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« J’ai toujours eu peur de devenir blasé de la pornographie »
Le Canadien Eric Chandonnet est un grand consommateur de X. Il en a même fait, pendant six ans, l’objet d’une chronique hebdomadaire sur le site Nightlife.ca. Il revient sur son expérience.
Eric Chandonnet, chroniqueur pour le site Nightlife.ca et auteur de « Victime de la porn ». Sandra Larochelle De 2010 à 2016, le Canadien quadragénaire Eric Chandonnet, fan de hard, a tenu une chronique sur la pornographie pour le site Nightlife.ca. Certaines d’entre elles font aujourd’hui l’objet d’un livre, Victime de la porn (Amazon, 344 p., 24,95 $, environ 22 €). Comment votre consommation de porno a-t-elle évolué avec le temps ? Je ne sais pas si « évoluer » est le bon terme, mais disons que cela a toujours été en mouvement. Internet est arrivé alors que j’étais adolescent. Quand on n’a encore rien vu, une grosse paire de seins en photo, et le tour est joué. Ensuite, certaines préférences demeurent, d’autres passent. Je peux être obsédé par une pornstar, une position ou une ethnie en particulier pendant quelques mois. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Fin de partie pour le porno à l’ancienne J’ai l’impression que c’est comme la nourriture : on a des préférences, mais certains goûts se développent avec le temps, ou en fonction de ce qu’on essaie. Et parfois, la « vraie vie » influence aussi nos recherches. Par exemple, la première fois que j’ai couché avec une Française, j’ai cherché du porno français durant des mois pour retrouver l’accent. Aucune lassitude, alors ? J’ai toujours eu peur de devenir blasé et, par certains aspects, je le suis devenu, mais rien de trop grave. Par exemple, je ne bande plus en tombant sur la photo d’une paire de seins… mais si une femme qui me désire m’envoie une photo de ses seins, cela m’excitera toujours, parce qu’il y a une intention derrière. Dans le porno, un truc qui ne me lasse pas, c’est lorsqu’on me regarde, la catégorie POV (« point of view », en anglais), où l’actrice plante son regard dans le vôtre… Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Payer pour du sexe revient encore souvent à être perçu comme un pervers » Comment imaginez-vous votre consommation dans le futur ? Je pense que je regarderai toujours du porno, mais que cela restera un plan B. Quand j’ai une copine, j’en consomme beaucoup moins. Cela dit, à 85 ans, la vraie vie offre sans doute moins d’options. La réalité virtuelle sera intéressante pour les nouvelles générations de personnes âgées. On pourra être en maison de retraite, avec un sex-appeal en chute libre, et quand même vivre des trucs. C’est mieux que rien. Et puis, si mes érections ramollissent, ça ne décevra personne d’autre que moi !
28/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/28/j-ai-toujours-eu-peur-de-devenir-blase-de-la-pornographie_5403229_4497916.html
Le fort de Brégançon cible d’une quarantaine de « gilets jaunes »
Arrivés en voitures de plusieurs communes, les manifestants ont tenté d’accéder à la résidence présidentielle.
Le fort de Brégançon, à Bormes-les-Mimosas, dans le sud-est de la France, le 7 août 2018. BORIS HORVAT / AFP « Nous reviendrons ! » Une quarantaine de « gilets jaunes » ont tenté jeudi 27 décembre d’investir le fort de Brégançon (Var), la résidence d’été des présidents de la République française, et comptent renouveler l’opération ce vendredi, rapporte Var-matin. Leur cortège de voitures a été stoppé par les gendarmes. Changement de plan : à pied, « divisés en plusieurs groupes, les manifestants cherchent par tous les moyens un accès au fort », détaille dans ses colonnes le quotidien, qui illustre en photos le jeu du chat et de la souris jeudi après-midi entre les « gilets jaunes » et les gendarmes aux abords du fort, situé sur une presqu’île. « La gendarmerie est intervenue pour bloquer au niveau du hameau de Cabasson une quarantaine de gilets jaunes qui voulaient aller dans le fort de Brégançon », a priori inoccupé, a confirmé le maire de Bormes-les-Mimosas (Var), François Arizzi. Le service de presse de l’Elysée a refusé de communiquer le lieu où se trouve actuellement Emmanuel Macron. « C’est du grand n’importe quoi, pour des gens qui veulent la démocratie, il faudrait déjà qu’ils commencent par respecter la propriété des autres », s’est emporté M. Arizzi, certains de ces « gilets jaunes » ayant traversé des domaines privés pour tenter d’accéder à leur cible.
28/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/28/le-fort-de-bregancon-cible-d-une-quarantaine-de-gilets-jaunes_5403209_3224.html
Le site de la gauche radicale « Lundimatin » boosté par l’effet « gilets jaunes »
Créée en 2014, la revue libertaire en ligne est dirigée par une rédaction anonyme et qui tient à le rester. Depuis le début du mouvement contestataire, elle connaît une forte audience, plus de 500 000 visites par mois.
Mathieu Burnel, l’un des relaxés dans l’affaire de Tarnac (ici, lors de l’ouverture du procès, en mars, à Paris), est souvent présenté comme le créateur principal de Lundi matin, ce que le site dément. Thomas Padilla/MAXPPP Le 8 décembre, jour de la grande manifestation parisienne des « gilets jaunes », vers 11 heures, Julien Coupat et l’un de ses amis sont interpellés par plusieurs policiers de la DGSI, avant d’être placés en garde à vue. Il y a dix ans, pour prouver l’implication de l’intellectuel de 44 ans dans l’affaire dite « de Tarnac », le texte L’insurrection qui vient (La Fabrique, 2007), signé du Comité invisible, avait été cité comme élément à charge. Cette fois-ci, certains semblent faire le lien entre cette arrestation et l’intérêt de Lundi matin pour le mouvement des « gilets jaunes ». La rédaction du site elle-même a publié un message indiquant que la DGSI serait « particulièrement remontée » contre leur audience croissante. Une rédaction « acéphale » Créée il y a quatre ans, cette revue en ligne est devenue une référence de la gauche radicale, nourrissant les grands mouvements du moment (mobilisation contre la loi travail, Nuit debout…). Le site, entièrement gratuit, revendique 500 000 visites par mois : sa notoriété déborde les seuls cercles militants. « C’est un endroit où les idées prennent de la consistance. L’application des idées à la réalité devient claire », souligne Eric Hazan, l’éditeur de La Fabrique. Après une réserve prudente, Lundi matin concentre désormais tous ses efforts à la couverture quasi quotidienne des « gilets jaunes ». Reportages, analyses, interviews, témoignages… et appels à la mobilisation. Dans « Prochaine station : destitution », publié la veille de la manifestation du 8 décembre (« soulèvement », est-il écrit dans le texte), on pouvait lire cette phrase : « Au point où nous en sommes, avec les moyens de répression contemporains, soit nous renversons le système, soit c’est lui qui nous écrase. » Est-ce cela qui a inquiété les autorités ? Les références intellectuelles communes (Michel Foucault, Gilles Deleuze, Giorgio Agamben), les ponts entre pensée critique et littérature, le goût pour l’exégèse talmudique et la kabbale, la radicalité insurrectionnelle, l’esthétisation de la violence… « C’est un endroit où les idées prennent de la consistance. L’application des idées à la réalité devient claire » Eric Hazan, éditeur de La Fabrique Le Comité invisible n’est évidemment pas étranger à Lundi matin, qui l’admet, mais précise : « Le Comité invisible et LM sont deux entités et projets parfaitement distincts. » Interrogé sur le rôle de Julien Coupat, LM souligne qu’il est un « contributeur irrégulier et parfois relecteur », mais qu’il n’est pas l’un des six animateurs du site. Mathieu Burnel, l’un des relaxés dans l’affaire dite « de Tarnac », est, lui, souvent présenté comme le créateur principal du site, « l’âme » du site, selon un proche. « C’est une fable que nous avons déjà entendue », répond LM. Lundi matin est acéphale, comme la revue de Bataille. C’est un réceptacle de très nombreuses âmes, contemporaines ou non (…). Ce serait d’ailleurs vraiment triste et ennuyeux que LM ne soit qu’UNE âme. »
28/12/2018
m-le-mag
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/28/le-site-de-la-gauche-radicale-lundimatin-booste-par-l-effet-gilets-jaunes_5403206_4500055.html
Fin de partie pour le porno à l’ancienne
Exit le film X d’antan, sa déco en stuc et son scénario en toc… Aujourd’hui, le consommateur plébiscite le contact direct avec les camgirls d’Internet et les services sur mesure.
« Eros plastiques », 2009. OLIVIER COULANGE / AGENCE VU C’était en juillet 1985 : ­Canal+ diffusait son premier « film du samedi soir », l’épatant Caligula, de Tinto Brass (1979). Les plus chanceux des quadragénaires d’aujourd’hui l’ont vu, les autres en ont certainement entendu parler dans la cour de récréation. Cette génération a eu accès aux VHS planquées dans le meuble télé, à la collection de BD cochonnes du grand-oncle, aux romans type San-Antonio ou SAS. Si vous êtes né après 1970, vous avez grandi avec le porno. Manifestement, vous avez survécu. Peut-être même êtes-vous parent d’enfants qui, aujourd’hui, découvrent la pornographie. Age moyen : 35 ans La consommation des mineurs fait les gros titres depuis des années, mais 2018 a été particulièrement chargée : en avril, un sondage OpinionWay-20 Minutes révélait qu’un adulte sur dix a été confronté au porno avant ses 11 ans, et six sur dix avant ses 15 ans. Le 15 juin, le président du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), Israël Nisand, et plusieurs professionnels de santé répondaient à ces chiffres par un « appel solennel » aux pouvoirs publics. De fait, avec un âge moyen du premier rapport sexuel à 17 ans, les plus jeunes commencent leur vie sexuelle par le porno. On croit avoir tout entendu sur la question, il reste pourtant un tabou : la consommation de porno est loin d’être l’apanage des jeunes. L’âge moyen de l’utilisateur du site anglophone Pornhub, la plus grosse plate-forme X du monde, est de 35 ans. Ces chiffres confirment les sondages nationaux : en France, la consommation des hommes adultes est passée de 30 % en septembre 2005, à 79 % en janvier 2014 – et la consommation des femmes, de 4 % à 41 % (IFOP-Tukif, avril 2014). En 2009, le pic de consommation de pornographie était atteint entre 35 et 49 ans (IFOP-Dorcel). Nous vieillissons avec le porno, et personne n’en parle. Ce que confirme le sociologue Baptiste Coulmont, maître de conférences à l’université Paris-VIII : « Pour ce qui est des études de sciences sociales, il y a énormément d’articles sur la consommation des adolescents et des jeunes adultes, mais presque rien sur les quadragénaires et le porno. » A ce vide théorique répond un scénario commode, mais faux : ces enfantillages seraient un pis-aller qu’on laisserait derrière soi en se mettant en couple. Soulagement expéditif Que se passe-t-il après nos 18 ans, quand le parfum de transgression s’évapore ? Les jeunes adultes se tournent massivement vers les plates-formes gratuites – pour des raisons pratiques et économiques. En quelques années, Pornhub a gagné une situation de quasi-monopole, et ça n’est pas fini, puisque ce site a plus que doublé son nombre de visiteurs en quatre ans (de 14,7 milliards de visites en 2014 à 33,5 milliards cette année).
28/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/28/fin-de-partie-pour-le-porno-a-l-ancienne_5403202_4497916.html
« La pornographie de masse, c’est le McDo du X »
La pornographie est désormais à portée de clic. La journaliste Marie Maurisse a enquêté sur la consommation massive de contenus X et sur sa conséquence.
« La pornographie de masse est aujourd’hui faite très vite, avec peu de moyens, peu de réflexion, peu d’érotisme et peu de scénario » explique Marie Maurisse, auteure d’une enquête sur la banalisation du X. M. M. Sand/CC BY-SA 2.0 Marie Maurisse, correspondante du Monde en Suisse, est l’auteure de Planète Porn (Stock, 224 p., 18 €), une enquête sur la banalisation du X. L’industrie du porno se préoccupe-t-elle de ne pas lasser ses consommateurs ? La lassitude du consommateur n’a strictement jamais été évoquée par l’ensemble des personnes actives dans l’industrie porno que j’ai rencontrées lors de mon enquête. Producteurs, réalisateurs, marketeurs et acteurs/actrices craignent que les clients ne souhaitent plus payer pour ce contenu, évoquent l’importance de la qualité de l’image, du jeu des acteurs, de leur physique, des conditions du tournage, mais personne ne se demande si les consommateurs en auront un jour marre de voir les mêmes « figures » sexuelles, les mêmes scripts à la noix, les mêmes remarques verbales lors des scènes. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Fin de partie pour le porno à l’ancienne Les indépendants parlent de cela, oui, mais plutôt pour évoquer la pauvreté artistique du X de masse. C’est comme si – enfin, selon moi – absolument personne ne pouvait envisager que les consommateurs et consommatrices de porno puissent se lasser du porno. Porno un jour, porno toujours, d’après eux. Et pourtant, je constate autour de moi, en questionnant de manière informelle les consommateurs et consommatrices, que certains s’en détournent, en ayant eu la sensation d’avoir « fait le tour » de ce qui existe. Le mécanisme d’excitation par le biais de la pornographie est tellement répétitif… Et le fait de renouveler les actrices n’y change pas grand-chose. Consomme-t-on différemment selon son âge ? Difficile de le dire, car les études sur le sujet ne sont pas toujours crédibles. Je peux faire une hypothèse personnelle, qui dépend moins de l’âge que de l’expérience de la pornographie : ceux qui s’y mettent vont d’abord apprendre à naviguer sur les sites et à y retrouver leurs goûts, en commençant par les choses « classiques » puis en apprenant à savoir ce qu’ils préfèrent. Une fois l’habitude installée, consommer de la pornographie est un moment très rituel, je pense. Et donc, après, on prend le pli : on cherche exactement ce que l’on veut, on zappe un moment, puis on jouit. L’exploration est probablement moins importante à partir d’un certain âge, mais ce n’est qu’une hypothèse personnelle construite à partir de mon enquête. Comment le porno évolue-t-il ? Vaste question… Internet a « disrupté » la pornographie de manière beaucoup plus violente que d’autres secteurs, dans la mesure où c’est un secteur dissimulé, dont les problèmes n’intéressent officiellement à peu près personne – et ne disposant que d’une régulation et d’une protection très faibles, voire inexistantes. Donc, c’est d’abord un choc économique qui a appauvri la pornographie : puisque tout est diffusé gratuitement, beaucoup de studios ont disparu. Le X payant, soit indé, soit en « cams », brouille la frontière entre pornographie et prostitution – car faire un show pour un client, même de manière virtuelle, n’a rien à voir avec un jeu d’actrice pour un film destiné à plusieurs spectateurs qui ne peuvent pas interagir avec toi. Les geeks ont investi le domaine, avec succès, et ont gagné la bataille sur les géants traditionnels du X. Il y a par conséquent une forte concentration du secteur. Concrètement, le résultat, c’est que la pornographie de masse est aujourd’hui faite très vite, avec peu de moyens, peu de réflexion, peu d’érotisme et peu de scénario. C’est le McDo du X. De l’autre côté, le progrès technique rend sa fabrication moins coûteuse, ce qui a permis à beaucoup d’indépendants de créer leur pornographie nouvelle, meilleure, où la femme est actrice et pas victime, où tous les corps et les genres sont permis, voire désirés. C’est chouette, mais ce contenu, payant, représente une extrême minorité de la pornographie consommée actuellement. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « J’ai toujours eu peur de devenir blasé de la pornographie » Dernière chose : comme la concurrence est rude et que tu peux voir des culs en un clic sur le Web, les producteurs ont massivement investi dans les « cams », qui permettent de faire un contenu exclusif, pour un client unique. Contenu qui est moins facilement piratable que le film que tu mets sur ton site payant et qui se retrouve le lendemain sur YouPorn. Je dirais donc que la pornographie va se scinder en deux mondes très opposés : d’un côté le X de « merde », de masse, gratuit, et de l’autre un X payant, soit indé, soit en « cams », ce qui brouille la frontière entre pornographie et prostitution – car faire un show pour un client, même de manière virtuelle, n’a rien à voir avec un jeu d’actrice pour un film destiné à plusieurs spectateurs qui ne peuvent pas interagir avec toi. Quand on observe les hashtags les plus usités, on constate une intéressante obsession pour les rapports d’âge… Est-ce que les seniors ou juniors recherchent des performeurs de leur âge ? C’est une bonne remarque, que je n’ai pas eu le temps de creuser lors de mon enquête. Donc là encore, ma réponse est un peu personnelle. Dans le désir, il y a parfois – souvent – quelque part l’idée de l’interdit. Un des derniers interdits, dans notre société, c’est l’inceste, ou l’inceste lointain, c’est-à-dire ce que les anglophones appellent le « fauxcest ». Freud ne doit pas être loin derrière, mais je ne saurais pas bien l’expliciter. Coucher avec quelqu’un de beaucoup plus vieux, ou de beaucoup plus jeune, ou alors quelqu’un de sa famille, ou de sa famille éloignée, est impossible, donc excitant. La pornographie est le lieu de tous les désirs possibles, car c’est un peu comme dans un rêve : on peut le fantasmer, on peut jouir même, mais tant qu’on ne fait rien dans la vie réelle, c’est OK. Je pense que cela explique le succès des questions d’âge sur ces sites. Par ailleurs, c’est super de voir que les hommes fantasment sur les MILF («Mother I’d like to fuck ») , et que les femmes peuvent désirer des hommes beaucoup plus jeunes ou plus âgés : cela montre que les clichés sur ce qui est désirable sont caducs. Est-ce qu’à un moment, il est normal de se détourner du porno ? Le mot « normal » en pornographie n’a pas beaucoup de sens. Chacun fait comme il veut ! Parfois les consommateurs y restent toute une vie, parfois ils s’en détournent. Le seul critère qui compte – en tout cas pour les médecins et les addictologues –, c’est de savoir si la pornographie abîme, gâche ou pose des problèmes dans la vraie vie du consommateur ou de la consommatrice. Si en consommer tous les jours ne change pas votre vie sexuelle pour de vrai, alors il n’y a aucun souci. Si la vie vous en détourne un moment ou pour toujours, et que cela ne vous déprime pas, alors c’est OK aussi. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Payer pour du sexe revient encore souvent à être perçu comme un pervers »
28/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/28/la-pornographie-de-masse-c-est-le-mcdo-du-x_5403200_4497916.html
« Payer pour du sexe revient encore souvent à être perçu comme un pervers »
A 34 ans, Fred est un consommateur de porno depuis vingt ans déjà, qui sait s’adapter, passant du X de Canal+, hier, aux camgirls d’Internet, aujourd’hui. Et compte bien vivre jusqu’à l’avènement de la réalité virtuelle en interface neuronale directe.
« Sur mon PC, il n’y a que du porno acheté en toute légalité. C’est une sorte de porno “bio” », affirme Fred, 34 ans (Photo d’illustration). Paolo Turini/CC BY-ND 2.0 Il s’appelle Fred, il a 34 ans, il est ingénieur… et il est entré en pornographie de manière extrêmement classique, par le biais de Canal+, en 1997. Depuis cette première expérience, advenue l’année de ses 13 ans, la télévision familiale a laissé place au modem 56k, puis au haut débit, tandis que ses goûts sont passés des dessins animés japonais érotiques aux séquences X gratuites des « tubes » (plates-formes de partage de vidéos). A priori, toutes les cases sont cochées : Fred, qui vit en couple, est l’incarnation du consommateur de pornographie moyen. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Fin de partie pour le porno à l’ancienne Comment êtes-vous sorti du porno de masse des « tubes » ? C’était un peu par hasard, en 2012. Je découvre alors le site de camgirls Chaturbate.com. En discutant avec la femme qui est sur mon écran, j’ai le déclic : les travailleurs du sexe sont des personnes comme les autres, qui travaillent. A partir de là, je me suis donné comme règle de toujours donner au moins un petit pourboire à mon interlocutrice. J’ai un budget mensuel de 75 euros (parfois dépassé pour un coup de cœur ou une opération spéciale). Quand je choisis une session privée avec des modèles – je préfère utiliser ce terme que « camgirl », par respect pour l’aspect artistique de la performance, et parce que je n’aime pas le mot girl, qui infantilise –, je demande presque toujours la même chose : qu’elles fassent ce qui leur fait plaisir avec les moyens qu’elles préfèrent. J’affine mes goûts tout en construisant de très bonnes relations (politesse, respect de leur temps, rétribution, ne rien envoyer de non sollicité). Puis, en 2016, j’ai découvert les sites où les modèles peuvent vendre leur production, en particulier les vidéos faites sur mesure. Je peux enfin être le propre scénariste de mes films X ! Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Le rapport aux images pornographiques est fait de répétitions et de surprises » Ce n’est pas le même budget… Non, effectivement. Pour ces vidéos, il faut compter entre 30 et 100 euros pour une scène d’entre 10 et 20 minutes. Cela peut augmenter beaucoup pour certaines demandes spécifiques (vidéo exclusive, utilisation du prénom…). En gros, plus le film est difficile à revendre à d’autres par la suite, plus il coûte cher. Mais, à l’écran, le degré de satisfaction est d’un autre niveau. Depuis, je ne vais plus sur aucun « tube ». Sur mon PC, il n’y a que du porno acheté en toute légalité. C’est une sorte de porno « bio ». Dernière étape en date : en 2017, je découvre les coulisses du métier, grâce à un modèle devenu une amie, et toutes les contraintes que l’on ne perçoit pas forcément en tant que consommateur. Depuis, je milite pour les droits des travailleurs du sexe et pour l’amélioration de leurs conditions de travail.
28/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/28/payer-pour-du-sexe-revient-encore-souvent-a-etre-percu-comme-un-pervers_5403199_4497916.html
Heureux comme un légionnaire en Corse
De nombreux ex-légionnaires ont posé définitivement leur barda sur l’Île de Beauté et sont devenus plus corses que les Corses eux-mêmes. Une greffe qui a fini par prendre, même si la cohabitation avec les insulaires n’allait pas toujours de soi.
de soi. Un beau jour, lassés du baroud ou d’un nom qui n’était pas le leur, ils ont rangé leur képi blanc au fond d’une armoire, déposé dans une cantine cabossée leurs médailles et leurs rêves déçus et se sont installés en Corse, leur dernière patrie après tant d’autres. Colosses mutiques ou musculeux nabots au crâne rasé, Tchèques tatoués, anciens dockers de Yokohama ou natifs de Meudon, patronymes imprononçables, accents des antipodes mâtinés d’argot de caserne, mercenaires repentis, Suisses de contrebande ou moines défroqués : combien sont-ils, ces anciens légionnaires établis à demeure, de Bonifacio à Bastia, depuis cinquante ans que l’île cohabite avec la Légion ? Un régiment mythique, depuis 1967, à Calvi « Rien qu’en Balagne, plusieurs dizaines, de tous les âges », estime l’un d’entre eux. Dans le nord-ouest de l’île, cette région parmi les plus belles de Corse abrite depuis 1967, à Calvi, le camp Raffalli, cantonnement du prestigieux 2e régiment étranger de parachutistes (REP), la crème de la crème, seule unité aéroportée de la Légion – un mythe forgé de Dien Bien Phu au Sahel en passant par Kolwezi, le Congo-Brazzaville ou l’Afghanistan. C’est autour de ce foyer que la plupart ont refait leur vie, souvent dans les villages alentour : Lumio, Monticello, Olmi-Cappella ou Moncale, où les avaient précédés quelques anciens. Rien qui aille de soi, dans une Corse capable de rejeter comme une mauvaise greffe un corps étranger, à plus forte raison celui de soldats à la trouble réputation – une « troupe rude et sans pédanterie », tentait déjà, à la fin du XIXe siècle, d’euphémiser le capitaine de Borelli dans A mes hommes qui sont morts, fameux poème aux accents parnassiens composé après la conquête de l’Indochine. « C’est une ambiance, le sentiment d’avoir enfin trouvé sa place dans un endroit où les gens sont rugueux mais entiers. ça n’existe pratiquement plus ailleurs. » Sébastien Dupront, ancien béret vert Et pourtant, voilà ces anciens légionnaires enrôlés dans le recensement d’une île à la démographie brouillonne, façonnée par des siècles d’apports extérieurs – « La Corse fabrique des Corses », prétend un dicton local. « Il y a quelque chose qui nous empêche de partir d’ici, mais je ne sais pas quoi, essaie d’analyser l’ancien béret vert Sébastien Dupront, 48 ans, attablé à un tonneau du Roi de Rome, haut lieu des nuits ajacciennes. C’est une ambiance, le sentiment d’avoir enfin trouvé sa place dans un endroit où les gens sont rugueux mais entiers. ça n’existe pratiquement plus ailleurs. »
28/12/2018
m-le-mag
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/28/heureux-comme-un-legionnaire-en-corse_5403191_4500055.html
Un apéro avec Frédéric Beigbeder : « Je suis un diplodocus dans le nouveau monde »
Chaque semaine, « L’Epoque » paie son coup, sauf quand l’invité décide de régaler. L’écrivain et chroniqueur, faux nonchalant, n’est décidément jamais où on l’attend.
Frédéric Beigbeder, à l’hôtel Grand Amour, à Paris, le 13 décembre . JÉRÔME BONNET POUR « LE MONDE » Double whisky sans glace et double enjeu pour cet article : c’est le dernier « Apéro avec » de 2018, et le client du jour a l’alcool redoutable. Prendre un apéro avec Beigbeder n’est donc pas un hasard mais plutôt toute une histoire, un art même, quand on perpétue, hors-la-loi Evin, l’alcoolisme mondain comme genre littéraire. Donc, grosse pression – Ah non ! Surtout pas de bière avec le « Beig », malheureux ! Beaucoup trop plouc ! On a tellement potassé les grimoires de posologie éthylique afin de dénicher, pour impressionner le Beig, le cocktail dernier cri à l’appellation poético-kitsch, qu’on a failli ne plus avoir de temps et de neurones disponibles pour lire son dernier bouquin. Courageux… Tss-tss. En réalité, on avait fait fausse route. Au barman de l’hôtel mi-cosy mi-bobo où nous nous sommes finalement retrouvés, Beig a fait : « Une caïpirinha fera l’affaire. » En réalité, on s’était trompé de Beig ou bien Beig s’était trompé. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Frédéric Beigbeder : « Le vin est un carburant à conversation » Beig était à l’heure, à jeun, vieux, basque et préoccupé. Préoccupé à un point tel que la pression, c’est Beig qui se l’était mise tout seul. Il semble bien qu’il s’agissait de trouver les conditions spatio-temporelles idoines qui président à ce moment incontournable, d’autant qu’il va devoir le partager avec un journaliste collaborant à un quotidien du soir « qui a massacré [s]es deux derniers bouquins et [s]on dernier film. Alors, s’il peut y en avoir au moins un, au sein de cette rédaction, qui soit bienveillant… » A ce titre, SMS de Beig, la veille du rendez-vous : « Petite question embêtante : avez-vous reçu mon livre ? » Nous : « La honte… Non… Même pas au courant… Je file l’acheter. » Remarquez que Beig prit le risque que nous n’aimassions pas son œuvre. Beig est un garçon courageux. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Mortellement Beigbeder Poli Une évidente solidarité confraternelle ne nous empêchera pourtant pas d’écrire qu’on a lu jusqu’au bout, et avec un plaisir un peu coupable, son livre, un recueil de « 99 essais », intitulé La frivolité est une affaire sérieuse (L’Observatoire, 384 p., 20 euros). Ouvrage brillant, érudit, percutant, voire indispensable – fayotage obligé pour ce dernier qualificatif, c’est lui qui a réglé l’apéro –, truffé de références (les Irlandais de Vincennes, Schopenhauer, Daniel Guichard, etc.), de paillettes chics et people (la description non censurée de ce dîner à Saint-Trop avec Kate Moss) et de choses profondes (des considérations sagaces sur les attentats parisiens ou la retranscription fidèle de ce proverbe zoulou presque nécro-pornographique : « Si tu avances, tu meurs. Si tu recules, tu meurs. Alors, pourquoi reculer ? »). Donc, à l’heure de notre rendez-vous, Beigbeder a mis beaucoup de soin à trouver…
28/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/28/un-apero-avec-frederic-beigbeder-je-suis-un-diplodocus-dans-le-nouveau-monde_5403159_4497916.html
Au nouveau « Club des cinq », on se promène en Uber et on se chamaille sur le Brexit
Gros succès de librairie en Grande-Bretagne, les versions adultes parodiques du célèbre « Club des cinq » d’Enid Blyton débarquent en français. Une résurrection nostalgique par l’auteur anglais Bruno Vincent.
Extrait de l’image de couverture de « Le Club des cinq part en séminaire », par Bruno Vincent. HACHETTE Le Club des cinq a grandi. Voilà que Claude, Mick, François et Annie, toujours suivis de près par le fidèle chien Dagobert, vivent en colocation, se déplacent en Uber, s’agacent des joueurs de ukulélé, se détendent avec le jeu vidéo World of Warcraft et découvrent les graines de chia. Hachette vient de traduire en français trois livres de la série d’Enid Blyton, réécrits dans une version adulte, parus fin 2016 au Royaume-Uni. Ainsi, le groupe d’amis devenus grands doit, selon les tomes, arrêter le gluten, s’occuper d’un bébé ou partir en séminaire. « Pour garder le format imposé par l’éditeur, pas plus de 15 000 mots, je me suis inspiré du rythme des sitcoms : des histoires courtes qui finissent toujours bien. » Bruno Vincent Derrière cette résurrection, et cette nostalgie revue avec humour, l’auteur anglais Bruno Vincent. En janvier 2016, celui qui est connu dans son pays pour ses livres humoristiques est contacté par l’éditeur britannique Quercus. « Quatre générations d’enfants ont grandi avec cette collection, donc il fallait que le pastiche reste respectueux. On ne pouvait pas se moquer des personnages, alors j’ai plutôt choisi de tourner en ridicule la vie moderne », raconte l’auteur. Après avoir envoyé une note d’intention à Hachette Angleterre, la société chargée de l’héritage d’Enid Blyton, l’éditeur reçoit un accord de principe en avril – « même si j’ai entendu dire que l’un des petits-enfants de Blyton avait trouvé l’idée effrayante ! », confie Bruno Vincent. Pour ne pas rater la manne que représente la période de Noël, l’éditeur accélère ensuite le processus et lui donne une semaine pour relire tous les volumes de la collection et trois semaines pour rédiger chaque tome. « Il a fallu écrire vite, mais ce rythme intense a été bénéfique, se souvient Bruno Vincent. J’ai conservé la structure, simple, pas de figure de style ni d’envolée lyrique, et la narration, centrée sur l’aventure. Pour garder le format imposé par l’éditeur, pas plus de 15 000 mots, je me suis inspiré du rythme des sitcoms : des histoires courtes qui finissent toujours bien. » Pas d’ambition littéraire donc, mais l’intrigue est cohérente jusqu’au bout, cela se lit aussi facilement qu’on regarderait une comédie américaine un dimanche soir. L’épisode « Brexit », record des ventes En témoigne le succès de l’aventure sur le Brexit (sortie prévue en France au mois de mai), best-seller en Angleterre, où la collection a dépassé le million d’exemplaires depuis son lancement, en 2016. « J’ai fait des recherches pour chaque thème car, pour que ce soit drôle, il faut que ce soit juste ! » Pour appuyer l’effet pastiche, les illustrations intérieures ont été piochées dans les premières éditions du Club des cinq et la nouvelle couverture réalisée dans l’esprit d’origine de la collection. Un détournement qui n’est pas sans rappeler les quantités de fausses couvertures de Martine, l’héroïne de Delahaye et Marlier, vues sur les réseaux sociaux (« Martine a loupé la Gay Pride, a une carte Cofidis, ne comprend rien à Twitter »…). Un second degré sur lequel semble miser Hachette puisque l’éditeur lance au même moment la version adulte d’une autre collection mythique : les Monsieur Madame, de Roger Hargreaves. Il y est aussi question de régime, des joies de l’entreprise et du bonheur de la maternité. De la vie (de grand) en somme. « Le Club des cinq pouponne », « Le Club des cinq part en séminaire », « Le Club des cinq arrête le gluten », Bruno Vincent, Hachette, 9,95 € chacun.
28/12/2018
m-le-mag
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/28/au-nouveau-club-des-cinq-on-se-promene-en-uber-et-on-se-chamaille-sur-le-brexit_5403154_4500055.html
Au Brésil, le combat des Guarani-Kaiowá pour sauver ce qu’il reste de leur terre
D’un côté, des agriculteurs soutenus par le président brésilien Bolsonaro. De l’autre, un peuple autochtone attaché à sa culture. Un combat inégal.
A Dourados. Victor Moriyama pour M Le magazine du Monde Le corps sec enfilé dans un bermuda élimé, Yvyrakandy nous fait tâter l’endroit où la balle est venue se loger. « On peut encore la sentir ici », indique l’indigène désignant l’étrange boursouflure à quelques centimètres d’une blessure en forme de trou désormais refermée. Poursuivant son récit, Yvyrakandy, ou Marcio Mendes de son nom portugais, raconte les tracteurs venus, en pleine nuit, dévaster les tentes misérables de sa communauté et les plants de manioc écrasés. « Ils ont beau nous attaquer, on se battra jusqu’au bout, on n’abandonnera pas notre terre ! », lâche le jeune homme, déterminé, comme les siens, à ne pas laisser le carré de terrain qu’il occupe depuis plus d’un mois revenir aux mains de son propriétaire officiel, Claudio Iguma, un riche agriculteur que tous appellent « le Japonais ». Un peuple en voie de disparition Malgré ses airs bravaches, Yvyrakandy reste un homme tourmenté, comme l’est son peuple, celui des Guarani-Kaiowá, ethnie autochtone maltraitée depuis plus d’un siècle au Brésil. En ce début décembre, à quelques mètres de la réserve indigène protégée de Dourados, dans l’Etat du Mato Grosso do Sul, Yvyrakandy, assommé par un soleil tropical, se dénude pour montrer son torse maculé de cicatrices, stigmates de ses précédentes batailles. Des impacts de balles tirées par des milices à la solde de fazendeiros, ces agriculteurs comme Claudio Iguma, à la tête de propriétés où s’étendent des champs de maïs et de soja sur des kilomètres et des kilomètres. Le lopin reconquis par Yvyrakandy et une poignée d’autres Indiens est une retomada, (« reprise »). Mais, pour les fazendeiros, il s’agit d’une invasion. « Ils portent des capuches, menacent les gens, la seule chose qu’ils veulent, c’est mettre le bazar ! », râle au téléphone un fermier voisin qui loue ses terres au « Japonais ». Ce différend historique remonte à la création même de la réserve de Dourados, en 1917. Alors qu’elle devait s’étendre sur 3 600 hectares, seuls 2 800 auraient été en réalité accordés aux Indiens. Au fil des ans, la ville et les plantations ont peu à peu rogné sur leur territoire. Sur cette terre volée, s’étend une agriculture intensive gorgée de pesticides, quelques habitations et même un projet de « condominium », un lotissement d’immeubles de luxe avec piscine et salles de sport destiné au gratin local. Une catastrophe écologique qui se cache derrière la disparition d’un peuple.
28/12/2018
m-le-mag
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/28/en-amazonie-le-combat-des-guarani-kaiowa-pour-sauver-ce-qu-il-reste-de-leur-terre_5403151_4500055.html
Vin : prenez de bonnes résolutions pour 2019
La vie est trop courte pour boire du mauvais vin. Pour trinquer sans fausse note, débarrassez-vous des idées reçues et apprenez à mieux sélectionner vos bouteilles.
Le cépage est l’instrument, l’AOC, un courant musical, et le vigneron appose sa signature, à la manière d’un musicien. CHANG KI CHUNG POUR "LE MONDE" Que 2019 soit l’année de la teuf ou du « presque neuf », il est plus que temps de prendre de bonnes résolutions en ce qui concerne le jus de la treille. Avec une idée à garder à l’esprit : la vie est trop courte pour boire du mauvais vin. En voici quelques-unes, à vous de choisir. 1- Stop aux débats sur le bio Si on vous demande de citer un « grand » vin bio, régalez-vous : le romanée-conti, le plus mythique des bourgognes (et accessoirement le plus cher du monde). Côté champagne, le vignoble de la maison Roederer. Et en bordeaux ? Château Latour, l’un des plus prestigieux, qui a annoncé cet automne avoir obtenu sa certification officielle. Il rejoint Pontet-Canet ou Château Palmer. Château Angélus est en conversion. Et c’est pareil dans toutes les régions. Les grands montrent l’exemple, une foule de plus modestes ont déjà fait leurs preuves. A votre cave de suivre. 2- On en finit avec le bordeaux bashing Dire du mal des bordeaux, c’est « so 2010 ». Certes, on trouve encore des vins gavés de copeaux, au goût de jus de planche et au nez de commode Ikea, mais on observe surtout la montée de petits vins de super-qualité, beaucoup plus harmonieux. Dans les castillon-côtes-de-bordeaux, par exemple. Quiconque dit que les bordeaux ne sont plus intéressants devrait se remettre à la page. 3- On ne regarde plus les notes des millésimes Les millésimes froids, quand le raisin n’est pas mûr, se font rares depuis quinze ans. Résultat, sur l’ensemble du vignoble français, il n’y a que des bonnes notes, ce qui ne veut plus rien dire. Quant aux millésimes considérés comme « grands » ou « exceptionnels », ce sont ceux qui promettent une longue garde aux vins. Mais qui, aujourd’hui, conserve son vin plus de quinze ans avant de le boire ? Hors cas particuliers, mieux vaut se rabattre sur les « petits » millésimes, ceux qui se boivent vite et sont moins chers. Pourvu que le vigneron soit bon, son vin le sera aussi, même dans les années difficiles. 4- On achète moins mais meilleur Préférer mettre quelques euros de plus dans une bouteille et en acheter moins. C’est un peu snob, mais c’est tellement mieux. Pour le palais, pour le terroir, pour la frime. Et pour l’image de la France, qui est le premier pays exportateur de vin en valeur. Nous sommes les champions du vin de catégorie premium, à quoi bon encourager un marché plancher sans avenir ? 5- Cépage, AOC ou marque ? On fait la différence Pour bien comprendre, transposons en musique. Le cépage, la variété de raisin, est l’instrument. L’AOC, qui classe les styles de vin en fonction des régions, est comme un courant musical, du plus mainstream au plus pointu. Et la marque, la maison, le domaine ou le vigneron apposent leur signature, à la manière d’un musicien. Certains cépages sont obligatoires dans une AOC : le pinot noir pour le gevrey-chambertin, aussi inévitable que l’orgue dans la musique d’église ou la guitare dans le rock. Après, selon le groupe, ça change tout. On a beau aimer la guitare et le rock, Indochine, ce n’est pas les Rolling Stones. Pour rabattre le caquet d’un interlocuteur qui balance crânement « J’ai bu un gevrey-chambertin », on répond : « Certes. Mais de chez qui ? » (Indice : s’il répond « du domaine Trapet », il est admis de se rouler par terre de jalousie).
28/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/28/vin-prenez-de-bonnes-resolutions-pour-2019_5403145_4497916.html
Le ski de randonnée à l’assaut des cimes
Grimper à la force du mollet pour dévaler des pentes immaculées, une pratique exigeante qui répond à une soif de retour à la nature et qui tend à se démocratiser.
La France compte environ 150 000 adeptes de ski de randonnée. Un chiffre qui grimperait de 5 % chaque année. MICHEL MORERE / TERRES D'AVENTURE Dans le van millésimé de Tom, qui grimpe péniblement les rampes d’asphalte au-dessus de La Grave (Hautes-Alpes), la sono crache du Cypress Hill (« Insane in the membrane, insane in the brain ! ») et couvre le bruit du moteur essoufflé. A l’arrière, certains estomacs sont un peu noués. Ce n’est pas la faute des virages ou en raison d’une allergie au rap des années 1990. Plutôt un fond d’appréhension. Les passagers à bord se sont tous inscrits à un stage de découverte du ski de randonnée. Et ce matin, c’est le grand jour. Le ski de rando, c’est la tendance montante des sports d’hiver. Au sens propre, comme au figuré. Adieu, téléphériques, télécabines, télésièges et même vétustes téléskis. Il faut gravir la montagne à la force des mollets et des cuisses, en soufflant comme une locomotive à vapeur. La récompense ? Atteindre des endroits inaccessibles au commun des skieurs et s’ouvrir, lors de la descente, des champs de poudreuse. Et aussi avoir, il faut bien le dire, l’impression de faire un peu partie d’une élite qui s’encanaille à l’écart du troupeau dévalant les pistes, ce qui se raconte bien le soir à l’heure de la fondue. « Sortir des stations et voir du paysage » Frédérique, 54 ans, est la doyenne du groupe. Cette juriste parisienne s’est inscrite à ce stage parce qu’elle veut « sortir des stations et voir du paysage ». Et pour « se surpasser » aussi. Mais, bon, elle a quand même un peu la frousse. Comment va-t-elle supporter l’effort ? Aura-t-elle le niveau technique pour se débrouiller dans la neige non damée ? Elle sent que ce sera dur. Les autres passagers s’affichent plus décontractés. Yannis, 29 ans, médecin urgentiste à Lyon, a des fourmis dans les jambes. Il s’extasie face au paysage. Le soleil inonde le ciel bleu, éclaire la neige fraîche, plus blanche que jamais. Sur la Meije, en face, les séracs aux reflets bleutés hérissent les glaciers. Les skis au pied, après la première ascension, Yannis rayonne. « En haut, c’est l’effet “waouh”. La vue est magnifique. Avec la fatigue de la montée, je ne sais pas si ce sont les endorphines, mais on est juste bien ! » Et le meilleur est à venir. Voilà la descente. « Dans la poudreuse, on a l’impression de flotter ! » Ce jour-là, les conditions sont une publicité grandeur nature pour ce type de ski. La neige fraîche est stable, épaisse juste comme il faut, et le versant fréquentable, à 30 degrés. Tout le monde peut s’élancer sans crainte des avalanches. Pourtant, Frédérique n’a jamais vraiment réussi à se détendre. En bas, c’est la crise de tétanie : « C’est physique, c’est très physique. Je ne pensais pas que ce serait si dur. » Elle recommencera quand même le lendemain. Skis plus larges et plus légers, chaussures plus rigides, peau antidérapante, les équipementiers soignent les randonneurs. PHILIPPE ROYER / NATURIMAGES Le ski de randonnée, c’est le ski originel revisité, comme l’on dit des vieilles recettes remises au goût du jour dans les émissions culinaires. A la montée, on colle une peau antidérapante sous le ski. A la descente, on l’enlève, on la range dans le sac à dos, et on file. Dans le sens ascensionnel, ça ressemble à du ski nordique, dans l’autre, à du ski alpin. Longtemps, cette pratique est restée l’apanage d’une poignée d’alpinistes ou de montagnards. Mais elle s’est démocratisée, sur fond de retour à la nature, comme si elle était estampillée du label bio. L’estimation la plus courante dénombre 150 000 adeptes en France. Et le chiffre grimperait de 5 % chaque année. C’est une niche, mais une grosse niche. L’évolution du matériel est l’une des clés du succès croissant de la discipline. Les professionnels le constatent. La clientèle évolue, s’ouvre, avec de nouvelles attentes. « Il y a désormais une génération de citadins trentenaires et de quadragénaires, des CSP+ qui demandent plus de confort. Ils veulent aussi plus de pédagogie, pour progresser. L’activité se rajeunit. On voit parfois des parents qui viennent avec leurs ados », pointe Bruno Poinson, responsable de l’activité chez Terres d’aventure. Les montagnards aguerris râlent souvent face à ces novices qui viennent batifoler dans leur chasse gardée, sans pour autant souscrire aux joies du « package » traditionnel – le confort spartiate des refuges, des dortoirs, et les odeurs de chaussettes partagées… De nombreux nouveaux venus n’ont ni les compétences ni le matériel, mais veulent essayer, au moins une fois, et plus si affinités. Les voyagistes s’adaptent, avec des services privilégiant souvent les hôtels, pour les séjours de découverte, et fournissent le matériel. « A Chamonix, il y en a qui louent jusqu’aux gants », constate Bruno Poinson. L’équipement s’est considérablement amélioré L’évolution du matériel est l’une des clés du succès croissant de la discipline. Ceux qui ont essayé il y a vingt ans se rappellent avec émotion, mais douleur, les skis-enclumes qu’ils devaient porter jusqu’aux sommets et les chaussures qui réussissaient la performance de n’assurer aucun maintien tout en étant des plus inconfortables. Depuis, l’ensemble de l’équipement s’est considérablement amélioré – les fixations (plus légères, plus sûres), les chaussures (plus rigides, pour un meilleur contrôle), comme les skis (plus larges, allégés pour une meilleure portance dans la poudreuse). « C’est l’une des nouvelles clientèles : il y en a qui veulent faire du cardio, mais qui prendraient bien la télécabine pour redescendre ! » Tom Minaudo, moniteur Cette révolution est arrivée par le freeride (le hors-piste), suivi de la mode du freerando (courtes randonnées depuis le sommet des remontées mécaniques pour rejoindre des « spots » inaccessibles), qui a amené de plus en plus de skieurs vers la rando à gros dénivelés. Les principaux équipementiers s’y sont mis (Salomon, Dynastar, Rossignol, Atomic…). De nouveaux fabricants plus branchés (Zag, Black Crows…) ont, eux, grandi en même temps que cette niche. Les stations de ski ont compris que le ski de randonnée peut être un bon relais de croissance. Elles sont désormais nombreuses (Les Arcs, Courchevel, La Clusaz, Chamonix…) à entretenir des parcours balisés et sécurisés, qui permettent de redescendre par les pistes. Ces itinéraires ciblent deux types d’adeptes : les débutants, qui n’osent pas se lancer ; mais aussi ceux qui pratiquent le ski de randonnée comme le jogging, pour l’effort plus que pour la glisse. « C’est l’une des nouvelles clientèles : il y en a qui veulent faire du cardio, mais qui prendraient bien la télécabine pour redescendre ! », s’amuse Tom Minaudo, moniteur pour Azimut Montagne. Les stages de ski de rando permettent aussi d’apprendre à trouver l’itinéraire adapté, la bonne trajectoire, dans un environnement sans balises. PIERRE MERIMEE / REA Pour les débutants peu rassurés comme Frédérique, les stages de découverte des voyagistes, encadrés par des professionnels, permettent de se familiariser avec l’univers sauvage et les règles de sécurité de cette activité, qui reste dangereuse et éprouvante. On apprend à y utiliser un DVA (détecteur de victime d’avalanche) ou un sac airbag (un ballon se gonfle en cas d’avalanche, pour rester à la surface) ; et à s’accoutumer à un type d’effort qui nécessite du souffle, des cuisses et un minimum d’entraînement. De nombreux béotiens l’ont appris à leurs dépens : si l’on arrive carbonisé au sommet, la descente, dans des neiges parfois complexes (croûtées, traffolées…), peut virer au pensum. Ces stages permettent aussi d’apprendre à trouver l’itinéraire adapté, la bonne trajectoire, dans un environnement sans balises. Bref, de tenter de se faire une culture de montagnard, car l’équipement a beau s’être amélioré, il ne fera jamais le skieur. Hors des stations, une journée de ski de randonnée se résume toujours à un double tête-à-tête : face à soi-même et face à la montagne. « C’est Into the Wild. Le goût de l’aventure », s’amuse Tom Minaudo. Mais cela finit souvent mieux, heureusement, que dans le roman de Jon Krakauer. Carnet pratique Terres d’aventure propose des séjours d’initiation en groupe incluant l’hébergement, le dîner et le casse-croûte du déjeuner, ainsi que l’accompagnement par un guide de haute montagne. Dans les Hautes-Alpes, le stage peut être organisé autour de La Grave et de Serre-Chevalier (cinq nuits, 830 €, voyage non compris). La location du matériel est proposée en option. L’hébergement est prévu en dortoir, mais il est possible de demander une chambre, avec un supplément. Le programme est susceptible d’être modifié en fonction de la météo et des conditions d’enneigement. Renseignements sur www.terdav.com
28/12/2018
m-voyage
https://www.lemonde.fr/m-voyage/article/2018/12/28/le-ski-de-randonnee-a-l-assaut-des-cimes_5403142_4497613.html
Syrie : le régime répond à l’invitation des Kurdes face à la Turquie, Erdogan proteste
Les zones du nord-est de la Syrie que les unités à dominante kurde contrôlent sont menacées par une offensive d’Ankara.
Un convoi de l’Armée nationale syrienne, qui regroupe des rebelles soutenus par la Turquie, près de Manbij (Syrie), le 28 décembre. KHALIL ASHAWI / REUTERS Le retrait planifié des forces américaines du nord-est de la Syrie commence à produire ses premiers effets dans la ville de Manbij, proche de la frontière avec la Turquie. Vendredi 28 décembre, les Unités de protection du peuple, la force kurde partenaire de la coalition internationale contre l’organisation Etat islamique (EI) emmenée par Washington, ont appelé les forces du régime syrien à « se déployer dans les régions d’où nos troupes se sont retirées, particulièrement à Manbij et à protéger ces régions contre l’invasion turque ». Les zones du nord-est de la Syrie que les unités à dominante kurde regroupées au sein des Forces démocratiques syriennes (FDS) contrôlent sont en effet menacées par une offensive d’Ankara qui pourrait survenir une fois le retrait états-unien effectif. Chasser ces forces de Manbij est par ailleurs une priorité formulée de longue date par le président turc, Recep Tayyip Erdogan. Carte de Syrie au 19 décembre. Le Monde En cours de négociation Peu après l’appel des forces kurdes, un porte-parole de l’armée syrienne à Damas a annoncé que « des unités de l’armée arabe syrienne [étaient] entrées dans la région de Manbij ». Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), environ 300 soldats et miliciens prorégime se sont déployés dans des secteurs au nord et à l’ouest de la ville, créant une « zone tampon » entre les territoires tenus par les rebelles pro-Ankara et Manbij. Un début d’accord serait en cours de négociation afin d’organiser le retour progressif du gouvernement syrien dans des zones contrôlées par les forces à dominante kurde. D’après des témoignages relevés par Le Monde, une délégation du régime serait entrée dans la ville de Manbij pour parlementer avec les autorités locales. A l’ouest de Manbij, les forces du régime se sont par ailleurs renforcées au cours des derniers jours dans des localités rurales dont elles partagent le contrôle avec les Forces démocratiques syriennes (FDS) depuis deux ans. De son côté, le président turc, M. Erdogan, a qualifié les déclarations du régime syrien d’« opération psychologique ». Dans un communiqué, le ministère de la défense turc a par ailleurs affirmé que les forces à dominante kurdes qui contrôlent toujours Manbij n’avaient « pas le droit ou le pouvoir de parler au nom de la population locale ou d’inviter une quelconque partie ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le régime syrien devrait intensifier sa pression sur les Kurdes après le retrait américain
28/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/28/syrie-le-regime-repond-a-l-invitation-des-kurdes-face-a-ankara-erdogan-proteste_5403137_3210.html
Jean-Luc Mélenchon et Raphaël Glucksmann, le déjeuner de Noël
Les deux hommes, accompagnés d’Emmanuel Maurel et de Thomas Porcher, se sont longuement vus avant les vacances de Noël, en toute discrétion.
L’essayiste Raphaël Glucksmann, lors du lancement de son mouvement Place publique, à Montreuil (Seine-Saint-Denis), le 15 novembre. JOEL SAGET / AFP Parfois la magie de Noël opère même en politique. Juste avant les vacances, un drôle de déjeuner s’est tenu près de l’Assemblée nationale. Il devait être secret et réunissait quatre convives rarement ensemble : Jean-Luc Mélenchon, le chef de file de La France insoumise (LFI) ; Emmanuel Maurel, ancien socialiste devenu « insoumis » ; l’essayiste Raphaël Glucksmann et l’économiste Thomas Porcher, qui ont lancé avec Claire Nouvian, militante écologiste, le mouvement Place publique, qui veut notamment œuvrer à l’unité de la gauche pour les élections européennes de mai 2019. Un plan de table surprenant puisque les relations entre MM. Mélenchon et Glucksmann étaient jusqu’à présent à couteaux tirés. L’auteur des Enfants du vide (Allary éditions, 2018), qui a conseillé Benoît Hamon lors de la campagne présidentielle de 2017, représente une famille politique héritière de la deuxième gauche (décentralisatrice, pro-européenne et écologiste), qui diffère en plusieurs points du mouvement de M. Mélenchon qui se réclame du populisme de gauche et de l’écosocialisme. En revanche, M. Porcher, lui, ne cache pas avoir voté pour le candidat « insoumis » et a assuré dans un entretien au Monde que Place publique « ne s’inscrivait pas contre Jean-Luc Mélenchon ». De quoi détendre l’atmosphère. « Ambiance très détendue » D’ailleurs, la discussion autour de la table aurait été « conviviale, sympathique et bienveillante », l’ambiance « très détendue ». Au menu, pas d’accord secret pour une liste d’union (le sujet n’aurait pas été abordé) mais des débats de fond, sur la gauche, les « gilets jaunes », et l’Europe, histoire de souligner les divergences (notamment sur le rôle des pays de l’Est au sein de l’Union européenne) et les convergences entre ces deux gauches qui ne veulent pas être irréconciliables. Cette rencontre a eu lieu, en tout cas, dans un moment de doute à gauche, à un peu plus de cinq mois des élections européennes. Place publique veut être le catalyseur d’une liste d’union et rencontre tous les acteurs à cet effet. Pour l’instant, seul le PS semble vraiment intéressé par la démarche tandis que Génération.s de Benoît Hamon fait monter les enchères. LFI, quant à elle, a toujours été claire sur son refus des « soupes de logos » et de la stratégie d’union de la gauche, qu’elle estime non seulement dépassée mais surtout mortifère. Selon les « insoumis », il faut « fédérer le peuple », mener un combat contre « l’oligarchie » incarnée aujourd’hui par Emmanuel Macron. Deux visions divergentes, donc, mais qui n’empêchent pas de se parler.
28/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/28/jean-luc-melenchon-et-raphael-glucksmann-le-dejeuner-de-noel_5403133_823448.html
Tous nos albums préférés de 2018
Les critiques musiques du « Monde » présentent chacun(e) leurs cinq opus favoris, parmi ceux remarqués et défendus durant l’année écoulée.
La sélection de Stéphanie Binet Pochette de l’album « Invasion of Privacy », de Cardi B. ATLANTIC RECORDS / WARNER MUSIC C’est une femme qui a dominé le rap mondial cette année : Cardi B, de son vrai nom Belcalis Marlenis Almanzar. Lancée par son tube Bodak Yellow en 2017, cette ancienne strip-teaseuse d’origine dominicaine a classé chacun des titres de son premier album Invasion of Privacy au sommet des tops. Sa force : reprendre à son compte les codes sexistes de l’industrie du disque et les élans narcissiques des réseaux sociaux. En revanche, pour l’innovation musicale, le flegme mélodique du rap actuel, il vaut mieux se tourner vers son homologue américain Travis Scott, qui a publié début août son fantasmagorique Astroworld. L’autre tendance de 2018 est la domination des cultures urbaines sur la variété française, avec beaucoup de disques à la musicalité afro-trap, ou d’albums de rap de rue plus dispensables les uns que les autres. Dans ce flot, quelques perles, dont le mélancolique Imany de Dinos ou le Polaroïd Experience de Youssoupha. Ces deux albums renouent avec la tradition littéraire du rap français, riche en métaphores filées et en rimes embrassées. Pour les grandes voix de la soul, il faut se tourner vers l’Angleterre avec le crooner Jacob Banks, nourri par les rythmes des sound-systems londoniens. La sélection de Franck Colombani Pochette de l’album « Joy as an Act of Resistance », d’Idles. PARTISAN RECORDS Signe de ces temps anxiogènes, le futur ne fait plus rêver grand monde, les musiciens entre autres. Le repli vers un passé fantasmé est devenu une échappatoire, une valeur sûre et rassurante. Un idéal poussé à son paroxysme avec The Last Detail, duo franco-américain emmené par Mehdi Zannad et Erin Moran, qui fantasment la pop romantique des années 1960 avec un pointillisme de l’harmonie très poussé. Cette tendance rétro est également marquée chez Cat Power, sur un Wanderer apaisé et aux réminiscences soul folk, ou encore le mystique californien Jonathan Wilson avec son ambitieux Rare Birds. Nouvelle (dernière ?) génération de rockers, le quintette britannique Idles apporte un humanisme salvateur à sa furie post-punk, en remettant en question la masculinité et en prônant l’amour et la compassion pour tous. Enfin, toujours ce passé qui nous rattrape, avec le fantôme d’Alain Bashung revenu hanter nos esprits sur le superbe En amont. La sélection de Stéphane Davet Pochette de l’album « Chris », de Christine and the Queens. BECAUSE Chris, de Christine and the Queens (Because) Il Francese, de Jean-Louis Murat (PIAS) Image au mur, de Grand Blanc (Entreprise-ALSO/Sony Music) Warm, de Jeff Tweedy (dBpm Records) Contre-Temps, de Flavien Berger (Pan European Recording/ALSO/Sony Music) Les musiques urbaines imprègnent aujourd’hui toutes les strates de la pop. Des mutations qui régénèrent spectaculairement la chanson française. Pionnière de ces croisements, Christine and the Queens, qui entremêlait Christophe et Kanye West dans son premier opus, Chaleur humaine (2014), s’arme aujourd’hui du funk le plus rutilant et d’un alias, Chris, à l’énergie pansexuelle, pour porter une vision politique, poétique et émotionnelle qui irradie ce deuxième album bilingue (une version conçue en français, l’autre en anglais) et une nouvelle tournée, confirmant la singularité de l’artiste. Si narration hip-hop et grooves électro ont souvent remplacé les guitares dans les cœurs des nouvelles plumes de notre avant-garde pop – à l’instar de Flavien Berger façonnant en autarcie l’envoûtant Contre-Temps –, ils ont aussi revitalisé l’inspiration de Jean-Louis Murat, remarquable d’invention formelle et de richesse mélodique dans Il Francese. Donnée moribonde, l’électricité rock palpite pourtant intensément chez les Messins de Grand Blanc, dont le deuxième album, Image au mur, vibre de noirceur euphorisante et de rêveries sensuelles. Quand, accroché à une guitare sèche aux miroitements country-rock, le leader de Wilco, l’Américain Jeff Tweedy, se met à nu avec panache. La sélection de Pierre Gervasoni Pochette de l’album « Continuum », de Justin Taylor. ALPHA CLASSICS / OUTHERE MUSIC Rapprocher Domenico Scarlatti et György Ligeti ne va pas de soi mais, pour Justin Taylor, l’arsenal où l’Italien prépare ses sonates comme des cocktails Molotov est le même que celui où le Hongrois renouvelle son identité de franc-tireur faussement nationaliste. Dans les deux cas, un composant dosé de main de maître par l’interprète de 25 ans : le clavecin. Comme Justin Taylor, le ténor Ian Bostridge mène à bien un vrai projet d’artiste, au-delà du calendrier de référence (l’armistice de 1918), pour tirer de sa voix si particulière des accents à l’humanité impérissable. A la fin de la Grande Guerre, sur les tréteaux des compères Ramuz et Stravinsky, l’Histoire du soldat, comme si vous y étiez ! C’est ce que garantit une distribution dramatique (pensionnaires de la Comédie-Française) de haut vol. Remonter le temps sans paraître vieillot, tel est aussi le pari gagné par Le Concert de la Loge, avec le concours du public qui applaudit au beau milieu de la Symphonie concertante de François Devienne, comme à l’époque postrévolutionnaire. Avec Astrig Siranossian, violoncelliste de 30 ans, pas de bravos en plein concerto mais des louanges à n’en plus finir pour une confrontation aussi audacieuse (Khatchaturian et Penderecki) et réussie que celle des deux baroques du clavecin. La sélection de Patrick Labesse Pochette de l’album « Visions of Selam », d’Arat Kilo, Mamani Keïta et Mike Ladd. ACCORDS CROISÉS / PIAS Associé à la chanteuse malienne Mamani Keïta et à Mike Ladd, slameur poète urbain américain, le sextette parisien épris de groove éthiopien Arat Kilo signe une bouillonnante ode aux tissages transculturels. Une démarche dans laquelle s’inscrit la chanteuse anglaise Susheela Raman, qui s’invente un nouvel horizon du côté de Java et de la musique ondoyante du gamelan. Elle crée avec le guitariste et arrangeur Sam Mills une pop raffinée où s’entremêlent envols célestes et plongées en eaux profondes. C’est également un guitariste et arrangeur, Nicolas Repac, qui met en valeur les nuances vocales de la chanteuse ivoirienne Dobet Gnahoré et lui a permis de signer son album le plus convaincant. Joueur de violon Hardanger (huit ou neuf cordes), le Norvégien Erlend Apneseth présente avec son trio un néo-folk contemporain et onirique qui fait entendre le vent, répand des brumes mystérieuses, dessine l’infini des paysages enneigés. Une musique apaisante pour revigorer l’esprit et le corps, qu’exprime aussi dans la nudité du silence, la flûte shakuhachi, un simple bout de bambou percé de quelques trous, avec le Japonais Teruhisa Fukuda, l’un des maîtres de cet instrument. La sélection de Francis Marmande Pochette de l’album « End to End », de Barre Phillips. ECM Barre Phillips, compositeur de l’instant, signe le solo le plus strict et libre à la fois (End To End). Ce recueil poétique gravé par le label ECM – qui est à la production ce que P.O.L est à l’édition – rassemble l’immense histoire de Barre Phillips (San Francisco, 1934). Soit dit en passant, expérience en tout point semblable à celle de Joëlle Léandre (Joëlle Léandre et Théo Ceccaldi, Elastic, CIP). Barre est en résidence à vie à l’Europa Jazz (Le Mans). Anne Paceo (batteuse, compositrice), son port d’attache, ce serait plutôt Coutances. Elle est née à Niort, cinquante ans après Barre à Frisco. Elle se permet tout, comme Juliette et ses binocles rondes, qu’on ne saurait s’étonner de rencontrer ici, à moins d’être ce que Lubat appelle « un couillon du jazz ». Musicienne plus connue comme chanteuse, Juliette emballe un des meilleurs orchestres actuels. Dans sa voix, telle les grand(e)s trompettistes, s’entendent toutes les voix. Palimpseste sonore qui pourrait bien caractériser Eric Le Lann, en duo dévolu à Louis Armstrong, avec Paul Lay (Thanks A Million, Gazebo). Marcus Miller, enfin (Laid Black) ! Tout ce qu’il fait est tellement pensé, funky, très grand public, élitiste, partagé (Selah Sue, Alex Han), qu’on en revient sauvé. De quoi ? On verra plus tard. La sélection de Marie-Aude Roux Pochette de l’album « Enfers », par Stéphane Degout et Raphaël Pichon. HARMONIA MUNDI / PIAS Imaginée par Raphaël Pichon et Stéphane Degout, cette messe des morts païenne doit au grand baryton français (timbre de mica, beauté du chant, intelligence dramaturgique) un visionnaire voyage au bout de l’enfer. On reste saisi devant cette édifiante confrontation de l’homme avec sa propre fin. Autre rencontre au sommet, celle du génial Daniil Trifonov avec le bel Orchestre de Philadelphie sous la direction de Yannick Nézet-Séguin dans un Rachmaninov tout simplement électrisant. Inventif, fulgurant, le pianiste russe éblouit par le naturel passionné avec lequel il respire cette musique. Même jeunesse et même insolence chez Elsa Dreisig, dont le premier disque ressemble à un manifeste. Technique guerrière, richesse expressive, beauté d’une voix lumineuse et fruitée : la tête du prophète Jean-Baptiste ne résistera pas à cette Salomé en version française, dont la violence érotique coupe le souffle. Du souffle, la flûte inépuisable et déliée de Marc Hantaï n’en manque pas, dont la souplesse ambulatoire et la vivacité rythmique dialoguent avec le clavecin capricant de son cadet, Pierre Hantaï. Les deux ont été nourris au biberon de Bach depuis leur enfance : ils en connaissent les retranchements les plus aventureux et expressifs. Iconoclaste, cette rencontre entre Philip Glass et Rachmaninov ? Il s’en dégage un charme singulier, comme si le minimalisme de l’Américain et le romantisme du Russe ouvraient un autre monde. La beauté inspirée de l’archet de Demarquette, le délié sensitif de Vanessa Benelli-Mosell font merveille. La sélection de Sylvain Siclier Pochette de l’album « Pas de géant », de Camille Bertault. OKEH / SONY MUSIC L’année 2018 a parfaitement débuté par le Pas de géant de la chanteuse Camille Bertault, où elle déploie ses qualités vocales dans le format de chansons fantasques ou intimes, avec un sens affiné de l’alliance entre le sens et le son. C’est de la scène jazz londonienne que vient le septette Maisha, mené par le batteur Jake Long, dont There Is a Place a enchanté par son évidence mélodico-harmonique, entre envolées spirituelles, musiques des Caraïbes et fusion jazz-rock. Fusion aussi, dans l’inspiration swing du big band et du funk, avec le Collectiv du vibraphoniste, compositeur et arrangeur Franck Tortiller, qui a réuni onze jeunes musiciens pour jouer une musique à l’écriture sophistiquée, en relances, croisements, ondulations et lyrismes. Un autre batteur, le Danois Snorre Kirk, propose avec son sextette dans Beat, un idéal de jazz dit « classique », du creuset New Orleans aux années 1950, avec des compositions dans l’esprit, qui prennent une tournure intemporelle. Enfin, le saxophoniste américain Joshua Redman rend, dans Still Dreaming, un hommage au groupe Old and New Dreams et au quartette sans piano d’Ornette Coleman qui en avait été l’inspiration, dans une combinaison parfaite entre l’écrit et l’improvisé. La sélection d’Aureliano Tonet Pochette de l’album « Evergreen », de Calcutta. BOMBA DISCHI / SONY MUSIC Evergreen, de Calcutta (Bomba Dischi/Sony Music) Recomeçar, de Tim Bernardes (Tratore) Little Dark Age, de MGMT (Columbia Records/Sony Music) Monopolis, de The Pirouettes (Kidderminster/Caroline Records) And Nothing Hurt, de Spiritualized (Bella Union)/K.T.S.E., de Teyana Taylor (Good Music/Def Jam) « Le monde est une table, et nous sommes les miettes », chante l’Italien Calcutta. En 2018, la table a terriblement tremblé ; mais quid des miettes ? C’est le paradoxe de la pop : quand un peuple va mal, ses chanteurs populaires, en général, vont mieux. Ainsi des pays anglo-saxons, où les triomphes trumpistes et xénophobes, portés par les technologies portables, ont inspiré à MGMT un chef-d’œuvre de new wave gothique et inquiète. Notre salut passerait-il par la soul, qu’elle se mesure à l’éros (Teyana Taylor, diablement sensuelle) ou au cosmos (Spiritualized, indubitablement universel) ? En France, les déchirures de la Cité se pansent à deux, cœur et voix délicatement à l’unisson : « ça ira ça ira », veulent croire The Pirouettes. Ainsi du Brésil, de même, où le jeune Tim Bernardes offre un visage autrement souriant et serein que Jair Bolsonaro, clown sinistre et grimaçant : son premier album solo, Recomeçar, n’est que saudade douce-amère et aubades pour temps meilleurs. Ainsi de la Botte, enfin, piétinée par les populistes, mais toujours à la pointe de l’euro-pop. Après les splendeurs de Fitness Forever, Andrea Poggio, Brunori Sas ou Andrea Laszlo de Simone en 2017, Calcutta enfonce le clou avec Evergreen, qui reverdit les vieilleries de Dalla, Motown ou Morricone. Ses miettes sont les graines de prochains printemps.
28/12/2018
musiques
https://www.lemonde.fr/musiques/article/2018/12/28/tous-nos-albums-preferes-de-2018_5403131_1654986.html
« Sally4Ever » : trash à l’anglaise pour Sally et Emma
La série de Julia Davis va loin dans les scènes scatologiques, au point de rendre lassant ce qui passait pour de l’irrévérence.
Julia Davis et Catherine Shepherd dans « Sally4Ever », une série créée par Julia Davis. OCS OCS Go, à la demande, série Les Anglais ont le chic – c’est le mot, car ils parviennent à garder une sorte d’imperturbable tenue jusque dans le scabreux – pour faire passer les situations les plus impensables. A qui en douterait, la série britannique Sally4Ever (lire : « Sally forever », c’est-à-dire « Sally pour toujours »), qu’OCS diffuse après Sky Atlantic au Royaume-Uni et HBO aux Etats-Unis, le rappellera. Disons-le d’emblée : on retiendra avant tout Sally4Ever pour sa scatologie débridée (notamment dans une scène de sexe aussi horrifique que drolatique dont on ne se rappelle aucun équivalent au petit écran) et son goût pour les expressions sécrétives du corps humain. On y chie, pisse et vomit à qui mieux mieux, on y parle de culottes sales et de pénétration par le gros orteil. Sally est l’une de ces « filles perdues, cheveux sales » au physique quelconque, au regard éteint, qui vit depuis dix ans une existence de frustration, de dégoût et d’ennui au côté d’un fiancé dont elle ne se résout pas à ce qu’il lui passe la bague au doigt. Par une sorte de pitié masochiste, elle finit par ­accepter de s’unir à lui quand le hasard lui fait rencontrer Emma. Créature aguicheuse Cette créature aguicheuse et délurée (jouée par Julia Davis, la créatrice de la série) lui révèle enfin les joies de la jouissance sexuelle, prend le dessus sur la vie de Sally, passablement passive et résignée, et se révèle bientôt dangereusement manipulatrice… Le septième et dernier épisode de cette première saison n’est vraiment pas ce qu’on recommanderait aux estomacs sensibles : il va encore plus loin dans les scènes où Emma,­atteinte d’une méchante gastro-entérite, salit de manière assez répugnante la chambre d’hôtel de sa nuit de noces avec Sally. On s’amusera de la malpensance irrévérente à propos des vieux, des moches, des handicapés. Mais l’accumulation des scènes de souillure excrémentielle et vomitive devient une sorte d’élément provocateur agité un peu vainement à la face du spectateur, comme pour mieux lui faire oublier les faiblesses du scénario. Car, décidément, sans perdre ses qualités comiques et urticantes, le portrait de cette relation toxique aurait pu connaître de meilleurs développements. Sally4Ever, série créée par Julia Davis. Avec Catherine Shepherd, Julia Davis, Julian Barratt, Alex Macqueen (RU, 2018, 7 × 29-33 min). Sur OCS Go à la demande.
28/12/2018
televisions-radio
https://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2018/12/28/sally4ever-trash-a-l-anglaise-pour-sally-et-emma_5403120_1655027.html
Passeports diplomatiques de Benalla : opposition et majorité demandent des comptes à l’Elysée
Le nouveau chapitre dans « l’affaire Benalla » irrite jusque dans la majorité, où la députée LRM Cendra Motin parle de « faute des services de l’Elysée ».
Ni les mises au point de l’Elysée ni le communiqué du Quai d’Orsay ne semblent avoir convaincu. A droite comme à gauche et dans la majorité, on entendait ouvrir, vendredi 28 décembre, un nouveau chapitre dans l’affaire Benalla. Selon nos informations et celles de Mediapart, M. Benalla, malgré sa mise à pied liée aux violences du 1er mai, continue de voyager avec un passeport diplomatique émis le 24 mai. C’est en effet avec un tel document qu’il a voyagé dans certains pays d’Afrique, en tant que « consultant » (comme il définit aujourd’hui ses nouvelles fonctions) en novembre et en décembre. Il avait pourtant affirmé, sous serment devant la commission d’enquête du Sénat en septembre, avoir laissé ce document dans son bureau de l’Elysée. Le Quai d’Orsay a, par ailleurs, expliqué dans un communiqué que les documents lui avaient été officiellement réclamés le 26 juillet, soit après son licenciement. Dès l’éviction de M. Benalla, l’Elysée a « demandé aux administrations compétentes […] que ces passeports soient restitués et ne puissent plus être utilisés », a confirmé vendredi la présidence. Celle-ci « ne dispose à ce stade d’aucune information remontée par les services de l’Etat concernés sur [leur] utilisation », précise le communiqué. « C’est très grave » Mais l’opposition exige désormais plus d’explications, suggérant le maintien de liens opaques entre la présidence et l’encombrant Alexandra Benalla. « On est très interrogatifs sur le scénario qui est présenté publiquement aujourd’hui, c’est-à-dire ce conflit qui subitement opposerait M. Benalla à M. Macron », a déclaré vendredi sur RTL Gilles Platret, porte-parole des Républicains. « La justice doit se saisir de cette nouvelle affaire », a-t-il insisté. « C’est au président de dire la vérité sur cette affaire, c’est très grave. Il y a mensonge et dissimulation », a renchéri sur LCI Laurence Sailliet, autre porte-parole des Républicains. « Cela peut devenir un danger pour la République », a lancé le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, sur Europe 1 : « Il est de notoriété publique qu’il continue de se balader dans l’Afrique entière, et malgré cela l’Elysée ne vérifie pas qu’il a bien rendu ses passeports diplomatiques, qui lui donnent une sorte de sésame. C’est profondément inquiétant, soit sur l’amateurisme de cette présidence, soit sur le double langage qu’elle continue d’avoir. » Pour Sébastien Chenu, porte-parole du Rassemblement national (RN), « Alexandre Benalla n’est pas complètement sorti de l’orbite élyséenne ». Cette affaire n’aura pas de fin « tant que l’Elysée ne nous aura pas dit la vérité », a-t-il lancé sur BFM-TV. Eric Coquerel, député La France insoumise (LFI) veut, quant à lui, demander de « rouvrir une commission d’enquête à l’Assemblée nationale sur tous les tenants des affaires Benalla. Ce serait un minimum dans une démocratie normale ». « Ça suffit ! Je crois qu’à un moment ou à un autre il faudra qu’[Emmanuel Macron] s’exprime sur le sujet », a aussi estimé Jean-Christophe Lagarde, le chef de file des députés UDI-Agir. « Faute » de l’Elysée Des élus de la majorité ont, eux aussi, demandé vendredi des éclaircissements. « Il faut récupérer ces passeports », a réclamé sur Franceinfo la députée La République en marche (LRM) Cendra Motin. « Il y a clairement une faute des services de l’Elysée, qui sont d’ailleurs actuellement en pleine refonte », a-t-elle déploré, évoquant « un dysfonctionnement grave ». « Il a reçu un courrier qui exigeait qu’il remette ses passeports, courrier qu’il a d’ailleurs retiré puisqu’on sait que l’accusé de réception a bien été retiré à La Poste. (…) C’est lui qui est en faute en les ayant gardés », a jugé, pour sa part, le sénateur LRM Julien Bargeton sur BFM-TV. « Si la commission d’enquête [du Sénat] souhaite rouvrir le cas, elle est libre (…) parce que, visiblement, Alexandre Benalla aurait peut-être menti », a-t-il ajouté. Le député LRM Bruno Questel a, lui, demandé sur LCI « une enquête administrative du ministère des affaires étrangères ». L’ex-homme de confiance d’Emmanuel Macron avait été mis à pied quinze jours, du 4 au 22 mai, pour avoir molesté des manifestants en marge des rassemblements du 1er-Mai à Paris. Mis en examen en juillet, notamment pour « violences volontaires » à la suite de la diffusion d’enregistrements vidéo des faits par Le Monde, il avait fait l’objet d’une procédure de licenciement de l’Elysée le 20 juillet. Depuis, la publication spécialisée La Lettre du continent puis Le Monde ont révélé qu’Alexandre Benalla s’était reconverti « dans les affaires africaines » et qu’il avait notamment été reçu par le président tchadien, Idriss Deby, au début de décembre, quelques semaines avant la visite officielle d’Emmanuel Macron à N’Djamena, les 22 et 23 décembre. L’Elysée souligne qu’Alexandre Benalla, 27 ans, n’est en rien « un émissaire officiel ou officieux » du chef de l’Etat. Le directeur du cabinet du président de la République, Patrick Strzoda, a adressé le 22 décembre une lettre sommant l’intéressé de clarifier ses activités, particulièrement celles qu’il exerçait lorsqu’il était encore en fonction à l’Elysée.
28/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/28/passeports-de-benalla-opposition-et-majorite-demandent-des-comptes-a-l-elysee_5403115_823448.html
Architecture : le musée de Besançon retrouve la lumière
L’établissement rouvre ses portes après une belle métamorphose opérée par l’architecte Adelfo Scaranello.
Sur le chantier du Musée des beaux-arts et d’archéologie (MBAA) de Besançon, architecte : Adelfo Scaranello. YOHAN ZERDOUN Le Musée des beaux-arts et d’archéologie (MBAA) de Besançon, l’un des plus anciens de France, vient de connaître une nouvelle métamorphose. Implantée en 1842 dans l’étage d’une halle aux grains dessinée par Pierre Marnotte (1797-1882), avant d’en occuper la totalité, l’institution a été bouleversée entre 1967 et 1970. Telle une construction dans la construction, une monumentale structure en béton brut conçue par Louis Miquel (1913-1987), un ancien collaborateur de Le Corbusier, a pris place dans la cour intérieure. Dernière transformation en date : Adelfo Scaranello a parachevé la fusion des deux styles en apportant de brillantes solutions d’espace et de lisibilité au bénéfice des visiteurs et des collections. Le musée de Besançon est un musée de collectionneurs. Il a bénéficié d’importantes donations : par Pierre-Adrien Pâris (1745-1819), architecte du roi Louis XVI, puis par l’artiste Jean Gigoux (1806-1894), qui a cédé à la ville des œuvres de Cranach, Bellini ou Tintoret. Tous deux ont notamment permis à Besançon de posséder un cabinet de dessins de haut vol, dont un prestigieux fonds Fragonard. Plus tard, le critique d’art George Besson (1882-1971) cédera à l’institution bisontine l’essentiel de sa collection d’art moderne composée, entre autres, de peintures de Matisse, Bonnard, Marquet, Signac, Renoir ou Van Dongen. Pour mener à bien son projet, Adelfo Scaranello a, dit-il, ­disposé de deux outils : la lumière et la transparence. C’est à partir de leur combinaison qu’il est parvenu à donner une nouvelle jeunesse au lieu et à réconcilier à sa manière l’éternel antagonisme entre ancien et moderne. « Beaucoup d’architectes avaient considéré le rajout de Louis Miquel comme un objet introverti, solitaire, explique-t-il. J’ai voulu qu’il devienne une bague dans son écrin. » « Réinterprétation du vide central » L’opposition entre l’enveloppe néoclassique, presque neutre, de Marnotte et l’intrusion moderniste, quasi brutaliste, de Miquel avait de quoi surprendre. Il faut saluer la ténacité du maire d’alors, Jean Minjoz, et de l’ancienne conservatrice en chef du musée, Marie-Lucie Cornillot, qui ont dû répondre à une volonté peu ordinaire. Dans une clause de donation, George Besson souhaitait la création, confiée à Le Corbusier, d’un espace destiné à accueillir sa collection de peintures. « C’est par rebonds successifs de disciple en disciple que Miquel se voit notifier le projet d’extension du musée », indique Christelle Lecœur dans le catalogue de « Maîtres carrés », l’exposition qui se tient au MBAA jusqu’au 14 avril 2019 et qui raconte la mutation architecturale singulière de l’institution culturelle. Cette « réinterprétation du vide central de la halle », souligne l’architecte et enseignante à l’Ecole nationale supérieure d’architecture de ­Paris-Malaquais, « marque durablement le champ de la muséographie ». La construction de Miquel, soumise à un système de rampes ouvrant sur des salles jamais totalement fermées, est une réinterprétation du Musée à croissance illimitée cher à Le Corbusier, modèle dont les circulations s’appuyaient sur le principe d’une spirale carrée.
28/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/28/architecture-le-musee-de-besancon-retrouve-la-lumiere_5403111_3246.html
De Beyrouth à Baalbek, voyage dans le Liban d’aujourd’hui
Cuisine chaleureuse à Beyrouth, vestiges romains à Baalbek, jolie maison d’hôtes à Douma... De la plaine à la montagne, les richesses du pays du Cèdre attirent de nouveau les touristes.
Dans le centre historique de Beyrouth, l’église Saint-Georges et la mosquée Mohamed Al-Amin. ANTOINE LORGNIER / ONLYWORLD.NET Par le hublot, un habitat serré et des façades colorées laissent deviner le foisonnement qui s’annonce. L’aéroport de Beyrouth ressemble un peu à celui d’une ville de province. Mais le Liban tout entier n’est-il pas plus petit que la région Ile-de-France ? C’est donc la capitale d’un de ces « grands petits pays » que l’on découvre en traversant le sud de la ville en direction du quartier d’Achrafiyé et de l’Hôtel Albergo. Grand, le Liban l’est par son histoire multiséculaire. Son passage brutal, dans les années 1970, du statut de « Suisse du Moyen-Orient » aux déchirements de la guerre civile a laissé des stigmates encore profonds. Trop complexe si on se laisse intimider, le pays oblige ses visiteurs – surtout pour une escapade de quelques jours – à choisir des objectifs simples : flâner à la découverte des quartiers de Beyrouth, la cuisine et la nuit en maîtres mots ; explorer les ruines de Baalbek, dans la plaine de la Bekaa ; vivre l’hospitalité libanaise dans la fraîcheur et le silence d’une maison de Douma, un village du nord. Chez Tawlet, pas de chef, mais le règne sans partage, par roulement, de cuisinières villageoises venues des quatre coins du pays. Au fond d’une impasse du quartier de Mar Mikhaël, Tawlet, le restaurant ouvert il y a dix ans par ­Kamal Mouzawak, est une cantine honorant la cuisine domestique. Ici, pas de chef, mais le règne sans partage, par roulement, de cuisinières villageoises venues des quatre coins du pays pour proposer les plats traditionnels qu’elles préparent d’habitude pour la table familiale. Aujourd’hui, la cuisinière s’appelle Saydeh Rizkallah. Elle vient du village de Qaïtoulé, dans le sud-est du grand gouvernorat du Mont-Liban, et a préparé des daoud bacha, ces boulettes de viande typiques du Liban, fondantes à souhait. Du taro, du cresson alénois au goût de capucine et des cornes grecques (nos gombos) figurent aussi sur l’ardoise du jour. Quelle meilleure première adresse à Beyrouth que cette table à la fois chaleureuse et trendy ? Poulet au blé vert Autre style dans le quartier arménien de Bourj Hammoud,proche de Mar Mikhaël, où l’on se régale d’un soudjouk sur le pouce chez Mano, ou d’un manouché sorti du four chez Mano Bakery, juste à côté. Cette « pizza » libanaise au zaatar (mélange composé essentiellement de thym et de graines de sésame) se mange dès le petit déjeuner et jusqu’à la nuit. Le soir justement, retour à Achrafiyé, chez Liza, où s’exprime tout le raffinement de la cuisine libanaise. Dans un décor fait de lumière, l’élégance des clients – on reconnaît la femme de Walid Joumblatt, le chef des Druzes du Liban –, le service virevoltant et la saveur du taboulé ou du djej bel frike, un poulet au blé vert incroyable, font de cette adresse l’un des plus beaux souvenirs de la ville. Le restaurant communautaire Tawlet honore la cuisine domestique du Liban. Ivor PRICKETT/PANOS-REA Beyrouth offre aussi de quoi nourrir l’esprit et l’œil : le Musée Nicolas Sursock, consacré à l’art moderne et contemporain, vaut surtout pour ses expositions temporaires et son architecture. En dehors d’Achrafiyé, il ne faut pas négliger la visite du Musée national de Beyrouth. Construit dans les années 1930, il fut le théâtre d’affrontements très violents pendant la guerre. Façade criblée de balles, salles dévastées par les soldats qui s’y battaient, il est aujourd’hui parfaitement reconstruit. Un film témoigne de son martyre, sans lequel on pourrait avoir l’illusion que rien n’est jamais venu troubler les plus belles pièces de cette collection archéologique : au rez-de-chaussée, le sarcophage du roi Ahiram, un bloc de calcaire finement sculpté portant sur un côté l’un des plus anciens textes écrits dans l’alphabet phénicien ; au sous-sol, les sarcophages anthropoïdes de la collection Ford, gisants sculptés dans le marbre trois cents ans avant Jésus-Christ et alignés ici comme à la parade. Lire aussi Beyrouth bohème A l’arrière du bâtiment, les ascenseurs de verre offrent une vue cinématographique sur le merveilleux champ de courses de Beyrouth. Au-delà, c’est le quartier de Badaro. En sortant du musée, sur la place, une dernière halte gourmande s’impose. Chez Mum & I, et son équipe 100 % féminine, Samia Massoud propose une cuisine « comme à la maison », généreuse et fine. Le poulet au four – djej w batata bel forn – est magnifiquement citronné, et les côtes de blette à la crème de sésame sont parfaites. « Il y a un concert gratuit tous les soirs à Beyrouth », raconte un vieux monsieur venu entendre la Chorale Fayha, où Arméniens, chrétiens et musulmans reprennent ensemble des chants de Noël. C’est la nuit que la ville est la plus fascinante. « Il y a un concert gratuit tous les soirs à Beyrouth », me dit mon voisin de banc dans la jolie église Saint-Maron. Ce vieux monsieur sort tous les soirs, et s’informe sur le site Lebtivity. com, qui recense tous les événements culturels. Il est venu entendre la Chorale Fayha, où Arméniens, chrétiens et musulmans reprennent ensemble des chants de Noël. Devant un public sage et très nombreux, les textes sont chantés en arabe ou en arménien, et même en anglais ou en français. « Quel dommage que vous ne compreniez pas l’arabe, c’est très beau », continue mon ami d’un soir. De fait, c’est très beau aussi sans comprendre, et le concert est un triomphe. Plus tard, le même soir, c’est la réouverture d’une des boîtes les plus célèbres de la ville, le B018, qui occupe l’esprit des fêtards. Des ruines et des vignes Le lendemain, en route pour le site archéologique romain de Baalbek, on prend d’abord la route de Damas, avant de descendre dans la plaine de la Bekaa. Il suffit d’énoncer ce parcours pour en mesurer les périls. La Syrie en guerre est si proche, et la ville de Baalbek est un fief du Hezbollah, le parti islamiste chiite qui contrôle cette partie du Liban. Aller à Baalbek est « formellement déconseillé » par le ministère des affaires étrangères, mais des touristes le font sans cesse en toute sécurité, toujours conduits par des Libanais, amis ou agences locales de voyages. Le site de Baalbek comporte trois temples principaux, restes magnifiques d’Héliopolis, la ville romaine du début de notre ère. Les pierres ne se racontent pas, mais ce qui se dégage de ce chaos de colonnes, ici effondrées, là encore fièrement dressées vers le ciel, est un choc esthétique bouleversant. On ne traîne pas à Baalbek. Sur le chemin du ­retour, on découvre le Château Ksara, un domaine viticole aux caves spectaculaires qui nous rappelle que le Liban est aussi un pays de vignes et de vins. A Baalbek, vestiges de la cité romaine d’Héliopolis. Thomas Doustaly/Le Monde Enfin, si l’hiver libanais prive des plages, c’est la saison idéale pour découvrir les montagnes. A Douma, nous voici de nouveau chez Kamal Mouzawak, à Beit Douma, une maison d’hôtes à la fois chic et rurale. Dans ce village perché à plus de 1 000 mètres d’altitude, à 80 kilomètres au nord de Beyrouth, les nuits sont fraîches, calmes et étoilées. On dîne au coin du feu dès la tombée du jour. En venant de la capitale par la route côtière, on a fait une halte à Byblos, pour ses ruines écroulées vers la mer, son port de pêche et aussi pour Pépé. Ce restaurant culte affiche fièrement les visages des célébrités qui l’ont fréquenté, de Johnny, dans les années 1970, à… François Fillon en 2014 ! Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Grand Sofar Hotel, palace de l’âge d’or du Liban, renaît de ses cendres En rentrant, on songe aux bras grands ouverts des Libanais, dont l’accueil est partout si chaleureux. « On a fini par s’habituer aux montagnes russes », nous avait dit, fataliste, Jihane Khairallah, la directrice de l’Hôtel Albergo, qui a vu se succéder les bonnes et les mauvaises années au gré des soubresauts géopolitiques. « Oui, 2018 a été une très bonne année. Les touristes reviennent au Liban », avait-elle ajouté en redoutant de trop s’avancer. Mais en rêvant d’une nouvelle année en paix. Carnet de route Y aller Aya Désirs du Monde, spécialiste du Liban, propose un package 5 jours/4 nuits de découverte de Beyrouth et sa région à partir de 1 199 € par personne, vol sur Transavia inclus, avec voiture avec chauffeur et guide privé durant trois jours. Renseignements et réservations : 01-42-68-68-06 ou ayavoyage.fr Transavia assure 3 vols par semaine entre Paris et Beyrouth à partir de 89 € l’aller, et ouvrira, en avril, une ligne Lyon-Beyrouth une fois par semaine à partir de 79 € l’aller. transavia.com Se loger Situé en plein cœur du quartier d’Achrafiyé, l’Albergo fait partie du réseau Relais & Châteaux. Avec sa splendide piscine sur le toit et ses chambres cosy, il est l’option chic pour un séjour à Beyrouth. Chambre double à partir de 230 euros avec petit déjeuner. albergobeirut.com Beit El Tawlet est la chambre d’hôte du restaurant Tawlet, à Mar Mikhaël. Déco sobre, terrasse et délicieux petits déjeuners. Chambre double à partir de 115 € environ. Building Chalhoub, rue Naher. soukeltayeb.com Beit Douma, dans un village de montagne au nord de Beyrouth. Comme une maison de campagne, avec les ballades et le feu de cheminée. Chambre double à partir de 130 € environ. soukeltayeb.com Déjeuner, dîner Liza, le très bon restaurant de cuisine libanaise. Réservation : +961-1-208-108 ou lizabeirut.com Mum & I, la meilleure adresse pour le déjeuner après le Musée national. +961-1-425-650 ou facebook.com/MumAndI Tawlet, la cantine branchée de cuisine familiale, est au fond d’une impasse dans le quartier de Mar Mikhaël. +961-1-448-129 ou soukeltayeb.com Boubouffe, une brasserie old school qui sert des chawarmas parfaits. Avenue Charles-Malek, Beyrouth. Réservations : +961-1-334-040 Visiter Le Musée national de Beyrouth, consacré à l’archéologie. Entrée : 3 €. museebeyrouth-liban.org Le Musée Sursock et les deux palais de la famille dans la même rue. Gratuit. sursock.museum Site archéologique de Baalbek, uniquement accompagné en voiture depuis Beyrouth par un guide professionnel. Entrée : 9 €. unesco.org Shopping Sarah’s Bag, c’est la plus jolie histoire de mode du Liban. Des sacs très girly choisis par la reine de Jordanie, Beyoncé ou Amal Clooney. Au fond d’un passage au 100, rue du Liban, à Tabaris. Renseignements : +961-1-575-586 ou shop.sarahsbag.com Deux adresses dans Pharaon Street, à Mar Mikhaël : Papercup, une librairie internationale, et Maison Tarazi, une boutique d’antiquité et d’artisanat. papercupstore.com et maisontarazi.com Livres d’artistes, photos et souvenirs de Beyrouth : Plan Bey, un éditeur formidable. Rue d’Arménie, dans Mar Mikhaël. plan-bey.com Notre journaliste a organisé son voyage avec l’aide d’Aya Désirs du Monde et Transavia.
28/12/2018
m-voyage
https://www.lemonde.fr/m-voyage/article/2018/12/28/de-beyrouth-a-baalbek-voyage-dans-le-liban-d-aujourd-hui_5403106_4497613.html
Melody d’Afrique, ou la chasse au trésor dans les archives télé du continent
La chaîne musicale française, spécialisée dans les artistes africains « vintage », déniche et restaure clips, extraits d’émissions ou de concerts.
La star de la rumba congolaise Papa Wemba en concert à Nairobi en décembre 2006. TONY KARUMBA / AFP Une chaîne musicale française, Melody d’Afrique, s’est lancée en quête d’archives d’émissions musicales et de clips d’artistes africains afin de les restaurer. De quoi contribuer à la sauvegarde de pépites du patrimoine mondial, de l’afrobeat de Fela Kuti à la rumba congolaise de Papa Wemba. Très peu des images produites sur le continent à partir des années 1960 et jusqu’à un passé récent sont aujourd’hui diffusables, faute de moyens et d’infrastructures adéquates. Aucune chaîne thématique n’était consacrée à ces artistes, au rayonnement pourtant considérable dans la musique du XXe siècle, jusqu’à ce que le groupe de médias Secom, installé à Villeneuve-d’Ascq, dans le nord de la France, lance l’an dernier Melody d’Afrique. La nouvelle venue est entièrement tournée vers les artistes africains « vintage », sur le modèle de Melody, spécialisée dans la chanson française des années 1960 à 2000. Et à l’instar de cette dernière, qui écume les placards de l’Institut national de l’audiovisuel (INA, l’organisme gérant les archives de la télévision française) et des chaînes européennes, Melody d’Afrique – payante et diffusée dans de nombreux pays du continent ainsi qu’en France – s’est lancée dans une chasse au trésor pour retrouver et restaurer des images d’époque. « Des bandes recouvertes de champignons » « Comme il n’y a pas l’équivalent de l’INA en Afrique, on a [décidé] d’investir et d’aller rencontrer les chaînes de télé [du continent], les artistes et leurs ayants droit, pour les sensibiliser et les aider à sauvegarder leur patrimoine », raconte à l’AFP Jérôme Dutoit, directeur général de Melody et Melody d’Afrique. Une quête qu’il a entamée il y a trois ans, en se rendant avec le directeur technique de Secom, Vincent Charley, à Abidjan et Kinshasa, pour y chercher des archives, notamment auprès des télévisions publiques. Emissions, clips, concerts ou documentaires, « il y a beaucoup de matière, mais on récupère souvent les bandes (notamment des cassettes vidéo au format U-matic, omniprésent dans les années 1970) en très mauvais état, recouvertes de champignons car elles ont été exposées à la chaleur, à la poussière et à l’humidité », dit-il. Manipulées avec précaution, les bandes jugées prometteuses sont rapportées en France et confiées à des laboratoires chargés de les restaurer et de les numériser. Une fois nettoyées, elles sont placées « dans un four, où elles chauffent à une température proche de celle de leur fabrication, puis dans un frigo », explique Vincent Charley. Il est ensuite possible de tenter de les exploiter, avec des résultats incertains. « C’est la loterie, on n’arrive pas toujours à les relire. Et parfois, on réussit, mais on découvre que le programme indiqué sur le boîtier a été effacé », ajoute-t-il. Une centaine d’heures de programmes Toute l’opération est une course contre la montre, car les supports se dégradent du fait de leurs mauvaises conditions de conservation. « Je suis ému par cette mémoire qui disparaît de jour en jour, confie le directeur technique. C’est l’histoire de ces pays qui part en poussière », souvent dans l’ignorance générale, faute d’indexation des archives télévisuelles. Une centaine d’heures de programmes ont déjà pu être restaurées, dont de véritables « trésors » culturels, souligne Jérôme Dutoit, qui cite « une chanson du roi de la rumba congolaise Wendo Kolosoy, Marie-Louise, dont les images [dénichées à Kinshasa] n’avaient jamais été rediffusées ». Quand aucun clip n’existe, il arrive que Melody d’Afrique en produise, à partir de photos ou de vidéos récupérées auprès des artistes ou de leurs descendants. Secom veut établir un cercle vertueux avec ses interlocuteurs du continent : « On achète les bandes, les droits d’utilisation des vidéoclips, et en complément on prend à notre charge la restauration et on donne aux chaînes le droit d’utiliser la version remasterisée », assure Jérôme Dutoit. Lire aussi L'héritage du musicien nigérian Fela Kuti célébré à Lagos Le chantier démarre seulement, mais la sauvegarde du patrimoine télévisuel africain commence à mobiliser. Alors que, selon une étude citée par l’INA, « moins de 1 % des émissions de radio et de télévision diffusées depuis 1995 » dans l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) ont été numérisées, cette organisation a adopté le 1er décembre une directive obligeant ses membres à se doter d’un dépôt légal audiovisuel. Et le passage à la télévision numérique, prévu dans ces pays d’ici à 2020, devrait faciliter ce mouvement.
28/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/28/melody-d-afrique-ou-la-chasse-au-tresor-dans-les-archives-tele-du-continent_5403097_3212.html
Sélection livre : « Africa Is Music », le son panafricain en images
Le journaliste photographe franco-camerounais Samuel Nja Kwa raconte les musiques de l’Afrique.
Samuel Nja Kwa hante les concerts, les festivals, les loges des artistes depuis des années. Autant sur le continent africain qu’en France, où il est né de parents camerounais en 1964 et où il réside. Dans Africa Is Music, il propose une photographie du nec plus ultra de la bande-son panafricaine d’hier et d’aujourd’hui. Après des études en sciences politiques, il décide de s’orienter vers le journalisme. Privilégiant l’écriture d’abord, il opte ensuite à plein temps pour la photo, une passion qu’il a attrapée adolescent, dans le club photo de son lycée à Melun (Seine-et-Marne). Appareil en main, il va d’abord approcher les scènes et les artistes de jazz. Des années plus tard, le livre de photographies Route du jazz (Editions Duta, 2014), préfacé par Manu Dibango, témoignera de cette expérience. La route du jazz l’amène naturellement vers l’Afrique et ses musiciens, le sujet de son nouvel ouvrage, Africa Is Music. Ses va-et-vient entre l’Europe et l’Afrique, raconte ce globe-trotteur de l’objectif, lui ont « permis de redécouvrir l’Afrique à travers la musique. Au fil des pages, chaque photographie dévoile la complicité que j’ai pu avoir avec les artistes ». Intimité et fièvre Préfacé par le bassiste sénégalais Alune Wade, que l’on retrouve sur la photo de couverture, ce livre ­regroupe des photographies en noir et blanc et en couleurs d’environ cent cinquante musiciens, prises entre 1996 et 2018. Y défilent les anciens, vivants ou partis faire danser les anges (Ali Farka Touré, Manu Dibango, Cesaria Evora, Kassé Mady Diabaté, Hugh Masekela, Miriam Makeba…), et leurs « petites sœurs et petits frères » (Fatoumata Diawara, Seun Kuti, Krotal, Sara Tavares…). Entre portraits et prises de vue récoltées au cours de concerts, c’est une succession de moments ­d’intimité et de fièvre, d’images vibrantes et vraies. Les photographies sont regroupées autour de thèmes transversaux (« Musique et tradition », « L’Afrique insulaire », « L’esprit jazz », « Musique et football », « Musique et cinéma »…) et complétées de textes et d’interviews souvent pertinents, de la plume de Samuel Nja Kwa ou des nombreux contributeurs, dont les artistes Aziz Sahmaoui, Blick Bassy, Wally Badarou ou Alsarah. Si l’on aurait souhaité voir un index en fin d’ouvrage pour retrouver facilement une photo ou un article, et des légendes plus lisibles, il faut saluer le mérite de ce beau livre qui porte témoignage de la richesse et de la vivacité des musiques africaines. Couverture de l’ouvrage « Africa Is Music », de Samuel Nja Kwa. EDITIONS DUTA Africa Is Music, de Samuel Nja Kwa, Editions Duta, 300 pages, 39,90 €. A commander sur samuelnjakwa.com.
28/12/2018
musiques
https://www.lemonde.fr/musiques/article/2018/12/28/selection-livre-africa-is-music-le-son-panafricain-en-images_5403094_1654986.html
Le blues des diplomates du Quai d’Orsay
Volontariste et européen, Emmanuel Macron a suscité de grandes attentes auprès des diplomates français, avant d’être rattrapé par la réalité d’un monde où la France est une puissance fragile. Au ministère des affaires étrangères, on s’interroge : la France se donne-t-elle les moyens de ses prétentions ?
Emmanuel Macron applaudi par les 80 dirigeants des pays rassemblés pour commémorer la fin de la Grande Guerre, à Paris, le 11 novembre. LUDOVIC MARIN / AFP En cette journée du 11 novembre 2018, pour la commémoration du centenaire de l’Armistice, Paris semblait être la capitale diplomatique de la planète. La plupart des chefs d’Etat ou de gouvernement dont les pays furent impliqués dans la première guerre mondiale étaient là : le président américain, Donald Trump, comme son homologue russe, Vladimir Poutine, la chancelière allemande, Angela Merkel, et les autres dirigeants européens, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, et bon nombre de leaders du Proche-Orient. « L’histoire retiendra une image, celle de 80 dirigeants réunis sous l’Arc de triomphe, mais ce qui est incertain est de savoir comment elle sera interprétée dans l’avenir : le symbole d’une paix durable entre les nations ou bien le dernier moment d’unité avant que le monde ne sombre dans un nouveau désordre », lançait avec gravité le président français. Infatigable héraut d’un multilatéralisme refondé et Européen convaincu, Emmanuel Macron n’avait cessé de répéter depuis son élection : « France is back ». Ces cérémonies en étaient la consécration. Un sans-faute, sinon un petit couac protocolaire avec la relégation hors de la principale tribune d’honneur du président serbe Aleksandar Vucic, représentant le pays qui, proportionnellement à sa population, paya le prix le plus fort lors du conflit. Le succès de ces célébrations montre que la France reste une puissance diplomatique majeure. « C’est malheureusement en bonne part une illusion, comme cent ans plus tôt celle d’une France victorieuse et première puissance militaire mondiale », soupire un haut fonctionnaire du ministère des affaires étrangères. « Il y a un fossé croissant entre les prétentions des autorités françaises à une diplomatie universelle et les moyens toujours plus insuffisants qu’elles sont prêtes à mettre en œuvre », relève Christian Lequesne, professeur à Sciences Po Paris Le Quai d’Orsay a du vague à l’âme. « Ce blues est profond car, après les débuts en fanfare d’Emmanuel Macron sur la scène internationale, le retour aux réalités et à ce que représente la puissance réelle de la France a été beaucoup plus rapide que prévu », note Thomas Gomart, le directeur de l’Institut français des relations internationales (IFRI), rappelant en outre « la mise sous tension, faute de moyens, d’un appareil diplomatique qui se sent en sous-effectifs avec des équipes fragilisées ». Certes, le malaise des diplomates est une vieille lune. « Il a commencé avec l’invention du téléphone et de l’avion, qui ont enlevé une bonne partie de l’autonomie d’action dont disposaient jadis des ambassadeurs », ironise un ancien ministre des affaires étrangères. Mais il devient encore plus évident.
28/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/28/le-blues-des-diplomates-du-quai-d-orsay_5403091_3210.html
Hubert Védrine : « Soyons déterminés face aux puissances hostiles à nos valeurs »
L’ancien ministre des affaires étrangères encourage la France à durcir sa politique extérieure et les peuples d’Europe à s’unir pour protéger leur autonomie.
Hubert Védrine, à Paris, le 16 avril 2014. Damien Grenon / Photo12 Ministre des affaires étrangères dans le gouvernement de Lionel Jospin et secrétaire général de l’Elysée sous François Mitterrand, Hubert Védrine revient sur les grands enjeux de la politique extérieure française. Vivons-nous la fin du monopole occidental ou celle de la parenthèse occidentale dans la conduite des affaires du monde ? Hubert Védrine : Fin du monopole, oui, c’est évident. Fin de la « parenthèse », j’espère que non. Cependant, comme aucune évolution en cours n’est mécaniquement favorable aux Européens, nous n’échapperons pas à une lecture plus lucide des rapports de force et à l’obligation de durcir nos politiques extérieures. La France reste-t-elle une puissance diplomatique ? Bien sûr ! Bien que la France soit taraudée par cette question depuis mai 1940 ! Ce n’est pas parce que la France n’est plus celle de Louis XIV ou de Napoléon qu’elle ne compte plus ; il n’y a dans le monde pas plus d’une quinzaine de puissances, certaines émergentes, d’autres, dont la France, établies, mais sur la défensive. La France n’est pas la Chine ni les Etats-Unis, certes, mais elle compte encore beaucoup plus que ne le croient les Français, qui passent d’un extrême à l’autre, de la grandiloquence bavarde à la dépression. Cette interrogation traduit avant tout un doute que nous devons dépasser pour affronter les grandes crises à venir, nous concentrer sur les enjeux essentiels, ne pas nous disperser sur des fronts secondaires. « Depuis des années, le budget du Quai d’Orsay est raboté de façon disproportionnée alors qu’il ne pèse qu’à peine 1 % de celui de l’Etat. Tout cela pour faire des économies minuscules pour l’Etat » Sur quoi se fonde aujourd’hui la puissance française ? Sur de grands acquis historiques dus à nos artistes, à nos savants, aux rois, à la Révolution, à la République, à de Gaulle, à Mitterrand, à nous tous, etc. Cela explique pourquoi notre pays pèse sur la scène internationale bien au-delà de sa superficie, de sa population et de son économie. Son rayonnement, l’attente envers lui, restent immenses. Nos handicaps sont connus, en tout cas des autres, mais nos atouts sont nombreux, et nous devons les mobiliser sans relâche, comme le fait Jean-Yves Le Drian [le ministre des affaires étrangères], pour constituer des coalitions ad hoc afin de traiter les problèmes globaux régionaux et de faire vivre la coopération internationale, à partir du G7 ou autre, sans les puissances qui la récusent, voire contre elles. Ce qui n’ira pas sans d’inévitables tensions.
28/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/28/hubert-vedrine-soyons-determines-face-aux-puissances-hostiles-a-nos-valeurs_5403090_3210.html
Les diplomates français craignent la « paupérisation de leur métier »
Le budget et les effectifs du ministère des affaires étrangères diminuant, la stratégie et les choix sont entièrement à revoir.
Emmanuel Macron lors de la Conférence des ambassadeurs, à Paris, le 29 août 2017. POOL New / REUTERS L’annonce de ce nouveau coup de rabot avait mis tout le Quai d’Orsay en émoi. Fin août, lors de la Conférence des ambassadeurs, le rendez-vous annuel de la diplomatie française, le premier ministre, Edouard Philippe, avait présenté un vaste projet de réorganisation des réseaux diplomatiques en appelant à une économie de 10 % sur la masse salariale à l’étranger d’ici à 2022. « Si notre ministre négocie avec Washington ou Moscou avec autant d’efficacité qu’avec Bercy, il y a de quoi être sérieusement inquiet », ironise un haut diplomate. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le blues des diplomates du Quai d’Orsay Le ministère des affaires étrangères se sent surcontributeur en matière d’économies budgétaires par rapport à son poids dans l’Etat. « Les diplomates ont le sentiment que leurs crédits ne sont pas assez défendus et que ni eux ni leur ministre n’arrivent suffisamment à montrer comment, avec à peine 13 000 fonctionnaires, ils font un travail remarquable », relève Thomas Gomart, directeur de l’Institut français des relations internationales. Des ambassadeurs manageurs Une note interne à diffusion restreinte intitulée « Augmenter les moyens ou raboter les fins » – dévoilée par Le Monde en juin – relevait que « la paupérisation de la diplomatie française pourrait encore s’aggraver au point de risquer le décrochage ». En fait, les restrictions annoncées avec la réduction de la masse salariale à l’étranger devraient pour l’essentiel concerner le Quai d’Orsay. Déjà, en 2018, le ministère supprime 100 emplois à temps plein et 130 de plus le seront l’an prochain. « Pour 2018 et 2019, les lignes budgétaires ont été augmentées ou stabilisées », souligne-t-on du côté du ministère, où l’on rappelle que, sur un autre plan, l’aide publique au développement a triplé pour 2019, et que les contributions volontaires de la France aux Nations unies ont sensiblement augmenté. Ce sont des leviers essentiels pour l’action extérieure de la France. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Hubert Védrine : « Soyons déterminés face aux puissances hostiles à nos valeurs » L’idée de la réforme est de gagner une « diplomatie plus agile » et de faire de l’ambassadeur un manageur armé d’un réel pouvoir de décision sur tous les autres personnels travaillant sous ses ordres, y compris ceux dépendant d’autres ministères ou agences (Bercy, la défense, l’intérieur). « Consultats d’influence » Quelques mois après cette annonce, il s’avère que dans beaucoup de « gros postes », la réduction de la masse salariale est plutôt de l’ordre de 13 %. En outre, le poids pèse quasi exclusivement sur les services du ministère des affaires étrangères, car les autres ministères ont renâclé ou parfois refusé de participer à l’effort à hauteur de ce qui était attendu, notamment les services qui dépendent de Bercy à l’étranger.
28/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/28/les-diplomates-francais-craignent-la-pauperisation-de-leur-metier_5403089_3210.html
Corée du Sud : les données d’un millier de transfuges nord-coréens piratées
Le système informatique d’un centre chargé d’aider les Nord-Coréens ayant rejoint le Sud a été infecté par un programme malveillant.
Le piratage pourrait exposer des transfuges aux représailles de Pyongyang. Les données personnelles et confidentielles de près d’un millier de Nord-Coréens passés au Sud ont été volées par des hackeurs, ont annoncé vendredi 28 décembre les autorités sud-coréennes. Selon le ministère de l’unification, c’est la première fois qu’autant de noms et d’adresses de Nord-Coréens ayant fait défection sont ainsi piratés. Ces données ont été volées dans le Centre Hana, situé dans le Gyeongsang du Nord (une province de l’est de la Corée du Sud). Le système informatique du centre a été infecté par un programme malveillant qui a été activé quand un employé qui ne se doutait de rien a ouvert un de ses courriels. Cet établissement est chargé d’aider les Nord-Coréens à s’installer au Sud et à s’adapter à sa société capitaliste. La Corée du Sud compte en tout vingt-cinq établissements comme celui-ci. Ils s’occupent d’environ trente mille Nord-Coréens passés au Sud. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Corées : les chances d’une visite à Séoul de Kim Jong-un s’amenuisent Inspection d’urgence Après avoir confirmé la réalité de ce piratage informatique la semaine dernière, les autorités sud-coréennes ont lancé une inspection d’urgence de tous les ordinateurs du Centre Hana. Mais aucune autre fuite n’a été détectée. « Nous présentons nos excuses aux Nord-Coréens ayant fait défection. Nous ferons tous les efforts pour protéger leurs informations personnelles et empêcher que ce genre d’incident ne se reproduise », a déclaré le ministère sud-coréen. Les médias nord-coréens ont maintes fois menacé de réduire au silence les transfuges qui s’engageraient au Sud dans des activités de propagande hostiles à Pyongyang. En 1997, deux hommes avaient assassiné devant son domicile à Séoul Yi Han-yong, neveu de Song Hye-rim, première maîtresse de l’ancien dirigeant Kim Jong-il. Yi Han-yong vivait en Corée du Sud depuis sa défection en 1982 et avait publié ses Mémoires, dans lesquels il révélait des détails sur la vie privée des Kim. La publication de ce livre fut considérée comme le mobile de son assassinat. Les deux meurtriers n’ont jamais été retrouvés.
28/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/28/coree-du-sud-les-donnees-personnelles-d-un-millier-de-transfuges-nord-coreens-piratees_5403075_3210.html
Arabie saoudite : remaniement au sommet de la diplomatie du royaume
Trois mois après l’affaire Khashoggi, une série de décrets royaux modifie la composition du gouvernement, même si la plupart des postes stratégiques restent inchangés.
Mohammed Ben Salman et le roi Salman à Riyad, Arabie saoudite, le 9 décembre 2018. AP Le 2 octobre 2018, le journaliste saoudien Jamal Khashoggi était assassiné dans l’enceinte du consulat de son pays, à Istanbul. L’affaire et ses multiples rebondissements ont considérablement affecté l’image, déjà peu reluisante, de l’Arabie saoudite ainsi que la réputation de réformateur de son tout puissant prince héritier de 33 ans, Mohammed Ben Salman, dit MBS. Trois mois plus tard à Riyad, l’heure est au remaniement. De nombreux postes sont concernés par une série de décrets royaux pris jeudi 27 décembre, mais parmi les portefeuilles les plus stratégiques, seules les affaires étrangères changent de patron. L’ancien chef de la diplomatie saoudienne, Adel Al-Jubeir, qui avait vigoureusement défendu le prince héritier, ce dernier étant mis directement en cause dans l’affaire Khashoggi, a été rétrogradé au poste de ministre d’Etat aux affaires étrangères. Le poste qu’il occupera désormais est donc situé plus bas dans la hiérarchie. Cet ancien diplomate aux Etats-Unis, parfaitement anglophone, avait été nommé en 2015 par le roi Abdallah, mort il y a quatre ans. Son successeur est l’ancien ministre des finances du royaume, Ibrahim Al-Assaf. M. Jubeir « a représenté l’Arabie saoudite et continuera de représenter l’Arabie saoudite […] dans le monde. On se complète », a affirmé M. Assaf, rejetant le fait que cela puisse être considéré comme une rétrogradation. « Lié à l’affaire Khashoggi » « Il est impossible de ne pas lier [le remaniement] à Khashoggi », a estimé auprès de l’Agence France-Presse Mohammed Alyahya, un expert pour le Gulf Research Centre. L’Arabie saoudite soutient que le journaliste a été tué lors d’une « opération hors de contrôle » de l’Etat saoudien, menée par le chef adjoint de l’agence saoudienne de renseignement, Ahmad Al-Assiri, et par le conseiller à la cour royale, Saoud Al-Qahtani, qui ont tous deux été destitués. Riyad nie toute implication du prince héritier dans ce meurtre, tandis que des médias turcs et américains, ainsi que la CIA, le soupçonnent de l’avoir commandité. « L’affaire Khashoggi […] nous a vraiment tous attristés. Mais, tout bien considéré, nous ne traversons pas de crise, nous sommes dans une phase de changement », a affirmé quant à lui le nouveau chef de la diplomatie du royaume, en référence aux réformes sociales et économiques engagées par Mohammed Ben Salman. Le remaniement ministériel surprise a surtout concerné des postes mineurs du gouvernement saoudien. Ainsi, le ministre de l’éducation Ahmed Al-Issa a été remplacé par Hamad Al-Cheikh. Celui de l’Information Awwad Al-Awwad a été remplacé par Turki Al-Chabana. Le ministre de la garde nationale, Khaled ben Abdel Aziz Al-Mogren, a, quant à lui, été remplacé par le prince Abdallah Ben Bandar. Le prince Sultan Ben Salman, ancien astronaute qui était en charge du tourisme, a été nommé à la tête d’une agence saoudienne de l’espace nouvellement créée, un poste équivalent à celui de ministre. « MBS consolide son pouvoir » Par ailleurs Turki Al-Cheikh, un proche du prince héritier, a été muté de la direction de l’agence chargée des sports à celle des loisirs, un domaine où le prince héritier, MBS, a voulu illustrer ses ambitions réformatrices en rendant possible l’autorisation des concerts et la réintroduction du cinéma dans le royaume. Le roi Salman a également procédé à de nombreux changements de gouverneurs de province, de hauts fonctionnaires et a remplacé un certain nombre de membres du Majlis al-Choura, une assemblée consultative. Pour Ali Shihabi, à la tête de la Fondation Arabia, souvent présentée comme proche du pouvoir saoudien, ce remaniement renforce MBS. Il a estimé sur Twitter que ces changements allaient « consolider son pouvoir », une bonne partie des nouveaux arrivants figurant parmi ses « alliés-clés ». Le remaniement n’a pas touché les postes liés à l’économie. Il intervient à la suite de l’annonce le 18 décembre d’un budget 2019 tablant sur un déficit à hauteur de 35 milliards de dollars, dans le rouge pour la sixième année consécutive en raison des prix bas du pétrole. Riyad, dont l’économie reste extrêmement dépendante des exportations d’or noir, prévoit des recettes globales de 260 milliards de dollars, principalement tirées des revenus pétroliers. Les autorités saoudiennes ont indiqué à l’occasion de l’annonce de ce budget que la croissance avait atteint 2,3 % du produit intérieur brut (PIB) en 2018, un net rebond après une contraction de 0,9 % en 2017. Ryad table sur une croissance de 2,6 % en 2019. Mais un rapport du cabinet d’experts Capital Economics publié le 20 décembre a jeté le doute sur la capacité du royaume à atteindre cet objectif.
28/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/28/arabie-saoudite-changement-au-sommet-de-la-diplomatie-du-royaume_5403073_3210.html
Le cannabis thérapeutique, « je n’ai trouvé que ça qui me soulage vraiment »
Deux personnes ayant recours à ces traitements témoignent au moment où la première expérimentation a été annoncée pour 2019.
Pour apaiser les douleurs neurologiques et musculaires dues à sa sclérose en plaques, Anna (le prénom a été modifié), 35 ans, éducatrice sportive dans l’ouest de la France, s’est vite aperçue que seul le cannabis était efficace. « Les médicaments, eux, me détraquaient d’un point de vue gastrique, hépatique et rénal. Ils rajoutaient des maux à une maladie déjà difficile à vivre », raconte-t-elle. Après une première tentative infructueuse, elle réussit à faire pousser dans son jardin une dizaine de pieds d’une variété médicinale de cannabis, ce qui lui permet aujourd’hui, tous les deux jours, de fumer un « petit » joint à base de fleurs séchées, sans tabac. Résultat : elle ne prend plus aucun médicament contre la douleur. « Je n’ai trouvé que ça qui me soulage vraiment », assure-t-elle, regrettant de devoir braver la loi pour accéder à quelque chose qui lui procure « autant de bénéfices et si peu de dommages collatéraux ». Adèle (le prénom a été modifié), 44 ans, fonctionnaire dans le centre de la France, est également rapidement devenue adepte du cannabis thérapeutique pour soulager la spasticité liée à sa sclérose en plaques et ainsi retrouver une « qualité de vie ». « Avec une seule prise par jour, je ne sens pratiquement plus une crampe qui aurait pu durer cinq heures », explique-t-elle, vantant l’absence de tout effet secondaire. « J’avais des nuits hachées, je dors plus paisiblement. » Tous ses médecins sont non seulement au courant de cette consommation mais approuvent cet usage – non fumé – du cannabis. Lire aussi Cannabis thérapeutique : vers une expérimentation avant la fin 2019 Un poste de dépense conséquent Pour se procurer la plante, dont elle dit ne même pas pouvoir vanter les vertus sans tomber sous le coup de la loi, l’une de ses amies résidant en Suisse lui envoie chaque mois par la poste sous sachet scellé 15 grammes de bourgeons de mango haze, une variété contenant moins de 1 % de tétrahydrocannabinol (THC, la substance psychoactive du cannabis, interdite par la loi française) et 20 % de cannabidiol (CBD, une autre molécule du ­cannabis, non prohibée, sans ­effet euphorisant). « Avec cette variété, j’ai pu obtenir les effets positifs sans les effets délétères », raconte Adèle, qui en « machouille » un gros bourgeon chaque jour, vers 18 heures. « Rarement un deuxième. » Le cannabis représente pour elle un poste de dépense conséquent, non pris en charge par la Sécu : une centaine d’euros pour 15 grammes par mois. « J’ai des parents qui m’aident financièrement explique Adèle, qui gagne environ 2 000 euros par mois. Mais comment font les personnes qui touchent l’allocation adulte handicapé ? Avec même pas 900 euros par mois, elles n’ont pas le budget… » A chaque fois qu’elle va ouvrir sa boîte aux lettres, les jours où elle attend un paquet en provenance de Suisse, Adèle dit avoir « peur » qu’il y ait eu un signalement de La Poste. « Je sais que je cours un risque pénal, c’est une source d’angoisse. Du fait que ce soit illégal, il y a un sentiment d’injustice très profond chez les malades, on se sent abandonné. » La légalisation progressive du cannabis thérapeutique Pays du monde ayant autorisé partiellement ou totalement le cannabis thérapeutique.
28/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/28/le-cannabis-therapeutique-je-n-ai-trouve-que-ca-qui-me-soulage-vraiment_5403066_3224.html
Terzéo, un projet de traitement de déchets controversé en Ile-de-France
L’installation d’un centre de valorisation des déchets du BTP, qui accueillera notamment ceux du Grand Paris, crée l’inquiétude en Seine-et-Marne.
Site de la future ligne 15 du Grand Paris Express, le 23 janvier 2018, à Champigny-sur-Marne, dans le sud-est de Paris. THOMAS SAMSON / AFP A l’est de Paris, dans l’agglomération du pays de Meaux, certains habitants voient rouge lorsqu’on leur parle du projet Terzéo. Cette filiale de la société de recyclage Clamens souhaite installer, à 5 kilomètres de Meaux et sur une zone à cheval entre les communes de Villenoy et Isles-lès-Villenoy, un centre de traitement des déchets du secteur du bâtiment et travaux publics. La préfecture de Seine-et-Marne étudie le dossier depuis deux ans et devrait se prononcer d’ici février 2019. Terres polluées excavées du Grand Paris Express A l’heure où la prochaine construction du nouveau métro Grand Paris Express produira une quantité importante de déchets, Terzéo se présente comme un projet ambitieux, visant à valoriser 75 % des 200 000 tonnes par an de terres polluées excavées, qui seront réceptionnées sur la zone et transformées en granulats réutilisables. Les 25 % restants seront stockés sur le site, dont la capacité est de 1 million de tonnes de déchets dangereux sur trente ans. Ce projet n’est toutefois pas au goût de certains riverains, répartis sur 21 communes du pays de Meaux, qui manifestent depuis deux ans leur opposition à Terzéo. Plusieurs collectifs et associations se sont ainsi formés pour relayer leurs craintes. Samedi 15 décembre, ils étaient environ 300 à défiler à Meaux pour réclamer l’abandon du projet. 80 % des déchets de la région Ile-de-France sont déjà stockés en Seine-et-Marne. André Moukhine-Fortier, de l’Association Meaux environnement, explique ces mobilisations par un « ras-le-bol des habitants de Seine-et-Marne, qui vivent dans un territoire déjà saturé en décharges ». En effet, 80 % des déchets de la région Ile-de-France sont stockés dans ce département. « Terzéo reste un projet d’avenir, puisqu’il vise à recycler les déchets, mais le site ne s’y prête pas ! », insiste M. Moukhine-Fortier. Des impacts potentiels sur une zone classée Natura 2000 Le site en question, de 64 hectares, est une friche industrielle de l’ancienne sucrerie Béghin Say devenue Tereos. Une forte pollution des sols à l’arsenic avait été découverte en 2013 au début des procédures préalables à l’installation de Terzéo, poussant l’entreprise à intégrer à son projet une phase de dépollution des lieux. Parmi les inquiétudes des opposants, les impacts potentiels sur une zone classée Natura 2000, les Boucles de la Marne, se trouvant à proximité du futur centre de traitement. Ils redoutent également une hausse du trafic déjà dense de la N3 et de l’A140, car le projet Terzéo engendrerait la circulation d’une soixantaine de poids lourds supplémentaires par jour.
28/12/2018
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/28/terzeo-un-projet-de-traitement-de-dechets-controverse-en-ile-de-france_5403064_3244.html
Repas du Nouvel An ? Trois idées de menus pour finir l’année en beauté
Plutôt homard ou huîtres, caviar ou légumes de saison ? Dans le luxe ou la simplicité, voici des recettes de fêtes pour mettre sa table sur son 31.
L’incontournable plateau de fruits de mer accompagné de champagne. IAN O'LEARY / MODE IMAGES / PHOTONONSTOP Encore un peu groggy après les agapes du 25 décembre, voilà qu’il faut déjà remettre le couvert. On cède une nouvelle fois à l’injonction à la fête, mais pour la bonne cause, celle du bien manger. « Le Monde » vous propose trois options : traditionnelle, végétarienne ou facile à réaliser (toutes les recettes sont en lien). Noix de Saint-Jacques, homard, merveilleux au chocolat : un festin tradi-chic Le homard grillé à l’estragon peut se déguster seul en entrée ou, pour en faire un plat complet, avec du riz ou des petites pommes de terre vapeur. JULIE BALAGUE POUR M LE MAGAZINE DU MONDE Produits de fêtes par excellence, les fruits de mer sont les inconditionnels du repas de la Saint-Sylvestre. Outre l’incontournable plateau, on peut démarrer les festivités par des noix de Saint-Jacques au caviar, une entrée proposée à la carte du restaurant Fiamma Cremisi, en Lombardie. Pour le plat, pourquoi pas du homard grillé au beurre d’estragon ? S’il est pêché sur les côtes bretonnes ou normandes, et flambé au calvados, c’est encore meilleur. En dessert, le merveilleux au chocolat est idéal pour allier gourmandise et raffinement, surtout si l’on opte pour la recette de Pierre Marcolini. Gyozas, bouillabaisse borgne, baba au rhum : le souper des végés La bouillabaisse borgne, avec des œufs à la place du poisson. JULIE BALAGUE POUR M LE MAGAZINE DU MONDE Chaleur et convivialité sont aussi au menu des repas de fêtes végétariens. A l’apéro ou à l’entrée, les savoureux gyozas frits de Taku Sekine et leur farce végétarienne rebondissent bien sur un gin tonic. Plat économique et généreux à la fois, la bouillabaisse borgne est une variante végétarienne de la fameuse soupe de poisson marseillaise qui réchauffera les convives. Enfin, le baba au rhum revisité à la sauce indienne par Beena Paradin cumule trois qualités d’un dessert de fêtes imparable : « moelleux, réconfortant, élégant ». Huîtres chaudes, rôti de veau, mousse au chocolat : des mets faciles à réaliser L’orange et la coriandre apportent aux huîtres (chaudes) un goût exotique. JULIE BALAGUE POUR M LE MAGAZINE DU MONDE Se régaler avec un menu aussi festif que simple, c’est possible. Dès l’entrée, on opte pour des huîtres, puisque c’est la pleine saison. Et pourquoi pas chaudes, avec du poivre, des graines de coriandre, du jus d’orange et des endives, comme le suggère le journaliste et œnologue Dominique Hutin ? Pour le plat, un rôti de veau en cocotte permettra grâce à sa cuisson lente de mieux profiter des invités durant l’apéro. En dessert, la mousse au chocolat Indian Tonic de Nicolas Julhès, rehaussée de bergamote et d’écorce de quinquina, apportera une touche finale pleine de fraîcheur et de gourmandise. … Trois recettes détox après les fêtes Le potage au fenouil d’Agnès b. est garni de quelques pluches vertes pour la déco. JULIE BALAGUE POUR M LE MAGAZINE DU MONDE Envie d’un peu de répit après tant de débauche culinaire ? Revenez à l’essentiel avec une bonne soupe de saison, comme le potage au fenouil d’Agnès b., un plat simple et généreux à la fois : des fenouils, quelques pommes de terre, des épices et du parmesan. Réputés pour leurs bienfaits sur l’organisme, les aliments lacto-fermentés sont bienvenus pendant la période post-fêtes. Comme le chou kimchi, sorte de pendant coréen et pimenté de la choucroute. Autre option fermentation, version liquide cette fois, le kéfir de fruits est une boisson riche en vitamines et en antioxydants. Décidément, le fermenté, c’est la santé !
28/12/2018
m-gastronomie
https://www.lemonde.fr/m-gastronomie/article/2018/12/28/repas-du-nouvel-an-trois-idees-de-menus-pour-finir-l-annee-en-beaute_5403061_4497540.html
Internement des Ouïgours : l’impunité chinoise
Editorial. Au Xinjiang, sous couvert de « déradicalisation » religieuse, au moins un million de personnes issues des minorités turcophones et musulmanes sont détenues arbitrairement.
Basitova Guzel et ses enfants, à Almaty (Kazakhstan), le 4 décembre. Mounissa (à gauche), tient le portrait de son père, détenu en Chine depuis un an. . Editorial du « Monde ». Les témoignages directs de détenus, les récits de familles à l’extérieur de Chine et les rapports d’ONG offrent un tableau alarmant du programme de détention à grande échelle des minorités turcophones et musulmanes du Xinjiang, en premier lieu les Ouïgours (11 millions) et les Kazakhs (1,5 million). Les estimations relayées par les experts du Comité contre la discrimination des Nations unies d’au moins 1 million de personnes internées semblent excessivement prudentes. Il existerait au moins 220 lieux d’internement de tailles variées. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Kazakhs et Ouïgours dans l’enfer du goulag chinois Pékin a une longue histoire de la détention forcée : les droitiers ou autres ennemis de classe envoyés dans des camps tout au long de la période maoïste, dont beaucoup ne sont jamais revenus, les intellectuels enfermés dans des « étables » sous la révolution culturelle – n’importe quel local convertible en prison –, les pétitionnaires ou les membres de la secte Falun Gong brutalisés dans des camps de rééducation (abolis en 2013), mais aussi des asiles, des prisons « noires » (lieux de détention illégaux)… Au Xinjiang, des puissances inquisitrices font feu de tout bois pour déporter et interner, sous couvert de « déradicalisation » religieuse et de « formation professionnelle », au mépris de toute logique : cette détention assimilable ailleurs à de la préventive, mais sans garde-fou, pour d’absurdes prétextes, peut s’étirer en longueur dans des conditions inhumaines, souvent pour une durée indéterminée, sous la menace permanente d’être envoyé dans des camps de formatage ethnique et idéologique. Elle conduit aussi à des condamnations à de la prison ferme, parfois à perpétuité. Faire apprendre de force le mandarin, chanter des chansons « rouges » et proclamer son allégeance au Parti communiste est vu comme la recette, nationaliste et antireligieuse, permettant de fabriquer des citoyens chinois loyaux et obéissants – d’« unifier les ethnies », selon les mots de la propagande –, en réalité de fondre les minorités dans la grande masse chinoise du groupe ethnique dominant, les Han (96 % de la population). La crainte de déplaire à Pékin Le succès de la Chine, et l’idéologie de sinisation et de recentrage du pouvoir politique autour du Parti communiste proclamée lors du 19e congrès, en 2017, y ont renforcé le sentiment d’impunité totale qui règne au sommet de l’Etat. L’exploration des versants les plus sombres de l’histoire du régime communiste, de la folie maoïste aux événements de Tiananmen, il y a trente ans, est encore moins d’actualité qu’elle ne l’était avant Xi Jinping. La notion défendue par le pouvoir est que la Chine, si grande, si variée, ne peut fonctionner qu’avec un pouvoir autoritaire. Elle fait oublier qu’il n’y a qu’un pas de l’usage de l’autorité à son abus, et de là, au crime. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Camps de détention en Chine : le Kazakhstan, trop dépendant pour froisser Pékin Le sort des Ouïgours reçoit certes une place croissante dans les médias étrangers depuis cet été, mais l’attention diplomatique est loin d’être proportionnelle aux enjeux. Les pays musulmans sont pour la plupart muets, par crainte de déplaire à Pékin. A l’ONU, Michelle Bachelet, la haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme (HDCH), a demandé « un accès direct à la région pour pouvoir vérifier les informations préoccupantes » sur le traitement des minorités. Une quinzaine d’ambassadeurs occidentaux ont écrit en novembre à Chen Quanguo, le secrétaire du Parti du Xinjiang, pour lui demander poliment des comptes. Une loi sur les droits humains des Ouïgours (Uyghur Human Rights Policy Act) a été proposée au Congrès américain le 13 novembre, avec un soutien bipartisan. Pour le moment, Pékin, qui se veut comme toujours insensible aux pressions étran­gères sur les droits humains, fait la sourde oreille. Le Monde
28/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/28/internement-des-ouigours-l-impunite-chinoise_5403054_3232.html
En Indonésie, la crainte d’un nouveau tsunami
La région du volcan Anak Krakatoa, qui a provoqué la mort de 430 personnes, est en état d’alerte haute.
Un pont effondré à Lebak, en Indonésie, le 26 décembre. ANTARA FOTO / REUTERS Moins d’une semaine après le tsunami qui a fait, selon un dernier bilan, plus 430 morts et près de 1 500 blessés, les autorités indonésiennes ont élevé d’un cran, jeudi 27 décembre, le niveau de l’alerte à la « grande vague » : elles redoutent la possibilité de nouvelles éruptions du volcan Anak Krakatoa, qui a déclenché le tsunami du samedi 22 décembre. Plus de cent cinquante personnes restent portées disparues et le bilan n’est toujours pas définitif, menaçant de s’alourdir encore un peu plus ces prochains jours. L’« alerte haute » a désormais été appliquée sur toute la zone. C’est l’avant-dernier des quatre niveaux d’alerte en vigueur dans l’archipel. Carence en eau potable Il est désormais interdit à toute embarcation d’approcher à moins de 5 kilomètres du volcan, susceptible de cracher par intermittence des rochers brûlants, des cendres et d’autres débris. Les avions doivent éviter la zone. « D’autres éruptions sont possibles », a mis en garde le porte-parole de l’Agence de gestion des catastrophes naturelles, Sutopo Purwo Nugroho. Quelque 22 000 personnes ont été évacuées et vivent désormais dans des abris installés de part et d’autre du détroit de la Sonde, où le désastre s’est produit. Au plan matériel, le bilan s’élève à 883 maisons détruites, ainsi que 73 hôtels et villas, 60 magasins et boutiques, 434 bateaux et 41 véhicules. Sur le terrain, alors que les secours et les équipes médicales poursuivent leurs efforts pour venir en aide aux victimes et récupérer les corps ensevelis dans les municipalités de l’Ouest javanais et du sud de Sumatra, les services de santé commencent aussi à s’inquiéter : une carence en eau potable et en médicaments se fait sentir dans les endroits plus reculés où ont frappé les grandes vagues, certaines hautes de près d’une dizaine de mètres. Les pluies torrentielles qui s’abattent en ce moment sur la région sont, en outre, en train de ralentir les opérations de secours. Des routes et des ponts ont été endommagés. Les régions touchées sont recouvertes par des amoncellements de voitures retournées, de bateaux échoués, de meubles et de débris divers. Des centaines d’employés et de volontaires de la Croix-Rouge indonésienne s’affairent à distribuer de l’eau potable, des couvertures, des bâches, et à fournir des unités médicales mobiles. « Nos équipes voient beaucoup de fractures, de maisons détruites, et des gens qui sont très secoués », relate Arifin Hadi, le directeur de la gestion des catastrophes de la Croix-Rouge, cité par l’Agence France presse.
28/12/2018
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/28/l-indonesie-redoute-un-nouveau-tsunami_5403051_3244.html
Un ex-conseiller de Sarkozy prend la tête de Rusal, le géant russe de l’aluminium
Jean-Pierre Thomas, banquier d’affaires et ex-député des Vosges, doit stabiliser un groupe que Donald Trump avait pris pour cible.
Jean-Pierre Thomas, en juin 2018. VALDAI DISCUSSION CLUB Une nouvelle vie, assez inattendue, s’ouvre pour Jean-Pierre Thomas. L’ex-député des Vosges et trésorier du Parti républicain, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, s’apprête à prendre la tête de Rusal, le premier producteur d’aluminium au monde. Le groupe industriel russe a annoncé vendredi 28 décembre sa nomination comme président du conseil d’administration à partir du 1er janvier. Jean-Pierre Thomas, 61 ans, était déjà membre du conseil d’administration de Rusal depuis juin, et rien ne laissait prévoir qu’il allait en prendre la présidence. Mais la crise russo-américaine au centre de laquelle s’est trouvé Rusal a bouleversé la donne. Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’économie russe sous la menace de nouvelles sanctions américaines Début avril, Donald Trump a en effet dévoilé des sanctions américaines contre 24 oligarques et responsables politiques russes proches du président Vladimir Poutine, et contre 14 groupes et entreprises soupçonnés d’être liés à des « activités malveillantes » envers les démocraties occidentales. Cible numéro un : Oleg Deripaska, 50 ans, le « roi de l’aluminium » avec son groupe Rusal. Echapper aux foudres de Washington Pour le producteur d’aluminium, qui réalisait jusqu’alors 14 % de son chiffre d’affaires aux Etats-Unis, ces sanctions représentaient une très forte menace. Le groupe industriel craignait de perdre une partie de ses marchés, et de ne pas pouvoir honorer les échéances sur sa dette. A la Bourse de Hongkong, où le groupe est coté, l’action a immédiatement encaissé le choc, avec une baisse de 50,4 % en une journée, le lundi 9 avril. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Russie, l’oligarque Oleg Deripaska met un genou à terre Pour échapper aux foudres de Washington, Rusal a alors mis en place un plan d’urgence. Oleg Deripaska a dénoué ses liens capitalistiques avec l’entreprise, et quitté le conseil d’administration avec une partie de l’équipe dirigeante de l’époque. Jean-Pierre Thomas connaît bien la Russie. En 2011, cet amateur de chasse à l’ours avait été nommé « représentant spécial » de Nicolas Sarkozy pour le pays. Dernier à partir dans ce cadre, l’Allemand Matthias Warnig. Cet ancien haut fonctionnaire d’Allemagne de l’est, ex-membre de la Stasi, proche de Vladimir Poutine, était devenu président de Rusal en 2012. Son départ, officialisé mercredi, faisait partie des engagements pris auprès des autorités américaines pour obtenir la levée des sanctions. A la suite de ces mesures, le Trésor américain a effectivement annoncé mi-décembre son intention de retirer Rusal de la liste des entités sanctionnées. Restait à remplacer Matthias Warnig. Forcément par un administrateur indépendant, sans lien avec les actionnaires. Une condition posée par Washington. Trois candidats étaient intéressés. Le conseil de Rusal, qui compte une douzaine de membres, a porté jeudi son choix sur Jean-Pierre Thomas, un des deux administrateurs indépendants français élus en juin par l’assemblée générale, avec Philippe Mailfait.
28/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/28/un-ex-conseiller-de-sarkozy-prend-la-tete-de-rusal-le-geant-russe-de-l-aluminium_5403048_3234.html
Plus de 300 personnes secourues par l’ONG Proactiva Open Arms en Méditerranée sont arrivées en Espagne
Ces hommes, femmes et enfants originaires de Somalie, du Nigeria et du Mali avaient été refusés par l’Italie et Malte.
L’Italie et Malte avaient refusé de les accueillir. Plus de 300 migrants secourus il y a une semaine au large de la Libye par l’ONG espagnole Proactiva Open Arms sont arrivés vendredi 28 décembre en Espagne. Le bateau de l’ONG est entré vers 8 h 30 dans la baie de Gibraltar, dans le sud de l’Espagne, avant d’accoster une demi-heure plus tard dans le port de Crinavis, sur la commune de San Roque. Après une semaine de mer, où ils ont célébré Noël à bord de l’Open Arms, les occupants du bateau ont crié et applaudi lors de leur arrivée dans le port. « Mission accomplie », a lancé, juste avant l’amarrage, le fondateur de l’organisation, Oscar Camps, sur Twitter : Buenos días, el #OpenArms ya en la bahía se dirige al punto de atraque, del único puerto seguro disponible en el M… https://t.co/kmt0nuEMJz — campsoscar (@Oscar Camps) « Bonjour, l’Open Arms, déjà dans la baie, se dirige vers le lieu d’accostage de l’unique port sûr disponible dans la Méditerranée. Mission accomplie. » Une fois sur la terre ferme, ces 311 migrants, originaires notamment de Somalie, du Nigeria ou du Mali, vont être accueillis par la Croix-Rouge, qui leur fournira vêtements, nourriture et assistance médicale si nécessaire. La police procédera ensuite à leur identification avant qu’ils puissent être dirigés vers des lieux d’accueil. Secourus le 21 décembre alors qu’ils se trouvaient à bord de trois embarcations précaires en Méditerranée, ces migrants avaient été autorisés à débarquer en Espagne le lendemain par le gouvernement socialiste de Pedro Sanchez, après avoir été refusés par l’Italie et Malte. Selon Madrid, la Libye, la France et la Tunisie n’avaient, quant à elles, pas répondu à la demande de l’ONG après la fin de non-recevoir opposée par l’Italie. Si Malte a refusé l’accès de ses ports au navire, une femme et un bébé, né sur une plage libyenne quelques jours avant la traversée, ont en revanche pu être évacués samedi sur l’île en hélicoptère. Un mineur a, par ailleurs, été emmené vers l’île italienne de Lampedusa. Traversée d’une semaine Depuis le feu vert accordé par Madrid, ces migrants ont entrepris une traversée d’une semaine pour rejoindre l’Espagne. Un autre bateau de l’ONG espagnole, le voilier Astral, les a ravitaillés lundi en pleine mer, leur apportant nourriture, médicaments et couvertures. Proactiva Open Arms avait repris fin novembre, avec deux autres bateaux d’ONG, ses missions de sauvetage au large de la Libye, après avoir décidé de les suspendre fin août. Elle dénonçait alors la « criminalisation des ONG », notamment par l’Italie, en particulier par son ministre de l’intérieur d’extrême droite, Matteo Salvini. C’est la première fois depuis près de cinq mois que l’Espagne accepte de laisser débarquer des migrants d’un bateau d’une ONG. Arrivé au pouvoir au début de juin à Madrid, Pedro Sanchez avait frappé un grand coup quelques jours plus tard en accueillant le navire humanitaire Aquarius, lui aussi refusé par l’Italie et Malte et au centre de fortes tensions en Europe à propos de la politique migratoire. Madrid avait ensuite accepté à trois reprises, en juillet et août, d’accueillir un bateau d’Open Arms avec des migrants à bord, avant de rechigner à laisser de nouveau débarquer les passagers de l’Aquarius. Le gouvernement préférait alors négocier avec d’autres Etats européens la répartition de ses migrants. L’Espagne est devenue depuis cet été la première porte d’entrée des migrants illégaux en Europe, devant la Grèce et l’Italie. Plus de 56 000 migrants sont arrivés dans ce pays par la mer depuis le 1er janvier, tandis que 769 sont morts au cours de la traversée. La route de la Méditerranée centrale est la plus meurtrière, avec 1 306 migrants morts lors de la traversée vers les côtes italiennes et maltaises depuis le début de l’année, selon les derniers chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), actualisés au 19 décembre. L’Espagne est, en revanche, devenue depuis cet été la première porte d’entrée des migrants illégaux en Europe, devant la Grèce et l’Italie. Plus de 56 000 migrants sont arrivés dans ce pays par la mer depuis le 1er janvier, tandis que 769 sont morts lors de la traversée. Lire sur Les Décodeurs : Un pays a-t-il le droit de fermer ses ports aux bateaux secourant les migrants ?
28/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/28/plus-de-300-migrants-secourus-par-l-ong-proactiva-open-arms-sont-arrives-en-espagne_5403045_3210.html
Camps de détention en Chine : le Kazakhstan, trop dépendant pour froisser Pékin
Le régime autoritaire de Noursoultan Nazarbaïev laisse, pour l’instant, agir les ONG qui défendent les droits des Kazakhs emprisonnés par son voisin chinois.
Le Kazakhstan est l’un des rares endroits où d’anciens détenus du système répressif mis en place dans le Xinjiang chinois contre les Ouïgours sont en mesure de témoigner. Mais le régime autoritaire de Noursoultan Nazarbaïev est dans une position ambivalente vis-à-vis de Pékin. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Kazakhs et Ouïgours dans l’enfer du goulag chinois Routes de la soie Etape-clé des « nouvelles routes de la soie » chinoise, le Kazakhstan livre un quart de son pétrole à la Chine par oléoduc et a annoncé, en septembre, la mise en œuvre de 51 projets sino-kazakhs pour 27 milliards de dollars (23,5 milliards d’euros). Cette dépendance économique croissante, et les accords de sécurité passés dans le cadre de l’Organisation de coopération de Shanghaï, réduisent les voies de recours d’Astana vis-à-vis de Pékin quand ses concitoyens sont détenus en Chine. Orynbek Korsebek, d'origine Kazakh, a passé 125 jours dans un camp de rééducation en Chine, dans le Xinjiang. A Almaty, Kazakhstan, décembre 2018. ROMAIN CHAMPALAUNE POUR LE MONDE « La Constitution du Kazakhstan défend les droits des citoyens kazakhs à l’étranger et assure la protection de la ­famille et des enfants, nous défendons ce point pour nos dossiers », explique la juriste Gulmira Kuatbekova, du Bureau international pour la protection des droits de l’homme, une ONG kazakhe. Le régime, qui endigue toute contestation, laisse, pour l’instant, agir les quelques ONG qui défendent les droits des Kazakhs – lesquels constituent une infime minorité des détenus du Xinjiang. « La police nous appelle régulièrement pour s’assurer que les journalistes étrangers ne sont pas là pour agir contre le gouvernement actuel », nous prévient Serikjan Bilash, le cofondateur de l’ONG Atazhurt, à Almaty (Kazakhstan). Dans les locaux de l'association Atajurt, une femme tient le portrait d'un de ses proches disparu en Chine. Almaty, Kazakhstan, décembre 2018. ROMAIN CHAMPALAUNE POUR LE MONDE Demandes officielles de libération Les demandes officiellement formulées par le ministère des affaires étrangères kazakh à son homologue chinois sur des citoyens détenus semblent toutefois contribuer à leur libération. C’est le cas de Gulbahar Jalilova, une commerçante ouïgoure de nationalité kazakhe qui a été détenue quinze mois à Urumqi, la capitale du Xinjiang, entre mai 2017 et septembre 2018, sans raison valable. Réfugiée à Istanbul (Turquie), elle montre les lettres des autorités kazakhes, et la réponse des autorités chinoises disant qu’elle était bien en détention. « Ce qui prouve qu’ils m’ont bien emprisonnée ! », dit-elle, au comble de l’exaspération, car les autorités chinoises l’ont relâchée sans attestation. Alors qu’elle n’a jamais eu la nationalité chinoise, le personnel du centre de détention lui avait assigné un numéro d’identité chinois pour que le système informatique prenne son cas en compte. Le politologue kazakh indépendant Rasul Jumaly a accompagné une délégation kazakhe invitée par la Chine à Pékin, Urumqi, et Ghulja (Xinjiang), en août. Elle était essentiellement, dit-il, composée d’entrepreneurs prochinois. Il a soulevé la question des détentions :
28/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/28/camps-de-detention-en-chine-le-kazakhstan-trop-dependant-pour-froisser-pekin_5403040_3210.html
Sélection scientifique de la semaine (numéro 337)
Au menu : un cheval et son harnachement découverts à Pompéi, l’effondrement de la natalité japonaise, le bilan scientifique de 2018, etc.
– Libération fait un point sur l'automédication chez les animaux. – Au Smithsonian's National Zoo de Washington, on tire le lait des orangs-outans, des zèbres, des ourses, etc., pour étudier ses qualités suivant les espèces de mammifères. (en anglais) – Le nombre de parasites qui vivent dans les océans et qui touchent les animaux marins (dont certains poissons que nous mangeons) est en augmentation. (en anglais) – Le Japon se retire de la Commission baleinière internationale, ce qui lui permettra de reprendre officiellement la chasse commerciale aux cétacés. – Japon toujours (mais sans rapport avec ce qui précède), où le nombre des naissances a atteint un plus bas depuis le début des statistiques en 1899. Les décès étant nettement plus nombreux que les naissances, la population nippone aura perdu près de 450 000 individus cette année. (en anglais) – Surpoids : le poids et le tour de taille moyens des Américains (dont la taille stagne) ont significativement augmenté entre 1999 et 2016. – Un long format du New York Times sur les pollutions aux Etats-Unis que l'administration Trump favorise au lieu de les combattre. (en anglais) – Trois espèces de salamandres vont-elles empêcher des travaux d'agrandissement d'un barrage en Californie ? (en anglais) – Après un nouveau tsunami meurtrier en Indonésie lié à un volcan, c'est l'Etna, en Sicile, qui est entré en éruption ces derniers jours. – Ce que les catastrophes liées au changement climatique coûtent. (en anglais) – Archéologie : découverte, à Pompéi, des restes d'un cheval et de son harnachement. – Astronomie : une collision avec un autre astre explique-t-elle pourquoi la planète Uranus est si inclinée ? (en anglais) – L'artiste américain Mako Miyamoto met en scène une Terre colonisée (ou en cours de colonisation) par des extraterrestres. – L'année 2018 côté sciences et environnement, vue par le site de la BBC. Voici aussi la sélection qu'a faite le site du Guardian (en anglais). Et pour une version française, voici le résumé de l'année scientifique en images que nous avons publié au Monde. – Un autre bilan de l'année un peu moins agréable à lire (mais pas moins indispensable) : le top 10 des articles scientifiques retirés pour erreurs ou fraudes. (en anglais) – Pour terminer, un constat que vous avez sûrement déjà fait sans moi : la stratégie de certains sites Web comme celui du Monde ou du Figaro consiste à réserver aux abonnés les articles à plus forte valeur ajoutée. Jusqu'ici, j'évitais d'en faire figurer dans cette sélection et je m'arrangeais pour en trouver des équivalents gratuits. Mais il faut bien admettre, d'une part, que c'est de plus en plus difficile car la qualité est rarement au rendez-vous, que les "papiers" gratuits sont de plus en plus envahis par la publicité et, d'autre part, que les journaux sont fondés à miser sur l'abonnement pour leur survie. Journaliste depuis 1990, je suis bien placé pour savoir que l'information a un prix et que la presse n'a pas d'autre solution que de faire payer pour son travail, son modèle économique traditionnel (basé sur une forte proportion de publicité) étant en train de s'effondrer lentement mais sûrement. J'ai donc choisi, tout seul comme un grand (je le précise à destination de ceux qui croient que les actionnaires du Monde me tiennent la main ou pointent un revolver sur ma nuque), de faire figurer, en 2019, des articles payants dans cette sélection, en le précisant clairement tout comme je signale que tel ou tel lien mène vers un site anglophone. Cette semaine j'aurais ainsi pu évoquer le reportage de Joan Tilouine sur le retour du virus Ebola en République démocratique du Congo ou le portrait que j'ai écrit de Sergio Canavero, l'homme qui veut greffer des têtes. Pierre Barthélémy (suivez-moi sur Twitter) Nota bene : le "Passeur" prenant quelques jours de vacances, il n'y aura pas de sélection de liens scientifiques la semaine prochaine. Je profite aussi de l'occasion pour vous souhaiter, avec un peu d'avance, une belle année 2019 !
28/12/2018
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http://passeurdesciences.blog.lemonde.fr/2018/12/28/selection-scientifique-de-la-semaine-numero-337/
Le protoxyde d’azote, un gaz hilarant qui ne fait pas du tout rire les médecins
L’usage récréatif de cet agent anesthésique, qui provoque une euphorie de courte durée, peut s’accompagner de sérieuses complications neurologiques.
Le protoxyde d’azote (N2O), communément appelé « gaz hilarant » ou « proto », est un agent anesthésique volatil utilisé par voie inhalée depuis 170 ans par les médecins. Son utilisation, dans le cadre d’un usage récréatif, peut être responsable d’accidents inattendus. Ces derniers mois, en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis et en Corée, des équipes médicales ont rapporté la survenue d’une atteinte de la moelle épinière dans le but d’attirer l’attention sur une complication peu connue du protoxyde d’azote détourné de son usage initial pour ses propriétés euphorisantes. Dans le champ médical, le N2O est contenu dans des bouteilles prêtes à l’emploi. Constitué de 50 % de protoxyde d’azote et de 50 % d’oxygène, ce mélange gazeux induit une sédation-analgésie (diminution de la vigilance et de la douleur) avec maintien de la conscience. Le N2O n’étant pas métabolisé par l’organisme, il est rapidement éliminé, avec une disparition des effets deux à trois minutes après arrêt de l’inhalation. Celle-ci entraîne une euphorie, un fou rire, une distorsion des sons et de légères hallucinations, qui culminent après une vingtaine de secondes pour rapidement se dissiper. Les usagers se sentent souvent parfaitement normaux dans les deux minutes qui suivent l’inhalation. Des vertiges, des maux de tête, une vision floue peuvent cependant survenir. Consommation visible dans l’espace public Le 20 décembre 2018, l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) a publié un rapport soulignant la visibilité du protoxyde d’azote dans l’espace public. « À Lille, à partir de 2017, des consommations sont devenues soudainement visibles. De nombreuses petites cartouches grises contenant le gaz sont retrouvées, de façon continuelle et massive, dans plusieurs secteurs de l’espace urbain : le long des trottoirs, aux abords de certaines épiceries de nuit, à proximité de grands ensembles urbains où se pratique le deal de drogues illicites, etc », peut-on lire. Plusieurs profils de consommateurs ont été identifiés dans la métropole lilloise : « jeunes impliqués dans le trafic de stupéfiants, personnes prostituées, personnes précaires, mais aussi des collégiens et des lycéens », avides d’expérimentations dans un cadre collectif et « convivial ». Ces usages détournés ont été observés dans d’autres contextes festifs : free parties, teknivals, soirées étudiantes, notamment « médecine » à Bordeaux, Paris, Lille, Lyon. Des cartouches prêtes à consommer au bar circulent dans des soirées lyonnaises. Manque d’information sur la dangerosité du « proto » Au sein de l’OFDT, les dispositifs TREND (Tendances récentes et nouvelles drogues) s’intéressent essentiellement aux groupes particulièrement consommateurs de produits psychoactifs. « Les sites TREND de Lille et Bordeaux insistent sur le manque d’information des usagers, notamment les plus jeunes d’entre eux, concernant la dangerosité du produit. La diffusion d’informations sur le protoxyde d’azote est d’autant plus nécessaire que des consommations répétées et à intervalles trop rapprochés peuvent entraîner des maux de têtes, des vertiges, mais également des troubles du rythme cardiaque graves (notamment si le gaz est associé à des stimulants », souligne le rapport. Un jeune homme de 19 ans est décédé en mai 2016 lors d’une soirée festive. Plusieurs études internationales ont récemment rapporté un autre risque, neurologique celui-là, lié à l’usage détourné du protoxyde d’azote. Elles rapportent que le protoxyde d’azote peut entraîner une atteinte de la moelle épinière. Une étude sud-coréenne, publiée en ligne en octobre 2018 dans le Journal of Clinical Neurology, rapporte la survenue de cette complication neurologique chez ces deux patients habitués à inhaler de fortes doses de N2O. Une femme de 22 ans a consulté pour des troubles de la sensibilité (paresthésie) des membres inférieurs et des mains, évoluant depuis deux mois. Sa marche était instable. L’interrogatoire de la patiente a permis d’apprendre qu’elle avait inhalé du protoxyde d’azote contenu dans des ballons de baudruche (« happy ballons ») plus de 100 fois au cours des deux derniers mois. Le second patient, un homme de 33 ans, a été hospitalisé pour faiblesse symétrique et progressive des membres inférieurs, trouble de l’équilibre et difficultés à la marche. Il a confié à l’équipe soignante avoir inhalé jusqu’à 5 litres de gaz hilarant au cours des six derniers mois. Atteinte de la moelle épinière Le N2O endommage le système nerveux en interférant avec le métabolisme de la vitamine B12*, avec pour conséquence une perte de la gaine de myéline qui permet la conduction, de manière rapide et efficace, des signaux électriques le long des fibres nerveuses. L’atteinte de la myéline entraîne donc une interruption de la transmission nerveuse. Le N2O est également responsable d’une anémie dite mégaloblastique, caractérisée par des globules rouges de grande taille. Les analyses sanguines des deux patients sud-coréens ont révélé de faibles taux de vitamine B12**. Ils présentaient une sclérose combinée de la moelle, une atteinte dégénérative de la moelle épinière se manifestant par une faiblesse musculaire dans les jambes et une atteinte de la sensibilité profonde. Le diagnostic est facilité par l’imagerie par résonance magnétique (IRM) qui montre souvent un aspect typique***. Le traitement consiste en des injections de vitamine B12 (1 mg) toutes les deux semaines suivies d’un relais par voie orale. Chez ces deux patients, la vitaminothérapie, associée à l’arrêt des inhalations de N2O, a entraîné une amélioration progressive de l’état neurologique. Nécessité d’un diagnostic et d’une prise en charge rapide En mai 2018, des médecins urgentistes et des neurologues de plusieurs hôpitaux londoniens ont rapporté dans le Journal of Neurology une série de dix cas de sclérose combinée de la moelle chez des patients âgés de 17 à 26 ans. La plupart d’entre eux ne buvaient pas d’alcool et ne consommaient pas d’autres drogues. Tous présentaient des troubles de la sensibilité des membres inférieurs, parfois également des membres supérieurs (7 cas), accompagnés de troubles de la marche. L’IRM de la région cervicale a révélé les images caractéristiques de sclérose combinée de la moelle. Les dix patients ont été traités par des injections intramusculaires de vitamine B12 un jour sur deux pendant deux semaines. Quatre patients ont été perdus de vue. Sur les six patients suivis, deux ont récupéré sans séquelles, trois ont continué de présenter des troubles sensitifs (paresthésies) au niveau des pieds. Enfin, un patient présente toujours, 27 mois plus tard, des troubles de la sensibilité superficielle et profonde, ainsi qu’une marche anormale. D’autres cas de sclérose combinée de la moelle associés à l’inhalation récréative de protoxyde d’azote ont été rapportés ces derniers mois par des urgentistes et radiologues américains dans l’American Journal of Emergency Medicine et The Journal of Emergency Medicine. Tous les auteurs soulignent la nécessité d’un diagnostic précoce et font remarquer que la mise en route rapide d’une supplémentation en vitamine B12 peut inverser le processus de dégénérescence. La récupération neurologique peut cependant être incomplète, en particulier lorsque les patients continuent d’inhaler du N2O.**** Selon une étude internationale (Global Drug Survey) ayant recueilli les données de plus de 100 000 utilisateurs de drogues dans 20 pays, le protoxyde d’azote est le septième produit récréatif le plus populaire dans le monde. Au Royaume-Uni, le gaz inhalant est la quatrième substance la plus utilisée par les clients des boîtes de nuit. On peut s’y procurer 96 cartouches pour environ 30 livres (40 euros). En France, ce gaz est conditionné dans des ballons vendus 1 à 2 euros l’unité. Toutes les équipes insistent sur l’importance pour les médecins urgentistes de connaitre la sclérose combinée de la moelle associée à l’inhalation de protoxyde d’azote pour un usage récréatif. Une complication rare qu’ils doivent avoir à l’esprit dans la mesure où l’usage du « proto » se banalise parmi les jeunes. Selon les auteurs de ces récentes publications, établir rapidement le diagnostic de cette rare complication neurologique est crucial pour des jeunes admis aux urgences pour des symptômes inhabituels et inexpliqués. Des symptômes qui n’ont franchement rien d’hilarant. Marc Gozlan (Suivez-moi sur Twitter, sur Facebook) Toute reproduction interdite. Toutes les informations reproduites sur cette page sont protégées par des droits de propriété intellectuelle. * Le protoxyde d’azote entraîne une inactivation irréversible de la vitamine B12 (cobalamine) en oxydant ses ions cobalt. La vitamine B12 ne peut alors plus se lier à l’enzyme méthionine synthétase. Il s’ensuit une diminution du recyclage de l’homocystéine en méthionine, ce qui empêche la méthylation des protéines de la gaine de myéline, avec pour conséquence une démyélinisation. ** Un taux sanguin de vitamine B12 n’exclut pas le diagnostic de sclérose combinée de la moelle dans la mesure où un déficit fonctionnel vitaminique peut se produire malgré des concentrations normales de vitamine B12. Dans de tels cas, des taux augmentés d’acide méthylmalonique (AMM) et d’homocystéine peuvent grandement orienter le diagnostic. *** Sur une coupe sagittale à l’IRM, la dégénérescence subaiguë de la moelle se traduit par un hypersignal en séquence pondérée T2 localisé préférentiellement au niveau des cordons postérieurs de la moelle cervicale ou dorsale. *** Il y a quelques mois, une sclérose combinée de la moelle a été diagnostiquée chez un homme de 30 ans hospitalisé à l’hôpital Bichat-Claude Bernard (Paris). Cette observation clinique n’a pas été publiée à ce jour. Ce patient avait inhalé « des dizaines de capsules chaque soir au cours des deux semaines précédentes ». Pour en savoir plus : Kwon YJ, Rho JH, Hwang J, Baek SH. Unhappy End of « Happy Balloons »: Subacute Combined Degeneration Caused by Nitrous Oxide Gas. J Clin Neurol. 2018 Oct 26. Egan W, Steinberg E, Rose J. Vitamin B12 deficiency-induced neuropathy secondary to prolonged recreational use of nitrous oxide. Am J Emerg Med. 2018 Sep;36(9):1717.e1-1717.e2. doi: 10.1016/j.ajem.2018.05.029 Johnson K, Mikhail P, Kim MG, Bosco A, Huynh W. Recreational nitrous oxide-associated neurotoxicity. J Neurol Neurosurg Psychiatry. 2018 Aug;89(8):897-898. doi: 10.1136/jnnp-2017-317768 Antonucci MU. Subacute Combined Degeneration from Recreational Nitrous Oxide Inhalation. J Emerg Med. 2018 May;54(5):e105-e107. doi: 10.1016/j.jemermed.2018.01.045 Keddie S, Adams A, Kelso ARC, Turner B, Schmierer K, Gnanapavan S, Malaspina A, Giovannoni G, Basnett I, Noyce AJ. No laughing matter: subacute degeneration of the spinal cord due to nitrous oxide inhalation. J Neurol. 2018 May;265(5):1089-1095. doi: 10.1007/s00415-018-8801-3 Buizert A, Sharma R, Koppen H. When the Laughing Stops: Subacute Combined Spinal Cord Degeneration Caused by Laughing Gas Use. J Addict Med. 2017 May/Jun;11(3):235-236. doi: 10.1097/ADM.0000000000000295 Thompson AG, Leite MI, Lunn MP, Bennett DL. Whippits, nitrous oxide and the dangers of legal highs. Pract Neurol. 2015 Jun;15(3):207-9. doi: 10.1136/practneurol-2014-001071 Morris N, Lynch K, Greenberg SA. Severe motor neuropathy or neuronopathy due to nitrous oxide toxicity after correction of vitamin B12 deficiency. Muscle Nerve. 2015 Apr;51(4):614-6. doi: 10.1002/mus.24482 Jordan JT, Weiser J, Van Ness PC. Unrecognized cobalamin deficiency, nitrous oxide, and reversible subacute combined degeneration. Neurol Clin Pract. 2014 Aug;4(4):358-361. doi: 10.1212/CPJ.000000000000001 Chaugny C, Simon J, Collin-Masson H, De Beauchêne M, Cabral D, Fagniez O, Veyssier-Belot C. Carence en vitamine B12 par toxicité du protoxyde d’azote : une cause méconnue de sclérose combinée de la moelle. Rev Med Interne. 2014 May;35(5):328-32. doi: 10.1016/j.revmed.2013.04.018 Cheng HM, Park JH, Hernstadt D. Subacute combined degeneration of the spinal cord following recreational nitrous oxide use. BMJ Case Rep. 2013 Mar 8;2013. pii: bcr2012008509. doi: 10.1136/bcr-2012-008509 Garbaz L, Mispelaere D, Boutemy M, Jounieaux V. Pneumothorax et inhalation volontaire de protoxyde d’azote. Rev Mal Respir. 2007 May;24(5):622-4. Vasconcelos OM, Poehm EH, McCarter RJ, Campbell WW, Quezado ZM. Potential outcome factors in subacute combined degeneration: review of observational studies. J Gen Intern Med. 2006 Oct;21(10):1063-8 Sur le web : Gérome C, Cadet-Taïrou A, Gandilhon M, Milhet M, Martinez M, Néfau T. Substances psychoactives, usagers et marchés : les tendances récentes (2017-2018). Tendances N° 129, décembre 2018. (OFDT, Observatoire français des drogues et des toxicomanies) Lose S. CedrAgir/TREND. Tendances récentes et nouvelles drogues. Décembre 2018. (OFDT, Observatoire français des drogues et des toxicomanies) Gaz hilarant, protoxyde d’azote, bonbonne… Quels sont les risques ? (Service-Public.fr)
28/12/2018
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http://realitesbiomedicales.blog.lemonde.fr/2018/12/28/le-protoxyde-dazote-un-gaz-hilarant-qui-ne-fait-pas-du-tout-rire-les-medecins/
Les jeunes pousses européennes des nouvelles technologies attirent toujours plus de capitaux
En 2018, en Europe, le nombre de « licornes », ces sociétés valorisées a plus de 1 milliard de dollars, s’est élevé à 61, contre 12 à peine cinq ans plus tôt.
Spotify a été cotée pour la première fois à la Bourse de New York le 3 avril. BRYAN R. SMITH / AFP A l’heure des premiers bilans, l’année 2018 se présente comme un excellent millésime pour la tech européenne. Selon un rapport du fonds britannique Atomico, dévoilé début décembre, le secteur a drainé plus de 23 milliards de dollars (20,2 milliards d’euros) d’investissements cette année sur le Vieux Continent. Une belle performance, qui témoigne du dynamisme de l’écosystème européen ces dernières années : en 2013, les investissements y étaient près de cinq fois moins importants, s’établissant seulement à 5 milliards de dollars. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Uber, Airbnb, Lyft... La ruée sur Wall Street des entreprises technologiques américaines Preuve de l’intérêt suscité par les jeunes pousses européennes, les investissements étrangers montent en puissance, notamment en provenance d’Asie. Les capitaux venant d’Orient ont atteint un montant record de 3,8 milliards de dollars au cours de cette année, dont 1 milliard émanant d’investisseurs chinois. Les montants des tours de table montrent, eux aussi, de belles progressions : les levées de fonds de plus de 50 millions de dollars ont été multipliées par sept ces cinq dernières années. Le dynamisme de la tech européenne reste toutefois en grande partie dû à l’effervescence des écosystèmes britannique, allemand et français. Le trio représente ainsi 60 % des investissements cumulés reçus depuis 2013 sur le continent, et même plus de 65 % pour la seule année 2018. 50 % de hausse par rapport à 2017 La bonne santé du secteur s’affiche aussi en Bourse. Selon Atomico, trois entreprises fondées en Europe figurent parmi les dix plus grosses introductions en Bourse de sociétés technologiques au niveau mondial en 2018. Parmi les plus belles réussites européennes de ces douze derniers mois figurent Spotify (streaming musical), Farfetch (mode), Adyen (fintech) et Elastic (big data). Ces start-up ont toutes dépassé le seuil des 5 milliards de dollars de valorisation lors de leur premier jour de cotation. Le Vieux Continent a également vu grimper en flèche le nombre de ses « licornes », ces sociétés valorisées à plus de 1 milliard de dollars. En 2018, dix-sept entreprises ont franchi ce cap symbolique, portant le nombre total de licornes en Europe à 61, contre 12 à peine cinq ans plus tôt. Dans ce contexte, la France affiche des résultats très encourageants. Selon Atomico, les entreprises technologiques tricolores auront attiré d’ici à la fin de l’année 3,7 milliards de dollars, un montant en hausse de 50 % par rapport à l’année précédente, alors que le nombre de levées de fonds dans l’Hexagone est, lui, en recul de près de 30 %. A elles seules, les entreprises de la « deep tech » (les innovations de rupture, telles que l’intelligence artificielle, la blockchain ou l’informatique quantique) ont capté un quart de cette manne.
28/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/28/les-jeunes-pousses-europeennes-des-nouvelles-technologies-attirent-toujours-plus-de-capitaux_5403026_3234.html
Uber, Airbnb, Lyft... La ruée sur Wall Street des entreprises technologiques américaines
Les deux plates-formes de VTC Uber et Lyft pourraient, parmi d’autres, faire leurs débuts boursiers au premier trimestre 2019.
Drew Houston and Arash Ferdowsi (au centre), fondateurs de Dropbox, à la Bourse de New York, le 23 mars, jour de la première cotation de la société à l’indice Nasdaq. Lucas Jackson / REUTERS Uber, Airbnb, Lyft, Palantir, Pinterest ou encore Slack. Après avoir repoussé l’échéance, ces « licornes » – entreprises valorisées à plus de 1 milliard de dollars – de la Silicon Valley sont désormais dans les starting-blocks pour rejoindre Wall Street. Malgré la récente chute des marchés, l’année 2019 s’annonce ainsi faste pour les introductions en Bourse (« initial public offering », IPO) dans le secteur technologique. Elle pourrait même battre un record historique établi en 2000, au plus haut de la bulle Internet. L’exercice 2018 a déjà été plutôt positif. Après une période de creux en 2015 et 2016, le nombre d’IPO technologiques a progressé pour la deuxième année consécutive aux Etats-Unis. La firme Renaissance Capital recense 52 opérations, soit 13 de plus qu’en 2017, qui ont permis de lever 18,4 milliards de dollars (16,1 milliards d’euros). Les débuts boursiers de Spotify ne sont pas comptabilisés, car la plate-forme suédoise de streaming musical a opté pour une cotation directe. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les jeunes pousses européennes des nouvelles technologies attirent toujours plus de capitaux Ces chiffres doivent cependant être nuancés : la moitié des sociétés nouvellement cotées sont étrangères, principalement chinoises et brésiliennes. « Il y a eu moins d’introductions d’entreprises technologiques américaines qu’en 2017 », constate Matthew Kennedy, analyste chez Renaissance Capital. Elles ont été au nombre de 26, contre 29 l’année précédente. « Les conditions sont désormais moins porteuses » En outre, « le quatrième trimestre a été plus difficile », note David Ethridge, responsable des IPO au sein du cabinet PricewaterhouseCoopers. Mi-décembre, Tencent Music, la filiale musicale du premier groupe Internet chinois, avait dû revoir ses ambitions à la baisse. Quelques jours plus tôt, la biotech américaine Moderna avait chuté de 19 % lors de son premier jour de cotation. Et, au quatrième trimestre, les actions des entreprises entrées en Bourse en 2018 ont davantage reculé que les marchés. Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’inquiétante nervosité des Bourses « Les conditions de marché sont désormais moins porteuses », poursuit M. Ethridge. Les indices américains ont en effet subi en décembre l’une des pires fins d’année de leur histoire, pénalisés par la hausse des taux de la Réserve fédérale (Fed) et par les incertitudes grandissantes sur la croissance économique. Selon un sondage réalisé par l’université de Duke, près de la moitié des grandes entreprises américaines redoutent une récession d’ici à la fin 2019. Et plus de 80 % l’attendent avant la fin 2020.
28/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/28/bourse-la-ruee-sur-wall-street-des-entreprises-technologiques-americaines_5403023_3234.html
Mort de Claude Mesplède, grand passeur du polar
L’un des meilleurs connaisseurs mondiaux du polar, auteur du « Dictionnaire des littératures policières », Claude Mesplède, est mort jeudi 27 décembre à l’âge de 79 ans, à Toulouse.
Critique littéraire et historien du roman policier, Claude Mesplède est mort le 27 décembre à Toulouse, à l’âge de 79 ans. Avec lui s’éteint l’un des meilleurs connaisseurs mondiaux du polar, un infatigable passeur, présent, jusqu’à la fin, malgré la maladie de Parkinson qui l’accablait depuis des années, dans tous les festivals spécialisés. Né le 11 janvier 1939 à Saint-Laurent-de-la-Prée (Charente-Maritime), Claude Mesplède obtint en 1957 un CAP d’électricien en aéronautique et effectua toute sa carrière à Air France. Adhérent à la CGT, dont il dirigea une section au sein de son entreprise, et affilié au PCF jusqu’au début des années 1980, il a dirigé en Mai 68 l’occupation du site d’Orly-Nord. Un défricheur sans égal En marge de son métier, ce fils d’un professeur de lettres, qui aurait, selon la légende familiale, appris à lire à 3 ans, s’est peu à peu imposé comme le défricheur sans égal d’une tradition littéraire jusque-là peu étudiée. Car Mesplède a tissé des liens de parenté entre thrillers, romans d’espionnage, romans noir et polars de diverses époques. Il ne cessait de répéter que les récits criminels sont vieux comme le monde – le meurtre d’Abel par Caïn, le parricide perpétré par Œdipe… Il partageait l’avis de l’écrivain Jean-Patrick Manchette (1942-1995), pour qui le roman noir est un roman de critique sociale prenant pour anecdote des histoires de crime. Un genre éminemment politique, précisait-il. En 1982, il fit paraître chez Futuropolis, avec Jean-Jacques Schleret, SN. Voyage au bout de la Noire, une monographie sur la « Série noire », la mythique collection de Gallimard créée en 1945. Ce travail de collecte et d’exégèse proprement colossal, qui inventorie la bibliographie de 732 auteurs, lui valut d’être invité sur le plateau d’« Apostrophes ». Puis il dirigea un volumineux Dictionnaire des littératures policières (Joseph K, 2003), qui totalise près de 2 000 pages – son ouvrage le plus important à ses yeux. Président, entre 1995 et 1998, de l’association 813, laquelle édite une revue de grande qualité sur les littératures policières, Claude Mesplède a également cosigné, avec Michel Lebrun, l’anthologie La Crème du crime (L’Atalante, 1995). Dans la préface de celle-ci, il observe qu’« au terme de son épopée sournoise le polar a doucement phagocyté la littérature. Et le métissage donne, on le sait, des enfants plus beaux et plus vivaces que les autres ». La bibliothèque de sa maison de Plaisance-du-Touch (Haute-Garonne) abritait 15 000 titres. Lui-même n’a commis que deux polars : un pour la jeunesse, Pas de peau pour Miss Amaryllis (Syros, « Souris noire », 1988), et Le Cantique des cantines (La Baleine, « Le Poulpe », 1997) mais ses innombrables chroniques, critiques, avant-propos, postfaces… ont été réunis en recueil : Trente ans d’écrits sur le polar. 1982-2012 (Krakoen, 2013).
28/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/28/mort-de-claude-mesplede-grand-passeur-du-polar_5403019_3246.html
« Le milieu hospitalier demeure excessivement machiste »
La sociologue Anne-Chantal Hardy décrypte les raisons qui font que si peu de femmes accèdent aux lieux de pouvoir
La sociologue de la santé Anne-Chantal Hardy, directrice de recherche au CNRS, revient sur les raisons pour lesquelles si peu de femmes accèdent aux lieux de pouvoir dans le monde hospitalo-universitaire. Pourquoi le monde hospitalo-universitaire n’a-t-il pas suivi la féminisation des professions médicales ? Aujourd’hui cela évolue doucement. Les spécialités se féminisent toutes un peu, mais à des rythmes très différents. Certaines sont en train de basculer vers l’équilibre. Il y a quelques années seulement qu’une femme est devenue urologue pour la première fois. Aucune citadelle n’est imprenable, mais il demeure des milieux, comme la chirurgie, où les femmes sont peu présentes et qui restent très durs pour elles. En médecine, elles n’ont jamais été en concurrence avec les hommes : elles sont arrivées, après la réforme de l’internat, là où les hommes n’allaient pas, d’où leur forte présence en médecine générale. Mais cette spécialité est quasiment absente du monde hospitalo-universitaire. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Dans les hôpitaux, des postes de pouvoir si masculins L’hôpital est-il un milieu conservateur ? Le milieu hospitalier demeure excessivement machiste. Il faut rappeler que l’on part de loin : les facultés de médecine ont longtemps été fermées aux femmes, de même que les salles de garde aux femmes internes. Les fresques avec des dessins pornographiques, qui s’y étalent sur les murs, ne font débat que depuis peu. Le sexisme reste fort dans le milieu médical, où la sexuation du corps non malade est fortement présente. La féminisation a été une petite révolution à l’hôpital, par exemple avec l’arrivée des demandes de congé maternité ! Il y a quelques années, j’entendais encore de jeunes internes tenter d’obtenir un emploi du temps avec moins de cinquante heures par semaine parce qu’elles étaient enceintes… Si elles veulent y arriver, elles ont intérêt à accepter n’importe quels horaires. Il y a des femmes qui ne prennent pas leur congé maternité. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Accès des femmes aux postes hospitalo-universitaires : il est temps de passer à l’action » N’y a-t-il pas aussi une autocensure des femmes vis-à-vis des postes de pouvoir ? On garde cette vision que l’idéal de vie et de carrière, c’est d’être dans toutes les hautes sphères de pouvoir et de cumuler cinquante postes à la fois. Mais cette norme masculine, d’une recherche d’un maximum de pouvoirs et de « places », n’est pas forcément celle que tout le monde veut atteindre. Si les femmes sont moins présentes sur ces postes, ce n’est pas qu’elles se censurent, mais que ça ne les intéresse pas forcément. Plutôt que de vouloir que les femmes se lancent dans la grande concurrence, il faudrait réfléchir plutôt à comment freiner ce mouvement d’empilement : on est PU-PH [professeur des universités-praticien hospitalier], chef de service, chef de pôle, chef de CME [commission médicale d’établissement]… Si on décide de mieux répartir les responsabilités, on trouvera plus de femmes à ces postes. Cela nécessite des moyens. Je pense que la question se pose désormais de manière générale : l’aspiration des jeunes médecins, hommes et femmes, est aujourd’hui à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, en passant moins de temps au travail. Ce qui peut participer à plus d’égalité entre sexes.
28/12/2018
sante
https://www.lemonde.fr/sante/article/2018/12/28/le-milieu-hospitalier-demeure-excessivement-machiste_5403016_1651302.html
Dans le ciel de New York, une explosion bleutée aux allures d’invasion extraterrestre
D’immenses éclairs bleus ont illuminé le ciel de la ville, à tel point que la police a été obligée de dire qu’il n’y avait « pas de traces d’activité extraterrestre ».
« Pas de blessés, pas d’incendie, pas de traces d’activité extraterrestre. » La police de New York a tenu à rassurer ses habitants jeudi 27 décembre au soir après que d’étranges lumières ont fait leur apparition dans le ciel de la capitale financière américaine. Bien qu’il ait suscité les spéculations les plus folles sur Twitter, ce festival de lumières bleues était dû à l’explosion d’un transformateur dans une centrale électrique de la compagnie Con Edison dans le quartier d’Astoria, situé dans le Queens. Peu après 21 heures (3 heures à Paris), une série d’éclairs bleus avait donné au ciel new-yorkais une allure de fin du monde, déclenchant très vite des messages annonçant (souvent au second degré) la venue d’extraterrestres ou de superhéros. Blue skies in New York, what’s going on? 😱 https://t.co/yBPKeYeh44 — _andresrios11 (@Andres Rios) « Ciels bleus à New York, que se passe-t-il ? » What are with all these lights in New York? Am I living in a sci-fi film/TV show? https://t.co/soEP8D57LL — hyejunie (@Hye Jun❄) « C’est quoi toutes ces lumières à New York ? Est-ce que je vis dans un film de science-fiction ou une émission de télévision ? » Anybody else out there getting weird spectral figures at the door asking for your souls? https://t.co/KP1idachRk — EricKlinenberg (@Eric Klinenberg) « Est-ce que quelqu’un d’autre aperçoit à sa porte d’étranges formes spectrales vous demandant votre âme ? » OH MY GOD THE SKY IS BROKEN #Astoria Is this how it ends? https://t.co/Xvzxep1vf8 — lalalalalemon (@Marie) « OH MON DIEU LE CIEL EST CASSÉ #Astoria C’est comme ça que ça finit ? » Le trafic brièvement interrompu à l’aéroport LaGuardia Au bout du compte, les New-Yorkais ont dû accepter une réalité plus prosaïque. « Pas d’extraterrestres », simplement « un transformateur explosé dans la centrale de Con Ed dans le Queens », a rapidement réagi sur Twitter Eric Phillips, porte-parole du maire de New York. Peu après 22 h 15, la police confirmait qu’il n’y avait « aucun blessé », et que la situation était « sous contrôle ». « Il y a eu un bref incendie électrique dans notre sous-station d’Astoria ce soir, qui a causé une chute de tension dans le secteur, a résumé vers 23 heures la compagnie d’électricité Con Edison. Toutes les lignes électriques du secteur fonctionnent et le système est stable. » Des images diffusées sur les réseaux sociaux montraient de la fumée s’échappant de la centrale électrique au moment de l’incident : The power plant by my house in Astoria exploded a little. https://t.co/P26kiTjYdX — alexanderckane (@Alexander C. Kane) Le trafic à l’aéroport LaGuardia, situé non loin de là et utilisé essentiellement pour des vols intérieurs, a tout de même été brièvement interrompu, de même que le trafic sur la ligne 7 du métro, qui traverse le quartier d’Astoria. Cité par le New York Times, l’inspecteur Osvaldo Nuñez a expliqué que les lumières vives et la forte détonation avaient provoqué une augmentation du nombre d’appels au 911, le numéro d’urgence aux Etats-Unis. Des habitants en panique ayant signalé des explosions, voire un crash aérien.
28/12/2018
big-browser
https://www.lemonde.fr/big-browser/article/2018/12/28/a-new-york-l-explosion-d-un-transformateur-electrique-prend-des-allures-d-invasion-extraterrestre_5403013_4832693.html
Plus de 350 personnes sur des « embarcations de fortune » secourues au large du Maroc
Venant pour la plupart d’Afrique subsaharienne, les hommes, femmes et enfants aidés par la marine marocaine tentaient d’atteindre l’Espagne.
Un bateau de migrants en mer Mediterranée, en mai 2018. LOUISA GOULIAMAKI / AFP La marine royale marocaine a secouru en Méditerranée, jeudi 27 décembre, 367 migrants majoritairement originaires d’Afrique subsaharienne qui tentaient de rejoindre les côtes espagnoles, a appris l’Agence France-Presse (AFP) de source militaire. Les migrants sauvés, dont des femmes et des enfants, étaient « en difficulté à bord de plusieurs embarcations de fortune », selon une note transmise à l’AFP. « Ils ont tous été ramenés sains et saufs par les unités de la Marine royale aux ports les plus proches », a ajouté la source militaire. Au moins 681 morts cette année Le Maroc a stoppé 68 000 tentatives d’immigration clandestine et démantelé 122 « réseaux criminels actifs » entre janvier et fin septembre, selon un récent bilan officiel. Outre les migrants venus d’Afrique subsaharienne, les tentatives de départ de jeunes Marocains à bord d’embarcations pneumatiques se sont multipliées ces derniers mois. Avec plus de 55 200 arrivées sur les côtes espagnoles cette année, la route migratoire maritime entre ces deux pays est à présent la plus fréquentée, d’après l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Au moins 681 migrants sont morts depuis le début de l’année en Méditerranée occidentale en tentant de gagner l’Espagne, selon l’OIM. En 2017, 224 migrants avaient péri dans cette zone.
28/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/28/plus-de-350-migrants-secourus-au-large-du-maroc_5403005_3212.html
Kanté et Pogba, deux étoiles ternies en Premier League
Les champions du monde polarisent l’attention pour des raisons très différentes.
N’Golo Kante (Chelsea) et Paul Pogba (Manchester United) lors du match de première ligue anglaise entre leurs deux clubs, à Stanford bridge (Londres), le 20 octobre. DYLAN MARTINEZ / REUTERS Des hommes de base de Didier Deschamps au Mondial, ce sont ces deux-là qui sont tombés du piédestal le plus violemment. N’Golo Kanté et Paul Pogba, idolâtrés de Moscou à Paris, ont été ramenés au rang d’un parmi d’autres par leurs entraîneurs lorsqu’ils ont retrouvé la Premier League. Et tout ce que le football anglais compte de commentateurs – ce qui fait beaucoup – continue, une moitié de saison plus tard, de s’interroger sur leur cas. Il est encore trop tôt pour dire si l’aventure de Paul Pogba à Manchester United a changé de direction le 18 décembre, lorsque le club s’est séparé de son entraîneur José Mourinho. Mais au moins y a-t-il un changement, sous les ordres du Norvégien Ole Gunnar Solskjaer : Pogba est sur le terrain. Mercredi 26 décembre, il y était si bien qu’il a inscrit deux buts, s’imposant comme le point central du jeu offensif mancunien et son premier récupérateur de ballons. Elu joueur du match, il a célébré son deuxième but – une frappe des 20 mètres – d’une façon que n’aurait pas reniée Eric Cantona, avec ce soupçon d’arrogance que lui reproche l’Angleterre. Lire aussi Football : retour sur terre pour les champions du monde « United doit vendre Pogba » Car Paul Pogba a une montagne à gravir avant d’être accepté par un football anglais qui, depuis son retour en 2016, ne s’est pas vraiment entiché du personnage. « United a envoyé un message fort en licenciant Mourinho. Il doit être tout aussi fort vis-à-vis de Pogba et le vendre si un club met le prix, a écrit l’ancien joueur de Liverpool Jamie Carragher dans le Telegraph du 19 décembre. Un club ne se résume pas à un joueur. Pogba est peut-être un joueur de très haut niveau mais il ne l’a jamais montré en Angleterre. » « Un club ne se résume pas à un joueur. Pogba est peut-être un joueur de très haut niveau mais il ne l’a jamais montré en Angleterre » Les anciens de Manchester United ne sont pas moins tendres. Ses déclarations visant la frilosité de Mourinho, comme les anecdotes distillées par l’entourage du Portugais à la presse, ont contribué à renforcer l’image – qu’il avait déconstruite durant le Mondial – d’un joueur égoïste et incapable de tirer son équipe vers le haut. Les consultants le soupçonnent aussi de se voir plus grand que le club, lui qui se définit, sur son compte Twitter, comme ambassadeur d’Adidas et non comme joueur des Red Devils. « Paul adore jouer pour ce club, c’est un joueur de Man(chester) United dans l’âme, un gars qui sait ce que c’est que d’y jouer », l’a défendu Solskjaer, qui fit office, durant onze saisons, de remplaçant de luxe sous Alex Ferguson, le légendaire manageur du club. En août, alors entraîneur de Mölde, Solskjaer n’avait pas caché que s’il était sur le banc de Manchester, il construirait l’équipe autour de lui. En deux matchs, c’est ce qu’a commencé à faire le Norvégien, lui qui, en 2009, avait fait faire à Pogba ses premiers pas dans la réserve de Manchester United à l’âge de 16 ans. « Il en a fait le principal milieu créateur de United, le déclencheur de situations dangereuses, observe Julien Momont, analyste tactique de la Premier League chez RMC Sport. Le simple fait d’avoir une animation de jeu plus ambitieuse permet à Pogba d’exprimer son talent plus haut et de se retrouver dans la zone qu’il connaissait à la Juventus Turin [2012-2016]. » Kanté, un rôle loin d’être sur mesure Ces trente derniers mètres face au but adverse, son compatriote N’Golo Kanté les côtoie plus régulièrement depuis que Chelsea a nommé Maurizio Sarri entraîneur à l’intersaison. Son statut de meilleur joueur du club n’a pas empêché le Français d’être délogé de son rôle de milieu récupérateur, celui qu’il occupe aussi avec les Bleus. Depuis août, sur les plateaux de télévision, dans les colonnes d’experts et les podcasts spécialisés, on s’échine à expliquer les intentions du technicien italien avec force statistiques et « heatmaps », ces infographies représentant la zone d’activité d’un joueur sur un terrain. Kanté ne sort jamais de l’équipe mais Sarri ne dissimule plus son impatience vis-à-vis du Français, encore dans l’apprentissage tactique de ce nouveau rôle De Naples, Maurizio Sarri a importé un schéma qui n’est pas celui dans lequel Kanté est devenu le meilleur récupérateur du monde. L’ancien banquier, adepte du jeu de possession, veut une sentinelle capable de briser les lignes adverses avec sa première passe. Et il l’a fait venir de Naples : le Brésilien Jorginho. « Kanté n’est pas assez technique pour jouer dans cette position », maintient l’Italien, qui le positionne un peu plus haut, à droite. Kanté ne sort jamais de l’équipe mais Sarri ne dissimule plus son impatience vis-à-vis du Français, encore dans l’apprentissage tactique de ce nouveau rôle qui implique davantage de responsabilités offensives et de prises de risques. « C’est une zone où il faut aller très vite techniquement et réussir à faire des différences, analyse Julien Momont. Kanté ne pèche pas par manque d’intelligence, car il fait les bonnes courses ni d’implication, car il fait tous les efforts. Mais il n’a pas encore tous ses repères. » Ce qui frappe, toutefois, c’est l’obstination que met le double champion d’Angleterre à s’adapter à un rôle éloigné, au moins dans l’esprit, de celui qui l’a propulsé parmi les meilleurs joueurs du monde. Et ce, sans qu’il ait eu son mot à dire. « Ce n’est pas un regret. J’apprécie de jouer à cette position un peu plus haut, d’accompagner les attaques, de revenir parfois quand il faut défendre. Je me plais bien dans ce nouveau registre », assurait N’Golo Kanté en septembre à RMC Sport. Il a, depuis, prolongé son contrat à Chelsea, ce qui fait de lui l’un des cinq plus gros salaires de Premier League. Signe que les Blues sont, à son sujet, plein de certitudes.
28/12/2018
football
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Le tribun, la politique et les belles paroles
A l’époque romaine, ce représentant de la plèbe, dont les techniques oratoires mobilisaient les foules, était déjà accusé de démagogie, rappelle l’historienne Sarah Rey.
Le 16 octobre 2018, une série de perquisitions vise La France insoumise (LFI) et le Parti de gauche. Pendant les opérations, Jean-Luc Mélenchon se filme chez lui et commente en direct les événements. Au moment où il est frôlé par le procureur en charge de perquisitionner son domicile, il glisse : « Personne ne me touche, ma personne est sacrée. » Puis invoque l’inviolabilité parlementaire inscrite dans la Constitution de la Ve République (article 26). Le leader de LFI ne se contente pas de fulminer. En vérité, il joue avec les mots et… avec l’histoire ! Car il s’est déjà plusieurs fois identifié aux tribuns de la plèbe, figures politiques majeures de la République romaine dont la personne était précisément dite « sacro-sainte » (sacrosancta), c’est-à-dire inviolable. Lors de la tenue, à Rome, d’une réunion des gauches radicales européennes en mars 2017, il prit le soin de visiter les vestiges du Forum romain, puis confia aux journalistes : « Donc, là, voilà, il faut penser à tout ce qu’il s’est passé là (…) Nous sommes les héritiers de ça, les tribuns du peuple. (…) » Après cette méditation historique, Jean-Luc Mélenchon n’imita pas, en ce printemps 2017, le geste de Simon Bolivar deux siècles plus tôt, faisant l’ascension du mont Sacré, cette colline romaine où les plébéiens se retirèrent en 494 av. J.-C. pour signifier leur volonté d’obtenir leurs propres représentants, les tribuns de la plèbe. Notons bien : de la plèbe, et non du peuple. Les deux termes ne sont pas équivalents dans l’Antiquité romaine : le populus désigne l’ensemble du corps civique, la plèbe n’en est qu’une fraction, qui a dû se battre pour obtenir les droits politiques auxquels elle aspirait, malgré l’hostilité des patriciens. Un contre-pouvoir doté du droit de veto Qui sont à l’origine ces tribuns de la plèbe ? Quelle est leur fonction dans le régime républicain sous lequel les Romains vécurent du Ve au Ier siècle av. J.-C. ? Ce sont des personnages de premier plan, formant un collège de dix membres. Elus pour un an, ils sont très redoutés pour la force d’opposition qu’ils incarnent face aux deux consuls placés à la tête de l’Etat romain. Les tribuns sont susceptibles de venir à tout moment en aide aux citoyens, c’est ce que l’on appelle l’auxilium. Leur principale arme : le droit de veto, grâce auquel ils peuvent bloquer l’action d’un consul, qui – dans le vote d’une loi ou la convocation d’une assemblée – court le risque permanent de se voir barrer la route par les tribuns. Ces derniers sont, au bout du compte, le seul contre-pouvoir que l’oligarchie républicaine ait toléré !
28/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/28/le-tribun-la-politique-et-les-belles-paroles_5402992_3232.html
Etudiants étrangers : le Canada engrange les déçus de Donald Trump
Deux ans après l’élection de Donald Trump à Washington, plus de 500 000 élèves et étudiants étrangers ont choisi le Canada pour se former outre-Atlantique. A la clé : 20 milliards de dollars de recettes.
L’Amérique de Donald Trump ne fait pas recette auprès des étudiants étrangers. C’est ce qui ressort des diverses statistiques publiées outre-Atlantique. Ainsi, le nombre de nouveaux étudiants étrangers recrutés sur le territoire américain pour l’année scolaire achevée à l’été 2018 n’était que de 271 000, soit un recul de 6,6 % en un an. Ce chiffre avait dépassé les 300 000 en 2015-2016, après plusieurs années de forte hausse. L’Amérique a retrouvé son niveau de 2013 et la tendance se poursuivrait. Les 1,1 million d’étudiants étrangers présents sur le sol américain rapportent au pays chaque année plus de 40 milliards de dollars, en frais de scolarité et de séjour. Mais le système de visa est bloqué aux Etats-Unis à cause de la rhétorique tatillonne du président Trump, du zèle de son administration, et surtout de la non-réforme des visas qualifiés H1B, qui s’obtiennent par tirage au sort. Un risque qu’on ne peut pas prendre si l’on s’est endetté pour payer ses études. Les officiels américains se gardent bien de pointer un « effet Trump ». Ils évoquent une compétition accrue de la part du Canada, de l’Australie, mais aussi d’universités européennes et asiatiques. « Il ne nous remonte pas que les étudiants ont le sentiment qu’ils ne peuvent pas venir. Il nous remonte qu’ils ont le choix. Pour la première fois, nous avons une vraie compétition », a déclaré Allan Goodman, président de l’Institut international pour l’éducation (IIE). 40 % de hausse au Canada entre 2015 et 2017 Le son de cloche est radicalement différent si l’on écoute le président de l’Association pour l’éducation internationale en Australie, Phil Honeywood. Lui assure que les méthodes de recrutement de son pays n’ont pas changé. « Nous entendons de la part des étudiants et de leurs professeurs dans les pays musulmans et d’Amérique latine qu’ils ne se sentent plus bienvenus ou en sécurité pour étudier dans l’Amérique de Donald Trump », a assuré M. Honeywood à l’agence AP. Le Canada, devenu plus accueillant sous le mandat du premier ministre Justin Trudeau, élu en novembre 2015, rafle la mise avec efficacité : le nombre d’étudiants ayant choisi ce pays a augmenté de 40 % entre 2015 et 2017 et l’on compte désormais plus de 500 000 étrangers inscrits dans ses écoles et ses universités (20 milliards de dollars de recettes). Depuis 2017, obtenir le statut de résident permanent est devenu plus facile pour les étrangers qui ont fait une partie de leurs études dans le pays.
28/12/2018
campus
https://www.lemonde.fr/campus/article/2018/12/28/etudiants-etrangers-le-canada-engrange-les-decus-de-donald-trump_5402991_4401467.html
« Restructurer le parc hospitalier, c’est l’adapter aux réalités démographiques et épidémiologiques »
Benoît Péricard, ancien directeur de l’agence régionale d’hospitalisation des Pays de la Loire, estime, dans une tribune du « Monde », que la transformation du parc hospitalier est nécessaire pour éviter un système de santé à deux vitesses.
Tribune. La transformation du parc hospitalier est nécessaire pour réussir Ma santé 2022 [le programme annoncé le 18 septembre par le président de la République]. Il faudra redonner de l’espoir aux personnels hospitaliers et en finir avec les déficits. Prenons l’exemple des petites maternités. Si nous étions capables de proposer et faire signer un tel courrier aux futures parturientes d’une cinquantaine de maternités dans l’Hexagone, nous n’aurions pas à soutenir les restructurations hospitalières avec cette tribune. « Madame, vous avez choisi d’accoucher dans notre maternité et nous vous félicitons de votre choix. Celle-ci fait partie des maternités de proximité, elle assure un service sur notre territoire qui entraîne certaines contraintes : votre accouchement se déroulera sous la responsabilité d’une sage-femme, un médecin généraliste d’astreinte pourra être appelé en cas de difficultés ou de complications. Si le déroulement de l’accouchement le nécessitait, un transfert serait effectué dans la maternité de la ville X, située à 45 km, ce qui représente un déplacement de 60 minutes maximum en ambulance. Votre signature vaut approbation de ces conditions de prise en charge et des risques encourus… » Article réservé à nos abonnés Lire aussi « La pression restera très forte sur l’hôpital » Dans un pays qui a inscrit le principe de précaution dans sa Constitution, où l’organisation et la réglementation des maternités ne sont pas fondées sur l’accouchement physiologique, largement majoritaire en France, une telle possibilité n’a aucune chance d’être traduite dans une disposition réglementaire dans le code de la santé publique. Dans les sous-préfectures, – Le Blanc (Indre), Guingamp (Côtes-d’Armor), Apt (Vaucluse), Die (Drôme), Saint-Claude (Jura), Vire (Calvados) –, dont beaucoup de Français découvrent le nom à l’occasion de la fermeture ou de la menace de fermeture d’une maternité, le scénario paraît inéluctable : le nombre de naissances diminue, au point de passer sous la barre des 500, et même des 300 accouchements par an (seuil réglementaire), c’est-à-dire moins d’un seul accouchement par jour. L’établissement a de plus en plus de mal à recruter du personnel médical, obstétriciens, anesthésistes, a donc recours pendant quelque temps à de l’intérim médical, ce qui fragilise à la fois la cohésion des équipes et pèse lourdement sur l’équilibre financier. L’autorité de tutelle, l’agence régionale de santé (ARS) avertit, l’agonie se prolonge parfois de longs mois voire de nombreuses années, et puis le verdict tombe : transformation de la maternité en Centre périnatal de proximité (CPP).
28/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/28/restructurer-le-parc-hospitalier-c-est-l-adapter-aux-realites-demographiques-et-epidemiologiques_5402984_3232.html
Exposition : les secrétaires particuliers de Napoléon
Des meubles conçus pour y cacher des trésors, prisés par l’empereur et Joséphine, sont réunis au château de Malmaison.
Un bouton dissimulé sous une dorure qui, lorsqu’on le manipule, fait glisser un panneau de bois révélant des cachettes insoupçonnées ; un abattant qui se replie sous la pression de la main, mettant au jour des nids à trésors… Les ébénistes des XVIIIe et XIXe siècles ont rivalisé d’imagination pour fabriquer les meubles à secrets, très prisés par la bourgeoisie et la noblesse. Secrétaires, bureaux ou coffres permettent, grâce à un mécanisme aussi ingénieux que sophistiqué importé d’Allemagne, de dissimuler documents et objets privés ou précieux. Même les nécessaires de toilette se dotent de cachettes, connues du seul fabricant et de son client. On n’est jamais trop prudent ! Barbière au chiffre du prince Eugène. RMN-GP (MUSÉE NATIONAL DES CHÂTEAUX DE MALMAISON ET BOIS-PRÉAU) / GÉRARD BLOT Une quarantaine de ces pièces de mobilier, réalisées pour la plupart sous le Consulat et le Premier ­Empire, ont été réunies par ­Isabelle Tamisier-Vétois, conser­vatrice au château de Malmaison, à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), pour l’exposition intitulée « Meubles à secrets, secrets de meubles », présentée dans ce qui fut la demeure de campagne de Napoléon Bonaparte (1769-1821) et de son épouse Joséphine de Beauharnais (1763-1814). Elle avait découvert ce joli manoir du XVIIe siècle, situé à une demi-heure de ­Paris, alors que le général menait la campagne d’Egypte. Le couple en fit l’acquisition en avril 1799. Quelques mois plus tard, Bonaparte devenait premier consul de la République avant d’être proclamé empereur, en 1804. Est-ce parce qu’ils avaient tous deux des choses à cacher qu’ils collectionnèrent, dans leurs différentes demeures – outre Malmaison, l’hôtel de la Victoire, les Tuileries, les châteaux de Saint-Cloud, de Compiègne et de Fontainebleau… – ces merveilles d’ébénisterie ? L’impératrice était dépensière et avait toujours besoin d’argent pour s’offrir toilettes, mobilier précieux et œuvres d’art : dans les recoins de ses secrétaires, pièces et billets étaient en sécurité, tout comme ses bijoux. Isabelle Tamisier-Vétois, commissaire de l’exposition : « Le maniement d’un ressort, son claquement, qui fait surgir un tiroir invisible, rendent encore aujourd’hui l’instant magique » Napoléon, en chef militaire et homme d’Etat, y dissimulait probablement une documentation stratégique. Le couple eut une vie sentimentale tumultueuse et les double-fonds servaient peut-être à ranger les mots doux d’un amant ou d’une maîtresse. Joséphine y plaça sans doute les brouillons de sa lettre de consentement au divorce qu’elle tint à lire en public au moment de leur séparation, en décembre 1809 : « La dissolution de mon mariage ne changera rien aux sentiments de mon cœur. L’empereur aura toujours en moi sa meilleure amie. »
28/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/28/exposition-les-secretaires-particuliers-de-napoleon_5402981_3246.html
A Bogota, le « contre-monument » hommage aux victimes des guérillas colombiennes
Dans ce lieu de mémoire, les visiteurs foulent un sol composé d’armes broyées.
« Fragmentos », « espace d’art et de mémoire », de Doris Salcedo, lors de sa pré-inauguration à Bogota en juillet. DIANA SANCHEZ / AFP Des murs blancs et nus de 8 mètres de haut, des baies vitrées qui donnent sur des ruines et des fougères, le silence, un sol d’acier. Fragmentos (« fragments »), « espace d’art et de mémoire », a ouvert ses portes dans le centre de Bogota. Le public y marche sur les armes des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), aujourd’hui démobilisées. Trente-sept tonnes de ­fusils-mitrailleurs, de lance-grenades, de munitions sont devenues 1 236 dalles d’acier. L’accord de paix signé en 2016 avec la guérilla prévoyait que les armes remises à l’ONU deviendraient un monument à la paix. « Aucune arme ne mérite d’être glorifiée dans la hauteur », résume l’artiste Doris Salcedo, qui présente son œuvre comme un « contre-monument ». Il a été érigé sur les restes d’une bâtisse en torchis du XVIIIe siècle. Les visiteurs y foulent en silence le métal meurtrier. « On pense aux victimes, la sensation est très forte », murmure Carolina, une étudiante de 23 ans, en entrant dans la gigantesque salle vide au bout du couloir vitré. Elle ajoute : « Mais, debout sur ces armes éteintes, je ressens aussi de l’espoir. » Fragmentos est une œuvre collective. Un bref documentaire l’explique. Des dizaines de femmes, toutes victimes sexuelles des acteurs du conflit armé, y ont contribué, martelant avec rage les plaques pour la fonte. Les unes avaient été violées par la guérilla, les autres par les paramilitaires et les forces armées. « Je n’ai pas voulu célébrer le regard du guerrier, explique Doris Salcedo. J’ai choisi celui des victimes. » Perceptibles sous la semelle, les cassures de l’acier rappellent à chaque pas que la guerre est meurtrissure. « 8 millions de victimes du conflit » Inutile de dire que les guérilleros tiquent. Parce qu’ils n’avaient pas été militairement vaincus, ils avaient refusé, en 2017, que la remise des armes à l’ONU soit filmée. Et voilà à terre ce qui a fait leur histoire et leur grandeur. Les chefs des FARC, devenus responsables politiques, ont d’abord tourné le dos au projet, avant d’y adhérer. « Je les comprends, ce n’est pas ce qu’ils attendaient, résume Doris Salcedo. Je n’ai cherché à faire plaisir à personne. » L’artiste colombienne Doris Salcedo lors de la pré-inauguration de son œuvre « Fragmentos » à Bogota, en juillet. DIANA SANCHEZ / AFP L’artiste poursuit : « Les armes que nous avons trouvées dans les conteneurs étaient striées, marquées d’initiales, peintes et décorées de rubans ou de perles. Dans une société aussi injuste et raciste que la société colombienne, l’arme était la seule chose qui donnait du pouvoir aux guérilleros, qui les faisait exister. C’était une partie de leur identité. »
28/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/28/a-bogota-le-contre-monument-hommage-aux-victimes-des-guerillas-colombiennes_5402978_3246.html
Sélection galerie : Marc Desgrandchamps chez Lelong
Ses lithographies ont été si entièrement retravaillées par l’artiste qu’elles sont devenues des œuvres nouvelles et différentes.
Travaux sur papier, estampes : les collectionneurs français sont réputés prêter peu d’attention à ce type d’œuvres, à l’inverse de ce qui se passe en Allemagne et dans le nord de l’Europe. Regrettable indifférence face à des modes de création qui se prêtent particulièrement bien à l’expérimentation, ce qui se vérifie ici. Pas une toile, mais des lithographies qui ont été si entièrement retravaillées par l’artiste qu’elles sont devenues des œuvres nouvelles et différentes. Accrochées ensemble, elles paraissent une suite de photogrammes tirés d’un film, mais d’un film qu’il aurait dessiné et colorisé, sans le secours d’aucun appareil. Il montrerait quelques plans du passage d’une ou deux femmes – ou la même dédoublée – et d’un homme à travers un paysage qui s’émiette, où les ombres transpercent les troncs des arbres et où l’eau et le ciel sont faits de la même matière. Une matière si fragile qu’elle se déchire et laisse voir le vide derrière elle. Cette séquence est précédée d’une suite de gouaches où courent, se croisent ou se heurtent des figures juste indiquées par des gris ou du noir, ce qui fait à nouveau penser à la photographie ou au cinéma, au négatif d’une pellicule légèrement surexposée. Le regard doit s’arrêter le temps nécessaire pour comprendre ce qu’il voit, bribes d’un récit dont on ne saura ni le début ni la fin. « Latona 2 » (2018), de Marc Desgrandchamps, lithographie. FABRICE GIBERT / GALERIE LELONG, PARIS « Latona », de Marc Desgrandchamps. Galerie Lelong, 13, rue de Téhéran, Paris 8e. Du mardi au vendredi, de 10 h 30 à 18 heures ; le samedi, de 14 heures à 18 h 30. Jusqu’au 20 janvier 2019.
28/12/2018
culture
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2018 dans le rétro : élimination précoce, bugs en série, vocation contrariée... les flops de l’année dans le sport
Julen Lopetegui, le XV de France, les footballeurs allemands, les avocats de la Sky ou le service clients de RMC Sport… Pour certains l’année n’a pas été un long fleuve tranquille.
En 2018, les Bleus ont accroché une deuxième étoile à leur maillot, Rafael Nadal a remporté Roland-Garros pour la onzième fois et la Belgique est même devenue championne du monde de hockey sur gazon. Mais le sport c’est aussi une histoire de défaites, de désillusions et de couacs. La preuve par huit. Les Allemands après leur défaite 2-0 contre la Corée du Sud le 27 juin, synonyme d’élimination de la Coupe du monde de football et de retour précipité au pays. SAEED KHAN / AFP Et à la fin ce sont les Allemands qui sortent les premiers Quel journaliste – un peu en manque d’inspiration – n’a jamais glissé la fameuse phrase (un peu déformée) de Gary Lineker dans un article sur la Mannschaft ? « Le football est un jeu qui se joue à onze contre onze, et à la fin, c’est l’Allemagne qui gagne. » Mais pas en 2018. « Je peux vous assurer qu’on ne fera pas partie des tenants du titre maudits », s’était un peu avancé le sélectionneur Joachim Löw après la défaite inaugurale face au Mexique (0-1) pour son entrée dans la Coupe du monde. Après une victoire tombée du ciel contre la Suède, les champions du monde 2014 rechutaient face à la Corée du Sud (0-2) et rejoignaient la France (2002), l’Italie (2010) et l’Espagne (2014) comme tenants du titre sortis dès le premier tour. Malgré ce fiasco russe, Löw s’est accroché à son poste. En Allemagne, on ne brûle pas tout de suite ce qu’on a pu adorer. Julen Lopetegui, à Barcelone le 28 octobre. JOSEP LAGO / AFP Julen Lopetegui, sélectionneur débarqué et entraîneur congédié Jusqu’au 13 juin, 2018 était plutôt une belle année pour Julen Lopetegui. L’ancien gardien était le sélectionneur d’une équipe d’Espagne séduisante, citée parmi les favorites de la Coupe du monde, et le Real Madrid lui lançait des œillades. Mais quand le président de la fédération espagnole, Luis Rubiales, apprend que Lopetegui a négocié dans son dos avec le Real, il le renvoie par le premier avion à deux jours du premier match de Coupe du monde de la Roja (éliminée en huitième de finale contre la Russie avec le pompier de service Fernando Hierro à sa tête). Quatre mois et quelques défaites plus tard (dont la dernière, fatale : 5-1 contre Barcelone), Lopetegui est démis de ses fonctions. Le Real est aussi une machine à broyer les entraîneurs, Zinédine Zidane l’avait bien pressenti en annonçant son départ. Lire aussi : Julen Lopetegui ou la vie impossible d’un entraîneur au Real Madrid L’interminable affaire Froome Vous n’avez pas tout compris de l’affaire du contrôle antidopage « anormal » de Christopher Froome ? C’est normal, ne remettez pas en doute vos facultés intellectuelles. Le 13 décembre 2017, Le Monde et The Guardian révèlent qu’une procédure est lancée contre le vainqueur du Tour d’Espagne, dont les urines révèlent un taux excessif de salbutamol à l’issue de la 18e étape. « Mon asthme s’est aggravé sur la Vuelta et j’ai suivi les conseils du médecin de l’équipe pour augmenter mon dosage de salbutamol », plaide alors l’intéressé. Le début d’une guerre d’experts et d’avocats (ceux de la Sky, la riche équipe du Britannique) et d’un interminable imbroglio. Le quadruple vainqueur du Tour sera-t-il autorisé à s’aligner au départ de l’édition 2018 ? Début juin, Froome remporte un Giro renversant mais avec le risque de voir ce succès annulé en cas de suspension. Le 1er juillet, l’organisation du Tour adresse un courrier à Froome pour lui signifier qu’il n’est pas le bienvenu, mais le lendemain l’Union cycliste internationale blanchit le coureur, autorisé à prendre le départ cinq jours plus tard. Froome chutera dès la première étape en Vendée et terminera 3e d’une épreuve pendant laquelle il essuiera les sifflets et les insultes. Lire aussi Christopher Froome blanchi par l’autorité mondiale du cyclisme Les joueurs du XV de France après leur défaite contre les Fidjiens, le 24 novembre. ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP Le XV de France, état stationnaire, donc inquiétant Un match nul contre le Japon pour finir 2017, une défaite face aux Fidji dans un Stade de France à moitié vide fin novembre 2018… les Bleus ne sont pas plus avancés avec Guy Novès ou Jacques Brunel à leur tête. Dans un style plus matois que son prédécesseur, le Gersois (nommé sélectionneur le 27 décembre 2017) affiche un bilan de 27 % de victoires, avec trois succès pour huit défaites. Il y a eu le drop assassin de l’Irlandais Jonathan Sexton, la victoire cache-misère face à une Angleterre en petite forme, un succès qui glisse des mains sur la dernière action face à l’Afrique du Sud. Il y a surtout une équipe qui se cherche une identité, une âme, des cadres et pointe à la 9e place du classement mondial juste derrière les Fidji à neuf mois de la Coupe du monde au Japon. Heureusement, il reste les filles pour se remonter le moral. Kevin Mayer après son troisième essai mordu à Berlin ANDREJ ISAKOVIC / AFP Kevin Mayer, le trou d’air avant le record Le sport est aussi une histoire de rebonds : prenez Kevin Mayer. Le 16 septembre à Talence (Gironde), le Français établit un nouveau record du monde au décathlon avec 9 126 points. Une performance majuscule qu’il avait déjà dans les jambes début août à Berlin lors des championnats d’Europe. Mayer explose son record sur le 100 m avant d’enchaîner sur le saut en longueur. Le premier essai va loin, mais il est mordu. Il reproduira l’erreur deux autres fois pour un zéro pointé qui annihile toutes ses chances et le force à abandonner. Et quand sur Twitter la Fédé de la Lose (qui moque gentiment les défaites à la française) lui souhaite la bienvenue, Mayer répond avec humour et détachement. Depuis, il a pris ses distances avec la « lose ». Merci à la FFL de mettre en avant le décathlon et les épreuves combinées, j’espère cependant ne pas devenir membre… https://t.co/3rbF1y0oP1 — mayer_decathlon (@Kevin MAYER Décathlon) Lire aussi Athlétisme : zéro pointé pour Kevin Mayer au décathlon RMC Sport, erreur 504 Pour s’assurer la diffusion en exclusivité de la Ligue des champions, le groupe SFR a mis la main à la poche (350 millions d’euros par an jusqu’en 2021). Et a voulu rentabiliser cet investissement avec le lancement des chaînes thématiques RMC Sport. Problème : la première soirée vire au fiasco lors du match du PSG à Liverpool le 18 septembre. Plantages, déconnexions, service inaccessible… Le service de communication de SFR a très vite reconnu le problème : « C’est la première grande soirée, il y a des difficultés sur la plate-forme de l’application RMC Sport. Toutes les équipes techniques sont sur le pont. » Insuffisant pour certains amateurs de football qui en lieu et place du match ont eu sur leur écran le bandeau « Erreur 504. Incident de réseau, si le problème persiste veuillez contacter notre service client. » Les défaillances du service en streaming de SFR sont rapidement devenues un sujet de plaisanteries amères sur les réseaux sociaux. Franchement vous devriez regarder une TL de gens qui galèrent avec RMC Sport c'est surement plus drôle que le match lui même. — MVCDLM (@MVCDLM) On peut vous l’avouer, même le service sport du Monde.fr a éprouvé les pires difficultés avant de pouvoir regarder le match et vous le faire vivre en live ce soir-là. Usain Bolt avec le mailot de Central Coast Mariners, le 31 août àà Gosford, en Australie. Steve Christo / AP Usain Bolt, footballeur contrarié Les supporteurs – vachards – ont un nom pour ce type de joueur : « un tout droit ». Le « tout droit » va vite, mais maîtrise mal l’objet sphérique qu’on appelle le ballon. Usain Bolt colle bien à la définition : 9,58 s sur 100 m mais une technique qui laisse à désirer. Le Jamaïcain aime le football d’amour et rêve d’en faire son second métier à 32 ans. Le 21 août, il est mis à l’essai par le club australien des Central Cost Mariners. Bolt participe à trois matchs amicaux, inscrit même un doublé face à Macarthur South West United (une sélection des meilleurs joueurs de deuxième division de l’état de Nouvelle-Galles du Sud), mais n’est pas retenu dans l’effectif des Mariners. « Regardez notre ligne d’attaque et demandez-vous où est-ce qu’il pourrait se faire une place ? », justifie l’entraîneur Mike Mulvey. « De ce que j’ai vu, son toucher de balle ressemble à du trampoline », juge Andy Keogh, attaquant de Perth Glory. Peu importe, Bolt aurait reçu des propositions de clubs turcs et mexicains aux dernières nouvelles. Lire aussi L’ex-roi du sprint Usain Bolt devra encore attendre avant de devenir footballeur professionnel Comité international olympique cherche ville candidate désespérément Vous voulez perdre un référendum ? Demandez conseil au Comité international olympique (CIO) : le rejet populaire, le 14 novembre, de la candidature de Calgary (Canada) pour l’organisation des Jeux olympiques d’hiver de 2026 était le neuvième de suite. Stockholm (Suède) et Milan-Cortina d’Ampezzo (Italie) sont les derniers survivants de ce jeu de massacre : Erzurum (Turquie), Graz (Autriche), Sapporo (Japon), Sion (Suisse) et, donc, Calgary avaient jeté l’éponge auparavant. Et encore, dans le cas de Stockholm ni l’Etat ni la municipalité ne veulent verser une couronne pour ce projet. Le gouvernement italien, après avoir soufflé le chaud et le froid sur Milan-Cortina d’Ampezzo, s’est engagé par la voix du ministre de l’intérieur, Matteo Salvini à mettre au pot pour combler d’éventuels déficits. Le CIO doit désigner la ville hôte en juin 2019. Encore faut-il qu’il reste des volontaires pour accueillir une compétition dont le gigantisme effraie de plus en plus les populations locales.
28/12/2018
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2018/12/28/2018-dans-le-retro-elimination-precoce-bugs-en-serie-vocation-contrariee-les-flops-de-l-annee-dans-le-sport_5402970_3242.html
Paraplégiques qui remarchent et avion super-ionique : les découvertes scientifiques de 2018
En médecine, en astronomie ou en matière de climat, les douze derniers mois ont été riches en découvertes.
Des bébés génétiquement modifiés prétendument nés en Chine, des paraplégiques qui remarchent, Mars et des astéroïdes revisités, des pierres taillées et des peintures rupestres trouvées dans des endroits inattendus, le tout sous un climat dont le dérèglement colle implacablement aux prévisions des experts… L’année écoulée a été à nouveau l’occasion pour la science de nous donner matière à réflexion, inquiétude, questionnements et émerveillement : bilan forcément incomplet et partial, en images, du cru 2018. Père indigne de bébés nés sous Crispr He Jiankui, le chercheur chinois qui revendique la naissance des deux premiers bébés génétiquement modifiés. MARK SCHIEFELBEIN / AP Le biologiste chinois He Jiankui est incontestablement la personnalité scientifique de l’année. Mais pour de mauvaises raisons. Le 26 novembre, il a annoncé la naissance de deux fillettes issues d’embryons dont le génome aurait été génétiquement modifié grâce à un outil moléculaire découvert en 2012, Crispr-Cas9. Cette modification avait pour objectif d’inactiver un gène pour leur conférer une résistance au sida. Lire aussi Des bébés génétiquement modifiés seraient nés en Chine Mais tout dans sa démarche – obtention des autorisations, information des parents, vérification des altérations génétiques, pertinence d’une telle modification… – appelle la critique. Les scientifiques lui reprochent en particulier d’avoir franchi une ligne rouge : induire une modification génétique sur les cellules germinales (sexuelles), ce qui affecte non seulement les individus « crisperisés », mais aussi leur descendance. Faire remarcher des paralytiques Début des essais cliniques de l’étude Stimo, le 31 octobre 2017, au Centre hospitalier universitaire vaudois, à Lausanne. MATTHIEU GAFSOU / GALERIE C / GALERIE ERIC MOUCHET / MAPS Retrouver l’usage de ses jambes, paralysées après une lésion de la moelle épinière. C’est ce que sont parvenus à faire une poignée de patients paraplégiques, grâce à des électrodes implantées. Fin septembre, des chercheurs de la clinique Mayo (Minnesota) et de l’université de Louisville (Kentucky) annoncent qu’une rééducation doublée de stimulations électriques de la moelle a permis une forme de régénération du système nerveux et une récupération rudimentaire de la marche chez trois patients. Début novembre, c’est Grégoire Courtine (Ecole polytechnique fédérale de Lausanne) qui décrit des progrès plus spectaculaires encore, deux patients parvenant après rééducation à faire quelques pas même en l’absence de stimulation. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Ils font remarcher les paralytiques L’immunothérapie du cancer nobélisée Lymphocyte T, cellule impliquée dans la réponse immunitaire suscitée par l’immunothérapie du cancer. NIAID / CC BY 2.0 Qualifiée de révolution thérapeutique car elle sauve la vie de patients atteints de tumeurs malignes jusqu’alors incurables, l’immunothérapie des cancers a été consacrée par le prix Nobel de médecine 2018, décerné à deux pionniers : l’Américain James Allison et le Japonais Tasuku Honjo. Avec leur approche originale – baptisée « inhibition de la régulation immunitaire négative » –, ils ont réussi là où leurs prédécesseurs avaient échoué. Plutôt que de s’appuyer sur une stimulation directe de la réponse immunitaire au cancer, ils ont levé les mécanismes qui la freinent permettant aux cellules malignes d’échapper à nos défenses. Ils ont ainsi ouvert la voie à des traitements dits « inhibiteurs de checkpoints immunitaires ». Ceux-ci reposent sur des anticorps monoclonaux dirigés spécifiquement contre des protéines situées à la surface des cellules cancéreuses et responsables du freinage de l’action des cellules immunitaires. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Nobel de médecine sacre la percée de l’immunothérapie du cancer Les #Nofakemeds vont-ils faire dérembourser l’homéopathie ? CHASSENET / BSIP / AFP L’homéopathie est-elle à un tournant de son histoire en France ? La Haute Autorité de santé (HAS), saisie cet été par le ministère de la santé, devrait rendre son verdict au printemps 2019 sur le bien-fondé du remboursement des produits homéopathiques, actuellement pour certains d’entre eux à hauteur de 30 %. Son avis reste toutefois consultatif. La HAS souligne l’ampleur du travail. Elle rappelle qu’il existe plus de 1 000 souches de ces granules appréciés des Français. Le branle-bas de combat est venu de « L’appel de 124 professionnels de la santé contre les “médecines alternatives” », une tribune publiée dans Le Figaro en mars, désormais signé par 3 300 personnes. Début décembre, 131 membres des Académies de médecine, de pharmacie et des sciences, ont publié dans L’Express une tribune intitulée : « La collectivité n’a pas à prendre en charge l’homéopathie ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi #Nofakemed : pourquoi cette croisade de professionnels de santé contre l’homéopathie ? Cannabis thérapeutique : le feu vert de l’ANSM FPA /AFP Les experts de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) ont estimé, le 13 décembre, qu’il est « pertinent d’autoriser l’usage du cannabis à visée thérapeutique pour les patients dans certaines situations cliniques et en cas de soulagement insuffisant ou d’une mauvaise tolérance des thérapeutiques, médicamenteuses ou non, accessibles (et notamment des spécialités à base de cannabis ou de cannabinoïdes disponibles). » Plusieurs situations thérapeutiques, principalement des douleurs non soulagées, ont été retenues. Les experts recommandent un suivi des patients, une évolution de la législation, mais excluent le cannabis fumé. Lire le destin de cellules individuelles Visualisation de neurones au sein du cerveau d’une drosophile. Z. Zheng et al./Cell 2018 Pour le magazine Science, il s’agit de la « percée de l’année » : la capacité à suivre la formation, le développement, la division et la différentiation de cellules individuelles au sein d’organes ou d’organismes entiers. Cette prouesse réside dans une combinaison de techniques de microscopie, de marquage et d’analyse moléculaires permettant de caractériser l’activité de chaque cellule. Qu’il s’agisse des 100 000 neurones poussant dans le cerveau d’une mouche ou de l’évolution des différents tissus au sein d’un embryon de souris, les films et images obtenus donnent une vision inédite de la construction du vivant. ADN + généalogie = prison Joseph James DeAngelo, confondu par son ADN, est accusé de treize meurtres en Californie dans les années 1970 et 1980. PAUL KITAGAKI JR. / AP Le 24 avril, Joseph James DeAngelo, un ex-policier de 72 ans, a été arrêté en Californie. Accusé de 13 meurtres et de plus de 50 viols commis entre 1974 et 1986, il correspond au profil de l’insaisissable « Golden State Killer ». Il a été confondu par son ADN au terme d’une enquête qui a mis à profit le développement des sites généalogiques s’appuyant sur des données génétiques personnelles pour retrouver des liens de parenté. En l’occurrence, en comparant l’ADN prélevé sur des scènes de crime aux séquences du site GEDmatch, une dizaine de personnes apparentées sont apparues, permettant aux enquêteurs d’identifier DeAngelo après avoir subrepticement prélevé son ADN. La génomique personnelle constitue une aubaine pour les forces de police, mais pose des questions éthiques, notamment sur la protection des données individuelles. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le nouvel âge de l’identification par l’ADN Climat : l’urgence toujours plus palpable Le 1er juillet, à Guinda (Californie). JOSH EDELSON / AFP « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. » Cette phrase prononcée par Jacques Chirac en 2002 au Sommet de la Terre reste d’actualité. Si la Conférence sur le climat (COP24) a Katowice (Pologne) a bien permis le 15 décembre de préciser les règles d’application de l’accord de Paris conclu en 2015, les émissions de gaz à effet de serre, tirées par la consommation de charbon, ont continué d’augmenter (de 2,7 %) cette année. Si cette hausse n’est pas enrayée, les catastrophes climatiques extrêmes et simultanées, comme les sécheresses pour partie responsables des récents incendies meurtriers en Californie, ne feront qu’empirer, selon une étude publiée en novembre dans la revue Nature Climate Change. Un musée en fumée Vue aérienne du Musée national de Rio de Janeiro, ravagé par un incendie début septembre. MAURO PIMENTEL / AFP Le 2 septembre, le Musée national de Rio a été ravagé par les flammes. Plus vieille institution académique du Brésil, il conservait des pièces de collection d’une valeur inestimable. Parmi elles, le squelette de Luzia, plus vieil Homo sapiens d’Amérique du Sud, daté de plus de 11 000 ans, des momies égyptiennes ou des squelettes de dinosaures, une riche bibliothèque… Seuls 10 % des collections auraient été préservés. Le monde de la recherche a un autre motif d’inquiétude pour le patrimoine naturel : l’élection de Jair Bolsonaro. Le nouveau président brésilien, climatosceptique, a annoncé son intention d’exploiter l’Amazonie, y compris des réserves indigènes. Lire aussi Au Brésil, Bolsonaro veut exploiter la réserve de Raposa Serra do Sol Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Brésil, le combat des Guarani-Kaiowá pour sauver ce qu’il reste de leur terre La mort mystérieuse des vieux baobabs Ce baobab baptisé Chapman, au Botswana, vieux de 1400 ans, est mort subitement en 2016. ABI. BHATTACHAN /CC BY 2.0 En analysant plus de soixante des plus vieux et plus gros baobabs d’Afrique, Adrian Patrut (Babes-Bolyai University, Cluj-Napoca, Roumanie) et ses collègues ont eu une mauvaise surprise. Ils ont constaté que depuis 2005, huit des treize plus anciens, et cinq des six les plus larges étaient morts entièrement, ou avaient perdu leurs troncs les plus âgés – ces arbres ont en effet la particularité de pouvoir pousser en rameaux dont chaque rejet naît à un moment différent. Les chercheurs estiment dans Nature Plant du 11 juin que ces monuments végétaux, dont le doyen âgé de plus de 2 500 ans, un arbre zimbabwéen nommé Panke, est mort en 2011, pourraient être victimes du réchauffement du climat. Mais admettent que des recherches complémentaires seront nécessaires pour étayer cette hypothèse. La crotte cubique du wombat livre ses secrets Crottes de wombat. P. YANG et D. HU / GEORGIA TECH Non ce ne sont pas des truffes de Noël. Mais des crottes, uniques par leur forme, produites par un animal bien singulier : le wombat. Un air de grosse marmotte au métabolisme ralenti mais une vitesse de course impressionnante, une poche marsupiale pour accueillir son petit, mais ouverte vers le bas : les scientifiques n’ont cessé d’étudier l’animal australien. Le plus grand mystère restait ses fameuses crottes cubiques, empilées pour marquer son territoire. Une équipe américaine a enfin livré le mode d’emploi. Conduite par Patricia Yang, du Georgia Tech, elle a montré que les 50 derniers centimètres des 6 mètres d’intestins appliquaient sur la matière fécale un effort différent selon les directions, façonnant ainsi le parallélépipède. Une manière également unique de produire des cubes, sans taille ni moule, dont l’industrie pourrait un jour s’inspirer. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le wombat et ses étranges crottes cubiques L’invasion des vers géants Bipalium vagum, présent dans la plupart des territoires français en zone tropicale, photographié ici en Guyane Française. SEBASTIEN SANT / CC BY-SA Turquoise, jaunes ou encore bruns avec des bandes plus foncées : les plathelminthes, des vers pouvant atteindre plusieurs dizaines de centimètres de long, envahissent secrètement les territoires français depuis une vingtaine d’années, se repaissant de vers de terre ou d’escargots – même si leur impact sur la faune des organismes mous reste mal mesuré. Une enquête participative publiée en mai dénombre dix espèces invasives venues d’Asie du Sud-Est ou du Japon, la majorité étant des clones issus d’individus uniques. Que faire si vous en croisez ? Prendre une photo à envoyer à http://bit.ly/Plathelminthe, puis les écraser consciencieusement – un fragment suffit à les régénérer. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Des vers géants envahissent la France Les Chinois dominent l’espace quantique Expérience de téléportation quantique entre le satellite Micius et la base d’Ali, au Tibet. JIN LIWANG / XINHUA En janvier, une équipe chinoise et australienne a expliqué comment elle avait effectué en septembre 2017 la première visioconférence aux flux protégés par des clés de chiffrement quantiques pendant plus d’une heure. La communication a eu lieu entre les Académies chinoise et autrichienne des sciences, distantes de 7 600 kilomètres environ. La communication quantique passe par le satellite chinois Micius, lancé en août 2016 à 500 kilomètres d’altitude de la Terre. Ce canal laser permet d’envoyer, à raison de mille fois par seconde, des clés pour chiffrer des vidéos. Cette transmission est réputée sûre car le protocole utilisé garantit que toute intrusion serait détectée grâce aux propriétés quantiques des grains de lumière. Le satellite permet de s’affranchir de la limite en distance des fibres optiques qui ne peuvent transmettre de la lumière que sur une centaine de kilomètres. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Technologies quantiques : l’Europe accélère Les métamorphoses du graphène Double couche de graphène. COURTESY PABLOJARILLO- HERRERO En avril, deux articles secouent la communauté de l’électronique. Une équipe du Massachusetts Institute of Technology (MIT) et de l’université de Tsukuba (Japon) a réussi à changer les propriétés conductrices du graphène (une molécule plane de carbone, habituellement très conductrice) par une très légère modification. Deux plans de graphène sont superposés l’un sur l’autre, mais avec un décalage d’un peu plus d’un degré seulement. Soudain le matériau devient isolant et à très basse température (– 271 °C environ), il est supraconducteur, c’est-à-dire qu’il conduit l’électricité sans résistance. Depuis, la « twistronique », cet art de modifier la superposition de plans de molécules, a fait des émules pour modifier les propriétés de différents matériaux. La fin du kilo étalon Le kilo n’est plus officiellement représenté par un étalon de platine irridié. CHRISTOPHE MAOUT POUR "LE MONDE" Le 16 novembre, la Conférence générale des poids et mesures (CGPM) a décidé que le 20 mai 2019 une page de l’histoire se tournerait. A cette date, le vénérable kilogramme étalon, conservé à Sèvres depuis 1899, ne sera plus la référence pour définir l’unité de masse. Cette dernière se rapportera désormais à une constante de la physique, la constante de Planck, qui intervient dans les formules décrivant l’infiniment petit de la mécanique quantique. Pour la vie quotidienne, cela ne changera rien. Seuls les services nationaux chargés d’étalonner les balances seront concernés. Ils se serviront d’une balance particulière dite de Kibble, dont l’équilibre relie l’unité de masse à la constante de Planck, et dont la valeur est fixée par convention. Dans la foulée, la CGPM a modifié trois autres unités pour les relier à d’autres constantes fondamentales : le kelvin, pour la température, relié à la constante de Boltzmann, la mole (quantité de matière) à la constante d’Avogadro et l’ampère à la charge électrique de l’électron. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le kilogramme se dématérialise, redéfini par la physique quantique Les neutrinos, du blazar au pôle sud Le laboratoire IceCube situé dans le station Amundsen-Scott au pôle sud est le plus grand détecteur de neutrinos du monde. Sven Lidstrom, IceCube/NSF L’énigme de l’origine des rayons cosmiques de très haute énergie s’éclaircit. Ces particules électriquement chargées – protons, électrons, noyaux atomiques… –, accélérées à une vitesse approchant celle de la lumière, proviennent d’autres galaxies que la nôtre. Mais d’où exactement ? Grâce aux efforts d’une quinzaine d’équipes d’astrophysiciens et à l’instrument IceCube installé au pôle Sud, il a été possible d’identifier la source d’un de ces rayons cosmiques. Il s’agit d’un blazar, une galaxie dont le cœur est occupé par un trou noir gigantesque autour duquel gravite un disque de matière surchauffée. Seuls des phénomènes extraordinairement puissants, tels que ceux qui se produisent dans l’environnement d’un trou noir supermassif, sont capables de créer des rayons cosmiques de très haute énergie. InSight sur Mars Premier selfie pris le 6 décembre par l’atterrisseur martien InSight. NASA/JPL-Caltech Voici le premier selfie d’InSight. Après un voyage de sept mois, cet atterrisseur américain s’est posé sans problème sur Mars le 26 novembre. Ses deux principaux instruments sont européens : le sismomètre français SEIS écoutera l’intérieur de la Planète rouge, à l’affût de ses moindres vibrations, tandis que HP3, fourni par l’Allemagne, s’enfoncera jusqu’à 5 mètres de profondeur dans le sol pour y déposer des capteurs de température. SEIS aura notamment pour but, grâce à l’analyse des ondes sismiques, de déterminer la structure interne de Mars. Il tentera aussi de comprendre pourquoi Mars est dénuée de tectonique et pourquoi son activité volcanique, autrefois impressionnante, s’est aujourd’hui éteinte. Lire aussi La sonde de la NASA InSight s’est posée sur Mars Hayabusa-2 à destination L’ombre de Hayabusa-2 sur la surface de Ryugu. JAXA Lancée en décembre 2014, la mission japonaise Hayabusa-2 est arrivée, le 27 juin, dans les parages immédiats de sa « cible », l’astéroïde Ryugu, d’un diamètre d’environ 900 mètres. Sur cette image, on distingue l’ombre du vaisseau sur la surface de Ryugu. Par trois fois, Hayabusa-2 effectuera des microprélèvements – de l’ordre du milligramme – de l’astéroïde, qui seront rapportés sur la Terre fin 2020. Pour pouvoir analyser de plus gros échantillons, il faudra attendre le retour de la mission américaine Osiris-Rex, qui s’est quant à elle mise en orbite autour de l’astéroïde Bénou le 3 décembre. Elle pourrait rapporter jusqu’à 2 kilogrammes de prélèvements en 2023. Lire aussi Mascot, le petit robot largué à 325 millions de kilomètres de la Terre Soyouz : une panne et ça repart La fusée Soyouz décolle du cosmodrome de Baïkonour (Kazakhstan), peu avant une panne qui contraindra l’Américain Nick Hague et le Russe Alekseï Ovtchinine à effectuer un atterrisage d’urgence. ALEXEY FILIPPOV / SPUTNIK / AFP Le 11 octobre, la fusée Soyouz emportant l’Américain Nick Hague et le Russe Alexeï Ovtchinine vers la Station spatiale internationale (ISS) a connu une défaillance deux minutes après le décollage, contraignant l’équipage à un atterrissage d’urgence dans la plaine kazakhe. Une première depuis trente-cinq ans ! Le 3 décembre, le lanceur russe a repris du service, permettant à la capsule du même nom de rejoindre l’ISS sans encombre. Le « taxi » russe est actuellement le seul à pouvoir conduire des équipages vers la station – en attendant les premiers vols habités des capsules de SpaceX et Boeing, annoncés pour l’été 2019. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La Lune, nouveau Graal de Roscosmos ? Starman en route pour le cosmos La Terre vue du roadster d’Elon Musk, peu après son lancement début 2018 par la fusée Falcon Heavy de sa société SpaceX. FALCON HEAVY DEMO MISSION / CC0 Vers Mars et au-delà ! Le voyage dans le système solaire du mannequin baptisé Starman, au volant d’un roadster de marque Tesla, ne fait que commencer. Lancé dans l’espace par la première fusée lourde Falcon Heavy de la société SpaceX, avec David Bowie pour bande-son, ce chargement inédit a constitué un formidable « coup » publicitaire pour les entreprises d’Elon Musk – avant que celui-ci n’explose en plein vol pour cause de burn-out avoué. Plus serein, Starman devrait poursuivre son périple pendant des millions d’années. Une étude modélisant sa trajectoire évalue à 6 % ses chances de percuter la Terre au cours du prochain million d’années, et à 2,5 % celles de croiser la route de Vénus. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Elon Musk fusionne publicité et science Article réservé à nos abonnés Lire aussi Où nous conduit ce roadster rouge cosmique ? Lire aussi Décollage de Falcon Heavy, la fusée la plus puissante du monde Frasques sur fresque à Pompéi Le 19 novembre, dégagement à Pompéi d’une fresque montrant les ébats mythologique de Léda et d’un cygne. CESARE ABBATE / AFP Parmi les découvertes effectuées lors des nouvelles fouilles sur le site italien de Pompéi figure cette fresque dépeignant les ébats de Léda avec Zeus, lequel avait pris la forme d’un cygne pour séduire la reine de Sparte. Les archéologues ont également trouvé sur un mur une courte inscription qui a remis en question la date exacte à laquelle le Vésuve, en entrant en éruption, a détruit la célèbre ville romaine ainsi que ses voisines Herculanum, Stabies et Oplontis, en l’an 79 de notre ère. Ce graffiti conforte l’idée, déjà avancée par d’autres chercheurs, que la catastrophe a eu lieu le 24 octobre de cette année-là, et non pas le 24 août. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La découverte d’une petite Pompéi, au sud de Lyon, primée De vieilles pierres taillées en Algérie Une des pierres taillées de type oldowayen mises au jour sur le site d’Aïn Boucherit en Algérie, et datées de 2,4 millions d’années. AFP PHOTO / MOHAMED SAHNOUNI/HANDOUT La découverte en Algérie de pierres taillées vieilles de 2,4 millions d’années, loin des sites d’Afrique de l’Est où se trouvent les gisements les plus anciens d’outils lithiques, bouscule une nouvelle fois les certitudes sur l’évolution de la lignée humaine. La présence de tels outils, et d’ossements d’animaux en portant les marques, à Aïn Boucherit, au sud-est d’Alger, peut avoir deux explications : soit cette technique s’est rapidement diffusée dans l’ensemble du continent africain, soit elle a pu avoir de multiples origines. Mohamed Sahnouni, du Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques d’Alger, qui a coordonné les fouilles, estime que ces outils « changent la vision de l’Afrique de l’Est comme berceau de l’humanité. En réalité, l’ensemble de l’Afrique a été le berceau de l’humanité ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Des pierres taillées vieilles de plus de 2 millions d’années découvertes en Algérie Bornéo, berceau de l’art figuratif ? Détail d’un gros animal à corne dessiné sur la paroi d’une grotte de Bornéo il y a au moins 40 000 ans. LUC-HENRI FAGE Les grottes indonésiennes redessinent la préhistoire de l’art. Il y a quatre ans, des représentations de deux animaux, dont un cochon doté de défenses, découvertes sur les parois calcaires d’une caverne de Sulawesi (Célèbes), en Indonésie, étaient datées de 35 000 ans environ – ce qui en faisait les contemporaines des gravures rupestres de la première phase d’occupation de la grotte Chauvet (Ardèche). La même équipe de chercheurs a présenté, dans Nature daté du 8 novembre, de nouvelles datations de gros mammifères dessinés cette fois dans une grotte de la partie indonésienne de l’île de Bornéo : ces représentations remonteraient au minimum à 40 000 ans, ce qui en fait les plus anciens vestiges d’art rupestre figuratif connus à ce jour. Article réservé à nos abonnés Lire aussi A Bornéo, l’art figuratif prend un coup de vieux En Sibérie, une jeune métisse de 90 000 ans Fragment d’un os ayant appartenu à une jeune fille issue de l’union d’une mère néandertalienne et d’un père dénisovien. T.HIGHAM / UNIVERSTE D'OXFORD La découverte était tellement surprenante que les chercheurs de l’Institut Max Planck d’anthropologie évolutionniste de Leipzig ont mis plusieurs mois pour tout vérifier : un fragment d’os vieux de 90 000 ans trouvé dans la grotte de Denisova, dans les montagnes de l’Altaï, en Sibérie, appartenait à une jeune fille dont la mère était néandertalienne, et le père dénisovien. L’analyse de l’ADN ancien avait déjà révélé que de tels croisements étaient intervenus dans ces deux lignées humaines aujourd’hui disparues, et aussi avec des Homo sapiens de passage – le génome de certaines populations actuelles en porte encore la trace. Mais c’est la première fois qu’on identifie un descendant direct de ces amours métisses. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Paléontologie : découverte en Sibérie d’une jeune métisse de 90 000 ans Un avion superionique Vue d’artiste de l’avion superionique. Christine Y. He Le MIT a fait, en novembre, la démonstration spectaculaire qu’un nouveau mode de propulsion aérien est possible, sans hélice ni turbine. L’engin de 2,5 kilogrammes et 5 mètres d’envergure a volé dix fois, sur cinquante mètres et à un mètre d’altitude, propulsé par un vent de particules chargées. Une décharge électrique crée des particules chargées qui sont accélérées par un fort champ électrique induit par une tension de 40 000 volts sous les ailes. Ces dernières s’appuient alors sur ce vent ionique artificiel. Si le principe était connu depuis plus d’un siècle, il avait été abandonné car considéré comme inefficace. Le système pourrait équiper des drones ou bien être associé avec des moteurs plus classiques. La voiture autonome, agent moral ? Le 19 mars, une voiture autonome Uber a mortellement percuté une piétonne traversant hors d’un passage protégé, à Tempe (Arizona). ABC-15.com via AP En mars, près de Phoenix (Arizona), une voiture autonome de l’entreprise Uber tue une piétonne. L’enquête montrera que le logiciel a fait une erreur de jugement, considérant que l’obstacle était « anodin » et qu’il n’était pas nécessaire de faire une embardée inconfortable pour les passagers. Quelques mois plus tard, une équipe franco-américaine rendait publics les résultats d’une vaste enquête en ligne sur les dilemmes moraux posés par les véhicules autonomes. Pour sauver la vie du conducteur, faut-il percuter une autre personne ? La réponse dépend-elle de l’âge des personnes, de leur statut social présumé, de leur poids, de leur nombre… ? Plus de 2,5 millions de personnes venues de 233 pays ont répondu à ce genre de questions sur moralmachine.mit.edu. Il en est ressorti des préférences générales sur le fait qu’il valait mieux épargner le plus grand nombre, privilégier les humains sur les animaux et sauver les enfants. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Jean-François Bonnefon trace sa route en toute autonomie Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les dilemmes moraux de l’humanité à l’épreuve de la voiture autonome Intelligence artificielle en folie A droite, caricatures dessinées par une intelligence artificielle en s’inspirant des photos de gauche. CariGANs, Cao et al. Encore une riche année pour l’intelligence artificielle par réseaux de neurones et apprentissage. Microsoft a ainsi exposé une méthode pour générer des caricatures de personnalités dans différents styles, que des jurés humains ont souvent estimées faites à la main. L’entreprise Nvidia a aussi généré de faux visages, aussi réels que des vrais. Ces possibilités font craindre la diffusion aisée de fausses images ou vidéos pour lancer des rumeurs. En santé, plusieurs équipes ont montré la supériorité des machines sur les médecins pour le diagnostic de tumeurs cérébrales, de coronaropathies ou de rétinopathies. Deepmind, filiale de la maison mère de Google, a aussi amélioré son logiciel de go, AlphaZero, capable de surpasser la précédente version, et qui en 2016 avait battu un champion humain – qui plus est en apprenant seul les règles du jeu. Il est aussi très fort aux échecs. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Intelligence artificielle : du Perceptron au premier Macintosh, la préhistoire d’une révolution Les visages de l’année Donna Strickland, troisième Nobel de physique Donna Strickland, corécipiendaire du Nobel de physique 2018. Cole Burston / AFP Cette physicienne canadienne n’est que la troisième femme à recevoir le prix Nobel de physique, après Marie Curie, en 1903, et Maria Goeppert-Mayer, en 1963. Professeure à l’université de Waterloo, elle a reçu la célèbre récompense avec son directeur de thèse, le Français Gérard Mourou, avec qui elle a mis au point une technique pour doper considérablement la puissance des lasers à partir de la fin des années 1980. Arthur Ashkin, pour des pinces lasers, reçoit l’autre moitié du prix. Caucher Birkar, médaillé Fields à qui on a volé sa médaille La mathématicien Caucher Birkar montre la nouvelle médaille Fields qui lui a été donnée le 8 août, après que celle qui lui avait été attribuée une semaine plus tôt lui ait été volée quelque minutes après la remise du prix, à Rio de Janeiro. CARL DE SOUZA / AFP Ce mathématicien kurde d’origine iranienne, professeur à Cambridge, est l’un des quatre lauréats de la médaille Fields, décernée tous les quatre ans à des chercheurs de moins de 40 ans. C’est un spécialiste de géométrie algébrique qui s’est aussi fait remarquer par le vol de sa médaille le jour de la cérémonie, au Brésil. Un nouvel exemplaire lui a été rapidement fourni. Les trois autres médaillés sont Alessio Figalli (Italie), Peter Scholze (Allemagne) et Akshay Venkatesh (Australie). Jocelyn Bell Burnell, Breakthrough Prize de physique Jocelyn Bell Burnell lors de la remise du Breakthrough Prize au NASA Ames Research Center (Mountain View, Californie), le 4 novembre. Kelly Sullivan / AFP Breakthrough Prize de physique pour l’ensemble de son œuvre, grande médaille de l’Académie des sciences, l’année 2018 aura encore offert à l’astrophysicienne de 75 ans une moisson de récompenses majeures. Pourtant, la découvreuse des pulsars, anoblie par la reine, reste célèbre pour le prix qu’elle n’aura jamais eu. En 1974, c’est son directeur de thèse, Antony Hewish, qui fut récompensé, par l’Académie suédoise, du Nobel de physique. Stephen Hawking, mort du célèbre cosmologiste Le cosmologiste Stephen Hawking (1942-2018). Julie Edwards / NurPhoto / AFP Le physicien et cosmologiste britannique s’est éteint le 14 mars, à l’âge de 76 ans. Devenu mondialement célèbre à la fin des années 1980 pour son livre Une brève histoire du temps, Stephen Hawking souffrait, depuis plus d’un demi-siècle, d’une forme rare de la maladie de Charcot, qui l’avait presque entièrement paralysé et confiné dans un fauteuil roulant. Ses principaux travaux portaient sur les singularités de l’espace-temps. Il avait prédit que les trous noirs n’étaient pas des pièges parfaits et émettaient une radiation qui porte désormais son nom. Emmanuelle Amar, lanceuse d’alerte sur les bébés agénésiques Emmanuelle Amar, directrice du registre des malformations en Rhone-Alpes (Remera), a donné l'alerte après la naissance de sept enfants sans bras ou sans mains dans l'Ain entre 2009 et 2014 dans un rayon de 17 km autour du village de Druillat. Des cas supplémentaires ont depuis été rapportés. Soudan / Alpaca / Andia A la tête, depuis 2007, du Registre des malformations en Rhône-Alpes (Remera), Emmanuelle Amar a mis en évidence un excès de cas de bébés nés avec des agénésies transverses des membres supérieurs dans l’Ain. D’autres agrégats ont été identifiés dans le Morbihan et la Loire-Atlantique. Cette quinquagénaire a réussi à faire ouvrir une nouvelle enquête de Santé publique France sur ce sujet, sur fond de désaccord sur le caractère significatif ou pas de l’accumulation des huit cas recensés dans l’Ain. Pour le conseil scientifique du Remera, l’agrégat pourrait être dû à une cause environnementale. Cette lanceuse d’alerte a un temps été menacée de licenciement. Le Remera avait déjà joué un rôle décisif dans la mise en lumière du caractère délétère pour le fœtus d’un antiépileptique, la Dépakine (valproate).
28/12/2018
sciences
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/28/medecine-astronomie-biodiversite-l-annee-2018-en-images_5402961_1650684.html
Prévention du suicide : ces numéros surtaxés qui cherchent à se substituer à SOS-Amitié
Pour être plus faciles à contacter que les associations qui aident les personnes suicidaires, certains services payants utilisent les pubs de Google.
Fang Zhou / Cultura / GraphicObsession Depuis quelques mois, les bénévoles qui donnent de leur temps aux lignes d’écoute pour les personnes suicidaires ou en détresse psychologique entendent une question de plus en plus récurrente : « Est-ce que cet appel est payant ? ». Cette nouvelle méfiance s’explique facilement. En 2018, diverses sociétés ont cherché à investir le créneau de l’aide téléphonique aux personnes suicidaires et qui souhaitent parler à des associations comme SOS-Amitié ou Suicide-Ecoute. Les sites façades de ces sociétés, dont certains sont désormais fermés, s’appellent SOS-Suicide, Allo-Amitié ou Numéro-SOS-Solitude, des noms qui entretiennent la confusion avec les associations reconnues. Des conséquences néfastes pour les personnes en difficulté L’ensemble des acteurs de la prévention du suicide sont préoccupés par ces numéros parasites. D’autant plus que, par manque de bénévoles, SOS-Amitié ne peut répondre qu’à un appel sur trois, d’après Alain Mathiot, son président. « On peut appeler ça un abus de faiblesse » La simplicité d’utilisation des numéros surtaxés en fait un outil privilégié pour ce genre de pratiques. Pour appeler un numéro à 80 centimes d’euros la minute, il n’est pas nécessaire de donner son numéro de carte bleue. Le prix de l’appel est répercuté sur la facture de téléphone. Avant le début de la conversation, un message automatique précise la surtaxe et son montant. « Mais les personnes qui présentent des risques suicidaires ont généralement des capacités cognitives abaissées, précise Marc Fillatre, psychiatre hospitalier et président de l’Union nationale de prévention du suicide (UNPS). On peut appeler ça un abus de faiblesse. » En effet, plusieurs bénévoles nous ont fait part de cas d’appelants dont l’état de détresse s’était empiré après avoir reçu des factures téléphoniques de plusieurs centaines d’euros. « C’était un jeune homme de 30-35 ans, qui me demandait avec insistance si l’appel était gratuit », se souvient Henri, un bénévole de SOS-Amitié (le prénom a été modifié) : « Il avait auparavant appelé un numéro surtaxé, une ou plusieurs fois. Il a bien reconnu qu’il y avait une annonce au début, mais il n’y avait pas prêté attention. C’était quelqu’un qui avait besoin de temps pour parler. » Dans ses notes, Henri a retrouvé le montant de la facture de téléphone évoquée par l’appelant : 400 euros. « Je me souviens du désarroi dans lequel ça l’avait mis », ajoute le bénévole. « Beaucoup des personnes qui nous appellent sont dans des situations financières très difficiles. Elles vivent avec l’AAH [allocation aux adultes handicapés] ou le RSA [revenu de solidarité active], beaucoup sont sous tutelle ou curatelle », précise Alain Mathiot, le président de SOS-Amitié.
28/12/2018
pixels
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/12/28/prevention-du-suicide-ces-numeros-surtaxes-qui-cherchent-a-se-substituer-a-sos-amitie_5402929_4408996.html
Les touristes américains mettent de nouveau le cap sur « Saint-Barth »
Quinze mois après les ravages de l’ouragan Irma, l’île des Caraïbes a tourné la page, alors que celle de Saint-Martin en est encore loin.
La baie Saint-Jean sur l’île de Saint-Barthélemy, en décembre 2017. HELENE VALENZUELA / AFP Mariah Carey en concert privé au Nikki Beach, un show aquatique sur fond de feu d’artifice dans la piscine du Christopher avec des petites sirènes… Quinze mois après les ravages de l’ouragan Irma, le 6 septembre 2017, Saint-Barthélemy est repassée au vert. Vert comme la végétation à nouveau luxuriante de l’île et, surtout, vert comme le dollar. Car les touristes américains sont de retour, comme Le Monde a été convié à le constater par la collectivité. « Saint-Barth », comme la surnomment les habitués, a gagné son pari. « Le premier test a été Thanksgiving, le dernier jeudi de novembre. Pour l’ouverture officielle de la saison, nos “meilleurs clients” sont revenus », se félicite Nils Dufau, vice-président de la collectivité et président du comité du tourisme de Saint-Barthélemy. L’île joue gros avec les Américains. Ils constituent « 60 % à 65 % » de sa clientèle, précise M. Dufau. Pour les financiers de Wall Street ou les fortunes de l’immobilier de Floride, Saint-Barthélemy fait office de proche banlieue chic. Un Neuilly des Caraïbes, à deux heures et demie d’avion de Miami et à peine quatre heures de New York. Pour le plus grand bonheur de Saint-Barthélemy, les touristes semblent avoir rangé Irma au rayon des souvenirs. « Ils n’ont pas oublié l’ouragan, car ils ne l’ont pas vécu. Ils ont juste “souffert” de n’avoir pas pu venir l’hiver dernier. Et maintenant, ils veulent participer à la relance de l’île », explique Sabine Masseglia, directrice des ventes et du marketing du Guanahani, l’une des plus prestigieuses adresses de l’île. « Les gens n’attendaient que de pouvoir revenir », renchérit Nils Dufau. Les hôteliers voient l’avenir en rose Réunie mardi 18 décembre à Gustavia, la « capitale » de Saint-Barthélemy, l’assemblée générale de l’association des hôteliers de l’île voit l’avenir en rose. « C’est une très belle saison qui s’annonce. La tendance est à la hausse par rapport à 2016, il y a plus de réservations jusqu’à la fin de mai qu’il y a deux ans », se réjouit Mme Masseglia. « En temps normal, Saint-Barth accueille chaque année de 170 000 à 180 000 touristes », pointe le vice-président de la collectivité. Pour son retour à la normale, la destination huppée prévoit qu’ils devraient être encore plus nombreux cette saison. A vrai dire Saint-Barthélemy n’a jamais douté de son avenir. L’élan de ce petit paradis pour riches n’a jamais été brisé. Tout au plus ralenti par l’ouragan. Pourtant, les pointes de vent à plus de 450 kilomètres par heure ont fait d’énormes dégâts matériels et quelques blessés légers. Maisons particulières, magasins, entreprises, villas et grands hôtels ont été soufflés par les bourrasques ou noyés sous les flots. La facture d’Irma est à la hauteur de la violence des éléments : plus de 800 millions d’euros au total, dont « 10 millions d’euros pour la collectivité et plus de 700 millions d’euros pour les particuliers », a calculé M. Dufau.
28/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/28/les-touristes-americains-mettent-de-nouveau-le-cap-sur-saint-barth_5402919_3234.html
Marine Le Pen et la guerre des « ex » : comment le RN poursuit ceux qui le quittent
Insultes, procédures judiciaires… Le Rassemblement national poursuit souvent élus ou adhérents en rupture de ban.
Le siège du Rassemblement national, à Nanterre (Hauts-de-Seine). JEAN BAPTISTE AUTISSIER / PANORAMIC L’un serait « porté sur la bouteille », l’autre aurait écrit un livre « ambigu » sur la seconde guerre mondiale. Ambiance délétère entre l’ex-Front national (FN) et ses démissionnaires. Depuis plusieurs mois, le parti d’extrême droite dresse un portrait peu flatteur de ceux qui osent le quitter. « Poubelles du parti », « inconnus », élus « amers » ou que « personne ne regrettera »… Les lieutenants de Marine Le Pen dégainent. La patronne elle-même aurait envoyé un texto « limite » à une élue sur le départ, raconte un cadre resté au Rassemblement national (RN) : « Quelque chose comme “Tu finiras dans une caravane”. » Les « ex » du RN sont nombreux à décrire les tensions au sein des hémicycles, depuis qu’ils ont décollé l’étiquette bleu marine de leur pupitre municipal, régional ou même européen. Les « philippotistes » s’en étaient faits les premiers relais, ébruitant dès septembre 2017 les bisbilles causées par le fracassant départ du favori déchu de Marine Le Pen… mais entretenant souvent eux-mêmes le face-à-face épidermique entre les deux clans. Depuis un an et demi et le choc, coup sur coup, des défaites présidentielle et législatives, d’autres quittent le mouvement plus discrètement. Sans tapage interne ou médiatique, mais en confiant au passage leurs réserves quant au leadership, à la ligne ou à la nature de la « refondation » du parti d’extrême droite. « On a perdu 40 % à 50 % des adhérents selon les fédérations », confie un frontiste historique. A l’image de ces militants qui ne voulaient pas « cracher dans la soupe » en partant, Jordan Grosse-Cruciani a même tenté de rester en bons termes. Le Vosgien de 28 ans n’a finalement pas échappé à ce qu’il qualifie de « vengeance » de l’appareil. « Au départ, je n’étais pas parti fâché, rappelait-il au Monde en novembre, soit huit mois après sa démission. Mais maintenant… » Maintenant, il se retrouve « traîné » devant la justice par son ancien parti, qui exige le remboursement des frais de campagne engagés pour son élection au conseil régional Grand-Est. Un chèque d’environ 5 700 euros qu’il assure avoir envoyé, et que le parti aurait égaré. « Au lieu de m’appeler, ils m’ont envoyé un huissier ! », s’agace le jeune élu, en acceptant de refaire un chèque du même montant, mais « sûrement pas » de payer les frais inhérents à la procédure judiciaire. Le RN, lui, estime être dans son bon droit en exigeant la somme qui lui est effectivement due.
28/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/28/marine-le-pen-et-la-guerre-des-ex_5402916_823448.html
Les Champs Elysées, théâtre du pouvoir macronien, de l’investiture aux « gilets jaunes »
L’ostentatoire avenue parisienne s’est transformée en rendez-vous des « gilets jaunes ». Un retour de bâton pour le président qui y a régulièrement mis en scène son pouvoir « jupitérien ».
Emmanuel Macron se rend sur le tombeau du Soldat inconnu, le 14 mai 2017, jour de la passation des pouvoirs. ALAIN JOCARD / AFP Raide comme un lancier dans son command car, Emmanuel Macron remonte les Champs-Elysées. Il a posé sa main sur l’arceau du véhicule militaire. Derrière lui, le Louvre et sa Pyramide, point de départ de la fameuse « voie royale », perspective esquissée au XVIIe siècle par le jardinier Le Nôtre, qui file désormais sans obstacles jusqu’au quartier d’affaires de la Défense. Un sourire pincé assouplit légèrement les lèvres du héros. Regard martial, maxillaires saillants, il faut clore la séquence du « président normal ». Représenter les Français, mais d’abord incarner la France. À chaque président, son mini-coup d’Etat dans des protocoles trop huilés. Ce dimanche 14 mai 2017, la passation des pouvoirs s’est déroulée selon le rituel constitutionnel : tapis rouge, garde républicaine, tête-à-tête avec François Hollande, visite du PC Jupiter, ce bunker réservé au commandement militaire. Emmanuel Macron est devenu à 39 ans le 25e président de la République française. Mais, au moment de quitter l’Elysée pour gagner la place de l’Etoile et raviver la flamme du tombeau du Soldat inconnu, surprise : ce n’est pas la traditionnelle Citroën qui patiente devant la grille du Coq, sortie la plus discrète du Palais. Emmanuel Macron n’a pas fait son service militaire mais raffole de l’uniforme. Sa griffe, ce sera ce VLRA (véhicule léger de reconnaissance et d’appui) en « livrée camouflage ». Ce jour-là, les Champs-Élysées s’imposent comme la scène politique du pouvoir macronien Hormis les cordons de chevaux et de motards de la garde républicaine, rien ne protège le nouveau président des spectateurs postés le long des trottoirs. De quoi aurait-il peur ? On ne hait pas un inconnu. À mi-parcours, plusieurs chevaux se cabrent brusquement, manquant de semer la panique dans le cortège, mais les ruades sont vite oubliées, un épiphénomène dans ce cours radieux. Qu’importe s’il a été élu par moins de 21 millions d’électeurs : Macron a conquis le pouvoir à la vitesse d’un Rafale, sans mandat ni parti. Il a raflé 66 % des voix au second tour, face à Marine Le Pen, et savoure son apothéose sur l’avenue de la mémoire nationale. Le pays tout entier a pris l’habitude de s’y rassembler pour fêter ses triomphes, deux millions de personnes pour la libération de la capitale en août 1944, un million et demi pour la victoire des Bleus de Zidane en juillet 1998. Ce 14 mai 2017, dans l’objectif des photographes, le visage juvénile du président sur « la-plus-belle-avenue-du-monde », encadré par l’écarlate des plumets, le cuivre des casques, le bleu des gyrophares, symphonie de couleurs devenue spécialité française, offre des clichés de rêve. Comment imaginer que l’avenue de son sacre deviendra bientôt le théâtre de sa disgrâce, l’artère d’une tragédie en plusieurs actes ? Ce jour-là, les Champs-Élysées s’imposent comme la scène politique du pouvoir macronien.
28/12/2018
m-le-mag
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/28/aux-champs-elysees-splendeurs-et-miseres-d-emmanuel-macron_5402911_4500055.html
La RDC se prépare à voter dans un climat tendu
Report des scrutins dans plusieurs régions, contestation de l’opposition, refus d’observateurs occidentaux : la tension monte à l’approche des élections censées se tenir dimanche.
Le silence est un art dans lequel excelle Joseph Kabila. Et le président sortant de la République démocratique du Congo (RDC) semble avoir initié en la matière son dauphin, Emmanuel Ramazani Shadary. En dehors de ses meetings de campagne, le candidat du pouvoir, visé par des sanctions de l’Union européenne (UE) pour la répression de manifestations du temps où il était ministre de l’intérieur (2016-2018), a appris à se taire. M. Shadary est plutôt un dur, intransigeant et loyal, un temps en première ligne pour défendre la possibilité d’un troisième mandat de Joseph Kabila. Ce dernier reste « l’autorité morale de référence » de la majorité présidentielle. Si les élections se déroulent dimanche 30 décembre, avec deux ans et une semaine de retard, et s’il est élu, malgré une campagne terne orchestrée par le régime avec de grands moyens, M. Shadary prolongera l’œuvre tant critiquée de son chef. Joseph Kabila, lui, n’exclut pas de revenir au pouvoir en 2023, et sera d’ici-là « consulté pour toute grande décision », selon l’un de ses conseillers qui évoque un « pacte » entre les deux hommes. Un t-shirt de soutien au candidat Emmanual Ramazani Shadary, à Kinshasa, le 18 décembre.. JOHN WESSELS / AFP Mais ce scénario est aussi incertain que la tenue des élections. Alors, le candidat de la majorité présidentielle se mure dans le silence, retient ses coups face à une opposition à la fois déroutée, réprimée et divisée. Cette dernière s’époumone à critiquer ce pouvoir et la Commission électorale (CENI) soupçonnée d’organiser la fraude. La colère monte En dernier recours, la coalition soutenant l’opposant Martin Fayulu a appelé à une journée ville morte dans tout le pays, vendredi 28 décembre. Un grand test périlleux de sa popularité et de sa capacité de mobilisation pour protester contre le report, à mars 2019, des élections à Beni et Butembo (Nord-Est) où sévissent Ebola et des groupes armés, de même qu’à Yumbi (Ouest) emportée par une spirale de violences communautaires. Au total, près de 1,2 million d’électeurs sont concernés par ce report dont une bonne partie, au Nord-Kivu, abhorre aujourd’hui M. Kabila – et son dauphin – pour qui elle avait pourtant voté en 2011. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le virus Ebola de retour en République démocratique du Congo A Beni, une poignée de jeunes gens est descendue dans la rue pour réclamer leur droit de voter. Certains s’en sont pris à des installations d’ONG et des Nations unies (ONU), considérées comme des complices du pouvoir, avant d’être dispersés par la police. La colère monte au sein d’une population usée par l’attente, la misère, la répression et ce qui est de plus en plus perçu comme des manœuvres d’une CENI inféodée au pouvoir. Cette ire populaire risque d’être instrumentalisée par des groupes armés guidés par leurs propres intérêts ou influencés par des politiciens de l’opposition très influents dans cette région meurtrie par des tueries non élucidées depuis 2014 et toujours traumatisée par les deux grandes guerres du Congo (1996-1997 et 1998-2003). « Trop, c’est trop. La CENI vient de dépasser la ligne rouge, dit Pierre Lumbi, ancien conseiller spécial en matière de sécurité de Joseph Kabila, désormais directeur de campagne de Martin Fayulu. On prend à témoin la communauté internationale et on l’interpelle pour qu’elle obtienne la levée de cette décision susceptible de fragiliser l’ordre et la stabilité. » Sauf que la « communauté internationale » est soigneusement tenue à l’écart par le régime Kabila qui a décliné les propositions de soutien logistique de la Mission des Nations unies (Monusco) mais aussi des Etats-Unis pour organiser ces élections dans ce pays immense, le plus grand d’Afrique francophone. Le candidat de l’opposition à la présidence de la République démocratique du Congo, Martin Fayulu, à Kinshasa, le 27 décembre. JEROME DELAY / AP L’Union européenne accusée d’« ingérence » La CENI, elle, a refusé la présence de tout observateur électoral occidental à commencer par le Centre Carter, une ONG américaine, et l’Union européenne (UE) qui avaient émis des critiques sur les élections de 2011. Jeudi en fin d’après-midi, le ministre congolais des affaires étrangères a invité « instamment » l’UE à rappeler « dans les 48 heures » son ambassadeur à Kinshasa. « Un signal inquiétant », selon plusieurs diplomates, lancé à deux jours des scrutins. Une riposte du régime à l’encontre de Bruxelles qui a renouvelé, le 10 décembre, ses sanctions à l’encontre de M. Shadary et finance un collectif congolais (la Symocel) qui constitue le deuxième plus grand réseau d’observateurs électoraux, après l’Eglise catholique, avec 20 000 personnes déployées. Ce qui vaut à l’UE d’être accusée d’« ingérence ». Dans ce climat de tensions, de suspicions et d’incertitude chaque jour un peu plus exacerbé, ces élections, censées permettre la première alternance pacifique depuis l’indépendance en 1960, préoccupent les neuf pays voisins et plus largement la sous-région. De la stabilité de la RDC dépend celle d’une grande partie du continent africain. Une population avide de changement Alors, de l’autre côté du fleuve Congo, à Brazzaville, les chefs d’Etat et ministres des affaires étrangères d’Afrique australe et des Grands Lacs ont tenu un mini-sommet de la dernière minute. Ils ont renouvelé leur « vive préoccupation face aux actes de violence qui ont émaillé la campagne électorale (…) de nature à compromettre la sérénité des élections ». Le pouvoir congolais, convié tardivement, n’y était pas représenté. Le silence conjugué à l’absence fait partie de la stratégie d’un régime toujours certain de sa puissance même s’il doit gérer plusieurs conflits sur son territoire, des crises humanitaires, une situation économique désastreuse et la colère d’une partie de la population avide de changement. La majorité est persuadée de l’emporter dans les urnes. L’opposition a déjà déclaré qu’elle contesterait la victoire de M. Shadary, laissant craindre le pire. Le lendemain du jour de vote, le 31, le Conseil de sécurité de l’ONU se réunit sur la RDC, qui cristallise toutes les peurs.
28/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/28/la-rdc-se-prepare-a-voter-dans-un-climat-tendu_5402904_3212.html
« Quand le roman souffre, la bande dessinée resplendit »
Dans sa chronique, Michel Guerrin, rédacteur en chef au « Monde », se demande si l’année 2018 ne marque pas, en matière de lecture, un passage de témoin générationnel.
Quand le roman peine, la BD est en pleine santé. CHARLY TRIBALLEAU / AFP Chronique. Depuis des mois, 2018 est décrite comme une année noire pour les librairies et les ventes de livres. La faute à la Coupe du monde de football, puis à la canicule, à une rentrée littéraire qui a fait flop, aux prix de novembre qui ont fait pschitt, aux « gilets jaunes » qui ont fait mal, à Amazon qui vampirise tout, aux bibliothèques qui n’achètent plus d’ouvrages, à Netflix qui rend le public drogué aux séries télés… Sauf qu’en fin d’année le Père Noël surgit tel Zorro, et les librairies retombent sur leurs pieds. Car le livre est le roi des cadeaux. Quant à celles qui ont souffert, elles misent sur la rentrée de janvier et sur Sérotonine (Flammarion, 352 p., 22 euros), le nouveau Houellebecq. Chaque année, pour le libraire, ce serait donc onze mois et demi dans le dur, quinze jours miraculeux. Ombres Blanches, enseigne phare à Toulouse, a vendu 12 500 livres rien que le samedi 22 décembre – plus de 10 % de son chiffre. « Attention, le paysage est erratique, [certains] ont un bon bilan, d’autres un mauvais », dit Guillaume Husson, délégué général du Syndicat de la librairie française (600 adhérents en France). Le mauvais semble dominer. « 2018 sera une année à oublier », dit, comme d’autres, Matthieu de Montchalin, qui dirige L’Armitière, à Rouen. Or ce serait le troisième exercice de stagnation voire de baisse des ventes. Pire, sur la décennie écoulée, seules 2015 et 2016 ont été de bons crus, mais grâce à un renouvellement des manuels scolaires. Et si des librairies se créent, comme Ici, ouverte en octobre sur les grands boulevards parisiens, d’autres meurent. Les romans ont beaucoup souffert 2018 avait pourtant bien commencé. Mais ensuite ce fut la dégringolade. Beaucoup pointent la responsabilité des « gilets jaunes », pénalisant les enseignes qui se trouvaient sur leur chemin. Etre perturbé, voire fermé cinq samedis en novembre et décembre, c’est rude. « Sans les “gilets jaunes”, on fait une bonne année », dit Christian Thorel, d’Ombres Blanches. Il n’y a pas que les « gilets jaunes ». Le recul des ventes en librairie a commencé durant l’été, s’est poursuivi en septembre, s’est aggravé en octobre. Surtout, ce sont les romans qui ont beaucoup souffert. La rentrée littéraire (567 romans) a été mauvaise. Comme si elle n’avait pas eu lieu. Une baisse en septembre, une autre de 14 % en octobre par rapport à 2017. « C’est la première fois en vingt-cinq ans que je vois ça », s’inquiète Matthieu de Montchalin. Les prix littéraires, en novembre, ont à peine corrigé le tir. Comme si cela jouait moins. Leurs enfants après eux (Actes Sud, 432 p., 21,80 euros), le Goncourt de Nicolas Mathieu, se vend bien mais il serait loin du « tarif standard », soit 450 000 exemplaires.
28/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/28/quand-le-roman-souffre-la-bande-dessinee-resplendit_5402901_3232.html
Dorothea Lange, Picasso, Miro… : les dix expositions à voir avant fermeture
Chaque vendredi, le service Culture du « Monde » propose aux lecteurs de « La Matinale » une sélection d’événements. Cette semaine, une spéciale fin d’année.
LES CHOIX DE LA MATINALE A l’occasion de cette dernière sélection de sorties pour le week-end de l’année 2018, « La Matinale » a choisi dix expositions, principalement à Paris, mais aussi à Antibes et à Roubaix, qui fermeront leurs portes d’ici quelques jours ou semaines. Les travailleurs migrants dans l’œil de Dorothea Lange, au Jeu de paume « Migrant Mother, Nipomo, California » (1936), de Dorothea Lange. OAKLAND MUSEUM OF CALIFORNIA La célèbre photo de la « mère migrante » qui serre contre elle ses enfants sales attire comme un aimant. Mais le reste de l’œuvre de Dorothea Lange vaut bien une visite au Jeu de paume, à Paris : on y découvre non seulement les préoccupations sociales de la photographe, qui travailla pour le gouvernement américain pendant la Grande Dépression des années 1930, mais aussi son œil, son sens de la composition et son approche empathique, qu’elle a utilisés pour suivre les travailleurs migrants, mais aussi les femmes ouvrières ou les Américains d’origine japonaise, enfermés dans des camps par le gouvernement pendant la seconde guerre mondiale sans avoir commis aucun crime. L’exposition étant très fréquentée, il vaut mieux la visiter le matin, ou entre 13 et 14 heures ou 17 et 19 heures. Claire Guillot « Dorothea Lange, politiques du visible ». Jeu de paume, place de la Concorde, Paris 8e. Jusqu’au 27 janvier 2019. Les vacances de Picasso, à Antibes « Paysage de Juan-les-Pins » (été 1920), de Pablo Picasso, huile sur toile. RMN-GRAND PALAIS (MUSÉE NATIONAL PICASSO-PARIS) / MATHIEU RABEAU / SUCCESSION PICASSO, 2018 Antibes ? Picasso y fut chez lui. Au bord du golfe et un peu partout sur le cap, à partir de 1920, et dans la ville même : entre septembre et novembre 1946, Romuald Dor de La Souchère, conservateur des lieux, lui donna les clés du château ­Grimaldi. Le lieu est devenu Musée Picasso, et consacre au peintre une exposition intitulée « Les Vacances de M. Pablo », où il se repaît des paysages méditerranéens, gorgés de lumière et de couleurs, mais aussi de baigneuses dénudées sur la plage de la Garoupe. Un Picasso intime, mais aussi un Picasso plus expérimentateur que jamais, et comme libéré, s’il en était besoin, par une atmosphère qui lui rappelle celle de son Espagne natale : les faunes cornus et rigolards, les satyres, les nymphes reviennent dans les tableaux, évocation d’un paradis retrouvé. Harry Bellet « Les Vacances de M. Pablo. Picasso à Antibes Juan-les-Pins, 1920-1946 ». Musée Picasso, château Grimaldi, Antibes (Alpes-Maritimes). Jusqu’au 13 janvier 2019. Les rêveries de Miro, au Grand Palais « Intérieur hollandais (III) » (1928), de Joan Miro, huile sur toile. SUCCESSION MIRO / ADAGP PARIS /THE METROPOLITAN MUSEUM OF ART / ART RESOURCE « Je sais que je suis des chemins extrêmement dangereux et je vous avoue que parfois, je suis pris d’une panique propre au voyageur qui se retrouve sur des chemins inexplorés », confiait Miro (1893-1983) à un ami, en 1923. Plutôt que la panique, c’est l’enchantement qui l’emporte dans le voyage proposé par le Grand Palais, truffé de péripéties formelles. Des premières toiles du Barcelonais, datées de 1916, qui mêlent les fulgurances des couleurs fauves et la rigueur analytique du cubisme, à son chef d’œuvre achevé en 1961, les trois Bleu, rarement présentés ensemble, où se lit la fascination de l’artiste pour l’abstraction américaine, en passant par les céramiques en « terre de grand feu » et les créatures en bronze peint, la rétrospective traverse sept décennies de création, un mouvement perpétuel vers toujours plus de liberté. Emmanuelle Lequeux Rétrospective Joan Miro. Grand Palais, 3, avenue du Général-Eisenhower, Paris 8e. Jusqu’au 4 février 2019. Picasso en bleu et rose, au Musée d’Orsay « La Chambre bleue » (1901), de Picasso, huile sur toile. THE PHILLIPS COLLECTION, WASHINGTON / SUCCESSION PICASSO 2018 Par « période bleue » et « période rose », l’histoire de l’art désigne deux phases dans l’œuvre de Picasso, de son arrivée à Paris, en octobre 1900, à son séjour en Catalogne, à l’été 1906, et aux premiers travaux préparatoires des Demoiselles d’Avignon. Ces périodes ont longtemps eu la préférence d’amateurs qui étaient rebutés par la complexité du cubisme et admettaient encore moins la suite de l’œuvre. Les toiles des débuts avaient à leurs yeux le mérite d’être immédiatement compréhensibles et soutenues par un dessin qu’ils disaient « classique ». L’exposition présentée au Musée d’Orsay est abondante : plus de 300 peintures, dessins, gravures et sculptures et des œuvres des proches de Picasso à titre comparatif. En dehors de L’Acteur (1904-1905), conservé par le Metropolitan de New York, et de Famille de saltimbanques (1905), à la National Gallery of Art de Washington, il ne manque aucune pièce majeure. Leur est adjointe une documentation dense, qui a, entre autres intérêts, celui de rappeler combien la proximité des poètes a été importante pour le jeune artiste. Philippe Dagen « Picasso. Bleu et rose ». Musée d’Orsay, 1, rue de la Légion d’Honneur, Paris 7e. Jusqu’au 6 janvier 2019. Les splendeurs de l’ère Meiji, au Musée Guimet « Promenade à bord d’une barque », illustration du chapitre Ukifune du « Dit du Genji », émaux cloisonnés, Japon, vers 1901. THE KHALILI COLLECTIONS OF JAPANESE ARTS Le règne de l’empereur Mutsuhito (1852-1912), qui dura de 1867 à 1912, se traduisit par une transformation tellement radicale du Japon qu’on lui a donné le nom d’ère « Meiji » (« politique de la lumière »). Une époque d’ouverture du pays sans précédent, après deux cent cinquante ans de repli sur soi, qui s’accompagne de bouleversements dans tous les domaines – politique, économique, sociétal, religieux, culturel, artistique. Le pays entend désormais faire rayonner ses talents à travers le monde, et les artistes ont pour mission d’exalter sa puissance créatrice. A l’occasion des 150 ans du début de cette période, le Musée national des arts asiatiques-Guimet, à Paris, a réuni plus de trois cents pièces – porcelaines, céramiques, étoffes, laques, peintures, sculptures, meubles – témoignant de cette virtuosité. Ces documents et objets illustrent les mutations opérées dans l’art, mais aussi dans la société japonaise tout entière. Sylvie Kerviel « Meiji, splendeurs du Japon impérial ». Musée national des arts asiatiques-Guimet, 6, place d’Iéna, Paris 16e. Jusqu’au 14 janvier 2019. Le trait décoratif de Mucha, au Musée du Luxembourg Papier à cigarettes « Job » (1896), d’Alphonse Mucha, exposé au Musée du Luxembourg à Paris jusqu’au 27 janvier 2019. MUCHA TRUST / ADAGP PARIS, 2018 Alphonse Mucha (1860-1939) est l’un des imagiers les plus célèbres de son temps. Plusieurs de ses affiches sont devenues des icônes. Son exposition au Musée du Luxembourg, à Paris, dispose une centaine de pièces dans une scénographie à arcades genre basilique : ses affiches des plus connues aux moins illustres, ses peintures à ambition mystico-humaniste et son cycle « L’Epopée slave » qui l’a occupé plus de vingt ans, jusqu’à son achèvement en 1928. Cet ensemble monumental de scènes historiques et religieuses difficilement déplaçable est présenté sous forme de film. S’ajoutent des photographies de lui-même, de ses amis et de ses modèles dans l’atelier. Ph. D. Exposition Alphonse Mucha. Musée du Luxembourg, 19, rue de Vaugirard, Paris 6e. Jusqu’au 27 janvier 2019. Basquiat et Schiele, deux fulgurances réunies, à la Fondation Louis Vuitton « Autoportrait au gilet, debout » (1911), d’Egon Schiele, gouache, aquarelle et crayon gras sur papier, monté sur carton. COLLECTION ERNEST PLOIL / VIENNE Pourquoi présenter en un même lieu Egon Schiele (1890-1918) et Jean-Michel Basquiat (1960-1988), que séparent plus d’un demi-siècle et l’Atlantique ? Parce qu’ils sont morts jeunes tous deux ? Faible prétexte. L’un a succombé à la grippe espagnole, l’autre à une overdose. Une raison bien plus convaincante est que tous deux font voir crûment à leurs contemporains ce que ceux-ci préfèrent faire semblant d’ignorer. Schiele doit exprimer combien il se sent prisonnier de la société de l’empire austro-hongrois au début du XXe siècle, de ses interdits, de ses hypocrisies ; Basquiat doit exprimer quel malaise il ressent dans la société nord-américaine des années 1980, au temps de Ronald Reagan, ce président qui commence par ne pas prendre au sérieux le sida et ne fait rien pour combattre le racisme si l’on peut dire « ordinaire » des Etats-Unis. Tous deux ont brisé les règles plastiques et le silence. Ainsi considérés, les deux artistes se ressemblent. Ph. D. Expositions Jean-Michel Basquiat et Egon Schiele. Fondation Louis Vuitton, 8, avenue du Mahatma-Ghandi, Paris 16e. Jusqu’au 14 janvier 2019 (Schiele), jusqu’au 21 janvier 2019 (Basquiat). Le Caravage avant-gardiste, au Musée Jacquemart-André « Judith décapitant Holopherne » (vers 1600), de Michelangelo Merisi, dit Caravage. MAURO COEN / GALLERIE NAZIONALI DI ARTE ANTICA DI ROMA / PALAZZO BARBERINI L’exposition présentée au Musée Jacquemart-André est brève, une trentaine de tableaux. Mais dix du Caravage. Le sujet est précis : sa période romaine, comment il invente une nouvelle peinture et comment celle-ci se répand aussitôt. Pour que ce qui est représenté le soit dans toute sa réalité matérielle et son intensité psychique, il imagine une façon différente de peindre. Il supprime apparitions célestes, anges à petites ailes blanches et allégories dénudées. Il se passe de l’architecture antique, des rideaux plissés, des perspectives profondes et de tout ce qui fait tomber dans le spectacle. Par le clair-obscur, il liquide le superflu encombrant la peinture maniériste tardive qui domine alors en Italie. Le Caravage est une avant-garde à lui tout seul. Ph. D. « Caravage à Rome. Amis et ennemis ». Musée Jacquemart-André, 158, boulevard Haussmann, Paris 8e. Jusqu’au 28 janvier 2019. Hervé Di Rosa, à la Piscine de Roubaix « Camping Beau Soleil » (non daté), d’Hervé Di Rosa, acrylique sur toile. Bâtie dans le style Art déco par l’architecte lillois Albert Baert, elle était, lors de son inauguration, en 1932, considérée comme la « plus belle piscine de France ». On se demande si elle n’est pas en train de devenir, ­sinon l’un des plus beaux musées du monde, en tout cas l’un des plus attachants. La Piscine, Musée d’art et d’industrie André-Diligent, vient de rouvrir après des travaux d’agrandissement, et l’ensemble est si réussi qu’il est à lui seul une raison de venir à Roubaix. Pour cette réouverture, le musée propose trois expositions temporaires. La plus grande et la plus sympathique est celle consacrée aux tableaux de voyage d’Hervé Di Rosa, artiste nomade qui parcourut le monde afin de confronter son art à celui des artistes et artisans. De Sofia à Lisbonne en passant par La Havane et Séville, il s’imprègne de son environnement pour nourrir ses œuvres, sculptures, peintures, travaux sur papier, tissu ou os. Ha. B. « Di Rosa. L’Œuvre au monde ». La Piscine, Musée d’art et d’industrie André-Diligent, 23, rue de l’Espérance, Roubaix (Nord). Jusqu’au 20 janvier 2019.
28/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/28/la-selection-expositions-jusqu-a-fin-janvier-du-monde_5402897_3246.html
Danse : Marius Petipa, chorégraphe star et méconnu
« Le Lac des cygnes », « Casse-Noisette », « La Bayadère »… les ballets du Français, exilé en Russie, font partie du patrimoine.
« Le Lac des cygnes », par le Yacobson Ballet, à l’Opéra de Massy. VLAD STEPANENKO Rendons à Marius Petipa (1818-1910) ce qui lui est dû. Le Français de ­Marseille, exilé en 1847 à Saint-Pétersbourg, en Russie, où il intégra comme danseur le ­Ballet impérial, reste un illustre inconnu, en particulier dans son pays d’origine. Pourtant, cet homme au prénom ensoleillé et au nom prédestiné est tout simplement le chorégraphe des plus fameux ballets du patrimoine qui constituent, aujourd’hui, le fonds de commerce des troupes classiques internationales. Quelques titres parmi des chefs-d’œuvre : La Bayadère (1877), La Belle au bois dormant (1890), Casse-Noisette (1892), Le Lac des cygnes (1895), Raymonda (1898)… Un coup d’œil sur les affiches de fin d’année confirme l’ampleur du phénomène. Si Casse-Noisette, le bonbon le plus prisé du public anglo-saxon, arrive en tête pour les fêtes, Le Lac des cygnes le talonne de près. Que ce soit dans l’interprétation du Ballet de Kiev (Ukraine) ou dans celle du Ballet et Orchestre de l’Opéra national de Russie, qui enchaînent ces deux productions, les versions sont signées « d’après Marius Petipa ». Idem pour le Yacobson Ballet de Saint-Pétersbourg, qui a élu La Belle au bois dormant et Le Lac pour sa tournée en France en début d’année 2019. Le nom de Petipa, déjà noyé dans la musique de ­Tchaïkovski, sera emporté par la célébrité de Noureev A l’Opéra national de Paris, le grand répertoire se compose, entre autres, de six œuvres créées par Petipa et relues par Rudolf Noureev (1938-1993), directeur de la danse de 1983 à 1989. Dont Le Lac des cygnes programmé, du 16 février au 19 mars 2019, à l’Opéra Bastille, dans le cadre du 350e anniversaire de l’institution. Paradoxalement, alors que Noureev est devenu l’un de ses passeurs, le nom de Petipa, déjà noyé dans la musique de ­Tchaïkovski, sera emporté par la célébrité de cette star. « Petipa est pourtant le socle de notre histoire de la danse, de notre héritage, et on ne le connaît pas, s’agace le chorégraphe Thierry Malandain, directeur du Ballet Biarritz. C’est malheureusement le lot des chorégraphes français ! On a fêté cette année chez nous l’Américain Jerome Robbins, mais pas Petipa, qui est par ailleurs le dépositaire des Français installés en Russie que l’on a aussi oubliés comme Jules Perrot et Arthur Saint-Léon, auxquels il succéda à la direction du Ballet impérial. Paradoxalement, Petipa a eu la chance de travailler dans un pays conservateur. Qu’il s’agisse de son époque ou, plus tard, de l’ère soviétique, cela explique qu’on ait sauvegardé ses ballets. »
28/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/28/marius-petipa-choregraphe-star-et-meconnu_5402896_3246.html
« Accès des femmes aux postes hospitalo-universitaires : il est temps de passer à l’action »
Dans une tribune au « Monde », un collectif de médecins appelle le gouvernement à mener un état des lieux sur la place des femmes dans les carrières hospitalo-universitaires en France afin de favoriser leur accès aux postes de direction dans le domaine de la santé
Une chercheuse au laboratoire de la biobanque de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, en 2015. THOMAS SAMSON / AFP Tribune. Le mercredi 24 octobre, Olivier Dussopt, secrétaire d’Etat auprès de Gérard Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, a engagé une discussion sur l’égalité entre les hommes et les femmes, érigée « grande cause du quinquennat », dans la fonction publique, dont la fonction publique hospitalière. Nous appelons à prendre toutes les mesures nécessaires pour favoriser une accession satisfaisante des femmes aux postes hospitalo-universitaires, au sein desquels elles ne sont que peu représentées depuis la création des Centres Hospitalo-Universitaires (CHU) en 1958. Nous appelons également à ce que les femmes soient davantage représentées dans les instances de gouvernance des hôpitaux, des facultés de médecine, et des conseils d’administration des sociétés savantes médicales. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon ceux du Conseil national de l’Ordre des médecins (consultables en ligne), en 2016, 54 % de la population des médecins de 35-50 ans étaient des femmes. Comparativement, en 2017 et 2018, sur 366 nominations à un poste de professeur des universités – praticien hospitalier (PU-PH), 104 (soit 28 %) concernaient des femmes. Ces mêmes années, sur 298 nominations à un poste de maître des conférences – praticien Hospitalier (MCU-PH), 113 (soit 38 %) concernaient des femmes. Dans certaines disciplines, l’écart de nomination entre les hommes et les femmes est particulièrement marqué : anesthésie, médecine intensive-réanimation, psychiatrie, rhumatologie, médecine Interne, gastro-entérologie et hépatologie, chirurgie thoracique, plastique, orthopédique, et vasculaire, ou gynécologie-obstétrique notamment. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Dans les hôpitaux, des postes de pouvoir si masculins Dans une enquête récente au sein d’un CHU parisien, alors que les femmes représentent 49 % de la population médicale, elles représentent seulement 15 % des professeurs de médecine, et 7 % des professeurs dans les spécialités chirurgicales (Revue de Médecine Interne 2018). Les douze présidents des commissions médicales d’établissement locales (CMEL : commissions qui représentent les médecins de chaque hôpital) du plus grand CHU de France (Assistance publique-Hôpitaux de Paris), sont tous des hommes. Les freins à l’accession des femmes La Commission médicale d’établissement centrale de ce même CHU comporte 10 représentants des chefs de pôle, et parmi eux une seule femme, et douze représentants des personnels enseignants et hospitaliers titulaires médicaux ou chirurgicaux, parmi eux une seule femme. Parmi les représentants des professeurs en biologie, les femmes sont en revanche prédominantes. Autre exemple récent, lors du vote pour le renouvellement des membres du Conseil d’administration d’une société savante médicale, la liste proposée comportait huit hommes, et une seule femme.
28/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/28/acces-des-femmes-aux-postes-hospitalo-universitaires-il-est-temps-de-passer-a-l-action_5402887_3232.html
Dans les hôpitaux, des postes de pouvoir si masculins
Maternité, barrière psychologique, machisme… les femmes médecins ne sont qu’une petite minorité à occuper les postes de prestige.
AUREL C’est un milieu prestigieux, difficile d’accès et… très largement tenu par des hommes. Alors que les femmes représentent plus de la moitié (52 %) des médecins hospitaliers en 2018, selon les chiffres du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers, elles ne sont qu’une petite minorité à occuper les postes de professeurs des universités – praticien hospitalier (PU-PH) et les postes de pouvoir à l’hôpital (chef de service, de pôle…). Pour mettre fin à cette anomalie, près de 130 médecins demandent dans une tribune publiée vendredi 28 décembre dans Le Monde que soient prises « toutes les mesures nécessaires à favoriser une accession satisfaisante des femmes » à ces postes. Après avoir longtemps été exclusivement masculin, le monde hospitalo-universitaire, où se combinent missions de soins, de recherche et d’enseignement, peine toujours à se mettre à l’heure de la parité. En 2016, les femmes ne représentaient toujours que 19 % du corps le plus élevé, celui des PU-PH en médecine, selon un rapport des inspections générales des affaires sociales et de l’enseignement supérieur, paru en juillet. Soit un taux encore plus bas que dans le reste du monde universitaire, où 24 % des professeurs sont des femmes. Et, en 2017 et 2018, seules 28 % de femmes ont été nommées PU-PH, pour un total de 366 nominations, font valoir les auteurs de la tribune. Une sous-représentation qui s’explique par une addition de facteurs, plus ou moins visibles. La carrière hospitalo-universitaire, qui se joue à la trentaine, est un parcours du combattant, décrivent unanimement les femmes médecins interrogées par Le Monde. Il faut mener de front une carrière médicale et scientifique, ajouter une thèse en science à celle de médecine, effectuer une mobilité – de préférence à l’étranger –, multiplier les publications de recherche pour avoir le dossier de candidature le plus consistant possible… Le tout à un âge où peut se poser pour les femmes la question de la maternité. « Mettre les bouchées doubles » « La grande complexité dans la carrière réside avant tout dans le fait d’être mère, résume Cécile Badoual, PU-PH anatomopathologiste à l’hôpital européen Georges-Pompidou (Assistance publique-Hôpitaux de Paris), présidente du conseil pédagogique de la faculté de médecine de Paris-Descartes, et mère de trois enfants. Qu’on soit un homme ou une femme, il faut travailler comme un cinglé, mais il y a la réalité de la mère de famille et, pour cela, on n’a pas de points en plus, pas de cadeau. » L’ancienne jeune interne « TGV », qui effectuait son internat à Tours alors que sa famille était à Paris, n’a cessé de « mettre les bouchées doubles ». « Je ne m’arrêtais pas de 8 heures à minuit… Il faut être épaulé, avec une structure familiale qui vous soutient, sinon on n’y arrive pas. »
28/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/28/un-monde-hospitalo-universitaire-si-peu-feminin_5402878_3224.html
L’ancien patron des services secrets chinois condamné à la prison
Considéré comme l’ancien chef du contre-espionnage chinois, Ma Jian a été condamné jeudi pour corruption à la prison à vie par un tribunal du Liaoning (nord-est de la Chine).
Considéré comme l’ancien chef du contre-espionnage chinois, Ma Jian a été condamné pour corruption à la prison à vie le 27 décembre. AP Deux personnalités chinoises de très haut niveau viennent d’être à leur tour condamnées pour corruption : Ma Jian, l’ancien patron du contre-espionnage chinois, et Cai Xiyou, ancien directeur du groupe public Sinochem, un des géants mondiaux de l’industrie chimique. Ma Jian a été condamné jeudi 27 décembre à la prison à vie par le tribunal de Dalian (Liaoning), pour « corruption, extorsion et délit d’initié ». Ancien vice-ministre de la sécurité d’Etat, ayant à ce titre régné sur les services d’espionnage et de contre-espionnage, Ma Jian avait été arrêté en 2015, à la suite de la chute de son patron, le tout-puissant Zhou Yongkang, ancien membre du bureau politique du Parti communiste, arrêté en 2014 pour corruption et condamné à la prison à vie. Selon le jugement rendu jeudi, à la suite d’une audience à huis clos tenue le 16 août, Ma Jian a profité de ses fonctions de ministre adjoint pour aider des entreprises contrôlées par le milliardaire en fuite Guo Wengui, sévère opposant au président chinois Xi Jinping. En retour, Ma Jian a reçu pour plus de 109 millions de yuans (près de 14 millions d’euros) de biens. Ma Jian, qui a été déchu de ses droits civiques et dont les biens ont été saisis, n’a pas fait appel de la décision du tribunal. Commerce illégal facilité La veille, Cai Xiyou, ancien directeur général de Sinochem, avait, lui, été condamné à douze ans de prison et à une amende de 3 millions de yuans (environ 381 000 euros) par le tribunal de Tai’an (Shandong). Il est reconnu coupable d’avoir reçu de l’argent et des cadeaux pour une valeur de 53,7 millions de yuans, afin de modifier des contrats et de faciliter le commerce illégal de produits raffinés entre 1997 et 2016, notamment à l’époque où il était chez Sinopec, le groupe pétrolier, avant d’être nommé directeur général de Sinochem en 2014. Le tribunal dit s’être montré indulgent car Cai Xiyou a coopéré avec la justice et a restitué l’argent gagné illégalement. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Chine, un dirigeant de la plate-forme vidéo d’Alibaba arrêté pour corruption Lancée fin 2012 lors de l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping, la campagne contre la corruption a touché plus de 1,3 million de membres du parti (sur environ 90 millions), de tous niveaux. Mi-décembre, le bureau politique l’a, pour la pour la première fois, qualifiée de « victoire éclatante ». Mais, selon l’avis des experts, cela ne signifie pas que cette campagne va prendre fin. Selon l’agence de presse officielle Xinhua, une des étapes essentielles de cette campagne fut la création en mars 2018 de la Commission nationale de lutte contre la corruption dotée de pouvoirs de répression non seulement envers les membres du parti mais aussi envers les fonctionnaires, notamment dans les écoles et les hôpitaux.
28/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/28/l-ancien-patron-des-services-secrets-chinois-condamne-a-la-prison_5402875_3210.html
Retraite Agirc-Arrco : les détails du malus entrant en vigueur le 1er janvier
A partir de 2019, certains salariés verront leurs pensions complémentaires minorées de 10 % durant leurs trois premières années de retraite. Qui est concerné ? Décryptage du dispositif.
Le malus, officiellement nommé « coefficient de solidarité », s’élève à 10 % de la pension complémentaire et sera appliqué trois ans. Eric Audras/Onoky / Photononstop Qui dit retraite de base à taux plein, dit, pour un salarié, pension complémentaire non minorée. C’est vrai, mais quelques jours seulement… Car pour les départs à la retraite intervenant en 2019 ou après, un malus temporaire pourra être appliqué à votre pension Agirc-Arrco même si vous avez tous vos trimestres. La mesure, une idée du Medef, avait été actée en 2015 à l’issue de tumultueuses négociations entre les organisations syndicales et patronales qui cogèrent ces régimes. Le malus en question, officiellement nommé « coefficient de solidarité », s’élève à 10 % de la pension complémentaire et sera appliqué trois ans, sans pouvoir courir au-delà des 67 ans du retraité. ll sera réduit de moitié (5 %) pour les retraités assujettis au taux réduit de CSG de 3,8 % – pour les pensions versées en 2018, le taux réduit de CSG concerne ainsi les retraités dont le revenu fiscal de référence (RFR) est compris entre 11 018 euros et 14 404 euros pour un foyer avec une part fiscale. Sera pris en compte le RFR figurant sur le dernier avis d’imposition connu au départ à la retraite et le malus restera ensuite inchangé durant trois ans. Qui y échappera ? Les seniors déjà à la retraite ne sont pas concernés. Ni ceux nés avant le 1er janvier 1957, et ce même s’ils seront encore en activité au 1er janvier 2019. Les partenaires sociaux ont aussi exempté de malus les plus modestes, ceux dont le revenu fiscal de référence leur permet d’être exonérés de CSG (RFR inférieur à 11 018 euros pour une part fiscale en 2018). D’autres exceptions ont en outre été prévues, par exemple pour certaines personnes handicapées. Lire aussi Réforme des retraites : ce que veulent les citoyens consultés Vous êtes né en 1957 ou après et ne faites pas partie des exceptions ? Deux options : soit vous partez tout de même dès que vous remplissez les conditions du taux plein et vous subissez le malus, soit vous reportez votre départ d’au moins un an et vous y échappez. Notez que dans le cas général, vous obtenez le taux plein dès lors que vous avez à la fois l’âge légal de la retraite et le nombre de trimestres requis pour votre génération. Quid des carrières longues ? Si vous avez commencé à travailler tôt et que vous pouvez prétendre à un départ anticipé pour carrière longue avant 2019, vous n’êtes pas concerné par le malus, quelle que soit votre date effective de retraite. Encore faudra-t-il fournir à l’Agirc-Arrco le certificat d’attestation carrière longue que peut vous envoyer, sur demande, le régime général. Lire aussi Rentabilité des cotisations retraite : le grand écart Et si vous pouvez prétendre à un départ anticipé pour carrière longue en 2019 ou après ? Dans ce cas s’appliquera la même règle que pour les autres : vous subirez le malus sauf si vous poursuivez votre activité un an après avoir rempli les conditions du taux plein (donc, pour vous, un an après la date à partir de laquelle vous avez le droit de prendre votre retraite). Et en cas de retraite progressive ? Le malus ne s’appliquera pas aux retraites progressives, ce n’est qu’au moment de votre départ complet qu’il pourra entrer sur scène. Et si vous n’avez pas le taux plein ? Si vous partez à la retraite sans avoir tous vos trimestres et avant l’âge du taux plein automatique (65 à 67 ans selon les générations), vous ne serez pas concerné par le nouveau malus temporaire. En revanche, vous subirez des abattements de pension définitifs (ceux-ci ne sont pas modifiés). Et si vous reportez votre départ d’au moins deux ans ? La mise en place du malus s’accompagne de l’instauration d’un système de bonus temporaires, les « coefficients majorants ». Ceux qui retardent leur retraite d’au moins deux ans (à partir du moment où ils remplissent les conditions du taux plein, toujours) verront leur pension complémentaire dopée de 10 % durant un an, c’est 20 % pour trois ans de report et 30 % pour quatre ans ou plus.
28/12/2018
argent
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La Nouvelle-Calédonie interdit le plastique à usage unique
La loi adoptée jeudi prévoit l’abandon des sacs plastique mais aussi des gobelets, verres, tasses, assiettes, pailles ou encore des Coton-Tige d’ici à 2020.
Les sacs en plastique seront interdits en Nouvelle-Calédonie à partir du 1er juillet 2019. Mark Baker / AP La Nouvelle-Calédonie a décidé d’interdire progressivement d’ici à 2020 l’utilisation de tous les objets en plastique à usage unique pour lutter contre la pollution. Adopté jeudi 28 décembre par le Congrès de Nouvelle-Calédonie, le texte a été soutenu par les élus de Calédonie ensemble, parti de droite modérée à l’origine du projet, et par les indépendantistes. Les deux groupes affiliés aux Républicains (LR) se sont abstenus. « Il était temps. Le plastique est un fléau en Nouvelle-Calédonie, on en trouve dans les rivières, les mangroves, les forêts, le lagon… », a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) Cécilia Royer, membre d’une association écologiste, Mocamana, qui fabrique des cabas en toile de jute recyclé sur ce territoire français. Voir notre infographie : L’impact du plastique sur l’environnement expliqué en quelques chiffres Fléau pour l’environnement A compter du 1er juillet 2019, les sacs en plastique à usage unique distribués à la caisse des magasins, les sacs non biosourcés ainsi que les cabas en plastique réutilisables seront interdits. Suivront ensuite, à partir du 1er septembre 2019, les gobelets, verres, tasses, assiettes, pailles ou encore Coton-Tige en plastique ; puis, à compter du 1er mai 2020, les barquettes destinées à l’emballage des denrées alimentaires au moment de l’achat ou pour les livraisons. « Dix ans après avoir inscrit notre lagon au Patrimoine mondial de l’humanité de l’Unesco (…), il était urgent d’agir face au fléau que représente pour l’environnement la pollution due aux produits en plastique », a estimé le parti Calédonie ensemble dans un communiqué. Selon des chiffres transmis en séance, les 268 000 habitants de Nouvelle-Calédonie utilisent chaque année 60 millions de sacs en plastique, 40 millions de barquettes et 5 tonnes de pailles. Située dans l’océan Pacifique Sud, à 1 500 kilomètres à l’est de l’Australie, la Nouvelle-Calédonie est un haut lieu de la biodiversité mondiale. Manque de préparation ? Le Rassemblement-LR et Les Républicains calédoniens ont critiqué une loi « rédigée dans l’urgence », qui a « négligé la préparation des industriels locaux ». Leurs réserves faisaient écho à l’avis rendu en octobre dernier par l’autorité locale de la concurrence, qui avait recommandé la suppression des « mesures protectionnistes » de ce texte qui portent une atteinte « injustifiée, inadaptée et disproportionnée à la libre concurrence ». Cette loi antipollution est en effet assortie d’une « interdiction générale et illimitée dans le temps de toute importation » du type de sacs destinés à se substituer aux actuels sacs en plastique à usage unique, non compostables et non recyclables. Leur production est réservée à l’industrie locale.
28/12/2018
planete
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Une tempête perturbe le trafic aérien aux Etats-Unis
Plus de 6 500 vols ont été retardés et environ 800 annulés. L’aéroport de Dallas, au Texas, est le plus touché.
Une tempête a provoqué, jeudi 27 décembre, l’annulation de centaines de vols et retardé des milliers d’autres dans le centre des Etats-Unis, perturbant ainsi les plans des voyageurs, particulièrement nombreux en cette période des fêtes. Plus de 6 500 vols ont été retardés et environ 800 annulés, selon le site de suivi des vols FlightAware. L’aéroport international de Dallas-Fort Worth, au Texas, a été le plus touché, avec plus de 450 annulations et 600 retards. « Nos vacances de Noël sont gâchées », a témoigné au journal local Fort Worth Star-Telegram une voyageuse en transit bloquée à Dallas, Denise Knight. « A peine arrivés à notre destination et il sera déjà le temps pour nous de rentrer », a-t-elle pesté. Nous n’avons « ni bagages ni vêtements propres, et pas de vol assuré avant samedi ». Trente centimètres de neige Pluie, neige et vents violents ont également rendu la circulation dangereuse, voire impossible, notamment dans le nord de la région des Grandes Plaines, où, par endroits, jusqu’à plus de 30 centimètres de neige sont tombés. Les autorités du Nebraska ont fermé à la circulation l’un des axes principaux de cet Etat rural du centre des Etats-Unis. Celles du Dakota du Nord ont de leur côté conseillé d’éviter tout déplacement dans la partie est de l’Etat, où le petit aéroport de Fargo a été fermé. Selon le service météo américain, cette tempête hivernale, baptisée « Eboni », devrait continuer vendredi matin à déverser, du nord au sud, d’importantes quantités de neige et de pluie, avant de s’estomper progressivement au fil de la journée.
28/12/2018
planete
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Kazakhs et Ouïgours dans l’enfer du goulag chinois
Le régime chinois déporte en masse ces minorités dans des camps. « Le Monde » a pu recueillir les rares témoignages d’anciens détenus.
Une femme tient le portrait d’un de ses proches disparu en Chine, dans les locaux de l’association Atajurt, à Almaty (Kazakhstan), le 4 décembre 2018. . En rangée, deux par deux, ils sont 500 détenus, que des gardes font monter dans des bus, cagoule sur la tête. Au bout du trajet, ils découvrent un nouveau camp d’internement, assez similaire à celui d’où ils viennent : « Il y avait des bâtiments neufs, et d’autres qui n’étaient pas finis. Il devait y avoir 3 000 personnes, beaucoup de Kazakhs comme moi, qui étaient nés en Chine et à qui on disait qu’ils n’auraient pas dû changer de nationalité. Des gens qui avaient utilisé WhatsApp. D’autres qui avaient dit “Assalamu alaykum” [“Que la paix soit sur vous” en arabe]. » Orinbek Koksebek, 38 ans, a passé cent vingt-cinq jours en détention en Chine début 2018 – mais il est incapable de dire combien dans l’un et l’autre des deux camps où il a été envoyé, à Tarbaghatay (Tacheng, en chinois), une sous-préfecture de l’ouest de la Région autonome ouïgoure du Xinjiang, là où la frontière chinoise avec le Kazakhstan fait un angle droit. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Kazakhstan, avec les rescapés de l’enfer du goulag chinois Lui qui parle très mal le mandarin doit apprendre par cœur trois chansons : La Marche des volontaires (l’hymne national chinois) et deux chants maoïstes, L’Orient est rouge et Sans le Parti communiste, il n’y a pas de Chine nouvelle. Sinon, lui disent ses interrogateurs, il restera cinq ans en détention. A six reprises, il est envoyé au cachot, un espace noir, très étroit, pour vingt-quatre heures, nourri d’un seul beignet, sans eau. La Chine présente ses camps comme de banals centres de déradicalisation et de «formation professionnelle» de ses minorités. Orinbek Koksebek, ainsi que trois autres anciens détenus rencontrés à Almaty (Kazakhstan) ou à Istanbul (Turquie), font partie des rares témoins du programme de détention de masse des minorités turcophones musulmanes du Xinjiang, l’immense territoire aux confins de l’Asie centrale que le régime communiste administre d’une main de fer. Y sont soumis les Ouïgours, qui constituent 11 millions des habitants de la région autonome, mais aussi les Kazakhs (1,5 million), dans des structures carcérales existantes, des prisons noires, des écoles du Parti, ainsi que de gigantesques camps récemment construits, dont plus d’une soixantaine ont été repérés par image satellite par des experts. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Camps de détention en Chine : le Kazakhstan, trop dépendant pour froisser Pékin La Chine présente officiellement ces derniers comme de banals centres de déradicalisation et de « formation professionnelle » de ses minorités, où les étudiants seraient rémunérés pour du travail en atelier. Selon la radio américaine Radio Free Asia, certains sont en train d’être aménagés dans ce sens pour de futures visites d’inspecteurs étrangers qui, dès lors, ne verront pas la réalité de cet archipel du goulag chinois.
28/12/2018
international
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Noël sec et amer au Zimbabwe
Un an après, l’euphorie qui a accompagné le départ de Robert Mugabe a laissé la place à une crise économique profonde, marquée par une inflation galopante.
LETTRE D’AFRIQUE En un an, la chute est terrible. C’est celle de l’espoir d’un pays, le Zimbabwe. Noël 2017 : cela semble si loin, à présent. La période des fêtes, alors, était une fête, une vraie. Dans les moindres rassemblements, en famille comme lors de la prestation de serment du nouveau président Emmerson Mnangagwa, on chantait Kutanga Kwaro, de Jah Prayzah, l’hymne du coup d’Etat qui avait renversé Robert Mugabe quelques mois plus tôt. La chanson était supposée avoir annoncé le changement avant qu’il n’ait lieu, et décrit en termes mystérieux le nouveau chef, qu’on surnommait encore « le crocodile » avec tendresse. L’histoire du Zimbabwe, tout à coup, redevenait une chose merveilleuse à vivre, et à raconter. La vie de tous les jours promettait d’être meilleure. Les policiers harceleurs avaient été priés de ficher le camp des routes, où ils rançonnaient en essaims serrés, et d’aller bouder dans leurs casernes. Les prix n’avaient pas baissé, les attentes devant les banques pour retirer des dollars n’avaient pas disparu, mais chacun était décidé à tout mettre en œuvre pour passer un Noël mémorable : dans les supermarchés, les queues s’étendaient au rayon des boissons, et ce n’était que le reflet de l’engouement général pour ce moment de suspension. Il va sans dire que ce Noël-là fut sérieusement arrosé. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Zimbabwe, pays en faillite où l’argent est devenu fou Pénurie et inflation En comparaison, comme la fête est amère, cette année. Dans les mêmes supermarchés, certains rayons sont vides. On peine à trouver, selon les moments, des produits aussi simples et répandus que certains sodas. L’huile de friture est un luxe. Le sucre une folie. Pour cause de pénurie, la bière ou les boissons sucrées sont limitées à une ou deux bouteilles par personne. Et les prix se sont envolés. L’inflation n’est en théorie que de 30 %, mais les étiquettes disent une autre réalité. Même le Mazoe, ce sirop d’orange qui est la boisson nationale modeste, manque dans les rayons. Dix ans après l’hyperinflation de 2008-2009, le pays semble à nouveau sur une pente inflationniste glissante. Ceci, en raison d’une menace d’effondrement financier. Depuis la mise à mort des dollars zimbabwéens pour stopper la hausse des prix, le pays s’est tourné vers le dollar américain. Mais les billets verts manquent, et le gouvernement, en 2016, a mis en circulation des bond notes, sortes de bons du trésor portables (on dirait surtout des billets de Monopoly), garantis par la banque centrale du Zimbabwe. En parallèle, le gouvernement a entrepris de procéder à ses paiements (notamment les salaires, l’essentiel de ses dépenses), en monnaie électronique, créant une masse toujours plus importante de dollars virtuels, mais non convertibles en dollars physiques.
28/12/2018
afrique
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En Andalousie, l’extrême droite est bien le faiseur de majorité
La candidate de la formation de centre droit Ciudadanos Marta Bosquet a été élue, jeudi, à la présidence du Parlement régional grâce à l’appui du parti Vox.
Marta Bosquet, du parti Ciudadanos, à la tribune du Parlement d’Andalousie, le 20 décembre 2017. PARLIAMENTO DE ANDALUCIA / CC BY 2.0 / FLICKR Une page vient de se tourner en Andalousie. Grâce au soutien de Vox, le petit parti d’extrême droite qui a fait une entrée en force lors des élections régionales du 2 décembre, la droite a pris pour la première fois la présidence du Parlement andalou. Vox confirme ainsi son rôle de faiseur de majorité qui devrait permettre au Parti populaire (PP, conservateur) et à Ciudadanos (centre droit) de gouverner la région la plus peuplée d’Espagne, qui était aux mains des socialistes (PSOE) depuis trente-six ans. Lors du scrutin du 2 décembre, le PSOE, bien qu’arrivé en tête, avait obtenu le pire résultat de son histoire, avec trente-trois députés et 28 % des voix. Le PP andalou était, lui, arrivé en deuxième place (26 sièges), devant Ciudadanos (21 élus). Mais c’est l’irruption inattendue de Vox et de ses douze députés (11 % de voix) qui a bouleversé le paysage politique local. Pour la première fois depuis le rétablissement de la démocratie en Espagne, après la mort du dictateur Francisco Franco en 1975, un parti d’extrême droite entrait dans un Parlement régional. Une coalition sans précédent Bien décidés à déboulonner les socialistes de leur fief, les conservateurs et les centristes ont scellé un accord pour gouverner l’Andalousie qui donnera, en janvier 2019, la présidence de la région à Juan Manuel Moreno, le patron du PP local. Mais, n’ayant pas à elles seules une majorité absolue dans un Parlement régional comptant 109 députés, les deux formations devront donc compter sur les élus de Vox. Un premier pas vers la constitution de cette coalition sans précédent a été franchi, jeudi 27 décembre, à l’occasion de l’élection du président du Parlement. La formation d’extrême droite a apporté son soutien à Marta Bosquet, candidate de Ciudadanos. En échange, l’un des députés de Vox, Manuel Gaviria, est devenu l’un des six membres du bureau de l’Assemblée qui siège à Séville. Le parti d’extrême droite avait répété ces dernières semaines qu’il ne serait pas « un obstacle pour le changement » en Andalousie. Il n’avait pas demandé à entrer au sein du nouvel exécutif mais il n’avait pas non plus confirmé qu’il voterait en faveur d’un gouvernement rassemblant le PP et Ciudadanos. Juan Manuel Moreno deviendra président de l’Andalousie en janvier, grâce à une alliance avec l’extrême droite. JORGE GUERRERO / AFP Vox semble décidé à vendre cher son soutien. « Les négociations pour former un gouvernement en Andalousie avec le PP et Ciudadanos ne font que commencer », a déclaré son secrétaire général, Javier Ortega, précisant qu’il « ne participait pas à l’accord » conclu par les deux partis. « Les tractations aborderont tous les sujets, point par point. » Sur le plan national, Vox, né en 2013, est opposé à l’immigration illégale et à l’indépendantisme catalan. Il veut supprimer l’autonomie des régions au nom des économies budgétaires et de la défense de l’unité de l’Espagne. Il demande aussi l’abolition de la loi contre les violences faites aux femmes, que le parti considère discriminatoire envers les hommes. Un rapprochement en Andalousie pourrait préfigurer d’autres alliances à droite, dans les régions ou à l’échelle nationale. Pour le président du PP, Pablo Casado, il n’est que « le préambule de ce qui va se passer lors des municipales » du 26 mai 2019. « Si un accord est possible entre les partis constitutionnalistes [qui défendent l’unité de l’Espagne] en Andalousie, pourquoi ne le serait-il pas dans d’autres régions ? », a déclaré le chef de file conservateur. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Espagne, la droite courtise l’extrême droite, qui a fait une entrée en force au Parlement andalou Selon les estimations de l’institut de sondage Metroscopia publiées le 19 décembre, Vox pourrait recueillir vingt-neuf députés (sur 350) au Parlement espagnol lors d’hypothétiques élections générales. Ciudadanos, de son côté, a plus de mal à gérer un soutien de l’extrême droite. Son secrétaire général, José Manuel Villegas, a affirmé que son parti « n’acceptera pas de changer le pacte conclu avec le PP » qui propose d’alléger la pression fiscale et de « dépolitiser » l’administration. Le PSOE n’a pas hésité, lui, à exploiter les contradictions de l’accord. « Sans l’extrême droite, ils n’ont pas de gouvernement. Pourquoi le cachent-ils ? Ont-ils honte ? », a dénoncé la présidente sortante d’Andalousie, Susana Diaz. Le pacte andalou pourrait poser problème au parti centriste, notamment en Catalogne où il est la principale force d’opposition face aux indépendantistes. Manuel Valls, qui se présente à la mairie de Barcelone et dont la plateforme bénéficie du soutien de Ciudadanos, a préféré prendre ses distances. « L’irruption de l’extrême droite, même si elle répond au résultat des urnes, est une mauvaise nouvelle pour l’Espagne et pour l’Europe, a assuré l’ancien premier ministre français sur Twitter. Tout accord de programme ou de gouvernement avec Vox serait une erreur politique et une incongruité morale. »
28/12/2018
international
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En Belgique, le gouvernement gêné par la décision de rapatrier des enfants de djihadistes
La justice oblige l’Etat à prendre « toutes les mesures nécessaires » pour rapatrier de Syrie six enfants de deux femmes belges.
Le camp de déplacés d’Al-Hol (Syrie), où sont retenus les enfants et leurs mères qui ont fait l’objet de la décision de justice belge, le 8 décembre. DELIL SOULEIMAN / AFP Le gouvernement belge, qui sort à peine d’une crise l’ayant laissé sans réel pouvoir, se serait sans doute bien volontiers épargné cette épine dans le pied. Mercredi 26 décembre, un juge de Bruxelles a ordonné à l’Etat, en référé, de prendre « toutes les mesures nécessaires et possibles » pour rapatrier d’Al-Hol, dans le nord-est syrien contrôlé par les Kurdes, six enfants nés de deux femmes djihadistes belges… Y compris en autorisant ces dernières à rentrer en Belgique pour les raccompagner. Agés de quelques mois à 6 ans, ces enfants sont retenus avec leurs mères, des visages connus de la justice belge, toutes deux condamnées en mars à Anvers (Flandre), en leur absence, à cinq ans de prison pour avoir rejoint les rangs de combattants djihadistes en Syrie dès 2012. La décision du juge des référés du tribunal néerlandophone de la capitale est un camouflet pour la ligne édictée par le gouvernement du premier ministre libéral Charles Michel, qui a décidé que la Belgique accepterait de reprendre au cas par cas les enfants des Belges partis combattre en Syrie, mais pas leurs parents si ceux-ci étaient des djihadistes avérés. Pour comprendre le contexte : Djihadistes étrangers en Syrie : le casse-tête du rapatriement des enfants Exécutif muet Elle a été saluée par les organisations non gouvernementales (ONG) et les avocats de familles – grands-parents, oncles, tantes – ayant entamé des démarches pour récupérer les enfants de leurs proches aujourd’hui bloqués dans des camps en Syrie ou en Turquie. « Nous espérons vraiment que ceci va pousser le gouvernement à ramener tous les enfants localisés en Syrie », a réagi la fondation Child Focus. En 2017, les autorités estimaient qu’une grosse centaine d’enfants belges de moins de 12 ans se trouvaient encore en Syrie, pays en guerre que plus de 400 adultes belges ont rejoint depuis 2012 dans le but d’y combattre. Au sein de l’exécutif, l’embarras était perceptible après le jugement, qu’aucun ministre n’a commenté. « Nous analysons la situation en concertation avec les ministères de la justice et de l’intérieur », a simplement fait savoir un porte-parole du ministère des affaires étrangères, joint par Le Monde. L’Etat belge a la possibilité d’interjeter appel, mais celui-ci ne sera pas suspensif. Dans l’opposition après son départ fracassant du gouvernement début décembre, l’Alliance néoflamande (N-VA, nationalistes flamands) s’est immédiatement indignée. « Le gouvernement doit faire appel sinon ça va dégénérer », a tweeté l’ancien secrétaire d’Etat à l’asile et à la migration Theo Francken, figure populaire de ce parti qui a décidé de faire campagne sur les thèmes de l’immigration et de la sécurité dans la perspective des élections législatives du 26 mai 2019. « Longue vie au califat grâce à l’Etat de droit belge », a-t-il ironisé en rappelant le parcours des deux mères de 25 et 26 ans, radicalisées dès l’adolescence. « Politique illégale » Le juge des référés a donné quarante jours à l’Etat pour rapatrier les six enfants, sous peine d’une astreinte de 5 000 euros par jour de retard et par enfant. Dans ses motivations, il épingle la politique « manifestement illégale » et « contraire aux droits fondamentaux » du gouvernement belge, qui a pour l’instant décidé de ne rapatrier que les enfants âgés de 12 ans et moins. Cela revient de fait, et dans ce cas précis, à séparer les enfants de leur mère, ce qu’interdit expressément la Convention internationale des droits de l’enfant, relève-t-il. Mais le juge va beaucoup plus loin : il prescrit à l’Etat de remettre ou de faire parvenir des passeports aux enfants et à leurs mères, lui ordonne « de trouver un accord avec les autorités locales, en particulier les gérants du camp » d’Al-Hol pour les en faire sortir, et de « faire accompagner les deux mères par des services de police ou de sécurité pour empêcher leur fuite ». Le député Georges Dallemagne, spécialiste des questions de terrorisme, rappelle que la Belgique, comme d’autres Etats européens, a toujours été « très réticente » pour aller chercher ses ressortissants, adultes ou enfants. « Mais les Kurdes de Syrie font pression pour qu’on leur reprenne ceux qu’ils hébergent (…). Il doit y avoir moyen de trouver une solution », plaide-t-il, en soulignant que le retrait des troupes américaines annoncé par Donald Trump risque de « compliquer considérablement » la situation des centaines de ressortissants européens aux mains des autorités kurdes du nord-est de la Syrie. Radicalisées de la première heure En Belgique, ajoute M. Dallemagne, élu du parti chrétien-démocrate CDH (Centre démocrate humaniste), « l’obstacle politique majeur, c’est que les mères sont elles-mêmes considérées par l’opinion comme des menaces potentielles pour la sécurité du pays, qu’elles aient participé au djihad ou qu’elles aient voulu s’échapper ». Le juge des référés néerlandophone avait été saisi par l’avocat des deux mères (ayant trois enfants chacune). Tatiana Wielandt et Bouchra Abouallal, présentées par les médias comme amies et belles-sœurs, font figure de radicalisées de la première heure, dans le sillage de leurs époux, des responsables du groupuscule djihadiste Sharia4Belgium (aujourd’hui dissous). Elles les ont suivis en Syrie fin 2012, à tout juste 20 ans. Rentrées en Belgique pour accoucher chacune de leur deuxième enfant, elles sont ensuite reparties en Syrie. Après la mort au combat de leurs maris respectifs en 2014, elles ont été unies à d’autres combattants de l’organisation, et ont donné chacune naissance à un troisième enfant. Si elles reviennent en Belgique, les mères n’échapperont pas à la prison, mais elles se disent prêtes à payer pour « leur faute ». L’essentiel, confiait Tatiana Wielandt dans un reportage diffusé en octobre par la télévision publique flamande VRT, c’est que « [ses] enfants soient en sécurité et aillent à l’école ».
28/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/28/embarras-de-l-executif-belge-apres-la-decision-de-rapatrier-les-enfants-de-djihadistes_5402848_3210.html
Bobigny : quatre personnes, dont deux petites filles, meurent dans l’incendie d’un immeuble
Plus d’une centaine de pompiers sont intervenus sur l’incendie de cet immeuble de la cité Paul-Eluard de cette ville de Seine-Saint-Denis.
LUCAS BARIOULET / AFP Un incendie, qui s’est déclaré jeudi 27 décembre dans la soirée dans un immeuble de la cité Paul-Eluard de Bobigny (Seine-Saint-Denis), a fait quatre morts et cinq blessés, selon une source proche de l’enquête. Une femme de 42 ans et ses filles, âgées de trois et huit ans, ont été retrouvées « à proximité ou dans l’ascenseur » de cet immeuble d’habitation, a précisé un porte-parole de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP). Elles sont mortes « intoxiquées par les fumées ». Le pronostic vital du père, 49 ans, était toujours engagé vendredi 28 décembre en fin d’après-midi. Une habitante de 25 ans est morte, vendredi, des suites de ses blessures. L’incendie s’est déclaré vers 21 h 20 dans un appartement du premier étage de cet immeuble d’habitation de 18 étages, situé dans le centre de la préfecture de Seine-Saint-Denis, et s’est « propagé horizontalement », avant d’être maîtrisé peu après 23 heures. Le parquet de Bobigny a confié l’enquête à la police judiciaire du département. Hypothèse d’un accident domestique Dans le quartier Paul-Eluard, composé de plusieurs de tours d’une vingtaine d’étages, des habitants manifestaient, vendredi, leur tristesse et leur colère. Lorsque des élus sont venus s’exprimer devant des caméras de télévision, des locataires ont pris à partie le maire (UDI) de Bobigny, Stéphane de Paoli, et les représentants du bailleur social Seine-Saint-Denis Habitat. « Ils viennent que quand la télé est là ou s’il y a des morts », fulmine Zafer, locataire dans l’immeuble incendié. Photo à l’appui, le jeune homme affirme que des tuyaux d’aération sont défectueux et exige des réparations. D’autres se plaignent de la présence de cafards et du manque de sécurité dans les parties communes de la tour. « L’immeuble n’était pas insalubre », a souligné auprès de l’Agence France-Presse (AFP) le maire de Bobigny, précisant que l’hypothèse d’un « accident domestique » était, pour l’heure, privilégiée. Dans un communiqué, le bailleur social souligne que le bâtiment avait fait récemment « l’objet de travaux lourds de réhabilitation de plusieurs millions d’euros » et que ses installations électriques étaient « en bon état ». Seine-Saint-Denis Habitat ajoute qu’une entreprise avait vérifié en novembre « la conformité des installations incendie » qui ont « bien fonctionné » jeudi soir. « Les gens ont paniqué. J’ai vu des gens sortir brûlés » LUCAS BARIOULET / AFP Selon une source proche du dossier, trois des victimes, issues d’une même famille vivant au 18e étage, avaient pris l’ascenseur pour quitter le bâtiment, se trouvant prises au piège quand celui-ci s’est arrêté au premier étage, là où l’incendie s’est déclaré. Selon des témoignages recueillis par l’AFP, le feu aurait pris dans une chambre avant de se propager dans l’appartement et le couloir. Pris de panique, les habitants de l’appartement se seraient précipités à l’extérieur en criant à leurs voisins de sortir eux aussi. Laetitia, qui habite au rez-de-chaussée, était, elle, à l’extérieur du bâtiment lorsqu’elle a vu les flammes : « J’ai crié aux locataires de sortir. Les gens ont paniqué. J’ai vu des gens sortir brûlés. » A leur arrivée sur place, les pompiers ont demandé aux habitants de rester confinés chez eux, à l’instar de Sonia, 20 ans, qui habite au quatrième étage. « J’ai paniqué. On a entendu les pompiers frapper à la porte. Ils nous ont dit de rester confinés. On est restés plus de deux heures chez nous », a-t-elle déclaré à une journaliste de l’AFP. L’incendie a nécessité l’intervention d’une centaine de pompiers. Le ministre de la cohésion des territoires, Julien Denormandie, a affirmé dans un Tweet que « toute la lumière [devrait] être faite sur les raisons de ce drame », en exprimant ses « pensées émues aux familles des victimes » et son « hommage au travail des équipes de secours ». L’immeuble, situé à une centaine de mètres de la mairie de Bobigny, « n’est pas insalubre », a précisé Sonia : « J’en ai vu des incendies depuis que j’habite ici, mais c’est la première fois qu’il y a des morts. » Zafer, qui habite aussi l’immeuble, dit avoir « déjà signalé à plusieurs reprises à l’office HLM que les normes de sécurité ne sont pas respectées dans la tour », répétant que l’immeuble « n’est pas insalubre ». Précédents dans le département LUCAS BARIOULET / AFP Plusieurs incendies meurtriers se sont produits en Seine-Saint-Denis cette année. Le 30 juillet, un feu dans un immeuble d’Aubervilliers avait provoqué la mort d’une mère et de ses trois enfants. Un enfant de dix ans, soupçonné d’avoir provoqué le sinistre en jouant avec un briquet et un torchon dans l’immeuble, avait été inculpé. Pénalement non responsable en raison de son âge, il avait été contraint à une mesure d’éloignement de la commune. A peine un mois plus tard, un incendie dans un immeuble d’habitation de la même commune avait blessé grièvement sept personnes, dont cinq enfants. Samedi soir, deux hommes sont morts après l’incendie d’un pavillon qu’ils squattaient à Drancy. Lire nos informations : Pourquoi l’habitat insalubre ne se résorbe pas
28/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/28/une-femme-et-deux-fillettes-meurent-dans-un-incendie-d-immeuble-d-une-cite-de-bobigny_5402845_3224.html
Maroc : un Suisse arrêté en lien avec le meurtre des deux touristes scandinaves
L’homme est notamment soupçonné d’avoir entraîné au tir certaines personnes interpellées pour leurs liens présumés avec le double homicide.
Un hommage aux deux touristes scandinaves, le 22 décembre, à Rabat. FADEL SENNA / AFP Un Suisse installé au Maroc a été arrêté samedi à Marrakech pour son lien présumé avec certains suspects dans le récent meurtre de deux jeunes randonneuses scandinaves dans le sud du Maroc, a annoncé le Bureau central d’investigations judiciaires (BCIJ). L’homme, « imprégné de l’idéologie extrémiste » et portant également la nationalité espagnole, est « soupçonné d’avoir appris à certaines personnes interpellées dans cette affaire les outils de communication issus des nouvelles technologies et de les avoir entraînées au tir », a ajouté le BCIJ dans un communiqué. L’enquête révèle son « adhésion à des opérations de recrutement et d’embrigadement de citoyens marocains et subsahariens pour exécuter des plans terroristes au Maroc », a précisé l’unité en charge de la lutte antiterroriste dans le royaume. Louisa Vesterager Jespersen, une étudiante danoise de 24 ans, et son amie Maren Ueland, une Norvégienne de 28 ans, ont été tuées dans la nuit du 16 au 17 décembre dans le sud du Maroc, où elles passaient des vacances. Leurs corps ont été découverts sur un site isolé du Haut Atlas, dans un secteur prisé des amateurs de marche. Les deux victimes ont été décapitées. Les autorités marocaines ont déjà arrêté 18 personnes pour leurs liens présumés avec ce double homicide qualifié de « terroriste » par Rabat. Lire aussi Après la mort de deux touristes, le Maroc rattrapé par le risque terroriste Allégeance à Abou Bakr al-Baghdadi Les quatre principaux auteurs présumés, interpellés à Marrakech les jours suivant le double meurtre, appartenaient à une cellule inspirée par l’idéologie du groupe Etat islamique (EI) mais « sans contact » avec ses cadres en Syrie ou en Irak, avait déclaré lundi à l’AFP le chef de l’antiterrorisme marocain Abdelhak Khiam. L’un d’eux, Abdessamad Ejjoud, un marchand ambulant de 25 ans, est soupçonné par les enquêteurs d’être le chef de cette « cellule terroriste ». C’est lui que l’on voit parler dans une vidéo tournée une semaine avant le meurtre, dans laquelle les quatre principaux suspects prêtent allégeance à Abou Bakr al-Baghdadi, le chef de l’EI. L’affaire a suscité une vive émotion en Norvège, au Danemark mais aussi au Maroc, où une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, montrant l’exécution d’une des deux victimes, a mis le pays en émoi. La vidéo est considérée comme authentique par les autorités marocaines, selon une source proche de l’enquête à l’AFP. Épargné jusqu’ici par les attentats de l’EI, le royaume – qui revendique une politique très active en matière de lutte antiterroriste – avait été meurtri par des attaques à Casablanca (33 morts en 2003) et à Marrakech (17 morts en 2011). Lire aussi Touristes tuées au Maroc : le quartier de deux des suspects marqué par la précarité et le salafisme
29/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/29/maroc-un-suisse-arrete-en-lien-avec-le-meurtre-des-deux-touristes-scandinaves_5403555_3212.html
Les députés italiens approuvent le budget 2019, revu à la baisse après les critiques de Bruxelles
La Commission européenne avait rejeté, à l’automne, la version initiale du premier budget porté par la coalition populiste au pouvoir.
Des députés du parti de droite « Forza italia » portent une veste bleue avec l’inscription « Stop aux impôts » lors d’une séance parlementaire pour le vote du budget italien pour 2019, le 29 décembre. ALBERTO PIZZOLI / AFP Les députés italiens ont approuvé, dans la soirée du samedi 29 décembre, le budget 2019 en votant la confiance à la coalition populiste au pouvoir, qui a cependant dû atténuer ses mesures phares sous la pression de la commission européenne et des marchés financiers. Le texte, issu d’un long bras de fer avec Bruxelles, qui en avait rejeté la version initiale pour la première fois dans l’histoire de l’Union européenne, a déjà été adopté par le Sénat en pleine nuit, il y a une semaine. Après deux heures de déclarations des différents groupes et une volée d’accusations réciproques entre majorité et opposition, le vote de confiance a été validé par 327 voix pour, 228 voix contre et une abstention. L’adoption formelle du texte est prévue dimanche matin. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Budget italien : quand Rome et Bruxelles jouent au poker menteur Le gouvernement constitué par le Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème) et la Ligue (extrême droite), au pouvoir depuis le 1er juin, prévoit un déficit public à 2,04 % du Produit intérieur brut (PIB), contre les 2,4 % inscrit dans le projet initial. La prévision de croissance 2019 a été abaissée à 1 %, au lieu de 1,5 %. L’Italie doit en effet contenir sa dette publique, qui dépasse les 130 % de son PIB, pour éviter une sanction des marchés financiers et une procédure d’infraction de l’UE. Et la majorité doit faire adopter le texte avant le 1er janvier, faute de quoi l’Italie fonctionnera d’un mois sur l’autre avec une réplique du budget 2018. Cela retarderait d’autant la mise en place des mesures dont les partis au pouvoir comptent se prévaloir lors de la campagne des élections européennes, au printemps. L’opposition de gauche comme de droite dénonce avec virulence un manque de respect du Parlement, dans la mesure où les sénateurs n’ont reçu le texte que quelques heures avant leur vote la semaine dernière. Samedi, plusieurs dizaines d’élus et de militants du Parti démocrate (PD, de centre gauche) ont manifesté devant la Chambre des députés. Le PD a également déposé un recours devant le Conseil constitutionnel, qui doit en examiner la recevabilité le 9 janvier. « Stop aux impôts » Dans l’hémicycle, les députés du parti de Silvio Berlusconi, Forza Italia (de droite) ont endossé des gilets bleus proclamant « Stop aux impôts », « Pas touche aux associations », « Pas touche aux retraites ». « A partir de janvier, ces mêmes gilets bleus seront dans les rues de toutes les villes pour continuer la mobilisation contre le gouvernement, au côté de l’autre Italie, l’Italie sérieuse et travailleuse encore une fois pénalisée », a promis M. Berlusconi dans un communiqué. La gauche et les syndicats ont également prévu une journée de mobilisation le 12 janvier, pour dénoncer en particulier la décision de désindexer de l’inflation les pensions de retraites supérieures à 1 500 euros nets par mois. Comme promis, le budget prévoit le revenu de citoyenneté promis par le M5S, l’abaissement de l’âge de la retraite et la diminution des impôts des autoentreprises, deux mesures voulues par le parti d’extrême droite la Ligue. Lire aussi L’Italie et Bruxelles enterrent la hache de guerre budgétaire Mais son vaste plan d’investissement a été revu à la baisse, faute de moyens, et au total les impôts sur les sociétés seront en hausse, y compris pour celles à but non lucratif, même si le gouvernement s’est engagé à revenir dès janvier sur cette dernière mesure qui a fait scandale. « La nécessité d’éviter la procédure d’infraction (…) nous a obligés à arriver dans la zone Cesarini », a expliqué vendredi en conférence de presse le chef du gouvernement, Giuseppe Conte, en référence à un footballeur des années 1930 resté célèbre pour ses buts en toute fin de match. « Il n’y a pas eu de volonté délibérée de la part du gouvernement d’éviter une discussion et de comprimer la durée du débat parlementaire », a-t-il ajouté, en assurant que le budget avait bien été rédigé « en Italie » et non à Bruxelles comme l’assure l’opposition. Le bras de fer entre gouvernement italien et autorités européennes s’était engagé au début de l’automne, quand Rome avait présenté un projet de budget prévoyant un déficit public à 2,4 % du PIB, bien au-delà des 0,8 % sur lesquels s’était engagé le gouvernement précédent. L’accord conclu le 19 décembre avec Bruxelles prévoit près de 5 milliards d’euros d’économies par rapport à la première version. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Pourquoi la BCE ne sauvera pas l’Italie
29/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/29/les-deputes-italiens-approuvent-le-budget-2019-revu-a-la-baisse-apres-les-critiques-de-bruxelles_5403552_3210.html
A nos lecteurs : à propos de la Une de « M le magazine du Monde »
Luc Bronner, directeur de la rédaction du « Monde », répond aux réactions critiques provoquées par la couverture de « M le magazine du monde » datée du 29 décembre.
La couverture de l’édition datée du 29 décembre de M, le magazine du Monde. La couverture de M le magazine du Monde datée du samedi 29 décembre a provoqué des réactions critiques de certains de nos lecteurs. Nous présentons nos excuses à ceux qui ont été choqués par des intentions graphiques qui ne correspondent évidemment en rien aux reproches qui nous sont adressés. Les éléments utilisés faisaient référence au graphisme des constructivistes russes au début du XXe siècle, lesquels utilisaient le noir et le rouge. La couverture s’inspire par ailleurs de travaux d’artistes, notamment ceux de Lincoln Agnew, qui a réalisé de nombreux sujets graphiques pour M le magazine du Monde. Quatre exemples de l’utilisation de ces références graphiques dans d’anciennes publications de M le magazine du Monde : M le magazine du Monde
29/12/2018
m-le-mag
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/29/a-nos-lecteurs-a-propos-de-la-une-de-m-le-magazine-du-monde_5403549_4500055.html
Premier League : Liverpool étrille Arsenal et lorgne sur le titre
La victoire 5-1 des Reds, conjuguée à la défaite de Tottenham, offre à l’équipe de Jürgen Klopp un matelas confortable en tête du championnat d’Angleterre.
Le panneau d’affichage d’Anfield Road est formel. PHIL NOBLE / REUTERS Les rencontres entre Liverpool et Arsenal sont souvent folles, mais la Premier League, même pendant les fêtes, peut aussi se montrer raisonnable : mené de trois buts à la mi-temps à Anfield Road, Arsenal n’a pas réalisé le come-back de l’année et s’est incliné 5-1 samedi 29 décembre, au bout d’une journée de football que l’on pourrait garder longtemps en mémoire sur les bords de la Mersey. Car c’est un pas important vers le titre en Premier League qu’a fait Liverpool ce samedi, entre cette nette victoire sur les Gunners et la défaite stupéfiante de Tottenham contre Wolverhampton, un peu plus tôt (1-3). Manchester City redeviendra son dauphin en cas de victoire, dimanche, à Southampton, mais jouerait sa survie dans la réception de… Liverpool, jeudi 3 janvier, dans ce qui ressemble déjà à une finale pour le titre, dès la 21e journée. En entrant sur la pelouse d’Anfield accompagnés par les chœurs de You’ll Never Walk Alone, les Reds savaient qu’une avance de neuf points s’offrait à eux en cas de victoire. Rapides dans l’exécution, lucides sur les choix à faire, puissants dans les duels : les Reds n’ont pas flanché, malgré l’ouverture précoce du jeune Maitland-Niles (11e) aligné à la place d’Alexandre Lacazette, remplaçant. Lire aussi Kanté et Pogba, deux étoiles ternies en Premier League Firmino joue au billard, les défenseurs d’Arsenal aux quilles Cela faisait un an que Liverpool n’avait pas été mené au score en Premier League, mais cela n’a duré que trois minutes. Le temps que Roberto Firmino, déjà à l’origine de l’action, ne profite d’un drôle de jeu de billard dans la malheureuse défense londonienne. Deux minutes plus tard, le Brésilien ne devait rien à personne et c’est plutôt aux quilles que jouaient les Gunners : Firmino slalomait sans réelle opposition et ajustait Bernd Leno, dont le cauchemar ne faisait que commencer. Les deux autres membres du trio d’attaque de Liverpool se mettaient au niveau après la demi-heure de jeu : Salah pour Sadio Mané pour le 3-1, puis Salah tout seul, provoquant et transformant un penalty pour le 4-1. Au retour des vestiaires, l’entrée en jeu de Laurent Koscielny, prenant le brassard de capitaine, ne suffisait pas à stabiliser la défense d’Arsenal, prise en défaut à plusieurs reprises. Le cinquième but de Liverpool venait sur penalty (65e), laissé par Mo Salah à Firmino pour parachever son triplé. La fin du match était une aimable partie de campagne sous le regard ravi des spectateurs d’Anfield. Pensée pour Pierre-Emerick Aubameyang : 7 ballons touchés en première période dont 4 coups d'envoi. https://t.co/QyoLO6BuKe — JulienMomont (@Julien Momont) Quant aux supporteurs d’Arsenal, peut-être se disent-ils désormais qu’Arsène Wenger n’était pas la cause de tous leurs maux. Dans les dernières années du long règne de l’Alsacien, les Gunners étaient souvent ramenés à leur rang de puissance de second rang par des défaites cinglantes chez les cadors de Premier League. Voilà la première pour Unai Emery, qui clôt une quinzaine fatale aux ambitions d’Arsenal : trois défaites en cinq matchs. Les problèmes d’Emery étaient ceux de Wenger Les problèmes sont les mêmes que sous Arsène Wenger : une défense passoire, indigne d’un prétendant au podium, avec 30 buts encaissés en vingt matchs. Le mal d’Emery est là et il le sait, même si les blessures dans ce secteur – l’absence de Laurent Koscielny, qui revient seulement à la compétition – sont une béquille sur laquelle il peut encore se reposer. Il bénéficie, pour l’heure, d’une certaine tranquillité d’esprit, grâce à la culture du club et à une série de 21 matchs sans défaite à l’automne. Mais une victoire contre Fulham, le 1er janvier, serait la bienvenue, alors qu’Arsenal peut se retrouver à l’issue du week-end à cinq points d’une place qualificative en Ligue des champions.
29/12/2018
football
https://www.lemonde.fr/football/article/2018/12/29/premier-league-liverpool-etrille-arsenal-et-lorgne-sur-le-titre_5403545_1616938.html
Rassemblement à Strasbourg, un an après la mort de Naomi Musenga
La jeune femme est morte en décembre 2017 d’une intoxication au paracétamol, après avoir été tardivement prise en charge par le Samu.
Une minute de silence a été observée en mémoire de Naomi Musenga, morte il y a un an après n’avoir pas été prise au sérieux au téléphone par le Samu, qui avait refusé de la prendre immédiatement en charge. Lors d’un rassemblement dans l’après-midi du samedi 29 décembre, à Strasbourg, un hommage a réuni une soixantaine de personnes à l’appel d’un collectif, « Justice pour Naomi Musenga ». Le rassemblement a débuté vers 16 heures 30 sur la place de l’Hôpital par une chanson entonnée par la mère de la victime, accompagnée à la guitare par sa fille, Louange. « Naomi était une musicienne, elle jouait de la guitare, de la batterie et faisait du gospel. On lui rend hommage en musique », a annoncé Alain Bokemposila, membre du collectif. Une grande banderole, sur laquelle était écrit : « Justice et vérité pour Naomi Musenga. Hommage et pensées pour tous les oubliés et toutes les Naomi de l’ombre », était déroulée sur le sol, derrière un bouquet de fleurs claires et d’une photo de la jeune femme, souriante. Lire aussi Mort de Naomi Musenga, le calvaire des trois opératrices accusées à tort Information judiciaire ouverte en juillet Âgée de 22 ans et mère d’un enfant de 18 mois, elle est morte le 29 décembre 2017 des conséquences d’une « intoxication au paracétamol absorbé par automédication sur plusieurs jours », selon des éléments médicaux obtenus par les enquêteurs. Elle avait été prise en charge avec « un retard global de près de 2 heures 20 », selon un rapport de l’Inspection des affaires sociales (Igas), après un premier appel qui n’avait pas été pris au sérieux par une opératrice du Samu. En juillet, une information judiciaire pour « non-assistance à personne en péril » et « homicide involontaire » a été ouverte contre X, visant notamment l’assistante de régulation. Le père de Naomi a remercié les personnes présentes, tenant pour la plupart une rose blanche, « en mémoire de cet événement inacceptable, inadmissible, de ce choc, pour se souvenir de ce mauvais exemple d’abandon, de mépris, d’une personne qui avait besoin d’une intervention urgente ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au SAMU d’Amiens, « on ne sait jamais ce qu’il y a derrière un appel » Gloire Musenga, frère de la victime, a lu une lettre adressée par ses parents aux hôpitaux universitaires de Strasbourg, réclamant de connaître la vérité sur les causes du décès de leur fille et de voir « l’ensemble des acteurs missionnés par les services d’urgence » prendre leurs responsabilités. A l’issue des prises de parole et de chants, une minute de silence a été observée par l’assistance et des fleurs ont été déposées au pied de l’hôpital civil, de l’autre côté de la place.
29/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/29/rassemblement-a-strasbourg-un-an-apres-la-mort-de-naomi-musenga_5403541_3224.html
« Cro Man » : le Brexit à l’âge de pierre
Nick Park, le créateur de « Wallace et Gromit », signe une fable préhistorique pleine d’humour, pour petits et grands.
« Cro Man », film d’animation britannique de Nick Park. STUDIOCANAL / BRITISH FILM INSTITUTE Canal+ Family, samedi 29 décembre à 20 h 50, film d’animation Cro Man se concentre sur une tribu vivant à l’âge de pierre, près de Manchester. L’auteur de ce film, le Britannique Nick Park, génie de l’animation de marionnettes contemporaine, ne manque pas d’humour. Il a choisi de faire vivre ces primitifs dans un cratère géant où, quelques millénaires plus tôt, de lointains ancêtres ­pratiquaient un football pour le moins énergique. Un jeu représenté sur les parois des cavernes où ils habitent, mais dont les membres de la tribu ne comprennent pas toutes les subtilités. En effet, ces hommes de Cro-Magnon ignorent comment leurs prédécesseurs se sont procuré cet objet mystérieux qu’est le ­ballon rond. Coupés du monde extérieur, ces petits personnages de couleurs de peau différentes, aux fronts étroits, aux yeux rapprochés, aux dents en avant et au nez de cochon, ont une conscience encore plus faible de leur futur : ils ne se voient pas chasser d’autres animaux que le lapin ; seul le jeune Doug estime qu’il est temps de s’attaquer au mammouth. Film bourré d’anachronismes L’idylle de ces chasseurs-cueilleurs est brisée par l’arrivée d’un peuple guerrier maîtrisant le bronze et la construction de gigantesques stades de football, qui va annexer leur vallée et les chasser vers les « moches terres ». Guidés par un roi corrompu, l’affreux Lord Noz, les habitants de cette forteresse que l’on appelle l’« empire de bronze » vivent au rythme des exploits des joueurs du Real Bronzio. Le jovial mais non moins intrépide Doug va proposer à Lord Noz un défi impossible : le sort du territoire des primitifs se réglera sur le pré contre cette équipe réputée injouable. « Cro Man », film d’animation britannique de Nick Park. STUDIOCANAL / BRITISH FILM INSTITUTE Fable préhistorique rejouant David contre Goliath, ce film bourré d’anachronismes un peu faciles paraît de prime abord dénué de complexité. Il n’en est rien. Les plus petits ne le relèveront certainement pas, mais il y a plusieurs façons de regarder ce film. On peut voir dans Cro Man une ­allégorie du Brexit. La ville impériale des bronzes est un creuset d’influences et d’accents continentaux – dans la version originale, Lord Noz parle l’anglais avec un accent français à couper au couteau. Son équipe, le Real Bronzio, dont les couleurs sont le bleu et le jaune, est composée de mercenaires athlétiques venus de Germanie, de Gaule et d’Afrique : difficile de ne pas y voir l’Union européenne. Comme le note le critique du Guardian, Steve Rose, le manque d’engagement de Doug et de sa tribu dans le monde extérieur les a fait revenir en arrière, vers les « moches terres ». Il leur faudra ­découvrir la signification des peintures rupestres ancestrales – celles-ci ne représentent que des défaites, en l’occurrence celles de l’Angleterre – pour comprendre qu’il est possible de dépasser les mythes identitaires. Blagues typiquement « British » A. O. Scott, du New York Times, adopte une lecture différente. Pour lui, Cro Man revisite le mythe de la perte du royaume tranquille d’Arcadie. « Un mode de vie paisible et authentique est menacé de destruction par les forces de la modernité, et la menace est combattue par une démonstration de courage émouvante et potentiellement tragique », écrit-il. Dans la lignée des précédentes créations des studios Aardman, Cro Man s’apprécie tant pour ses gags visuels – le meilleur ami de Doug, un cochon dénommé Crochon, est aussi drôle qu’attachant – que pour ses blagues typiquement British. Certaines pitreries finissent par lasser, mais qu’importe, le plaisir est surtout visuel : les héros de Cro Man, aussi peu avancés soient-ils, sont tout aussi expressifs que leurs homologues numériques. Cro Man, film d’animation de Nick Park (GB-Fr. 2018) sur Canal+ Family.
29/12/2018
televisions-radio
https://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2018/12/29/cro-man-le-brexit-a-l-age-de-pierre_5403536_1655027.html
L’ostracisme, le « dégagisme » antique ?
Au VIe siècle av. J.-C., pour éviter le retour de la tyrannie, les Athéniens avaient inventé un mécanisme d’éloignement des personnages publics qu’ils ne désiraient plus voir exercer leurs fonctions : l’ostracisme. Peut-on faire un parallèle avec la défiance radicale qui vise aujourd’hui nos élites ?
Lors d’une manifestation de « gilets jaunes » à Nantes, le 8 décembre 2018. Jérémie Lussau pour "Le Monde" Le slogan est d’une brutale simplicité : « Macron démission ! » Les ronds-points de France ont résonné ces dernières semaines de ce cri de ralliement qui n’est pas sans rappeler le grand mouvement de « dégagisme » que le jeune président avait cru lui-même incarner. « Dégage ! » L’injonction date des « printemps arabes », plus précisément du mouvement tunisien de décembre 2010. Elle visait alors le président Ben Ali. On la retrouve très vite dans la bouche du leader de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, comme une autre traduction possible du « Que se vayan todos » (« Qu’ils en aillent tous ! »), la devise des manifestants pendant la crise économique argentine de 2001. Le « dégagisme » consiste à déloger le détenteur du pouvoir sans nécessairement vouloir prendre sa place. Il est l’expression d’une défiance radicale et d’une aspiration révolutionnaire. Mais, bien que d’invention récente, il pose une question aussi vieille que la politique, celle du rapport du peuple avec les élites. Pour tenter d’y répondre, les Athéniens avaient inventé un mécanisme d’éloignement des personnages publics qu’ils ne désiraient plus voir exercer leurs fonctions : l’ostracisme. « Une arme redoutable dans les mains du peuple » Mis en place après la fin de la tyrannie dans le cadre des réformes constitutionnelles des dernières années du VIe siècle av. J.-C., il visait à en éviter le retour. La mesure prévoyait une peine d’exil temporaire, de dix ans, frappant quiconque était suspecté de vouloir la rétablir. Chaque année, un vote populaire à main levée décidait de son opportunité. Deux mois plus tard, un second vote permettait de désigner l’homme que l’on jugeait dangereux : son nom était inscrit sur un tesson, un ostrakon. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le dictateur : un modèle de vertu dans l’Antiquité L’ostracisme n’était accompagné d’aucune justification – ni accusation ni défense. Il fut, selon l’historienne Claude Mossé, « une arme redoutable dans les mains du peuple ». Les nombreux ostraka (« bulletins ») qui nous sont parvenus montrent qu’aucun homme politique n’échappa à la méfiance populaire. Le mécanisme d’expulsion jouait au fond sur le sentiment négatif que suscitait chez les Grecs celui qui s’était élevé trop haut. Aristote, par exemple, le justifiait en expliquant que, si un être dépasse le niveau commun en vertu ou en capacité politique, on ne saurait l’admettre sur un pied d’égalité avec les autres citoyens.
29/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/29/l-ostracisme-le-degagisme-antique_5403530_3232.html
Le résistant juif Georges Loinger est mort
Commandeur de la Légion d’honneur, Georges Loinger avait participé au sauvetage de plus de 350 enfants juifs vers la Suisse pendant la seconde guerre mondiale.
Georges Loinger (à gauche), président de l'Association de la Résistance juive de France (ARJF), reçoit les insignes de commandeur de la Légion d'honneur, le 19 septembre 2005 à Paris. JACQUES DEMARTHON / AFP Doyen de la résistance juive pendant l’Occupation en France, Georges Loinger est mort, vendredi 28 décembre, à l’âge de 108 ans. « Avec lui s’éteint un homme d’exception dont les combats resteront dans les mémoires », a écrit la Fondation pour la mémoire de la Shoah dans un bref communiqué publié sur son site, samedi. M. Loinger, né à Strasbourg en août 1910, fait commandeur de la Légion d’honneur en 2005 et titulaire de la médaille de la Résistance et de la Croix de Guerre, a présidé l’Association de la Résistance juive de France (ARJF). Fait prisonnier par l’armée allemande en 1940, Georges Loinger parvient à s’échapper et à rentrer en France l’année suivante. Proche du médecin Joseph Weill au sein de l’Œuvre de secours aux enfants, il contribue à créer une filière d’hébergement et de passage d’enfants juifs vers la Suisse depuis Annemasse, commune de Haute-Savoie proche de Genève. L’arrivée et le rassemblement des enfants étaient effectués sous couvert d’une colonie de vacances. « Un exemple pour le peuple juif et pour la France » Il continuera ensuite à aider aux sauvetages d’enfants juifs, sauvant ainsi plus de 350 d’entre eux pendant l’Occupation. Après la guerre, il a notamment occupé le poste de directeur pour la France de la Compagnie nationale de navigation israélienne (ZIM). Georges Loinger œuvrera également pour faciliter le passage des rescapés du nazisme en Palestine et jouera un grand rôle dans l’affaire de l’Exodus lorsqu’il fera escale en France. Celui qui était le doyen de la Résistance juive en France a aussi participé à la création de « la Fraternité d’Abraham » qui prône le rapprochement des trois religions monothéistes. Le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) a rendu hommage à « ce combattant qui fait figure d’exemple pour le peuple juif et pour la France ». Son président Francis Kalifat a salué dans un tweet ce « combattant de la mémoire, défenseur acharné du peuple Juif et de l’Etat d’Israël ». En 2013, il était reçu à l’âge de 102 ans par le président israélien Shimon Peres. La communauté juive endeuillée par le décès de Georges Loinger. Résistant, combattant de la mémoire, défenseur acha… https://t.co/1Gnmw7NVUy — FrancisKalifat (@Francis Kalifat)
29/12/2018
disparitions
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2018/12/29/le-resistant-juif-georges-loinger-est-mort_5403527_3382.html
Yémen : les rebelles amorcent leur retrait du port stratégique de Hodeïda
Des officiels pro gouvernementaux disent de leurs côtés douter de ce retrait des forces houthistes du noeud stratégique qu’est devenu ce port.
Des rebelles houthistes, dans le port d’Hodeïda, le 29 décembre, alors qu’ils amorcent leur retrait de la ville portuaire. ABDO HYDER / AFP Dans le conflit yéménite, la ville de Hodeïda est un nœud stratégique. Tenu par les rebelles houthistes appuyés par l’Iran, ce port de la mer Rouge est assiégé par les forces gouvernementales et les alliés locaux de la coalition arabe menée par l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis. Pour ces derniers qui encadrent les opérations au sol, le contrôle de Hodeïda constitue un enjeu majeur. En y plaçant leurs supplétifs yéménites, les Emiratis prendraient le contrôle de la côte occidentale du pays, s’érigeant ainsi en gardiens de l’intense trafic commercial et pétrolier qui passe par ces eaux ouvrant sur le canal de Suez. Le début, samedi 29 décembre, du retrait des houthistes de la cité portuaire qui s’est fait en application d’un accord conclu mi-décembre avec le gouvernement est un pas supplémentaire dans cette direction. Accord sous l’égide de l’ONU Annoncé par un responsable rebelle à l’agence de presse Saba, le retrait des houthistes a été confirmé à l’Agence France-Presse (AFP) par un responsable de l’Organisation des nations unies (ONU) qui a précisé que les rebelles avaient amorcé leur redéploiement vers minuit, heure locale. Mais, un officiel pro gouvernemental a fait part à l’AFP de la « surprise » des loyalistes. « Les Houthis ont profité de leur contrôle de Hodeida pour placer leurs combattants dans la marine et les gardes-côtes, ce qui est une source d’inquiétude pour le gouvernement légitime », a-t-il estimé samedi. Dans un communiqué transmis par l’agence Saba, un autre officiel pro gouvernemental a estimé qu’il s’agissait « d’une tentative transparente pour modifier le sens de l’accord » obtenu au début du mois en Suède. Le départ des troupes houthistes intervient une dizaine de jours après l’entrée en vigueur le 18 décembre d’une trêve entre les belligérants qui s’affrontent autour de Hodeïda, principale voie d’entrée de l’aide humanitaire et des importations dont dépend la survie de la population du pays, déjà lourdement affectée par ce que les Nations unies décrivent comme la plus grave crise humanitaire de la planète. La trêve et le retrait des houthistes de Hodeïda sont prévus par un accord conclu à la mi-décembre à Stockholm sous l’égide de l’ONU. Le Conseil de sécurité des Nations unies avait décidé la semaine dernière d’envoyer des observateurs civils au Yémen pour notamment sécuriser le fonctionnement du port stratégique de Hodeida et superviser l’évacuation des combattants de cette ville. Le chef des observateurs de l’ONU au Yémen, le général néerlandais à la retraite Patrick Cammaert, a présidé cette semaine la première réunion du comité mixte (rebelles-gouvernement) chargé de mettre en oeuvre la trêve mais aussi le retrait des combattants des ports de Hodeida, de Salif et de Ras Issa, dans la même province. Selon l’ONU, ce comité a discuté « de la première phase d’implantation de l’accord basé sur le cessez-le-feu et des mesures de confiance pour permettre de distribuer l’aide humanitaire et un redéploiement (des belligérants) ». Une nouvelle réunion de ce comité est prévue le 1er janvier afin de discuter d’un retrait complet. Trêve fragile Un convoi d’aide humanitaire devrait partir de Hodeida samedi, en direction de la capitale Sanaa aux mains des rebelles. Mais les rebelles Houthis n’ont pas autorisé le convoi, qui transportait 32 tonnes de farine, à quitter samedi le port de Hodeida, selon un communiqué de la coalition menée par Ryad, cité par l’agence de presse saoudienne Spa. De leur côté, les rebelles ont affirmé dans un communiqué qu’ils bloquaient la route menant à Sanaa « parce que la partie opposée ne s’est pas retirée » de Hodeida. La trêve reste très fragile : dans les faits, les combats, escarmouches et autres échanges de tirs n’ont pas réellement cessé depuis son entrée en vigueur alors que les deux parties s’accusent mutuellement de la violer. Un habitant de Hodeida a indiqué samedi à l’AFP que les forces loyalistes et les rebelles avaient brièvement échangé des tirs durant la nuit. Il a précisé avoir entendu les avions de la coalition samedi matin. Outre le cessez-le-feu, l’accord de Suède prévoit un échange de quelque 15.000 prisonniers ainsi que des mesures pour faciliter l’acheminement de l’aide à Taëz (sud-ouest), ville aux mains des loyalistes et assiégée par la rébellion. Les pourparlers inter-yéménites doivent reprendre fin janvier. L’aéroport de Sanaa, fermé depuis presque trois ans aux vols commerciaux, sera au centre de ces discussions, selon l’émissaire de l’ONU au Yémen, Martin Griffiths.
29/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/29/yemen-les-rebelles-amorcent-leur-retrait-du-port-strategique-de-hodeida_5403521_3210.html
Bangladesh : les islamistes en embuscade avant les élections générales
Face au groupe de pression islamiste Hefazat-e-Islam, la première ministre, Sheikh Hasina, multiplie les concessions.
Les deux derniers mandats de Sheikh Hasina auront vu se réveiller au Bangladesh le spectre de l’islamisme radical, que la première ministre croyait pouvoir éradiquer. A la veille des élections générales, dimanche 30 décembre, qui doivent renouveler les 350 sièges du Parlement, la dirigeante, qui vise un quatrième mandat, continue d’osciller entre sécularisme et islamisme, multipliant les concessions aux religieux musulmans sous la pression du groupe Hefazat-e-Islam. A son accession au pouvoir en 2009, elle avait entrepris de réaliser une promesse de campagne : traduire en justice les responsables du génocide de la guerre de libération, lorsque les Razakars, des supplétifs locaux du régime militaire pakistanais, massacrèrent des centaines de milliers de civils, mais aussi des intellectuels, à la suite de la sécession de sa province orientale. Une partie de ces auxiliaires sont des dirigeants historiques du parti islamiste Bangladesh Jamaat-e-Islami, comme Abdul Qader Molla, dit « le boucher de Mirpur ». Un tribunal dit « international » – en réalité local – le condamna à la prison à perpétuité en février 2013. Cette sentence fit aussitôt descendre dans la rue la jeunesse éduquée de Dacca : la jugeant trop légère, celle-ci réclame pour les « traîtres » la peine de mort, ainsi que l’interdiction du parti Jamaat. C’est le mouvement Shahbag, de la place du même nom à Dacca, qui durera plusieurs semaines et conduira à la pendaison de l’ancien chef de milice pro-pakistanais en décembre 2013. « Réduire la mixité » Pour les élections prévues début 2014, Sheikh Hasina décide de faire interdire le Jamaat-e-Islami, partenaire de coalition naturel de la principale formation de l’opposition, le Parti nationaliste du Bangladesh (BNP). De quoi se faire des ennemis. Une partie de la société bangladaise gronde de colère : c’est le cas des membres du Hefazat-e-Islam, mouvement d’enseignants et d’étudiants des madrasas Qwami, qui s’est fait connaître en 2010 avec une manifestation monstre pour s’opposer aux propositions du gouvernement de donner aux femmes les mêmes droits de succession qu’aux hommes. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Fin de campagne dans la violence au Bangladesh Il se transforme en un groupe de pression islamiste ultraorthodoxe de plus en plus influent. « En 2010, le Hefazat avait exposé une charte en treize points, qui réclamait notamment une loi contre le blasphème et voulait réduire la mixité hommes-femmes. Puis, lors du mouvement Shahbag en 2013, le Hefazat exigea la peine capitale pour les blogueurs athées, accusés de blasphème, et dont certains sont les organisateurs à l’origine du mouvement », rappelle une doctorante française d’origine bangladaise travaillant sur ce sujet, et qui préfère garder l’anonymat en raison du caractère sensible de la question au Bangladesh.
29/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/29/bangladesh-les-islamistes-en-embuscade-avant-les-elections-generales_5403516_3210.html
Le député Joachim Son-Forget, auteur de dérapages sur Twitter, quitte La République en marche
Le cas de M. Son-Forget, auteur notamment de propos sexistes contre une sénatrice, devait être examiné le 14 janvier par le bureau du groupe LRM à l’Assemblée nationale en vue d’éventuelles sanctions.
Joachim Son-Forget, député La République en marche des Français établis hors de France, à l’Assemblée nationale, le 21 février. JACQUES DEMARTHON / AFP Le député Joachim Son-Forget, convoqué dans deux semaines par le bureau du groupe La République en marche (LRM) après des propos sexistes contre la sénatrice EELV Esther Benbassa, a annoncé au magazine Valeurs actuelles puis à l’Agence France-Presse, samedi 29 décembre, qu’il avait quitté le parti présidentiel et son groupe parlementaire. Le représentant à l’Assemblée nationale des Français de Suisse et du Liechtenstein a confié à l’hebdomadaire continuer de soutenir le président Emmanuel Macron, mais ne pas exclure de « constituer une liste aux élections européennes et de créer un parti, quitte à continuer à utiliser la satire et des méthodes de communication innovantes ». La sénatrice EELV Esther Benbassa s’est réjouie sur Twitter du départ de LRM de Joachim Son-Forget : Merci à ttes & ts pour votre soutien. D'abord suspendu de son groupe à l'#Assemblée, @sonjoachim quitte #LREM. Le… https://t.co/r5VH9L2lbj — EstherBenbassa (@Esther Benbassa) « Dédicace spéciale à tous les trolls » « Après échanges téléphoniques non fructueux, j’ai pris ma décision après l’avoir annoncée au président. Pas de drame mais de la constance », a, de son côté, écrit le député de 35 ans dans un de ses nombreux messages publiés samedi sur Twitter. « J’ai fait la guerre pour habiter rue de la paix », a-t-il encore publié, citant ainsi le rappeur Booba, accompagné du mot-clé « démissionLREM ». "J'ai fait la guerre pour habiter rue de la paix" #Booba #demissionLREM https://t.co/cYeYMi5GF2 — sonjoachim (@𝙹𝚘𝚊𝚌𝚑𝚒𝚖 𝚂𝚘𝚗-𝙵𝚘𝚛𝚐𝚎𝚝 💡) Le cas de M. Son-Forget devait être examiné le 14 janvier par le bureau du groupe LRM à l’Assemblée nationale en vue d’éventuelles sanctions. Le président de la majorité parlementaire, Gilles Le Gendre, a déclaré sur Twitter que « le bureau du groupe LREM et moi-même prenons acte de la démission » de Joachim Son-Forget. Son départ ramène à 305 le nombre de députés membres du groupe. Déjà dans le collimateur d’une lettre d’avertissement de son parti pour des propos sexistes contre la sénatrice EELV Esther Benbassa, le député a signé depuis jeudi soir de nombreux tweets assez éloignés de la réserve attendue d’un député. Selfie avec une peluche de blaireau Un peu avant minuit jeudi, il avait commencé par un selfie posté par le député avec une peluche de blaireau, où il s’en prenait à ceux, dont ses collègues LRM, qui avaient critiqué ses propos envers Mme Benbassa. « Dédicace spéciale à tous les trolls, collègues hypocrites déversant leur fiel, poltrons cachés dans leur anonymat, et toute ma compassion envers les binaires et les coincés au level 1, le boss de fin étant trop subtil et trop intelligent pour eux », avait-il légendé. Plus tard, le député a posté une vidéo de lui tirant avec un fusil de sniper – un de ses hobbies – ou des photomontages le montrant en personnage de dessin animé ou en joueur de foot avec le maillot de la Suisse devant le drapeau du Kosovo – dont il a reçu il y a quelques mois un certificat de nationalité.
29/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/29/le-depute-joachim-son-forget-auteur-de-derapages-sur-twitter-quitte-la-republique-en-marche_5403510_823448.html
Planète : les (plutôt) bonnes nouvelles de 2018
Réchauffement climatique, déclin de la biodiversité, catastrophes naturelles… L’état de la Planète s’est dégradé en 2018. On a tout de même trouvé quelques raisons d’espérer.
Quelques espèces animales en voie de récupération Certaines espèces disparaissent, mais d’autres sont sur le point d’être sauvées. Ceci grâce à de nombreux programmes de réintroduction et de lutte contre le braconnage. C’est le cas du gorille des montagnes et du rorqual, selon une étude de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) publiée le 14 novembre. Celle-ci indique que ces deux espèces autrefois en grave danger sont désormais en voie de récupération. Après la mise à jour par l’UICN de sa liste rouge des espèces menacées, le rorqual, second plus gros animal marin après la baleine bleue, est passé de la catégorie « en danger » à « vulnérable », sa population ayant atteint cette année plus de 100 000 individus. Le gorille des montagnes se porte également un peu mieux. Il a basculé de la catégorie « en danger critique » à « en danger » : en dix ans, la population des gorilles de montagne est passée de 680 à 1 000 individus, selon l’UICN. Lire aussi Biodiversité : hausse de la population de baleines et de gorilles D’autres espèces menacées ont vu leur effectif augmenter au cours de l’année 2018 comme les dauphins du Mékong, selon WWF. L’ONG a également publié en juin un recensement du jaguar au Mexique, dont la population a augmenté de 20 % en huit ans. En France, le gypaète barbu, plus grand vautour des Alpes et un des plus menacés, est de retour après un programme européen de réintroduction démarré en 2012. Des efforts pour les zones protégées fragiles Certaines zones de la planète, très fragiles, constituent de véritables sanctuaires de biodiversité et des États prennent des engagements pour les conserver. C’est le cas de la Grande barrière de corail, pour laquelle l’Australie va investir 312 millions d’euros pour sa protection. En Nouvelle-Calédonie, le gouvernement accroît quant à lui la protection de ses eaux territoriales. Fin octobre 2018, le pays a ainsi annoncé qu’une aire marine d’une superficie comprise entre 200 000 et 400 000 km² serait protégée d’ici 2019. Au Brésil, l’agence environnementale du pays a rejeté le 7 décembre la demande de Total de forer au large de l’embouchure de l’Amazone. De nouveaux espaces protégés devraient être prochainement créés, comme en Russie où le gouvernement a annoncé au printemps 2018 la création de la plus grande réserve terrestre et marine du pays (6 millions d’hectares) à Sakha, dans le nord-est de la Sibérie. L’UICN a élargi sa liste des « aires les mieux protégées du monde » à quinze zones supplémentaires, lors de la Conférence des Nations Unies sur la biodiversité qui a eu lieu en novembre en Égypte. La France est actuellement le pays accueillant le plus de sites sur la liste verte de l’organisme.
29/12/2018
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/29/planete-les-plutot-bonnes-nouvelles-de-2018_5403506_3244.html
« Aujourd’hui, en Israël, ceux qui partagent les opinions d’Amos Oz semblent terrassés »
Gilles Rozier, ancien directeur de la Maison de la culture yiddish, écrivain, traducteur et éditeur, revient sur le parcours de l’auteur israélien mort vendredi.
L’écrivain israélien Amos Oz en 2015. Dan Balilty / AP Gilles Rozier, ancien directeur de la Maison de la culture yiddish, est écrivain, traducteur et éditeur. En 2014, il a cofondé avec Anne-Sophie Dreyfus les Editions de l’Antilope, spécialisées dans les cultures juives. Lire aussi le portrait : Amos Oz, écrivain israélien et militant pour la paix Quels souvenirs gardez-vous de vos rencontres avec Amos Oz ? Je l’ai rencontré en 2003 à l’occasion de la sortie d’Une histoire d’amour et de ténèbres [Gallimard, 2004]. J’en garde un souvenir vif. Nous l’avions invité à la Maison de la culture yiddish pour parler de son histoire. A cette occasion, l’universitaire Yitskhok Niborski lui a fait la surprise de lire en yiddish quelques pages consacrées à ses aïeux en Europe de l’Est. Amos Oz, à qui la langue yiddish n’a pas été transmise, s’est mis à pleurer. La sonorité de la langue résonnait très fort en lui, bien qu’il ait été coupé de sa compréhension. Avant cela, en 1990, j’avais suivi, à Jérusalem, ses séminaires de littérature hébraïque, parmi des centaines d’étudiants massés dans un amphithéâtre. Son enseignement était lumineux. Que retenez-vous de son œuvre ? Parmi ses premiers romans, ceux qui m’ont le plus marqué sont Mon Michaël [Gallimard, 1995] et La Boîte noire [Calmann-Lévy, 1988], deux magnifiques textes ancrés dans la réalité israélienne. Plus tard, j’ai été emporté par Une histoire d’amour et de ténèbres, un chef-d’œuvre de sensibilité, avec des pages bouleversantes, notamment sur le suicide de sa mère, et sa relation avec elle. Il décrit également ses relations avec son père d’une manière très humaine. Mais ce livre est aussi magistral par sa capacité à restituer une époque révolue : la Jérusalem d’avant 1948 [année de la fondation de l’Etat d’Israël]. Comment vous paraissait-il articuler son rôle politique et son travail d’écrivain ? Les deux dimensions sont indissociables. Amos Oz était un écrivain engagé. Comme la majorité des Israéliens de sa génération, il restait attaché à l’Israël que dessine la déclaration d’indépendance : un pays pour les juifs fondé dans l’esprit des prophètes bibliques. Un pays à majorité juive, mais qui tient compte et prend soin de ses minorités. Et il s’est battu pour cela, tant dans ses écrits littéraires que dans son action politique. Sa vie se confond avec l’histoire d’Israël… A cet égard, il est emblématique de sa génération : il avait 9 ans lors de la création de l’Etat. Et il a été d’une immense loyauté à son égard. Jusqu’en 1977, il a fait corps avec la majorité travailliste du pays. Pourtant, dès le lendemain de la guerre des Six-Jours, il part en reportage pour interviewer les soldats sur ce qu’ils ont vu et fait. Les enregistrements de ces interviews ont été sous embargo militaire pendant des décennies, jusqu’à ce qu’ils soient diffusés dans le documentaire Des voix au-delà de la censure, de Mor Loushy, en 2015. Après 1977 et la nomination de Menahem Begin [1913-1992] au poste de premier ministre, le pays sera souvent dirigé par la droite nationaliste. C’est alors qu’Oz va s’ériger comme l’une des voix morales du pays.
29/12/2018
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/29/aujourd-hui-en-israel-ceux-qui-partagent-les-opinions-d-amos-oz-semblent-terrasses_5403498_3260.html
Pourquoi le champagne est-il cher ?
En France, le prix moyen d’une bouteille de champagne dépasse 20 euros. C’est une somme qui n’est pas à la portée de tout le monde. Mais il y a des raisons à ce prix.
prix. En France, le prix moyen d’une bouteille de champagne dépasse 20 euros. C’est une somme qui n’est pas à la portée de tout le monde. Mais il y a des raisons à ce prix. D’abord, le champagne, c’est compliqué à faire. Mais d’autres facteurs moins connus font monter le tarif de la bouteille. Comme, par exemple, une entente des producteurs pour un prix d’achat du raisin à la hausse. De leur côté, les grandes surfaces cassent les prix de ce produit d’exception. Cette pratique inquiète d’ailleurs la filière champagne. En effet, avec un champagne à prix bas, il y a le risque de ternir l’image d’une boisson assimilée au luxe et à la fête. Sources : Comité Champagne : Les chiffres-clés du champagne Syndicat des vignerons de la Champagne L’Union : le prix du raisin en 2018 Analyse économique du marché du raisin en Champagne La Champagne de Sophie Claeys, blog de référence sur le champagne et son économie
29/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/video/2018/12/29/pourquoi-le-champagne-est-il-cher_5403493_3234.html
Norman Gimbel, parolier de « Killing Me Softly » et « The Girl From Ipanema », est mort
Le parolier américain, récompensé de plusieurs Grammy Awards, est mort à l’âge de 91 ans, le 19 décembre.
Le parolier américain Norman Gimbel, auteur de The Girl from Ipanema et de Killing Me Softly, est mort à l’âge de 91 ans. L’organisme américain de protection des droits musicaux, la BMI, l’a annoncé vendredi. « Ecrivain authentiquement doué et prolifique », selon les termes de la Broadcast Music Inc., Norman Gimbel est mort le 19 décembre à son domicile de Montecito, en Californie, où il résidait depuis de nombreuses années, a fait savoir son fils Tony Gimbel, au magazine Hollywood Reporter. Il avait remporté en 1973, avec son collaborateur de longue date Charles Fox, le Grammy pour la meilleure chanson de l’année, pour Killing Me Softly, interprété par Roberta Flack. L’air avait été repris avec succès dans les années 1990 par le groupe de hip hop The Fugees. « The Girl from Ipanema », l’une des chansons les plus diffusées de tous les temps Mais les paroles en anglais de The Girl from Ipanema, écrites pour accompagner un air célèbre brésilien, lui valurent également en 1965 un Grammy pour l’enregistrement de l’année, devenu avec les années l’une des chansons les plus diffusées de tous les temps. Natif de Brooklyn, Norman Gimbel avait également remporté un Academy Award pour la meilleure chanson originale avec David Shire pour It Goes Like It Goes, interprété par Jennifer Warnes, pour le film Norma Rae, de 1979. Robert Folk, qui a écrit avec Norman Gimbel une quinzaine de chansons, s’est souvenu sur Facebook des confidences amusées que lui avait faites le disparu, après une composition pour un producteur de films de renom. « Ne leur dis jamais combien ce travail nous est facile et comme il nous a été plaisant d’écrire ces chansons. Autrement, ils ne nous verseraient plus autant d’argent ! »
29/12/2018
musiques
https://www.lemonde.fr/musiques/article/2018/12/29/norman-gimbel-parolier-de-killing-me-softly-et-the-girl-from-ipanema-est-mort_5403491_1654986.html
Jules César a-t-il inventé le césarisme ?
Formé sur le patronyme de Jules César, le mot n’apparaît qu’à partir de 1849 pour définir la politique de Louis-Napoléon Bonaparte, futur Napoléon III, plaçant le régime impérial dans la lignée des dictatures à l’antique.
Louis-Napoléon Bonaparte (1808-1873), dit Napoléon III, empereur des Français de 1852 à 1870. UIG/Photononstop Ne rendons pas si vite à Jules ce « césarisme » qui lui appartient finalement si peu. Le patronyme de l’ancien consul romain en est certes l’étymologie. Mais le mot ne fit son apparition que dix-neuf siècles après son assassinat. Le Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle attribue la première occurrence à Proudhon, et la date de 1849. Dans son ouvrage La Fabrique d’une nation (Perrin, 2003), l’historien Claude Nicolet (1930-2010) la situe, pour sa part, dans un texte, L’Ere des Césars, publié par Auguste Romieu en 1850. Forme impériale du XIXe siècle Une chose est sûre : le césarisme est étroitement lié à Louis-Napoléon Bonaparte, qui devient Napoléon III en 1852. « Le mot est utilisé dès les premiers mois qui suivent le coup d’Etat du 2 décembre 1851 pour caractériser le nouveau régime, écrit Pierre Rosanvallon dans La Démocratie inachevée (Gallimard, 2000). Il permet alors d’associer de façon commode le souvenir des dictatures antiques à la forme impériale du XIXe siècle. C’est aussi le moyen de jeter une dimension d’opprobre sur le régime que le qualificatif de bonapartisme, d’un usage courant dès la Restauration, n’emportait pas. » Si le terme est ainsi employé par ses adversaires, Napoléon III n’a rien fait pour s’en démarquer, bien au contraire. A la différence de son oncle, qui s’était contenté – si l’on peut dire – d’agir, Louis-Napoléon s’est préoccupé dès les années 1830 de construire un cadre théorique autour de cette pratique du pouvoir qu’il espérait alors poursuivre et perpétuer. Il en développe les thèmes dans différents écrits – Rêveries politiques (1832), puis Des idées napoléoniennes (1839). La publication de son Histoire de Jules César, dont le premier volume parut en 1865, consacrera l’expression de « césarisme ». Dans sa préface, comme le rappelle Claude Nicolet, l’auteur estime que César, Charlemagne et Napoléon sont des hommes « suscités par la Providence », pour « tracer aux peuples la voie qu’ils doivent suivre, marquer du sceau de leur génie une ère nouvelle, et accomplir en quelques années le travail de plusieurs siècles ». Pouvoir personnel et autoritaire Le mot de « césarisme » s’est ainsi imposé. Notant toutefois que le concept qu’il est censé exprimer est resté « singulièrement flou » – au-delà de l’idée évidente d’un pouvoir personnel et autoritaire –, Pierre Rosanvallon s’est attaché à en cerner les contours. Il en retient « un triple cadre : une conception de l’expression populaire par la procédure privilégiée du plébiscite ; une philosophie de la représentation comme incarnation du peuple en un chef ; un rejet des corps intermédiaires qui font obstacle à un face-à-face du peuple et du pouvoir ».
29/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/29/jules-cesar-a-t-il-invente-le-cesarisme_5403483_3232.html
Egypte : après une attaque contre des touristes, les autorités annoncent avoir abattu « 40 terroristes »
Alors que la violence djihadiste freine le redressement de l’économie du pays, le gouvernement cherche à démontrer que la lutte antiterroriste reste sa priorité.
Le bus attaqué à Gizeh transportait des touristes, le 28 décembre 2018. AMR ABDALLAH DALSH / REUTERS Répondre au défi du terrorisme par des annonces musclées, c’est le choix que semblent faire les autorités égyptiennes. Au lendemain d’une attaque à la bombe artisanale contre un car de touristes vietnamiens qui a fait quatre morts et onze blessés, le ministère égyptien de l’intérieur a annoncé, samedi 29 décembre, que les forces de sécurité avaient abattu un nombre dix fois supérieur de djihadistes à l’issue de plusieurs raids. Les opérations annoncées ont eu lieu à Gizeh, lieu de l’attaque de vendredi, où trente terroristes ont été tués selon les autorités mais aussi dans le Sinaï Nord, où l’armée égyptienne mène une guerre à huis clos contre une insurrection djihadiste liée à l’Etat islamique. Selon le communiqué publié samedi par le ministère de l’intérieur, les individus tués au cours de ces raids « planifiaient une série d’agressions contre le secteur du tourisme, les lieux de culte chrétiens et les forces de sécurité ». Le ministère n’a pas lié directement ces raids policiers à l’attaque de vendredi qui n’a pas été revendiquée, mais une source sécuritaire a précisé à l’Agence France-Presse (AFP) qu’ils avaient eu lieu « tôt » samedi matin, donc après l’attentat. Médias sous contrôle Comme à leur habitude, les médias égyptiens ont relayé samedi, à la télévision et sur les réseaux, les photos des djihadistes présumés tués. Elles montrent des hommes ensanglantés, une arme à la main, le visage flouté, gisant dans des cachettes rudimentaires. Mais ces médias, sous contrôle étroit de l’Etat, ont évoqué de manière succincte l’attentat, un sujet sensible en Egypte où le pouvoir se présente comme un allié majeur des puissances occidentales dans la lutte antiterroriste. La veille, le premier ministre égyptien, Moustafa Madbouli, en déplacement à l’hôpital Al-Haram où les personnes blessées, lors de l’attaque, avaient été admises a évoqué au sujet de l’explosion de Gizeh un « incident regrettable ». « Nous devons savoir qu’il est possible que cela se répète à l’avenir, a-t-il ajouté. Aucun pays au monde ne peut garantir la sécurité à 100 %. » Groupes extrémistes Malgré des améliorations récentes – l’attaque de vendredi est la première depuis l’été 2017 –, le secteur du tourisme qui était autrefois un fleuron de l’économie égyptienne a pâti de l’instabilité politique causée par la révolution de 2011 et continue de pâtir la dégradation réelle ou perçue des conditions de sécurité dans le pays. Depuis la destitution, en 2013, par l’armée du président islamiste Mohamed Morsi, l’Egypte a été la cible de nombreuses attaques menées par des groupes extrémistes, visant essentiellement les forces de sécurité et la minorité chrétienne copte, provoquant la mort de centaines de personnes. En avril 2017, le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi avait décrété l’état d’urgence après des attaques contre des églises, une mesure sans cesse renouvelée depuis. La plus importante attaque récente contre des touristes remonte au 31 octobre 2015. L’organisation djihadiste Etat islamique (EI) avait revendiqué un attentat à la bombe ayant coûté la vie aux 224 occupants d’un avion russe transportant des touristes russes après son décollage de Charm El-Cheikh, une célèbre station balnéaire située dans le sud du Sinaï. C’est cette attaque qui a porté le coup le plus dur au tourisme en Egypte, en particulier auprès des voyageurs russes mais aussi européens. Les autorités avaient ensuite tenté d’attirer une clientèle asiatique et arabe. « L’attaque sape le message très déterminé du gouvernement égyptien selon lequel le pays est sûr pour les touristes », a déclaré à l’AFP Zack Gold, spécialiste des questions de sécurité au Moyen-Orient et analyste au centre de recherches CNA, basé aux Etats-Unis. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les coptes une nouvelle fois pris pour cible en Egypte
29/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/29/egypte-apres-une-attaque-contre-des-touristes-les-autorites-annoncent-avoir-abattu-40-terroristes_5403481_3212.html
« Rembob’INA » : Alexandre Soljenitsyne et Bernard Pivot, faiseurs d’histoire
L’émission de LCP, animée par Patrick Cohen, fait revivre trois rencontres entre l’écrivain russe et le présentateur d’« Apostrophes ».
LCP, samedi 29 décembre à 14 heures, émission « Ce n’est pas tous les jours que l’on rencontre quelqu’un qui a changé le cours de l’histoire ! » Bernard Pivot, créateur des émissions littéraires « Apostrophes » (1975-1990) et « Bouillon de culture » (1991-2001), a eu « la chance » de vivre une telle expérience à quatre reprises, face à l’écrivain russe dissident Alexandre Soljenitsyne (1918-2008). « Rembob’INA », l’émission de LCP animée par Patrick Cohen, nous fait revivre trois de ces « directs » par la magie des archives de l’Institut national de l’audiovisuel. Au commentaire, Bernard Pivot n’a rien perdu de sa faculté d’étonnement à 83 ans. Lire le récit : Une journée dans la vie d’Alexandre Soljenitsyne Lorsqu’il reçoit pour la première fois l’auteur de L’Archipel du goulag (Seuil, 1974) sur le plateau d’Antenne 2, le 11 avril 1975, la présence de ce dernier, expulsé d’URSS, est un événement en soi. L’opposant à Staline s’exprime sans exubérance. Oui, il a appris « par cœur » ses livres écrits en détention ; non cela n’a rien d’extraordinaire. L’émission fait toutefois l’effet d’une bombe et provoque la scission des intellectuels de gauche. « Le communisme sera vaincu » La deuxième rencontre a lieu le 9 décembre 1983 à Cavendish, dans le Vermont, où l’écrivain vit alors en reclus, avec sa femme, leurs trois fils et sa belle-mère. Alexandre Soljenitsyne apparaît agité, agacé par les critiques, mais d’un optimisme déconcertant : « Le communisme sera vaincu (…) de l’intérieur. » Ainsi pourra-t-il rentrer chez lui, en Russie. « La certitude du retourne me quitte pas. » Six ans plus tard, la chute du mur de Berlin lui donnera raison. C’est ainsi en Russie que Bernard Pivot retrouve en 1998 le Nobel de littérature, quatre ans après son installation dans la banlieue de Moscou. Ses fils, naturalisés américains, sont restés aux Etats-Unis. Affaibli, Soljenitsyne remercie Pivot de sa présence, une inversion des rôles qui déstabilise le présentateur. L’idéaliste s’est aigri. Il parle de démocratie « comme [de] la gestion effective du peuple par lui-même, de la base au sommet », mais n’y croit plus : « Eux [les dirigeants russes] l’entendent comme une gestion exercée par la classe instruite. » Des mots qui s’inscrivent étrangement dans notre actualité de fin d’année. Rembob’INA, présenté par Patrick Cohen. presse.lcp.fr et lcp.fr/collection/rembobina
29/12/2018
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https://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2018/12/29/rembob-ina-alexandre-soljenitsyne-et-bernard-pivot-faiseurs-d-histoire_5403482_1655027.html
La discrète révolution de la justice des affaires sociales
Le contentieux de la maladie, des cotisations sociales ou des pensions intègre le 1er janvier les tribunaux de grande instance.
Le 1er janvier, près de 250 000 affaires vont être transférées vers les tribunaux de grande instance (TGI), du jour au lendemain. C’est le résultat d’une réforme de grande ampleur des juridictions sociales inscrite dans la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle de novembre 2016. Les 115 tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS), les 26 tribunaux du contentieux de l’incapacité (TCI) et les 101 commissions départementales d’aide sociale (CDAS) disparaissent le 31 décembre. Ce contentieux sera désormais traité dans 116 pôles sociaux, qui voient le jour au sein des TGI. « Cette justice peu visible, qui concerne souvent nos concitoyens les plus vulnérables, intègre pleinement la juridiction judiciaire, avec une simplification, grâce à une procédure unique, sans représentation obligatoire », résume Peimane Ghaleh-Marzban, directeur des services judiciaires à la chancellerie. Pour des contentieux, parfois de quelques centaines d’euros, qui peuvent porter sur des remboursements de taxi pour des soins à l’hôpital, des cotisations aux Urssaf, la reconnaissance d’une invalidité après un accident du travail ou le montant d’une pension de réversion, les justiciables devaient se débrouiller seuls entre des juridictions différentes, aux procédures incompatibles. Désormais, un formulaire unique recto-verso pourra être déposé dans n’importe quel tribunal du pays ou être rempli avec l’aide des greffiers des services d’accueil unique du justiciable. Et, contrairement à ce qui avait été prévu, le nombre de pôles sociaux n’a pas été réduit à un par département. Le maillage territorial est conservé. Justice du quotidien Hérité de l’après-guerre, ce contentieux social avait d’abord été traité par des commissions administratives avant de se judiciariser progressivement. Mais, aujourd’hui encore, le travail de greffe des TASS était assuré par des fonctionnaires du ministère des solidarités et de la santé ou des salariés de droit privé des caisses d’assurance-maladie, tandis que les TCI pouvaient être présidés par des médecins ou des avocats. De quoi considérer cette justice du quotidien, souvent technique, comme une sous-justice, dont les magistrats se désintéressaient. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La justice multiplie les chantiers numériques « Nous aurons désormais la pleine responsabilité de ce contentieux, dont nous pourrons améliorer le pilotage, prévient Joëlle Munier, présidente du tribunal de Caen et de la Conférence nationale des présidents de TGI. Il y a eu un effort considérable pour préparer cette réforme. » L’un des enjeux était de réduire le nombre d’affaires en souffrance avant de basculer dans le nouveau dispositif. Des assistants de justice ont été recrutés par la chancellerie tandis que des contractuels étaient mis à disposition par le ministère de la santé avec l’idée de faire passer entre décembre 2016 et décembre 2018 les affaires en cours de deux ans d’activité à environ un an. Tout ne s’est pas si bien passé… L’équivalent de dix-huit mois d’activité est finalement transféré. Avec de grosses inégalités selon les départements.
29/12/2018
police-justice
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« Monsieur le Président, la Guinée doit protéger ses filles de l’excision, du viol et du mariage précoce »
Amour et sexualité : avoir 20 ans en Afrique de l’Ouest (7). La militante Hadja Idrissa Bah interpelle le chef de l’Etat, Alpha Condé, sur la situation dramatique des jeunes Guinéennes.
Lycéennes à Conakry, capitale de la Guinée, le 15 décembre 2017. Vincent Tremeau/FFMUSKOKA Lettre ouverte au président Alpha Condé. Votre Excellence Monsieur le Président de la République de Guinée, Je vous écris pour attirer votre attention sur la situation alarmante des jeunes filles de notre pays. Depuis quelques années, il connaît une recrudescence des violences faites aux femmes, notamment au travers du mariage d’enfants, des mutilations génitales, des abus sexuels. Ces situations tragiques constituent une grave violation des droits humains et une menace à l’intégrité physique et morale des victimes. Présentation de notre série Amour et sexualité : avoir 20 ans en Afrique de l’Ouest Aujourd’hui, il y a urgence. La presque totalité de nos fillettes subissent des mutilations génitales (97 %), et notre Guinée occupe toujours le deuxième rang mondial des pays qui font perdurer cette pratique. Nos mamans subissent toute leur vie les conséquences de ces mutilations. Certaines souffrent d’une stérilité irréversible, d’autres connaissent le malheur et la douleur d’être privées d’une sexualité satisfaisante pour elle et pour leur mari. Et beaucoup meurent en accouchant. Après la mort de cette petite de 10 ans le 17 août 2016 à Koropara, dans la région de Nzérékoré, le gouvernement s’était engagé à œuvrer sans relâche contre cette ignoble pratique et à en traduire en justice les auteurs et complices. Car l’excision est bien souvent pratiquée au sein de « camps de vacances » au vu et au su de tous, mais personne n’a le courage de les dénoncer. Traumatisées à vie Monsieur le Président, combien de petites filles sont violées tous les jours dans notre pays, malgré la ratification par la Guinée des conventions relatives aux droits de l’enfant ? Ces crimes horribles restent encore largement impunis et nombreuses sont les victimes qui sont montrées du doigt comme si elles étaient les fautives d’actes qu’on leur a fait subir. La honte doit changer de camp. La loi doit être strictement appliquée contre les auteurs de viols. Sinon, que deviendront ces jeunes filles innocentes violées et parfois même engrossées par un proche, un père, un oncle, un ami de la famille ? Que répondrons-nous à ces victimes traumatisées à vie ? Que ceux qui sont censés nous protéger peuvent nous violer et nous détruire en toute impunité ? Monsieur le Président, je suis meurtrie. Meurtrie par la souffrance de toutes ces fillettes que je côtoie quotidiennement dans mon travail avec le Club des jeunes filles leaders de Guinée. Meurtrie de constater que, tous les jours, dans nos villages, nos leaders religieux règlent ces crimes à l’amiable et que leurs auteurs puissent continuer à jouir de la vie. Episode 8 Hadja Idrissa Bah, une jeunesse contre les violences faites aux femmes Et que dire des mariages précoces ? Que dire de nos parents pris dans une course de vitesse pour nous marier à l’âge de 12 ans alors que la loi guinéenne nous protège en son article 320 du Code pénal qui proscrit toute union avant 18 ans. Le manque de connaissance et d’application de nos lois aboutit à ce que 51 % des jeunes filles de Guinée soient mariées avant l’âge de 18 ans et 19 % avant 15 ans, selon les dernières statistiques de l’Unicef. En discutant et en convainquant des parents attentifs, nous parvenons à sauver tous les jours nombre de jeunes filles d’un mariage précoce, mais c’est bien peu au regard du plus d’un million de Guinéennes forcées de prendre époux trop tôt. Monsieur le Président, l’heure est très grave ! Il faut que le pays fasse de la protection de ses jeunes filles une priorité nationale, car nous restons parmi les plus vulnérables de la société alors que nous devrions pouvoir participer, grâce à une éducation inclusive et de qualité, au développement de notre chère Guinée. Hadja Idrissa Bah, Guinéenne âgée de 19 ans, a créé en 2016 le Club des jeunes filles leaders de Guinée proposant des cellules d’écoute et des actions de sensibilisation pour lutter notamment contre les mariages forcés, les viols conjugaux et les mutilations génitales. Cette série a été réalisée dans le cadre d’un partenariat avec le Fonds français Muskoka. Hadja Idrissa Bah (Fondatrice du Club des jeunes filles leaders de Guinée)
29/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/29/monsieur-le-president-la-guinee-doit-proteger-ses-filles-de-l-excision-du-viol-et-du-mariage-precoce_5403467_3212.html
Syrie : à l’appel des Kurdes, le régime avance ses pions à Manbij et dans le nord
Menacées par Ankara depuis l’annonce du retrait des troupes américaines, les forces kurdes ont appelé vendredi le régime syrien à l’aide.
Des soldats turcs près de Manbij, le 28 décembre. KHALIL ASHAWI / REUTERS Le retrait planifié des forces américaines du nord-est de la Syrie commence à produire ses premiers effets dans la ville de Manbij, proche la frontière avec la Turquie. Vendredi 28 décembre, les Unités de protection du peuple, la force kurde partenaire de la coalition internationale contre l’Etat islamique emmenée par Washington, ont appelé les forces du régime syrien à « se déployer dans les régions d’où nos troupes se sont retirées, particulièrement à Manbij, et à protéger ces régions contre l’invasion turque ». Les zones du nord-est de la Syrie que les unités à dominante kurde regroupées au sein des Forces démocratiques syriennes (FDS) contrôlent sont en effet menacées par une offensive d’Ankara qui pourrait survenir une fois le retrait des Etats-Unis effectif. Chasser ces forces de Manbij est par ailleurs une priorité formulée de longue date par le président turc, Recep Tayyip Erdogan. Peu après l’appel des forces kurdes, le porte-parole de l’armée syrienne a annoncé à la télévision que le drapeau syrien avait été hissé à Manbij, laissant entendre que les forces du régime de Damas étaient entrées dans la ville. Il n’en est cependant rien sur le terrain : les forces gouvernementales ne sont pas entrées dans la cité, où des militaires américains sont toujours présents et où leurs blindés ont patrouillé dans l’après-midi. « La coalition n’a constaté aucun changement venant confirmer ses allégations. Nous appelons toutes les parties à respecter l’intégrité de Manbij et de ses citoyens », a affirmé la coalition dirigée par les Etats-Unis dans un court communiqué. Déclarations « va-t-en guerre » A l’ouest de Manbij, les forces du régime se sont toutefois renforcées au cours des derniers jours dans des localités rurales dont elles partagent le contrôle avec les Forces démocratiques syriennes (FDS) depuis deux ans. Et un début d’accord serait en négociation afin d’organiser le retour progressif du gouvernement syrien dans des zones contrôlées par les forces à dominante kurde. D’après des témoignages relevés par Le Monde, une délégation du régime serait entrée dans la ville de Manbij pour parlementer avec les autorités locales et des responsables des FDS confirment au Monde qu’ils sont prêts à se coopérer avec Damas au nom de la « défense du pays ». « Les forces gouvernementales avancent en coordination avec les Unités de protection du peuple pour couper la route aux forces d’occupation turque, affirme Ibrahim Issa, une personnalité tribale arabe associée aux Kurdes au sein des FDS. L’armée turque se mobilise dans un contexte de déclarations va-t-en guerre et de menaces proférées par des dirigeants turcs à notre égard. Nous les prenons au sérieux. Le régime turc nous a déjà attaqués par le passé à Afrin. Et nous nous défendrons. Seuls ou en coopération avec les forces gouvernementales. » Article réservé à nos abonnés Lire aussi La France mise hors jeu dans le conflit syrien En mars, l’armée turque et ses supplétifs syriens avaient pris le contrôle de la ville d’Afrin, dans l’enclave kurde du même nom, dans le nord-ouest de la Syrie, au terme de cinquante-huit jours de combats qui ont provoqué la fuite de 250 000 personnes. De son côté, le président turc, Recep Tayip Erdogan, a qualifié les déclarations du régime syrien d’« opération psychologique ». Dans un communiqué, le ministère de la défense turc a par ailleurs affirmé que les forces à dominante kurdes qui contrôlent toujours Manbij n’avaient « pas le droit ou le pouvoir de parler au nom de la population locale ou d’inviter une quelconque partie ». « Les Unités de protection du peuple kurde et le gouvernement syrien veulent défendre Manbij et les frontières de l’Etat syrien contre une invasion turque », rétorque un haut responsable kurde de Syrie. « Les militaires des deux côtés [FDS et régime] sont chargés des questions techniques et l’Etat syrien est membre légal des Nations unies. Nous ne sommes pas contre la protection de Manbij et des frontières de la Syrie par l’armée gouvernementale. L’autonomie des régions dans le monde n’est pas contraire au principe de protection de frontière d’Etat par l’armée du pays », veut-il croire. « Apporter de la clarté » Il n’est pas sûr que Damas se contente sur le long terme de « questions techniques » alors que le retrait américain pourrait consacrer son retour dans le nord du pays en position de force. Et fort, notamment, du soutien de son allié russe. Moscou a d’ailleurs jugé « positive » l’annonce de l’entrée de l’avancée des forces syriennes, estimant que cela allait « dans le sens d’une stabilisation de la situation ». La question devait être discutée samedi 29 décembre lors d’une visite à Moscou des ministres turcs des affaires étrangères et de la défense, qui doit « apporter de la clarté », selon le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. « Les Kurdes ont lancé un appel auquel le régime s’est fait une joie de répondre en investissant les zones de contact entre les FDS d’une part, et les Turcs d’autre part. Les Russes sont dans la boucle et font l’intermédiaire entre les Kurdes et le régime », estime une source proche du dossier, qui ajoute : « Les Kurdes ne sont pas dupes. Il est clair que les négociations les plus dures avec Damas sont à venir. »
29/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/29/syrie-a-l-appel-des-kurdes-le-regime-avance-ses-pions-a-manbij-et-dans-le-nord_5403464_3210.html
« Gilets jaunes » : mobilisation timide, des heurts dans plusieurs villes
Des incidents entre des manifestants et les forces de l’ordre ont émaillé, dans plusieurs villes, les dernières heures d’une mobilisation en baisse pour l’« acte VII ».
Une manifestante porte un bonnet phrygien, un des symboles de la République, lors de la manifestation à Lille, le 29 décembre. FRANCOIS LO PRESTI / AFP Ils n’entendent pas renoncer. Malgré un « acte VI » qui a peu mobilisé et les fêtes de fin d’année, des « gilets jaunes » se sont à nouveau mobilisés pour un septième samedi consécutif d’actions, ce 29 décembre, avec des rassemblements mineurs notamment à Paris, Marseille, Lyon, Toulouse ou encore Bordeaux. Les rassemblements ont été émaillés d’incidents entre les manifestants et les forces de l’ordre en fin d’après-midi, notamment à Metz, ou plus de 300 « gilets jaunes » ont tenté de forcer un barrage de gendarmes mobiles près de la préfecture, selon l’Agence France-Presse. Six personnes ont été interpellées et trois manifestants ont été blessés à Lille, où les policiers ont fait usage de gaz lacrymogènes à plusieurs reprises pour disperser les quelque 600 manifestants comptabilisés par la préfecture. Manifestation de « gilets jaunes », à Bordeaux, le 29 décembre. MEHDI FEDOUACH / AFP A Bordeaux, où la mobilisation était plus importante avec 2 600 personnes présentes, des « gilets jaunes » ont érigé quelques barricades dans le centre-ville avant plusieurs échanges de projectiles divers, de gaz lacrymogènes et de balles de défenses avec les forces de l’ordre. Cinquante-sept interpellations à Paris Huit cents « gilets jaunes » se sont rassemblés à Paris, selon un bilan de la préfecture de police en fin de journée, qui fait état de 57 interpellations dans la capitale à 18 heures, dont 33 placements en garde à vue. Après plusieurs face à face avec les forces de l’ordre, la circulation a été rétablie en début de soirée sur les Champs-Elysées, partiellement bloqués par les « gilets jaunes » pendant près d’une heure. Plusieurs centaines de manifestants s’étaient rendus en début d’après-midi devant les locaux de la chaîne d’information en continu BFM-TV, dans le quinzième arrondissement de la capitale. Certains d’entre eux ont envahi la voie de circulation du tramway et jeté des projectiles sur les forces de l’ordre, qui ont répliqué par des tirs de gaz lacrymogène et procédé à plusieurs interpellations, selon l’Agence France-Presse (AFP). Lors de la manifestation des « gilets jaunes » à Paris, le 29 décembre. ZAKARIA ABDELKAFI / AFP « C’est à la population de décider » Environ un millier de « gilets jaunes » se sont également rassemblés samedi matin devant l’arc de triomphe de Marseille, désirant prouver que leur mouvement ne s’essouffle pas malgré les fêtes. Les manifestants, venus de plusieurs points de blocage à travers la région, ont commencé à se réunir dans le calme vers 10 heures Porte d’Aix, dans le centre de la ville. Priscillia Ludosky, une automobiliste francilienne considérée comme l’une des initiatrices du mouvement des « gilets jaunes » avec sa pétition en octobre contre la hausse des taxes sur les carburants, est venue les soutenir. « Ce qui ressort de toutes les personnes qui ont quelque chose à dire, c’est qu’on veut retrouver du pouvoir d’achat et avoir notre mot à dire dans les décisions », a-t-elle déclaré. « On veut un référendum sur la mise en place du RIC [référendum d’initiative citoyenne], la baisse des taxes sur les produits de première nécessité et la baisse des rentes du gouvernement. C’est à la population de décider. » Dix-sept interpellations à Amiens Dix-sept participants au mouvement des « gilets jaunes » ont été interpellées à Amiens, où une manifestation a eu lieu malgré l’interdiction de tout rassemblement par la préfecture jusqu’au 2 janvier, a appris l’AFP auprès du parquet. Les forces de l’ordre ont par ailleurs procédé à cinq interpellations autour d’Albertville (Savoie) dans la journée de samedi, a indiqué la préfecture du département, qui avait déclaré ne vouloir tolérer aucun blocage des routes menant aux stations de sports d’hiver. Les personnes interpellées l’ont été au péage de Sainte-Hélène-sur-Isère et à un rond-point situé à l’entrée d’Albertville, soit les deux points de rassemblement du jour pour les « gilets jaunes » de Savoie. Toujours selon la préfecture, des pneus ont été incendiés sur la bande d’arrêt d’urgence de l’A43 et des forces de l’ordre ont été caillassées. A Rouen, les locaux de la Banque de France visés La porte d’enceinte de la Banque de France a été incendiée samedi à Rouen lors d’une manifestation de « gilets jaunes » qui a réuni environ un millier de personnes sur fond de heurts avec la police, a indiqué l’AFP en citant des informations de la préfecture de Seine-Maritime. « Les “gilets jaunes” ont mis un stock de poubelles près de la porte puis y ont mis le feu », a précisé la préfecture. La police du département a fait état sur son compte Twitter de « jets de projectiles, feux de poubelles, barricades » dans le centre-ville de Rouen. #Acte7 / #GiletsJaunes à #Rouen : gendarmes et policiers de la Bac sont en position pour permettre l'intervention d… https://t.co/gkG3jYDgoK — LouvetSimon (@simon louvet) Les pompiers sont intervenus à vingt-cinq reprises dans la ville normande pour éteindre des feux sur la voie publique. Six personnes ont été interpellées, notamment pour des jets de projectiles. En Bretagne, blocages autour de magasins du groupe Mulliez Des « gilets jaunes » manifestent dans plusieurs villes de Bretagne devant des enseignes qui appartiendraient selon eux « à la famille Mulliez » – notamment propriétaire des magasins Auchan, des enseignes Flunch ou Leroy Merlin. Plusieurs dizaines d’entre eux bloquaient dans la matinée les accès au Décathlon de Morlaix (Finistère), a pu constater un journaliste du Monde sur place. Certains manifestants présents affirment que la famille Mulliez aurait financé la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron, que le groupe « ne paye pas ses impôts en France » et qu’il voudrait licencier certains de ses salariés alors qu’il aurait « amplement bénéficié du CICE », le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Des rassemblements prévus pour la nuit de la Saint-Sylvestre Pour cette nouvelle journée d’action, les « gilets jaunes » se montrent plus discrets sur les réseaux sociaux qui leur servent de plates-formes d’échanges depuis le début du mouvement. Pour surprendre les forces de l’ordre notamment, les actions et les lieux de rassemblement sont maintenant annoncés à la dernière minute. Sur le terrain, les actions s’étiolent : cette semaine, les forces de l’ordre ont poursuivi les évacuations de rond-point, alors que quelque 2 500 personnes étaient mobilisées quotidiennement ces derniers jours contre 4 000 la semaine précédente. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les Champs Elysées, théâtre du pouvoir macronien, de l’investiture aux « gilets jaunes » Toutefois certains « gilets jaunes » ont aussi déjà en point de mire la soirée du réveillon. Plusieurs rassemblements sont attendus la nuit de la Saint-Sylvestre, notamment sur le pont d’Aquitaine à Bordeaux, ou sur les Champs-Elysées à Paris où se réunissent traditionnellement quelques milliers de Parisiens et de touristes pour le passage de la nouvelle année. Le mouvement, qui dure depuis un mois et demi, a largement décru ces dernières semaines : 38 600 manifestants en France le 22 décembre, contre 66 000 une semaine plus tôt et 282 000 pour la première journée de mobilisation le 17 novembre, d’après les chiffres du gouvernement. Depuis le début du mouvement en novembre, dix personnes sont mortes sur des points de blocage et plus de 1 500 manifestants ont été blessés sur les ronds-points ou lors de manifestations, dont une cinquantaine grièvement.
29/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/29/gilets-jaunes-que-faut-il-attendre-du-septieme-samedi-de-mobilisation_5403461_3224.html
En RDC, tensions et incertitudes planent sur les élections
L’opposition suspecte la commission électorale de préparer une fraude lors du scrutin présidentiel prévu dimanche mais déjà retardé d’une semaine.
Des employés de la Commission électorale congolaise supervisent l’impression de bulletins de vote, à Kinshasa, le 23 décembre. JEROME DELAY / AP Le président de la Commission électorale congolaise (CENI), Corneille Nangaa, l’a garanti vendredi 28 décembre, à Kinshasa. « Nous allons tous voter dimanche. » Il s’est voulu rassurant à la sortie d’une réunion improvisée avec des diplomates de la Communauté de développement des Etats de l’Afrique australe (SADC) et de l’opposant Martin Fayulu, l’un des trois grands candidats à la présidentielle, les autres ayant dépêché des représentants. Tous ont toutefois refusé de signer un document les engageant « pour la paix », consistant entre autres à respecter le verdict des urnes et à ne pas appeler à la violence. Ils devaient se retrouver samedi 29 décembre pour une seconde session de négociations avec une CENI toujours suspectée par l’opposition d’être à la solde du pouvoir, et de préparer une fraude avec des machines à voter électroniques, malgré ses promesses que seul le dépouillement des bulletins papier sera pris en compte. Le doute et la méfiance persistent sur une transmission des résultats par voie numérique. « Trop, c’est trop » L’autre point de désaccord porte sur la suspension, par la CENI, des élections à Beni et Butembo (est), où sévit une épidémie d’Ebola qui a tué 359 personnes ces cinq derniers mois, de même qu’à Yumbi (ouest), ravagée par des violences communautaires. Au total, près de 1,2 million d’électeurs sont concernés par ce report à mars 2019, dont une bonne partie, au Nord-Kivu, abhorre aujourd’hui Joseph Kabila – et son dauphin –, pour qui elle avait pourtant voté en 2006. A Beni, des jeunes en colère sont descendus dans la rue, ont défié les forces de sécurité qui ont ouvert le feu. Ces manifestants ont détruit des installations d’ONG dont un centre de transit Ebola d’où se sont échappés des malades présumés. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Joseph Kabila : « Il faut regarder la RDC aujourd’hui et il y a dix ans » Une partie de l’opposition réclame toutefois l’annulation de cette décision. « Trop, c’est trop. La CENI vient de dépasser la ligne rouge, a déclaré Pierre Lumbi, ancien conseiller spécial à la sécurité de M. Kabila, désormais directeur de campagne de Martin Fayulu. On prend à témoin la communauté internationale et on l’interpelle pour qu’elle obtienne la levée de cette décision susceptible de fragiliser l’ordre et la stabilité. » Sauf que la « communauté internationale » est tenue à l’écart par le régime Kabila, qui a décliné les propositions de soutien logistique de la Mission des Nations unies (Monusco) mais aussi des Etats-Unis pour organiser ces élections dans ce pays immense, le plus grand d’Afrique francophone.
29/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/29/en-rdc-tensions-et-incertitudes-planent-sur-les-elections_5403457_3212.html
« Costa Brava, déjeuner gratuit et machines miraculeuses »
Dans sa chronique, Frédéric Potet, journaliste au « Monde », fait le récit de la présentation commerciale d’une société spécialisée dans le bien-être, qui appâte les clients en leur affirmant qu’ils ont gagné un séjour en Espagne.
Chronique. Ma mère a reçu un courrier lui annonçant qu’elle avait gagné un séjour de cinq jours en pension complète sur la Costa Brava. Seule contrepartie : assister auparavant à la « présentation privée » d’une société appelée Physaro, spécialisée dans les produits de bien-être. Tout invité pouvant être accompagné, nous y sommes allés ensemble. Intrigués et méfiants. Appâtés, également, par la promesse d’un déjeuner offert à l’issue de la réunion. Le salon d’un hôtel-restaurant de Bourges a été réservé pour l’occasion. Une cinquantaine de personnes – moyenne d’âge, 70 ans – sont accueillies par un jeune homme tout juste arrivé d’une animation similaire, la veille à Mulhouse. Il se prénomme Ivan, a 27 ans et travaillait chez Ikea avant de rejoindre Physaro, sur les conseils de sa grand-mère, cliente de la maison. « Celui qui a la santé ne connaît pas sa richesse », lance-t-il à la manière d’un dicton, avant de donner quelques détails sur le fameux voyage en Espagne. Prévu pour le printemps, celui-ci ne sera pas aussi « gratuit » qu’annoncé. Les candidats aux plages catalanes devront en effet se rendre sur place par leurs propres moyens. Ils devront également s’acquitter de frais de dossier (99 euros), payer le parking, l’excursion à Barcelone… Un concert de Johnny Success, un sosie de feu Johnny Hallyday, figure au programme : « Vous verrez, il est très impressionnant en termes de ressemblance et de voix », assure Ivan. La même contrainte attend les futurs participants : assister, au milieu du séjour, à la « journée du sponsor », sans laquelle cette simili-gratuité ne serait pas possible. « Pressothérapie professionnelle à cinq canaux » À Bourges, l’animation commerciale du jour, elle, démarre. Elle est consacrée à la promotion de « la pressothérapie professionnelle à cinq canaux », une technique de drainage lymphatique inventée par un physiothérapeute allemand dont le portrait orne un dépliant énumérant les innombrables bienfaits qu’elle procure. Elimination de la cellulite, soulagement de la fatigue musculaire, réduction des inflammations, oxygénation de la peau, amélioration de la circulation, disparition des toxines, n’en jetez plus ! Cette méthode miracle nécessite un appareillage adapté, explique le démonstrateur, en l’occurrence un compresseur à air, relié à des bottes gonflables dans lesquelles se glisseront les jambes fatiguées. Lire aussi A Amboise, le Père Noël préfère le côté obscur « Tout le monde devrait avoir chez soi cet appareil qui mériterait d’être remboursé par la Sécu », s’enhardit Ivan. Conviés à tester l’engin, deux cobayes se sont levés de leur chaise pour chausser ces jambières magiques. Le racolage n’en continue pas moins de plus belle, autour d’un argument massue : la non-dangerosité (supposée) du massage prodigué. « Vous ne vous injectez rien », assène le maître de cérémonie, avant de poser une devinette : « Savez-vous combien de personnes meurent chaque année à cause de surdosage de médicaments ? Plus de dix mille. Et ça, personne n’en parle à la télé. »
29/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/29/costa-brava-dejeuner-gratuit-et-machines-miraculeuses_5403454_3232.html
Le serpent de mer du racisme dans les stades italiens
Les cris visant Kalidou Koulibaly sont une triste habitude du football italien depuis les années 1980. Avant les joueurs noirs, les méridionaux étaient la cible de banderoles racistes, rappelle l’historien du supportérisme Sébastien Louis.
Lors du match au sommet de la dix-huitième journée de Série A Inter-Napoli, le défenseur de l’équipe méridionale, Kalidou Koulibaly, a de nouveau été victime d’injures racistes de la part d’une partie du public. Le racisme dans les stades de football est malheureusement un serpent de mer et ce depuis le début des années 1980. Aucun pays en Europe n’est épargné par ce fléau, mais dans certains championnats, la question est récurrente. C’est le cas notamment de la péninsule. Mais comment se fait-il qu’encore aujourd’hui le championnat italien fasse régulièrement parler de lui pour les actes de racisme de certains supporteurs ? Dans la péninsule, l’un des premiers cas de xénophobie lors d’un match de football a eu lieu le 21 novembre 1982 lors d’Hellas Verona-Cagliari. Des ultras véronais accueillent alors le joueur péruvien de l’équipe sarde, Julio Cesar Uribe, avec un étendard raciste, puis lui jettent des bananes. Cet acte ne va pas être relevé par la presse nationale. Il faut attendre quelques années pour que les médias s’intéressent aux discriminations, mais celles-ci sont inter-italiennes. En effet, avec la montée en puissance sur le plan sportif de l’équipe parthénopéenne, ces tifosi deviennent une cible. Lors du choc sportif Hellas Verona-Napoli, le 23 février 1986, les ultras véronais déploient trois messages explicites : « Apartheid », « Bienvenue en Italie » et « Lavez-vous », alors qu’un célèbre chant anti-napolitain se diffuse dans la plupart des stades septentrionaux. Hellas Verona-Napoli 1985/1986, banderole des Brigate Gialloblu « Bienvenue en Italie » Cette rhétorique connaît un immense succès avec la montée en puissance des ligues séparatistes. C’est d’ailleurs dans la région de Vénétie que le premier parti de ce genre se constitue en 1979. Il essaime rapidement et d’autres ligues se constituent dans les régions septentrionales. Tout au long de la décennie 1980 ces partis sécessionnistes progressent aux différentes élections. À la même époque, les banderoles hostiles aux napolitains se multiplient. À Milan, le 29 novembre 1987, les ultras lombards exhibent un message clair lors d’Inter-Napoli : « La drogue et les culs-terreux sont les plaies de l’Italie ». La figure du terrone (littéralement le « cul-terreux ») est une allusion péjorative pour désigner le méridional. Alors que le nord du pays connaît un boom économique sans précédent dans les années 1980, la partie méridionale de la péninsule ne décolle pas. Au contraire, les différentes mafias semblent y régner en maître et les clichés colportés par les partis sécessionnistes connaissent un véritable succès. Le terrone par excellence est alors incarné par le Napolitain. Car la métropole sudiste voit son équipe remporter deux titres de champion en 1987 et en 1990, une coupe d’Italie en 1987 et une coupe de l’UEFA en 1990. Naples symbolise ce sud tant honnie. Dans un championnat où les équipes septentrionales sont sous-représentées et n’ont jamais remporté le scudetto, à l’exception de Cagliari en 1970, le SSC Napoli et ses supporteurs deviennent rapidement la cible des tifosi des grandes métropoles du nord habituées à s’accaparer les titres de champion d’Italie. Autocollant des ultras de l’Hellas Verona avec le slogan « Culs-terreux ? Non merci ! » À la même époque, la rhétorique anti-méridionale des partis sécessionnistes obtient une nouvelle audience. La Ligue du Nord vient à peine de se constituer suite à la fusion des différentes ligues autonomistes du nord de la péninsule en 1989. La formation connaît alors ses premiers succès électoraux et propose une thématique identitaire qui dénonce la gabegie de l’État central et de « Rome la voleuse ». C’est dans ce contexte qu’il faut interpréter les banderoles qui se multiplient alors dans les stades italiens. Le 22 septembre 1991, lors du match Torino-Napoli on peut lire : « La race des infâmes est née avec les Napolitains ! La Ligue ne suffit plus, il faut un mur ». Il n’y a pas de militant ou de stratégie du parti sécessionniste derrière ces actes, mais des ultras qui utilisent cette rhétorique pour décrier leurs adversaires du jour. D’ailleurs, il n’existe pas de ligne de fracture entre ultras du nord et du sud de la péninsule malgré ces discours. Les multiples amitiés entre groupes méridionaux et septentrionaux en témoignent. C’est durant cette décennie que la péninsule connaît une mutation importante. L’Italie, qui était jusque dans les années 1980 un pays traditionnel d’émigrés, devient une terre d’immigration. C’est le basculement fondamental d’une nation dont l’économie est devenue l’une des plus puissantes du globe et où se presse une main-d’œuvre bon marché. À l’inverse des autres pays européens où le passé colonial est bien plus important et se note depuis de nombreuses années dans l’espace public, la péninsule n’est pas préparée à cette diversité. Dans une société assez homogène où la religion catholique est encore très forte, les nouveaux arrivants sont remarqués. À la classique conflictualité inter-italienne vient s’ajouter un rejet de la différence qui se note avec une augmentation des actes racistes. Ce n’est pas le parti néofasciste Mouvement Social Italien qui surfe sur cette vague, mais bien la Ligue du Nord qui prend en charge le discours contre les nouveaux arrivants. Affiche de propagande électorale pour les élections générales de 2008 de la Ligue du Nord. Il est écrit : « Ils n’ont pas pu mettre en place des règles pour l’immigration. Aujourd’hui, ils vivent dans des réserves. Pense-y » Dans les stades du pays les actes xénophobes se multiplient. Ainsi, le 28 avril 1996, pour protester contre l’éventuel transfert d’un joueur hollandais du Surinam à l’Hellas Verona, deux ultras véronais arborent des capuches du Ku Klux Klan, puis ils pendent un mannequin noir à la rambarde du virage sud où trône une banderole explicite : « Le nègre nous vous l’offrons pour nettoyer le stade » (sic). Au cours de cette décennie, les ultras de l’AS Roma et de la Lazio multiplient les saillies antisémites sur des immenses banderoles. Ces actes sont l’œuvre d’une minorité d’ultras, plus ou moins politisés, avec parfois l’aval de groupuscules d’extrème-droite comme le MSI Flamme tricolore ou Forza Nuova. Différents termes, qui ont une connotation négative dans la rhétorique néofasciste ou de la Ligue, se répandent chez certains ultras : « juifs », « tziganes », « albanais » et bien sûr « terroni ». Mais, à la fin des années 1990, des actes différents se popularisent dans les stades. Cette fois, c’est une partie du public qui manifeste son hostilité envers des joueurs d’origines africaines. Les ultras ne sont pas toujours à la manœuvre. Au contraire, certains affichent clairement des messages antiracistes et entreprennent des actions pour lutter contre ces phénomènes. À l’image de sa société, le football italien s’est ouvert plus tard que les autres à la « diversité » et aux footballeurs africains ou d’origine. Des cris du singe sont entonnés par une partie des spectateurs pour déstabiliser les joueurs noirs. Parfois des virages clairement marqués à droite, comme la Curva Nord de la Lazio ou la Curva Sud de l’Hellas Verona, en sont les instigateurs mais dans des stades où les ultras n’affichent pas de position néofasciste, il est possible d’entendre ces hululements. Le 27 novembre 2005, le joueur ivoirien de Messina, Marc Zoro, tente de stopper la rencontre Messina-Inter suite aux cris de singe de la part d’une frange des tifosi de l’Inter qui le visent Pour nombre de supporteurs il n’y a pas de racisme derrière ces cris mais il s’agit uniquement de déstabiliser le joueur adverse par tous les moyens. Le tifo contro (le fait de dénigrer l’adversaire) est, il est vrai, une caractéristique du supportérisme en général, mais en particulier en Italie. Les autorités vont cependant réagir et ce suite au message des Irriducibili de la Lazio qui rend hommage au criminel de guerre serbe Arkan, le 30 janvier 2000. Cet événement extrêmement médiatisé suscite une réaction très rapide de la fédération italienne de football, qui proscrit ce genre de banderole des stades. Suite à l’exposition d’un message au contenu raciste ou violent, l’arbitre peut désormais suspendre la rencontre tant que la banderole n’a pas été enlevée. Si cette suspension dure plus de quarante-cinq minutes, l’arbitre peut même interrompre le match et la justice sportive peut imposer la défaite 2-0 de l’équipe dont les supporteurs sont mis en cause. Cependant les actes racistes se poursuivent et les banderoles discriminatoires ou fascisantes continuent d’être exposées de manière ponctuelle. À chaque fois la réaction médiatique et celle des autorités sont similaires, mais rien ne change. La Ligue, forte de ses succès électoraux et de sa participation au gouvernement, modifie sa stratégie. Elle a consolidé sa base électorale en s’appuyant sur un discours populiste et démagogique, elle se reconvertit dans la « croisade contre le péril islamique ». La lutte contre l’immigration est aussi un de ses chevaux de bataille. Car la péninsule est l’une des portes d’entrée de l’Union Européenne. L’économie de la péninsule est encore dynamique et le marché du travail absorbe cette main-d’œuvre bon marché, mais la crise mondiale va frapper le pays de plein fouet en 2008. Les discours xénophobes de la Ligue infusent une société italienne fragilisée. De plus, plusieurs personnalités du monde du football italien dérapent. En juillet 2014, Carlo Tavecchio, candidat à la présidence de la Fédération Italienne de football (FIGC) s’exprime de la sorte lors d’une conférence de presse : « Opti Poba est arrivé et mangeait des bananes, aujourd’hui il joue en titulaire en Série A » en se référant à un joueur nigérian de la Lazio. Un mois plus tard Tavecchio est élu à la tête de la Fédération avec 63,63% des voix. En outre, aucune rencontre professionnelle de football italien n’a encore été suspendue suite aux actes racistes, à l’exception d’un banal match amical Pro Patria-AC Milan en janvier 2013. Bien entendu, les sanctions collectives ne sont pas une solution car la question du racisme, comme celle de la violence, demande des mesures ciblées et non pas collectives. Mais cela démontre que la volonté des autorités sportives dans le domaine de la lutte contre le racisme est encore essentiellement une question de pure rhétorique en Italie comme dans de nombreux pays. Sébastien Louis
29/12/2018
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http://cotetribunes.blog.lemonde.fr/2018/12/29/le-racisme-dans-les-stades-italiens-un-vieux-serpent-de-mer/
La diplomatie d’Emmanuel Macron, un beau discours
Editorial. Les engagements du président français tardent à se concrétiser, notamment en matière de droits humains ou d’environnement.
Emmanuel Macron lors de la conférence des ambassadeurs, en août 2017. POOL New / REUTERS Editorial du « Monde ». C’est peu de dire qu’Emmanuel Macron a suscité des attentes en matière de politique internationale. Non seulement sa jeunesse et son talent ont intrigué, voire enthousiasmé, partenaires comme adversaires de la France, mais le président français a affiché des valeurs et une volonté de réforme, dans un monde de plus en plus crispé et chaotique. En quelques discours – à l’ONU à New York et devant le Congrès américain à Washington sur le multilatéralisme, à Athènes et à la Sorbonne sur l’Europe –, il a posé les jalons d’une vision du monde et d’une ambition. La promesse Macron est ainsi résumée : « Une vision humaniste de la mondialisation. » Face au repli et à l’unilatéralisme des Etats-Unis, à la puissance de la Chine et au retour de la Russie dans les affaires internationales, le président français veut une Europe qui, défendant « démocratie et valeurs progressistes », s’affirme en « leader du monde libre ». Il veut être aussi « la voix des oubliés ». Il ne promet rien de moins qu’une double refondation du multilatéralisme et de l’Europe. Sachant que la France sera, une fois le Brexit effectif, le seul pays de l’Union européenne à être membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, sachant aussi que la France joue historiquement un rôle diplomatique sans commune mesure avec sa géographie, sa population ou son économie, M. Macron veut devenir, au moment où Angela Merkel arrive en fin de règne et où Londres va quitter le bateau européen, le capitaine de cette Europe « leader du monde libre ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le blues des diplomates du Quai d’Orsay Cela faisait longtemps que l’on n’avait pas vu une telle ambition, de surcroît portée par un homme dont les convictions européennes et progressistes semblent sincères, voire passionnées. Un homme qui, en outre, sait trouver les mots – contrairement à un François Hollande qui s’est révélé fiable dans la tempête, mais a rarement su expliquer ses décisions aux Français : quant à la qualité de ses discours, on peut presque risquer la comparaison avec ceux de Barack Obama, orfèvre en la matière. Une crise de l’ambition Un an et demi après son arrivée au pouvoir, le président Macron n’a toutefois guère dépassé le stade de la parole. Sur certains dossiers brûlants comme la Syrie, c’est même la confusion qui l’a emporté. Les diplomates français ont le blues, comme en témoigne notre enquête. Ils pointent à la fois une crise de l’ambition, et des moyens mis au service de cette ambition. Il n’est pas question de dresser avant l’heure un bilan de la diplomatie Macron. Il faut attendre la fin du quinquennat, ou que ce président affronte une crise majeure, pour savoir de quel bois il est fait. Mais on peut s’interroger sur le fait que M. Macron porte ou non la promesse qu’il a définie. Le souffle du discours est-il suivi d’une audace dans l’action ? Pour le moment, on comprend que les priorités de la diplomatie française – sécurité et économie – restent inchangées et, sur tout ce qui touche justement à l’humanisme, que ce soient les droits humains, les migrations ou l’environnement, la voix du président ne se traduit pas dans les faits. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Hubert Védrine : « Soyons déterminés face aux puissances hostiles à nos valeurs » Il est difficile de révolutionner la politique étrangère, un domaine qui, en France, n’est pas dépourvu de serviteurs qualifiés, mais est en manque de théoriciens et d’idées neuves. De même que la gauche n’a pas su inventer depuis vingt ans ce qui aurait pu être une politique internationale « de gauche », libérée du cynisme de l’ère mitterrandienne, Emmanuel Macron saura-t-il inventer la politique étrangère « humaniste et progressiste » qu’il promet ? Le Monde
29/12/2018
idees
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Passeports d’Alexandre Benalla : le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire
Après une semaine d’imbroglio au sommet de l’Etat, le ministère des affaires étrangères a saisi le procureur de la République de Paris.
Alexandre Benalla, ancien chargé de mission à l’Elysée, à Paris, le 19 septembre. THIBAULT CAMUS / AP Qui croire, dans cet « acte II » de l’affaire Benalla ? Après une semaine de révélations médiatiques, les déclarations ou les silences des différents acteurs ne permettent pas de dissiper le mystère qui plane autour de l’ancien chargé de mission de la présidence de la République. Une chose est certaine : Alexandre Benalla n’a pas restitué les passeports diplomatiques dont il disposait dans le cadre de ses fonctions auprès d’Emmanuel Macron. L’un d’eux lui avait été délivré après sa mise à pied de deux semaines, à la suite des violences qu’il avait commises le 1er-Mai à Paris. Et M. Benalla s’est servi de ce document à l’automne pour se rendre dans différents pays africains dans le cadre de ses nouvelles activités privées. L’enquête préliminaire ouverte, samedi 29 décembre, par le parquet de Paris permettra peut-être de faire la lumière sur ce nouvel épisode de l’affaire Benalla. Confiée à la brigade de répression de la délinquance à la personne de la direction régionale de la police judiciaire de Paris, celle-ci porte sur les chefs d’« abus de confiance », « usage sans droit d’un document justificatif d’une qualité professionnelle » et « exercice d’une activité dans des conditions de nature à créer dans l’esprit du public une confusion avec l’exercice d’une fonction publique ou d’une activité réservée aux officiers publics ou ministériels ». La veille, et après une journée de silence, l’Elysée avait réagi par un communiqué, indiquant que « la présidence de la République a demandé aux administrations compétentes de procéder aux démarches nécessaires afin que ces passeports soient restitués et ne puissent plus être utilisés », cela par « souci constant de transparence ». Une manière de renvoyer la responsabilité au ministère des affaires étrangères. Dès jeudi 27 décembre, le Quai d’Orsay expliquait avoir officiellement demandé en juillet à M. Benalla de restituer ces documents. Le ministère a même précisé que, sans réponse de l’ancien collaborateur d’Emmanuel Macron, relance avait été faite en septembre. Sans effet. Quarante minutes après le communiqué de l’Elysée, vendredi, le ministère des affaires étrangères affirmait avoir saisi le procureur de la République de Paris en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale qui veut que « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit, est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République ». Article 40 dont l’Elysée n’avait pas fait usage, en mai, après les incidents de la place de la Contrescarpe et qui a conduit, après analyse par le parquet, à ouvrir une enquête préliminaire, samedi.
29/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/29/imbroglio-au-sommet-sur-les-passeports-d-alexandre-benalla_5403445_3224.html
Le magistrat honoraire et ses Tweet racistes envers les migrants
Le bâtonnier de l’ordre des avocats a demandé au président du tribunal administratif de Lyon la réouverture de toutes les procédures traitées par Philippe Sauvannet.
L’affaire fait scandale à Lyon. « Des Tweet xénophobes, racistes et indignes du statut de magistrat. » Farid Hamel a fait part de sa « vive émotion » au président du tribunal administratif de Lyon, après la révélation par Le Canard enchaîné le 5 décembre d’une série de Tweet rédigés par Philippe Sauvannet, magistrat honoraire à la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). Ce président de chambre a immédiatement été invité à démissionner. Il a aussi fermé son compte twitter. Dans son courrier daté du 13 décembre, le bâtonnier de l’ordre des avocats demande au tribunal administratif de lui fournir « la liste de l’ensemble des dossiers » jugés par M. Sauvannet. Objectif : rouvrir toutes les procédures traitées de février 2016 à novembre 2018, période durant laquelle le juge honoraire a été en poste au tribunal administratif de Lyon, avant d’exercer à la CNDA. L’ancien sous-préfet à la retraite était chargé des audiences à juge unique, consacrées aux recours déposés contre les obligations de quitter le territoire français (OQTF) à délais rapides. Selon les premières estimations du barreau de Lyon, il a rendu une centaine de décisions relatives à ces « OQTF six semaines ». « Il était très avenant pendant les audiences, sans signe apparent de subjectivité. Il a rendu des jugements plutôt lapidaires, dans un contentieux assez standardisé, confie Morade Zouine, président de la commission droit des étrangers du barreau de Lyon. Mais depuis cette affaire, le doute s’est instillé sur sa partialité. » « On se demande comment sa hiérarchie l’a laissé en place sans s’apercevoir de ses idées xénophobes. Les professions juridiques se sentent trahies. On veut savoir jusqu’à quel point il a pu véhiculer une idéologie en son nom propre, et certainement pas au nom du peuple français », ajoute son confrère avocat Jean-Philippe Petit. Chevalier de la Légion d’honneur « La plupart des jugements de ce monsieur ont fait l’objet d’appel. S’il y avait eu des problèmes juridiques, ils auraient été revus par le second degré de juridiction », relativise un magistrat administratif lyonnais. Au-delà de l’étude des jugements rendus, le barreau de Lyon réfléchit à un recours au niveau de la Cour européenne des droits de l’homme. Et ce pour dénoncer plus généralement l’absence de possibilité de révision d’une décision administrative à partir d’éléments nouveaux, ce qui est offert dans l’ordre judiciaire. En attendant l’ouverture de ce débat, le barreau souhaite un déplacement rapide à Lyon de la mission permanente d’inspection des juridictions administratives afin de mieux comprendre le parcours atypique du magistrat. Selon le Journal officiel, Philippe Sauvannet a été directeur de préfecture dans la Loire, conseiller à la chambre régionale des comptes Rhône-Alpes, sous-préfet dans le Sud-Ouest, et même promu chevalier de la Légion d’honneur, en mars 2008, sur la liste du ministère de l’immigration, de l’intégration et de l’identité nationale. Il a aussi affiché récemment une activité de conseil en entreprise, en contradiction avec le statut de magistrat. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Droit d’asile : à Lyon, les avocats refusent les vidéo-audiences
29/12/2018
police-justice
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/29/le-magistrat-honoraire-et-ses-tweet-racistes-envers-les-migrants_5403441_1653578.html
Droit d’asile : à Lyon, les avocats refusent les vidéo-audiences
Le projet prévu par la loi asile et immigration pour l’examen des recours des demandeurs d’asile devait voir le jour en janvier. Il risque aujourd’hui d’être bloqué.
Le barreau de Lyon s’oppose catégoriquement au projet de « vidéo-audiences » pour juger les recours des demandeurs d’asile. Cette nouvelle forme d’audience devait être mise en place dès janvier à Lyon et Nancy pour examiner les recours formés par les demandeurs d’asile, après refus de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Or, la réforme prévue par la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) risque aujourd’hui d’être bloquée. A Lyon, une salle spécifique est déjà aménagée, au premier étage des juridictions administratives, rue Duguesclin. L’espace, éclairé par deux fenêtres, est constitué d’une table avec trois micros, placée face à deux grands écrans plats fixés contre un mur. La salle dispose d’une caméra et d’un lecteur de documents, avec trois rangées de chaises pour le public. « La technologie a déjà été expérimentée dans les DOM-TOM, elle fonctionne parfaitement. Elle facilite la vie des justiciables en leur évitant des déplacements sur grandes distances », assure Régis Fraisse, président de la cour administrative d’appel de Lyon. Le projet a été annoncé au barreau de Lyon par simple courrier, le 19 septembre. Dominique Kimmerlin, présidente de la CNDA, invoque « la mise en œuvre » de la loi du 10 septembre 2018, « pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie », qui prévoit la possibilité de vidéo-audiences afin d’examiner les recours des demandeurs d’asile résidant dans les départements du ressort du tribunal administratif de Lyon. La plupart des dossiers bénéficient de l’aide juridictionnelle, avec une rétribution fixée à hauteur de 500 euros, selon un juge administratif. « On touche aux droits fondamentaux » Pour assurer le déroulement des audiences à venir, la CNDA a demandé au barreau d’établir la liste des avocats désignés à l’aide juridictionnelle. Ce qu’a refusé, selon nos informations, Farid Hamel, bâtonnier de Lyon, après une délibération à l’unanimité de son conseil de l’ordre. Dans sa réponse datée du 11 octobre à la présidente de la CNDA, que Le Monde a pu lire, ce dernier écrit : « La matière du droit d’asile est à la fois d’une grande complexité sur le plan de la technicité juridique et géopolitique, mais encore humaine. » « L’intime conviction est l’essence même du droit d’asile. Cette méthode risque de changer totalement l’appréhension du juge dans ces dossiers, on touche aux droits fondamentaux alors que les migrations nous posent des questions essentielles à résoudre. On ne va pas dans le sens de l’histoire », ajoute Jean-Philippe Petit, membre de la commission droit des étrangers du barreau de Lyon. Lors de la réunion de présentation de la nouvelle salle d’audience, le 23 octobre, les avocats lyonnais ont entendu Dominique Kimmerlin répondre à leurs inquiétudes en ces termes : « Quand vous êtes au cinéma, vous avez des émotions devant l’écran. »
29/12/2018
police-justice
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/29/droit-d-asile-a-lyon-les-avocats-refusent-les-visio-audiences_5403439_1653578.html
Jean-Luc Konan, l’Ivoirien qui finance les PME africaines
A mi-chemin entre microfinance et banque, la Compagnie financière africaine a accompagné depuis 2014 quelque 130 000 patrons d’Afrique subsaharienne.
Jean-Luc Konan, patron de la Cofina. DR Depuis son bureau épuré du quartier de Cocody, au cœur d’Abidjan, la capitale économique ivoirienne, Jean-Luc Konan dirige la Compagnie financière africaine (Cofina). Un groupe spécialisé dans la « mésofinance », ou « finance du milieu », que cet Ivoirien de 45 ans, à la cravate et aux chaussettes vermillon, nous décrit en ces termes : « Notre métier, c’est d’aider au financement de structures qui sont devenues trop grosses pour la microfinance et qui ne peuvent avoir accès aux solutions des banques traditionnelles par manque de formalisation de leurs activités. Et ce, même lorsqu’elles font d’importants chiffres d’affaires. L’objectif est de les stabiliser et de les faire grandir », explique-t-il. Un enjeu crucial sur un continent où les PME sont à la fois prédominantes et fragiles. La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) souligne, dans son rapport 2018, que, en Afrique subsaharienne, ces entreprises butent toujours sur de « multiples obstacles », dans le secteur formel comme informel : difficile accès au crédit, bureaucratie, cherté de l’énergie, manque d’infrastructures, ressources humaines déficientes, etc. Une ascension express L’idée de s’attaquer à ce marché, Jean-Luc Konan l’a eue en 2009. A 36 ans, il est alors déjà passé par BNP Paribas, Citibank ou Barclays, et il vit au Gabon, où il dirige la filiale d’une des plus grandes banques nigérianes, United Bank for Africa (UBA). Entre 2009 et 2013, il supervisera le déploiement d’UBA au Cameroun, en République démocratique du Congo (RDC), puis au Sénégal. L’étape nigériane est cruciale dans l’ascension express de ce banquier formé en France, à l’ESC Toulouse et à l’université Paris-V. « Il y a eu un avant et un après-UBA, relate-t-il. C’est une expérience qui a d’abord commencé par une rencontre, celle d’un homme, d’un patron – Tony Elumelu –, dont les méthodes de management m’ont impressionné. C’est ensuite un état d’esprit, mélange de détermination et d’audace, qui se résume en une formule : tout est possible. » Pour lui, le célèbre milliardaire nigérian est un « modèle » à qui il n’hésite pas à lancer, lors de son départ de l’entreprise, en 2013 : « Je vais faire comme toi, tracer mon propre chemin. Et je vais y arriver ! » Pour Jean-Luc Konan, c’est le déclic. Car, même s’il a déjà lancé, parallèlement à sa carrière de banquier, des petites entreprises dans divers domaines comme la restauration rapide ou les transports – qui n’ont pas prospéré –, sa nouvelle aventure entrepreneuriale s’annonce plus ambitieuse et plus collective.
29/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/29/cofina-et-la-mesofinance-a-l-aide-des-pme-africaines_5403437_3212.html