topic
stringclasses
469 values
title
stringlengths
3
208
text
stringlengths
789
3.9k
url
stringlengths
32
250
date
stringlengths
10
10
summary
stringlengths
74
853
disparitions
La mort de Maria Pacôme
Maria Pacôme, au Théâtre de la Gaité-Montparnasse, le 13 décembre 2012, dans « L’Eloge de ma paresse ». FRANCOIS GUILLOT / AFP Michel Cournot avait écrit dans Le Monde qu’elle avait un visage de « vieux chef sioux », et ça l’avait fait beaucoup rire. Maria Pacôme était une bonne nature, une comédienne qui aurait rêvé d’être Anna Magnani mais qui prenait son talent pour ce qu’il était : un don de soi destiné à distraire, ce qu’elle réussissait formidablement. Cette comédienne sans prétention, morte le 1er décembre à Ballainvilliers (Essonne), à 95 ans, jouait avec une énergie inaltérable. Elle « se cravachait elle-même », pour reprendre l’expression de Bertrand Poirot-Delpech, un autre de ses admirateurs du Monde, et le public accourait dans les théâtres où elle se produisait, parfois en excellente compagnie : Edwige Feuillère, pour La Reine et les insurgés, Jean-Paul Belmondo pour Oscar, Jean Le Poulain pour Le noir te va si bien, Jean Poiret pour Joyeuses Pâques… Maria Pacôme, née Simone Maria Pacôme en 1923, dans une famille de militants, avait le cœur à gauche mais n’aimait pas parler de politique : « J’ai trop souffert de la déportation de mon père, pendant la seconde guerre mondiale, parce qu’il était communiste, et de la mort de mon frère, fusillé. » Jeune fille, elle doit se débrouiller seule, vend des chaussures et pousse la porte du cours Simon, où Danièle Delorme est élève et où passe parfois une ancienne du cours devenue une star, Michèle Morgan. Et puis, il y a la rencontre avec Maurice Ronet. « Ça a été un coup de foudre terrible », se souvenait Maria Pacôme, qui, après son mariage, décide de mettre sa carrière de côté au profit de celle de Maurice Ronet : « Je pensais qu’il n’y avait que lui qui pouvait réussir. » Avec de Funès dans « Oscar » Il réussit, et Maria Pacôme peint. Puis vient le divorce, la nécessité de gagner de l’argent. Maria Pacôme lit dans un journal qu’on cherche une comédienne pour la pièce d’Ugo Betti, La Reine et les insurgés. Elle se présente, est retenue. Elle a 33 ans, joue un rôle dramatique dont elle espère beaucoup. Mais, reconnaissait-elle, « je n’ai pas fait d’étincelles et la pièce n’a pas été un gros succès ». Retour à la case départ : comment trouver sa place ? En faisant rire, puisque « tu fais rire tes amis », lui dit-on. Oscar arrive à point nommé, en 1958. C’est un succès, qui devient un triomphe quand Louis de Funès reprend le rôle-titre, de 1959 à 1972. Maria Pacôme accompagne de Funès sur scène les deux dernières saisons. Entre-temps, elle s’impose au boulevard, avec ses dents du bonheur, qui avaient fait dire à un de ses professeurs qu’elle ne réussirait pas, pour cette raison, sa voix grave qui la démarque, et la générosité réjouissante de son jeu.
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2018/12/03/la-mort-de-maria-pacome_5392037_3382.html
03/12/2018
La comédienne est décédée le 1er décembre à l’âge de 95 ans. Ses rôles au cinéma, notamment dans « La Crise » ou « Les Sous-doués », resteront. Amoureuse de théâtre, elle a aussi créé plusieurs pièces.
economie
« Gilets jaunes » : une centaine de stations-service en difficulté
Dans une station-service de Quimper, le 3 décembre. FRED TANNEAU / AFP Le mouvement des gilets jaunes va-t-il entrer dans une nouvelle phase avec des blocages de dépôts de carburants pour ralentir l’économie française ? Depuis plusieurs jours, des tentatives de blocages de dépôts se succèdent sur tout le territoire, entraînant des difficultés mineures d’approvisionnement. Mais le caractère insaisissable du mouvement fait penser que ces actions pourraient se multiplier. Selon le site mon-essence.fr, alimenté par les particuliers, 122 stations étaient en rupture partielle et 62 en rupture totale lundi en début d’après-midi. Une toute petite fraction des 11 000 stations que compte le territoire. Mais ces chiffres sont mouvants et la réalité des blocages est difficile à suivre. Certains dépôts, ou axes routiers qui y mènent, sont bloqués puis débloqués rapidement. Chez Total, lundi après-midi, on précise que « trois dépôts de carburants appartenant ou liés au Groupe Total sont difficiles d’accès [contre onze lundi matin] et environ 6 % de ses stations-service sont en rupture de carburant, sur un réseau total de 2 100 en France ». Le groupe pétrolier recommande toutefois à ses clients de « ne pas modifier leurs habitudes de consommation ». Les dépôts pétroliers du Mans (Sarthe), du Grand-Quevilly (Seine-Maritime) étaient également bloqués, ainsi que celui du port de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône). Restrictions dans le Finistère Les blocages de ces derniers jours ont parfois tenu quelques heures, mais certains ont été évacués, ou transformés en barrages filtrants par les manifestants. Ainsi, lundi matin le rond-point d’accès au dépôt pétrolier de Donges (Loire-Atlantique) a été évacué par les gendarmes, après avoir été brièvement occupé, rapporte Ouest-France. Les difficultés d’approvisionnement concernent surtout des stations dans le sud-est de la France et en Bretagne. Le Finistère est particulièrement touché, mais pour une autre raison. Le dépôt de Brest est bloqué depuis plusieurs jours par des entrepreneurs des travaux publics. Ils se mobilisent contre la fin du carburant détaxé pour les entreprises du secteur. Le dépôt de Lorient (Morbihan) est lui bloqué depuis une semaine par des « gilets jaunes ». La préfecture a d’ailleurs annoncé la mise en place, lundi, de restrictions transitoires sur les achats de carburant dans les stations-service. Les achats dans le département sont limités à 30 euros par jour pour un véhicule léger et à 200 euros pour un poids lourd. Ces restrictions ne s’appliquent pas aux véhicules considérés comme prioritaires, notamment les services de secours ou les transports de données périssables.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/03/gilets-jaunes-une-centaine-de-stations-service-en-difficulte_5392021_3234.html
03/12/2018
Les blocages de dépôts de carburants ces derniers jours ont rendu difficile l’approvisionnement en essence, mais ces conséquences restent limitées.
sciences
Premier vol habité de la fusée « Soyouz » depuis le lancement avorté du 11 octobre
La fusée Soyouz décolle depuis le centre spatial de Baïkonour (Kazakhstan), lundi 3 décembre, avec trois membres d’équipage à son bord. NASA De retour sur les rails ! La fusée Soyouz, qui est actuellement le seul moyen d’acheminer des équipages vers la Station spatiale internationale (ISS), a repris du service, lundi 3 décembre. A 18 h 40 (heure de Paris), l’agence spatiale russe a annoncé son arrimage à l’ISS. Elle avait décollé sans encombre à 12 h 31 depuis le centre spatial de Baïkonour, au Kazakhstan, avec trois équipiers à son bord : l’Américaine Anne McClain, le Canadien David Saint-Jacques et le Russe Oleg Kononenko, partis pour un séjour de six mois dans l’espace. Ce vol était sous haute tension : le 11 octobre, la fusée emportant l’Américain Nick Hague et le Russe Alexeï Ovitchinine avait connu une défaillance deux minutes après le décollage. Ce lancement raté, le premier pour un vol habité dans l’histoire de la Russie post-soviétique, avait relancé les doutes sur l’industrie spatiale russe, en proie à de nombreux échecs ces dernières années. Quelques semaines après l’accident, la commission d’enquête mise en place par l’agence spatiale russe Roscosmos avait conclu à la « déformation » d’un capteur lors de l’assemblage de la fusée Soyouz à Baïkonour. « Psychologiquement et techniquement prêt » « Le risque fait partie de notre métier », avait déclaré dimanche, lors de la traditionnelle conférence de presse de veille de lancement, le commandant de bord, Oleg Kononenko. A 54 ans et avec déjà trois vols spatiaux à son actif, il se disait « psychologiquement et techniquement prêt » pour le décollage. Parmi les missions assignées au Russe figure une sortie dans l’espace, prévue le 11 décembre, pour enquêter sur le trou découvert en août dans un vaisseau Soyouz amarré à la station orbitale, qui avait provoqué une légère décompression de l’ISS. Voir aussi Récit d’un départ raté vers la Station spatiale internationale Depuis l’accident, plusieurs fusées Soyouz inhabitées ont décollé sans encombre, dont une le 16 novembre, qui emportait un vaisseau cargo Progress de ravitaillement à destination de la station. Prévu le 20 décembre, le lancement de lundi a été avancé afin d’assurer une présence permanente dans l’ISS, alors que l’équipage actuel, composé de Sergueï Prokopyev, Alexander Gerst et Serena Auñon-Chancellor doit revenir sur terre le 20 décembre. Lundi, l’amarrage à l’ISS de l’équipage est prévu à 18 h 30, soit six heures à peine après le lancement.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/03/premier-vol-habite-de-la-fusee-soyouz-depuis-le-lancement-avorte-du-11-octobre_5392003_1650684.html
03/12/2018
L’équipage avait dû procéder à un atterrissage d’urgence après une défaillance de la fusée. Le vol de lundi constituait un test pour l’agence spatiale russe.
m-styles
Dior Men fait son show à Tokyo
Défilé Dior Men, précollection automne 2019, le vendredi 30 novembre, au Telecom Center Building de Tokyo. Dior C’est dans la capitale du Japon que Dior a choisi de présenter sa précollection masculine de l’automne 2019 (disponible en boutique en mai prochain). ­Question d’affinités : le fondateur de la maison et le nouveau directeur artistique de la ligne homme, Kim Jones, partagent un penchant pour la culture nippone. Dans un pays qui voue un véritable culte à la mode masculine, le créateur anglais est reçu comme un roi. Mercredi 28 novembre, les fans ont fait la queue de longues heures pour s’offrir une des pièces de la ligne capsule vendue exclusivement par le grand magasin Isetan, une collection épuisée en 60 secondes. Le lendemain, l’attroupement avait lieu à la boutique Dior du quartier de Ginza, où le designer dédicaçait (avec le photographe Juergen Teller) le nouveau numéro du magazine System qui lui est consacré, et titré « J’adore Kim ». Un fan particulièrement zélé a même demandé un autographe du créateur sur son passeport. Pin-up et robotique Pour le show, Dior investissait vendredi 30 novembre l’arène futuriste du Telecom Center Building habitée par une statue de 12 mètres de haut représentant une femme androïde signée ­Hajime Sorayama. L’artiste japonais connu pour son œuvre mêlant robotique et pin-up, érotisme et esprit pop, a également collaboré à la collection. Ses femmes et dinosaures robotisés peuplent des vêtements au fort potentiel de best-sellers. Alors que des lumières laser caressent le corps de cette statue aux courbes conquérantes, arrivent les premiers modèles d’une collection riche et inventive. On y croise de tout : costumes en pied-de-poule à texture faussement usée, blouson bombardier associant toile logo Dior et un motif panthère métallisé, pantalon multipoches de baroudeur urbain et veste couture dont l’astrakan paraît s’effriter sur du tulle brodé, soie effet papier aluminium imprimée de fleurs et de robots, ensemble façon pyjama imprimé du dernier motif cravate inventé par M. Dior, smoking noir ou en soie irisée multicolore… Le vestiaire masculin est décliné dans toutes ses variantes. Après six mois passés dans la maison, l’Anglais insuffle déjà une nouvelle énergie bienvenue, cool, raffinée, bien maîtrisée. Malgré sa réussite, au moment de saluer, il a timidement fait le tour du podium, au pas de charge. Un passage éclair, presque en contradiction avec son statut de rock star tokyoïte.
https://www.lemonde.fr/m-styles/article/2018/12/03/dior-men-fait-son-show-a-tokyo_5391989_4497319.html
03/12/2018
Le deuxième défilé de Kim Jones pour la ligne masculine de Dior, Vendredi 30 novembre, a confirmé un nouvel esprit urbain et moderne… Dans le respect du patrimoine de la maison, « of course ».
bien-gerer-sa-vie-etudiante
Bien choisir son budget pour une année d’étude à l’étranger
ontières n’est plus un privilège de nanti. À condition de travailler, séjourner à l’étranger est aussi accessible aux petits budgets. Je ne rentre pas dans les critères d’Erasmus Star des programmes d’échanges universitaires, Erasmus est un succès tel que la Commission européenne l’a étoffé. Sous l’ombrelle « Erasmus + » se trouvent désormais également des programmes dédiés aux apprentis, aux stagiaires et aux jeunes actifs, qu’ils soient diplômés ou non. L’objectif ? Donner aux moins de 30 ans la possibilité de séjourner à l’étranger pour renforcer leurs compétences, quel que soit leur profil. Travailler sur place pour financer mon séjour Pour travailler à l’étranger, au-delà d’une recherche d’emploi classique, de nombreuses formules s’offrent à vous : workaway, woofing, travail au pair, volontariat international (en entreprise, en administration ou de solidarité internationale), service civique, service volontaire européen, volontariat des Nations unies… Si vous souhaitez faire de l’humanitaire, sachez que beaucoup d’organismes proposent des missions de volontourisme qui satisferont votre désir d’exotisme mais n’apporteront pas grand-chose aux populations locales. Demandez-vous si vous êtes vraiment qualifié pour la mission proposée et soyez extrêmement rigoureux dans le choix de la structure. Quelle destination choisir en fonction de mon budget ? On pense spontanément au niveau de vie de la destination convoitée pour déterminer si on a les moyens d’y séjourner, mais d’autres paramètres sont à prendre en compte, comme les frais de visa, de vaccins, les frais scolaires s’il s’agit d’études, le billet d’avion… Pensez aussi aux frais bancaires : souvent gratuits au sein de la zone euro, ils sont susceptibles de faire grimper considérablement votre facture ailleurs dans le monde. Sur ce point, vérifiez les conditions au sein de votre banque et changez d’établissement si nécessaire : le Crédit Agricole propose par exemple aux 18-25 ans une offre permettant des retraits et paiements sans aucuns frais, partout sur la planète. Direction : Canada Vous souhaitez partir vivre quelques mois ou plusieurs années au Canada ? En partenariat avec la Banque nationale du Canada, le Crédit Agricole facilite la réalisation de votre projet. Votre conseiller vous aide à préparer l’ouverture d’un compte bancaire canadien en amont de votre départ, une formule bancaire dédiée vous est réservée et, une fois sur place, vous avez accès pendant 12 mois à un service d’assistance pour obtenir des renseignements sur le système bancaire canadien.
https://www.lemonde.fr/bien-gerer-sa-vie-etudiante/article/2018/12/03/peut-on-voyager-et-etudier-a-l-etranger-avec-un-petit-budget_5391982_5350140.html
03/12/2018
En France, un jeune sur trois passe au moins un semestre à l’étranger durant ses études, signe que s’instruire hors de nos frontières n’est plus un privilège de nanti. À condition de travailler, séjourner à l’étranger est aussi accessible aux petits budgets.
societe
Violences de samedi à Paris : quel a été le rôle des ultras ?
Au pied de l’Arc de triomphe, des manifestants arborent un drapeau avec le blason de Jeanne d'Arc. JULIEN MUGUET POUR LE MONDE Qui a vraiment été à l’origine de la violence du mouvement des « gilets jaunes », samedi 1er décembre, en particulier à Paris ? Est-ce le mouvement qui s’est autoradicalisé ? Ou a-t-il été instrumentalisé par des groupuscules, notamment d’extrême droite et d’extrême gauche, comme l’ont dénoncé à tour de rôle le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, et son secrétaire d’Etat, Laurent Nuñez ? Deux jours après les scènes d’insurrection qui ont pris de court tous les observateurs, il était encore difficile d’établir avec précision les responsabilités de chacun. Mais une chose est sûre, un noyau dur d’environ 2 000 à 3 000 militants de tout bord a ­clairement cherché à en découdre avec les forces de l’ordre. De l’aveu même de militants ­nationalistes interrogés par Le Monde, l’extrême droite était ainsi présente en nombre, samedi 1er décembre au matin, place de l’Etoile, là où a commencé l’essentiel de la mobilisation parisienne des « gilets jaunes ». Des militants venus en nombre, dans le cadre d’un soutien ­affiché au mouvement de la part de plusieurs groupes qui composent la mouvance – comme l’Action française (royaliste) ou les nationalistes révolutionnaires du Bastion social (ex-Groupe union défense) – et dans le cadre de mots d’ordre diffusés de façon plus confidentielle. Un sentiment partagé par les forces de l’ordre qui étaient positionnées très tôt sur ce point stratégique, situé juste en amont des Champs-Elysées où devait avoir lieu le rassemblement pacifique. Emballement Selon nos informations, à cette heure matinale, la gauche radicale n’est pas encore de la partie, ou alors très marginalement. Il y a en revanche, déjà, beaucoup de « gilets jaunes » ordinaires. Des individus peu expérimentés mais très motivés, venus avec tout le matériel nécessaire à un affrontement violent, d’après plusieurs témoignages : masques à gaz, gants, ­protections... Cette foule de « gilets jaunes » est plutôt composée d’hommes, âgés de 20 à 40 ans. Peu de femmes et de retraités sont présents sur ce qui va être une des lignes de front de la journée. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les « gilets jaunes », un casse-tête pour le maintien de l’ordre L’emballement se fait très vite, à l’initiative des ultras « nationalistes », comme ils se décrivent. Des activistes qui ne craignent pas d’aller à l’affrontement alors que ce n’est d’ordinaire pas dans leurs habitudes, même si on avait pu voir ce genre de scènes à la marge des rassemblements de La Manif pour tous en 2013. Leur coup d’éclat sera l’occupation du tombeau du Soldat inconnu, autour duquel ils se masseront en fin de matinée pour une image qui ­risque de rester dans les annales du quinquennat.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/03/violences-de-samedi-a-paris-quel-a-ete-le-role-des-ultras_5391949_3224.html
03/12/2018
Militants d’extrême droite, activistes d’extrême gauche et « gilets jaunes » ordinaires ont affronté ensemble les forces de l’ordre.
economie
« Le repli de la mondialisation n’est finalement pas une bonne nouvelle pour la planète »
196 pays participent au sommet de la COP24, du 2 au 14 décembre, en Pologne. JANEK SKARZYNSKI / AFP Chronique. La ville polonaise et charbonnière de Katowice sera-t-elle le théâtre d’un sursaut des consciences environnementales planétaires ? Les 196 pays qui s’y sont donné rendez-vous du 2 au 14 décembre pour le sommet de la COP24, supposé mettre en musique l’accord de Paris de 2015, arrivent bardés de bonnes intentions. Mais l’ambiance n’est plus aux grandes envolées lyriques. Le retrait des Etats-Unis a plombé l’atmosphère, et les perspectives sont aussi sombres que le ciel de Katowice en cette saison. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Climat : quels sont les enjeux de la COP24 qui s’est ouverte en Pologne ? Pour se réconforter, les experts et ministres pourront toujours se replonger dans le rapport de l’organisation météorologique mondiale, paru le 5 novembre, et qui fait état d’une amélioration spectaculaire de la couche d’ozone, cette mince pellicule gazeuse de la stratosphère qui nous protège des rayons ultraviolets. Durant les années 1980 et 1990, le sujet du « trou dans la couche d’ozone » était de tous les débats. Comme une grande répétition de la mobilisation climatique entamée dix ans plus tard. De la même manière, tout est parti d’un cri d’alarme et de la désignation d’un coupable. Depuis les années 1950, la quantité d’ozone atmosphérique diminue et disparaît même chaque printemps au niveau des pôles. Le coupable principal en est le chlore présent dans les gaz de type CFC comme le fréon, utilisé dans des milliers d’applications industrielles. Le protocole de Montréal, signé en 1987, a lancé le mouvement, suivi d’un calendrier précis d’interdiction des différentes substances utilisées par près de 240 secteurs industriels différents. Ce qui manque, c’est la volonté politique En 2009, la totalité des pays avaient ratifié l’accord et éradiqué progressivement les émissions, en dehors de fraudes qui subsistent, notamment en Chine. Résultat, selon les Nations unies, la couche d’ozone devrait être complètement rétablie d’ici à 2030 dans l’hémisphère Nord et 2050 dans l’hémisphère Sud. La preuve qu’un accord climatique international peut réussir à enrayer une catastrophe climatique. En sera-t-il de même avec le réchauffement ?
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/03/le-repli-de-la-mondialisation-n-est-finalement-pas-une-bonne-nouvelle-pour-la-planete_5391946_3234.html
03/12/2018
Alors que les 196 pays de la COP24 sont réunis en Pologne pour accroître l’effort en matière de lutte contre le réchauffement climatique, l’exemple de la réussite de l’accord sur la couche d’ozone montre que la coopération internationale peut fonctionner. Mais les temps ont changé…, pointe Philippe Escande, éditorialiste économique du « Monde ».
societe
En région, les « gilets jaunes » toujours mobilisés
Lors de la manifestation des « gilets jaunes », à Bordeaux, samedi 1er décembre. NICOLAS TUCAT / AFP A Pau, la police fait face, depuis un bon moment déjà, à plusieurs dizaines de personnes revêtues du désormais fameux gilet fluo. Et puis soudain, les CRS retirent leurs casques. Ils ne tenteront rien contre les manifestants qu’ils connaissent pour la plupart. On chante La Marseillaise, on s’applaudit mutuellement. Cette fraternisation inattendue n’empêche nullement les « gilets jaunes » de continuer à invectiver Emmanuel Macron et la politique du gouvernement. Le maire, François Bayrou, tente pourtant depuis trois semaines d’engager le président au dialogue, mais cela n’a pas calmé les manifestants. Ce samedi 1er décembre, en région, n’a pas tout à fait le même visage que dans la capitale. Le tableau y est plus contrasté, avec des scènes d’orages et des abris au calme. Après les CRS de Pau, renonçant à réprimer les « gilets jaunes », c’est à Cholet (Maine-et-Loire), que les pompiers expriment leur mécontentement. Ils devaient être célébrés par les élus locaux et le préfet, mais en pleine cérémonie, l’effectif sorti de sa caserne a tourné le dos à la délégation de maires en écharpe tricolore, pour protester contre les coupes dans les effectifs. Dans ces petites villes, forces de sécurité et de protection savent trop bien la dureté de la vie dénoncée par les manifestants. Dans la plupart des régions en pointe dans le mouvement de protestation, les barrages dressés les semaines précédentes sur les routes ont été réinvestis sans difficultés par les manifestants. Cela ne va pas sans heurts ni accidents, cependant. Dans la nuit de samedi à dimanche, à Arles, dans les Bouches-du-Rhône, un automobiliste est mort après avoir percuté un poids lourd à l’arrêt en raison d’un bouchon provoqué par un barrage de « gilets jaunes ». C’est le troisième mort, depuis le début des manifestations, trois semaines plus tôt. Slogans hostiles Et puis, il y a des échauffourées plus ou moins graves, selon les endroits. A Lille, le crachin et le froid n’ont pas arrêté les protestataires qui marchent en scandant « Macron démission ! ». Un bon millier de personnes, des jeunes, des retraités, venus parfois en famille. Masque sur le visage « au cas où » et bonnet sur la tête, Sylvie Bauchemin, 58 ans et en préretraite, avait manifesté les samedis précédents à Englos et Faches-Thumesnil, dans la métropole lilloise. « Aujourd’hui, en venant à Lille, j’ai peur mais je suis là », dit-elle, parce qu’à la fin du mois, il ne reste que 70 euros dans son porte-monnaie. A ses côtés, son compagnon, André Locoge, ingénieur, remarque :
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/03/en-region-les-gilets-jaunes-toujours-mobilises_5391930_3224.html
03/12/2018
Hormis quelques villes dans lesquelles le calme a régné, les rassemblements ont dégénéré à Toulouse, Marseille et Bordeaux, samedi.
politique
Les syndicats restent sur le bas-côté de la mobilisation des « gilets jaunes »
2 000 militants CGT défilaient samedi 1er décembre place de la République à Paris. ZAKARIA ABDELKAFI / AFP Se rendre, samedi 1er décembre, place de la République, à Paris, permettait de se faire une idée de l’impuissance des syndicats face au mouvement des « gilets jaunes ». La CGT avait appelé « tous les citoyens, les salariés actifs et retraités » à se mobiliser. Non pas sur les Champs-Elysées mais au cours d’un autre défilé, organisé tous les ans à cette date en soutien aux chômeurs et précaires, et dont le mot d’ordre avait été élargi au pouvoir d’achat. Une main tendue aux protestataires avec une stratégie de convergence des luttes. Las ! Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Gilets jaunes » : entre l’exécutif et les citoyens, le grand vide des corps intermédiaires Si certains « gilets jaunes » émaillaient le cortège, l’appel n’a guère été entendu. Quelque 2 100 personnes ont battu le pavé, selon la Préfecture de Paris, 15 000 selon les organisateurs. Au grand dam de Pierre Langellier, ancien militant CGT aujourd’hui retraité, croisé à République. « C’est quand même tristounet, se désolait-il. Il y a des millions de chômeurs, des retraités qui voient leur pouvoir d’achat impacté, des “gilets jaunes” qui font entendre leur colère, et là on est si peu… » La manifestation s’est déroulée dans le calme, loin de la fureur qui se déversait presque au même moment aux Champs-Elysées. Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, dit son inquiétude et condamne des « violences inacceptables contre des lieux publics et privés, des lieux de la République et contre les policiers ». Elles sont, selon lui, le fait de personnes issues « de l’ultragauche, de l’ultradroite et de la radicalisation d’un certain nombre de gens » venant des « gilets jaunes », indique-t-il au Monde. Pour Fabrice Angei, un dirigeant de la CGT, il s’agit d’« événements plus que regrettables » mais, selon lui, « le gouvernement et sa majorité portent une lourde responsabilité à force de ne pas entendre ce qui s’exprime ». Pour beaucoup, le rétablissement de l’état d’urgence, évoqué dès samedi soir par le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, n’est pas la solution. « On ne répond pas à l’urgence sociale par l’état d’urgence », pointe Yves Veyrier, le nouveau patron de FO. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Emmanuel Macron, un président mutique face à la pression « Répondre à l’urgence » Que faire alors pour répondre à une colère qui a franchi un nouveau cap samedi ? « Il faut que le président soit ferme sur l’autorité de l’Etat, mais il doit faire un geste », répond M. Berger. Reste à savoir lequel, certains ne voyant même pas ce qui serait à même de faire retomber la tension. « C’est inquiétant car, quand on fait une analyse rationnelle et documentée de la situation, on ne voit pas de solution », juge ainsi François Homméril, président de la CFE-CGC.
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/03/les-syndicats-restent-sur-le-bas-cote-de-la-mobilisation-des-gilets-jaunes_5391924_823448.html
03/12/2018
La CGT, FO et la CFDT condamnent la violence, mais poussent le gouvernement à trouver des solutions sur le pouvoir d’achat.
international
En Allemagne, l’extrême droite revêt l’uniforme des « gilets jaunes »
Avec le gilet jaune, l’extrême droite allemande s’est trouvé un nouvel uniforme. Pour la première fois, trois de ses organisations ont appelé à un « rassemblement en gilets jaunes », samedi 1er décembre, devant la porte de Brandebourg, à Berlin. Pegida, un mouvement « contre l’islamisation de l’Occident », créé à Dresde (Saxe), en 2014, Zukunft Heimat (Avenir patrie), un collectif anti-immigration implanté dans l’est du Brandebourg, près de la frontière polonaise, et Merkel-muss-weg-Mittwoch, un groupe d’opposants à la chancelière allemande qui, chaque mercredi, se réunit devant ses bureaux pour réclamer son départ, ont réuni environ un millier de personnes. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Gilets jaunes » : le monde politique abasourdi face à une crise inédite Le prétexte du rassemblement était la dénonciation du Pacte des Nations unies « pour des migrations sûres, ordonnées et régulières », qui avait été approuvé la veille par le Bundestag et doit être adopté, les 10 et 11 décembre, à Marrakech. Pourquoi revêtir des gilets jaunes pour défendre une telle cause ? « Notre combat rejoint celui des “gilets jaunes” français. Ici, nous voulons nous débarrasser de Merkel. En France, ils veulent que Macron démissionne, mais au fond, notre objectif est le même : redonner le pouvoir aux peuples européens, en finir avec ces politiques inconséquentes qui donnent tous les droits aux étrangers alors que les Européens de souche, eux, sont traités comme des citoyens de seconde zone », explique un homme venu de Dresde, qui, dans sa main, tient un tract titré « Ça suffit » et décoré de gilets jaunes. Dessus, une longue liste de doléances : « les impôts et le coût de la vie ne cessent de croître », « la classe moyenne perd plus que les autres » ; « les personnes âgées sont menacées par la pauvreté » ; « l’immigration de masse n’en finit pas » ; « les politiciens de plus en plus pourris » ; « la presse mensongère de plus en plus cynique »… Un combat « justifié » Même si le parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD) n’était pas officiellement coorganisateur du rassemblement de samedi, certains de ses dirigeants avaient fait le déplacement. Quatre jours plus tôt, la princesse Doris von Sayn-Wittgenstein, patronne de l’AfD dans le Land du Schleswig-Holstein, avait diffusé sur les réseaux sociaux une photo d’elle en chemisier à col en dentelle et gilet jaune, avec ce slogan : « Solidarité avec les citoyens français ».
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/03/en-allemagne-l-extreme-droite-revet-l-uniforme-des-gilets-jaunes_5391918_3210.html
03/12/2018
Samedi, trois organisations, dont Pegida, ont mobilisé à Berlin contre l’immigration en demandant à leurs partisans de porter des « gelbe Westen ».
economie
Record historique pour les profits des groupes américains
Dion Weisler n’est pas peu fier. Hewlett-Packard a encore bouclé « un solide trimestre » pour clore en beauté « une année exceptionnelle », a déclaré jeudi 29 novembre l’Australien qui dirige le numéro deux mondial des ordinateurs. Dans un secteur du matériel informatique où la compétition lamine les marges, le fabricant de Palo Alto, en Californie, a plus que doublé son résultat net trimestriel en un an. Même en retranchant les éléments exceptionnels, les profits ont augmenté de 15 %. Et le groupe a dégagé assez de trésorerie pour choyer ses actionnaires, en leur transférant 3,5 milliards de dollars en un an… « Solide trimestre », « année exceptionnelle », « succès » : les mots de Dion Weisler pourraient être repris par la majeure partie des patrons américains. Il y a quelques semaines encore, nombre d’analystes s’attendaient à ce que les grands noms de Wall Street subissent un tassement de leurs marges bénéficiaires au troisième trimestre. Raté. Maintenant que presque tous les champions de l’indice S&P 500 ont publié leurs chiffres, il faut se rendre à l’évidence : leurs profits ont non seulement poursuivi leur ascension, mais ils l’ont fait de façon très spectaculaire. Infographie Le Monde En moyenne, leur bénéfice net trimestriel a bondi de 26 % d’une année sur l’autre, selon les pointages de Factset. C’est la plus forte hausse depuis l’automne 2010. Trois groupes sur quatre ont, comme HP, dégagé des profits plus élevés qu’attendu. Les marges ont retrouvé le niveau d’avant la crise Apple, General Motors, Pfizer, Visa, ExxonMobil et les autres affichent ainsi, en moyenne, une marge nette représentant 12 % de leur chiffre d’affaires. Du jamais-vu ! Depuis la grande crise économique de 2008-2009, qui avait ramené la marge moyenne à 6 % des ventes, les ténors américains n’ont pratiquement pas cessé d’améliorer leurs comptes. Dès 2015, les marges ont retrouvé leur niveau d’avant la crise. Depuis, elles continuent à grimper, trimestre après trimestre, signant record sur record au mépris des prévisions. « Cette saison des résultats s’est révélée exceptionnelle, encore plus que nous ne l’avions anticipé, reconnaissent les experts de LPL Financial, un des principaux courtiers américains. Les affirmations antérieures selon lesquelles la croissance des bénéfices avait atteint un pic étaient prématurées. » A quoi tient cette embellie prolongée ? Le capitalisme américain bénéficie d’un alignement des astres qui demeure assez parfait. Même si le FMI a légèrement revu ses perspectives à la baisse, la croissance mondiale devrait encore atteindre 3,7 % en 2018 comme en 2019. L’économie des Etats-Unis, en hausse ininterrompue depuis neuf ans, tourne à peu près au même rythme, notamment grâce aux dépenses publiques accrues par l’administration Trump. Autant d’occasions pour les multinationales américaines d’écouler davantage de logiciels, de voitures, de plastique, de prêts, etc. En rythme annuel, leur chiffre d’affaires s’est accru de 9 % au troisième trimestre, la hausse la plus vigoureuse depuis sept ans.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/03/record-historique-pour-les-profits-des-groupes-americains_5391913_3234.html
03/12/2018
Au troisième trimestre, la marge nette des champions de Wall Street a atteint en moyenne 12 %, du jamais-vu, après un bond de 26 % , la plus forte hausse depuis huit ans.
football
Ligue 1 : Sabri Lamouchi « mis à pied » par Rennes
Sabri Lamouchi, le 8 novembre à Kiev en Ligue Europa. VALENTYN OGIRENKO / REUTERS Ce n’est pas une séparation, mais cela y ressemble très fort. L’entraîneur Sabri Lamouchi (47 ans) a été « mis à pied » par Rennes, au lendemain d’une déroute (4-1) à domicile contre Strasbourg, plongeant le club au 14e rang de la Ligue 1 après 15 journées. « Julien Stéphan, entraîneur de l’équipe réserve, sera en charge de l’équipe professionnelle durant cette période », a expliqué le club dans son communiqué. Dimanche, Rennes a sombré devant son public face à Strasbourg, après avoir pourtant ouvert le score par Ismaïla Sarr, Lamouchi évoquant « un naufrage collectif » de son équipe, très irrégulière depuis le début de la saison. [COMMUNIQUÉ OFFICIEL] Le Stade Rennais F.C. ayant décidé de mettre à pied son entraîneur Sabri Lamouchi, Julien Sté… https://t.co/22vqZcDCMi — staderennais (@Stade Rennais F.C.) Les Bretons étaient pourtant allés arracher un succès quatre jours plus tôt en Ligue Europa chez les Tchèques de Jablonec (1-0), qui offrait au club une chance de se qualifier dans dix jours pour les seizièmes de finale de la C3 en cas de succès à domicile contre Astana. Mais le niveau de jeu trop faible souvent affiché par l’équipe depuis le début de cette saison, malgré un recrutement vendu par le club comme exceptionnel, avec notamment les arrivées d’Hatem Ben Arfa et Mbaye Niang, ont fini par coûter sa place au coach, qui sera resté à peine plus d’un an pour son premier poste en Ligue 1. L’ancien milieu de terrain international avait succédé le 8 novembre 2017 à Christian Gourcuff. Il avait repris en main une équipe 10e de la Ligue 1 pour la hisser jusqu’à la 5e place en fin de saison et une qualification européenne. Entraîneur de l’équipe réserve rennaise depuis 2015, Julien Stéphan (38 ans) présente surtout un profil de formateur et n’a jamais dirigé une équipe professionnelle. Il est le fils de Guy Stéphan, adjoint de Didier Deschamps en équipe de France.
https://www.lemonde.fr/football/article/2018/12/03/ligue-1-sabri-lamouchi-mis-a-pied-par-rennes_5391900_1616938.html
03/12/2018
Au lendemain de la défaite à domicile contre Strasbourg (1-4), l’entraîneur du Stade rennais a été mis à pied par sa direction. Julian Stephan assurera l’intérim.
afrique
Une actrice égyptienne poursuivie pour « incitation à la débauche »
Rania Youssef à la cérémonie de clôture du Festival international du film du Caire, le 29 novembre. SUHAIL SALEH / AFP L’actrice égyptienne Rania Youssef a créé l’émoi en défilant, jeudi 29 novembre, à la cérémonie de clôture du Festival international du film du Caire en body moulant et robe transparente noire, dévoilant ses jambes nues. Cette audace lui vaut d’être appelée à comparaître, le 12 janvier, devant la justice. Un avocat égyptien, Amrou Abdessalam, a déposé plainte devant un tribunal du Caire, accusant l’actrice « d’incitation à la débauche », un délit passible de cinq ans d’emprisonnement, selon un responsable judiciaire. Une seconde plainte a été déposée auprès du procureur général par l’avocat Samir Sabri, coutumier des procès en morale contre des célébrités, des hommes politiques et des religieux. Reconnaissant avoir sous-estimé la colère populaire en choisissant un créateur trop inspiré par les festivals internationaux, Rania Youssef a tenté de faire amende honorable. « Je tiens à redire mon attachement aux valeurs et mœurs dans lesquelles nous avons été élevés dans la société égyptienne », a-t-elle écrit, samedi, sur Facebook. Croisade moralisatrice Ses excuses n’ont pas suffi. Hormis la vague de réactions outrées échangées sur les réseaux sociaux, l’actrice a été lâchée par sa corporation. Le syndicat des artistes égyptiens a dénoncé, dans un communiqué, « l’apparence de certaines invitées du festival qui n’est guère conforme aux traditions de la société (…) » et les a appelées « à prendre leurs responsabilités envers un public qui respecte leur art ». Cette croisade moralisatrice pourrait prêter à sourire si la justice égyptienne ne s’était illustrée, ces dernières années, par son intransigeance en matière de respect des bonnes mœurs et de l’image du pays. En décembre 2017, la chanteuse Shyma, 21 ans, a été condamnée à deux ans de prison pour « incitation à la débauche » après son apparition dans un vidéoclip incluant des scènes de danse orientale sensuelle. En février, la chanteuse à succès Sherine Abdel Wahab a été, à son tour, condamnée à six mois de prison pour avoir dénigré le Nil en plaisantant sur la qualité de son eau lors d’un concert. Cinq ans après le renversement du président islamiste, Mohamed Morsi, par l’armée, en 2013, et malgré le bras de fer engagé par les nouvelles autorités contre l’islam politique, les avocats moralisateurs accumulent les « victoires ». Le conservatisme social et religieux gagne du terrain dans ce pays musulman de 100 millions d’habitants, où la danse du ventre avait pourtant jadis acquis ses lettres de noblesse et où tant de popstars arabes aux attitudes lascives ont propulsé leur carrière. Les autorités, tenues d’une main de fer par le président Abdel Fattah Al-Sissi, ont embrassé ce conservatisme aux accents moralisateurs et nationalistes. Le pieux chef d’Etat – dont les appels à réformer le discours religieux pour l’expurger des textes promouvant haine et violence sont restés sans suite – se pose en boussole morale du pays. « Je défendrai les valeurs, les mœurs, les principes et la religion [de la nation] », avait-il d’ailleurs promis avant son élection, en juin 2014.
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/03/une-actrice-egyptienne-poursuivie-pour-incitation-a-la-debauche_5391886_3212.html
03/12/2018
Deux avocats ont déposé plainte contre Rania Youssef. En cause : sa tenue lors de la cérémonie de clôture du Festival international du film du Caire.
idees
« Gilets jaunes » : « Une partie de la solution serait de fabriquer des voitures consommant 3 litres aux 100 »
« Que proposent les constructeurs par rapport à la crise écologique actuelle et à l’usage de la voiture ? Des voitures chères et rentables pour eux, dont ils ne nous disent pas quelle fraction de la population pourra les acheter. » Fotofeeling / Westend61 / Photononstop Tribune. L’auteur de ces lignes n’est pas spécialiste de l’industrie automobile, mais, ayant obtenu son permis de conduire en décembre 1968, voilà cinquante ans, il est sans doute capable d’effectuer quelques comparaisons utiles… Une 2 CV de 1965, achetée en 1975, lui a permis l’été d’aller en Grèce. Cette 2 CV pesait 500 kg, consommait vraiment 4 litres d’essence aux 100 kilomètres, ne dépassait les 100 km/h que dans les descentes. Si l’accent avait vraiment été mis depuis la crise pétrolière de 1973 sur la réduction de la consommation d’énergie, des voitures consommant 3 litres aux 100 rouleraient aujourd’hui, une diminution de 4 à 3 litres n’étant pas hors d’atteinte compte tenu du progrès technique. Ce n’est pas ce qui s’est produit : le modèle le plus simple de Renault, la Clio de 2018, pèse 1 090 kg, atteint 178 km/h, consomme selon le constructeur 5 litres, en réalité au moins 6 litres. Les voitures d’aujourd’hui consomment autant que celles des années 1960. Elles sont beaucoup plus lourdes et, la mode des SUV [véhicules utilitaires de sport] aidant, moins aérodynamiques. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Gilets jaunes » : « La priorité est d’apporter des solutions rapides au recul des services de proximité » Le rendement énergétique des moteurs a certes progressé : une proportion plus forte qu’avant de l’énergie sert à faire tourner les roues, et non à réchauffer l’atmosphère. Mais d’une part ces augmentations de rendement sont insuffisantes, d’autre part elles ont été compensées par une augmentation du poids, de la largeur et de la hauteur des voitures. Il suffit de se retrouver dans la circulation à côté d’une minuscule Fiat 500 des années 1960 pour comprendre ces évolutions. Les voitures d’aujourd’hui sont trop grandes, trop puissantes, trop gourmandes en essence et trop coûteuses par rapport aux besoins d’une large partie de la population. Pourquoi peuvent-elles aller si vite ? Elles sont plus sûres qu’il y a cinquante ans. Mais pourquoi peuvent-elles aller si vite alors que partout des limitations de vitesse s’imposent ? Les choix des constructeurs ont été déraisonnables par rapport aux besoins de la population dont le kilométrage parcouru annuellement s’est réduit ces dernières années. Les constructeurs ont poussé à l’achat de grosses voitures et non de petites parce que les grosses rapportent plus. Ils ont incité à un achat systématique de voitures diesel, ce qui s’est révélé désastreux pour l’environnement, et ont longtemps été soutenus par l’Etat dans cette politique.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/gilets-jaunes-une-partie-de-la-solution-serait-de-fabriquer-des-voitures-consommant-3-litres-aux-100_5391871_3232.html
03/12/2018
En préférant construire et vendre des véhicules lourds, coûteux et gourmands en carburant, les constructeurs automobiles participent plus au problème qu’à la solution, observe l’économiste Pierre Le Masne dans une tribune au « Monde ».
sante
Manifestation d’ambulanciers à Paris contre la réforme du financement des transports sanitaires
Des ambulances bloquent le trafic près de l’Assemblée nationale, à Paris, le 3 décembre. GONZALO FUENTES / REUTERS Toutes sirènes hurlantes, des ambulances étaient stationnées lundi 3 décembre au matin sur le pont de la Concorde, devant l’Assemblée nationale, d’autres bloquaient complètement l’accès à la place depuis la rue de Rivoli… Au moins une centaine d’ambulanciers – 350 à 400 selon les organisateurs – manifestaient à Paris pour réclamer la suspension d’une réforme du financement des transports sanitaires. Paris - Blocage surprise de plusieurs centaines d’ambulances devant l’Assemblée Nationale et sur la place de la Con… https://t.co/N5QRujQOaj — RemyBuisine (@Remy Buisine) Depuis une dizaine de jours, des réunions ont lieu un peu partout en France, à l’initiative de la toute jeune Association pour la défense des transporteurs sanitaires (ADTS), pour préparer le rassemblement. Les grands groupes favorisés Cette réforme menace, selon les manifestants, les petites et moyennes entreprises du secteur. En ligne de mire : l’article 80 du projet de budget de la Sécurité sociale 2017, entré en vigueur le 1er octobre. Cette mesure a renversé les règles des transports entre établissements de santé. Désormais, hôpitaux et cliniques choisissent leurs ambulances par appel d’offres, à la place des patients, et en assument directement le coût. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Mobilisation des ambulanciers : « On entre en résistance, on va se battre pour sauver notre métier » Depuis, la filiale de la SNCF « Keolis a acheté deux sociétés », s’indigne Hakim, propriétaire d’une société d’ambulances des Hauts-de-Seine interrogé par l’Agence France-Presse (AFP). « Plusieurs artisans ont acheté des structures, des autorisations de mise en service jusqu’à 200 000 euros, ils vont tout perdre », dit-il, dénonçant « l’“ubérisation” du travail et la fermeture des petites structures ». « Les grands groupes veulent casser les prix », abonde Annie, qui exerce à Paris. Le 5 novembre, 700 à 1 200 véhicules sanitaires avaient bloqué le périphérique parisien pendant près de trente-six heures, provoquant des centaines de kilomètres de bouchons. Comme pour la manifestation précédente, les fédérations représentatives du secteur n’ont pas appelé à manifester.
https://www.lemonde.fr/sante/article/2018/12/03/manifestation-d-ambulanciers-a-paris-contre-la-reforme-du-financement-des-transports-sanitaires_5391868_1651302.html
03/12/2018
Les ambulanciers dénoncent l’« ubérisation » de leur profession et réclament l’abrogation du nouveau système de financement entré en vigueur en octobre.
idees
« Le plus étonnant dans la chute de Facebook est peut-être que l’on s’en étonne »
Marchés. La compagnie américaine Facebook, fondée, en 2004, par Mark Zuckerberg, qui en est toujours le président et en contrôle 60 %, compte 30 000 employés et gère un réseau social de 2 milliards d’utilisateurs. Son chiffre d’affaires en 2017 a été de 35 milliards d’euros. Mais au cours des cinq derniers mois, l’action Facebook a perdu 38 % de sa valeur, dont 21 % sur la seule semaine du 24 au 30 juillet. La perte se monte, pour ses actionnaires, à plus de 100 milliards de dollars. Certains réclament la démission de Zuckerberg. Lire aussi Face à un ralentissement de sa croissance, Facebook investit pour répondre à ses futurs défis Le plus étonnant dans cette chute est peut-être que l’on s’en étonne. Car après tout, quel est le rapport entre ces chiffres faramineux et le jeu inventé par des étudiants d’Harvard dans des soirées bien arrosées pour partager leur appréciation sur les filles du campus : « baisable, ou pas ? » Le film de David Fincher The Social Network (2010), inspiré d’un récit de Ben Mezrich (traduit en français sous le titre La Revanche d’un solitaire, J’ai lu, 2011), rappelant cela, met en scène un Zuckerberg prétentieux, pédant et goujat, que les femmes éconduisent. Surprenante aussi est la bienveillance des utilisateurs et des financiers envers une entreprise dont le business model est basé sur le mensonge de l’innocuité de la publicité, de l’hyper-surveillance et de la manipulation en général. Données monnayables Il s’agissait, au tout début, de créer un trombinoscope unique pour Harvard à partir de bases de données disparates, puis d’étendre l’outil à d’autres universités tout en maintenant une image d’exclusivité. La solution : permettre aux premiers membres sélectionnés d’en coopter d’autres, qui se verraient ainsi honorés d’accéder au même privilège pour partager informations, photos, messages, avis, opinions, le tout « gratuitement ». Gratuité fondée bien sûr sur une largesse puisque les données recueillies sont éminemment monnayables (de 0,75 dollar à 5 dollars par individu en 2015) et utilisables par quiconque voudra en tirer parti, qu’il s’agisse d’entreprises cherchant à vendre un produit, de gouvernements fichant leurs contestataires, ou de partis cherchant à faire voter pour eux. Comme on le sait, cette utilisation de Facebook par les commerçants et les gouvernements n’a irrité jusqu’ici que lesdits contestataires, opposants de la société marchande comme contestataires du cyberdespotisme. Il aura donc fallu attendre que la complicité de Facebook avec des officines manipulant le résultat d’élections éclate au grand jour, en mars 2018, avec l’affaire Cambridge Analytica, pour que le business model hérité d’une blague de potache soit enfin remis en question. Cette compagnie britannique, fondée par Robert Mercer, libertarien militant richissime grâce à son fonds spéculatif Renaissance Technologies, et Steve Bannon, figure de l’extrême droite américaine identitaire, directeur de campagne de Trump en 2016 puis stratège en chef à la Maison Blanche de janvier à août 2017, a exploité les données Facebook de 87 millions d’Américains pour tenter d’influencer les électeurs par des messages ciblés.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/le-plus-etonnant-dans-la-chute-de-facebook-est-peut-etre-que-l-on-s-en-etonne_5391859_3232.html
03/12/2018
Dans sa chronique, l’économiste Paul Jorion estime que les limites du « business plan » du réseau social menacent l’avenir de son ambitieux dirigeant Mark Zuckerberg.
idees
« Pierre, Paul, Jacques et les “gilets jaunes” »
Un « gilet jaune » devant le centre des finances publiques de Rennes, dimanche 2 décembre 2018. JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP Tribune. Le mouvement des « gilets jaunes » – après celui des « bonnets rouges », il y a cinq ans à peine – est le dernier avatar d’une série d’éruptions collectives dont les ressorts et les mobiles sont si complexes qu’ils engendrent une masse de commentaires à peu près proportionnelle au désarroi dans lequel ils plongent les sociologues, bien en peine de dessiner les contours d’un phénomène aussi gazeux qu’instable. Reste que beaucoup d’observateurs s’entendent pour voir dans cette nouvelle jacquerie le résultat des inégalités qui mineraient notre société. Et comme on pouvait s’y attendre, le libéralisme fait souvent, dans leur bouche ou sous leur plume, office de bouc émissaire tout trouvé. La mission première de l’Etat consiste quotidiennement à déshabiller Pierre pour habiller Paul Si on les suit, ce sont en effet les politiques supposément libérales mises en œuvre par tous les gouvernements français récents qui auraient contribué à creuser les inégalités sociales dans notre pays, minant par là même le contrat social que nous avions hérité du Conseil national de Résistance. Dès lors, le mouvement des « gilets jaunes » ne serait qu’une nouvelle manifestation de l’indignation d’un peuple méprisé par ses élites et abandonné au règne de l’individualisme et du profit, fondements du cruel ordre libéral contemporain. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Gilets jaunes » : « La priorité est d’apporter des solutions rapides au recul des services de proximité » Et si la vérité était à l’opposé d’une telle vision ? Et si, loin d’être une explosion engendrée par les renoncements de l’Etat social qui fut au cœur des « trente glorieuses », le mouvement des « gilets jaunes » était, au contraire, le résultat des impasses d’une spirale interventionniste et redistributrice, celle d’un Etat devenu obèse et impotent ? Ressentiments violents Expliquons-nous. Avec un taux de prélèvements obligatoires avoisinant les 45 % du PIB et une part des dépenses publiques représentant 54 % de notre richesse nationale, l’Etat français (nous y incluons évidemment notre système de protection sociale) est devenu une gigantesque machine à redistribuer, dont la mission première consiste quotidiennement à déshabiller Pierre pour habiller Paul. Par le biais de la fiscalité et des prestations sociales, la collectivité prend, d’une main, une part croissante des revenus de chacun, pour mieux redonner, de l’autre main, cette même quantité de richesses.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/pierre-paul-jacques-et-les-gilets-jaunes_5391857_3232.html
03/12/2018
Le mouvement de contestation est moins le résultat d’une politique libérale que celui des impasses d’un système de redistribution devenu opaque, estime l’historien Jérôme Perrier dans une tribune au « Monde ».
idees
Julia Cagé : « La crise des “gilets jaunes” est une crise du pouvoir d’achat »
A Toulouse, le 24 novembre 2018, lors d’une manifestation des « gilets jaunes ». MATTHIEU RONDEL / HANSLUCAS POUR LE MONDE Tribune. Combien de « gilets jaunes » supplémentaires faudra-t-il pour que le gouvernement se rende compte de ce qui est en train de se jouer sous ses yeux ? Et dont il est responsable, contrairement à ce qu’il prétend. Car la crise que connaît actuellement la France n’est pas une crise du prix du carburant, dont les fluctuations sont, il est vrai, largement dues à la situation géopolitique internationale. L’essence n’a été que le combustible d’une allumette dont la flamme grossissait depuis de longs mois : la crise des « gilets jaunes » est une crise du pouvoir d’achat. Une crise dont on pourrait presque s’étonner qu’elle n’ait pas explosé plus tôt, dès les premiers mois du quinquennat, quand Emmanuel Macron a diminué les aides au logement et reporté l’exonération de la taxe d’habitation ; ou il y a quelques semaines, depuis Marseille, tant l’effondrement mortel des immeubles insalubres témoigne de l’abandon dont sont victimes les classes populaires. « Certains voudraient voir dans le mouvement des “gilets jaunes” une crise du consentement à l’impôt. Ce sont les plus riches qui ont fait sécession et refusent de payer l’impôt » La crise des « gilets jaunes » est une crise du pouvoir d’achat. Un pouvoir d’achat qui a diminué pour les Français les plus modestes, du fait des politiques mises en œuvre par le gouvernement. Au même moment, conséquence directe de la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune et de l’introduction d’un prélèvement forfaitaire unique sur le capital – qui implique entre autres choses que les plus riches n’ont pas, contrairement à l’ensemble des Français et notamment des petits retraités, fait face à l’augmentation de la CSG sur les revenus du capital –, le pouvoir d’achat des 1 % les plus favorisés a augmenté de 6 %, quand celui des 0,1 % les plus favorisés a augmenté lui de 20 %, comme l’a très bien montré une étude de l’Institut des politiques publiques. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les ultrariches, grands gagnants de la fiscalité Macron Certains voudraient voir dans le mouvement des « gilets jaunes » une crise du consentement à l’impôt. Mais la réalité est toute autre : ce sont les plus riches qui, depuis dix-huit mois, ont fait sécession et refusent de payer l’impôt. Je ne parle même pas ici d’un Carlos Ghosn, symbole de l’avidité d’un certain nombre de grands patrons qui ne se contentent même plus de 16 millions d’euros par an, niveau de rémunération historiquement improbable qui est le fruit du manque de gouvernance démocratique des entreprises. Je parle de la progressivité même de l’impôt : d’après une étude de la World Inequality Database, la courbe de prélèvements obligatoire est, du fait des politiques fiscales mises en œuvre par Emmanuel Macron, devenue régressive au sommet de la distribution. Ce qui veut dire, très concrètement, que les plus riches paient des taux de prélèvement plus faibles que les autres.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/julia-cage-la-crise-des-gilets-jaunes-est-une-crise-du-pouvoir-d-achat_5391851_3232.html
03/12/2018
L’économiste estime, dans une tribune au « Monde », que le mouvement actuel est le résultat d’une politique de classe menée par Emmanuel Macron et le gouvernement, et y voit une crise de la représentation sociale
idees
« Gilets jaunes » : « Refuser la vision caricaturale d’une France coupée en deux ne signifie pas négliger la gravité de la crise »
Manifestation de « gilets jaunes » à Bordeaux, samedi 1er décembre 2018. NICOLAS TUCAT / AFP Tribune. Lors de leur troisième journée de protestation nationale, samedi 1er décembre, les « gilets jaunes » ont rassemblé quelque 136 000 personnes dans toute la France. Cependant que la mobilisation s’essouffle sensiblement, la contestation a pris en plusieurs endroits un tour violent et presque insurrectionnel : à Paris, bien sûr, en raison de l’infiltration de nombreux casseurs, mais aussi à Toulouse, Bordeaux, Nice ou Strasbourg, métropoles régionales parmi les plus dynamiques du pays, et jusqu’au Puy-en-Velay, fief de Laurent Wauquiez, président du principal parti d’opposition (LR), qui a bénéficié comme aucune autre ville moyenne des dispositifs d’action publique territoriale depuis une quinzaine d’années. Dans ce contexte de tension extrême, le gouvernement semble encore hésiter, au-delà de la fermeté affichée quant aux enjeux sécuritaires, sur la nature des réponses politiques à apporter. Depuis trois semaines, les interprétations se suivent et se ressemblent. L’irruption des « gilets jaunes » aurait consacré, de manière presque définitive, le succès d’une représentation déjà bien établie dans les champs politique et médiatique : celle d’une France coupée en deux entre métropoles dynamiques intégrées dans la mondialisation et territoires « périphériques » laissés pour compte. La contestation en cours serait l’expression d’une colère, sinon d’une revanche, des seconds à l’égard des premiers. Pourtant, les chercheurs et experts en sciences sociales, dans leur diversité d’approches, de profils et de disciplines (sociologie, économie, géographie), contestent radicalement cette lecture binaire de la France contemporaine. Sur la base de nombreuses enquêtes et observations, deux idées fortes font l’objet d’un consensus scientifique : d’une part, si les inégalités progressent, leurs logiques sont de plus en plus complexes et leurs échelles de plus en plus fines ; de l’autre, elles ne sauraient se réduire à une distinction radicale entre ceux qui regarderaient le monde de quelque part (somewhere) ou de nulle part (nowhere). « Zapping territorial » Et de fait, les premières enquêtes sur les « gilets jaunes » soulignent la diversité de leurs profils socio-professionnels, ainsi que la multiplicité de leurs espaces de vie (résidence, études, travail, loisirs), dont l’automobile est bien souvent la seule à permettre l’interconnexion. Peu importe qu’ils soient définis comme « urbains des villes petites et moyennes », « périurbains » ou « ruraux » – d’ailleurs, eux-mêmes ne se définissent que très rarement en ces termes ; en réalité, ils sont très souvent un peu des trois à la fois, en fonction de leurs pratiques sociales et de leurs trajectoires résidentielles. Familiers du « zapping territorial », ils sont sans aucun doute mobiles.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/gilets-jaunes-refuser-la-vision-caricaturale-d-une-france-coupee-en-deux-ne-signifie-pas-negliger-la-gravite-de-la-crise_5391848_3232.html
03/12/2018
Dans une tribune au « Monde », les géographes Daniel Behar et Aurélien Delpirou estiment que la diversité des profils des manifestants oblige à sortir de la vision caricaturale du concept de « France périphérique ».
international
Le Qatar annonce son départ de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole
L’annonce a surpris. « Le Qatar a décidé de se retirer comme membre de l’OPEP avec effet en janvier 2019 », a déclaré lundi 3 décembre le nouveau ministre de l’énergie de l’émirat, Saad Sherida Al-Kaabi. Le pays est membre depuis 1961 de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole. Cette décision résulte d’une réflexion sur les moyens de renforcer le profil international du Qatar et de préparer sa stratégie de long terme, largement axée sur l’industrie gazière, a expliqué M. Al-Kaabi. Le richissime émirat, premier exportateur mondial de gaz naturel liquéfié, est l’un des plus petits producteurs de l’OPEP et son influence y est limitée. Son annonce survient juste avant une réunion cruciale du cartel et de ses partenaires à Vienne, en Autriche, les 6 et 7 décembre, qui a pour objectif de trouver un accord sur une réduction de la production de pétrole. Les prix de l’or noir ont chuté de plus d’un quart depuis le début d’octobre, lorsqu’ils avaient atteint leur plus haut niveau en quatre ans. Doha a assuré cependant qu’il continuerait de respecter ses engagements, comme les autres pays qui ne font pas partie de l’OPEP. Monarchie isolée Le ministre de l’énergie qatari assure que ce départ n’est pas politiquement motivé. Mais le petit Etat de 2,6 millions d’habitants est en conflit ouvert avec ses voisins, dont l’Arabie saoudite, chef de file du cartel et l’un de ses cofondateurs. Depuis le 5 juin 2017, Riyad et ses alliés – les Emirats arabes unis, Bahreïn et l’Egypte – ont tous coupé leurs liens avec Doha, l’accusant de soutenir des mouvements « terroristes », de se rapprocher de l’Iran et de saper la stabilité de la région. Lire aussi Le conflit entre le Qatar et ses voisins devant la Cour internationale de justice La seule frontière terrestre de la petite nation péninsulaire avait alors été fermée, sa compagnie aérienne publique interdite d’emprunter l’espace aérien des pays voisins, et ses citoyens expulsés de ces mêmes pays. Depuis plusieurs mois, le régime saoudien entretient également le flou autour d’un projet de canal maritime, percé parallèlement à sa frontière avec le Qatar, qui transformerait de facto l’émirat en île.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/03/le-qatar-annonce-son-depart-de-l-organisation-des-pays-exportateurs-de-petrole_5391842_3210.html
03/12/2018
L’émirat du Golfe, qui devrait se retirer du cartel de l’or noir en janvier, est l’un des plus petits producteurs de l’OPEP et son influence y est limitée.
idees
Etudiants étrangers : « L’attractivité par le prix, une hypothèse (très) risquée »
Tribune. Il faut reconnaître à l’actuel gouvernement le souci louable de se pencher sur des questions qui agitent depuis des années le monde de l’enseignement supérieur. Ainsi la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants a-t-elle opportunément mis fin, en 2017, au dramatique et peu glorieux casse-tête du tirage au sort à l’entrée des licences. De même, le débat sur les droits d’inscription des étudiants extracommunautaires occupait depuis des années les cercles universitaires. Le gouvernement prétend aujourd’hui le trancher d’autorité, sans avoir apparemment consulté qui que ce soit. Le plan Bienvenue en France comporte diverses dispositions, dont certaines, réclamées depuis longtemps, faciliteront sans doute en pratique l’accueil des étudiants internationaux. C’est cependant la spectaculaire augmentation du montant réglementaire des droits d’inscription qui en constitue l’aspect le plus significatif et aussi le plus discutable. L’ambition affichée par le gouvernement – passer de 343 000 à 500 000 étudiants internationaux en huit ans – est tout à fait estimable : elle correspond à l’objectif de rayonnement de la science et de la culture françaises à travers le monde. Cette ambition repose cependant sur une approche « marketing » très particulière, qui, pour avoir été essayée dans d’autres pays avec des fortunes diverses, ne présente ni toutes les garanties d’efficacité ni tous les gages de conformité avec les valeurs de l’enseignement supérieur français. Nouvelle politique La France serait en effet menacée de perdre, au bénéfice de l’Allemagne ou de la Russie, son actuelle quatrième place mondiale parmi les pays « importateurs d’étudiants », et ce en raison de son déficit d’attractivité par rapport aux pays d’Asie, dont on connaît le dynamisme aussi bien démographique qu’économique. C’est donc en vertu de cette seule cible que semble construite la nouvelle politique, qui trouve là argument à la hausse très substantielle du montant des droits. En effet, habitués à mesurer la valeur d’une formation à l’aune du tarif qu’elle pratique, les étudiants asiatiques jugeraient fort mal aujourd’hui les diplômes français, trop bon marché pour paraître de bonne qualité. Il suffirait ainsi de multiplier les droits par quinze ou vingt pour redorer d’un coup l’image des formations françaises : c’est facile, et en plus ça peut rapporter gros. Le risque d’une telle analyse monofactorielle, c’est qu’elle oublie bien des choses. D’abord, il n’est pas certain que le déficit relatif d’attractivité de la France à l’égard des étudiants asiatiques tienne seulement au trop faible tarif de ses formations. Depuis quinze ans, on entend dire, dans les médias comme dans les discours politiques, que le rang médiocre des universités françaises dans les classements internationaux (ARWU, THE, etc.) constitue aussi un frein à notre attractivité. Payer plus cher l’accès à des établissements toujours aussi mal classés constituera-t-il demain une réelle motivation pour ces étudiants ?
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/etudiants-etrangers-l-attractivite-par-le-prix-une-hypothese-tres-risquee_5391834_3232.html
03/12/2018
L’ambition du gouvernement d’attirer davantage d’étudiants étrangers en augmentant les frais d’inscription relève d’une approche « marketing » qui pourrait entraîner « un désastre scientifique, culturel et diplomatique », analyse Matthieu Gallou, président de l’université de Bretagne occidentale dans une tribune au « Monde ».
societe
Les « gilets jaunes », un casse-tête pour le maintien de l’ordre
Christophe Castaner, Michel Delpuech et Laurent Nuñez attendent Emmanuel Macron devant l’Arc de triomphe, à Paris, le 2 décembre. JULIEN MUGUET POUR LE MONDE Deux jours après les scènes de violence inédites survenues à Paris, la pertinence du dispositif de maintien de l’ordre qui avait été mis en place par la Préfecture de police (PP), samedi 1er décembre, se retrouve au cœur de toutes les interrogations. La situation n’est pas nouvelle pour la PP, habituée à ce que ses décisions soient passées au crible après chaque manifestation. Mais l’ampleur des dégâts constatés et les difficultés dans lesquelles se sont retrouvées les forces de l’ordre dans la capitale placent cette fois le préfet de police, Michel Delpuech, dans une situation plus délicate que d’ordinaire. Conscient des périls du contexte, alors que la préfecture s’est déjà retrouvée dans le viseur de l’Elysée lors de l’affaire Benalla, M. Delpuech a souhaité organiser un point presse, dimanche 2 décembre, pour justifier ses choix stratégiques. « Nous n’avons eu aucun interlocuteur », a-t-il notamment regretté, alors que les « gilets jaunes » n’ont effectivement déposé aucune déclaration de manifestation. M. Delpuech a aussi décrit un « niveau de violence jamais atteint, en tout cas dans les dernières décennies ». Preuve de la sensibilité du sujet, le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, et son secrétaire d’Etat, Laurent Nuñez, doivent être entendus par la commission des lois du Sénat, mardi 4 décembre. Lire aussi Le préfet de police de Paris dans la tourmente Un schéma tactique critiqué en interne Les habituelles proclamations de l’indéfectible soutien aux forces de l’ordre suffiront-elles à défendre le dispositif mis en place ? Le choix fait par la PP, responsable des opérations, de verrouiller entièrement les Champs-Elysées et le périmètre très large autour du palais présidentiel est aujourd’hui déjà critiqué en interne. Très consommateur en termes d’unités de forces mobiles, ce schéma tactique a dégarni les rangs aux abords de la place de l’Etoile, où la majorité des « gilets jaunes » radicaux s’étaient regroupés. « On avait une partie minoritaire de nos troupes face aux casseurs, ce qui nous laissait peu de forces pour faire les manœuvres », regrette un haut gradé. Cette décision, pourtant, a été prise en réaction aux débordements du 24 novembre sur les Champs-Elysées, alors qu’il avait été justement reproché à la préfecture de ne pas avoir « fermé » l’artère. Après l’annonce des « gilets jaunes » de vouloir de nouveau manifester, le 1er décembre, sur la célèbre avenue, la PP avait décidé de sécuriser le périmètre. Une façon d’accéder aux exigences du mouvement pour éventuellement mieux le tempérer, en somme.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/03/les-gilets-jaunes-un-casse-tete-pour-le-maintien-de-l-ordre_5391829_3224.html
03/12/2018
Le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, et son secrétaire d’Etat, Laurent Nuñez, doivent être entendus par la commission des lois du Sénat, le 4 décembre.
idees
« Gilets jaunes » : pour Philippe Aghion, « le gouvernement devrait mettre sur pied un “Grenelle” de la fiscalité »
« Nous ne devons pas lâcher sur ces réformes mais en revanche mieux traiter les coûts de transition, et ils sont nombreux. » FACEBOOK Philippe Aghion est économiste, professeur au Collège de France. Spécialiste de la croissance, il a conseillé Emmanuel Macron durant la dernière campagne présidentielle. Pour sortir de l’impasse et financer un coup de pouce sur les retraites, il propose un rétablissement temporaire d’une taxation des très hauts revenus, voire une sortie provisoire de la contrainte européenne des 3 % de déficit budgétaire. Le gouvernement doit-il changer de cap ? Le gouvernement doit maintenir le cap des grandes réformes structurelles. Comme l’explique très bien Jean Pisani-Ferry dans sa récente chronique (Le Monde daté du 30 novembre), avec le vieillissement de notre population, l’augmentation de notre potentiel de croissance est le seul moyen d’assurer à nos concitoyens une progression continue du pouvoir d’achat, et cette augmentation passe par la mise en œuvre de réformes trop longtemps différées. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Jean Pisani-Ferry : « Les bénéfices de la croissance se dissipent avant de parvenir aux individus » En à peine plus d’un an, le gouvernement a réalisé la réforme du marché du travail, celle de la formation professionnelle et de notre système éducatif, ainsi que la taxation forfaitaire des revenus du capital. Mais il reste encore à conduire la réforme des retraites – pour passer de manière juste à un système par points qui assure le maintien du pouvoir d’achat des prestations de retraite sans pénaliser ceux qui ont commencé à travailler tôt –, celle de notre système d’assurance-chômage – pour instaurer une véritable flexisécurité à la française – et celle de l’Etat – pour mieux utiliser l’argent des contribuables et le diriger davantage vers la santé, l’environnement, la rémunération des enseignants et la recherche fondamentale. Nous ne devons pas lâcher sur ces réformes mais, en revanche, mieux traiter les coûts de transition, et ils sont nombreux. C’est justement ce qui a généré la colère des « gilets jaunes ». Que peut-on faire pour répondre à cette inquiétude ? Je vois trois sujets qui reviennent régulièrement dans les revendications. Le premier touche aux retraites. Ce n’est pas une bonne chose d’avoir abandonné l’indexation des prestations de retraite sur l’inflation, ce qui se traduit par une perte de pouvoir d’achat pour les retraités. Le deuxième sujet est celui de la taxation des carburants : il ne fallait pas l’augmenter par-dessus la hausse des prix du pétrole. Et derrière tout cela, le sentiment diffus mais exprimé avec violence que les riches sont trop favorisés, notamment avec la suppression du très symbolique impôt de solidarité sur la fortune (ISF).
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/pour-l-economiste-philippe-aghion-il-faut-retablir-une-nouvelle-forme-d-isf-pour-sauver-les-reformes_5391824_3232.html
03/12/2018
L’économiste, qui a conseillé Emmanuel Macron lors de la présidentielle, estime qu’une sortie provisoire de la contrainte européenne des 3 % de déficit budgétaire est souhaitable.
international
En Espagne, l’entrée de l’extrême droite au Parlement andalou ébranle le paysage politique
Les militans du parti d’extrême droite Vox célèbrent les résultats de l’élection régionale en Andalousie, à Seville (Espagne), le 2 décembre. MARCELO DEL POZO / REUTERS Depuis la fin de la transition démocratique, en 1982, et la dissolution du mouvement franquiste Fuerza Nueva, aucun parti d’extrême droite n’avait plus siégé dans un Parlement espagnol, régional ou national. Cette exception est terminée : le parti d’extrême droite Vox a obtenu un résultat inattendu aux élections andalouses, dimanche 2 décembre, avec 11 % des voix et 12 sièges (sur 109) au Parlement régional. L’émergence de cette petite formation anti-immigration, antiféministe, souverainiste et recentralisatrice secoue l’échiquier politique espagnol : le parti est en mesure de jouer les arbitres pour éventuellement faire basculer l’Andalousie à droite. Et promet de poursuivre sa « reconquête » et de « s’étendre dans le reste de l’Espagne », un des rares pays d’Europe qui restait jusqu’alors étanche aux discours xénophobes et eurosceptiques. Le résultat de Vox a tout de suite été salué par la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, qui a envoyé sur Twitter ses « vives et chaleureuses félicitations à [ses] amis de Vox ». 🇪🇸 Mes vives et chaleureuses félicitations à nos amis de @vox_es qui, ce soir en #Espagne, font un score très significatif pour un jeune et dynamique mouvement. 👏🏻 MLP #Andalousie Cc @Santi_ABASCAL — Marine Le Pen (@MLP_officiel) 2 décembre 2018 Créé en 2013 par d’anciens militants du Parti populaire (PP, droite) critiques des hausses d’impôts et de la gestion « molle » de la crise catalane par l’ancien premier ministre Mariano Rajoy, le parti propose, entre autres, la construction de murs antimigrants dans les enclaves de Ceuta et Melilla, la recentralisation de l’Etat, l’interdiction des partis indépendantistes et la suppression de la loi mémorielle qui a interdit l’exaltation du franquisme, en 2006. Il demande aussi l’abrogation des textes sur les violences faites aux femmes. Alors que la gauche gouverne la région depuis trente-six ans sans interruption, les socialistes ont obtenu le pire résultat de leur histoire. Bien que le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) soit arrivé en tête, avec 33 députés et 28 % des voix, il perd 14 sièges et 7 points par rapport à 2015. L’abstention, à près de 42 %, a augmenté de 4 points, témoignant d’une certaine démobilisation des électeurs de gauche. Et non seulement le PSOE chute brutalement, mais une alliance avec le parti de la gauche radicale Podemos ne lui suffira pas pour gouverner. Les dix-sept sièges obtenus par Adelante Andalucia, la coalition locale menée par Podemos, ne sont pas suffisants. Ces résultats sont un coup dur pour le président du gouvernement espagnol et secrétaire général socialiste, Pedro Sanchez, qui gouverne le pays avec seulement 84 des 350 députés à Madrid, et compte sur le soutien ponctuel de Podemos et des indépendantistes catalans. L’Andalousie, région la plus peuplée d’Espagne, est traditionnellement un réservoir de voix socialistes.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/03/en-espagne-l-entree-de-l-extreme-droite-au-parlement-andalou-ebranle-le-paysage-politique_5391821_3210.html
03/12/2018
La gauche perd la majorité dans la région, et le parti radical Vox obtient douze députés. Une première depuis la transition démocratique.
planete
En Pologne, l’avenir de Katowice ne passe plus par le charbon
Vue sur la ville de Katowice, en Pologne, depuis la mine de Wujek, le 29 novembre. KUBA KAMINSKI POUR LE MONDE Darek Gieron est un bonhomme souriant à l’allure ronde, pull-over, chemise et jean dernier cri. Son téléphone portable sonne toutes les trois minutes, car il y a « beaucoup de problèmes à résoudre », dans la mine de charbon de Wujek où il travaille, au cœur du bassin houiller de Silésie, en périphérie de Katowice. La ville accueille, jusqu’au 14 décembre, la 24e conférence mondiale sur le climat (COP24). Un paradoxe, alors que le charbon est considéré comme l’énergie la plus « sale » ? Plutôt un symbole, pour la ville qui s’est choisi pour slogan « From black to green » (« du noir au vert »). Article réservé à nos abonnés Lire aussi Climat : quels sont les enjeux de la COP24 qui s’est ouverte en Pologne ? A 31 ans, Dareck Gieron est le leader local du syndicat Solidarnosc, la mythique fédération dirigée dans les années 1980 par Lech Walesa, principale motrice de la chute du communisme en Pologne. « Une vocation et une fierté » pour ce mineur, d’autant que la mine de Wujek, imposant complexe en briques rouges mis en service en 1899, a payé un lourd tribut dans la lutte contre le communisme : neuf mineurs sont morts pendant la loi martiale, le 16 décembre 1981, quand, en pleine guérilla, les chars de l’armée du général Jaruzelski ont écrasé les barricades des mineurs. Mais cela est une autre histoire, un autre combat. Aujourd’hui, la principale lutte du syndicat Solidarnosc, cauchemar des gouvernements successifs, est la survie du secteur du charbon en Pologne. Une industrie en déclin Malgré ses responsabilités syndicales, Darek descend quelques jours chaque mois au plus profond de la terre, pour ressortir souillé d’« or noir » et de ce qu’il considère comme une « source de vie ». Environ 680 mètres de descente verticale, sept kilomètres à l’horizontale, soit deux heures de trajet pour atteindre « le mur », où une énorme machine ponce la roche et extrait 5 000 tonnes de charbon par jour. Au fil des années, il faut descendre toujours plus profond, dans des conditions toujours plus dangereuses, pour extraire un charbon de moins en moins rentable. Si les accidents tragiques sont devenus rares, la mine de Wujek a un taux maximum de concentration en méthane. Le signe de croix est donc de mise quand retentit la sonnerie de l’ascenseur. Darek est fils, petit-fils et arrière-petit-fils de mineur. Même son arrière-grand-mère poussait des wagons sous terre, dans les années 1930. « Nous sommes en Silésie. Il est difficile de trouver une famille où il n’y a pas au moins un mineur. C’est plus qu’un métier, c’est une tradition transmise de père en fils. » Mais, avoue-t-il, le jour où il aura un fils, il lui préférera un métier « plus moderne ». « Je suis conscient qu’on est sans doute la dernière génération à porter cette tradition. »
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/03/en-pologne-l-avenir-de-katowice-ne-passe-plus-par-le-charbon_5391818_3244.html
03/12/2018
Alors que le pays dépend toujours à 80 % de la houille pour son énergie, la ville qui accueille la conférence mondiale sur le climat (COP 24) a débuté sa reconversion économique.
economie
Luciano Hang, le patron brésilien prêt à tout pour soutenir Bolsonaro
Le président de Havan, Luciano Hang, lors d’une conférence de presse pour parler de politique, en 2018, à Brusque (Brésil). MALFADA PRESS / AGENCIA O GLOBO Une personne mal avisée pourrait penser que Luciano Hang, 56 ans, n’est pas né au bon endroit. Que cet entrepreneur brésilien issu de l’Etat de Santa Catarina, dans le sud du pays, est un frustré du rêve américain qui aurait préféré voir le jour à New York, Washington ou Miami. L’hypothèse permettrait d’expliquer l’empressement du quinquagénaire à tapisser les zones périurbaines du Brésil de ces statues de la liberté en carton-pâte annonçant l’entrée de ses magasins Havan, des bazars bon marché à l’architecture imitant la Maison Blanche. Il n’en est rien. Luciano Hang ne rêve pas d’Amérique, il s’en inspire. Les Etats-Unis sont pour lui un modèle. Celui que le Brésil doit suivre pour échapper à la « philosophie du mal », celle du socialisme. « Les pays alignés sur la gauche sont voués à la décadence », confie l’entrepreneur, ajoutant : « Je suis Trump. » Luciano Hang n’est pas seulement « Trump », il est aussi « Bolsonaro », du nom du président d’extrême droite élu à la tête du Brésil le 28 octobre. Pendant des mois, l’entrepreneur a mené campagne pour son champion, publiant sur les réseaux sociaux vidéos et messages sans nuances. Sur Facebook, Twitter ou Instagram, les internautes ont pu le voir dans des mises en scène frisant le grotesque, déguisé en clown, en femme, en capitaine et même en croque-mort du communisme. Pour Jair Bolsonaro, Luciano Hang a perdu toute pudeur. L’ancien parachutiste est à ses yeux, le messie des « businessmen ». L’adoration est telle que certains imaginaient, en janvier, Luciano Hang en vice-président de Jair Bolsonaro ou, pour le moins, en membre éminent de son gouvernement. L’entrepreneur n’a, à ce jour, pas été sollicité par les équipes du président élu, mais il ne cache pas sa soif d’« en être ». « J’ai toujours voulu changer le pays, mais pour le moment, ma mission c’est d’ouvrir des boutiques », dit-il sans rancœur. Ce samedi 1er décembre, c’est lors de l’inauguration de son 119e « mégastore » que nous l’avons rencontré, dans la ville de Campinas, à une heure et demie de Sao Paulo. La statue de la Liberté, symbole de la « liberté d’entreprendre, d’acheter, de travailler » est bien là, à l’entrée du parking, visible depuis la grand-route, incitant les consommateurs à se jeter sur les robots mixeurs, appareils à croque-monsieur, draps de bain, jouets ou même pneus de voiture, qu’ils pourront payer à crédit avec la carte du magasin.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/03/luciano-hang-l-entrepreneur-bresilien-qui-se-reve-en-trump_5391810_3234.html
03/12/2018
Avec ses vidéos et messages sans nuances, le fondateur des magasins Havan a mené campagne pour le nouveau président d’extrême droite.
idees
Renault-Nissan : « La tentation d’une reprise en main de l’alliance par le français serait hautement contre-productive »
Carlos Ghosn, à Shanghai, en 2015, alors qu’il était PDG de Nissan et de Renault. JOHANNES EISELE / AFP Après la séquence « stupeurs et tremblements », l’affaire Carlos Ghosn est entrée dans une phase que l’on pourrait intituler « colère et ressentiments ». Vingt ans après la signature de l’Alliance Renault-Nissan, la compréhension mutuelle et l’appréhension des différences culturelles, que la structure imaginée par Louis Schweitzer promettait de faire fructifier, semblent au point mort. Les deux partenaires se regardent en chiens de faïence et le poison de la défiance menace de se diffuser, risquant de déstabiliser l’une des plus belles réussites de l’industrie automobile. Le défi consiste désormais à savoir dépasser la dramaturgie du fait divers et les rancœurs passagères pour s’atteler à la remise à plat d’une relation qui en a furieusement besoin. Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, un complexe édifice industriel L’arrestation au Japon de Carlos Ghosn, le 19 novembre, alors qu’il est accusé d’avoir dissimulé une partie substantielle de ses revenus et d’avoir utilisé des fonds de l’entreprise à des fins personnelles, a choqué de part et d’autre pour des raisons différentes. Côté français, on a du mal à accepter d’avoir été tenu à l’écart d’une procédure déstabilisante pour l’Alliance et on s’insurge contre la dureté du sort que la justice japonaise a réservé au patron du groupe, dont la garde à vue vient d’être prolongée de dix jours. Désormais, l’essentiel consiste à réfléchir aux dérives d’un système dont le PDG est à l’origine Quand, il y a quelques jours, Philippe Klein, un ex-Renault devenu membre du comité exécutif de Nissan, est venu expliquer la situation au siège de Boulogne-Billancourt, il s’est heurté à un mur d’incompréhension qui n’augure rien de bon pour la suite. Les Japonais, eux, sont convaincus d’avoir été trompés et ne savent plus très bien si c’est la honte ou l’indignation qui l’emporte. En l’absence à ce stade d’éléments précis sur le dossier judiciaire, il est délicat de se prononcer sur les récriminations des uns et des autres. Désormais, l’essentiel consiste à réfléchir aux dérives d’un système dont le PDG est à l’origine, conduisant à des dysfonctionnements évidents tant sur le plan de la gouvernance que du dialogue entre les deux partenaires. Gouvernance déficiente Pour désamorcer la rancœur, il faut d’abord se demander si le numéro deux de Nissan, Hiroto Saikawa, avait d’autre choix que d’exécuter en place publique son président. A moins que le dossier soit totalement vide – ce qui paraît improbable –, il faut se rendre à l’évidence que la marge de manœuvre était étroite. Toute attitude conciliante aurait été interprétée comme une tentative de couvrir M. Ghosn, et prendre ainsi le risque, à chaque découverte d’une nouvelle malversation, d’être entraîné avec son patron dans le tourbillon judiciaire.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/renault-nissan-la-tentation-d-une-reprise-en-main-de-l-alliance-par-le-francais-serait-hautement-contre-productive_5391808_3232.html
03/12/2018
Le défi pour l’Alliance Renault-Nissan consiste désormais à dépasser la dramaturgie de l’arrestation de Carlos Ghosn et les rancœurs pour s’atteler à une remise à plat de la relation, explique Stéphane Lauer, éditorialiste au « Monde ».
idees
La rénovation énergétique des bâtiments cherche son modèle économique
Analyse. Elle est la clé de voûte de la transition énergétique, mais pour beaucoup d’acteurs, la rénovation thermique des bâtiments fait figure de grande oubliée de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) présentée par Emmanuel Macron mardi 27 novembre. C’est pourtant « le premier pilier » de la stratégie énergétique du gouvernement, assure le ministre de la transition écologique et solidaire, François de Rugy ; une politique qui mobilise un investissement « colossal » de l’Etat, renchérit le ministre de la ville et du logement, Julien Denormandie. Le problème, c’est que l’isolation de millions d’édifices anciens cherche encore un modèle économique soutenable. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Nucléaire, renouvelables... le détail du plan du gouvernement en matière d’énergie Après l’annonce, en avril, d’un plan de rénovation énergétique des bâtiments jugé très en deçà des besoins par les associations écologistes comme par le secteur de la construction, ni le projet de loi de finances 2019, actuellement en discussion au Parlement, ni la PPE n’ont apporté la bouffée d’oxygène espérée, y compris par des députés de la majorité. Ceux-ci ont ainsi œuvré, sans succès, pour réintroduire dans le crédit d’impôt transition écologique (CITE) le remplacement de vieilles fenêtres par du double vitrage, que Bercy a exclu du dispositif, effrayé par son coût exponentiel. Alors que le plan de rénovation énergétique avait été précédé de plusieurs mois d’intense concertation, M. de Rugy annonce désormais un nouveau cycle de réunions avec les acteurs du bâtiment et de l’énergie dans les semaines à venir… A la croisée des questions d’environnement et des problématiques sociales – plus de 3 millions de ménages modestes sont affectés par la précarité énergétique –, le thème est pourtant porteur. Entre inflation des prix de l’énergie et revenus qui stagnent, il fait largement écho à la mobilisation des « gilets jaunes ». Consensus sur l’enjeu Il y a consensus sur l’enjeu : « Se désintoxiquer des énergies fossiles, c’est d’abord consommer moins d’énergie », a rappelé le chef de l’Etat le 27 novembre. Environ 45 % de la consommation d’énergie de la France et un quart des émissions de gaz à effet de serre sont attribués aux bâtiments. Impossible de réduire à la fois la dépendance aux énergies fossiles et la part du nucléaire dans notre mix énergétique sans réduire drastiquement la consommation. Impossible aussi d’atteindre la neutralité carbone en 2050 si l’intégralité du parc immobilier n’a pas, d’ici là, été rénovée aux normes « bâtiment basse consommation ».
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/la-renovation-energetique-des-batiments-cherche-son-modele-economique_5391786_3232.html
03/12/2018
La rénovation thermique des logements fait figure de grande oubliée de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), analyse le journaliste du « Monde » Grégoire Allix.
idees
« L’Etat ne parvient pas à montrer l’exemple en matière d’égalité homme-femme »
Tribune. Alors que nous avons encore en tête l’ampleur des manifestations du 24 novembre contre les violences sexistes et sexuelles, les résultats des trois concours d’entrée à l’Ecole nationale d’administration (ENA), publiés le vendredi 30 novembre, se font écho d’une réalité sociale encore fondamentalement inégalitaire. Une nouvelle fois, les femmes seront largement minoritaires à intégrer l’école : elles ne constituent que 37,5 % des admis, et ce pour les trois concours. Cette année encore, l’Etat ne parvient pas à montrer l’exemple en matière d’égalité femmes-hommes dans le recrutement des futurs hauts fonctionnaires. Lire aussi Au grand oral de l’ENA, boxe thaïe et légalisation du cannabis Alors que les femmes tendent à mener des études plus longues que les hommes et sont plus nombreuses à être diplômées du supérieur (près de 50 % des femmes de 25-34 ans contre moins de 40 % des hommes du même âge), l’accès aux concours et aux postes de la haute fonction publique continue de leur être difficile. Fin 2016, la fonction publique de l’Etat comptait ainsi 28 % de directrices d’administration centrale, 27 % d’ambassadrices et 21 % de préfètes. Notre association ENA 50-50 a mis en place des actions ciblées Au-delà de la répartition par genre des postes, les femmes font également face à des conditions de travail moins favorables : dans la fonction publique d’Etat, elles représentent 61,1 % des personnes contractuelles et sont 16 % à travailler à temps partiel, contre seulement 1,6 % de leurs collègues masculins. Depuis 2017, à travers le programme « Action publique 2022 », l’Etat s’est lancé dans une révision de ses missions en interrogeant leur pertinence par rapport aux besoins et aux évolutions de la société française. Parmi celles-ci, la lutte contre les discriminations faites aux femmes figure au premier plan. L’année qui vient de s’écouler, marquée par le mouvement #metoo, a mis en avant une véritable exigence sociétale en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. La mobilisation massive du 24 novembre devrait achever de convaincre les plus sceptiques. L’Etat ne peut donc faire l’impasse du chantier d’une meilleure représentativité de ses agents publics (en matière de genre, de diversité, d’origines sociale et géographique). Comme les autres écoles de formation de la fonction publique, l’ENA est à ce titre un outil puissant de constitution de pépinières de femmes, sans lesquelles le renouvellement des élites et des pratiques administratives restera un vœu pieux.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/l-etat-ne-parvient-pas-a-montrer-l-exemple-en-matiere-d-egalite-homme-femme_5391787_3232.html
03/12/2018
En plus d’une répartition inégalitaire des postes dans la fonction publique, les femmes font face à des conditions de travail moins favorables, pointent les membres de l’association ENA 50-50, qui se bat pour promouvoir l’égalité femmes-homme.
idees
Etudiants étrangers : « Donnons-nous les moyens d’une grande ambition »
Tribune. Dans son discours du 19 novembre, le premier ministre a manifesté une ambition nouvelle pour mieux positionner l’enseignement supérieur français au service de l’influence mondiale de la France. Avec un changement d’échelle notable : passer de 320 000 à 500 000 étudiants étrangers en huit ans. Bravo ! Mais nous donnons-nous les vrais moyens de cette ambition ? Comment libérer toute l’énergie des acteurs au service de cette politique ? Quels droits d’inscription pour quels étudiants ? Il faut aller plus loin. La formation de jeunes étrangers pendant des périodes assez longues pour qu’ils deviennent familiers et solidaires du pays qui les a accueillis représente à long terme un vrai levier d’influence : le « soft power » de la France ! Influence culturelle, sociale, politique mais aussi économique : les liens tissés lui feront penser au pays où il/elle a fait ses études comme un partenaire naturel lorsqu’il/elle cherchera un fournisseur, un investisseur, un partenaire. Si l’amélioration des services d’accueil et le développement de campus délocalisés sont deux leviers essentiels proposés par le gouvernement pour atteindre l’objectif d’un développement ambitieux des effectifs d’étudiants étrangers, le passage à des frais d’études significatifs pour les étudiants hors Union européenne constitue une décision préalable nécessaire. Accueillir 180 000 étudiants de plus représente en effet un changement d’échelle dont on peut estimer le coût à 1,5 milliard d’euros. Où les trouver ? Sauf à estimer qu’universités et écoles doivent supporter le coût du « soft power » français, il nous paraît raisonnable de demander aux autres pays de contribuer au financement de la formation massive de leurs cadres supérieurs. Une proposition « politiquement acceptable » Le saut proposé par le gouvernement en matière de droits d’inscription pour les étudiants hors UE a été arbitré comme « politiquement acceptable », dans un champ de contraintes multiples : un tiers du coût réel des études. On peut en souligner toutefois l’ambiguïté : en « offrant » aux étudiants étrangers non européens une formation au tiers de son coût réel, la charge d’accueil des étudiants supplémentaires va se retrouver, pour les deux tiers de son coût, à charge de l’établissement qui accueillera l’étudiant. Tant qu’il s’agira de faibles cohortes à intégrer dans des formations existantes avec les professeurs en poste, on pourra considérer ce coût comme marginal, et faire avec les droits annoncés. Mais cela tue dans l’œuf la perspective du changement d’échelle annoncé, qui passe nécessairement par la création et le financement à 100 % du coût réel de nouveaux programmes tournés vers de nouveaux publics internationaux.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/03/etudiants-etrangers-donnons-nous-les-moyens-d-une-grande-ambition_5391788_3232.html
03/12/2018
Le président de l’université de Cergy-Pontoise et le président de Paxter préconisent, dans une tribune au « Monde », de laisser le soin aux établissements de décider des frais de scolarité des étudiants non communautaires.
international
L’Italie sous la botte des ultra-conservateurs
tional. Cette église du centre de Rome, située sur une petite place encombrée de voitures, n’a pas grand-chose pour attirer l’œil. Non pas que la façade ocre de la Santissima Trinita dei Pellegrini soit ingrate. Avec sa colonnade et ses statues des quatre évangélistes, on pourrait même convenir qu’elle n’est pas sans élégance. Mais, dans les environs, la concurrence est si rude en matière de beauté… Non, cette église est seulement un lieu de culte comme les autres, perdue dans un décor hors du commun. Elle a pourtant une particularité, qui la nimbe d’une aura sulfureuse : en 2008, le pape Benoît XVI a autorisé que la messe y soit célébrée selon le rite tridentin. Résumé plus simplement, c’est la seule église de Rome où la messe est dite en latin. Chaque matin, à 7 heures et quart, un office est célébré devant une poignée de fidèles, selon un rite immuable et hypnotisant : le prêtre dit la messe à voix basse, comme pour lui-même, le dos à l’assemblée, et non pas face à elle. Sous la nef, rien à voir avec l’affluence des dimanches : l’assistance est clairsemée. Il y a là un ou deux hommes en costume, des femmes immobiles, la tête couverte, ou d’autres en tenue plus décontractée, venus recevoir la communion à genoux avant de commencer leur journée de travail. Au milieu de ce petit groupe se trouve, tous les matins ou presque, un des hommes les plus puissants d’Italie. Lorenzo Fontana, 38 ans, est le ministre de la famille du gouvernement Conte, en même temps qu’une des personnes les plus proches du ministre de l’intérieur Matteo Salvini. Le très conservateur curé de la paroisse, Vilmar Pavesi, est originaire de Vérone, comme M. Fontana, et se présente comme le « conseiller spirituel » du ministre. Il n’est pas rare de voir l’un et l’autre, à la fin de l’office, partir ensemble vers la sacristie pour y discuter au calme. Les fidèles de Salvini Lorenzo Fontana, militant de la Ligue du Nord depuis l’adolescence, est longtemps resté dans l’ombre, par goût autant que par l’effet de l’éloignement – il a été député européen de 2009 à son entrée au gouvernement, en 2018. Mais aujourd’hui que la Ligue (nouveau nom de la Ligue du Nord) partage le pouvoir avec le Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème), son influence est considérable. D’abord en raison de son envergure intellectuelle (il est diplômé en sciences politiques et en histoire du christianisme), mais aussi de sa grande proximité avec le « capitaine », le Milanais Matteo Salvini. « Lorsqu’il a été élu au Parlement européen, en 2009, Fontana avait pris un petit appartement à Bruxelles, se souvient un témoin de son ascension. Et comme Matteo, qui siégeait avec lui, n’en avait pas, ils cohabitaient. » Dans un parti où tout procède du chef, ce n’est pas rien.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/03/l-italie-sous-la-botte-des-ultra-conservateurs_5391780_3210.html
03/12/2018
Le ministre de l’intérieur Matteo Salvini et celui de la famille Lorenzo Fontana ont refondé la ligne de leur parti, la Ligue. Leurs idées, portées par des milieux très actifs, s’infiltrent dans le débat national.
societe
Au Puy-en-Velay, des « gilets jaunes » écœurés mais combatifs après l’incendie de la préfecture
Lors de la manifestation des « gilets jaunes », la préfecture de Haute-Loire a été incendiée au Puy-en-Velay, le 1er décembre. MICHEL TAFFIN POUR LE MONDE Mais où diable est passé Laurent Wauquiez ? Dimanche 2 décembre, au lendemain de l’incendie de la préfecture de Haute-Loire lors d’une manifestation de « gilets jaunes », le président (Les Républicains, LR) du conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes est presque invisible, si ce n’est un duplex au 13 heures de TF1. Pas d’appel de soutien au préfet, et pas même une apparition à la préfecture pour la visite de Jacqueline ­Gourault, ministre de la cohésion des territoires. A peine a-t-il publié la vidéo de son intervention au JT sur son compte Twitter, afin de condamner les violences, tout en estimant que « la réponse ne doit pas se faire uniquement sur la sécurité ». M. Wauquiez était pourtant bien présent au Puy-en-Velay, ville dont il fut le maire entre 2008 et 2016. Samedi 1er décembre, à 17 h 40, il recevait une délégation de « gilets jaunes » dans sa permanence, pendant que les heurts faisaient rage aux abords de la préfecture, gaz lacrymogènes contre pavés et jets d’ammoniaque. Le lendemain, dans l’après-midi, les passants l’ont vu se promener en face de la bâtisse incendiée pour bavarder avec ses anciens administrés. Sans gilet jaune, cette fois, contrairement au 24 novembre, date à laquelle il arborait la veste fluorescente par-dessus sa parka rouge. Impossible, pourtant, de ne pas voir cet édifice situé place du Breuil, en plein centre du Puy-en-Velay. Car la préfecture de Haute-Loire a triste allure, derrière ses façades noircies. Le hall principal d’abord, jonché d’éclats de verre, mais surtout l’aile est du bâtiment, presque entièrement carbonisée. Dans les pièces ordinairement consacrées au repos du personnel, les peintures sont rongées, les fils électriques dénudés, les menuiseries réduites en cendres et les plafonds tellement abîmés qu’ils menacent de s’effondrer. A première vue, le montant des réparations pourrait atteindre plusieurs centaines de milliers d’euros. Nombreux sont les habitants du Puy-en-Velay à venir constater les dégâts au lendemain de l’incendie de la préfecture, le 2 décembre. MICHEL TAFFIN POUR LE MONDE Samedi, la journée avait pourtant commencé dans le calme. Dès 10 heures, un convoi s’était ébranlé depuis un parking situé aux portes de la ville : 41 tracteurs, des motards, des taxis, des ambulances et des piétons venus de tout le département. Mais les derniers participants n’avaient pas encore quitté leur point de départ que la manifestation a dégénéré. Vers 13 h 30, certains manifestants ont pris d’assaut les grilles de la préfecture pour accéder à la cour. Une fois la clôture enfoncée, ils ont entassé des centaines de pneus devant le perron d’honneur.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/03/au-puy-en-velay-des-gilets-jaunes-ec-ures-mais-determines-apres-l-incendie-de-la-prefecture_5391776_3224.html
03/12/2018
Les protestataires se disent « sous le choc » et « dégoûtés » par les dégradations. Le préfet, lui, les accuse de n’avoir « rien empêché ». Le patron de LR, Laurent Wauquiez, ex-maire de la ville, qui avait affiché son soutien au mouvement, se fait discret.
international
Un avion de l’ONU affrété au Yémen pour transporter des houthistes blessés
Pour « instaurer [un climat de] confiance » avant de nouveaux pourparlers de paix, la coalition emmenée par l’Arabie saoudite a pris une mesure. Un avion affrété par les Nations unies (ONU) va se poser, lundi 3 décembre, dans la capitale du Yémen tenue par les rebelles houthistes, Sanaa, pour transporter une cinquantaine d’entre eux blessés vers Oman. Ils seront accompagnés par « trois médecins yéménites et un autre de l’ONU », a précisé à l’agence de presse officielle saoudienne le colonel saoudien Turki Al-Maliki, porte-parole de la coalition antirebelles. L’initiative doit accélérer la tenue de négociations pour mettre fin à quatre longues années de guerre, qui ont épuisé et affamé la population, estiment des experts. Le sort des rebelles blessés a été l’une des raisons de l’échec d’une précédente session de pourparlers de paix en septembre. La coalition a accédé à une demande de l’envoyé spécial de l’ONU pour le Yémen, le Britannique Martin Griffiths, qui a défendu des « raisons humanitaires », a déclaré le porte-parole. Des efforts pour déboucher sur une solution politique Alors que l’Arabie saoudite a souvent été accusée d’être un frein à un règlement du conflit au Yémen, le colonel Maliki a tenu à souligner que la coalition soutenait les efforts de M. Griffiths « pour parvenir à une solution politique », ainsi que les mesures d’ordre « humanitaire » pour alléger les souffrances de la population. Jeudi, les rebelles avaient expliqué vouloir se rendre à des négociations sous l’égide de l’ONU prévues en Suède si on leur garantissait de pouvoir quitter le Yémen et y revenir en toute sécurité. Le gouvernement yéménite reconnu par la communauté internationale, que soutient militairement la coalition emmenée par les Saoudiens, compte également s’y rendre. M. Griffiths s’est entretenu ces derniers jours avec des responsables des deux camps, séparément, pour préparer les négociations. En septembre, les pourparlers prévus à Genève avaient tourné court, les houthistes refusant de faire le déplacement en accusant l’ONU d’apporter trop peu de garanties quant à la sécurité de leur délégation. D’autres pourparlers avaient aussi échoué en 2016, au terme de 108 jours de négociations au Koweït. La délégation des houthistes était alors restée bloquée dans le sultanat d’Oman pendant trois mois. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Yémen : efforts diplomatiques en faveur de négociations
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/03/un-avion-de-l-onu-affrete-au-yemen-pour-transporter-des-houthis-blesses_5391766_3210.html
03/12/2018
Le sort des rebelles blessés était l’une des pierres d’achoppement des pourparlers de paix en septembre. En prenant cette mesure, la coalition veut rassurer les houthistes.
economie
Un collectif de femmes dirigeantes appelle à « imposer la mixité » dans l’économie numérique
Nathalie Balla, coprésidente entre autres de La Redoute et de Relais Colis, figure parmi les signataires de ce texte. TWITTER « Imposer la mixité dans l’économie numérique », telle est la requête d’un collectif de femmes dirigeantes d’entreprises qui appelle, dans une tribune publiée lundi 3 décembre, à la création d’un fonds d’investissement pour les entreprises fondées ou dirigées par des femmes. Nathalie Balla, coprésidente de La Redoute et de Relais Colis ; Mercedes Erra, cofondatrice de l’agence Betc et présidente exécutive d’Havas Worldwide ; Tatiana Jama, cofondatrice de Selectionnist et Visualbot.ai ; Céline Lazorthes, fondatrice de Leetchi et Mangopay ; ou encore Stéphane Pallez, présidente-directrice générale de la Française des jeux, figurent parmi les signataires de ce texte paru dans le quotidien économique Les Echos. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les dirigeantes misent sur le numérique « En France, les neuf plus gros fonds d’investissement français n’ont investi que 2,6 % des fonds levés dans des entreprises cofondées par des femmes sur les cinq dernières années », affirme la tribune, estimant que cette « inégalité face aux capitaux est une triste réalité et une erreur stratégique ». Et « les dirigeantes ne captent que 2,2 % des financements des fonds d’investissement dans le monde », constatent les signataires. Féminiser les équipes d’investissement Or « les entreprises ayant au moins une fondatrice ont des résultats plus élevés de 63 % que les entreprises n’ayant que des fondateurs », affirme le texte, estimant qu’« atteindre la parité générerait plus de 2 000 milliards d’euros de PIB supplémentaire en Europe d’ici à 2025 ». « Hommes et femmes, nous payons tous le prix inique du maintien du privilège masculin », jugent les signataires de la tribune. Le texte demande que les fonds d’investissement « s’engagent à investir 10 % des fonds déployés dans des start-up fondées par des femmes » et à cette fin, qu’ils féminisent notamment des équipes d’investissement qui « ne comptent que 7 % de femmes ». « A moyen terme, il faut favoriser la création d’un fonds d’investissement dédié aux entreprises fondées ou dirigées par des femmes comme cela existe aux Etats-Unis, avec The Helm ou Backstage Capital », poursuit-il. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le secteur des nouvelles technologies en quête de femmes La tribune lance un appel aux « pouvoirs publics pour accompagner cette démarche » et aux « entrepreneurs et financiers pour imaginer ensemble les meilleurs moyens de permettre aux femmes de participer au développement de notre économie ».
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/03/un-collectif-de-femmes-dirigeantes-appelle-a-imposer-la-mixite-dans-l-economie-numerique_5391760_3234.html
03/12/2018
Les signataires du texte, publié dans « Les Echos », déplorent une « inégalité face aux capitaux », demandant des changements aux fonds d’investissement et pouvoirs publics.
international
Damas accuse la coalition internationale, qui nie, d’avoir tiré des missiles sur des positions de l’armée
Le régime de Damas a accusé, dimanche 2 décembre, la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis d’avoir tiré des missiles sur des positions de son armée, selon l’agence de presse officielle syrienne Sana, citant une source militaire. Contactée par l’Agence France-presse (AFP), la coalition a nié avoir visé les forces du régime de Bachar Al-Assad, affirmant avoir ciblé des djihadistes de l’organisation Etat islamique (EI). Selon Sana, « les forces de la coalition américaine ont tiré vers 20 heures (19 heures à Paris) ce [dimanche] soir plusieurs missiles contre quelques positions de nos forces dans la montagne d’Al-Ghourab au sud d’Al-Soukhna », causant uniquement « des dégâts matériels », a rapporté l’agence, sans plus de précisions. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), les forces de la coalition positionnées dans la région d’Al-Tanaf ont tiré « plus de quatorze missiles » contre un convoi des forces du régime au moment de son passage dans la Badiya (désert), dans l’extrême est de la province de Homs. « Le groupe était perdu au milieu du désert à 35 km de la base d’Al-Tanaf » où se trouvent des troupes américaines et britanniques, a précisé à l’AFP le directeur de l’OSDH, Rami Abdel Rahmane. Un haut responsable de l’EI ciblé par les Etats-Unis « Faux (…) Les forces de la coalition ont mené des frappes de précision » contre des djihadistes, dont « un haut placé du [groupe] Etat islamique, Abou Al-Oumarayn », a assuré, de son côté, à l’AFP Ryan Sean, porte-parole américain de la coalition. Ce dernier « était impliqué dans le meurtre du citoyen américain (…) Peter Kassig », enlevé en Syrie en 2013 et exécuté en novembre 2014, a-t-il ajouté. Le responsable djihadiste « avait donné des indications constituant une menace imminente pour les forces de la coalition », a-t-il ajouté. Les Etats-Unis utilisent généralement la base d’Al-Tanaf pour procéder à des frappes contre le groupe EI. Celle-ci a également été utilisée par le passé en tant que camp d’entraînement de combattants de l’opposition syrienne. Des affrontements ont opposé en 2017 les forces du régime syrien à celles soutenues par la coalition dans cette région. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Syrie : la Russie met la pression sur les rebelles Damas a maintes fois appelé au retrait des forces américaines de cette zone en Syrie, à la lisière de l’Irak et de la Jordanie.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/03/damas-accuse-la-coalition-internationale-qui-nie-d-avoir-tire-des-missiles-sur-des-positions-de-l-armee_5391757_3210.html
03/12/2018
La coalition dirigée par les Etats-Unis a nié avoir visé les forces du régime de Bachar Al-Assad, affirmant avoir ciblé des djihadistes de l’organisation Etat islamique.
international
Les jeunes Chinois pas si mâles que ça ?
Un participant se prépare à défiler lors de la Pride Run, à Shanghai, le 9 juin. JOHANNES EISELE / AFP LETTRE DE PÉKIN Début novembre, l’institut français de Pékin a hébergé un événement devenu audacieux par les temps qui courent : la « Love Queer Cinema Week ». Dans la plupart des pays, cette manifestation se serait appelée festival du cinéma LGBTQ. Mais, les organisateurs – ils préfèrent rester anonymes – ont été priés, en 2016, d’adopter une dénomination plus abstraite. En particulier de renoncer au terme de « festival » employé depuis les origines en 2001, qui suppose une autorisation explicite des autorités. Ni interdite, ni autorisée, cette « semaine du cinéma » n’est sans doute encore tolérée que parce qu’elle est abritée par une institution étrangère et que les organisateurs se sont engagés à ne pas trop la médiatiser. Malgré tout, quelques dizaines d’initiés ont pu voir vingt-sept longs et courts-métrages venus du monde entier dont une douzaine de films chinois. Et certains de ces derniers vont pouvoir être distribués dans le pays. Comme le film d’ouverture, Birds in Mire du réalisateur Zhang Wanlin, qui sera néanmoins amputé de trois minutes jugées particulièrement choquantes : on y voit deux hommes s’embrasser dans un bar gay ! « Les autorités chinoises n’ont pas encore définitivement tranché l’attitude à adopter face aux mouvements LGBT », note un observateur. Ainsi, alors que le magazine The Economist jugeait récemment que « les activistes gays ont un peu plus de liberté que d’autres groupes pour plaider leur cause », un tribunal de l’Anhui vient de condamner à dix de prison ferme une femme dont le seul crime est d’avoir vendu à plus de 5 000 exemplaires un recueil de nouvelles érotiques homosexuelles. Lire aussi En Chine, 10 ans de prison pour avoir écrit un roman porno gay pour femmes « Culture malsaine » Ces hésitations sont aussi le reflet d’un pays qui s’interroge sur la masculinité. Certains pans de la société chnoise s’inquiètent notamment du succès rencontré auprès de la jeunesse par des « boys bands » venus de Corée du Sud et du Japon qui valoriseraient l’image de jeunes gens bien peu virils. Signe que le pouvoir marche sur des œufs, en septembre, deux des principaux médias communistes ont adopté des points de vue diamétralement opposés sur la question. C’est l’agence de presse Chine nouvelle qui a ouvert le feu. Dénonçant les idoles masculines « aux cheveux gominés, au visage maquillé et à la taille fine », l’agence mettait ses lecteurs en garde contre le déclin de la Chine qui pourrait en découler. Rien de moins. « Cette culture malsaine qui influence négativement la jeunesse ne doit pas être sous-estimée. La jeunesse c’est l’avenir du pays. (…) On a besoin de résister à ce genre de culture », estimait l’agence.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/03/les-jeunes-chinois-pas-si-males-que-ca_5391755_3210.html
03/12/2018
Marquée par la politique de l’enfant unique qui aurait surprotégé les garçons, la société chinoise s’interroge sur la virilité des jeunes hommes. Les médias officiels se sont emparés des débats.
televisions-radio
« Thomas Pesquet chez les Kogui » : un spationaute en terre inconnue
Chez les Kogis dans la Sierra Nevada en Colombie Jean Michel TURPIN / Jean Michel TURPIN France 2 - Mardi 4 Décembre - 21 h 05. Documentaire Une hôtesse de l’air confirme l’image que tout le monde se fait de Thomas Pesquet : « J’ai l’impression que c’est M. Parfait ! ». Détendu, confiant, drôle, le spationaute français monte dans l’avion, les yeux bandés, ne sachant pas où il va passer les deux prochaines semaines. Frédéric Lopez, le présentateur de « Rendez-vous en terre inconnue », finit par lui révéler qu’ils partent à la rencontre des Indiens kogui qui vivent dans la majestueuse Sierra Nevada de Santa Marta, haut massif côtier dans le nord de la Colombie. Ces premières saynètes sont un peu lourdes, un peu comme les mélodies mièvres qui vont malheureusement accompagner une bonne partie de ce magazine, mais il faut se laisser prendre au jeu. Car la magie va vite opérer, les vues aériennes du splendide massif côtier aidant : le duo, sortes de Tintin et Haddock du XXIe siècle, va vivre une expérience unique parmi leurs hôtes. Les premiers échanges avec leurs trois guides, Felix, Santos et Antonio sont hésitants, mais Thomas Pesquet et Frédéric Lopez vont réussir à gagner leur confiance, se montrant soucieux de comprendre leurs coutumes et volontaires pour participer aux travaux du village. Leur dialogue est empreint d’une grande pudeur. Des discussions s’engagent sur le mariage et la sexualité. La réciprocité n’est toutefois pas toujours de mise : si Felix accepte de raconter comment sa mère et le mamo – le chaman du village – l’ont aidé à choisir son épouse après avoir renoncé à quatre prétendantes, on n’en saura pas plus sur les vies privées respectives du tandem. Un pacte commun, de protéger la Terre Les assemblées sous la grande hutte sont magnifiques : les hommes vêtus de blanc devisent, tout en frottant leur poporo, calebasse évidée contenant une poudre de coquillages écrasés, qu’ils mélangent à une boule de coca coincée dans leur bouche. Leurs convives les écoutent exposer leur vision du monde, basée à la fois sur des croyances ancestrales et une conscience aiguë des enjeux écologiques mondiaux. A son tour, Thomas Pesquet leur raconte ce qu’il a vu de la Terre depuis l’espace. Au fil des jours se nouent une amitié fondée sur le pacte commun de protéger la Terre. L’ultime marche qui les conduit sur une plage où une centrale à charbon a été construite sur un des lieux sacrés du peuple kogui les amène à ouvrir un peu plus les yeux sur leurs responsabilités en tant qu’amis et en tant qu’humains. Une belle histoire. Thomas Pesquet chez les Kogui, de Frédéric Lopez et Franck Desplanques, réalisé par Pierre Stine (France, 2018, 185 min). Sur le web : www.france.tv/france-2/
https://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2018/12/04/thomas-pesquet-chez-les-kogui-un-spationaute-en-terre-inconnue_5392642_1655027.html
04/12/2018
Thomas Pesquet et Frédéric Lopez vont à la rencontre d’une tribune indienne dans le nord de la Colombie.
police-justice
Un an de prison ferme pour le professeur qui encadrait les élèves morts sous une avalanche en Isère
Au lycée Saint-Exupéry, hommage aux trois skieurs morts dans une avalanche le 13 janvier 2016. JEFF PACHOUD / AFP Il était poursuivi par la justice après la mort, en janvier 2016, dans une avalanche, de deux lycéens qu’il encadrait lors d’une sortie de ski en Isère : un enseignant a été condamné, mardi 4 décembre, à Grenoble, à deux ans de prison, dont un avec sursis. Reconnu coupable d’homicides involontaires, Michel A., 50 ans, s’est également vu infliger une interdiction d’exercer son métier de professeur d’éducation physique et sportive (EPS) pendant trois ans et doit verser des dommages et intérêts aux familles des victimes. Le tribunal n’a suivi qu’en partie les réquisitions du procureur, qui avait réclamé « une interdiction définitive d’enseigner » à l’encontre du professeur de sport, accusé d’avoir emprunté une piste noire fermée de la station des Deux-Alpes avec un groupe d’élèves, malgré un dispositif de dissuasion. « Le tribunal a fait une appréciation juste de la situation. Mais la famille de Thelma souhaitait que l’interdiction d’exercer soit totale. C’est la seule réserve que j’émets devant ce jugement », a indiqué Me Eymeric Molin, l’avocat de l’une des parties civiles. Signalétique dissuasive Ce 13 janvier 2016, deux lycéens de 16 ans et un skieur de 46 ans avaient été retrouvés morts dans une coulée qui avait été déclenchée plus haut par des randonneurs sur un secteur hors piste de la station. L’avalanche, qui avait progressé sur une piste noire fermée dont l’accès était encadré d’une signalétique dissuasive en plusieurs langues, avait également enseveli deux autres skieurs, dont l’enseignant. Ce dernier avait été mis en examen trois jours plus tard pour homicides involontaires et avait immédiatement reconnu sa responsabilité dans ce drame, selon son avocate. Grave dépression Lors de l’audience, le 23 octobre, le professeur d’EPS avait expliqué qu’il venait de reprendre le travail après une grave dépression et que son maintien sous médication l’avait « probablement empêché » de juger correctement du danger de la piste noire sur laquelle le groupe s’est engagé. « Il ne se passe pas un jour sans que je pense à Léo, à Thelma et à leurs parents: il n’y a rien de pire que de perdre un enfant (...) Je ne peux que demander pardon », avait-il déclaré à la barre. De son côté, le procureur avait appuyé les plaidoiries des avocats des familles des victimes qui, citant un rapport d’expert, avaient rappelé que le traitement pris par l’enseignant « était tout à fait toléré, avec peu d’effets secondaires, dont aucun effet sédatif ».
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/04/un-an-de-prison-ferme-pour-le-professeur-qui-encadrait-les-eleves-morts-sous-une-avalanche-en-isere_5392637_1653578.html
04/12/2018
L’enseignant d’EPS est accusé d’avoir emprunté une piste noire fermée de la station des Deux-Alpes avec un groupe d’élèves en janvier 2016.
pixels
Jeux vidéo : l’éditeur de « Fortnite » annonce son concurrent de Steam
L’éditeur de « Fortnite » se lance dans la bataille des plates-formes de distribution numérique de jeux vidéo. Epic Branle-bas de combat dans l’industrie du jeu vidéo. L’entreprise américaine Epic Games, qui surfe depuis un an sur le succès phénoménal de Fortnite, a annoncé mardi 4 décembre le lancement de sa propre plate-forme de distribution de jeux vidéo. Baptisée Epic Games Store, elle sera mise en ligne sur PC, Mac, puis Android « et autres plates-formes ouvertes » en 2019, précise l’éditeur sur son blog : « Ces cinq dernières années, nous avons construit des outils permettant à Epic d’amener directement ses jeux aux joueurs. Nous avons développé l’Epic Games launcher [un logiciel de lancement de programmes] sur PC et Mac pour “Fortnite” et [la bibliothèque d’outils de développement] Unreal Engine ; nous avons bâti un écosystème commercial en ligne acceptant des douzaines de méthode de paiement, et nous avons réalisé d’importantes économies d’échelle grâce à la croissance de “Fortnite”. » Epic Games promet une rétribution très avantageuse pour les studios et les éditeurs : 88 %, et la gratuité d’utilisation de moteur Unreal Engine 4. L’annonce résonne tout particulièrement avec l’actualité compliquée du numéro un occidental de la distribution en ligne sur ordinateur, Steam, qui a révélé le 1er décembre avoir modifié sa grille de partage des revenus rétroactivement au 1er octobre en faveur des plus grosses ventes. La société derrière la plate-forme phare laissera désormais 80 % des revenus aux jeux ayant généré plus de 50 millions de dollars, 75 % de 10 à 50 millions, et seulement 30 % en dessous. Plusieurs studios se sont par ailleurs inquiétés que les nouveaux algorithmes de Steam mettent désormais davantage en avant les superproductions, au détriment des jeux indépendants ayant fait son succès. Guerre des plates-formes Alors que l’industrie se prépare à l’arrivée du modèle Netflix, de nombreux acteurs ont lancé ces dernières années leur propre plate-forme, qu’il s’agisse de CD Projekt (The Witcher) avec GOG.com, d’Electronic Arts (FIFA, Battlefield) avec Origin ou Ubisoft (Assassin’s Creed) avec Uplay, souvent avec un succès limité. Ces derniers mois, itch.io, réservé aux jeux expérimentaux, a pris de plus en plus d’importance, tandis que le déploiement en Occident de WeGame, la solution maison du géant chinois Tencent, a été annoncé. L’idée d’une guerre des plates-formes de jeux vidéo en ligne a par ailleurs droit à un rebondissement pour le moins cocasse. Sergey Galyonkin, programmeur à l’origine du compte Steam Spy (« l’espion de Steam »), qui estimait grâce à des calculs complexes les ventes de jeu sur Steam, au point de s’imposer comme une référence dans l’industrie, a révélé qu’il travaillait depuis des années sur le projet concurrent d’Epic.
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/12/04/jeux-video-l-editeur-de-fortnite-annonce-son-concurrent-de-steam_5392634_4408996.html
04/12/2018
La plate-forme Epic Games Store sera lancée en 2019, et cherchera à convaincre les déçus de la nouvelle politique tarifaire de l’actuel leader occidental.
sciences
Le carbone dans tous ses états
Le livre. Il est des mots devenus si courants que leur sens, leur définition ou leur origine finissent par se perdre. Ainsi du terme « carbone », omniprésent dans les têtes, synonyme de « dioxyde de carbone », l’un des gaz à effet de serre dont l’augmentation de la ­concentration cause le réchauffement climatique. Mais cette forme ferait oublier que, avant de devenir la molécule à abattre (ou à séquestrer), d’autres « pics » de carbone ont alimenté les chroniques, plus optimistes, ­telles les fibres de carbone (matériau révolutionnaire léger et résistant) ou les nanotubes de carbone (découverte pleine de promesses, dont la réalisation se fait encore attendre). A l’inverse, périodiquement, des actualités plus dramatiques font parler de cet atome, lorsque des gens meurent d’intoxication au monoxyde de carbone. Mais ces formes font aussi oublier toutes celles qui ont fait disparaître le mot lui-même : pétrole, plastique, graphite (des ­mines de crayon aussi bien que des modérateurs des premières centrales nucléaires ­françaises), le diamant ou l’une des dernières-nées, le graphène (molécule plane qui en ­s’enroulant forme des nanotubes)… sont faits de chaînes carbonées. Un élément venu des étoiles Opportunément, le livre de Bernadette Bensaude-Vincent et Sacha Loeve vient nous remettre en tête l’importance multiforme de l’élément chimique carbone. Tout cela en évitant de dresser un catalogue ­rébarbatif de ses apparitions, considérant que cette diversité est la source même de l’intérêt que tout le monde devrait avoir pour le carbone. Les auteurs décident donc de nous raconter des histoires tour à tour chimiques, économiques, géologiques, technologiques ou philosophiques… Le lecteur apprendra forcément quelque chose (tout le monde n’est pas chimiste, spécialiste des liaisons entre atomes), et redécouvrira des faits peut-être oubliés (le carbone vient des étoiles).Les premiers récits, classiques mais très clairs, racontent « l’invention » du carbone, c’est-à-dire ses premières apparitions, depuis la mythologie jusqu’aux premiers laboratoires de chimie au XVIIe siècle. Les chapitres suivants, également passionnants, montrent comment le carbone a structuré et structure encore nos sociétés. Cela passe par l’écriture (charbon de bois et graphite), la mémoire (le carbone 14 pour ­dater en archéologie,l’ADN qui transmet les gènes), les énergies (charbon, pétrole), les matériaux (plastique) ou, actuellement, le ­réchauffement climatique.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/04/le-carbone-dans-tous-ses-etats_5392598_1650684.html
04/12/2018
L’ouvrage passionnant de Bernadette Bensaude-Vincent et Sacha Loeve raconte le carbone sous tous ses angles : chimique, technologique, géologique, économique ou philosophique.
campus
Classements des grandes écoles : pourquoi les hiérarchies restent figées
Lors d’une cérémonie de remise des diplômes à HEC Olivier Ouadah/HEC via Campus Le suspense est rarement insoutenable dans le haut de tableau des classements des grandes écoles. A quelques exceptions près, qui n’ont guère fait date, HEC, l’Essec et l’Insead dominent les palmarès des écoles de commerce françaises et Polytechnique ceux des écoles d’ingénieurs. A tel point qu’un classement qui reléguerait ces établissements en milieu de tableau semblerait peu crédible. Le classement européen des écoles de commerce du Financial Times, paru lundi 3 décembre, ne déroge pas à la règle : HEC occupe, comme l’année dernière, la deuxième place du podium derrière la London Business School. L’Insead arrive en troisième. En France, la dernière édition du palmarès de L’Etudiant, sorti début novembre, propose un top 10 inchangé par rapport à l’édition précédente, les surprises arrivant généralement dans le milieu du tableau. Cette stabilité globale semble naturelle à Frank Pacard, directeur de l’enseignement et de la recherche à l’Ecole polytechnique : « Les établissements d’enseignement supérieur sont des objets qui évoluent lentement. » Un top 25 des écoles de commerce Le Monde Loïck Roche, directeur général de Grenoble Ecole de management, qui se positionne dans le top 10 des écoles françaises, va plus loin : « Les palmarès figent les hiérarchies et assurent aux meilleures écoles une rente : celle de toujours remplir leur promotion avec les meilleurs élèves. Ne nous y trompons pas, un élève de prépa qui réussit à intégrer HEC a raison d’y aller car il sera traité différemment que s’il sort d’une autre école en termes de salaire, de carrière mais aussi presque de la déférence qu’on lui manifestera. » Les classements introduisent ainsi deux spirales parallèles : plus une école apparaît dans le haut du classement, plus elle y restera, et plus une école est dans le bas du tableau, plus elle y restera. « On ne prête qu’aux riches » Réseau d’anciens, de partenaires, recrutement des meilleurs élèves et insertion professionnelle au top… Polytechnique et HEC bénéficient depuis leur création, en 1794 pour l’une et 1881 pour l’autre, de cette spirale favorable qui fait dire « qu’on ne prête qu’aux riches ». Les deux établissements profitent par exemple de fondations, construites avec leurs associations d’alumni, qui viennent abonder leur budget sur des domaines comme la recherche, l’ouverture sociale, l’innovation pédagogique ou l’entrepreneuriat. Là où les autres fondations universitaires peinent à récolter quelques millions d’euros, la première campagne de levée de fonds de Polytechnique, entre 2008 et 2013, a rapporté plus de 35 millions d’euros, et celle de HEC – aux mêmes dates – 112 millions d’euros. Pas moins de 142 grands donateurs, souvent dirigeants de grandes entreprises comme François-Henri ­Pinault (PDG du groupe de luxe Kering) ou Henri de Castries (dirigeant d’Axa jusqu’en 2016), ont à cette occasion fait des dons supérieurs à 150 000 euros à « leur » école.
https://www.lemonde.fr/campus/article/2018/12/04/classements-des-grandes-ecoles-pourquoi-les-hierarchies-restent-figees_5392583_4401467.html
04/12/2018
Le palmarès des « business schools » du « Financial Times », paru le 3 décembre, le confirme : les écoles ont beau évoluer, ce sont toujours les mêmes qui gagnent. Un conservatisme qui n’est pas près de s’arrêter.
international
Un siège de l’UE au Conseil de sécurité ? « C’est l’exemple type de la fausse bonne idée »
L’ambassadeur de France aux Nations unies, François Delattre, lors d’une séance du Conseil de sécurité, à New York, le 14 avril. HECTOR RETAMAL / AFP En suggérant, mercredi 28 novembre, que la France renonce à son siège de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) en faveur de l’Union européenne (UE), le vice-chancelier et ministre allemand des finances, Olaf Scholz, a lâché une petite bombe diplomatique. Pour l’ambassadeur de France à l’ONU, François Delattre, la proposition du responsable social-démocrate, non reprise à ce stade par le gouvernement allemand, est irréaliste. Que penser de l’idée d’un siège européen au Conseil de sécurité de l’ONU ? Au-delà même de ses implications pour la France, qui est unanimement reconnue comme l’un des membres les plus actifs du Conseil de sécurité, c’est l’exemple type de la fausse bonne idée. Pour l’Allemagne elle-même, alors que l’objectif commun des diplomaties française et allemande est d’en faire un membre permanent du Conseil de sécurité dans le cadre d’un élargissement du Conseil ; et pour l’UE, dont l’objectif est, par construction, d’avoir le plus grand nombre possible de pays membres représentés au Conseil. Pour mémoire, il y en a cinq aujourd’hui – France et Royaume-Uni comme membres permanents, Suède, Pologne et Pays-Bas comme membres élus. Quel intérêt les Européens auraient-ils à ne limiter leur présence au Conseil qu’à un siège ? A cela s’ajoutent les difficultés juridiques et politiques sans doute insolubles de concevoir la présence de l’UE en tant que telle au Conseil, alors que, selon la charte des Nations unies, seuls les Etats sont membres de l’ONU. Alors, quelle stratégie proposez-vous aux Allemands ? La France et l’Allemagne doivent garder le cap de leur stratégie commune, qui est de peser de tout leur poids pour promouvoir l’élargissement du Conseil de sécurité à plusieurs nouveaux membres permanents : l’Allemagne, mais aussi l’Inde, le Brésil, le Japon et une présence africaine à déterminer. Chacun reconnaît aujourd’hui que cet élargissement est indispensable pour renforcer la représentativité du Conseil de sécurité et, avec elle, la crédibilité des Nations unies. C’est cette stratégie qu’il faut poursuivre et réussir. C’est la meilleure option pour la France, pour l’Allemagne et pour l’Europe. C’est la meilleure option aussi pour conforter le multilatéralisme. Mais ne faut-il pas renforcer la coopération entre Européens au Conseil de sécurité ? En effet, et c’est bien ce que nous faisons. Les pays européens membres du Conseil de sécurité expriment de plus en plus souvent, chaque fois que c’est possible, des positions coordonnées au Conseil et conjointes devant la presse.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/04/un-siege-de-l-ue-au-conseil-de-securite-c-est-l-exemple-type-de-la-fausse-bonne-idee_5392574_3210.html
04/12/2018
Selon François Delattre, l’ambassadeur français aux Nations unies, il est à la fois impossible et inopportun que l’Union européenne remplace la France au Conseil.
international
Brexit : selon l’avocat général de la Cour de justice de l’UE, le Royaume-Uni peut arrêter unilatéralement le divorce
Des opposants au Brexit, à Londres, le 4 décembre. HENRY NICHOLLS / REUTERS Cette conclusion pourrait-elle aider les Britanniques à sortir de l’impasse politique, à une semaine d’un vote décisif à la Chambre des communes, mardi 11 décembre, sur le traité de Brexit conclu entre Theresa May et les 27 autres dirigeants de l’Union ? Mardi 4 décembre, l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), Manuel Campos Sanchez-Bordona, a proposé qu’elle déclare que l’article 50 des traités de l’UE, qui servent de cadre au divorce, « autorise la révocation unilatérale de la notification de l’intention de se retirer de l’Union. Cette possibilité demeure jusqu’à la date de conclusion de l’accord de retrait ». M. Sanchez-Bordona se prononçait en réponse à une question préjudicielle posée par une juridiction écossaise saisie par les parlements écossais, britannique et européen. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les députés britanniques partent en guerre contre l’accord sur le Brexit négocié par Theresa May En clair – et si la Cour, qui doit publier son arrêt dans les semaines à venir, suit cette opinion (c’est généralement le cas) –, le Royaume Uni peut très bien décider de son propre chef de rester dans l’UE. Il suffit qu’il le veuille, le notifie à Bruxelles, et que cette décision soit prise avant le 29 mars 2019, date effective du Brexit. Les dix-sept mois d’intenses négociations entre Londres et Bruxelles, et les 585 pages de traité qui en ont résulté, iraient à la poubelle, et les Européens à 27 auraient probablement l’impression d’avoir vécu une chaotique, chronophage et très inutile parenthèse. « Souveraineté » Dans ses conclusions, l’avocat général explique qu’il « rejette la thèse selon laquelle l’article 50 admettrait uniquement la possibilité, avancée par la Commission et le Conseil [les Etats membres], d’une révocation décidée à l’unanimité par le Conseil européen ». Pas question, donc, que la révocation de l’article 50 soit subordonnée à la volonté des Vingt-Sept : « Accepter que le Conseil européen ait, à l’unanimité, le dernier mot sur la révocation de la notification de l’intention de se retirer de l’Union, augmente le risque que l’Etat membre quitte l’Union contre sa volonté. » L’éminent juriste pose quand même quelques conditions à une révocation unilatérale : elle ne peut advenir qu’à condition d’avoir été « décidée conformément aux règles constitutionnelles de l’Etat membre », et si elle « fait l’objet d’une communication formelle au Conseil européen et qu’elle n’emporte pas de pratique abusive ». M. Sanchez-Bordona fonde son raisonnement sur la convention de Vienne sur le droit des traités internationaux, dont un article précise que les notifications de retrait d’un traité peuvent être révoquées à tout moment avant qu’elles aient pris effet. « Le retrait d’un traité international, qui constitue le corollaire du pouvoir de conclure celui-ci, est, par définition, un acte unilatéral d’un Etat partie et une manifestation de la souveraineté de cet Etat », ajoute l’avocat.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/04/brexit-selon-l-avocat-general-de-la-cour-de-justice-de-l-ue-le-royaume-uni-peut-arreter-unilateralement-le-divorce_5392571_3210.html
04/12/2018
Pour Manuel Campos Sanchez-Bordona, « le retrait d’un traité international, qui est le corollaire du pouvoir de conclure celui-ci, est par définition un acte unilatéral d’un Etat ».
idees
Entreprises : « les avocats sont au service de leurs clients et non les valets d’une autorité quelconque »
« Tous les avocats exerçant en France sont soumis à la même déontologie, que leur cabinet ait ou non une dimension internationale.» Philippe Turpin / Photononstop Tribune. Peu de professions sont réglementées avec autant de rigueur que la profession d’avocat. Transgresser les règles, c’est s’exposer à des sanctions allant jusqu’à l’exclusion de la profession. Ces règles sont les mêmes pour tous les avocats exerçant en France indépendamment de leur structure d’exercice. Le grand public l’ignore parfois. Pourtant ces règles sont pour l’essentiel conçues pour protéger ce public, bien plus que pour protéger les avocats eux-mêmes. Il faut donc le rappeler. Et ce rappel est d’autant plus nécessaire que la presse s’est récemment fait l’écho de fantasmes, instrumentalisés par ceux qui y ont intérêt, selon lequel des avocats exerçant en France au sein de cabinets internationaux se livreraient à une violation systématique de leur obligation de secret professionnel. Pire encore, ces violations seraient commises dans l’intérêt de puissances étrangères, au premier rang desquelles figureraient les Etats-Unis. Cela est rigoureusement faux. Tous les avocats exerçant en France sont soumis à la même déontologie, que leur cabinet ait ou non une dimension internationale. Les uns comme les autres comptent l’indépendance parmi leurs principes cardinaux et sont identiquement tenus au respect du secret professionnel. Et tous, sans différence en fonction des structures d’exercice, peuvent garantir qu’aucune information qu’un client nous confie n’est transmise à qui que ce soit en France ou à l’étranger. Cela relève de l’évidence, car il n’y a pas de défense si celui qui est défendu ne peut pas se confier sans crainte à son avocat. Priorité au client Cette règle est immuable et aucune activité exercée par les avocats n’est susceptible de l’altérer. Pas même les travaux d’investigation interne consistant à rassembler les éléments factuels d’une situation potentiellement dangereuse pour le client dans le but de le conseiller sur les qualifications juridiques en jeu et la stratégie judiciaire à suivre. Mission classique et finalement sans grande nouveauté pour des avocats. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Entreprises : comment « mieux maîtriser le risque judiciaire américain » ? Prétendre, comme cela a pu être dit, que pour les avocats membres de cabinets internationaux, une telle mission les délierait de leur secret professionnel au profit d’autorités étatiques est gravement mensonger. Dans ce cas, comme dans tous les autres, et comme tous leurs confrères, ces avocats ne travaillent que pour leur client, rien que pour leur client, jamais pour les autorités de poursuite.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/04/entreprises-les-avocats-sont-au-service-de-leurs-clients-et-non-les-valets-d-une-autorite-quelconque_5392566_3232.html
04/12/2018
Dans une tribune au « Monde », une trentaine d’avocats de cabinets internationaux récusent toute collusion et rappellent que dans aucun cas, ils ne sont soumis aux injonctions de la justice américaine.
economie
A Paris, un drugstore remplace un musée place de la Madeleine
Le Drugstore Parisien s’installera en 2019 à l’emplacement qu’occupait la Pinacothèque. DOMINIQUE FAGET / AFP Le Drugstore Parisien poursuit son expansion. L’enseigne de produits de beauté, que L’Oréal et Casino testent depuis juin 2018, s’installera en 2019 au 28 de la place de la Madeleine. Le Drugstore Parisien occupera 900 m² à l’emplacement qu’occupait la Pinacothèque. Depuis la fermeture de ce musée privé, en 2016, ce local – il abritait initialement le laboratoire de la pâtisserie Fauchon – était vacant. Le Drugstore Parisien est un concept de magasin atypique dans le secteur des produits de beauté. Lancée par le groupe de distribution Casino et la filiale française de L’Oréal, numéro un mondial des produits de beauté, il est censé réconcilier les jeunes consommatrices avec les magasins et les marques de grande diffusion. Ces dernières ont de plus en plus tendance à délaisser les grandes surfaces alimentaires et les parfumeries pour se fournir en maquillage et soins chez des spécialistes, type Kiko, ou sur le Net, à moindre prix, en choisissant des marques alternatives à celle du groupe L’Oréal. En sus, ce magasin, que ces protagonistes présentent comme celui de « l’effervescence urbaine », s’adresse aux urbains qui veulent acheter leurs produits d’hygiène et de beauté à toute heure. Le Drugstore Parisien est ouvert tous les jours jusqu’à minuit. Un laboratoire du commerce L’Oréal et Casino avaient inauguré deux magasins à Paris, cet été. L’un est situé rue du Bac dans le 7e arrondissement. L’autre est situé rue de la Chaussée d’Antin, à deux pas des grands magasins du boulevard Haussmann dans 8e arrondissement que fréquentent les touristes étrangers. Le magasin de la place de la Madeleine devrait, lui aussi, s’adresser à une clientèle internationale. L’Oréal affirme cependant qu’il est « trop tôt » pour évoquer cette ouverture. L’installation du Drugstore Parisien dans le quartier intervient alors que la place de la Madeleine est en pleine révolution. Plusieurs enseignes misent sur ce quartier que la Ville de Paris « va rénover », rappelle Thierry Bonniol, responsable du département commerces du cabinet immobilier BNP Real Estate. Fin 2017, le café Pouchkine a remplacé l’agence de téléphonie Orange. En juin dernier, Leroy-Merlin y a inauguré un magasin de 5 000 m², à la place d’un ancien parking. Et, à quelques mètres de là, boulevard de la Madeleine, sur une surface analogue, au cours de l’été 2019, Ikea doit inaugurer un magasin au concept urbain inédit. Signe que la place de la Madeleine devient un laboratoire du commerce, à la veille de sa piétonnisation prévue également en 2019.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/04/a-paris-un-drugstore-remplace-un-musee-place-de-la-madeleine_5392560_3234.html
04/12/2018
L’Oréal et Casino, qui ont lancé en juin le Drugstore Parisien, installe cette enseigne de produits de beauté à la place de la Pinacothèque, musée de la place de la Madeleine fermé depuis deux ans. Inauguration prévue en 2019.
pixels
Un musée européen du manga en réflexion en Alsace
Détail du fonds de 130 000 ouvrages d’études japonaises du CEEJA (Haut-Rhin). W.A. Les archives d’Osamu Tezuka et de l’histoire de la bande dessinée nippone vont-elles faire leur nid en Alsace ? Le Centre européen d’études japonaises d’Alsace (CEEJA), une association à but non lucratif, travaille à l’ouverture à moyen terme d’un musée européen du manga à Mulhouse, a révélé au Monde son président, le député Agir Olivier Becht, vice-président du groupe d’amitié France-Japon à l’Assemblée. L’idée, qui a germé en 2017, n’en est encore qu’à la phase de montage budgétaire. Olivier Becht évalue à 2,5 millions d’euros l’enveloppe nécessaire à son lancement, et planche sur un modèle pour financer son fonctionnement annuel. « Le projet doit tenir debout tout seul, mais si le ministère de la culture aide, ce sera forcément un plus », admet le député, proche du ministre Franck Riester, avec qui il a fondé le groupe Agir. Si aucun lieu n’est officiellement arrêté, le député du Haut-Rhin privilégie l’option de Mulhouse, notamment en raison de sa proximité avec la Suisse et l’Allemagne et de son aéroport, le septième plus fréquenté de France et le plus important du Grand-Est, avec 8 millions de passagers par an. Une place pour l’animation et les jeux vidéo Le projet de musée européen du manga ne devrait pas voir le jour avant quatre ou cinq ans, précise le président du CEEJA, mais bénéficie déjà du soutien du prestigieux Musée international du manga de Kyoto, principale référence mondiale dans le domaine. Ce dernier a notamment demandé à ce que la future collection soit hébergée dans un bâtiment traditionnel, comme c’est déjà le cas au Japon, où les fonds ont été entreposés dans une ancienne école. Le futur musée ne souhaite pas s’enfermer dans une vision cloisonnée de la BD japonaise Ses contours exacts restent à définir, mais le souhait des personnes chargées du projet est de ne pas s’enfermer dans une vision cloisonnée de la BD japonaise. « Nous allons créer un groupe de travail pour bien le ficeler. Il faut un conseil scientifique et des spécialistes de l’animation et du manga, mais aussi d’autres horizons », détaille Virginie Fermaud, directrice du CEEJA, qui héberge déjà le plus grand fonds européen – environ 130 000 pièces – de livres d’études japonaises. Le musée laisserait ainsi une place aux figurines et aux jeux vidéo. Le conseil scientifique s’appuie déjà sur deux grands noms de la recherche, l’historien Xavier Kawa-Topor, qui a contribué à la reconnaissance de Hayao Miyazaki en France, et Ilan Nguyên, maître de conférences à l’université des arts de Tokyo et interprète de plusieurs grands noms historiques de l’animation japonaise, qu’il accompagne régulièrement en France.
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/12/04/un-musee-europeen-du-manga-en-reflexion-en-alsace_5392526_4408996.html
04/12/2018
Le projet, porté par le député centriste Olivier Becht, bénéficie de l’appui du prestigieux Musée international du manga de Kyoto, au Japon.
economie
Hyperconsommateurs, amateurs de fast-foods et de bio… portrait robot des jeunes bobos urbains
Qui est le jeune bobo parisien ? Un amateur d’expérience, bien plus individualiste et hédoniste dans son comportement que les idéaux auxquels il se réfère, hyperconsommateur et fuyant la contrainte, nous apprend une étude de l’Observatoire société et consommation (L’ObSoCo), publiée mardi 4 décembre. Réalisée à partir d’une compilation d’enquêtes, elle s’est penchée sur cette frange de la population appelée les « jeunes urbains créatifs » (spécialistes du marketing, architectes, designers, professionnels de la culture et des médias…) qui est « souvent confondue avec l’ensemble des millenials (les 18-34 ans), probablement parce que c’est la plus médiatisée, explique Philippe Moati, cofondateur de l’ObSoCo. Bien qu’ils représentent moins de 5 % de la population, c’est une classe influente puisqu’étant au cœur des lieux de décision des marques et des enseignes, sa manière de consommer a tendance à se diffuser dans la société ». Ainsi apprend-on qu’ils pensent intégrer plus que la moyenne la préoccupation environnementale dans leurs comportements d’achat (75 % des personnes interrogées), sont attentifs aux effets de l’alimentation sur leur santé (79 % d’entre eux), achètent des produits alimentaires bio (44 % contre 34 % pour l’ensemble des Français) et utilisent des applications comme Yuka (39 %). 57,9 % d’entre eux ne se reconnaissent d’ailleurs pas dans le modèle de consommation de masse. Et pourtant, ces jeunes urbains créatifs fréquentent des fast-foods plus que la moyenne des Français (58 % contre 40 %), aiment faire les soldes (65,2 %), et près de la moitié d’entre eux ne s’est jamais rendue dans l’année dans un marché paysan ou de producteurs (contre 42,5 % de l’ensemble des Français). Voyager le plus souvent possible fait partie des priorités pour 66 % d’entre eux. « Fuite devant la contrainte » L’étude dresse le portrait d’une génération toute en contradictions « qui n’est pas dans la déconsommation, selon M. Moati, mais dans une forme d’hyperconsommation tournée vers l’être plutôt que l’avoir ». Elle est impliquée dans le faire soi-même, la cuisine, comme une réalisation de soi que l’on « peut montrer aux autres, de manière assez grégaire, en postant sur les réseaux sociaux ». « Ils sont dans la simplification du quotidien pour pouvoir consacrer du temps à d’autres activités qu’ils jugent extrêmement importantes, comme boire un café en terrasse. C’est un mélange d’hyper individualisme et de projection en direction des autres et du monde. C’est l’économie de la flemme, le confort, la fuite devant la contrainte. Ce qui en fait des pionniers de l’économie à la demande et de l’utilisation des VTC, des Deliveroo, qu’ils ont d’ailleurs les moyens de se payer », constate M. Moati. Jusqu’au régime végétariens ou végétaliens qu’ils ne sont que 3,9 % à suivre, contrairement aux idées reçues. « Etre vegan, cela impose des contraintes », précise M. Moati. Cette génération urbaine, minoritaire, inspire néanmoins les grands groupes du secteur de la consommation dans la construction d’une offre dans laquelle ne se reconnaîtra peut-être pas le reste de la France.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/04/hyperconsommateurs-amateurs-de-fast-foods-et-de-bio-portait-robot-des-jeunes-bobos-urbains_5392515_3234.html
04/12/2018
L’Observatoire société et consommation dresse le portrait d’une frange « influente » des 18-34 ans : celle des villes, composée d’architectes ou designers, bourrée de contradictions.
international
La Russie débloque « partiellement » l’accès à la mer d’Azov
Un militaire ukrainien sur un bateau des garde-côtes au port de Marioupol, en mer d’Azov le 25 novembre. Evgeniy Maloletka / AP La Russie a partiellement débloqué les ports ukrainiens en mer d’Azov, ont annoncé mardi 4 décembre les autorités ukrainiennes, laissant présager un apaisement des tensions dans cette zone sensible au cœur d’un bras de fer entre Kiev et Moscou. Cruciaux pour les exportations ukrainiennes, « les ports de Berdiansk et Marioupol sont partiellement débloqués. Les navires entrent et sortent par le détroit de Kertch » reliant la mer Noire à celle d’Azov, a annoncé le ministre ukrainien des infrastructures, Volodymyr Omelyan. « La partie russe les arrête et les inspecte comme avant, mais la circulation a partiellement repris », a-t-il poursuivi. Selon lui, 17 navires attendaient toujours lundi de pouvoir entrer en mer d’Azov et un autre patientait à la sortie. Lire aussi Poutine défend sa version des affrontements avec l’Ukraine en mer Noire Pire bras de fer depuis des années Kiev et Moscou sont engagées dans leur pire bras de fer depuis plusieurs années après l’arraisonnement manu militari par la Russie le 25 novembre de trois navires ukrainiens qui tentaient de pénétrer en mer d’Azov. Il s’agit de la première confrontation militaire ouverte entre Moscou et Kiev depuis l’annexion en 2014 par la Russie de la péninsule ukrainienne de Crimée et le début la même année d’un conflit armé dans l’est de l’Ukraine entre forces gouvernementales et séparatistes prorusses qui a fait plus de 10 000 morts. Avant l’incident naval, Kiev et les Occidentaux accusaient depuis des mois la Russie d’entraver délibérément la navigation des navires commerciaux par le détroit de Kertch, dont Moscou revendique le contrôle à la suite de l’annexion de la Crimée. En réponse à cette dernière flambée de tension, Kiev a instauré pour un mois la loi martiale dans ses régions frontalières et côtières, disant craindre une « guerre totale » de la part de Moscou qu’il accuse d’avoir drastiquement renforcé sa présence militaire à la frontière ukrainienne. Cet affrontement a ravivé les craintes d’une plus vaste escalade entre ces deux ex-républiques soviétiques. Si les pays occidentaux ont soutenu l’Ukraine dans ce conflit, ils ont appelé les deux parties à la retenue. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Moscou a ouvert un troisième front dans son offensive contre l’Ukraine en mer d’Azov »
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/04/la-russie-debloque-partiellement-l-acces-a-la-mer-d-azov_5392508_3210.html
04/12/2018
Cette réouverture partielle laisse présager un apaisement des tensions dans cette zone sensible au cœur d’un bras de fer entre Kiev et Moscou.
societe
Divisions et règlements de comptes entre « gilets jaunes »
Dans une tribune parue ce week-end dans Le Journal du dimanche, dix « gilets jaunes » partisans du dialogue disaient se tenir à la disposition du premier ministre pour « un premier rendez-vous ». Il fallait cependant lire la tribune jusqu’au bout : en conclusion, ils exigeaient comme préalable à la rencontre, le gel de la hausse des taxes sur les carburants et l’annulation de l’alourdissement du contrôle technique. Ne voyant rien venir, un des signataires a finalement annoncé lundi au Monde que la délégation ne se rendrait pas mardi à Matignon. « Nous attendons un geste fort qui ne vient pas, indiquait lundi soir Benjamin Cauchy, l’un des signataires. Nous ne voulons pas faire figure de marionnettes pour des politiques qui vont juste nous refaire la pédagogie de la pédagogie. » Vendredi 30 novembre, déjà, un premier rendez-vous à Matignon proposé à une délégation de huit porte-parole avait tourné court : seuls deux « gilets jaunes » avaient fait le déplacement, mais l’un était reparti au bout de quelques minutes et l’identité de l’autre est restée inconnue. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Face au mouvement des « gilets jaunes », l’exécutif recule pour tenter de sortir de la crise Une autre raison a dissuadé les volontaires du JDD. Jacline Mouraud, hypnothérapeute bretonne dont la vidéo virale a contribué à lancer le mouvement fin octobre, dit avoir reçu des menaces de mort. « Nous sommes tous victimes de menaces et d’intimidations sur les réseaux sociaux de la part d’autres “gilets jaunes” qui ont appelé à faire un cordon pour nous empêcher d’atteindre Matignon », confirme Benjamin Cauchy. Dans son viseur, le « canal historique » du mouvement, constitué autour du routier qui a lancé l’idée d’un blocage le 17 novembre, Eric Drouet, de la microentrepreneuse auteure d’une pétition pour la baisse des taxes sur le carburant, Priscillia Ludosky, et du Breton Maxime Nicolle, alias « Fly Rider ». Soupçons de « projet politique » Au lendemain du 24 novembre, la pression s’était faite plus vive pour qu’émergent des interlocuteurs pour le gouvernement. Le sujet a été discuté entre plusieurs dizaines de « gilets jaunes » administrateurs de groupes Facebook qui dialoguent sur la messagerie Messenger depuis la fin octobre. « Là, Drouet et compagnie m’ont exclu tout de suite d’une éventuelle délégation au prétexte que j’étais un ancien de l’UMP », s’indigne Benjamin Cauchy. Eric Drouet raconte que Benjamin Cauchy aurait alors menacé de quitter les « gilets jaunes » avec pertes et fracas. Ce qu’il a fait dans les médias, lundi 26 novembre, annonçant la création du mouvement « citron ». Resté sans suite. La tribune au JDD a signé son retour parmi les « gilets ». Une dramaturgie digne d’un vrai parti politique.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/04/divisions-et-reglements-de-comptes-entre-gilets-jaunes_5392504_3224.html
04/12/2018
Une délégation de manifestants a renoncé à se rendre à Matignon, accusant d’autres membres du mouvement de les avoir menacés.
idees
La gageure de la réforme de la fiscalité locale
Des maires reçus à l’Elysée, le 22 novembre 2017, à l’occasion du 100e congrès des maires de France. LUDOVIC MARIN / AFP Analyse. Tout au long du 101e congrès des maires, qui s’est achevé le 22 novembre à Paris, un sujet aura hanté toutes les conversations, alimenté tous les débats : l’exonération totale de la taxe d’habitation à partir de 2021 et le dispositif qui sera mis en place pour compenser la perte de ressources directes – au bas mot 19 milliards d’euros, si l’on considère que les résidences secondaires seront exclues de cette exonération – qui en découlera pour les communes et les intercommunalités. Force est de constater que la solution miracle tarde à émerger, tant sont divergentes les positions entre l’exécutif et les pouvoirs locaux. « Je suis conscient des inquiétudes qui se sont fait jour à propos de la suppression annoncée de la taxe d’habitation », reconnaît Emmanuel Macron dans la lettre qu’il a adressée aux maires à l’ouverture du congrès. Dans ce même courrier, le chef de l’Etat s’engage « à veiller à ce que la suppression de cet impôt soit compensée à l’euro près ». « A moyen terme, poursuit-il, il s’agit de repenser totalement, en concertation avec l’ensemble des élus, notre système de fiscalité locale. Une réforme globale sera présentée au printemps. » Mais cela ne dit pas ce qu’il y a dans les tuyaux. Le président de l’Association des maires de France (AMF), François Baroin, a beau jeu de dire qu’« aujourd’hui, un brouillard très épais entoure ce chantier ». Pour le maire (LR) de Troyes, « c’est à l’Etat de faire des propositions ». Mais les propositions que le gouvernement a pu esquisser, sur la base du rapport sur la refonte de la fiscalité locale, remis le 9 mai par Dominique Bur et Alain Richard au premier ministre, les trois associations « historiques » – AMF, Assemblée des départements de France (ADF) et Régions de France – les rejettent en bloc. A ce tarif, la « concertation » risque de tourner court. « Pas question de jouer les uns contre les autres » Jusque-là, l’idée qui semblait se dégager, comme l’avait expliqué Edouard Philippe le 4 juillet à la Conférence nationale des territoires, boycottée par l’AMF, l’ADF et Régions de France, était d’affecter aux communes la part de taxe foncière sur les propriétés bâties actuellement perçue par les départements (14 milliards d’euros en 2017), en compensant la perte de recettes pour les intercommunalités par une part de TVA ou de contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Tout en engageant le chantier de la révision des bases locatives, ce qui n’est pas une mince affaire.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/04/la-gageure-de-la-reforme-de-la-fiscalite-locale_5392498_3232.html
04/12/2018
Alors qu’Emmanuel Macron doit recevoir à l’Elysée, mardi 4 décembre, l’ensemble des associations d’élus pour relancer la concertation, le blocage semble total, analyse Patrick Roger, journaliste politique au « Monde »
politique
Face au mouvement des « gilets jaunes », l’exécutif recule pour tenter de sortir de la crise
Edouard Philippe est arrivé tôt, vers 7 heures, dans son bureau ce mardi 4 décembre. Le premier ministre voulait avoir le temps de préparer son discours, en peser chaque mot. Ce discours qu’il devait lire, face caméra en direct de Matignon en milieu de journée, doit désamorcer la colère des « gilets jaunes » alors que de nouvelles manifestations sont annoncées samedi 8 décembre et que la convergence des mécontentements menace. Annonces du gouvernement sur les « Gilets jaunes » : suivez notre direct Selon nos informations, sont donc suspendues pendant six mois la hausse de la taxe carbone, la convergence diesel-essence et la hausse de la fiscalité sur le gazole entrepreneur non routier. De même, le gouvernement renonce provisoirement à l’alourdissement des conditions de contrôle technique sur les automobiles qui était prévu l’an prochain. Il s’engage aussi à ce qu’il n’y ait pas de hausse du tarif de l’électricité d’ici à mai 2019. Le gouvernement a donc finalement décidé « un énorme gel », comme le dit un conseiller de l’exécutif. Ce recul concerne les mesures qui ont mis les Français dans la rue, mais aussi celles susceptibles de rogner encore plus leur pouvoir d’achat au 1er janvier 2019 et de relancer leur exaspération. « On a entendu la colère des Français. On a compris que les Français veulent que le travail paye mieux », explique un conseiller de l’exécutif, qui rappelle que la revalorisation automatique du smic et la hausse prévue de la prime d’activité se traduiront par une augmentation de 3 % du salaire minimum net. Plan de sortie de crise Pendant cette période de moratoire, outre la grande concertation prévue dans les territoires sur la transition écologique, l’exécutif va organiser un débat sur les mesures d’accompagnement pour en adoucir la facture. « On va rediscuter du plan de 500 millions. S’il faut, on le modifiera », explique un proche du pouvoir. Une réunion sera par ailleurs organisée, comme l’a suggéré la CFDT, avec les partenaires sociaux sur la mobilité du quotidien. « Enfin on organisera un grand débat sur l’impôt et les dépenses publiques », poursuit un conseiller. Edouard Philippe a réservé la primeur de ses annonces au groupe parlementaire de La République en marche (LRM), qu’il a rencontré mardi dans la matinée. Il n’aura pas en revanche l’occasion d’expliquer sa démarche aux « gilets jaunes », puisque la rencontre qui était prévue mardi après-midi avec des représentants du mouvement a été annulée, faute de participants. La plupart des membres de la délégation qui étaient prêts à se rendre à Matignon ont renoncé pour « des raisons de sécurité », faisant état de menaces d’autres « gilets jaunes ».
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/04/face-au-mouvement-des-gilets-jaunes-l-executif-recule-pour-tenter-de-sortir-de-la-crise_5392494_823448.html
04/12/2018
Taxe carbone, hausse de la fiscalité sur le diesel et l’essence, contrôle technique… le premier ministre, Edouard Philippe, a annoncé un « gel » des mesures.
blog-mediateur
« Le Monde des lecteurs » - Gilets jaunes : originalités et contradictions
« Le rejet de toute référence politique comporte également certaines ambiguïtés, ne serait-ce que parce que l’inévitable portée politique d’un mouvement social le préserve de l’isolement. » Daniel Sambraus/GO Free / Photononstop Sur le blog « Le Monde des lecteurs », les lectrices et lecteurs du « Monde » peuvent commenter l’actualité. Vous pouvez contacter la rédaction par courriel : courrier-des-lecteurs@lemonde.fr. Le mouvement social actuel présente des originalités. Son caractère inter-catégoriel explique en partie la diversité des revendications qu’il porte, conjuguée à l’exigence contemporaine d’immédiateté. Il ne propose pas clairement un autre modèle de société. En revanche, ses évolutions et notamment celle d’une propension à la radicalisation de l’action faute d’un aboutissement par des moyens conventionnels sont beaucoup plus traditionnelles. Ce même mouvement n’a cependant pas jusqu’ici résolu quelques-unes de ses contradictions. Il réclame par exemple quelquefois un retour des services publics qui ont été si souvent dénigrés, alors que cet objectif n’est guère compatible avec une baisse importante des prélèvements sociaux. Le rejet de toute référence politique comporte également certaines ambiguïtés, ne serait-ce que parce que l’inévitable portée politique d’un mouvement social le préserve de l’isolement. Sentiment d’injustice Cette révolte est surtout fondée sur un sentiment d’injustice. Les cadeaux fiscaux dont ont profité les grandes entreprises et les plus riches entraînent une augmentation de la fiscalité sur la consommation, tandis que dans le même temps, le contrôle de l’Etat sur les individus ne cesse de se renforcer. La question écologique est souvent avancée. Mais elle est posée en des termes réducteurs qui pointent une culpabilité des seuls consommateurs, soumis en conséquence à une pénalisation spécifique, alors que l’avenir de la planète concerne tout le monde. Bien que leurs choix aient été naguère orientés vers des produits dépréciés aujourd’hui, ils sont encore incités à consommer davantage. Quant à l’indispensable accompagnement social de la transition écologique, il reste pour l’instant virtuel. Ainsi, pour beaucoup de citoyens, l’écologie est désormais perçue comme un prétexte pour leur appliquer une fiscalité punitive qui a pour rôle principal de renflouer les caisses de l’Etat. Les événements en cours marquent l’expression dans la vie publique de catégories sociales un peu oubliées. Si leur action ne suscite pas une réponse politique responsable, une escalade dans la violence est prévisible. René Robert, Aiguilhe (Haute-Loire)
https://www.lemonde.fr/blog-mediateur/article/2018/12/04/le-monde-des-lecteurs-gilets-jaunes-originalites-et-contradictions_5392490_5334984.html
04/12/2018
René Robert estime que « pour beaucoup de citoyens, l’écologie est désormais perçue comme un prétexte pour leur appliquer une fiscalité punitive qui a pour rôle principal de renflouer les caisses de l’Etat. »
sciences
Marin Dacos, héraut de la science ouverte
Marin Dacos, à Paris le 28 novembre. MARTIN COLOMBET POUR "LE MONDE" Les évidences mettent parfois du temps à s’imposer. Et elles ne le font pas toutes seules. Marin Dacos, agrégé d’histoire et ingénieur de recherche au CNRS, 47 ans, en sait quelque chose. Il est l’un de ceux qui, en France, ont fait cheminer l’une de ces idées simples qui peuvent révolutionner la manière de faire de la recherche. « Je pensais qu’en cinq ans j’aurais réussi mais ça a été plus long », confesse ce Franco-Belge, après… vingt ans de batailles. Cette évidence est que les résultats de recherches financées par des fonds publics (percées thérapeutiques, avancées technologiques ou découvertes fondamentales) devraient être accessibles gratuitement. Or, c’est l’inverse qui est encore bien souvent la règle : les chercheurs publient dans des journaux dont l’accès est payant, y compris pour les chercheurs. Mais le climat change. En juillet, Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, a rendu public son plan national pour la science ouverte. Avec, comme première mesure, l’obligation de publier en accès ouvert les articles et livres issus de recherches financées par appel d’offres sur fonds publics. Et comme principal inspirateur du texte, Marin Dacos donc, conseiller science ouverte au ministère depuis 2017. Dix-huit ans plus tôt, en 1999, étudiant en thèse, il crée le portail Revues.org, qui héberge des journaux de sciences humaines et sociales (SHS). Ils sont près de 500 aujourd’hui, dont les trois quarts en libre accès (open access en anglais) et le reste avec une barrière mobile (les articles sont gratuits après une certaine période). L’infrastructure technique de ce portail est Open Edition Center, dirigé par Marin Dacos, une unité de service et de recherche du CNRS, des universités Aix-Marseille, Avignon et de l’EHESS. Une dénomination baroque qui désigne, concrètement, des services de l’Etat équivalents à des acteurs privés, comme par exemple le portail Cairn.info et ses 500 journaux. Aux articles en ligne s’ajoutent aussi plus de 6 000 livres, 2 750 « carnets de recherche » (des blogs de chercheurs), 40 000 événements recensés dans un calendrier et une équipe de recherche et développement. Du local à l’institutionnel « L’un des succès de Marin est d’avoir réussi à institutionnaliser ce qu’il avait construit localement et qui n’était pas dans les pratiques habituelles, à savoir des outils permettant l’édition en accès ouvert. Ce n’était pas facile ! », rappelle Stéphane Pouyllau, directeur d’une autre infrastructure en SHS, Huma-num, qui se positionne sur la gestion et l’analyse des données de recherche.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/04/marin-dacos-heraut-de-la-science-ouverte_5392481_1650684.html
04/12/2018
Il est l’inspirateur du plan national rendant obligatoire la publication en accès libre des résultats de recherche sur fonds publics. Un chantier qu’il porte depuis vingt ans.
blog-mediateur
« Le Monde des lecteurs » - Gilets jaunes : « manque de démocratie, pas le manque de communication »
« Emmanuel Macron est un président technicien hors pair : il deviendrait un président marquant l’histoire s’il entreprenait une réforme qui ferait que notre gouvernance allierait l’expertise technique à l’expertise d’usage. » Photo- : Lendemain de manifestation des "Gilets Jaunes" le 2 decembre 2018 autour de la Place de l’Etoile. Emmanuel Macron, ici saluant la foule, accompagné du Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur, Laurent Nuñez et de Michel Delpuech, préfet de police de Paris, s’apprête a descendre l’Avenue Kleber. Julien Luguet pour «Le Monde» Sur le blog « Le Monde des lecteurs », les lectrices et lecteurs du « Monde » peuvent commenter l’actualité. Vous pouvez contacter la rédaction par courriel : courrier-des-lecteurs@lemonde.fr. Ni le pays où le taux de taxes est le plus élevé, ni le moins, notre démocratie devrait s’inspirer des écrits de Pierre Rosanvallon, Jürgen Habermas, Loïc Blondiaux et autres. L’expression actuelle de ras-le-bol fiscal est aussi une crise de la démocratie, pas seulement une non-acceptation de l’impôt. On a tort de soigner les symptômes et d’ignorer la cause. Emmanuel Macron qui a eu la lucidité de vouloir traiter le chômage en diminuant le coût du travail et favorisant l’investissement, en manque singulièrement pour appréhender la situation actuelle : ce que disent les gilets jaunes, c’est le manque de démocratie, pas le manque de communication. La légitimation des décisions démocratiques vient du processus de délibération pas de la compétence : « La légitimité… ne repose plus seulement sur la nature de l’autorité qui prend la décision, mais aussi sur la manière dont elle est produite… ». « Pour autant, la démocratie participative ne désarme pas les conflits et, de ce fait, ne réduit pas les possibilités d’action. Elle rend impossible l’argument d’autorité sur le débat. Elle reconnaît l’expertise d’usage. Finalement, elle renforce l’action publique et incite à une nouvelle approche en obligeant à la prise en compte, a priori même, des arguments contraires » (Loïc Blondiaux) Une opportunité Ce ne sont pas des « Grenelle » régionaux qu’il faut mettre en place : la concertation n’est pas suffisante s’il n’y a pas d’impact sur la décision ; de plus, elle est nécessaire en permanence, pas seulement en temps de crise. Une démocratie véritablement participative passe par une refonte de la démocratie élective et la redéfinition des responsabilités du parlement : oui à la réduction du nombre d’élus, à la suppression du Sénat, à la transformation des Conseils économiques et sociaux en conseils citoyens sans les partis politiques et les syndicats dont les lieux d’expression ne manquent pas et sont ailleurs. La crise actuelle est un signe de la maturité de notre démocratie qui ne peut désormais se résumer à donner des mandats par le vote. C’est une opportunité. Emmanuel Macron est un président technicien hors pair : il deviendrait un président marquant l’histoire s’il entreprenait une réforme qui ferait que notre gouvernance allierait l’expertise technique à l’expertise d’usage. Guy Legal, Marseille
https://www.lemonde.fr/blog-mediateur/article/2018/12/04/le-monde-des-lecteurs-gilets-jaunes-manque-de-democratie-pas-le-manque-de-communication_5392458_5334984.html
04/12/2018
Guy Legal estime qu’« une démocratie véritablement participative passe par une refonte de la démocratie élective et la redéfinition des responsabilités du parlement »
economie
Smic : un rapport d’experts met en exergue les risques de rester longtemps au salaire minimum
A Lille, en 2015. PHILIPPE HUGUEN / AFP Voilà un rapport qui a, dans l’absolu, tout pour retenir l’attention : rédigé par un groupe d’experts, il porte sur le smic et sur sa revalorisation. Une thématique au cœur de la crise actuelle, puisque le pouvoir d’achat des plus modestes en constitue la toile de fond. Mais ce document de quelque 213 pages, transmis lundi 3 décembre aux partenaires sociaux, a peu de chances d’être repris par le gouvernement, du moins pour l’instant : il va à rebours d’une de revendications portées par les « gilets jaunes » – la hausse du salaire minimum (pour le porter à 1 300 euros nets par mois pour un temps plein, contre un peu plus de 1 150 euros aujourd’hui). Chaque fin d’année, le gouvernement doit décider à quelle hauteur il relève le smic, à partir du 1er janvier suivant. Pour éclairer ses choix, il dispose d’un comité de « sachants », présidé par l’économiste Gilbert Cette. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Smic : le gouvernement travaille à une subtile réforme de l’indexation L’un des principaux points à trancher est le suivant : faut-il accorder un coup de pouce au smic, en plus de l’augmentation automatique à laquelle il est soumis ? Les textes prévoient en effet que ce minimum salarial doit progresser, tous les douze mois, en fonction de deux paramètres : l’inflation (mesurée pour les 20 % de ménages situés en bas de l’échelle des revenus) et la moitié de la hausse annuelle du pouvoir d’achat du salaire horaire de base des ouvriers et des employés (SHBOE). Outre cet accroissement, qui est de droit, le gouvernement a donc aussi la faculté d’octroyer un « bonus » – ce qui s’est produit, pour la dernière fois, au début du quinquennat de François Hollande. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Emploi : des dispositifs « coûteux pour une efficacité modérée » Pas de coup de pouce en 2019 Dans son rapport annuel, le comité d’experts formule diverses recommandations – dont l’une concerne, en temps ordinaire, la question du « coup de pouce » : en donner un ou pas ? Non, avait préconisé, ces dernières années, le groupe d’experts. Cette fois, il « ne juge pas utile » de prendre position, puisque Edouard Philippe a déjà statué, le 28 novembre : il n’y aura pas « petit cadeau » pour les smicards en 2019. Leur rémunération n’est rehaussée qu’en vertu de la formule de calcul automatique. Le premier ministre a justifié cette annonce en rappelant que les salaires se sont améliorés grâce aux baisses de cotisations. Une décision critiquée par plusieurs centrales syndicales.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/04/smic-un-rapport-d-experts-met-en-exergue-les-risques-de-rester-longtemps-au-salaire-minimum_5392452_3234.html
04/12/2018
Ces « effets de trappes » s’avèrent plus marqués « pour les femmes, les ouvriers et employés », selon le comité présidé par l’économiste Gilbert Cette.
politique
« Gilets jaunes » : « Les policiers craignent de se faire tirer dessus »
© Julien Muguet pour Le Monde, Paris, France le 1 decembre 2018 - Manifestation des "Gilets Jaunes" autour de la Place de l Etoile. Sur l Avenue de la Grande Armee, un cordon de CRS fait face a des baricades et plusieurs foyers de feux. JULIEN MUGUET POUR LE MONDE La teinte violacée des hématomes s’atténue doucement, mais l’humeur, elle, reste noire. Le moral des forces de l’ordre a été sérieusement atteint, après le déchaînement de violence de la journée de mobilisation des « gilets jaunes », samedi. Les CRS et les unités mobiles de gendarmerie, en première ligne, ont l’impression d’avoir été la cible d’une agressivité rarement vue ces dernières années, principalement à Paris, mais sur le reste du territoire également. Les chiffres du bilan humain – 85 blessés et plusieurs centaines de « contusionnés », selon le jargon policier – ne disent pas tout du malaise que ressentent les fonctionnaires sur le terrain. « Les troupes sont épuisées, parce que ça fait plusieurs jours qu’on est sur tous les fronts, mais elles sont aussi choquées », assure Christophe Rouget, secrétaire général adjoint du Syndicat des cadres de la sécurité intérieure (SCSI), principale organisation chez les officiers. Bunkériser les Champs-Elysées « C’est inédit, nos techniques de maintien de l’ordre habituelles n’ont pas fonctionné, on a balancé plus de lacrymos que dans toutes les dernières manifestations réunies, et ça n’a servi à rien », raconte un policier présent samedi à Paris. Les forces de l’ordre ont également utilisé des grenades de désencerclement, et même des grenades de type GLI-F4 (à la fois lacrymogène et assourdissante), qui avait été remisées ces dernières années, car jugées trop dangereuses. Mais rien n’y a fait : tous témoignent de la détermination des manifestants face à eux. « On est loin de l’image du mouvement des “gilets jaunes” bon enfant des premiers jours, on était face à des gens qui voulaient nous affronter », juge une source policière parisienne. Les choix stratégiques faits en haut lieu sont également largement critiqués sur le terrain. « C’est un échec en termes de maintien de l’ordre », estime Philippe Capon, secrétaire général de l’UNSA-Police. La décision de la préfecture de police de Paris, validée par le ministre de l’intérieur, de bunkériser les Champs-Elysées, en délaissant la place de l’Etoile, fait débat. L’état de fatigue des troupes est d’autant plus important qu’elles sont très sollicitées sur le terrain par le mouvement des « gilets jaunes », diffus et difficile à cerner. « Le problème c’est que, dès qu’il y a dix mecs qui mettent un barrage quelque part en France, on doit y aller, ça mobilise énormément de compagnies », explique une source chez les CRS. La perspective d’une mobilisation durable avec des épisodes de violences tous les week-ends inquiète au plus haut point la hiérarchie policière.
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/04/les-policiers-craignent-de-se-faire-tirer-dessus_5392441_823448.html
04/12/2018
Les CRS et les unités mobiles de gendarmerie, surpris par le niveau de violence, ont dénombré 85 blessés dans leurs rangs ce week-end.
economie
L’effet paralysant du Brexit sur les start-up de la finance à Londres
Le quartier financier de Canary Wharf, à Londres, le 19 novembre. ADRIAN DENNIS / AFP Quand les Britanniques ont voté en faveur du Brexit, le 23 juin 2016, Hervé Hatt a immédiatement suspendu ses projets au Royaume-Uni. Le directeur général de Meilleurtaux.com, un site français de comparaison de taux pour l’immobilier et le crédit, étudiait, à l’époque, une possible acquisition d’une entreprise britannique. « On a arrêté d’en faire une priorité et on s’est mis à regarder ailleurs. » Cette non-acquisition, qui n’apparaîtra dans aucune statistique et se ressentira à peine, est symbolique du froid glacial que le Brexit a fait souffler sur « Tech City », le surnom du quartier de l’est de Londres où sont situées de nombreuses start-up de la finance (les fintech). Dans ce milieu cosmopolite, qui utilise Londres comme centre pour se déployer sur l’ensemble de l’Europe, le Brexit a eu un effet paralysant. Si la capitale britannique reste, de loin, le leader de la fintech dans l’Union européenne (UE), il y règne désormais une certaine anxiété, alors que les députés du Royaume-Uni menacent de rejeter l’accord signé entre Londres et Bruxelles. Mercredi 28 novembre, un séminaire organisé lors du passage d’Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’économie, a illustré cette forte incertitude. « Les grandes entreprises sont prêtes et ont les autorisations nécessaires [pour continuer à travailler en Europe], mais la question concerne les petits acteurs », explique Olivier Fliche, membre de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le régulateur français de la banque et de l’assurance. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le magnat américain Warren Buffett investit dans deux fintech « Le régulateur irlandais est submergé par les demandes » Marieke Flament dirige la filiale européenne de Circle Pay, une entreprise américaine spécialisée dans les cryptomonnaies. La société, qui possède une moitié de ses soixante employés à Londres et l’autre moitié à Dublin, s’est naturellement tournée vers l’Irlande, au lendemain du Brexit pour demander une licence « e-money », afin de pouvoir continuer à travailler à travers l’UE. Mais les choses ne se sont pas déroulées comme prévu. « Le régulateur irlandais est submergé par les demandes provenant des grandes banques jusqu’aux petites start-up. On n’arrive pas à obtenir de rendez-vous. » Inquiète, Marieke Flament a cherché une alternative, s’intéressant notamment à Malte, mais sa réputation sulfureuse l’a refroidie. Après des mois d’hésitations, elle a fini par se tourner vers les régulateurs français, l’Autorité des marchés financiers et l’ACPR. Elle a été surprise de leur accueil. « Il est aussi facile d’avoir un dialogue avec eux qu’avec le régulateur britannique, et on peut poser son dossier en anglais, ce qui m’a énormément facilité les choses. »
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/04/l-effet-paralysant-du-brexit-sur-les-start-up-de-la-finance-a-londres_5392438_3234.html
04/12/2018
La capitale britannique reste, de loin, le premier centre européen de la « fintech », mais de nombreux projets sont suspendus.
smart-cities
Les Grands Moulins de Pantin, une greffe réussie
Les Grand Moulins de Pantin, en 2017. Luc Boegli/Reinchen&Robert Les Parisiens connaissent bien la silhouette caractéristique des Grands Moulins de Pantin, ses hautes tours, son beffroi chapeauté d’un clocheton visible depuis le périphérique, mais peu ont pu entrer dans cette citadelle. En 2009, 3 200 salariés de BNP Paribas Securities Services, filiale de BNP Paribas, leader mondial du postmarché, c’est-à-dire qui traite les transactions des titres après négociation, ont investi cette ancienne minoterie qui a fonctionné jusqu’en 2003. Lourde réhabilitation Les architectes Reichen et Robert, chargés de cette lourde réhabilitation, ont magnifié cette architecture des années 1920, en brique blonde du Nord, et le passé industriel des lieux. Cinq bâtiments reliés par des passerelles s’articulent autour de la cour pavée où courent encore les rails du chemin de fer qui acheminait la farine ou le blé. Lire aussi : Le Grand Paris redonne vie aux cathédrales industrielles désertées La puissante chaudière Babcock & Wilcox, en céramique blanche, trône à l’entrée des salles de réunion, la cafétéria est installée dans l’ancienne chaudière. « Au début, cela surprend, raconte Claire Lumley, attachée de presse, mais ce campus se révèle très adapté à nos activités. » Certes, à l’exception d’une Journée du patrimoine en 2008, le public n’est pas admis, « c’est une banque », explique Mme Lumley, qui rappelle que la BNP est le premier employeur de Seine-Saint-Denis. Bertrand Kern, le maire (PS) de la ville de 70 0000 habitants, témoigne: « Pour autant, les salariés n’y sont pas claquemurés. Ils fréquentent les commerces et les restaurants, se font soigner chez les dentistes. Plusieurs salariés sont venus habiter dans notre ville. La banque fait appel à Pôle Emploi, notamment pour des postes non qualifiés, et soutient plusieurs associations. Il n’y a pas eu de rejet des Pantinois vis-à-vis de ces salariés dont certains sont parfois très bien payés ». Lire aussi Autour du canal de l’Ourcq, le risque de la gentrification L’implantation de BNP Paribas a permis d’améliorer les transports, malgré des débuts difficiles L’installation de la banque apporte aussi des ressources financières non négligeables, de 500 000 euros par an à la commune et 5 millions d’euros pour Est Ensemble, l’intercommunalité. L’implantation a permis d’améliorer les transports, malgré des débuts difficiles. Aux heures de pointe, les usagers devaient faire la queue et patienter de longues minutes pour accéder aux quais du RER E qui relie le site à la gare Saint-Lazare en 20 minutes. La fréquentation de la gare de Pantin a quintuplé entre 1998 et 2018, passant de 3 000 passages par jour à 15 000, une affluence mal anticipée par le syndicat des transports d’Île-de-France. La banque a financé la construction d’une passerelle en bout de quai, la gare a été réaménagée, percée de plusieurs ouvertures pour fluidifier les allers et venues. La ville a obtenu que le tramway qui ceinture Paris passe aux pieds des Grands Moulins. « Dix ans plus tard, l’impact est très positif », résume l’élu. Cet article fait partie d’un dossier réalisé en partenariat avec l’établissement public foncier d’Ile-de-France.
https://www.lemonde.fr/smart-cities/article/2018/12/04/les-grands-moulins-de-pantin-une-greffe-reussie_5392421_4811534.html
04/12/2018
Les Grands Moulins de Pantin, autrefois une minoterie, abritent depuis 2009 les bureaux de BNP Paribas Securities Services, filiale de BNP Paribas. La greffe – entre les 3 200 salariés et les habitants, entre les lieux magnifiés par les architectes et la ville de Pantin – a pris.
planete
Des substances utilisées en cosmétique associées à une puberté plus précoce
Le lien entre perturbateurs endocriniens et puberté précoce, de plus en plus fréquente, se précise. Une étude américaine, publiée mardi 4 décembre, dans la revue Human Reproduction suggère, chez les filles, une association entre l’âge de survenue de la puberté et l’exposition in utero à plusieurs substances suspectées d’altérer l’équilibre hormonal. Conduits par Kim Harley et Brenda Eskenazi, de l’université de Californie, à Berkeley, les chercheurs se sont intéressés à des substances présentes dans des désodorisants d’intérieur ou des produits d’hygiène et de soins corporels, ou à leurs molécules de dégradation. Au total, trois des neuf molécules recherchées présentent les associations les plus marquées avec l’irruption de la puberté des petites filles : le phthalate de monoéthyle (MEP), le triclosan (TCS) et le 2,4-dichlorophénol (2,4-DCP). Le premier est principalement le produit de la dégradation d’un phtalate souvent utilisé dans les produits parfumés, les plastiques souples, etc. Le second est un antimicrobien et antifongique présent dans certains savons, détergents ou dentifrices, et le troisième, un produit de dégradation du second. Pour parvenir à leurs résultats, les chercheurs ont utilisé les données d’une cohorte américaine de 340 couples mère-enfant, recrutés au début des années 2000, dite « cohorte Chamacos » (pour « Center for the Health Assessment of Mothers and Children of Salinas »). L’exposition des mères a été mesurée au cours de leur grossesse, et les enfants issus de ces grossesses ont été régulièrement examinés par des médecins jusqu’à leur puberté. Pour le MEP, un doublement de l’exposition de la mère est associé à une apparition de la pilosité pubienne chez la fille avancée de 1,3 mois en moyenne. Le doublement de l’exposition maternelle aux deux autres substances est pour sa part associé à une survenue des premières menstruations avancée d’un peu moins d’un mois. Eventuelle « causalité inversée » L’association mise en évidence peut sembler faible. Mais ce n’est pas le cas, les écarts d’exposition, au sein des femmes enrôlées dans l’étude, étant considérables. S’agissant du MEP, les expositions varient d’un facteur 10 entre les moins exposées et les plus exposées. Pour le 2,4-DCP, l’écart varie d’un facteur 20, et il est plus important encore pour le TCS… De telles différences font varier significativement l’âge de la puberté chez les filles.
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/04/des-substances-utilisees-en-cosmetique-associees-a-une-puberte-plus-precoce_5392391_3244.html
04/12/2018
Une étude met en évidence un lien entre l’avancée des premières règles et l’exposition in utero à des molécules utilisées en cosmétique.
economie
La malédiction des impôts européens
Colcanopa Dans la nuit du lundi 3 au mardi 4 décembre, après des mois de tractations et de tergiversations côté allemand, Paris et Berlin se sont entendus sur l’adoption rapide d’une taxe digitale, « dans tous les cas avant mars 2019 », selon leur « déclaration commune », rédigée quelques heures avant une réunion décisive, mardi, des ministres des finances de l’Union européenne (UE). Ce projet de taxe digitale est très éloigné de la copie de départ, cette « taxe GAFA » ardemment défendue par la présidence Macron au nom d’une plus grande équité, les mastodontes du Web étant devenus des champions de l’évasion fiscale. La Commission européenne, qui avait pris le relais de Paris avec une proposition de directive en mars, suggérait de taxer à 3 % les revenus issus de la revente de données par les vendeurs en ligne, les plates-formes et les éditeurs de services. La nouvelle taxe digitale devrait s’appliquer à Google et à Facebook, mais elle épargnera Amazon et Apple Pour convaincre Olaf Scholz, son homologue, le ministre français de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, a dû accepter de restreindre le champ au seul commerce des données liées à la publicité en ligne. La chancellerie et les finances à Berlin redoutaient que Donald Trump prenne la taxe pour une provocation et veuille en retour taxer les voitures allemandes importées par les Etats-Unis. Lire aussi Comment la France tente de sauver la taxe numérique européenne La nouvelle taxe digitale devrait s’appliquer à Google et à Facebook, mais elle épargnera Amazon et Apple. Ses recettes seraient deux fois moindres que les 5 milliards d’euros annuels escomptés par Bruxelles. Le compromis franco-allemand vide en grande partie la taxe de sa substance, mais il devrait permettre à M. Le Maire, qui n’a pas ménagé sa peine pour le décrocher, d’éviter une rebuffade publique. Encore faut-il que ce compromis passe la barre des vingt-six autres pays membres de l’UE, ce qui n’avait rien d’évident ces derniers jours. Fin novembre à Bruxelles, quatre Etats avaient signifié leur opposition : l’Irlande, la Finlande, la Suède et le Danemark. Ambitions nettement revues à la baisse Si la taxe digitale échappait à la malédiction des impôts européens, ce serait une première. En effet, la plupart des idées émises par la Commission, ces dernières années, ont rapidement viré aux « taxes zombies ». Ainsi de la taxe sur les transactions financières (TTF). Proposée par la Commission en 2011, elle n’en finit plus de refaire surface, avant de redisparaître des agendas. Surprenant Paris, Olaf Scholz a décidé, l’été dernier, de la réactiver, en l’incluant dans la déclaration franco-allemande de Meseberg (Land de Brandebourg).
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/04/la-malediction-des-impots-europeens_5392385_3234.html
04/12/2018
Après des mois de tergiversations, Paris et Berlin sont parvenus à s’entendre sur une taxe digitale assez éloignée du projet français initial.
economie
« Le cobalt congolais sent le soufre »
Une usine de transformation du cobalt, à Lubumbashi, au Congo, en février. SAMIR TOUNSI / AFP La porcelaine de Sèvres doit beaucoup au cobalt, les batteries d’automobiles aussi. Avec l’essor programmé de la voiture électrique, pour laquelle les constructeurs mondiaux ont prévu d’investir près de 100 milliards de dollars (88 milliards d’euros), la demande est intense et les prix grimpent. Ils ont doublé depuis deux ans. De quoi réjouir les producteurs de ce précieux métal. Ou plutôt le producteur. Car la singularité de ce minerai est d’être produit en grande majorité dans un seul pays, la République démocratique du Congo (RDC). Celui-ci représente plus de 60 % de la production mondiale et pourrait, selon certains analystes, en fournir les trois quarts en 2021. La décision de la RDC de classer ce métal parmi les « substances minérales stratégiques », au même titre que le germanium et la colombo tantalite, plus discrets, mais essentiels dans les objets électroniques comme les smartphones, est des plus logiques. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Cobalt : du sang sur les batteries Le gouvernement a profité de la révision de son code minier et de ce nouveau classement pour multiplier par trois les royalties qu’il impose aux entrepreneurs miniers. Il percevra désormais 10 % du prix de vente. Il a également décidé de mettre fin aux contrats de long terme avec les grandes compagnies minières et de tous les renégocier. Selon le président de la compagnie nationale Gécamines, Albert Yuma, il s’agit de faire participer davantage les géants britanniques (Glencore) ou chinois (Molybdenum) au développement du pays. Il les accuse notamment de réduire artificiellement leurs bénéfices pour échapper à l’impôt. L’Occident cherche à développer des batteries sans cobalt Article réservé à nos abonnés Lire aussi Matières premières : les bleus du cobalt Le plus vaste pays d’Afrique subsaharienne a certainement raison de chercher à accroître ses revenus tirés de l’exploitation de son exceptionnel sous-sol. Le cobalt est un sous-produit du cuivre et du nickel, qu’il produit donc également en masse. Mais des doutes subsistent sur l’utilisation de ces ressources par les autorités. Selon certaines organisations non gouvernementales, comme le Carter Center américain ou le Global Witness britannique, des centaines de millions de dollars versées par les compagnies minières à Gécamines ont mystérieusement disparu ces dernières années. Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’envolée du cours du cobalt accentuée par la politique congolaise Un argent qui sert parfois à alimenter des conflits ou à enrichir des proches du pouvoir. Albert Yuma dément ces allégations, mais le cobalt congolais sent le soufre. La RDC est l’un des pays les plus pauvres du monde, et l’on sait que près du quart de la production est extrait artisanalement par des travailleurs dont certains s’insinuent la nuit sur les sites, creusent leur trou et repartent à l’aube vendre leur production à des négociants chinois.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/04/le-cobalt-congolais-sent-le-soufre_5392384_3234.html
04/12/2018
Le gouvernement, qui a révisé son code minier, veut accroître ses revenus tirés de l’exploitation de son sous-sol. Mais cet argent sert parfois à alimenter des conflits ou à enrichir des proches du pouvoir, explique Philippe Escande, éditorialiste économique au « Monde ».
international
Italie : arrestation d’un nouveau chef de la mafia sicilienne
Il n’aura pas eu le temps d’être officiellement intronisé à la tête de la mafia sicilienne. Settimo Mineo, un bijoutier de 80 ans, a été arrêté, mardi 4 décembre, lors d’une vaste opération policière en Sicile. Son arrestation ainsi que celle d’au moins 45 autres personnes a été effectuée juste avant son intronisation en bonne et due forme prévue lors d’une réunion spéciale de la mafia sicilienne. Les personnes arrêtées sont accusées, entre autres, d’association de malfaiteurs de type mafieux, d’extorsion, port d’armes, incendies, et cette opération est le fruit de quatre enquêtes pénales distinctes. « C’est un des coups les plus durs infligés par l’Etat à la mafia », s’est félicité Luigi Di Maio, vice-premier ministre et chef du Mouvement 5 Etoiles (M5S, antisystème). « Tonton Settimo », comme il était surnommé, avait été désigné en mai chef de la « coupole » de Palerme, c’est-à-dire chef suprême des familles mafieuses de la province de Palerme, en remplacement de Toto Riina, l’ancien chef historique de toute la mafia sicilienne, mort l’année dernière en prison. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Jusqu’à son dernier souffle, Salvatore « Toto » Riina a régné sur la mafia sicilienne
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/04/italie-arrestation-d-un-nouveau-chef-de-la-mafia-sicilienne_5392369_3210.html
04/12/2018
Settimo Mineo, un bijoutier de 80 ans, a été arrêté avec une quarantaine d’autres suspects mardi lors d’une vaste opération policière en Sicile.
afrique
Le président gabonais Ali Bongo poursuit sa convalescence au Maroc
Le roi du Maroc Mohammed VI (à gauche) et le président gabonais Ali Bongo, à l’hôpital militaire de Rabat, le 3 décembre 2018. HANDOUT / AFP Le roi du Maroc, Mohammed VI, a rendu visite lundi 3 novembre au président gabonais Ali Bongo Ondimba qui poursuit sa convalescence depuis le 29 novembre à l’hôpital militaire de Rabat, a appris l’AFP de source officielle marocaine. Au cours de cette visite, le roi s’est réjoui de l’état de santé du président Bongo qui évolue favorablement de jour en jour, a ajouté cette source. « A cette occasion », le président gabonais « a exprimé ses remerciements les plus fraternels à l’endroit de Sa Majesté le roi pour l’accueil chaleureux que celui-ci lui a réservé et l’attention qu’il lui a portée depuis son arrivée dans la capitale marocaine », indique lundi soir un communiqué de la présidence gabonaise. « Les deux dirigeants ont également échangé sur plusieurs sujets d’intérêt commun », ajoute le communiqué. Lire aussi Ali Bongo absent, le Gabon évite la vacance du pouvoir Une photo et une courte vidéo de la rencontre ont été publiées, montrant les deux dirigeants assis dans des fauteuils installés autour d’une petite table sur laquelle sont posés deux verres et surmontée des drapeaux respectifs de leurs pays. Vêtu d’un turban et d’une djellaba à rayures grises, le président Bongo y apparaît légèrement souriant et regardant le roi. Une communication officielle parcimonieuse Ces publications devrait faire taire les rumeurs persistantes et les fausses informations concernant l’état de santé du président Bongo, certaines allant jusqu’à le considérer comme mort. Le président gabonais était arrivé jeudi 29 novembre à Rabat pour y poursuivre sa convalescence en milieu hospitalier, après plus d’un mois passé dans un hôpital de Ryad pour une maladie qui reste officiellement inconnu. La communication officielle sur la santé d’Ali Bongo est restée pour le moins parcimonieuse à Libreville, avec seulement deux interventions du porte-parole de la présidence, Ike Ngouoni, en plus d’un mois. La première, le 28 octobre, pour annoncer son hospitalisation quatre jours auparavant en Arabie saoudite, à la suite d’un « malaise » provoqué par « une fatigue sévère », due à une « très forte activité » récente. La seconde, le 11 novembre, pour préciser qu’il était « dans une phase de recouvrement de la plénitude ses facultés physiques », après « un saignement justifiant une prise en charge médico-chirurgicale en secteur hautement spécialisé ». Une manière implicite de dire que son état était sérieux. Mais, à aucun moment la présidence n’a révélé quel était le mal dont souffrait le chef de l’Etat. Seules des sources non officielles ont évoqué un accident vasculaire cérébral (AVC).
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/04/au-maroc-premieres-images-du-president-gabonais-ali-bongo-en-convalescence_5392365_3212.html
04/12/2018
Le roi du Maroc a rendu visite au chef de l’Etat gabonais qui poursuit son rétablissement depuis le 29 novembre à l’hôpital militaire de Rabat.
sciences
Alerte sanitaire sur un produit utilisé pour la dialyse
Des centaines de personnes dialysées, peut-être plus, pourraient avoir perdu la vie prématurément. Les patients traités par un liquide de dialyse (ou dialysat) au citrate présenteraient une surmortalité de 40 % par rapport à ceux traités avec d’autres produits plus anciens à l’acétate ou à l’acide chlorhydrique (HCl). Cette surmortalité aurait essentiellement une origine cardio-vasculaire. Tel est le principal constat d’une étude rétrospective pilotée par le docteur Lucile Mercadal ­ (Inserm, CESP 1018 et hôpital Pitié-Salpêtrière) réalisée avec une équipe de néphrologues et de biostatisticiens français (REIN-Agence de la biomédecine, ABM), à partir des données du registre national REIN. Elle a été présentée le ­3 octobre lors du congrès de la Société francophone de néphrologie, dialyse et transplantation (SFNDT) ; elle n’est pas encore publiée. En France, environ 47 000 patients souffrant d’insuffisance rénale terminale sont traités par dialyse. Ils entrent en dialyse à l’âge moyen de 70 ans, avec souvent d’autres maladies associées, et leur survie médiane est d’environ cinq ans. Plus de 20 % des dialysés sont traités avec un dialysat au citrate. Le principe de précaution « Les centres qui ont utilisé le citrate ont une surmortalité, ceux qui ont utilisé le HCl ont une baisse de mortalité », précise le docteur Mercadal. Elle a croisé les données du registre (25 629 patients dialysés depuis au moins trois mois) avec les chiffres de vente de dialysat, par centre, fournis par les industriels. Elle a observé l’évolution des décès en fonction du type de dialysat utilisé. Les données concernant le dialysat au citrate l’ont conduite à stopper l’utilisation de ce produit début novembre pour le centre de dialyse de la Pitié-Salpêtrière. Il devrait, selon cette experte, « être retiré du marché, au nom du principe de précaution, en attendant d’autres études ». Informée de cette étude par l’association de ­patients Renaloo fin novembre, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a ­convoqué une réunion d’urgence mercredi ­ 5 décembre. « L’importance des résultats présentés amène l’ANSM à réunir l’ensemble des parties prenantes », indique l’agence dans un courriel. Comment expliquer de tels chiffres ? Pour quelles raisons ni l’ABM, qui gère le registre REIN, ni la SFNDT ni les industriels ni les médecins n’ont-ils pas prévenu l’ANSM à la suite du congrès du 3 octobre ? Quand on interroge les deux principaux fabricants de ces dialysats sur la dangerosité du ­ citrate, la société Fresenius nous indique que « l’évaluation est encore en cours » et dit ne pouvoir donner plus d’informations ; Baxter nous ­répond « ne pas avoir constaté de tendance anormale concernant le citrate » et « être à disposition des autorités de santé ».
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/04/alerte-sanitaire-sur-un-produit-utilise-pour-la-dialyse_5392362_1650684.html
04/12/2018
Une étude montre une surmortalité de 40 % pour des personnes traitées avec un liquide de dialyse contenant du citrate.
disparitions
Mort de Michel Lucas, ancien dirigeant historique du Crédit mutuel
L’ancien dirigeant du Crédit mutuel Michel Lucas en mars 2016. ERIC PIERMONT / AFP Le Crédit mutuel a annoncé, mardi 4 décembre, la mort de son ancien dirigeant Michel Lucas à l’âge de 79 ans. En mars 2016, après 40 ans de carrière au sein du groupe, il avait cédé sa place de président de la Confédération nationale du Crédit mutuel (CNCM) à Nicolas Théry. « En 1971, quand je suis entré au Crédit mutuel, nous étions 861 salariés sur toute la France. Nous sommes 78 800 », savourait Michel Lucas à l’époque. Avec Michel Lucas disparaît le grand architecte du @CreditMutuel. S’appuyant sur les valeurs mutualistes et la forc… https://t.co/uCU6LqvxeA — CreditMutuel (@Crédit Mutuel) Né le 4 mai 1939 à Lorient, dans le Morbihan, Michel Lucas avait fait des études d’ingénieur au sein de l’institut industriel du Nord et était membre diplômé de l’Institut des actuaires français. « Requin blanc » Au début des années 1970, c’est Théo Braun, patron du Crédit mutuel d’Alsace, qui avait repéré l’ingénieur diplômé de Centrale Lille chez Steria, une jeune SSII. Le futur ministre de Michel Rocard avait convaincu le trentenaire de le rejoindre à Strasbourg, lui confiant la « mécanographie », l’ancêtre de l’informatique. Il avait notamment dirigé le CM11, entité basée à Strasbourg regroupant onze des 18 fédérations régionales du Crédit mutuel, avant de prendre la tête de la CNCM, l’organe central du groupe mutualiste. M. Lucas avait notamment été l’artisan à la fin des années 1990 du rachat du réseau CIC par la fédération de l’Est qu’il dirigeait. Il avait aussi dirigé le groupe de presse régionale Ebra (Le Progrès, Le Dauphiné Libéré, L’Est Républicain, Les Dernières Nouvelles d’Alsace, etc.). Il s’était forgé une réputation de patron aussi redouté que respecté au sein du monde des affaires et tout particulièrement au sein du milieu bancaire. Surnommé le « requin blanc » en raison de sa chevelure blanche comme de son aptitude à croquer ses proies au moment où ses concurrents s’y attendent le moins, M. Lucas était intraitable en affaires et peu doué pour les mondanités.
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2018/12/04/mort-de-michel-lucas-ancien-dirigeant-historique-du-credit-mutuel_5392358_3382.html
04/12/2018
Le groupe bancaire mutualiste a annoncé, mardi, la mort à 79 ans de Michel Lucas, qui s’était retiré en 2016, après plus de quarante ans de carrière au sein du groupe.
cinema
Roberto Minervini : « Nous sommes assis sur une poudrière »
« What You Gonna Do When the World’s on Fire ? », documentaire de Roberto Minervini. SHELAC Le documentaire What You Gonna Do When the World’s on Fire ? est né d’un changement de cap. Parti dans les quartiers pauvres de La Nouvelle-Orléans, avec pour projet de remonter aux sources de la culture afro-américaine, Roberto Minervini explique comment il s’est éloigné de ses intentions initiales au profit d’un autre sujet, le racisme et la violence auxquels sont confrontés les Noirs dans le sud des Etats-Unis. Comment votre projet initial a-t-il glissé vers celui du film ? Roberto Minervini : Désireux de creuser les origines de la musique afro-américaine, j’ai commencé, en 2015, un travail de recherche qui m’a mené dans les ghettos de La Nouvelle-Orléans. C’est à cette occasion que j’ai rencontré Judy Hill, le personnage principal du film. Elle m’a ouvert la porte sur un monde, en principe inaccessible, et conduit vers des personnes dont les témoignages m’ont touché. Cette parole a conduit mon film, elle a imposé son univers. J’ai compris que les Noirs américains avaient besoin d’espace pour parler, et j’ai décidé que ce film devait être un film de dialogue. La musique, elle, est demeurée présente, dans la bande-son, comme protagoniste invisible. Comment parvenez-vous à établir un lien avec ces personnes méfiantes face à une caméra ? Avant le tournage, le travail consiste précisément à fréquenter ces personnes, à créer avec elles un dialogue informel qui n’a pas pour but d’être dans le film. Il est primordial pour moi de créer un rapport d’intimité, de confiance et d’affection. S’il n’existe pas, je ne peux rien envisager. Ensuite, pour le tournage, je procède avec une petite équipe, à qui je confie une histoire très grande. Comment s’est construite l’esthétique du film ? J’avance par petits pas. En 2016, je n’ai tourné que quelques minutes par jour, sans écrire ni diriger, seulement pour observer et introduire en douceur la présence de la caméra. Puis, en 2017, j’ai tourné trois mois d’affilée. Mes tournages s’inscrivent dans l’immédiateté, en fonction de l’endroit et de la lumière. Cela me laisse peu de possibilités. Mais je préfère ne pas tourner si ces conditions ne sont pas remplies. Je considère comme un devoir de rendre l’élégance et la solennité du moment, de restituer aux personnes leur dignité. Cela ne relève pas de l’écriture, mais d’autre chose : une façon très sélective de présenter la réalité. Est-ce dans cette optique que vous avez choisi le noir et blanc ? La couleur aurait accentué de façon préjudiciable les changements de lieu et de milieu. Elle aurait probablement aussi créé une hiérarchie entre les différents groupes, ceux habillés en noir auraient paru très austères et moins séduisants que les Indiens de Mardi gras par exemple. Le noir et blanc crée aussi une absence de temporalité dont j’avais besoin pour raconter une histoire qui dure depuis des siècles.
https://www.lemonde.fr/cinema/article/2018/12/04/roberto-minervini-dans-le-sud-nous-sommes-assis-sur-une-poudriere_5392354_3476.html
04/12/2018
Avec son documentaire « What You Gonna Do When the World’s on Fire? », le réalisateur veut témoigner de la violence et du racisme dans le sud des Etats-Unis.
cinema
A Moscou, le procès kafkaïen du réalisateur Kirill Serebrennikov
Le réalisateur russe Kirill Serebrennikov à Moscou, le 3 décembre 2018. Pavel Golovkin / AP Cinquième semaine. Chaque jour ou presque, le metteur en scène Kirill Serebrennikov s’assoit sur le même banc, au 4e étage du tribunal Mechtchanski de Moscou où naguère, avant que ce dernier ne soit refait à neuf, l’ex-oligarque Mikhaïl Khodorkovski fut jugé. Petit bonnet noir sur la tête, sweat assorti et baskets bleues d’où surgissent des chaussettes vertes, le réalisateur reste ainsi, immobile et stoïque pendant de longues heures, se contentant parfois de tourner un regard interrogatif vers une salle d’audience de plus en plus dépeuplée à mesure que le temps s’écoule. Son procès public, qui s’est ouvert le 7 novembre, pourrait encore durer des mois. La sortie en France, sur les écrans de cinéma, de Leto (« l’été ») est étroitement associée à cette scène. C’est pendant le tournage de ce film, consacré aux débuts du rock underground en Union soviétique, avant la perestroïka, que Kirill Serebrennikov a été arrêté en août 2017. Son montage sera achevé à distance. Sa présentation en compétition au Festival de Cannes, en mai, se fera par procuration avec ces quelques mots lus en son nom : « J’ai fait ce film, à la fois pour et à propos d’une génération qui considère la liberté comme un choix personnel et le seul choix possible. » Lire la critique du film : « Leto » : par la grâce du rock, en Union soviétique Leto, c’est un peu le journal d’un prisonnier : depuis dix-huit mois, le réalisateur est en effet assigné à résidence sous surveillance, accusé d’avoir détourné 133 millions de roubles (environ 1,7 million d’euros) de subventions publiques pour des spectacles montés par sa troupe théâtrale, 7e Studio, entre 2011 et 2014. « Je n’ai jamais rien volé », clame-t-il. Enfant terrible de la scène russe Pour ses défenseurs et partisans, l’enfant terrible de la scène russe, qui dirige également le Centre Gogol, théâtre moderne réputé à Moscou, paie la montée en puissance du conservatisme dans un pays où l’art contemporain est de plus en plus soumis aux pressions. Kirill Serebrennikov, pourtant, ne lâche rien. Confiné dans son petit appartement moscovite, soumis à l’interdiction de communiquer avec quiconque, autre que son avocat, sans accès à Internet ni au téléphone, il a poursuivi sans relâche son travail. Le 4 novembre, à Zurich, la première de l’opéra Cosi fan tutte, de Mozart, mis en scène par ses soins, a bien eu lieu. Pour y parvenir, c’est un véritable pont virtuel qui s’est mis en place. Pendant six semaines, le danseur Evgueni Koulaguine a joué le rôle de son assistant, en dirigeant à sa place les répétitions, toutes filmées. Ce dernier envoyait ensuite les vidéos par Internet à l’avocat de Kirill Serebrennikov, seule courroie de transmission possible, qui les enregistrait à son tour sur une clé USB, avant de les transmettre à son client. Par le même chemin, le metteur en scène faisait part de ses observations détaillées et de ses consignes. Près de quarante-six vidéos ont ainsi transité par ce circuit hors norme.
https://www.lemonde.fr/cinema/article/2018/12/04/a-moscou-le-proces-kafkaien-du-realisateur-kirill-serebrennikov_5392343_3476.html
04/12/2018
Assigné en résidence surveillée depuis dix-huit mois, le metteur en scène poursuit son travail artistique par le truchement de son avocat.
pixels
Tumblr va interdire les publications de contenus sexuels
La plate-forme Tumblr a annoncé, lundi 3 décembre, qu’elle allait bannir de ses pages la plupart des contenus sexuels, après avoir vu le mois dernier son application retirée de l’App Store d’Apple pour avoir hébergé de la pornographie infantile. Cette nouvelle politique sera effective à compter du 17 décembre, afin de laisser aux utilisateurs publiant du contenu pour adultes sur Tumblr l’opportunité de le migrer ailleurs, selon le patron de Tumblr Jeff D’Onofrio. « Internet ne manque pas de sites proposant du contenu pour adultes », écrit ce dernier dans un article de blog. « Nous leur laisserons cela et nous efforcerons à créer l’environnement le plus accueillant possible pour notre communauté », précise le texte. La société new-yorkaise, rachetée en mai 2013 par Yahoo! pour plus d’un milliard de dollars, filtre normalement automatiquement ce qui est publié sur sa plate-forme. Mais du contenu pédopornographique, normalement interdit sur Tumblr, a récemment échappé à ce contrôle. « Publier quoi que ce soit de préjudiciable envers des mineurs, dont de la pornographie infantile, est abominable et n’a pas de place dans notre communauté », souligne M. D’Onofrio. « Nous avons toujours eu et aurons toujours une politique de tolérance zéro pour ce type de contenu. » Tumblr avait déjà été bloquée au printemps en raison de contenu à caractère pornographique en Indonésie, pays musulman le plus peuplé au monde, qui fait la chasse aux contenus jugés obscènes. La plate-forme, qui permet à ses utilisateurs de publier textes, images et vidéos, abrite aujourd’hui quelque 417 millions de blogs.
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/12/04/tumbr-va-interdire-les-publications-de-contenus-sexuels_5392330_4408996.html
04/12/2018
La plate-forme de blog appartenant à Yahoo! avait été déréférencé de l’Apple Store en novembre, en raison de la présence de fichiers pédopornographiques.
economie
Accord des ministres des finances de l’UE sur la réforme de la zone euro
Les ministres des finances de l’Union européenne (UE) sont parvenus à un accord, mardi 4 décembre, sur une réforme de la zone euro pour mieux faire face aux prochaines crises financières. L’accord conclu entre les 27 ministres de l’UE – sans le Royaume-Uni pour cause de Brexit – a pour objectif de doter les autorités européennes d’une boîte à outils plus efficace en cas de choc majeur pour l’économie européenne. Ces propositions renforcent, certes, le système financier européen mais n’incluent aucune des grandes visions évoquées par le passé telles qu’un ministre des finances de la zone euro ou une sorte de FMI européen. De même, sur un budget spécifique de la zone euro, l’une des idées-phares d’Emmanuel Macron, les discussions n’ont pas autant progressé que l’aurait souhaité Paris. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Zone euro : Paris et Berlin précisent leur projet d’embryon de budget Les réformes, décidées après dix-huit heures de négociations dans la capitale belge, doivent encore être approuvées par les chefs d’Etat et de gouvernement lors d’un sommet en fin de semaine prochaine à Bruxelles. « Une étape importante » « Nous avons un bon résultat. La réforme de la zone euro avance à pas décisifs. Merci à tous ceux qui ont aidé », s’est félicité le ministre allemand des finances, Olaf Scholz. « Nous avons franchi une étape importante cette nuit, qui renforcera considérablement la zone euro », a estimé, de son côté, le Français Bruno Le Maire. Les ministres européens discutaient depuis des mois de la proposition française visant à créer une sorte de capacité budgétaire pour les pays ayant adopté la monnaie unique, qui aurait pu être utilisée en cas de crise ou de choc économique grave. M. Macron avait fait de l’idée d’un budget de la zone euro une partie intégrante de sa vision pour relancer l’UE après la crise de la dette, le choc du Brexit et la montée des populistes. Mais les 27 ministres se sont mis d’accord sur une version beaucoup plus édulcorée de son idée, la liant strictement au renforcement des réformes soutenues par l’UE, sans en faire une aide en cas de ralentissement économique inattendu. Les Pays-Bas se sont sans surprise montrés les plus réticents face à cette idée de budget, entraînant dans leur sillage un certain nombre de pays du nord de l’Europe – souvent qualifiés de « ligue hanséatique ».
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/04/accord-des-ministres-des-finances-de-l-ue-sur-la-reforme-de-la-zone-euro_5392323_3234.html
04/12/2018
L’accord conclu entre les 27 ministres de l’UE, sans le Royaume-Uni, a pour but de doter les autorités européennes d’une boîte à outils plus efficace en cas de choc majeur pour l’économie européenne.
police-justice
Les « gilets jaunes » en comparution immédiate : « Les bouteilles d’essence, c’était pour faire le malin devant les copains »
Des comparutions immédiates ont eu lieu lundi 3 décembre au tribunal de grande instance de Paris à la suite des violences du samedi 1er décembre. Laurence Geai pour "Le Monde" Il est minuit passé de quelques minutes et, dans le box de la salle d’audience 6-05 du tribunal de grande instance de Paris, l’un des six prévenus reste prostré sur le banc, la tête enfouie dans ses mains. Le tribunal vient de lui annoncer sa condamnation à trois mois ferme avec mandat de dépôt, il part donc immédiatement en prison. Il a 21 ans, vit dans une bourgade proche de Nevers et travaille comme intérimaire dans une usine de métallurgie. Il a été interpellé samedi 1er décembre, en fin de matinée, boulevard Haussmann, près des grands magasins. Dans son sac, les policiers ont trouvé deux paires de lunettes de piscine, sept masques de protection, un masque de plongée, un casque de ski, des genouillères, des protège-tibias, une protection dorsale, un pistolet à gaz, un poing américain, deux matraques télescopiques, des bouteilles en verre et d’autres en plastique contenant deux litres d’essence, des chiffons imbibés et… un gilet jaune. « On a vraiment l’impression que vous êtes venu pour en découdre », observe la présidente, Anne Wyon. Il lève vers elle un long visage blême, un regard terrorisé. « J’sais pas si j’aurais été capable. Les bouteilles d’essence et tout, c’était pour faire le malin devant les copains », répond-il. « Là, vous parlez d’une toute petite voix, mais au téléphone, vous vous réjouissiez beaucoup », réplique-t-elle. Sa messagerie est en effet bavarde. Les policiers ont consigné les échanges qu’il a eus avec son groupe sur l’application WhatsApp. « Un pote militaire m’a dit, le feu c’est mieux », « on est bien équipé [il dressait la liste] mais pour les cocktails, j’hésite ». Entre eux, ils réglaient les derniers détails de leur venue à Paris. « Y’en a vingt qui montent et on rejoint les black blocs », lui dit un de ses interlocuteurs. Lui a pris le train de 6 heures samedi à Nevers. « Faut bouger son cul maintenant, y’en a marre », a-t-il écrit. Soixante-dix prévenus jugés Au même moment, dans la chambre voisine présidée par Isabelle Prevost-Desprez, un électricien de 23 ans est condamné à dix mois de prison avec mandat de dépôt. Venu manifester de Saincaize-Meauce dans la Nièvre, il nie les accusations portées par la police. Il ronge ses ongles en affirmant que la pince, les boulons et les morceaux de bitume retrouvés dans son sac à dos lors de la fouille qui a suivi son interpellation avenue de Friedland à 15 h 15, « ce n’est pas à moi ».
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/04/comparutions-immediates-de-gilets-jaunes-mais-comment-ca-se-fait-qu-on-n-a-pas-les-casseurs_5392318_1653578.html
04/12/2018
Soixante-dix prévenus ont été jugés, lundi, à Paris, après les interpellations en marge de la manifestation du 1er décembre. Dix-huit peines de prison ferme ont été prononcées.
idees
« L’injustice profonde du système est ce qui fait la puissance du mouvement des “gilets jaunes” »
Le président Emmanuel Macron rencontre des pompiers de Paris, au lendemain des manifestations du 1er décembre, dans la capitale française. JULIEN MUGUET POUR LE MONDE Tribune. Depuis un mois maintenant, se joue une partie sur tout le territoire français qui a surpris le pouvoir et qui était pourtant prévisible. La Ve République donne au président des prérogatives inégalées parmi les grandes démocraties, y compris par rapport aux Etats-Unis où le président est élu pour un mandat plus court, plus contrôlé par un Parlement qui est renouvelé à mi-mandat. Cette caractéristique s’est renforcée depuis 1962 et l’élection du président de la République française au suffrage universel, et depuis 2001 et la création du quinquennat avec inversion du calendrier électoral qui a fait succéder l’élection législative à l’élection présidentielle et coïncider leur durée. Emmanuel Macron a en outre fait le choix d’un exercice vertical du pouvoir : les députés de la majorité et le gouvernement dans son ensemble se tiennent étroitement aux directives de l’Elysée, et ceux qui pourraient avoir des velléités de faire valoir leur propre voix sont écartés ou partent d’eux-mêmes avec fracas. Le président de la République a aussi distillé durant les dix-huit derniers mois un certain nombre de phrases malheureuses qui laissent à penser qu’il conçoit un écart très important entre lui et les autres citoyens, incapables d’aller traverser une rue pour trouver un emploi, de gagner assez d’argent pour se payer un costume ou bénéficiant des « dingues » largesses de l’Etat-providence. Le président Macron a totalement tracé un trait sur les conditions dans lesquelles il a recueilli les suffrages Le président Macron a surtout totalement tracé un trait sur les conditions dans lesquelles il a recueilli les suffrages, ce que n’avait pas fait le seul président à avoir été choisi dans le même contexte, Jacques Chirac. Il s’arc-boute sur sa légitimité à appliquer le programme pour lequel il dit avoir été élu. Il est vrai qu’il a obtenu une large majorité à l’Assemblée lors des élections législatives de juin 2017 (28 % des voix au premier tour, 43 % au second, et 53 % des députés élus). Ce fut aussi le cas avec Jacques Chirac, dont le parti avait recueilli 33 % des suffrages au premier tour des élections législatives en 2002, 47 % au second et obtenu un député de plus que La République en marche. Mais le programme du candidat Macron n’a recueilli que 24 % des suffrages exprimés au premier tour de l’élection présidentielle (28 % pour Jacques Chirac en 2002), et c’est contre le spectre d’une arrivée au pouvoir de l’extrême droite qu’il a recueilli une large majorité au second. Ce vote n’était pas une onction démocratique et populaire pour mener une politique verticale et mécanique. C’était la manifestation du fait que la majorité des citoyens ne voulait pas du Front national pour diriger leur politique.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/04/l-injustice-profonde-du-systeme-est-ce-qui-fait-la-puissance-du-mouvement-des-gilets-jaunes_5392303_3232.html
04/12/2018
Après une série de réformes clivantes (ordonnances sur le travail, réforme du rail, suppression de l’ISF…), le pouvoir est mis en cause par des Français qui n’ont rien à perdre, estime, dans une tribune au « Monde », la philosophe Valérie Charolles.
idees
Edgar Morin : « Il manque une pensée directrice au mouvement des “ gilets jaunes ”»
Tribune. La jaunisse est le signe d’une crise de foie. Les « gilets jaunes » sont le signe d’une crise de foi. Crise de la foi dans l’Etat, dans les institutions, dans les partis, dans la démocratie, dans ce que les partis appellent le système tout en faisant partie du système. L’irruption soudaine de ce mouvement imprévu, son ampleur, ses désordres, puis les violences du samedi 1er décembre nous obligent à réviser les modes de penser prééminents sur notre société, sur sa civilisation, sur leurs carences et misères tant physiques que morales, sur notre République, sur notre présent, notre avenir et à repenser notre politique. La longue apathie de nos concitoyens devant les multiples restrictions et suppressions appelées réformes donnait l’illusion de l’acceptation ou de la résignation. Alors qu’une fois de plus un feu couvait dans le sous-sol d’un édifice qu’on croyait stable, et la taxe carbone a fait la brèche qui l’a déchaîné. Le caractère spontané du mouvement, son caractère inédit et sa diffusion par les réseaux sociaux ont fait sa réussite initiale. Le « gilet jaune » a soudain changé de fonction. Il est devenu étendard de révolte. Pas de responsable, pas de chef, pas de structure, pas d’idéologie, ce qui a permis de rassembler les mécontentements, déceptions, frustrations, colères diverses et hétérogènes, du retraité au cultivateur, du membre du Rassemblement national au jeune urbain insoumis. Handicap Mais cette force initiale est devenue un handicap au moment où il fallait annoncer sinon un programme du moins une orientation pour des réformes, et non des suppressions fiscales ou la démission du président. Certes des revendications multiples formulées à travers des voix diverses comportent des suggestions pertinentes mêlées à des idées farfelues. Mais il manque totalement une pensée directrice et une telle pensée conduirait à un éclatement entre les composantes hétérogènes d’un mouvement où les colères unies contre le pouvoir, sont en fait antagonistes entre elles. Donc tout ce qui a fait la réussite du mouvement risque de le conduire à un échec final. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « L’injustice profonde du système est ce qui fait la puissance du mouvement des “gilets jaunes” » Ce mouvement spontané est évidemment infrapolitique à sa source, mais son caractère déstructuré a suscité le parasitage des partis politiques d’opposition, en même temps que celui des casseurs de tous poils qui ont eu le temps de bien préparer leur agression le 1er décembre. Ce mouvement est aussi au départ supra politique car il fait appel à la morale et à la justice dans un pays où le pouvoir favorise les déjà favorisés et défavorise les déjà défavorisés.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/04/edgar-morin-il-manque-une-pensee-directrice-au-mouvement-des-gilets-jaunes_5392302_3232.html
04/12/2018
En s’opposant à la taxe carbone, le mouvement des « gilets jaunes » se montre aveugle à ce qui peut être leur salut : l’élaboration d’une politique écologique multiforme, estime le sociologue dans une tribune au « Monde ».
idees
Cahuzac et l’évasion fiscale en procès
Livre. Ce n’est pas tous les jours que l’on prend plaisir à rire de la richesse des autres. Et même à se marrer franchement de la rocambolesque, et non moins authentique, histoire du « malheureux » Cahuzac, condamné par la justice, pour fraude fiscale et blanchiment, le 8 décembre 2016, à trois ans de prison ferme et à cinq ans d’inéligibilité. En appel, le 15 mai 2018, le président de la 11e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris, Dominique Pauthe, énonçait la décision : quatre ans d’emprisonnement dont deux avec sursis, cinq ans d’inéligibilité, ainsi que 300 000 euros d’amende. Narré par Monique et Michel Pinçon-Charlot, véritables anthropologues de l’écosystème des fortunes, ce conte des temps modernes fait l’objet d’un magnifique album dessiné. Les traits, joliment travaillés par Etienne Lécroart, accompagnent finement la démonstration pédagogique des sociologues. Et, au-delà des tribulations de Jérôme Cahuzac, qui fut ministre du budget dans les gouvernements socialistes de Jean-Marc Ayrault, mais aussi conseiller général et député du Lot-et-Garonne, c’est bien tout le système de l’évasion fiscale qui nous est donné à comprendre. Au fil des chapitres qui en démontent l’ingénierie financière – à savourer tout particulièrement, l’humour ravageur d’Etienne Lécroart traitant de la « fraude en famille » –, le lecteur comprend parfaitement comment le scénario, improbable a priori, d’un ministre du budget devenu champion de l’évasion fiscale, a pu se réaliser. Comment aussi tout cela n’a pu avoir lieu sans que de nombreux responsables haut placés en aient été informés. La dissimulation fiscale, sport courant chez les grandes fortunes – « Qu’apprends-je, Charles-Edouard ? ! Nous n’avons rien en Suisse ? ! Pourvu que nul ne le sache » –, est radiographiée, les circuits d’évasion sont cartographiés, et l’affaire Cahuzac, qui sert ici de modèle pour une démonstration systémique, par nature opaque, devient lumineuse. Ludique et accessible L’artiste montreuillois, membre de l’Oubapo (Ouvroir de bande dessinée potentielle), auteur de nombreux albums drolatiques, avait déjà illustré l’enquête sociologique des Pinçon-Charlot consacrée à l’ouverture d’un centre d’hébergement pour personnes sans-abri dans le 16e arrondissement de Paris (Panique dans le 16e !, La Ville brûle, 2017). Ludique et accessible, la couverture dessinée d’un procès avait déjà donné lieu à des livres délectables, tel Le Procès Colonna, du regretté Tignous (avec Paganelli, Glénat, 2015) ou encore Le Procès Papon, de Riss (publié dans Charlie Hebdo en 2017) ; Maurice Papon fut reconnu coupable de « crime contre l’humanité », au terme d’un procès qui dura six mois en 1997.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/04/cahuzac-et-l-evasion-fiscale-en-proces_5392304_3232.html
04/12/2018
Anthropologues de l’écosystème des fortunes, Monique et Michel Pinçon-Charlot narrent un conte des temps modernes joliment illustré par Etienne Lécroart.
sciences
Orrorin : « L’idée du chaînon manquant est un mythe »
Claudine Cohen est philosophe et historienne des sciences, directrice d’études à l’EHESS, auteure de La Femme des origines (Belin-Herscher, 2003) Quelles sont les caractéristiques de la bipédie, critère essentiel de l’appartenance à la famille ­humaine, attribué à « Orrorin » ? La marche permanente et exclusive sur deux pieds implique un remodelage de l’architecture du corps entier. Le squelette s’adapte pour absorber les nouvelles contraintes. Le pied se fortifie et se creuse de plusieurs ­arches, formant la voûte plantaire. Le fémur se redresse et s’allonge. Le ­bassin, qui soutient à présent le tronc et les viscères, s’élargit. La colonne se cambre, forme quatre courbures et devient perpendiculaire au crâne. Le trou occipital, point de jonction du crâne et des vertèbres, se recentre. Conséquence de tout cela : le crâne « s’enroule », rendant possible le ­développement des aires frontales et une expansion du cerveau. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Mais où est donc passé « Orrorin », ce fossile disparu ? La bipédie change aussi les proportions du corps. Les membres supérieurs se raccourcissent, les mains se différencient des pieds et se spécialisent dans la préhension et la saisie. L’homme devient un « bimane ». Quelles furent les conséquences sociales de la bipédie sur les ­premiers homininés ? La bipédie, en libérant la main, rend possible la création d’outils et les premières formes de technologie. La bouche, libérée des nécessités de la préhension, est disponible pour le langage. Mais en remodelant le corps, la station bipède a sans doute profondément transformé la sexualité et la sociabilité des premiers au sein des groupes préhumains. L’œstrus, ou période d’ovulation, n’est plus perçu directement par des signes visuels olfactifs (fesses rouges, odeurs, vulve saillante…). Les organes génitaux des femelles sont désormais cachés à la vue des mâles, tandis que les zones érogènes se multiplient. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Paléontologie : dans le rift règne une « guerre des os » La sexualité des hommes, à la différence de celle des grands singes ­rythmée par des périodes de rut, tend à devenir permanente. Toutes ces transformations liées à la bipédie changent la nature du désir et les rapports entre les sexes. D’où, sans doute, la formation de familles et de groupes où s’instaurent de nouvelles règles de sociabilité et de parenté. Faut-il toujours considérer la bipédie comme le critère le plus important de l’appartenance à la « famille humaine » ? C’est en tout cas l’un des seuls, aux périodes les plus anciennes. L’anthropologue André Leroi-Gourhan disait que l’évolution humaine « a commencé par les pieds ». La réduction de la taille des dents, ainsi que l’accroissement du volume crânien sont aussi essentiels bien sûr, même si ce dernier critère est plus tardif.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/04/orrorin-l-idee-du-chainon-manquant-est-un-mythe_5392301_1650684.html
04/12/2018
Pour Claudine Cohen, historienne des sciences, la ­rareté et le morcellement des vestiges crée une part inévitable d’incertitude dans l’intégration ou non d’un ­fossile dans la lignée humaine.
idees
« “Gilets jaunes” : la violence, l’arme des bavards, est aussi celle des silencieux »
Au lendemain des manifestations des « gilets jaunes » du 1er décembre autour de la place de l’Etoile, à Paris. JULIEN MUGUET POUR "LE MONDE" Tribune. Les images qui ont alimenté pendant des heures les chaînes d’information continue ont transformé le regard que l’on porte sur le paysage urbain parisien. La Ville Lumière est devenue une ville de cris et de feu en quelques heures sans que l’on en comprenne vraiment la raison. Quels sont les moteurs de cette violence émeutière qui a accompagné la protestation nationale des « gilets jaunes », ce samedi 1er décembre ? On distinguera sept principales entrées explicatives de cette fureur, qui relèvent des facteurs classiques du surgissement de la violence mais qui, ce jour, se sont cumulés. C’est d’abord l’absence de structuration du groupe protestataire qui peut expliquer l’élan de radicalité. A l’inverse des syndicats traditionnels, disposant de services d’ordre souvent très professionnalisés, à l’image de celui de la CGT, les « gilets jaunes » occupent la rue sans encadrement, sur la seule directive de mots d’ordre proposés sur les réseaux sociaux, incapables de « tenir les rangs » et accessoirement de se protéger des casseurs extérieurs au mouvement. Cette logique de la désinstitutionalisation du mouvement, paradoxalement encouragée par un pouvoir favorisant la fluidité et la fin des structures rigides partisanes ou syndicales, est inévitablement propice aux désordres. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Edgar Morin : « Il manque une pensée directrice au mouvement des “ gilets jaunes ”» Peu préparés à la rue C’est ensuite la participation massive à ce mouvement de groupes sociaux peu habitués aux phénomènes manifestants, comme le confirmeront maints témoignages indiquant l’inexpérience de la rue de la part de citoyens en repli de formes conventionnelles de politisation. Peu préparés à la rue, les acteurs contestataires sont également impréparés aux logiques du maintien de l’ordre policier dont ils ne saisissent pas les codes. A l’image des manifestants de « La Manif pour tous » de 2013, issus des rangs catholiques, tout étonnés de se faire gazer et charger, nombre de « gilets jaunes » ont très mal vécu une pratique qui relève d’un maintien de l’ordre classique. Le sentiment de désespoir est largement partagé par des « gilets jaunes » effrayés par le déclassement possible et tétanisés par des fins de mois de plus en plus difficiles En écho aux grandes manifestations très violentes qui endeuillèrent l’Est lorrain et le monde de la sidérurgie à l’aube des années 1980, le sentiment de désespoir est ici largement partagé par des « gilets jaunes » effrayés par le déclassement possible et tétanisés par des fins de mois de plus en plus difficiles.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/04/gilets-jaunes-la-violence-l-arme-des-bavards-est-aussi-celle-des-silencieux_5392285_3232.html
04/12/2018
Absence d’encadrement du mouvement, inexpérience des manifestants, action de groupes extrémistes, forces de l’ordre dépassées… Un cumul de facteurs a produit les violentes exactions à Paris, le 1er décembre, explique Xavier Crettiez dans une tribune au « Monde ».
international
Sahel : l’opération « Barkhane » contrainte de s’adapter
Un soldat de l’opération « Barkhane » à Niamey, la capitale du Niger, en août. FRED MARIE / HANS LUCAS Que faire de « Barkhane » ? Plus de 4 500 soldats, un effort annuel de 700 millions d’euros, des opérations continues depuis quatre ans pour contenir tant bien que mal quelques centaines de djihadistes dans les immensités déshéritées des cinq pays formant le G5 Sahel : Paris s’interroge sur l’avenir de la principale opération extérieure française. L’année 2018 a été marquée par un enchaînement d’actions de force au Mali. Sur le plan militaire, 2019 devrait marquer une phase plus équilibrée, entre des missions de « réaction rapide » en soutien aux armées du G5, et un partenariat de terrain. L’Elysée souhaiterait alléger le dispositif. Dans la « stratégie Sahel » de la France, actualisée en octobre, les mots d’ordre sont « développement et consolidation », explique-t-on au quai d’Orsay, où on souhaite « accentuer la lutte contre les trafics » et mettre « une pression maximale », au moyen de sanctions, sur les chefs de groupes armés non respectueux de l’accord de paix malien, signé à Alger, en 2015. La France prévoit 2 milliards d’euros d’aide d’ici à 2022 pour le Sahel. Le centre du Mali au cœur des attentions Depuis février, « Barkhane » a concentré ses opérations dans la région du Liptako, à la frontière entre le Mali et le Niger. « Nous avons littéralement labouré une zone de 600 kilomètres sur 200 du Nord au Sud, a précisé, le 28 novembre, à l’Ecole militaire, à Paris, le général Bruno Guibert, en dressant le bilan de son mandat entre l’été 2017 et l’été 2018. Il y a un affaiblissement très net des groupes armés terroristes. » L’effort porté contre l’organisation Etat islamique dans le Grand Sahara, entre les villes d’Ansongo et de Ménaka, a permis de neutraliser les adjoints du leader Abou Walid Al-Sahraoui, qui « est en fuite, probablement retourné en Mauritanie ». Pour encourager les forces maliennes, « Barkhane » a construit un quartier à Indeliman, et il est question d’en bâtir un deuxième dans la zone. Plus au Nord, c’est la katiba 3 Alpha qui a été durement touchée mi-novembre. Mais le sujet de préoccupation est devenu le centre du Mali, les régions du Gourma, sous la boucle du Niger, et du Macina plus au sud, d’où l’Etat malien a disparu et où « Barkhane » n’intervenait pas jusqu’alors. L’émir touareg du Nord, Iyad Ag-Ghali, avec son Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), lié à Al-Qaida, y soutient les Peuls du Front de libération du Macina, menés par Amadou Koufa, vraisemblablement tué par les Français le 23 novembre.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/04/sahel-l-operation-barkhane-contrainte-de-s-adapter_5392282_3210.html
04/12/2018
Plus de 4 500 soldats, un effort annuel de 700 millions d’euros, des missions continues depuis quatre ans... Paris s’interroge sur l’avenir de la principale intervention extérieure française.
economie
La dernière houillère de la Ruhr ferme
La cokerie de Prosper-Haniel à Bottrop (Allemagne), le 20 novembre. PATRIK STOLLARZ / AFP Dans un claquement métallique, la porte de la cage s’est refermée. Quelques secondes plus tard, tout s’ébranle, le sol se dérobe. Nous plongeons dans les entrailles de la terre, serrés les uns contre les autres, à la lueur des lampes portées autour du cou. Le vent siffle, la descente semble interminable. Un autre bruit sourd, puis le silence. La cage s’est arrêtée. La grille s’ouvre. Nous sommes à 1 200 mètres sous terre, dans la fosse Prosper-Haniel, à Bottrop, dans la Ruhr (Rhénanie-du-Nord-Westphalie). C’est la toute dernière mine de houille d’Allemagne. Le 21 décembre, une équipe opérera une ultime descente avant que l’exploitation de ce type de charbon, emblématique de l’essor industriel allemand et européen, soit définitivement arrêtée outre-Rhin. Enormes foreuses A cet endroit, le boyau fait sept à dix mètres de haut. Il est consolidé par une épaisse charpente d’acier. C’est la septième voie de la fosse Prosper-Haniel, la plus profonde, la plus chère. Le système d’aération, qui doit alimenter en air frais les travailleurs dans toutes les galeries, produit un vent froid qui s’insinue entre les omoplates. Un ronronnement rappelle la pompe géante, qui aspire indéfiniment l’eau des profondeurs. Dans la pénombre, on distingue les glissières qui transportent les mineurs sur leurs chantiers. Plus de pic, plus de rivelaine, plus de berline à pousser. Les travailleurs du fond assistent les énormes foreuses qui creusent le minerai, poussé ensuite sur des tapis roulants. Un groupe de mineurs débouche du fond de la galerie. C’est la fin de l’équipe du matin, qui a commencé à 6 heures. Les camarades ont la gueule noire et portent le torse fier. « Glückauf ! », lancent-ils gaiement aux autres compagnons qui les rejoignent pour la remontée. C’est la salutation traditionnelle des mineurs. Les hommes se sourient, se donnent l’accolade. Tous portent la veste de coton blanc, la chemise rayée et le gros ceinturon de cuir des travailleurs du fond. Ici, règne une ambiance chaleureuse, très masculine. La solidarité est de mise : un individu seul dans ce dédale souterrain est perdu. Les mineurs entretiennent le souvenir des accidents mortels qui ont émaillé l’histoire minière. « Le charbon, on va l’importer » Klaus Pütz s’apprête à remonter. Il est descendu pour la première fois à 17 ans dans la fosse. Il en a aujourd’hui 49. Après une trentaine d’années de mine, il fera dans quelques jours son ultime descente. « C’est triste. Y a pas d’autre mot. Ici dans la Ruhr, un mineur, c’est encore un gars qu’on respecte. Il y a une tradition. Le mineur, il sait tout faire. Et puis en bas, on tient ensemble, chacun fait gaffe à l’autre. Ça, je ne le retrouverai jamais en haut », dit-il.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/04/la-derniere-houillere-de-la-ruhr-ferme_5392277_3234.html
04/12/2018
La cessation d’activité, le 21 décembre, de la mine Prosper-Haniel marque la fin de l’exploitation d’un charbon qui a profondément marqué l’industrie, l’histoire et la culture allemandes et européennes.
international
Le Danemark veut parquer sur une île les migrants délinquants en attente d’expulsion
L’îlot danois de Lindholm hébergera, à partir de 2021, les étrangers déboutés, délinquants, soupçonnés ou accusés d’un délit ou d’un crime, ou condamnés à l’expulsion, et ceux dont la demande d’asile a été rejetée. ERIK CHRISTENSEN / WIKICOMMONS Située à une centaine de kilomètres au sud de Copenhague, dans le golfe de Stege, l’île de Lindholm fait sept hectares. Depuis 1926, ce petit bout de terre isolé, parsemé de bâtiments blancs aux toits gris, abritait l’Institut vétérinaire de recherche sur les virus. A partir de 2021, l’îlot hébergera les étrangers condamnés à l’expulsion après avoir commis un crime, ainsi que les étrangers délinquants dont la demande d’asile a été rejetée et qui sont en attente d’un renvoi dans leur pays. La mesure, négociée dans le cadre de l’accord sur le budget entre le gouvernement libéral-conservateur et son allié parlementaire, le Parti populaire danois (Dansk Folkeparti, DF), formation populiste anti-immigration et eurosceptique, a été dévoilée le 30 novembre. Elle fait partie d’une série de propositions destinées à donner un nouveau tour de vis dans la politique d’accueil déjà très restrictive du Danemark, à moins de sept mois des prochaines élections législatives – prévues le 17 juin 2019 au plus tard. Les détails du projet restent à peaufiner. L’objectif officiel : répondre au mécontentement des riverains du centre de Kærshovedgard, réservé aux déboutés, dans la province du Jutland. Ils y avaient été transférés de Copenhague en 2016. Les habitants de la commune de Bording se plaignaient de l’insécurité croissante depuis leur arrivée. Sous surveillance policière Le nouveau centre, sur l’île de Lindholm, sera géré par l’administration pénitentiaire. Il devrait pouvoir accueillir 125 personnes et sera placé sous surveillance policière permanente. Toutefois, ce ne sera pas une prison, a tenu à préciser Kristian Jensen, le ministre des finances : « Un ferry leur permettra de faire des allers-retours sur l’île, mais il ne naviguera pas vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et les délinquants devront être au centre la nuit. Ainsi, nous pourrons mieux surveiller où ils se trouvent. » Pour Martin Henriksen, député du parti anti-immigration DF et président de la commission sur l’immigration et l’intégration au Parlement, la solution est toute trouvée, comme il l’expliquait le 30 novembre sur le plateau de la chaîne TV2 : « Ces gens-là n’ont pas beaucoup d’argent, donc plus les billets pour le ferry sont chers, plus il leur sera difficile de rejoindre la terre ferme. » L’île devra d’abord être vidée, puis décontaminée. Les chercheurs de l’Institut vétérinaire y menaient des travaux sur la rage canine et la peste porcine. « Ces activités cesseront naturellement sur l’île, quand les criminels condamnés à l’expulsion y emménageront », a tenu à préciser sur son blog Peter Kofod Poulsen, porte-parole de DF sur les questions de justice.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/04/le-danemark-veut-parquer-les-migrants-en-attente-d-expulsion-sur-une-ile_5392274_3210.html
04/12/2018
Le gouvernement libéral-conservateur et l’extrême droite se sont accordés sur la création d’un centre sur l’île de Lindholm.
sciences
Mais où est donc passé « Orrorin », ce fossile disparu ?
motage. Publié le 04 décembre 2018 à 06h20 - Mis à jour le 04 décembre 2018 à 20h23 Pendant 6 millions d’années, l’un de nos plus vieux ancêtres connus a reposé sous terre, survécu à quatre époques géologiques, à l’effondrement du grand rift, à quantité d’éruptions volcaniques, aux séismes et autres ­cataclysmes en tout genre. Aujourd’hui, le fossile d’Orrorin tugenensis est perdu. Probablement dissimulé au fond du coffre-fort d’une banque kényane. Peut-être détruit. Orrorin ? Le nom ne vous dit peut-être rien. En l’an 2000, le fossile, mis au jour dans les collines Tugen du rift kényan, faisait ­pourtant les gros titres de la presse mondiale. « L’homme des origines » (traduction d’« Orrorin » en langue locale), « ancêtre du millénaire » ou « premier des hominidés » pour les uns, « grand-papa » et même « chaînon manquant » pour les autres, enflamme la « planète paléo ». Jugez-en : ses membres supérieurs, humérus et phalanges, sont robustes, courbés, simiesques, rappelant les chimpanzés et autres primates arboricoles. Mais ses molaires, toutes petites, ont l’émail épais, évoquant un être plus évolué : microdonte, frugivore, peut-être même omnivore. Surtout, Orrorin a un fémur très allongé, bien renforcé. Pour ses découvreurs, les paléontologues Brigitte Senut et Martin Pickford, pas de doute : cet hominidé est bipède. Il appartient à la lignée humaine. L’histoire de l’homme est à réécrire La découverte est une bombe qui pulvérise les frontières de l’humanité, renvoyées en plein Miocène supérieur. Orrorin, décédé il y a quelque 6 millions d’années, est deux fois plus âgé que la juvénile « grand-mère » Lucy, et un million et demi d’années plus ancien que les autres ancêtres potentiels connus. Un millénaire s’ouvre et l’histoire de l’homme est à réécrire. Que fait donc, près de deux décennies plus tard, ce très vieil aïeul, si loin des musées et des universités, où il devrait être exposé et étudié ? Retour sur les « lieux du crime ». Direction la formation Lukeino, au cœur du rift kényan. Ici, à plus de 2 000 mètres et à hauteur d’équateur, trônent les collines Tugen : des buttes hostiles, broussailleuses, divinement érodées, entourées de sédiments remontant jusqu’à 16 millions ­d’années. Depuis des décennies, les archéologues s’en donnent à cœur joie. Ce massif, Martin Pickford le connaît bien pour l’avoir longtemps fouillé. Ce Britannique, né en 1943 et élevé au Kenya, trouve là, dans les années 1970, une intrigante molaire inférieure – plus tard attribuée à un Orrorin.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/04/mais-ou-est-donc-passe-orrorin-ce-fossile-disparu_5392271_1650684.html
04/12/2018
Cet hominidé vieux de 6 millions d’années, découvert au Kenya avait volé, en 2000, la vedette à d’autres prétendants au titre d’aïeul de l’humanité. Mais depuis des années, nul n’a plus accès à ces précieux ossements. Enquête sur un troublant escamotage.
afrique
Soudan du Sud : l’ONU réclame justice après des agressions sexuelles massives
En juin 2017, une Sud-soudanaise de 32 ans violée pendant plusieurs jours par des soldats dans un camp pour réfugiés en Ouganda. Ben Curtis / AP Les Nations unies (ONU) ont dénoncé lundi 3 décembre les viols ou agressions sexuelles commis récemment à l’encontre de plus d’une centaine de femmes ou filles au Soudan du Sud par des hommes armés, dont plusieurs en uniforme. « Au cours des douze derniers jours », près de 150 d’entre elles sont venues chercher de l’aide, détaille dans un communiqué conjoint trois responsables onusiens, Henrietta Fore (Unicef), Mark Lowcock (Affaires humanitaires) et Natalia Kanem (Fonds des Nations unies pour la population). « Nous appelons les autorités compétentes à dénoncer publiquement ces attaques et à s’assurer que leurs auteurs soient traduits en justice. Toutes les parties au conflit doivent s’acquitter de leurs obligations humanitaires internationales et cesser les attaques contre les civils. » « Le secrétaire général [des Nations unies, Antonio Guterres] condamne fermement les attaques sexuelles brutales », ont indiqué lundi soir ses services. « En dépit des engagements des dirigeants de ce pays à cesser les hostilités et à relancer le plan de paix, la situation sécuritaire pour les civils reste catastrophique, notamment pour les femmes et les enfants. » Evoquant le recours aux violences sexuelles comme « tactique de guerre » récurrente dans le pays, M. Guterres souligne que de tels « comportements prédateurs contre les plus vulnérables sont inacceptables ». « Le secrétaire général exhorte les dirigeants de toutes les parties au conflit (...) à s’opposer à l’impunité pour ces crimes via des enquêtes et des poursuites judiciaires pour leurs auteurs. » Des victimes âgées de moins de 10 ans Vendredi, l’ONG Médecins sans frontières (MSF) avait affirmé que 125 femmes et filles sud-soudanaises avaient été violées ou brutalisées en dix jours alors qu’elles cherchaient à s’approvisionner en nourriture fournie par des organisations humanitaires internationales autour de la ville de Bentiu, dans le nord du pays. Certaines des victimes sont âgées de moins de 10 ans, d’autres étaient enceintes ou avaient plus de 65 ans, avait précisé MSF. Lire aussi L’ONG Oxfam visée par de nouvelles accusations portant sur des viols au Soudan du Sud Le Soudan du Sud a sombré dans la guerre civile en décembre 2013 à Juba, lorsque le président Salva Kiir, un Dinka, a accusé Riek Machar, son ancien vice-président, de l’ethnie nuer, de fomenter un coup d’Etat. Le conflit, marqué par des atrocités à caractère ethnique et le recours au viol comme arme de guerre, a fait plus de 380 000 morts selon une étude récente, et poussé plus de quatre millions de Sud-soudanais, soit près d’un tiers de la population, à s’enfuir.
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/04/soudan-du-sud-l-onu-reclame-justice-apres-des-agressions-sexuelles-massives_5392267_3212.html
04/12/2018
Au cours des douze derniers jours, plus de 150 femmes et filles sont venus chercher de l’aide auprès avoir été violées ou brutalisées.
societe
Les « gilets jaunes » ciblent la suppression de l’ISF, « péché originel » de Macron
Le mouvement citoyen des "gilets jaunes" manifeste à dans le centre ville de Toulouse. Un homme a pancarte devant un nouveau magasin largement protégé du centre ville. Matthieu RONDEL pour Le Monde « Cela va leur coller à la peau ! » Le député communiste du Nord Fabien Roussel avait vu juste, à la suite du vote de l’Assemblée nationale, le 20 octobre 2017, qui avait acté la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour le transformer en un impôt sur la fortune immobilière (IFI). Un peu plus d’un an plus tard, le président de la République, Emmanuel Macron, traîne comme un boulet cette réforme fiscale dénoncée comme « un cadeau aux riches » par l’opposition. La gauche y voit même le « péché originel » de son quinquennat, à l’instar du « paquet fiscal » de Nicolas Sarkozy en 2007. Cette mesure hautement symbolique revient au premier plan à l’occasion de la crise des « gilets jaunes ». Depuis le début du mouvement, sa réintroduction immédiate fait partie des revendications des manifestants. « Paie ton ISF ! », clamaient plusieurs d’entre eux en descendant les Champs-Elysées, lors de la manifestation du 17 novembre. Un message également entonné par l’opposition. L’ensemble de la gauche – des communistes aux socialistes en passant par les écologistes et La France insoumise (LFI) – ainsi que Marine Le Pen (Rassemblement national, ex-FN) pressent l’exécutif de rétablir cet impôt sur les plus fortunés au nom de la « justice fiscale ». Une demande récurrente aussi lors des débats budgétaires au Parlement, ces dernières semaines. « Rendez l’ISF d’abord ! », a lancé le député (LFI) de la Somme François Ruffin à l’attention du gouvernement, le 13 novembre, à l’Assemblée nationale. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Derrière les « gilets jaunes » : François Ruffin, omniprésent mais insaisissable L’exécutif défend la suppression de l’ISF L’opposition exige le rétablissement de cet impôt pour envoyer un signal puissant aux « gilets jaunes », et trouver des recettes pour financer des mesures en faveur du pouvoir d’achat ou de la transition écologique. Avec la réforme de l’ISF, le manque à gagner pour l’Etat approche les 3 milliards d’euros par an. Le rendement attendu de l’IFI étant de 1,2 milliard d’euros cette année, avec 120 000 contribuables, contre 4,23 milliards d’euros en 2017, quand 350 000 foyers fiscaux y étaient assujettis. Mais, pour l’instant, l’exécutif n’entend pas revenir sur cette mesure visant à inciter les plus riches à investir dans l’économie réelle. Le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a écarté cette idée, lundi, sur France Inter. « L’ISF n’est pas un cadeau aux riches » : il doit « permettre aux entreprises d’avoir de l’argent réinvesti dans les territoires » au lieu de le voir « partir à l’étranger », a-t-il argumenté. « C’est exclu », confirme Matignon. « Ce n’est pas du tout envisagé », abonde un ministre, précisant que « d’autres pistes sont étudiées » pour répondre à la crise.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/04/les-gilets-jaunes-ciblent-la-suppression-de-l-isf-peche-originel-de-macron_5392241_3224.html
04/12/2018
L’exécutif n’entend pas revenir sur cette mesure, visant à inciter les plus riches à investir dans l’économie. Mais au sein de la majorité, l’heure est aux regrets.
culture
Jean-Louis Trintignant : « Je suis un raté qui a eu beaucoup de chance »
Jean-Louis Trintignant, à Paris, en février 2017. ED ALCOCK / M.Y.O.P. C’est au milieu d’un océan de vignes roussies par l’automne que l’on retrouve Jean-Louis Trintignant, sur son domaine viticole Rouge Garance, entre Avignon et Uzès. Le 11 décembre, jour de son 88e anniversaire, l’acteur remontera sur scène, au Théâtre de la Porte-Saint-Martin, à Paris, pour une série de représentations, jusqu’au 22 décembre, d’un nouveau spectacle poético-musical, en compagnie des poètes qu’il aime, du compositeur et accordéoniste Daniel Mille, et du musicien argentin Astor Piazzolla. Certains soirs, le comédien Denis Podalydès sera aussi de la partie. Entretien, à lire avec dans l’oreille la voix inimitable de Jean-Louis Trintignant. On revient sur la vie qui a fait de vous l’acteur que vous êtes… Oh vous savez… Ma vie, au fond, elle n’est pas brillante. Enfin, elle peut être considérée comme brillante, mais moi j’ai le sentiment d’être un raté. J’ai raté beaucoup de choses. Ce que je fais avec ces spectacles poétiques, par exemple, je voudrais que ça ait beaucoup d’audience, et ça n’en a pas tellement. Enfin, je suis un peu compliqué, aussi : si les salles ne sont pas totalement pleines, ça me déprime. La poésie n’intéresse pas énormément de gens. Elle fait peur, même si la poésie qui sert de matière à mes spectacles est à la fois de qualité et assez populaire. Ce que j’aime par-dessus tout, c’est Baudelaire, Rimbaud, Verlaine… Ce ne sont quand même pas des poètes emmerdants, non ? La poésie vous a accompagné très tôt ? Ah oui, et c’est de plus en plus le cas. Maintenant je n’arrive même plus trop à lire des romans, je trouve que ça traîne, que c’est trop long. Alors qu’avec la poésie, le plaisir est toujours là. Ces derniers mois, j’ai dû enregistrer deux mille fois Le Bateau ivre, de Rimbaud, que j’aimerais faire avec Denis Podalydès, un acteur que j’aime beaucoup. C’est peut-être le plus beau poème de la littérature française, mais ce n’est pas le plus évident, alors je travaille encore et encore. C’est plus difficile que Prévert, mais Prévert, c’est vachement bien, vous savez. On ne connaît de lui que quelques poèmes, toujours les mêmes. Comme beaucoup de gens, je le mésestimais un peu, et depuis j’ai lu beaucoup de textes que je ne connaissais pas et qui sont magnifiques. Tiens, je vous en dis un : « Des milliers et des milliers d’années/Ne sauraient suffire/Pour dire/La petite seconde d’éternité/Où tu m’as embrassé/Où je t’ai embrassée/Un matin dans la lumière de l’hiver/Au parc Montsouris à Paris/A Paris/Sur la terre/La terre qui est un astre » [Le Jardin]. Cela n’a pas l’air du tout, mais c’est beau, non ? Il en a écrit plein comme ça, dont un sur les sans-papiers, comme on ne disait pas encore à l’époque. J’ai sorti aussi des textes de Prévert plus longs, comme La Grasse Matinée, ou La Lessive, qui sont des sortes de poèmes-récits.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/04/jean-louis-trintignant-je-suis-un-rate-qui-a-eu-beaucoup-de-chance_5392238_3246.html
04/12/2018
A l’occasion de son retour sur scène, au Théâtre de la Porte-Saint-Martin à Paris, l’acteur revient sur sa vie et sa carrière.
idees
Chez Facebook, l’icône Sandberg décrédibilisée
Sheryl Sandberg, directrice des opérations et numéro deux de Facebook, lors de son audition devant la commission du renseignement du Sénat, le 5 septembre 2018. JIM WATSON / AFP Chronique « Transformations ». Il est toujours décevant de voir les femmes tomber dans les mêmes travers que leurs collègues masculins. Surtout une pionnière comme Sheryl Sandberg, la numéro deux de Facebook, version madone de l’extraterrestre Mark Zuckerberg et égérie féministe, dont l’aura s’est répandue bien au-delà de la Silicon Valley. La directrice des opérations (COO) de Facebook, 49 ans, salaire de 25 millions de dollars en 2017, est dans la tourmente pour avoir participé à l’un de ces scandales dont le réseau social ne semble plus se dépêtrer depuis qu’il est apparu que l’appât du gain l’avait conduit à ignorer les manipulations russes. A moins d’un mois de la fin de l’année, il est clair que Mark Zuckerberg n’a pas « réparé » Facebook, contrairement à ses résolutions de début 2018. A San Francisco, l’un des conseillers municipaux a même relancé l’idée de débaptiser l’hôpital public auquel le couple Zuckerberg a donné son nom (et 75 millions de dollars), illustration du tour agressif qu’a pris le désamour pour le secteur de la tech. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Facebook met en avant ses efforts pour lutter contre les fausses informations L’épisode actuel est finalement assez banal : quoi de plus commun, dans le monde de la politique ou de la com, que de recruter des intermédiaires pour dire du mal de ses concurrents ? Mais s’agissant d’une entreprise qui prétend être « une force de bien » sur la planète, c’est une nouvelle preuve qu’elle n’a rien à envier aux champions de l’hypocrisie. Comme l’a révélé le New York Times le 15 novembre, dans un article encore plus long qu’un post expiatoire de Mark Zuckerberg, Facebook a recruté, à partir de 2017 – après la victoire de Donald Trump –, le cabinet de conseil républicain Definers. Il s’agissait de « répondre aux accusations injustes » dont la société faisait l’objet, a expliqué, le 21 novembre, le spin doctor (démissionnaire) du réseau social, Elliot Schrage. Autrement dit, de « vendre » à la presse des éléments susceptibles de décrédibiliser les critiques. Réputation écornée Et de nuire en particulier à la coalition Freedom From Facebook, un groupe de gauche partisan de « casser » le réseau social au nom de la loi antitrust. Definers a encouragé les journalistes à se pencher sur le financement de ce groupe – au portefeuille bien garni –, qui avait loué un avion pour promener une banderole anti-Zuckerberg au-dessus de l’assemblée générale des actionnaires. La presse était invitée à enquêter du côté de la fondation de George Soros, l’omniprésent financier de la gauche progressiste.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/04/chez-facebook-l-icone-sandberg-decredibilisee_5392232_3232.html
04/12/2018
Empêtrée dans un scandale, Sheryl Sandberg, la numéro deux du réseau social, est accusée des mêmes turpitudes que ses collègues masculins, constate, dans sa chronique, Corine Lesnes, correspondante du « Monde » à San Francisco.
affaire-khashoggi
La chef de la CIA va informer des parlementaires sur le meurtre de Khashoggi
La directrice de la CIA, Gina Haspel, lors de sa prestation de serment au Capitole, à Washington, le 9 mai. AARON P. BERNSTEIN / REUTERS La directrice de la CIA (Central Intelligence Agency), Gina Haspel, va être entendue mardi 4 décembre par des parlementaires sur ce que sait l’agence de renseignement concernant le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi. Lire aussi : Toujours aucune trace du corps du journaliste saoudien Khashoggi un mois après son assassinat Le républicain Bob Corker, chef de la puissante commission des affaires étrangères, n’a pas voulu entrer dans les détails de cette réunion, lundi, précisant simplement qu’elle aurait lieu à 11 heures au Sénat et que seul « un petit groupe » de parlementaires y participerait. Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’affaire Khashoggi divise Washington Mme Haspel n’avait pas répondu à l’invitation des sénateurs, qui avaient entendu à huis clos, le 28 novembre, les ministres de la défense, Jim Mattis, et des affaires étrangères, Mike Pompeo, sur les informations dont dispose l’administration Trump au sujet de cet assassinat, début octobre, au consulat saoudien à Istanbul. L’absence de la chef de la CIA avait outré de nombreux sénateurs, y compris au sein des rangs républicains. Journaliste critique de Riyad, Jamal Khashoggi vivait depuis 2017 aux Etats-Unis, où il collaborait pour le Washington Post. Degré de certitude « moyen à élevé » Mike Pompeo avait affirmé devant les sénateurs que le rapport de la CIA ne contenait « aucun élément direct liant le prince héritier à l’ordre de tuer Jamal Khashoggi ». Pourtant, selon plusieurs médias américains, l’agence de renseignement estime que l’assassinat a été commandité par Mohammed Ben Salman, surnommé « MBS ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le G20 fait bon accueil à « MBS » malgré l’affaire Khashoggi Elle aurait comme preuve un échange de messages avec un proche conseiller supervisant l’opération, Saoud Al-Qahtani, dans les heures précédant et suivant le meurtre. Son rapport conclut, avec un degré de certitude « moyen à élevé », que « MBS » « ciblait personnellement » M. Khashoggi et qu’il a « probablement ordonné sa mort ». Les fuites dans la presse auraient provoqué la colère de la patronne de la CIA, alors que la Maison Blanche est accusée de vouloir épargner le prince héritier, en raison notamment des intérêts stratégiques américains au Moyen-Orient. Donald Trump a déclaré publiquement que le service de renseignement n’avait « rien trouvé d’absolument certain ». « Il se pourrait très bien que le prince héritier ait eu connaissance de cet événement tragique – peut-être, peut-être pas ! », a-t-il dit dans un communiqué le 20 novembre.
https://www.lemonde.fr/affaire-khashoggi/article/2018/12/04/la-cheffe-de-la-cia-va-informer-des-parlementaires-sur-le-meurtre-de-khashoggi_5392229_5390206.html
04/12/2018
Mme Haspel n’avait pas répondu à l’invitation des sénateurs, qui avaient entendu à huis clos fin novembre, les ministres de la défense et des affaires étrangères sur ce dossier.
international
Mexique : création d’une commission d’enquête sur la disparition de 43 étudiants en 2014
Les proches des 43 disparus d’Ayotzinapa brandissant les photos de ces derniers, à Mexico City, le 3 décembre. CHRISTIAN PALMA / AP Le président mexicain, Andres Manuel Lopez Obrador (surnommé « AMLO »), a annoncé, lundi 3 décembre, la mise en place d’une commission d’enquête sur la disparition des quarante-trois étudiants d’Ayotzinapa, en 2014, dans le sud du pays. Il a promis une rupture avec le passé sur cette affaire qui avait entaché le mandat de son prédécesseur Enrique Peña Nieto et déclenché un scandale international. Lire aussi : La disparition de 43 étudiants au Mexique reste un mystère « Avec la signature de cet accord, nous débutons le processus de recherche. (…) C’était notre engagement et nous tenons parole, a déclaré le chef de l’Etat qui a pris ses fonctions samedi 1er décembre. J’espère que nous connaîtrons rapidement la vérité, que la justice se fasse et que cela devienne un exemple pour que plus jamais ne soient violés les droits de l’homme dans notre pays. » La nouvelle commission sera formée au cours des trente prochains jours et intégrera les parents des étudiants, des membres du gouvernement, des experts et des techniciens. « Tout le gouvernement va aider et je vous assure qu’il n’y aura pas d’impunité, ni dans ce cas si triste ni dans aucun autre », a promis M. Lopez Obrador. « Nous n’avons plus confiance en personne, mais nous avons un peu d’espoir que vous soyez davantage humain », lui a dit Maria Martinez, mère d’un des étudiants disparus. Guerreros Unidos Cette annonce est intervenue quelques heures après une conférence de presse matinale de AMLO, qui sera désormais un rendez-vous quotidien pour informer la presse et les Mexicains sur les dossiers en cours. Dans la nuit du 26 au 27 septembre 2014, des étudiants de l’école normale rurale d’Ayotzinapa, qui s’étaient emparés de cinq autobus pour aller manifester à Mexico, avaient été attaqués par des officiers de la police municipale d’Iguala, sur ordre du maire. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Mexique, le scandale des escadrons de la mort de Veracruz entâche le parti au pouvoir Selon les autorités, les policiers les auraient ensuite livrés au cartel des Guerreros Unidos, qui les aurait confondus avec des membres d’un cartel rival et les aurait tués, avant d’incinérer leurs corps dans une décharge. Mais des experts indépendants de la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) ont contesté cette version dans un rapport publié en 2015.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/04/mexique-creation-d-une-commission-d-enquete-sur-la-disparition-de-43-etudiants-en-2014_5392226_3210.html
04/12/2018
Le président Lopez Obrador a promis une rupture avec le passé sur cette affaire qui avait entaché le mandat de son prédécesseur et déclenché un scandale international.
international
Les députés britanniques partent en guerre contre l’accord sur le Brexit négocié par Theresa May
Le Parlement britannique, à Londres, le 3 décembre. DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP A Londres, un vent de révolte souffle, non pas de la rue comme à Paris, mais du Parlement de Westminster. A huit jours d’un vote des députés sur l’accord de divorce avec l’Union européenne, scrutin à très hauts risques pour Theresa May, l’opposition a déterré la hache de guerre contre le gouvernement, lundi 3 décembre, dans un climat général de confusion et d’incertitude. Dans la soirée, John Bercow, le speaker (président) de la Chambre des Communes a donné son aval à la procédure d’« outrage au Parlement » visant le gouvernement de Mme May et réclamée quelques heures plus tôt par l’ensemble des partis de l’opposition – Labour, indépendantistes écossais du SNP, LibDems – et même par le Parti démocratique unioniste nord-irlandais (DUP) pourtant allié de la première ministre. Ils lui reprochent de n’avoir publié qu’un résumé expurgé de l’avis juridique officiel rendu à propos de l’accord sur le Brexit approuvé le 25 novembre à Bruxelles par les vingt-sept pays de l’UE. Conséquence de cette décision du speaker, les députés devraient se prononcer, dès mardi, sur le renvoi d’un membre du gouvernement – l’attorney general (procureur et conseiller juridique) Geoffrey Cox ou le numéro deux du gouvernement David Lidington – devant la commission de la réglementation des Communes. Cette instance pourrait lui infliger une sanction. Retarder le débat parlementaire Non seulement ce vote inattendu devrait retarder le début du débat parlementaire sur l’accord lui-même, prévu mardi 4 décembre, mais il risque de constituer un lever de rideau désastreux pour Mme May, en permettant aux opposants au texte de se compter. Avant même ce nouveau revers, personne ne voyait comment elle pourrait obtenir l’approbation des députés sur le « deal » avec l’UE lors du vote programmé le 11 décembre, puisque plus de 90 députés conservateurs sur 315 menacent de le rejeter alors qu’il lui faut 320 voix pour passer. Sur le fond, le coup de sang des députés, lundi, paraît assez artificiel : l’accord sur le Brexit prévoit que l’ensemble du Royaume-Uni restera dans une union douanière avec l’UE pour éviter le retour d’une frontière en Irlande, tant qu’un accord commercial n’aura pas été signé entre Londres et les Vingt-Sept. Les opposants, pro-Brexit ou non, estiment qu’un tel arrangement dit « backstop » (filet de sécurité) constitue un « piège » dont le pays ne pourra pas sortir sans l’assentiment de l’UE. Pour les europhobes, c’est une trahison du Brexit ; pour les europhiles, c’est une entorse à la souveraineté du pays et il vaudrait mieux rester dans l’Union.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/04/les-deputes-britanniques-partent-en-guerre-contre-l-accord-sur-le-brexit-negocie-par-theresa-may_5392214_3210.html
04/12/2018
Une procédure d’« outrage au Parlement » visant le gouvernement a été lancée hier pour obtenir la publication intégrale de l’avis juridique officiel sur le texte.
economie
Pression fiscale : la France en tête du classement de l’OCDE
Source : OCDE La France est, parmi les 36 Etats membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le pays où la pression fiscale est la plus forte. C’est la conclusion d’un rapport publié par l’organisation internationale mercredi 5 décembre. Avec 46,2 % de son produit intérieur brut (PIB) représenté par les prélèvements obligatoires en 2017, la France est passée devant le Danemark, qui passe en deuxième place avec un ratio de 46 %, suivi de la Belgique, qui affiche un taux de 44,6 %. L’augmentation de la pression fiscale en France s’inscrit dans le contexte d’une hausse généralisée à l’échelle de l’OCDE. En moyenne, les prélèvements obligatoires ont représenté 34,2 % du PIB des pays membres en 2017 contre 34 % en 2016. Il s’agit du chiffre le plus élevé enregistré depuis que l’organisation établie à Paris a commencé à compiler ces données fiscales, en 1965. Un record absolu « Cette moyenne représente désormais un record absolu, y compris par rapport aux chiffres les plus élevés enregistrés en 2000 (33,8 %) et en 2007 (33,6 %) », souligne le rapport, précisant que la hausse des prélèvements fiscaux par rapport au PIB a été observée dans 19 des 34 pays, tandis qu’un mouvement inverse a été constaté dans 15 autres. En 2017, les plus fortes augmentations des recettes fiscales globales rapportées au PIB sur un an se sont produites en Israël, sous l’effet de réformes fiscales qui ont accru les recettes générées par les impôts sur le revenu, et aux États-Unis, en raison d’une taxe exceptionnelle sur les bénéfices réalisés à l’étranger qui s’est traduite par la hausse des recettes des impôts sur le patrimoine. Ces conclusions ne devraient pas contribuer à apaiser la contestation des « gilets jaunes », qui envisagent de poursuivre leur mouvement malgré la suspension de six mois annoncée mardi par le gouvernement pour trois mesures fiscales qui devaient entrer en vigueur le 1er janvier, dont la hausse de la taxe carbone.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/05/pression-fiscale-la-france-en-tete-du-classement-de-l-ocde_5393237_3234.html
05/12/2018
Dans le contexte d’une hausse généralisée, Paris est passé au premier rang des membres de l’organisation internationale avec des prélèvements obligatoires qui représentent près de la moitié de son PIB.
culture
Des musiciens rejouent la musique d’Auschwitz
-Unis. Patricia Hall, professeure de solfège à l’université du Michigan, a redonné vie à des compositions arrangées par des prisonniers d’Auschwitz. Elle s’est appuyée sur des manuscrits qu’elle a retrouvés en 2016, lors de recherches au musée d’Auschwitz-Birkenau. Ces arrangements sont particuliers, car ils sont adaptés aux instruments disponibles dans le camp. L’une des œuvres ressuscitées s’appelle Die Schönste Zeit des Lebens (La plus belle période de la vie). A l’origine, elle a été composée par Franz Grothe. Joshua DeVries, un étudiant en solfège, a numérisé la partition des arrangements. Et le chef d’orchestre Oriol Sans et ses musiciens l’ont enregistrée en studio, en octobre 2018. Patricia Hall a pu identifier deux des trois arrangeurs grâce à leur matricule. Tous les deux étaient des prisonniers politiques polonais et ont survécu au camp de la mort. L’orchestre jouait des « marches » pour accompagner les va-et-vient des prisonniers. Et il donnait des concerts devant la maison du commandant, Rudolf Höss. Près de 1,1 million de personnes, en majorité juives, sont mortes dans ce camp d’extermination.
https://www.lemonde.fr/culture/video/2018/12/05/des-musiciens-rejouent-la-musique-d-auschwitz_5393220_3246.html
05/12/2018
Des partitions de musique arrangées par les prisonniers d’Auschwitz ont été rejouées pour la première fois depuis la seconde guerre mondiale, aux Etats-Unis.
climat
La Chine et l’Inde responsables de la forte hausse des émissions mondiales de CO2
Cheminée de la centrale électrique au charbon de Kostolac (Serbie), le 3 octobre. DARKO VOJINOVIC / AP Le réchauffement climatique met en péril nos habitations, nos économies, notre santé et même nos vies. Cette réalité ne fait pas pour autant fléchir les émissions mondiales de CO 2, qui devraient atteindre un niveau inégalé en 2018. C’est ce qui ressort du bilan annuel diffusé, mercredi 5 décembre, par le Global Carbon Project (GCP), un consortium scientifique international sous l’égide de l’université britannique d’East Anglia. Après le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et l’appel de l’Organisation des Nations unies à tripler, voire quintupler, les efforts des pays, cette nouvelle étude met encore davantage la pression sur les 196 Etats réunis pour la conférence mondiale sur le climat (COP24) à Katowice, en Pologne. Selon les projections du GCP, publiées dans les revues Nature, Earth System Science Data et Environmental Research Letters et intégrées dans un atlas interactif, les émissions mondiales de dioxyde de carbone issues de la combustion de ressources fossiles (charbon, pétrole et gaz) ainsi que des cimenteries devraient s’élever à 37 milliards de tonnes (soit 37 gigatonnes ou Gt) cette année. Soit une augmentation de 2,7 % par rapport à l’an dernier. « Le pic ne semble pas encore en vue » Pis, cette hausse est plus importante encore qu’en 2017 (+ 1,6 %), après une relative stagnation de 2014 à 2016, qui laissait espérer qu’un plafond était atteint. Au total, les rejets carbonés ont augmenté de 65 % depuis 1990. Reste encore à ajouter les émissions liées à la déforestation et aux autres changements d’affectation des sols (destruction de prairies…). Le bilan total devrait ainsi s’élever à 41,5 milliards de tonnes de CO 2 en 2018. Conséquence : la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère pourrait atteindre 407 parties par million sur l’année, soit 45 % de plus que les niveaux préindustriels. Et encore l’étude ne prend-elle pas en compte les autres gaz à effet de serre, tels que le méthane. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Climat : quels sont les enjeux de la COP24 qui s’est ouverte en Pologne ? « Il semble que le pic des émissions n’est pas encore en vue. Or, elles doivent diminuer rapidement pour faire face au changement climatique. Les incendies en Californie ne sont qu’un aperçu de ce qui nous attend si nous n’y parvenons pas », prévient Corinne Le Quéré, professeure de science et de politique du changement climatique à l’université d’East Anglia (Royaume-Uni). « Les émissions doivent chuter de 25 % d’ici à 2030 pour ne pas dépasser 2 °C de réchauffement, et de 50 % pour rester en deçà de 1,5 °C, selon les objectifs de l’accord de Paris conclu en 2015 », rappelle Philippe Ciais, chercheur au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement. Si les émissions continuent à croître au rythme d’environ 3 % par an, la planète subirait un réchauffement global de plus de 4 °C.
https://www.lemonde.fr/climat/article/2018/12/05/forte-hausse-des-emissions-mondiales-de-co2_5393211_1652612.html
05/12/2018
Les rejets d’origine fossile auraient augmenté de 2,7 % entre 2017 et 2018. En cause : la consommation de charbon, repartie à la hausse.
politique
Les Républicains : Jean Leonetti ne sera pas candidat aux élections européennes
Cette fois, les choses sont claires : « Je ne suis pas candidat », annonce au Monde Jean Leonetti. Depuis plusieurs mois, le vice-président délégué du parti Les Républicains (LR) était pressenti pour mener la liste de la formation de droite aux élections européennes de mai 2019. Réfléchi, consensuel…, le maire d’Antibes (Alpes-Maritimes) avait tout pour incarner la figure de rassemblement d’une droite d’ordinaire fracturée sur la question européenne. « Une droite ferme et à l’écoute », faisait valoir à son endroit un député. « Notre sage ! », s’enflammait une dirigeante du parti à l’évocation de son nom. Mais, à 70 ans, l’intéressé assure ne pas vouloir s’engager dans cette course, au nom du « renouvellement ». « C’est une élection dans laquelle on ne brille pas en général. C’est donc l’occasion de rajeunir et de porter un nouveau projet européen », explique cet ancien centriste. M. Leonetti avait déjà affirmé cette conviction dans Le Journal du dimanche, le 28 octobre. Mais la déclaration avait alors été perçue comme une manière d’essayer de se débarrasser sur sa liste de Nadine Morano, Rachida Dati et Brice Hortefeux, députés européens sortants, qualifiés par certains au sein de LR de « vieux schnocks ». « Je ne peux pas dire qu’il faut renouveler et ensuite vouloir être tête de liste. Je suis certes brillant et jeune d’esprit, mais j’ai 70 ans », sourit Jean Leonetti. Suspense jusqu’à début 2019 L’ancien ministre jure avoir prévenu Laurent Wauquiez, le président de LR, dès octobre. « Leonetti reste très intéressé », assurait pourtant, il y a encore quelques jours, un élu proche de M. Wauquiez. A défaut d’enthousiasmer, l’hypothèse de sa candidature était perçue comme un moyen de couper l’herbe sous le pied de ceux qui, à l’image d’Alain Juppé, critiquent les accents trop eurosceptiques du discours de LR. Ce retrait ouvre un peu plus grand la voie à François-Xavier Bellamy, jeune philosophe conservateur de 33 ans. La candidature de l’adjoint au maire de Versailles, ancienne figure de proue des manifestations contre le mariage pour tous, est sérieusement étudiée par Laurent Wauquiez pour conduire la liste LR. Le suspense devrait durer au moins jusqu’au mois de janvier ou de février 2019, assure-t-on dans l’entourage du président du parti de droite. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Européennes : le PS et LR rêvent de réactiver le clivage droite-gauche
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/05/les-republicains-jean-leonetti-ne-sera-pas-candidat-aux-elections-europeennes_5393176_823448.html
05/12/2018
Le vice-président de LR, pressenti pour prendre la tête de liste du parti en mai, renonce à se présenter. Le philosophe Bellamy est en bonne position.
les-decodeurs
Laurent Wauquiez « oublie » avoir porté un gilet jaune
Soutenir sans aller trop loin. C’est le difficile équilibre que tente de trouver Laurent Wauquiez face au mouvement des « gilets jaunes ». Le président du parti Les Républicains (LR) affirme être « aux côtés » du mouvement de contestation, soutenant l’annulation des hausses de taxes sur les carburants mais condamnant les violences et appelant à « rétablir l’ordre ». Invité de l’émission « Les 4 Vérités », mercredi 5 décembre sur France 2, Laurent Wauquiez a de nouveau dénoncé l’incendie de la préfecture de Haute-Loire au Puy-en-Velay, samedi 1er décembre. Il a pris une distance avec le mouvement des « gilets jaunes »… de manière un peu rapide. Ce qu’il a dit Quand la journaliste, Caroline Roux, lui a demandé s’il avait « regretté, à un moment, d’avoir enfilé le gilet jaune », Laurent Wauquiez a répondu : « Je n’ai jamais enfilé de gilet jaune. J’ai apporté mon soutien et je ne renie rien de ça. » Pourquoi c’est faux Malheureusement pour le président des Républicains, une photo vient le contredire. M. Wauquiez a rendu visite à des « gilets jaunes » au Puy-en-Velay le 24 novembre. Le site d’information local La Commère 43 était présent et a publié ensuite un cliché où le président du conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes revêt nettement un gilet jaune : Lors d’un rassemblement devant la préfecture, place du Breuil, au Puy-en-Velay, Laurent Wauquiez se mêle aux manifestants, le 24 novembre. LaCommère43 Mémoire sélective, mauvaise foi, voire mensonges grossiers… Laurent Wauquiez use fréquemment de contrevérités dans son expression publique. Une stratégie décomplexée régulièrement mise en lumière par les articles de vérification, dont ceux des Décodeurs du Monde. Coïncidence ou imitation, les jeunes militants LR du Puy-de-Dôme ont tenté de défendre M. Wauquiez en évoquant une image « datée de 2012 » : Un argument aussitôt battu en brèche par un journaliste de France 3 Auvergne, qui note la présence sur l’image d’un iPhone X, reconnaissable à son appareil photo. Or ce modèle date de 2017.
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/12/05/laurent-wauquiez-oublie-avoir-porte-un-gilet-jaune_5393170_4355770.html
05/12/2018
Le président des Républicains a assuré n’avoir « jamais enfilé de gilet jaune ». Une photo au Puy-en-Velay vient contredire son affirmation.
sciences
Mais que fabriquent les sociologues ?
Carte blanche. Parcourez les rayons « sociologie » d’une bonne librairie. Vous y verrez La Fabrique du droit, de Bruno Latour, mais aussi La Fabrique de la radicalité, de Laurent Bonelli et Fabien Carrié, ou La Fabrique des transclasses, de Gérard Bras et Chantal Jaquet, La Fabrique des identités, d’Audrey Célestine, La Fabrique des sciences sociales, de Johann Michel, La Fabrique du féminisme, de Geneviève Fraisse. Prenez une chose que, d’habitude, on ne « fabrique » pas : famille, intime, homme, ­bébés, jeunesse, pervers, terroristes… et vous pouvez être certain que, maintenant, il existe un livre, ou un article, montrant sa ­fabrique. Qu’est ce qui a bien pu se passer dans la tête de mes collègues (et dans la tête de leurs éditeurs) pour tout passer à la fabrique ? On m’a raconté, mais peut-être était-ce un mauvais esprit, que l’inspiration venait d’une erreur de traduction du mot anglais fabric (« tissu ») utilisé depuis longtemps dans l’expression urban fabric pour parler des formes que prennent les villes. Il est plus probable que l’inspiration provienne d’ouvrages, ou d’articles, ayant pour titre The Making of…, « La fabrication de… » Mais alors, pourquoi « la fabrique » et pas « la fabrication » ? Probablement parce que « fabrication » est trop proche de « construction ». En effet, pendant toute une période, les sociologues ont abusé de « construction sociale ». Entre 1966, date de parution de La Construction sociale de la réalité, de Peter Berger et Thomas Luckmann, et la fin des ­années 1990, avec l’ouvrage critique de Ian Hacking, Entre Science et réalité. La Construction sociale de quoi ?, en passant par Laboratory Life : the Social Construction of Scientific facts, de Bruno Latour et Steve Woolgar (1979), tout est passé à la moulinette de la construction sociale. Abus de construction sociale Au départ, il y a la volonté de présenter certains des phénomènes observés par les sociologues comme le résultat de séquences particulières de processus sociaux. Il en va ainsi de la race, construction artificielle, portée par des individus, des institutions, des idéologies…, mais construction qui a des ­effets bien réels sur des individus qui se ­retrouvent classés dans telle ou telle catégorie raciale. Mais au fil des années, « construction sociale de… » est devenue une expression routinisée, appliquée à tout vent. L’ouvrage de Ian Hacking vient fermer le ban : ­« construction sociale » est désormais passé.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/05/mais-que-fabriquent-les-sociologues_5393163_1650684.html
05/12/2018
Quel est cet étrange phénomène qui a remplacé dans les rayons des librairies « la construction sociale de » par « la fabrique de » ?
livres
L’écrivaine Elizabeth Strout vrille le cœur
Tout est possible (Anything is Possible), d’Elizabeth Strout, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pierre Brévignon, Fayard, 304 p., 19 €. La ­romancière américaine Elizabeth Strout, en 2013. Heike STEINWEG/Opale Dans le monde de la romancière américaine Elizabeth Strout, de nouveaux secrets en remplacent toujours d’anciens. On y tient, à ses fêlures. Elles sont tapies, là, semblables à une dent ébréchée sur laquelle la langue repasse journellement et qu’on n’ira jamais faire soigner car on s’y est fait. Dans le monde de Strout, une mère ne peut avouer à sa fille que l’aimer tellement, toute cette place prise dans son cœur, est aussi un fardeau. Seul dans son salon, persiennes fermées, le vétéran d’une guerre dont plus personne ne se souvient, celle du Vietnam, est brusquement saisi du désir de retourner « chez lui », mais où est-on chez soi quand on est habité d’une douleur sans nom ? Tout est possible rayonne autour de Lucy Barton, devenue une célèbre écrivaine new-yorkaise qui s’apprête à revenir dans sa petite ville natale d’Amgash, Illinois, après dix-sept ans d’absence. Le retour annoncé de Lucy, personnage auquel Strout a consacré son précédent roman, Je m’appelle Lucy Barton (Fayard, 2017), défait le cours du quotidien de ceux qui l’ont connue ou croisée enfant, lorsqu’elle était pauvre à fouiller les poubelles pour trouver de quoi se nourrir. Les chapitres ricochent les uns sur les autres, ces instants choisis de la vie du frère de Lucy, de sa sœur, d’un vieux voisin ou d’une camarade de classe, qui, tous, l’attendent, l’espèrent ou la redoutent. Un tableau de Hopper Si on peut lire Tout est possible comme une chronique de l’Amérique rurale et white trash, c’est pourtant Tolstoï, un des auteurs favoris de Strout, qui vient à l’esprit dans cette ode aux non-dits où les objets se révèlent parfois plus parlants que ceux qui les possèdent : les tasses de thé partagées entre deux femmes leur « donnent la permission de parler », une demeure parfaite dévoile la « monstruosité énorme » des besoins de celle qui l’habite, qui « s’était servie des déceptions de sa vie pour en faire une maison ». Un tableau de Hopper paraît dire à sa propriétaire : « Tes problèmes sont énormes et insignifiants, seul compte le soleil sur la façade d’une maison. » Il est question de ce qui ne passe pas dans Tout est possible : des écorchures trop longtemps à vif, des rancœurs tenaces, de la honte et des enfances dont on ne parvient pas à s’extirper. Pourtant, à aucun moment Strout n’enferme ses personnages dans une quelconque fatalité. Chacun des chapitres propose un retournement parfois infime du rapport de force entre un supposé destin de classe et ce qu’il est pos­sible d’en faire ; le désir intime a beau être sans cesse contrarié par la bienséance sociale, il surgit, même tardif et parfois cocasse, comme cette femme qui, à 78 ans passés, confesse à celui qu’elle aime qu’Elvis Presley a toujours été son « ami imaginaire ».
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/05/l-ecrivaine-elizabeth-strout-vrille-le-c-ur_5393161_3260.html
05/12/2018
Le retour dans sa ville natale d’une écrivaine célèbre suscite l’attente, l’espoir ou la crainte des personnages de « Tout est possible ». Lola Lafon a lu cette superbe ode aux non-dits.
planete
« Gilets jaunes » : la fiscalité écologique, variable d’ajustement des gouvernements
Une pancarte contre l’écotaxe sur l’A55, près de Châteauneuf-les-Martigues (Bouches-du-Rhône), en novembre 2013. La contestation aura poussé François Hollande à y renoncer. BERTRAND LANGLOIS / AFP La couleur et l’accessoire vestimentaire des contestataires ont varié, passant du bonnet rouge au gilet jaune. Le président de la République et la majorité gouvernementale ont aussi changé, Emmanuel Macron et La République en marche ayant remplacé François Hollande et le Parti socialiste. Mais les deux scénarios, l’abandon de l’écotaxe destinée aux poids lourds, en octobre 2014, et l’annonce, mardi 4 décembre, par le premier ministre, de la suspension pour six mois notamment de la hausse de la taxe carbone, présentent des similitudes qui inquiètent ceux qui souhaitent la mise en place d’une fiscalité écologique traduisant les engagements de la France dans la lutte contre le réchauffement climatique. La fiscalité environnementale apparaît en effet régulièrement comme la victime collatérale des réponses politiques du gouvernement aux mobilisations sociales. Des différences existent certes entre l’histoire de l’écotaxe, imaginée lors du Grenelle de l’environnement en 2007 et votée à la quasi-unanimité des parlementaires en 2009, et celle de la taxe carbone, ou contribution climat-énergie, mise en place en 2014. « Suicide écologique » Pour Delphine Batho, ancienne ministre de l’écologie du gouvernement de Jean-Marc Ayrault, députée des Deux-Sèvres, le recul d’aujourd’hui serait encore plus grave, signant selon elle « le suicide écologique du gouvernement ». « Alors que l’opposition à l’écotaxe était sectorielle et régionale [elle concernait principalement le secteur des transports et la Bretagne], la question de la taxe carbone est au cœur de la problématique de la fiscalité environnementale, analyse la présidente de Génération écologie. Et quand un gouvernement annonce une pause, on sait, d’expérience, que cette pause devient définitive. » Edouard Philippe a en effet indiqué vouloir utiliser le laps de temps des six mois de suspension pour « identifier et mettre en œuvre de mesures d’accompagnement justes et efficaces ». « Si nous ne les trouvons pas, nous en tirerons les conséquences », a-t-il précisé, ouvrant la porte à un possible abandon de la mesure. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Climat : la COP24 confrontée à un grand vide politique Ce ne serait pas la première fois qu’un gouvernement renoncerait à la mise en place d’une fiscalité environnementale. En 2000, le gouvernement (socialiste) de Lionel Jospin décide d’augmenter la portée de la taxe générale sur les activités polluantes, mais le Conseil constitutionnel censure la mesure, estimant que l’égalité devant l’impôt n’aurait alors pas été respectée.
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/05/la-fiscalite-ecologique-variable-d-ajustement-des-gouvernements_5393118_3244.html
05/12/2018
La pause annoncée, mardi, par Edouard Philippe fait écho à de précédents renoncements sous les présidences de Nicolas Sarkozy et François Hollande.
politique
Macron et les élus locaux, le rendez-vous manqué
Un nouveau rendez-vous manqué, au plus mauvais moment. A l’heure où il essuyait des sifflets et des huées à la sortie de la préfecture partiellement calcinée du Puy-en-Velay, mardi 4 décembre, Emmanuel Macron devait initialement recevoir l’ensemble des associations d’élus à l’Elysée. Une rencontre déjà différée à plusieurs reprises et dont les participants n’ont appris que la veille, par un simple courriel du secrétariat du président de la République, qu’elle était une nouvelle fois annulée, « en raison des circonstances actuelles », et reportée « en janvier » 2019. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Puy-en-Velay, des « gilets jaunes » écœurés mais combatifs après l’incendie de la préfecture Les circonstances, précisément, n’appellent-elles pas à ce que le président de la République, confronté à une crise majeure, cherche à renouer un lien fort avec les élus locaux, à s’appuyer sur eux pour tenter de retrouver les voies du dialogue et de l’apaisement ? Interrogé lundi sur France 2, c’est le conseil adressé par Jean-Pierre Raffarin au chef de l’Etat. « Rétablir le dialogue avec les élus locaux, les maires, leur faire confiance en leur donnant les moyens de répondre aux inquiétudes de nos concitoyens avec qui ils sont en première ligne, peut conduire à l’apaisement », estimait l’ancien premier ministre de Jacques Chirac. « Laisser s’exprimer les colères et les attentes » « Nous n’avons pas réussi aujourd’hui à inclure tous les territoires et toute la population et faire que les solutions, les accompagnements soient au rendez-vous pour tout le monde. C’est vrai et c’est ce que nous dit le mouvement actuel », reconnaissait M. Macron, mardi 27 novembre, appelant à un « débat national » sur les propositions de transition énergétique et la stratégie d’accompagnement. « Je souhaite que, partout sur le territoire, cette concertation puisse être déclinée et que l’ensemble des territoires et des élus soit pleinement associé, indiquait-il. Pas associé pour constater des décisions qui seraient prises jusqu’au dernier bouton de guêtre, mais pour avoir leur mot à dire et les construire avec le gouvernement. » Vœu pieux ? Simple déclaration d’intention ? Ces derniers jours, les responsables d’associations d’élus ont, à de multiples reprises, affirmé leur volonté de « s’engager aux côtés de l’Etat ». Dans une tribune publiée lundi par Paris Match, François Baroin, Dominique Bussereau et Hervé Morin, respectivement présidents de l’Association des maires de France (AMF), de l’Assemblée des départements de France (ADF) et de Régions de France, appellent à « une grande concertation, qui soit la plus décentralisée possible, pour laisser s’exprimer les colères et les attentes et pour construire, avec l’appui des élus locaux, des propositions de solution adaptées à la réalité des territoires ». Un appel qui témoigne de la convergence d’intérêts entre l’Etat et les élus locaux. A condition de le vouloir.
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/05/macron-et-les-elus-locaux-le-rendez-vous-manque_5393115_823448.html
05/12/2018
Le chef de l’Etat a reporté à janvier 2019 la réunion avec les représentants des associations d’élus qui plaident pour renouer un lien fort avec eux en ces temps de crise.
m-le-mag
David Zwirner, la nouvelle boussole du marché de l’art contemporain
à Miami. A l’ombre des palmiers qui entourent le Convention Center de Miami Beach, Larry Gagosian, 73 ans, est la star de l’étape américaine de la foire Art Basel. Ce rendez-vous incontournable de l’art contemporain, qui s’ouvrira le 6 décembre, met encore à l’honneur le célèbre galeriste américain, à la tête de seize espaces dans dix métropoles, du bas des Champs-Elysées au quartier d’affaires de Hongkong. Pourtant, c’est vers l’un de ses confrères, David Zwirner, 54 ans, que se tournent désormais les regards des collectionneurs chics ou branchés des États-Unis et d’Amérique du Sud. Chaque année, ceux-ci viennent à Miami renifler les tendances, courir les fêtes endiablées qui accompagnent la manifestation et, parfois, acheter quelques œuvres entre deux coupes de champagne ou « shots » de rhum local. Et tous ont en tête le palmarès des cent personnes les plus influentes dans le monde de l’art, établi début novembre par le magazine ArtReview. Plus policé mais tout aussi coriace que Gagosian, Zwirner revendique aujourd’hui le leadership du grand marché international, en trustant la première place du classement. Loin derrière, son rival, lui, se contente d’une plus modeste 22e position. Le vieux sage au regard clairvoyant La légende de « Gago » est celle d’une époque. Celle de deux décennies où les spéculateurs ont pris le pas sur les amateurs cultivés. Après avoir commencé tout en bas de l’échelle dans les années 1970, en self-made-man, vendant des affiches sur des parkings de Los Angeles, le loup de Beverly Hills est devenu le requin de Chelsea. Cheveux ras, regard bleu métallique et placidité de joueur de poker, il ne s’intéresse qu’aux artistes déjà au sommet. Ceux qui, tels Damien Hirst, Jeff Koons ou Anselm Kiefer, peuvent se vendre à des prix stratosphériques aux plus gros collectionneurs du monde. Mais les temps changent. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Un regard décapant sur l’art contemporain Comme Larry Gagosian, David Zwirner a le sourire rare, toutefois, son léger zozotement trahit une certaine humanité. Son parcours raconte une tout autre histoire. Le fils de Rudolf Zwirner, un grand marchand d’art de Cologne, n’a vraiment émergé qu’une fois passée la quarantaine, dans les années 2000, quand les artistes dont il avait deviné le potentiel, comme Tomma Abts ou Marcel Dzama, ont fini par entrer dans les musées. Bien qu’il soit un enfant du sérail, David Zwirner a pris son temps pour s’inventer un créneau et un credo.
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/05/david-zwirner-la-nouvelle-boussole-du-marche-de-l-art-contemporain_5393113_4500055.html
05/12/2018
Le galeriste allemand installé à New York, Londres et ­Hongkong domine cette année le classement des personnalités les plus influentes du monde de l’art. Et compte parmi les favoris de la foire Art Basel qui se tient à Miami.
planete
Dans la baie de Somme, la densité de poissons en baisse de 80 % en trente ans
Près du port du Hourdel, dans la baie de Somme, le 5 août 2016. PHILIPPE HUGUEN / AFP Que vont devenir cabillauds, flets, merlans, limandes ou autre harengs de la baie de Somme ? La densité des poissons, toutes espèces confondues, a diminué de 80 % en trente ans dans cette immense baie du littoral picard, selon une étude de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer). Elle est ainsi passée de 200 000 individus par mètre carré à 40 000 individus, conclut l’étude, qui impute cette chute à la hausse de la température de l’eau. « Cette diminution substantielle touche principalement les espèces à croissance rapide et ainsi précocement matures pour la reproduction, comme la limande, la plie, le sprat ou le hareng », souligne l’étude, publiée dans la revue Global Change Biology. Ces espèces sont particulièrement sensibles aux variations de l’environnement, davantage que les espèces à croissance lente comme le bar par exemple, selon l’Ifremer. Augmentation rapide de la température Pour l’Institut, ce bouleversement est bien dû au réchauffement des océans, exacerbé dans le cas de la baie de Somme. « La température de l’eau en Manche est-Mer du Nord a connu une augmentation rapide sur la période étudiée, entre 0,3 et 0,4 °C par décennie, avec une accélération entre 1998 et 2003 (plus de 1 °C entre ces cinq années), soit une hausse quatre fois supérieure au réchauffement moyen de l’ensemble des océans », affirme l’Ifremer. « D’ici 2100, la hausse des températures en Manche Est-Mer du Nord pourrait atteindre 2,5 à 3 °C par rapport à la période actuelle, ce qui risque d’amplifier les effets néfastes déjà observés en baie de Somme. » Pour réaliser cette étude, l’Ifremer s’est appuyé sur des données recueillies entre 1987 et 2012 avec des engins de pêche standardisés, utilisés chaque année à la même période. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Nous sommes tous des climatosceptiques »
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/05/dans-la-baie-de-somme-la-densite-de-poissons-en-baisse-de-80-en-trente-ans_5393103_3244.html
05/12/2018
De 200 000 individus par mètre carré il y a trois décennies, on ne trouve plus que 40 000 individus aujourd’hui, selon l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer.
idees
Etudiants étrangers : « L’augmentation des droits de scolarité heurte les fondements de l’université française »
« Réserver la quasi-gratuité aux seuls citoyens français et européens qui s’inscriront demain dans une université française ne repose sur aucune justification objective. » Photo : université de Poitiers. DR Tribune. L’annonce par le premier ministre de l’augmentation exponentielle des droits de scolarité dans les universités pour les étudiants étrangers extracommunautaires a surpris la communauté universitaire qui avait en mémoire un autre discours du même premier ministre, en mai 2018, lors de la conférence ministérielle européenne de l’enseignement supérieur à Paris : « Tout ce que nous pourrons faire pour faire circuler l’intelligence et l’élever collectivement sera une réponse aux défis du monde. » Cette décision aura les effets inverses de ce discours ainsi que n’ont pas manqué de le déplorer des universités accueillant depuis des décennies des milliers d’étudiants étrangers, pour lesquels l’université française est leur alma mater, et qui sont autant d’ambassadeurs de la France. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Universités : la hausse des droits d’inscription suscite des inquiétudes L’augmentation ciblée des droits de scolarité (passage de 170 à 2 770 euros en licence et de 243 et 380 à 3 770 euros en master et doctorat) heurte de plein fouet les fondements mêmes de l’université française. Jusqu’à présent ouverte sur le monde, comme l’avait constaté le premier ministre en mai 2018, la France pourra-t-elle rester le quatrième pays de destination des étudiants internationaux après une telle annonce ? Une chance pour la France Cette mesure abrupte revient à considérer les étudiants étrangers comme une charge pour le contribuable français et non comme une chance. Mais combien d’étudiants étrangers modestes ont réussi en France ou dans leur pays d’origine grâce à l’ouverture sur le monde qu’incarne l’université française ? Pourquoi ne pas rappeler que les étudiants étrangers rapportent plus qu’ils ne coûtent à l’économie française, lorsqu’ils séjournent sur notre territoire ? Comme l’atteste une étude commandée par Campus France en 2014, si ces étudiants représentent chaque année une charge pour le budget de l’Etat de trois milliards d’euros, ils participent aussi à l’économie nationale à hauteur de 4,65 milliards d’euros. L’argument lié à l’iniquité fiscale qui voudrait qu’il soit injuste de faire supporter par le contribuable français le coût réel de la scolarité d’un étudiant étranger – en supposant de façon hasardeuse que ni cet étudiant ni ses parents n’ont jamais contribué aux finances publiques de la France – est inopérant. Rembourserait-on à une famille sans enfant une part de sa contribution fiscale correspondant au coût de l’éducation ? Doit-on, au nom des nécessités du financement de l’enseignement supérieur, renoncer également au principe d’universalité de l’impôt ?
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/05/etudiants-etrangers-l-augmentation-des-droits-de-scolarite-heurte-les-fondements-de-l-universite-francaise_5393100_3232.html
05/12/2018
L’augmentation ciblée des droits de scolarité pour les étudiants extracommunautaires risque de fragiliser le potentiel de la recherche nationale, déplore, dans une tribune au « Monde » Yves Jean, président de l’université de Poitiers.
international
La France donne son aval à l’extradition de François Compaoré vers le Burkina Faso
Le « petit président » sera-t-il jugé dans son pays ? La justice française a autorisé, mercredi 5 décembre, l’extradition de François Compaoré vers le Burkina Faso, où le frère de l’ancien président déchu, Blaise Compaoré, est mis en cause dans l’enquête sur l’assassinat du journaliste Norbert Zongo en 1998. La cour d’appel de Paris a donné son feu vert à cette extradition, à laquelle le parquet général s’était déclaré favorable, mais qui, pour être effective devra également faire l’objet d’un décret gouvernemental. La décision de la cour a déjà fait l’objet d’un pourvoi en cassation de la part des avocats de François Compaoré, 64 ans. Par ailleurs, l’un des défenseurs de M. Compaoré, Pierre-Olivier Sur, annonce son intention de demander la comparution du juge d’instruction burkinabé pour « faux en écriture publique », après que le cour d’appel de Paris a relevé que l’une de ses citations n’était pas « correcte ». Lire aussi notre portrait : François Compaoré, le « petit président » du Burkina Faso Assassinat d’un journaliste Au Burkina Faso, François Compaoré est accusé d’« incitation à assassinat » dans l’affaire Norbert Zongo, du nom du directeur de publication de l’hebdomadaire L’Indépendant. Le journaliste avait été tué, avec trois personnes qui l’accompagnaient, dans des conditions mystérieuses, le 13 décembre 1998, alors qu’il enquêtait sur la mort de David Ouedraogo, le chauffeur de François Compaoré. Classé en 2003, après un « non-lieu » en faveur du seul inculpé, le dossier Zongo a été rouvert à la faveur de la chute du président Blaise Compaoré à la fin octobre 2014, chassé par la rue après vingt-sept ans au pouvoir. Sous le coup d’un mandat d’arrêt international depuis mai 2017, François Compaoré avait été interpellé à l’aéroport de Roissy à la fin octobre 2017. Son avocat avait alors exprimé son indignation quant à cette « manœuvre politique » visant à atteindre par son biais l’ex-président, également sous le coup d’un mandat d’arrêt international dans le cadre de l’enquête sur la répression de l’insurrection d’octobre 2014. François Compaoré avait été placé sous contrôle judiciaire fin 2017 mais d’après son conseil, ce contrôle est désormais levé et M. Compaoré est libre de ses mouvements.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/05/la-france-donne-son-aval-a-l-extradition-de-francois-compaore-vers-le-burkina-faso_5393091_3210.html
05/12/2018
Le frère de Blaise Compaoré, l’ancien président déchu, est mis en cause dans l’enquête sur l’assassinat en 1998 du journaliste Norbert Zongo.
sport
Voile : le départ de la Brest Océans reporté
« Brest Océans aura lieu, c’est une certitude. Reste à trouver le meilleur timing, et on fera tout en bonne intelligence, d’une manière collective pour prendre la meilleure décision. » C’est la réponse qu’avait faite François Gabart, fin novembre, lors d’un tchat avec les internautes du Monde.fr, alors que l’un d’entre eux lui demandait si, « en voyant les dégâts sur l’ensemble de la catégorie Ultim » lors de la Route du rhum, il pensait que le projet de course autour du monde en solitaire sans escale était « compromis ou pas ». La réponse est tombée mercredi 4 décembre. Les nombreuses avaries subies au cours de la Route du rhum par les maxi-trimarans de cette classe Ultim (32 mètres de long, 23 mètres de large au maximum), ont conduit les organisateurs de la course Brest Oceans à en reporter le départ, initialement prévu le 29 décembre 2019. Aucune nouvelle date n’a été communiquée. « La classe Ultim 32/23 et Brest Ultim Sailing (organisateur de l’événement) valideront une date en tenant compte de tous les éléments portés à leur connaissance avant la fin du mois de janvier 2019 », ont précisé les organisateurs. Multiples casses La Route du rhum a mis en lumière la fragilité de la dernière génération d’Ultim, ces géants des mers, équipés de foils, qui leur permettent de voler au-dessus de l’eau. François Gabart (Macif), deuxième de la course derrière Francis Joyon (Idec Sport), a connu des problèmes, avec un foil et un safran hors d’usage et une grand-voile endommagée, pendant une bonne partie de la course. Ces avaries lui ont pour partie coûté la victoire finale. Malmenés par deux violentes tempêtes sur les trois premiers jours de course, une partie des bateaux avaient auparavant dû à se mettre à l’abri, quand deux bateaux de la classe Ultim, celui de Sébastien Josse (Maxi Edmond-de-Rothschild) et celui d’Armel Le Cléac’h (Banque-Populaire IX) étaient contraints à l’abandon, victimes d’importantes avaries. Thomas Coville (Sodebo) avait, lui aussi, été victime d’une avarie dans les vingt-quatre premières heures de course. Dérouté vers La Corogne (Espagne), il avait repris la course, pour franchir la ligne d’arrivée le 20 novembre à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe). Lire aussi Route du rhum 2018 : les Ultimes passent leur crash test « Les périodes de profondes évolutions technologiques conduisent régulièrement à ces phases qui sont douloureuses mais qui doivent permettre de comprendre et, ensuite, de fiabiliser », a souligné Patricia Brochard, présidente de la classe Ultim 32/23, citée dans le communiqué de la Brest Océans. Les organisateurs de la Lorient-Les Bermudes-Lorient, double transatlantique en équipage, avaient déjà annoncé le 21 novembre un report du départ, initialement prévu le 5 mai 2019, en raison de la casse subie par les Ultim sur la Route du rhum.
https://www.lemonde.fr/sport/article/2018/12/05/voile-prevu-fin-2019-le-depart-de-la-brest-oceans-est-reporte_5393078_3242.html
05/12/2018
Les organisateurs de la course autour du monde en solitaire sans escale ont mis en avant la casse subie durant la Route du rhum par les bateaux de la classe Ultim pour justifier le report.