impositions mises à la charge de la SELARL Pharmacie de Barby est également contestée. Par des mémoires, enregistré les 5 décembre 2022 et 17 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - il convient de substituer aux bases légales initialement retenues, à savoir le 2° de l'article 109-1 du code général des impôts et le c de l'article 111 du même code, les dispositions du 1° de l'article 109-1 de ce code, Mme B... étant le maître de l'affaire et présumée, en cette qualité, avoir appréhendé les revenus distribués par la SELARL Pharmacie de Barby ; - les autres moyens de la requête ne sont pas fondés. Mme B... a produit un mémoire le 2 mai 2023, qui n'a pas été communiqué. Par un mémoire distinct enregistré le 2 février 2023, Mme B... demande à la Cour, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts. Elle soutient que : - ces dispositions, qui constituent la nouvelle base légale de l'imposition revendiquée par l'administration, sont applicables au litige ; - ces dispositions n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; - elles méconnaissent les articles 6, 13 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui garantissent, respectivement, l'égalité devant la loi, l'égalité devant les charges publiques et le droit à un recours effectif. Par un mémoire, enregistré le 17 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut à la non-transmission de la question prioritaire de constitutionnalité. Il soutient que la question présentée est dépourvue de caractère sérieux. Mme B... a produit un mémoire le 2 mai 2023, qui n'a pas été communiqué. Par ordonnance du 20 avril 2023, la clôture d'instruction a été reportée au 11 mai 2023. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - la Constitution, notamment son Préambule ainsi que son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure, - et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ; Considérant ce qui suit : 1. La SELARL Pharmacie de Barby, qui exploite une officine de pharmacie à Barby (Savoie) et dont Mme B... était la gérante et l'unique associée, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 1er avril 2014 au 31 mars 2016. A l'issue de ce contrôle, qui a notamment donné lieu à la réintégration, dans ses bases imposables à l'impôt sur les sociétés des exercices clos en 2015 et 2016, de recettes omises, l'administration a, dans le cadre d'un contrôle sur pièces, imposé entre les mains de Mme B... les revenus distribués correspondants à ces minorations de recettes dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le double fondement du 2° de l'article 109-1 et du c de l'article 111 du code général des impôts et l'a, en conséquence, assujettie, selon la procédure contradictoire, à des suppléments d'impôt sur le revenu et à des cotisations de contributions sociales au titre de l'année 2016. Mme B... relève appel du jugement du 31 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des majorations correspondantes. Sur la question prioritaire de constitutionnalité : 2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ". Mme B... conteste la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de ces dispositions, que le ministre demande à la cour de substituer à celles du 2° du 1 du même article et du c de l'article 111 du code général des impôts retenues dans la proposition de rectification comme fondement légal de l'imposition à l'impôt sur le revenu mise à sa charge. 3. Mme B... soutient, d'une part, qu'en soumettant le maître de l'affaire à la présomption irréfragable qu'il a disposé des revenus distribués par une société, ces dispositions, telles qu'interprétées par la jurisprudence, permettent à l'administration, lorsqu'elle est en présence d'un bénéficiaire identifié en la personne du gérant et unique associé d'une société, de choisir le mode de preuve applicable selon qu'elle décide de recourir, ou non, à la qualification de maître de l'affaire, aboutissant à un traitement différencié des contribuables qui se trouvent dans une même situation objective, en méconnaissance des principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques consacrés par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Elle fait valoir, d'autre part, que la substitution de base légale demandée par le ministre en appel, qui ne peut être discutée qu'au cours de la procédure juridictionnelle devant la cour administrative d'appel, la place dans une situation défavorable par rapport à l'administration et l'empêche de présenter tous les éléments utiles à sa défense, en méconnaissance des droits de la défense garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. 4. Il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que la cour administrative d'appel, saisie d'un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un mémoire distinct et motivé, statue par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux. 5. En premier lieu, est qualifiée de maître de l'affaire une personne qui exerce la responsabilité effective de l'ensemble de la gestion administrative, commerciale et financière de la société et dispose sans contrôle de ses fonds. Si l'administration fiscale entend imposer des revenus réputés distribués sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts au nom du maître de l'affaire, elle doit justifier de cette qualification, qui nécessite une analyse des circonstances propres à l'affaire et notamment du fonctionnement spécifique de l'entreprise. Le contribuable peut établir que les éléments apportés par l'administration sont insuffisants pour justifier de cette qualification. S'il est reconnu maître de l'affaire, il est réputé avoir appréhendé la totalité des revenus distribués par la société. Alors que la qualité de gérant et unique associé d'une personne ne suffit à établir ni qu'elle était la bénéficiaire effective des revenus distribués par la société, ni qu'elle en était le maître de l'affaire, le choix de l'administration de recourir, ou non, à la présomption du maître de l'affaire dans une telle hypothèse, ne peut être regardé comme entrainant, au regard du mode de preuve applicable, un traitement différent de contribuables placés dans une même situation objective, une personne ayant la qualité d'associée unique et gérante reconnue comme étant le seul maître de l'affaire n'étant pas placée dans la même situation qu'un autre associé unique et gérant qui n'est pas reconnu comme tel. Il s'ensuit que la présomption du maître de l'affaire à laquelle l'administration peut recourir lorsqu'elle fonde l'imposition de revenus distribués sur les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général d'impôt ne méconnaît ni le principe d'égalité devant la loi, garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ni le principe d'égalité devant les charges publiques, protégé par l'article 13 de la même Déclaration. 6. En second lieu, le principe des droits de la défense, qui résulte de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ne trouve à s'appliquer qu'aux peines et aux sanctions ayant le caractère d'une punition, notamment aux sanctions fiscales. La substitution de base légale demandée par le ministre, qui permet à l'administration, qui ne peut renoncer à l'application de la loi fiscale, d'invoquer, à tout moment de la procédure contentieuse, une base légale différente de celle initialement retenue pour fonder l'imposition, porte sur des dispositions, celles du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, qui ont pour objet de fonder les seules impositions en litige, à l'exclusion des sanctions dont elles ont été assorties, et notamment de la majoration pour manquement délibéré de 40 %, laquelle a été appliquée sur le fondement du a. de l'article 1729 du code général des impôts. Par suite, et en tout état de cause, Mme B... ne peut utilement soutenir que cette substitution de base légale porte atteinte à la garantie des droits de la défense qui découle de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. 7. Il suit de là que la condition tenant au caractère sérieux de la question soulevée n'est pas satisfaite. Ainsi, et sans qu'il soit besoin de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité, le moyen tiré de ce que ces dispositions portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté. Sur la régularité du jugement : 8. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". 9. Contrairement à ce que soutient Mme B..., le tribunal administratif a répondu, de manière suffisamment circonstanciée, au point 4 du jugement contesté, au moyen de première instance tiré de ce que l'administration n'était pas fondée à rejeter la comptabilité de la SELARL Pharmacie de Barby, en évoquant, pour les valider, chacun des motifs de rejet retenu par le service, notamment celui résultant du nombre de factures sans numéro, étant précisé, à cet égard, que les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à chacun des arguments exposés par Mme B... à l'appui de son moyen. Le tribunal a par ailleurs répondu, au point 5 du jugement, au moyen tiré de ce que la reconstitution du chiffre d'affaires de la SELARL Pharmacie de Barby aboutissait à un résultat largement surestimé, par une motivation, certes succincte, mais en adéquation avec l'argumentation développée devant lui sur ce point dans les écritures de Mme B.... Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement contesté doit être écarté. Sur le bien-fondé des impositions : 10. L'administration a imposé entre les mains de Mme B... les revenus réputés distribués correspondant au rehaussement du résultat imposable de la SELARL Pharmacie de Barby au titre de l'exercice clos en 2016 résultant de minorations de recettes de 160 039 euros, majorés de 25 % en application du 7° de l'article 158 du code général des impôts, sur le double fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et du c de l'article 111 du même code. Le ministre demande en appel qu'à ces dispositions soient substituées celles du 1° du 1 de l'article 109 de ce code. 11. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". En cas de refus des propositions de rectifications par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire de sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle. En ce qui concerne l'existence et le montant des revenus distribués : 12. Il résulte de l'instruction que la SELARL Pharmacie de Barby, qui dispose d'une comptabilité informatisée, utilise un système de caisses centralisées sur un serveur central fonctionnant avec le logiciel Caduciel. A partir des données de ce logiciel, la gérante, Mme B... procède mensuellement à un récapitulatif sous format papier, envoyé au comptable qui procède alors à la saisie manuelle dans le logiciel Coala. A la suite de la demande du vérificateur de procéder, sur le fondement du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, à des retraitements informatiques sur les données du logiciel de caisse, la SELARL a choisi de réaliser elle-même ces retraitements. 13. Il est constant, en premier lieu, que la société n'a pas produit l'inventaire des stocks au 1er avril 2014 et au 1er avril 2015. Si Mme B... indique avoir présenté, dans le cadre des traitements informatiques, des fichiers détaillés incluant pour chaque jour le code article, le libellé produit, la journée, la quantité initiale en début de journée, les approvisionnements, la quantité finale en fin de journée et les mouvements de stock hors approvisionnements, ces fichiers ne peuvent pallier l'absence de l'inventaire physique prévu à l'article L. 123-12 du code de commerce, qui seul permet le contrôle de l'existence et de la valeur de tous les éléments d'actif et de passif à la date de clôture et qui doit être produit en cas de contrôle. Le vérificateur a constaté, en deuxième lieu, l'existence, dans les fichiers transmis, de factures non numérotées, représentant 42 % du nombre total de factures pour l'exercice 2015 et 41 % pour l'exercice 2016, élément non contesté par Mme B..., qui se borne, à cet égard, à faire valoir que seules les factures concernant des produits délivrés sur ordonnance se voient attribuer un numéro de facture. Le vérificateur a relevé, en troisième lieu, des ruptures dans la séquentialité des numéros des factures avec ordonnance, aboutissant au constat de près de 500 factures manquantes par exercice, circonstance que la requérante explique par les modalités de fonctionnement du logiciel Caduciel, lequel réserve un numéro dès la réalisation d'une vente et ne permet pas sa réaffectation en cas d'annulation de l'opération, explication peu convaincante dans la mesure où une facture annulée doit être libellée comme telle dans la liste des factures issue du retraitement, ce qui est d'ailleurs le cas pour un certain nombre d'entre elles. Le vérificateur a noté, en quatrième lieu, que les écritures étaient validées une seule fois par an, en fin d'exercice, ce qui était matériellement impossible en raison de l'heure de la fermeture de la pharmacie les 31 mars 2015 et 2016, que cette validation annuelle contrevenait à l'article 921-2 du plan comptable général selon lequel les écritures des journaux doivent être récapitulés au livre journal au jour le jour ou, à défaut, mensuellement et qu'elle avait pour conséquence de permettre la modification des écritures pendant tout l'exercice. A cet égard, Mme B... ne peut soutenir utilement que l'administration ne démontre pas l'existence de corrections postérieures au dépôt des déclarations fiscales. Le vérificateur a relevé, en cinquième lieu, que dans la colonne " numéro pièce " du grand livre, de nombreuses lignes (3 419 lignes sur 11 576 en 2015 et 2 489 lignes sur 11 677 en 2016) ne comportaient aucune référence à une pièce justificative (mention " NS ") et que, par conséquence, la permanence du chemin de révision comptable n'était pas assurée. En se bornant à faire valoir que cet état de fait résulte du logiciel, qui renseigne " NS " par défaut et qu'il ne lui a pas été reproché de ne pas produire des justificatifs, Mme B... ne conteste pas utilement ce constat. En sixième lieu, le vérificateur a constaté l'existence d'écritures globalisées, retracées dans l'annexe 2 à la proposition de rectification, sans qu'il soit possible d'identifier chaque opération en l'absence de journal auxiliaire ou de référence à une pièce justificative, constat non contesté par la requérante, qui admet également qu'il existe des ruptures dans la séquentialité des numéros d'écritures comptables. Ces nombreuses anomalies sont de nature à ôter à la comptabilité de la SELARL Pharmacie de Barby son caractère probant. Par suite, l'administration a pu, à bon droit, l'écarter et procéder à la reconstitution extracomptable de ses chiffres d'affaires et de ses résultats. 14. Le chiffre d'affaires de la SELARL Pharmacie de Barby a été reconstitué à partir des retraitements informatiques réalisés par cette dernière, et notamment ceux détaillant l'ensemble de la facturation des exercices 2015 et 2016. Le vérificateur a, d'une part, déterminé le chiffre d'affaires omis correspondant à des factures numérotées manquantes, identifiées à partir des ruptures constatées dans la séquentialité des numéros de facture, auxquelles il a appliqué le prix moyen par facture ressortant des factures numérotées, soit 45,80 euros HT en 2015 et 44,30 euros HT en 2016, aboutissant à un chiffre d'affaires omis de 22 241 euros en 2015 et de 22 066 euros en 2016. Il a ensuite identifié une minoration de recettes déclarées en comparant le résultat déclaré par la société à celui ressortant du détail de la facturation, après prise en compte des pratiques particulières de la pharmacie, explicitées au cours du contrôle, à savoir les factures doublons non comptabilisés, les factures annulées, les régularisations des " avances de vignettes ", les régularisations des " mises en crédit " et les factures dites " recyclées ", examen qui a fait ressortir une insuffisance de 38 865 euros en 2015 et de 135 463 euros en 2016. 15. S'agissant des factures manquantes, Mme B... fait valoir que la rectification conduit à un double redressement sur le même chiffre d'affaires de sa société, dans la mesure où le chiffre d'affaires est également recalculé à partir du chiffre d'affaires global issu du logiciel, qui comprend à la fois des ventes avec un numéro de dossier et d'autres ventes sans numéro de dossier. Toutefois, et alors que le chiffre d'affaires global ressortant du logiciel de caisse comprend toutes les factures enregistrées dans ce dernier, qu'elles soient ou non numérotées, selon qu'elles correspondent, selon la requérante, à des ventes sur ordonnance ou des ventes sans ordonnance, les factures manquantes correspondent uniquement à des factures numérotées mais qui ne figurent pas dans la liste détaillée des factures issue des retraitements, utilisée pour déterminer le chiffre d'affaires réalisé. Ces factures manquantes, en l'absence de tout élément tendant à démontrer qu'elles correspondraient, de fait, à des factures non numérotées, ne sont donc pas incluses dans le chiffre d'affaires global ressortant du logiciel de caisse et ne peuvent, dès lors, être regardées comme ayant été comptabilisées deux fois par le service. 16. Les " doublons ", qui sont des factures portant le même numéro mais qui ont des dates et des heures de création différentes, ont été prises en compte par le vérificateur, lequel, selon les termes de la proposition de rectification, n'a pas remis en cause la comptabilisation opérée à ce titre par la SELARL Pharmacie de Barby et a retenu, sans le corriger, le retraitement réalisé par cette dernière dans le fichier intitulé (CDT-2*TRT-4) pour justifier de la comptabilisation ou non des factures doublons. Les factures doublons non comptabilisées ont, par conséquent, été valorisées et extournées de la liste des factures ayant servi à déterminer le chiffre d'affaires de chaque exercice. Mme B... soutient qu'elle justifie d'un montant supérieur à retrancher du chiffre d'affaires et produit, à l'appui de cette allégation, pour chaque exercice, un fichier Excel intitulé " détail des doublons ", qui ferait ressortir, selon elle, un total de chiffre d'affaires en doublon de 36 946 euros en 2015 et de 42 445 en 2016. Toutefois, ces fichiers, qui ne sont assortis d'aucun justificatif, ni d'aucun détail permettant d'expliquer le mode de calcul du chiffre d'affaires global censé en résulter, et qui, au surplus, contredisent les éléments comptabilisés par la société elle-même, sont insuffisants, à eux seuls, et alors que le vérificateur a déjà pris en compte les explications apportées par la société au cours du contrôle, pour remettre en cause les montants retenus à ce titre et déjà retranchés des chiffres d'affaires reconstitués. 17. Les " avances de vignette ", qui correspondent à l'hypothèse où le pharmacien délivre un médicament sans facturation immédiate, laquelle intervient ultérieurement, une fois l'ordonnance présentée, et les " mises en crédit ", qui recouvrent les cas où le patient ne règle pas immédiatement alors que la remise du médicament implique le constat d'une vente dans le logiciel de caisse, ont été prises en compte par le vérificateur, qui a retranché des chiffres d'affaires reconstitués les factures ayant une taxe sur la valeur ajoutée nulle ou négative. Il en va de même des factures " recyclées ", qui concernent des ventes de produits bénéficiant du tiers-payant, dans le cas où le paiement est rejeté par la sécurité sociale ou la mutuelle, le vérificateur ayant retiré les factures ayant un numéro inférieur à celui de la première facture de l'exercice. Si Mme B... fait valoir que ces corrections sont insuffisantes, elle se borne à indiquer que le vérificateur aurait dû procéder à une comparaison avec les fichiers détaillés des ventes et de variation des stocks produits au cours du contrôle, et ce alors que ces fichiers, qui ne sont pas des inventaires, ainsi qu'il a été dit au point 13, sont, en eux-mêmes, dénués de valeur probante. 18. Il résulte de ce qui précède que l'administration justifie du bien-fondé de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de la SARL Pharmacie de Barby au titre de l'exercice clos en 2016, et par suite, de l'existence et du montant des minorations de recettes qui correspondent à des revenus réputés distribués par cette société. En ce qui concerne la demande de substitution de base légale et l'appréhension des revenus réputés distribués : 19. L'administration, qui a relevé que Mme B..., associée unique et gérante de la SELARL Pharmacie de Barby, était seule en charge de l'intégralité de la gestion administrative et financière de la société, qu'elle fournissait les données à intégrer en comptabilité au cabinet comptable et qu'elle avait choisi le logiciel permettant le suivi du fonctionnement de sa pharmacie et la restitution des données à intégrer en comptabilité, a considéré qu'elle était le seul maître de l'affaire et imposé entre ses mains la totalité des revenus distribués par la société au titre de l'exercice clos en 2016. 20. Il ressort des dispositions énoncées au point 11 du présent arrêt que seules les rectifications ayant donné lieu au constat d'un bénéfice soumis à l'impôt sur les sociétés sont imposables entre les mains du bénéficiaire sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. 21. Il résulte de l'instruction et notamment du tableau des conséquences financières annexé à la proposition de rectification du 11 juillet 2018 adressée à la SELARL Pharmacie de Barby que le rehaussement notifié après contrôle au titre de l'exercice clos en 2016 a eu pour effet de substituer au résultat déficitaire de - 101 363 euros déclaré par celle-ci un bénéfice de 236 165 euros. Ce rehaussement résulte, outre de la remise en cause d'une provision pour dépréciation du fonds de commerce de 180 000 euros, de la réintégration dans le résultat imposable à l'impôt sur les sociétés de la société de recettes omises sur factures manquantes d'un montant de 22 065 euros et de recettes omises sur factures non comptabilisées d'un montant de 135 463 euros. Par suite, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que la somme de 160 039 euros réintégrée dans la base imposable à l'impôt sur le revenu de Mme B... en conséquence de ces rectifications, qui est inférieure au montant du bénéfice retenu pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés, est imposable en tant que revenus distribués sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Il en résulte, dès lors que la substitution de base légale sollicitée n'a pour effet de priver la contribuable d'aucune garantie de procédure et qu'il ressort des éléments fournis par le ministre, énoncés au point 19 ci-dessus et non contestés, que celle-ci était le maître de l'affaire, qu'il y a lieu d'accueillir sa demande tendant au maintien du complément d'impôt sur le revenu assigné à Mme B... au titre de l'année 2016 à raison des distributions provenant de la SELARL Pharmacie de Barby sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code. Sur les majorations : 22. L'administration a appliqué aux impositions à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales mises à la charge de Mme B... au titre de l'année 2016 la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts. 23. En premier lieu, aux termes de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, d'une part : " Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l'Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter. Une aide juridictionnelle est accordée à ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes, dans la mesure où cette aide serait nécessaire pour assurer l'effectivité de l'accès à la justice ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt C-199/11 Europese Gemeenschap c/ Otis NV et autres du 6 novembre 2012, que le principe de protection juridictionnelle effective figurant à cet article 47 est constitué de divers éléments, lesquels comprennent, notamment, les droits de la défense, le principe d'égalité des armes, le droit d'accès aux tribunaux ainsi que le droit de se faire conseiller, défendre et représenter. Le respect des droits de la défense constitue un principe général du droit communautaire qui trouve à s'appliquer dès lors que l'administration se propose de prendre à l'encontre d'une personne un acte qui lui fait grief (CJCE, 18 décembre 2008, Sopropé, C-349/07). Il implique un droit d'accès au dossier au cours de la procédure préalable à l'adoption d'une décision, dont la violation n'est pas régularisée du simple fait que l'accès a été rendu possible au cours de la procédure juridictionnelle (CJUE, 25 octobre 2011, Grande chambre, Solvay SA c/ Commission européenne, C-110/10 P) arrêt Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, précité, point 318). 24. D'autre part, aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens des articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. / Les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations. ". Aux termes de l'article L. 80 E du même livre : " La décision d'appliquer les majorations et amendes prévues aux articles 1729, 1732 et 1735 ter du code général des impôts est prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités. ". 25. Il résulte des termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales que la décision d'infliger une pénalité fiscale à un contribuable ne peut intervenir qu'après l'expiration d'un délai minimum de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration lui fait connaître la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations. En l'espèce, la motivation de la pénalité de 40 % infligée à Mme B... figure dans la proposition de rectification du 11 juillet 2018, qui lui a accordé un délai de réponse de trente jours. Contrairement à ce que soutient la requérante, ce document, qui se borne à motiver, en droit et en fait, la pénalité envisagée, ne se confond pas avec la décision d'appliquer ladite pénalité, qui intervient ultérieurement et est matérialisée par la mise en recouvrement de celle-ci, laquelle est intervenue le 30 avril 2019. Il s'en déduit, d'une part, que l'administration fiscale n'était pas tenue d'informer Mme B... de son intention de lui infliger une sanction fiscale préalablement à l'envoi de la proposition de rectification, et, d'autre part, que l'intéressée a été mise à même de contester l'application de cette sanction, ce qu'elle s'est, au demeurant, abstenue de faire, son courrier du 10 septembre 2018 en réponse à la proposition de rectification ne comportant aucune observation sur ce point. Dans ces conditions, le moyen tiré de violation des stipulations de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit, en tout état de cause, être écarté. 26. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". 27. En faisant état de la qualité d'associé unique et de gérante de Mme B..., qui assurait la gestion de la SELARL Pharmacie de Barby, de la circonstance qu'elle ne pouvait ignorer les minorations de recettes de sa société, qui ont été constatées sur l'ensemble de la période vérifiée et qui trouvent leur origine dans des pratiques comptables irrégulières, ainsi que de l'importance des revenus distribués correspondants dans le revenu imposable rectifié de l'intéressée, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe en application de l'article L. 195 du livre des procédures fiscales, de l'intention délibérée de Mme B... d'éluder l'impôt, et par suite, du bien-fondé de la pénalité de 40 % qui lui a été appliquée sur le fondement des dispositions précitées. 28. En troisième lieu, si Mme B... soutient que la majoration de 40 % appliquée aux impositions supplémentaires mises à la charge de la SELARL Pharmacie de Barby n'est pas justifiée, un tel moyen est inopérant, s'agissant d'une pénalité appliquée à un contribuable distinct. 29. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme B... relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Article 2 : La requête de Mme B... est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Pruvost, président de chambre, Mme Courbon, présidente-assesseure, M. Pin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 juin 2023. La rapporteure, A. Courbon Le président, D. Pruvost La greffière, N. Lecouey La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 22LY01628
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2021 par lequel le préfet du Rhône lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours, et a fixé la destination d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire. Par un jugement n° 2106257 du 17 décembre 2021, le tribunal a rejeté sa requête. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 25 mai 2022, M. B..., représenté par Me Fréry, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté susmentionné ; 2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois, subsidiairement, de réexaminer sa situation après lui avoir remis une autorisation provisoire de séjour et de travail, dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt ; 3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - le refus de séjour est insuffisamment motivé ; il méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; - l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée, a été édictée de manière automatique et doit être annulée en raison de l'illégalité du refus de séjour ; elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3, 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la décision fixant le délai de départ volontaire doit être annulée en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, et elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; un délai plus important devait lui être accordé ; - la décision fixant le pays de destination doit être annulée en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; elle est insuffisamment motivée et méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La requête de M. B... a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - et les observations de Me Tronquet, substituant Me Fréry, pour M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant ivoirien né en 1985 et entré sur le territoire français en juin 2017 selon ses déclarations, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 13 juillet 2021 lui refusant un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours. Sur l'arrêté dans son ensemble : 2. L'arrêté en litige énonce de manière détaillée les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé pour refuser le titre de séjour sollicité, l'obligation de quitter le territoire français n'ayant pas à faire l'objet, selon l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une motivation distincte de celle du refus de séjour. La désignation de la Côte d'Ivoire comme pays de destination suffit à assurer la motivation de la décision fixant le pays de renvoi. L'arrêté contesté est, dans son ensemble, motivé. Sur le refus de séjour : 3. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. (...) ". 4. Selon l'avis rendu par le collège des médecins de l'OFII le 29 mars 2021, dont le préfet du Rhône s'est approprié le contenu, si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et y voyager sans risques. Il ressort des différentes pièces produites par l'administration que des médicaments appartenant à la classe des antidépresseurs, des anxiolytiques et à celle des antipsychotiques sont disponibles en Côte d'Ivoire. Si M. B... soutient que le coût de son traitement constituerait un obstacle à sa prise en charge en Côte d'Ivoire et qu'il n'y bénéficierait d'aucune possibilité de s'affilier à un système de protection sociale, il n'en justifie pas. S'il fait valoir qu'il ne pourra pas avoir accès à son traitement en Côte d'Ivoire en raison de l'insuffisance des structures et personnels compétents, il apparaît qu'une offre de soins en psychiatrie existe dans son pays d'origine, en dépit de sa faiblesse numérique, relevée par l'Organisation mondiale de la santé en 2016. Si, par ailleurs, les certificats médicaux produits par M. B... soulignent le caractère post-traumatique de sa pathologie, rien ne permet d'affirmer qu'un retour en Côte d'Ivoire constituerait, par lui-même, une nouvelle exposition traumatique incompatible avec sa prise en charge médicale. Il n'apparaît ainsi pas que les soins dans son pays d'origine seraient indisponibles. Par suite, aucune violation des dispositions précitées ni erreur manifeste d'appréciation ne sont caractérisées. Sur l'obligation de quitter le territoire français : 5. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour. 6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône se serait cru en situation de compétence liée pour prendre l'obligation de quitter le territoire français litigieuse. Dès lors, le moyen doit être écarté. 7. Compte tenu de ce qui a été dit au point 4, et alors que l'avis du collège des médecins de l'OFII, non précisément contesté sur ce point, indique que le requérant peut voyager sans risque vers son pays d'origine, aucune violation de l'article L. 611-3, 9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne saurait être retenue. Sur le délai de départ volontaire : 8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le délai de départ volontaire serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. 9. Si M. B... soutient qu'un délai de quatre-vingt-dix jours était insuffisant, aucune nécessité quelconque justifiant qu'un délai supérieur lui soit accordé n'est avérée. L'erreur manifeste d'appréciation dont il se prévaut sur ce point n'est pas caractérisée. Sur la fixation du pays de destination : 10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. 11. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. " Si M. B... fait valoir qu'il encourt des risques en cas de retour en Côte d'Ivoire, il ressort de ce qui a été dit au point 4 qu'il peut y bénéficier d'un traitement approprié. Par ailleurs les risques autres que liés à sa santé auxquels il prétend être personnellement soumis à cette occasion, compte tenu notamment du décès de son père, ne sont pas avérés. Au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée par la cour nationale du droit d'asile le 25 mars 2021. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit donc être écarté. 12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Dès lors sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète du Rhône. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, C. DjebiriLe président, V.-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 22LY01631 al
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 12 avril 2022 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination. Par un jugement n° 2201179 du 15 juillet 2022, la magistrate désignée du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Clemang, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ; 2°) d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : Sur la régularité du jugement attaqué : - le premier juge n'a pas répondu au moyen tiré de l'accessibilité aux soins dans son pays d'origine ; Sur le refus de titre de séjour : - il y a lieu de demander la communication de son entier dossier médical détenu par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) et, en particulier, des trois rapports médicaux au vu desquels s'est prononcé successivement le collège de médecins de l'OFII ; - il appartient au préfet de justifier du contenu du rapport médical adressé au collège de médecins de l'OFII en application de l'article R. 425-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'avis du collège de médecins de l'OFII est insuffisamment motivé ; - le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence ; - l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ; - il appartient à la cour de mettre en œuvre ses pouvoirs d'instruction en ordonnant, le cas échéant, une expertise médicale ; - la charge de la preuve de l'accès effectif aux soins incombe, compte tenu du sens de précédents avis rendus par le collège de médecins de l'OFII, au préfet ; - le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ; Sur l'obligation de quitter le territoire français : - elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ; - l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ; Sur la décision fixant le pays de renvoi : - l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ont été méconnus. La requête a été communiquée au préfet de Saône-et-Loire qui n'a pas produit de mémoire. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 novembre 2022. En application de l'article R. 611-7 du code justice administrative, les parties ont été informées que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence du magistrat désigné du tribunal administratif de Dijon pour statuer sur la demande qui relevait d'une formation collégiale du tribunal. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Le rapport de M. Pin, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ; Considérant ce qui suit : 1. Selon ses déclarations, M. A..., ressortissant albanais né le 24 juillet 2003, est entré en France le 29 octobre 2018. Le 17 mai 2021, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en invoquant son état de santé. Par un arrêté du 12 avril 2022, le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. M. A... relève appel du jugement du 15 juillet 2022 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; (...) ". Aux termes de l'article L. 614-4 de ce code : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français prise en application des 3°, 5° ou 6° de l'article L. 611-1 est assortie d'un délai de départ volontaire, le tribunal administratif est saisi dans le délai de trente jours suivant la notification de la décision. (...) ". 3. Les articles L. 614-4 et L. 614-5 distinguent deux procédures contentieuses lorsque la décision est assortie d'un délai de départ volontaire, en l'absence d'assignation à résidence ou de placement en rétention. Lorsque la décision est prise en application des 3°, 5° ou 6° de l'article L. 611-1 le délai de recours est de trente jours et le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois. Lorsqu'elle est prise en application des 1°, 2° ou 4° du même article, le délai de recours est réduit à quinze jours et le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin statue dans un délai de six semaines. 4. Il ressort des pièces du dossier que, pour obliger M. A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, le préfet de Saône-et-Loire s'est fondé sur le 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant a été placé en rétention ou assigné à résidence avant le jugement. Ainsi, en application de l'article L. 614-4 de ce code, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Dijon n'était pas compétente pour statuer seule sur la demande de M. A... qui relevait d'une formation collégiale du tribunal. Il s'ensuit, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen d'omission à statuer, que le jugement est irrégulier et doit être annulé. 5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Dijon. Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour : 6. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". L'article R. 425-11 du même code prévoit que l'autorité préfectorale délivre un tel titre de séjour au vu d'un avis émis, sur le fondement d'un rapport médical, par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'article R. 425-12 de ce code dispose que : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa du même article. (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-13 du même code : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins (...) Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) ". Enfin, l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313 22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. (...) ". 7. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment du bordereau de transmission produit par le préfet de Saône-et-Loire à l'appui de ses écritures en première instance, que le rapport médical prévu par les dispositions de l'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été établi par un médecin du service de l'OFII qui ne faisait pas partie du collège de médecins de l'Office, constitué de trois autres praticiens, qui ont signé l'avis émis le 5 janvier 2022. Cet avis indique que, si l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut de traitement peut entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Albanie dont il est originaire, bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans ce pays, à destination duquel il peut voyager sans risque. Cet avis, qui est émis dans le respect du secret médical, est ainsi suffisamment motivé au regard des exigences du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de refus de séjour a été prise à la suite d'une procédure irrégulière doit être écarté. 8. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Saône-et-Loire, qui cite dans l'arrêté litigieux le contenu de l'avis du collège de médecins de l'OFII du 5 janvier 2022, se serait cru lié par cet avis. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu l'étendue de sa compétence doit être écarté. 9. En troisième lieu, si M. A... entend contester le sens de cet avis, les certificats médicaux qu'il a produits, en levant ainsi le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, et notamment le certificat médical destiné à l'OFII, s'ils font état de l'insuffisance hypophysaire dont il souffre, caractérisée en particulier par la nécessité de suivre un traitement hormonal, ne font pas état d'une absence de traitement approprié en Albanie. D'ailleurs, M. A... verse lui-même au débat une attestation du ministère albanais chargé de la santé mentionnant que l'hormone qui lui est prescrite, à savoir la lévothyroxine sodique, est commercialisée dans ce pays. M. A... n'établit pas, en se bornant à produire un article d'ordre général sur le système d'assurance maladie en Albanie, qu'il ne pourrait pas avoir effectivement accès au traitement nécessité par son état de santé alors qu'il ne soutient pas, ni même n'allègue, qu'il serait dépourvu de ressources dans son pays d'origine ni qu'il ne remplirait pas les conditions requises pour bénéficier d'une prise en charge par l'assurance maladie albanaise. Dans ces conditions, M. A... ne remet pas en cause, par les éléments qu'il produit, l'avis du collège des médecins de l'OFII sur lequel s'est fondé le préfet de Saône-et-Loire pour prendre sa décision. La circonstance qu'il a antérieurement été provisoirement admis au séjour à raison de son état de santé est, à cet égard, sans incidence dès lors qu'elle ne justifie pas, en soi, du bien-fondé de ses allégations. Par suite, eu égard à l'ensemble de ces éléments, et sans qu'il y ait lieu en l'espèce de solliciter la communication du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'OFII, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet a méconnu l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui délivrer un titre de séjour. 10. En quatrième lieu, si le requérant se prévaut de son état de santé et de sa scolarisation en classe de terminale professionnelle, il n'apparaît pas, notamment pour les motifs exposés au point précédent, que le préfet de Saône-et-Loire aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. A... en refusant de l'admettre au séjour. Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français : 11. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. 12. En second lieu, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre d'une décision qui, par elle-même, n'implique pas le retour de l'intéressé dans son pays d'origine. Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi : 13. Ainsi qu'il a été dit aux points 7 et 9 du présent arrêt, il ressort des pièces du dossier que M. A..., eu égard à son état de santé, peut voyager sans risque à destination de l'Albanie, où il peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié à sa pathologie. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait, pour ce motif, méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté. 14. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale, que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de Saône-et-Loire du 12 avril 2022. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2201179 du 15 juillet 2022 de la magistrate désignée du tribunal administratif de Dijon est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Dijon et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Pruvost, président de chambre, Mme Courbon, présidente-assesseure, M. Pin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. Le rapporteur, F.-X. Pin Le président, D. PruvostLa greffière, N. Lecouey La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 22LY03792
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Hesselmans Beheer BV a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 21 janvier 2021 par laquelle le président de la communauté de communes Terre d'Auge a rejeté sa demande tendant à l'inscription à l'ordre du jour du conseil communautaire de la question de l'abrogation de la délibération du 5 mars 2020 du conseil communautaire portant approbation du plan local d'urbanisme intercommunal, en tant que cette délibération classe en zone A1 les parcelles cadastrées section A nos 209, 210, 211, 278, 279, 332, 337, 338 et 372 sur le territoire de la commune de Bourgeauville. Par un jugement no 2100683 du 24 janvier 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 24 mars 2022, la société Hesselmans Beheer BV, représentée par Me Cavelier, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du 21 janvier 2021 du président de la communauté de communes Terre d'Auge ; 3°) d'enjoindre à la communauté de communes Terre d'Auge de réexaminer le classement des parcelles en cause dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de la communauté de communes Terre d'Auge une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision contestée a été prise par une autorité incompétente ; - le rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal était insuffisamment motivé ; - le classement en zone A1 des parcelles précitées est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2022, la communauté de communes Terre d'Auge, représentée par la SELARL Concept Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Hesselmans Beheer BV une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la requête est irrecevable en raison de son insuffisante motivation ; - les moyens invoqués par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Bréchot, - les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique, - les observations de Me Cavelier, représentant la société Hesselmans Beheer BV, et les observations de Me Delaunay, substituant Me Agostini, représentant la communauté de communes Terre d'Auge. Une note en délibéré, présentée par la société Hesselmans Beheer BV, a été enregistrée le 6 juin 2023. Considérant ce qui suit : 1. Par une délibération du 5 mars 2020, le conseil communautaire de la communauté de communes Terre d'Auge a approuvé son plan local d'urbanisme intercommunal. Par un courrier du 16 décembre 2020, reçu le 23 décembre suivant, la société Hesselmans Beheer BV a demandé au président de la communauté de communes Terre d'Auge d'inscrire à l'ordre du jour du conseil communautaire la question de l'abrogation de la délibération du 5 mars 2020 du conseil communautaire portant approbation du plan local d'urbanisme intercommunal en tant que cette délibération classe en zone A1 les parcelles cadastrées section A nos 209, 210, 211, 278, 279, 332, 337, 338 et 372 sur le territoire de la commune de Bourgeauville, dont la société Hesselmans Beheer BV est propriétaire. Cette demande a été rejetée par une décision du président de la communauté de communes Terre d'Auge du 21 janvier 2021, reçue le 4 février suivant, dont la société Hesselmans Beheer BV a demandé l'annulation au tribunal administratif de Caen. La société Hesselmans Beheer BV relève appel du jugement du 24 janvier 2022 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. L'autorité compétente, saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal, est tenue d'y déférer, soit que, réserve faite des vices de forme et de procédure dont il serait entaché, ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date. 3. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus d'abroger un acte réglementaire illégal réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour l'autorité compétente, de procéder à l'abrogation de cet acte afin que cessent les atteintes illégales que son maintien en vigueur porte à l'ordre juridique. Il s'ensuit que lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation du refus d'abroger un acte réglementaire, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier la légalité de l'acte réglementaire dont l'abrogation a été demandée au regard des règles applicables à la date de sa décision. 4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 153-19 du code de l'urbanisme : " L'abrogation d'un plan local d'urbanisme est prononcée par l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ou par le conseil municipal après enquête publique menée dans les formes prévues par le chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement. / (...). " En vertu des dispositions combinées des articles L. 2121-10 et L. 5211-1 du code général des collectivités territoriales, toute convocation du conseil communautaire est faite par son président et indique les questions portées à l'ordre du jour. Il résulte de ces dispositions combinées que, si l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale est seul compétent pour abroger tout ou partie du plan local d'urbanisme intercommunal, c'est au président de cet établissement public qu'il revient d'inscrire cette question à l'ordre du jour d'une réunion de l'organe délibérant. Par suite, le président de l'établissement public a compétence pour rejeter une demande tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme intercommunal ou de certaines de ses dispositions. Toutefois, il ne peut légalement prendre une telle décision que si les dispositions dont l'abrogation est sollicitée sont elles-mêmes légales. Dans l'hypothèse inverse, en effet, il est tenu d'inscrire la question à l'ordre du jour de l'organe délibérant, pour permettre à celui-ci, seul compétent pour ce faire, de prononcer l'abrogation des dispositions illégales. 5. Par suite, le moyen tiré de ce que le président de la communauté de communes Terre d'Auge n'était pas compétent pour rejeter la demande de la société Hesselmans Beheer BV tendant à ce que soit inscrite à l'ordre du jour du conseil communautaire la question de l'abrogation partielle du plan local d'urbanisme intercommunal doit être écarté. 6. En deuxième lieu, si, dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision refusant d'abroger un acte réglementaire, la légalité des règles fixées par celui-ci, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées, il n'en va pas de même des conditions d'édiction de cet acte, les vices de forme et de procédure dont il serait entaché ne pouvant être utilement invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux. 7. Il suit de là que la société requérante ne peut utilement invoquer, à l'appui de sa demande d'annulation du refus opposé par le président de la communauté de communes Terre d'Auge, l'insuffisante motivation du rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal de la communauté de communes. 8. En dernier lieu, il est de la nature de toute réglementation d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes, ainsi que des zones inconstructibles. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts. 9. En vertu de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme définit notamment " les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques " et " fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain ". En vertu de l'article L. 151-9 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 151-22 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". L'article R. 151-23 du même code précise : " Peuvent être autorisées, en zone A : / 1°-Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime ; / 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci. " 10. Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. 11. Il ressort du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme intercommunal litigieux que les auteurs de ce plan se sont fixés pour objectif, notamment, " d'affirmer la place de l'activité agricole, de sa diversité et de sa qualité, comme l'un des vecteurs privilégiés pour le maintien de la qualité du paysage ", de " favoriser le dynamisme de l'activité agricole locale " et, surtout, " de maintenir la vocation agricole de [leur] territoire " par une réduction importante de la consommation foncière par extension ainsi que par la limitation de l'étalement urbain. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles de la société Hesselmans Beheer BV, d'une surface de plus de 5 hectares, sont situées à l'ouest du bourg de Bourgeauville, en dehors des parties urbanisées de la commune. Ce tènement, qui supporte une demi-douzaine de constructions, dont deux maisons d'habitation, une piscine et un terrain de tennis concentrés au nord-ouest, ainsi qu'une autre maison d'habitation au sud, est pour l'essentiel non bâti et laissé à l'état naturel ou planté d'arbres. Il est bordé à l'ouest par une zone boisée, classée en zone N (naturelle), au sud et au nord par des parcelles non bâties à usage de prairie ou mises en culture ainsi qu'à l'est par des parcelles faiblement bâties, classées, comme les parcelles litigieuses, en zone A1 (agricole). Si la partie nord-est du tènement est limitrophe d'une frange faiblement urbanisée du bourg de Bourgeauville, classée en zone UD4, c'est-à-dire en " zone urbaine aérée à vocation principale d'habitat ", les rares constructions de ce tènement sont séparées de cette frange du bourg par la vaste parcelle no 210, qui ne comporte aucune construction ni installation, à l'exception d'un court de tennis. Si la société requérante soutient, en se fondant sur une cartographie peu lisible des " terres à enjeux agricoles ", annexée au rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal, que les parcelles qu'elle détient ne présenteraient en elles-mêmes " aucun enjeu agricole ", il ne ressort pas des pièces du dossier que ces terres, pour l'essentiel non bâties et laissées à l'état naturel ou plantées d'arbres, seraient dépourvues de tout potentiel agronomique, biologique ou économique pour un usage agricole. En tout état de cause, ces parcelles, en dépit de leur relative proximité du bourg, s'insèrent dans un vaste secteur à dominante agricole, qui inclut notamment une exploitation agricole limitrophe du tènement en sa partie sud. Dès lors, au regard du parti d'aménagement des auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal, de l'emplacement et de la configuration des parcelles en cause, le classement de celles-ci en zone A1 n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, alors même qu'elles comportent quelques habitations, qu'elles sont desservies par les réseaux publics et qu'elles faisaient antérieurement l'objet d'un classement en zone NB assorti de moindres restrictions quant à leur constructibilité. 12. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la communauté de communes Terre d'Auge, que la société Hesselmans Beheer BV n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la société Hesselmans Beheer BV, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées. Sur les frais liés au litige : 14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Terre d'Auge, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Hesselmans Beheer BV demande au titre des frais exposés par elle à l'occasion du litige soumis au juge. 15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Hesselmans Beheer BV la somme de 1 500 euros à verser à la communauté de communes Terre d'Auge au titre des frais liés à l'instance. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la société Hesselmans Beheer BV est rejetée. Article 2 : La société Hesselmans Beheer BV versera à la communauté de communes Terre d'Auge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Hesselmans Beheer BV et à la communauté de communes Terre d'Auge. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Buffet, présidente de chambre, - Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure, - M. Bréchot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. Le rapporteur, F.-X. BréchotLa présidente, C. Buffet La greffière, A. Lemée La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 22NT00934
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. C... B... et Mme A... B... ont chacun demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les arrêtés du 23 mai 2022 par lesquels le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé. Par un jugement n° 2204372, 2204373 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Lyon a joint ces demandes et les a rejetées. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 12 janvier2023, M. et Mme B..., représentés par Me Vernet, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement et les arrêtés du préfet du Rhône du 23 mai 2022 ; 2°) d'enjoindre au préfet du Rhône à titre principal, de leur délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de leur situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ; 3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Ils soutiennent que : - le refus de titre de séjour opposé à M. B... méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; - les refus de titre de séjour sont entachés d'un défaut de motivation, d'un défaut d'examen particulier et d'une erreur de fait ; ils sont entachés d'une erreur de droit en ce qui concerne leur demande d'admission exceptionnelle au séjour ; ils méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions des articles L. 423-3 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; - les obligations de quitter le territoire français sont privées de base légale par suite de l'illégalité des décisions portant refus de titres de séjour ; elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; la mesure d'éloignement prise à l'encontre de M. B... méconnaît le 9°de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - les décisions fixant le pays de renvoi sont privées de base légale par suite de l'illégalité des décisions précédentes. La requête M. et Mme B... a été communiquée à la préfète du Rhône qui n'a pas produit d'observations. M. et Mme B... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision commune du 7 décembre 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - et les observations de Me Lule, substituant Me Vernet, pour M. et Mme B... ; Considérant ce qui suit : 1. M. et Mme B..., de nationalité albanaise, sont entrés en France le 24 avril 2018, accompagnés de leurs deux enfants. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 29 juin 2018, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 24 septembre 2019. M. B... a sollicité, le 9 octobre 2019, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, son épouse ayant sollicité, le même jour, son admission au séjour sur le fondement du 7° du même article en qualité d'accompagnante de son conjoint malade. Une carte de séjour temporaire, valide du 7 septembre au 6 décembre 2020 lui a été délivrée, son épouse ayant bénéficié dans le même temps d'une autorisation provisoire de séjour. Puis le préfet du Rhône, saisi de demandes de renouvellement de ces titres, a, par décisions du 23 mai 2022, refusé d'y faire droit, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 16 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes d'annulation de ces arrêtés. Sur la légalité des refus de titres de séjour : 2. Les refus de titre de séjour attaqués comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement des décisions qu'ils contiennent. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions doit être écarté. Il n'apparaît pas que le préfet du Rhône aurait entaché ses décisions d'un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de M. et Mme B.... 3. Si M. B... soutient que la décision attaquée, faute de tenir compte de ce que son contrat de travail à durée déterminée, par un avenant en date du 25 mars 2022, a été transformé en contrat de travail à durée indéterminée, et de ce que le nombre d'heures travaillées a augmenté, et de ce qu'il a transmis ce contrat à la préfecture par lettre recommandé avec accusé de réception du 10 mai 2022, serait entachée d'une erreur de fait, il n'apparaît pas que ces circonstances auraient eu une incidence sur le sens de cette décision, notamment l'appréciation que le préfet a pu porter sur le motif exceptionnel lié à sa situation professionnelle. Par suite, le moyen ainsi articulé ne pourra qu'être écarté. 4. M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir qu'en l'espèce, le préfet du Rhône aurait entaché ses décisions d'un défaut d'examen, constitutif d'une erreur de droit, en n'examinant pas la possibilité de les admettre au séjour à titre exceptionnel au regard de leur vie privée et familiale en France alors que, après avoir examiné leur situation, le préfet a retenu qu'aucune mesure dérogatoire n'était justifiée et que, bien que n'étant pas saisi d'une demande sur ce fondement, il a examiné la possibilité de les admettre au séjour à titre exceptionnel au titre du travail et a examiné leur vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 5. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / (...) ". 6. Il ressort des pièces du dossier que la décision rejetant la demande de titre de séjour de M. B... a été prise notamment au vu d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 14 juillet 2022, selon lequel si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, et que son état de santé lui permet de voyager sans risque. S'il fait valoir qu'il a bénéficié précédemment d'une autorisation provisoire de séjour en raison de son état de santé, alors considéré d'une exceptionnelle gravité et pour lequel il ne pouvait pas recevoir un traitement approprié dans son pays d'origine, son état de santé avait évolué à la date de la décision en litige. Il ne verse aucun élément au dossier de nature à remettre en cause le sens de l'avis de l'OFII, notamment à propos des conséquences en l'absence de prise en charge. Par suite, et faute d'éléments de nature à établir la gravité de la pathologie dont souffre l'intéressé, c'est sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé. 7. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de l'article L. 423-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges. 8. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État. " 9. Compte tenu de leur vie privée et familiale, qui peut se reconstituer en Albanie, et de leurs expériences professionnelles, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'admission au séjour de M. et Mme B... répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels qu'ils auraient fait valoir. Ils ne sont, dès lors, pas fondés à soutenir que les décisions attaquées seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En ce qui concerne les obligations de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours : 10. Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, ils ne sont pas fondés à invoquer l'illégalité des refus de titres de séjour à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les obligations de quitter le territoire français et les décisions fixant le délai de départ volontaire. 11. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". 12. Pour les motifs précédemment exposés au point 6, la décision obligeant l'intéressé à quitter le territoire français ne méconnaît pas les dispositions citées au point précédent. 13. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges. En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination : 14. Compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, les requérants ne sont pas fondés à invoquer l'illégalité des obligations de quitter le territoire français à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions fixant le pays de destination. 15. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Leur requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D..., à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète du Rhône. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, C. Djebiri Le président, V.-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 23LY00152 al
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 12 avril 2022 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination. Par un jugement n° 2201178 du 15 juillet 2022, la magistrate désignée au tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Clemang, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ; 2°) d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : Sur le refus de titre de séjour : - la décision a été prise en méconnaissance de l'article L. 443-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il remplit les conditions posées par l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ; - l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile été méconnu ; Sur l'obligation de quitter le territoire français : - elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour. La requête a été communiquée au préfet de Saône-et-Loire qui n'a pas produit de mémoire. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 novembre 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code du travail ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Le rapport de M. Pin, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Selon ses déclarations, M. A..., ressortissant albanais né en 1976, est entré en France le 29 octobre 2018, avec ses épouse et leurs deux enfants alors mineurs, afin d'y solliciter le bénéfice du statut de réfugié, qui lui a été refusé par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 21 juin 2019, confirmée le 15 novembre 2019 par la Cour nationale du droit d'asile. Il a bénéficié d'autorisations provisoires de séjour en qualité d'accompagnant d'enfant malade valables du 9 janvier 2020 au 27 janvier 2022. Le 2 juin 2021, il a sollicité son admission au séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 12 avril 2022, le préfet de Saône-et-Loire a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 15 juillet 2022 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la légalité du refus de titre de séjour : 2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France ou du livre II, tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois doit être titulaire de l'un des documents de séjour suivants : (...) 3° Une carte de séjour temporaire ; (...) 8° L'autorisation provisoire de séjour prévue aux articles L. 425-4, L. 425-10 ou L. 426-21 ". Aux termes de l'article L. 443-6 de ce code : " L'étranger qui sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle sur un autre fondement que celui au titre duquel lui a été délivré la carte de séjour ou le visa de long séjour mentionné au 2° de l'article L. 411-1, se voit délivrer le titre demandé lorsque lesconditions de délivrance, correspondant au motif de séjour invoqué, sont remplies, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ". Aux termes de l'article L. 425-10 du même code : " Les parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions prévues à l'article L. 425-9, ou l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, se voient délivrer, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, une autorisation provisoire de séjour d'une durée maximale de six mois. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour (...) ". En vertu de l'article L. 421-1 du même code : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. (...) ". Selon l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; (...) ". 4. Il est constant que M. A... n'était pas titulaire d'un visa de long séjour lors de son entrée sur le territoire français. Si M. A... a été muni d'autorisations provisoires de séjour qui lui ont été délivrées en raison de l'état de santé de son fils mineur, sur le fondement de l'article L. 412-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'a, en revanche, pas bénéficié d'une carte de séjour temporaire au sens de l'article L. 411-1 du même code, de sorte qu'il ne peut utilement se prévaloir de l'article L. 443-6 de ce code. Dès lors, le préfet de Saône-et-Loire a pu légalement refuser de délivrer à M. A... le titre de séjour qu'il sollicitait sur le fondement de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif qu'il n'a pas produit de visa de long séjour à l'appui de sa demande. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". 6. Si M. A... fait valoir qu'eu égard à l'état de santé de son fils majeur, la cellule familiale doit se maintenir en France, il ressort des pièces du dossier que celui-ci a fait l'objet d'un refus de délivrance d'un titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Le requérant n'établit pas, par les pièces médicales qu'il produit, que son fils ne pourrait pas bénéficier des soins nécessités par son état de santé en Albanie, alors que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé, par un avis du 5 janvier 2022, que si l'état de santé du fils de M. A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut de traitement pouvait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Albanie dont il est originaire, bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans ce pays, à destination duquel il peut voyager sans risque. Au surplus, M. A... n'établit pas que sa présence ainsi que celle de son épouse est indispensable aux côtés de son fils majeur. Si le requérant soutient qu'il a bénéficié, de même que son épouse, de contrats de travail à durée déterminée, il ne démontre pas une intégration socio-professionnelle particulière en France, où il ne justifie d'aucune attache et où son épouse se trouve également en situation irrégulière. Par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la brièveté du séjour du requérant en France, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a, ainsi, méconnu ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ". 8. Eu égard aux éléments exposés au point 6, et notamment à la circonstance qu'il n'est pas démontré que l'état de santé du fils majeur de M. A... nécessiterait le maintien de celui-ci sur le territoire national, le préfet de Saône-et-Loire a pu légalement estimer que le requérant ne justifiait pas de l'existence de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires, au sens l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, par suite, lui refuser l'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de ces dispositions. Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français : 9. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. 10. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Pruvost, président de chambre, Mme Courbon, présidente-assesseure, M. Pin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 juin 2023. Le rapporteur, F.-X. Pin Le président, D. PruvostLa greffière, N. Lecouey La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 22LY03789
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler, d'une part, la délibération du 5 mars 2020 par laquelle la communauté de communes Terre d'Auge a approuvé son plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi), d'autre part, la délibération du 7 octobre 2021 par laquelle la communauté de communes Terre d'Auge a approuvé la modification simplifiée no 1 de son plan local d'urbanisme intercommunal. Par un jugement no 2001719 du 24 janvier 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 25 mars et 25 juillet 2022, M. A..., représenté par Me Bardoul, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de mettre à la charge de la communauté de communes Terre d'Auge une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens. Il soutient que : - le jugement attaqué a omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 151-23 du code de l'urbanisme ; - la délibération du " 9 mars 2021 " est entachée d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article L. 153-16 du code de l'urbanisme ; - elle est entachée d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme ; - le dossier d'enquête publique était incomplet, en méconnaissance des dispositions des articles R. 153-8 et R. 123-8 du code de l'urbanisme ; - des modifications ont été illégalement opérées après l'arrêt du projet de plan local d'urbanisme intercommunal, postérieurement à l'enquête publique ; - le classement en zone agricole de la parcelle cadastrée section D no 138, à Saint-Philbert-des-Champs, est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; - le classement en zone 1AU de la parcelle d'assiette de l'orientation d'aménagement et de programmation du secteur A de Saint-Philbert-des-Champs est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et est incompatible avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale Nord Pays d'Auge ainsi qu'avec le schéma d'aménagement et de gestion des eaux applicable ; - la délibération " du 15 octobre 2021 " est illégale dès lors que ses auteurs ne pouvaient pas légalement avoir recours à la procédure de modification simplifiée. Par des mémoires en défense, enregistrés les 13 mai et 26 juillet 2022, la communauté de communes Terre d'Auge, représentée par la SELARL Concept Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés et que, en tout état de cause, une régularisation serait possible sur le fondement de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Bréchot, - les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique, - les observations de Me Bardoul, représentant M. A..., et les observations de Me Delaunay, substituant Me Agostini, représentant la communauté de communes Terre d'Auge. Une note en délibéré, présentée par M. A..., a été enregistrée le 8 juin 2023. Considérant ce qui suit : 1. Par une délibération du 3 décembre 2015, le conseil communautaire de la communauté de communes Terre d'Auge a prescrit l'élaboration de son plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) applicable au territoire de ses 31 communes membres. À la suite de l'extension du périmètre de la communauté de communes, par arrêtés du préfet du Calvados du 28 décembre 2015 et du 7 décembre 2017, portant le nombre de communes membres à, respectivement, 35 puis 45, le conseil communautaire a, par délibérations du 6 avril 2017 et du 11 janvier 2018, prescrit l'élaboration de son plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) et fixé les modalités de la concertation. Le conseil communautaire a débattu, le 6 décembre 2018, des orientations du projet d'aménagement et de développement durable du futur plan. Le projet de plan local d'urbanisme intercommunal a été arrêté par une délibération du même conseil communautaire du 27 juin 2019. Une enquête publique s'est tenue sur ce projet du 28 octobre au 29 novembre 2019. Par une délibération du 5 mars 2020, le conseil communautaire de la communauté de communes Terre d'Auge a approuvé son plan local d'urbanisme intercommunal. Par une délibération du 7 octobre 2021, le conseil communautaire de la communauté de communes a approuvé la modification no 1 de ce plan. M. A... relève appel du jugement du 24 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux délibérations. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Il ne ressort pas des pièces du dossier de première instance que M. A... a invoqué le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 151-23 du code de l'urbanisme. Dès lors, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif de Caen a omis de se prononcer sur ce moyen ne peut qu'être écarté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la délibération du 5 mars 2020 : S'agissant des moyens de légalité externe : 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 153-16 du code de l'urbanisme : " Le projet de plan arrêté est soumis pour avis : / 1° Aux personnes publiques associées à son élaboration mentionnées aux articles L. 132-7 et L. 132-9 ; / (...). " Figurent notamment parmi les personnes publiques associées, en vertu de l'article L. 132-7 du même code, les chambres de commerce et d'industrie territoriales et les chambres de métiers, ainsi que, en vertu de l'article L. 132-9 de ce code, l'établissement public chargé de l'élaboration, de la gestion et de l'approbation du schéma de cohérence territoriale lorsque le territoire objet du plan est situé dans le périmètre de ce schéma. 4. Il ressort des pièces du dossier que les chambres de commerce et d'industrie territoriales, les chambres de métiers et le syndicat mixte du schéma de cohérence territoriale Nord Pays d'Auge ont, par des courriers datés du 28 juin 2019, été consultés sur le projet de plan local d'urbanisme arrêté le 27 juin 2019. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 153-16 du code de l'urbanisme doit être écarté. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 153-8 du code de l'urbanisme : " Le dossier soumis à l'enquête publique est composé des pièces mentionnées à l'article R. 123-8 du code de l'environnement et comprend, en annexe, les différents avis recueillis dans le cadre de la procédure. / (...). " En vertu de l'article R. 123-8 du même code, le dossier soumis à l'enquête publique " comprend au moins : / (...) / 3° La mention des textes qui régissent l'enquête publique en cause et l'indication de la façon dont cette enquête s'insère dans la procédure administrative relative au projet, plan ou programme considéré, ainsi que la ou les décisions pouvant être adoptées au terme de l'enquête et les autorités compétentes pour prendre la décision d'autorisation ou d'approbation ; / 4° Lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête, les avis émis sur le projet, plan, ou programme ; / (...). " 6. D'une part, il ressort des pièces du dossier, en particulier d'une attestation non contestée du président de la communauté de communes Terre d'Auge, que le dossier soumis à l'enquête publique comprenait notamment la liste des textes régissant cette enquête ainsi que l'arrêté du 4 octobre 2019 prescrivant l'enquête publique sur le projet de plan local d'urbanisme intercommunal. Ce dernier arrêté comportait l'indication de la façon dont cette enquête s'insérait dans la procédure administrative relative au projet de plan local d'urbanisme intercommunal ainsi que les décisions qui pourraient être adoptées par le conseil communautaire Terre d'Auge au terme de l'enquête. 7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de la commission d'enquête, que le dossier soumis à l'enquête publique comprenait les avis émis par les personnes publiques associées ainsi que l'avis émis sur le projet de plan local d'urbanisme intercommunal par la mission régionale d'autorité environnementale le 23 octobre 2019. Le rapport de la commission d'enquête précisait en outre, en page 33, les personnes publiques associées qui n'avaient pas répondu à la demande d'avis qui leur avait été adressée sur le projet de plan local d'urbanisme intercommunal. 8. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme doit être écarté. 9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 153-14 du code de l'urbanisme : " L'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou le conseil municipal arrête le projet de plan local d'urbanisme. " Les articles L. 153-16 et suivants du même code prévoient que le projet de plan arrêté est soumis pour avis, à titre obligatoire ou à leur demande, à diverses personnes publiques et autorités administratives. Aux termes de l'article L. 153-19 du code de l'urbanisme : " Le projet de plan local d'urbanisme arrêté est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou le maire. " En vertu des dispositions de l'article R. 153-8 du même code, citées au point 5 du présent arrêt, le dossier soumis à l'enquête publique comprend, en annexe, les différents avis recueillis dans le cadre de la procédure. 10. Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'il appartient à une commune ou à un établissement public de coopération intercommunale souhaitant modifier son projet de plan local d'urbanisme avant l'ouverture de l'enquête publique, notamment pour tenir compte de l'avis rendu par une personne publique associée à son élaboration, de consulter à nouveau l'ensemble des personnes publiques associées, afin que le dossier soumis à l'enquête publique comporte des avis correspondant au projet modifié. Toutefois, l'omission de cette nouvelle consultation n'est de nature à vicier la procédure et à entacher d'illégalité la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information du public ou si elle a été de nature à exercer une influence sur cette décision. 11. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 123-14 du code de l'environnement : " I. - Pendant l'enquête publique, si la personne responsable du (...) plan (...) estime nécessaire d'apporter à celui-ci (...) des modifications substantielles, l'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête peut, après avoir entendu le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête, suspendre l'enquête pendant une durée maximale de six mois. (...) / II. - Au vu des conclusions du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête, la personne responsable du (...) plan (...) peut, si elle estime souhaitable d'apporter à celui-ci des changements qui en modifient l'économie générale, demander à l'autorité organisatrice d'ouvrir une enquête complémentaire portant sur les avantages et inconvénients de ces modifications pour le projet et pour l'environnement. (...). " 12. Aux termes de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " À l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : / 1° L'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à la majorité des suffrages exprimés après que les avis qui ont été joints au dossier, les observations du public et le rapport du commissaire ou de la commission d'enquête aient été présentés lors d'une conférence intercommunale rassemblant les maires des communes membres de l'établissement public de coopération intercommunale ; / (...). " 13. Il résulte de ces dispositions que le projet de plan ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations de la commission d'enquête, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête. 14. D'une part, en se bornant à soutenir que l'analyse des annexes à la délibération contestée " fait apparaître de nombreuses modifications postérieures à l'arrêt du projet ", les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir que ces modifications, motivées par les avis émis par les personnes publiques associées, ont été apportées au projet de plan avant l'ouverture de l'enquête publique, ni, en tout état de cause, que l'omission d'une nouvelle consultation de l'ensemble des personnes publiques associées sur le projet modifié aurait pu, en l'espèce, avoir pour effet de nuire à l'information du public ou été de nature à exercer une influence sur la délibération contestée. 15. D'autre part, en se bornant à soutenir que " les modifications apportées postérieurement à l'enquête publique sont récapitulées, de manière imprécise, dans l'annexe 1 à la délibération " contestée, les requérants n'établissent ni même n'allèguent que ces modifications ne procédaient pas de l'enquête publique et qu'elles remettaient en cause l'économie générale du projet. 16. Dès lors, le moyen tiré de ce que des modifications auraient été illégalement apportées au projet de plan local d'urbanisme intercommunal après l'arrêt de ce projet de plan ou postérieurement à l'enquête publique doit être écarté. 17. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'une conférence intercommunale rassemblant les maires des communes membres de la communauté de communes Terre d'Auge, tous convoqués par un courriel de cette dernière du 20 décembre 2019, s'est tenue le 9 janvier 2020, au cours de laquelle le rapport de la commission d'enquête sur le projet de plan local d'urbanisme intercommunal a été présenté. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme doit, dès lors, être écarté. S'agissant des moyens de légalité interne : 18. En premier lieu, il est de la nature de toute réglementation d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes, ainsi que des zones inconstructibles. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts. 19. Aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". 20. Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. 21. Il ressort du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme intercommunal litigieux que les auteurs de ce plan se sont fixés pour objectif notamment " d'affirmer la place de l'activité agricole, de sa diversité et de sa qualité, comme l'un des vecteurs privilégiés pour le maintien de la qualité du paysage ", de " favoriser le dynamisme de l'activité agricole locale " et, surtout, " de maintenir la vocation agricole de [leur] territoire " par une réduction importante de la consommation foncière par extension, laquelle devra être réduite de 50 %, pour la période 2019-2035, par rapport à la consommation foncière annuelle de la période 2005-2015. Le projet d'aménagement et de développement durables indique également que " le PLUI vise à minima, une réduction par deux des zones à urbaniser des documents d'urbanisme en vigueur et leur recentrage sur les pôles du territoire. " Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section D no 138, sur le territoire de la commune de Saint-Philbert-des-Champs, est un terrain d'une grande superficie faisant l'objet d'une exploitation agricole. Si cette parcelle jouxte à l'est le bourg de Saint-Philbert-des-Champs, elle en est séparée par une voie publique et est bordée à l'ouest, au sud et au nord-est par des terres agricoles, un verger et une exploitation agricole, ainsi qu'au nord-ouest par un compartiment de quatre parcelles supportant une urbanisation diffuse, elle-même séparée du bourg et classée en zone agricole. Dans ces conditions, alors même que la parcelle en cause était classée en zone urbaine constructible dans le précédent plan local d'urbanisme, les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal litigieux n'ont pas entaché leur décision d'une erreur manifeste d'appréciation en la classant en zone agricole. 22. En second lieu, aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites "zones AU". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. " 23. Le plan local d'urbanisme intercommunal litigieux comporte une orientation d'aménagement et de programmation relative au secteur A de Saint-Philbert-des-Champs, applicable aux parcelles cadastrées section B nos 360, 480 et 481. La partie sud de ce compartiment de parcelles est classée en zone 1 AUc, c'est-à-dire en zone à urbaniser de moyenne densité à vocation principale d'habitat. Les principes fixés par cette orientation sont, dans cette zone, d'accueillir une nouvelle offre de logements à dominante individuelle respectant une densité brute de dix logements par hectare minimum, de desservir le projet par le chemin de la Voie de la fontaine d'Anjou et d'y créer un espace de convivialité en lien avec les équipements sportifs de la commune situés au nord-ouest. La partie nord de la parcelle cadastrée section B no 481 est classée en zone Nmc, c'est-à-dire en zone naturelle dédiée à des mesures compensatoires. Il est prévu de mettre en place une frange paysagère de type haies bocagères ou talus plantés autour de cette zone Nmc, à l'exception de sa limite sud. 24. Il ressort des pièces du dossier que les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal ont cherché à limiter l'impact de ce plan sur les zones humides par des mesures d'évitement, conduisant à relocaliser cinq secteurs de projets d'urbanisation, et des mesures de réduction consistant à réduire l'emprise des projets, qui ont permis d'éviter la destruction de 12 hectares de zone humide. Pour les 17,3 hectares de zones humides impactées par le plan, qui concernent essentiellement des secteurs dont le processus d'urbanisation était déjà engagé lors de l'élaboration du plan, des mesures de compensation ont été intégrées dans ce dernier. S'agissant de l'orientation d'aménagement et de programmation relative au secteur A de Saint-Philbert-des-Champs, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'étude de prédisposition des zones humides et de l'évaluation environnementale du plan local d'urbanisme intercommunal litigieux, que la superficie de zone humide à aménager dans le cadre de cette orientation d'aménagement et de programmation a été réduite de moitié par rapport à ce qui était prévu initialement. La partie ouest du périmètre de cette orientation d'aménagement et de programmation est ainsi constituée d'une zone humide de 1,59 hectares, dont 0,76 hectares sont destinés à être urbanisés. La réduction du secteur à urbaniser a été associée à la mise en place d'un zonage Nmc destiné à compenser l'atteinte à la zone humide, cette mesure de compensation devant prendre place immédiatement au nord de la zone à urbaniser, sur une parcelle agricole en continuité directe de la zone humide existante. Enfin, l'ouverture à l'urbanisation de cette zone 1 AUc est subordonnée à la réalisation d'une étude de fonctionnalité des secteurs humides et à la mise en place d'un projet de compensation de la zone humide impactée cohérent avec les espaces de compensations définis par le plan. Dès lors, les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en classant en zone 1 AUc une partie du terrain d'assiette de l'orientation d'aménagement et de programmation du secteur A de Saint-Philbert-des-Champs, laquelle n'est, en tout état de cause, pas incompatible avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale Nord Pays d'Auge ni avec le schéma d'aménagement et de gestion des eaux applicable. 25. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 5 mars 2020 de la communauté de communes Terre d'Auge. En ce qui concerne la délibération du 7 octobre 2021 : 26. Aux termes de l'article L. 153-36 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Sous réserve des cas où une révision s'impose en application de l'article L. 153-31, le plan local d'urbanisme est modifié lorsque l'établissement public de coopération intercommunale ou la commune décide de modifier le règlement, les orientations d'aménagement et de programmation ou le programme d'orientations et d'actions. " Aux termes de l'article L. 153-41 du même code : " Le projet de modification est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou le maire lorsqu'il a pour effet : / 1° Soit de majorer de plus de 20 % les possibilités de construction résultant, dans une zone, de l'application de l'ensemble des règles du plan ; / 2° Soit de diminuer ces possibilités de construire ; / 3° Soit de réduire la surface d'une zone urbaine ou à urbaniser ; / 4° Soit d'appliquer l'article L. 131-9 du présent code. " Enfin, aux termes de l'article L. 153-45 du même code : " La modification peut être effectuée selon une procédure simplifiée : / 1° Dans les cas autres que ceux mentionnés à l'article L. 153-41 ; / 2° Dans les cas de majoration des droits à construire prévus à l'article L. 151-28 ; / 3° Dans le cas où elle a uniquement pour objet la rectification d'une erreur matérielle. / (...) ". 27. Il ressort de la délibération du 15 avril 2021, prescrivant le lancement de la procédure de révision simplifiée no 1 du plan local d'urbanisme intercommunal, que celle-ci avait pour objet de " permettre le développement des agriculteurs sur l'ensemble du territoire en supprimant la disposition suivante : pour les sous-secteurs A1 et Nh1 "les toitures des constructions à vocation agricole auront une pente d'au moins 25° minimum" " et de " corriger l'erreur matérielle du règlement écrit liée à la zone Ne qui omet d'autoriser les équipements d'intérêt collectif et services publics et plus précisément les "locaux et bureaux accueillant du public des administrations publiques et assimilés" et les "locaux techniques et industriels des administrations publiques et assimilés" au sein de la zone Ne ". 28. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la première des deux modifications apportées au plan local d'urbanisme intercommunal par la délibération du 7 octobre 2021 relèverait d'un des cas mentionnés à l'article L. 153-41 du code de l'urbanisme, et notamment qu'elle avait pour effet de majorer de plus de 20 % les possibilités de construction résultant, dans les zones A1 et Nh1, de l'application de l'ensemble des règles du plan. Quant à la seconde modification apportée par cette même délibération, à supposer même qu'elle ne puisse être regardée comme la rectification d'une erreur matérielle au sens du 3° de l'article L. 153-45 du code de l'urbanisme, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'elle relèverait d'un des cas mentionnés à l'article L. 153-41 du code de l'urbanisme. Dès lors, le moyen tiré de ce que les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal ne pouvaient légalement modifier ce plan par la procédure de révision simplifiée doit être écarté. 29. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 7 octobre 2021 de la communauté de communes Terre d'Auge. Sur les frais liés au litige : 30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Terre d'Auge, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui à l'occasion du litige soumis au juge. 31. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme de 1 500 euros à verser à la communauté de communes Terre d'Auge au titre des frais liés à l'instance. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : M. A... versera à la communauté de communes Terre d'Auge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la communauté de communes Terre d'Auge. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Buffet, présidente de chambre, - Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure, - M. Bréchot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. Le rapporteur, F.-X. BréchotLa présidente, C. Buffet La greffière, A. Lemée La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 22NT00939
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 3 février 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 15 octobre 2020 de l'autorité consulaire française à Fès (Maroc) refusant de lui délivrer un visa de retour, ainsi que cette décision du 15 octobre 2020. Par un jugement no 2104057 du 29 novembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 janvier et 12 juillet 2022, Mme B..., représentée par la SELARL Boezec Caron, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du 3 février 2021 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; 3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de faire délivrer le visa sollicité dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision contestée est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et individuelle ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, d'une erreur de droit et d'une erreur de fait au regard de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Bréchot, - et les observations de Me Boezec, représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ressortissante marocaine née en 1939, titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle valable jusqu'au 12 juillet 2020, s'est rendue au Maroc le 16 novembre 2019. Le 7 octobre 2020, elle a sollicité auprès de l'autorité consulaire française à Fès la délivrance d'un visa de long séjour dit " de retour ". Un refus lui a été opposé par une décision du 15 octobre 2020. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, saisie du recours administratif préalable obligatoire prévu à l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable, a rejeté ce recours par décision du 3 février 2021. Mme B... relève appel du jugement du 29 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de cette décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France. 2. En premier lieu, la décision de refus contestée précise, après avoir cité les articles L. 211-1 et L. 211-2-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elle fait application, que Mme B... ne peut solliciter un visa dit de retour en l'absence de droit au séjour à la date de sa demande de visa, le 7 octobre 2020, sa carte de séjour étant expirée depuis le 12 juillet 2020. Cette décision, qui mentionne les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde, est dès lors suffisamment motivée. 3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commission n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de la requérante, alors même qu'elle fait pas mention de son état de santé ou de ses attaches familiales en France. 4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, recodifié à l'article L. 311-1 du même code : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur (...) ". Aux termes de l'article L. 212-1 du même code, alors en vigueur : " Par dérogation aux dispositions de l'article L. 211-1, les étrangers titulaires d'un titre de séjour (...) sont admis sur le territoire au seul vu de ce titre et d'un document de voyage ". Il résulte de ces dispositions qu'un étranger titulaire d'un titre l'autorisant à séjourner en France peut quitter le territoire national et y revenir, tant que ce titre n'est pas expiré, en se voyant délivrer un " visa de retour ", lequel présente le caractère d'une information destinée à faciliter les formalités à la frontière. 5. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors applicable : " Entre la date d'expiration de la carte de séjour pluriannuelle d'une durée de quatre ans mentionnée au premier alinéa de l'article L. 313-18, de la carte de résident ou d'un titre de séjour d'une durée supérieure à un an prévu par une stipulation internationale et la décision prise par l'autorité administrative sur la demande tendant à son renouvellement, dans la limite de trois mois à compter de cette date d'expiration, l'étranger peut également justifier de la régularité de son séjour par la présentation de la carte ou du titre arrivé à expiration. Pendant cette période, il conserve l'intégralité de ses droits sociaux ainsi que son droit d'exercer une activité professionnelle. " 6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... était titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle valable du 13 juillet 2018 au 12 juillet 2020. Ce document de séjour, délivré au titre de la " vie privée et familiale " pour une durée de deux ans, n'est pas au nombre de ceux énumérés par le deuxième alinéa de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En particulier, contrairement à ce qu'elle soutient, sa carte de séjour pluriannuelle portant la mention " vie privée et familiale ", délivrée sur le fondement du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'était pas un titre de séjour d'une durée supérieure à un an prévu par une stipulation internationale au sens du deuxième alinéa de cet article L. 311-4. Dès lors, Mme B... ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions pour soutenir que son titre de séjour, dont elle n'a au demeurant pas demandé le renouvellement, était encore valable à la date de sa demande de visa, le 7 octobre 2020. Dans ces conditions, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas entaché sa décision d'une erreur de fait et d'une erreur de droit ni fait une inexacte application des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant le visa sollicité au motif que Mme B... ne disposait pas d'un droit au séjour à la date de sa demande de visa. 7. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., âgée de 81 ans à la date de la décision contestée, résidait en France depuis 2013, d'abord en situation irrégulière puis sous couvert d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " depuis 2017, et qu'elle était prise en charge par une de ses filles, de nationalité française, à Rouen, où réside également une autre de ses filles française, tandis que sa troisième fille réside à Nantes. Si elle soutient être retournée au Maroc " courant 2020 " afin d'y " gérer certaines difficultés, notamment familiales " pour " y rester deux ou trois mois au maximum ", il ressort du tampon de sortie de son passeport qu'elle a quitté la France pour le Maroc dès le 19 novembre 2019 et qu'elle s'y trouvait depuis quatre mois au moment de la fermeture des frontières, à la fin du mois de mars 2020, en raison de la crise sanitaire liée à la pandémie de coronavirus. S'il est vrai que l'expiration de sa carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", le 12 juillet 2020, l'a empêchée de revenir en France malgré la réouverture des frontières entre la France et le Maroc ce même mois et l'acquisition d'un billet d'avion pour Paris le 27 juillet 2020, il ressort des pièces du dossier que Mme B... n'est pas dépourvue d'attaches familiales au Maroc, où résident quatre de ses enfants et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 74 ans. Par ailleurs, si son état de santé nécessite un suivi et un traitement médical régulier, les documents produits ne suffisent pas à établir qu'elle serait dans l'impossibilité de bénéficier d'un tel traitement dans son pays d'origine ou de prendre en charge, avec l'aide éventuelle de ses enfants, le coût de ce traitement d'environ 800 dirhams marocains, ainsi que cela ressort des factures mensuelles d'une pharmacie marocaine. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que ses quatre enfants résidant au Maroc seraient dans l'incapacité d'assurer la prise en charge de leur mère au quotidien. Dans ces conditions, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer à Mme B... le visa sollicité. 8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Il suit de là que la requête de Mme B... doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Buffet, présidente de chambre, - Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure, - M. Bréchot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. Le rapporteur, F.-X. BréchotLa présidente, C. Buffet La greffière, A. Lemée La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 22NT00266
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 18 août 2022 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination Par un jugement n° 2206172 du 3 février 2023, le tribunal a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 10 mars 2023, le préfet de l'Isère demande à la cour d'annuler ce jugement. Il soutient que c'est à tort que le tribunal a annulé pour méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'arrêté du 18 août 2022. Par un mémoire enregistré le 31 mai 2023, M. A..., représenté par Me Adja Oke, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'État une somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - et les observations de Me Adja Oke pour M. A... ; Considérant ce qui suit : 1. Le préfet de l'Isère relève appel du jugement du 3 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 18 août 2022 rejetant la demande de titre de séjour présentée par M. A..., ressortissant sénégalais, et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges : 2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui est entré en France en 2017, se prévaut de sa relation avec une compatriote titulaire d'une carte pluriannuelle valable jusqu'au 27 décembre 2023, de leur situation professionnelle, de leur mariage en date du 6 février 2021 et de la naissance de leur enfant en France le 5 juillet 2021. Il apparaît toutefois que ce mariage et cette naissance étaient très récents à la date de l'arrêté contesté, l'intéressé s'étant par ailleurs maintenu en France de manière irrégulière malgré la fin de validité de son visa, et sans chercher à régulariser sa situation avant février 2022. Par suite, et alors que M. A... a passé la majeure partie de son existence au Sénégal, c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges se sont fondés sur le motif tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention pour annuler l'arrêté litigieux. 4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A.... Sur les autres moyens : 5. L'arrête contesté a été signé par Mme B... C..., attachée, cheffe du bureau du droit au séjour, qui a reçu délégation à cet effet par arrêté du préfet de l'Isère du 26 juillet 2022, publié au recueil des actes administratifs du même jour. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté. 6. Le préfet de l'Isère, qui a notamment rappelé la situation familiale de M. A... ses démarches auprès d'une agence privée d'emploi française et qui n'était pas tenu de reprendre précisément l'ensemble des pièces produites à l'appui de la demande, a énoncé les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige ne serait pas suffisamment motivé. 7. Il ressort de l'arrêté litigieux, ainsi motivé, que le préfet de l'Isère a, contrairement à ce que prétend M. A... préalablement procédé à un examen de sa situation particulière, tant professionnelle que familiale. 8. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., en sa qualité de conjoint d'une ressortissante sénégalaise titulaire d'une carte pluriannuelle, entre dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial alors même qu'il s'est marié après son entrée sur le territoire français. Il ne peut donc utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 9. M. A... n'établit pas que le préfet aurait commis une erreur de fait en retenant qu'il n'a pas réalisé d'effort pour s'insérer alors qu'il a produit trente-quatre bulletins de salaires, ou que cette erreur aurait été déterminante sur le sens de la décision. 10. En l'absence d'autres éléments que ceux qui ont été exposés au point 3 du présent arrêt, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Isère aurait méconnu les stipulations rappelées plus haut de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ni que, faute d'exercice par le préfet de son pouvoir de régularisation, et alors même qu'il n'aurait pas contrefait un titre, le refus de séjour serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation. 11. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A..., qui ne pouvait ignorer la fragilité de sa situation en France, ne pourrait s'installer au Sénégal pays dont tous les membres de la famille ont la nationalité ou, au moins, retourner dans son pays d'origine le temps que soit instruite une éventuelle demande de regroupement familial, rien ne permettant de dire qu'il n'y serait pas éligible. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté. 12. M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour, ni que la décision octroyant un délai de départ volontaire et celle fixant le pays de destination devraient être annulées par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire français. 13. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a annulé son arrêté du 18 août 2022. Les conclusions à fin d'injonction, d'astreinte et celles présentées en première instance sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 2206172 du 3 février 2023 est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. E... A.... Copie en sera adressée au préfet de l'Isère. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, C. DjebiriLe président, V.-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, . N° 23LY00886 2 lc
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Caen, d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 par lequel le président de la région Normandie lui a octroyé un complément indemnitaire au titre de l'année 2019 en tant qu'il a limité ce montant à la somme de 150 euros, et l'arrêté du 15 novembre 2019 par lequel le président de cette région l'a affectée sur des fonctions d'agent d'accueil et de surveillance, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux dirigé contre ces deux décisions, et, d'autre part, de condamner la région à l'indemniser des préjudices financiers qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité fautive dont sont entachés ces arrêtés. Par un jugement n° 2002035 du 19 novembre 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 24 janvier 2022, Mme D..., représentée par Me Desert, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 19 novembre 2021 ; 2°) d'annuler ces arrêtés du président de la région Normandie des 29 octobre et 15 novembre 2019 et de condamner la région Normandie à lui verser une indemnité en réparation de son préjudice financier pour la liquidation de laquelle elle sera renvoyée devant son administration ; 3°) de mettre à la charge de la région Normandie la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - la signataire des arrêtés contestés n'avait pas compétence pour ce faire dès lors que M. A... et Mme C... n'étaient pas absents ou empêchés ; - l'arrêté du 29 octobre 2019 est insuffisamment motivé ; - il est entaché d'une erreur de droit, dès lors que c'est en raison de son placement en congé pour maladie que le montant du complément indemnitaire annuel qui lui a été attribué a été réduit ; - il méconnaît le principe de parité ; - il est entaché d'une erreur d'appréciation ; - l'arrêté du 15 novembre 2019 est entaché d'une erreur d'appréciation, dès lors que le poste auquel il l'affecte n'est pas compatible avec son état de santé ; - les illégalités fautives dont sont entachés les arrêtés contestés lui ouvrent droit à la réparation de son préjudice financier, tenant en particulier à la réduction indue de son traitement en raison de l'attribution d'un logement de fonction qu'elle n'occupe pas, pour la liquidation duquel elle devra être renvoyée devant son administration. Par un mémoire en défense enregistré 12 août 2022, la région Normandie, représentée par Me Cuzzi, conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration, - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Catroux, - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - et les observations de Me Duvernois, représentant la région Normandie. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... D..., agent technique territorial principal de 2ème classe, exerce ses fonctions au sein du lycée .... Par un arrêté du 29 octobre 2019, le président de la région Normandie a attribué à Mme D... un complément indemnitaire annuel (CIA) au titre de l'année 2019 d'un montant de 150 euros. Par un arrêté du 15 novembre 2019, le président de cette région l'a affectée sur des fonctions d'agent d'accueil et de surveillance au sein du lycée ... à compter du 18 novembre 2019. Par un courrier du 3 mars 2020, reçu le 9 mars 2020, Mme D... a formé, auprès du président de la région Normandie, un recours gracieux contre ces deux arrêtés et a sollicité le versement du reliquat de CIA qui, selon elle, lui était dû, ainsi que le remboursement des sommes prélevées par la région au titre du logement qui lui a été attribué sur ce poste pour nécessité absolue de service. Mme D... a demandé au tribunal administratif de Caen, d'une part, d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2019 et l'arrêté du 29 octobre 2019, en tant qu'il a limité à un montant de 150 euros son CIA au titre de l'année 2019, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux et, d'autre part, de condamner la région Normandie à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis. Par un jugement du 19 novembre 2021, le tribunal a rejeté ces demandes. Mme D... relève appel de ce jugement. 2. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire des arrêtés contestés, que Mme D... reprend en appel, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...) ". 4. Les décisions attribuant un complément indemnitaire annuel au titre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel institué par la délibération du 17 décembre 2018 du conseil régional de Normandie ne refusent pas un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir. Le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté du 29 octobre 2019, qui comporte, au demeurant, l'énoncé des considérations de droit et de fait qui le fondent, ne peut, dès lors, qu'être écarté. 5. En troisième lieu, l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors en vigueur : " Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics fixent les régimes indemnitaires, dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat. Ces régimes indemnitaires peuvent tenir compte des conditions d'exercice des fonctions et de l'engagement professionnel des agents. Lorsque les services de l'Etat servant de référence bénéficient d'une indemnité servie en deux parts, l'organe délibérant détermine les plafonds applicables à chacune de ces parts et en fixe les critères, sans que la somme des deux parts dépasse le plafond global des primes octroyées aux agents de l'Etat (...) ". La délibération du 17 décembre 2018 ci-dessus mentionnée précise que " le complément indemnitaire annuel a pour objet de valoriser l'engagement professionnel et la manière de servir de l'agent " et que : " L'autorité territoriale arrête les montants individuels en tenant compte des résultats de l'évaluation annuelle soumis à l'avis de la commission administrative partiaire compétente (pour les fonctionnaires) ou la commission consultative paritaire (pour les contractuels). Ces montants qui ne sont pas reconductibles automatiquement d'une année sur l'autre, sont définis comme suit au regard des tranches de répartition du résultat calculé de l'évaluation professionnelle (...) : pas d'avancement : 0 euros brut, délai d'avancement de grade de 5 ans : 150 euros bruts, délai de trois ans : 350 euros bruts, sans délai : 500 euros bruts ". Enfin, la même délibération exclut le CIA des éléments du régime indemnitaire en cause soumis à réfaction en fonction des absences pour certains congés de maladie. 6. Il ressort du compte rendu de l'évaluation professionnelle de Mme D... du 25 juin 2019, au titre de l'exercice 2018-2019, que s'il mentionne le placement en arrêt de travail de l'intéressée à compter du retour des vacances de Pâques, il fait également état de ce que les résultats de l'évaluation de l'intéressée avaient fixé un délai de 5 ans pour la proposition d'avancement de grade de l'intéressée. Il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision en se fondant seulement sur ces résultats d'évaluation. Dans ces conditions et au regard de cette évaluation, les moyens tirés de ce que l'arrêté du 29 octobre 2019, serait entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ne peuvent qu'être écartés. 7. En quatrième lieu, le principe de parité interdit aux organes délibérants des collectivités territoriales de prévoir pour les fonctionnaires territoriaux des régimes indemnitaires plus favorables que ceux dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes. Un tel principe ne peut ainsi être utilement invoqué contre la décision contestée en ce qu'elle limite à 150 euros le complément indemnitaire annuel de l'intéressée. Le moyen invoqué ne peut, dès lors, qu'être écarté comme inopérant. 8. En cinquième lieu, Mme D... soutient que l'arrêté du 15 novembre 2019, qui l'affecte sur un poste d'agent d'accueil et de surveillance, est entaché d'une erreur d'appréciation, dès lors que ce poste implique d'être logé par nécessité de service et nécessite un état de vigilance la nuit notamment alors qu'elle prend des médicaments pour dormir. Il ressort toutefois de l'expertise médicale, qui a été réalisée le 2 mars 2020 et a pris en compte le fait que Mme D... prenait un somnifère, que l'intéressée reste apte, en dépit de ses problèmes de santé, aux fonctions d'agent d'accueil. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit être écarté. 9. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation des arrêts contestés ainsi que, par voie de conséquence, sa demande d'indemnisation. Ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent par voie de conséquence, être également rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et à la région Normandie. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le rapporteur X. CatrouxLe président D. Salvi La greffière A. Martin La République mande et ordonne au préfet de la région Normandie en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 22NT00218
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) à l'indemniser de la somme de 2 077 207,31 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, en réparation des préjudices résultant de la cécité de son œil gauche. Par un jugement n° 1809048 du 16 février 2022, le tribunal administratif de Nantes a condamné l'ONIAM à verser à M. A... une somme de 198 275,07 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, ainsi qu'une rente trimestrielle de 6 180 euros, dont il y aura lieu de déduire les montants perçus, le cas échéant, au titre de la prestation de compensation du handicap, sous la forme d'aide humaine et, ou, de l'allocation personnalisée d'autonomie, sous réserve de la production de justificatifs de perception ou de l'absence de perception, de ces prestations. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 7 mars 2022, 23 janvier 2023 et 31 mars 2023, M. B... A..., représenté par Me Gonet, demande à la cour : 1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 16 février 2022 en tant qu'il ne lui a pas été donné entière satisfaction ; 2°) de condamner l'ONIAM à lui verser une somme globale de 2 032 755,5 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, en réparation des préjudices subis à la suite de l'accident médical non fautif dont il a été victime, dont il convient de déduire les sommes qui lui ont déjà été versées ; 3°) de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il remplit les conditions pour être indemnisé au titre de la solidarité nationale, eu égard au taux d'atteinte permanent à son intégrité physique et psychique retenu, évalué à 60%, en lien avec l'accident médical ; - contrairement à ce qu'il a été jugé, il justifie qu'il avait entrepris avant son accident des démarches actives pour retrouver du travail, ces démarches ayant été interrompues par la baisse de vision de son œil gauche à l'automne 2009 ; - au titre de ses préjudices patrimoniaux, il demande à être indemnisé à hauteur des sommes de : * 43 342,50 euros au titre des frais divers permanents liés au handicap ; * 4 453,81 euros au titre des dépenses de santé permanentes (collyres mouillants et consultation ophtalmologiques) ; * 1 408 000 euros au titre des frais permanents d'assistance par une tierce personne déduction faite du forfait cécité dont il a bénéficié à compter du 1er décembre 2019 ; * 274 553 euros au titre de la perte de revenus consécutive à la perte de son œil gauche déduction faite des revenus de substitution perçus ; * 20 000 euros au titre du préjudice permanent exceptionnel ; - au titre de ses préjudices extrapatrimoniaux, il demande à être indemnisé à hauteur des sommes de : * 33 858 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ; * 35 000 euros au titre des souffrances endurées ; * 8 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ; * 152 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent afin de tenir compte de l'atteinte à la qualité de la vie qui n'a pas été prise en compte par l'expert ; * 50 000 euros au titre du préjudice d'agrément ; * 8 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent ; * 20 000 euros au titre du préjudice sexuel. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2022, le centre hospitalier universitaire (CHU) de Nantes et la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) concluent à ce que la cour les mette hors de cause. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2022, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes, représentée par Me Birot, conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande à la cour de réformer le jugement du tribunal administratif de Nantes en rejetant la demande présentée par M. A... au titre des frais de logement adapté, en lui allouant une somme qui n'excèdera pas 117 126 euros au titre du déficit fonctionnel permanent partiel, en rejetant sa demande présentée au titre de l'assistance par une tierce personne pour la période allant jusqu'à la date du jugement attaqué, en réduisant la rente trimestrielle fixée à 6 180 euros à compter du 16 février 2022, pour tenir compte du montant perçu par l'intéressé au titre de la prestation de compensation du handicap (PCH) et de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ou subsidiairement en lui accordant une somme de 243 141,80 euros au titre de l'assistance par une tierce personne et en déduisant les sommes perçues au titre de la PCH et de l'APA, et de la majoration tierce personne de la rente trimestrielle qui lui a été allouée par les premiers juges. Il soutient que : - les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés ; - il y a lieu de réformer le jugement sur les points suivants : - les frais de logement adapté ne sont pas justifiés et aucune indemnité ne peut lui être allouée à ce titre ; - les frais d'assistance par une tierce personne laissés à sa charge à la date de la décision ne sont pas justifiés et ne pourront dès lors être indemnisés ; s'agissant de la période postérieure, il y a lieu de ramener la rente à de plus justes proportions ; - le requérant n'ayant pas sollicité d'indemnisation au titre de l'incidence professionnelle, il y a lieu de réformer le jugement attaqué en tant qu'il lui a accordé une indemnité à ce titre ; - l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent de M. A... ne pourra excéder 117 126 euros ; Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'action sociale et des familles ; - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Lellouch, - et les conclusions de M. Berthon, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., né le 13 août 1950, a présenté le 17 juillet 2008 un traumatisme orbitaire au niveau de l'œil droit avec hémorragie intra-vitréenne et le décollement de la rétine de son œil droit qui s'en est suivi a nécessité une chirurgie réalisée au centre hospitalier universitaire (CHU) de Nantes le 28 juillet 2008. Des récidives du décollement de la rétine ont justifié plusieurs reprises chirurgicales. A la fin du mois d'août 2009, est survenue une inflammation de l'œil gauche et une baisse sensible de l'acuité visuelle de cet œil a été constatée le 18 septembre 2009. Le diagnostic d'une ophtalmie sympathique de l'œil gauche a été posé dans les suites de la chirurgie du segment postérieur de l'œil droit et une cécité bilatérale a finalement été constatée en novembre 2009. Par jugement du 16 février 2022, le tribunal administratif de Nantes, après avoir mis hors de cause le CHU de Nantes, a condamné l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) à verser à M. A... une somme de 198 000 euros ainsi qu'une rente trimestrielle de 6180 euros en réparation des préjudices résultant de l'accident médical non fautif à l'origine de la cécité de son œil gauche. M. A... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à sa demande. L'ONIAM qui ne conteste pas le principe de la réparation au titre de la solidarité nationale, demande, par la voie de l'appel incident, à la cour de ramener à de plus justes proportions les sommes allouées à M. A.... Sur les préjudices patrimoniaux : En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux temporaires : 2. En premier lieu, la circonstance que la victime d'un accident médical se trouvait à la date de cet accident médical au chômage et ne justifie pas avoir retrouvé un emploi à cette date ne fait pas obstacle à son indemnisation pour le préjudice né de la perte de chance sérieuse de reprendre une activité rémunérée et d'en percevoir à l'avenir les revenus correspondants. 3. Il résulte de l'instruction que M. A... exerçait la fonction de technicien dans des ateliers mécaniques de précision, dans une entreprise de travail temporaire, qu'il alternait des périodes de travail et des périodes chômées et qu'il était sans emploi depuis l'intervention chirurgicale sur son œil droit du 28 juillet 2008. Il résulte du rapport d'expertise que sa cécité de l'œil droit est imputable à un état antérieur et l'expert a estimé que la perte de cet œil droit était susceptible d'entraîner une inaptitude de l'intéressé du fait de la perte de la vision binoculaire utile dans le métier de précision de technicien qu'il exerçait. Lors de l'apparition de l'ophtalmie sympathique à l'œil gauche en septembre 2009, à l'âge de 59 ans, M. A... était inscrit à Pôle emploi. Il se borne à justifier de renseignements pris en mars 2009 sur internet relatifs au diplôme d'accès aux études universitaires et d'un rendez-vous programmé le 25 septembre 2009 à Cap Emploi de Saint-Nazaire, sans plus de précision sur l'objet de ce rendez-vous. Dès lors, et compte tenu notamment de son âge à la date de l'accident et de l'âge légal de départ à la retraite, il ne résulte pas de l'instruction qu'il avait une chance sérieuse d'entreprendre une activité rémunérée avant la date de consolidation fixée au 19 novembre 2012 par l'expert. Il s'ensuit que l'existence du préjudice temporaire né de la perte de chance sérieuse de reprendre une activité rémunérée et d'en percevoir les revenus correspondants n'est pas établie. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à solliciter une indemnisation au titre de ce poste de préjudice. 4. En second lieu, en vertu des principes qui régissent l'indemnisation par une personne publique des victimes des dommages dont elle doit répondre, il y a lieu de déduire de l'indemnisation allouée à la victime d'un dommage corporel au titre des frais d'assistance par une tierce personne le montant des prestations dont elle bénéficie par ailleurs et qui ont pour objet la prise en charge de tels frais. Il en est ainsi alors même que les dispositions en vigueur n'ouvrent pas à l'organisme qui sert ces prestations un recours subrogatoire contre l'auteur du dommage. La déduction n'a toutefois pas lieu d'être lorsqu'une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement au bénéficiaire s'il revient à meilleure fortune. 5. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que la cécité bilatérale de M. A... implique qu'il soit assisté d'une tierce personne pour les actes de la vie courante à hauteur de 4 heures par jour. Si M. A... produit un rapport d'expertise concluant à un besoin d'assistance d'une tierce personne de 6 à 8 heures par jour, ce rapport établi en 2018 à sa demande de manière non contradictoire y inclut deux heures de marche liées à une artériopathie qui n'est pas datée et dont le premier expert ne fait au demeurant pas état, et il ne résulte pas de l'instruction que l'intéressé ait besoin de l'assistance d'une tierce personne pour la marche. Il y a lieu en conséquence de retenir pour la période allant de l'accident médical de septembre 2009 au 19 novembre 2012, date de consolidation, un besoin de 4 heures par jour. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi à ce titre en tenant compte du niveau de rémunération rappelé au point précédent constaté sur la période considérée augmenté des charges sociales et des majorations de rémunération pour travail du dimanche et d'une année de 412 jours pour tenir compte des congés payés et des jours fériés. Compte tenu du salaire moyen de référence observé au cours de la période en cause, soit un montant horaire majoré de cotisations sociales dues par l'employeur passant de 8,82 euros en 2009 à 9,40 en 2012, le besoin de M. A... d'assistance par une tierce personne avant consolidation peut être évalué à la somme arrondie à 60 700 euros, dont il convient de déduire la somme de 21 528 euros de prestation de compensation du handicap (PCH) qu'il a perçue du département de la Loire-Atlantique au titre de l'aide humaine pour la période considérée. L'ONIAM devra ainsi verser à M. A... une somme de 39 172 euros au titre du besoin temporaire d'assistance d'une tierce personne. En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux permanents : 6. En premier lieu, il résulte du rapport d'expertise que M. A... doit faire l'objet de deux consultations ophtalmologiques par an, et utiliser des collyres mouillants. Toutefois, en dépit des mesures d'instruction diligentées, le requérant ne produit aucune facture, ni ne justifie des frais restant à sa charge. Dès lors, les dépenses de santé liées à l'achat de collyres mouillants, contestées par l'ONIAM, au titre de la période du 19 novembre 2012 à la date de mise à disposition du présent arrêt ne peuvent être indemnisées. S'agissant des consultations ophtalmologiques, la somme de 205,07 euros allouée par les premiers juges à titre de capital au titre de telles dépenses de santé futures, qui n'est pas contestée par l'ONIAM, sera mise à sa charge. 7. En deuxième lieu, M. A... sollicite le versement d'une indemnité d'un montant de 43 342,50 euros au titre de frais de formations personnalisées et de l'achat de matériels adaptés à sa cécité bilatérale, et établit avoir acquis postérieurement à la date de consolidation de son état de santé, une machine à lire, un lecteur de livre audio, un porte-clés montre, une canne canadienne, un magnétophone portable, un téléphone portable, une montre parlante et des séances informatiques. Il résulte de l'instruction que depuis l'accident, M. A... a perçu du département de la Loire-Atlantique une aide technique d'un montant de 2 300,75 euros pour une machine à lire et le lecteur de livres Victor Stratus alors que les factures qu'il produit pour justifier des frais d'appareillages techniques qu'il a exposés afin de compenser sa cécité bilatérale se sont élevés à la somme globale de 4 004,55 euros, soit une somme de 1 703,80 euros restée à sa charge qu'il convient de mettre à la charge de l'ONIAM. En outre, M. A... produit des devis datant de 2018 pour une formation de quatre jours pour l'utilisation de matériels et logiciels adaptés d'un montant de 2 800 euros, pour un abonnement annuel de 190 euros pour une téléassistance informatique, ainsi que pour du matériel spécialisé pour un montant global de 5 038, 50 euros. Il résulte du rapport d'expertise que ce matériel adapté est nécessaire. M. A... n'apporte toutefois pas d'éléments pour justifier de la nécessité de remplacer le matériel adapté tous les cinq ans. Dès lors, outre la somme de 1 703,8 euros qu'il établit avoir exposée à la date du présent arrêt, pour l'avenir, il y a lieu de mettre à la charge de l'ONIAM les sommes que M. A... exposera à ce titre sur la base de justificatifs actualisés et sous déduction des aides qu'il est susceptible de percevoir au titre de ces frais divers. 8. En troisième lieu, M. A... fait état d'un préjudice au titre des frais de logement adapté (rampe, douche, WC) que l'expertise a estimés nécessaires. Toutefois, l'intéressé ne produit aucun élément permettant d'évaluer ces frais divers, ni ne justifie avoir exposé de tels frais depuis la date de l'accident médical, soit depuis près de quatorze ans. D'ailleurs, le requérant ne réclame aucune somme à ce titre et ne reprend pas cette demande dans ses conclusions d'appel. 9. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été exposé au point 5, que l'ophtalmie sympathique de l'œil gauche ayant conduit à la cécité bilatérale justifie l'aide quotidienne de M. A... par une tierce personne non qualifiée à hauteur de 4 heures par jour. Compte tenu du salaire moyen de référence observé au cours de la période allant du 19 novembre 2012 jusqu'à la date de mise à disposition du présent arrêt, pour une aide non spécialisée, soit un montant horaire augmenté des cotisations sociales dues par l'employeur allant de 9,40 euros en 2012 à 11,27 euros en 2023, et d'une année de 412 jours pour tenir compte des congés payés et des jours fériés, le montant du besoin d'assistance par une tierce personne peut être évalué à la somme arrondie de 245 100 euros. Toutefois, il résulte de l'instruction que M. A... a bénéficié de la prestation de compensation du handicap (PCH), prévue par l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, laquelle est exclusive de l'allocation pour personne handicapée, et qu'il a perçu des départements de la Loire-Atlantique puis de Saône-et-Loire un " forfait cécité " au titre des aides humaines représentant 50 heures par mois pour un montant global de 83 720 euros sur la période allant de la date de consolidation à la date du présent arrêt. Par suite, il sera fait une exacte appréciation de l'indemnité due à M. A... au titre de l'assistance d'une tierce personne permanente pour la période allant du 19 novembre 2012, date de consolidation, à la date de mise à disposition du présent arrêt, en l'évaluant à la somme de 161 380 euros. 10. Postérieurement à la date de mise à disposition du présent arrêt, eu égard à la fois à l'âge de 72 ans de M. A... à cette date, sur la base d'un même besoin d'assistance de 4 heures par jour, d'un taux horaire augmenté des charges sociales de 16 euros, en déduisant la somme de 4 440 euros correspondant aux sommes auxquelles il a droit pour un semestre au titre de la PCH aide humaine, le préjudice pour l'avenir peut être indemnisé sous la forme d'une rente semestrielle arrondie à la somme de 8 700 euros, qu'il y aura lieu de revaloriser par application du coefficient prévu par l'article L. 161-25 du code de sécurité sociale. 11. En cinquième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 du présent arrêt, M. A... n'est pas fondé à solliciter une indemnisation au titre du préjudice permanent né de la perte de chance sérieuse de reprendre une activité rémunérée et d'en percevoir à l'avenir les revenus correspondants, dont il ne justifie pas à la date de consolidation, date à laquelle il avait soixante-deux ans. Eu égard à l'âge de la retraite, et ainsi que le fait valoir l'ONIAM, sa demande d'indemnisation au titre de l'incidence professionnelle doit être rejetée. Sur les préjudices extrapatrimoniaux : Sur les préjudices extrapatrimoniaux temporaires : 12. En premier lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que M. A... a été hospitalisé en raison de l'ophtalmie sympathique de l'œil gauche du 29 septembre au 7 octobre 2009, du 13 au 19 février 2010, du 28 au 30 juin 2010, du 9 au 12 novembre 2010, du 10 janvier au 18 mars 2011 et du 13 au 17 juin 2011, l'hospitalisation du 5 au 7 février 2009 étant antérieure à l'accident médical. Ainsi, il justifie de 96 jours de déficit fonctionnel temporaire total imputable à l'accident médical. En outre, dès lors qu'il souffrait déjà d'un déficit fonctionnel temporaire évalué à 25% lié à la perte d'acuité visuelle de l'œil droit, la pathologie litigieuse lui a causé un déficit fonctionnel temporaire partiel évalué à 60% à compter du 16 septembre 2009 et jusqu'à la date de consolidation de son état de santé, le 19 novembre 2012. Ainsi, M. A... a subi un déficit fonctionnel temporaire partiel de 60% lié à l'ophtalmie sympathique de l'œil gauche pendant une durée de 1 065 jours, déduction faite des jours d'hospitalisation. Dans ces conditions, il sera fait une équitable appréciation de la réparation du déficit fonctionnel temporaire, total et partiel, imputable à l'accident médical non fautif subi par M. A... jusqu'à la date de consolidation de son état de santé en l'évaluant à la somme totale de 13 000 euros. 13. En deuxième lieu, l'expert a évalué à 4 sur une échelle de 7 le préjudice esthétique temporaire subi par M. A... à raison de l'ophtalmie sympathique de l'œil gauche, que l'expert caractérise par une évolution vers la phtyse, l'utilisation d'une canne blanche et le port de verres teintés. Bien que ces éléments aient perduré après la consolidation, M. A... a droit à être indemnisé du préjudice esthétique qu'il a ainsi subi entre la date de l'accident en septembre 2019 et la date de consolidation le 19 novembre 2012. Il y a lieu d'évaluer à la somme de 7 000 euros le préjudice esthétique au titre de cette période. 14. En troisième lieu, il sera fait une équitable appréciation des souffrances endurées, évaluées par l'expert à 5 sur une échelle de 7, en indemnisant M. A... à hauteur de 15 000 euros à ce titre. Sur les préjudices extrapatrimoniaux permanents : 15. En premier lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que M. A... souffrait d'un déficit fonctionnel de 25% imputable à la cécité de son œil droit et que la survenue de l'ophtalmie sympathique de l'œil gauche lui a causé un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique et psychique évalué en propre à 60%. Ainsi, il est fondé à solliciter l'indemnisation correspondant à une évolution de 25% à 85% de son déficit fonctionnel permanent à l'âge de 62 ans, étant précisé que la cécité est de nature à entraîner d'importants troubles dans les conditions d'existence liés en particulier à la perte de l'autonomie et du lien social. Il sera fait une juste appréciation de l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent en l'évaluant à la somme de 165 000 euros. 16. En deuxième lieu, il sera fait une équitable appréciation du préjudice esthétique permanent, évalué par l'expert à 5 sur une échelle de 7, en fixant l'indemnité due à ce titre à M. A... à la somme de 10 000 euros. 17. En troisième lieu, bien que l'expert relaye dans son rapport les déclarations de M. A... selon lesquelles il pratiquait régulièrement la course à pieds et la natation, activités que sa cécité bilatérale ne lui permet plus d'exercer, aucun élément probant ne vient justifier de la pratique régulière de ces activités de loisir. La demande tendant à l'indemnisation de son préjudice d'agrément doit dès lors être rejetée. 18. En quatriième lieu, il résulte du rapport d'expertise que M. A... subit, du fait notamment du traitement antidépresseur prescrit à raison de l'accident médical, un préjudice sexuel dont il sera fait une juste appréciation en l'évaluant à la somme de 3 000 euros. 19. En dernier lieu, si M. A... fait état d'un préjudice exceptionnel permanent résultant de sa cécité en faisant valoir le caractère exceptionnel du risque qui s'est réalisé, ces éléments ne caractérisent pas des circonstances autres que celles résultant du fait dommageable, qui n'auraient pas été prises en compte à un autre titre, seules susceptibles de caractériser un préjudice permanent exceptionnel. La demande d'indemnisation présentée à ce titre doit être rejetée. 20. Il résulte de tout ce qui précède que les préjudices subis par M. A... consécutivement à l'accident médical dont il a été victime doivent, en l'espèce, être évalués à la somme totale arrondie à 415 460 euros, outre le remboursement du matériel adapté sur justificatifs et sous déduction des aides qu'il est susceptible de percevoir au titre de ces frais divers et le versement d'une rente semestrielle d'un montant de 8 700 euros à revaloriser en application du coefficient prévu par l'article L. 161-25 du code de sécurité sociale. Ces sommes doivent être mises à la charge de l'ONIAM. Par suite, M. A... est seulement fondé à soutenir que le jugement attaqué doit être réformé en tant qu'il a limité à 198 275,07 euros le montant de l'indemnité destinée à réparer les préjudices dont il a été victime et à 6 180 euros le montant de la rente trimestrielle. Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts : 21. Le requérant a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 415 460 euros, dont il y a lieu de déduire la provision de 130 200 euros versée, soit la somme de 285 260 euros à compter du 25 septembre 2018, date de réception de sa réclamation préalable par l'ONIAM. Les intérêts échus à compter du 25 septembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés pour produire eux-mêmes des intérêts. Sur les frais du litige : 22. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : L'ONIAM versera à M. A... la somme de 285 260 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 septembre 2018 et de la capitalisation des intérêts à compter du 25 septembre 2019 et à chaque échéance annuelle, déduction faite de la provision de 130 200 euros déjà versée à l'intéressé. Article 2 : L'ONIAM versera à M. A... une rente semestrielle de 8 700 euros à revaloriser dans les conditions indiquées au point 10. Article 3 : L'ONIAM remboursera à M. A... sur justificatifs, les frais qu'il aura à exposer au titre des matériels rendus nécessaires par sa cécité, sous déduction des aides qu'il percevra le cas échéant et dont il devra justifier. Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 16 février 2022 est réformé en ce qu'il est contraire aux articles précédents. Article 5 : L'ONIAM versera à M. A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. C..., au Centre hospitalier universitaire de Nantes, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes, à la société hospitalière d'assurances mutuelles. Une copie en sera adressée, pour information, à l'expert, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique, à la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire, aux départements de la Loire-Atlantique et de Saône-et-Loire. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. La rapporteure, J. Lellouch Le président, D. Salvi La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00684
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Vu la procédure suivante : Par une requête et des mémoires enregistrés les 15 décembre 2021, 8 juillet 2022, 31 août 2022 et 8 décembre 2022, la SCI Mons Mirabilis, l'association Vent du Perche, M. O... L..., Mme J... F..., M. H... C..., M. G... K..., M. D... B..., M. A... P..., Mme N... M... et M. E... I..., représentés par Me de Kersauson et Me Chevalier, demandent à la cour : 1°) d'annuler l'arrêté du 6 août 2021 par lequel le préfet de la Sarthe a délivré à la société Ferme éolienne Huisne et Braye une autorisation environnementale pour la construction et l'exploitation d'un parc éolien de quatre aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Cormes et de Cherré-Au, les décisions des 30 novembre 2021 par lesquelles le préfet de la Sarthe a expressément rejeté les recours gracieux de MM. L..., C..., K... et B... formés contre cet arrêté ainsi que les décisions implicites de rejet des recours gracieux formés par l'association Vents du Perche, Mme F..., M. P... et M. I... ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à chacun d'eux, de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - ils justifient d'un intérêt à agir ; - l'étude chiroptérologique est insuffisante en l'absence d'écoutes en altitude et dans la recherche de gîtes ; - l'étude sur l'avifaune est insuffisante au regard de l'activité migratoire significative présente sur le site et du risque de collision ; - l'étude paysagère est lacunaire, voire trompeuse dans la représentation des conditions d'insertion du projet dans le paysage ; - certaines zones d'impacts, situées dans le périmètre immédiat du projet éolien, n'ont fait l'objet d'aucune analyse dans le dossier soumis à enquête publique ; - ces insuffisances ont été de nature à nuire à l'information du public et ont exercé une influence sur le sens de la décision attaquée ; - le projet génère des risques importants pour la sécurité des personnes, en particulier des risques de projection des pales ou de glace, alors que le périmètre de dangers des éoliennes englobe l'autoroute A 11 ainsi que les routes départementales D 261 et D 98 ; - le projet est de nature à porter atteinte à des espèces protégées de chiroptères compte-tenu de la proximité de haies et à des espèces protégées d'oiseaux migrateurs, les éoliennes 3 et 4 se trouvant dans l'axe de couloirs de migration ; - le projet est de nature à porter atteinte aux paysages du Perche sarthois et au patrimoine notamment aux édifices classés que sont l'église Saint-Martin de Lamnay et le château de Montmirail, compte-tenu des phénomènes de co-visibilité, aux hameaux, au patrimoine archéologique sans que la DRAC n'ait été consultée et à l'activité touristique ; - le projet, situé au cœur d'une zone d'élevage, crée des dangers pour la préservation de la santé animale et aucune mesure n'a été prise pour réduire ce risque. Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 mai 2022, 12 octobre 2022 et 20 janvier 2023, la société Ferme éolienne Huisne et Braye, représentée par Me Elfassi, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les requérants ne justifient pas d'un intérêt pour agir contre la décision attaquée ; - les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés. Par un mémoire enregistré le 8 novembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit prononcé, sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, un sursis à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai permettant la délivrance d'une autorisation modificative régularisant le vice relevé. Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés. La SCI Mons Mirabilis a été désignée par ses mandataires, Me de Kersauson et Me Chevalier, représentant unique, destinataire de la notification de la décision à venir. Par un courrier du 1er juin 2023, les parties ont été invitées à produire des observations sur l'application par la cour de l'article L. 181-18 du code de l'environnement afin de permettre à la société Ferme éolienne Huisne et Braye d'obtenir une autorisation modificative régularisant le vice tiré de l'insuffisance du volet chiroptérologique de l'étude d'impact en l'absence d'écoutes en altitude. Par un mémoire, enregistré le 2 juin 2023, la SCI Mons Mirabilis et autres, représentée par Me de Kersauson et Me Chevalier, ont présenté des observations en réponse au courrier du 1er juin 2023. Par un mémoire, enregistré le 5 juin 2023, la société Ferme éolienne Huisne et Braye, représentée par Me Elfassi, a présenté des observations en réponse au courrier du 1er juin 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Montes-Derouet, - les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique, - et les observations de Me de Kersauson et Me Chevalier, pour les requérants et de Me Kabra, substituant Me Elfassi, pour la société Ferme éolienne Huisne et Braye. Une note en délibéré présentée par SCI Mons Mirabilis, représentant unique des requérants, a été enregistrée le 7 juin 2023. Une note en délibéré présentée par la société Ferme éolienne Huisne et Braye a été enregistrée le 14 juin 2023. Considérant ce qui suit : 1. La société Ferme éolienne Huisne et Braye a déposé le 31 juillet 2018 une demande d'autorisation environnementale, complétée le 16 janvier 2019, en vue d'exploiter un parc éolien constitué de quatre aérogénérateurs, d'une hauteur maximale de 150 et 180 mètres en bout de pale et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Cormes et Cherré-Au. Par l'arrêté du 6 août 2021, le préfet de la Sarthe a délivré à la société Ferme éolienne Huisne et Braye l'autorisation environnementale sollicitée. Par lettres du 30 novembre 2021, le préfet de la Sarthe a rejeté expressément les recours gracieux formés contre cet arrêté par M. L..., M. C..., M. K... et M. B... et a implicitement rejeté les recours formés par Mme F..., M. P..., M. M... et M. I... contre ce même arrêté. La SCI Mons Mirabilis et autres demandent l'annulation de l'arrêté du 6 août 2021 ainsi que des décisions par lesquelles le préfet de la Sarthe a rejeté leurs recours gracieux. Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête : 2. Aux termes de l'article R. 181-50 du code de l'environnement : " Les décisions mentionnées aux articles L. 181-12 à L. 181-15 peuvent être déférées à la juridiction administrative : / (...) 2° Par les tiers intéressés en raison des inconvénients ou des dangers pour les intérêts mentionnés à l'article L. 181-3 (...) ". L'article L. 181-3 de ce code énonce : " I. L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas (...) ". Parmi ces intérêts, l'article L.511-1 du même code mentionne les dangers ou les inconvénients pour la commodité du voisinage, la santé, la protection de la nature, de l'environnement et des paysages ainsi que la conservation des sites et des monuments. 3. En premier lieu, l'intérêt pour agir des groupements et associations s'apprécie au regard de leur objet statutaire et de l'étendue géographique de leur action. 4. Il résulte de l'instruction que l'association " Vent du Perche " a pour objet statutaire " de lutter, notamment, par toutes actions en justice, contre les projets et installations des parcs éoliens dans le département de la Sarthe ou départements voisins, et particulièrement dans le périmètre de la communauté de communes de l'Huisne sarthoise, projets qui sont incompatibles avec les sites remarquables, paysages, monuments, équilibres biologiques, espèces animales et végétales, et avec la santé et la sécurité ". Eu égard à son objet statutaire, à son champ d'intervention géographique et aux missions qu'elle s'est assignées, cette association justifie d'un intérêt à demander l'annulation de l'arrêté attaqué du 6 août 2021 portant autorisation d'exploiter un parc éolien constitué de quatre aérogénérateurs, dont trois d'entre eux présentent une hauteur maximale de 180 mètres en bout de pâle, sur le territoire des communes de Cherré-Au et de Cormes, toutes deux membres de la communauté de communes de l'Huisne sarthoise, sans que puisse lui être opposée la circonstance que ses statuts ont été déposés en préfecture le 16 septembre 2021, postérieurement à la date de la décision attaquée. 5. En second lieu, il appartient au juge administratif d'apprécier si les tiers, personnes physiques, qui contestent une autorisation environnementale justifient d'un intérêt suffisamment direct leur donnant qualité pour en demander l'annulation, compte tenu des inconvénients et dangers que présente pour eux l'installation en cause, appréciés notamment en fonction de la situation des intéressés et de la configuration des lieux. 6. Il résulte de l'instruction, notamment des prises de vue réalisées dans l'étude paysagère, que les domiciles de M. B..., de M. P..., de M. I... et de Mme M..., distants de 500 à 650 mètres du projet de parc éolien, présentent des vues ouvertes sur le parc éolien projeté, lesquelles sont susceptibles de modifier leur cadre de vie. Ils justifient de la sorte d'un intérêt d'un intérêt suffisamment direct leur donnant qualité pour agir contre l'autorisation environnementale attaquée. Il en va de même pour la SCI Mons Mirabilis et M. L..., respectivement propriétaire et gérant du château de Montmirail, lequel situé sur un promontoire dominant la vallée de la Braye aura des vues sur le parc éolien malgré la distance de plus de 8 km l'en séparant. 7. En revanche, Mme F..., M. K... et M. C... ne justifient pas, par les pièces qu'ils produisent, de la réalité des impacts visuels dont ils se prévalent, compte-tenu de la présence d'espaces boisés venant filtrer les vues sur le parc éolien projeté, et ne justifient donc pas d'un intérêt à agir contre l'autorisation litigieuse. 8. Il résulte de tout ce qui précède que la requête n'est pas recevable en tant seulement qu'elle émane de Mme F..., de M. K... et de M. C.... Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 6 août 2021 : En ce qui concerne l'étude d'impact : 9. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. S'agissant des impacts sur l'avifaune : 10. Si les requérants soutiennent que les enjeux avifaunistiques n'ont pas été suffisamment appréhendés, s'agissant des espèces migratrices volant à haute altitude, comme le Pluvier doré, en l'absence notamment de toute écoute en altitude, ce type d'écoutes n'est pas préconisé s'agissant de l'avifaune par le guide relatif à l'élaboration des études d'impacts des projets de parcs éoliens terrestres. En tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que cette circonstance aurait faussé l'inventaire des espèces migratrices fréquentant la zone d'implantation du projet, cet inventaire ayant été réalisé sur une période d'observation d'une année afin de couvrir l'ensemble du cycle biologique des espèces en recensant les espèces en période prénuptiale (de mars à avril 2015), les espèces nicheuses (d'avril à mai 2015), les espèces en période postnuptiale (de septembre à octobre 2014) et les espèces hivernantes (de décembre 2014 à janvier 2015). Le suivi de l'avifaune migratrice a été réalisé au moyen de l'observation et du comptage des oiseaux à poste fixe durant 5-6 heures à partir du lever du soleil à l'aide d'une paire de jumelles et d'une longue-vue et qu'afin d'optimiser la détection des migrateurs, 3 points d'observation localisés sur une zone dégagée offrant un champ de vision suffisamment large ont été utilisés de manière à couvrir l'ensemble de la zone. L'étude de l'avifaune, suivie sur une durée suffisante, a permis de dresser la liste des espèces présentes sur le site et leur densité, 23 espèces migratrices ayant ainsi été identifiées, dont 4 classées en vulnérabilité modérée (l'Hirondelle rustique, le Pluvier doré, le Pipit des arbres et le Merle à plastron) et 2 en vulnérabilité assez forte (la grande Aigrette et l'Autour des palombes). 11. Par ailleurs, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les incidences du projet sur les espèces migratrices ont été suffisamment appréhendées, les auteurs de l'étude écologique s'étant attachés à identifier les couloirs de migration traversant le site et les hauteurs de vol des espèces, en période de migration prénuptiale et postnuptiale. L'étude conclut que les implantations des quatre éoliennes sont en dehors des couloirs de migration postnuptiale identifiés et que seule l'éolienne E3 est localisée sur une branche de l'axe de migration prénuptiale, localisée au niveau du vallon de " Barbe d'Orge ". Elle qualifie l'impact du projet, en période d'exploitation, pour l'avifaune migratrice prénuptiale de faible à modéré, compte-tenu des flux faibles identifiés mais majoritairement compris entre 30 et 50 m d'altitude. Le risque de collision pour les espèces hivernantes, au nombre desquelles se trouve également le Pluvier doré, est qualifié de faible aux motifs que les haies, qui servent de refuge à ces espèces, seront globalement préservées et qu'elles se concentrent essentiellement dans les vallons humides éloignés de l'implantation projetée des éoliennes. La seule circonstance que la zone a été déclarée défavorable à l'éolien par le conseil départemental en raison de la richesse de sa biodiversité (espaces naturels sensibles des Ajeux à la Ferté-Bernard et d'un site natura 2000 à Vibray et Vouvray-sur-Huisne) ne suffit pas à démontrer le caractère insuffisant de l'étude écologique dans l'analyse des impacts du projet sur les espèces migratrices. S'agissant de l'étude paysagère : 12. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'étude paysagère, annexée à l'étude d'impact, compte plus de cinquante photomontages, principalement autour de la vallée de l'Huisne repérée comme présentant une forte sensibilité vis-à-vis du projet, auxquels se sont ajoutées de nouvelles prises de vue réalisées en janvier 2019, également soumises à l'enquête publique, pour apprécier l'impact du projet sur ses environnements immédiat, rapproché et intermédiaire. Si les requérants soutiennent que l'étude paysagère n'a pas été réalisée " dans le respect des règles ", la méthodologie suivie est clairement exposée en page 82 et suivantes de l'étude paysagère qui précise que la localisation des photomontages a été déterminée à partir des zones de visibilités potentielles identifiées après modélisation des zones de visibilité théorique du projet dans un rayon d'environ 20 km autour de la zone d'implantation potentielle, qui intègre les effets de topographie et la présence de boisements, à l'exclusion des haies et des zones bâties, puis à partir de l'analyse paysagère qui a permis d'évaluer l'impact visuel du projet à l'échelle des 3 aires d'études paysagères, depuis les principaux sites identifiés comme présentant un intérêt paysager ou touristique, les bourgs et les axes de circulation. 13. En deuxième lieu, si les requérants soutiennent que les photomontages ne permettraient pas de décrire de façon objective et sincère les impacts des éoliennes sur le paysage et le patrimoine historique, dont le château de Montmirail, il résulte de l'instruction que l'étude paysagère a reconnu la sensibilité forte du site de Montmirail à l'égard du projet, compte-tenu de sa localisation sur un promontoire lui offrant un large point de vue sur le parc éolien et lui a consacré 4 photomontages pris depuis les voies environnant le bourg et depuis le centre du bourg, dont les commentaires associés mettent en exergue la situation en hauteur du bourg et du château, construits sur une butte que les voies d'accès au bourg contournent, ce qui permet " d'ouvrir des panoramas sur des profondeurs de champs très éloignées " et relèvent que les éoliennes forment un nouveau point de repère dans le paysage. Si la mission régionale de l'autorité environnementale (MRAE) a indiqué dans son avis que " les photomontages sont réalisés sur la base de photographies prises à une saison où la végétation est en feuilles ce qui contribue à davantage masquer les éoliennes et ne rend pas compte de leur visibilité hivernale ", elle n'a pour autant formulé aucune recommandation visant à la réalisation de nouvelles prises de vue. Il résulte en outre de l'instruction que cette circonstance est évoquée notamment dans les photomontages concernant le site de Montmirail. Ainsi la prise de vue 9 relève que la végétation masque le parc éolien, mais reconnaît qu'en " se décalant légèrement (...), il est facile de se rendre compte de la possible visibilité du projet " et la prise de vue 11 mentionne que " le projet ne se perçoit que partiellement mais en l'absence de feuillage, le regard pourrait porter sur le lointain permettant de révéler de manière plus importante la présence du projet ". 14. En troisième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne résulte pas de l'instruction que l'étude paysagère aurait cherché à minimiser l'impact du projet éolien sur le château de Montmirail, situé à plus de 8 km du projet, en le classant dans l'aire d'étude éloignée en lieu et place de l'aire d'étude rapprochée, dès lors, d'une part, que l'aire d'étude éloignée est décrite dans cette étude comme couvrant une zone distante de 7 à 20 km du projet et l'aire d'étude rapprochée comme couvrant une zone distante de 3 à 10 km et que, d'autre part, l'étude paysagère met en exergue la situation particulière du château de Montmirail parmi les monuments historiques protégés dans cette aire d'étude. 15. En quatrième lieu, la circonstance que le résumé non technique fasse état, de façon erronée, de l'absence de toute servitude patrimoniale au sein de la zone d'implantation potentielle et de l'aire d'étude immédiate n'a pu avoir pour effet de tromper le public sur la réalité des impacts du projet sur le patrimoine, dès lors que ce dernier a été précisément identifié et localisé et que sa sensibilité vis-à-vis du projet éolien a été examinée. Si le résumé technique ne présente pas la répartition géographique du patrimoine protégé au sein des aires d'études, cette information figurait dans l'étude d'impact et dans l'étude paysagère qui listent, aire par aire, les éléments du patrimoine protégé faisant l'objet d'un enjeu de co-visibilité et décrit la nature des impacts du projet, sans que les requérants n'allèguent au demeurant que ces études auraient omis de faire état d'autres éléments du patrimoine protégés susceptibles d'être impactés par le projet contesté. 16. En dernier lieu, les requérants soutiennent que le contenu de l'étude paysagère serait insuffisant en l'absence de photomontages depuis l'ensemble des lieux de vie situés à moins de mille mètres du parc projeté. Toutefois, et alors que la société pétitionnaire n'était pas tenue de réaliser des photomontages depuis l'ensemble des habitations concernées par le projet en l'absence de particularités nécessitant une information spécifique du public, il résulte de l'instruction que les lieux cités par les requérants, à savoir la commune de Saint-Maxent, les lieux-dits " Le Clouteau ", " Les Petites Lèvries " et " Les Richardières " ont été étudiés et qu'ils n'ont pas fait l'objet de photomontage au motif que leur sensibilité au projet éolien a été considérée comme nulle ou nulle à faible. S'agissant de l'étude acoustique : 17. La seule circonstance que le hameau " Les Richardières " n'a fait l'objet d'aucune écoute ne suffit pas à établir le caractère insuffisant de l'étude acoustique au regard de la méthodologie suivie, non contestée par les requérants, selon laquelle les points de mesure du bruit résiduel ont été choisis parmi les ZER " zones à émergence réglementée ", en fonction de leur exposition sonore vis-à-vis des éoliennes, des orientations de vent dominant et de la topographie de la végétation, notamment, et que, regardés comme représentatifs de l'environnement sonore de la zone du projet et ses environs, ils permettent une extrapolation de leur bruit résiduel vers des points ayant une ambiance sonore comparable et n'ayant pas fait l'objet de mesures. Il résulte ainsi de l'instruction que des écoutes ont été réalisées au niveau des lieu-dit " Les grands Hêtres " et " La Justière ", qui encadrent " les Richardières ", sans que les requérants n'établissent ni même n'allèguent que ce hameau ne présenterait pas une ambiance sonore comparable ne permettant pas de mesurer le bruit résiduel par extrapolation des résultats obtenus à partir des écoutes effectuées sur les deux hameaux voisins. Il en résulte que l'étude acoustique ne présente pas d'insuffisance sur ce point. 18. Il résulte des points 10 à 17 que l'étude d'impact ne présente pas d'insuffisance dans ses volets avifaunistique, paysager et acoustique. S'agissant des impacts sur les chiroptères : 19. Si les requérants soutiennent que le suivi de l'activité des chiroptères dans la zone d'implantation potentielle des éoliennes a été réalisé sur une période trop courte et que la recherche de gîtes a été conduite sur un périmètre restreint, il résulte de l'instruction que l'inventaire acoustique a été dressé à partir de 10 points d'écoutes actives au sol, réalisées lors de 6 sorties nocturnes et de 12 points d'écoutes passives sur 5 nuits, réparties sur deux périodes courant de juillet à septembre 2014, périodes de mise-bas, d'élevage des jeunes, de migration, d'accouplement et de transit vers les gîtes hivernaux et d'avril à juin 2015, périodes de migration et de transit vers les gîtes de mise-bas. Ces écoutes ont couvert de la sorte l'ensemble du cycle biologique annuel des chiroptères. Cet inventaire acoustique a permis d'identifier la présence certaine au sein de l'aire d'étude rapprochée de 15 espèces de chiroptères, dont la Pipistrelle commune qui domine le peuplement chiroptérologique du site (55,4 %), la Pipistrelle de Kuhl (28,9 %) puis dans une moindre mesure, la Sérotine commune (2,5%), le Murin à moustaches (2,2%), le complexe des Murin sp (2%), la Noctule commune (1%), le Murin de Natterer (1%), la Pipistrelle de Nathusius (1%), la Noctule de Leisler (0,8 %), toutes espèces inscrites à l'article 2 de l'arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection. Quant à la recherche de gîtes, il résulte de l'étude chiroptérologique que les prospections de gîtes d'hibernation et de parturition ont été menées sur la base de potentialités d'accueil, repérées tant au sein de la zone d'implantation potentielle qu'en périphérie, compte-tenu du caractère aléatoire et perturbant pour les espèces des visites de gîtes sur le terrain, ainsi que le relève le guide relatif à l'élaboration des études d'impacts des projets de parcs éoliens terrestres, lesquelles ont permis de conclure que si l'aire d'étude présente un potentiel d'accueil limité pour les espèces anthropophiles, des potentialités de gîtes existent toutefois pour les espèces arboricoles. 20. En revanche, il est constant, ainsi que le soutiennent les requérants, que le suivi d'activité des chiroptères n'a fait l'objet d'aucune écoute en altitude, ainsi que l'a relevé la MRAE, dans son avis du 19 mars 2019, malgré les éléments de justification apportés le 16 janvier 2019 par la société pétitionnaire, jugés insuffisants par la MRAE au regard des potentiels enjeux identifiés sur le site. La société Ferme éolienne Huisne et Braye ne saurait se prévaloir, pour justifier l'absence de réalisation d'écoutes en altitude au stade de l'étude d'impact, du protocole de suivi environnemental des parcs éoliens terrestres, reconnu par une décision du ministre de la transition écologique et solidaire du 5 avril 2018, en ce qu'il prévoit des modalités de suivi post-implantation renforcées pour les parcs éoliens dont l'étude d'impact n'a pas fait l'objet d'un suivi d'activité en hauteur en continu et sans échantillonnage, dès lors que l'objet de ce protocole est de définir les modalités de suivi environnemental des parcs éoliens en exploitation. L'étude chiroptérologique a elle-même relevé que les écoutes effectuées au sol ne permettent de connaître précisément que le peuplement chiroptérologique évoluant entre le sol et une vingtaine de mètres de hauteur, à l'exclusion donc du " cortège spécifique évoluant au niveau de la zone de rotation des pales, pouvant être impacté par un risque de collision " et que malgré les extrapolations qui peuvent être faites à partir du comportement et des mœurs des différentes espèces recensées sur la zone, " la connaissance du peuplement évoluant en altitude reste partielle (notamment sur l'abondance et la diversité spécifique du fait de la non-détection de certaines espèces liées à des hauteurs de vol supérieures à 25 m) ". Or, il résulte de l'instruction que, parmi les espèces identifiées sur la zone, six sont des espèces volant en altitude, à savoir la Pipistrelle de Nathusius, la noctule de Leisler, la Noctule commune, la Sérotine commune, la Pipistrelle de Kuhl et la Pipistrelle commune, toutes espèces protégées décrites dans l'étude comme présentant un niveau de sensibilité élevé au risque de collision et dont certaines sont inscrites sur la liste rouge régionale comme espèces quasi-menacées, à savoir la Pipistrelle de Nathusius, la Noctule de Leisler et la Pipistrelle commune. Il résulte également de l'instruction que les zones d'implantation des deux groupes d'éoliennes constituent des territoires de chasse favorables pour les chiroptères et que l'éolienne E4, dont le mât sera implanté à 58 mètres d'un boisement, survolera une partie de ce boisement que l'étude écologique décrit comme attractif pour les espèces de haut vol, les lisières de boisements constituant des territoires de chasse préférentiels pour les Pipistrelles, mais aussi pour les Sérotules (groupe composé de la Sérotine commune, de la Noctule commune et de la Noctule de Leisler) qui exploitent indifféremment les milieux ouverts de type prairiaux et les lisières boisées. Enfin, il résulte de l'étude écologique que le niveau de vulnérabilité sur le site de ces espèces de haut vol, avant mise en œuvre de mesures d'évitement et de réduction, a été qualifié de faible, pour la Pipistrelle de Nathusius, de modéré à faible pour la Pipistrelle commune, la Pipistrelle de Khul et la Sérotine commune et de modéré pour la Noctule commune et la Noctule de Leisler au regard des niveaux d'activité, faibles à modérés, de ces espèces observés lors de l'inventaire acoustique. 21. Il résulte des développements qui précèdent, et alors qu'aucun élément ne permet d'estimer que la réalisation d'écoutes en altitude n'aurait pas modifié l'appréhension de l'impact du projet sur les chiroptères, que les conclusions de l'étude écologique évaluant les impacts résiduels du projet comme faibles pour la Pipistrelle de Khul, la Pipistrelle de Nathusius et la Pipistrelle commune et comme modérés pour la Noctule commune, la Sérotine commune et la Noctule de Leisler, ne peuvent être regardés comme ayant pleinement appréhendé l'ampleur des risques de collision et de barotraumatisme associé, tout au long de leur cycle biologique de ces espèces de chiroptères, sans que la société pétitionnaire puisse utilement faire état de l'installation en mars 2022, soit postérieurement à l'enquête publique, d'un mât de mesure. 22. Il résulte des points 19 à 21 que l'étude d'impact présente des insuffisances dans son volet chiroptérologique et que celles-ci ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population et ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. En ce qui concerne les atteintes aux intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement : 23. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas ". L'article L. 511-1 du même code énonce que : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ". Selon l'article L. 512-1 du même code : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. (...) ". S'agissant de la sécurité publique : 24. Il résulte de l'instruction que l'étude de dangers a analysé les risques résultant des différents scenarii d'accidents, dont ceux afférents à la projection de pales et de glace et a retenu que les risques étaient tous acceptables au titre de la " synthèse de l'acceptabilité des risques ". Si, s'agissant du risque de projection de pales ou fragments de pales, le niveau de gravité a été qualifié de " catastrophique " pour l'éolienne E1 et d'" important " pour l'éolienne E2 du fait de la présence, dans la zone d'effet du risque d'un rayon de 500 m autour des machines concernées, de l'autoroute A 11 et des routes départementales D 98 et D 961, situées respectivement à 150 m de l'éolienne E1 et 75 m et 210 m de l'éolienne E2, la probabilité d'occurrence de ce phénomène, de 10-4, a été codée en " D " dans l'étude de dangers, ce qui signifie que " ce phénomène s'est produit " mais qu'il a fait l'objet de mesures correctives réduisant significativement la probabilité grâce à la mise en place de différents dispositifs permettant de mieux maîtriser les risques. La probabilité de concomitance de l'évènement de projection de pâle et du passage d'un véhicule sur l'autoroute, de 10-6, a été qualifiée de très faible. S'agissant du risque de projection de glace, la probabilité d'accident sur les voies de circulation est également qualifiée de très faible, du fait de l'éclatement des morceaux de glace projetés en petits fragments, limitant ainsi le risque pour les véhicules circulant tant sur l'autoroute A11 que sur les routes départementales D 98 et D 961, alors en outre que les machines seront dotées d'un système d'arrêt en cas de détection de glace. Il s'ensuit que la seule proximité des éoliennes des voies de circulation et l'importance du trafic supporté par l'autoroute, invoqués par les requérants, ne suffisent pas à caractériser l'existence de risques qui viendraient infirmer la qualification de risque " acceptable " retenue dans l'arrêté attaqué. En outre, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la société s'est engagée à mettre en œuvre différentes mesures de maitrise des risques, qui ne se limitent pas à la réduction de la hauteur de l'éolienne E1 de 180 à 150 m, parmi lesquelles la mise en place d'un mécanisme d'alerte de l'opérateur lorsque les conditions climatiques sont favorables à la formation de glace sur les pales et une mise à l'arrêt automatique de l'installation, d'un dispositif de détection des vents forts et tempêtes avec arrêt automatique et diminution de la prise au vent de l'éolienne, d'un système de détection de l'échauffement des pièces mécaniques avec mise à l'arrêt ou bridage de l'installation ou encore d'un dispositif de détection des survitesses avec un système de freinage et mise en sécurité des installations. Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, il ne résulte pas de l'instruction que le projet de parc éolien exposerait les usagers des voies de circulation proches du projet éolien à des risques qui ne pourraient être prévenus et tels qu'ils auraient justifié un refus d'autorisation ou la prescription d'autres mesures que celles prévues. S'agissant de l'impact sur les chiroptères : 25. Le caractère insuffisant de l'étude écologique dans son volet chiroptérologique relevé au point 22 ne met pas la cour en mesure d'apprécier le respect, par la décision attaquée, des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement, s'agissant des atteintes susceptibles d'être portées par le projet aux espèces protégées de chiroptères. Il y a, dès lors, lieu pour la cour de réserver la réponse au moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions. S'agissant des atteintes à l'avifaune : 26. En premier lieu, si les requérants font valoir que les éoliennes E3 et E4 sont situées dans un couloir de migration prénuptiale, emprunté par la plupart des oiseaux migrateurs, ainsi qu'il a été dit au point 11, il résulte de l'étude écologique que les implantations des éoliennes E1, E2 et E4 " sont clairement en dehors du couloir de migration identifié " et que seule l'E3 est " localisée sur une branche de l'axe de migration des migrateurs ". S'agissant de l'avifaune migratrice postnuptiale, les implantations des quatre éoliennes sont situées en dehors des couloirs de migration identifiés. Les requérants n'apportent aucun élément permettant de remettre en cause le niveau d'impact du projet sur la migration prénuptiale qualifié de faible à modéré compte-tenu des faibles flux qu'elle concerne sur le site, ni le niveau d'impact faible retenu pour l'avifaune migratrice postnuptiale. Il résulte également de l'instruction que l'implantation retenue évite les zones de halte migratoire localisées au sud du projet et que l'impact sur la perte de zones de nourrissage et de zones de halte pour l'avifaune migratrice est considéré comme faible. Par ailleurs, l'arrêté attaqué prescrit la mise en place d'un suivi environnemental comprenant le suivi de l'activité et de la mortalité de l'avifaune selon les modalités du protocole de suivi environnemental des parcs éoliens terrestres reconnu par le ministère en charge de l'environnement, dans les 12 mois suivant la mise en service des installations. L'arrêté prévoit en outre que, dans le cadre du suivi de l'activité de l'avifaune, soit portée une attention particulière aux oiseaux migrateurs prénuptiaux et qu'en cas de mortalité significative de l'avifaune, l'exploitant devra adapter le fonctionnement des éoliennes, dès connaissance des résultats de suivi. Il ne résulte pas de l'instruction que ces mesures ne seraient pas suffisantes pour assurer la protection des chiroptères et de l'avifaune. 27. En second lieu, si comme le soutiennent les requérants, le secteur présente dans un rayon de 20 km une richesse écologique certaine avec notamment 4 ZNIEFF et 3 sites Natura 2000, à savoir la zone spéciale de conservation (ZSC) " carrières souterraines de Vouvray-sur-Huisne " située à 7,7 km du projet, la ZSC " massif forestier de Vibraye " à 9 km et la ZSC " Cuesta cénomanienne du Perche d'Eure-et-Loire " à 12 km, aucune zone de protection spéciale (ZPS) dépendant de la Directive européenne " Oiseaux " n'est localisée dans les 20 km autour de la zone d'implantation du projet. Sur ce point, les requérants n'apportent aucun élément permettant de remettre en cause l'analyse de l'étude avifaunistique selon laquelle l'incidence sur les populations des sites Natura 2000 est estimée comme non significative. 28. Il résulte des points 26 et 27 qu'aucune atteinte excessive portée aux espèces migratrices en violation des dispositions ci-dessus de l'article L. 511-1 du code de l'environnement ne saurait donc être retenue. S'agissant des atteintes aux paysages et au patrimoine : Quant aux atteintes aux paysages du Perche sarthois : 29. Il résulte de l'instruction que le projet éolien contesté s'inscrit en rive gauche de la large vallée de l'Huisne, au sein d'un relief de plaines entouré, à l'ouest, par une zone de plateaux aux vallées encaissées et, à l'est, par des espaces aux reliefs un peu contrastés. Le territoire d'implantation se caractérise par un paysage structuré par un relief de Cuesta (Cuesta de Melleray), la vallée encaissée de l'Huisne, et par des promontoires visuels formés par des crêtes et des buttes témoins. Le paysage est composé de bocage résiduel parsemé, de grandes cultures sur les pentes et les plateaux, et de prairies en fond de vallée. Parmi les différentes unités paysagères que compte le territoire d'implantation du projet, celle du Perche de la Haute Braye est décrite, dans l'étude paysagère, comme dessinant des paysages ouverts ponctués de buttes sur lesquelles prennent place des bourgs qui bénéficient ainsi de vues lointaines vers la Braye et ses affluents. Elle relève que les jeux de volumes qui suscitent des alternances d'écrans volumineux et boisés, de vues plates et filantes et de couloirs dégagés s'insérant entre deux pentes, constituent l'élément marqueur de ce paysage. Si l'architecte des bâtiments de France a émis un avis défavorable au projet, le 17 septembre 2018, après avoir considéré que le projet " défigurera une grande plaine, affectant le paysage sur des kilomètres à la ronde ", il résulte de l'instruction que le caractère visible des aérogénérateurs ne suffit pas à démontrer l'atteinte qui serait portée aux paysages alors qu'il résulte de l'instruction que l'ouverture du paysage et les grands volumes qui se dégagent offrent la possibilité d'assimiler visuellement l'échelle d'un projet éolien, ainsi que l'illustrent les photomontages qui ont été réalisés depuis des points hauts du territoire offrant de larges panoramas. Ces photomontages ont d'ailleurs permis de sélectionner la variante 4, décomposée en deux groupes de deux éoliennes, présentant une orientation semblable à celle de la vallée de la Queusne et dont le caractère compact est propre à recréer un élément repère fort dans le paysage. La seule allégation des requérants selon laquelle le projet éolien aura pour effet la dégradation " irréversible " des paysages du Perche sarthois ne saurait suffire à établir les atteintes aux paysages dont ils se prévalent et qui, selon eux, seraient de nature à justifier un refus d'autorisation. Quant aux atteintes au patrimoine : 30. Il résulte de l'instruction qu'au sein de l'aire d'étude immédiate du projet se trouve l'église de Saint-Martin à Lamnay, édifice protégé au titre de la législation des monuments historiques. Si une situation de co-visibilité du projet éolien avec le clocher de cette église a été identifiée depuis l'entrée sud du bourg, elle ne concerne que deux des 4 aérogénérateurs qui, situés en arrière-plan, ne seront visibles que de façon furtive par les usagers de la route. De même, si les 4 éoliennes sont visibles simultanément avec l'église de Saint-Martin à Courgenard, édifice classé depuis 1995, depuis un point haut à proximité du bourg, la silhouette de l'église, enserrée dans une trame arborée, est peu perceptible dans le paysage de sorte que les éoliennes n'entrent pas en concurrence visuelle avec elle. S'agissant du château de Montmirail, édifice inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, la seule circonstance que le parc éolien, situé à plus de 8 km, soit visible depuis la tour mais aussi depuis l'esplanade du château ne suffit pas à établir l'atteinte qui serait ainsi portée à l'édifice, compte-tenu de l'éloignement du parc qui vient amoindrir son effet visuel et au regard de la vue panoramique sur le paysage dont jouit le château et dans lequel le parc n'occupe qu'une portion limitée. Par ailleurs, les co-visibilités du parc éolien avec le château de Montmirail, illustrées par des photomontages réalisés depuis la forêt de Montmirail, ne révèlent aucun phénomène de concurrence visuelle ni de bouleversement des rapports d'échelle, compte-tenu de la distance qui les sépare et de l'implantation de l'édifice sur un promontoire lui permettant de conserver le caractère saillant de sa silhouette dans le paysage. Enfin, la végétation qui ceinture le parc du château permet de masquer en partie le parc éolien et d'amoindrir son effet visuel en période hivernale, depuis le parvis et les jardins du château ainsi que depuis le cœur du village, depuis lequel les vues sur le parc éolien sont impossibles. Quant à l'atteinte portée au patrimoine archéologique : 31. Si les requérants se prévalent de la réalisation de prospections menées lors d'une campagne en 2000/2001 par la société du Pays fertois sur les territoires des communes de Cherré-Au et Cormes qui auraient révélé une présence gallo-romaine associée à des éléments néolithiques, il ne résulte pas de l'instruction que ces vestiges se situeraient dans la zone d'implantation du parc éolien alors qu'aucune zone de présomption de prescriptions archéologiques n'est présente au sein de l'aire d'étude immédiate, la seule zone de sensibilité archéologique repérée étant localisée à la limite nord-est de l'aire d'étude immédiate et que le service régional de l'archéologie saisi, ainsi que le fait valoir le ministre, dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, n'a à cet égard émis aucune observation. En tout état de cause, la décision attaquée prévoit en son article 2.5.7 que si lors de la réalisation de travaux, des vestiges archéologiques étaient mis à jour, ils devront faire l'objet d'un signalement au service régional de l'archéologie. Quant à l'atteinte portée à l'activité touristique : 32. En se bornant à soutenir que le parc éolien autorisé par la décision attaquée sera de nature à porter atteinte au potentiel touristique dépendant de la préservation des paysages et du patrimoine local, les requérants n'établissent nullement leurs allégations alors qu'il ne résulte pas de l'instruction, ainsi que cela a été dit aux points 28 et 29, que le projet contesté serait de nature à porter atteinte aux paysages et au patrimoine local protégé. S'agissant de l'atteinte portée aux hameaux : 33. L'analyse spécifique portant sur la saturation visuelle réalisée sur les hameaux situés à moins d'un kilomètre du projet montre qu'aucun effet de saturation visuelle ni d'encerclement n'est observé sur l'ensemble des hameaux riverains. Certains hameaux et habitations présentent toutefois des ouvertures visuelles importantes vers le projet, pour lesquels une incidence forte a été retenue, à savoir les hameaux de la Verrerie, La Justière, Les Rieux, Le Petit Carémus et Bourdigal. La décision attaquée prévoit néanmoins, ainsi que s'y engageait le porteur du projet, de réduire l'impact visuel depuis les lieux de vie concernés par la plantation, en accord avec les riverains concernés, de haies et d'arbres de haut jet près des habitations, et a étendu cette mesure aux hameaux " Le Cormier ", " Les Richardières " et " Maison Rouge ", sans que les requérants n'établissent que d'autres hameaux subiraient également des ouvertures visuelles importantes sur le parc éolien. Si cette mesure ne permet pas d'occulter totalement le projet, elle est néanmoins de nature à en favoriser l'insertion dans son environnement proche. Par ailleurs, la circonstance, à la supposer établie, que le parc éolien serait source d'une perte de la valeur vénale des biens immobiliers situés dans la zone d'implantation du projet, dont le château de Montmirail, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, ce préjudice n'étant pas, en tout état de cause au nombre des intérêts protégés par les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement. S'agissant des risques pour la santé animale : 34. Si les requérants soutiennent que le parc éolien contesté exposera l'élevage de poulinières gestantes situé à moins de 500 mètres à des risques importants pour leur santé, les études produites ne permettent pas de conclure à un lien de causalité certain entre la mise en service de parcs éoliens et les troubles qui ont pu être observés dans certains élevages de bovins. L'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, saisie le 3 mai 2019, par le ministère de la Transition écologique et solidaire et le ministère de l'agriculture et de l'alimentation de la question de l'imputabilité à la présence d'un champ d'éoliennes de troubles rapportés dans deux élevages bovins, a, à cet égard, conclu dans son avis du 13 octobre 2021, produit par la société pétitionnaire, que " l'application de la méthode aux données exploitables conduit à considérer comme hautement improbable voire exclue que la mise en place des éoliennes ait conduit à générer les troubles objectivés ", après avoir souligné que " la vingtaine de retours obtenus d'acteurs homologues sollicités auprès des Etats Membres de l'Union Européenne n'a donné aucune identification de problème de ce type, y compris dans des pays ayant déployé de manière plus précoce et large que la France des parcs éoliens. En outre, l'analyse bibliographique conduit à constater un manque actuel de connaissances scientifiques concernant l'existence ou non d'effets sanitaires chez les animaux d'élevage imputables à la proximité de parc éolien en fonctionnement. Le peu de travaux disponibles sur le sujet ne mettent pas en évidence de tels effets, ni de mécanismes physiopathologiques, liés aux champs électromagnétiques, aux infrasons et aux vibrations générés par les éoliennes ". 35. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que les atteintes que le projet litigieux serait susceptible de porter à la protection de la nature et de l'environnement présentent le caractère de graves dangers ou inconvénients pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, pour la conservation des sites et des monuments, ainsi que pour la commodité du voisinage, pour la santé, la sécurité et l'agriculture. Sur l'application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : 36. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / II. - En cas d'annulation ou de sursis à statuer affectant une partie seulement de l'autorisation environnementale, le juge détermine s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties de l'autorisation non viciées. " 37. La faculté ouverte par les dispositions précitées du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, relève de l'exercice d'un pouvoir propre du juge, qui n'est pas subordonné à la présentation de conclusions en ce sens. Lorsqu'il n'est pas saisi de telles conclusions, le juge du fond peut toujours mettre en œuvre cette faculté, mais il n'y est pas tenu, son choix relevant d'une appréciation qui échappe au contrôle du juge de cassation. En revanche, lorsqu'il est saisi de conclusions en ce sens, le juge est tenu de mettre en œuvre les pouvoirs qu'il tient du 2° du I de l'article L. 181-18-du code de l'environnement si les vices qu'il retient apparaissent, au vu de l'instruction, régularisables. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l'intervention d'une décision corrigeant le vice dont est entachée la décision attaquée. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision attaquée, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. Si ces modalités ne sont pas légalement applicables, notamment du fait de l'illégalité des dispositions qui les définissent, il appartient au juge de rechercher si la régularisation peut être effectuée selon d'autres modalités qu'il lui revient de définir en prenant en compte les finalités poursuivies par les règles qui les ont instituées et en se référant, le cas échéant, aux dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue. 38. En l'espèce, le vice entachant l'autorisation environnementale en litige relatif aux insuffisances et inexactitudes de l'étude d'impact, relevé aux points 19 à 21, est susceptible d'être régularisé par un complément d'étude d'impact, le cas échéant, une enquête publique complémentaire afin de soumettre ces nouveaux éléments à la connaissance du public et une autorisation modificative. 39. Cette éventuelle autorisation modificative devra être communiquée à la cour dans un délai de 18 mois à compter de la notification du présent arrêt. Il y a lieu par suite de surseoir à statuer sur le surplus des conclusions de la requête jusqu'à l'expiration de ce délai afin de permettre cette régularisation. DÉCIDE : Article 1er : Il est sursis à statuer sur les conclusions de la requête présentée par la SCI Mons Mirabilis et autres jusqu'à l'expiration d'un délai de 18 mois, courant à compter de la notification du présent arrêt, imparti à l'État et à la société Ferme éolienne Huisne et Braye pour produire devant la cour une autorisation environnementale modificative conforme aux modalités définies au point 38 du présent arrêt. Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Mons Mirabilis, représentant unique désignée par Me de Kersauson et Me Chevalier, mandataires, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société Ferme éolienne Huisne et Braye. Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Buffet, présidente de chambre, - Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure, - M. Bréchot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. La rapporteure, I. MONTES-DEROUET La présidente, C. BUFFET La greffière, A. LEMEE La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03592
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme D... C..., épouse A... et M. B... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon, chacun en ce qui le concerne, d'annuler les arrêtés du 17 novembre 2021 par lesquels la préfète de l'Ain a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2201908-2201909 du 27 juin 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 24 octobre 2022, M. et Mme A..., représentés par Me Delbes, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler les arrêtés de la préfète de l'Ain du 17 novembre 2021 ; 3°) d'enjoindre à la préfète de l'Ain de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à leur conseil, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Ils soutiennent que : - la décision de refus de titre de séjour prise à l'encontre de Mme A... méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - les décisions prises à leur encontre méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale ; - ces décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation. En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction. Les requérants ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 septembre 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure, ayant été entendu au cours de l'audience publique ; Considérant ce qui suit : 1. M. et Mme A..., ressortissants kosovars nés respectivement les 17 juillet 1965 et 9 mai 1968, sont entrés en France en mai et avril 2019. Leurs demandes d'asile ont été rejetées, en dernier lieu, par la Cour nationale du droit d'asile le 10 février 2020. Mme A... a été admise au séjour en qualité d'étranger malade pendant la période du 23 mars 2020 au 22 mars 2021, son époux s'étant vu délivrer une autorisation provisoire de séjour valable du 26 octobre 2020 au 22 mars 2021. Les 26 janvier et 24 mars 2021, Mme A... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour et M. A... la délivrance d'un titre de séjour. Par des arrêtés du 17 novembre 2021, la préfète de l'Ain a refusé de faire droit à leurs demandes, a assorti ces refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 27 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions. 2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". 3. La partie qui justifie de l'avis d'un collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié et effectivement accessible dans le pays de renvoi. 4. Pour refuser de renouveler le titre de séjour de Mme A..., la préfète de l'Ain s'est fondée sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 4 juin 2021 indiquant que si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel elle peut voyager sans risque. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des différents certificats médicaux produits, que Mme A... a été prise en charge en France pour un cancer du rectum, qui a donné lieu à des séances de radiothérapie et de chimiothérapie préopératoires, à une opération chirurgicale réalisée le 14 octobre 2019, suivis d'une nouvelle chimiothérapie adjuvante d'une durée de six mois. Elle a, à ce titre, bénéficié d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade valable jusqu'en mars 2021, délivré après un premier avis favorable du collège de médecins du 23 mars 2020. Selon le certificat médical établi en dernier lieu le 1er février 2022 par le praticien hospitalier qui la suit, son traitement est terminé mais elle doit bénéficier, en raison du risque de rechute, d'une surveillance clinique impliquant la réalisation de scanners tous les cinq à six mois et de coloscopies régulières pendant cinq ans. Ce certificat, comme d'ailleurs les autres pièces médicales produites par Mme A..., n'indiquent pas que ce suivi ne pourrait pas être réalisé au Kosovo, pays dans lequel sa maladie a été diagnostiquée. Enfin, le refus de renouvellement de titre de séjour opposé à Mme A... ne lui interdit pas, par lui-même, de venir ponctuellement sur le territoire national pour y pratiquer des examens et y recevoir des soins. Dans ces conditions, en refusant de faire droit à sa demande de titre de séjour, la préfète de l'Ain n'a pas méconnu l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 5. Les moyens tirés de ce que les décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français prises à l'encontre de M. et Mme A... méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur leur situation personnelle, invoqués dans les mêmes termes qu'en première instance sans être assortis d'éléments nouveaux, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 9 de leur décision. 6. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C..., épouse A... et à M. B... A.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à la préfète de l'Ain. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : M. Pruvost, président, Mme Courbon, présidente-assesseure, M. Pin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 juin 2023. La rapporteure, A. Courbon Le président, D. Pruvost La greffière, N. Lecouey La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 22LY03146
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 22 mars 2021 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé la destination d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire. Par un jugement n° 2101553 du 28 avril 2022, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 29 octobre 2022, M. B..., représenté par Me Gauché, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté contesté ; 2°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans le délai de trente jours, subsidiairement, de réexaminer sa situation après lui avoir remis une autorisation provisoire de séjour et de travail, sans délai à compter de l'arrêt ; 3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement est irrégulier, il est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur de fait au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il retient l'absence de qualification et la durée de travail limitée ; il est entaché d'une erreur de droit au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que le caractère irrégulier du séjour ne peut servir de fondement au refus de titre ; - la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; - l'obligation de quitter le territoire français sera annulée en conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour ; elle est entachée de violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; - la décision fixant le pays de destination sera annulée en conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français. La requête de M. B... a été communiquée au préfet du Puy-de-Dôme qui n'a pas produit d'observations. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 septembre 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale des droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Le rapport de Mme Djebiri, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant kosovar né en 1978 et entré sur le territoire français en 2014 selon ses déclarations, relève appel du jugement du 28 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Clermont -Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 22 mars 2021 du préfet du Puy-de-Dôme lui refusant un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Si M. B... fait valoir que les premiers juges ont commis des erreurs de droit et de fait dans l'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme, de tels moyens ne mettent pas en cause l'irrégularité du jugement mais son bien-fondé. Aucune irrégularité ne saurait donc être retenue à cet égard. Sur le fond du litige : En ce qui concerne le refus de séjour : 3. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée (...) à l'étranger (...) dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) ". 4. Si M. B... se prévaut de son intégration en France, faisant état notamment de sa présence sur le territoire depuis sept ans, de sa connaissance du français, de ses activités bénévoles ou salariées et de la scolarisation de ses enfants, aucune de ces circonstances ne suffit à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels qui justifieraient, en l'espèce, son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Aucune erreur manifeste d'appréciation ne saurait être relevée ici. 5. M. B... se prévaut de la durée de sa présence en France avec son épouse de nationalité kosovare et ses trois enfants, et de son intégration sociale. Toutefois, le requérant qui a déjà fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il ne disposerait d'aucune attache au Kosovo, où il a vécu durant la majeure partie de sa vie, et où la famille pourra se reconstituer et les enfants pourront poursuivre leur scolarité. Ainsi, et en dépit des efforts fournis par M. B... pour s'insérer socialement, la décision contestée ne porte pas au droit dont il dispose en vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis. 6. Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " Le refus de titre de séjour opposé à M. B... n'a ni pour objet ni pour effet de le séparer de ses enfants dont il n'est pas établi qu'ils ne pourraient poursuivre leur scolarité au Kosovo. Dès lors, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision en cause méconnaîtrait l'intérêt supérieur de ses enfants. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 7. Compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus l'obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour. 8. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés plus haut. 9. La cellule familiale a vocation à se reconstituer au Kosovo dont tout la famille à la nationalité, où deux de ses enfants sont nés et où ils pourront poursuivre leur scolarité. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas nécessairement pour effet de séparer M. B... de ses enfants. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que la décision en cause méconnaîtrait l'intérêt supérieur de ses enfants, garanti par les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant. En ce qui concerne la fixation du pays de destination : 10. Compte tenu de ce qui a été dit plus haut, le requérant n'est pas fondé à invoquer l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination. 11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, C. DjebiriLe président, V.-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 22LY03198 al
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 13 février 2023 par lequel le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois et l'a assigné à résidence. Par un jugement n° 2301145 du 20 février 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal a rejeté cette demande. Procédures devant la cour I - Par une requête enregistrée le 16 mars 2023 sous le n° 23LY00939, M. B..., représenté par Me Vray, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal et l'arrêté susmentionné ; 2°) d'enjoindre au préfet de la Loire, sous astreinte de 50 euros par jour de retard dans le délai de huit jours de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir de réexaminer sa situation administrative en application de l'application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ; 3°) de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - le jugement est irrégulier ; le premier juge a entaché sa décision d'une contradiction de motif et d'une erreur de droit en relevant des faits démontrant que M. B... participe effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants, avant d'en conclure le contraire et le manque d'ancrage de sa vie privée et familiale en France ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation particulière ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; - la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois méconnaît les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il présente des circonstances humanitaires ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. La requête de M. B... a été communiquée au préfet de la Loire qui n'a pas présenté d'observations. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 avril 2023. II - Par une requête enregistrée le 16 mars 2023 sous le n° 23LY00940, M. B..., représenté par Me Vray, demande à la cour : 1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement ; 2°) d'enjoindre au préfet de la Loire sous astreinte de 50 euros par jour de retard dans le délai de huit jours de le de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à l'arrêt à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - son éloignement du territoire français, rendu possible par le jugement dont il sollicite le sursis à exécution, risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables ; - les moyens qu'il présente dans le cadre de sa requête enregistrée sous le n° 23LY00939 sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué et des décisions contestées. La requête de M. B... a été communiquée au préfet de la Loire qui n'a pas présenté d'observations. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 avril 2023. Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention internationale des droits de l'enfant ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - et les observations de M. B... ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 8 juin 2023, présentée pour M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant malien, est entré en France en 2016 selon ses déclarations. Par arrêté du 13 février 2023 le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois et l'a assigné à résidence. Par les deux requêtes visées plus haut, qu'il y a lieu de joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt, M. B..., relève appel du jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon portant rejet de sa demande d'annulation de l'arrêté du 13 février 2023 et demande également le sursis à exécution de ce jugement. Sur la régularité du jugement : 2. La circonstance que le tribunal, au prix d'une contradiction de motifs sur la contribution à l'éducation et à l'entretien de ses enfants, aurait à tort écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, intéresse le fond du litige et non la régularité de ce jugement. Sur la légalité de l'arrêté du 13 février 2023 : En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : 3. En premier lieu, le préfet de la Loire a indiqué les motifs de droit et de fait de sa décision, qui est ainsi régulièrement motivée. 4. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision qu'elle a été prise après examen effectif de la situation de M. B.... 5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". M. B... se prévaut de sa résidence en France depuis 2016 et de la présence, sur le territoire national, de ses deux enfants mineurs, nés en 2019 et 2022 pour l'un né d'une mère guinéenne titulaire d'un titre de séjour, dont il est séparé, et pour l'autre née d'une mère malienne qui a présenté une demande d'asile. Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'il vivrait avec cette dernière compagne, mère de sa fille trisomique alors qu'il s'est déclaré célibataire lors de son audition par les services de police le 13 février 2023. M. B..., n'a pas exécuté la mesure d'éloignement prise à son encontre par le préfet du Rhône le 16 septembre 2018 et n'a cherché à régulariser sa situation qu'à compter du 18 janvier 2023 en déposant une pré-demande de titre de séjour. S'il fait valoir qu'il entretient des liens avec ses enfants, il ne justifie pas avoir contribué à leur entretien et leur éducation par la production notamment de transferts d'argent destinés à son fils et d'un courrier adressé à son domicile concernant sa fille. M. B... n'est par ailleurs pas dépourvu d'attaches personnelles et familiales au Mali, où il a vécu jusqu'à l'âge de seize ans et où résident son père et ses demi-frères. Dans ces conditions, eu égard aux conditions de son séjour en France, il n'apparaît pas que l'obligation litigieuse de quitter le territoire aurait porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. 6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Les deux mandats de transferts d'argent, le courrier adressé à son domicile concernant sa fille, les achats de lait infantile et l'attestation qu'il accompagne sa fille à des rendez-vous médicaux, produits par M. B..., ne permettent ni d'établir qu'il contribuerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants, ni même qu'il vivrait sous le même toit. En outre, le préfet de la Loire n'a prononcé à l'encontre de l'appelant, qui ne pouvait ignorer la précarité de sa situation lors de son engagement dans des relations conjugales, qu'une interdiction de retour sur le territoire français de six mois, si bien que la mesure d'éloignement ne peut en tout état de cause être regardée comme ayant pour effet d'entraîner une séparation de longue durée entre les enfants et leur père. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées au point précédent doit donc être écarté. En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français : 7. M. B... réitère en appel sans y ajouter de nouveau développement son moyen tiré de la violation par la décision portant interdiction de retour sur le territoire de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce qu'il présente des circonstances humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 612-6 du même code, son moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur sa situation personnelle dont cette décision serait entachée, et son moyen relatif à la disproportion de la mesure. Il convient de les écarter par adoption des motifs circonstanciés retenus par le premier juge. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête enregistrée sous le n° 23LY00299 doit donc, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée. Sur les conclusions à fin de sursis à exécution : 9. Le présent arrêt statuant sur l'appel de M. B... dirigé contre le jugement n° 2301145 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon, les conclusions de la requête n° 23LY00940 tendant ce qu'il soit sursis à son exécution ont perdu leur objet et il n'y a donc plus lieu d'y statuer. 10. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par le conseil de M. B..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, et tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 DÉCIDE : Article 1er : La requête n° 23LY00939 de M. B... est rejetée. Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 23LY00940 de M. B... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 2301145 du 20 février 2023 du tribunal administratif de Lyon. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête n° 23LY00940 de M. B... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Loire. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, C. DjebiriLe président, V.-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N°s 23LY00939, 23LY00940 lc
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Vu la procédure suivante : I. Par une requête, enregistrée le 17 décembre 2021 sous le n° 21NT03611, la commune de Cherré-Au, représentée par Me Forcinal, demande à la cour : 1°) d'annuler l'arrêté du 6 août 2021 par lequel le préfet de la Sarthe a délivré à la société Ferme éolienne Huisne et Braye une autorisation environnementale pour la construction et l'exploitation d'un parc éolien de quatre aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Cormes et de Cherré-Au ainsi que la décision du 30 novembre 2021 portant rejet de son recours gracieux ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle justifie d'un intérêt pour agir ; - l'étude d'impact, réalisée par un bureau d'études non indépendant vis-à-vis du porteur du projet, est empreinte de partialité, ce qui a nui à l'information du public et des services ; - l'étude chiroptérologique est insuffisante en l'absence d'écoutes en altitude et dans la recherche de gîtes ; - l'étude sur l'avifaune est insuffisante au regard de l'activité migratoire significative présente sur le site et du risque de collision ; - ces insuffisances ont été de nature à nuire à l'information du public et ont exercé une influence sur le sens de la décision attaquée ; - l'étude paysagère est lacunaire, voire trompeuse dans la représentation des conditions d'insertion du projet dans le paysage ; - le projet génère des risques importants pour la sécurité des personnes, au regard du risque de projection des pales ou de glace, alors que le périmètre de dangers des éoliennes englobe l'autoroute A 11 ainsi que les routes départementales 261 et 98 ainsi que des habitations ; - le projet est de nature à porter des atteintes graves et irréversibles à l'environnement, en méconnaissance du principe de précaution, notamment à des espèces protégées de chiroptères compte-tenu de la proximité de haies et de différents espaces protégés abritant des chiroptères et des oiseaux, de la perte de fonctionnalité écologique globale du secteur et aux zones naturelles dont les zones humides ; - le projet est de nature à porter atteinte aux paysages du Perche sarthois et au patrimoine notamment aux édifices classés que sont l'église Saint-Martin de Lamnay et le château de Montmirail, compte-tenu des phénomènes de co-visibilité, à la commune de La Ferté-Bernard, aux hameaux, au patrimoine archéologique et à l'activité touristique ; - le projet, situé au cœur d'une zone d'élevage, crée des dangers pour la préservation de la santé animale. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2022, la société Ferme éolienne Huisne et Braye, représentée par Me Elfassi, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la requérante ne justifie pas d'un intérêt pour agir contre la décision attaquée ; - les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, conclut au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit prononcé, sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, un sursis à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai permettant la délivrance d'une autorisation modificative régularisant le vice relevé. Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. II. Par une requête, enregistrée le 17 décembre 2021 sous le n° 21NT03615, la commune de la Ferté-Bernard, représentée par Me Forcinal, demande à la cour : 1°) d'annuler l'arrêté du 6 août 2021 par lequel le préfet de la Sarthe a délivré à la société Ferme éolienne Huisne et Braye une autorisation environnementale pour la construction et l'exploitation d'un parc éolien de quatre aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Cormes et de Cherré-Au ainsi que la décision du 30 novembre 2021 portant rejet de son recours gracieux ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle justifie d'un intérêt pour agir ; - l'étude d'impact, réalisée par un bureau d'études non indépendant vis-à-vis du porteur du projet, est empreinte de partialité, ce qui a nui à l'information du public et des services ; - l'étude chiroptérologique est insuffisante en l'absence d'écoutes en altitude et dans la recherche de gîtes ; - l'étude sur l'avifaune est insuffisante au regard de l'activité migratoire significative présente sur le site ; - ces insuffisances ont été de nature à nuire à l'information du public et ont exercé une influence sur le sens de la décision attaquée ; - l'étude paysagère est lacunaire, voire trompeuse dans la représentation des conditions d'insertion du projet dans le paysage ; - le projet génère des risques importants pour la sécurité des personnes, au regard du risque de projection des pales ou de glace, alors que le périmètre de dangers des éoliennes englobe l'autoroute A 11 ainsi que les routes départementales 261 et 98 ainsi que des habitations ; - le projet est de nature à porter des atteintes graves et irréversibles à l'environnement, en méconnaissance du principe de précaution, notamment à des espèces protégées de chiroptères compte-tenu de la proximité de haies et de différents espaces protégés abritant des chiroptères et des oiseaux, de la perte de fonctionnalité écologique globale du secteur et aux zones naturelles dont les zones humides ; - le projet est de nature à porter atteinte aux paysages du Perche sarthois et au patrimoine notamment aux édifices classés que sont l'église Saint-Martin de Lamnay et le château de Montmirail, compte-tenu des phénomènes de co-visibilité, à la commune de La Ferté-Bernard, aux hameaux, au patrimoine archéologique et à l'activité touristique ; - le projet, situé au cœur d'une zone d'élevage, crée des dangers pour la préservation de la santé animale. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2022, la société Ferme éolienne Huisne et Braye, représentée par Me Elfassi, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la requérante ne justifie pas d'un intérêt pour agir contre la décision attaquée ; - les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, conclut au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit prononcé, sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, un sursis à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai permettant la délivrance d'une autorisation modificative régularisant le vice relevé. Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. III. Par une requête, enregistrée le 17 décembre 2021 sous le n° 21NT03617, la communauté de commune du Pays de l'Huisne sarthoise, représentée par Me Forcinal, demande à la cour : 1°) d'annuler l'arrêté du 6 août 2021 par lequel le préfet de la Sarthe a délivré à la société Ferme éolienne Huisne et Braye une autorisation environnementale pour la construction et l'exploitation d'un parc éolien de quatre aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Cormes et de Cherré-Au ainsi que la décision du 30 novembre 2021 portant rejet de son recours gracieux ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle justifie d'un intérêt pour agir ; - l'étude d'impact, réalisée par un bureau d'études non indépendant vis-à-vis du porteur du projet, est empreinte de partialité, ce qui a nui à l'information du public et des services ; - l'étude chiroptérologique est insuffisante en l'absence d'écoutes en altitude et dans la recherche de gîtes ; - l'étude sur l'avifaune est insuffisante au regard de l'activité migratoire significative présente sur le site et du risque de collision ; - ces insuffisances ont été de nature à nuire à l'information du public et ont exercé une influence sur le sens de la décision attaquée ; - l'étude paysagère est lacunaire, voire trompeuse dans la représentation des conditions d'insertion du projet dans le paysage ; - le projet génère des risques importants pour la sécurité des personnes, au regard du risque de projection des pales ou de glace, alors que le périmètre de dangers des éoliennes englobe l'autoroute A 11 ainsi que les routes départementales 261 et 98 ainsi que des habitations ; - le projet est de nature à porter des atteintes graves et irréversibles à l'environnement, en méconnaissance du principe de précaution, notamment à des espèces protégées de chiroptères compte-tenu de la proximité de haies et de différents espaces protégés abritant des chiroptères et des oiseaux, de la perte de fonctionnalité écologique globale du secteur et aux zones naturelles dont les zones humides ; - le projet est de nature à porter atteinte aux paysages du Perche sarthois et au patrimoine notamment aux édifices classés que sont l'église Saint-Martin de Lamnay et le château de Montmirail, compte-tenu des phénomènes de co-visibilité, à la commune de La Ferté-Bernard, aux hameaux, au patrimoine archéologique et à l'activité touristique ; - le projet, situé au cœur d'une zone d'élevage, crée des dangers pour la préservation de la santé animale. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2022, la société Ferme éolienne Huisne et Braye, représentée par Me Elfassi, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la communauté de communes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la requérante ne justifie pas d'un intérêt pour agir contre la décision attaquée ; - les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, conclut au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit prononcé, sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, un sursis à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai permettant la délivrance d'une autorisation modificative régularisant le vice relevé. Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Par un courrier du 1er juin 2023, les parties ont été invitées à produire des observations sur l'application par la cour de l'article L. 181-18 du code de l'environnement afin de permettre à la société Ferme éolienne Huisne et Braye d'obtenir une autorisation modificative régularisant le vices tiré de l'insuffisance du volet chiroptérologique de l'étude d'impact en l'absence d'écoutes en altitude. Par un mémoire, enregistré le 2 juin 2023, la commune de Cherré-Au, représentée par Me Forcinal, a présenté des observations en réponse au courrier du 1er juin 2023. Par un mémoire, enregistré le 2 juin 2023, la commune de La Ferté-Bernard, représentée par Me Forcinal, a présenté des observations en réponse au courrier du 1er juin 2023. Par un mémoire, enregistré le 2 juin 2023, la communauté de communes du Pays de l'Huisne sarthoise, représentée par Me Forcinal, a présenté des observations en réponse au courrier du 1er juin 2023. Par un mémoire, enregistré le 5 juin 2023, la société Ferme éolienne Huisne et Braye, représentée par Me Elfassi, a présenté des observations en réponse au courrier du 1er juin 2023. Une note en délibéré présentée par la société Ferme éolienne Huisne et Braye a été enregistrée le 14 juin 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Montes-Derouet, - les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique, - et les observations de Me Forcinal pour la commune de Cherré-Au, la commune de La Ferté-Bernard et la communauté de communes du Pays de l'Huisne sarthoise et de Me Kabra, substituant Me Elfassi, pour la société Ferme éolienne Huisne et Braye. Considérant ce qui suit : 1. La société Ferme éolienne Huisne et Braye a déposé, le 31 juillet 2018, une demande d'autorisation environnementale, complétée le 16 janvier 2019, en vue d'exploiter un parc éolien constitué de quatre aérogénérateurs, d'une hauteur maximale de 150 et 180 mètres en bout de pale et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Cormes et Cherré-Au. Par un arrêté du 6 août 2021, le préfet de la Sarthe a délivré à la société Ferme éolienne Huisne et Braye l'autorisation environnementale sollicitée. Par lettres du 30 novembre 2021, le préfet de la Sarthe a rejeté les recours gracieux formés contre cet arrêté par la commune de Cherré-Au, la commune de La Ferté-Bernard et la communauté de communes du Pays de l'Huisne sarthoise. Ces dernières demandent l'annulation de l'arrêté préfectoral du 6 août 2021 ainsi que des décisions par lesquelles le préfet de la Sarthe a expressément rejeté leur recours gracieux formé par lettres des 12 et 18 octobre 2021. 2. Les requêtes susvisées de la commune de Cherré-Au, de la commune de La Ferté-Bernard et de la communauté de communes du Pays de l'Huisne sarthoise sont relatives à un même projet de parc éolien et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt. Sur les fins de non-recevoir opposées aux requêtes : 3. En application de l'article R. 181-50 du code de l'environnement, les autorisations environnementales peuvent être déférées à la juridiction administrative " par les tiers intéressés en raison des inconvénients ou des dangers pour les intérêts mentionnés à l'article L. 181-3 ". L'article L. 511-1 du même code, auquel renvoie l'article L. 181-3, vise les dangers et inconvénients " soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ". Pour pouvoir contester une autorisation environnementale, les collectivités territoriales doivent justifier d'un intérêt suffisamment direct et certain leur donnant qualité pour en demander l'annulation, compte tenu des inconvénients et dangers que présente pour elles l'installation en cause, appréciés notamment en fonction de leur situation, de la configuration des lieux et des compétences que la loi leur attribue. 4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le projet d'exploitation du parc éolien litigieux se situe pour partie sur le territoire de la commune de Cherré-Au, laquelle se prévaut des incidences paysagères du parc sur son territoire et sur son patrimoine religieux telles que relevées par l'architecte des bâtiments de France dans son avis du 17 septembre 2018. Par suite, elle justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'autorisation délivrée pour l'exploitation de ce parc. 5. En deuxième lieu, si la commune de La Ferté-Bernard ne constitue pas le territoire d'implantation du parc éolien contesté, elle se prévaut des atteintes qui seront portées au paysage de la commune et à l'intérêt touristique de son territoire. Il résulte de l'instruction, notamment de l'étude paysagère, que le parc éolien, distant de la commune de 3,5 km, aura des incidences moyennes depuis les coteaux sur lesquels le bourg s'étend en raison des vues ouvertes sur le parc qu'ils permettent, depuis le GR 235, sentier touristique situé à l'ouest de la commune mais aussi partiellement depuis le centre du bourg. Cette commune justifie dès lors d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'arrêté attaqué. 6. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que la communauté de communes Huisne sarthoise recouvre les territoires d'implantation du parc éolien, à savoir les aires d'études immédiate, rapprochée et une grande partie de l'aire d'étude éloignée du parc. Elle est compétente notamment en matière d'aménagement de l'espace (SCOT et aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine), d'action de développement économique dont la promotion du tourisme et, au titre des compétences facultatives, pour l'aménagement des sentiers de randonnée. Elle se prévaut des incidences que le parc éolien pourra avoir sur les paysages de son territoire, ainsi que cela résulte de l'instruction, notamment sur les entités paysagères de la vallée de l'Huisne, que la communauté de communes. Par suite, elle justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'arrêté attaqué. 7. Il résulte des points 4 à 6 que les fins de non-recevoir opposées aux requêtes de la commune de Cherré-Au, de la commune de La Ferté-Bernard et de la communauté de communes du Pays de l'Huisne sarthoise doivent être écartées. Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 6 août 2021 : En ce qui concerne l'étude d'impact : 8. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. S'agissant des impacts sur l'avifaune : 9. En premier lieu, si les requérantes soutiennent que les enjeux avifaunistiques n'ont pas été suffisamment appréhendés, s'agissant des espèces migratrices volant à haute altitude, comme le Pluvier doré, la grande Aigrette, le Héron cendré et le Vanneau huppé, en l'absence notamment de toute écoute en altitude, ce type d'écoutes n'est pas préconisé s'agissant de l'avifaune par le guide relatif à l'élaboration des études d'impacts des projets de parcs éoliens terrestres. En tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que l'absence de telles écoutes aurait faussé l'inventaire des espèces migratrices fréquentant la zone d'implantation du projet, cet inventaire ayant été réalisé sur une année entière afin de couvrir l'ensemble du cycle biologique des espèces, en recensant les espèces en période prénuptiale (de mars à avril 2015), les espèces nicheuses (d'avril à mai 2015), les espèces en période postnuptiale (de septembre à octobre 2014) et les espèces hivernantes (de décembre 2014 à janvier 2015). Le suivi de l'avifaune migratrice a été réalisé au moyen de l'observation et du comptage des oiseaux à poste fixe durant 5-6 heures à partir du lever du soleil à l'aide d'une paire de jumelles et d'une longue-vue et qu'afin d'optimiser la détection des migrateurs, 3 points d'observation localisés sur une zone dégagée offrant un champ de vision suffisamment large ont été utilisés de manière à couvrir l'ensemble de la zone. Ce faisant, les auteurs de l'étude de l'avifaune ont suivi une méthodologie standardisée et éprouvée sur une durée suffisante pour dresser la liste des espèces présentes sur le site et leur densité, 23 espèces migratrices ayant ainsi été identifiées, dont 4 classées en vulnérabilité modérée (l'Hirondelle rustique, le Pluvier doré, le Pipit des arbres et le Merle à plastron) et 2 en vulnérabilité assez forte (la grande Aigrette et l'Autour des palombes). 10. En second lieu, les incidences du projet sur les espèces migratrices ont été suffisamment appréhendées, les auteurs de l'étude écologique s'étant attachés à identifier les couloirs de migration traversant le site et les hauteurs de vol des espèces, en période de migration prénuptiale et postnuptiale. L'étude conclut que les implantations des quatre éoliennes sont en dehors des couloirs de migration postnuptiale identifiés et que seule l'éolienne E3 est localisée sur une branche de l'axe de migration prénuptiale, au niveau du vallon de " Barbe d'Orge ". Elle qualifie l'impact du projet en période d'exploitation pour l'avifaune migratrice prénuptiale de faible à modéré, compte-tenu des flux faibles identifiés mais majoritairement compris entre 30 et 50 m d'altitude. Le risque de collision pour les espèces hivernantes, au nombre desquelles se trouve également le Pluvier doré et le Vanneau huppé, est qualifié de faible aux motifs que les haies, qui servent de refuge à ces espèces, seront globalement préservées et qu'elles se concentrent essentiellement dans les vallons humides éloignés de l'implantation projetée des éoliennes. La circonstance que la zone a été déclarée défavorable à l'éolien par le conseil départemental en raison de la richesse de sa biodiversité (espaces naturels sensibles des Ajeux à la Ferté-Bernard et d'un site Natura 2000 à Vibray et Vouvray-sur-Huisne) ne suffit pas à démontrer le caractère insuffisant de l'étude écologique dans l'analyse des impacts du projet sur les espèces migratrices. S'agissant de l'étude paysagère : 11. En premier lieu, si les requérantes soutiennent que les photomontages de l'étude paysagère ne rendraient pas suffisamment compte des impacts du projet de parc éolien sur le patrimoine historique composé de plus de 15 monuments historiques en situation de co-visibilité avec le projet éolien, il résulte de l'instruction que l'étude paysagère, annexée à l'étude d'impact, comporte plus de cinquante photomontages, principalement autour de la vallée de l'Huisne repérée comme présentant une forte sensibilité vis-à-vis du projet, auxquels se sont ajoutées de nouvelles prises de vue réalisées en janvier 2019, également soumises à l'enquête publique, pour apprécier l'impact du projet sur ses environnements immédiat, rapproché et intermédiaire. La localisation des photomontages a été déterminée à partir des zones de visibilités potentielles identifiées après modélisation des zones de visibilité théorique du projet dans un rayon d'environ 20 km autour de la zone d'implantation potentielle, qui intègre les effets de topographie et la présence de boisements, à l'exclusion des haies et des zones bâties, puis à partir de l'analyse paysagère qui a permis d'évaluer l'impact visuel du projet à l'échelle des 3 aires d'études paysagères, depuis les principaux sites identifiés comme présentant un intérêt paysager ou touristique, les bourgs et les axes de circulation. 12. En deuxième lieu, si les requérantes soutiennent que les photomontages ne permettraient pas de décrire de façon objective et sincère les impacts des éoliennes sur le paysage et le patrimoine historique, l'étude paysagère a identifié 15 monuments historiques et examiné la nature des incidences du projet sur ces édifices qui ont été décrits comme présentant une sensibilité de nulle à moyenne pour la majorité des édifices, à l'exception de l'église Sain-Martin à Lamnay et le château de Montmirail. L'étude paysagère présente plusieurs photomontages soulignant le caractère prégnant du parc éolien, notamment depuis le sentier GR 235 qui traverse une grande partie de la Sarthe en passant par la commune de La Ferté-Bernard ou depuis le hameau du Tertre, qui domine la ville et qualifie, du fait de ces points de vue, l'incidence du projet sur la commune de moyenne. Si la mission régionale d'autorité environnementale (MRAE) a indiqué dans son avis que " les photomontages sont réalisés sur la base de photographies prises à une saison où la végétation est en feuilles ce qui contribue à davantage masquer les éoliennes et ne rend pas compte de leur visibilité hivernale ", elle n'a pour autant formulé aucune recommandation visant à la réalisation de nouvelles prises de vue. Il résulte en outre de l'instruction que cette circonstance est évoquée dans certains photomontages concernant notamment la commune de La Ferté-Bernard, dont le photomontage n° 42 pris depuis un point haut proche de la commune, qui s'il fait état de la présence de haies jouant le rôle d'écran visuel, précise également qu'en l'absence de feuillage le projet bénéficiera d'une plus grande visibilité. 13. Il résulte des points 9 à 12 que l'étude d'impact ne présente pas d'insuffisance dans ses volets avifaunistique et paysager, lesquels ont été respectivement réalisés, ainsi que cela résulte de l'instruction, par 2 experts naturalistes du bureau d'études Althis et par 2 ingénieurs paysagistes du bureau d'études Vu d'Ici dont l'expertise n'est nullement contestée par les requérantes. La circonstance que ces bureaux d'études ont été sollicités par la société Energieteam dont le président assure également la présidence de la société EnR Gie Eole qui préside elle-même la société pétitionnaire est sans incidence sur le caractère suffisant de l'étude d'impact concernant ces deux volets, alors en outre que les dispositions de l'article R. 122-1 du code de l'environnement précise que " L'étude d'impact préalable à la réalisation du projet est réalisée sous la responsabilité du ou des maîtres d'ouvrage ". S'agissant des impacts sur les chiroptères : 14. Si les requérantes se prévalent de l'avis du commissaire-enquêteur soulignant que la recherche de gîtes a été conduite sur un périmètre restreint, il résulte de l'étude chiroptérologique que les prospections de gîtes d'hibernation et de parturition ont été menées sur la base de potentialités d'accueil, repérées tant au sein de la zone d'implantation potentielle qu'en périphérie, compte-tenu du caractère aléatoire et perturbant pour les espèces des visites de gîtes sur le terrain, ainsi que le relève le guide relatif à l'élaboration des études d'impacts des projets de parcs éoliens terrestres, lesquelles ont permis de conclure que l'aire d'étude présente un potentiel d'accueil limité pour les espèces anthropophiles, en dépit de potentialité de gîtes pour les espèces arboricoles. Il résulte également de l'instruction qu'un inventaire acoustique a été dressé à partir de 10 points d'écoutes actives au sol, réalisées lors de 6 sorties nocturnes et de 12 points d'écoutes passives sur 5 nuits, réparties sur deux périodes courant de juillet à septembre 2014, périodes de mise-bas, d'élevage des jeunes, de migration, d'accouplement et de transit vers les gîtes hivernaux et d'avril à juin 2015, périodes de migration et de transit vers les gîtes de mise-bas. Ces écoutes ont couvert de la sorte l'ensemble du cycle biologique annuel des chiroptères. Cet inventaire acoustique a permis d'identifier la présence certaine au sein de l'aire d'étude rapprochée de 15 espèces de chiroptères, dont la Pipistrelle commune qui domine le peuplement chiroptérologique du site (55,4 %), la Pipistrelle de Kuhl (28,9 %) puis dans une moindre mesure, la Sérotine commune (2,5%), le Murin à moustaches (2,2%), le complexe des Murin sp (2%), la Noctule commune (1%), le Murin de Natterer (1%), la Pipistrelle de Nathusius (1%), la Noctule de Leisler (0,8 %), toutes espèces inscrites à l'article 2 de l'arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection. 15. En revanche, il est constant, ainsi que le soutiennent les requérantes, que le suivi d'activité des chiroptères n'a fait l'objet d'aucune écoute en altitude, ainsi que l'a relevé la mission régionale de l'autorité environnementale (MRAE) dans son avis du 19 mars 2019, malgré les éléments de justification apportés le 16 janvier 2019 par la société pétitionnaire, qui ont été jugés insuffisants par la MRAE au regard des potentiels enjeux identifiés sur le site. La société Ferme éolienne Huisne et Braye ne saurait se prévaloir, pour justifier l'absence de réalisation d'écoutes en altitude au stade de l'étude d'impact, du protocole de suivi environnemental des parcs éoliens terrestres, reconnu par une décision du ministre de la transition écologique et solidaire du 5 avril 2018, en ce qu'il prévoit des modalités de suivi post-implantation renforcées pour les parcs éoliens dont l'étude d'impact n'a pas fait l'objet d'un suivi d'activité en hauteur en continu et sans échantillonnage, dès lors que l'objet de ce protocole est de définir les modalités de suivi environnemental des parcs éoliens en exploitation. L'étude chiroptérologique a elle-même relevé que les écoutes effectuées au sol ne permettent de connaître précisément que le peuplement chiroptérologique évoluant entre le sol et une vingtaine de mètres de hauteur, à l'exclusion donc du " cortège spécifique évoluant au niveau de la zone de rotation des pales, pouvant être impacté par un risque de collision " et que malgré les extrapolations qui peuvent être faites à partir du comportement et des mœurs des différentes espèces recensées sur la zone, " la connaissance du peuplement évoluant en altitude reste partielle (notamment sur l'abondance et la diversité spécifique du fait de la non détection de certaines espèces liées à des hauteurs de vol supérieures à 25 m) ". Or, il résulte de l'instruction que parmi les espèces identifiées sur la zone, six sont des espèces volant en altitude, à savoir la Pipistrelle de Nathusius, la noctule de Leisler, la Noctule commune, la Sérotine commune, la Pipistrelle de Kuhl et la Pipistrelle commune, toutes espèces protégées décrites dans l'étude comme présentant un niveau de sensibilité élevé au risque de collision et dont certaines sont inscrites sur la liste rouge régionale comme espèces quasi-menacées, à savoir la Pipistrelle de Nathusius, la Noctule de Leisler et la Pipistrelle commune. Il résulte également de l'instruction que les zones d'implantation des deux groupes d'éoliennes constituent des territoires de chasse favorables pour les chiroptères et que l'éolienne E4, dont le mât sera implanté à 58 mètres d'un boisement, survolera une partie de ce boisement que l'étude écologique décrit comme attractif pour les espèces de haut vol, les lisières de boisements constituant des territoires de chasse préférentiels pour les Pipistrelles, mais aussi pour les Sérotules (groupe composé de la Sérotine commune, de la Noctule commune et de la Noctule de Leisler) qui exploitent indifféremment les milieux ouverts de type prairiaux et les lisières boisées. Enfin, il résulte de l'étude écologique que le niveau de vulnérabilité sur le site de ces espèces de haut vol, avant mise en œuvre de mesures d'évitement et de réduction, a été qualifié de faible, pour la Pipistrelle de Nathusius, de modéré à faible pour la Pipistrelle commune, la Pipistrelle de Khul et la Sérotine commune et de modéré pour la Noctule commune et la Noctule de Leisler au regard des niveaux d'activité, faibles à modérés, de ces espèces observés lors de l'inventaire acoustique. 16. Il résulte des développements qui précèdent, et alors qu'aucun élément ne permet d'estimer que la réalisation d'écoutes en altitude n'aurait pas modifié l'appréhension de l'impact du projet sur les chiroptères, que les conclusions de l'étude écologique évaluant les impacts résiduels du projet comme faibles pour la Pipistrelle de Khul, la Pipistrelle de Nathusius et la Pipistrelle commune et comme modérés pour la Noctule commune, la Sérotine commune et la Noctule de Leisler, ne peuvent être regardées comme ayant pleinement appréhendé l'ampleur des risques de collision et de barotraumatisme associé, tout au long de leur cycle biologique de ces espèces de chiroptères, sans que la société pétitionnaire puisse utilement faire état de l'installation en mars 2022, postérieurement à l'enquête publique, d'un mât de mesure. 17. Il résulte des points 15 et 16 que les insuffisances de l'étude d'impact dans son volet chiroptérologique ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population et ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. En ce qui concerne les atteintes aux intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement : 18. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas ". L'article L. 511-1 du même code énonce que : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ". Selon l'article L. 512-1 du même code : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. (...) ". S'agissant de la sécurité publique : 19. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'étude de dangers a analysé les risques résultant des différents scenarii d'accidents, dont ceux afférents à la projection de pales et de glace et a retenu que les risques étaient tous acceptables au titre de la " synthèse de l'acceptabilité des risques ". Si, s'agissant du risque de projection de pales ou fragments de pales, le niveau de gravité a été qualifié de " Catastrophique " pour l'éolienne E1 et " Important " pour l'éolienne E2 du fait de la présence dans la zone d'effet du risque d'un rayon de 500 m autour des machines concernées de l'autoroute A 11 et des routes départementales D 98 et D 961, situées respectivement à 150 m de l'éolienne E1 et 75 m et 210 m de l'éolienne E2, la probabilité d'occurrence de ce phénomène, de 10-4, a été codée en " D " dans l'étude de dangers, ce qui signifie que " ce phénomène s'est produit " mais qu'il a fait l'objet de mesures correctives réduisant significativement la probabilité grâce à la mise en place de différents dispositifs permettant de mieux maîtriser les risques. La probabilité de concomitance de l'évènement de projection de pâle et du passage d'un véhicule sur l'autoroute, de 10-6, a été qualifiée de très faible. S'agissant du risque de projection de glace, la probabilité d'accident sur les voies de circulation est également qualifiée de très faible, du fait de l'éclatement des morceaux de glace projetés en petits fragments, limitant ainsi le risque pour les véhicules circulant tant sur l'autoroute A11 que sur les routes départementales D 98 et D 961, alors en outre que les machines seront dotées d'un système d'arrêt en cas de détection de glace. Il s'ensuit que la seule proximité des éoliennes des voies de circulation et l'importance du trafic supporté par l'autoroute, invoqués par les requérants, ne suffisent pas à caractériser l'existence de risques qui viendraient infirmer la qualification de risque " acceptable " retenu par l'arrêté attaqué. 20. En second lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, la société pétitionnaire s'est engagée à mettre en œuvre différentes mesures de maitrise des risques, qui ne se limitent pas à la réduction de la hauteur de l'éolienne E1 de 180 à 150 m, parmi lesquelles la mise en place d'un mécanisme d'alerte de l'opérateur lorsque les conditions climatiques sont favorables à la formation de glace sur les pales et une mise à l'arrêt automatique de l'installation, d'un dispositif de détection des vents forts et tempêtes avec arrêt automatique et diminution de la prise au vent de l'éolienne, d'un système de détection de l'échauffement des pièces mécaniques avec mise à l'arrêt ou bridage de l'installation ou encore d'un dispositif de détection des survitesses avec un système de freinage et de mise en sécurité des installations. 21. Il résulte des points 19 et 20 que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le projet de parc éolien n'expose pas les usagers des voies de circulation proches du projet éolien à des risques qui ne pourraient être prévenus et tels qu'ils auraient justifié un refus d'autorisation sollicitée ou la prescription d'autres mesures que celles prévues. S'agissant de l'impact sur les chiroptères : 22. Le caractère insuffisant de l'étude écologique dans son volet chiroptérologique ne met pas la cour en mesure d'apprécier le respect, par la décision attaquée, des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement s'agissant des atteintes susceptibles d'être portées par le projet aux espèces protégées de chiroptères. Il y a lieu, dès lors, pour la cour de réserver la réponse au moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions. S'agissant des atteintes à l'avifaune : 23. S'il résulte de l'instruction que le secteur présente dans un rayon de 20 km une richesse écologique certaine avec notamment 4 ZNIEFF et 3 sites Natura 2000, à savoir la zone spéciale de conservation (ZSC) " carrières souterraines de Vouvray-sur-Huisne " située à 7,7 km du projet, la ZSC " massif forestier de Vibraye " à 9 km et la ZSC " Cuesta cénomanienne du Perche d'Eure-et-Loire " à 12 km, aucune zone de protection spéciale (ZPS) dépendant de la Directive européenne " Oiseaux " n'est localisée dans les 20 km autour de la zone d'implantation potentielle. Si les requérantes se prévalent de ce que le parc éolien aura pour effet la perte de fonctionnalité écologique des corridors écologiques que constitueraient, pour les oiseaux, les ZNIEFF, les sites Natura 2000 mais aussi le parc naturel régional du Perche distant de 10 km ainsi qu'un espace naturel sensible sur la commune de La Ferté-Bernard, labellisé au titre de sa richesse ornithologique, l'étude écologique, dont il a été dit qu'elle n'était pas insuffisante dans son volet avifaunistique, conclut à l'absence de toute incidence sur la fréquentation et le rôle de ces espaces pour l'avifaune compte-tenu de leur éloignement du site, sans que ne soient apportés d'éléments venant remettre en cause ces appréciations. Par ailleurs, la destruction dans l'aire d'étude immédiate de haies qu'emportera la réalisation de chemins d'accès aux éoliennes ne concernera que 10 m linéaires d'une haie présentant un enjeu modéré, sur les 140 m linéaires existants et conservés. Il ne résulte dès lors pas de l'instruction que le parc éolien contesté porterait atteinte à l'avifaune et occasionnerait des dommages graves et irréversibles en méconnaissance du principe de précaution. S'agissant des atteintes aux milieux naturels et aux zones humides : 24. Si les requérantes font état de la présence dans l'aire d'étude immédiate de 230 ha de zones humides, il résulte de l'instruction qu'une étude pédologique a été menée pour le compte de la société pétitionnaire, que de vastes surfaces humides ont été prélocalisées sur les trois sous-unités de la zone d'implantation potentielle du parc éolien et que l'analyse des différentes données disponibles sur les zones humides a permis d'éviter l'implantation des éoliennes et de leurs aménagements annexes dans les zones humides identifiées. Ainsi, la détection d'une zone humide au niveau du chemin d'accès initialement prévu au Nord-Ouest des éoliennes E3 et E4 a conduit à son déplacement le long du boisement pour éviter tout impact sur ces milieux. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 23, le site d'implantation du parc éolien se trouve hors des périmètres des ZNIEFF, des sites Natura 2000 et du parc naturel régional du Perche et les requérantes n'apportent aucun élément établissant que le parc éolien aura une incidence sur les habitats naturels et la flore de ces sites. A cet égard, la seule circonstance que la zone a été identifiée comme défavorable à l'éolien en raison de la richesse de sa biodiversité, dans le schéma départemental éolien adopté par le conseil départemental par une délibération du 15 décembre 2017, qui est dépourvue de tout caractère réglementaire, ne suffit pas à établir que le projet sera de nature à générer des incidences sur la biodiversité. S'agissant des atteintes aux paysages et au patrimoine : Quant aux atteintes aux paysages du Perche sarthois : 25. Il résulte de l'instruction que le projet éolien contesté s'inscrit en rive gauche de la large vallée de l'Huisne, au sein d'un relief de plaines entouré, à l'ouest, par une zone de plateaux aux vallées encaissées et, à l'est, par des espaces aux reliefs un peu contrastés. Le territoire d'implantation se caractérise par un paysage structuré par un relief de Cuesta (Cuesta de Melleray), la vallée encaissée de l'Huisne et par des promontoires visuels formés par des crêtes et des buttes témoins. Le paysage est composé de bocage résiduel parsemé, de grandes cultures sur les pentes et les plateaux et de prairies en fond de vallée. Parmi les différentes unités paysagères que compte le territoire d'implantation du projet, celle du Perche de la Haute Braye est décrite, dans l'étude paysagère, comme dessinant des paysages ouverts ponctués de buttes sur lesquelles prennent place des bourgs qui bénéficient ainsi de vues lointaines vers la Braye et ses affluents. Elle relève que les jeux de volumes qui suscitent des alternances d'écrans volumineux et boisés, de vues plates et filantes et de couloirs dégagés s'insérant entre deux pentes, constituent l'élément marqueur de ce paysage. Si l'architecte des bâtiments de France a émis un avis défavorable le 17 septembre 2018, au projet en indiquant qu'" défigurera une grande plaine, affectant le paysage sur des kilomètres à la ronde ", le caractère visible des aérogénérateurs ne suffit pas à démontrer l'atteinte qui serait portée aux paysages alors qu'il résulte de l'instruction que l'ouverture du paysage et les grands volumes qui se dégagent offrent la possibilité d'assimiler visuellement l'échelle d'un projet éolien, ainsi que l'illustrent les photomontages qui ont été réalisés depuis des points hauts du territoire offrant de larges panoramas. Ces photomontages ont d'ailleurs permis de sélectionner la variante 4, décomposée en deux groupes de deux éoliennes, présentant une orientation semblable à celle de la vallée de la Queusne et dont le caractère compact est propre à recréer un élément repère fort dans le paysage. Quant aux atteintes au patrimoine : 26. Il résulte de l'instruction qu'au sein de l'aire d'étude immédiate du projet, se trouve l'église de Saint-Martin à Lamnay, édifice protégé au titre de la législation des monuments historiques. Si une situation de co-visibilité du projet éolien avec le clocher de cette église a été identifiée depuis l'entrée sud du bourg, elle ne concerne que deux des 4 aérogénérateurs qui, situés en arrière-plan, ne seront visibles que de façon furtive par les usagers de la route. De même, si les 4 éoliennes sont visibles simultanément avec l'église de Saint-Martin à Courgenard, édifice classé depuis 1995, depuis un point haut à proximité du bourg, la silhouette de l'église, enserrée dans une trame arborée, est peu perceptible dans le paysage de sorte que les éoliennes n'entrent pas en concurrence visuelle avec elle. Le château du Haut-Buisson, situé sur la commune de Cherré-Au, à 1,9 km de l'éolienne la plus proche, est un édifice abandonné et très dégradé qui ne fait l'objet d'aucune protection. Si le parc est ouvert au public, le photomontage 47 de l'étude paysagère révèle l'absence de toute vue sur le parc éolien du fait du contexte arboré du lieu qui masque les éoliennes. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que le patrimoine historique de la commune de La Ferté-Bernard se trouvant dans la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) serait en situation de co-visibilité avec le parc éolien contesté, alors qu'il résulte de l'étude paysagère que les monuments historiques de la commune, à savoir l'ancien château fort, son enceinte, l'ancienne porte de la ville, une église, une chapelle, les anciennes halles et les maisons de rue sont enserrés au sein d'un tissu urbain dense, ce qui les rend peu visibles. S'agissant, enfin, du château de Montmirail, édifice inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, la seule circonstance que le parc éolien, situé à plus de 8 km, soit visible depuis la tour mais aussi depuis l'esplanade du château ne suffit pas à établir l'atteinte qui serait ainsi portée à l'édifice, compte-tenu de l'éloignement du parc qui vient amoindrir son effet visuel et au regard de la vue panoramique sur le paysage dont jouit le château et dans lequel le parc n'occupe qu'une portion limitée. Par ailleurs, les co-visibilités du parc éolien avec le château de Montmirail, illustrées par des photomontages réalisés depuis la forêt de Montmirail, ne révèlent aucun phénomène de concurrence visuelle ni de bouleversement des rapports d'échelle, compte-tenu de la distance qui les sépare et de l'implantation de l'édifice sur un promontoire lui permettant de conserver le caractère saillant de sa silhouette dans le paysage. Enfin, la végétation qui ceinture le parc du château permet de masquer en partie le parc éolien et d'amoindrir son effet visuel en période hivernale, depuis le parvis et les jardins du château ainsi que depuis le cœur du village, depuis lequel les vues sur le parc éolien sont impossibles. Quant à l'atteinte portée au patrimoine archéologique : 27. Si les requérantes se prévalent de la réalisation de prospections menées lors d'une campagne en 2000/2001 par la société du Pays fertois sur les territoires des communes de Cherré-Au et Cormes qui auraient révélé une présence gallo-romaine associée à des éléments néolithiques, il ne résulte pas de l'instruction que ces vestiges se situeraient dans la zone d'implantation du parc éolien alors qu'aucune zone de présomption de prescriptions archéologiques n'est présente au sein de l'aire d'étude immédiate, la seule zone de sensibilité archéologique repérée étant localisée à la limite nord-est de l'aire d'étude immédiate et qu'il résulte de l'instruction que le service régional de l'archéologie saisi, ainsi que le fait valoir le ministre, dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, n'a à cet égard émis aucune observation. En tout état de cause, la décision attaquée prévoit en son article 2.5.7 que si lors de la réalisation de travaux, des vestiges archéologiques étaient mis à jour, ils devront faire l'objet d'un signalement au service régional de l'archéologie. Quant à l'atteinte portée à l'activité touristique : 28. En se bornant à soutenir que le parc éolien autorisé par la décision attaquée sera de nature à porter atteinte au potentiel touristique dépendant de la préservation des paysages et du patrimoine local mais aussi à un parcours cyclable recensé " par le guide touristique " entre les communes de Montmirail et de la Ferté-Bernard, via la D98, les requérantes ne démontrent nullement ces allégations, alors qu'il ne résulte pas de l'instruction, ainsi que cela a été dit au point 25, que le projet contesté serait de nature à porter atteinte aux paysages et au patrimoine local protégé. S'agissant de l'atteinte portée aux hameaux : 29. L'analyse spécifique portant sur la saturation visuelle réalisée sur les hameaux situés à moins d'un kilomètre du projet montre qu'aucun effet de saturation visuelle ni d'encerclement n'est observé sur l'ensemble des hameaux riverains. Certains hameaux et habitations présentent toutefois des ouvertures visuelles importantes vers le projet, pour lesquels une incidence forte a été retenue, à savoir les hameaux de la Verrerie, La Justière, Les Rieux, Le Petit Carémus et Bourdigal. La décision attaquée prévoit néanmoins, ainsi que s'y engageait le porteur du projet, de réduire l'impact visuel depuis les lieux de vie concernés par la plantation, en accord avec les riverains concernés, de haies et d'arbres de haut jet près des habitations, et a étendu cette mesure aux hameaux Le Cormier, Les Richardières et Maison Rouge, sans que les requérantes n'établissent que d'autres hameaux subiraient également des ouvertures visuelles importantes sur le parc éolien. Si cette mesure ne permettra pas d'occulter totalement le projet, elle est de nature à en favoriser l'insertion dans son environnement proche. Par ailleurs, la circonstance, à la supposer établie, que le parc éolien serait source d'une perte de la valeur vénale des biens immobiliers situés dans la zone d'implantation du projet est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, ce préjudice n'étant pas, en tout état de cause, au nombre des intérêts protégés par les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement. S'agissant des risques pour la santé animale : 30. Si les requérantes soutiennent que le parc éolien contesté exposera l'élevage de poulinières gestantes situé à moins de 500 mètres à des risques importants pour leur santé, les études produites ne permettent pas de conclure à un lien de causalité certain et direct entre la mise en service de parcs éoliens et les troubles qui ont pu être observés dans certains élevages de bovins. L'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, saisie le 3 mai 2019 par le ministère de la Transition écologique et solidaire et le ministère de l'agriculture et de l'alimentation de la question de l'imputabilité à la présence d'un champ d'éoliennes de troubles rapportés dans deux élevages bovins, a, à cet égard, conclu dans son avis du 13 octobre 2021, produit par la société pétitionnaire, que " l'application de la méthode aux données exploitables conduit à considérer comme hautement improbable voire exclue que la mise en place des éoliennes ait conduit à générer les troubles objectivés ", après avoir souligné que " la vingtaine de retours obtenus d'acteurs homologues sollicités auprès des Etats Membres de l'Union Européenne n'a donné aucune identification de problème de ce type, y compris dans des pays ayant déployé de manière plus précoce et large que la France des parcs éoliens. En outre, l'analyse bibliographique conduit à constater un manque actuel de connaissances scientifiques concernant l'existence ou non d'effets sanitaires chez les animaux d'élevage imputables à la proximité de parc éolien en fonctionnement. Le peu de travaux disponibles sur le sujet ne mettent pas en évidence de tels effets, ni de mécanismes physiopathologiques, liés aux champs électromagnétiques, aux infrasons et aux vibrations générés par les éoliennes ". 31. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que les atteintes que le projet litigieux serait susceptible de porter à la protection de la nature et de l'environnement présentent le caractère de graves dangers ou inconvénients pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, pour la conservation des sites et des monuments ainsi que pour la commodité du voisinage, pour la santé, la sécurité et l'agriculture. Sur l'application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : 32. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / II. - En cas d'annulation ou de sursis à statuer affectant une partie seulement de l'autorisation environnementale, le juge détermine s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties de l'autorisation non viciées. " 33. La faculté ouverte par les dispositions précitées du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, relève de l'exercice d'un pouvoir propre du juge, qui n'est pas subordonné à la présentation de conclusions en ce sens. Lorsqu'il n'est pas saisi de telles conclusions, le juge du fond peut toujours mettre en œuvre cette faculté, mais il n'y est pas tenu, son choix relevant d'une appréciation qui échappe au contrôle du juge de cassation. En revanche, lorsqu'il est saisi de conclusions en ce sens, le juge est tenu de mettre en œuvre les pouvoirs qu'il tient du 2° du I de l'article L. 181-18-du code de l'environnement si les vices qu'il retient apparaissent, au vu de l'instruction, régularisables. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l'intervention d'une décision corrigeant le vice dont est entachée la décision attaquée. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision attaquée, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. Si ces modalités ne sont pas légalement applicables, notamment du fait de l'illégalité des dispositions qui les définissent, il appartient au juge de rechercher si la régularisation peut être effectuée selon d'autres modalités qu'il lui revient de définir en prenant en compte les finalités poursuivies par les règles qui les ont instituées et en se référant, le cas échéant, aux dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue. 34. En l'espèce, le vice entachant l'autorisation environnementale en litige relatif aux insuffisances et inexactitudes de l'étude d'impact, relevé aux points 15 et 16, est susceptible d'être régularisé par un complément d'étude d'impact, le cas échéant, une enquête publique complémentaire afin de soumettre ces nouveaux éléments à la connaissance du public et une autorisation modificative. 35. Cette éventuelle autorisation modificative devra être communiquée à la cour dans un délai de 18 mois à compter de la notification du présent arrêt. Il y a lieu par suite de surseoir à statuer sur les conclusions des requêtes jusqu'à l'expiration de ce délai afin de permettre cette régularisation. DÉCIDE : Article 1er : Il est sursis à statuer sur les conclusions des requêtes présentées par la commune de Cherré-Au, par la commune de La Ferté-Bernard et par la communauté de communes du Pays de l'Huisne sarthois jusqu'à l'expiration d'un délai de 18 mois, courant à compter de la notification du présent arrêt, imparti à l'État et à la société Ferme éolienne Huisne et Braye pour produire devant la cour une autorisation environnementale modificative conforme aux modalités définies au point 34 du présent arrêt. Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cherré-Au, à la commune de La Ferté-Bernard, à la communauté de communes du Pays de l'Huisne sarthoise, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société Ferme éolienne Huisne et Braye. Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Buffet, présidente de chambre, - Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure, - M. Bréchot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. La rapporteure, I. MONTES-DEROUET La présidente, C. BUFFET La greffière, Aline LEMEE La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03611, 21NT03615, 21NT03617
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... C... et M. A... D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 22 mars 2018 par lequel le maire d'Erbray a accordé à la société Free mobile un permis de construire un pylône de relais de radiotéléphonie mobile sur la parcelle cadastrée section YI no 36 au lieu-dit " La Moussais " à Erbray. Par un jugement no 1806812 du 11 janvier 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 9 mars 2022, Mme C... et M. D..., représentés par la SELARL Cadrajuris, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 22 mars 2018 du maire d'Erbray ; 3°) de mettre à la charge de la commune d'Erbray une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - ils justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre l'arrêté contesté ; - le permis de construire contesté méconnait l'article A3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Erbray ; - il méconnait les dispositions de l'article R. 111- 2 du code de l'urbanisme et le principe de précaution reconnu par l'article 5 de la charte de l'environnement ; - les dispositions des articles L. 34-9-1 et R. 20-29 du code des postes et des communications électroniques ont été méconnues dès lors que les délais et les modalités d'information des habitants n'ont pas été respectés. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2022, la commune d'Erbray, représentée par la SELARL Cornet-Vincent-Ségurel, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme C... et M. D... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme C... et M. D... ne sont pas fondés. La requête a été communiquée à la société Free Mobile, qui n'a pas produit de mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la Charte de l'environnement ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Bréchot, - les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique, - les observations de Me Rioual, substituant Me Flynn, représentant M. D... et Mme C..., et les observations de Me Léon, représentant la commune d'Erbray. Considérant ce qui suit : 1. Le 16 novembre 2017, la société Free mobile a déposé en mairie d'Erbray une demande de permis de construire pour l'implantation d'un pylône de relais de radiotéléphonie mobile d'une hauteur de 40 mètres, couronné d'un paratonnerre d'une hauteur de 1,86 mètre, sur la parcelle cadastrée section YI n° 36, située au lieu-dit La Moussais à Erbray. Par un arrêté du 22 mars 2018, le maire d'Erbray a délivré ce permis de construire. Mme C... et M. D..., voisins immédiats du terrain d'assiette du projet, relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande d'annulation de cet arrêté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes de l'article A3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Erbray, relatif à la voirie et aux accès : " Tout terrain enclavé est inconstructible à moins que son propriétaire ne produise une servitude de passage suffisante, instituée par un acte authentique ou par voie judiciaire, en application de l'article 682 du Code Civil. / (...) / Les voies doivent avoir des caractéristiques adaptées à l'approche du matériel de lutte contre l'incendie. / Les dimensions, formes et caractéristiques techniques des voies doivent être adaptées aux usages qu'elles supportent ou aux opérations qu'elles doivent desservir. / Les voies se terminant en impasse doivent être aménagées de telle sorte que les véhicules puissent faire demi-tour. / (...). " 3. Il ressort des pièces du dossier que la desserte du terrain d'assiette du projet est prévue par le chemin de " la Moussais ", qui part de la voie communale de la Moussais et dessert notamment la maison d'habitation des requérants et plusieurs parcelles agricoles. Ce chemin est bitumé dans sa première partie, jusqu'à la maison des requérants, et enherbé au-delà. Si les requérants soutiennent que ce chemin constituerait un chemin d'exploitation, cette circonstance s'avère sans incidence sur la légalité du permis de construire du 22 mars 2018 au regard de l'article A3 du règlement du plan local d'urbanisme, l'article 5 des dispositions générales du plan local d'urbanisme qu'ils invoquent se bornant à définir " les voies et emprises publiques " pour la seule application de l'article 6 de chaque zone, relatif à l'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques. En tout état de cause, ils n'apportent aucun élément sérieux de nature à démontrer que ce chemin, identifié au cadastre comme étant un chemin rural, ne serait pas affecté à l'usage du public, notamment à celui des véhicules des propriétaires riverains ainsi qu'à celui des piétons et randonneurs qui peuvent l'emprunter pour rejoindre la route départementale no 40. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la partie non bitumée de ce chemin, d'une largeur importante, ne serait pas carrossable ni adaptée à l'approche du matériel de lutte contre l'incendie et à son utilisation par les véhicules chargés occasionnellement de la maintenance du pylône. Enfin et en tout état de cause, s'il est vrai que ce chemin se termine en impasse pour les véhicules motorisés, il ne ressort pas des pièces du dossier que la configuration de son extrémité, eu égard à sa largeur, empêcherait les véhicules d'y faire demi-tour. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article A3 du règlement du plan local d'urbanisme d'Erbray doit être écarté. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Selon l'article 5 de la Charte de l'environnement : " Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. " 5. Les requérants soutiennent que l'installation d'une antenne-relais de téléphonie mobile à proximité directe de leur habitation pourrait, dès lors qu'elle sera source de champs électromagnétiques, selon eux, dangereux pour la santé humaine, être nuisible à leur santé ainsi qu'à celle des enfants qu'accueille Mme C... au titre de son activité d'assistante maternelle. S'ils produisent une étude de l'Agence nationale de sécurité sanitaire parue en juin 2016 relative aux dangers pour la santé des enfants que peut, en général, comporter l'exposition aux ondes électromagnétiques et aux radiofréquences émises notamment par les téléphones portables, les éléments contenus dans cette étude ne sont pas suffisamment circonstanciés pour considérer qu'en l'état des connaissances scientifiques, des risques, mêmes incertains, seraient de nature à faire obstacle au projet de la société Free Mobile. Par suite, les moyens tirés de ce que l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance du principe de précaution et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doivent être écartés. 6. En dernier lieu, le moyen, inopérant, tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 34-9-1 et R. 20-29 du code des postes et des communications électroniques, doit être écarté par adoption des motifs retenus au point 6 du jugement attaqué. 7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... et M. D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Erbray, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme C... et M. D... demandent au titre des frais exposés par eux à l'occasion du litige soumis au juge. 9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune d'Erbray au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme C... et M. D... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la commune d'Erbray présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et M. A... D..., à la société Free Mobile et à la commune d'Erbray. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Buffet, présidente de chambre, - Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure, - M. Bréchot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. Le rapporteur, F.-X. BréchotLa présidente, C. Buffet La greffière, A. Lemée La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 22NT00733
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Brest à lui verser la somme de 149 286,42 euros en réparation des préjudices résultant de sa prise en charge par cet établissement le 26 janvier 2011. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Finistère a demandé au tribunal de condamner le centre hospitalier universitaire de Brest à lui verser la somme de 160 176,80 euros ou, à défaut la somme de 64 070,72 euros, au titre de ses débours. Par un jugement n° 1805567 du 8 octobre 2021, le tribunal administratif de Rennes a condamné le CHU de Brest à verser à M. B... la somme de 34 221,68 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère la somme de 63 057,93 euros au titre de ses débours. Procédure devant la cour : Par un arrêt du 17 juin 2022, la cour, après avoir joint les deux requêtes, a appelé à la cause l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales et a ordonné avant dire droit une nouvelle expertise médicale. Par des mémoires enregistrés les 19 avril et 16 mai 2023, le CHU de Brest, représenté par Me Le Prado, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ; 2°) de rejeter les demandes présentées par M. B... et la CPAM du Finistère devant le tribunal ; 3°) de rejeter les conclusions présentées par la voie de l'appel incident par M. B.... Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a jugé qu'il avait commis une faute dans la prise en charge de M. B..., dès lors qu'aucune maladresse chirurgicale fautive dans cette prise en charge n'est établie. Par un mémoire enregistré le 28 mars 2023, M. B..., représenté par Me Cartron, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête du centre hospitalier universitaire de Brest ; 2°) de réformer le jugement du 8 octobre 2021 en ce qu'il a limité la somme que le centre hospitalier est condamné à lui verser à un montant de 34 221,68 euros et de la porter à un montant global de 151 898,38 euros, assorti des intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2018 et de leur capitalisation ; 3°) de mettre à la charge du CHU ou, à titre subsidiaire de l'ONIAM, la somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - le CHU a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, dès lors que plusieurs maladresses techniques ont été commises lors de sa prise en charge, qui sont en lien direct avec les dommages subis découlant d'une plaie urétérale et d'une fistule urétro-colique ; - si la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Brest pour faute n'était pas retenue, l'indemnisation des préjudices subis incomberait à l'ONIAM au titre de la solidarité nationale en application des dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dès lors que les dommages subis sont imputables à un acte de soin et ont entraîné un déficit fonctionnel temporaire supérieur à 50% pendant une durée de deux ans et demi sans interruption ; - la maladresse fautive commise a entraîné l'entier dommage subi ; - à supposer même que cette maladresse n'ait entraîné qu'une perte de chance d'éviter ce dommage, le taux de perte de chance retenu ne saurait être inférieur à 40% ; - il a subi des préjudices qui doivent être évalués aux sommes de : * 3 967,66 euros au titre des frais divers, * 5 255,76 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels, * 15 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, * 11 063 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire, * 35 000 euros au titre des souffrances endurées, * 20 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, * 37 800 euros au titre de son déficit fonctionnel permanent, * 8 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, * 15 000 euros au titre du préjudice sexuel. Par un mémoire enregistré le 23 mars 2023, la CPAM du Finistère, représentée par Me Paublan, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête du CHU de Brest ; 2°) de mettre à la charge du centre hospitalier la somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et celle de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens soulevés par le CHU de Brest ne sont pas fondés. Par un mémoire enregistré le 2 mai 2023, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) a produit des observations sur le rapport des experts désignés par la cour. Il fait valoir que la mission des experts désignés par la cour englobait nécessairement de délivrer un avis sur la prise en charge des complications survenues au décours et dans les suites de l'intervention du 26 janvier 2011. Vu : - les ordonnances des 22 et 24 mai 2023 par lesquelles le président de la cour a taxé et liquidé les frais et honoraires de l'expertise ; - les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Catroux, - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - et les observations de Me Cahu, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. Au mois de mars 2010, il a été diagnostiqué chez M. B..., né le 3 mai 1958, un cancer du tiers inférieur du rectum. Il a été pris en charge au centre hospitalier universitaire (CHU) de Brest pour cette affection, qui a donné lieu à un traitement par radio-chimiothérapie, ainsi que, le 26 janvier 2011, à une intervention chirurgicale par colo-proctectomie gauche avec résection inter sphinctérienne et anastomose colo-anale en losange, et iléostomie temporaire de décharge. A la suite de cette intervention, une plaie de l'uretère gauche et une fistule urétrale ont été découvertes. Le 4 mars 2011, les sondes de néphrostomie gauche et droite de M. B... ont été remplacées et une sonde urétérale droite a été ajoutée. Ces sondes ont été changées à plusieurs reprises durant des interventions au cours desquelles une persistance des lésions a été constatée. Le 11 juin 2013, M. B... a été opéré au CHU Saint Antoine à Paris par laparotomie d'un abaissement trans-mésentrique du côlon extériorisé à l'anus, sous couvert d'une iléostomie latérale. Lors de cette intervention, une nécrose de l'uretère gauche a été constatée. A la suite de celle-ci, une insuffisance rénale aigüe associée a justifié le transfert de M. B... en service de réanimation du 17 au 21 juin 2013. M. B... a de nouveau été opéré les 3 et 23 juillet 2013 puis enfin le 3 mars 2014 pour une ablation de la sonde gauche. Restant atteint de séquelles importantes, l'intéressé a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI). Après la réalisation d'une expertise par un chirurgien urologue et un chirurgien viscéral, qui ont adressé le 29 novembre 2015 leur rapport à la CCI, celle-ci a, par un avis du 25 février 2016, rejeté la demande indemnitaire de M. B.... Le 17 juillet 2018, M. B... a adressé au CHU de Brest une réclamation indemnitaire préalable qui a été rejetée par une décision du 24 octobre 2018. Par un jugement du 10 juin 2020, dont le centre hospitalier universitaire de Brest relève appel par la requête n° 21NT03440, le tribunal administratif de Rennes l'a condamné à verser à M. B... la somme de 34 221,68 euros et à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère la somme de 63 057,93 euros au titre de ses débours. Par la voie de l'appel incident dans l'affaire n° 21NT03440 et par la requête n° 21NT03771, M. B... demande que la somme que le centre hospitalier a été condamné à lui verser soit portée à un montant global de 151 898,38 euros. 2. Par un arrêt du 17 juin 2022, la cour a, après avoir joint les deux requêtes, appelé l'ONIAM à la cause et ordonné avant dire droit une nouvelle expertise médicale. Le rapport d'expertise a été enregistré au greffe de la cour le 17 mars 2023. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". 4. Il ressort du jugement attaqué qu'il comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui le fondent. Par suite, le CHU de Brest n'est pas fondé à soutenir que ce jugement est insuffisamment motivé. Sur la responsabilité du CHU de Brest : 5. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ". 6. Il résulte de l'instruction, compte tenu notamment des conclusions du rapport des deux médecins spécialisés en urologie et en chirurgie digestive, désignés par la cour comme experts, que le dommage dont a été victime M. B... résulte d'une plaie urétérale et d'une fistule urétro-colique. Il en résulte également que la plaie urétérale est survenue lors de la dissection du rectum au cours de l'intervention chirurgicale du 26 janvier 2011 et a entraîné une anomalie de drainage des urines du rein homolatéral et une hyperpression dans les cavités excrétrices, conduisant à la destruction du rein adjacent. La fistule urétro-colique dont a été victime M. B... résulte également de la dissection réalisée le 26 janvier 2011. Comme l'ont relevé les experts désignés par la cour, tant la plaie urétérale que la fistule urétro-colique, ont été causés par des maladresses chirurgicales, qui doivent être regardées, dans les circonstances de l'espèce, comme fautives. En effet, ainsi qu'ils l'ont estimé, la dissection d'une tumeur de stade trois, sans être facile, ne présente pas une difficulté insurmontable, au regard du risque très classique et bien pris en compte par les chirurgiens d'un traumatisme chirurgical de l'uretère. De plus, la survenue au cours de la même proctectomie d'un traumatisme de l'uretère gauche dont le risque d'incidence, peut être estimé inférieur à 3%, puis de l'urètre, d'une probabilité très faible, est de nature à révéler, en l'occurrence, une maîtrise insuffisante de la technique chirurgicale mis en œuvre lors de cette intervention. Si le surpoids de M. B... au moment de l'opération en litige a été un facteur de difficulté de l'opération, la préparation de l'intervention n'a, en outre, pas été optimisée par l'établissement public, dès lors notamment qu'il n'a pas été mis en place de régime hypocalorique, ni une prescription d'immunonutrition. Il résulte aussi de l'instruction que l'abord chirurgical retenu, qui était très exigu, a contribué à la difficulté de l'opération, alors qu'un autre abord était possible et présentait plus de facilité. Dans ces conditions, les circonstances que M. B... avait subi un traitement par radio-chimiothérapie, de nature à fragiliser les tissus, avant d'être opéré le 26 janvier 2011, et que les conditions de réalisation de l'opération impliquaient d'opérer sur une zone à proximité de l'uretère, ne permettent pas d'établir que le dommage en litige ne résulterait pas de maladresses chirurgicales. De même, la circonstance selon laquelle le chirurgien qui a pratiqué l'intervention n'ait pas observé, alors, de plaie franche n'implique pas à elle seule que la plaie ne résulte pas d'une faute technique, la plaie de l'uretère pouvant d'ailleurs avoir une origine non mécanique mais thermique. La réalisation du dommage en litige résulte, dès lors, malgré la fragilisation de tissus entraînée par la radiothérapie subie par M. B... et en dépit de la surcharge pondérale présentée par ce dernier, de maladresses dans la réalisation de l'intervention chirurgicale, qui doivent être regardées comme fautives et sont de nature à engager la responsabilité du CHU de Brest. Sur le lien direct de causalité entre la faute et les préjudices invoqués : 7. Il résulte de l'instruction, eu égard à ce qui précède, que les fautes commises dans la prise en charge de M. B... lors de l'intervention chirurgicale du 26 janvier 2022 sont à l'origine directe de l'entier dommage corporel en litige et non d'une perte de chance d'éviter sa survenance. Sur les préjudices : En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux : S'agissant des dépenses de santé actuelles : 8. La CPAM du Finistère, justifie, par une attestation du médecin conseil de l'assurance maladie, de débours directement imputables à la faute en litige, d'un montant total de 145 362,30 euros, correspondant à diverses dépenses de santé actuelles : frais d'hospitalisation, médicaux, de soins infirmiers, pharmaceutiques, d'actes de biologie, de kinésithérapie, d'appareillage, ainsi qu'aux frais de transport. S'agissant des frais divers : 9. En premier lieu, il résulte de l'instruction que M. B... a exposé des frais de déplacement en lien avec le dommage en litige. Il s'est ainsi déplacé, ainsi qu'il est relevé dans le rapport des experts désignés par la cour, pour divers rendez-vous médicaux ou hospitalisation, à onze reprises au CHU de Brest, à deux reprises à l'hôpital Saint-Antoine à Paris et à quatre reprises à la clinique Sant Michel de Quimper. Il n'établit pas en revanche s'être déplacé au centre Perharidy à Roscoff. Compte tenu des distances parcourues et du barème kilométrique applicable pour un véhicule de 5 chevaux, il y a lieu d'évaluer à 1 963,49 euros les dépenses exposées à ce titre. 10. En deuxième lieu, le montant des frais de déplacement de l'intéressé, déterminé selon les modalités précisées au point précédent, pour participer à la réunion d'expertise qui a eu lieu à Paris le 8 septembre 2015 et à la séance de la CCI à Rennes s'élève à 846,55 euros. S'agissant des pertes de gains professionnels actuelles : 11. Il résulte de l'instruction que la consolidation de l'état de santé de M. B... est intervenue le 31 juillet 2014. 12. En premier lieu, M. B... justifie avoir perçu avant la faute médicale en litige, survenue le 26 janvier 2011, des revenus annuels d'un montant de 13 405 euros. Compte tenu de ce que, même en l'absence des complications en litige, l'intéressé aurait été en arrêt de travail pendant trois mois, la période à prendre en compte au titre de ses pertes de gains professionnels actuels est celle allant du 25 avril 2011 au 31 juillet 2014, date de la consolidation de son état de santé. Il résulte de l'instruction qu'au cours de cette période, M. B... a subi, eu égard aux revenus de substitution perçus, une perte de revenus de 2 021,75 euros entre le 25 avril et le 31 décembre 2011, et de 3 234 euros en 2012, mais n'a pas subi de perte de gains professionnels après 2012. Le préjudice de l'intéressé à ce titre doit, dès lors, être évalué à 5 255,75 euros. 13. En second lieu, eu égard à la finalité de réparation d'une incapacité permanente de travail qui lui est assignée par ces dispositions de l'article L. 341-1 du code de la sécurité sociale et à son mode de calcul, en fonction du salaire, fixé par l'article R. 341-4 du même code, la pension d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est-à-dire ses pertes de revenus professionnels et l'incidence professionnelle de son incapacité. Dès lors, le recours exercé par une caisse de sécurité sociale au titre d'une pension d'invalidité ne saurait s'exercer que sur ces deux postes de préjudice. 14. Il résulte de l'instruction que M. B... s'est vu accorder en 2005, antérieurement à l'accident médical en litige, une pension d'invalidité de 1ère catégorie. La CPAM du Finistère justifie de débours, directement imputables à la faute du CHU, de 5 822,20 euros au titre des indemnités journalières pour la période allant du 27 juin 2012 au 30 août 2013. Elle justifie également de débours de 3 649,58 euros pour la période allant du 1er septembre 2013 au 31 juillet 2014. Ces derniers débours correspondent à la différence entre les montants des arrérages de pension d'invalidité de 2ème catégorie, versés pour cette période, et ceux des arrérages pour une pension d'invalidité de 1ère catégorie qui auraient été versés même en l'absence de faute. Le centre hospitalier soutient à cet égard que la mise en invalidité de M. B... résulte non de la faute en litige, mais de la fragilité présentée par ce dernier au niveau des membres supérieurs, qui lui a interdit de poursuivre son activité professionnelle de chaudronnier soudeur. Cela n'est toutefois pas établi par la seule circonstance, qu'il fait valoir, selon laquelle le médecin du travail, l'ayant déclaré inapte à son poste, a proposé un reclassement dans des postes en station assise sans contrainte pour les membres supérieurs. Il résulte au contraire de l'instruction qu'avant son accident médical, M. B... pouvait encore exercer son activité professionnelle, tout en bénéficiant d'une pension d'invalidité de catégorie 1, et l'exerçait effectivement à temps partiel. Ainsi, les dépenses supplémentaires au titre de la pension d'invalidité de catégorie 2 sont directement liées à la faute de l'établissement public. S'agissant des pertes de gains professionnels futurs et de l'incidence professionnelle : 15. En premier lieu, avant l'accident médical en litige, M. B... n'exerçait ses fonctions qu'à mi-temps, entre 2005 à 2010, en raison d'une pathologie caractérisée par des douleurs à l'épaule et au coude droit dont le caractère professionnel avait été reconnu. A la suite de l'intervention du 26 janvier 2011 et des dommages qui en ont résulté, il s'est vu reconnaître une invalidité de 2ème catégorie à compter du 31 août 2013 puis a été licencié pour inaptitude en raison d'une impossibilité de reclassement, le 3 décembre 2013. Il ne résulte pas de l'instruction que les fautes de l'établissement seraient la cause directe d'une perte de gains professionnels après la date de consolidation, dès lors que les lésions qu'elles ont causées n'ont pas rendu impossible une activité professionnelle de l'intéressé. Toutefois, M. B... subit notamment une incapacité fonctionnelle permanente de 20% en lien avec la faute en litige, qui entraîne une dévalorisation sur le marché du travail et une pénibilité accrue de l'exercice d'une activité professionnelle. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de l'incidence professionnelle subie par M. B..., âgé de 56 ans à la date de consolidation, en l'évaluant à la somme de 5 000 euros. Toutefois, M. B... bénéficie depuis le 31 août 2013 d'une pension d'invalidité de 2ème catégorie qui était d'un montant brut annuel de 9 869,47 euros à cette date, supérieure à la pension qu'il percevait en 2012 d'un montant annuel imposable de 6 283 euros. Dans ces conditions, l'incidence professionnelle subie doit être regardée comme intégralement réparée par la différence entre les sommes perçues au titre de la pension d'invalidité de 2ème catégorie et celles au titre de la pension de 1ère catégorie précédemment perçue. La demande de M. B... à ce titre doit, dès lors, être rejetée. 16. En second lieu, la CPAM du Finistère justifie de débours, directement imputables à la faute du CHU, de 5 242,72 euros au titre de la différence entre le montant des arrérages de pension d'invalidité de 2ème catégorie, versés pour la période postérieure à la consolidation, du 1er août 2014 au 31 novembre 2015, et celui des arrérages pour une pension d'invalidité de 1ère catégorie qui auraient été versés en l'absence de faute. Compte tenu du montant de l'incidence professionnelle subie, précisée au point précédent, la caisse a donc droit à l'allocation d'une somme de 5 000 euros au titre des pertes de gains professionnels après consolidation. 17. Il résulte de ce qui précède que les préjudices patrimoniaux indemnisables de M. B... s'élèvent à 8 065,79 euros (1 963,49 + 846,55 + 5 255,75) et que les débours de la CPAM s'élèvent à 159 834,08 euros (145 362,30 + 5 822,20 + 3 649,58 + 5 000). En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux : S'agissant du déficit fonctionnel temporaire : 18. Il résulte de l'instruction que le déficit fonctionnel temporaire subi par M. B... imputable à la faute a été total du 6 au 29 décembre 2011, du 21 au 28 février 2012, les 12 et 13 juillet 2012, le 10 janvier 2013, le 16 mai 2013, du 10 juin au 5 juillet 2013 et du 22 au 25 juillet 2013. Il a été de 50 % du 15 avril au 5 décembre 2011, du 30 décembre 2011 au 20 février 2012, du 1er mars au 11 juillet 2012, du 14 juillet 2012 au 9 janvier 2013, du 11 janvier au 15 mai 2013, du 17 mai au 9 juin 2013 et du 6 au 22 juillet 2013. Il a été de 25 % du 26 juillet 2013 au 1er octobre 2013. Enfin, il a été de 10 % du 2 octobre 2013 au 3 mars 2014 puis du 6 mars au 31 juillet 2014. Il en sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 9 900 euros. S'agissant des souffrances endurées : 19. Les souffrances endurées par M. B... ont été estimées à 5 sur une échelle de 1 à 7. Par suite, il sera fait une juste évaluation de ce préjudice en le fixant à la somme de 15 000 euros. S'agissant du préjudice esthétique temporaire : 20. Il résulte de l'instruction que M. B... a subi un préjudice esthétique temporaire qui peut être estimé à 4,5 sur une échelle de 1 à 7. Par suite, il y a lieu compte tenu de l'altération de l'apparence physique subie et de la durée de celle-ci, d'évaluer ce préjudice à la somme de 8 000 euros. S'agissant du déficit fonctionnel permanent : 21. Il résulte de l'instruction que M. B... subit, du fait de la faute du CHU, un déficit fonctionnel permanent de 20 %. Compte tenu de l'âge du requérant à la date de la consolidation de son état de santé, il en sera fait une juste appréciation en l'évaluant à la somme de 32 000 euros. S'agissant du préjudice esthétique permanent : 22. Le préjudice esthétique permanent subi par M. B... consiste en des cicatrices et peut être fixé à 3 sur une échelle allant de 1 à 7. Il en sera fait une juste appréciation en l'évaluant à la somme de 3 500 euros. S'agissant du préjudice sexuel : 23. Il ne résulte pas de l'instruction que la faute en litige aurait été la cause directe du préjudice sexuel subi par M. B..., dès lors que ce préjudice résulte de la radio-chimiothérapie. Par suite, sa demande à ce titre doit être rejetée. 24. Il résulte de ce qui précède que les préjudices extrapatrimoniaux de M. B... doivent être évalués à la somme de 68 400 euros. 25. Il résulte de tout ce qui précède que la somme que le CHU de Brest a été condamné, par le jugement attaqué, à verser à M. B... doit être portée à 76 465,79 euros (8 065,79 + 68 400). Il en résulte aussi que le CHU de Brest n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce même jugement, le tribunal administratif de Rennes l'a condamné à verser à la CPAM du Finistère la somme de 63 057,93 euros au titre de ses débours. Sur les intérêts et la capitalisation : 26. M. B... a droit aux intérêts au taux légal sur la somme qui lui est allouée au point précédent à compter du 24 juillet 2018, date de réception par le CHU de Brest de sa réclamation indemnitaire préalable. Il a en outre demandé la capitalisation des intérêts dans sa demande enregistrée au greffe du tribunal le 19 novembre 2018 et a, dès lors, droit également à la capitalisation de ces intérêts à compter du 24 juillet 2019, date à laquelle les intérêts étaient dus pour une année entière, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Sur l'indemnité forfaitaire de gestion : 27. La somme que le CHU de Brest a été condamné à verser à la CPAM du Finistère au titre de ses débours n'étant pas majorée par le présent arrêt, la demande de la caisse dans la présente instance au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ne peut qu'être rejetée. Sur les frais d'instance : 28. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) ". 29. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge définitive du CHU de Brest les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 6 022,05 euros. 30. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHU de Brest une somme de 2 000 euros à verser à M. B... ainsi qu'une somme de 1 000 euros à verser à la CPAM du Finistère au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête du CHU de Brest est rejetée. Article 2 : La somme que le CHU de Brest a été condamné à verser à M. B... est portée à 76 465,79 euros. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2018, et de leur capitalisation à compter du 24 juillet 2019, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date. Article 3 : Le jugement du 8 octobre 2021 du tribunal administratif de Rennes est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt. Article 4 Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 6 022,05 euros sont mis à la charge définitive du CHU de Brest. Article 5: Le CHU de Brest versera à M. B... la somme de 2 000 euros et à la CPAM du Finistère la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au centre hospitalier universitaire régional de Brest, à la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales. Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe 23 juin 2023. Le rapporteur, X. CATROUXLe président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03440-21NT03471
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La SAS Kervandis a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 et de la période du 1er janvier 2015 au 31 mai 2016. Par un jugement n° 1906494 du 30 décembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a déchargé, en droits et pénalités, la SARL Kervandis des rappels de taxe sur la valeur qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 et de celle du 1er janvier 2015 au 31 mai 2016 en tant qu'ils procèdent de la remise en cause des montants déclarés de taxe sur la valeur ajoutée déductible et a rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : I. Par une requête et un mémoire enregistrés, sous le n°22NT00587, les 25 février 2022 et 14 mars 2023 la SARL Kervandis, représentée par Me Lefeuvre, demande à la cour : 1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement qui a rejeté le surplus de ses conclusions ; 2°) de prononcer le surplus de la décharge sollicitée ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le service, en sollicitant au cours de la vérification de comptabilité sur place une reconnaissance des omissions de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée, a suivi une pratique qui est contraire au livre des procédures fiscales et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en matière fiscale ; - le service n'a pas explicité la méthode retenue pour effectuer les rappels de la taxe sur la valeur ajoutée collectée ; - l'administration s'est bornée à calculer la taxe sur la valeur ajoutée collectée sans s'interroger sur sa situation juridique par rapport à la société Amazon ; c'est à tort qu'elle a estimé que les commissions réclamées par la société Amazon pour toutes ses ventes de produits ne devaient pas venir en déduction de la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée ; - la taxe sur la valeur ajoutée est appliquée deux fois, d'abord avec la taxe auto-liquidée sur les prestations de services de la société Amazon, puis sur le chiffre d'affaires constitué par l'ensemble des recettes perçues du fait de la vente de ses produits ; - la majoration pour manquement délibéré n'est pas justifiée ; il y a lieu d'apprécier les conditions dans lesquelles elle aurait reconnu les insuffisances de la taxe déclarée et cette reconnaissance, qui a été obtenue d'une manière irrégulière. Par des mémoires en défense enregistrés les 8 août 2022 et 16 mars 2023 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Kervandis ne sont pas fondés. II. Par une requête et un mémoire enregistrés, sous le n°22NT01000, les 1er avril 2022 et 20 mars 2023 le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour d'annuler les articles 1er et 2 du même jugement du 30 décembre 2021 par lesquels le tribunal administratif de Rennes a partiellement déchargé la SARL Kervandis des taxes contestées. Il soutient que c'est à tort que le jugement a retenu l'insuffisante motivation des propositions de rectifications des 30 septembre 2016 et 3 mars 2017 en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible. Par un mémoire en défense enregistré le 10 mars 2023 la SARL Kervandis, représentée par Me Lefeuvre, conclut au rejet de la requête et à la mise en charge de l'Etat d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que le moyen soulevé par le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Geffray, - et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La SARL Kervandis, qui exerce une activité de vente à distance de produits DVD et jeux vidéo sur les plateformes de vente en ligne des sociétés Amazon et FNAC, a fait l'objet de deux vérifications de comptabilité en 2015 et 2016. La première, au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, a permis à l'administration de constater l'absence de tenue d'une comptabilité informatique ou matérielle et de procéder notamment à une reconstitution du chiffre d'affaires de la société et des montants de taxe sur la valeur ajoutée collectée et déductible. Par une proposition de rectification du 30 septembre 2016, le service a notifié à la société les rectifications et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée envisagés. Par sa réponse aux observations de la société, il a abandonné une partie des rectifications notifiées. La seconde vérification de comptabilité a porté sur la période du 1er janvier 2015 au 31 mai 2016 et a abouti, par une proposition de rectification du 3 mars 2017, à la même constatation d'absence de tenue d'une comptabilité et à des rectifications identiques à celles notifiées au titre de la période antérieure. La SARL Kervandis a demandé au tribunal administratif de Rennes la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 et de celle du 1er janvier 2015 au 31 mai 2016. Par un jugement du 30 décembre 2021, le tribunal a déchargé, en droits et pénalités, la SARL Kervandis des rappels de taxe sur la valeur qui lui ont été réclamés au titre de ces deux périodes en tant qu'ils procèdent de la remise en cause des montants déclarés de taxe sur la valeur ajoutée déductible et a rejeté le surplus de sa demande. La SARL Kervandis relève appel du jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande tandis que le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel du jugement en tant qu'il a prononcé les décharges mentionnées ci-dessus. 2. Les requêtes n° 22NT00587 et n° 22NT01000, présentées respectivement par la SARL Kervandis et le ministre de l'économie, des finances et de la relance, sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt. Sur la requête de la SARL Kervandis : En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition : 3. En premier lieu, le moyen tiré de ce que le service, en sollicitant au cours de la vérification de comptabilité sur place une reconnaissance des omissions de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée, aurait suivi une pratique contraire au livre des procédures fiscales et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en matière fiscale est dépourvu de précisions tant en ce qui concerne sa réalité factuelle qu'en ce qui concerne son bien-fondé juridique et ne peut qu'être écarté. 4. En second lieu, la SARL Kervandis reprend en appel sans apporter des éléments nouveaux en fait et en droit le moyen invoqué en première instance et tiré de ce que le service n'a pas explicité la méthode retenue pour effectuer les rappels de la taxe sur la valeur ajoutée collectée. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif, d'écarter ce moyen. En ce qui concerne le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée : 5. Dans le cadre de la vérification, le service a constaté une discordance importante entre les montants de chiffre d'affaires hors taxes et de taxe sur la valeur ajoutée collectée tels qu'ils avaient été déclarés et les montants reconstitués par lui pour les livraisons de biens réalisées mensuellement par la SARL Kervandis. S'agissant de la déduction des commissions versées à Amazon : 6. Il résulte de l'instruction que la société Amazon n'est qu'un intermédiaire dans la mesure où elle n'est selon les termes du " Contrat AMAZON Services Europe Business Solutions " ni vendeur ni acheteur. Elle n'est que le dépositaire des produits de la SARL Kervandis. En outre, les marchandises déposées par cette dernière restent sa propriété jusqu'à leur vente. La SARL Kervandis supporte donc le risque commercial des transactions, qui doivent être regardées comme réalisées pour son propre compte. Enfin, il n'est pas contesté que les sommes perçues par la société Amazon sont des commissions correspondant à la contrepartie des prestations de service rendues par elle à la SARL Kervandis, lesquelles commissions sont comprises dans les prix facturés aux clients par cette dernière. Ainsi, la SARL Kervandis doit être regardée comme ayant vendu pour son compte les produits déposées pour un prix égal à la recette totale des ventes y compris la rémunération de la prestation de la société dépositaire Amazon. Dès lors, le chiffre d'affaires imposable à la taxe sur la valeur ajoutée était, en application des articles 266 et 267-1 du code général des impôts, constitué par l'ensemble des recettes perçues des clients. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a, pour déterminer le montant du chiffre d'affaire réalisé et le montant total de la taxe sur la valeur ajoutée collectée, pris en compte les commissions retenues par la société Amazon. S'agissant de la prétendue double imposition des commissions en litige : 7. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " Le lieu des prestations de services est situé en France : / 1° Lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel et qu'il a en France : / a) Le siège de son activité économique, sauf lorsqu'il dispose d'un établissement stable non situé en France auquel les services sont fournis ;(...). Il résulte de ces dispositions que le lieu de taxation des prestations de services est situé au lieu de l'établissement du preneur. 8. En l'espèce, si la SARL Kervandis a, conformément aux dispositions précitées, auto-liquidé ou payé en France le montant de la taxe sur la valeur ajoutée se rapportant à la facture hors taxes reçue de son prestataire de service, la société Amazon Luxembourg, cette même taxe a ensuite été comprise par elle dans le montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible, de sorte que la neutralité de la taxe était assurée. Dès lors, il ne saurait y avoir une double imposition de taxe sur la valeur ajoutée, comme le prétend la SARL Kervandis. En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré : 9. L'administration, en se fondant, en premier lieu, sur le caractère répétitif sur une longue période, soit du 1er janvier 2013 au 31 mai 2016, de l'existence de montants occultés en matière de taxe sur la valeur ajoutée collectée représentant 27%, 30 % et 32 % respectivement en 2013, 2014 et 2015 ainsi que 5 % pour la période du 1er janvier au 31 mai 2016, soit 29 854 euros en 2013, 37 474 euros en 2014, 45 531 euros en 2015 et 4 203 euros pour la période partielle de 2016, en deuxième lieu, sur les minorations systématiquement répétées chaque mois dans des proportions allant de 12% à 100 % en 2013 et 2014 et de 6% à 100% en 2015 et 2016 et, enfin, sur l'existence d'une précédente vérification de comptabilité en matière de taxe sur la valeur ajoutée portant sur la période du 1er janvier 2010 au 30 juin 2012 et l'application de la procédure de la taxation d'office, apporte la preuve, dont la charge lui incombe, de l'intention de la SARL Kervandis d'éluder l'impôt et, par suite, du manquement délibéré justifiant l'application de la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts. Les conditions dans lesquelles la société requérante aurait reconnu les insuffisances de la taxe déclarée sont sans influence sur l'appréciation de l'administration au regard de l'application de cette majoration. Sur la requête du ministre : 10. Pour décharger la SARL Kervandis des rappels de taxe sur la valeur qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 et de celle du 1er janvier 2015 au 31 mai 2016 en tant qu'ils procèdent de la remise en cause des montants déclarés de taxe sur la valeur ajoutée déductible, le tribunal administratif s'est fondé sur la circonstance que les propositions de rectification des 30 septembre 2016 et 3 mars 2017 n'identifient pas les opérations au titre desquelles l'administration a admis l'existence d'une taxe sur la valeur ajoutée déductible ni le montant pouvant être déduit au titre de chacune de ces opérations. Toutefois, il résulte de l'instruction que les montants mensuels figurant dans les tableaux des propositions de rectification ne font que reprendre, sans aucune modification, la taxe sur la valeur ajoutée déductible de l'ensemble des opérations figurant dans le journal de saisie de la taxe déductible issu des fichiers informatiques transmis par le gérant de la société au vérificateur, les opérations étant présentées chronologiquement sans total ou sous-total mensuel. En effet, tant dans la proposition de rectification du 30 septembre 2016 relative aux années 2013 et 2014 que dans celle du 3 mars 2017 relative à la période du 1er janvier 2015 au 31 mai 2016, figurent les tableaux indiquant pour chaque mois le montant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible qui a été déclarée, celui de la taxe déductible issue des fichiers informatiques et par différence le montant des rappels de la taxe déductible en définitive. Le service n'a fait que préciser les totaux mensuels résultant de ces données. Ainsi, dans le cadre des deux procédures, la SARL Kervandis détenait nécessairement le détail des opérations concernant la taxe sur la valeur déductible. Les deux propositions de rectification, qui mentionnent également l'impôt, la période d'imposition, les dispositions légales, les raisons de l'établissement de procès-verbaux pour défaut de présentation de la comptabilité, les éléments retenus et la méthode suivie pour déterminer le montant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée déductible, sont suffisamment motivées au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. Dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif s'est, pour prononcer les décharges en litige, fondé sur le moyen tiré de l'insuffisante motivation des propositions de rectification en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible. 11. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner le moyen invoqué par la SARL Kervandis devant le tribunal administratif de Rennes relatif à la majoration pour manquement délibéré, la société n'invoquant par ailleurs aucun moyen relatif au bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux. 12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9, le moyen invoqué à l'encontre de la majoration pour manquement délibéré doit être écarté. 13. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1er et 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a déchargé, en droits et pénalités, la SARL Kervandis des rappels de taxe sur la valeur qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 et de celle du 1er janvier 2015 au 31 mai 2016 en tant qu'ils procèdent de la remise en cause des montants déclarés de taxe sur la valeur ajoutée déductible. La SARL Kervandis n'est, quant à elle, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du même jugement, le tribunal a rejeté le surplus de sa demande. Ses conclusions ne peuvent donc qu'être rejetées, de même, par voie de conséquence, que celles présentées dans les deux requêtes au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : Sont remis à la charge de la SARL Kervandis, en droits et pénalités, les rappels de taxe sur la valeur au titre de la période du 1er janvier 2013 au décembre 2014 et de celle du 1er janvier 2015 au 31 mai 2016 en tant qu'ils procèdent de la remise en cause des montants déclarés de taxe sur la valeur ajoutée déductible. Article 2 : Le jugement n°1906494 du tribunal administratif de Rennes du 30 décembre 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : La requête n°22NT00587 de la SARL Kervandis ainsi que les conclusions présentées par elle dans le cadre de la requête n°22NT01000 sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Kervandis et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, présidente de chambre, - M. Geffray, président-assesseur - M. Penhoat, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le rapporteur J.E. GeffrayLa présidente I. PerrotLa greffière S. Pierodé La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00587, 22NT01000
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner le groupement d'intérêt public (GIP) RESOTEC à lui verser la somme de 75 000 euros en réparation du harcèlement moral dont elle estime avoir été l'objet. Par un jugement n° 2001320 du 17 décembre 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 février 2022 et 16 février 2023, Mme A... B..., représentée par Me Fautrat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 17 décembre 2021 ; 2°) de condamner le GIP RESOTEC à lui verser une somme de 75 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi ; 3°) de mettre à la charge du GIP RESOTEC une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle a subi un harcèlement moral de la part du GIP RESOTEC ; - elle évalue à la somme de 75 000 euros la réparation des préjudices résultant de ce harcèlement. Un mémoire, enregistré le 14 février 2023, a été présenté par le lycée polyvalent "Alexis de Tocqueville", sans ministère d'avocat. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 19832 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - le décret n° 2001-1227 du 19 décembre 2001 ; - le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Lellouch, - et les conclusions de M. Berthon, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B... a été recrutée, le 1er octobre 2003, par le groupement d'intérêt public (GIP) Innovation et transfert de technologie Réseau Opérationnel Technologique du Cotentin, dénommé GIP RESOTEC, en qualité d'agente contractuelle de droit public en contrat à durée déterminée jusqu'au 31 décembre 2006. Le 23 décembre 2006, le GIP RESOTEC a conclu avec Mme B... un nouveau contrat à durée indéterminée de droit privé la recrutant sur un poste de .... Le 20 avril 2007, Mme B... et le GIP RESOTEC ont signé un nouveau contrat à durée indéterminée avec effet au 1er janvier 2007, qui s'est substitué au précédent, afin d'engager Mme B... sur le même poste en qualité d'agente contractuelle de droit public. Par un arrêté du 20 septembre 2013, le directeur du GIP RESOTEC a licencié Mme B..., avec effet au 31 décembre 2013. Par un jugement du 25 mars 2016, le conseil de prud'hommes de Cherbourg en Cotentin a débouté Mme B... de sa demande d'indemnité pour harcèlement moral et a condamné le GIP Resotec à lui verser la somme de 16 110 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Par un arrêt du 24 mars 2017, la cour d'appel de Caen a infirmé le jugement et s'est déclarée incompétente pour connaître du litige au profit des juridictions administratives. Par un courrier du 14 août 2020, Mme B... a saisi le GIP RESOTEC d'une demande d'indemnisation à hauteur de 75 000 euros au titre du harcèlement moral. Mme B... relève appel du jugement du 17 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation du GIP RESOTEC à lui verser la somme de 75 000 euros en réparation du harcèlement moral dont elle estime avoir été victime. 2. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi visée ci-dessus du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus ". 3. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. 4. La requérante soutient avoir été victime de harcèlement moral en faisant valoir qu'elle a signé successivement un contrat à durée indéterminée puis un contrat à durée déterminée en violation manifeste du droit du travail, qu'elle a fait l'objet de trois licenciements successifs entre mars et décembre 2013, qu'elle a été informée brutalement de la rupture de son contrat de travail en conseil d'administration devant tous ses collègues, que son lieu de travail a été modifié sans explication et qu'à compter du mois de mai 2013, elle a été " placardisée " sans qu'aucune mission ne lui ait été confiée. Il résulte toutefois de l'instruction que dès la signature de son premier contrat de travail à durée indéterminée avec le GIP RESOTEC, le 21 décembre 2006, Mme B... avait été informée par les termes de ce contrat que celui-ci était directement lié à l'existence du GIP RESOTEC dont la fin était d'ores-et-déjà programmée au 31 décembre 2013. En outre, les circonstances que la première décision du 2 avril 2013 prononçant le licenciement de Mme B... à compter du 17 avril 2013 pour dissolution anticipée de la personne morale employeuse, a été remplacée par une décision du 11 avril 2013 ayant exactement la même nature et prenant effet le 16 avril 2013, soit la veille, afin de coïncider avec la dissolution initialement prévue du GIP puis que cette décision a été annulée le 19 avril suivant au motif que la dissolution du GIP ne pouvait être effective à la date du 16 mai 2013, ne peuvent s'analyser en des agissements répétés constitutifs de harcèlement moral. Par ailleurs, la modification du lieu de travail de Mme B... a été clairement expliquée à l'intéressée par un courrier qui lui a été adressé le 18 juillet 2013 et tient à des considérations tant financières que liées à l'intérêt du service. Enfin, il résulte de l'instruction que jusqu'à sa dissolution, le GIP RESOTEC a continué à confier des missions à Mme B..., afin notamment d'accompagner la clôture de ce groupement. Au regard de l'ensemble de ces éléments, même s'il résulte du dossier médical produit par l'intéressée que celle-ci a mal vécu la dissolution du GIP et la rupture consécutive de son contrat de travail, il ne résulte pas de l'instruction que Mme B... aurait fait l'objet de faits répétés constitutifs de harcèlement moral. 5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande indemnitaire. Ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être également rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au lycée polyvalent "Alexis de Tocqueville". Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président, - Mme Lellouch, première conseillère, - M. Xavier Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. La rapporteure, J. Lellouch Le président, D. Salvi La greffière, A. Martin La République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00317
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Sous le no 1910943, M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, d'une part, la décision du 6 février 2019 par laquelle le préfet de police de Paris a déclaré irrecevable sa demande de naturalisation et, d'autre part, la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours formé contre cette décision. Sous le no 1913217, M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 septembre 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de naturalisation. Par un jugement nos 1910943, 1913217 du 30 septembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 2 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Besse, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 septembre 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de naturalisation ; 2°) d'annuler la décision du 30 septembre 2019 du ministre de l'intérieur ; 3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui octroyer la nationalité française ou, à défaut, de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de fait. Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Bréchot a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., né le 13 février 1946 à Pinsk en URSS et reconnu apatride, a sollicité sa naturalisation. Par une décision du 6 février 2019, le préfet de police de Paris a déclaré irrecevable sa demande de naturalisation. Le recours formé contre cette décision a d'abord été rejeté par une décision implicite du ministre de l'intérieur, à laquelle s'est substituée la décision du 30 septembre 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté la demande de naturalisation de M. B... au motif que son épouse résidait à l'étranger. M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'ensemble de ces décisions. Il relève appel du jugement de ce tribunal du 30 septembre 2021 en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 septembre 2019 du ministre de l'intérieur. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger ". Aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions ". 3. Aux termes de l'article 21-16 du même code : " Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation ". Ces dispositions imposent à tout candidat à l'acquisition de la nationalité française de résider en France et d'y avoir fixé durablement le centre de ses intérêts familiaux et matériels à la date à laquelle il est statué sur sa demande. Pour apprécier si cette dernière condition est remplie, l'administration peut notamment se fonder, sous le contrôle du juge, sur la durée de la présence du demandeur sur le territoire français, sur sa situation familiale, ainsi que sur le caractère suffisant et durable des ressources qui lui permettent de demeurer en France. Le ministre auquel il appartient de porter une appréciation sur l'opportunité d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite peut légalement, dans le cadre de cet examen d'opportunité, tenir compte de toutes les circonstances de l'affaire, y compris de celles qui ont été examinées pour statuer sur la recevabilité de la demande. 4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a épousé, en 2014, Mme D... A..., ressortissante autrichienne titulaire d'une carte de résident en Suisse, où elle a exercé l'essentiel de son activité professionnelle depuis au moins 1999. Le couple détient depuis 2002, via une société civile immobilière, un appartement à Paris qu'ils soutiennent occuper ensemble depuis cette date en dépit des séjours fréquents de Mme A... en Suisse pour ses activités professionnelles. Si M. B... soutient que son épouse réside en France depuis sa retraite, en 2017, et produit un document daté du 15 mars 2017 attestant du versement à Mme A... de son capital retraite par un organisme suisse, il a indiqué, lors de sa demande de naturalisation datée du 10 juillet 2017, par laquelle il déclarait sur l'honneur " véritables et complets les renseignements " figurant dans son dossier de demande, que son épouse résidait en Suisse. L'extrait Kbis d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés de la société civile LL Consulting, " à jour au 28 février 2019 ", détenue par M. B... et son épouse,mentionne indique également que Mme A... réside en Suisse. En se bornant à produire des factures téléphoniques, un appel de charges de copropriété, un certificat médical et des relevés d'un compte à la Société générale adressés à Mme A... à l'appartement détenu par le couple à Paris, sans que ces relevés bancaires ne fassent apparaître le moindre débit de carte bancaire lié à des dépenses courantes en France, M. B... n'apporte pas suffisamment d'éléments de nature à démontrer que son épouse ne résidait plus durablement en Suisse à la date de la décision contestée. Dès lors, le ministre de l'intérieur, en rejetant sa demande de naturalisation au motif que son épouse résidait à l'étranger, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ni d'une erreur de fait. 5. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 septembre 2019 du ministre de l'intérieur. Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 6. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent être rejetées. Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui à l'occasion du litige soumis au juge. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Buffet, présidente de chambre, - Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure, - M. Bréchot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. Le rapporteur, F.-X. BréchotLa présidente, C. Buffet La greffière, A. Lemée La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 21NT03375
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La SARL Grimault a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er novembre 2012 au 30 avril 2016. Par un jugement n° 1906479 du 7 janvier 2022, le tribunal administratif de Nantes a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur de 14 euros et rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 11 mars 2022 la SARL Grimault, représentée par Me Magguilli, demande à la cour : 1°) d'annuler de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ; 2°) de prononcer la décharge sollicitée ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la vérification de comptabilité, commencée le 11 juillet 2016, a excédé le délai de trois mois prévu à l'article L. 52 du livre des procédures fiscales compte tenu de la tenue d'une réunion de synthèse sur place le 29 novembre 2016 ; - le changement de vérificateur intervenu le 15 septembre 2016 a eu une incidence sur le déroulement de la procédure ; - la durée de la vérification de comptabilité a été prorogée au-delà de trois mois sans qu'elle ait été préalablement informée ; - la restitution tardive des copies des fichiers a vicié la procédure d'imposition ; il ne peut y avoir un nouvel avis de mise en recouvrement à la suite d'un dégrèvement total pour défaut de restitution ; la restitution des documents après la fin des opérations de contrôle sur place l'a privée de la garantie d'un débat oral et contradictoire. Par un mémoire en défense enregistré le 19 septembre 2022 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Grimault ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Geffray, - et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La SARL Grimault, qui exploite une activité de boulangerie à Laval, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er novembre 2012 au 30 avril 2016 et, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les exercices clos les 30 octobre 2013, 30 octobre 2014 et 31 octobre 2015. Après avoir rejeté sa comptabilité comme irrégulière et non probante, procédé à la reconstitution de son chiffre d'affaires au titre de cette même période et constaté diverses irrégularités dans ses déclarations relatives à la taxe sur la valeur ajoutée, le service, par une proposition de rectification du 30 novembre 2016, a notifié à la SARL Grimault des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des rehaussements de son bénéfice imposable au titre de l'ensemble de la période vérifiée, assortis d'intérêts de retard, de la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses en ce qui concerne les rehaussements résultant de la réintégration dans le bénéfice imposable de recettes non comptabilisées et de la majoration de 40 % pour manquement délibéré en ce qui concerne les rehaussements résultant de la rectification des omissions déclaratives de la société. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les impositions supplémentaires d'impôt sur les sociétés ont été respectivement mis en recouvrement le 31 octobre 2017 et le 15 novembre 2017, mais après une admission totale de la réclamation de la société à la suite de la constatation par le service de l'absence de restitution des copies des fichiers, ils ont fait l'objet d'un dégrèvement le 25 juin 2018. Après restitution des copies concernées le 28 août 2018, un nouvel avis de mise en recouvrement a été adressé à la SARL Grimault le 28 septembre 2018. La SARL Grimault a demandé au tribunal administratif de Nantes la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er novembre 2012 au 30 avril 2016 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015. Par un jugement du 7 janvier 2022, le tribunal, après avoir prononcé un non-lieu à statuer pour un montant de 14 euros, a rejeté le surplus de sa demande. La SARL Grimault relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions. 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable en 2016 : " I. Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; (...) / II.- Par dérogation au I, l'expiration du délai de trois mois n'est pas opposable à l'administration : / (...) / 4° En cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité. Dans ce cas, la vérification sur place ne peut s'étendre sur une durée supérieure à six mois. "." . 3. Les opérations de la vérification de comptabilité ont eu lieu sur place, soit dans les locaux du cabinet CER France à Laval, du 11 juillet 2016 au 4 octobre 2016. La SARL Grimault soutient que la durée de la vérification a excédé le délai de trois mois prévu à l'article L. 52 du livre des procédures fiscales compte tenu d'une réunion de synthèse sur place qui s'est tenue le 29 novembre 2016. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas soutenu que des documents comptables auraient été examinés au cours de cette réunion, ni d'ailleurs après le 4 octobre 2016. Dès lors, le moyen tiré de ce que la vérification de comptabilité mise en œuvre en l'espèce aurait excédé la durée de trois mois doit être écarté. 4. En deuxième lieu, le changement de vérificateur le 15 septembre 2016 est sans incidence sur le déroulement de la procédure. 5. En troisième lieu, il résulte des dispositions du 4° du II de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales que l'expiration du délai de vérification de trois mois n'est pas opposable à l'administration en cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité et, dans ce cas, la vérification sur place peut être prolongée jusqu'à six mois. A supposer que l'administration fiscale ait entendu user de cette faculté en l'espèce, les dispositions de livre des procédures fiscales ne prévoient, en tout état de cause, aucune obligation d'informer le contribuable de cette prolongation. 6. Compte tenu de ce qui a été dit au point 5, le moyen tiré de ce que la durée de la vérification de comptabilité a été illégalement prorogée au-delà de trois mois est infondé. 7. En dernier lieu, aux termes du I de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en 2016 : " Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contribuable peut satisfaire à l'obligation de représentation des documents comptables mentionnés au premier alinéa de l'article 54 du code général des impôts en remettant, sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget, une copie des fichiers des écritures comptables définies aux articles 420-1 et suivants du plan comptable général. / (...) / L'administration peut effectuer des tris, classements ainsi que tous calculs aux fins de s'assurer de la concordance entre la copie des enregistrements comptables et les déclarations fiscales du contribuable. L'administration restitue au contribuable, avant la mise en recouvrement, les copies des fichiers transmis. (...) / II.- En présence d'une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu'ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l'administration fiscale indiquent par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées. Le contribuable formalise par écrit son choix parmi l'une des options suivantes : (...) / c) Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. Il met alors à la disposition de l'administration les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle. Ces copies sont produites sur tous supports informatiques, répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget. L'administration restitue au contribuable avant la mise en recouvrement les copies des fichiers et n'en conserve pas de double. L'administration communique au contribuable, sous forme dématérialisée ou non au choix du contribuable, le résultat des traitements informatiques qui donnent lieu à des rehaussements au plus tard lors de l'envoi de la proposition de rectification mentionnée à l'article L. 57. (...) ". 8. Il résulte des dispositions de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales que celles-ci interdisent à l'administration fiscale de conserver les copies des fichiers d'écritures comptables après la mise en recouvrement des impositions. Ces dispositions, ainsi que cela ressort des travaux préparatoires dont elles sont issues, sont destinées à garantir au contribuable que des impositions ultérieures ne seront pas établies sur la base des données contenues dans ces fichiers. L'omission de restitution des copies des fichiers en cause, en méconnaissance des dispositions précitées, est susceptible d'entacher la régularité des impositions qui viendraient à être ultérieurement établies sur la base des données qu'ils contiennent. Elle est, en revanche, sans influence sur les impositions mises en recouvrement après la consultation et l'exploitation des fichiers. 9. En l'espèce, l'administration a omis de restituer les copies des fichiers avant les avis de mise en recouvrement des 31 octobre et 15 novembre 2017. Pour ce motif, elle a dégrevé les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les impositions supplémentaires d'impôt sur les sociétés contestés, puis a restitué les copies le 28 août 2018 en application des dispositions du c du II de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales. Il n'est pas établi qu'après la restitution, elle aurait exploité à nouveau les fichiers dans le cadre de la procédure d'imposition ayant abouti aux rappels et impositions supplémentaires litigieux. Dès lors, l'administration a pu valablement émettre un nouvel avis de mise en recouvrement du 28 septembre 2018 sans avoir porté atteinte à la garantie d'un débat oral et contradictoire qui, au demeurant, avait eu lieu au cours de la procédure d'imposition. 10. Il résulte de ce qui précède que la SARL Grimault n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté le surplus de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de la SARL Grimault est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Grimault et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, présidente de chambre, - M. Geffray, président-assesseur - M. Penhoat, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le rapporteur J.E. GeffrayLa présidente I. PerrotLa greffière S. Pierodé La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00758
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 23 septembre 2021 par lequel le préfet de la Côte-d'Or lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé la destination d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire. Par un jugement n° 2102795 du 12 mai 2022, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 21 octobre 2022, Mme B..., représentée par Me Grenier, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté contesté ; 2°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale ", subsidiairement, de réexaminer sa situation ; 3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - le refus de séjour méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; - l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée en raison de l'illégalité du refus de séjour ; elle méconnaît l'article L. 611-3, 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; - la fixation du pays de destination et la décision fixant le délai de départ volontaire doivent être annulées en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire. Par un mémoire enregistré le 31 mai 2023, le préfet de la Côte-d'Or, représenté Me Rannou, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de Mme B... une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 septembre 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - et les observations de Me D'Ovidio pour le préfet de la Côte-d'Or ; Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., ressortissante albanaise née en 1962 et entrée sur le territoire français en 2017, relève appel du jugement du 12 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation présentée à l'encontre de l'arrêté du 23 septembre 2021 du préfet de la Côte d'Or lui refusant un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Sur le refus de séjour : 2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (...) ". 3. Il ressort des pièces du dossier que la décision rejetant la demande de titre de séjour de Mme B... a été prise notamment au vu d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 23 juillet 2021, selon lequel si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale, son absence ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, son état de santé lui permettant par ailleurs de voyager sans risque. Si pour contredire cet avis, Mme B... verse au dossier des certificats médicaux émanant du docteur A..., praticien hospitalier, et du docteur D..., médecin généraliste, dont il résulte, pour le premier, qu'il est nécessaire pour l'intéressée de prendre un traitement médicamenteux quotidien et que les soins dont elle a fait l'objet ont permis la disparition des idées suicidaires, toute rupture de continuité étant susceptible d'entraîner pour elle des conséquences négatives sur son état de santé et, pour le second, que son syndrome dépressif traité en centre hospitalier spécialisé ne lui permet pas de rentrer dans son pays d'origine sans que cela nuise à sa santé, il n'apparaît pas pour autant, eu égard à la relative généralité de ces certificats et à l'absence de plus amples précisions sur le degré exact de son état dépressif que l'intéressée encourrait des conséquences exceptionnellement graves en l'absence de prise en charge. Il apparaît que, pour le traitement de ses troubles dépressifs, celle-ci prenait, à la date de la dernière ordonnance produite, du deroxat, de l'abifily du prazepam, et que la liste des médicaments disponibles en Albanie (fiche medcoi produite par le préfet en première instance) comporte, outre des médicaments prescrits pour les poly pathologies chroniques invalidantes dont elle souffre par ailleurs, des antidépresseurs adaptés au traitement d'une pathologie dépressive ou post-traumatique. Il ressort également des pièces versées qu'en Albanie existent des structures adaptées, notamment psychiatriques, auxquelles cette dernière ne justifie pas ne pas avoir financièrement ou matériellement accès. Par suite, c'est sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans erreur de qualification juridique des faits et sans erreur manifeste d'appréciation que le préfet de la Côte-d'Or a refusé de délivrer à Mme B... le titre de séjour demandé. Sur l'obligation de quitter le territoire français : 4. Compte tenu de ce qui précède, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour. 5. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 611-3, 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés par les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3. Sur la fixation du délai de départ volontaire et du pays de destination : 6. Eu égard à ce qui précède, les décisions accordant un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination ne sont pas illégales du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. 7. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Dès lors sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public après mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, C. DjebiriLe président, V.-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 22LY03098 al
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 à 2015. Par un jugement n° 1906714 du 7 janvier 2022, le tribunal administratif de Nantes a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur de 817 euros et rejeté le surplus de leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 11 mars 2022 M. et Mme C..., représentés par Me Magguilli, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ; 2°) de prononcer la décharge sollicitée ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la vérification de comptabilité de la SARL C..., commencée le 11 juillet 2016, a excédé le délai de trois mois prévu à l'article L. 52 du livre des procédures fiscales compte tenu la tenue d'une réunion de synthèse sur place le 29 novembre 2016 ; - le changement de vérificateur intervenu le 15 septembre 2016 a eu une incidence sur le déroulement de la procédure ; - la durée de la vérification de comptabilité a été prorogée au-delà de trois mois sans que la société ait été préalablement informée ; - la restitution tardive des copies des fichiers a vicié la procédure d'imposition ; il ne peut y avoir un nouvel avis de mise en recouvrement à la suite d'un dégrèvement total pour défaut de restitution ; la restitution des documents après la fin des opérations de contrôle sur place l'a privée de la garantie d'un débat oral et contradictoire ; - la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses n'est pas justifiée. Par un mémoire en défense enregistré le 19 septembre 2022 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme C... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Geffray, - et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. A la suite de la vérification de comptabilité de la SARL C..., qui exploite une activité de boulangerie à Laval, l'administration a constaté l'existence de revenus réputés distribués au bénéfice de M. et Mme C..., chacun associé de la société, et dont M. C... est le gérant. Par une proposition de rectification du 2 mai 2016, l'administration a notifié à M. et Mme C... des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2013 à 2015 en raison de ces revenus distribués, réputés appréhendés par eux au sens du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions supplémentaires. Par un jugement du 7 janvier 2022, le tribunal, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'un montant de 817 euros, a rejeté le surplus de leur demande. M. et Mme C... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ce surplus. 2. M. et Mme C... invoquent le dépassement du délai de trois mois de la vérification de comptabilité de la SARL C..., la prorogation du délai supplémentaire de cette vérification, le remplacement du vérificateur pendant la procédure de vérification et l'atteinte au débat oral et contradictoire de la procédure d'imposition du fait de l'absence de restitution des fichiers avant la fin des opérations de vérification sur place. Toutefois, en vertu du principe d'indépendance des procédures, ces moyens relatifs à la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre d'une société soumise au régime d'imposition des sociétés de capitaux sont sans influence sur les impositions personnelles mises à la charge des bénéficiaires des revenus de capitaux mobiliers distribués par cette société. Dès lors, ces moyens soulevés par M. et Mme C... doivent être écartés. 3. L'administration, en se fondant sur la suppression de recettes d'exploitation perçues en espèces grâce à un logiciel externe au logiciel de caisse, sur l'utilisation de ce logiciel externe qui avait pour but de ne pas faire apparaître des recettes et de donner une apparence de sincérité à la comptabilité de la SARL C... et sur la circonstance que les mêmes recettes en espèces ont été appréhendées par M. et Mme C..., établit l'existence, de la part des contribuables, de démarches ou procédés destinés à l'égarer dans ses contrôles et caractérisant des manœuvres frauduleuses justifiant l'application de la majoration prévue au c. de l'article 1729 du code général des impôts. 4. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté le surplus de leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, présidente de chambre, - M. Geffray, président-assesseur - M. Penhoat, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2023. Le rapporteur J.E. GeffrayLa présidente I. PerrotLa greffière S. Pierodé La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT00759