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Racisme : « La Tunisie doit proclamer son africanité ! »
LE RENDEZ-VOUS DES IDÉES. Après le meurtre d’un Ivoirien à Tunis, la militante antiraciste Saadia Mosbah analyse la situation dramatique des Noirs dans son pays.
Manifestation à Tunis, le 24 décembre 2018, après le meurtre de Falikou Coulibaly, président de l’Association des Ivoiriens en Tunisie. FETHI BELAID / AFP Tribune. Mon pays, la Tunisie, se trouve au nord de l’Afrique, à la pointe septentrionale, si proche de l’Europe mais aussi étranger au continent auquel il appartient. Ce petit pays a réalisé d’extraordinaires avancées modernistes, comme l’abolition de l’esclavage en 1846 – une première dans le monde arabo-musulman –, avec une longueur d’avance sur les Etats-Unis et la France. Ou le code du statut personnel, qui octroie en 1956 aux Tunisiennes des droits et une liberté dont rêvent encore des millions de femmes dans le monde. Seule une frange de la population est restée dans l’ombre de ces avancées. Même après la « révolution » de 2011, les Tunisiens noirs peinent encore à trouver leur juste place dans la société. Les raisons sont multiples, mais la principale est la méconnaissance de l’Histoire. Dans la mémoire collective, le Noir est arrivé en Afrique du Nord asservi, les chaînes aux pieds, chose que certains compatriotes nous crachent à la figure au moment où nous nous y attendons le moins. On sous-entend ceci : « Quoi que vous fassiez, n’oubliez surtout pas que vous êtes arrivés ici en tant qu’esclaves, que nous achetions pour quelques pièces. » Mais ont-ils pensé, ne serait-ce qu’une fois, que les Noirs pouvaient aussi être des enfants de la région ? Le grand tacticien Hannibal Barca était un guerrier noir. Pourtant, peu à peu, il est devenu méconnaissable, ses représentations prenant les couleurs et les traits d’un Nord-Africain. Fini les cheveux frisés et le nez aplati des pièces vues dans mon enfance au musée du Bardo. Tout se transforme, même l’Histoire ! Comment voulez-vous que les jeunes Tunisiens se sentent africains s’ils méconnaissent le passé du continent ? Combien d’entre eux connaissent Cheikh Anta Diop et ses œuvres capitales ? Ont-ils une idée de qui était Thomas Sankara, l’homme intègre, ou encore le président-poète Léopold Sedar Senghor, l’un des pères de la négritude, mouvement de résistance d’une Afrique qui s’éveille ? Crimes de haine Quand je leur parle de racisme, mes compatriotes ont des réactions assez amusantes. Ils ou elles ont toujours un ou une ami(e) noir(e) avec qui ils mangent dans la même assiette. Mais seraient-ils prêts, pour autant, à l’épouser ? Le Tunisien a beaucoup de mal à reconnaître que le racisme existe dans son pays, comme partout ailleurs. Quand le racisme mène à l’agression, les commentateurs ont vite fait de disqualifier cette motivation de l’attaque. On parle de « déséquilibrés » qu’il ne faut surtout pas prendre au sérieux. Pourtant, ces dernières années, la liste des victimes de crimes de haine s’est tristement allongée. Le 7 décembre 2016, à Tunis, une jeune Ivoirienne échappe in extremis à une tentative d’égorgement. Dix-sept jours plus tard, à la veille de Noël, deux étudiantes congolaises sont poignardées en plein centre-ville à 11 heures du matin. Un jeune Congolais qui tente de les secourir est, lui, atteint au bras. Ces victimes ont survécu mais elles ont gardé de douloureuses séquelles physiques et psychologiques. Quant à l’agresseur, il avouera ne pas supporter de voir des Noirs parler une autre langue entre eux. Il ne sera pas inquiété par la justice car considéré comme malade. Quelque mois après ces attaques, un douanier tunisien noir, en vacances avec sa famille dans un hôtel à Mahdia (centre-est), est agressé par un serveur qui refuse de le servir à cause de la couleur de sa peau. Le douanier termine ses congés à l’hôpital. Le 23 décembre 2018, l’Ivoirien Falikou Coulibaly, 33 ans, père de deux enfants, est poignardé à mort à Tunis. Décidément, en Tunisie, les veilles de Noël ont un goût de larmes et de sang pour certaines communautés. Sortir du silence Ce meurtre s’est produit deux mois après l’adoption d’une loi pénalisant le racisme en Tunisie. C’était une première dans le monde arabe. Ce texte, que nous attendions avec impatience, a été voté par 125 députés. On notera l’absence, ce jour-là, d’environ 40 % des représentants du peuple… La Tunisie aime à dire qu’elle est africaine, mais dans les faits elle ne proclame ni son africanité, ni son caractère multiethnique. Une multiculturalité qui n’est d’ailleurs pas inscrite dans la nouvelle Constitution post- « révolution ». Malgré tout, cette loi permet aux victimes de racisme de sortir du silence et à la société tunisienne de s’extraire de son long déni. Mon constat est cependant amer : les lois – celle-ci ou celle à venir concernant les migrants – sont écrites avec le sang de nos congénères, nos frères et sœurs, citoyens subsahariens. Une société change non pas grâce à ses réglementations pénalisantes mais par la volonté de tous d’adhérer à un projet commun, celui du « vivre ensemble ». La loi est un recours quand l’éducation échoue. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Loi pénalisant le racisme en Tunisie : une première victoire pour la minorité noire Pour combattre la bête immonde, l’Education nationale doit lancer un travail en profondeur. Le racisme et la violence se manifestent dès le plus jeune âge, à l’école. Il est nécessaire de former les enseignants. Sur le volet de la représentation, une présence visuelle des Noirs dans les médias, les publicités, les affiches, au cinéma, à la télévision me parait indispensable. Ceci afin que le Tunisien noir ne soit plus cette tache de naissance que l’on porte honteusement sur le visage et qu’on veut oublier ou faire disparaître, mais un joli grain de beauté. Saadia Mosbah est présidente de l’Association M’nemty (« mon rêve »), qui lutte contre les discriminations raciales en Tunisie. Saadia Mosba (présidente de l’Association M’nemty)
29/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/29/racisme-la-tunisie-doit-proclamer-son-africanite_5403434_3212.html
« Aujourd’hui, l’hubris désigne le comportement d’Emmanuel Macron, de Carlos Ghosn ou de l’homme face à la nature »
Pour Vincent Azoulay, le terme « hubris » nous sert à désigner la démesure de l’homme en politique ou en matière d’environnement. L’historien y voit une dérive sémantique : chez les Grecs, le mot qualifiait des actes transgressifs violents, comme le viol.
Giuseppe Ragazzini Spécialiste d’histoire ancienne, Vincent Azoulay est directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) et directeur de la rédaction de la revue Les Annales. Il est notamment l’auteur de Périclès. La démocratie athénienne à l’épreuve du grand homme (Armand Colin, 2010) et des Tyrannicides d’Athènes. Vie et mort de deux statues (Seuil, 2014). Il revient sur l’usage de la notion d’hubris dans le discours contemporain. On assiste à une utilisation de plus en plus courante du terme « hubris » dans le commentaire politique, pour désigner l’orgueil démesuré. Pourquoi ce retour au lexique grec ? En réalité, je ne crois pas du tout qu’il s’agisse d’une redécouverte du grec, mais plutôt d’un effet de circulation internationale. En effet, le terme n’était pas employé avant les années 2000 dans la presse française, sinon dans les articles consacrés à l’Antiquité. En revanche, il est courant, depuis longtemps, dans le monde médiatique américain et britannique. On recense par exemple, pour le New York Times, plus de 5 000 occurrences. On en trouve 200 seulement dans Le Monde, et encore concentrées pour l’écrasante majorité entre 2000 et 2018. Cette découverte de l’hubris me semble donc plutôt un de ces transferts de notions qui se font aujourd’hui d’un univers culturel à un autre, de façon plus fluide et massive qu’auparavant. « L’hubris aurait un lien avec le comportement qui écrase, qui piétine, et qu’on peut associer à des actes transgressifs violents et notamment au viol. On retrouve (…) l’usage du mot “hubris” pour parler des comportements outrageants à la Weinstein… » Dans le monde anglo-saxon, c’est un terme sinon appartenant à la vie courante du moins utilisé très souvent sur les plateaux télé. C’est lié au mode d’éducation des élites à la fois en Angleterre et aux Etats-Unis, où sont organisés à l’université, en première année, des cours de découverte qui comprennent de l’histoire ancienne, même dans les formations les plus généralistes. Si on se penche rapidement sur les usages du terme dans la presse française, on voit qu’il apparaît dans deux domaines, celui de la politique et de l’environnement. Très dernièrement, c’est le vocabulaire employé pour évoquer le comportement de Carlos Ghosn, celui d’Emmanuel Macron, mais aussi pour dénoncer l’orgueil de l’homme face à la nature dans les conférences sur le climat. Et quel est le sens de l’hubris, non pas en grec ancien, mais en français ou en anglais ? Le sens d’« hubris » s’est construit dans l’imaginaire occidental à travers deux récits, qui sont fondateurs, l’un que l’on doit à Hésiode et l’autre à Hérodote. Dans Les Travaux et les Jours, Hésiode énumère les races créées par les dieux, la race d’or, d’argent, de bronze, de fer et il raconte comment certaines ont été anéanties pour avoir fait preuve de démesure. Le couplage entre la démesure et l’anéantissement est évident. Ce lien entre l’hubris et la némésis dans l’imaginaire explique d’ailleurs qu’on retrouve l’hubris dans des contextes où l’on parle du climat et donc d’apocalypse. C’est aussi à mettre en lien avec cette idée que celui qui s’élèvera trop haut chutera brusquement. Le thème est abondamment traité dans la tragédie grecque, notamment dans Œdipe tyran, de Sophocle : le renversement de la fortune est lié à un comportement transgressif vis-à-vis des hommes et des dieux.
29/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/29/aujourd-hui-l-hubris-designe-le-comportement-d-emmanuel-macron-de-carlos-ghosn-ou-de-l-homme-face-a-la-nature_5403433_3232.html
Officier de marine marchande, « l’antidote à une vie de routine »
Des bords de la Baltique, de la Méditerranée ou de l’Atlantique à l’Ecole nationale supérieure maritime, de jeunes officiers racontent leur choix de carrière.
Ecole nationale supérieure maritime Guillaume GUERIN Quand on naît malouin, on grandit face à l’océan. Sur les remparts de la cité corsaire, la statue de bronze de Robert Surcouf, dos au continent, pointe, depuis plus d’un siècle, la direction à prendre pour les nouvelles générations : le large. Les siècles passent et certaines traditions restent. « Moi aussi, je veux voir du pays », déclare Jacques Chevalier, 25 ans, originaire de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), fraîchement diplômé de l’Ecole nationale supérieure maritime (ENSM) et, donc, jeune officier de la marine marchande. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Forte houle à l’école de la marine marchande Comment changer d’horizon à chaque lever de soleil et être bien payé pour parcourir le monde : voilà ce qui a motivé plusieurs jeunes officiers rencontrés dans la grande école de la marine marchande, dont le bâtiment à la fine étrave est planté entre terre et mer sur le port du Havre (Seine-Maritime). Bac scientifique en poche, Carl Larsson, 24 ans, né à Upsalla en Suède, ville universitaire posée à quelques encablures du port de Kapellskär, sur la mer Baltique, a intégré l’école havraise avec les objectifs partagés par tous les marins : « Partir, naviguer, changer. » Sus à la routine! Ce désir de renouvellement, d’aventures, Basile Buisson, Marseillais de 29 ans, l’a ressenti fort. Diplômé en informatique, le jeune homme entame sa vie professionnelle sur les rails de sa spécialité : derrière un ordinateur. Il exécute ses tâches, conduit un projet, puis un autre, clone du précédent. « On recommence, on répète », se souvient-il. A 24 ans, l’ENSM lui apparaît comme « l’antidote à une vie de routine » et il réembarque pour cinq nouvelles années d’études. Officiellement diplômé jeudi 20 décembre, il prendra la mer pour une seconde carrière dès les premières semaines de 2019. « Des Seychelles à l’Antarctique » Le tour du monde, les jeunes marins l’ont déjà exécuté lors de leurs phases de formation en entreprise, auprès des armateurs, à bord de paquebots, porte-conteneurs, pétroliers, méthaniers, navires océanographiques… « Je reviens de République dominicaine et j’embarque pour Panama », raconte, placide et visiblement heureux, Léo Bargain, 24 ans, malouin, nouvellement diplômé de l’ENSM. Avant même sa remise de diplôme, Carl Larsson, lui, est engagé par le croisiériste Ponant. Son année 2019 commencera par la réception et le contrôle d’un tout nouveau bateau, le dernier palace flottant de la compagnie. Il partira comme officier mécanicien sur toutes les mers du globe, « des Seychelles à l’Antarctique ». Un marin aime partir, mais aussi revenir. En France, chaque jour travaillé donne droit à un jour de congé. « Le rythme me plaît, s’amuse Léo Bargain. Deux mois en mer, puis deux mois de vacances payé à ne rien faire… » Un système « plein d’avantages », souligne également Basile Buisson. En mer, l’équipage travaille sept jours sur sept et dix heures par jour. Peu de répit donc, mais une fois le navire conduit à quai, une autre vie de totale liberté est offerte. Avec suffisamment de revenus pour en jouir : les officiers débutants sont payés environ 3 000 euros par mois, sur treize mois. « Cela nous donne les moyens d’en profiter », s’accordent les jeunes marins. Reste que le cadre des seuls océans, la promiscuité d’un équipage et la distance mise avec les proches demandent une adaptation. « Il faut être égoïste, savoir gérer l’éloignement de la famille et laisser vos proches gérer le quotidien », analyse Fabienne Perrot, qui, après onze années à parcourir mers et océans aux commandes de cargos, est devenue professeure de génie mécanique au sein de l’établissement. Il faut donc savoir tourner le dos au continent et à ses soucis pour se concentrer sur l’océan et la coque d’acier que l’on manœuvre. « L’humilité face à l’élément est indispensable, pas de fanfaron dans le rapport à la mer », dit l’enseignante. Vivre des semaines, voire des mois, avec un équipage dans un environnement restreint demande une force de caractère. « Les anxieux, les nerveux… n’ont pas leur place à bord. » Les autres, tels des aventuriers modernes, sont parés à embarquer, au long cours.
29/12/2018
campus
https://www.lemonde.fr/campus/article/2018/12/29/officier-de-marine-marchande-l-antidote-a-une-vie-de-routine_5403428_4401467.html
En Belgique, des banquiers incités à devenir infirmiers
Le besoin de banquiers diminue, les métiers de la santé peinent à recruter. Un accord va faciliter les transferts entre les deux secteurs.
Le siège du groupe bancaire belge KBC, à Bruxelles, en février 2014. BENOIT DOPPAGNE / AFP Deux problèmes, une solution. En Belgique, une résolution insolite vient d’être mise sur la table pour régler les questions d’effectifs rencontrées par deux secteurs-clés de l’économie du royaume. Comme en France, le secteur bancaire belge, bouleversé par la révolution numérique, l’intelligence artificielle et la chute de fréquentation des agences, ne cesse de détruire des emplois. « Les effectifs sont en baisse constante depuis vingt ans, de 2 % par an en moyenne », explique Rodolphe de Pierpont, le porte-parole de la Febelfin, la Fédération belge du secteur financier. Ce mouvement s’est jusqu’à présent « passé en douceur », par le biais de mobilités internes et de départs volontaires ou à la retraite non remplacés, « mais il va se poursuivre », prévient M. de Pierpont. « Pour éviter des licenciements secs, nous proposons d’accompagner cette transformation en facilitant la mobilité externe. » La fédération se propose ainsi de faire le pont avec d’autres secteurs, comme celui de la santé, qui, à rebours des banques belges, peine à recruter. Pour encadrer cette « mobilité des talents », la Febelfin vient de signer avec plusieurs syndicats un protocole, dévoilé par le quotidien belge L’Echo, mardi 26 décembre. L’objectif ? « Faciliter la rencontre entre le collaborateur et un futur employeur potentiel, l’offre d’une formation adéquate et, si le travailleur le souhaite, la conclusion d’un nouveau contrat auprès d’un nouvel employeur », résume la Febelfin. Lire aussi Polémique de genre à la Banque nationale de Belgique La logistique aussi Plusieurs formules seront proposées aux salariés des banques : de la possibilité de tester un nouveau métier en accomplissant à l’extérieur une mission temporaire de trois mois au « prêt » d’employés seniors à d’autres organisations (celles-ci rembourseront une partie du salaire à « l’entreprise qui prête »), en passant par la mise en relation d’employés plus âgés ou limités à des métiers bancaires en perte de vitesse « avec des emplois vacants chez d’autres employeurs », précise la Febelfin. Le secteur de la santé, premier à signer un accord, proposera aux banquiers d’entamer une formation d’infirmier ou d’aide-soignant à partir de septembre 2019. « Une rémunération sera versée pendant le temps de cette formation, prise en charge pas le futur employeur, avec l’aide du fonds social de formation pour le secteur de la santé, précise Rodolphe de Pierpont. L’idée a été testée, il existe bien une demande pour changer de parcours. » Après la santé, c’est le secteur de la logistique, dynamisé par l’essor de l’e-commerce, qui démarrera prochainement des discussions avec la Fédération belge du secteur financier.
29/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/29/en-belgique-des-banquiers-incites-a-devenir-infirmiers_5403425_3234.html
Tournée des quatre tremplins : la lente agonie du saut à ski français
Le seul Français au départ de la Tournée des quatre tremplins, grand rendez-vous de la saison de saut à ski, nourrit peu d’espoirs. La discipline est à l’arrêt en France.
En haut des tremplins de saut à ski, où l’on grelotte en attendant de se lancer dans le vide, le Français est une espèce en voie de disparition. In extremis, il a été décidé d’en aligner un, le jeune Jonathan Learoyd, au départ de la mythique Tournée des quatre tremplins qui débute ce samedi 29 décembre à Oberstdorf (Allemagne). Le circuit le plus prestigieux de la discipline voit, autour du Nouvel An, les hommes volants lutter contre la pesanteur lors de quatre étapes successives dans les Alpes. La France évite ainsi un symbole fâcheux, sans que cela ne change rien à la quasi-disparition des sauteurs tricolores au haut niveau. Depuis la retraite d’Emmanuel Chedal en 2013, le saut à ski tricolore reposait sur les seules spatules de Vincent Descombes-Sevoie. Le natif de Chamonix a pris sa retraite en juin, à 34 ans, usé par une longue carrière. Ronan Lamy-Chappuis, le cousin de Jason (champion olympique de combiné nordique à Vancouver en 2010), absent de Coupe du monde depuis deux hivers, a aussi mis un terme à sa carrière à l’âge de 25 ans, vaincu par ses douleurs dorsales. Jonathan Learoyd a pris la 46e place de la Coupe du monde d’Engelberg, en Suisse, le 15 décembre 2018. FABRICE COFFRINI / AFP Avoir enfin une concurrence à l’échelle nationale Conséquence : il n’y a plus de groupe A en équipe de France masculine, du nom des collectifs qui, dans les sports d’hiver, s’alignent au départ des manches de Coupe du monde. Seul demeure un groupe B de trois jeunes sauteurs, 20 ans de moyenne d’âge. La Fédération française de ski (FFS) préfère consacrer ses moyens au développement d’un groupe de sauteurs plutôt que de se focaliser sur l’accompagnement d’un seul, dont les chances de réussite au plus haut niveau seraient, dans l’immédiat, minimes. « L’objectif est de développer la performance de plusieurs athlètes simultanément, résume le directeur technique des sauts, Jérôme Laheurte. Performer d’abord en équipe sur des compétitions de moindre importance et, ensuite, amener tout un collectif en Coupe du monde. » Ces trois sauteurs, rejoints de temps à autre par un ou deux juniors, participent donc essentiellement aux épreuves de Coupe continentale, la deuxième division mondiale du saut à ski. « Il s’agit d’un niveau inférieur qui correspond à leur niveau, où ils peuvent jouer la victoire avec des adversaires de leur âge », rappelle leur entraîneur, Nicolas Bal. Même en Coupe continentale, cette saison, les Français peinent à exister, régulièrement rejetés en fond de classement. « Un sentiment de survie » Sans locomotive comme le biathlon, sans bassin de pratiquants conséquent comme le ski de fond ou l’alpin, le saut à ski, avec ses 200 à 250 licenciés, demeure une discipline de second rang pour la FFS. Son budget annuel est de 420 000 euros, la moitié de celui du biathlon. Cette enveloppe est divisée de manière égale entre les filles et les garçons. Les filles, qui ont connu leur heure de gloire aux JO de Sotchi avec la médaille de bronze de Coline Mattel (depuis retirée des tremplins), sont elles aussi en retrait malgré la présence de Léa Lemare et Lucile Morat sur les Coupes du monde et l’organisation d’une manche à Prémanon en décembre. A l’image de Stephan Leyhe, le saut à ski allemand va bien. A titre de comparaison, il a chaque année un budget compris entre deux et trois millions d’euros, soit cinq à sept fois supérieur au saut à ski français. CHRISTOF STACHE / AFP « On possède de magnifiques infrastructures pour le saut en France, mais c’est beaucoup plus compliqué de trouver des moyens financiers pour l’humain, pour trouver des coachs notamment chez les jeunes », concède Jérôme Laheurte. Pour le directeur technique, il conviendrait de « remettre un peu plus de moyens » au niveau des comités régionaux « pour que notre système soit mieux structuré à la base et avoir plus de professionnalisation dans l’encadrement, notamment dans la détection de talents dès le plus jeune âge ». Jonathan Learoyd, qui avait intégré la finale sur petit tremplin (27e) aux JO de Pyeongchang malgré ses 17 ans, ne se plaint de rien. « On a tout pour y arriver, je peux m’entraîner quasiment quand je veux, on a du bon matériel et de supercoachs, ça va être à nous de serrer les dents », explique-t-il, tout en soulignant que sa réussite passera par une plus grande émulation. « Je pense qu’il est possible d’avoir cette mentalité d’entraide ; c’est là-dedans que je vois l’avenir du saut français. » Celui qui s’entraîne à Courchevel, sur le tremplin des JO de 1992, vise à long terme des victoires en Coupe du monde. Du jamais-vu pour un Français depuis le succès de Nicolas Dessum à Sapporo (Japon). C’était il y a un siècle, en 1995.
29/12/2018
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2018/12/29/tournee-des-quatre-tremplins-la-lente-agonie-du-saut-a-ski-francais_5403422_3242.html
Joseph Kabila : « Il faut regarder la RDC aujourd’hui et il y a dix ans »
Entretien avec le président congolais alors que la RDC s’apprête à élire son successeur avec deux ans et une semaine de retard.
Le président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila, à Kinshasa, le 10 décembre. JOHN WESSELS / AFP C’est un vendredi très particulier, ce 28 décembre, en République démocratique du Congo (RDC). Le dernier avant les élections prévues dimanche, avec deux ans et une semaine de retard. Une tension épaisse plane sur ce territoire aussi vaste que l’Europe occidentale. Si l’appel à une « journée ville morte » lancé par une frange de l’opposition n’a pas pris, à Beni, dans le nord-est, les forces de sécurité ont tout de même ouvert le feu sur des manifestants. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La ville de Beni cristallise tous les drames de la RDC Comme trois autres villes, cette cité en proie aux tueries et à Ebola ne votera pas ce dimanche, alors qu’à Kinshasa le compte à rebours est lancé. L’ambassadeur de l’Union européenne n’a plus qu’une journée pour quitter le pays, à la demande des autorités. Et dans son bureau le président sortant, Joseph Kabila, orchestre les derniers préparatifs de ce scrutin, toujours techniquement incertain. « J’ai l’intime conviction que tout va bien se passer dimanche. Des violences post-électorales ne sont pas à exclure, mais la menace sécuritaire est sous contrôle. Seul Ebola nous fait peur et la CENI [Commission électorale nationale indépendante] a bien fait de suspendre les élections dans les zones touchées par l’épidémie », dit le président, 47 ans, détendu dans sa résidence officielle, à Kinshasa. Pour son unique entretien avec un média français, il a choisi Le Monde pour évoquer sa situation bien singulière de chef d’Etat qui vit les dernières heures à son poste alors que son mandat constitutionnel a pris fin depuis deux ans. Pourtant, il continue de gérer le plus grand pays d’Afrique francophone avec ses conflits, ses crises humanitaires, ses attaques d’une opposition déterminée mais divisée et les menaces de la rue, tout en ayant eu à faire face à d’intenses pressions diplomatiques occidentales. Mais de tout cela il n’a cure. Ce vendredi si particulier, Joseph Kabila veut défendre son bilan, posément. Un « résistant à tous ceux qui veulent soumettre ce pays » « Un pays sans problèmes, c’est le paradis. Mes détracteurs peuvent aller au diable, lâche-t-il, le regard implacable, qui annulerait presque son sourire plein de douceur. A mon arrivée à la tête de l’Etat en 2001, j’avais promis la réunification du pays, la stabilité de l’économie, la démocratisation et la reconstruction. La croissance économique n’a jamais été de moins de 3 %, le pays est uni et j’ai organisé trois élections avec celle de dimanche. » Joseph Kabila parle « Etat », « institutions », « armée ». Il raconte un « Congo qu’il aime passionnément », un « pouvoir au service du peuple », quand des diplomates, des enquêteurs des Nations unies et des ONG parlent de « système répressif », l’accusent de piller le pays, de détourner des milliards de dollars et d’entretenir le désordre quitte à sous-traiter des tueries à des militaires ou à des groupes armés pour maintenir le « raïs » (« chef ») au pouvoir. « Foutaises », rit le président.
29/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/29/joseph-kabila-il-faut-regarder-la-rdc-aujourd-hui-et-il-y-a-dix-ans_5403412_3212.html
L’Eglise catholique s’inquiète de la baisse des dons de ses fidèles
L’épiscopat vient de lancer une campagne à destination des donateurs du denier du culte, qui représente 40 % des ressources des diocèses.
L’Eglise catholique parviendra-t-elle, en 2018, à maintenir au niveau de 2017 sa collecte de dons auprès de ses fidèles, appelée le denier ? C’est parce qu’elle craint, pour la première fois, une baisse des rentrées dans les caisses des associations diocésaines que la Conférence des évêques de France (CEF) a lancé, en fin d’année, une campagne nationale pour tenter de redresser la barre. L’épiscopat a en effet constaté une réduction de 2,2 % des montants collectés sur les trois premiers trimestres de 2018 par rapport à la même période de l’année précédente. Cette baisse serait même de 5 % si l’on y intègre les dons qui bénéficiaient d’une déduction de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Or le denier représente 40 % des ressources des diocèses (pour un total national de 640 millions d’euros de ressources en 2017). Celles-ci servent principalement à verser un traitement aux 14 000 prêtres en activité, à payer les salaires des laïcs en mission ecclésiale et le personnel administratif, et à financer le fonctionnement et l’entretien courant des églises et des autres bâtiments. Les autres ressources proviennent des quêtes, des offrandes pour les messes et les cérémonies (le casuel) et des legs. C’est uniquement grâce à ces derniers, qui sont par définition des ressources exceptionnelles, que la très grande majorité des diocèses parviennent à boucler leur budget. Recul de 25 % Depuis plusieurs années, le nombre des donateurs du denier diminue (1 110 000 en 2017 contre 1 330 000 en 2011, au total un recul de 25 % par rapport à 2007), mais le montant moyen des dons progresse (232 euros en 2017 contre 181 euros en 2011), ce qui permettait une progression globale du niveau du denier. C’est ce niveau global qui a fléchi entre janvier et septembre 2018. Plusieurs facteurs explicatifs ont été mis en avant par l’épiscopat. Certains sont communs avec les autres institutions qui vivent en grande partie des dons, comme les associations caritatives, et qui ont elles aussi, pour la plupart, enregistré une baisse significative de leurs rentrées d’argent. Ils tiennent à la suppression de l’ISF, au passage au prélèvement à la source, qui a pu faire craindre à certains donateurs de ne pas récupérer l’exonération fiscale à laquelle ils avaient droit, ou encore la situation économique générale des foyers. Mais la CEF a aussi évoqué un facteur propre à l’Eglise catholique : « Le retentissement médiatique des rapports établis sur les abus sexuels commis par des clercs. » La campagne de communication lancée en fin d’année pourrait cependant infléchir la tendance : 45 % de la collecte annuelle se fait au dernier trimestre.
29/12/2018
argent
https://www.lemonde.fr/argent/article/2018/12/29/l-eglise-catholique-s-inquiete-de-la-baisse-des-dons-de-ses-fideles_5403402_1657007.html
L’île de La Réunion, nouvel eldorado pour les réfugiés sri-lankais ?
En dix mois, quatre embarcations battant pavillon sri-lankais ont touché les côtes du département français d’outre-mer.
Le périple est aussi long que périlleux. Alors que 4 000 kilomètres séparent les deux îles, plus de 80 ressortissants sri-lankais ont pris cette année le risque de traverser l’océan Indien à bord d’embarcations sommaires en direction de La Réunion. En moins de quinze jours, en décembre, le département français a intercepté à proximité de ses côtes le Wasana 1, avec à son bord 62 Sri-Lankais, puis un bateau de pêche, baptisé Roshan, transportant sept hommes. Ce navire était le quatrième en provenance du Sri Lanka à rejoindre l’île française en dix mois. Du jamais-vu. Les six personnes secourues au large de La Réunion en mars à bord d’un radeau de fortune ont pu formuler des demandes d’asile. La soixantaine d’hommes, femmes et jeunes enfants qui ont posé le pied sur l’île à la mi-décembre sont en train de faire la même chose. Un vœu également formulé par les tout derniers arrivants. L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) n’aura jamais eu à traiter autant de dossiers en une année pour La Réunion – en 2017, dix demandes avaient été enregistrées. La Fédération tamoule de La Réunion a été l’une des premières associations à venir en aide à ces nouveaux venus bouddhistes, hindouistes et chrétiens, qui parlent le tamoul ou le cinghalais, parfois un peu l’anglais. « Ils disent avoir été persécutés dans leur pays. Ils craignaient pour leur vie », souligne Jean-Luc Amaravady, président de la fédération. Même s’ils sont arrivés vêtus très simplement pour la plupart, « ce ne sont pas des gens qui n’avaient rien. Ils travaillaient, comme plombiers, carreleurs, techniciens ou encore cuisiniers », précise-t-il. Me Mihidoiri Ali, qui assiste la plupart des demandeurs d’asile, complète : « Leur périple est motivé par des craintes vis-à-vis des autorités pour des motifs politiques, religieux et ethniques. » Commentaires xénophobes Inédite, l’interception répétée d’embarcations sri-lankaises ces derniers mois pose de nombreuses questions, pour le moment sans réponse. La Réunion, qui est, avec Mayotte, l’une des deux portes d’entrée en France de l’océan Indien, serait-elle devenue une destination privilégiée pour ceux qui cherchent à fuir le Sri Lanka ? Existe-t-il une filière organisée ? Le département d’outre-mer est-il présenté par des passeurs comme un nouvel eldorado depuis l’arrivée du premier navire, en mars ? Quoi qu’il en soit, la préfecture de La Réunion dit être « extrêmement vigilante ». « Nous travaillons en étroite collaboration avec les autorités sri-lankaises résolues à lutter contre les trafics d’êtres humains », a affirmé à la télévision locale Frédéric Joram, son secrétaire général.
29/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/29/l-ile-de-la-reunion-nouvel-eldorado-pour-les-refugies-sri-lankais_5403399_3224.html
La France mise hors jeu dans le conflit syrien
Alors que les Kurdes syriens lui demandent un soutien diplomatique, voire une protection militaire, la France n’a jamais semblé autant isolée sur ce dossier.
Carte Syrie au 19 décembre 2018 Le Monde Analyse. Les militaires des forces spéciales françaises ont ostensiblement patrouillé, le week-end de Noël, dans les rues de Manbij. Depuis, redevenus plus discrets, les 4 × 4 ornés du drapeau tricolore étaient là pour bien signifier que, malgré l’annonce du retrait américain, ils restent, au moins pour le moment, déployés dans le nord-est de la Syrie et en premier lieu dans cette petite ville à l’ouest de l’Euphrate qui depuis des mois est le point nodal d’un bras de fer entre les forces turques, les milices arabo-kurdes des Forces démocratiques syriennes et les troupes du régime d’Assad. Au-delà de ce geste symbolique, la France n’a pourtant jamais semblé autant isolée sur ce dossier, alors même que les Kurdes syriens demandent au président français un soutien diplomatique, voire une protection militaire. Sans les Américains, rien n’est possible. « Nous ne pouvons pas rester s’ils partent et nous n’avons d’ailleurs même pas les moyens de partir sans eux » « Un allié se doit avant tout d’être fiable », a lancé Emmanuel Macron à N’Djamena, le 23 décembre, taclant ouvertement son homologue américain pour son désengagement de Syrie, imposé contre sa propre administration et prenant de court tous ses alliés. A commencer par Paris, alors même que le président français pensait avoir réussi à le convaincre de rester. Paris insiste notamment sur la protection des forces arabo-kurdes qui ont joué un rôle crucial contre les djihadistes. La France pourra-t-elle néanmoins se montrer elle-même « fiable » vis-à-vis de ces alliés, alors même qu’Ankara masse ses forces le long de la frontière et que les Kurdes négocient avec le régime syrien un accord chaudement appuyé par Moscou ? Lire aussi Le coup de poignard de Trump vis-à-vis des Kurdes Sans les Américains, rien n’est possible. « Nous ne pouvons pas rester s’ils partent et nous n’avons d’ailleurs même pas les moyens de partir sans eux », soupire une source proche du dossier. Les forces françaises dépendent en effet de leurs partenaires d’outre-Atlantique, y compris pour les évacuations par hélicoptère des blessés. Quelque 200 hommes sont impliqués dans cette opération très spécifique au sein de l’opération « Chamal », quelque 1 100 hommes, ainsi que des moyens aériens et des bateaux déployés depuis septembre 2014 dans le cadre de la coalition internationale contre l’organisation Etat islamique. « Les Nations unies court-circuitées » La volte-face américaine met crûment en lumière l’impasse de la politique syrienne de la France. Paris avait d’autant plus misé sur la coopération avec Washington que l’administration Trump semblait nettement plus engagée sur la Syrie que celle de son prédécesseur, n’hésitant pas, par deux fois, à ordonner des frappes contre des installations du régime en représailles contre des attaques chimiques. « La priorité des autorités françaises est de terminer la destruction de Daech, mais, au-delà de cet objectif, on voit mal ce que peut et surtout ce que veut faire la France en Syrie », s’interroge Marc Pierini, ancien ambassadeur de l’Union européenne à Damas et à Ankara, désormais chercheur à Carnegie Europe, relevant qu’en outre « les Nations unies elles-mêmes sont désormais court-circuitées par la Russie, la Turquie et l’Iran ».
29/12/2018
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La fin du « moment kurde » ?
Boris James et Jordi Tejel Gorga consacrent leur dernier ouvrage aux Kurdes, dont les origines remontent à la haute Antiquité. Peuple sans Etat, ils sont présents en Irak, en Iran, en Turquie et en Syrie.
Le Livre. L’histoire d’une nation n’est jamais simple à raconter et à décrypter. Surtout quand celle-ci traverse le temps et l’espace depuis des millénaires et se trouve aujourd’hui principalement divisée sur plusieurs Etats : les Kurdes sont, dans ce cas, partagés entre la Turquie, la Syrie, l’Iran et l’Irak, autant dire assis sur une marmite que l’actualité réchauffe toujours un peu plus à chaque pic de violence au Proche-Orient. C’est pourtant le pari que se sont lancés Boris James, chercheur à l’Institut français du Proche-Orient et ancien responsable de son antenne à Erbil (Kurdistan irakien), et Jordi Tejel Gorga, professeur titulaire à l’université de Neuchâtel (Suisse), dans leur dernier ouvrage consacré à ce peuple dont les origines remontent à la haute Antiquité. Le résultat est d’autant plus éclairant et percutant que la collection « Un peuple en cent questions » peut parfois conduire à la simplification ou à un choix arbitraire d’occurrences, en prenant au passage quelques libertés avec l’Histoire. Mais là, les deux auteurs, fins connaisseurs de la question kurde, ont contourné les généralités et proposé une plongée dans le monde kurde aussi passionnante qu’inquiétante. Passionnante, car le sens commun se limite trop souvent à présenter un profil kurde incarné par le peshmerga ou la combattante kurde, alors que la société sort peu à peu de son moule traditionnel sous l’effet d’une forte diversité culturelle (cinéma, littérature et musique), trop souvent oubliée ou négligée. Inquiétante, car les Kurdes ont toujours été ballottés par l’histoire des empires rivaux pour devenir finalement les orphelins du système international depuis l’entre-deux-guerres. Tectonique des plaques géopolitiques et ordre mondial C’est contre cette tectonique des plaques géopolitiques et l’ordre mondial que les Kurdes se battent depuis des décennies afin d’obtenir une reconnaissance internationale qui va au-delà d’un vague droit à l’existence qu’on leur lance trop souvent au visage pour les rassurer, comme s’ils n’avaient pas droit eux aussi à l’autodétermination, surtout quand leurs armes servent de rempart contre la barbarie de l’organisation Etat islamique et constituent ainsi les premières lignes de défense de la civilisation contre la barbarie. Le « moment kurde » auquel nous assistons depuis la chute de Saddam Hussein en Irak en 2003 et la guerre en Syrie en 2011 se heurte cependant à la logique souverainiste des deux vieux Etats de la région, l’Iran et la Turquie. Les deux auteurs l’expliquent avec précision quand ils abordent l’évolution de la question kurde dans ces deux anciennes puissances impériales, notamment la Sublime Porte, qui multiplie les déclarations d’intervention au Rojava (Kurdistan syrien), après le retrait annoncé des troupes américaines et après avoir pris possession de la poche d’Afrin, au nord de la Syrie, au début de l’année 2018. Ni fatalistes ni dupes, les Kurdes savent pourtant que les Occidentaux ne sont pas fiables, que leur promesse de liberté universelle et de solidarité ne peut pas tromper la vigilance de la chaîne du Zagros, car comme le dit l’adage : « Les seuls amis des Kurdes sont les montagnes. »
29/12/2018
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Pétition « L’Affaire du siècle » : « Cette mobilisation participe de l’émergence d’une citoyenneté écologique »
Dans une tribune au « Monde », la politologue Carole-Anne Sénit estime que le succès de la pétition visant à sanctionner l’Etat français pour inaction climatique confère au pouvoir judiciaire un rôle primordial dans la défense de l’environnement.
Un écran d’ordinateur affichant le site Web «L’Affaire du siècle », le 27 décembre. DAMIEN MEYER / AFP Tribune. Seulement trois jours après son lancement, le 18 décembre, la pétition « L’Affaire du siècle » récoltait déjà un million de signatures et devenait en moins d’une semaine la pétition la plus signée de France (1,9 million au 29 décembre). Celle-ci accompagne un recours porté par les associations Notre affaire à tous, la Fondation pour la nature et l’homme, Greenpeace France et Oxfam France devant le tribunal administratif de Paris visant à sanctionner l’État français pour inaction climatique. Comment expliquer le succès de cette campagne d’action et que signifie-t-elle pour la mobilisation environnementale ? Le succès de cette mobilisation tient à plusieurs facteurs. Le premier d’entre eux est le sentiment profond d’indignation et d’injustice suscité par l’inadéquation croissante entre l’urgence à agir et l’action de l’Etat en matière de lutte contre le changement climatique. Efforts insuffisants Les alertes, fondées sur des données scientifiques rétrospectives et prospectives, sont pourtant nombreuses et itératives : 2018 a ainsi été l’année la plus chaude jamais enregistrée en France ; le dernier rapport du GIEC met en garde contre les conséquences délétères d’un réchauffement climatique supérieur à 1,5 °C, tout particulièrement pour la France, qui est d’ores et déjà le pays d’Europe le plus affecté par le réchauffement, selon l’ONG Germanwatch. Or, la France a dépassé de 6,7 % son budget carbone pour l’année 2017, s’éloignant de ses objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre fixés dans la stratégie nationale bas carbone. De plus, quatre Français sur cinq estiment que les efforts déployés pour lutter contre le changement climatique sont insuffisants, selon un sondage IFOP-4D publié cette année. Le deuxième facteur a trait à la défiance croissante vis-à-vis des formes traditionnelles de participation des citoyens dans les processus politiques. Alors que les consultations de la société civile organisées par les pouvoirs publics peinent à influencer la définition des politiques climatiques, le recours au droit apparaît comme un nouveau moyen de mobilisation offrant aux citoyens la possibilité de contraindre l’Etat à se conformer à ses engagements internationaux et nationaux pour le climat et à protéger sa population contre les dérèglements climatiques. En adoptant ce mode de mobilisation, les citoyens reprennent espoir dans leur capacité collective à se faire entendre. Une évolution de la mobilisation
29/12/2018
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Pétition « L’Affaire du siècle » : « Attaquer la France en justice est à la fois injuste, idiot et inopérant »
Dans une tribune au « Monde », le professeur au Collège de France Marc Fontecave juge la pétition « déplacée », l’Hexagone étant, grâce à l’énergie nucléaire, un leader mondial en matière de limitation des gaz à effet de serre.
Tribune. Puisque de toute part on se réjouit du succès de la pétition, signée par 1,9 million de Français – un record semble-t-il –, visant à soutenir un recours en justice contre l’Etat français coupable d’« inaction » face au changement climatique, il est utile et urgent que d’autres voix s’expriment pour dire à quel point cette démarche est déplacée. Si François de Rugy, le ministre de la transition écologique, a été « agréablement surpris » et Ségolène Royal juge qu’il vaudrait mieux ne pas polémiquer avec les porteurs de cette pétition, heureusement Brune Poirson, secrétaire d’Etat à la transition écologique, a le courage de rappeler que « la France est une nation leader en matière d’environnement ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi La pétition pour le climat rencontre un succès inédit Les divers observateurs et commentateurs semblent ne voir dans le succès de cette pétition que la révélation d’une adhésion profonde d’une partie importante de la population française à la défense de l’environnement et à la lutte contre le réchauffement climatique. C’est en effet réjouissant, mais il n’y a pourtant là rien de vraiment nouveau. Par contre, par démagogie sans doute, un sentiment très partagé actuellement dans la classe politique, personne ne semble trouver choquant que des citoyens français attaquent leur propre pays en justice. Ce French bashing, cet autodénigrement, l’une de nos activités préférées (l’herbe serait toujours plus verte ailleurs), est sans doute encore plus choquant quand c’est au motif d’une « carence fautive de l’Etat à respecter son obligation de protection de l’environnement, de la santé et de la sécurité humaines ». Succès dû aux énergies nucléaire et hydraulique Comment peut-on dire des choses pareilles ? Il faut rappeler à ces gens-là que leur pays est non seulement un champion en matière de protection sociale et de solidarité, possédant un système de santé unique au monde donnant un accès aux soins gratuit, que beaucoup d’autres pays nous envient, mais également un champion en matière de limitation de la production de gaz à effet de serre. Il vaudrait mieux s’en réjouir. Et également comprendre, une fois pour toutes, que la France doit ce succès à son choix historique d’une production électrique essentiellement à base d’énergie nucléaire et d’énergie hydraulique, toutes les deux énergies bas carbone. Comment, dans ces conditions, cette pétition peut-elle demander en même temps, et en pleine contradiction avec sa demande de « réduction des émissions de gaz à effet de serre », l’abandon « du recours aux énergies fossiles et nucléaire » ? Comme s’il était possible d’assurer une production d’électricité et l’ensemble des transports routiers, maritimes et aériens, uniquement avec des énergies renouvelables. Ceci est simplement absurde.
29/12/2018
idees
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Alberto Manguel : « Une vision du bonheur : la lecture d’un livre »
L’essayiste, conteur, traducteur et éditeur canadien parle de son lien vital avec la littérature alors que paraît, en poche, le passionnant et passionné « La Cité des mots ».
L’écrivain canadien Alberto Manguel, dans sa bibliothèque, en 2013. ULF ANDERSEN / AURIMAGES Pourquoi certains cherchent-ils à définir leurs identités par le langage ? Quel est, au sein de cette quête, le rôle du raconteur d’histoires ? Est-il possible que les récits, qu’ils mentent ou non, transforment ceux qui les écoutent ? C’est à sonder ce lien entre les mots, les hommes et le monde que s’est appliqué, dans presque toute son œuvre, l’essayiste, conteur, traducteur et éditeur canadien d’origine argentine Alberto Manguel. Depuis son premier ouvrage traduit, Dernières nouvelles d’une terre abandonnée (Seuil, 1993), en passant par Tous les hommes sont menteurs (Actes Sud, 2009) et La Cité des mots, qui paraît en poche chez Babel (lire plus bas), ou Je remballe ma bibliothèque – une « élégie et quelques digressions » autour des 35 000 ouvrages qui composèrent naguère sa bibliothèque personnelle (Actes Sud, traduit de l’anglais par Christine Le Bœuf, 158 p., 18 €) –, tous ses livres reviennent sur cette relation passionnée et passionnante qu’il a eue avec les textes. Un lien « vital » qu’explique celui qui a également été, jusqu’en juillet 2018, le directeur de la Bibliothèque nationale d’Argentine. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Jean Clair, René Descartes, Colette Pétonnet, Simone Weil… Une sélection d’essais en poche pour la fin de l’année Comment vous êtes-vous trouvés, les livres et vous ? J’avais 3 ou 4 ans quand ma nourrice, ­Ellin Slonitz, une Tchèque de langue allemande, m’a acheté mes premiers livres et lu mes premières histoires. Je me souviens parfaitement de celle qui m’a irrémédiablement frappé : un conte des Mille et Une Nuits, un des tout premiers de ce livre vertigineux. C’était le conte du prince des îles Noires qui se voit transformé en colonne de marbre par son épouse infidèle, une femme sorcière qui le fouette tous les soirs et fait l’amour devant lui avec son esclave noir. Cette scène m’a tellement marqué que je me rappelle encore les cauchemars récurrents qui s’ensuivirent. Vous parlez beaucoup, dans vos souvenirs, de « Contes » de Grimm imprimés en gothique dans une édition des années 1930… Mon préféré était celui du Fidèle Jean, le serviteur injustement condamné par son roi. Jean une fois mort, le roi repenti prie pour qu’il revienne à la vie et apprend que, pour ce faire, il doit couper la tête de ses propres enfants et badigeonner le corps de Jean avec leur sang. Le roi (à contrecœur bien sûr, mais avec un sentiment d’obligation envers son fidèle serviteur) suit les atroces instructions. Et Jean, mais aussi les enfants, retrouvent la vie. Jean était-il votre héros préféré ? J’aimais aussi le Petit Chaperon rouge, parce qu’elle incarne la désobéissance civile, le pouvoir de choisir par soi-même le chemin à prendre.
29/12/2018
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/29/alberto-manguel-une-vision-du-bonheur-la-lecture-d-un-livre_5403381_3260.html
Séisme de magnitude 6,9 au large des Philippines
Le Centre d’alerte des tsunamis dans le Pacifique a affirmé que des « vagues dangereuses » de tsunami étaient « possibles ».
Un séisme de magnitude 6,9 a frappé, samedi 29 décembre, l’île de Mindanao, dans le sud des Philippines, a annoncé l’Institut géologique américain (USGS), tandis qu’était lancée une alerte en raison d’un possible tsunami. Le séisme s’est produit au sud-est de la ville de Davao, à 59 kilomètres de profondeur, selon l’USGS, qui avait initialement estimé la magnitude à 7,2. Le Centre d’alerte des tsunamis dans le Pacifique a précisé que des « vagues dangereuses » de tsunami étaient « possibles » sur les côtes du sud des Philippines et du nord de l’Indonésie. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les catastrophes climatiques ont coûté au moins 80 milliards d’euros en 2018
29/12/2018
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Manifestations et arrestations au Soudan
Les forces de sécurité soudanaises ont tiré des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes pour disperser des manifestants dans la capitale, Khartoum, et d’autres villes du pays, vendredi.
Manifestations à Khartoum, le 25 décembre. Mohamed Nureldin Abdallah / REUTERS Plusieurs manifestations antigouvernementales dans des villes du Soudan, après la prière du vendredi 28 décembre, ont été vigoureusement réprimées par la police, qui a interpellé un leader de l’opposition. Les forces de l’ordre ont également arrêté un groupe de rebelles darfouriens qui prévoyaient de « tuer des manifestants », a fait savoir à la presse un porte-parole du gouvernement. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Soudan, la rue défie le pouvoir d’Omar Al-Bachir Depuis le 19 décembre, le pouvoir du général Omar Al-Bachir est confronté à une vague de manifestations à travers le pays, parfois réprimées dans le sang. La violence a été dénoncée par le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. Dans un communiqué, il « appelle au calme et à la retenue et demande aux autorités de mener une enquête approfondie sur les morts et la violence » et « souligne la nécessité de garantir la liberté d’expression et de rassemblement pacifique ». Eviter l’escalade de violence Aristide Nononsi, expert indépendant des Nations unies sur la situation des droits de l’homme au Soudan, a exhorté « avec force les services de sécurité soudanais à la retenue pour éviter une escalade des violences et à prendre des mesures immédiates pour protéger le droit à la vie des manifestants ». La contestation se concentre autour du prix du pain, alors que le Soudan connaît un marasme économique aggravant la pauvreté. Lire aussi Violentes manifestations au Soudan contre la hausse du prix du pain Au moins 19 personnes, dont deux membres des forces de sécurité, ont été tuées lors d’affrontements en marge de ces manifestations, selon les chiffres officiels. La plupart des manifestants ont été victimes d’« incidents liés au pillage », avait affirmé jeudi le porte-parole du gouvernement, Boshara Juma. « La police a capturé dix personnes affiliées au groupe ALS-Abdel Wahid et saisi quatorze Kalashnikovs et 1 000 munitions », a annoncé lors d’une conférence de presse Mamoun Hassan, ministre d’Etat à l’information, en précisant que des ordinateurs avaient également été confisqués. « Des documents trouvés sur les ordinateurs indiquent que ces personnes avaient l’intention de tuer des manifestants », a précisé M. Hassan. Gaz lacrymogènes Plusieurs bâtiments du parti d’Omar Al-Bachir, le Congrès national, avaient été pris d’assaut et brûlés par des manifestants lors des premiers jours des manifestations, qui se sont propagées dans des villes et villages soudanais avant d’atteindre la capitale, Khartoum. Selon le chef des services de sécurité, des membres du groupe rebelle étaient responsables de ces violences. L’Armée de libération du Soudan (ALS) d’Abdel Wahid Mohammed Al-Nour et d’autres groupes rebelles affrontent les autorités soudanaises au Darfour (ouest) depuis 2003 sur fond de tensions ethniques. Vendredi à Omdourman, ville jumelle de Khartoum, située sur la rive occidentale du Nil, des centaines de fidèles sortant d’une mosquée du parti Oumma, principal parti de l’opposition, ont scandé « Liberté, paix, justice », avant l’intervention des forces antiémeutes qui ont dispersé la foule à coups de gaz lacrymogène, selon des témoins. Les forces antiémeutes ont également fait usage de gaz lacrymogène pour disperser des manifestants à Port-Soudan, Madani et Atbara, ville de l’est du pays où a débuté le mouvement de contestation, selon des témoins. Des photos publiées par des militants sur les réseaux sociaux montrent d’épaisses colonnes de fumée s’élevant de plusieurs quartiers de Khartoum, alors que les manifestants ont brûlé des poubelles et des pneus. Policiers et officiers des services de sécurité ont été déployés dans plusieurs secteurs de la capitale. Arrestations de journalistes Réunis jeudi soir, des groupes d’opposition avaient appelé à poursuivre les manifestations dans les jours à venir, a rapporté le Parti communiste dans un communiqué. Plusieurs membres de formations de l’opposition ont été arrêtés en marge des manifestations. Le Parti du Congrès soudanais a ainsi précisé que, quelques heures après le début des manifestations vendredi, son chef Omar El-Digeir avait été arrêté par les services de sécurité. « Il a été emmené vers une destination inconnue », a affirmé le parti dans un communiqué. L’Association des écrivains soudanais a, pour sa part, annoncé l’arrestation mardi du poète Mohamed Taha, qui avait participé à une manifestation. « Nous ignorons où il se trouve », a-t-elle affirmé. Le réseau des journalistes soudanais a fait état de l’arrestation de deux journalistes. Sur décision du gouvernement, le prix du pain est passé mi-décembre d’une livre soudanaise (un centime d’euro) à trois livres, tandis que le prix du carburant grimpait également, provoquant la colère de la population. Au-delà des revendications sociales, parmi les manifestants certains réclament aussi « la chute du régime », slogan du « printemps arabe » en 2011, du président Bachir, au pouvoir depuis 1989. Amputé des trois quarts de ses réserves de pétrole depuis l’indépendance du Soudan du Sud en 2011, le pays a vu l’inflation s’établir à près de 70 % annuels, tandis que la livre soudanaise plongeait face au dollar américain.
29/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/29/manifestations-et-arrestations-au-soudan_5403376_3210.html
Falsifications au « Spiegel » : deux responsables du magazine mis à pied
Claas Relotius, journaliste au service Société, avait admis avoir imaginé des histoires et inventé de toutes pièces des personnages dans une douzaine d’articles.
Le prestigieux hebdomadaire allemand Der Spiegel, ébranlé par l’affaire de son journaliste vedette qui avait falsifié ses articles pendant des années, a annoncé, vendredi 28 décembre, avoir mis à pied deux responsables éditoriaux du magazine. Les contrats d’un rédacteur en chef, Ullrich Fichtner, et d’un éditeur en chef, Matthias Geyer, ont été « suspendus jusqu’à ce que la commission interne [du magazine] ait terminé son enquête sur cette affaire », a expliqué aux collaborateurs du titre le rédacteur en chef Steffen Klusmann, dans une lettre interne dont l’AFP a obtenu une copie. Le 19 décembre, Der Spiegel avait lui-même révélé qu’un de ses reporters, Claas Relotius, primé à de multiples reprises, avait depuis plusieurs années inventé en partie ou intégralement le contenu d’articles. « L’affaire Relotius a soulevé la question de savoir si Ullrich Fichtner, en tant que rédacteur en chef, et Matthias Geyer, en tant qu’éditeur en chef, peuvent poursuivre leurs tâches après une telle catastrophe », a expliqué M. Klusmann. « Le premier l’a découvert pour le Spiegel, le second l’a engagé et était jusqu’à dernièrement son responsable. » Prendre ses responsabilités Ces deux journalistes avaient de suite « mis à disposition » leur poste auprès de leur responsable hiérarchique, qui les a, finalement, simplement suspendus. « Nous pourrions maintenant demander des comptes à toute personne qui a eu affaire à Relotius, et cela pourrait continuer jusqu’en haut de la hiérarchie. Je pense, cependant, que vous devriez prendre vos responsabilités lorsque vous avez quelque chose à vous reprocher », a poursuivi Steffen Klusmann. Celui-ci a d’ailleurs catégoriquement refusé que le service Société, rubrique pour laquelle travaillait M. Relotius, qui « fait partie de l’ADN » de l’hebdomadaire, soit entièrement démantelé en raison ce scandale. Histoires inventées Claas Relotius avait admis avoir imaginé des histoires et inventé de toutes pièces des personnages dans une douzaine d’articles. Le scandale avait ensuite été révélé par le magazine allemand après la démission le 16 décembre du journaliste de 33 ans. Dimanche, Der Spiegel avait annoncé qu’il portait plainte contre lui, le soupçonnant d’avoir détourné des dons en faveur d’orphelins syriens mis à l’honneur dans l’un de ses articles dont la crédibilité est elle-même en cause. Jeudi, l’intéressé a nié ces accusations. Ces révélations ont suscité une vive émotion en Allemagne et soulevé de nombreuses interrogations, notamment sur la façon dont le jeune journaliste a procédé durant toutes ces années sans être inquiété.
29/12/2018
actualite-medias
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Marseille : cent immeubles frappés de péril imminent
Depuis l’effondrement mortel de deux immeubles en novembre, la ville a évacué 1 600 personnes pour inspecter 200 immeubles.
Manifestation après l’effondrement d’immeubles dans le quartier de Noailles, le 10 novembre. CHRISTOPHE SIMON / AFP La ville de Marseille a annoncé, vendredi 28 décembre, avoir pris cent arrêtés de péril grave et imminent concernant divers immeubles à travers la ville, depuis l’effondrement de deux bâtiments qui a fait huit morts début novembre. L’effondrement de ces deux immeubles vétustes de la rue d’Aubagne, le 5 novembre, a plongé la ville et le maire LR Jean-Claude Gaudin dans l’une de ses plus graves crises, soulignant l’ampleur du problème du logement insalubre et dangereux. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La psychose d’un nouvel effondrement gagne les Marseillais Deux mois pour faire les travaux Les signalements se sont, depuis, succédé, et jusqu’à quelque 1 600 personnes ont été évacuées d’environ 200 immeubles, le temps de vérifier leur état. Temporairement sans domicile fixe, elles ont été hébergées la plupart du temps en hôtel. Ces évacuations ont donné lieu à la prise de 100 arrêtés de péril grave et imminent, qui obligent les propriétaires à faire des travaux d’urgence dans les deux mois. Après ce délai, la ville peut se substituer à eux et leur envoyer la facture. « Par ailleurs, seize procédures de péril simple ont été lancées pour des travaux plus légers. Dans ce cas, les propriétaires disposent de six à huit mois pour réaliser les travaux », précise la mairie, très critiquée depuis le drame par les évacués et son opposition pour l’insuffisance de son action en matière de logement insalubre ou dangereux. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Avant l’effondrement des immeubles, la gestion de l’habitat par la mairie de Marseille déjà critiquée Cette centaine d’arrêtés de péril en moins de deux mois représente une augmentation vertigineuse : 35 arrêtés avaient été pris en 2015, 43 en 2016, 57 en 2017 et 48 en 2018 jusqu’en octobre. Depuis le drame, des travaux ont été réalisés ou des doutes ont été levés, permettant la réintégration de 318 personnes dans 50 immeubles, a précisé la ville. Soixante-dix-neuf personnes ont, par ailleurs, pu signer des baux pour un relogement temporaire ou définitif dans le cadre d’un dispositif mis en place par la mairie.
29/12/2018
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Nigeria : l’ex-président Shehu Shagari est mort
L’ancien chef d’Etat, né le 25 février 1925, est mort à l’âge de 93 ans. Il fut l’un des rares de sa génération à accéder au poste suprême par le vote.
L’ex-président Shehu Shagari à Abuja, en mai 2015. Akintunde Akinleye / REUTERS Shehu Usman Aliyu Shagari, qui a dirigé le Nigeria entre 1979 et 1983, est mort vendredi 28 décembre, a annoncé l’actuel président Muhammadu Buhari, celui-là même qui l’avait renversé par un coup d’Etat pendant la période tourmentée des dictatures militaires. « C’est avec une immense tristesse que j’ai reçu la nouvelle du décès du premier président exécutif du Nigeria, Alhaji Shehu Shagari », a fait savoir l’ancien général Muhammadu Buhari, vendredi soir. « Les Nigérians le portaient en haute estime, alors même qu’il n’était plus au pouvoir, et ses conseils avisés seront toujours regrettés », peut-on lire dans ce communiqué de la présidence. Président contre son gré L’ancien président, né le 25 février 1925, est mort à l’âge de 93 ans. Il fut l’un des rares chefs d’Etat de sa génération à accéder au poste suprême par le vote, sous la bannière du Parti national du Nigeria (NPN), après treize années de dictature militaire. Ce politicien, d’origine peule et musulman, s’était présenté comme sénateur, avant d’être désigné par son parti pour être candidat à l’élection présidentielle de 1979. Il a toujours gardé la réputation d’être devenu président contre son gré. Shagari, qui s’était toujours présenté comme un homme intègre et incorruptible, n’a pas réussi à résister à la mauvaise gouvernance, aggravée par les crises pétrolières des années 1970. Coup d’Etat Depuis le début de l’exploitation du pétrole dans les années 1960, après son indépendance, le Nigeria a connu une histoire politique très mouvementée et, jusqu’à son accession à la démocratie en 1999, une série de coups d’Etat menés par une junte militaire. Le 31 décembre 1983, le général Buhari – réélu démocratiquement en 2015 et actuellement au pouvoir – a renversé Shagari par un coup d’Etat sanglant. L’ancien président fut arrêté ainsi que de nombreux de ses ministres pour corruption. Après une série de procès militaires, il fut acquitté de l’accusation de corruption, tandis que de nombreux cadres de son parti écopaient de lourdes peines de prison. Après avoir quitté la scène politique, il n’était que rarement apparu en public.
29/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/29/nigeria-l-ex-president-shehu-shagari-est-mort_5403369_3212.html
Rugby : Toulouse surclasse Toulon et conserve la deuxième place du Top 14
Le Stade Toulousain a empoché le bonus en s’imposant 39-0, à domicile, face au Rugby club toulonnais, et garde la seconde place du classement à la mi-saison.
Le Toulousain Iosefa Tekori est taclé par le Toulonnais Louis Carbonel, le dimanche 30 décembre, à Toulouse. PASCAL PAVANI / AFP Toulouse a surclassé Toulon avec le bonus (39-0) dimanche dans un Stadium à guichets fermés en clôture de la 13e journée du Top 14, la dernière de la phase aller, pour conserver à mi-parcours la 2e place derrière Clermont. Dimanche, Toulouse a inscrit cinq essais, autant que de points marqués avec le bonus. Le club a aussi fait le plein de spectateurs (32 700) dans le grand stade de Toulouse, et n’a encaissé aucun point sur sa pelouse : une manière de clôturer l’année par une nouvelle soirée parfaite, comme le club en a pris l’habitude depuis fin septembre et son dernier revers en date face à Castres (26-22). L’équipe des entraîneurs Ugo Mola et Régis Sonnes a aligné une onzième rencontre sans défaite (dix succès contre un nul) et retrouve la 2e place que La Rochelle, vainqueur de Castres (53-27), lui avait provisoirement chipée samedi. L’écart avec le leader Clermont, également vainqueur bonifié à Perpignan (37-16), ne varie pas (3 points). Dominé sur la totalité de la rencontre, Toulon, incapable d’inscrire le moindre point sur la pelouse comme de glaner le moindre point à l’extérieur depuis le début de la saison, retombe dans ses travers après sa belle victoire sur Lyon (40-7). Le RCT reste 10e et compte 12 points de retard sur le peloton des barragistes composé de Lyon (5e), du Racing 92 (6e) et du Stade Français (7e). Lire aussi : Les sponsors envahissent le cœur des maillots Clermont et La Rochelle foncent, Castres régresse Clermont 37-16 Perpignan 48, le nombre total de points glanés par le leader Clermont lors de la phase aller est le meilleur depuis Toulon (51) en 2013. L’ASM, vainqueur bonifié à Perpignan (37-16), ne s’est ratée sur aucun match, ramenant au minimum un bonus défensif lors de ses deux seules défaites à l’extérieur. La Rochelle 53-27 Castres Et de sept victoires de rang pour La Rochelle, qui a dégoûté le champion Castres (53-27), bonus offensif à la clé. Le nouveau directeur sportif Jono Gibbes n’a toujours pas connu la défaite en Top 14 depuis son arrivée en novembre, quand il a récupéré une machine déjà bien huilée. Bordeaux-Bègles 40-7 Racing 92 Bordeaux-Bègles, euphorique depuis un mois en Top 14, a enregistré dimanche une quatrième victoire de suite aux dépens du Racing 92 (40-7) rapidement réduit à 14, lui permettant de virer à la 4e place à l’issue de la phase aller. Stade Français 23-20 Grenoble A peine sorti d’un cycle négatif, le Stade Français a failli rechuter aussitôt à domicile face à Grenoble, l’emportant de justesse (23-20) face à un mal-classé qui a confirmé samedi qu’il méritait sa place en Top 14. Montpellier 41-13 Pau Montpellier a conclu sa phase aller de Top 14 avec un succès bonifié sur Pau dimanche (41-13) qui lui permet de rester en course pour les barrages, contrairement aux Palois qui subissent leur 6e revers de rang et jouent désormais le maintien. Lyon 52-20 Agen Lyon n’a pas fait de détails en battant avec le bonus Agen (52-20) samedi en ouverture de la 13e journée de Top 14. Dans une rencontre décousue avec 10 essais, les Lyonnais ont dominé en inscrivant sept, dont un doublé pour l’ailier Alexis Palisson.
30/12/2018
rugby
https://www.lemonde.fr/rugby/article/2018/12/30/rugby-toulouse-surclasse-toulon-et-conserve-la-deuxieme-place-du-top-14_5403745_1616937.html
Quarante-cinq migrants secourus au large des côtes tunisiennes
L’embarcation clandestine, partie de Libye, était tombée en panne près de l’archipel de Kerkennah. Aucun blessé n’est à déplorer, selon la Garde nationale tunisienne.
Le long de la côte de Kerkennah. L’archipel est situé au large de la ville tunisienne de Sfax. FETHI BELAID / AFP Quarante-cinq migrants clandestins ont été secourus par les garde-côtes au large de l’archipel de Kerkennah, dans l’est de la Tunisie, a indiqué, dimanche 30 décembre, la Garde nationale tunisienne, qui n’a pas fait état de victimes. Leur embarcation était tombée en panne au large d’une des deux principales îles de l’archipel, a indiqué à l’AFP le porte-parole de la Garde nationale Houssemeddine Jebabli, précisant que le sauvetage avait eu lieu en matinée. Les personnes secourues, pour la plupart des ressortissants de pays d’Afrique subsaharienne, sont « en bonne santé », a-t-il affirmé, mentionnant la présence de deux femmes enceintes à bord. Leur embarcation était partie des côtes libyennes pour rejoindre l’Europe, selon ce porte-parole, ajoutant que les migrants ont été pris en charge par le Croissant-Rouge tunisien. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La Tunisie face aux pressions de l’Europe sur le dossier migratoire 40 migrants accueillis au mois de juillet Le pays a été témoin de plusieurs naufrages meurtriers. Le dernier en date a fait 87 morts en juin, en majorité des migrants de nationalité tunisienne, après le naufrage de leur bateau au large de l’île de Kerkennah. Fin juillet, les autorités avaient décidé « pour des raisons humanitaires », d’accueillir 40 migrants secourus par un navire commercial qui attendait depuis deux semaines d’accoster au large de Zarzis, dans le sud de la Tunisie. Un nombre croissant de Tunisiens en quête d’emploi et de perspectives d’avenir tente de se rendre illégalement en Italie via la Méditerranée. La Tunisie est considérée comme l’un des principaux points de passage de migrants clandestins, essentiellement originaires d’Afrique subsaharienne, vers l’Europe, et principalement l’Italie. Lire aussi La question migratoire au cœur de la visite d’Angela Merkel en Tunisie
30/12/2018
afrique
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Premier League : Pogba et Kanté relancent Manchester United et Chelsea dans la course à l’Europe
Un grand match de Paul Pogba, auteur d’un doublé, a donné la victoire à United contre Bournemouth. Chelsea a souffert à Crystal Palace, mais N’Golo Kanté a inscrit un but d’attaquant.
Paul Pogba après son match contre Bournemouth, à Old Trafford. JASON CAIRNDUFF / Action Images via Reuters Pour un peu, on aurait pitié de José Mourinho. Car le comportement de Paul Pogba sur le terrain, depuis le départ de l’entraîneur qui l’avait pris en grippe, a quelque chose d’une humiliation pour l’ex-« Special One ». Dimanche 30 décembre, pour son troisième match en huit jours, le Français a offert un nouveau récital sous le maillot de Manchester United. Pogba, qui semble libéré d’un poids énorme et se voit confier les clés du jeu par le nouvel entraîneur Ole Gunnar Solskjaer, a inscrit un doublé et offert une passe décisive face à Bournemouth (4-1). Cette victoire, la troisième pour Solskjaer en autant de matchs face à des « petits » de Premier League (Cardiff, Huddersfield et Bournemouth), fut tout aussi impressionnante que les précédentes. Elle permet à United, auteur de douze buts sur cette période, de recoller à trois points d’Arsenal, 5e et écrasé la veille à Liverpool (5-1). Arsenal comme United restent à bonne distance de Chelsea, 4e à seulement deux points de Tottenham grâce à sa victoire 1-0 à Crystal Palace, sur un but de N’Golo Kanté. Manchester City a repris la place de dauphin de Liverpool en s’imposant facilement à Southampton (1-3). Lire aussi : Liverpool étrille Arsenal et lorgne sur le titre Pogba : « C’est comme cela qu’on veut jouer » Si la Premier League se joue peut-être durant les fêtes – on en aura une idée plus claire après le choc entre City et Liverpool, le 3 janvier –, Paul Pogba est l’autre feuilleton de cette quinzaine dans les stades anglais. En trois rencontres, le Français a marqué quatre buts et offert trois passes décisives à ses attaquants. Ecarté par José Mourinho dans ses dernières semaines de mandat, l’international français renaît sous la direction de Solskjaer, qui a fait de lui son meneur de jeu. Dimanche à Old Trafford, Pogba a d’abord conclu un superbe slalom de Marcus Rashford en se jetant devant le but (4e), puis marqué de la tête en anticipant un centre de Ander Herrera (33e). Il est aussi à l’origine du quatrième but mancunien, sur une ouverture en une touche de balle trouvant Romelu Lukaku dans la surface de réparation (72e). Paul Pogba a frôlé le premier triplé de sa carrière sur une frappe à l’entrée de la surface de réparation qui aurait fini dans les filets de Bournemouth, sans une parade d’Asmir Begovic pour la dévier sur le poteau. Le Français a aussi effectué quelques interventions décisives dans sa propre surface de réparation et beaucoup parlé à ses coéquipiers, en nouveau maître du jeu. « L’équipe doit prendre du plaisir à jouer au football. C’est différent [avec Solskjaer], a dit Paul Pogba après la rencontre. On gagnait quand même des matchs avec l’ancien entraîneur. Mais c’est une façon différente de jouer, plus offensive, je dirais. C’est comme cela que nous voulons jouer. (…) J’essaye de ne pas en faire trop et de jouer pour l’équipe. On vole et on veut encore s’améliorer. » Troisième but pour Kanté Pour le Paris-Saint-Germain, futur adversaire de Manchester United en huitièmes de finale de la Ligue des champions, le tirage au sort ressemble de plus en plus à une mauvaise opération, même si la résistance défensive de cette équipe face à des adversaires plus ambitieux reste à évaluer. N’Golo Kanté félicité par Eden Hazard après son but, face à Crystal Palace. DAVID KLEIN / REUTERS N’Golo Kanté, qui connaissait lui aussi des difficultés depuis le début de la saison, continue de s’adapter à un rôle nouveau, plus haut sur le terrain. Il lui offre des possibilités de s’illustrer offensivement et le Français les rate de moins en moins : son appel de balle, et l’enchaînement contrôle de la poitrine-reprise de volée au cœur de la défense de Crystal Palace, dimanche, ressemblait davantage à une action de son coéquipier Olivier Giroud. Lire aussi Kanté et Pogba, deux étoiles ternies en Premier League L’autre champion du monde de Chelsea était moins en veine à Selhurst Park : il a marqué deux beaux buts, tous deux refusés pour un léger hors-jeu, et s’est blessé à la cheville gauche sur son tir du second. Pour N’Golo Kanté, c’est déjà le troisième but de la saison : autant que depuis son arrivée en Angleterre en 2015.
30/12/2018
football
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Réseaux sociaux, données personnelles, algorithmes… comment inventer un futur numérique plus radieux ?
Au Chaos Communication Congress, la fine fleur de la communauté des hackeurs tente de défendre un monde numérique plus équitable. Non sans peine.
Il y a quelques années à peine, Internet devait libérer les peuples, ouvrir l’accès à la connaissance et faire tomber les barrières sociales. Depuis quelque temps, ce plan de vol initial et utopique, adapté au rythme d’ingérences étrangères sur les réseaux sociaux, de la prolifération des discours haineux en ligne ou de la collecte sans fin de données personnelles, a pris un coup dans l’aile. Le Chaos Communication Congress (CCC) rassemble chaque année en Allemagne et depuis trente-quatre ans la fine fleur de la communauté des hackeurs d’Europe et du monde. Il l’a à nouveau fait, du 27 au 30 décembre, dans un grand bâtiment de verre et de métal de la banlieue de Leipzig. Oubliez l’image d’Epinal : il n’est ici question d’un homme à capuche piratant des sites Internet dans le confort obscur d’une chambre d’adolescent. Mais plutôt de curieux, de précurseurs, d’insatisfaits, qui veulent décortiquer, démonter et dépiauter la technologie pour l’aligner au mieux avec leurs idéaux de liberté et d’autonomie. Comment éviter que les réseaux sociaux ne perturbent les élections ? La question du rôle des réseaux sociaux dans les élections hante plusieurs pays depuis 2016, date à laquelle la Russie a, selon les autorités et la justice américaine, tenté d’influencer le résultat de l’élection présidentielle aux Etats-Unis. Une partie de cette opération d’influence a pris la forme de publicités ciblées. Une question que connaît parfaitement Damon McCoy, professeur d’informatique à la New York University. Lors d’une conférence, ce dernier a rappelé les objectifs poursuivis par l’officine russe chargée de la propagande numérique : « décourager le vote de certaines catégories de la population, notamment les Noirs, polariser le débat et créer le chaos ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les plates-formes du Web s’organisent pour éviter un « hack » des élections Depuis, une très forte pression politique s’est exercée sur les principaux réseaux sociaux, en premier lieu Facebook. Ces derniers ont donc été contraints de rendre publiques les publicités politiques et un certain nombre d’informations à leur sujet. C’est cette transparence qui, selon le chercheur, permet de mieux comprendre les mécanismes de cette nouvelle forme de communication politique et d’en limiter les effets pervers. Une ouverture qu’il aimerait encore plus grande. Mais la tâche est ardue : Facebook a déployé des mesures empêchant les chercheurs de compiler rapidement et à grande échelle le contenu de ses archives publicitaires. De plus, pointe le chercheur, il est encore possible de payer de la publicité pour des faux comptes. « Facebook ne vérifie pas l’identité des publicitaires », déplore encore M. McCoy : « Nous devons continuer à faire pression sur eux pour qu’ils améliorent leurs archives. J’espère qu’ils l’amélioreront pour que nous soyons en mesure de comprendre les aspects positifs et négatifs des publicités politiques pour l’élection de 2020. » Pour Diego Naranjo, de l’EDRI – une association européenne de défense des droits numériques –, il faut surtout « s’en prendre au modèle économique [des grandes plates-formes] qui est centré sur l’objectif de générer plus de “like”, plus de tweets, plus d’engagement ». Comment reprendre le contrôle de nos données personnelles ? Les fuites de données personnelles et les scandales liés à la vie privée se sont enchaînés ces derniers mois. Pourtant, le modèle économique dominant d’Internet, basé sur la publicité et les données personnelles, ne semble pas être remis en cause. Lire aussi Le contrôle des données numériques personnelles est un enjeu de liberté collective « Nous devons reprendre possession d’Internet. Il n’y a pas de loi naturelle qui veut que les sites et les applications doivent envoyer des données aussi précises à chaque fois qu’on les utilise ! », a lancé Frederike Kaltheuner, de l’ONG Privacy International, en présentant les résultats d’une étude montrant, une nouvelle fois, l’appétit de Facebook en matière de données personnelles. Elle en appelle aussi aux développeurs, qui ne doivent « pas transmettre de données, dont ils n’ont pas besoin, et donner le choix aux gens ». L’entrée en application du nouveau cadre européen de protection des données personnelles, le RGPD, est une source d’espoir pour certains. « Vingt ans en arrière, nous n’avions rien. Désormais, nous avons un cadre de protection des données fort, avec les Gafam [Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft] dans le viseur. Les gens s’éveillent et se sentent concernés », veut croire Diego Naranjo, de l’EDRI. Faudra-t-il, pour rééquilibrer la balance entre les internautes dont les données sont pillées et les grandes plates-formes numériques, passer par le revenu de base universel ? C’est la thèse qu’a brièvement défendue l’économiste Guy Standing lors de la conférence d’ouverture du CCC. Ce défenseur de longue date du revenu universel estime qu’il pourrait s’agir, entre beaucoup d’autres choses, d’un moyen de récupérer du pouvoir sur « Facebook, Google et les autres qui extraient tant de nous » et crée une richesse dont les citoyens ne voient pas la couleur. Les algorithmes sont-ils condamnés à décider à notre place ? La question des algorithmes – entendus comme des programmes informatiques autonomes affectant l’environnement de l’internaute ou du citoyen – a également été abordée. « Ce débat n’est pas encore assez informé », déplore Claudio Agosti, un hackeur qui tente depuis plusieurs mois de comprendre comment fonctionne, en détail, l’algorithme de Facebook. Le problème, explique-t-il lors d’une conférence remarquée, c’est que « les algorithmes peuvent prendre la forme de l’oppression. Facebook peut du jour au lendemain changer son algorithme dans une direction qui n’est pas dans votre intérêt. » Ce hackeur a donc lancé une initiative destinée à comprendre la manière, dont il organise et présente les contenus à ses utilisateurs, grâce à une extension installée par des volontaires dans leurs navigateurs et Internet qui collecte certaines publications affichées sur le fil d’actualité Facebook. « Ne supprimez pas Facebook, donnez votre profil à la science ! Votre profil est un moyen unique d’observer le réseau, un point d’observation de choix pour comprendre comment Facebook fonctionne. » Un point de vue partagé par Yann Leretaille, qui pilote le Good Technology Collective, une organisation destinée à conseiller les entreprises et expliquer au grand public les grands enjeux sociétaux des nouvelles technologies ; pour lui, trop souvent, les services numériques « prennent des décisions à la place de l’utilisateur » sans lui donner la possibilité de le savoir, de le comprendre ou de l’empêcher. Peut-on encore vivre un Internet sans les géants de la Silicon Valley ? En tirant tous les fils des maux qui affectent le monde numérique contemporain, on remonte à une pelote unique : tous les usages, toutes les données, tous les réflexes sont rattachés à des plates-formes centralisées, la plupart issues de la Silicon Valley. Est-il pourtant réaliste de quitter les services des géants du numérique ? « C’est très dur de demander cela aux gens, une partie d’entre eux en dépendent. J’ai quitté Facebook il y a quelques années, et j’ai perdu le contact régulier avec certains amis », reconnaît même Diego Naranjo. « Nous avons besoin d’alternatives à ces plates-formes centrales de communication. On doit ne pas le décider demain, mais aujourd’hui » dit-il encore. Claudio Agosti formule le même diagnostic : il ne faut pas que le pouvoir « reste au centre du réseau » mais soit décentralisé vers les utilisateurs. S’il y a bien un endroit au monde où l’idéal de décentralisation et de solution respectueuses des droits des utilisateurs est encore vivace, c’est justement au CCC. Certains murs y arborent des posters aux couleurs du réseau social Diaspora, vestiges d’une époque pas si lointaine où promettre une alternative à Facebook soulevait les foules. « C’est plus qu’un problème technique, c’est un problème politique. » Les grandes plates-formes, qui captent une part des activités humaines sur Internet, ont réussi le tour de force de recentraliser une technologie, Internet, dont la force et le succès tiennent à son caractère décentralisé. Certains s’échinent tout de même à imaginer des outils et des technologies qui rompent avec le centralisme ambiant. On a ainsi pu entendre l’un des responsables de Matrix, un système qui permet d’interconnecter tous les services de discussion (Slack, WhatsApp…) à travers un système sans serveur central, expliquer à quel point son service, qui sera même utilisé par l’Etat français, peut être une solution d’avenir. D’autres essaient de mettre entre les mains du plus grand nombre des alternatives aux géants du numérique. Ils étaient ainsi une cinquantaine à se masser dans une petite salle pour apprendre à faire fonctionner Nextcloud, une alternative aux systèmes de cloud traditionnels comme Google et qui permet de choisir où sont hébergées ses photos, sa musique ou ses contacts (une petite entreprise d’hébergement ou même un simple ordinateur branché dans son salon). « C’est plus qu’un problème technique, c’est un problème politique. Mais nous autres développeurs pouvons imaginer des solutions », veut ainsi croire Jos Poortvliet, l’un des membres du projet NextCloud.
30/12/2018
pixels
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/12/30/reseaux-sociaux-donnees-personnelles-algorithmes-comment-inventer-un-futur-numerique-plus-radieux_5403732_4408996.html
Un détenu s’évade de la prison de Fresnes
Un homme incarcéré pour des vols avec effraction est parvenu à s’enfuir du centre pénitentiaire, dimanche, malgré les tirs d’un surveillant.
Dans le centre pénitentiaire de Fresnes (Val-de-Marne). STEPHANE DE SAKUTIN / AFP Un détenu s’est évadé, dimanche 30 décembre dans l’après-midi, de la prison de Fresnes (Val-de-Marne), malgré les tirs d’un surveillant qui a tenté de l’empêcher de s’enfuir, a appris l’Agence france presse (AFP) auprès de l’administration pénitentiaire, confirmant des informations publiées par Le Parisien. « Les surveillants postés aux miradors, qui étaient tous tenus ce jour, ont procédé aux sommations réglementaires puis à plusieurs tirs ; le détenu est néanmoins parvenu à franchir le mur d’enceinte » vers 16 h 30, a indiqué le ministère de la justice dans un communiqué. Le détenu « se serait blessé à cette occasion », est-il ajouté, précisant que des recherches ont été entreprises « sans délais ». C’est aux mains que le détenu se serait blessé en escaladant le mur d’enceinte de la prison, l’une des plus grandes de France et qui compte quelque 2 500 détenus. Agé de 29 ans, l’homme était classé parmi les détenus particulièrement surveillés (DPS) après s’être déjà enfui pendant son procès en décembre 2016 à Créteil, selon une source proche du dossier à l’AFP. Ce jour-là, il avait été condamné à 8 ans de prison pour vol avec effraction, extorsion avec violence et escroquerie. Rattrapé en mars 2017, il a été ensuite condamné à 3 ans et 6 mois de prison pour cette évasion ainsi que pour une autre tentative d’évasion depuis le dépôt du même tribunal. Libérable en 2026, cet homme était par ailleurs soupçonné dans une autre affaire : il devait prochainement comparaître pour extorsion, vol et recel en bande organisée, selon la même source.
30/12/2018
police-justice
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/30/un-detenu-s-evade-de-la-prison-de-fresnes_5403729_1653578.html
Hadja Idrissa Bah, une jeunesse contre les violences faites aux femmes
Elle a créé en 2016 le Club des jeunes filles leaders de Guinée qui lutte contre les mariages forcés, les viols conjugaux et les mutilations génitales.
Amour et sexualité : avoir 20 ans en Afrique de l’Ouest (8). C’est un foulard écarlate qui coiffe sa colère au milieu de la foule. « Les filles et les femmes sont victimes. C’est notre journée ! Nous appelons les autorités à répondre de leurs responsabilités », martèle Hadja Idrissa Bah devant une poignée de journalistes. Nous sommes à Conakry le 8 mars 2017, et, avec ses camarades, elle vient d’être aspergée de gaz lacrymogène par la police. La vidéo fait le tour du Web, reprise par des médias internationaux impressionnés par son éloquence et son témérité, rares chez une jeune fille de 18 ans. Mais, dans la capitale, tout le monde connaît déjà la verve de Hadja. « On m’appelle la fille à foulard briseuse de mariages », lance-t-elle, avec une pointe de fierté. Cela veut dire que les actions de son Club des jeunes filles leaders de Guinée fonctionnent. « Tous les jours, je reçois des appels de femmes violentées par leur mari. Ça m’encourage à continuer la lutte, car, en me parlant, elles démontrent que quelque chose est en train de changer en Guinée. Aujourd’hui, les femmes osent dénoncer. » Présentation de notre série Amour et sexualité : avoir 20 ans en Afrique de l’Ouest Mariages forcés, grossesses précoces, viols conjugaux, mutilations génitales, violences de genre, ces thématiques lourdes, Hadja les éponge depuis ses 13 ans, âge de sa naissance militante, lorsqu’elle a été élue au Parlement des enfants guinéens représentante de Ratoma, la commune populaire de Conakry qui l’a vue grandir. C’est sa fine connaissance de ces sujets qui a décidé de sa sélection pour le projet éditorial du Monde Afrique avec le Fonds français Muskoka, dont l’ambition est de faire parler huit jeunes Ouest-Africains sur ces enjeux. « On dit que c’est le milieu qui fait l’homme, eh bien dans mon quartier, tout le monde fait n’importe quoi ! », lance-t-elle. A quelques pas de la maison familiale, l’axe routier « Carrefour transit » est un haut lieu de prostitution. Le quartier dégorge sur le bitume ses restaurants bon marché et ses « espaces de blague », comme on appelle ici les bars remplis de jeunes riards fumant et draguant. Dans un café de Conakry, en décembre 2017, la Guinéenne Hadja Idrissa Bah discute avec une adolescente et sa mère qui ont appelé au secours son Club après le viol de la jeune fille. UNFPA/Fonds Francais/Muskoka/Vincent Tremeau « Il y a de nombreuses grossesses non désirées chez les jeunes, explique-t-elle. Toutes ces filles prennent soin de leur enfant et ne vont plus à l’école, ou les parents les rejettent. » Cette exclusion a été l’un des déclencheurs de son enga­gement. Le premier, plus intime, remonte à ses 10 ans. Des vacances « convoquées » par sa famille pour mieux masquer une tromperie. « Je me suis retrouvée face à une vieille femme qui m’a excisée. » Une tradition dont sont encore victimes 92 % des Guinéennes. Le deuxième pays le plus concerné dans le monde après la Somalie. La tâche est vaste « Je suis issue d’une famille où les jeunes filles n’ont pas le droit à la parole, avance-t-elle. Ma mère est une femme très soumise qui fait des ménages. Elle est la raison pour laquelle je mène cette lutte. » A son père, boutiquier, elle voue de l’admiration. « Ma chance, c’est qu’il a compris l’importance de l’éducation et m’a mise dans une école française. » Bosseuse, Hadja enquille les bonnes notes. Son père est fier de sa réussite. « Il m’encourage à oser, à défendre mes idées. » Un jour de 2009, il la présente à l’un de ses amis, Ibrahima Diallo, directeur de l’ONG Protégeons les droits humains. Celui-ci la forme aux thématiques sociales et lui apprend à parler en public. Un second père pour Hadja. En 2014, à 15 ans, elle devient présidente du Parlement des enfants. Puis, avec plusieurs filles volontaires, elles décident de créer une organisation consacrée à la lutte pour les droits des femmes et des enfants. Le 28 février 2016 naît le Club. La tâche est vaste. Selon une enquête de 2017 réalisée par le gouvernement, 63 % des Guinéennes sont victimes de violences conjugales, 29 % de violences sexuelles, 22,8 % des filles sont mariées avant leurs 15 ans, et 55 % avant 18 ans. Avec l’appui de structures internationales, le Club a mis en place des sensibilisations communautaires et des cellules d’écoute. « Depuis juillet, on a empêché quatorze mariages précoces », se félicite Hadja. Le Club passe à la télé, remporte des prix, dont le dernier lui a été remis au Canada, le 17 novembre. Une célébrité devenue fardeau. « On dit à mon père : “Tu as perdu ta fille, elle mène une lutte contre la tradition et la religion !” Il a peur mais me soutient. » Hadja est l’aînée de neuf enfants et la première de la famille à faire des études supérieures. En science politique, depuis la rentrée d’octobre. Mais elle aimerait faire du droit, car le temps politique est déjà le sien hors des cours. Avec ses engagements, les profs ne la voient qu’une semaine par mois. Hadja garde la tête froide. « Pour l’instant, nous avons des plaidoyers à mener sur le terrain et le ministère de la justice à interpeller. » Les âmes critiques ? Elle les invite à la rejoindre. « Notre lutte doit devenir celle de tous : parents, chef de quartier, juge, imam… Nous ne luttons pas pour l’argent ou la célébrité, mais parce que ces violences, nous les avons vécues. Les femmes méritent d’avoir un corps pur et complet, de ne pas être privées de leurs droits. » Le pouvoir ? Avec ses jeunes lionnes, elle l’arracherait bien à la vieille garde, jusqu’à devenir « ministre, présidente même… Une fille peut bien aussi rêver ! ». Cette série a été réalisée dans le cadre d’un partenariat avec le Fonds français Muskoka.
30/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/30/hadja-idrissa-bah-une-jeunesse-contre-les-violences-faites-aux-femmes_5403724_3212.html
A Johannesburg, un scarabée menace l’une des plus grandes forêts urbaines du monde
L’insecte envahissant et tueur d’arbres serait arrivé dans des palettes de bois importées d’Asie du Sud-Est, et pourrait bouleverser la physionomie de la ville d’Afrique du Sud.
Le parc Delta, à Johannesburg. MARC SHOUL POUR LE MONDE Un petit scarabée, pas plus gros qu’une fourmi, fait des ravages dans l’une des plus grandes forêts urbaines au monde plantée par l’homme. L’arrivée de l’été austral fin décembre renforce les craintes des résidents de Johannesburg et des spécialistes de la végétation, qui s’inquiètent des dommages causés par le scolyte polyphage Euwallacea fornicatus, en anglais « polyphagous shothole borer beetle » (PSHB), un insecte originaire d’Asie envahissant et tueur d’arbres. « Lorsque les arbres auront fini de fleurir, c’est là qu’on verra vraiment l’étendue des dégâts et qu’on comptera les morts », explique, dépitée, Andrea Rosen. Cette quinquagénaire amoureuse des arbres vit depuis vingt ans à Craighall Park, l’un des quartiers qui bordent le parc Delta, un poumon vert de 100 hectares au cœur de la mégalopole sud-africaine. Conséquence du plan de développement imposé par le régime de l’apartheid, ces quartiers sont plutôt blancs et aisés. Très verdoyants, les jardins y sont copieusement arrosés et très bien entretenus. Au fond de son terrain, Andrea Rosen montre un érable de Chine dont le tronc écorcé est parsemé de trous minuscules. « Le scolyte entre par les fissures de l’écorce, donc on ne sait pas tout de suite quel arbre est touché. Ensuite, le scarabée creuse des sillons et s’enfonce très profondément. Aucun pesticide ne marche », déplore-t-elle. Dans ces sillons, un champignon, Fusarium euwallaceae, se développe et asphyxie la jeune écorce, ce qui peut à terme tuer l’arbre. Rubans jaunes Avec d’autres résidents, Andrea Rosen a fondé l’Alliance pour la forêt urbaine de Johannesburg, une association qui tente par tous les moyens d’alerter l’opinion sur la menace du scolyte. A l’heure actuelle, personne n’est en mesure de dire combien des 6 à 10 millions d’arbres que compte la ville sont affectés. « Mais vu que plus de quatre-vingts espèces sont touchées, ça pourrait être des dizaines, voire des centaines de milliers », affirme l’arboriste Julian Ortlepp. Ce « chirurgien pour arbres », comme le présente sa carte de visite, est venu inspecter le jardin d’Andrea. « La difficulté, c’est que tous les arbres présentent des symptômes différents », explique-t-il en montrant des résidus de sève cristallisés sur un chêne, signe de la présence du scarabée. Les habitants sont invités à signaler les arbres malades au département des parcs et forêts. MARC SHOUL POUR LE MONDE Le duo poursuit la visite vers l’avenue de Buckingham, où, d’après eux, tous les arbres sont condamnés. Un résident a pris la liberté d’entourer les troncs d’un ruban jaune et d’y agrafer des affiches rouges où est inscrit « Retirez cet arbre mort… et cherchez sur Google “PSHB” ». « Malheureusement, la tendance ici a été de planter une même espèce par rue. Ça fait plus joli, mais lorsque il y a un insecte ravageur, il faut tout abattre », commente M. Ortlepp.
30/12/2018
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/30/a-johannesburg-un-scarabee-menace-l-une-des-plus-grandes-forets-urbaines-du-monde_5403720_3244.html
Immobilier : ce qui va changer en 2019
Taxe sur l’assurance emprunteur, revalorisation des APL, nouveau dispositif d’investissement locatif sont les principales évolutions l’an prochain.
Une habitation à loyer modéré (HLM) à Calais, en septembre 2017. Les aides personnalisées au logement seront revalorisées de 0,3% au 1er janvier 2019. PHILIPPE HUGUEN / AFP Dans le secteur de l’immobilier, les changements prévus en 2019 sont mineurs. Sauf pour ceux qui sont concernés. Avec des gagnants et des perdants. Les contrats d’assurance emprunteur taxés Une nouvelle taxe pour démarrer l’année : les contrats d’assurance emprunteur souscrits à partir du 1er janvier 2019 écoperont d’une taxe de 9 % sur toutes les garanties. Un choc pour les courtiers en assurances, qui anticipent déjà une hausse des cotisations de 6 % pour les emprunteurs. Les APL (légèrement) revalorisées Les ménages défavorisés ont droit à un bien maigre coup de pouce pour leur pouvoir d’achat. Les aides personnelles au logement (APL) seront revalorisées au 1er janvier 2019 de 0,3 %. Une paille qui arrive quelques mois avant une réforme plus profonde des APL, au printemps, dont le but est d’attribuer l’aide en fonction des revenus de l’année en cours, réactualisés tous les trois mois, et non plus des deux années précédentes. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Pourquoi l’habitat insalubre ne se résorbe pas Un nouveau dispositif d’investissement locatif Appelez-le « Denormandie ancien ». Ce nouveau dispositif d’investissement locatif dans l’ancien sera accessible dès le 1er janvier 2019 dans les villes moyennes du plan Action Cœur de Ville, soit 222 communes un peu partout en France. Les investisseurs profiteront d’une déduction d’impôt pouvant aller de 12 % à 21 % s’ils acquièrent un bien dans l’une de ces villes, réalisent des travaux à hauteur de 25 % du montant total de l’opération, et mettent le logement en location pendant six à douze ans. Un plafond de loyer sera instauré et les locataires ne devront pas dépasser un certain niveau de ressources. L’adoucissement du régime des plus-values immobilières pour les non-résidents Article réservé à nos abonnés Lire aussi Construction de logements : les promoteurs accumulent retards et malfaçons C’est l’un des derniers amendements du projet de loi de finances. Les contribuables qui mettent en vente leur résidence principale en raison d’un départ hors de France profiteront d’une exonération sur la plus-value réalisée « à condition que cette dernière intervienne dans un délai normal, au plus tard à la fin de l’année qui suit le départ à l’étranger, et que l’immeuble soit inoccupé pendant ce délai », précisent les textes. Seules les transactions réalisées dans l’année 2019 sont concernées par cette mesure. Encore faut-il qu’elle soit retenue en l’état dans le projet de loi de finances de 2019. Le CITE et l’éco-PTZ prolongés Article réservé à nos abonnés Lire aussi Immobilier : les prix se stabilisent sauf à Paris et dans les métropoles attractives Après mûres réflexions des pouvoirs publics, le crédit d’impôt transition énergétique ne sera pas transformé en prime versée au moment des travaux. Le dispositif va se poursuivre jusqu’au 31 décembre 2019 et permettra ainsi de déduire de son impôt sur le revenu une partie des dépenses engagées pour rénover une résidence principale de plus de deux ans. L’éco-PTZ (prêt à taux zéro) aussi voit sa durée de vie augmenter, et ce jusqu’en 2021. Il sera d’ailleurs élargi dès le 1er mars 2019 avec une durée d’emprunt maximale portée à quinze ans et la possibilité de n’avoir qu’un seul projet de travaux pour y recourir. La location saisonnière encore plus contrôlée L’étau se resserre autour adeptes des plates-formes de location saisonnière comme Abritel ou Airbnb. Dès le 1er janvier 2019, ces sites auront l’obligation de transmettre l’ensemble des informations sur les revenus dégagés par les loueurs à l’administration fiscale. Certains instaureront également un décompte des nuitées afin de bloquer les propriétaires qui mettraient en location leur résidence principale plus de trois mois dans l’année.
30/12/2018
economie
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David Diop : « La France a construit l’image d’un tirailleur courageux, obéissant et parfois sanguinaire »
Auteur du roman « Frère d’âme », le lauréat du Goncourt des lycéens décrypte les représentations liées aux combattants africains pendant la première guerre mondiale.
L’écrivain David Diop, à Paris, le 20 septembre 2018. JOËL SAGET / AFP A 52 ans, David Diop a obtenu le très prescripteur prix Goncourt des lycéens pour son deuxième roman, Frère d’âme (Seuil). Un livre remarqué dès sa parution en août, en cette année du centenaire de la première guerre mondiale. L’écrivain né à Paris, qui a grandi au Sénégal, y suit la trajectoire d’Alfa Ndiaye, originaire, comme la famille paternelle de l’auteur, de Gandiol, au sud de Saint-Louis. Quand l’histoire commence, Alfa a perdu Mademba Diop, son ami d’enfance, son « plus que frère », tué par l’ennemi. Depuis, l’esprit du narrateur a comme vrillé. Il n’entend plus la voix de ses ancêtres et a décidé de faire ce que le capitaine Armand attend de lui : le soldat « chocolat », sauvage et sanguinaire. Avec son coupe-coupe, il se glisse dans les tranchées une fois la retraite sonnée, éventre l’adversaire aux yeux bleus, lui coupe une main et rapporte son butin à ses camarades. Ces derniers le célèbrent, puis, quand la septième main arrive, prennent peur. Avec sa concision, son style incantatoire qui évoque les griots, ses références subtiles aux poèmes d’Apollinaire ou de Senghor, le roman emporte indéniablement. En outre, rares sont les fictions qui donnent à entendre l’expérience vécue par les milliers de soldats colonisés lors de la Grande Guerre. Ce silence a inspiré David Diop, enseignant-chercheur à l’université de Pau, spécialiste des représentations européennes de l’Afrique et de l’Africain au siècle des Lumières. Un mois après le Goncourt des lycées, l’auteur évoque ses inspirations, sa méthode de travail, l’image et la mémoire des tirailleurs sénégalais en France et en Afrique, ainsi que les relations entre les deux espaces. Votre premier roman, 1889, l’Attraction universelle (L’Harmattan, 2012), imaginait une délégation africaine en France, attirée dans un cirque pour participer à un spectacle de nègres à Bordeaux. Quel a été le point de départ de ce travail ? David Diop : Il y a très longtemps, j’ai lu un numéro du Monde diplomatique construit par Pascal Blanchard et d’autres universitaires sur les zoos humains. En cherchant de la documentation sur les exhibitions, j’ai appris qu’il y avait eu un cirque en Allemagne, le cirque Hagenbeck, qui fut le premier à avoir fait venir des Ashanti en Europe. A cette époque commence à poindre un intérêt pour les cultures africaines, mais, en même temps, du fait de l’organisation de l’empire colonial, il faut que les colonisés restent des sujets et non des citoyens, il faut conserver une hiérarchie. J’ai voulu mettre à l’épreuve les regards qui s’affrontent à ce moment-là. Qu’est-ce qui vous a poussé, six ans plus tard, à écrire sur la première guerre mondiale ? « Il y a dans mon roman une part de ce que j’ai imaginé de la vie de mon arrière-grand-père. » Non seulement la lecture des lettres de poilus rassemblées par Jean-Pierre Guéno, mais aussi peut-être l’histoire de mon arrière-grand-père maternel, qui a été gazé à l’ypérite [gaz moutarde] lors de la Grande Guerre et qui n’a pas raconté grand-chose de son parcours. Son mutisme, qui a intrigué ma mère, a dû être celui de tous ces soldats traumatisés par la guerre qui n’ont pas voulu revivre leur calvaire en le racontant à leurs proches. Raconter, c’est revivre. Du coup, il me semble que même si Alfa Ndiaye est un tirailleur sénégalais venant de bien plus loin que les Landes, il y a peut-être dans mon roman une part de ce que j’ai imaginé de la vie de mon arrière-grand-père à la Grande Guerre. Article réservé à nos abonnés Lire aussi David Diop subvertit le centenaire de la première guerre mondiale Et du côté de votre père ? Du côté de mon père, il n’y a pas de tirailleur. Un de mes oncles, historien, vient de m’apprendre qu’il a interrogé dans sa jeunesse un ancien tirailleur d’une famille alliée à la nôtre qui a combattu en Grèce, à Mytilène. Il lui a raconté que les Turcs et les Grecs avaient très peur d’eux et que l’armée française en jouait. Ceci dit, Frère d’âme est une œuvre de pure fiction. Je me suis demandé s’il y avait des lettres de tirailleurs sénégalais qui ont la même intimité avec la guerre, qui expriment la même émotion que les lettres de poilus. Il n’y en a pas. Alors j’ai eu envie d’imaginer ce qu’avait pu être l’émotion d’un combattant paysan qui arrive d’Afrique de l’Ouest dans le grand théâtre de la guerre. Il n’existe aucune lettre de tirailleur sénégalais ? Si. Mais celles que j’ai trouvées étaient administratives. Il s’agit des lettres de tirailleurs sénégalais citoyens français car ils font partie des quatre communes [la loi Diagne du 29 septembre 1916 conférait aux habitants de Saint-Louis, Gorée, Rufisque et Dakar la pleine citoyenneté française]. Souvent très instruits, ils demandent par exemple le paiement des retards de solde. Toutefois, quelques-uns sont un peu plus explicites sur la dureté de la guerre. Dernièrement, j’ai découvert la lettre d’un tirailleur qui écrit à son petit frère : « Ne viens pas dans cet enfer-là. » Depuis la parution du livre, beaucoup de gens m’alimentent en témoignages et en travaux historiques. J’ai l’impression d’en apprendre beaucoup plus maintenant. Mais je ne souhaitais pas écrire un roman historique. J’ai voulu éviter de tomber dans un documentaire, pour arriver à la vérité des émotions de ces Africains – ou en tout cas de l’un d’entre eux. Comment, à l’époque, étaient représentés les tirailleurs sénégalais ? « Le tirailleur est pris entre deux feux, deux propagandes, l’allemande et la française. » En 1910, le général Charles Mangin écrit La Force noire, livre dans lequel il préconise l’utilisation de tirailleurs sénégalais en cas de conflit en Europe. Pour lui, ce sont des soldats féroces qui ont aidé à la colonisation. Ils viennent de sociétés nobiliaires d’Afrique de l’Ouest où la capacité guerrière est valorisée. Il ne reste plus qu’à construire l’image – et ce ne fut pas très difficile – d’un tirailleur sénégalais courageux, qui obéit aux ordres. Et qui peut être sanguinaire. L’armée française joue là-dessus pour terroriser les Allemands. On envoie parfois les tirailleurs sénégalais avec le coupe-coupe pour nettoyer les tranchées. Cela crée un passif très fort. L’Allemagne lance une contre-propagande qui met en scène un tirailleur sénégalais violent, sauvage, tout en accusant la France de négrifier son armée et d’introduire la barbarie en Europe. Le tirailleur est donc pris entre deux feux, deux propagandes, l’allemande et la française. Ce passif-là dure jusqu’à la seconde guerre mondiale puisque des tirailleurs sénégalais, dans bien des cas, sont tués, mitraillés sur le bord du chemin par des nazis au sein de l’armée allemande, sans autre forme de procès. Par la suite, les Allemands supportent très mal l’occupation de la Rhénanie en 1920 par les troupes coloniales. Pour eux, c’est une humiliation que des Nègres gardent la Rhénanie. Il y a tout un jeu de représentations négatives dans lequel le tirailleur est piégé. Enfin, une autre image exploitée est celle du grand enfant. C’est logique. Nous sommes dans l’empire colonial et il faut maintenir une hiérarchie des races et justifier une mission civilisatrice. Senghor le voit dans les affiches « Y’a bon Banania ». Il le dit dans le poème liminaire du recueil Hosties noires (1948) : « Je déchirerai les rires banania sur tous les murs de France. » Vous avez vécu entre la France et le Sénégal. Quelles mémoires ces pays conservent-ils des tirailleurs sénégalais ? Je pense que dans l’inconscient collectif en France, le tirailleur sénégalais est courageux. Quand je suis arrivé en France dans les années 1980 pour mes études supérieures, j’ai eu l’occasion de rencontrer à plusieurs reprises des personnes qui me racontaient que leur père avait été ramené blessé mais sauf vers les lignes arrières grâce au courage d’un tirailleur sénégalais. La grande histoire ne parle pas trop de la fraternisation qui a dû exister entre les troupes issues de la métropole et celles de son empire colonial. Il n’est pas simple de la quantifier. La solidarité des troupes prises dans la grande misère de la guerre a dû permettre à plus de métropolitains qu’on ne le croit de dépasser leurs préjugés racistes. « Des tirailleurs ne gagnaient que 5 euros par mois à la fin de leur vie, d’où un sentiment d’injustice. » Quand j’étais au collège et au lycée à Dakar, tout ce que j’entendais autour de cette question des tirailleurs sénégalais était lié à une forme de ressentiment. Longtemps les associations d’anciens combattants tirailleurs se sont battues pour faire connaître leurs droits. Et puis dans les années 1960, au moment où les pays d’Afrique noire prennent leur indépendance, les soldes ont été indexées sur un rapport fiduciaire de 1960, ce qui fait que des tirailleurs ne gagnaient que 5 euros par mois à la fin de leur vie. Cela a créé un sentiment d’injustice. Et en même temps, dans certaines familles, puisqu’on est dans des sociétés nobiliaires, il y a une fierté d’avoir participé à travers leur arrière-grand-père à cette guerre-là. Qu’avez-vous pensé de l’hommage rendu par les présidents français et malien aux troupes coloniales ? J’en ai eu écho par mon ami Alain Mabanckou, qui était invité à l’inauguration du monument aux Héros de l’armée noire, le 6 novembre à Reims. J’ai trouvé que c’était une belle initiative. Beaucoup de gens que je rencontre ignorent l’existence des tirailleurs sénégalais. C’est important de savoir que, quand la France avait un empire colonial, les tirailleurs sénégalais ont participé à l’effort de guerre et ont payé l’impôt du sang. Et du rapport sur la restitution du patrimoine africain ? La restitution est une excellente chose. Beaucoup d’objets ont été emportés, et pas simplement en Afrique. Cela peut être très intéressant pour les populations qui n’ont pas vu ces objets de les contempler chez elles. Comprenez-vous ceux qui craignent de voir les musées français se vider ? Les musées français que je fréquente sont très fournis. Je ne pense pas qu’on pourra les vider d’un coup. D’autre part, si les Etats africains le souhaitent – j’ai entendu parler du Bénin, qui se réjouit de récupérer ces œuvres –, on peut leur faire confiance pour en organiser la conservation de façon tout à fait correcte. Après, à charge pour ceux qui sont intéressés par ces objets de venir, pour une fois, les admirer en Afrique. En tant que Franco-Sénégalais et enseignant chercheur, que vous inspire la hausse des frais d’inscription à l’université pour les étudiants non européens ? Je regrette que la France fasse le choix d’élever les droits d’inscription dans des proportions qui interdiront à beaucoup d’étudiants d’Afrique francophone, qui venaient traditionnellement dans les universités françaises, de poursuivre leurs études ici. Depuis longtemps, cela crée des liens ou en entretient. En général, les étudiants africains les plus fortunés se tournent vers les pays anglo-saxons, où les droits d’inscription sont beaucoup plus élevés. La France avait donc une spécificité. C’est dommage de fermer l’université, qui a vocation à être ouverte au monde entier. Et cela pourrait dégrader les relations futures de la France avec le continent africain.
30/12/2018
afrique
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Comment une artiste féministe s’est invitée dans les communautés en ligne hostiles
Depuis 2012, l’Américaine Angela Washko s’est confrontée à la communauté des joueurs de « World of Warcraft » mais aussi à certains groupes masculinistes sur la question du sexisme et du harcèlement.
arcèlement. C’est vendredi et vous tentez de rejoindre des amis dans votre bar préféré. Le lieu est populaire et la salle bondée. Vous cherchez votre meilleure amie mais ne l’apercevez pas. Peut-être a-t-elle du retard, alors vous commandez au bar. Tandis que vous tournez dans la foule pour tenter de la trouver, vous réalisez que six hommes vous bouchent complètement la vue. Vous ne pouvez pas les éviter. Vous croisez accidentellement le regard de l’un d’entre eux. De taille moyenne, jean skinny et chemise noire, il avance avec aisance et vous fixe intensément du regard. Puis, il intime dans un ton faussement amical : « Hey ! » Avant que vous ne puissiez réagir, il vous attrape le bras et tente de vous faire tourner et vous dit : « Tourne ! » Ce n’est pas une demande, c’est un ordre. Toujours retenue avec poigne, vous devez réagir. Que faites-vous ? Vous souriez et l’autorisez à vous faire tourner ; Vous esquivez doucement et bizarrement pour ne pas l’embarrasser ; Vous secouez votre tête pour dire non et vous échappez de lui ; Vous riez bruyamment à son encontre et faites des bonds. Ainsi démarre, en résumé, le jeu vidéo The Game mis au point par l’artiste et activiste américaine Angela Washko. Selon ce que vous cocherez, Julien – c’est le nom du personnage – adaptera son jeu de « séduction ». Un écran à choix multiples qui conduit le joueur sur les différents scénarios de drague de « The Game ». THE GAME A. WASHKO Etudier les gourous de la drague Tout au long du scénario à choix multiples, qui vous conduira à la possibilité de le repousser physiquement ou à accepter ses avances, Julien se montrera pressant, peut-être agressif, vous touchera sans consentement. Les situations, comme Julien, ne relèvent pas de la fiction. Julien Blanc est un « pick-up artist », un soi-disant artiste de la drague, qui prodigue et monnaye ses conseils auprès d’une communauté d’hommes, soudée en ligne. Angela Washko s’est basée sur ses méthodes comme celles de cinq autres gourous de la séduction pour mettre au point son jeu vidéo. Le nom, The Game, s’inspire d’ailleurs de celui d’un best-seller rédigé par l’un de leurs pionniers : Neil Strauss, comme l’explique l’artiste, par ailleurs professeure assistante d’art à la prestigieuse université de Carnegie Mellon de Pittsburgh (Etats-Unis). Lors d’une conférence au 35e Chaos Communication Congress, la grand-messe annuelle des hackeurs qui se tient à Leipzig (Allemagne) jusqu’au 30 décembre, la féministe trentenaire a expliqué comment elle a régulièrement investi des communautés en ligne, réputées hostiles envers les femmes. C’est dans le jeu multijoueur en ligne World of Warcraft (WOW) qu’Angela Washko a trouvé un premier projet. « J’y ai joué pendant plusieurs années, depuis 2006, et je me sentais frustrée de voir que mon expérience n’était pas la même que celles des joueurs hommes. Le nombre d’entre eux me sollicitant de façon agressive pour des relations sexuelles du moment où ils comprenaient que j’étais une femme me mettait incroyablement mal à l’aise. Et j’en avais marre qu’on me dise de rentrer dans ma cuisine préparer des sandwichs aux joueurs masculins », explique-t-elle. De 2012 à 2016, elle décide donc de se servir de son expérience et de l’appliquer à cet espace public virtuel pour s’adresser directement aux joueurs et comprendre pourquoi cette communauté pouvait s’avérer homophobe, misogyne et raciste. Elle fonde alors The Council on Gender Sensitivity and Behavioral Awareness in World of Warcraft, que l’on pourrait traduire par le conseil sur la sensibilisation à la problématique hommes-femmes et à l’éveil des comportements. Elle arrête de pourfendre les ennemis et troque les quêtes du jeu contre une tout autre mission : se déplacer de ville en ville virtuelle, utiliser les fenêtres de discussion entre joueurs pour aborder la question de l’exclusion des personnes appartenant à des minorités, du harcèlement. « Je souhaitais comprendre comment il se faisait que les biais du quotidien étaient si ancrés dans un monde fantasy comme celui que représente WOW où vous pouvez incarner des orques, des trolls et bien plus. » Se rapprocher du « plus infâme misogyne » Angela Washko, lors de sa présentation au CCC de Leipzig. CAPTURE D'ECRAN En parallèle, Angela Washko commence à s’intéresser à celui qui avait été désigné « le plus infâme misogyne du Web », Roosh V, blogueur et prétendu artiste de la drague, héraut de la manosphère qui passe son temps à voyager à travers le monde pour enseigner aux hommes comment outrepasser les barrières linguistiques et culturelles pour coucher avec des femmes. En résulte les « bangs », une dizaine de guides de voyage centrés sur les relations sexuelles : « Bang, Day Bang, Bang Iceland, Bang Estonia, Bang Poland », égrène, non sans soupirer, Angela Washko lors de sa présentation. L’Américain dont de nombreuses publications en ligne ont été retirées par les plates-formes essuie de vives critiques pour son antiféminisme, sa promotion de la culture du viol mais aussi d’accusations d’antisémitisme. « Après avoir lu énormément de ses écrits et passé du temps au sein de sa communauté, une chose m’a frappée. Le point de vue des femmes qu’il a séduites n’est jamais exposé, malgré les méthodes intrusives qu’il utilise », explique également Angela Washko. Elle tente donc dans un premier temps de mettre en place des appels à témoins pour retrouver les conquêtes. « Au fil des recherches, Roosh V m’apparaît comme une personne plus complexe qu’il n’y paraît. Plutôt que de simplement jeter la lumière sur ses méthodes, j’ai essayé d’en savoir plus sur ses tactiques, ses motivations personnelles et l’attraction que lui et ses techniques exercent sur sa communauté de fans grandissante. » Pendant plusieurs mois, elle tente de solliciter un tchat vidéo avec lui. Roosh V se laisse convaincre et accorde une interview de deux heures à Angela Washko qui doit se mettre en situation de « soumission », de candeur pour ne pas froisser l’interviewé. Un entretien abracadabrant qu’elle retranscrira en intégralité en ligne et dont elle offre un extrait lors de sa présentation au Chaos Communication Congress. [Angela] « Tu as mentionné dans ton e-mail que ton orgasme est d’une importance primordiale. [Roosh] – Absolument. [Angela] – Et que tu ne leur fais pas de cunnilingus. C’est ça ? [Roosh] – Oui. [Angela] – (Rires.) Puis-je demander pourquoi ? [Roosh] – Parce que la nature a jugé l’orgasme masculin plus important. Si, à l’heure actuelle, un nuage magique de gaz entoure la terre et infecte les filles et les empêche d’avoir à nouveau un orgasme féminin, l’espèce humaine continuera. Mais si ce nuage de gaz n’affectait que les hommes et empêchait l’orgasme masculin, que se passerait-il ? L’espèce humaine est terminée. C’est foutu. C’est donc la nature, pas moi, la nature qui a déclaré que l’orgasme masculin est essentiel à la vie ! Mais l’orgasme féminin est comme une cerise sur le gâteau. Si elle l’obtient, c’est génial ! Miam miam. Mais sinon, ce n’est pas grave. Donc je suis juste… Je crois en ce que la nature a dit à ce sujet. Et ils ont dit que l’orgasme masculin est extrêmement important. » Au départ enthousiastes, Roosh V et sa communauté prennent ombrage des échos négatifs de cet échange dans les médias anglophones. Ses fans harcèlent en ligne Angela Washko, profèrent des menaces de viol et de mort, tentent de la discréditer auprès de collègues ou de proches. Lors de sa présentation, Angela Washko a partagé un aperçu de sa conversation avec Roosh V en 2015. CAPTURE D'ECRAN Se glisser dans la peau des conquêtes Selon l’activiste féministe, le dérapage du deuxième projet tient aussi à une différence notable qu’elle n’avait pas immédiatement réalisée : « Ma position dans ces deux espaces. Dans WOW, j’étais reconnaissable comme une joueuse de haut niveau avec des années d’expérience. Un membre de la communauté engagée pour le jeu. Dans la manosphère, je serais toujours une outsider. » Ce qui la conduit à changer de méthode pour la réalisation de son jeu vidéo The Game. En mettant au point ce simulateur de rencontre à choix multiples, l’artiste ne se met plus au centre de l’expérience mais crée une coquille pour que les gens expérimentent et comprennent l’idéologie de la manosphère sans avoir à y passer autant de temps qu’elle, à devoir développer des stratégies pour l’infiltrer. Mais aussi d’en montrer toutes les variantes. « Il y a tant de sous-communautés, de langages spécifiques, de tactiques difficiles à affronter », ajoute-t-elle. « Tous les dialogues du jeu sont construits mot à mot à partir de leurs propos, écrits, recommandations tirées de leurs livres, sites Web, DVD, conférences mais aussi des situations tirées de leurs enregistrements vidéo », explique Angela Washko. Chaque interaction avec un des personnages montre comment ils parviennent à aborder, isoler, approcher physiquement leurs conquêtes jusqu’à obtenir un rapport sexuel. Mais aussi comment, finalement, ces hommes se copient entre eux. « Il faut bien comprendre qu’ils vendent leur comportement et leurs recommandations comme la méthode à suivre pour obtenir du succès, pour réussir », explique l’artiste. « C’est pour cela que, quand j’ai construit le jeu, je ne voulais pas nécessairement que l’unique fin soit de pouvoir leur échapper. Je voulais que les gens puissent voir à quoi ressemble une conquête réussie dans l’idée de chacun de ces hommes. » Une des situations dans lesquelles peut se retrouver le joueur. Ici, il éprouve la technique de séduction de Neil Strauss. THE GAME A. WASHKO En compilant des dialogues qui tiendraient dans un livre d’au minium 400 pages, Angela Washko souhaitait « non seulement pointer le danger de ces techniques mais aussi montrer l’absurdité de ces tactiques ». Comme quand, par exemple, pour badiner, Roosh V parle de cultiver des laitues bio ou que Julien évoque régulièrement les films de vampire Twilight. D’abord présenté en avant-première entre janvier et avril 2018 au Museum of the Moving Image de New York, le jeu a reçu un prix au festival IndieCade du jeu vidéo indépendant. Angela Washko espère surtout pouvoir le proposer plus largement sur des plates-formes vidéoludiques.
30/12/2018
pixels
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Bangladesh : la première ministre Hasina remporte les législatives, l’opposition proteste
La coalition de Sheikh Hasina a obtenu dimanche 288 des 300 sièges du Parlement, a annoncé le secrétaire de la Commission électorale. L’opposition dénonce des fraudes.
La première ministre du Bangladesh, Sheikh Hasina, vote dans la capitale Dacca, le dimanche 30 décembre. - / AFP La première ministre sortante du Bangladesh, Sheikh Hasina, 71 ans, a largement remporté les élections législatives du 30 décembre, décrochant son quatrième mandat à la tête du gouvernement en vingt-deux ans, selon les résultats officiels annoncés dans la nuit de dimanche à lundi et rejetés par l’opposition qui dénonce des fraudes. La coalition de Sheikh Hasina a obtenu 288 des 300 sièges du Parlement monocaméral contre six seulement au principal parti d’opposition, a indiqué dans la nuit de dimanche à lundi le secrétaire de la Commission électorale, Helal Uddin Ahmed. Mais il n’est pas exclu que les résultats puissent provoquer lundi des réactions violentes dans le contexte d’un scrutin marqué par la mort de dix-sept personnes et une situation politique des plus volatiles. Au Bangladesh, les périodes électorales sont toujours tendues et la dérive autoritaire de la « Ligue Awami », le parti au pouvoir, n’aura rien fait pour arranger les choses : le Parti national du Bangladesh (BNP), principale formation de la coalition de l’opposition, a affirmé que 10 400 de ses membres et de ses activistes ont été arrêtés depuis que le scrutin a été annoncé, le 8 novembre. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Fin de campagne dans la violence au Bangladesh La présidente du BNP, la « Begum » Khaleda Zia, qui ne cesse de « s’échanger » le pouvoir avec sa rivale Sheikh Hasina depuis le retour à la démocratie en 1990, purge par ailleurs depuis février une peine de prison de cinq ans pour corruption. Et l’opposition dénonce déjà des fraudes électorales et de multiples intimidations de ses candidats et supporters, affirmant qu’un « climat de peur » a été instauré par les nervis du régime en place. Quant au chef de la coalition, le vieux juriste et ex-ministre Kamal Hossain, qui fut un proche allié de la première ministre avant de se retourner contre elle, a dénoncé le 21 décembre, lors d’une conférence de presse, « un niveau de harcèlement sans précédent et contraire à la Constitution ». Un rythme de croissance sans précédent La troisième victoire consécutive de la Ligue Awami, le parti symbole de l’indépendance arrachée au Pakistan en 1971, pourrait cependant illustrer un autre type de réalité, d’ordre socio-économique celle-là : depuis 2009, date de l’accession au pouvoir de la première ministre, – elle a aussi été à la tête du gouvernement entre 1996 et 2001 –, le « pays des Bangladais » (Bangladesh) a connu un rythme de croissance sans précédent (7,8 % cette année). Sous son « règne », la dérive antidémocratique aura été de pair avec la chute de l’extrême pauvreté, tendance enclenchée depuis une vingtaine d’années : cet indicateur est passé de 34,3 % à 12,9 % entre l’an 2000 et 2016, selon la Banque mondiale. Pas mal pour un jeune pays qui était encore, au tournant du siècle, l’un des plus miséreux de la planète et dont la population (169 millions d’habitants) est la nation la plus densément peuplée du monde. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Bangladesh, la répression s’intensifie à l’approche des élections « Je considère que les droits de l’Homme, c’est d’être capable de fournir assez à manger, des emplois et des soins médicaux [aux Bangladais] », a déclaré Sheikh Hasina lors d’une interview au New York Times. Défiante à l’égard des accusations croissantes de comportement autoritaire à son encontre, Mme Hasina a dit à son fils, qui l’a répété et vient d’être cité par l’Agence Reuters, qu’elle considérait « comme une marque d’honneur d’être accusée d’autoritarisme par les médias étrangers ». Son fils Sajeeb Wazed a plus tard précisé que cette provocante déclaration était une référence au fait que l’ancien premier ministre singapourien, Lee Kuan Yew, était lui aussi taxé de tyran quand il conduisait son pays sur les voies de la prospérité… « Encore plus autoritaire » Le Bangladesh fait aussi face depuis une dizaine d’années à d’autres évolutions : non seulement celles de l’islamisation et de la bigoterie, mais aussi celles de la violence de type djihadiste – même si ce pays à 90 % musulman pratiquait encore récemment un Islam tolérant influencé par la mystique du soufisme. Les dirigeants du BNP ont ainsi choisi de capitaliser sur le désir religieux en affichant, de longue date, leur proximité avec le parti fondamentaliste Jamaat-e-islami. Une formation accusée de crimes de guerre durant la guerre d’indépendance contre le Pakistan, au début des années 1970 – entre 1947 et 1971, le Bangladesh s’appelait « Pakistan oriental », conséquence de la partition de l’empire des Indes britanniques. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Bangladesh : les islamistes en embuscade avant les élections générales Les accusations de disparitions forcées et de tortures aux mains des forces paramilitaires bangladaises concernent d’ailleurs surtout les membres de cette organisation islamiste, que le parti au pouvoir a fait interdire en 2013. La Ligue Awami, dont le fondateur et père de l’actuelle première ministre, Sheikh Mujibur Rahman, qui fut le premier chef de gouvernement du Bangladesh indépendant avant d’être assassiné en 1975, avait opté pour un Bangladesh laïque et tolérant à l’égard des minorités hindoues, chrétiennes ou bouddhistes. Mais l’islamisation croissante du pays a conduit le parti au pouvoir à instrumentaliser, lui aussi, cette demande religieuse en donnant des gages à certains lobbies des milieux islamo-conservateurs. La question de la place de l’Islam dans la société et de ses rapports avec l’Etat est ainsi devenue centrale dans le débat électoral, confirmant un affaissement réel du sécularisme originel. Le scrutin du 30 décembre revient ainsi pour certains observateurs à choisir « entre deux maux » : c’est ce que pense Iftekhar Zaman, directeur de l’ONG « Transparency international » pour le Bangladesh. Il n’est pas optimiste pour la suite des événements : « si Mme Hasina gagne un nouveau mandat », affirme-t-il, « elle deviendra encore plus autoritaire qu’elle ne l’était déjà ». Voir aussi Au moins douze personnes sont mortes dimanche en marge des législatives au Bangladesh
30/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/30/elections-au-bangladesh-victoire-attendue-de-la-premiere-ministre-hasina_5403702_3210.html
De plus en plus de migrants traversent la Manche sur des bateaux de fortune
Près de 500 migrants ont tenté la traversée, très dangereuse, depuis deux mois. Les autorités britanniques accusent la France de les laisser passer.
Un bateau de réfugiés intercepté par la marine nationale française au large de Calais, le 25 décembre. MARINE NATIONALE / AP Depuis deux mois, des centaines de migrants, majoritairement iraniens, ont tenté de traverser la Manche sur des canots pneumatiques pour rejoindre le Royaume-Uni, poussant le ministre de l’intérieur britannique, Sajid Javid, à déclarer un « incident majeur » et à rentrer précipitamment de ses vacances dimanche 30 décembre. Après un échange téléphonique avec son homologue français, Christophe Castaner, il a annoncé un renforcement de la surveillance des plages et de la mer. Les Britanniques vont notamment financer des drones et des caméras pour surveiller la dizaine de points d’embarquement qui a été identifiée en France. Le nombre de passages de migrants reste limité et n’a rien à voir avec ce qu’il se passe dans la Méditerranée. Selon le décompte du ministère de l’intérieur français, 443 personnes ont tenté la traversée cette année, dont la moitié a atteint les eaux britanniques. Mais le phénomène est nouveau, explique Ingrid Parrot, porte-parole de la préfecture maritime de la Manche : « En 2017, on a compté treize tentatives de traversée et jusqu’en octobre de cette année, on était sur le même ordre de grandeur. Depuis, cela augmente de façon exponentielle. » Ces derniers jours sont venus le démontrer. Quarante migrants ont été secourus sur cinq canots pneumatiques différents le jour de Noël, trois l’ont été le lendemain, vingt-trois le surlendemain, douze encore le jour d’après… Nouvelles filières de passeurs Le mode opératoire est presque toujours le même. Les migrants tentent le passage sur de gros canots pneumatiques à moteur, qui ne sont pas équipés pour la traversée des trente-trois kilomètres qui séparent Calais et Douvres. Beaucoup se lancent de nuit. Les risques sont énormes, au regard du très important trafic de ferrys. La police britannique compare cela « à traverser le [périphérique] à pied à l’heure de pointe ». Matt Coaker, un pêcheur britannique, a vu pour la première fois un canot pneumatique avec quatre migrants en septembre. « Il y avait quatre personnes (…) à la dérive depuis un moment, qui n’avaient pas de moteur et juste quelques rames », témoigne-t-il à la BBC. « Ils voulaient désespérément un peu d’eau, un peu à manger, et juste atteindre la terre sèche. » Depuis, ce genre de rencontres s’est multiplié. « Ce n’est pas la norme, mais ça devient presque commun », poursuit-il. Pour le ministère de l’intérieur, cette soudaine augmentation des traversées vient du travail « de gangs criminels organisés ». En novembre, la BBC avait envoyé un journaliste iranien, se faisant passer pour un migrant, dans les camps près de Calais et de Dunkerque. Un homme, affirmant être un ancien pêcheur iranien lui avait proposé un passage par bateau pour trois mille livres (3 327 euros).
30/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/30/de-plus-en-plus-de-migrants-traversent-la-manche-sur-des-bateaux-de-fortune_5403699_3210.html
Pirater des sextoys connectés, une partie de plaisir
Un nombre important de failles de sécurité informatique pourraient mettre en péril la vie privée de certains utilisateurs et certaines utilisatrices de jouets sexuels.
En matière de sécurité, les sextoys connectés font plus trembler de peur que vibrer de plaisir. Werner Schober, consultant en sécurité informatique autrichien, en a apporté une nouvelle preuve lors du 35e Chaos Communication Congress, grand rassemblement annuel de hackeurs, qui se clôture dimanche 30 décembre à Leipzig (Allemagne). Ce spécialiste, qui a publié en février les résultats de ses travaux sur ce sujet, entend mettre en lumière les enjeux en matière d’Internet des objets. « J’ai choisi une catégorie d’objets dont les vulnérabilités auraient des conséquences critiques », explique en préambule le conférencier. En se penchant sur trois modèles de sextoys connectés – deux Chinois et un Allemand –, il a mis en évidence « un abysse de failles » et prouvé la négligence des fabricants de sextoys en matière de sécurité. « Certaines failles pourraient véritablement affecter la vie privée des utilisateurs », précise le spécialiste. Une liste de détenteurs sans protection Lors de sa démonstration à Leipzig, Werner Schober s’est concentré sur l’un des trois produits, le Vibratissimo Panty Buster, fabriqué en Allemagne et commercialisé aux alentours de 40 euros. Un vibromasseur connecté, qui se glisse dans la culotte et que les utilisateurs et utilisatrices peuvent activer via une application ou le Bluetooth sur leur smartphone servant de télécommande. Lors de son enquête, à l’aide d’un simple fichier de configuration sur le site Web du fabricant, le chercheur a pu accéder à une base de données interne dans laquelle figurait des données personnelles telles que le nom ou l’adresse des utilisateurs. Des photos intimes, partagées par des centaines d’utilisateurs sur le petit réseau social proposé en parallèle de ce sextoy, étaient même facilement accessibles en ligne. Le modèle de sextoy allemand au cœur de la présentation et des inquiétudes de Werner Schober. Vibratissimo.com Une prise de contrôle à distance possible Le spécialiste a également démontré qu’il était possible pour un tiers de prendre le contrôle à distance du sextoy. L’application mobile permet de générer un lien, qui, envoyé par e-mail ou SMS, permet à un ou une complice de faire vibrer son sextoy à distance. Le chercheur a découvert qu’il suffisait de modifier ce lien pour faire vibrer des culottes inconnues au hasard. Par ailleurs, la connexion Bluetooth n’étant pas suffisamment sécurisée, quiconque se trouvant à proximité d’un sextoy peut s’y connecter via son smartphone et l’activer. Et le spécialiste de soulever une question délicate : un contrôle à distance et sans consentement d’un sextoy peut-il s’apparenter à du viol ? Il se demande ainsi, sans répondre, comment les législations pénales prendraient en compte ces cas de figure. Le spécialiste s’est rapproché du fabricant pour signaler les failles afin qu’il les corrige. Si ce dernier s’est exécuté, les sextoys n’ont pas été pour autant totalement sécurisés. En effet, le système d’exploitation ne pouvant être mis à jour à distance, les détenteurs et détentrices auraient dû les renvoyer à l’usine.
30/12/2018
pixels
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/12/30/pirater-des-sextoys-connectes-une-partie-de-plaisir_5403696_4408996.html
La playlist 2018 de la rédaction du « Monde.fr »
Jorja Smith, MGMT, Flavien Berger, Janelle Monae… Sélection (purement subjective) des chansons qui ont marqué cette année selon nos journalistes.
Flavien Berger, Kiddy Smile, Jorja Smith, Janelle Monae, MGMT... La rédaction du « Monde.fr » a concocté sa sélection (purement subjective) des chansons qui ont marqué l’année 2018. MONTAGE PHOTO Vous avez entendu une ritournelle lors du repas de Noël, mais impossible de la retrouver ? Vous voulez ambiancer la soirée de la Saint-Sylvestre avec de récents tubes français ou des pépites électro plus rares ? La rédaction du Monde.fr peut vous aider. Plusieurs membres de notre équipe ont réfléchi aux chansons qui ont marqué leur année 2018 et vous proposent leur sélection complètement subjective de dix morceaux. Les albums de l’Anglaise Jorja Smith, du groupe new-yorkais MGMT, l’Américaine « Chan » Marshall alias Cat Power, mais aussi du chanteur français Flavien Berger, sont parmi ceux qui ont le plus fait vibrer les casques au 80, boulevard Auguste-Blanqui. Le bipolaire This Is America du rappeur Childish Gambino, comme les tubes I Like That et PYNK de l’Américaine Janelle Monae, ou encore Burn the House Down de l’artiste producteur Kiddy Smile, sont également revenus à plusieurs reprises. Le lecteur Spotify ci-dessous rassemble les titres qui nous semblaient immanquables. Bonne écoute à vous. Et voici, dans le désordre, les choix des journalistes qui ont participé à l’élaboration de cette playlist. – Romain Geoffroy : Beach House – Black Car Jon Hopkins – Emerald Rush Damso – Ipséité Blood orange – Charcoal Baby Denzel Curry – TABOO | TA13OO – Pauline Croquet : Childish Gambino – This Is America Slaves – Magnolia Nova Twins – Hit Girl Idles – Danny Nedelko Rise of The Northstar – Nekketsu –Michaël Szadkowski : Travis Scott – SICKO MODE Nine Inch Nails – God Break Down The Door Eminem (feat. Joyner Lucas) – Lucky You Migos (feat. Drake) – Walk It Talk It Drake – Nonstop – Brice Laemle : Flavien Berger & Etienne Jaumet – Arco Iris Tyler, the creator & A$AP Rocky – Potato Salad Delgres – Mr President Mitski – Nobody Lewis OfMan – Yes – Olivier Clairouin : Bicep – Opal (Four Tet Remix) Peggy Fou – It Makes You Forget (Itgehane) Lone – Smoke Signals Pressyes – Summertime Nick Mulvey – Dancing For The Answers – Audrey Fournier : Gorillaz – Hollywood Chris – Damn dis–moi Rejie Snow – The Rain Lomepal/Alt–J – 3WW Cat Power – Stay – Philippe Lecœur : Nils Frahm – All Melody Fever Ray – Mustn’t Hurry Parra for Cuva – While You Sleep Jorja Smith – Don’t Watch Me Cry Daniel Blumberg – The Bomb – Pierre Bouvier : Parquet Courts – Almost Had To Start A Fight/In And Out Of Patience MorMor– Heaven’s Only Wishful Kurt Vile – Bassackwards Earl Sweatshirt – The Mint DJ Chelou rend hommage à Charles Aznavour – Boobaznavour – Cécile Bouanchaud : Flavien Berger – 99999999 Polo & Pan – Arc–en–ciel Angele & Romeo Elvis – Tout oublier Rejjie Snow – Egyptian Luv Kokoroko – Abusey Junction – Allan Kaval : Clara Luciani – La grenade Perez – Niki Vendredi sur Mer – Ecoute Chérie Marie–Henri – On voyage Fred Nevché – L’Océan –Florian Reynaud : Rita Ora – Falling To Pieces Deafheaven – Worthless Animal Aya Nakamura – La Dot Carpenter Brut – Leather Teeth Carly Rae Jepsen – Party For One – Nicolas Lepeltier : Feu Chatterton ! – Ginger Radio Elvis – 23 Minutes Arctic Monkeys – Tranquility Base Hotel + Casino MGMT – Little Dark Age The Good Bad and the Queen – Merrie Land – Olivier Laffargue : Tamino – Cigar Twenty One Pilots – Nico And The Niners Interpol – The Rover Calexico – Eyes Wide Awake Winston Mc Anuff – My Angel – Pierre Trouvé : Aphex Twin – T69 Collapse JPEGMAFIA – Puff Daddy Etienne Jaumet – Nuclear War Masayoshi Fujita – Book of Life Thom Yorke – Suspirium Et vous, quelles chansons ont marqué votre année 2018 ? Lire aussi Tous nos albums préférés de 2018
30/12/2018
big-browser
https://www.lemonde.fr/big-browser/article/2018/12/30/la-playlist-2018-de-la-redaction-du-monde-fr_5403693_4832693.html
Migrants : l’Etat français accusé de « mise en danger délibérée » par plusieurs associations
Quatorze associations dénoncent « la faillite de l’Etat » dans la protection et la mise à l’abri des migrants, dans une tribune publiée dimanche dans « Le JDD ».
« A ce jour, nous ne pouvons que constater la faillite de l’Etat dans l’exercice de sa responsabilité de protection, de mise à l’abri et d’accueil inconditionnel », écrivent quatorze associations dans une lettre ouverte adressée au président de la République. Des membres d’une ONG donnent à manger à des migrants kurdes à Grande-Synthe, le 11 avril 2017. PHILIPPE HUGUEN / AFP La charge à l’encontre d’Emmanuel Macron et de l’Etat français est lourde. Celle-ci est à la hauteur de la colère exprimée par les associations qui travaillent auprès des migrants. Médecins du monde, le Secours catholique et douze autres associations accusent l’Etat français de « mise en danger délibérée » des migrants, dans une tribune publiée le 30 décembre par Le Journal du dimanche. « A ce jour, nous ne pouvons que constater la faillite de l’Etat dans l’exercice de sa responsabilité de protection, de mise à l’abri et d’accueil inconditionnel », écrivent les associations dans une lettre ouverte adressée au président de la République. Que cela soit « à Paris, en Ile-de-France, mais aussi à Grande-Synthe, sur le littoral nord, ailleurs », le sort des migrants « confine à une mise en danger délibérée » critiquent les associations, qui exigent des réponses « à la hauteur de la situation d’urgence ». « Toujours plus de difficultés à se nourrir et à se soigner » Au début de son mandat, le 27 juillet 2017, le chef de l’Etat avait promis de ne plus avoir « d’ici la fin de l’année des hommes et des femmes dans les rues, dans les bois ». « Un an après, des milliers de personnes, femmes, hommes, enfants, familles, se partagent les interstices des villes, s’abritent sous des échangeurs, sont échoués sur les trottoirs de Paris et de son immédiate périphérie », souligne le texte, avant de pointer « la réalité des personnes vivant à la rue parmi les rats nous démontre à quel point cette politique est un échec ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Migrants à la rue : « Ils sont dans une errance infinie » Dix-huit mois après l’engagement d’Emmanuel Macron de n’avoir plus personne à la rue fin 2017, les quatorze associations appellent à un « changement de cap » : Monsieur le président, votre engagement (…) a été vite oublié par votre gouvernement, votre majorité, vos services. Plus grave, par vous-même. Les représentants de Médecins du monde France, du Secours catholique-Caritas France, d’Emmaüs France, de la Ligue des droits de l’homme et de divers collectifs et associations venant en aide aux migrants déplorent également que les personnes à la rue « ont toujours plus de difficultés à se nourrir, à se soigner, à trouver une information fiable pour faire valoir leurs droits élémentaires ».
30/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/30/migrants-l-etat-francais-accuse-de-mise-en-danger-deliberee-par-plusieurs-associations_5403675_3224.html
Ce qu’on nous avait annoncé pour 2018 et qui ne s’est pas produit
L’année 2018 devait voir arriver l’ordinateur « exascale », la lune de miel sur Mars et la fusion nucléaire… mais ça a raté.
« La prédiction est un exercice très compliqué, spécialement quand elle concerne le futur », plaisantait le physicien Niels Bohr. Et relever les prédictions passées qui ont raté est une gourmandise à laquelle il est difficile de résister. Les Décodeurs ont donc passé en revue dix grands événements qui devaient marquer l’année 2018… mais n’ont pas eu lieu. 1. L’informatique devait franchir en 2018 une étape décisive, avec la mise au point du premier ordinateur « exascale », capable de franchir le cap de l’« exaflop », c’est-à-dire d’effectuer un milliard de milliards d’opérations par seconde. La Darpa (Defense Advanced Research Projects Agency), la prestigieuse agence de recherche de l’armée américaine, s’était fixé cet objectif il y a huit ans, mais elle ne l’a toujours pas atteint. Et les Chinois sont bien partis pour ravir la victoire aux Américains dans cette course à la puissance, version moderne de la guerre des étoiles : Pékin devrait officiellement lancer son premier supercalculateur exascale en 2020, deux ans avant les Etats-Unis. Tianhe 3, the world's first exascale #supercomputer, is expected to be completed by 2020. https://t.co/mBFNBKotuz — ChinaDaily (@China Daily) 2. L’EPR de Flamanville n’a pas ouvert en 2018 – pas plus qu’en 2017, en 2016, en 2014 ou en 2012. Le chantier de cette centrale nucléaire de nouvelle génération dans la Manche accumule les déboires et les retards depuis son lancement en 2007. L’objectif de mise en service est désormais fixé à la fin 2019. Ces reports à répétition empêchaient jusqu’à présent la fermeture des vieux réacteurs nucléaires de Fessenheim, mais Emmanuel Macron a décidé de dissocier le sort des deux centrales, en promettant l’arrêt de Fessenheim en 2020. 3. Un nouveau télescope géant de 42 mètres devait partir à la recherche de nouvelles exoplanètes dès 2018 : mais l’Extremely Large Telescope est toujours en chantier dans le désert d’Atacama, au Chili, et son miroir de 39 mètres de diamètre ne sera pas opérationnel avant 2024. Il faudra donc attendre encore un peu pour « révolutionner notre perception de l’Univers, bien plus que ne le fit Galilée il y a quatre cents ans », comme le promet l’Observatoire européen austral, principal architecte du projet. L’Extremely Large Telescope tel qu’imaginé par l’Observatoire européen austral. L. CALCADA / AFP 4. Le téléphone à écran 3D était annoncé comme la prochaine grande révolution mobile au tournant des années 2010. Le cabinet DisplaySearch prédisait une explosion de cette technologie en 2018, avec 71 millions de smartphones équipés à travers le monde. Force est de constater qu’on en est encore loin. Les téléphones capables d’afficher des images en trois dimensions sans lunettes sont encore peu nombreux sur le marché et déçoivent les spécialistes, même si la 3D fait toujours fantasmer les amateurs de nouvelles technologies. 5. Une sonde européenne devait se poser sur Mars en 2018, pour chercher de nouvelles traces de matières organiques. Mais le lancement du programme ExoMars 2018 a été reporté de deux ans. La faute à la NASA, qui a arrêté de soutenir le projet pour des raisons budgétaires. La mission a finalement été sauvée grâce à un accord de l’Agence spatiale européenne avec la Russie, mais repoussée à 2020… et rebaptisée ExoMars 2020. 6. 2018 ne sera pas non plus l’année du premier voyage en amoureux dans le ciel de la planète Mars, comme l’avait promis il y a cinq ans le millionnaire américain Dennis Tito, qui fut lui-même le premier touriste autorisé à rejoindre la Station spatiale internationale. Le coût exorbitant d’un tel projet a eu raison des ambitions de M. Tito, qui a dû rapidement abandonner l’idée, après avoir échoué à convaincre la NASA d’investir 700 millions de dollars. Que les rêveurs se rassurent : le flambeau a été repris par le milliardaire californien Elon Musk, qui proclame depuis quelques années qu’il sera le premier à envoyer des hommes sur Mars. Dans l’une de ses déclarations chocs dont il a le secret, le fondateur de SpaceX a estimé à 70 % les chances qu’il foule un jour lui-même le sol de la Planète rouge (après un voyage qui sera probablement sans retour). Le scepticisme affiché par les scientifiques ne l’a pas empêché d’annoncer l’installation d’une base martienne d’ici 2028. 7. Le projet ITER, un réacteur expérimental à fusion nucléaire en construction à Cadarache (Bouches-du-Rhône) depuis 2010, devait commencer à fonctionner en 2018. Mais les retards se sont accumulés, et la production du premier plasma est désormais prévue pour décembre 2025. Ce projet très ambitieux ne devrait pas apporter de sitôt de solution miracle au défi énergétique criant qui se pose à l’humanité : la première fusion nucléaire ne devrait pas intervenir avant 2035, et une éventuelle commercialisation de l’électricité ainsi produite arriverait au mieux en 2060, pour un coût total du projet approchant les 20 milliards d’euros. Une maquette du futur réacteur nucléaire ITER, exposée en 2005 sur le site du CEA de Cadarache. BORIS HORVAT / AFP 8. Le Grand Paris Express, un nouveau métro automatique qui relie entre elles les villes de la banlieue parisienne, devait progressivement entrer en service à partir de 2018. Mais de multiples difficultés politiques et techniques ont retardé le chantier, qui n’a véritablement commencé qu’en 2016. Cette nouvelle « ligne 15 » ne sera donc pas ouverte avant 2025, et même 2030 pour les tronçons est et ouest. 9. Les tours Duo accusent également un retard, toutefois moins impressionnant : ces nouveaux gratte-ciel imaginés par l’architecte Jean Nouvel devraient être inaugurés dans le 13e arrondissement de Paris en 2020, au lieu de 2018. 10. Les nazis de l’espace réfugiés sur la face cachée de la Lune depuis la fin de la guerre ne sont pas revenus sur terre pour se venger en 2018, contrairement à ce que dépeignait le scénario du film culte Iron Sky.
30/12/2018
les-decodeurs
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/12/30/ce-qu-on-nous-avait-annonce-pour-2018-et-qui-ne-s-est-pas-produit_5403670_4355770.html
Niger : une quinzaine de djihadistes tués par les forces françaises et l’armée nigérienne
Pour Paris, l’opération démontre l’efficacité de la coopération de la France avec les pays du G5 Sahel.
Des soldats de la force « Barkhane » à Tillit, frontière entre le Niger et le Mali, 1er novembre 2017. DAPHNE BENOIT/AFP L’Etat-major français a annoncé, dimanche 30 décembre, que la force « Barkhane » et l’armée nigérienne, avaient abattu une quinzaine de djihadistes dans la nuit de jeudi à vendredi, lors d’une action conjointe. « Un raid aérien combiné de chasseurs et d’hélicoptères Tigre a, dans un premier temps, frappé les différents points de regroupement des groupes armés terroristes situés dans une zone d’un rayon d’une quinzaine de kilomètres », précise-t-il dans un communiqué. Le porte-parole de l’Etat-major des armées françaises, le colonel Patrik Steiger a précisé à l’Agence France-Presse qu’il s’agissait vraisemblablement de membres de l’organisation « Etat islamique dans le Grand Sahara » (EIGS). L’opération s’est, ensuite, poursuivie au sol. les militaires nigériens et français notamment des commandos parachutistes et de montagne, appuyés par des hélicoptères français, se sont emparés « des différentes positions avant de conduire une fouille complète de toute la zone pendant les quarante-huit heures qui ont suivi ». En plus du bilan humain, une vingtaine de motos ont été saisies, ainsi que des armes et des munitions. Aucune perte en vies humaines ou matérielles n’est à déplorer côté nigérien et français, a assuré le ministère nigérien de la défense. Opération franco-nigérienne Le raid est intervenu au nord-ouest de Tongo Tongo, village du sud-ouest du Niger, à environ 175 kilomètres au nord de Niamey, où une patrouille de militaires américains et nigériens avait été la cible le 4 octobre 2017 d’une embuscade meurtrière de combattants de l’Etat islamique dans le Grand Sahara (EIGS). A Paris, on estime que l’opération démontre l’efficacité de la force conjointe transfrontalière du G5 Sahel, créée en juillet 2017 par le Niger, le Mali, le Tchad, le Burkina Faso, la Mauritanie. Sur Twitter, la ministre française des armées, Florence Parly a salué la montée en puissance des armées alliées en son sein. Il s’agissait toutefois d’une opération strictement franco-nigérienne qui n’a pas associé la force antidjihadiste conjointe du G5 Sahel. Cette force, qui suscite beaucoup d’attentes, a subi un coup d’arrêt brutal après l’attaque de son QG le 29 juin au Mali et doit reprendre ses opérations au début 2019. Un exemple d'opération conjointe réussie à l'Ouest du Niger : militaires nigériens et français (opération Barkhane)… https://t.co/n6zsJmvSdf — florence_parly (@Florence Parly) Article réservé à nos abonnés Lire aussi Sahel : l’opération « Barkhane » contrainte de s’adapter
30/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/30/niger-une-quinzaine-de-djihadistes-tues-par-les-forces-francaises-et-l-armee-nigerienne_5403665_3212.html
Franchouillarde et consternante « Deutsch-les-Landes »
Cette série proposée par Amazon Prime Video narre de manière ridicule un choc des cultures entre Français et Allemands.
Marie-Anne Chazel et Sylvie Testud dans la série « Deustch-les-Landes ». AMAZON PRIME VIDEO Amazon Prime Video, à la demande, série Netflix avait ouvert la voie avec la création de séries « locales » dans certains pays disposant des droits d’accès et de diffusion de la plate-forme mondiale de vidéo à la demande par abonnement. En France, cela avait mené à un beau ratage, avec Marseille (2016-2018), abandonné après deux saisons calamiteuses. Voici qu’Amazon Video, dont les contenus sont réservés aux abonnés « Prime » du géant de la distribution en ligne, lance à son tour une série made in France, ou presque, car, ainsi que l’indique son titre, Deustch-les-Landes est une coproduction franco-allemande. Jiscalosse est un charmant Trifouilly-les-Oies du Sud-Ouest. Sa maire (Marie-Anne Chazel) essaie de trouver des revenus pour éponger les dettes de sa commune. Elle rencontre le patron d’une entreprise allemande qui s’attache au village et décide d’y transplanter le quartier général de son affaire. Du jour au lendemain, quelque 200 Allemands débarquent à Jiscalosse. Ce qui ne manque pas de créer le choc des cultures qu’on imagine – jusqu’à une guerre de tranchées entre les deux communautés et la constitution d’une résistance à l’ennemi qu’on pourra trouver d’un goût discutable. Surjeu permanent Ce cliché ressassé serait plaisant s’il était traité avec drôlerie et imagination et si Amazon avait proposé une version multilingue où les Allemands parlent leur langue. Alors que ceux-ci sont doublés en français sans accent, on les entend néanmoins s’essayer à des exercices de diction sur « Les chaussettes de l’archiduchesse… ». A lire sur ses lèvres, Sylvie Testud, qui joue le rôle d’une professeure d’allemand, s’exprime parfois dans cette langue. Mais elle se double elle-même en français, y compris quand elle essaie d’impressionner les hôtes par quelques citations littéraires dans le texte… Depuis le moment où nous avons visionné les épisodes en version française, la seule alors disponible, une « version originale » a été ajoutée. Mais demeurent le surjeu permanent des acteurs, le grotesque des situations et des dialogues au long de dix épisodes qui restent sur l’estomac. De sorte que la crétinerie de Deutsch-les-Landes ferait presque passer la série Marseille de Netflix pour le chef-d’œuvre d’un Scorsese des calanques. Deustch-les-Landes, créée et réalisée par Denis Dercourt. (Fr.-All., 2018, 10 × 26 min). www.primevideo.com
30/12/2018
televisions-radio
https://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2018/12/30/franchouillarde-et-consternante-deutsch-les-landes_5403658_1655027.html
Inde : quinze mineurs en danger de mort, une opération de sauvetage en cours
Les secours ont mis plus de deux semaines à intervenir, provoquant la colère sur les réseaux sociaux.
Des secouristes sur le site de la mine de charbon de Kson, dans l’Etat du Meghalaya, le 14 décembre 2018. Sannio Siangshai / AP Au fond d’une mine de charbon indienne, quinze hommes ont été pris au piège. Et le peu d’empressement que montrent les autorités indiennes pour les secourir efficacement a fait scandale. Le 13 décembre, l’eau d’une rivière, dont le cours est proche de la mine, s’est déversée dans les galeries de cette exploitation illégale de l’Etat de Meghalaya, dans le nord-est du pays condamnant potentiellement les mineurs qui y travaillaient. Depuis, ils n’ont donné aucun signe de vie et ce n’est que deux semaines plus tard, le dimanche 30 décembre, que la marine indienne a lancé une opération de secours adaptée en envoyant sur place quatorze plongeurs. Les familles des hommes pris au piège se raccrochent à l’espoir qu’ils aient pu trouver refuge dans une poche d’air. En 2012, un incident similaire avait causé la mort de quinze mineurs dont les corps n’ont jamais été retrouvés. Deux ans plus tard, un tribunal indien avait interdit les mines de charbon sauvages dans l’Etat de Meghalaya après des plaintes de militants écologistes dénonçant les risques pour la sécurité des mineurs, ainsi qu’une grave pollution de l’eau. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Inde, la chasse aux défenseurs de l’environnement Mines illégales Mais en raison de recours devant la Cour suprême de la part de propriétaires de mines et des autorités de cet Etat, cette pratique a perduré : les habitants extraient illégalement du charbon à l’aide de moyens sommaires en perçant des trous sur le flanc des collines puis en creusant de petits tunnels horizontaux pour atteindre des veines de charbon. L’incapacité des autorités à organiser le sauvetage des mineurs a provoqué de vives réactions. Great country India exports scientists and disaster experts across the globe but unable to put resources together t… https://t.co/SmtQaI1npA — meipat (@patricia mukhim) Sur les réseaux sociaux, la lenteur des secours a été comparée à l’exceptionnelle mobilisation de cet été, en Thaïlande, pour sauver douze enfants et leur entraîneur de football piégés dans une grotte.
30/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/30/inde-quinze-mineurs-en-danger-de-mort-une-operation-de-sauvetage-en-cours_5403654_3210.html
Comment réguler l’exploitation de notre attention ?
En passant d’une innovation médiatique l’autre, des journaux à la radio, de la télé à l’internet, Tim Wu, professeur de droit, tisse une très informée histoire du rapport de l’exploitation commerciale de l’information et du divertissement.
Dans Les marchands d’attention (The Attention Merchants, 2017, Atlantic Books, non traduit), le professeur de droit, spécialiste des réseaux et de la régulation des médias, Tim Wu (@superwuster), 10 ans après avoir raconté l’histoire des télécommunications et du développement d’internet dans The Master Switch (où il expliquait la tendance de l’industrie à créer des empires et le risque des industries de la technologie à aller dans le même sens), raconte, sur 400 pages, l’histoire de l’industrialisation des médias américains et de la publicité de la fin du XIXe siècle à aujourd’hui. En passant d’une innovation médiatique l’autre, des journaux à la radio, de la télé à l’internet, Wu tisse une très informée histoire du rapport de l’exploitation commerciale de l’information et du divertissement. Une histoire de l’industrialisation des médias américains qui se concentre beaucoup sur leurs innovations et leurs modèles d’affaires, c’est-à-dire qui s’attarde à montrer comment notre attention a été convertie en revenus, comment nous avons été progressivement cédés à la logique du commerce – sans qu’on n’y trouve beaucoup à redire d’ailleurs. La compétition pour notre attention n’a jamais cherché à nous élever, au contraire Tout le long de cette histoire, Tim Wu insiste particulièrement sur le fait que la capture attentionnelle produite par les médias s’est faite par-devers nous. La question attentionnelle est souvent présentée comme le résultat d’une négociation entre l’utilisateur, le spectateur, et le service ou média qu’il utilise… mais aucun d’entre nous n’a jamais consenti à la capture attentionnelle, à l’extraction de son attention. Il souligne notamment que celle-ci est plus revendue par les médias aux annonceurs, qu’utilisée par les médias eux-mêmes. Il insiste également à montrer que cette exploitation vise rarement à nous aider à être en contrôle, au contraire. Elle ne nous a jamais apporté rien d’autre que toujours plus de contenus insignifiants. Des premiers journaux à 1 cent au spam publicitaire, l’exploitation attentionnelle a toujours visé nos plus vils instincts. Elle n’a pas cherché à nous élever, à nous aider à grandir, à développer nos connaissances, à créer du bien commun, qu’à activer nos réactions les plus instinctives. Notre exploitation commerciale est allée de pair avec l’évolution des contenus. Les journaux qui ont adopté le modèle publicitaire, ont également inventé des rubriques qui n’existaient pas pour mieux les servir : comme les faits divers, les comptes-rendus de procès, les récits de crimes… La compétition pour notre attention dégrade toujours les contenus, rappelle Tim Wu. Elle nous tourne vers « le plus tapageur, le plus sinistre, le plus choquant, nous propose toujours l’alternative la plus scandaleuse ou extravagante ». Si la publicité a incontestablement contribué à développer l’économie américaine, Wu rappelle qu’elle n’a jamais cherché à présenter une information objective, mais plutôt à déformer nos mécanismes de choix, par tous les moyens possibles, même par le mensonge. L’exploitation attentionnelle est par nature une course contre l’éthique. Elle est et demeure avant tout une forme d’exploitation. Une traite, comme disait le spécialiste du sujet Yves Citton, en usant volontairement de ce vocabulaire marqué au fer. Wu souligne que l’industrie des contenus a plus été complice de cette exploitation qu’autre chose. La presse par exemple, n’a pas tant cherché à contenir ou réguler la publicité et les revenus qu’elle générait, qu’à y répondre, qu’à évoluer avec elle, notamment en faisant évoluer ses contenus pour mieux fournir la publicité. Les fournisseurs de contenus, les publicitaires, aidés des premiers spécialistes des études comportementales, ont été les courtiers et les ingénieurs de l’économie de l’attention. Ils ont transformé l’approche intuitive et improvisée des premières publicités en machines industrielles pour capturer massivement l’attention. Wu rappelle par exemple que les dentifrices, qui n’existaient pas vraiment avant les années 20, vont prendre leur essor non pas du fait de la demande, mais bien du fait de l’offensive publicitaire, qui s’est attaquée aux angoisses inconscientes des contemporains. Plus encore que des ingénieurs de la demande, ces acteurs ont été des fabricants de comportements, de mœurs… L’histoire de l’exploitation de notre attention souligne qu’elle est sans fin, que « les industries qui l’exploitent, contrairement aux organismes, n’ont pas de limite à leur propre croissance ». Nous disposons de très peu de modalités pour limiter l’extension et la croissance de la manipulation attentionnelle. Ce n’est pas pour autant que les usagers ne se sont pas régulièrement révoltés, contre leur exploitation. « La seule dynamique récurrente qui a façonné la course des industries de l’attention a été la révolte ». De l’opposition aux premiers panneaux publicitaires déposés en pleine ville au rejet de services web qui capturent trop nos données ou exploitent trop notre attention, la révolte des utilisateurs semble avoir toujours réussi à imposer des formes de régulations. Mais l’industrie de l’exploitation attentionnelle a toujours répondu à ces révoltes, s’adaptant, évoluant au gré des rejets pour proposer toujours de nouvelles formes de contenus et d’exploitation. Parmi les outils dont nous nous sommes dotés pour réguler le développement de l’économie de l’attention, Wu évoque trop rapidement le travail des associations de consommateurs (via par exemple le test de produits ou les plaintes collectives…) ou celui des régulateurs définissant des limites au discours publicitaire (à l’image de la création de la Commission fédérale du commerce américaine et notamment du bureau de la protection des consommateurs, créée pour réguler les excès des annonceurs, que ce soit en améliorant l’étiquetage des produits ou en interdisant les publicités mensongères comme celles, nombreuses, ventant des produits capables de guérir des maladies). Quant à la concentration et aux monopoles, ils ont également toujours été surveillés et régulés, que ce soit par la création de services publics ou en forçant les empires des médias à la fragmentation. L’attention, un phénomène d’assimilation commercial et culturel L’invention du prime time à la radio puis à la télé a été à la fois une invention commerciale et culturelle, fusionnant le contenu au contenant, l’information/divertissement et la publicité en inventant un rituel d’attention collective massive. Il n’a pas servi qu’à générer une exposition publicitaire inédite, il a créé un phénomène social, une conscience et une identité partagée, tout en rendant la question de l’exposition publicitaire normale et sociale. Dans la succession des techniques qu’ont inventés les médias de masse pour mobiliser et orienter les foules que décrit Tim Wu, on constate qu’une sorte de cycle semble se reproduire. Les nouvelles technologies et les nouveaux formats rencontrent des succès très rapides. Puis, le succès rencontre des résistances et les audiences se délitent vers de nouvelles techniques ou de nouveaux formats proposés par des concurrents. On a l’impression d’être dans une course poursuite où chaque décennie pourrait être représentée par le succès d’un support phare à l’image des 28 courts chapitres qui scandent le livre. L’essor de la télévision par exemple est fulgurant : entre 1950 et 1956 on passe de 9% à 72% des maisons équipées et à la fin des années 50, on l’a regarde déjà 5 heures par jour en moyenne. Les effets de concentration semblent très rapides… et dès que la fatigue culturelle pointe, que la nouveauté s’émousse, une nouvelle vague de propositions se développe à la fois par de nouveaux formats, de nouvelles modalités de contrôle et de nouveaux objets attentionnels qui poussent plus loin l’exploitation commerciale des publics. Patiemment, Wu rappelle la très longue histoire des nouveaux formats de contenus : la naissance des jeux, des journaux télé, des soirées spéciales, du sport, des feuilletons et séries, de la télé-réalité aux réseaux sociaux… Chacun ayant généré une nouvelle intrication avec la publicité, comme l’invention des coupures publicitaires à la radio et à la télé, qui nécessitaient de réinventer les contenus, notamment en faisant monter l’intrigue pour que les gens restent accrochés. Face aux outils de révolte, comme l’invention de la télécommande ou du magnétoscope, outils de reprise du contrôle par le consommateur, les industries vont répondre par la télévision par abonnement, sans publicité. Elles vont aussi inventer un montage plus rapide qui ne va cesser de s’accélérer avec le temps. Pour Wu, toute rébellion attentionnelle est sans cesse assimilée. Même la révolte contre la communication de masse, d’intellectuels comme Timothy Leary ou Herbert Marcuse, sera finalement récupérée. De l’audience au ciblage La mesure de l’audience a toujours été un enjeu industriel des marchands d’attention. Notamment avec l’invention des premiers outils de mesure de l’audimat permettant d’agréger l’audience en volumes. Wu prend le temps d’évoquer le développement de la personnalisation publicitaire, avec la socio-géo-démographie mise au point par la firme Claritas à la fin des années 70. Claritas Prizm, premier outil de segmentation de la clientèle, va permettre d’identifier différents profils de population pour leur adresser des messages ciblés. Utilisée avec succès pour l’introduction du Diet Coke en 1982, la segmentation publicitaire a montré que la nation américaine était une mosaïque de goûts et de sensibilités qu’il fallait adresser différemment. Elle apporte à l’industrie de la publicité un nouvel horizon de consommateurs, préfigurant un ciblage de plus en plus fin, que la personnalisation de la publicité en ligne va prolonger toujours plus avant. La découverte des segments va aller de pair avec la différenciation des audiences et la naissance, dans les années 80, des chaînes câblées qui cherchent à exploiter des populations différentes (MTV pour la musique, ESPN pour le sport, les chaînes d’info en continu…). L’industrie du divertissement et de la publicité va s’engouffrer dans l’exploitation de la fragmentation de l’audience que le web tentera de pousser encore plus loin. Wu rappelle que la technologie s’adapte à ses époques : « La technologie incarne toujours l’idéologie, et l’idéologie en question était celle de la différence, de la reconnaissance et de l’individualité ». D’un coup le spectateur devait avoir plus de choix, plus de souveraineté… Le visionnage lui-même changeait, plus inattentif et dispersé. La profusion de chaînes et le développement de la télécommande se sont accompagnés d’autres modalités de choix comme les outils d’enregistrements. La publicité devenait réellement évitable. D’où le fait qu’elle ait donc changé, devenant plus engageante, cherchant à devenir quelque chose que les gens voudraient regarder. Mais dans le même temps, la télécommande était aussi un moyen d’être plus branché sur la manière dont nous n’agissons pas rationnellement, d’être plus distraitement attentif encore, à des choses toujours plus simples. « Les technologies conçues pour accroître notre contrôle sur notre attention ont parfois un effet opposé », prévient Wu. « Elles nous ouvrent à un flux de sélections instinctives et de petites récompenses »… En fait, malgré les plaintes du monde de la publicité contre la possibilité de zapper, l’état d’errance distrait des spectateurs n’était pas vraiment mauvais pour les marchands d’attention. Dans l’abondance de choix, dans un système de choix sans friction, nous avons peut-être plus perdu d’attention qu’autre chose. L’internet a démultiplié encore, par de nouvelles pratiques et de nouveaux médiums, ces questions attentionnelles. L’e-mail et sa consultation sont rapidement devenus une nouvelle habitude, un rituel attentionnel aussi important que le prime time. Le jeu vidéo dès ses débuts a capturé toujours plus avant les esprits. « En fin de compte, cela suggère aussi à quel point la conquête de l’attention humaine a été incomplète entre les années 1910 et les années 60, même après l’entrée de la télévision à la maison. En effet, même s’il avait enfreint la sphère privée, le domaine de l’interpersonnel demeurait inviolable. Rétrospectivement, c’était un territoire vierge pour les marchands d’attention, même si avant l’introduction de l’ordinateur domestique, on ne pouvait pas concevoir comment cette attention pourrait être commercialisée. Certes, personne n’avait jamais envisagé la possibilité de faire de la publicité par téléphone avant même de passer un appel – non pas que le téléphone ait besoin d’un modèle commercial. Ainsi, comme AOL qui a finalement opté pour la revente de l’attention de ses abonnés, le modèle commercial du marchand d’attention a été remplacé par l’un des derniers espaces considérés comme sacrés : nos relations personnelles. » Le grand fournisseur d’accès des débuts de l’internet, AOL, a développé l’accès aux données de ses utilisateurs et a permis de développer des techniques de publicité dans les emails par exemple, vendant également les mails de ses utilisateurs à des entreprises et leurs téléphones à des entreprises de télémarketing. Tout en présentant cela comme des « avantages » réservés à ses abonnés ! FB n’a rien inventé ! « La particularité de la modernité repose sur l’idée de construire une industrie basée sur la demande à ressentir une certaine communion ». Les célébrités sont à leur tour devenues des marchands d’attention, revendant les audiences qu’elles attiraient, à l’image d’Oprah Winfrey… tout en transformant la consommation des produits qu’elle proposait en méthode d’auto-récompense pour les consommateurs. L’infomercial a toujours été là, souligne Wu. La frontière entre divertissement, information et publicité a toujours été floue. La télé-réalité, la dernière grande invention de format (qui va bientôt avoir 30 ans !) promettant justement l’attention ultime : celle de devenir soi-même star. Le constat de Wu est amer. « Le web, en 2015, a été complètement envahi par la malbouffe commerciale, dont une grande partie visait les pulsions humaines les plus fondamentales du voyeurisme et de l’excitation. » L’automatisation de la publicité est le Graal : celui d’emplacements parfaitement adaptés aux besoins, comme un valet de chambre prévenant. « Tout en promettant d’être «utile» ou «réfléchi», ce qui a été livré relevait plutôt de «l’intrusif» et pire encore. » La télévision – la boîte stupide -, qui nous semblait si attentionnellement accablante, paraît presque aujourd’hui vertueuse par rapport aux boucles attentionnelles sans fin que produisent le web et le mobile. Dans cette histoire, Wu montre que nous n’avons cessé de nous adapter à cette capture attentionnelle, même si elle n’a cessé de se faire à notre détriment. Les révoltes sont régulières et nécessaires. Elles permettent de limiter et réguler l’activité commerciale autour de nos capacités cognitives. Mais saurons-nous délimiter des frontières claires pour préserver ce que nous estimons comme sacré, notre autonomie cognitive ? La montée de l’internet des objets et des wearables, ces objets qui se portent, laisse supposer que cette immixtion ira toujours plus loin, que la régulation est une lutte sans fin face à des techniques toujours plus invasives. La difficulté étant que désormais nous sommes confrontés à des techniques cognitives qui reposent sur des fonctionnalités qui ne dépendent pas du temps passé, de l’espace ou de l’emplacement… À l’image des rythmes de montage ou des modalités de conception des interfaces du web. Wu conclut en souhaitant que nous récupérions « la propriété de l’expérience même de la vie ». Reste à savoir comment… Comment répondre aux monopoles attentionnels ? Tim Wu – qui vient de publier un nouveau livre The Curse of Bigness : antitrust in the new Gilded age (La malédiction de la grandeur, non traduit) – prône, comme d’autres, un renforcement des lois antitrusts américaines. Il y invite à briser les grands monopoles que construisent les Gafam, renouvelant par là la politique américaine qui a souvent cherché à limiter l’emprise des monopoles comme dans le cas des télécommunications (AT&T), de la radio ou de la télévision par exemple ou de la production de pétrole (Standard Oil), pour favoriser une concurrence plus saine au bénéfice de l’innovation. À croire finalement que pour lutter contre les processus de capture attentionnels, il faut peut-être passer par d’autres leviers que de chercher à réguler les processus attentionnels eux-mêmes ! Limiter le temps d’écran finalement est peut-être moins important que limiter la surpuissance de quelques empires sur notre attention ! La règle actuelle pour limiter le développement de monopoles, rappelle Wu dans une longue interview pour The Verge, est qu’il faut démontrer qu’un rachat ou une fusion entraînera une augmentation des prix pour le consommateur. Outre, le fait que c’est une démonstration difficile, car spéculative, « il est pratiquement impossible d’augmenter les prix à la consommation lorsque les principaux services Internet tels que Google et Facebook sont gratuits ». Pour plaider pour la fragmentation de ces entreprises, il faudrait faire preuve que leur concentration produit de nouveaux préjudices, comme des pratiques anticoncurrentielles quand des entreprises absorbent finalement leurs concurrents. Aux États-Unis, le mouvement New Brandeis (qui fait référence au juge Louis Brandeis acteur majeur de la lutte contre les trusts) propose que la régulation favorise la compétition. Pour Wu par exemple, la concurrence dans les réseaux sociaux s’est effondrée avec le rachat par Facebook d’Instagram et de WhatsApp. Et au final, la concurrence dans le marché de l’attention a diminué. Pour Wu, il est temps de défaire les courtiers de l’attention, comme il l’explique dans un article de recherche qui tente d’esquisser des solutions concrètes. Il propose par exemple de créer une version attentionnelle du test du monopoleur hypothétique, utilisé pour mesurer les abus de position dominante, en testant l’influence de la publicité sur les pratiques. Pour Tim Wu, il est nécessaire de trouver des modalités à l’analyse réglementaire des marchés attentionnels. Dans cet article, Wu s’intéresse également à la protection des audiences captives, à l’image des écrans publicitaires des pompes à essence qui vous délivrent des messages sans pouvoir les éviter où ceux des écrans de passagers dans les avions… Pour Wu, ces nouvelles formes de coercition attentionnelle sont plus qu’un ennui, puisqu’elles nous privent de la liberté de penser et qu’on ne peut les éviter. Pour lui, il faudrait les caractériser comme un « vol attentionnel ». Certes, toutes les publicités ne peuvent pas être caractérisées comme telles, mais les régulateurs devraient réaffirmer la question du consentement souligne-t-il, notamment quand l’utilisateur est captif ou que la capture cognitive exploite nos biais attentionnels sans qu’on puisse lutter contre. Et de rappeler que les consommateurs doivent pouvoir dépenser ou allouer leur attention comme ils le souhaitent. Que les régulateurs doivent chercher à les protéger de situations non consensuelles et sans compensation, notamment dans les situations d’attention captive ainsi que contre les intrusions inévitables (celles qui sont augmentées par un volume sonore élevé, des lumières clignotantes, etc.). Ainsi, les publicités de pompe à essence ne devraient être autorisées qu’en cas de compensation pour le public (par exemple en proposant une remise sur le prix de l’essence)… Wu indique encore que les réglementations sur le bruit qu’ont initié bien des villes peuvent être prises pour base pour construire des réglementations de protection attentionnelle, tout comme l’affichage sur les autoroutes, également très réglementé. Pour Tim Wu, tout cela peut sembler peut-être peu sérieux à certain, mais nous avons pourtant imposé par exemple l’interdiction de fumer dans les avions sans que plus personne aujourd’hui n’y trouve à redire. Il est peut-être temps de prendre le bombardement attentionnel au sérieux. En tout cas, ces défis sont devant nous, et nous devrons trouver des modalités pour y répondre, conclut-il. Hubert Guillaud
30/12/2018
blog
http://internetactu.blog.lemonde.fr/2018/12/27/comment-reguler-lexploitation-de-notre-attention/
« Le rapport aux images pornographiques est fait de répétitions et de surprises »
Florian Vörös, chercheur spécialisé en études de genre, en sexualité et en médias numériques, analyse les motivations du visionnage de contenus pornographiques.
Selon Florian Vörös, « une même image pornographique peut susciter à la fois du plaisir, du dégoût et de la lassitude, successivement ou simultanément ». (Photo : "Eros plastiques", d’Olivier Coulange/Agence VU). Olivier Coulange/Agence VU Florian Vörös est maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’université de Lille. Il est l’auteur d’une thèse de sociologie sur « Les usages sociaux de la pornographie en ligne et les constructions de la masculinité » (2015). Article réservé à nos abonnés Lire aussi Fin de partie pour le porno à l’ancienne Se lasse-t-on du porno, et si oui, pourquoi ? Une même image pornographique peut susciter à la fois du plaisir, du dégoût et de la lassitude, successivement ou simultanément. Ces sentiments ne sont pas exclusifs. Ils sont le plus souvent mêlés les uns aux autres, comme le souligne la théoricienne des affects et des médias Susanna Paasonen. Aussi, les motivations du visionnage de pornographie sont extrêmement variées : lutter contre l’ennui, le désœuvrement, pallier une sexualité jugée insuffisante, renforcer une relation amoureuse, s’informer, interroger ses sensations et ses fantasmes, rencontrer des partenaires sexuels, etc., comme le montrent les résultats de l’enquête Pornresearch.org. Cette étude montre aussi qu’une majorité du public accorde une faible importance à la pornographie. Les personnes passionnées sont minoritaires. Quand devient-on « trop vieux » pour le porno ? Les groupes d’âge qui déclarent la fréquence de visionnage la plus élevée dans l’enquête Pornresearch.org sont les 18-25 ans et les plus de 65 ans. Parmi les femmes, un clivage générationnel apparaît : les 18-25 ans investissent nettement plus la pornographie que les femmes plus âgées. Les femmes et les hommes plus jeunes invoquent en priorité les items suivants pour rendre compte de leur usage de pornographie : « parce que je suis excité·e », « quand je n’ai rien de mieux à faire », « quand je m’ennuie », « quand je n’arrive pas à me détendre ou à dormir » et « pour rire ». Les plus âgés invoquent en priorité les motifs : « je veux prendre part au monde du sexe », « pour me reconnecter avec mon corps », « pour voir reconnus mes désirs sexuels », « pour trouver des histoires qui théâtralisent le sexe » et « pour voir des choses que je ne peux pas faire ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Payer pour du sexe revient encore souvent à être perçu comme un pervers » Le porno parvient-il à réactiver notre intérêt ? Le rapport aux images pornographiques est à la fois fait de répétitions et de surprises. Les stéréotypes de la disponibilité sexuelle des femmes et de la virilité brute des hommes organisent les fantasmes pornographiques les plus visibles sur les grandes plates-formes de streaming et les plus récurrents dans les enquêtes auprès des publics. La pornographie est en effet un divertissement basé sur l’érotisation des stéréotypes sociaux dominants de chaque époque, de chaque société. Toutefois, la manière dont ces sons et ces images résonnent en nous n’est jamais tout à fait prévisible. Il y a toujours du jeu, de l’incertitude et de la créativité dans la réception des vidéos pornos. Des hommes hétérosexuels m’ont, par exemple, raconté comment leur intérêt pour la pornographie les a progressivement ouverts à une sensibilité homoérotique, alors que la sexualité gay suscitait initialement du dégoût chez eux.
30/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/30/le-rapport-aux-images-pornographiques-est-fait-de-repetitions-et-de-surprises_5403648_4497916.html
La popularité planétaire du foulard palestinien
« Le keffieh palestinien est aujourd’hui porté dans le monde entier, y compris par des icônes de la mode », souligne l’historien Jean-Pierre Filiu.
Le keffieh palestinien, foulard traditionnel des paysans et des Bédouins, est aujourd’hui porté dans le monde entier, y compris par des icônes de la mode. Porté lors d’un défilé Balenciaga par la top model Behati Prinsloo Magazines de mode et sites spécialisés s’intéressent régulièrement au keffieh palestinien, qu’il soit porté en foulard, comme ci-dessus, ou que son motif inspire robes, vestes, ceintures ou short. Le paradoxe n’est pas mince de voir cette pièce de coton, dont les paysans arabes se recouvraient le visage pour se protéger du vent, du soleil et du sable, récupérée désormais par les fashionistas et autres adeptes du street style. L’histoire contemporaine du keffieh n’en mérite que plus d’être racontée, même sommairement. UN SYMBOLE DU NATIONALISME PALESTINIEN Les notables palestiniens portaient volontiers, au début du XXème siècle, le chapeau occidental ou le tarbouche ottoman. C’est l’incapacité de ces élites urbaines à résister à la fois à la domination britannique et à l’expansion sioniste qui a alimenté, de 1936 à 1939, la « Grande Révolte arabe » en Palestine. Ouverte par six mois de grève générale, cette mobilisation anti-coloniale s’est radicalisée en guérilla venue des campagnes pour s’implanter, en 1938, jusque dans la vieille ville de Jérusalem. Les diplomates français notent alors que « des ordres mystérieusement transmis ont interdit aux Arabes de porter le tarbouche. La coiffure de tout patriote conscient doit dorénavant être celle des Bédouins, le koufié (sic) ». Le paysan palestinien défendant sa terre est ainsi exalté par le keffieh à motifs noirs sur fond blanc, un renversement de la hiérarchie sociale que le Fatah et les autres mouvements fedayines reprennent dans les années 60 pour nourrir leur propagande révolutionnaire. Dans la Jordanie voisine, le général britannique qui avait établi la « Légion arabe » choisit pour en distinguer les combattants le keffieh à motifs rouges. C’est pourquoi la guerre palestino-jordanienne du « Septembre Noir » voit en 1970 s’affronter keffiehs noirs et rouges. Et c’est le keffieh noir sur fond blanc qu’arbore Yasser Arafat à la tribune de l’ONU, lorsqu’il y est invité en 1974 comme chef de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Symbole des fedayines durant les crises du Liban et l’invasion israélienne de ce pays, en 1982, le keffieh devient l’attribut obligé des manifestants qui défient l’occupation israélienne, de 1988 à 1993, en Cisjordanie et à Gaza. Pour les jeunes engagés dans cette intifada (le terme arabe pour « soulèvement »), le keffieh permet aussi bien d’avancer masqués que d’atténuer l’impact des gaz lacrymogènes. Mais il s’agit surtout d’un symbole nationaliste, équivalent vestimentaire du drapeau palestinien. En veste dessinée par Chanel pour Gigi Hadid PORTE PAR LES HOMMES, MAIS ARBORE PAR LES FEMMES Lorsque le keffieh se retrouve au cou des manifestants occidentaux, dans les années 70, la référence au militantisme palestinien est assumée, sur fond de romantisme révolutionnaire. A la génération suivante, c’est une forme de solidarité plus diffuse avec les jeunes frondeurs de l’intifada qui anime les porteurs de keffieh. Au début de ce siècle, la récupération du keffieh, d’abord par des entrepreneurs du « cool », puis par des designers de mode, ne se fait pas sans polémique. En 2007, la chaîne américaine Urban Outfitters doit ainsi retirer de ses magasins ses keffiehs multicolores au nom de la « nature sensible de ce produit ». Elle cède à une campagne de protestation qui mettait en avant l’utilisation du keffieh par les guérilleros d’Irak et les jihadistes du monde entier. Mais c’est bel et bien sa dimension palestinienne qui continue de poser problème aux adversaires du keffieh, même si elle n’est plus, ou peu, prise en compte par les millenials qui portent un tel foulard. En Palestine même, les keffiehs sont très majoritairement importés d’Inde ou de Chine, surtout quand ils sont proposés aux touristes de passage. La seule fabrique de keffiehs en Cisjordanie se trouve à Hébron, où, fondée en 1961 par Yasser Hirbawi, elle est gérée aujourd’hui par ses trois fils. Elle a développé la vente en ligne pour échapper aux contraintes multiformes imposées par Israël, déclinant le modèle traditionnel pour des créations baptisées « Gaza », « Jénine » ou « Bethléem ». En Jordanie, des réfugiées palestiniennes du camp de Jerash, historiquement originaires de Gaza, ont conçu une gamme originale de keffiehs, dorénavant distribués, entre autres, par Boutique 1. Cette évolution s’accompagne d’une féminisation de plus en plus accentuée de la clientèle internationale des keffiehs. Les dirigeants palestiniens sont désormais bien rares à porter le keffieh, à l’image de Mahmoud Abbas, qui a succédé en 2005 à Arafat à la tête de l’OLP et de l’Autorité palestinienne. En revanche, les militants de base continuent d’associer leur détermination patriotique au keffieh noir sur fond blanc. C’est tout récemment le cas d’Ahed Tamimi, emprisonnée à 16 ans pour avoir résisté à l’intrusion de militaires israéliens dans la maison familiale, et libérée après avoir purgé une sentence de huit mois ferme. Nouvelle illustration de la persistance de la question palestinienne, alors même que la diffusion mondiale du keffieh va naturellement de pair avec la dilution de sa signification politique.
30/12/2018
blog
http://filiu.blog.lemonde.fr/2018/12/30/la-popularite-planetaire-du-foulard-palestinien/
Phi et lambda: l’alphabet grec comme signe de ralliement
Les deux lettres de l’alphabet grec sont devenues des symboles de reconnaissance politique, empruntant aux répertoires visuels de l’Antiquité et de la pop culture. La France insoumise a choisi la première, des groupuscules d’extrême droite ont opté pour la seconde.
Un chevron noir inscrit dans un cercle et flottant le plus souvent sur un drapeau – bleu, si vous êtes en France ; jaune, si vous êtes en Allemagne ou en Autriche. L’emblème de la mouvance identitaire, qui rassemble plusieurs groupes politiques d’extrême droite européens nés à la fin du XXe siècle, est aussi accrocheur qu’à première vue énigmatique. Ces groupuscules, faibles en effectifs mais très visibles par leurs actions coups-de-poing, se sont en effet choisi un symbole commun : le Λ, ou lambda, la onzième lettre de l’alphabet grec, astucieusement rajeuni par un graphisme dynamique et le choix de couleurs vives. Derrière ce symbole se trouve une référence classique : la lettre lambda était dans la Grèce antique utilisée pour désigner Sparte, alors appelée Lacédémone (Λακεδαίμων). Sa récente réapparition du côté des tenants de l’« ethno-différencialisme » a alors de quoi étonner, mais elle est en réalité le fruit d’une communication léchée. Distorsion historique Sous sa forme actuelle, ce lambda a été popularisé par le blockbuster hollywoodien 300, de Zack Snyder (2006), nouvelle version filmique de la bataille des Thermopyles, qui le place notamment sur les boucliers des guerriers spartiates. Les identitaires, en reprenant à leur compte ce lambda, dressent un très audacieux parallèle : ils seraient le dernier rempart contre l’invasion des « barbares étrangers », au même titre que les Spartiates se sacrifiant pour sauver l’alliance des cités helléniques de l’envahisseur perse. Une distorsion historique qui rencontre cependant un certain succès. « 300 », de Zack Snyder (2006). La mouvance identitaire s’est approprié le symbole lamda des boucliers spatiates. © 2007 Warner Bros. Entertainment Inc. All Rights Reserved. L’historien allemand Bodo Mrozek s’est en effet penché sur le choix de ce symbole dans un article publié dans sa version française sur le site Antiquipop. Il montre comment l’extrême droite souffrant d’une image vieillissante et peu attractive – le stéréotype du nazi en bottes de cuir ayant été abondamment ridiculisé par la pop culture, comme dans Inglorious Bastards de Quentin Tarantino (2009) – est justement allée puiser au sein de ce réservoir d’images pour rebâtir une image séduisante : « Ces activistes cherchaient des symboles appréciés de la pop culture qui pourraient correspondre de quelque manière que ce soit à leurs idées de puissance, de violence, de masculinité et de nationalisme. Tout cela fonctionnait avec le film 300 : l’objectif était de séduire ses fans, ces jeunes hommes d’ores et déjà attirés par les images traditionnelles de la masculinité, du sacrifice, de la guerre et du combat. Et peu à peu, ils ont chargé ces images d’un sens politique. »
30/12/2018
idees
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HaYemin HeHadash, un nouveau parti de droite en Israël
Le parti, créé par le ministre de l’éducation et de la justice du gouvernement de Benyamin Nétanyahou, doit s’adresser à l’électorat religieux et non religieux.
La ministre israélienne de la justice, Ayelet Shaked (à gauche), et le ministre de l’éducation, Naftali Bennett (à droite), ont annoncé la création de La Nouvelle Droite, un parti qu’ils dirigeront. JACK GUEZ / AFP Deux membres du gouvernement de droite du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, ont annoncé lors d’une conférence de presse, samedi 29 décembre, à Tel-Aviv la création de HaYemin HeHadash (La Nouvelle Droite), un parti ouvert sur l’électorat non religieux à trois mois des élections générales anticipées. Le ministre de l’éducation, Naftali Bennett, et la ministre de la justice, Ayelet Shaked, quittent donc le parti nationaliste religieux Foyer juif. HaYemin HeHadash s’appuie toutefois sur une plate-forme identique, revendiquant son opposition à la création d’un Etat palestinien. Avec huit députés sur 120 à la Knesset, Foyer juif, lancé en 2013, stagne dans les sondages alors que le Parlement sera renouvelé le 9 avril prochain. La formation ne gagnera qu’un à quatre sièges, en partie parce qu’elle ne parvient pas à séduire le centre droit, l’une de ses ambitions initiales. Le poste de premier ministre dans le viseur ? Autre limite : les sionistes religieux, la base électorale du Foyer juif, restent pour beaucoup attachés au Likoud, dont le premier ministre est le leader. « Nétanyahou a compris que la communauté sioniste religieuse était dans sa poche, et que peu importe la façon dont il les traite, au bout du compte, ils le suivent toujours », a expliqué Naftali Bennett pendant la conférence de presse. Pour le quotidien Haaretz, Bennett se venge ainsi de la communauté religieuse qui l’aurait « trahi » à deux reprises en votant en faveur du Likoud. Le quotidien suggère également que le ministre « sentirait le déclin » de M. Nétanyahou, mis en cause dans plusieurs affaires de corruption et viserait le poste de leader du gouvernement.
30/12/2018
international
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Salaires, retraites, tarifs réglementés : ce qui change au 1er janvier
Cotisations, smic, heures supplémentaires, prix du gaz... Le premier jour de l’année est marqué par une série de nouveautés susceptibles d’influer sur le pouvoir d’achat. A la hausse comme à la baisse.
COLCANOPA Résolutions, cotillons, étrennes, baisers sous le gui, vœux de bonne santé et… nouveautés pour votre budget ! Les changements affectant les dépenses et recettes des ménages sont nombreux à entrer en vigueur le 1er janvier 2019. Tour d’horizon de ce qui va évoluer. Pour les travailleurs modestes Parmi les mesures les plus emblématiques, la hausse de la prime d’activité, complément de revenus destiné aux personnes qui travaillent, mais gagnent peu (qu’elles soient salariées, indépendantes ou fonctionnaires), et versé sous condition de ressources du foyer. Il est question d’une hausse de 90 euros pour un bénéficiaire au niveau du smic. Cette mesure aboutira, en outre, à élargir le nombre d’allocataires potentiels, de 3,8 millions à 5 millions, selon le gouvernement. La prime d’activité étant versée à terme échu, au début du mois suivant celui pour lequel elle est due, les allocataires verront concrètement la couleur de cette augmentation sur le montant touché début février 2019. Pour les salariés et fonctionnaires Salariés du privé comme du public verront, en 2019, leurs heures supplémentaires exonérées d’impôt sur le revenu, dans certaines limites, et de cotisations salariales (CSG, CRDS et cotisations patronales resteront toutefois dues). Le niveau du smic horaire sera également relevé de 1,5 %, à 10,03 euros brut. Résultat : le montant mensuel atteindra 1 521,22 euros brut, contre 1 498,47 euros aujourd’hui. Moins réjouissant pour le pouvoir d’achat : des hausses de cotisations vieillesse sont prévues. Elle sera de +0,27 point pour les fonctionnaires. Et celles d’une grande partie des salariés grimperont du fait de la fusion des régimes Agirc et Arrco, qui implique une refonte de l’architecture globale des cotisations de retraite complémentaire. A retenir : le niveau de la hausse dépendra du statut (cadre ou non) et du salaire, et les cotisations de certains salariés vont, au contraire, diminuer (les cadres mal rémunérés). Article réservé à nos abonnés Lire aussi 2019 devrait être l’année du pouvoir d’achat Actée en 2015, cette fusion s’accompagne de l’instauration d’un nouveau paramètre de calcul des retraites Agirc-Arrco : un malus temporaire de pension de 10 %, les trois premières années de retraite. Vous ne serez toutefois pas concerné par ce dispositif si vous êtes dans l’un des cas suivants : vous êtes né avant 1957 ; vos revenus sont modestes (retraités exonérés de CSG) ; vous remplissez, avant 2019, les conditions de la retraite à taux plein ; vous attendez un an pour partir une fois les conditions du taux plein remplies ; vous prenez votre retraite sans avoir le taux plein (mais des abattements définitifs s’appliqueront). D’autres exceptions sont prévues, notamment pour les personnes handicapées, et le malus sera de 5 % pour les retraités au taux réduit de CSG. Un bonus de pension Agirc-Arrco fera aussi son apparition, pour ceux qui prendront leur retraite au moins deux ans après le taux plein (10 % à 30 %, selon les cas). Pour les retraités Sous la pression du mouvement des « gilets jaunes », le gouvernement est finalement partiellement revenu sur la hausse du taux plein de CSG, entrée en vigueur en 2018. Près de la moitié de ceux qui avaient été touchés verront leur taux de CSG repasser de 8,3 % à 6,6 % au 1er janvier 2019. La mesure ayant été décidée tardivement, ce correctif ne sera pas appliqué les premiers mois de l’année, mais donnera lieu à des remboursements a posteriori. Environ 3,8 millions de foyers fiscaux sont concernés, selon le gouvernement, pour un gain de pension nette de 448 euros par an. Ce changement de dernière minute vient s’ajouter à une autre mesure prise dans le cadre du budget 2019 de la Sécurité sociale : pour être soumis au taux plein de CSG, il faudra désormais dépasser, deux années d’affilée, le plafond de revenu fiscal de référence fixé. Si le gouvernement a lâché du lest sur la sensible CSG, il a maintenu la sous-indexation des retraites, qui seront revalorisées, au 1er janvier 2019, de 0,3 %, soit moins que l’inflation. Sont concernées les pensions de base (sauf avocats), mais aussi les complémentaires des artisans, commerçants et agents non titulaires de la fonction publique. L’allocation de solidarité aux personnes âgées (l’ex-minimum vieillesse) profitera en revanche d’une nouvelle revalorisation exceptionnelle de 35 euros. Pour les indépendants Lire aussi Quelles entreprises vont verser une prime exceptionnelle à leurs salariés ? Plusieurs nouveautés toucheront les non salariés. L’année 2019 marque notamment l’acte II de la suppression du régime social des indépendants : dès le 1er janvier, les nouveaux indépendants (hors agriculteurs) relèveront directement de l’Assurance-maladie. Pour ceux déjà en activité avant 2019, le transfert est planifié en 2020. A savoir aussi : la durée du congé maternité des commerçantes, artisanes, agricultrices et libérales s’alignera sur celui des salariées, soit seize semaines. Elles seront cependant obligées de s’arrêter au moins huit semaines pour être indemnisées. Au-delà, elles pourront reprendre partiellement sans devoir renoncer à la totalité de leurs indemnités journalières. Parmi les autres changements visant les indépendants : la suppression de la cotisation foncière des entreprises pour les micro-entrepreneurs avec moins de 5 000 euros de chiffre d’affaires, l’année blanche de cotisations de Sécurité sociale pour les créateurs d’entreprise et la réduction à une vingtaine de professions du périmètre de la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance-vieillesse, principale caisse de retraite des professions libérales. Des prix qui baissent, d’autres qui grimpent… Du côté des factures, celle du gaz devrait baisser. En tout cas pour les 4,5 millions de ménages ayant conservé les tarifs réglementés, puisque ceux-ci accuseront une diminution moyenne de 1,9 % en janvier 2019, hors taxes. Par ailleurs, contrairement à ce qui était prévu, la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel, qui pèse, elle, sur le prix TTC du gaz, réglementé ou non, n’augmentera pas au 1er janvier 2019. Enfin, il reste quelques jours aux adeptes de l’épistolaire pour prendre les devants, car les prix des timbres s’apprêtent à prendre du galon en 2019. La hausse sera de 10 % sur les timbres rouges (qui passeront à 1,05 euro), verts (0,88 euro) et gris (0,86 euro).
30/12/2018
economie
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Président Trump, an II : le consigné de la Maison Blanche
Pour cause de « shutdown », Donald Trump est enfermé à Washington. Mais plus personne n’attend rien avant que la nouvelle majorité démocrate ne prenne ses quartiers à la Chambre des représentants, le 3 janvier.
La Maison Blanche, à Washington, le 28 décembre. ALEX BRANDON / AP Cette retraite pourrait être gaullienne, mais c’est une pénitence. Pour cause de « shutdown », Donald Trump est enfermé à la Maison Blanche. Privé de Mar-a-Lago en hiver. Privé de ses ors. Privé du Trump International Golf Club de Palm Beach. Pour ne rien arranger, il fait un temps de décembre à Washington. Lire aussi Donald Trump impose un exercice de plus en plus solitaire du pouvoir La First Lady s’en est retournée sous le soleil de Floride après l’avoir accompagné pour une brève visite aux troupes américaines en Irak puis en Allemagne, improvisée comme pour tromper l’ennui. Vendredi, Donald Trump a dîné avec son gendre Jared Kushner à la résidence de son vice-président, Mike Pence. Un homme qui se refuse à partager un repas avec une convive en l’absence de sa femme. Un économe en fantaisie. Une salve de menaces Le 24 décembre, le président consigné, enfermé par son exigence de « mur » à la frontière avec le Mexique que ses opposants au Congrès refusent de financer, avait exposé sa détresse sur son compte Twitter. « Je suis tout seul (pauvre de moi) à la Maison Blanche, attendant que les démocrates reviennent et concluent un accord sur la sécurité des frontières qui fait cruellement défaut », avait-il écrit. Quatre jours plus tard et après avoir agoni quotidiennement ses adversaires, Donald Trump a passé son matin à menacer. Lire aussi : A quoi ressemble la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique A menacer de couper l’aide américaine aux pays d’Amérique centrale d’où viennent les demandeurs d’asile qui l’obsèdent. Ce qui arrangerait à coup sûr la situation. A menacer de fermer « entièrement » la frontière avec le Mexique. Ce qui reste à voir, surtout au moment où l’économie américaine émet de premiers signes d’interrogation. Des sabres de bois déjà agités deux mois plus tôt et qui n’effraient plus grand monde. Samedi, il a accusé les démocrates de la mort de deux enfants de demandeurs d’asile venus du Guatemala, emportés par la fatigue et la maladie alors qu’ils étaient retenus par la police des frontières. Son « mur », a-t-il affirmé, les aurait dissuadés de se lancer dans ce périple. Marais d’indifférence Invisible depuis l’escapade moyen-orientale, ce président dont le service de presse a renoncé ces jours derniers à publier l’agenda de ses activités, grommelle et tempête en solitaire. Tout ce que Washington compte de responsables politiques a abandonné la capitale fédérale. Les couloirs vides du Sénat ne sont arpentés que par un vieux sénateur républicain du Kansas, Pat Roberts, qui réside en fait à deux pas, en Virginie, et qui y fait à l’occasion une brève ronde de gardien d’archives départementales. Le Washington Post a publié la photo de la porte close du bureau du chef de la majorité républicaine du Sénat, Mitch McConnell. Une pile de courrier attend son retour.
30/12/2018
chroniques-de-la-presidence-trump
https://www.lemonde.fr/chroniques-de-la-presidence-trump/article/2018/12/30/president-trump-an-ii-le-consigne-de-la-maison-blanche_5403604_5077160.html
2018, la fin de l’innocence... sexuelle ?
L’année qui s’achève fut celle de #metoo et de la grande remise en cause des privilèges de genre, de race, de classe et d’orientation sexuelle. Rarement avons-nous autant parlé et écouté. Et pourtant ! Il en est encore qui estiment qu’ouvrir la sexualité au débat crée des problèmes qui n’existaient pas avant. Maïa Mazaurette, chroniqueuse sexe de La Matinale, fait le point sur la réalité de cette « innocence perdue ».
MAIA MAZAURETTE LE SEXE SELON MAÏA L’année 2018 se termine : c’était chouette, non ? Eprouvant ? Certes. Nous avons beaucoup parlé de sexualité, et de temps en temps, nous nous sommes même mutuellement écoutés – hourra ! 39 % des Français ont évoqué le mouvement #metoo avec leurs proches (Harris Interactive, octobre 2018), 38 % des hommes ont remis en cause leur comportement (OpinionWay pour Le Parisien, juin 2018). On a parlé de masculinités plurielles sur le service public et dans une tripotée de podcasts privés : une conversation menée par des femmes (Les couilles sur la table) comme par des hommes (Mansplaining). Nous avons examiné nos privilèges, de genre, de classe, de race, d’orientation sexuelle. Nous avons débattu de la soumission féminine (On ne naît pas soumise, on le devient, par la philosophe Manon Garcia, Flammarion). Nous avons commencé à faire le ménage dans la zone grise (L’Amour après #metoo, de Fiona Schmidt, Hachette). Nous avons écouté l’humoriste Océan nous parler de sa transition. Je m’arrête là : impossible d’être exhaustive tant cette année a été riche d’occasions de mieux nous entendre – dans tous les sens du terme. Et pourtant ! Il y a encore deux-trois malins au fond qui clament que c’était mieux avant, et qui auraient préféré ne pas savoir. Pour ces personnes, notre conversation crée des problèmes qui n’existaient pas (selon cette fameuse sagesse populaire voulant que la description des violences soit plus embêtante que les violences elles-mêmes – une assertion d’ailleurs parfaitement exacte… pour peu qu’on parle du point de vue des personnes commettant ces violences). Cette résistance au dialogue pose la question à cent mille dollars de cette fin d’année : comment peut-on, en toute bonne foi, demander moins de partage, moins de conversation, moins d’écoute ? Par quelle curieuse alchimie deviendrait-on plus sage en disposant de moins de connaissance ? A ce titre, la sexualité est sans doute le seul domaine au monde où la prime à l’ignorance demeure d’actualité (imaginez si nous appliquions la même logique avec nos enfants : « N’apprends pas le solfège, les notes tueraient ta connexion avec le piano », «Laisse tomber l’algèbre, laisse-toi porter par la spontanéité de ton rapport avec cette équation »). Un espace conflictuel Les adeptes de l’omerta répondent à notre perplexité par un argument émotionnel : le discours sexuel les prive d’une part d’innocence. En 2018, la sexualité serait ainsi passée d’une croustillante pantalonnade à un espace conflictuel. Elle était une distraction, légère, elle devient un sujet, grave. (Car il faudrait choisir son camp, n’est-ce pas.) Alors d’accord. Pourquoi pas ? Mais face à cette demande, il est intéressant de questionner qui a le droit d’être innocent. Plus clairement : qui peut se permettre de considérer la sexualité comme une pure bagatelle ? Car étrangement, en 2018, on n’a pas entendu des masses de femmes, ou de minorités, se plaindre de « perdre leur innocence ». On a plutôt observé un certain soulagement : ah, tiens, on commence à nous croire. Les personnes pour qui la sexualité ne fait pas débat sont celles pour qui elle n’a pas de conséquences – ni grossesses, ni viols, ni tabassages dans la rue, ni humiliations au boulot, ni rejet familial, ni administrations sourdes. En toute logique, ces bienheureux revendiquent le droit de voir perdurer cette délicieuse inconséquence. Pour le dire clairement : le droit à l’irresponsabilité. Car par définition, les innocents ne sont coupables de rien : selon le dictionnaire, ils ne font par nature aucun mal à autrui. Cette stratégie du bon élève distrait est constamment utilisée comme défense : je ne savais pas/ce n’est pas ma faute/ce n’est pas une faute. Encore aujourd’hui, certains hommes prétendent qu’une accusation de harcèlement sexuel peut surgir de n’importe où, de manière totalement arbitraire. Comme si on pouvait harceler sans faire exprès. Comme si la définition même du harcèlement ne consistait pas à répéter une transgression (ne pas faire exprès, mais plein de fois d’affilée : une étonnante coïncidence, non ?). Parler d’innocence, c’est aussi s’approprier un mot dénué de menace, évoquant l’enfance, les plaisirs bucoliques, le jardin d’Eden. C’est d’ailleurs la deuxième définition du mot dans le dictionnaire : « état de l’homme avant le péché originel ». Si la révélation du savoir constitue le péché originel, il est facile de rejeter la faute sur les victimes – ce sont elles qui commettent le crime. A ce titre, elles sont priées de maugréer ou de manifester en silence. Cette innocence-là blesse : elle est une violence qui tait son nom. Elle n’appartient d’ailleurs pas à la douce passivité qu’on lui associe spontanément : refuser d’entendre, faire taire sont au contraire des positions actives. Dans le cas qui nous intéresse, l’innocence aura consisté à obstinément regarder ailleurs : innocence, ou indifférence – déni, lâcheté ? Je veux bien (enfin, dans un monde dénué d’empathie) qu’on préfère s’accrocher à un âge d’or originel (celui des années 1950, 1968 ou 1990, choisissez votre passé préféré, on a tous les parfums). Mais dans ce cas-là, merci d’admettre que l’âge d’or avait quelques ratés. L’émergence de plusieurs discours sexuels Ceux qui revendiquent les bienfaits de l’ignorance le font, paradoxalement, en connaissance de cause : parce qu’ils savent précisément ce qu’ils ont à y perdre. Leur demande d’innocence ne concerne d’ailleurs que le discours de subversion de l’ordre sexuel. La parole masculine hétérosexuelle monogame grivoise (qui n’a pas eu besoin de se libérer cette année, tiens donc) n’est jamais remise en cause : ce n’est pas le discours sexuel qui pose problème (la sexualité fait partie du vivre-ensemble le plus élémentaire), c’est l’émergence de plusieurs discours sexuels, qui demandent la prise en compte d’autres consentements, d’autres dignités. A ce titre, l’argument du « respect de la vie privée » relève d’une hypocrisie à se rouler sous la table : la vie sexuelle mâle conventionnelle est archi-publique depuis une éternité. En somme, colmater ses oreilles avec des petits fours quand les « autres » prennent la parole nous propulse surtout vers l’âge de pierre (qui pave mieux les routes de l’enfer que du paradis). Je ressors mon dictionnaire, définition numéro trois d’« innocence » : « état de celui qui ne se rend pas compte des choses, qui manifeste une trop grande ignorance des réalités ». Ne pas se rendre compte, pour ne pas rendre de comptes ? Si je peux me permettre quelques souhaits de fin année (c’est de saison) : en 2019, préférons la parole au silence, la bête à deux dos plutôt que la bêtise. Espérons que ces discours riches, stimulants, exaspérants, nous permettront de continuer à faire lumière sur nos différences, nos bizarreries, nos frustrations. Posons plein de questions, n’oublions pas d’écouter les réponses. Fiat lux ! Retrouvez ici toutes les chroniques de Maïa Mazaurette dans La Matinale.
30/12/2018
m-perso
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James Ivory, jeune cinéaste de 90 ans
Il a reçu, en mars, son premier Oscar pour le scénario de « Call Me by Your Name ». Un sacre pour le réalisateur américain qui n’a rien perdu de sa liberté de penser et d’agir.
d’agir. James Ivory chez lui, à Claverack, dans l’Etat de New York, le 13 décembre 2018. YOSHIYUKI MATSUMURA POUR M LE MAGAZINE DU MONDE « Le train est parfois un peu capricieux. Appelez-moi quinze minutes avant, je viendrai vous chercher à la gare de Hudson », écrivait James Ivory, mi-décembre, dans un e-mail. Quelques jours plus tard, attablé devant une soupe de poulet et une limonade, dans le diner local de cette petite ville de campagne repeuplée depuis quelques années par de jeunes couples nantis de Brooklyn, le cinéaste explique : « Nous avons eu un appartement à Paris, vécu en Italie, nous sommes souvent allés en Inde, et j’ai aussi un appartement à Manhattan, mais cette maison, ça a toujours été chez nous. » « Nous », c’est lui et le producteur indien Ismail Merchant, qui fut son compagnon pendant quarante-six ans, jusqu’à sa mort, en 2005. En 1975, le couple achète cette grande bâtisse blanche à Claverack, dans l’est de l’État de New York et y installe son quartier général informel, travaillant sans relâche aux multiples projets estampillés Merchant Ivory Productions, à l’image de Retour à Howards End, ressorti en salle le 26 décembre, ou de Quartet, qui sera montré en mars 2019 à la Cinémathèque. Un style joyeusement iconoclaste Ici aussi que James Ivory a fêté, en juin, son quatre-vingt-dixième anniversaire. Pour l’occasion, il a demandé à l’une de ses voisines de réquisitionner sa maison pour héberger ses amis. Elle a bien sûr accepté, à condition qu’il lui montre son Oscar. Voilà pourquoi, explique-t-il, la statuette rutilante trône sur une table du rez-de-chaussée, au milieu du courrier ouvert et de livres annotés, non loin d’un ordinateur portable en veille. En mars, l’Académie a fait de James Ivory l’oscarisé le plus âgé de son histoire, en lui décernant le prix du Meilleur scénario adapté pour Call Me by Your Name (d’après le roman d’André Aciman). Le film de l’Italien Luca Guadagnino raconte l’éveil aux sens et aux sentiments d’un garçon de bonne famille qui tombe amoureux d’un jeune collaborateur de son père. Sur la scène du Dolby Theater, le doyen est allé chercher son trophée en smoking noir sur chemise blanche, décorée d’un portrait romantique de la jeune star du film, Timothée Chalamet. L’illustration parfaite de son style, joyeusement iconoclaste sous des atours traditionnels. Cette soirée fut une consécration personnelle pour Ivory, réalisateur de vingt-sept longs-métrages, qui ont totalisé, en près d’un demi-siècle, trente et une nominations et remporté six Oscars. Lui avait été nommé trois fois (en tant que meilleur réalisateur pour Chambre avec vue en 1987, Retour à Howards End en 1993 et Les Vestiges du jour l’année suivante), mais jamais encore récompensé.
30/12/2018
m-le-mag
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/30/james-ivory-jeune-cineaste-de-90-ans_5403599_4500055.html
Elections en RDC : dépouillement en cours, l’opposition déplore des irrégularités
Quarante millions d’électeurs de la République démocratique du Congo étaient appelés aux urnes, dimanche, pour élire le successeur de Joseph Kabila.
Le dépouillage a commencé, ici à Lubumbashi, dans l’est de la République démocratique du Congo, le 30 décembre. CAROLINE THIRION / AFP La longue attente des résultats et des premières tendances va tenir en haleine, lundi 31 décembre, la République démocratique du Congo (RDC) après l’élection présidentielle de ce dimanche. Quatre morts dans le Sud-Kivu, l’opposition déplore des irrégularités A défaut de résultats, les deux principaux candidats de l’opposition ont déjà contesté dimanche soir le déroulement des opérations de vote dans le plus grand pays d’Afrique subsaharienne. Quatre personnes ont été tuées dans le Sud-Kivu où un agent électoral a voulu bourrer les urnes en faveur du dauphin de M. Kabila, Emmanuel Ramazani Shadary, a accusé un proche du candidat de l’opposition, Félix Tshisekedi. Pas n’importe quel proche : Vital Kamerhe, ex-président de l’Assemblée nationale, ex-candidat en 2011, et homme fort du Sud-Kivu. « Le peuple va assumer son choix », a prévenu M. Kamerhe, qui deviendrait premier ministre en cas de victoire de Félix Tshisekedi. L’autre candidat de l’opposition, Martin Fayulu, a dénoncé « de nombreuses et graves irrégularités » dans le déroulement des opérations de vote. M. Fayulu affirme, par exemple, que ses observateurs « ont été chassés de plusieurs bureaux de vote ». Sans revendiquer la victoire, M. Fayulu a écarté l’hypothèse de celle du candidat du pouvoir : « Est-ce que quelqu’un de sérieux peut dire que Shadary a gagné l’élection ? » « J’ai déjà gagné. Je serai élu, c’est moi le président à partir de ce soir », avait affirmé le même Emmanuel Ramazani Shadary, dès le matin en sortant d’un bureau de vote. Kinshasa a refusé toute aide logistique des Nations unies, présentes depuis vingt ans au Congo, de même que toute mission d’observation occidentale. Internet n’a pas été coupé lors de cette journée électorale, comme cela arrive généralement en période de fortes tensions. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En RDC, les élections de tous les dangers Les résultats provisoires attendus samedi La majorité a envisagé la possibilité de donner ses premières tendances lundi matin. Les résultats provisoires ne doivent être proclamés que samedi prochain, d’après la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Le compte à rebours a commencé avec le comptage manuel des voix de Kinshasa à Goma et de Lubumbashi à Tshikapa. A Goma, les agents électoraux suivent scrupuleusement le mode opératoire sous l’œil attentif et fatigué des témoins des candidats. Les trois parties de chaque bulletin de vote sont détachées pour constituer trois piles, une pour chaque scrutin (présidentiel, législatif et provincial). Des opérations de vote se sont poursuivies à la tombée de la nuit en raison de l’ouverture tardive de certains bureaux. Quelque 40 millions d’électeurs, dont beaucoup de jeunes, ont été appelés à désigner le successeur du président Joseph Kabila. De bon matin, M. Kabila a voté en famille à Kinshasa, suivi de son dauphin. Climat général calme, couacs de la « machine à voter » La Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) estime que « le climat général du déroulement du vote a été relativement calme ». Les incidents portent sur des « dysfonctionnements de la machine à voter », l’« interdiction d’accès ou expulsion des observateurs des bureaux de vote » ou le même sort réservé aux « témoins » des candidats. A Kinshasa, des électeurs ont hué le président de la CENI, Corneille Nangaa, venu en personne constater les problèmes au centre de vote Saint-Raphaël à Limete. Des électeurs à Kinshasa, le 30 décembre. MARCO LONGARI / AFP Beni martyrisé, Beni exclu, mais Beni surprenant de vitalité : la cité du Nord-Kivu a organisé un vote symbolique pour protester contre le report des élections présidentielle, législatives et provinciales dans sa région. Les autorités ont justifié ce report en raison de l’épidémie d’Ebola et des massacres de civils dans la région, ce qui a provoqué la colère des habitants. « La ville de Beni est dans la République démocratique du Congo. On ne peut pas nous priver du droit de vote », a insisté Manix, un jeune. Objet de toutes les polémiques depuis plus d’un an, la machine à voter a connu de nombreux couacs dimanche. « Il n’y a pas de machines et les quelques machines qui sont là, elles ont des problèmes, elles ne marchent pas, et nous n’avons pas de matériel électoral », a déclaré Pesible, un électeur à Kinshasa. Le vote « avec la machine est très compliqué. J’ai appuyé sans trop savoir pour qui. Je n’ai pas vu le numéro ni le visage de mon candidat », regrette Madeleine, une dame d’un âge avancé, en sortant de l’isoloir d’un bureau de vote du quartier populaire de Ndjili. Les électeurs qui ont pu voter normalement ne cachaient par leur enthousiasme et leur soif d’autres horizons. « Parce que le Congo a trop souffert, nous méritons le changement », résume un électeur à Goma, Patrice Nzanzu, technicien. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Présidentielle en RDC : une campagne sur fond d’alliances et de trahisons Vingt et un candidats, trois favoris Parmi les 21 candidats en lice, trois personnalités se démarquent pour le poste présidentiel. Emmanuel Ramazani Shadary, aujourd’hui secrétaire du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD). Ce politicien de 58 ans est visé par des sanctions européennes depuis mai 2017 en raison de son rôle dans la répression de manifestations de l’opposition en 2016. Félix Tshisekedi, lui, a pris le relais de son père, Etienne Tshisekedi, décédé l’an dernier, à la tête de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Il s’est désolidarisé le mois dernier de Martin Fayulu, ancien cadre de la compagnie pétrolières Exxon Mobil d’abord désigné comme le candidat unique de l’opposition. Un sondage le donne largement en tête, même si le nombre élevé de candidats pourrait toutefois diluer les voix de l’opposition et profiter à Shadary. Le spectre de la violence La campagne avait été rattrapée par la violence, avec une dizaine de morts selon une association de défense des droits humains, ce que nie le pouvoir. Martin Fayulu et Félix Tshisekedi ont tous les deux refusé de signer samedi soir l’« acte pour la paix », un document dans lequel ils se seraient engagés à rejeter toute violence. Les deux hommes estiment que le texte ne tient pas compte de leurs demandes relatives à la gestion des bulletins de vote (comptage manuel, présence des observateurs électoraux à tous les stades du dépouillement). « Nous avons compris que la CENI [la commission électorale nationale indépendante] et le FCC [coalition de la majorité] ne sont pas pour des élections crédibles et transparentes », a expliqué le directeur de campagne de Félix Tshisekedi, Vital Kamerhe. « Des inquiétudes planent encore sur nos têtes et la peur couve dans nos cœurs », a déclaré l’archevêque de Kinshasa, Mgr Fridolin Ambongo, alors que catholiques et protestants ont manifesté samedi matin pour demander des élections pacifiques. Le scrutin a été reporté dans trois zones (Beni, Butembo et Yumbi), victimes d’Ebola ou de violences communautaires. Ce qui devait priver de vote plus d’un million d’électeurs dans ces régions, vues comme des bastions de l’opposition. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Report des élections en RDC : le pouvoir évoque « un cas de force majeure » Pour Joseph Kabila, « la menace sécuritaire est sous contrôle » L’actuel président ne brigue pas de troisième mandat successif puisque la Constitution le lui interdit. « J’ai l’intime conviction que tout va bien se passer dimanche », a-t-il confié au Monde, admettant que « des violences post-électorales ne sont pas à exclure, mais la menace sécuritaire est sous contrôle ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Joseph Kabila : « Il faut regarder la RDC aujourd’hui et il y a dix ans » A 47 ans, M. Kabila n’a pas forcément dit adieu au pouvoir. Il pourrait se présenter en 2023 et une victoire d’Emmanuel Ramazani Shadary lui permettrait de rester actif en coulisses.
30/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/30/scrutin-historique-et-a-hauts-risques-en-rdc_5403581_3212.html
Malus de l’Agirc-Arrco : « Ne vous trompez pas d’enjeux ! »
Certains salariés vont voir leurs pensions complémentaires minorées de 10 % durant leurs trois premières années de retraite à partir du 1er janvier. Ce n’est pas une raison suffisante pour retarder son départ en retraite, estime Dominique Prévert, du cabinet Optimaretraite.
Si quelqu’un ne supporte pas l’idée de voir sa pension minorée, ou s’il ne peut se le permettre, il n’a pas forcément à travailler un an de plus pour éviter cette perte. Philippe Turpin / Photononstop Question à un expert Avec la mise en place du malus qui minore ma retraite complémentaire. Ai-je intérêt à la prendre plus tard ? Sauf cas marginaux, il serait stupide de changer sa date de retraite simplement pour éviter le malus ou décrocher le bonus. Sur le plan financier, continuer à travailler un an de plus est dans tous les cas souvent une très bonne affaire, parce que vous continuez à percevoir votre salaire plutôt que de toucher une pension, parce que vous continuez à améliorer vos futures pensions, à bénéficier de la mutuelle de l’entreprise, etc. Si vous êtes prêt à travailler plus longtemps, le véritable enjeu, en termes d’euros sonnants et trébuchants, est là ! L’annulation du malus ou l’application d’un bonus ne représenteront qu’une petite partie du gain total. Imaginons un cadre de 62 ans ayant tous ses trimestres en mai 2019, gagnant 55 000 euros par an et pouvant prétendre, hors malus, à une pension annuelle de 37 000 euros, dont 20 000 euros de pensions Agirc-Arrco. S’il part dès mai 2019, le malus représentera pour lui une perte totale de pension de 6 000 euros (trois fois 10 % de 20 000). L’enjeu numéro un s’il retarde d’un an sa retraite n’est pas d’éviter de perdre 6 000 euros sur trois ans, c’est bien avant tout de percevoir 18 000 euros de plus sur l’année (différence salaire/pension). Mon conseil : raisonnez en euros dans cette affaire, au-delà des concepts. Et prenez en compte tous les aspects financiers, pas que l’effet sur la pension. Après, si quelqu’un ne supporte pas l’idée de voir sa pension minorée, ou s’il ne peut se le permettre, il n’a pas forcément à travailler un an de plus pour éviter cette perte, contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire. Là encore, il faut tout chiffrer. Revenons à notre senior à qui le malus ferait perdre 6 000 euros de pension sur trois ans : il lui suffit de retarder son départ de quatre mois, donc de percevoir durant quatre mois son salaire plutôt que sa pension, pour rattraper les 6 000 euros du malus. Dominique Prévert (Cabinet Optimaretraite)
30/12/2018
argent
https://www.lemonde.fr/argent/article/2018/12/30/malus-de-l-agirc-arrco-ne-vous-trompez-pas-d-enjeux_5403578_1657007.html
Au moins douze personnes sont mortes dimanche en marge des législatives au Bangladesh
Le bilan s’élève désormais à quatorze morts, selon les chiffres de la police, depuis l’annonce, le 8 novembre, de la date du scrutin.
u scrutin. Les Bangladais se rendent aux urnes, dimanche 30 décembre, pour des législatives sous haute sécurité. Les bureaux de vote ont ouvert à 8 heures après plusieurs semaines d’une campagne marquée par des violences meurtrières et par des accusations de répression à l’encontre de milliers de militants de l’opposition. Les douze décès annoncés dimanche portent à quatorze le nombre de morts confirmées par la police depuis l’annonce, le 8 novembre, de la date du scrutin. Le gouvernement avait, pourtant, annoncé avoir déployé 600 000 policiers, militaires et forces de sécurité pour prévenir des violences dimanche. Le régulateur des télécoms a également ordonné aux opérateurs mobiles bangladais de couper la 3G et la 4G jusqu’à dimanche soir minuit, afin « d’éviter que des rumeurs ne se répandent », a déclaré un porte-parole.
30/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/portfolio/2018/12/30/les-bangladais-se-rendent-aux-urnes-dans-un-contexte-securitaire-tendu_5403575_3210.html
Données personnelles : sur les téléphones Android, des applications très bavardes avec Facebook
Une ONG a découvert que des données étaient envoyées à Facebook, même lorsque leur utilisateur ne disposait pas de compte sur le réseau social.
Des données étaient envoyées à Facebook par des applications Android, même lorsque leur utilisateur ne disposait pas de compte. QUENTIN HUGON / LE MONDE De nombreuses applications pour Android partagent avec Facebook des informations sur leurs utilisateurs, y compris sans le consentement de ces derniers et même lorsqu’ils ne disposent pas de compte sur le réseau social. Deux chercheurs de l’ONG Privacy International, Frederike Kaltheuner et Christopher Weatherhead, ont ainsi analysé 34 applications pour smartphones Android de toutes sortes et très populaires – installées entre 10 et 500 millions de fois chacune. Ils ont découvert que plus de la moitié d’entre elles transmettaient des informations au réseau social dès l’ouverture du programme, sans aucune intervention de l’usager. « Il est crucial de se rappeler que cela arrive que vous soyez ou non un utilisateur de Facebook » a martelé M. Weatherhead sur la scène du Chaos Communication Congress, la grand-messe des hackers qui se tient jusqu’au 30 décembre à Leipzig (Allemagne), où les deux experts présentaient leurs travaux. Lire aussi Des mouchards cachés dans vos applications pour smartphones Des informations techniques mais parlantes Ces informations sont davantage techniques que personnelles au sens propre (nom du programme qui vient d’être lancé, modèle et nom du téléphone, la langue sélectionnée…). Elles peuvent cependant permettre à Facebook de savoir quelles applications sont installées et ouvertes. L’ONG donne l’exemple d’un utilisateur qui aurait téléchargé Indeed (entreprise spécialisée dans la recherche d’emploi), Qibla Connect (prières musulmanes) et Period Tracker Clue (suivi des règles). Toutes ces applications envoient des données à Facebook, et il est possible, par leur seule présence sur un téléphone et selon Privacy International, de déterminer que l’usager est une femme musulmane à la recherche d’un emploi. Or, les informations relatives à la religion sont particulièrement protégées par le droit européen sur les données personnelles. Par ailleurs, écrit l’ONG, « les applications qui transmettent automatiquement des données à Facebook les accompagnent de l’identifiant publicitaire de Google », une suite de caractère assignée de manière unique à tout usager d’un téléphone Android. Cet identifiant permet ensuite aux « publicitaires de lier les données issues d’applications différentes et de navigation Web dans un seul et unique profil ». En outre, « certaines applications envoient à Facebook des données incroyablement détaillées » a expliqué M. Weatherhead. Et ce toujours indépendamment de la possession – ou non – par l’utilisateur d’un compte Facebook. C’est le cas, écrit l’ONG, de l’application de voyage Kayak qui envoie au réseau social toutes les recherches faites par l’usager à l’intérieur de ce programme et le détail de ses voyages. Les chercheurs ont techniquement prouvé que ces données étaient envoyées à Facebook. Mais ils le reconnaissent eux-mêmes : « Sans davantage de transparence de la part de Facebook, il est impossible de savoir comment les données que nous décrivons sont utilisées. » Comment cela est-il possible ? Les applications pour téléphones mobiles comportent très fréquemment des portions de code d’entreprises tierces, invisibles pour l’utilisateur final. Il peut s’agir, par exemple, d’un moyen de compter les visiteurs d’une application. Facebook permet aux développeurs d’insérer des portions de son code afin qu’ils puissent faire profiter à leurs usagers de certaines fonctionnalités issues de Facebook. Selon Privacy International, cela leur permet donc également de récupérer des informations. La question de la responsabilité est « complexe » Qui est responsable, légalement, de cette collecte ? Frederike Kaltheuner reconnaît que la question est « complexe ». Le règlement sur la protection des données (RGPD), la loi européenne, impose, dans la plupart des cas, de recueillir le consentement de la personne pour récolter ses données. Un principe qui ne semble pas toujours respecté, notamment lorsque des données sont envoyées dès le lancement de l’application et sans action de la part de l’utilisateur. Pour Facebook, ce sont les développeurs des applications qui sont responsables des données qu’ils lui envoient. Le réseau social a introduit un outil pour permettre aux développeurs de n’envoyer aucune donnée avant d’avoir obtenu le consentement de leurs utilisateurs. Mais selon Privacy International, cet outil a été introduit après l’entrée en vigueur du RGPD et fonctionne de manière imparfaite. Facebook offre aussi la possibilité à des personnes non inscrites sur sa plate-forme de limiter la collecte de données : Privacy International affirme les avoir testées, sans que cela n’ait, écrit-elle, « d’impact visible sur la quantité de données partagées ». Cette découverte relance en tout cas la lancinante question des « shadow profiles », ces informations que Facebook collecte sur les internautes ou mobinautes ne disposant pas de profil sur le réseau social. Ce sujet avait fait l’objet d’une attention toute particulière lors de l’audition de son patron Mark Zuckerberg au Congrès américain. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Facebook : l’humiliation de Mark Zuckerberg, convoqué devant le Congrès Facebook n’est bien entendu pas la seule entreprise à collecter des informations de la sorte. « Il y a des milliers d’entreprises qui font la même chose » a pointé Mme Kaltheuner.
30/12/2018
pixels
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/12/30/donnees-personnelles-sur-les-telephones-android-des-applications-tres-bavardes-avec-facebook_5403566_4408996.html
Bercy veut que les patrons d’entreprise française paient leurs impôts en France
Dans un entretien au « JDD », Gérald Darmanin, le ministre des comptes publics, assure que le gouvernement est « prêt à prendre toutes les mesures nécessaires » pour s’en assurer.
Gérald Darmanin, le ministre de l’action et des comptes publics. FRANCOIS MORI / AP « Comme l’a dit le président de la République, les dirigeants d’entreprises cotées ou dont l’Etat est actionnaire doivent impérativement être résidents fiscaux français », a assuré Gérald Darmanin au Journal du dimanche (JDD) du 30 décembre. Le ministre de l’action et des comptes publics confirme donc l’intention exprimée par Emmanuel Macron lors de son discours du 10 décembre en plein mouvement des « gilets jaunes ». La mesure se veut un signe de « civisme fiscal », sorte de pendant à la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, a ajouté M. Darmanin, qualifiant l’ISF d’« impôt absurde ». La tâche ne s’annonce pas forcément aisée, mais le ministre promet que « nous sommes prêts à prendre toutes les mesures nécessaires » si les dirigeants concernés s’abstiennent. Lire aussi Les annonces inapplicables de Macron contre l’évasion fiscale Renégociation des conventions bilatérales ? D’après l’hebdomadaire, Bercy envisagerait de renégocier les conventions fiscales entre pays, notamment en Europe. Mais avec 159 conventions bilatérales signées à travers le monde pour ne pas imposer deux fois les revenus, l’initiative, qui pourrait prendre des années, ne convainc pas tous les fiscalistes. Toujours est-il, rappelle Le JDD, que certains PDG parviennent, en effet, à échapper au fisc français, en payant, par exemple, leurs impôts au Royaume-Uni, en Belgique ou au Portugal, des terres plus accueillantes en termes de taxation.
30/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/30/bercy-veut-que-les-patrons-d-entreprises-francaises-paient-leurs-impots-en-france_5403563_3234.html
Le réalisateur hongkongais Ringo Lam est mort
Le spécialiste de films d’action a été retrouvé inanimé dans son lit par sa femme samedi. M. Lam avait 63 ans. Il a notamment inspiré Quentin Tarantino avec « City on Fire ».
Ringo Lam (à droite) au côté du réalisateur Johnnie To lors de la présentation de « Triangle » au Festival de Cannes en mai 2007. ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP Même moins célèbre, il était de ceux, avec John Woo, Tsui Hark ou Johnnie To, qui ont fait du film d’action hongkongais une référence des cinéphiles dans les années 1980 et 1990. Ringo Lam est décédé, samedi 29 décembre, retrouvé inanimé dans son lit par sa femme selon le Apple Daily, un journal hongkongais. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les films de Hongkong dans le temple de la cinéphilie Son film le plus marquant reste City on Fire (1987), l’histoire d’un policier infiltré incarné par Chow Yun-fat. Star montante à l’époque, l’acteur avait rencontré Lam lorsqu’ils prenaient tous les deux des cours de comédie. Succès public, le long-métrage a valu au réalisateur un Hongkong Film Award, l’équivalent local d’un Oscar. Il l’a aussi éloigné des comédies que Lam avait tournées au début de sa carrière. Le magazine Variety rappelle que City on Fire a inspiré Quentin Tarantino pour Reservoir Dogs, notamment les plans de gangsters marchant côte à côte dans leur costume noir. « C’est un film vraiment cool. Il m’a beaucoup influencé », a volontiers reconnu l’Américain dans The Baltimore Sun. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Quand Ringo inspirait Tarantino JCVD en deuil M. Lam, passé par une école de cinéma au Canada, a également tourné en Occident, utilisant, à l’instar de John Woo (Chasse à l’homme en 1993) ou Tsui Hark (Double Team en 1997), Jean-Claude Van Damme comme porte d’entrée. Mais Risque maximum (1996), Replicant (2001) ou In Hell (2003), tous avec le Belge en tête d’affiche, ont laissé le box-office indifférent. Sur Twitter, l’acteur s’est dit « profondément attristé » par le décès du réalisateur. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les cinéastes de Hongkong écartelés entre Hollywood et la Chine Lassé par le fonctionnement de l’industrie cinématographique sur son île, M. Lam a moins tourné dans les années 2000, collaborant tout de même avec Tsui Hark et Johnnie To sur l’un des trois segments de Triangle, présenté hors compétition au Festival de Cannes en 2007. Son dernier film Sky on Fire, avec Daniel Wu, est sorti en 2016. Informé de sa disparition, l’acteur qui partage sa carrière entre Hollywood et Hongkong, a décrit Ringo Lam comme un « maestro » et un « réalisateur légendaire » dans un post sur Facebook.
30/12/2018
disparitions
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2018/12/30/le-realisateur-hongkongais-ringo-lam-est-mort_5403558_3382.html
La permanence d’un député LRM encore taguée, cette fois en Gironde
Florent Boudié, élu en Gironde, a porté plainte pour « provocation à la haine ».
« Islamo-collabo. Les mineurs isolés dans ton cul » : les murs de la permanence du député La République en marche Florent Boudié à Libourne ont été tagués à la peinture, dans la nuit de dimanche à lundi. L’élu de Gironde a annoncé porter plainte pour « provocation à la haine », lundi 31 décembre. Dégradation de ma permanence la nuit dernière: des inscriptions stupides & grossières. Mais plus encore: une incita… https://t.co/3eX7MAkNEr — florent_boudie (@Florent Boudié) Ce tagage est « vraisemblablement le fait de la mouvance identitaire, anti-musulmans et anti-migrants, dans une circonscription où le Rassemblement National avait obtenu plus de 40 % des voix » au second tour des législatives de juin 2017, écrit-il dans un communiqué. « Incitation à la haine » « Ces insultes ne sont pas seulement grossières et stupides. Elles expriment une grave incitation à la haine et à la discrimination. Elles soulignent la dérive d’une frange toujours plus active de militants désinhibés qui se vivent comme la pointe avancée, brutale et violente, de l’extrême droite nationaliste et xénophobe », ajoute-t-il. Le député rappelle travailler à l’Assemblée nationale « pour donner à l’islam de France un cadre et des règles » ainsi que « pour apporter une réponse humaine et digne à la question de la rétention des enfants étrangers en situation irrégulière ». Cet incident s’ajoute à plusieurs dégradations de permanence de députés depuis novembre, comme les coups portés contre celle de Guillaume Chiche à Niort ou le tag « dégage » « barbouillé » sur la « façade » du député LRM de l’Hérault, Philippe Huppé, à la veille de Noël. Veille de Noël, les #JG ont encore barbouillé ma façade. Cela ne peut que renforcer ma détermination et l’opinion… https://t.co/FiGSwBlSUi — PhilippeHuppe (@Philippe HUPPE) D’autres élus de la majorité ont fait l’objet de menaces, notamment sur les réseaux sociaux, mais aussi près de leurs domiciles. La députée LRM de l’Aude, Mireille Robert, avait porté plainte à la fin de novembre, après avoir affirmé que des « gilets jaunes » encagoulés et casqués s’étaient introduits dans sa propriété pour allumer un feu et proférer des menaces. Le 7 décembre, c’est le député « marcheur » du Pas-de-Calais Benoit Potteriequi a, par courrier à sa permanence, reçu une balle la veille d’une manifestation.
31/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/31/la-permanence-d-un-depute-lrm-encore-taguee-cette-fois-en-gironde_5404040_3224.html
Les vœux d’Emmanuel Macron critiqués par l’opposition et les « gilets jaunes »
Les opposants du président ont dénoncé un discours « loin de la réalité des Français », « donneur de leçons » ou encore « moralisateur ».
Le chef de l’Etat n’a pas fait de nouvelles annonces sociales lors de ses voeux télévisés, lundi 31 décembre. Cette absence de nouveaux gestes a été immédiatement critiquée par certains « gilets jaunes » mobilisés sur de nombreux sites en France. « Il a rallumé le feu, il a décrété qu’il ne ferait rien pour nous aider. S’il veut rien faire, on restera là comme on l’a décidé », a annoncé Marc, 40 ans, qui a regardé l’intervention avec une quinzaine de personnes près du Mans. « Franchement, il est sourd, il ne montre aucun signe d’apaisement. Les gens vont continuer de plus belle », a averti Rabah, 52 ans, qui avait prévu de fêter le réveillon sur le pont d’Aquitaine à Bordeaux. Sur les Champs-Elysées, épicentre parisien du mouvement, quelques dizaines de « gilets jaunes », mêlés aux touristes et badauds, ont scandé des « Macron démission » et entonné des Marseillaises au moment de l’allocution présidentielle. « Jamais je vais l’écouter ! On n’attend rien de lui, on veut qu’il démissionne », lance Laetitia Karen, Parisienne de 48 ans. Emmanuel Macron avait annoncé 10 milliards d’euros d’aides en faveur du pouvoir d’achat pour tenter de répondre aux demandes des « gilets jaunes » lors d’une allocution télévisée le 10 décembre. « Imposteur » et « pyromane » Les opposants de droite et gauche ont également critiqué les voeux d’Emmanuel Macron, estimant qu’il va renforcer la mobilisation des « gilets jaunes ». « Ce président est un imposteur » et « un pyromane », a lancé Marine Le Pen dans deux tweets successifs. Et un pyromane... MLP https://t.co/7ZZqezToQq — MLP_officiel (@Marine Le Pen) « On ne sait pas pourquoi mais tout ce qu’il dit tombe à plat. Et quand on comprend, on préférerait ne pas avoir entendu. Quel lunaire donneur de leçons. » , a écrit de son côté Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise), fustigeant dans un autre tweet « le président des riches ». On ne sait pas pourquoi mais tout ce qu'il dit tombe à plat. Et quand on comprend, on préférerait ne pas avoir ente… https://t.co/3rJjxMKDNt — JLMelenchon (@Jean-Luc Mélenchon) La porte-parole des Républicains, Laurence Sailliet, estime que le président « a récité un texte sans émotion, sans conviction et si loin de la réalité des Français », tandis que le secrétaire national du PCF Fabien Roussel dénonce « un président moralisateur qui va poursuivre ses réformes sans tenir compte des colères, des attentes de ceux qui aspirent tout simplement à vivre mieux ».
31/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/31/les-v-ux-d-emmanuel-macron-critiques-par-l-opposition-et-les-gilets-jaunes_5404036_823448.html
Vœux 2018 : Emmanuel Macron déterminé mais réceptif à la « colère »
Sans prononcer les mots « gilets jaunes », le chef de l’Etat a bâti son discours en réaction au mouvement qui a déchiré la France, et a encore fait tomber sa cote de popularité.
« Je suis au travail ! » Dix-neuf mois après son élection à la présidence de la République et alors qu’il vient de vivre six semaines de violente contestation, Emmanuel Macron est apparu offensif lors de ses vœux aux Français, diffusés lundi 31 décembre. Comme un symbole, c’est debout que le chef de l’Etat a d’ailleurs prononcé son allocution, enregistrée en fin de journée dans le salon d’angle de l’Elysée, là où se trouve son bureau. Même si Emmanuel Macron n’a pas prononcé une seule fois les mots « gilets jaunes », ceux-ci ont été omniprésents durant les dix-sept minutes de son intervention. « L’année 2018 ne nous a pas épargnés en émotions intenses », a ainsi reconnu le chef de l’Etat. « Nous avons vécu de grands déchirements », a-t-il poursuivi, utilisant à plusieurs reprises le mot de « colère » pour expliquer les manifestations et blocages de ronds-points vécus ces dernières semaines un peu partout en France. La responsabilité de ses prédécesseurs Selon le chef de l’Etat, cette « colère » n’est pas nouvelle et vient « de loin », manière de faire porter tout ou partie de sa responsabilité sur ses prédécesseurs. Il y a en France une « colère contre les injustices, contre le cours d’une mondialisation parfois incompréhensible, colère contre un système administratif devenu trop complexe et manquant de bienveillance, colère aussi contre des changements profonds qui interrogent notre société sur son identité et son sens, a énuméré M. Macron, ajoutant : J’ai grandi en province et je connais ces terres (…) qui parfois doutent. » Désireux de se montrer réceptif à cette colère, l’ancien ministre de l’économie a donné quelques gages aux « gilets jaunes ». Il a par exemple dénoncé le « capitalisme ultralibéral et financier, trop souvent guidé par le court terme et l’avidité de quelques-uns », et reconnu qu’il fallait « remettre l’homme au cœur » de son action. Il a aussi estimé qu’il fallait « lutter contre les intérêts profonds qui, parfois, bloquent notre société et notre Etat ». « Nous devons faire mieux », a-t-il concédé, expliquant qu’il allait écrire aux Français dans les prochains jours afin de préciser les contours du grand « débat national » promis pour répondre à la crise et qui doit débuter mi-janvier. Pour autant, pas question pour le président de la République, rentré lundi matin du fort de Brégançon (Var), où il séjournait depuis le 25 décembre, de courber l’échine. Alors que des violences ont encore émaillé certaines manifestations de « gilets jaunes », samedi 29 décembre, M. Macron a fustigé les « porte-voix d’une foule haineuse » qui s’en prendraient, selon lui, « aux élus, aux forces de l’ordre, aux journalistes, aux juifs, aux étrangers, aux homosexuels » au prétexte de « parler au nom du peuple ».
31/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/31/v-ux-2018-emmanuel-macron-determine-mais-receptif-a-la-colere_5404032_823448.html
Emmanuel Macron appelle à une « unité retrouvée »
Dans son allocution télévisée, le chef de l’Etat a appelé à « en finir avec le sentiment d’impuissance ». Il écrira aux Français « dans quelques jours » au sujet du grand débat national lancé après la crise des « gilets jaunes ».
Emmanuel Macron lors de ses vœux à l’Elysée, le 31 décembre à Paris. MICHEL EULER / AFP « Notre avenir ne se fera pas autrement que par une unité retrouvée et un effort de chacun », a déclaré Emmanuel Macron lors de son allocution télévisée, lundi 31 décembre à 20 heures. Soulignant les « émotions intenses de toute nature » qu’a traversées la France en 2018, le président français a présenté ses vœux pour la nouvelle année sous le signe du rassemblement. « Nous ne sommes pas résignés » Sans citer les « gilets jaunes », le chef de l’Etat a évoqué dans son allocution « de grands déchirements et une colère qui venait de loin : colère contre les injustices, contre le cours d’une mondialisation parfois incompréhensible, colère contre un système administratif devenu trop complexe et manquant de bienveillance, colère aussi contre des changements profonds qui interrogent notre société sur son identité et son sens. » Il a ajouté : « Cette colère a dit une chose : nous ne sommes pas résignés. Notre pays veut bâtir un avenir meilleur reposant sur notre capacité à inventer de nouvelles manières de faire et d’être ensemble. Telle est à mes yeux la leçon de 2018. » Emmanuel Macron a estimé que « les résultats » des réformes engagées depuis le début du quinquennat « ne peuvent pas être immédiats et l’impatience que je partage ne saurait justifier aucun renoncement ». Il a évoqué le grand « débat national » lancé après la crise des gilets jaunes : « [Il] doit nous permettre de parler vrai et je vous écrirai dans quelques jours pour vous en préciser les attentes ». Il a également mis en garde contre le « déni flagrant de réalité » dans lequel « nous nous sommes installés » : « On ne peut pas travailler moins, gagner plus, baisser nos impôts et accroître nos dépenses, ne rien changer à nos habitudes et respirer un air plus pur ». « Nous dépensons pour le fonctionnement et en investissement pour notre sphère publique plus que la moitié de ce que nous produisons chaque année », a souligné le président de la République. « Nous pouvons faire mieux et nous devons faire mieux », a-t-il toutefois ajouté. « Nous assurer que nos services publics restent présents partout où nous en avons besoin. Que les médecins s’installent où il en manque, dans certaines campagnes ou dans des villes ou des quartiers où il n’y en a plus ». Un « vœu de vérité » Le président a par ailleurs affirmé dans une allusion aux débordements des « gilets jaunes » que « l’ordre républicain sera assuré sans complaisance ». « Que certains prennent pour prétexte de parler au nom du peuple (…) et n’étant en fait que les porte-voix d’une foule haineuse, s’en prennent aux élus, aux forces de l’ordre, aux journalistes, aux juifs, aux étrangers, aux homosexuels, c’est tout simplement la négation de la France », a encore ajouté le président. M. Macron a aussi dénoncé la désinformation, les « manipulations » et les « intoxications » qui entament selon lui la « confiance démocratique ». « Parler vrai, c’est parler de la réalité », a-t-il lancé, énonçant un « vœu de vérité ». « On peut débattre de tout », a-t-il poursuivi, « mais débattre du faux peut nous égarer, surtout lorsque c’est sous l’impulsion d’intérêts particuliers. A l’heure des réseaux sociaux, du culte de l’immédiateté et de l’image, du commentaire permanent, il est indispensable de rebâtir une confiance démocratique dans la vérité de l’information reposant sur des règles de transparence et d’éthique ». « Projet européen renouvelé » Le scrutin européen prévu en mai prochain revêt une importance cruciale pour le chef de l’État : il sera le premier grand test électoral de son quinquennat. Emmanuel Macron a donc annoncé qu’il proposera dans les prochaines semaines aux Français « un projet européen renouvelé ». « Je crois très profondément dans cette Europe qui peut mieux protéger les peuples et nous redonner espoir », a-t-il assuré. « Ce que nous voulons profondément c’est retrouver la maîtrise de notre quotidien et de notre destin, ne plus subir », a-t-il affirmé, énumérant : « Retrouver la maîtrise de notre vie, c’est choisir notre alimentation, assurer la justice fiscale, c’est nous protéger contre nos ennemis, c’est investir pour innover, c’est apporter une réponse commune aux migrations. » Affirmant vouloir « en finir avec le sentiment d’impuissance », il a conclu : « Je crois en nous, dans ce projet français et européen que nous pouvons porter ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Macron face à l’équation délicate de 2019
31/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/31/voeux-2018-emmanuel-macron-appelle-a-une-unite-retrouvee_5404028_823448.html
Audiences 2018 des chaînes historiques en hausse, sauf M6
En tête des parts d’audience, TF1 décroche aussi la palme des programmes les plus regardés et de la meilleure audience dans chaque type de programme.
Après avoir reculé ces dernières années au profit de la TNT, les chaînes historiques ont vu leurs audiences repartir à la hausse en 2018. Profitant du Mondial, le leader TF1 termine l’année avec une part d’audience (pda) de 20,2 % selon les données de Médiamétrie publiées lundi 31 décembre. La « Une », codiffuseur de la Coupe du monde de football avec BeIN Sports, décroche la première place des programmes les plus regardés avec la finale de la compétition (19,4 millions de téléspectateurs). TF1 enregistre aussi la meilleure audience dans chaque type de programmes : divertissement (« Les Enfoirés », 10,2 millions), information (déclaration d’Emmanuel Macron pendant la crise des « gilets jaunes », 9,7 millions), fiction française (Jacqueline Sauvage, 8,8 millions), cinéma (Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ?, 8,5 millions) et série étrangère (Good Doctor, 7,9 millions). Succès des fictions Sur la deuxième marche du podium, France 2, avec 13,5 % de pda, a bénéficié de la remontée de ses après-midi, la tranche horaire 14 heures-20 heures affichant son plus haut score depuis 2010. La « Deux » se félicite aussi du lancement de son feuilleton quotidien Un si grand soleil, qui réunit en moyenne 3,8 millions de téléspectateurs (15,9 % de pda) depuis ses débuts fin août. Bénéficiant également de ses fictions, France 3 se hisse sur la troisième marche des audiences avec 9,4 % de pda, et signe sa meilleure année depuis 2014. La chaîne bénéficie notamment de sa série à succès Capitaine Marleau, en tête des fictions françaises derrière Jacqueline Sauvage. Toujours côté hausse, Arte bat son record d’audience en 2018, avec 2,4 % de pda (+ 0,2 point), grâce au cinéma mais aussi aux documentaires comme Le Monde selon Xi Jinping, qui a attiré plus d’un million de téléspectateurs. Quelques petites chaînes ont tiré leur épingle du jeu, comme RMC Découverte (2,2 %), RMC Story (ex-Numéro 23, 1,4 %), Gulli (1,7 %) ou L’Equipe, qui signe son record avec 1,2 % de pda grâce aux avant-matchs et débriefs du Mondial de foot. Après une année 2017 en berne, M6 ne remonte pas la pente en 2018 et affiche une audience en baisse, à 9,1 %. Pour se renouveler, la chaîne mise notamment sur la fiction française avec plusieurs lancements prévus en 2019. Canal+ reste stable avec 1,2 % de pda. L’année 2018 a profité aux chaînes d’info, BFM-TV attirant 2,6 % des téléspectateurs, CNews et LCI 0,7 % et Franceinfo 0,4 %. Les chaînes ont aligné les records en décembre, portées par la couverture des « gilets jaunes ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’heure de la transformation a sonné pour France Télévisions
31/12/2018
actualite-medias
https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2018/12/31/audiences-2018-des-chaines-historiques-en-hausse-sauf-m6_5404025_3236.html
A Orléans, SOS Amitié à votre écoute coûte que coûte
Chaque semaine, Frédéric Potet sillonne la France pour relater les petits et grands événements. Dans le Loiret, les bénévoles de SOS Amitié répondent aux appels des personnes déprimées.
Le poste d’écoute de SOS Amitié à Orléans. F.P. La période des fêtes est un enfer pour ceux qui ne la font pas, la fête. A SOS Amitié, on connaît bien le sujet : entre Noël et le Nouvel An, les appels sont plus nombreux, plus sensibles aussi. ­Bénévole depuis quinze ans au sein de l’antenne d’Orléans de l’association, Alain a appris à distinguer deux grands types de profils, chaque fin d’année. Ici, les personnes seules qui se désespèrent de voir les autres s’amuser « alors qu’elles ne sont invitées nulle part, n’ayant plus de liens familiaux ». Là, celles à qui les convenances imposent de « faire semblant d’être joyeux pendant les fêtes » avec des proches qu’ils n’aiment pas : « Les familles ne sont pas toujours le lieu du bonheur », rappelle Alain. « Ce fut très émouvant d’accompagner ce moment d’angoisse même si on sait très bien que la solitude vous revient à la figure sitôt raccroché. » Alain, « écoutant » de SOS Amitié L’homme ne dira pas son patronyme, et nous ne dévoilerons pas l’adresse de l’appartement où les trente-trois « écoutants » de l’association orléanaise se relaient quotidiennement pour échanger, anonymement, avec des êtres en détresse. Une pièce est occupée par un bureau sur lequel un téléphone et un ordinateur ont été installés. Dans le salon, une demi-douzaine de fauteuils forment un cercle : c’est ici que les bénévoles se retrouvent deux fois par mois pour débriefer, avec un psychiatre, et pour échanger autour du concept d’« écoute active » développé par le psychologue humaniste américain Carl Rogers. Au siège orléanais de SOS Amitié. FP Ancien prof de français, Alain, 75 ans, se souvient d’un soir de la Saint-Sylvestre, où un homme a appelé alors qu’il réveillonnait seul : « Il a souhaité que je reste avec lui au téléphone, afin de “partager” le repas modeste qu’il avait préparé, autour d’une petite bouteille de vin. Ce fut très beau, très émouvant, d’accompagner ce moment d’angoisse, qui s’est sans doute allégée, même si on sait très bien que la solitude vous revient à la figure, sitôt raccroché. » Activiste de l’empathie Contrairement au Père Noël est une ordure (1982), le long-métrage à succès de Jean-Marie Poiré dans lequel plusieurs angoissés de l’existence défilent dans le local d’une association quasi homonyme (« SOS Détresse-Amitié »), les personnes en souffrance ne rencontrent jamais leurs interlocuteurs, à SOS Amitié. La mise en place d’une plate-forme d’appels nationale, il y a trois ans, a même dilaté un peu plus la relation entre écoutants et appelants : auparavant, un bénévole d’Orléans pouvait retrouver au bout du fil certains « habitués », originaires de l’agglomération ou du département ; les appels viennent aujourd’hui de partout en France. Comme dans le film, en revanche, le désir de suicide est une réalité – c’est pour prévenir ce fléau que SOS Amitié a été créé en 1960. A « trois ou quatre reprises », Alain s’est trouvé confronté à des personnes affirmant « avoir tout préparé » – comprendre : avoir sorti les médicaments de l’armoire à pharmacie pour les ingurgiter. Le but est alors de les garder en ligne le plus longtemps possible, parfois pendant une heure trente, en leur demandant si elles n’auraient pas encore quelques raisons de vivre. « Et vos chats, que vont-ils devenir sans vous ? », n’est-il pas rare de demander. Une fois, Alain a dû appeler les secours avant que ne soit commis l’irréparable, avec l’accord du désespéré (seul cas où celui-ci est invité à donner ses coordonnées). Une autre fois, il est resté seul au téléphone : « La personne était dans son lit. J’ai entendu comme un râle, qui s’est éteint. Je ne sais pas ce qui s’est passé. Cela vous fiche un sacré coup derrière la tête », raconte cet activiste de l’empathie qui, par principe et éthique, ne juge jamais ceux et celles qui composent le numéro. « Vous donnez beaucoup en écoutant les autres, mais vous recevez beaucoup aussi. En humanité », lâche Alain avant de rejoindre son poste d’écoute. Au dernier étage d’un immeuble d’une ville appelée Orléans. Lire aussi A Amboise, le Père Noël préfère le côté obscur
31/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/31/a-orleans-sos-amitie-a-votre-ecoute-coute-que-coute_5404023_4497916.html
Charles Aznavour, Joël Robuchon, Maurane… Ils nous ont quittés en 2018
Ils étaient artistes, politiques, sportifs, de diverses nationalités. Retour sur les disparitions marquantes de l’année 2018.
Alors que 2018 vit ses dernières heures, c’est l’occasion de revenir sur ces chanteurs, ces comédiens, ces sportifs ou ces chefs cuisiniers qui nous ont quittés cette année. Ces derniers mois, comme un dernier hommage, on a ainsi pu découvrir ou redécouvrir les œuvres de Charles Aznavour, Aretha Franklin ou encore Jacques Higelin. De grandes figures du petit écran, comme Philippe Gildas ou Pierre Bellemarre, ont emporté avec eux de nombreux souvenirs télévisuels de plusieurs générations de Français. Et aux Etats-Unis, la mort de l’ancien président George H. W. Bush, de son épouse Barbara et du sénateur républicain John McCain marquent la fin d’une époque. Retour sur les disparitions qui nous ont marqués cette année. Musique France Gall. Elle a disparu dès les premiers jours de l’année, le 7 janvier. De France Gall, on retient notamment sa victoire pour le Luxembourg à l’Eurovision en 1965 avec Poupée de cire, poupée de son, de Serge Gainsbourg. Sa rencontre avec Michel Berger en 1973 a constitué le tournant de sa carrière. Ensemble, ils ont enchaîné les succès musicaux : Musique, Viens je t’emmène, Besoin d’amour, Il jouait du piano debout, Tout pour la musique, Résiste, Diego, Evidemment, Ella, elle l’a… Elle a succombé à un cancer à l’âge de 70 ans. Dolores O'Riordan le 7 juillet 2016. GUILLAUME SOUVANT / AFP Dolores O’Riordan. Chanteuse du groupe irlandais de pop-rock The Cranberries, Dolores O’Riordan, est retrouvée morte dans sa chambre d’hôtel le 15 janvier à Londres. Devenu célèbre dans les années 1990, avec des tubes comme Zombie (sur la guerre en Irlande du Nord), Just My Imagination ou Animal Instinct, le groupe a vendu plus de 40 millions d’albums à travers le monde. Le chanteur Jacques Higelin se produit sur la scène de l'Olympia, le 17 janvier 2005 à Paris. AFP/BERTRAND GUAY Jacques Higelin. Avec la mort de Jacques Higelin, le 6 avril, la scène musicale française a perdu un chanteur et poète engagé. En plus de cinquante ans de présence sur scène, Higelin a fait voltiger les mots, les mélodies, les rythmes, les sons, tour à tour facétieux ou sauvage. C’est à la fin des années 1970 qu’il est devenu un artiste reconnu et une bête de scène. De nombreux tubes resteront malgré sa disparition : Tête en l’air, Hold Tight, Tombé du ciel, ou encore son titre-phare, Champagne. Avicii, le 30 mai 2015. BJORN LARSSON ROSVALL/TT NEWS AGENCY/AFP Avicii. A seulement 28 ans, il était l’un des DJ les plus célèbres de la scène musicale électronique. Avicii, qui a connu un succès mondial lors de la sortie de son titre Wake Me Up en 2013, a été retrouvé mort le 20 avril à Mascate, la capitale du sultanat d’Oman. L’annonce de sa disparition a bouleversé la Suède. Dès le lendemain, des milliers de fans lui ont rendu hommage à Stockholm. Maurane. Interprète à la voix puissante, généreuse, la chanteuse belge Maurane, de son vrai nom Claudine Luypaerts, est morte lundi 7 mai, à son domicile, à Bruxelles. Elle s’était révélée au grand public en 1988 avec sa participation, dans le rôle de Marie-Jeanne, à la deuxième version de la comédie musicale Starmania de Michel Berger et Luc Plamondon. Elle a publié une douzaine d’albums au fil de sa carrière, le dernier, Ouvre, datant de 2014. Ses chansons les plus populaires étaient Sur un prélude de Bach, Tu es mon autre ou encore Tout faux. Elle avait interrompu sa carrière en 2016 à cause de problèmes aux cordes vocales. Yvette Horner, le 17 février 1987. GEORGES BENDRIHEM / AFP Yvette Horner. C’était la reine de l’accordéon et des bals populaires. L’accordéoniste est morte le 11 juin à l’âge de 95 ans. Immensément populaire, plus encore que son alter ego masculin André Verchuren, Yvette Horner aurait vendu 30 millions de disques – tous supports confondus. Elle avait donné son ultime récital en 2011 et publié l’année suivante un dernier enregistrement, Yvette hors norme, comprenant des duos avec Lio, Michel Legrand et Richard Galliano. Aretha Franklin, le 21 juin 1978. HANDOUT/REUTERS Aretha Franklin. Décédée le 31 août à 76 ans, « la Reine de la soul » a eu droit à des funérailles grandioses – six heures durant –, dans sa ville de Detroit, où des milliers d’admirateurs sont venus lui rendre hommage. Aretha Franklin était l’une des plus grandes voix américaines et une figure emblématique de la communauté noire, qui a marqué des générations entières d’artistes. La chanteuse américaine avait fait de Respect un hymne universel pour l’égalité. Mac Miller, le 28 octobre 2017. KEVIN WINTER / AFP Mac Miller. Le rappeur, qui avait conquis ses fans grâce à un hip-hop rétro, est mort le 7 septembre à l’âge de 26 ans. Dans ses chansons, Mac Miller parlait ouvertement de ses problèmes d’addiction, notamment à la codéine et avait dit à l’occasion de la sortie en août de son cinquième album enregistré en studio, Swimming, qu’il allait de mieux en mieux. Connu également pour avoir été le petit ami de la star Ariana Grande, ses chansons comportaient un son minimaliste avec un rythme puissant rappelant les prémices du rap. Charles Aznavour, le 19 novembre 2017. ROMAIN LAFABREGUE / AFP Charles Aznavour. Plus de soixante-dix ans de carrière, 1 400 chansons, dont une centaine d’anthologie, une soixantaine de films… La France a perdu un de ses chanteurs les plus populaires avec la disparition le 1er octobre de Charles Aznavour à l’âge de 94 ans. Que ce soit en France ou en Arménie, la terre de ses ancêtres, les hommages se sont multipliés à l’annonce de sa mort. Et un hommage national lui a été rendu à Paris en présence du président de la République, Emmanuel Macron, de 200 personnalités et de milliers d’admirateurs. Cinéma, théâtre et télévision Christophe Salengro lors d’une visite du Musée Georges-Labit, à Toulouse, le 16 septembre 2015. Pablo Tupin-Noriega/ Wikimedia france Christophe Salengro. C’était le rôle de sa vie. Depuis 1992, Christophe Salengro était le président « autoélu à vie et inmourable » de « Groland », l’émission satirique de Canal+. « Il restera président pour l’éternité », a d’ailleurs salué la chaîne cryptée en annonçant sa mort le 30 mars. Mais avant d’être une figure de « Groland », Christophe Salengro a également été danseur au sein de la compagnie DCA de Philippe Découflé. Pierre Bellemare, le 22 novembre 2016. JOEL SAGET / AFP Pierre Bellemare. Sa stature de tribun populaire a fait de lui l’un des animateurs les plus appréciés du petit écran, des années 1960 au milieu des années 1980. Pierre Bellemare s’est éteint à l’âge de 88 ans, le 26 mai. Il a notamment présenté et produit un grand nombre de programmes entre 1954 et 1977, dont « La Caméra invisible », « Rien que la vérité », « 20 Millions cash », « Pièces à conviction », « Les Dossiers extraordinaires »… Claude Lanzmann, le 11 février 2016. JOËL SAGET/AFP Claude Lanzmann. Défenseur acharné de la cause d’Israël, le journaliste et cinéaste, mort le 5 juillet, était notamment l’auteur du documentaire « Shoah », consacré à l’extermination des juifs pendant la seconde guerre mondiale. D’une durée de neuf heures et demie, ce film est réalisé à partir de trois cent cinquante heures de prises de vues, effectuées entre 1974 et 1981. Il est le fruit de douze années de travail autour de la parole des protagonistes des camps de concentration et d’extermination. Jean Piat. Homme de théâtre connu du grand public pour son rôle de Robert d’Artois dans le feuilleton télévisé Les Rois maudits en 1972, Jean Piat est mort le 18 septembre à 93 ans. Tour à tour pendant plus de soixante-dix ans, Jean Piat aura été Don César (Ruy Blas), Alceste (Le Misanthrope) ou Don Quichotte, chantant après Jacques Brel, dans L’Homme de la Mancha. Interprète des grands rôles classiques et romantiques, Jean Piat fut surtout un grand Cyrano de Bergerac, qu’il incarnera près de quatre cents fois. Venantino Venantini, le 30 novembre 2013. VALERY HACHE / AFP Venantino Venantini. Il était le dernier des Tontons flingueurs. Venantino Venantini était notamment connu pour avoir incarné Pascal, l’homme de main flegmatique « à la présence tranquillisante » du gangster « le Mexicain » dans le film de Georges Lautner en 1963. Il s’est éteint le 9 octobre à 88 ans après une riche carrière au cinéma en France et en Italie, où il a tourné sous la direction de grands réalisateurs tels qu’Ettore Scola, Lucio Fulci, Claude Lelouch, Edouard Molinaro, Jean Yanne ou encore Christian-Jaque. Et dans les dernières années de sa vie, Venantino Venantini s’est surtout consacré à la peinture. Philippe Gildas, le 6 mars 2010. LIONEL BONAVENTURE / AFP Philippe Gildas. Connu du grand public pour avoir animé l’émission culte de Canal+ « Nulle part ailleurs », Philippe Gildas est mort le 28 octobre à l’âge de 82 ans. Outre son passage sur la chaîne cryptée, le journaliste a également dirigé la rédaction des trois plus importantes stations de radio, RTL, France Inter et Europe 1, et a présenté le journal télévisé au temps de l’ORTF d’après Mai 68. Stan Lee. EVAN HURD PHOTOGRAPHY / Corbis via Getty Images Stan Lee. Il est l’homme qui a révolutionné l’industrie des comics. Iron Man, Daredevil, Spider-Man… Le scénariste et éditeur de comics américain, mort le 12 novembre à 95 ans, était à l’origine d’une pléiade de superhéros. Il est aussi reconnu pour avoir fait de la bande dessinée américaine un registre artistique pas seulement réservé aux plus jeunes. Stephen Hillenburg, 31 janvier 2015. Charles Sykes / Charles Sykes/Invision/AP Stephen Hillenburg. Notamment connu pour avoir créé le dessin animé Bob l’éponge, Stephen Hillenburg est mort le 27 novembre des suites d’une maladie neurodégénérative. Lancé en 1999, Bob l’éponge met en scène un personnage à l’optimisme naïf qui vit au fond de l’océan Pacifique, dans la ville de Bikini Bottom. Diffusé dans plus de 150 pays, le dessin animé a rencontré un immense succès, au point que de nouveaux épisodes continuent d’être produits, quasiment vingt ans après la diffusion des premiers. Photo de l'autrice et comédienne Maria Pacôme prise le 13 décembre 2002 au théâtre de la Gaîté Montparnasse à Paris, au cours d'une répétition de la pièce « L'Eloge de ma paresse », mise en scène par Agnès Boury. FRANÇOIS GUILLOT / AFP Maria Pacôme. Figure du théâtre et du cinéma populaires, Maria Pacôme est morte le 1er décembre à 95 ans. Elle a été l’une des reines du théâtre de boulevard, dans des rôles de bourgeoises exubérantes et un visage familier au cinéma, où elle marqua les esprits en mère indigne et énervée dans La Crise. La comédienne a également connu le succès à la télévision, notamment dans Un chapeau de paille d’Italie, Ça commence à bien faire ! et dans la série Dr Sylvestre. Ecrivains et dessinateurs Tom Wolfe, en novembre 1986. AP Tom Wolfe. Connu notamment pour Le Bûcher des vanités (1987), le journaliste et écrivain américain est mort à l’âge de 88 ans, à la mi-mai. C’est à New York, dans les années 1960, quand il a commencé à travailler pour plusieurs quotidiens et magazines, dont Esquire, qu’il s’est fait remarquer. On a fait de lui l’inventeur d’un « nouveau journalisme ». S’ensuivirent d’immenses succès en librairie : Un homme, un vrai (1998), Moi, Charlotte Simmons (2004)… Philip Roth, le 15 septembre 2010. ERIC THAYER/REUTERS Philip Roth. A sa mort, le 22 mai, la presse américaine a salué la disparition d’une « figure prééminente de la littérature du XXe siècle ». Il a notamment été l’auteur de La Plainte de Portnoy (1969), Ma vie d’homme (1974), Le Théâtre de Sabbath (1995) ou encore La Tache (2000). Souvent cité, ce géant de la littérature américaine n’a pourtant jamais obtenu le prix Nobel de littérature. Amos Oz à Tel-Aviv, le 4 novembre 2015. DAN BALITY / AP Amos Oz. Considéré comme l’un des plus grands écrivains israéliens, Amos Oz est l’auteur d’une œuvre maintes fois primée, riche d’une vingtaine de romans et de recueils de nouvelles, ainsi que de nombreux essais. En plus de ses écrits, Amos Oz était connu pour ses prises de position politiques en faveur de la paix au Proche-Orient. Son autobiographie, Une histoire d’amour et de ténèbres (2004) est considérée comme son chef-d’œuvre. Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’écrivain israélien et militant pour la paix Amos Oz est mort René Pétillon, le 5 octobre 2009. STEPHAN AGOSTINI / AFP René Pétillon. Connu notamment pour avoir créé le personnage de Kack Palmer, un détective calamiteux, dont les péripéties ont été narrées à travers plusieurs albums, publiés entre 1976 et 2013, René Pétillon est mort fin septembre à 72 ans. Le dessinateur a notamment remporté le prix du meilleur album au Festival d’Angoulême en 2001, grâce à L’Enquête corse, qui avait été adapté au cinéma avec les acteurs Christian Clavier et Jean Reno. Dans le monde politique Winnie Mandela. Parfois critiquée pour la radicalité de son engagement, Winnie Mandela, morte le 2 avril à 81 ans, a été une icône populaire de la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud. Après avoir épousé Nelson Mandela en 1958, elle prend la tête de la contestation alors que son mari se trouve en prison. Elle s’entoure notamment d’un groupe de jeunes hommes formant sa garde rapprochée, le Mandela United Football Club (MUFC), aux méthodes particulièrement brutales. En 1998, la Commission vérité et réconciliation, chargée de juger les crimes politiques de l’apartheid, déclare Winnie « coupable politiquement et moralement des énormes violations des droits de l’homme » commises par le MUFC. Malgré leur divorce en 1996, une image restera : celle où le couple Mandela marche main dans la main à la libération de Nelson en 1990. Nicole Fontaine, le 14 avril 2004 à Paris. JACK GUEZ / AFP Nicole Fontaine. Ancienne présidente centriste du Parlement européen et ex-ministre de Jacques Chirac, Nicole Fontaine est morte le 18 mai à 76 ans. Elle s’était fait connaître en 1984 lors de la mobilisation contre le projet de loi Savary sur l’école privée, finalement retiré par François Mitterrand sous la pression de la rue. Elle fut eurodéputée de 1984 à 2002, et présida le Parlement européen de 1999 à 2002, avant d’intégrer le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin comme ministre déléguée à l’industrie (2002-2004). A la tête de ce portefeuille, elle avait porté la loi fondatrice de l’Internet français, la loi pour la confiance dans l’économie numérique. Le sénateur UMP Serge Dassault, en juin 2012. AFP/KENZO TRIBOUILLARD Serge Dassault. Industriel de l’armement, patron de presse et quatrième fortune de France, Serge Dassault est mort le 28 mai à 93 ans. Nommé en 1987 président-directeur-général de Dassault Industries (devenu depuis Groupe Dassault), il est également élu maire de Corbeil-Essonnes en 1995 et sénateur en 2004. Dans les dernières années de sa vie, Serge Dassault a été mêlé à plusieurs affaires de corruption. Il est condamné en février 2017 à deux millions d’euros d’amende et à cinq ans d’inéligibilité pour « blanchiment de fraude fiscale » et « omission de déclaration de patrimoine par un parlementaire ». Au début d’août, il est mis en examen pour « achat de votes », « blanchiment » et « complicité de financement illicite de campagne électorale ». Kofi Annan. Selon ses proches, l’ancien diplomate est mort le 18 août « paisiblement » des suites d’une « brève maladie », après une carrière riche ponctuée notamment par un prix Nobel de la paix. En 1997, le Ghanéen a succédé à Boutros Boutros-Ghali à la tête de l’Organisation des nations unies (ONU). Son mandat est notamment marqué par son opposition en 2003 à l’invasion « illégale » des Etats-Unis en Irak : cette opération n’avait pas été entérinée par le Conseil de sécurité. Après son départ de l’ONU en 2006, Kofi Annan est notamment devenu président de la Fondation de soutien à l’Organisation mondiale contre la torture en 2007. Il avait également accepté le poste de médiateur de l’ONU et de la Ligue arabe en Syrie, dont il a démissionné en 2012, estimant ne pas avoir « reçu tous les soutiens que la cause méritait ». John McCain en campagne, le 15 septembre 2008, à Jacksonville, en Floride. AP/Don Burk John McCain. Sa mort a marqué la fin d’une époque dans la politique américaine. Pourfendeur du président Donald Trump, qui n’a pas assisté à ses obsèques, John McCain est mort le 25 août d’un cancer du cerveau, à 81 ans. Portant haut son surnom de « maverick » (iconoclaste), il était le sénateur le plus connu à l’étranger et le plus anticonformiste. Un trompe-la-mort qui avait échappé, en juillet 1967, à une explosion sur le porte-avions USS Forrestal (134 victimes). ll est ensuite fait prisonnier par les Nord-Vietnamiens. Torturé à plusieurs reprises, il n’est libéré qu’en 1973. Candidat républicain à la présidentielle de 2008, il est battu par le candidat démocrate, Barack Obama. En 2016, pendant la campagne présidentielle, il exprime ses critiques envers le candidat républicain Donald Trump. Il deviendra, jusqu’à ses derniers instants, l’un des républicains les plus critiques du nouveau président. Robert Faurisson, le 14 septembre 2000. JACK GUEZ / AFP Robert Faurisson. Connu pour ses thèses contestant le génocide des juifs et l’existence de chambres à gaz, le négationniste est mort le 21 octobre à 89 ans. Professeur de littérature de l’université de Lyon, il affirmait que les chambres à gaz n’avaient jamais été utilisées pour gazer les hommes, mais qu’elles servaient d’épouillage en temps de guerre. Il a été le premier justiciable français condamné en vertu de la loi Gayssot de 1990, qui interdit de contester les crimes contre l’humanité définis en 1946 par le statut du tribunal de Nuremberg. George H.W. Bush et sa femme Barbara à Washington le 20 janvier 2009. AFP/PAUL J. RICHARDS George H. W. et Barbara Bush. L’ex-président républicain de 1989 à 1993 et vice-président de Ronald Reagan est mort le 30 novembre à l’âge de 94 ans. Il a notamment marqué l’histoire des Etats-Unis et des relations internationales pour avoir dirigé la coalition lors de l’opération « Tempête du désert », qui a chassé les forces du despote irakien Saddam Hussein hors du Koweït en 1991. Sa disparition est intervenue quelques mois après la mort de son épouse Barbara, qui avait décidé d’arrêter son traitement médical. Edmond Simeoni, le 26 janvier 2018. PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP Edmond Simeoni. C’était la figure corse la plus marquante des cinquante dernières années. Edmond Simeoni est mort le 14 décembre à Ajaccio à l’âge de 84 ans. Il est à la fois père fondateur du nationalisme insulaire, militant écologiste avant l’heure et conscience parfois controversée d’un courant d’idées traversé par de profondes lignes de fracture. Il est également le père de Gilles Simeoni, premier nationaliste à présider le Conseil exécutif corse. Dans le monde économique Sergio Marchionne, le 10 septembre 2014. ANTONIO CALANNI / AP Sergio Marchionne. L’emblématique administrateur et patron du grand groupe automobile Fiat Chrysler (FCA) est mort à 66 ans le 25 juillet. Il a été victime de complications alors qu’il se remettait d’une opération à l’épaule, fin juin. Le manageur italo-canadien aux éternels pulls ou polos noirs, qui avait pris les commandes de Fiat en 2004, prévoyait initialement de passer les rênes de FCA dans le courant de l’année 2019. En quatorze ans, il a profondément remodelé le groupe, d’abord en redressant Fiat, en l’alliant en 2014 à l’américain Chrysler, tout en détachant, d’une part, les activités gros engins-camions en 2011 pour créer CHN Industrial et, d’autre part, le joyau Ferrari, en janvier 2016. Ingvar Kamprad, le 3 décembre 2012. FABRICE COFFRINI / AFP Ingvar Kamprad. Mort à 91 ans, le 28 juillet, il a donné son nom à la société qu’il a créée en 1943 : « Ikea » est constitué des initiales d’Ingvar Kamprad Elmtaryd Agunnaryd. M. Kamprad a commencé ses activités, d’abord en vendant des allumettes à vélo, puis en continuant avec la vente par correspondance. Puis il a décidé de créer Ikea avec un objectif clair : meubler la classe moyenne mondiale en lui donnant accès à des produits de qualité au plus bas prix possible. Et donc à monter soi-même. En chemin, Ingvar Kamprad est devenu l’un des hommes les plus riches du monde, à la tête d’un empire qui, en 2016, a réalisé 34,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Paul Allen, le 2 février 2014. USA Today Sports / USA Today Sports Paul Allen. Pionnier et visionnaire dans le domaine de la micro-informatique, Paul Allen, qui est mort le 15 octobre à 65 ans, avait cofondé avec Bill Gates la société Microsoft en 1975. Il avait quitté la firme en 1983 pour fonder et présider Vulcan, une société d’investissement qui gère des actifs dans la culture, l’immobilier, les médias et le sport. Il était, par ailleurs, propriétaire de l’équipe de football américain de Seattle, les Seahawks, et de l’équipe de basket-ball de Portland (Oregon), les Trail Blazers. Avant sa mort, sa fortune était estimée à 20,3 milliards de dollars (17,5 milliards d’euros), selon le magazine Forbes. Dans le monde sportif Maria Esther Bueno dans les années 1960. - / AFP Maria Esther Bueno. Lauréate de 19 titres de Grand Chelem, dont sept en simple, la championne de tennis brésilienne est morte le 8 juin à 78 ans. En plus de vingt ans de carrière, elle a remporté la bagatelle de 589 trophées, dont trois titres en simple à Wimbledon (1959, 1960, 1964) et quatre à l’US National Championship (1959, 1963, 1964, 1966), ancêtre de l’US Open. La numéro 1 mondiale à l’issue de quatre saisons (1959, 1960, 1964 et 1966) est entrée au Hall of Fame du tennis en 1978. Née en 1939 à Sao Paulo, elle a soulevé son premier trophée majeur en 1958, remportant le double à Wimbledon aux côtés de l’Américaine Althea Gibson. Pierre Camou, le 2 juillet 2016. GAIZKA IROZ / AFP Pierre Camou. Mort le 15 août à l’orée de ses 73 ans, Pierre Camou était l’archétype du dirigeant à la carrière ascensionnelle, du terrain, comme joueur et patron de club, jusqu’à la présidence de la Fédération française de rugby (FFR). Il a notamment créé l’US Garazi à Saint-Jean-Pied-de-Port, avant de faire un passage au comité Côte basque-Landes et de devenir trésorier adjoint de la FFR en 1996. Après avoir été vice-président en 2000, il se présente donc naturellement en 2008 à la succession de Bernard Lapasset et il est élu à l’unanimité président de la FFR. Candidat à un troisième mandat en 2016, le Basque est détrôné par Bernard Laporte, ancien secrétaire d’Etat aux sports, après une âpre campagne. Henri Michel, le 24 avril 2018. ABDELHAK SENNA / AFP Henri Michel. A 38 ans, il avait déjà tout connu, la gloire de joueur au FC Nantes, le titre olympique comme sélectionneur et le banc des Bleus en demi-finales de Coupe du monde. Henri Michel avait ensuite exporté sa science du football en Afrique alors que le football français lui a tourné le dos. Mais il lui a rendu un hommage unanime le 24 avril, jour de sa mort à 70 ans. Quelques jours avant sa disparition, Henri Michel avait notamment été élu « légende des légendes » par les supporteurs nantais. Mais aussi… Marceline Loridan-Ivens, le 15 janvier 2015. DOMINIQUE FAGET / AFP Marceline Loridan-Ivens. Meurtrie à jamais par sa déportation à Auschwitz-Birkenau à l’âge de 15 ans, l’écrivaine et cinéaste Marceline Loridan-Ivens est morte le 19 septembre à l’âge de 90 ans, au terme d’une vie passée à dénoncer l’injustice et la violence. « C’est la fin d’une époque », celle des témoins de l’extermination des juifs d’Europe par les nazis, avait-elle affirmé en juin 2017, après la mort de sa camarade de déportation, Simone Veil. Joël Robuchon, le 14 janvier 2016. FRANCOIS GUILLOT / AFP Joël Robuchon. Détenteur du record absolu d’étoiles Michelin, le « pape des cuisiniers » Joël Robuchon, mort le 6 août à 73 ans, était à la tête d’un empire de la gastronomie française, dont il était le plus grand ambassadeur. D’origine modeste – père maçon, mère au foyer –, il a collectionné les distinctions au fil des années : meilleur ouvrier de France (1976), chef de l’année (1987), cuisinier du siècle (1990) et a même été qualifié par la presse anglo-saxonne de « meilleur du monde ». Stephen Hawking, le 18 août 2002. - / AFP Stephen Hawking. L’astrophysicien britannique Stephen Hawking, devenu une célébrité pour ses travaux sur l’Univers, qu’il scrutait depuis son fauteuil roulant, est mort le 14 mars à l’âge de 76 ans à Cambridge, suscitant un hommage unanime à travers le monde. Chercheur reconnu notamment pour ses découvertes sur les trous noirs, il était devenu une icône après la publication, en 1988, de l’ouvrage de vulgarisation scientifique Une brève histoire du temps. Paul Bocuse, le 24 mars 2011. LAURENT CIPRIANI / AP Paul Bocuse. Paul Bocuse, surnommé « le Pape » de la gastronomie française, qu’il a incarnée durant des décennies dans le monde entier, est mort le 20 janvier. Celui qui fut élu « cuisinier du siècle » s’est éteint à 91 ans dans sa célèbre auberge de Collonges-au-Mont-d’Or. Paul Bocuse souffrait depuis plusieurs années de la maladie de Parkinson. Ara Güler. Ses photographies avaient capté l’âme de sa ville, Istanbul, sa nostalgie, la douceur triste de ses paysages perdus au fil du temps par un implacable mouvement de transformation urbaine. Mercredi 17 octobre, Ara Güler s’est éteint dans la cité qui l’avait vu naître. Il avait 90 ans. Né le 16 août 1928 dans une famille arménienne d’Istanbul, il avait commencé sa carrière en 1950 au journal Yeni Istanbul en 1950, puis au quotidien de référence Hürriyet, avant de travailler pour de grands médias internationaux comme Time-Life ou Paris Match. Voir aussi Dans l’objectif du photographe turc Ara Güler Le pénaliste Jean-Yves Liénard a choisi son camp : celui des parrains, caïds et autres voyous. FRÉDÉRIC STUCIN pour « M Le magazine du Monde » Jean-Yves Liénard. On n’a pas tous les jours la chance de croiser dans sa vie un gamin septuagénaire aux yeux turquoise sous une broussaille de sourcils gris blanc, qui a lu tous les livres, mais dit la vie comme personne ; un tendre chez les durs, un pudique chez les vaniteux, un avocat qui ne se prend pas au sérieux. Ce spécimen rare s’appelait Jean-Yves Liénard, il est mort mardi 9 octobre à Versailles, à l’âge de 76 ans.
31/12/2018
disparitions
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2018/12/31/charles-aznavour-joel-robuchon-maurane-ils-nous-ont-quittes-cette-annee_5404018_3382.html
Un ancien préfet rwandais renvoyé aux assises en France pour complicité de génocide
Réfugié dans l’Hexagone depuis 1997, Laurent Bucyibaruta s’est « rendu complice d’une pratique massive et systématique d’exécutions sommaires », selon un juge d’instruction du tribunal de Paris.
Les perspectives de procès liés au génocide au Rwanda se multiplient en France. Après un ancien chauffeur et un médecin, un ex-préfet rwandais est à son tour renvoyé devant les assises de Paris. Laurent Bucyibaruta est accusé d’être impliqué dans les massacres de masse commis en 1994. Le juge d’instruction Alexandre Baillon a ordonné, le 24 décembre, un procès aux assises pour ce fonctionnaire de la province de Gikongoro (sud), une des régions de ce pays d’Afrique où les massacres contre les Tutsi furent les plus violents. « Pratique massive et systématique d’exécutions sommaires » Né en 1944, réfugié depuis 1997 en France où il est placé sous contrôle judiciaire, M. Bucyibaruta est soupçonné de s’être rendu complice d’actes de génocide et de crimes contre l’humanité entre avril et juillet 1994. Pendant cette période, les tueries ont fait environ 800 000 morts au Rwanda. Dans son ordonnance, le juge du pôle « crimes contre l’humanité » du tribunal de Paris estime en particulier que l’ancien préfet s’est « rendu complice d’une pratique massive et systématique d’exécutions sommaires ». Le magistrat a en revanche rendu à son égard un non-lieu partiel concernant notamment l’assassinat d’un gendarme et de trois prêtres, ainsi que des viols. « Nous allons faire appel dans les jours qui viennent parce qu’il y a dans ce dossier un certain nombre d’éléments à décharge », a annoncé l’avocat de M. Bucyibaruta, Ghislain Mabonga Monga. « C’était une décision que nous attendions depuis très longtemps », a réagi de son côté Alain Gauthier, le président du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), une association qui traque les génocidaires présumés. Laurent Bucyibaruta était visé depuis 2000 par une plainte déposée par les associations Survie et FIDH et des familles des victimes. Il avait été un temps réclamé par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), qui l’accusait d’avoir ordonné aux Interahamwe (extrémistes hutu) qui étaient sous ses ordres de commettre plusieurs massacres contre les Tutsi. Le TPIR s’était finalement dessaisi au profit des juridictions françaises. Mais en 2013, il s’était dit préoccupé par la lenteur de celles-ci dans le traitement de cette affaire. 25 dossiers liés au génocide Quelque 25 dossiers liés au génocide rwandais sont instruits au pôle « crimes contre l’humanité », créé en 2012 face à l’accumulation des plaintes, plusieurs auteurs présumés s’étant réfugiés en France. A ce jour, leur travail a débouché sur deux grands procès : celui de Pascal Simbikangwa, condamné définitivement à vingt-cinq ans de prison pour génocide, et celui de deux anciens maires rwandais, dont la condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité a été confirmée en appel en juillet. En novembre 2017, la justice française a ordonné un troisième procès aux assises, visant cette fois Claude Muhayimana, un Franco-Rwandais accusé de complicité de génocide pour avoir transporté des miliciens auteurs de massacres. La cour d’appel de Paris doit confirmer ou pas ce renvoi fin mars. Et début décembre, le médecin rwandais Sosthène Munyemana, réfugié sur le territoire français depuis septembre 1994 et qui exerce depuis dix-sept ans comme urgentiste dans un hôpital de Villeneuve-sur-Lot, a été renvoyé devant les assises pour génocide et crimes contre l’humanité. Ses avocats avaient aussitôt annoncé leur intention de faire appel de cette décision. Lire aussi Le Rwanda met la pression sur Emmanuel Macron pour régler le contentieux lié au génocide
31/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/31/un-ancien-prefet-rwandais-renvoye-aux-assises-en-france-pour-complicite-de-genocide_5403979_3212.html
« Les Chinois caressent mes cheveux crépus, mais personne ne me drague »
Amour et sexualité : avoir 20 ans en Afrique de l’Ouest (9). La Togolaise Judith Gnamey est partie aux confins de la Mandchourie pour préparer un doctorat en biochimie. Une expérience décoiffante.
Dans la ville chinoise de Harbin, en Mandchourie, non loin de la frontière russe. David Gray/REUTERS Témoignage. L’une des premières images que je garde de mon arrivée en Chine est celle de la gare de Pékin en septembre 2018. Je ne parlais pas le mandarin et mon anglais n’était pas au point. J’étais apeurée, j’avoue. Aussi loin que portait mon regard, je ne voyais aucun Noir. Oui, j’étais bien la seule à avoir une peau foncée et des cheveux crépus. Toutes les têtes se tournaient sur mon passage. J’ai ressenti là ma différence. Alors que j’étais assise à attendre le train, un groupe de personnes âgées est même venu m’entourer, me harcelant de questions auxquelles je ne comprenais rien. Présentation de notre série Amour et sexualité : avoir 20 ans en Afrique de l’Ouest La ville d’Harbin a très tôt conquis mon cœur. Le « Moscou d’Orient », métropole chinoise à l’architecture russe, résonnait d’un calme apaisant malgré ses chutes de température impressionnantes jusqu’à - 35 °C. Arrivée tout droit de Lomé, au Togo, à 26 ans pour préparer un doctorat en biochimie, j’étais horrifiée les premiers jours lorsque tous les téléphones se braquaient sur moi dans la rue. Des inconnus me prenaient en photo simplement parce que j’étais noire. Certains me désignaient à leurs enfants et se mettaient à chuchoter. Les plus courageux, posaient des questions ou voulaient que je pose pour eux. J’ai ainsi provoqué un attroupement de curieux dans une station de ski. Les gens se bousculant pour avoir mon cliché. J’avoue, j’ai presque fini par prendre du plaisir à me sentir comme une star. « Sauvage » Si les Chinois ont la même réaction avec tous les étrangers, elle est plus prononcée avec les femmes noires. D’autant que ma chevelure crépue suscite énormément d’interrogations. Souvent persuadés que ce ne sont pas mes propres cheveux. Je ne compte plus les personnes qui les touchent dans la rue. Beaucoup le font sans demander. Parfois, je ne m’en rends même pas compte. Cela peut me faire sourire, mais habituellement ça m’agace. Car c’est une partie de ma personne qu’ils s’autorisent à « peloter ». Demander la permission semble une évidence. Pourtant, j’ai découvert que le Code pénal chinois ne considère pas que toucher le corps de quelqu’un en public est un acte de harcèlement sexuel ou une forme de racisme. Au Togo, ça n’est pas le cas non plus, mais là-bas, personne ne fourre sa main dans ma chevelure sans autorisation. Je ne crie pas au racisme pour autant. Quoique agacée, je comprends que ces voyeurs ne sont que de grands curieux. D’ailleurs, je me demande souvent si l’acharnement du Noir à se défriser les cheveux, à faire des rajouts, n’est pas une des causes de la méconnaissance qu’ont les gens de nos cheveux. A cause de cela, j’ai décidé de ne plus porter de rajouts et de promouvoir le cheveu crépu. Ici en Chine, être Noir est à double tranchant : soit on vous prend pour un Américain et vous êtes adulé, soit l’on sait que vous être un Africain, et vous êtes peu considéré. En mandarin, le mot Meiguo désigne les Etats-Unis, dont la signification est « beau pays ». Tandis que le mot feizhou, que l’on pourrait traduire par « sauvage », désigne l’Afrique. S’il n’y a pas de racisme anti-Africains patent, la langue, elle, discrimine. Mais être une Africaine au fin fond de la Mandchourie, à 350 km de la frontière russe, diminue cruellement mes chances de séduction. Les hommes chinois nous trouvent peu belles car leur société survalorise la blancheur de peau, premier critère de beauté, et la minceur. Pas de chance pour les Africaines aux rondeurs généreuses ! Au Togo, la drague est partout. Dans la rue, il n’est pas rare d’être hélée, comme sur les réseaux sociaux où l’on reçoit des messages appuyés. Avoir été élevée dans un contexte de séduction permanente me fait un peu perdre le nord ici. Tous mes codes sont bouleversés car aucun Chinois ne m’a draguée pour l’instant. Aucun flirt ne fait sonner mon téléphone. Je n’ai même pas d’amis chinois hommes. Amoureux de circonstance Alors, aux femmes africaines expatriées, il ne reste bien souvent que la possibilité de relations « Addis-Abeba ». On les appelle ainsi car les vols à destination de la plupart des capitales africaines ont pour escale la capitale éthiopienne, également siège de l’Union africaine (UA). C’est là que survient en général la séparation physique entre ces amoureux de circonstance résidant en Chine. Chacun prendra ensuite son vol de retour vers son pays. Mais même ces relations ont peu d’avenir. Car, réputé entreprenant et bon amant, l’homme africain se croit à la mode et n’a pas toujours envie de s’embarrasser des exigences des femmes africaines qu’il juge trop difficiles. Aujourd’hui, après quatre mois passés à Harbin, la Chine me conquiert peu à peu. Je suis admirative de sa culture plurielle, de ses travailleurs acharnés qui chaque jour s’usent pour que brille plus haut le drapeau rouge étoilé. Je suis encore plus amoureuse de ma ville. Une ville où la délinquance est presque inexistante. Où je rencontre beaucoup de personnes accueillantes, au grand cœur, fidèles en amitié. En hiver, la ville chinoise de Harbin, à la frontière russe, se bâtit une gigantesque cité de glace, très courue des touristes. Kim Kyung Hoon/REUTERS Mais, quelle que soit la direction dans laquelle je regarde, mes possibilités de relations amoureuses restent très limitées. Je ne peux pas faire ma capricieuse. Soit je reste célibataire, soit je collectionne des aventures sans lendemain. Judith Gnamey est une Togolaise de 26 ans, blogueuse prolixe et doctorante en herbe. Partie réaliser sa thèse de biochimie en Chine, elle s’est retrouvée dans la ville glaciale de Harbin proche de la Russie. Elle partage son temps entre ses études de mandarin et l’écriture d’articles sur la sexualité, la religion ou la politique togolaise. Elle aime se définir avec une pointe de provocation comme « une Négresse qui pense ». Judith Gnamey (Harbin, Mandchourie, Chine)
31/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/31/les-chinois-caressent-mes-cheveux-crepus-mais-personne-ne-me-drague_5403975_3212.html
Le gouvernement britannique critiqué pour un contrat avec une compagnie de ferry… sans bateau
Dans le cadre de ses préparatifs à un Brexit sans accord, le gouvernement a passé un contrat de 15 millions d’euros avec une compagnie sans expérience et sans navire.
Un ferry arrive au port de Douvres, en Angleterre, en mars 2018. DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP Un Brexit sans accord. Une compagnie de ferry sans bateau. Le gouvernement britannique était sous le feu de critiques, lundi 31 décembre, pour avoir passé un contrat de 13,8 millions de livres (15,3 millions d’euros) avec une compagnie de ferrys sans expérience et sans navire, dans le cadre de ses préparatifs au Brexit. Le ministère des transports britannique a passé des contrats avec trois compagnies de ferrys pour un montant de 107 millions de livres (120 millions d’euros) afin de limiter les perturbations dans les ports en cas de sortie de l’Union européenne sans accord. L’un de ces contrats, d’un montant de 13,8 millions de livres, a été noué avec la société britannique Seaborne pour créer des liaisons supplémentaires avec le continent. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Brexit, ce poison des réveillons familiaux Mise en service en mars Seaborne doit transporter du fret de Ramsgate, en Angleterre, jusqu’au port belge d’Ostende. Le port de Ramsgate, situé dans le Kent, ne fournit plus ce type de services depuis 2013. Or Seaborne n’a jamais eu d’activité de fret et n’a « ni navire ni historique commercial », selon le conseiller local Paul Messenger (conservateur), interrogé par la BBC. « Pourquoi choisir une entreprise qui n’a jamais transporté un seul camion de son histoire et leur donner 14 millions de livres sterling ? Je ne vois pas la logique », a-t-il déclaré, estimant peu probable que la compagnie soit capable de mettre en place ce service à temps pour le Brexit, prévu le 29 mars 2019. Dans un communiqué, Seaborne a affirmé travailler depuis 2017 pour lancer un service de ferry début 2019. « Le service devait démarrer à la mi-février, mais il a maintenant été retardé à la fin mars pour des raisons opérationnelles », a souligné la compagnie. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Brexit : beaucoup de prévisions catastrophiques pour rien « Fiasco du Brexit » « Ce contrat a été attribué en sachant que Seaborne Freight est un nouveau fournisseur de services de transport maritime et que la capacité et les navires supplémentaires seraient fournis dans le cadre de ses premiers services », s’est défendu le ministère des transports dans un communiqué. Mais l’opposition a tancé le gouvernement. « Le fait que le gouvernement ait signé un contrat avec une compagnie de ferrys sans ferrys résume en gros leur approche grotesque du fiasco du Brexit », a moqué le député Edward Davey, membre du Parti libéral-démocrate, pro-UE, sur Twitter. Le député travailliste Neil Coyle, anti-Brexit, a dénoncé « le dernier gâchis en date » du ministre des transports Chris Grayling, après l’affaire des drones qui ont semé la pagaille à l’aéroport de Gatwick récemment.
31/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/31/le-gouvernement-britannique-critique-pour-un-contrat-avec-une-compagnie-de-ferry-sans-bateau_5403970_3210.html
L’état d’urgence décrété dans plusieurs provinces du Burkina Faso
Le pays est confronté depuis trois ans à des attaques djihadistes de plus en plus fréquentes et meurtrières.
A Koupela, dans l’est du Burkina Faso, en octobre 2018. ISSOUF SANOGO / AFP L’état d’urgence a été décrété, lundi 31 décembre, dans plusieurs provinces du Burkina Faso, en proie à des attaques djihadistes récurrentes, a annoncé le ministre burkinabé de la communication, Remis Fulgance Dandjinou. « Le président du Faso a décidé de déclarer l’état d’urgence dans certaines provinces du Burkina Faso. Il a également donné des instructions pour des dispositions sécuritaires particulières sur toute l’étendue du territoire », a déclaré M. Dandjinou à la sortie d’un conseil des ministres extraordinaire sur la « situation sécuritaire ». Ces mesures font suite à une rencontre avec la hiérarchie militaire, convoquée au lendemain de la mort de dix gendarmes, jeudi, dans une embuscade à Toeni, une localité située au nord-ouest de Ouagadougou. Lire aussi Le Burkina Faso désormais sur la carte du djihadisme Le Burkina Faso est confronté depuis trois ans à des attaques de plus en plus fréquentes et meurtrières. D’abord concentrées dans le nord du pays, elles se sont ensuite étendues à d’autres régions dont celle de l’Est, frontalière du Togo et du Bénin, qui est désormais une deuxième grande zone d’insécurité. Pour le moment, les forces burkinabées semblent incapables d’enrayer le mouvement et les djihadistes étendent leur influence sur des zones de plus en plus grandes. De nombreux observateurs craignent que d’autres régions suivent. Perquisitions à domicile L’état d’urgence concerne « plusieurs provinces » à l’intérieur de sept régions (sur les treize que compte le pays), a indiqué M. Dandjinou, citant les régions des Hauts Bassins, de la Boucle du Mouhoun, des Cascades, du Centre-Est, de l’Est, du Nord et du Sahel. Les détails sur les provinces concernées seront précisés dans un décret présidentiel, a-t-il souligné. « Ces dispositions […] ont pour objectif d’assurer avec sérénité et efficacité la lutte contre le terrorisme au Burkina Faso et de ramener la quiétude au sein des populations », a-t-il justifié. L’état d’urgence accorde notamment des pouvoirs supplémentaires aux forces de défense et de sécurité, dont celui d’ordonner des perquisitions à domicile de jour et de nuit. Certaines libertés fondamentales peuvent être restreintes, comme la liberté de circulation. « Le conseil a échangé sur les nouvelles mesures visant à accélérer la réorganisation opérationnelle des forces de défense et de sécurité, l’amélioration du maillage du territoire, le renforcement de la vigilance et la protection de la population et des infrastructures », a précisé le ministre. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Burkina Faso, les forces de sécurité démunies face aux djihadistes Mercredi, un policier a été tué dans l’attaque du commissariat de district de police de Solan, dans le nord du pays, frontalier du Mali. Les attaques attribuées aux groupes djihadistes Ansaroul Islam et Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) et à d’autres groupuscules ont fait plus de 270 morts depuis 2015. Ouagadougou, la capitale, a été frappée à trois reprises, avec un bilan total de près de 60 morts.
31/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/31/l-etat-d-urgence-decrete-dans-plusieurs-provinces-du-burkina-faso_5403966_3212.html
Aux Emirats, dix ans de prison pour l’opposant Ahmed Mansoor
L’activiste émirati, défenseur des droits de l’homme, a été condamné pour avoir critiqué le pouvoir et nui à l’image des Emirats arabes unis sur les réseaux sociaux.
L’activiste Ahmed Mansoor, à Dubaï, le 30 novembre 2011. Nikhil Monteiro / REUTERS Les Emirats arabes unis témoignent une nouvelle fois de la répression que le pays livre contre la liberté d’expression. La Cour suprême a confirmé, lundi 31 décembre, une peine de dix ans de prison à l’encontre de l’opposant Ahmed Mansour pour avoir critiqué le pouvoir et nui à l’image du pays sur les réseaux sociaux, a rapporté Amnesty International et la presse locale. Ce jugement émanant de la chambre d’appel du haut tribunal fédéral ne peut pas faire l’objet d’un recours, a précisé l’organisation de défense des droits de l’homme, en s’élevant contre ce verdict. La condamnation d’Ahmed Mansoor à une amende de 1 million de dirhams (270 000 dollars) a été également confirmée par le tribunal siégeant à Abou Dhabi, selon le quotidien Gulf News. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Nouveau tour de vis aux Emirats arabes unis contre la liberté d’expression La presse internationale n’est pas autorisée à assister à ce genre de procès aux Emirats, où les familles régnantes ne tolèrent aucune critique de la part d’opposants. Ce verdict « confirme qu’il n’y a pas de place pour la liberté d’expression dans les Emirats arabes unis », dit Amnesty dans un communiqué. « Le seul crime d’Ahmed Mansoor a été d’exprimer ses opinions pacifiques sur les réseaux sociaux, et il est scandaleux qu’il soit puni d’une peine de prison aussi lourde », a ajouté l’organisation, en précisant qu’« il s’agit d’un verdict final qui ne peut faire l’objet d’un appel ». « Au lieu de punir Ahmed Mansoor pour avoir osé exprimer ses opinions, les autorités doivent annuler sa peine et le libérer immédiatement et sans condition. » Vague de protestations Ahmed Mansoor, 49 ans, a été condamné en première instance le 31 mai pour avoir terni « le statut et le prestige des Emirats arabes unis et ses symboles », et pour avoir nui aux relations entre ce pays et ses voisins. Il avait toutefois été blanchi de l’accusation de complot avec une « organisation terroriste ». Son arrestation en mars 2017 avait suscité une vague de protestations des principales organisations de défense des droits de l’homme, dont Human Rights Watch et Amnesty. Lire aussi Apple corrige de graves failles de sécurité sur iOS grâce à un militant des droits de l’homme Lors de son arrestation, le procureur chargé de la lutte contre la cybercriminalité l’avait notamment accusé d’avoir utilisé les réseaux sociaux pour « publier de fausses informations ». On lui avait aussi reproché de porter atteinte à « l’unité nationale et à la paix sociale et d’avoir nui à la réputation de l’Etat et incité à la désobéissance ». M. Mansoor avait déjà été condamné à trois ans de prison en 2011 — au début du printemps arabe — lors d’un premier procès jugé « manifestement injuste » par des groupes de défense des droits de l’homme. Il avait été jugé coupable d’avoir « utilisé internet pour insulter les dirigeants des Emirats arabes unis ». L’opposant avait été pardonné par le président la même année, mais privé de son passeport et interdit de voyage à l’étranger.
31/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/31/aux-emirats-dix-ans-de-prison-pour-l-opposant-ahmed-mansoor_5403963_3210.html
Au Brésil, le trumpisme à risque du président Jair Bolsonaro
Les convictions du chef de l’Etat, qui mêlent paranoïa et détestation du socialisme, le poussent à singer la diplomatie de Donald Trump.
Le président élu brésilien, Jair Bolsonaro, à Brasilia, le 11 décembre 2018. JORGE WILLIAM / AP Avant même la victoire du chef de file de l’extrême droite brésilienne à la présidence, Steven Bannon a salué, avec des accents de triomphe, la soudaine popularité de Jair Bolsonaro. Pour l’ancien conseiller de Donald Trump, chantre du national-populisme, l’ascension du personnage qu’il décrit comme un homme « brillant » et « sophistiqué » et qu’il compare au dirigeant américain ne faisait que confirmer sa thèse d’une montée globale d’un courant mêlant antimondialisation, xénophobie et foi chrétienne. Un phénomène où, aux côtés des Etats-Unis de Trump, se rejoignent notamment la Hongrie de Victor Orban, l’Italie de Matteo Salvini et, désormais, le Brésil de Jair Bolsonaro. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Brésil, Jair Bolsonaro prend le pouvoir L’ancien patron du site de droite radicale Breitbart News, qui nie avoir participé à la campagne du militaire, a vu juste. A peine élu, Jair Bolsonaro n’a pas tardé à reconnaître ses alliés, qui, comme lui, luttent contre le « marxisme culturel ». Félicité après sa victoire, le 28 octobre, par Donald Trump, Jair Bolsonaro, par ailleurs en bons termes avec le ministre italien de l’intérieur et chef de file de la Ligue, Matteo Salvini, s’est empressé de parler au téléphone avec le chef d’Etat hongrois, Viktor Orban, avec lequel il prévoit « un grand partenariat ». « La Hongrie est un pays qui a beaucoup souffert du communisme par le passé. C’est un peuple qui sait ce qu’est une dictature. Le peuple brésilien ne sait pas ce qu’est une dictature », a commenté après son coup de fil le président élu, vantant la politique anti-immigration de son homologue européen. Le Brésil a bien vécu une dictature militaire entre 1964 et 1985, mais Jair Bolsonaro considère qu’il s’agit d’une période démocratique qui a évité au pays de connaître le sort de Cuba ou du Venezuela, tombés dans les mains du communisme. Tensions et incidents diplomatiques Les convictions de Jair Bolsonaro mêlant paranoïa et détestation du socialisme le poussent à singer la diplomatie de Donald Trump – il fustige la Chine, encense Israël, dénonce l’immigration et se moque des préoccupations écologiques. Pour incarner cette ligne, M. Bolsonaro a trouvé son homme : Ernesto Araujo. Un diplomate qui prétend redonner à Dieu toute sa place dans la politique et dans l’histoire. Avant même l’entrée en fonctions du président militaire, le 1er janvier 2019, la nouvelle orientation géopolitique du Brésil a suscité son lot de tensions, voire d’incidents diplomatiques. L’annonce de l’intention de déplacer, à l’instar des Etats-Unis, l’ambassade du Brésil en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem a provoqué l’ire des pays arabes et en particulier de l’Egypte. Le Caire, qui a signé un accord de libre-échange avec le Brésil, auquel il achète quantité de viandes halal, a annulé sans ménagement une visite diplomatique prévue de longue date.
31/12/2018
international
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Mort de l’écrivain allemand Edgar Hilsenrath, iconoclaste auteur du « Nazi et le Barbier »
Né à Leipzig en 1926, Edgar Hilsenrath, fils de commerçants juifs, avait été déporté en 1941 dans le ghetto roumain de Mogilev-Podolsk.
Edgar Hilsenrath, écrivain juif allemand, déporté, auteur entre autre de « La Nuit », « Le Nazi et le Barbier » et « Le Conte de la pensée dernière ». MARC CHAUMEIL Sa plume était aussi crue que caustique, bousculant volontiers les convenances sociales et la manière d’évoquer la Shoah dans la littérature. L’écrivain allemand Edgar Hilsenrath, à qui l’on doit notamment Le Nazi et le Barbier (1971), est mort dimanche 30 décembre à l’âge de 92 ans, a confirmé son éditeur au Monde. Né à Leipzig en 1926, Edgar Hilsenrath est le fils d’une famille de commerçants juifs, qui tente de fuir la montée du nazisme en gagnant la Roumanie. Mais en 1941, le jeune garçon est déporté, ainsi que son frère et sa mère, dans le ghetto roumain de Mogilev-Podolsk. Il n’en sera libéré qu’en mars 1944 par les troupes russes. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Edgar Hilsenrath, les obsessions ironiques De ces longues années de souffrances et de privations, l’auteur dira qu’elles constituent sa Nuit, du nom de son premier roman, paru en 1964 en Allemagne, avant d’être censuré par son éditeur. Car déjà, la crudité et l’humour au vitriol de l’auteur heurtent, lui qui ose le récit imagé de toutes les bassesses humaines que peut engendrer la volonté de survivre. « La nuit ne se finit jamais », disait ainsi l’écrivain iconoclaste dans une interview à Actualité juive en 2015. A la fin de la guerre, le jeune homme gagne la Palestine, où il vivote de petits boulots. En 1947, Edgar Hilsenrath rejoint la France, où sa famille a trouvé refuge. Puis tous émigrent à New York. C’est aux Etats-Unis que le jeune homme se met à écrire – une envie qui le hantait depuis le ghetto, confessera-t-il. Son deuxième ouvrage, Le Nazi et le Barbier, écrit en 1968 lors d’un séjour à Munich, met en scène le sinistre et cynique Max Schultz, un salopard picaresque, sujet de toutes les métamorphoses hémoglobinées. Enfant « illégitime mais aryen » d’une grosse femme de petite vertu, le bourreau rejoint les SS à la fin des années 1930, parce que « l’avenir de l’Allemagne sera noir à coup sûr » comme leurs uniformes. Sur le front de l’Est, puis dans un camp de concentration, il se livre aux pires monstruosités avant de disparaître, la guerre finie. Il prend l’identité (voire la personnalité) d’Itzig Finkelstein, son meilleur ami d’enfance, juif, et s’enfuit en Israël. Aussi décriée qu’applaudie, cette farce burlesque vaut à son auteur un succès mondial, malgré le refus par soixante maisons d’édition de le publier. Il sera finalement édité dans 22 pays, en seize langues – mais seulement en 2010 en France. Lire aussi notre critique de « Le Nazi et le Barbier » : L'indicible, côté farce « Dans les familles, on en parle peu » La carrière d’Edgar Hilsenrath lui vaudra ensuite plusieurs récompenses, dont le prix Alfred Döblin pour le roman Le Conte de la pensée dernière, paru en 1989. Un ouvrage dans lequel l’auteur allemand, qui retournera vivre à Berlin en 1975, compare le génocide arménien à la Shoah, et rappelle le devoir de mémoire. « Il y a une communauté arménienne à Berlin, ils sont tous trop jeunes, ils ne connaissent souvent pas leur propre histoire. C’est comme un sujet tabou. Dans les familles, on en parle peu, ou pas », déplorait-il dans l’entretien donné à Actualité juive. Toute l’œuvre de l’éruptif Edgar Hilsenrath restera marquée par ce mélange d’autobiographie fictionnelle, que ce soit quand il raconte le village roumain présent dans Le Retour au pays de Jossel Wassermann (1993), ou quand il rend compte de son expérience palestinienne, dans Les Aventures de Ruben Jablonski (1997). Un roman qui trace un portrait glacial et coupable des rescapés de la Shoah, dont fait partie le narrateur : « Six millions. Je ne savais pas qu’il y avait eu tant de morts. (…) Je leur ai montré le journal et leur ai demandé en yiddish : “Vous saviez qu’il y en avait eu autant ? – Non”, ont répondu les Juifs. »
31/12/2018
disparitions
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Des blessés et de la pollution : la coûteuse tradition des feux d’artifice du réveillon en Allemagne
Le pays débat d’une possible interdiction, dans certaines zones, de cette pratique qui blesse 700 personnes chaque année le 31 décembre.
Feu d’artifice au-dessus de la porte de Brandebourg, à Berlin, le 1er janvier 2016. Markus Schreiber / AP Comme chaque année, les Allemands n’ont pas attendu le soir de la Saint-Sylvestre pour perpétuer une tradition dont ils n’ont certes pas l’exclusivité mais qui a atteint chez eux une telle ampleur qu’elle se voit de plus en plus contestée : célébrer le Nouvel An à coups de pétards et de feux d’artifice, activité à laquelle ils commencent à se livrer trois ou quatre jours avant le 31 décembre et à pratiquement toute heure, du matin jusqu’à tard dans la nuit. En 2005, les Allemands avaient dépensé 87 millions d’euros en achat d’objets pyrotechniques. En 2017, 137 millions d’euros. Or, cette passion a un coût. Médical, d’abord. Il y a un an, deux habitants du Brandebourg, l’un de 19 ans, l’autre de 35 ans, sont morts en tirant des feux d’artifice. A Berlin, cinq personnes ont été amputées en raison de blessures à la main. En Thuringe, une adolescente a perdu la vue à cause d’un pétard. En moyenne, entre 700 et 800 personnes sont blessées chaque fin d’année en Allemagne à la suite d’accidents provoqués par des objets pyrotechniques. Afin de limiter le nombre d’accidents, l’association allemande des médecins urgentistes a récemment réclamé la mise en place d’un permis d’utilisation. « L’acquisition d’objets pyrotechniques doit être mieux encadrée. (…) On pourrait ainsi imaginer la création d’un équivalent du permis de conduire pour feux d’artifice et pétards, afin que les gens apprennent à s’en servir », a proposé son président, Frank Riebandt, dans la Rheinische Post, le 27 décembre. Selon lui, la possession d’un tel document devrait être nécessaire pour pouvoir acheter de tels objets. Reste qu’une telle mesure en Allemagne ne résoudrait que partiellement le problème, beaucoup de ces achats étant faits en ligne sur des sites étrangers – notamment polonais – qui proposent des objets de catégorie F3 et F4, les plus puissants et les plus dangereux, destinés normalement aux professionnels. En Allemagne, seuls les objets de catégorie F1 sont en vente toute l’année, ceux de catégorie F2 ne pouvant être vendus que durant les quatre derniers jours de l’année à des personnes majeures. Ces dernières années, les douanes allemandes ont saisi de plus en plus d’objets pyrotechniques importés illégalement de Pologne ou de République tchèque. 5 000 tonnes de particules fines Le second coût est environnemental, et pas seulement à cause des tonnes de déchets laissés un peu partout. Selon la puissante association de défense de l’environnement Deutsche Umwelthilfe, 5 000 tonnes de particules fines sont libérées par les explosions d’objets pyrotechniques chaque fin d’année en Allemagne, l’équivalent d’un cinquième des particules fines émises chaque année dans le pays par les automobiles et les camions. En plus d’une réglementation plus stricte concernant les produits utilisés, dangereux pour la santé et en particulier les voies respiratoires, le président de cette ONG a récemment réclamé que leur usage soit interdit à l’intérieur des villes, où la circulation de l’air est plus difficile, et qu’elle ne soit autorisée que dans des espaces moins densément peuplés, en périphérie des agglomérations.
31/12/2018
international
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Face à l’incertitude du Brexit, un nombre record de Britanniques demandent un passeport irlandais
Sur tout le Royaume-Uni, près de 200 000 demandes ont été enregistrées en 2018. Un record pour Dublin.
Manifestation anti-Brexit devant le Parlement britannique, le 9 octobre. TOLGA AKMEN / AFP A mesure que la date fatidique approche, les préparatifs s’accélèrent. A moins de trois mois de l’entrée en vigueur officielle du Brexit, et sur fond d’impasse politique à Westminster, les demandes de passeport irlandais en provenance de Grande-Bretagne ont augmenté de 22 % en 2018 par rapport à l’année précédente en raison du Brexit, selon des chiffres du ministère des affaires étrangères irlandais. Sur tout le Royaume-Uni, incluant aussi l’Irlande du Nord, près de 200 000 demandes ont ainsi été enregistrées en 2018. Des chiffres qui font de 2018 une année record en la matière pour Dublin, qui a émis au total plus de 822 000 passeports. « Le nombre de demandeurs d’Irlande du Nord et de Grande-Bretagne continue d’augmenter depuis le vote sur le Brexit en juin 2016 », confirme le ministère dans un communiqué. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Brexit, ce poison des réveillons familiaux « Le chaos du Brexit empire » Cette année, le service irlandais chargé des passeports a reçu 84 855 demandes provenant d’Irlande du Nord et 98 544 venant de Grande-Bretagne, soit une « augmentation de respectivement 2 % et 22 % par rapport aux chiffres de 2017 ». Une affluence telle que le sénateur Niall Ó Donnghaile (Sinn Féin) a estimé que la hausse des demandes justifiait l’ouverture d’un bureau des passeports en Irlande du Nord. « Alors que le chaos du Brexit empire, de plus en plus de personnes revendiquent leur droit à un passeport irlandais et à la citoyenneté européenne. Il est important que ce processus se déroule sans problème. » Vers un « no deal » ? Officiellement, le Royaume-Uni doit quitter l’UE le 29 mars 2019. Mais comment ? La question reste toujours en suspens. Le Parlement britannique doit se prononcer en janvier sur l’accord de retrait conclu avec Bruxelles par le gouvernement de Theresa May. Ce vote, prévu initialement mi-décembre, avait été annulé par la première ministre, faute de soutien suffisant parmi les députés. Un scénario de rejet qui risque de se reproduire lors de ce nouveau scrutin parlementaire, et laisserait le pays dans une incertitude plus grande encore. La perspective d’un no deal, c’est-à-dire une sortie sans accord, semble chaque jour plus crédible, malgré les inquiétudes qu’il suscite dans une large partie de la classe politique et de la population. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Brexit : les Britanniques les plus inquiets font des stocks
31/12/2018
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Vatican : démission du porte-parole du Saint-Siège et de son adjointe
Le Vatican a annoncé, sans explication, la démission de l’Américain Greg Burke et de l’Espagnole Paloma Garcia Ovejero, ainsi que la nomination d’un porte-parole par intérim.
Les statues des saints sur les colonnes de la place Saint-Pierre, au Vatican, le 30 décembre 2018. ALBERTO PIZZOLI / AFP C’est une décision impromptue, donnée sans plus d’explication. Le Vatican a annoncé, lundi 31 décembre, la démission de son porte-parole, l’Américain Greg Burke et de son adjointe, l’Espagnole Paloma Garcia Ovejero, et la nomination d’un porte-parole par intérim. Le pape « a accepté la démission du directeur et du vice-directeur de la salle de presse du Vatican Greg Burke et Paloma García Ovejero, et a nommé directeur par intérim Alessandro Gisotti, jusqu’ici coordinateur des médias sociaux pour le dicastère [ministère] de la communication », précise un communiqué du Saint-Siège. Membre de l’Opus Dei L’Américain Greg Burke, membre de l’Opus Dei, influente institution conservatrice au sein de l’Eglise catholique, avait été nommé en juillet 2016 après avoir occupé le poste de numéro 2 du service de presse. Il succédait au jésuite Federico Lombardi. Il avait auparavant travaillé comme journaliste à Rome pour l’hebdomadaire catholique National Catholic Reporter, le magazine Time puis comme correspondant de la chaîne américaine Fox News. Agé de 59 ans, il était le deuxième membre de l’Opus Dei à occuper le poste de porte-parole du Vatican, après l’Espagnol Joaquin Navarro Valls, directeur tout-puissant de la communication de Jean Paul II. Première femme à occuper le poste de numéro 2 du service de presse du Vatican, la journaliste espagnole Paloma Garcia Overo, 43 ans, avait été auparavant correspondante pour le Vatican auprès de Cadena COPE, l’une des principales stations de radio espagnoles. Tourmente Ces démissions interviennent deux semaines après que le pape François a annoncé avoir mis fin aux fonctions de trois des neufs cardinaux, qu’il avait choisis sur tous les continents pour le conseiller dans la réforme du Vatican, au début de son pontificat. Deux des cardinaux évincés font l’objet de poursuites dans des affaires de violences sexuelles sur mineurs ou pour en avoir couvert. Le Vatican prépare un important sommet sur la « protection des mineurs » qui sera organisé du 21 au 24 février 2019. Il réunira, à Rome, les présidents de toutes les conférences épiscopales du monde, des experts et des victimes. Cet événement est censé sonner une mobilisation générale pour la prévention des violences sexuelles dans l’ensemble de l’Eglise catholique, où la prise de conscience n’est pas au même niveau partout.
31/12/2018
international
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L’Irak a jugé plus de 600 étrangers en 2018 pour appartenance à l’Etat islamique
Trois Français – deux femmes et un homme – ont été condamnés à la prison à vie. Une Allemande a également été condamnée à la peine capitale, de même qu’un Belge et un Russe.
La cour de Tel Keif, en Irak. Maya Alleruzzo / AP Quelque 616 étrangers ont été jugés en Irak en 2018 pour appartenance à l’organisation Etat islamique (EI), a fait savoir, lundi 31 décembre, la justice irakienne, ajoutant qu’une centaine d’autres devaient encore comparaître. Au total, « 508 d’entre eux ont été condamnés en vertu de la loi antiterrorisme » qui prévoit jusqu’à la peine de mort, a détaillé dans un communiqué le juge Abdel Settar Bayraqdar, porte-parole du Conseil supérieur de la magistrature. Parmi ces personnes jugées, on trouve une grande majorité de femmes : 466 contre 42 hommes, ainsi que 108 mineurs – 31 garçons et 77 filles. En outre, « 99 personnes, dont 73 femmes » subissent encore des interrogatoires du parquet ou ont vu leur procès s’ouvrir récemment, selon le juge Bayraqdar. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Irak, l’expéditive justice antiterroriste après l’Etat islamique Trois Français condamnés La plupart des condamnées sont turques ou originaires des anciennes Républiques de l’Union soviétique. Une Allemande a également été condamnée à la peine capitale, de même qu’un Belge et un Russe. En outre, trois Français – deux femmes et un homme – ont été condamnés à la prison à vie. Parmi eux, le cas de Mélina Boughedir, capturée par les forces irakiennes à Mossoul le 8 juillet 2017, avait été particulièrement symptomatique du casse-tête diplomatique, sécuritaire et juridique que représente le sort des ex-djihadistes français et de leur famille dans la zone irako-syrienne. Capturée avec ses quatre enfants mineurs – dont trois ont été rapatriés en France –, Mme Boughedir avait été condamnée à sept mois de prison pour entrée illégale sur le territoire irakien, le 19 février. Aucune accusation pour terrorisme n’avait été retenue par le juge d’instruction. Mais, lors de l’examen de l’appel – automatique en Irak –, à la fin du mois de mars, le Conseil suprême des juges a ordonné un nouveau procès et a décidé de requalifier les charges pesant contre la Française pour y ajouter l’accusation d’appartenance à l’organisation Etat islamique. La Cour de cassation avait estimé que Mélina Boughedir avait suivi son mari « en connaissance de cause ». La jeune femme de 27 ans avait été condamnée en juin à la prison à perpétuité par la cour pénale de Bagdad. Ses avocats français, William Bourdon, Martin Pradel et Vincent Brengarth, se sont dits « soulagés qu’elle n’ait pas été condamnée à mort ». Lire aussi La Française Mélina Boughedir condamnée à la perpétuité pour appartenance à l’EI 20 000 arrestations Depuis fin 2017, l’Irak a officiellement déclaré la « victoire » sur l’Etat islamique. Mais depuis lors, le pays continue de juger quasi quotidiennement des accusés parmi les quelque 20 000 personnes arrêtées pour suspicion de terrorisme depuis la percée djihadiste de 2014. Deux tribunaux jugent les affaires de terrorisme en Irak, l’un à Tel Keif, près de Mossoul (nord) – l’ancienne « capitale » irakienne du « califat » autoproclamé de l’EI –, et l’autre à Bagdad, où la Cour pénale centrale s’occupe notamment des étrangers et des femmes. Parmi elles, beaucoup avaient suivi leurs époux avec leurs enfants, dont certains sont toujours en attente de rapatriement d’Irak, alors que leur mère est en prison. Dimanche, trente enfants russes sont toutefois arrivés à Moscou dans une nouvelle opération d’évacuation d’enfants vers leur pays d’origine. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Enfants kamikazes : le projet secret des frères Clain
31/12/2018
international
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En 2018, au moins 1 386 migrants sont morts sur les routes africaines
Le projet « Missing Migrants », de l’Organisation internationale pour les migrations, a confirmé la mort de 6 615 migrants ces cinq dernières années sur le continent africain.
Des migrants dans le désert algérien après avoir passé la frontière nigérienne, en juin 2018. Jerome Delay / AP Avant d’atteindre la mer Méditerranée, il y a la traversée de l’Afrique. Passage de frontières, traversées de zones désertiques… les routes terrestres empruntées par les migrants sont moins médiatisées que la Méditerranée, mais tout aussi meurtrières. En 2018, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a comptabilisé 1 386 décès sur le continent africain, contre 2 242 en mer. Deux données à mettre en lien avec les 4 503 morts répertoriés par la même organisation sur toute la planète. Si ces 1 386 morts font de l’Afrique le continent de loin le plus meurtrier pour cette catégorie de population, l’OIM sait ses données territoriales largement sous-estimées. « Nos experts pensent qu’il pourrait y avoir autant de morts dans le Sahara qu’en mer Méditerranée », explique même Julia Black, la coordinatrice du projet « Missing Migrants » qui documente ces décès. Pour elle aussi, « il est très probable que le nombre de migrants morts sur terre soit bien plus élevé » que ne le laissent présager les statistiques. Mais le manque de signalements officiels et non officiels des décès, rend le décompte difficile. « Si l’on prend le cas d’une personne tombant de l’arrière d’un camion en transit dans le Sahara, la probabilité de sa mort est élevée. Celle de voir son cas rapporté et enregistré est très basse », ajoute la coordinatrice. Or, rares sont les migrants qui n’ont pas été témoins de ce type d’accident. Le manque de médicaments première cause de décès Cette sous-évaluation s’explique évidemment d’abord par le manque de sources de remontées d’informations puisqu’« il y a très peu de sources officielles sur la mortalité durant la migration », rappelle Mme Black. « En Afrique, nous tirons surtout nos données d’enquêtes conduites auprès des migrants africains. Nous demandons à des cohortes entières de migrants s’ils ont été témoins de la mort de personnes de leur groupe », ajoute la spécialiste. A partir de ces cohortes, l’OIM a documenté les causes des décès. En 2018, c’est le manque de médicaments et d’accès à des soins qui a le plus tué (263 morts) sur le continent africain. La déshydratation (122 morts) suit juste derrière, talonnée par la mort de faim (116), les accidents de la circulation (107) et les décès causés par des abus physiques sur les personnes (102). Dans la corne de l’Afrique, 60 cas de migrants sont aussi décédés des suites de blessures par balle ou à l’arme blanche. Plus globalement, c’est la population issue de cette zone du continent qui paie le plus lourd tribut à ces morts sur terre avec 589 victimes en 2018 contre 381 pour les subsahariens. Petite lueur d’espoir dans ce décompte macabre, le nombre de morts sur le continent a décru ces deux dernières années, s’établissant en retrait par rapport aux 1 800 victimes de cette route terrestre en 2016.
31/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/31/en-2018-au-moins-1-386-migrants-sont-morts-sur-les-routes-africaines_5403938_3212.html
Un incident maritime militaire ravive les tensions entre le Japon et la Corée du Sud
Tokyo accuse la marine sud-coréenne d’avoir menacé de tirer sur un avion de patrouille japonais.
Le destroyer porte-hélicoptères japonais des Forces nippones d’autodéfense « Izumo » en mai 2017. AP « Le Japon va trop loin ». Le quotidien sud-coréen Korea Times ne cachait pas son inquiétude et son agacement, lundi 31 décembre, face à l’exacerbation des tensions entre Tokyo et Séoul depuis l’incident survenu le 20 décembre en mer du Japon (mer de l’Est pour la Corée). Ce jour-là, le destroyer Gwanggaeto-le-Grand, de la marine sud-coréenne, a verrouillé son radar de contrôle de tir sur un avion de patrouille maritime Kawasaki P-1 des Forces nippones d’autodéfense. Le 28 décembre, l’affaire a pris une tournure spectaculaire avec la diffusion publique par le Japon d’une vidéo tournée par l’équipage de l’aéronef, censée étayer la version nippone de l’incident. Tokyo exige que Séoul reconnaisse sa responsabilité dans ce qu’il considère comme un « acte dangereux aux conséquences imprévisibles ». Le verrouillage peut en effet précéder un tir de missile. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Japon muscle les capacités offensives des Forces d’autodéfense Réagissant à la vidéo, Choi Hyun-soo, porte-parole du ministère sud-coréen de la défense, a qualifié le contenu de « trompeur ». D’après Séoul, son navire utilisait ses radars dans le cadre d’une opération d’assistance d’un bateau nord-coréen en détresse. Les militaires du Sud jugent par ailleurs que l’appareil japonais volait anormalement près du destroyer. Exprimant de « profondes inquiétudes et des regrets », Mme Choi a souligné la retenue de la partie sud-coréenne dans cette affaire et rappelé la position de Séoul en faveur du renforcement de la coopération bilatérale « tournée vers l’avenir ». Multiples incidents Un appel au calme alors que les incidents s’enchaînent entre les deux voisins. Le 13 décembre, Tokyo avait vilipendé les exercices militaires menés par Séoul près des Dokdo. Ces îlots appelés Takeshima au Japon sont au cœur d’un contentieux territorial entre les deux pays. La Corée du Sud les administre. Le Japon les revendique. Ces dernières années, les réactions japonaises à ces manœuvres n’étaient pas si vives. Le mécontentement nippon découlerait de la remise en cause, en juillet, par l’administration du président progressiste Moon jae-in, de l’accord conclu en 2015 par le premier ministre nippon, Shinzo Abe, et l’ex-présidente conservatrice Park Geun-hye (en poste de 2013 à 2017), devant résoudre « définitivement et de manière irréversible » la question des femmes dites « de réconfort » – des esclaves sexuelles contraintes de se prostituer pour l’armée impériale nippone pendant la guerre. Pour M. Moon, cet accord ne peut s’appliquer tant que l’opinion sud-coréenne n’y adhère pas pleinement.
31/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/31/un-incident-maritime-militaire-ravive-les-tensions-entre-le-japon-et-la-coree-du-sud_5403935_3210.html
Ligue 1 : Dijon limoge son entraîneur, Olivier Dall’Oglio
En poste depuis 2012, le technicien paye la mauvaise première moitié de saison de son équipe (18e) du championnat de France.
Olivier Dall’Oglio, à Dijon en octobre. ROMAIN LAFABREGUE / AFP Tout va très vite en football. Le 25 août 2018 au soir, Dijon occupait la 2e place de la Ligue 1 dans la roue de l’intouchable Paris-Saint-Germain. Les Bourguignons venaient d’écraser Nice (4-0) et leur entraîneur, Olivier Dall’Oglio était salué pour le style de jeu séduisant et offensif de son équipe. Derrière, le DFCO (Dijon Football Côte-d’Or) a aligné dix défaites, quatre matchs nuls, une malheureuse victoire et pointe à la 18e place du classement. Ce lundi 31 décembre, le président du club, Olivier Delcourt, a tiré les conséquences de ces mauvais résultats et décidé de « mettre un terme aux fonctions d’entraîneur d’Olivier Dall’Oglio », a précisé le club dans un communiqué. OFFICIEL : Olivier Dall’Oglio n’est plus l’entraîneur du @DFCO_Officiel + d'infos ➡️ https://t.co/LrDO9VGBHQ… https://t.co/v2eAkBXLnZ — DFCO_Officiel (@Dijon FCO) Dès la reprise ce 31 décembre 2018, la gestion du groupe professionnel sera confiée à David Linarès (ancien milieu de terrain de Lyon), jusqu’alors entraîneur adjoint, dans l’attente de la nomination du nouvel entraîneur. Olivier Dall’Oglio (54 ans) était en poste depuis le 1er juin 2012. Il avait permis en mai 2017 au DCFO de retrouver la Ligue 1. Le club a terminé la saison 2017-2018 à la 11e place du classement, sa meilleure performance, et l’entraîneur a fait partie des quatre nommés aux Trophées de l’Union nationale des footballeurs professionnels (UNFP). Après Gustavo Poyet (Bordeaux), Miguel Cardoso (Nantes), Leonardo Jardim (Monaco), Antoine Kombouaré (Guingamp) et Sabri Lamouchi (Rennes), il est le 6e entraîneur démis de ses fonctions cette saison.
31/12/2018
football
https://www.lemonde.fr/football/article/2018/12/31/ligue-1-olivier-dall-oglio-n-est-plus-l-entraineur-de-dijon_5403932_1616938.html
Ce qu’il faut retenir de l’année 2018 en Afrique
De la démission de Jacob Zuma en Afrique du Sud aux élections en République démocratique du Congo, retour sur les événements qui ont marqué le continent.
L’Ethiopie et l’Erythrée enterrent la hache de guerre Le premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, au Parlement d’Addis-Abeba, le 25 octobre 2018. Tiksa Negeri / REUTERS La nouvelle a surpris tout le monde : après vingt ans d’état de guerre entre les deux pays de la Corne de l’Afrique, le premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, et le président érythréen, Isaias Afwerki, ont mis officiellement fin, en septembre, à un conflit qui a fait 80 000 morts entre 1998 et 2000. Le différend portait surtout sur la frontière entre les deux pays. Le tracé qui avait été défini lors de négociations de paix, en 2000, est désormais appliqué, ce qui permet la reprise des transports, du commerce et des communications entre les deux voisins. En septembre, l’Arabie saoudite, désireuse de pacifier l’Afrique de l’Est pour trouver des alliés dans sa guerre au Yémen, a accueilli très positivement la signature d’un nouvel accord de lutte conjointe contre le terrorisme et les trafics entre l’Erythrée et l’Ethiopie. Par ses réformes et son audace, le premier ministre Abiy Ahmed apparaît comme l’homme de l’année en Afrique. Des élections pour la rupture ou la continuité L’année 2018 aura connu son lot d’élections sur le continent. Au Mali et au Cameroun, les scrutins ont été synonymes de continuité politique dans des pays affaiblis par des conflits internes. Alors que son pays est toujours le théâtre d’affrontements avec des groupes djihadistes, le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, a été réélu en août avec 67 % des suffrages lors du second tour de la présidentielle. Au Cameroun, Paul Biya, président depuis trente-six ans, a été reconduit avec officiellement 71 % des votes, tandis que la crise dans la partie anglophone du pays s’aggrave. Au Zimbabwe, en revanche, un dinosaure a tiré sa révérence – contre son gré – pour céder la place à un « crocodile », surnom donné à son successeur. Neuf mois après le coup d’Etat qui a chassé Robert Mugabe du pouvoir, Emmerson Mnangagwa, qui fut son vice-président mais aussi le principal artisan de sa chute, a été élu en août avec 50,8 % des suffrages. Madagascar a aussi connu un scrutin présidentiel, qui a offert une large victoire à Andry Rajoelina sur son vieil ennemi Marc Ravalomanana. Quant aux élections tant attendues en République démocratique du Congo (RDC), elles ont bien eu lieu dimanche 30 décembre ; un scrutin imparfait mais qui a eu le mérite d’exister, alors qu’il était attendu depuis deux ans. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Après des élections chaotiques, la RDC dans l’attente du résultat En RDC, le retour d’Ebola On n’a d’ailleurs pas voté, dimanche, dans les zones de la RDC les plus affectées par l’épidémie d’Ebola. La décision a été prise alors que la maladie a déjà fait plus de 300 morts au cours de la deuxième plus grande épidémie qu’a connue l’est du pays. Apparue pour la première fois en 1976 en RDC, la maladie s’est réveillée de façon d’autant plus inquiétante qu’elle touche les deux provinces du Nord et du Sud-Kivu (est), en proie à des affrontements récurrents depuis plus de vingt ans. En Afrique du Sud, la fin d’un règne En février, le président « Téflon » sur lequel glissaient toutes les affaires a finalement démissionné. Après dix ans à la tête du Congrès national africain (ANC) et à la présidence sud-africaine, Jacob Zuma est tombé en disgrâce. Poussé vers la sortie par son propre parti après de nombreuses affaires de corruption, l’ancienne figure de la lutte contre l’apartheid a dû laisser la place à Cyril Ramaphosa, un autre poids lourd de l’ANC, qui fut ces dernières années son principal adversaire. Le Maroc passe à la grande vitesse Le président français, Emmanuel Macron, et le roi du Maroc, Mohammed VI, lors de l’inauguration du TGV entre Casablanca et Tanger, le 15 novembre 2018. FADEL SENNA / AFP C’est une première sur le continent. Un train à grande vitesse a été inauguré en novembre au Maroc par le roi Mohammed VI et le président français, Emmanuel Macron. Baptisé « Al-Boraq » en référence au coursier qui, selon le Coran, est descendu du paradis pour devenir la monture des prophètes de l’islam, le train permettra de diviser par deux le temps de trajet entre les deux poumons économiques du Maroc, Tanger et Casablanca. Le projet, qui a nécessité un investissement colossal de 2,1 milliards d’euros, a été largement critiqué dans un pays où le réseau ferroviaire classique reste en souffrance. Le retour d’œuvres d’art africaines C’est une victoire pour ceux qui militent pour le retour des œuvres africaines sur le continent. La France a annoncé en novembre la restitution au Bénin de 26 œuvres d’art parmi lesquelles des statues et des trônes ayant appartenu aux rois d’Abomey, autant de prises de guerre lors de la victoire de la France au XIXe siècle sur le roi du Dahomey, dans le sud de l’actuel Bénin. Cette décision d’Emmanuel Macron ouvre la voie à d’autres retours, car le président français a également annoncé le lancement d’un processus de concertation au niveau européen sur le rapatriement des œuvres d’art africain. Le projet global de restitution est ambitieux, puisque plus de 80 % du patrimoine africain serait toujours en dehors du continent, avec pas moins de 90 000 objets d’Afrique subsaharienne entreposés dans les musées français. Le Sénégal, parmi d’autres pays, a demandé le retour de son patrimoine. Un nouveau musée a ouvert ses portes début décembre à Dakar. Lutte d’influences en Centrafrique Le drapeau russe flotte à Bangui lors du concours de Miss Centrafrique, le 9 décembre 2018. FLORENT VERGNES / AFP La Centrafrique, en proie à de graves violences depuis 2012, a vu arriver de nouveaux acteurs sur son sol. Alors que la France et les Nations unies étaient jusque-là en première ligne pour tenter de sécuriser le pays et l’aider à reconstruire son Etat, le gouvernement russe et la société militaire privée Wagner, très proche du Kremlin, ont dépêché leurs conseillers pour participer à la formation de l’armée centrafricaine et entourer le président Faustin-Archange Touadéra. Alors que Moscou a livré de premières armes à Bangui, la France, puissance malmenée par cette arrivée, a réagi avec une aide de 24 millions d’euros et une petite livraison de fusils-mitrailleurs saisis au large de la Somalie. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La Centrafrique, un pion sur l’échiquier russe La ZLEC, un nouveau marché unique Avec l’adoption de la zone de libre-échange continentale (ZLEC), en mars, lors d’un sommet de l’Union africaine (UA) à Kigali, un nouveau marché africain pourrait bien apparaître. Créé avec l’espoir d’accélérer le commerce intra-africain, cet espace devrait compter plus de 1,2 milliard de consommateurs. Une nouvelle zone non tarifaire qui vise à protéger les PME africaines d’une concurrence extérieure et à encourager la production sur le continent. Les 49 pays signataires de l’accord devront cependant faire sans l’un des géants de l’économie africaine, le Nigeria, premier producteur de pétrole du continent. Le pays d’Afrique de l’Ouest craint que l’accord ne menace certains secteurs de son industrie, comme le textile. Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’Afrique pose les fondations d’une zone de libre-échange Au Sahel, la guerre se poursuit L’attaque du 2 mars visant l’ambassade de France et l’état-major burkinabé à Ouagadougou, qui a fait une trentaine de morts, a rappelé, s’il en était besoin, que la situation sécuritaire au Sahel reste extrêmement préoccupante. Avec 4 500 hommes sur le terrain, la France, à travers sa force « Barkhane », a mené plusieurs opérations militaires. En manque de financements et avec des armées aux niveaux disparates, le G5 Sahel, composé du Mali, du Niger, du Burkina Faso, de la Mauritanie et du Tchad, apparaît encore trop faible pour répondre seul à cette menace terroriste. Les groupes djihadistes, repoussés par l’intervention militaire soutenue par la France, ont depuis regagné de l’influence au Mali et étendu leur zone d’action au Burkina Faso et au Niger voisins. Des migrations toujours mortelles Si les estimations les plus optimistes portent à 1 400 le nombre de migrants morts sur les routes africaines en 2018, ce nombre est sans doute bien plus élevé et s’additionne aux 2 242 noyades lors de la traversée de la Méditerranée. Si elle est moins empruntée qu’en 2016 ou 2017, la route qui conduit de l’Afrique subsaharienne vers l’Europe devient de plus en plus difficile au fil des ans. Confrontés à la volonté européenne de fermer la route italienne – la traversée de la Méditerranée centrale –, de nombreux migrants ont tenté d’autres stratégies, notamment en entrant par l’Espagne. Mais avant, une partie d’entre eux se retrouvent refoulés du Maghreb vers le Sahel. Lire aussi Les autorités algériennes continuent d’expulser les migrants en plein désert Le Soudan du Sud, un conflit oublié Le 15 décembre, la guerre au Soudan du Sud est entrée dans sa sixième année. Cette guerre civile a causé la mort de 400 000 personnes, selon une étude financée par le département d’Etat américain. Malgré un accord signé le 31 octobre pour trouver une solution au conflit, la paix reste fragile et la situation dramatique : plus de 2 millions de Sud-Soudanais ont été chassés de leur domicile par les violences. Denis Mukwege, Prix Nobel de la paix Le docteur Denis Mukwege, Prix Nobel de la paix, à Bukavu, en RDC, le 27 décembre 2018. FREDRIK LERNERYD / AFP « L’homme qui répare les femmes » a remporté le Prix Nobel de la paix 2018. Ce gynécologue obstétricien et militant des droits humains a vu son combat pour la défense des civils dans l’est de la RDC récompensé à Stockholm. L’homme de 63 ans s’est spécialisé dans la gynécologie réparatrice pour les victimes de viols dans son hôpital de Panzi, à Bukavu. Les violences dans cette région durent depuis vingt ans. Dans son allocution, Denis Mukwege a notamment appelé à une accélération du processus judiciaire et du jugement des responsables des violences : « Ayons le courage de révéler les noms des auteurs des crimes contre l’humanité pour éviter qu’ils continuent d’endeuiller cette région. » Lire aussi Les cinq phrases à retenir du discours de Denis Mukwege, Prix Nobel de la paix 2018 Le ratage de la Coupe du monde de football Lors du Mondial 2018 en Russie, les pays africains n’ont pas réussi à reproduire l’exploit des équipes camerounaise, sénégalaise et ghanéenne qui s’étaient hissées en quarts de finale lors de précédentes éditions. Cette année, elles ont subi de lourds échecs. Le Maroc a fini dernier de son groupe, tout comme l’Egypte et son buteur Mohamed Salah, qui n’ont pas concrétisé les espoirs placés en eux. Guère mieux pour le Nigeria, la Tunisie ou le Sénégal, qui ont raté la qualification pour les huitièmes de finale. Si Eric Cantona s’était dit persuadé qu’« une équipe africaine gagnera bientôt la Coupe du monde », le rêve de l’ancien international français n’est pas encore devenu réalité.
31/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/31/ce-qu-il-faut-retenir-de-l-annee-2018-en-afrique_5403928_3212.html
Automobile : les tops et les flops de 2018
Louer plutôt qu’acheter, miser sur l’hybride ou l’électrique... 2018, année de la transition ? C’est compter sans le triomphe du polluant SUV.
Malgré les contraintes toujours plus fortes qui pèsent sur son usage – en particulier les coûts induits par sa transition énergétique, un enjeu déjà palpable –, l’automobile demeure une locomotive économique en même temps qu’un objet emblématique, capable d’inspirer l’aversion comme la passion. L’année 2018 aura vu s’accélérer les mutations à l’œuvre – le succès sans précédent des SUV ou l’électrification des gammes – et se préciser de nécessaires rééquilibrages, opérés parfois sans ménagement pour les entreprises mais aussi leurs dirigeants. Les tops La SUVmania Le Honda HR-V, symbole de l’irrésistible ascension des SUV. Honda Le sport utility vehicle (SUV) est entré dans le vocabulaire courant. Ce qui n’a rien de très surprenant lorsque l’on désigne une catégorie de voitures qui, désormais, pèse plus d’un tiers du marché français. Stimulée par une noria de nouveautés (Citroën C5 Aircross, Audi Q3, Mercedes GLE, BMW X2 et X5, Honda CR-V et HR-V…) et alimentée par l’appétence des consommateurs pour les véhicules qui les installent en position haute, la SUVmania écrase tout sur son passage. Sa part de marché a progressé de huit points en deux ans, mais quelques vents contraires semblent se lever. Le durcissement progressif des normes environnementales et l’adoption d’un mode plus strict (dit « WLTP ») du calcul de la consommation tendent à en faire une cible de choix pour la fiscalité automobile. Il est vrai que le sport utility vehicle consomme tendanciellement davantage qu’une berline. Une petite musique, sur l’air du « SUV qui pollue », commence donc à se faire entendre, comme si les nouveaux modèles étaient rattrapés par la mauvaise réputation de leurs prédécesseurs, que l’on appelait 4 × 4. Pour l’instant sans le moindre effet durable sur les ventes. La LOA fait la loi C’est une révolution discrète, mais qui agit en profondeur : louer sa voiture sur une longue période. Un peu plus d’un particulier sur trois recourt désormais à la LOA (location avec option d’achat) lorsqu’il choisit un véhicule neuf. La formule consiste à payer pendant trois, quatre ou cinq ans un loyer calculé en fonction de la décote estimée. Une variable qui donne un réel avantage aux marques « premium » dont les modèles perdent moins de valeur que les généralistes. Au terme de la période de location, la voiture est restituée ou (ce qui est beaucoup plus rare) définitivement acquise par le locataire. Outre qu’elle s’inscrit dans l’air du temps, la LOA (ou la LLD, location de longue durée sans option d’achat) tend à diluer le budget automobile sur une longue période, ce qui contribue globalement à pousser à la dépense. Reste un inconvénient à ne pas perdre de vue : même si, finalement, elle ne convient pas, il faudra conserver sa nouvelle voiture jusqu’au terme du contrat. Lire aussi Les SUV, une irrésistible ascension La ruée sur la fée électricité C’est le maître mot de l’année automobile : électrification. Il y a peu, on imaginait plutôt ce terme réservé au monde ferroviaire, mais en quelques années il s’est greffé sur celui de la voiture. Ce terme désigne l’hybridation des modèles utilisant un moteur à combustion interne (hybrides classiques ou rechargeables sur une borne), ainsi que le lancement d’un nombre croissant de modèles 100 % électriques. Sur les onze premiers mois de 2018, les hybrides (6 % du marché) et les électriques (2 %) battent tous leurs records, même s’ils ne sont pas près de devenir majoritaires. Cette ruée vers la fée électricité apparaît comme le seul moyen de satisfaire aux objectifs fixés par l’Union européenne (UE) pour 2021 (95 g de CO₂ en moyenne par kilomètre). Comme l’UE l’a proposé le 17 décembre, il faudra après cette date aller encore plus loin et réduire ces mêmes émissions de 37,5 % à l’horizon 2030. Assorties à de lourdes pénalités, ces contraintes imposées au grand dam du « lobby automobile » font fleurir les programmes les plus ambitieux, y compris chez les constructeurs historiquement les plus réticents. Comme PSA qui s’est engagé à ce qu’en 2025 toutes ses gammes disposent d’une option « électrifiée ». Jaguar I-Pace, une belle surprise Avec la I-Pace, même Jaguar se met à l’électrique. Jaguar Il n’est pas acquis – c’est un euphémisme – que la Jaguar I-Pace soit promise à devenir un modèle de grande diffusion, mais cette voiture, quoique élitiste, sert parfaitement la cause de la mobilité électrique. Elle prend le risque de s’écarter du cadre traditionnel de la marque en exploitant les marges de créativité qu’offre l’absence d’un encombrant moteur thermique (les moteurs électriques sont logés sur les essieux et la batterie sous le plancher). D’où cette architecture dite « en cabine avancée », ce capot court, l’empattement long et le centre de gravité abaissé. Le résultat est original et franchement élégant avec, en prime, un habitacle aussi vaste que celui d’un monospace. A la fois sportive et familiale, pourvue de quatre roues motrices, cette automobile métissée développe l’équivalent de 400 chevaux. La I-Pace se conduit tout en souplesse et affiche, au mieux, une autonomie de 480 kilomètres. Son tarif est salé (à partir de 70 000 euros ou 890 euros par mois en location longue durée), mais un « plein » d’électricité revient à environ 12 euros. Hardi mais prudent, Jaguar a développé une formule permettant à ses clients d’emprunter huit fois par an un véhicule thermique. Les flops La chute des grands patrons Il ne faisait pas bon diriger un groupe automobile en 2018. Rattrapé par le scandale du « dieselgate », Rupert Stadler, le président du directoire d’Audi, a passé l’été derrière les barreaux, entre juin et octobre. Au sein du même groupe, Oliver Schmidt, ponte de Volkswagen, purge actuellement une peine de sept ans aux Etats-Unis pour avoir lui aussi participé au trucage des tests antipollution. Et que dire de Carlos Ghosn, figure tutélaire du premier groupe automobile mondial, écroué dans une geôle japonaise depuis le 19 novembre. Menacé des foudres de la justice américaine pour s’être soustrait aux contraintes de la communication boursière, Elon Musk a sauvé in extremis sa place à la tête de Tesla. Non sans avoir accepté de partager le pouvoir à la tête de la firme. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Carlos Ghosn : l’ambition, l’argent et la gloire, jusqu’à la démesure Le plongeon du diesel Ce n’est plus une érosion mais un effondrement. La part du diesel, qui avoisinait les trois quarts des ventes de voitures neuves en 2012 et ne représentait plus que 47 % en 2017, termine l’année à 35 % des immatriculations. Certains constructeurs comme Volvo, PSA, Toyota, Fiat, Smart ou Porsche ont annoncé qu’ils cesseraient à moyen terme d’en proposer. Quant à la région Ile-de-France, elle emboîte le pas à la Mairie de Paris, et a décidé de programmer son bannissement en 2025. Le relèvement des taxes et la hausse des coûts de raffinage ont même abouti à ce que son prix à la pompe dépasse celui de l’essence. La mobilisation des « gilets jaunes » offre toutefois un léger répit au diesel, qui va échapper aux taxes supplémentaires qui lui étaient promises en 2019. Cela ne lui permettra point de remonter la pente mais devrait contribuer à amortir sa chute. L’e-Mehari en court-circuit Lors du lancement de l’e-Mehari, en 2016, on s’était gaussé. Et on avait raison. Cette année-là, la voiture électrique « fraîche, optimiste et distinctive » de Citroën avait été diffusée à 569 exemplaires. L’année suivante, les ventes ne dépassaient pas 353, et cela ne s’est pas arrangé en 2018 avec 288 unités péniblement écoulées sur les onze premiers mois de l’année. Etroitement dérivée de la Bluecar de Bolloré (un autre flop de l’année, emportée par la faillite d’Autolib’), l’e-Mehari (à partir de 25 500 euros) est un non-sens. Outre qu’elle n’a rien de particulièrement attirant, elle exige d’être en permanence branchée à l’arrêt sur une borne de recharge sous peine de voir sa batterie se décharger en quelques heures. Pas vraiment pratique pour un modèle qui se destine à jouer les voitures de plage… Article réservé à nos abonnés Lire aussi La disparition des Autolib’ risque de porter un coup dur aux batteries du groupe Bolloré Le design à la peine Les designers de l’automobile doivent un peu s’ennuyer derrière l’écran de leur ordinateur. Les audaces stylistiques, en effet, se raréfient même lorsqu’il s’agit de concevoir une voiture électrique. Le design des automobiles modernes s’est enfermé dans un cadre purement défensif, dominé par le souci de ne pas heurter l’acheteur, et la volonté de faire prévaloir à tout prix une identité de marque. Ce qui signifie que, du plus modeste au plus huppé, tous les modèles d’un catalogue doivent se ressembler. « L’avenir s’écrit sans doute en Chine, premier marché mondial, où les nouveautés proposent des choix plus audacieux qu’en Europe ou aux Etats-Unis », estime Jean-Michel Prillieux, consultant chez Inovev. La petite voiture en péril La Peugeot 108, modèle en voie d’extinction. Peugeot Elle pollue, par définition, moins que les autres et ne prend pas trop de place en ville. Pourtant, le déclin de la petite voiture semble inévitable. En vingt ans, la diffusion annuelle de la Twingo est passée de 200 000 à 80 000 unités, et, hormis la Fiat 500, les ventes de toutes les représentantes de la catégorie sont en berne. En annonçant la fin de leur partenariat, Toyota et PSA vont précipiter ce mouvement. Le groupe français n’a pas prévu de remplacer les petites Peugeot 108 et Citroën C1 alors que la firme japonaise songe à troquer sa citadine Aygo pour un mini-SUV. L’avenir est sans doute aux mini-modèles urbains 100 % électriques, proposés pour l’essentiel en autopartage. C’est notamment la voie choisie par Smart.
31/12/2018
m-styles
https://www.lemonde.fr/m-styles/article/2018/12/31/automobile-les-tops-et-les-flops-de-2018_5403925_4497319.html
A propos de la « une » de « M le magazine du Monde »: notre erreur et notre responsabilité
Editorial. Face au malaise créé par la couverture de notre magazine, nous avons présenté nos excuses aux lecteurs. Pour un journal, reconnaître ses torts revient à augmenter sa liberté d’informer, et sa crédibilité pour y parvenir.
Editorial du « Monde ». Nous avons reçu, depuis trois jours, de nombreux courriels de lecteurs exprimant leur réprobation, voire leur indignation, à l’encontre de la couverture du dernier numéro de « M le magazine du Monde ». Ces messages font état de la même impression : le dispositif visuel employé assimilerait la représentation du président de la République, Emmanuel Macron, à l’imagerie des dictateurs du XXe siècle, et particulièrement à celle utilisée pour Adolf Hitler. Ce n’était évidemment pas notre intention, comme nous l’avons indiqué dès samedi 29 décembre. Nul n’ignore, au Monde, quel abîme sépare un président de la Ve République des tyrans les plus abjects du siècle dernier. Nul ne jouerait à confondre un démocrate et un nazi. Toutefois, le malaise qu’a créé cette couverture, même si d’autres lecteurs n’en ont pas eu la même interprétation, montre que sa publication était une erreur. Puiser dans le vocabulaire visuel d’un courant esthétique du début du XXe siècle, le constructivisme, qui a imprégné les représentations des dictatures qui l’ont suivi, n’était pas un bon choix, puisque cela exposait à ce risque de confusion. S’inspirer d’un graphiste qui avait déjà utilisé ces codes pour une illustration sur Hitler ne pouvait qu’accroître ce risque. Apporter de la clarté, de la mesure et de la profondeur Nous avons manqué de discernement dans la validation de cette couverture qui ne correspondait pas au fond du récit consacré à Emmanuel Macron dans ce numéro. Nous avons donc présenté nos excuses, dès samedi, aux lecteurs qui en ont été choqués. Nous considérons en effet que, pour un journal, reconnaître ses torts ne revient pas à restreindre mais bien à augmenter sa liberté d’informer, et sa crédibilité pour y parvenir. Cette maladresse est d’autant plus regrettable qu’elle introduit du trouble dans une époque où notre rôle est, plus que jamais, d’apporter de la clarté, de la mesure et de la profondeur. La période extrêmement instable, et dangereuse, dans laquelle nous sommes entrés, tant en France que dans nombre de démocraties, accroît notre responsabilité de collectivité de journalistes dont l’indépendance éditoriale, qui s’est construite depuis bientôt soixante-quinze ans, a été intégralement maintenue. Cette responsabilité, nous serons encore plus vigilants pour la préserver des erreurs – aucune rédaction n’est infaillible – qui peuvent entamer la confiance de nos lecteurs. Cette liberté, nous veillerons aussi à la protéger des pressions qui ont pris de nouvelles formes, depuis l’avènement des réseaux sociaux. Car, depuis trois jours, en sus des courriers de nos lecteurs de bonne foi, nous voyons aussi se déployer, autour de cette couverture ratée, l’habituelle tentative de nous caricaturer en ce que nous ne sommes pas : un journal militant, voué au dénigrement systématique du président de la République – ce qui ne manque pas d’ironie quand on se souvient du reproche, tout aussi fallacieux, qui nous était adressé par ses opposants, de l’avoir soutenu durant sa campagne électorale. Un quotidien, un site et un magazine non partisans A cette mauvaise foi, nous ne cesserons d’opposer notre travail de journalistes, qui dit chaque jour ce que nous sommes : un quotidien, un site et un magazine non partisans, qui cherchent toujours, par des informations inédites, des reportages ou des enquêtes originales, à alerter leurs lecteurs sur les grands mouvements de la planète ou du pays. Alerter signifie bien plus souvent inquiéter ou déranger que rassurer ou conforter dans ses certitudes. Cela nous vaut de prendre des coups et d’être attaqués sans cesse par tous les camps. Ces procès d’intention, nous y sommes confrontés depuis longtemps. Ils ont valu aux journalistes de notre service Planète d’innombrables critiques sur leur couverture de la catastrophe en cours du réchauffement climatique, avant que cette vérité finisse par s’imposer à tous, comme le décrivait très bien le précédent numéro de notre magazine. Aujourd’hui, ils se déploient à l’occasion de la crise politique et sociale majeure que révèle le soulèvement des « gilets jaunes », tout autant que la montée de nombre de mouvements populistes dans le monde. Nous ne renoncerons pas à décrire, sans concession pour aucune partie, les enjeux anciens et récents de cette fragmentation de nos sociétés. C’est par ce rôle que se construit l’utilité d’un journalisme indépendant, et la confiance de ses lecteurs.
31/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/31/a-propos-de-la-une-de-m-le-magazine-du-monde-notre-erreur-et-notre-responsabilite_5403917_3232.html
En plein « shutdown », des bénévoles en renfort dans les parcs nationaux américains
21 000 fonctionnaires employés du National Park Service sont au chômage forcé et sans salaire à cause de la paralysie budgétaire aux Etats-Unis.
Les rangers du parc national Joshua Tree en Californie ont été mis au chômage forcé du fait du « shutdown ». ROBYN BECK / AFP Depuis le 22 décembre à minuit, tout est figé dans les parcs nationaux américains. La faute au shutdown, cette paralysie des administrations fédérales due à une absence de consensus politique. Et avec elle, quelque 21 000 fonctionnaires employés du National Park Service (NPS) mis au chômage forcé et sans salaire. En pleine saison haute, le NPS a ainsi annoncé qu’il « n’assurerait pas le fonctionnement des parcs pendant le shutdown et ne fournirait pas de services aux visiteurs », y compris « les toilettes, le ramassage d’ordures, l’entretien des routes et installations ». Des annonces qui ont poussé des centaines de bénévoles à venir prêter main-forte aux autorités locales pour continuer d’exploiter ces lieux touristiques souvent déterminants pour l’équilibre économique régional. « Un semblant de normalité » à Joshua Tree Autour de Joshua Tree, en Californie, connu pour ses magnifiques arbres de Josué et ses énormes monolithes de granit, de nombreux bénévoles sont ainsi venus en renfort, alors que le parc connaît son pic de fréquentation entre Noël et le jour de l’An. Des dizaines de volontaires s’affairent ainsi pour nettoyer les WC, remettre du papier toilette et ramasser les déchets. Tout l’approvisionnement vient de la poche des entrepreneurs locaux, mais quelques dons commencent à arriver. « Il y a quelque 150 W.-C. dans le parc ; j’estime que nous avons distribué plus de 500 rouleaux de papier toilette et je ne crois pas que nous ayons atteint tous les W.-C., seulement les plus importants », déclare à l’agence France-Presse John Lauretig, directeur exécutif de l’ONG Friends of Joshua Tree. « Nous faisons de notre mieux pour maintenir un semblant de normalité, mais nous n’avons pas l’autorité ou le pouvoir d’empêcher une personne qui conduirait en dehors des chemins dédiés, qui couperait un arbre ou volerait des objets. » Vue du parc national de Joshua Tree, en Californie. GABRIEL BOUYS / AFP Dix-sept jours en 2013 Sabra Purdy, qui organise des randonnées depuis huit ans dans le parc, dit avoir vu du désordre lorsqu’elle est entrée dans le parc vendredi, mais « pas de chaos ». « Il y avait beaucoup de gens avec des chiens » alors que ces derniers sont interdits dans certaines zones, « ou qui campaient là où ils ne doivent pas le faire. Mais c’est sûr, ça pourrait être pire », raconte-t-elle. Les volontaires en profitent pour orienter les touristes et leur expliquer les règles. « Ce n’est pas notre premier shutdown et ce ne sera probablement pas le dernier », lâche Mme Purdy. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Derrière le « shutdown » américain, les craintes sur le plafond de la dette En 2013, le parc avait fermé pendant dix-sept jours en raison d’une paralysie budgétaire. « Ce fut financièrement dévastateur pour nous », se souvient Mme Purdy. « Les gens ont arrêté de venir, les restaurants locaux et les commerces ont dû se séparer d’employés, ils les avaient renvoyés chez eux parce qu’il n’y avait plus d’argent, plus de visiteurs », affirme, de son côté, M. Lauretig. En décembre 2017, le parc a accueilli 285 493 visiteurs. Sur les onze premiers mois de 2018, 2,4 millions de touristes s’y sont rendus. Dans le pays, d’autres parcs ont été contraints à une fermeture totale, tandis que d’autres opèrent partiellement. En Californie, les populaires Death Valley et Channel Islands restent ainsi ouverts.
31/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/31/en-plein-shutdown-des-benevoles-viennent-en-aide-aux-parcs-nationaux-americains_5403912_3210.html
En Roumanie, les procureurs s’inquiètent de la « pression autocratique »
Des magistrats déplorent les intimidations de l’exécutif, surtout après le limogeage de la chef du parquet anticorruption, en juillet 2018.
Conférence de presse de Laura Codruta Kövesi, après son limogeage du poste de chef du parquet anticorruption roumain, à Bucarest, le 9 juillet 2018. ADRIAN CATU / AFP Son bureau donne directement sur le gigantesque Palais du parlement construit par Nicolae Ceausescu, renversé en 1989, et depuis lequel le président de la Chambre des députés mène l’offensive contre lui. Augustin Lazar, 62 ans, procureur général de Roumanie, a ces derniers temps de multiples occasions de méditer sur la résistance du système juridique roumain au système communiste de Ceausescu, son sujet de prédilection. Depuis le 24 octobre, il est en effet à son tour menacé de destitution par le gouvernement. Ce jour-là, le ministre de la justice a lancé la procédure en lui reprochant d’avoir « tenu des discours politiques », « contesté des décisions de la Cour constitutionnelle » ou encore « critiqué des juges ». Personne ne doute que cette procédure est en réalité téléguidée par Liviu Dragnea, le chef du Parti social-démocrate, qui depuis deux ans contrôle l’exécutif roumain depuis la présidence de la Chambre basse, en multipliant les attaques contre le système judiciaire. Sans nommer celui qui fait actuellement l’objet de deux procédures pour corruption, M. Lazar dénonce « ceux qui veulent discipliner la justice aujourd’hui pour revenir aux années 1990, quand la justice roumaine n’était que de façade dès qu’il s’agissait de personnes très haut placées ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi La Roumanie sur la voie de la Hongrie et de la Pologne Le premier procureur rappelle pourtant qu’« avec l’adhésion de la Roumanie à l’UE en 2007, la justice était devenue très efficace, avec des centaines de condamnations ». C’est cet héritage que M. Lazar compte défendre : « Je dis tous les jours à mes collègues qu’il faut continuer notre travail et ne pas céder. » Lui-même conteste la procédure de destitution auprès de la justice administrative : « Sa décision sera un test de résistance du système judiciaire. » Il espère éviter le sort de l’ex-chef du parquet anticorruption, Laura Codruta Kövesi, qui a dû quitter son poste en juillet après avoir vainement tenté pendant plusieurs mois de résister à une procédure similaire. « Attitude docile » Depuis, le parquet anticorruption, institution particulièrement populaire en Roumanie, est plongé dans le désarroi. « Beaucoup de collègues ont peur », témoigne un procureur sous le couvert de l’anonymat. D’autant que le code pénal est modifié en permanence, fragilisant toutes les enquêtes, à commencer par celles visant M. Dragnea. Les procureurs n’osent plus, par exemple, communiquer sur le fond des dossiers, craignant que les enquêtes ne soient cassées en cas de propos publics imprudents.
31/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/31/les-procureurs-roumains-s-inquietent-de-la-pression-autocratique_5403907_3210.html
Les syndicats critiquent le nouveau barème de sanctions contre les chômeurs
Le dispositif s’inscrit dans la volonté du gouvernement de renforcer le contrôle des demandeurs d’emploi.
Il faut toujours garder un œil sur le Journal officiel : à défaut d’être exaltante, la lecture de cette publication peut s’avérer instructive, en particulier entre Noël et le Jour de l’an. Démonstration vient d’en être faite avec l’édition du dimanche 30 décembre, qui contient près de 20 décrets d’application de la loi « avenir professionnel » – une réforme votée l’été dernier sous la houlette de la ministre du travail, Muriel Pénicaud. L’un des décrets parus dimanche a trait « aux droits et aux obligations » des chômeurs, ainsi qu’au « suivi de la recherche d’emploi ». Le contenu de ce texte, éminemment sensible, est grosso modo en ligne avec les intentions affichées initialement par le gouvernement. A une réserve près, qui n’est pas anodine : elle porte sur les sanctions prononcées contre un inscrit à Pôle emploi qui contrevient à ses devoirs. Dès le départ, l’exécutif avait manifesté le souhait de revoir le barème des « peines » applicables. Le 20 mars, des pistes très précises avaient été dévoilées à la presse par le ministère du travail. Il avait alors été indiqué qu’un chômeur qui ne se présente pas à un rendez-vous avec son conseiller chez Pôle emploi serait radié des listes durant deux semaines et non plus pendant deux mois. « On diminue par quatre [la durée de] la sanction, qui était complètement disproportionnée sur ce sujet-là », avait expliqué l’entourage de Mme Pénicaud. Finalement, la « punition » sera un peu plus lourde qu’annoncée : un mois de radiation (au lieu de quinze jours, donc), ce qui la place tout de même à un niveau inférieur à celui en vigueur avant la réforme ; durant cette période, la prestation cesse momentanément d’être versée. Lire aussi Contrôle des chômeurs : une nouvelle échelle de sanctions annoncée Un autre changement s’est produit par rapport à la communication gouvernementale. Il concerne une option, également évoquée le 20 mars, pour l’ensemble des « manquements » du demandeur d’emploi (à l’exception du rendez-vous manqué avec son conseiller, sans motif valable). L’idée présentée à l’époque consistait à dire que, à la première incartade (par exemple, le fait de ne pas rechercher activement un poste), l’allocation serait suspendue pendant un mois – les droits restant acquis et pouvant être utilisés plus tard, en cas de besoin. Si le chômeur commet un deuxième écart, le ministère avait précisé que la prestation serait supprimée durant deux mois – ce qui signifiait, cette fois-ci, une amputation des droits d’une durée équivalente. A la troisième « infraction », le coup de bâton serait de quatre mois.
31/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/31/les-syndicats-critiquent-le-nouveau-bareme-de-sanctions-contre-les-chomeurs_5403904_823448.html
La sonde New Horizons poursuit sa visite des confins du Système solaire
L’appareil a survolé mardi Ultima Thulé, l’objet céleste le plus distant jamais étudié, un astre glacé qui pourrait livrer des indices sur la formation des planètes.
On l’aurait presque oubliée tant elle est loin de nous. La sonde New Horizons de la NASA avait eu son heure de gloire le 14 juillet 2015 en étant le premier engin humain à survoler la planète naine Pluton. Elle avait alors envoyé aux astronomes des images époustouflantes de ce corps gelé, d’une topographie bien plus complexe que ce que l’on imaginait. Et le vaisseau, qui n’avait pas les moyens de se mettre en orbite autour de Pluton, avait poursuivi sa route, s’enfonçant à la fois dans les tréfonds du Système solaire et dans ceux, non moins sombres, de notre mémoire. Lire aussi Une sonde américaine survole l’objet céleste le plus distant jamais étudié Cependant, la mission de New Horizons n’était pas terminée. Voilà que la sonde, désormais à 6,5 milliards de kilomètres de nous, resurgit pour le premier jour de 2019 où elle a survolé un petit astre glacé que la NASA a baptisé Ultima Thulé, en référence au nom de Thulé que le navigateur massaliote Pythéas avait attribué, au IVe siècle av. J.-C., à la contrée la plus septentrionale de l’Europe. Le nom officiel de cet objet céleste d’une trentaine de kilomètres de diamètre est 2014 MU69. Il s’agit de l’un des milliers de corps qui occupent ce que les spécialistes nomment la ceinture de Kuiper, du nom de l’astronome néerlando-américain Gerard Kuiper (1905-1973) qui, le premier, suggéra l’existence, au-delà de l’orbite de Neptune, d’une zone peuplée d’astres froids et modestes en taille. 51 000 kilomètres/heure Ainsi que l’explique le planétologue François Forget, directeur de recherches au CNRS impliqué dans la mission New Horizons, « pendant longtemps on a eu une vision assez simple du Système solaire : quatre planètes telluriques – Mercure, Vénus, la Terre et Mars –, quatre planètes gazeuses – Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune – et un canard bizarre et solitaire qui était Pluton. Aujourd’hui, la ceinture de Kuiper est considérée comme une vraie grande partie du Système solaire, une troisième zone remplie de nombreux objets dont Pluton, l’un des plus gros, est l’ambassadeur. » Article réservé à nos abonnés Lire aussi Sur Pluton, il y a des dunes de glace Etudier in situ un des représentants de ces objets transneptuniens (TNO, selon l’acronyme anglais) est à la fois une première dans l’histoire de l’astronomie et une chance pour les chercheurs. A peine visibles dans les télescopes tellement ils sont minuscules et lointains, les TNO n’y apparaissent que sous la forme de points et les informations que l’on récolte à leur sujet s’avèrent bien maigres. Pourtant, mieux connaître ces astres primitifs permettrait de remonter à la naissance du Système solaire il y a un peu plus de 4,5 milliards d’années, et de livrer des indices sur la manière dont se sont alors agrégées les planètes. Les images et les données de New Horizons sont donc attendues avec une certaine impatience. Mardi 1er janvier, à 6 h 33 (heure de Paris), l’émissaire robotisé de la NASA, filant dans l’espace à près de 51 000 km/h, passera à 3 500 km d’Ultima Thulé, dont on sait déjà qu’il s’agit d’un objet de forme allongée, cette information ayant été obtenue en le regardant occulter une étoile. « On se demande s’il s’agit d’un seul corps qui, comme la comète Tchouri étudiée par la sonde Rosetta, ressemblerait à deux patates collées, ou bien s’il s’agit de deux corps qui tournent très près l’un de l’autre, précise François Forget. Si c’est un seul objet, a-t-il été créé ainsi ou bien est-ce le fragment d’un plus gros corps, auquel cas il pourrait avoir été chauffé en se brisant et présenter des couches ? » Débusqué par Hubble D’autres questions concernent sa composition, la présence d’une atmosphère ou d’anneaux. « Ce ne sera pas aussi spectaculaire que pour Pluton, où l’on a découvert un autre monde, explique le planétologue, mais il y aura quand même l’excitation de survoler quelque chose de totalement nouveau ! » Le plus incroyable de cette aventure scientifique réside dans le fait que, lorsque New Horizons a quitté la Terre le 19 janvier 2006, la NASA ignorait quelle serait sa destination après Pluton, car Ultima Thulé n’avait pas encore été découvert… « On a commencé par chercher une cible avec de gros télescopes terrestres, rappelle François Forget, un objet dans le cône atteignable par la sonde, mais on n’a rien trouvé du tout. La NASA a donc demandé du temps d’observation sur le télescope spatial Hubble, avec une très grosse pression pour détecter des TNO. A vivre, c’était assez particulier, et il y a même eu un moment où tout le monde a pensé qu’on ne trouverait pas de cible. Au bout du compte, on a eu des centaines d’heures sur Hubble, ce qui était exceptionnel. » Ultima Thulé, dans la ceinture de Kuiper. AP/NASA Heureusement pour la mission, Ultima Thulé est apparu en 2014 sur une des images prises par le télescope spatial, ce qui a laissé assez de temps pour étudier son orbite et programmer les changements de trajectoire nécessaires afin que New Horizons aille lui rendre visite. Dans une déclaration publiée par le Guardian, Alan Stern, le responsable de la mission, explique qu’il faudra « environ vingt mois pour récupérer les données » enregistrées lors du survol du 1er janvier. Et il pense déjà à la suite. La sonde a encore du carburant, ses instruments sont opérationnels, sa batterie nucléaire peut lui fournir de l’électricité pendant des années. Mais aucune nouvelle cible n’est en vue… Cette fois-ci, New Horizons pourrait bien poursuivre sa course vers nulle part.
31/12/2018
sciences
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/31/la-sonde-new-horizons-poursuit-sa-visite-des-confins-du-systeme-solaire_5403892_1650684.html
La justice française ordonne la remise à la CPI d’un patron du football centrafricain et ex-milicien
Patrice-Edouard Ngaïssona est soupçonné d’avoir commis ou aidé à commettre des crimes de guerre et crimes contre l’humanité en République centrafricaine entre 2013 et 2014.
Patrouille des militaires français de l’opération « Sangaris » à Bangui, en septembre 2015. EDOUARD DROPSY / AFP Patrice-Edouard Ngaïssona, le chef d’une faction anti-balaka, milice à majorité chrétienne en Centrafrique, devrait bien faire l’objet de poursuites devant la Cour pénale internationale (CPI). La cour d’appel de Paris a donné, lundi 31 janvier, son feu vert à la remise à la CPI, basée à La Haye, de cette figure des autorités du football africain. Visé par un mandat d’arrêt de la CPI, M. Ngaïssona, 51 ans, est soupçonné d’avoir commis ou aidé à commettre des crimes de guerre et crimes contre l’humanité dans l’ouest de la République centrafricaine entre septembre 2013 et décembre 2014. Il avait été interpellé en France le 12 décembre et écroué dans la prison de Fleury-Mérogis (Essonne). Cette arrestation était intervenue quelques semaines seulement après la remise à la Cour d’un autre ex-chef de milice anti-balaka, Alfred Yekatom, parfois surnommé « Rambo ». « J’étais un porte-parole qui a amené la paix en Centrafrique et non un chef de guerre », avait déclaré, le 19 décembre, devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel M. Ngaïssona. Il avait affirmé, par ailleurs, qu’il n’était « pas au pays » au moment des faits qui lui sont reprochés. Malgré un lourd passif dans son pays à la tête des milices anti-balaka, M. Ngaïssona, qui fut un éphémère ministre des sports en 2013, avait été élu en février 2018 au comité exécutif de la Confédération africaine de football (CAF). Il est aussi président de la Fédération centrafricaine de football. Régulièrement cité Son nom est régulièrement cité dans les rapports de l’ONU et dans les notes d’enquête de la justice centrafricaine comme l’un des chefs des milices anti-balaka qui ont semé la terreur dans le pays. Créées en 2013 après la prise du pouvoir à Bangui par les rebelles de la coalition de la Séléka, ces milices peu structurées ont pris les armes en prétendant défendre les intérêts des chrétiens et en représailles aux exactions des groupes armés musulmans. A la chute du président Michel Djotodia, issu de la Séléka en 2014, les anti-balaka se sont lancés dans une chasse aux musulmans dans Bangui et ses environs, faisant des centaines de morts. Lire aussi La mission impossible de la Cour pénale spéciale en Centrafrique Selon la CPI, il y a des « motifs raisonnables » de croire qu’une « attaque généralisée et systématique a été perpétrée par les anti-balaka contre la population civile musulmane et quiconque semblait soutenir la Séléka ». Dans le viseur de la justice Plusieurs fois déjà, M. Ngaïssona avait été dans le viseur de la justice : en 2014, une vaste opération de l’armée française pour l’appréhender dans son fief de Boy-Rabe, quartier du nord de Bangui, avait échoué. Il a bien été incarcéré au début des années 2000 pour enrichissement illicite, mais semblait passer entre les mailles de tous les filets depuis. A Bangui, ses détracteurs avaient lié son inexorable ascension — jusqu’à se présenter à l’élection présidentielle de 2015 — à ses liens avec l’ancien président François Bozizé (2002-2013) et ses connexions présumées avec l’actuel président Faustin-Archange Touadéra. Sa candidature à la présidentielle a néanmoins été rejetée, ce qui provoqua barricades et échauffourées dans des quartiers de la capitale centrafricaine.
31/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/31/la-justice-francaise-ordonne-la-remise-a-la-cpi-d-un-patron-du-football-centrafricain-et-ex-milicien_5403887_3212.html
Forêts, mines, climat… au Brésil, les ONG craignent une catastrophe environnementale
Jair Bolsonaro, investi président le 1er janvier, veut exploiter davantage de mines, remettre en question l’accord de Paris sur le climat, faciliter la vente de pesticides et amplifier la déforestation.
Près de la réserve de Salto Morato, au Brésil, en 2012. YASUYOSHI CHIBA / AFP Un épais dossier est déjà fin prêt. On y trouve, en pagaille, les intentions du président élu brésilien, Jair Bolsonaro, et de son équipe pour la « préservation » de l’environnement et la sauvegarde des intérêts économiques du pays : revenir sur les démarcations des territoires indigènes afin d’en exploiter les richesses minières, ouvrir au tourisme les réserves naturelles protégées, mettre fin à « l’industrie des amendes » de l’Ibama, institut gouvernemental de protection de l’environnement, remettre en question l’accord de Paris sur le climat, autoriser plus largement et rapidement la commercialisation de pesticides et, enfin, amplifier la déforestation – légale – des forêts brésiliennes, comme celle de l’Amazonie. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Brésil, Jair Bolsonaro prend le pouvoir Jair Bolsonaro n’est pas un climatosceptique. « Je crois en la science, point final », a-t-il lâché début décembre. Mais il fustige ceux qu’il appelle les « chiites de l’environnement », les intégristes qu’il voit dans la plupart des organisations non gouvernementales qui se consacrent à la préservation de la planète. Le président entretient aussi sans complexe un discours semi-colonialiste envers les populations indigènes, considérées comme les meilleurs protecteurs de la nature, qu’il entend convertir à la modernité du monde occidental. « Jair Bolsonaro doit comprendre qu’être président, ce n’est pas être le propriétaire du Brésil », signale Marcio Astrini, de Greenpeace Brésil Chapeau de cow-boy sur la tête et lasso en main, le président a choisi son camp dès le début de sa campagne électorale en s’érigeant comme un allié indéfectible des fazendeiros, ces grands propriétaires terriens à la tête de milliers de têtes de bétail ou de centaines de milliers d’hectares de cultures de soja ou de maïs. Une population qui, dans son immense majorité, considère le réchauffement climatique comme une « théorie » venue de l’étranger pour anéantir l’agriculture brésilienne. C’est à cet électorat que s’adresse avant tout le président, épaulé par sa ministre de l’agriculture, Tereza Cristina, figure de proue de l’agronégoce surnommée la « muse du poison », du fait de sa défense immodérée des pesticides et désherbants. Le militaire, prêt à dessiner des autoroutes, construire des barrages hydroélectriques au milieu de terres sauvages, aura à affronter des obstacles. Ses velléités anti-écologiques sont, en majorité, présumées inconstitutionnelles. Le capitaine de réserve en a pris conscience au fil de ses déclarations péremptoires. Il a notamment dû baisser les armes vingt-quatre heures après avoir fait part de son intention de révoquer, « par décret », la démarcation du territoire indigène Raposa Serra do Sol.
31/12/2018
climat
https://www.lemonde.fr/climat/article/2018/12/31/forets-mines-climat-au-bresil-les-ong-craignent-une-catastrophe-environnementale_5403882_1652612.html
La politique, option latin-grec : pourquoi les mots de l’Antiquité reviennent sur la place publique ?
Du président surnommé « Jupiter » à la définition du mot « peuple », l’Antiquité fait un retour en force avec ses termes et ses concepts. Retrouvez ici les neuf articles du supplément Idées.
Giuseppe Ragazzini Emmanuel Macron en est sans doute convaincu, à la fin de ce mois de décembre agité : la roche Tarpéienne est proche du Capitole, il n’y a qu’un pas de la réussite à l’échec. Lui qui est né à la politique parce qu’il avait su saisir le bon moment est maintenant puni pour sa démesure, disent les observateurs. Du kairos à l’hubris. Mais sans oublier Jupiter… On pourrait s’amuser de ces clins d’œil à l’Antiquité qui ponctuent le mandat présidentiel et n’y voir que le jeu du hasard ou des effets de salonnards. C’est pour partie vrai. Ce retour d’un lexique emprunté à des mondes lointains tient d’abord de l’appétit des commentateurs pour la nouveauté. Et même trouvé chez Aristote, soit vieux de vingt-quatre siècles, le kairos a évidemment quelque chose de frais. Questionner nos institutions Mais on pourrait aussi être plus sérieux et considérer que ce goût pour l’antique est le symptôme de la crise que nous traversons – crise politique, mais aussi, plus profondément, crise démocratique, qui nous contraint à questionner en profondeur nos institutions. Après tout, si Athènes a inventé le pouvoir au peuple (« democratia »), Rome a fondé la République (« res publica »). Le monde des Anciens n’est pas le nôtre, mais les notions forgées il y a plus de deux mille ans continuent de donner forme à nos façons de penser. Les « gilets jaunes » n’ont-ils pas proclamé qu’ils étaient « le peuple » ? Les ambiguïtés de la notion sautent aux yeux si l’on en revient aux distinctions qu’opéraient le grec (entre dèmos et ethnos) et le latin (entre populus, plebs et vulgus). De même, sans prétendre fournir de conclusion sur la nature du populisme, on aura profit à examiner le rôle des tribuns de la plèbe, à Rome, ainsi que leur legs contemporain. Et quant à la nature autoritaire de certaines démocraties, la longue histoire de la dictature et du césarisme nous rappelle que l’illibéralisme n’est pas d’invention récente. Allons donc vers le passé avec les questions du présent, car, comme le disait l’historienne Nicole Loraux, tout ce que l’on risque, c’est de « revenir vers le présent lesté de ce que l’on a appris dans le passé ». On tente !
31/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/31/la-politique-option-latin-grec_5403880_3232.html
« Gilets jaunes » : la nuit du réveillon sous surveillance à Paris et dans plusieurs grandes villes
La sécurité va être renforcée sur l’avenue des Champs-Elysées à Paris, alors que des rassemblements de manifestants sont annoncés.
Les festivités du Nouvel An vont se dérouler sous haute sécurité, lundi 31 décembre, à Paris ainsi que dans plusieurs villes de province. La menace terroriste reste toujours élevée, après l’attaque contre le marché de Noël de Strasbourg, le 11 décembre. Mais cette année, la particularité du passage à 2019 réside également dans les appels des « gilets jaunes » à manifester, notamment sur les Champs-Elysées, dans la capitale. Un appel a été ainsi lancé ces derniers jours sur Facebook pour un rassemblement « festif et non violent » sur l’avenue parisienne à 20 heures, au moment des traditionnels vœux télévisés du président de la République aux Français. Un périmètre de sécurité est prévu dès 16 heures lundi sur les Champs-Elysées et la place de l’Etoile, avec des points de filtrage installés aux entrées de la zone. A l’intérieur du périmètre, où sont strictement interdits alcools et engins pyrotechniques, pourront avoir lieu « des palpations de sécurité, des fouilles de bagage et de véhicule », selon la préfecture de police. Le maintien de l’ordre sera particulièrement délicat à assurer alors que les « gilets jaunes » devaient converger sur l’avenue parisienne en plus des touristes et des badauds traditionnels. L’an dernier, le réveillon de la Saint-Sylvestre avait attiré près de 400 000 personnes sur les Champs-Elysées. Quelque 12 000 policiers vont être mobilisés dans la capitale, complétés par 6 000 gendarmes, pompiers et secouristes, a détaillé Michel Delpuech, le préfet de police, lundi matin sur LCI. Au total, « 147 935 personnels, forces de l’ordre, de sécurité civile et militaires de l’opération Sentinelle seront mobilisés sur l’ensemble du territoire », a déclaré le ministère de l’intérieur dans un communiqué diffusé dimanche soir, un chiffre légèrement supérieur à 2017 avec des effectifs de près de 140 000 personnes déployées. Sur l’ensemble de la région parisienne, des contrôles dans les transports en commun et dans les gares étaient également prévus, ainsi que sur les axes routiers structurants. Nouvelles actions en janvier Les effectifs de sécurité et de secours devaient être renforcés dans d’autres villes du pays, notamment à Bordeaux et à Nice où des « gilets jaunes » ont lancé des appels au rassemblement. Les manifestants avaient prévu de tirer un feu d’artifice à minuit, le 31 décembre, depuis le pont d’Aquitaine à Bordeaux, ou de se retrouver place Masséna à Nice, mais aussi au rond-point de Saint-Isidore (Alpes-Maritimes), près de l’autoroute A8. Cette mobilisation des « gilets jaunes » intervient alors que l’« acte VII », samedi 29 décembre, a moins mobilisé, plus d’un mois et demi après le début du mouvement. Selon les chiffres du gouvernement, près de 12 000 manifestants au total se sont rassemblés sur l’ensemble du territoire, mais les personnes mobilisées promettent de nouvelles actions en janvier, alors que débutera le « grand débat national » décidé par le gouvernement pour tenter de répondre à la crise. Avec quelque 2 500 manifestants, Bordeaux est la ville où la mobilisation a été la plus forte samedi tandis qu’à peine un millier de personnes ont défilé à Marseille, à Rouen ou à Nantes et 800 à Paris, selon les chiffres officiels. A Marseille comme à Bordeaux, des heurts ont éclaté entre des protestataires et les forces de l’ordre. A Paris, plusieurs centaines de « gilets jaunes » s’en sont pris aux médias, venant notamment manifester à proximité des locaux de BFM-TV, de France Télévisions et de Radio France. A Paris, 57 personnes ont été interpellées et 33 placées en garde à vue. Des heurts ont également éclaté à Rouen, où la porte de la Banque de France a été incendiée, et à Nantes où un manifestant a été blessé à la tête après qu’il aurait reçu un tir de lanceur de balles de défense, selon France Bleu. Depuis le début du mouvement en novembre, dix personnes ont été tuées sur des points de blocage en France et plus de 1 600 manifestants ont été blessés, dont une cinquantaine gravement. L’inspection générale de la police nationale a été saisie par la justice de 48 affaires de violences policières présumées lors de manifestations de « gilets jaunes » et de lycéens. La mobilisation des anti-« gilets jaunes » tente par ailleurs de s’organiser pour dénoncer les blocages et les violences : un appel a été lancé pour une manifestation à Paris, le 27 janvier, en soutien à Emmanuel Macron et au gouvernement. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Macron face à l’équation délicate de 2019
31/12/2018
police-justice
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/31/gilets-jaunes-la-nuit-de-la-saint-sylvestre-sous-surveillance_5403874_1653578.html
« Je suis devenu fou, je veux retourner au bled » : les migrants qui optent pour un retour volontaire
L’aide au retour volontaire a concerné en 2018 plus de 10 000 personnes, dont beaucoup d’Afghans.
AUREL Il a les yeux rouge vif. A plusieurs reprises, il demande s’il pourra aller aux toilettes après l’enregistrement. Dans un hall de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, Noorislam Oriakhail vit ses derniers moments en France, fébrile. Il prend l’avion pour la première fois de sa vie. Au bout du voyage : l’Afghanistan. Comme 1 055 Afghans en 2018, des hommes majoritairement, Noorislam a choisi de rentrer. Ils étaient déjà 970 à avoir opté pour un « retour volontaire » depuis la France en 2017. Volet peu connu de la politique d’éloignement des étrangers en situation irrégulière, l’aide au retour volontaire a concerné cette année plus de 10 000 personnes au total, un chiffre en hausse de 58 % sur un an. Après les Albanais et devant les Moldaves, les Afghans sont les plus concernés par ce dispositif mis en œuvre par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII). Une situation qui s’explique : ils sont les premiers demandeurs d’asile en 2018. En outre, précise Didier Leschi, le directeur général de l’OFII, « lorsqu’ils arrivent en France, ils ont déjà déposé en moyenne près de deux demandes d’asile en Europe, principalement en Allemagne et en Suède, où elle a été rejetée ». Ils entrent donc dans la catégorie dite des « Dublinés », ne peuvent pas demander l’asile en France avant un délai de six à dix-huit mois. Dans l’intervalle, ils sont en situation irrégulière. L’OFII assume une politique volontariste à leur endroit : « Nous les démarchons pour leur proposer l’aide au retour, d’autant que les retours forcés sont très difficiles », reconnaît Didier Leschi. Au premier semestre, avec 23 éloignements, le taux d’exécution des obligations de quitter le territoire français prononcées à l’encontre des Afghans atteignait 4 %. En plus d’être moins onéreux qu’un éloignement forcé, les retours volontaires ont beaucoup plus de succès. « Trop de pression » Noorislam est « fatigué » de ne pas parvenir à s’extirper d’une situation précaire. D’un voyage entamé en 2006 et financé par son père et un oncle, il est arrivé « jeune et fort » sur le continent, avec l’Angleterre en ligne de mire. « C’était un rêve, reconnaît-il. J’ai essayé cinq ou six fois avant de réussir à monter dans un camion. » Outre-Manche, il est pris en charge en tant que mineur. Mais, à sa majorité, sa demande d’asile est rejetée et il devient « illégal ».
31/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/31/je-suis-devenu-fou-je-veux-retourner-au-bled_5403872_3224.html
Ankara veut l’aval de Moscou pour « en finir » avec les Kurdes de Syrie
La Turquie et la Russie cherchent une stratégie après le retrait américain. Leur optimisme tranche avec les tensions sur le terrain.
Des rebelles syriens à Manbij, en Syrie, le 29 décembre 2018. KHALIL ASHAWI / REUTERS Pris de court par l’annonce du retrait américain de Syrie, Moscou et Ankara « sont tombés d’accord » pour coordonner leurs actions à l’est de l’Euphrate, après le départ, sans calendrier précis pour le moment, des forces américaines présentes sur le terrain. « La Turquie et la Russie discutent de qui mettra la main sur les territoires laissés par les Américains », résumait le site d’information Annanews.com, proche de l’armée russe. Rien de concret n’est ressorti de la rencontre entre officiels turcs et russes à Moscou, samedi 29 décembre. « Nous avons le désir commun de nettoyer le territoire syrien de toute organisation terroriste », a souligné Mevlüt Çavusoglu, le ministre turc des affaires étrangères après des entretiens avec son homologue russe, Sergueï Lavrov. Tout sourire, ce dernier s’est dit « optimiste » sur l’avenir de la coopération entre les deux partenaires en Syrie. L’optimisme des deux pays tranche avec les tensions observées sur le terrain, où les forces kurdes YPG, ex-protégées des Américains dans la lutte contre les djihadistes de l’organisation Etat islamique (EI), font face à des menaces d’attaque de la part de la Turquie. Depuis la mi-décembre, le président Recep Tayyip Erdogan et son ministre de la défense, Hulusi Akar, n’ont eu de cesse de menacer les YPG d’une offensive pour les déloger des territoires qu’elles contrôlent de part et d’autre de l’Euphrate. Maintien de la pression militaire Samedi matin, alors que la délégation turque s’apprêtait à s’envoler pour Moscou, de nouveaux blindés turcs ont été acheminés vers Sanliurfa, le long de la frontière turco- syrienne, où un dispositif militaire est en place depuis plusieurs semaines déjà. Ankara continue de maintenir la pression militaire à la frontière et dans la région de Manbij, tout en négociant ferme avec ses alliés pour mieux tirer son épingle du jeu dans le nouvel ordre qui se dessine en Syrie. Car malgré son apparente victoire diplomatique, M. Erdogan, courtisé par Washington et par Moscou, se retrouve dans une position délicate. « Les zones évacuées par les Américains devront être reprises par Damas », Maria Zakharova, la porte-parole du ministère russe des affaires étrangères Si le retrait américain lui laisse le champ libre pour, comme il le clame, « en finir » avec les KYPG kurdes, il lui est impossible de lancer son offensive dans le nord-est de la Syrie sans l’aval de la Russie, le principal soutien militaire de Bachar Al-Assad. Or, Moscou veut voir les territoires laissés par les Américains passer sous le contrôle du régime syrien. « Les zones évacuées par les Américains devront être reprises par Damas », a expliqué Maria Zakharova, la porte-parole du ministère russe des affaires étrangères, mercredi 26 décembre.
31/12/2018
international
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Meurtre de deux touristes au Maroc : quinze suspects devant le juge d’instruction
Les autorités ont interpellé une vingtaine de personnes pour leurs liens présumés avec le double homicide, qualifié de « terroriste » par Rabat.
Des Marocains rendent hommage à Louisa Vesterager Jespersen et Maren Ueland devant l’ambassade du Danemark, à Rabat, le 22 décembre 2018. FADEL SENNA / AFP Le parquet de Rabat a présenté au juge d’instruction antiterroriste, dimanche 30 décembre, quinze personnes soupçonnées d’être liées au meurtre de deux jeunes randonneuses scandinaves dans le sud du Maroc, a annoncé le procureur général de Rabat. Le parquet a demandé au juge d’instruction d’interroger les suspects pour « constitution d’une bande afin de préparer et commettre des actes terroristes », « atteinte à la vie de personnes avec préméditation » et « apologie du terrorisme », a précisé le procureur général de Rabat dans un communiqué. Le parquet a en outre requis « la détention préventive des personnes arrêtées », alors que sept autres suspects, placés en garde à vue, doivent être déférés devant le parquet dans les prochains jours. Lire aussi Après la mort de deux touristes, le Maroc rattrapé par le risque terroriste Louisa Vesterager Jespersen, une étudiante danoise de 24 ans, et son amie Maren Ueland, une Norvégienne de 28 ans, ont été tuées dans la nuit du 16 au 17 décembre dans le sud du Maroc, où elles passaient des vacances. Leurs corps ont été découverts sur un site isolé du Haut-Atlas, dans un secteur prisé des amateurs de marche. Les deux victimes ont été décapitées. Un Hispano-Suisse arrêté samedi Les autorités marocaines ont interpellé une vingtaine de personnes pour leurs liens présumés avec le double homicide, qualifié de « terroriste » par Rabat. L’un d’eux, un Hispano-Suisse installé au Maroc et « imprégné de l’idéologie extrémiste » selon les autorités, a été arrêté samedi à Marrakech pour ses liens présumés avec certains des suspects. Les quatre principaux suspects appartenaient, eux, à une cellule inspirée par l’idéologie du groupe Etat islamique (EI) mais « sans contact » avec ses cadres en Syrie ou en Irak, avait déclaré à l’AFP le chef de l’antiterrorisme marocain, Abdelhak Khiam. Le chef de cette « cellule terroriste », Abdessamad Ejjoud, un marchand ambulant de 25 ans, a été condamné par le passé pour avoir voulu rejoindre les zones alors contrôlées par l’EI en Irak et en Syrie, avant de bénéficier d’une réduction de peine. Lire aussi Maroc : un Suisse arrêté en lien avec le meurtre des deux touristes scandinaves L’affaire a suscité une vive émotion en Norvège, au Danemark mais aussi au Maroc, où une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, montrant l’exécution d’une des deux victimes, a mis le pays en émoi. La vidéo est considérée comme authentique par les autorités marocaines, selon une source proche de l’enquête. Epargné jusqu’ici par les attentats de l’EI, le royaume avait été meurtri par des attaques à Casablanca (33 morts en 2003) et à Marrakech (17 morts en 2011).
31/12/2018
afrique
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Une cyberattaque vise la livraison de plusieurs quotidiens américains
Le « Los Angeles Time », le « New York Times » ou encore le « Wall Street Journal » ont été perturbés par cette attaque qui a ciblé la production et l’impression des journaux.
Une cyberattaque a visé l’entreprise Tribune Publishing, samedi 29 décembre. Damian Dovarganes / AP Sur la Côte ouest américaine, les lecteurs du Los Angeles Times ont parfois dû prendre leur mal en patience, ce week-end. Une attaque malveillante, qui pourrait venir d’en dehors des Etats-Unis, a retardé la distribution, samedi 29 décembre, de plusieurs grands journaux américains. D’abord considérée comme une panne de serveur, l’attaque a frappé un réseau d’ordinateurs chez Tribune Publishing, une entreprise connectée au processus de production et d’impression de plusieurs journaux à travers le pays. Par conséquent, la livraison des éditions de samedi du Los Angeles Times et du San Diego Union Tribune a été retardée. Le nombre exact d’abonnés touchés n’était pas encore connu, mais la majorité des clients du LA Times ont reçu leur journal samedi matin, avec quelques heures de retard. L’attaque a aussi eu un impact sur la distribution dans l’Ouest de quotidiens nationaux comme le New York Times et le Wall Street Journal, publiés dans cette région par le même imprimeur. Un rançongiciel soupçonné Les premiers signes de l’attaque sont apparus jeudi soir, selon le New York Times, qui affirme qu’il pourrait s’agir d’une attaque par « logiciel extorqueur » ou rançongiciel, (ransomware en anglais). « Nous pensons que l’intention était de mettre l’infrastructure, en particulier les serveurs, hors d’usage, plutôt que de voler des informations », a déclaré une source proche du dossier citée par le LA Times. Selon des responsables cités par le journal, il est encore trop tôt pour déterminer si l’attaque a été menée par des acteurs étatiques ou non étatiques. « Nous sommes au courant d’informations sur une potentielle cyberattaque affectant plusieurs journaux, et nous travaillons avec notre gouvernement et partenaires dans le domaine pour mieux comprendre la situation », a affirmé, de son côté, le département à la sécurité intérieure. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La cyberguerre est déclarée
31/12/2018
pixels
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/12/31/une-cyberattaque-vise-la-livraison-de-plusieurs-quotidiens-americains_5403863_4408996.html
La fréquentation en salle a baissé de 4,25 % en 2018
La canicule, la Coupe du monde de football et l’absence de grosses productions américaines expliqueraient ce recul.
Avec 200,5 millions de spectateurs, l’année 2018 reste une bonne année pour le cinéma français. ALFRED BUELLESBACH / BUCHCOVER / PHOTONONSTOP En France, 200,5 millions de spectateurs sont allés au cinéma en 2018, selon les chiffres du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), publiés lundi 31 décembre. Ce résultat marque une baisse de 4,25 % par rapport à 2017 où l’on avait compté 209,4 millions de personnes dans les salles obscures. Ce recul s’explique par l’effet conjugué de trois facteurs : le manque de gros films américains très porteurs, la tenue de la Coupe du monde de football, ainsi que la canicule estivale. Si bien que les spectateurs potentiels ont eu tendance à rester chez eux et à moins fréquenter les cinémas, explique-t-on au CNC. La succession de mouvements de grève à la SNCF, au printemps, tout comme les manifestations des « gilets jaunes » et les débordements de violence à Paris, en novembre et décembre, ont également ajouté un petit coup de frein à cette tendance. Le cap des 200 millions de spectateurs constitue bon an mal an la norme en France depuis une dizaine d’années Toutefois, le cap des 200 millions de spectateurs constitue bon an mal an la norme en France depuis une dizaine d’années. Le pic des 411,7 millions dans l’Hexagone remonte à… 1957, quand la télévision était balbutiante et Netflix inexistante. Avec 5 909 écrans bien répartis sur tout le territoire, la France reste très largement leader dans le cinéma en Europe. Le Royaume-Uni, doublement dopé par l’ouverture massive de nouvelles salles et le succès fulgurant de deux films (Mamma Mia ! Here We Go Again, d’Ol Parker, et Bohemian Rhapsody, de Bryan Singer) a endigué sa chute et sa fréquentation a stagné à 176 millions d’entrées. Nos autres grands voisins ont en revanche souffert. Pénalisés par un parc de salles vieillottes et un manque de films nationaux forts, les spectateurs ont délaissé le cinéma en Allemagne, où la fréquentation a chuté de 17 % à 90 millions. Elle s’est également érodée de 4 % en Espagne à 92 millions de spectateurs et a baissé de 6 % en Italie pour tomber à 79 millions. « Un record en Europe » En France, Les Indestructibles 2, de Brad Bird, arrive en tête des cinq films qui ont drainé le plus d’audience (5,8 millions d’entrées), suivi par Les Tuche 3, d’Olivier Baroux (5,7 millions), La Ch’tite Famille, de Dany Boon (5,6 millions), Avengers : Infinity War, d’Anthony et Joe Russo (5,1 millions), et Le Grand Bain, de Gilles Lellouche (4,2 millions). Astérix. Le secret de la potion magique, d’Alexandre Astier et Louis Clichy, qui n’a pas fini sa carrière en salle, pourrait encore entrer dans ce top 5. Persuadée que « les salles de cinéma sont des lieux de vie indispensables à la société », Frédérique Bredin, présidente du CNC, se félicite que 2018 soit « une très belle année pour le cinéma français. Il réalise 40 % de part de marché, un record en Europe », affirme-t-elle. Entre 2017 et 2018, le cinéma français a gagné près d’un million de spectateurs pour atteindre 78 millions. C’est le meilleur résultat depuis 2013 dans l’Hexagone. Les comédies ont trouvé leur public, tout comme les films d’action comme Taxi 5 (3,6 millions d’entrées), les films d’aventures pour enfants comme Belle et Sébastien 3. Le dernier chapitre (1,7 million), les westerns tels que Les Frères Sisters, de Jacques Audiard (840 000), ou les comédies dramatiques comme Première année (1 million). Le CNC très confiant pour 2019 A l’inverse, malgré un budget colossal de 300 millions de dollars (262,50 millions d’euros), Solo. A Star Wars Story, de Ron Howard, n’a que péniblement atteint 1,4 million d’entrées en France. Bumblebee, de Travis Knight, autre très gros film américain, a été devancé le premier jour de son exploitation en salle par Mia et le lion blanc, de Gilles de Maistre. Le CNC se dit très confiant pour l’année 2019. Les blockbusters américains seront de retour, et leur sortie mieux étalée tout au long de l’année. Il s’agit presque exclusivement d’énièmes suites d’histoires déjà très largement éprouvées : Men in Black : International, Toy Story 4, Top Gun : Maverick, La Reine des neiges 2 et même Star Wars Episode IX… Un Dumbo de Tim Burton est également attendu. En production française également, une avalanche de suites de recettes qui ont bien marché est prévue. Y figurent Tanguy, le retour, d’Etienne Chatiliez, Qu’est-ce qu’on a encore fait au bon Dieu ?, de Philippe de Chauveron, ­Minuscule 2. Les mandibules du bout du monde, d’Hélène Giraud et Thomas Szabo, ou encore Nous finirons ensemble, de Guillaume Canet.
31/12/2018
cinema
https://www.lemonde.fr/cinema/article/2018/12/31/dans-les-cinemas-francais-la-frequentation-a-baisse-de-4-25-en-2018_5403860_3476.html
La troisième voie progressiste de l’ex-chiraquien Renson
Dans son livre, « Le Refus de la parenthèse » (Débats publics éditions, 198 pages, 18 euros), le député La République en marche (LRM) de Paris Hugues Renson appelle son camp à se doter d’un vrai corpus idéologique.
Comment assurer la pérennité du macronisme ? Comment faire en sorte que le mouvement porté au pouvoir par Emmanuel Macron ne soit pas qu’un feu de paille ? Le député La République en marche (LRM) de Paris Hugues Renson appelle son camp à se doter d’un vrai corpus idéologique, dans son livre Le Refus de la parenthèse (Débats publics éditions, 198 pages, 18 euros), paru le 22 novembre, pour permettre aux élus macronistes de disposer d’« une grille de lecture progressiste commune avec des valeurs identifiées ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi A Paris, le quadra Bournazel rêve de faire le pont entre la droite et LRM Le vice-président de l’Assemblée nationale met en garde la majorité contre le risque de n’être qu’un « rassemblement opportun de gens » venus de gauche, de droite ou de la société civile, « qui ne croient pas aux mêmes choses et ne sont guidés que par le seul critère de l’efficacité ». Avec comme méthode le pragmatisme, « pour mettre en place tantôt la bonne mesure de gauche, tantôt la bonne mesure de droite ». « Cette aventure politique-là ne survivra pas à Emmanuel Macron », tranche cet élu du « nouveau monde » issu de l’ancien, qui fait partie des rares députés expérimentés du groupe majoritaire à l’Assemblée. Hugues Renson est en effet un ancien chiraquien, qui a travaillé pendant neuf ans aux côtés de Jacques Chirac, notamment en tant que conseiller technique à l’Elysée. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Macronie, le bal des prétendants pour la Mairie de Paris « Troisième voie » Pour installer le macronisme dans le paysage politique sur le long terme, le député LRM appelle au « renforcement » d’un « troisième pôle idéologique » à côté des oppositions de droite et de gauche : « un projet progressiste qui serait une concrétisation française de la fameuse troisième voie » incarnée par Tony Blair en Grande-Bretagne. Un « espace central » construit « autour de valeurs et d‘un socle communs », et axé autour d’une sensibilité humaniste, sociale et écologiste. Bien qu’issu de la droite, celui qui se définit comme « ni frondeur ni membre d’un fan-club », appelle l’exécutif à « ne pas abandonner » l’électorat de gauche, dont une bonne partie a voté en faveur d’Emmanuel Macron à la présidentielle de 2017. Alors que la politique du chef de l’Etat est accusée de pencher à droite, lui appelle son camp à porter « les combats de la justice sociale, du progrès sociétal ou de l’environnement ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Avant la bataille de Paris, Anne Hidalgo cherche la paix des braves Lutte contre le réchauffement climatique, régulation de la mondialisation, lutte contre les inégalités, accueil solidaire des réfugiés… Les thématiques mises en avant visent-elles à séduire l’électorat parisien ? A 40 ans, Hugues Renson fait partie des possibles candidats LRM à la Mairie de Paris aux élections municipales de 2020, avec pour rivaux internes le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux, le député Cédric Villani ou le secrétaire d’Etat au numérique Mounir Mahjoubi. Loin de torpiller le bilan de la maire socialiste sortante, il juge nécessaire de ne pas tomber dans une « opposition frontale et dogmatique » à Anne Hidalgo sur l’engagement de la capitale contre le réchauffement climatique.
31/12/2018
elections
https://www.lemonde.fr/elections/article/2018/12/31/la-troisieme-voie-progressiste-de-l-ex-chiraquien-renson_5403857_5001134.html
A Paris, le quadra Bournazel rêve de faire le pont entre la droite et LRM
Le député, issu de la droite parisienne mais sans étiquette aujourd’hui, se voit en candidat du consensus dans la capitale.
A tous ceux qu’il reçoit dans son bureau avec vue panoramique sur l’Hôtel de ville, Pierre-Yves Bournazel explique qu’il « prépare une offre politique inédite pour Paris ». Alors que la droite parisienne et La République en marche (LRM) se cherchent toujours un candidat pour 2020, le député (Agir) de la 18e circonscription de Paris pense qu’il a une fenêtre de tir. Le quadra, issu des rangs de la droite parisienne, mais sans étiquette aujourd’hui, laisse entendre qu’il va se présenter sous ses propres couleurs, avec la conviction qu’il est le mieux placé pour rallier les électeurs macronistes et ceux du centre droit aux municipales dans la capitale. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Avant la bataille de Paris, Anne Hidalgo cherche la paix des braves A l’entendre, Emmanuel Macron aurait intérêt à l’adouber plutôt que d’investir un ministre, un parlementaire, voire un simple élu estampillé LRM. Conseiller de Paris depuis 2008, donc au faîte des arcanes parisiennes, Macron-compatible sans être adhérent du parti présidentiel, Pierre-Yves Bournazel fait valoir que soutenir sa candidature éviterait à LRM de subir « la foudre d’un vote-sanction contre le gouvernement ». « Si Macron veut éviter de nationaliser la campagne et ne pas trop s’exposer dans une bataille à l’issue incertaine, la solution, c’est Bournazel », proclame un proche du quadra. Toutefois, un tel scénario est encore loin d’avoir convaincu dans les rangs macronistes. « Les marcheurs souhaitent un candidat issu du parti, assure un parlementaire parisien LRM. Seule une partie des électeurs de Macron soutiendrait Bournazel, le reste se rallierait à Hidalgo », redoute cet élu. « Homme de terrain » Proche d’Alain Juppé dont il fut porte-parole pendant la primaire UMP de 2016, élu député avec le soutien affiché d’Edouard Philippe en 2017, Pierre-Yves Bournazel n’est pas moins persuadé que son profil modéré est plus à même de séduire l’électorat de droite parisien qu’un candidat du parti Les Républicains (LR), obligé de donner des gages à la ligne dure de Laurent Wauquiez. Membre du groupe Les Républicains et indépendants au conseil de Paris – même s’il a rendu sa carte LR depuis 2017 –, Pierre-Yves Bournazel a, du reste, le soutien de plusieurs « barons » de la droite : Philippe Goujon, maire (LR) du 15e arrondissement, Claude Goasguen, député (LR) du 16e, ou Jean-François Legaret, maire (LR) du 1er. Certains élus LR de la nouvelle génération telle Valérie Montandon, conseillère de Paris dans le 12e, misent aussi sur lui. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Macronie, le bal des prétendants pour la Mairie de Paris Député d’un arrondissement populaire après avoir conquis un siège longtemps détenu par le PS, Pierre-Yves Bournazel se fait fort aussi de séduire les électeurs de centre gauche « déçus par Anne Hidalgo ». Elu de Montmartre, berceau électoral de Bertrand Delanoë, il ne manque pas une occasion de citer l’ancien maire de Paris : « Delanoë est pour moi une source d’inspiration par son parcours et sa créativité », glisse-t-il. Mais, pour le moment, « les personnalités de gauche » dont il assure qu’elles le « soutiendront le moment venu » restent discrètes. Il peut se targuer en revanche du soutien de Max Guazzini. L’ancien patron de la radio NRJ et du club de rugby du Stade français juge qu’« il est le meilleur candidat pour être maire de Paris. C’est un homme de terrain, modéré, le seul qui peut faire consensus et donc permettre l’alternance », affirme-t-il au Monde. Ami de Bertrand Delanoë, Max Guazzini avait soutenu Anne Hidalgo en 2014. Mais il juge aujourd’hui que, sous son mandat, la « qualité de vie à Paris s’est dégradée ».
31/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/31/a-paris-le-quadra-bournazel-reve-de-faire-le-pont-entre-la-droite-et-lrm_5403855_823448.html
En Macronie, le bal des prétendants pour la Mairie de Paris
Au sein de La République en marche, les esprits et les candidats s’échauffent en vue des municipales de 2020.
Le porte parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, le 19 décembre. JULIEN MUGUET POUR "LE MONDE" « Pas de bordel ! » Jusqu’ici, la consigne passée par l’entourage d’Emmanuel Macron a été relativement respectée. Elle remonte à l’automne, quand le député La République en marche (LRM) Cédric Villani s’est officiellement mis sur les rangs pour Paris. Dernier arrivant sur la liste des prétendants plus ou moins officiels à la candidature pour la tête de liste parisienne aux municipales en 2020, le mathématicien, lauréat de la médaille Fields, n’est pas le moins déterminé. « Je ne me serais pas lancé dans l’aventure si je pensais que ce serait impossible d’être désigné », confie le député de l’Essonne. Au vu du score record obtenu à Paris par Emmanuel Macron à la présidentielle, les dirigeants de LRM peuvent supposer que « la capitale est gagnable en 2020, d’où la pléthore d’ambitions », explique un cadre du mouvement. Alors que la commission d’investiture ne tranchera pas avant les élections européennes de mai 2019, chacun, en coulisse, cherche à dessiner son projet. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Avant la bataille de Paris, Anne Hidalgo cherche la paix des braves Micro-trottoir A ce stade, les noms de six possibles prétendants circulent : le porte-parole du gouvernement et député de la 5e circonscription de Paris Benjamin Griveaux ; le député de l’Essonne Cédric Villani ; le secrétaire d’Etat au numérique et élu du 19e arrondissement, Mounir Mahjoubi ; l’ex-adjoint aux finances d’Anne Hidalgo Julien Bargeton ; l’adjointe LRM au maire PS du 4e arrondissement, Anne Lebreton, et le député de Paris Hugues Renson. Tous se retrouveront, le 28 janvier, au théâtre Le Trianon, dans le 18e arrondissement, pour la restitution de la consultation des Parisiens, « Paris & moi », lancée en octobre. Les adhérents du parti présidentiel ont recueilli pendant six semaines près de 13 000 « témoignages » vocaux auprès de quelque 8 000 Parisiens. Ce micro-trottoir à l’échelle de la ville devrait alimenter le projet de LRM pour les municipales. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La troisième voie progressiste de l’ex-chiraquien Renson Afin d’éviter que la soirée ne vire au bal des prétendants, ministres, parlementaires et élus parisiens du mouvement ne monteront pas sur scène. « D’abord le diagnostic, ensuite le projet et enfin les candidatures », martèle le coanimateur du comité de pilotage de LRM, Pacôme Rupin, garant du respect du calendrier. Le député de Paris reproche à Cédric Villani d’avoir lancé sa campagne « à contretemps ». « Dommage que Villani joue perso en profitant de sa notoriété », déplore M. Rupin, proche de Benjamin Griveaux. L’intéressé réplique qu’il « joue parfaitement collectif » et revendique d’être ouvertement en lice quand « d’autres cultivent l’ambiguïté ».
31/12/2018
elections
https://www.lemonde.fr/elections/article/2018/12/31/en-macronie-le-bal-des-pretendants-pour-la-mairie-de-paris_5403853_5001134.html
Aux Philippines, le bilan de la tempête Usman s’alourdit à 68 morts
Nombre de Philippins n’avaient pas pris, samedi, les précautions d’usage dans l’archipel, parce que la tempête n’était pas classifiée comme un typhon.
Vue de la ville de Baao, dans la province de Camarines Sur, le 30 décembre. - / AFP D’ordinaire, les tempêtes aux Philippines sont accompagnées de vents puissants les transformant en typhons. Mais la tempête Usman, qui a balayé samedi 29 décembre le pays, a généré d’intenses précipitations qui ont entraîné des inondations et fragilisé les sols, provoquant de nombreux glissements de terrain. Le bilan humain en est d’autant plus lourd : au moins 68 personnes ont été tuées, selon les derniers chiffres diffusés lundi 31 décembre par les autorités. La région montagneuse de Bicol, au sud-est de Manille, est la plus touchée : au moins 57 personnes y ont trouvé la mort. Onze autres personnes ont été tuées sur l’île de Samar. « J’ai peur que le bilan n’augmente encore parce qu’il y a encore beaucoup de zones que nous n’avons pas atteintes », a déclaré Claudio Yucot, directeur de la protection civile dans la région de Bicol. Plus de 40 000 habitants ont été déplacés en raison de la tempête. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les catastrophes climatiques ont coûté au moins 80 milliards d’euros en 2018 « Les gens ont été trop confiants » Nombre de Philippins n’avaient pas pris les précautions d’usage dans l’archipel habitué aux phénomènes climatiques extrêmes, et ce, parce que la tempête n’était justement pas classifiée comme un typhon. « Les gens ont été trop confiants parce qu’ils étaient en pleines vacances de Noël et qu’aucun avis d’alerte au typhon n’avait été émis », a déploré M. Yucot auprès de l’agence France-Presse. Environ vingt typhons ou tempêtes frappent chaque année les Philippines, tuant des centaines de personnes. Le typhon Haiyan, survenu en novembre 2013, reste le plus meurtrier de l’histoire des Philippines, laissant derrière lui plus de 7 350 morts ou disparus.
31/12/2018
climat
https://www.lemonde.fr/climat/article/2018/12/31/aux-philippines-le-bilan-de-la-tempete-usman-s-alourdit-a-68-morts_5403850_1652612.html
Ronaldo encore battu, des dopés en prison et les records de Shiffrin : ce que vous avez manqué en sport ce week-end
Il n’y a pas eu que de la Premier League au menu de ce dernier week-end de l’année. Il y avait aussi du saut à ski.
Oui, Paul Pogba va beaucoup mieux. PHIL NOBLE / REUTERS Oui, Liverpool est bien parti pour devenir champion d’Angleterre pour la première fois depuis 1990. CARL RECINE / Action Images via Reuters Oui, le choc du Top 14 entre Toulouse et Toulon a encore accouché d’une souris, dimanche au Stadium. PASCAL PAVANI / AFP Mais il s’est passé autre chose ce week-end en sport. Et vous êtes peut-être passés à côté. Les trois leçons du week-end Les Européens, chez eux tu battras Un aller-retour au Japon pour le réveillon, une photo avec un bonnet de père Noël pour les fans sur Instagram, et Ryoyu Kobayashi était fin prêt pour avaler la concurrence sur la mythique Tournée des quatre tremplins. Bon début dimanche à Oberstdorf : le sauteur à ski japonais, visage d’ado à 22 ans, s’est posé tout au fond du tremplin allemand sur son premier saut de la première manche de la tournée. Suffisant, malgré un deuxième saut raté, pour l’emporter avec une très maigre avance sur l’Allemand Markus Eisenbichler et l’Autrichien Stefan Kraft, deux locaux puisque la compétition se déroule à cheval sur les deux pays, jusqu’à dimanche. Kobayashi tente de succéder à son compatriote Kazuyoshi Funaki, seul vainqueur extraeuropéen de la Tournée des quatre tremplins en 1998. La quasi-totalité des 66 Tournées ont été remportées par les sauteurs des quatre pays dominant la discipline : Allemagne, Autriche, Norvège et Finlande. Evidemment, il risque de peser un peu plus lourd au prochain saut. MICHAEL DALDER / REUTERS En Chine, te faire choper pour dopage tu éviteras Ne riez pas : la Chine va adopter une tolérance zéro vis-à-vis du dopage. Le régime va adopter une loi permettant de faire tomber certains cas de dopage sous le coup du code pénal, a rapporté vendredi l’agence officielle Xinhua, sans plus de détail. Ces mesures entreront en vigueur au début de l’année prochaine, pour « montrer au monde que nous sommes réellement sérieux quant à l’antidopage », selon le directeur de l’administration sportive chinoise. Confirmant par cette simple phrase qu’il s’agit essentiellement d’une mesure d’affichage, alors que s’approchent les Jeux olympiques d’hiver de Pékin 2022. La pénalisation du dopage pour les sportifs – et non pour les receleurs de produits – est relativement peu répandue, les sciences sociales ayant largement montré que les sportifs dopés sont le plus souvent victimes d’un système. Comble de l’ironie, c’est particulièrement le cas en Chine où le dopage organisé par l’Etat à la fin du XXe siècle est attesté par plusieurs témoignages. Premier sans jouer, tu finiras Lionel Messi s’en fiche peut-être, mais pas Cristiano Ronaldo : l’Argentin finit devant le Portugais au nombre de buts marqués sur l’année civile, malgré un dernier effort de Ronaldo samedi (doublé avec la Juventus). Messi, déjà en vacances, a marqué 51 buts en 54 matchs, soit deux de plus que son rival. Robert Lewandowski (46) complète le podium. Des chiffres en légère baisse après une folle année 2017, où cinq joueurs (les trois cités, plus Harry Kane et Edinson Cavani) avaient marqué 53 buts ou plus. L’équipe du week-end : Wolverhampton Drôle de club que celui de Wolverhampton, promu cette saison en Premier League. L’équipe des Midlands est propriété du plus grand conglomérat chinois, Fosun, qui a glissé un club de foot dans son portefeuille qui contient aussi le Club Med, la première banque portugaise ou un groupe minier. Fosun est aussi actionnaire de Gestifute, la société du plus puissant des agents du monde du football, Jorge Mendes. En bonne logique, le Portugais est donc le directeur sportif officieux de cette équipe, où cohabitent sept Lusitaniens, membres de l’écurie Mendes, sous les ordres de l’entraîneur Nuno Espirito Santo, lui aussi portugais et placé par l’ancien patron de boîte de nuit. Ainsi, Mendes offre à ses ouailles une visibilité en Premier League ; et permet au club de son actionnaire de recruter des joueurs qui, sans cela, n’auraient peut-être pas eu l’idée de passer l’hiver des Midlands. La plus belle barbe de Premier League nous vient de Sao Tomé-et-Principe. Kirsty Wigglesworth / AP Etonnamment, ça ne marche pas si mal : après avoir pris des points contre Manchester City, United, Arsenal et Chelsea, les Wolves se sont imposés 3-1 samedi à Tottenham. Ils étaient menés 1-0 jusqu’à la 72e minute et ont renversé la rencontre, pour le plus grand plaisir de Liverpool, plus que jamais en tête de la Premier League. Saine réaction d’Espirito Santo : « J’avais dit que le nul serait un bon résultat, mais je ne peux pas contrôler les émotions des gars s’ils voient de l’espace devant eux. » Wolverhampton est septième de Premier League, juste derrière le Big 6. Le chiffre du week-end : 15 A l’ESF, Mikaela Shiffrin aurait sans doute le Chamois d’or, voire mieux. Giovanni Auletta / AP « Je ne cours pas après les records », dit Mikaela Shiffrin. Tant pis pour elle, en voilà encore deux : en remportant le slalom de Semmering samedi, l’Américaine a décroché son 15e bouquet sur l’année civile, un record depuis la création de la Coupe du monde de ski, il y a cinquante-deux ans. C’est un de mieux que Marcel Hirscher, vainqueur de quatorze courses cette année aussi. Autre record : celui du nombre de victoires en slalom, que Shiffrin dérobe à son idole Marlies Schild avec 36 succès. L’Américaine n’est pas pour autant devenue championne olympique de cette discipline qu’elle écrase, remportant « seulement » le géant à Pyeongchang. « Il s’est passé beaucoup de choses cette année, a dit Shiffrin après sa victoire, obtenue devant la Slovaque Petra Vlhova qui l’avait battue la veille sur le slalom géant. Mon progrès le plus important cette année, c’est d’être capable d’entendre les gens me parler de records, de répondre aux questions dessus, mais de ne pas laisser cela m’affecter. » Prochain record en vue : les 2 414 points marqués par Tina Maze sur la saison 2012-2013. Les wikis du week-end Niveau : moyen Ancien international italien, mon but sur penalty n’a pas suffi à empêcher la victoire de la Juventus Turin contre la Sampdoria de Gênes (2-1) ; mais c’est tout de même mon neuvième match d’affilée avec au moins un but marqué en championnat. Encore deux, et j’égale le record appartenant à Gabriel Batistuta (Fiorentina, 1994). Niveau : difficile « J’ai eu envie de le tuer », a dit mon entraîneur Claudio Ranieri à mon endroit après que j’ai pris – et raté – un penalty avec mon équipe, alors que je n’étais pas censé le tirer. Bon, on a gagné quand même, contre Huddersfield. Et puis, je suis français, donc les langues étrangères…
31/12/2018
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2018/12/31/ronaldo-encore-battu-des-dopes-en-prison-et-les-records-de-shiffrin-ce-que-vous-avez-manque-en-sport-ce-week-end_5403847_3242.html
Doit-on souhaiter la bonne année pour 2019 ?
Corvée pour les uns, plaisir pour les autres... Après l’ivresse du réveillon du Nouvel An démarre le marathon des cartes de vœux.
Dans la nuit de la Saint-Sylvestre, et jusqu’à la fin janvier, des milliards de bons vœux s’échangent. Pierre Cheuva/Photononstop A l’approche du début d’une nouvelle année, il y a ceux qui sont toujours prompts à envoyer leurs bons vœux, et ceux qui se sentent obligés d’y répondre... A vos souhaits ! Pourquoi ne pas céder au plaisir annuel des vœux ? Qu’on s’attendrisse des premiers pas de la benjamine, avec son « Tresse joyeux anné tati », ou qu’on s’afflige du poétique « En 2019, tu vas t’choper une meuf », qu’on se le dise, 2019 rime surtout avec neuf, mais aussi, plus difficile à placer, teuf, keuf, bluff, œuf et bœuf. Dans la nuit de la Saint-Sylvestre, et jusqu’à la fin janvier, des milliards de bons mots s’échangent. Attendez-vous aux bonnes résolutions les plus diverses : « En 2019, on arrête le bœuf ! » comme aux prophéties les plus étranges : « En 2019, vive les manifs de keufs. » Pour les moins inventifs, le triptyque bien huilé fonctionne toujours : « santé, argent, bonheur » – « Mais surtout la santé ! ». Que l’on compose un message personnalisé ou copié-collé, original ou tout ce qu’il y a de plus attendu, la carte de vœux – alliée idéale des étrennes –, le SMS ou un « Snap », c’est assurer l’autre, souvent éloigné à regret, de ses authentiques et chaleureuses pensées. En 2019, plus de place pour le bluff. Hypocrite à souhait A quoi bon souhaiter le meilleur, alors que le pire sera forcément de la partie ? Entre hypocrisie et poudre de perlimpinpin, les vœux ne sont qu’une illusoire tradition, doublée de mièvrerie et de condescendance. Tout au plus, un appât à étrennes. Vouloir le meilleur à son interlocuteur – croisé une fois cette année, ou évité à plusieurs occasions – ou croire qu’avec quelques mots on peut changer la donne – il a perdu un être cher, est souffrant, en instance de divorce, sans le sou ou encore pingre, égoïste, acariâtre… –, ce ne sont que sornettes ! Autant épargner à notre planète l’impact écologique de l’envoi de tels plans sur la comète et s’affranchir, au passage, d’une fastidieuse corvée. Message personnel : merci de ne pas m’envoyer, pour la énième année par SMS, ces « Toc toc ! – C’est qui ? – C’est Lapinou ! – Lapinou qui ? – Lapinouyear ! »
31/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/31/doit-on-souhaiter-la-bonne-annee-pour-2019_5403837_4497916.html
« Echanges » entre Benalla et Macron : l’Elysée dénonce un « faisceau de contrevérités »
Alexandre Benalla prévient dans un entretien à « Mediapart » avoir gardé les preuves de ces échanges. L’Elysée reconnaît deux échanges « laconiques » avec l’ancien chargé de mission depuis son licenciement cet été.
Emmanuel Macron et Alexandre Benalla, le 12 avril 2018 à Berd’huis, dans l’Orne. Gonzalo Fuentes / REUTERS Alexandre Benalla a-t-il été en contact avec Emmanuel Macron depuis son licenciement de l’Elysée ? Les rebondissements de l’affaire Benalla ont tourné lundi 31 décembre au bras de fer entre l’Elysée et l’ancien conseiller d’Emmanuel Macron, qui affirme avoir continué d’échanger avec le chef de l’Etat après son licenciement en juillet. Affirmation rapidement démentie par la présidence, qui accuse Alexandre Benalla d’entretenir « tout un faisceau de contrevérités et d’approximations » pour « se venger ». Le ministère des affaires étrangères a dénoncé pour sa part des propos « faux » et « fantaisistes » de l’ancien conseiller de l’Elysée. Benalla affirme échanger régulièrement avec le président Selon Alexandre Benalla, ses conversations avec Emmanuel Macron depuis l’été sont comparables aux échanges qu’il avait déjà avec le chef de l’Etat quand il était son homme de confiance à l’Elysée. Elles portent « sur des thématiques diverses » : « C’est souvent sur le mode “comment tu vois les choses ?” Cela peut aussi bien concerner les “gilets jaunes”, des considérations sur untel ou sur untel ou sur des questions de sécurité. » Dans un entretien accordé dimanche 30 décembre à Mediapart, il assure avoir continué à échanger régulièrement avec le chef de l’Etat via la messagerie Telegram, précisant avoir conservé la preuve de ces échanges sur son téléphone portable. « Ça va être très dur de le démentir parce que tous ces échanges sont sur mon téléphone portable », prévient celui qui est mis en cause pour des violences sur des manifestants le 1er-Mai. A BFM-TV, M. Benalla a précisé que le dernier échange datait du 24 décembre. Dans cet entretien, Alexandre Benalla affirme aussi échanger de manière régulière avec d’autres membres de la présidence, comme il l’avait déjà affirmé ces derniers jours dans un courrier adressé à l’Elysée. Ces échanges ont eu lieu jusqu’aux récentes révélations sur son utilisation d’un passeport diplomatique pour des voyages d’affaires en Afrique. « Là, le lien est coupé », selon lui. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Voyage au Tchad : Alexandre Benalla s’est reconverti dans la diplomatie privée en Afrique L’Elysée reconnaît deux échanges « laconiques » L’Elysée a réagi officiellement, lundi, faisant savoir qu’il ne souhaitait « pas poursuivre un dialogue par presse interposée » avec son ancien chargé de mission « qui se venge de son licenciement pour faute grave ». « Le président de la République n’échange pas avec Alexandre Benalla, ni sur les “gilets jaunes” ni sur les questions de sécurité », a réagi l’Elysée, dénonçant « tout un faisceau de contrevérités et d’approximations ». La présidence répète que l’ex-collaborateur « n’est pas un émissaire de la présidence, ni officiel ni officieux », sans pour autant démentir tout échange entre MM. Macron et Benalla. Mercredi 2 janvier, à la mi-journée, l’Elysée a finalement confirmé qu’Emmanuel Macron avait échangé avec Alexandre Benalla deux fois depuis l’été, « de manière laconique ». Benalla affirme tenir informé de ses déplacements l’Elysée, qui dément Alexandre Benalla, qui a récemment effectué plusieurs voyages en Afrique et rencontré des dirigeants, affirme aussi dans Mediapart avoir toujours rendu compte au président ou à son entourage de ses faits et gestes. « J’explique que j’ai vu telle personne, je détaille les propos qui m’ont été rapportés et de quelle nature ils sont. Après, ils en font ce qu’ils veulent. Y compris le président de la République, qui est informé en direct. » L’ancien chargé de mission définit son rôle des derniers mois comme celui d’un « un élément extérieur qui veut du bien au mec [Emmanuel Macron] qui lui a fait confiance ». « J’aurais pu claquer la porte et passer à autre chose. Mais on continue à me solliciter, alors je continue à répondre. (…) Cela dérange un certain nombre de personnes, qui sont puissantes et qui font comme si le président était sous curatelle. Ils lui font faire des conneries phénoménales. » Souhaitant revenir « aux faits », le palais présidentiel a assuré à nouveau lundi qu’Alexandre Benalla « n’a tenu l’Elysée au courant d’une partie de ses déplacements que le 20 décembre, c’est-à-dire après que des journalistes ont appris l’existence de son déplacement au Tchad ». Benalla affirme avoir récupéré ses passeports diplomatiques de l’Elysée, qui dément Alexandre Benalla affirme par ailleurs que, début octobre, une personne de l’Elysée lui a rendu des effets personnels et ses passeports diplomatiques dans une rue près du Palais de l’Elysée avec pour seule consigne « tu ne fais pas de bêtises avec ». « Si on ne veut pas que j’utilise ces passeports, il n’y a qu’à les désactiver et les inscrire à des fichiers », plaide-t-il, précisant les avoir utilisés pour entrer dans « une dizaine de pays » depuis l’automne. « Quand vous voyagez à l’étranger avec un passeport diplomatique, l’ambassade de France est au courant que vous arrivez », assure-t-il. A propos des passeports diplomatiques, l’Elysée a assuré n’avoir pas détenu ces documents et donc n’avoir pu les lui remettre, laissant entendre qu’Alexandre Benalla ne les avait jamais rendus. « L’Elysée a procédé depuis son licenciement à toutes les diligences pour récupérer les passeports et autres titres de l’intéressé », a insisté le palais présidentiel. « Il revient à la justice de donner suite à l’éventuelle utilisation de ces passeports diplomatiques par Alexandre Benalla depuis son départ de l’Elysée, utilisation dont l’Elysée n’avait pas connaissance avant que la presse ne la révèle », souligne la présidence de la République. La controverse sur l’utilisation de ces passeports diplomatiques par Alexandre Benalla a pris samedi un tour judiciaire, avec l’ouverture par le parquet de Paris d’une enquête préliminaire pour « abus de confiance » et « usage sans droit d’un document justificatif d’une qualité professionnelle ». Le Quai d’Orsay a également affirmé lundi que l’ancien conseiller n’a « bénéficié d’aucune indulgence particulière » de sa part et que « plusieurs démarches » ont été effectuées par le ministère pour obtenir la restitution des passeports diplomatiques. Pas de nouvelle commission d’enquête malgré les appels de l’opposition La présidente de la commission des lois de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet (La République en marche), a fermé la porte mardi à la nouvelle convocation d’une commission d’enquête sur l’affaire Benalla. Au vu des « nouveaux rebondissements », les députés socialistes avaient réclamé sa « convocation en urgence, dès le mercredi 2 janvier 2019 ». « Les dernières révélations relatives aux agissements de M. Benalla ne [relèvent] pas du périmètre précis fixé en juillet », a répondu Mme Braun-Pivet dans un communiqué. Elle dit souhaiter « que la lumière puisse être faite » sur les éléments nouveaux, tout en dénonçant une demande « précipitée » qui « dénote une nouvelle fois de la volonté de l’opposition d’instrumentaliser à tout prix les dérives personnelles de M. Benalla à des fins politiques ». Dénonçant des « mensonges » et des « dissimulations », plusieurs responsables de l’opposition, des Républicains (LR) et du Parti socialiste, ont par ailleurs demandé lundi des explications de l’Elysée. Le député LR Guillaume Larrivé a, lui, demandé que le ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, soit poursuivi devant la Cour de justice de la République. Proche d’Emmanuel Macron, l’ancien conseiller de François Hollande Gaspard Gantzer a estimé pour sa part que l’Elysée a voulu « cacher des choses sous le tapis » et qu’il serait temps que la présidence « dise la vérité, une fois pour toutes ».
31/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/31/alexandre-benalla-affirme-echanger-regulierement-avec-emmanuel-macron-sur-des-thematiques-diverses_5403834_823448.html
Pourquoi les calendriers de nus ont-ils du succès ?
Ringard, le calendrier ? Il a fait peau neuve, en proposant de regarder d’un autre œil des corporations entières – facteurs, agriculteurs, infirmières, pompiers… – qui ont osé tomber le haut et le bas.
Le rugbyman Arthur Bonneval pour le calendrier des « Dieux du stade » 2019. STADE.FR D’habitude, côté bête à poil, l’almanach du facteur propose, entre autres, un golden retriever gambadant, oreilles au vent, vers l’un des étangs de la Brenne (Indre), un chartreux pelotonné au coin du feu, une vache rouge des prés en pleine rumination ligérienne, un écureuil roux de Dordogne. Eh bien, cette année, ce sera le préposé lui-même. Nu. Comme la main. Douze hommes de lettres ont décidé, pour une fois, de se défaire de leur enveloppe. Les mois défilent, les modèles s’effeuillent Ils posent sans complexe, regard droit, fiers et souriants. Seuls d’infimes détails rappellent leur fonction : une sacoche par-ci, une casquette par-là, quelques cartes postales punaisées sur un mur, un parterre de plis cachetés tout aussi affranchis qu’eux. Plutôt timbrés, ne manqueront pas de renchérir certains. Ils se trompent. Les gars n’ont pas perdu la boule. Tout cela a été pensé, organisé. A la manœuvre, Philippe Delval, 52 ans, facteur à Mouvaux (Nord). « L’idée est née d’une discussion avec la société Lavigne, un des éditeurs historiques de notre almanach, assure-t-il. Les rugbymen et les pompiers l’avaient déjà fait. Pourquoi pas nous ? Mais j’ai posé une condition : que l’opération profite également à une association humanitaire. Parce que c’est ça, notre boulot : l’humain. » A chaque vente (19,95 euros, voire plus si affinités), 1 euro est donc reversé aux ­Blouses roses, reconnues d’utilité publique, qui, depuis 1944, assistent les personnes âgées et les enfants hospitalisés. Nu pour tous, tous tout nus ! On ne compte plus les calendriers où les mois défilent tandis que les modèles s’effeuillent, même en avril, au nom de la générosité ou de la lutte des classes. Le coup d’envoi aurait été donné en 2001 par Max Guazzini, président du Stade français, déshabillant ses rugbymen pour la bonne cause – celle de leur club et celle d’une association. Ses « Dieux du stade » font un tabac : les ventes s’envolent (jusqu’à 250 000 exemplaires par an), les dons aussi (jusqu’à 500 000 euros pour l’association bénéficiaire). Sébastien Faure, facteur du mois d’avril, a posé pour le calendrier des « Hommes de lettres » 2019. HOMMES DE LETTRES Se dévêtir pour défendre une cause Des vocations naissent. Citons pêle-mêle les barmen lillois, les papas de l’Association française du syndrome de Rett, les cuistots de l’Isère, la communauté Emmaüs de Lescar-Pau (Pyrénées-Atlantiques), les ailurophiles alsaciens ou les artisans d’Eure-et-Loir. A noter, la surreprésentation des pêcheurs en mer, de Granville (Manche) au Grau-du-Roi (Gard), de Port-en-Bessin-Huppain (Calvados) à Saint-Pierre-d’Oléron (Charente-Maritime). C’est curieux, chez les marins, ce besoin de faire des frasques.
31/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/31/pourquoi-les-calendriers-de-nus-ont-ils-du-succes_5403829_4497916.html
Ryusuke Hamaguchi et la mémoire du désastre
L’œuvre du réalisateur japonais est marquée par le tsunami qui a touché l’Archipel, en mars 2011.
Le cinéaste japonais Ryusuke Hamaguchi à Paris, en octobre 2018. JOËL SAGET / AFP Début 2018, le succès inattendu de Senses dans les salles françaises l’a fait connaître d’un public de cinéphiles, séduit par ce long film découpé en épisodes. Au printemps, le cinéaste quadragénaire a fait partie du contingent de réalisateurs retenus par Thierry Frémaux et son équipe pour renouveler la compétition du Festival de Cannes, avec Asako I & II. Mais si – en ce mois d’octobre où nous le rencontrons – les étudiants de l’Ecole normale supérieure de Lyon se pressent dans l’amphithéâtre Descartes pour écouter Ryusuke Hamaguchi, c’est pour découvrir une autre facette du cinéaste japonais. Lire la critique d’« Asako I & II » : Eternel recommencement amoureux Peu de temps après le tremblement de terre et le tsunami du 11 mars 2011 et la catastrophe de Fukushima, l’auteur de Senses a entrepris, avec son collègue Ko Sakai, de collecter les récits des survivants de la région de Tohoku, dans le nord-est de l’île principale de l’archipel japonais. A l’invitation de l’universitaire et critique Elise Domenach, Ryusuke Hamaguchi est venu à Lyon montrer le résultat de ce travail et lui donner une place dans sa carrière de cinéaste. Ryusuke Hamaguchi, cinéaste : « Mais, s’il y a des images, c’est que cette réalité existe. Filmer, c’était faire œuvre de mémoire, par l’enregistrement » Devant les étudiants, il se réfère immédiatement à son maître à l’université de Tokyo, Kiyoshi Kurosawa : « Quand j’ai intégré le master de cinéma, je n’étais pas particulièrement amateur du cinéma de Kurosawa, reconnaît-il. Il m’a montré quelles étaient les tâches fondamentales du cinéaste, en premier lieu de savoir où placer la caméra. » Lorsque le cataclysme a frappé, le réalisateur d’Asako ne s’est pas précipité sur la caméra. Après sa conférence, il revient sur les jours qui ont suivi le 11 mars : « J’ai vu les images prises par les avions et les hélicoptères, le tsunami qui avalait des villages, je n’avais pas imaginé que ça arriverait de mon vivant, pas plus que les catastrophes nucléaires. Mais, s’il y a des images, c’est que cette réalité existe. Filmer, c’était faire œuvre de mémoire, par l’enregistrement. Il fallait aussi enquêter : qu’est-ce qui s’est passé ? Et je voulais aussi répondre à la question de Kurosawa : où allez-vous placer la caméra ? Beaucoup d’images diffusées par la télévision montraient les maisons détruites, flottantes, les bateaux à l’intérieur d’une ville ou des montagnes de gravats. Je pense que ce n’est pas la bonne réponse à la question de ­Kurosawa. Il a dit, “placez votre caméra à l’endroit où il va se passer quelque chose” ; ce n’est pas dans les tas de gravats qu’il va se passer quelque chose. Je crois avoir placé la caméra à l’endroit où de nouvelles choses allaient surgir. »
31/12/2018
cinema
https://www.lemonde.fr/cinema/article/2018/12/31/cinema-ryusuke-hamaguchi-et-la-memoire-du-desastre_5403823_3476.html
Les 20 ans de l’euro : pour Jean-Claude Trichet, « la monnaie unique est un bouc émissaire facile »
L’ancien patron de la Banque centrale européenne estime qu’en stabilisant les prix, la monnaie unique a contribué à soutenir le pouvoir d’achat.
Jean-Claude Trichet, ancien gouverneur de la Banque de France, à Paris, en juillet. LIONEL BONAVENTURE / AFP Gouverneur de la Banque de France entre 1993 et 2003, puis président de la Banque centrale européenne (BCE) jusqu’en 2011, il est l’un des Français qui ont participé à la création de la monnaie unique. Et qui ont été aux premières loges, lorsque la crise de 2008 a frappé l’Europe. Pour Jean-Claude Trichet, l’euro a protégé les ménages contre l’inflation. Vous avez participé au lancement de la monnaie unique. Quel souvenir le plus fort gardez-vous de cette période ? Probablement, ce sommet franco-allemand d’août 1989, au début de l’effondrement du rideau de fer. Ce jour-là, j’ai compris que l’idée encore abstraite d’une monnaie unique pouvait réellement devenir concrète, car nos deux pays ont chacun esquissé un pas majeur. Pour la première fois, les Allemands ont signalé qu’ils pouvaient accepter de fusionner le deutschemark, emblème de leur réussite d’après-guerre et de la fin de l’opprobre qui accablait leur pays, avec le franc et d’autres monnaies. Les Français, eux, ont indiqué qu’ils pouvaient accepter le principe d’une banque centrale indépendante, pourtant éloigné de leur culture historique. Mon autre souvenir, très marquant, est la négociation du traité de Maastricht, en 1992, lorsque les chefs d’Etat et de gouvernement sont convenus que nous adopterions l’euro le 1er janvier 1999 et ce, quel que soit le nombre de pays prêts à ce moment-là. Quelles ont été les plus grandes difficultés techniques ? Elles ont été nombreuses ! Adopter une monnaie unique était une expérience historique jamais tentée auparavant. Beaucoup d’amis américains et anglais la jugeaient vouée à l’échec. Ils prédisaient qu’en réunissant des monnaies de crédibilités aussi différentes que le deutschemark, l’escudo [portugais] et la drachme [grecque], elle serait forcément médiocre, instable et appelée à disparaître. Beaucoup prédisaient que la fusion des marchés monétaires de tous les pays membres en une nuit serait un naufrage informatique monumental. Mais tout s’est bien passé. En 2002, un défi considérable s’est aussi posé : assurer au même moment l’approvisionnement en pièces et billets dans les douze pays de la zone euro. Cela a été l’opération logistique la plus importante en temps de paix ! Qu’est-ce que l’euro a changé dans la vie des Français ? L’euro apporte la stabilité des prix au service de tous nos concitoyens et, avant tout, des plus défavorisés : la première défense du pouvoir d’achat est la stabilité des prix. En supprimant les frais et les risques de change, il simplifie considérablement les échanges des nombreux Français qui vont à l’étranger ou qui y travaillent, ainsi que la vie des entreprises.
31/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/31/les-20-ans-de-l-euro-pour-jean-claude-trichet-la-monnaie-unique-est-un-bouc-emissaire-facile_5403820_3234.html
Les 20 ans de l’euro : au cœur de la BCE, la tour de contrôle de la devise européenne
La monnaie unique est née il y a vingt ans, le 1er janvier 1999. Depuis, la Banque centrale européenne n’a cessé d’élargir ses fonctions.
Au centre, à gauche, Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne, lors d’une réunion de l’Eurogroupe, à Bruxelles, le 3 décembre. Olivier Matthys / AP C’est l’étage à 2 500 milliards d’euros. Ici, dans la salle de marché, des courbes et des chiffres clignotent sur les écrans d’ordinateur. A droite, un jeune homme sirote un café. Plus loin, un autre consulte les dépêches financières. Impossible de distinguer quoi que ce soit derrière les fenêtres : ce matin de décembre, à quelques jours de Noël, une brume épaisse et froide recouvre la ville de Francfort. L’ambiance est calme et, pour ainsi dire, étrangement… normale. On imaginait pourtant l’endroit hors du commun. C’est en effet ici que les tradeurs de la Banque centrale européenne (BCE) ont géré le plus ambitieux programme jamais mené par l’institution, objet de toutes les attentions, craintes et fantasmes des investisseurs et des gouvernements, ces derniers mois : l’assouplissement quantitatif (le quantitative easing, en anglais, ou QE). Pendant trois ans, avec leurs confrères des banques centrales nationales, ils ont racheté jusqu’à 80 milliards d’euros par mois de dettes publiques et privées – soit plus de 2 500 milliards d’euros au total –, dans l’espoir de réanimer une croissance européenne anémique. Le QE s’est achevé fin décembre. Mais les vingt-cinq personnes de la maison spécifiquement détachées au programme ont encore du travail : « Nous continuerons de réinvestir les titres du stock arrivant à échéance pendant une période prolongée », explique Christophe Beuve, responsable de l’équipe. Une opération que les marchés et les Etats surveilleront de près en 2019. Car la moindre erreur de pilotage est susceptible de faire déraper le coût des emprunts. Voire de fragiliser la reprise. Le 1er janvier 2019, l’euro fêtera son vingtième anniversaire. En deux décennies, la BCE, créée pour le gouverner, a pris une importance considérable dans la vie des Européens. Et pas seulement parce qu’elle fixe le loyer de l’argent. Au départ calquée sur la rigoureuse banque centrale allemande, alors uniquement chargée de surveiller l’inflation, elle s’est retrouvée en première ligne lors de la crise de 2008. Face à la paralysie des gouvernements, elle est montée au front pour stopper la spéculation sur les dettes publiques et relancer l’activité. « Elle n’a pas hésité à multiplier ses outils pour sauver l’euro », résume Florence Pisani, économiste à la société de gestion d’actifs Candriam. La tour de verre et d’acier que ses 2 000 salariés occupent, depuis décembre 2014, dans le quartier d’Ostend, dans l’est de Francfort, est à l’image de l’ampleur prise par l’institution depuis sa naissance. Chacun de ses 45 étages ultramodernes, reliés par des ascenseurs dont la vitesse soulève l’estomac, offre une plongée dans l’un des nombreux métiers permettant à la monnaie unique de fonctionner, des plus pointus aux plus concrets.
31/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/31/les-20-ans-de-l-euro-au-c-ur-de-la-bce-la-tour-de-controle-de-la-devise-europeenne_5403817_3234.html