title
stringlengths
1
209
summary
stringlengths
38
964
text
stringlengths
168
100k
date
stringlengths
10
10
topic
stringclasses
573 values
url
stringlengths
21
250
Noël : récit utopique, agir pour la planète… 15 bons livres à glisser sous le sapin
L’année qui s’achève marque un tournant dans la prise de conscience écologique. Voici une sélection de quelques bouquins clés à offrir ou lire pour les fêtes.
L’année qui s’achève marque un tournant dans la prise de conscience écologique. Noël est donc l’occasion rêvée de glisser quelques bouquins clefs sous le sapin. Voilà une petite sélection qui j’espère vous inspirera ! Comment faire quand on sait que tout va s’effondrer ? La « collapsologie » et la théorie de l’effondrement prospèrent amplement depuis plusieurs mois. Pour comprendre de quoi il s’agit et ne pas tomber dans le réflexe d’isolement survivaliste, plusieurs ouvrages sont recommandés : la série des ouvrages co-écrits Pablo Servigne, Raphael Stevens et Gauthier Chapelle – à savoir Comment tout peut s’effondrer. Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes (Seuil Ed., 2015), L’entraide, l’autre loi de la jungle (LLL, 2017) puis Une autre fin du monde est possible (Seuil Ed., octobre 2018). Le plus « optimiste » reste le dernier publié, de fait, tant il explique comment « vivre avec » la conscience du monde à venir… Il vous aidera et aidera vos proches à comprendre l’état de pré-traumatisme dans lequel certain.e.s peuvent être aujourd’hui. A lire également sur le même sujet : l’historique Effondrement: Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie de Jared Diamond (en poche chez Folio depuis 2009), l’économique « Il faut dire que les temps ont changé… » : Chronique (fiévreuse) d’une mutation qui inquiète de Daniel Cohen (Albin Michel, 2018) ou De quoi l’effondrement est-il le nom ?: La fragmentation du monde (Ruptures) de Renaud Duterme (Utopia, 2018). A consulter aussi: Pourquoi tout va s’effondrer (LLL, 2018) de Julien Wosnitza qui, du haut de ses 24 ans, essaye avec ce manifeste de limiter la hauteur de la chute. Si vous avez un.e historien.ne dans votre entourage, la valeur sûre sera La Contamination du monde – Une histoire des pollutions à l’âge industriel (Seuil, 2017) de Francois Jarrige et Thomas Le roux. Un recueil très étayé de toutes les sources de pollution qui, à mesure du développement de notre civilisation, sont venues abîmer les milieux naturels et nous intoxiquer. Et pour ceux/celles qui doutent de l’état de nos réserves en ressources naturelles, la percutante analyse de Philippe Bihouix dans L’Âge des low tech. Vers une civilisation techniquement soutenable (Seuil, 2014) vaut le détour. Agir, plus que jamais Maintenant que vous savez, soit vous sombrez, soit vous agissez. Solution pour allier les deux ? Se plonger dans le petit guide Découvrir les vins bio et nature d’Olivier Le Naire (Actes Sud Kaizen) dans la collection Je passe à l’acte : l’auteur y confie son chemin vers des vins bio et naturels qui aujourd’hui proposent une belle gamme d’alternatives aux vins « chimiques » conventionnels. On le suit et profite avec plaisir de l’ensemble de ses conseils, en comprenant que ces breuvages sont sans doute un peu plus sauvages et difficile à maîtriser, mais meilleurs pour la santé car non « gavés de souffre » pour rentrer dans les standards… Si autour de vous on est convaincu que « nous allons tous mourir » (à prononcer avec un ton grave et alarmiste), procurez-vous, dans la même collection Ré-enchanter la mort, du journaliste Youki Vattier. Suite au décès de son père, cet auteur a exploré les différentes dimensions des rites funéraires et invite à les revisiter, dans une démarche profondément humaine et sociale. Sur ce sujet que l’on prend bien soin d’éloigner de nous au quotidien, ce petit livre à destination des mortels donne envie de célébrer cette « maladie qui s’attrape à la naissance » (dixit Woody Allen) comme il se doit ! Comment être inspiré ? Si vous cherchez des inspirations pour agir, pourquoi ne pas commencer par la fiction ? Deux ouvrages ont marqué cette fin d’année pour cela : la ré-édition d’Ecotopia, chez Rue de l’échiquier. Initialement publié en 1975, ce récit utopique est d’une actualité saisissante ! On y suit un journaliste américain qui découvre une société écologique radicale (Ecotopia) installée dans trois états de la côte ouest des Etats-Unis (la Californie, l’Oregon et l’Etat de Washington) – le protagoniste, d’abord cynique, est de plus en plus séduit par cette société où les femmes sont au pouvoir, où l’on pratique l’autogestion, la décentralisation, les 20h de travail hebdomadaire, le recyclage systématique, etc. Bref, une sorte de Demain avant l’heure qui à l’époque a été vendu, déjà, à des millions d’exemplaires ! Autre roman à offrir, en deux tomes : Siècle Bleu, de Jean-Pierre Goux (La Mer Salée Ed., 2018). Paru la première fois en 2010, il vient d’être réédité et le succès est tel qu’une nouvelle impression est en cours. Pour cause : ce roman d’aventures est à la fois un thriller écologique visionnaire et une épopée moderne qui nous interroge sur le monde d’aujourd’hui comme celui de demain. Dans la catégorie Feel Good, il y a aussi le premier roman d’écologie positive de Camille Choplin, Tout le monde ne raffole pas des brocolis (chez Hugo & Cie), pour aborder avec légèreté et justesse les problématiques auxquelles nous sommes tous confrontés aujourd’hui. Une très belle entrée en matière sur tout ce qui peut être fait au quotidien ! Comment agir ? Une fois ces nouveaux récits bien intégrés, il s’agit de voir comment se positionner et mettre à profit ce que l’on sait faire ! Pour cela, Activez vos talents, ils peuvent changer le monde ! (Éditions Alisio, novembre 2018) sera un bon compagnon ! Matthieu Dardaillon, fondateur de Ticket for change, y délivre un ensemble de conseils pour bien considérer l’utilité du travail que l’on exécute au quotidien. Si vous ou vos proches vous interrogez sur la façon dont vous pouvez travailler « dans le bon sens », voilà qui vous fera du bien ! Et comme tout passe, à un moment, par un travail intime et personnel, couplez donc cette recherche de sens à la lecture de l’ouvrage Pour une écologie spirituelle de Satish Kumar récemment traduit en français, chez Belfond. Cet ancien jaïn et infatigable disciple de Gandhi, a développé une approche de l’écologie basée non pas sur la peur et l’urgence sanitaire, mais sur une vision globale et spirituelle de notre place dans l’univers. Il partage ici son cheminement et son vécu en invitant à trouver un nouvel équilibre entre la Terre, l’Âme et la Société… A méditer assurément ! De l’aventure en veux tu en voilà ! Envie de prendre le large et de partir à l’aventure sans un rond ni trop de grammes CO2 ? Deux bouquins à recommander dans ce cas : pour les grands, Nomade des mers, le tour du monde des innovations de Corentin de Chatelperron (avec Nina Fasciaux) chez ARTE Ed./Le Chêne Ed. L’aventurier est passionné de voile et de sobriété technologique, si bien qu’il narre ici son tour du monde en quête de solutions issues du bon sens et du système D – des solutions accessibles et économiques, faciles à fabriquer et à réparer partout. De quoi revivre son périple, découvrir des innovations astucieuses et tenter, même, de reproduire cela soi-même à la maison grâce aux nombreuses fiches techniques fournies dans l’ouvrage. A noter : cette aventure se retrouve en images et vidéos ici sur le site d’ARTE. Pour les plus jeunes, Jean-Louis Etienne – L’enfant qui marche (co-écrit par Florence Thinard, illustré par Marc N’Guessan) publié il y a peu chez Plume de Carotte : on est plongé dans la vie du jeune explorateur, à saisir que très jeune déjà il rêvait de grands espaces pour s’évader et partir à l’aventure. Tantôt ajusteur sur métaux, rugbyman, médecin, puis grand explorateur, c’est l’audace tout autant que la curiosité (et un peu de chance aussi !) qui ont fabriqué son parcours sur les terrains les plus hostiles de la planète – ceux des glaces permanentes. Missions Antarctica, Erebus, Spitzberg, Banquise, Clipperton, il en était ! « Si tu crées ta chance, si tu la saisis quand elle se présente, alors la vie prend le relais et fait pour toi l’autre moitié du chemin. Alors, ose, et va au bout de tes rêves ! » conseille-t-il aujourd’hui aux plus jeunes…. De quoi offrir une belle conclusion à ce billet en vous demandant à mon tour quels livres engagés vous glisserez sous le sapin cette année ? Belles fêtes de fin d’année à toutes et à tous ! Anne-Sophie Novel / @SoAnn sur twitter A noter Pour vos achats neufs, privilégiez les librairies indépendantes ! Pour les trouver ? Rien de plus simple : utilisez Amazon Killer de façon à rechercher les références sur Amazon et à acheter en suite chez le libraire le plus proche de chez vous ! Autre option : le site des libraires indépendants. Pour les achats d’occasion : pensez aux nombreux points de revente d’occasion près de chez vous, mais aussi au Bon Coin ou autres sites tels tonbooktoo.com ou même Livres de proches (pour les échanges de livres)
20/12/2018
blog
http://alternatives.blog.lemonde.fr/2018/12/19/noel-15-bons-bouquins-a-glisser-sous-le-sapin/
Cinq livres jeunesse à poser sous le sapin
Dernière ligne droite avant Noël. Si vous ne savez pas quoi offrir aux marmots, voici une sélection de valeurs sûres adaptées à chaque âge.
Pour les bébés : « Le Livre des saisons » « Les Livres des saisons ». EDITIONS LA JOIE DE LIRE Les livres sur les saisons, c’est un grand classique de la littérature jeunesse. Et en la matière, l’illustratrice allemande Rotraut Susanne Berner est imbattable. Elle a publié un album sur chaque saison, une succession de doubles pages sans texte mais aux illustrations très précises, aussi denses qu’Où est Charlie ? et où l’on retrouve à chaque fois les mêmes personnages dans les mêmes paysages. Quand on ne possède qu’un album, on suit l’évolution de Pierre, Thomas ou Danièle au fil des pages. Mais si on a tous les volumes sous la main, rien de plus chouette que de comparer les mêmes paysages dans des conditions climatiques différentes, de regarder la construction du jardin d’enfants avancer, le lac se geler, la programmation du centre culturel évoluer… Pour ce faire, le coffret des quatre albums au format poche est très pratique. Les Livres des saisons, de Rotraut Susanne Berner (La Joie de lire, coffret de quatre albums illustrés. 24,90 euros). Dès 12 mois. Dès qu’ils commencent à parler : « L’Imagier toc-toc » « L’Imagier toc-toc ». EDITIONS MILAN Les imagiers fonctionnent très bien auprès des enfants qui formulent leurs premiers mots et qui sont très fiers de pointer une voiture du doigt en hurlant « tut-tut ! ». L’Imagier toc-toc va un cran plus loin : il raconte n’importe quoi. L’auto est légendée comme étant une saucisse, le bateau devient une courgette, l’arbre un rhinocéros, la moto une brosse à dents… Evidemment, il faut que le marmot soit en âge de contredire son aîné pour profiter de cet ouvrage, mais quel enthousiasme dans la voix et quelle satisfaction dans le regard quand il corrige son débile de parent ! L’éditeur recommande l’imagier à partir de 4 ans, mais on a testé et, dès 2 ans, votre enfant est déjà en âge de vous prendre pour un abruti. L’Imagier toc-toc, d’Edouard Manceau (Milan, 72 pages, 9,90 euros). Dès 2 ans. Pour les petites filles ambitieuses : « Joan Procter, la femme qui aimait les reptiles » « Joan Procter, la femme qui aimait les reptiles ». EDITIONS CAMBOURAKIS Joan Procter est née en 1897 à Londres, et se passionne dès son plus jeune âge pour les reptiles. A 16 ans, on lui offre d’ailleurs un petit crocodile qu’elle emmène partout avec elle, y compris à l’école. Pendant la première guerre mondiale, la main-d’œuvre venant à manquer, le conservateur du Musée d’histoire naturelle la recrute comme assistante. Elle est tellement brillante qu’elle finit par lui succéder et devient célèbre pour la façon dont elle révolutionne le cadre de vie de ces animaux. L’album, peuplé de dragons de Komodo et autres reptiles fascinants très joliment illustrés par Felicita Sala, résume le parcours de cette femme singulière qui s’est imposée dans un monde d’hommes. S’attendre, après la lecture, à ce que l’enfant réclame une visite au vivarium du zoo le plus proche ou un crocodile à domicile. Joan Procter, la femme qui aimait les reptiles, de Patricia Valdez et Felicita Sala (Cambourakis, 48 pages, 14 euros). A partir de 4 ans. Pour les fans de dinosaure : « Le Fossile » « Le Fossile ». EDITIONS SARBACANE Avec ses pages découpées en courbe, ce livre met en scène un chantier de fouilles où le squelette d’un gigantesque dinosaure se découvre peu à peu. Le texte, simple et court, raconte que le jeune Clément, en se promenant avec son père, remarque un caillou, qui pourrait être un fossile. Ensemble, ils appellent un ami professeur de paléontologie qui démarre les fouilles. L’album comporte deux surprises : dans l’avant-dernière page, on découvre que le prédateur déterré tenait dans sa gueule un petit dinosaure qu’il était en train de croquer. Et dans la dernière double page, clou du spectacle, le squelette se déploie soudain en 3D ! Succès garanti auprès des amateurs de paléontologie et de tous les Clément (soit environ 168 000 personnes en France), puisque le dino est finalement baptisé « Clémentosaure ». Le Fossile, de Max Ducos (Sarbacane, 35 pages, 24,90 euros). Dès 6 ans. Pour frimer à la récré : « La Fameuse invasion de la Sicile par les ours » « La fameuse invasion de la Sicile par les ours ». EDITIONS GALLIMARD JEUNESSE Dino Buzzati a publié en 1945 ce livre qu’il a écrit et illustré pour sa fille, et qui raconte une guerre entre les ursidés et les hommes. Roman d’aventure, fantastique, à la croisée de la tragédie et du conte philosophique mais pas dépourvu d’humour, cet album s’est déjà écoulé à plus de 518 000 exemplaires depuis sa sortie. Gallimard jeunesse réédite ce classique dans une version pimpante avec une couverture dorée et des pages de papier épais qui lui donne des allures de grimoire magique. Juste à temps avant la sortie du film d’animation de Prima Linea, très attendue, et prévue au printemps 2019. Le livre permettra aux lecteurs de crâner dans la cour de récré, et de spoiler la fin de l’histoire aux camarades paresseux. La Fameuse invasion de la Sicile par les ours, de Dino Buzzati (Gallimard, 144 pages, 17,50 euros). A partir de 10 ans.
20/12/2018
m-perso
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/20/cinq-livres-jeunesse-a-poser-sous-le-sapin_5400316_4497916.html
Implants médicaux : un système à réformer d’urgence
Après les révélations de l’enquête « Implant Files », les députés ont annoncé la création d’une mission d’information parlementaire qui devrait débuter ses travaux courant janvier.
Le sujet de la défaillance du contrôle des implants médicaux a officiellement fait son entrée au Parlement, mercredi 19 décembre. Trois semaines après les révélations de l’enquête « Implant Files » menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), dont Le Monde, Radio France et « Cash Investigation » sont partenaires, les députés ont annoncé la création d’une mission d’information parlementaire. Cette mission, dont les députés Julien Borowczyk (LRM, Loire) et Pierre Dharréville (PCF, Bouches-du-Rhône) ont été désignés comme corapporteurs, devrait débuter ses travaux courant janvier. « Il y a une forme d’urgence qui s’impose à nous. Nous mesurons chaque jour un peu plus les dégâts que provoque la marchandisation de la santé », explique Pierre Dharréville, pour qui il s’agit de « mettre fin à des agissements graves et de placer les pouvoirs publics devant leurs responsabilités. Le contexte de ces révélations va nous pousser à prendre des dispositions offensives, notamment sur la qualité des produits et sur leur coût », insiste-t-il. L’enquête des « Implants Files » publiée fin novembre révélait les lacunes du système de contrôle et d’évaluation des dispositifs médicaux en France et en Europe. Les implants médicaux, ce sont tous ces objets – les stents, prothèses de hanches, implants mammaires, défibrillateurs ou encore les pacemakers – introduits dans le corps, de manière durable, mais qui n’obéissent pas aux mêmes règles de mise sur le marché que le médicament. Haute pile de travaux La création de cette mission d’information semble a priori une bonne nouvelle. Sur la base de ses travaux, et en fonction des préconisations qu’elle formulera, les parlementaires pourront proposer des évolutions législatives. Seulement, il faudrait que son rapport ne finisse pas sur la déjà très haute pile de travaux publiés sur le sujet ces dernières années, et dont les recommandations formulées sont toutes restées aux oubliettes. Depuis 2011, au moins cinq rapports sur les dispositifs médicaux ont été remis au ministère de la santé. Il y a là le rapport du groupe de travail des assises du médicament (2011). Celui de la mission d’information parlementaire… du Sénat, de 2012, sur les dispositifs médicaux implantables. L’ouvrage coécrit l’année suivante par Eric Vicaut, le responsable du centre d’évaluation du dispositif médical de l’AP-HP. Les inspecteurs de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) se sont aussi intéressés à la question et ont publié deux rapports : l’un concerne « l’évolution et la maîtrise de la dépense des dispositifs médicaux » (2010), le second, « la régulation du secteur des dispositifs médicaux » (2015). Tous ces travaux arrivent aux mêmes conclusions : il y a urgence à réformer le système. Ainsi, au terme des assises du médicament de 2011, le groupe de travail note « un grand retard en matière d’évaluation clinique, notamment un déficit d’évaluation du bénéfice/risque », pointe des normes « très insuffisantes » dont dépend la qualité du marquage CE et décrit la matériovigilance – le signalement des incidents liés aux dispositifs médicaux – comme le « maillon faible » du dispositif actuel. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Implants médicaux : autopsie d’un système de conflits d’intérêts généralisé « Pas de fatalité » Les sénateurs, après avoir auditionné des dizaines de personnes et s’être rendus aux Etats-Unis, en Suède, à Bruxelles et au Danemark, dénonçaient, eux, dans un document de 167 pages, « les graves lacunes du système européen de contrôle des dispositifs médicaux ». Quant aux inspecteurs de l’IGAS, ils avaient débusqué les « stratégies de contournement » trouvées par les industriels pour que leur nouveau dispositif ne soit pas évalué par les experts de la Haute Autorité de santé (HAS). Il fallait donc réformer le système ; tous étaient d’accord. « Il n’existe pas de fatalité à voir se répéter les scandales sanitaires ; il importe seulement de remettre la sécurité au premier rang des priorités de l’action publique », insistaient les sénateurs. Or, en dépit de ces constats unanimes, rien n’a pas bougé. Une nouvelle réglementation européenne a été rédigée. Elle doit voir le jour en 2020, mais rien dans les nouveaux textes n’oblige, par exemple, à évaluer les dispositifs médicaux avec la même exigence que les médicaments avant leur mise sur le marché. Cinq associations, ONG et la revue médicale indépendante Prescrire ont demandé, fin novembre, que les dispositifs médicaux « les plus à risque » fassent l’objet d’une autorisation de mise sur le marché au même titre que les médicaments. La France avait porté cette demande sous la présidence de Nicolas Sarkozy, mais n’avait été suivie que par une poignée de pays dont le plus important était l’Autriche. Sans relâche, pendant plus d’une décennie, le lobby des implants médicaux a œuvré pour faire plier la Commission européenne. Une eurodéputée a confié au Monde qu’en vingt-cinq ans à Bruxelles, il s’agissait de la campagne de lobbying la plus « intense » dont elle avait été témoin. A la seule exception de celles des fabricants de tabac. Ce qu’il faut savoir sur l’enquête « Implant Files » Les « Implant Files » désignent une enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et 59 médias partenaires, dont Le Monde. Au cœur de l’enquête : les dispositifs médicaux. Plus de 250 journalistes ont travaillé sur les incidents occasionnés par ces outils censés aider les patients (de la pompe à insuline aux implants mammaires en passant par les pacemakers ou les prothèses de hanche). Plus de 250 journalistes ont travaillé sur les incidents occasionnés par ces outils censés aider les patients (de la pompe à insuline aux implants mammaires en passant par les pacemakers ou les prothèses de hanche). Une absence de contrôle. Ces dispositifs médicaux bénéficient facilement du certificat « Conformité européenne » permettant de les vendre dans toute l’Europe… Et ce, quasiment sans aucun contrôle. Ces dispositifs médicaux bénéficient facilement du certificat « Conformité européenne » permettant de les vendre dans toute l’Europe… Et ce, quasiment sans aucun contrôle. Un bilan de victimes très opaque. Seuls les Etats-Unis recueillent de manière détaillée les incidents relatifs à ces dispositifs médicaux. La base américaine compte 82 000 morts et 1,7 million de blessés en dix ans. En Europe, ces informations sont inexistantes, faute de « remontée » systématique et de contrôle. Retrouvez tous nos articles sur l’enquête « Implant Files » dans cette rubrique. Vous souhaitez témoigner ? Racontez-nous votre histoire :
20/12/2018
sante
https://www.lemonde.fr/sante/article/2018/12/20/implants-medicaux-un-systeme-a-reformer-d-urgence_5400308_1651302.html
Erosion côtière : l’Assemblée vote l’indemnisation des habitants du Signal
Sept millions d’euros ont été dégagés pour les 75 copropriétaires d’un immeuble de Soulac-sur-Mer, en Gironde, condamné à sombrer dans l’océan.
Ce n’est qu’une ligne budgétaire à sept chiffres dans le volumineux projet de loi de finances pour 2019, mais elle augure de l’épilogue prochain d’une situation kafkaïenne : celle que vivent depuis près de cinq ans les 75 copropriétaires de l’immeuble Le Signal, à Soulac-sur-Mer (Gironde). Mercredi 19 décembre, à l’aube, l’Assemblée nationale a adopté un amendement visant à indemniser, pour un montant total de 7 millions d’euros, les anciens habitants de cette barre de béton de quatre étages condamnée par l’érosion dunaire à sombrer dans l’océan Atlantique. Construit en 1967 à 200 mètres du trait de côte, dans le cadre d’un vaste plan d’aménagement touristique du littoral aquitain supervisé par l’Etat, Le Signal s’est mué en symbole d’un littoral français rongé par la montée des eaux. Tagué et éventré, cet immeuble qui se trouve aujourd’hui à moins de 10 mètres du bord de la dune a des allures de vaisseau fantôme. Fin janvier 2014, à la suite de violentes tempêtes, ses habitants ont été contraints par un arrêté municipal de « péril imminent » de quitter les lieux en quelques jours. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le littoral français recule de manière accélérée Modestes retraités ou familles remboursant parfois encore des emprunts immobiliers, contraints de se reloger à leurs frais, ils contestent depuis lors cette expropriation sans indemnisation. En août, leur combat judiciaire s’est achevé devant le Conseil d’Etat, qui leur a définitivement barré l’accès qu’ils réclamaient au Fonds Barnier. Spécifiquement créé par une loi de 1995 pour les cas d’expropriations pour « risques naturels majeurs », ce dispositif exclut en effet l’érosion dunaire, alors qu’il inclut l’érosion rocheuse, et la juridiction administrative suprême a confirmé que le risque de submersion marine n’était pas « imminent » à l’époque de l’évacuation du Signal. Pour défendre leurs intérêts, ses anciens habitants misaient parallèlement sur la voie législative, qui ne leur a pas davantage réussi. Depuis janvier 2017, plusieurs propositions de loi sur l’adaptation des territoires littoraux au changement climatique se sont enlisées à l’Assemblée nationale comme au Sénat. Et, le 19 décembre, le gouvernement qui avait juré, à l’été, de régler l’affaire dans un cadre « plus global », a émis un avis défavorable pour le vote de l’amendement à l’Assemblée. « Le Parlement est souverain et nous prenons acte de sa décision », a néanmoins indiqué au Monde un porte-parole du ministère de la transition écologique et solidaire. « Les deux Chambres se sont prononcées pour apporter une réponse politique à une situation inhumaine qui n’a que trop duré, a déclaré au Monde la sénatrice girondine Françoise Cartron, qui avait présenté ce dispositif au Sénat, le 2 décembre, pour le groupe LRM. L’amendement avait alors été adopté à une large majorité transpartisane, mais les crédits de la mission « écologie » destinés à financer la mesure, eux, ne l’avaient pas été. Cela rendait nécessaire son dépôt à l’Assemblée nationale, en nouvelle lecture. Désamiantage « L’Etat, qui était à l’origine du projet d’aménagement de la côte aquitaine, doit maintenant prendre ses responsabilités et négocier dans le cadre de cette enveloppe avec les copropriétaires en fonction des situations propres à chacun », estime Mme Cartron. Pour Benoît Simian, député girondin LRM qui a porté l’amendement à l’Assemblée nationale, il s’agissait de « réparer une injustice », de « combler un vide juridique » et de régler des « urgences environnementales et sociales » liées à l’état de l’immeuble. « Nous n’avons pas créé de charges nouvelles, explique-t-il. Nous réorientons 7 millions d’euros sur les 340 dont dispose la mission “Ecologie, développement et mobilités durables” pour répondre à une situation qui n’a pas d’équivalent en France à l’heure actuelle. » Malgré la perspective de sortir enfin de l’impasse, Jean-José Guichet, le président du syndicat des copropriétaires du Signal, âgé de 80 ans, évoque une « double peine ». « L’immeuble a été estimé par la direction immobilière de l’Etat à environ 11 millions d’euros, il y a quelques années, note-t-il. On nous propose donc aujourd’hui moins de 70 % de sa valeur et, les recours judiciaires étant purgés, nous n’avons guère le choix. » La démolition du Signal ne pourra intervenir que lorsque M. Guichet et ses anciens voisins auront renoncé à leur droit de propriété, après leur indemnisation. Son désamiantage – dont M. Simian a obtenu, en juin, la prise en charge intégrale par l’Etat – doit débuter en janvier 2019. Dans l’attente de ces travaux, évalués à 1,5 million d’euros, du sable a été apporté, dès septembre, pour consolider la dune. « Il devait permettre aux ouvriers de l’entreprise mandatée de travailler en sécurité, mais une bonne moitié a déjà été emportée par la mer, déplore M. Guichet. Il aurait fallu le livrer à la veille des travaux ; les technocrates continuent d’ignorer la réalité du terrain à laquelle nous sommes confrontés. »
20/12/2018
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/20/erosion-cotiere-l-assemblee-vote-l-indemnisation-des-habitants-du-signal_5400306_3244.html
Bataille judiciaire autour de la libération de Carlos Ghosn
Un tribunal de Tokyo a pris la décision de ne pas prolonger la détention de l’ex-patron de Nissan, ouvrant à sa défense la possibilité d’une demande de libération sous caution.
Devant la prison où est incarcéré Carlos Ghosn, à Tokyo, jeudi 20 décembre. ISSEI KATO / REUTERS Carlos Ghosn doit passer par tous les sentiments. Jeudi 20 décembre, un tribunal de Tokyo a décidé ne pas prolonger la garde à vue de l’ex-patron de Nissan. La procédure, ouverte au recours, a été contestée par le bureau des procureurs de la ville, qui a essuyé un nouveau refus du parquet peu après 14 heures à Paris (22 heures au Japon). Cette confirmation de la fin de sa garde à vue ouvre à la défense de M. Ghosn la possibilité de demander sa libération dès vendredi en échange du paiement d’une caution, après un mois derrière les barreaux. A la lumière de ce nouveau développement, « une chose est sûre : au Japon, l’ambiance a changé, affirme une source proche des familiers du patron emprisonné. C’est sensible dans la presse japonaise, cela nous est aussi remonté par la voie diplomatique. L’histoire d’un méchant Carlos Ghosn, forcément coupable, commence à être contestée. » Cet imbroglio judiciaire intervient alors que Renault et Nissan rétablissent, plutôt laborieusement, leur dialogue. Mardi 18 décembre, Thierry Bolloré, le directeur général délégué du constructeur hexagonal, et le directeur général de Nissan, le Japonais Hiroto Saikawa, se sont longuement expliqués en tête-à-tête sur la crise actuelle au siège de l’Alliance Renault-Nissan (RNBV), à Amsterdam. « Des échanges tout à fait cordiaux ont eu lieu, confirme-t-on chez Renault. Sur l’opérationnel, des décisions ont été prises de manière collégiale pour poursuivre la coopération. » Concernant la gouvernance de Nissan, comme la nomination d’un nouveau président et la mise en place d’un comité de rémunération, la société française veut participer et « apporter son aide dans le respect des accords actuels entre [les] deux entreprises », précise-t-on au sein de l’ex-régie. Un véritable dialogue de sourds sur la gouvernance Lire aussi Carlos Ghosn mis en examen au Japon, une procédure engagée contre Nissan Et comme la meilleure défense, c’est l’attaque, Renault veut aujourd’hui reprendre la main. « Nous avons une forte volonté de jouer notre rôle d’actionnaire de Nissan, indique un proche de la direction du constructeur. Ce qui nous inquiète, c’est la mise en examen de notre partenaire nippon, qui fait peser une menace sur l’ensemble de ses dirigeants. Or il faut remédier au plus vite aux difficultés de gouvernance de Nissan, car le groupe doit se concentrer sur son business. Aujourd’hui, notre partenaire est dans une passe difficile, après quatre rappels de véhicules pour des défauts de qualités et deux avertissements sur résultats, alors que le marché se tend, notamment aux Etats-Unis, où Nissan est important. » Article réservé à nos abonnés Lire aussi Motonari Otsuru, l’implacable « confesseur » au chevet de Carlos Ghosn Sur la gouvernance, on assiste à un véritable dialogue de sourds entre les deux entreprises. Nissan ne veut pas entendre parler d’assemblée générale extraordinaire, comme le suggérait M. Bolloré dans un courrier, et veut remédier à ces défauts de gouvernance grâce à un comité d’experts qui rendra ses recommandations en mars 2019. Le Japonais ne souhaite pas non plus répondre aux interrogations sur l’impact de la mise en examen de Nissan, consignées dans un second courrier de M. Bolloré, qui n’a pas été rendu public. « Nous n’avons pas la même lecture de l’urgence de la situation, constate-t-on chez Renault. [Mais] il n’est pas question pour nous de mettre de l’huile sur le feu. Faire respecter nos droits en brusquant Nissan, serait contre-productif. » Avant son arrestation, M. Ghosn avait exposé, à quelques dirigeants des deux sociétés, sa volonté de présenter, dès janvier 2019, un schéma permettant de rendre « indétricotable » l’alliance entre Renault et Nissan. « Il ne s’agissait pas d’une fusion, mais d’une réunion des deux entreprises, avec, à la clé, un rééquilibrage capitalistique et de gouvernance. Pour sortir de la crise actuelle, nous devons viser une telle sortie par le haut », juge-t-on chez Renault. Restaurer la confiance Article réservé à nos abonnés Lire aussi Carlos Ghosn : l’ambition, l’argent et la gloire, jusqu’à la démesure Avant d’en arriver là, il faudra restaurer la confiance. Et c’est loin d’être gagné, car des éléments du dossier constitué par Nissan contre son ancien président Carlos Ghosn continuent à fuiter dans la presse. Mercredi 19 décembre, Les Echos et Reuters ont ainsi évoqué, documents à l’appui, des échanges de courriels, remontant à 2010, entre des dirigeants de Nissan et Mouna Sepehri, chargée du bureau de la présidence chez Renault, sur la possibilité de faire endosser par l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi une partie de la rémunération japonaise de M. Ghosn. Cela semble indiquer que la dirigeante et d’autres cadres du constructeur au losange étaient au courant de l’intention de M. Ghosn de dissimuler une partie de ses revenus japonais. Finalement, l’ex-PDG a opté pour un système de paiement différé et caché de sa rémunération. Cette dissimulation vaut à l’ex-patron de Nissan d’être incarcéré au Japon. Les Echos révèlent également que RNBV (Renault-Nissan BV) était régulièrement sollicité pour des paiements qui ne relèveraient théoriquement pas de son mandat légal. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Affaire Carlos Ghosn : Renault refuse de lâcher son patron emprisonné « RNBV est une organisation assez opaque. Personne ne sait ce qui s’y passe », assure un observateur au Japon. « Cette structure ressemble de plus en plus à une boîte noire », ajoute un proche de Nissan. Alors que le constructeur nippon demande, depuis de nombreux jours, une enquête indépendante sur RNBV, « les avocats de Renault et de Nissan discutent du protocole juridique pour lancer cette investigation », assure-t-on désormais chez Renault. En attendant cette nouvelle investigation, la direction de Renault et les administrateurs du constructeur restent sur leur faim dans l’enquête de Nissan concernant M. Ghosn. « Lors de la présentation du dossier au dernier conseil d’administration de Renault, nous n’avons pas appris grand-chose de plus que ce qui a été publié dans la presse japonaise, regrette un administrateur. Nous avons accès à des éléments à charge, mais aucune mise en perspective, ni d’éléments à décharge. C’est assez grave. C’est pour cela que M. Ghosn n’a toujours pas été démis de ses fonctions chez Renault. »
20/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/20/bataille-judiciaire-autour-de-la-liberation-de-carlos-ghosn_5400305_3234.html
Loto du patrimoine : Franck Riester répond à Stéphane Bern
L’Etat « ne va rien se mettre dans la poche », a assuré jeudi le ministre de la culture. Le rétablissement de la taxation avait ulcéré l’animateur chargé d’une mission sur le patrimoine.
Le ministre de la culture, Franck Riester, a répondu jeudi 20 décembre aux critiques formulées par Stéphane Bern, chargé d’une mission sur le patrimoine. L’animateur s’est élevé mardi contre un amendement de l’Assemblée supprimant un article du Sénat qui exonérait le Loto du patrimoine de la taxation (CSG, TVA et autres) que l’Etat prélève habituellement sur les jeux de loterie. L’Etat « ne va rien se mettre dans la poche » avec le rétablissement de la taxation, a déclaré M. Riester, plaidant qu’il était « plus simple de ne pas modifier la législation de la Loterie nationale », qui « fonctionne avec des taxes ». « C’est une question de tuyauterie budgétaire », a expliqué le ministre sur Europe 1, assurant que la taxe serait compensée par l’Etat en 2019 si le loto est reconduit, comme cela a été le cas lors de la première édition cette année. « Ce qui compte, c’est l’efficacité » « Les taxes générées en 2018 représentent 14 millions d’euros. L’Etat met 21 millions, donc largement plus que ce qu’il a collecté à travers le dispositif fiscal du Loto du patrimoine. Et en 2019, on s’est engagé à faire la même chose si le Loto du patrimoine est lancé, ce qui n’est pas encore définitif, a-t-il ajouté. Si les Français répondent présents comme ils ont répondu présents en 2018, l’Etat accompagnera à la hauteur de ce que seront les revenus du Loto du patrimoine. » « Ce qui compte, c’est l’efficacité, a-t-il encore dit. Le résultat final, c’est que les Français veulent que leur patrimoine de proximité soit restauré, et grâce à cette initiative (…), on va avoir ce résultat-là. » Ce jeu vise à financer la rénovation de monuments en France à travers un jeu de grattage et un loto. Dix-huit monuments « emblématiques » en péril doivent en bénéficier.
20/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/20/loto-du-patrimoine-franck-riester-repond-a-stephane-bern_5400301_823448.html
« Gilets jaunes » : procédure accélérée pour le projet de loi sur les mesures d’urgences
Le texte issu des annonces d’Emmanuel Macron est examiné par l’Assemblée puis le Sénat. Il doit être voté avant vendredi.
Une course contre la montre. Examiné au conseil des ministres, mercredi, le projet de loi sur les mesures d’urgences économiques et sociales, décidées par Emmanuel Macron pour répondre à la crise des « gilets jaunes », arrive devant les députés jeudi. Dès 13 heures, mercredi, les ministres du travail et de la santé, Muriel Pénicaud et Agnès Buzyn, étaient auditionnées à l’Assemblée nationale sur le texte, avant de faire de même au Sénat dans l’après-midi. Les députés avaient jusqu’à 17 heures pour proposer des amendements avant leur examen à 21 h 30 en commission. Douze heures seulement après sa présentation en conseil des ministres. Un rythme digne des situations de plus grande urgence. En 2015, le projet de loi prolongeant l’état d’urgence de trois mois, au lendemain des attentats du 13-Novembre, avait connu le même examen express. Présenté en conseil des ministres, le texte composé de six articles avait été adopté en deux jours par le Parlement et publié au Journal officiel dans la foulée. En cette fin d’année bousculée par la crise des « gilets jaunes », l’objectif est le même : que le texte soit définitivement adopté vendredi soir. Pour tenir ce délai, il fallait réunir deux conditions. D’abord, que les débats ne se prolongent pas et donc éviter la multiplication des amendements. Une gageure. En temps normal, quand le rythme s’accélère, les oppositions sont toujours enclines à ralentir le rythme et fustiger l’attitude de l’exécutif en lui reprochant de mépriser les droits du Parlement. « Ce serait mal vu de voter contre » Pour que le texte soit adopté vendredi, il faut aussi et surtout que le Sénat vote « conforme » la version sortie de l’Assemblée, et donc n’en modifie pas une ligne. Le moindre changement par les sénateurs déclencherait une navette obligeant les parlementaires à se retrouver entre Noël et le jour de l’An. « Pas grand monde ne veut travailler pendant les fêtes », résume Jean-Marie Vanlerenberghe, le sénateur centriste désigné rapporteur du projet de loi. « Les Français n’ont pas envie qu’on leur parle de politique entre Noël et le Nouvel An ! », ajoute son homologue à l’Assemblée, Olivier Véran. Tout a donc été fait pour accélérer. D’abord, les mesures contenues dans le projet de loi sont plutôt consensuelles. La droite, majoritaire au Sénat, défend depuis le quinquennat de Nicolas Sarkozy la défiscalisation des heures supplémentaires prévue dans le texte. « Ce serait mal vu de voter contre, même si le dispositif retenu ne prévoit pas d’exonérations de cotisations patronales », confie le président du groupe LR du Sénat, Bruno Retailleau.
20/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/20/gilets-jaunes-procedure-acceleree-pour-le-projet-de-loi-sur-les-mesures-d-urgences_5400299_823448.html
Bertrand Camus va devenir patron du groupe Suez
Le conseil d’administration du numéro 2 mondial des services aux collectivités a nommé, jeudi 20 décembre, le remplaçant de Jean-Louis Chaussade, directeur général depuis 2008 et atteint en mai par la limite d’âge statutaire.
Le groupe Suez aura un nouveau patron opérationnel à partir de la mi-mai. Réuni jeudi 20 décembre, le conseil d’administration du numéro 2 mondial des services aux collectivités (eaux, déchets…) a nommé Bertrand Camus, 51 ans, au poste de directeur général. Ingénieur des Ponts et chaussées, il remplacera Jean-Louis Chaussade, patron du groupe depuis 2008, qui sera atteint par la limite d’âge statutaire à l’issue de son mandat. Gérard Mestrallet, président de Suez jusqu’à l’assemblée générale du 14 mai, a soutenu ce choix, qui avait fait au préalable l’unanimité des quatre membres du comité des nominations présidé par Anne Lauvergeon, ex-dirigeante d’Areva. Cette nomination aurait pu être compliquée, voire entravée, par Engie, premier actionnaire de Suez avec 32 % du capital. Il n’en a rien été : le groupe dirigé par Isabelle Kocher semble observer une neutralité bienveillante à l’égard d’une entreprise dont elle vient de décider de rester l’actionnaire de référence. Au moins jusqu’en mai, quand la nouvelle gouvernance sera aux commandes (président et directeur général). Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le groupe Suez ouvre le capital de sa filiale américaine C’est finalement un candidat interne qui a séduit. Et, comme souvent, pas celui qui semblait tenir la corde. Le nom de Marie-Ange Debon, diplômée de HEC et ancienne élève de l’ENA, était le plus cité. La feuille de route de M. Camus, qualifiée de « très ambitieuse » par une source proche du dossier, a davantage séduit que le projet de la patronne des activités en France. Une solide réputation d’industriel M. Camus était aussi plus ancien dans l’entreprise, où il est entré en 1994, et il était précédé d’une solide réputation d’industriel doté d’une bonne expérience de l’international. Deux atouts, au moment où Suez entend se projeter toujours plus sur les marchés étrangers et se renforce sur le segment des gros clients industriels, comme l’illustre le rachat de GE Water en 2017 pour 3,2 milliards d’euros. MM. Mestrallet et Chaussade privilégiaient visiblement une candidature interne, signe qu’une entreprise peut nourrir en son sein des dirigeants capables d’accéder aux plus hautes responsabilités. Les administrateurs de Suez avaient tout de même mandaté un cabinet de chasseurs de têtes pour trouver un candidat à l’extérieur. Ancien numéro 2 bis de Total avec Patrick Pouyanné, finalement choisi en 2014 comme PDG de la compagnie pétrolière au lendemain de la mort accidentelle de Christophe de Margerie, Philippe Boisseau a été approché, sans être retenu. Un nouveau président d’ici à fin février Jérôme Pécresse, patron de la division mondiale des énergies renouvelables de l’américain General Electric, a été lui aussi auditionné. Un bon profil, même s’il ne connaît pas la « maison ». Il a été écarté, notamment en raison des fonctions de son épouse, Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France. Si cette collectivité ne lance pas elle-même d’appels d’offres pour la gestion de l’eau et des déchets, sa proximité avec les syndicats intercommunaux aurait inévitablement suscité soupçons et critiques sur de possibles conflits d’intérêts avec Suez. La nomination de M. Camus n’est qu’une première étape. Reste à trouver le futur président de Suez. Figure historique de l’entreprise, M. Mestrallet quittera en effet ses fonctions le 14 mai, lui aussi atteint par la limite d’âge statutaire. Le nom de son successeur fait déjà l’objet de tractations en coulisses. Il semble qu’Engie ait renoncé à proposer la candidature de son secrétaire général, Pierre Mongin, ancien PDG de la RATP, tout en rejetant celle de M. Chaussade, aux relations sans aménité avec Mme Kocher. Lire aussi Engie ne veut pas lancer d’OPA sur Suez Si les dirigeants d’Engie ne veulent pas monter dans Suez, voire envisagent de céder tout ou partie des 32 % qu’ils possèdent, on les voit mal faire la pluie et le beau temps dans une société où ils ont peu de pouvoirs. Mais ils peuvent légitimement défendre un certain équilibre en proposant un candidat externe à Suez. Il sera désigné d’ici à la fin février, quand seront connues les résolutions soumises à l’assemblée générale du 14 mai.
20/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/20/bertrand-camus-va-devenir-patron-du-groupe-suez_5400297_3234.html
« CumEx Files » : les députés rendent le bouclier anti-fraude quasi inopérant
Sous le prétexte d’un nettoyage juridique, la majorité a vidé le dispositif censé récupérer les milliards de l’évasion fiscale.
La France va-t-elle récupérer dès l’an prochain les milliards envolés à cause de l’évasion fiscale autour des dividendes, révélée en octobre par Le Monde avec l’enquête « CumEx Files » ? Le dispositif antifraude adopté le 17 décembre par l’Assemblée nationale pourrait le laisser penser. Les députés ont introduit dans le code des impôts un nouvel article extrêmement technique, qui vise à empêcher, à partir de juillet 2019, les montages baptisés « CumCum » dans le jargon financier. Ceux-ci consistent à mettre momentanément à l’abri des actions auprès d’entités exonérées d’impôts, au moment précis du versement du dividende, pour échapper aux taxes. Le gouvernement a soutenu l’initiative, par la voix du ministre de l’économie, Bruno Le Maire, qui a jugé « inacceptables » ces montages fiscaux. Les failles du bouclier Mais l’examen de ce dispositif antifraude conduit par Le Monde avec un fin connaisseur de ce type d’opérations boursières montre qu’il risque d’être totalement inopérant. En réécrivant le texte proposé initialement par le Sénat, les députés de La République en marche (LRM) et du MoDem l’ont vidé de sa substance. Le nouveau bouclier anti-« CumCum » cible uniquement les opérations les plus simples, dans lesquelles un investisseur étranger signe un contrat avec un établissement français pour lui céder temporairement ses actions, afin d’échapper à l’impôt français sur les dividendes. C’est ce qu’on appelle le « prêt-emprunt de titres » ou les « contrats à terme ferme ». Des opérations légèrement plus complexes permettent de contourner ce bouclier Or, des opérations légèrement plus complexes permettent de contourner ce bouclier. En utilisant des instruments financiers au nom barbare comme le « total return swap », les deux complices peuvent échanger des actions en toute discrétion sur les marchés, sans conclure formellement de contrats de cession des actions. Et échapper ainsi à la nouvelle loi. Les établissements financiers désireux de continuer le « CumCum » pourraient donc opportunément se rabattre sur ce type de solution pour pouvoir poursuivre cette activité lucrative, qui fait perdre plusieurs milliards d’euros au contribuable français chaque année, selon l’estimation du Monde, validée par les pouvoirs publics. Le bouclier instauré par le Parlement contient une autre faille de taille : il est limité aux opérations financières qui surviennent dans les quatre-vingt-dix jours autour de la date de versement du dividende. C’était a priori une bonne idée, puisque c’est dans cette période que sont créés les montages « CumCum ». Problème : trop imprécis, le texte des députés pourrait là encore être contourné par des traders ingénieux. Il leur suffirait de dissocier le moment de la conclusion des contrats de cession de celui de la « livraison » effective des actions. Ainsi, les titres seraient toujours échangés autour de la date du versement du dividende, mais sous le régime d’un contrat conclu avant la période de quatre-vingt-dix jours, et donc hors d’atteinte du bouclier antifraude. La réforme adoptée par la majorité laisse enfin de côté un pan entier des abus révélés par les « CumEx Files » : les montages dits « externes », qui profitent des conventions fiscales favorables signées par la France avec les pays comme les Emirats arabes unis, où les dividendes sont imposés à zéro. Un texte rédigé dans l’urgence Pourquoi l’Assemblée a-t-elle ainsi affaibli le dispositif initial du Sénat ? « Pour le rendre plus opérationnel, car il entrait en contradiction avec le droit européen », soutient le député MoDem Jean-Noël Barrot, l’un des artisans de ce ripolinage. Or, si le troisième point posait effectivement problème, ce n’était pas le cas des deux premières failles introduites par les députés. Qui donc leur a soufflé l’idée de restreindre aussi drastiquement la portée du bouclier antifraude ? « La rédaction est faite en lien avec les services de l’administration [Bercy] et du rapporteur du budget [Joël Giraud] », explique M. Barrot, qui reconnaît qu’« elle ne convient peut-être pas, parce qu’elle a été faite dans une période chargée et compliquée où on était très sollicités ». A peine deux mois se sont en effet écoulés entre les révélations du Monde et le vote du texte. « Je pense que c’est déjà très bien », se félicite l’élu des Yvelines, qui renvoie la balle vers la future mission d’information parlementaire sur les « CumEx Files », « qui permettra de vérifier que les instruments dont on dispose fonctionnent et d’aboutir à des dispositifs bétons ». En attendant, les orfèvres du « CumCum » peuvent dormir sur leurs deux oreilles.
20/12/2018
les-decodeurs
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/12/20/cumex-files-les-deputes-ont-vide-le-dispositif-anti-fraude-de-sa-substance_5400294_4355770.html
Dans les Pyrénées, les ourses Claverina et Sorita ont parcouru plus de 500 km chacune
Une vidéo de l’un des deux plantigrades relâchés à l’automne dans le Béarn vient d’être publiée. Les animaux sont en bonne santé et dorment maintenant au fond de leur tanière dans un lieu gardé secret.
Cette capture d’écran d’une vidéo montre le lâcher d’une des deux ourses slovènes dans les montagnes du Béarn, le 5 octobre. ONCFS / AFP Deux yeux scintillants dans la nuit, un collier émetteur accroché au cou et un épais pelage qui va se frotter contre un arbre. Le tout en noir et blanc dans une courte séquence. L’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), a mis en ligne, mardi 18 décembre, une première vidéo de l’ourse Sorita, captée fin octobre sur le territoire béarnais du parc national des Pyrénées. « La bonne santé des deux ourses est attestée par l’impressionnante distance couverte depuis leur lâcher. Claverina et Sorita ont parcouru pas moins de 530 kilomètres chacune, depuis début octobre », affirme l’ONCFS dans un communiqué. Claverina, « l’héritière ou celle qui détient les clés » en béarnais, était, le 4 octobre, la première ourse à fouler le sol béarnais depuis une décennie. Sorita, sa petite sœur, l’avait rejointe le lendemain, hélitreuillée elle aussi sous les yeux furieux de certains opposants, bergers ou élus, des vallées d’Aspe et d’Ossau. A la mi-octobre, plusieurs dizaines de chasseurs et d’éleveurs étaient montés vers la cabane de Sesques, dans la zone où Sorita avait été lâchée lors d’une battue pour faire peur au plantigrade. Ces deux derniers lâchers ont pour objet de préserver une population considérée en danger dans les Pyrénées. Une population ursine estimée à 43 animaux en 2018, après des réintroductions en 1996 et 2006, mais « pas encore complètement viable et nécessitant un renforcement sur le plan quantitatif et qualitatif, c’est-à-dire leur qualité génétique », déclarait à l’automne Nicolas Alban, chef de projet pour cette opération. « Dans une colère froide » Claverina et Sorita, qui n’auraient que 5 ans – et non pas 7 à 8 ans comme estimé précédemment –, pèsent donc autour de 150 kg, et ont fait quelques incursions sur le territoire voisin espagnol, en Aragon et en Navarre. C’est lors de ces déplacements que Claverina a sans doute tué à plusieurs reprises des ovins d’élevage, en novembre, mais pas sur le sol français à ce jour. « Il est impossible d’affirmer dès maintenant de manière certaine que les ourses attendent ou non des petits », l’ONCFS David Gaillardon, chargé de communication à l’ONCFS, a confirmé au Monde que les deux ourses étaient désormais entrées en période d’hibernation, sur un lieu et dans des tanières gardés secrets. Pour Olivier Maurin, coprésident de la Fédération transpyrénéenne des éleveurs de montagne, opposée à la présence de l’ours, « il vaut mieux s’amuser de cette vidéo. Depuis octobre, elles ont dû faire bien des dégâts. Cela dit, nous sommes désormais dans une colère froide et nous préparons des actions et plaintes pour le printemps. »
20/12/2018
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/20/dans-les-pyrenees-les-ourses-claverina-et-sorita-ont-parcouru-plus-de-500-km-chacune_5400293_3244.html
Comment les anneaux de Saturne vont disparaître
Les célèbres anneaux de cette planète vont disparaître d’ici à 300 millions d’années, selon une étude de la NASA.
Les anneaux de Saturne vont disparaître. Selon une nouvelle étude de la NASA, cette disparition est prévue d’ici à 300 millions d’années. Une modélisation accélérée du phénomène a été publiée en même temps que cette étude. Ce phénomène a plusieurs causes. Il y a d’une part le rayonnement ultraviolet du Soleil et d’autre part, le contact du plasma produit par les collisions avec des micrométéorites. Résultat, les poussières de glace qui composent majoritairement les anneaux se retrouvent chargées électriquement. Elles sont alors captées par le champ magnétique de Saturne. Et la gravité de la planète les ramène vers elle. Finalement, elles sont vaporisées dans son atmosphère. Les spécialistes surnomment ce phénomène « la pluie des anneaux » sur Saturne. « La quantité d’eau des anneaux déversée sur la planète pourrait remplir l’équivalent d’une piscine olympique toutes les trente minutes », précise l’étude de la NASA. Cela a pour effet un grignotement progressif de ces célèbres structures circulaires du Système solaire. L’autre question posée dans cette étude est de savoir d’où proviennent les anneaux de Saturne. Ces structures circulaires n’ont pas toujours existé. La planète Saturne est née il y a plus de 4 milliards d’années sans anneaux. Ils se seraient formés il y a « à peine » 100 millions d’années, selon les auteurs de l’étude. Une des principales théories suppose qu’ils résulteraient de collisions d’astres. Sous le choc, ils ont été réduits en débris qui se seraient fixés en orbite autour de Saturne. Les anneaux de Saturne sont emblématiques du Système solaire. Mais ils ne sont pas uniques en leur genre. On en retrouve autour d’autres planètes, par exemple Uranus ou l’exoplanète J1407b.
20/12/2018
sciences
https://www.lemonde.fr/sciences/video/2018/12/20/comment-les-anneaux-de-saturne-vont-disparaitre_5400287_1650684.html
Plan « gilets jaunes » : l’exécutif gagné par la fébrilité
Le gouvernement enchaîne les cafouillages qui embrouillent sa communication sur ses mesures sociales.
Le premier ministre, Edouard Philippe, et le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, à la sortie du conseil des ministres du 19 décembre. Julien Muguet pour « Le Monde C’est un détail mais qui en dit long sur l’état d’urgence qui règne au sein de l’exécutif. Mercredi 19 décembre, le conseil des ministres a été exceptionnellement avancé d’une heure, obligeant les membres du gouvernement à se présenter dès 9 heures à l’Elysée. Objectif : avoir le temps d’examiner le projet de loi sur les mesures économiques et sociales décidées par Emmanuel Macron pour répondre à la crise des « gilets jaunes », et transmettre le texte au Parlement dans un délai permettant son adoption avant la fin de la semaine. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Gilets jaunes » : Macron lance son « grand débat » dans la douleur « Nous avons tenu ce conseil des ministres à un horaire plus matinal que nous le faisons habituellement (…) afin que nous puissions déposer sur le bureau de l’Assemblée nationale avant midi ce projet de loi », a expliqué le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, assurant que les dispositions ont été élaborées « en un temps record ». « Préparer un texte aussi intense dans un délai aussi rapide est un exercice délicat », a lui-même reconnu le premier ministre, Edouard Philippe, mercredi devant les députés. Emmanuel Macron l’avait pourtant promis : avec lui, fini les improvisations vécues lors du mandat de François Hollande. Son quinquennat serait « efficace ». Mais s’il a réussi à tenir ce cap durant les dix-huit premiers mois de son mandat, enquillant les réformes au pas de charge, le chef de l’Etat semble aujourd’hui gagné par les mêmes maux que ceux qu’il reprochait à son prédécesseur. « On sent de la fébrilité à tous les étages, tout est décidé à la dernière minute, ça ne nous ressemble pas », s’agace un conseiller de l’exécutif. « A l’ancienne » Dernier exemple en date, le gouvernement a annoncé, mardi 18 décembre, la suppression de plusieurs mesures destinées à compenser la hausse de la taxe carbone… avant d’y renoncer deux heures plus tard. « Il nous apparaissait normal de supprimer les compensations à la hausse de la taxe carbone à partir du moment où cette hausse était elle-même supprimée. Mais au vu de l’incompréhension suscitée par cette annonce, le premier ministre a préféré revenir aux mesures initiales », explique un conseiller de Matignon, qui évoque un « choix politique » préféré à un « choix budgétaire ». Autre signe d’atermoiement, l’annonce par Bruno Le Maire, le 10 décembre, qu’il n’était pas question pour le gouvernement de revenir sur la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) décidée au début du quinquennat. « Vous allez être déçu », avait répondu le ministre de l’économie à un auditeur de RTL qui l’interrogeait sur cette possibilité. Las, quelques heures plus tard, le chef de l’Etat annonçait qu’il remontait à 2 000 euros de revenu le seuil d’exonération de la hausse de la CSG pour les retraités, excluant de fait 5 millions de pensionnés supplémentaires de la mesure. « Le Maire a voulu la jouer à l’ancienne, obtenir un arbitrage dans les médias. Il a joué, il a perdu », s’amuse un poids lourd de la majorité, oubliant les dégâts en matière de cohérence gouvernementale.
20/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/20/plan-gilets-jaunes-l-executif-gagne-par-la-febrilite_5400284_823448.html
Brexit : huit questions sur la possibilité d’un second référendum
Si cette option pourrait permettre de sortir de l’impasse politique, elle créerait aussi d’autres interrogations.
L’hypothèse aurait encore paru farfelue voilà un an. Mais le Royaume-Uni cherche plus que jamais un moyen de sortir de la crise politique dans laquelle l’a plongé le Brexit, dont le mode d’application divise profondément députés et citoyens britanniques. Et face à cette impasse, l’idée d’un nouveau référendum paraît soudain moins fantaisiste. Un choix qui serait pour autant loin de régler tous les atermoiements de Londres. Pourquoi l’hypothèse d’un second référendum surgit-elle ? La première ministre, Theresa May, a répété à de nombreuses reprises son opposition à l’idée d’un nouveau référendum. Une position réaffirmée lundi 17 décembre au Parlement par la cheffe de file des conservateurs : « Un autre vote provoquerait des dommages irréparables à l’intégrité de notre politique, parce qu’il dirait aux millions qui ont cru en notre démocratie que notre démocratie ne fonctionne pas. » L’idée d’un second référendum ne convainc d’ailleurs pas plus le leader travailliste, Jeremy Corbyn – qui se garde pourtant de l’assumer comme tel afin d’éviter de diviser son parti. Des dizaines de députés travaillistes se sont en effet publiquement exprimés en faveur d’un nouveau vote. Force est de constater que le plan défendu par Theresa May, et officiellement approuvé le 14 novembre, fait l’objet d’une vive contestation parlementaire, au point que l’exécutif a préféré reporter le vote d’approbation des députés – seuls 230 des 639 élus défendaient l’accord. La possibilité d’un Brexit sans accord, un « no deal », n’est pas non plus du goût de Westminster, bien qu’une partie des députés europhobes milite pour cette option. Dès lors, l’idée d’un second référendum commence à être étudiée de près par l’exécutif, apparaissant comme une manière de sortir de l’impasse par le haut. Il s’agirait que le peuple tranche le dilemme que les députés ne parviennent pas à résoudre. Selon les dernières enquêtes, 45 % des Britanniques souhaitent un second référendum, 35 % y sont opposés et 20 % sans opinion. Qui milite pour un nouveau référendum ? Une partie des députés travaillistes, mais aussi des députés conservateurs, le Parti libéral-démocrate, centriste, ainsi que les indépendantistes écossais du Parti national écossais (SNP), opposés au Brexit. Lundi, le chef des libéraux-démocrates, Vince Cable, la codirigeante des Verts, Caroline Lucas, le député travailliste Chuka Umunna et Justine Greening, députée du Parti conservateur, ont remis une pétition d’un million de signatures en ce sens au 10, Downing street. Deux anciens premiers ministres ont également apporté leur soutien à cette option : Tony Blair et John Major. Tout comme le maire de Londres, Sadiq Khan. Enfin, des collectifs citoyens tentent de peser dans le débat, notamment le groupe People’s Vote, qui milite depuis deux ans pour l’organisation d’un second référendum. Manifestation de militants favorables et opposés au Brexit, le 18 décembre, devant le Parlement britannique. ALASTAIR GRANT / AP Quels sont leurs arguments ? Les partisans d’un second référendum estiment que lors du premier vote, le 23 juin 2016, les électeurs n’étaient pas suffisamment informés des conséquences de leur choix, voire mal informés – les pro-Brexit n’ayant pas hésité à diffuser des informations s’étant révélées fausses. Deux ans plus tard, les principales difficultés logistiques soulevées par le Brexit ont été mises au jour, et notamment l’épineux sujet de la frontière irlandaise. Les partisans du référendum estiment qu’un retour aux urnes est indispensable pour confirmer ou infirmer le processus engagé. L’ancien premier ministre Tony Blair a ainsi osé une comparaison : la période écoulée depuis le premier vote s’apparenterait, selon lui, à « des fiançailles », dont il s’agit désormais de dire si oui ou non elles se transformeront en mariage. Qui peut décider ? Cela serait au gouvernement d’en faire la proposition, afin que le Parlement puisse lui donner un cadre légal lors d’un vote. Les députés devraient ainsi en valider la tenue, mais aussi s’accorder sur la question posée aux électeurs. Quelle pourrait être la question posée lors de ce référendum ? C’est une grande partie du problème : il n’y a pas vraiment de consensus à ce sujet. La première option serait de revoter dans les mêmes termes que lors du référendum initial. Mais beaucoup estiment qu’il s’agirait de reproduire la même erreur, puisque l’option du « Leave » ne définit pas selon quelles modalités se ferait cette séparation. Beaucoup défendent donc l’idée d’un référendum « pour » ou « contre » le plan négocié par Theresa May avec l’Union européenne, seul processus concret actuellement sur la table, aujourd’hui bloqué par les divisions politiques. Mais là encore, si le plan est rejeté, que faire ensuite ? Le groupe People’s Vote estime pour sa part que la question devrait être : approbation de l’accord de Theresa May ou abandon du Brexit. Mais ce choix très orienté exclut de fait tout scénario d’un Brexit pour ceux qui ne sont pas convaincus par le plan du gouvernement, ce qui promet déjà une levée de boucliers. D’autres plaident donc pour un entre-deux, avec trois options sur le bulletin : l’accord négocié par la première ministre, un Brexit avec un « no deal », ou pas de Brexit du tout et le Royaume-Uni reste finalement dans l’Union européenne. Une option qui pourrait être également organisée en deux tours, à savoir un premier scrutin sur le seul plan dit « de Chequers » (du nom de la résidence de villégiature des premiers ministres britanniques), et en cas de rejet, un deuxième vote « Leave » or « Remain ». Dans quel délai pourrait être organisé ce second référendum ? C’est une autre inconnue du scénario. La date du scrutin pourrait être fixée ultérieurement au vote parlementaire le validant. Selon les politologues britanniques, il faut au moins vingt-deux semaines pour organiser un tel vote. Mais la Grande-Bretagne est censée quitter officiellement l’Union européenne le 29 mars. Cela laisse donc un calendrier très serré, à moins que cette date butoir soit suspendue par une extension de l’article 50, c’est-à-dire la notification de sortie officielle de l’UE. Mais se posera dès lors la question de la tenue au Royaume-Uni des élections européennes, qui débutent le 23 mai : si le pays est encore membre de l’UE à cette date, doit-il élire des députés européens ? Quel pourrait être le résultat et pourrait-il vraiment résoudre la crise actuelle ? Selon les dernières enquêtes, si la question de 2016 leur était reposée, 55 % des Britanniques voteraient pour rester (« Remain »), contre 48,1 % en 2016. Un résultat qui peut notamment s’expliquer par les changements démographiques dans le pays depuis le premier référendum. Les partisans du Brexit étant plus âgés, leur population diminuerait de 260 000 par an quand les anti-Brexit, plus jeunes et désormais en âge de voter, voient leur nombre grossir de 235 000 chaque année, selon une analyse publiée par Yougov. Mais selon l’institut de sondage, l’intitulé de la question aura une grande influence sur l’issue du scrutin. Le « Remain » gagnerait ainsi à 62 % contre le seul deal de Mme May, mais moins largement si l’hypothèse du « no deal » était introduite. Or, si le « Remain » l’emportait, il faudrait qu’il soit plébiscité pour être légitimé, sous peine de précipiter le pays dans des divisions encore plus violentes. Et empirer, finalement, la situation d’un Royaume-Uni qui n’en a assurément pas besoin. Notre sélection d’articles pour comprendre le Brexit Six mois après le refus du Parlement britannique de ratifier l’accord entre Theresa May et l’Union européenne sur le Brexit, un nouvel accord a été négocié par le premier ministre Boris Johnson. Ce texte, qui reprend l’essentiel de l’« accord de retrait » en novembre 2018, supprime notamment l’existence du « backstop » à la frontière entre les deux Irlandes. En voici les points-clés. Comprendre : le schéma qui résume les options possibles (daté d’octobre 2019), alors que les parlementaires doivent valider l’accord de Boris Johnson pour officialiser le divorce entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Retrouvez tous nos articles sur le Brexit dans cette rubrique.
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/brexit-huit-questions-sur-la-possibilite-d-un-second-referendum_5400281_3210.html
Eric Woerth : « Macron a eu un temps de retard, dans le diagnostic et la résolution »
Le président LR de la commission des finances de l’Assemblée estime que le président de la République n’a pas su humaniser ses réformes.
Eric Woerth, à l’Assemblée, le 19 décembre. Julien Muguet pour "Le Monde" Alors que le projet de loi de finances 2019 devait être définitivement adopté, jeudi 20 décembre, Eric Woerth, le président (LR) de la commission des finances de l’Assemblée nationale, analyse la réponse du gouvernement à la crise des « gilets jaunes » et dessine la stratégie à suivre pour son parti. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Face à la crise des « gilets jaunes », Laurent Wauquiez contraint à un exercice d’équilibriste Vous avez qualifié d’« embrouillamini » le débat budgétaire, percuté par la crise des « gilets jaunes ». Cette dernière aurait-elle pu être évitée ? C’est toujours facile à dire. Mais son intensité aurait pu être réduite si le gouvernement nous avait un peu écoutés : dès l’examen du budget 2018, il y a un an, nous avions proposé une trajectoire carbone moins brutale. En réponse à Gérald Darmanin et à son petit livret du pouvoir d’achat, j’avais dressé le profil-type du Français « ennemi de la République » : retraité, rural, qui roule au diesel, fume et se chauffe au fuel. En octobre dernier, avant qu’il y ait le moindre « gilet jaune », nous avions aussi proposé le gel de la hausse des taxes carburant en première lecture du budget, car nous l’estimions insupportable pour les Français. Mais nous étions inaudibles. Pour le gouvernement, la situation est le résultat de décennies d’erreurs politiques. Partagez-vous ce constat ? Non. Elle repose d’abord sur de la colère vis-à-vis d’Emmanuel Macron lui-même, de ses méthodes, de ses « petites phrases ». Cela a créé une crise sociale qui, à son tour, a entraîné une crise politique. Et le président a toujours eu un temps de retard, à la fois dans le diagnostic et dans la résolution de cette crise. Les réformes auxquelles les Français sont vraiment sensibles, ce sont les taxes, les services publics et la protection sociale, car elles changent le quotidien des gens. Et ça ne remonte pas à trente ans ! Tous les pays ont des différences de niveaux de vie. La France est plutôt correctement placée en la matière, même si c’est difficile à dire au milieu d’un rond-point. Il y a toujours eu des gens en bas de l’échelle sociale, mais on vivait avec, car cela se doublait d’une protection, d’une attention vis-à-vis de cette population. Et parce que ces populations ne se sentaient pas condamnées au smic ou aux minima sociaux. Et tout d’un coup un président arrive, qui rompt avec ces idées-là, et fait passer les gens de la catégorie des oubliés à celle des méprisés. Il a échoué car il n’a pas su humaniser ses réformes. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Gilets jaunes » : le monde politique abasourdi face à une crise inédite C’est donc surtout une question de ressenti ?
20/12/2018
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/20/eric-woerth-macron-a-eu-un-temps-de-retard-dans-le-diagnostic-et-la-resolution_5400280_823448.html
Le Sénat veut mettre un terme aux fantasmes sur les « fichés S »
Un rapport de la commission des lois sénatoriale rejette toute idée d’expulsion ou d’internement des personnes signalées.
Vouloir faire œuvre de pédagogie sur les fiches « S » une semaine après l’attentat de Strasbourg qui a fait cinq morts n’est pas chose aisée. C’est pourtant l’ambition du sénateur du Cher François Pillet, rattaché au groupe Les Républicains (LR), qui a piloté le groupe de travail de la commission des lois du Sénat sur « l’amélioration de l’efficacité des fiches “S” ». Ses conclusions livrées mercredi 19 décembre prennent le contre-pied de ce que nombre de responsables politiques de droite et d’extrême droite proposent pour renforcer l’arsenal de prévention du terrorisme. Le rapport du groupe de travail souligne d’abord avec force que « les fiches “S” ont été assimilées à tort à un marqueur de radicalisation et de dangerosité ». En raison de nombreuses confusions et approximations véhiculées, « elles ont fait l’objet au cours des dernières années d’une focalisation politico-médiatique délétère, tant pour l’efficacité de l’outil que pour l’action des services de renseignement ». C’est d’ailleurs au lendemain de l’attaque perpétrée dans le quartier de l’Opéra en mai par Khamzat Azimov, Français d’origine Tchétchène, « fiché S », que la commission des lois du Sénat et son président, Philippe Bas (LR), avaient créé ce groupe de travail. Remontée d’information Au 11 décembre, le fichier des personnes recherchées, qui contient des signalements sur environ 580 000 personnes, comportait 29 973 personnes faisant l’objet d’une fiche « S ». Les sénateurs rappellent qu’il s’agit d’un outil destiné à faire remonter de l’information, mais aucunement à inscrire une personne parmi les objectifs des services de renseignement. Les services de police ou de contrôle aux frontières sont ainsi censés collecter de l’information, par exemple avec qui voyage la personne et sa destination, lorsque au hasard d’un contrôle routier ou dans un aéroport le clignotant d’une fiche « S » s’allume. Il existe onze catégories de fiches « S » qui ne correspondent pas à des niveaux de dangerosité, mais renvoient à des conduites à tenir. Seules 12 % de ces fiches exigent de « contacter immédiatement le service demandeur pour instructions ». « La fiche “S” est donc un moyen d’investigation à faible coût humain », lit-on dans ce rapport, « et pas un outil de suivi de la radicalisation ». C’est le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste créée en 2015 qui remplit cet office. Sur les 20 560 individus figurant au 1er décembre dans ce fichier, 9 762 font d’ailleurs l’objet d’une fiche dite « active » affectée à un service de renseignement. Il existe bien sûr des croisements puisque environ les deux tiers des personnes faisant l’objet d’une fiche « S » sont fichées pour radicalisation ou en raison de leurs relations avec des personnes radicalisées.
20/12/2018
police-justice
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/20/le-senat-veut-mettre-un-terme-aux-fantasmes-sur-les-fiches-s_5400274_1653578.html
Policiers : avec la menace d’une mobilisation « illimitée », les syndicats obtiennent une hausse salariale
Après une journée de mobilisation, les syndicats et le ministre de l’intérieur ont trouvé un accord.
La victoire est nette et sans bavure. Après à peine une journée de protestation, mercredi 19 décembre, les policiers ont obtenu de la part de Christophe Castaner une augmentation substantielle des salaires, la principale de leurs revendications. Les trois grands syndicats – Unité SGP-Police-FO, Alliance Police nationale et UNSA Police – sont ressortis du bureau ministériel tard dans la nuit avec, en main, un accord signé. Celui-ci prévoit une revalorisation de la rémunération nette de 120 euros (pour un gardien de la paix) à 150 euros (pour les gradés comme les brigadiers-chefs ou les majors). Dans le détail, il s’agira de hausses successives sur un an de l’allocation de maîtrise, ainsi que de l’indemnité de sujétion spéciale police. Les corps supérieurs des officiers et des commissaires ne bénéficieront pas de cette mesure. Par ailleurs, le ministre de l’intérieur a accepté d’ouvrir une phase de discussion en janvier pour régler le problème latent des millions d’heures supplémentaires effectuées par les policiers et non payées par l’Etat. Un problème de « stock » mais aussi de « flux », tant les missions de sécurisation des manifestations des « gilets jaunes » et l’attentat terroriste de Strasbourg ont mobilisé de manière exceptionnelle les troupes ces dernières semaines, provoquant un alourdissement de la dette. Lire aussi Conditions de travail et salaires, les policiers sont en colère « Reconnaissance » Les négociations à venir porteront également sur les conditions de travail et l’état des équipements, souvent vétustes. Dans un communiqué publié jeudi 20 décembre, Christophe Castaner et son secrétaire d’Etat, Laurent Nuñez, estiment que cet accord « constitue aussi et surtout la base d’un projet de transformation en profondeur de la police nationale, qui portera sur l’organisation du temps de travail, les heures supplémentaires et la fidélisation fonctionnelle ou territoriale des policiers ». En contrepartie de l’augmentation des salaires, les gardiens de la paix et gradés ne toucheront pas la prime exceptionnelle de fin d’année de 300 euros promise par Emmanuel Macron. Seuls les agents administratifs, les employés de préfecture et les personnels techniques et scientifiques mobilisés sur la crise des « gilets jaunes » y auront droit. L’ensemble de ces mesures n’a pas été officiellement chiffré par le gouvernement mais cela vient s’ajouter aux 10 milliards d’euros déjà lâchés depuis le début de la crise des « gilets jaunes ». « On est très satisfaits, enfin le travail des gradés et gardiens a été pris en considération, avec cette revalorisation salariale et cette hausse du pouvoir d’achat des policiers », s’est félicité Yves Lefebvre, patron du syndicat Unité SGP-Police-FO, à la sortie des négociations. « C’est la reconnaissance de l’Etat, c’est la reconnaissance matérielle que nous avions exigée », a exulté de son côté Jean-Claude Delage, secrétaire national d’Alliance Police nationale. La négociation s’est jouée en deux temps. A l’issue du premier tour de concertation, mardi soir, certaines avancées avaient été entérinées, mais l’écart entre les positions des uns et des autres demeurait considérable et invitait plutôt au pessimisme. C’est donc avec une certaine surprise que les syndicats ont accueilli le revirement ministériel le lendemain. Aux dires des participants, la discussion a été âpre. « On est passé à un millimètre du crash », confie une source présente. Après une interruption de séance lors de laquelle le ministre de l’intérieur est allé à l’arbitrage du côté de l’exécutif, un protocole d’accord donnant satisfaction aux syndicats a été finalement signé sur le fil. Risques de revendications sectorielles La journée de mobilisation des policiers sur le terrain, mercredi, qui n’avait d’ailleurs pas donné de résultats spectaculaires, n’explique pas à elle seule ces concessions. Quelques antennes de police avaient tourné au ralenti ça et là. Un zèle du contrôle dans les aéroports avait notamment engorgé les files d’attente à Orly et à Roissy. Mais c’est davantage la perspective d’une mobilisation « illimitée », promise par les syndicats, qui a fait pencher la balance. Alors que la crise des « gilets jaunes » est encore loin d’être réglée, le ministre de l’intérieur ne pouvait se permettre d’avoir des forces de l’ordre récalcitrantes. La légitimité des syndicats, qui sont sortis renforcés des élections professionnelles avec une participation massive (quelque 85 % dans la police), a également joué un rôle, alors que les corps intermédiaires avaient plutôt été mis à distance place Beauvau, depuis l’arrivée de M. Castaner. Au risque de voir maintenant les revendications sectorielles se multiplier. Car en éteignant aussi rapidement l’incendie dans la police nationale, le gouvernement ouvre la porte à des contestations dans d’autres secteurs tendus de la fonction publique, qui n’ont pas connu de revalorisation de longue date. Dans l’immédiat, Christophe Castaner et Laurent Nuñez devraient faire baisser la pression au sein des rangs policiers. L’engagement des syndicats à participer aux discussions sur la réorganisation de la police ouvre un espace de concertation sociale. Seul le Mouvement des policiers en colère (MPC), créé en 2016 après l’attaque au cocktail Molotov d’une voiture de patrouille à Viry-Châtillon (Essonne), appelle à poursuivre la mobilisation. Ce collectif très actif sur Facebook, mais dont la représentativité est difficile à cerner, dénonce la signature du protocole et devait organiser un rassemblement jeudi 20 décembre devant un commissariat du 8e arrondissement à Paris, au mot d’ordre des « gyros bleus ». Précédents dans la fonction publique Dans l’histoire récente de la fonction publique, les revalorisations salariales ont rarement atteint l’ampleur de celles accordées, dans la nuit du mercredi 19 au jeudi 20 décembre, par le ministère de l’intérieur. Fin 2001, sous le gouvernement Jospin, des accords avaient été conclus en faveur des gendarmes et des policiers qui prévoyaient des hausses significatives (hausse de 1 000 francs par mois pour les premiers et de 600 à 716 francs pour les gardiens de la paix). De gros coups de pouce ont également été donnés à l’occasion du rapprochement de la direction générale des impôts (DGI) et de la direction générale de la comptabilité publique (DGCP), sous le quinquennat Sarkozy : une « prime de fusion » de 350 euros par an a été versée aux agents en 2012, puis elle a été pérennisée et portée à 500 euros, selon un rapport sénatorial. Les personnels de l’aviation civile (contrôleurs aériens notamment) ont obtenu, à intervalles réguliers, des majorations substantielles : elles se sont traduites, de 1994 à 2000, par une hausse de 43 % des dépenses de rémunération, selon la Cour des comptes.
20/12/2018
police-justice
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/20/les-policiers-obtiennent-une-revalorisation-salariale_5400272_1653578.html
Face au risque d’un Brexit sans accord, les entreprises britanniques font des stocks
Alors que le Royaume-Uni met en réserve 3 500 soldats, les entreprises anticipent l’engorgement du commerce à la frontière en cas de sortie brutale de l’UE.
A Leighton Buzzard, dans les entrepôts de Miniclipper, le 3 décembre. SIMON DAWSON / REUTERS Matt Hancock, le ministre britannique de la santé, a provoqué une certaine émotion, lundi 17 décembre, en déclarant sur la BBC qu’il était devenu « le premier acheteur au monde de réfrigérateurs ». Objectif : stocker les médicaments importés au Royaume-Uni, afin d’avoir suffisamment de réserves en cas de Brexit sans accord. En fait, le ministère de la santé a simplement lancé un appel d’offres pour réserver de la place dans des entrepôts réfrigérés. Il va ainsi pouvoir fournir des lieux de stockage aux compagnies pharmaceutiques, auxquelles il a ordonné d’avoir six semaines de stocks de plus qu’en temps normal. A cent jours de l’entrée en vigueur du Brexit, le Royaume-Uni en est donc à envisager très sérieusement une pénurie de médicaments. Mardi, le gouvernement a présenté son plan pour faire face à l’hypothèse d’un Brexit sans accord. Il a débloqué un budget de 2 milliards de livres (2,2 milliards d’euros), portant à plus de 6 milliards de livres l’argent dépensé à la préparation de la sortie de l’Union européenne. Sa principale inquiétude concerne l’engorgement du commerce à la frontière. S’il faut introduire des contrôles systématiques à la douane, les files de camions vont rapidement s’allonger et l’approvisionnement du marché britannique sera beaucoup plus lent. Pour anticiper le pire, l’Etat britannique met en réserve 3 500 soldats, prêts à intervenir. Il va aussi embaucher 3 000 douaniers et personnels administratifs pour aider à l’examen des déclarations des entreprises. Enfin, il va réserver de la place sur les ferrys, pour faire passer en priorité des biens qui viendraient à manquer. « Etagères combles » Pas vraiment de quoi rassurer les entreprises. Dans une rare déclaration commune, les cinq principaux groupes patronaux britanniques ont fait connaître leur colère face à l’incapacité des députés à se mettre d’accord : « Les entreprises regardent avec horreur les responsables politiques qui se livrent à des querelles entre factions au lieu de prendre des mesures concrètes. » Article réservé à nos abonnés Lire aussi A 100 jours du Brexit, l’Europe se prépare à un éventuel « no deal » A défaut d’y voir clair, les sociétés sont désormais forcées de prendre des décisions. Depuis quelques mois, elles ont commencé à réserver de la place dans les entrepôts du pays. « Sinon, le risque est qu’elles se trouvent en rupture de stock et incapables de livrer leurs produits », explique Marcos Hart, de Wincanton, l’une des plus grosses entreprises de logistique du Royaume-Uni, propriétaire de plus de 200 entrepôts. Pourtant, beaucoup de sociétés hésitent : « Le risque inverse est qu’elles louent de la place dans un entrepôt pour finalement ne pas en avoir besoin s’il y a un accord sur le Brexit », continue M. Hart.
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/face-au-risque-d-un-brexit-sans-accord-les-entreprises-commencent-a-augmenter-leurs-stocks_5400269_3210.html
La justice américaine a ouvert une enquête sur Airbus
Selon les informations du « Monde », l’entreprise pourrait payer une amende de plusieurs milliards de dollars ou, catastrophe ultime, être condamnée au pénal.
La révélation d’une procédure judiciaire américaine faisait chuter le titre d’Airbus de 5,89 %, jeudi midi, à la Bourse de Paris. SEVERIN MILLET C’est une terrible secousse pour Airbus, déjà fragilisé par plusieurs enquêtes anticorruption. Selon les informations du Monde, l’entreprise est sous le coup d’une nouvelle procédure judiciaire lancée, cette fois, par le parquet américain, le redouté Department of Justice (DoJ), bras armé des Etats-Unis dans la poursuite, sur leur territoire et à l’étranger, des entreprises soupçonnées de pratiques inappropriées. Les françaises Total, Technip, Alcatel, Société générale et Alstom figurent à son tableau de chasse, condamnées à des amendes qui ont atteint des centaines de millions d’euros. Fidèle à ses méthodes, le DoJ a attendu plusieurs mois avant de prévenir le groupe aéronautique européen des investigations engagées officiellement fin 2017, comme nous l’avons découvert. L’annonce ne lui a été faite qu’à la fin de cet été. Les autorités américaines ont-elles voulu gagner du temps pour rassembler des pièces à charge ? Si l’on met de côté plusieurs affaires anciennes toujours à l’instruction, à l’instar du « Kazakhgate » – une affaire portant sur des soupçons de corruption en marge de contrats commerciaux entre la France et le Kazakhstan –, Airbus était mobilisé en priorité depuis deux ans pour répondre aux questions, à Londres, du Serious Fraud Office (SFO), l’agence britannique anticorruption et, à Paris, du parquet national financier (PNF). Les deux instances coopèrent sur le même dossier : au printemps 2016, le géant de l’aéronautique (66,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 129 500 salariés en 2017) a de lui-même confessé avoir oublié de mentionner la présence d’intermédiaires lors de la négociation de plusieurs gros contrats à l’étranger, en Asie notamment. Airbus réagit aux informations du « Monde » Quelques heures après la révélation par Le Monde de la procédure judiciaire américaine impliquant Airbus, l’avionneur européen a annoncé dans un communiqué coopérer « avec les autorités américaines [le Department of Justice] en étroite coordination » avec le Parquet national financier (PNF) en France et le Serious Fraud Office (SFO) en Grande-Bretagne. « C’est un fait connu qu’Airbus fait l’objet d’une enquête, et il n’est donc pas en mesure de commenter les procédures en cours », explique le communiqué. C’est la première fois qu’Airbus commente publiquement l’existence de ces procédures, dont la révélation a fait chuter le titre du groupe de 5,89 % à 82,06 euros, jeudi midi, à la Bourse de Paris. Le recours à des « business partners » (intermédiaires) est autorisé par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), à condition que ces tiers soient identifiés et leur rémunération traçable. Soupçonnant des malversations, le SFO avait, le premier, ouvert une enquête en juillet 2016, suivi par le PNF, pour « corruption d’agents publics à l’étranger, blanchiment, abus de biens sociaux, faux et usage de faux ». L’amende fixée pourrait, selon nos informations, atteindre un montant record de plusieurs milliards d’euros Depuis que les Etats-Unis ont notifié leur entrée en lice dans la bataille judiciaire, c’est le branle-bas de combat à Toulouse, le siège opérationnel du constructeur. Pendant longtemps, la direction et ses conseils juridiques avaient espéré que le DoJ renonce à franchir le pas, rassuré de voir le SFO – où l’institution américaine dispose d’un officier de liaison – participer à la procédure. Cette vieille complicité entre Londres et Washington a d’ailleurs été couronnée en juin par l’arrivée à la tête de l’agence britannique de l’Anglo-Américaine Lisa Osofsky, une ancienne du FBI, qui fut également procureur fédéral aux Etats-Unis. Mais visiblement ces liens profonds n’ont pas suffi et le ciel s’obscurcit pour les cadres d’Airbus qui voyagent outre-Atlantique et dont les ordinateurs et les téléphones portables sont désormais susceptibles d’être saisis par les autorités.
20/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/20/la-justice-americaine-a-ouvert-une-enquete-sur-airbus_5400268_3234.html
Elections en RDC : le difficile retour de Martin Fayulu à Kinshasa
L’opposant n’a pas pu tenir son meeting dans la capitale, tandis que les scrutins prévus le 23 décembre ont été reportés d’une semaine.
Un partisan de Martin Fayulu, candidat à l’élection présidentielle en RDC, après le tir de gaz lacrymogènes par la police, à Kinshasa, le 19 décembre 2018. JOHN WESSELS / AFP Le soleil descend sur Kinshasa, la capitale de la République démocratique du Congo (RDC). A une cinquantaine de kilomètres du centre-ville agité, une fermière arrose sa petite parcelle bordant le goudron, tandis qu’un employé agricole laboure un champ sur son tracteur. Sereins et imperturbables. Sur la route qui les sépare, des gamins hâves, des étudiants diplômés mais chômeurs et des militants politiques venus à pied ou en moto des quartiers populeux défient depuis des heures les escadrons mobiles de la police qui bloquent le passage. Quelques pierres sont jetées et des slogans hostiles au président Joseph Kabila psalmodiés. Il est 16 h 30 dans la commune de Nsele, ce mercredi 19 décembre, et le périlleux jeu du chat et de la souris prend fin avec des gaz lacrymogènes et des tirs d’intimidation. La petite centaine de jeunes gens déguerpissent sur la route et à travers champs. La fermière reste indifférente. Le laboureur s’est évaporé. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En RDC, les élections de tous les dangers De l’autre côté du glacis improvisé par la police, une file de voitures et de camions chargés de récoltes s’impatientent. Ils viennent de la province voisine du Bandundu, l’un des greniers de Kinshasa, mégapole où presque tout ce qui est consommé par les privilégiés est importé. Mais ce mercredi, la frontière formée par les véhicules de la police au niveau de la petite mosquée décatie « Aboubakar le véridique » semble infranchissable. Pris au piège, l’opposant Martin Fayulu, le héros des jeunes réprimés de l’autre côté, poireaute en plein soleil à l’arrière d’un 4x4, la gorge irritée par les gaz lacrymogènes, entouré de militants bouillonnants et de quelques policiers. « Pourquoi on me bloque ? Ils ont peur d’avoir plus de 3 millions de gens dans la rue. Ils veulent arrêter le phénomène Fayulu mais personne ne peut l’arrêter, car c’est un phénomène divin et je n’ai pas peur de mourir », dit le candidat à l’élection présidentielle que ses partisans ont désigné comme le « soldat du peuple ». A ses côtés, sur la banquette arrière, un homme allongé et en chaussettes. C’est Adolphe Muzito, un ancien premier ministre (2008-2012) passé à l’opposition. Enfants des rues enivrés Ensemble, ils pensaient faire une entrée en grande pompe dans la capitale pour célébrer la fin de leur tournée de campagne dans ce pays vaste comme l’Europe occidentale, accompagnés de militants et d’enfants des rues enivrés de liqueurs bachiques qui ne votent pas mais s’amusent à rêver d’une vie meilleure. Ils s’y voyaient déjà : saluer une foule grandissante massée le long du boulevard Lumumba, avant de faire leur entrée sur la place Sainte-Thérèse, dans la commune déshéritée de Ndjili, car le stade Tata-Raphaël leur a été refusé. Là-bas, deux scènes ont été montées sur le sable chaud et des artistes font danser depuis la fin de la matinée des jeunes du quartier, dans l’attente de leur candidat qui ne viendra pas. La plupart ne savent pas encore que le gouverneur de la capitale, André Kimbuta, a argué de risques sécuritaires pour décréter dans la matinée « la suspension sur toute l’étendue de la capitale des activités de campagne électorale » pour les candidats à la présidentielle. Les concerts se poursuivent, mais la perspective d’un meeting s’obscurcit. Lire aussi Elections en RDC : la campagne suspendue à Kinshasa Immobilisé sur cette route bordée de champs et, au loin, de collines majestueuses, Martin Fayulu s’agace. D’autant que deux grandes affiches de campagne lui gâchent ce paysage champêtre et narguent le malheureux. Celle d’André Kimbuta, justement, et une autre d’Emmanuel Ramazani Shadary, le visage souriant mais crispé, un peu trop « photoshopé ». Ce dernier, bien que visé par des sanctions de l’Union européenne, est le dauphin du président sortant, Joseph Kabila, qui lui apporte tout son soutien politique, logistique et financier tout en songeant à son propre retour en 2023. Pagode chinoise en ruine Cette scène surréaliste se déroule dans un paysage chargé de symboles de l’histoire récente de la RDC, qui s’entremêlent dans une atmosphère laissant craindre des violences électorales. Ces terres fertiles où courent les jeunes pour éviter les balles de la police et qui bordent la route rectiligne sur laquelle est bloqué l’opposant, appartenaient autrefois à Mobutu Sese Seko. Le pays s’appelait alors Zaïre et ces champs étaient un pan de son domaine où il fit ériger une pagode chinoise, aujourd’hui en ruine, et initia le parc agro-industriel de la Nsele, qui fut un fiasco onéreux. C’est là aussi que, le 24 avril 1990, le dictateur prononça, la larme à l’œil, le discours historique ouvrant la voie au multipartisme qui permet aujourd’hui l’existence de près de 600 partis politiques et ces élections présidentielle, législatives et provinciales censées se tenir le 23 décembre mais dont le report au 30 décembre a finalement été annoncé, jeudi, par la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Enfin, c’est par cette route que déboulèrent en mai 1997 des troupes rebelles venues de l’est et menées par Laurent-Désiré Kabila, le tombeur de Mobutu, soutenu par le Rwanda et l’Ouganda, qui sera assassiné quatre ans plus tard. Son fils Joseph lui succède. L’actuel chef de l’Etat – dont le dernier mandat s’est terminé il y a deux ans, selon la Constitution – est coutumier des lieux. Il y a aménagé l’une de ses immenses fermes, traversée par la rivière Nsele, où il aime se retrancher pour travailler, recevoir et chevaucher des motos, l’une de ses passions. « C’est la barbarie » La nuit est tombée et Martin Fayulu ne sait plus quoi espérer entre les policiers, ses militants brailleurs et la mosquée du « véridique ». « Ce sont des méthodes surannées. C’est la barbarie », peste cet ancien cadre de la société pétrolière américaine ExxonMobil qui s’est jeté dans l’arène politique congolaise il y a une quinzaine d’années. A 62 ans, il s’est lancé dans la course à la présidentielle sans trop y croire, aux côtés des ténors de l’opposition dont les divisions et les invalidations de candidatures ont fini par le servir. L’enthousiasme qu’il suscite agace la majorité présidentielle, qui méprise ce député à la tête de son propre petit parti. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La ville de Beni cristallise tous les drames de la RDC Ce mercredi soir, peu avant 20 heures, il finit par solliciter l’aide de la mission des Nations unies en RDC, la Monusco, qui entame des démarches auprès des autorités. La situation finit par se débloquer. Martin Fayulu accepte de renoncer à son meeting et de rentrer chez lui, escorté par la police. Un violent orage s’abat sur Kinshasa et certains y voient un signe. Le 4x4 du candidat cahote sur les routes défoncées par les pluies et creusées de terribles ornières, acclamé par quelques grappes de sympathisants et d’errants dans les ruelles dangereuses de la capitale la nuit. Martin Fayulu est rentré à Kinshasa.
20/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/20/elections-en-rdc-le-difficile-retour-de-martin-fayulu-a-kinshasa_5400261_3212.html
Un classement sinon rien ?
De Shanghaï au « Financial Times », les classements mondiaux de l’enseignement supérieur sont devenus des instruments de « soft power ». Comment l’« exception française » peut-elle y trouver sa place ?
ISABEL ESPANOL « Cours, camarade, le vieux monde est derrière toi », proclamait-on en Mai 68. Cinquante ans après, la course continue, et elle est désormais planétaire. Les classements internationaux des universités – et des grandes écoles en France – sont devenus, à la manière des Jeux olympiques, des instruments de soft power. La Chine, entrée dans la compétition en 2003 avec son « classement de Shanghaï », l’a bien compris. Depuis cette date, tous les établissements de France et de Navarre scrutent avec autant d’angoisse que d’espoir sa publication au cœur de l’été. En pestant contre les critères d’« excellence » retenus pas les experts chinois… mais en cherchant comment monter dans le peloton de tête, occupé par les universités anglo-saxonnes. Au pays de la « méritocratie républicaine » – où le concours est roi et l’ascenseur social en panne – le classement de Shanghaï a poussé à la concentration des universités en Comue (Communauté d’universités et d’établissements), pour doter l’Hexagone de campus géants et attirants sur la scène mondiale, comparables à Cambridge, Harvard, Oxford, Stanford… Au prix, peut-être, d’une « parkerisation » – uniformisation – de l’enseignement supérieur hexagonal. Lire aussi Le classement U-Multirank 2018 distingue les universités françaises au 3e rang mondial Mais la France, c’est aussi ces universités de proximité, en régions, qui ouvrent des chemins de traverse. Les campus de Besançon, Chambéry, Poitiers, Reims, Rennes offrent aux étudiants une qualité de vie qui n’est pas un critère de choix à négliger. « Notre objectif n’est pas de talonner les universités en tête de classement, mais de donner une chance à tous de réussir », assure Sabine Mallet, vice-présidente de l’université d’Angers. Pédagogie, suivi, accompagnement des étudiants sont difficilement mesurables dans les palmarès. Faut-il les rejeter pour autant ? Dans l’enseignement supérieur, l’heure est à la concurrence internationale. Pour ou contre les classements, telle ne serait donc plus la question. « Même leurs détracteurs reviennent à une analyse des critères et s’interrogent sur la stratégie nécessaire pour gagner quelques places », tranche Timothée Toury, enseignant-chercheur et ancien directeur de la formation et de la pédagogie à l’Université de technologie de Troyes. Qu’on le veuille ou non, l’offre répond à une demande, celle de ceux qui sont en questionnement sur leur avenir. « Les classements ne font que dévoiler un secret de Polichinelle, dit Claudia Senik, professeure à l’Ecole d’économie de Paris. Sans eux, seuls les plus informés seraient capables d’identifier les meilleures prépas, les meilleures écoles et universités, tandis que les autres feraient leur choix dans l’obscurité. »
20/12/2018
campus
https://www.lemonde.fr/campus/article/2018/12/20/un-classement-sinon-rien_5400255_4401467.html
Douze migrants retrouvés morts au large des côtes méridionales de l’Espagne
L’embarcation était recherchée entre l’Andalousie et le nord du Maroc. Trente-trois personnes ont été retrouvées vivantes, toutes en provenance d’Afrique subsaharienne.
Leur embarcation était recherchée depuis deux jours. Douze migrants sont morts en tentant de gagner les côtes du sud de l’Espagne dans une embarcation précaire et douze sont portés disparus tandis qu’une trentaine ont été retrouvés vivants, a-t-on appris jeudi 20 décembre auprès des garde-côtes et de la Croix Rouge. Après un signalement de la part d’un navire de l’armée, à onze miles nautiques au sud du phare de Sabinal près d’Almeria, les garde-côtes sont intervenus, retrouvant « onze personnes mortes à bord et 33 en vie », toutes provenant d’Afrique subsaharienne, a indiqué une porte-parole des garde-côtes. L’embarcation était recherchée dans la mer d’Alboran, entre l’Andalousie et le nord du Maroc. Les migrants ont été ramenés dans le port d’Almería vers 4 h 45 jeudi matin et l’un d’eux est mort par la suite, a appris l’Agence France-Presse auprès de l’hôpital où il avait été pris en charge. Cela porte à 12 le nombre de morts, dix hommes et deux femmes dont une enceinte, qui s’ajoutent à douze personnes encore disparues, a déclaré à une représentante de la Croix Rouge à Almeria. Trois autres embarcations sont recherchées dans la zone avec à bord de chacune d’elles entre 50 et 55 migrants. L’Espagne est devenue cet été la première porte d’entrée des migrants illégaux en Europe devant la Grèce et l’Italie. Selon les derniers chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), actualisés au 16 décembre, plus de 55 000 migrants sont arrivés en Espagne par la mer depuis le 1er janvier et 744 sont morts dans la traversée, plus de trois fois plus qu’en 2017. Les arrivées par la mer en Espagne représentent la moitié du total en Europe (environ 111 000 selon l’OIM). La route la plus dangereuse reste celle de la Méditerranée centrale avec 1 306 morts au large des côtes italiennes depuis le début de l’année. Au total, 2 217 personnes sont mortes ou disparues cette année en tentant de traverser la Méditerranée vers l’Europe, toujours selon l’OIM. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Sous la pression de l’Union européenne, le Maroc fait la chasse aux migrants
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/onze-migrants-retrouves-morts-au-large-des-cotes-meridionales-de-l-espagne_5400250_3210.html
Uber devra payer une amende de 400 000 euros pour n’avoir pas assez « sécurisé les données » de ses usagers
La CNIL juge que les manquements de l’entreprise ont permis le piratage massif des informations relatives à 57 millions clients en octobre 2016.
Uber a été victime d’un piratage en 2016. Les données de 57 millions d’utilisateurs avaient alors été dérobées. Kirsty Wigglesworth / AP La Commission nationale de l’informatique et des libertés a annoncé jeudi 20 décembre une sanction de 400 000 euros à l’égard d’Uber. Le gendarme français des données personnelles estime que l’entreprise de VTC a « insuffisamment sécurisé les données » de ses utilisateurs, ce qui a permis à des pirates de dérober des informations relatives à 57 millions d’entre eux en octobre 2016. Il avait alors fallu plus d’un an à Uber pour rendre public ce piratage, qui concernait les noms, adresses e-mails et numéros de téléphone de ses utilisateurs. Environ 1,4 million d’entre eux étaient « situés sur le territoire français », précise la commission. Le G29, qui réunit les CNIL européennes, avait alors lancé une enquête. « Les attaquants ont tout d’abord réussi à accéder à des identifiants stockés en clair sur la plate-forme collaborative de développement “GitHub”, explique la CNIL. Ils ont ensuite utilisé ces identifiants pour accéder à distance à un serveur sur lequel sont stockées les données. » La Commission estime que « cette attaque n’aurait pu aboutir si certaines mesures élémentaires en matière de sécurité avaient été mises en place ». Lire aussi Le piratage massif d’Uber en sept questions Uber déjà sanctionné Uber aurait ainsi pu imposer à ses ingénieurs de se connecter à GitHub « grâce à une mesure d’authentification forte » comme la double authentification – un système couramment utilisé demandant un mot de passe, mais aussi un code secret envoyé sur un téléphone par exemple. De plus, l’entreprise n’aurait pas dû, explique la CNIL, stocker en clair sur GitHub les identifiants permettant d’accéder au serveur. Enfin, elle estime que les serveurs contenant les données des utilisateurs auraient dû être protégés par « un système de filtrage des adresses IP ». Une adresse IP est l’identifiant unique d’un appareil qui se connecte à Internet. Il est possible de n’en autoriser que certaines à accéder à un serveur. La CNIL souligne que les faits ont eu lieu avant la mise en œuvre en mai du RGPD, qui ne s’applique donc pas dans ce cas. Ce nouveau règlement européen sur les données personnelles rend possible des sanctions plus lourdes, pouvant aller jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires d’une entreprise. « Nous sommes heureux de clore ce chapitre sur l’incident de données de 2016 », a déclaré Uber dans un e-mail transmis au Monde. L’entreprise dit avoir depuis « apporté plusieurs améliorations techniques à la sécurité de [ses] systèmes » et « d’importants changements dans [son] management afin d’assurer la transparence aux autorités régulatrices et aux clients ». « Nous tirons les leçons de nos erreurs et poursuivons notre engagement à gagner chaque jour la confiance de nos utilisateurs », ajoute encore la société. Ce n’est pas la première fois qu’Uber est condamné dans le cadre de ce piratage. En novembre, la CNIL néerlandaise lui avait infligé 600 000 euros d’amende pour ne pas avoir signalé assez vite la violation de données. Son équivalent britannique avait de son côté sanctionné Uber à hauteur de 385 000 livres (426 000 euros) pour des faits similaires à ceux reprochés par la CNIL.
20/12/2018
pixels
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/12/20/protection-des-donnees-la-cnil-inflige-400-000-euros-d-amende-a-uber-apres-son-piratage_5400247_4408996.html
Israël appelle l’ONU à dénoncer les tunnels du Hezbollah libanais
L’annonce du retrait américain de Syrie est un coup dur pour l’Etat hébreu, décidé à contrer les ambitions iraniennes dans la région.
Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, à la Knesset, le Parlement israélien, à Jérusalem, le 19 décembre. AMIR COHEN / REUTERS L’étroitesse des liens entre l’administration Trump et Israël n’est pas à toute épreuve. Dans un communiqué sec publié mercredi 19 décembre en fin de journée, Benyamin Nétanyahou a précisé qu’il était averti depuis lundi du retrait américain à venir de Syrie. Il s’est gardé de tout autre commentaire désobligeant. Mais en privé, les experts israéliens sont inquiets. Cette décision prive le pays de la présence dissuasive, psychologiquement importante, des soldats américains. Elle ressemble à leurs yeux à un abandon, alors qu’ils espéraient, au contraire, une plus grande implication de Washington sur le terrain pour contrer les ambitions iraniennes au Moyen Orient, notamment en Syrie et au Liban. L’annonce du retrait coïncide avec l’opération « Bouclier du nord », conduite depuis quinze jours par l’armée israélienne à la frontière avec le Liban. Son objectif est de neutraliser les tunnels d’attaque frontaliers attribués au Hezbollah, qui garde le silence. Benyamin Nétanyahou a décidé de mettre la pression sur Beyrouth. Lors d’une conférence de presse mercredi, le premier ministre a mis en cause, à différents titres, la milice chiite, l’armée et les autorités libanaises, ainsi que l’Iran, parrain politique et financier du Hezbollah, auquel Téhéran verserait « un milliard de dollars par an » selon l’état-major israélien. M. Nétanyahou a pris la parole avant une réunion sur le sujet du Conseil de sécurité de l’ONU. Trois tunnels confirmés Depuis le début de « Bouclier du nord », l’armée a mis au jour quatre tunnels d’attaque creusés par le Hezbollah. Dans un communiqué publié le 17 décembre, la Finul, la force intérimaire de l’ONU au Liban, a précisé que ses experts avaient confirmé l’existence de ces quatre tunnels, dont deux franchissaient la Ligne bleue de démarcation, longue de 120 km, en violation de la résolution 1701 du Conseil de sécurité, qui date de 2006. A grand renfort de vidéos, de conférences de presse et de visites organisées pour les diplomates occidentaux, le gouvernement israélien s’est assuré d’une attention internationale depuis quinze jours. Selon M. Nétanyahou, la milice chiite, « outil de l’Iran », commet « un double crime de guerre. Elle vise les civils israéliens, tout en se dissimulant derrière les civils libanais. » Le chef du gouvernement israélien met en cause l’armée libanaise. Son inaction actuelle « signifie qu’ils sont incapables ou réticents, ou les deux, à agir sur ce sujet ».
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/israel-appelle-l-onu-a-denoncer-les-tunnels-du-hezbollah-et-a-mettre-le-liban-sous-pression_5400245_3210.html
« Le Monde des lecteurs » - Société : attentat de Strasbourg
Daniel Schmitt rappelle la pensée Aldous Huxley qui a dit ceci : « La philosophie nous enseigne à douter de ce qui nous paraît évident. La propagande, au contraire, nous enseigne à accepter pour évident ce dont il serait raisonnable de douter. ».
« « Douce nuit, sainte nuit… » Chacun de nous a au moins déjà entendu une fois cette chanson de Noël. Créée en 1818 en Autriche, elle est pour moi la plus belle des chansons de Noël. Il s’y dégage une sérénité et une paix intérieure qui font monter en moi beaucoup d’émotions et d’espoir pour le monde à venir.» Hans-Peter Merten/robertharding / Photononstop / Hans-Peter Merten/robertharding / Photononstop Sur le blog « Le Monde des lecteurs », les lectrices et lecteurs du « Monde » peuvent commenter l’actualité. Vous pouvez contacter la rédaction par courriel : courrier-des-lecteurs@lemonde.fr. Attentat de Strasbourg. « Douce nuit, sainte nuit… » Chacun de nous a au moins déjà entendu une fois cette chanson de Noël. Créée en 1818 en Autriche, elle est pour moi la plus belle des chansons de Noël. Il s’y dégage une sérénité et une paix intérieure qui font monter en moi beaucoup d’émotions et d’espoir pour le monde à venir. Mais pourquoi faut-il que ce moment soit entaché par un assassin qui sème la panique auprès de gens qui ne demandaient qu’à passer un bon moment ensemble, qu’ils soient croyants ou non-croyants ? Pourquoi cet attentat au marché de Noël de Strasbourg ? J’essaie de comprendre mais je n’y arrive pas. A chaque fois on parle d’islamistes radicalisés, moi je vois surtout des délinquants de droit commun soi-disant radicalisés en prison. J’ai cherché la définition du mot radicalisation sur internet et en termes de religion, c’est prôner le retour aux racines et aux origines de la religion en question. C’est quoi les racines de l’Islam ? J’ai lu, toujours sur internet ce qui suit : « En Islam, l’amour de son prochain est une des conditions essentielles de la croyance : le Messager de Dieu a dit : « Vous n’entrerez au Paradis que lorsque vous aurez cru et vous ne croirez que lorsque vous vous aimerez les uns les autres. Voulez-vous que je vous indique une chose capable de vous faire aimer les uns les autres ? Saluez-vous entre vous » Hadîth rapporté par At-tirmithî, selon Abû Hurayra » (Un hadith ou hadîth est une communication orale du prophète Mahomet). Là je me dis « ceux qui ont été radicalisés ont dû mal comprendre le message ». Nouvelle interrogation ? Sont-ils vraiment des musulmans ou alors plutôt des délinquants manipulés ? Je crois que les mots utilisés pour les décrire sont impropres à leur situation. Au lieu d’islamistes, on devrait parler de voyous ou de criminels, au lieu de radicalisation, on devrait parler de manipulation ou d’endoctrinement à la haine de l’autre. Ceci pour éviter un amalgame créant la méfiance et la peur de l’autre. C’est la pire des choses et la porte ouverte à l’intolérance, l’intégrisme et au final au despotisme. Aldous Huxley a dit ceci : « La philosophie nous enseigne à douter de ce qui nous paraît évident. La propagande, au contraire, nous enseigne à accepter pour évident ce dont il serait raisonnable de douter. ». Joyeux Noël à tous. Daniel Schmitt, Reitwiller (Bas-Rhin)
20/12/2018
blog-mediateur
https://www.lemonde.fr/blog-mediateur/article/2018/12/20/le-monde-des-lecteurs-societe-attentat-de-strasbourg_5400241_5334984.html
L’eldorado des nanoparticules d’or
Suivant leur forme, les nanoparticules de ce métal précieux ont des propriétés optiques et chimiques différentes, et promettent donc des applications très variées.
Des nanoparticules d’or étaient déjà utilisées dès l’Antiquité : la fameuse coupe romaine de Lycurgue (IVᵉ siècle), qui passe du rouge au vert suivant l’éclairage, en est l’illustration la plus connue. En fonction de leur forme, les nanoparticules ont des propriétés optiques, chimiques et une compatibilité dans le corps humain différentes, ce qui ouvre des champs de recherche très variés. En particulier dans le domaine de la thérapie contre le cancer… Explications des physiciens Olivier Pluchery, directeur du groupement de recherche Or-Nano (CNRS) et Magali Gary-Bobo, chercheuse à l’Institut des biomolécules Max-Mousseron à Montpellier, dans cette vidéo proposée en partenariat avec Universcience.tv. Partage Partager sur Facebook Partager sur Facebook Envoyer par e-mail Envoyer par e-mail Partager sur Messenger Partager sur Messenger Partager sur Whatsapp Partager sur Whatsapp Plus d’options Plus d’options Plus d’options Twitter Linkedin Copier le lien
20/12/2018
sciences
https://www.lemonde.fr/sciences/video/2018/12/20/l-eldorado-des-nanoparticules-d-or_5400238_1650684.html
« Le Monde des lecteurs » - Société : pauvre en Suisse
Natacha Salagnac témoigne « Les Suisses pauvres existent. Ils se taisent. Ils ont été ainsi éduqués qu’ils n’ont jamais parlé argent. Ils ont travaillé toute leur vie (55 heures par semaine dans les hôpitaux en 1964 !). Ils ont été floués. »
« Vous souriez de ces Suisses pauvres («comprenez gagnant moins de 2000 francs suisses par mois»). Sachez que oui, il y a des pauvres en Suisse, des femmes seules, des vieux, des travailleurs sans qualités spécifiques.» Christof Sonderegger/Sime / Photononstop Sur le blog « Le Monde des lecteurs », les lectrices et lecteurs du « Monde » peuvent commenter l’actualité. Vous pouvez contacter la rédaction par courriel : courrier-des-lecteurs@lemonde.fr. Réflexions suite à l’article « Le drôle de voyage d’un Anglais en Europe », « Le Monde », 16-17 décembre 18, d’Alain Constant Monsieur, J’apprécie depuis des années vos articles et votre style, mais laissez-moi vous donner aujourd’hui les impressions (pas neutres du tout) d’une vieille Helvète ayant trouvé refuge (économique) en France. Vous souriez de ces Suisses pauvres (« comprenez gagnant moins de 2000 francs suisses par mois »). Sachez que oui, il y a des pauvres en Suisse, des femmes seules, des vieux, des travailleurs sans qualités spécifiques. Je fais partie des deux premières catégories. Ne m’enviez pas ma retraite de 2 200 CHF (1 853 euros au cours du jour). Elle devait se partager entre mon assurance maladie-accident (base obligatoire) à 534 francs par mois, et si les cantons vous octroient un droit de prestation complémentaire, il faut accéder à ce droit, et le loyer d’une chambre ou d’un studio entre Genève et Lausanne coûtant au minimum 700 CHF, et plutôt 1 200 pour un logement correct. Le prix des produits alimentaires de base est en moyenne deux fois plus cher. Pour exemple : la baguette que je paie un euro dans le Midi (soit 1 CHF 19) coûte en tout cas 2 francs suisses. Les impôts fédéraux, cantonaux, communaux vous taxent. Peu. Mais essayez de donner encore le 10 % de ces « revenus » ! Sans parler du prix des journaux ou des livres, du cinéma (minimum de 14 euros la place), bref, ces vieux nantis de Suisse dont vous vous gaussez sont des pauvres. Pas des miséreux, certes. Ils ont sous leurs yeux Le Grand Paysage, le Lac (Le Léman donc, il n’y a que les Américains qui affirment que c’est le Lac de Genève). Ils regardent passer les trains qu’ils ne prendront plus : le trajet entre Genève et Zurich coûte plus cher que l’aller-retour Nîmes Genève. Bref, les Suisses pauvres existent. Ils se taisent. Ils ont été ainsi éduqués qu’ils n’ont jamais parlé argent. Ils ont travaillé toute leur vie (55 heures par semaine dans les hôpitaux en 1964 !). Ils ont été floués. Je vous remercie de lire ce message d’une Suissesse de « septante » ans qui ne pouvait survivre dans son pays. Natacha Salagnac, Uzès (Gard)
20/12/2018
blog-mediateur
https://www.lemonde.fr/blog-mediateur/article/2018/12/20/le-monde-des-lecteurs-societe-pauvre-en-suisse_5400233_5334984.html
Syrie : un retrait américain déroutant
Editorial. La décision de Donald Trump, au mépris de ses propres conseillers et experts, est un coup dévastateur pour ceux qui ont combattu les djihadistes au côté des Etats-Unis.
Des troupes américaines près de Manbij, au nord de la Syrie, en mars 2017. DELIL SOULEIMAN / AFP Editorial du « Monde ». Donald Trump préfère trancher selon ses instincts plutôt qu’écouter ses conseillers. Il en a administré une nouvelle fois la preuve en décidant, mercredi 19 décembre, de retirer les forces spéciales déployées en Syrie depuis plus de deux ans. Tout ce que son administration compte d’experts du terrorisme djihadiste et du Moyen-Orient plaidait au contraire pour le maintien de cette force de stabilisation, certes dépourvue de tout mandat international, dans un pays devenu la proie des ambitions croisées de la Turquie, de l’Iran et de la Russie. Le président des Etats-Unis a passé outre, fidèle au court-termisme et à l’unilatéralisme qui imprègnent la plupart de ses décisions de politique étrangère. En l’occurrence, l’annonce semble tenir lieu de stratégie. L’organisation Etat islamique est certes très affaiblie et acculée, mais la nouvelle de sa disparition définitive apparaît pour le moins prématurée. Des milliers de combattants peuvent encore alimenter une guérilla de longue haleine et entretenir un brasier destructeur qui ignore les frontières. D’autant que les ressorts de leur capacité à se reconstruire restent intacts, à commencer par la nature du régime syrien, débarrassé désormais de toute forme de pression américaine. Ce régime peut crier aujourd’hui victoire, juché sur les épaules de parrains russe et iranien qui ont désormais les mains libres dans une bonne partie du Levant : le nouvel ordre régional bouscule l’ambition de M. Trump d’y réduire l’influence de l’Iran. Comme le résume au Monde Hassan Mohammed, un haut responsable kurde syrien : « Washington avait fixé plusieurs objectifs à sa présence en Syrie. Non seulement ces objectifs ne sont pas remplis, mais le retrait va dans le sens contraire. » Une trahison pour les forces kurdes Le coup est dévastateur pour ceux qui ont combattu les djihadistes au côté des Etats-Unis. Pour les forces locales à dominante kurde désormais placées sous la menace de la Turquie, ce retrait relève de la trahison pure et simple. Washington peut bien annoncer une « nouvelle phase » de la lutte contre l’organisation Etat islamique, en mentionnant le Sinaï et la Libye, le message est clair : les Etats-Unis de M. Trump n’ont que faire de leurs supplétifs. Comme ils semblent se moquer d’un embrasement qui pourrait nourrir à nouveau les vagues migratoires responsables de la fragilisation de leurs alliés européens. Depuis son élection, M. Trump a eu la chance de ne pas être confronté à une crise internationale d’ampleur. Il s’en est approché dans le dossier de la Corée du Nord, avant d’opter, avec une dose hardie de candeur, pour une ouverture envers Kim Jong-un. L’avenir dira très prochainement si elle a relevé du coup de génie ou de l’incompétence. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Paris s’inquiète du retrait américain de Syrie Mais les leçons que l’on peut tirer dès à présent de la décision sur la Syrie ne peuvent qu’inquiéter dans cette perspective. L’imprévisibilité que revendique le président s’étend à son administration comme une lèpre. La vacuité avérée des chaînes de décision dévalue la parole des interlocuteurs des alliés comme des ennemis de Washington, susceptibles à chaque instant d’être démentis par celui qui est leur commandant en chef. La boussole de « l’Amérique d’abord » elle-même s’affole lorsque le président arbitre contre ce qui fondamentalement relève des intérêts américains. Cette « Amérique d’abord » est une chimère lorsqu’il s’agit des périls les plus menaçants pour l’équilibre du monde comme pour la sécurité des Etats-Unis. Et son timonier ne semble malheureusement capable que d’ajouter le chaos au chaos.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/syrie-un-retrait-americain-deroutant_5400230_3232.html
Quand le capitalisme fabriquait son propre récit
L’historien japonais Koji Yamamoto montre que, dès le XVIIe siècle, les termes du débat sur la responsabilité sociale des entreprises se sont mis en place, rapporte Antoine Reverchon, journaliste au « Monde », dans sa chronique.
Devant la Bourse de Londres, en août 2017. TOLGA AKMEN / AFP Chronique « Recherches ». S’intéresser au « narratif » ou au « story telling » pour mettre en évidence le rôle majeur des représentations et de la fiction dans la dynamique de la réalité matérielle des sociétés humaines n’est plus l’apanage des psychologues, des historiens et des politistes. Les économistes s’y mettent de plus en plus. Ils ont commencé par « les histoires que l’on se raconte à soi-même » pour comprendre les décisions des agents économiques : c’est le « petit singe sur l’épaule » qui murmure à l’oreille du trader, du PDG, du consommateur, mis en évidence par les économistes américains George Akerlof et Robert Shiller (Marchés de dupes : l’économie du mensonge et de la manipulation, Odile Jacob, 2016). D’autres ont élargi cet intérêt pour le récit – littérature, poésie, journaux, théâtre – aux faits économiques, pour mieux en comprendre les évolutions, comme Deirdre McCloskey, auteure de Bourgeois Equality. How Ideas, not Capital or Institutions, Enriched the World (University of Chicago Press, 2016, non traduit), où elle montre comment le renversement positif du jugement moral et de la représentation du rôle des « marchands », au milieu du XVIIIe siècle aux Pays-Bas et en Angleterre, fut le prélude à l’extension foudroyante du capitalisme. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Et pendant ce temps-là… Macron vante la « start-up nation » Koji Yamamoto, professeur d’histoire économique à l’université de Tokyo, est remonté un peu plus haut dans le temps avec son livre Taming Capitalism Before its Triumph (« apprivoiser le capitalisme avant son triomphe », Oxford University Press, 2018, non traduit), qu’il est venu présenter à Paris le 5 décembre. Etudiant la toute première phase de la naissance du capitalisme anglais sous le règne de Charles Ier Stuart (de 1625 à sa décapitation en 1649), il montre comment de riches commerçants anglais, familiarisés avec les opérations financières par la création du Royal Exchange en 1565 (où s’échangent les titres de la dette royale) se regroupent, sur le modèle de la Compagnie des Indes orientales, créée en 1600, pour proposer au roi d’assurer la production, le transport et le commerce de certains produits ou services : en échange de ce monopole, à l’échelle du royaume ou de comtés, ils s’engagent à verser au Trésor royal une redevance fixe. C’est le système des patentes. Bien commun et intérêts privés Ces entrepreneurs vantent leurs projets en affirmant assurer le « bien public » mieux que ne pourrait le faire le roi, tout en finançant le royaume. Mais la littérature de l’époque, les caricatures, les libelles et même des saynètes jouées sur les places des villes, racontent plutôt l’histoire d’escrocs proches du pouvoir qui profitent de la faiblesse royale pour s’octroyer avec avidité des rentes juteuses aux dépens de l’argent public.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/quand-le-capitalisme-fabriquait-son-propre-recit_5400225_3232.html
Le smic mensuel passera à 1 521,22 euros au 1er janvier
La hausse du smic de 1,5 % prendra effet au 1er janvier 2019.
Johnér / Photononstop Le salaire minimal interprofessionnel de croissance (smic) passera à 10,03 euros de l’heure brut à compter du 1er janvier 2019, en hausse de 1,5 %, selon le décret n° 2018-1173 du 19 décembre 2018, publié au Journal officiel jeudi 20 décembre. Le brut mensuel est donc relevé à 1 521,22 euros mensuels sur la base de la durée légale du travail de 35 heures hebdomadaires. Le smic horaire brut s’élevait en 2018 à 9,88 euros, et à 8,82 euros il y a dix ans, en 2009. Ces montants s’appliquent en métropole, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon. En revanche, à Mayotte, le montant du smic brut horaire également augmenté de 1,5 % sera à 7,57 euros à partir du 1er janvier 2019, soit 1 148,12 euros mensuels. Enfin, le minimum garanti s’établit à 3,62 euros, précise le décret.
20/12/2018
emploi
https://www.lemonde.fr/emploi/article/2018/12/20/le-smic-mensuel-passera-a-1-521-22-euros-au-1er-janvier_5400222_1698637.html
« Le Monde des lecteurs » - Société : L’urgence écologiste
Rémy Risser observe : « Il est temps que les femmes et les hommes qui entendent assumer leurs responsabilités écologiques se reprennent et abandonnent aux poubelles de l’histoire ces prétendus partis qui les représentent si mal. Et qu’ils abandonnent par là même toute idée de parti car nulle institution héritée du passé n’est à la hauteur des défis écologiques actuels. »
« le salut de l’humanité ne saurait dépendre d’une classe sociale, ni de celle des pauvres, ni de celle des riches et, d’ailleurs, d’aucune classe intermédiaire comme vient encore de le démontrer la révolte des « gilets jaunes » dont certains se prétendent écologistes mais dont aucun ne manque d’exiger, avant tout autre chose, une part plus importante du gâteau. » D.R Sur le blog « Le Monde des lecteurs », les lectrices et lecteurs du « Monde » peuvent commenter l’actualité. Vous pouvez contacter la rédaction par courriel : courrier-des-lecteurs@lemonde.fr. Les données récentes en matière d’émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) ont souligné l’avantageuse position de la France. Parmi les pays riches, la France est l’un de ceux qui émettent le moins de GES par tête d’habitant et elle appartient au petit groupe de ceux qui ont pu ces dernières années décorréler croissance économique et croissance des émissions de GES. Mais il s’agit d’une situation trompeuse : les GES que nous économisons grâce à nos centrales nucléaires ont pour contrepartie des milliers de tonnes de déchets radioactifs à haute activité. En outre, il n’échappe à personne que nos façons de produire et de consommer n’ont pas changé de façon fondamentale ces dernières années. Enfin, les émissions mondiales de GES sont reparties à la hausse en 2018, y compris en France. Pendant ce temps, que font nos partis écologistes ? Ils continuent à se disputer et à se montrer incapables d’offrir aux électeurs la perspective d’un mouvement uni et pragmatique. S’il est vrai que tout le monde regarde ailleurs pendant que la maison brûle, nos écologistes politiques trouvent plus intéressant, eux, de se chamailler… Il est temps que les femmes et les hommes qui entendent assumer leurs responsabilités écologiques se reprennent et abandonnent aux poubelles de l’histoire ces prétendus partis qui les représentent si mal. Et qu’ils abandonnent par la même toute idée de parti car nulle institution héritée du passé n’est à la hauteur des défis écologiques actuels. Exemplarité L’effort requis est celui de tout habitant de la planète et il est illusoire de penser que l’on pourra, grâce à une institution, fédérer l’ensemble des volontés humaines. Ainsi l’effort doit être avant tout individuel. Et pour ne pas se perdre dans des débats sans fin et être le plus concret possible, il doit se porter sur trois priorités : le logement, les transports, l’alimentation. Les écologistes responsables seront celles et ceux qui porteront toujours devers eux une fiche où sera inscrite, pour l’année écoulée, le ratio des kilowattheures consommés par mètre carré de logement occupé, les tonnes d’équivalent carbone émises en déplacements pour le travail et les loisirs (et la distance parcourue), la part des aliments consommés en provenance de productions respectueuses de l’environnement. L’important est moins l’exactitude des calculs que la pédagogie et l’exemplarité de l’exercice. La tenue d’une telle fiche permettra aux écologistes d’objectiver leurs responsabilités et leurs efforts, année après année. Elle nourrira le dialogue sur les solutions à mettre en œuvre pour améliorer les résultats et susciter, sur une base pragmatique, l’entraide qui facilitera la recherche et la mise en œuvre en commun des solutions. Les débrouillards partageront leur véhicule, les matheux proposeront des tontines pour financer l’isolation des logements des démunis, les gros bras porteront les ballots de laine de verre et les petites mains les poseront, les bricoleurs aideront ceux qui ne disposent pas de panneaux solaires à en installer ; chacune et chacun diminuera sa consommation de protéines animales et augmentera ses achats de fruits et légumes auprès de producteurs engagés dans des modes de production respectueux de l’environnement. Priorité au local Et toutes et tous planteront dans les moindres recoins disponibles ces sympathiques puits de carbone que l’on appelle arbres et dont nous allons tant avoir besoin. Tout cela, et bien d’autres initiatives partagées, peut être mis en œuvre sans parti, sans loi, sans argent public. En comptant sur l’intelligence collective, l’universelle huile de coude et les économies investies, à bon escient, par les individus qui en disposent. Point d’autre organisation n’est requise que le réseau et le plus petit réseau commence là où une oreille et une main se tendent. Le maître mot est : « local ». L’initiative de constituer un réseau est celle d’un individu d’un village ou d’un quartier qui s’adresse à un autre individu du même village ou quartier. Chaque réseau s’étend de bouche-à-oreille et à l’occasion des coups de main échangés. Les réseaux virtuels sont utilisés pour favoriser l’apprentissage et le partage d’expériences, pour alléger la gestion des réseaux d’entraide locale prenant de l’ampleur et pour les articuler entre eux. La fiche évoquée sert de signe de ralliement et, s’il faut des termes pour fédérer, ceux d’« écologistes responsables » pourront convenir. La stratégie est celle de la percolation, c’est-à-dire l’accumulation des petits pas, des efforts individuels ; accumulation qui chemine, qui enfle et qui se répand jusqu’à atteindre un seuil critique au-delà duquel les propriétés du système sont changées. Cette accumulation n’est-elle pas plus intéressante que celle des signes de richesse ? La conviction est que l’effort nécessaire pour changer le système capitaliste est trop important pour être réuni au sein d’une force sociale, d’un gouvernement, d’un accord international. Responsabilité Songeons un instant à toutes les violences produites au quotidien par le système capitaliste – prédation destructive de la Nature, exploitation de l’homme par l’homme, exploitation des femmes par les hommes, exploitation des jeunes par les vieux (dettes et pollutions transmises aux générations futures) ; toutes les violences de l’argent-roi, du fric qui décide de tout, la vie comme la mort, qui tout acquiert, les corps aussi bien que toutes les parties du corps, les consciences comme les opinions et, bien sûr, les biens, tous les biens, des plus essentiels aux plus extravagants – et on saisira l’incommensurable quantité de violence qu’il faudrait mobiliser pour y mettre fin. La crainte est que cette violence ne pourra pas être rassemblée utilement entre des mains de bonne volonté mais, au contraire, qu’elle risque de se déchaîner sans espoir de retour en arrière lorsque le dynamisme aveugle du système capitaliste aura achevé de rendre l’humanité complètement dépendante de modes de vie prédateurs dans un monde devenu complètement artificialisé et exsangue de ressources naturelles. Rendons-nous compte que l’accumulation de biens de toute nature est le rouage essentiel du dynamisme capitaliste auquel adhèrent autant les classes pauvres que les riches. L’affamé veut manger, le pauvre échapper à la misère et le riche veut conserver ou accroître ses richesses. À chacune, à chacun, le capitalisme propose la même réponse efficace : accumuler ! Personne n’y résiste parce que personne n’imagine que l’accumulation puisse avoir un terme. Et, d’ailleurs, pourquoi le système capitaliste entretiendrait-il l’idée que l’accumulation puisse avoir un terme ? Ainsi le salut de l’humanité ne saurait dépendre d’une classe sociale, ni de celle des pauvres, ni de celle des riches et, d’ailleurs, d’aucune classe intermédiaire comme vient encore de le démontrer la révolte des « gilets jaunes » dont certains se prétendent écologistes mais dont aucun ne manque d’exiger, avant tout autre chose, une part plus importante du gâteau. Le salut de l’humanité repose sur la parcelle d’humanité qui n’est pas soumise à la logique de l’accumulation, ce qui se trouve en chaque individu, et sur son partage entre individus responsables. Tout individu qui raisonne son accumulation de biens est un ferment de dissolution du capitalisme. Tout individu qui s’allie à son voisin aux mêmes fins prépare sans violence, sans constitution d’aucun pouvoir ni d’aucune institution, les conditions de la fin du capitalisme. Rémy Risser, Paris, Economiste de l’environnement
20/12/2018
blog-mediateur
https://www.lemonde.fr/blog-mediateur/article/2018/12/20/le-monde-des-lecteurs-societe-l-urgence-ecologiste_5400219_5334984.html
A l’ONU, incertitude autour d’un bras de fer américano-africain
Le texte, qui doit être soumis au vote du Conseil de sécurité, porte sur le principe d’un possible cofinancement par l’ONU d’opérations de paix africaines.
Le Conseil de sécurité de l’ONU, à New York, en mars 2018. SPENCER PLATT / AFP Les pays africains du Conseil de sécurité ont annulé mercredi 19 décembre, pour la deuxième fois en dix jours, la convocation d’un vote destiné à établir « le principe » d’un possible cofinancement par l’ONU d’opérations de paix africaines, en raison de la menace d’un veto américain. Portée par l’Ethiopie, la Guinée équatoriale et la Côte d’Ivoire, le projet de résolution pose « le principe d’un possible versement de contributions des Nations unies, au cas par cas, pour soutenir des opérations de paix menées par l’Union africaine [UA] et autorisées par le Conseil de sécurité ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’ONU renouvelle sa mission en Centrafrique sur fond de tensions entre Paris et Moscou Ce texte prévoit que le financement de l’ONU pourrait atteindre jusqu’à 75 % du coût des opérations concernées, les autres 25 % demeurant à la charge de l’Union africaine. Le projet, qui porte d’une manière plus générale sur les relations entre l’ONU et les organisations régionales africaines, suit depuis le début du mois de décembre un chemin compliqué. Très optimiste sur l’adoption du texte, la présidence ivoirienne du Conseil de sécurité avait le 10 décembre convoqué une réunion pour un vote. Quelques heures plus tard, sous la pression de pays européens, la réunion était annulée, une volte-face rare à l’ONU pour une mise aux voix d’un texte. Depuis le début du mois, les Etats-Unis répètent dans les réunions qu’ils ne sont pas opposés sur le fond au projet, mais qu’ils ont un « problème de timing », selon des diplomates. « Des lignes rouges » Une nouvelle Chambre des représentants, compétente en matière budgétaire, doit entrer en fonction en janvier et l’administration de Donald Trump ne peut s’engager sans son aval sur un éventuel transfert de financement de l’ONU à l’Union africaine, a-t-on précisé de mêmes sources. Mercredi, les trois pays africains du Conseil de sécurité sont revenus à la charge pour « mettre Washington devant ses responsabilités ». Dans le même temps, un compromis offert par les Etats-Unis était rejeté par l’Afrique, évoquant « des lignes rouges ». Peu avant le vote, le scrutin était annulé. « Nous nous donnons encore 36 heures », mais « les choses sont sur la bonne trajectoire », a assuré à l’AFP un diplomate africain sous couvert d’anonymat. Il faut « juste un petit effort de part et d’autre ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’ONU s’inquiète du manque de moyens de la force du G5 Sahel « Le vote a été reporté à vendredi », a confirmé un autre diplomate. En attendant, la menace de veto américain demeure. L’ambassadrice sortante, Nikki Haley, peu présente en décembre au Conseil de sécurité et absente dans la matinée alors que le sujet concernait Israël – l’un de ses sujets de prédilection –, avait prévu mercredi de venir en personne utiliser ce veto en cas de vote, selon des diplomates.
20/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/20/a-l-onu-incertitude-autour-d-un-bras-de-fer-americano-africain_5400214_3212.html
« L’affaire Huawei touche à la rivalité stratégique entre la Chine et les Etats-Unis »
Derrière l’arrestation au Canada de Meng Wanzhou, cadre du géant des télécoms chinois, se dispute l’hégémonie technologique mondiale, explique dans sa chronique Alain Frachon, éditorialiste au « Monde ».
Chronique. Dans la bataille pour l’hégémonie technologique mondiale, qui oppose la Chine aux Etats-Unis, le 1er décembre 2018 restera comme une date symbole – un moment-clé. Ce jour-là, à l’aéroport de Vancouver, au Canada, une Chinoise, sourire discret, allure élancée, est arrêtée à sa descente d’avion. Meng Wanzhou, 46 ans, vient de Hongkong et doit prendre une correspondance pour Mexico. Elle est interpellée à la demande de la justice américaine, qui réclame son extradition. La Chine dénonce une provocation : Meng Wanzhou n’est pas n’importe qui. Fille aînée de Ren Zhengfei, PDG et fondateur de Huawei, joyau de la haute technologie chinoise, Mme Meng appartient à un cercle fermé : l’aristocratie du monde des affaires en Chine, l’élite de l’entrepreneuriat aux caractéristiques chinoises. Elle assure la direction financière de Huawei, sans doute le seul groupe chinois à avoir vraiment une assise mondiale. Elle passe aussi pour être l’héritière de son père à la tête de l’entreprise. Huawei est l’instrument d’une stratégie de conquête et d’influence. Elle rivalise avec les géants de la haute technologie américaine Les Etats-Unis reprochent à Weng Wanzhou d’avoir monté un réseau destiné à contourner les sanctions unilatérales qu’ils ont prises contre l’Iran : Huawei veut continuer à vendre dans ce pays. Mais à Pékin, l’affaire est interprétée bien différemment. On dénonce un coup porté à la Chine dans la course engagée avec les Etats-Unis pour la domination technologique du paysage industriel de l’avenir. Cri de ralliement sur les réseaux sociaux chinois : « C’est une déclaration de guerre. » Les huit pétales rouges de l’enseigne Huawei sont l’un des symboles de la fierté nationale chinoise, l’étendard de la percée technologique du pays. Avec ses 180 000 salariés de par le monde, la firme occupe le haut du pavé de la téléphonie mobile. Elle vend plus de smartphones qu’Apple et développe les plates-formes et les réseaux qui porteront la prochaine révolution technologique – la génération 5G. Lire aussi Télécoms : le groupe chinois Huawei englué dans une sévère crise diplomatique Huawei est l’instrument d’une stratégie de conquête et d’influence. Elle rivalise avec les géants de la haute technologie américaine. Derrière l’épisode Meng Wanzhou « se déroule un combat décisif », écrit dans le New York Times, la journaliste Kara Swisher, l’une des commentatrices les plus percutantes des aventures de la techno-sphère. De quoi s’agit-il ? « De rien de moins qu’une bataille pour l’hégémonie technologique dans le monde de demain, dit-elle. Très spécifiquement, la question est de savoir qui aura le contrôle de l’Internet et qui en déterminera les normes de fonctionnement. »
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/l-affaire-huawei-touche-a-la-rivalite-strategique-entre-la-chine-et-les-etats-unis_5400207_3232.html
Des hackeurs s’infiltrent dans la diplomatie de l’Union européenne
Le piratage de télégrammes de la diplomatie européenne met en évidence les lacunes dans la protection des réseaux de l’Union.
Le Conseil européen, à Bruxelles, le 14 décembre 2018. STEPHANIE LECOCQ / AFP La lecture du New York Times daté du mardi 18 décembre a désarçonné une partie du personnel diplomatique du Service européen d’action extérieure (SEAE), à Bruxelles. Le quotidien révélait le contenu de câbles et de télégrammes, en principe confidentiels, volés grâce à une opération massive de piratage qui aurait duré au moins trois ans. Les hackeurs se sont introduits dans le réseau de correspondance européenne (COREU) de l’Union (UE) et ont pu télécharger des milliers de documents après, semble-t-il, être parvenus à dérober les données et les codes d’accès de diplomates chypriotes. Le COREU est le réseau de communication entre les vingt-huit pays membres de l’UE ainsi que les institutions (Conseil, Commission et SEAE). Il assure un flux régulier d’informations et facilite la coopération en matière de politique étrangère par le biais des chancelleries. Il permettrait aussi une prise de décision rapide en cas de crise. En principe protégé, il véhicule de 25 000 à 30 000 messages par an, qui concernent la politique étrangère et de sécurité (PESC), les conclusions des conseils tenus par les ministres des affaires étrangères, les déclarations, les démarches diplomatiques de l’UE, etc. Informations les plus sensibles Les informations les plus sensibles, celles qui concernent notamment les grandes questions sécuritaires, transitent, elles, par un autre canal, crypté et hautement sécurisé, affirmait, mercredi, un ancien responsable des services de la haute représentante de l’UE pour les affaires étrangères, Federica Mogherini. Les courriers révélés par le New York Times concernent une série de sujets internationaux, comme l’éventuelle relance du programme nucléaire iranien – que les Vingt-Huit tente à tout prix d’empêcher, tandis que le président américain a dénoncé l’accord signé à Vienne en 2015 – les inquiétudes soulevées par l’élection de Donald Trump en 2016 et la mise en œuvre de sa politique, la relation avec la Russie, ou encore les négociations commerciales et la migration. L’un des câbles mentionne des discussions tenues entre des responsables de l’UE et le président Xi Jinping, à Pékin, en juillet. Le dirigeant chinois y compare les manœuvres d’« intimidation » de Donald Trump envers son pays à un « combat de boxe où tous les coups sont permis ». A Bruxelles, des responsables reconnaissent un défaut de prudence des institutions face à la technologie chinoise. Le quotidien américain dit s’être appuyé sur le travail d’Area 1, une société de cybersécurité fondée par d’anciens employés de la NSA, l’agence de renseignement des Etats-Unis chargée, notamment, de la sécurité des systèmes d’information. Ces experts montrent du doigt la Chine : ils n’auraient « aucun doute » quant à l’impli­cation de Pékin. A Bruxelles, des responsables refusant d’être cités ne veulent pas désigner de coupables. Certains reconnaissent toutefois un défaut de prudence des institutions face, notamment, à la technologie chinoise.
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/des-hackeurs-s-infiltrent-dans-la-diplomatie-de-l-union-europeenne_5400204_3210.html
Avec leur départ de Syrie, les Etats-Unis prennent de court leurs alliés et comblent leurs adversaires
Donald Trump a décidé brusquement de mettre fin à la présence des 2 000 forces spéciales, bousculant l’équilibre géopolitique de la région.
DELIL SOULEIMAN / AFP Donald Trump a comblé des adversaires des Etats-Unis et frappé de stupeur certains de leurs alliés, mercredi 19 décembre, en décidant brusquement de mettre fin à la présence des forces spéciales dans le nord-est de la Syrie. Ce retrait pourrait être achevé d’ici un mois et il a déjà commencé, selon un communiqué de la porte-parole de la Maison Blanche, Sarah Sanders, publié dans la matinée, sans toutefois apporter la moindre précision chiffrée. Le président a justifié une décision qui a manifestement pris de court sa propre administration en déclarant de bon matin sur son compte Twitter : « Nous avons vaincu l’Etat islamique [EI] en Syrie, ma seule raison d’y être pendant la présidence Trump. » « Nous avons gagné. (...) Il est temps que nos troupes rentrent à la maison. Nos garçons, nos jeunes femmes, nos hommes, ils rentrent tous, et ils rentrent maintenant », a-t-il ensuite confirmé dans une vidéo, publiée dans la soirée. Peu convaincu de longue date de l’intérêt de s’investir militairement sur place, le président des Etats-Unis a toujours circonscrit les ambitions américaines à la lutte contre le groupe djihadiste. Alors que celle-ci a enregistré, le 14 décembre, un nouveau succès avec la prise, par les milices kurdes, de Hajin – dernière localité aux mains de l’EI, près de la frontière avec l’Irak, dans la vallée de l’Euphrate –, le Pentagone et le département d’Etat n’ont cessé de militer pour le maintien sur place de ce contingent de 2 000 membres des forces spéciales déployé sans le moindre mandat international. « Se débarrasser [de l’EI] ne signifie pas que vous dites aveuglément : “Bon, on s’en est débarrassé”, et que vous vous en allez, pour ensuite vous interroger sur le fait qu’il réapparaît », avait assuré, en septembre, le secrétaire américain à la défense, James Mattis. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Paris s’inquiète du retrait américain de Syrie Dissonances Donald Trump, à la Maison Blanche, le 18 décembre. EVAN VUCCI / AP L’envoyé spécial du président chargé de la coalition internationale mise sur pied pour lutter contre les djihadistes n’a pas dit autre chose, le 11 décembre, au département d’Etat. « On peut considérer que les Américains resteront sur le terrain après la défaite [de l’EI], jusqu’à ce que nous ayons tous les éléments en main pour faire en sorte que cette défaite soit durable », a assuré Brett McGurk. Il a même jugé toute autre politique « téméraire », ajoutant que « toute personne ayant examiné un conflit comme celui-ci ne pourrait qu’être d’accord avec ça ». Le 17 décembre, l’envoyé spécial de Washington pour la Syrie, James Jeffrey, a tenu le même discours devant l’Atlantic Council, un cercle de réflexion de Washington, sans évoquer une seule fois l’hypothèse d’un retrait précipité. En septembre, le conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, John Bolton, avait rappelé une autre justification du maintien de ces forces spéciales en Syrie. « Nous ne partirons pas tant que les troupes iraniennes resteront à l’extérieur des frontières iraniennes, ce qui vaut également pour les milices iraniennes » déployées en Syrie à la faveur de la guerre civile, avait-il assuré en marge de l’Assemblée générale des Nations unies (ONU). Interrogé sur ces dissonances, un haut responsable de l’administration a défendu une « prérogative » présidentielle. Un précédent, le retrait d’Irak ordonné par Obama Le Monde La décision de Donald Trump rappelle un précédent pour lequel il n’avait pourtant pas eu de mots assez durs : le retrait d’Irak ordonné par Barack Obama en 2011, jugé précipité. Ce retrait, conforme à l’engagement du président démocrate, avait alors privé les Etats-Unis d’influence sur le gouvernement dirigé par Nouri Al-Maliki. Les dérives sectaires de ce premier ministre chiite avaient contribué à la renaissance du djihadisme dans les provinces sunnites du pays et à l’avènement de l’EI, tout d’abord en Irak, puis en Syrie, à la faveur de la guerre civile. L’un des « faucons » républicains du Congrès, Lindsey Graham, sénateur de Caroline du Sud, furieux de cette décision précipitée, ne s’est d’ailleurs pas privé d’établir cette comparaison peu flatteuse, mercredi, en dépit de sa proximité avec le président. Dans une équation régionale particulièrement complexe, les forces spéciales américaines ne se sont pas limitées strictement à la simple mission d’éradication des djihadistes. Elles ont également joué un rôle stabilisateur en tenant à distance les forces du régime de Bachar Al-Assad et leurs alliés iraniens, ainsi que celles de la Turquie. Leur présence sur place a protégé en effet les forces locales à dominante kurde qui se sont portées au premier rang de la bataille contre l’EI, comme encore à Hajin, vendredi. Or, la Turquie considère ces dernières comme une extension du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qu’elle combat militairement à l’intérieur de ses frontières. Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, s’était vanté, lundi, d’avoir désormais le feu vert de Washington pour que « les groupes terroristes soient chassés de l’est de l’Euphrate », après un entretien téléphonique avec son homologue américain, le 14 décembre. « Nous pouvons enclencher nos opérations en Syrie à n’importe quel moment à partir des territoires qui correspondront à nos projets », a-t-il averti. Déception israélienne Des véhicules de la coalition soutenue par les forces américaines dans la ville de Manbij, dans le nord de la Syrie, en mai 2018. DELIL SOULEIMAN / AFP Le retrait des forces américaines témoigne en fait d’un renoncement à toute stratégie syrienne. Le président n’est pas le premier à reculer sur ce dossier. L’inertie de son prédécesseur avait permis à la Russie de faire un retour spectaculaire au Levant, en 2015. Après la décision de mercredi, le président Vladimir Poutine y sera plus que jamais en position d’arbitre. L’autre grand bénéficiaire de cette décision est le dirigeant syrien Bachar Al-Assad. Lundi, James Jeffrey a assuré que Washington souhaitait « un régime qui soit fondamentalement différent », tout en indiquant ne pas vouloir se « débarrasser d’Assad ». Ces attentes risquent d’être considérablement déçues s’il ne reste plus à Washington et à ses alliés européens, pour peser sur une issue politique satisfaisante à la guerre civile, que le levier de la reconstruction dans un pays qui aura besoin de centaines de milliards de dollars pour se relever de ses ruines. Le retrait américain de Syrie ajoute enfin une note discordante à la stratégie offensive de Washington visant l’Iran. Donald Trump abandonne en effet un terrain sur lequel l’influence de Téhéran s’est faite plus pesante au cours des dernières années. Cette même influence contre laquelle les Etats-Unis entendent pourtant lutter. La tonalité du communiqué laconique publié mercredi par le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, à propos « d’une décision américaine », a témoigné de sa déception. Il a précisé que le gouvernement allait étudier les conséquences de ce désengagement en ajoutant qu’Israël « saura se défendre » contre toute menace venant de Syrie. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Syrie : le dernier fief urbain de l’EI repris par les forces kurdes
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/donald-trump-renonce-a-toute-strategie-en-syrie_5400200_3210.html
Meurtre de deux jeunes Scandinaves au Maroc : deux vidéos orientent vers la « piste terroriste »
Une vidéo d’allégeance à l’Etat islamique, que « Le Monde » a pu consulter, a été authentifiée jeudi par le procureur de Rabat.
Des enquêteurs marocains à Imlil, dans une vallée du massif du Haut Atlas, le lendemain de la découverte des corps, mardi 18 décembre. AP La piste terroriste se précise dans le meurtre de deux jeunes touristes norvégienne et danoise, dont les corps ont été découverts lundi 17 décembre dans une vallée du massif du Haut Atlas réputée pour ses sentiers de randonnée. Une vidéo d’allégeance à l’organisation Etat islamique (EI), que Le Monde a pu visionner, a été partagée sur les réseaux sociaux. Diffusée sur Twitter et Telegram, elle met en scène un groupe de quatre personnes, filmées dans une pièce sombre avec un drapeau de l’EI confectionné à la main accroché à un mur. Trois des quatre hommes qui y apparaissent correspondent aux images des suspects arrêtés par la police marocaine qui ont été publiées dans la presse. L’un d’eux affirme que la cellule a répondu aux appels de l’« émir des croyants, Abou Bakr Al-Baghdadi », le chef de l’EI, et en « soutien à nos frères de par le monde, et particulièrement nos frères de Hajin [détruite] par l’aviation croisée ». Cette vidéo, dont l’authenticité a été confirmée jeudi soir par le procureur de Rabat, « a été enregistrée la semaine dernière, avant l’exécution des actes criminels faisant l’objet de l’enquête », selon le communiqué officiel. Dernier centre de commandement urbain de l’organisation Etat islamique (EI) en Syrie, la ville de Hajin a été reprise par les Forces démocratiques syriennes (FDS) la semaine passée. Les quatre hommes prêtent ensuite allégeance à Abou Bakr Al-Baghdadi. Une vidéo d’exécution Les services de renseignement danois (PET) ont également indiqué, jeudi, analyser une première vidéo qui pourrait montrer le meurtre de l’une des deux jeunes Scandinaves. Ce film, extrêmement brutal, qu’a également pu consulter Le Monde est vraisemblablement pris à l’aide d’un téléphone. Il montre l’assassinat de l’une des deux touristes, égorgée vivante. L’un des bourreaux, en dialecte marocain, prononce alors une unique phrase : « Aux frères de Hajin. » Le procureur marocain en charge du dossier a précisé dans un communiqué que « les investigations se poursuivent pour authentifier une vidéo relayée sur les réseaux sociaux, présentée comme montrant le meurtre d’une des deux touristes ». « La vidéo, nous sommes sur le plan technique en train de l’analyser, nous ne pouvons pas encore confirmer ou démentir son authenticité. La vidéo est entre les mains du laboratoire scientifique. C’est une question d’heures », a précisé le porte-parole de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN). Si l’implication de ces hommes est confirmée, elle pourrait éloigner l’hypothèse d’un crime d’opportunité et d’une rencontre fortuite entre les deux Scandinaves, qui avaient décidé de bivouaquer en montagne, et les terroristes présumés. Après avoir évoqué un crime crapuleux, la police marocaine envisage sérieusement la « piste terroriste ». « La piste radicale islamiste n’est pas écartée, du fait du profil » des suspects arrêtés, « qui ont des liens avec le milieu islamiste radical », a déclaré à l’AFP une source proche du dossier. Lire aussi Meurtre de deux touristes au Maroc : un suspect arrêté Au total, quatre hommes ont été arrêtés à Marrakech. Le premier suspect, arrêté le jour-même de la découverte des corps dans un quartier populaire de Marrakech, « appartient à un groupe extrémiste », selon un communiqué du procureur général du roi près la Cour d’appel de Rabat. Les trois autres suspects, dont l’un a un « passé judiciaire lié à des actes terroristes », ont été arrêtés peu après dans la même ville, a-t-on appris jeudi de source proche du dossier. Deux amies en vacances L’une des victimes, la Norvégienne Maren Ueland, de 28 ans. HO / AFP Les deux victimes sont deux amies : Louisa Vesterager Jespersen, une étudiante danoise de 24 ans, et Maren Ueland, une Norvégienne de 28 ans. Elles étaient parties ensemble pour un mois de vacances au Maroc. Leurs corps ont été découverts lundi dans un site isolé où elles avaient planté la tente pour la nuit, sur la route du mont Toubkal, le plus haut sommet d’Afrique du Nord. L’une des deux a été décapitée, a indiqué à l’AFP la source proche du dossier. Le Maroc avait été meurtri par des attaques à Casablanca en 2003 (33 morts) et à Marrakech en 2011 (17 morts). Depuis, le pays, qui met souvent en avant sa sécurité, a été épargné par les attaques djihadistes. « C’est un événement qui peut arriver n’importe où mais qui n’entache en rien ni la stabilité et la sécurité assurée pour le tourisme », a tenu à souligner une source proche du dossier à l’AFP. Le double meurtre du Haut Atlas « est pris très au sérieux » par les autorités marocaines, a assuré la même source, assurant que les ambassades du Danemark et du Norvège « sont associées » aux investigations et que « tout se fait dans la transparence totale ». Lire aussi Le Maroc ouvre les portes de La Mamounia au secteur privé Le double assassinat a semé la consternation à Imlil, une localité de montagne de 10 000 habitants sans histoires qui, avec ses auberges et ses modestes gîtes, sert de camp de base aux randonneurs étrangers. On s’y inquiète d’une possible désaffection des touristes. A Imlil, beaucoup préfèrent se taire pour ne pas « nuire à l’image de la région ». Certains disent avoir été sommés par les autorités de ne pas parler aux journalistes. « Notre région est sûre, ceux qui ont fait ça ne sont pas d’ici », assure à l’AFP Mohamed, le patron sexagénaire d’une auberge familiale au bout de la route goudronnée qui conduit à Imlil, avant les pistes caillouteuses menant vers les cimes enneigées du mont Toubkal.
20/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/20/meurtre-de-deux-touristes-au-maroc-la-piste-terroriste-envisagee_5400201_3212.html
Qu’est-ce qu’on mange en France ? Votre assiette décortiquée
Les pratiques et habitudes alimentaires évoluent depuis 50 ans, mais sont particulièrement bousculées depuis quelques années.
L’assiette en tête. Depuis les années 1960 et l’image d’Epinal du repas pris à la maison, en famille, avec des produits achetés au petit commerçant du coin et un menu unique, les modes de consommation alimentaire des Français ont bien changé. Si l’alimentation est devenue une dépense de moins en moins lourde dans le budget des ménages, elle reste un sujet de préoccupation majeur chez les Français, qui adaptent de plus en plus leur repas pour des raisons environnementales, sanitaires ou médicales. C’est le sens de la nouvelle rubrique « L’assiette en tête » du Monde.fr, que cet article vient ouvrir. 1. L’état des lieux : une alimentation à domicile qui coûte de moins en moins cher 2,9 kg d’aliments et de boissons consommés par jour C’est, en moyenne, la quantité d’aliments et de boissons que consomme chaque jour un adulte en France, selon la vaste étude individuelle nationale des consommations alimentaires (INCA 3) de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de 2014. Sur ces 1 060 kg annuels, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) estime que chacun d’entre nous jette près de 30 kg de nourriture à la poubelle, c’est-à-dire quasiment 3 % de notre consommation. L'assiette des Français Le Monde Voir notre infographie : En France, le gaspillage alimentaire en chiffres 3 600 euros de budget annuel C’est la somme que les Français ont consacrée en moyenne à leur budget « alimentation » en 2014, soit 232 milliards d’euros au total, en cumulant l’alimentation à domicile (produits alimentaires et boissons) et l’alimentation hors domicile (restaurant, café, cantine, sandwichs, etc.). Selon les calculs de l’Insee, cela représentait 20,4 % de la dépense de consommation moyenne des Français, soit la part la plus importante du budget familial après celle réservée à l’habitat (loyer ou traites, eau, électricité, gaz, etc.). La proportion du budget alimentation est en baisse constante depuis 1960, où elle représentait alors le principal poste de dépenses des ménages, à hauteur de 34,6 %. 75 % de repas à domicile C’est le pourcentage de repas que les Français adultes ont pris chez eux en 2014, selon l’étude INCA 3, contre 86 % en 1960. La proportion a tendance à s’inverser chez les enfants avec un peu plus de 60 % des 3 à 17 ans qui déjeunent régulièrement à la cantine (au moins trois fois par semaine), alors que seulement 20 % n’y vont jamais. Un tiers des déjeuners sont pris hors domicile En semaine, 81 % des déjeuners hors domicile sont pris au travail. INCA 3, Anses 2017 Source : Deux tiers d’achats dans les grandes surfaces C’est la part de marché des grandes surfaces (super et hypermarchés) dans la commercialisation des produits alimentaires en 2017, selon l’Insee. Une proportion à peu près stable depuis le bond qu’a connu la grande distribution à la fin du XXe siècle, passant de 30,9 % de part de marché dans l’alimentaire en 1980 à 67,7 % en 2000 ; ce sont principalement les enseignes d’alimentation spécialisée et d’artisanat commercial qui ont pâti de cette croissance, voyant leur part de marché passer de 36,6 % en 1980 à 17,6 % vingt ans plus tard. Les grandes surfaces restent, de loin, les plus utilisées mais perdent des parts de marché Parts de marché selon le type de commerce. Source : Insee - Comptes du commerce 3,9 % d’intolérances ou allergies C’est le pourcentage de Français qui déclarent souffrir d’intolérances ou d’allergies alimentaires, selon l’étude INCA 3 de 2014. La plus courante étant le lait de vache (30 % des allergies déclarées), puis les légumes, tandis que le gluten arrive en cinquième position (11 %) derrière les mollusques et les fruits à coque, mais devant les œufs et l’arachide. Le lait de vache est l'aliment le plus mal toléré Fréquence de citation des aliments liés à des intolérances ou allergies chez les adultes de 18 à 79 ans (plusieurs réponses possibles, en %) Etude INCA3 (2014-2015), traitement Anses Source : 2. L’évolution de la consommation : moins de viande, plus de bio 12 % de viande consommée en moins C’est, en dix ans, le taux de chute de la consommation des produits carnés en France, selon une étude du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc) rendue publique en septembre 2018. En 2017, les Français consommaient environ 48 kg de viande par personne et par an (contre environ 56 kg en 2007). La consommation de viande diminue Quantités moyennes journalières de produits carnés consommés en g/jour. Credoc Source : 34 % de flexitariens C’est, selon une étude du cabinet Kantar Worldpanel réalisée en septembre 2018 auprès de 12 000 ménages, la part de Français qui déclarent être flexitariens, c’est-à-dire qui réduisent leur consommation de viande et de poisson, sans y renoncer complètement. Ils n’étaient que 25 % en 2015. L’étude note également une légère progression du végétarisme (près de 2 % des foyers français comptent au moins un membre végétarien, contre 1,5 % en 2015) mais estiment que le végétalisme (proscrivant tout produit animal) reste confidentiel avec 0,4 % des ménages concernés en septembre 2018. L’enquête INCA 3 de 2014 estimait, elle, la part des Français végétariens à 1,8 % et celle des végétaliens à seulement 0,1 %. Pour aller plus loin : Un tiers des ménages français sont « flexitariens », 2 % sont végétariens Doublement du chiffre d’affaires du bio C’est l’augmentation qu’a connue le chiffre d’affaires de l’alimentation biologique dans la distribution alimentaire en cinq ans, de 2012 à 2017. Selon l’Agence française pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique, la consommation de produits bio est en constante hausse depuis 1999. Une progression cohérente avec le résultat d’un sondage OpinionWay réalisé auprès de 1 044 personnes en septembre, qui révèle que 81 % des Français disent acheter du bio (fruits et légumes et produits laitiers en tête), dont 34 % au moins une fois par semaine. Le bio, un marché multiplié par quatre en dix ans Evolution du chiffre d'affaires bio par circuit de distribution depuis 2005 (en millions d'euros) Agence bio 2017 Source : 2001, début de l’AMAP C’est l’année qui a vu naître, en France, la première association pour le maintien d’une agriculture paysanne (AMAP), créée pour favoriser l’agriculture paysanne et biologique face à l’agro-industrie ; quatorze ans plus tard, l’Ademe en comptait 1 600 sur tout le territoire, un chiffre en constante hausse. Aujourd’hui, 6 % à 7 % des achats des Français se feraient en circuits courts (avec un nombre d’intermédiaires limité), selon l’Ademe, qui comptabilisait également 600 à 1 200 marchés de producteurs, 650 ruches et 250 magasins de producteurs en France en 2014-2015. De nouvelles initiatives naissent avec des regroupements de producteurs ou de consommateurs au sein de supermarchés coopératifs et participatifs. Points de vente en circuits courts les plus fréquentés Source : Projet Codia, Casdar 2013 Notre rubrique « L’assiette en tête » Des scandales sanitaires aux régimes sans gluten, en passant par la question des additifs, des perturbateurs endocriniens ou encore de la maltraitance animale… le souci de connaître l’origine et le mode de production de ce que l’on mange n’a jamais été aussi présent. En France et dans le monde, les initiatives se multiplient pour reprendre le pouvoir sur ce que nous mangeons : notre assiette, nous l’avons tous plus que jamais en tête, et c’est ce que cette rubrique raconte. Voir aussi A Sourcieux-les-Mines, le cuisinier de la cantine privilégie les circuits courts
20/12/2018
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/20/qu-est-ce-qu-on-mange-l-assiette-des-francais-decortiquee_5400180_3244.html
La Fed relève ses taux en dépit des pressions de Trump
Mercredi 19 décembre, la Réserve fédérale a relevé ses taux directeurs d’un quart de point, malgré les inquiétudes sur l’économie mondiale.
Le patron de la Fed Jerome Powell lors de sa conférence de presse à Washington, le 19 décembre 2018. YURI GRIPAS / REUTERS Elle n’a pas plié face aux pressions de Donald Trump. Mercredi 19 décembre, la Réserve fédérale américaine (Fed) a relevé ses taux directeurs d’un quart de point : ils évoluent désormais dans une fourchette allant de 2,25 % à 2,50 %. Il s’agit de la quatrième hausse actée cette année par l’institution, et la neuvième depuis 2015. Dans leur communiqué, ses membres ont souligné la force de l’économie américaine, justifiant la poursuite du resserrement monétaire. « Le marché du travail a continué de se renforcer et l’activité a progressé à un rythme solide », ont-ils déclaré. Dans la foulée, l’indice Standard & Poor’s 500 a clôturé en baisse de plus de 1,5 %, tandis qu’à Tokyo, le Nikkei a terminé en repli de 2,84 % jeudi. Une partie des investisseurs espéraient que, face à la volatilité des marchés et aux doutes planant sur l’économie mondiale, la Fed renonce à relever ses taux. Ils ont eu tort. En outre, elle continuera de revendre les titres financiers qu’elle avait achetés pendant la crise, à hauteur de 50 milliards de dollars par mois. Une « nouvelle erreur » Cette réunion faisait figure de test pour Jerome Powell, nommé à la tête de la Fed fin 2017 par Donald Trump. Ces derniers jours, le président américain lui a lancé sur Twitter une série d’avertissements : une hausse du taux directeur serait une « nouvelle erreur », a-t-il écrit mardi. La veille, il déclarait déjà : « C’est incroyable qu’avec un dollar très fort et virtuellement aucune inflation, le monde qui explose autour de nous, Paris qui brûle et la Chine sur la pente descendante, la Fed puisse seulement penser à une nouvelle hausse des taux. » Ces mises en garde se limitent-elles à la rhétorique agressive et versatile dont le président est coutumier, ou menace-t-il réellement l’indépendance de l’institution ? Alors que le relèvement des taux est indispensable pour éviter une surchauffe de l’économie et pour permettre à la Fed de regagner des marges de manœuvre avant la prochaine crise, le milliardaire à la mèche blonde semble convaincu qu’il est nocif pour l’activité – notamment pour la Bourse et l’immobilier. Mais le comité de politique monétaire a ignoré ses menaces, adoptant la hausse à l’unanimité. « Les considérations politiques ne jouent absolument aucun rôle dans nos discussions ou décisions », a déclaré Jerome Powell, soulignant la santé de l’économie américaine. Prudence pour l’avenir Il est vrai qu’à première vue, celle-ci est éclatante. Le pays enregistre sa neuvième année de croissance, portée par les mesures de relance et les réductions massives d’impôts (1 500 milliards de dollars) accordées ces derniers mois. Surtout, à 3,7 %, le taux de chômage est au plus bas depuis 50 ans. Malgré tout, les nuages s’accumulent à l’horizon, et pas seulement du fait du ralentissement européen et des tensions commerciales. L’inflation, à 2,2 %, reste étonnamment plate au regard du plein-emploi. « La remontée des taux des emprunts hypothécaires, qui évoluent désormais autour de 5 %, et la force du dollar devraient commencer à peser sur l’activité, tandis que l’effet du stimulus fiscal va s’estomper », estime James Knightley, économiste chez ING. Et les marchés sont nerveux : Le S&P 500 a plongé de 15 % en trois mois.
20/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/20/la-fed-releve-ses-taux-en-depit-des-pressions-de-trump_5400170_3234.html
Spectacle : un « Hamlet » filmique à l’Opéra-Comique
L’œuvre d’Ambroise Thomas renaît avec de superbes chanteurs et une partition d’images élaborée par Cyril Teste.
Sabine Devieilhe (Ophélie) dans « Hamlet », d’Ambroise Thomas. VINCENT PONTET Mettre ou ne pas mettre – en scène. Telle est peut-être la question posée par cette nouvelle production d’Hamlet, d’Ambroise Thomas, confiée à Cyril Teste, à l’Opéra-Comique de Paris. Le travail spectaculaire, et somme toute assez élégant, de l’homme aux « partitions pour performance filmique » déploie en effet une extraversion du plateau, qui, dans une forêt d’écrans vidéo, créations numériques, filmage en direct ou séquences préenregistrées, envahit l’espace entier de la Salle Favart, loges, coulisses et espaces de déambulation. Que l’opéra se décadre et s’émancipe du tabernacle scénique pour ingérer cette spatio-temporalité qui l’entoure est une conquête qu’autorise, voire réclame, la technologie. Mais cela comporte l’écueil incontournable d’une diffraction qui, en diluant l’action théâtrale, brise le lieu du pacte. Alors, il nous faut ballotter entre moments forts, comme cette arrivée en fanfare (également visuelle) du roi Claudius intronisé par le fond de la salle, et pragmatisme désespérant – le Spectre installé au milieu du rang F révélant en simple spectateur la vérité de sa mort à Hamlet. Parfois, les deux cohabitent. Ainsi lorsque la pauvre Ophélie apparaît sur l’écran noyant son chagrin dans l’alcool au bar du Foyer du public, avant que l’Air de la folie ne l’assigne scéniquement à s’abîmer dans un lac au milieu d’un ballet de techniciens compatissants ou goujats (après avoir soutenu sa douleur et son ébriété, ils lui rouleront un tapis sous les pieds comme pour entraver la musique). Le procédé ne fonctionne jamais aussi bien que quand il s’agit de créer des espaces mentaux, comme celui qui confond dans l’esprit d’Hamlet les visages du défunt roi son père et de son frère Claudius, régicide usurpateur et époux de sa mère. Endurance, diction, musicalité, le baryton français Stéphane Degout est sans nul doute le tenant actuel du rôle Disparu des écrans radars depuis la fin de la seconde guerre mondiale comme tant d’autres opéras du répertoire romantique français, Hamlet avait fait sa dernière apparition sur la scène parisienne en 2000, avec la reprise d’une production du Capitole au Théâtre du Châtelet. C’était avant qu’une magistrale mise en scène d’Olivier Py au Theater an der Wien, en 2012, reprise l’année suivante au Théâtre Royal de La Monnaie, à Bruxelles, sous la direction de Marc Minkowski, consomme définitivement la rupture avec les clichés qui résumait Ambroise Thomas (1811-1896) au bon mot d’Emmanuel Chabrier – « Il y a trois sortes de musique, la bonne, la mauvaise, et celle d’Ambroise Thomas. »
20/12/2018
musiques
https://www.lemonde.fr/musiques/article/2018/12/20/spectacle-un-hamlet-filmique-a-l-opera-comique_5400167_1654986.html
Un « classique » de David Hockney chez Christie’s
Estimé à plus de 33 millions d’euros, un tableau représentant l’historien d’art Henry Geldzahler va être vendu le 6 mars 2019.
Le tableau de David Hockney représente l’historien d’art Henry Geldzahler (assis au centre) avec son compagnon, le peintre Christopher Scott. DAVID HOCKNEY / RICHARD SCHMIDT Henry Geldzahler va-t-il devenir l’historien d’art le plus coûteux du monde ? Ce serait certes post mortem (il est décédé en 1994), mais son portrait, où il est représenté avec son compagnon, le peintre Christopher Scott, va être vendu le 6 mars 2019 à Londres par Christie’s, qui l’estime à plus de 30 millions de livres (33 millions d’euros) ! Il faut dire qu’il a été peint en 1968 par David Hockney, devenu, depuis l’enchère record de 90 millions de dollars (79 millions d’euros) portée le 15 novembre, également chez Christie’s, l’artiste vivant coté le plus haut. Le tableau est dans la veine « classique » d’Hockney, et représente Geldzahler dans un intérieur new-yorkais – il s’agit de son appartement sur la VIIe Avenue et on devine les immeubles de Manhattan à travers la fenêtre derrière lui –, assis en majesté, trônant au centre d’un canapé mauve. Il a tombé la veste, croisé les jambes (ce qui laisse apparaître un mollet un peu pâle), son ventre rebondi tend un gilet noir et soyeux. La bouche légèrement entrouverte, il regarde le spectateur, frontalement, à travers des lunettes où Hockney s’est ingénié à peindre des reflets, tout comme sur le lampadaire à sa droite, ou sur la table de verre qui sépare Geldzahler du bord inférieur du tableau. Scott est vu de profil, vêtu d’un imperméable, debout, les bras le long du corps, comme un courtisan venu rendre hommage à son monarque. Henry Geldzahler était bien en son temps, le roi de New York, tout-puissant conservateur du département d’art du XXe siècle au Metropolitan Museum Et c’est bien ce qu’il était en son temps, le roi de New York ! Né à Anvers (Belgique) en 1935, émigré avec ses parents en 1940 aux Etats-Unis, Henry Geldzahler était le tout-puissant conservateur du département d’art du XXe siècle qu’il avait contribué à créer au Metropolitan Museum de New York. L’exposition qu’il réalisa en 1969, « New York Painting and Sculpture : 1940-1970 », fut la première organisée par le musée qui soit consacrée à l’art américain contemporain et n’a pas été pour rien dans ce que les historiens d’art ont ensuite baptisé le « triomphe » de l’art américain. Il était proche de bon nombre d’artistes, et pas des moindres, comme Willem de Kooning, Jasper Johns, Larry Rivers ou Frank Stella (mais aussi, plus tard, du jeune Jean-Michel Basquiat) et, bien sûr, d’Andy Warhol. Bradée pour 1,1 million de dollars C’est chez lui qu’il rencontra en 1963 un jeune peintre britannique qui se cherchait, David Hockney. Quand Hockney peint ce portrait, Geldzahler est en train de préparer l’exposition qui va le rendre célèbre, et l’artiste, lui, commence à s’engager sur la voie qui en fera un des grands peintres de sa génération. Enfin, ça, c’est Geldzahler qui le dit : « Dans ce tableau, David a finalement abandonné l’idée d’être un “artiste moderne” et décidé à la place de devenir le meilleur artiste qu’il pouvait être. » Bref, de trouver sa propre voie, plutôt que de marcher sur les brisées des autres.
20/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/20/un-classique-de-david-hockney-chez-christie-s_5400161_3246.html
« Gilets jaunes » : 14 personnes mises en examen après l’incendie d’un péage à Bandol
La barrière de péage a été incendiée dans la nuit de lundi à mardi en marge du mouvement des « gilets jaunes ». Dix-sept personnes avaient été interpellées.
GERARD JULIEN / AFP Quatorze « gilets jaunes » qui avaient été interpellés lundi après l’incendie du péage de Bandol (Var) sur l’autoroute 50 ont été mis en examen et placés sous contrôle judiciaire mercredi 19 décembre, a-t-on appris auprès du parquet de Toulon. Peu après les faits, les forces de l’ordre avaient procédé, dans la nuit de lundi à mardi, à l’interpellation de dix-sept personnes soupçonnées d’avoir participé à ces exactions. Mercredi, à l’issue de leur garde à vue, trois d’entre elles avaient été mises hors de cause et relâchées. Quatorze autres ont été présentées à un juge d’instruction dans le cadre d’une information judiciaire ouverte pour « incendie volontaire, participation à un attroupement en vue de commettre des violences ou des dégradations, entrave à la circulation et, pour certains des mis en cause, rébellion », a précisé Bernard Marchal, procureur de la République de Toulon. Le parquet avait requis un mandat de dépôt pour un certain nombre de ces prévenus, mais il n’a pas été suivi par le juge des libertés et de la détention. Dégradations de plusieurs péages dans le Sud La société autoroutière Vinci a fait savoir mercredi que des travaux effectués dans la nuit avaient permis de rouvrir en partie le péage dévasté par l’incendie. Trois voies sont de nouveau ouvertes dans le sens Marseille-Toulon, mais « l’importance des dégâts n’a pas encore permis de remettre en fonction des voies dans l’autre sens de circulation », précise l’exploitant de l’autoroute. Depuis plusieurs semaines, plusieurs péages et installations autoroutières du sud de la France, de Perpignan à Orange en passant par La Ciotat, ont été dégradés. Dans la nuit de mardi à mercredi, c’est un local appartenant à Vinci, à Bessan, dans l’Hérault, qui a été endommagé par un sinistre.
20/12/2018
police-justice
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/20/incendie-d-un-peage-a-bandol-quatorze-gilets-jaunes-mis-en-examen_5400156_1653578.html
Les Chinois peuvent enfin voir leur « voisin Totoro » au cinéma
Il aura fallu trente ans pour que le film d’animation du maître japonais Miyazaki soit diffusé dans les salles chinoises. Un moyen pour les deux pays d’opérer un rapprochement.
Koji Hoshino (à droite), patron des studios Ghibli, et l’actrice Qin Lan, lors de l’annonce de la sortie, en Chine, de « Mon voisin Totoro », le 10 décembre, à Shanghaï. KYODO NEWS / GETTY IMAGES Le 14 décembre, trente ans après le Japon, Mon voisin Totoro est – enfin – sorti sur les écrans chinois. Un événement pour le cinéma japonais. Ce film d’animation de Hayao Miyazaki, datant de 1988, est le premier produit par les célèbres studios Ghibli à avoir accès à ce marché, désormais le plus important au monde. Si les productions de la société fondée par Hayao Miyazaki et Isao Takahata en 1985 sont présentes sur les marchés de DVD piratés, aucune n’est sortie légalement. Pékin n’autorise l’importation que de quelques dizaines de films étrangers par an. Essentiellement des blockbusters américains ainsi que quelques productions indiennes, sud-coréennes et françaises. Les longs-métrages japonais n’ont droit qu’à une place marginale et doivent batailler. Six ans de négociation furent nécessaires pour que Totoro apparaisse sur les écrans chinois. Un show à la gloire de Totoro Et l’attente du public est forte. Lundi 10 décembre, plus de 137 000 personnes avaient préacheté des tickets, environ dix fois plus que pour les autres sorties de la semaine. La conférence de presse, organisée le même jour à Shanghaï, fut surréaliste. Aucune question n’y a été posée. L’événement a pris la forme d’un show à la gloire de Totoro. Le cinéaste Hayao Miyazaki n’avait pas fait le déplacement. Mais Qin Lan, la jeune actrice qui prête sa voix à la mère des deux petites héroïnes dans la version chinoise, s’était rendue au Japon quelques jours plus tôt pour discuter avec le septuagénaire au regard à la fois doux et espiègle. « La principale leçon du film est qu’il faut préserver la nature », lui a-t-il expliqué. Un message qui n’avait rien d’évident il y a trente ans et auquel le public chinois devrait également être sensible. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La dernière prophétie de Miyazaki Miyazaki s’est déjà publiquement étonné d’être aussi connu en Chine. Lors de la fameuse conférence de presse sans questions, l’animatrice a lu quelques messages de fans. « Je regarde vos films depuis tout petit. Je vous aime », lui écrit l’un d’eux. « À chaque fois que j’ai un chagrin, je regarde un de vos films », témoigne un second. Cet été, histoire sans doute d’alimenter le teasing, Shanghaï a hébergé une grande exposition consacrée aux productions de Miyazaki et Takahata. Alors que dix salles de cinéma s’ouvriraient chaque jour en Chine, le pays a aussi besoin de films étrangers pour répondre à la demande d’une classe moyenne urbaine de plus en plus internationalisée. L’arrivée des studios Ghibli en Chine n’est pas qu’un conte pour enfants. L’année 2018 marque le quarantième anniversaire du traité de paix et d’amitié signé avec le Japon. Rivaux sur bien des sujets, les deux pays, déstabilisés à des degrés divers par la politique de Donald Trump, cherchent à se rapprocher. Le cinéma est l’un des outils de cette politique. Pékin et Tokyo ont d’ailleurs signé en mai un accord favorisant la coproduction de films. Mais encore faut-il que la Chine permette aux cinéphiles d’avoir accès aux œuvres japonaises. On peut compter sur le succès récent de quatre productions nippones en Chine : trois longs-métrages d’animation (Your Name, Doraemon et Detective Conan) et Une affaire de famille, de Kore-eda, Palme d’or à Cannes en 2018. Alors que dix salles de cinéma s’ouvriraient chaque jour en Chine, le pays a aussi besoin de films étrangers pour répondre à la demande d’une classe moyenne urbaine de plus en plus internationalisée. Une aubaine pour les studios Ghibli, qui espèrent bien que le succès attendu de la version restaurée de Mon voisin Totoro ne soit que le premier d’une longue série.
20/12/2018
m-le-mag
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/20/les-chinois-peuvent-enfin-voir-leur-voisin-totoro-au-cinema_5400154_4500055.html
« Aquaman » fait plouf
Le nouveau superhéros aquatique du studio Warner, issu de l’univers DC Comics, s’échoue laborieusement.
Jason Momoa et Amber Heard dans « Aquaman », de James Wan. COURTESY OF WARNER BROS. ENTERTAINMENT INC. L’avis du « Monde » – on peut éviter Il ne fait plus mystère pour personne qu’en matière de superhéroïsme, la maison Marvel/Disney fait désormais la loi. Le studio Warner, représentant du concurrent DC Comics (Batman), tente ainsi avec quelque retard de développer ce fameux « univers étendu » à d’autres personnages, ce à quoi Disney s’est attelé avec le succès, parfois mérité, que l’on sait. L’affaire in fine se développe cahin caha, comportant plus d’échecs (Justice League, 2017) que de succès (Wonder Woman, 2017). Le choix d’Aquaman, rien que sur le papier, ne laissait, de nouveau, rien présager de bon. Né en 1941, ce héros fleurant le dentifrice, élevé par des dauphins et nommé Arthur Curry, est maître d’un royaume aquatique, télépathe à ses heures, naturellement amphibien, détenteur d’un trident que lui aurait légué Poséidon. Voilà qui fait sinon rêver, du moins sourire. Son interprète, Jason Momoa, est, quant à lui, un ex-mannequin d’origine hawaïenne, cantonné, pour cette raison-même imagine-t-on, par Hollywood et consorts aux rôles de primitif musculeux (Conan le barbare, Khal Drogo dans Game of Thrones). Le tout est mis en scène par un petit maître du film d’horreur contemporain (Saw, Insidious…), James Wan. Course à la super-échalote entre Disney et Warner Y avait-il donc autre chose à attendre de ce « package » qu’une sorte de Thor halieutique, eu égard à la course à la super-échalote que se livrent Disney et Warner ? La réponse est non. Même typologie du héros, mêmes références d’une creuse grandiloquence à la mythologie, même histoire de frère dingo qui brigue la royauté de l’Atlantide, veut rayer l’humanité (les « surfaciens ») de la carte et vise à l’hégémonie terrestre, mêmes personnages ectoplasmiques, même mélange de flatulences formelles et de farce tombant à plat. Aquaman est, en un mot, une assommante resucée en milieu aqueux du Thor : Ragnarok (2017), de Taika Waititi, qui était déjà une parodie lourdingue de lui-même. Ce virage brechtien du superhéroïsme, à force d’être aussi paresseusement employé, devient fastidieux. Il faudrait peut-être voir à réviser la formule avant qu’on en arrive au stade des Pieds Nickelés. Film américain de James Wan. Avec Jason Momoa, Amber Heard, Willem Dafoe, Nicole Kidman (2 h 24). Sur le Web : www.dccomics.fr/articles/aquaman-5-bonnes-raisons-cinema et www.aquamanmovie.com
20/12/2018
cinema
https://www.lemonde.fr/cinema/article/2018/12/20/aquaman-fait-plouf_5400150_3476.html
D’où vient le Père Noël ?
Quelle est l’origine du Père Noël ? Qui est saint Nicolas ? Est-ce que Coca-Cola a inventé le costume rouge et blanc ? Explications.
Quelle est donc l’origine du Père Noël ? « LE MONDE » Quelle est l’origine du Père Noël ? Qui est saint Nicolas ? Est-ce que Coca-Cola a inventé le costume rouge et blanc ? La tradition du célèbre Petit Papa Noël ne s’est installée que récemment en occident. Mais ses origines remontent au IIIe siècle. Tout aurait commencé en Turquie, avec l’histoire de saint Nicolas, un bienfaiteur devenu le patron des enfants. Au fil des siècles et des migrations en Europe, puis aux Etats-Unis, son nom, son costume et même la date de livraison des cadeaux ont changé. Alors, comment ça s’est passé ? Sources :
20/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/video/2018/12/20/d-ou-vient-le-pere-noel_5400145_3246.html
Près de 700 prêtres accusés d’agression sur mineur dans l’Illinois, aux Etats-Unis
La justice de cet Etat estime que la plupart des accusations n’ont pas fait l’objet d’enquêtes appropriées par l’Eglise catholique.
Après la Pennsylvanie cet été, c’est au tour de l’Illinois d’être touché. L’ampleur du scandale des prêtres pédophiles ne cesse de croître aux Etats-Unis, où la justice a révélé mercredi 19 décembre que près de sept cents membres du clergé de l’Illinois avaient été accusés, sur plusieurs décennies, d’agression sur mineur. La procureure de l’Illinois, Lisa Madigan, avait lancé une enquête en août dans cet Etat industriel du nord du pays, après la publication d’un rapport sur l’Eglise de Pennsylvanie qui avait suscité une onde de choc aux Etats-Unis. Depuis, ses services ont épluché les archives des six diocèses de l’Etat et leurs conclusions préliminaires sont tout aussi accablantes. Les diocèses de l’Illinois ont rendu publics les noms de 185 prêtres visés par des accusations sérieuses, mais ils avaient été avisés d’« accusations contre au moins cinq cents prêtres supplémentaires », écrit Lisa Madigan dans un rapport d’étape. La plupart des cas n’ont pas fait l’objet d’enquêtes appropriées, ou n’en ont pas du tout fait l’objet, ajoute-t-elle, en regrettant que la justice n’ait pas été saisie. « L’Eglise catholique n’est pas capable de faire sa police elle-même », conclut Mme Madigan dans un communiqué au ton sévère pour l’institution religieuse. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Donald Wuerl, l’archevêque de Washington, dans la tourmente Manque de « considération » et de « transparence » Le cardinal Blase Cupich, archevêque de Chicago, a immédiatement fait acte de contrition dans un communiqué publié sur le site du diocèse. « Je tiens à redire les regrets profonds de toute l’Eglise pour notre échec à répondre au scandale des prêtres pédophiles », a-t-il écrit, en évoquant « la douleur inimaginable » des victimes. Il a toutefois souligné que « la grande majorité des agressions avaient eu lieu il y a plusieurs décennies » et que son prédécesseur avait mis en place dès 1991 un « ensemble de procédures strictes pour protéger les jeunes des prédateurs ». L’archidiocèse s’est également vanté d’être « à la pointe de la réponse au scandale des abus sexuel dans l’Eglise depuis près de trois décennies ». A en croire, le rapport de Mme Madigan, les diocèses de l’Illinois ont pourtant « manqué de considération pour les victimes » et de « transparence ». Et, assène-t-elle, « les accusations d’agression sexuelle sur mineur, même si elles remontent à de longues années, ne peuvent pas être considérées comme une question interne ». L’Eglise américaine ébranlée L’Eglise catholique états-unienne a été ébranlée par une série d’articles du Boston Globe en 2002 sur les abus commis par le clergé dans cette ville de l’est. Ces révélations, popularisées dans le film Spotlight, ont libéré la parole des victimes dans tout le pays. Depuis, de nombreux prêtres ont été exclus du clergé et poursuivis en justice. L’Eglise a aussi versé des sommes importantes pour dédommager les victimes. Cet été, les services du procureur de Pennsylvanie ont porté un nouveau coup dur à l’Eglise, en détaillant les abus perpétrés par plus de trois cents prêtres prédateurs sur un millier d’enfants au cours de plusieurs décennies. Dans la foulée, l’archevêque de Washington, le cardinal Donald Wuerl, accusé d’avoir contribué à étouffer le scandale, a été contraint de démissionner. Des diocèses ont commencé à publier des listes noires et une dizaine d’Etats ont lancé des investigations pour mettre au jour les abus. L’ordre des jésuites, qui gère de nombreux établissements scolaires aux Etats-Unis, s’est joint à cet effort de transparence en publiant depuis le début de décembre les noms de plus de deux cents prêtres « visés par des accusations crédibles » depuis les années 50.
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/nouveau-scandale-de-pretres-pedophiles-aux-etats-unis-dans-l-illinois_5400138_3210.html
L’autre Cartier-Bresson
A l’occasion du récent déménagement, dans le Marais à Paris, de la Fondation qui porte son nom, « M » ouvre sa carte blanche à une série d’images moins connues et plus contemplatives du photographe de « l’instant décisif ».
Parmi les tirages préférés de l’artiste figure « Mexico », 1934. HENRI CARTIER-BRESSON / MAGNUM PHOTOS Le photographe Henri Cartier-Bresson, disparu en 2004, reste à jamais le maître de « l’instant décisif ». Soit. Mais encore ? Cette formule, qui résume le coup d’œil fulgurant du photographe, capable de saisir l’instant où le passant saute par-dessus une flaque d’eau, a fini par enfermer son auteur dans un cliché. Celui d’un artiste qui tire plus vite que son ombre et saisit le mouvement. « Cette histoire d’instant décisif est une tromperie, plaide Agnès Sire, directrice artistique de la Fondation Henri Cartier-Bresson. Elle n’est pas fausse, mais elle est réductrice. » L’expression est née en 1952, lorsque le premier livre du photographe, Images à la sauvette, a été traduit en anglais et qu’il a fallu trouver un titre. Ce sera The Decisive Moment. « Il a été retenu parmi des dizaines d’autres ! En dépit de la résistance d’Henri qui le trouvait très éloigné du français. » « Henri Cartier-Bresson attachait beaucoup d’importance au travail de l’inconscient, à la mémoire. » Agnès Sire, directrice artistique de la Fondation Henri Cartier-Bresson Alors que la Fondation Henri Cartier-Bresson, qui conserve ses archives et organise des expositions, a emménagé en octobre dans de nouveaux locaux, plus spacieux, à Paris, cette carte blanche présente des images moins connues et plus inattendues du cofondateur de l’agence Magnum Photos. Henri Cartier-Bresson était un reporter nerveux et agité, un « moustique » toujours en mouvement, au point que l’écrivain américain Truman Capote n’hésitait pas à le qualifier de « libellule frénétique ». Mais le photographe a aussi cherché à atteindre dans son œuvre une dimension plus contemplative, voire méditative. « Il y a aussi des ‘‘temps faibles’’ à la Raymond Depardon dans son travail, explique Agnès Sire. Des moments où il ne se passe rien. » Dans certains paysages, on serait bien en peine de trouver le fameux « instant décisif » : des arbres qui bordent une route, une barque qui pourrit au bord d’un fleuve, des tourbillons dans l’eau qui dessinent le symbole du yin et du yang. Ces images-là se veulent hors du temps et font appel à d’autres ressources : le symbole, l’évocation, la métaphore. « Henri Cartier-Bresson attachait beaucoup d’importance au travail de l’inconscient, à la mémoire », rappelle Agnès Sire. Ses images de la période surréaliste, dans les années 1930, le voient s’attarder sur des natures mortes ou des portraits dans lesquels la part invisible est primordiale – un corps endormi qui fait penser à un cadavre, une femme enveloppée dans un voile et qui semble privée de tête… France. HENRI CARTIER-BRESSON / MAGNUM PHOTOS Le photographe, connu pour sa réticence à être photographié, a aussi réalisé quelques rares autoportraits. Ils évoquent plus qu’ils ne dévoilent et jouent autour de l’absence. Henri Cartier-Bresson photographie son pied nu ou son ombre sur le sol ; ou cet incroyable lit défait, dont les plis dessinent les histoires et les corps qui y sont passés. « Grand lecteur de Proust, il puisait beaucoup de ses références dans la littérature ou la peinture, qui est sa formation première », souligne Agnès Sire. Marqué par ses voyages en Asie et par le bouddhisme, il finira par abandonner la photographie pour le dessin. « La photo est une action immédiate. Le dessin, c’est la méditation », disait-il. Il passera des jours au Muséum national d’histoire naturelle, à dessiner des squelettes d’animaux, « car, disait-il, ceux-là ne bougent pas ».
20/12/2018
m-le-mag
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/20/l-autre-cartier-bresson_5400127_4500055.html
« Il est nécessaire de fixer un agenda pour une résolution politique du conflit au Yémen »
L’accord conclu le 13 décembre est insuffisant et l’ONU doit redoubler d’énergie pour empêcher le Yémen de devenir « la Libye » de la péninsule arabe, estime Anne Gadel, de l’Institut Open Diplomacy, dans une tribune au « Monde ».
Le ministre des affaires étrangères yéménite, Khaled Al-Yamani, serre la main du chef des forces rebelles houthistes Mohammed Abdel Salam, sous les yeux du secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres, le 13 décembre à Rimbo (Suède). Pontus Lundahl / AP Tribune. L’image était d’autant plus belle qu’elle était inespérée il y a encore quelques mois : le ministre des affaires étrangères yéménite, Khaled Al-Yamani, serrant la main au chef des forces rebelles houthistes Mohammed Abdel Salam, le 13 décembre, sous les yeux du secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres. L’accord conclu au château de Johannesberg à Rimbo, près de Stockholm (Suède), au terme d’une semaine de consultations, avait suscité des espoirs de voir se normaliser la situation au Yémen. La priorité était donnée au rétablissement de la confiance entre les parties, matérialisé par l’échange de prisonniers (15 000 en tout), à la conclusion d’accords de cessez-le-feu dans les régions touchées par la famine, ainsi qu’à l’évacuation du port d’Hodeïda, contrôlé par les houthistes, par lequel transite l’essentiel de l’aide humanitaire (80 %) au Yémen. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Accord pour un cessez-le-feu à Hodeïda, au Yémen Plusieurs signes pouvaient laisser présager une issue positive à ces consultations. C’était la première fois depuis 2016 que les belligérants – les rebelles houthistes et les représentants du gouvernement d’Abd Rabbo Mansour Hadi – étaient rassemblés sous un même toit dans l’intention de négocier. Chacun semblait disposé à faire montre d’efforts particuliers pour faire aboutir les discussions, des accords préalables sur des échanges de prisonniers ayant été conclus en forme de garanties. De fait, les puissances occidentales se disaient soulagées de la tenue de ces négociations, rendues inévitables par l’ampleur exceptionnelle de la catastrophe humanitaire, et par les pressions exercées sur le royaume saoudien au lendemain de « l’affaire Khashoggi » (une résolution condamnant l’aide militaire apportée à Riyad a symboliquement été votée au Congrès américain le 13 décembre). Presque immédiatement suivi de raids aériens et de combats sporadiques dans la région d’Hodeïda, cet accord souffre cependant de lacunes qui, couplées à la situation hautement inflammable sur le terrain, le rendent structurellement fragile. Des points d’accord partiels Les parties prenantes aux consultations ne représentaient pas toute la réalité des forces en présence sur le terrain : si les rebelles ont su s’imposer comme des interlocuteurs légitimes, le gouvernement est fragilisé depuis l’exil de son leader Hadi à Riyad en 2015. Manquaient en outre à l’appel la principale force d’opposition Al-Islah et le mouvement Al-Hirak des séparatistes du sud du pays, ainsi que les parrains saoudiens et émiriens.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/il-est-necessaire-de-fixer-un-agenda-pour-une-resolution-politique-du-conflit-au-yemen_5400120_3232.html
Mali : « On ne peut pas abandonner les enfants malades à la sélection naturelle »
Trois mois après la première opération à cœur ouvert à Bamako, le cardiologue Mamadou Bocary Diarra appelle les autorités à investir davantage dans la santé.
Le cardiologue malien Mamadou Bocary Diarra sur TV5 Monde, le 16 décembre 2018. TV5 Monde Trouver des sous… Bamako a son hôpital pour enfants souffrant de maladies cardiaques, le problème reste de trouver l’argent pour le faire fonctionner. C’est le message qu’a voulu faire passer son directeur, Mamadou Bocary Diarra, dimanche 16 décembre, dans l’émission « Internationales » diffusée sur TV5 Monde en partenariat avec Le Monde et Radio France internationale. Lire aussi Pour la première fois au Mali, une fillette opérée à cœur ouvert Le 10 septembre, le centre hospitalier mère-enfant Le Luxembourg, à Bamako, accueillait une première au Mali : une opération à cœur ouvert sur une petite fille de 6 ans atteinte d’une malformation cardiaque. Trois mois plus tard, ils sont plus de 58 enfants à avoir bénéficié des deux nouveaux blocs opératoires dont la construction, financée par l’ONG française La Chaîne de l’espoir, apporte une lueur d’espoir dans ce pays déchiré par la guerre depuis 2012. Reste à trouver un mode de financement pérenne une fois que les bienfaiteurs seront repartis. Quinze opérations par mois Mamadou Bocary Diarra, 60 ans, n’en peut plus de devoir choisir, parmi les jeunes enfants sur sa liste d’attente, qui bénéficiera d’une opération à cœur ouvert. Avant la construction du centre, les enfants malades les plus chanceux pouvaient être opérés en France. Ils ont été environ 600 depuis les années 2000. « Ça faisait à peu près une quarantaine d’enfants par an au maximum, ce qui était nettement insuffisant », observe le médecin sur le plateau de TV5 Monde. En moins de quatre mois, l’équipe chirurgicale de l’hôpital Le Luxembourg a dépassé cette moyenne annuelle : 58 opérations ont été réalisées depuis septembre, soit quinze par mois. Mais ce n’est pas assez pour le chirurgien malien : « Nous comptons doubler ce rythme. Nous avons un volume d’attente considérable. Quand nous avons démarré la première opération, le registre d’attente était à plus de 3 000 enfants. Et ça, c’est ceux qui ont pu venir à Bamako. » La capitale rassemble 60 % des soins, pour seulement 12 % de la population. A l’hôpital Le Luxembourg, chirurgiens maliens, français et italiens se relaient dans les blocs opératoires pour traiter les malformations cardiaques des enfants. « Il faudra environ un an, un an et demi, avant que les chirurgiens maliens puissent opérer seuls », estime Mamadou Bocary Diarra. Aujourd’hui, ils ne sont que trois Maliens à réaliser ce genre d’opération, alors qu’« il faudrait huit chirurgiens pour que les deux blocs puissent fonctionner de façon permanente ». Une question de « volonté politique » C’est vers le pouvoir politique malien que Mamadou Bocary Diarra s’est d’abord tourné. Alors que le Mali reste un pays où l’accès aux soins est difficile, il en appelle à une implication financière plus importante : « Ce n’est pas au-dessus des moyens de nos pays. Il s’agit d’une volonté politique qui doit se manifester. Chaque pays choisit ses vivants et ses morts en fonction de l’orientation que l’on donne au budget. » Lire aussi Le tradipraticien, acteur marginalisé de la santé publique en Afrique francophone Quelques mois après avoir rencontré les autorités, le cardiologue espère encore : « J’attends beaucoup de la part du pouvoir public, parce que nous avons un ministre qui est chercheur. Je suis certain qu’il a les outils nécessaires pour mettre en œuvre une politique digne de ce nom. J’en attends aussi de la part du privé, des ONG locales, maliennes ou africaines, pour que nous nous donnions la main. La Chaîne de l’espoir nous a mis le pied à l’étrier. Nous avions besoin de cela pour démarrer, mais cela ne peut pas être une fin en soi. Il est temps de s’organiser à l’intérieur de nos pays pour nous prendre en charge nous-mêmes. C’est fondamental. » Celui qui plaide pour un réel développement des infrastructures nationales souhaite que les acteurs de son pays cessent en premier lieu de rejeter la faute sur le passé : « Il est hors de question de passer toute notre vie à pleurnicher sur une colonisation qui n’est plus d’actualité. Il n’y a pas un seul peuple qui n’ait pas été colonisé. Beaucoup de peuples se sont relevés d’eux-mêmes. » Il en va de vies… « Il s’agit de la santé de nos enfants. Vous ne pouvez pas laisser les enfants au sort d’une sélection naturelle, dénonce-t-il. C’est immoral. » Tancrède Chambraud
20/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/20/mali-on-ne-peut-pas-abandonner-les-enfants-malades-a-la-selection-naturelle_5400119_3212.html
« Les “ gilets jaunes ” ont offert un étrange miroir au pouvoir des investisseurs »
Multiples, insaisissables, exigeants, court-termistes… actionnaires et gilets jaunes fonctionnent, paradoxalement, de la même manière, constate le chercheur en gestion Rémi Jardat dans une tribune au « Monde ».
Tribune. Au milieu des années 1990, manageurs et syndicalistes partageaient ce constat : les salariés, les organisations syndicales étaient désemparés par la montée en puissance d’un nouvel acteur, intraitable autant qu’inaccessible, l’actionnaire. « Il n’y a plus d’adversaire identifié : l’exigence de rentabilité pour l’investisseur nous met face à une puissance anonyme, insaisissable, qui en veut toujours plus. Comment lutter contre cela ? », disaient-ils conjointement. Nous avons suffisamment invoqué ce pouvoir de la finance qui terrorise les politiques avec les crises de la dette, les salariés avec les « licenciements boursiers », les dirigeants d’entreprise eux-mêmes avec la volatilité du cours de l’action. Nous avons enseigné dans nos facultés et nos écoles de gestion les principes de bonne gouvernance censés accompagner voire encadrer ce nouveau monde. La multitude actionnariale exerce, comme nous l’expliquons à nos étudiants, une « discipline de marché » sur le dirigeant d’entreprise en revendant des actions lorsque ce dernier fait preuve d’inconduite : le cours de l’action baisse, la valeur de marché de l’entreprise et sa capacité d’emprunt également, des raiders boursiers pourront plus facilement racheter cette entreprise et en évincer le patron. De même les investisseurs en obligations sanctionnent-ils un Etat trop endetté qui fait montre d’indiscipline budgétaire. Sous cette pression, chefs d’entreprise et chefs d’Etat deviennent « raisonnables ». Pourtant, bien des scientifiques ont analysé à quel point ce pouvoir tire une partie de sa force de l’irrationalité qui l’anime. Mimétiques, plus sensibles aux préférences de leurs pairs qu’aux fondamentaux de l’entreprise, insatiables dans leurs exigences et aveugles aux enjeux de moyen terme, les investisseurs font la loi aux Etats, aux patrons, aux travailleurs, et cela de manière capricieuse, convulsive, aveugle, jusqu’à conduire comme en 2008 nos sociétés au bord de l’abîme. De nouvelles formes de résistance Or, qu’observe-t-on aujourd’hui ? Tout à coup le gouvernement augmente les revenus, les grandes entreprises accordent à tous des sursalaires, demain peut-être les ultrariches réintégreront le corps fiscal de la nation… Ce qui hier paraissait impossible est soudain devenu une évidence face à laquelle il n’existe « aucune alternative ». C’est qu’entre-temps une autre terreur s’est levée. Le mouvement des « gilets jaunes » a offert ces dernières semaines un étrange miroir au pouvoir des investisseurs. La multitude des « gilets jaunes » agit de manière virale, elle n’est jamais satisfaite, elle se dérobe, refuse l’émergence de toute souveraineté en son sein, affirme la primauté du court terme (la fin du mois) sur le long terme (la fin du monde), et son action s’accompagne de graves dommages collatéraux. Cette multitude anonyme, insatiable, insaisissable, oblige le politique à plier, mais dans un sens contraire à celui qu’imposaient auparavant les investisseurs.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/les-gilets-jaunes-ont-offert-un-etrange-miroir-au-pouvoir-des-investisseurs_5400117_3232.html
Anne-Sophie Lapix, reine du « Grand Echiquier »
La présentatrice du journal de France 2 reprend l’émission créée par Jacques Chancel.
Anne-Sophie Lapix présente « Le Grand Echiquier », jeudi 20 décembre, à 21 heures sur France 2. STÉPHANE GRANGIER France 2, jeudi 20 décembre à 21 heures, magazine « Personne ne devrait accepter de reprendre “Le Grand Echiquier” ! », s’exclame Anne-Sophie Lapix, actuelle présentatrice du JT de France 2, juste trois jours avant… de présenter, jeudi 20 décembre, sa version 2018 de l’émission créée par Jacques Chancel pour l’ORTF. Derrière l’humour, on détecte une pointe de stress chez celle qui s’attaque à un monument de la culture télévisuelle, porté durant plus d’un quart de siècle (1972-1989) par une figure charismatique du petit écran. « Jacques Chancel avait une présence, une façon unique d’interviewer des artistes… Je ne saurai pas la restituer. Je n’essaierai pas. » Anne-Sophie Lapix a pourtant décidé de relever le défi. Elle n’a pas eu à se battre pour ça, même si Stéphane Bern a bien été pressenti un temps, en août. « Je suis arrivée sur le projet tout à fait à la fin, quand tout était réglé. Je n’avais plus qu’à dire oui ou non. » Elle a dit oui à Pierre-Antoine Capton, patron de Troisième œil Productions, producteur de l’émission, pour quatre « Grand Echiquier » trimestriels. Et ce malgré le surcroît de travail et ses deux enfants (13 et 16 ans). Seule ­concession, elle passe de quatre JT hebdomadaires à deux, uniquement les semaines où elle présente « Le Grand Echiquier ». Journaliste à l’ascension qualifiée de fulgurante, passée par Bloomberg TV, LCI, « Zone interdite » sur M6, pour devenir « joker » de Claire Chazal au JT de TF1, présentatrice de « C à vous » et, depuis 2017, du JT de France 2 en remplacement de David Pujadas, Anne-Sophie Lapix relève donc le gant, et se creuse les méninges. Anne-Sophie Lapix a « 8 ou 9 ans » lorsqu'elle voit son premier « Grand Echiquier » à la télé. COLLECTION ANNE-SOPHIE LAPIX Née la même année que l’émission de Jacques Chancel – 1972 –, elle se souvient à peine de son premier « Grand Echiquier ». « J’étais à Saint-Jean-de-Luz [sa ville natale dans les Pyrénées-Atlantiques], donc je devais avoir 8 ou 9 ans. » Comme dans tout foyer d’alors, la télévision trônait dans le salon. « Le “Grand Echiquier” était le rendez-vous familial », au sein d’un foyer de musiciens amateurs. Même si « regarder, écouter du lyrique, Rostropovitch, séduisait surtout mes parents ! » Faute de pouvoir s’appuyer sur sa mémoire, en bonne élève, Anne-Sophie Lapix s’est attelée au visionnage des « Grand Echiquier », du moins « ceux où il se passe quelque chose » Faute de pouvoir s’appuyer sur sa mémoire, en bonne élève (Sciences Po, Centre de formation des journalistes), Anne-Sophie Lapix s’est attelée au visionnage des « Grand Echiquier », du moins « ceux où il se passe quelque chose ». La première frappait fort, avec une visite surprise à Louis de Funès jouant Oscar, des reportages et direct depuis New York, Los Angeles, Barcelone, et le voyage en live de Georges Brassens, du Bourget (Seine-Saint-Denis) à un village des Pyrénées-Atlantiques où il chantait. Une décennie plus tard, le 20 octobre 1985, Jacques Chancel présentait « un jeune philosophe qui déjà fait preuve d’une grande maturité », nommé Bernard-Henri Lévy. A son côté, une France Gall timide triture une pomme avant de chanter, parce que « C’est ce que je fais le mieux. » Sans oublier le fameux direct – toujours – de la place Rouge à Moscou, avant la chute du Mur. Ces heures d’archives ont convaincu la journaliste de faire, mais pas comme avant : « Dans des ­conditions différentes, avec des temps différents. Aujourd’hui, nous n’avons pas le même temps pour laisser parler les gens. » Ni le même rapport à l’image. Dans les années 1980, les téléspectateurs étaient en demande ; aujourd’hui ils sont saturés. Pour capter leur attention, il faut donc « être attractif, entrer dans l’univers des artistes. Les invités vont ainsi convier des personnalités qui les ont marqués ». « Un équilibre entre les arts » Quatre ans après la disparition de Jacques Chancel, le 23 décembre 2014, à l’âge de 86 ans, ce premier numéro de jeudi 20 décembre sera diffusé en direct depuis le Palais des beaux-arts de Lille. « Nous changerons d’endroit à chaque fois. Pour aller à la rencontre des Français en province, pour démocratiser la culture auprès des télé­spectateurs des régions. Je suis une provinciale », rappelle Anne-Sophie Lapix. L’émission est prévue pour durer deux heures trente « au minimum. Vu la difficulté de mettre tout ça en scène… » La présentatrice sera entourée d’une quinzaine d’artistes, dont l’acteur Daniel Auteuil, l’ex-danseuse étoile et directrice du Ballet de l’Opéra de Paris Aurélie Dupont, et le ténor Roberto Alagna. « Le casting a été établi par la rédaction en chef et les productrices. Je n’ai pas les commandes intégrales. Il a été choisi avec la volonté d’un équilibre entre les arts, la musique, la danse, le théâtre… » Tous styles fondus et confondus. Ainsi le duo de rap sage Bigflo et Oli se produira, « magnifié par l’orchestre symphonique de Lille. » La chanteuse Jain sera, elle, « accompagnée par les danseurs de Yoann Bourgeois », artiste protéiforme formé aux arts du cirque. Première satisfaction pour Anne-Sophie Lapix, ses enfants viendront – surtout pour Bigflo et Oli. Au-delà, elle aimerait « ne pas pouvoir poser toutes [ses] questions. Que les artistes s’interrogent les uns les autres, sans moi, dans un échange réciproque ». Celle qui a toujours refusé d’être la reine du JT va-t-elle devenir la reine du « Grand Echiquier » ? « On va faire comme on peut. Parfois, dans la vie, il faut savoir se jeter dans le vide. » Une maxime que n’aurait pas reniée Jacques Chancel. « Le Grand Echiquier », réalisé en direct de Lille par François Goetghebeur (France, 2018, 175 min). France.tv
20/12/2018
televisions-radio
https://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2018/12/20/anne-sophie-lapix-reine-du-grand-echiquier_5400104_1655027.html
Spectacle : « Kiss & Cry », une chorégraphie à quatre mains
La Belge Michèle Anne De Mey et son compagnon, le réalisateur Jaco Van Dormael, font escale à La Scala, à Paris.
Le spectacle « Kiss & Cry », mis en scène par Michèle Anne De Mey et Jaco Van Dormael à La Scala, à Paris. MAARTEN VANDEN ABEELE C’est en sortant de sa salle de bains que la chorégraphe belge Michèle Anne De Mey a eu l’idée de son solo Amor (2017). C’est dans la cuisine qu’elle l’a proposé au cinéaste Jaco Van Dormael. Et c’est sur la table de cette même cuisine qu’est né, il y a sept ans, leur spectacle Kiss & Cry, devenu depuis un best-seller. Les jouets des enfants, leur train miniature, les Playmobil, un sèche-cheveux, des feuilles mortes, des doigts qui s’enlacent, une fiction amoureuse… tout prend vie ­devant la caméra de Van Dormael. Lire la critique (parue en juin 2013) : « Kiss & Cry » ouvre les petites boîtes des souvenirs Unis à la ville comme à la scène, Michèle Anne De Mey et Jaco Van Dormael ont momentanément déménagé de Bruxelles pour camper pendant deux mois à ­Paris. Ils sont les invités de La Scala, la nouvelle scène privée du boulevard de Strasbourg, dans le 10e arrondissement : au menu jusqu’au 26 janvier, Kiss & Cry et Cold Blood, volets d’une trilogie dont le troisième temps, Amor, est à l’affiche jusqu’au 21 décembre au Théâtre Wolubilis, à Bruxelles, et au programme de la saison prochaine à La Scala. Une pièce montée parfaite pour sabler leur succès depuis 2011. Les deux premiers pans ont additionné 500 représentations. Kiss & Cry a été traduit en neuf langues, de l’anglais au coréen en passant par le grec. « A chaque fois, c’est une nouvelle musique, un autre rythme, un sens inédit », s’enthousiasme Michèle Anne De Mey. La création au bout des doigts Décrocher le gros lot est un cadeau du ciel. Surtout lorsqu’on ne s’y attend pas. « Nos amis étaient perplexes lorsque nous évoquions ­notre projet, et se demandaient ce qui allait en surgir, se souvient la chorégraphe. On ne se rendait pas compte de ce que l’on faisait. On avançait, on pataugeait, on était dans notre bulle. On inventait une sorte d’arte povera sans y penser. La photo s’est révélée à la fin. » Jaco Van Dormael ajoute : « Quand j’étais jeune, je pédalais dans la choucroute lorsque je réalisais un film et ça me faisait peur. Maintenant, je sais que c’est normal de ­pédaler, et ça me va très bien. » Chacun de son côté, Michèle Anne De Mey et Jaco Van Dormael n’en étaient pourtant pas à leur coup d’essai. Figure de la scène chorégraphique belge depuis le début des années 1980, complice d’Anne Teresa De Keersmaeker de 1982 à 1990, De Mey a créé sa compagnie en 1990. Elle a conçu une trentaine de spectacles, tout en codirigeant, de 2005 à 2016, Charleroi Danses. Jaco Van Dormael, metteur en scène et clown, a réalisé, entre autres, Toto le héros (1991), avec Michel Bouquet, Caméra d’or au Festival de Cannes, Le Huitième Jour (1996) et Mr. Nobody (2009). « Il me disait qu’il ne pouvait pas filmer la danse, qu’il ne savait pas choisir entre gros plan et plan d’ensemble, se souvient la chorégraphe. Un jour, je lui ai dit en agitant deux doigts sur la table : “Et si je fais ça, tu peux filmer la danse ?” Ce moment est devenu le prologue de Kiss & Cry. »
20/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/20/kiss-cry-choregraphie-a-quatre-mains_5400098_3246.html
« Prime Macron » : le retour du revenu universel
Pour notre journaliste Antoine Reverchon, la prime proposée par le président démontre que la simple rémunération du travail ne représente parfois pas un revenu suffisant pour vivre.
Assemblée générale des « gilets jaunes » de Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire), le 18 décembre. ARNAUD FINISTRE / HANS LUCAS POUR " LE MONDE" Descendre de l’Olympe de la théorie économique est sans doute tout aussi délicat et douloureux que déchoir de l’Olympe de la pratique du pouvoir politique. Les économistes – du moins un grand nombre d’entre eux – s’étaient réjouis de voir depuis dix-huit mois régner à Bercy, à Matignon et à l’Elysée des politiques qui avaient enfin intégré « les lois de l’économie » : seules les entreprises créent de la richesse ; c’est cette richesse qui, une fois répartie, crée les profits des investisseurs, les salaires des travailleurs – et des fonctionnaires par l’impôt, les prestations des assurances sociales et des aides publiques – par les cotisations et l’impôt ; le niveau de ces prestations et de ces aides doit donc être indexé sur la capacité des entreprises à les financer. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Crise sociale : comment financer les promesses de Macron Pour cela, il faut d’une part augmenter la capacité de financement des entreprises, et donc réduire les impôts qui pèsent sur leurs bénéfices et sur la rémunération de ceux qui y investissent ou qui les dirigent, les fameux « premiers de cordée » ; d’autre part réduire la dépense publique et respecter les règles budgétaires des traités européens, les prestations sociales étant revues à la baisse selon une logique assurancielle – pallier l’absence momentanée d’un revenu d’activité – et non plus selon une logique de droit à la solidarité. Le tout résumé d’une belle formule dont la multiplicité sémantique laisse rêveur : « Le travail doit payer. » A cette aune, augmenter le revenu des Français en puisant dans l’argent public comme vient de l’annoncer le président de la République apparaît comme une double hérésie, et l’on comprend que les « technocrates de Bercy » et leurs ministres aient eu un haut-le-cœur. C’est accorder un revenu supplémentaire qui n’est basé sur aucun gain de productivité ni aucune nouvelle activité créatrice de richesse ; c’est augmenter – de 10 milliards d’euros – la dépense publique qui, tôt ou tard, pèsera sur l’activité économique malgré les dénégations empressées d’économistes girouettes du « story-telling ». Prime d’activité et coup de pouce au smic Ce sont pourtant exactement les reproches que ces mêmes économistes adressaient à l’idée d’un revenu universel versé à tous les citoyens, idée défendue par quelques intellectuels, de nombreuses associations et un certain Benoît Hamon, qui fut candidat du Parti socialiste à l’élection présidentielle de 2017 et obtint au premier tour le score calamiteux de 6,35 %.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/prime-macron-le-retour-du-revenu-universel_5400095_3232.html
L’Italie roule sur l’or (noir) du caviar
Devant la Russie et l’Iran, l’Italie s’est imposée comme le 2e producteur mondial derrière la Chine.
La chaîne de production du caviar Calvisius de l’entreprise italienne Agroittica Lombarda, à Brescia. ALESSIA PIERDOMENICO / BLOOMBERG / GETTY C’est un mastodonte de 2 mètres de long, à l’aspect préhistorique. Corps allongé, tête en forme de bec, il pèse près de 200 kg. Vorace, l’esturgeon qui nous dévisage n’en fait pas moins la fine bouche. Après avoir aspiré goulûment des petites crevettes, il recrache un crustacé qui n’est pas de son goût, pour ensuite disparaître dans les eaux troubles. Nous ne sommes pas au bord de la mer Caspienne ni sur les rives de la mer Noire, mais dans le village de Calvisano, au cœur de la Plaine du Pô, en Lombardie. C’est ici, à 200 kilomètres de la mer, mais tout près d’une aciérie, que sont élevés les esturgeons de l’entreprise Agroittica Lombarda. Profitant de l’interdiction totale de la pêche de l’esturgeon, en voie d’extinction, l’Italie a damné le pion à la Russie et l’Iran, et s’est imposée comme le deuxième producteur mondial de caviar derrière la Chine. « On dit caviar, on pense immédiatement à la cuisine russe et à la vodka, mais un caviar frais se marie mieux avec du champagne. » Mario Pazzaglia, de Agroittica Lombarda Improbable, cette résurrection lombarde ? Pas tant que cela, selon Mario Pazzaglia. « Les Italiens mangeaient du caviar avant même que les Français n’apprennent à se servir de la fourchette ! », taquine le responsable des projets scientifiques et des relations extérieures de Agroittica Lombarda. Le Tintoret – qui a convié l’esturgeon à sa Création des animaux, une toile peinte en 1550 – confirme. Bartolomeo Sacchi aussi : en 1471, le gastronome cite l’or noir dans De honesta voluptate et valetudine, le premier ouvrage de cuisine à avoir été imprimé, best-seller parmi les élites de la Renaissance. Jusque dans les années 1950, les esturgeons agitent les eaux italiennes, du Pô lombard au Tibre romain, en passant par l’Arno florentin et même le golfe de Palerme. « Seuls les riches le dégustaient. Pour les pêcheurs, c’était comme tomber sur un coffre-fort, il était hors de question d’y toucher. Le produit n’est jamais entré dans les mœurs », regrette Mario Pazzaglia. La dégradation des eaux et la pêche abusive auront ensuite presque raison du poisson… sauvé par la rencontre entre un visionnaire lombard et un biologiste russe. Nous sommes en 1978. A la tête d’une aciérie, Gino Ravagnan optimise les immenses quantités d’eau et de chaleur dégagées par son usine avec un élevage d’anguilles : l’eau de l’aciérie chauffe les bassins. Mais c’est d’esturgeons que rêve ce passionné d’aquaculture. Difficile, à l’époque, d’obtenir des lumières sur le poisson osseux : aucune information ne filtre depuis l’Union soviétique. Le salut viendra du professeur Serge Doroshov, exilé en Californie où il travaille sur les esturgeons blancs dans le fleuve Sacramento. « Il nous a envoyé quelques larves », raconte Mario Pazzaglia. Quarante ans plus tard, l’exploitation italienne compte près de 350 000 esturgeons, et produit, sous la marque Calvisius, près de 28 tonnes de caviar l’année, écoulées dans toute l’Europe, notamment en France, mais aussi aux Etats-Unis et même en Russie – il se murmure que Vladimir Poutine en raffolerait. Vingt ans pour pondre Pendant plusieurs années, l’Italie a plastronné en tête de la production mondiale. « La Chine a fini par nous dépasser, mais ils pâtissent d’une mauvaise image en raison de la pollution des eaux », glisse Mario Pazzaglia. Après nous avoir aspergé de désinfectant, il nous invite à enfiler blouse, bonnet et chaussons pour une visite dans l’unité de production. On y apprend que les esturgeons ont 250 millions d’années, vivent plus de 100 ans, et aiment prendre leur temps avant de pondre : il faut patienter vingt ans pour l’appétissant béluga. Voilà qui explique les prix pour le moins salés du caviar. Et oblige l’entreprise à anticiper l’évolution du marché. Quid d’une démocratisation ? « La plupart des gens n’ont jamais goûté de caviar et n’ont aucune idée de son prix, c’est cher bien sûr, mais c’est comme du bon vin, si on est curieux et qu’on veut s’offrir une belle expérience, c’est possible », assure Mario Pazzaglia. Pour une boîte de 30 grammes, compter entre 50 et 179 euros en fonction des variétés. Mais attention aux arnaques, prévient notre guide : « Des chefs étoilés servent du caviar chinois en le faisant passer pour un produit d’excellence. Les œufs devraient arriver à table dans leur boîte, ouverte devant le client, comme pour le vin : lorsqu’on commande un bon cru, on veut voir la bouteille ! » Mario Pazzaglia organise des visites publiques de l’usine avec dégustation à la clé, et travaille avec des écoles de cuisine et des chefs pour bousculer les idées reçues : « On dit caviar, on pense immédiatement à la cuisine russe et à la vodka, mais d’un point de vue sensoriel, c’est abscons ! Cela faisait sens lorsque la chaîne du froid n’existait pas : le produit était mal conservé, et l’alcool fort permettait d’atténuer une saveur trop prononcée. Mais un caviar frais se marie mieux avec du champagne. » Pour nous convaincre, il nous sert un verre de Franciacorta et nous invite à déguster du caviar d’esturgeon blanc, servi sur une cuillère nacrée – l’argent compromettrait le goût : « Il faut jouer avec les œufs, les faire rouler entre la langue et le palais pour stimuler le contact avant l’explosion des arômes. Les enfants adorent cette variété, également très prisée par les compagnies aériennes. » La saveur est en effet très douce, évoquant moins le poisson que le beurre et les fruits secs. « Le caviar se rapproche plus de l’univers de la pâtisserie que de celui des fruits de mer », abonde le biologiste, qui a travaillé sur des associations, très réussies, jure-t-il, entre caviar et chocolat blanc ou encore caviar et glace. Gualtiero Marchesi, le fondateur de la nouvelle cuisine italienne, s’est quant à lui lancé dans de délicieux spaghetti au caviar : « La recette est simple, mais facilement ratable, tempère Mario Pazzaglia, notamment en termes de température : la chaleur des spaghetti ne doit pas abîmer la fraîcheur des œufs. » Pour une mise en bouche moins risquée, on peut positionner quelques œufs entre le pouce et l’index : la chaleur du corps fera éclore les saveurs. Aux sceptiques, vous rétorquerez que c’est ainsi que se dégustait le caviar du temps du Tintoret. Lire aussi Les adresses
20/12/2018
m-gastronomie
https://www.lemonde.fr/m-gastronomie/article/2018/12/20/l-italie-roule-sur-l-or-noir-du-caviar_5400091_4497540.html
Claas Relotius, journaliste vedette du « Spiegel » qui falsifiait ses articles
Ce journaliste allemand, dont un reportage en Syrie a été primé, avait écrit des « choses purement imaginées ».
La direction du « Spiegel » s’est excusée auprès de ses lecteurs, choisissant de faire elle-même la transparence sur les articles « falsifiés ». KAY NIETFELD / AP C’était un journaliste vedette, une des plumes du Spiegel, un jeune homme de 33 ans qui, le 3 décembre, à Berlin, s’était vu décerner le Prix du meilleur reportage de l’année pour un article sur la guerre en Syrie paru en juin dans le grand hebdomadaire allemand. Deux semaines plus tard, la gloire a laissé la place à l’opprobre. Dans un long article publié mercredi 19 décembre sur son site Internet, le Spiegel affirme que « toutes les sources » du reportage pour lequel Claas Relotius a été primé sont « douteuses ». Avant d’ajouter : « Beaucoup de choses sont purement imaginées, inventées, mensongères. Citations, lieux, scènes, personnages soi-disant de chair et de sang. Fake ! » Mais l’accusation ne s’arrête pas là. Selon le Spiegel, ce sont au moins quatorze des quelque soixante articles écrits par Claas Relotius dans l’hebdomadaire depuis 2011 qui seraient « en partie falsifiés ». D’autres titres pourraient être concernés : avant d’être intégré à la rédaction du Spiegel, en 2017, le journaliste avait « pigé » pour de nombreux autres journaux, comme la Süddeutsche Zeitung, la Frankfurter Allgemeine Zeitung ou Die Welt. C’est à la suite d’un reportage publié à la mi-novembre que le Spiegel a démasqué son reporter vedette. Consacré à une milice de citoyens américains patrouillant le long de la frontière avec le Mexique pour barrer la route aux migrants venus du Sud, cet article avait été cosigné avec un autre journaliste du Spiegel, lequel avait eu des doutes sur l’authenticité des sources citées par son confrère. « La peur de l’échec » « Après avoir commencé par nier, Relotius a finalement avoué en fin de semaine dernière », indiquait, mercredi, le Spiegel. Selon l’hebdomadaire, le reporter, qui a désormais quitté l’entreprise, a « trompé avec intention et de façon méthodique », n’a « jamais rencontré nombre de protagonistes qu’il cite ». Quant à ses « descriptions », « beaucoup sont inspirées d’autres médias ou d’extraits vidéos ». Pour expliquer son besoin d’enjoliver ses récits afin de les rendre plus plaisants à lire, Claas Relotius aurait évoqué « la peur de l’échec » : « La pression que je me mettais à ne pas m’autoriser à échouer grandissait au fur et à mesure que j’avais plus de succès », aurait-il avoué à sa hiérarchie. « Je suis malade et j’ai besoin qu’on m’aide », aurait-il ajouté. Dans son article de mercredi, le Spiegel affirme que l’affaire est « un des moments les plus difficiles de [ses] 70 ans d’histoire », « un choc » pour l’ensemble des employés du magazine de Hambourg, fondé en 1947 et longtemps considéré comme le temple du journalisme d’investigation en Allemagne. Soucieux de sauver sa réputation, le Spiegel a présenté ses excuses auprès de ses lecteurs. Choisissant de faire elle-même la transparence sur cette affaire, la direction a annoncé la mise en place d’une « commission de trois journalistes expérimentés », deux membres de la rédaction, l’une venue de l’extérieur, afin d’« enquêter sur les falsifications qui ont eu lieu » et de « proposer des améliorations aux procédures d’authentification au sein de la rédaction ».
20/12/2018
actualite-medias
https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2018/12/20/scandale-au-spiegel_5400087_3236.html
A Marseille, un conseil municipal sous haute tension
Les conséquences politiques de l’effondrement d’immeubles ayant causé la mort de huit personnes le 5 novembre secouent la majorité LR de Jean-Claude Gaudin, un maire contesté comme jamais.
Le maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin, lors du conseil municipal le 20 décembre. Theo Giacometti/ Hans Lucas pour Le Monde En reportant de dix jours le conseil municipal du 10 décembre, le maire (Les Républicains, LR) de Marseille, Jean-Claude Gaudin, espérait, en vieux routier de la politique, bénéficier d’un climat plus apaisé pour affronter l’inévitable débat sur sa gestion de l’habitat indigne. Peine perdue. L’annonce de mesures d’urgence et la réception, in extremis, mardi 18 décembre, des collectifs citoyens qui pointent les responsabilités de sa municipalité dans le drame de la rue d’Aubagne, qui a fait huit morts le 5 novembre, n’ont pas atténué la tension. Pire, en ce jeudi 20 décembre, des colères longtemps disparates contre la politique municipale convergent. Les membres du Collectif contre le PPP (partenariat public-privé) des écoles, un plan de rénovation à un milliard d’euros qui doit être confié au privé, et ceux de l’Assemblée de la Plaine, qui s’oppose au réaménagement brutal de la plus grande place de la ville, seront présents devant un hémicycle transformé en bunker. En grève pour dénoncer « des niveaux de sous-effectif jamais atteints mettant en danger les enfants », les agents des crèches et des écoles manifesteront également toute la matinée à l’appel des syndicats CGT, FO et FSU. Les 101 conseillers municipaux marseillais, qui se réunissent pour la première fois depuis la catastrophe du 5 novembre, seront accueillis par huit cercueils portés par les familles et les proches des victimes de l’effondrement. « C’est une façon de demander des comptes à cette municipalité qui n’a rien fait pour prévenir ce qui s’est passé », accuse Kevin Vacher, un des fondateurs du Collectif du 5 novembre. Une façon aussi, selon cette structure d’aide aux sinistrés du quartier Noailles, de rappeler à M. Gaudin qu’il n’a toujours pas reçu les familles des victimes, quarante-trois jours après le drame. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Marseille : rue d’Aubagne, rue de colère Crise humaine, financière et politique Le conseil municipal doit s’ouvrir par le vote de huit rapports validant une série de mesures d’urgence. Prise en charge des frais d’obsèques pour une enveloppe de 100 000 euros, une promesse du maire qui attendait d’être officialisée pour se concrétiser par un remboursement ; mise en place avec l’Etat d’une mission de maîtrise d’œuvre urbaine et sociale pour accélérer le relogement des personnes concernées ; gratuité des cantines scolaires et des crèches pour les familles évacuées… Des délibérations qui pourront difficilement juguler la crise de l’habitat indigne qui semble engloutir Marseille, alors que les associations citoyennes réclament la réquisition de logements vides et la mise en place d’une charte de « droit au retour dans leur quartier » pour les personnes délogées. De fait, depuis le 5 novembre, 195 immeubles ont été évacués ; 1 600 Marseillais vivent provisoirement à l’hôtel ou dans des appartements de court séjour. Une situation, qui, selon nos informations, a déjà coûté 4 millions d’euros à la collectivité.
20/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/20/a-marseille-un-conseil-municipal-sous-haute-tension_5400081_3224.html
« Face aux “gilets jaunes”, l’action répressive est d’une ampleur considérable »
Le sociologue Fabien Jobard note que le bilan, en termes de blessés, de ce mouvement social est sans précédent depuis Mai 68.
Un « gilet jaune » blessé secouru par d'autres manifestants, le 15 décembre, à Nantes. JEREMIE LUSSEAU / HANS LUCAS POUR "LE MONDE" Fabien Jobard est directeur de recherches au CNRS, au sein du Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (Cesdip). Il est également chercheur au Centre Marc-Bloch à Berlin. Il a coécrit, avec Jérémie Gauthier, Police : questions sensibles (PUF, 108 pages, 9,50 euros), et, avec Jacques de Maillard, Sociologie de la police. Politiques, organisations, réformes (Armand Colin, 2015). Les forces de l’ordre ont réalisé un nombre record d’interpellations préventives le 8 décembre, en amont des mobilisations des « gilets jaunes ». Près de 1 500 personnes ont été arrêtées en France. Que vous inspire ce chiffre ? A strictement parler, ces interpellations ne sont pas préventives : elles répriment une incrimination créée sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui consiste à se regrouper en vue de se préparer à commettre, par exemple, des dégradations. « En vue de la préparation » permet d’interpeller un très grand nombre de personnes dans un très large périmètre et, in fine, de les empêcher de manifester. Ce n’est pas la Préfecture de police, ce ne sont pas les policiers qui empêchent de manifester, mais bel et bien notre droit ordinaire, et c’est le signe d’une évolution marquante. Le droit n’exige plus des éléments matériels incontestables, comme une arme par destination [un objet qui, sans être une arme, peut être employé comme tel], pour empêcher des gens de prendre part à une manifestation, mais une simple intention déduite d’éléments incertains, mais suffisants pour placer en garde à vue durant le temps de la manifestation. Beaucoup de responsables aujourd’hui souhaiteraient réserver aux manifestants le même traitement qu’aux supporteurs de football : identifier ceux qui sont potentiellement violents dans un fichier et les assigner à résidence le jour de la manifestation. Mais on ne peut pas, car manifester est un droit fondamental (à la différence d’assister à un match de foot). Alors, l’incrimination qui permet d’interpeller sur un motif très large tout petit groupe proche du lieu de la manifestation est un mécanisme de substitution, à coûts très élevés. Il est très coûteux car il est très consommateur de forces sur place et multiplie les occasions de face-à-face en amont de la manifestation. Près de 1 500 gardes à vue en une journée, c’est un record, bien au-delà de ce que l’on a vu à l’occasion de sommets internationaux tels que, dernièrement, le G20 de Hambourg, pourtant marqué par des destructions et, plus rarement, des pillages. Articulée à cette justice très particulière, là aussi propre à la France, qu’est la comparution immédiate, l’action répressive est d’une ampleur considérable.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/face-aux-gilets-jaunes-l-action-repressive-est-d-une-ampleur-considerable_5400077_3232.html
« Le statu quo nous mène tout droit vers une dissolution de la zone euro »
Conserver l’euro est nécessaire mais ne sera possible que si les dirigeants européens sortent d’une conception du rôle de la monnaie qui date d’un autre siècle, avance l’économiste Thomas Lagoarde-Segot dans une tribune au « Monde ».
Tribune. Le 1er janvier 1999, l’euro est devenu la monnaie légale des Etats membres participants qui, à cette date, ont fixé les taux de change de leurs monnaies respectives avec la monnaie unique de manière irrévocable, trois ans avant son arrivée dans le porte-monnaie des citoyens de la zone euro. Vingt ans plus tard, l’enthousiasme a laissé place à une profonde crise de légitimité qui menace la survie de l’Union européenne. La raison fondamentale de cette crise est que la monnaie unique repose sur une théorie d’un autre siècle, qui n’est jamais parvenue à incorporer de façon satisfaisante le fonctionnement réel des systèmes monétaires et financiers, comme l’a démontré l’incapacité du modèle dominant à prévoir la crise de 2008. Sauver la construction européenne nécessite donc, en amont, de lever plusieurs idées fausses sur la monnaie et sur la dette publique. Contrairement à la vulgate, la monnaie n’est pas un « voile sur les échanges », pas plus qu’elle ne « tombe d’un hélicoptère ». Elle est créée – et détruite – par des impulsions numériques dans les ordinateurs bancaires, dans la seule limite des régulations comptables et des conventions temporaires que des gouvernements élus édictent et s’imposent à eux-mêmes. Cette nuance est centrale. Création monétaire Expliquons-nous. Dans un système monétaire souverain (comme le dollar canadien ou la couronne suédoise), l’Etat désigne et émet la monnaie utilisée pour le paiement de l’impôt, ce qui garantit son acceptabilité par le public. Il taxe en débitant les réserves bancaires et dépense en créditant les réserves et dépôts bancaires. Si l’Etat crédite davantage de comptes qu’il n’en débite, il enregistre un déficit, dont la contrepartie comptable est l’accumulation de richesse financière par le secteur privé (cash, réserves et obligations d’Etat). L’Etat émetteur de monnaie ne peut donc jamais manquer de ressources financières – les gigantesques émissions obligataires en temps de guerre en sont une preuve indiscutable. Le lieu commun d’un Etat soumis à une « contrainte budgétaire » et devant lever l’impôt pour dépenser à moins d’emprunter et de « creuser la dette publique » ne correspond pas à la réalité d’un système monétaire souverain. Bien entendu, si l’Etat peut dépenser autant qu’il le souhaite, cela n’implique pas qu’il doive le faire ! Mais si des dettes excessives se sont accumulées dans certains secteurs de l’économie (comme le secteur financier), cela implique que des actifs financiers correspondants sont détenus par d’autres secteurs. L’Etat, qui détient le pouvoir de taxation et de création monétaire, doit alors utiliser ses prérogatives pour redistribuer la dette et le crédit en accord avec l’intérêt général. Cela s’est produit durant la période de Bretton Woods, où les dettes publiques furent liquidées par la croissance économique et les taux réels négatifs.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/le-statu-quo-nous-mene-tout-droit-vers-une-dissolution-de-la-zone-euro_5400076_3232.html
Entreprises : la ligne de crête de Macron
Dans sa chronique, la journaliste du « Monde » Audrey Tonnelier dresse un premier bilan des mesures annoncées par le président de la République pour calmer la colère des « gilets jaunes ».
Chronique « Tendances France ». Le plus dur semble passé. La cinquième journée de mobilisation des « gilets jaunes », samedi 15 décembre, a marqué un reflux du mouvement. Les 10 milliards d’euros de mesures sociales et fiscales annoncées dans l’urgence par Emmanuel Macron, bien qu’encore brouillonnes, commencent à prendre forme. Et même si l’opposition a beau jeu de dénoncer l’« insincérité » (Valérie Rabault, à gauche) et les « embrouillaminis » (Eric Woerth, à droite) du gouvernement, ce dernier semble s’être assuré que les principales dispositions entreront en vigueur dès janvier 2019. Dans l’opinion publique, la crise laissera des traces, mais l’incendie semble circonscrit. En revanche, quid des entreprises ? Depuis la campagne présidentielle, Emmanuel Macron a placé son action sous le signe de l’attractivité économique de la France, auprès des patrons comme des investisseurs internationaux. Tous ont observé avec effroi les soubresauts de ces dernières semaines, qu’il s’agisse des dégradations place de l’Etoile et dans les beaux quartiers de Paris, ou des revirements de politique économique réclamés par les manifestants et l’opposition (rétablissement de l’ISF, suppression du CICE…) « Comment faire un geste fort pour répondre au ras-le-bol fiscal sans remettre en cause les orientations “business friendly” du gouvernement ? » Face à ces inquiétudes, la voie était étroite. Comment faire un geste fort pour répondre au ras-le-bol fiscal et à la demande de justice sociale des « gilets jaunes », sans remettre en cause les orientations « business friendly » du gouvernement ? Comment poursuivre une politique économique dite « de l’offre » qui, parce qu’elle est censée agir d’abord sur l’investissement, et ensuite seulement sur les emplois et la croissance, est par définition plus longue à donner des résultats tangibles qu’une hausse directe du pouvoir d’achat des Français ? L’exécutif semble avoir réussi à évoluer sur cette ligne de crête. D’abord, l’annonce de la hausse de 100 euros des revenus des personnes touchant le smic ménage un patronat dont la ligne rouge a toujours été la hausse du salaire minimum, car elle renchérit le coût du travail peu qualifié. Ensuite, la transformation en baisse de charges du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE), qui entraîne un double versement de 20 milliards d’euros en direction des entreprises en 2019, n’est pas remise en cause. La baisse des charges patronales au niveau du smic, prévue pour octobre 2019 et dont une partie de la majorité réclamait un report à 2020, a été préservée. De même que la suppression de l’ISF – même si, en expliquant que la réforme sera revue en cas d’absence de résultats, le gouvernement a probablement écorné une partie de son efficacité espérée.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/entreprises-la-ligne-de-crete-de-macron_5400075_3232.html
Le qi gong sur ordonnance
A Strasbourg, des ateliers sont proposés chaque semaine dans le cadre du sport santé sur ordonnance pour des patients qui souffrent de maladies chroniques ou certaines personnes âgées.
Dix mille pas et plus. Ce matin de novembre, la séance démarre doucement. La dizaine de personnes, à majorité féminine, est concentrée. D’une voix douce, Svetlana Nedelkina, enseignante, accompagne les mouvements de qi gong, en prenant les images d’un lion, d’une tortue, d’un ours. L’idée est d’harmoniser mouvements et respiration, ce qui nécessite une grande concentration. Une musique douce accompagne les mouvements, corrigés si nécessaire de façon bienveillante. C’est l’un des ateliers proposés chaque semaine dans le cadre du « sport santé sur ordonnance » lancé en 2012 par la ville de Strasbourg, pour des personnes qui souffrent de maladies chroniques ou, depuis peu, des personnes âgées désireuses de bouger. Dans le parc de la citadelle, à Strasbourg. Jean-François Badias Le qi gong, qui signifie littéralement en chinois « travail et maîtrise de l’énergie », consiste en un enchaînement de mouvements et de postures, « en général proposé aux personnes qui ont besoin d’une activité douce », explique Svetlana Nedelkina, chercheuse en biologie, devenue enseignante de qi gong grâce à sa passion pour cette discipline. Elle a aussi suivi une formation spécifique de sport santé. « Les pratiquants nous signalent une diminution des douleurs, une baisse de la tension artérielle chez l’hypertendu, une amélioration de problèmes du dos ou des genoux, de la souplesse, du sommeil, des effets antistress, une capacité retrouvée pour faire les gestes du quotidien et un bien-être général », souligne l’enseignante. Des effets qui commencent à être démontrés par la littérature scientifique. Pas de questions de performance L’une des participantes, Josiane Capodicasa, confirme : « Le fait de rebouger me fait du bien, ça me redonne de l’énergie et c’est très motivant de faire quelque chose en groupe. » Cette femme de 64 ans a toujours été sportive (marche en montagne, natation), mais « des accidents successifs, des problèmes de surpoids m’ont fait tout arrêter et perdre confiance en mes capacités physiques, avec en outre la peur de réveiller des douleurs », raconte-t-elle. L’inscription dans un club de sport était alors exclue. Pas question ici de performance. Un médecin qui voit son bilan sanguin et ses résulatts au niveau de la glycémie et de la tension artérielle l’oriente vers les ateliers sport santé de la ville. A l’issue de l’entretien, elle opte pour l’aquamarche et le qi gong. Assidue depuis mi-septembre, Josiane Capodicasa compte bien continuer ! Pionnière du sport sur ordonnance, la ville de Strasbourg propose depuis 2012 la pratique d’une activité physique, « une thérapeutique non médicamenteuse », comme le dit le docteur Alexandre Feltz, adjoint au maire chargé des questions de santé, initiateur du projet. Avant de se lancer, chaque participant doit s’être vu prescrire par son médecin une activité physique. Puis elle ou il rencontre un éducateur, qui évalue la condition physique. Et l’oriente vers l’activité la plus adaptée en fonction de ses possibilités et de ses envies. La première année est gratuite pour le patient, les deux suivantes sont proportionnelles aux revenus.
20/12/2018
sciences
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/20/le-qi-gong-sur-ordonnance_5400070_1650684.html
Avec « La Toile du monde », Antonin Varenne électrise le Paris de 1900
1900 : l’Exposition universelle célèbre la modernité dans la capitale, que parcourent deux Américains en quête de leurs racines – et d’amour. Un roman étincelant.
La Toile du monde, d’Antonin Varenne, Albin Michel, 352 p., 21,50 €. Dans l’Exposition universelle de Paris, en 1900. LÉON ET LÉVY / ROGER VIOLLET A proximité du vélodrome municipal, entre les chênes du bois de Vincennes, un campement d’Indiens. La scène est inhabituelle mais, en ce printemps 1900, au moment de l’inauguration de l’Exposition universelle, Paris s’est parée de mille couleurs insolites et déroutantes. Le monde entier s’y est donné rendez-vous pour le lancement de ce grand XXe siècle à venir, et même une troupe d’Amérindiens et de cow-boys s’y donne en spectacle – une troupe qu’il faut donc bien loger quelque part, avec chevaux et tipis. C’est sur la toile de l’un de ceux-ci que le regard s’arrête, couverte de dessins et de symboles complexes, d’objets et de personnages, et même d’une ligne de chemin de fer qui s’entortille autour de la structure en cône. Ici loge Joseph, métis de Païute et de Blanc, rendu fou par les univers qui cohabitent en lui. Il est un cousin d’Aileen Bowman, mère française et père anglais, journaliste et féministe, venue officiellement à Paris pour l’Exposition universelle, mais officieusement à sa recherche. Allures atmosphériques Bowman ? Oui, comme le personnage principal de Trois mille chevaux-vapeurs (Albin Michel, 2014), roman d’aventures de très haute volée, le premier d’une série de trois pour Antonin Varenne (avec Equateur, en 2017, et aujourd’hui La Toile du monde), mini-fresque de la seconde moitié du XIXe siècle aux Amériques et en Europe, formidable galerie de portraits de famille, si l’on peut dire, puisque beaucoup de personnages sont apparentés. Le premier livre était véritablement la peinture d’un protagoniste hors-norme, le deuxième, un trépidant voyage du Nord au Sud, le troisième est essentiellement parisien, il a des allures atmosphériques, plus immobile et plus mélancolique que les précédents, dévoré par une sensualité de tous les instants, aussi. Peut-être cela tient-il en partie à la décision d’Antonin Varenne (inédite pour lui, a priori) d’écrire ce roman en costume féminin – choisissant une héroïne bisexuelle, militante, dans l’appétit du monde et d’une ville, Paris, qui fait ici honneur à sa réputation de l’époque. Des chroniques émaillent le récit, dont certaines sous pseudonymes et à la première personne, évidemment écrites par Aileen Bowman, mais où c’est Paris, fardée comme une demi-mondaine, « putain des despotes », qui parle dans les pages du premier quotidien féministe du monde, La Fronde (1897-1905, fondé par une ancienne journaliste du Figaro, Marguerite Durand, écrit par des femmes pour des femmes). L’une des grandes réussites de La Toile du monde tient à l’absence de précautions de son auteur, pourrait-on dire. En effet, il parvient se glisser dans la peau de son héroïne (et sa peau est aussi dure que sensible) pour remettre constamment en perspective le combat féministe et l’émancipation du désir, la défense des droits et la libération sexuelle. Dans le mouvement de ce roman d’aventures, tout cela fonctionne et donne un sens, une direction, à un propos qui n’y va pas par quatre chemins.
20/12/2018
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/20/avec-la-toile-du-monde-antonin-varenne-electrise-le-paris-de-1900_5400068_3260.html
Orange et Pôle emploi s’entendent en faveur de l’emploi des personnes handicapées
Le recrutement par simulation, qui fait fi de l’expérience et du niveau de diplôme des candidats, devrait faciliter leur entrée dans l’entreprise. Pôle emploi annonce son ambition de devenir « un partenaire de premier rang en matière de handicap ».
« Orange compte aujourd’hui 7 % de ses salariés en situation de handicap, mais souhaite aller plus loin et recruter sur ses cœurs de métier 150 collaborateurs, 360 alternants et stagiaires en situation de handicap de 2017 à la fin de 2019. » DANAE MUNOZ / Ikon Images / Photononstop Esthéticienne de formation, Aurélie a travaillé quinze ans dans plusieurs instituts de beauté, « jusqu’au jour où ce n’était plus possible ». Au café littéraire du groupe Orange dans le 15e arrondissement de Paris, devant un parterre de journalistes, et assise près du directeur général de Pôle emploi, Jean Bassères, et de la directrice des ressources humaines d’Orange, Valérie Le Boulanger, la trentenaire revient sur la malformation congénitale qui a fini par la priver de son emploi, et lui a valu tant de refus. « Je me suis inscrite à Pôle emploi, mais entre l’absence de diplômes et le handicap, trouver un travail relevait de l’impossible. » Ou presque. Aurélie travaille désormais comme conseillère commerciale pour Orange. Et ce, grâce au recrutement par simulation, une pratique qui va être démocratisée avec la signature d’un accord de partenariat en faveur de l’emploi des personnes handicapées, annoncé par Orange et Pôle emploi vendredi 7 décembre. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Handicap : malaise dans le secteur « protégé et adapté » Concrètement, l’accord de partenariat va installer une relation de proximité entre les référents diversité d’Orange et les représentants régionaux de Pôle emploi. Dans chaque territoire, les deux partenaires établiront conjointement un plan d’action qui prendra en compte les besoins et les ressources disponibles et décrira les modalités d’intervention sur le terrain. Recrutement par simulation « Par la signature de cet accord avec Pôle emploi, Orange réaffirme ses engagements en faveur de l’emploi et de l’insertion des personnes en situation de handicap. Les actions concrètes mises en œuvre dans ce cadre témoignent de notre volonté collective d’inclusion et de notre attachement à la diversité », explique Valérie Le Boulanger. Orange compte aujourd’hui parmi ses salariés 7 % de handicapés, mais souhaite aller plus loin et recruter dans ses cœurs de métier 150 collaborateurs, 360 alternants et stagiaires en situation de handicap de 2017 à la fin de 2019. « Nous avons atteint et même dépassé l’obligation légale, mais nous souhaitons continuer à recruter des personnes en situation de handicap. Le problème, c’est que 80 % de la population en situation de handicap n’a que son bac, alors que chez Orange, nous recrutons sur bac + 2 minimum, et toutes les boîtes s’arrachent les profils spécialisés », détaille Sandrine Laborde, directrice du département recrutement régions de France chez Orange. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le handicap est un peu mieux intégré en entreprise Recrutement par simulation, cursus de professionnalisation, journées de présentation de métiers, visites du site d’Orange pour des personnes handicapées… toutes ces initiatives, développées avec Pôle emploi, permettent au groupe de recruter des candidats sans diplôme ou avec un diplôme sans rapport avec les postes sur lesquels embauche le groupe — conseiller ou ingénieur commercial, technicien d’intervention, ingénieur réseau, data scientist. « Cet accord nous engage à faire un pilotage national de toutes les actions sur le territoire et à mettre en place les bonnes méthodes », se réjouit Mme Laborde.
20/12/2018
emploi
https://www.lemonde.fr/emploi/article/2018/12/20/orange-et-pole-emploi-s-entendent-en-faveur-de-l-emploi-des-personnes-handicapees_5400069_1698637.html
« En l’Europe, l’équité, l’environnement et le droit doivent l’emporter sur la loi du marché »
Patrick d’Humières, consultant en stratégie, estime, dans une tribune au « Monde », que l’Etat français peut user des instruments juridiques des conventions sociales internationales pour s’opposer à la fermeture de l’usine Ford.
Tribune. La décision autiste de Ford concernant l’avenir de son établissement industriel de Blanquefort, près de Bordeaux [le constructeur a annoncé jeudi 13 décembre l’arrêt de la production sur ce site en août 2019, écartant l’offre de reprise de l’entreprise belge Punch Powerglide soutenue par l’Etat], remet sur le devant de la scène la question des relations entre les grandes entreprises et les Etats : qui commande ? Pour sa part, la société civile répond clairement : aux Etats de faire respecter les valeurs qui fondent la souveraineté de nos sociétés démocratiques et ce d’autant plus qu’elles ne cessent de s’engager dans des traités internationaux qu’elles sont censées faire respecter, comme les conventions de l’Organisation internationale du travail, les principes de l’OCDE, la charte des Nations unies sur les droits de l’homme, etc. Dans le cas de Ford, aucune justification ne pourra légitimer le refus d’une continuation d’activité qui conserve un maximum d’emplois Les opinions publiques ressentent aujourd’hui comme un déni de démocratie l’impuissance des pouvoirs publics à utiliser un arsenal juridique désormais très complet pour faire valoir la primauté du politique sur l’économique. Il est d’autant plus étonnant que le Conseil constitutionnel ait décidé, en 2017, de censurer la loi sur le devoir de vigilance des multinationales, qui prévoyait d’infliger une amende aux firmes qui ne respecteraient pas leur obligation de prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales. L’application extraterritoriale de ces principes est pourtant plus que jamais nécessaire à l’époque de la mondialisation. Dans le cas de Ford, aucune justification ne pourra légitimer le refus d’une continuation d’activité qui conserve un maximum d’emplois, ne serait-ce qu’au regard des principes directeurs de l’OCDE signés par plus de quarante pays et qui imposent aux entreprises de « coopérer avec les partenaires sociaux et les autorités nationales compétentes pour atténuer au maximum tout effet défavorable » aux salariés. Ce point s’inscrit dans le cadre de « la conduite responsable des affaires » que les Etats développés et les grandes entreprises revendiquent aujourd’hui, mais dont elles se gardent encore d’appliquer rigoureusement les modalités, prenant le risque d’enlever toute crédibilité à ces approches de « régulation douce » et ouvrant la porte aux mesures coercitives à contre-courant d’une « globalisation civilisée » à laquelle on voudrait croire.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/en-l-europe-l-equite-l-environnement-et-le-droit-doivent-l-emporter-sur-la-loi-du-marche_5400066_3232.html
Carlos Ghosn pourrait bientôt sortir de prison au Japon
Un tribunal a rejeté une demande d’extension de garde à vue du PDG de Renault, mis en examen pour n’avoir pas déclaré tous ses revenus. Le parquet de Tokyo a fait appel de cette décision.
Carlos Ghosn, PDG de Renault et de l’Alliance Renault-Nissan, le 8 novembre 2018. LUDOVIC MARIN / AFP Un mois après son arrestation surprise au Japon, et alors que personne ne s’y attendait, Carlos Ghosn peut espérer être libéré bientôt sous caution : le tribunal de Tokyo a rejeté, jeudi 20 décembre, la requête du parquet d’étendre sa garde à vue. Selon la chaîne publique NHK, il pourrait être relâché dès vendredi en échange du paiement d’une caution, dans l’attente de son procès. Le parquet a visiblement été pris de court par le rejet humiliant de sa demande d’extension de la garde à vue de M. Ghosn jusqu’au 30 décembre. Il est en effet très rare au Japon qu’un tribunal s’oppose à ce type de décision. Dans une réaction attendue, la procédure étant ouverte à des recours, le bureau des procureurs de Tokyo a donc annoncé, peu après 10 heures à Paris (18 heures au Japon), avoir fait appel de la décision du tribunal. Nos explications : Tout comprendre à l’affaire Carlos Ghosn 38 millions d’euros non déclarés L’homme fort de l’alliance entre Nissan et Renault a été mis en examen le 10 décembre pour avoir omis de déclarer aux autorités boursières environ 5 milliards de yens (38 millions d’euros) de revenus sur cinq années, de 2010 à 2015. Arrêté à la sortie de son jet privé et placé en garde à vue depuis le 19 novembre, M. Ghosn séjourne actuellement dans une cellule d’un centre de détention de Tokyo.Son bras droit, Greg Kelly, arrêté en même temps que lui, a lui aussi été inculpé. La garde à vue des deux hommes avait été prolongée sur de nouveaux soupçons de minoration de ses émoluments, cette fois entre 2015 et 2018, pour un montant de 4 milliards de yens (31,1 millions d’euros). C’est une nouvelle prolongation sur ce second motif qui a été refusée par le tribunal de Tokyo jeudi. M. Ghosn reste en détention provisoire dans l’attente de son procès dans le cadre de la première mise en examen, mais celle-ci peut faire l’objet d’une demande de libération sous caution, dont devrait profiter la défense de l’homme d’affaires. Nissan est également poursuivi en tant qu’entité morale, le parquet jugeant que la responsabilité de l’entreprise est aussi engagée, car c’est elle qui a remis les rapports incriminés aux autorités boursières. Accusation d’abus de biens sociaux C’est une enquête interne menée au sein du constructeur japonais qui a conduit à l’arrestation de Carlos Ghosn, limogé dans la foulée de la présidence du conseil d’administration. Il a aussi été démis de celle de Mitsubishi Motors, tandis que Renault l’a maintenu à son poste. La décision du tribunal ne veut pas dire que M. Ghosn ne sera pas inculpé une deuxième fois, a expliqué l’avocat Yasuyuki Takai, ancien membre de l’unité spéciale du bureau des procureurs de Tokyo, instance qui mène l’enquête sur le puissant patron d’industrie. « Il a sans doute jugé que l’on pouvait d’ores et déjà trancher sur le fait de l’inculper ou non sur le deuxième motif sans nécessité de prolonger la garde à vue, a-t-il expliqué à l’Agence France-Presse. De plus, il est possible que [Carlos Ghosn] soit arrêté pour un troisième motif, on n’en sait rien. » Outre les accusations de dissimulation de revenus, Nissan reproche à son ancien sauveur des abus de biens sociaux, notamment l’utilisation aux frais de la compagnie de résidences de luxe aux quatre coins du monde.
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/la-detention-de-carlos-ghosn-au-japon-ne-sera-pas-prolongee_5400059_3210.html
Mehdi Meklat, l’Arabe imaginaire
Dans « Autopsie », l’ex-chroniqueur de France Inter et du Bondy Blog tente de s’expliquer sur les Tweet haineux, antisémites et homophobes qu’il a publiés sous pseudonyme et qui ont provoqué sa chute.
Livre. Il n’y a pas si longtemps, le jeune Mehdi Meklat occupait le haut de l’affiche, et son omniprésence médiatique couronnait une ascension éclair. Recruté à 17 ans par France Inter (avec Badrou, son comparse), il allait bientôt être propulsé à la « une » des Inrocks comme de M Le magazine du Monde. Tandis que sa revue, Téléramadan, recevait les subsides de Pierre Bergé, il se voyait sollicité par tous, invité à dîner par tel ou tel patron de presse, et même convié par François Hollande à l’Elysée. Et puis, en février 2017, voilà soudain le jeune homme conspué par les gens qui, la veille encore, l’adulaient, brûlé par « l’affaire Meklat ». En cause, on s’en souvient, une série de messages souvent vains, parfois drôles, d’autres fois bêtes et méchants, et de temps à autre spectaculairement haineux, homophobes, racistes, misogynes ou antisémites, publiés par Meklat sur Twitter, à l’époque où il y sévissait sous le pseudonyme de Marcelin Deschamps. Quel était le statut de cet avatar ? Sommé de s’expliquer, Mehdi Meklat avait répondu, sans convaincre, qu’il s’agissait d’un « double maléfique ». Aujourd’hui, à lire le plaidoyer pro domo qu’il publie sous le titre Autopsie, on n’est guère plus avancé. C’est presque tant mieux, car si ce livre est digne d’intérêt, c’est précisément par ses vaines tentatives d’élucidation, ses points obstinément aveugles, ses contradictions vivaces, qui devraient nous obliger à regarder en face une certaine comédie médiatique et le jeu de dupes dont elle se nourrit. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le double alibi de Mehdi Meklat Bien sûr, ce livre est l’occasion, pour Meklat, de faire un retour critique sur Twitter, décrit comme un « espace infecté par la violence », fréquenté par de « jeunes imbéciles » oubliant que les mots n’ont pas que des effets virtuels. Ici, on pourrait lui objecter que la quête effrénée de « followers » et les délices du « retweet » vénéneux ne sont en rien réservés à son milieu et à sa génération. Mais surtout, ce qu’il dit de sa propre dérive numérique n’est guère cohérent. D’un côté, il fait valoir que Marcelin Deschamps représente « la part d’ombre que l’on a en chacun de nous ». Mais, de l’autre, il en fait le masque derrière lequel il s’avançait, de façon assumée, pour « dire fuck » aux figures médiatiques qui l’avaient adoubé : Twitter est « la vraie place que je me suis choisie (…), celle où je n’étais pas le jeune de banlieue qui parle bien, mais le jeune de banlieue qui parle mal et qui parle contre vous », écrit-il.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/mehdi-meklat-l-arabe-imaginaire_5400056_3232.html
Parcoursup 2019, mode d’emploi
A partir du 22 janvier, les futurs bacheliers peuvent formuler leurs choix de formations. « Le Monde » vous dit ce qu’il faut savoir, comment s’inscrire, quel est le calendrier et ce qui a changé.
S.GRAVELEAU / LE MONDE Parcoursup, top départ. Alors que la plateforme est en ligne depuis le 20 décembre, c’est à partir du mardi 22 janvier 2019 que les lycéens pourront commencer à faire leurs vœux de formations. Voici les principaux éléments à retenir pour comprendre ce processus. Qui peut s’inscrire sur Parcoursup ? Parcoursup est la plate-forme dévolue aux élèves de terminale, aux apprentis ou aux étudiants en réorientation qui souhaitent entrer en première année d’enseignement supérieur à la rentrée 2019. Toutefois, les réorientations au sein d’une même université sont souvent traitées en interne. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Parcoursup : le Défenseur des droits demande plus de transparence Comment s’inscrit-on sur Parcoursup ? L’inscription se fait en ligne en quelques minutes en cliquant sur « Créer mon dossier 2019 ». Le candidat doit accepter la charte de Parcoursup avant d’indiquer sa date de naissance et son numéro INE (identifiant national élève), 11 caractères figurant sur les bulletins de notes ou la carte d’étudiant. Après avoir complété l’état civil et indiqué un numéro de téléphone mobile qui servira à recevoir des alertes durant la procédure, le candidat obtient un numéro de dossier, à noter. Les titulaires d’une bourse doivent se signaler, les rectorats fixant un nombre de places réservées aux boursiers du secondaire dans chaque formation. Enfin, les futurs bacheliers prendront soin de vérifier l’exactitude des informations sur leur série de bac, leur spécialité, leurs options et leurs langues. En cas d’erreur, le service de la scolarité du lycée rectifiera. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Orientation : comment Parcoursup a changé les stratégies des lycéens Toutes les formations postbac sont-elles sur Parcoursup ? Selon la loi orientation et réussite des étudiants (ORE) du 8 mars 2018, toutes les formations postbac ayant une reconnaissance de l’Etat doivent être sur la plate-forme nationale au plus tard le 1er janvier 2019. Toutes… à l’exception de celles ayant obtenu une dérogation du ministère pour la rejoindre au 1er janvier 2020 (le plus souvent pour des questions de réorganisation complète de leur concours d’entrée). Les formations qui recruteront en dehors du portail commun en 2019 sont : l’université Paris-Dauphine, Sciences Po Paris et les neuf Instituts d’études politiques en province, une partie des écoles supérieures d’art, d’ingénieurs, de commerce, ainsi que certaines écoles privées d’arts appliqués, de gestion, de transport, de secrétariat, etc. Il y aura malgré tout davantage de choix sur Parcoursup. Aux 13 469 formations postbac présentes sur la plate-forme en 2018 (soit 85 % d’entre elles), il faut ajouter les écoles qui recrutaient hors Parcoursup et qui intègrent la procédure cette année (par exemple, les écoles d’ingénieurs des réseaux Icam et France Agro 3), les IFSI (instituts de formation en soins infirmiers) et les IRTS (instituts régionaux du travail social). Combien de vœux peut-on faire ? Le nombre de vœux dans les formations sous statut scolaire est limité à dix, au total. Cependant, pour certaines formations (BTS, prépas, licences très demandées…), le candidat a la possibilité de faire un « vœu multiple ». Cette fonction permet de postuler en un vœu à plusieurs cursus similaires (par exemple : « BTS diététique ») pouvant appartenir ou non à la même académie, chacun comptant pour un « sous-vœu ». Lorsque cette possibilité est offerte, elle est limitée à dix sous-vœux par « vœu multiple », avec un maximum de vingt « sous-vœux » au total. Les formations en apprentissage, présentées dans un autre onglet, peuvent aussi faire l’objet de dix vœux au maximum, avec le même principe de « sous-vœux ». Quelles réponses peut-on recevoir ? Les formations demandées par un candidat lui donnent toutes une réponse. Pour les formations sélectives, trois réponses sont possibles : « oui », « non » ou « en attente ». Pour les licences et la Paces (première année commune aux études de santé), l’élève peut obtenir l’une de ces trois réponses : « oui », « oui si » (candidat accepté sous réserve qu’il suive un parcours de remédiation) ou « en attente ». En 2018, les candidats ont, en moyenne, fait sept vœux et reçu trois propositions d’admission (avec d’importants écarts selon la filière de bac). Au total, 85 % des candidats ont reçu au moins une proposition (un taux grimpant à 94,5 % pour les bacheliers 2018). Doit-on postuler dans son académie ? Pour les formations sélectives, le critère géographique n’est pas pris en compte. Pour encourager la mobilité des étudiants, le ministère a instauré une aide financière à la mobilité (au total, une enveloppe d’une trentaine de millions d’euros). Ces aides seront soumises à des conditions qui seront détaillées aux candidats en amont (contrairement à l’an dernier). En ce qui concerne les licences et la Paces, la règle d’affectation de Parcoursup reste cantonnée à l’académie du bachelier. Il est néanmoins possible de postuler hors de sa zone géographique. En effet, les rectorats fixent, après consultation des universités, des quotas de bacheliers hors académie qui seront acceptés dans chaque licence. Ces quotas devraient être revus à la hausse en 2019. En Ile-de-France, la fin de la sectorisation académique, pour les lycéens franciliens, a été annoncée, et prendra effet dès cette année. Les lycéens de Paris, Versailles et Créteil seront traités de manière équivalente dans tous les établissements de la région. Quelle(s) stratégie(s) adopter ? Faut-il choisir ses vœux en fonction des « attendus », cet ensemble de connaissances et de compétences requises pour chaque filière ? De toute évidence, un candidat dont le profil correspond aux prérequis pour réussir aura plus de chances d’y être accepté. Mais il ne faut pas s’autocensurer pour autant. Le niveau des autres candidats et les désistements pendant la phase de réponses entrent en jeu. Pour les licences, les universités ont adopté deux types de stratégies. Certaines disent « oui » à tous les candidats (ou « en attente », en cas de capacité d’accueil inférieure à la demande), et proposent des parcours de remédiation aux étudiants en difficulté, à l’issue des premières notes du semestre. D’autres universités disent « oui » ou optent pour le « oui si » (145 000 propositions en 2018). Les candidats qui acceptent cette proposition « oui si » de Parcoursup s’engagent, dans un contrat de réussite, à suivre un parcours personnalisé (tutorat, cours de méthodologie, licence en quatre années au lieu de trois, etc.). Mais avant tout, les candidats sont invités à postuler dans les formations qui les motivent. Mieux vaut multiplier les vœux si l’on hésite entre plusieurs domaines, si on a un dossier « moyen » ou si on postule dans des filières sélectives ou très demandées. Le candidat s’assure une sécurité en choisissant les licences de son académie, sans que cela l’empêche de postuler aussi dans des licences hors académie. Que se passe-t-il si aucun vœu n’est satisfait ? Si un candidat n’a aucune proposition d’admission, son cas sera examiné par une CAES (commission d’accès à l’enseignement supérieur), pilotée par le recteur, qui lui proposera des affectations en fonction de ses préférences, exprimées dans un onglet consacré du dossier Parcoursup. Jusqu’à quand peut-on choisir sa formation ? Du fait de la non-hiérarchisation des vœux, le candidat aura une réponse à toutes ses demandes à partir du 15 mai, et jusqu’au 19 juillet. Il peut « maintenir » des vœux en attente tout en ayant accepté une proposition. C’est seulement lorsqu’il obtiendra au moins deux réponses positives (comme deux « oui », ou un « oui » et un « oui, si ») qu’il devra renoncer à l’une des deux propositions. Il restera en lice pour les formations dont il attend encore une réponse. L’affichage du rang du dernier appelé en 2018, en plus du taux de remplissage de la formation, permettra cette année aux candidats en liste d’attente d’évaluer si leurs chances d’obtenir une proposition d’admission sont réelles ou faibles. Autre nouveauté : au moment des résultats du bac, pour ceux qui savent quelle(s) formation(s) les intéresse(nt) en priorité, et uniquement sur la base du volontariat, il sera possible d’indiquer ses vœux préférés. Le principe sera celui d’une « réponse automatique » positive en cas de proposition d’admission à un vœu déclaré comme préféré aux autres. Le candidat pourra instaurer cette réponse automatique pour un ou plusieurs de ses choix, compte tenu des informations à sa disposition : position sur la liste d’attente (à comparer avec le dernier appelé en 2018), taux de remplissage de la formation l’année précédente, etc. Cette fonction sera un moyen pour le candidat de s’assurer qu’il ne ratera pas le coche pour répondre, sans pour autant rester connecté à son dossier. Il conviendra ensuite de procéder à l’inscription administrative dans le délai imparti. Attention : une fois inscrit dans une formation, il ne sera plus possible de conserver des vœux en attente. Pour les candidats non satisfaits (ou n’étant pas inscrits) en phase principale, la phase complémentaire permet de faire de nouveaux vœux d’orientation, de fin juin à mi-septembre. Un « Parcoursup » du combattant : selon le ministère, seuls 5 % des bacheliers 2018 avaient accepté une proposition par le biais de ce plan B.
20/12/2018
campus
https://www.lemonde.fr/campus/article/2018/12/20/parcoursup-2019-mode-d-emploi_5400050_4401467.html
L’agenda Parcoursup 2019
Voici les principales étapes de la plate-forme d’inscription dans l’enseignement supérieur.
Université Paris-Descartes. Camille Stromboni / Le Monde Sortez vos agendas ! La procédure Parcoursup, la plate-forme d’inscription dans l’enseignement supérieur, est jalonnée de grandes étapes. En voici les principales : Depuis le 20 décembre Dans un premier temps, la plate-forme propose uniquement de s’informer. Les candidats sont invités à découvrir les différentes filières de l’enseignement supérieur, à consulter les fiches des attendus (prérequis), les critères d’examen des dossiers, ainsi que les possibilités de poursuite d’études et les débouchés professionnels. Jusqu’ici, le moteur de recherche n’autorisait qu’une navigation par grand type de formation, puis par domaine d’études, ou par localisation géographique. Cette année, il sera possible d’entrer des mots-clés (par exemple : « environnement »), ce qui permettra d’avoir une vision plus complète des formations liées à un domaine. Du 22 janvier au 14 mars A partir du 22 janvier, il sera possible d’ouvrir un dossier Parcoursup par candidat. Cette démarche est souvent effectuée en classe avec les professeurs principaux. Le dernier jour pour ajouter des vœux à sa liste est le 14 mars inclus. Il est toutefois envisageable de compléter ses candidatures jusqu’au 3 avril avec les pièces demandées (bulletins de notes, projet de formation motivé, CV, etc.). C’est aussi la date limite pour confirmer chaque vœu. A partir du 4 avril C’est au tour des commissions d’examen des vœux de vérifier la cohérence du projet du candidat avec les attendus de la formation. Elles utilisent ou non l’outil d’aide à la décision de leur interface Parcoursup pour classer les candidatures. Ensuite, l’algorithme national de la plate-forme détermine, en fonction des paramétrages fixés (quotas de boursiers, de bacs technologiques ou professionnels, de candidats hors académie, etc.), le rang des appelés pour chaque filière. Du 15 mai au 19 juillet La phase de réponse aux candidats débutera mi-mai. Cette phase s’achèvera avant la fin du mois de juillet. L’an passé, elle s’étirait jusqu’au 5 septembre, ce qui avait généré du stress chez les candidats, de l’attente inutile (97 % ont conservé la proposition déjà acceptée avant la fin juillet), sans compter des contraintes lourdes pour les établissements. La procédure sera suspendue durant la semaine des épreuves écrites du baccalauréat, entre le 17 et le 24 juin.
20/12/2018
campus
https://www.lemonde.fr/campus/article/2018/12/20/parcoursup-2019-les-grandes-etapes_5400052_4401467.html
« Nous veillerons à ce que “Science & vie” ne soit pas dénaturé »
Dans une tribune au « Monde », un collectif de scientifiques s’inquiète d’un éventuel changement de propriétaire du magazine, relais d’informations précieux pour la diffusion des connaissances scientifiques et contre les « fake news ».
Tribune. Nous, chercheurs et personnalités du monde scientifique, avons tous lu un magazine Science & vie. En faisant émerger et en nourrissant la soif de comprendre et d’apprendre, il a même pu jouer un rôle dans la vocation de certains d’entre nous. Nos étudiants le lisent. Nos enfants, nos petits-enfants y sont abonnés… Chaque mois, ce sont des centaines de milliers de lecteurs à travers le monde, petits et grands, qui se plongent dans les pages de ces magazines. Les journalistes des magazines Science & vie nous ont fait part de leurs inquiétudes dans la perspective d’un changement de propriétaire de leur groupe de presse. Ils craignent que leur indépendance éditoriale soit remise en cause, que des groupes d’intérêt et des industriels peu scrupuleux puissent, à l’avenir, imposer leurs vues dans leurs magazines. Les premiers à en pâtir seraient évidemment les lecteurs, qui se retrouveraient, bien malgré eux, face à des articles biaisés, plus intéressés qu’intéressants. Dans une démocratie, c’est aux citoyens et à leurs représentants qu’il revient de décider de la manière dont les nouvelles connaissances et technologies doivent être mises en œuvre, dans l’intérêt de tous. Pour cela, il est nécessaire que le public le plus large dispose de sources d’information scientifique grand public objectives, pertinentes et exemptes de tout parti pris, traitant avec la même rigueur les progrès de la science et les éventuels dangers de ses applications. A défaut de culture scientifique partagée, comment parvenir collectivement à des choix éclairés sur des sujets aussi importants que la transition énergétique ou l’avenir de la thérapie génique ? Sans parler des « fake news » se propageant aussi vite que la lumière, ou des pseudosciences toujours plus séduisantes… Science & vie est un passeur de science essentiel depuis plus de cent ans. Nous veillerons à ce qu’un tel pilier de la culture scientifique ne soit pas dénaturé.
20/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/20/nous-veillerons-a-ce-que-science-vie-ne-soit-pas-denature_5400051_3232.html
Parcoursup en 2019 : qu’est-ce qui change par rapport à 2018 ?
Le site, très critiqué pour sa première année, est revenu en ligne le 20 décembre. « Le Monde » vous décrypte les nouveautés.
JÉRÉMY BARANDE / Flickr (CC BY-SA 2.0) Mise en place en 2018, Parcoursup a essuyé, lors sa première édition, de multiples critiques. Cette deuxième version de la plate-forme d’inscription dans les études supérieures prévoit quelques petits changements. Des « formations podium ». Première nouveauté : les candidats auront la possibilité, sur la base du volontariat, de faire valoir dès les résultats du bac leurs vœux préférés : des « formations podium » selon l’appellation provisoire. Ces « formations podium » feront l’objet d’une réponse automatique positive en cas de proposition d’admission. Un moyen pour le candidat de s’assurer qu’il ne ratera pas le coche pour répondre, sans pour autant rester connecté à son dossier. Il conviendra ensuite de procéder à l’inscription administrative dans le délai imparti. Choix des vœux. Du fait de la non-hiérarchisation des vœux, le candidat aura une réponse à toutes ses demandes à partir de la mi-mai. Il peut « maintenir » des vœux en attente tout en ayant accepté une proposition. C’est seulement lorsqu’il obtiendra au moins deux réponses positives qu’il devra renoncer à l’une des deux propositions. Une fois inscrit dans une formation, il ne sera plus possible de conserver des vœux en attente. « Cette forme de réponse automatique devrait fluidifier la phase d’affectation », selon la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, Frédérique Vidal. Certaines décisions attendent encore d’être tranchées, alors que sont attendus dans les prochaines semaines les rapports du comité éthique et scientifique de Parcoursup, d’une part, et du comité de suivi de la loi ORE (orientation et réussite des étudiants), d’autre part. Parmi les incertitudes figure aussi l’anonymisation des dossiers, souhaitée par Mme Vidal, encore en discussion pour une éventuelle application dès 2019. Le niveau d’information. Les candidats disposeront d’une meilleure information, notamment grâce à un moteur de recherche amélioré (pour la phase de formulation des vœux) et à l’affichage du rang du dernier appelé en 2018, pour chaque formation (lors de la phase de réponses). Le calendrier. Le calendrier a été resserré : les établissements et les étudiants devront donner leurs réponses avant le 19 juillet. La plate-forme est en ligne depuis jeudi 20 décembre 2018, mais les lycéens ne pourront commencer à faire leurs choix qu’à partir du 22 janvier 2019. Lire aussi L’agenda Parcoursup 2019
20/12/2018
campus
https://www.lemonde.fr/campus/article/2018/12/20/parcoursup-2019-qu-est-ce-qui-change-par-rapport-a-l-annee-derniere_5400049_4401467.html
Madagascar : chaque finaliste de la présidentielle pense avoir gagné
L’ancien président Marc Ravalomanana s’oppose à Andry Rajoelina, l’homme qui l’a renversé en 2009 à la suite de grandes manifestations.
Dépouillement du scrutin présidentiel, le 19 décembre à Madagascar. RIJASOLO / AFP Les deux finalistes de l’élection présidentielle malgache, Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina, se sont déclarés convaincus d’avoir remporté la victoire, mercredi 19 décembre au soir devant leurs partisans, quelques heures à peine après la clôture du scrutin. « Le changement arrive demain et, dès aujourd’hui, vous pouvez dire que “Dada” [“Papa”, son surnom en malgache] est élu », a lancé M. Ravalomanana à son quartier général. « Quoi qu’il arrive, une seule chose compte, on va remporter la victoire ! » Son rival lui a emboîté le pas peu de temps après. « C’est le numéro 13 [son numéro sur la liste des candidats] qui mène dans tout Madagascar, a asséné M. Rajoelina. Je suis persuadé de remporter une victoire, mais on va attendre les résultats officiels. » Lire aussi Présidentielle à Madagascar : un second tour de scrutin sous haute surveillance Inimitié Toute la journée, les Malgaches ont voté pour départager les deux anciens chefs de l’Etat, engagés dans un duel au couteau aux airs de règlement de compte personnel. Selon le chef de la mission des observateurs de l’Union européenne (UE), Cristian Preda, la participation était en baisse d’environ 4 % à 5 % à la mi-journée par rapport à celle du premier tour (54 %). La rivalité, voire l’inimitié exacerbée, entre les deux hommes fait planer le risque d’une nouvelle crise politique dans un pays qui en a connu de nombreuses depuis son indépendance de la France, en 1960. Dès la fermeture des bureaux de vote, les opérations de dépouillement ont débuté. Dans le lycée J.-J.-Rabearivelo, dans le centre de la capitale du pays, Antananarivo, le comptage de chacune des voix des candidats no 25 et 13 a été salué par les cris de joie de leurs partisans chauffés à blanc, ont constaté des journalistes de l’Agence France-Presse. Rancunes La Commission électorale (CENI) a promis de publier les premiers résultats significatifs après Noël. Lors des dernières semaines de campagne, tous les deux ont laissé libre cours à leurs rancunes personnelles, nées de la crise de 2009. Elu président en 2002, M. Ravalomanana avait été contraint à la démission sept ans plus tard par une vague de violentes manifestations ourdies par M. Rajoelina. Maire de la capitale, ce dernier avait alors été installé par l’armée à la tête d’une présidence non élue. Ils avaient été privés de revanche en 2013, interdits de candidature à la faveur d’un accord de sortie de crise validé par la communauté internationale. Pour retrouver le pouvoir, MM. Rajoelina et Ravalomanana n’ont pas lésiné sur les moyens financiers, apparemment illimités, ni à s’accuser de fraude. Dès leur second débat télévisé, M. Ravalomanana a reproché à son rival de préparer la fraude, faisant état de la circulation de « fausses cartes d’identité et de fausses cartes d’électeurs ». Il a assuré mercredi qu’il n’accepterait « jamais » les résultats « s’il y a de la fraude ». Quelques heures plus tard, le camp de M. Rajoelina a riposté en dénonçant les « nombreuses manipulations, actes de corruption et tentative de détournement des voix de la part des partisans du candidat 25 ». Enjeux Pour nombre d’observateurs, ces échanges laissent présager de très vives tensions dès la confirmation des premières tendances. « Les résultats pourraient être très serrés et, dans ce contexte, même des irrégularités très minimes pourraient amener l’un ou l’autre candidat à les contester », a pronostiqué Marcus Schneider, analyste à la fondation allemande Friedrich-Ebert. Comme l’a souligné l’ancien ministre de l’éducation et candidat malheureux au premier tour, l’universitaire Paul Rabary, la défaite leur est interdite. « Pour Marc Ravalomanana, c’est une question de vie ou de mort. Son groupe ne peut pas survivre s’il ne reprend pas le pouvoir, a-t-il résumé. Quant à Andry Rajoelina, son histoire personnelle est salie par le coup d’Etat. Il doit gagner pour laver son honneur. » Le premier ministre en exercice, Christian Ntsay, a appelé les deux candidats à la raison. « Je suis sûr qu’ils sauront calmer leurs partisans (…), le pays ne mérite pas d’autres troubles », a-t-il déclaré.
20/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/20/madagascar-les-deux-finalistes-persuades-d-avoir-gagne_5400040_3212.html
Le Sénat américain vote la fin du lynchage
Si la législation est adoptée par l’ensemble du Congrès, les exécutions sommaires, symbole du passé raciste des Etats-Unis, seront désormais qualifiées de « crimes haineux ».
Le sénateur démocrate Cory Booker a défendu la loi contre le lynchage devant le Sénat états-unien, le 19 décembre. SUSAN WALSH / AP Après avoir essayé sans succès pendant un siècle, le Sénat des Etats-Unis a adopté mercredi 19 décembre, à l’unanimité, une proposition de loi faisant du lynchage – ces exécutions sommaires devenues le symbole du passé raciste des Etats-Unis – un crime fédéral. Les trois élus noirs du Sénat, un républicain et deux démocrates, avaient présenté, ensemble, ce texte en début d’année. Son adoption a représenté « un moment beau et significatif » pour le Sénat, a commenté Cory Booker, sénateur du New Jersey considéré comme un possible candidat démocrate pour l’élection présidentielle de 2020. « Nous avons la possibilité de reconnaître les erreurs de notre histoire, de rendre hommage à la mémoire de ceux qui ont été brutalement tués et de laisser un héritage pour que les générations futures puissent savoir qu’après 200 tentatives en un siècle (…) cette assemblée a fait la bonne chose », a-t-il déclaré. « Hate crimes » Si la législation est adoptée par l’ensemble du Congrès, le lynchage sera dorénavant considéré par la justice états-unienne comme « l’expression suprême du racisme » après la guerre de Sécession. Il sera qualifié par les autorités fédérales de « hate crimes » (« crime haineux »), une catégorie d’infractions pénales à part dans laquelle les victimes ont en commun d’avoir été ciblées en raison de leur appartenance, réelle ou supposée, à un groupe racial ou à une religion, ou encore en raison de leur identité sexuelle ou de leur handicap. Le texte, dont la portée est largement symbolique, ajoute que 4 472 personnes, principalement noires, ont été victimes de lynchage entre 1882 et 1968. Selon la sénatrice californienne Kamala Harris, une autre démocrate qui pourrait s’opposer à Donald Trump en 2020, la loi aidera les Américains « à dire la vérité sur notre passé ». Cindy Hyde-Smith, une sénatrice républicaine du Mississippi, Etat du Sud où la mémoire des nombreux lynchages de Noirs reste douloureuse, a présidé le vote mercredi. Une première au Sénat Le mois dernier, avant les élections législatives de mi-mandat, ses propos sur le lynchage avaient créé la polémique. En présentant l’un de ses partisans devant quelques supporteurs, Mme Hyde-Smith avait affirmé qu’elle se placerait « au premier rang » si celui-ci l’invitait à une « pendaison publique ». Le texte adopté par le Sénat doit maintenant être voté par la Chambre des représentants, qui passera sous contrôle démocrate en janvier 2019. Entre 1920 et 1940, à une époque où les lynchages racistes étaient encore pratiqués, la Chambre avait voté trois fois contre cette pratique. Mais jamais le Sénat ne l’avait pas rejointe. En 2005, la Haute Chambre du Congrès états-unien s’est excusée pour ses échecs passés.
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/le-senat-americain-vote-la-fin-du-lynchage_5400037_3210.html
Le rap russe, oui, mais dans la « bonne direction »
Vladimir Poutine, qui garde en mémoire l’échec de l’URSS du temps où le rock était prohibé, veut contrôler, sans l’interdire, ce genre musical prisé des jeunes Russes.
LETTRE DE MOSCOU Le rap, cet objet d’importation, est-il compatible avec la culture russe ? Vladimir Poutine a son idée sur la question. « Tout dépend de l’époque où nous vivons et de notre propre évaluation… Chacun sait que dans le temps, la valse n’était pas très appréciée, à l’époque, c’était mal vu de danser la valse, et ensuite c’est devenu un classique », a assuré, le 15 décembre, le chef du Kremlin. Igor Matvienko lui fait face. Chanteur, producteur, compositeur, ce dernier fait partie des membres du Conseil de la culture réuni par la présidence russe à Saint-Pétersbourg, et il cherche prudemment des « solutions ». La loi interdit de prononcer des gros mots, le « mat », cet argot propre à la Russie, en public. Mais surtout, le rap est devenu l’un des genres musicaux les plus populaires parmi les jeunes Russes grâce à son franc-parler sur les réalités quotidiennes, voire, de plus en plus, pour ses critiques cinglantes du pouvoir. Vingt concerts annulés Interdire cette « tendance mondiale », prévient cependant Igor Matvienko, « serait comme tenter d’inverser le cours d’une rivière avec un filet ». « Peut-être, suggère-t-il alors à son interlocuteur, pourriez-vous proposer une sorte d’étiquetage de contenu, avec un marquage « +18 », « +16 », « +20 »… ? » Vladimir Poutine tient bon la barre. « Vous avez dit que le rap s’appuie sur trois piliers, le sexe, la drogue et la protestation. Bien sûr, le plus inquiétant, ce sont les drogues. C’est à l’évidence une voie vers la décadence de la nation ». Eh bien, poursuit le chef du Kremlin, « si c’est impossible de l’arrêter, nous devons l’orienter dans la bonne direction ». Le président russe, qui a grandi à Saint-Pétersbourg, au temps du rock underground prohibé en pure perte par les autorités soviétiques, le sait bien : « La méthode la moins efficace, c’est d’interdire. L’effet sera inverse à celui escompté. » Il faut donc contrôler. Depuis des mois, pas moins de vingt concerts de rap, selon le dernier recensement du site Meduza, ont été annulés avec, le plus souvent, l’intervention de la police. Le 28 novembre encore, le concert du groupe IC3PEAK, prévu pour le 1er décembre, n’a pu se tenir à Novossibirsk. A Kazan, à Perm, les « siloviki » (forces de sécurité) sont aussi intervenus. A Rostov-sur-le-Don, le son et les lumières ont été débranchés. Le 21 novembre, à Krasnodar, dans le sud du pays, cela a fini par tourner vinaigre. Après intervention du parquet qui voyait le concert du rappeur Husky comme une « activité extrémiste », l’événement est annulé au dernier moment. Furieux, Dmitri Kouznetsov, alias Husky, reprend devant la foule, juché sur le toit d’une voiture, les paroles d’un clip vu par 2,8 millions de personnes sur YouTube. « Aïe/Arrête la soirée/Je vais chanter ma musique/Aïe/La musique la plus honnête/La musique des yeux cassés/La musique de la neige jaune/La musique de l’alcoolisme noir/La Musique de notre enfance/La musique qui parle de nous ». Il écope d’une peine de douze jours de prison pour « hooliganisme ».
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/le-rap-russe-oui-mais-dans-la-bonne-direction_5400034_3210.html
A Montréal, face au réchauffement climatique, les habitants verdissent les rues
La ville, qui a connu des épisodes caniculaires récurrents, cherche à limiter le phénomène des îlots de chaleur, accentué par l’omniprésence des surfaces asphaltées.
Une ruelle verte « démineralisée » dans l’arrondissement Rosemont-La Petite-Patrie de Montréal, le 24 octobre. CLAIRE LEGROS / "LE MONDE" C’est une rue étroite comme il en existe des milliers à Montréal. A peine trois cents mètres de long sur quatre de large, bordés de façades de brique au traditionnel escalier en métal. Un raccourci idéal en voiture quand on veut éviter le trafic des avenues adjacentes. Sauf que l’une des entrées est désormais plantée d’arbustes et de grimpantes qui s’enroulent sur un portique de bois. Sur les bas-côtés et au centre de la chaussée, l’asphalte a disparu, remplacé par de l’herbe ou des parterres un peu dégarnis en cette fin d’automne. Pour les automobilistes, le passage reste libre, mais sérieusement ralenti. Luc Corbin, le président du comité de cette ruelle du quartier Rosemont-La Petite-Patrie, non loin du centre de Montréal, assure la visite : la marelle dessinée à la peinture, les trois ruches postées sur un toit, le mur blanc qui sert d’écran lors des soirées cinéma estivales… Pour ce jeune propriétaire et père de famille, il y a bien un avant et un après. « Notre vie a changé. On se parlait à peine, et la rue était régulièrement jonchée de poubelles. Aujourd’hui, les enfants peuvent jouer en sécurité, et on a retrouvé une vie de quartier. » Luc Corbin et des voisins dans la « ruelle verte » située entre la 6e et la 7e avenue de l’arrondissement Rosemont-La Petite-Patrie, à Montréal. La végétalisation et la déminéralisation de la chaussée contribuent à lutter contre les îlots de chaleur pendant l’été. CLAIRE LEGROS / "LE MONDE" Ilots de chaleur Lorsque le programme « ruelles vertes » a été lancé à Montréal dans les années 2000, l’objectif était d’abord de « redonner du pouvoir aux citoyens, afin qu’ils puissent agir eux-mêmes sur leur environnement », note le maire de l’arrondissement, François Croteau. Depuis, la métropole québécoise a été rattrapée elle aussi par le changement climatique. S’il fait froid à Montréal l’hiver, le thermomètre dépasse de plus en plus souvent les 30 degrés pendant les mois d’été. Et la ville, qui a connu ces dernières années des épisodes caniculaires récurrents, cherche à lutter contre le phénomène des îlots de chaleur, accentué par l’omniprésence des surfaces asphaltées. La marelle et les bancs de bois de la ruelle verte située entre les 6e et 7e avenues de l’arrondissement Rosemont-La Petite-Patrie, à Montréal. CLAIRE LEGROS / "LE MONDE" Or, rien de tel que l’ombre et l’humidité des végétaux pour apporter de la fraîcheur. La plantation d’une vigne vierge peut réduire de près de 20 degrés la température d’un mur exposé plein sud. En outre, la suppression d’une partie de l’asphalte favorise l’écoulement des eaux de pluie. En s’évaporant le matin, l’eau accumulée dans les sols participe au rafraîchissement de la ville. Alors, ces dernières années, le programme s’est accéléré. Dans le seul arrondissement de Rosemont-La-Petite-Patrie (15,9 km2 de superficie pour 145 000 habitants) où habite Luc, l’équivalent de neuf terrains de football a été « déminéralisé », soit quelque 20 km linéaires de béton et d’asphalte remplacés par des végétaux. La municipalité apporte un soutien de 15 000 dollars canadiens (10 000 euros) par ruelle pour les travaux d’excavation, le mobilier urbain et les plantes. A charge pour les riverains de faire la preuve qu’au moins la moitié des habitants sont favorables au changement. Revers de la médaille, le prix des maisons augmente dans ce quartier populaire, où 72 % des habitants sont locataires et où le revenu moyen est le troisième plus bas à Montréal. Une ruelle verte « démineralisée » dans l’arrondissement Rosemont-La Petite-Patrie de Montréal, le 24 octobre. CLAIRE LEGROS / "LE MONDE" Expérience de ruelle « comestible » Verdir la ville pour résister aux crises. En 1975 déjà, des jardins communautaires avaient été créés à Montréal après le premier choc pétrolier, pour « aider les populations de quartiers abandonnés à se nourrir », raconte Eric Duchemin, directeur scientifique du Laboratoire sur l’agriculture urbaine (AU/LAB). La ville compte aujourd’hui 97 de ces jardins partagés, divisés en 7 000 parcelles de 10 à 12 m2 attribuées chacune, gratuitement, à un jardinier amateur. « On y trouve une grande mixité, avec à la fois des personnes qui veulent montrer à leurs enfants comment poussent les légumes et d’autres qui ont besoin de ce coin de terre pour se nourrir », constate le chercheur. Mais désormais, les plantes comestibles débordent des potagers pour conquérir les espaces publics. Autour du jardin communautaire Basile-Patenaude, cent cinquante arbustes fruitiers ont été plantés côté rue, le long du trottoir, ainsi que sur une friche mitoyenne, jouxtant un parking de supermarché réputé pour sa chaleur estivale. Les fruits sont à la disposition des passants, des tables ont été installées pour pique-niquer et une fermette accueille des poules en été. « Ce sont des habitants bénévoles qui ont la clef et se relaient pour récupérer les œufs, chacun peut s’inscrire », explique David-Alexandre Boutin, président du conseil d’administration du jardin, qui a voulu ainsi « ouvrir les barrières ». « Les listes d’attente pour obtenir une parcelle sont très longues. Il est temps de revoir ces programmes afin de pouvoir faire participer plus d’habitants. » La mairie d’arrondissement et le laboratoire de M. Duchemin accompagnent cette expérience de « ruelle comestible ». Le scientifique a notamment réalisé une étude sur le risque de contamination aux métaux lourds présents dans la terre de cette ancienne parcelle industrielle. Les analyses sur les baies et les fruits récoltés sont rassurantes, et le chercheur en agriculture urbaine se réjouit de voir « les comestibles grignoter du terrain ». Il n’est pas rare qu’aux beaux jours des plants de tomates ou des framboisiers s’épanouissent le long de la chaussée, sur la partie herbeuse des trottoirs des avenues ou au pied des arbres. Nul besoin d’autorisation. « Pour nous, l’espace public n’appartient pas à la ville mais aux citoyens », affirme François Croteau, dont les services municipaux ne tondent plus ces parcelles. Plus de 552 de ces mini-jardins citoyens ont été créés dans l’arrondissement. A Montréal, dans l’arrondissement Rosemont-La Petite-Patrie, les riverains cultivent les espaces publics devant chez eux. Plus de 552 de ces mini-jardins citoyens ont été créés dans l’arrondissement. CLAIRE LEGROS / "LE MONDE" Stratégie des petits pas Laurence Bherer, professeure en sciences politiques qui étudie les mouvements citoyens à l’université de Montréal, voit dans ces initiatives un « engagement politique de la part d’habitants qui veulent changer les choses en commençant par leur mode de vie ». « On assiste ces dernières années à une intensification de cette stratégie des petits pas pour créer du collectif et agir en faveur de la transition écologique », ajoute la chercheuse. Pour Mme Bherer, le verdissement des rues procède des mêmes motivations que le glanage des aliments dans les poubelles, un phénomène lui aussi en augmentation, notamment grâce aux réseaux sociaux qui « permettent facilement à des particuliers de se donner rendez-vous pour nettoyer et partager les invendus des commerçants ». Gladys Liard, administratrice de Solon, collectif citoyen qui veut « agir collectivement pour réinventer nos milieux de vie », en est convaincue : « Il y a un effet boule de neige dans ces initiatives citoyennes. Les gens veulent agir, ils sont de moins en moins insensibles aux signaux d’alarme climatiques et s’engagent à leur tour quand ils voient que les projets fonctionnent. » Le collectif Solon a lancé un ambitieux chantier de chauffage collectif géothermique dans les ruelles, qui vise à remplacer le fuel et le gaz par de l’énergie renouvelable. Le montage financier est quasiment bouclé, avec à la fois des fonds privés et publics pour que « la transition se fasse à coût zéro pour les habitants ». Les travaux – des puits de 200 à 300 mètres de profondeur où puiser de l’air chaud l’hiver et l’y rejeter durant l’été – pourraient démarrer au printemps 2020.
20/12/2018
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/20/a-montreal-les-habitants-verdissent-les-rues-pour-lutter-contre-le-rechauffement-climatique_5400032_3234.html
Les syndicats de policiers obtiennent une revalorisation salariale
Avec cette mesure et le paiement de millions d’heures sup, le gouvernement veut désamorcer un mouvement social dans la police.
Commissariat bloqué par les policiers, pour réclamer de meilleurs salaires et plus de moyens après les manifestations des « gilets jaunes », à Mantes-la-Jolie, le 19 décembre. CHRISTOPHE ENA / AP A l’issue d’une journée de protestation des policiers, le ministère de l’intérieur a accepté, mercredi 19 décembre au soir de revaloriser leurs salaires, eux qui réclamaient plus de moyens après leur mobilisation pendant près d’un mois lors des manifestations de « gilets jaunes ». Depuis le début de la semaine, le gouvernement cherche à désamorcer un éventuel mouvement social dans la police et avait promis de s’attaquer au « chantier » du paiement des millions d’heures supplémentaires en souffrance et de verser une prime exceptionnelle de 300 euros. Sous pression à la suite des fermetures « symboliques » de commissariat dans plusieurs villes, le gouvernement est finalement allé plus loin en concluant un accord de revalorisation salariale à l’issue de négociations tendues avec les trois principaux syndicats de la profession. Modernisation Policier lors de la manifestation des « gilets jaunes » à Bordeaux, le 15 décembre. GEORGES GOBET / AFP « Cet accord (…) ouvre la voie à une amélioration et une modernisation des conditions de travail et de rémunération des policiers », ont affirmé dans un communiqué le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, et son secrétaire d’Etat, Laurent Nuñez, précisant qu’une première revalorisation de 40 euros par mois aurait lieu dès le 1er janvier. « C’est ce qu’on voulait, on voulait une amélioration immédiate du pouvoir d’achat », s’est félicité le secrétaire général d’Unité-Syndicat général de la police (SGP), Yves Lefebvre. Selon le syndicat, l’augmentation des salaires sera ensuite graduelle et devrait aboutir au bout d’un an à une hausse en moyenne de 120 euros net par mois pour les gardiens de la paix et qui pourrait aller jusqu’à 150 euros pour les plus hauts gradés. Le coût pour les finances publiques n’a pas été communiqué alors que le gouvernement a déjà annoncé plusieurs milliards d’euros de mesures destinées à faire retomber la colère des « gilets jaunes ». « Reconnaissance matérielle » Conséquence de cette revalorisation, la prime exceptionnelle de 300 euros, durement critiquée par des policiers qui y voyaient une proposition « méprisante », voit son périmètre drastiquement réduit : elle ne sera versée qu’aux personnels techniques, scientifiques et administratifs, et aux employés de préfecture mobilisés par la crise des « gilets jaunes » depuis le 17 novembre, a ajouté M. Lefebvre. Le chantier des heures supplémentaires, qui porte sur quelque 275 millions d’euros, reste en revanche ouvert et sera « traité » à partir de janvier, a assuré le syndicaliste. « C’est la reconnaissance de l’Etat, c’est la reconnaissance matérielle que nous avions exigée », s’est réjoui son homologue du syndicat Alliance, Jean-Claude Delage, qui évoque une avancée « conséquente » à l’issue des négociations et rend hommage à la mobilisation des policiers mercredi. Confronté à sa première crise en interne depuis son arrivée il y a deux mois à Beauvau, Christophe Castaner s’était voulu rassurant mardi, en affirmant que les policiers n’étaient pas des « gilets jaunes » et qu’ils ne bloqueraient pas les commissariats, « parce qu’ils ont le sens du service public ».
20/12/2018
police-justice
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/20/fronde-des-policiers-un-accord-de-revalorisation-salariale-est-conclu_5400025_1653578.html
Le Guatemala menace d’expulser les fonctionnaires d’une commission anticorruption de l’ONU
La Commission internationale contre l’impunité au Guatemala, institution onusienne, enquête sur des irrégularités dans le financement de la campagne électorale du président Jimmy Morales en 2015.
« Ivan Velasquez dehors ! » Un manifestant réclame le départ du chef de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala, le 31 août 2018, devant le siège de l’Organisation desNations unies. MOISES CASTILLO / AP Le président guatémaltèque, l’ancien comique de télévision Jimmy Morales, a fait un pas de plus dans le conflit qui l’oppose à un organisme des Nations unies de lutte contre la corruption. La décision du gouvernement « viole la Constitution du pays et représente une atteinte à l’Etat de droit ». Ivan Velasquez Le gouvernement a annoncé, mardi 18 décembre, avoir retiré l’immunité des onze fonctionnaires de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (Cicig), qui enquête sur le chef de l’Etat pour des irrégularités dans sa campagne électorale de 2015, leur donnant soixante-douze heures pour quitter le pays. Faute de quoi ils pourront être expulsés. Le chef de la Cicig, le magistrat colombien Ivan Velasquez, a estimé que la décision du gouvernement, qu’il qualifie d’« arbitraire », « viole la Constitution du pays et représente une atteinte à l’Etat de droit ». « Les immunités [des fonctionnaires] sont issues de la convention de création de la commission, pas d’un processus d’accréditation ou de visa de courtoisie, a précisé la Cicig dans un communiqué. Seul le commissaire [Velasquez] peut retirer l’immunité prévue pour les fonctionnaires internationaux. » « En plus de nous faire de nouveau honte face au reste du monde, cette nouvelle absurdité du ministère des affaires étrangères ne fait que confirmer l’intention obsessionnelle du pouvoir exécutif de freiner et – ce qui est encore plus préoccupant – de faire reculer la lutte contre la corruption et l’impunité », a tweeté le défenseur des droits, Jordan Rodas Andrade. Des étudiants participent à une manifestation, devant le Congrès de la République du Guatemala, le 11 septembre 2018, pour dénoncer la politique du gouvernement vis-à-vis de la Commission internationale contre l’impunité (Cigig). JOHAN ORDONEZ / AFP « Menace de paix » Le chef de l’Etat estime que la commission, avec qui il entretenait pourtant de bons rapports à son arrivée au pouvoir, en 2016, est une « menace à la paix ». Les hostilités ont commencé en mai 2017, quand la Cicig s’en est prise à un frère et à un fils du chef de l’Etat, pour des malversations remontant à 2013. Lorsque sa propre campagne électorale a été soupçonnée de financements illicites, en août 2017, et que la Cicig a demandé la levée de son immunité présidentielle, M. Morales a déclaré Ivan Velasquez persona non grata, l’accusant d’avoir outrepassé ses fonctions, une décision immédiatement invalidée par la Cour constitutionnelle. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Guatemala, duel entre le président Jimmy Morales et « Ivan le terrible » Un an plus tard, le président est allé plus loin encore : lors d’une cérémonie en août, entouré de militaires, il a annoncé qu’il ne demanderait pas à l’ONU le renouvellement du mandat de la Commission au-delà de septembre 2019. Le 4 septembre, il a interdit le retour de M. Velasquez dans le pays, profitant d’une tournée que le commissaire faisait aux Etats-Unis. Depuis lors, celui-ci n’a pas pu retourner au Guatemala. Fléau de la corruption Le 20 septembre 2018, des milliers de Guatémaltèques, très attachés à la Cicig, l’institution la plus appréciée du pays, avec 70 % d’opinions favorables (contre moins de 20 % pour Jimmy Morales), sont sortis dans la rue pour exiger la démission du président. L’organisme a été créé sous l’égide des Nations unies, en 2007, pour suppléer la justice guatémaltèque défaillante face au fléau de la corruption, dans un Etat infiltré par le crime organisé après des décennies de guerre civile et de dictature (1960-1996). Après la mise au jour de très nombreuses affaires, la Cicig a pris de l’importance en 2015, lorsqu’une enquête conjointe avec la procureure générale du Guatemala, Thelma Aldana, a révélé une fraude douanière qui a conduit à la démission du président de l’époque, Otto Perez (2012-2015). Ironie de l’histoire, Jimmy Morales s’était précisément présenté comme un rempart contre la corruption pour se faire élire à la tête du pays quelques mois plus tard.
20/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/20/le-guatemala-menace-d-expulser-les-fonctionnaires-d-une-commission-anticorruption-de-l-onu_5400022_3210.html
Coupe de la Ligue : Marseille s’enfonce, Lyon et Monaco passent dans la douleur
L’OM a été éliminée en 8e de finale face à Strasbourg lors des tirs au but. Lyon, Monaco, Bordeaux, Guingamp, Le Havre restent en course.
Le défenseur de l’OM Hiroki Sakai face à Strasbourg lors du match de Ligue des champions, le 19 décembre au stade Vélodrome. CHRISTOPHE SIMON / AFP Marseille s’est offert une fin d’année agitée avec son élimination en 8e de finale de Coupe de la Ligue mercredi 19 décembre face à Strasbourg, Lyon et Monaco se qualifiant, eux, dans la douleur pour les quarts. Eliminés aux tirs au but par Strasbourg (1-1, 4 t.a.b. à 2) dans un Vélodrome aux trois quarts vide, les Marseillais n’ont pas réussi à relever la tête après leurs défaites à Nantes et face à Limassol. À l’image de leur capitaine Dimitri Payet qui a manqué un penalty au cours de match puis son tir au but, alors que Luiz Gustavo avait permis aux Olympiens d’égaliser à 10 minutes de la fin du temps réglementaire. Lyon, Monaco, Bordeaux, Guingamp, Le Havre gagnants Lyon en revanche a validé sa place en quarts de finale même si les joueurs de Bruno Genesio se sont fait peur en fin de match à Amiens. Alors qu’ils avaient rapidement pris l’avantage grâce à un penalty marqué par Moussa Dembélé (20e) et qu’ils ont mené 3-0 à l’heure de jeu, les Lyonnais ont laissé les Picards revenir à 3-2 en toute fin de match. Dans le doute depuis des semaines, l’AS Monaco a écarté dans la difficulté Lorient (1-0) grâce à un but de Giulian Biancone (70e) au bout d’un match arrêté pendant 36 minutes pour cause de pluies torrentielles en Principauté. Sur une bonne dynamique ces dernières semaines, les Girondins de Bordeaux ont confirmé en s’imposant à Dijon (1-0) grâce à un but de leur international espoir croate Toma Basic, titulaire pour la première fois depuis son arrivée cet été. Guingamp a éliminé Nice (0-0, 3 t.a.b. à 1) et Le Havre, seul pensionnaire de Ligue 2 qualifié pour les quarts de finale, complète le tableau après sa victoire 2-1 à domicile face à Dijon.
20/12/2018
football
https://www.lemonde.fr/football/article/2018/12/20/coupe-de-la-ligue-marseille-s-enfonce-lyon-et-monaco-passent-dans-la-douleur_5400019_1616938.html
Washington et Ottawa exigent la « libération immédiate » de deux Canadiens détenus en Chine
Pékin détient depuis le 10 décembre deux ressortissants canadiens, après qu’Ottawa a arrêté la directrice financière de la société Huawei à la demande des Etats-Unis.
La ministre des affaires étrangères canadienne, Chrystia Freeland, lors d’une conférence de presse à Ottawa le 12 décembre. CHRIS WATTIE / REUTERS Le Canada et les Etats-Unis ont exigé vendredi 21 décembre la « libération immédiate » de deux Canadiens arrêtés en Chine le 10 décembre, officiellement soupçonnés de mener des « activités menaçant la sécurité nationale ». « Nous sommes profondément préoccupés par l’arrestation survenue plus tôt ce mois-ci et la détention arbitraire de deux Canadiens par les autorités chinoises, et demandons leur libération immédiate », a souligné Chrystia Freeland, ministre canadienne des affaires étrangères, à propos de l’ex-diplomate Michael Kovrig et du consultant Michael Spavor. Les détentions en Chine de ces deux ressortissants canadiens sont considérées comme une réponse à l’arrestation le 1er décembre au Canada de la directrice financière du géant chinois des équipements de télécommunication Huawei, Meng Wanzhou, le 1er décembre, à la demande de Washington. Les Etats-Unis la soupçonnent d’avoir violé le régime de sanctions contre l’Iran. « Profonde inquiétude » « Nous exprimons notre profonde inquiétude concernant la détention par le gouvernement chinois de deux Canadiens (…) et appelons à leur libération immédiate, a de son côté affirmé dans un communiqué Robert Palladino, porte-parole du département d’Etat américain. Le Canada, un pays où règne l’Etat de droit, mène une procédure juridique juste, équitable et transparente concernant Mme Meng Wanzhou, directrice financière de Huawei. » Selon Washington, Ottawa « respecte ses engagements juridiques internationaux en honorant ses traités d’extradition avec les Etats-Unis ». La directrice financière de Huawei a depuis été remise en liberté sous caution dans l’attente d’une procédure d’extradition vers les Etats-Unis, qui pourrait prendre plusieurs mois. Lire aussi Télécoms : le groupe chinois Huawei englué dans une sévère crise diplomatique
21/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/21/washington-et-ottawa-exigent-la-liberation-immediate-de-deux-canadiens-detenus-en-chine_5401191_3210.html
Hongrie : des milliers de manifestants dans la rue contre une réforme du droit du travail
Plusieurs milliers de Hongrois se sont réunis à Budapest vendredi, au lendemain de la promulgation d’une loi très controversée, mais défendue par Viktor Orban.
Des Hongrois manifestent contre la réforme du droit du travail voulue par le gouvernement Orban, à Budapest le vendredi 21 décembre. MARKO DJURICA / REUTERS Plusieurs milliers de manifestants ont défilé vendredi 21 décembre à Budapest au lendemain de la promulgation de la loi hongroise assouplissant le temps de travail, une réforme très controversée qui a déclenché une vague de manifestations depuis son vote au Parlement. La manifestation de vendredi devrait être la dernière avant les fêtes de fin d’année, mais l’opposition espère maintenir la mobilisation après le 1er janvier 2019. Ce mouvement de protestation a été déclenché le 12 décembre par le vote au Parlement de cette loi qui porte à 400 le nombre des heures supplémentaires annuelles que les employeurs pourront demander à leurs salariés, payables trois ans plus tard. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Des Hongrois manifestent leur « ras-le-bol » de Viktor Orban Vendredi, le premier ministre hongrois, Viktor Orban, a défendu cette réforme contre des manifestants « hystériques ». « Ceux qui crient à la fin du monde sont ceux qui ont ruiné le pays et leurs mensonges n’ont pas de limites », a commenté à la radio publique le chef de l’Etat à propos des protestataires. « Nous boycotterons les oligarques par des moyens pacifiques » Le mouvement de contestation, qui a débuté de façon informelle, a été marqué par des échauffourées inédites avec les forces de l’ordre devant le siège du Parlement. Il a depuis été endossé par les syndicats et par l’opposition, dont toutes les composantes (gauche, libéraux et extrême droite) ont pour la première fois uni leur voix. Aux revendications concernant la loi sur le droit du travail s’est ajoutée une dénonciation de la mainmise du parti Fidesz de M. Orban (au pouvoir depuis 2010) sur les médias, l’économie et la justice. Une douzaine de députés d’opposition avaient occupé dans la nuit de dimanche à lundi le siège de la télévision publique accusée de partialité. Avant la manifestation de vendredi, le président du parti d’opposition de gauche MSZP, Bertalan Toth, a mis en garde le pouvoir en place : « Nous allons élargir les manifestations et les protestations [en visant] là où ça fait mal, c’est un régime bâti sur la cupidité et nous boycotterons les oligarques par des moyens pacifiques (…) Nous allons cibler ceux que le régime de Fidesz sert avec ses lois. » Selon un sondage publié vendredi par l’institut Publicus, plus des deux tiers des Hongrois estiment que les manifestations sont justifiées. Ces manifestations n’ont cependant culminé qu’à 15 000 personnes au cours d’un rassemblement à Budapest dimanche, loin des 60 000 qui s’étaient rassemblées en avril 2017 pour dénoncer des mesures contre les ONG et l’« université Soros » ou de la contestation d’un projet de taxe internet en 2014. Lire l’interview du philosophe Luuk van Middelaar : « La Hongrie est devenue une autocratie électorale »
21/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/21/hongrie-des-milliers-de-manifestants-dans-la-rue-contre-une-reforme-du-droit-du-travail_5401188_3210.html
« Gilets jaunes » : les mesures d’urgence adoptées à l’Assemblée et au Sénat
Le Parlement a définitivement adopté le texte en faveur du pouvoir d’achat. Il devrait être mis en œuvre dès début 2019.
Prime exceptionnelle, heures supplémentaires défiscalisées, hausse de la prime d’activité… Le Parlement a définitivement adopté, vendredi 21 décembre, une série de mesures en faveur du pouvoir d’achat décidées par l’exécutif pour tenter de mettre fin à la crise des « gilets jaunes ». Après l’Assemblée dans la nuit de jeudi à vendredi, le Sénat, dans une procédure express, a voté vendredi soir à main levée en faveur du projet de loi portant « mesures d’urgence économiques et sociales ». Le texte ayant été adopté « conforme », sans changement par rapport à la version de l’Assemblée, son adoption est définitive. En voici le contenu : Selon l’exposé des motifs du projet de loi, le gouvernement a choisi d’augmenter la prime d’activité jusqu’à 90 euros (ce montant peut varier d’un cas à l’autre) au niveau du smic début 2019. Pour atteindre les « 100 euros » promis par Emmanuel Macron, le gouvernement compte aussi la revalorisation mécanique du smic de 1,5 % au 1 er janvier 2019, soit environ 16 euros net pour un temps plein. Selon la ministre de la santé, Agnès Buzyn, la prime d’activité concernera ainsi 12 % des fonctionnaires (contre 8 % actuellement) et 18 % des indépendants (contre 15 %). janvier 2019, soit environ 16 euros net pour un temps plein. Selon la ministre de la santé, Agnès Buzyn, la prime d’activité concernera ainsi 12 % des fonctionnaires (contre 8 % actuellement) et 18 % des indépendants (contre 15 %). L’exonération élargie de la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG), qui concernera désormais cinq millions de retraités (70 % d’entre eux), sera appliquée « au plus tard » le 1 er juillet avec remboursement rétroactif au 1 er janvier, a confirmé Benjamin Griveaux. M me Buzyn a précisé que les caisses de retraite « se sont engagées pour être en capacité de rembourser les retraités du trop-prélevé (…) autour de début mai ». La ministre envisage un amendement gouvernemental pour avancer la date butoir, une fois qu’elle aura « la certitude » que les caisses sont vraiment « en mesure de le faire ». juillet avec remboursement rétroactif au 1 janvier, a confirmé Benjamin Griveaux. M Buzyn a précisé que les caisses de retraite « se sont engagées pour être en capacité de rembourser les retraités du trop-prélevé (…) autour de début mai ». La ministre envisage un amendement gouvernemental pour avancer la date butoir, une fois qu’elle aura « la certitude » que les caisses sont vraiment « en mesure de le faire ». La prime exceptionnelle versée par les entreprises aux salariés rémunérés jusqu’à 3 600 euros devra être versée avant le 31 mars et concernera « 4 à 5 millions de salariés », a également détaillé le porte-parole du gouvernement. Le projet de loi doit permettre « aux entreprises de verser (…) une prime exceptionnelle jusqu’à 1 000 euros qui sera exonérée de toute charge sociale et de l’impôt sur le revenu », a-t-il dit. Les heures supplémentaires effectuées par les salariés du privé et par les fonctionnaires seront par ailleurs défiscalisées et exonérées de cotisations salariales dès le 1er janvier, a annoncé M. Griveaux. « Sur les 17,6 millions de salariés du secteur privé, environ 4 à 5 millions devraient en bénéficier au moins », a précisé la ministre du travail, Muriel Pénicaud, relevant que la mesure va toucher aussi les fonctionnaires. Abstention des socialistes Les sénateurs Les Républicains ont voté pour, pas « par adhésion » mais par « responsabilité », selon leur chef de file, Bruno Retailleau. Les sénateurs La République en marche et de l’Union centriste, ainsi que les Indépendants et ceux du groupe RDSE (Rassemblement démocratique et social européen, à majorité radicale) ont fait de même. Les socialistes se sont abstenus, comme les communistes. Seuls huit amendements, tous présentés par la gauche, ont été examinés, avant d’être rejetés ou retirés. Il n’y aura a priori pas de saisine préalable du Conseil constitutionnel et le texte devrait être promulgué rapidement, pour une mise en œuvre dès le début 2019.
21/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/21/gilets-jaunes-les-mesures-d-urgences-adoptees-a-l-assemblee-et-au-senat_5401184_3224.html
Le Conseil de sécurité décide d’envoyer des observateurs de l’ONU au Yémen
La résolution adoptée par les 15 membres du Conseil insiste notamment « sur le plein respect par toutes les parties du cessez-le-feu décrété pour la province d’Hodeïda ».
Le Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) a décidé, vendredi 21 décembre, à l’unanimité d’envoyer des observateurs civils au Yémen pour, notamment, sécuriser la gestion du port stratégique d’Hodeïda et superviser l’évacuation des combattants de la ville. Une résolution rédigée par le Royaume-Uni, adoptée par les quinze membres du Conseil, entérine également les acquis obtenus lors des récentes consultations inter-yéménites qui se sont tenues en Suède. Le texte, amendé à plusieurs reprises cette semaine à la demande des Etats-Unis, de la Russie ou du Koweït, « insiste sur le plein respect par toutes les parties du cessez-le-feu décrété pour la province d’Hodeïda ». Entre 30 et 40 observateurs dans la région d’Hodeïda Il autorise l’ONU « à établir et à déployer, pour une période initiale de trente jours à compter de l’adoption de la résolution, une avant-garde pour commencer un travail d’observation », sous la direction du général néerlandais à la retraite Patrick Cammaert. Cet ex-officier, qui a déjà effectué plusieurs missions dans le monde pour l’organisation onusienne comme casque bleu, est attendu vendredi à Amman, la capitale de la Jordanie, avant de se rendre au Yémen, à Sanaa et à Hodeïda à des dates non précisées. Des diplomates ont évoqué le déploiement à Hodeïda et ses environs de trente à quarante observateurs – des civils ayant une expérience militaire – pour garantir l’arrêt des hostilités et sécuriser l’acheminement de l’aide humanitaire. Des membres de l’avant-garde sont déjà en route pour la région, a précisé vendredi l’ONU. Les consultations inter-yéménites en Suède ont notamment permis d’aboutir à un cessez-le-feu à Hodeïda, qui est entré en vigueur mardi, et à la décision d’un retrait des combattants de cette ville et de son port. Les deux parties – rebelles houthistes, appuyés par l’Iran, et forces gouvernementales soutenues par la coalition militaire dirigée par l’Arabie saoudite – avaient donné en Suède leur accord pour que l’ONU supervise les activités portuaires. La ville, par où transite la majeure partie de l’aide humanitaire destinée au Yémen, est un enjeu stratégique dans ce conflit. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Ahmed Saleh Al-Essi, portrait d’un profiteur de guerre au Yémen Des discussions qui traînent en longueur Il y a une semaine, au lendemain des accords obtenus en Suède, l’émissaire de l’ONU pour le Yémen, Martin Griffiths, avait réclamé au Conseil de sécurité un déploiement d’observateurs en urgence. Les discussions entre membres du Conseil ont cependant traîné en longueur. A la demande des Etats-Unis, une mention accusant nommément l’Iran de soutenir des attaques de houthistes avait été ajoutée au texte. La Russie est alors intervenue pour menacer d’utiliser son veto si cette mention était gardée. Un compromis a permis de remplacer le mot « Iran » par une condamnation du soutien apporté aux rebelles, « quelle qu’en soit sa source ». Dans la résolution adoptée vendredi, l’ensemble du paragraphe concerné a finalement été supprimé. La Chine et la France se sont félicitées vendredi de l’« unité » retrouvée du Conseil de sécurité. « La résolution adoptée à l’unanimité est un fort signal d’unité et d’engagement du Conseil » et affirme tout son « poids » derrière les efforts de l’ONU au Yémen, a relevé l’ambassadeur français, François Delattre. Sans compter les renouvellements annuels du régime de sanctions concernant le Yémen, il s’agit de la première résolution adoptée sur ce dossier par le Conseil de sécurité depuis 2015 et l’entrée en guerre de la coalition arabe. Le 8 décembre, l’ONU avait estimé que jusqu’à 20 millions de personnes étaient « en situation d’insécurité alimentaire » au Yémen, où la guerre a fait plusieurs dizaines de milliers morts depuis plus de quatre ans.
21/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/21/le-conseil-de-securite-decide-d-envoyer-des-observateurs-de-l-onu-au-yemen_5401182_3210.html
Une médecin anesthésiste du Tarn soupçonnée d’euthanasie mise en examen pour meurtre
L’infirmière qui a injecté la dose mortelle sous son autorité a été placée, vendredi, sous le statut de témoin assisté.
Une médecin anesthésiste, soupçonnée d’avoir euthanasié une patiente octogénaire à l’hôpital de Lavaur, dans le Tarn, a été mise en examen, vendredi 21 décembre, pour « meurtre ». Elle a été placée sous contrôle judiciaire, a affirmé à l’Agence France-Presse (AFP) le parquet de Toulouse, chargé de l’affaire. L’infirmière qui a injecté la dose mortelle, sous l’autorité de l’anesthésiste, a été « placée sous le statut de témoin assisté » et n’a donc pas été mise en examen, a précisé le parquet. L’anesthésiste de 68 ans aurait reconnu avoir volontairement fait administrer une dose létale de curare à cette octogénaire, qui avait été admise en urgence à l’hôpital, selon une source proche de l’enquête citée par l’AFP. Vendredi après-midi, un conseil de surveillance de cet établissement s’est tenu en urgence pour évoquer l’affaire. Euthanasie et suicide assisté sont interdits Le maire de Lavaur et président du conseil de surveillance de l’hôpital, Bernard Carayon, s’est déclaré « stupéfait car l’anesthésiste est une femme de qualité, connue depuis longtemps dans l’établissement pour son expérience, sa technicité et je dirais même son humanité ». « Je suis effondré car je suis très attaché aux soins palliatifs, c’est-à-dire cette voie médiane entre acharnement thérapeutique et euthanasie qui suscite ma révulsion pour des raisons philosophiques et humanistes », a-t-il ajouté, affirmant qu’il pensait « évidemment à la famille [de la personne décédée] ». Fin septembre, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) avait jugé que la loi Claeys-Leonetti de 2016 sur la fin de vie, qui interdit l’euthanasie et le suicide assisté, ne devait pas être modifiée. Il avait « insisté sur l’impérieuse nécessité que cette loi soit mieux connue et mieux respectée », et il avait « souhaité qu’un nouveau plan gouvernemental de développement des soins palliatifs soit financé ». Le gouvernement a déjà assuré que la fin de vie ne figurerait pas dans son projet de loi de bioéthique, puisqu’elle fait l’objet d’une loi à part.
21/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/21/une-anesthesiste-du-tarn-soupconnee-d-euthanasie-mise-en-examen-pour-meurtre_5401179_3224.html
En Méditerranée, la dépollution durera jusqu’au printemps
Deux mois après l’arrivée des premières boulettes de fioul sur le littoral varois, l’impact écologique et financier de l’accident du « Virginia » reste à établir.
Sur la plage de la Douane, dans le parc national de Port-Cros, le 7 octobre. Valentine Vermeil pour Le Monde Entre Ramatuelle et La Croix-Valmer (Var), la zone qui s’étend du cap Taillat au cap Lardier est une merveille de paysage méditerranéen et l’un des joyaux de l’aire d’adhésion du parc national de Port-Cros. Le sentier littoral qui serpente au milieu des pins sur huit kilomètres à l’extrémité ouest du golfe de Saint-Tropez devrait pourtant rester fermé aux visiteurs – 250 000 estimés chaque année – pour plusieurs mois. Depuis le 16 octobre, les petites criques et zones rocheuses qui constituent cette partie de la côte varoise sont souillées par la pollution aux hydrocarbures consécutive à la collision, neuf jours plus tôt, de deux navires marchands au large du cap Corse. l’Ulysse et le Virginia. Une puissante odeur de myrte a supplanté les effluves de fuel qui, fin octobre, flottaient encore. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Après l’accident maritime au large de la Corse, le littoral du Var souillé par les hydrocarbures Mais, à l’ouest de la paradisiaque plage de la Briande et de ses cabanons fortunés, l’impact écologique saute aux yeux. « Cette zone a été l’une des plus touchées, car elle regarde l’est d’où arrive le courant ligure », confirme Camille Casteran, agent technique de l’environnement et responsable du secteur pour le parc national. D’un pas leste, il arpente le littoral et désigne les roches sur lesquelles les plaques d’hydrocarbure semblent s’être incrustées, les nappes huileuses mêlées de bois et de posidonies, restées prisonnières dans les anfractuosités. « Toutes ces parties-là ne seront pas forcément totalement nettoyées car elles sont très difficiles d’accès. Le mal est fait, il faut laisser le temps faire son œuvre », concède-t-il, remué. Deux cents personnes déployées A quelques pas de là, en revenant vers Ramatuelle, les équipes de dépollution, elles, sont en plein travail. Les plages, fermées elles aussi au public depuis deux mois, constituent la priorité des autorités. Gants verts, combinaisons blanches, seaux en plastique et longues pinces en main, des groupes de cinq ou six éléments, recrutés spécialement et conduits par un chef d’équipe en gilet jaune, procèdent à un ramassage lent et ciblé. Pampelonne, la plus emblématique plage de Ramatuelle, a déjà été arpentée à deux reprises. Comme les Salins à Saint-Tropez ou la Madrague à Sainte-Maxime. « L’objectif est que nos plages soient ouvertes pour Noël » Roland Bruno, maire de Ramatuelle Deux cents personnes sont déployées sur les différents chantiers en cours entre Var et Bouches-du-Rhône. « La phase 1 est bouclée. Elle consistait à enlever toutes les accumulations d’hydrocarbure qui peuvent être remobilisées par une mer agitée et partir polluer d’autres sites. Nous sommes en pleine seconde phase, qui concerne les zones rocheuses et les endroits où la pollution s’est enfouie », détaille Jean-Pierre Vanbaelinghem, le PDG de la société Le Floch Dépollution, mandatée et payée par les assureurs des deux armateurs incriminés. Pour ce second volet, des pompes à eau de mer ont été hélitreuillées sur des points difficilement accessibles. En retour, l’hélicoptère emporte des « big bags », ces énormes sacs contenant plus de 500 kg de déchets déjà récoltés.
21/12/2018
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/21/en-mediterranee-la-depollution-durera-jusqu-au-printemps_5401177_3244.html
L’ANSM lance une enquête après l’alerte sanitaire sur un produit de dialyse
L’agence de sécurité du médicament va évaluer les effets du remplacement du liquide au citrate, qui présenterait un risque de surmortalité de 40 % chez les patients traités.
Quels seraient les effets des changements de pratiques de dialyse pour le traitement de l’insuffisance rénale ? L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a lancé une enquête, vendredi 21 décembre, à la suite d’une étude montrant une surmortalité notable chez des patients dialysés avec un liquide contenant du citrate, rendue publique par Le Monde. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Alerte sanitaire sur un produit utilisé pour la dialyse Cette enquête décidée à la « suite [de] la réunion des parties prenantes sur l’utilisation de dialysats au citrate » se déroulera jusqu’au 31 mars, a précisé l’agence. Son objectif : repérer d’éventuels effets indésirables survenant au cours et après une séance de dialyse et mesurer les changements de pratiques après la publication de l’étude. L’ANSM, qui l’a examinée le 5 décembre, avait jugé que cette recherche constituait « un signal à prendre en compte », mais qu’il était encore trop tôt pour « statuer sur un éventuel risque ». Des centaines de morts prématurées Selon cette étude présentée par le docteur Lucile Mercadal (Inserm et hôpital de la Pitié-Salpêtrière) le 3 octobre, les patients traités par un liquide de dialyse (ou dialysat) au citrate présenteraient une surmortalité de 40 % par rapport à ceux traités avec d’autres produits plus anciens à l’acétate ou à l’acide chlorhydrique. Cette surmortalité aurait essentiellement une origine cardiovasculaire. Cela pourrait concerner des centaines de morts prématurées de personnes dialysées, peut-être plus. Quelque 20 % des 47 000 personnes souffrant d’insuffisance rénale traitées par dialyse en France utilisent un produit au citrate, introduit sur le marché en 2012. Dans l’attente d’investigations complémentaires, certains centres ont basculé aux dialysats sans citrate qui conviennent moins pour certains patients et sont parfois moins bien tolérés, ce qui pourrait représenter un risque pour la santé publique. Une nouvelle réunion avec les parties prenantes se tiendra en janvier pour partager les données recueillies auprès des fabricants, analyser les études complémentaires et élaborer des recommandations.
21/12/2018
sante
https://www.lemonde.fr/sante/article/2018/12/21/l-ansm-lance-une-enquete-apres-l-alerte-sanitaire-sur-un-produit-de-dialyse_5401161_1651302.html
« Un village français » : des personnages pris dans le chaos de l’Occupation
Durant sept saisons, la série a mis en scène la vie de Français moyens durant ces années noires.
« Un village français », une série créée par Frédéric Krivine, Philippe Triboit et Emmanuel Daucé. CHARLOTTE SCHOUSBOE RMC Story, vendredi 21 décembre à 20 h 55, série Le projet d’Un village français était très ambitieux, et d’un type nouveau. Ses créateurs, Frédéric Krivine, Philippe Triboit et Emmanuel Daucé, en 2009, espéraient, sans trop y croire, qu’on leur laisserait le temps de réaliser pas moins de cinq saisons pour reconstituer la vie d’une petite ville fictive, Villeneuve, pendant les cinq années de l’Occupation. Leur pari est plus que gagné : cette monumentale production était devenue une référence en matière de séries historiques avant même la diffusion de sa septième et dernière saison, à l’automne 2017. « Notre intention, dès le départ, était d’évoquer les 95 % de Français qui n’ont été ni résistants ni collabos, indiquait Emmanuel Daucé lors du lancement de la série. Nous nous sommes donc posé la question de la représentation sociologique de la population pour créer les personnages, en nous concentrant finalement sur les personnes les plus impliquées dans la société, afin de disposer de ressorts de dramatisation et ne pas confronter le téléspectateur qu’à du “neutre”. » Pas question que l’époque prenne le dessus, a expliqué Philippe Triboit, le réalisateur. « Décors, costumes, reconstitutions ne devaient pas l’emporter sur les personnages. Nous avons voulu montrer une époque sans que cela se voie, c’est-à-dire à hauteur d’yeux de personnages pris dans le chaos de l’Occupation. » Ce parti pris originel avait tellement enthousiasmé l’historien spécialiste de cette période Jean-Pierre Azéma qu’il a suivi chaque étape de cette production, des aspects historiques jusqu’à l’évolution de la vie privée des personnages. Robin Renucci (au premier plan à gauche) incarne Daniel Larcher dans la série « Un village français ». CHARLOTTE SCHOUSBOE « Cette approche est très efficace pour penser l’Occupation, a-t-il expliqué. Elle respecte deux éléments essentiels pour comprendre les choix des Français moyens durant ces années noires : l’ambivalence des réactions, des attitudes, des appréciations, et le respect de la chronologie. On suit des personnages dans des cheminements qui sont personnels mais que l’historien analyse en termes plus généraux. Des hommes et des femmes ont eu des discussions, des problèmes financiers ou familiaux, des expériences religieuses ou militantes, ont vécu des amours, etc., qui les poussaient dans telle ou telle voie qui n’avait pas forcément le sens clair que nous lui imposons rétrospectivement. » Une fresque romanesque Pour sa part, la situation géographique de Villeneuve, où se concentrent toutes les intrigues, ne doit rien au hasard. Elle a pour modèle une ville bien réelle et bien étudiée par les historiens : Dole, dans le Jura, terre de passeurs et de maquis. Ce qui induit un mode de résistance intérieure propre à ce type de ville rurale, coincée en deçà de la ligne de démarcation toute proche, mais non loin de Sochaux-Montbéliard et de la Suisse, et donc propice à faire passer vers la zone libre des juifs chassés du nord de l’Europe. Loin des séries « de guerre », Un village français propose une fresque romanesque dans laquelle des personnages « tout-venant » se retrouvent confrontés à un contexte historique exceptionnel – le couple d’instituteurs, le médecin, une fermière, le patron d’une petite entreprise, un enfant, un policier, etc. Des personnages qui vous restent à jamais en tête, d’autant qu’ils sont tous interprétés par d’excellents comédiens. Un village français, saison 1, série créée par Frédéric Krivine, Philippe Triboit et Emmanuel Daucé. Avec Robin Renucci, Audrey Fleurot, Thierry Godard, Nade Dieu (Fr., 2009, 6 × 60 min). www.numero23.fr
21/12/2018
televisions-radio
https://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2018/12/21/un-village-francais-des-personnages-pris-dans-le-chaos-de-l-occupation_5401158_1655027.html
Hernan Diaz signe « Au loin », western de la conquête de l’être
Etats-Unis, XIXe siècle. Hakan, immigrant suédois, se perd dans les désertes étendues américaines, et en lui-même. Roman enchanteur d’un écrivain argento-américain.
Au loin (In the Distance), d’Hernan Diaz, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Christine Barbaste, Delcourt, 334 p., 21,50 €. San Francisco, vers 1850. GROSVENOR PRINTS / MARY EVANS PICTURE LIBRARY / PHOTONONSTOP Quoi de neuf sous un soleil de plomb ? Le western, toujours le western. Tombé en désuétude dès lors que la caricature des gentils cow-boys contre les méchants Indiens a été réduite en fagot pour feu de bois, le genre ne s’est pourtant jamais totalement éteint. Mieux, il ne cesse de renaître de ses braises pour se réinventer. Car, quelle que soit l’époque, il permet de rebattre des cartes éternelles, des enjeux de première nécessité : les migrants et leurs espoirs, la survie, les frontières de toutes natures. Pour son premier roman, Hernan Diaz, 45 ans, écrivain au pedigree vagabond (natif d’Argentine, il a vécu en Suède, en Angleterre et habite aujourd’hui New York), s’est lancé sur les traces trompeuses du mythe qu’est le western en sa période fondatrice : la conquête de l’Ouest, la Ruée vers l’or. Soit l’aube d’un nouveau siècle gonflé de promesses, les prémices d’une nation. Dès le début, tout est à rebours, déréglé, dans Au loin. Hakan, son protagoniste esseulé, n’a jamais eu l’esprit d’un pionnier. Il n’a pas fait fortune. Il est désormais fort loin de la Californie. Quoique vieux, il demeure une force de la nature, un être quasi irréel par sa stature de géant. Dans la scène d’ouverture, en Alaska, les passagers d’un schooner assistent à son apparition : un colosse surgit d’un trou de la banquise. Barbe blanche et cheveux longs, il est nu et ne porte rien d’autre qu’un fusil. Il n’a rien. Pas un sou, nulle attache. Il leur racontera son histoire autour d’un brasero sur l’entrepont : l’itinéraire d’un jeune garçon parti, vers 1850, de Suède pour l’Amérique avec son frère aîné et les maigres économies confiées par leurs parents, des fermiers acculés à la famine. Il se trompe de navire lors d’une escale à Portsmouth (Angleterre), et accoste à San Francisco quand Linus a embarqué pour New York. S’éloigner des hommes Aussi n’aura-t-il qu’une idée : traverser le continent en direction de l’est, afin de l’y retrouver. Sa trajectoire ne cesse d’être déviée au gré de rencontres : une famille de prospecteurs, la tenancière d’un saloon qui séquestre l’adolescent pour assouvir ses désirs. Devenu homme, Hakan a défait des gangs et des milices. Il a appartenu à une caravane. Il a suivi un géologue en quête de l’origine du monde dans les « proto-organismes ». Il a tué des adversaires. Il a affronté la soif la plus cruelle et la faim la plus terrible. Il s’est peu à peu éloigné des campements, des villes, puis des hommes. Tel est Hakan. « Hawk », prononcent ceux qui ne comprennent pas cet étrange prénom de Nordique en terre américaine. « Hawk », comme le propagera la légende du Far West.
21/12/2018
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/21/hernan-diaz-signe-au-loin-western-de-la-conquete-de-l-etre_5401157_3260.html
Dans le sillage des migrants, à la frontière entre le Chili et le Pérou
Le Chili et d’autres pays d’Amérique latine relativement riches absorbent une nouvelle vague migratoire en provenance de pays démunis, comme Haïti et le Venezuela.
Un poste-frontière délabré éclairé par une patrouille de la police, le 15 novembre. Le Chili affiche le PIB par habitant le plus élevé d’Amérique du Sud, des taux de corruption faibles et le taux d’homicides le plus faible, d’après les chiffres de la Banque mondiale et d’InSight Crime (un organisme de journalisme et d’enquête à but non lucratif spécialisé dans le crime organisé en Amérique latine et dans les Caraïbes). IVAN ALVARADO / REUTERS
21/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/portfolio/2018/12/21/dans-le-sillage-des-migrants-a-la-frontiere-entre-le-chili-et-le-perou_5401150_3210.html
Kurdes de Syrie : « Si la Turquie nous attaque, nous ne pourrons plus lutter contre l’Etat islamique »
La chef politique kurde Ilham Ahmed a alerté les autorités françaises sur les risques de renaissance de l’EI à la suite du retrait américain et dans la perspective d’une offensive d’Ankara.
Ilham Ahmed, à Paris, le 21 décembre. STEPHANE DE SAKUTIN / AFP Coprésidente du Conseil démocratique syrien, qui chapeaute les institutions en place dans le nord-est du pays, Ilhan Ahmed est une des principales responsables politiques kurdes de Syrie. Interlocutrice régulière des Etats de la coalition, elle était, vendredi 21 décembre, à Paris pour rencontrer des conseillers d’Emmanuel Macron, alors que le retrait des troupes américaines en Syrie, et notamment dans les zones contrôlées par les Forces démocratiques syriennes (FDS) à dominante kurde, ouvre la voie à une offensive de la Turquie. Ankara a déjà massé des troupes à la frontière. Après avoir chassé l’organisation Etat islamique de tout le nord-est de la Syrie et avoir repris le contrôle fin 2017 de la capitale du « califat », Rakka, avec le soutien de la coalition internationale contre l’EI, les FDS sont confrontées à une menace existentielle. Quel est le résultat de vos échanges avec les autorités françaises ? Nous avons exposé à nos interlocuteurs nos craintes au sujet des suites du retrait des Etats-Unis de Syrie, et nous avons voulu étudier avec eux ses conséquences catastrophiques pour la lutte contre Daech [acronyme arabe de l’EI]. Nous souhaitons que les Français restent et nous savons qu’ils sont contre ce retrait, mais nous savons aussi qu’à ce stade le départ des Américains entraînera celui des Français. Abandonnés par nos alliés, le risque principal auquel nous serions confrontés viendrait de la Turquie, qui menace de nous envahir avec ses supplétifs islamistes, qui ne sont pas différents des djihadistes de Daech. Nous avons donc demandé à la France de faire pression sur la Turquie, qui est un pays de l’OTAN, pour éviter cela. C’est une obligation morale. Nous avons envoyé nos fils et nos filles au combat pour la sécurité de l’Europe. Nous avons perdu des milliers de jeunes pour cet objectif. Nous avons aussi dit à nos interlocuteurs que si notre région était envahie, nous ne serons plus en mesure de contrôler nos prisons et qu’il faudra craindre que les centaines de djihadistes étrangers que nous gardons dans nos prisons pour le compte des pays occidentaux, dont la France, s’échappent. Il est évidemment hors de question pour nous d’ouvrir les portes des prisons, mais si la situation nous échappe, c’est le risque. Nos alliés doivent bien comprendre que si nous perdons le contrôle de notre territoire à cause de leur retrait, nous n’allons pas prendre les terroristes étrangers avec nous. Ce n’est pas seulement de la survie de notre peuple qu’il s’agit, c’est de la sécurité des rues de Paris et des villes européennes. Si la Turquie nous attaque, l’Etat islamique sera renforcé et la sécurité de l’Europe sera à nouveau menacée. Le retrait américain marquerait la fin de la lutte contre l’Etat islamique ? Nous avons combattu avec les Américains, les Français et nos autres alliés pour vaincre les djihadistes, les chasser du nord de la Syrie. Ensemble, nous avons repris Rakka. Notre combat a servi à protéger les Etats occidentaux et leurs populations du terrorisme. « Le retrait américain est une excellente nouvelle pour l’Etat islamique » Aujourd’hui, nous risquons d’être livrés à nous-mêmes et attaqués par la Turquie. Nos forces seront dirigées vers la frontière pour nous défendre et nous ne pourrons plus poursuivre la lutte contre les djihadistes. Le retrait américain de Syrie est une excellente nouvelle pour l’Etat islamique. Nous avons des informations qui nous reviennent de nos services de renseignement et qui indiquent qu’ils se préparent à être de plus en plus offensifs dans la région de Deir ez-Zor et que leurs cellules dormantes s’activent à Rakka, leur ancienne capitale. Ils peuvent revenir. Nos victoires communes avec les pays occidentaux sont menacées. Si les Américains se retirent, nos autres alliés doivent prendre leurs responsabilités. C’est dans leur propre intérêt. Mais ils les fuient. Nous n’avons pas encore de nouvelle rencontre prévue avec des responsables français. A quels scénarios vous préparez-vous ? Une première offensive turque pourrait avoir lieu sur les localités de Manbij, Tall Abyad et aussi Kobané, qui sont proches de la frontière turque. Mais le plan de la Turquie va plus loin. L’Etat turc veut prendre le contrôle de l’ensemble du nord de notre territoire. C’est là que se trouve l’essentiel des populations kurdes. Ils veulent faire du nettoyage ethnique, pousser les Kurdes à partir et les remplacer par des populations qui leur sont favorables. Carte des forces en présence en Syrie au 19 décembre. Le Monde C’est ce qu’ils ont fait au début de l’année, quand ils ont pris le contrôle de la région kurde d’Afrin, où les exactions, les meurtres de civils ont été nombreux. Si la Turquie et les milices islamistes qu’ils soutiennent et qui se massent côté turc le long de la frontière entrent sur notre territoire, on peut craindre des massacres de grande ampleur. Voilà ce qui va arriver si notre région n’est pas protégée. Les pays de la coalition seront aussi responsables de ces massacres. Nous résisterons. Nous nous défendrons et, si la Turquie occupe notre territoire, nous y mènerons des actions de guérilla. Comme nous aurons retiré nos forces de la région de Deir ez-Zor pour nous défendre au nord, le régime et les forces iraniennes qui sont déployées à proximité se déploieront et prendront immédiatement le contrôle des ressources en hydrocarbures qui s’y trouvent. Nous serons attaqués sur deux fronts. Les autorités du nord-est de la Syrie pourraient-elles passer un accord avec le régime de Damas pour organiser son retour sur ce territoire et éviter une guerre ? Nous voulons trouver un compromis équitable avec le régime syrien. Mais ce dernier veut un retour à la situation antérieure, revenir à zéro. Nous perdrions nos forces armées, nos institutions, notre autonomie. Un tel recul serait inacceptable pour notre peuple. Quoi qu’il en soit, le régime ne décide pas seul. Il dépend de la Russie et de l’Iran. Et nous avons toutes les raisons de penser qu’il existe un accord entre l’Iran, la Russie et la Turquie contre nous. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le retrait américain de Syrie, une victoire diplomatique pour Erdogan
21/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/21/kurdes-de-syrie-si-la-turquie-nous-attaque-nous-ne-pourrons-plus-lutter-contre-l-etat-islamique_5401133_3210.html
« Gilets jaunes » : des citoyens tirés au sort pour contribuer au « grand débat »
Dans chaque région, une centaine de personnes devraient participer à des conférences organisées pour donner leur avis.
Des « conférences » d’une centaine de citoyens tirés au sort seront associées aux remontées du « grand débat national » organisé à la suite du mouvement des « gilets jaunes », a annoncé vendredi 21 décembre le premier ministre, Edouard Philippe. « Afin d’être innovants, nous avons aussi pensé qu’il était sage de procéder à la désignation de conférences qui, dans chacune des régions, pourront réunir une centaine de citoyens français tirés au sort », a expliqué le chef du gouvernement au terme d’une réunion avec des maires ruraux et quelques « gilets jaunes » à Saint-Yrieix-la-Perche, en Haute-Vienne. « L’idée, c’est de faire en sorte que les Français qui ne sont pas forcément les plus impliqués dans la vie et le débat publics puissent donner leur avis sur le débat et sur les propositions », a-t-il déclaré. « Place éminente » des maires Le « grand débat », dont les formes se veulent multiples et diverses un peu partout sur le territoire, doit formellement durer de la mi-janvier au 1er mars. Il est ouvert à tous et doit associer de nombreux « gilets jaunes ». Les maires volontaires « vont avoir une place éminente » car « ils sont les élus les plus au contact de nos concitoyens », a assuré M. Philippe. L’organisation de ce débat a été confiée à la Commission nationale du débat public (CNDP), une autorité indépendante présidée par l’ancienne secrétaire d’Etat chargée de l’écologie Chantal Jouanno. Les remontées des débats – propositions ou doléances – doivent ensuite faire l’objet de synthèses. Le gouvernement s’est déjà engagé à ce qu’elles se traduisent par des « mesures concrètes », en plus des mesures d’urgence déjà annoncées.
21/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/21/gilets-jaunes-des-citoyens-tires-au-sort-pour-contribuer-au-grand-debat_5401128_3224.html
L’année 2018 est la plus chaude jamais enregistrée en France
Avec une moyenne annuelle de 14 °C, l’Hexagone a connu les températures les plus élevées depuis le début des mesures météorologiques en 1900.
C’est l’année la plus chaude jamais mesurée en France métropolitaine. Avec une moyenne annuelle de 14 °C, l’Hexagone a connu les températures les plus élevées depuis le début des mesures météorologiques en 1900, a annoncé vendredi 21 décembre Météo France. « La moyenne de la température annuelle devrait se situer 1,4 °C au-dessus de la moyenne de référence 1981-2010, peut-on lire dans ce premier bilan. Cet écart fait de 2018 l’année la plus chaude en France métropolitaine depuis le début des mesures en 1900, devant 2014 (+ 1,2 °C) et 2011 (+ 1,1 °C). » Les 10 années les plus chaudes depuis 1900 Les années les plus chaudes sont toutes postérieures à 1994 Météo France Source : « Une séquence inédite depuis le début du XXe siècle » Cette chaleur inédite avait été relevée dès janvier, « au premier rang des mois de janvier les plus doux », avant un mois de février frais et un mois de mars « proches de la normale », détaille l’institut météorologique. Depuis avril, « les températures sont restées en moyenne plus élevées que la normale », avec un été particulièrement chaud, le plus chaud après celui de 2003, marqué par une forte canicule qui avait entraîné 15 000 morts. « D’avril à décembre, la France a ainsi connu neuf mois chauds consécutifs. Une telle séquence est inédite depuis le début du XXe siècle », relève Météo France.
21/12/2018
climat
https://www.lemonde.fr/climat/article/2018/12/21/l-annee-2018-est-la-plus-chaude-jamais-enregistree-en-france_5401126_1652612.html
« Ce n’est pas notre combat » : Trump soutenu par les médias de l’« alt-right » sur le retrait de Syrie
Sans pouvoir occulter le déluge de critiques ayant suivi l’annonce du président américain, de nombreux commentateurs saluent sa volonté de quitter le Moyen-Orient.
Le président américain Donald Trump et l’ancien secrétaire à la défense, James Mattis, à Washington, en octobre. CHIP SOMODEVILLA / AFP Au lendemain de l’annonce de Donald Trump du retrait des quelque 2 000 soldats stationnés dans le nord-est de la Syrie, les médias de la droite américaine apportent un soutien discret mais ferme au président des Etats-Unis. Habituellement prompts à soutenir les décisions controversées du chef de l’Etat, les titres les plus conservateurs adoptent, depuis le 19 décembre, un ton plus modéré devant le déluge de critiques internationales et le scepticisme exprimé par de nombreux cadres du Parti républicain – le sénateur Lindsey Graham est allé jusqu’à qualifier d’erreur « à la Obama » la décision du président d’arrêter la lutte contre l’organisation Etat islamique (EI) en Syrie au sein de la coalition internationale. « La stabilisation de la situation n’a jamais été l’objectif de Trump », Christian Whiton, ancien conseiller de George W. Bush et de Donald Trump La démission du secrétaire à la défense, James Mattis, partisan d’un maintien des troupes sur place, et le probable retrait de la moitié du contingent d’Afghanistan, ont soulevé, jeudi 20 décembre, de nouvelles protestations dans l’entourage politique de Donald Trump, tout en montrant l’inflexibilité du président américain sur cette question. Une détermination soulignée par de nombreux éditorialistes : « La stabilisation de la situation n’a jamais été l’objectif de Trump », soutient Christian Whiton, ancien conseiller de George W. Bush et de Donald Trump, qui approuve, dans une tribune publiée sur le site de la chaîne conservatrice Fox News, la volonté du président de ne pas intervenir au Moyen-Orient pour « reconstruire des Etats » après les combats. « Nous ne sommes pas là pour recréer une nation » au-delà de la lutte contre l’Etat islamique, revendique aussi l’éditorialiste conservateur Eric Bolling sur The Blaze, en lançant un « Bravo ! » à Donald Trump. Crainte d’un nouvel enlisement L’annonce du retrait « promet un débat national sur ce que signifie pour les Etats-Unis de sortir de ces guerres du Moyen-Orient, débat que nous n’avons pas eu depuis quinze ans et notre défaite en tentant d’envahir l’Irak pour la première fois », estime, de son côté, l’ancien candidat à l’investiture républicaine Patrick J. Buchanan sur le site WND. La crainte d’un nouvel « enlisement » de l’armée américaine au Moyen-Orient rythme les arguments des soutiens de Donald Trump, pour qui la « victoire » territoriale sur les djihadistes, revendiquée par le président américain, justifie un départ des soldats malgré ses lourdes conséquences géopolitiques. « Notre combat n’est pas de défendre Israël, notre combat n’est pas de défendre les Kurdes qui combattent l’EI en Syrie, notre combat n’est pas de prévenir toute ingérence iranienne dans la région », assène aussi Jake Lloyd sur le site conspirationniste Infowars, proche de l’« alt-right » américaine. Fondé par Steve Bannon, ancien conseiller spécial de Donald Trump, le site Breitbart est, lui, beaucoup plus emprunté dans ses commentaires : « Sortir de Syrie, en l’absence d’informations sur ce que Trump peut obtenir en retour de la Turquie et de la Russie, est probablement un mauvais choix, souligne Joel B. Pollak. Mais cela n’est pas forcément un désastre. » La journaliste Caroline Glick s’engage sur le même site dans une liste des « pour et contre » la décision de Donald Trump, notant qu’en cas de conflit important entre Israël et l’Iran en Syrie, « les seuls 2 000 soldats sur place n’auraient pas été suffisants pour contribuer réellement » à la victoire des alliés israéliens. « Au contraire, leur présence dans un conflit aurait pu mettre Trump sous pression d’un déploiement beaucoup plus important en Syrie », souligne-t-elle. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le retrait américain de Syrie, un revers majeur pour Israël La pression médiatique sur le président républicain s’est rapidement détournée, vendredi 21 décembre, vers la Chambre des représentants et le Sénat, où le vote sur le budget pourrait aboutir à un shutdown (arrêt de certains services de l’Etat et de l’administration) dû au refus démocrate de voter le financement du mur voulu par Donald Trump à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique. « Les Américains sont fatigués de se battre et de mourir dans des pays qui ne sont pas reconnaissants, lance Ezra Levant, sur le site canadien d’extrême droite The Rebel. Il est temps de ramener les troupes à la maison. Il y a une frontière à protéger aux Etats-Unis, et Trump échoue à le faire. »
21/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/21/ce-n-est-pas-notre-combat-trump-soutenu-par-les-medias-de-l-alt-right-sur-le-retrait-de-syrie_5401123_3210.html
Football : les cinq joueurs évoluant en Afrique qui ont marqué 2018
Jouant en Tunisie, au Maroc, en RDC, en Afrique du Sud ou en Egypte, plusieurs footballeurs ont particulièrement brillé cette année.
De gauche à droite : Anice Badri, de l’Espérance sportive de Tunis ; Mahmoud Benhalib, du Raja Club Athletic de Casablanca ; Jean-Marc Makasu, de l’AS Vita Club de Kinshasa ; Denis Onyango, du Mamelodi Sundows FC de Pretoria ; Walid Soliman, du Al-Ahly SC du Caire. AFP, REUTERS et DR. Lors d’une année 2018 particulièrement riche pour le football africain, plusieurs joueurs évoluant sur le continent ont particulièrement brillé, avec leur club ou leur sélection. Anice Badri (Espérance sportive de Tunis, Tunisie) Il appartient à cette catégorie – rare – de joueurs nés en France, mais qui ont décidé de poursuivre leur carrière dans leur pays d’origine. Né à Lyon, le milieu de terrain de 28 ans a été formé à l’Olympique lyonnais, avant d’évoluer dans des clubs de sa région (Saint-Priest, Chasselay) et de partir à Lille, où il ne joue que pour l’équipe réserve. C’est dans le Nord qu’il s’est fait remarquer par le Royal Excel Mouscron (Belgique), avant d’être transféré à l’Espérance sportive de Tunis en juillet 2016, avec la perspective de disputer régulièrement la Ligue des champions. Cette année, Anice Badri a été un des principaux artisans des deux titres obtenus par le club (championnat de Tunisie et Ligue des champions, où il a inscrit 8 buts). Depuis mars 2016, il est régulièrement appelé en sélection nationale, avec qui il a disputé la dernière Coupe du monde. Lire aussi CAN 2019 : le pays hôte sera connu le 9 janvier Mahmoud Benhalib (Raja Club Athletic, Maroc) Les douze buts qu’il a inscrits en Coupe de la confédération ont largement aidé le Raja de Casablanca à reconquérir un titre continental, après une longue attente de quinze ans, face aux Congolais (RDC) de l’AS Vita Club (3-0, 1-3). Ce pur Casablancais de 22 ans, formé au Raja, a paradoxalement plus brillé sur la scène internationale que domestique. Ses performances lui valent d’être observé par quelques riches clubs du golfe Persique, où il pourrait tripler ou quadrupler son salaire, mais pas encore en Europe. En revanche, Mahmoud Benhalib n’a encore jamais été convoqué par Hervé Renard en sélection nationale, même si le sélectionneur français des Lions de l’Atlas suit de près le championnat marocain. Ce fort caractère n’a pas hésité en début d’année à boycotter l’entraînement pendant plusieurs jours afin d’exiger ses arriérés de salaire, une attitude qui avait fortement déplu aux dirigeants rajaouis. Jean-Marc Makasu (AS Vita Club, République démocratique du Congo) Revenir au point de départ et tirer un trait – au moins temporairement – sur ses rêves européens n’est jamais une démarche facile pour un footballeur africain. Jean-Marc Makasu, 26 ans, avait quitté Kinshasa et le petit club de Bel’Or pour tenter sa chance au Standard de Liège, un des meilleurs clubs de Belgique. Ce sera le début d’une errance entre le plat pays, la Hongrie, l’Algérie, un bref retour en RDC (AS Vita Club, Motema Pembe) et un nouvel exil raté, à Wadi Degla, en Egypte. Revenu à l’AS Vita Club en janvier 2018, champion de RDC quelques mois plus tard, le Kinois empile les buts à un rythme d’enfer, même si son efficacité n’a pas suffi à son équipe pour remporter la Coupe de la confédération (12 buts). L’international congolais, qui n’a pas renoncé à réussir à l’étranger, pourrait donc de nouveau quitter sa ville natale en 2019. Denis Onyango (Mamelodi Sundowns FC, Afrique du Sud) Cela fait treize ans que le gardien Denis Onyango a quitté l’Ouganda et Kampala. Il n’avait que 20 ans, et son premier exil l’avait conduit au Saint-George SC d’Addis-Abeba, en Ethiopie. Il y deviendra international, mais s’y fera remarquer au Supersport, un club du puissant championnat d’Afrique du Sud, en 2006. Depuis, Denis Onyango a vieilli – il a 33 ans – mais il n’a plus jamais quitté la « nation arc-en-ciel ». Depuis 2011, il joue au Mamelodi Sundows FC, avec qui il a remporté la Ligue des champions en 2016. Cette année, celui qui est considéré comme un des meilleurs gardiens africains a gagné le championnat national sud-africain. Il a aussi largement contribué à la qualification de l’équipe nationale ougandaise pour la phase finale de la CAN : grâce à lui, l’Ouganda n’a pas encaissé le moindre but en qualifications. Malgré son statut, aucun club européen ne s’est jamais vraiment intéressé à lui. Et Mamelodi Sundows FC, en lui faisant signer un contrat jusqu’en 2021, lui a prouvé son attachement. Walid Soliman (Al-Ahly SC, Egypte) La fin de carrière est proche pour celui qui a fêté ses 34 ans le 1er décembre. Comme beaucoup de footballeurs égyptiens, le milieu de terrain offensif du Al-Ahly SC a préféré rester dans son pays, à l’exception d’une brève escapade rémunératrice en Arabie saoudite en 2009. Depuis 2011, l’élégant Soliman rafle les titres avec le mastodonte du Caire, dont le palmarès est un des plus fournis de la planète. Cette année, il s’est juste contenté du championnat d’Egypte, échouant en finale de la Ligue des champions face à l’Espérance de Tunis (3-1, 0-3), dont il a terminé troisième meilleur buteur (6 buts). En froid avec sa sélection, Walid Soliman, écarté au dernier moment de la liste des joueurs retenus pour la Coupe du monde, a pris sa retraite internationale, alors que son pays organisera peut-être la CAN à l’été 2019.
21/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/21/football-les-cinq-joueurs-evoluant-en-afrique-qui-ont-marque-2018_5401120_3212.html
Dans les revues
Cette semaine, « Modes pratiques » dont le troisième numéro est consacré aux saisons du vêtement, de la mode et des industries.
« Elle toussait un peu, mais quoi ! Comme toutes les Parisiennes après la saison des bals. » La citation issue d’un ouvrage d’Alphonse Daudet est, pour l’historienne Corinne Legoy, révélatrice : dans son article « Poitrinaires et décolletés au XIXe siècle », au sommaire du 3e numéro de la ­revue Modes pratiques, elle fait ­valoir tout ce que la notion de « saison » et les usages qui lui sont associés contiennent de la construction sociale. S’il est désormais tendance de râler quand le mercure baisse, l’auteure rappelle qu’au XIXe siècle, dans l’univers social très spécifique de l’élite parisienne, l’hiver annonçait les plaisirs du divertissement et de la sociabilité. A l’époque, le mois de novembre était le temps des sorties au théâtre et des événements mondains mis de côté l’été, lorsque les grandes ­familles quittaient la ville… Corinne Legoy analyse le lien entre cette ­dénégation des duretés de l’hiver et la profondeur des décolletés féminins, reflet de leur position sociale – elles allaient de calèches en palais chauffés – et de leur connaissance pointue des règles de bienséance – chaque encolure était codifiée en fonction du soir, du lieu, de la place. Avant qu’ils ne disparaissent, ­victimes notamment d’un discours médical et social plus sensible aux affections pulmonaires… Usages ­sociaux, symboliques, voire poétiques Ce nouveau numéro de Modes pratiques, la revue d’histoire du vêtement et de la mode, s’attache ainsi à mesurer les écarts entre la réalité d’une saison – ses composantes astronomiques, météorologiques, géographiques – et ses usages ­sociaux, symboliques, voire poétiques. D’autant qu’avec les ­bouleversements de notre siècle, même le climat se fait incertain : les ­saisons sont aussi « le moyen de questionner le dérèglement de nos horloges biologiques, sociales, économiques ou industrielles ». Peut-on parler de saisons pour la mode industrielle quand le rythme des collections s’accélère à ­l’extrême, et qu’elles sont prévues dans la haute couture plusieurs ­années à l’avance (Manuel Charpy) ? Comment l’habillement hivernal des enfants est-il à la fois une inquiétude parentale légitime et un moment primordial d’éducation, où l’enfant prend conscience d’un temps objectif et d’un temps social (Aude Le Guennec) ? Quelles réalités historiques se cachent derrière la tardive promotion du pull islandais lopapeysa comme symbole de l’identité nationale (Anaïs Kien) ? Réponses dans cette belle somme qui fait feu de tout bois, publiée par l’Ecole Duperré et l’Institut de recherches historiques du Septentrion (université de Lille).
21/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/21/dans-les-revues_5401119_3232.html
Le Japon annonce la reprise prochaine de la chasse commerciale à la baleine
Tokyo a l’intention de se retirer de la Commission baleinière internationale, qui fait respecter depuis 1986 un moratoire assorti de dérogations sur la pêche aux cétacés.
Une rorqual capturée par des pêcheurs japonais, dans le port de Kushiro, dans le nord de l’île d’Hokkaïdo, en septembre 2017. KYODO NEWS / AP Le Japon s’apprête à reprendre la chasse commerciale à la baleine. La décision du gouvernement a été communiquée jeudi 20 décembre aux parlementaires du Parti libéral démocrate (PLD au pouvoir). L’annonce officielle devrait être faite avant le 1er janvier. La relance de cette activité suivra le retrait de l’archipel de la Commission baleinière internationale (CBI), qui sera effectif le 30 juin prochain. « Je soutiens la décision du gouvernement », a déclaré à la chaîne publique NHK l’ancien ministre de la défense, Itsunori Onodera. Aujourd’hui conseiller du PLD, il a fustigé la CBI, y voyant une organisation « qui ne fonctionne plus », où les « points de vue exprimés sont extrêmement partiaux ». Sam Annesley, directeur exécutif de la branche nippone de l’Organisation de protection de l’environnement Greenpeace, a qualifié la décision de « grave erreur qui est en décalage avec le reste du monde » et a appelé Tokyo à revenir dessus. Il est extrêmement rare que le Japon, toujours enclin à appeler les autres pays à respecter le droit international, se retire d’une instance internationale. Sa décision traduit pourtant le fossé grandissant avec la CBI. Lors de la dernière réunion de l’organisation, en septembre, l’archipel avait demandé – une nouvelle fois – de pouvoir reprendre la chasse commerciale, en vain. Des milliers de baleines tuées Cette activité fait l’objet d’un moratoire depuis 1986. Des dérogations ont permis au Japon de s’y livrer sous couvert d’études scientifiques. Il est régulièrement critiqué car, depuis la reprise de la chasse en 1988, ses pêcheurs ont pris plusieurs milliers de baleines, un niveau jugé disproportionné pour de simples recherches. Lire aussi Malgré des mesures strictes et une demande faible, la chasse à la baleine perdure Les critiques déplorent également le choix des baleiniers nippons d’aller chasser dans l’océan Antarctique, une zone considérée comme un sanctuaire par plusieurs pays comme l’Australie. En 2014, le Japon avait été condamné à ce sujet par la Cour internationale de justice (CIJ). Le tribunal onusien avait donné raison à l’Australie qui, appuyée par la Nouvelle-Zélande, reprochait à l’archipel de maquiller une activité commerciale en programme de recherche et d’enfreindre « la préservation des mammifères marins et de l’environnement marin ». Si la reprise de la pêche commerciale était confirmée, elle devrait se limiter aux eaux proches du Japon.
21/12/2018
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/21/le-japon-annonce-la-reprise-prochaine-de-la-chasse-commerciale-a-la-baleine_5401112_3244.html
Architecture : Saclay, campus monstre en quête d’urbanité
Grand chantier depuis 2008, le plateau du sud de Paris attend que la vie veuille bien fleurir sur le béton.
Le « Lieu de vie » du campus de Paris-Saclay, vu de l’intérieur, au début du mois d’octobre. EPA PARIS-SACLAY / NICOLAS GALLON / CONTEXTES On passerait des journées entières à arpenter le grand hall de l’Ecole centrale-Supélec de Saclay, ses terrasses mezzanines, ses couloirs suspendus, son vaste rez-de-chaussée, à évoluer entre ses espaces de travail informels, zones de détente, quartiers de restauration… sans même penser à pousser la porte d’une salle de cours ou d’un laboratoire. (Dé)structuré par les reliefs de divers bâtiments intérieurs, subtilement orchestré par une signalétique pop minimaliste, ce gigantesque open space baigné de la lumière naturelle qu’y diffuse un grand plafond de plastique mou a des airs de paysage high-tech. Les bosquets de chaises longues en mousse couleur pastel sur la mezzanine répondent aux grappes de fauteuils en cuir brun du ­rez-de-chaussée, des espaces de réunion souples, à géométrie variable, font contrepoint à l’alignement strict des fines tables de la cafète. Ouvert à l’interprétation, offert à l’appropriation, le lieu peut même se transformer en night-club à la nuit tombée. Les éclairages installés au plafond sont de ceux qu’on utilise dans les théâtres et les boîtes de nuit, les terrasses semblent avoir été pensées pour accueillir des DJ, et le rez-de-chaussée pour se muer en dancefloor. « Je ne l’ai pas dit explicitement, tempère ­Ellen van Loon, l’architecte, associée de Rem Koolhaas au sein de l’agence OMA, mais j’ai pensé que si le matériel était là, des choses se passeraient. Et ça n’a pas manqué : les étudiants ont déjà organisé de grandes fêtes dans le bâtiment. » Ils ont fait leur première rentrée en septembre 2017. Responsable du schéma directeur de toute la zone Centrale Supélec, Ellen van Loon avait milité sans succès pour faire construire un lieu de fête sur le plateau de Saclay, situé à cheval entre Yvelines et Essonne. « Pas besoin d’architecture, une boîte en béton aurait suffi. Les étudiants organisent de grandes fêtes, c’est quand même la base de penser à ça quand on fait un ­campus ! Et encore plus quand on a une situation comme Saclay, où on est loin de Paris, sans liaison de métro. » Rêve de Silicon Valley à la française Initialement prévue pour 2025, la mise en service de la ligne 18 du Grand Paris Express qui doit relier à Paris l’archipel de laboratoires d’entreprises, de start-up, d’établissements d’enseignement supérieur qui s’étend de ­Palaiseau à Versailles, sur le plateau de Saclay, a été reportée à 2027. Ce n’est qu’avec elle que le rêve de Silicon Valley à la française, formulé par Nicolas Sarkozy quand il était président de la République, prendra tout son sens, que les synergies pourront opérer d’un quartier à l’autre et les quartiers eux-mêmes exprimer leur plein potentiel.
21/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/21/architecture-saclay-campus-monstre-en-quete-d-urbanite_5401111_3246.html
Architecture : Artem Nancy, un regroupement d’écoles pensé comme un écosystème
Sorti de terre par tranches successives entre 2012 et 2017, le campus attend d’être officiellement inauguré.
Vue extérieure du campus Artem à Nancy. GRAND NANCY Sorti de terre par tranches successives entre 2012 et 2017, le campus Artem de Nancy, regrou­pement stratégique de l’école des Mines de Nancy, de l’Ecole nationale supérieure d’art et de design de Nancy et de l’ICN Business School, ­attend d’être officiellement inauguré. Pour ce ­projet interministériel d’ampleur, visant à induire des synergies entre les différentes disciplines enseignées autant qu’à expérimenter un nouveau modèle de campus durable, la direction espérait que le président de la République ferait le déplacement. Elle attend toujours. Dans le quartier résidentiel d’Haussonville-Blandan, cette petite ville dans la ville claque comme un fouet. Installés sur le site des anciennes casernes Molitor-Manutention, ses bâtiments aux couleurs vives, aux formes irrégu­lières, électrisent la blancheur fatiguée du bâti alentour, tandis que les centaines d’étudiants, de chercheurs, de professeurs qui s’y pressent dynamisent jour après jour le tissu urbain. Le pari était audacieux. C’est celui de Nicolas ­Michelin, architecte urbaniste français en pointe sur l’ingénierie écologique qui a remporté le ­concours de la maîtrise d’œuvre urbaine organisé par Nancy métropole en 2005, et de l’école des ­Mines qui lui était associée. L’institut Jean Lamour, laboratoire de recherche en science et ­ingénierie des matériaux, qui s’est greffé sur le projet, a également fait appel à lui pour son ­bâtiment : un assemblage de trois grandes nefs, ­séparées par des patios végétalisés, qui abrite entre autres machines sophistiquées un équipement unique au monde : un tube long de 70 mètres et plein d’ultravide, environnement quasiment dépourvu d’atomes, idéal pour fabriquer ou étudier de nouveaux matériaux. Une spectaculaire verrière rose et bleue Objet d’un concours spécifique, l’école des Beaux-Arts a été construite par les Autrichiens Dietrich-Untertrifaller. Enveloppé d’une coque sombre, le bâtiment offre aux étudiants des ­conditions de travail d’un luxe exceptionnel : ­volumes splendides sculptés dans un béton raffiné, soin du détail qui anoblit le moindre ­élément, grandes fenêtres qui, non contentes d’aspirer la lumière à l’intérieur, offrent à chacune des deux ailes une multitude de vues cadrées sur celle d’en face, et aux passants, côté rue, le spectacle des artistes au travail… La troisième tranche de l’opération comprenait l’ICN, la médiathèque et la maison des étudiants. Elle a été confiée à l’agence Lipsky-Rollet qui a déployé un rapport ludique à l’espace et aux perspectives dans le souci manifeste de la joie des usagers.
21/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/21/architecture-artem-nancy-un-regroupement-d-ecoles-pense-comme-un-ecosysteme_5401103_3246.html
Au Maroc, cinq nouvelles arrestations dans l’affaire du meurtre des touristes scandinaves
Au total, dix-huit personnes ont été interpellées pour leurs liens présumés avec les auteurs de l’acte terroriste.
Des policiers marocains conduisent vers l’aéroport de Marrakech les corps des deux randonneuses scandinaves assassinées, le 20 décembre 2018. - / AFP Cinq nouvelles personnes ont été arrêtées au Maroc pour leurs liens présumés avec le meurtre de deux jeunes randonneuses scandinaves dans le sud du pays, a annoncé, lundi 24 décembre, le chef de l’antiterrorisme marocain dans un entretien à l’Agence France-Presse (AFP). Ces arrestations ont été menées dans plusieurs villes du royaume, a déclaré Abdelhak Khiam, directeur du Bureau central d’investigations judiciaires (BCIJ). Au total, ce sont dix-huit personnes qui ont été arrêtées pour leurs liens présumés avec ce double homicide. Les quatre principaux suspects de cet acte qualifié de « terroriste » par Rabat ont été interpellés entre lundi 17 et jeudi 20 décembre à Marrakech, la capitale touristique du royaume. Ils appartenaient à une « cellule » inspirée par l’idéologie du groupe Etat islamique (EI), mais « sans contact » avec ses cadres en Syrie ou en Irak, a indiqué à l’AFP le chef de l’antiterrorisme marocain. Louisa Vesterager Jespersen, une étudiante danoise de 24 ans, et son amie Maren Ueland, une Norvégienne de 28 ans, ont été tuées dans la nuit du 16 et 17 décembre dans le sud du Maroc, où elles passaient des vacances. Le corps des deux touristes avaient été découverts sur un site isolé du Haut-Atlas, dans un secteur prisé des amateurs de marche. « Les deux victimes ont été poignardées, égorgées puis décapitées », selon le patron du BCIJ. Allégeance à l’Etat islamique La « cellule » démantelée comprenait 18 membres, dont « trois ayant des antécédents judiciaires dans des affaires liées au terrorisme ». A sa tête, un certain Abdessamad Ejjoud, 25 ans, marchand ambulant considéré comme « l’émir du groupe », souligne M. Khiam. « Il a déjà purgé une peine car il voulait rejoindre les foyers de tension en 2014 », précise-t-il en faisant référence aux zones qu’a un temps contrôlé l’EI en Irak et en Syrie. Après avoir bénéficié « d’une réduction de peine », Abdessamad Ejjoud est « resté fidèle à ses idées extrémistes », déclare le patron du BCIJ. Il a « constitué une sorte de cellule qui discutait de la façon de mener une action terroriste à l’intérieur du royaume ». C’est lui que l’on voit parler dans une vidéo tournée une semaine avant le meurtre, dans laquelle les quatre suspects directs prêtent allégeance à Abou Bakr al-Baghdadi, le chef de l’EI, avec en arrière plan un drapeau de cette organisation confectionné à la main. Mais « les membres de cette cellule n’ont eu aucun contact avec les opérationnels de Daech dans les foyers de tension, que ce soit en Syrie, en Irak ou en Libye, malgré la vidéo d’allégeance » au chef du groupe ultra-radical, explique le patron du BCIJ. 185 « cellules démantelées » Vivant dans la précarité dans la région de Marrakech et issus de milieux modestes, les quatre suspects directs du meurtre avaient ainsi adopté « ce crédo djihadiste », selon M. Khiam. Abdessamad Ejjoud était marchand ambulant, Abderrahim Khayali, 33 ans, travaillait comme plombier, Younes Ouaziyad, 27 ans, comme menuisier et Rachid Afatti, 33 ans, comme marchand ambulant. Ces deux derniers étaient présents aux côtés du chef du groupe lors du double meurtre, selon les enquêteurs. Lire aussi Touristes tuées au Maroc : le quartier de deux des suspects marqué par la précarité et le salafisme Cependant, note le chef de l’antiterrosrime, les auteurs présumés « n’avaient pas préparé leur action », confie M. Khiam. « Ils sont partis dans la région d’Imlil parce qu’elle est fréquentée par des étrangers. » Deux jours après leur arrivée, ils ont vu les deux touristes installées dans une zone isolée et ils « se sont mis d’accord pour passer à l’acte », poursuit M. Khiam. Epargné jusqu’ici par les attentats de l’EI, le royaume – qui revendique une politique très active en matière de lutte antiterroriste – avait été meurtri par des attaques à Casablanca en 2003 (33 morts) et à Marrakech en 2011 (17 morts). Selon M. Khiam, « 185 cellules ont été démantelées » depuis 2012, et l’Etat marocain a entrepris une série de mesures pour réhabiliter les « personnes arrêtées ». Lire aussi Après la mort de deux touristes, le Maroc rattrapé par le risque terroriste
21/12/2018
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/21/au-maroc-neuf-nouvelles-arrestations-dans-l-affaire-du-meurtre-des-touristes-scandinaves_5401098_3212.html
Dans le camp du Magny, reconstruit par les « gilets jaunes »
Le camp des gilets jaunes au Magny, à hauteur de Montceau-les-mines, a été réinstallé le 18 décembre en quelques heures à peine, après avoir été entièrement rasé par les gendarmes mobiles.
« Ils vont voir au 1er janvier ce qu’il en est, met en garde un retraité. Et la CSG, soi-disant qu’on va devoir attendre six mois ? Ils se foutent de nous ! » « Et la prime de fin d’année ?, lance un jeune homme. Je bosse dans un groupe qui gagne des milliards, et ce matin, ils nous ont annoncé qu’on aura rien du tout ! » ARNAUD FINISTRE / HANS LUCAS pour « Le Monde »
21/12/2018
societe
https://www.lemonde.fr/societe/portfolio/2018/12/21/dans-le-camp-du-magny-reconstruit-par-les-gilets-jaunes_5401094_3224.html
La sélection scientifique de la semaine (numéro 336)
Au menu : les 50 ans de la mission Apollo-8, découverte du tombeau très bien conservé d’un prêtre égyptien, de magnifiques empreintes de dinosaures en Angleterre, etc.
– La sonde Mars Express a photographié un magnifique cratère martien rempli de glace. – En vidéo, comment les anneaux de Saturne vont disparaître. Selon des chercheurs de la NASA, cette disparition devrait prendre environ 300 millions d'années. – Cérès, la plus petite des planètes naines du Système solaire, pourrait être particulièrement riche en carbone. – A quoi pourrait ressembler la machine à forer la très épaisse banquise d'Europe (satellite glacé de Jupiter) afin d'avoir accès à l'océan qui se trouve en-dessous. – Il y a 50 ans, le 21 décembre 1968, décollait la mission Apollo-8. Pour la première fois, un équipage humain quittait l'orbite terrestre et se dirigeait vers la Lune... qu'il allait cependant se contenter de contempler du ciel. – Géophysique : faut-il revoir la théorie des chambres magmatiques sous les volcans ? – Fin de l'an rime avec bilan. Voici donc le bilan scientifique de 2018 fait par le New York Times. (en anglais) – Le site de la BBC quant à lui évoque 10 espèces de plantes découvertes cette année. (en anglais) – Climat : le bilan très mitigé de la COP24 au cours de laquelle les Etats n'ont pu se mettre d'accord sur une hausse des efforts pour lutter contre le réchauffement. Une bonne nouvelle cependant sur ce front : les Européens vont réduire (de 37,5 % d'ici à 2030) les émissions de CO 2 de leurs voitures. – En deux jours, les ONG qui veulent attaquer l'Etat français en justice pour son "inaction climatique", ont reçu le soutien d'un million de personnes par le biais d'une pétition. – Comme cela s'est déjà produit au cours des années passées, des dizaines de milliers de chauves-souris ont succombé à la chaleur en Australie. – Par quels mécanismes une reine termite parvient-elle à vivre jusqu'à 40 ans ? – En Afrique, une mystérieuse maladie touchant le cerveau des enfants présente des ressemblances étonnantes avec Alzheimer. (en anglais) – Archéologie : découverte à Saqqara de la tombe très bien conservée d'un prêtre égyptien mort il y a environ 4 400 ans. – Les plantes à fleurs existaient déjà il y a 174 millions d'années. Ce qui vieillit leur apparition de près de 50 millions d'années. (en anglais) – De magnifiques empreintes de dinosaures découvertes en Angleterre, dans le Sussex de l'est. (en anglais) – A-t-on vraiment besoin de mettre au point l'ordinateur quantique ? (en anglais) Pierre Barthélémy (suivez-moi sur Twitter)
21/12/2018
blog
http://passeurdesciences.blog.lemonde.fr/2018/12/21/la-selection-scientifique-de-la-semaine-numero-336/
Double meurtre de Montigny-lès-Metz : perpétuité en appel pour Francis Heaulme
Le « routard du crime » est bien coupable des meurtres en 1986 de Cyril Beining et Alexandre Beckrich, 8 ans, selon la cour d’assises de Versailles.
Croquis de la cour de Versailles, le 20 décembre. BENOIT PEYRUCQ / AFP La cour d’assises des Yvelines a confirmé vendredi 21 décembre la peine prononcée en première instance : Francis Heaulme est condamné en appel à la perpétuité pour le meurtre de deux garçons de 8 ans en 1986 à Montigny-lès-Metz. Le verdict s’est imposé malgré l’absence de preuves matérielles ou d’aveux venant de l’accusé, qui a toujours nié avoir été l’auteur du double meurtre. Francis Heaulme dispose d’un délai de cinq jours pour se pourvoir en cassation, ce qu’il compte faire, ont assuré ses avocats. Il est déjà condamné pour neuf autres meurtres et incarcéré depuis 1992. Le 28 septembre 1986, Cyril Beining et Alexandre Beckrich avaient été retrouvés morts, le crâne fracassé, sur un talus près d’une voie ferrée de cette commune située en périphérie de Metz. D’abord condamné puis innocenté, Patrick Dils a passé à tort quinze ans en prison pour ce crime. Il avait été libéré en 2002 à la faveur de la révision de son procès. Mémoire défaillante des témoins Pendant trois semaines, la cour a dû lutter contre la mémoire défaillante des témoins, trente-deux ans après les faits, mais aussi contre l’absence de preuves matérielles, toutes détruites en 1995 sur ordre du parquet de Metz. Elle s’est appuyée sur un faisceau d’indices, comme la parfaite connaissance des lieux du crime par Francis Heaulme, le témoignage de certains codétenus ayant recueilli ses confidences, ou encore les similitudes avec d’autres crimes du tueur en série, pour le condamner à sa troisième peine de perpétuité. Pendant leurs plaidoiries jeudi, les avocats de la défense avaient tenté d’instiller le doute dans l’esprit des jurés en rappelant les aveux de Patrick Dils, ou bien les soupçons ayant pesé sur Henri Leclaire, un ex-manutentionnaire un temps suspecté, avant d’être mis hors de cause. Alexandre Bouthier, l’un des conseils de Francis Heaulme, est aussi longuement revenu sur le témoignage d’un adolescent qui avait assuré à l’époque avoir aperçu un homme, la chemise et les mains couvertes de sang, non loin des faits. Un personnage jamais identifié. Ce doute, qui avait profité à Patrick Dils en 2002 lors de la révision de son procès, n’a pas convaincu les jurés. Lire sur le premier procès : Le tueur en série Francis Heaulme de retour au tribunal
21/12/2018
police-justice
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/21/double-meurtre-de-montigny-les-metz-perpetuite-en-appel-pour-francis-heaulme_5401082_1653578.html
« Pour une société où chacun sera traité à égale dignité »
Un collectif de gens jeunes dit dans une tribune au « Monde » leur volonté de dépasser les clivages identitaires. Ils ont donc entrepris début novembre un tour de France qui se terminera en 2019 afin de débattre des moyens pour participer au rassemblement de la jeunesse dans une communauté de destin.
« Nous avons grandi dans différents quartiers, différentes villes, différents milieux sociaux. Nous avons vibré ensemble lors de la victoire de la France à la Coupe du monde. » Frederic Cirou/PhotoAlto / Photononstop Tribune. Nous sommes des jeunes Français arabes, berbères et juifs. Nous avons grandi dans différents quartiers, différentes villes, différents milieux sociaux. Nous avons vibré ensemble lors de la victoire de la France à la Coupe du monde. Nous avons vécu ces moments de dignité et de rassemblements lorsque nous étions testés dans nos certitudes au lendemain des attentats. Nous nous sommes insurgés face aux avancées électorales de l’extrême-droite. Pourtant, nous sommes aussi celles et ceux qui avons vu notre génération se fracturer à cause de polémistes ou de pseudo-humoristes se délectant des passions croisées qu’une histoire longue et tumultueuse nous a léguées. Mais nous refusons que ces passions, lorsqu’elles sont mauvaises, soient le moteur d’une confrontation dont se délectent, en toute perversité, les faiseurs de haine, qu’ils appartiennent aux « communautés » en question ou qu’ils en soient extérieurs. Nous refusons que la lutte contre l’antisémitisme serve de prétexte à exprimer, sous des dehors prétendument antiracistes, une haine contre les Arabes. Nous refusons que le racisme anti-arabe serve lui aussi de prétexte à légitimer, sous les mêmes habits, la haine contre les juifs. Cette manipulation malsaine n’affecte pas que les Juifs et les Arabes puisqu’elle est le fondement à l’éclatement plus général des alliances et de la construction de combats communs dans notre société. Pas de naïveté Dans notre démarche, il n’y a aucune naïveté. Nous savons que le racisme anti-arabe peut exister chez des juifs ainsi que l’antisémitisme chez des arabo-musulmans. Mais nous refusons d’être instrumentalisés par ceux qui jouent sur nos peurs et frustrations. Nous rejetons cette dynamique qui cherche à nous dresser en ennemis sur des bases identitaires, à vivre dans la peur de l’Autre ou à le considérer comme un bouc émissaire. Lire aussi A quoi sert le mouvement des lycéens ? Nous affirmons que ni les attentats perpétrés en France au nom d’un islam dévoyé ni les tentatives d’importation du conflit israélo-palestinien n’auront raison de notre désir de vie ensemble. Nous affirmons que nos mémoires et nos souffrances ne s’excluent pas entre elles et refusons la concurrence victimaire dans laquelle trop de mauvais génies cherchent à nous inscrire. Nous souhaitons lutter ensemble contre le racisme, l’antisémitisme et pour l’égalité. Si nous écrivons aujourd’hui, c’est parce que nous souhaitons prendre nos responsabilités. Celles d’une jeunesse vivante participant à construire la société de demain. Nous ne voulons plus laisser notre parole être confisquée par des polémistes malsains qui ont tous les micros ouverts. Nous souhaitons enfin faire entendre nos voix.
21/12/2018
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/21/pour-une-societe-ou-chacun-sera-traite-a-egale-dignite_5401079_3232.html
L’ancien président roumain Ion Iliescu mis en examen pour crimes contre l’humanité
L’ex-ministre de Ceausescu aurait contribué par de « fausses informations » à des « tirs fratricides » après le soulèvement de décembre 1989, selon les procureurs.
Ion Iliescu, alors président, le 21 décembre 2004 à Bucarest, en Roumanie. DANIEL MIHAILESCU / AFP L’ancien président de Roumanie Ion Iliescu a été inculpé de « crimes contre l’humanité », ont annoncé des procureurs roumains vendredi 21 décembre. Il était poursuivi pour son rôle dans les événements sanglants ayant suivi la révolution de 1989 et le renversement du régime communiste. Cette nouvelle étape d’une longue enquête survient vingt-neuf ans après la révolte qui s’est emparée de Bucarest, la capitale du pays, après avoir commencé dans la ville de Timisoara, dans l’ouest, le 16 décembre 1989. Aujourd’hui âgé de 88 ans, M. Iliescu a exercé comme ministre auprès du dictateur communiste Nicolae Ceausescu puis a dirigé le Front de salut national qui a pris le contrôle du pays après la révolution. Il a ensuite été élu président en 1990 puis de nouveau entre 2000 et 2004. « Tirs fratricides » Aux côtés de M. Iliescu, les procureurs ont mis en examen quatre autres personnes, dont l’ancien vice-premier ministre Gelu Voican Voiculescu. « MM. Iliescu et Voiculescu ont répandu de fausses informations lors de leurs prises de parole à la télévision et dans des communiqués, contribuant ainsi à créer une psychose généralisée », ont-ils estimé. Leurs déclarations ont alimenté les « situations de tirs fratricides, de fusillades confuses et d’ordres militaires contradictoires », ont-ils ajouté, précisant que 862 personnes avaient été tuées lors du soulèvement de décembre. Les accusés ont également contribué à « la condamnation et l’exécution des Ceausescu après un simulacre de procès », ont fait valoir les procureurs. A l’occasion d’un rare commentaire public sur le sujet en avril, M. Iliescu avait dit pouvoir « garder la tête haute devant le jugement de l’histoire ». Selon les procureurs, 275 personnes ont déjà fait face à des poursuites pour leur rôle dans ces évènements de décembre 1989. Cependant, selon des groupes de soutien aux victimes, seulement une petite dizaine de personnes ont été condamnées. La chute de Ceausescu est survenue à la fin d’une année décisive qui a vu les régimes communistes d’Europe centrale et de l’est s’effondrer – et avec eux le mur de Berlin en novembre – précédant l’effondrement de l’Union soviétique fin 1991.
21/12/2018
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/21/l-ancien-president-roumain-ion-iliescu-mis-en-examen-pour-crimes-contre-l-humanite_5401076_3210.html
Théâtre : irradiante Souheila Yacoub
La comédienne de 26 ans fait des débuts éblouissants dans « Tous des oiseaux », de Wajdi Mouawad à la Colline.
La comédienne Souheila Yacoub à Paris en juin 2017. ALEXANDRE DELAMADELEINE Il faut faire vite. Le 30 décembre, Souheila Yacoub jouera pour la dernière fois dans Tous des oiseaux, au Théâtre national de la Colline, à Paris. Après, le spectacle triomphal de Wajdi Mouawad poursuivra la tournée qui l’a conduit jusqu’à Tel-Aviv, en Israël, en novembre. Souheila Yacoub, elle, changera de cap, et on risque de ne pas la revoir de sitôt au théâtre : le cinéma est en train de la happer. Dans les premiers mois de 2019, elle tournera dans Les Sauvages, une série réalisée par Rebecca Zlotowski pour Canal+, puis dans Le Sel des larmes, le nouveau film de Philippe Garrel. Quand on a 26 ans, comme Souheila Yacoub, on trouve que « c’est trop cool ». Quand on connaît l’histoire de cette jeune comédienne, on reste baba. Lire la critique : Les « oiseaux » de bon augure de Wajdi Mouawad Imaginez une petite fille née en Suisse où son père, tunisien, et sa mère, flamande, se sont rencontrés. Elle a 4 ans et commence à suivre des cours de gymnastique, avec sa sœur, Inès. Il se trouve qu’elle est douée, et qu’elle aime ça. Peu à peu, la gymnastique prend toute sa vie. « Sou », comme on l’appelle, intègre l’équipe ­féminine suisse. Glissons sur les années loin de la famille, la pesée quatre fois par jour, l’entraî­nement intensif sous la direction de coachs bulgares qui vont jusqu’à faire injecter à « Sou » des ­hormones masculines pour épaissir ses ligaments, en lui faisant croire que ce sont des antidouleurs. Signalons l’objectif : présenter l’équipe suisse aux Jeux olympiques de Londres en 2012. Arrêtons-nous sur la fin : l’équipe n’est pas sélectionnée, et « Sou » retourne à Genève, à 20 ans et 40 kg. Ce qui surprend, c’est l’exceptionnel instinct de vie de Souheila Yacoub Qu’une dépression suive n’étonnera pas. Ce qui surprend, c’est l’exceptionnel instinct de vie de Souheila Yacoub, qui peu à peu retrouve un corps de jeune femme et retourne la situation. Le hasard lui vient en aide, en la mettant, un jour qu’elle est au supermarché avec sa sœur, devant un stand où l’on recrute des candidates pour l’élection de Miss Suisse romande. « Vas-y », dit Inès à « Sou », qui y va. Et elle est élue. « Bien sûr, dit-elle aujourd’hui, je sais bien qu’il n’est pas féministe, ce ­concours, mais il m’a permis de rencontrer des gens, souvent hyper­intéressants, qui n’avaient rien à voir avec ce que j’avais fait avant. Et puis j’étais jeune, je découvrais. Jusqu’à 20 ans je n’avais rien vécu. Gagner le prix me consolait de la violence que j’avais subie. »
21/12/2018
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/21/theatre-irradiante-souheila-yacoub_5401075_3246.html