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JADE/CETATEXT000046502630.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 février 2022 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités espagnoles responsables de l'examen de sa demande d'asile. Par un jugement n° 2203703 du 15 mars 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 3 février 2022, a enjoint au préfet de police d'enregistrer sa demande d'asile en procédure normale dans un délai de dix jours à compter de la mise à disposition au greffe de ce jugement et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au bénéfice de Me Fauveau Ivanovic au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 14 avril 2022, le préfet de police demande à la Cour : 1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 du jugement du 15 mars 2022 ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif. Il soutient que : - c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a fait droit au moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; - c'est également à tort qu'il lui a enjoint de délivrer à M. A... un dossier de demande d'asile en procédure normale, alors que M. A... ne pouvait en tout état de cause relever que de la procédure accélérée ; - les autres moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés. Par un mémoire enregistré le 17 juin 2022, M. A..., représenté par Me Fauveau Ivanovic, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - c'est à bon droit que le premier juge a annulé cet arrêté sur le fondement de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; - l'arrêté du préfet de police du 3 février 2022 a été pris en méconnaissance de l'article 4 de ce règlement. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 13 juin 2022. Par un courrier du 17 août 2022 les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen tiré de l'existence d'un non-lieu à statuer sur le recours du préfet de police, dans la mesure où l'arrêté de transfert de M. A... en date du 3 février 2022 n'est plus susceptible d'exécution à l'expiration d'un délai de six mois ayant couru à compter de la notification du jugement du 15 mars 2022 au préfet de police. Un mémoire en réponse au moyen d'ordre public a été enregistré le 19 août 2022 pour le préfet de police. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 3 février 2022 le préfet de police a décidé le transfert de M. A..., ressortissant mauritanien né le 31 décembre 1996, aux autorités espagnoles, responsables de l'examen de sa demande d'asile. Le préfet de police fait appel du jugement du 15 mars 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté, lui a enjoint d'enregistrer sa demande d'asile en procédure normale dans un délai de dix jours à compter de la mise à disposition du jugement et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au bénéfice de l'avocat de M. A... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Le préfet de police relève régulièrement appel de ce jugement. Sur l'exception de non-lieu à statuer sur les conclusions du préfet de police tendant à l'annulation des articles 2 et 3 du jugement : 2. Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ". 3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. ". Aux termes de l'article L. 742-4 du même code : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) / Lorsqu'une décision d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert, l'étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de la décision de transfert et de la décision d'assignation à résidence. Le président du tribunal administratif statue dans un délai de quatre-vingt-seize heures à compter de l'expiration du délai de recours (...). ". 4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, a été notifié à l'administration, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale. 5. Si le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 a été interrompu par l'introduction, par M. A..., d'un recours contre l'arrêté du 3 février 2022, un nouveau délai de six mois a commencé à courir à compter de la notification au préfet de police, le 15 mars 2022, du jugement du même jour rendu par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris. Il ne ressort pas des pièces du dossier que ce délai aurait été prolongé, en application du paragraphe 2 de l'article 29, en raison de l'emprisonnement ou de la fuite de l'intéressé, ou que la décision de transfert aurait été exécutée à la date d'expiration de ce délai de six mois. Dès lors, en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, la France est devenue responsable de l'examen de la demande de protection internationale de M. A.... 6. Par suite, les conclusions de la requête d'appel du préfet de police tendant à l'annulation des articles 2 et 3 du jugement, par lesquels le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a fait droit aux conclusions aux fins d'annulation et d'injonction présentées par M. A..., sont devenues sans objet. Dès lors, il n'y a pas lieu d'y statuer. Sur les conclusions du préfet de police tendant à l'annulation de l'article 4 du jugement : 7. Aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, dans sa rédaction applicable à la date du jugement attaqué : " (...) Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. / Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat (...). ". 8. Le non-lieu à statuer, constaté sur les conclusions de la requête d'appel du préfet de police tendant à l'annulation des articles 2 et 3 du jugement, ne permet pas au juge d'appel de se prononcer sur le bien-fondé de l'article 4 du même jugement, par lequel le tribunal administratif, regardant l'Etat comme la partie perdante dans l'instance qui lui était soumise, a mis à sa charge une somme de 1 000 euros sur le fondement de ces dispositions. Les conclusions du préfet de police dirigées contre ce dernier article ne peuvent donc qu'être rejetées. Sur les frais liés à l'instance : 9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme demandée par l'avocat de M. A... au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête du préfet de police en tant qu'elles tendent à l'annulation des articles 2 et 3 du jugement n° 2203703 du 15 mars 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête du préfet de police est rejeté. Article 3 : Les conclusions de M. A... tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. C... A.... Copie en sera adressée au préfet de police. Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président, - Mme Boizot, première conseillère, - Mme Lorin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 28 octobre 2022. La rapporteure, C. B...Le président, S. CARRERE La greffière, C. DABERT Le président, S. CARRERE La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N°22PA01703
JADE/CETATEXT000046502624.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la taxe sur les logements vacants et de la majoration de 10 % mises à sa charge au titre de l'année 2018 pour un appartement sis à Paris 16ème arrondissement. Par un jugement n° 1918195 du 15 juillet 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme C.... Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 14 septembre 2021, Mme C..., représentée par Me Guetta, avocat, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement entrepris ; 2°) de prononcer la restitution, assortie des intérêts moratoires, de la taxe sur les logements vacants et de la majoration de 10 % mises à sa charge au titre de l'année 2018 pour un appartement sis 34 rue du Docteur B... à Paris 16ème arrondissement ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les premiers juges ont commis des erreurs de droit ; - l'appartement en litige est situé dans un immeuble dans lequel des travaux sur les canalisations ont dû être effectués en raison de fuites et un sinistre en date du 8 août 2016 a rendu nécessaires de nouveaux travaux, lesquels ont pris du retard ; en raison de ces divers travaux indépendants de sa volonté, l'appartement est inhabitable ; - il résulte de la doctrine BOI-IF-AUT-60-11 du 11 mars 2014, paragraphe 80, que la taxe sur les logements vacants ne concerne pas les logements meublés. Par un mémoire en défense enregistré le 18 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme D... C... exerce une activité professionnelle de location de meublés, au travers de l'entreprise Connan, propriétaire d'un bien immobilier sis à Paris 16ème arrondissement et constitué d'un appartement. A raison de son inhabitation durant l'année 2017, Mme C... a ainsi été assujettie à une cotisation de taxe sur les logements vacants au titre de l'année 2018 à hauteur de 3 806 euros. Elle relève régulièrement appel du jugement du 15 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette taxe. Sur la régularité du jugement : 2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Mme C... ne peut donc utilement soutenir que le tribunal a entaché sa décision d'erreurs de droit pour demander l'annulation du jugement attaqué. Sur le bien-fondé du jugement : 3. Aux termes de l'article 232 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année en litige : " I.- La taxe annuelle sur les logements vacants est applicable dans les communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de cinquante mille habitants où existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d'acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d'emménagements annuels dans le parc locatif social. Un décret fixe la liste des communes où la taxe est instituée. / II.- La taxe est due pour chaque logement vacant depuis au moins une année, au 1er janvier de l'année d'imposition, à l'exception des logements détenus par les organismes d'habitations à loyer modéré et les sociétés d'économie mixte et destinés à être attribués sous conditions de ressources. / III.- La taxe est acquittée par le propriétaire, l'usufruitier, le preneur à bail à construction ou à réhabilitation ou l'emphytéote qui dispose du logement depuis le début de la période de vacance mentionnée au II. (...) / VI. - La taxe n'est pas due en cas de vacance indépendante de la volonté du contribuable. (...) ". Le Conseil Constitutionnel, dans ses décisions n° 98-403 DC du 29 juillet 1998 et n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012, n'a admis la conformité à la Constitution des dispositions instituant la taxe sur les logements vacants que sous certaines réserves en précisant que : " Ne sauraient être assujettis des logements dont la vacance est imputable à une cause étrangère à la volonté du bailleur, faisant obstacle à leur occupation durable, à titre onéreux ou gratuit, dans des conditions normales d'habitation, ou s'opposant à leur occupation, à titre onéreux, dans des conditions normales de rémunération du bailleur ; (...). " et il a également jugé que : " (...) ne sauraient être assujettis des logements qui ne pourraient être rendus habitables qu'au prix de travaux importants et dont la charge incomberait nécessairement à leur détenteur ; / (...). ". Il appartient au juge de l'impôt, saisi par un contribuable qui fait valoir qu'un logement est exclu pour une telle raison du champ d'application de la taxe sur les logements vacants, de se prononcer sur cette question au terme de l'instruction dont le litige qui lui est soumis a fait l'objet. 4. Tout d'abord, il est constant que l'appartement à raison duquel Mme C... a été assujettie à l'imposition contestée était vacant depuis plus d'un an au 1er janvier 2018. Pour contester l'imposition mise à sa charge, Mme C... fait valoir que la vacance de ce bien est indépendante de sa volonté dès lors que le logement en cause devait faire l'objet de travaux importants avant une mise en location suite à deux dégâts des eaux survenus en 2014 et 2015. Toutefois, en premier lieu, l'attestation du 14 décembre 2017 établie par le syndic de l'immeuble permet seulement d'établir que des travaux ont été réalisés au cours de la période comprise entre les mois de février et de décembre 2015 mais ne précise pas les raisons ayant conduit à ces travaux qui ont débuté dès 2009 au sein de la résidence. Par ailleurs, si un courrier de son assureur en date du 22 novembre 2016 établit l'existence d'un dégât des eaux, le 8 août 2016, dans l'appartement en litige, il résulte toutefois de cette attestation, non assortie du rapport de l'expertise qui a été diligentée, que les dommages concernent les " embellissements et objets mobiliers " du dressing et des toilettes. Ainsi, il ne ressort pas de ces documents que le logement en litige ne pouvait être donné en location. En deuxième lieu, il ne ressort pas des photos transmises, datées du 9 octobre 2018, à supposer qu'elles reflètent un état des lieux au 1er janvier 2018, date du fait générateur de l'imposition en litige, et des différentes factures communiquées, relatives à l'achat de plinthes électriques en bois pour un montant de 1 700 euros, au changement d'une serrure suite à vol de clé pour un montant de 1 468 euros, à la réparation des étagères d'un dressing suite à un dégât des eaux pour un montant de 844,93 euros, à l'achat d'un climatiseur et de son unité intérieure pour un montant de 774,85 euros, à la réparation de deux robinets pour un montant de 528,93 euros, à des travaux de peinture décorative pour un montant total de 2 490 euros, à la pose et à la dépose de panneaux simili cuir d'un montant de 6 468 euros, à l'achat de matériel électrique pour un montant total de 385,59 euros, au déplacement de la climatisation pour un montant de 764,50 euros, à la vérification et à l'entretien du climatiseur d'un montant de 1 176 euros, à l'installation de revêtements d'un montant de 5 541,68 euros, et à la pose d'un plafond tendu d'un montant de 6 328,96 euros, que les travaux en cours au titre de la période de référence (2017) auraient porté sur des éléments de gros œuvre ou sur le remplacement d'équipements ou de systèmes techniques indispensables au maintien du caractère habitable de cet appartement. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que si cet appartement pouvait nécessiter des travaux d'entretien, de réparation et d'amélioration, il était clos et couvert et disposait de l'eau, de l'électricité, du chauffage, de WC et de salles d'eau et de bains et ne pouvait être considérée comme inhabitable. Enfin, le montant des travaux mentionnés, d'un total d'environ 30 000 euros hors taxes, ne représentent qu'une faible part de la valeur supposée du bien en cause, constitué par un appartement de 85 mètres carrés dans le 16ème arrondissement de Paris. Ces éléments sont donc insuffisants à eux seul pour établir que le local d'habitation litigieux ne pourrait être rendu habitable qu'au prix de travaux importants. Dans ces conditions, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le local d'habitation en cause serait inhabitable au sens des dispositions précitées de l'article 232 du code général des impôts telles qu'interprétées par le Conseil Constitutionnel. Par suite, c'est à bon droit que l'administration l'a assujettie à la taxe des logements vacants au titre de l'année 2018 à raison de ce bien. 5. Par ailleurs, Mme C... doit être regardée comme se prévalant pour la première fois en appel, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, 2ème alinéa, du paragraphe 80 de l'instruction référencée BOI-IF-AUT-60 du 11 mars 2014, pour soutenir que la taxe sur les logements vacants ne s'applique pas aux logements meublés. 6. Selon le paragraphe 80 de l'instruction mentionnée : " Les logements vacants s'entendent des logements non meublés et, par conséquent, non assujettis à la taxe d'habitation en application du 1° du I de l'article 1407 du CGI. Les résidences secondaires, notamment, sont donc exclues du champ d'application de la TLV. ". Ce paragraphe porte sur l'articulation entre la taxe d'habitation et la taxe sur les logements vacants. A ce titre, et aux termes de l'article 1407 du code général des impôts, un logement, n'est soumis à la taxe d'habitation, notamment, que s'il est meublé. Toutefois, aux termes des articles 1408 et 1415 du même code, un tel logement n'est soumis à cette taxe, au titre d'une année, que s'il dispose, au 1er janvier de cette année, d'un occupant, la taxe d'habitation étant alors mise à la charge de l'occupant qui en a la disposition, distinct du propriétaire. En revanche, il ressort des dispositions précitées de l'article 232 du même code que la taxe sur les logements vacants s'entend des logements, susceptibles d'être donnés en location, et qui, durant plus d'une année, sont restés vacants, indépendamment de leur caractère meublé ou non meublé. La précision doctrinale invoquée ne comportant, eu égard à son objet, aucune interprétation contraire de la loi sur ce point, le moyen doit être écarté. 7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.Copie en sera adressée à l'administratrice des finances publiques chargée de la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- Mme Boizot, première conseillère,- Mme Lorin, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 octobre 2022.La rapporteure,S. A...Le président,S. CARRERELa greffière,C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.N° 21PA05088 2
JADE/CETATEXT000046502629.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler le compte-rendu, en date du 6 décembre 2018, de son entretien professionnel pour l'année 2018, ainsi que les décisions implicites de refus nées du silence gardé par le département de la Seine-Saint-Denis sur ses demandes, en dates du 18 décembre 2018 et du 16 avril 2019, de révision de ce compte-rendu d'entretien. Par un jugement n° 1908036 du 3 décembre 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 2 février 2022 Mme E..., représentée par Me Dutheuil-Lécouvé, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1908036 du 3 décembre 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation du compte-rendu, en date du 6 décembre 2018, de son entretien professionnel pour l'année 2018, ainsi que les décisions implicites de refus nées du silence gardé par le département de la Seine-Saint-Denis sur ses demandes de révision en dates du 18 décembre 2018 et du 16 avril 2019 ; 2°) d'annuler ce compte-rendu, ensemble les décisions implicites refusant de le réviser ; 3°) d'enjoindre au département de la Seine-Saint-Denis de réaliser un nouvel entretien professionnel au titre de l'année 2018 dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les premiers juges ont écarté à tort l'acquiescement aux faits correspondant à l'absence de contradictoire motivé par un défaut de communication de trois rapports internes sur lesquels s'est fondé l'entretien ; - le jugement est entaché d'erreurs de fait, d'erreurs manifeste d'appréciation ainsi que d'une erreur de droit ; - le compte-rendu d'entretien en litige comme les décisions implicites de rejet ne sont pas motivés ; - l'entretien professionnel n'a pas été réalisé par son supérieur hiérarchique direct en méconnaissance des dispositions des articles 76 de la loi du 26 janvier 1984 et 2 du décret du 16 décembre 2014 ; - le compte-rendu d'entretien est entaché d'erreurs de fait et d'erreurs manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense enregistré le 31 mai 2022 le conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, représenté par Me Pichon, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de Mme E... la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de la fonction publique ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 2013-489 du 10 juin 2013 ; - le décret n° 2014-1526 du 16 décembre 2014 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme E..., assistante socio-éducative principale affectée depuis le 8 avril 2013 à la circonscription du service social de Rosny-sous-Bois, relevant de la direction de la prévention de l'action sociale du département de la Seine-Saint-Denis, a demandé devant le tribunal administratif de Montreuil l'annulation de son compte-rendu d'entretien professionnel pour 2018, en date du 6 décembre 2018, ensemble les deux décisions résultant du silence gardé par l'administration sur ses demandes de révision de ce compte-rendu présentées le 18 décembre 2018 et le 16 avril 2019. Par un jugement n° 1908036 en date du 3 décembre 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Mme E... relève régulièrement appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement : 2. Dans le cadre de l'effet dévolutif, le juge d'appel, qui est saisi du litige, se prononce non sur les motifs du jugement de première instance mais directement sur les moyens mettant en cause la régularité et le bien-fondé des décisions en litige. Par suite, Mme E... ne peut utilement soutenir que les premiers juges ont entaché leur jugement d'erreurs de fait, de droit et manifeste d'appréciation, et ont à tort écarté l'acquiescement aux faits pour demander l'annulation du jugement entrepris. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la légalité externe : 3. En premier lieu, Mme E... soutient que l'entretien professionnel du 6 décembre 2018 n'a pas été réalisé par une autorité compétente, à savoir son supérieur hiérarchique direct, et ce en méconnaissance des dispositions des articles 76 de la loi du 26 janvier 1984 et 2 du décret du 16 décembre 2014. 4. D'une part, aux termes de l'article 76 de la loi du 26 janvier 1984 visée ci-dessus : " L'appréciation, par l'autorité territoriale, de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct qui donne lieu à l'établissement d'un compte-rendu. " Cette obligation est reprise au sein de l'article 2 du décret du 16 décembre 2014 visé ci-dessus qui dispose que : " (...) L'entretien professionnel est conduit par le supérieur hiérarchique direct (...). ". 5. D'autre part, selon l'article 1er du décret du 10 juin 2013 portant statut particulier du cadre d'emplois des conseillers territoriaux socio-éducatifs visé ci-dessus : " Les conseillers territoriaux socio-éducatifs constituent un cadre d'emplois social de catégorie A au sens de l'article 13 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée. / Ce cadre d'emplois comprend les grades de conseiller socio-éducatif, de conseiller supérieur socio-éducatif et de conseiller hors classe socio-éducatif. ". L'article 2 de ce décret précise que : " I- Les membres du cadre d'emplois participent à l'élaboration des projets thérapeutiques, éducatifs ou pédagogiques mis en œuvre dans les services des collectivités territoriales et de leur établissement. Ils ont pour mission d'encadrer notamment les personnels sociaux et éducatifs de l'établissement ou du service de la collectivité. / (...) / Dans les départements, ils peuvent occuper les emplois de responsable de circonscription et de conseiller technique. / Les responsables de circonscription sont chargés, dans leur circonscription d'action sanitaire et sociale, sous l'autorité du responsable de l'action sanitaire et sociale du département, de définir les besoins et de mettre en œuvre la politique du département dans les secteurs qui sont de la compétence en matière sanitaire et social et d'encadrer ou de coordonner l'action des agents du département travaillent dans le secteur sanitaire et social / (...) / II. Les fonctionnaires du grade de conseiller supérieur socio-éducatif exercent des fonctions correspondant à leur qualification et consistant à encadrer des fonctionnaires du grade inférieur du cadre d'emplois et les personnels sociaux et éducatifs, et à diriger une ou plusieurs circonscriptions d'action sociale ou services d'importance équivalente dans un établissement ou une collectivité (...). ". 6. Si le compte-rendu d'entretien professionnel en litige ne comporte ni le prénom et le nom de l'évaluateur ni sa fonction mais seulement sa signature, il n'est pas sérieusement contesté que c'est Mme D..., la supérieure hiérarchique directe de Mme E..., responsable adjointe de la circonscription de Rosny-sous-Bois, qui a conduit l'entretien. En effet, la requérante indique elle-même dans sa demande de révision en date du 18 décembre 2018 que Mme D... s'est appuyée tout au long de l'entretien sur trois rapports rédigés par ses soins et ceux de sa hiérarchie pour établir le compte-rendu d'entretien professionnel et qu'au regard du contexte professionnel difficile dans lequel elle avait évolué avant sa reprise du travail en novembre 2017, il apparaissait malvenu que cette dernière mentionne les termes " Mme A... " dans les appréciations littérales écrites en lieu et place de son patronyme complet. Par ailleurs, la fiche de poste de la requérante précise que son supérieur hiérarchique direct est le ou la responsable adjoint(e) de circonscription ou le/la responsable de circonscription s'il n'y a pas d'adjoint(e). Or, il ressort des termes de l'arrêté d'affectation de Mme D... en date du 12 décembre 2017 que cette dernière était bien à la date d'évaluation la responsable adjointe de la circonscription du service social départemental de Rosny-sous-Bois relevant de la direction de la prévention et de l'action sociale dans laquelle était affectée la requérante. En tout état de cause, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que le détenteur du pouvoir hiérarchique bénéficie d'une délégation de signature pour viser les comptes-rendus de ses agents. Au regard des éléments précités et nonobstant la circonstance que le nom et la qualité de l'auteur de la notation ne figurent pas sur le compte-rendu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige, soulevé pour la première fois en appel par Mme E..., doit être écarté. 7. En deuxième lieu, la requérante fait valoir que les décisions attaquées souffrent d'un défaut de motivation au regard des 6° et 8° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. 8. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; 2° Infligent une sanction ; 3° Subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; 5° Opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ; 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire. ". 9. Les comptes-rendus d'entretien professionnel et les décisions refusant de réviser une notation n'étant pas au nombre des actes soumis à une obligation de motivation par les dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, Mme E... ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions pour critiquer le caractère suffisant de la motivation de son évaluation professionnelle. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté. En ce qui concerne la légalité interne : 10. En premier lieu, si Mme E... conteste au sein du cartouche C intitulé " qualités relationnelles de l'agent ", le contenu de la rubrique " points à améliorer " qui retient à ce titre " l'écoute de l'usager, du cadre hiérarchique et des partenaires, la réserve, le calme, l'empathie et la communication professionnelle " au motif que ces appréciations conduisent à remettre en cause sa légitimité à exercer son métier et que les qualités à améliorer constituent le fondement même de sa profession et de son éthique, en se bornant à de simples allégations, non assorties d'éléments, l'intéressée n'apporte aucune preuve que cette appréciation reposerait sur des faits inexacts ou serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation nonobstant la circonstance que le notateur ait relevé " au titre des faits marquants de l'année " une amélioration dans la gestion de situations sociales diverses et complexes. En effet, ces deux assertions qui impliquent que la requérante doit veiller à améliorer ces points au long cours, ne sont pas incompatibles. Par ailleurs, les mentions contestées sont cohérentes avec la fixation, pour 2018, de l'objectif d'accompagnement des demandeurs d'emploi, qui, selon les mentions figurant dans le cartouche B du compte-rendu, n'a été que partiellement atteint. La circonstance que le service était en reprise d'activité en 2018 et devait traiter des situations complexes est sans incidence sur ce qui précède. 11. En deuxième lieu, la requérante fait valoir que l'imprécision des mentions portées au sein de la rubrique " points restant à améliorer " dans le cartouche E " compétences professionnelles et techniques de l'agent " à savoir : " respecter le cadre de l'intervention individuelle avec les partenaires, l'usager, les membres de l'équipe (cadres, assistantes administratives) " ne lui permet pas de comprendre aisément ce qui lui est reproché ni ce qu'elle peut améliorer et que les griefs en cause relèveraient du cartouche C intitulé " qualités relationnelles " et non du cartouche E susmentionné. Si l'énoncé des griefs retenus à l'encontre de Mme E..., qui n'en conteste pas le bien-fondé, peut prêter à confusion, ces griefs impliquent, toutefois, que la requérante doit dans le cadre de son activité professionnelle respecter l'organisation du service ainsi que son cadre institutionnel ce qui n'est pas toujours le cas comme en attestent les rapports en date des 18 mai et 31 octobre 2018, lesquels, revêtus de la signature de la requérante, lui ont nécessairement été communiqués, et qui soulignent que Mme E... n'hésite pas à remettre en question les orientation de son encadrement. En outre, les mentions figurant dans la rubrique concernée retiennent également, à titre de " point fort ", la connaissance des dispositifs et du partenariat. Au regard de ce qui précède, aucune erreur de fait ou manifeste d'appréciation ne peut être relevée. 12. En troisième lieu, il ressort du compte-rendu d'entretien attaqué que trois objectifs ont été fixés à Mme E... pour l'année 2019 à savoir " participation à la construction du projet de service ", " respecter le cadre hiérarchique et la commande " et " respecter son cadre d'intervention professionnelle dans la relation avec l'usager et les partenaires associés ". Contrairement à ce que soutient la requérante, les deux premiers objectifs sont assortis d'outils d'évaluations suffisamment précis et mesurables (participation à des groupes de travail, entretiens périodiques avec sa hiérarchie et comptes-rendus réguliers). Si l'outil d'évaluation du troisième objectif est abscons, il s'agit d'une simple erreur de plume qui ne saurait caractériser l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation, le même outil d'évaluation ayant été retenu par le notateur (rédaction de comptes-rendus d'entretien). 13. En dernier lieu, Mme E... constate que l'appréciation générale littérale de sa valeur professionnelle rédigée dans la partie " synthèse " ne relève que " les prétendues difficultés relationnelles existantes " avec sa hiérarchie. Elle indique également avoir fait l'objet d'un dénigrement systématique de son travail et de ses qualités professionnelles par sa hiérarchie directe qui s'évertue à remettre en cause sa façon de servir, sans qu'aucun élément objectif ne le justifie. 14. Or, selon l'article 5 du décret n° 2014-1526 du 16 décembre 2014 : " Le compte-rendu de l'entretien, établi et signé par le supérieur hiérarchique direct, comporte une appréciation générale littérale exprimant la valeur professionnelle du fonctionnaire au regard des critères fixés à l'article 4. " L'article 4 dudit décret précise que : " Les critères à partir desquels la valeur professionnelle du fonctionnaire est appréciée, au terme de cet entretien, sont fonction de la nature des tâches qui lui sont confiées et du niveau de responsabilité assumé. Ces critères, fixés après avis du comité technique, portent notamment sur : 1° Les résultats professionnels obtenus par l'agent et la réalisation des objectifs ; 2° Les compétences professionnelles et techniques ; 3° Les qualités relationnelles ; 4° La capacité d'encadrement ou d'expertise ou, le cas échéant, à exercer des fonctions d'un niveau supérieur. ". En l'espèce, les éléments mentionnés dans l'appréciation littérale en litige portent tant sur les compétences relationnelles de la requérante que ses compétences professionnelles et techniques ainsi que sur ses résultats professionnels, en cohérence avec les mentions figurant dans les rubriques " qualités professionnelles " et " compétences professionnelles et techniques " mentionnées. Contrairement à ce qui est soutenu, ces éléments ne retiennent pas un comportement de " désobéissance ". Ils doivent permettre à Mme E... de continuer à progresser dans l'exercice de ses fonctions et ne remettent pas en cause, contrairement à ce qu'elle soutient, sa présence au sein de son service. Si Mme E... indique également faire l'objet de dénigrement, elle n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations. De même, il n'est pas démontré au regard des éléments mentionnés au point 11 que sa hiérarchie se serait appuyée sur des éléments antérieurs à la période d'évaluation pour établir la notation en litige. Ainsi, elle n'établit pas que la synthèse de l'entretien d'évaluation serait entachée d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation. 15. Il résulte de tout ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 16. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme E..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction de la requérante ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais liés à l'instance : 17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Seine-Saint-Denis, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par Mme E... en lien avec la présente instance et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme E... la somme demandée par le département de la Seine-Saint-Denis au titre des mêmes dispositions. D E C I D E :Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.Article 2 : Les conclusions présentées par le conseil départemental de la Seine-Saint-Denis au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E... et au conseil départemental de la Seine-Saint-Denis.Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président,- Mme Boizot, première conseillère,- Mme Lorin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 octobre 2022. La rapporteure, S. C...Le président, S. CARRERE La greffière, C. DABERTLa République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.N° 22PA00466 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 15 décembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit. Par un jugement n° 2100495 du 10 mars 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros au bénéfice de son conseil au titre des frais liés à l'instance. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 9 avril 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2100495 du 10 mars 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Montreuil. Il soutient que : - c'est à tort que le premier juge a retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - les autres moyens soulevés par M. D... en première instance ne sont pas fondés. La requête a été communiquée à M. D... qui n'a pas produit d'observation. Vu : - les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. D..., ressortissant bangladais né le 15 août 1982, a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), par une décision du 21 mars 2019, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 7 octobre 2020. Par un arrêté du 15 décembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Par la présente requête, le préfet de la Seine-Saint-Denis relève régulièrement appel du jugement du 10 mars 2021 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros au bénéfice de son conseil au titre des frais liés à l'instance. Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal : 2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code, dans sa version applicable : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci (...). ". Aux termes du III de l'article R. 723-19 dudit code, dans sa version applicable : " La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office et est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire. ". 3. Il ressort des pièces du dossier que le recours présenté par M. D... aux fins d'annulation de la décision de l'OFPRA du 21 mars 2019 a été rejeté par une décision de la CNDA lue en audience publique le 7 octobre 2020. M. D... bénéficiait ainsi du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à cette date, et non jusqu'à celle de la notification de la décision, en application de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge, estimant que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaissait les dispositions précitées l'article L. 743-1 du même code, faute de notification régulière de la décision de la CNDA, a annulé l'arrêté en litige pour ce motif. 4. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... devant le tribunal administratif de Montreuil et devant la Cour. Sur les autres moyens soulevés en première instance : En ce qui concerne le moyen de légalité externe soulevé à l'encontre de l'ensemble des décisions : 5. Par un arrêté n° 2020-2175 du 2 octobre 2020, régulièrement publié au bulletin d'informations administratives de la préfecture de la Seine-Saint-Denis du 5 octobre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné à Mme C... E..., adjointe à la cheffe du bureau de l'asile, délégation à l'effet de signer, notamment, les décisions portant obligation de quitter le territoire et celles fixant le pays à destination duquel sera éloigné un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de ce que ces décisions auraient été signées par une autorité incompétente doit être écarté. En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 6. En premier lieu, aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) ". 7. L'arrêté du 15 décembre 2020, qui vise notamment l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il est fait application et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, indique que la demande d'asile présentée par M. D... a été rejetée par l'OFPRA et la CNDA aux dates précisées au point 1. L'arrêté comporte également l'appréciation du préfet selon laquelle, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale et que ce dernier n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Ainsi, la décision attaquée répond aux exigences de motivation posées par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté. 8. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté rappelé ci-dessus ni des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'était pas tenu de faire état de tous les éléments relatifs à la situation de M. D..., aurait entaché sa décision d'un défaut d'examen de la situation personnelle de l'intéressé. 9. En troisième lieu, pour les motifs indiqués au point 3, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur de droit au motif qu'il bénéficiait du droit de se maintenir sur le territoire français à la date de l'arrêté attaqué faute de notification de la décision de la CNDA. Au demeurant et en tout état de cause, il ressort du relevé d'information de la base de données " Telemofpra " relative à l'état des procédures de demande d'asile, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire en application des dispositions précitées de l'article R. 723-19 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la décision de la CNDA du 7 octobre 2020 a été notifiée à M. D... le 30 octobre 2020. 10. En quatrième lieu, M. D... soutient que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de prendre en considération l'ensemble des éléments caractérisant sa situation personnelle et les conséquences qu'elle est susceptible d'entraîner au regard en particulier des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine. Toutefois, d'une part, la mesure d'éloignement en litige n'implique pas par elle-même le retour de M. D... dans son pays d'origine. D'autre part, M. D... n'assortit ses allégations d'aucune précision relative à sa situation personnelle susceptible de retenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en décidant de son éloignement du territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté. Sur la décision fixant le pays de renvoi : 11. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire n'étant entachée d'aucune illégalité pour les motifs précédemment énoncés, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, doit en conséquence être écarté. 12. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains et dégradants. ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile (...). / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". 13. Si M. D... soutient que son retour au Bangladesh l'expose à un risque de subir des traitements inhumains et dégradants en raison d'un conflit foncier l'opposant à des membres de la Ligue Awami, il n'assortit ses allégations d'aucune précision, ni d'aucune pièce justificative susceptible d'établir les risques actuels et personnels qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine, alors même que sa demande d'asile a été définitivement rejetée le 7 octobre 2020. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 15 décembre 2020 obligeant M. D... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, lui a enjoint de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros à son avocat au titre des frais liés à l'instance. Par suite, ce jugement doit être annulé, et la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Montreuil doit être rejetée. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2100495 du 10 mars 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Montreuil est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... D.... Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis. Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président, - Mme Boizot, première conseillère, - Mme Lorin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 28 octobre 2022. La rapporteure, C. B... Le président, S. CARRERE La greffière, C. DABERT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA01824
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : I- Par une requête enregistrée sous le n° 1801008, la société à responsabilité limitée (SARL) SEJM a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie, en qualité de tête de groupe, au titre des années 2009 à 2012, ainsi que des pénalités correspondantes, mises en recouvrement le 16 novembre 2015. II- Par une requête enregistrée sous le n° 1801010, la SARL SEJM a demandé au tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des pénalités correspondantes, mises en recouvrement le 28 avril 2014. Par un jugement n° 1801008, 1801010 du 23 janvier 2020, le tribunal administratif de Paris a déchargé la SARL SEJM de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2011, mise en recouvrement le 28 avril 2014, pour un montant de 15 246 euros, et des pénalités correspondantes, pour un montant de 7 257 euros, et rejeté le surplus des conclusions des demandes. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 16 mars 2020 et 27 juillet 2021, la SARL SEJM, représentée par Me Mosser, avocat, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler et de réformer l'article 2 du jugement n° 1801008, 1801010 du 23 janvier 2020 du tribunal administratif de Paris en ce qu'il lui fait grief ; 2°) de prononcer à titre principal, la décharge des impositions en litige et, à titre subsidiaire, de réduire les bases d'imposition à 340 544 euros pour 2009 après la prise en compte du déficit antérieur à l'intégration fiscale de 7 161 euros, à 1 972 046 euros pour 2010 et à 234 155 euros pour 2011 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que l'administration fiscale a réintégré au résultat fiscal des exercices clos les 31 décembre 2010 et 2011 les provisions constituées sur les avances consenties par la SARL SEJM à la SNC Société Parisienne d'Immobilier (SPI) et à la SCI du 6 rue Vineuse à Paris 16e, lesdites sociétés étant dans l'incapacité de rembourser leur compte courant débiteur auprès de la société SEJM ainsi que de M. B... ; - compte tenu des abandons de redressement qui ont été prononcés postérieurement à l'avis de mise en recouvrement du 16 novembre 2015, le résultat fiscal imposable rectifié qui devait être transmis à la société requérante, société mère du groupe fiscal, était de 1 952 548 euros au titre de l'année 2010 et de 234 155 euros au titre de l'année 2011 ; il s'ensuit que l'impôt sur les sociétés, la contribution sur l'impôt sur les sociétés, les majorations et les intérêts de retard doivent être calculés sur les bases de 347 705 euros au titre de 2009, 1 972 046 au titre de 2010 et de 234 155 euros au titre de 2011 avec déduction pour l'année 2009 du déficit antérieur de l'intégration fiscale soit 7 161 euros ; - il convient de prononcer le dégrèvement d'impôt sur les sociétés pour la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2009 suite à l'abandon des rehaussements de l'administration ; - la procédure de recouvrement est viciée car la lettre d'information communiquée à la société tête de groupe ainsi que l'avis de mise en recouvrement sont erronés par l'inclusion de la SCI 6 rue Vineuse au résultat d'ensemble du groupe alors que celle-ci n'était pas fiscalement intégrée. Par un mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - la SARL SEJM conteste en appel l'intégralité des impositions mises à leur charge sans tenir compte des dégrèvements prononcés le 28 novembre 2017 ; le litige est désormais limité à la somme totale de 465 842 euros en droits et pénalités ; - les autres moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Des pièces, enregistrées le 6 juillet 2022, ont été produites par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en réponse à une mesure d'instruction adressée par la Cour, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, à l'administration fiscale le 30 juin 2022. Un mémoire, enregistré le 26 septembre 2022, a été présenté pour la SARL SEJM par Me Mosser. Un courrier a été adressé par le président de la 9ème chambre de la Cour aux parties, le 3 octobre 2022, aux fins de les inviter à faire part de leurs observations au cours de l'audience sur le montant des impositions supplémentaires au titre de l'exercice 2010 résultant des redressements apportés, après interlocution départementale, aux résultats de la SARL SEJM en qualité de membre du groupe dont elle constitue la tête. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public, - et les observations de Me Mosser, pour la SARL SEJM. Considérant ce qui suit : 1. La SARL SEJM, dont M. C... B... est l'unique associé, est à la tête d'un groupe fiscalement intégré composé de la société SEJM, société mère, de la SAS Etablissements Salvi et de la SAS financière Rive Droite, sociétés filiales. Par ailleurs, elle est associée à 99 % de la SCI du 6 rue Vineuse et de la SNC Société Parisienne d'Immobilier, qui ne sont pas intégrées fiscalement au groupe et dans lesquelles M. B... détient 1 %. La SARL SEJM a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle l'administration fiscale, après avoir procédé à des retraitements du résultat d'ensemble du groupe, lui a assigné des compléments d'impôt sur les sociétés au titre des années 2010 et 2011, mis en recouvrement le 28 avril 2014. Puis, à la suite d'autres vérifications de comptabilité, des rectifications ont été apportées à ses résultats propres, ainsi qu'aux résultats d'une autre société du groupe, la SAS Etablissements Salvi, et à la SCI du 6 rue Vineuse au titre des exercices 2009 à 2012. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt correspondantes, déterminées au niveau de la SARL SEJM en qualité de tête de groupe, ont fait l'objet d'un avis d'imposition du 16 novembre 2015. La SARL SEJM a demandé la décharge de ces impositions supplémentaires, par deux requêtes distinctes enregistrées sous les numéros 1801010 et 1801008 devant le tribunal administratif de Paris, relatives aux impositions mises en recouvrement respectivement en 2014 et en 2015. Par un jugement n° 1801008, 1801010 en date du 23 janvier 2020, le tribunal administratif de Paris a déchargé la SARL SEJM des impositions et pénalités mises en recouvrement le 28 avril 2014, à raison de, respectivement, 15 246 euros et 7 257 euros, et rejeté le surplus des conclusions des demandes. La SARL SEJM relève régulièrement appel du jugement précité en tant qu'elle n'a pas été déchargée des impositions et pénalités, visées ci-dessus, mises en recouvrement en 2015. Sur la régularité de la procédure d'imposition : 2. La SARL SEJM a présenté dans son mémoire en réplique et, avant la clôture de l'instruction, un moyen nouveau tendant à contester la régularité de la procédure d'imposition, ainsi que l'y autorisent les dispositions de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales. Elle soutient que le résultat d'ensemble rectifié, et la détermination des compléments d'imposition et des pénalités correspondantes contenus dans la lettre d'information qui lui a été adressée, en qualité de société tête de groupe, le 16 octobre 2015, ainsi que, par suite, les sommes faisant l'objet de l'avis de mise en recouvrement en date du 16 novembre 2015, sont erronées à raison de l'inclusion des résultats rectifiés de la SCI du 6 rue Vineuse dans le résultat d'ensemble du groupe, alors que celle-ci n'est pas fiscalement intégrée au groupe SEJM. Elle considère que la procédure est, en conséquence, entachée d'irrégularité. 3. Il résulte de l'instruction que la SCI du 6 rue Vineuse, qui a pour activité depuis 2005 la location d'un studio avec garage, est détenue à 99 % par la société SEJM et à 1 % par M. B... qui détient 100 % de la société SEJM. Cette dernière étant imposée à l'impôt sur les sociétés, elle doit être imposée à raison de la part des résultats sociaux correspondant aux droits détenus dans la SCI du 6 rue Vineuse, soit 95 %. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration fiscale a intégré dans le résultat imposable de la SARL SEJM la part des bénéfices taxables correspondant à ses droits dans la SCI du 6 rue Vineuse et par voie de conséquence, a rapporté ces bénéfices au résultat d'ensemble de la SARL, nonobstant la circonstance que la SCI n'est pas fiscalement intégrée au groupe SEJM. 4. Par ailleurs, en vertu de l'article 223 A du code général des impôts, une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe. Dans ce cas, les sociétés du groupe restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats qui peuvent être vérifiés dans les conditions prévues par les articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales. Aux termes de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " (...) / Lorsqu'en application des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts la société mère d'un groupe est amenée à supporter les droits et pénalités résultant d'une procédure de rectification suivie à l'égard d'une ou de plusieurs sociétés du groupe, l'administration adresse à la société mère, préalablement à la notification de l'avis de mise en recouvrement correspondant, un document l'informant du montant global par impôt des droits, des pénalités et des intérêts de retard dont elle est redevable. L'avis de mise en recouvrement, qui peut être alors émis sans délai, fait référence à ce document. / (...) ". 5. Il résulte de ces dispositions qu'alors même que la société mère d'un groupe fiscal intégré s'est constituée seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur le résultat d'ensemble déterminé par la somme algébrique des résultats des différentes sociétés du groupe, celles-ci restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats et que c'est avec ces dernières que l'administration fiscale mène la procédure de vérification de comptabilité et de redressement, dans les conditions prévues aux articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales. Les redressements ainsi apportés aux résultats déclarés par les sociétés membres du groupe constituent cependant les éléments d'une procédure unique conduisant d'abord à la correction du résultat d'ensemble déclaré par la société mère du groupe, puis à la mise en recouvrement des rappels d'impôt établis à son nom. L'information qui doit être donnée à la société mère avant cette mise en recouvrement peut être réduite à une référence aux procédures de redressement qui ont été menées avec les sociétés membres du groupe et à un tableau chiffré qui en récapitule les conséquences sur le résultat d'ensemble, sans qu'il soit nécessaire de reprendre l'exposé de la nature, des motifs et des conséquences de chacun des chefs de redressement concernés. En outre, un tel document, à visée informative, ne constitue pas un élément d'une procédure d'imposition contradictoire conduite avec la société tête de groupe au sens des dispositions des articles L. 57 et suivants du livre des procédures fiscales. 6. Il résulte de l'instruction que, à la suite des rectifications opérées sur le résultat de ses filiales et sur son résultat propre, la SARL SEJM a été informée par courrier du 16 octobre 2015 des rectifications opérées sur le résultat de ses filiales et de la rectification du résultat d'ensemble du groupe ainsi que des droits et pénalités résultant de ces rectifications, objet de l'avis de mise en recouvrement du 16 novembre 2015. En outre, les dispositions précitées de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, qui n'ont pas pour objet de permettre l'engagement d'un débat contradictoire entre l'administration fiscale et la société mère, imposent seulement que cette dernière soit informée des conséquences financières du contrôle de l'une de ses filiales avant l'avis de mise en recouvrement des impositions correspondantes. Dès lors, les erreurs ayant pu entacher la lettre d'information adressée à la SARL SEJM en qualité de tête de groupe sont sans incidence. Enfin, eu égard à ce qui a été dit au point précédent, la circonstance que ces rectifications incluent les rectifications apportées aux résultats de la SCI du 6 rue Vineuse, alors même qu'elle ne fait pas partie du groupe fiscal intégré que constitue la SARL avec, notamment, la SAS Etablissements Salvi, est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition. Par suite, le moyen soulevé doit être écarté. Sur le bien-fondé des impositions en litige : En ce qui concerne le résultat fiscal imposable rectifié : 7. D'une part, si la SARL SEJM soutient que l'administration fiscale n'a pas tenu compte, lors du calcul du résultat imposable rectifié de la société, prise en qualité de membre du groupe dont elle constitue la tête, pour l'exercice 2009, d'un déficit antérieur à la période d'intégration de 7 161 euros, il résulte de l'instruction et notamment du courrier adressé par le service au contribuable le 16 octobre 2015, préparatoire à l'émission de l'avis de mise en recouvrement du 16 novembre 2015, qu'il a été tenu compte de ce déficit pour la détermination du résultat du groupe au titre de cet exercice. 8. D'autre part, il résulte de l'instruction et des différents éléments communiqués dans le cadre de la présente instance, notamment des pièces produites par l'administration le 6 juillet 2022 en réponse à une mesure d'instruction adressée à l'administration fiscale par la Cour le 30 juin précédent, que, s'agissant de la rectification des résultats de la SARL SEJM, prise en qualité de membre du groupe dont elle constitue la tête, au titre de l'exercice 2010, l'administration fiscale, d'une part, en réponse aux observations du contribuable du 10 octobre 2013, a abandonné les rehaussements opérés sur les provisions relatifs aux sociétés SDI, FRD et Bineau, soit un total de 3 569 619 euros, et, d'autre part, a également abandonné la réintégration de la charge exceptionnelle d'un montant de 2 070 620 euros à la suite de l'interlocution du 25 novembre 2014. Ainsi, les rehaussements de base ont été réduits de 12 432 738 euros à 6 792 509 euros. Par ailleurs, il ressort du courrier adressé le 10 février 2015 à la suite de cette interlocution, et notamment des conséquences financières qui lui sont annexées, que la base d'imposition de la SARL au titre de cet exercice a été réduite à 1 952 548 euros après imputation d'un déficit au titre d'exercices antérieurs de 4 394 286 euros, conduisant à une imposition supplémentaire, au titre de l'impôt sur les sociétés et de la contribution sur cet impôt, hors majorations, de 650 849 euros. Par suite, et dès lors que les rectifications apportées aux résultats de la SAS Etablissements Salvi au titre de l'exercice 2010 s'établissaient à 19 498 euros, et que celles apportées aux résultats de la SCI du 6 rue Vineuse, avant dégrèvement contentieux, au titre de ce même exercice, s'établissaient à 449 145 euros, ainsi que ceci ressort du courrier du service du 16 octobre 2015 préparatoire à l'émission de l'avis de mise en recouvrement du 16 novembre 2015, la SARL SEJM est fondée à soutenir que le montant de l'imposition établie par cet avis à la charge de la SARL SEJM, en qualité de tête de groupe, pour un montant en droits de 2 420 384 euros, correspondant notamment à la prise en compte du résultat imposable redressé de la SARL SEJM en qualité de membre du groupe au titre de 2010 ne tient pas compte du report déficitaire de 4 394 286 euros mentionné ci-dessus, indépendamment des dégrèvements intervenus par la suite à titre contentieux et qui ont eu pour effet de ramener le montant de ces droits à 2 221 360 euros. Par suite, il y a lieu de prononcer la réduction des impositions en litige, pénalités comprises, correspondant à la prise en compte, au titre du résultat imposable de la SARL SEJM en qualité de membre du groupe pour l'exercice 2010, du déficit reportable de 4 394 286 euros mentionné ci-dessus. En ce qui concerne les provisions litigieuses : 9. D'une part, aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges celles-ci comprenant notamment 1° les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'œuvre (...) /Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais. / 5° les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à la condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice et figurent au relevé des provisions prévu à l'article 54 ". Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provisions et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice et qu'elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées, à cette date, par l'entreprise. Par ailleurs, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable de justifier tant du montant des provisions qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. 10. D'autre part, les associés d'une société relevant du régime fiscal de l'article 8 du code général des impôts étant tenus au paiement des dettes de celle-ci à l'égard de ses créanciers, une créance sur une société de cette forme ne peut être considérée comme douteuse que si elle est reconnue comme telle non seulement à l'égard de la société associée elle-même, mais également à l'égard des autres membres associés. 11. Il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification du 5 juin 2013 qu'à l'occasion de la vérification de comptabilité diligentée à l'égard de la SARL SEJM, l'administration a constaté que cette société détenait, au 31 décembre des exercices 2010 et 2011, au titre des créances déclarées, des avances consenties en compte courant de montants globaux respectifs de 9 706 199 et 9 726 103 euros, dont 4 917 360 et 4 937 666 euros pour la SNC Société Parisienne d'Immobilier et 1 219 220 et 1 230 750 euros pour la SCI du 6 rue Vineuse. La SARL SEJM fait valoir que des avances en compte courant ont été régulièrement consenties notamment à ces sociétés depuis 1995, année d'obtention d'un plan de continuation pour l'ensemble des sociétés du groupe et que ces avances répondent à " l'intérêt financier du groupe " afin de couvrir le risque d'irrécouvrabilité des sociétés bénéficiaires des avances consenties. L'administration, estimant que la procédure de redressement en cause avait pris fin en 2005, a réintégré ces provisions au titre de l'exercice 2010 dans les résultats de la SARL SEJM en qualité de membre du groupe dont elle est la tête, en tant que les avances consenties relevaient d'un acte anormal de gestion, la justification du taux de provision (100 %) n'étant en outre pas justifiée et aucun élément ne rendant probable un risque de ne pas pouvoir mobiliser ces créances à la date de clôture de l'exercice en litige. Si la SARL SEJM soutient que son intérêt à consentir ses avances doit être apprécié au regard de la situation de M. B..., autre associé de ces sociétés, lequel était titulaire de comptes courants débiteurs dans ces sociétés correspondant à des affectations de quotes-parts déficitaires, et qu'en conséquence les avances en litige visent à permettre à cet associé de ne plus être débiteur, il résulte de ces éléments que les avances consenties ne l'ont pas été dans l'intérêt de M. B... en qualité d'associé de ces sociétés, dont il ne détient d'ailleurs que 1 % des droits, mais dans l'intérêt de M. B... en qualité de débiteur de ces sociétés, en permettant notamment de combler les déficits portés en compte courant. En outre, s'agissant des droits de la société requérante dans ces sociétés, l'intérêt à consentir ces avances ne ressort pas de l'instruction, ces sociétés n'ayant qu'une activité résiduelle dépourvue de liens d'affaires avec elle. La SARL SEJM ne justifie d'ailleurs d'aucun événement rendant probable, à la clôture de l'exercice 2010, un risque de ne pouvoir mobiliser les créances en cause. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré les provisions litigieuses. 12. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL SEJM est seulement fondée à demander à la Cour de prononcer la réduction des impositions, et des pénalités correspondantes, auxquelles elle a été assujettie, en qualité de tête de groupe, au titre de l'exercice 2010, résultant de la prise en compte, au titre du résultat imposable de la SARL SEJM en qualité de membre du groupe pour cet exercice, du déficit reportable de 4 394 286 euros mentionné au point 8 du présent arrêt, et de réformer en conséquence le jugement entrepris. Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 13. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de la SARL SEJM, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.D E C I D E : Article 1er : Les bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés de la SARL SEJM prise en qualité de membre du groupe dont elle constitue la tête sont réduites de 4 394 286 euros au titre de l'exercice 2010. Article 2 : La SARL SEJM est déchargée des impositions, et des pénalités correspondantes, auxquelles elle a été assujettie au titre de 2010 en qualité de tête de groupe résultant de la réduction de la base d'imposition mentionnée à l'article 1er du présent arrêt.Article 3 : Le jugement n° 1801008, 1801010 du tribunal administratif de Paris du 23 janvier 2020 visé ci-dessus est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2 du présent arrêt.Article 4 : L'Etat versera à la SARL SEJM une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL SEJM est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée (SARL) SEJM et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.Copie en sera adressée à l'administratrice des finances publiques chargée de la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président,- Mme Boizot, première conseillère,- Mme Lorin, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 octobre 2022. La rapporteure, S. A...Le président, S. CARRERE La greffière, C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.N° 20PA00988 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois. Par un jugement n° 2114447 du 22 décembre 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du préfet de police en date du 10 octobre 2021 en tant qu'il refuse à M. A... l'octroi d'un délai de départ volontaire et qu'il prononce à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 21 janvier 2022, le préfet de police demande à la Cour : 1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement n° 2114447 en date du 22 décembre 2021 en tant qu'il annule les décisions du 10 octobre 2021 du préfet de police refusant d'accorder un délai de départ volontaire à M. A... et portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois ainsi que celle le signalant dans le système d'information Schengen ; 2°) de rejeter la demande de l'intéressé. Il soutient que : - le comportement de M. A... constitue une menace à l'ordre public et que la durée d'interdiction de trois ans n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation ; il existe un risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire ; - les autres moyens soulevés par le requérant en première instance ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense enregistré le 3 mars 2022, M. A..., représenté par Me Bertaux, demande à la Cour : 1°) de rejeter la requête ; 2°) d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois ; 3°) d'enjoindre au préfet de police de procéder à son effacement du fichier SIS (système d'information Schengen) ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me Bertaux sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Il fait valoir que : En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen personnel de sa situation ; - elle méconnaît le droit d'être entendu ; - elle a violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.En ce qui concerne la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire : - elle est fondée sur l'obligation de quitter le territoire français, elle-même illégale ; - elle est entachée d'une insuffisance de motivation ; - elle est entachée de méconnaissance des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'une erreur manifeste d'appréciation sur le risque de fuite. En qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans : - elle est fondée sur l'obligation de quitter le territoire français, elle-même illégale ; - elle méconnaît le droit à être entendu ; - elle est insuffisamment motivée et entachée de défaut d'examen de la situation du requérant ; - elle est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de qualification des faits ; - elle est entachée de méconnaissance de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est illégale en l'absence de l'information spéciale prévue par l'article R. 613-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination : - elle est fondée sur l'obligation de quitter le territoire français, elle-même illégale ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - et les observations de Me Bertaux pour M. A.... Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 10 octobre 2021, le préfet de police a obligé M. A..., ressortissant malien né le 13 juillet 2003 à Bamako (Mali), à quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays à destination duquel il pourra être éloigné et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois. Le préfet de police fait appel du jugement du 22 décembre 2021 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du préfet de police en date du 10 octobre 2021 en tant qu'il refuse à M. A... l'octroi d'un délai de départ volontaire et qu'il prononce à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois. Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif : En ce qui concerne la décision portant refus d'un délai de départ volontaire : 2. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Aux termes de l'article L. 612-3 de ce code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...). ". 3. Pour annuler la décision contestée devant lui, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a, tout d'abord, estimé que le comportement de M. A... ne pouvait être regardé comme présentant une menace à l'ordre public en l'absence de tout élément permettant d'établir des liens entre l'intéressé et les personnes prises en flagrant délit de recel d'objets volés, ces faits n'ayant donné lieu à aucune condamnation. Puis, il a estimé que si M. A... n'avait pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, il n'était majeur que depuis trois mois à la date de la décision attaquée et avait entrepris des démarches, ralenties par le confinement, afin d'obtenir les documents administratifs lui permettant de déposer une demande de titre de séjour. 4. Toutefois, il est constant que M. A... a été interpellé par les services de police pour participation à un vol sous menace d'une arme, le jour de la commission de cet acte, et avoir été le jour même formellement reconnu par la victime qui a porté plainte comme en atteste la procédure d'interpellation. Ainsi, alors même qu'il n'aurait pas été condamné pour ces faits à la date à laquelle sa décision est intervenue, le préfet de police pouvait fonder sa décision sur ces circonstances dans le but de prévenir toute atteinte à l'ordre public. En outre, il a reconnu lors de son audition être connu des services de police pour des faits de recel de vol. De plus, aucune pièce du dossier ne permet de démontrer que M. A... a entrepris des démarches pour régulariser sa situation administrative auprès des services de la préfecture ou de justifier de circonstances qui auraient été de nature à faite obstacle à ce qu'il saisisse, dans les délais requis, l'administration aux fins d'admission au séjour. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé ait pu présenter aux services de police des documents d'identité ou de voyage en cours de validité et qu'il ait justifié d'un hébergement stable. Si au cours de son audition par les services de police, M. A... a déclaré demeurer au 148 avenue Jean Jaurès à Pantin, la seule attestation d'hébergement produite dans la cadre de la présente instance, qui est postérieure à l'arrêté attaqué, est insuffisante pour établir le caractère effectif et permanent de sa résidence à l'adresse précitée. 5. Il résulte de ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler la décision portant refus d'un délai de départ volontaire et, par voie de conséquence, l'arrêté lui interdisant de retourner sur le territoire français pour une durée de trente-six mois, le premier juge a considéré qu'il avait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard du risque de fuite. 6. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif et la Cour. En ce qui concerne les autres moyens soulevés par M. A... : En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire : 7. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, pour obliger M. A... à quitter le territoire français, l'arrêté préfectoral litigieux vise les textes dont il fait application, notamment les dispositions applicables au code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'arrêté précise par ailleurs les éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de M. A... qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, qu'il est défavorablement connu des services de police pour avoir commis un vol avec arme en réunion dans un lieu destiné à l'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs. La décision litigieuse fait état de sa situation familiale et de ce qu'il ne justifie pas de liens privés et familiaux intenses et stables en France. Cette motivation, qui révèle l'examen de la situation personnelle de l'intéressé, n'est pas entachée d'insuffisance ni n'est stéréotypée. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué et de l'absence d'examen de sa situation personnelle doivent être écartés. 8. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...). ". 9. Il ressort des pièces du dossier que M. A... allègue être entré sur le territoire français depuis quatre années. Par ailleurs, il est défavorablement connu des services de police pour sa participation à un vol avec arme et des faits de recel de vol. S'il se prévaut de sa scolarisation pendant une année et demie en unité pédagogique pour élève allophone arrivant et son inscription en certificat d'aptitude professionnelle " cuisine ", M. A... est célibataire et sans enfant. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation du requérant. En ce qui concerne la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire : 10. En premier lieu, l'arrêté litigieux cite l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article L. 612-3 de ce code, qui constituent le fondement en droit de la décision refusant le délai de départ volontaire. Il indique que le comportement de l'intéressé constitue une menace pour l'ordre public, que l'intéressé ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour et qu'il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée est insuffisamment motivée. 11. En second lieu, les conclusions dirigées contre la décision d'obligation de quitter le territoire français ayant été rejetées par le jugement n° 2114447 en date du 22 décembre 2021, il s'ensuit que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire doit être écarté. En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire pour une durée de trois ans : 12. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre l'interdiction de retour sur le territoire français, doit être écarté. 13. En deuxième lieu, la décision prononçant l'interdiction de retour sur le territoire français à l'encontre de M. A... vise notamment les articles L. 612-6 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort également des termes de cette décision que le préfet a pris en compte, au vu de la situation de M. A..., l'ensemble des critères prévus par les dispositions précitées pour fixer la durée de l'interdiction de retour en relevant, d'une part, que l'intéressé, qui a déclaré être entré en France depuis quatre ans, a été signalé par les services de police le 9 octobre 2021 pour vol avec arme en réunion dans un lieu destiné à l'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs. D'autre part, la décision mentionne que la mesure d'éloignement ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale, ce dernier se déclarant célibataire et sans enfant à charge, et que son comportement constitue une menace pour l'ordre public. Ainsi, la décision en litige, qui comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui la fondent, est suffisamment motivée. 14. En troisième lieu, M. A... soutient qu'il n'a pas été informé préalablement de ce que la mesure d'éloignement était également susceptible d'être assortie d'une interdiction temporaire du territoire. Aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires réglées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...). ". Aux termes de l'article 51 de cette charte : " 1. Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions et organes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux États membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union. En conséquence, ils respectent les droits, observent les principes et en promeuvent l'application, conformément à leurs compétences respectives. / (...). ". 15. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt C-141/12 et C-372/12 du 17 juillet 2014), que l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions par une autorité d'un Etat membre est inopérant. Enfin, une atteinte au droit d'être entendu garanti par les principes généraux du droit de l'Union européenne n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision. 16. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. A... a été entendu par un agent de police judiciaire le 9 octobre 2021 et qu'il a pu à cette occasion présenter des observations. Il ne précise par ailleurs pas en quoi il disposait d'informations nouvelles et pertinentes tenant à sa situation personnelle ou familiale qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise la décision en litige et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à son édiction. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement, ne peut qu'être écarté. 17. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés aux points 4 et 9, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation et ne méconnaît pas les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 18. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 613-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel est notifiée une interdiction de retour sur le territoire français est informé du caractère exécutoire de cette décision et de ce que la durée pendant laquelle il lui est interdit de revenir sur le territoire commence à courir à la date à laquelle il satisfait à son obligation de quitter le territoire français. / Il est également informé des conditions d'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français mentionnées à l'article R. 711-1, ainsi que des conditions dans lesquelles il peut justifier de sa sortie du territoire français conformément aux dispositions de l'articleR. 711-2. ". 19. Les dispositions précitées de l'article R. 613-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile définissent les informations, figurant notamment aux articles R. 711-1 et R. 711-2 du même code, qui doivent être communiquées à un étranger faisant l'objet d'une interdiction de retour sur le territoire français, postérieurement au prononcé de cette interdiction. Dès lors, ces dispositions, qui sont propres aux conditions d'exécution de l'interdiction, sont sans incidence sur sa légalité, et ne peuvent être utilement invoquées au soutien de conclusions tendant à son annulation. 20. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à demander l'annulation des articles 1er et 2 du jugement du 10 octobre 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil et le rejet de la demande soumise par M. A... devant ce tribunal tendant à l'annulation des décisions du 10 octobre 2021 par lesquelles M. A... s'est vu refuser l'octroi d'un délai de départ volontaire et s'est vu interdire le retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois. D E C I D E : Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement n° 2114447 du 22 décembre 2021 sont annulés.Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Montreuil et ses conclusions d'appel présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. C... A....Copie en sera adressée au préfet de police.Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- Mme Boizot, première conseillère,- Mme Loroin, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 octobre 2022.La rapporteure,S. B...Le président,S. CARRERELa greffière,C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.N° 22PA00307 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit. Par un jugement n° 2007989 du 16 mars 2021, le tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 6 juillet 2020, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement à M. B... d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 avril 2021 et le 22 avril 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2007989 du 16 mars 2021 du tribunal administratif de Montreuil ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montreuil. Il soutient que : - c'est à tort que les premiers juges ont accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le tribunal ne pouvait prendre en considération des éléments de fait postérieurs à la décision attaquée ou ceux qui n'avaient pas été portées à la connaissance de l'administration ; - les autres moyens soulevés en première instance par M. B... ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2021, M. B..., représenté par Me Masilu conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par le préfet ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant ivoirien né le 27 juillet 1979, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité de parent d'enfant français. Par un arrêté du 6 juillet 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il devait être éloigné. Le préfet de la Seine-Saint-Denis fait régulièrement appel du jugement du 16 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable à la date de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...). ". 3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est père d'un enfant de nationalité française né le 6 décembre 2009. Il a bénéficié de titres de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile entre le 22 décembre 2010 et le 18 décembre 2019. Pour refuser le renouvellement du titre de séjour de M. B..., sur le fondement des mêmes dispositions, le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur l'absence de démonstration de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de son enfant, par la seule production de trois ordres de paiement établis aux mois d'août, novembre et décembre 2019. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, susceptibles d'être prises en considération dans le cadre de la requête de première instance comme en appel dès lors qu'elles révèlent une situation de faits antérieurs et ont été soumises à l'instruction contradictoire diligentée par le juge, que M. B... justifie à la date de l'arrêté en litige avoir versé mensuellement au bénéfice de la mère de l'enfant, par virements bancaires, chèques régulièrement encaissés et mandat, des sommes comprises entre 100 et 200 euros à compter du mois de février 2019. Si les sommes ainsi versées ont pu être inférieures à celle fixée à hauteur de 200 euros mensuels par un jugement avant dire-droit du 15 mai 2020 rendu par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Bobigny, ce jugement n'a toutefois été rendu exécutoire qu'à compter de sa signification par voie d'huissier le 24 juillet 2020, soit postérieurement à l'arrêté en litige. Par ailleurs, le juge, saisi successivement par les deux parents aux mois d'août et septembre 2019, a constaté qu'ils entretenaient des relations très dégradées et que la mère de l'enfant s'opposait à des rencontres du père avec l'enfant, l'exercice aléatoire et distancé des droits de visite du père étant contraire au bien-être de l'enfant. Aux termes de ce jugement, et dans l'attente de l'intervention d'un rapport d'expert, l'autorité parentale est exercée conjointement et M. B... bénéficie des droits de garde un week-end sur deux ainsi que les vacances scolaires. Il ressort ainsi de ces éléments que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'était pas légalement fondé à refuser le renouvellement de la carte de séjour sollicitée par M. B... et avait méconnu les dispositions de l'article L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 4. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 6 juillet 2020, lui a enjoint de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par voie de conséquence, les conclusions de sa requête doivent être rejetées. Sur les frais liés à l'instance : 5. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, une somme de 1 200 euros à verser à M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête du préfet de la Seine-Saint-Denis est rejetée. Article 2 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de M. B... présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. C... B.... Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis. Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président, - Mme Boizot, première conseillère, - Mme Lorin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 28 octobre 2022. La rapporteure, C. A... Le président, S. CARRERE La greffière, C. DABERT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N°21PA01950
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'association Alliance pour la recherche en cancérologie (APREC) a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir le courrier du 22 mai 2017 par lequel le directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a refusé de la labelliser en tant que structure tierce pour la conduite de recherches biomédicales. Par un jugement n° 1712217/6-3 du 4 juillet 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 19PA02902 du 1er décembre 2020, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête de l'APREC et les conclusions présentées par l'AP-HP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par une décision n° 449254 du 23 décembre 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi formé par l'APREC, a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire à la Cour. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 5 septembre 2019, 5 mars et 4 novembre 2020, 24 février et 22 août 2022, l'APREC, représentée par Me Scanvic, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 4 juillet 2019 du Tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler le courrier du 22 mai 2017 du directeur de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ; 3°) d'enjoindre à l'AP-HP de la labelliser en qualité de structure tierce dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de reprendre l'instruction de sa demande de labellisation dans le même délai et sous la même astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'AP-HP la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 22 mai 2017 sont recevables, dès lors que cette mesure lui fait grief en ce qu'elle ne lui permet pas de présenter sa candidature à une convention tripartite conclue par l'AP-HP ; le tribunal a estimé à tort qu'il s'agissait d'une mesure préparatoire à la conclusion d'un contrat, lequel ne sera pas un acte administratif relevant du droit de la commande publique ; - il ressort des termes de la décision du Conseil d'Etat du 23 décembre 2021 que sa demande de première instance est recevable ; - la décision du 22 mai 2017, qui constitue une décision qui refuse un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, n'est pas suffisamment motivée ; - elle est entachée d'un vice de procédure, l'AP-HP ayant consulté une commission qui n'a été prévue et organisée par aucun texte ; - l'AP-HP ne pouvait légalement mettre en œuvre une procédure de labellisation, qui n'est prévue par aucun texte ; - en admettant que les structures tierces doivent être désignées par l'établissement de santé et que ce dernier peut prévoir des conditions supplémentaires à celles fixées par le décret du 16 novembre 2016, le directeur général de l'AP-HP n'est pas compétent pour édicter ces conditions supplémentaires ; - la politique de labellisation décidée par l'AP-HP a conduit à une forte diminution des essais cliniques. - elle a procédé à une inexacte application des dispositions de l'article R. 1121-3-1 du code de la santé publique s'agissant des conditions qui y sont définies pour la désignation des structures tierces ; elle est tenue de désigner comme structure tierce un organisme remplissant les conditions posées par cet article et ne peut prévoir des conditions supplémentaires ; - la décision contestée est entachée d'erreur d'appréciation quant aux qualités de l'association, alors par ailleurs que les projets de recherche ne sont pas connus ; les structures tierces ne peuvent être choisies qu'in concreto, en fonction de leur spécialité, de leur disponibilité et de leurs compétences, pour répondre concrètement à un projet de recherche particulier ; - l'AP-HP a commis un détournement de pouvoir, dès lors qu'elle cherche à privilégier la Fondation AP-HP pour la recherche et à éliminer les associations dites de service. Par des mémoires en défense enregistrés les 14 février 2020, 21 juin et 31 août 2022, l'AP-HP, représentée par Me Memlouk, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de l'APREC sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la demande de l'APREC est irrecevable, dès lors que l'intéressée disposera, le cas échéant, de la faculté d'exercer un recours en contestation de la validité du contrat administratif que constituera une convention tripartite ; - à titre principal, le Conseil d'Etat a qualifié la labellisation mise en place par l'AP-HP de " préalable nécessaire à la conclusion d'une convention unique " ; il s'ensuit que le courrier de refus de labellisation est l'équivalent d'un courrier d'information d'un candidat non retenu dans le cadre d'une procédure de passation d'un marché public et dans ces conditions, la décision de rejet ne peut être contestée, hors référés précontractuels, que dans le cadre d'un recours Tarn-et-Garonne dans les conditions précisées par la décision n° 358994 du Conseil d'Etat du 4 avril 2014 ; - l'APREC est dépourvue d'intérêt à agir contre l'acte contesté, car elle n'est lésée, comme elle le fait d'ailleurs valoir, par la conclusion d'aucune convention tripartite ; - les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ; - les conséquences de la décision contestée, et plus généralement de la procédure de labellisation, décrites par la requérante sont erronées et sont, en tout état de cause, sans incidence sur la décision en litige ; - la Fondation AP-HP pour la recherche ne fait pas l'objet d'un choix quasi exclusif dans le cadre de la recherche médicale de l'AP-HP ; - son objet principal n'est pas de financer le fonctionnement de l'AP-HP contrairement aux allégations de la requérante. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique, - et les observations de Me Scanvic, représentant l'Alliance pour la recherche en cancérologie et les observations de Me Juquin, avocat de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Considérant ce qui suit : 1. Par une note du 24 janvier 2017 publiée sur son site internet, l'AP-HP a lancé un appel à candidature en vue de la " labellisation des structures tierces à la convention unique dans le cadre des essais industriels " prévue au IV de l'article L. 1121-16-1 du code de la santé publique. Par un courrier du 22 mai 2017, le directeur général de l'AP-HP a informé le président de l'association Alliance pour la recherche en cancérologie (APREC) que sa candidature à la labellisation n'avait pas été retenue. Par un jugement du 4 juillet 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de l'APREC tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de ce courrier. Par un arrêt du 1er décembre 2020, la Cour a rejeté l'appel de l'APREC dirigé contre ce jugement. Par une décision du 23 décembre 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi formé par l'APREC, a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire à la Cour. Sur la recevabilité de la demande de première instance : 2. Il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que le courrier du 22 mai 2017 par lequel le directeur général de l'AP-HP a refusé d'accorder à l'APREC le label de structure tierce à la convention unique prévue au IV de l'article L. 1121-16-1 du code de la santé publique dans le cadre des essais industriels impliquant l'AP-HP ne s'inscrivait dans le cadre de la conclusion d'aucune convention unique en particulier. Dans ces conditions, ce courrier ne peut être regardé comme présentant le caractère d'un acte préparatoire dans le cadre d'une procédure mise en œuvre en vue de la conclusion d'une convention unique. Il s'ensuit que doit être écartée la fin de non-recevoir opposée par l'AP-HP tirée de l'irrecevabilité de la demande de l'APREC au motif que la procédure de labellisation mise en œuvre par l'AP-HP et le courrier du 22 mai 2017 ne peuvent être, le cas échéant, contestés qu'à l'occasion du recours de pleine juridiction dont disposent les tiers pour contester la validité de la convention unique conclue par l'AP-HP dans les conditions définies par la décision n° 358994 du 4 avril 2014 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux. 3. Il résulte en outre du point 2 que la fin de non-recevoir opposée par l'AP-HP et tirée de ce que l'APREC ne disposerait pas d'un intérêt à agir contre le courrier du 22 mai 2017 au motif qu'il s'agirait d'un acte préparatoire et qu'elle ne serait pas lésée par la signature d'une convention unique à laquelle elle ne serait pas partie doit être écartée. 4. Si l'AP-HP entend soutenir que l'APREC ne dispose pas d'un intérêt suffisant à l'annulation du courrier du 22 mai 2017, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que le but statutaire unique de l'APREC est de " promouvoir, soutenir et développer la recherche (...) contre le cancer (...) selon des protocoles de coopération établis entre les services du GHU Paris-Est, de Cancer-Est, de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris et des groupes de recherche nationaux et internationaux ". En outre, il ressort du bilan comptable pour l'exercice 2015 qu'entre le quart et la moitié des ressources financières de l'APREC provient de sa participation à des recherches impliquant la personne humaine. Il suit de là que l'APREC dispose d'un intérêt suffisant à agir contre le courrier du 22 mai 2017 qui constitue un acte faisant grief à l'APREC, eu égard notamment à la portée attachée par l'AP-HP à la labellisation décrite par la note du 24 janvier 2017 comme un préalable nécessaire à la conclusion d'une convention unique portant sur des recherches impliquant la personne humaine se déroulant à l'AP-HP et à ses termes mêmes, invitant l'APREC à se rapprocher de l'AP-HP " pour déterminer les nouvelles modalités de collaboration, notamment à propos de vos salariés dont le changement d'employeur devrait être envisagé, le cas échéant ". 5. Il résulte des points précédents que la demande présentée par l'APREC devant le Tribunal administratif de Paris est, en tout état de cause, recevable. Sur les conclusions à fin d'annulation : 6. Aux termes de l'article L. 1121-1 de la santé publique, dans sa version applicable à la date de la décision contestée : " Les recherches organisées et pratiquées sur l'être humain en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales sont autorisées dans les conditions prévues au présent livre et sont désignées ci-après par les termes " recherche impliquant la personne humaine ". / Il existe trois catégories de recherches impliquant la personne humaine : / 1° Les recherches interventionnelles qui comportent une intervention sur la personne non justifiée par sa prise en charge habituelle ; / 2° Les recherches interventionnelles qui ne comportent que des risques et des contraintes minimes, dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ; / 3° Les recherches non interventionnelles qui ne comportent aucun risque ni contrainte dans lesquelles tous les actes sont pratiqués et les produits utilisés de manière habituelle. / La personne physique ou la personne morale qui est responsable d'une recherche impliquant la personne humaine, en assure la gestion et vérifie que son financement est prévu, est dénommée le promoteur. (...) / La ou les personnes physiques qui dirigent et surveillent la réalisation de la recherche sur un lieu sont dénommées investigateurs. (...) / Si, sur un lieu, la recherche est réalisée par une équipe, l'investigateur est le responsable de l'équipe et est dénommé investigateur principal. (...) ". Le IV de l'article L. 1121-16-1 du même code, dans sa version applicable à la date de la décision contestée, dispose que " Lorsqu'une recherche mentionnée au 1° et au 2° de l'article L. 1121-1 à finalité commerciale est réalisée dans des établissements de santé (...), le promoteur prend en charge les frais supplémentaires liés à d'éventuels fournitures ou examens spécifiquement requis par le protocole. / La prise en charge des frais supplémentaires fait l'objet d'une convention conclue entre le promoteur, le représentant légal de chacun des organismes mentionnés au premier alinéa du IV et, le cas échéant, le représentant légal des structures destinataires des contreparties versées par le promoteur. La convention, conforme à une convention type définie par arrêté du ministre chargé de la santé, comprend les conditions de prise en charge de tous les coûts liés à la recherche, qu'ils soient ou non relatifs à la prise en charge du patient. (...) ". 7. Aux termes de l'article R. 1121-3-1 du même code : " I.- Lorsqu'une recherche mentionnée au 1° et au 2° de l'article L. 1121-1 à finalité commerciale est réalisée dans des établissements de santé, ou des maisons ou des centres de santé, elle fait l'objet de la convention prévue au deuxième alinéa du IV de l'article L. 1121-16-1, entre le représentant légal du lieu de la recherche et le représentant légal du promoteur de la recherche. / Cette convention est dénommée convention unique. Elle est exclusive de tout autre contrat à titre onéreux conclu pour la recherche à finalité commerciale dont il s'agit dans l'établissement de santé, la maison ou le centre de santé concerné. (...) / Le promoteur est tenu de : / 1° Fournir gratuitement les produits faisant l'objet de la recherche, ou de les mettre gratuitement à disposition pendant le temps de la recherche, sauf dans les cas où la loi en dispose autrement ; / 2° Prendre en charge les frais définis ci-dessous qui sont engagés par l'établissement de santé, maison ou un centre de santé : / - d'une part, les frais de mise en œuvre du protocole de la recherche non liés à la prise en charge médicale du patient ou du volontaire sain, dénommés " coûts ", notamment les tâches d'investigation nécessaires à la recherche et les tâches administratives et logistiques liées à la recherche ; / - d'autre part, les frais supplémentaires, dénommés " surcoûts ", qui s'entendent des frais liés à la prise en charge médicale du patient ou du volontaire sain, et requis par la mise en œuvre du protocole. (...) / II.- Des contreparties prévues par la convention unique au titre de la qualité escomptée des données issues de la recherche impliquant la personne humaine peuvent être versées par le promoteur. / La convention peut prévoir que tout ou partie des contreparties mentionnées à l'alinéa précédent soient directement versées à une structure tierce distincte, participant à la recherche mais ne relevant pas de l'autorité du représentant légal de l'établissement ou de la maison ou du centre de santé où se déroule également la recherche. Des contreparties ne peuvent être accordées que si la structure tierce remplit les conditions suivantes : / 1° Elle est désignée par le représentant légal de l'établissement de santé, de la maison ou du centre de santé conformément au droit de la commande publique s'il y a lieu ; / 2° Elle dispose d'une gouvernance qui soit propre à la prémunir, ainsi que ses dirigeants, d'un risque de mise en cause de leur responsabilité, notamment au regard du risque de conflit d'intérêt ou de la violation des principes et règles de protection des personnes participant à la recherche ; / 3° Elle utilise les fonds reçus du promoteur à des fins de recherche. / III.- Le représentant légal de l'établissement de santé, maison ou centre de santé ainsi que le représentant légal du promoteur et, le cas échéant, le représentant légal de la personne morale tierce susmentionnée signent la convention. / L'investigateur responsable de la recherche dans l'établissement de santé, la maison ou le centre de santé, vise la convention, attestant ainsi qu'il en a pris connaissance. (...) ". En ce qui concerne la compétence du directeur général de l'AP-HP : 8. Il résulte des dispositions du 1° du II de l'article R. 1121-3-1 du code de la santé publique précitées que la structure tierce à la convention unique prévue par le IV de l'article L. 1121-16-1 du code de la santé publique est " désignée par le représentant légal de l'établissement de santé, de la maison ou du centre de santé conformément au droit de la commande publique s'il y a lieu ". L'article L. 6143-7 du même code prévoit que le directeur, président du directoire, conduit la politique générale de l'établissement, représente l'établissement dans tous les actes de la vie civile et agit en justice au nom de cet établissement. Le directeur est également compétent pour régler les affaires de l'établissement autres que celles énumérées aux 1° à 15° de cet article et autres que celles qui relèvent de la compétence du conseil de surveillance énumérées à l'article L. 6143-1 de ce code parmi lesquelles ne figurent pas la mise en œuvre d'une procédure en vue de la labellisation des structures tierces qui seront parties, le cas échéant, à la convention unique conclue dans le cadre de recherches biomédicales pratiquées sur l'être humain. 9. Il résulte du point précédent que le directeur général de l'AP-HP est non seulement compétent pour désigner la structure tierce à la convention unique prévue par le IV de l'article L. 1121-16-1 du code de la santé publique dans le respect des principes généraux du droit de la commande publique, mais qu'il peut aussi légalement décider de mettre en place une procédure de labellisation au terme de laquelle seules les structures tierces qui se seront vu accorder le label seront habilitées à recevoir le cas échéant des contreparties négociées avec les promoteurs des recherches impliquant la personne humaine auxquelles participe l'AP-HP en application des dispositions du II de l'article R. 1121-3-1 du code de la santé publique. Dans le cadre de cette procédure de labellisation, le directeur de l'AP-HP peut fixer des critères de sélection différents de ceux prévus par le II de l'article R. 1121-3-1 du code, lesquels concernent seulement les critères à remplir pour pouvoir bénéficier le cas échéant de contreparties financières versées par le promoteur de la recherche médicale. En ce qui concerne la procédure de labellisation : 10. Si le directeur général de l'AP-HP décide de mettre en place une procédure de sélection des structures tierces par l'octroi d'un label et, dès lors, que ce label constitue un préalable nécessaire à la désignation de ces structures tierces et à la conclusion par ces dernières d'une convention unique portant sur des recherches impliquant la personne humaine se déroulant à l'AP-HP, la procédure de labellisation doit, comme la désignation d'une structure tierce, être également soumise aux principes généraux du droit de la commande publique, en particulier au principe de transparence des procédures et au principe d'égalité de traitement des candidats. 11. La requérante soutient que la procédure de labellisation des structures tierces n'a pas été régulièrement appliquée par l'AP-HP dès lors qu'à l'issue de la procédure de sélection, l'AP-HP a établi un classement des candidatures au regard de la valeur scientifique des dossiers alors qu'aucun bilan scientifique, ni rapport d'activité n'étaient mentionnés dans la liste des pièces à fournir à l'appui des candidature et que, dans ces conditions, la valeur scientifique de sa candidature n'a nécessairement pas fait l'objet d'un examen. L'APREC doit ainsi être regardée comme soulevant le moyen tiré de la méconnaissance par l'AP-HP du principe de transparence des procédures. 12. Il ressort des termes de la note du 24 janvier 2017 par laquelle l'AP-HP a lancé un appel à candidature en vue de la " labellisation des structures tierces à la convention unique dans le cadre des essais industriels " prévue au IV de l'article L. 1121-16-1 du code de la santé publique que lors de l'examen des demande des structures souhaitant être labellisées " structure tierce ", l'AP-HP tiendrait compte des statuts de la structure, de l'existence de salariés chargés de l'accomplissement des prestations de service dans le cadre de la recherche médicale, de la gouvernance de la structure, du processus décisionnel au sein de la structure apprécié au regard de la tenue effective des conseils et des assemblées générales et la réalisation des relevés de décisions, de la comptabilité de la structure établie par la production des bilans et comptes de résultat des deux derniers exercices comptables, certifiés, le cas échéant, du respect de ses obligations fiscales, de la transparence de ses liens avec les industriels depuis 2015 et de la convention avec l'établissement de santé le cas échéant. A l'appui de sa demande, la structure devait ainsi fournir les exposés des motifs, le périmètre de son intervention, ses statuts, la liste de ses salariés, les déclarations d'intérêts de tous les membres de ses instances, les relevés de décisions des instances statutaires, le détail de l'ensemble des financements industriels dont elle a bénéficié depuis janvier 2015, les bilans et comptes des deux derniers exercices comptables, certifiés, le cas échéant, une attestation de régularité fiscale et les rapports moraux des deux dernières années. 13. Il ressort des termes de la décision du 22 mai 2017 que pour refuser d'accorder à l'APREC le label de structure tierce à la convention unique dans le cadre des essais industriels prévue au IV de l'article L. 1121-16-1 du code de la santé publique, l'AP-HP s'est fondée sur la circonstance qu'" en dépit de la qualité de la candidature de l'APREC ", cette dernière n'a pas été retenue, notamment, " eu égard au niveau élevé des dossiers présentés par les autres structures candidates ". Cependant, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'AP-HP ait informé les structures candidates que leurs demandes de label seraient examinées au regard d'éléments d'appréciation portant sur la qualité de leurs activités. En ne portant pas à la connaissance des candidats les critères de sélection relatifs à la qualité de leurs prestations de service dans le cadre de la recherche médicale qui, s'ils avaient été connus des structures candidates, étaient susceptibles d'avoir une influence sur la présentation de leurs dossiers de candidature, l'AP-HP a commis un manquement au principe de transparence des procédures. L'irrégularité de la procédure de labellisation ayant nécessairement privé la requérante d'une garantie, la décision du 22 mai 2017 doit être annulée. 14. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement ni d'examiner les autres moyens de la requête, que l'APREC est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sur les conclusions aux fins d'injonction : 15. Eu égard au motif d'annulation retenu par la Cour, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que l'AP-HP délivre à l'APREC le label de structure tierce à la convention unique dans le cadre des essais industriels. En revanche, il y a lieu d'enjoindre à l'AP-HP de procéder au réexamen de la candidature de l'APREC en vue d'obtenir ce label dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a toutefois pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés à l'instance : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association Alliance pour la recherche en cancérologie, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande l'AP-HP au titre des frais liés à l'instance. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, par application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 2 000 euros à verser à l'association Alliance pour la recherche en cancérologie. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1712217/6-3 du 4 juillet 2019 du Tribunal administratif de Paris et la décision du 22 mai 2017 du directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris sont annulés. Article 2 : Il est enjoint à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris de réexaminer la candidature de l'association Alliance pour la recherche en cancérologie en vue d'obtenir le label de structure tierce à la convention unique dans le cadre des essais industriels impliquant l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris versera à l'association Alliance pour la recherche en cancérologie la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de l'association Alliance pour la recherche en cancérologie est rejeté. Article 5 : Les conclusions présentées par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Alliance pour la recherche en cancérologie et à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Délibéré après l'audience du 5 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Le Goff, président de chambre, - M. Ho Si Fat, président assesseur, - Mme Larsonnier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2022. La rapporteure, V. A... Le président, R. LE GOFF La greffière, E. VERGNOL La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 21PA06696 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure La Fédération Rhône-Alpes de la protection de la nature (FRAPNA région) a demandé au tribunal administratif de Grenoble : 1°) d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2017 par lequel le préfet coordonnateur du massif des Alpes a autorisé l'aménagement d'une unité touristique nouvelle présentée par les communes de Sixt-Fer-à-Cheval et de Samoëns ; 2°) à défaut, et avant dire droit, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle relative au champ d'application de la directive n° 2001/42/CE afin de déterminer si une unité touristique nouvelle constitue " un plan ou programme " susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement au sens de cette directive ; 3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1707080 du 31 décembre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du préfet coordonnateur du massif des Alpes du 20 juillet 2017. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 28 février 2020, la commune de Sixt-Fer-à-Cheval, représentée par Me Poncin, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 31 décembre 2019 ; 2°) de rejeter la demande de la fédération Rhône-Alpes de la protection de la nature reprise par l'association France nature Environnement Auvergne Rhône Alpes présentée devant le tribunal administratif ; 3°) de mettre à la charge de l'association France nature Environnement Auvergne Rhône Alpes une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La commune de Sixt-Fer-à-Cheval soutient que : - la requête de la Fédération Rhône-Alpes de la protection de la nature (FRAPNA région) est irrecevable ; - le tribunal administratif a annulé l'arrêté d'autorisation UTN en considérant, à tort, que celui-ci devait faire l'objet d'une évaluation environnementale et que le projet ne respectait pas la qualité des sites et les grands équilibres naturels dès lors qu'il se développait dans un site d'une qualité remarquable avec des équilibres d'une grande sensibilité dont l'atteinte était avérée sans que les compensations prévues soient suffisantes ; -la cour administrative d'appel ne pourra qu'écarter les autres moyens du recours de première instance. Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mai 2020, l'association France nature Environnement Auvergne Rhône Alpes, représentée par Me Wormser : 1°) conclut au rejet de la requête ; 2°) demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Sixt-Fer-à-Cheval sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés. Par ordonnance du 18 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 11 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - La directive n° 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement, - le code de l'environnement, - le code de l'urbanisme, - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Fédi, président-assesseur, - les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public, - et les observations de Me Poncin, représentant la commune de Sixt-Fer-à-Cheval , et celles de Me Wormser, représentant l'association France nature Environnement Auvergne Rhône Alpes Considérant ce qui suit : 1. Par arrêté du 20 juillet 2017, le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, préfet coordonnateur du massif des Alpes, a autorisé une unité touristique nouvelle sur le territoire des communes de Sixt-Fer-à-Cheval et de Samoëns, dans le département de la Haute-Savoie. La Fédération Rhône-Alpes de la protection de la nature (FRAPNA région) a demandé l'annulation de cet arrêté, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux en date du 24 octobre 2017. La commune de Sixt-Fer-à-Cheval relève appel du jugement rendu le 31 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision d'autorisation. Sur la recevabilité de la demande de première instance : En ce qui concerne la capacité à agir de l'association requérante : 2. Il ressort des pièces du dossier que la requête a été introduite devant le tribunal administratif de Grenoble par l'association " Fédération Rhône-Alpes de la protection de la nature (FRAPNA région) ". S'il est vrai que les statuts de l'association arrêtés le 25 juillet 1995 et l'arrêté préfectoral du 25 août 2017 renouvelant l'agrément au titre de la protection de l'environnement indiquent " Union Régionale FRAPNA ", cette dénomination courante mais distincte de celle mentionnée par l'association requérante en première instance ne permet pas d'établir que cette dernière n'aurait aucune existence juridique et serait dans l'incapacité d'ester en justice, contrairement à ce qui est soutenu. En ce qui concerne la qualité pour agir du président de l'association requérante : 3. L'article 10 des statuts de l'association indique que " l'initiative de toute action en justice appartient au Bureau ou au Conseil d'administration qui statue par décision spéciale ". En l'espèce, le président de l'association a été habilité par le bureau, le 13 septembre 2017, à déposer des recours tant gracieux que contentieux contre l'arrêté en cause. En outre, si le juge doit s'assurer de la réalité de l'habilitation du représentant de l'association qui l'a saisi, lorsque celle-ci est requise par les statuts, il ne lui appartient pas, en revanche, de vérifier la régularité des conditions dans lesquelles cette habilitation a été adoptée. Par suite, la commune de Sixt-Fer-à-Cheval ne peut utilement invoquer la double circonstance qu'il n'est pas établi, d'une part, que la décision du bureau décidant d'engager l'action contentieuse ait été prise en application d'une décision du conseil d'administration, seul compétent pour décider des actions à mener en justice, d'autre part, que l'urgence particulière justifiait qu'il soit statué sur l'habilitation du président à poursuivre l'action en justice au contentieux, alors qu'à cette date aucun recours gracieux n'avait été présenté. En ce qui concerne le respect des délais de recours : 4. Alors même qu'il ressort des pièces du dossier que le recours gracieux a été reçu en préfecture le 21 septembre 2017 et non le 22 septembre 2017, contrairement à ce que soutient la commune de Sixt-Fer-à-Cheval, aucune pièce du dossier ne permet de démontrer que les formalités auraient été accomplies pour procéder à la publicité de l'arrêté litigieux. Par suite, en tout état de cause, et en l'absence de preuve d'une publicité régulière de l'acte contesté, le délai de recours contentieux ouvert pour contester l'arrêté n'a pas couru à l'encontre des tiers. Dans ces conditions, la commune de Sixt-Fer-à-Cheval ne peut utilement soutenir que la requête serait tardive, faute pour l'association d'apporter la preuve de la date de réception de son recours gracieux. En ce qui concerne la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'intervention et des demandes de FNE AURA : 5. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'arrêté ministériel du 13 mars 2020, que les dénominations Fédération Rhône-Alpes de la protection de la nature (FRAPNA région), Union Régionale FRAPNA, association France nature Environnement Auvergne Rhône Alpes et FNE-AURA désignent la même personne morale. Par suite, la circonstance que des mémoires postérieurs aient été produits par la FNE-AURA devant le tribunal administratif de Grenoble est sans incidence sur la recevabilité du recours contentieux. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la nécessité d'une évaluation environnementale : 6. Aux termes de l'article L. 122-16 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne : " Toute opération de développement touristique effectuée en zone de montagne et contribuant aux performances socio-économiques de l'espace montagnard constitue une "unité touristique nouvelle", au sens de la présente sous-section ". Les articles L. 122-17 et L. 122-18 du même code distinguent les unités touristiques dites " structurantes " et " locales ", dont les caractéristiques sont définies par décret en Conseil d'Etat. L'article L. 122-19 du même code prévoit que les unités touristiques nouvelles ne sont pas soumises au principe de l'extension de l'urbanisation en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, prévu aux articles L. 122-5 à L. 122-7 du même code. En vertu des articles L. 122-20 et L. 122-21 du même code, la création et l'extension d'unités touristiques nouvelles structurantes et locales sont prévues, respectivement, par le schéma de cohérence territoriale et par le plan local d'urbanisme dans les communes qui sont couvertes par ces documents, et pour celles qui ne le sont pas, par l'autorité administrative selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat. Pour ces dernières, l'article R. 122-6 de ce code, tel que modifié par décret du 11 août 2016, dispose que " Sont soumises à autorisation du préfet coordonnateur de massif, après avis de la commission spécialisée du comité de massif, les unités touristiques nouvelles ayant pour objet : / 1° La création, l'extension ou le remplacement de remontées mécaniques, lorsque ces travaux ont pour effet : (...) / b) L'augmentation de la superficie totale d'un domaine skiable alpin existant, dès lors que cette augmentation est supérieure ou égale à 100 hectares ; / 2° Des opérations de construction ou d'extension d'hébergements et d'équipements touristiques d'une surface de plancher totale supérieure à 12 000 mètres carrés, à l'exclusion des logements à destination des personnels saisonniers ou permanents des équipements et hébergements touristiques ". 7. D'après l'article 3 de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement : " Une évaluation environnementale est effectuée, conformément aux articles 4 à 9, pour les plans et programmes visés aux paragraphes 2, 3 et 4 susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ". Aux termes de l'article L. 122-4 du code de l'environnement, dans sa version applicable au jour de la décision attaquée, transposant l'article 3 de la directive 2001/42/CE : " II. - Font l'objet d'une évaluation environnementale systématique : / 1° Les plans et programmes qui sont élaborés dans les domaines de l'agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l'énergie, de l'industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l'eau, des télécommunications, du tourisme ou de l'aménagement du territoire et qui définissent le cadre dans lequel les projets mentionnés à l'article L. 122-1 pourront être autorisés ; (...) / III. - Font l'objet d'une évaluation environnementale systématique ou après examen au cas par cas par l'autorité environnementale : / 1° Les plans et programmes mentionnés au II qui portent sur des territoires de faible superficie s'ils sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ". 8. Si la création d'unités touristiques nouvelles, par leur inscription dans le schéma de cohérence territoriale, est prise en compte par l'évaluation environnementale réalisée dans le cadre de l'élaboration de ce document d'urbanisme, tel n'est pas le cas pour celles qui sont autorisées par l'autorité administrative dans les communes non couvertes par un tel document. Eu égard à sa nature et à sa portée, la décision préfectorale créant une telle unité touristique nouvelle constitue, non un projet, mais un plan ou programme au sens de la directive du 27 juin 2001 et de l'article L. 122-4 du code de l'environnement cités au point précédent. 9. Si la commune de Sixt-Fer-à-Cheval soutient que le dossier d'autorisation d'UTN contesté n'a pas été déposé, ni instruit dans le cadre juridique résultant de la loi Montagne II du 28 décembre 2016 et de son décret d'application du 10 mai 2017, mais avant l'entrée en vigueur des dispositions de la loi et donc sous le régime juridique antérieur toutefois la décision en litige, en tant que plan ou programme au sens de la directive du 27 juin 2001, devait faire l'objet d'une évaluation environnementale systématique. 10. En l'espèce, l'unité touristique nouvelle en cause, portant notamment sur la construction de 20 000 m² de surfaces habitables et la restructuration profonde du domaine skiable de la combe de Gers, est susceptible, de par son objet et son importance, d'avoir des incidences notables sur l'environnement. Il est, par ailleurs, constant que cette opération, présentée par les communes de Sixt-Fer-à-Cheval et de Samoëns, lesquelles ne sont pas couvertes par un schéma de cohérence territoriale, n'a fait l'objet d'aucune évaluation environnementale. Cette carence, au regard de l'importance des opérations autorisées, est nécessairement susceptible d'avoir eu une influence sur le sens de la décision contestée et d'avoir eu pour effet de nuire à l'information complète de la population. Par suite, c'est à bon droit, que les premiers juges ont considéré que la décision était entachée d'un vice de procédure tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-4 du code de l'environnement. En ce qui concerne l'erreur d'appréciation quant au respect de la qualité des sites et des grands équilibres naturels : 11. Aux termes de l'article L. 122-15 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Le développement touristique et, en particulier, la création d'une unité touristique nouvelle doivent prendre en compte les communautés d'intérêt des collectivités territoriales concernées et contribuer à l'équilibre des activités économiques et de loisirs, notamment en favorisant l'utilisation rationnelle du patrimoine bâti existant et des formules de gestion locative pour les constructions nouvelles. / La localisation, la conception et la réalisation d'une unité touristique nouvelle doivent respecter la qualité des sites et les grands équilibres naturels ". 12. Le projet litigieux, qui autorise une unité touristique nouvelle comprenant la création d'une nouvelle offre d'hébergement et la réalisation de la liaison Sixt-Flaine (combe de Gers) prévoit, d'une part, la réalisation de 20 000 m² de surface de plancher d'hébergements et de services touristiques correspondant à environ 1 700 lits, d'autre part, la restructuration des domaines skiables de ces stations par le démontage de la partie haute du domaine skiable des Vagnys, la réalisation de deux remontées mécaniques entre le domaine skiable de Sixt-Fer-à-Cheval et le secteur de la côte 2050, dans la combe de Gers, avec une gare de départ et d'arrivée, le remplacement du téléski du Gers par un télésiège à pinces fixes et la création d'une surface de 12,6 hectares de pistes de ski. 13. Il ressort des pièces du dossier que la combe de Gers, fait l'objet de plusieurs classements illustrant la qualité remarquable du site et la sensibilité des grands équilibres en place. Le secteur envisagé pour la création de pistes de ski, et l'installation de deux remontées mécaniques et d'un télésiège, est localisé dans une zone inscrite en réservoir de biodiversité au schéma régional de cohérence écologique. Ce territoire fait l'objet de deux classements en zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF). Celui-ci est ainsi couvert, dans sa quasi intégralité, par la ZNIEFF II du " Haut Faucigny " et, pour une large partie, par la ZNIEFF I de la " Combe de Sales ". Treize zones humides sont, par ailleurs, recensées à l'intérieur du périmètre des opérations. Il s'agit d'habitats abritant, sur le site, des espèces protégées, considérées pour un nombre important d'entre elles comme patrimoniales ou d'intérêt communautaire, certaines étant qualifiées de " vulnérable " tels l'aigle royal ou la chouette chevêchette, voire " en danger " ou " en danger grave " à l'instar du lynx d'Europe, de la caille des bois ou du gypaète barbu. Ce secteur est encore caractérisé par ses espaces de " perméabilité " assurant un rôle de corridor entre les réservoirs de biodiversité. Aux alentours immédiats des opérations se trouve une zone Natura 2000 et la zone d'importance pour la conservation des oiseaux (ZICO) du Haut-Giffre ainsi qu'une importante réserve naturelle. Le quatrième volet du dossier de demande relatif aux effets du projet précise que l'UTN engendre une perte importante de surfaces forestières dont l'effet est permanent et élevé du fait de l'implantation des gares de départ ainsi que du passage des câbles de remontée mécanique. Les effets de cette restructuration du domaine skiable sont qualifiés de permanents et d'élevés, d'une part, pour les mammifères terrestres en raison du déboisement et de l'exploitation du secteur, d'autre part, pour les oiseaux, comme l'aigle royal, le tétras-lyre et le lagopède. Ces dangers résultent non seulement, en phase de travaux, de la destruction de nichées, mais encore, pendant l'exploitation du site, des déclenchements d'avalanches et d'éventuelles collisions avec les câbles, qualifiés de sources de " dérangement voire de mortalité ". 14. En outre, l'appelante ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que le projet ne porte que sur une partie limitée du Grand Massif, dès lors que la restructuration du domaine skiable vise à équiper la combe de Gers, qui est la dernière zone du Grand Massif à avoir préservé son caractère naturel et sa vocation de refuge pour la faune sur un secteur de plus de 12 hectares. En se bornant essentiellement à soutenir, en cause d'appel, sans critiquer le jugement attaqué, s'agissant des espèces patrimoniales, des oiseaux hivernants, des rapaces nocturnes, des chiroptères, des odonates, que les inventaires ont bien été effectués, la commune de Sixt-Fer-à-Cheval ne démontre pas que le projet respecterait la qualité du site et les grands équilibres naturels. 15. Enfin, l'arrêté retient, au titre des prescriptions conditionnant la réalisation des opérations, en premier lieu, qu'un " comité de suivi soit particulièrement attentif " sur la prise en charge du démontage du téléski existant et son remplacement par un télésiège à pinces fixes, en deuxième lieu, que le conventionnement " Loi Montagne " soit bien suivi dans le temps pour assurer la pérennité des " lits chauds ", en troisième lieu, qu'un suivi des logements saisonniers soit mis en place , en quatrième lieu, que soient uniquement créées les trois pistes nécessaires au fonctionnement de la liaison entre les domaines skiables de Sixt-Fer-à-Cheval et Samoëns, associé à " un travail poussé d'intégration paysagère des remontées mécaniques " et enfin " que les compensations agricoles et forestières soient mises en place ". Ces mesures, qui ne sont définies ni dans leur portée, ni dans leur calendrier d'application, ne sont pas de nature à compenser l'atteinte à la qualité du site résultant du projet. De même, la collectivité ne peut utilement invoquer le bénéfice de l'article 3 de l'arrêté litigieux qui prévoit qu'un comité de suivi sera mis en place pour accompagner la mise en œuvre du projet avec un " suivi précis " dans le temps des différentes phases du projet, dès lors que cet article 3 ne prévoit aucune prescription précise de nature à limiter l'impact du projet sur la qualité du site. Par suite, le préfet de la région Provence-Alpes Côte d'Azur n'a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que le projet soumis à son autorisation respectait la qualité du site dans lequel il s'inscrit et les grands équilibres naturels. 16. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Sixt-Fer-à-Cheval n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 20 juillet 2017, par lequel le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, préfet coordonnateur du massif des Alpes, a autorisé une unité touristique nouvelle sur les communes de Sixt-Fer-à-Cheval et de Samoëns. Sur les frais liés au litige : 17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association France nature Environnement Auvergne Rhône Alpes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de Sixt-Fer-à-Cheval. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Sixt-Fer-à-Cheval une somme de 2 000 euros à verser à l'association France nature Environnement Auvergne Rhône Alpes, au titre de ces mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : La requête de la commune de Sixt-Fer-à-Cheval est rejetée. Article 2 : La commune de Sixt-Fer-à-Cheval versera à l'association France nature Environnement Auvergne Rhône Alpes une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Sixt-Fer-à-Cheval, à l'association France nature Environnement Auvergne Rhône Alpes et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Copie en sera adressée à la commune de Samoens. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Sophie Corvellec, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022. Le rapporteur, Gilles FédiLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY00888
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société Thyssenkrupp Ascenseurs a demandé au Tribunal administratif de Melun de la décharger de l'obligation de payer la somme de 230 610 euros mise à sa charge au titre du décompte des pénalités faisant suite à la résiliation du marché de maintenance des ascenseurs et des portes et barrières automatiques de garages conclu avec l'office public de l'habitat Kremlin-Bicêtre Habitat ou, à défaut, de réduire le montant de ces pénalités, et de condamner cet office à lui verser la somme de 38 736,68 euros TTC au titre du décompte de liquidation de ce marché. Par un jugement n° 1608874 du 11 décembre 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 février 2019 et le 16 avril 2020, la société Thyssenkrupp Ascenseurs, représentée par Me D..., demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de la décharger de l'obligation de payer la somme de 230 610 euros mise à sa charge au titre du décompte des pénalités ci-dessus mentionné ou, à défaut, de réduire le montant des pénalités, et de condamner l'office public de l'habitat Kremlin-Bicêtre Habitat à lui verser la somme de 38 736,68 euros TTC au titre du décompte de liquidation du marché de maintenance des ascenseurs et des portes et barrières automatiques de garages conclu avec cet office ; 3°) de faire application de l'article 15 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du lot 1 en désignant un expert et de lui préciser sa mission ; 4°) de mettre à la charge de Kremlin-Bicêtre Habitat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : En ce qui concerne le lot n° 1 : - les premiers juges ont commis une erreur manifeste d'appréciation et de droit en rejetant comme irrecevables ses demandes indemnitaires et de décharge des pénalités, faute de mise en œuvre par elle de la procédure d'expertise amiable prévue à l'article 15 du CCAP ; - d'une part, elle a tenté de régler amiablement son différend avec Kremlin-Bicêtre Habitat par son courrier du 19 novembre 2015 ; - d'autre part, il incombait à Kremlin-Bicêtre Habitat, qui a le premier considéré qu'il existait un différend, de mettre en œuvre le recours prévu à l'article 15 du CCAP ; notamment, Kremlin-Bicêtre Habitat ne pouvait prendre unilatéralement une décision de résiliation et d'application de pénalités d'un montant de 230 610 euros sans avoir préalablement sollicité le recours à l'expertise ; - enfin, ce recours, qui était en tout état de cause, compte tenu de la décision de Kremlin-Bicêtre Habitat de résilier le marché et d'appliquer des pénalités pour un montant disproportionné, dépourvu d'utilité et d'efficacité, lui était inopposable. En ce qui concerne le lot n° 2 : - les premiers juges ont également commis une erreur manifeste d'appréciation et de droit en rejetant comme irrecevables, sur le fondement de l'article 37.2 du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services (CCAG-FCS), ses demandes indemnitaires et à fin de décharge des pénalités, faute de transmission au pouvoir adjudicateur d'un mémoire de réclamation dans un délai de deux mois courant à compter du jour où le différend est apparu ; - d'une part, les premiers juges ne pouvaient considérer que le décompte de résiliation aurait été notifié le 28 février 2016 qui était un dimanche ; - d'autre part et en tout état de cause, Kremlin-Bicêtre Habitat n'apporte pas la preuve de la date de notification du décompte de résiliation. En ce qui concerne les pénalités : - les pénalités pour retard d'intervention et pour mauvais fonctionnement sont infondées dans leur principe dès lors qu'elles ne sont ni décrites ni justifiées par Kremlin-Bicêtre Habitat ; - elle a en outre multiplié les efforts pour mener à bien ses interventions, alors même qu'une grande partie des dysfonctionnements constatés ne relevaient pas de sa responsabilité ; - les pénalités appliquées, qui représentent plus de 359% du montant annuel hors taxes du lot 1 et plus de 1 935% du montant annuel hors taxes du lot 2 sont manifestement excessives. Par des mémoires en défense, enregistrés le 5 novembre 2019 et le 28 octobre 2020, l'office public de l'habitat Kremlin-Bicêtre Habitat conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Thyssenkrupp Ascenseurs de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - s'agissant du lot n°1, c'est à bon droit que les premiers juges ont opposé à la requérante le non-respect de la procédure contractuelle de règlement des litiges par voie d'expertise ; - le moyen tiré de ce qu'il lui aurait incombé d'engager la procédure d'expertise préalable prévue à l'article 15 du CCAP du lot 1 est infondé dès lors que ce n'est pas lui qui a saisi le tribunal administratif d'un différend relatif à l'exécution du marché ; - le moyen tiré de ce que le recours à l'article 15 du CCAP aurait été inutile est infondé ; - s'agissant du lot n° 2, la circonstance que le 28 février 2016, date de notification de la décision de résiliation et du décompte de liquidation, ait été un dimanche est sans incidence sur la validité de cette date en tant que point de départ du délai de deux mois prévu à l'article 37.2 du CCAG-FCS ; - le moyen tiré de ce que la date de notification du décompte de résiliation ne serait pas établie est infondé dès lors que son courrier de résiliation du 24 février 2016 comporte un tampon attestant de sa réception par la société requérante le 28 février 2016 ; - les pénalités contestées sont fondées tant dans leur principe que dans leur montant. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ; - le code de la construction et de l'habitation ; - le décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 ; - l'arrêté interministériel du 19 janvier 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services (CCAG-FCS) ; - le code de justice administrative. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C..., - les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public, - et les observations de Me Le Fustec, avocat de l'office public de l'habitat Kremlin-Bicêtre Habitat. Considérant ce qui suit : 1. L'office public de l'habitat Kremlin-Bicêtre Habitat a notifié à la société Thyssenkrupp Ascenseurs, le 3 août 2015, un " marché d'entretien portant sur les ascenseurs et ouvertures automatiques de garages de Kremlin-Bicêtre Habitat ", composé d'un lot n° 1 " Maintenance des ascenseurs ", d'un montant de 49.999,95 euros HT, prévu pour une durée d'un an renouvelable trois fois, et d'un lot n° 2 " Maintenance des portes et barrières automatiques de garages ", d'un montant de 2 640 euros HT, également prévu pour une durée d'un an renouvelable trois fois. Le marché a pris effet à la date du 1er septembre 2015. Estimant que l'exécution des deux lots du marché était très insatisfaisante, tant au regard du respect des délais prévus par les documents contractuels que du fonctionnement correct des installations, Kremlin-Bicêtre Habitat a mis en demeure le titulaire du marché, par lettre en date du 9 novembre 2015, de mettre en œuvre l'ensemble des prescriptions du marché sous peine de résiliation de celui-ci. Cette mise en demeure étant restée, selon Kremlin-Bicêtre Habitat, infructueuse, ce dernier, compte tenu du préjudice estimé par lui ainsi que des plaintes répétées des locataires résultant des manquements constatés a, par lettre du 24 février 2016, procédé à la résiliation du marché, aux torts du titulaire, et adressé à ce dernier le décompte des pénalités et le décompte de liquidation du marché, arrêté à la somme de 211 411,56 euros en faveur de l'office. Par une lettre du 13 mai 2016, la société Thyssenkrupp Ascenseurs a contesté les deux décomptes précités et adressé à Kremlin-Bicêtre Habitat une réclamation tendant à l'annulation des pénalités infligées à hauteur de 230 610 euros et au paiement d'un reliquat de factures à hauteur de 38 736,68 euros. Par deux lettres en date du 30 août 2016 et du 18 octobre 2016, Kremlin-Bicêtre Habitat a rejeté la réclamation du titulaire du marché. La société Thyssenkrupp Ascenseurs relève appel du jugement du 11 décembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la condamnation de Kremlin-Bicêtre Habitat à lui verser la somme de 38 736,68 euros TTC et, d'autre part, à l'annulation des pénalités infligées à hauteur de 230 610 euros ou, à titre subsidiaire, à la réduction de ce montant, au titre du solde du décompte de résiliation du marché. Sur la recevabilité de la demande de première instance : En ce qui concerne le lot n°1 : 2. Aux termes de l'article 6 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du lot n° 1 du marché litigieux intitulé " Pièces constitutives du marché " : " Les pièces constitutives du marché sont des pièces générales et des pièces particulières (...). Les pièces constitutives des marchés prévalent dans l'ordre où elles sont mentionnées ci-dessous ". / 6.1 Pièces particulières. Les pièces particulières au marché sont : 6.1.1 L'acte d'engagement (...) 6.1.4 Le C.C.A.P.(...) 6.2 Pièces générales.(...) 6.2.1 L'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ainsi que le décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 (...) ". Aux termes de l'article 14.1 du même CCAP : " (...) le pouvoir adjudicateur peut résilier le marché pour faute du titulaire dans les cas suivants et conditions suivantes : (...) e) Le titulaire ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels (...) h) Carence du titulaire à assurer le fonctionnement correct des installations qui lui sont confiées ; (...) Sauf dans les cas prévus aux i), j), k) ci-dessus, une mise en demeure, assortie d'un délai d'exécution, doit avoir été préalablement notifiée au titulaire et être restée infructueuse (...) ". Et aux termes de l'article 15 de ce CCAP : " Tout litige survenant lors de l'application du présent marché et qui ne pourrait être réglé à l'amiable entre les parties, le sera par voie d'expertise. / L'expert sera désigné d'un commun accord et proposera son arbitrage dans les 20 jours suivant sa mission lettre recommandée avec accusé de réception. / Dans le cas où l'une des parties contesterait le résultat de l'expertise, la juridiction compétente pour trancher en dernier ressort, sera le tribunal compétent dont dépend le siège du pouvoir adjudicateur, saisi dans les huit jours suivant la réception du rapport de l'expert, sur l'initiative de la partie qui serait en désaccord avec ses conclusions. Faute de saisie du tribunal dans ce délai, le rapport de l'expert est réputé avoir recueilli l'agrément des parties. ". Ces dernières stipulations font obstacle à la recevabilité, devant le tribunal administratif, d'une demande qui n'aurait pas été précédée de la mise en œuvre de la procédure d'expertise qu'elles prévoient. 3. En premier lieu, la circonstance que la société Thyssenkrupp Ascenseurs aurait tenté de régler amiablement le différend l'opposant à Kremlin-Bicêtre Habitat, ainsi qu'en attesterait la lettre du 19 novembre 2015 adressée par elle en réponse à la mise en demeure de l'office public du 9 novembre 2015, à la supposer même établie, est en tout état de cause sans incidence sur la recevabilité de ses conclusions indemnitaires dès lors qu'il est constant que cette tentative de règlement amiable n'a pas abouti et que la procédure d'expertise prévue à l'article 15 du CCAP n'a pas été mise en œuvre. 4. En second lieu, en se bornant à mettre en demeure la société Thyssenkrupp Ascenseurs, par deux lettres des 16 octobre 2015 et 9 novembre 2015, de respecter ses engagements contractuels sous peine de résiliation du marché, à la suite notamment de trois pétitions de locataires se plaignant de carences dans la maintenance des ascenseurs, Kremlin-Bicêtre Habitat ne saurait être regardé comme ayant fait survenir un litige dans l'application du marché au sens de l'article 15 du CCAP. En outre, l'office public, en tirant les conséquences de ses mises en demeure restées infructueuses par la prise d'une décision de résiliation du marché accompagnée de l'application de pénalités pour un montant de 230 610 euros, n'a pas davantage fait survenir un litige dans l'application du marché mais s'est borné à mettre en œuvre les stipulations contractuelles prévues aux articles 14.1, 22 et 23 du CCAP, lesquelles ne prévoient pas que ces mesures doivent être précédées du recours à une expertise préalable. Dès lors, la société Thyssenkrupp Ascenseurs qui, par son mémoire réceptionné par l'office public le 13 mai 2016 en contestation du décompte de liquidation, a fait survenir le présent litige, n'est fondée à soutenir ni que Kremlin-Bicêtre Habitat aurait, le premier, considéré qu'il existait un différend dans l'application du marché et qu'il lui aurait, par suite, incombé de mettre en œuvre la procédure d'expertise prévue à l'article 15 du CCAP ni qu'elle aurait " délibérément agi contre sa propre volonté " et " violé ses propres obligations contractuelles ". 5. En troisième lieu, la société Thyssenkrupp Ascenseurs ne saurait utilement soutenir que le recours à la procédure décrite à l'article 15 du CCAP se serait révélé en tout état de cause, au regard de la position prise par Kremlin-Bicêtre Habitat, inefficace et en conséquence inutile, dès lors qu'il n'appartient pas à la Cour de se prononcer sur l'opportunité de la mise en œuvre d'une telle procédure. Par suite, la société Thyssenkrupp Ascenseurs n'est pas fondée à soutenir que pour ce motif, qui n'est en tout état de cause pas établi, le recours à l'article 15 du CCAP lui serait inopposable. 6. Enfin et ainsi qu'il a été dit au point 4, la société Thyssenkrupp Ascenseurs a fait survenir le présent litige par sa contestation contenue dans son mémoire du 13 mai 2016. Par suite, faute pour la société d'avoir sollicité de Kremlin-Bicêtre Habitat, à la date d'enregistrement de sa demande devant le Tribunal administratif de Melun, le recours à la procédure prévue à l'article 15 du CCAP, ses conclusions à fin de décharge des pénalités à hauteur d'un montant de 179 510 euros présentées devant ce tribunal étaient irrecevables, sans que la société requérante puisse utilement faire valoir qu'elle a demandé à Kremlin-Bicêtre Habitat, par lettre du 25 janvier 2019, postérieure au jugement attaqué, de désigner un expert commun dans le cadre de l'article 15 précité pour trancher cette contestation. Il en résulte que ses conclusions indemnitaires, alors même que la société n'a pas précisé l'imputation respective des différentes factures dont elle demande le paiement à l'un ou l'autre des deux lots du marché, étaient en tout état de cause également irrecevables en ce qu'elles concerneraient le lot n° 1. En ce qui concerne le lot n° 2 : 7. D'une part, aux termes de l'article 3.1 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du lot n° 2 du marché litigieux intitulé " Pièces contractuelles " : " Les pièces contractuelles du marché sont les suivantes : 3.1.1 Pièces particulières : - L'acte d'engagement et ses annexes ; - Le présent Cahier des Clauses Administratives Particulières (C.C.A.P), (...) 3.1.2 Pièces générales : - Le cahier des clauses administratives générales (C.C.A.G.) applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services (arrêté du 19 janvier 2009...) ". Aux termes de l'article 12 du même cahier intitulé " Contestations " : " En cas de contestation sur l'interprétation ou l'exécution du présent contrat, le différent sera porté devant le tribunal compétent du lieu de situation du Kremlin-Bicêtre Habitat ". Et aux termes de l'article 14 de ce cahier intitulé " Dérogations au CCAG-FCS " : " L'article 5 du CCAP déroge à l'article 11 du CCAG-FCS concernant les pénalités de retard. L'article 10.2 du CCAP déroge à l'article 31.2 du CCAG-FCS concernant les modalités de résiliation ". 8. D'autre part, aux termes de l'article 32 du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services (CCAG-FCS), dans sa rédaction applicable : " 32.1 Le pouvoir adjudicateur peut résilier le marché pour faute du titulaire dans les cas suivants : (...) c) Le titulaire ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels (...) ". Aux termes de l'article 34 du CCAG-FCS : " 34.1 La résiliation fait l'objet d'un décompte de résiliation, qui est arrêté par le pouvoir adjudicateur et notifié au titulaire (...) 34.5 La notification du décompte par le pouvoir adjudicateur au titulaire doit être faite au plus tard deux mois après la date d'effet de la résiliation du marché (...) ". Aux termes de l'article 37 du CCAG-FCS : " 37.1 Le pouvoir adjudicateur et le titulaire s'efforceront de régler à l'amiable tout différend éventuel relatif à l'interprétation des stipulations du marché ou à l'exécution des prestations objet du marché. 37.2 Tout différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'un mémoire de réclamation exposant les motifs et indiquant, le cas échéant, le montant des sommes réclamées. Ce mémoire doit être communiqué au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion. 37.3 Le pouvoir adjudicateur dispose d'un délai de deux mois, courant à compter de la réception du mémoire de réclamation, pour notifier sa décision. L'absence de décision dans ce délai vaut rejet de la réclamation ". 9. Il résulte des stipulations de l'article 37 précédemment citées du cahier des clauses administratives générales que, lorsqu'intervient, au cours de l'exécution d'un marché, un différend entre le titulaire et l'acheteur, résultant d'une prise de position écrite, explicite et non équivoque émanant de ce dernier et faisant apparaître le désaccord, le titulaire doit présenter, dans un délai de deux mois, un mémoire de réclamation, à peine d'irrecevabilité de la saisine du juge du contrat. En revanche, dans l'hypothèse où l'acheteur a résilié unilatéralement le marché, puis s'est abstenu d'arrêter le décompte de liquidation dans le délai qui lui était imparti, si le titulaire ne peut saisir le juge qu'à la condition d'avoir présenté au préalable un mémoire de réclamation et s'être heurté à une décision de rejet, les stipulations de l'article 37 relatives à la naissance du différend et au délai pour former une réclamation ne sauraient lui être opposées. 10. Ainsi qu'il a été dit au point 1, Kremlin-Bicêtre Habitat a, par sa lettre du 24 février 2016, procédé à la résiliation du marché et adressé à la société Thyssenkrupp Ascenseurs un décompte de liquidation du marché, arrêté à la somme de 211 411,56 euros au crédit de l'office. Ce décompte doit être regardé comme une prise de position écrite, explicite et non équivoque émanant de l'office public. Dès lors qu'il résulte de l'instruction que la société Thyssenkrupp Ascenseurs était en désaccord avec ce décompte, il résulte des stipulations de l'article 37.2 du CCAG-FCS ainsi que de ce qui a été dit au point 9 que celle-ci devait communiquer son mémoire en réclamation au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion, ce jour devant être regardé comme celui où lui a été notifié le décompte de liquidation. 11. Il ressort de l'examen du tampon de réception par la société Thyssenkrupp Ascenseurs de la lettre du 24 février 2016 de Kremlin-Bicêtre Habitat que le deuxième chiffre du jour du mois de février 2016 qui y figure est illisible alors que les autres éléments de cette date, à savoir le premier chiffre du jour, le mois et l'année sont, quant à eux, parfaitement lisibles. Or, si la société Thyssenkrupp Ascenseurs soutient que Kremlin-Bicêtre Habitat n'apporte pas la preuve de la date de notification du décompte de résiliation, elle n'invoque toutefois aucune précision utile à l'appui de ce moyen, autre que celle tenant à ce que le décompte de résiliation n'avait pu être notifié le 28 février 2016 qui était un dimanche. Notamment, elle ne conteste sérieusement ni, d'une part, que le décompte de liquidation était contenu dans le pli contenant la lettre du 24 février 2016, ni, d'autre part, que la date apposée par le tampon appartenait à la troisième décade du mois de février 2016 et était nécessairement antérieure ou correspondante au 29 février 2016. Par suite, et à supposer même que la date apposée par le tampon soit celle du 29 février 2016, le mémoire de réclamation de la société Thyssenkrupp Ascenseurs, en date du 13 mai 2016, a nécessairement été communiqué au-delà du délai de deux mois courant à compter de la date de notification du décompte de liquidation. Par suite, les conclusions de la société Thyssenkrupp Ascenseurs à fin de décharge des pénalités à hauteur d'un montant de 51 100 euros, présentées devant le tribunal, étaient irrecevables. Il en résulte que ses conclusions indemnitaires, alors même que la société n'a pas précisé l'imputation respective des différentes factures dont elle demande le paiement à l'un ou l'autre des deux lots du marché, étaient en tout état de cause également irrecevables en ce qu'elles concerneraient le lot n° 2. 12. Il résulte de tout ce qui précède que la société Thyssenkrupp Ascenseurs n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande comme irrecevable. Sa requête ne peut, par suite, qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fin de désignation d'un expert. Sur les frais liés au litige : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Kremlin-Bicêtre Habitat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Thyssenkrupp Ascenseurs demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Thyssenkrupp Ascenseurs une somme de 1 500 euros à verser à l'office public de l'habitat Kremlin-Bicêtre Habitat sur le fondement des mêmes dispositions. DECIDE : Article 1er : La requête de la société Thyssenkrupp Ascenseurs est rejetée. Article 2 : La société Thyssenkrupp Ascenseurs versera à l'office public de l'habitat Kremlin-Bicêtre Habitat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Thyssenkrupp Ascenseurs et à l'office public de l'habitat Kremlin-Bicêtre Habitat. Délibéré après l'audience du 21 mai 2021 à laquelle siégeaient : - Mme B..., présidente de chambre, - M. C..., premier conseiller, - Mme A..., première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juin 2021. Le rapporteur, P. C... La présidente, M. B... La greffière, A. BENZERGUA La République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 19PA00631
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon : 1°) d'annuler la décision du 21 mars 2019 par laquelle le préfet de l'Ardèche a implicitement rejeté sa demande d'autorisation de pêche professionnelle de l'anguille sur les lots E4, E5 et E6 sur le fleuve Rhône, ainsi que par voie de conséquence la décision expresse confirmative du 17 mai 2019 ; 2°) d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de lui délivrer l'autorisation sollicitée dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ou, à défaut, de statuer à nouveau sur sa demande dans le même délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1903657 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon, après avoir admis les interventions du comité national de la pêche en eau douce et de la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Ardèche, a rejeté cette demande. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 11 septembre 2020 et un mémoire en réplique, non communiqué, enregistré le 25 octobre 2021, M. A..., représenté par Me Benesty, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 juillet 2020 ; 2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Ardèche des 21 mars et 17 mai 2019 ; 3°) de mettre une somme de 10 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le tribunal a méconnu l'article R. 611-7 du code de justice administrative, faute de porter à la connaissance des parties, dans le cadre de son moyen relevé d'office, outre la référence au 2° de l'article L. 110-1, celle aux textes qui, dans le cas de l'espèce, en définissent la portée ; - le principe de " prévention " ne peut être invoqué directement et à lui seul, puisque sa portée et sa mise en œuvre requièrent une disposition législative ; le 2° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement ne constitue donc pas en lui-même une base légale ; - la substitution de base légale est irrégulière, en ce qu'il n'est pas possible de prétendre qu'il n'a pas été privé d'une garantie ; le pouvoir d'appréciation n'est ni identique, ni similaire dans les deux bases légales ; l'appréciation pour le principe de précaution est celle de l'existence d'un risque alors qu'elle porte sur une action " utilisant les meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable " s'agissant du principe de " prévention " ; - le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit, faute pour le préfet de l'Ardèche de démontrer que la décision ministérielle de réouverture de la pêche à l'anguille jaune sur le Rhône contreviendrait au principe de prévention ; le seul accroissement de prélèvement ne peut fonder une méconnaissance de ce principe, dès lors que la pêche ne touche qu'un facteur secondaire de l'obstacle à la restauration de la population, qui repose sur des causes anthropiques ; la perte nette de biodiversité ne sera pas évitée ; - le préfet de l'Ardèche a entaché sa décision d'incompétence, aucune disposition légale ou réglementaire ne lui donnant compétence pour prononcer l'interdiction générale de l'exercice d'une activité économique sur tout ou partie du territoire dont il a la responsabilité, alors que le ministre compétent a décidé d'autoriser et de fixer la date d'ouverture de la pêche ; - le préfet de l'Ardèche ne pouvait fonder sa décision sur le principe de précaution de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, dès lors que le risque est avéré, d'une part, et que la mesure ne serait pas " effective ", d'autre part, l'interdiction de la pêche professionnelle ne constituant pas un moyen efficace et proportionné d'enrayer la disparition de l'anguille ; - le préfet de l'Ardèche a entaché sa décision d'une double erreur de droit, d'une part, en invoquant, dans le cadre d'une décision individuelle régie par les dispositions du code de l'environnement, les règles du code de la consommation ou de la santé, d'autre part, en appréciant l'opportunité de la demande alors qu'il était en situation de compétence liée dès lors que le pétitionnaire remplit les conditions de l'arrêté du 4 octobre 2010 ; - le préfet de l'Ardèche a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de la carence d'action sur les autres axes du plan de gestion anguille (PGA) ; les études scientifiques retiennent que la cause essentielle du déclin de l'espèce ne résulte pas de la pêche ; - la décision litigieuse révèle une inégalité de traitement entre pêcheurs professionnels et non professionnels ; elle est d'autant plus inacceptable que le préfet détient, par l'article 5 de l'arrêté du 4 octobre 2010, les pouvoirs pour fixer le nombre d'équipements utilisé et maîtriser ainsi l'importance du prélèvement. Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2021, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés sont infondés. Par ordonnance du 29 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 25 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; - le règlement (CE) n° 1100/2007 du 18 septembre 2007 ; - le code de l'environnement ; - le code rural et de la pêche maritime ; - l'arrêté du 5 février 2016 relatif aux périodes de pêche de l'anguille européenne (Anguilla anguilla) aux stades d'anguille jaune et d'anguille argentée ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ; - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ; - et les observations de Me Benesty pour M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... A... exerce une activité de pêche dite professionnelle sur le fleuve Rhône. Il est à ce titre preneur d'un bail de pêche conclu avec l'Etat pour la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2021. Par une lettre du 20 janvier 2019, reçue le 21 janvier 2019, M. A... a sollicité auprès du préfet de l'Ardèche l'autorisation de pêcher l'anguille jaune sur les lots E4, E5 et E6 pour la période courant du 1er mai au 30 septembre 2019. Si le silence gardé par le préfet suite à la demande de l'intéressé a fait naître une décision implicite de rejet, une décision explicite de rejet du 17 mai 2019 s'y est substituée. M. A... relève appel du 10 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus d'autorisation. Sur la légalité du refus d'autorisation : 2. Aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement : " Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l'air, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. Ce patrimoine génère des services écosystémiques et des valeurs d'usage ./ (...) II. - Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants :/ (...) 2° Le principe d'action préventive et de correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement, en utilisant les meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable. Ce principe implique d'éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu'elle fournit ; à défaut, d'en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes qui n'ont pu être évitées ni réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées ; Ce principe doit viser un objectif d'absence de perte nette de biodiversité, voire tendre vers un gain de biodiversité (...) ". 3. Le Conseil de l'Union européenne a adopté le 18 septembre 2007 le règlement (CE) n° 1100/2007 instituant des mesures de reconstitution du stock d'anguilles européennes (Anguilla anguilla), espèce migratrice catadrome qui se reproduit dans la mer des Sargasses et grandit dans les eaux douces européennes, désormais classée dans la catégorie des espèces en situation de " danger critique d'extinction ". Ce règlement a, notamment, imposé aux Etats membres d'élaborer un plan de gestion de l'anguille pour chaque bassin hydrographique et de le soumettre à la Commission avant le 31 décembre 2008. L'objectif de ces plans de gestion est, dans une perspective de long terme, de " réduire la mortalité anthropique afin d'assurer avec une grande probabilité un taux d'échappement vers la mer d'au moins 40 % de la biomasse d'anguilles argentées ". Parmi les mesures des plans de gestion, figurent notamment, outre des mesures de repeuplement ou d'aménagement des cours d'eaux, " la réduction de l'activité de pêche commerciale " et " la limitation de la pêche récréative ". En application de ce règlement, la France a notamment pris, vis-à-vis de l'Union européenne, l'engagement de réduire en trois ans de 30 %, puis de 60 % à partir de 2015, la mortalité liée à la pêche légale. Elle a présenté à la Commission le 31 décembre 2008 un plan national de gestion de l'anguille, ultérieurement révisé les 12 novembre 2009 et 3 février 2010 conformément à ce que prévoit l'article 5 du règlement. Par une décision du 15 février 2010, la Commission a approuvé, au vu des résultats de l'évaluation technique et scientifique réalisée par le Conseil international pour l'exploration de la mer, le plan de gestion français révisé. 4. Les dispositions combinées des articles R. 436-65 à R. 436-65-9 du code de l'environnement, créés par le décret n° 2010-1110 du 22 septembre 2010 relatif à la gestion et à la pêche de l'anguille, précisent, la portée du principe dit " de prévention " défini au 2° du II de l'article L. 110-1 du même code. La pêche de l'anguille, aux trois stades de son développement (anguille de moins de douze centimètres, anguille jaune, anguille argentée), est interdite en dehors des limites des unités de gestion fixées par arrêté du préfet de région. La pêche de l'anguille de moins de 12 centimètres, interdite aux pêcheurs de loisir en tous lieux, peut être autorisée sous conditions aux pêcheurs professionnels, pendant une période de cinq mois consécutifs au plus et dans la limite de quotas de pêche répartis par unité de gestion, fixés par arrêté ministériel et en affectant une part de la capture de l'anguille de moins de 12 cm au repeuplement. La pêche de l'anguille argentée est interdite, sauf sur certains cours d'eau et plans d'eau des unités de gestion de l'anguille Loire, Bretagne et Rhône-Méditerranée, sur dérogation accordée par arrêté ministériel aux pêcheurs professionnels. Pour ce qui concerne la pêche de l'anguille jaune, l'article R. 436-65-4 du code de l'environnement prévoit que : " I. - La pêche de l'anguille jaune est autorisée pendant une période fixée par unité de gestion, et le cas échéant par secteur, par arrêté conjoint du ministre chargé de la pêche en eau douce et du ministre chargé de la pêche maritime. II. - La pêche de l'anguille jaune par les pêcheurs professionnels, ainsi que, lorsqu'ils utilisent des engins ou des filets, par les membres des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique et les pêcheurs de loisir en zone maritime, est subordonnée à l'obtention d'une autorisation délivrée selon les modalités fixées, selon le cas, par arrêté du ministre chargé de la pêche en eau douce ou par arrêté du ministre chargé de la pêche maritime. ". L'arrêté ministériel du 5 février 2016, modifié le 28 décembre 2018 fixe la période d'autorisation de la pêche de l'anguille jaune, dans le bassin Rhône Méditerranée en domaine fluvial, 2ème catégorie pour le département de l'Ardèche du 1er mai au 30 septembre 2019. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 4 octobre 2010 relatif à la mise en place d'autorisations de pêche de l'anguille en eau douce : " L'autorisation de la pêche de l'anguille par les pêcheurs amateurs aux engins et aux filets et par les pêcheurs professionnels prévue aux II des articles R. 436-65-3, R. 436-65-4 et R. 436-65-5 du code de l'environnement est délivrée à titre individuel par le préfet de département. ". 5. Il résulte des dispositions précitées que le plan national de gestion de l'anguille n'interdit pas la pêche de l'anguille jaune mais la subordonne seulement à une autorisation individuelle, y compris pour l'unité de gestion n° 8 " Rhône-méditerranée ". A cet égard, si les premiers juges ont relevé que la situation du cours moyen du fleuve Rhône est parmi les plus exposées, des facteurs extérieurs à la mortalité par pêche, tels que la contamination du fleuve du Rhône par les polychlorobiphényles et la mortalité des anguilles lors du passage des turbines à la dévalaison y contribuent largement. Alors que l'interdiction de la pêche à l'anguille jaune en vue de sa consommation et sa commercialisation en raison du danger que cette consommation faisait courir à la santé humaine a été partiellement levée par arrêté inter-préfectoral des préfets de la Drôme et de l'Ardèche des 7 et 9 novembre 2018, il ne ressort pas des pièces du dossier, qu'un principe d'interdiction de la pêche de l'anguille jaune serait localement justifié, en dépit de l'objectif de préservation que poursuit le préfet dans le cadre de l'exercice des pouvoirs de police spéciale que lui confèrent les dispositions citées au point précédent et qui peuvent d'ailleurs le conduire à compléter la délivrance de l'autorisation requise des mesures appropriées à la charge du pétitionnaire. La ministre ne conteste pas, dès lors que le risque d'atteinte à l'environnement est avéré, que la base légale tirée du principe de précaution prévu au 1° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement sur laquelle s'était fondé le préfet, était erronée. Dans ces conditions, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges lui ont substitué le principe d'action préventive et de correction, énoncé au 2° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, lequel ne pouvait, sans erreur d'appréciation, fonder le refus d'autorisation sollicitée, qui ne repose sur aucun motif propre à la situation individuelle du demandeur ni aucune spécificité des lots concernés. 6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'en examiner la régularité, que M. A... est fondé à demander l'annulation du jugement du 10 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus d'autorisation de pêche professionnelle de l'anguille opposé par le préfet de l'Ardèche. Sur les conclusions à fin d'injonction : 7. Eu égard au motif d'annulation exposé ci-dessus, l'exécution du présent arrêt n'impose pas qu'il soit fait droit à la demande de délivrance de l'autorisation sollicitée mais implique seulement que cette demande soit réexaminée. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La décision du 17 mai 2019 par laquelle le préfet de l'Ardèche a rejeté la demande d'autorisation de pêche professionnelle de l'anguille de M. A... sur les lots E4, E5 et E6, est annulée. Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Ardèche d'instruire à nouveau cette demande, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022. La rapporteure, Bénédicte LordonnéLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY02659
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon : 1°) d'annuler l'arrêté du 6 mai 2019 par lequel le maire de la commune de D... a prononcé à son encontre la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quarante-cinq jours, dont quinze avec sursis ; 2°) de mettre à la charge de la commune de D... la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1905231 du 14 octobre 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du maire de D... du 6 mai 2019 et a mis à la charge de la commune de D... une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 14 décembre 2020, la commune de D..., représentée par Me Alberto (AARPI Alternatives avocats), avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 14 octobre 2020 ; 2°) de rejeter les demandes présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Lyon ; 3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les faits fautifs reprochés à l'intéressé sont établis. Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Matricon, avocate, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la commune de D... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il expose que le moyen soulevé n'est pas fondé. Par ordonnance du 3 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ; - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ; - et les observations de Me Alberto, avocat, représentant la commune de D..., et de Me Matricon, avocate, représentant M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. La commune de D... relève appel du jugement du 14 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de son maire du 6 mai 2019 sanctionnant, par une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de quarante-cinq jours, dont quinze avec sursis, M. B..., adjoint technique territorial principal de seconde classe. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale (...) ". Selon l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...) Troisième groupe : (...) l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans (...) ". 3. En l'absence de disposition législative contraire, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, à laquelle il incombe d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public, peut apporter la preuve de ces faits devant le juge administratif par tout moyen. Il appartient au juge administratif, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. 4. Pour prononcer la sanction en litige, le maire de la D... a reproché à M. B... d'avoir " menti quant à l'utilisation d'un véhicule de service, falsifié un carnet de bord et fait preuve d'intimidation auprès d'un collègue en vue de produire une fausse attestation ". 5. Le 3 juillet 2018, à 9 h 34, le véhicule de service immatriculé ... appartenant à la commune de D... et affecté à l'atelier transport du service " festivités " a été verbalisé pour " usage d'un téléphone en main par le conducteur d'un véhicule en circulation ". Après examen des " bons de travail " et des carnets de bord des véhicules du service, M. B... a été identifié comme le conducteur du véhicule verbalisé, à l'occasion d'une livraison effectuée auprès d'une médiathèque municipale, en dépit d'une mention relative à cette mission portée par celui-ci sur le carnet de bord d'un autre véhicule, immatriculé .... Toutefois, il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport du directeur de la proximité du 11 septembre 2018, qu'à défaut de toute mention utile dans le carnet de bord du véhicule en cause, cette identification se fonde d'abord sur la circonstance que la mention portée par M. B... sur le carnet de bord du véhicule immatriculé ... était raturée, notamment quant à la date de la mission. Cette circonstance ne remettait néanmoins en cause ni la lisibilité, ni la cohérence et la crédibilité de cette mention. Le rapport relève ensuite que la mission alors confiée à M. B... le " localisait (...) à proximité du lieu de l'infraction ". Cependant, la commune de D... ne conteste pas que d'autres missions, confiées à d'autres agents ce même jour, étaient également compatibles géographiquement avec la commission de cette infraction, sans que les véhicules alors utilisés ne soient précisément identifiés. Le responsable du service a ainsi indiqué que six agents " pouvaient se trouver dans le secteur " au moment des faits, dans un courrier électronique non contredit du 30 juillet 2018. Enfin, si M. A..., agent accompagnant M. B... lors de cette mission, a, dans une attestation du 5 septembre 2018, finalement certifié que celle-ci avait été effectuée grâce au véhicule verbalisé alors conduit par l'intéressé, il est constant qu'il est ainsi revenu sur les propos contraires qu'il avait initialement tenus au mois de juillet 2018, ainsi que sur une première attestation établie peu de temps après les faits. Contrairement à ce que prétend la commune de D..., la circonstance que cette première attestation ait été rédigée à la demande de M. B..., afin de se défendre des accusations dont il venait d'être informé, n'est pas de nature à en remettre cause la sincérité, à défaut de tout commencement de preuve d'une pression alors exercée sur son auteur, dont les déclarations à cet égard, telles qu'elles apparaissent dans son attestation du 5 septembre 2018, dans sa déclaration de main courante du 12 septembre 2018, dans sa demande de protection fonctionnelle du 17 septembre 2018 et dans le rapport du 11 septembre 2018, sont peu précises et présentent des incohérences. Ainsi, les attestations contradictoires établies par M. A... ne sauraient permettre de démontrer la réalité des faits reprochés à M. B.... Par suite, les éléments apportés par la commune de D... ne permettent pas d'identifier de manière certaine M. B... comme étant le conducteur du véhicule de service verbalisé le 3 juillet 2018, ni, dès lors, davantage, de tenir pour établis les griefs qui lui sont reprochés, ainsi que l'ont retenu les premiers juges. 6. Il résulte de ce qui précède que la commune de D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de son maire du 6 mai 2019 sanctionnant M. B.... Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de D.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement d'une somme de 2 000 euros à M. B..., en application de ces mêmes dispositions DÉCIDE : Article 1er : La requête de la commune de D... est rejetée. Article 2 : La commune de D... versera à M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de D... et à M. C... B.... Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Sophie Corvellec, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022. La rapporteure, Sophie CorvellecLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne au préfet du Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY03664
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon : 1°) d'annuler la décision du 3 décembre 2018 par laquelle le directeur régional de l'agriculture et de la forêt a implicitement refusé de mettre en demeure la SCV Des Pillets et la SARL de la Morcille de cesser d'exploiter une surface de 17,42 hectares au titre de laquelle il bénéficie d'une autorisation d'exploiter ; 2°) d'ordonner au préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes de procéder à une nouvelle instruction de sa demande tendant à ce que la SCV Des Pillets et la SARL de la Morcille soient mises en demeure de cesser d'exploiter, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1900868 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 3 décembre 2018, a enjoint au préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes de mettre en demeure la SCV Des Pillets et la SARL de la Morcille de cesser d'exploiter une surface de 17,42 hectares au titre de laquelle M. B... bénéficie d'une autorisation d'exploiter, dans un délai de deux mois, a mis à la charge de l'Etat le versement à M. B... de la somme de 1 400 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les conclusions présentées par la SARL de la Morcille et la SCV Des Pillets sur le même fondement. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 11 septembre 2020 et un mémoire en réplique, non communiqué, enregistré le 20 septembre 2021, la SARL La Morcille et la SCV Des Pillets, représentées par Me Bardet, demandent à la cour : 1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 juillet 2020 ; 2°) de mettre à la charge de M. B... le versement d'une somme de 3 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - la fraude à la loi n'est nullement démontrée ; - c'est à tort que les premiers juges, après avoir relevé que les surfaces cumulées exploitées par la SARL La Morcille et la SCV Des Pillets étaient mises en valeur, directement ou indirectement, par M. C... du Jeu, ont considéré que ce sont les personnes morales qui auraient dû se soumettre au contrôle des structures, alors qu'elles n'y sont pas soumises ; il n'appartenait qu'à celui-ci de solliciter et d'obtenir une autorisation d'exploiter. Par un mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2020, M. A... B..., représenté par la SCP Desilets Robbe Roquel, agissant par Me Robbe, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCV Des Pillets et la SARL de la Morcille en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les société requérantes n'ont pas déposé de recours contre les mises en demeure de cesser d'exploiter du 6 août 2020 ; la fraude est définitivement établie, en droit et en fait ; - l'exploitante unique des parcelles était la SCV Des Pillets, qui a déclaré que la SARL de la Morcille exploitait le surplus ; il était donc légitime que ces deux sociétés soient destinataires d'une mise en demeure de cesser d'exploiter. Par un mémoire, enregistré le 17 septembre 2021, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation s'en remet à la sagesse de la cour. Par ordonnance du 17 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 septembre 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code rural et de la pêche maritime ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ; - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ; - et les observations de Me Goirand pour M. B.... Considérant ce qui suit : 1. La SCV Des Pillets et la SARL de la Morcille relèvent appel du jugement du 10 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon, sur demande de M. A... B..., a annulé la décision du 3 décembre 2018 par laquelle le directeur régional de l'agriculture et de la forêt a implicitement refusé de mettre en demeure la SCV Des Pillets et la SARL de la Morcille de cesser d'exploiter une surface de 17,42 hectares au titre de laquelle il bénéficie d'une autorisation d'exploiter, et a enjoint au préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes de les mettre en demeure de cesser d'exploiter. Sur le bien-fondé du jugement : 2. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a bénéficié, en l'absence de candidatures concurrentes, d'une autorisation tacite d'exploiter une surface de 29,86 ha situées sur le territoire de la commune de Villié-Morgon. Il a signalé le 26 septembre 2017 à la direction départementale des territoires du Rhône qu'il ne pouvait entrer en jouissance de parcelles, d'une surface de 17,42 ha, exploitées sans autorisation par la société SCV Des Pillets, propriétaire des terrains. La société SCV Des Pillets a été mise en demeure de régulariser sa situation. Celle-ci a informé la direction départementale des territoires du Rhône que les terrains étaient exploités par elle-même pour 8,0574 ha ainsi que par une autre société, la SARL de la Morcille pour 8,5644 ha, en vertu d'un bail consenti par la SCV Des Pillets. Si les surfaces ainsi déclarées comme mises en valeur par chacune des sociétés n'excédaient pas le seuil de contrôle, M. B..., par l'intermédiaire de son conseil, a sollicité la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) Auvergne Rhône-Alpes afin de constater que la SARL de la Morcille a été créée le 27 novembre 2017 dans le seul et unique but de contourner la législation sur le contrôle des structures et a demandé de mettre en demeure la SCV Des Pillets et la SARL de la Morcille de cesser d'exploiter lesdites parcelles en application du troisième alinéa de l'article L. 331-7 du code rural et de la pêche maritime. 3. Pour annuler la décision de refus implicite du 3 décembre 2018 résultant du silence gardé par l'administration sur cette demande, les premiers juges ont fait droit au moyen de M. B..., tiré de la fraude. 4. Pour retenir que les surfaces cumulées, exploitées par la SCV Des Pillets et par la SARL de la Morcille, auraient dû être prises en compte par l'administration pour apprécier le respect du seuil fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles, les premiers juges se sont fondés sur un ensemble d'éléments. Ils ont relevé que la SARL de la Morcille, créée le 27 novembre 2017, a pour associé majoritaire (92 %) la Foncière héritiers Saint Genys holding, dont le gérant est M. C... du Jeu, qui est également l'un des principaux actionnaires de la SCV Des Pillets (27,13 %), que l'épouse de M. C... du Jeu est co-gérante de la SARL de la Morcille, que M. C... du Jeu a déclaré être logé sur place pendant les vendanges et être salarié de la SCV Des Pillets et bénéficiait d'une délégation de pouvoir de la gérance " pour le compte en banque ". Ils se sont également fondés sur le procès-verbal, dressé le 11 septembre 2018, par lequel un huissier de justice a constaté sur le cahier destiné à la consultation de récolte et de vinification qu'aucune indication ne permettait de distinguer les cuves de la SCV Des Pillets et celles de la SARL de la Morcille et qu'aucune des cuves ne comportait d'indication de distinction de récolte entre ces deux sociétés. Les sociétés requérantes, qui ne contestent aucun de ces éléments, se bornent à soutenir, sans assortir ce moyen des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, que la fraude ne serait pas établie. 5. En vertu de l'article L. 331-7 du code rural et de la pêche maritime : " (...) Lorsque l'intéressé, tenu de présenter une demande d'autorisation, ne l'a pas formée dans le délai mentionné ci-dessus, l'autorité administrative lui notifie une mise en demeure de cesser d'exploiter dans un délai de même durée. (...). " 6. Comme il a été dit au point 2, en réponse à la mise en demeure qui lui a déjà été adressée le 6 octobre 2017, la SCV Des Pillets a elle-même indiqué que les terrains étaient exploités par elle-même et par la SARL de la Morcille. Alors que ces sociétés doivent être regardées, au sens et pour l'application de l'article L. 331-1-1 du code rural et de la pêche maritime, comme une seule et même exploitation agricole, et que les surfaces cumulées mises en valeur par ces deux sociétés excédent, ce qui n'est pas contesté, le seuil de contrôle fixé à 9,8 ha en viticulture pour la commune concernée dans le schéma directeur départemental des structures agricoles du Rhône, elles pouvaient légalement être destinataires de la mise en demeure prévue par les dispositions citées au point précédent, quand bien même les premiers juges ont relevé que ces surfaces étaient mises en valeur, directement ou indirectement, par M. C... du Jeu. 7. Il résulte de ce qui précède que la SCV Des Pillets et la SARL de la Morcille ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 3 décembre 2018 et a enjoint au préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes de les mettre en demeure de cesser d'exploiter. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que les sociétés requérantes demandent au titre des frais qu'elles ont exposés soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre solidairement à la charge de la SCV Des Pillets et de la SARL de la Morcille le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par ce dernier. D E C I D E : Article 1er : La requête de la SCV Des Pillets et la SARL de la Morcille est rejetée. Article 2 : La SCV Des Pillets et la SARL de la Morcille verseront solidairement la somme de 2 000 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCV Des Pillets, à la SARL de la Morcille, à M. A... B... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022. La rapporteure, Bénédicte LordonnéLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY02661
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... ... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision en date du 8 mars 2018 par laquelle le directeur du centre hospitalier de C... a rejeté sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident survenu le 30 juillet 2015 et de condamner le centre hospitalier de C... à lui verser une somme de 25 000 euros en réparation de son préjudice moral. Par un jugement n° 1800717 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ces demandes. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 14 décembre 2020, M. B..., représenté par Me Maisonneuve (SCP Teillot et associés), avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 15 octobre 2020 ; 2°) d'annuler la décision du directeur du centre hospitalier de C... du 8 mars 2018 ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de C... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la réalité de l'accident survenu le 30 juillet 2015 est établie ; - survenu dans le cadre et à l'occasion du service, cet accident est imputable au service, en application notamment de la présomption instituée par l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. Par un mémoire en défense enregistré le 30 mars 2021, le centre hospitalier de C... - ..., représenté par Me Lesné (SELARL Houdart et associés), avocate, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Par une décision du 24 mars 2021, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par ordonnance du 3 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 . - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ; - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ; - et les observations de Me Laurent, avocat, représentant le centre hospitalier de C... - ... ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., agent des services hospitaliers qualifié, a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 8 mars 2018 par laquelle le directeur du centre hospitalier de C... a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident survenu le 30 juillet 2015 et à la condamnation de cet établissement à réparer le préjudice moral qui en est résulté. Par un jugement du 15 octobre 2020, le tribunal administratif a rejeté ces demandes. M. B... doit être regardé comme relevant appel de ce jugement uniquement en tant qu'il rejette sa demande d'annulation, seule évoquée dans sa requête. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, l'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issues de l'ordonnance du 19 janvier 2017, était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. En conséquence, ces dispositions ne sont entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique hospitalière, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 16 mai 2020, du décret du 13 mai 2020 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique hospitalière. Ces dispositions n'étant pas applicables à la date de la survenance de l'accident qu'il invoque et de la décision en litige, M. B... ne saurait utilement s'en prévaloir. 3. En second lieu, aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...) / Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". 4. Constitue un accident de service, pour l'application de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. 5. Par déclaration du 27 octobre 2017, M. B... a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident qui serait survenu le 30 juillet 2015. Il ressort des pièces du dossier qu'il visait ainsi une altercation verbale qui l'aurait opposé au directeur de la communication de l'établissement, en présence du directeur général, concernant le stationnement du véhicule de son épouse dans l'enceinte de l'établissement. Toutefois, pour établir la réalité de cet accident, il se prévaut d'abord du compte-rendu d'une réunion organisée le 20 août 2015, qui, s'agissant de la journée du 30 juillet 2015, se borne à reprendre ses propres termes sans en corroborer la réalité. S'il se prévaut également de différents certificats médicaux relatant une pathologie psychiatrique, seul l'un d'eux mentionne, sans autre justification, une " altercation vécue le 30 juillet 2015 " en se fondant sur les seuls propos de l'intéressé, alors que deux autres évoquent un lien avec une procédure disciplinaire par ailleurs engagée à son encontre. Enfin, il ne produit aucun témoignage, nonobstant la présence de témoins dont il avait précédemment fait état. Dans ces circonstances, il ne ressort nullement des pièces du dossier que le directeur mis en cause aurait eu, à l'égard de M. B..., un comportement ou des propos étrangers à l'exercice normal de relations professionnelles et constituant un évènement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service. Par suite, le directeur du centre hospitalier n'a pas méconnu les dispositions précitées en refusant de reconnaître l'existence d'un tel accident imputable au service. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de C... - ..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le paiement des frais exposés par le centre hospitalier de C... - ... au titre de ces mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de C... - ... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au centre hospitalier de C... - .... Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Sophie Corvellec, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022. La rapporteure, Sophie CorvellecLe président, Jean-Yves TallecLa greffière, Sandra BertrandLa République mande et ordonne à la préfète de l'Allier en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY03662
JADE/CETATEXT000046502661.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon : 1°) d'annuler la décision du 12 mars 2019 par laquelle le préfet de l'Ardèche a implicitement rejeté sa demande d'autorisation de pêche professionnelle de l'anguille sur les lots E7, E8, E9 et E11 sur le fleuve Rhône, ainsi que, par voie de conséquence, la décision expresse confirmative du 17 mai 2019 ; 2°) d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de lui délivrer l'autorisation sollicitée dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ou, à défaut, de statuer à nouveau sur sa demande dans le même délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1903656 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon, après avoir admis les interventions du comité national de la pêche en eau douce et de la fédération départementale de pêche et de protection du milieu aquatique de l'Ardèche, a rejeté cette demande. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 11 septembre 2020 et un mémoire en réplique, non communiqué, enregistré le 25 octobre 2021, M. A..., représenté par Me Benesty, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 juillet 2020 ; 2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Ardèche des 12 mars et 17 mai 2019 ; 3°) de mettre une somme de 10 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le tribunal a méconnu l'article R. 611-7 du code de justice administrative, faute de porter à la connaissance des parties, dans le cadre de son moyen relevé d'office, outre la référence au 2° de l'article L. 110-1, celle aux textes qui, dans le cas de l'espèce, en définissent la portée ; - le principe de " prévention " ne peut être invoqué directement et à lui seul, puisque sa portée et sa mise en œuvre requièrent une disposition législative ; le 2° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement ne constitue donc pas en lui-même une base légale ; - la substitution de base légale est irrégulière, en ce qu'il n'est pas possible de prétendre qu'il n'a pas été privé d'une garantie ; le pouvoir d'appréciation n'est ni identique, ni similaire dans les deux bases légales ; l'appréciation pour le principe de précaution est celle de l'existence d'un risque alors qu'elle porte sur une action " utilisant les meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable " s'agissant du principe de " prévention " ; - le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit, faute pour le préfet de l'Ardèche de démontrer que la décision ministérielle de réouverture de la pêche à l'anguille jaune sur le Rhône contreviendrait au principe de prévention ; le seul accroissement de prélèvement ne peut fonder une méconnaissance de ce principe, dès lors que la pêche ne touche qu'un facteur secondaire de l'obstacle à la restauration de la population, qui repose sur des causes anthropiques ; la perte nette de biodiversité ne sera pas évitée ; - le préfet de l'Ardèche a entaché sa décision d'incompétence, aucune disposition légale ou réglementaire ne lui donnant compétence pour prononcer l'interdiction générale de l'exercice d'une activité économique sur tout ou partie du territoire dont il a la responsabilité, alors que le ministre compétent a décidé d'autoriser et de fixer la date d'ouverture de la pêche ; - le préfet de l'Ardèche ne pouvait fonder sa décision sur le principe de précaution de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, dès lors que le risque est avéré, d'une part, et que la mesure ne serait pas " effective ", d'autre part, l'interdiction de la pêche professionnelle ne constituant pas un moyen efficace et proportionné d'enrayer la disparition de l'anguille ; - le préfet de l'Ardèche a entaché sa décision d'une double erreur de droit, d'une part, en invoquant, dans le cadre d'une décision individuelle régie par les dispositions du code de l'environnement, les règles du code de la consommation ou de la santé, d'autre part, en appréciant l'opportunité de la demande alors qu'il était en situation de compétence liée dès lors que le pétitionnaire remplit les conditions de l'arrêté du 4 octobre 2010 ; - le préfet de l'Ardèche a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de la carence d'action sur les autres axes du plan de gestion anguille (PGA) ; les études scientifiques retiennent que la cause essentielle du déclin de l'espèce ne résulte pas de la pêche ; - la décision litigieuse révèle une inégalité de traitement entre pêcheurs professionnels et non professionnels ; elle est d'autant plus inacceptable que le préfet détient, par l'article 5 de l'arrêté du 4 octobre 2010, les pouvoirs pour fixer le nombre d'équipements utilisé et maîtriser ainsi l'importance du prélèvement. Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2021, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés sont infondés. Par ordonnance du 29 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 25 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; - le règlement (CE) n° 1100/2007 du 18 septembre 2007 ; - le code de l'environnement ; - le code rural et de la pêche maritime ; - l'arrêté du 5 février 2016 relatif aux périodes de pêche de l'anguille européenne (Anguilla anguilla) aux stades d'anguille jaune et d'anguille argentée ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ; - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ; - et les observations de Me Benesty pour M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... A... exerce une activité de pêche dite professionnelle sur le fleuve Rhône. Il est à ce titre preneur d'un bail de pêche conclu avec l'Etat pour la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2021. Par une lettre du 20 janvier 2019, reçue le 21 janvier 2019, M. A... a sollicité auprès du préfet de l'Ardèche l'autorisation de pêcher l'anguille jaune sur les lots E7, E8, E9 et E11 pour la période courant du 1er mai au 30 septembre 2019. Si le silence gardé par le préfet suite à la demande de l'intéressé a fait naître une décision implicite de rejet, une décision explicite de rejet du 17 mai 2019 s'y est substituée. M. A... relève appel du 10 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus d'autorisation. Sur la légalité du refus d'autorisation : 2. Aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement : " Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l'air, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. Ce patrimoine génère des services écosystémiques et des valeurs d'usage./ (...) II. - Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants :/ (...) 2° Le principe d'action préventive et de correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement, en utilisant les meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable. Ce principe implique d'éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu'elle fournit ; à défaut, d'en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes qui n'ont pu être évitées ni réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées ; Ce principe doit viser un objectif d'absence de perte nette de biodiversité, voire tendre vers un gain de biodiversité (...) ". 3. Le Conseil de l'Union européenne a adopté le 18 septembre 2007 le règlement (CE) n° 1100/2007 instituant des mesures de reconstitution du stock d'anguilles européennes (Anguilla anguilla), espèce migratrice catadrome qui se reproduit dans la mer des Sargasses et grandit dans les eaux douces européennes, désormais classée dans la catégorie des espèces en situation de " danger critique d'extinction ". Ce règlement a, notamment, imposé aux Etats membres d'élaborer un plan de gestion de l'anguille pour chaque bassin hydrographique et de le soumettre à la Commission avant le 31 décembre 2008. L'objectif de ces plans de gestion est, dans une perspective de long terme, de " réduire la mortalité anthropique afin d'assurer avec une grande probabilité un taux d'échappement vers la mer d'au moins 40 % de la biomasse d'anguilles argentées ". Parmi les mesures des plans de gestion, figurent notamment, outre des mesures de repeuplement ou d'aménagement des cours d'eaux, " la réduction de l'activité de pêche commerciale " et " la limitation de la pêche récréative ". En application de ce règlement, la France a notamment pris, vis-à-vis de l'Union européenne, l'engagement de réduire en trois ans de 30 %, puis de 60 % à partir de 2015, la mortalité liée à la pêche légale. Elle a présenté à la Commission le 31 décembre 2008 un plan national de gestion de l'anguille, ultérieurement révisé les 12 novembre 2009 et 3 février 2010 conformément à ce que prévoit l'article 5 du règlement. Par une décision du 15 février 2010, la Commission a approuvé, au vu des résultats de l'évaluation technique et scientifique réalisée par le Conseil international pour l'exploration de la mer, le plan de gestion français révisé. 4. Les dispositions combinées des articles R. 436-65 à R. 436-65-9 du code de l'environnement, créés par le décret n° 2010-1110 du 22 septembre 2010 relatif à la gestion et à la pêche de l'anguille, précisent la portée du principe dit " de prévention " défini au 2° du II de l'article L. 110-1 du même code. La pêche de l'anguille, aux trois stades de son développement (anguille de moins de douze centimètres, anguille jaune, anguille argentée), est interdite en dehors des limites des unités de gestion fixées par arrêté du préfet de région. La pêche de l'anguille de moins de 12 centimètres, interdite aux pêcheurs de loisir en tous lieux, peut être autorisée sous conditions aux pêcheurs professionnels, pendant une période de cinq mois consécutifs au plus et dans la limite de quotas de pêche répartis par unité de gestion, fixés par arrêté ministériel et en affectant une part de la capture de l'anguille de moins de 12 cm au repeuplement. La pêche de l'anguille argentée est interdite, sauf sur certains cours d'eau et plans d'eau des unités de gestion de l'anguille Loire, Bretagne et Rhône-Méditerranée, sur dérogation accordée par arrêté ministériel aux pêcheurs professionnels. Pour ce qui concerne la pêche de l'anguille jaune, l'article R. 436-65-4 du code de l'environnement prévoit que : " I. - La pêche de l'anguille jaune est autorisée pendant une période fixée par unité de gestion, et le cas échéant par secteur, par arrêté conjoint du ministre chargé de la pêche en eau douce et du ministre chargé de la pêche maritime. II. - La pêche de l'anguille jaune par les pêcheurs professionnels, ainsi que, lorsqu'ils utilisent des engins ou des filets, par les membres des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique et les pêcheurs de loisir en zone maritime, est subordonnée à l'obtention d'une autorisation délivrée selon les modalités fixées, selon le cas, par arrêté du ministre chargé de la pêche en eau douce ou par arrêté du ministre chargé de la pêche maritime. ". L'arrêté ministériel du 5 février 2016, modifié le 28 décembre 2018, fixe la période d'autorisation de la pêche de l'anguille jaune, dans le bassin Rhône Méditerranée en domaine fluvial, 2ème catégorie pour le département de l'Ardèche du 1er mai au 30 septembre 2019. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 4 octobre 2010 relatif à la mise en place d'autorisations de pêche de l'anguille en eau douce : " L'autorisation de la pêche de l'anguille par les pêcheurs amateurs aux engins et aux filets et par les pêcheurs professionnels prévue aux II des articles R. 436-65-3, R. 436-65-4 et R. 436-65-5 du code de l'environnement est délivrée à titre individuel par le préfet de département. ". 5. Il résulte des dispositions précitées que le plan national de gestion de l'anguille n'interdit pas la pêche de l'anguille jaune mais la subordonne seulement à une autorisation individuelle, y compris pour l'unité de gestion n°8 " Rhône-méditerranée ". A cet égard, si les premiers juges ont relevé que la situation du cours moyen du fleuve Rhône est parmi les plus exposées, des facteurs extérieurs à la mortalité par pêche, tels que la contamination du fleuve du Rhône par les polychlorobiphényles et la mortalité des anguilles lors du passage des turbines à la dévalaison y contribuent largement. Alors que l'interdiction de la pêche à l'anguille jaune en vue de sa consommation et sa commercialisation en raison du danger que cette consommation faisait courir à la santé humaine a été partiellement levée par arrêté inter-préfectoral des préfets de la Drôme et de l'Ardèche des 7 et 9 novembre 2018, il ne ressort pas des pièces du dossier, qu'un principe d'interdiction de la pêche de l'anguille jaune serait localement justifié, en dépit de l'objectif de préservation que poursuit le préfet dans le cadre de l'exercice des pouvoirs de police spéciale que lui confèrent les dispositions citées au point précédent et qui peuvent d'ailleurs le conduire à compléter la délivrance de l'autorisation requise des mesures appropriées à la charge du pétitionnaire. La ministre ne conteste pas, dès lors que le risque d'atteinte à l'environnement est avéré, que la base légale tirée du principe de précaution prévu au 1° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement sur laquelle s'était fondé le préfet, était erronée. Dans ces conditions, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges lui ont substitué le principe d'action préventive et de correction, énoncé au 2° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, lequel ne pouvait, sans erreur d'appréciation, fonder le refus d'autorisation sollicitée, qui ne repose sur aucun motif propre à la situation individuelle du demandeur ni aucune spécificité des lots concernés. 6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'en examiner la régularité, que M. A... est fondé à demander l'annulation du jugement du 10 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus d'autorisation de pêche professionnelle de l'anguille opposé par le préfet de l'Ardèche. Sur les conclusions à fin d'injonction : 7. Eu égard au motif d'annulation exposé ci-dessus, l'exécution du présent arrêt n'impose pas qu'il soit fait droit à la demande de délivrance de l'autorisation sollicitée mais implique seulement que cette demande soit réexaminée. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La décision du 17 mai 2019 par laquelle le préfet de l'Ardèche a rejeté la demande d'autorisation de pêche professionnelle de l'anguille de M. A... sur les lots E7, E8, E9 et E11, est annulée. Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Ardèche d'instruire à nouveau cette demande, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022. La rapporteure, Bénédicte LordonnéLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY02655
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme A... B..., épouse C..., a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 19 décembre 2018 par laquelle le maire de Lyon l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité. Par un jugement n° 1901608 du 16 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 15 septembre 2020, et un mémoire en réplique, non communiqué, enregistré le 19 octobre 2021, Mme B..., épouse C..., représentée par Me Lambert, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 juillet 2020 ; 2°) d'annuler la décision du 19 décembre 2018 ; 3°) d'enjoindre au maire de Lyon de procéder à son reclassement, dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de reconstituer sa carrière dans un délai de trente jours ; 4°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la ville de Lyon a méconnu ses obligations en matière de recherches de reclassement. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2021, la ville de Lyon, représentée par l'AARPI ADALTYS, agissant par Me Nugue, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme B..., épouse C..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que le moyen soulevé est infondé. Par ordonnance du 24 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 19 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ; - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ; - et les observations de Me Lambert pour Mme C... ainsi que celles de Me Armand pour la ville de Lyon. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B..., épouse C..., relève appel du jugement du 16 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 décembre 2018 par laquelle le maire de Lyon l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité. 2. Aux termes de l'article 81 de la loi du 26 janvier 1984 : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi, emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". 3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., épouse C..., exerçant des fonctions de surveillante de crèche depuis 2008 pour la commune de Lyon, a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 26 mai 2014 en raison des polyarthralgies invalidantes dont elle est atteinte. Dès le 28 mai 2014, le médecin de prévention a considéré qu'elle était inapte définitivement au poste d'agent technique en crèche et qu'il fallait envisager un reclassement sur un " poste adapté en fonction de la fiche médicale d'évaluation des aptitudes ". Mme B..., épouse C..., a sollicité son reclassement le 7 juillet 2014. Le comité médical saisi pour avis, lors sa séance du 4 décembre 2014, a déclaré l'intéressée inapte à l'exercice de ses fonctions, et s'est prononcé en faveur du maintien en congé maladie ordinaire jusqu'au 27 février 2015 et d'un reclassement professionnel sur un poste sédentaire. Le comité médical a rendu un nouvel avis le 3 septembre 2015, confirmant les termes de son avis précédent et se prononçant en faveur du maintien en congé maladie ordinaire jusqu'au 27 mai 2015 et, à l'expiration de ses droits statutaires à congé de maladie ordinaire, en faveur de son placement en disponibilité d'office pour maladie à compter du 28 mai 2015 jusqu'au 27 février 2016, dans l'attente d'un reclassement professionnel. Mme B..., épouse C..., a ainsi été placée en disponibilité d'office par des arrêtés successifs, qu'elle n'a pas contestés. Après nouvel avis du comité médical du 6 juillet 2017, par une décision du 19 décembre 2018, le maire de Lyon l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité. 4. Pour contester cette décision, Mme B... épouse C... reprend en appel son moyen selon lequel la commune de Lyon aurait méconnu son obligation de reclassement prévue par les dispositions citées au point 2 avant de la placer à la retraite pour invalidité. 5. Il ressort des pièces du dossier que la ville a proposé à Mme B..., épouse C..., deux postes d'agent de surveillance de la voie publique en 2016 et d'agent de surveillance au sein de la police des grands parcs en 2017, que l'intéressée a légitimement refusés, un tel reclassement s'avérant impossible compte tenu des importantes restrictions médicales à une reprise d'activité qu'elle présentait, en particulier, limiter le piétinement, la marche prolongée, la station debout, l'exposition aux intempéries, ainsi qu'il ressort de la fiche d'aptitude médicale établie par le médecin de prévention au mois de mai 2014. 6. Cependant, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., épouse C..., a fait l'objet en mars 2017 d'un diagnostic de positionnement établi par la société Solerys à l'initiative de la ville, dont l'objectif était d'objectiver et de mesurer ses compétences sur la base de son parcours professionnel et de sa formation initiale. Eu égard aux difficultés rencontrées par l'intéressée dans l'utilisation des outils bureautiques, la maîtrise de la langue française, ainsi que dans l'exécution de tâches de bureau, le positionnement de Mme B..., épouse C..., sur un poste d'agent d'accueil et de gestion administrative, qu'elle ne pourrait occuper qu'au prix d'une " formation significative ", n'a pu être envisagé sérieusement. Dans ces conditions, la requérante, qui ne conteste pas les lacunes identifiées, n'est pas fondée à soutenir qu'un poste vacant d'adjoint administratif aurait dû lui être proposé. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la ville de Lyon disposait d'un emploi compatible avec son état de santé, en rapport avec ses compétences et aptitudes professionnelles, susceptible de lui être proposé, ni, par suite, qu'elle aurait manqué à son obligation de recherche de reclassement. 7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la ville de Lyon à la demande de première instance, que Mme B..., épouse C..., n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. 8. Ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles qu'elle présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au demeurant mal dirigées, doivent être rejetées par voie de conséquence. 9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la requérante la somme que la ville de Lyon demande au titre des frais non compris dans les dépens sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme B..., épouse C..., est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la ville de Lyon tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., épouse C..., et à la ville de Lyon. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022. La rapporteure, Bénédicte LordonnéLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne au préfet du Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY02676
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... F..., Mme D... B... épouse F..., Mme A... F... et Mme C... F... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à verser, avec intérêts au taux légal, les sommes de 112 815,21 euros à M. E... F... en réparation des préjudices subis du fait de sa contamination G... le virus de l'hépatite C, 30 000 euros à Mme D... F... au titre de son préjudice propre et 20 000 euros à chacune de leurs filles, Mmes A... et C... F... au titre de leurs préjudices propres. G... un jugement n° 1406513 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Grenoble a condamné l'ONIAM à verser à M. E... F... une somme de 14 769 euros, à Mme D... F... une somme de 3 000 euros, et à Mme C... F... comme à Mme A... F... une somme de 2 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 2014. Procédure devant la cour : G... une requête enregistrée le 14 septembre 2020 et un mémoire non communiqué enregistré le 24 août 2021, M. et Mmes F..., représentés G... la SELARL Coubris, Courtois et Associés, demandent à la cour : 1°) de réformer le jugement n° 1406513 du 15 juillet 2020 du tribunal administratif de Grenoble ; 2°) de sursoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pendante devant le tribunal judiciaire de Paris ; 3°) de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à verser, avec intérêts au taux légal, la somme de 112 815,21 euros à M. E... F... en réparation des préjudices subis du fait de sa contamination G... le virus de l'hépatite C, 30 000 euros à Mme D... F... au titre de son préjudice propre et 20 000 euros chacune à Mme A... F... et à Mme C... F... au titre de leurs préjudices propres ; 4°) à ce que soit mise à la charge de l'ONIAM la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Ils soutiennent que : - c'est à tort que le tribunal n'a pas sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pendante devant le tribunal judiciaire de Paris ; - le tribunal a procédé à une évaluation insuffisante de leurs préjudices. G... un mémoire en défense enregistré le 29 juin 2021, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, représenté G... Me Fitoussi, conclut au rejet de la requête. Il soutient que les prétentions des requérants ne sont pas fondées. G... ordonnance du 1er juillet 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 août 2021 ; Un mémoire présenté pour M. et Mmes F... a été enregistré le 28 septembre 2022, postérieurement à la clôture de l'instruction, et n'a pas été communiqué en application de l'article R. 613-3 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Bentéjac, première conseillère, - les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique, - et les observations de Me Grillet, représentant M. F... et autres. Considérant ce qui suit : 1. M. E... F..., né le 10 juin 1958, a été victime, le 24 novembre 1983, d'un accident de la circulation à la suite duquel il a été transféré au centre hospitalier de Sallanches où il a subi de multiples interventions nécessitant l'administration de produits dérivés du sang. A la suite d'un bilan biologique réalisé le 27 juillet 2012, sa contamination G... le virus de l'hépatite C a été diagnostiquée. L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) ayant reconnu la matérialité des transfusions sanguines et l'imputabilité de la contamination du requérant aux transfusions sanguines reçues lui a adressé une offre d'indemnisation. M. F... ayant refusé celle-ci, il a saisi le tribunal administratif de Grenoble afin de voir condamner l'ONIAM à réparer les différents préjudices résultant de cette contamination. G... jugement n° 1406513 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Grenoble a mis à la charge de l'ONIAM, au titre de la solidarité nationale, l'indemnisation des préjudices résultant de la contamination de M. F... G... le virus de l'hépatite C en le condamnant à verser à M. E... F... une somme de 14 769 euros, à Mme D... F... une somme de 3 000 euros, et à Mmes C... et A... F... une somme de 2 000 euros chacune avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 2014. M. et Mmes F... relèvent appel de ce jugement en vue d'obtenir la majoration des sommes qui leur ont été allouées. L'ONIAM, qui ne conteste pas en appel devoir prendre en charge, au titre de la solidarité nationale, les préjudices résultant de cette contamination conclut au rejet de la requête. Sur la régularité du jugement attaqué et les conclusions à fin de sursis à statuer : 2. Si les consorts F... soutiennent qu'une procédure est en cours devant le tribunal judiciaire de Paris à l'encontre de la GMF, assureur du véhicule impliqué dans l'accident dont a été victime M. F..., cette circonstance est sans incidence sur l'étendue des obligations pesant sur l'ONIAM au titre de la solidarité nationale. G... suite, les requérants ne sont ni fondés à soutenir que le tribunal administratif de Grenoble a entaché son jugement d'irrégularité en ne faisant pas droit à leur demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal judiciaire de Paris, ni fondés à demander à la cour de surseoir à statuer dans l'attente de cette décision. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne l'évaluation des préjudices de M. E... F... : 3. En premier lieu, lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire déterminé, au vu des pièces du dossier, G... référence, soit au montant des salaires des personnes à employer augmentés des cotisations sociales dues G... l'employeur, soit aux tarifs des organismes offrant de telles prestations, en permettant le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat et sans être lié G... les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée G... un membre de la famille ou un proche de la victime. 4. Il résulte de l'instruction, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, que M. F... doit être considéré comme consolidé au 18 juillet 2015 soit six mois après la fin de son second traitement. Son état de santé en lien avec sa contamination G... le virus de l'hépatite C a rendu tout d'abord nécessaire l'aide d'une tierce personne à raison d'une heure G... semaine, hors périodes d'arrêt de travail, avant le début de son premier traitement du 1er juin 2012 au 31 octobre 2012 ainsi qu'après la fin de ce premier traitement du 1er décembre 2013 au 18 juillet 2015, date de sa guérison. Durant son premier traitement, son état a nécessité l'assistance d'une tierce personne à raison de deux heures G... semaine du 1er novembre 2012 au 1er décembre 2013 également hors périodes d'arrêt de travail. Durant les périodes d'arrêt de travail, ses besoins d'assistance G... une tierce personne se sont élevés à 3 heures G... semaine pour les périodes du 22 avril 2013 au 5 mai 2013 et du 27 juillet 2013 au 4 août 2013 ainsi que durant son hospitalisation au centre hospitalier de Grenoble et ses visites dans cet établissement. Afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés, il y a lieu de calculer l'indemnisation sur la base d'une année de 412 jours. En outre, dès lors qu'il résulte de l'expertise que l'aide G... une tierce personne consiste en une aide pour les actes courants de la vie quotidienne qui peut être fournie G... un personnel non spécialisé, la somme à allouer à M. F... à ce titre doit être calculée à partir du coût horaire moyen du salaire minimum interprofessionnel de croissance majoré des cotisations sociales entre 2012 et 2014 et non, comme le font valoir les requérants à partir d'un montant supérieur à ce coût horaire. Ainsi, en retenant, pour ces différentes périodes, un taux horaire de 13 euros pour fixer le montant de ces frais d'assistance, les premiers juges n'ont pas, contrairement à ce que soutiennent les requérants, fait une estimation insuffisante du montant de ce chef de préjudice. Il y a lieu, dans ces conditions, d'évaluer la somme accordée au titre de l'aide à la tierce personne à 3 295 euros. 5. En deuxième lieu, il résulte du rapport de l'expertise que M. F... a subi, en lien avec sa contamination, un déficit fonctionnel temporaire total durant trente jours, puis un déficit fonctionnel temporaire à hauteur de 10 % antérieurement à l'administration de son premier traitement soit du 1er juin 2012 au 31 octobre 2012, une seconde période de déficit fonctionnel temporaire à hauteur de 25 % durant ce premier traitement jusqu'à deux mois plus tard soit du 1er novembre 2012 au 1er janvier 2014 hormis les deux périodes d'arrêt de travail susmentionnées, enfin une dernière période de déficit fonctionnel temporaire à hauteur de 10 % du 1er décembre 2013 jusqu'à la consolidation de son état de santé soit le 18 juillet 2015, hormis la période d'arrêt de travail susmentionnée. Il y a lieu, en conséquence d'allouer à M. F... une somme de 3 109 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire total et partiel subi au cours de ces différentes périodes. 6. En troisième lieu, M. F... a exposé des frais de déplacement, de péage et d'hébergement non contestés à hauteur respectivement de 1 060 euros, 151 euros et 214 euros. S'agissant des frais de repas, les premiers juges n'ont pas fait une appréciation insuffisante de ce chef de préjudice en l'évaluant à 64 euros. 7. En quatrième lieu, les souffrances subies G... M. F..., en lien avec la contamination, ont été évaluées G... l'expert à 3,5 sur une échelle de 7 au regard, notamment, des effets secondaires des deux périodes de traitement et de la biopsie subie. En l'évaluant à 8 000 euros les premiers juges ont fait une juste évaluation de ce chef de préjudice. 8. En cinquième lieu, de la date de la révélation de sa contamination en août 2012, jusqu'à la date du constat de sa guérison le 18 juillet 2015, M. F... a pu légitiment éprouver des inquiétudes du fait de sa contamination G... la maladie qui avait été diagnostiquée et des conséquences qui pouvaient en résulter. Il sera fait une juste appréciation du préjudice qu'il a subi de ce fait en lui allouant une somme de 1 000 euros à ce titre. 9. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer dans l'attente de la procédure pendante devant le tribunal judiciaire de Paris, que la somme mise à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales au titre des préjudices subis G... M. F... doit être portée à celle de 16 893 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 28 août 2014, date de l'offre d'indemnisation de l'Office. En ce qui concerne l'évaluation des préjudices de Mme D... F..., Mme A... F... et C... F... : 10. En retenant un préjudice d'affection de 3 000 euros pour Mme D... F..., épouse de M. E... F..., qui comprend les troubles dans les conditions d'existence subis G... celle-ci et 2 000 euros pour chacune des deux filles de M. F..., le tribunal administratif de Grenoble n'a pas fait une évaluation insuffisante de ce chef de préjudice. 11. Il résulte de ce qui précède, que les requérants sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, G... le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a limité à un montant de 14 769 euros le montant de l'indemnisation des préjudices subis G... M. F..., ce montant devant être porté à 16 893 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 2014. Sur les frais liés au litige : 12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés G... M. F... et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La somme mise à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales G... l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 juillet 2020 au titre des préjudices subis G... M. F... est portée à la somme de 16 893 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 28 août 2014. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 3 : Le jugement du 15 juillet 2020 du tribunal administratif de Grenoble est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 4 : L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales versera à M. F... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... F..., à Mme D... F..., à Mme A... F..., à Mme C... F..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire, à la mutuelle générale et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Pourny, président de chambre, M. Stillmunkes, président assesseur, Mme Bentéjac, première conseillère. Rendu public G... mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. La rapporteure, C. Bentéjac Le président, F. Pourny La greffière, F. Abdillah La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY02694
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... ... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision en date du 1er juillet 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier de C... l'a admis d'office à la retraite pour invalidité, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par un jugement n° 1902628 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 14 décembre 2020, M. B..., représenté par Me Maisonneuve (SCP Teillot et associés), avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 15 octobre 2020 ; 2°) d'annuler la décision en date du 1er juillet 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier de C... l'a admis d'office à la retraite pour invalidité, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ; 3°) subsidiairement, d'ordonner la réalisation d'une expertise ; 4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de C... la somme de 2 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - la décision l'admettant à la retraite a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière, dès lors qu'il n'a pas été invité à prendre connaissance de son dossier préalablement à la réunion de la commission de réforme, en méconnaissance de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 ; - cette décision a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière, aucun spécialiste de sa pathologie n'ayant participé à la séance de la commission de réforme, en méconnaissance de l'article 4 de l'arrêté du 4 août 2004 ; - cette décision a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière, l'avis émis par la commission de réforme n'étant pas suffisamment motivé, en méconnaissance de l'article 17 de l'arrêté du 4 août 2004 ; - cette décision n'est pas suffisamment motivée, en méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ; - cette décision est entachée d'une erreur d'appréciation, dès lors qu'il n'est pas définitivement inapte à toute fonction ; - cette décision n'a pas été précédée d'une recherche de reclassement ou d'un aménagement de son poste, en méconnaissance de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986. Par un mémoire en défense enregistré le 20 décembre 2021, le centre hospitalier de C... - ..., représenté par Me Lesné (SELARL Houdart et associés), avocate, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il expose que les moyens soulevés, qui soit sont inopérants, soit ne sont pas fondés, doivent être écartés. Par une décision du 24 mars 2021, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par ordonnance du 3 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ; - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ; - et les observations de Me Laurent, avocat, représentant le centre hospitalier de C... - ... ; Une note en délibéré, enregistrée le 24 octobre 2022, a été produite pour le centre hospitalier de C... - ... et n'a pas été communiquée. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., agent des services hospitaliers qualifié, relève appel du jugement du 15 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier de C... du 1er juillet 2019 l'admettant d'office à la retraite pour invalidité et de celle rejetant implicitement son recours gracieux en date du 29 août 2019. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article 35 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme. " Selon l'article 16 de l'arrêté 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " (...) Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux (...) ". 3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie. 4. Pour démontrer que M. B... a dûment été informé de son droit à prendre connaissance de son dossier préalablement à la réunion de la commission de réforme, le centre hospitalier de C... se prévaut d'un courrier daté du 6 décembre 2017 portant convocation à la séance du 21 décembre 2017 et comportant une mention en ce sens. Toutefois, il ne justifie pas que ce courrier a été effectivement notifié, dans le respect du délai imparti, à M. B..., qui, pour la première fois en appel, le conteste. Il ne ressort par ailleurs d'aucune pièce du dossier que celui-ci aurait présenté des observations écrites ou qu'il aurait été présent ou représenté à cette séance. Ainsi, et dès lors que l'absence d'une telle information l'a, en l'espèce, privé d'une garantie, M. B... est fondé à soutenir que la décision du directeur du centre hospitalier de C... du 1er juillet 2019, fondée notamment sur l'avis émis par la commission de réforme au cours de cette séance, a été prise au terme d'une procédure irrégulière l'entachant d'illégalité. 5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ni d'ordonner la réalisation d'une expertise, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier de C... du 1er juillet 2019 l'admettant d'office à la retraite pour invalidité et de celle rejetant implicitement son recours gracieux en date du 29 août 2019. Sur les frais liés au litige : 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par le centre hospitalier de C... - .... 7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, sous réserve que Me Maisonneuve, avocate de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge du centre hospitalier de C... - ... le versement à ce dernier d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 15 octobre 2020, la décision du directeur du centre hospitalier de C... du 1er juillet 2019 admettant d'office M. B... à la retraite pour invalidité et la décision implicite rejetant le recours gracieux de M. B... en date du 29 août 2019 sont annulés. Article 2 : Le centre hospitalier de C... - ... versera à Me Maisonneuve une somme de 2 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée. Article 3 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de C... - ... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au centre hospitalier de C... - .... Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Sophie Corvellec, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022. La rapporteure, Sophie CorvellecLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne à la préfète de l'Allier en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY03660
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler le certificat d'urbanisme négatif délivré par le maire de la commune de Bertangles le 9 août 2019 pour le changement de destination d'un garage en habitation sur la parcelle cadastrée AB75 située 2 rue de Poulainville. Par un jugement n° 1903314 du 23 juin 2020, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 juillet et 16 novembre 2020, Mme C... B..., représentée par Me A... D..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir ce certificat ; 3°) d'enjoindre à la commune de Bertangles de lui délivrer un certificat d'urbanisme ; 4°) de condamner la commune de Bertangles à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. -------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ; - le décret n° 2020-1404 du 18 novembre 2020 ; - le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Marc Heinis, président de chambre, - et les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public. Considérant ce qui suit : Sur le certificat d'urbanisme négatif : En ce qui concerne la légalité externe : 1. Le maire de Bertangles, après avoir cité les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de la commune applicables, a exposé de manière suffisamment précise les motifs pour lesquels l'opération envisagée n'était pas réalisable. Le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation du certificat d'urbanisme négatif au regard de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme manque donc en fait. En ce qui concerne la légalité interne : 2. Aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme, dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. (...) ". 3. Il appartient aux auteurs du plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait fondée sur des faits matériellement inexacts ou entachée d'une erreur manifeste. 4. Le plan local d'urbanisme de la commune de Bertangles prévoit que la zone urbaine comprend un secteur UAa " qui caractérise le noyau ancien dense tandis que les quartiers d'extension présentant une urbanisation aérée et diversifiée se positionnent en U " et un secteur Uj qui " correspond aux espaces de jardins " où, selon l'article U2, " seules les serres, remises et abris d'une surface cumulée inférieure à 20 m2 par unité foncière sont autorisés ". 5. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle 75 comprend à l'ouest une partie en secteur UAa où est implantée la moitié d'un garage, au centre une partie en secteur Uj où est implantée l'autre moitié du garage, au nord-est une partie en secteur UAa où est implantée une maison en ruine et à l'est une partie en U où est implantée la maison d'habitation de Mme B.... 6. D'une part, le zonage d'un plan local d'urbanisme n'est pas tenu de respecter les limites d'une parcelle ou d'une unité foncière. 7. D'autre part, le classement d'une partie de la parcelle en secteur Uj est conforme au parti d'aménagement ressortant du rapport de présentation du plan local d'urbanisme adopté en 2007 : " Le secteur Uj délimite les secteurs de jardins où les constructions à usage d'habitation sont interdites. Les constructions à usage d'annexes sont quant à elles réglementées. Des cœurs d'îlots apparaissent ainsi dans l'agglomération comme des espaces aérés, privilégiés, que les élus souhaitent préserver. Ces zones correspondent à une réalité des secteurs, à dominante naturelle, à l'arrière de fronts bâtis en présence ou à venir. Il n'est pas souhaité développer une urbanisation dans ces fonds de parcelles, afin de maintenir une cohérence avec le bâti environnant, mais aussi de " resserrer " l'urbanisation à proximité de la voie afin de construire l'espace public et d'en faciliter la lecture. Il s'agit essentiellement d'arrières d'habitations, de jardins, pâtures qui participent à l'ambiance du milieu rural en présence, à sa richesse et à sa diversité ". 8. Enfin, il ressort des pièces du dossier que cette même partie de parcelle a conservé, à l'exception de la moitié est du garage, le caractère de jardin. 9. Dans ces conditions, même si ce caractère a été perdu pour cette moitié est du garage, même si sa moitié ouest est classée en secteur UAa, même si ce garage, autorisé en 1993 par un permis de construire, est l'accessoire de la maison d'habitation et même si la parcelle est desservie par les réseaux et la voirie, le classement de ladite moitié est, qui a fondé la décision attaquée, n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation. 10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée en défense, que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 11. Le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution pour l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Sur les frais exposés et non compris dans les dépens : 12. D'une part, la demande présentée par Mme B..., partie perdante, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être rejetée. 13. D'autre part, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'accueillir la demande présentée par la commune de Bertangles sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme C... B... est rejetée. Article 2 : La demande présentée par la commune de Bertangles au titre des frais exposés et non compris dans les dépens est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... D... pour Mme C... B... et à la commune de Bertangles. N°20DA01043 2
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Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 7 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat jeunes médecins demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre des solidarités et de la santé sur sa demande tendant à l'abrogation du décret n° 2006-1222 du 5 octobre 2006 relatif aux personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques hospitaliers en tant qu'il exclut les praticiens contractuels du bénéfice de l'indemnité d'engagement de service public exclusif ; 2°) d'enjoindre au Premier ministre d'abroger le décret n°2006-1222 du 5 octobre 2006 dans la même mesure et d'édicter un nouveau décret afin de rendre éligibles à cette indemnité l'ensemble des praticiens hospitaliers titulaires et contractuels ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999 ; - le code général de la fonction publique ; - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative ; -le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Ségolène Cavaliere, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 10octobre 2022, présentée par le syndicat jeunes médecins ; Considérant ce qui suit : 1. D'une part, aux termes de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique : " Le personnel des établissements publics de santé comprend, (...) : / 1° Des médecins, des odontologistes et des pharmaciens dont le statut, qui peut prévoir des dispositions spécifiques selon que ces praticiens consacrent tout ou partie de leur activité à ces établissements, est établi par voie réglementaire ; / 2° Des médecins, des odontologistes et des pharmaciens recrutés par contrat dans des conditions déterminées par voie réglementaire ". Aux termes de de l'article L. 6154-1 du code de la santé publique : " Les praticiens mentionnés au 1° de l'article L. 6152-1 et à l'article L. 952-21 du code de l'éducation exerçant au minimum huit demi-journées par semaine dans les établissements publics de santé sont autorisés à exercer une activité libérale dans les conditions définies au présent chapitre, sous réserve que l'exercice de cette activité n'entrave pas l'accomplissement des missions définies aux articles L. 6111-1 à L 6111-1-4 ainsi qu'à l'article L. 6112-1 ". Aux termes de l'article R. 6152-406 du même code : " (...) En aucun cas, les praticiens contractuels ne peuvent exercer une activité libérale au sein de l'établissement public de santé ". 2. D'autre part, l'article D. 6152-23-1 du code de la santé publique détermine les indemnités dont peuvent bénéficier les praticiens hospitaliers titulaires exerçant à temps plein dans un établissement public de santé, au nombre desquelles figure notamment l'indemnité d'engagement de service public exclusif versée à ceux de ces praticiens hospitaliers titulaires qui s'engagent, pour une période de trois ans renouvelable, à ne pas exercer une activité libérale telle que prévue à l'article L. 6154-1 du même code. L'indemnité d'engagement de service public exclusif n'est, en revanche, pas au nombre des indemnités énumérées par l'article R. 6152-417 du même code dont peuvent bénéficier les praticiens contractuels. 3. Le syndicat requérant demande l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre des solidarités et de la santé a rejeté sa demande d'abrogation des dispositions réglementaires qui excluent du bénéfice de l'indemnité d'engagement de service public exclusif les praticiens contractuels exerçant dans des établissements publics de santé. 4. Aux termes de la clause 4 de l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée annexé à la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999 : " 1. Pour ce qui concerne les conditions d'emploi, les travailleurs à durée déterminée ne sont pas traités d'une manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée comparables au seul motif qu'ils travaillent à durée déterminée, à moins qu'un traitement différent soit justifié par des raisons objectives ". Cette clause, dans l'interprétation qu'en retient la Cour de justice de l'Union européenne, s'oppose aux inégalités de traitement dans les conditions d'emploi entre travailleurs à durée déterminée et travailleurs à durée indéterminée, sauf à ce que ces inégalités soient justifiées par des raisons objectives, qui requièrent que l'inégalité de traitement se fonde sur des éléments précis et concrets, pouvant résulter, notamment, de la nature particulière des tâches pour l'accomplissement desquelles des contrats à durée déterminée ont été conclus et des caractéristiques inhérentes à celles-ci ou, le cas échéant, de la poursuite d'un objectif légitime de politique sociale d'un Etat membre. 5. Toutefois, la différence de traitement, résultant des dispositions critiquées, entre praticiens titulaires et praticiens contractuels, qui sont placés dans des situations différentes pour ce qui concerne la détermination des éléments de leur rémunération, n'est pas fonction de la durée déterminée ou indéterminée de la relation de travail mais est liée à la faculté ouverte aux praticiens titulaires de consacrer une part de leur service à l'exercice d'une activité libérale, la prime ayant pour objet de compenser l'engagement des praticiens titulaires de ne pas faire usage de cette faculté. Au surplus, cette différence de traitement se justifie par l'objectif légitime consistant à rendre attractif l'exercice des fonctions de praticien hospitalier dans le cadre d'emplois publics permanents de praticiens titulaires pourvus par la voie d'un concours national qui assure la qualité du recrutement nécessaire aux soins. Dès lors, et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que les dispositions attaquées méconnaîtraient la clause 4 de l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée ne peut qu'être écarté. 6. Il résulte de ce qui précède que la requête du syndicat jeunes médecins doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête du syndicat jeunes médecins est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat jeunes médecins, à la Première ministre, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, au ministre de la santé et de la prévention et au ministre de la transformation et de la fonction publique. Délibéré à l'issue de la séance du 7 octobre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre ; M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, M. Olivier Rousselle, Mme Suzanne Von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Cyril Roger-Lacan, conseillers d'Etat et Mme Ségolène Cavaliere, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure. Rendu le 28 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Ségolène Cavaliere Le secrétaire : Signé : Mme Anne-Lise Calvaire
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Vu la procédure suivante : La société Multihabitation 6, à l'appui de sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 4 679,95 euros en réparation des préjudices ayant résulté pour elle du refus du préfet de la Seine-Saint-Denis de lui accorder le concours de la force publique pour l'exécution d'une décision de justice entre le 1er avril 2020 et le 25 août 2020, a produit un mémoire distinct, enregistré le 11 février 2022 au greffe du tribunal administratif de Melun, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel elle soulève une question prioritaire de constitutionnalité. Par un jugement n° 2106911 du 29 juillet 2022, enregistré le 5 août 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Melun, avant qu'il soit statué sur la demande de la société Multihabitation 6, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative au prolongement de la trêve hivernale et de l'article 10 de la loi du 11 mai 2020 prolongeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions. Par la question prioritaire de constitutionnalité transmise et par un nouveau mémoire, enregistré le 3 octobre 2022 au greffe du contentieux du Conseil d'Etat, la société Multihabitation 6 soutient que l'ordonnance du 25 mars 2020 relative au prolongement de la trêve hivernale et l'article 10 de la loi du 11 mai 2020 prolongeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, applicables au litige, méconnaissent le principe d'égalité devant les charges publiques, le principe d'égalité devant la loi et l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020, notamment son article 10 ; - l'ordonnance n° 2020-331 du 25 mars 2020 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société Multihabitation 6 ; Considérant ce qui suit : 1. Il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux. 2. Aux termes de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution : " Nonobstant toute décision d'expulsion passée en force de chose jugée et malgré l'expiration des délais accordés en vertu de l'article L. 412-3, il est sursis à toute mesure d'expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu'au 31 mars de l'année suivante, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l'unité et les besoins de la famille./ Par dérogation au premier alinéa du présent article, ce sursis ne s'applique pas lorsque la mesure d'expulsion a été prononcée en raison d'une introduction sans droit ni titre dans le domicile d'autrui par voies de fait (...) ". Les dispositions de l'article 1er de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative au prolongement de la trêve hivernale, puis celles du I de l'article 10 de la loi du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions ont prolongé, pour l'année 2020, cette période, dite de trêve hivernale, prévue au premier alinéa de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution, en repoussant son terme du 31 mars au 31 mai 2020, puis au 10 juillet 2020. Ces dispositions ont ainsi eu pour effet de faire obstacle à ce que le concours de la force publique soit mis en œuvre, jusqu'au 10 juillet 2020, pour procéder à l'expulsion des occupants de logements à usage d'habitation. 3. En premier lieu, ni le sursis aux mesures d'expulsion prévu par le premier alinéa de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution ni la prolongation de sa période de mise en œuvre, qui résulte des dispositions contestées, n'ont d'incidence sur la créance, exigible devant le juge civil, que le bailleur conserve contre l'occupant, aussi longtemps que le versement d'une indemnité ne subroge pas l'Etat dans ses droits. Si la société Multihabitation 6 fait valoir que les dispositions qu'elle conteste seraient contraires au principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la prolongation de la période de sursis d'avril à juillet 2020, dans le contexte de crise sanitaire causée par l'épidémie de covid-19 et des mesures qui ont alors été prises par les autorités publiques pour y répondre, a été motivée par l'objectif d'intérêt général de santé publique consistant à réduire les déplacements et interactions individuels pendant cette phase de la crise sanitaire, par le respect des exigences découlant, en matière de logement durant cette période, de la dignité de la personne humaine ainsi que par l'objectif d'intérêt général de préservation de l'ordre public. La prolongation de la période de sursis résultant des dispositions contestées a été limitée à la durée de l'état d'urgence sanitaire, sans extension des catégories d'occupants susceptibles de bénéficier de telles mesures de sursis. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les dispositions qu'elle conteste, par les conséquences qu'elles emportent sur la situation des propriétaires de logements, entraîneraient une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. 4. En deuxième lieu, si la société Multihabitation 6 fait valoir que, l'année suivante, l'ordonnance du 10 février 2021 relative au prolongement de la trêve hivernale a prolongé la période de sursis jusqu'en mai 2021 en prévoyant, à la différence des dispositions dont elle conteste la constitutionnalité, que, lorsque la responsabilité de l'Etat serait engagée à la suite d'un refus de concours de la force publique, la période de responsabilité débuterait à compter du 1er avril 2021, la circonstance qu'un autre dispositif ait été retenu en 2021, différent de celui résultant des dispositions contestées pour l'année 2020, ne traduit pas de méconnaissance du principe d'égalité. 5. En dernier lieu, la société Multihabitation 6 soutient que les dispositions litigieuses méconnaîtraient l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en ce qu'elles remettraient en cause de manière rétroactive le droit des bailleurs ayant obtenu, avant leur entrée en vigueur, une décision accordant le concours de la force publique pour exécuter un jugement d'expulsion. Toutefois, en ce qu'elles se bornent à différer, pour les motifs d'intérêt général mentionnés au point 3, les effets qui peuvent être légitimement attendus des jugements d'expulsion, et alors au demeurant que, de manière générale, la survenance de circonstances postérieures à la décision judiciaire d'expulsion conduisant à ce que l'exécution de celle-ci puisse être regardée comme susceptible d'attenter à la dignité de la personne humaine peut légalement justifier le refus de prêter le concours de la force publique, les dispositions litigieuses ne portent pas au droit au recours ni aux situations légalement acquises d'atteinte qui serait contraire à la garantie des droits protégée par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. 6. Il résulte de tout ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. Par suite, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel. D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Multihabitation 6. Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Multihabitation 6, au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et à la Première ministre. Délibéré à l'issue de la séance du 7 octobre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre et M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, Mme Sophie-Caroline de Margerie, M. Olivier Rousselle, Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Cyril Roger-Lacan, conseillers d'Etat et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat-rapporteur. Rendu le 28 octobre 2022.
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Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 11 avril 2017 par lequel le préfet de la Marne a prononcé la fusion des associations foncières de Lagery et de Lagery LGV et d'autre part, de lui enjoindre ainsi qu'à l'association foncière de Lagery 2 de produire, sous astreinte, les pouvoirs comptabilisés lors du vote aux assemblées générales extraordinaires des propriétaires du 13 décembre 2013 de ces deux associations foncières. Par un jugement n° 1701112 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du préfet de la Marne du 11 avril 2017. Par un arrêt n°18NC03516, 18NC03517 du 10 novembre 2020, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par le ministre de l'agriculture et de l'alimentation contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 janvier et 12 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code rural et de la pêche maritime ; - la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 ; - l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 ; - le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Rousselle, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de M. A... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que les associations foncières de remembrement de Lagery et de Lagery LGV, créées respectivement par arrêtés préfectoraux des 30 avril 1971 et 28 avril 2003, ont été fusionnées par un arrêté du 11 avril 2017 du préfet de la Marne sous le nom d'association foncière de remembrement de Lagery 2. Par un jugement du 16 octobre 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a, sur la demande de M. A..., exploitant agricole sur le territoire de la commune de Lagery, annulé cet arrêté. Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 10 novembre 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté le recours qu'il avait formé contre ce jugement. 2. Aux termes de l'article 48 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires, rendu applicable, en vertu de l'article L. 131-1 du code rural et de la pêche maritime, aux associations foncières de remembrement désormais dénommées associations foncières d'aménagement foncier agricole et forestier : " Deux ou plusieurs associations syndicales autorisées ou constituées d'office peuvent être autorisées, à leur demande ou à la demande de toute personne ayant capacité à la création d'une association syndicale autorisée, à fusionner en une association syndicale autorisée. / La demande est adressée à l'autorité administrative compétente dans le département où la future association a prévu d'avoir son siège. / La fusion peut être autorisée par acte de l'autorité administrative lorsque l'assemblée des propriétaires de chaque association appelée à fusionner s'est prononcée favorablement dans les conditions de majorité prévues à l'article 14 ". Aux termes de l'article 14 de cette ordonnance : " La création de l'association syndicale peut être autorisée par l'autorité administrative lorsque la majorité des propriétaires représentant au moins les deux tiers de la superficie des propriétés ou les deux tiers des propriétaires représentant plus de la moitié de la superficie des propriétés se sont prononcés favorablement ". Aux termes de l'article 13 de cette même ordonnance : " L'acte ordonnant l'ouverture de l'enquête prévue à l'article 12 organise la consultation des propriétaires, qui intervient à l'issue de l'enquête. Un propriétaire qui, dûment averti des conséquences de son abstention, ne s'opposerait pas expressément au projet est réputé favorable à la création de l'association. Les modalités de la consultation des propriétaires sont définies par le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 62 ", l'article 12 prévoyant que l'autorité administrative soumet à une enquête publique le projet de statuts de l'association syndicale autorisée et que l'acte ordonnant l'ouverture de l'enquête est notifié à chaque propriétaire d'un immeuble susceptible d'être inclus dans le périmètre de la future association. 3. Il résulte des dispositions de l'ordonnance du 1er juillet 2004 que la règle figurant à l'article 13 de cette ordonnance, qui conduit à compter comme étant favorables au projet de création d'une association les propriétaires qui, dûment avertis des conséquences de leur abstention, ne s'opposent pas expressément au projet, est prévue pour la consultation des propriétaires dans le cadre de l'enquête publique qui porte sur le projet de statuts d'une association syndicale en voie de création. Aucune disposition de l'ordonnance ne rend cette règle particulière applicable à la fusion d'associations, ni n'implique qu'elle le soit, l'article 48 se bornant pour le cas de la fusion à rendre applicables les conditions de majorité qualifiée figurant à l'article 14 de l'ordonnance sans renvoyer à son article 13. Une telle règle n'est pas davantage prévue par l'article 82 du décret du 3 mai 2006, relatif à la procédure de fusion d'associations syndicales autorisées. 4. Il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que la règle figurant à l'article 13 de l'ordonnance du 1er juillet 2004, applicable à la création d'une association syndicale, n'a pas été rendue applicable à une opération de fusion d'associations syndicales autorisées régie par l'article 48 de cette ordonnance par le renvoi qu'il fait aux conditions de majorité prévues à l'article 14 de l'ordonnance et en énonçant, en outre, qu'une telle règle, également prévue spécifiquement par l'article 76 du décret du 3 mai 2006 portant application de l'ordonnance du 1er juillet 2004 pour une opération d'unions d'associations, ne figure pas davantage à l'article 82 de ce décret, propre aux fusions d'associations, et qu'aucune autre disposition législative ou réglementaire relative aux fusions d'associations syndicales de propriétaires n'édicte une telle règle, la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit . 5. Il suit de là que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 6. Il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de juridiction administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros que demande M. A... à ce titre. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'agriculture et de l'alimentation est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à M. A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire et à M. B... A.... Délibéré à l'issue de la séance du 7 octobre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Cyril Roger-Lacan, M. Jean-Dominique Langlais, conseillers d'Etat et M. Olivier Rousselle, conseiller d'Etat-rapporteur. Rendu le 28 octobre 2022. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl Le rapporteur : Signé : M. Olivier Rousselle La secrétaire : Signé : Mme Anne-Lise Calvaire
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 et 21 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... C... et M. B... D... demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : 1°) d'ordonner la suspension de l'exécution du décret n° 2022-1327 du 17 octobre 2022 portant injonction, au regard de la menace grave et actuelle contre la sécurité nationale, de conservation pour une durée d'un an de certaines catégories de données de connexion ; 2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative. Ils soutiennent que : - ils justifient d'un intérêt pour agir ; - la condition d'urgence est satisfaite ; - il existe un doute sérieux quant à la légalité du décret attaqué, en ce que les données de connexion et de localisation sont de nature à porter atteinte au droit au respect de la vie privée, garanti par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et qu'il n'est pas établi que serait constatée une menace grave et actuelle contre la sécurité nationale, par rapport à la situation antérieure, compte tenu de l'amélioration de la situation et de l'entrée en vigueur de nouvelles dispositions pour lutter contre le terrorisme. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des postes et des communications électroniques ; - la loi n° 2021-998 du 30 juillet 2021 ; - le décret n° 2021-1362 du 20 octobre 2021 ; - le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. M. C... et M. D... demandent au juge des référés du Conseil d'Etat de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution du décret du 17 octobre 2022 par lequel la Première ministre, retenant l'existence d'une menace grave et actuelle contre la sécurité nationale, a enjoint aux opérateurs de communications électroniques ainsi qu'aux personnes mentionnées aux 1 et 2 du I de l'article 6 de la loi du 21 juin 2004, sur le fondement du III de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques tel que modifié par l'article 17 de la loi du 30 juillet 2021 relative à la prévention d'actes de terrorisme et au renseignement, de conserver, pour une durée d'un an, les données de trafic et de localisation respectivement énumérées au V de l'article R. 10-13 du code des postes et des communications électroniques et à l'article 6 du décret du 20 octobre 2021. 2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 522-1 du code de justice administrative : " La requête visant au prononcé de mesures d'urgence doit (...) justifier de l'urgence de l'affaire ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. 3. Il appartient au juge des référés, saisi sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative d'une demande tendant à la suspension d'une décision administrative, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de cette décision sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence, qui doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celle-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. L'office du juge des référés, saisi de conclusions à fin de suspension, le conduit à porter sur l'urgence une appréciation objective, concrète et globale, au vu de l'ensemble des intérêts en présence, afin de déterminer si, dans les circonstances particulières de chaque affaire, il y a lieu d'ordonner une mesure conservatoire à effet provisoire dans l'attente du jugement au fond de la requête à fin d'annulation de la décision contestée. 4. Contrairement aux prescriptions de l'article R. 522-1 du code de justice administrative, la requête, qui se borne à affirmer que la condition d'urgence est satisfaite du fait de l'atteinte portée à des libertés fondamentales et de l'application générale des dispositions contestées à l'ensemble de la population, ne justifie pas de l'urgence qu'il y aurait à suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution des dispositions du décret contesté. 5. Il s'ensuit que la requête, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peut qu'être rejetée par application de l'article L. 522-3 du même code, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa recevabilité. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête de M. C... et autre est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... C..., premier requérant dénommé. Copie en sera adressée à la Première ministre. Fait à Paris, le 26 octobre 2022 Signé : Jacques-Henri Stahl
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Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 15 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... doit être regardé comme contestant devant le juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, les deux refus consécutifs que l'agence Pôle Emploi d'Albi a opposé à ce qu'il bénéficie de l'allocation d'aide au retour à l'emploi (ARE). Il soutient qu'il satisfait les conditions pour bénéficier de cette allocation. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-3 du code de justice administrative : " En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. 2. Le juge des référés du Conseil d'Etat ne peut être régulièrement saisi, en premier et dernier ressort, d'une requête tendant à la mise en œuvre de l'une des procédures régies par le livre V du code de justice administrative que pour autant que le litige principal auquel se rattache ou est susceptible de se rattacher la mesure d'urgence qu'il lui est demandé de prendre ressortit lui-même à la compétence directe du Conseil d'Etat. L'article R. 522-8-1 du même code prévoit que, par dérogation aux dispositions du titre V du livre III relatif au règlement des questions de compétence au sein de la juridiction administrative, le juge des référés qui entend décliner la compétence de la juridiction rejette les conclusions dont il est saisi par voie d'ordonnance. 3. M. B... conteste devant le juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, les deux refus consécutifs que l'agence Pôle Emploi d'Albi a opposé à ce qu'il bénéficie de l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Ce recours n'est manifestement pas au nombre de ceux dont il appartient au Conseil d'Etat de connaître. 4. Il résulte de ce qui précède qu'il est manifeste que la requête de M. B... ne peut être accueillie. Par suite, sa requête doit être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B.... Fait à Paris, le 24 octobre 2022 Signé : Christophe Chantepy
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Vu la procédure suivante : MM. Noor F... et Akhtar G..., ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, d'enjoindre, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de l'Europe et des affaires étrangères de délivrer à Mme D... F... et ses enfants, au titre de la protection fonctionnelle, aux deux frères, à la sœur et aux belles-sœurs de M. G..., et leurs enfants, au même titre ou à titre humanitaire, un visa d'entrée en France, dans un délai de 7 jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, de traiter de manière urgente les demandes de visa des intéressés déposées au poste consulaire français à Téhéran, en admettant leur demande dès qu'ils se présenteront devant une autorité consulaire française, même sans avoir obtenu un rendez-vous préalable. Par une ordonnance n° 2213204 du 12 octobre 2022, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté leur demande. Par une requête et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 16, 17 et 24 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. G... et M. F... demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) de faire droit à leurs conclusions de première instance. Ils soutiennent que : - ils sont tous les deux anciens collaborateurs de l'armée française en Afghanistan et sollicitent le bénéfice de la protection fonctionnelle pour les membres de la famille demeurés sur place à savoir Mme D... F..., l'épouse de M. G... et ses enfants, à A.... Milad et Hamid F..., fils de M. F..., à la fille de ce dernier, ainsi qu'à leurs enfants ; - ces personnes, qui s'étaient rendues en Iran afin de solliciter la délivrance d'un visa d'entrée en France auprès des services consulaires français, ont vu leurs visa d'entrée en Iran expirer le 18 octobre 2022 et ont été expulsées d'Iran ; - le jeune frère de M. G..., M. C... F..., a été capturé par les talibans au mois d'octobre 2022 et est apparu sur une vidéo dans laquelle il est frappé et menacé d'être décapité si son père et son frère ne se rendent pas aux autorités militaires des talibans ; - sa sœur a également disparu et le reste de la famille est caché dans des conditions précaires à la frontière de l'Iran et de l'Afghanistan ; - cette situation caractérise une situation d'extrême urgence justifiant l'intervention du juge du référé-liberté. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. " En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. 2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Nantes que M. G... a servi du 1er avril 2005 au 1er mars 2013 au sein des forces françaises en Afghanistan, sous un statut de personnel recruté par contrat de droit local. Ayant obtenu son évacuation vers le territoire français, il a été reconnu combattant de l'armée française par une décision du 23 décembre 2019 et a ensuite obtenu la nationalité française. Son père, M. F..., soutient également avoir été employé comme auxiliaire de l'armée française. Ils cherchent à obtenir que les membres de leur famille demeurés en Afghanistan, et se trouvant actuellement en Iran ou en Afghanistan, soient autorisés à entrer en France. Des visas ayant été délivrés le 13 avril 2022 aux parents de M. G..., dont sa mère, ainsi qu'à ses deux frères, les requérants doivent être regardés comme demandant la délivrance de visas à la sœur de M. G..., à son épouse, ainsi qu'à ses neveux et nièces. Ils font appel de l'ordonnance du 12 octobre 2022 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande pour défaut d'urgence. 3. Si les requérants produisent, pour justifier de l'urgence de leur demande, une vidéo de moins de 30 secondes, diffusée sur YouTube et accompagnée d'un commentaire en langue arabe dont la traduction n'est pas fournie, qu'ils présentent comme donnant à voir le jeune frère de M. G..., capturé par des talibans qui menaceraient les requérants de l'exécuter faute pour eux de se rendre, aucun élément au dossier ne vient corroborer ces allégations et la valeur probante de ce document. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'ordonnance qu'ils attaquent. Il y a lieu de rejeter leur requête selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête de M. G... et autre est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. E... G... et à M. B... F.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Fait à Paris, le 25 octobre 2022 Signé : Alain Seban
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Vu la procédure suivante : M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 16 février 2017 par laquelle le directeur des ressources humaines de l'armée de terre a rejeté sa demande tendant à ce que son indice brut soit fixé au moins à 750 et les décisions des 21 juin et 19 juillet 2017 de la ministre des armées rejetant ses recours gracieux. Par un jugement n°s 1703673, 1802596 du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande. Par un arrêt n° 20NT02536 du 15 mars 2022, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mai et 5 août 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un mémoire, enregistré le 5 août 2022, présenté en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, M. B... demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'arrêt du 15 mars 2022 de la cour administrative d'appel de Nantes, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droit et libertés garantis par la Constitution des dispositions des articles L. 4138-8 et L. 4138-9 du code de la défense et de l'article 5 de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 34 et 61-1 ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code de la défense ; - le code général de la fonction publique ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. François Lelièvre, maître des requêtes, - les conclusions de M. A... C... de Vendeuil, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., officier de carrière dans l'armée de terre, a été détaché auprès du ministère de l'éducation nationale du 1er juillet 2014 au 1er août 2016. Le 1er juillet 2016, il a été promu au 13ème échelon du grade d'ingénieur de 2ème classe et rémunéré sur la base de l'indice brut 750. Lors de sa réintégration au ministère de la défense, le 1er août 2016, sa rémunération a été calculée sur la base de l'indice brut 706. M. B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les décisions par lesquelles la ministre des armées a rejeté ses demandes tendant à ce que lui soit attribué au moins l'indice brut 750. Par un jugement du 18 juin 2020, le tribunal administratif a rejeté ces demandes. M. B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 15 mars 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son appel contre ce jugement et demande au Conseil d'Etat de transmettre au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions des articles L. 4138-8 et L. 4138-9 du code de la défense et de l'article 5 de la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique. Sur la question prioritaire de constitutionnalité : 2. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement de circonstances, et qu'elle soit nouvelle ou présente un caractère sérieux. 3. Aux termes de l'article L. 4138-8 du code de la défense : " Le détachement est la position du militaire placé hors de son corps d'origine. Dans cette position, le militaire continue à figurer sur la liste d'ancienneté de son corps et à bénéficier des droits à l'avancement et à pension de retraite (...) ". Et aux termes de l'article L. 4138-9 du même code : " Le militaire détaché est réintégré à l'expiration de son détachement, à la première vacance venant à s'ouvrir dans le corps auquel il appartient ou en surnombre dans les cas déterminés par décret en Conseil d'Etat. / Le militaire détaché remis à la disposition de son administration d'origine avant l'expiration de son détachement pour une cause autre qu'une faute commise dans l'exercice de ses fonctions, et qui ne peut être réintégré dans son corps d'origine en l'absence d'emploi vacant, continue d'être rémunéré par l'organisme de détachement jusqu'à sa réintégration. / Le militaire peut être intégré, sur demande agréée, dans le corps ou cadre d'emploi de détachement dans les mêmes conditions que celles prévues pour un fonctionnaire par le statut particulier de ce corps ou cadre d'emploi. " 4. M. B... soutient que les dispositions des articles L. 4138-8 et L. 4138-9 du code de la défense et celles de l'article 5 de la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique méconnaissent, d'une part, le principe d'égalité tel que garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et, d'autre part, la compétence que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution dans des conditions affectant ce principe, faute de disposer, à la différence de ce qui est prévu pour un fonctionnaire civil, que lors de la réintégration du militaire détaché, il soit tenu compte du grade et de l'échelon atteints dans le corps ou cadre d'emplois de détachement, sous réserve qu'ils lui soient plus favorables. En ce qui concerne l'applicabilité au litige des dispositions contestées : 5. Il résulte des dispositions contestées des articles L. 4138-8 et L. 4138-9 du code de la défense qu'elles ne prévoient pas qu'il soit tenu compte, lors de la réintégration d'un militaire détaché dans la fonction publique civile, du grade et de l'échelon atteints dans le corps ou cadre d'emplois de détachement, lorsqu'ils lui sont plus favorables. Si ces dispositions sont ainsi applicables au litige opposant M. B... au ministre des armées, en revanche, les dispositions de l'article 5 de la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique, qui modifient des dispositions, aujourd'hui codifiées dans le code général de la fonction publique, de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, ne régissent pas la situation des militaires. N'étant pas non plus indissociables des dispositions des articles L. 4138-8 et L. 4138-9 du code de la défense, elles ne sont pas applicables au litige. En ce qui concerne le caractère sérieux de la question prioritaire de constitutionnalité : 6. En premier lieu, la circonstance que les dispositions législatives contestées du code de la défense ne prévoient pas qu'il soit tenu compte, lors la réintégration du militaire détaché, du grade et de l'échelon atteints dans le corps ou cadre d'emplois de détachement, sous réserve qu'ils lui soient plus favorables, n'implique en tout état de cause pas, contrairement à ce que soutient M. B..., que le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence. 7. En second lieu, le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la loi qui l'établit. 8. Le principe de l'égalité de traitement dans le déroulement de la carrière des fonctionnaires civils et des militaires n'est susceptible de s'appliquer qu'entre les agents appartenant à un même corps. Par suite, M. B... ne saurait utilement soutenir que la circonstance que, du fait des dispositions des articles L. 4138-8 et L. 4138-9 du code de la défense, les militaires détachés ne bénéficient pas des mêmes avantages que les fonctionnaires détachés lors de leur réintégration caractérise une méconnaissance du principe d'égalité de traitement. 9. Par suite, la question de constitutionnalité soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. Il n'y a par suite pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel. Sur l'autre moyen : 10. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ". 11. Pour demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque, M. B... soutient, en outre, que la cour administrative d'appel de Nantes a commis une erreur de droit en jugeant que le fait que les conditions de réintégration après détachement des militaires ne sont pas alignées sur celles des fonctionnaires ne méconnaît pas les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 14 de cette convention. 12. Ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi. D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B.... Article 2 : Le pourvoi de M. B... n'est pas admis. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. D... B..., à la Première ministre et au ministre des armées. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel. Délibéré à l'issue de la séance du 17 octobre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; M. Géraud Sajust de Bergues, Mme Anne Courrèges, M. Benoît Bohnert, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat et M. François Lelièvre, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 2 novembre 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé Le rapporteur : Signé : M. François Lelièvre La secrétaire : Signé : Mme Nadine Pelat
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Vu la procédure suivante : M. B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner au préfet de la Guadeloupe de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, conformément aux dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à défaut, d'enjoindre au préfet de la Guadeloupe de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2201059 du 30 septembre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande. Par une requête, enregistrée le 17 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : 1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ; 2°) d'annuler l'ordonnance attaquée ; 3°) de suspendre l'exécution de l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 30 août 2022 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de renvoi ; 4°) d'enjoindre au préfet de la Guadeloupe de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à tout le moins et dans le même délai, de réexaminer sa situation ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la condition d'urgence est satisfaite dès lors qu'il peut être éloigné du territoire français sans délai ; - il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales ; - la décision contestée méconnaît le droit au respect de la vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'intérêt supérieur de l'enfant, garanti par l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, dès lors qu'il justifie subvenir aux besoins de son enfant et que ce dernier souffre d'asthme chronique nécessitant des déplacements réguliers en métropole si bien que sa présence à ses côtés est nécessaire. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. 2. La circonstance qu'une atteinte à une liberté fondamentale, portée par une mesure administrative, serait avérée n'est pas de nature à caractériser l'existence d'une situation d'urgence justifiant l'intervention du juge des référés dans le très bref délai prévu par les dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. Il appartient au juge des référés d'apprécier, au vu des éléments que lui soumet le requérant comme de l'ensemble des circonstances de l'espèce, si la condition d'urgence particulièrement requise par l'article L. 521-2 est satisfaite, en prenant en compte la situation du requérant et les intérêts qu'il entend défendre mais aussi l'intérêt public qui s'attache à l'exécution des mesures prises par l'administration. 3. M. A... a saisi le juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Guadeloupe de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour puis une carte de séjour temporaire, ou, à défaut, de réexaminer sa situation. Il fait appel de l'ordonnance du 30 septembre 2022 par laquelle le juge des référés a rejeté sa demande. 4. Il résulte de l'instruction devant le tribunal administratif de la Guadeloupe que M. A..., ressortissant haïtien, né en 1985, qui est entré irrégulièrement en France en 2019 et s'est maintenu sur le territoire malgré le rejet de sa demande d'asile le 29 novembre 2019, a fait l'objet, le 30 août 2022, d'un arrêté lui imposant de quitter le territoire sans délai, pris par le préfet de la Guadeloupe, à la suite de son interpellation pour conduite d'un véhicule sans permis de conduire. Pour justifier de l'urgence de sa demande de délivrance d'un titre de séjour, le requérant fait valoir les conséquences de son départ sur la situation de sa fille, de nationalité française, née le 14 janvier 2020. Toutefois, si le requérant a reconnu sa fille, par un acte du 9 janvier 2020, et produit des justificatifs du versement de sommes d'argent à la mère de cette dernière entre mars 2021 et février 2022, il est constant qu'il ne vit pas avec sa fille. Les seules photographies fournies en appel ne suffisent pas à justifier de sa présence auprès d'elle et de sa participation à son éducation. Par suite, le juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe a pu estimer que la condition d'urgence particulière requise par l'article L. 521-2 du code de justice administrative n'était pas, en l'espèce, satisfaite. 5. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande. Il y a lieu dès lors de rejeter son appel selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris ses conclusions présentées au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sans qu'il y ait lieu de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B.... Copie en sera adressée au préfet de la Guadeloupe et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Fait à Paris, le 27 octobre 2022 Signé : Nathalie Escaut
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Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 15 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " Shu-Typique-Sortons du Silence " demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : 1°) de suspendre l'exécution de la décision implicite de rejet du 15 août 2022 née du silence du ministre de la santé et de la prévention sur sa demande tendant à ce que le Haut conseil de la santé publique soit saisi en vue d'ajouter le syndrome hémolytique et urémique (SHU) à la liste des maladies à déclaration obligatoire ; 2°) d'enjoindre au ministre de la santé et de la prévention de saisir le Haut conseil de la santé publique pour avis, en vue d'ajouter le SHU à la liste des maladies à déclaration obligatoire, puis selon cet avis, l'y ajouter sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 3°) d'enjoindre au ministre de la santé et de la prévention de prendre, dans l'attente, toutes les mesures réglementaires appropriées propres à assurer une intervention urgente locale, nationale ou internationale, pour tout cas de SHU identifié, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle a intérêt à agir ; - la condition d'urgence est satisfaite dès lors que l'absence de classement du SHU en tant que maladie à déclaration obligatoire porte une atteinte au droit à la vie, au droit à la sécurité ainsi qu'au droit au recours effectif, tels que garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que, d'une part, elle fait obstacle à ce que les malades puissent déterminer avec précision l'aliment responsable de leur pathologie et, d'autre part, il existe une menace immédiate contre la santé publique à raison de l'exposition potentielle et quotidienne de la population aux germes pathogènes responsables du SHU ; - il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; - la décision contestée est entachée d'un vice de procédure dès lors que le ministre n'a pas saisi pour avis le Haut conseil de la santé publique, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3113-1 du code de la santé publique, alors même que cet avis est susceptible d'influencer la décision du ministre d'inscrire ou non le SHU dans la liste des maladies à déclaration obligatoire ; - la décision contestée est entachée d'erreur d'appréciation, d'une part, en méconnaissance des dispositions du règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires, dès lors que l'Etat est tenu d'assurer un rôle actif dans la gestion du risque alimentaire et, d'autre part, l'absence de déclaration obligatoire ne permet pas de diligenter une enquête alimentaire, alors même que le SHU représente un danger pour la population du fait de son taux de létalité et que le SHU remplit l'ensemble des critères justifiant qu'il soit inscrit dans la liste des maladies à déclaration obligatoires ; - la décision contestée est entachée d'illégalité en ce qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L. 3113-1 du code de la santé publique. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. 2. Aux termes de l'article L. 3113-1 du code de la santé publique : " Font l'objet d'une transmission obligatoire de données individuelles à l'autorité sanitaire par les médecins et les responsables des services et laboratoires de biologie médicale publics et privés : / 1° Les maladies qui nécessitent une intervention urgente locale, nationale ou internationale ; / 2° Les maladies dont la surveillance est nécessaire à la conduite et à l'évaluation de la politique de santé publique. / Un décret pris après avis du Haut Conseil de la santé publique définit la liste des maladies correspondant aux 1° et 2°. Les modalités de la transmission des données à l'autorité sanitaire dans les deux cas, en particulier la manière dont l'anonymat est protégé, sont fixées par décret en Conseil d'Etat. " Si l'article D. 1136-2 du même code prévoit, parmi les maladies qui relèvent de la procédure de signalement prévue à l'article R. 3113-4, " u) Toxi-infections alimentaires collectives ", l'association " Shu-Typique-Sortons du Silence " a demandé au ministre de la santé et de la prévention de saisir la Haute autorité de santé en vue d'inscrire en tant que tel sur la liste des maladies à déclaration obligatoire le syndrome hémolytique et urémique typique, causé par des bactéries à l'origine essentiellement alimentaire. Elle demande au juge des référés du Conseil d'Etat de suspendre l'exécution de la décision implicite de refus résultant du silence gardé par le ministre sur sa demande. 3. Il résulte des termes mêmes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative cité ci-dessus que la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. En faisant valoir qu'une meilleure surveillance par le système de santé des cas de syndrome hémolytique et urémique typique permettrait de mieux appréhender l'incidence de cette maladie, dont 167 cas ont été déclarés en France en 2020, d'en mieux connaître les causes et de prévenir l'apparition de nouveaux cas en retirant du marché les aliments en cause, l'association requérante n'établit pas que cette condition est remplie, eu égard notamment aux caractéristiques de la maladie en cause, à son incidence et à sa létalité de 1 à 5%. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un moyen de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée, il y a lieu de rejeter sa requête, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête de l'association " Shu-Typique-Sortons du Silence " est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association " Shu-Typique-Sortons du Silence ". Copie en sera adressée au ministre de la santé et de la prévention. Fait à Paris, le 26 octobre 2022 Signé : Alain Seban
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Vu la procédure suivante : M. A... B..., maître de conférences au sein de l'unité de formation et de recherches (UFR) de l'université de la Réunion, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de La Réunion, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au président de l'université de La Réunion, sous astreinte, d'organiser les élections au conseil de cette UFR avant fin novembre 2022. Par une ordonnance n° 2201341 du 21 octobre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande. Par une requête, enregistrée le 23 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : 1°) d'annuler l'ordonnance attaquée ; 2°) d'enjoindre au président de l'université de La Réunion d'organiser les élections du conseil d'UFR droit et économie avant fin novembre 2022, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de l'université de La Réunion la somme de 150 euros conformément aux dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de La Réunion est entachée d'une insuffisance de motivation et d'une erreur de droit dès lors que la rédaction retenue par le juge des référés ne permet pas de déterminer les raisons du rejet de sa requête ; - la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, en premier lieu, les statuts de l'UFR prévoient une élection avant le 22 novembre et dont l'organisation nécessiterait un délai de trois semaines, en deuxième lieu, il est privé de son droit de vote ainsi que de son droit d'être candidat et, en dernier lieu, la carence de la rectrice rend nécessaire l'intervention du juge des référés ; - il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales ; - la décision contestée, en ce qu'elle reporte les élections à février 2023 sans fixer une date précise de tenue de ces élections le prive, de manière grave et manifestement illégale, de son droit ; - la décision contestée porte atteinte au principe de non-discrimination et au principe d'égalité dès lors que les autres composantes de l'université ont déjà organisé leurs élections ; - la décision du président de l'université de La Réunion est entachée d'illégalité dès lors que, en premier lieu, aucune disposition du code de l'éducation et des statuts de l'UFR n'autorise le président de l'université à reporter les élections d'une composante, en deuxième lieu, elle a pour effet de prolonger d'un an les mandats du personnels qui sont membres du conseil d'administration de l'université, en méconnaissance des dispositions des articles L. 719-1 et suivants du code de l'éducation et, en dernier lieu, aucune circonstance est de nature à justifier un report les élections. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code l'éducation ; - le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. 2. Il résulte de l'instruction que le président de l'université de La Réunion, afin notamment de tenir compte de la surcharge de travail représentée par l'organisation des élections des représentants aux conseils des différentes composantes de cette université dans un contexte de reprise du fonctionnement normal de l'université consécutif à l'épidémie de Covid-19, a décidé de reporter à 2023 les élections aux conseils de certaines de ces composantes, prévues en 2022, dont l'UFR de droit et d'économie, à laquelle appartient le requérant. 3. Eu égard, d'une part, au fait que les représentants élus de ces composantes seront maintenus en fonction jusqu'à l'organisation de ces élections en 2023, de sorte que les personnels et étudiants ne seront pas privés de représentation durant le délai séparant la décision litigieuse de la tenue des élections, et d'autre part, à la possibilité dont dispose le recteur de la région académique concernée, dont il résulte de l'instruction qu'il est informé de la décision litigieuse, s'il estime que cette décision est de nature à faire naître une grave difficulté dans le fonctionnement des organes statutaires de cette université, de prendre toute mesure conservatoire de nature à prévenir l'apparition de ces difficultés en vertu des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 719-8 du code de l'éducation, et du pouvoir dont dispose le ministre de l'éducation nationale, s'il le juge nécessaire en application des mêmes dispositions, de prendre toute mesure de nature à mettre fin à de telles difficultés, la condition d'urgence requise par l'article L. 521-2 du code de justice administrative ne saurait, en tout état de cause, être considérée comme remplie. 4. Si M. B..., qui est maître de conférences, fait valoir en outre qu'il serait privé, faute de pouvoir se porter candidat à ces élections dès 2022 dans le collège des enseignants-chercheurs, de la possibilité de renforcer ses chances de bénéficier d'une promotion à laquelle il indique être éligible à compter de février 2023, cette circonstance ne saurait, à l'évidence, caractériser une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. 5. Il résulte de ce qui précède que le recours en appel de M. B..., qui n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal de La Réunion a rejeté sa demande, est manifestement mal fondé, et doit être rejeté en application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B.... Copie en sera adressée au président de l'université de La Réunion et au recteur de l'académie de la Réunion. Fait à Paris, le 27 octobre 2022 Signé : Cyril Roger-Lacan
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Vu la procédure suivante : Par une requête et deux mémoires en réplique, enregistrés les 20 novembre 2020, 20 octobre 2021 et 2 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la fédération française de détection de métaux demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 23 octobre 2020 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de faire droit à sa demande d'abrogation de la circulaire du 18 avril 2017 relative à l'extension de la compétence concurrente des juridictions du littoral spécialisées aux infractions d'atteintes aux biens culturels maritimes, notamment de la fiche intitulée " Le traitement judiciaire des atteintes au patrimoine culturel, archéologique et historique " qui lui est annexée ; 2°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, de procéder à l'abrogation de cette circulaire ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, sous une astreinte de cent euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; - le code du patrimoine ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat, - les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 octobre 2022, présentée par la fédération française de détection de métaux ; Considérant ce qui suit : 1. La circulaire attaquée du 18 avril 2017 du directeur des affaires criminelles et des grâces est relative à l'extension de la compétence concurrente des juridictions du littoral spécialisées (JULIS) aux infractions d'atteintes aux biens culturels maritimes, en application des articles 706-111-1 et suivants du code de procédure pénale, introduits par la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle. Elle comporte, en annexe 1, une fiche technique intitulée " Le traitement judiciaire des atteintes au patrimoine culturel archéologique et historique ", qui rappelle le cadre juridique des atteintes au patrimoine et la manière dont ces dernières peuvent être poursuivies et sanctionnées. Le 21 août 2020, la fédération française des détecteurs de métaux a demandé au garde des sceaux, ministre de la justice, d'abroger cette circulaire, notamment son annexe 1. Elle demande l'annulation pour excès de pouvoir du refus implicite né du silence gardé par le ministre sur sa demande, en contestant uniquement la légalité de la fiche technique. 2. En premier lieu, cette fiche technique, qui se borne à rappeler la réglementation applicable, est dépourvue de caractère réglementaire. Le moyen tiré de l'incompétence du directeur des affaires criminelles et des grâces pour l'édicter doit donc être écarté. 3. En second lieu, cette fiche technique comporte des considérations générales dépourvues de portée juridique ou d'effets notables. Il en va ainsi de l'affirmation, critiquée par l'association requérante, selon laquelle : " l'usage du détecteur de métaux n'intervient d'ailleurs qu'à titre exceptionnel et de façon très technique dans la pratique professionnelle de la discipline archéologique ". Il en va de même pour la formule, présentée comme étant la " position " du ministre de la culture : " si l'archéologie bénévole a toute sa place sur le territoire national, elle ne saurait en rien être assimilée à la détection de loisir ; terme qui n'a aucun fondement juridique et recouvre en réalité une chasse au trésor ". 4. En troisième lieu, c'est à bon droit que la fiche technique indique que " les trouvailles réalisées au moyen d'un détecteur de métaux et sans autorisation ne peuvent être reconnues comme des découvertes fortuites ", puisque les découvertes fortuites, telles qu'elles sont définies à l'article L. 531-14 du code du patrimoine, sont nécessairement des découvertes involontaires nées de travaux ou d'un fait quelconque, alors que l'utilisation d'un détecteur de métaux démontre la volonté de trouver des objets. De même, la précision donnée, en note de bas de page, sur la " détermination de la valeur historique et/ou archéologique ", renvoyant aux " biens issus de la période antérieure au dernier quart du XIXème siècle et ceux liés aux deux guerres mondiales " ne présente, contrairement à ce que soutient la fédération requérante, aucune contradiction avec la définition retenue à l'article L. 510-1 du code du patrimoine. 5. En quatrième lieu, la réglementation de l'utilisation des détecteurs de métaux rappelée dans la fiche technique n'interdit ni ne limite la commercialisation des détecteurs de métaux, mais soumet simplement à autorisation certains de leurs usages. Elle s'applique de manière non discriminatoire et poursuit, en outre, l'intérêt général de préservation du patrimoine archéologique, historique et artistique. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 34 et 36 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ne peut qu'être écarté. 6. En dernier lieu, si la circulaire rappelle qu'en vertu du code du patrimoine l'Etat est propriétaire des biens archéologiques mobiliers mis au jour à la suite d'opérations de fouilles archéologiques ou de découvertes fortuites, un tel régime, qui s'applique à des biens sur lesquels aucun droit de propriété ne peut être invoqué par les utilisateurs de détecteurs de métaux et est motivé par la volonté de protéger le patrimoine archéologique, ne méconnaît ni l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni l'article 14 de cette convention. 7. Il résulte de ce qui précède que la requête de la fédération française de détection de métaux tendant à l'annulation du refus du garde des sceaux, ministre de la justice, d'abroger la circulaire du 18 avril 2017 doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de la fédération française de détection de métaux est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à la fédération française de détection de métaux, au garde des sceaux, ministre de la justice et à la ministre de la culture. Délibéré à l'issue de la séance du 6 octobre 2022 où siégeaient : Mme Suzanne von Coester, assesseure, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat-rapporteure. Rendu le 2 novembre 2022. La présidente : Signé : Mme Suzanne von Coester La rapporteure : Signé : Mme Rozen Noguellou La secrétaire : Signé : Mme Marie-Adeline Allain
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Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui remettre sans délai le formulaire de demande d'asile sous astreinte de 500 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2206706 du 17 octobre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, rejeté le surplus de ses demandes. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 et 26 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) d'enjoindre à l'administration de remettre sans délai à M. A... l'imprimé OFPRA lui permettant de formuler sa demande d'asile sous astreinte de 500 euros par jour de retard, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, d'une part, le refus, même partiel, d'enregistrer une demande d'asile porte par lui-même une atteinte suffisamment grave et immédiate à sa situation et, d'autre part, le refus ci-opposé entraîne un risque de clôture du dossier à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) sans examen approfondi de sa demande qui, à son tour, entraînera une perte du droit au séjour et des conditions matérielles d'accueil ; - il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile ; - la préfecture de la Moselle ainsi que la préfecture du Bas-Rhin ont méconnu les dispositions des articles R. 521-14 et R. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui transmettre l'imprimé de l'OFPRA nécessaire à la formulation d'une demande d'asile en procédure ordinaire. Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite, et que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution de 1958, et notamment son Préambule ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative ; Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. A..., et d'autre part, le ministre de l'intérieur et des outre-mer ; Ont été entendus lors de l'audience publique du 27 octobre 2022, à 10 heures 30 : - Me Gury, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A... ; - la représentante de M. A... ; - les représentantes du ministre de l'intérieur et des outre-mer ; à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". 2. M. B... A..., de nationalité ougandaise, est entré en Europe par la Croatie, avant de se rendre en France où il a demandé à pouvoir déposer une demande d'asile. La préfète du Bas-Rhin, estimant que sa demande d'asile devait être examinée par les autorités croates, a cependant ordonné son transfert en Croatie. Par jugement du 17 août 2022, le tribunal administratif de Strasbourg, saisi par M. A..., a, d'une part, annulé la décision de transfert et, d'autre part, enjoint à la préfète du Bas-Rhin d'enregistrer la demande d'asile et de lui délivrer une attestation de demande d'asile. Estimant ce jugement entaché d'erreur de droit l'administration en a relevé appel devant la cour administrative d'appel de Nancy, et a assorti ses conclusions d'une demande de sursis à exécution. La préfète du Bas-Rhin a parallèlement, en exécution du jugement, délivré à M. A... une attestation de demande d'asile, mais refusé de lui remettre le formulaire imprimé prévu par l'article R. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour assurer la régularité d'une demande d'asile, estimant que permettre l'instruction d'une telle demande rendrait plus difficile le renvoi de l'intéressé en Croatie, si la cour administrative d'appel suspend puis annule le jugement critiqué. 3. Dans la mesure où le défaut d'imprimé fait obstacle au dépôt régulier de la demande d'asile, alors que celle-ci doit intervenir dans les vingt-et-un jours de la remise de l'attestation de demande d'asile, M. A..., craignant d'être déclaré forclos, a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. Ce dernier a rejeté sa demande d'injonction à la préfète du Bas-Rhin de remise du formulaire de demande d'asile par une ordonnance du 17 octobre 2022. M. A... relève appel de cette ordonnance. 4. Au cours des débats à l'audience devant le juge des référés du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur a exposé qu'en remettant le formulaire demandé, l'administration rendrait, dans l'hypothèse où il serait fait droit aux conclusions de l'administration par la cour administrative d'appel de Nancy, plus compliqué le renvoi de l'intéressé en Croatie dès lors qu'une demande d'asile serait en cours d'examen en France. Toutefois, le ministre concourt avec le demandeur pour convenir que si la cour administrative d'appel de Nancy annule le jugement sur le fondement duquel le formulaire a été remis et la qualité de demandeur d'asile en France reconnue, l'OFPRA, le cas échéant dument informé par ses soins, ne disposerait plus de base légale pour examiner, sur ce fondement, la demande et ne pourrait donc qu'en cesser l'instruction. Dès lors, le ministre pourrait, si les conditions légales en sont réunies, reprendre la procédure de transfert que ce jugement a interrompu. Dans ces conditions, le ministre a convenu que la remise du formulaire ne préjugeait en rien des conditions dans lesquelles les décisions à intervenir de la cour administrative d'appel de Nancy devront être exécutées, et s'est engagé à remettre ledit formulaire à M. A... dans les meilleurs délais après la notification de la présente ordonnance. M. A... comme le ministre ont constaté que cet engagement mettait fin à leur divergence sur ce point. En conséquence, il n'y a plus lieu de statuer sur l'appel de M. A... que l'engagement pris par le ministre, en faisant droit à sa demande, rend sans objet. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros que M. A... demande sur le fondement de l'article L 761-1 du CJA. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : Compte tenu de l'engagement pris par le ministre de l'intérieur et des Outre-Mer devant le juge des référés du Conseil d'Etat de fournir le formulaire de l'OFPRA prévu par l'article R. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A.... Article 2 : L'Etat versera à M. A... la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des Outre-Mer. Fait à Paris, le 28 octobre 2022 Signé : Thierry Tuot
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 et 20 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national de la publicité extérieure (SNPE) demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : 1°) de suspendre l'exécution du décret n° 2022-1294 du 5 octobre 2022 portant modification de certaines dispositions du code de l'environnement relatives aux règles d'extinction des publicités lumineuses et aux enseignes lumineuses ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il justifie d'un intérêt lui donnant qualité à agir au regard de son objet statutaire ; - la condition d'urgence est satisfaite en ce que la décision contestée porte une atteinte grave et immédiate à la situation des opérateurs de publicité extérieure dont il défend les intérêts, dès lors que, en premier lieu, les dispositions portant sur les nouvelles règles d'extinction nocturne des publicités lumineuses sont entrées en vigueur le 7 octobre 2022, en deuxième lieu, ces opérateurs sont dans l'incapacité technique de respecter à brève échéance ces nouvelles règles et, en dernier lieu, compte tenu des sanctions pénales prévues par la décision contestée, ces opérateurs s'exposent à des amendes et, ainsi, à de grave difficultés financières, eu égard notamment au nombre important des dispositifs publicitaires concernés par ces nouvelles règles et au délai nécessaire pour se mettre en conformité avec celles-ci ; - il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; - la décision contestée est entachée d'erreur de droit en ce qu'elle méconnaît le principe de sécurité juridique garanti par les articles L. 221-5 et L. 221-6 du code des relations entre le public et l'administration dès lors qu'elle n'assortit pas les nouvelles règles d'extinction nocturne des publicités lumineuses d'aucune période transitoire permettant aux opérateurs concernés d'adapter leurs nombreux dispositifs publicitaires en cause alors même qu'elle prévoit des sanctions pénales pour réprimer le non-respect de ces nouvelles règles ; - la décision contestée est entachée de violation directe de la loi en ce qu'elle est contraire au principe d'égalité devant la loi dans la mesure où elle introduit une différence de traitement entre les aéroports et le marché d'intérêt national de Rungis dès lors que les premiers sont exclus de l'obligation d'extinction des lumières de 1 heure à 6 heures tandis que le second est tenu de la respecter et ce, alors même qu'il n'existe pas de différence de situation justifiant cette différence de traitement. Par un mémoire en défense, enregistré les 18 octobre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et que les moyens soulevés, qui ne sont pas fondés, ne sont pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du décret contesté. La requête a été communiquée à la Première ministre qui n'a pas produit d'observations. Après avoir convoqué à une audience publique, en premier lieu, le Syndicat national de la publicité extérieure, en deuxième lieu, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et, en dernier lieu, la Première ministre ; Ont été entendus lors de l'audience publique du 20 octobre 2022, à 15 heures : - Me Gatineau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du Syndicat national de la publicité extérieure ; - la représentante du Syndicat national de la publicité extérieure ; - les représentants du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ; à l'issue de laquelle le juge des référés a repoussé la clôture de l'instruction au 24 octobre à 17 heures. Vu les mémoires après audience, enregistrés les 21 et 24 octobre 2022, présentés par le Syndicat national de la publicité extérieure ; Vu le mémoire après audience, enregistré le 21 octobre 2022, présenté par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'environnement ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". 2. La possibilité pour le juge des référés d'ordonner la suspension de l'exécution d'une décision administrative est subordonnée notamment à la condition qu'il y ait urgence. Il lui appartient d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à porter à un intérêt public, à sa situation ou aux intérêts qu'il entend défendre une atteinte suffisamment grave et immédiate pour caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit, enfin, être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire, à la date à laquelle le juge des référés statue. 3. En vertu des nouvelles dispositions de l'article R. 581-35 du code de l'environnement introduites par l'article 1er du décret contesté du 5 octobre 2022 portant modification de certaines dispositions du code de l'environnement relatives aux règles d'extinction des publicités lumineuses et aux enseignes lumineuses, les publicités lumineuses sont éteintes entre 1 heure et 6 heures, sous réserve d'exceptions concernant les publicités installées sur l'emprise des aéroports et de celles supportées par le mobilier urbain affecté aux services de transport. L'article 4 du même décret diffère au 1er juin 2023 l'obligation d'extinction pour les publicités lumineuses supportées par le mobilier urbain soumis à la nouvelle réglementation. En vertu de l'article R. 581-87-1 du code de l'environnement, inséré par l'article 3 de ce décret, est puni désormais de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe, le fait d'apposer, de faire apposer ou de maintenir après mise en demeure, une publicité ou une enseigne lumineuse sans observer notamment les prescriptions de l'article R. 581-35. 4. Eu égard aux termes de sa requête en référé, et ainsi que cela a été confirmé à l'audience, le Syndicat national de la publicité extérieure (SNPE) doit être regardé comme demandant, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution des articles 1er et 4 du décret contesté dans la seule mesure où l'exécution des nouvelles dispositions de l'article R. 581-35 du code de l'environnement qui est, pour la généralité des publicités lumineuses - ainsi que des préenseignes qui suivent le même régime -, d'application immédiate, ne ménage pas de régime transitoire pour permettre aux professionnels d'installer, de modifier ou de régler les nombreux dispositifs d'éclairage des publicités lumineuses. 5. Il ressort des termes du décret contesté qu'il vise à harmoniser au niveau national les règles d'extinction nocturne des publicités lumineuses quelle que soit la taille de l'unité urbaine dans laquelle se situent ces dispositifs sans renvoyer, sur ce point, comme c'était le cas, sous l'empire des dispositions abrogées de l'article R. 581-35, aux différents règlements locaux de publicité adoptés pour les communes appartenant à des unités urbaines de plus de 800 000 habitants. S'il n'est pas contesté que des règlements locaux de publicité, notamment dans les grandes agglomérations, avaient déjà prévu une règle d'extinction nocturne des publicités et des enseignes lumineuses identique ou comparable à celle résultant de la disposition contestée, il ne ressort pas des pièces du dossier, en l'état de l'instruction, que ces mesures étaient applicables dans l'ensemble des communes comprises dans des unités urbaines de plus de 800 000 habitants, ni que, pour celles dans lesquelles cette mesure avait été instituée, le délai de mise en conformité était, dans tous les cas, expiré à la date d'entrée en vigueur du décret contesté. 6. Le SNPE qui ne conteste pas la nécessité de la mesure d'extinction nocturne, et ne reproche pas davantage à ce dispositif d'imposer, pour les entreprises dont elle défend les intérêts, une charge financière qui résulte de l'adaptation des dispositifs de réglage des publicités lumineuses, fait valoir, au titre de la condition d'urgence, que l'entrée en vigueur immédiate des dispositions issues du décret contesté a néanmoins des conséquences financières disproportionnées de nature à fragiliser la situation économique des opérateurs de la publicité extérieure. En effet, selon ce syndicat, ces derniers sont exposés immédiatement et massivement à des poursuites pénales sanctionnées par des amendes lourdes prévues pour les contraventions de la cinquième classe sans disposer du temps nécessaire pour mettre en conformité un ensemble important de dispositifs publicitaires ou de préenseignes jusque-là dispensés de cette obligation et répartis sur un grand nombre de communes et d'emplacements. Il soutient, en outre, que l'urgence à ne pas suspendre le décret contesté, tirée des impératifs de sobriété énergétique et de lutte contre le réchauffement climatique, n'est pas caractérisée dans la mesure où de nombreux dispositifs publicitaires sont éclairés par de l'énergie photovoltaïque propre au dispositif publicitaire ou par des composants LED qui fonctionnent avec une faible tension électrique. 7. D'une part, en l'état de l'instruction, il reste difficile de se faire une idée précise du nombre de dispositifs concernés par une mise en conformité et de leurs lieux d'implantation, des délais nécessaires, selon les secteurs, pour cette mise en conformité ainsi que de l'état de la réglementation locale antérieurement au décret contesté. Il n'apparaît cependant pas qu'une intervention à bref délai destinée au réglage d'une partie significative des horloges programmées pour permettre l'éclairage nocturne des dispositifs publicitaires qui sont répartis entre de nombreuses entreprises, s'avérerait matériellement impossible. D'autre part, le SNPE ne justifie par aucune des pièces produites du risque réel et actuel de poursuites pénales massives et systématiques dont elle se borne à alléguer qu'elles menaceraient la pérennité économique des entreprises dont elle défend les intérêts, sans d'ailleurs tenir compte du caractère non forfaitaire de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe. Enfin, il ressort des dispositions de l'article R. 581-87-1 du code de l'environnement que, pour les dispositifs maintenus de manière non conforme aux prescriptions de l'article R. 581-35, les poursuites pénales doivent être précédées de mises en demeure de mise en conformité sous cinq jours, prononcées par l'autorité administrative compétente, dont il n'est même pas allégué qu'elles seraient déjà intervenues. Dans ces conditions, le SNPE ne justifie pas, de manière concrète, d'une atteinte suffisamment grave et immédiate aux intérêts qu'elle entend défendre pour caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution du décret contesté soit suspendue. 8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition tenant à l'existence d'un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée, que la requête du SNPE doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête du SNPE est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au Syndicat national de la publicité extérieure et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Copie en sera adressée à la Première ministre, au garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de la transition énergétique. Fait à Paris, le 26 octobre 2022 Signé : Olivier Yeznikian
JADE/CETATEXT000046519826.xml
Vu la procédure suivante : Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 25 et 26 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... doit être regardé comme contestant devant le juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : 1°) diverses prises de position du président-directeur général du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), qui méconnaissent les articles 1er et 2 de la Constitution du 4 octobre 1958 ; 2°) l'ensemble des lois de la Ve République, la loi de programmation de la recherche n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 en particulier, et le principe hiérarchique au sein du secteur public. Il soutient qu'il est porté atteinte aux valeurs de la République, aux principes de liberté, égalité et fraternité en particulier. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. 2. Le juge des référés du Conseil d'Etat ne peut être régulièrement saisi, en premier et dernier ressort, d'une requête tendant à la mise en œuvre de l'une des procédures régies par le livre V du code de justice administrative que pour autant que le litige principal auquel se rattache ou est susceptible de se rattacher la mesure d'urgence qu'il lui est demandé de prendre ressortit lui-même à la compétence directe du Conseil d'Etat. L'article R. 522-8-1 du même code prévoit que, par dérogation aux dispositions du titre V du livre III relatif au règlement des questions de compétence au sein de la juridiction administrative, le juge des référés qui entend décliner la compétence de la juridiction rejette les conclusions dont il est saisi par voie d'ordonnance. 3. M. A... conteste devant le juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, diverses prises de positions du président-directeur général du CNRS et, d'autre part, l'ensemble des lois de la Ve République, ainsi que le principe hiérarchique au sein du secteur public. Sur les conclusions tendant à contester des dispositions de nature législative : 4. Il résulte des pièces du dossier et des écrits de M. A... que ce dernier entend contester devant le juge des référés du Conseil d'Etat l'ensemble des lois promulguées sous la Ve République, en particulier la loi de programmation de la recherche du 24 décembre 2020, dès lors que, par leurs contenus, elles méconnaissent les valeurs de la République française et les dispositions de la Constitution du 4 octobre 1958. Toutefois, de telles conclusions ne sont manifestement pas au nombre de celles dont il appartient au Conseil d'Etat de connaître. Sur les autres conclusions de la requête : 5. Par ailleurs, M. A... conteste devant le Conseil d'Etat diverses prises de positions du président-directeur général du CNRS, et le principe hiérarchique au sein du secteur public. Les éléments ainsi contestés ne constituent pas des actes susceptibles de recours. Par suite, ces conclusions sont manifestement irrecevables. 6. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. A... doit être rejetée en toutes ses conclusions, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A.... Fait à Paris, le 27 octobre 2022 Signé : Christophe Chantepy
JADE/CETATEXT000046519827.xml
Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montreuil, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre toute mesure visant à l'exécution de la mesure d'éloignement à son encontre et, d'autre part, d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de l'Aisne de réexaminer sa situation dans un délai de quarante-huit heures et de l'assigner à résidence. Par une ordonnance n° 2215464 du 22 octobre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par une requête, enregistrée le 25 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) de suspendre toute mesure visant à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire pendant l'examen par la cour nationale du droit d'asile de sa demande d'avis ; 3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de l'Aine de réexaminer sa situation dans un délai de quarante-huit heures et de l'assigner à résidence ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il justifie de circonstances nouvelles conduisant au réexamen par le juge des référés de sa demande de suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre dès lors que le jugement du tribunal administratif statuant sur la légalité de cette décision n'a pas tenu compte de sa qualité de réfugié et qu'il a saisi la cour nationale du droit d'asile d'une demande d'avis sur la possibilité de son éloignement, ce dernier ayant en outre été fixé pour la première fois le 5 octobre vers le pays dont il est le ressortissant ; - la mesure d'éloignement prise à son encontre porte une atteinte grave à son droit au respect de mener une vie privée et familiale dès lors qu'il réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans et qu'il a bénéficié du statut de réfugié dès son arrivée sur le territoire national. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. 2. M. A..., ressortissant de la République démocratique du Congo, né en 1977, s'était vu reconnaître la qualité de réfugié par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 19 décembre 1994 sur le fondement du principe de l'unité de famille. Mais à la suite des nombreuses condamnations pénales dont il a fait l'objet, dont deux punies de réclusion criminelle, l'office, par une décision du 3 janvier 2019, a mis fin à son statut de réfugié sur le fondement de l'article L. 711-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La cour nationale du droit d'asile a, le 5 décembre 2019, rejeté le recours formé par M. A... contre cette décision. Le préfet de l'Aisne a pris, le 23 août 2022, un arrêté, notifié le même jour, obligeant l'intéressé à quitter le territoire français. A sa levée d'écrou, le 17 septembre 2022, M. A... a été placé en rétention administrative. Il a formé un recours contre l'arrêté du 23 août 2022 qui a été rejeté par un jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 1er septembre 2022. Son éloignement à direction de Kinshasa, en République démocratique du Congo, étant prévu le 30 octobre, M. A... a, le 18 octobre, saisi le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une requête tendant à la suspension de toute mesure visant à l'exécution de la décision d'éloignement prise à son encontre. Il fait appel de l'ordonnance en date du 22 octobre 2022 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. 3. Il appartient à l'étranger qui entend contester une obligation de quitter le territoire français lorsqu'elle est accompagnée d'un placement en rétention administrative ou d'une mesure d'assignation à résidence, de saisir le juge administratif, sur le fondement des dispositions des articles L. 614-8 et L. 614-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une demande tendant à leur annulation, assortie le cas échéant de conclusions à fin d'injonction. Cette procédure particulière est exclusive de celles prévues par le livre V du code de justice administrative. Il en va autrement dans le cas où les modalités selon lesquelles il est procédé à l'exécution d'une telle mesure relative à l'éloignement forcé d'un étranger emportent des effets qui, en raison de changements dans les circonstances de droit ou de fait survenus depuis l'intervention de cette mesure et après que le juge, saisi sur le fondement de l'article L. 614-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a statué ou que le délai prévu pour le saisir a expiré, excèdent ceux qui s'attachent normalement à sa mise à exécution. 4. Pour justifier de changements dans les circonstances de droit ou de fait survenus depuis l'intervention de la mesure d'éloignement dont il fait l'objet et du jugement rendu par le tribunal administratif d'Amiens, M. A... se borne à faire valoir que, d'une part, ce jugement n'aurait pas pris en compte le maintien de sa qualité de réfugié, que, d'autre part, il a saisi, le 5 octobre 2022, la cour nationale du droit d'asile, sur le fondement de l'article L. 532-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une demande d'avis sur cette mesure d'éloignement et qu'enfin, ce n'est que le 5 octobre qu'il a appris son renvoi vers son pays d'origine. Mais, d'une part, le tribunal administratif d'Amiens a, en tout état de cause, jugé non justifiés les risques allégués par l'intéressé en cas de retour dans son pays d'origine et, d'autre part, la cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande d'avis comme tardive par une décision du 10 octobre 2022. 5. Il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Il y a lieu dès lors de rejeter l'appel qu'il a formé contre cette ordonnance selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du même code. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Fait à Paris, le 27 octobre 2022 Signé : Nathalie Escaut
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " étudiant ", ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente et dans un délai de huit jours, une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, enfin, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au profit de Me Mukendi Ndonki au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 2103884 du 3 février 2022, le tribunal administratif de Rouen a, d'une part, annulé l'arrêté du 7 juillet 2021 du préfet de la Seine-Maritime, d'autre part, enjoint au préfet territorialement compétent de délivrer à Mme B... un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de ce jugement, enfin, mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à verser à Me Mukendi Ndonki en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 14 février 2022, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande de Mme B.... Il soutient que : - c'est à tort que les premiers juges, pour annuler l'arrêté contesté, ont retenu le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ; - les autres moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal administratif de Rouen ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 23 août 2022, Mme A... B..., représentée par Me Mukendi Ndonki, conclut, d'une part, au rejet de la requête, d'autre part, à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros, à titre principal, à Me Mukendi Ndonki, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, à titre subsidiaire, à Mme B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens soulevés par le préfet de la Seine-Maritime ne sont pas fondés ; En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour : - cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation ; - l'absence de production d'un visa de long séjour ne peut justifier le refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " ; - cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation ; - elle est entachée d'illégalité, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi : - cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation ; - elle est entachée d'illégalité, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ; - elle méconnaît les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Mme B... a été maintenue de plein droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 mars 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour et des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Baillard, premier conseiller, - et les observations de Me Mukendi Ndonki, représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B..., ressortissante tunisienne née le 13 juin 2001 à Bizerte (Tunisie), est entrée en France le 23 mars 2018, sous couvert d'un passeport national revêtu d'un visa de court séjour en cours de validité, alors qu'elle était mineure, accompagnée de sa mère et de ses deux frères, également mineurs. Elle a présenté, le 14 août 2019, une demande d'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 29 octobre 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 6 janvier 2021. Mme B..., devenue majeure, a sollicité, le 4 mars 2020, son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, repris sous l'article L. 423-23, puis, le 30 juin 2021, sur le fondement de l'article L. 422-1 du même code. Par un arrêté du 7 juillet 2021, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Le préfet de la Seine-Maritime relève appel du jugement du 3 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté. Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Rouen : 2. Pour annuler l'arrêté du 7 juillet 2021 du préfet de la Seine-Maritime, les premiers juges ont relevé que Mme B... avait obtenu, avec la mention très bien, un baccalauréat scientifique en juin 2020, soit deux ans après son entrée en France, qu'elle poursuivait des études scientifiques à l'université de Rouen et qu'en parallèle, elle suivait, avec un plein succès, des cours de musique classique, incluant l'enseignement du piano. Après avoir recensé ces éléments de fait, les premiers juges ont estimé que, compte-tenu de ce parcours personnel remarquable et eu égard également à la circonstance que Mme B... était entrée en France alors qu'elle n'était encore qu'adolescente, la décision du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour devait être regardée comme étant entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. 3. Toutefois, s'il est constant que Mme B... a effectivement obtenu de très bons résultats dans le cadre de son parcours scolaire en France et a suivi, au titre de l'année universitaire 2020/2021, une première année de licence " informatique, électronique, énergie électrique, automatique " à l'université de Rouen, rien ne faisait obstacle à ce qu'elle poursuive ses études universitaires, entamées récemment, hors de France et, en particulier, dans son pays d'origine, de même que ses cours de musique, ou, le cas échéant, qu'elle regagne la Tunisie pour solliciter un visa de long séjour pour poursuivre ses études universitaires en France. Par ailleurs, si Mme B... est entrée en France alors qu'elle était âgée de seize ans, elle n'y résidait que depuis trois années à la date de l'arrêté en litige. Enfin, Mme B... ne peut être regardée comme disposant d'attaches familiales en France, puisque sa mère a fait l'objet d'une mesure d'éloignement, dont la légalité a été confirmée par un jugement du 3 février 2022 du tribunal administratif de Rouen, devenu définitif, et a donc vocation à quitter la France avec ses deux enfants mineurs. En conséquence, la décision de refus de titre de séjour ne peut être regardée, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, comme étant entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a fait droit à ce moyen pour annuler la décision de refus de titre de séjour, ainsi que les autres décisions contenues dans son arrêté du 7 juillet 2021. 4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... tant devant le tribunal administratif de Rouen qu'en appel. Sur le moyen commun aux décisions contestées : 5. L'arrêté contesté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles les mesures édictées par le préfet de la Seine-Maritime se fondent, et satisfait ainsi à l'exigence de motivation posée par les dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté doit être écarté. Sur la décision de refus de titre de séjour : 6. En premier lieu, aux termes de l'article 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an. / En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sous réserve d'une entrée régulière en France et sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Cette carte donne droit à l'exercice, à titre accessoire, d'une activité professionnelle salariée dans la limite de 60 % de la durée de travail annuelle. ". Aux termes de l'article L. 412-1 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1. ". 7. S'il est constant que Mme B... est entrée régulièrement en France alors qu'elle était âgée de seize ans, sous couvert d'un passeport national revêtu d'un visa de court séjour, il ressort des pièces du dossier que celle-ci n'a été scolarisée qu'à compter de l'année scolaire 2018/2019, alors qu'elle était âgée de dix-sept ans. Dès lors, elle ne remplissait pas les conditions pour que l'obligation de production d'un visa de long séjour, prévue à l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne puisse lui être opposée. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, en tout état de cause, être écarté. 8. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B... était présente en France depuis environ trois années, à la date de la décision contestée. Par ailleurs, celle-ci est célibataire et sans enfant. Si elle est entrée en France accompagnée de sa mère et de ses deux frères mineurs, cette dernière a fait l'objet d'un refus de titre de séjour et d'une mesure d'éloignement, dont la légalité a été confirmée par un jugement du 3 février 2022 du tribunal administratif de Rouen, de sorte qu'elle n'a pas vocation à rester sur le territoire français. Dans les circonstances de l'espèce, le préfet de la Seine-Maritime, en refusant de délivrer à Mme B... un titre de séjour, n'a donc pas porté au droit de l'intéressée au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs de sa décision. En conséquence, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Il en est de même du moyen tiré de ce que cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme B.... Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : 9. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme B..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. 10. En second lieu, les moyens tirés de ce que la décision faisant obligation à Mme B... de quitter le territoire français sans délai méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée, doivent être écartés par les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 3 et 8. Sur la décision fixant le pays de destination : 11. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 5, 9 et 10 que Mme B..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision par laquelle le préfet de la Seine-Maritime lui a fait obligation de quitter le territoire français. 12. En second lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". 13. Mme B... soutient que sa mère encourt un emprisonnement, en cas de retour en Tunisie, et qu'il n'est pas exclu qu'elle soit également inquiétée en cas de retour dans son pays. Toutefois, à la supposer établie, la circonstance selon laquelle la mère de Mme B... aurait fait l'objet d'une condamnation à une peine de prison n'implique pas que la requérante encoure un tel risque en cas de retour en Tunisie. Par ailleurs, la requérante, dont la demande d'asile a d'ailleurs été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, ne produit aucun élément de nature à établir qu'elle courrait des risques pour sa sécurité ou son intégrité en cas de retour dans son pays d'origine. Dès lors, le préfet de la Seine-Maritime, en désignant la Tunisie au nombre des pays à destination desquels Mme B... pourra être reconduite d'office, n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 7 juillet 2021, a enjoint au préfet territorialement compétent de délivrer à Mme B... un titre de séjour et a mis à la charge de l'Etat le versement au conseil de Mme B... de la somme de 800 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Par voie de conséquence, la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Rouen doit être rejetée. Il en va de même des conclusions présentées par Mme B... devant la cour au titre des frais exposés et non-compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 3 février 2022 du tribunal administratif de Rouen est annulé. Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Rouen, ainsi que les conclusions présentées par celle-ci devant la cour tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au préfet de la Seine-Maritime, à Mme A... B... et à Me Mukendi Ndonki. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : B. BaillardLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 2 N°22DA00298
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 26 août 2019 par laquelle le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Nord, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité, dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification du jugement à intervenir, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans le même délai, et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Par un jugement n° 2000457 du 3 mai 2022, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, annulé la décision du 26 août 2019 du préfet du Nord, d'autre part, enjoint au préfet du Nord de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement, enfin, mis à la charge de l'Etat le versement à l'avocate de M. A... d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 9 mai 2022, le préfet du Nord demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement, en tant qu'il annule sa décision du 26 août 2019 et qu'il lui enjoint de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; 2°) de constater qu'il n'y avait pas lieu, pour le tribunal administratif, de statuer sur la demande de M. A.... Il soutient que : - il a délivré à M. A..., le 20 avril 2021, c'est-à-dire en cours d'instance devant le tribunal administratif, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " que celui-ci sollicitait en tant qu'étranger majeur ayant été précédemment confié à l'aide sociale à l'enfance, et avait ainsi régularisé la situation de M. A... à la date de ce jugement ; - s'il est vrai que l'administration n'a pas porté à la connaissance du tribunal administratif la régularisation de la situation de M. A..., il y a lieu pour la cour de constater que celui-ci a annulé à tort la décision de refus de titre de séjour du 26 août 2019 contestée devant lui, alors qu'il n'y avait pas lieu, pour le tribunal administratif, de statuer sur les conclusions de la demande de M. A... tendant à l'annulation de cette décision et à ce qu'il lui soit enjoint de délivrer à celui-ci une carte de séjour temporaire. La requête a été communiquée à M. A..., qui n'a pas produit de mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., ressortissant guinéen né le 28 août 2000 à Missidé Bouroudji Labé (République de Guinée), est entré en France au mois de mai 2016. Il a été placé, en qualité de mineur non accompagné, auprès des services de l'aide sociale à l'enfance du département du Nord par une ordonnance de placement provisoire du 7 juin 2016, confirmée et prolongée jusqu'à sa majorité par un jugement du juge des enfants près le tribunal de grande instance de Lille du 21 juin 2016. Le 4 janvier 2018, M. A... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de mineur confié à l'aide sociale à l'enfance avant l'âge de seize ans. Par une décision du 26 août 2019, le préfet du Nord a rejeté cette demande. Le préfet du Nord relève appel du jugement du 3 mai 2022 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Lille, d'une part, a annulé sa décision du 26 août 2019, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". 2. Il ressort des pièces produites au dossier, devant la cour, par le préfet du Nord, en particulier de données issues de l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers tenue par la préfecture du Nord et d'une attestation de remise signée, le 20 avril 2021, par M. A..., que le préfet du Nord a délivré à ce dernier, le 20 avril 2021, c'est-à-dire au cours de l'instance devant le tribunal administratif de Lille, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " que l'intéressé sollicitait. Il n'y avait, dans ces conditions, pas lieu, pour le tribunal administratif, de statuer sur les conclusions de la demande de M. A... tendant à l'annulation de la décision du 26 août 2019 par laquelle le préfet du Nord lui avait refusé la délivrance de ce titre de séjour et à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, à cette autorité de délivrer ce titre à l'intéressé ou de procéder au réexamen de sa situation après l'avoir mis en possession d'une autorisation provisoire de séjour. Ainsi, le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort, en dépit du fait que l'administration n'avait pas porté ces éléments à la connaissance de la juridiction de première instance, que le tribunal administratif de Lille a annulé sa décision du 26 août 2019 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A... et lui a enjoint de délivrer à ce dernier un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", alors que les conclusions y afférentes étaient devenues sans objet. Le jugement attaqué est, par suite, entaché d'une irrégularité de nature à en justifier l'annulation. 3. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Lille. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2000457 du 3 mai 2022 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 26 août 2019 par laquelle le préfet du Nord a refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour et lui a enjoint de délivrer à ce dernier une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Lille. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au préfet du Nord et à M. B... A.... Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°22DA00992
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) MD Investissements a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er mars 2013 au 31 décembre 2015. Par un jugement n° 1900746 du 23 février 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 22 avril 2021, la SAS MD Investissements, représentée par la SCP d'avocats Dhalluin, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge de la majoration en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de même que les entiers dépens de l'instance sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du même code. Elle soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; - elle n'a jamais eu l'intention d'éluder l'impôt, ni de se soustraire à ses obligations fiscales, les manquements constatés résultant exclusivement du désordre ponctuel interne à son service comptable depuis la démission, le 30 juillet 2013, de sa responsable ; elle a d'ailleurs procédé à la régularisation intégrale, avant même le début des opérations de contrôle, de la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de la période en cause, ce dont l'administration a d'ailleurs accepté de tenir compte en prononçant les dégrèvements, en droits et pénalités, correspondants ; - les manquements qui lui sont reprochés ne peuvent être regardés comme répétés ; - l'administration, à qui incombe, en application de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, la charge d'apporter la preuve du contraire n'a pas apporté cette démonstration, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, qui n'a pas tenu compte des circonstances particulières qu'elle invoquait. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - la SAS MD Investissements a omis de déclarer la taxe sur la valeur ajoutée collectée sur le produit de la vente d'un immeuble situé à Neufchâtel-en-Bray, alors même que l'acte de vente mentionnait expressément ses obligations en la matière, qu'elle ne pouvait, dès lors, ignorer, alors d'ailleurs que sa dette de taxe sur la valeur ajoutée était constatée dans sa comptabilité ; - le départ de la comptable de la SAS MD Investissements, qui a été effectif le 6 septembre 2013, ne peut expliquer l'omission de déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée sur cette vente, qui devait être effectuée sur la déclaration de chiffre d'affaires souscrite au titre du mois de juillet 2013 ; - contrairement à ce que soutient la SAS MD Investissements, celle-ci n'a opéré qu'une régularisation partielle de sa situation, plus de deux ans après la date d'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de la vente réalisée en juillet 2013 ; elle n'a procédé à cette régularisation qu'après avoir été avisée de l'engagement prochain d'une vérification de sa comptabilité ; - l'existence d'une intention délibérée d'éluder l'impôt doit être appréciée à la date à laquelle chaque déclaration devait être souscrite ; - le tribunal administratif, compte tenu des circonstances de l'espèce, a retenu à juste titre que l'administration apportait la preuve du caractère délibéré des manquements de la SAS MD Investissements à ses obligations déclaratives. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société par actions simplifiée (SAS) MD Investissements, qui a son siège à Isneauville (Seine-Maritime), a pour objet social l'acquisition, la location, la construction, la promotion et la vente de biens immobiliers. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2013 au 31 mars 2016. Au cours de ce contrôle, le vérificateur a constaté des insuffisances de déclaration, par cette société, de la taxe sur la valeur ajoutée collectée par elle à l'occasion de la réalisation de ses opérations taxables. Il a notamment relevé que la taxe sur la valeur ajoutée qu'il appartenait à la SAS MD Investissements de collecter, pour un montant de 117 600 euros, en ce qui concerne la vente, réalisée le 31 juillet 2013, d'un immeuble situé à Neufchâtel-en-Bray, n'avait pas été déclarée dans le délai imparti. L'administration a fait connaître sa position à la SAS MD Investissements par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 15 septembre 2016 et qui précisait que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant des rectifications notifiées pourraient être assortis de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts. Les observations présentées par la SAS MD Investissements n'ont pas amené l'administration à modifier son analyse et il en a été de même de l'entretien accordé, aux représentants de la société, par le supérieur hiérarchique du vérificateur. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant, au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, des rectifications notifiées ont été mis en recouvrement le 2 février 2017, pour un montant total de 179 181 euros en droits et pénalités, dont 47 011 euros au titre de la majoration de 40 % pour manquement délibéré. La SAS MD Investissements ayant déposé plusieurs déclarations de taxe sur la valeur ajoutée rectificatives, notamment au titre des mois de décembre 2015, de mai 2016 et de février 2017 et ayant sollicité, en conséquence, le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 117 038 euros, l'administration a décidé de faire droit à cette demande à concurrence de la somme de 96 138 euros. 2. Ses réclamations ayant fait l'objet d'une admission partielle, mais l'administration ayant décidé de maintenir l'application de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, la SAS MD Investissements a porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, en lui demandant de prononcer la décharge de cette majoration, dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée maintenus à sa charge au titre de la période allant du 1er mars 2013 au 31 décembre 2015. La SAS MD Investissements relève appel du jugement du 23 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. Il ressort des motifs du jugement attaqué que, pour estimer que l'administration était fondée à assortir les rappels de taxe sur la valeur ajoutée maintenus à la charge de la SAS MD Investissements de la majoration de 40 %, prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, le tribunal a apprécié si les éléments avancés par l'administration, à laquelle il a fait supporter la charge de prouver l'intention délibérée d'éluder l'impôt qu'elle prêtait à la SAS MD Investissements, étaient de nature à établir le caractère intentionnel des manquements relevés, puis a estimé que tel était le cas, en dépit des explications avancées par la société. En statuant ainsi, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu d'apporter, à peine d'irrégularité de son jugement, une réponse expresse à l'ensemble des arguments développés par la SAS MD Investissements, a apporté une réponse suffisante au moyen, qu'il a visé et repris dans les motifs de son jugement, invoqué par cette société, tiré de ce que ses manquements à ses obligations déclaratives résultaient des conséquences d'un événement indépendant de sa volonté. En conséquence, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté. Sur le bien-fondé de la majoration en litige : 4. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ". 5. Pour justifier, comme il lui incombe, que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée maintenus à la charge de la SAS MD Investissements ont été à bon droit assortis de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, le ministre fait valoir que la SAS MD Investissements a omis de déclarer, dans le délai qui lui était imparti, la taxe sur la valeur ajoutée collectée par elle, pour un montant de 117 600 euros, sur la vente, réalisée le 31 juillet 2013, d'un immeuble situé à Neufchâtel-en-Bray, alors que les stipulations de l'acte de vente correspondant mentionnaient ses obligations en la matière, qu'elle ne pouvait ainsi ignorer. Le ministre ajoute que la SAS MD Investissements, qui avait pourtant constaté comptablement sa dette de taxe dans un compte de taxe sur la valeur ajoutée à régulariser, ce qui confirme qu'elle avait connaissance de sa situation débitrice, a continué à souscrire ses déclarations mensuelles de chiffre d'affaires en faisant abstraction de cette dette et qu'elle n'a commencé à régulariser sa situation que plus de deux années après la date d'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée due sur la vente immobilière du 31 juillet 2013. Le ministre précise que cette régularisation n'a finalement été que partielle et qu'elle a été effectuée, pour l'essentiel, après la réception, par la SAS MD Investissements, de l'avis qui lui a été adressé le 19 mai 2016 pour l'informer de l'engagement prochain d'une vérification de sa comptabilité. Le ministre tire de ces éléments la conclusion que la SAS MD Investissements avait connaissance de ses obligations déclaratives à la date à laquelle la déclaration de chiffre d'affaires du mois de juillet 2013 devait être souscrite et qu'il en était de même aux dates auxquelles elle a établi, en faisant abstraction de la taxe due par elle, les déclarations suivantes. 6. La SAS MD Investissements soutient que ces manquements à ses obligations déclaratives sont exclusivement imputables à des circonstances indépendantes de sa volonté, liées à la démission, par lettre du 30 juillet 2013, de la responsable de son service comptable et à la désorganisation ponctuelle du service qui en a résulté. Elle ajoute que les manquements qui lui sont imputés ne peuvent être regardés comme présentant un caractère répété et que le fait qu'elle ait procédé, depuis lors, à la régularisation de sa situation confirme que son intention n'était pas d'éluder l'impôt, ni de se soustraire à ses obligations fiscales. 7. Toutefois, la SAS MD Investissements n'apporte aucun élément de nature à permettre d'apprécier la réalité, ni même l'ampleur, du dysfonctionnement qui a pu affecter son service comptable après le départ de la responsable de celui-ci, qui, comme le relève le ministre, sans être contredit, a été effectif à compter seulement du 6 septembre 2013. Dans ces conditions, ce départ ne peut expliquer, à lui seul, que cette société n'ait pas mentionné, sur la déclaration de chiffre d'affaires qu'elle était à même de souscrire, entre le 15 et le 24 août 2013, au titre du mois de juillet 2013, la taxe sur la valeur ajoutée collectée par elle sur la vente immobilière réalisée le 31 juillet 2013, ni qu'elle ait persisté à ne faire aucune mention de cette dette de taxe, pourtant identifiée dans sa comptabilité, sur ses déclarations ultérieures. Le manquement de la SAS MD Investissements à ses obligations déclaratives, qu'elle ne pouvait, dans ces conditions, raisonnablement ignorer, s'est ainsi prolongé sur plusieurs mois et doit, dès lors, être regardé comme répété. Enfin, s'il est constant que la SAS MD Investissements a finalement entrepris de régulariser sa situation, cette régularisation, dont l'administration a tenu compte, est intervenue, ainsi que le relève le ministre, plus de deux ans après la date d'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée collectée sur la vente immobilière du 31 juillet 2013 et n'a été que partielle. Ainsi, par les éléments qu'il avance, le ministre doit être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée d'éluder l'impôt, qui a été celle de la SAS MD Investissements, laquelle intention doit être appréciée aux dates auxquelles chaque déclaration mensuelle de chiffre d'affaires devait être souscrite. En conséquence, c'est à bon droit que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée maintenus à la charge de la SAS MD Investissements ont été assortis de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts. 8. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS MD Investissements n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette majoration. Les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées, ainsi, en tout état de cause, que ses conclusions afférentes à la charge des dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la SAS MD Investissements est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS MD Investissements et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°21DA00875 1 3 N°"Numéro"
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Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 5 juin 2020 et le 2 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, l'Union nationale des syndicats CGT Protection judiciaire de la jeunesse demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note du 7 avril 2020 de la directrice de la protection judiciaire de la jeunesse relative à la continuité des missions de la protection judiciaire de la jeunesse face à l'épidémie de Covid-19 et aux modalités d'organisation de l'injonction ; 2°) d'enjoindre à l'administration de modifier la procédure applicable pour assurer la continuité en cas de crise sanitaire. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule ; - le code de procédure pénale ; - le code du travail ; - la loi n° 61-825 du 29 juillet 1961 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ; - la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 ; - le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat, - les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. En raison de l'émergence d'un nouveau coronavirus (covid-19), de caractère pathogène et particulièrement contagieux, et de sa propagation sur le territoire français, après de premières mesures arrêtées par le ministre des solidarités et de la santé et par le Premier ministre, en particulier l'interdiction, décidée par le décret du 16 mars 2020, de déplacement de toute personne, en principe, hors de son domicile, la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 a déclaré l'état d'urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter du 24 mars 2020. L'article 1er de la loi du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions a prorogé cet état d'urgence sanitaire jusqu'au 10 juillet 2020 inclus. L'interdiction de déplacement hors du domicile, sous réserve d'exceptions limitativement énumérées et devant être dûment justifiées, s'est appliquée entre le 17 mars et le 11 mai 2020, avant que ne soient prescrites, par décret du 11 mai 2020, de nouvelles mesures générales, moins contraignantes que celles applicables dans la période antérieure mais continuant d'imposer de strictes sujétions afin de faire face à l'épidémie de covid-19 puis, par décret du 31 mai 2020, des mesures moins contraignantes encore, compte tenu de l'évolution de l'épidémie et de la situation sanitaire. 2. Pendant l'état d'urgence sanitaire, l'activité des services de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) a été adaptée de manière à tenir compte de la propagation du covid-19. La garde des sceaux, ministre de la justice, a annoncé le 15 mars 2020 le maintien de certaines activités au sein des services de placement de la protection judiciaire de la jeunesse. Elle a précisé que les activités collectives à l'extérieur des établissements étaient suspendues et que les consignes sanitaires devaient être respectées pour celles qui seraient organisées à l'intérieur des établissements. L'activité des services en milieu ouvert a été suspendue, à l'exception de l'accueil téléphonique et de la permanence physique d'un ou deux agents pour faire face aux urgences, de la disponibilité requise pour les présentations de mineurs au tribunal et des audiences qui seraient maintenues. Des plans de continuation d'activité ont été mis en œuvre dès le 16 mars 2020. Le 7 avril 2020, la directrice de la protection judiciaire de la jeunesse a adressé aux directeurs interrégionaux de la PJJ et au directeur général de l'école nationale de la PJJ une note relative à la continuité des missions de la PJJ face à l'épidémie de covid-19 et aux modalités d'organisation de l'injonction. L'Union nationale des syndicats CGT Protection judiciaire de la jeunesse demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette note et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de modifier la procédure applicable pour assurer la continuité en cas de crise sanitaire. 3. L'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose que " des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail ". L'article 2-1 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique précise que : " Les chefs de service sont chargés, dans la limite de leurs attributions et dans le cadre des délégations qui leur sont consenties, de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité ". Conformément à ces dispositions, il incombe à l'administration de prendre les mesures destinées à assurer aux fonctionnaires, appelés à occuper leur poste afin de garantir la continuité du service public en cas de crise sanitaire, des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à protéger leur santé et leur intégrité physique. 4. La note attaquée précise que la direction de la protection judiciaire de la jeunesse a l'obligation d'assurer un fonctionnement minimum du service public qu'elle administre dans l'intérêt des publics qui lui sont confiés et que, à ce titre, les activités relatives à la mission éducative auprès du tribunal, les activités en hébergement ainsi que celles qui s'exercent auprès des détenus sont obligatoirement maintenues. Elle prévoit que la continuité d'activité peut nécessiter le concours d'agents pour assurer les missions essentielles dans d'autres services ou établissements que ceux auxquels ils sont affectés. Les tâches à réaliser peuvent ne pas correspondre à leurs fonctions habituelles sans que, pour autant, elles excèdent la qualification des agents concernés. Il est recouru aux agents, fonctionnaires et contractuels, qui se portent volontaires puis, si la situation l'exige, à des agents auxquels il est adressé une injonction valant ordre de mission. 5. En premier lieu, il appartenait à l'autorité hiérarchique de prendre les mesures d'organisation nécessitées par le fonctionnement des services placés sous son autorité dont la continuité devait être assurée durant l'état d'urgence sanitaire. A cette fin, la directrice de la protection judiciaire de la jeunesse pouvait, sans excéder ses pouvoirs, définir le service minimum devant être assuré par les services placés sous son autorité et notamment prévoir, en cas de besoin, de recourir à d'autres agents que ceux appartenant aux services concernés, pour des tâches, le cas échéant, différentes de leurs fonctions habituelles. Elle pouvait à ce titre autoriser les fonctionnaires stagiaires en deuxième année de formation à l'École nationale de la protection judiciaire de la jeunesse à remplir, dans certains services, des missions n'excédant pas leur qualification. 6. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, la circonstance que les mesures prévues, notamment la possibilité d'adresser des injonctions à certains personnels, seraient similaires à celles prévues par une circulaire du 23 octobre 2001 en cas de grève au sein des services de la protection judiciaire de la jeunesse, n'est pas de nature à caractériser un détournement de procédure. 7. En troisième lieu, la note attaquée, qui ne constitue pas l'ensemble de la réglementation destinée à assurer le respect de l'obligation de protection de la santé des personnels de la protection judiciaire de la jeunesse à l'égard des risques de contamination par le covid-19, prévoit que, lorsqu'une intervention éducative avec présence physique est nécessaire, du matériel de protection doit être mis à la disposition des agents, conformément aux directives du ministère des solidarités et de la santé. Elle précise également que les agents entrant dans la catégorie des personnes vulnérables, définie par le Haut Conseil de la santé publique, ne peuvent pas être sollicités par leur hiérarchie pour assurer des missions essentielles dans des structures dont l'activité est maintenue, ni se porter volontaires pour l'exercice de ces missions. Elle demande également aux chefs de service de veiller à limiter les déplacements lointains des agents volontaires ou faisant l'objet d'une injonction, eu égard au contexte de crise sanitaire. Par suite, le syndicat requérant n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que la note attaquée méconnaîtrait l'objectif à valeur constitutionnelle de droit à la protection de la santé et les règles du droit du travail en matière d'hygiène et de sécurité. 8. En quatrième lieu, la note attaquée énonce les différents principes devant guider le choix des agents appelés à assurer les missions essentielles de certains services de la PJJ durant la période de l'état d'urgence sanitaire. Il appartient aux chefs de service de combiner l'application de ces principes et celle des autres mesures et recommandations énoncées par le Gouvernement pour faire face à l'épidémie de covid-19, au regard de l'ensemble des éléments d'appréciation à leur disposition. Le moyen tiré de ce que la note attaquée n'aurait pas précisément déterminé l'ensemble des critères à prendre en compte et défini, pour chaque cas, un ordre de priorité ne peut donc, en tout état de cause, qu'être écarté. 9. En cinquième lieu, la note attaquée prévoit que l'injonction doit être notifiée directement à l'agent par tout moyen permettant de justifier de la preuve de la remise. Contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, la directrice de la protection judiciaire de la jeunesse n'était pas tenue de préciser les moyens permettant de respecter la condition ainsi posée. 10. En dernier lieu, d'une part, aux termes du premier alinéa de l'article 28 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public ". Le premier alinéa de l'article 29 de cette loi dispose que " toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". D'autre part, aux termes de l'article 20 de la même loi : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement (...) ". Aux termes de l'article 4 de la loi du 29 juillet 1961 de finances rectificative pour 1961 : " (...) / L'absence de service fait, pendant une fraction quelconque de la journée, donne lieu à une retenue dont le montant est égal à la fraction du traitement frappée d'indivisibilité (...). / Il n'y a pas service fait : / 1°) Lorsque l'agent s'abstient d'effectuer tout ou partie de ses heures de services ; / 2°) Lorsque l'agent, bien qu'effectuant ses heures de service, n'exécute pas tout ou partie des obligations de service qui s'attachent à sa fonction telles qu'elles sont définies dans leur nature et leurs modalités par l'autorité compétente dans le cadre des lois et règlements. / (...) ". 11. En précisant que le non-respect d'une injonction par un agent de la protection judiciaire de la jeunesse est susceptible de donner lieu à une retenue sur traitement et à l'engagement d'une procédure disciplinaire sur le fondement des dispositions citées au point précédent, la note attaquée se borne à rappeler ces dispositions édictées par le législateur. Par suite, le syndicat requérant ne peut utilement soutenir que la note serait illégale en raison du caractère disproportionné de telles conséquences dans le contexte de l'épidémie de covid-19. 12. Il résulte de ce qui précède que l'Union nationale des syndicats CGT Protection judiciaire de la jeunesse n'est pas fondée à demander l'annulation de la note qu'elle attaque. Il suit de là que ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de l'Union nationale des syndicats CGT Protection judiciaire de la jeunesse est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Union nationale des syndicats CGT Protection judiciaire de la jeunesse et au garde des sceaux, ministre de la justice. Délibéré à l'issue de la séance du 6 octobre 2022 où siégeaient : Mme Suzanne von Coester, assesseure, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat-rapporteure. Rendu le 2 novembre 2022. La présidente : Signé : Mme Suzanne von Coester La rapporteure : Signé : Mme Rozen Noguellou La secrétaire : Signé : Mme Marie-Adeline Allain
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Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 26 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association VIA La Voie du Peuple demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : 1°) de suspendre l'exécution du décret n° 2022-1327 du 17 octobre 2022 portant injonction, au regard de la menace grave et actuelle contre la sécurité nationale, de conservation pour une durée d'un an de certaines catégories de données de connexion ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle justifie d'un intérêt à agir ; - la condition d'urgence est satisfaite, dès lors que le décret contesté produit des effets immédiats et risque de porter atteinte de manière irréversible à certaines libertés fondamentales ; - il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales ; - le décret contesté méconnaît la liberté d'expression, la liberté d'opinion et l'exigence de protection des données personnelles et risque de conduire à une censure préalable de la part des opérateurs en ligne ; - le décret contesté méconnaît le droit au respect de la vie privée, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la collecte des données résultant du décret contesté se traduisant par une ingérence disproportionnée par rapport aux buts poursuivis. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des postes et des communications électroniques ; - la loi n°2021-998 du 30 juillet 2021 ; - le décret n° 2021-1362 du 20 octobre 2021 ; - le code de justice administrative ; Considérant ce qui suit : 1. L'association VIA La voie du peuple demande au juge des référés du Conseil d'Etat de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, l'exécution du décret du 17 octobre 2022 par lequel la Première ministre, retenant l'existence d'une menace grave et actuelle contre la sécurité nationale, a enjoint aux opérateurs de communications électroniques ainsi qu'aux personnes mentionnées aux 1 et 2 du I de l'article 6 de la loi du 21 juin 2004 de conserver, pour une durée d'un an, les données de trafic et de localisation respectivement énumérées au V de l'article R. 10-13 du code des postes et des communications électroniques et à l'article 6 du décret du 20 octobre 2021, sur le fondement du III de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques tel que modifié par l'article 17 de la loi du 30 juillet 2021 relative à la prévention d'actes de terrorisme et au renseignement. 2. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. " Aux termes du premier alinéa de l'article R. 522-1 du code de justice administrative : " La requête visant au prononcé de mesures d'urgence doit (...) justifier de l'urgence de l'affaire ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée. 3. Le requérant qui saisit le juge des référés sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative doit justifier des circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de cet article. L'invocation d'une atteinte portée à une liberté fondamentale n'est pas de nature à caractériser par elle-même l'existence d'une situation d'urgence. 4. En l'espèce, la requête se borne à affirmer que la condition d'urgence est satisfaite du fait de l'atteinte portée à des libertés fondamentales par l'application immédiate du décret contesté. Elle ne justifie nullement de circonstances particulières qui caractériseraient la nécessité du prononcé à très bref délai d'une mesure provisoire en référé sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. 5. Il résulte de ce qui précède que la requête, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peut qu'être rejetée par application de l'article L. 522-3 du même code, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa recevabilité. O R D O N N E : ------------------ Article 1er : La requête de l'association VIA La Voie du Peuple est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association VIA La Voie du Peuple. Copie en sera adressée à la Première ministre. Fait à Paris, le 28 octobre 2022 Signé : Jacques-Henri Stahl
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... A... et M. B... D... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la réduction, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à leur charge au titre de l'année 2014. Par un jugement n° 1802634 du 4 février 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 22 mars 2021, Mme A... et M. D..., représentés par Me Demailly, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la réduction, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à leur charge au titre de l'année 2014 ou, dans l'hypothèse où une erreur serait retenue quant à la date de souscription, au titre de l'année 2015 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la souscription au capital de la société F... répond aux conditions de l'article 199 terdecies 0-A du code général des impôts dès lors que la société a pour objet social exclusif de détenir des participations ; - ils sont fondés à invoquer la doctrine exprimée dans le document référencée BOI-IR-RICI-90-10-20 sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales. Par un mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... et M. D... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 19 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 février 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... et M. D... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel l'administration a remis en cause la réduction d'impôt qu'ils avaient pratiquée sur le fondement de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts au titre de l'année 2014 à raison de la souscription par eux, le 24 décembre 2014, au capital de la société E..., par l'intermédiaire de la société F.... En conséquence, l'administration les a assujettis, en suivant la procédure de rectification contradictoire, à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu, assortie de pénalités, au titre de l'année 2014. Mme A... et M. D... relèvent appel du jugement du 4 février 2021 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge de cette imposition. Sur les conclusions aux fins de décharge de l'imposition en litige : En ce qui concerne l'application de la loi fiscale : 2. Il ressort des mentions de la proposition de rectification adressée à Mme A... et M. D... que l'administration a remis en cause le bénéfice de la réduction d'impôt au motif que la société F..., au capital de laquelle les contribuables avaient souscrit, n'avait pas pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant les activités mentionnées au d du 2° de l'article 199 terdecies 0-A du code général des impôts. L'administration a également relevé un deuxième motif tiré de ce que la société F... ayant clôturé son premier exercice le 30 septembre 2015, la réduction d'impôt ne pouvant, en tout état de cause, pas être accordée au titre de l'année 2015. 3. Aux termes du I de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 2014 : " 1° Les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier d'une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 18 % des versements effectués au titre de souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés. / (...) / 3° L'avantage fiscal prévu au 1° trouve également à s'appliquer lorsque la société bénéficiaire de la souscription remplit les conditions suivantes : / a) La société vérifie l'ensemble des conditions prévues au 2°, à l'exception de celle tenant à son activité ; / b) La société a pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant les activités mentionnées au d du 2° ; / (...) ". Aux termes du troisième alinéa du VI quater du même article : " Les souscriptions réalisées au capital d'une société holding animatrice ouvrent droit à l'avantage fiscal mentionné au I lorsque la société est constituée et contrôle au moins une filiale depuis au moins douze mois. Pour l'application du présent alinéa, une société holding animatrice s'entend d'une société qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, participe activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales et rend le cas échéant et à titre purement interne des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers. ". 4. Il résulte de ces dispositions que la réduction d'impôt qu'elles prévoient s'applique tant aux souscriptions directes au capital ou augmentations de capital de sociétés éligibles à ce dispositif, qu'aux souscriptions indirectes réalisées par l'intermédiaire d'une société holding dite passive, c'est à dire ayant pour objet social exclusif de détenir des participations dans les sociétés opérationnelles, visées au d) du 2° du I de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts. En outre, les société holding non passives, dites " animatrices " au sens du VI quater du même article, peuvent y donner droit sous réserve d'avoir été constituées et de contrôler au moins une filiale depuis au moins douze mois. 5. D'une part, si les requérants soutiennent que la souscription au capital de la société F... répond aux conditions de l'article 199 terdecies 0-A du code général des impôts dès lors que la société a pour objet social exclusif de détenir des participations, il résulte de l'instruction que les statuts de la société F... mentionnent, à titre d'objet social, outre la prise de participation au capital de toutes sociétés existantes ou nouvelles, " la gestion des participations, l'assistance à toutes sociétés filiales par la fourniture de service de toute nature et notamment de services sur les plans administratif, commercial, comptable et financier, et plus généralement, le financement, la gestion, la direction de ces sociétés en vue de favoriser leur développement. " Par suite, il doit être déduit de ces mentions des statuts que l'objet social de la société F... ne se limite pas à la détention et la gestion de son portefeuille de participations. De surcroit, l'administration a relevé, au cours des opérations de vérifications, que la société F... avait effectivement fourni à sa filiale, la société E..., des prestations d'assistance commerciale depuis le 1er juin 2015, la convention de prestations de services ayant été approuvé par l'assemblée générale de la société E... le 30 juillet 2015. Ces prestations d'assistance commerciale dépassaient les attributions de la société F... en sa qualité d'actionnaire. Par suite, la société F... ne peut pas être regardée comme ayant pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés. 6. D'autre part, si le troisième alinéa du VI quater de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts prévoit que la réduction d'impôt est applicable aux souscriptions réalisées au capital d'une société holding animatrice, cet avantage fiscal est néanmoins subordonné à la condition que la société soit constituée et contrôle au moins une filiale depuis au moins douze mois. En l'espèce, la société F... a été constituée le 7 janvier 2015 et a procédé à l'acquisition de la société E... le 9 juin 2015. Par suite, la condition de contrôle depuis au moins douze mois prévue au troisième alinéa du VI quater de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts pour les souscriptions réalisées au capital d'une société holding animatrice n'était pas davantage remplie. Dès lors, le moyen doit être écarté. 7. De surcroit et en tout état de cause, le cinquième alinéa du e du 3° du I de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts prévoit que : " La réduction d'impôt sur le revenu est accordée au titre de l'année de la clôture de l'exercice de la société mentionnée au premier alinéa au cours duquel le contribuable a procédé à la souscription. ". En l'espèce, la société F... a été constituée le 7 janvier 2015 et a clôturé son premier exercice le 30 septembre 2015. Par voie de conséquence, les requérants ne pouvaient bénéficier de la réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts au titre de l'année 2014. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause le bénéfice de l'avantage fiscal dont Mme A... et M. D... avaient bénéficié au titre de l'année 2014. En ce qui concerne l'application de la doctrine : 8. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. ". 9. Mme A... et M. D... revendiquent l'application, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine exprimée sous la référence BOI-IR-RICI-90-10-20 n°90 selon laquelle : " En cas de souscriptions indirectes, par l'intermédiaire d'une société holding, au capital initial ou aux augmentations de capital de PME opérationnelles non cotées (BOI-IR-RICI-90-10-30), le contribuable bénéficie de la réduction d'impôt sur le revenu au titre de l'année de la clôture de l'exercice de la société holding au cours duquel il a procédé au versement de tout ou partie de sa souscription (BOI-IR-RICI-90-10-20). Lorsque l'exercice de la société holding ne coïncide pas avec l'année civile, il est admis que le contribuable puisse bénéficier de la réduction d'impôt sur le revenu au titre de l'année civile au cours de laquelle est intervenu le versement de sa souscription au capital de la société holding si les conditions suivantes sont remplies : - la société holding procède, avant la fin de ladite année civile, au versement de la totalité des souscriptions qu'elle a reçues, au titre de l'opération à laquelle le contribuable a participé, au capital de PME non cotées (BOI-IR-RICI-90-10-20) ; - et les versements du contribuable et de la société holding interviennent au cours du même exercice. ". 10. Toutefois, Mme A... et M. D... n'apportent pas la preuve que la société F... a procédé, avant la fin de ladite année civile, au versement de la totalité de leur souscription au capital de petites et moyennes entreprises non cotées ni davantage que les versements des contribuables et de la société holding sont intervenus au cours du même exercice. Par suite, ils n'apportent pas la preuve qu'ils rentrent dans les prévisions de la doctrine. Le moyen doit donc être écarté. 11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... et M. D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge de l'imposition en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de Mme A... et M. D... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme A... et M. D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et M. B... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. SauveplaneLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Nathalie Roméro N°21DA00637 2
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Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision du 3 août 2022 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a prolongé son placement à l'isolement pour trois mois. Par une ordonnance n° 2217520 du 31 août 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a fait droit à sa demande. Par un pourvoi enregistré le 15 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le garde des sceaux, ministre de la justice demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) statuant en référé, de rejeter la requête de M. A.... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code pénitentiaire ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. David Moreau, maître des requêtes, - les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Zribi et Texier, avocat de M. B... A... ; Considérant ce qui suit : 1. M. A..., écroué depuis le 26 janvier 2018, a été initialement placé à l'isolement judiciaire, auquel s'est substitué un isolement administratif à partir du 7 août 2020. Par une décision du 3 août 2022, le garde des sceaux, ministre de la justice a prolongé le placement à l'isolement de M. A... jusqu'au 4 novembre 2022, portant à deux ans la durée totale de mise à l'isolement. Le garde des sceaux, ministre de la justice se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 31 août 2022 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 511-2 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution de cette décision. 2. Aux termes de l'article L. 213-8 du code pénitentiaire : " Toute personne détenue majeure peut être placée par l'autorité administrative, pour une durée maximale de trois mois, à l'isolement par mesure de protection ou de sécurité soit à sa demande, soit d'office. Cette mesure ne peut être renouvelée pour la même durée qu'après un débat contradictoire, au cours duquel la personne intéressée, qui peut être assistée de son avocat, présente ses observations orales ou écrites. / L'isolement ne peut être prolongé au-delà d'un an qu'après avis de l'autorité judiciaire. / Le placement à l'isolement n'affecte pas l'exercice des droits prévus par les dispositions de l'article L. 6, sous réserve des aménagements qu'impose la sécurité. / Lorsqu'une personne détenue est placée à l'isolement, elle peut saisir le juge des référés en application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 213-30 du même code : " Tant pour la décision initiale que pour les décisions ultérieures de prolongation, il est tenu compte de la personnalité de la personne détenue, de sa dangerosité ou de sa vulnérabilité particulière, et de son état de santé ". 3. Saisi d'un recours pour excès de pouvoir contre une décision de mise à l'isolement, le juge administratif ne peut censurer l'appréciation portée par l'administration pénitentiaire quant à la nécessité d'une telle mesure qu'en cas d'erreur manifeste. 4. Il résulte des énonciations de l'ordonnance attaquée que, pour suspendre l'exécution de la décision de prolongation du placement à l'isolement de M. A..., le juge des référés du tribunal administratif de Paris a retenu, comme propre à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par l'auteur de la décision. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en ne s'en tenant pas au seul contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation sur le bien-fondé des motifs de la prolongation de la mesure de placement à l'isolement de M. A..., le juge des référés du tribunal administratif de Paris a entaché son ordonnance d'une erreur de droit qui en justifie l'annulation, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée. 6. Il résulte des éléments versés au dossier de référé que M. A... a fait l'objet en 2022 d'une double condamnation à une peine de 25 ans de réclusion criminelle assortie d'une période de sûreté de 16 ans et à une peine de 30 ans de réclusion criminelle assortie d'une période de sûreté de 20 ans en raison du rôle déterminant qu'il a joué dans la préparation et la commission des actes terroristes qui ont été perpétrés, d'une part, à bord du train Thalys Amsterdam-Paris le 21 août 2015 et, d'autre part, à Saint-Denis et Paris le 13 novembre suivant. Eu égard à l'extrême gravité de ces agissements, au caractère très récent de la démarche de dé-radicalisation dans laquelle il se serait engagé, aux vives réactions que pourrait susciter sa présence parmi les détenus de l'établissement dans lequel il est incarcéré et à une certaine instabilité psychologique, dont témoignent les insultes et menaces qu'il a proférées en octobre 2021 à l'endroit du personnel pénitentiaire afin de se soustraire à une fouille intégrale, le moyen tiré de ce que l'administration, sur l'avis favorable du service pénitentiaire d'insertion et de probation et du parquet national antiterroriste, en l'absence d'opposition du juge de l'application des peines sollicité pour avis et au regard de l'avis d'un médecin concluant à l'absence de contre-indication médicale particulière au maintien à l'isolement, aurait entaché la décision attaquée de maintien à l'isolement de M. A... d'une erreur manifeste d'appréciation n'est pas, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité. 7. Les autres moyens soulevés par M. A..., tirés de l'incompétence de l'auteur de la décision, de son insuffisante motivation, de l'irrégularité de la procédure d'adoption et de la méconnaissance de l'article R. 213-25 du code pénitentiaire ne sont pas davantage propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de la mesure litigieuse. 8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander la suspension de l'exécution de la décision qu'il attaque. 9. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font, par suite, obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'ordonnance du 31 août 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Paris est annulée. Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris est rejetée. Article 3 : Les conclusions présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice et à M. B... A.... Délibéré à l'issue de la séance du 27 octobre 2022 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; M. Alexandre Lallet, conseiller d'Etat ; M. David Moreau, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 2 novembre 2022 Le président : Signé : M. Bertrand Dacosta Le rapporteur : Signé : M. David Moreau La secrétaire : Signé : Mme Naouel Adouane
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Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 26 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Unité Sainte-Rose Football Club demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la Fédération française de football a refusé de modifier les règlements des compétitions nationales qu'elle organise aux fins d'en ouvrir l'accès à l'ensemble des clubs qui lui sont affiliés, y compris ceux établis sur le territoire des départements d'outre-mer, telle que la Guadeloupe ; 2°) d'enjoindre à la Fédération française de football de modifier, dans un délai d'un mois, les règlements des compétitions nationales qu'elle organise aux fins d'en ouvrir l'accès à l'ensemble des clubs établis sur le territoire de la Guadeloupe qui lui sont affiliés ; 3°) de mettre à la charge de la Fédération française de football la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code du sport ; - les règlements généraux de la Fédération française de football ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Clément Tonon, auditeur, - les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public, La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la Fédération française de football ; Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article L. 131-1 du code du sport : " Les fédérations sportives ont pour objet l'organisation de la pratique d'une ou de plusieurs disciplines sportives ". Selon l'article L. 131-14 du même code, dans chaque discipline sportive et pour une durée déterminée, une seule fédération sportive agréée reçoit délégation du ministre chargé des sports. En vertu du 1° de l'article L. 131-15, les fédérations délégataires " organisent les compétitions sportives à l'issue desquelles sont délivrés les titres internationaux, nationaux, régionaux ou départementaux " et édictent, en vertu du 1° de l'article L. 131-16, " les règles techniques propres à leur discipline (...) ". Aux termes de l'article R. 131-32 du même code : " Les règles techniques édictées par les fédérations sportives délégataires comprennent : 1° Les règles du jeu applicables à la discipline sportive concernée ; / 2° Les règles d'établissement d'un classement national, régional, départemental ou autre, des sportifs, individuellement ou par équipe ; / 3° Les règles d'organisation et de déroulement des compétitions ou épreuves aboutissant à un tel classement ; / 4° Les règles d'accès et de participation des sportifs, individuellement ou par équipe, à ces compétitions et épreuves ". Enfin, il résulte des articles 132 et 133 des règlements généraux de la Fédération française de football, qui a reçu délégation exclusive du ministre chargé des sports pour régir la pratique de ce sport en France, que la Fédération organise notamment les championnats masculins de National 1 et National 2 et le championnat de National 3, les championnats féminins de Division 1 et Division 2, les championnats nationaux de jeunes B... et A..., les championnats de futsal de Division 1 et Division 2, ainsi que la Coupe de France et la Coupe Gambardella réservée aux jeunes. 2. L'Unité Sainte-Rose Football Club et douze autres clubs guadeloupéens ont demandé à la Fédération française de football de modifier les règlements qu'elle a édictés, sur le fondement des dispositions citées au point précédent, et qui sont relatifs aux compétitions nationales qu'elle organise, de manière à permettre l'accès à celles-ci par les clubs ultramarins qui lui sont affiliés. L'Unité Sainte-Rose Football Club doit être regardée comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de refus opposée à sa demande en tant qu'elle concerne les règlements des championnats de National 3, de la phase d'accession au championnat de division 2 de football féminin et de futsal, des championnats nationaux de jeunes A... et B... et de la coupe Gambardella. Sur les fins de non-recevoir soulevées par la Fédération française de football : 3. Il ressort des pièces du dossier que l'Unité Sainte-Rose Football Club ne dispose ni d'équipe de football féminin, ni d'équipe de futsal, ni d'équipe évoluant dans la catégorie B.... Par suite, la Fédération française de football est fondée à soutenir que l'Unité Sainte-Rose Football Club ne justifie pas d'une qualité lui donnant intérêt pour demander l'annulation du refus de modifier les règlements relatifs aux compétitions nationales dans ces pratiques et catégories. Ses conclusions présentées à ce titre ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées comme irrecevables. Sur les conclusions dirigées contre le refus de modifier les règlements des championnats de N3 et A... et de la Coupe Gambardella : 4. En premier lieu, il ressort de l'économie générale des règlements des championnats de National 3 et de jeunes A..., notamment respectivement de leurs articles 3 et 7 relatifs à leur composition en ce qu'ils se réfèrent aux treize ligues régionales, que les équipes des six ligues ultramarines n'ont pas vocation à accéder à ces compétitions. Il en va de même pour le règlement de la coupe Gambardella, en particulier au regard de ses articles 5.2 et 12.4 qui impliquent une organisation de la coupe dans le cadre des seules ligues régionales de métropole. L'exclusion contestée procédant directement des règlements des compétitions, la requérante ne peut utilement soutenir que celle-ci résulterait d'une dérogation individuelle à ces mêmes règlements. 5. En second lieu, il appartient aux fédérations sportives délégataires, habilitées à organiser les compétitions sportives officielles, de prendre des dispositions utiles pour assurer leur bon déroulement. Dans l'exercice de ce pouvoir, les fédérations ne peuvent légalement porter atteinte au principe du libre accès aux activités sportives pour tous et à tous les niveaux, et au principe d'égalité, que dans la mesure où ces atteintes ne sont pas excessives au regard des objectifs poursuivis. Eu égard à la situation particulière des équipes ultramarines, en particulier à leur éloignement géographique, au décalage horaire pouvant en résulter, et aux contraintes matérielles et économiques liées aux déplacements d'équipes amateures de ou vers la métropole ainsi qu'à leur séjour sur place, la Fédération française de football a pu se fonder, pour exclure la participation des équipes ultramarines aux compétitions nationales, sur la nécessité de garantir le bon déroulement de celles-ci. Ce faisant, elle n'a pas porté une atteinte excessive au principe de libre accès aux activités sportives, ni davantage au principe d'égalité. 6. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de l'Unité Sainte-Rose Football Club ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association requérante le versement d'une somme au même titre. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de l'association Unité Sainte-Rose Football Club est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par la Fédération française de football au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association Unité Sainte-Rose Football Club et à la Fédération française de football. Copie en sera adressée à la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques
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Vu la procédure suivante : La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a transmis au tribunal administratif de Dijon, en application de l'article L. 52-15 du code électoral, sa décision en date du 24 février 2022 par laquelle elle a rejeté le compte de campagne de Mme C... B... et de M. D... A..., candidats au premier tour des élections départementales qui se sont déroulées le 20 juin 2021 dans le canton de Vincelles (Yonne), après avoir constaté l'absence de présentation de ce compte par un expert-comptable. Par un jugement n° 2200680 du 28 avril 2022, le tribunal administratif de Dijon a déclaré Mme B... et M. A... inéligibles pour une durée de douze mois. Par une requête enregistrée le 13 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de juger qu'il n'y a pas lieu de la déclarer inéligible. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code électoral ; - la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 ; - la loi n° 2019-1269 du 2 décembre 2019 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Cécile Nissen, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ; Considérant ce qui suit : 1. Il résulte de l'instruction que le binôme constitué par Mme B... et M. A..., candidats aux élections départementales des 20 et 27 juin 2021 dans le canton de Vincelles (Yonne), a obtenu 20,41 % des suffrages exprimés et n'a pas accédé au second tour de ce scrutin. Par une décision en date du 24 février 2022 la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a rejeté leur compte de campagne au motif qu'il n'était pas présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables, en méconnaissance des dispositions du III de l'article L. 52-12 du code électoral. En application de l'article L. 52-15 du code électoral, la Commission a saisi le tribunal administratif de Dijon, qui a déclaré Mme B... et M. A... inéligibles pour une durée de douze mois, par un jugement du 28 avril 2022 dont Mme B... relève appel. 2. D'une part, en vertu de l'article L. 52-3-1 du code électoral : " Pour l'application du présent chapitre aux scrutins binominaux, les membres du binôme exercent les droits reconnus aux candidats et sont tenus aux obligations qui s'imposent à eux, de manière indissociable. / Les membres du binôme déclarent un mandataire unique et déposent un compte de campagne unique. " Aux termes de l'article L. 52-12 du même code dans sa rédaction issue de la loi du 2 décembre 2019 visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral : " I. Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne lorsqu'il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés (...). / III. Le compte de campagne est présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables. Ce dernier met le compte de campagne en état d'examen et s'assure de la présence des pièces justificatives requises. / Cette présentation n'est pas obligatoire : / 1° Lorsque le candidat ou le candidat tête de liste n'est pas tenu d'établir un compte de campagne, en application du I du présent article ; / 2° Ou lorsque le candidat ou le candidat tête de liste a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n'excèdent pas un montant fixé par décret. (...) ". 3. D'autre part, en vertu de l'article L. 52-15 du code électoral dans sa rédaction issue de la même loi du 2 décembre 2019 : " La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne. / (...) Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté, (...) la commission saisit le juge de l'élection. (...) " Aux termes de l'article L. 118-3 de ce code dans sa rédaction issue de cette même loi : " Lorsqu'il relève une volonté de fraude ou un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible : 1° Le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12 ; (...) L'inéligibilité mentionnée au présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections.(...) / En cas de scrutin binominal, l'inéligibilité s'applique aux deux candidats du binôme. (...) ". 4. En application des dispositions de l'article L. 118-3 du code électoral citées ci-dessus, en dehors des cas de fraude, le juge de l'élection ne peut prononcer l'inéligibilité d'un candidat sur le fondement de ces dispositions que s'il constate un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales. Il lui incombe à cet effet de prendre en compte l'ensemble des circonstances de l'espèce et d'apprécier s'il s'agit d'un manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales et s'il présente un caractère délibéré. En raison des finalités poursuivies par les dispositions précitées de l'article L. 52-12 du code électoral, l'obligation de recourir à un expert-comptable pour présenter le compte de campagne constitue une formalité substantielle dont l'omission est un manquement d'une particulière gravité, hormis le cas où les dépenses et les recettes sont nulles. En outre, il résulte des dispositions des articles L. 191, L. 210-1 et L. 221 du même code dans leur version issue notamment de la loi du 16 janvier 2015 que le législateur a instauré un mode de scrutin majoritaire binominal à deux tours sans panachage ni vote préférentiel, afin d'assurer la parité au sein des conseils départementaux, et a retenu le principe de solidarité des candidats d'un même binôme. Cette solidarité conduit à ce que les membres d'un même binôme soient tous les deux déclarés inéligibles en cas de méconnaissance des règles relatives au financement des campagnes électorales, ainsi que le prévoient les dispositions, citées au point 3, de l'article L. 118-3 du code électoral, dans sa rédaction issue de la loi du 2 décembre 2019. 5. Il résulte de l'instruction que les deux membres du binôme, qui a obtenu plus de 5 % au premier tour du scrutin, ont déposé conjointement un compte de campagne dont les dépenses et recettes n'étaient pas nulles. Si Mme B... fait valoir, d'une part, qu'elle n'avait pas accès au compte de campagne et, d'autre part, qu'elle pensait que M. A... connaissait la réglementation et l'avait assurée que celle-ci serait respectée, elle n'invoque aucune circonstance précise de nature à démontrer que la méconnaissance, par le binôme, de l'obligation de recourir à un expert-comptable ne constitue pas, dans les circonstances de l'espèce, un manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales présentant un caractère délibéré. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif l'a déclarée inéligible pour une durée de douze mois, la circonstance que M. A... ait financé l'essentiel des dépenses de campagne par un apport personnel étant à cet égard sans incidence. 6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme C... B..., à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à M. D... A.... Délibéré à l'issue de la séance du 13 octobre 2022 où siégeaient : M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat, présidant ; M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat et Mme Cécile Nissen, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure. Rendu le 27 octobre 2022. Le président : Signé : M. Thomas Andrieu La rapporteure : Signé : Mme Cécile Nissen La secrétaire : Signé : Mme Wafak Salem
JADE/CETATEXT000046519771.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 2 avril 2019 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé d'admettre son enfant mineure B... A... au bénéfice du regroupement familial, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine d'autoriser le regroupement familial sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1907326 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 29 juin 2021 et 18 août 2022, M. A..., représenté par Me Maire, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine d'accorder le bénéfice du regroupement familial sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais engagés et non compris dans les dépens. Il soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il ne fournit aucun élément concret et précis permettant de comprendre le raisonnement suivi ; - la décision attaquée est illégale en ce que le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de la situation ; - elle est entachée d'une erreur de fait, le préfet ayant retenu une surface habitable erronée pour son logement ; - elle est aussi entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 411-5 et R. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il dispose d'un logement qui doit être considéré comme normal pour une famille comparable vivant en région parisienne ; - elle porte atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale, en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense enregistré le 25 octobre 2021, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Par ordonnance du 2 août 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 août 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience dans la présente instance. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. D..., - et les observations de Me Verdeil, substituant Me Maire, pour M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant comorien né le 18 novembre 1963, titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle valable jusqu'en juin 2019, a sollicité, le 14 février 2018, le bénéfice du regroupement familial au profit de son enfant B... A..., encore mineure à la date de la demande. Il relève appel du jugement du 25 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 2 avril 2019 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé d'admettre l'enfant précité au bénéfice du regroupement familial. Sur la régularité du jugement : 2. M. A... soutient que le jugement attaqué ne contient aucun élément concret et précis permettant de comprendre le raisonnement des premiers juges concernant le moyen soulevé en première instance et repris en appel, tiré du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle de la part du préfet avant l'édiction de la décision litigieuse. 3. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que les premiers juges, qui ne sont pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'ont pas omis de répondre aux moyens tirés notamment du défaut de motivation de l'arrêté en litige, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige, et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ils ont en outre précisé qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Hauts-de-Seine n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A... avant d'édicter la décision contestée. Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a dès lors pris en considération l'ensemble des éléments soumis à son appréciation et a répondu par un jugement qui est suffisamment motivé à l'ensemble des moyens soulevés dans la demande. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité. Sur les conclusions aux fins d'annulation : 4. En premier lieu, M. A... soutient, comme en première instance, que le préfet des Hauts-de-Seine n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation. Toutefois, le requérant n'apporte pas d'éléments de nature à établir un défaut d'examen particulier de sa situation de la part du préfet, dès lors que l'arrêté mentionne les informations relatives à son état civil ainsi qu'à la demande de regroupement familial, en sus de celles relatives à son logement et au nombre de personnes composant le foyer. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa situation doit être écarté. 5. En deuxième lieu, le requérant fait valoir que l'acte attaqué est entaché d'une erreur de fait en ce que le préfet aurait pris sa décision en se fondant sur une surface habitable de logement erronée, à savoir 59 mètres carrés, alors que la surface habitable réelle serait de 62 mètres carrés. S'il ressort des pièces du dossier, et plus particulièrement du bail conclu le 29 décembre 2008, que la surface habitable du logement est celle indiquée dans ses écritures par M. A..., il n'en demeure pas moins que les premiers juges ont estimé à bon droit que le préfet aurait pris la même décision en retenant la surface précitée, dès lors qu'elle s'avère toujours nettement inférieure à la surface minimale requise pour un logement considéré comme normal compte tenu de la composition du foyer du requérant et son lieu de résidence, à savoir 72 mètres carrés. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'erreur de fait ne peut qu'être écarté. 6. En troisième lieu, le requérant soutient que l'arrêté en litige est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, en ce que le préfet ne pouvait valablement se fonder sur le seul caractère insuffisant de la superficie du logement dans son appréciation du caractère normal du logement au sens des dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le nombre de pièces du logement ne pouvant en outre constituer un critère d'appréciation pouvant à lui seul motiver la décision en litige. Il fait valoir, à cet égard, qu'il dispose d'un logement qui doit être considéré comme normal compte tenu des spécificités de la région parisienne en matière de logements. 7. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis plus de dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans ". Aussi, aux termes de l'article L. 411-5 de ce code : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : (...) / 2° Le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique (...). ". Enfin, l'article R. 411-5 du même code dispose : " Pour l'application du 2° de l'article L '411-5, est considéré comme normal un logement qui : / 1° Présente une superficie habitable totale au moins égale à : - en zones A bis et A : 22 m² pour un ménage sans enfants ou deux personnes, augmentée de 10 m² par personne jusqu'à huit personnes et de 5 m² par personne supplémentaire au-delà de huit personnes (...). / Les zones A bis, A, B1, B2 et C ci-dessus sont celles définies pour l'application de l'article R. 304-1 du code de la construction et de l'habitation ; / 2° Satisfait aux conditions de salubrité et d'équipement fixées aux articles 2 et 3 du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain ". 8. Tout d'abord, si M. A... fait valoir que son logement bénéficie d'une surface au sol de 100 mètres carrés, qui lui permettrait de loger des enfants même dans des espaces dont la hauteur est inférieure à 1,80 mètres, compte tenu notamment du jeune âge de ses trois derniers enfants, il n'en demeure pas moins qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a conclu le 29 décembre 2008 un bail portant sur un logement conventionné pour le bénéfice de la prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale (PALULOS) dont la surface habitable et réelle est de 62 mètres carrés, soit 10 mètres carrés en-dessous de la surface minimale requise pour un logement considéré comme normal au sens des dispositions précitées et compte tenu du nombre de personnes y habitant et du lieu de résidence, ceci sans que la circonstance que la surface au sol soit supérieure ait une quelconque incidence sur l'appréciation de ce critère. 9. En outre, contrairement à ce que soutient M. A..., l'appréciation du caractère normal d'un logement au sens des dispositions des articles L. 411-5 et R. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile tient précisément compte des spécificités du marché immobilier sur le territoire national, et plus particulièrement en région parisienne, dès lors que sont distinguées cinq zones géographiques au sein desquelles la surface minimale d'un logement considéré comme normal varie en fonction de ces critères et du nombre de personnes composant le foyer. Ainsi, M. A... n'apporte pas d'éléments de nature à démontrer que le logement considéré, d'une surface habitable de seulement 62 mètres carrés et donc inférieure à la surface minimale de 72 mètres carrés retenue à juste titre par le préfet, devrait être considéré comme un logement normal au sens des dispositions précitées. 10. Enfin, si le préfet mentionne dans les motifs de l'arrêté contesté qu'un " logement de trois pièces n'est pas adapté pour une famille composée d'un couple, d'un autre adulte et de quatre enfants d'âge et de sexe différents ", il est constant qu'il était parfaitement en droit de fonder sa décision sur le seul critère de la superficie insuffisante du logement par rapport à la superficie minimale retenue, le nombre de pièces étant seulement un motif supplémentaire dans son appréciation. 11. Par conséquent, et compte tenu de ce qui précède, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet a commis une erreur de droit en considérant que son logement n'était pas normal au sens des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour refuser le bénéfice du regroupement familial sollicité, sans que la conclusion d'un nouveau bail d'une surface supérieure mais tout de même sensiblement inférieure à la surface minimale retenue puisse être utilement invoquée. Dès lors, ce moyen ne peut qu'être écarté. 12. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 13. Au cas particulier, M. A... précise que sa fille, qui a des problèmes de santé, est atteinte d'une splénomégalie homogène, à savoir une augmentation de la rate, nécessitant des soins, et qu'elle serait isolée dans son pays d'origine. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A... réside sur le territoire national depuis 1986 et qu'il a toujours vécu éloigné de sa fille, élevée aux Comores par sa grand-mère et son arrière-grand-mère, depuis le départ de sa mère en France, en 2001, année de sa naissance. En outre, si le requérant indique qu'il se rend régulièrement aux Comores auprès des autres membres de sa famille, et produit en ce sens des justificatifs de voyage, il ne justifie pas plus de l'intensité réelle des liens qu'il aurait noués avec sa fille qui n'a jamais résidé avec lui, et ne justifie pas davantage que cette dernière serait dépourvue d'attaches familiales et personnelles dans son pays d'origine, où elle a vécu depuis sa naissance auprès de membres de sa famille, malgré le décès de son arrière-grand-mère, et a poursuivi des études. Enfin, le requérant n'apporte pas d'éléments suffisamment précis et circonstanciés quant à l'incidence de la pathologie précitée, pour laquelle la jeune B... aurait ponctuellement reçu des soins à l'Ile Maurice, sur sa vie quotidienne. Par conséquent, compte tenu de ces éléments, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale, de sorte que ce moyen doit être également écarté. 14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Albertini, président de chambre, M. Mauny, président assesseur, Mme Viseur-Ferré, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2022. Le président assesseur, O. MAUNY Le président rapporteur, P.-L. D...La greffière, S. DIABOUGA La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE01889
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de contribution sur les hauts revenus auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013. Par un jugement n° 1804080 du 1er décembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés le 19 janvier 2021, le 11 juin 2021 et le 21 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Horrie, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de contribution sur les hauts revenus auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013, pour un montant de 185 988 euros ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le logement situé au 5-7 rue de Buffon à Rouen constituait bien sa résidence principale au jour de sa cession de sorte que l'exonération de la plus-value prévue au 1° du II de l'article 150 U du code général des impôts était applicable ; - les pénalités appliquées aux droits en litige ne sont pas justifiées, l'administration n'apportant pas la preuve d'un manquement délibéré. Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2021, et des mémoires, enregistrés le 12 juillet 2021 et le 26 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 14 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 15 juillet 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Horrie, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle à l'issue duquel le service vérificateur a remis en cause le régime d'exonération d'impôt sur la plus-value réalisée à l'occasion de la cession le 31 janvier 2013 d'un appartement, lui appartenant, situé au 5-7, rue de Buffon à Rouen, déclaré comme étant sa résidence principale à la date de la cession. En conséquence, l'administration l'a assujetti, au titre de l'année 2013, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de contribution sur les hauts revenus, assorties de pénalités, en suivant la procédure de rectification contradictoire. M. B... relève appel du jugement du 1er décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions. Sur le bien-fondé des impositions en litige : 2. Aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : " I. - (...) les plus-values réalisées par les personnes physiques (...) lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis (...) sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH (...) / II. - Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : / 1° Qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la cession ; / (...) ". 3. Il résulte des dispositions du 1º du II de l'article 150 U du code général des impôts que la plus-value réalisée par une personne physique lors de la cession à titre onéreux d'un bien immobilier qui constitue sa résidence principale au jour de la cession n'est pas passible de l'impôt sur le revenu. 4. M. B... a acquis le 20 octobre 2011 un bien immobilier situé au 5-7 de la rue Buffon à Rouen " en l'état brut ", sans chauffage ni électricité, pour un prix de 45 000 euros. Cette acquisition faisait suite à la signature d'un accord et d'un protocole de travaux avec le vendeur dès le 20 mars 2011. Ce bien immobilier a été revendu le 31 janvier 2013 pour un prix de 366 000 euros à la suite de la signature d'un compromis de vente intervenu dès le 2 octobre 2012 et de la réalisation d'un diagnostic amiante et énergie en septembre 2012. M. B... a placé le produit de cette vente sous le régime de l'exonération de la plus-value prévu, dans le cadre de la cession de la résidence principale, par les dispositions du 1° du II de l'article 150 U du code général des impôts. 5. Pour justifier de l'occupation du bien en cause depuis son acquisition jusqu'à sa cession en janvier 2013, M. B... produit plusieurs documents, tels qu'attestations d'assurance, bulletins de salaires, relevés bancaires, factures d'eau et d'électricité qui mentionnent tous l'adresse du 5-7 rue Buffon. Toutefois, il n'est pas contesté que M. B... était également propriétaire d'un immeuble, situé à la même adresse, jusqu'à sa vente en juin 2012 et d'un autre immeuble, situé au 23 rue de Brazza à Rouen à un kilomètre de l'immeuble litigieux de la rue Buffon, et qui était son domicile fiscal déclaré avant l'acquisition de l'immeuble en cause et après sa cession. De surcroit, l'administration fait valoir que M. B... avait déjà fait l'objet d'un contrôle en 2012 qui avait abouti à la remise en cause de l'exonération d'une plus-value réalisée sur la cession en 2009 d'un immeuble situé à Trouville-sur-Mer, présenté à tort par le requérant comme sa résidence principale, rectification confirmée par un arrêt du 15 septembre 2016, devenu définitif, de la cour administrative d'appel de Nantes. Dès lors, et en l'absence de certitude sur la date d'achèvement des travaux importants entrepris sur l'immeuble, les éléments avancés par M. B... ne sauraient suffire à établir, dans les circonstances particulières de l'espèce, que le bien litigieux a été occupé de manière effective par le contribuable et qu'il constituait son habitation principale au jour de la cession. Par suite, M. B... ne peut prétendre à l'exonération de la plus-value qu'il a réalisée à l'occasion de cette cession, sur le fondement des dispositions précitées du 1° du II de l'article 150 U du code général des impôts. En conséquence, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause le bénéfice de cette exonération. Sur les pénalités : 6. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, (...) la preuve de la mauvaise foi (...) incombe à l'administration. ". 7. Pour justifier l'application aux droits en litige de la majoration de 40 % prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fait valoir que M. B... avait déjà fait l'objet, en 2012, d'un contrôle qui avait abouti à la remise en cause de l'exonération de la plus-value qu'il avait réalisée à l'occasion de la cession, en 2009, d'un immeuble lui appartenant, situé à Trouville-sur-Mer, présenté à tort par l'intéressé comme sa résidence principale, cette rectification ayant été confirmée par un arrêt du 15 septembre 2016, devenu définitif, de la cour administrative d'appel de Nantes, et que le contribuable n'ignorait donc pas les conditions tenant à l'occupation d'un immeuble, au jour de la cession, à titre de résidence principale, pour le bénéfice de l'exonération prévue au 1° du II de l'article 150 U du code général des impôts. Par suite, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de M. B... de se soustraire au paiement de l'impôt dû. En conséquence, c'est à bon droit que l'administration a fait application aux droits en litige de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 9. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de M. B... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. SauveplaneLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaire de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Nathalie Roméro N°21DA00108 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2020 par lequel le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé son pays de destination, ainsi que de lui enjoindre de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative et lui accorder une autorisation provisoire de séjour durant cet examen. Par un jugement n° 2008014 du 10 mars 2021, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2021, M. C..., représenté par Me Peschanski, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ; 4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il soutient que : - le jugement attaqué n'est pas motivé et le tribunal administratif n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation ; - il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à la violation de son droit à la vie privée et familiale, sur le fondement de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à l'application de l'article L. 423-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable ; - il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à l'application de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable ; - il est entaché d'une erreur d'appréciation quant à l'application de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qui concerne le pays de renvoi ; - il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne les conséquences de la décision sur sa situation personnelle. Par un mémoire en défense enregistré le 13 avril 2022, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 novembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience dans la présente instance. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., ressortissant congolais né le 12 mai 1970 à Brazzaville, déclare être entré en France le 6 juin 2013. Il relève appel du jugement du 10 mars 2021 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 novembre 2020 par lequel le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination. Sur les moyens communs aux décisions en litige : 2. En premier lieu, M. C... soutient que l'arrêté du 29 novembre 2020 est entaché d'une illégalité tenant à l'incompétence de son signataire. Or, M. Benoit Kaplan, secrétaire général de la préfecture de l'Essonne, a reçu, par un arrêté n° 2020-PREF-DCPPAT-BCA-241 du 19 octobre 2020, régulièrement publié le même jour au recueil n° 163 spécial des actes administratifs de cette préfecture, délégation du préfet de l'Essonne pour signer les décisions attaquées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de ces décisions manque en fait et doit être écarté. 3. En second lieu, l'arrêté en litige vise les textes dont il fait application et fait état des conditions d'entrée sur le territoire français de M. C.... Il indique qu'il s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour et a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le 6 décembre 2018, à l'exécution de laquelle il s'est soustrait. Il ressort aussi des motifs de l'arrêté contesté que le préfet a pris sa décision après avoir examiné la situation de M. C... au regard des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'arrêté comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement et est donc suffisamment motivé. Sur l'obligation de quitter le territoire français : 4. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 5. En outre, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...) ". 6. M. C... fait valoir qu'il réside depuis 2013 en France, où il a noué des relations, et qu'il a conclu un pacte civil de solidarité avec Mme A..., avec laquelle il soutient vivre en concubinage depuis 2010. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que ce pacte civil de solidarité, conclu en 2019, est récent, qu'il ne justifie pas " d'une relation de concubinage stable et ancienne qui aurait débuté avant son arrivée en France ou peu après et qu'il est le père de deux enfants mineurs demeurant au Congo, son pays d'origine. Ainsi, le requérant n'apporte pas d'éléments de nature à prouver une intégration sociale et professionnelle suffisante sur le territoire français. Par suite, l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, en tout état de cause, celles de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 7. En deuxième lieu, M. C... est entré irrégulièrement sur le territoire français et qu'il s'y est maintenu, malgré une obligation de quitter le territoire français qui lui a été notifiée le 8 décembre 2018, sans solliciter la délivrance d'un titre de séjour. Dans ces conditions, le requérant se trouvait dans la situation visée au 1° de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à la date de la décision en cause et le préfet de l'Essonne était ainsi fondé à l'obliger à quitter le territoire français. 8. En outre, si M. C... fait valoir que le dépôt d'une demande d'admission au séjour le 19 janvier 2020, qui ne ressort pas des pièces du dossier, ferait obstacle au prononcé d'une mesure d'éloignement, dès lors que le préfet n'a pas, au préalable, statué sur cette demande de titre de séjour, le seul dépôt d'une demande de titre de séjour ne saurait faire obstacle à ce que l'autorité administrative décide de l'éloignement d'un étranger qui se trouve dans l'un des cas mentionnés au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, le requérant ne justifie pas qu'il remplit les conditions de délivrance d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté. Sur la décision fixant le pays de destination : 9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...). " et aux termes de l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". 10. Il ressort des termes mêmes de la décision en litige que le préfet de l'Essonne a examiné si le requérant encourrait des risques personnels en cas de retour au Congo. M. C... se borne à faire valoir qu'il a fui son pays en raison de persécutions liées à ses opinions politiques, sans apporter d'éléments permettant d'apprécier le bien-fondé de ses allégations, de telle sorte que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté. 11. En second lieu, compte tenu des éléments relevés au point 6, le requérant n'est pas plus fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnaîtrait les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en fixant le pays de renvoi. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle doit aussi être écarté. Sur le refus de délai de départ volontaire : 12. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français (...). / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ". 13. Il ressort des motifs de la décision attaquée que le préfet de l'Essonne s'est fondé sur les circonstances que M. C... est entré irrégulièrement sur le territoire français en 2013 et s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement, qui lui avait été notifiée en 2018, et qu'il ne justifie pas non plus avoir déposé une demande de titre de séjour. Il s'ensuit qu'en reprenant ces motifs pour établir le risque de fuite du requérant, le préfet de l'Essonne n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne lui accordant pas un délai de départ volontaire, de sorte que ce moyen doit également être écarté. 14. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées à titre accessoire, y compris celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent, par suite, qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Albertini, président de chambre, M. Mauny, président assesseur, Mme Viseur-Ferré, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2022. Le président assesseur, O. MAUNY Le président rapporteur, P.-L. D...La greffière, S. DIABOUGA La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE02261
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Pharmacie de Ferrières a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014. Par un jugement n° 1804539 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 17 février 2021, et un mémoire, enregistré le 22 septembre 2021, qui n'a pas été communiqué, la SELAS Pharmacie de Ferrières, représentée par Me Laleouse, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle a justifié la réalité des prestations de management commercial réalisées pour son compte par la société Pharmacie de la Grande Poste ; les charges de sous-traitance ne constituent donc pas un acte anormal de gestion ; - la majoration de 40 % appliquée sur ce chef de redressement est injustifiée ; - c'est à tort que le vérificateur a retenu la période 2009 à 2014 pour analyser l'évolution économique de l'entreprise ; l'analyse doit être effectuée à compter de l'année 2004 au regard des chiffres ayant déterminé le prix d'acquisition du fonds de commerce en 2006 ; - la constitution de provision pour dépréciation était justifiée par l'analyse des indices qui ont montré une dépréciation significative de la valeur du fonds de commerce par rapport à son prix d'acquisition. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la SELAS Pharmacie de Ferrières ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 19 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 février 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La SELAS Pharmacie de Ferrières, qui exploite une officine de pharmacie à Gournay-en-Bray (Seine-Maritime), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration l'a assujettie, en suivant la procédure de rectification contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2013 et 2014 et a rappelé des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1e janvier 2013 au 31 décembre 2014. Elle relève appel du jugement du 15 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a ainsi été assujettie au titre des années 2013 et 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014. Sur le bien-fondé des impositions en litige : En ce qui concerne les charges de sous-traitance : 2. Il résulte des mentions de la proposition de rectification adressée le 21 juillet 2016 à la SELAS Pharmacie de Ferrières que l'administration a refusé d'admettre en charges déductibles du bénéfice imposable de cette société deux factures, d'un montant de 60 000 euros au titre de l'exercice 2013 et 80 000 euros au titre de l'exercice 2014, émises par la SELAS Pharmacie de la Grande Poste à Lyon en exécution de deux contrats de prestation de services conclus avec cette dernière et par lesquels la SELAS Pharmacie de Ferrières lui a confié une mission de prestation de conseils de mise en place des procédures de commande, logistique et informatique, de mise en place de fiches de conseils, de mise en place, organisation et affichage des promotions et de journées d'animation. 3. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive. 4. Pour justifier la réalité des prestations confiées à la SELAS Pharmacie de la Grande Poste, la société requérante produit trois documents à l'en-tête de la Pharmacie de la Grande Poste intitulés " procédures commandes ", " procédure DASRI " et " procédures animation ". Toutefois ces documents, rédigés en termes très généraux, ne comportent aucune référence à la pharmacie de Ferrières ni aucune analyse critique des méthodes et pratiques de la pharmacie de Ferrières, et se bornent à décrire les pratiques en vigueur au sein de la SELAS Pharmacie de la Grande Poste. De surcroit, ces documents sont datés du 6 mars et 13 juin 2013 alors que le contrat de prestation de services signé le 31 octobre 2013 stipule expressément que la mission débute à la signature du contrat. Par ailleurs, l'administration fait valoir que la SELAS Pharmacie de la Grande Poste est actionnaire, depuis le 26 avril 2013, à hauteur de 95 % du capital social, de la SELAS Pharmacie de Ferrières, que les missions confiées au prestataire de service correspondent à des compétences qui ne font pas défaut à la SELAS Pharmacie de Ferrières, cette dernière employant, outre sa gérante, deux autres pharmaciens salariés. L'administration fait également valoir qu'aucun frais de déplacement n'a été constaté en comptabilité alors même que les contrats prévoyaient un remboursement des frais de déplacements. Si la SELAS Pharmacie de Ferrières a fourni des billets de train comme justificatif des déplacements allégués du gérant de la SELAS Pharmacie de la Grande Poste et des réunions au cours des opérations de vérification de comptabilité, ces billets n'étaient pas nominatifs et ne correspondaient pas aux dates des visites supposées du gérant le 26 novembre 2013, le 10 novembre 2014 et les 11, 12, 18 et 19 décembre 2014. Enfin, les comptes rendus de réunion, sans date certaine, se bornent à rappeler les obligations légales des pharmaciens et à dresser une liste de conseils de bon sens tels que : " ne pas faire crédit, être souriant et regarder et dire bonjour aux clients, ne pas sur-stocker et faire attention à l'étiquetage des prix ". Dès lors, la SELAS Pharmacie de Ferrières ne peut être regardée comme apportant la preuve de l'existence et la valeur de la contrepartie des deux factures, d'un montant de 60 000 euros au titre de l'exercice 2013 et de 80 000 euros au titre de l'exercice 2014, émises par la SELAS Pharmacie de la Grande Poste en exécution de deux contrats de prestation de services. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la déductibilité de ces charges du bénéfice imposable de la SELAS Pharmacie de Ferrières. En ce qui concerne les provisions pour dépréciation du fonds de commerce : 5. Les impositions supplémentaires ayant été établies selon la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, la preuve du bien fondé de celles-ci incombe à l'administration. Toutefois, il incombe à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de ses prétentions et les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. S'agissant d'une rectification portant sur une écriture comptable de dépréciation, il appartient au contribuable de justifier non seulement du montant de la dépréciation, mais de la correction de son inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de sa déductibilité. 6. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (...) ". Aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III au code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de manière irréversible, notamment les terrains, les fonds de commerce, les titres de participation, donnent lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° du I de l'article 39 du code général des impôts ". 7. Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise qui constate, par suite d'événements en cours à la clôture de l'exercice, une dépréciation non définitive d'un élément de son actif immobilisé, peut, alors même que celui-ci est amortissable, constituer une provision dont le montant ne peut excéder, à la clôture de l'exercice, la différence entre la valeur nette comptable et la valeur probable de réalisation de l'élément dont il s'agit, à la condition notamment que le mode de calcul de la provision soit propre à exprimer avec une approximation suffisante le montant probable de cette dépréciation. 8. Pour les exercices ouverts depuis le 1er janvier 2005, le plan comptable général et notamment son article 322-5 impose aux entreprises d'apprécier, à chaque clôture des comptes et à chaque situation intermédiaire, s'il existe un indice quelconque montrant qu'un ou plusieurs de leurs actifs ont pu perdre de leur valeur. Lorsqu'un tel indice existe, un test de dépréciation consistant à comparer la valeur nette du bien considéré et sa valeur actuelle doit être effectué afin de confirmer ou non la perte de valeur. En présence d'une telle perte de valeur, l'entreprise peut, le cas échéant, déprécier l'actif concerné en fonction de sa valeur actuelle. 9. Il résulte des mentions de la proposition de rectification adressée le 21 juillet 2016 à la SELAS Pharmacie de Ferrières que le fonds de commerce de pharmacie d'officine exploité par cette société a été acquis par la SELAS Pharmacie de Ferrières le 20 avril 2006 pour un montant de 2 090 000 euros au titre des éléments incorporels. La société a commencé à comptabiliser des dotations pour dépréciation du fonds de commerce à compter de l'exercice 2010, jusqu'à atteindre un montant cumulé de 420 000 euros en 2014, soit 20 % de la valeur immobilisée du fonds de commerce. Elle a notamment comptabilisé deux provisions pour dépréciation de son fonds de commerce, pour un montant de 40 000 euros au titre de l'exercice 2013 et de 30 000 euros au titre de l'exercice 2014, et a constaté à due concurrence une diminution de la valeur comptable du fonds de commerce. Pour calculer le montant des provisions, la société s'est fondée sur l'évolution de son chiffre d'affaires et sur l'indice Interfimo basé sur l'évolution des prix de cession d'officine en pourcentage du chiffre d'affaires, un taux de 85 % ayant ainsi été appliqué pour déterminer la valeur du fonds de commerce à la clôture des exercices 2013 et 2014. 10. L'administration a refusé d'admettre en déduction du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés ces deux dotations pour dépréciation du fonds de commerce au motif que la société s'était limitée à appliquer à l'évolution de son chiffre d'affaires un indice statistique qui ne lui est pas propre alors que le chiffre d'affaires était stable entre 2009 et 2013, seul un repli de 9 % pouvant être constaté en 2014, et que le résultat comptable retraité des provisions montrait une augmentation de 31 % entre 2010 et 2014 ainsi qu'une augmentation de la marge nette retraitée. L'administration a également constaté que ni le coefficient de bénéfice brut (chiffre d'affaires HT/achats revendus HT) ni le rapport entre le chiffre d'affaires et les salariés ne traduisait de baisse de rentabilité de la société. Pour ces mêmes motifs, le vérificateur a réintégré le montant des provisions ainsi comptabilisées par la SELAS Pharmacie de Ferrières au cours des exercices 2010 à 2012 à hauteur de 350 000 euros. 11. En premier lieu, la SELAS Pharmacie de Ferrières soutient que l'analyse de la situation économique qui était la sienne devait être effectuée à partir des données économiques de l'exercice 2004. Toutefois, ainsi qu'il a été dit, le fonds de commerce ayant été acquis en 2006, l'analyse de l'évolution de la rentabilité économique ne pouvait en aucun cas remonter aux exercices précédents l'acquisition. De surcroit, par ce moyen, la société requérante ne justifie pas, alors que la charge de la preuve lui incombe, ni du montant de la dépréciation ni de la correction de son inscription en comptabilité. Par suite, le moyen doit être écarté. 12. En second lieu, la société requérante présente un tableau retraçant l'évolution, de 2004 à 2016, des indicateurs économiques, pour conclure que l'analyse de ce tableau permet, selon elle, de constater une dépréciation de la valeur du fonds de commerce par rapport à son prix d'acquisition. Toutefois, pour conclure à l'existence d'une diminution de la valeur du fonds de commerce, la société s'est bornée à appliquer à l'évolution de son chiffre d'affaires un pourcentage de l'indice Interfimo. Or, si l'évolution à la baisse de cet indice basé sur l'évolution des prix de cession des officines de pharmacie peut constituer un indice pertinent de la perte de valeur du fonds de commerce, la société ne saurait se limiter à appliquer un tel indice à son chiffre d'affaires pour calculer le montant de la provision pour dépréciation. Il lui revenait, en plus, de pratiquer un test de dépréciation consistant à comparer la valeur nette du bien considéré et sa valeur actuelle. Et l'évolution du chiffre d'affaires ne peut constituer, à lui seul, un test de dépréciation du fonds de commerce, en l'absence d'autres indicateurs économiques corroborant la baisse de rentabilité économique de la société. En l'espèce, si le chiffre d'affaires de la SELAS Pharmacie de Ferrières a subi une baisse entre 2006 et 2014, passant de 2 500 169 euros à 2 199 837 euros, le résultat fiscal retraité, après neutralisation des provisions litigieuses, a été porté de 60 542 euros en 2006 à 119 064 euros en 2010 et 161 392 euros en 2014. La marge nette retraitée a augmenté, quant à elle, de 2,42 euros en 2006 à 5,62 euros en 2010 et 7,33 euros en 2014. L'excédent brut d'exploitation retraité a augmenté de 273 169 euros en 2006 à 283 244 euros en 2014. Dès lors, aucune dégradation de la rentabilité économique ne peut être constatée de 2006, année de l'acquisition du fonds de commerce, à la période 2010-2014 de constitution des provisions. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause l'ensemble des provisions constituées depuis 2014 par la SELAS Pharmacie de Ferrières pour dépréciation du fonds de commerce. En ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée : 13. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / (...) / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; / (...) ". Aux termes du 2 du IV de l'article 206 de l'annexe II au même code : " Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : / 1° Lorsque le bien ou le service est utilisé par l'assujetti à plus de 90 % à des fins étrangères à son entreprise ; / (...) ". 14. L'administration a par ailleurs remis en cause la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux factures émises par la SELAS Pharmacie de la Grande Poste au motif que la SELAS Pharmacie de Ferrières n'ayant pas justifié ces charges, celles-ci n'ont pas été exposées dans l'intérêt direct de l'exploitation. En conséquence d'un coefficient d'admission nul, la taxe sur la valeur ajoutée grevant ces factures n'était pas déductible et l'administration a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée correspondante. 15. La société requérante ne conteste pas la remise en cause de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée par des moyens autres que ceux mentionnés au point 4. Or, dans les circonstances de l'espèce, les charges en cause ne peuvent être regardées comme ayant été engagées pour les besoins de l'exploitation. C'est donc à bon droit que l'administration a remis en cause la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à ces factures. En ce qui concerne la majoration de 40 % appliquée au chef de redressement afférent au redressement portant sur les charges de sous-traitance : 16. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ". 17. Pour justifier l'application de la majoration prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts aux droits supplémentaires procédant du rehaussement, en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée, à raison du rejet des charges de sous-traitance, l'administration a relevé, dans la proposition de rectification adressée le 21 juillet 2016 à la SELAS Pharmacie de Ferrières, qu'alors qu'aucune pièce probante n'avait été produite quant à la réalité des prestations de service en cause et qu'aucune justification de ce que ces charges avaient été engagées dans l'intérêt de l'exploitation n'avait été apportée, la SELAS Pharmacie de Ferrières avait nécessairement connaissance de ces éléments et que ces manquements, du fait de leur nature et de leur importance, excédaient le cadre strict de l'erreur ou de l'omission mais permettaient de caractériser l'intention d'éluder l'impôt. Par suite, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de la SELAS Pharmacie de Ferrières de se soustraire au paiement de l'impôt dû, justifiant l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré. 18. Il résulte de tout ce qui précède que la SELAS Pharmacie de Ferrières n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 19. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de la SELAS Pharmacie de Ferrières tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de la SELAS Pharmacie de Ferrières est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SELAS Pharmacie de Ferrières et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, - M. Bertrand Ballard, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. SauveplaneLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Nathalie Roméro N°21DA00381 2
JADE/CETATEXT000046519789.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012. Par un jugement n° 1803794 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer, à concurrence du dégrèvement de 7 692 euros prononcé en cours d'instance en matière de prélèvements sociaux, sur la demande de M. et Mme B... et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2020, et un mémoire, enregistré le 7 octobre 2022, qui n'a pas été communiqué, M. et Mme B..., représentés par la SELARL Guidet et Associés, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction ; 2°) de prononcer la décharge des impositions demeurant en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - le tribunal administratif n'a pu, sans entacher son jugement d'une irrégularité constitutive d'une méconnaissance du droit à un procès équitable, tel que protégé par le 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, confirmer le bien-fondé du rehaussement relatif aux revenus regardés comme distribués par l'Office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ) en se référant aux mentions d'un procès-verbal qui n'avait pas été versé à l'instruction ; - les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige ont été établis à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors que la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris n'était pas territorialement compétente pour diligenter l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont ils ont fait l'objet et que ce service n'était pas en situation de se prévaloir du droit de suite prévu au V de l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts ; ce vice substantiel de procédure est de nature à justifier la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige ; les paragraphes nos 200 à 210 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-CF-DG-30 confortent leur position quant à l'incompétence territoriale du service vérificateur ; - contrairement à ce qu'a retenu, à tort, l'administration, ils n'avaient pas maintenu, au cours des années 2011 et 2012 en litige, leur domicile fiscal en France, puisqu'ils avaient transféré, en décembre 2010, le lieu de leur habitation principale en Tunisie, où ils ont pris une villa en location ; le fait qu'ils n'ont pas résilié, dans le même temps, les contrats de distribution d'eau et d'électricité qu'ils avaient souscrits pour le logement dont ils disposaient en France ne constitue pas, à cet égard, un critère significatif, les relevés de consommation que le service a obtenus dans le cadre de l'exercice de son droit de communication confirmant d'ailleurs qu'ils n'ont conservé ce logement que pour un usage occasionnel ; enfin, s'il était besoin d'examiner ce critère subsidiaire, ils ont bien fixé, à compter de décembre 2010, le centre de leurs intérêts vitaux en Tunisie, où est implantée la société Harmonie, qui constitue le centre d'intérêt professionnel principal de M. B..., tandis que les trois sociétés dont il était le gérant en France ont, pour deux d'entre elles, cessé leur activité, et, pour la troisième, été cédée ; enfin, Mme B... a fait valoir ses droits à la retraite en France à la fin de l'année 2010, période à compter de laquelle elle a transféré le centre de ses intérêts vitaux en Tunisie, sans qu'ait d'incidence le fait qu'elle a débuté deux activités, en France, après la période vérifiée et de façon temporaire ; - les crédits mis en évidence sur un compte bancaire ouvert au nom de M. B... et qui résultent de virements opérés par l'OFAJ, ont été regardés à tort comme correspondant à des revenus distribués, alors qu'il s'agit de règlements qui trouvent leur contrepartie dans des prestations effectuées par la société tunisienne Harmonie ; ces sommes avaient d'ailleurs été remboursées au 31 décembre 2012 ; en conséquence, il ne pouvait être procédé, à ce titre, à un rehaussement de leurs revenus imposables sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts. Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - M. et Mme B..., qui, dans leur réclamation, n'ont pas contesté les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre de l'année 2010 et résultant de la réintégration, dans leurs revenus imposables, de sommes regardées comme distribuées par la société Symphonie, ne sont pas recevables à demander au juge de l'impôt, en tenant compte de ce chef de rectification, une décharge d'un montant supérieur à celui mentionné dans cette réclamation ; - le premiers juges, qui ont seulement exploité les informations produites à l'instruction et dont disposaient les deux parties au litige, n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité en appuyant leur raisonnement sur les mentions d'un procès-verbal d'une assemblée générale des actionnaires de la société de droit tunisien Harmonie que les requérants ont d'ailleurs eux-mêmes communiqué à la vérificatrice et dont ils n'ont pas contesté la teneur ; - la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris, qui venait d'effectuer une vérification de la comptabilité de la société Symphonie, dont le siège est situé à Paris et dont M. B... était le gérant, a pu se prévaloir de son droit de suite, qui, en vertu de l'article 3 de l'arrêté du 16 mars 2012 relatif aux directions spécialisées de contrôle fiscal, s'exerce dans les mêmes conditions que celles dont disposent ces directions spécialisées, pour procéder à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de l'intéressé et de l'épouse de celui-ci ; en conséquence, le moyen tiré de l'incompétence territoriale de ce service doit être écarté ; M. et Mme B... ne sont pas fondés à invoquer, à cet égard, les paragraphes nos 200 à 210 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-CF-DG-30 ; - dans la mesure où M. et Mme B... disposaient, au cours des années 2011 et 2012, d'un lieu d'habitation en Tunisie et d'un autre en France, il y a lieu de déterminer, pour l'application tant de la loi fiscale que des stipulations de la convention fiscale conclue le 28 mai 1973 entre la France et la Tunisie, le lieu où se situait le centre de leurs intérêts vitaux ; à cet égard, quand bien même M. et Mme B... ont effectivement emménagé, de décembre 2010 à février 2011, dans une villa prise en location en Tunisie, cette circonstance ne peut suffire à déterminer ce lieu comme centre de leurs intérêts vitaux, compte-tenu notamment de l'impossibilité de comparer les niveaux de consommation d'eau et d'électricité, le système de facturation en vigueur en Tunisie étant différent de celui utilisé en France et M. et Mme B... n'ayant communiqué aucune donnée concernant leurs consommations en Tunisie ; en outre, si les intéressés ont précisé, au cours du contrôle, avoir maintenu les abonnements d'eau et d'électricité souscrits pour leur logement situé en France dans l'attente de la revente de celui-ci, ils n'ont apporté aucun élément de nature à justifier des démarches qu'ils auraient accomplies afin de mettre cet immeuble en vente ; par ailleurs, les trois enfants majeurs de M. et Mme B... vivent en France ; en outre, selon les éléments d'information portés à la connaissance de l'administration, Mme B..., qui a créé, en octobre 2012, une société en France, en continuant de mentionner l'adresse de sa résidence française, d'ailleurs reprise dans la déclaration de revenus souscrite en 2011 au titre de l'année 2010, n'a pas informé les organismes qui lui servent une pension de retraite en France, ni l'administration fiscale française, de son adresse en Tunisie ; enfin, Mme B... continuait d'occuper, en 2016, les fonctions de directrice des ressources humaines dans une société créée en 2013 et dirigée par son fils, ce qui, ajouté aux autres indices relevés par le service, manifeste qu'elle et son époux ont entendu, au cours des années 2011 et 2012, maintenir le centre de leurs intérêts vitaux en France, où le couple dispose d'ailleurs de plusieurs comptes bancaires dont les relevés font mention de nombreuses opérations courantes, ainsi que de l'essentiel de leurs revenus, provenant notamment de sociétés dont ils sont les associés ; dans ces conditions et alors que M. et Mme B... n'ont apporté aucun élément de nature à justifier des revenus dont ils disposent en Tunisie, le service était fondé à les regarder comme domiciliés fiscalement en France au cours des années 2011 et 2012 ; - il ressort des éléments d'information communiqués par l'OFAJ au service, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, que les virements reçus sur l'un des comptes bancaires de M. B... correspondent au paiement de prestations effectuées, pour le compte de l'OFAJ, par la société tunisienne Harmonie, dans le cadre de l'exécution d'une convention conclue en 2009 par cette dernière avec la SA Symphonie ; M. B... ne conteste pas sérieusement avoir eu la disposition des sommes correspondantes, inscrites au débit du compte courant d'associé ouvert à son nom dans la comptabilité de la société Harmonie, ce que confirme d'ailleurs les mentions du procès-verbal de l'assemblée générale du 25 juin 2013 des actionnaires de cette société ; par suite et quand bien même ces sommes auraient été remboursées en 2012, ce dont il n'est justifié par aucune pièce, elles ont été à bon droit regardées comme ayant la nature d'avantages occultes imposables au sein du foyer fiscal de M. et Mme B... sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts, sans bénéfice de l'abattement prévu au 2° du 3 de l'article 158 de ce code. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la Constitution ; - la convention entre la France et la Tunisie, tendant à éliminer les doubles impositions et à établir des règles d'assistance mutuelle administrative en matière fiscale, signée à Tunis le 28 mai 1973, et le protocole qui y est annexé ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. L'administration a adressé, le 27 juillet 2013, à M. et Mme A... B... un avis les informant de l'engagement prochain d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, en ce qui concerne la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012. Au cours de ce contrôle, pour les besoins duquel le service a exercé son droit de communication auprès, notamment, des établissements bancaires détenteurs des comptes ouverts au nom des intéressés, la vérificatrice a mis en évidence la perception, par M. B..., de virements bancaires de la part de la société anonyme (SA) Symphonie, dont il est le gérant, ainsi que de la société STA et de l'Office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ). Après avoir estimé que M. et Mme B... avaient, durant les années vérifiées, maintenu leur domicile fiscal en France, l'administration a regardé les sommes perçues de la SA Symphonie, de la société STA, ainsi que de l'OFAJ, comme étant imposables au sein de leur foyer fiscal dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. L'administration a fait connaître à M. et Mme B... sa position sur ces points par deux propositions de rectification qu'elle leur a adressées les 6 décembre 2012 et 23 juillet 2014, en ce qui concerne, respectivement, l'année 2010 et les années 2011 et 2012. Les observations formulées par M. et Mme B... n'ont pas convaincu l'administration de modifier son analyse. Toutefois, la supérieure hiérarchique de la vérificatrice ayant accepté de tenir compte des remboursements opérés par les intéressés sur le compte-courant détenu par M. B... dans les comptes de la société STA, les rectifications afférentes à l'année 2010 ont été réduites. Les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant des rectifications maintenues à la charge de M. et Mme B... ont été mis en recouvrement le 30 septembre 2015, pour un montant total de 156 902 euros, en droits et pénalités. 2. Leurs réclamations ayant été rejetées, M. et Mme B... ont porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont ainsi été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012. Par un jugement du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer, à concurrence du dégrèvement de 7 692 euros prononcé en cours d'instance en matière de prélèvements sociaux, sur la demande de M. et Mme B... et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande. M. et Mme B... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. Il ressort des motifs énoncés au point 15 du jugement attaqué que, pour confirmer la qualification de revenus distribués donnée par l'administration aux sommes reçues par M. B... de l'OFAJ, le tribunal s'est référé aux mentions d'un procès-verbal d'une assemblée générale des actionnaires de la société de droit tunisien Harmonie, selon lesquelles ces derniers ont décidé de servir notamment à M. B... une distribution de dividendes d'un montant supérieur aux sommes en cause, reçues de l'OFAJ par cette société en paiement de prestations, par voie d'inscription au compte courant d'associé ouvert à son nom dans la comptabilité de cette société. Or, s'il est constant que ce procès-verbal n'avait pas été versé à l'instruction, il ressort des termes du mémoire en défense, produit devant le tribunal administratif par l'administration, que les énonciations utiles de ce procès-verbal y sont reprises, de sorte que M. et Mme B..., qui ont reçu communication de ce mémoire en temps suffisant avant l'audience et qui y ont d'ailleurs répliqué, ont été mis à même de discuter de la pertinence de cet élément, dont ils n'ont, au demeurant, aucunement contesté la teneur dans leurs écritures contentieuses. Par suite, en appuyant son raisonnement sur les mentions, telles que reprises par le mémoire de l'administration, de ce procès-verbal, que M. et Mme B... avaient, au demeurant, communiqué eux-mêmes à la vérificatrice au cours du contrôle, le tribunal administratif ne peut être regardé comme ayant entaché son jugement d'une irrégularité de procédure qui aurait été de nature à priver les requérants du droit à bénéficier d'un procès équitable. Sur le lieu du domicile fiscal des contribuables au titre des années 2011 et 2012 : 4. Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. Par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale. Au regard de la loi fiscale : 5. Aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / (...) ". Aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; / c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques. / (...) ". 6. Il est constant que M. et Mme B..., qui avaient jusqu'alors déclaré à l'administration être domiciliés en France, dans le département de l'Eure, ont, à compter du mois de décembre 2010, emménagé dans une villa qu'ils ont prise en location en Tunisie, cet emménagement, incluant le transport, par avion et par bateau, de nombreux meubles et objets personnels, ainsi que de linge, ayant été achevé en février 2011. M. et Mme B... soutiennent avoir, depuis lors, fixé en Tunisie leur domicile fiscal. Toutefois, ainsi que le relève le ministre, ce seul emménagement ne peut suffire aux intéressés, en l'absence d'éléments de nature à permettre d'évaluer les temps de présence respectifs des intéressés en France et en Tunisie au cours des années 2011 et 2012 en litige, à justifier d'un tel transfert de leur domicile fiscal. Dans ces conditions, alors d'ailleurs que les intéressés admettent avoir maintenu les abonnements de distribution d'eau et d'électricité souscrits pour leur logement français et avoir continué, au cours des années 2011 et 2012, à utiliser celui-ci pour de courts séjours, M. et Mme B... doivent être regardés comme disposant, au cours des deux années en cause, d'un lieu de résidence en Tunisie et d'un autre en France, sans que les éléments versés à l'instruction suffisent à permettre de déterminer lequel de ces lieux constituait leur lieu de séjour principal. 7. Il résulte de l'instruction et, notamment, des éléments d'information non contestés avancés par le ministre que M. B... détenait, au cours de l'année 2011 et de la première moitié de l'année 2012, avant de les revendre en juin 2012, 51 % des parts de la SA Symphonie, dont le siège est situé en France et qu'il y exerce une activité effective. Il résulte également de l'instruction que M. B... était le gérant statutaire, jusqu'en juin 2012, de cette société, qui lui a d'ailleurs versé, à compter du mois de février 2011, une indemnité forfaitaire de déplacement et de séjour s'élevant à 2 000 euros par mois, et qu'il était également, durant toute la période couvrant les années 2011 et 2012, le gérant de la société STA, dont l'intégralité du capital était détenue par la SA Symphonie, tandis qu'il dirigeait, en Tunisie, la seule société Harmonie. Dans le même temps, Mme B... était l'associée et la dirigeante d'au moins deux sociétés ayant leur siège en France et qui étaient actives au cours des années 2011 et 2012 en litige. Par ailleurs, il est constant que Mme B... a fait valoir, à la fin de l'année 2010, ses droits à la retraite auprès de la caisse de retraite dont elle relevait en France, laquelle lui verse, depuis lors, une pension de source française. Enfin, il résulte également de l'instruction et, notamment, des éléments avancés par le ministre et qui ne sont pas davantage contestés sur ce point, que M. et Mme B..., qui n'ont apporté aucun élément de nature à permettre de déterminer les ressources de source tunisienne qu'ils seraient susceptibles de percevoir, ni le niveau de leur imposition en Tunisie, sauf à faire état de la direction, par M. B..., de la société de droit tunisien Harmonie, disposaient, en 2011 et 2012, de plusieurs comptes bancaires en France, sur lesquels étaient opérés, de façon habituelle, des prélèvements correspondant à des dépenses courantes, telles des dépenses de télécommunications, d'électricité ou des abonnements à la presse. Dans ces conditions, l'administration était fondée à regarder M. et Mme B... comme disposant, au cours des années 2011 et 2012, du centre de leurs intérêts économiques et professionnels en France, où ils percevaient l'essentiel de leurs revenus, où ils disposaient de la majeure partie de leurs avoirs et où ils exerçaient la plus grande part de leur activité de dirigeants de sociétés. Par suite, l'administration était fondée à estimer, pour l'application des dispositions précitées des articles 4 A et 4 B du code général des impôts, que M. et Mme B... avaient, malgré l'installation, à compter de la fin de l'année 2010, d'un second lieu de résidence en Tunisie, maintenu en France, où résidaient d'ailleurs leurs trois enfants majeurs, leur domicile fiscal au cours des années 2011 et 2012. Au regard de la convention fiscale bilatérale : 8. Aux termes de l'article 3 de la convention entre la France et la Tunisie, tendant à éliminer les doubles impositions et à établir des règles d'assistance mutuelle administrative en matière fiscale, signée à Tunis le 28 mai 1973 : " Domicile fiscal / 1. Au sens de la présente Convention, l'expression " résident d'un Etat contractant " désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. / 2. Lorsque, selon la disposition du paragraphe 1, une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, le cas est résolu d'après les règles suivantes : / a) Cette personne est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent. Lorsqu'elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans chacun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) / (...) ". 9. Eu égard à ce qui a été dit au point 7, M. et Mme B..., qui disposaient, en 2011 et 2012, d'un foyer d'habitation permanent en France et en Tunisie, doivent être regardés comme disposant en France, au sens des stipulations précitées de l'article 3 de la convention fiscale franco-tunisienne, du centre de leurs intérêts vitaux, dès lors que leurs liens personnels et économiques y étaient, en l'absence de justification du contraire, demeurés les plus étroits. Par suite, les stipulations précitées de l'article 3 de la convention fiscale franco-tunisienne ne font pas obstacle à ce que M. et Mme B... soient regardés comme résidents de la France, au sens de ces stipulations. 10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 et 9 que l'administration était fondée à retenir, pour mettre à la charge du foyer fiscal de M. et Mme B... des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2011 et 2012, que les intéressés devaient être regardés comme ayant maintenu, au cours de ces deux années, leur domicile fiscal en France, tant au regard de la loi fiscale qu'au regard de la convention fiscale franco-tunisienne, et qu'ils avaient, au titre de ces mêmes années, la qualité de résidents fiscaux français. Sur la régularité de la procédure d'imposition : 11. En vertu du II de l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts, les fonctionnaires mentionnés au premier alinéa du I de cet article, à savoir les fonctionnaires de la direction générale des finances publiques appartenant à des corps des catégories A et B, peuvent exercer les attributions que ces dispositions leur confèrent, c'est-à-dire celles de fixer les bases d'imposition et de liquider les impôts, taxes et redevances ainsi que de proposer les rectifications, à l'égard des personnes physiques ou morales ou groupements de personne de droit ou de fait qui ont déposé ou auraient dû déposer, dans le ressort territorial du service déconcentré ou du service à compétence nationale dans lequel ils sont affectés, une déclaration, un acte ou tout autre document, ainsi qu'à l'égard des personnes ou groupements qui, en l'absence d'obligation déclarative, y ont été ou auraient dû y être imposés ou qui y ont leur résidence principale, leur siège ou leur principal établissement. Le V du même article dispose que ces fonctionnaires peuvent exercer leurs attributions à l'égard des personnes physiques ou morales et des groupements liés aux personnes ou groupements qui relèvent de leur compétence, et précise que les liens existant entre les personnes ou groupements s'entendent de l'appartenance ou du rattachement à un même foyer fiscal, de l'exercice d'un rôle de direction de droit ou de fait, d'une relation d'association, de subordination ou d'interposition, ou de l'appartenance à un même groupe d'intérêts. 12. Il est constant que les deux propositions de rectification qui ont été adressées le 6 décembre 2012 et le 23 juillet 2014 à M. et Mme B..., à la suite de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont ils ont fait l'objet en ce qui concerne la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012, ont été signées par une inspectrice des finances publiques, c'est-à-dire par un fonctionnaire de catégorie A, en poste à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris. Si le domicile fiscal de M. et Mme B..., situé dans le département de l'Eure, n'était pas inclus dans le ressort territorial de ce service, il résulte de l'instruction que cette inspectrice des finances publiques s'était précédemment livré à une vérification de la comptabilité de la SA Symphonie, dont M. B... était le gérant jusqu'en juin 2012, et dont le siège est situé à Paris, dans le ressort territorial de ce service. Ce fonctionnaire bénéficiait, en conséquence, en application des dispositions, rappelées au point précédent, du V l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts, qui ne trouvent pas exclusivement à s'appliquer aux directions spécialisées de contrôle fiscal, du pouvoir d'exercer ses attributions de contrôle à l'égard des personnes liées à la société vérifiée, dont M. B..., son dirigeant, et du foyer fiscal de celui-ci. Par suite, le moyen tiré de ce que le fonctionnaire qui a procédé à l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et Mme B... et qui leur a ensuite, à l'issue de ce contrôle, notifié les rehaussements en litige était territorialement incompétent doit être écarté. M. et Mme B... ne sont pas fondés à invoquer, à cet égard, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations des paragraphes nos 200 à 210 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-CF-DG-30, qui, s'agissant d'une question relative à la régularité de la procédure d'imposition, ne peuvent être regardées comme comportant une interprétation formelle de la loi fiscale susceptible d'être opposée à l'administration. Sur le bien-fondé de la rectification afférente à des revenus regardés comme distribués : 13. En vertu du c. de l'article 111 du code général des impôts, les rémunérations et avantages occultes, notamment, sont considérés comme des revenus distribués. 14. Au cours de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont M. et Mme B... ont fait l'objet, la vérificatrice a constaté que M. B... avait perçu, au cours de la période vérifiée, des virements opérés sur l'un de ses comptes bancaires par l'OFAJ. Dans le cadre de l'exercice, auprès de cet organisme, de son droit de communication, le service vérificateur a obtenu de l'OFAJ l'information selon laquelle ces versements constituaient le paiement de factures qui lui avaient été adressées par la société de droit tunisien Harmonie et par la SA Symphonie et qui concernaient des ventes, ainsi que des prestations de service réalisées auprès de lui par ces sociétés. Au cours des entretiens avec la vérificatrice, M. B... a déclaré que ces factures s'inscrivaient dans le cadre d'une convention conclue en 2009 entre ces deux sociétés. 15. Si M. et Mme B... soutiennent que la société Harmonie a accusé réception de ces paiements auprès de l'OFAJ et a inscrit ceux-ci dans sa comptabilité, ils ne contestent pas que la créance correspondante, constatée dans la comptabilité de cette société au crédit du compte de client ouvert au nom de l'OFAJ, a été soldée non pas par le débit d'un compte de liquidités, mais par le débit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B..., ni que c'est ce dernier qui a perçu, sur l'un de ses comptes bancaires personnels, les sommes correspondantes, soit 105 000 euros en 2010, 57 000 euros en 2011 et 25 300 euros en 2012. Or, sans qu'il soit même besoin d'apprécier la portée de la délibération du 25 juin 2013 de l'assemblée générale des actionnaires de la société Harmonie, produite à la vérificatrice par M. B... au cours du contrôle, décidant une distribution de dividendes, l'inscription des sommes correspondant à ces règlements de factures sur le compte courant d'associé de M. B..., dont celui-ci est réputé avoir la libre disposition, établit, par elle-même, en l'absence d'élément probant contraire, leur appréhension par le foyer fiscal de M. et Mme B..., qui les ont d'ailleurs effectivement perçues par virement bancaire sur un compte personnel. Si les intéressés soutiennent que ces sommes avaient été intégralement remboursées au 31 décembre 2012, ils n'en justifient pas, en tout état de cause, par le tableau qu'ils versent à l'instruction et qui n'est étayé par aucun élément de nature à établir que les remboursements repris dans ce tableau ont bien été effectués. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a regardé les sommes ainsi perçues par M. B... comme ayant la nature de rémunérations occultes imposables au sein de son foyer fiscal, sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. 16. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions demeurant en litige. Par voie de conséquence, les conclusions qu'ils présentent sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA01952 1 3 N°"Numéro"
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) Maserati West Europe a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, qui a transmis sa requête au Tribunal administratif de Paris, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 décembre 2012 et le 31 décembre 2013, en droits et pénalités, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, en droits et pénalités. Par un jugement n° 1814469 du 23 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires enregistrés le 7 août 2020, le 6 octobre 2020 et le 27 octobre 2020, représentés par Me Ebrard-Grellety, Me Bitar et Me Raillat, la société Maserati West Europe demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1814469 du 23 juin 2020 ; 2°) de prononcer la décharge demandée en première instance ; 3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La société Maserati West Europe soutient que : - elle exerce une activité de négoce en parallèle à son activité de promotion et de développement de la marque Maserati qui représente environ 20 % de son chiffre d'affaires ; - les véhicules de tourisme de démonstration, qui ont vocation à être revendus dès leur acquisition et qui sont conservés en moyenne durant moins d'une année, ne peuvent pas être immobilisés au moment de leur acquisition, et constituent naturellement des éléments du stock et non des éléments de l'actif immobilisé comme le soutient l'administration ; - le principe de réalisme de la taxe sur la valeur ajoutée impose la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les véhicules concernés dans la mesure où l'achat s'inscrit dans le cadre de l'exploitation commerciale ; - la règle de l'affectation, rappelée par la doctrine administrative 3D-1-07 de 2007, impose la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux véhicules concernés ; - le principe de neutralité, consacré par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, impose la récupération de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les véhicules concernés ; - elle est fondée à se prévaloir de la doctrine administrative codifié au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-TVA-DED-30-30-20-20170201. Par un mémoire en défense et un mémoire enregistrés le 4 septembre 2020 et le 12 octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les véhicules de démonstration ne font pas partie des stocks dans la mesure où ils n'ont pas été achetés pour être revendus neufs. Ils doivent donc être immobilisés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de Mme Lescaut, rapporteur public, - et les observations de Me Raillat pour la société Maserati West Europe. Considérant ce qui suit : 1. Consécutivement à une procédure de vérification de comptabilité portant sur les exercices 2012, 2013 et, en matière de taxe sur la valeur ajoutée étendue jusqu'au 31 décembre 2014, la société par actions simplifiée (SAS) Maserati West Europe, a fait l'objet de cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de rappels de taxe sur la valeur ajoutée, qui résultent de la remise en cause de l'inscription en stocks des véhicules de démonstration de la société et de la variation de l'actif net de la société résultant de leur immobilisation pour une valeur toutes taxes comprises, ainsi que du rejet de la déductibilité de la taxe ayant grevé leur achat. La société relève appel du jugement du 23 juin 2020 par lequel les premiers juges ont rejeté sa demande de décharge des impositions qui ont résulté de ce différent dans la qualification des véhicules de démonstration. Sur l'étendue du litige : 2. Il résulte de l'instruction que la société a contesté à hauteur de 21 603 euros les rehaussements d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de son exercice clos en 2013. Elle a consécutivement obtenu un dégrèvement de cette imposition d'un montant de 51 160 euros. Si comme elle le relève, les rehaussements d'impôt sur les sociétés pour cet exercice 2013 s'élevant à 131 047 euros, un reliquat de rehaussement de 78 887 euros subsiste, ce dernier montant n'avait pas été contesté dans sa réclamation préalable. Les conclusions de la requête qui s'y rapportent sont donc irrecevables comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges qui ne se sont, dès lors, pas mépris sur l'étendue du litige. Sur le bien-fondé de l'imposition : En ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés : 3. Il résulte des propres assertions de la SAS Maserati West Europe qu'alors qu'avant l'année 2010, son activité principale consistait à acheter à sa mère des véhicules homonymes pour les revendre à des concessionnaires établis en France, elle s'est consacré depuis cette date à y développer une activité d'animation et de développement commercial. La société fait valoir qu'elle a conservé une activité d'achat et de revente qui représente, pour la période ayant fait l'objet de la procédure de vérification, environ 10 % de son chiffre d'affaires. Les véhicules qu'elle achète sont immatriculés comme véhicules de démonstration et sont mis à disposition de différents acteurs économiques au support de son activité commerciale, étant par exemple exposés dans des salons automobiles ou prêtés à des journalistes. La société Maserati West Europe ne soutient cependant pas qu'elle effectuerait un commerce de véhicules d'occasion puisqu'elle achète les véhicules neufs. Si elle fait valoir que les véhicules sont toujours achetés avec la perspective d'être vendus dans une période qui varie entre quelques mois et plus d'une année, il n'est pas contesté que le prix de vente est toujours inférieur au prix d'achat, car l'intention au moment de l'achat n'est pas de réaliser un profit au moment de la vente du véhicule en cause, mais de développer son activité promotionnelle en France, prestation de service qui doit aboutir, pour sa mère, à la vente de véhicules. 4. En conséquence, ces véhicules ne sont pas directement utilisés par la requérante pour le commerce de véhicules, qu'elle ne réalise pas elle-même, et n'ont pas la même nature que ceux faisant l'objet de son négoce propre, qui consiste en des prestations de services. Ainsi, même si tous ses véhicules de démonstration ont vocation à être revendus dès la date de leur acquisition, dont la moitié après une courte période inférieure à une année, ils n'ont toutefois ni la nature de charges de l'exercice ni de stocks mais font partie de l'actif immobilisé à cette date. En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée : 5. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) ". L'article 205 de l'annexe II à ce code prévoit que : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction. ". L'article 206 de cette annexe ajoute que : " I.- Le coefficient de déduction mentionné à l'article 205 est égal au produit des coefficients d'assujettissement, de taxation et d'admission. (...) IV.-1. Le coefficient d'admission d'un bien ou d'un service est égal à l'unité, sauf dans les cas décrits aux 2 à 4. (...) 2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : (...) 6° Pour les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes, à l'exception de ceux : a. Destinés à être revendus à l'état neuf ; b. Donnés en location ; c. Comportant, outre le siège du conducteur, plus de huit places assises et utilisés par des entreprises pour amener leur personnel sur les lieux du travail ; d. Affectés de façon exclusive à l'enseignement de la conduite ; e. De type tout terrain affectés exclusivement à l'exploitation des remontées mécaniques et des domaines skiables, dans des conditions fixées par décret ; f. Acquis par les entreprises de transports publics de voyageurs et affectés de façon exclusive à la réalisation desdits transports (...) ". 6. Il résulte également des points 2 et 3 que les véhicules de démonstration acquis à l'état neuf par la SAS Maserati West Europe, inscrits à tort à l'actif de son bilan en tant que stocks et revendus d'occasion à l'issue de leur période de démonstration, n'étaient destinés ni à être revendus à l'état neuf ni à être donnés en location, et ne sont pas au nombre de ceux, énumérés au 6° du 2 du IV de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts, pour lesquels le coefficient d'admission n'est pas nul. Dès lors, la société requérante ne disposait d'aucun droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé le prix d'achat de ces véhicules. Ces éléments de l'actif devant être immobilisés, et pour une somme incluant la taxe sur la valeur ajoutée grevant le prix d'acquisition, ni le principe de réalisme de la taxe sur la valeur ajoutée, ni la règle de l'affectation ou le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée ne sont méconnus, et ce traitement comptable et fiscal est conforme à la destination du bien au moment de l'achat étant donné la nature et les conditions d'exploitation de la société. 7. La documentation administrative BOI-TVA-DED-30-30-20 du 1er février 2017 n° 60 à n° 70 et n° 190 à n° 250 étant postérieure au fait générateur des impositions litigieuses, elle ne peut pas être utilement invoquée contre les rehaussements litigieux. En tout état de cause et de surcroît, le paragraphe 70 ne s'applique qu'aux véhicules qui ont le caractère d'éléments de stock et les paragraphes 190 et suivants, ne s'appliquent qu'aux véhicules dont l'emploi est non seulement lié au négoce mais qui sont de même nature que ceux sur lesquels porte le négoce. Or, la société n'a pas l'activité d'un concessionnaire dont le but est de réaliser directement un bénéfice par la vente de véhicules. Elle n'entre dès lors pas dans les prévisions de ces doctrines. 8. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Maserati West Europe n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 23 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la SAS Maserati West Europe est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée (SAS) Maserati West Europe et au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction sépcialisée de contrôle fiscal d'Île-de-France - division juridique. Délibéré après l'audience du 24 juin 2021, à laquelle siégeaient : - M. Formery, président de chambre, - M. Platillero, président-assesseur, - M. Sibilli, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2021. Le rapporteur, B. A...Le président, S.-L. FORMERY La greffière, F. DUBUY-THIAM La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20PA02183
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... et Mme C... A..., son épouse, ont demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013, 2014 et 2015. Par un jugement no 1902220 du 24 août 2020, le tribunal administratif de Rouen a déchargé M. et Mme A... de la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses appliquée aux droits procédant de l'omission de déclaration de la distribution de dividende de la société à responsabilité limitée (SARL) CPX dont ils ont été bénéficiaires au titre de l'année 2015, a substitué à cette pénalité la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 21 octobre 2020, 1er mars 2021 et 27 juin 2022, M. et Mme A..., représentés par Me Horrie, demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions et prélèvements sociaux demeurant en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la société civile immobilière (SCI) Tunis ne s'est pas réservée la jouissance des immeubles situés 121 rue Saint Vivien à Rouen et 10 rue Edouard Charles à Elbeuf ; - la quote-part du prélèvement non libératoire et des prélèvements sociaux réclamée à la SARL CPX pour la distribution de dividendes octroyées à M. A... au titre de l'année 2015 ne doit pas être laissée à leur charge compte-tenu de l'engagement de cette société de l'acquitter ; - la somme de 51 813 euros ne présente pas la nature de revenus distribués au sens du a. de l'article 111 du code général des impôts mais correspond à des versements effectués par la SARL CPX au profit de la SCI Tunis et de la SCI Casablanca dans le cadre de deux conventions de prêt, dont l'existence est prouvée selon les conditions fixées par la doctrine BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20120912 ; - les pénalités pour manquement délibéré afférentes aux revenus fonciers au titre de l'année 2013 ne sont pas fondées, faute pour l'administration d'établir le caractère délibéré de l'omission ; - les intérêts de retard, les contributions sociales, ainsi que les pénalités pour manquement délibéré afférentes aux déficits fonciers au titre des années 2014 et 2015, sont sans fondement, en raison de l'absence de bien-fondé des suppléments d'imposition en litige. Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés les 29 janvier 2021 et 3 juin 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut, dans le dernier état de ses écritures, au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement accordé le 25 mai 2022 et au rejet du surplus des conclusions de la requête. Il soutient que : - il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge à hauteur du dégrèvement accordé le 25 mai 2022 au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2015 ; - les conclusions devant le tribunal administratif de Rouen aux fins de décharge, en ce qu'elles sont relatives au déficit foncier antérieur déclaré au titre de l'année 2013, au déficit global antérieur déclaré au titre de l'année 2013 et aux rectifications notifiées à la SCI Tunis en ce qui concerne les immeubles situés 9 rue Pont à Dame-Renaude et 6 rue d'Ecosse à Rouen, étaient irrecevables, aucun moyen spécifique n'ayant été soulevé à ce titre ; - les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 9 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 8 juillet 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Baillard, premier conseiller, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Horrie, représentant M. et Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. M. et Mme A... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2013, 2014 et 2015. A la suite de ce contrôle, l'administration fiscale a mis à leur charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus fonciers et des revenus de capitaux mobiliers, ainsi que des cotisations supplémentaires de prélèvements sociaux, assorties de pénalités, au titre des années 2013, 2014 et 2015. M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions. Par un jugement du 24 août 2020, le tribunal administratif de Rouen les a déchargés de la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses appliquée aux droits procédant de l'omission de déclaration de la distribution de dividende de la société à responsabilité limitée (SARL) CPX dont ils ont été bénéficiaires au titre de l'année 2015, a substitué à cette pénalité la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande. M. et Mme A... demandent l'annulation de ce jugement en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction. Sur l'étendue du litige : 2. Par une décision du 25 mai 2022, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration a accordé à M. et Mme A... un dégrèvement, en droits, de 39 060 euros au titre de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à leur charge au titre de l'année 2015. Dans cette mesure, les conclusions de la requête de M. et Mme A... sont devenues sans objet. Sur le bien-fondé des impositions demeurant en litige : En ce qui concerne les revenus fonciers : 3. Aux termes du II de l'article 15 du code général des impôts : " Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu. / (...) " Il résulte de ces dispositions que les charges afférentes aux logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne peuvent pas venir en déduction pour la détermination du revenu foncier compris dans le revenu global soumis à l'impôt sur le revenu. La réserve de jouissance est établie, notamment, par l'accomplissement ou non de diligences ayant pour objet de donner le bien en location. 4. D'une part, M. et Mme A... soutiennent, pour la première fois devant la cour, que la société civile immobilière (SCI) Tunis, dont M. A... détient 50 % des parts sociales, a été dans l'impossibilité de réaliser des travaux et de mettre en location le bien leur appartenant, situé 121 rue Saint Vivien à Rouen, en raison d'un problème cadastral. Toutefois, si les requérants produisent une pièce permettant d'établir qu'en 2020, un cabinet de géomètre expert était mandaté dans le cadre d'une procédure de régularisation cadastrale, cette pièce n'est pas, à elle seule, de nature à établir l'impossibilité dans laquelle ils se seraient trouvés de mettre en location le bien depuis 2011. Par ailleurs, si un devis pour la réalisation de travaux est produit en appel, ce devis, dont il n'est d'ailleurs pas établi qu'il aurait été accepté par M. et Mme A..., a été établi le 13 janvier 2021, soit dix ans après l'acquisition de l'immeuble par les intéressés, et ne permet donc pas d'établir que l'état du bien aurait fait obstacle à sa mise en location au titre des années en cause. Au surplus, M. et Mme A... ne se sont, à aucun moment de la procédure de contrôle, prévalus de ce qu'ils auraient été dans l'impossibilité de réaliser des travaux et de mettre en location le bien leur appartenant, les intéressés ayant au contraire soutenu avoir engagé des démarches afin de mettre en location le bien en cause. D'autre part, s'agissant de l'immeuble situé 10 rue Edouard Charles à Elbeuf, si M. et Mme A... persistent à soutenir que l'absence de mise en location résulte, d'une part, d'un arrêté d'insalubrité dont cet immeuble a fait l'objet en 2008, et, d'autre part, d'une procédure d'expropriation, ils ne produisent pas plus qu'en première instance les décisions afférentes et ne justifient pas de ce que des travaux auraient pu être réalisés afin de rendre habitable l'immeuble, ou des diligences effectuées en vue de permettre sa mise en location. Dès lors, l'administration, pour remettre en cause les déficits fonciers déclarés au titre de ces immeubles en 2013 et imposer les époux A... à concurrence de leur quote-part dans la SCI Tunis, a pu considérer, à bon droit, que cette société civile immobilière avait conservé la jouissance de ces deux biens. En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers : 5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, à la suite de la distribution au cours de l'année 2015 de dividendes au profit de M. A... par la SARL CPX, dont celui-ci détient 50 % des parts sociales, cette société n'a pas acquitté le prélèvement forfaitaire non libératoire relatif à l'impôt sur le revenu ainsi que les prélèvements sociaux relatif à cette distribution. Il est constant que, à la suite du règlement par la SARL CPX des sommes de 28 830 euros au titre des prélèvements sociaux, et de 39 060 euros au titre du prélèvement forfaitaire, l'administration a accordé à M. et Mme A..., les 24 avril 2019 et 25 mai 2022, des dégrèvements correspondants. Toutefois, dès lors que cette société ne s'est pas acquittée de l'intégralité de ces prélèvements dont le montant total s'élevait à 135 780 euros, M. et Mme A... ne peuvent demander à en être déchargés, quand bien même la SARL CPX a établi un échéancier avec l'administration fiscale en vue du règlement de la totalité de ces prélèvements. 6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes. / (...) ". 7. Il résulte de ces dispositions que l'administration ne peut en principe regarder l'existence d'un solde débiteur du compte courant ouvert dans les écritures d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés au nom d'une société civile immobilière dont le contribuable est l'associé tout en étant, parallèlement, associé de la première, comme de nature à établir que le montant de ce solde a constitué pour l'intéressé un revenu distribué au sens du a. de l'article 111 du code général des impôts, qu'à la condition d'établir que la société civile immobilière en cause n'a fait que s'interposer entre la société soumise à l'impôt sur les sociétés et le contribuable, bénéficiaire réel de la distribution. 8. Le service vérificateur a estimé que les différents versements inscrits sur les livres comptables de la SARL CPX au crédit de la SCI Tunis et de la SCI Casablanca, dont M. A... détient 50 % du capital social et assure la gérance, constituaient des revenus distribués, imposables entre ses mains, à concurrence de la quote-part des parts détenus par celui-ci dans le capital de ces deux SCI, soit 10 682,50 euros au titre de l'année 2014 et 53 075 euros au titre de l'année 2015, sur le fondement du a. de l'article 111 du code général des impôts. Au cours des opérations de contrôle, M. A... s'est prévalu, pour justifier ces versements, de deux conventions par lesquelles par lesquelles la SARL CPX a prêté respectivement à la SCI Tunis et à la SCI Casablanca les sommes de 70 000 euros et 1 200 000 euros. Toutefois, ainsi que l'a relevé l'administration, les versements avaient une périodicité et des montants variables, alors que les conventions de prêt ne contenaient ni précision quant à la date de mise à disposition des fonds, ni échéancier de remboursement, le seul élément y figurant étant une date limite d'exigibilité de la créance. Par ailleurs, si ces conventions pouvaient être établies sous seing privé, elles ne peuvent, en l'espèce, être regardées comme ayant été établies à une date certaine. Enfin, aucun élément n'est produit quant à l'objet et à l'utilisation de ces prêts. Dans ces conditions, l'administration a pu considérer, à bon droit, que M. A... était le bénéficiaire de ces versements et que les sommes en cause présentaient le caractère de revenus distribués au sens du a. de l'article 111 du code général des impôts. 9. En troisième lieu, M. et Mme A... ne sont pas fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 130 de l'instruction BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20-20120912 qui ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il est fait application par le présent arrêt. Sur les intérêts de retard et les prélèvements sociaux : 10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 9 que M. et Mme A... ne sont pas fondés à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, demeurant en litige. Le moyen tiré de ce que les intérêts de retard, dont été assorties ces impositions, ainsi que les prélèvements sociaux mis à leur charge sont, par voie de conséquence de l'absence de bien-fondé des droits, dépourvus de fondement doit donc être écarté. Sur les pénalités : 11. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. ". En ce qui concerne l'année 2013 : 12. M. et Mme A... soutiennent qu'à la date de souscription de leur déclaration de revenus au titre de l'année 2013, les contrôles fiscaux dont eux-mêmes et la SCI Tunis faisaient l'objet au titre des années antérieures n'étaient pas clos, de sorte que l'omission de déclaration de revenus fonciers au titre de l'année en cause était dépourvue de tout caractère intentionnel. Toutefois, l'administration fait valoir que les contribuables avaient connaissance de la remise en cause des déficits fonciers pour l'année 2012, ainsi que des motifs de cette remise en cause, dans le cadre d'une proposition de rectification qui leur avait été transmise antérieurement à la date de souscription, le 8 juin 2014, de leur déclaration de revenus pour l'année 2013. Par ailleurs, antérieurement à cette date, les requérants avaient été également informés du rejet de leur recours hiérarchique, s'agissant de ces mêmes déficits fonciers. Dès lors, M. et Mme A... ayant connaissance de ces éléments, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée des intéressés d'éluder le paiement de l'impôt, s'agissant de ce chef de rectification. En ce qui concerne l'année 2015 : 13. Dès lors que M. A..., gérant de la SARL CPX, a sciemment omis de déposer, au nom de cette société, la déclaration relative aux revenus distribués soumis au prélèvement forfaitaire et aux prélèvements sociaux, et que celui-ci n'a pas porté sa quote-part de distributions sur la déclaration de revenus qu'il a souscrite au titre de l'année 2015, alors qu'il avait une parfaite connaissance du caractère imposable de ces dividendes, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de M. A... d'éluder le paiement de l'impôt. Il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à contester l'application, à ce chef de rectification, de la majoration pour manquement délibéré prévue par le a. de l'article 1729 du code général des impôts. 14. En revanche, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 2, l'administration a accordé à M. et Mme A... un dégrèvement, en droits, d'un montant 39 060 euros, au titre de la cotisation d'impôt sur le revenu mise à leur charge au titre de l'année 2015, les intéressés sont fondés, par voie de conséquence, à demander la décharge de la majoration de 40 % pour manquement délibéré dont ce chef de redressement a été assorti. 15. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... sont uniquement fondés à demander la décharge de la majoration de 40 % pour manquement délibéré appliquée, sur le fondement du a. de l'article 1729 du code général des impôts, au montant de 39 060 euros, en droits, qui avait été mis à leur charge au titre de la cotisation d'impôt sur le revenu de l'année 2015, et l'annulation, dans cette mesure, du jugement attaqué. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 16. L'Etat n'étant pas la partie principalement perdante à l'instance, les conclusions de de M. et Mme A... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme A..., à concurrence du dégrèvement de 39 060 euros prononcé, en droits, le 25 mai 2022, au titre de la cotisation d'impôt sur le revenu de l'année 2015. Article 2 : M. et Mme A... sont déchargés de la majoration de 40 % pour manquement délibéré appliquée au montant de 39 060 euros, en droits, au titre de la cotisation d'impôt sur le revenu de l'année 2015. Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 24 août 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : B. BaillardLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA01629 1 3 N°"Numéro"
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 29 avril 2021 par lequel le préfet de l'Essonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation, également dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation temporaire de séjour jusqu'à ce qu'il soit de nouveau statué sur son cas, dans un délai de sept jours à compter du jugement. Par un jugement n° 2105525 du 16 novembre 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 17 décembre 2021, Mme A..., représentée par Me Monconduit, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ; 3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans le même délai ; 4°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit de nouveau statué sur son cas, dans un délai de sept jours à compter de la notification du présent arrêt ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais engagés et non compris dans les dépens. Elle soutient que : S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour : - elle est entachée d'une insuffisance de motivation ; - elle est illégale en ce que le préfet n'a pas procédé à un examen de la demande d'un titre portant la mention " vie privée et familiale ", " salarié " ou " étudiant " ; - le préfet n'a pas procédé dans sa décision à un examen particulier de sa situation personnelle ; - elle est entachée d'une erreur de fait s'agissant de sa situation personnelle ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à l'application de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle a été prise en méconnaissance de l'article 3.1. de la convention internationale des droits de l'enfant ; S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours : - elle est illégale par la voie de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; - elle est illégale en ce qu'elle aurait dû bénéficier de la délivrance de plein droit d'un titre de séjour ; - elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle a été prise en méconnaissance de l'article 3.1. de la convention internationale des droits de l'enfant. Par un mémoire en défense enregistré le 20 avril 2022, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ; - la convention internationale des droits de l'enfant ; - le protocole relatif à la gestion concertée des migrations et du développement solidaire entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne du 28 avril 2008 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience dans la présente instance. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C..., - et les observations de Me Cabral, substituant Me Monconduit, pour Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B... A..., ressortissante tunisienne née le 16 janvier 1971, est entrée en France le 23 septembre 2017, sous couvert d'un visa de long séjour. Elle a ensuite bénéficié d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " étudiant ", valable du 20 septembre 2018 au 19 septembre 2020. Elle relève appel du jugement du 16 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 29 avril 2021 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation. Sur la légalité externe : 2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient Mme A..., l'arrêté attaqué comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, lui permettant ainsi de le contester utilement. Ainsi, en considérant que l'arrêté rappelle les conditions d'entrée et de séjour de la requérante, précise les éléments relatifs à sa situation professionnelle, personnelle et familiale, mentionne qu'elle est mère de trois enfants dont deux sont majeurs et signale la présence en France de sa mère, de deux de ses frères et de ses deux sœurs, les premiers juges ont écarté à bon droit le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions contenues dans l'arrêté en litige. 3. En second lieu, et compte tenu des éléments précités, il ne ressort pas plus des pièces du dossier, et plus particulièrement de l'arrêté en litige lui-même, que le préfet n'aurait pas procédé à un examen de la situation particulière tant personnelle que professionnelle de Mme A..., ni qu'il aurait fondé son refus de titre de séjour uniquement sur l'avis du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi sans procéder à un tel examen, de sorte que ce moyen doit être également écarté. Sur la légalité interne : 4. En premier lieu, Mme A... soutient que l'arrêté en litige est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur de fait, en ce que le préfet n'aurait pas examiné sa demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et se serait fondé sur des faits matériellement inexacts pour rejeter la demande de titre de séjour. 5. D'une part, il est constant que la requérante ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce qu'elles ne sont pas applicables aux ressortissants tunisiens. D'autre part, s'il ressort des pièces du dossier que Mme A... et sa mère sont co-titulaires du bail locatif de leur logement, alors que le préfet a estimé que cette dernière était hébergée par sa fille, il est constant, eu égard à la motivation de l'arrêté, que le préfet aurait pris la même décision. Le moyen tiré d'une erreur de droit et d'une erreur de fait ne peut dès lors qu'être écarté. 6. En deuxième lieu, et ainsi que l'ont exactement rappelé les premiers juges, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour pouvant être délivrés aux étrangers s'appliquent, en vertu de l'article L. 111-2 de ce code, " sous réserve des conventions internationales ". Ainsi, aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1 du présent Accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable et portant la mention " salarié " (...) ". Les dispositions précitées sont complétées par l'article 2.3.3. du protocole relatif à la gestion concertée des migrations et du développement solidaire entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne du 28 avril 2008. Enfin, aux termes du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarie ". (...) ". 7. Le préfet de l'Essonne, tout en mentionnant l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 précité dans les visas de sa décision, a fondé cette même décision de refus de délivrance d'un titre de séjour sur l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'est pas applicable aux ressortissants tunisiens en vertu des dispositions précitées. Toutefois, il est constant que les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien précitées, concernant les titres de séjour portant la mention " salarié " pouvant être délivrés aux ressortissants tunisiens, peuvent être substituées aux dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans que l'intéressée ne soit privée d'aucune garantie, dès lors que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation lorsqu'elle se fonde sur l'une ou l'autre de ces dispositions similaires. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit fondée sur l'application de l'article L. 313-10 précité doit être écarté. 8. En troisième lieu, la requérante fait valoir que l'arrêté pris par le préfet de l'Essonne serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle aurait dû se voir délivrer un titre de séjour de plein droit portant la mention " vie privée et familiale ", et porte atteinte à son droit au respect de la vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 9. Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature des liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". 10. D'une part, si Mme A... fait valoir qu'elle réside avec sa mère dont elle s'occupe, qui est veuve et handicapée, à la suite d'un accident vasculaire cérébral (AVC), il ressort des pièces du dossier que ses quatre frères et sœurs résident régulièrement sur le territoire français et que la requérante n'apporte pas d'éléments suffisants, à l'exclusion d'attestations des intéressés, de nature à démontrer que ses frères et sœurs ne seraient pas en mesure de s'occuper de leur mère qui réside depuis 25 ans sur le territoire français. 11. D'autre part, Mme A... soutient qu'elle est séparée de son mari qui réside en Tunisie, que ses trois enfants, dont deux sont majeurs, sont scolarisés ou poursuivent des études en France, et qu'elle serait parfaitement intégrée sur le territoire, où elle a suivi une formation, exerce une activité salariée et contribue, en tant que bénévole, aux activités du Secours populaire de Morsang-sur-Orge. Toutefois, la requérante est entrée récemment en France, en 2017, à l'âge de quarante-six ans, pour y effectuer des études, et il ne ressort des pièces du dossier qu'elle occupe un emploi en adéquation avec l'objet de ses études ou qu'elle serait démunie d'attaches familiales en Tunisie. 12. Il résulte de ce qui précède qu'aucun des éléments invoqués par Mme A... à l'appui de sa requête n'est de nature à établir qu'en prenant l'arrêté refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours le préfet aurait porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale, de sorte que les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent tous deux être écartés. 13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant au prononcé d'injonctions et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Albertini, président de chambre, M. Mauny, président assesseur, Mme Viseur-Ferré, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2022. Le président assesseur, O. MAUNY Le président rapporteur, P.-L. C...La greffière, S. DIABOUGA La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE03377
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) Heurtaux Investissements a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2014 et des intérêts de retard afférents. Par un jugement no 1801364 du 2 juin 2020, le tribunal administratif de Rouen a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à la charge de la SARL Heurtaux Investissement au titre de l'année 2014 et des intérêts de retard correspondants et a mis à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par la SARL Heurtaux Investissements et non compris dans les dépens. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 juillet 2020 et le 2 juin 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de remettre à la charge de la SARL Heurtaux Investissements les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés dont la décharge a été prononcée par ce jugement. . Il soutient que : - la créance abandonnée ne constitue pas une aide à caractère commercial au sens du point 13 de l'article 39 du code général des impôts ; - cet abandon de créance constitue un acte anormal de gestion ; - aucune double imposition résultant du rejet de la déduction de l'abandon de créance en litige n'est susceptible d'intervenir pour l'exercice clos 2014, de telle sorte qu'il appartiendrait à la société Heurtaux Investissements de s'en prévaloir en temps utile ; - aucune double imposition n'est susceptible d'intervenir. Par un mémoire en défense enregistré le 23 mai 2022, et un mémoire non-communiqué enregistré le 17 juin 2022, la société à responsabilité limitée (SARL) Heurtaux Investissements, représentée par la société d'avocats Fidal, conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens invoqués ne sont pas fondés ; - si la déduction de la créance abandonnée n'était pas admise, elle serait assujettie à une double imposition méconnaissant l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Par une ordonnance du 25 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 juillet 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société à responsabilité limitée (SARL) Heurtaux Investissements, qui exerce l'activité de société holding et détient à ce titre 99,89% des actions de la société par actions simplifiées (SAS) Heurtaux à laquelle elle loue des locaux commerciaux situés à Saint-Aubin-les-Elbeuf et à Hyères, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er novembre 2011 au 31 octobre 2014, à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause la déduction, au titre des charges exceptionnelles de l'exercice 2014, d'un abandon de loyer au bénéfice de sa filiale d'un montant de 91 185 euros, au motif que cet abandon de créance, d'une part, ne pouvait être qualifié d'aide commerciale déductible au sens du point 13 de l'article 39 du code général des impôts, et, d'autre part, constituait un acte anormal de gestion. Après rejet de sa réclamation préalable, la SARL Heurtaux Investissements a porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen en lui demandant d'être déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'année 2014 et des intérêts de retard afférent. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique relève appel du jugement du 2 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a fait droit à cette demande. Sur le motif de décharge retenu par les premiers juges : 2. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation / (...) / ". Aux termes de l'article 39 même code : " 13. Sont exclues des charges déductibles pour l'établissement de l'impôt les aides de toute nature consenties à une autre entreprise, à l'exception des aides à caractère commercial. / Le premier alinéa ne s'applique pas aux aides consenties en application d'un accord constaté ou homologué dans les conditions prévues à l'article L. 611-8 du code de commerce ni aux aides consenties aux entreprises pour lesquelles une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte. / (...)/ ". En vertu de ces dispositions, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature effectuées par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Le fait pour une entreprise de renoncer à percevoir des loyers, même lorsqu'ils sont dus par une société appartenant au même groupe, ne relève pas en règle générale d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant un tel avantage, l'entreprise a agi dans son propre intérêt. Il incombe à cette entreprise de justifier de l'existence d'une contrepartie à un tel choix, tant dans son principe que dans son montant.'Il appartient ensuite à l'administration de démontrer que ces contreparties sont inexistantes, dépourvues d'intérêt pour l'entreprise ou insuffisantes. 3. En premier lieu, l'administration fiscale soutient que, ainsi que l'avait retenu le service vérificateur tant dans la proposition de vérification du 8 janvier 2016 que dans le rejet de la réclamation du 19 février 2018, l'abandon de loyer en litige ne constitue pas une aide à caractère commercial au sens du 13 de l'article 39 du code général des impôts. Toutefois, il résulte de l'instruction que la SARL Heurtaux Investissements est une société commerciale qui a une activité de holding mixte et loue à sa filiale la SAS Heurtaux des locaux pour l'exercice par cette dernière de son activité industrielle et commerciale. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que la location de ces locaux à sa filiale constitue l'essentiel de l'activité de la SARL Heurtaux Investissements. La relation existant entre ces deux sociétés est donc une relation commerciale. Enfin, le fait que l'abandon de créances en litige ait été comptabilisé en " charges exceptionnelles " est, en tout état de cause, sans incidence sur sa qualification d'aide commerciale dès lors qu'il a bien été enregistré au plan comptable comme une charge. Aussi, wl'abandon de créances accordé par la SARL Heurtaux Investissements au bénéfice de la SAS Heurtaux constitue une aide à caractère commercial au sens de l'article 39 du code général des impôts. 4. En second lieu, il n'est pas contesté que la SAS Heurtaux a rencontré d'importantes difficultés financières antérieurement à l'abandon de créances de telle sorte que la poursuite de l'exécution des baux de locations consentis par la SARL Heurtaux Investissements n'était pas assurée sans l'octroi de cette aide commerciale. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que les locaux loués présentent, de par leurs localisations, leurs dimensions et leurs aménagements, des spécificités liées à l'activité particulière de la SAS Heurtaux et ne permettant pas de trouver dans de brefs délais un nouveau preneur pour les occuper, en cas de liquidation de la SAS Heurtaux. De plus, ainsi qu'il a été dit au point précédent, la location de ces locaux industriels, où s'exerce l'activité de sa filiale, constitue l'essentiel de l'activité commerciale de la SARL Heurtaux Investissements. Enfin, il résulte de la convention du 10 mars 2014 que l'abandon de créance consenti est assorti d'une clause de retour à meilleure fortune. A ce titre, si l'administration fiscale se prévaut du caractère irréaliste de cette clause, il ne lui appartient pas de se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par la SARL Heurtaux Investissements et notamment pas sur l'ampleur des risques pris par elle pour améliorer ses résultats, l'administration devant apprécier si les opérations litigieuses correspondent à des actes relevant d'une gestion commerciale normale uniquement au regard du seul intérêt propre de l'entreprise. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont estimé que l'abandon de créance commerciale consenti par la SARL Heurtaux Investissements à la SAS Heurtaux ne constituait pas un acte anormal de gestion. 5. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a déchargé la SARL Heurtaux Investissements des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'année 2014 et à demander que soient remises à la charge de la SARL Heurtaux Investissements les impositions supplémentaires dont elle a été déchargée par le tribunal administratif de Rouen, ainsi que les intérêts afférents. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est rejetée. Article 2 : L'Etat versera à la SARL Heurtaux Investissements une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la SARL Heurtaux Investissements. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 29 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : B. BaillardLe président de la formation de jugement, Signé : M. A... La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA00982 1 3 N°"Numéro"
JADE/CETATEXT000046519779.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite. Par un jugement n° 2101687 du 26 avril 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil après avoir admis Mme A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, et enfin, a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Procédure devant la Cour : I - Par une requête enregistrée le 21 mai 2021 sous le n° 21PA02774, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2101687 du 26 avril 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil ; 2°) de rejeter la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Montreuil. Il soutient que : - c'est à tort que le premier juge a retenu le moyen tiré de ce que Mme A... bénéficiait du droit de se maintenir sur le territoire en application de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - les autres moyens soulevés par Mme A... en première instance ne sont pas fondés. Par un mémoire, enregistré le 15 juillet 2022, Mme A..., représentée par Me Goujon, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour : 1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ; 2°) de confirmer le jugement du 26 avril 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Elle soutient que : - à la date du jugement attaqué, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'avait pas justifié de la notification de l'ordonnance par laquelle la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) avait rejeté sa demande d'asile, le pli ayant été adressé à une adresse postale alors même qu'elle résidait avec son époux à une nouvelle adresse qu'elle ne pensait pas devoir communiquer urgemment aux services préfectoraux ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut de motivation et d'examen particulier de sa situation ; - elle a été prise en méconnaissance du principe général du droit à être entendu défini à l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet ayant méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant en situation de compétence liée par les décisions prises par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et par la CNDA ; - elle méconnaît les articles L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ; - elle est illégale par voie d'exception en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire sur laquelle elle se fonde. Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 août 2022. II - Par une requête, enregistrée le 11 juin 2021 sous le n° 21PA03246, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 2101687 du 26 avril 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil. Il soutient que les conditions fixées par l'article R. 811-15 du code de justice administrative sont en l'espèce remplies. La requête a été communiquée à Mme A... qui n'a pas produit d'observation. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - la convention internationale des droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - et les observations de Me Goujon, représentant Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., ressortissante bangladaise née le 24 mars 1994, a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'OFPRA, par une décision du 20 janvier 2020, confirmée par une ordonnance de la CNDA du 13 novembre 2020 notifiée le 20 novembre 2020. Par un arrêté du 15 janvier 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Par la présente requête, le préfet de la Seine-Saint-Denis relève régulièrement appel du jugement n° 2101687 du 26 avril 2021 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, et enfin, a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Le préfet de la Seine-Saint-Denis demande, en outre, à la Cour d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement. 2. Les requêtes susvisées nos 21PA02774 et 21PA03246, présentées par le préfet de la Seine-Saint-Denis, tendent respectivement à l'annulation et au sursis à l'exécution du même jugement du 26 avril 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt. Sur la requête n° 21PA02774 : Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle : 3. Par une décision du 8 août 2022, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a admis Mme A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, il n'y a pas lieu d'accorder à Mme A... le bénéfice d'une admission provisoire à l'aide juridictionnelle. Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal : 4. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...). ". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code, dans sa version applicable : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci (...). ". Aux termes du III de l'article R. 723-19 dudit code, dans sa version applicable : " La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office et est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire. ". 5. Pour annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 15 janvier 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a accueilli le moyen tiré de ce qu'en l'absence de production en défense, il n'était pas établi que la CNDA ait statué sur le recours de Mme A... et, par suite, que son droit au maintien sur le territoire avait pris fin en application des dispositions alors codifiées à L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, il ressort de la fiche Telemofpra versée pour la première fois en appel par le préfet de la Seine-Saint-Denis et qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, en application des dispositions précitées de l'article R. 723-19 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que l'ordonnance par laquelle la CNDA a rejeté, le 13 novembre 2020, le recours présenté par Mme A... à l'encontre de la décision du 20 janvier 2020 de l'OFPRA, a été notifiée à l'intéressée le 20 novembre 2020, préalablement à l'édiction de l'arrêté du 15 janvier 2021. Dès lors, le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir qu'à la date de l'arrêté en litige, Mme A... ne justifiait plus du droit de se maintenir sur le territoire français, et que c'est à tort que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté au motif qu'il aurait été pris en méconnaissance des dispositions alors codifiées à l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 6. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A... devant le tribunal administratif de Montreuil et devant la Cour. Sur les autres moyens soulevés en première instance : En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français : 7. En premier lieu, par un arrêté n° 2020-0665 du 16 mars 2020, régulièrement publié le même jour au bulletin d'informations administratives, le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné délégation à Mme D... E..., signataire de l'arrêté contesté et cheffe du bureau de l'asile, à l'effet de signer les décisions dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figurent les décisions en litige, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'auraient pas été absentes ou empêchées. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions en litige doit par suite être écarté. 8. En deuxième lieu, aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) ". 9. L'arrêté du 15 janvier 2021, qui vise notamment l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il est fait application et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, indique que la demande d'asile présentée par Mme A... a été rejetée par l'OFPRA et la CNDA aux dates précisées au point 1 du présent arrêt. L'arrêté comporte également l'appréciation du préfet selon laquelle, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme A... au respect de sa vie privée et familiale et cette dernière n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Ainsi, la décision attaquée qui n'avait pas à reprendre l'ensemble des éléments propres à la situation de l'intéressée, comporte un énoncé suffisamment précis des considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde la mesure d'éloignement et répond aux exigences de motivation posées par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté. 10. En troisième lieu, si le moyen tiré de la violation de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne est inopérant au soutien des conclusions présentées par Mme A..., il ressort de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Ce droit ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause. 11. Dans le cas prévu aux dispositions alors codifiées au 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise après que la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger, ce dernier ne saurait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande, il pourra, si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire lui ont été définitivement refusés, faire l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire français. Il lui appartient ainsi, lors du dépôt de sa demande d'asile, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles, et notamment celles de nature à permettre à l'administration d'apprécier son droit au séjour au regard d'autres fondements que celui de l'asile. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de la reconnaissance de la qualité de réfugié, n'impose pas à l'autorité administrative de le mettre à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise en conséquence du refus définitif de reconnaissance de la qualité de réfugié. 12. En l'espèce, si Mme A... soutient qu'elle n'a pas été mise en mesure de présenter ses observations avant l'intervention de la décision portant obligation de quitter le territoire français, cette mesure fait suite au rejet par la CNDA de sa demande d'asile. Or, ainsi qu'il vient d'être dit, dans un tel cas, aucune obligation d'information préalable ne pèse sur le préfet. Au demeurant, et alors que Mme A... a été entendue par l'OFPRA dans le cadre de l'examen de sa demande d'asile, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux, ni qu'elle aurait été empêchée de présenter ses observations, si elle l'avait souhaité, avant que ne soit prise la décision litigieuse. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée du droit d'être entendue qu'elle tient du principe général du droit de l'Union. 13. En quatrième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté rappelé au point 9, ni des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'était pas tenu de faire état de tous les éléments relatifs à la situation de Mme A..., aurait entaché sa décision d'un défaut d'examen de la situation personnelle de l'intéressée ou se serait estimé en situation de compétence liée par les décisions prises par l'OFPRA et par la CNDA, avant de prendre l'arrêté attaqué. 14. En cinquième lieu, pour les motifs indiqués au point 5, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur de droit au motif qu'elle bénéficiait du droit de se maintenir sur le territoire français à la date de l'arrêté attaqué faute de notification de la décision de la CNDA. 15. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...). ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". 16. Si Mme A... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis le mois de septembre 2018 et fait valoir son projet de mariage avec un compatriote réfugié statutaire dont elle attend un enfant, elle ne justifie pas l'ancienneté de la communauté de vie dont elle se prévaut depuis le mois de mars 2019 par la seule production de photographies et ne démontre pas qu'à la date de l'arrêté attaqué, elle avait durablement établi le centre de ses intérêts privés et familiaux en France, compte tenu du caractère extrêmement récent, à la date du 15 janvier 2021, des démarches administratives entreprises en vue de la célébration de son union. Par suite, il ne ressort ni des éléments tenant à sa situation personnelle qui viennent d'être énoncées, ni de la durée de son séjour sur le territoire qui n'excède pas vingt-huit mois à la date de l'arrêté en litige, que le préfet de la Seine-Saint-Denis ait porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme A... au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour le même motif, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement prise à l'encontre de Mme A... sur sa situation personnelle. Ces moyens doivent par suite être écartés. 17. En septième lieu, les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, relatives à l'admission exceptionnelle au séjour, ne prévoient pas la délivrance de plein droit d'un titre de séjour. Dès lors, Mme A... ne peut utilement s'en prévaloir pour contester la légalité de la mesure d'éloignement prise à son encontre. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté. 18. En dernier lieu, Mme A... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, en vertu desquelles dans toutes les décisions qui concernent les enfants, l'intérêt supérieur de ceux-ci doit être pris en considération, dès lors que son enfant n'est pas né à la date de l'arrêté contesté. En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi : 19. En premier lieu, la décision contestée vise notamment les dispositions des articles L. 513-1 à L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, rappelle la nationalité de Mme A... et précise qu'elle n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou dans son pays de résidence habituelle. Par suite, la décision litigieuse comporte les considérations de droit et de fait qui la fondent et est suffisamment motivée. 20. En deuxième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire n'étant entachée d'aucune illégalité pour les motifs précédemment énoncés, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, doit en conséquence être écarté. 21. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains et dégradants. ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile (...). / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". 22. Si Mme A... soutient que son retour au Bangladesh l'expose à un risque de subir des traitements inhumains et dégradants et s'en rapporte à des publications présentant un caractère général sur la situation des femmes au Bangladesh, émanant en particulier de l'organisation non gouvernementale Odhikar ou à un rapport de mission de la CNDA et de l'OFPRA de 2010, elle n'assortit ses allégations d'aucune précision, ni d'aucune pièce justificative susceptible d'établir les risques actuels et personnels qu'elle encourrait en cas de retour dans son pays d'origine, alors même que sa demande d'asile a été définitivement rejetée le 13 novembre 2020. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté. 23. En dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 18 du présent arrêt. 24. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 15 janvier 2021 obligeant Mme A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, lui a enjoint de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, et enfin, a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu en conséquence d'annuler les articles 2, 3 et 4 de ce jugement et de rejeter les conclusions de la demande de Mme A... auxquelles il a été fait droit en première instance. 25. Il résulte de ce qui précède que la demande présentée par Mme A... au titre des frais liés à l'instance doit également être rejetée. Sur la requête n° 21PA03246 : 26. La Cour se prononçant, par le présent arrêt, sur la requête n° 21PA02774 du préfet de la Seine-Saint-Denis tendant à l'annulation dans son ensemble du jugement du 26 avril 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil, il n'y a plus lieu de statuer sur la requête n° 21PA03246 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis sollicitait de la Cour le sursis à exécution de ce jugement. D E C I D E : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire de Mme A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 21PA03246 du préfet de la Seine-Saint-Denis. Article 3 : Le jugement n° 2101687 du 26 avril 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil est annulé. Article 4 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Montreuil est rejetée. Article 5 : La demande de Mme A... présentée au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejetée. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Mme C... A.... Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis. Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président, - Mme Boizot, première conseillère, - Mme Lorin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 28 octobre 2022. La rapporteure, C. B... Le président, S. CARRERE La greffière, C. DABERT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 Nos 21PA02774, 21PA03246
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) La Grange de Fontenay a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 30 avril 2016, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1903674 du 24 août 2020, le tribunal administratif de Rouen a prononcé la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige et a mis à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par la SARL La Grange de Fontenay et non compris dans les dépens. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 octobre 2020 et le 9 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de remettre à la charge de la SARL La Grange de Fontenay les rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont la décharge a été prononcée par le tribunal administratif de Rouen. Il soutient que : - les premiers juges, pour prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, ont estimé à tort que les locations consenties par la SARL La Grange de Fontenay à ses clients portaient sur des locaux nus, alors que les locaux étaient, durant la période vérifiée, mis à disposition avec les aménagements nécessaires à leur exploitation en tant que salles de réception ; en effet, la SARL La Grange de Fontenay imposait à ses clients, en vertu des stipulations du contrat conclu avec chacun d'eux, de recourir à l'un des traiteurs figurant sur une liste limitative préétablie, jointe au dossier de réservation remis à la clientèle ; ces traiteurs, liés par convention avec la SARL La Grange de Fontenay, versaient à celle-ci, pour chaque contrat conclu avec un locataire du site, une commission correspondant à une part fixe, s'élevant généralement à 10 % du montant facturé à chaque client, en contrepartie de l'usage des locaux ; ainsi, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, d'une part, la relation nouée entre chaque client et le traiteur n'était pas indépendante du contrat de location, d'autre part, les clients de la SARL La Grange de Fontenay n'étaient, dans les faits, pas libres de choisir ou non de faire appel à un traiteur ; en outre, des indices concordants relevés par le service permettent d'établir que la SARL La Grange de Fontenay proposait à ses clients, dans le prolongement de sa pratique antérieure telle qu'elle avait été constatée à l'occasion d'une précédente vérification de sa comptabilité, de prendre en location les tables, chaises et le mobilier nécessaires à chaque événement, ces matériels étant mis, sur place, à la disposition des clients ; - dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause le régime d'exonération de taxe sur la valeur ajoutée, prévu en faveur de la location de locaux nus par le 2° de l'article 261 D du code général des impôts, sous lequel la SARL La Grange de Fontenay avait entendu placer, durant la période vérifiée, la location de ses locaux ; - pour les motifs exposés dans les écritures produites au nom de l'Etat devant les premiers juges, les autres moyens soulevés par la SARL La Grange de Fontenay devant le tribunal administratif de Rouen, dont la cour se trouverait saisie par l'effet dévolutif de l'appel, ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 décembre 2020, la SARL La Grange de Fontenay, représentée par Me Dhalluin, conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - comme l'a estimé à bon droit le tribunal administratif, ses locaux étaient, durant la période vérifiée, donnés en location sans les aménagements et équipements nécessaires à leur exploitation commerciale, les prestations annexes utiles n'étant pas incluses dans le contrat de location conclu avec ses clients mais faisant l'objet d'un contrat indépendant et distinct, de sorte que le bénéfice, pour ces locations, du régime d'exonération, prévu en faveur de la location de locaux nus par le 2° de l'article 261 D du code général des impôts, a été remis en cause à tort par l'administration ; en effet, chaque client avait la possibilité, et non l'obligation, de commander des prestations à un traiteur ; le fait qu'elle impose de choisir ceux-ci sur une liste préétablie, qui s'enrichit d'ailleurs chaque année, aux seules fins de garantir un niveau de qualité des prestations et de préserver sa réputation, ainsi que le bon usage et la conservation de ses équipements de cuisine, est sans incidence sur le caractère facultatif du recours à un traiteur ; la relation contractuelle nouée entre chaque client et le traiteur choisi est indépendante et distincte du contrat de location des locaux, sans qu'ait d'incidence le versement, par le traiteur, d'une commission assise sur les propres recettes de celui-ci ; de même, ses clients étaient libres d'utiliser, pour l'organisation de leur réception, soit les tables et chaises en matière plastique qu'elle mettait à leur disposition, soit le mobilier proposé à la location par une société partenaire, soit leur propre matériel ou celui mis à disposition par les traiteurs ou par un tiers ; ainsi, la prestation annexe de mise à disposition du mobilier était indépendante et distincte de la location des locaux et laissée au seul choix des locataires ; - les autres moyens soulevés dans la demande qu'elle a présentée devant le tribunal administratif de Rouen sont fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société à responsabilité limitée (SARL) La Grange de Fontenay, qui a son siège à Fontenay-en-Vexin (Eure), a pour objet la gestion et l'exploitation des locaux et des dépendances de la propriété dénommée La Grange de Fontenay, qui appartient à la société civile immobilière (SCI) La Grange de Fontenay et qui est située sur le territoire de cette commune. La SARL La Grange de Fontenay propose à la location, en vue de l'organisation d'événements familiaux, principalement des mariages, mais aussi de séminaires ou colloques d'entreprise, une salle de réception d'une surface de 270 m², d'une capacité d'accueil de 250 personnes assises, ainsi qu'une grange aménagée en " espace cocktails " d'une capacité d'accueil de 350 personnes. Ces locaux sont situés dans un parc de quatre hectares incluant un parc de stationnement d'une centaine de places et comprennent une salle de préparation aménagée à l'usage des traiteurs, ainsi qu'un gîte d'une capacité d'accueil de 40 couchages. La SARL La Grange de Fontenay a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, étendue au 30 avril 2016 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Au cours de ce contrôle, le vérificateur a constaté que les seules opérations ayant donné lieu, durant la période vérifiée, à la comptabilisation de taxe sur la valeur ajoutée collectée consistaient en la perception de commissions versées par les traiteurs ayant fourni des prestations sur le site, ainsi que par quelques prestataires annexes, tels ceux chargés de l'animation des soirées. Dans le même temps, il est apparu au vérificateur que la location des lieux par la SARL La Grange de Fontenay à ses clients avait été placée sous le régime d'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévu en faveur des locations de locaux nus par le 2° de l'article 261 D du code général des impôts. Les éléments d'information portés à la connaissance du vérificateur, au cours du contrôle, l'ont conduit à estimer que les locations en cause ne portaient pas exclusivement sur des locaux nus et, en conséquence, à remettre en cause le bénéfice de ce régime d'exonération. La SARL La Grange de Fontenay a été informée, par une proposition de rectification qui lui a été adressée le 30 septembre 2016, des rectifications ainsi envisagées. Celles-ci ont été maintenues malgré les observations formulées par la société. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant des rectifications notifiées ont été mis en recouvrement le 31 janvier 2017 à hauteur des sommes de 46 485 euros en droits, 3 345 euros en intérêts de retard et 18 594 euros en pénalités, soit une somme totale de 68 424 euros. 2. Sa réclamation ayant été rejetée, la SARL La Grange de Fontenay a porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen en lui demandant, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, et des pénalités correspondantes, auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 30 avril 2016, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement du 24 août 2020, le tribunal administratif de Rouen a prononcé la décharge, en droits et pénalités, de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée et a mis à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par la SARL La Grange de Fontenay et non compris dans les dépens. Le ministre de l'action et des comptes publics, qui relève appel de ce jugement, demande à la cour d'en prononcer l'annulation et de remettre à la charge de la SARL La Grange de Fontenay les rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont la décharge a été prononcée par le tribunal administratif de Rouen. 3. En vertu du I. de l'article 256 du code général des impôts, les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée. En outre, le c) du 2. de l'article 269 de ce code dispose que, pour les prestations de services, la taxe est exigible lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. Toutefois, le 2° de l'article 261 D du même code exonère de la taxe sur la valeur ajoutée les locations de terrains non aménagés et de locaux nus, à l'exception des emplacements pour le stationnement des véhicules. Ce même 2° précise que ces dispositions ne sont pas applicables lorsque les locations constituent pour le bailleur un moyen de poursuivre, sous une autre forme, l'exploitation d'un actif commercial ou d'accroître ses débouchés ou lorsque le bailleur participe aux résultats de l'entreprise locataire. 4. Doit être regardée comme une location de locaux nus, au sens des dispositions du 2° de l'article 261 D du code général des impôts, celle qui porte sur des locaux qui ne sont pas pourvus des aménagements nécessaires, c'est-à-dire de ceux sans lesquels l'exploitation commerciale à laquelle ils sont destinés n'est pas possible. A l'exception des cas, qui ne sont pas celui de l'espèce, où, eu égard à la procédure d'imposition mise en œuvre, la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si une entreprise contribuable remplit les conditions légales d'une exonération. 5. Il résulte de l'instruction que la SARL La Grange de Fontenay, durant la période vérifiée, proposait à sa clientèle de prendre en location ses locaux et leurs dépendances en vue de la réalisation d'événements privés ou de séminaires d'entreprise. Les stipulations des contrats qu'elle proposait, à cette fin, à ses clients, dont un exemplaire type a été produit à l'instruction, énoncent ainsi, à l'article 3, que le loueur met à disposition du locataire les locaux suivants : une entrée principale, une salle de réception dite " Sucrerie ", des toilettes accessibles aux personnes handicapées, une douche, une nurserie, un vestiaire, un local avec serrure à code, une mezzanine ouverte sur la salle de réception " Sucrerie ", une réserve destinée à l'entreposage des boissons, la salle dite " Pommeraie " ouverte sur l'extérieur avec un sas, ainsi que des locaux de service dont l'accès est réservé exclusivement au traiteur et sous sa responsabilité. L'article 4 des mêmes contrats précise que la location comprend, en outre, la fourniture de l'eau froide et de l'eau chaude, du papier toilette, de l'électricité et du chauffage, et qu'elle inclut une prestation de nettoyage des locaux. Le même article ajoute que la location n'inclut cependant aucun mobilier ni matériel. Par ailleurs, l'article 5 des mêmes contrats stipule qu'il convient que le locataire contacte directement les traiteurs exclusifs référencés dans la liste fournie par le loueur pour l'organisation de la réception. Le même article précise que le loueur n'acceptera pas de traiteur hors liste et que toute réception alimentaire devra être effectuée par l'un des traiteurs référencés par le loueur, y compris les lendemains de réception. Il ajoute que, pour des raisons de sécurité, le traiteur devra être présent pendant toute la durée de la réception, et qu'il assurera la fermeture de la salle " Sucrerie ", le site ne pouvant en aucun cas faire l'objet d'une location sans la présence d'un responsable de salle et de service, ainsi que du personnel de service désigné par le traiteur ou par le loueur. Enfin, l'article 8 des mêmes contrats comporte une clause voisine, selon laquelle le locataire devra faire appel, pour l'animation des réceptions, aux prestataires référencés sur la liste fournie par le loueur. 6. L'appréciation, au regard des règles fiscales, des conditions d'exercice, par la SARL La Grange de Fontenay, durant la période vérifiée, de son activité ne saurait se fonder sur les seules stipulations contractuelles énoncées au point précédent. Ainsi, s'il résulte de ces stipulations que, comme l'a relevé le tribunal administratif, les clients de la SARL La Grange de Fontenay n'étaient pas contractuellement contraints de faire appel aux services d'un traiteur, sauf s'ils se proposaient de servir des denrées alimentaires à leurs invités, il n'est toutefois pas établi que, pour les besoins d'événements justifiant la location de locaux dédiés à l'organisation de réceptions incluant, par nature, le service d'un cocktail, voire des prestations de restauration, certains des clients de la SARL La Grange de Fontenay se soient abstenus de recourir aux professionnels inclus sur la liste imposée par cette société, qui n'apporte d'ailleurs aucun élément au soutien de ses allégations contraires. En outre, il résulte de l'instruction que chacun des traiteurs, portés sur la liste établie par la SARL La Grange de Fontenay, sollicités par la clientèle de cette société était tenu, en application d'un contrat conclu avec cette dernière, de lui verser, en contrepartie de leur maintien sur la liste des traiteurs agréés pour intervenir sur le site et utiliser les locaux, une commission représentant une part fixe, s'élevant le plus souvent à 10 %, du montant des prestations réalisées dans ces locaux et facturées par lui à son client, les sommes facturées au titre de la mise à disposition du personnel étant généralement non comprises. Ainsi et contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, la relation contractuelle nouée entre le traiteur et son client n'était pas sans lien avec les locations consenties par la SARL La Grange de Fontenay, dès lors que celle-ci était intéressée au chiffre d'affaires réalisé, dans ses locaux, par le traiteur auquel elle était elle-même contractuellement liée. 7. Il résulte, par ailleurs, de l'instruction que, dans le but d'appréhender l'étendue des prestations associées aux locations de locaux consenties par la SARL La Grange de Fontenay, le service avait, dans le cadre d'une précédente vérification de comptabilité réalisée en 2013, pris l'attache d'anciens clients qui avaient organisé des événements familiaux dans les salles de réception proposées par cette société. Il ressort des réponses concordantes ainsi adressées à l'administration, dont la teneur est reprise dans la proposition de rectification établie le 30 septembre 2016, que la SARL La Grange de Fontenay avait pour habitude, jusqu'au 31 juillet 2015, d'inciter ses clients à prendre en location, auprès d'une tierce société, la société par actions simplifiée (SAS) Locarial, qui était dirigée par ses propres associés et qui avait pour objet social la location de mobilier et équipements destinés aux espaces de réception, les tables, chaises et autres mobiliers nécessaires à l'organisation des réceptions, lesquels, composés de plusieurs modèles assortis, étaient d'ailleurs stockés dans une dépendance des salles de réception. La SARL La Grange de Fontenay informait aussi sa clientèle qu'elle était à même, à défaut ou en complément, de leur fournir une quarantaine de chaises en matière plastique, ainsi que les tables associées à celles-ci. Si, comme l'a relevé le tribunal administratif, le recours au mobilier proposé à la location par la SAS Locarial, à laquelle a succédé, à compter du 31 juillet 2015, la SARL Your Event Service, constituée par deux anciennes associées de la SARL La Grange de Fontenay, n'était pas imposé par cette dernière à ses clients, ainsi qu'il en était des matériels lui appartenant, la proposition systématique à ceux-ci de faire appel aux prestations offertes par la SAS Locarial puis par la SARL Your Event Service, avec lesquelles elle était liée par une communauté d'intérêts, associait, en réalité, ces prestations accessoires à la prestation principale de mise à disposition des locaux. Plusieurs anciens clients ont d'ailleurs indiqué au service que la mise à disposition du mobilier n'avait pas fait l'objet d'une facturation distincte, mais qu'elle leur avait été présentée comme assurée par la SARL La Grange de Fontenay, et qu'elle avait donné lieu, sur la demande de cette dernière, à un règlement en espèces. Ainsi, la dissociation de la location et de la prestation de mise à disposition du mobilier nécessaire aux réceptions, d'une part, n'était pas systématique durant la période vérifiée, d'autre part, reposait sur une répartition artificielle, entre des entités liées par une forte communauté d'intérêts, de la même activité de location de salles de réception. 8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6 et 7 que la SARL La Grange de Fontenay doit être regardée comme ayant exercé, au cours de la période vérifiée, une activité de location de locaux pourvus des aménagements et équipements nécessaires à leur exploitation commerciale, d'une part, en raison de son intéressement direct à l'activité des traiteurs liés contractuellement avec elle et dont le concours était, par nature, inhérent à son activité de mise à disposition de salles de réception, d'autre part, en raison des liens étroits qu'elle entretenait avec les principaux fournisseurs des mobiliers nécessaires à la tenue des réceptions organisés dans ses locaux par ses clients. Le ministre de l'action et des comptes publics est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen, pour prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, a retenu que l'administration n'avait pu, en l'espèce, remettre en cause le bénéfice du régime d'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévu en faveur des locations de locaux nus par le 2° de l'article 261 D du code général des impôts. 9. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par la SARL La Grange de Fontenay devant le tribunal administratif de Rouen. Sur la régularité de la procédure d'imposition : 10. En vertu de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. 11. Il ressort des termes de la proposition de rectification adressée le 30 septembre 2016 à la SARL La Grange de Fontenay que celle-ci précise les impôts ainsi que les périodes et exercices concernés par les rectifications envisagées, et comporte l'énoncé des motifs de droit et de fait justifiant ces rectifications. En particulier, si, pour les besoins de sa démonstration, le vérificateur s'est référé, dans la proposition de rectification, à des extraits d'une précédente proposition de rectification, adressée le 11 décembre 2013 à la SARL La Grange de Fontenay à l'issue d'une vérification de comptabilité dont celle-ci avait fait l'objet au titre d'une période antérieure, en reproduisant ces extraits qui reprennent la teneur des réponses apportées au service par d'anciens clients ayant fait appel à la SARL La Grange de Fontenay pour l'organisation d'événements familiaux, ces mentions, qui ont mis la contribuable à même de contester la position de l'administration, et que le vérificateur a complétées par le constat de ce qu'aucun des éléments portés à sa connaissance ne l'avait conduit à estimer que la SARL La Grange de Fontenay avait adopté des modalités d'exploitation différentes depuis le précédent contrôle, constituent une motivation suffisante au regard de l'exigence posée par les dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. Sur les pénalités : 12. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ". 13. Pour justifier l'application aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration a retenu, selon les termes de la proposition de rectification qu'elle a adressée à la SARL La Grange de Fontenay le 30 septembre 2016 et du mémoire produit devant les premiers juges, que la taxe sur la valeur ajoutée, dont la collecte, au cours de la période vérifiée, avait été omise par la SARL La Grange de Fontenay à l'occasion de la réalisation des prestations de location, portait sur des sommes importantes et qu'à l'issue du précédent contrôle dont la société avait fait l'objet en 2013, l'administration lui avait déjà fait savoir que son mode de fonctionnement consistant à créer, par l'intervention de sociétés avec lesquelles elle entretenait une communauté étroite d'intérêts, une dissociation entre l'activité de location de locaux nus et celle de mise à disposition de mobiliers et d'équipements, alors qu'elle ne pouvait ignorer que ces deux activités étaient, dans les faits, intrinsèquement liées, l'avait mise en situation de bénéficier indûment d'une exonération à laquelle elle ne pouvait légalement prétendre. Ces éléments sont de nature à établir l'intention délibérée d'éluder l'impôt qui a animé la SARL La Grange de Fontenay au cours de la période vérifiée. En conséquence, c'est à bon droit que l'administration a fait application aux droits en litige de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a prononcé la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la SARL La Grange de Fontenay a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 30 avril 2016, et a mis la somme de 1 200 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le ministre est également fondé à demander que ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée, en droits et pénalités, soient remis à la charge de la SARL La Grange de Fontenay. La demande présentée par la SARL La Grange de Fontenay devant le tribunal administratif de Rouen doit donc être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1903674 du 24 août 2020 du tribunal administratif de Rouen est annulé. Article 2 : Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée établis au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 30 avril 2016, dont la décharge a été prononcée par ce jugement, sont remis, en droits et pénalités, à la charge de la SARL La Grange de Fontenay. Article 3 : La demande présentée par la SARL La Grange de Fontenay devant le tribunal administratif de Rouen est rejetée. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la SARL La Grange de Fontenay. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA01626 1 7 N°20DA01626
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1702499 du 3 février 2020, le tribunal administratif de Lille, d'une part, a prononcé la décharge, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. B... en remboursement de frais kilométriques, d'autre part, a mis une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, enfin, a rejeté le surplus des conclusions de cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 9 mars 2020, et par des mémoires, enregistré le 28 juin 2022, le 10 août 2022, le 29 août 2022 et le 6 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) de constater qu'il n'y a pas lieu de statuer à concurrence du dégrèvement de 1 551 euros prononcé, en droits et pénalités, en cours d'instance en ce qui concerne les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 2010 ; 2°) d'annuler le jugement du 3 février 2020 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge d'une partie des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige et mis la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 3°) de remettre à la charge de M. et Mme B... les suppléments d'impôt sur le revenu dont la décharge a été prononcée par le tribunal administratif de Lille, en tant qu'ils demeurent en litige s'agissant de l'année 2010 et à concurrence d'une base imposable de 17 790 euros et d'une base de prélèvements sociaux de 15 167 euros s'agissant de l'année 2011. Il soutient que : - l'administration demande que soient substituées aux dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts, sur lequel le service avait fondé les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux dont le tribunal administratif a prononcé la décharge, à titre principal, celles du c. du même article ou, à titre subsidiaire, celles du 2° du 1. de l'article 109 du même code ; une telle substitution de base légale, qui est demandée dans des termes suffisamment précis, peut être opérée, dès lors qu'elle n'a pour effet de priver les contribuables d'une garantie de procédure, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'étant, en particulier, pas compétente en matière de revenus distribués ; - ces suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux sont susceptibles de trouver leur fondement dans les dispositions du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, dès lors qu'il est établi que M. B..., unique associé et gérant statutaire de la société distributrice, la société à responsabilité limitée (SARL) E..., a appréhendé les sommes réintégrées dans ses bases imposables ; à cet égard, l'administration est fondée à se prévaloir de la présomption d'appréhension attachée à la qualité de seul maître de l'affaire, qui était celle de M. B... au cours de la période vérifiée, dès lors qu'il était le seul à pouvoir librement disposer, en toute autonomie et sans contrôle, des fonds sociaux ; par ailleurs, les sommes inscrites, comme en l'espèce, au crédit d'un compte courant d'associé ouvert dans la comptabilité d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé et ont, même dans le cas d'une erreur involontaire, le caractère de revenus distribués imposables entre ses mains sur le fondement du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ; - les sommes en cause, inscrites sur le compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E... en tant que remboursement de frais professionnels et au sujet desquels l'intéressé n'a fourni que des justifications insuffisantes, insusceptibles d'établir la réalité ou le caractère professionnel des déplacements mentionnés, que l'intéressé a pu aussi accomplir pour les besoins de l'activité de l'autre société dont il est le gérant et qui lui a versé des indemnités kilométriques, ont également la nature d'avantages occultes imposables sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts ; le kilométrage déclaré pour le calcul des frais de déplacements que M. B... aurait effectués pour le compte de la SARL E... est d'ailleurs incompatible, en tenant compte des trajets pris en compte par l'autre société, avec la distance parcourue, au cours des deux années en cause, par le véhicule personnel de marque allemande de l'intéressé, telle qu'elle ressort des factures d'entretien fournies, alors qu'aucune facture d'entretien n'a été fournie pour l'autre véhicule que M. B... aurait également utilisé au cours de l'année 2010 et que l'intéressé n'a fourni aucun élément concernant l'utilisation privée de ces véhicules ; au surplus, le caractère non déductible des frais de déplacement comptabilisés par la SARL E... a été confirmé, au niveau de cette dernière, par un jugement du 3 février 2020, devenu définitif, du tribunal administratif de Lille ; - en vertu du principe de l'indépendance des procédures, le moyen tiré de ce que les suppléments d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la SARL E... ont été établis à l'issue d'une procédure irrégulière est inopérant ; - en tant que seul maître de l'affaire, M. B... est réputé avoir appréhendé les sommes portées en comptabilité, par la SARL E..., en tant que charges et dont la déductibilité des résultats imposables de cette société a, pour les motifs exposés dans les écritures produites au nom de l'Etat en première instance, été remise en cause à bon droit, le service était donc fondé à imposer entre ses mains ces sommes, qui ne sont pas demeurées investies dans la société, sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ; - dans le cadre de la vérification de comptabilité dont la SARL E... a fait l'objet, le service vérificateur a constaté que le compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de cette société présentait, à la clôture de l'exercice 2011, un solde débiteur de 4 685,54 euros, tandis que ce solde était créditeur de 12,38 euros à l'ouverture de cet exercice ; la variation positive de ce solde, soit 4 673,16 euros, a été regardée à bon droit comme correspondant à des revenus distribués imposables, entre les mains de M. B..., sur le fondement du a. de l'article 111 du code général des impôts ; si M. et Mme B... invoquent un remboursement du solde de ce compte et se prévalent, à cet égard, de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20, en son paragraphe n°190, ils n'apportent, en tout état de cause, aucun élément de nature à justifier du remboursement effectif de la somme en cause, les pièces produites par eux ne permettant pas de justifier du solde du compte courant de M. B... au 12 avril 2013, ni, a fortiori, au 29 août 2013, date à laquelle la SARL E... a reçu l'avis de vérification qui lui avait été adressé le 27 août 2013 ; - il y a lieu de tirer les conséquences de ce que la majoration d'assiette de 25 % prévue au 2° du 7. de l'article 158 du code général des impôts n'est pas applicable en matière de prélèvements sociaux. Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2022, et par des mémoires enregistrés les 4 et 28 août 2022, M. et Mme B..., représentés par Me Guey, concluent au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement attaqué, en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction ; ils demandent également que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la demande de substitution de base légale présentée par le ministre n'est pas recevable, dès lors que la base proposée n'est pas définie avec une précision suffisante, l'administration ne pouvant concurremment invoquer deux fondements légaux ; - si elle était opérée, la substitution de base légale sollicitée par l'administration conduirait à les priver de la possibilité de restitution prévue par les dispositions sur lesquelles les suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux dont la décharge a été prononcée par le tribunal administratif étaient fondés, à savoir les dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts ; elle les priverait, en outre, du bénéfice de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20, qui énonce, en son paragraphe n°190, que, lorsque l'administration découvre qu'une avance taxable a été intégralement remboursée, on peut admettre, à titre de règle pratique, qu'il n'y a pas eu de distribution de revenus s'il apparaît que le remboursement a été opéré à une date antérieure à celle de la réception, par la société, de l'avis de vérification ou, en cas de contrôle inopiné, antérieurement au passage du vérificateur ; - il incombe à l'administration de justifier de l'homologation, par une autorité compétente, des rôles émis pour le recouvrement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 ; or, il n'est pas établi que les rôles ont été signés par une autorité compétente ; - l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce que les déplacements professionnels ayant donné lieu aux remboursements servis à M. B... et déduits des résultats imposables de la SARL E... ont été pris en charge par l'autre société dont l'intéressé est le gérant ; l'administration n'établit pas davantage que les clients figurant sur la liste qu'il a fourni étaient aussi des clients de cette dernière ; l'administration ne démontre pas non plus la discordance entre les éléments fournis par eux et les sommes portées en déduction par la SARL E... ; - la procédure d'imposition mise en œuvre à l'égard de la SARL E... est irrégulière en ce qui concerne l'exercice clos en 2010, en ce que l'administration a mis à tort en œuvre la procédure de taxation d'office, de sorte que les sommes dont la déduction des résultats de cette société a été remise en cause ne pouvaient pas être regardées comme imposables, en tant que revenus distribués, entre les mains de M. B..., sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ; - en tout état de cause, les charges dont la déductibilité par la SARL E... a été remise en cause ne pouvaient légalement être regardées comme correspondant à des revenus imposables sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ; - les sommes imposées en tant que revenus distribués sur ce même fondement, qui, en vertu de l'article 110 du même code, s'entendent des sommes retenues pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés, ne peuvent, en toute hypothèse, être supérieures aux rehaussements notifiés à la SARL E... ; - la base d'imposition aux prélèvements sociaux a été, en ce qui concerne les années 2010 et 2011, majorée à tort de 25 % ; - ils sont fondés à invoquer le bénéfice de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20, en son paragraphe n°190, pour soutenir que l'accroissement du solde débiteur du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E... ne peut être regardé comme correspondant à des revenus distribués imposables sur le fondement du a. de l'article 111 du code général des impôts, dès lors que les sommes en cause ont été intégralement remboursées, comme ils en justifient ; - la somme de 1 172,86 euros dont la déduction par la SARL E... a été remise en cause par l'administration correspond à des charges locatives déductibles ; il en est de même de la somme de 797,33 euros, qui correspond à une dépense publicitaire ; par ailleurs, la somme de 107,40 euros correspond à un don. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, - les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Guey, représentant M. et Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. M. D... B... détient l'intégralité des parts sociales de la société à responsabilité limitée (SARL) E..., dont il est le gérant statutaire et qui exerce une activité de gestion de biens. Cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012. A l'issue de ce contrôle, l'administration a fait connaître à cette société, par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 18 décembre 2013, qu'elle envisageait de rectifier, sur plusieurs points, ses recettes taxables et ses résultats imposables. Parallèlement, l'administration a estimé que M. B... avait bénéficié, de la part de cette société, de revenus distribués imposables entre ses mains dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Par une proposition de rectification adressée le 18 décembre 2013 à M. et Mme B..., l'administration leur a fait connaître le rehaussement des revenus imposables de leur foyer fiscal qu'elle envisageait, en conséquence de la réintégration des sommes correspondantes. Les observations présentées par M. et Mme B... n'ayant pas convaincu l'administration, les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant, pour les années 2010 et 2011, des rehaussements notifiés ont été mis en recouvrement le 30 juin 2014 à hauteur d'une somme totale de 27 811 euros, en droits et pénalités. M. B... a présenté une réclamation, qui a été partiellement admise par l'administration, qui a prononcé, à concurrence d'une somme de 4 499 euros en droits et pénalités, le dégrèvement des suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux contestés par l'intéressé. 2. Insatisfaits de cette issue partielle, M. et Mme B... ont porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement du 3 février 2020, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, a prononcé la décharge, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. B... et présentées comme des remboursements de frais kilométriques, d'autre part, mis une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, enfin, rejeté le surplus des conclusions de cette demande. 3. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement en tant qu'il prononce la décharge d'une partie des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige et qu'il met la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. et Mme B... demandent, par la voie de l'appel incident, l'annulation du même jugement, en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction. Sur l'étendue du litige : 4. Par une décision du 29 juin 2022, intervenue en cours d'instance d'appel, le directeur régional des finances publiques des Hauts-de-France a prononcé un dégrèvement, à concurrence de la somme de 1 551 euros, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 2010. Le litige d'appel a, dans cette mesure, perdu son objet. Dès lors, il n'y a pas lieu, dans la même mesure, de statuer sur les conclusions de M. et Mme B... à fin de décharge des impositions et contributions dont l'administration leur a ainsi accordé la décharge. Sur la requête du ministre : 5. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes. / Nonobstant toutes dispositions contraires, lorsque ces sommes sont remboursées (...) à la personne morale qui les avait versées, la fraction des impositions auxquelles leur attribution avait donné lieu est restituée aux bénéficiaires ou à leurs ayants cause dans des conditions et suivant des modalités fixées par décret ; / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; / (...) ". 6. Pour prononcer, par le jugement attaqué, la décharge, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites, en tant que remboursement de frais professionnels, au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E..., le tribunal administratif a estimé, d'office, que l'imposition de ces sommes, qui n'avaient pas la nature d'avances, de prêts ou d'acomptes, ne pouvait trouver son fondement dans les dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts. Au soutien des conclusions de sa requête dirigées contre ce jugement, en tant qu'il prononce cette décharge, le ministre demande que soient substituées à ces dispositions, à titre principal, celles du c. de l'article 111 du code général des impôts ou, à titre subsidiaire, celles du 2° du 1. de l'article 109 du même code. 7. La demande de substitution de base légale doit être regardée, eu égard aux termes dans lesquels elle est formulée, comme suffisamment explicite et précise, alors même qu'elle consiste à proposer, de façon alternative, deux fondements juridiques différents. Elle est, par suite, recevable et il y a, dès lors, lieu de l'examiner. 8. Au cours de la vérification de comptabilité dont la SARL E... a fait l'objet, la vérificatrice a constaté que cette société avait, au cours des exercices clos en 2010 et en 2011, mis à la disposition de M. B..., son associé et gérant, par voie d'inscription au crédit de son compte courant d'associé, diverses sommes représentant les montants totaux de 10 803,10 euros au titre de l'exercice clos en 2010 et de 9 127,92 euros au titre de l'exercice clos en 2011. Ces écritures ont eu pour contrepartie des inscriptions au débit du compte 625100 " Voyages et déplacements ", comportant un libellé faisant référence à des remboursements de frais exposés par M. B... dans le cadre de déplacements effectués pour les besoins de l'exercice de ses fonctions de gérant. Toutefois, la vérificatrice a estimé que les notes de frais produites par la SARL E..., à l'appui de ces écritures, dont les mentions étaient trop imprécises quant à l'objet de chaque déplacement, n'étaient pas de nature, même rapprochées des agendas que M. B... avait fournis au cours du débat oral et contradictoire, lesquels faisaient seulement mention, aux dates des déplacements en cause, du nom de personnes, à justifier du caractère inhérent à ses fonctions de gérant, ni d'ailleurs de la réalité, de ces déplacements. En outre, ayant eu connaissance de déplacements effectués par M. B... dans le cadre des fonctions de gérant exercées par lui au sein d'une autre société, le service a exercé son droit de communication auprès de cette dernière et a été amené à constater, au vu des éléments fournis en réponse par cette société, que celle-ci avait porté dans sa comptabilité des remboursements de frais de déplacement versés à M. B... à hauteur des montants de 19 788 euros au titre de l'exercice clos en 2010 et de 18 510 euros au titre de l'exercice clos en 2011. Enfin, M. B... a précisé, au cours du contrôle dont la SARL E... a fait l'objet, avoir effectué l'ensemble des déplacements en cause à l'aide de ses véhicules personnels et a fourni des certificats d'immatriculation correspondant à une berline de marque suédoise et à un coupé de marque allemande, en précisant qu'il avait utilisé le premier de ces véhicules jusqu'au 6 août 2010, puis l'autre à compter de cette date. Il a fourni, en outre, des factures d'entretien se rapportant exclusivement au second de ces véhicules. Or, après avoir reconstitué, à l'aide du barème kilométrique publié par l'administration, les distances correspondant aux remboursements de frais servis à M. B... par la SARL E... et par l'autre société dont l'intéressé était le gérant, le service a constaté que ces distances étaient incompatibles avec celles ressortant des factures d'entretien fournies en ce qui concerne le second véhicule, tandis qu'aucun élément ne permettait de déterminer les distances parcourues par le premier véhicule. Après avoir remis en cause, pour ces motifs, la déductibilité de ces versements, en tant que charges des exercices clos en 2010 et 2011, des résultats imposables de la SARL E..., l'administration a regardé ces mêmes sommes, mises à la disposition de M. B... par voie d'inscription sur son compte courant d'associé, comme ayant la nature de revenus distribués imposables entre ses mains. 9. M. et Mme B... contestent la remise en cause de la déductibilité de ces versements des résultats imposables de la SARL E..., en faisant valoir que les écritures comptables correspondantes étaient suffisamment justifiées, et soutiennent que c'est à tort que les sommes correspondantes ont été regardées comme ayant la nature de revenus distribués imposables au niveau de leur foyer fiscal. Toutefois, M. et Mme B... ne produisent, au soutien de leurs allégations, aucun élément probant, les déplacements mentionnés dans les notes de frais, déjà fournies au service, qu'ils versent à l'instruction, étant, pour la plupart, dépourvus de précision quant à leur lieu de destination, la seule mention d'une destination située dans le Douaisis étant insuffisante à cet égard. En outre, s'ils font état de l'utilisation, par M. B..., d'un autre véhicule leur appartenant, en précisant qu'il était assuré pour une utilisation professionnelle, ils n'apportent aucun élément de nature à leur permettre de justifier d'une utilisation effective de ce véhicule par l'intéressé pour les besoins de l'exercice de ses fonctions de gérant de la SARL E..., alors d'ailleurs que les notes de frais qu'ils ont versées à l'instruction identifient exclusivement les deux autres véhicules, mentionnés au point 8, comme ayant été utilisés pour les déplacements en cause. Enfin, il n'est pas sérieusement contesté que M. B... a perçu de l'autre société dont il était le gérant, des remboursements de frais de déplacement à hauteur des montants de 19 788 euros au titre de l'exercice clos en 2010 et de 18 510 euros au titre de l'exercice clos en 2011 et que la conversion, au moyen du barème kilométrique publié par l'administration, de ces montants en distance, aboutit, en les ajoutant à celles correspondant aux remboursements servis à M. B... par la SARL E..., à des montants excédant largement les distances parcourues, au cours de chacune des années en cause, par le véhicule de marque allemande que l'intéressé a utilisé pour effectuer la majeure partie des déplacements en cause, telles qu'elles résultent des factures d'entretien communiquées au service. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin, pour l'administration, de démontrer que les clients mentionnés sur les notes de frais produites étaient aussi clients de l'autre société ou de s'assurer que les déplacements portés sur ces fiches n'ont pas donné lieu à des remboursements concurrents de la part des deux sociétés, ce qu'aucun élément de l'instruction ne permet d'ailleurs de retenir, l'administration était fondée à écarter comme non déductibles des résultats imposables de la SARL E... les sommes versées par cette société à M. B... à titre d'indemnités kilométriques. 10. Des avantages personnels dissimulés sous couvert de remboursements de frais professionnels constituent des avantages occultes au sens du c. de l'article 111 du code général des impôts, imposables comme revenus distribués. Il en résulte que l'imposition des sommes versées par la SARL E..., à titre d'indemnités kilométriques, à M. B..., sans que ces versements soient justifiés, dans leur principe comme dans leur montant, et sans que ces avantages aient fait l'objet de la comptabilisation explicite prévue à l'article 54 bis du code général des impôts, est susceptible de trouver son fondement dans les dispositions du c. de l'article 111 du code général des impôts que le ministre demande, à titre principal, de substituer à celles du a. du même article, initialement retenues par le service. Or, une telle substitution de base légale n'a pas pour effet de priver M. et Mme B... d'une garantie de procédure accordée par la loi aux contribuables, la possibilité, en cas de remboursement des sommes distribuées, d'obtenir une restitution de l'impôt, sur le fondement des dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts, ou une décharge, en invoquant la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20, de cet impôt, ne présentant pas le caractère d'une garantie de procédure. Il y donc lieu de faire droit à cette demande de substitution de base légale. Il suit de là que le ministre est fondé à soutenir que le tribunal administratif de Lille n'a pu valablement prononcer la décharge d'une partie des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige, au seul motif que ces impositions méconnaissaient le champ d'application des dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts. 11. Toutefois, il y a lieu pour la cour, saisie, par l'effet dévolutif de l'appel, de l'ensemble du litige afférent à la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites, en tant que remboursements de frais professionnels, au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E..., d'examiner les autres moyens présentés par M. et Mme B..., tant devant le tribunal administratif de Lille que devant elle. En ce qui concerne l'homologation des rôles : 12. Aux termes de l'article 1658 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Les impôts directs et les taxes y assimilées sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet ou d'avis de mise en recouvrement. / Pour l'application de la procédure de recouvrement par voie de rôle prévue au premier alinéa, le représentant de l'Etat dans le département peut déléguer ses pouvoirs aux agents de catégorie A placés sous l'autorité des directeurs départementaux des finances publiques ou des responsables de services à compétence nationale, détenant au moins un grade fixé par décret en Conseil d'Etat. La publicité de ces délégations est assurée par la publication des arrêtés de délégation au recueil des actes administratifs de la préfecture. ". Pour l'application de ces dispositions, l'article 376-0 bis de l'annexe II à ce code précise que le grade mentionné au second alinéa de l'article 1658 du code général des impôts est celui d'administrateur des finances publiques adjoint. 13. Il résulte des éléments versés à l'instruction en appel par le ministre que les rôles émis le 28 mai 2014 pour le recouvrement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige, auxquels M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, et sur le fondement desquels ont été émis les avis d'imposition supplémentaires adressés aux contribuables, ont été rendus exécutoires le 2 juin 2014 par M. C... A..., administrateur des finances publiques adjoint. M. A... bénéficiait, comme tous les collaborateurs du directeur régional des finances publiques du Nord-Pas-de-Calais et du département du Nord ayant au moins le grade d'administrateur des finances publiques adjoint requis par les dispositions énoncées au point précédent, d'une délégation de pouvoir qui lui avait été consentie par un arrêté du 21 février 2012 du préfet de la région Nord-Pas-de-Calais, préfet du Nord, et qui a fait l'objet, conformément à l'exigence posée par le dernier alinéa de l'article 1658 du code général des impôts, d'une publication le même jour au n°45 spécial du recueil des actes administratifs de la préfecture du Nord. Dès lors, le moyen tiré par M. et Mme B... de ce que les rôles émis pour assurer le recouvrement des suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre des années 2010 et 2011 n'ont pas été régulièrement rendus exécutoires doit être écarté. En ce qui concerne l'autre moyen : 14. L'inscription d'une somme au crédit d'un compte courant d'associé ouvert au nom du contribuable dans la comptabilité d'une société dans le capital de laquelle il a souscrit implique, par elle-même, la mise à disposition, dès la clôture de l'exercice concerné, de cette somme entre les mains de ce contribuable, qui a la libre disposition de ce compte sur lequel il lui est loisible d'effectuer des prélèvements, sauf à ce qu'il démontre qu'il se trouvait dans l'impossibilité de le faire. Par suite, M. et Mme B..., qui ne se livrent pas à une telle démonstration, ne peuvent utilement soutenir que le service n'aurait pas démontré, par l'identification d'un flux financier, la mise à disposition de leur foyer fiscal des sommes inscrites, au cours des exercices clos en 2010 et 2011, en tant que remboursements de frais professionnels, au débit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E.... 15. Il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites, en tant que remboursement de frais professionnels, au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E.... Par voie de conséquence, le ministre est également fondé à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement, le tribunal administratif de Lille a mis la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sur l'appel incident : En ce qui concerne l'homologation des rôles : 16. Pour les motifs énoncés au point 13, le moyen tiré par M. et Mme B... de ce que les rôles émis pour assurer le recouvrement des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre des années 2010 et 2011 n'ont pas été régulièrement rendus exécutoires doit être écarté comme manquant en fait. En ce qui concerne la régularité de la procédure de rectification mise en œuvre à l'égard de la société : 17. En raison du principe d'indépendance des procédures de rectification menées à l'encontre, d'une part, d'une société à responsabilité limitée et, d'autre part, de ses associés, les irrégularités de la procédure de redressement suivie à l'encontre de la société à responsabilité limitée, à les supposer établies, sont sans incidence sur l'imposition personnelle des associés au titre des revenus distribués entre leurs mains au prorata de leurs droits en application des dispositions du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, alors même que l'article 110 de ce code dispose que, pour la détermination de la base assujettie à l'impôt sur le revenu, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. Il suit de là que M. et Mme B... ne peuvent utilement invoquer, au soutien de leurs conclusions tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, l'irrégularité qui affecterait la procédure de rectification mise en œuvre à l'égard de la SARL E.... En ce qui concerne les autres sommes regardées comme distribuées au titre de l'année 2010 : 18. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. / (...) ". 19. Au cours de la vérification de comptabilité dont la SARL E... a fait l'objet, la vérificatrice a constaté que celle-ci avait déduit de son résultat imposable de l'exercice clos en 2010, en tant que charges, des dépenses, représentant un montant total de 5 862 euros, dont la réalité ou l'intérêt pour l'entreprise ne lui paraissait pas établi. La société ayant apporté, à l'appui de sa réclamation, des justifications concernant la nature et l'objet de ces dépenses, l'administration a accepté de ramener à 4 753 euros le montant des dépenses non justifiées. Parallèlement, l'administration, après avoir estimé que cette somme avait été désinvestie par la SARL E... et après avoir regardé M. B... comme le maître de l'affaire, a estimé que cette somme présentait la nature d'un revenu distribué imposable, moyennant l'application de la majoration d'assiette de 25 % prévue au 2° du 7. de l'article 158 du code général des impôts, entre les mains de l'intéressé, sur le fondement des dispositions du 1° du 1. de l'article 109 de ce code. Ce chef de rehaussement ayant été contesté par M. et Mme B... dans le cadre de la mise en œuvre, à leur égard, de la procédure de rectification contradictoire, il incombe à l'administration de démontrer, d'une part, que la somme regardée comme distribuée a effectivement été désinvestie par la société distributrice et, d'autre part, que le contribuable peut être regardé comme le seul maître de l'affaire. 20. D'une part, la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SARL E... a donné lieu, ainsi que le rappelle le ministre, à un rehaussement des bénéfices imposables déclarés par cette société au titre, notamment, de l'exercice clos en 2010, lequel rehaussement résulte de la remise en cause d'écritures de charges. En outre, aucun des éléments relevés par la vérificatrice dans la proposition de rectification adressée à cette société, dont une copie est versée à l'instruction, ne fait état d'une décision d'investir ou de mettre en réserve tout ou partie du résultat réalisé par cette société au titre de l'exercice clos en 2010, de sorte que celui-ci doit être regardé comme susceptible d'avoir fait l'objet d'un désinvestissement, ce que confirme le ministre, dans ses écritures, sans être contredit. 21. D'autre part, le ministre fait valoir, sans davantage être contredit, que M. B..., détenteur de l'intégralité des parts sociales de la SARL E..., dont il est le gérant statutaire, était seul titulaire, en cette qualité, du pouvoir de disposer, sans contrôle des fonds sociaux, et que celui-ci était seul autorisé à mouvementer le compte bancaire ouvert au nom de cette société. Par ces éléments, qui ne sont pas contestés, et alors qu'il n'est pas allégué qu'une autre personne aurait exercé, de fait, des pouvoirs équivalents, le ministre doit être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, que M. B... était, au cours de l'année 2010 en litige, le seul maître de l'affaire. 22. Il résulte de ce qui a été dit aux points 20 et 21 que le ministre doit être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'appréhension, par le foyer fiscal de M. B..., des charges injustifiées déduites, par la SARL E..., de son résultat de l'exercice clos en 2010. Il ressort des éléments exposés par le ministre, dans ses écritures, que, compte-tenu du dégrèvement, mentionné au point 4, intervenu en cours d'instance, le rehaussement maintenu à ce titre par l'administration, soit 4 753 euros, n'excède pas, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme B..., l'assiette sur la base de laquelle la SARL E... a été imposée, de ce chef, à l'impôt sur les sociétés. En outre, l'administration a tenu compte, pour prononcer ce dégrèvement, de sa décision d'abandonner, pour cause d'inconstitutionnalité, la majoration d'assiette de 25 % initialement appliquée à la base assujettie aux prélèvements sociaux. Par ailleurs, si M. et Mme B... soutiennent que les sommes versées par la SARL E... au syndic de la résidence de Mormal à Aulnoye-Aymeries ainsi qu'au golf de Sin-le-Noble ont la nature de charges déductibles et ne pouvaient, dès lors, être regardées comme des revenus distribués, il résulte des éléments, non contestés, repris par le ministre dans ses écritures, d'une part, que la SARL E... n'était plus propriétaire, au titre de l'exercice clos en 2010, d'aucun logement au sein de la résidence de Mormal, de sorte que le rattachement de cette dépense à cet exercice ne peut être tenu pour établi, et, d'autre part, qu'elle n'a pas justifié, par une facture établie, d'ailleurs en 2009, au nom d'une tierce société, que la somme de 797,33 euros versée au golf de Sin-le-Noble correspond, comme M. et Mme B... l'allèguent, à une dépense liée à la mise en place d'un support publicitaire et présentant un caractère déductible du résultat de l'exercice clos en 2010, enfin, qu'il n'est pas justifié de l'intérêt direct que revêtait, pour la SARL E..., le versement d'une " dotation ", selon les termes mêmes de la facture produite, d'un montant de 107,40 euros, effectué au bénéfice, non pas de l'association gestionnaire du golf de Sin-le-Noble, mais d'une entreprise ayant son siège à Wasquehal et commercialisant des équipements de golf. Dans ces conditions, eu égard à la présomption d'appréhension qui s'attache, pour l'application des dispositions du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, à la qualité de seul maître de l'affaire, M. et Mme B... ne peuvent utilement alléguer que la somme que l'administration a regardée comme correspondant à un revenu distribué par la SARL E... n'aurait pas été effectivement versée par celle-ci. En ce qui concerne les autres sommes regardées comme distribuées au titre de l'année 2011 : 23. En application des dispositions, citées au point 5, du a. de l'article 111 du code général des impôts, sont regardés comme des revenus distribués, sauf preuve contraire, les montants des soldes débiteurs des comptes courants ouverts dans les écritures d'une société au nom des associés, actionnaires ou porteurs de parts. 24. Au cours de la vérification de comptabilité dont la SARL E... a fait l'objet, la vérificatrice a constaté que le compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de cette société présentait, à la clôture de l'exercice 2011, un solde débiteur d'un montant de 4 685,54 euros, alors que le solde de ce compte était, à l'ouverture du même exercice, débiteur d'un montant de 12,38 euros. L'administration a estimé que la somme de 4 673,16 euros, correspondant à l'accroissement, au cours de l'exercice clos en 2011, de ce solde débiteur correspondait à un revenu distribué imposable au sein du foyer fiscal de M. B... sur le fondement des dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts. 25. M. et Mme B... ne contestent pas avoir eu la disposition de la somme de 4 673,16 euros, mais soutiennent avoir remboursé, après le 31 décembre 2011 mais avant la réception, par la SARL E..., de l'avis informant cette société de l'engagement d'une vérification de sa comptabilité, le solde débiteur de ce compte courant d'associé de M. B.... Ils invoquent, en conséquence, les dispositions, citées au point 5, du second alinéa du a. de l'article 111 du code général des impôts, en vertu desquelles, lorsque les sommes mises à la disposition d'un associé, par voie d'inscription à son compte courant d'associé, sont remboursées par lui à la personne morale qui les lui avait versées, la fraction des impositions auxquelles leur attribution a donné lieu est restituée à cet associé ou à ses ayants cause dans des conditions et suivant des modalités fixées par un décret, qui a été codifié aux articles 49 bis à 49 sexies de l'annexe III au code général des impôts. 26. Toutefois, d'une part, les dispositions du second alinéa du a. de l'article 111 du code général des impôts ouvrent au contribuable, non pas la possibilité de demander la décharge ou la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu assise sur les avances, prêts ou acomptes que lui a consentis une société, mais un droit à restitution de l'imposition en principal à proportion des remboursements de ces sommes à la société, à la condition que le contribuable ait procédé, au préalable, au paiement effectif des impositions procédant de la taxation de ces sommes. D'autre part, l'extrait, arrêté au 12 avril 2013, du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E... n'est pas, à lui seul, de nature à établir la réalité du remboursement dont il est fait état. Enfin, si M. et Mme B... invoquent, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le bénéfice des énonciations du paragraphe n°190 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20, selon lesquelles, lorsque l'administration découvre qu'une avance taxable a été intégralement remboursée, il est possible d'admettre, à titre de règle pratique, qu'il n'y a pas eu de distribution de revenus s'il apparaît que le remboursement a été opéré à une date antérieure à celle de la réception par la société de l'avis de vérification, ils n'établissent pas, ainsi qu'il vient d'être dit, avoir opéré un tel remboursement, ni, par suite, entrer dans les prévisions de cet extrait de doctrine. 27. Enfin, il résulte de l'instruction et, notamment, des termes mêmes de la requête qu'en déterminant l'étendue des conclusions de son appel, qui ne tend qu'à un rétablissement partiel des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 2011, le ministre a tenu compte de sa décision d'abandonner, pour cause d'inconstitutionnalité, la majoration d'assiette de 25 % initialement appliquée à la base assujettie aux prélèvements sociaux. En conséquence, le moyen tiré, par M. et Mme B..., de ce que cette majoration d'assiette ne pouvait légalement être appliquée aux suppléments de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre de l'année 2011 est sans portée. 28. Il résulte de ce qui a été dit aux points 16 à 27 que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus des conclusions de leur demande. 29. Enfin, il résulte de ce qui a été dit aux points 15 et 28 que l'Etat ne peut pas être regardé comme ayant la qualité de partie perdante à l'instance d'appel, au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dès lors, les conclusions présentées par M. et Mme B... sur le fondement de ces dispositions doivent être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. et Mme B... tendant à la décharge, à concurrence de la somme de 1 551 euros, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2010. Article 2 : Le jugement n° 1702499 du 3 février 2020 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant, d'une part, qu'il prononce la décharge, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. B... en tant que remboursement de frais kilométriques et, d'autre part, qu'il met une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, auxquels M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 et dont la décharge a été prononcée par ce jugement est remise à la charge des intéressés, en intégralité s'agissant de l'année 2010 et à concurrence d'une base imposable de 17 790 euros et d'une base de prélèvements sociaux de 15 167 euros s'agissant de l'année 2011. Article 4 : Les conclusions de la demande présentée par M. et Mme B..., accueillies par le tribunal administratif de Lille, ainsi que leurs conclusions d'appel incident et celles qu'ils présentent devant la cour au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. et Mme D... B.... Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : J.-F. PapinLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA00421 1 3 N°"Numéro"
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, d'une part, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, d'autre part, de l'amende mise à sa charge sur le fondement du IV de l'article 1736 du code général des impôts. Par le jugement no 1803894 du 20 octobre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 décembre 2020 et 19 avril 2021, M. A..., représenté par Me Horrie, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige ainsi que de l'amende mise à sa charge sur le fondement du IV de l'article 1736 du code général des impôts ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il n'a pas conservé la jouissance de l'immeuble situé à Appeville-Annebaut de sorte que les déficits fonciers relatifs à cet immeuble sont déductibles de ses revenus fonciers ; - les sommes de 4 220 euros et de 13 000 euros, ainsi que les chèques encaissés émanant de la CARPA, doivent être déduits de l'assiette de ses revenus fonciers au titre de l'année 2013 ; - les sommes de 541,26 euros, de 452, 10 euros, de 600 euros et de 112,50 euros doivent également être déduites de l'assiette de ses revenus fonciers au titre de l'année 2014 ; - la prise en compte de la somme de 5 008 euros au titre des revenus de capitaux mobiliers de l'année 2014 conduit à une double imposition ; - la contribution sociale généralisée calculée sur les revenus des années 2013 et 2014 doit être déduite des revenus imposables de l'année 2015 ; - les pénalités dont les droits en litige ont été assortis sont dépourvues de fondement ; - l'amende qui lui a été infligée sur le fondement du IV de l'article 1736 du code général des impôts est dépourvue de fondement dès lors que l'administration a admis sa bonne foi. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2021, et un mémoire, enregistré le 7 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés ; - les travaux réalisés sur l'immeuble situé à Appeville-Annebault présentant le caractère de travaux de reconstruction, les sommes correspondant au coût de ces travaux ne sont pas déductibles des revenus fonciers de M. A... ; - la demande tendant à ce que la contribution sociale généralisée calculée sur les revenus 2013 et 2014 soit prise en compte dans la liquidation de l'imposition due par le contribuable au titre de l'année 2015 est irrecevable, le litige ne portant pas sur cette année d'imposition. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Baillard, premier conseiller, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Horrie, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2013 et 2014. A la suite de ce contrôle, l'administration fiscale a mis à sa charge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2013 et 2014, d'autre part, une amende pour non-déclaration d'un compte détenu à l'étranger sur le fondement du IV de l'article 1736 du code général des impôts. M. A... a porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a ainsi été assujetti au titre des années 2013, ainsi que de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement du IV de l'article 1736 du code général des impôts. Par un jugement du 20 octobre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. M. A... relève appel de ce jugement. Sur le bien-fondé des impositions en litige : En ce qui concerne les revenus fonciers : 2. D'une part, aux termes du II de l'article 15 du code général des impôts : " Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que les charges afférentes aux logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne peuvent pas venir en déduction pour la détermination du revenu foncier compris dans le revenu global soumis à l'impôt sur le revenu. La réserve de jouissance est établie, notamment, par l'accomplissement ou non de diligences ayant pour objet de donner le bien en location. D'autre part, aux termes de l'article 31 du code général des impôts : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; (...) / b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...) ". Au sens de ces dispositions, doivent être regardés comme des travaux de reconstruction ceux qui comportent la création de nouveaux locaux d'habitation, ou qui ont pour effet d'apporter une modification importante au gros œuvre, ainsi que les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à des travaux de reconstruction, et, comme des travaux d'agrandissement, ceux qui ont pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable des locaux existants. 3. En premier lieu, le service vérificateur a constaté que l'immeuble, situé à Appeville-Annebault, acquis par M. A... en 2007, n'a pas été loué par celui-ci entre 2007 et 2014. Si, ainsi que le soutient M. A..., un litige s'est noué, dès août 2008, avec les voisins de cet immeuble s'agissant de l'existence d'une servitude de passage permettant l'accès à cet immeuble, il résulte de l'arrêt de la cour d'appel de Rouen du 6 décembre 2012, qui a définitivement confirmé qu'une servitude de passage existait au profit de M. A..., que, par une ordonnance du 2 décembre 2008, le juge des référés du tribunal d'instance de Pont-Audemer avait rétabli le droit de passage de l'intéressé, de sorte que celui-ci ne peut se prévaloir de l'impossibilité d'accéder à cet immeuble que pour une courte période allant d'août à décembre 2008. Or, M. A... ne justifie d'aucune démarche pour louer ce bien avant l'année 2010, au cours de laquelle il a confié la location de l'immeuble à une agence immobilière, pour une durée de trois mois, avec un loyer attendu de 900 euros, avant, peu de temps après, de le confier à un autre professionnel de l'immobilier, pour la même durée, mais avec un loyer attendu porté à 1 200 euros. Le requérant n'apporte toutefois aucune explication convaincante quant à cette hausse importante du loyer escompté. Par ailleurs, M. A... ne justifie d'aucune diligence pour permettre la location du bien à compter de l'année 2011. Dans ces conditions, l'administration a pu considérer, à bon droit, que M. A... avait conservé la jouissance de ce bien, au titre des années en litige, et remettre en cause les déficits fonciers déclarés au titre de cet immeuble. Au surplus, il résulte de l'arrêt de la cour d'appel de Rouen du 6 décembre 2012 que l'immeuble en cause était un bâtiment à toît de chaume à usage de garage, que M. A... a transformé en immeuble à usage d'habitation. Or, de tels travaux doivent être regardés comme des travaux de reconstruction au sens du b) de l'article 31 du code général des impôts, lesquels ne constituent pas des charges déductibles des revenus fonciers. 4. En second lieu, concernant les revenus fonciers perçus en 2013, si M. A... soutient que la somme de 4 220 euros doit être déduite de l'assiette de ses revenus fonciers au titre de cette année, il n'établit pas que cette somme résulterait de loyers perçus pour un logement, propriété de sa compagne, qu'il aurait remboursés à celle-ci, alors que le loyer mentionné sur le bail de location dont il se prévaut ne correspond pas, à une exception près, aux montants figurant au crédit de son compte bancaire et que le rythme des crédits n'est pas cohérent avec le règlement d'un loyer mensuel. Par ailleurs, M. A... soutient que des versements au crédit de son compte, à hauteur de la somme de 13 000 euros, correspondent au remboursement partiel d'un prêt par un tiers. Toutefois, la seule attestation de ce tiers, établie en 2017, n'est pas de nature à établir que les sommes crédités ne constitueraient pas des revenus fonciers alors qu'aucune preuve du versement initial de la somme prêtée n'est apportée et que les sommes crédités sur le compte de M. A... résultent de versements en espèces. Enfin, contrairement à ce que soutient le requérant, il résulte de l'instruction, et notamment de courriers, produits par celui-ci, émanant de son avocat, que les chèques, d'un montant respectif de 300 et de 400 euros, n'étaient pas en lien avec le litige intéressant l'immeuble situé à Appeville-Annebault mais s'inscrivent dans le cadre d'un litige avec le locataire d'un autre immeuble dont M. A... est, par ailleurs, propriétaire. 5. Concernant les revenus fonciers perçus en 2014, M. A... ne démontre pas que les sommes de 541,26 euros, de 452,10 euros, de 600 euros et de 112,50 euros, correspondant pour la première, à un trop-perçu d'aide au logement, et, pour les autres, à des dépôts de garantie, auraient été prises en compte par l'administration comme des recettes foncières alors que l'administration fait valoir que ces sommes n'ont pas été incluses dans le revenu foncier du contribuable. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à demander que ces sommes soient déduites de l'assiette de ses revenus fonciers. En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers : 6. Aux termes du deuxième alinéa de l'article 125 du code général des impôts : " 'L'impôt est dû par le seul fait, soit du paiement des intérêts, de quelque manière qu'il soit effectué, soit de leur inscription au débit ou au crédit d'un compte. ". Si, en vertu de ces dispositions, les intérêts sont présumés mis à la disposition du titulaire d'un compte courant d'associé dès leur inscription au crédit, l'intéressé peut néanmoins apporter la preuve que, en droit ou en fait, leur prélèvement était impossible. 7. Il résulte de l'instruction que la société CHL Immobilier a versé des intérêts à M. A..., d'un montant de 5 008,24 euros, lesquels ont été inscrits au crédit de son compte courant d'associé le 31 décembre 2014. En se bornant à soutenir qu'il n'a disposé de cette somme qu'au mois de mai 2015, le requérant n'établit pas que leur prélèvement était impossible en 2014. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a procédé, à ce titre, au rehaussement des revenus imposables de l'intéressé au titre de l'année 2014. Par ailleurs, la circonstance selon laquelle cette somme aurait été également soumise à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2015, et aurait ainsi fait l'objet d'une double imposition, est sans incidence sur le bien-fondé des impositions mises à la charge de M. A... au titre des années 2013 et 2014. En ce qui concerne la déduction de la contribution sociale généralisée : 8. Aux termes de l'article 154 quinquies du code général des impôts : " I. Pour la détermination des bases d'imposition à l'impôt sur le revenu, la contribution prévue à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale au titre des revenus d'activité et de remplacement est, à hauteur de 5,1 points (...), admise en déduction du montant brut des sommes payées et des avantages en nature ou en argent accordés, ou du bénéfice imposable, au titre desquels la contribution a été acquittée. La contribution prévue au 6° du II de l'article L. 136-2 du même code est admise en déduction du revenu imposable de l'année de son paiement. / II. La contribution afférente aux revenus mentionnés aux a, b, c, e, (...) et f du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, au II du même article et aux revenus mentionnés au premier alinéa et au 1° du I de l'article L. 136-7 du même code n'ayant pas fait l'objet des prélèvements prévus au II de l'article 125-0 A et aux I bis, II, III, second alinéa du 4° et deuxième alinéa du 9° du III bis de l'article 125 A est admise en déduction du revenu imposable de l'année de son paiement, à hauteur de 5,1 points. ". 9. Il résulte de ces dispositions que la quote-part déductible des suppléments de contribution sociale généralisée due en raison de la rectification du revenu imposable des années 2013 et 2014 ne peut être admise en déduction que des revenus imposables de l'année de leur paiement. Or, il est constant que les suppléments de contribution sociale généralisée pour les années 2013 et 2014 n'ont pas été acquittés par M. A... avant le 31 décembre, respectivement, de l'année 2014 ou de l'année 2015. En conséquence, M. A... n'est, en tout état de cause, pas fondé à demander que ces suppléments soient pris en compte dans la liquidation de son impôt sur le revenu au titre des années 2014 et 2015. Sur les pénalités : 10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 7 que M. A... n'est pas fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années en litige. Le moyen tiré de ce que les pénalités y afférentes sont dépourvues, par voie de conséquence de l'absence de bien-fondé des droits, de tout fondement, doit donc être écarté. Sur l'amende prononcée en application du IV de l'article 1736 du code général des impôts : 11. La majoration de 10 % des droits mis à la charge du contribuable en application des dispositions du I de l'article 1758 A du code général des impôts et qui s'applique, notamment, lorsque des inexactitudes ou des omissions sont relevées dans les déclarations souscrites en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, a une finalité différente de l'amende prononcée en application du IV de l'article 1736 du même code, laquelle a pour objet de sanctionner la non-déclaration d'un compte ouvert à l'étranger. Par ailleurs, cette amende, qui a un caractère forfaitaire, ne dépend pas des intentions frauduleuses du contribuable mais résulte du seul constat d'une situation factuelle. Dès lors, le moyen tiré par M. A... de ce que l'administration, en lui infligeant la majoration prévue au I de l'article 1758 A du code général des impôts, aurait admis sa bonne foi, est inopérant. 12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : B. BaillardLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°20DA01987 1 3 N°"Numéro"
JADE/CETATEXT000046519780.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : I- Par une requête enregistrée sous le n° 1802320 M. B... a demandé au tribunal administratif de Melun : 1°) d'annuler les décisions implicites par lesquelles le recteur de l'académie de Créteil a rejeté ses demandes reçues le 30 novembre 2017 tendant, d'une part, à la prise en charge des frais qu'il a exposés pour ses déplacements au titre de l'année scolaire 2013-2014 et des frais de réparation de son ordinateur personnel endommagé au cours d'une formation, d'autre part, à lui verser la rémunération qui lui est due en raison des services rendus au titre de ses fonctions de maître contractuel de l'enseignement privé sous contrat à titre provisoire de septembre 2014 à septembre 2015 au sein du lycée privé Teilhard de Chardin, enfin, au versement des allocations de retour à l'emploi qui lui sont dues en raison des services accomplis en qualité de maître contractuel de l'enseignement privé sous contrat, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé contre ces décisions le 1er décembre 2017 ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 55 743,68 euros, à parfaire, en réparation du préjudice que lui ont causé les agissements de l'administration, ainsi que les intérêts à compter de la date de réception de la demande préalable d'indemnisation et la capitalisation de ces intérêts à la date anniversaire de la réception de cette demande ; 3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Créteil de régulariser sa situation auprès des organismes sociaux. Par un jugement n° 1802320 en date du 12 mai 2021 le tribunal administratif de Melun a condamné l'Etat à lui verser la somme de 960,40 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2017 pour ses frais de transport adapté puis l'a renvoyé devant l'administration pour le calcul de l'indemnité due au titre des rémunérations non perçues pendant son arrêt de maladie prescrit du 1er septembre 2014 au 15 septembre 2014 puis pendant la période de reprise des fonctions après la mise en demeure académique du 18 juin 2015 au 31 août 2015 et enfin pour la période comprise entre le 1er septembre et le 30 septembre 2015 et a rejeté le surplus de ses demandes. II- Par une requête enregistrée sous le n° 1804173 M. B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Créteil a refusé de faire droit à sa demande reçue le 25 janvier 2018 tendant au versement des allocations de retour à l'emploi et d'enjoindre au recteur de lui verser les allocations de retour à l'emploi. Par un jugement n° 1804173 du 12 mai 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : I- Par une requête sommaire, un mémoire ampliatif et un mémoire en réplique enregistrés sous le n° 21PA04276 les 27 juillet et 27 septembre 2021 et 5 mai 2022, M. B..., représenté par Me Arvis, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1804173 du 12 mai 2021 du tribunal administratif de Melun et la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Créteil a refusé de faire droit à sa demande reçue le 25 janvier 2018 tendant au versement des allocations de retour à l'emploi ; 2°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Créteil de lui verser les allocations de retour à l'emploi dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761 1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la fin de non-recevoir opposée par le recteur de l'académie de Créteil tirée de la tardiveté de la requête doit être écartée ; - le jugement est irrégulier au motif que le sens des conclusions du rapporteur public n'a pas été porté à la connaissance des parties dans un délai suffisant avant l'audience ; - le jugement n'est pas revêtu de l'ensemble des mentions obligatoires prévues par le code de justice administrative, l'audience n'ayant pas eu lieu le 17 mars 2020 contrairement à ce qui est indiqué sur la première page du jugement ; - le jugement est entaché d'erreur de fait, d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation ; - les premiers juges n'ont pas répondu à l'ensemble des moyens soulevés en se bornant à se référer à un autre jugement ; - la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Créteil a refusé de faire droit à sa demande reçue le 25 janvier 2018 tendant au versement des allocations de retour à l'emploi est entachée d'une erreur de fait ; - il a droit aux allocations de retour à l'emploi dès lors qu'il a démissionné pour un motif légitime tenant à la préservation de son état de santé, et en particulier de sa vision déjà dégradée, l'administration ayant refusé, de manière répétée, de mettre en place les mesures appropriées destinées à compenser son handicap ; il a ainsi été exposé à des conditions de travail incompatibles avec son état de santé ; l'administration lui a transmis les documents lui permettant de solliciter le versement des allocations de retour à l'emploi avec retard ce qui l'a placé dans une situation précaire et incertaine. Par un mémoire en défense enregistré le 11 octobre 2021 le recteur de l'académie de Créteil conclut à titre principal à l'irrecevabilité de la requête en raison de sa tardiveté et, à titre subsidiaire, au rejet au fond de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. II- Par une requête sommaire, un mémoire ampliatif et un mémoire en réplique enregistrés sous le n° 21PA04277 les 27 juillet et 27 septembre 2021 et 5 mai 2022, M. B..., représenté par Me Arvis, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1802320 du 12 mai 2021 du tribunal administratif de Melun en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant au versement d'une part, de sa rémunération entre le 16 septembre 2014 et le 18 juin 2015 et, d'autre part, au versement des allocations de retour à l'emploi ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 48 045,20 euros, à parfaire, en réparation du préjudice que lui ont causé les agissements de l'administration, ainsi que les intérêts à compter de la date de réception de la demande préalable d'indemnisation et la capitalisation de ces intérêts à la date anniversaire de la réception de cette demande ; 3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Créteil de régulariser sa situation auprès des organismes sociaux ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la fin de non-recevoir opposée par le recteur de l'académie de Créteil tirée de la tardiveté n'est pas recevable ; - le jugement est irrégulier au motif que le sens des conclusions du rapporteur public n'a pas été porté à la connaissance des parties dans un délai suffisant avant l'audience ; - le jugement n'est pas revêtu de l'ensemble des mentions obligatoires prévue par le code de justice administrative, l'audience n'ayant pas eu lieu le 17 mars 2020 contrairement à ce qui est indiqué sur la première page du jugement ; - le jugement est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ; - il a exercé pendant cette période son droit de retrait en application des dispositions de l'article 5-6 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ; il avait une croyance raisonnable en l'existence d'un danger grave et imminent pour sa santé puisque les prescriptions médicales d'aménagement de poste posées par le médecin de prévention dans son avis du 18 juillet 2013 n'ont pas été respectées et l'exercice de ses fonctions sans ces aménagements étaient délétères pour son acuité visuelle ; en outre, l'absence de mesures appropriées prises en application de l'article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 est un signe fort du danger auquel il était exposé ; - ses troubles majeurs de la vision associés à l'absence d'adaptation ergonomique de son poste de travail sont à l'origine de son arrêt de travail du 1er au 15 septembre 2014, au terme duquel il a dû exercer son droit de retrait, compte tenu de ce que les aménagements indispensables à la reprise de son activité sur son poste n'étaient pas opérationnels ; la dégradation de sa santé visuelle a d'ailleurs été mise en évidence le 10 juillet 2014 et il devait être vu en commission pour envisager un aménagement ; les autorités étaient informées de ce problème et il est resté en lien avec son établissement d'affectation pour reprendre le service sitôt que les aménagements nécessaires à son activité et à sa formation professionnelle seraient opérationnels, mais rien n'a été fait, le contraignant ainsi à exercer son droit de retrait ; - il a droit à une rémunération pour cette période à hauteur de 16 845,20 euros, sauf à parfaire ; - sa perte d'emploi doit être considérée comme étant involontaire au sens des dispositions de l'article L. 5422-1 du code du travail ; compte-tenu des conditions de service qui lui ont été proposées, et compte tenu de l'absence persistante des aménagements de son poste conformément aux prescriptions du médecin de prévention, ses conditions de travail étaient incompatibles avec son état de santé et il n'a pas eu d'autre solution que de démissionner ; le rectorat a commis une faute en ne lui versant pas ces allocations ; l'administration n'a pas transmis dans les délais les documents lui permettant de solliciter le versement des allocations de retour à l'emploi ce qui l'a placé dans une situation précaire et incertaine ; - il a droit à une indemnité de 31 200 euros, à parfaire, représentant deux ans de salaire à 1 300 euros par mois. Par un mémoire en défense enregistré le 11 octobre 2021 le recteur de l'académie de Créteil conclut à titre principal à l'irrecevabilité de la requête en raison de sa tardiveté et, à titre subsidiaire, au rejet au fond de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - le code du travail ; - le code de l'éducation ; - la convention relative à l'indemnisation du chômage du 14 mai 2014 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; - le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique ; - le décret n° 95-979 du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique pris pour l'application de l'article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat fixant les dispositions applicables aux stagiaires de l'Etat et de ses établissements publics ; - l'arrêté du 25 juin 2014 portant agrément de la convention du 14 mai 2014 relative à l'indemnisation du chômage et les textes qui lui sont associés ; - le règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014 relative à l'indemnisation du chômage ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public, - et les observations de Me Bourgeois, substituant Me Arvis, pour M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... a été recruté par les services de l'académie de Créteil, après une visite d'aptitude en date du 4 septembre 2013 et par contrat du 19 septembre 2013, en qualité de maître contractuel de l'enseignement privé sous contrat à titre provisoire afin d'exercer les fonctions d'enseignant en mathématiques pour les classes du second degré, en application des dispositions du décret n° 95-979 du 25 août 1995 modifié relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique et de l'article R. 914-33 du code de l'éducation. D'abord engagé pour servir au sein du lycée privé du Petit Val à Sucy-en-Brie (Val-de-Marne) pour l'année scolaire 2013-2014, il a par avenant du 22 août 2014 été affecté au sein du lycée privé Teilhard de Chardin à Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne) pour l'année scolaire 2014-2015. A compter du 15 septembre 2014, M. B... a exercé son droit de retrait en faisant valoir que le poste qui lui a été confié ne répondait pas aux exigences d'aménagement fixées par la médecine de prévention. Par une lettre du 4 juin 2015, l'autorité académique a mis en demeure M. B... de rejoindre son poste, à peine d'être considéré comme étant en situation d'abandon de poste. M. B... a repris ses fonctions au sein de l'établissement Teilhard de Chardin le 18 juin 2015. Par un avenant du 28 août 2015, il a été à nouveau engagé pour servir dans ce même lycée pour l'année scolaire 2015-2016. Par une lettre du 24 septembre 2015, M. B... a toutefois présenté sa démission, avec prise d'effet au 1er octobre 2015. Par une lettre du 13 octobre 2015, le recteur de l'académie de Créteil a pris acte de cette démission. Par une lettre du 29 novembre 2017, reçue le 30 novembre suivant, M. B... a demandé au recteur de l'académie de Créteil de lui verser une somme de 55 743,68 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des refus répétés de l'administration d'adapter son poste de travail à son handicap visuel, de prendre en charge les frais correspondants et de l'obligation dans laquelle il s'est trouvée, pour préserver sa santé, d'exercer son droit de retrait, puis de démissionner de ses fonctions. Suite au rejet implicite de ses demandes, il a demandé devant le tribunal administratif de Melun la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 55 743,68 euros en réparation du préjudice que lui ont causé les agissements de l'administration. Par un jugement n° 1802320 du 12 mai 2021, le tribunal administratif de Melun a d'une part, condamné l'Etat à lui verser la somme de 960,40 euros au titre des frais de transport adapté et de la réparation des matériels informatiques, d'autre part, renvoyé l'intéressé devant l'administration pour le calcul de l'indemnité due au titre des rémunérations non perçues pendant l'arrêt de maladie prescrit du 1er septembre 2014 au 15 septembre 2014, pendant la période de reprise des fonctions après la mise en demeure académique du 18 juin 2015 au 31 août 2015 et pendant la période comprise entre le 1er septembre et le 30 septembre 2015. 2. Par ailleurs, par une lettre du 8 décembre 2017, la rectrice de l'académie de Créteil a communiqué à M. B... l'attestation employeur établie à la suite de sa démission. M. B... a demandé son admission au chômage à Pôle Emploi, mais par une décision du 4 janvier 2018, le directeur général de Pôle Emploi a refusé de l'admettre au chômage dans le cadre du régime général de l'assurance chômage au motif que sa demande ne relevait pas de la compétence de Pôle Emploi, mais de celle de son employeur public qui assure lui-même l'indemnisation de ses anciens agents. Par une lettre du 23 janvier 2018, reçue le 25 janvier 2018, M. B... a demandé au recteur de l'académie de Créteil de lui verser la valeur des allocations de retour à l'emploi qu'il estime avoir acquise au titre de ses services au sein de l'éducation nationale. Le silence conservé par l'administration pendant une période de deux mois a fait naître une décision implicite de rejet. M. B... a demandé l'annulation de cette décision devant le tribunal administratif de Melun qui par un jugement n° 1804173 en date du 12 mai 2021 a rejeté sa demande. M. B... relève régulièrement appel du jugement n° 1804173 en tant qu'il a rejeté sa demande ainsi que du jugement n° 1802320 du même jour en tant que le tribunal n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes pécuniaires mentionnées ci-dessus. Sur la jonction : 3. Les requêtes susvisées de M. B... sont relatives à la situation administrative d'un même agent, présentent à juger des questions connexes et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt. Sur la régularité des jugements : 4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne ". 5. La communication aux parties du sens des conclusions, prévue par ces dispositions, a pour objet de les mettre en mesure d'apprécier l'opportunité d'assister à l'audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu'elles peuvent y présenter, après les conclusions du rapporteur public, à l'appui de leur argumentation écrite et d'envisager, si elles l'estiment utile, la production, après la séance publique, d'une note en délibéré. En conséquence, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d'adopter, à l'exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire, notamment celles qui sont relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Cette exigence s'impose à peine d'irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public. 6. Il est constant que dans le cadre de l'instance n° 1804173 le sens des conclusions du rapporteur public devant le tribunal administratif de Melun tendant au " rejet au fond " de la demande de M. B... a été porté à la connaissance des parties dans l'application " sagace " le dimanche 14 mars 2021 à 12 heures en vue de l'audience se tenant le mercredi 17 mars 2020 à 10 heures, soit près de 72 heures avant l'audience. S'agissant de l'instance n° 1802320, le sens des conclusions du rapporteur public devant le tribunal administratif de Melun a également été mis en ligne le 14 mars à 12 heures pour l'audience se tenant également le 17 mars 2020 à 10 heures. De tels délais doivent être regardés comme suffisants pour satisfaire à l'exigence mentionnée au point précédent du présent arrêt, nonobstant la circonstance que le délai couru le dimanche présente une utilité réduite au regard de la finalité du délai entre la communication du sens des conclusions et l'audience. En outre, il résulte des principes rappelés ci-dessus que le rapporteur public n'était pas tenu, à peine d'irrégularité du jugement rendu par le tribunal administratif, d'indiquer les motifs qui le conduisaient à proposer le rejet de la demande. M. B... ne peut, dès lors se prévaloir, au soutien de ses conclusions aux fins d'annulation des jugements attaqués, de l'absence de communication aux parties, en temps utile, du sens des conclusions du rapporteur public. Ce moyen d'irrégularité ne peut donc qu'être écarté. 7. En deuxième lieu, si le jugement attaqué n° 1804173 du 12 mai 2021 mentionne en première page la date du 17 mars 2020 comme date d'audience, au lieu du 17 mars 2021, il mentionne correctement, en page 1, la date de délibéré du 21 mai 2021 et, en dernière page, les dates d'audience et de lecture des 17 mars 2021 et 12 mai 2021, conformes à celles indiquées sur les fiches de suivi informatique des demandes du requérant. Il est dès lors manifeste que la mention de l'année 2020 pour la date d'audience constitue une simple erreur de plume qui, pour regrettable qu'elle soit, est sans incidence sur la régularité des jugements attaqués. 8. En troisième lieu, M. B... soutient que les jugements sont entachés d'une erreur de droit, d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation. Ces moyens, qui relèvent du bien-fondé de la décision juridictionnelle attaquée, ne constituent pas des moyens touchant à sa régularité. En tout état de cause, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. B... ne peut donc utilement soutenir que le tribunal a entaché sa décision d'erreur de droit et d'erreur de fait pour demander l'annulation des jugements attaqués. 9. En dernier lieu, dans le cadre de l'instance n° 21PA04276, M. B... soutient que les premiers juges ne se sont pas prononcés sur l'ensemble des moyens présentés dans sa requête de première instance. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le tribunal administratif de Melun s'est prononcé, le même jour, lors de l'instance n° 1802320 sur les conclusions présentées par M. B... tendant à obtenir réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait des refus répétés de l'administration d'adapter son poste de travail à son handicap visuel, de prendre les frais correspondants et de l'obligation dans laquelle il s'est retrouvée, pour préserver sa santé, d'exercer son droit de retrait, puis de démissionner de ses fonctions. A cette occasion, le tribunal a considéré que l'intéressé n'établissait pas la légitimité de sa démission de ses fonctions de maître contractuel à titre provisoire de l'enseignement privé sous contrat et qu'il ne pouvait être regardé comme ayant été privé involontairement d'emploi au sens des dispositions de l'article L. 5322-1 du code du travail. Les premiers juges, après avoir analysé au point 5 du jugement n° 1804173 les moyens soulevés, ont rappelé les motifs retenus au soutien du jugement n° 1802320 du 12 mai 2021 pour rejeter la demande indemnitaire tirée de l'existence d'une démission légitime contrainte, et examiné dans le cadre de l'instance n° 1804173 les différentes hypothèses où une démission est réputée ou considérée comme légitime. Par suite, contrairement à ce que soutient le requérant, le tribunal a bien répondu à l'ensemble des moyens. Sur les conclusions aux fins d'annulation et d'indemnisation : Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées en défense ; En ce qui concerne l'adaptation du poste de M. B... à son handicap visuel et le bien-fondé de l'exercice de son droit de retrait : 10. Tout d'abord, aux termes de l'article 5-6 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique : " I. - L'agent alerte immédiatement l'autorité administrative compétente de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection. / Il peut se retirer d'une telle situation. / L'autorité administrative ne peut demander à l'agent qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une défectuosité du système de protection. / II. - Aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l'encontre d'un agent ou d'un groupe d'agents qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de chacun d'eux. ". Par ailleurs, l'article 15 du décret précité dispose que : " Le médecin de prévention est le conseiller de l'administration, des agents et de leurs représentants (...) ". Enfin, l'article 26 du même décret précise que : " Le médecin de prévention est habilité à proposer des aménagements de poste de travail ou de conditions d'exercice des fonctions justifiés par l'âge, la résistance physique ou l'état de santé des agents. (...) Lorsque ces propositions ne sont pas agréées par l'administration, celle-ci doit motiver son refus et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail doit en être tenu informé. ". 11. Selon les dispositions précitées, lorsqu'il a un motif raisonnable de penser que sa situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ou en cas de défectuosité dans les systèmes de protection, l'agent alerte l'employeur et peut se retirer de cette situation. L'agent qui a fait usage de son droit de retrait ne peut pas être obligé à reprendre son activité dans la même situation de travail et ne peut faire l'objet d'aucune sanction ni d'aucune retenue de salaire tant que persiste un danger grave et imminent. 12. Il résulte de l'instruction que, le 30 août 2014, M. B... a adressé au rectorat de l'académie de Créteil une correspondance dans laquelle il fait part de la mise en danger de sa santé au regard des aménagements insuffisants de son poste de travail par rapport aux différentes préconisations du médecin de prévention et indique, à cette occasion, vouloir exercer son droit d'alerte. Il est constant que, suite à la dégradation de la santé visuelle de M. B... constatée au mois de juillet 2014, et après préconisations d'un médecin ophtalmologiste le 5 juillet 2014 retenant notamment une diminution d'au moins un tiers de son temps de service, le rectorat a proposé, le 22 août 2014, par voie d'avenant à son contrat de travail, un aménagement du temps de travail de M. B... consistant en neuf heures en présence devant les élèves, contre dix-huit heures l'année précédente, et neuf heures de formation. En outre, le médecin de prévention a informé, le 9 septembre 2014, l'administration que son état de santé nécessitait pour l'accomplissement des missions qui lui étaient confiées des aménagements en sus de ceux définis lors de son recrutement en qualité de stagiaire le 4 septembre 2013 (interdiction d'utiliser un rétroprojecteur ou écran cathodique, utilisation de son propre matériel adapté à sa situation médicale, d'une imprimante laser multifonction avec scanner et d'un vidéo projecteur portatif et prise en charge des transports domicile/travail ainsi que l'assurance valeur de remplacement de son ordinateur). Il a, ainsi, notamment préconisé la mise en place d'une aide humaine de 15 heures par semaine ainsi qu'une réduction du temps des intercours à deux heures maximum et une limitation des préparations à deux niveaux en qualité de stagiaire. Ces recommandations ont été complétées par un certificat médical en date du 10 septembre 2014 dans lequel le médecin de prévention a conseillé des aménagements supplémentaires de l'espace de travail de M. B... suite à l'avis émis par le médecin agréé chargé de l'examen médical d'aptitude physique aux fonctions du requérant (utilisation d'un ordinateur portable adapté écran 17 pouces format 16/9 à dalle mate antireflet et luminosité constante sur sa surface, d'un télé-agrandisseur portable sans écran, d'une imprimante en couleur avec scanner recto verso, d'un vidéo projeteur portable à ultra courte focale, d'un éclairage d'appoint dans la salle des professeurs type halogène, d'un logiciel d'agrandissement, de dictée vocale et calculatrice graphique, d'outils numériques du champ professionnel depuis son poste, d'une version numérique adaptée des manuels (fortement agrandissable), d'un matériel d'écriture adapté et d'une solution spécifique d'effacement des tableaux y compris son nettoyage périodique). Par ailleurs, le 8 octobre 2014, le professeur D... a établi un certificat médical précisant que l'état de santé de M. B... justifiait un passage en commission afin d'envisager un aménagement de poste pour optimiser ses conditions visuelles. 13. Si l'administration n'a d'abord mis en œuvre que partiellement les aménagements préconisés par la médecine de prévention comme en attestent les courriels de M. B... en date des 8 et 30 octobre 2014 destinés au proviseur de son établissement d'affectation et aux services du rectorat en ne livrant qu'une partie du matériel informatique, des logiciels de la calculatrice graphique correspondant aux trois niveaux de classes attribués et la version numérique des manuels utilisés, il apparaît, toutefois, que l'intéressé était autorisé à utiliser son ordinateur personnel adapté à son handicap, ainsi qu'il l'avait fait au cours de l'année 2013/2014. Par ailleurs, les aménagements horaires proposés à la rentrée 2014, mentionnés au point précédent, sont compatibles avec les préconisations des médecins traitants ou de prévention indiqués précédemment. En outre, face aux différentes demandes de l'intéressé et afin de tenir compte des préconisations médicales, le régime de service de M. B... a été ultérieurement modifié en prévoyant la concentration de ses heures de travail sur deux journées et le recours à une aide extérieure, lors de sa présence dans l'établissement, par des personnes proposées par le requérant. 14. De plus, il convient de relever que, lors de sa précédente affectation au collège du Petit Val à Sucy-en-Brie, le rectorat a eu recours aux services de la société CECIAA chargée de favoriser l'intégration des personnes en situation de handicap au quotidien dans la vie scolaire et professionnelle en proposant notamment des études d'aménagements de poste de travail ainsi qu'une gamme de matériels et logiciels adaptés, répondant aux besoins spécifiques des personnes concernées et que cette société a été confrontée à des difficultés importantes de communication avec M. B... qui n'a notamment pas souhaité l'informer de ses capacités fonctionnelles visuelles, des difficultés visuelles rencontrées ainsi que de ses besoins en terme de compensation, arguant d'un manque de disponibilités au regard de ses obligations professionnelles, laissant ainsi la société dans l'impossibilité d'assurer sa prestation de conseil et d'identification des techniques de compensation nécessaires dans le cadre du travail du requérant pour permettre une adaptation technique rapide de son poste de travail. 15. Par ailleurs, s'il est indéniable que M. B... a besoin d'une aide humaine extérieure pour l'aider lors des contrôles de connaissance mais également lors de la correction des copies au regard de son handicap, il ne démontre pas qu'en dépit de l'absence de recrutement d'une telle aide, il était dans l'impossibilité d'obtenir un appui technique comme notamment l'agrandissement des copies à corriger comme cela lui avait été déjà proposé dans son précédent poste ou que les autres enseignements auraient refusé de lui apporter leur concours. 16. Enfin, il convient de rappeler qu'il relève de la seule responsabilité individuelle de l'agent de prendre toutes les dispositions nécessaires pour s'informer de l'évolution de la situation puisque son droit de retrait repose sur son appréciation subjective du danger et que pendant l'exercice de ce droit, il n'est en rien suspendu de ses fonctions, seule l'exécution des tâches regardées comme représentant un danger grave et imminent étant suspendue. Le droit de retrait est un acte de responsabilité individuelle qui ne saurait être subordonné à une décision de l'administration portant sur l'état des risques tant au moment de sa mise en œuvre que de son terme. Or, il résulte de l'instruction que, le 8 octobre 2014, une partie complémentaire du matériel informatique et des logiciels a été réceptionnée par son établissement. Si, dans un courriel en date du 13 octobre 2014, le requérant a estimé que la dalle de l'ordinateur réceptionné était inadaptée en raison de variations trop fortes de luminosité sur sa surface, l'intéressé souligne qu'il peut continuer à utiliser son propre matériel dans les conditions d'assurance prévues dans sa demande d'aménagement. En outre, il a été informé par les services du rectorat de l'acquisition de matériels supplémentaires qui ont été livrés début février 2015. Or, M. B... ne s'est présenté que le 17 mars 2015, pour vérifier la conformité du matériel aux préconisations médicales édictées par le médecin de prévention. De même, il n'apporte aucun élément médical complémentaire sur sa santé visuelle et ne démontre pas qu'il aurait essayé de ne pas accomplir uniquement les tâches qui n'étaient pas conformes aux préconisations de la médecine du travail. 17. Au regard de ce qui précède, M. B... n'apporte pas d'élément caractérisant un danger grave et imminent pour sa santé, au sens des dispositions précitées du code du travail, de nature à justifier l'exercice de son droit de retrait. Par suite et quelque regrettable qu'ait pu être l'exécution tardive par l'administration des préconisations de la médecine du travail, il n'est pas fondé à faire valoir que son droit de retrait était justifié. En ce qui concerne le versement des allocations de retour à l'emploi : 18. Lorsqu'il statue sur un recours dirigé contre une décision par laquelle l'administration, sans remettre en cause des versements déjà effectués, détermine les droits d'une personne en matière d'aide ou d'action sociale, de logement ou au titre des dispositions en faveur des travailleurs privés d'emploi, et sous réserve du contentieux du droit au logement opposable, il appartient au juge administratif, eu égard tant à la finalité de son intervention qu'à sa qualité de juge de plein contentieux, non de se prononcer sur les éventuels vices propres de la décision attaquée, mais d'examiner les droits de l'intéressé, en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction et, notamment, du dossier qui lui est communiqué en application de l'article R. 772-8 du code de justice administrative. Au vu de ces éléments, il lui appartient d'annuler ou de réformer, s'il y a lieu, cette décision, en fixant alors lui-même tout ou partie des droits de l'intéressé et en le renvoyant, au besoin, devant l'administration afin qu'elle procède à cette fixation pour le surplus, sur la base des motifs de son jugement. Dans le cas d'un contentieux portant sur les droits au revenu de remplacement des travailleurs privés d'emploi, c'est au regard des dispositions applicables et de la situation de fait existant au cours de la période en litige que le juge doit statuer. 19. D'une part, aux termes de l'article L. 5422-1 du code du travail : " Ont droit à l'allocation d'assurance les travailleurs involontairement privés d'emploi (...), et ceux dont le contrat de travail a été rompu d'un commun accord selon les modalités prévues aux articles L. 1237-17 et suivants, aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure ". L'article L. 5424-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige dispose que : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : 1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ainsi que les militaires ; (...) ". Selon l'article L. 5424-2 du même code : " Les employeurs mentionnés à l'article L. 5424-1 assurent la charge et la gestion de l'allocation d'assurance (...) ". Il résulte de ces articles que le versement d'allocations d'assurance chômage à un agent public est subordonné à l'existence d'une privation involontaire d'emploi ou situation assimilée ou à une cessation de la relation de travail d'un commun accord avec son employeur. La démission constitue, pour l'application de ces dispositions, une situation assimilée à une privation volontaire d'emploi lorsqu'elle intervient pour un motif légitime. 20. D'autre part, aux termes de l'article 1er du règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014 relative à l'indemnisation du chômage : " Le régime d'assurance chômage assure un revenu de remplacement dénommé allocation d'aide au retour à l'emploi, pendant une durée déterminée, aux salariés involontairement privés d'emploi qui remplissent des conditions d'activité désignées période d'affiliation, (...). ". Aux termes de l'article 2 de ce règlement : " Sont involontairement privés d'emploi ou assimilés les salariés dont la cessation du contrat de travail résulte : (...) ; / - d'une démission considérée comme légitime dans les conditions fixées par un accord d'application (...) ". L'accord d'application n° 14 du 14 mai 2014 pris pour l'application des articles 2, 4 e) et 26 paragraphe 1 b) du règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014 énumère les hypothèses dans lesquelles une démission est considérée comme étant légitime. 21. S'agissant de la démission d'un agent d'une collectivité publique, il appartient à l'autorité administrative compétente, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les motifs de cette démission permettent d'assimiler celle-ci à une perte involontaire d'emploi. 22. En l'espèce, le requérant fait valoir que les moyens matériels mis à sa disposition par le rectorat n'étaient pas suffisants pour lui permettre de compenser son handicap, de sorte qu'il n'a pas eu d'autre choix que de présenter une démission. Il se trouvait dans une situation de contrainte et de perte involontaire d'emploi au sens de l'assurance chômage. 23. Au regard des éléments mentionnés aux points 11 à 15 du présent arrêt, et eu égard aux aménagements complémentaires proposés à la rentrée 2015, prévoyant notamment la suppression de toute heure de cours en présence des élèves pour effectuer des heures de soutien auprès des élèves de différentes classes au vu des indications données par leurs professeurs, il ne résulte pas de l'instruction que la démission de M. B... aurait été motivée par des raisons autres que des convenances personnelles de l'intéressé au regard de son appréciation de ses conditions de travail. Dès lors, le recteur de l'académie de Créteil a pu légalement considérer que M. B... ne pouvait être regardé comme ayant été involontairement privé d'emploi, et, par suite, prétendre au bénéfice des allocations d'assurance chômage. Enfin, la circonstance que l'administration a tardé à lui transmettre les documents lui permettant de solliciter le versement des allocations de retour à l'emploi est sans influence sur la légalité de la décision attaquée. 24. Il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes. Sur les conclusions à fin d'injonction : 25. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions présentées par M. B... dans les instances nos 21PA04276 et 21PA04277 n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction du requérant ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais liés à l'instance : 26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. B... qu'il demande dans les présentes instances et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Les requêtes nos 21PA04276 et 21PA04277 de M. B... sont rejetées. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Créteil. Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président, - Mme Boizot, première conseillère, - Mme Lorin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 octobre 2022. La rapporteure, S. A...Le président, S. CARRERE La greffière, C. DABERT La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N° 21PA04276, 21PA04277 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner la ville de Grenoble à lui verser une provision de 47 166, 03 euros, outre les intérêts légaux à compter du 12 janvier 2013 et la capitalisation des intérêts, à valoir sur la réparation du préjudice financier qu'il a subi du fait de l'illégalité fautive de l'arrêté du 6 avril 2006 l'admettant à la retraite pour invalidité qui le conduit au remboursement d'un indu de pension. Par une ordonnance n° 2104263 du 21 septembre 2021, le juge des référés a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 octobre 2021 et 14 septembre 2022, M. B..., représenté par Me Angot, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance du 21 septembre 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble ; 2°) de condamner la ville de Grenoble à lui verser une provision de 47 166,03 euros, outre intérêts légaux à compter du 12 janvier 2013 et capitalisation de ceux-ci ; 3°) de mettre à la charge de la ville de Grenoble la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il a été condamné, par un jugement du tribunal de grande instance de Grenoble du 21 janvier 2019, à rembourser à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) la somme de 47 166,03 euros en restitution de pensions versées entre le 1er mars 2008 et le 30 septembre 2011 perçues alors qu'il avait été illégalement mis à la retraite par un arrêté du 6 avril 2006 du maire de Grenoble ; - si, le 13 février 2020, la cour administrative d'appel a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Grenoble à lui verser cette somme en raison de l'illégalité de cet arrêté, c'est au motif que le jugement du tribunal de grande instance n'était pas définitif ; - sur son pourvoi, la cour d'appel a confirmé le jugement du tribunal de grande instance par un arrêt du 30 mars 2021, devenu définitif ; - la créance de la CNRACL étant désormais définitive, il est fondé à réclamer réparation à la même hauteur à la ville de Grenoble ; - la ville de Grenoble a rejeté sa demande préalable ; - l'obligation de l'administration de réparer le préjudice qu'il a subi est non sérieusement contestable et la ville de Grenoble devra être condamnée à lui verser une somme provisionnelle de 47 166, 03 euros. Par un mémoire enregistré le 6 juillet 2022, la ville de Grenoble conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Par un mémoire enregistré le 14 septembre 2022, M. B..., dans le dernier état de ses écritures, demande à la cour de prendre acte de son désistement. Par un mémoire enregistré le 20 septembre 2022, la ville de Grenoble demande à la cour dans le dernier état de ses écritures d'accepter le désistement et se désiste de ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère, - et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Par un mémoire enregistré le 14 septembre 2022, M. B... se désiste purement et simplement de sa requête. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte. 2. La ville de Grenoble a également entendu se désister de ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Rien ne s'oppose à ce qu'il soit donné acte de ce désistement. DECIDE : Article 1er : Il est donné acte à M. B... du désistement de sa requête. Article 2 : Il est donné acte à la ville de Grenoble du désistement de ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ville de Grenoble. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre, M. Seillet, président-assesseur, Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 octobre 2022. La rapporteure, C. DjebiriLe président, V.-M. Picard La greffière, S. Lassalle La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 21LY03239 ar
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2016 et 2017, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement no 1811770 du 18 novembre 2020, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, dit que les cotisations d'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme A... au titre des années 2016 et 2017 devaient être réduites après un nouveau calcul avec imputation du montant du crédit d'impôt équivalent à la retenue à la source danoise puis des réductions d'impôt des dispositifs " Duflot " et " Scellier " auxquels ils avaient droit, d'autre part, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 janvier 2021 et le 9 mars 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande de M. et Mme A.... Il soutient que : - le tribunal ne pouvait se fonder sur la convention fiscale franco-danoise signée le 8 février 1957 pour prononcer la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme A... au titre des années 2016 et 2017 ; - l'instruction publiée sous la référence BOI-IR-RICI-20150729 n'est pas applicable à la situation de M. et Mme A... ; - l'administration a fait une exacte application des dispositions du 5. du I de l'article 197 du code général des impôts ; - le bien-fondé des impositions en cause étant démontré, la condamnation prononcée en première instance en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être annulée. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mars 2021, M. B... A..., représenté par Me Schmidbauer, avocat, conclut, d'une part, au rejet de la requête, d'autre part, à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les moyens soulevés par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ne sont pas fondés ; - les dispositions du 5. du I de l'article 197 du code général des impôts ne sont pas compatibles avec la liberté de circulation garantie par le droit communautaire. Par une ordonnance du 4 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 juin 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Baillard, premier conseiller, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me Jolk, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., résident fiscal français, a exercé pour partie son activité professionnelle au Danemark au cours des années 2016 et 2017 et a été imposé à ce titre au Danemark. M. A... a ensuite déclaré auprès de l'administration fiscale française l'ensemble de ses revenus perçus au titre de ces deux années, et a par ailleurs sollicité des réductions d'impôt au titre des dispositifs " Duflot " et " Scellier " en application des articles 199 nonovicies et 199 septivicies du code général des impôts. L'administration fiscale française a, en conséquence, fait application des dispositions du 5. du I de l'article 197 du code général des impôts et a imputé ces réductions d'impôt avant d'imputer un crédit d'impôt d'un montant équivalent à l'imposition acquittée au Danemark dans le cadre d'une retenue à la source. Après rejet de sa réclamation, M. A... a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, lequel, par un jugement du 18 novembre 2020, a dit que les cotisations d'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme A... au titre des années 2016 et 2017 devaient être réduites après un nouveau calcul avec imputation du montant du crédit d'impôt équivalent à la retenue à la source danoise puis des réductions d'impôt des dispositifs " Duflot " et " Scellier " auxquels ils avaient droit et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique relève appel de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement : 2. En vertu du 5. du I de l'article 197 du code général des impôts, pour les contribuables ayant leur domicile fiscal en France, les réductions d'impôt s'imputent, en matière d'impôt sur le revenu, sur l'impôt avant imputation, notamment, des crédits d'impôt. 3. Pour prononcer la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu, assignées à M. et Mme A... au titre des années 2016 et 2017, les premiers juges, après avoir rappelé que les juridictions administratives et judiciaires peuvent écarter une disposition législative du fait de son incompatibilité avec une stipulation conventionnelle ou, le cas échéant, une règle du droit de l'Union européenne, ont relevé qu'en imputant sur l'impôt de M. et Mme A..., en application des dispositions du 5. du I de l'article 197 du code général des impôts, au titre des années 2016 et 2017, d'abord les réductions d'impôt dont ils bénéficiaient sur le fondement des articles 199 nonovicies et 199 septivicies de ce code, dont le solde peut être reporté, puis le crédit d'impôt auquel ils avaient droit en application des stipulations de la convention fiscale franco-danoise signée le 8 février 1957 au titre des revenus de source étrangère, qui n'est ni restituable, ni reportable, l'administration fiscale avait placé les contribuables dans une situation moins favorable que s'ils avaient perçu uniquement des revenus professionnels de source française. Le tribunal en a déduit que les dispositions de l'article 197 du code général des impôts étaient de nature à dissuader les contribuables d'user des libertés garanties par le droit communautaire, telles que la liberté de circulation des travailleurs, et n'étaient donc pas compatibles avec l'exercice de ces libertés, auquel elles constituent une entrave. Les premiers juges ont, en conséquence, écarté l'application, dans le litige dont ils étaient saisis, des dispositions de l'article 197 du code général des impôts et ont dit que les cotisations d'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme A... au titre des années 2016 et 2017 devaient être réduites après un nouveau calcul avec imputation du montant du crédit d'impôt équivalent à la retenue à la source danoise puis des réductions d'impôt des dispositifs " Duflot " et " Scellier " auxquels ils avaient droit pour ces deux années. Si le jugement en litige évoque la convention fiscale franco-danoise signée le 8 février 1957, laquelle avait été dénoncée antérieurement aux années d'imposition en litige, le tribunal n'a pas accordé de réduction d'imposition en raison de la méconnaissance des stipulations de cette convention. 4. Devant la cour, le ministre se borne à soutenir que le tribunal ne pouvait se fonder sur la convention fiscale franco-danoise signée le 8 février 1957 pour prononcer la réduction des impositions en litige, que l'administration a fait une exacte application des dispositions du 5. du I de l'article 197 du code général des impôts et que l'instruction publiée sous la référence BOI-IR-RICI-20150729 n'est pas applicable à la situation de M. et Mme A.... Or, ce faisant, elle ne critique pas utilement le motif de réduction des cotisations d'impôt sur le revenu, assignées à M. et Mme A..., tel que retenu par le tribunal, tiré de l'inconventionnalité des dispositions du 5. du I de l'article 197 du code général des impôts. Ces moyens ne peuvent donc qu'être écartés comme inopérants. 5. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a prononcé la réduction des impositions en litige et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance industrielle et numérique est rejetée. Article 2 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. B... A.... Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller, - M. Jean-François Papin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : B. BaillardLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Nathalie Roméro 1 2 N°21DA00063 1 3 N°"Numéro"
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le refus du 27 février 2020 de la préfète de Lot-et-Garonne de délivrer à sa fille F... D... une carte nationale d'identité et un passeport. Par un jugement n° 2004546 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision contestée, a enjoint au préfet de Lot-et-Garonne de délivrer à Mme C... une carte nationale d'identité et un passeport au nom de sa fille F... D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Procédure devant la cour administrative d'appel : Par une requête enregistrée le 26 août 2022 et un mémoire enregistré le 20 septembre 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juin 2022. Il soutient que : - ses conclusions sont fondées sur l'article R. 811-15 du code de justice administrative dont les conditions sont remplies ; - il existe un doute suffisant sur la paternité de M. D..., ressortissant français qui a reconnu l'enfant, et, par conséquent, sur la nationalité française de l'enfant ; Mme C..., mère de l'enfant vit depuis 2015 en France en situation irrégulière et la nationalité française de son enfant lui permettrait d'obtenir un titre de séjour ; elle a déposé une demande d'admission exceptionnelle au séjour le 16 septembre 2020 et a fait l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français du 11 août 2021 notifiée le 13 août suivant ; la demande de titre d'identité pour l'enfant a été déposée seulement cinq mois après la naissance de l'enfant ; M. D... a reconnu six autres enfants ; il existe un écart d'âge important entre Mme C... et M. D... et celui-ci est demeuré imprécis sur la date de la rencontre, sur la durée du lien entre lui et Mme C... et sur la période de conception de l'enfant ; il n'a pas assisté à la naissance de l'enfant ; il n'y a jamais eu de communauté de vie entre eux ; il n'est pas démontré que M. D... participerait à l'entretien et à l'éducation de l'enfant ; durant l'entretien mené avec lui, il n'a pas été en mesure de trouver le numéro de téléphone de Mme C... ni d'indiquer par quel moyen il restait en contact avec elle ; l'enfant vit avec sa mère à Bressuire tandis que M. D... vit à Marseille ; il a indiqué rendre visite à l'enfant de temps en temps sans en apporter la preuve ; les factures d'achat de matériel pour bébé d'un montant de 202,80 euros et les deux versements de 50 euros postérieurs à l'audition de M. D... ne suffisent pas à attester de sa participation à l'entretien et à l'éducation de l'enfant ; le 7 janvier 2021, le préfet des Deux-Sèvres a informé le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Niort d'une suspicion de reconnaissance frauduleuse de paternité et par courriel du 28 août 2022, le procureur de la République a indiqué que l'enquête était toujours en cours ; eu égard à l'ensemble des indices précis et concordants révélant l'existence d'une reconnaissance frauduleuse, le préfet a pu légalement refuser la délivrance des titres sollicités ; - les autres moyens soulevés à l'encontre de la décision contestée ne sont pas fondés et il se réfère sur ce point aux écritures produites par le préfet en première instance. Par un mémoire enregistré le 19 septembre 2022, Mme C..., représentée par Me Hay conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Elle soutient que : - les conditions de l'article R. 811-17 du code de justice administrative ne sont pas remplies ; - le ministre ne justifie pas de conséquences difficilement réparables qu'entraînerait l'exécution du jugement ; l'exécution du jugement attaqué n'entrainera d'ailleurs aucune conséquence difficilement réparable puisqu'au cas où le jugement serait annulé, il suffirait à l'administration de demander la restitution des documents délivrés ; - le ministre ne procède que par supputation s'agissant de la fraude alléguée, sans apporter aucune preuve ; il n'y a nul doute que l'enfant soit française par application de l'article 18 du code civil ; le procureur de la République n'avait pas été saisi à la date de la décision contestée ; elle a rencontré M. D... à Marseille, à son arrivée en France ; ils ont entretenu une relation amoureuse à partir de 2016 ; ils ne vivaient pas ensemble car M. D... a une compagne et des enfants ; il est arrivé à l'hôpital le matin de l'accouchement et est resté trois jours avec elle et le bébé ; il l'a accompagnée en préfecture pour demander la carte nationale d'identité de l'enfant ; il s'est également rendu à l'entretien auquel il a été convoqué à la préfecture des Bouches-du-Rhône le 24 février 2020 ; s'il n'était pas le père de l'enfant, il ne se serait pas déplacé ; il contribue à sa mesure à l'entretien et à l'éducation de l'enfant ; il affirme avoir apporté durant l'entretien des précisions sur sa relation avec elle. Par décision du 13 octobre 2022, le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale a été attribué à Mme C.... Vu : - la requête au fond enregistrée sous le n° 22BX02258 ; - les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 ; - le décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de Mme E... A... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ". 2. La préfète de Lot-et-Garonne a refusé, le 27 février 2020, de délivrer à Mme C... une carte nationale d'identité au nom de sa fille F... D... au motif que la reconnaissance de paternité de l'enfant présentait un caractère frauduleux. Par jugement du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Bordeaux, saisi par Mme C..., a annulé cette décision, a enjoint au préfet de Lot-et-Garonne de lui délivrer une carte nationale d'identité et un passeport au nom de sa fille F... D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer, qui a fait appel de ce jugement, demande, dans la présente instance, qu'il soit sursis à son exécution. 3. A l'appui de sa requête, le ministre soutient que les conditions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative sont remplies, qu'eu égard à l'ensemble des indices précis et concordants révélant l'existence d'une reconnaissance frauduleuse de l'enfant, le préfet a pu légalement refuser la délivrance des titres sollicités et que les autres moyens soulevés à l'encontre de la décision contestée ne sont pas fondés. En l'état de l'instruction, ces moyens du ministre paraissent sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué du 7 juin 2022, le rejet des conclusions en annulation accueillies par ce jugement. 4. Il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à demander qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué. En conséquence, les conclusions de Mme C... tendant à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées. DECIDE : Article 1er : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur l'appel du ministre de l'intérieur et des outre- mer contre le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juin 2022, il est sursis à l'exécution de ce jugement. Article 2 : Les conclusions de Mme C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Mme B... C.... Une copie en sera adressée au préfet de Lot-et-Garonne. Délibéré après l'audience du 26 octobre 2022 à laquelle siégeait Mme Elisabeth Jayat, présidente de chambre. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. La présidente, Elisabeth A... La greffière, Virginie Santana La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 22BX02327
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) ADF Assurances, venant aux droits de la société à responsabilité limitée (SARL) Assursanté, a, par deux demandes successives, demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre, d'une part, des années 2014 à 2015 et, d'autre part, de l'année 2016. Par un jugement n° 1901274, 1901275 du 18 novembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2021, la société par actions simplifiée (SAS) ADF Assurances, représentée par Me Blanquart, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 à 2016 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que le portefeuille clients ASAF-GIEPS pouvait faire l'objet d'une provision de 129 871,86 euros, déductible fiscalement, dès lors que la valeur nette comptable de ce portefeuille correspond bien à la clôture de chacun de ces exercices à sa valeur réelle déterminée selon la même méthode de valorisation qu'à la date d'acquisition en 2004, et qu'il est dissociable des autres actifs. Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la SAS ADF Assurances ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 14 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 15 juillet 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société à responsabilité limitée (SARL) Assursanté, qui exerçait une activité de courtage en assurance et aux droits de laquelle succède la société par actions simplifiée (SAS) ADF Assurances, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a notamment remis en cause la déductibilité des provisions pour dépréciation d'un portefeuille clients acquis en 2004, comptabilisées par la société, et l'a assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2014 à 2016 en suivant la procédure de rectification contradictoire. La SAS ADF Assurances relève appel du jugement du 18 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a ainsi été assujettie au titre des années 2014 à 2016. Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions en litige : 2. Les impositions supplémentaires en litige ayant été établies selon la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, la preuve du bien-fondé de ces impositions incombe à l'administration. Toutefois, il incombe à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de ses prétentions et les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. S'agissant d'une rectification portant sur une écriture comptable de dépréciation, il appartient au contribuable de justifier non seulement du montant de la dépréciation, mais de la correction de son inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de sa déductibilité. 3. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (...) ". Aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III au code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de manière irréversible, notamment les terrains, les fonds de commerce, les titres de participation, donnent lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° du I de l'article 39 du code général des impôts ". 4. Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise qui constate, par suite d'événements en cours à la clôture de l'exercice, une dépréciation non définitive d'un élément de son actif immobilisé, peut, alors même que celui-ci est amortissable, constituer une provision dont le montant ne peut excéder, à la clôture de l'exercice, la différence entre la valeur nette comptable et la valeur probable de réalisation de l'élément dont il s'agit, à la condition notamment que le mode de calcul de la provision soit propre à exprimer avec une approximation suffisante le montant probable de cette dépréciation. Par ailleurs, il résulte également de ces dispositions qu'un élément d'actif incorporel identifiable, y compris un fonds de commerce, ne peut donner lieu à une dotation spécifique de provision pour dépréciation que si, en raison de ses caractéristiques, il est dissociable à la clôture de l'exercice des autres éléments représentatifs de la clientèle attachée au fonds. 5. Il résulte des mentions de la proposition de rectification adressée à la SARL Assursanté que cette dernière a fait l'acquisition en 2004 d'un portefeuille clients dans le secteur de la santé pour un prix de 212 934 euros. L'administration a refusé la déductibilité des provisions constituées au titre des exercices 2013, 2014 et 2015, pour un montant total de 120 634 euros, au motif que la dissociation du portefeuille ASAF-GIEPS acquis en 2004 des autres actifs de la société était artificielle, et que le chiffre d'affaires de la société avait augmenté ainsi que les résultats d'exploitation. 6. Pour justifier les provisions comptabilisées et déduites de la base à l'impôt sur les sociétés, la SAS ADF Assurances fait valoir que le portefeuille clients ASAF-GIEPS, objet des provisions litigieuses, a connu une résiliation de plusieurs clients entrainant une baisse de commissions perçues, et que ce portefeuille client est individualisé dans la comptabilité de la société et dissociable des autres actifs. 7. Il résulte de l'instruction que le portefeuille clients ASAF-GIEPS acquis par la société Assursanté, représentatif d'une certaine partie de la clientèle attachée à son fonds de commerce, ne différait pas, en raison de ses caractéristiques, des autres portefeuille clients qu'elle exploitait dans le domaine de la santé, et s'est indissociablement intégré dans un portefeuille qui se renouvelait en permanence au fur et à mesure de la résiliation de clients et de l'obtention de nouveaux. Ce portefeuille clients ne pouvait, dès lors, faire l'objet d'une dotation à un compte de provision pour dépréciation. 8. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS ADF Assurances n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant à la décharge des impositions en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 9. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de la SAS ADF Assurances tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de la SAS ADF Assurances est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS ADF Assurances et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. SauveplaneLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Nathalie Roméro N°21DA00085 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) Pharmacie Dosset a, par deux demandes successives, demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014. Par un jugement n° 1806618, 1807257 du 18 novembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 15 janvier 2021, la SARL Pharmacie Dosset, représentée par Me Dubois, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la comptabilisation des provisions et leur déductibilité étaient justifiées sur le fondement du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts au regard de la baisse du chiffre d'affaires de l'officine, de la baisse de rentabilité de l'officine et des indications de l'étude du cabinet Inerfimo sur le prix de cession des officines en pourcentage de leur chiffre d'affaires ; - elle peut se prévoir, sur le fondement de l'article L. 80 B du code général des impôts, du rescrit du 18 juillet 2013. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Pharmacie Dosset ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Sauveplane, président assesseur, - les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La société à responsabilité limitée (SARL) Pharmacie Dosset a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a notamment remis en cause la déductibilité des provisions pour dépréciation du fonds de commerce comptabilisées par la société et l'a assujettie, en suivant la procédure de rectification contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2013 et 2014. La SARL Pharmacie Dosset relève appel du jugement du 18 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a ainsi été assujettie au titre des années 2013 et 2014. Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions en litige : 2. Les impositions supplémentaires en litige ayant été établies selon la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, la preuve du bien-fondé de ces impositions incombe à l'administration. Toutefois, il incombe à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de ses prétentions et les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. S'agissant d'une rectification portant sur une écriture comptable de dépréciation, il appartient au contribuable de justifier non seulement du montant de la dépréciation, mais de la correction de son inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de sa déductibilité. 3. En premier lieu, aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (...) ". Aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III au code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de manière irréversible, notamment les terrains, les fonds de commerce, les titres de participation, donnent lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° du I de l'article 39 du code général des impôts ". 4. Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise qui constate, par suite d'événements en cours à la clôture de l'exercice, une dépréciation non définitive d'un élément de son actif immobilisé, peut, alors même que celui-ci est amortissable, constituer une provision dont le montant ne peut excéder, à la clôture de l'exercice, la différence entre la valeur nette comptable et la valeur probable de réalisation de l'élément dont il s'agit, à la condition notamment que le mode de calcul de la provision soit propre à exprimer avec une approximation suffisante le montant probable de cette dépréciation. 5. Pour les exercices ouverts depuis le 1er janvier 2005, le plan comptable général, et notamment son article 322-5, impose aux entreprises d'apprécier, à chaque clôture des comptes et à chaque situation intermédiaire, s'il existe un indice quelconque montrant qu'un ou plusieurs de leurs actifs ont pu perdre de leur valeur. Lorsqu'un tel indice existe, un test de dépréciation consistant à comparer la valeur nette du bien considéré et sa valeur actuelle doit être effectué afin de confirmer ou non la perte de valeur. En présence d'une telle perte de valeur, l'entreprise peut, le cas échéant, déprécier l'actif concerné en fonction de sa valeur actuelle. L'article 322-5 du plan comptable précise que la valeur actuelle du bien doit être significativement inférieure à sa valeur nette comptable. 6. Il résulte des mentions de la proposition de rectification adressée à la SARL Pharmacie Dosset que le fonds de commerce de pharmacie d'officine exploité par cette société a été acquis par celle-ci en 2011 pour un prix de 2 990 000 euros. La SARL Pharmacie Dosset a comptabilisé, le 31 décembre 2012, une provision pour dépréciation du fonds de commerce d'un montant de 164 924 euros. Des dotations complémentaires, d'un montant respectif de 183 416 euros et 93 438 euros, ont été comptabilisées en 2013 et 2014, portant ainsi à 441 778 euros le montant total des provisions comptabilisées au 31 décembre 2014, soit 14,77 % du prix d'acquisition du fonds de commerce. L'administration a remis en cause la déductibilité de ces provisions pour dépréciation du fonds de commerce au motif que le mode de détermination du montant de cette provision reposait uniquement sur l'application au chiffre d'affaires de l'officine exploitée par la société d'un pourcentage issu d'une étude annuelle du cabinet Interfimo relative à la valeur des fonds de commerce des pharmacies en fonction du chiffre d'affaires. L'administration a estimé que l'application de cette méthodologie extrinsèque aux données propres de la SARL Pharmacie Dosset ne reflétait pas l'évolution de la valorisation du fonds de commerce de cette société, l'administration ayant par ailleurs relevé que si le chiffre d'affaires avait effectivement baissé, la légère baisse des résultats ne justifiait pas les provisions pour dépréciation comptabilisées depuis l'année 2012. 7. Pour justifier les provisions ainsi comptabilisées et déduites de la base à l'impôt sur les sociétés, la SARL Pharmacie Dosset fait valoir que son chiffre d'affaires a baissé de 626 000 euros entre 2011, date d'acquisition du fonds de commerce, et l'exercice 2014, soit une baisse de 18,44 %. Elle fait également valoir qu'elle a subi une perte de rentabilité annuelle de 120 000 euros, qu'elle a licencié un préparateur en pharmacie et que la gérante a été dans l'obligation de réaliser des apports financiers significatifs en compte-courant, pour un montant total de 213 474 euros, entre 2013 et 2016. 8. Toutefois, il résulte de l'instruction que s'il n'est pas contesté que le chiffre d'affaires de l'officine exploitée par la SARL Pharmacie Dosset, qui était de 3 516 121 euros en 2011, s'est limité à 2 979 677 euros en 2014, le résultat comptable retraité des provisions litigieuses et des éléments exceptionnels, qui était de 904 309 euros en 2011, s'est limité à 876 481 euros en 2014, soit une baisse de seulement 2,85 %. De même, si l'excédent brut d'exploitation retraité des charges et rémunération de gérance, qui s'élevait à 478 966 euros en 2011, s'est limité à 381 021 euros en 2014, soit une baisse de 20,44 %, rapportée au chiffre d'affaires HT, l'excédent brut d'exploitation est, quant à lui, passé de 13,62 % en 2011 à 12,79 % en 2014. Par ailleurs, la situation de trésorerie nette de la société n'a pas connu de dégradation significative, passant de 458 878 euros au 31 décembre 2012 à 462 071 euros au 31 décembre 2014. Ainsi, s'il est incontestable que la SARL Pharmacie Dosset a subi une baisse de performance économique entre l'exercice 2011, date d'acquisition du fonds de commerce, et l'exercice 2014, la société requérante n'apporte pas la preuve que la provision cumulée représentant un peu plus de 14 % du prix d'acquisition reflétait la baisse de valeur vénale du fonds de commerce, alors, de surcroit, qu'il est constant que la méthodologie de calcul des provisions s'est fondée uniquement sur l'application au chiffre d'affaires de l'officine exploité par la société requérante d'un pourcentage issu d'une étude annuelle du cabinet Interfimo relative à la valeur des fonds de commerce des pharmacies en fonction de leur chiffre d'affaires. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la provision cumulée comptabilisée par la SARL Pharmacie Dosset au cours des exercices 2012 à 2014. Cette dernière n'est donc pas fondée à soutenir que la comptabilisation de la provision était justifiée au regard des dispositions du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts. 9. En second lieu, aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi. / (...) ". 10. Il ressort des termes mêmes du rescrit du 18 juillet 2013 que l'administration fiscale, à la suite de la demande qui lui avait été présentée par la SARL Pharmacie Dosset, a indiqué que " les éléments fournis ne me permettent pas de corroborer la réalité de la dépréciation de votre fonds ". L'administration ne peut ainsi être regardée comme ayant formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal. La société requérante n'est donc pas fondée à se prévaloir de la garantie prévue à l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales. 11. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Pharmacie Dosset n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant à la décharge des impositions en litige. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de la SARL Pharmacie Dosset tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de la SARL Pharmacie Dosset est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Pharmacie Dosset et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient : - M. Christian Heu, président de chambre, - M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur, - M. Bertrand Baillard, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. Le président, rapporteur, Signé : M. SauveplaneLe président de chambre, Signé : C. Heu La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière, Nathalie Roméro N°21DA00083 2
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Vu la procédure suivante : Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 et 28 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Respire, l'association Ras-le-Scoot et l'association Paris sans voiture demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2022-1044 du 25 juillet 2022 abrogeant le décret n° 2021-1062 du 9 août 2021 relatif à la mise en place du contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur ; 2°) d'enjoindre à l'Etat de prendre toutes mesures nécessaires afin de garantir la mise en place du contrôle technique des véhicules de catégorie L, sous astreinte définitive d'un million d'euros par jour de retard à compter de la lecture de la décision à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à chacune des requérantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention d'Aarhus ; - la directive 2014/45/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 relative au contrôle technique périodique des véhicules à moteur et de leurs remorques ; - le code de l'environnement ; - le code de la route ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Pauline Hot, auditrice, - les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la fédération française des motards en colère ; Considérant ce qui suit : 1. Le décret du 25 juillet 2022, dont les associations requérantes demandent l'annulation pour excès de pouvoir, abroge le décret du 9 août 2021 relatif à la mise en place du contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur, qui soumettait l'ensemble de ces véhicules en circulation à une obligation de contrôle technique périodique à compter du 1er janvier 2023 suivant un calendrier d'échelonnement des contrôles par ancienneté des véhicules, définissait les conditions de mise en œuvre de cette mesure, les conditions d'exercice de l'activité de contrôle par des centres spécifiquement agréés à cet effet, et les obligations incombant à ces derniers. Les articles 6 et 9 du décret du 9 août 2021 relatif à la mise en place du contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur ont été annulés par la décision n° 457398 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux en tant qu'ils reportent au-delà du 1er janvier 2022 l'entrée en vigueur de l'obligation de contrôle technique des véhicules de catégorie L3e, L4e, L5e et L7e de cylindrée supérieure à 125 cm3, et l'article 8 du même décret a été annulé par la même décision. Par une autre décision n° 456131 du même jour, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a par ailleurs annulé la décision du ministre chargé des transports du 12 août 2021 de " suspendre " le décret du 9 août 2021. 2. Aux termes de son article 1er, la directive 2014/45/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 relative au contrôle technique périodique des véhicules à moteur et de leurs remorques " établit les exigences minimales pour un dispositif de contrôle technique périodique des véhicules utilisés sur la voie publique ", son article 4 précisant que " Chaque État membre veille à ce que les véhicules immatriculés sur son territoire soient périodiquement contrôlés conformément à la présente directive par les centres de contrôle autorisés par l'État membre où ces véhicules sont immatriculés ". Aux termes de l'article 2 de la directive : " 1. La présente directive s'applique aux véhicules dont la vitesse par construction est supérieure à 25 km/h et appartenant aux catégories suivantes, telles que visées par les directives 2002/24/CE, 2003/37/CE et 2007/46/CE: (...) à compter du 1er janvier 2022, véhicules à deux ou trois roues - véhicules des catégories et sous-catégories L3e, L4e, L5e et L7e, de cylindrée supérieure à 125 cm3 ; (...) 2. Les États membres peuvent exclure de l'application de la présente directive les véhicules suivants, immatriculés sur leur territoire: (...) véhicules de catégories L3e, L4e, L5e et L7e, de cylindrée supérieure à 125 cm3, lorsque l'État membre a mis en place des mesures alternatives de sécurité routière pour les véhicules à deux ou trois roues, en tenant notamment compte des statistiques pertinentes en matière de sécurité routière pour les cinq dernières années. Les États membres communiquent ces exemptions à la Commission ". Il résulte de ces dispositions que la directive 2014/45 du Parlement européen et du Conseil fait obligation aux Etats-membres de soumettre les véhicules à deux roues relevant des catégories et sous-catégories L3e, L4e, L5e et L7e, de cylindrée supérieure à 125 cm3 à un dispositif de contrôle technique périodique, lequel doit alors être applicable à compter du 1er janvier 2022, sauf à ce qu'un Etat membre opte pour une exclusion de ces catégories de véhicules du champ du contrôle technique obligatoire, lorsqu'il a mis en place des mesures alternatives de sécurité routière, qui doivent alors tenir notamment compte des statistiques pertinentes de sécurité routière. Si l'Etat membre opte pour une telle exclusion, il doit alors communiquer les exemptions retenues à la Commission européenne. Enfin, il résulte des dispositions précitées de la directive, éclairées notamment par ses considérants 1, 2, 3, 7 et 8, que cette directive a pour objectif tant le renforcement de la sécurité routière dans l'Union européenne et la diminution du nombre de décès liés aux transports routiers que la réduction de leur impact sur l'environnement, et qu'à cet égard le contrôle technique vise notamment à garantir que les véhicules sont maintenus dans un état acceptable au regard de la sécurité et de la protection de l'environnement pendant leur exploitation. Il résulte en particulier des considérants 7 et 8 que la mise en place par les Etats-membres d'un contrôle technique périodique a pour objectif de contrôler et de limiter la circulation des véhicules dont les systèmes de régulation des émissions fonctionnent mal, qui ont un impact sur l'environnement plus important que les véhicules correctement entretenus et, ce faisant, de contribuer à améliorer l'état de l'environnement, en réduisant les émissions moyennes des véhicules. La directive vise également à prévenir la manipulation frauduleuse ou la falsification de pièces et de composants de ces véhicules, susceptibles d'avoir une incidence négative sur leur impact sur l'environnement. Son annexe 1 comporte ainsi des exigences minimales concernant le contenu et les méthodes de contrôle recommandées à utiliser pour le contrôle technique périodique et les critères sur lesquels se fonder pour déterminer si l'état du véhicule est acceptable, en particulier en ce qui concerne les émissions à l'échappement et les nuisances sonores. Sur la légalité externe: 3. Aux termes de l'article 7 de la Charte de l'environnement : " Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ". Le respect du principe de participation du public défini à l'article 7 de la Charte de l'environnement s'apprécie au regard des dispositions législatives prises afin de préciser, pour ce type de décisions, les conditions et les limites de l'applicabilité de ce principe. Ainsi, aux termes du I de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement : " I. - Le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public, prévu à l'article 7 de la Charte de l'environnement, est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration. / Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux décisions qui modifient, prorogent, retirent ou abrogent les décisions mentionnées à l'alinéa précédent soumises à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration. / Ne sont pas regardées comme ayant une incidence sur l'environnement les décisions qui ont sur ce dernier un effet indirect ou non significatif (...) ". 4. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 que la directive 2014/45/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 vise, en rendant obligatoire la mise en place, notamment, du contrôle technique pour les véhicules à deux ou trois roues relevant des catégories et sous-catégories L3e, L4e, L5e et L7e, de cylindrée supérieure à 125 cm3 à compter du 1er janvier 2022, à améliorer l'état de l'environnement en réduisant les émissions moyennes de ces véhicules. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que, comme le soutiennent les requérantes, sans que ce point ne soit contesté en défense, la circulation de ces véhicules a des effets nocifs sur l'environnement, en termes de pollution atmosphérique et sonore, particulièrement dans les zones urbaines. Par conséquent, le décret attaqué, eu égard à sa finalité et à sa portée, qui consiste en la suppression de l'obligation de contrôle technique périodique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur relevant des catégories et sous-catégories L3e, L4e, L5e et L7e, de cylindrée supérieure à 125 cm3 à compter du 1er janvier 2023, doit être regardé comme ayant une incidence directe et significative sur l'environnement, au sens des dispositions de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement précédemment citées. Son adoption devait, dès lors, être précédée, à peine d'illégalité, d'une consultation préalable du public conformément à ces dispositions. Par suite, les associations requérantes sont fondées à soutenir que le décret attaqué a été pris au terme d'une procédure irrégulière, dès lors que ses dispositions n'ont pas fait l'objet d'une consultation du public préalablement à leur adoption. Cette irrégularité est de nature à avoir exercé une influence sur le sens du décret attaqué, et a privé le public de la garantie de voir son avis pris en considération à l'égard d'un acte ayant une incidence directe et significative sur l'environnement. Sur la légalité interne : 5. Pour justifier l'abrogation, par le décret attaqué, des dispositions prévoyant notamment la mise en œuvre du contrôle technique périodique pour les véhicules à deux roues relevant des catégories énoncées par la directive, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires se prévaut de la possibilité, ouverte par le paragraphe 2 de l'article 2 de la directive citée au point 2, d'exclure ces catégories de véhicules du champ du contrôle technique obligatoire et de la communication, adressée par le Gouvernement français à la Commission européenne le 3 décembre 2021, de mesures alternatives de sécurité routière. 6. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les statistiques pertinentes de sécurité routière disponibles font état d'une mortalité routière particulièrement élevée des conducteurs français de deux-roues relevant des catégories et sous-catégories L3e, L4e, L5e et L7e, de cylindrée supérieure à 125 cm3, en valeur absolue ainsi que par comparaison avec les données observées pour d'autres catégories de véhicules, et dans les autres Etats membres de l'Union européenne. Or la majorité des mesures notifiées à la Commission européenne ne sauraient être regardées comme des mesures alternatives de sécurité routière, soit parce qu'elles ont pour objet exclusif de réduire les nuisances sonores ou les émissions de polluants et ne constituent pas, par suite, des mesures de sécurité routière au sens de la directive, soit parce qu'elles se bornent à faire état de projets futurs ou de simples réflexions, alors que la directive fait référence à la mise en place de mesures efficaces, soit enfin parce qu'elles se contentent de transposer des mesures définies au niveau européen, telles que l'obligation du système anti-blocage des roues pour les deux-roues motorisés de plus de 125 cm3. La réduction de la vitesse de circulation de tous les véhicules à 80km/h, si elle peut notamment participer à la limitation de la mortalité routière des conducteurs de deux-roues relevant des catégories et sous-catégories L3e, L4e, L5e et L7e, de cylindrée supérieure à 125 cm3, a quant à elle vu sa portée limitée par la possibilité ouverte aux départements d'y déroger. Ainsi, seules la réforme du permis A intervenue en 2016 et celle des permis A1 et A2 intervenue en 2020, la mise en œuvre de l'obligation du port de gants pour les conducteurs et les passagers de motocyclette, de tricycle à moteur, de quadricycle à moteur ou de cyclomoteur, l'uniformisation des dimensions des plaques d'immatriculation des véhicules à moteur à deux ou trois roues et quadricycles à moteur, l'apposition sur les véhicules lourds d'autocollants " angles morts " et la mise en œuvre de campagnes de communication et de prévention visant à améliorer la sécurité de tous les conducteurs de deux-roues motorisés, destinées à ces conducteurs mais aussi à l'ensemble des usagers de la route, sont susceptibles de relever de la catégorie de mesures alternatives de sécurité routière visée par le paragraphe 2 de l'article 2 de la directive citée au point 2. Toutefois, alors qu'il résulte des dispositions de cet article que les mesures alternatives de sécurité routière permettant d'ouvrir la voie de l'exclusion de ces véhicules du dispositif de contrôle technique doivent être efficaces afin d'atteindre l'objectif "zéro décès" dans les transports routiers d'ici à 2050, rappelé au premier considérant de la directive 2014/45 précitée, de telles mesures n'apparaissent pas comme procédant d'une stratégie cohérente de sécurité routière et ne peuvent qu'être regardées comme trop ponctuelles et manifestement insuffisantes pour assurer efficacement la sécurité des usagers des deux-roues motorisés relevant des catégories et sous-catégories L3e, L4e, L5e et L7e, de cylindrée supérieure à 125 cm3, au regard des statistiques pertinentes de sécurité routière qui démontrent que celle-ci demeure très dégradée. Elles ne peuvent donc être regardées comme des mesures alternatives de sécurité routière prises au sens et pour l'application de la directive 2014/45 du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014. 7. Il résulte de ce qui précède qu'en abrogeant les dispositions du décret du 9 août 2021 rendant obligatoire la mise en œuvre du contrôle technique périodique pour les véhicules à deux roues motorisés relevant des catégories et sous-catégories L3e, L4e, L5e et L7e, de cylindrée supérieure à 125 cm3, le décret du 25 juillet 2022 a méconnu la directive 2014/45/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014. 8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 7 que l'association Respire et autres sont fondés à demander l'annulation du décret attaqué. Sur la modulation dans le temps des effets de la décision d'annulation : 9. L'annulation d'un acte administratif implique en principe que cet acte est réputé n'être jamais intervenu. Toutefois, s'il apparaît que cet effet rétroactif de l'annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur, que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif - après avoir recueilli sur ce point les observations des parties et examiné l'ensemble des moyens, d'ordre public ou invoqués devant lui, pouvant affecter la légalité de l'acte en cause - de prendre en considération, d'une part, les conséquences de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d'autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l'annulation. Il lui revient d'apprécier, en rapprochant ces éléments, s'ils peuvent justifier qu'il soit dérogé au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l'affirmative, de prévoir dans sa décision d'annulation, ou, lorsqu'il a décidé de surseoir à statuer sur cette question, dans sa décision relative aux effets de cette annulation, que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de sa décision prononçant l'annulation contre les actes pris sur le fondement de l'acte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l'annulation ne prendra effet qu'à une date ultérieure qu'il détermine. S'agissant d'une annulation résultant d'une méconnaissance du droit de l'Union européenne, cette faculté ne peut être utilisée qu'à titre exceptionnel et en présence d'une nécessité impérieuse. 10. En l'espèce, le moyen accueilli au point 7 de la présente décision est tiré de la violation du droit de l'Union. Si le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires fait valoir que la mise en place du dispositif du contrôle technique implique nécessairement de différer dans le temps les effets d'une éventuelle annulation, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'effet rétroactif de l'annulation des dispositions litigieuses, qui a pour effet de faire à nouveau entrer en vigueur le décret du 9 août 2021, à l'exception de ses articles 6, 8 et 9, annulés par la décision n° 457398 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux dans les conditions rappelées au point 1 de la présente décision, se heurterait à une considération impérieuse de nature à justifier de déroger au principe de l'effet rétroactif d'une annulation contentieuse qui résulte de la méconnaissance du droit de l'Union européenne, d'autant que la mise en œuvre effective du décret du 9 août 2021 doit être accompagnée de mesures d'application, notamment quant à l'échelonnement dans le temps de la mise en œuvre du dispositif de contrôle technique, laquelle peut être différenciée selon l'ancienneté du véhicule, et permettant de préciser les normes techniques de référence et les conditions de mise en œuvre de ce contrôle, notamment s'agissant de l'agrément des centres de contrôle technique. Les conclusions tendant à ce que les effets de l'annulation soient modulés dans le temps doivent par suite être rejetées. Sur les conclusions aux fins d'injonction : 11. L'annulation prononcée, dont l'effet est, ainsi qu'il a été dit au point 10, de faire à nouveau entrer en vigueur le décret du 9 août 2021, à l'exception de ses articles 6, 8 et 9, n'impliquant pas l'édiction de mesures d'exécution au sens des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions aux fins d'injonction des requérantes. Sur les frais irrépétibles : 12. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme globale de 3 000 euros à verser aux associations requérantes en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le décret du 25 juillet 2022 est annulé. Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté. Article 3 : L'Etat versera aux associations requérantes une somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'association Respire, à l'association Ras-le-Scoot, à l'association Paris sans voiture, à la Première ministre et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré à l'issue de la séance du 12 octobre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Pauline Hot, auditrice-rapporteure. Rendu le 31 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé La rapporteure : Signé : Mme Pauline Hot La secrétaire : Signé : Mme Valérie Peyrisse
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Vu la procédure suivante : Procédure antérieure : M. D... A... a demandé le 27 juin 2019 au juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe, statuant sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, d'ordonner une expertise pour déterminer les préjudices subis à la suite de sa prise en charge entre le 1er mars et le 1er mai 2019 par le centre pénitentiaire de Baie-Mahault et par le centre hospitalier universitaire (CHU) de Pointe-à-Pitre/Les Abymes. Par une ordonnance n° 1900637 du 1er septembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 15 septembre 2020, M. A... demande au juge des référés de la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) de faire droit à sa demande d'expertise ; 3) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le premier juge ne pouvait lui faire grief de n'apporter aucun élément de nature à démontrer une négligence dans l'administration des soins alors que sa situation de détenu ne lui permettait pas de recueillir des témoignages et que l'expertise avait précisément pour objet d'établir les faits reprochés ; - il a souffert pendant 17 jours de fièvre, fortes quintes de toux, violentes douleurs thoraciques et abdominales, difficultés respiratoires, et l'unité sanitaire en milieu pénitentiaire s'est bornée à diagnostiquer une simple grippe sur la base de seuls relevés de température ; il accusait pourtant une importante perte de poids, présentait une notable hémoptysie et baignait quasi-quotidiennement dans son urine et ses excréments ; le personnel pénitentiaire a tardé à prendre ses alertes au sérieux et à le transférer au CHU où il a été soigné 10 jours pour une infection pulmonaire qui aurait pu lui être fatale ; la circonstance relevée par le premier juge qu'il aurait été vu 19 fois par un médecin ou un membre de l'unité médicale de l'établissement n'est pas de nature à établir que les soins reçus auraient été appropriés à son état de santé et de même qualité qu'à l'égard d'un individu libre, ce que l'expertise doit rechercher ; - les faits sont susceptibles d'engager la responsabilité de l'Etat et l'expertise est utile. Par un mémoire enregistré le 6 octobre 2020, le CHU de la Guadeloupe conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A... d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et subsidiairement à ce que la mission de l'expert soit précisée et que les frais soient mis à la charge de M. A.... Il soutient que M. A... n'apporte aucun élément nouveau en appel, alors qu'il avait la possibilité de solliciter son dossier médical préalablement ; il ne décrit pas les conditions de sa prise en charge par le CHU, et aucune faute n'apparaît imputable à celui-ci. Par un courrier du 7 décembre 2020, la Caisse primaire d'assurance maladie du Tarn indique ne pas être en mesure de chiffrer sa créance. La requête a été communiquée au garde des sceaux, qui n'a pas produit d'observations en appel. La présidente de la cour a désigné, par une décision du 1er décembre 2020, Mme Catherine Girault, président de chambre, comme juge des référés en application des dispositions du livre V du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative. 1. M. A..., incarcéré au centre pénitentiaire de Baie-Mahault du 3 novembre 2018 au 12 septembre 2019, s'est plaint de la mauvaise qualité des soins qu'il aurait reçus pendant la période du 1er mars au 1er mai 2019. Sa demande d'expertise a été rejetée par le juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe aux motifs qu'il n'apportait aucun élément à l'appui de ses allégations de négligence, et qu'il a été vu en consultation médicale à 19 reprises entre son incarcération au centre pénitentiaire de Baie-Mahault le 8 novembre 2018 et son transfèrement dans un autre établissement en métropole le 12 septembre 2019, et notamment à six reprises durant la période litigieuse des mois de mars et d'avril 2019, au cours de laquelle il se plaint de ne pas avoir été pris en charge médicalement. Il relève appel de cette ordonnance. Sur l'utilité de l'expertise : 2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d'expertise lorsque, en particulier, elle est formulée à l'appui de prétentions qui ne relèvent manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative, qui sont irrecevables ou qui se heurtent à la prescription. De même, il ne peut faire droit à une demande d'expertise permettant d'évaluer un préjudice, en vue d'engager la responsabilité d'une personne publique, en l'absence manifeste de lien de causalité entre le préjudice à évaluer et la faute alléguée de cette personne. 3. En premier lieu, au regard de la situation de vulnérabilité particulière d'un détenu et de l'objet de l'expertise sollicitée, destinée à évaluer si le comportement de l'administration et du centre de soins auquel le centre pénitentiaire était rattaché lui a permis de bénéficier des soins appropriés à son état de santé, le premier juge ne pouvait opposer à l'intéressé l'absence d'éléments autres que ses propres allégations de négligence à son égard. En second lieu, le nombre de consultations médicales durant la période de deux mois litigieuse, fût-il élevé à six, n'était pas davantage de nature à établir à lui seul l'efficacité de sa prise en charge, alors que l'intéressé indique que lors de son hospitalisation les médecins qui l'ont vu ont précisé qu'il n'aurait pas survécu à une pathologie pulmonaire aigue s'il était resté incarcéré. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a dénié toute utilité à l'expertise demandée. 4. Il y a lieu d'annuler l'ordonnance attaquée et, statuant par l'effet dévolutif de l'appel, d'ordonner l'expertise dans les conditions fixées ci-après, au contradictoire tant du CH de Pointe-à-Pitre-Les Abymes que de l'Etat, dès lors que la circonstance qu'en vertu du code de la santé publique, le service public hospitalier assure, dans des conditions fixées par voie réglementaire, les examens de diagnostic et les soins dispensés aux détenus en milieu pénitentiaire n'exonère pas l'Etat du devoir de suivre avec attention l'état de santé des détenus. 5. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A... présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Les conclusions du CHU de Pointe-à Pitre ne peuvent qu'être rejetées ORDONNE : Article 1er : M. B... C..., expert en pneumologie exerçant à l'Institut Médico légal, 12 avenue Rockfeller 69008 LYON 08, est désigné pour réaliser une expertise aux fins de : 1. Se faire communiquer le dossier médical de M. A..., ainsi que les éléments de son dossier pénitentiaire afférents aux signalements qu'il aurait pu effectuer aux surveillants, et tous documents relatifs à l'état de santé du détenu entre le 1er mars 2019 et le 1er mai 2019 ; 2. Entendre M. A..., l'examiner, prendre connaissance de toutes autres pathologies antérieures ou postérieures à l'épisode de 2019. Le cas échéant et s'il l'estime utile, entendre tout membre du personnel du centre pénitentiaire de Baie-Mahault et du Centre Hospitalier Universitaire Pointe-à-Pitre/Les Abymes en contact avec le requérant entre le 1er mars 2019 et le 1er mai 2019 ; 3. Décrire en détail les conditions de la survenance d'une infection, les symptômes notés, les demandes de l'administration pénitentiaire au service de santé et les soins prodigués. Indiquer si les soins reçus par M. A... au centre pénitentiaire de Baie-Mahault entre le 1er mars 2019 et le 1er mai 2019 ont été conformes aux règles et usages, diligents et adaptés à son état ;; 4. Rechercher si les soins, traitements et interventions prodigués par les médecins et/ou l' établissement de santé, tant au titre de l'établissement du diagnostic, le choix de la thérapie, la réalisation des soins, qu'au titre du suivi et de la surveillance ont été pleinement justifiés par l'état du patient, parfaitement adaptés au traitement de son état, et conformes aux données acquises de la science et de la pratique médicale au jour des faits ; 5. Dans la négative analyser de façon détaillée et motivée la nature des erreurs, imprudences, manques de précautions nécessaires, négligences, maladresses ou autres défaillances fautives notamment au niveau de l'établissement du diagnostic, du choix de la thérapie, des soins, de la surveillance ; préciser à qui elles sont imputables ; 6. Déterminer la nature des préjudices subis, en quantifiant le cas échéant sur une échelle de 1 à 7 les souffrances supplémentaires, physiques et psychiques, résultant d'un retard de soins, préciser la durée de ce retard et l'incapacité qui en est résultée, en distinguant éventuellement avant et après consolidation. Dire s'ils sont directement imputables à un acte de prévention de diagnostic ou de soins, y compris une abstention, ou résultent de l'évolution normale de la pathologie initiale. Dire quelles sont les causes possibles de ce dommage et indiquer le cas échéant si d'autres pathologies ou une infection nosocomiale ont pu interférer sur les événements qui en sont à l'origine. Préciser si l'état de la victime en lien avec l'infection pulmonaire en cause est susceptible de modification en aggravation ou en amélioration ; 7. D'une manière générale fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la juridiction compétente de déterminer les responsabilités encourues au regard des préjudices subis, le lien de causalité entre ces diverses lésions et séquelles et les fautes ou négligences commises, et les parts éventuellement imputables à l'administration pénitentiaire et aux intervenants du CHU. Article 2 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues aux articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il ne pourra recourir à un sapiteur sans l'autorisation préalable du président de la cour. Article 3 : Préalablement à toute opération, l'expert prêtera serment dans les formes prévues à l'article R. 621-3 du code de justice administrative. Article 4 : L'expertise aura lieu en présence de M. A..., du garde des sceaux, ministre de la justice, du CHU de Pointre-à-Pitre-Les Abymes et de la CPAM du Tarn. Article 5 : L'expert avertira les parties conformément aux dispositions de l'article R. 621-7 du code de justice administrative. Article 6 : L'expert déposera son rapport au greffe en format dématérialisé dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente ordonnance. Des copies seront notifiées par l'expert aux parties intéressées. Avec leur accord, cette notification pourra s'opérer sous forme électronique. L'expert justifiera auprès de la cour de la date de réception de son rapport par les parties. Article 7 : Les frais et honoraires de l'expertise seront mis à la charge de la ou des parties désignées dans l'ordonnance par laquelle le président de la cour liquidera et taxera ces frais et honoraires. Article 8 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 9 : La présente ordonnance sera notifiée à M. D... A..., au garde des sceaux, ministre de la justice, au CHU de Pointre-à-Pitre-Les Abymes et aux CPAM du Tarn et de Guadeloupe . Copie en sera adressée au directeur du centre pénitentiaire de Baie Mahault. Fait à Bordeaux, le 7 janvier 2021. Le juge d'appel des référés, Catherine Girault, La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance N° 20BX03033 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mmes Q... et J... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2014 par lequel le maire de Cotignac a accordé, à M. et à Mme T... H..., et à M. et à Mme R... L..., un permis de construire en vue de l'édification d'une maison d'habitation avec garage et piscine. Par un jugement n° 1902627 du 26 juin 2020, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté attaqué. Procédure devant la Cour : I°) Par une requête n° 20MA03106 et un mémoire complémentaire enregistrés le 25 août 2020 et le 12 mars 2021, M. R... L..., Mme F... C... épouse L..., M. T... H... et Mme U... G... épouse H..., représentés par Me Guenot, demandent à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 26 juin 2020 ; 2°) de rejeter la demande de Mmes Q... et J... ; 3°) de mettre à la charge de Mmes Q... et J... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - le tribunal a, à tort, retenu l'illégalité du permis de construire pour violation de l'article II NB3 du plan d'occupation des sols (POS) de la commune de Cotignac en méconnaissance l'autorité de la chose jugée et en tout état de cause, il existe un accord de tous les copropriétaires riverains quant à l'élargissement à 4 mètres du chemin litigieux reliant le chemin d'Andriou au chemin de M... ; - les plans et notamment le plan de masse sont conformes aux prescriptions de l'article R 431-9 du code de l'urbanisme ; - le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; - le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article II NB4 du plan d'occupation des sols de la commune. Par un mémoire distinct, enregistré le 26 août 2020, M. et Mme L..., et M. et Mme H..., représentés par Me Guenot, demandent au Tribunal de condamner Mmes Q... et J... à leur verser une indemnité de 15 000 euros en réparation des conséquences dommageables de leur recours, sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme. Ils soutiennent que : - Mmes Q... et J... ont, depuis plusieurs années, multiplié les démarches pour faire échec à tout projet de construction sur leur terrain et cet acharnement procédural a dégénéré en abus ; - cette situation leur cause un préjudice dans la mesure où ils souhaiteraient vendre leur terrain avec le permis de construire litigieux. Par deux mémoires en défense enregistrés le 27 octobre 2020 et un mémoire enregistré le 9 août 2021, Mmes Q... et J... concluent au rejet de la requête et de la demande indemnitaire et à la mise à la charge de la commune de Cotignac et des requérants la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - les moyens de la requête sont infondés ; - les plans ne sont pas conformes aux prescriptions de l'article R 431-9 du code de l'urbanisme ; - l'avis du Service départemental d'incendie et de secours du 18 septembre 2014 est erroné, l'avis de défrichement n'est pas produit et la configuration du terrain et des voies d'accès s'opposent au projet au regard du risque incendie ; - le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article II NB3 et 4 du plan d'occupation des sols de la commune ; - La commune aurait dû opposer un sursis à statuer à la demande de permis de construire. II°) Par une requête n° 20MA03111 et un mémoire complémentaire enregistrés le 25 août 2020 et le 15 avril 2022, la commune de Cotignac, représentée par Me Lopasso, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 26 juin 2020 ; 2°) de rejeter la demande de Mmes Q... et J... ; 3°) de mettre à la charge de Mmes Q... et J... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le tribunal a, à tort, retenu l'illégalité du permis de construire pour violation de l'article II NB3 du plan d'occupation des sols de la commune de Cotignac en méconnaissance l'autorité de la chose jugée et en tout état de cause, il existe un accord de tous les copropriétaires riverains quant à l'élargissement à 4 mètres du chemin litigieux reliant le chemin d'Andriou au chemin de M... ; - les plans et notamment le plan de masse sont conformes aux prescriptions de l'article R 431-9 du code de l'urbanisme ; - le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; - le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article II NB4 du plan d'occupation des sols de la commune. Par des mémoires en défenses enregistrés le 14 février 2022 et 9 mai 2022, Mmes Q... et J... concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune de Cotignac et des requérants la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - les moyens sont infondés ; - les plans ne sont pas conformes aux prescriptions de l'article R 431-9 du code de l'urbanisme ; - l'avis du Service départemental d'incendie et de secours du 18 septembre 2014 est erroné, l'avis de défrichement n'est pas produit et la configuration du terrain et des voies d'accès s'opposent au projet au regard du risque incendie ; - le projet ne méconnait pas les dispositions de l'article II NB3 et 4 du plan d'occupation des sols de la commune ; - La commune aurait dû opposer un sursis à statuer. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. N..., - les conclusions de M. Roux, rapporteur public, - et les observations de Me Stephan, substituant Me Lopasso, représentant la commune de Cotignac, Me Ghigo, substituant Me Guenot, représentant M. et Mme L..., et M. et Mme H..., et A... P... et E... B..., représentant Mme Q... et Mme J.... Considérant ce qui suit : 1. Les requêtes qui portent sur l'annulation d'un même jugement ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y donc lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt. 2. Par un arrêté en date du 10 décembre 2014, le maire de Cotignac a délivré, à M. et à Mme H... et à M. et à Mme L..., un permis de construire en vue de l'édification d'une maison d'habitation d'une surface de plancher de 221 m², avec garage et piscine, sur des parcelles initialement cadastrées section E nos 2240, 2242 et 2244, puis section E nos 541, 584 et 1966, et situées lieu-dit M..., sur le territoire de la commune. La commune de Cotignac et les bénéficiaires du permis de construire relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 10 décembre 2014 ensemble la décision implicite portant rejet du recours gracieux de Mmes Q... et J... à l'encontre du permis de construire. Sur le bien-fondé du jugement : 3. En vertu des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un permis de construire en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation. Dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance. Dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens. Il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, en application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime, en l'état du dossier, de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges. 4. Le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 10 décembre 2014 au seul motif qu'il méconnaissait les dispositions de l'article II NB 3 du règlement du POS de la commune de Cotignac. 5. Aux termes de l'article II NB 3 du règlement du POS de la commune de Cotignac, relatif aux accès et voiries : " 1. Accès / Pour être constructible, un terrain doit comporter un accès à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisin ou éventuellement obtenu par application de l'article 682 du code civil. / Les caractéristiques des accès doivent permettre de satisfaire aux règles minimales de desserte : défense contre l'incendie, protection civile, brancardage... / (...) 2. Voirie / Les terrains doivent être desservis par des voies publiques ou privées répondant à l'importance et à la destination de la construction ou de l'ensemble des constructions qui y sont édifiées. / Aucune voie ne doit avoir une largeur inférieure à 4 M. " 6. En premier lieu, par un jugement du 20 juin 2013 n° 1200647, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté en date du 12 octobre 2011 par lequel le maire de Cotignac a accordé à M. et Mme K... D... un permis de construire d'une maison d'habitation avec garage et piscine, implantée conformément au permis contesté, pour méconnaissance des dispositions de l'article II NB 4 du POS relatif aux réseaux d'eau pluviales et l'article II NB 10 du POS relatif aux hauteurs des constructions et estimé, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'aucun des autres moyens invoqués à l'encontre de cette décision, en particulier la méconnaissance des dispositions de l'article II NB3 du plan d'occupation des sols (POS), n'était susceptible d'en fonder l'annulation. Toutefois, et alors même que le nouveau permis attaqué reprend les caractéristiques de celui de M. et Mme D... corrigé des illégalités relevées par les premiers juges, ce jugement, devenu définitif, n'est revêtu de l'autorité de la chose jugée que dans la mesure où il fonde celle-ci sur la méconnaissance des dispositions des articles II NB 3 et 10 du POS, seuls motifs constituant le soutien nécessaire de son dispositif sur ce point. Ainsi et en tout état de cause, Mmes Q... et J... sont recevables à invoquer, à l'appui de leur conclusion à fin d'annulation du nouveau permis, la méconnaissance des dispositions de l'article II NB3 du POS sans méconnaitre l'autorité de la chose jugée ou le principe de sécurité juridique. 7. En second lieu, il ressort des pièces du dossier et en particulier des plans produits au soutien de la demande de permis de construire présentée par M. et Mme L... et M. et Mme H..., que l'accès au terrain d'assiette du projet de construction en litige doit se faire, dans le prolongement du chemin de Camp d'Andriou, grâce à l'élargissement et à la réouverture de l'ancien chemin qui reliait ce chemin de Camp d'Andriou à celui de M..., empruntant notamment une parcelle appartenant à Mmes Q... et J.... Toutefois, il ressort des constatations mentionnées dans un procès-verbal d'huissier dressé le 2 mars 2015 et dans un rapport en date du 7 septembre 2018 établi par un expert missionné par Mmes Q... et J..., que le chemin de Camp d'Andriou, était, à la date d'édiction de l'arrêté attaqué, une piste en terre d'une largeur variant de 2,30 à 3,60 mètres. Il ressort de ces mêmes pièces que l'ancien chemin susmentionné qui reliait ce chemin du Camp d'Andriou à celui de M... était réduit à certains endroits à un simple sentier piétonnier, d'une largeur limitée, en mauvais état et traversant une zone restée à l'état naturel et que, s'il avait vocation à relier effectivement le chemin du Camp d'Andriou à celui de M..., son débouché avait disparu sous la végétation au niveau de son point de jonction avec le chemin de M.... Un tel chemin ne répond pas aux prescriptions de l'article II NB 3 du règlement du POS de la commune de Cotignac à la date de la décision attaquée au regard de sa largeur. 8. Si les pétitionnaires et la commune se prévalent de la délibération du conseil municipal de Cotignac adoptée le 27 mai 2010 prévoyant la réouverture et la réfection du chemin reliant le Camp d'Andriou à celui de M... permettant de desservir le terrain d'assiette, il ressort des termes mêmes de la délibération qu'il existe des blocages des riverains à ce projet " sur le seul fait que sa largeur est inférieure à 4 mètres ". Ils ne peuvent davantage se prévaloir utilement de la circonstance que des négociations ont été engagées avec les consorts Q... en vue de modifier le tracé d'une partie du chemin d'accès antérieurement à la délivrance du permis en litige. En effet, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces négociations ont donné lieu à un accord sur la modification du tracé de ce chemin. Par ailleurs si les défendeurs se prévalent des emplacements réservés nos 35 et 36 qui figuraient dans le POS, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il existait, à la date d'édiction de l'arrêté attaqué, un projet suffisamment précis et certain d'élargissement à plus de quatre mètres du chemin d'accès au terrain d'assiette du projet. Par suite, la demande de permis de construite en litige méconnait les dispositions de l'article II NB 3 du règlement du POS de la commune de Cotignac. 9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Cotignac et les pétitionnaires ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 10 décembre 2014 du maire de Cotignac dans sa totalité et, par voie de conséquence, la décision implicite portant rejet de leur recours gracieux. Sur les conclusions reconventionnelles à fin d'indemnisation : 10. L'article L. 600-7 du code de l'urbanisme permet au juge administratif d'accorder des dommages et intérêts au bénéficiaire d'un permis de construire lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre cet acte est mis en œuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis. Toutefois, l'annulation des deux décisions attaquées s'oppose à ce qu'il soit fait droit à la demande présentée à ce titre par M. et Mme H..., et par M. et Mme L... sur le fondement de ces dispositions. Leurs conclusions doivent donc être rejetées. Sur les frais liés au litige : 11. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " 12. Ces dispositions font obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par la commune de Cotignac, d'une part, et, M. et Mme H..., et M. et Mme L..., d'autre part, soient mises à la charge de Mmes Q... et J... qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, et sur le fondement de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Cotignac une somme de 1 000 euros et la même somme à la charge de M. et de Mme H..., et M. et de Mme L..., à verser aux requérantes. D É C I D E : Article 1er : Les requêtes de la commune de Cotignac et de M. et Mme L... et M. et Mme H... sont rejetées. Article 2 : La commune de Cotignac d'une part, et M. et Mme L... et M. et Mme H... pris ensemble d'autre part, verseront chacun la somme de 1 000 euros à Mme Q... et Mme J... prises ensemble en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cotignac, à M. T... H... ayant été désigné comme représentant unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à Mme O... Q... et à Mme I... J.... Délibéré après l'audience du 13 octobre 2022, où siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 octobre 2022. 2 Nos 20MA03106, 20MA03111 nb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers à lui verser une indemnité provisionnelle de 685 641,46 euros, ou subsidiairement de 452 523, 36 euros, en réparation des préjudices subis du fait de deux infections nosocomiales et d'un retard de diagnostic. Par ordonnance n° 2000748 du 23 décembre 2021, la présidente du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 4 janvier 2022, Mme A... demande au juge d'appel des référés : 1°) à titre principal, d'annuler cette ordonnance du 23 décembre 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Poitiers ; 2°) de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers à lui verser une indemnité provisionnelle de 734 660,50 euros, subsidiairement la somme de 484.875,93 euros par application d'un taux de perte de chance de 66 % ; 3°) de mettre à la charge du CHU une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens. Elle soutient que : - l'obligation du CHU et de la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) n'est pas sérieusement contestable ; elle a été victime de deux infections nosocomiales diagnostiquées en novembre 2012 après arthrodèse du genou gauche et en novembre 2016, après retrait d'une fistule de l'enclouage ; la seconde infection est bien intervenue sur le matériel d'arthrodèse et doit être regardée, comme l'a reconnu la Commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI), comme une récidive de la première, sans que le délai d'incubation d'une infection osseuse permette d'écarter cette conclusion ; c'est donc à tort que le premier juge s'est référé à un second rapport d'expertise estimant que la seconde infection était d'origine communautaire, retenant un caractère non nosocomial du fait d'une origine exogène, distinction qui n'est pas pertinente dans le dernier état de la jurisprudence ; - son taux de déficit fonctionnel permanent a été évalué, après amputation au niveau de la cuisse gauche et dépression réactionnelle, à 50 % dont 25 % imputables aux infections ; la responsabilité sans faute du CHU étant engagée sur le fondement de l'article L.1142-1 du code de la santé publique pour la totalité du préjudice résultant de ces infections, c'est à tort que la SHAM a estimé devoir ne répondre que d'une perte de chance de 66 % au titre des fautes commises dans la prise en charge des infections ; - subsidiairement, le CHU a tardé à diagnostiquer la deuxième infection en 2016, le scanner aurait dû être pratiqué dès le mois de mai, et non en novembre, et l'ablation de la fistule en juillet 2016 s'avérait un geste chirurgical inadapté, alors que l'ablation du matériel aurait pu éviter l'amputation ; il n'a pas contesté cette faute ; - le CHU ne s'était pas opposé à la réévaluation du taux de perte de chance de 50 % à 66 % par les seconds experts, et la SHAM a indemnisé la caisse de ses débours sur cette base ; rien ne justifiait donc que le premier juge estime " non fixé " le taux de perte de chance au vu de deux rapports " contradictoires " ; - les préjudices ayant été évalués conformément aux conclusions des experts qui avaient pour mission d'examiner ceux en lien avec les manquements du CHU de Poitiers, le premier juge ne pouvait estimer que la distinction avec l'état initial n'était pas justifiée ; seul le déficit fonctionnel temporaire pouvait être discuté sur ce point ; - la période de déficit total a duré 9 mois, qui pourraient a minima être indemnisés par une somme de 8 150 euros sur la base de 25 euros par jour, le déficit fonctionnel temporaire à 75 % pendant 366 jours justifie une somme de 6 862, 50 euros, celui à 50 % pendant 60 jours une somme de 750 euros et celui à 25 % pendant 178 jours une somme de 1 112,50 euros, soit au total 16 875 euros ; - les souffrances endurées cotées à 6/7 du fait des très nombreuses hospitalisations et de la dépression réactionnelle ayant conduit à une intoxication médicamenteuse volontaire justifient 50 000 euros d'indemnité ; - le préjudice esthétique temporaire de 3,5/7 subi pendant six ans ouvre droit à une provision de 12 000 euros ; - ses frais divers s'élèvent à la somme de 982,75 euros auxquels s'ajoutent des frais exposés pour l'aménagement de son logement pour 8 356,90 euros ; - elle sollicite 21 420 euros pour l'aide à la tierce personne temporaire sur la base d'un tarif horaire de 20 euros ; - son déficit fonctionnel permanent fixé à 25 % justifie, compte tenu de l'âge de 68 ans atteint lors de la consolidation en 2018, une somme de 41 250 euros selon le " référentiel Mornet " de 2020 ; - le préjudice esthétique permanent résultant de l'amputation, coté 4/7, doit être indemnisé à hauteur de 20 000 euros ; - la privation de toutes activités de loisirs justifie l'indemnisation du préjudice d'agrément à hauteur de 20 000 euros, et les répercussions sur sa vie sexuelle une provision de 20 000 euros ; - l'aide d'une tierce personne pendant trois heures par jour doit être évaluée, sur la base d'un taux horaire de 20 euros, à 80 100 euros jusqu'au 31 décembre 2021, puis à 443 229,60 euros sur la base d'un coefficient de capitalisation de 17,93 pour une femme de 71 ans ; - elle n'a pas demandé à ce stade l'indemnisation de la totalité de ses préjudices retenus par les experts et peut obtenir par provision l'indemnisation intégrale de ceux qui sont certains. Par une lettre du 13 janvier 2022, la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Charente-Maritime agissant pour le compte de celle des Deux-Sèvres ne s'oppose pas à la demande de Mme A... et informe la cour qu'elle a été indemnisée par la SHAM sur la base d'un taux de perte de chance de 66 %. Le président de la cour a désigné, par une décision du 1er septembre 2022, Mme Catherine Girault, présidente de chambre, comme juge des référés en application des dispositions du livre V du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... a été hospitalisée au CHU de Poitiers pour arthrodèse du genou gauche pratiquée le 1er octobre 2012. Dans les suites, un sepsis a été constaté, et elle été réadmise dans le même établissement le 7 novembre pour reprise chirurgicale avec lavage débridement, et antibiothérapie qui a permis la cicatrisation. En février 2016 une fistule sur la cicatrice d'arthrodèse est apparue, et son ablation a été pratiquée en juillet 2016, à l'occasion de laquelle la présence de plusieurs germes a été constatée. Puis la patiente a subi, après constat d'une zone de nécrose et d'une résurgence de la fistule, une nouvelle intervention pour ablation du clou d'enclouage en novembre 2016 avec exérèse de tissu osseux, suivie en février 2017 d'une greffe osseuse avec reconstruction fémoro-tibiale. Plusieurs épisodes infectieux avec fièvre ont conduit entre-temps à des hospitalisations à Parsay et à Niort avec prise en charge des infections dues aux cathéters de dispensation des antibiotiques, et en dernier lieu Mme A... a dû subir au CHU de Poitiers une amputation au milieu de la cuisse gauche le 15 avril 2017, suivie d'une rééducation avec prothèse fémorale. 2. Mme A... a saisi la CCI de Poitou-Charentes qui a diligenté successivement deux expertises. Le premier rapport déposé le 17 octobre 2017 a conclu qu'elle a été victime d'une infection nosocomiale en 2012, et que la seconde infection en 2016 ne peut être regardée comme nosocomiale au regard du délai de survenance de plus de deux ans après la première, alors pourtant que les experts ont relevé que la fistule est apparue " sur une infection chronique d'arthrodèse ". Ils ont toutefois noté pour la seconde période que la patiente a été victime de deux infections nosocomiales par le cathéter d'administration des antibiotiques, traitées par antibiotiques, et que la prise en charge de la fistule, non conforme aux règles de l'art, est à l'origine d'une perte de chance de 50 % d'éviter l'amputation. Le second rapport déposé le 20 mai 2018 par un chirurgien orthopédiste et un infectiologue a également estimé que l'infection de 2016, qualifiée de " communautaire ", était sans lien avec la précédente. Il a relevé que son diagnostic avait été retardé par une prise en charge inappropriée par le médecin traitant de Mme A..., que le chirurgien finalement consulté en mai 2016 au CHU de Poitiers aurait dû prescrire un scanner dès cette période et en tout état de cause lors de l'ablation de la fistule en juillet, et que la faute entraînant un retard de prise en charge, l'ablation du matériel n'ayant eu lieu qu'en novembre, était à l'origine d'une perte de chance de 66 % d'éviter l'amputation. 3. La CCI de Poitou-Charentes a estimé le 5 septembre 2018 que, contrairement à ce qu'avaient retenu les seconds experts, l'infection nosocomiale constatée en 2016 était une récidive de celle survenue en 2012, et que les préjudices devaient être indemnisés par le CHU et son assureur la SHAM. La proposition de celle-ci n'a pas été acceptée par Mme A..., qui a seulement admis l'offre d'une indemnité provisionnelle de 20 000 euros. Elle a alors saisi le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers d'une demande de provision à hauteur de 685 641,46 euros, ou subsidiairement 452 523,36 euros si une perte de chance de 66 % d'éviter l'amputation était retenue à raison de la faute commise dans le traitement de la seconde infection. Elle relève appel de l'ordonnance du 23 décembre 2021 qui a intégralement rejeté ses demandes. Sur le caractère non sérieusement contestable des créances alléguées : 4. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Il résulte de ces dispositions que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état. En ce qui concerne la responsabilité sans faute du CHU pour infection nosocomiale : 5. Selon le deuxième alinéa de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, les établissements, services ou organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins " sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère (...) ". Selon l'article L. 1142-1-1 du même code : " (...) ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale : 1° Les dommages résultant d'infections nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l'article L. 1142-1 correspondant à un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % (...) ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales (...) ". Doit être regardée, au sens de ces dispositions, comme présentant un caractère nosocomial une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d'un patient et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s'il est établi qu'elle a une autre origine que la prise en charge. 6. Il ressort des expertises produites au dossier qu'une première infection nosocomiale à staphylococcus epidermidis, peptoniphilus indolicus et staphylococcus hominis est survenue en octobre 2012 dans les suites de l'arthrodèse du genou gauche. Après antibiothérapie, elle semblait avoir disparu en mai 2013, ce qui a permis la mise en place d'une prothèse totale du genou droit en juillet 2013. Une suspicion de sepsis profond a toutefois été soulevée après l'apparition d'une fistule au niveau de la cicatrice du genou gauche en février 2016, et les prélèvements réalisés en juillet lors de l'ablation de cette fistule ont révélé des germes différents, staphylococcus simulans et corynebacterium aurimucosum. En l'absence de succès de l'antibiothérapie, et alors qu'un épisode fiévreux a conduit fin aout à l'identification de nouvelles bactéries Escherichia coli et Pseudomonas aeruginosa au centre hospitalier de Niort, l'indication du retrait du matériel d'enclouage a été posée, et lors de l'opération du 15 novembre 2016 au CHU de Poitiers, il a été constaté une infection à Enterococcus faecalis, Staphylococcus aureus et Staphylococcus capitis. La première de ces trois dernières bactéries est à l'origine de l'état infectieux sévère qui a conduit à l'amputation. 7. Au regard de l'historique de ces infections, de la diversité des germes en cause et des conclusions des experts rappelées au point 2, c'est à bon droit que la première juge a estimé qu'il n'appartiendrait qu'au juge du fond de se prononcer sur le lien entre l'infection nosocomiale de 2012 et l'infection de 2016, et que la créance alléguée résultant pour l'ensemble des préjudices d'une infection nosocomiale ayant abouti, selon les experts, à un déficit fonctionnel permanent imputable de 25 %, ne présentait pas un caractère non sérieusement contestable au sens des dispositions précitées du code de justice administrative. Par suite, et sans qu'il soit besoin de s'interroger sur la déduction pratiquée par les seconds experts sur le taux de déficit fonctionnel permanent de 50 % auxquels ils ont évalué l'état de Mme A... du fait de l'amputation de cuisse et des séquelles psychologiques, d'un taux de 25 % pour " état antérieur constitué par une arthrodèse du genou pour 25 % ", la demande de provision présentée à l'encontre du centre hospitalier au titre d'une infection nosocomiale ne peut être accueillie. En ce qui concerne la responsabilité pour faute dans le traitement de la seconde infection : 8. Il ressort des avis médicaux au dossier que sont fautives l'abstention du chirurgien auquel Mme A... a été adressée en mai 2016 de faire procéder à un scanner, qui aurait permis de préciser l'état osseux devant une suspicion d'infection profonde, de rechercher une collection et de préciser le site des prélèvements, la décision de procéder seulement à une fistulectomie en juillet au lieu de retirer le matériel à l'origine de l'infection, et l'abstention de réaliser un scanner au vu de l'état des tissus lors de l'excision de la fistule, ce qui a conduit à un retard de traitement de quatre mois, et fait perdre à l'intéressée une chance sérieuse d'éviter l'amputation. Le centre hospitalier universitaire de Poitiers n'a contesté ni lors de la seconde expertise, ni devant le tribunal que les fautes commises ont fait perdre 66 % de chance d'éviter l'amputation, et a indemnisé les débours de la caisse sur cette base. Dans ces conditions, la créance de Mme A... présente en principe un caractère non sérieusement contestable à hauteur de 66 % des préjudices liés à l'amputation. 9. La circonstance que les experts n'ont pas évalué séparément les préjudices imputables à l'amputation et ceux en lien avec des interventions que Mme A... aurait subies en toute hypothèse ne faisait pas obstacle, contrairement à ce qu'a retenu la première juge, à ce que le juge des référés apprécie au vu des éléments des expertises si certains des préjudices pouvaient être regardés, en tout ou partie, comme non sérieusement contestables. Il y a lieu de procéder à cette évaluation sur la base a minima des propositions avancées par la SHAM, dont le caractère approprié au regard des prétentions de Mme A... devra être débattu devant le juge du fond, le supplément éventuel relevant alors d'une obligation contestable. 10. L'état de santé de Mme A..., qui était alors âgée de 68 ans, a été consolidé à la date de la seconde expertise réalisée le 7 mai 2018, avec un déficit fonctionnel permanent de 25 % imputable, que la SHAM a admis d'indemniser à hauteur de 19 800 euros après application du taux de perte de chance. Il y a lieu de retenir ce montant comme non sérieusement contestable. 11.Compte tenu du nécessaire report dans le temps des périodes de déficit temporaire, qui seraient intervenues en partie si la dépose du matériel avait été réalisée plus tôt, il n'y a pas lieu de fixer en l'état une provision sur ce point, comme l'admet d'ailleurs Mme A.... 12. En revanche, le besoin d'assistance par une tierce personne, en l'occurrence apportée par le mari de l'intéressée, ce qui ne fait pas obstacle à l'indemnisation, peut être fixé a minima après l'amputation sur la base de deux heures par jour, sans retenir à ce stade les 2,5 ou 3 heures envisagées par les experts, compte tenu de la contestation sur l'état antérieur, Mme A... marchant avec une canne avant l'arthrodèse du genou gauche. La créance non sérieusement contestable s'élève donc, depuis l'amputation jusqu'à la date de la présente décision, sur la base du tarif particulièrement bas proposé par la SHAM dans sa première offre à 10 euros par heure, à 24 720 euros, dont il y a lieu de retenir 66 % soit 16 315 euros. Pour l'avenir, il appartiendra au juge du fond de fixer les modalités d'indemnisation de ce préjudice, en tenant compte de la situation personnelle de Mme A... à la date de sa décision et des justificatifs d'aides qu'elle pourrait percevoir. 13. L'indemnisation des souffrances endurées, physiques et psychiques, cotées à 6/7 , a été admise par la SHAM à 15 180 euros après application du taux de perte de chance. Il y a lieu de retenir ce montant comme non sérieusement contestable. 14. Le préjudice esthétique issu de l'amputation et de la présentation en fauteuil roulant, qui est similaire avant comme après la consolidation, a été coté respectivement à 3,5 et 4 sur une échelle de 7. Il y a lieu de retenir comme non contestable la somme globale de 9 000 euros admise par la SHAM, soit 5 940 euros après application du taux de perte de chance. 15. Les experts ont retenu un préjudice sexuel, la part non contestable de l'indemnisation est celle admise par la SHAM pour 500 euros. 16. Enfin, Mme A... a justifié de frais d'aménagement de son domicile pour 7 056 euros, de frais de dossier médical pour 69,72 euros, qui présentent un lien suffisant avec les fautes retenues. Après application du taux de perte de chance, une provision de 4 703 euros peut être fixée à ce titre. 17. Pour le surplus, il appartiendra aux parties de discuter au fond devant le tribunal des frais de transport et de séjour dans divers établissements antérieurement à l'amputation et du préjudice d'agrément, pour lequel aucun élément particulier n'est apporté pour en justifier le caractère spécifique et distinct du déficit fonctionnel permanent, de nature à caractériser une créance non sérieusement contestable. 18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que la première juge lui a refusé toute indemnité provisionnelle, et que la part non sérieusement contestable de la créance de Mme A... sur le centre hospitalier de Poitiers peut être fixée à 65 498 euros. Compte tenu de la provision déjà perçue de 20 000 euros, il y a donc lieu de condamner le CHU de Poitiers à lui verser la somme provisionnelle de 45 498 euros. Sur les dépens : 19. Mme A... ne saurait demander au juge des référés de se prononcer sur les dépens, qui relèvent du juge du fond, alors au demeurant que les frais des expertises diligentées par la CCI ne sont pas mis à la charge des demandeurs. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative : 20. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du CHU de Poitiers une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A... dans la présente instance. ORDONNE : Article 1er : L'ordonnance n° 2000748 du 23 décembre 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Poitiers est annulée. Article 2 : Le CHU de Poitiers est condamné à verser à Mme A... une indemnité provisionnelle de 45 498 euros. Article 3 : Le CHU de Poitiers versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5: La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A..., au Centre hospitalier universitaire de Poitiers et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Charente-Maritime. Fait à Bordeaux, le 31 octobre 2022. La juge des référés, Catherine Girault La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance. 2 No 22BX00009
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme I... D..., M. B... E... et Mme A... G... ainsi que M. H... F... ont chacun demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 11 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de Mallemort a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune et les décisions rejetant leurs recours gracieux contre cette délibération. Par un jugement n° 1802957, 1802960, 20008951 du 8 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a annulé la délibération du 11 octobre 2017 en tant qu'elle place les parcelles cadastrées section A n° 513, 512, 67 et 629 en zone agricole et rejeté le surplus des conclusions à fin d'annulation de leurs demandes. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires enregistrés le 6 mai 2021, le 11 mai 2021 et le 17 octobre 2021, M. E... et Mme G..., représentés par Me Guin et Me Hequet, demandent à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 mars 2021 ; 2°) d'annuler totalement cette délibération du conseil municipal de Mallemort du 11 octobre 2017 et la décision implicite rejetant leur recours gracieux contre cette délibération ; 3°) de mettre à la charge de la métropole d'Aix-Marseille-Provence la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - la délibération du 11 octobre 2017 a été adoptée en méconnaissance des articles L. 2121-12 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ; - la délibération du 11 octobre 2017 a méconnu l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales ; - le plan local d'urbanisme a été modifié après l'enquête sans respecter les dispositions de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme ; - le classement en zone A des parcelles cadastrées section D, n° 828, 1067, 1068 et 1070 et du hameau de Bramejean est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; - le classement en zone UP des parcelles cadastrées section D, n° 785, 831, 832, 904, 1072, 1066 et 822 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; - le classement en zone N des parcelles cadastrées section E, n° 405, 406, 1001, 1002 et 1192 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense enregistré le 30 août 2021, la métropole d'Aix-Marseille-Provence et la commune de Mallemort, représentées par Me Gouard-Robert, concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. E... et Mme G... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que les moyens soulevés par M. E... et Mme G... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. d'Izarn de Villefort, - les conclusions de M. Roux, rapporteur public, - et les observations de Me Humbert-Simeone substituant Me Hequet, représentant M. E... et Mme G..., et de Me Gouard-Robert, représentant la métropole d'Aix-Marseille-Provence et la commune de Mallemort. Considérant ce qui suit : 1. Par une délibération du 28 août 2008, le conseil municipal de Mallemort a décidé la révision générale du plan d'occupation des sols de la commune valant élaboration du plan local d'urbanisme. Par une délibération du 14 décembre 2016, il a arrêté le plan local d'urbanisme. Après l'enquête publique qui s'est tenue du 15 mai 2017 au 19 juin 2017, il a approuvé ce plan par une délibération du 11 octobre 2017. Sur la demande de plusieurs résidents de la commune, dont M. E... et Mme G..., le tribunal administratif de Marseille a, par un jugement du 8 mars 2021, annulé cette délibération en tant qu'elle place les parcelles cadastrées section A n° 513, 512, 67 et 629 en zone agricole et rejeté le surplus des conclusions à fin d'annulation de ces demandes. M. E... et Mme G... relèvent appel de ce jugement et demandent l'annulation totale de cette délibération. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la légalité externe : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération attaquée : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée. ". Aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. (...) / Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. En cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. (...) ". Aux termes de l'article L. 2121-13 de ce code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ". 3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, la convocation aux réunions du conseil municipal doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut d'envoi de cette note ou son insuffisance entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. 4. Il ressort des pièces du dossier que la délibération attaquée mentionne que le conseil municipal a été régulièrement convoqué. La commune de Mallemort a produit par ailleurs copie des deux courriels adressés par le secrétariat général le 4 octobre 2017 informant, respectivement, les conseillers municipaux du groupe majoritaire, de ce que les " dossiers " relatifs à la séance du conseil municipal du 11 octobre suivant, contenant notamment les rapports, avaient été déposés dans leurs casiers en mairie, et les autres conseillers, de ce que ces dossiers leur avaient été envoyés ce jour par voie postale. La commune a également produit copie de la note de synthèse destinée à accompagner la convocation des conseillers et dont M. E... et Mme G... ne contestent pas le contenu. En se bornant à soutenir que la commune ne démontre pas que cette note faisait partie du " dossier " précité dont ils ne contestent pas la remise ou l'envoi aux conseillers, les requérants ne font état d'aucun élément de nature à remettre en cause la régularité de la convocation des conseillers au regard des exigences résultant de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales. 5. En application de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales, le maire est tenu de communiquer aux membres du conseil municipal les documents nécessaires pour qu'ils puissent se prononcer utilement sur les affaires de la commune soumises à leur délibération. Si les requérants soutiennent qu'aucune mise à disposition des pièces et documents nécessaires à l'information des élus n'a été organisée, ils ne démontrent ni même n'allèguent que l'un des conseillers municipaux aurait demandé une telle communication et que cette demande aurait été refusée. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales doit donc être écarté. 6. Aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires ". Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération. Cependant, s'agissant d'une délibération déterminant des prévisions et règles d'urbanisme applicables dans l'ensemble d'une commune, la circonstance qu'un conseiller municipal intéressé au classement d'une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n'est de nature à entraîner son illégalité que s'il ressort des pièces du dossier que, du fait de l'influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel. 7. Il est constant que Mme C..., propriétaire de l'un des deux campings existants sur la commune a participé tant aux travaux préparatoires de la commission d'urbanisme, dont elle est membre, avant l'adoption de la délibération du 11 octobre 2017, qu'au vote de celle-ci. Il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme approuvé a confirmé l'inclusion de ce camping, déjà prévue par le plan arrêté, dans un secteur de taille et de capacité d'accueil limités (STECAL) Nt dans lequel sont admis les aménagements de terrains permettant l'installation de campings et de caravaning ainsi que les constructions et installations nécessaires au fonctionnement de ces activités, sans porter atteinte au caractère naturel de la zone. A l'inverse, alors que le plan local d'urbanisme arrêté incluait le second camping, dit des Fontenelles, dans un autre STECAL, correspondant à un secteur Nt, ce dernier a été supprimé après l'enquête publique pour tenir compte de l'avis émis par le préfet des Bouches-du-Rhône le 14 mars 2017 qui préconisait que les STECAL Nt, Nt2 et Ntp soient strictement limités aux seules emprises correspondant à des besoins éventuels de construction, avec la définition de règles de surface de plancher ou d'emprise au sol, de hauteur et d'implantation. La commune de Mallemort, qui avait invité à ce titre les propriétaires des deux campings précités à lui indiquer quels étaient leurs besoins éventuels de construction, notamment dans le cadre d'une réunion, n'a pas reçu de réponse de la part du propriétaire du camping qui n'a plus été inclus dans un STECAL, même si les appelants soutiennent que l'intéressé n'avait pas été clairement informé du motif de cette consultation. Si, eu égard au faible nombre de parcelles couvertes par le STECAL confirmé par le PLU approuvé, Mme C... doit être regardée comme conseiller intéressé, la délibération n'a pas pris en compte son intérêt personnel eu égard aux motifs d'ordre urbanistique qui ont justifié l'approbation du PLU sur les points précités. Le moyen tiré de l'application de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales n'est donc pas fondé en sa première branche. En outre, la seconde branche de ce moyen tirée de ce que la participation de la maire de Mallemort entacherait d'illégalité la délibération attaquée doit être écartée par adoption des motifs retenus par les premiers juges, les requérants ne faisant valoir en appel sur ce point aucun élément distinct de ceux soumis à l'appréciation du tribunal. 8. Aux termes de l'article de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : (...) 2° Le conseil municipal dans le cas prévu au 2° de l'article L. 153-8. ". Il résulte de ces dispositions que le projet de plan ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et qu'elles procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête. 9. Ainsi qu'il a été mentionné au point 7, le plan local d'urbanisme a été approuvé après la suppression, postérieurement à l'enquête publique, du STECAL recouvrant le camping de Fontenelle, prévu par le plan local d'urbanisme arrêté. Cette modification résulte de l'avis émis par le préfet des Bouches-du-Rhône le 14 mars 2017 cité à ce même point, quand bien même elle fait suite à l'absence de réponse obtenue du propriétaire de ce camping sur cette question. En outre, les requérants justifient en appel que le classement en zone Up, par le plan approuvé, de la plus grande partie de la parcelle cadastrée D n° 829 constitue une modification du plan arrêté qui classait cette parcelle entièrement en zone A. Il ressort néanmoins des pièces du dossier que cette modification est liée à une observation formulée par M. E... au cours de l'enquête publique demandant la modification de la délimitation de cette zone urbaine pour y inclure son propre terrain. Ainsi, le plan local d'urbanisme n'est entaché d'aucune irrégularité sur ce point. En ce qui concerne la légalité interne : 10. Aux termes du premier alinéa du VI de l'article 12 du décret du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme : " Les dispositions des articles R. 123-1 à R. 123-14 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015 restent applicables aux plans locaux d'urbanisme dont l'élaboration, la révision, la modification ou la mise en compatibilité a été engagée avant le 1er janvier 2016. Toutefois, dans les cas d'une élaboration ou d'une révision prescrite sur le fondement du I de l'article L. 123-13 en vigueur avant le 31 décembre 2015, le conseil communautaire ou le conseil municipal peut décider que sera applicable au document l'ensemble des articles R. 151-1 à R. 151-55 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur à compter du 1er janvier 2016, par une délibération expresse qui intervient au plus tard lorsque le projet est arrêté. (...) ". La révision du plan d'occupation des sols de la commune de Mallemort a été décidée par une délibération de son conseil municipal du 28 août 2008. Dès lors, en application de ces dispositions et en l'absence au dossier de délibération expresse du conseil municipal optant pour l'application des articles R. 151-1 à R. 151-55 du code de l'urbanisme, les dispositions des articles R. 123-1 à R. 123-14 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015, sont restées applicables au plan local d'urbanisme adopté par la délibération attaquée du 11 octobre 2017. S'agissant du classement en zone urbaine : 11. Aux termes de l'article R. 123-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2015 : " Les zones urbaines sont dites " zones U ". Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter. ". 12. Le plan local d'urbanisme a délimité une zone urbaine Up que le règlement définit comme correspondant aux " pôles d'équipements publics ou d'intérêt collectif " et au sein de laquelle ne sont autorisées principalement que les constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif, et notamment équipements scolaires et sportifs, les extensions mesurées des constructions existantes et les logements de fonctions strictement liés à ces activités. Cette zone recouvre des parcelles situées au sud-ouest du hameau de Pont-Royal, sur lesquelles un centre de formation d'apprentis est implanté, et, au sud-est, jouxtant le rond-point de Pont-Royal, les parcelles cadastrées section D, n° 785, 831, 832, 904, 1072, 1066 et 822. Si ces derniers terrains sont non bâtis ou supportent des constructions affectées à un usage commercial ou d'habitation sans relation avec cet établissement ou un autre service public ou d'intérêt collectif, ils font partie d'un espace intégré au reste de la zone Up dont ils ne sont séparés que par le chemin d'Alleins de largeur réduite. Leur classement dans cette zone n'est dès lors, pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation. S'agissant du classement en zone agricole : 13. En vertu de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme définit notamment " Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques " et " fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain ". En vertu de l'article L. 151-9 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 123-7 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. / En zone A peuvent seules être autorisées : / - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ; / - les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. (...) ". 14. Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. 15. Les orientations du projet d'aménagement et de développement durables tendent notamment à protéger la plaine agricole de la Durance pour son potentiel économique et stopper le phénomène de mitage et préserver l'écrin paysager, naturel et patrimonial, en particulier par le classement en zone agricole des milieux naturels et agricoles, en imposant des règles de constructibilité limitée dans sa partie inondable. Il ressort des pièces du dossier que le hameau de Bramejean est situé au nord-est de la commune à 4 kilomètres du bourg environ, à la jonction d'une voie et d'un chemin communaux. Les parcelles qui le composent ont toutes été classées en zone A par le plan local d'urbanisme. Selon le rapport de présentation du plan, ce hameau, auparavant classé au plan d'occupation des sols en zones urbaines Ua et Ud, s'étend sur une surface de 4 hectares environ. Identifié comme une tache urbaine sur la carte de synthèse des objectifs de développement durable du schéma de cohérence territoriale " de l'Agglopole Provence approuvé le 15 avril 2013, il s'inscrit au sein d'un vaste espace agricole dont la partie nord est couverte par le plan de prévention des risques naturels d'inondation de la basse vallée de la Durance. Si le rapport de présentation n'identifie pas ce secteur parmi ceux qui sont raccordés au réseau public d'eau potable, il indique que la commune est équipée d'un système d'assainissement collectif ainsi que d'un réseau d'assainissement distinct, raccordé à la station d'épuration de Bramejean et desservant le domaine de Pont-Royal et le hameau de Bramejean, lequel est désigné sur une carte comme une zone d'assainissement collectif déjà raccordée au réseau. Par ailleurs, selon les vues aériennes et les autres éléments apportés par les appelants, non contredits en défense, ce hameau comporte une quarantaine de maisons d'habitation regroupées et n'apparaît pas comprendre majoritairement de bâtiments ou d'installations qui seraient en lien avec une exploitation agricole. Il ne constitue pas en lui-même un espace agricole à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. Dans ces conditions, bien que ce hameau soit situé en bordure d'un espace classé en zone agricole, son inclusion dans cette zone procède d'une erreur manifeste d'appréciation, nonobstant le caractère actuellement privé du réseau d'assainissement collectif précité. 16. M. E... et Mme G... contestent le classement des parcelles cadastrées section D, n° 828, 1067, 1068 et 1070 leur appartenant. Toutefois, la contestation ne porte que sur le classement en zone A qui ne concerne que la parcelle n° 1070, les autres parcelles ayant été classées en zone Up. Il ressort des pièces du dossier que cette parcelle se situe au sud-ouest du hameau de Pont-Royal, entre, au nord, une bande de terrains classés en zone Up longeant le chemin d'Alleins, et, au sud, le canal d'Alleins, qui est lui-même, ainsi que la berge nord, classé en zone A dans ce secteur. S'il est vrai que la zone A se poursuit à l'ouest où elle recouvre des terrains majoritairement cultivés, ce n'est pas le cas de l'espace de largeur assez réduite et boisé dans cette zone incluant leur parcelle n° 1070, laquelle est d'ailleurs bâtie, et la berge nord jusqu'au rond-point de Pont-Royal. Bien que cette parcelle ne soit pas raccordée au réseau public d'eau potable et que son raccordement au réseau d'assainissement, possible dans un proche avenir, ne soit pas effectif et à supposer que cet espace présente une certaine valeur agronomique, son classement en zone A est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. S'agissant du classement en zone naturelle : 17. Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / a) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / b) Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / c) Soit de leur caractère d'espaces naturels ; En zone N, peuvent seules être autorisées : / - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole et forestière ; (...) ". Aux termes de l'article L. 151-13 du même code : " Le règlement peut, à titre exceptionnel, délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées dans lesquels peuvent être autorisés : / 1° Des constructions ; (...) 3° Des résidences démontables constituant l'habitat permanent de leurs utilisateurs. / Il précise les conditions de hauteur, d'implantation et de densité des constructions, permettant d'assurer leur insertion dans l'environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. / Il fixe les conditions relatives aux raccordements aux réseaux publics, ainsi que les conditions relatives à l'hygiène et à la sécurité auxquelles les constructions, les résidences démontables ou les résidences mobiles doivent satisfaire. (...) ". 18. Le plan local d'urbanisme de Mallemort délimite une zone N qui correspond aux secteurs à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractère d'espaces naturels. Aucune nouvelle construction n'y est autorisée et y sont autorisés sous conditions, les aménagements, les extensions et les annexes des constructions à usage d'habitation ainsi que les constructions et installations nécessaires à des services publics ou à des équipements collectifs, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière. 19. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées section E, n° 405, 406, 1001, 1002 et 1192 sur lesquelles est implanté le camping Fontenelle ont été classées au plan local d'urbanisme en zone N. En dépit des limitations apportées par le règlement de zone, ce classement n'est pas incohérent avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables tendant à la préservation des campings existants. Par ailleurs, ces parcelles éloignées du bourg de Mallemort forment un tènement foncier d'une superficie de deux hectares en bordure d'un canal qui constitue une enclave au sein d'un vaste espace classé en zone A. Il résulte de la rédaction même de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme que la présence des différents réseaux ne fait pas obstacle à un classement en zone naturelle. Dans ces conditions, même si le plan local d'urbanisme arrêté prévoyait la création à cet endroit d'un STECAL au titre de l'article L. 151-13 du code de l'urbanisme, la présence à elle seule de quelques constructions, des installations de loisirs et des emplacements aménagés et la superficie occupée ne caractérisent pas l'erreur manifeste d'appréciation que les auteurs du plan local d'urbanisme approuvé auraient commise dans le classement retenu. 20. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... et Mme G... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande en tant que la délibération du 11 octobre 2017 classe en zone agricole le hameau de Bramejean et la parcelle cadastrée section D n° 1070. 21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. E... et Mme G..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la métropole d'Aix-Marseille-Provence demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la métropole d'Aix-Marseille-Provence la somme demandée par M. E... et Mme G... au même titre. D É C I D E : Article 1er : La délibération du conseil municipal de Mallemort du 11 octobre 2017, en tant qu'elle classe en zone agricole le hameau de Bramejean et la parcelle cadastrée section D n° 1070, ensemble, dans la même mesure, la décision implicite rejetant le recours gracieux contre cette délibération, sont annulées. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 mars 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de M. E... et Mme G... et les conclusions de la métropole d'Aix-Marseille-Provence au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et Mme A... G...,à la métropole d'Aix-Marseille-Provence et à la commune de Mallemort. Délibéré après l'audience du 13 octobre 2022, où siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. N° 21MA01696 2 nb
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Le comité d'intérêt de quartier (CIQ) du hameau de Bramejean-Mallemort, Mme L... E..., M. Q... C..., M. AG... J..., M. AI... AN..., M. W... AC..., M. AI... U..., Mme AM... O..., M. G... AF..., Mme N... Y..., M. AJ... H..., M. B... AB..., Mme AD... S..., Mme AH... V... , M. K... AE..., Mme AA... AK..., Mme M... AK..., Mme P... T..., M. D... F..., M. I... F..., M. A... Z... et Mme R... X... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 11 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de Mallemort a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. Par un jugement n° 1709628 du 8 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoire enregistrés le 27 avril 2021 le 27 juillet 2021 et le 24 septembre 2021, le CIQ du hameau de Bramejean-Mallemort et les autres requérants, représentés par Me Fouilleul, demandent à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 mars 2021 ; 2°) d'annuler cette délibération du conseil municipal de Mallemort du 11 octobre 2017 en ce qu'elle classe le hameau de Bramejean en zone agricole ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Mallemort la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - le plan local d'urbanisme est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale concernant le classement du hameau de Bramejean en zone agricole ; - le classement du hameau de Bramejean en zone agricole est en contradiction avec le rapport de présentation et le projet d'aménagement et de développement durable ; - le classement du hameau de Bramejean en zone agricole est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; - le risque inondation ne pouvait légalement justifier un zonage agricole et la réalité de ce risque n'est pas établie. Par des mémoires en défense enregistrés le 10 juin 2021 et le 13 septembre 2021, la métropole d'Aix-Marseille-Provence et la commune de Mallemort, représentées par Me Gouard-Robert, concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge du CIQ du hameau de Bramejean-Mallemort et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que les moyens soulevés par le CIQ du hameau de Bramejean-Mallemort et autres ne sont pas fondés. Des mémoires ont été enregistrés le 15 novembre 2021, le 20 avril 2022 et 22 septembre 2022, présentés pour le CIQ du hameau de Bramejean-Mallemort et autres, parvenus à la Cour après la clôture de l'instruction et non communiqués. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. d'Izarn de Villefort, - les conclusions de M. Roux, rapporteur public, - et les observations de Me Cournand représentant le CIQ du hameau de Bramejean-Mallemort et autres, et de Me Gouard-Robert, représentant la métropole d'Aix-Marseille-Provence et la commune de Mallemort. Considérant ce qui suit : 1. Par une délibération du 28 août 2008, le conseil municipal de Mallemort a décidé la révision générale du plan d'occupation des sols de la commune valant élaboration du plan local d'urbanisme. Par une délibération du 14 décembre 2016, il a arrêté le plan local d'urbanisme. Après l'enquête publique qui s'est tenue du 15 mai 2017 au 19 juin 2017, il a approuvé ce plan par une délibération du 11 octobre 2017. Par un jugement du 8 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande du comité d'intérêt de quartier (CIQ) du hameau de Bramejean-Mallemort et d'autres habitants de ce hameau tendant à l'annulation de cette délibération. Ces derniers relèvent appel de ce jugement et demandent désormais l'annulation de cette délibération en ce qu'elle classe le hameau de Bramejean en zone agricole. 2. En vertu de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme définit notamment " Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques " et " fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain ". En vertu de l'article L. 151-9 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 123-7 du même code, dans sa rédaction applicable en vertu de l'article 12 du décret du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. / En zone A peuvent seules être autorisées : / - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ; / - les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. (...) ". 3. Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. 4. Les orientations du projet d'aménagement et de développement durables tendent notamment à protéger la plaine agricole de la Durance pour son potentiel économique et stopper le phénomène de mitage et préserver l'écrin paysager, naturel et patrimonial, en particulier par le classement en zone agricole des milieux naturels et agricoles, en imposant des règles de constructibilité limitée dans sa partie inondable. Il ressort des pièces du dossier que le hameau de Bramejean est situé au nord-est de la commune à 4 kilomètres du bourg environ, à la jonction d'une voie et d'un chemin communaux. Les parcelles qui le composent ont toutes été classées en zone A par le plan local d'urbanisme. Selon le rapport de présentation du plan, ce hameau, auparavant classé au plan d'occupation des sols en zones urbaines Ua et Ud, s'étend sur une surface de 4 hectares environ. Identifié comme une tache urbaine sur la carte de synthèse des objectifs de développement durable du schéma de cohérence territoriale " de l'Agglopole Provence approuvé le 15 avril 2013, il s'inscrit au sein d'un vaste espace agricole dont la partie nord est couverte par le plan de prévention des risques naturels d'inondation de la basse vallée de la Durance. Si le rapport de présentation n'identifie pas ce secteur parmi ceux qui sont raccordés au réseau public d'eau potable, il indique que la commune est équipée d'un système d'assainissement collectif ainsi que d'un réseau d'assainissement distinct, raccordé à la station d'épuration de Bramejean et desservant le domaine de Pont-Royal et le hameau de Bramejean, lequel est désigné sur une carte comme une zone d'assainissement collectif déjà raccordée au réseau. Par ailleurs, selon les vues aériennes et les autres éléments apportés par les appelants, non contredits en défense, ce hameau comporte une quarantaine de maisons d'habitation regroupées et n'apparaît pas comprendre majoritairement de bâtiments ou d'installations qui seraient en lien avec une exploitation agricole. Il ne constitue pas en lui-même un espace agricole à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. Dans ces conditions, bien que ce hameau soit situé en bordure d'un espace classé en zone agricole, son inclusion dans cette zone procède d'une erreur manifeste d'appréciation, nonobstant le caractère actuellement privé du réseau d'assainissement collectif précité. 5. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est susceptible de fonder l'annulation partielle, en l'état du dossier, de la délibération du 11 octobre 2017. 6. Il résulte de tout ce qui précède que le CIQ du hameau de Bramejean-Mallemort et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande. 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CIQ du hameau de Bramejean-Mallemort et autres, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la métropole d'Aix-Marseille-Provence demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Mallemort la somme de 2 000 euros à verser aux requérants pris ensemble sur le fondement de ces dispositions. D É C I D E : Article 1 er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 mars 2021 et la délibération du conseil municipal de Mallemort du 11 octobre 2017, en ce qu'elle classe le hameau de Bramejean en zone agricole, sont annulés. Article 2 : Les conclusions du CIQ du hameau de Bramejean-Mallemort et autres et de la métropole d'Aix-Marseille-Provence au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : la commune de Mallemort versera la somme de 2 000 euros au comité d'intérêt de quartier (CIQ) du hameau de Bramejean-Mallemort et à Mme L... E..., , M. AG... J..., M. AI... AN..., M. W... AC..., M. AI... U..., Mme AM... O..., M. G... AF..., Mme N... Y..., M. AJ... H..., M. B... AB..., Mme AM... S..., Mme AH... V..., , Mme AA... AK..., Mme M... AK..., , M. D... F..., , M. A... Z... et Mme R... X... pris ensemble en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au comité d'intérêt de quartier du hameau de Bramejean-Mallemort ayant été désigné comme représentant unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la commune de Mallemort et à la métropole d'Aix-Marseille-Provence. Délibéré après l'audience du 13 octobre 2022, où siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. N° 21MA01569 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme J... E..., M. B... F... et Mme A... H... ainsi que M. I... G... ont chacun demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 11 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de Mallemort a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune et les décisions rejetant leurs recours gracieux contre cette délibération. Par un jugement n° 1802957, 1802960, 2008951 du 8 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a annulé la délibération du 11 octobre 2017 en tant qu'elle place les parcelles cadastrées section A n° 513, 512, 67 et 629 en zone agricole et rejeté le surplus des conclusions à fin d'annulation de leurs demandes. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires enregistrés le 6 mai 2021, le 7 mai 2021 et le 11 mai 2021, M. G..., représenté par Me Guin et Me D..., demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 mars 2021 ; 2°) d'annuler totalement cette délibération du conseil municipal de Mallemort du 11 octobre 2017 et la décision implicite rejetant son recours gracieux contre cette délibération ; 3°) de mettre à la charge de la métropole d'Aix-Marseille-Provence la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la délibération du 11 octobre 2017 a été adoptée en méconnaissance des articles L. 2121-12 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ; - la délibération du 11 octobre 2017 a méconnu l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales ; - le classement en zone agricole du hameau de Bramejean est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; - le classement en zone N des parcelles cadastrées section E, n° 405, 406, 1001, 1002 et 1192 n'a pu légalement être modifié après l'enquête publique et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense enregistré le 13 juillet 2021, la métropole d'Aix-Marseille-Provence et la commune de Mallemort, représentées par Me Gouard-Robert, concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. G... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que les moyens soulevés par M. G... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. d'Izarn de Villefort, - les conclusions de M. Roux, rapporteur public, - et les observations de Me Humbert-Simeone substituant M° D..., représentant M. G..., et de Me Gouard-Robert, représentant la métropole d'Aix-Marseille-Provence et la commune de Mallemort. Considérant ce qui suit : 1. Par une délibération du 28 août 2008, le conseil municipal de Mallemort a décidé la révision générale du plan d'occupation des sols de la commune valant élaboration du plan local d'urbanisme. Par une délibération du 14 décembre 2016, il a arrêté le plan local d'urbanisme. Après l'enquête publique qui s'est tenue du 15 mai 2017 au 19 juin 2017, il a approuvé ce plan par une délibération du 11 octobre 2017. Sur la demande de plusieurs résidents de la commune, dont M. G..., le tribunal administratif de Marseille a, par un jugement du 8 mars 2021, annulé cette délibération en tant qu'elle place les parcelles cadastrées section A n° 513, 512, 67 et 629 en zone agricole et rejeté le surplus des conclusions à fin d'annulation de ces demandes. M. G... relève appel de ce jugement et demande l'annulation totale de cette délibération. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la légalité externe : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération attaquée : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée. ". Aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. (...) / Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. En cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. (...) ". Aux termes de l'article L. 2121-13 de ce code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ". 3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, la convocation aux réunions du conseil municipal doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut d'envoi de cette note ou son insuffisance entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. 4. Il ressort des pièces du dossier que la délibération attaquée mentionne que le conseil municipal a été régulièrement convoqué. La commune de Mallemort a produit par ailleurs copie des deux courriels adressés par le secrétariat général le 4 octobre 2017 informant, respectivement, les conseillers municipaux du groupe majoritaire, de ce que les " dossiers " relatifs à la séance du conseil municipal du 11 octobre suivant, contenant notamment les rapports, avaient été déposés dans leurs casiers en mairie, et les autres conseillers, de ce que ces dossiers leur avaient été envoyés ce jour par voie postale. La commune a également produit copie de la note de synthèse destinée à accompagner la convocation des conseillers et dont M. G... ne conteste pas le contenu. En se bornant à soutenir que la commune ne démontre pas que cette note faisait partie du " dossier " précité dont ils ne contestent pas la remise ou l'envoi aux conseillers, le requérant ne fait état d'aucun élément de nature à remettre en cause la régularité de la convocation des conseillers au regard des exigences résultant de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales. 5. En application de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales, le maire est tenu de communiquer aux membres du conseil municipal les documents nécessaires pour qu'ils puissent se prononcer utilement sur les affaires de la commune soumises à leur délibération. Si le requérant soutient qu'aucune mise à disposition des pièces et documents nécessaires à l'information des élus n'a été organisée, il ne démontre ni même n'allègue que l'un des conseillers municipaux aurait demandé une telle communication et que cette demande aurait été refusée. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales doit donc être écarté. 6. Aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires ". Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération. Cependant, s'agissant d'une délibération déterminant des prévisions et règles d'urbanisme applicables dans l'ensemble d'une commune, la circonstance qu'un conseiller municipal intéressé au classement d'une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n'est de nature à entraîner son illégalité que s'il ressort des pièces du dossier que, du fait de l'influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel. 7. Il est constant que Mme C..., propriétaire de l'un des deux campings existants sur la commune a participé tant aux travaux préparatoires de la commission d'urbanisme, dont elle est membre, avant l'adoption de la délibération du 11 octobre 2017, qu'au vote de celle-ci. Il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme approuvé a confirmé l'inclusion de ce camping, déjà prévue par le plan arrêté, dans un secteur de taille et de capacité d'accueil limités (STECAL) Nt dans lequel sont admis les aménagements de terrains permettant l'installation de campings et de caravaning ainsi que les constructions et installations nécessaires au fonctionnement de ces activités, sans porter atteinte au caractère naturel de la zone. A l'inverse, alors que le plan local d'urbanisme arrêté incluait le second camping, dit des Fontenelles, dans un autre STECAL, correspondant à un secteur Nt, ce dernier a été supprimé après l'enquête publique pour tenir compte de l'avis émis par le préfet des Bouches-du-Rhône le 14 mars 2017 qui préconisait que les STECAL Nt, Nt2 et Ntp soient strictement limités aux seules emprises correspondant à des besoins éventuels de construction, avec la définition de règles de surface de plancher ou d'emprise au sol, de hauteur et d'implantation. La commune de Mallemort, qui avait invité à ce titre les propriétaires des deux campings précités à lui indiquer quels étaient leurs besoins éventuels de construction, notamment dans le cadre d'une réunion, n'a pas reçu de réponse de la part du propriétaire du camping qui n'a plus été inclus dans un STECAL, même si les appelants soutiennent que l'intéressé n'avait pas été clairement informé du motif de cette consultation. Si, eu égard au faible nombre de parcelles couvertes par le STECAL confirmé par le PLU approuvé, Mme C... doit être regardée comme conseiller intéressé, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la délibération ait pris en compte son intérêt personnel par suite d'une influence que qu'elle aurait exercée. Le moyen tiré de l'application de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales n'est donc pas fondé en sa première branche. En outre, la seconde branche de ce moyen tirée de ce que la participation de la maire de Mallemort entacherait d'illégalité la délibération attaquée doit être écartée par adoption des motifs retenus par les premiers juges, le requérant ne faisant valoir en appel sur ce point aucun élément distinct de ceux soumis à l'appréciation du tribunal. 8. Aux termes de l'article de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : (...) 2° Le conseil municipal dans le cas prévu au 2° de l'article L. 153-8. ". Il résulte de ces dispositions que le projet de plan ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et qu'elles procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête. 9. Ainsi qu'il a été mentionné au point 7, le plan local d'urbanisme a été approuvé après la suppression, postérieurement à l'enquête publique, du STECAL recouvrant le camping de Fontenelle, prévu par le plan local d'urbanisme arrêté. Cette modification résulte de l'avis émis par le préfet des Bouches-du-Rhône le 14 mars 2017 cité à ce même point quand bien même elle fait suite à l'absence de réponse obtenue du propriétaire de ce camping sur cette question. En ce qui concerne la légalité interne : 10. Aux termes du premier alinéa du VI de l'article 12 du décret du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme : " Les dispositions des articles R. 123-1 à R. 123-14 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015 restent applicables aux plans locaux d'urbanisme dont l'élaboration, la révision, la modification ou la mise en compatibilité a été engagée avant le 1er janvier 2016. Toutefois, dans les cas d'une élaboration ou d'une révision prescrite sur le fondement du I de l'article L. 123-13 en vigueur avant le 31 décembre 2015, le conseil communautaire ou le conseil municipal peut décider que sera applicable au document l'ensemble des articles R. 151-1 à R. 151-55 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur à compter du 1er janvier 2016, par une délibération expresse qui intervient au plus tard lorsque le projet est arrêté. (...) ". La révision du plan d'occupation des sols de la commune de Mallemort a été décidée par une délibération de son conseil municipal du 28 août 2008. Dès lors, en application de ces dispositions et en l'absence au dossier de délibération expresse du conseil municipal optant pour l'application des articles R. 151-1 à R. 151-55 du code de l'urbanisme, les dispositions des articles R. 123-1 à R. 123-14 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015, sont restées applicables au plan local d'urbanisme adopté par la délibération attaquée du 11 octobre 2017. S'agissant du classement en zone agricole : 11. En vertu de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme définit notamment " Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques " et " fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain ". En vertu de l'article L. 151-9 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 123-7 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. / En zone A peuvent seules être autorisées : / - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ; / - les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. (...) ". 12. Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. 13. Les orientations du projet d'aménagement et de développement durables tendent notamment à protéger la plaine agricole de la Durance pour son potentiel économique et stopper le phénomène de mitage et préserver l'écrin paysager, naturel et patrimonial, en particulier par le classement en zone agricole des milieux naturels et agricoles, en imposant des règles de constructibilité limitée dans sa partie inondable. Il ressort des pièces du dossier que le hameau de Bramejean est situé au nord-est de la commune à 4 kilomètres du bourg environ, à la jonction d'une voie et d'un chemin communaux. Les parcelles qui le composent ont toutes été classées en zone A par le plan local d'urbanisme. Selon le rapport de présentation du plan, ce hameau, auparavant classé au plan d'occupation des sols en zones urbaines Ua et Ud, s'étend sur une surface de 4 hectares environ. Identifié comme une tache urbaine sur la carte de synthèse des objectifs de développement durable du schéma de cohérence territoriale " de l'Agglopole Provence approuvé le 15 avril 2013, il s'inscrit au sein d'un vaste espace agricole dont la partie nord est couverte par le plan de prévention des risques naturels d'inondation de la basse vallée de la Durance. Si le rapport de présentation n'identifie pas ce secteur parmi ceux qui sont raccordés au réseau public d'eau potable, il indique que la commune est équipée d'un système d'assainissement collectif ainsi que d'un réseau d'assainissement distinct, raccordé à la station d'épuration de Bramejean et desservant le domaine de Pont-Royal et le hameau de Bramejean, lequel est désigné sur une carte comme une zone d'assainissement collectif déjà raccordée au réseau. Par ailleurs, selon les vues aériennes et les autres éléments apportés par les appelants, non contredits en défense, ce hameau comporte une quarantaine de maisons d'habitation regroupées et n'apparaît pas comprendre majoritairement de bâtiments ou d'installations qui seraient en lien avec une exploitation agricole. Il ne constitue pas en lui-même un espace agricole à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. Dans ces conditions, bien que ce hameau soit situé en bordure d'un espace classé en zone agricole, son inclusion dans cette zone procède d'une erreur manifeste d'appréciation, nonobstant le caractère actuellement privé du réseau d'assainissement collectif précité. S'agissant du classement en zone naturelle : 14. Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / a) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / b) Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / c) Soit de leur caractère d'espaces naturels ; En zone N, peuvent seules être autorisées : / - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole et forestière ; (...) ". Aux termes de l'article L. 151-13 du même code : " Le règlement peut, à titre exceptionnel, délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées dans lesquels peuvent être autorisés : / 1° Des constructions ; (...) 3° Des résidences démontables constituant l'habitat permanent de leurs utilisateurs. / Il précise les conditions de hauteur, d'implantation et de densité des constructions, permettant d'assurer leur insertion dans l'environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. / Il fixe les conditions relatives aux raccordements aux réseaux publics, ainsi que les conditions relatives à l'hygiène et à la sécurité auxquelles les constructions, les résidences démontables ou les résidences mobiles doivent satisfaire. (...) ". 15. Le plan local d'urbanisme de Mallemort délimite une zone N qui correspond aux secteurs à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractère d'espaces naturels. Aucune nouvelle construction n'y est autorisée et y sont autorisées sous conditions, les aménagements, les extensions et les annexes de la des constructions à usage d'habitation ainsi que les constructions et installations nécessaires à des services publics ou à des équipements collectifs, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière. 16. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées section E, n° 405, 406, 1001, 1002 et 1192, sur lesquelles est implanté le camping Fontenelle ont été classées au plan local d'urbanisme en zone N. En dépit des limitations apportées par le règlement de zone, ce classement n'est pas incohérent avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables tendant à la préservation des campings existants. Par ailleurs, ces parcelles éloignées du bourg de Mallemort forment un tènement foncier d'une superficie de deux hectares en bordure d'un canal qui constitue une enclave au sein d'un vaste espace classé en zone A. Il résulte de la rédaction même de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme que la présence des différents réseaux ne fait pas obstacle à un classement en zone naturelle. Dans ces conditions, même si le plan local d'urbanisme arrêté prévoyait la création à cet endroit d'un STECAL au titre de l'article L. 151-13 du code de l'urbanisme, la présence à elle seule de quelques constructions, des installations de loisirs et des emplacements aménagés et la superficie occupée ne caractérisent pas l'erreur manifeste d'appréciation que les auteurs du plan local d'urbanisme approuvé auraient commise dans le classement retenu. 17. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en tant que la délibération du 11 octobre 2017 classe en zone agricole le hameau de Bramejean. 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. G..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la métropole d'Aix-Marseille-Provence demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la métropole d'Aix-Marseille-Provence la somme demandée par M. G... au même titre. D É C I D E : Article 1er : La délibération du conseil municipal de Mallemort du 11 octobre 2017, en tant qu'elle classe en zone agricole le hameau de Bramejean, ensemble, dans la même mesure, la décision implicite rejetant le recours gracieux contre cette délibération, sont annulées. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 mars 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de M. G... et les conclusions de la métropole d'Aix-Marseille-Provence au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... G... à la métropole d'Aix-Marseille-Provence et à la commune de Mallemort. Délibéré après l'audience du 13 octobre 2022, où siégeaient : - M. Portail, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Quenette, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. N° 21MA01697 2 nb
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Vu les procédures suivantes : 1° Sous le n° 443683, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 septembre 2020 et 6 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat France Hydro-Electricité, la Fédération française des associations de sauvegarde des moulins, la Fédération des moulins de France et l'association des riverains de France demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'article 3 du décret n° 2020-828 du 30 juin 2020 modifiant la nomenclature et la procédure en matière de police de l'eau, d'autre part, l'arrêté du ministre de la transition écologique et solidaire du 30 juin 2020 définissant les travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques relevant de la rubrique 3.3.5.0. de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. 2° Sous le n° 443684, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 septembre 2020 et 6 et 8 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Hydrauxois demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'article 3 du décret n° 2020-828 du 30 juin 2020 modifiant la nomenclature et la procédure en matière de police de l'eau, d'autre part, l'arrêté ministériel du 30 juin 2020 définissant les travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques relevant de la rubrique 3.3.5.0. de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. .................................................................................... 3° Sous le n° 448250, par une requête, un nouveau mémoire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 29 décembre 2020, 30 septembre 2021, 22 juin et 10 août 2022, au secrétariat de la section du contentieux, l'association Union des étangs de France demande au Conseil d'Etat d'annuler, d'une part, le décret n° 2020-828 du 30 juin 2020 modifiant la nomenclature et la procédure en matière de police de l'eau en tant qu'il modifie l'article R. 214-1 du code de l'environnement en ce qui concerne les rubriques 3.2.3.0 et 3.3.5.0, d'autre part, la décision de rejet de son recours gracieux du 30 août 2020. .................................................................................... Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - la Constitution ; - le code civil ; - le code de l'environnement ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire, - les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 octobre 2022, présentée par l'association Union des étangs de France ; Considérant ce qui suit : 1. Les requêtes présentées par la syndicat France Hydro-Electricité et autres, par l'association Hydrauxois et par l'association Union des étangs de France tendent à l'annulation pour excès de pouvoir de l'article 3 du décret du 30 juin 2020 modifiant la nomenclature relative aux installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) ayant une incidence sur l'eau ou le fonctionnement des écosystèmes aquatiques. Cet article a, d'une part, remplacé, dans le tableau annexé à l'article R. 214-1 du code de l'environnement, à son f), les rubriques 3.2.3.0 et 3.2.4.0 relatives aux différents types de plans d'eau par une rubrique 3.2.3.0 consacrée aux plans d'eau, permanents ou non, et a supprimé à cette occasion les dispositions du 2° de la rubrique 3.2.4.0 qui dispensaient de toute formalité les vidanges des piscicultures mentionnées à l'article L. 431-6 du code l'environnement, et a, d'autre part, à son h), créé une nouvelle rubrique 3.3.5.0, exclusive des autres rubriques de cette nomenclature, soumettant à déclaration les travaux ayant uniquement pour objet la restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques, y compris les ouvrages nécessaires à cet objectif. Les requêtes tendent également à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du même jour par lequel le ministre de la transition écologique et solidaire a fixé la liste des travaux régis par cette nouvelle rubrique. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision. 2. Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, qui prévoit que les dispositions du titre Ier du livre II de ce code, relatives à l'eau et aux milieux aquatiques et marins, ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau, cette gestion vise à assurer : " 1° La prévention des inondations et la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides (...) ; / 2° La protection des eaux et la lutte contre toute pollution par déversements, écoulements, rejets, dépôts directs ou indirects de matières de toute nature (...) ; 3° La restauration de la qualité de ces eaux et leur régénération ; / 4° Le développement, la mobilisation, la création et la protection de la ressource en eau ; / 5° La valorisation de l'eau comme ressource économique et, en particulier, pour le développement de la production d'électricité d'origine renouvelable ainsi que la répartition de cette ressource ;/ 5° bis La promotion d'une politique active de stockage de l'eau pour un usage partagé de l'eau permettant de garantir l'irrigation (...) ; / 6° La promotion d'une utilisation efficace, économe et durable de la ressource en eau (...) ; / 7° Le rétablissement de la continuité écologique au sein des bassins hydrographiques (...) ". L'article L. 214-1 du même code prévoit que " Sont soumis aux dispositions des articles L. 214-2 à L. 214-6 les installations, les ouvrages, travaux et activités réalisés à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, une modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux, la destruction de frayères, de zones de croissance ou d'alimentation de la faune piscicole ou des déversements, écoulements, rejets ou dépôts directs ou indirects, chroniques ou épisodiques, même non polluants ". Aux termes de l'article L. 214-2 du même code : " Les installations, ouvrages, travaux et activités visés à l'article L. 214-1 sont définis dans une nomenclature, établie par décret en Conseil d'Etat après avis du Comité national de l'eau, et soumis à autorisation ou à déclaration suivant les dangers qu'ils présentent et la gravité de leurs effets sur la ressource en eau et les écosystèmes aquatiques compte tenu notamment de l'existence des zones et périmètres institués pour la protection de l'eau et des milieux aquatiques ". Enfin, aux termes de l'article L. 214-3 du même code : " I.- Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles.(...) / II.- Sont soumis à déclaration les installations, ouvrages, travaux et activités qui, n'étant pas susceptibles de présenter de tels dangers, doivent néanmoins respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3. / Dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, l'autorité administrative peut s'opposer à l'opération projetée s'il apparaît qu'elle est incompatible avec les dispositions du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ou du schéma d'aménagement et de gestion des eaux, ou porte aux intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 une atteinte d'une gravité telle qu'aucune prescription ne permettrait d'y remédier. Les travaux ne peuvent commencer avant l'expiration de ce délai. / Si le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 n'est pas assuré par l'exécution des prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3, l'autorité administrative peut, à tout moment, imposer par arrêté toutes prescriptions particulières nécessaires ". Sur les fins de non-recevoir opposées par la ministre de l'écologie et du développement durable : 3. Le syndicat France Hydro-Electricité, la Fédération française des associations de sauvegarde des moulins, la Fédération des moulins de France, l'association des riverains de France et l'association Hydrauxois justifient, eu égard à leur objet social, d'un intérêt leur donnant qualité pour attaquer les dispositions du h) de l'article 3 du décret du 30 juin 2020 et de l'arrêté du même jour du ministre de la transition écologique et solidaire. Il en résulte que les fins de non-recevoir opposées par la ministre doivent être rejetées. Sur la légalité externe : 4. En premier lieu, il résulte des dispositions des articles L. 214-1 et L. 214-3 citées ci-dessus que le législateur a donné compétence au pouvoir réglementaire pour déterminer les formalités auxquelles sont soumis les installations, ouvrages, travaux et activités ayant une incidence sur l'eau ou le fonctionnement des écosystèmes aquatiques. Dès lors que les dispositions contestées du f) de l'article 3 du décret litigieux regroupent deux rubriques de la nomenclature en une seule et distinguent au sein de cette rubrique les installations, ouvrages, travaux et activités qui devront faire l'objet d'une autorisation et ceux qui seront soumis à une déclaration préalable, l'association Union des étangs de France n'est pas fondée à soutenir que le pouvoir réglementaire n'était pas compétent pour les prendre. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement : " I. - Le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public, prévu à l'article 7 de la Charte de l'environnement, est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration. / (...) / II. - Sous réserve des dispositions de l'article L. 123-19-6, le projet d'une décision mentionnée au I, accompagné d'une note de présentation précisant notamment le contexte et les objectifs de ce projet, est mis à disposition du public par voie électronique et, sur demande présentée dans des conditions prévues par décret, mis en consultation sur support papier dans les préfectures et les sous-préfectures en ce qui concerne les décisions des autorités de l'Etat, y compris les autorités administratives indépendantes, et des établissements publics de l'Etat, ou au siège de l'autorité en ce qui concerne les décisions des autres autorités. (...) / Au plus tard à la date de la mise à disposition prévue au premier alinéa du présent II, le public est informé, par voie électronique, des modalités de consultation retenues. / Les observations et propositions du public, déposées par voie électronique ou postale, doivent parvenir à l'autorité administrative concernée dans un délai qui ne peut être inférieur à vingt et un jours à compter de la mise à disposition prévue au même premier alinéa. / Le projet de décision ne peut être définitivement adopté avant l'expiration d'un délai permettant la prise en considération des observations et propositions déposées par le public et la rédaction d'une synthèse de ces observations et propositions. Sauf en cas d'absence d'observations et propositions, ce délai ne peut être inférieur à quatre jours à compter de la date de la clôture de la consultation ". Les dispositions du I de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement impliquent que les projets d'acte réglementaire de l'Etat ayant une incidence sur l'environnement soient mis à disposition du public afin de lui permettre de présenter des observations et propositions. Ces dispositions n'imposent toutefois de procéder à une nouvelle procédure de participation du public pour recueillir ses observations sur les modifications ultérieurement apportées au projet de décision, au cours de son élaboration, que lorsque celles-ci ont pour effet de dénaturer le projet sur lequel ont été initialement recueillies ces observations. 6. Il ressort des pièces du dossier de la consultation du public organisée du 3 au 26 mai 2019 sur le site internet du ministère de la transition écologique et solidaire que le projet de décret modifiant la nomenclature et la procédure en matière de police de l'eau et le projet d'arrêté définissant les travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques relevant de la rubrique 3.3.5.0 de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement ont été soumis à cette consultation. La note de présentation du projet de décret, qui n'avait en tout état de cause pas à respecter l'obligation de motivation des décisions individuelles prévue par le code des relations entre le public et l'administration, a été mise à la disposition du public par voie électronique. Elle décrivait le contexte et les objectifs du projet et, en particulier, les motifs du regroupement des rubriques 3.2.3.0 et 3.2.4.0 en une seule rubrique de la nomenclature. Par suite, les moyens tirés de ce que le public n'aurait pas été régulièrement consulté sur les textes attaqués manque en fait. 7. En troisième lieu, ni les dispositions de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement ni aucune autre disposition ou principe n'imposaient d'organiser une nouvelle consultation du public sur le projet de décret attaqué en raison des travaux menés par le Comité national de l'eau ayant abouti à une note technique, en date du 30 avril 2019, du ministre de la transition écologique et solidaire, relative à la mise en œuvre du plan d'action pour une politique apaisée de restauration de la continuité écologique des cours d'eau. En l'absence de circonstances de droit ou de fait qui aient rendu nécessaire une nouvelle consultation du public sur ce projet, la circonstance qu'un délai de plus d'un an se soit écoulé entre la consultation du public et la publication du décret litigieux n'a pas entaché cette consultation d'irrégularité. 8. En quatrième lieu, si l'Union des étangs de France estime que la composition du Comité national de l'eau, qui a été consulté le 7 mars 2019 sur le projet de décret, telle qu'elle est fixée par les articles D. 213-1 à D. 213-4 du code de l'environnement, est marquée par une sous-représentation de la pisciculture extensive, qui n'y dispose que d'un représentant, il ne ressort pas des pièces du dossier que le pouvoir réglementaire qui dispose, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'un large pouvoir d'appréciation pour fixer la composition des organismes d'expertise et de réflexion placés auprès des autorités de l'Etat, ait entaché la composition de ce conseil d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité de ces dispositions, invoquée par voie d'exception par l'Union des étangs de France, doit, en tout état de cause, être écarté. Sur la légalité interne : En ce qui concerne les dispositions du décret relatives à la rubrique 3.2.3.0 de la nomenclature : 9. En premier lieu, si l'Union des étangs de France soutient que les étangs piscicoles devraient être exclus de la réglementation applicable aux plans d'eau, résultant de la nouvelle rubrique 3.2.3.0 de la nomenclature, qui soumet à autorisation les plans d'eau dont la superficie est supérieure ou égale à 3 hectares et à déclaration ceux dont la superficie est supérieure à 0,1 hectare mais inférieure à 3 hectares et qui inclut les vidanges des piscicultures auparavant dispensées de toute formalité, car ils n'auraient aucun impact négatif sur l'environnement et les milieux aquatiques et contribueraient à l'inverse au maintien de la biodiversité et à la lutte contre le réchauffement climatique et à la souveraineté alimentaire de la France, il ressort des pièces des dossiers que si ces étangs sont susceptibles d'avoir certains des effets bénéfiques invoqués, ils présentent également des risques d'altération de la quantité et de la qualité des eaux qui justifient qu'ils soient intégrés à la nomenclature relative aux plans d'eau. 10. En deuxième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 214-2 du code l'environnement, citées au point 2 ci-dessus, que la nomenclature que le législateur a chargé le pouvoir réglementaire d'établir par décret en Conseil d'Etat concerne toutes les installations, ouvrages, travaux et activités ayant une incidence sur l'eau, qu'ils soient exploités par des personnes publiques ou privées, et quel que soit leur propriétaire. Les dispositions du f) de l'article 3 du décret attaqué qui modifient la nomenclature des installations, ouvrages, travaux et activités relevant de la police de l'eau se fondent sur les risques pouvant résulter pour l'environnement de la vidange des plans d'eau, et n'ont ni pour objet ni pour effet de porter atteinte aux droits reconnus par les articles 641 et 642 du code civil, qui disposent respectivement que tout propriétaire a le droit d'user et de disposer des eaux pluviales qui tombent sur son fonds et qu'il dispose librement des sources existant dans ce fonds. L'Union des étangs de France n'est par suite, et en tout état de cause, pas fondée à soutenir que les dispositions du décret du 30 juin 2020 ayant modifié sur ce point la nomenclature seraient contraires au droit de propriété. 11. En troisième lieu, les moyens tirés de ce que les dispositions du f) de l'article 3 méconnaîtraient le droit européen et la liberté d'entreprendre ne sont pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. 12. Il résulte de ce qui précède que l'association Union des étangs de France n'est pas fondée à demander l'annulation des dispositions du f) de l'article 3 du décret qu'elle attaque. En ce qui concerne les dispositions du décret et de l'arrêté attaqués relatives à la rubrique 3.3.5.0 de la nomenclature : 13. Il résulte des dispositions de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, citées au point 2 ci-dessus, que les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles notamment de présenter des risques pour la santé et la sécurité publiques, ou d'accroître notablement le risque d'inondation, doivent être soumis à autorisation. Si, ainsi que le soutient le ministre de la transition écologique, la création, dans la nomenclature des installations, ouvrages, travaux et activités ayant une incidence sur l'eau ou le fonctionnement des écosystèmes aquatiques, de la rubrique 3.3.5.0 regroupant les travaux ayant uniquement pour objet la restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques et la soumission de ces travaux à un régime de déclaration a été prévue pour répondre à l'objectif de simplifier la procédure pour des projets favorables à la protection de ces milieux, au renouvellement de la biodiversité et au rétablissement de la continuité écologique dans les bassins hydrographiques, il ressort des pièces du dossier que certains de ces travaux, notamment quand ils ont pour objet l'arasement des digues et des barrages, mentionné au 1° de l'article 1er de l'arrêté du 30 juin 2020, auquel renvoient les dispositions litigieuses du décret attaqué, sont susceptibles, par nature, de présenter des dangers pour la sécurité publique ou d'accroître le risque d'inondation. Par suite, en soumettant à déclaration tous les travaux ayant pour objet la restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques, indépendamment des risques et dangers qu'ils sont susceptibles de présenter, les dispositions du h) de l'article 3 du décret attaqué méconnaissent l'article L. 214-3 du code de l'environnement. 14. Les requérants sont dès lors fondés, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leurs requêtes, à en demander l'annulation, ainsi que l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêté attaqué du 30 juin 2020. Sur les conséquences de l'annulation : 15. L'annulation d'un acte administratif implique en principe que cet acte est réputé n'être jamais intervenu. Toutefois, s'il apparaît que cet effet rétroactif de l'annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif - après avoir recueilli sur ce point les observations des parties et examiné l'ensemble des moyens, d'ordre public ou invoqués devant lui, pouvant affecter la légalité de l'acte en cause - de prendre en considération, d'une part, les conséquences de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d'autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l'annulation. Il lui revient d'apprécier, en rapprochant ces éléments, s'ils peuvent justifier qu'il soit dérogé, à titre exceptionnel, au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l'affirmative, de prévoir dans sa décision d'annulation que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de celle-ci contre les actes pris sur le fondement de l'acte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l'annulation ne prendra effet qu'à une date ultérieure qu'il détermine. 16. Eu égard aux conséquences manifestement excessives de l'annulation rétroactive des dispositions du h) de l'article 3 du décret attaqué, ainsi que de l'arrêté du 30 juin 2020, en raison notamment de l'intérêt général qui s'attache au maintien des travaux qui ont fait l'objet d'une déclaration en application de ces dispositions ou dont la demande de déclaration est en cours d'instruction, il y a lieu de différer l'effet de leur annulation au 1er mars 2023 et de préciser que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de la présente décision contre les actes pris sur son fondement, les effets des dispositions litigieuses doivent être regardés comme définitifs. Sur les conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 17. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser, d'une part, au syndicat France Hydro-Electricité et autres, d'autre part, à l'association Hydrauxois. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de l'Union des étangs de France présentées sur le fondement des mêmes dispositions. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le h) de l'article 3 du décret du 30 juin 2020 modifiant la nomenclature et la procédure en matière de police de l'eau et l'arrêté du 30 juin 2020 définissant les travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques relevant de la rubrique 3.3.5.0 de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement sont annulés. Cette annulation prendra effet au 1er mars 2023. Article 2 : Sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de la présente décision contre les actes pris sur le fondement des dispositions annulées, les effets antérieurs à cette annulation doivent être réputés définitifs. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de l'association Union des étangs de France est rejeté, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Article 4 : L'Etat versera, d'une part, au syndicat France Hydro-Electricité et autres, d'autre part, à l'association Hydrauxois la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : La présente décision sera notifiée au syndicat France Hydro-Electricité, premier dénommé pour les autres requérants de la requête n° 443683, à l'association Hydrauxois, à l'association Union des étangs de France, à la Première ministre et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré à l'issue de la séance du 12 octobre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat ; Mme Pauline Hot, auditrice et Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire-rapporteure. Rendu le 31 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé La rapporteure : Signé : Mme Catherine Moreau La secrétaire : Signé : Mme Valérie Peyrisse
JADE/CETATEXT000046511545.xml
Vu les procédures suivantes : 1° Sous le n° 454633, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 juillet 2021 et 22 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association One Voice demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 mai 2021 de la ministre de la transition écologique et du ministre de l'agriculture et de l'alimentation relatif à la mise en place à titre expérimental de mesures d'effarouchement de l'ours brun dans les Pyrénées pour prévenir les dommages aux troupeaux ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. 2° Sous le n° 455273, par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés le 5 août 2021 et les 25 avril et 29 août 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Ferus - Ours, Loup, Lynx, l'association pour la protection des animaux sauvages et du patrimoine naturel, l'association Pays de l'Ours - Adet, le comité écologique ariégeois, l'association Nature en Occitanie, le fonds d'intervention écopastoral, la société nationale de protection de la nature et d'acclimatation de France, l'association Animal Cross, l'association Nature Comminges et l'association France Nature Environnement 65 demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 mai 2021 de la ministre de la transition écologique et du ministre de l'agriculture et de l'alimentation relatif à la mise en place à titre expérimental de mesures d'effarouchement de l'ours brun dans les Pyrénées pour prévenir les dommages aux troupeaux ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. .................................................................................... Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment son article 191 ; - la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 ; - le code de l'environnement ; - l'arrêté du 28 novembre 2019 de la ministre de la transition écologique et solidaire, le ministre de l'action et des comptes publics et le ministre de l'agriculture et de l'alimentation relatif à l'opération de protection de l'environnement dans les espaces ruraux portant sur la protection des troupeaux contre la prédation ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Pauline Hot, auditrice, - les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de l'association One Voice ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 octobre 2022, présentée par l'association One Voice Considérant ce qui suit : 1. Les requêtes de l'association One Voice France et de l'association Ferus et autres sont dirigées contre le même arrêté du 31 mai 2021, relatif à la mise en place à titre expérimental de mesures d'effarouchement de l'ours brun dans les Pyrénées pour prévenir les dommages aux troupeaux. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision. 2. D'une part, l'article 12 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvage, dite directive " Habitats " prévoit que : " 1. Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l'annexe IV point a), dans leur aire de répartition naturelle, interdisant : (...) b) la perturbation intentionnelle de ces espèces, notamment durant la période de reproduction et de dépendance (...) ". L'ours brun (Ursus arctos) est au nombre des espèces figurant au point a) de l'annexe IV de la directive. L'article 16 de la même directive énonce toutefois que : " 1. A condition qu'il n'existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle, les Etats membres peuvent déroger aux dispositions des article 12, 13, 14 et de l'article 15 points a) et b) : (...) b) pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l'élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d'autres formes de propriété ". 3. D'autre part, aux termes du I de l'article L. 411-1 du code de l'environnement, pris pour la transposition de la directive " Habitats " : " Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation (...) d'espèces animales non domestiques (...) et de leurs habitats, sont interdits : 1° (...) la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces (...) ". Aux termes de l'article L. 411-2 du même code, pris pour la transposition de l'article 16 de la même directive : " Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : 1° La liste limitative des habitats naturels, des espèces animales non domestiques (...) ainsi protégés ; 2° La durée et les modalités de mise en œuvre des interdictions prises en application du I de l'article L. 411-1 ; 3° La partie du territoire sur laquelle elles s'appliquent (...) ; 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : (...) b) Pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l'élevage (...) et à d'autres formes de propriété ". 4. Enfin, pour l'application de ces dernières dispositions, l'article R. 411-1 du code de l'environnement prévoit que la liste des espèces animales non domestiques faisant l'objet des interdictions définies à l'article L. 411-1 est établie par arrêté conjoint du ministre chargé de la protection de la nature et du ministre chargé de l'agriculture. L'article R. 411-6 du même code précise que : " Les dérogations définies au 4° de l'article L. 411-2 sont accordées par le préfet, sauf dans les cas prévus aux articles R. 411-7 et R. 411-8. / (...) ". Son article R. 411-13 prévoit que les ministres chargés de la protection de la nature et de l'agriculture fixent par arrêté conjoint pris après avis du Conseil national de la protection de la nature " (...) / 2° Si nécessaire, pour certaines espèces dont l'aire de répartition excède le territoire d'un département, les conditions et limites dans lesquelles les dérogations sont accordées afin de garantir le respect des dispositions du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ". 5. Pris sur le fondement de ces dernières dispositions, l'arrêté attaqué a pour objet de fixer, à titre expérimental jusqu'au 30 novembre 2021, les conditions et limites dans lesquelles des dérogations à l'interdiction de perturbation intentionnelle des ours bruns peuvent être accordées par les préfets en vue de la protection des troupeaux domestiques. Son article 2 autorise le recours à des moyens d'effarouchement selon deux modalités, l'effarouchement simple, par des moyens sonores, olfactifs ou lumineux, et l'effarouchement renforcé, au moyen de tirs non létaux. L'article 3 de l'arrêté fixe les conditions de mise en œuvre de l'effarouchement simple, justifiée par la survenance d'au moins une attaque sur l'estive lors de l'année précédente ou d'au moins quatre attaques cumulées au cours des deux années précédentes. L'usage de la dérogation est conditionné à la mise en œuvre effective et proportionnée de moyens de protection du troupeau tels que définis par les plans de développement ruraux ou de mesures reconnues équivalentes, sauf si le troupeau est reconnu comme ne pouvant être protégé. Le déclenchement des opérations d'effarouchement n'est possible qu'en présence d'indices de la présence récente de l'ours brun à proximité du troupeau. Les dispositions prévoient une information préalable par les agents de l'Office français de la biodiversité et un compte rendu annuel de réalisation adressé au préfet. L'article 4 de l'arrêté précise les modalités de mise en œuvre de l'effarouchement renforcé, lequel est subordonné à la mise en place de l'effarouchement simple et à la survenance, malgré la mise en œuvre effective de moyens d'effarouchement simple, d'une deuxième attaque en moins d'un mois. Sur les estives ayant subi au moins quatre attaques sur les deux dernières années, l'effarouchement renforcé peut être mis en œuvre dès la première attaque imputable à l'ours survenue malgré la mise en œuvre effective de moyens d'effarouchement sonores, olfactifs et lumineux lors de l'estive en cours. Les opérations d'effarouchement renforcé sont mises en œuvre autour d'un troupeau regroupé pour la nuit, lorsqu'il est exposé à la prédation d'un ours repéré à sa proximité immédiate, de nuit avec une extension possible aux périodes crépusculaires ou matinales. Elles sont réalisées par des binômes, depuis un poste fixe. Les tirs de munition à double détonation sont effectués en veillant à ce que celles-ci restent entre le troupeau ou le poste fixe et la zone estimée de présence de l'ours, et en maintenant un angle d'au moins 45° par rapport au sol. Les tirs sont réalisés seulement tant que le prédateur persiste dans un comportement intentionnel de prédation, et prennent en compte le risque incendie. L'article 5 de l'arrêté prévoit l'autorisation du directeur du parc national des Pyrénées pour toute mesure d'effarouchement dans le cœur du parc, et interdit toute mesure d'effarouchement renforcé dans le cœur du parc national des Pyrénées. 6. Il est constant que l'ours brun ne vit plus en France que dans le massif des Pyrénées. Alors que l'effectif de l'espèce en France comptait encore environ 150 individus au début du XXème siècle, la population ursine a connu un fort déclin au cours de ce siècle pour ne plus compter que 7 ou 8 individus dans les années 1980. En dépit du régime de protection institué en 1981 et des réintroductions effectuées à compter de 1996, l'état de conservation de l'espèce n'a pas retrouvé un caractère favorable au sens de l'article 1er de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992. Il ressort ainsi des différentes études produites au dossier que les effectifs d'ours bruns dans la chaîne pyrénéenne s'élevaient à environ 68 individus en 2021. Il ressort, en outre, du rapport d'évaluation établi le 26 septembre 2013 par le Muséum national d'histoire naturelle à la demande du Gouvernement que, malgré l'évolution positive des effectifs et de l'aire de répartition et malgré la stabilité de l'habitat de l'espèce, les perspectives futures restent défavorables, dans la mesure où les effectifs sur l'aire de répartition demeurent inférieurs à la valeur de référence jugée nécessaire pour assurer la survie de l'espèce, estimée à une centaine d'individus. Sur la légalité externe de l'arrêté attaqué : 7. Aux termes de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement : " I. - Le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public, prévu à l'article 7 de la Charte de l'environnement, est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration. / Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux décisions qui modifient, prorogent, retirent ou abrogent les décisions mentionnées à l'alinéa précédent soumises à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration. / Ne sont pas regardées comme ayant une incidence sur l'environnement les décisions qui ont sur ce dernier un effet indirect ou non significatif. II. - Sous réserve des dispositions de l'article L. 123-19-6, le projet d'une décision mentionnée au I, accompagné d'une note de présentation précisant notamment le contexte et les objectifs de ce projet, est mis à disposition du public par voie électronique et, sur demande présentée dans des conditions prévues par décret, mis en consultation sur support papier dans les préfectures et les sous-préfectures en ce qui concerne les décisions des autorités de l'Etat, y compris les autorités administratives indépendantes, et des établissements publics de l'Etat, ou au siège de l'autorité en ce qui concerne les décisions des autres autorités. [...] Au plus tard à la date de la publication de la décision et pendant une durée minimale de trois mois, l'autorité administrative qui a pris la décision rend publics, par voie électronique, la synthèse des observations et propositions du public avec l'indication de celles dont il a été tenu compte, les observations et propositions déposées par voie électronique ainsi que, dans un document séparé, les motifs de la décision. " 8. Il ressort des pièces du dossier que la note de présentation du projet accompagnant le projet d'arrêté soumis à la participation du public a été mise à la disposition du public par voie électronique entre le 16 avril et le 9 mai 2021. L'association requérante soutient que cette note ne serait pas sincère en tant qu'elle présente le projet d'arrêté comme " donnant suite " à l'avis du Conseil national de protection de la nature (CNPN) par l'interdiction des mesures d'effarouchement renforcé dans la zone cœur du parc national des Pyrénées. La formulation retenue, qui peut suggérer que l'avis du CNPN aurait été entièrement suivi, n'en reflète pas exactement la teneur, au demeurant très défavorable, dès lors que le Conseil recommandait l'interdiction de l'effarouchement renforcé mais aussi simple dans la zone cœur du parc national des Pyrénées, ainsi que de sa mise en œuvre auprès des femelles suitées. Cependant, pour regrettable que soit cette circonstance, dès lors que l'avis du CNPN était joint à la note de présentation, le public a pu en prendre connaissance avec le projet d'arrêté. Par suite, la sincérité de la procédure de participation du public n'a pas été affectée. La circonstance qu'il n'aurait pas été tenu compte du sens de la majorité des observations formulées par le public à l'occasion de cette consultation est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de l'arrêté. De même, le défaut de publication de la synthèse des observations du public ainsi que des motifs de l'arrêté attaqué antérieurement ou concomitamment à sa publication est, par lui-même, sans incidence sur la légalité de celui-ci. Le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement ne peut, dès lors, qu'être écarté. Sur la légalité interne de l'arrêté attaqué : Sur les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 411-2 du code de l'environnement : En ce qui concerne la méconnaissance de la condition relative à l'existence de dommages importants à l'élevage : 9. Les dispositions de l'article 3 de l'arrêté attaqué, rappelées au point 5, conditionnent le recours à des mesures d'effarouchement simple au fait que le troupeau ait subi " au moins une attaque sur l'estive au cours de l'année précédant la demande ou d'au moins quatre attaques cumulées sur l'estive au cours des deux années précédant la demande ". Les dispositions de l'article 4 de l'arrêté attaqué autorisent la mise en œuvre de mesures d'effarouchement renforcé " dès la deuxième attaque intervenue dans un délai inférieur à un mois (...) ou, pour les estives ayant subi au moins quatre attaques cumulées sur les deux années précédentes, dès la première attaque imputable à l'ours (...) ". Une attaque est définie à l'article 3 de l'arrêté attaqué comme " toute attaque pour laquelle la responsabilité de l'ours n'a pas pu être exclue et donnant lieu à au moins une victime indemnisable au titre de la prédation de l'ours ". Les dispositions de l'arrêté attaqué ne permettent ainsi le recours à des mesures d'effarouchement, simple ou renforcé, que dans le cas où le troupeau concerné a déjà subi des dommages caractérisés. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaîtrait la condition relative à l'existence de dommages importants à l'élevage posée à l'article L. 411-2 du code de l'environnement ne peut qu'être écarté. En ce qui concerne la méconnaissance de la condition relative à l'absence d'autre solution satisfaisante : 10. Si la nécessité de protéger les élevages est au nombre des motifs qui peuvent justifier, aux termes des dispositions législatives citées ci-dessus, une dérogation à l'interdiction de perturbation intentionnelle des conditions de vie d'une espèce protégée au titre de l'article L. 411-1 du code de l'environnement, dont l'état de conservation est défavorable, de telles mesures dérogatoires ne sauraient être légalement adoptées que si elles ne portent pas atteinte au maintien des populations concernées dans leur aire de répartition naturelle et ne compromettent pas l'amélioration de l'état de l'espèce. 11. D'une part, si les requérantes soutiennent que les mesures d'effarouchement sont inefficaces, il ressort des pièces du dossier que ces mesures, mises en œuvre à titre expérimental depuis 2019 sur le fondement des données scientifiques disponibles, ont permis, dans la majorité des cas, la mise en fuite des individus concernés et la réduction du nombre d'attaques dans les estives concernées, sans que les requérantes n'apportent suffisamment d'éléments pour démontrer que d'autres mesures auraient une efficacité supérieure à celles résultant de l'arrêté attaqué. 12. D'autre part, l'arrêté attaqué prévoit en son article 2 que la délivrance des dérogations permettant le recours à des moyens d'effarouchement des ours sur une estive donnée " est conditionnée à la mise en œuvre effective et proportionnée des moyens de protection du troupeau tels que définis dans les plans de développement ruraux (mesures préventives raisonnables de protection des troupeaux prévues par l'arrêté du ministre chargé de l'agriculture pris en application de l'article D. 114-11 du code rural et de la pêche maritime), ou à la mise en œuvre effective attestée par la direction départementale des territoires (et de la mer) de mesures reconnues équivalentes, sauf si le troupeau est reconnu comme ne pouvant être protégé par le préfet de département ". Il résulte de ces dispositions que la mise en œuvre des mesures d'effarouchement est subsidiaire, et subordonnée à l'existence de mesures effectives et proportionnées de protection du troupeau, prévues par l'arrêté du 28 novembre 2019 relatif à l'opération de protection de l'environnement dans les espaces ruraux portant sur la protection des troupeaux contre la prédation ou de mesures effectives et reconnues équivalentes par la direction départementale des territoires et de la mer. Si les associations requérantes soutiennent que la combinaison du gardiennage par les bergers, du regroupement nocturne des troupeaux et de la présence de chiens de protection, notamment préconisée par le CNPN, constitue une autre solution satisfaisante, elles n'établissent pas que la mise en œuvre de telles mesures présenterait des résultats équivalents à ceux de l'effarouchement, qui n'est susceptible d'être autorisé qu'à titre subsidiaire, lorsque les mesures de protection du troupeau, bien qu'effectives et proportionnées, s'avèrent insuffisantes. 13. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement en ce que le ministre n'établit pas qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante à la mise en place de mesures d'effarouchement doit être écarté. En ce qui concerne la méconnaissance de la condition relative au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations de l'espèce dans son aire de répartition naturelle : 14. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport réalisé par le conseil général de l'environnement et du développement durable et le conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux, publié en septembre 2018, qu'en l'état des connaissances disponibles, les mesures d'effarouchement simple par des moyens sonores, olfactifs ou lumineux, mises en œuvre dans les conditions prévues par l'arrêté attaqué, ne sont pas de nature à porter atteinte au maintien des populations d'ours ou à compromettre l'amélioration de l'état de conservation de l'espèce. 15. En revanche, l'article 4 de l'arrêté attaqué, sous réserve que soient remplies les conditions qu'il prévoit en termes d'attaques des troupeaux, permet à tout éleveur, groupement pastoral ou gestionnaire d'estive de déposer auprès du préfet une demande de dérogation permettant le recours à l'effarouchement à l'aide d'un fusil de calibre 12 chargé de cartouches à double détonation, ou, pour la protection des personnes réalisant l'opération face au comportement menaçant d'un ours, de cartouches à munition en caoutchouc et prévoit que les dérogations accordées sont délivrées pour six mois. Il permet la mise en œuvre de ces opérations d'effarouchement renforcé par l'éleveur ou le berger, titulaires du permis de chasser, ou par des lieutenants de louveterie ou par des chasseurs ou par des agents de l'Office français de la biodiversité, après une formation préalable par les agents de cet office, en dehors de la zone cœur du parc national des Pyrénées et sous un certain nombre de conditions tenant notamment à l'installation du dispositif d'effarouchement, rappelées au point 5, opéré sauf exception en binôme, depuis un poste fixe situé à proximité d'un troupeau. En ouvrant ainsi ces possibilités de recourir à l'effarouchement renforcé, sans encadrer expressément leur mise en œuvre auprès des femelles en gestation et suitées, les dispositions de l'arrêté attaqué relatives à ce mode d'effarouchement ne permettent pas de s'assurer, eu égard aux effets d'un tel effarouchement sur l'espèce, et en l'absence de données scientifiques nouvelles témoignant d'une amélioration de son état de conservation, que les dérogations susceptibles d'être accordées sur ce fondement par le préfet ne portent pas atteinte au maintien des populations concernées dans leur aire de répartition naturelle et ne compromettent pas l'amélioration de l'état de l'espèce. Par suite, les associations requérantes ne sont fondées à soutenir que l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement qu'en tant qu'il ne prévoit pas de mécanisme encadrant la mise en œuvre du dispositif d'effarouchement renforcé auprès des femelles en gestation et suitées. Sur le moyen tiré de la méconnaissance du principe de précaution : 16. Aux termes de l'article 191 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 2. La politique de l'Union dans le domaine de l'environnement vise un niveau de protection élevé, en tenant compte de la diversité des situations dans les différentes régions de l'Union. Elle est fondée sur les principes de précaution et d'action préventive, sur le principe de la correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement et sur le principe du pollueur-payeur ". En vertu de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt C-674/17 du 10 octobre 2019, il découle du principe de précaution consacré par les stipulations précitées que si l'examen des meilleures données scientifiques disponibles laisse subsister une incertitude sur le point de savoir si une dérogation susceptible d'intervenir sur le fondement de l'article 16 de la directive du 21 mai 1992 précitée nuira ou non au maintien ou au rétablissement des populations d'une espèce menacée d'extinction dans un état de conservation favorable, l'Etat membre doit s'abstenir de l'adopter ou de la mettre en œuvre. 17. Si les requérantes soutiennent que l'arrêté attaqué méconnaîtrait le principe de précaution tel que défini par l'article 191 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, les risques invoqués pour la viabilité de l'espèce, s'agissant d'une règlementation ayant pour objet d'organiser les conditions de mise en œuvre de dérogations au principe de protection des espèces protégées et de leurs habitats posé par la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 et les articles L. 411-1 et suivants du code de l'environnement, ne sont pas au nombre de ceux, présentant des incertitudes en l'état des connaissances scientifiques, visés à cet article. Dès lors, le moyen soulevé ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté. Sur les conclusions relatives aux frais d'instance : 18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser d'une part à l'association One Voice, d'autre part à l'ensemble des autres associations requérantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'article 4 de l'arrêté du 31 mai 2021 relatif à la mise en place à titre expérimental de mesures d'effarouchement de l'ours brun dans les Pyrénées pour prévenir les dommages aux troupeaux est annulé en tant qu'il ne prévoit pas de mécanisme encadrant la mise en œuvre du dispositif d'effarouchement renforcé auprès des femelles en gestation et suitées. Article 2 : L'Etat versera d'une part à l'association One Voice, d'autre part à l'ensemble des autres associations requérantes une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté. Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'association One Voice, à l'association Ferus - Ours, Loup, Lynx, première dénommée pour l'ensemble des requérantes sous le n° 455273, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Délibéré à l'issue de la séance du 12 octobre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat ; Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire et Mme Pauline Hot, auditrice-rapporteure. Rendu le 31 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé La rapporteure : Signé : Mme Pauline Hot La secrétaire : Signé : Mme Valérie Peyrisse
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner le Crédit municipal de Paris à lui verser la somme totale de 205 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des manquements de son employeur à son obligation de sécurité et de protection des agents. Par un jugement n° 2005901 du 30 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a condamné le Crédit municipal de Paris à verser à Mme D... une somme de 20 000 euros au titre des manquements à ses obligations en matière de protection et de sécurité des agents et rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er février et 4 mai 2022, Mme C..., représentée par Me Cier, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) de réformer le jugement n° 2005901 du 30 novembre 2021 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a limité, à la somme de 20 000 euros, l'indemnité due par le Crédit municipal de Paris au titre des manquements à ses obligations en matière de protection et de sécurité des agents ; 2°) de rejeter le recours incident du Crédit municipal de Paris ; 3°) de porter le montant de la condamnation du Crédit municipal de Paris à la somme de 205 000 euros en réparation des divers préjudices qu'elle estime avoir subis ; 4°) de mettre à la charge du Crédit municipal de Paris le versement de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 5°) de condamner le Crédit municipal de Paris aux entiers dépens. Elle soutient que : - la responsabilité pour faute du Crédit municipal de Paris est engagée à raison de la dégradation de ses conditions de travail et de l'insuffisance des mesures de protection mises en place pour prévenir les risques d'inhalation de substances chimiques auxquels elle a été soumise ; son employeur a méconnu l'obligation de sécurité définie à l'article 23 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ainsi qu'aux articles 2 du décret n° 85-603 du 10 juin 1985 et L. 4121-1 du code du travail en l'exposant à des produits chimiques dans le cadre de ses missions d'analyse et de poinçonnage de bijoux et d'objets en métaux précieux ; les pathologies physiques et psychiques qu'elle a contractées sont en lien direct avec le service, ainsi que l'a estimé la commission de réforme départementale lors de sa séance du 4 mai 2017 ; - la responsabilité sans faute de l'établissement public est engagée ; - elle a subi divers chefs de préjudices en lien direct avec la faute commise par son employeur : elle est ainsi fondée à demander la somme de 15 000 euros au titre du pretium doloris et du préjudice d'anxiété ; son préjudice moral doit être indemnisé à hauteur de 10 000 euros ; elle a subi un préjudice de 75 000 euros en raison de la perte de rémunération subie durant sa période de disponibilité ; le préjudice résultant du manquement de son employeur à son obligation de protection et de sécurité doit être évalué à la somme de 35 000 euros ; le préjudice de carrière et d'absence d'avancement doit être évalué à la somme de 60 000 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 4 avril 2022, le Crédit municipal de Paris, représenté par la SCP Thouvenin, Coudray et Grevy, demande à la Cour : 1°) de rejeter les demandes de Mme C... ; 2°) par la voie de l'appel incident, à titre principal, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 30 novembre 2021 en tant qu'il le condamne à verser à Mme D... la somme de 20 000 euros au titre des manquements à ses obligations en matière de protection et de sécurité des agents et, à titre subsidiaire, de ramener à la somme globale de 8 000 euros l'indemnité à laquelle il a été condamné et de réformer dans cette mesure le jugement ; 3°) de mettre à la charge de Mme C... la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - c'est à tort que le tribunal a jugé qu'il avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; il a pris toutes les mesures nécessaires pour satisfaire à son obligation de sécurité et pour assurer la protection de la santé de la requérante en application des dispositions législatives et réglementaires applicables en la matière ; - la requérante a commis une faute de nature à exonérer l'établissement public de toute responsabilité ; - la responsabilité sans faute de l'établissement public ne saurait être engagée dans la mesure où la pathologie de l'intéressée n'a pas été déclarée imputable au service et où, à supposer même que les pathologies présentent un lien direct avec l'exercice des fonctions, la requérante a adopté un comportement fautif ; - dans l'hypothèse où la responsabilité de l'établissement serait retenue, celui-ci doit en être exonéré partiellement au regard de la faute de la requérante qui a contribué à la survenance et l'aggravation de ses souffrances et de son préjudice moral ; il convient d'en limiter le montant à 8 000 euros ; - en tout état de cause, Mme D... n'apporte aucun élément nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur les préjudices subis. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de la fonction publique ; - le code du travail ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 ; - le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public, - et les observations de Me Coudray pour le Crédit municipal de Paris. Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., agent de constatation à la direction générale des douanes et droits indirects, a été recrutée en 2005 par le Crédit municipal de Paris en qualité d'adjoint administratif, par la voie du détachement, puis intégrée en 2007 dans le corps des secrétaires administratifs des administrations parisiennes. Ses missions comprenaient notamment l'analyse et le poinçonnage de bijoux et objets en métaux précieux destinés à la vente par le Crédit municipal de Paris et pour le compte d'opérateurs extérieurs. Par un arrêté du 26 décembre 2016, le directeur général du Crédit municipal de Paris l'a placée en disponibilité pour convenances personnelles pour une durée d'un an, à compter du 1er février 2017. Le 4 mai 2017, la commission de réforme du département de Paris a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service des pathologies d'agueusie (perte de goût) et d'anosmie (perte de l'odorat) développées par l'intéressée, dues à son exposition répétée à des produits chimiques dans le cadre de ses fonctions. Par un courrier du 27 octobre 2017, elle a sollicité sa réintégration dans les effectifs du Crédit municipal de Paris. Toutefois, après qu'elle a refusé le poste de coordinatrice des prêts sur gages qui lui avait été proposé, elle a été placée en disponibilité d'office par un arrêté du directeur général du Crédit municipal de Paris du 14 mai 2018. Le 10 décembre 2018, elle a été admise, à sa demande, à faire valoir ses droits à la retraite et a été radiée des cadres à compter du 1er avril 2019. Estimant que le Crédit municipal de Paris avait commis divers manquements à ses obligations de protection et de sécurité de ses agents, notamment en ne procédant pas à un aménagement suffisant de son poste de travail, elle a formé, le 28 novembre 2019, une demande indemnitaire préalable d'un montant de 170 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estimait avoir subis qui a été implicitement rejetée. Mme C... relève régulièrement appel du jugement du 30 novembre 2021 visé ci-dessus, en tant que, par celui-ci, le tribunal administratif de Paris ne lui a accordé qu'une indemnité de 20 000 euros en réparation des divers préjudices qu'elle estime avoir subis et demande à la Cour de porter ce montant à 205 000 euros. Par la voie de l'appel incident, le Crédit municipal de Paris demande à titre principal l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Paris et, à titre subsidiaire, de ramener à la somme globale de 8 000 euros l'indemnité à laquelle il a été condamné. Sur la responsabilité du Crédit municipal de Paris : En ce qui concerne la responsabilité pour faute : 2. D'une part, aux termes de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires visée ci-dessus, désormais codifié à l'article L. 136-1 du code général de la fonction publique : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurés aux fonctionnaires durant leur travail ". Aux termes de l'article 2 du décret du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail, visé ci-dessus : " Dans les collectivités et établissements mentionnés à l'article 1er, les locaux et installations de service doivent être aménagés, les équipements doivent être réalisés et maintenus de manière à garantir la sécurité des agents et des usagers. Les locaux doivent être tenus dans un état constant de propreté et présenter les conditions d'hygiène et de sécurité nécessaires à la santé des personnes. ". Aux termes de l'article 2-1 de ce même décret : " Les autorités territoriales sont chargées de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité. ". En application de l'article L. 4121-1 du code du travail, rendu applicable aux agents publics relevant de la fonction publique territoriale par l'article 3 du décret du 10 juin 1985 susmentionné et l'article 108-1 de la loi du 26 janvier 1984 visée ci-dessus, désormais codifié à l'article L. 811-1 du code général de la fonction publique : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : / 1° Des actions de prévention des risques professionnels (...) ; / 2° Des actions d'information et de formation ; / 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. / L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". 3. D'autre part, selon l'article L. 4121-2 du code du travail : " l'employeur met en œuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : 1° Eviter les risques ; 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ; 3° Combattre les risques à la source ; 4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ; 5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ; 6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ; 7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l'article L. 114 -2-1 ; 8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ; 9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs. ". L'article R. 4412-15 du code du travail précise que : " le risque que présente un agent chimique dangereux pour la santé et la sécurité des travailleurs doit être supprimé. Lorsque la suppression de ce risque est impossible, ce dernier est réduit au minimum par la substitution d'un agent chimique dangereux par un autre agent chimique ou par un procédé non dangereux ou moins dangereux ". Enfin l'article R. 4412-16 dudit code indique que : " lorsque la substitution d'un agent chimique dangereux n'est pas possible au regard de la nature de l'activité et de l'évaluation des risques, le risque est réduit au minimum par la mise en œuvre, par ordre de priorité, des mesures suivantes : 1° Conception des procédés de travail et contrôles techniques appropriés ; 2° Utilisation des équipements et des matériels adéquats de manière à éviter ou à réduire le plus possible la libération d'agents chimiques dangereux sur le lieu de travail ; 3° Application, à la source du risque, des mesures efficaces de protection collective, telles qu'une bonne ventilation et des mesures appropriées d'organisation du travail ; 4° Utilisation' si l'exposition ne peut être réduite par d'autres moyens, de moyens de protection individuelle, y compris d'équipements de protection individuelle. ". 4. Tout d'abord, il appartient aux autorités administratives, qui ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de leurs agents, d'assurer, sauf à commettre une faute de service, la bonne exécution des dispositions législatives et réglementaires qui ont cet objet, ainsi que le précise l'article 2-1 du décret du 10 juin 1985 précité. A ce titre, il leur incombe notamment de veiller au respect des dispositions des articles L. 4121-1, R. 4412-15 et R. 4412-16 du code du travail mentionnés aux points 2 et 3. Dès lors, l'agent public qui fait valoir que l'exposition à des produits toxiques sur son lieu de travail serait à l'origine de ses problèmes de santé, mais dont l`affection ne peut être prise en charge au titre de la législation sur les maladies professionnelles dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle serait essentiellement et directement causée par son travail habituel, peut néanmoins rechercher la responsabilité de sa collectivité en excipant de la méconnaissance fautive par cette dernière de ses obligations. 5. En outre, si, en application de la législation du travail désormais codifiée à l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur a l'obligation générale d'assurer la sécurité et la protection de la santé des travailleurs placés sous son autorité, il incombe aux autorités publiques chargées de la prévention des risques professionnels de se tenir informées des dangers que peuvent courir les travailleurs dans le cadre de leur activité professionnelle, compte tenu notamment des produits et substances qu'ils manipulent ou avec lesquels ils sont en contact' et d'arrêter, en l'état des connaissances scientifiques, au besoin à l'aide d'études ou d'enquêtes complémentaires, les mesures les plus appropriées pour limiter et si possible éliminer ces dangers. L'employeur est donc tenu à une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs sur leur lieu de travail, dès lors que le risque est connu de lui. 6. En l'espèce, Mme C... fait valoir que, dans le cadre de son obligation de sécurité et de protection de ses agents, le Crédit municipal de Paris a tardé à mettre en œuvre les différentes préconisations d'aménagement de son poste de travail émises par le médecin de prévention dès 2005 ce qui a conduit à une détérioration de son état de santé et plus particulièrement à des pathologies d'agueusie et d'anosmie d'origine séquellaire en raison d'une inhalation chronique de vapeurs toxiques dans le cadre de son travail. Il résulte de l'instruction que, lors d'une première visite sur le lieu de travail de la requérante, le 25 novembre 2005, le médecin du travail a relevé, à cette occasion, que Mme C... utilisait régulièrement différents produits toxiques (acide chlorhydrique, acide nitrique, sulfate d'argent, iodate de potassium, perchlorure de fer et de l'eau de touche (mélange d'acide chlorhydrique et d'acide nitrique) dans un environnement bruyant et a notamment recommandé l'achat de lunettes de protection ainsi que l'installation d'un système de ventilation. Ces conditions de travail ont conduit le médecin à prescrire très régulièrement des bilans sanguins ainsi que des explorations fonctionnelles respiratoires. 7. Par ailleurs, face à la détérioration de l'état de santé de la requérante, le médecin du travail a demandé, lors des visites médicales des 24 janvier 2013 et 25 février 2014, que lui soient communiquées les fiches techniques des produits utilisés et qu'une étude du poste de Mme C... soit réalisée afin de contrôler les points suivants : ventilation, bruit et confinement. Lors de la visite de l'établissement, le 18 mars 2014, il est apparu que, dès le matin, une odeur nette de produits chimiques était présente, que le système d'aspiration des vapeurs chimiques émises lors des analyses était très bruyant et qu'il ne pouvait, en conséquence, être utilisé de manière continue, l'évacuation des vapeurs chimiques résiduelles devant être réalisée par l'ouverture de la fenêtre lorsque les conditions climatiques le permettaient. Au regard des conditions de travail de Mme C..., le médecin de prévention a estimé qu'il était nécessaire de déplacer la centrale d'aspiration dans un local attenant pour supprimer la nuisance sonore existante, de s'assurer de la maintenance périodique du système de ventilation en changeant régulièrement les filtres, d'installer également une ventilation mécanique de type VMC pour éliminer les vapeurs résiduelles ainsi qu'un point d'eau avec douchette et rince-œil pour assurer les premiers soins en cas de projections accidentelles sur la peau et les yeux des produits chimiques utilisés. 8. En l'absence de mesures prises pour mettre en œuvre les préconisations mentionnées au point précédent, Mme C..., qui a transmis à sa hiérarchie une déclaration de maladie professionnelle le 13 janvier 2015, lui a adressé divers courriels en date des 20 mai, 15 juin et 16 juin 2015 dans lesquels elle faisait part de la dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé, ainsi que de son souhait de se consacrer uniquement aux ventes du Crédit municipal de Paris et non plus aux ventes d'opérateurs extérieurs. Cet état de fait est corroboré par le médecin de prévention qui constatant, lors d'une nouvelle visite du bureau de l'intéressée le 1er décembre 2015, que les travaux prescrits n'étaient toujours pas réalisés, a décidé de limiter à deux heures en fin de journée l'utilisation de produits chimiques, l'a exemptée de port de charges lourdes et de positions contraintes prolongées et a prescrit un bilan complémentaire. Cette préconisation a été renouvelée le 12 avril 2016. Une expertise médicale en date du 16 décembre 2016 a permis de confirmer que la requérante présentait une réelle perte de l'odorat et du goût ainsi que le caractère professionnel et irréversible des lésions des muqueuses constatées. L'expert a conclu à la pertinence du classement en maladie professionnelle de l'affection dont souffre Mme C... et considère que le début de la maladie remonte au début de l'exposition aux produits toxiques soit le 1er octobre 2005. A cette occasion, il a estimé qu'il convenait d'attribuer à la requérante une IPP de 40 % (10 % au titre de l'anosmie sévère, 5 % de la rhinite sévère, 5 % de l'agueusie, 10 % pour la fragilité broncho-pulmonaire et la dyspnée permanente associées et 10 % pour les troubles psychologiques secondaires. Ces conclusions médicales sont corroborées par le certificat médical du 4 décembre 2017 établi par le médecin responsable de l'unité odorat du service oto-rhinolaryngologie de l'hôpital Georges Pompidou qui relève que Mme C... présente des seuils olfactifs indétectables avec une absence de discrimination et une absence de reconnaissance et de perception des odeurs au test qualitatif. Il considère que cette anosmie est probablement séquellaire d'une inhalation chronique de vapeurs toxiques dans le cadre de son activité professionnelle. 9. Si le Crédit municipal de Paris fait valoir que les différentes préconisations du médecin du travail ont été appliquées, que l'efficacité du dispositif de ventilation n'a pas été remise en cause, et que Mme C... n'a jamais été reconnue inapte à son activité professionnelle, les diverses pièces produites dans le cadre de la présente instance ne permettent pas de s'assurer que les travaux d'aménagement du système de ventilation demandés dans le local où Mme C... exerçait son office (déplacement de l'équipement et installation d'une ventilation mécanique contrôlée) aient été réalisés avant le début de l'année 2017, seule l'installation d'une armoire de stockage pour les produits utilisés par la requérante ayant eu lieu dans le courant de l'été 2016 après une nouvelle visite du service de la médecine de prévention le 9 mai 2016. Une analyse similaire peut être faite s'agissant de l'achat d'une paire de lunettes de protection. 10. De même, si le Crédit municipal de Paris met en avant le comportement fautif de Mme C... qui n'aurait pas porté les équipements de sécurité mis à sa disposition en produisant notamment une attestation rédigée par la responsable des ressources humaines en date du 22 septembre 2021 qui précise qu'il a été rappelé à plusieurs reprises à l'intéressée qu'elle devait porter les équipements de protection mis à sa disposition mais que cette dernière aurait systématiquement répondu qu'elle était dans l'incapacité de réaliser correctement les missions qui lui étaient dévolues en les portant, aucune pièce du dossier ne permet de s'assurer que les phases d'information et de formation de la salariée au port des équipements de protection individuelle ont bien été mises en œuvre, la fiche de poste de l'intéressée ne mentionnant notamment pas le port obligatoire des lunettes de protection. De même, il ne résulte pas de l'instruction qu'un masque de protection ait été effectivement mis à sa disposition. 11. Ainsi, il apparaît qu'en dépit des préconisations régulières du médecin de prévention et des alertes régulières de Mme C... sur les conséquences néfastes de ses conditions de travail sur son état de santé, le Crédit municipal de Paris a tardé à mettre en œuvre les mesures nécessaires, a minima à compter du 1er décembre 2015, date des préconisations du médecin de prévention mentionnées au point 8 du présent arrêt, et jusqu'au début de l'année 2017, pour satisfaire à son obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs sur leur lieu de travail et a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité. En ce qui concerne la responsabilité pour risque : 12. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et pour les fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales et le I° de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 désormais abrogé, qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité. 13. Par ailleurs, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 14. En l'espèce, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise médicale en date du 16 décembre 2016, mentionné au point 8 du présent arrêt, que Mme C... qui, dans le cadre de son activité professionnelle, a analysé, pendant plus de dix ans, des métaux aux moyens de substances chimiques, et réalisé leur poinçonnage, présente une réelle perte de goût et d'odorat liée à l'absence de réelles protections contre les gaz et aérosols lors de la manipulation de produits hautement toxiques. L'expert considère que la pathologie est irréversible et que le caractère professionnel de l'atteinte est certain, son origine pouvant être fixée au 1er octobre 2005, date de son affectation dans le poste en cause. Cet avis est corroboré par la commission de réforme du département de Paris qui a émis le 4 mai 2017 un avis favorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la pathologie. Dans ces conditions, en l'absence de circonstances particulières la détachant du service, ressortant de l'instruction, Mme C... est fondée à soutenir que sa pathologie présente un lien direct avec le service et caractérise dès lors une maladie professionnelle. Par suite, la requérante est fondée à soutenir, pour la première fois en appel, que la responsabilité sans faute du Crédit municipal de Paris est engagée. Sur l'indemnisation des préjudices : En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux : S'agissant de la perte de gains professionnels : 15. Mme C... sollicite le versement d'une indemnité de 75 000 euros en réparation des préjudices résultant de son placement en disponibilité pour convenances personnelles à compter du 1er février 2017, puis en disponibilité d'office à compter du 14 mai 2018. Toutefois, alors qu'il résulte de l'instruction que les aménagements rendant la poursuite de son activité à temps plein compatible avec son état de santé avaient été réalisés, cette mise en disponibilité pour convenances personnelles est la conséquence d'un choix personnel de la requérante. Une analyse similaire doit être faite pour le maintien en disponibilité, Mme C... ayant refusé le poste offert par son employeur à son retour de disponibilité alors que les fonctions proposées de " coordinatrice des prêts sur gages " correspondaient à son cadre d'emploi. Ce préjudice n'est donc pas indemnisable, tant au titre de la responsabilité pour faute qu'au titre de la responsabilité pour risque mentionnée, l'intéressée n'établissant pas l'existence d'un lien direct et certain entre les manquements commis par son employeur et les mesures précitées. S'agissant des incidences professionnelles : 16. Si Mme C... sollicite la réparation des préjudices résultant de l'absence d'avancement dans sa carrière et de sa mise en retraite de façon anticipée, il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'elle ne démontre pas d'une part, une chance sérieuse d'obtenir une promotion et, d'autre part, avoir été contrainte de demander son placement en position de retraite pour carrière longue en raison des manquements de son employeur à ses obligations de protection. Ce préjudice n'est donc pas indemnisable, tant au titre de la responsabilité pour faute qu'au titre de la responsabilité pour risque mentionnée. En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux : S'agissant des souffrances endurées : 17. Tout d'abord, il résulte de l'instruction que Mme C... a été exposée pendant plusieurs années et a minima à compter du début de l'année 2013, sans réelle protection, à des acides forts qui ont altéré de manière irrémédiable son goût et son odorat. L'expert a estimé que l'intéressée était atteinte d'une incapacité permanente partielle de 40 % se décomposant à hauteur de 10 % au titre de l'anosmie sévère, de 5 % pour l'agueusie, de 5 % pour la rhinite sévère, de 10 % pour la fragilité broncho-pulmonaire et la dyspnée permanente associée et de 10 % pour les troubles psychologiques secondaires. 18. Par ailleurs, cette situation a généré un préjudice d'anxiété qui est né de la conscience prise par la requérante qu'elle courrait un risque élevé de développer une pathologie grave, et par là-même d'une espérance de vie diminuée, à la suite de son exposition prolongée à des produits toxiques. 19. Au regard de ces éléments et nonobstant la circonstance qu'il ne résulte pas de l'instruction que le taux de déficit fonctionnel permanent de Mme C... devrait s'aggraver, il n'en demeure pas moins qu'elle est soumise à une surveillance médicale régulière de son état de santé, qui a pu générer de l'inquiétude. Dans ces circonstances, il y a lieu de porter l'indemnité réparant ces chefs de préjudice à la somme globale de 20 000 euros. S'agissant du préjudice moral : 20. Il résulte de l'instruction que Mme C... a été exposée pendant au moins quatre ans à des produits toxiques qui ont altéré de manière irrémédiable sa santé en dépit des préconisations récurrentes du médecin de prévention et de ses alertes répétées auprès de sa hiérarchie. Au regard de la durée particulièrement longue d'exposition quotidienne au risque d'inhalation de produits toxiques pendant ses périodes d'activité, il sera fait une juste appréciation suffisante du préjudice moral subi par l'intéressée en fixant sa réparation à la somme de 10 000 euros. Sur le préjudice résultant du manquement à l'obligation de prévention des risques : 21. Si la requérante demande l'indemnisation du " préjudice résultant du manquement du Crédit municipal de Paris au titre de l'obligation de prévention des risques ", elle ne précise pas la consistance de ce chef de préjudice. En tout état de cause, il ne saurait constituer par lui-même un préjudice indemnisable distinct de celui réparé au titre du préjudice moral et des troubles de toute nature dans les conditions d'existence. Par suite, la demande d'indemnisation présentée à ce titre doit être rejetée. 22. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... est seulement fondée à demander la réformation du jugement attaqué du tribunal administratif de Paris dans la mesure prévue aux points 19 et 20 du présent arrêt. Sur l'appel incident du Crédit municipal de Paris : 23. Il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que le Crédit municipal de Paris n'est pas fondé à demander la réformation de l'article 1er du jugement attaqué. Sur les frais liés au litige : 24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par le Crédit municipal de Paris en lien avec la présente instance et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du Crédit municipal de Paris une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par Mme C..., en application de ces dispositions. En revanche, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des dépens auraient été exposés, les conclusions de la requérante au titre des dispositions de l'article R. 761-1 doivent être écartées. D E C I D E :Article 1er : La somme que le Crédit municipal de Paris a été condamnée à verser à Mme E... le jugement du tribunal administratif de Paris du 30 novembre 2021 est portée de 20 000 (vingt mille) euros à 30 000 (trente mille) euros.Article 2 : Le Crédit municipal de Paris versera à Mme C... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 30 novembre 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1 et 2 du présent arrêt.Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C... est rejeté. Article 5 : Les conclusions du Crédit municipal de Paris sont rejetées. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au directeur général du Crédit municipal de Paris.Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président,- Mme Boizot, première conseillère,- Mme Lorin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 octobre 2022. La rapporteure, S. A...Le président, S. CARRERELa greffière, C. DABERTLa République mande et ordonne au préfet de la région d'Île-de-France en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.N° 22PA00461 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Le comité social et économique et central Virgin Radio et RFM (CSEC) et le comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions (CSER) ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 8 décembre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France (DRIEETS) a rejeté la demande d'injonction du 19 novembre 2021 du CSEC, l'annulation de la décision du 9 décembre 2021 par laquelle le DRIEETS n'a que partiellement fait droit à la demande d'injonction du 7 décembre 2021 du CSER, l'annulation de la décision du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 15 décembre 2021 du CSEC et la décision du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale Virgin Radio Régions. Par un jugement n° 2205725/3-1 du 7 juin 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande du comité social et économique Virgin Radio et RFM et du comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions tendant à l'annulation de la décision du 8 décembre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France (DRIEETS) a rejeté la demande d'injonction du 19 novembre 2021 du CSEC, l'annulation de la décision du 9 décembre 2021 par laquelle le DRIEETS n'a que partiellement fait droit à la demande d'injonction du 7 décembre 2021 du CSER, l'annulation de la décision du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 15 décembre 2021 du CSEC et l'annulation de la décision du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale Virgin Radio Régions. Procédure devant la Cour : Par une requête et deux mémoires enregistrés les 21 juillet, 15 et 22 septembre 2022, le comité social et économique central Virgin Radio et RFM et le comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions, représentés par la SCP Borie et associés, demandent à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2205725/3-1 du 7 juin 2022 du Tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler la décision du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale Virgin Radio Régions ; 3°) d'annuler les décisions du 8 décembre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France (DRIEETS) a rejeté la demande d'injonction du 19 novembre 2021 du CSEC, du 9 décembre 2021 par laquelle le DRIEETS n'a que partiellement fait droit à la demande d'injonction du 7 décembre 2021 du CSER et du 10 janvier 2022 par laquelle le DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 15 décembre 2021 du CSEC ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Ils soutiennent que : Sur la régularité du jugement : - le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'absence de mesure de prévention pendant la période d'attente de l'avis de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) ; - il n'a pas répondu au moyen tiré de l'incompétence du DRIEETS et au caractère illicite de la décision de rejet de la demande d'injonction du 10 janvier 2022 ; - il a estimé à tort que ses conclusions tendant à l'annulation des décisions prises sur les demandes d'injonction étaient irrecevables ; Sur la procédure d'information et de consultation : - les élus du personnel n'ont pas été associés à la détermination des mesures de prévention en ce qui concerne la sécurité, la santé et les conditions de travail au cours de la procédure d'information et de consultation en violation des dispositions des articles L. 4121-3, L. 2312-9, L. 2312-40 et L. 2312-15 du code du travail ; - les décisions prises sur les demandes d'injonction vicient la décision d'homologation du document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ; - les moyens soulevés en première instance s'agissant de ces décisions sont repris : - en saisissant d'une demande d'autorisation préalable le Conseil supérieur de l'audiovisuel, l'UES Virgin Radio Régions a privé d'effet utile la procédure d'information et de consultation ; - la procédure est irrégulière faute de report de son délai ; - elle est irrégulière en l'absence de remise du rapport de l'expert désigné sur le volet santé, sécurité et conditions de travail ; - les conditions de réalisation de l'expertise n'ont pas permis aux représentants du personnel de disposer de l'ensemble des éléments leur permettant de rendre un avis éclairé ; - l'employeur n'a pas apporté de réponse motivée au projet alternatif présenté par le CSEC ; Sur le contenu du plan de sauvegarde et de l'emploi : - l'employeur a méconnu l'intention du législateur en neutralisant l'application des critères d'ordre des licenciements préalablement définis en retenant comme périmètre de mise en œuvre des critères d'ordre les zones d'emploi comprenant une seule cabine News ; - le périmètre des critères d'ordre des licenciements a été défini en vue de choisir nominativement les salariés dont le licenciement est envisagé ; - les catégories professionnelles ont été déterminées avec la volonté de cibler des salariés détenant un mandat de représentation ; - les mesures de reclassement sont dérisoires au regard des moyens du groupe Lagardère Active Broadcast ; - elles sont insuffisantes ; - les mesures de prévention en matière de santé, sécurité et conditions de travail sont insuffisantes. Par un mémoire en défense enregistré le 25 août 2022, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés. Par deux mémoires en défense enregistrés les 8 et 20 septembre 2022, la société par actions simplifiée unipersonnelle Europe 2 Entreprises, la société par actions simplifiée unipersonnelle RFM Entreprises, la société par actions simplifiée unipersonnelle Virgin Radio Régions, la société par actions simplifiée unipersonnelle RFM Régions et la société à responsabilité limitée RFM Est, représentées par Me Angotti, concluent au rejet de la requête. Elles soutiennent que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés. Par des lettres du 22 juillet et 3 août 2022, les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, il était envisagé d'appeler l'affaire à une audience qui pourrait avoir lieu le 26 septembre 2022 et que l'instruction pourrait être close à partir du 9 septembre 2022 avec effet immédiat. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code du travail ; - la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique, - et les observations de Me Borie, avocat du comité social et économique central Virgin Radio et RFM et du comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions et de Me Angotti, avocat des sociétés défenderesses. Une note en délibéré a été enregistrée le 6 octobre 2022 pour le CSEC Virgin Radio et RFM et le CSER Virgin Radio et RFM Régions. Considérant ce qui suit : 1. L'unité économique et sociale (UES) Virgin Radios Régions est constituée de cinq sociétés, qui appartiennent au groupe Lagardère et exercent leur activité dans le secteur d'activité des radios à caractère musical. Les sociétés par actions simplifiée unipersonnelles Europe 2 Entreprises, RFM Entreprises, Virgin Radio Régions et RFM Régions ainsi que la société à responsabilité limitée RFM Est composent l'unité économique et sociale. Celle-ci comprend deux radios, Virgin Radio et RFM, et exerce son activité sur tout le territoire. Au 31 août 2021, le réseau Virgin Radio disposait de 118 autorisations d'émettre par voie hertzienne du Conseil supérieur de l'audiovisuel en catégorie D (services de radio thématiques à vocation nationale) et de 121 autorisations (hors Europe Ajaccio) en catégorie C (services de radio locaux ou régionaux diffusant le programme d'un réseau thématique à vocation nationale, dont le programme national est complété par un programme d'intérêt local) et le réseau RFM disposait de 155 autorisations en catégorie D et 50 autorisations (hors RFM Est et RFM Ajaccio) en catégorie C. Le réseau national est constitué d'une tête de réseau et d'émetteurs autorisés en catégorie D. Les réseaux locaux de Virgin Radio et de RFM Régions et RFM Est sont constitués, pour Virgin Radio, de 27 studios principaux auxquels sont rattachées 27 cabines News, celles-ci étant destinées à la réalisation et à la mise en ondes des informations locales, et pour RFM de 11 studios principaux auxquels sont rattachées 6 cabines News, toutes les cabines News ne comprenant qu'un journaliste, seul salarié. En raison d'une érosion de l'audience des radios, d'une baisse des revenus publicitaires et de la concurrence de nouveaux médias, le groupe Lagardère a élaboré un plan de restructuration et annoncé ce plan le 18 octobre 2021 au comité social et économique central Virgin Radio et RFM (CSEC) et au comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions (CSER), lequel doit aboutir à mutualiser les coûts et implique la suppression d'emploi de 34 salariés, dont 30 dans la société Virgin Radio Régions et 4 dans la société RFM Régions. Ces deux sociétés comptaient respectivement au 30 juin 2021 133 et 61 salariés en contrat à durée indéterminée. Lors de la première réunion du CSEC, le 18 octobre 2021, lequel s'est ensuite réuni les 29 octobre, 24 et 29 novembre, 2, 9, 14 et 16 décembre 2021, le cabinet d'expertise Progexa a été désigné tandis qu'après la première réunion du 18 octobre 2021, le CSER s'est réuni les 28 octobre, 17, 25, 29 et 30 novembre 2021. Le cabinet Progexa a remis un rapport lors de la réunion du CSEC du 24 novembre 2021, un rapport lors de la réunion pour avis du CSER du 9 décembre 2021 et un point d'étape sur la sécurité, la santé et les conditions de travail lors des réunions du CSEC et du CSER du 14 décembre 2021. Le CSER et le CSEC ont refusé de rendre leurs avis sur le projet respectivement les 9 et 17 décembre 2021. Pendant la procédure d'information et de consultation, le CSEC a adressé le 19 novembre 2021 une première demande d'injonction, complétée le 23 novembre 2021 au directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France (DRIEETS). Le CSER lui a adressé le 7 décembre 2021 une demande d'injonction et le 15 décembre 2021, le CSEC lui a adressé une nouvelle demande d'injonction. La DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 19 novembre 2021, a partiellement fait droit à la demande adressée le 7 décembre 2021 et a rejeté la dernière demande d'injonction. A l'issue de la procédure d'information et de consultation, la direction de l'unité économique et sociale Virgin Radios Régions a adressé le 21 décembre 2021 à la DRIEETS la demande d'homologation du document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l'emploi. Par décision du 10 janvier 2022, le DRIEETS l'a homologué. Par jugement du 7 juin 2022, dont relèvent appel le CSEC et le CSER, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande d'annuler la décision du 10 janvier 2022 ainsi que les décisions du 8 décembre 2021 par laquelle le DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 19 novembre 2021 du CSEC, du 9 décembre 2021 par laquelle il n'a que partiellement fait droit à la demande d'injonction du 7 décembre 2021 du CSER et du 10 janvier 2022 par laquelle il a rejeté la demande d'injonction du 15 décembre 2021 du CSEC. Sur la régularité du jugement : En ce qui concerne la recevabilité des conclusions dirigées contre les décisions prises sur les demandes d'injonction formées par les comités sociaux et économiques : 2. Selon l'article L. 1233-57-5 du code du travail : " Toute demande tendant, avant transmission de la demande de validation ou d'homologation, à ce qu'il soit enjoint à l'employeur de fournir les éléments d'information relatifs à la procédure en cours ou de se conformer à une règle de procédure prévue par les textes législatifs, les conventions collectives ou un accord collectif est adressée à l'autorité administrative. Celle-ci se prononce dans un délai de cinq jours ". Aux termes de l'article D. 1233-12 du même code : " La demande mentionnée à l'article L. 1233-57-5 est adressée par le comité social et économique, ou, à défaut, les délégués du personnel, ou, en cas de négociation d'un accord mentionné à l'article L. 1233-24-1 par les organisations syndicales représentatives de l'entreprise, au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi compétent en application des articles R. 1233-3-4 et R. 1233-3-5, par tout moyen permettant de conférer une date certaine. / La demande est motivée. Elle précise les éléments demandés et leur pertinence. / Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi se prononce après instruction dans un délai de cinq jours à compter de la réception de la demande. / S'il décide de faire droit à la demande, le directeur régional adresse une injonction à l'employeur par tout moyen permettant de lui conférer une date certaine. Il adresse simultanément une copie de cette injonction à l'auteur de la demande, au comité d'entreprise et aux organisations syndicales représentatives en cas de négociation d'un accord mentionné à l'article L. 1233-24-1 ". 3. Ces dispositions n'imposent pas, par elles-mêmes, à l'administration de faire droit à toute demande tendant à ce qu'il soit enjoint à l'employeur de communiquer des pièces au comité d'entreprise ou à l'expert-comptable désigné dans le cadre de la procédure de consultation du comité d'entreprise en cas de licenciements collectifs pour motif économique. Cependant il appartient à l'administration, dans le cadre du contrôle global de la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise qui lui incombe en vertu des dispositions citées au point 5 lorsque le plan de sauvegarde de l'emploi résulte d'un accord collectif, de vérifier, sous le contrôle du juge, que le comité d'entreprise, et le cas échéant, l'expert-comptable qu'il a désigné lors de sa première réunion, ont été mis à même de rendre leurs avis en toute connaissance de cause. 4. Aux termes de l'article L. 1235-7-1 du code du travail : " (...) les décisions prises par l'administration au titre de l'article L. 1233-57-5 et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4. / Ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux ". Si l'administration prend une décision en statuant sur une demande d'injonction, cette décision ne peut faire l'objet d'un recours distinct de celui relatif à la décision administrative prise sur le projet de plan de sauvegarde de l'emploi, mais sa contestation entre dans le cadre du contrôle global de la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique. Dès lors, c'est à bon droit que le tribunal a considéré que ne pouvait être demandée l'annulation des décisions prises sur les demandes d'injonction adressées à l'administration, mais que les demandeurs devaient être regardés comme soutenant que les refus opposés aux demandes d'injonction entachaient d'irrégularité la procédure d'information et de consultation. En ce qui concerne les moyens tirés de l'omission à statuer sur des moyens : 5. Devant les premiers juges, les requérants avaient expressément soutenu que la procédure d'information et de consultation était irrégulière dans la mesure où elle a été lancée de manière concomitante à la saisine du Conseil supérieur de l'audiovisuel, devenu l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), alors que les comités sociaux et économiques de l'unité économique et sociale auraient dû être préalablement consultés sur le projet de réorganisation. Il ressort des points 22 et 23 du jugement que celui-ci a, après avoir rappelé les termes de l'article 42-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, considéré, d'une part, " qu'en procédant ainsi, l'employeur n'a pas privé d'effet utile la procédure d'information-consultation dont l'objet est distinct de la demande de modification d'autorisation présentée devant l'ARCOM " et, d'autre part, " qu'il n'appartient pas au juge administratif de contrôler les conditions dans lesquelles s'effectue la consultation du comité social et économique, hors le cas de la préparation du plan de sauvegarde de l'emploi ". Dès lors que les motifs de droit et de fait conduisant à écarter le moyen ont été précisés de manière à répondre au moyen ainsi soulevé en première instance, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'un défaut de réponse au moyen en cause, la critique de l'appréciation à laquelle il s'est livré relevant du bien-fondé de son jugement et, dès lors, échappant à l'office du juge d'appel, qui, eu égard à l'effet dévolutif de l'appel, se prononce sur les motifs de la décision attaquée et non sur les motifs du jugement. 6. Devant la Cour, les requérants soutiennent que le tribunal n'a pas répondu aux moyens qui auraient été tirés de ce qu'aucune mesure de prévention n'a été prise pour faire face à l'incertitude liée à l'attente de l'avis de l'ARCOM. Cette argumentation n'a pas de lien avec le moyen lié à l'ARCOM formé par les requérants, lequel concernait la procédure d'information et de consultation. Par ailleurs, s'il apparaît que, dans le cadre d'un moyen soulevé en première instance sur l'insuffisance des mesures de prévention, les requérants avaient développé une argumentation relative au fait que la réalisation du plan de sauvegarde de l'emploi dépendait d'une décision à venir de l'ARCOM, il ne s'agissait que d'un argument au soutien du moyen relatif à l'insuffisance des mesures de prévention, moyen auquel le tribunal, qui n'était pas tenu d'entrer dans le détail de l'argumentation soulevée devant lui, a répondu aux points 17 et 18 du jugement. 7. Selon les requérants, le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'incompétence du DRIEETS et au caractère illicite de la décision de rejet du 10 janvier 2022 de la demande d'injonction. Cependant, s'agissant du DRIEETS, ils se réfèrent à leur mémoire en réplique devant le tribunal dont l'argumentation est précisément celle à laquelle, comme il a été dit au point 4 du présent arrêt, il a été répondu par les premiers juges. S'agissant de la demande d'injonction du 15 décembre 2021, le tribunal a, à bon droit, considéré que celle-ci a été présentée deux jours seulement avant la date à laquelle le CSEC devait rendre son avis, qu'il n'appartenait à l'administration ni d'ordonner à l'employeur de suspendre la procédure, ni de contrôler le déroulement de la saisine de l'ARCOM. Il suit de là que, contrairement à ce qui est soutenu, il a été répondu au moyen tiré du caractère illicite de la décision de rejet du 10 janvier 2022 de la demande d'injonction. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne la procédure d'information et de consultation : 8. Aux termes de l'article L. 1233-28 du code du travail : " L'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours réunit et consulte le comité social et économique dans les conditions prévues par le présent paragraphe ". L'article L. 1233-30 de ce code dispose que : " I.- Dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins cinquante salariés, l'employeur réunit et consulte le comité social et économique sur : / 1° L'opération projetée et ses modalités d'application, conformément à l'article L. 2323-31 ; / 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d'emploi, les catégories professionnelles concernées (...), les mesures sociales d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi et, le cas échéant, les conséquences des licenciements projetés en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-31 du même code : " L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la première réunion, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif. / Il indique : / 1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement (...) / 3° Les catégories professionnelles concernées (...) / 4° Le nombre de salariés (...) dans l'établissement / (...) / 6° Les mesures de nature économique envisagées ; / 7° Le cas échéant, les conséquences de la réorganisation en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail ". 9. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que la procédure d'information et de consultation du comité social et économique a été régulière. Elle ne peut légalement accorder l'homologation demandée que si le comité a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part sur l'opération projetée et ses modalités d'application et, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi. À ce titre, il appartient à l'administration de s'assurer que l'employeur a adressé au comité tous les éléments utiles pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause, dans des conditions qui ne sont pas susceptibles d'avoir faussé sa consultation. 10. Devant le juge d'appel, les requérants critiquent la procédure en remettant en cause la consultation des comités sociaux et économiques et les décisions prises sur les demandes d'injonction. S'agissant de la consultation des comités sociaux et économiques : 11. Le CSEC et le le CSER font valoir en appel que les élus du personnel n'ont pas été associés à la détermination des mesures de prévention en ce qui concerne la sécurité, la santé et les conditions de travail au cours de la procédure d'information et de consultation en violation des dispositions des articles L. 4121-3, L. 2312-9, L. 2312-40 et L. 2312-15 du code du travail. 12. L'article L. 2312-40 du code du travail dispose que : " Lorsque l'employeur envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique, le comité social et économique est consulté dans les conditions prévues par le titre III du livre II de la première partie du présent code ". Dès lors que l'article L. 1233-28 du code du travail qui figure dans les dispositions visées par cet article prévoit les conditions dans lesquelles le comité social et économique doit être consulté, le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article L. 2312-40 du code du travail ne peut qu'être écarté. 13. L'article L. 1233-31 du code du travail relatif à l'obligation pour l'employeur de donner aux représentants du personnel, dès le début de la procédure, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif prévoit qu'il doit indiquer, le cas échéant, les conséquences de la réorganisation en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'article L. 4121-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, qui prévoyait les conditions dans lesquelles il appartient à l'employeur d'évaluer les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, n'imposait pas de consultation en cas de projet de licenciement collectif pour motif économique. 14. Les articles L. 2312-9 et L. 2312-15 se trouvent dans la section 3 du chapitre II du titre 1er du livre III du code du travail qui définit les attributions du comité social et économique dans les entreprises d'au moins cinquante salariés. Ils n'ont ni pour objet ni pour effet de créer une obligation de consulter le comité social et économique lorsqu'un employeur envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours. 15. Il suit de là que les requérants ne peuvent utilement invoquer les dispositions des articles L. 2312-9, L. 2312-15 et L. 4121-3 du code de travail pour soutenir que les élus du personnel devaient, au-delà de la consultation prévue à l'article L. 1233-31 du même code, être associés à la détermination des mesures de prévention des risques professionnels. S'agissant des demandes d'injonction formées par les comités sociaux et économiques : 16. Par sa lettre du 19 novembre 2021, le secrétaire du CSEC demandait à l'administration d'enjoindre à l'UES Virgin Radio Régions de cesser d'entraver le bon déroulement de l'expertise et la procédure d'information et de consultation, de reporter la date de remise du report complet de l'expert et de reporter la date de la fin de la procédure d'information et de consultation, d'organiser des visites et des entretiens et de communiquer diverses informations. Les trois premiers points de la demande n'entrent pas dans le champ des injonctions que l'administration est susceptible de prononcer en application de l'article L. 1233-57-5 du code du travail. S'agissant des informations dont la communication était demandée, l'administration a constaté qu'elles avaient entretemps été communiquées, ce que ne contestent pas les requérants. Dans ces conditions, le comité social et économique central a disposé de tous les éléments utiles pour se prononcer en toute connaissance de cause sans que la réponse de l'administration à la demande d'injonction au-delà du délai de cinq jours fixé par l'article L. 1233-57-5 du code du travail n'ait eu d'effet. 17. Par sa décision du 9 décembre 2021, le DRIEETS a rejeté la demande d'injonction du 7 décembre 2021 adressée par le CSER en tant qu'elle demandait d'enjoindre à l'UES Virgin Radio Régions de reporter la date de la remise de l'avis du comité social et économique d'établissement. Dès lors qu'une telle demande n'entre pas dans le champ des injonctions que l'administration est susceptible de prononcer, cette décision de rejet a été prise à bon droit. En outre, en l'absence de toute disposition prescrivant de leur transmettre les observations formulées par l'employeur sur la demande d'injonction, les requérants ne peuvent reprocher à l'administration de ne pas les avoir transmises au CSER. 18. Le 15 décembre 2021, le DRIEETS a été saisi d'une demande d'injonction du secrétaire du CSEC lui demandant d'enjoindre à l'UES Virgin Radio Régions, d'une part, de se déclarer incompétente pour connaître du projet dont elle est saisie en raison de la nécessité d'une autorisation préalable du Conseil supérieur de l'audiovisuel, du caractère hypothétique du projet de suppression de postes et parce qu'il constitue un détournement de la procédure de licenciement pour motif économique et, d'autre part, d'informer et consulter les élus du personnel d'un projet du groupe Lagardère Active Broadcast et de leur présenter un plan global et unique de réduction d'effectifs prenant en compte l'ensemble du secteur d'activité des radios. En tant qu'elle demandait à l'administration de se déclarer incompétente, la saisine ne peut s'analyser en une demande d'injonction à adresser à l'employeur au sens de l'article L. 1233-57-5 du code du travail. S'agissant de l'information demandée au sujet d'un plan d'ensemble des activités de radio du groupe Lagardère Active Broadcast, elle ne concerne pas le plan de sauvegarde de l'emploi de l'UES Virgin Radio Régions. Dès lors, c'est à bon droit que le DRIEETS a, en tout état de cause, rejeté cette demande. 19. En première instance, les requérants ont soutenu que la procédure de consultation et d'information était irrégulière et reprennent à cet égard les moyens qu'ils ont développés. S'agissant de la saisine du Conseil supérieur de l'audiovisuel 20. Aux termes du premier alinéa de l'article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : " L'autorisation peut être retirée, sans mise en demeure préalable, en cas de modification substantielle des données au vu desquelles l'autorisation avait été délivrée, notamment des changements intervenus dans la composition du capital social ou des organes de direction et dans les modalités de financement ". 21. En application de ces dispositions, toute modification substantielle des données au vu desquelles l'autorisation avait été délivrée est soumise à un accord préalable du Conseil supérieur de l'audiovisuel, devenu l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM). Dès lors, la réalisation effective d'un tel projet suppose la saisine préalable de cette autorité indépendante et une décision favorable. Cette saisine a trait à la mise en œuvre d'un projet pour lequel l'autorité de régulation est compétente et n'a pas de lien avec les consultations qui peuvent être prescrites par des dispositions législatives ou réglementaires ne relevant pas de la législation en matière de communication audiovisuelle. 22. Le moyen tiré de ce que le comité social et économique doit être saisi dans le cadre des dispositions de l'article L. 2312-8 du code du travail avant toute saisine de l'autorité de régulation audiovisuelle ne peut, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, avoir d'incidence sur la régularité de la procédure d'information et de consultation. 23. Les sociétés Virgin Radio et RFM Régions sont titulaires de deux types d'autorisation d'émettre délivrées par l'autorité de régulation audiovisuelle qui leur permettent de diffuser, outre un programme national identique sur tout le territoire, des programmes d'intérêt local élaborés localement. Le projet qui repose sur la suppression de plusieurs studios principaux et cabines News nécessite une autorisation préalable de l'ARCOM, laquelle a été demandée par l'UES Virgin Radio Régions. Cette autorisation constitue la condition nécessaire pour la mise en œuvre du projet de réorganisation, mais elle n'a pas d'incidence sur les obligations que doit respecter le titulaire d'une autorisation d'émettre dans le cadre des dispositions s'appliquant aux plans de sauvegarde de l'emploi. Il suit de là que l'employeur n'a pas privé d'effet utile la procédure d'information et de consultation dont l'objet est distinct de la demande de modification d'autorisation présentée devant l'autorité de régulation audiovisuelle. S'agissant de l'absence de report du délai de la procédure d'information et de consultation : 24. En l'absence d'accord collectif en disposant autrement, le délai de la procédure d'information et de consultation est resté fixé à deux mois à compter de la première réunion du comité social et économique central, en application de l'article L. 1233-30 du code du travail. L'employeur n'était pas tenu de faire droit à la demande formulée par le CSER de reporter cette consultation et n'a en tout état de cause pas entaché la procédure d'illégalité en proposant de convenir, dans le cadre d'un accord de méthode conclu avec les organisations syndicales, des conditions de report du délai de la procédure. S'agissant de l'expertise ordonnée par le comité social et économique d'établissement " Régions " : 25. Il ressort des pièces du dossier que lors de la réunion du 17 novembre 2021, le CSER a, en application de l'article L. 2315-96 du code du travail, décidé de nommer un expert pour l'éclairer sur les enjeux et les conséquences du projet de réorganisation sur la santé, la sécurité et les conditions de travail. Les requérants reprochent à l'autorité administrative d'avoir homologué le document unilatéral sans attendre les conclusions de l'expertise et l'avis du comité social et économique d'établissement " Régions " sur ce point. Toutefois, la désignation d'un expert dans le cadre de la procédure d'information et de consultation mentionnée à l'article L. 1233-30 du code du travail cité au point 8 est expressément prévue par les dispositions de l'article L. 1233-34 de ce code selon lesquelles cette expertise est décidée lors de la première réunion. En outre, en application du dernier alinéa de l'article L. 1233-36 du même code, il appartenait au comité social et économique central de désigner un expert, ce qu'il a fait dès la première réunion du 18 octobre 2021. Dans ces conditions, et alors qu'il n'appartient pas à l'autorité administrative de contrôler les conditions dans lesquelles ont pu se dérouler d'autres expertises ordonnées en parallèle de la procédure d'information et de consultation, la circonstance que l'expert désigné par le CSER n'avait pas remis de rapport au moment où est intervenue la décision d'homologation ne peut avoir d'incidence sur la régularité de la procédure. S'agissant des conditions de réalisation de l'expertise : 26. Il ressort des pièces du dossier que lors de la première réunion du 18 octobre 2021, le CSEC a décidé de procéder à la désignation comme expert du cabinet Progexa. Ce dernier s'est plaint de manœuvres dilatoires de la part de la direction de l'UES qui aurait refusé de communiquer certains documents et retardé l'organisation des entretiens avec les salariés. Si dans la demande d'injonction du 19 novembre 2021, le CSEC avait demandé à la DRIEETS d'enjoindre à la direction de l'UES de communiquer un certain nombre d'éléments, il n'y avait plus lieu, dès lors que les documents demandés avaient été communiqués par l'employeur, d'enjoindre leur communication. Au demeurant, les requérants ne précisent pas quels documents auraient manqué ni en quoi cela les aurait empêchés de rendre un avis éclairé. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier, au regard notamment des échanges de courriels entre la direction de l'UES et le cabinet Progexa et des comptes rendus de réunions, que celle-ci aurait volontairement entravé la réalisation des entretiens. De plus, si l'expert a estimé ne pas être en mesure de rendre un rapport définitif, il a successivement remis un rapport d'étape le 19 novembre, un rapport transitoire le 3 décembre et un point d'étape Volet santé de la mission d'assistance le 14 décembre 2021. Dans ces conditions, à supposer même que certains documents n'aient pas été communiqués à l'expert, il n'est pas établi que cela l'aurait empêché d'exercer sa mission et que les représentants du personnel ne disposaient pas de l'ensemble des éléments leur permettant de rendre un avis éclairé. S'agissant du projet alternatif du CSEC : 27. L'article 1233-33 du code du travail dispose que : " L'employeur met à l'étude, dans le délai prévu à l'article L. 1233-30, les suggestions relatives aux mesures sociales envisagées et les propositions alternatives au projet de restructuration mentionné à l'article L. 2323-31 formulées par le comité social et économique. Il leur donne une réponse motivée ". 28. Selon les requérants, l'employeur n'a pas apporté de réponse motivée au projet alternatif que le CSEC a présenté le 9 décembre 2021. Or une réponse écrite et motivée lui a été adressée le 16 décembre suivant. Par suite, le moyen manque en fait. En ce qui concerne le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi : 29. En application de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, l'autorité administrative homologue le document unilatéral mentionné à l'article L. 1233-24-4 du même code après avoir vérifié le contenu du plan qui doit comporter les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, à savoir : " 1° Les modalités d'information et de consultation du comité social et économique, en particulier les conditions dans lesquelles ces modalités peuvent être aménagées en cas de projet de transfert d'une ou de plusieurs entités économiques prévu à l'article L. 1233-61, nécessaire à la sauvegarde d'une partie des emplois ; / 2° La pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements mentionnés à l'article L. 1233-5 ; / 3° Le calendrier des licenciements ; / 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées ; / 5° Les modalités de mise en œuvre des mesures de formation, d'adaptation et de reclassement prévues à l'article L. 1233-4 ". S'agissant du périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements : 30. Aux termes des trois derniers alinéas de l'article L. 1233-5 du code du travail dans sa version applicable : " (...) Le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements peut être fixé par un accord collectif. / En l'absence d'un tel accord, ce périmètre ne peut être inférieur à celui de chaque zone d'emplois dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernés par les suppressions d'emplois. / Les conditions d'application de l'avant-dernier alinéa du présent article sont définies par décret ". L'article D. 1233-2 du même code dispose que : " Les zones d'emploi mentionnées à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 1233-5 sont celles référencées dans l'atlas des zones d'emploi établi par l'Institut national de la statistique et des études économiques et les services statistiques du ministre chargé de l'emploi ". 31. Selon les requérants, l'employeur a, en retenant les zones d'emploi comprenant une seule cabine News comme périmètre de mise en œuvre des critères d'ordre, méconnu l'intention du législateur en neutralisant l'application des critères d'ordre des licenciements préalablement définis. 32. Les sociétés Virgin Radio et RFM Régions disposent d'un réseau local composé de studios principaux qui assurent notamment la mise en ondes des programmes d'intérêt local et de cabines News rattachées à un studio principal et chargées de réaliser et de mettre sur les ondes des informations locales. Le document unilatéral fixe des critères d'ordre et précise qu'ils seront mis en œuvre au niveau de zones d'emploi. D'une part, il est constant qu'aucun accord collectif ne détermine le périmètre d'application des critères d'ordre, d'autre part, le projet de restructuration prévoit la suppression de postes au sein de trois studios principaux situés à Avranches, Bar-le-Duc et Bonnières-sur-Seine et de vingt-sept cabines News. Il ressort des pièces du dossier que les zones d'emploi mentionnées dans le document unilatéral correspondent aux zones d'emploi définis par l'INSEE et qu'au sein de ces zones se trouvait au moins un site concerné par les suppressions d'emploi, à savoir une cabine News ou un studio principal. Chacun de ces sites doit, pour l'application des dispositions de l'article L. 1233-5 du code du travail, être regardé comme un établissement compte tenu de la répartition de l'activité sur l'ensemble du territoire des deux sociétés de l'unité économique et sociale, de leur organisation pouvant reposer sur des sites ne comportant qu'un seul salarié et du nombre total des salariés en contrat à durée indéterminée qui était, au 30 juin 2021, de 194 personnes des deux sociétés concernées par le plan de sauvegarde de l'emploi, soit 133 dans la société Virgin Radio Régions et 61 dans la société RFM Régions. Dans ces conditions, dès lors que l'employeur a respecté le périmètre d'application des critères d'ordre tel que prévu par le législateur, il n'appartenait pas à l'autorité administrative de se prononcer sur l'opportunité de ce choix. Enfin, les contrats de travail des salariés de l'entreprise ne peuvent avoir d'incidence sur la définition du périmètre des critères d'ordre des licenciements résultant de l'article L. 1233-5 du code du travail. S'agissant du caractère discriminatoire allégué des modalités de mise en œuvre prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi : 33. Les requérants soutiennent que le périmètre des critères d'ordre des licenciements a été défini en vue de choisir nominativement les salariés dont le licenciement est envisagé, que les catégories professionnelles ont été déterminées avec la volonté de cibler des salariés détenant un mandat de représentation et que la proportion de représentants du personnel occupant les postes dont la suppression est envisagée laissent supposer l'existence d'une discrimination. 34. Le périmètre des critères d'ordre des licenciements a été défini en conformité avec les dispositions de l'article L. 1233-5 du code du travail au niveau le plus petit qu'elles prévoient. Il n'est pas établi que ce choix aurait eu pour objet de permettre un choix nominatif des salariés susceptibles de faire partie des personnes dont la suppression d'emploi serait envisagée. 35. Aux termes de l'article L. 1233-24-2 du code du travail : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233 63. / Il peut également porter sur : (...) 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées (...) ". L'article L. 1233-57-3 du même code prévoit qu'en l'absence d'accord collectif, ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 (...) ". 36. En vertu de ces dispositions, il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document qui fixe les catégories professionnelles mentionnées au 4° de l'article L. 1233-24-2 du code du travail, de s'assurer, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d'information et de consultation ainsi que des justifications qu'il appartient à l'employeur de fournir, que ces catégories regroupent, en tenant compte des acquis de l'expérience professionnelle qui excèdent l'obligation d'adaptation qui incombe à l'employeur, l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Au terme de cet examen, l'administration refuse l'homologation demandée s'il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations, telles que l'organisation de l'entreprise ou l'ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, permettent de regrouper les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s'il apparaît qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée. 37. Il ressort des pièces du dossier que la notion de catégorie professionnelle a été définie comme l'ensemble des salariés exécutant le même type d'activité au sein de l'entreprise qui sont capables de changer de postes au sein de la même catégorie professionnelle, à condition qu'ils n'aient besoin pour ce faire d'aucune formation complémentaire autre qu'une simple formation d'adaptation. Ainsi les catégories professionnelles retenues sont celles des journalistes, des animateurs et des titulaires de postes d'ordre technique ou administratif, soit pour les salariés en contrat à durée indéterminée, dans la société RFM Régions, 23 journalistes, 15 animateurs et 23 autres postes, dans la société Virgin Radio Régions, 64 journalistes, 26 animateurs et 43 autres postes. La méthodologie, qui ne fait pas l'objet d'une critique précise, renvoie, ainsi que l'a vérifié le DRIEETS, à une logique de compétences professionnelles. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cette distinction aurait été établie dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne et notamment en raison de leurs fonctions de représentant du personnel. Au demeurant, aucune précision portant sur une discrimination précise concernant un ou plusieurs salariés n'est apportée à l'appui de l'argumentation des requérants. 38. Si la suppression de certains postes serait susceptible de conduire au licenciement de représentants du personnel, il ressort du document unilatéral que les postes d'élus concernés par une suppression de poste appartiennent tous à des sites appelés cabines News ne comptant qu'un seul journaliste, soit, pour la radio RFM, l'un des quatre journalistes et, pour la radio Virgin Radio, cinq des vingt-six journalistes dont la suppression de poste est envisagée. Le projet prévoit au sein des sociétés Virgin Radio Régions et RFM Régions respectivement 30 et 4 suppressions de postes. Il ressort des pièces du dossier que si les suppressions de postes envisagées concernent 11,4 % des salariés et 40 % des représentants du personnel, ainsi que l'a relevé le tribunal, seuls 17,4 % des emplois supprimés sont occupés par des représentants du personnel. Deux circonstances liées à la restructuration et à la catégorie professionnelle des élus contribuent à cette proportion plus élevée des postes occupés par des salariés exerçant un mandat de représentant du personnel. Tout d'abord, le projet de réorganisation prévoit, s'agissant de Virgin Radio, la suppression de trois studios principaux à Avranches, employant deux animateurs et un journaliste, et à Bar-le-Duc et Bonnières-sur-Seine, employant chacun un animateur et un journaliste, et de vingt-trois cabines News rattachées à un studio maintenu, qui emploient chacune un journaliste, et, s'agissant de RFM, la suppression de quatre cabines News employant chacune un journaliste. Pour les zones concernées de Virgin Radio, il s'agit, dans dix d'entre elles, de la totalité des cabines News rattachées à des studios principaux et pour les zones de programme d'intérêt local de Marseille et de Pau, d'une cabine News sur les deux qu'elles comptent. Pour les deux zones concernées de RFM, il s'agit de la totalité des cabines News de la zone de programme d'intérêt local de Toulouse et de l'une des deux de la zone de programme d'intérêt local de Marseille. Ainsi, il s'agit bien d'un plan de restructuration des deux sociétés. Ensuite, les six représentants du personnel, soit cinq pour la société Virgin Radio Régions et un pour la société RFM Régions, dont la suppression de poste est envisagée, sans qu'un licenciement en soit nécessairement induit, sont tous, ainsi qu'il ressort des pièces du dossier, des journalistes exerçant leur activité dans les cabines News faisant partie des zones dans lesquelles la totalité des cabines News est supprimée. Il suit de là que, d'une part, si six représentants du personnel sur seize élus sont concernés, soit 40 % d'entre eux, cette circonstance résulte de la forte proportion de journalistes parmi les élus et que, d'autre part, il s'agit d'une conséquence de la restructuration qui vise principalement les cabines News, conduisant au nombre respectif de trente emplois et d'un emploi de journalistes dont la suppression est envisagée pour les sociétés Virgin Radio et RFM Régions. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les suppressions de cabines News aient un lien avec les fonctions d'élu des journalistes concernés ou qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée. Dès lors, le moyen tiré du caractère discriminatoire qu'auraient les modalités de mise en œuvre prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi doit être écarté, sans, par ailleurs, que puisse être utilement invoquée la violation alléguée des dispositions de l'article L. 1134-1 du code du travail, qui ne s'appliquent qu'aux candidats à un stage ou un emploi. S'agissant des mesures d'accompagnement : 39. Aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement sur le territoire national des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile ". Aux termes de l'article L. 1233-62 du même code : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des mesures telles que : / 1° Des actions en vue du reclassement interne sur le territoire national, des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-24-4 du même code : " A défaut d'accord (...), un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité social et économique fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur ". Aux termes de l'article L. 1233-57-3 du même code : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique, le respect, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 ". 40. Il résulte de l'ensemble des dispositions citées ci-dessus que, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier la conformité de ce document et du plan de sauvegarde de l'emploi dont il fixe le contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles applicables, en s'assurant notamment du respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du même code. A ce titre, elle doit, au regard de l'importance du projet de licenciement, apprécier si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si, à raison, pour chacune, de sa contribution aux objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à ces objectifs compte tenu, d'une part, des efforts de formation et d'adaptation déjà réalisés par l'employeur et, d'autre part, des moyens dont disposent l'entreprise et, le cas échéant, l'unité économique et sociale et le groupe. 41. Les requérants reprennent l'argumentation développée en première instance selon laquelle les mesures de reclassement sont dérisoires au regard des moyens du groupe et font état du résultat net de la société mère Lagardère Active Broadcast en 2020 et de sa trésorerie nette. Cependant celle-ci est une filiale de la société Lagardère Media SAS, elle-même filiale de la société Lagardère SA, de telle sorte que le " groupe Lagardère Active Broadcast " n'est qu'une partie du groupe Lagardère. Au demeurant, le contrôle opéré par la DRIEETS au regard du groupe Lagardère a montré que celui-ci a connu en 2020 un recul de son chiffre d'affaires et une chute de 63 % de son résultat net consolidé et que les pertes du groupe se poursuivaient en 2021. Ainsi les mesures ont été analysées par l'autorité administrative par rapport aux moyens du groupe. 42. Le document unilatéral homologué par l'administration comporte, en annexe 4, une liste de postes de reclassement en France au sein du groupe Lagardère. Il prévoit que cette liste sera mise à jour tous les quinze jours. Si cette liste de postes est susceptible d'évoluer, en fonction notamment de la décision de l'autorité de régulation audiovisuelle, cette circonstance n'entache pas d'illégalité le document unilatéral. Celui-ci prévoit, en matière de reclassement interne, quatorze mesures d'accompagnement et le même nombre en matière de reclassement externe, dont l'administration a contrôlé le caractère suffisant et proportionné comme le précise la décision d'homologation du 10 janvier 2022. Le document unilatéral prévoit, outre des modalités spécifiques d'accompagnement en cas de reclassement interne et une priorité de réembauche, un dispositif d'accompagnement pour les reclassements externes qui comporte un congé de reclassement, des aides financières pour la formation ou la création et la reprise d'entreprise, des aides financières pour la mobilité géographique, une prime à la reprise d'emploi et une allocation différentielle de salaire. Il ressort des pièces du dossier que ces mesures ont pour la plupart été réévaluées à la hausse par rapport à la proposition initiale, de façon notamment à tenir compte de la fragilité particulière de certaines catégories de salariés. Ainsi, la prise en charge d'une formation d'adaptation en externe a été revalorisée à 5 000 euros et à 7 000 euros pour les salariés dont la réinsertion professionnelle serait particulièrement difficile, contre 3 000 euros initialement, et le montant des aides à la reconversion a été rehaussé à 12 000 euros contre 10 000 euros initialement pour les salariés dont la réinsertion professionnelle serait particulièrement difficile. Il ressort des pièces du dossier que le budget du plan de sauvegarde de l'emploi, hors mesures transactionnelles, s'élève à 4 179 805,15 euros soit un montant de 122 935,44 euros par salarié. Par ailleurs, la définition de l'offre valable d'emploi retenue dans le document unilatéral, qui inclut notamment les contrats à durée déterminée et les contrats d'intérim et qui prévoit une base de rémunération de 70 % du salaire antérieur, ne permet pas non plus de caractériser une insuffisance du plan. Il suit de là que le moyen tiré de ce que les mesures prévues dans le plan seraient insuffisantes doit être écarté. S'agissant des mesures de prévention : 43. Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. / Ces mesures comprennent : / 1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ; / 2° Des actions d'information et de formation ; / 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. / L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". En vertu des articles L. 1233-57-2 et L. 1233-57-3 du même code, le contrôle de la régularité de la procédure d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel ainsi que des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi incombe à l'autorité administrative, lors de sa décision de validation ou d'homologation. Dans le cadre d'une réorganisation qui donne lieu à élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'autorité administrative de vérifier le respect, par l'employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. À cette fin, elle doit contrôler tant la régularité de l'information et de la consultation des institutions représentatives du personnel que les mesures auxquelles l'employeur est tenu en application de l'article L. 4121-1 du code du travail au titre des modalités d'application de l'opération projetée. 44. Il ressort des pièces du dossier, notamment des procès-verbaux des réunions, que dès la première réunion du CSEC, ont été évoquées la mise en place d'une cellule d'écoute et de soutien psychologique et la mobilisation spécifique des services de santé au travail. Dès le 16 novembre 2021, une note sur la santé, la sécurité et les conditions de travail a été communiquée aux représentants du personnel. Une note consacrée aux risques psycho-sociaux a également été élaborée au début du mois de décembre. Dans ces conditions, bien que ces documents n'aient fait l'objet d'une présentation formelle que lors des réunions du 9 et des 14 et 16 décembre, les représentants du personnel ont disposé d'une information suffisante dans le cadre de la procédure d'information et de consultation. Par ailleurs, il ressort de ces documents que l'employeur avait précisément identifié trois facteurs de risque, soit l'éloignement géographique, l'incertitude quant à l'avenir liée à l'attente de l'autorisation du Conseil supérieur de l'audiovisuel et l'usure des salariés et la perte de sens, liées au chômage partiel en 2020 et 2021 et à la répétition des plans de sauvegarde de l'emploi, et qu'il avait prévu des dispositifs d'accompagnement spécifiques à destination des salariés. En outre, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les conséquences de la réorganisation sur la charge de travail des salariés restants ont fait l'objet d'une évaluation. Le document d'information en vue de la consultation du CSEC et du CSER sur les conséquences du projet de réorganisation des radios musicales en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail et de prévention des risques psycho-sociaux étudie l'impact du projet de réorganisation sur l'organisation du travail et la charge de travail et prévoit l'accompagnement de la restructuration et la prévention des risques psycho-sociaux avec des mesures mettant en place un dispositif d'écoute et d'accompagnement, un dispositif d'assistance et d'intervention sociale et la mobilisation des services de santé au travail. Si les représentants du personnel ne partagent pas l'analyse de l'employeur selon laquelle la réorganisation n'aura pas d'effet sur la charge de travail, cette différence d'appréciation n'est pas par elle-même de nature à caractériser une insuffisance des mesures. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance des mesures de prévention en matière de santé, sécurité et conditions de travail doit être écarté. Sur les frais liés à l'instance : 45. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par le comité social et économique et central Virgin Radio et RFM et le comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête du comité social et économique et central Virgin Radio et RFM et du comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au comité social et économique et central Virgin Radio et RFM, au comité social et économique d'établissement Virgin Radio et RFM Régions, à la société par actions simplifiée unipersonnelle Europe 2 Entreprises, à la société par actions simplifiée unipersonnelle RFM Entreprises, à la société par actions simplifiée unipersonnelle Virgin Radio Régions, à la société par actions simplifiée unipersonnelle RFM Régions, à la société à responsabilité limitée RFM Est et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Copie en sera adressée au directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France. Délibéré après l'audience publique du 26 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Le Goff, président de chambre, - M. Ho Si Fat, président assesseur, - Mme Collet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2022. Le président assesseur, F. HO SI FATLe président-rapporteur, R. A... La greffière, E. VERGNOL La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA03371
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler les décisions en date du 6 juin 2021 par lesquelles le préfet du Nord l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, lui a interdit le retour sur le territoire français avant l'expiration du délai de deux ans. Par un jugement n° 2104440 du 30 juillet 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 6 juin 2021 par laquelle le préfet du Nord a interdit à M. B... le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et a rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 10 septembre 2021, et un mémoire du 16 septembre 2022, qui n'a pas été communiqué, M. B..., représenté par Me Olivier Cardon, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler les décisions du 6 juin 2021 portant obligation de quitter le territoire français, refusant un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 2 ans ; 3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de 15 jours suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ; 4°) d'enjoindre au préfet du Nord de procéder à l'effacement de son signalement au fichier SIS et au fichier FPR, en application de l'article 24 du règlement 1977/2006 du 20 décembre 2006 ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement est entaché d'irrégularité, les premiers juges n'ayant pas répondu aux moyens tirés de la méconnaissance du droit d'être entendu préalablement aux décisions défavorables, de l'absence de prise en considération de l'intérêt supérieur de l'enfant et de l'insuffisante motivation en droit de l'arrêté ; En ce qui concerne la légalité externe de l'ensemble des décisions : - elles sont insuffisamment motivées ; - elles sont entachées d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ; - le droit d'être entendu préalablement à la décision a été méconnu ; En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français : - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des 5°) et 9°) de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - elle méconnaît les dispositions de l'article R. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; En ce qui concerne la décision refusant un délai de départ volontaire : - elle est illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ont été méconnues ; En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement : - elle est illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français : - elle est illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un mémoire en défense, enregistré le19 juillet 2022, le préfet du Nord, représenté par Me Xavier Termeau, conclut au rejet de la requête, et par la voie de l'appel incident, à l'annulation de l'article 1er du jugement du 30 juillet 2021 et au rejet de la demande de M. B... tendant à l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, présentée devant le tribunal administratif de Lille. Il soutient que : - les moyens de la requête ne sont pas fondés. - en ce qui concerne le bien-fondé de l'interdiction de retour d'une durée de deux ans, l'intéressé représente une menace pour l'ordre public au vu des faits de menaces réitérées de destruction dangereuse et des faits de violence sans incapacité, il s'est maintenu sur le territoire national plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour sans en avoir demandé le renouvellement et ne justifie d'aucune circonstance humanitaire particulière s'opposant à cette interdiction ; la durée de deux ans est proportionnée à sa situation. Par ordonnance du 8 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 26 août 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ; - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le règlement (UE) n° 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. D... A..., magistrat administratif honoraire, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C... B..., ressortissant marocain, relève appel du jugement du 30 juillet 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille, en tant qu'elle a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 6 juin 2021 par lesquelles le préfet du Nord l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Il demande également de procéder à l'effacement de son signalement au fichier SIS et au fichier FPR. Par la voie de l'appel incident, le préfet du Nord demande l'annulation du jugement, en tant qu'il a annulé sa décision du 6 juin 2021 par laquelle il a interdit à M. B... le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Sur la régularité du jugement : 2. Il ressort des points 3 à 5 du jugement en litige que la magistrate désignée a répondu au moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu préalablement aux décisions défavorables et du point 12 qu'elle a répondu au moyen tiré de la prise en considération de l'intérêt supérieur de l'enfant de l'intéressé. La magistrate désignée n'était en outre pas tenue de répondre à tous les arguments développés à l'appui du moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne les moyens communs aux décisions attaquées : S'agissant de l'insuffisance de motivation : 3. Les décisions attaquées mentionnent avec suffisamment de précisions les circonstances de fait et de droit sur lesquelles elles se fondent. Le préfet a mentionné notamment la présence de la fille de l'intéressé sur le territoire national en indiquant qu'elle n'était pas à sa charge et que celui-ci ne justifiait pas contribuer à son entretien et à son éducation, prenant ainsi en considération l'intérêt supérieur de l'enfant, sans que puisse lui être reproché l'absence de visa de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. En outre, l'erreur de plume commise par le préfet sur la citation de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est sans incidence sur la légalité de l'arrêté. 4. Les considérations de fait et de droit sont donc suffisamment développées pour mettre utilement M. B... en mesure de discuter les motifs de ces décisions. Par suite, alors que le préfet du Nord n'avait pas à reprendre expressément et de manière exhaustive l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle, familiale ou professionnelle de l'intéressé, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions doit être écarté. S'agissant du défaut d'examen particulier de la situation de l'intéressé : 5. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet du Nord, pour prendre ses décisions, a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé au regard de ses droits. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de M. B... doit être écarté. S'agissant de la méconnaissance du droit d'être entendu préalablement aux décisions : 6. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Enfin, aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union. (...) ". 7. Le droit d'être entendu, principe général du droit de l'Union européenne, se définit comme celui de toute personne à faire connaître, de manière utile et effective, ses observations écrites ou orales au cours d'une procédure administrative, avant l'adoption de toute décision susceptible de lui faire grief. Toutefois, ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales. Enfin, une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie. 8. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de son audition par les services de police le 6 juin 2021 à 11 heures 50, que M. B... a été informé de ce qu'il était susceptible de faire l'objet d'une décision l'obligeant à quitter le territoire à destination de son pays d'origine ou de tout autre pays où il serait légalement admissible, éventuellement assortie d'une assignation à résidence, d'un placement en centre de rétention administrative ou d'une interdiction de retour sur le territoire français. Il a été invité à présenter des observations sur ces points et a donc été mis en mesure de faire part de tout élément relatif à sa situation personnelle. Par suite, et malgré la brièveté de cette audition, le moyen tiré de ce que le préfet du Nord a méconnu le droit de M. B... d'être entendu doit être écarté. En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français : 9. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " 10. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui a bénéficié d'un titre de séjour à compter du 23 septembre 2006, renouvelé jusqu'au 22 septembre 2010, est à nouveau entré en France le 7 octobre 2015 avec un visa valable pour une durée de 30 jours. Un titre de séjour d'une durée d'un an à compter du 6 novembre 2018 lui a ensuite été délivré. L'intéressé fait valoir qu'il est le père d'une fille de nationalité française, née le 2 février 2006. Toutefois, il a divorcé de la mère de cette enfant par un jugement du 6 janvier 2009 du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nice, lequel a notamment prévu l'exercice exclusif de l'autorité parentale par la mère, la fixation de la résidence de l'enfant au domicile de cette dernière et des droits de visite au bénéfice du requérant, une fois par mois, dans le cadre d'un espace de rencontre. Dans un jugement du 22 mai 2017, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny a défini des modalités d'exercice de l'autorité parentale identiques et renouvelé les droits de visite de M. B... dans un espace de rencontre en en fixant les modalités précises. S'il ressort des pièces du dossier que la mère de l'enfant s'est opposée à plusieurs reprises à l'organisation de rencontres entre le père et sa fille, l'intéressé ne démontre pas avoir entrepris, en dehors d'une déclaration de main courante effectuée le 18 avril 2018, des démarches tendant à faire respecter son droit de visite. En outre, il ne verse à l'instance aucun élément tendant à établir qu'il contribue, dans la mesure de ses moyens, à l'entretien et à l'éducation de sa fille ou qu'il entretient avec elle des liens affectifs, à l'exception d'une attestation de la mère de son enfant en ce sens et d'un billet de train au nom de sa fille entre Paris et Lille, postérieurs à la décision attaquée et dont il n'est pas établi que les faits attestés portent sur une période antérieure. Si M. B... s'est marié à une ressortissante française le 5 octobre 2019, il est constant qu'il est séparé de son épouse et n'a d'ailleurs pas sollicité le renouvellement de la carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dont il bénéficiait depuis le 6 novembre 2018. Enfin, les membres de la famille de M. B... résident dans son pays d'origine, selon ses propres déclarations, et son passeport mentionne plusieurs allers-retours entre la France et le Maroc en 2018 et 2019. Il n'établit donc pas avoir transféré en France le centre de ses intérêts personnels et familiaux. Dans ces conditions, la décision en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et, par suite, ne méconnaît pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 11. En deuxième lieu, aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Dans la mesure où, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. B... ne vit pas avec sa fille, n'exerce pas l'autorité parentale, ne cherche pas à faire respecter son droit de visite auprès de celle-ci dans un espace tiers et ne participe pas à son entretien et à son éducation et dès lors que rien ne s'oppose à ce qu'une rencontre avec sa fille puisse être organisée lors de ses courts séjours en France, son éloignement ne porte pas aux intérêts de celle-ci une atteinte incompatible avec ces stipulations au regard desquelles la décision en litige n'est en outre pas entachée de l'erreur manifeste d'appréciation invoquée par l'appelant. 12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 5° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; /.../ 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ". 13. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux qui sont exposés au point 10, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions précitées du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 14. En cinquième lieu, M. B... réitère devant la cour le moyen, déjà soulevé devant les premiers juges, tiré de ce que la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 9°) de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, il ne produit en appel aucun élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur ce moyen. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges, au point 10 du jugement attaqué. 15. En sixième lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / Toutefois, lorsque l'étranger est assigné à résidence aux fins d'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français ou placé ou maintenu en rétention administrative en application du titre IV du livre VII, l'avis est émis par un médecin de l'office et transmis sans délai au préfet territorialement compétent ". Il résulte des pièces du dossier que l'intéressé n'a pas fait valoir, lors de son audition par les services de police ni devant le médecin qui l'a examiné lors de sa retenue administrative, que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dès lors, la décision en litige n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile. En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la décision refusant un délai de départ volontaire : 16. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 15 que M. B..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant un délai de départ volontaire, n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. 17. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". L'article L. 612-3 de ce code précise que : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; / 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; (...) / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. " 18. Il ressort des termes de l'arrêté du 6 juin 2021 que le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire est notamment fondé sur l'absence d'une résidence stable sur le territoire et la circonstance que l'intéressé est démuni de tout document de voyage. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. B... justifie d'un domicile stable et d'un document d'identité en cours de validité. La décision en litige ne pouvait donc pas être légalement fondée sur ces motifs. 19. Il est cependant constant que M. B... s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour sans en avoir demandé le renouvellement. Dans ces conditions, le préfet pouvait légalement se fonder sur ce motif pour refuser d'accorder un délai de départ volontaire. Il résulte de l'instruction que le préfet du Nord aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que ce motif. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées des articles L 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'intéressé au regard de ces dispositions doivent être écartés. En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement : 20. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 15 que M. B..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination, n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. 21. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumaines ou dégradants ". 22. En se bornant à soutenir que le centre de ses intérêts personnels et familiaux se situe dorénavant en France et que son éloignement au Maroc constitue un traitement inhumain ou dégradant, M. B... n'établit pas être personnellement et actuellement exposé au risque de subir dans son pays d'origine des traitements prohibés par les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, la décision en litige n'a pas méconnu ces stipulations. Par suite, ce moyen doit être écarté. En ce qui concerne les conclusions d'appel incident du préfet du Nord : 23. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". En outre, aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ". 24. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. 25. Il ressort des pièces du dossier que la décision d'interdiction de retour pendant une durée de deux ans est fondée sur les conditions de l'entrée et du séjour de l'intéressé en France, sur la circonstance qu'il n'a jamais fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, sur l'absence de liens familiaux stables et anciens sur le territoire national et sur l'appréciation qu'il représente une menace pour l'ordre public au vu des faits pour lesquels il est connu au fichier " FAED ". 26. Même si l'intéressé n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, il s'est maintenu depuis le 5 novembre 2019 sur le territoire national sans avoir demandé le renouvellement de son titre de séjour. La réalité de ses liens privés et familiaux stables et anciens en France n'est pas établie, ainsi qu'il a été dit ci-dessus. Il ne ressort en revanche d'aucune pièce du dossier que les faits de violences signalés en novembre 2019 et reprochés à l'intéressé, faits qu'il ne conteste pas, aient fait l'objet d'une condamnation pénale, ni même d'une information judiciaire, ni qu'ils aient été renouvelés. Ainsi, les motifs retenus par le préfet du Nord ne permettent pas de justifier légalement la durée de la décision d'interdiction de retour en France au regard des critères posés par les dispositions précitées de l'article L. 612-10. En outre, dès lors que l'interdiction de retour sur le territoire français rend impossible l'exercice du droit de visite de M. B... auprès de sa fille mineure selon les modalités et le lieu fixés par le juge aux affaires familiales, la décision en litige porte une atteinte disproportionnée au droit de l'appelant au respect de sa vie familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 27. Il résulte de tout ce qui précède d'une part, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 30 juillet 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 6 juin 2021 par lesquelles le préfet du Nord l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et d'autre part, que le préfet du Nord n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le même jugement, la magistrate désignée a annulé la décision du 6 juin 2021 prononçant une interdiction de retour de M. B... sur le territoire français pour une durée de deux ans. Sur les conclusions à fin d'injonction : 28. Aux termes de l'article L. 613-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel est notifiée une interdiction de retour sur le territoire français est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 24 du règlement (UE) n° 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen et modifiant et abrogeant le règlement (CE) n° 1987/2006. Les modalités de suppression du signalement de l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. " et aux termes de l'article R. 613-7 du même code : " Les modalités de suppression du signalement d'un étranger effectué au titre d'une décision d'interdiction de retour sont celles qui s'appliquent, en vertu de l'article 7 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées, aux cas d'extinction du motif d'inscription dans ce traitement. ". Aux termes du IV de l'article 2 du décret du 28 mai 2010 : " IV. - Peuvent également être inscrits dans le fichier à l'initiative des autorités administratives compétentes : ... / 5° Les étrangers faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français non exécutée, en application du I de l'article L. 511-1 ou de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; / 6° Les étrangers faisant l'objet d'une interdiction de retour en application du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pendant sa période de validité ; (...) ". 29. L'exécution du présent arrêt, qui confirme notamment l'annulation de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans prise à l'encontre de M. B..., implique seulement la rectification du fichier du système d'information Schengen et celle du fichier des personnes recherchées, en tant que l'intéressé est inscrit dans ces fichiers au titre de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français. Il y a donc lieu d'enjoindre au préfet du Nord ou au préfet territorialement compétent de procéder à cette rectification dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions d'appel incident présentées par le préfet du Nord sont rejetées. Article 3 : Il est enjoint au préfet du Nord ou au préfet territorialement compétent de rectifier le signalement de M. B... dans le fichier du système d'information Schengen et dans le fichier des personnes recherchées, en tant qu'il est inscrit dans ces fichiers au titre de l'interdiction de retour sur le territoire français, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 4 : Les conclusions de M. B... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B..., au préfet du Nord et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience publique du 22 septembre 2022 à laquelle siégeaient : - Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. D... A..., magistrat administratif honoraire ; - M. Stéphane Eustache, premier conseiller. . Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2022. Le rapporteur, Signé : J.-P. A... La présidente de la formation de jugement, Signé : C. Baes-Honoré La greffière, Signé : S. Cardot La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N°21DA02190 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : L'association de défense contre les nuisances aériennes, l'association Collectif de refus des nuisances aériennes, l'association Collectif santé nuisances aériennes, l'association France nature environnement Ile-de-France, l'association Union française contre les nuisances des aéronefs, l'association SOS Vallée de Montmorency, l'association Qualité de vie de la Borde, l'association Ville et Aéroport, l'association Les amis de la Terre Val d'Oise, la commune de Saint-Prix et la commune de Gonesse ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté inter-préfectoral du 16 novembre 2016 approuvant le plan de prévention du bruit dans l'environnement de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle (Paris CDG), ainsi que la décision implicite de la ministre de la transition écologique et solidaire rejetant leur recours hiérarchique. Par un jugement n° 1800706 du 30 juin 2020, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette requête. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2020, et un mémoire complémentaire enregistré le 14 février 2022, l'association de défense contre les nuisances aériennes et autres représentées par Me Louis Cofflard demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler cet arrêté ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux ; 3)° à titre subsidiaire, de surseoir à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice de l'Union européenne se soit prononcée à titre préjudiciel sur la question de savoir si l'article 5§2 du règlement n° 598/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 est applicable aux plans d'action des aérodromes, au sens de l'article V et de l'article 8 de la directive 2002/49/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 juin 2002 ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont insuffisamment motivé un moyen soulevé et n'ont pas répondu à un moyen qui n'était pas inopérant ; - le tribunal n'a pas communiqué à la défense le mémoire contenant un nouveau moyen soulevé par les requérantes, ce qui témoigne d'une application irrégulière du principe du contradictoire ; - l'arrêté est entaché d'un vice de procédure, dès lors que l'autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires devait être saisie préalablement à l'adoption du plan de prévention du bruit dans l'environnement de l'aéroport de Paris-CDG, ainsi que l'exige l'article L. 6361-7 du code des transports ; - en refusant de reconnaitre le caractère réglementaire du plan de prévention du bruit dans l'environnement, les premiers juges ont entaché leur jugement d'une contradiction de motifs ; - l'arrêté est entaché d'un vice de procédure, car le plan de prévention du bruit dans l'environnement comporte des modifications substantielles par rapport au projet qui a été soumis à la consultation du public ; - il est entaché d'une erreur de droit, dès lors que le plan de prévention du bruit dans l'environnement de l'aéroport de Paris-CDG ne comporte pas d'évaluation du rapport coût-efficacité probable des mesures d'atténuation du bruit ni d'objectif chiffré de réduction du bruit, en méconnaissance de l'article 5 du règlement (UE) n° 598/2014 du 16 avril 2014, de la directive du 25 juin 2002 et de l'article R. 572-8 du code de l'environnement ; à titre subsidiaire, la question de l'application de cet article justifie un renvoi préjudiciel devant la Cour de justice de l'union européenne ; - il méconnaît les dispositions des articles L. 572-5 du code de l'environnement et R. 112-5 du code de l'urbanisme, dès lors que le plan de prévention du bruit dans l'environnement a été établi sur le fondement de cartes de bruits datant de plus de cinq ans alors que les niveaux de bruit ambiant générés par le fonctionnement de l'aéroport de Paris-CDG ont augmenté ; - l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que les mesures de réduction du bruit qu'il prévoit sont insuffisantes. - elles se rapportent aux moyens déjà présentés en première instance. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2021, et un mémoire complémentaire, enregistré le 1er mars 2022, la ministre de la transition écologique, représentée par la société Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérantes de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 25 mars 2022, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive 2002/49/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 juin 2002 ; - le règlement (UE) n° 598/2014 du parlement européen et du conseil du 16 avril 2014 ; - le code de l'environnement ; - le code des transports ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Baes-Honoré présidente-assesseure, - les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public, - et les observations de Me Louis Cofflard, représentant l'association de défense contre les nuisances aériennes et autres et de Me Michaël Rouland, représentant le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Une note en délibéré présentée par l'association de défense contre les nuisances aériennes et autres a été enregistrée le 5 octobre 2022 Considérant ce qui suit : 1. Les préfets des départements de l'Oise, de Seine-et-Marne, de Seine-Saint-Denis, du Val d'Oise et des Yvelines ont approuvé le plan de prévention du bruit dans l'environnement de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle (Paris CDG) par un arrêté du 16 novembre 2016. Le 23 décembre 2016, l'association de défense contre les nuisances aériennes, l'association Collectif de refus des nuisances aériennes, l'association Collectif santé nuisances aériennes, l'association France nature environnement Ile-de-France, l'association Union française contre les nuisances des aéronefs, l'association SOS Vallée de Montmorency, l'association Qualité de vie de la Borde, l'association Ville et Aéroport, l'association Les amis de la Terre Val d'Oise, la commune de Saint-Prix et la commune de Gonesse ont présenté un recours hiérarchique contre cet arrêté. Par un jugement du 30 juin 2020, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 16 novembre 2016 ainsi que de la décision implicite de rejet du recours gracieux. L'association de défense contre les nuisances aériennes et autres relèvent appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement : 2. En premier lieu, pour écarter le moyen tiré de l'insuffisance des mesures de réduction du bruit, les premiers juges ont relevé que les mesures préventives et réductrices permettront de réduire le nombre de personnes et d'établissements exposés à des valeurs limites. Si les requérantes reprochent au tribunal de ne pas avoir été plus précis sur l'étendue de cette diminution, cette circonstance ne permet pas de caractériser une insuffisante motivation de la réponse au moyen, les premiers juges n'étant pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments des parties. 3. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement (UE) n° 598/2014 du 16 avril 2014 a été écarté par les premiers juges comme étant inopérant. Si ces derniers n'ont pas spécifiquement répondu à l'argument relatif aux appréciations portées par la direction générale Environnement de la Commission européenne, ils ont exposé les motifs pour lesquels le moyen devait être écarté comme inopérant. Par suite, et dès lors qu'ils n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments présentés par les requérantes, le moyen tiré du défaut de réponse à un moyen doit être écarté. 4. En troisième lieu, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le principe du contradictoire a été méconnu en ce que les premiers juges n'ont pas communiqué le mémoire enregistré le 26 septembre 2019, dans lequel elles ont développé pour la première fois le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 6361-7 du code des transports, dès lors que le tribunal a, en tout état de cause, écarté leur moyen. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la légalité externe : 5. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 6361-7 du code des transports : " Dans le domaine des nuisances sonores, l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires : (...) 6° Est consultée sur les projets de textes réglementaires fixant, pour les aérodromes concernés, les mesures visant à assurer la protection de leur environnement sonore, notamment les valeurs maximales de bruit à ne pas dépasser, et sur les projets d'élaboration ou de modification des procédures de départ, d'attente et d'approche aux instruments des mêmes aérodromes ; (...) ". 6. D'autre part, le I de l'article R. 572-8 du code de l'environnement rendu applicable aux plans de prévention du bruit dans l'environnement des aérodromes civils dont le trafic annuel est supérieur à 50 000 mouvements par l'article R. 112-5 du code de l'urbanisme prévoit que : " I.-Le plan de prévention du bruit dans l'environnement prévu au présent chapitre comprend : 1° Un rapport de présentation présentant, d'une part, une synthèse des résultats de la cartographie du bruit faisant apparaître, notamment, le nombre de personnes vivant dans les bâtiments d'habitation et le nombre d'établissements d'enseignement et de santé exposés à un niveau de bruit excessif et, d'autre part, une description des infrastructures et des agglomérations concernées ; / 2° S'il y a lieu, les critères de détermination et la localisation des zones calmes définies à l'article L. 572-6 et les objectifs de préservation les concernant ; / 3° Les objectifs de réduction du bruit dans les zones exposées à un bruit dépassant les valeurs limites mentionnées à l'article R. 572-4 ; / 4° Les mesures visant à prévenir ou réduire le bruit dans l'environnement arrêtées au cours des dix années précédentes et prévues pour les cinq années à venir par les autorités compétentes et les gestionnaires des infrastructures, y compris les mesures prévues pour préserver les zones calmes ; / 5° S'ils sont disponibles, les financements et les échéances prévus pour la mise en œuvre des mesures recensées ainsi que les textes sur le fondement desquels ces mesures interviennent ; / 6° Les motifs ayant présidé au choix des mesures retenues et, si elle a été réalisée par l'autorité compétente, l'analyse des coûts et avantages attendus des différentes mesures envisageables ; / 7° Une estimation de la diminution du nombre de personnes exposées au bruit à l'issue de la mise en œuvre des mesures prévues ; / 8° Un résumé non technique du plan. / II.-Sont joints en annexe du plan les accords des autorités ou organismes compétents pour décider et mettre en œuvre les mesures prévues. " 7. En l'espèce, le plan de prévention du bruit dans l'environnement de l'aéroport de Paris- Charles-de-Gaulle présente les résultats de la cartographie du bruit, permettant d'évaluer le bruit ambiant et de prévoir son évolution. Il comprend également les objectifs de réduction de bruit, les motifs pour lesquels certaines mesures ont été adoptées, et recense les mesures déjà prises pour prévenir ou réduire le bruit dans l'environnement. Il n'impose ainsi aucune mesure réglementaire visant à assurer la protection de l'environnement sonore de l'aérodrome concerné. Par suite, et alors que la recevabilité d'un recours n'est pas subordonnée au caractère règlementaire de la décision contestée, c'est sans contradiction de motif que les premiers juges ont écarté comme inopérant le moyen tiré de ce que ce plan aurait dû, en vertu des dispositions citées au point 5, être soumis pour avis à l'autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires. 8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 572-8 du code de l'environnement : " Les projets de plans de prévention du bruit dans l'environnement font l'objet d'une consultation du public, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article R. 572-9 du même code : " Le projet de plan comprenant les documents prévus à l'article R. 572-8 est mis à la disposition du public pendant deux mois. / Un avis faisant connaître la date à compter de laquelle le dossier est mis à la disposition du public est publié dans un journal diffusé dans le ou les départements intéressés, quinze jours au moins avant le début de la période de mise à disposition. Cet avis mentionne, en outre, les lieux, jours et heures où le public peut prendre connaissance du projet et présenter ses observations sur un registre ouvert à cet effet ". 9. Il ressort des pièces du dossier que le projet de plan de prévention du bruit dans l'environnement de l'aéroport de Paris- Charles-de-Gaulle a été mis à la disposition du public du 16 février au 17 avril 2015 selon les modalités prévues par les dispositions précitées en vue de permettre au public de formuler ses observations. Si des modifications ont été ultérieurement apportées à plusieurs dispositions de ce projet, en ce qui concerne notamment l'annexion de nouvelles cartes stratégiques du bruit, la mise à jour des tableaux dénombrant les surfaces, populations et établissements d'enseignement et de santé particulièrement exposés au bruit, et l'utilisation de données du plan de gêne sonore de 2013, il ressort des pièces du dossier que ces modifications, qui ont été apportées pour tenir compte des observations présentées par le public, n'ont pas une ampleur telle qu'elles auraient dénaturé le projet au vu duquel le public a pu formuler des observations. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué est entaché d'irrégularité, faute d'avoir fait l'objet d'une seconde consultation du public, doit être écarté. En ce qui concerne la légalité interne : 10. En premier lieu, aux termes de l'article 1 du règlement n° 598/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif à l'établissement de règles et de procédures concernant l'introduction de restrictions d'exploitation liées au bruit dans les aéroports de l'Union, dans le cadre d'une approche équilibrée et abrogeant la directive 2002/30/CE : " (...) 2. Le présent règlement a pour objectifs de : a) faciliter la réalisation d'objectifs spécifiques, y compris sanitaires, en matière d'atténuation du bruit au niveau de chaque aéroport, tout en respectant les règles pertinentes de l'Union, en particulier celles fixées par la directive 2002//49/CE, ainsi que la législation applicable dans chaque Etat membre (...) ". Aux termes de l'article 5 de ce règlement : " (...) 2. Les États membres veillent à ce que soit adoptée l'approche équilibrée en ce qui concerne la gestion des nuisances sonores liées au trafic aérien dans les aéroports où un problème de bruit a été identifié. À cette fin, les États membres veillent à ce que : / a) l'objectif de réduction du bruit pour l'aéroport concerné, en tenant compte, le cas échéant, de l'article 8 et de l'annexe V de la directive 2002/49/CE, soit défini ; (...) / c) le rapport coût-efficacité probable des mesures d'atténuation du bruit soit évalué de manière approfondie ; (...) ". 11. Il résulte des dispositions citées au point 6 que le plan de prévention du bruit dans l'environnement n'a pas pour objet d'établir en tant que tel des restrictions d'exploitation liées au bruit. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 2 de l'article 5 du règlement (UE) 598/2014 du 16 avril 2014 est inopérant et doit être écarté. 12. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la directive 2002/49/CE : " Les plans d'action satisfont aux prescriptions minimales énoncées à l'annexe V " et le 1. de l'annexe V de cette même directive prévoit que : " Les plans d'action doivent comporter au minimum les éléments suivants : (...) - informations financières (si disponibles) : budgets, évaluation du rapport coût-efficacité ou coût-avantage ". 13. Si les requérantes soutiennent que l'arrêté est illégal en raison de l'absence d'objectifs suffisamment précis et chiffrés, et de présentation du rapport coût-efficacité probable, les dispositions de l'article R. 572-8 du code de l'environnement qui assurent la transposition en droit interne des exigences de l'article 8 et l'annexe V de la directive 2002/49/CE, et notamment celles du 3°) et du 6°) du I de l'article R. 572-8, n'exigent ni la présentation d'objectifs chiffrés ni de date de réalisation des objectifs. Elles n'imposent en outre l'analyse des coûts et avantages attendus des mesures envisageables, que dans la mesure où cette analyse aurait été réalisée, ce qui ne ressort pas des pièces du dossier en l'espèce. Par suite, le moyen doit être écarté. 14. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 572-5 du code de l'environnement : " Les cartes de bruit sont réexaminées et, le cas échéant, révisées, au moins tous les cinq ans. (...) ". Aux termes de l'article R. 112-5 du code de l'urbanisme : " Afin d'évaluer, de prévenir et de réduire le bruit émis dans l'environnement, les données, objectifs et mesures constitutifs des cartes de bruit et du plan de prévention du bruit dans l'environnement prévus par les articles R. 572-4, R. 572-5 et R. 572-8 du code de l'environnement sont établis pour les aérodromes civils dont le trafic annuel est supérieur à 50 000 mouvements, hors les mouvements effectués exclusivement à des fins d'entraînement sur des avions légers. (...). Ces données, objectifs et mesures constitutifs des cartes de bruit et du plan de prévention du bruit dans l'environnement sont : 1° Elaborés, soit à l'occasion de la révision du plan d'exposition au bruit, soit indépendamment de celle-ci dans les conditions prévues par les articles R. 572-9 à R. 572-11 du code de l'environnement ; 2° Annexés au rapport de présentation du plan d'exposition au bruit de l'aérodrome ; 3° Réexaminés en cas d'évolution significative des niveaux de bruit identifiés et, en tout état de cause, au moins tous les cinq ans ; (...) ". 15. Il ressort des pièces du dossier que les cartes stratégiques ont été élaborées afin de comparer les zones exposées au bruit à long terme, par rapport à une situation de référence correspondant aux hypothèses de trafic publiées fin 2013, soit moins de cinq ans avant l'adoption du plan contesté. Si les requérantes font valoir que des documents cartographiques annexés au plan de prévention du bruit dans l'environnement sont datés de 2007, il ne résulte pas de l'étude de mai 2019 versée au dossier par les requérantes, que les résultats auraient évolué de façon significative, l'étude précisant à cet égard que " L'analyse de l'évolution des différents indicateurs de bruit aérien ne montre pas de tendance nette d'évolution du bruit aérien à l'échelle de l'Ile-de-France depuis 2012 ". Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que les cartes stratégiques de bruit intégrées au plan contesté ont été actualisées après la consultation de public, notamment en prenant en compte d'autres courbes isophones, l'actualisation du dénombrement des populations et des établissements d'enseignement et de santé. Par suite, les moyens tirés de ce que les cartes de bruit auraient dû être révisées et de ce qu'il n'a pas été tenu compte d'une augmentation significative du bruit doivent être écartés. 16. En quatrième lieu, le plan de prévention du bruit dans l'environnement de l'aérodrome de Paris-Charles-de-Gaulle présente les mesures mises en place et envisagées pour prévenir ou réduire le bruit dans l'environnement. Il prévoit notamment de suivre l'évolution de l'urbanisme autour de l'aéroport, de poursuivre et d'encourager l'insonorisation en améliorant notamment le délai de traitement des dossiers, d'examiner régulièrement la pertinence des hypothèses utilisées pour l'élaboration du plan d'exposition au bruit, et de poursuivre la mise en place des descentes continues. Le plan présente ensuite une estimation de la diminution du nombre de personnes exposées au bruit à l'issue de la mise en œuvre des mesures prévues. Si, ainsi que le soulignent les requérantes, en dépit de ces mesures, le plan de prévention du bruit dans l'environnement de l'aérodrome de Paris- Charles-de-Gaulle fait apparaitre, entre la situation de référence de 2013 et la situation à long terme, une augmentation du nombre de personnes exposées dans leur habitation à certaines classes de décibels, le nombre total de personnes exposées à des bruits dépassant les valeurs limites diminue, en particulier pour l'indice Lden. Dans ces conditions, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce que les mesures de réduction de bruit seraient insuffisantes. 17. En cinquième lieu, les requérantes déclarent se rapporter aux moyens déjà présentés en première instance. Ce faisant, elles ne mettent pas la cour en mesure de se prononcer sur les erreurs que le tribunal administratif aurait pu commettre en écartant ces moyens. 18. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, que l'association de défense contre les nuisances aériennes et autres ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 30 juin 2020, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté inter-préfectoral du 16 novembre 2016 approuvant le plan de prévention du bruit dans l'environnement de l'aéroport de Paris- Charles-de-Gaulle, ainsi que la décision implicite de la ministre de la transition écologique et solidaire rejetant leur recours hiérarchique. Sur les frais exposés et non compris dans les dépens : 19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les requérantes demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. 20. ll y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association de défense contre les nuisances aériennes et les autres requérantes, une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'Etat et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de l'association de défense contre les nuisances aériennes et autres est rejetée. Article 2 : L'association de défense contre les nuisances aériennes et les autres requérantes verseront à l'Etat une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association de défense contre les nuisances aériennes, qui a été désignée à cette fin dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Copie en sera transmise pour information aux préfets des départements de l'Oise, de Seine-et-Marne, de Seine-Saint-Denis, du Val d'Oise et des Yvelines, aux communes de Compans, Cormeilles-en-Parisis, Sannois, Plessis-Bouchard, Andilly, Eaubonne, Domont, Frette-sur-Seine, Taverny, Stains et à l'association MNLE 93. Délibéré après l'audience publique du 22 septembre 2022 à laquelle siégeaient : Mme Baes-Honoré, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Denis Perrin, premier conseiller, - M. Stéphane Eustache, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2022. L'assesseur le plus ancien, Signé: D. PerrinLa présidente-rapporteure, Signé: C. Baes-Honoré La greffière, Signé: C. Sire La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière en chef, Par délégation, La greffière, Christine Sire N° 20DA01387 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012. Par un jugement n° 1901859 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la demande à concurrence du dégrèvement accordé le 29 octobre 2019 pour un montant, en droits et pénalités, de 1 725 312 euros et, dans un article 2, rejeté le surplus des conclusions de la demande. Procédure devant la cour Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 10 septembre 2020, 29 juillet 2021 et 8 février 2022 (non communiqué), M. D... C..., représenté par la SELAS De Gaulle Fleurance et associés, agissant par Me Ladreyt, demande à la cour : 1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 juillet 2020 et lui accorder la décharge des suppléments restant en litige pour les années 2011 et 2012 pour un montant total en droits et pénalités de 605 067 euros ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 22 596,27 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la qualification d'abus de droit constituée par l'interposition de la société luxembourgeoise Holdem entre la société Fidem et les associés de la société Holdem n'est pas fondée ; les éléments relevés par l'administration ne permettent pas de caractériser l'absence de substance économique de la société Holdem ; l'abus de droit n'est pas caractérisé dès lors que le service aurait dû tenir compte du prix de revient très important des titres de la société Fidem dû aux droits de succession importants dont il a dû s'acquitter à la suite du décès de son père en 2006 ; il avait la possibilité d'appréhender la trésorerie de la société Fidem sans fiscalité en se faisant racheter la totalité de ses titres par cette société suivi de leur annulation en application de l'article 161 du code général des impôts ; la réduction de capital de la société Holdem opérée le 27 décembre 2012 et celle opérée le 17 décembre 2015 lui a permis d'appréhender une somme de 356 410 euros et 2 851 280 euros en contrepartie de l'annulation de 90% des actions de la société Holdem ; la supposée absence de consistance économique de la société Holdem ne suffit pas en elle-même à établir l'abus de droit dès lors que la création de cette société ne lui a procuré aucun gain fiscal ; l'administration, qui ne conteste pas qu'il n'a perçu aucun revenu des sociétés Fidem ou Holdem sur l'ensemble des trois années vérifiées, impose un revenu fictif, qui n'a pas été effectivement perçu ; les dividendes litigieux ont été perçus par la société Holdem sans jamais être redistribués aux deux associés ; l'existence d'un abus de droit aurait pour seule conséquence la remise en cause du bénéfice du sursis d'imposition prévu à l'article 150-0 B du code général des impôts dont a bénéficié la plus-value dégagée lors de l'apport des titres de la société Fidem à la société luxembourgeoise Holdem ; - il conteste les autres rectifications résiduelles restant en litige afférentes aux crédits bancaires non justifiés et aux revenus de capitaux mobiliers en conséquence de sa contestation de la procédure d'abus de droit et de l'absence de domiciliation en France au cours des années 2011 et 2012 ; il résidait aux Emirats Arabes Unis durant cette période. Par deux mémoires, enregistrés les 25 mars 2021 et 7 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés. Une ordonnance du 10 janvier 2022 a fixé la clôture de l'instruction au 10 février 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère, - les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public, - et les observations de Me Ladreyt pour M. C.... Considérant ce qui suit : 1. La société civile Fidem est une société holding créée le 2 juin 1997 par M. B... C.... A la suite d'une donation du 23 novembre 2006, le capital de cette société, d'un montant de 3 061 528,47 euros divisé en 2 000 999 parts, était détenu par M. B... C... à hauteur de 1 998 998 parts en usufruit et une part en pleine propriété, et par ses deux fils, A... et D..., qui détenaient chacun la nue-propriété de 999 499 parts et la pleine propriété de 1 000 parts. A la suite du décès de M. B... C... le 6 décembre 2006, ses deux fils détenaient alors chacun la pleine propriété de 1 000 499 parts, la part restante de la société civile Fidem étant détenue par l'indivision. Cette société possédait des participations dans trois sociétés, la SARL JP2A, la SCI Le parc millésime et la SA Jardiland, ainsi que plusieurs biens immobiliers. Le 12 décembre 2008, MM. A... et D... C... ont créé la société de droit luxembourgeois Holdem, société holding qui a pour objet la prise de participations dans toutes sociétés, dont le capital de 31 000 euros est divisé en 3 100 actions de 10 euros réparties à parts égales entre ses deux associés qui sont également les deux administrateurs de cette société. Le 31 mars 2009, les deux frères ont apporté à la société Holdem l'intégralité des parts qu'ils détenaient dans la société Fidem, laquelle a été transformée le 24 février 2009 en société par actions simplifiée, pour une valeur de 7 097 200 euros, le capital de la société luxembourgeoise étant ainsi porté à 7 128 200 euros. Au cours des années 2009 à 2011, la société Fidem a distribué des dividendes à la société Holdem à hauteur respectivement de 3 501 749 euros, 414 371 euros et 2 165 049,23 euros. M. D... C... a fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle portant sur les années 2010, 2011 et 2012 et d'un contrôle sur pièces sur l'année 2009. A l'issue de ces contrôles, le service a considéré que M. C... devait être regardé comme domicilié en France au titre des années 2009 à 2012, alors qu'il revendiquait une domiciliation au Royaume-Uni, et elle a estimé, dans le cadre de la procédure d'abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, que les dividendes servis au titre des années 2009 à 2011 par la société française Fidem à sa société-mère luxembourgeoise Holdem, dépourvue de toute substance économique, devaient être soumis directement à l'impôt sur le revenu au nom de M. C..., associé à 50 % de cette société luxembourgeoise à hauteur de ses droits dans cette société. M. C... a été également imposé d'office sur des revenus de capitaux mobiliers et des crédits bancaires non déterminés à l'issue du contrôle en application des articles L. 66 et L. 67 du livre des procédures fiscales. Le comité de l'abus de droit fiscal a validé la mise en œuvre de la procédure d'abus de droit par l'administration dans un avis du 22 mars 2017. A la suite de l'acceptation partielle de sa réclamation préalable, M. D... C... a demandé au tribunal de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il reste assujetti au titre des années 2011 et 2012. 2. Par un jugement n° 1901859 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la demande à concurrence du dégrèvement accordé le 29 octobre 2019 pour un montant, en droits et pénalités, de 1 725 312 euros et, dans un article 2, rejeté le surplus des conclusions de la demande. Par sa requête, M. D... C... relève appel de l'article 2 de ce jugement. Sur la décharge sollicitée : 3. En premier lieu, l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. / En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité. / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification (...) ". 4. Il résulte de ces dispositions que, lorsque l'administration use des pouvoirs que lui confère ce texte dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif ou que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. L'administration fiscale apporte cette preuve par la production de tous éléments suffisamment précis attestant du caractère fictif des actes en cause ou de l'intention du contribuable d'éluder ou d'atténuer ses charges fiscales normales. Dans l'hypothèse où l'administration s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au contribuable, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de la réalité des actes contestés ou de ce que l'opération litigieuse est justifiée par un motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer ses charges fiscales normales. 5. Il résulte de l'instruction que le comité de l'abus de droit fiscal, par avis du 22 mars 2017, a confirmé le bien-fondé de la mise en œuvre de la procédure de répression des abus de droit et que l'administration s'est conformée à l'avis du comité. Par suite, il incombe à M. C..., en vertu des dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve inverse. 6. En l'espèce, il ressort de la proposition de rectification du 25 juillet 2014 adressée à M. C... pour les années 2010 à 2012 que l'administration a estimé, dans le cadre de la procédure d'abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, que les dividendes servis par la société française Fidem à sa société-mère luxembourgeoise Holdem, laquelle était dépourvue de substance économique réelle, au titre des années en litige, devaient être regardés comme ayant été directement appréhendés par le requérant, à hauteur des montants de 207 185 euros en 2010 et 1 082 525 euros en 2011 correspondants à sa participation au capital de cette société, et à ce titre soumis directement à l'impôt sur le revenu sur le fondement du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts. Afin de démontrer l'absence de substance économique réelle de la société Holdem, l'administration a relevé que la société Holdem, dont l'objet social est la prise de participations dans toutes sociétés et l'achat de titres, l'emprunt, l'avance de fonds sur prêts ainsi que la gestion et le développement de ses participations, ne disposait d'aucun moyen matériel ou humain lui permettant d'exercer une quelconque activité et que son adresse au Luxembourg était une adresse de domiciliation. Elle a également souligné que les parts détenues dans la société Fidem constituaient le seul actif immobilisé de la société et que celle-ci ne détenait aucune autre participation ni aucun autre actif mobilier ou immobilier. Elle a constaté que les seuls produits de la société Holdem sur la période en cause étaient uniquement constitués des distributions effectuées par sa filiale Fidem et des revenus de valeurs mobilières tirés des placements de sa trésorerie constituée grâce à ces distributions. A ce titre, il est constant que la société Fidem a distribué à sa société-mère au cours de l'exercice 2009 une somme totale de 3 501 749 euros qui représente la totalité des ressources de la société Holdem sur cet exercice, qu'au cours de l'exercice 2010, la société Fidem a versé 638 451,52 euros de dividendes à sa société-mère, représentant plus de 86 % de ses revenus annuels, hors produits de placements financiers, et qu'au cours de l'exercice 2011, la société Holdem a bénéficié de la réduction du capital de la société Fidem à hauteur de 1 940 969,03 euros, décidée le 27 juin 2011 par la société Holdem, associée unique, ce qui lui a permis de rembourser par compensation un prêt de 2 100 000 euros souscrit auprès de sa filiale le 28 décembre 2009, démontrant ainsi l'absence de fonds propres de la société holding lui permettant la réalisation de son activité de placement et de gestion de trésorerie. L'administration a enfin relevé que les distributions opérées par la filiale Fidem au profit de sa société-mère ont conduit à transférer à cette dernière la majeure partie des actifs de sa filiale, dès lors qu'à la clôture de l'exercice 2014, le poste " disponibilités " représentait plus de 98 % de l'actif du bilan de la société Fidem. Il ressort de l'ensemble de ces éléments, non contestés par M. C..., que l'administration a pu à bon droit estimer que la société Holdem était dénuée de substance économique et que sa création, qui ne répondait pas à un motif économique, financier ou patrimonial, et son interposition entre la société Fidem et les associés de la société-mère présentait le caractère d'un montage artificiel réalisé dans le but exclusif de permettre à ceux-ci de s'approprier le produit de la cession des actifs de la société Fidem via la société luxembourgeoise Holdem, bénéficiaire des dividendes versés par la société Fidem exonérés de toute imposition au Luxembourg. 7. Afin de contester l'existence du caractère artificiel de ce montage, M. C... soutient qu'il doit être tenu compte du prix de revient très élevé, s'élevant à 6 845 662 euros, soit 3 422 831 euros en ce qui le concerne, des titres de la société Fidem en raison des droits de succession acquittés à la suite du décès de son père. Il se prévaut de la faible plus-value réalisée lors de l'apport de ces titres effectués à la société Holdem en mars 2009 alors que, selon lui, il avait la possibilité d'appréhender la trésorerie de la société Fidem en faisant procéder au rachat de ses propres titres par la société Fidem suivi de leur annulation. Toutefois, la circonstance que M. C... ait disposé de plusieurs possibilités pour appréhender la trésorerie de la société Fidem en franchise d'impôt n'a aucune incidence sur l'existence et la remise en cause du montage artificiel en litige. En outre, s'il estime que l'absence de consistance économique de la société Holdem ne suffit pas en elle-même à établir l'abus de droit dès lors que la création de cette société ne lui a procuré aucun gain fiscal et que l'administration impose un revenu fictif, qui n'a pas été effectivement perçu, dès lors qu'elle ne conteste pas que M. C... n'a perçu aucun revenu des sociétés Fidem ou de Holdem sur l'ensemble des années vérifiées, il résulte de ce qui a été dit que l'interposition de la société Holdem, dépourvue de toute substance économique, a permis de verser à cette société les dividendes de la société Fidem, en franchise d'impôt, dont les bénéficiaires réels étaient au final ses deux associés. En outre, ces distributions ont permis à la société Holdem de racheter 10% en 2012 puis 80% en 2015 de ses propres titres à M. C... et son frère et à ceux-ci de rembourser les deux prêts obtenus de la société holding concernant des sommes versées à M. D... C... de 700 000 euros au titre de l'année 2011 et 500 000 euros au titre de l'année 2012. Le requérant ne saurait ainsi soutenir que le montage en litige ne lui a procuré aucun gain fiscal ni qu'il n'a perçu aucun revenu dès lors que l'interposition de la société Holdem étant artificielle, M. C... doit être regardé comme ayant directement perçu les dividendes versés par la société Fidem. Enfin, contrairement à ce que fait valoir M. C..., l'existence d'un abus de droit n'a pas pour unique conséquence de remettre en cause le bénéfice du sursis d'imposition dont a bénéficié la plus-value qu'il a réalisée lors de l'apport des titres de la société Fidem à la société Holdem. Cette opération n'a pas été remise en cause par l'administration et la procédure de répression des abus de droit en litige consiste à remettre en cause le versement des dividendes de la société Fidem à sa société-mère en franchise d'impôt. 8. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. (...) ". Aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b. celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c. celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économique ". 9. Pour l'application des dispositions du a du 1 de l'article 4 B précité, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles. Le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer. 10. Il est constant que, durant la période courant du 1er avril 2011 au 31 décembre 2012, M. C... n'a exercé aucune activité professionnelle en France ou à l'étranger et qu'il n'a tiré aucun revenu de ses biens mobiliers et immobiliers situés en France et à l'étranger. Il est également constant que le requérant n'a pas disposé d'un foyer en France ou à l'étranger au sens des dispositions précitées dès lors qu'il indique vivre en union libre avec une ressortissante française vivant à Lyon, qu'il n'a pas d'enfant et que s'il résulte de l'instruction qu'il a séjourné au domicile de sa mère à Lyon durant ses séjours en France au cours de la période considérée, ce lieu ne peut être regardé comme celui où il habite normalement. En revanche, M. C... soutient lui-même avoir séjourné en France entre avril 2011 et septembre 2011 et entre le 9 juillet et le 31 décembre 2012, et au moins 108 jours au titre de l'année 2011 et 124 jours au titre de l'année 2012, et précise avoir séjourné pour le reste à bord de son voilier en effectuant un tour de l'Atlantique à la voile entre le 20 septembre 2011 et le 8 juillet 2012. Dans ces conditions, le requérant doit être regardé comme ayant eu en France le lieu de son séjour principal au titre de la période susvisée. 11. En outre, en vertu de ce qui a été dit au point 6, M. C... doit être regardé comme ayant tiré l'essentiel de ses ressources, pour l'année 2011, des dividendes versés par la société française Fidem à sa société-mère luxembourgeoise Holdem, sous la forme d'avances de trésorerie et de prêts, qui doivent être regardés comme ayant été directement appréhendés par le requérant à hauteur de sa participation dans la société Holdem, dépourvue de toute substance économique. M. C... ne soutient ni n'établit que son patrimoine situé à l'étranger aurait été productif de revenus et en particulier de revenus supérieurs à ceux considérés comme distribués à son profit par la société française Fidem. Dans ces conditions, M. C... doit être regardé comme ayant son domicile fiscal en France au sens des dispositions du c) de l'article 4 B du code général des impôts au cours de la période courant du 1er avril 2011 au 31 décembre 2011. Par suite, l'administration a pu à bon droit considérer que l'intéressé, qui ne se prévaut d'aucune des stipulations de la convention conclue le 19 juillet 1989 entre la France et les Emirats Arabes Unis pour contester sa domiciliation fiscale en France ni ne soutient ni n'établit avoir été imposé sur ses revenus dans un autre Etat, était fiscalement domicilié en France au titre de la période en cause. 12. En dernier lieu, la procédure de répression de l'abus de droit étant en l'espèce régulière et fondée et le requérant devant être regardé comme ayant disposé d'une domiciliation fiscale en France pour la période du 1er avril 2011 au 31 décembre 2012, M. C... n'est pas fondé à contester par voie de conséquence les autres rectifications mises à sa charge pour cette période afférente à des crédits bancaires non justifiés et à des revenus de capitaux mobiliers. 13. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2011 et 2012. Sur les frais liés au litige : 14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. C.... DECIDE : Article 1er : La requête de M. D... C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Bourrachot, président de chambre, Mme Dèche, présidente assesseure, Mme Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 octobre 2022. La rapporteure, V. Rémy-Néris Le président, F. Bourrachot La greffière, A-C. Ponnelle La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N°20LY02680 lc
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 7 décembre 2017 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision de l'autorité consulaire française à Casablanca (Maroc) du 18 août 2017 refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de travailleur salarié. Par un jugement n° 1801235 du 11 mai 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 9 juillet 2021, M. C... B..., représenté par Me Gault, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 11 mai 2021 du tribunal administratif de Nantes ; 2°) d'annuler la décision du 7 décembre 2017 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision de l'autorité consulaire française à Casablanca (Maroc) du 18 août 2017 refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de travailleur salarié ; 3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité. Il soutient que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a porté une inexacte appréciation sur l'adéquation de sa qualification et de son expérience professionnelle à l'emploi saisonnier envisagé et que la décision contestée est entachée d'une erreur d'appréciation. La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur, qui n'a pas produit de mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code du travail ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Par un jugement du 11 mai 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. C... B... tendant à l'annulation de la décision du 7 décembre 2017 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision de l'autorité consulaire française à Casablanca (Maroc) du 18 août 2017 refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de travailleur salarié. M. B... relève appel de ce jugement. 2. Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, désormais repris à l'article L. 311-1 du même code : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / (...) 3° Des documents nécessaires à l'exercice d'une activité professionnelle s'il se propose d'en exercer une ". Aux termes de l'article L. 211-2-1 du même code alors en vigueur, désormais repris à l'article L. 312-2 du même code : " (...) Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". La circonstance qu'un travailleur étranger dispose d'un contrat de travail visé par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) ou d'une autorisation de travail, ne fait pas obstacle à ce que l'autorité compétente refuse de lui délivrer un visa d'entrée en France en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur tout motif d'intérêt général. Constitue un tel motif l'inadéquation entre l'expérience professionnelle et l'emploi sollicité et, par suite, le détournement de l'objet du visa à des fins migratoires. 3. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer le visa de long séjour sollicité, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur l'inadéquation entre le profil professionnel de M. B... et le poste pour lequel il a été embauché, dont il se déduit un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires. 4. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., ressortissant marocain né le 1er février 1972, a conclu le 1er avril 2017 un contrat de travail à durée indéterminée avec la société de construction " Les Mas de Jadis " en qualité d'ouvrier " maçon - sculpteur sur plâtre ". Le requérant soutient qu'il dispose des compétences requises pour occuper cet emploi du fait de son diplôme d'aptitude en gravure sur pierre obtenu en 2018 et de son expérience professionnelle. Toutefois, les documents produits, qui n'attestent au demeurant que de sept mois de travail cumulés en qualité de sculpteur, respectivement au sein des sociétés " BA Top Services " en 2018 et " Maghreb Aluminium " en 2014, sont insuffisants pour établir que M. B... aurait effectivement travaillé en cette qualité pendant une durée significative. Le requérant, âgé de 45 ans à la date de la décision contestée, ne se prévaut d'aucune attache familiale dans son pays d'origine et ne conteste pas l'allégation du ministre selon laquelle son cousin, gérant de l'entreprise qui souhaite l'embaucher, réside en France. Dans ces conditions, en refusant de délivrer le visa sollicité, la commission n'a pas porté une inexacte appréciation sur l'inadéquation de la qualification et l'expérience professionnelle de l'intéressé à l'emploi proposé, dont il se déduit un risque de détournement de l'objet du visa dans le but de favoriser l'entrée sur le territoire français. 5. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 14 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2022. Le rapporteur, A. A...Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 21NT01948
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 29 janvier 2021 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a désigné le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 2101309 du 11 juin 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 30 juin 2021, M. A..., représenté par la Selarl Lozen avocats, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler les décisions du 29 janvier 2021 ; 3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder à une nouvelle instruction de sa demande ou à un réexamen de sa situation ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et a été pris en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'illégalité du refus de séjour entraîne, par voie d'exception, l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; - la mesure d'éloignement porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; - l'illégalité des précédentes entraîne, par voie d'exception, l'illégalité de la décision fixant le pays de destination. La requête a été communiquée au préfet du Rhône, qui n'a pas produit de mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ; - le code de justice administrative ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Le rapport de Mme Le Frapper, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ; Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant de la République de Madagascar né le 28 juin 1989, a déclaré être entré en France le 9 septembre 2019, sous couvert d'un titre de séjour délivré par les autorités allemandes. Il relève appel du jugement du 11 juin 2021 du tribunal administratif de Lyon ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 29 janvier 2021 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour sur le fondement du 2° de l'article L. 314-11, du 7° de l'article L. 313-11, de l'article L. 313-10 ainsi que de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction alors applicable, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination. 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française (...) s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois (...) ". Lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour par un ressortissant étranger faisant état de sa qualité de descendant à charge de ressortissant français, l'autorité administrative peut légalement fonder sa décision de refus sur la circonstance que le demandeur ne saurait être regardé comme étant à la charge de son ascendant, dès lors qu'il dispose de ressources propres lui permettant de subvenir aux besoins de la vie courante dans des conditions décentes, que son ascendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire. 3. Pour refuser l'admission au séjour de M. A... sur ce fondement, le préfet du Rhône lui a opposé, d'une part, l'absence de visa de long séjour délivré par les autorités consulaires françaises, et, d'autre part, l'absence de preuve suffisante de la prise en charge alléguée par sa mère de nationalité française, alors que M. A... n'est pas dans l'impossibilité de subvenir à ses propres besoins et n'est pas totalement à la charge de sa mère en présence de revenus propres. S'il n'est pas contesté que M. A... était hébergé chez sa mère, de nationalité française, la seule production d'une attestation de cette dernière et de copies de relevés bancaires du requérant depuis novembre 2019, faisant apparaître la perception d'indemnités de stage substantielles et ne permettant pas d'identifier que les autres versements proviendraient de Mme E... C... née B..., est insuffisante à justifier que Mme C... aurait régulièrement pourvu aux besoins de son fils, dont le curriculum vitae mentionne plusieurs emplois occupés à Madagascar préalablement à son entrée en France, à l'âge de 30 ans, et qui, nonobstant sa poursuite d'études, est ainsi en mesure de subvenir à ses propres besoins. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Rhône, en estimant que la prise en charge par sa mère n'était pas démontrée, aurait entaché sa décision de refus de séjour d'une erreur d'appréciation. 4. Au surplus, M. A... ne conteste pas plus en appel qu'en première instance le bien-fondé du motif principal de refus opposé à sa demande, tiré de l'absence de visa de long séjour délivré par les autorités consulaires françaises. 5. En deuxième lieu, aux termes, d'une part, de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes, d'autre part, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... était présent depuis moins de dix-huit mois en France à la date de la décision attaquée, après avoir vécu plus de 28 ans à Madagascar et environ un an en Allemagne. S'il est hébergé par sa mère, qui a obtenu la nationalité française, il a vécu séparé de cette dernière depuis l'âge de treize ans, selon leurs propres déclarations, et ne conteste pas qu'il dispose d'attaches personnelles à Madagascar, où résident notamment d'autres membres de sa famille, alors que, désormais majeur, il ne fait état, en France, d'aucune autre relation personnelle que sa mère. Par ailleurs, il ne justifie pas d'une intégration socioprofessionnelle particulièrement notable du seul fait qu'il a poursuivi des études d'expert-comptable en France, qu'il a donné satisfaction lors de stages réalisés au cours de ces études, et qu'il justifie d'une perspective d'embauche. Par suite, le refus de séjour en litige ne porte pas d'atteinte disproportionnée au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale. Il ne méconnaît ainsi ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ". 8. Les circonstances que M. A... soit présent en France depuis septembre 2019 auprès de sa mère, qu'il ait mené des études sérieuses, qu'il justifie d'une perspective d'embauche dans un cabinet d'expertise-comptable, et qu'il ait été bénévole auprès du Secours populaire français, ne sauraient suffire à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels d'admission au séjour au sens des dispositions précitées. Le refus de séjour opposé par le préfet du Rhône ne procède ainsi d'aucune erreur manifeste d'appréciation dans leur mise en œuvre. 9. En quatrième lieu, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement porterait une atteinte disproportionnée au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt. 10. En dernier lieu, en l'absence d'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement, les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français puis contre la décision fixant le pays de destination et tirés, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions qu'elles accompagnent doivent être écartés. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes. Ses conclusions à fin d'injonction doivent, par voie de conséquence, être également rejetées. 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse au conseil de M. A..., alors en outre qu'aucune demande d'aide juridictionnelle n'a été déposée, la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Rhône. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Bourrachot, président de chambre, Mme Dèche, présidente assesseure, Mme Le Frapper, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 octobre 2022. La rapporteure, M. Le FrapperLe président, F. Bourrachot La greffière, A.-C. Ponnelle La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY02232 ar
JADE/CETATEXT000046526973.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... E..., M. B... E..., Mme A... E... et la société d'assurance MACIF (mutuelle d'assurance des commerçants et industriels de France et des cadres et salariés de l'industrie et du commerce) ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner solidairement le centre hospitalier de Bourg-Saint-Maurice et son assureur la SHAM (société hospitalière d'assurance mutuelle) à verser à Mme C... E... la somme de 31 995,47 euros, à Mme A... E... la somme de 15 000 euros, à M. B... E... la somme de 15 000 euros, et à la MACIF la somme de 3 440 euros. Par un jugement n° 1807779 du 23 février 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 15 avril 2021, Mme C... E..., M. B... E..., Mme A... E... et la société d'assurance MACIF, représentés par la SCP Milliand-Dumolard-Thill, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1807779 du 23 février 2021 du tribunal administratif de Grenoble ; 2°) de condamner solidairement le centre hospitalier de Bourg-Saint-Maurice et son assureur la SHAM à verser à Mme C... E... la somme de 31 995,47 euros, à Mme A... E... la somme de 15 000 euros, à M. B... E... la somme de 15 000 euros, et à la MACIF la somme de 3 440 euros. ; 3°) de mettre à la charge solidaire du centre hospitalier de Bourg-Saint-Maurice et de la SHAM une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les requérants soutiennent que : - l'hôpital a commis une faute en ne prenant pas les précautions nécessaires pour éviter le suicide de M. D... E... ; - sa veuve et ses enfants ont subi un préjudice moral ; - sa veuve a par ailleurs dû prendre en charge une partie des frais d'obsèques, l'autre partie ayant été prise en charge par la MACIF qui est ainsi subrogée à due concurrence. Par un mémoire en défense enregistré le 17 février 2022, le centre hospitalier de Bourg-Saint-Maurice et la SHAM, représentés par le cabinet Le Prado - Gilbert, concluent au rejet de la requête. Ils soutiennent que : - aucune faute n'est imputable à l'hôpital ; - subsidiairement, les montants demandés apparaissent excessifs. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des assurances ; - le code civil ; - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Stillmunkes, rapporteur, - et les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. D... E..., né en 1953, s'est présenté aux urgences du centre hospitalier de Bourg-Saint-Maurice le 24 mai 2014 en indiquant des troubles du sommeil datant de deux mois et ayant connu une aggravation dans la semaine qui précède, ainsi que des troubles importants de l'humeur et du comportement et un épisode anormal d'agressivité la veille. Un diagnostic de dépression sans symptôme psychotique a été posé et le patient a pu sortir avec une prescription médicamenteuse. Le patient étant revenu le soir du 25 mai 2014, avec un tableau comparable, il a été gardé la nuit puis admis le lendemain au service de médecine. Il s'est défenestré le 26 mai 2014 et il est décédé le lendemain. Sa veuve et leurs deux enfants, ainsi que leur assureur agissant comme subrogé à hauteur des sommes versées, demandent la réparation des préjudices résultant de ce décès. 2. Il résulte de l'instruction que, si lors de l'admission aux urgences le 24 mai, le médecin qui a examiné le patient a pu relever des symptômes sérieux de troubles du sommeil, d'anorexie, d'anhédonie, de perte d'élan vital, de tristesse et d'auto-dépréciation, qu'il a rattachés à un tableau de dépression, il a également relevé que le patient avait des idées noires, mais sans intention suicidaire, et qu'il indiquait même ne pas penser être capable de passer à l'acte, notamment pour ne pas faire souffrir sa femme et ses enfants. Sa prise en charge le 25 mai a été faite sur un tableau similaire, l'absence d'idée de mort avouée ayant été relevée. Il a été pris en charge dans un service de médecine en raison du refus du patient et de sa famille d'une prise en charge dans un centre spécialisé. Il a de nouveau été noté que le patient n'exprimait pas d'idée suicidaire et le médecin responsable du service a indiqué lors de son audition avoir constaté un état dépressif, mais l'absence d'idée suicidaire et l'absence de tout élément pouvant faire suspecter un éventuel passage à l'acte. Aucun élément précis du comportement du patient de nature à faire suspecter par l'hôpital un tel geste n'est d'ailleurs identifié. Son fils a au demeurant indiqué qu'il l'avait vu le lundi 26 mai dans sa chambre d'hôpital et qu'il avait trouvé son état meilleur. Le diagnostic des conditions de la défenestration retient l'idée d'un acte fait sur une pulsion et ne correspondant pas à une intention suicidaire réelle exprimée. Si les membres de la famille soutiennent avoir constaté dans le cadre privé un comportement suspect, il ne résulte toutefois pas de l'instruction que l'hôpital en aurait été informé ou aurait pu en avoir connaissance. Il n'est par ailleurs pas établi que l'hôpital aurait été informé d'éventuels antécédents de tentative de suicide. Enfin, si le patient a été placé dans une chambre du troisième étage, sans contention ni fermeture bloquée des fenêtres, alors d'ailleurs que le patient n'était pas en hospitalisation sous contrainte, il était toutefois dans une chambre double avec un autre patient. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, et notamment du comportement constaté du patient, des informations dont l'hôpital a pu avoir connaissance et des moyens dont il disposait, l'hôpital ne peut en l'espèce être regardé comme ayant commis une faute en raison des conditions de l'accueil du patient. 3. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande. 4. Les conclusions des requérants relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées en conséquence du rejet de leurs conclusions principales. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme C... E... et autres est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E..., à M. B... E..., à Mme A... E..., à la société d'assurance MACIF, au centre hospitalier de Bourg-Saint-Maurice et à la SHAM. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Pourny, président de chambre, M. Stillmunkes, président assesseur, Mme Bentéjac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 novembre 2022. Le rapporteur, H. Stillmunkes Le président, F. Pourny La greffière, F. Abdillah La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY01203
JADE/CETATEXT000046526998.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours dirigé contre la décision du 26 février 2020 des autorités consulaires françaises à Alger (Alger) refusant de lui délivrer un visa d'établissement en France en qualité d'enfant majeur à charge de ressortissants français. Par un jugement n° 2010549 du 10 mai 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 6 juillet 2021, et des productions de pièces enregistrées les 31 janvier, 3 février et 8 février 2022 (non communiquées), Mme C... B..., représentée par Me Gillioen, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 10 mai 2021 du tribunal administratif de Nantes ; 2°) d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours dirigé contre la décision du 26 février 2020 des autorités consulaires françaises à Alger (Alger) refusant de lui délivrer un visa d'établissement en France en qualité d'enfant majeur à charge de ressortissants français ; 3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier, en ce qu'il n'a pas répondu aux moyens tirés de ce que sa demande de visa était complète et d'une erreur de fait ; - la décision contestée, ainsi que le refus consulaire, sont entachés d'un défaut de motivation ; - la décision contestée, ainsi que le refus consulaire, sont entachés d'un défaut d'examen complet et sérieux de sa situation ; - la décision contestée méconnaît les stipulations du b) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; - la décision contestée méconnaît les stipulations des articles 8 et 6-5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... B..., ressortissante algérienne née le 4 juillet 1995, a sollicité le 4 février 2020 la délivrance d'un visa d'établissement en France en qualité d'enfant majeur à charge de ressortissants français auprès des autorités consulaires françaises à Alger. Par une décision du 26 février 2020, l'autorité consulaire française à Alger (Algérie) a rejeté sa demande. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté les recours dirigés contre ces décisions. Mme B... relève appel du jugement du 10 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande d'annulation de la décision de la commission de recours. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, si Mme B... soutient que le jugement attaqué est entaché de défaut de réponse " au moyen invoqué relatif à l'erreur de fait ", elle n'assortit pas son argumentation sur ce point des précisions qui permettraient d'en apprécier la portée. Le moyen ne peut, dès lors, qu'être écarté. 3. En second lieu, il ne ressort pas des écritures de première instance que les demandeurs auraient soulevé un moyen tiré de ce que son dossier était complet et répondait aux exigences de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors même, en tout état de cause, que le ministre n'a pas rejeté la demande de visa de Mme B... au motif qu'elle aurait été incomplète, mais en raison d'une part, de ce que la demanderesse de visa, âgée de plus de 21 ans, ne justifie pas être à la charge de ses parents de nationalité française, d'autre part, de ce que ses ascendants de nationalité française ne pourvoient pas régulièrement à ses besoins et ne justifient pas des ressources nécessaires pour le faire. Par suite, et alors que ce moyen n'avait pas à être relevé d'office par le tribunal, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité en ce qu'il n'a pas répondu à ce moyen. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 4. En premier lieu, en vertu des dispositions de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, désormais repris à l'article D. 312-3 du même code, la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, prise sur recours préalable obligatoire, s'est substituée à la décision consulaire du 26 février 2020. Il suit de là que les moyens dirigés contre la décision de l'autorité consulaire doivent être écartés comme inopérants. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ". En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... ait demandé la communication des motifs de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté sa demande. Dans ces conditions, et à supposer qu'il ait été soulevé, le moyen tiré de l'absence de motivation de cette décision implicite ne peut qu'être écarté. 6. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée serait entachée d'un défaut d'examen de la situation personnelle de Mme B.... 7. En quatrième lieu, et ainsi qu'il a été dit au point 3, il ressort des pièces du dossier que le ministre n'a pas rejeté la demande de visa de Mme B... au motif qu'elle aurait été incomplète, mais en raison d'une part, de ce que la demanderesse de visa, âgée de plus de 21 ans, ne justifie pas être à la charge de ses parents de nationalité française, d'autre part, de ce que ses ascendants de nationalité française ne pourvoient pas régulièrement à ses besoins et ne justifient pas des ressources nécessaires pour le faire. Par suite, et à supposer qu'il ait été soulevé, le moyen tiré de ce que son dossier était complet et de ce que la décision contestée méconnaît ainsi l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, doit être écarté comme inopérant. 8. En cinquième lieu, aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit (...) : / b) (...) aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge ". Le deuxième alinéa de l'article 9 du même accord prévoit que : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis, alinéa 4 (lettres c à d), et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. ". 9. Il résulte de la combinaison de ces stipulations que, que, lorsqu'elles sont saisies d'une demande tendant à la délivrance d'un visa de long séjour au bénéfice d'un ressortissant algérien âgé de plus de 21 ans qui fait état de sa qualité de descendant à charge d'un ressortissant français, les autorités consulaires et la commission de recours contre les décisions de refus de visas d'entrée en France peuvent légalement fonder leur décision de refus sur la circonstance que l'intéressé ne saurait être regardé comme étant à la charge de son ascendant dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son ascendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins, ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire. 10. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, les parents de Mme B..., M. D... B... et Mme E... B..., de nationalité française, ont envoyé à la requérante des sommes se limitant à 250 euros pour l'année 2018, et 220 euros pour l'année 2019. Les parents de Mme B... résident en France, sont locataires d'un appartement pour lequel ils acquittent un loyer d'environ 600 euros par mois et prennent en charge quatre de leurs cinq enfants présents en France. M. D... B... percevait, à la date de la décision contestée, un revenu d'un montant mensuel net d'environ 1 600 euros. Il est constant que Mme E... B... n'exerce pas d'activité professionnelle et ne perçoit aucun revenu autre que des prestations familiales. Dans ces conditions, Mme B... ne peut être regardée comme à la charge de ses parents à la date de la décision attaquée. Mme B... ne peut, au demeurant, utilement se prévaloir des revenus perçus par ses deux sœurs résidant en France. 11. D'autre part, et en tout état de cause, la seule circonstance que Mme B..., âgée de 25 ans à la date de la décision contestée, n'exercerait aucune activité professionnelle, ne suffit pas à justifier qu'elle serait dépourvue de ressources dans son pays d'origine. 12. Il résulte de ce qui précède qu'en estimant que Mme B... ne pouvait être regardée comme étant à charge de ses ascendants de nationalité française pour obtenir un visa de long séjour en qualité d'enfant majeur à charge de ressortissants français, la commission de recours n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 citées au point 8. 13. En sixième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., âgée de 26 ans, réside en Algérie avec trois membres de la fratrie. Il n'est pas établi qu'elle serait dépourvue d'attaches personnes significatives en Algérie, où elle a toujours vécu, ni que ses parents ou les autres membres de la famille qui résident en France seraient dans l'impossibilité de lui rendre visite en Algérie. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision contestée porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations des articles 8 et 6-5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de la requérante, doivent être écartés. 14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 14 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2022. Le rapporteur, A. A...Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 No 21NT01916
JADE/CETATEXT000046526958.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 31 mai 2021 par lesquelles le préfet de la Savoie lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit de revenir sur le territoire français pendant une durée d'un an. Par un jugement n° 2104125 du 4 juin 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a, dans son article 2, annulé les décisions du 31 mai 2021 du préfet de la Savoie privant M. C... d'un délai de départ volontaire et lui interdisant de revenir sur le territoire français pendant une durée d'une année. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 18 juin 2021, le préfet de la Savoie demande à la cour d'annuler ce jugement du 4 juin 2021 en tant qu'il a annulé ses décisions du 31 mai 2021 privant M.C... d'un délai de départ volontaire et lui interdisant de revenir sur le territoire français pendant une durée d'une année. Il soutient que : - au regard de l'ensemble des éléments du dossier, et notamment des 1°, 4° et 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile code, l'intéressé pouvait légalement être privé d'un délai de départ volontaire ; - l'interdiction de retour sur le territoire français est suffisamment motivée ; - cette décision est également fondée. Par mémoire enregistré le 1er juillet 2022, M. D..., représenté par Me Vray, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête du préfet de la Savoie ; 2°) à titre incident, d'annuler le jugement du 4 juin 2021 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mai 2021 lui faisant obligation de quitter le territoire français ; 3°) d'annuler cette décision du 31 mai 2021 portant obligation de quitter le territoire français, ainsi que les décisions subséquentes ; 4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé que les décisions préfectorales méconnaissaient les dispositions des 1°, 4° et 8° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - l'interdiction de retour sur le territoire français constitue une mesure disproportionnée et n'a pas été précédée de l'examen des circonstances humanitaires particulières ; - l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ; - cette décision n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ; - elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 août 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990 ; - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le règlement (UE) n°2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontière Schengen) ; - le règlement (UE) 2018/1806 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ; Considérant ce qui suit : 1. M. C..., ressortissant albanais, né le 31 juillet 1989, a déclaré être entré en France au cours de l'année 2012. Le 31 mai 2021, il a fait l'objet d'une interpellation par les services de police, à l'issue de laquelle, le préfet de Savoie, le même jour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, lui a interdit de revenir sur ce territoire pendant une durée d'un an et a fixé le pays de renvoi. Le préfet de la Savoie relève appel du jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon du 4 juin 2021 en tant que, dans son article 2, il a annulé ses décisions du 31 mai 2021 privant M. C... d'un délai de départ volontaire et lui interdisant de revenir sur le territoire français pendant une durée d'une année. A titre incident, M. C... relève appel de ce même jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mai 2021 lui faisant obligation de quitter le territoire français. 2. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". L'article L. 612-3 du même code dispose que : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; 2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) ; 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, (...) qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) ". 3. Aux termes de l'article L. 612-4 du même code : " L'étranger en provenance directe du territoire d'un des États parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 peut se voir appliquer les 1° et 2° de l'article L. 612-3 lorsqu'il ne peut justifier être entré ou s'être maintenu sur le territoire métropolitain en se conformant aux stipulations des paragraphes 1 et 2 de l'article 19, du paragraphe 1 de l'article 20 et des paragraphes 1 et 2 de l'article 21 de cette même convention ". 4. L'article 5 du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 dispose que : " 1. Les frontières extérieures ne peuvent être franchies qu'aux points de passage frontaliers et durant les heures d'ouverture fixées. Les heures d'ouverture sont indiquées clairement aux points de passage frontaliers qui ne sont pas ouverts 24 heures sur 24. / Les États membres notifient la liste de leurs points de passage frontaliers à la Commission conformément à l'article 39 (...) ". Aux termes de l'article 14 du même règlement : " 1. L'entrée sur le territoire des États membres est refusée au ressortissant de pays tiers qui ne remplit pas l'ensemble des conditions d'entrée énoncées à l'article 6, paragraphe 1, et qui n'appartient pas à l'une des catégories de personnes visées à l'article 6, paragraphe 5. Cette disposition est sans préjudice de l'application des dispositions particulières relatives au droit d'asile et à la protection internationale ou à la délivrance de visas de long séjour. 2. L'entrée ne peut être refusée qu'au moyen d'une décision motivée indiquant les raisons précises du refus. La décision est prise par une autorité compétente habilitée à ce titre par le droit national. Elle prend effet immédiatement (...) ". Aux termes de l'article 22 de la Convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985 : " 1.Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties Contractantes sont tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque Partie Contractante, aux autorités compétentes de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie Contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie Contractante sur lequel ils pénètrent (...) ". Aux termes de l'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile repris en substance à l'article R. 621-2 du même code : " Sous réserve des dispositions de l'article R. 621-4, l'étranger souscrit la déclaration d'entrée sur le territoire français mentionnée à l'article L. 621-3 auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale. A cette occasion, il lui est remis un récépissé qui peut être délivré par apposition d'une mention sur le document de voyage (...) ". L'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, repris en substance par l'article L. 311-1 du même code dispose que : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Sous réserve des conventions internationales, du justificatif d'hébergement prévu à l'article L. 211-3, s'il est requis, et des autres documents prévus par décret en Conseil d'Etat relatifs, d'une part, à l'objet et aux conditions de son séjour et, d'autre part, s'il y a lieu, à ses moyens d'existence, à la prise en charge par un opérateur d'assurance agréé des dépenses médicales et hospitalières, y compris d'aide sociale, résultant de soins qu'il pourrait engager en France, ainsi qu'aux garanties de son rapatriement ; 3° Des documents nécessaires à l'exercice d'une activité professionnelle s'il se propose d'en exercer une ". 5. Il ressort de la décision en litige que, pour refuser à M. C... l'octroi d'un délai de départ volontaire, le préfet s'est fondé sur les circonstances que l'intéressé qui ne justifie pas d'une entrée régulière en France n'a pas sollicité de titre de séjour, qu'il a explicitement déclaré ne pas vouloir se conformer à la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet et qu'il ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes. Il ressort cependant des pièces du dossier que l'intéressé a présenté un passeport valide, délivré le 28 juillet 2011, lui permettant de justifier d'une entrée régulière en France au regard du 1° de l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Egalement, s'il ressort du procès-verbal d'interpellation établi par les services de police, le 31 mai 2021 que M. C... a effectivement déclaré ne pas vouloir retourner en Albanie, une telle déclaration ne peut être comprise comme exprimant la volonté explicite de l'intéressé de se soustraire à toute future mesure d'éloignement dont il ferait l'objet. Enfin, contrairement à ce que soutient le préfet, l'intéressé qui justifiait d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale, détenait effectivement un passeport, en cours de validité, qu'il a proposé aux services de police de récupérer chez son cousin, ce dès avant la prise de la mesure d'éloignement du 31 mai, et qu'il a remis auxdits services le 1er juin. Par conséquent, c'est à tort que le préfet de la Savoie s'est appuyé sur ces motifs pour priver l'intéressé d'un délai de départ volontaire. 6. Toutefois, il résulte des dispositions susvisées que la seule détention d'un passeport biométrique n'est pas suffisante pour se prévaloir d'une entrée régulière en France et M. C... ne justifie pas d'une assurance prenant en charge les dépenses médicales et hospitalières, y compris d'aide sociale ainsi que de garanties relatives à son rapatriement. 7. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... remplissait les conditions posées par les dispositions du 2° de l'article L.211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile repris en substance à l'article L. 311-1 du même code, lesquelles constituent des conditions de la régularité de l'entrée en France. En outre, il résulte de l'article 22 de la Convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985 et de l'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile repris en substance à l'article R. 621-2 du même code une obligation pour les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties Contractantes de se déclarer aux autorités compétentes de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent, obligation à laquelle M. C... ne justifie pas s'être conformé. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet de la Savoie a pris sa décision le privant d'un délai de départ volontaire en s'appuyant sur la considération selon laquelle il est entré irrégulièrement en France. 8. Il résulte de l'instruction que les motifs tenant, d'une part, au fait que la déclaration selon laquelle l'intéressé ne souhaite pas rentrer dans son pays d'origine caractériserait un risque de soustraction à la décision d'éloignement prise à son encontre et d'autre part qu'il ne présenterait pas de garanties de représentation suffisantes sont erronés. Néanmoins, il résulte de l'instruction que le préfet de la Savoie aurait pris la même décision en se fondant sur les seules dispositions des 1° et 2° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sur ces seuls motifs non entachés d'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le préfet de la Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler la décision refusant à M. C... l'octroi d'un délai de départ volontaire, le premier juge s'est fondé sur le motif tiré de ce qu'il n'existait pas un risque de soustraction à la mesure d'éloignement dont il faisait l'objet. 9. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. C... à l'encontre de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et de la décision subséquente lui faisant interdiction de revenir sur le territoire pour une durée d'un an. 10. En premier lieu, les décisions contestées ont été signées par M. A... B..., responsable, à la préfecture de la Savoie, de la direction de la citoyenneté et de la légalité, qui bénéficiait, par arrêté du 14 octobre 2020, publié le même jour au recueil des actes administratifs de cette préfecture, d'une délégation pour ce faire. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions en litige manque en fait. 11. En deuxième lieu, les décisions refusant à M. C... un délai de départ volontaire et lui faisant interdiction de revenir sur le territoire national pendant une durée d'un an comportent les considérations de fait et de droit qui en constituent les fondements. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que ces décisions seraient insuffisamment motivées au regard des exigences de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 12. En troisième lieu, il ne ressort ni des motifs des décisions en litige, ni des autres pièces du dossier que le préfet de la Savoie se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation de M. C... avant de refuser de lui accorder un délai de départ volontaire et de lui faire interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Par suite, les moyens tirés du défaut d'un tel examen doivent être écartés. 13. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes des dispositions de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ". 14. Il ressort des pièces du dossier que M. C... se maintient en situation irrégulière depuis son entrée en France en 2012. S'il se prévaut de ce qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche ainsi que de la présence en France de plusieurs membres de sa famille, il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans enfant à charge et que ses parents ainsi que ses deux sœurs résident en Albanie où il a vécu jusqu'à l'âge de 23 ans. Enfin, alors qu'il résulte des dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'il appartient au préfet qui, comme c'est le cas en l'espèce, prend une décision portant obligation de quitter le territoire français ne comportant aucun délai de départ volontaire, d'assortir cette décision, sauf dans le cas où des circonstances humanitaires y feraient obstacle, d'une interdiction de retour sur le territoire français, les circonstances selon lesquelles M. C... n'aurait précédemment fait l'objet d'aucune mesure d'éloignement et ne représenterait aucune menace à l'ordre public, ne sauraient faire regarder le préfet de la Savoie comme ayant entaché de disproportion et d'erreur d'appréciation la décision par laquelle il a fixé à un an la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français attaquée, quand bien même cette mesure interdirait au requérant de retourner dans un autre pays de l'espace Schengen. 15. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 31 mai 2021 privant M. C... d'un délai de départ volontaire et lui interdisant de revenir sur le territoire français pendant une durée d'une année. Sur l'appel incident de M. C... : 16. M. C... reprend en appel les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée, qu'elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation et qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, auxquels le premier juge a répondu par une motivation qu'il y a lieu, pour la cour d'adopter. Sur les frais liés au litige : 17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse au conseil de M. C... la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : L'article 2 du jugement n°2104125 du 4 juin 2021 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon est annulé. Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Lyon aux fins d'annulation des décisions du préfet de la Savoie le privant d'un délai de départ volontaire et lui interdisant de revenir sur le territoire français pendant une durée d'une année, ensemble ses conclusions devant la cour, sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Savoie et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Chambéry. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Bourrachot, président de chambre, Mme Dèche, présidente assesseure, Mme Le Frapper, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. La rapporteure, P. Dèche Le président, F. Bourrachot La greffière, A.C. Ponnelle La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY02037 kc
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 12 mai 2021 par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais liés au litige. Par un jugement n° 2103562 du 19 mai 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 26 août 2021, M. B..., représenté par Me Morel, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler les décisions du 12 mai 2021 du préfet du Puy-de-Dôme ; 3°) d'enjoindre à l'autorité préfectorale de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de statuer sur son droit au séjour dans un délai d'un mois à compter de la même date et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de sept jours ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la mesure d'éloignement, le refus de délai de départ volontaire et l'interdiction de retour sur le territoire français méconnaissent l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le principe constitutionnel et général de respect des droits de la défense et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'elles font obstacle à ce qu'il bénéficie de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité à laquelle il est convoqué et le cas échéant à l'audience correctionnelle ; - l'illégalité de la mesure d'éloignement entraîne l'illégalité de la décision le privant de délai de départ volontaire ; - il bénéficiait en outre d'un hébergement stable depuis avril 2019 et était en possession de documents d'identité en cours de validité ; - l'illégalité de la mesure d'éloignement entraîne l'illégalité de l'interdiction de retour sur le territoire français ; - elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation. La requête a été communiquée au préfet du Puy-de-Dôme, qui n'a pas produit de mémoire en défense. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 août 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code de procédure pénale ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ; - le code de justice administrative ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Le Frapper, première conseillère ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant de Géorgie né le 5 août 1969, est entré régulièrement en France le 6 avril 2019. Sa demande de protection internationale a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 27 mai 2020. A l'issue d'une garde à vue pour des faits de vol à l'étalage, le préfet du Puy-de-Dôme, par des décisions du 12 mai 2021, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée d'un an. M. B... relève appel du jugement du 19 mai 2021 par lequel un magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions. 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ". 3. Il ressort des pièces médicales produites par le requérant ainsi que de l'avis émis le 18 mai 2021 par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), au cours de la rétention de l'intéressé, que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité. M. B... ne conteste toutefois pas sérieusement la disponibilité en Géorgie, où il en a déjà bénéficié, des suivis et traitements qui restent requis par son état de santé, et n'apporte aucun élément de nature à remettre utilement en cause l'avis du médecin de l'OFII, postérieur à la décision attaquée mais néanmoins pertinent en l'absence d'évolution de la situation médicale évaluée. Si l'appelant produit en revanche quelques éléments se rapportant au coût des traitements en Géorgie, il ne justifie nullement qu'il ne pourrait effectivement en bénéficier en se bornant à faire valoir qu' " à l'évidence, [il] ne disposera pas des ressources nécessaires pour financer cette prise en charge médicale au long cours " et à mentionner le montant du revenu moyen en Géorgie sans donner aucune précision notamment sur son patrimoine et sur les ressources dont il dispose ou dont il pourrait disposer au regard de ses propres qualifications professionnelles. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, par suite, être écarté. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...) / 3. Tout accusé a droit notamment à : / (...) b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; / c) se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix (...) ". 5. Contrairement à ce que soutient M. B..., la mesure d'éloignement n'avait ni pour objet, ni pour effet, de l'empêcher de comparaître personnellement soit à l'audience de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité du 22 novembre 2021 soit à l'audience ultérieurement prévue, en cas d'échec de cette procédure, devant le tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand le 17 décembre 2021. En effet, si l'administration consulaire dispose en principe d'un large pouvoir discrétionnaire pour se prononcer sur les demandes de visa de court séjour dont elle est saisie, elle est toutefois tenue de réserver à ces demandes une suite favorable lorsque l'étranger doit se voir reconnaître le bénéfice des garanties résultant des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, relatives au procès équitable et au recours effectif. Tel est le cas, en particulier, lorsque l'étranger doit comparaître personnellement, à la demande de la juridiction, à l'audience au cours de laquelle un tribunal français doit se prononcer sur le fond d'un litige auquel l'intéressé est partie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du principe du respect des droits de la défense doit, en tout état de cause, être écarté. La mesure d'éloignement n'est, pour les mêmes motifs, pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. 6. En troisième lieu, en l'absence d'illégalité de la mesure d'éloignement, M. B... n'est pas fondé à demander, par voie de conséquence, l'annulation de la décision le privant de délai de départ volontaire. 7. En quatrième lieu, pour les motifs exposés au point 5, cette décision ne méconnaît, en tout état de cause, ni l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni le principe du respect des droits de la défense et ne procède d'aucune erreur manifeste d'appréciation. 8. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Selon l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; / (...) 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5 ". 9. Il ressort, d'une part, du procès-verbal d'audition de M. B... qu'il a déclaré qu'il s'opposerait à la décision d'éloignement, y compris après exercice des voies de recours. D'autre part, si l'appelant a remis un passeport en cours de validité, il ne justifiait pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale, au sens des dispositions précitées, dès lors qu'il ne disposait que d'un hébergement d'urgence dans un hôtel, quand bien même cet hébergement aurait duré depuis quelques mois. Par suite, en refusant à M. B... un délai de départ volontaire, le préfet du Puy-de-Dôme n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées. 10. En sixième lieu, en l'absence d'illégalité de la mesure d'éloignement, M. B... n'est pas fondé à demander, par voie de conséquence, l'annulation de la décision fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit. 11. En dernier lieu, toutefois, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour ". Aux termes de l'article L. 311-2 du même code : " Un étranger ne satisfait pas aux conditions d'entrée sur le territoire français lorsqu'il se trouve dans les situations suivantes : / (...) 2° Il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission sur le territoire français introduit dans le système d'information Schengen, conformément au règlement (UE) n° 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen et modifiant et abrogeant le règlement (CE) n° 1987/2006 ; / 3° Il fait l'objet (...) d'une interdiction de retour sur le territoire français (...) ". 12. Il résulte de ces dispositions que l'interdiction de retour prononcée à l'encontre de M. B... faisait obstacle à ce que les autorités consulaires puissent lui délivrer un visa de court séjour afin d'assister à l'audience du 22 novembre 2021 de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, au cours de laquelle le prévenu, qui n'encourt plus qu'une peine d'emprisonnement réduite de moitié, doit comparaître personnellement et être assisté mais ne peut valablement se faire représenter. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que, dans les circonstances de l'espèce, l'interdiction de retour sur le territoire français prise à son encontre est entachée d'une erreur d'appréciation. 13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens dirigés contre cette dernière décision, que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français. 14. Le présent arrêt, eu égard à ses motifs, n'implique pas nécessairement que l'autorité préfectorale délivre à M. B... un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour, ni qu'elle procède au réexamen de son droit au séjour. Les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant doivent en conséquence être rejetées. 15. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par le conseil de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : La décision du préfet du Puy-de-Dôme du 12 mai 2021 faisant interdiction de retour sur le territoire français à M. B... est annulée. Article 2 : Le jugement n° 2103562 du 19 mai 2021 du tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Bourrachot, président de chambre, Mme Dèche, présidente assesseure, Mme Le Frapper, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022. La rapporteure, M. Le Frapper Le président, F. Bourrachot La greffière, A.-C. Ponnelle La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY02875 kc
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de l'arrêté du 26 novembre 2020 par lequel le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 90 jours et a fixé le pays de destination. Par jugement n° 2009157 du 3 mars 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 20 juin 2021, M. B..., représenté par Me Petit, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 3 mars 2021 et l'arrêté du 26 novembre 2020 pris à son encontre ; 2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour jusqu'au réexamen de sa situation ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 300 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ; - elle est entachée d'un vice de procédure en raison de l'absence de procédure contradictoire et ce en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ; - elle méconnaît le principe général du droit d'être entendu garanti par la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; - la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; - elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations. La demande d'aide juridictionnelle déposée par M. B... a été rejetée par décision du 30 juin 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère, - et les observations de Me Simonin, substituant Me Petit, pour M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ressortissant angolais né le 2 janvier 1954 déclarant être entré irrégulièrement en France le 22 novembre 2018, relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 novembre 2020 par lequel le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 90 jours et a fixé le pays de destination. 2. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français opposée à M. B... comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle n'avait pas à mentionner, contrairement à ce que soutient le requérant, les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'à la date de l'édiction de cette décision, l'intéressé n'avait encore déposé aucune demande de titre de séjour. Par suite, cette décision est suffisamment motivée quand bien même elle ne fait pas état de la convocation en préfecture de M. B... prévue pour le 1er mars 2021 afin d'y déposer une demande de titre de séjour. 3. En deuxième lieu, il ressort de la décision en litige que le préfet du Rhône a procédé à un examen sérieux et complet de sa situation en rappelant notamment les éléments afférents à sa situation administrative ainsi que ses attaches personnelles et familiales. Il s'ensuit que le moyen tiré du défaut d'examen de la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté. 4. En troisième lieu, si M. B... soutient que la décision en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, il ressort des dispositions des articles L. 512-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative fait obligation à un étranger de quitter le territoire français. Dès lors, l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ne saurait être utilement invoqué à l'encontre de la décision litigieuse. 5. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union. (...) ". 6. Ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans ses arrêts C-166/13 et C-249/13 des 5 novembre et 11 décembre 2014, le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Il n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français ou sur la décision le plaçant en rétention dans l'attente de l'exécution de la mesure d'éloignement, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement. 7. Le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français non prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. 8. Une violation des droits de la défense, en particulier du droit d'être entendu, n'entraîne l'annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l'absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent. 9. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait été, à un moment de la procédure, informé de ce qu'il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ou mis à même de présenter des observations, la procédure de demande d'asile n'ayant pas une telle finalité. Dans ces conditions, le préfet du Rhône a entaché sa décision d'irrégularité. 10. Toutefois, par l'unique certificat médical qu'il produit, daté du 19 novembre 2020, il n'établit pas plus en appel qu'en première instance que son état de santé nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni qu'il ne pourrait bénéficier effectivement en Angola d'un traitement et suivi médical approprié à son état de santé. Par suite, l'irrégularité commise par le préfet du Rhône, en privant M. B... de faire valoir son état de santé, ne l'a pas privé d'une garantie dans les circonstances de l'espèce et n'a pas été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision attaquée. 11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". 12. M. B... est célibataire et sans enfant sur le territoire français sur lequel il est entré en 2018 à l'âge de 64 ans. Il conserve dans son pays d'origine ses enfants, ainsi que l'a relevé le préfet dans sa décision sans être contesté, et ainsi des attaches privées et familiales qu'il n'a pas en France. Il ne justifie d'aucune intégration sur le territoire français. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit précédemment, il n'est pas établi que l'intéressé ne pourrait effectivement bénéficier en Angola d'un traitement adapté à son état de santé. Par suite, en édictant la mesure d'éloignement en litige, le préfet du Rhône n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas méconnu de ce fait, les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle n'est pas davantage, pour les mêmes motifs, entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle. 13. En cinquième lieu, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, M. B... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français pour contester la décision fixant le pays de destination. 14. En sixième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " Si M. B... fait valoir appartenir à la communauté de l'Eglise des adventistes du septième jour - lumière du monde qui est considérée comme une secte en Angola et encourir à ce titre des risques pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine sans pouvoir obtenir une protection de cet Etat, l'intéressé ne produit aucun élément de nature à corroborer ses allégations ni tendant à démontrer qu'il serait effectivement exposé à des risques pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le préfet du Rhône, en désignant l'Angola comme pays de destination, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 15. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Rhône. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Bourrachot, président de chambre, Mme Dèche, présidente assesseure, Mme Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 octobre 2022. La rapporteure, V. Rémy-NérisLe président, F. Bourrachot La greffière, A-C. Ponnelle La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY02061 ar
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 7 mai 2019 par laquelle le président du conseil départemental de l'Isère lui a retiré son agrément d'assistante familiale, ensemble la décision tacite rejetant son recours gracieux reçu le 6 juin 2019. Par un jugement n° 1906616 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 23 juillet 2021, Mme B... A... épouse C..., représentée par Me Bendjouya, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1906616 du 25 mai 2021 du tribunal administratif de Grenoble ; 2°) d'annuler la décision du 7 mai 2019 par laquelle le président du conseil départemental de l'Isère lui a retiré son agrément d'assistante familiale et la décision tacite rejetant son recours gracieux reçu le 6 juin 2019 ; 3°) de mettre à la charge du département de l'Isère la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision du 7 mai 2019 n'est pas motivée ; - les faits d'atteinte sexuelle ne sont pas établis ; - le second motif de retrait invoqué par le département repose sur des faits qui ne sont pas davantage matériellement établis ; - la décision est entachée d'erreur d'appréciation. Par un mémoire en défense enregistré le 24 novembre 2021, le département de l'Isère, représenté par laSELARL LLC et associés, agissant par Me Bracq, conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le département soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'action sociale et des familles ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Stillmunkes, président-assesseur, - les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique, - les observations de Me Bendjouya, représentant Mme C..., - et les observations de Me Berlottier-Merle, représentant le département de l'Isère. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... était assistante familiale au sens de l'article L. 421-2 du code de l'action sociale et des familles. Par les décisions contestées, le président du conseil départemental de l'Isère lui a retiré son agrément pour des motifs tirés de suspicions d'atteintes sexuelles sur deux enfants accueillis et de difficultés répétées à assurer ses fonctions. Le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le recours que l'intéressée a formé contre cette décision de retrait et contre la décision tacite rejetant son recours gracieux. Sur la légalité des décisions : 2. Aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. / Un référentiel approuvé par décret en Conseil d'Etat fixe les critères d'agrément. / (...) / L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne (...) ". Aux termes de l'article R. 421-3 du même code : " Pour obtenir l'agrément d'assistant maternel ou d'assistant familial, le candidat doit : / 1° Présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif (...) ". L'annexe 4-9 du même code établit le référentiel fixant les critères de l'agrément des assistants familiaux. Enfin, aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article L. 421-6 du même code : " Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait (...) / Toute décision de retrait de l'agrément, de suspension de l'agrément ou de modification de son contenu doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés ". 3. En premier lieu, la décision contestée indique les textes dont elle fait application et précise les motifs de fait sur lesquels elle se fonde, en termes suffisants pour permettre à la requérante de les discuter utilement. Le moyen tiré du défaut de motivation doit en conséquence être écarté. 4. En deuxième lieu, il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil chez l'assistant familial garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément de l'assistant familial si ces conditions ne sont plus remplies. A cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant, notamment de suspicions d'agression sexuelle de la part du bénéficiaire de l'agrément ou de son entourage, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux et de déterminer si ces éléments sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que l'enfant est exposé à de tels comportements ou risque de l'être. 5. En l'espèce, il est constant que les services départementaux ont été alertés de suspicions d'atteinte sexuelle commises par un membre de l'entourage de la requérante sur deux enfants accueillis. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les faits en cause ont été déduits de déclarations des deux enfants, sur lesquelles l'un d'eux est revenu en évoquant des mensonges proférés pour pouvoir revenir dans leurs familles, et que les enquêtes réalisées n'ont pas permis de corroborer les faits avec un niveau suffisant de certitude. La requérante est dès lors fondée à soutenir que la matérialité de ces faits d'atteinte sexuelle n'est pas suffisamment établie. 6. En troisième lieu, toutefois, la décision se fonde également sur ce qu'une enquête administrative a permis de constater des carences affectant la pratique professionnelle de la requérante. Elle souligne en effet une difficulté à désamorcer les conflits avec les enfants, voire une propension à les provoquer, ainsi que la pratique d'une différence de traitement entre chaque enfant, avec une tendance à les rabaisser et une difficulté à percevoir leur souffrance. Pour les motifs retenus par le tribunal au point 6 du jugement, et que la cour fait siens, le moyen tiré du défaut de matérialité des faits portant sur la pratique professionnelle de la requérante doit être écarté, ces faits apparaissant par ailleurs de nature à établir que l'agrément ne peut être maintenu. 7. Il résulte de l'instruction que ce second motif, tiré de la pratique professionnelle, apparait de nature à justifier la décision du 7 mai 2019 et que le président du conseil départemental aurait pris les mêmes décisions s'il ne s'était fondé que sur lui. 8. En quatrième lieu, eu égard à la nature des faits précités affectant la pratique professionnelle de la requérante, qui pouvaient être retenus à son encontre, la décision n'est pas entachée d'erreur d'appréciation. 9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Sur les frais de l'instance : 10. La requérante étant partie perdante, ses conclusions fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. 11. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par le département sur le fondement des mêmes dispositions. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par le département de l'Isère sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... épouse C... et au département de l'Isère. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Pourny, président de chambre, M. Stillmunkes, président assesseur, Mme Bentéjac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 novembre 2022. Le rapporteur, H. Stillmunkes Le président, F. Pourny La greffière, F. Abdillah La République mande et ordonne au préfet de l'Isère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY02522
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Par un arrêt n° 21LY00044 du 15 juillet 2021, la cour a, dans son article 2, enjoint au ministre de la justice, garde des sceaux, de prendre en charge les soins et frais médicaux de Mme B... directement entraînés par l'accident du 17 octobre 2017 et de maintenir le plein traitement de celle-ci au-delà du 30 décembre 2017, dans un délai d'un mois à compter de la notification et a décidé de prononcer une astreinte provisoire à son encontre, dont le taux journalier a été fixé à 100 euros. Le garde des sceaux, ministre de la justice, a accusé réception, le 15 juillet 2021, de l'arrêt lui délivrant une injonction sous astreinte. Par un mémoire, enregistré le 20 juin 2022, Mme B..., représentée par Me Ricci, demande à la cour d'ordonner l'exécution totale de l'arrêt du 14 novembre 2019 assortie d'une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de liquider provisoirement l'astreinte à hauteur de la somme de 27 800 euros à parfaire à hauteur de 100 euros par jour de retard jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'elle a perçu un traitement de 7 176,80 euros en août 2021 dont seul le montant de 1 876,63 euros correspond à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 14 novembre 2019 au lieu de la somme totale de 29 032,56 euros qui lui est due. Par courrier du 22 juin 2022, le greffe de la cour a invité le garde des sceaux, ministre de la justice à produire sous quinzaine les mesures prises en exécution de l'injonction. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère, - et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par un jugement n° 1804377 du 14 novembre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a, dans un article 2, enjoint au ministre de la justice de placer Mme B... en position de congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 18 octobre 2017, de prendre en charge les soins et frais médicaux directement entraînés par l'accident du 17 octobre 2017 et de maintenir le plein traitement de Mme B... au-delà du 30 décembre 2017, et ce dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans un article 3, condamné l'Etat à payer à Mme B... une indemnité de 3 000 euros en réparation du préjudice moral causé par le harcèlement dont elle a été victime. Par une ordonnance n°20LY00305 du 26 août 2020, la cour a donné acte du désistement de la requête du garde des sceaux, ministre de la justice. Par un arrêt n° 21LY00044 du 15 juillet 2021, la cour a, dans un article 2, enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice, de prendre en charge les soins et frais médicaux directement entraînés par l'accident du 17 octobre 2017 et de maintenir le plein traitement de Mme B... au-delà du 30 décembre 2017, dans un délai d'un mois à compter de la notification sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Sur la liquidation de l'astreinte : 2. Aux termes de l'article L. 911-6 du code de justice administrative : " L'astreinte est provisoire ou définitive. Elle doit être considérée comme provisoire à moins que la juridiction n'ait précisé son caractère définitif. Elle est indépendante des dommages et intérêts ". Aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée ". Aux termes de l'article L. 911-8 du même code : " La juridiction peut décider qu'une part de l'astreinte ne sera pas versée au requérant. / Cette part est affectée au budget de l'Etat ". 3. L'arrêt du 15 juillet 2021 de la cour ayant été notifié au garde des sceaux, ministre de la justice, le même jour, ce dernier avait jusqu'au 15 août 2021 pour exécuter l'article 2 de cet arrêt. En dépit de la mesure d'instruction qui lui a été adressée, ledit ministre n'a pas communiqué au greffe de la cour copie des actes justifiant des décisions prises pour exécuter l'injonction. Mme B... fait valoir, à ce titre, sans être contestée, qu'elle n'a perçu qu'une somme de 7 176,80 euros en août 2021 dont seul le montant de 1 876,63 euros correspond à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 14 novembre 2019 au lieu de la somme totale de 29 032,56 euros qui lui est due. Il y a donc lieu de considérer que le ministre n'a pas entièrement procédé à l'exécution de l'injonction prononcée. Il y a lieu, dès lors, de procéder au bénéfice de Mme B... à la liquidation provisoire de l'astreinte pour la période du 15 août 2021 inclus au 27 octobre 2022 inclus, soit 456 jours. Toutefois, en application des dispositions précitées de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, et compte tenu de l'exécution partielle de l'article 2 de l'arrêt susvisé, il y a lieu de modérer à 25 euros le tarif journalier de l'astreinte initialement prononcée et de fixer à 11 400 euros le montant de la somme due par l'État à Mme B.... 4. Il y a lieu, en revanche, de maintenir le taux de l'astreinte journalière à 100 euros s'agissant des mesures d'injonction qui n'ont pas encore été exécutées. Sur les frais liés au litige : 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais liés au litige exposés par Mme B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à Mme B... une somme de 11 400 euros. Article 2 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par Mme B... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Bourrachot, président de chambre, Mme Dèche, présidente assesseure, Mme Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 octobre 2022. La rapporteure, V. Rémy-Néris Le président, F. Bourrachot La greffière, A-C. Ponnelle La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY00044 lc
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires de Dijon du 5 avril 2018 confirmant la décision du 13 février 2018 par laquelle le chef d'établissement du centre pénitentiaire de Châteauroux a abrogé son permis de visite au bénéfice de son conjoint, et d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un permis de visite. Par un jugement n° 1800981 du 18 juin 2020, le tribunal a annulé la décision du 13 février 2018, ensemble celle du 5 avril 2018, et a rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 18 août 2020, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par Mme C... devant le tribunal. Il soutient que : - le jugement, qui n'explicite pas en quoi la décision de suspension du permis de visite du 13 février 2018 serait entachée d'erreur de droit, est insuffisamment motivé ; - en se fondant sur l'erreur de droit affectant la décision du directeur interrégional pour retenir une illégalité de la décision du directeur du centre de détention, le tribunal a entaché le jugement d'une contradiction de motifs ; - si la décision du 13 février 2018 est relativement elliptique, elle doit être regardée comme fondée, implicitement mais nécessairement, sur la nécessité de prévenir toutes nouvelles infractions et de maintenir le bon ordre et la sécurité de l'établissement, car l'interdiction de contact avec la victime a pour objet de prévenir toute nouvelle violence ; c'est ainsi à tort que les premiers juges ont retenu une erreur de droit sans tenir compte de ce motif implicite ; - si la cour estimait que la décision du 13 février 2018 n'était pas motivée par la prévention d'une infraction et par le maintien du bon ordre, il demande de substituer ce motif à celui fondant initialement les décisions, dès lors que les faits de violences commis par M. B... envers sa compagne et envers les dépositaires de l'autorité publique intervenus pour les faire cesser démontrent que la présence de Mme C... pouvait constituer un risque pour elle-même ainsi que pour le maintien du bon ordre et la sécurité de l'établissement ; cette substitution ne prive Mme C... d'aucune garantie procédurale liée au motif substitué ; - les liens familiaux peuvent être maintenus par correspondance ou par téléphone, et les permis de visite des enfants n'ont pas été supprimés ; - il s'en rapporte à ses écritures de première instance en ce qui concerne les moyens invoqués par Mme C.... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code pénal ; - le code de procédure pénale ; - la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Dans le cadre d'une procédure de comparution immédiate, M. B... a été condamné à une peine d'emprisonnement de trois ans, dont un an de sursis avec deux ans de mise à l'épreuve, pour des faits d'outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique et de violence suivie d'une incapacité n'excédant pas huit jours commis en récidive sur sa compagne, Mme C..., par un jugement du tribunal correctionnel de Châteauroux du 9 janvier 2018. M. B... a aussitôt été incarcéré au centre pénitentiaire de Châteauroux, et Mme C... a été autorisée à lui rendre visite par une décision du 30 janvier 2018. Toutefois, par une décision du 13 février 2018 le chef d'établissement du centre pénitentiaire a abrogé ce permis de visite à compter du même jour, au motif que le jugement du 9 janvier 2018 avait prononcé une interdiction de contact d'une durée de deux ans avec la victime. Le recours hiérarchique présenté par Mme C... a été rejeté par une décision du directeur interrégional des services pénitentiaires de Dijon du 5 avril 2018, en confirmant ce motif et en précisant que la juge de l'application des peines n'entendait pas lever l'interdiction de contact. Mme C... a attaqué cette dernière décision, et par un jugement du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Limoges a requalifié ses conclusions comme dirigées contre la décision du 13 février 2018, ensemble celle du 5 avril 2018, et les a annulées pour erreur de droit. Le garde des sceaux, ministre de la justice, relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement : 2. Le jugement annule la décision du 13 février 2018, ensemble celle du 5 avril 2018, pour erreur de droit au regard des dispositions alors applicables de l'article 132-43 du code pénal, dont il résulte que les obligations imposées dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve, au nombre desquelles figure l'interdiction d'entrer en relation avec certaines personnes, cessent de s'appliquer durant l'incarcération du condamné. Il précise que la circonstance que la juge de l'application des peines a indiqué ne pas avoir l'intention d'ordonner une mainlevée de l'interdiction de contact ne fait pas obstacle à ce que cette mesure cesse de produire effet pendant la durée de l'incarcération. Ainsi, l'erreur de droit entachant l'unique motif tiré de l'interdiction de contact prononcée par le jugement du tribunal correctionnel de Châteauroux du 9 janvier 2018 est explicitée, de sorte que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté. Sur le bien-fondé du jugement : 3. En premier lieu, ainsi qu'il est exposé au point précédent, les premiers juges ont annulé les deux décisions en retenant une erreur de droit entachant leur unique motif, de sorte que la contradiction de motifs invoquée, tirée de ce qu'ils se seraient fondés sur l'erreur de droit affectant la décision du directeur interrégional pour retenir une illégalité de la décision du directeur du centre de détention, ne peut qu'être écartée. 4. En deuxième lieu, la décision du 13 février 2018 est ainsi rédigée : " Votre permis est annulé à partir de ce jour du 13 février 2018, suite au jugement du tribunal du 9 janvier 2018. Lors de ce jugement, il a été prononcé une interdiction de contact avec la victime, en l'occurrence vous, pour une durée de deux ans. " Elle oppose seulement l'interdiction de contact prononcée par le jugement et ne peut être regardée comme comportant " implicitement mais nécessairement " un second motif tiré de la nécessité de prévenir toutes nouvelles infractions et de maintenir le bon ordre et la sécurité de l'établissement. Par suite, le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à reprocher aux premiers juges de ne pas avoir tenu compte d'un tel " motif implicite ". 5. En troisième lieu, l'erreur de droit retenue par le tribunal n'est pas contestée au regard des dispositions applicables à la date des décisions attaquées. Sur la demande de substitution de motif : 6. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué. 7. Le garde des sceaux, ministre de la justice, demande que soit substitué, au motif tiré de l'interdiction de contact prononcée par le jugement du tribunal correctionnel de Châteauroux du 9 janvier 2018, celui tiré de la prévention des infractions et du maintien du bon ordre et de la sécurité dans l'établissement. 8. Aux termes de l'article 35 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 : " Le droit des personnes détenues au maintien des relations avec les membres de leur famille s'exerce soit par les visites que ceux-ci leur rendent, soit, pour les condamnés et si leur situation pénale l'autorise, par les permissions de sortir des établissements pénitentiaires. (...) / L'autorité administrative ne peut refuser de délivrer un permis de visite aux membres de la famille d'un condamné, suspendre ou retirer ce permis que pour des motifs liés au maintien du bon ordre et de la sécurité ou à la prévention des infractions. / (...) ". L'article R. 57-8-10 du code de procédure pénale désigne le chef d'établissement comme l'autorité responsable de la délivrance, de la suspension ou du retrait d'un permis de visiter une personne condamnée. Aux termes de l'article R. 57-8-11 du même code : " Le chef d'établissement fait droit à tout permis de visite qui lui est présenté, sauf à surseoir si des circonstances exceptionnelles l'obligent à en référer à l'autorité qui a délivré le permis, ou si les personnes détenues sont matériellement empêchées, ou si, placées en cellule disciplinaire, elles ont épuisé leur droit à un parloir hebdomadaire. " L'article R. 57-8-12 du code de procédure pénale dispose : " Les visites se déroulent dans un parloir ne comportant pas de dispositif de séparation. Toutefois, le chef d'établissement peut décider que les visites auront lieu dans un parloir avec un tel dispositif : / 1° S'il existe des raisons sérieuses de redouter un incident ; (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 57-8-15 : " A l'exception des visites se déroulant dans les parloirs familiaux ou les unités de vie familiale, un surveillant est présent dans les locaux. (...) / Le surveillant peut mettre un terme à la visite pour des raisons tenant au maintien du bon ordre et de la sécurité ou à la prévention des infractions. / (...). " 9. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les décisions tendant à restreindre, supprimer ou retirer les permis de visite relèvent du pouvoir de police des chefs d'établissements pénitentiaires. Ces décisions affectant directement le maintien des liens des détenus avec leurs proches, elles sont susceptibles de porter atteinte à leur droit au respect de leur vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il appartient en conséquence à l'autorité compétente de prendre les mesures nécessaires, adaptées et proportionnées, pour assurer le maintien du bon ordre et de la sécurité de l'établissement pénitentiaire ou, le cas échéant, la prévention des infractions sans porter d'atteinte excessive au droit des détenus. 10. Si le motif d'incarcération de M. B... devait appeler l'attention de l'administration pénitentiaire sur la demande de permis de visite de Mme C..., la circonstance que M. B... avait été condamné pour violences sur sa compagne, même en récidive, ainsi que pour outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique, ne suffisait pas à établir un risque d'incident au parloir tel qu'il justifie l'abrogation du permis de visite accordé, lequel permettait également de faciliter le maintien des liens familiaux avec les deux jeunes enfants du couple, alors âgés de trois et six ans. Par suite, la demande de substitution de motif doit être rejetée. 11. Il résulte de ce qui précède que la requête du garde des sceaux, ministre de la justice, doit être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête du garde des sceaux, ministre de la justice, est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice, et à Mme D... C.... Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 novembre 2022. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20BX02675
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 25 février 2021 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement n° 2102028 du 23 septembre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 19 octobre 2021, M. B... A..., représenté par Me Kummer, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2102028 du 23 septembre 2021 du tribunal administratif de Grenoble ; 2°) d'annuler les décisions du 25 février 2021 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; 3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou subsidiairement de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation de séjour aux mêmes conditions de délai et d'astreinte ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Il soutient que : - le refus de séjour méconnait le 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; il méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; - l'obligation de quitter le territoire français méconnait le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 6, 5° de l'accord franco-algérien ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; - la fixation du pays de renvoi méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. Stillmunkes, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 25 février 2021, le préfet de l'Isère a refusé à M. A..., de nationalité algérienne, la délivrance d'un titre de séjour et a assorti ce refus d'une mesure d'éloignement. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande formée par l'intéressé contre ces décisions. Sur la légalité du refus de titre de séjour : 2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". 3. Tout d'abord, pour rejeter la demande de séjour formée par le requérant sur le fondement des stipulations précitées, le préfet s'est en particulier fondé sur un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) indiquant que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé algérien, l'intéressé peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine et peut voyager pour s'y rendre sans risque médical. Si le requérant fait valoir qu'il est atteint de plusieurs pathologies, les pièces qu'il produit n'établissent pas que celles-ci ne pourraient être prises en charge de façon adaptée en Algérie. Par ailleurs, la seule circonstance qu'un médecin généraliste a indiqué, le 22 janvier 2021, que les déplacements prolongés, en particulier en avion, lui apparaissaient contre-indiqués, ne suffit pas à établir que le requérant ne serait pas médicalement en mesure de se rendre sans risque dans son pays d'origine, qui demeure proche du territoire français et qui est en outre accessible par plusieurs modes de transport. 4. Ensuite, il est vrai que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. En l'espèce, le requérant ne conteste pas l'accessibilité des soins en Algérie à la généralité de la population, mais soutient que sa situation serait exceptionnelle. D'une part, alors que le requérant n'a indiqué dans sa demande, produite en première instance, aucune circonstance humanitaire exceptionnelle concernant le fondement tiré de l'état de santé, la circonstance que le préfet n'a pas analysé des circonstances particulières qui n'étaient pas invoquées devant lui, ne caractérise pas en l'espèce une erreur de droit. D'autre part, si le requérant, qui dispose d'une pension de retraite, fait valoir dans le cadre de la présente instance qu'il ne serait pas affilié à la sécurité sociale algérienne, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne pourrait obtenir son affiliation ni bénéficier le cas échéant de mesures d'aide sociale pour l'accès aux soins. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant ne pourrait, en raison de circonstances exceptionnelles, bénéficier en Algérie des soins qu'appelle son état de santé. 5. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu les stipulations précitées. Le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir de régularisation. 6. En second lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est né en janvier 1942 à Oued Cheham et qu'il est de nationalité algérienne. Il a épousé une compatriote en Algérie en 1963 et quatre de ses enfants demeurent en Algérie, seul le cinquième résidant en France. Le requérant est entré en France en 2015 sous couvert d'un visa court séjour et a formé une première demande de séjour, qui a été rejetée, ce refus étant assorti d'une mesure d'éloignement qui a été exécutée. Le requérant a demandé en 2016 un titre de séjour depuis l'Algérie mais a fait l'objet d'un nouveau refus. Il est revenu en France en décembre 2017, sous couvert d'un visa court séjour, à l'âge de 75 ans et ayant vécu l'essentiel de sa vie dans son pays d'origine. Il a formé en 2018 une nouvelle demande de séjour qui a de nouveau été rejetée, et il a fait l'objet d'une nouvelle mesure d'éloignement. La décision en litige a été prise sur une nouvelle demande formée en 2019. Ainsi qu'il vient d'être dit, si le requérant est atteint de plusieurs pathologies, elles peuvent être prises en charge en Algérie. Il est vrai que, si son épouse a pour sa part également fait l'objet d'un refus de séjour et d'une mesure d'éloignement, ces décisions ont été annulées par jugement du tribunal de Grenoble du 27 septembre 2021. Toutefois, cette annulation se fonde sur un vice de procédure et ne reconnait pas à son épouse le bénéfice d'un droit au séjour mais enjoint uniquement au préfet de réexaminer régulièrement la demande. Eu égard en l'espèce au caractère très récent de l'entrée du requérant et aux attaches privées et familiales ancrées dans la durée qu'il a constituées dans son pays d'origine, le préfet n'a pas, en lui refusant le séjour, porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au regard des buts que sa décision poursuivait. Les moyens tirés de la méconnaissance du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent ainsi être écartés. Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français : 8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-4, 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable, devenu l'article L. 611-3, 9° : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Le moyen doit être en l'espèce écarté compte tenu de ce qui a été dit précédemment sur l'état de santé du requérant, la possibilité pour lui d'être pris en charge médicalement dans son pays d'origine et la possibilité de s'y rendre. 9. En second lieu, en l'absence de tout nouvel argument, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien doivent être écartés pour les motifs qui ont été exposés précédemment. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant. Sur la légalité de la fixation du pays de renvoi : 10. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales se fonde sur l'argument tiré de l'état de santé du requérant. Eu égard à ce qui a été dit précédemment sur cet état de santé et en particulier sur la possibilité pour M. A... d'être pris en charge médicalement dans son pays d'origine et de s'y rendre sans risque médical, ce moyen doit être écarté. Le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation en retenant comme pays de renvoi le pays d'origine du requérant, où celui-ci pourra être soigné. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Pourny, président de chambre, M. Stillmunkes, président assesseur, Mme Bentéjac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 novembre 2022. Le rapporteur, H. Stillmunkes Le président, F. Pourny La greffière, F. Abdillah La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY03373
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... D... épouse C... a demandé au tribunal des pensions militaires de Saint-Denis d'annuler la décision du 22 juillet 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " périarthrite de l'épaule droite chez une droitière : limitation de l'abduction à 90 ° et de l'antépulsion à 30° ". La procédure a été transmise au tribunal administratif de La Réunion. Par un jugement n° 1901754 du 29 juin 2020, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision du 22 juillet 2016 en tant qu'elle impute l'infirmité à une maladie contractée en temps de paix sans recherche de son origine et fixe le taux d'invalidité à 10 %, a jugé que l'infirmité dont se prévaut Mme C... trouve son origine dans une maladie en lien direct avec l'accident dont elle a été victime le 14 octobre 2009 et justifie d'un taux d'invalidité de 15 %, et a rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 28 août 2020 et un mémoire enregistré le 5 novembre 2020, la ministre des armées demande à la cour de réformer ce jugement et de juger que l'infirmité " tendinopathie séquellaire du supra-épineux épaule droite " relève d'une maladie contractée en temps de paix, dont le taux d'invalidité de 10 % est inférieur au minimum indemnisable. Elle soutient que : - la décision de rejet porte sur une " périarthrite de l'épaule droite chez une droitière : limitation de l'abduction à 90° et de l'antépulsion à 30° ", le premier expert a conclu en 2016 à une " raideur moyenne non compensée par l'omoplate " de 20 % avec une majoration de 10 % pour la douleur, et l'expert judiciaire a retenu en 2018 une " tendinopathie post-traumatique du sus-épineux épaule droite " au taux de 15 % ; en s'abstenant de préciser l'intitulé de l'infirmité dans le dispositif, le tribunal a statué d'une manière imprécise et méconnu son office de juge de plein contentieux ; - le tribunal a retenu que l'infirmité trouve son origine dans une maladie et que le taux d'invalidité est de 15 %, en contradiction avec les dispositions de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre qui imposent un taux minimum de 30 % pour ouvrir droit à pension lorsque les infirmités résultent de maladies ; - la douleur à l'épaule droite ressentie le 14 octobre 2009 n'a pas donné lieu à un arrêt de travail, l'examen clinique du 23 novembre 2009 était normal, et aucun suivi ni aucune restriction particulière en lien avec une gêne de l'épaule droite n'ont été portés au dossier jusqu'au départ en retraite de Mme C... en 2013 ; le diagnostic de tendinopathie séquellaire du sus-épineux a été confirmé par les deux expertises, et l'invalidité correspondante a été justement évaluée à 10 % par l'administration, ce qui est inférieur au minimum de 30 %, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de rechercher l'origine de l'infirmité ; le tribunal a opéré une confusion entre les notions de maladie et de blessure, ce qui l'a conduit à tort à accorder un droit à pension pour une maladie avec un taux d'invalidité de 15 % ; - les éléments du dossier médico-administratif ne permettent pas de retenir une blessure comme le revendique Mme C... ; - elle s'en remet à la sagesse de la cour sur la demande subsidiaire de Mme C... tendant à l'organisation d'une nouvelle expertise. Par un mémoire en défense enregistré le 19 octobre 2020, Mme C..., représentée par la SELARL Ker Avocats, conclut au rejet de la requête et demande à la cour, à titre principal de réformer le jugement en tant qu'il a retenu que l'infirmité trouve son origine dans une maladie et de juger que l'infirmité résulte de blessures et ouvre droit à une pension au taux de 30 %, et à titre subsidiaire d'ordonner une nouvelle expertise. Elle fait valoir que : - l'accident du 14 octobre 2009 a bien été à l'origine d'une blessure dont elle conserve des séquelles ; le lien entre cet accident et la lésion de tendinopathie post-traumatique du sus-épineux de l'épaule droite a été reconnu par l'expert judiciaire ; le taux d'invalidité ouvrant droit à pension est ainsi de 10 % et non de 30 % comme l'a retenu le tribunal ; - en l'espèce, l'expert de l'administration a retenu un taux de 30 %, plus pertinent que le taux de 15 % fixé par l'expert judiciaire dès lors qu'elle est droitière et que l'infirmité la gêne dans la plupart des tâches quotidiennes ; - à titre subsidiaire, s'il n'était pas fait droit à ses demandes, il conviendrait d'ordonner une nouvelle expertise. Par ordonnance du 15 septembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 20 octobre 2021. Par lettre du 12 septembre 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité de l'appel de la ministre des armées dès lors que le jugement, qui rejette la demande de pension de Mme C..., ne fait pas grief à l'Etat. Des observations en réponse à ce moyen d'ordre public ont été présentées par le ministre des armées le 23 septembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - et les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique. 1. Mme C..., aide-soignante au service de santé des armées sous contrats successifs, puis admise à l'état de sous-officier de carrière à compter du 31 décembre 1991 et radiée des cadres pour atteinte de la limite d'âge à compter du 19 février 2013 au grade d'aide-soignante de classe exceptionnelle, a déposé le 10 mai 2011 une demande de pension militaire d'invalidité pour une blessure à l'épaule droite, consécutive à un accident du travail du 14 octobre 2009 inscrit au registre des constatations et blessures. L'expert missionné par l'administration a retenu un taux d'invalidité imputable au service de 30 %, dont 20 % pour une raideur moyenne de l'épaule et 10 % de majoration pour la douleur. Par une décision du 22 juillet 2016, le ministre, suivant l'avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité, a rejeté la demande de pension en retenant une infirmité de " périarthrite de l'épaule droite chez une droitière : limitation de l'abduction à 90° et de l'antépulsion à 30° " au taux de 10 %, inférieur au minimum indemnisable de 30 % pour une maladie contractée en temps de paix, de sorte qu'il n'y avait pas lieu d'en rechercher l'origine. 2. Mme C... a saisi le tribunal des pensions militaires de Saint-Denis, lequel a ordonné une expertise médicale par un jugement avant dire droit du 13 mars 2018. L'expert judiciaire a retenu un taux de 15 % pour une " tendinopathie post-traumatique du sus-épineux de l'épaule droite chez une droitière ", en lien avec l'accident du 14 octobre 2009. Par un jugement du 29 juin 2020, le tribunal administratif de La Réunion, auquel l'affaire avait été transférée en application de la loi du 13 juillet 2018 susvisée, a annulé la décision du ministre de la défense du 22 avril 2016 en tant qu'elle impute l'infirmité à une maladie contractée en temps de paix sans recherche de son origine et fixe le taux d'invalidité à 10 %, a substitué à ce fondement du refus celui tiré de ce que " l'infirmité dont se prévaut Mme C... trouve son origine dans une maladie en lien direct avec l'accident dont elle a été victime le 14 octobre 2009 et justifie d'un taux d'invalidité de 15 % ", et a rejeté le surplus de la demande. La ministre des armées relève appel de ce jugement. Mme C... demande à la cour, à titre principal de réformer ce jugement et de juger que l'infirmité résulte de blessures et ouvre droit à une pension au taux de 30 %, et à titre subsidiaire d'ordonner une nouvelle expertise. 3. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicable à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite (...) d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service (...) ". Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : / 30 % en cas d'infirmité unique ; / (...). " 4. Contrairement à ce que soutient la ministre des armées, le tribunal n'a pas accordé un droit à pension pour une maladie avec un taux d'invalidité inférieur à 30 %, mais au contraire a rejeté la demande de pension de Mme C..., en substituant, comme base légale du refus, le 2° de l'article L. 4 au 3° du même article retenu par la décision initiale, l'ouverture du droit à pension étant conditionnée dans les deux cas par un taux d'invalidité de 30 % dont les premiers juges, comme l'administration, ont estimé qu'il n'était pas atteint. Par suite, et alors même qu'il a annulé partiellement la décision du 22 juillet 2016 dans son dispositif alors qu'il aurait dû se borner à rejeter la demande de Mme C..., le jugement ne fait pas grief à l'Etat, et l'appel de la ministre des armées est irrecevable. 5. L'irrecevabilité de l'appel principal du ministre des armées entraîne, par voie de conséquence, celle de l'appel incident de Mme C.... DÉCIDE : Article 1er : La requête de la ministre des armées et les conclusions d'appel de Mme C... sont rejetées. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à Mme A... D... épouse C.... Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 novembre 2022. La rapporteure, Anne B... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20BX02878
JADE/CETATEXT000046526990.xml
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Sous le n° 1304635, M. C... F... et Mme D... F... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux, à titre principal de condamner solidairement le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine à verser les sommes de 1 614 768,80 euros à M. F... et de 16 022,08 euros à Mme F... et à titre subsidiaire de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à verser les sommes de 1 544 768,80 euros à M. F... et de 6 022,08 euros à Mme F..., en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de la myélinolyse consécutive à la greffe hépatique subie G... M. F... les 26 et 27 janvier 2011, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2013. Dans la même instance, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Charente-Maritime a demandé au tribunal de condamner " le CHU de Bordeaux si sa responsabilité est reconnue " à lui rembourser la somme de 177 169,96 euros. Sous le n° 1400362, M. et Mme F... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine à verser solidairement des provisions de 412 949,45 euros à M. F... et de 6 022,08 euros à Mme F..., l'ONIAM à verser des provisions de 377 948,45 euros à M. F... et de 1 028,08 euros à Mme F..., et le CHU de Bordeaux à verser à M. et Mme F... une provision de 5 000 euros chacun, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2013. G... un jugement nos 1304635, 1400362 du 14 avril 2015, le tribunal a condamné le CHU de Bordeaux à verser à M. et Mme F... une indemnité de 10 000 euros chacun et a rejeté le surplus de leurs demandes, ainsi que les conclusions de la CPAM de la Charente-Maritime. Procédure initiale devant la cour : G... un arrêt n° 15BX01943 du 11 juillet 2017, la cour confirmé les fautes retenues G... le tribunal et a ordonné une nouvelle expertise afin d'apprécier l'existence d'un lien de causalité ces fautes et la survenue de la myélinolyse dont a été victime M. F..., et d'évaluer l'éventuelle perte de chance d'éviter la myélinolyse. Le rapport d'expertise a été enregistré le 4 juin 2018. G... une ordonnance du 19 juillet 2018 la présidente de la cour a liquidé et taxé les frais et honoraires d'expertise à la somme de 3 334,80 euros. G... une requête enregistrée le 11 juin 2015 et des mémoires enregistrés les 21 août et 30 novembre 2015, les 8 et 14 avril et le 24 novembre 2016, les 15 avril et 10 mai 2017, les 3 août et 14 décembre 2018 et les 8 et 27 février 2019, M. et Mme F..., représentés G... Me Abidos, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a rejeté leurs demandes autres que celle relative au préjudice d'impréparation ; 2°) à titre principal, de condamner solidairement le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine et à verser les sommes de 2 495 075,43 euros à M. F... et de 19 635,33 euros à Mme F..., et de condamner l'ONIAM à verser les sommes de 606 268,84 euros à M. F... et de 2 408,83 euros à Mme F... ; 3°) à titre subsidiaire, de condamner l'ONIAM à verser les sommes de 3 101 344,20 euros à M. F... et de 12 044,17 euros à Mme F..., et de condamner solidairement le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine à verser une somme de 10 000 euros à Mme F... en réparation de son préjudice d'affection, et à titre infiniment subsidiaire de condamner solidairement le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine à verser les sommes de 3 101 344,20 euros à M. F... et de 22 044,17 euros à Mme F... ; 4°) dans tous les cas, de condamner le CHU de Bordeaux à verser à M. et Mme F... une somme de 10 000 euros chacun au titre du préjudice d'impréparation ; 5°) de " condamner la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) à garantir le CHU de Bordeaux des condamnations prononcées à son encontre " ; 6°) d'assortir les condamnations prononcées des intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2013 et de leur capitalisation, ainsi que d'une injonction de paiement sous astreinte de 400 euros G... jour de retard à compter du quinzième jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; 7°) de mettre à la charge du CHU de Bordeaux, du groupe hospitalier du Havre, de l'Agence de la biomédecine et de l'ONIAM les dépens ainsi qu'une somme de 6 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - le jugement est irrégulier en tant qu'il ne statue pas sur la demande en garantie formulée à l'encontre de la SHAM ; - c'est à tort que le tribunal a conclu à l'absence de lien de causalité direct et certain entre la survenue de la myélinolyse centro et extra-pontine et les fautes retenues à l'encontre du CHU de Bordeaux, du groupe hospitalier du Havre et de l'Agence de la biomédecine et qu'il n'a pas retenu de perte de chance d'échapper à la myélinolyse ; - contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les conditions d'engagement de la solidarité nationale sont réunies dès lors notamment que les dommages subis présentent un degré de gravité suffisant et que la myélinolyse centro et extra-pontine est une complication peu connue et rare, à laquelle M. F... n'était pas exposé de façon accrue ; - ils justifient des préjudices qu'ils invoquent et au titre desquels ils réitèrent la demande de réparation formulée en première instance, excepté en ce qui concerne l'indemnisation du préjudice d'impréparation résultant du manquement du CHU à son obligation d'information. G... des mémoires en défense, enregistrés les 10 mars et 12 avril 2016, le 24 avril 2017 et les 9 janvier et 19 février 2019, le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et la SHAM, représentés G... Me Le Prado, concluent au rejet de la requête et des conclusions de la CPAM de la Charente-Maritime. Dans le dernier état de leurs écritures, ils font valoir que : - la part du dommage imputable à l'état antérieur du patient ne saurait être contestée, et la preuve d'un lien de causalité direct et certain entre la myélinolyse et les manquements fautifs reprochés au groupe hospitalier du Havre et au CHU de Bordeaux n'est pas rapportée ; - l'Agence de la biomédecine, de G... sa mission de synchronisation des étapes du prélèvement, doit intégralement supporter les 25 % du dommage que l'expert a estimé en lien avec la myélinolyse ; - M. et Mme F... ne sont pas fondés à demander que la SHAM soit condamnée à garantir le CHU de Bordeaux ; - les demandes des consorts F... sont excessives ; - les consorts F... ne peuvent demander qu'il soit fait injonction de payer les sommes réclamées sous astreinte ; - la CPAM de la Charente-Maritime, qui ne peut solliciter pour la première fois en appel le remboursement de frais datant de 2013 qu'elle n'a pas demandé en première instance, est irrecevable à solliciter le remboursement de frais antérieurs au 14 avril 2015, date du jugement attaqué ; - la CPAM n'établit ni la réalité des dépenses dont elle demande le remboursement, ni leur lien certain et exclusif avec les manquements fautifs reprochés, alors que l'état de santé de M. F... imposait une greffe de foie emportant de nombreux frais. G... des mémoires, enregistrés le 2 novembre 2015, le 24 mars 2016, le 14 avril 2017, le 15 novembre 2018 et les 8 janvier et 27 février 2019, la CPAM de la Charente-Maritime, représentée G... la SCP Beauchard, Bodin, Demaison, Giret, Hidreau, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) de condamner solidairement le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine, à lui rembourser la somme de 112 703,76 euros ; 2°) de mettre à la charge solidaire du CHU de Bordeaux, du groupe hospitalier du Havre, de la SHAM et de l'Agence de la biomédecine les sommes de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que sa créance définitive s'élève à la somme de 450 815,06 euros, dont un quart doit, compte tenu des conclusions de l'expert judiciaire, être pris en charge solidairement G... le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine. G... des mémoires enregistrés les 29 juillet et 16 septembre 2015, le 10 mars 2016, les 27 mars et 5 mai 2017, le 25 juillet 2018 et le 18 décembre 2018, l'ONIAM, représenté G... la SELARL Birot, Ravaut et Associés, conclut à sa mise hors de cause. Il fait valoir que les conditions d'une indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas remplies et qu'il ne peut être condamné à rembourser les débours de la CPAM de la Charente-Maritime. G... des mémoires, enregistrés le 1er avril 2016, le 7 novembre 2016, le 6 avril 2017 et le 5 septembre 2018, l'Agence de la biomédecine, représentée en dernier lieu G... la SCP Piwnica et Molinié, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. et Mme F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans le dernier état de ses écritures, elle fait valoir que : - contrairement à ce que soutiennent M. et Mme F..., le tribunal, en rejetant le surplus des conclusions des parties, a statué sur leur demande de condamnation de la SHAM à garantir le CHU de Bordeaux ; - comme l'a jugé le tribunal, aucun lien de causalité direct et certain ne peut être retenu entre les fautes relevées et la survenue de la myélinolyse ; en tout état de cause, la responsabilité des trois intervenants au processus de greffe ne saurait être répartie entre eux de manière égalitaire ; - le jugement ne comporte aucune contradiction, et c'est à bon droit que le tribunal a écarté l'existence d'une perte de chance ; - elle n'a commis aucune faute ou négligence ni dans la sélection du donneur ni dans l'absence de recherche d'antécédents, ni dans l'appréciation de la qualité du greffon ; - les conclusions présentées à son encontre G... la CPAM sont nouvelles en appel, donc irrecevables, et au demeurant, la caisse ne justifie pas de l'intégralité des débours dont elle fait état. G... un arrêt n° 15BX01943 du 2 avril 2019, la cour a condamné solidairement l'Agence de la biomédecine, le CHU de Bordeaux et le groupe hospitalier du Havre à verser à M. F... la somme de 206 289,97 euros et à Mme F... la somme de 245 euros, avec intérêts à compter du 8 octobre 2011 et capitalisation à compter du 8 février 2019, à verser à la CPAM de la Charente-Maritime la somme de 44 292,89 euros, et à rembourser 25 % du montant des dépenses de santé futures de la caisse sur présentation de justificatifs. G... une décision nos 431291, 431347 du 15 octobre 2021, le Conseil d'Etat a annulé les arrêts n° 15BX01943 du 11 juillet 2017 et du 2 avril 2019, et a renvoyé l'affaire devant la cour. Procédure devant la cour après cassation : G... des mémoires enregistrés les 22 décembre 2021 et 20 septembre 2022, la CPAM de la Charente-Maritime, représentée G... la SCP Beauchard, Bodin, Demaison, Giret, Hidreau, demande à la cour : 1°) de condamner solidairement le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre, la SHAM et l'Agence de la biomédecine à lui rembourser la somme de 67 737,43 euros ; 2°) de mettre à la charge solidaire du CHU de Bordeaux, du groupe hospitalier du Havre, de la SHAM et de l'Agence de la biomédecine les sommes de 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'attestation d'imputabilité de son médecin conseil établit le lien entre les prestations dont elle demande le remboursement et les faits survenus le 26 janvier 2011 ; - ses débours définitifs s'élèvent à 270 949,73 euros ; elle sollicite, conformément à la part de responsabilité de 25 % retenue G... l'expert, le remboursement de la somme de 67 737,43 euros. G... des mémoires enregistrés les 6 janvier, 28 mars, 29 avril et 19 mai 2022, M. et Mme F..., représentés G... Me Abidos, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux nos 1304635, 1400362 du 14 avril 2015 en tant qu'il a rejeté leurs demandes autres que celles relatives au préjudice d'impréparation ; 2°) A titre principal de condamner solidairement le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine à verser les sommes de 3 415 481,39 à M. F... et de 19 635,33 euros à Mme F..., et de condamner l'ONIAM à verser les sommes de 836 370,34 euros à M. F... et de 2 408,83 euros à Mme F... ; 3°) à titre subsidiaire de condamner l'ONIAM à verser les sommes de 4 251 851,75 euros à M. F... et de 12 044,17 euros à Mme F..., et de condamner solidairement le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine à verser une somme de 10 000 euros à Mme F... au titre de son préjudice d'affection, et à titre infiniment subsidiaire, de condamner solidairement le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine à verser les sommes de 4 251 851,75 euros à M. F... et de 22 044,17 euros à Mme F... ; 4°) dans tous les cas, de condamner le CHU de Bordeaux à verser à M. et Mme F... une somme de 10 000 euros chacun au titre du préjudice d'impréparation ; 5°) de " condamner la SHAM à garantir le CHU de Bordeaux des condamnations prononcées à son encontre " ; 6°) d'assortir les condamnations prononcées des intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2013 et de leur capitalisation à compter du 27 janvier 2014, ainsi que d'une injonction de paiement sous astreinte de 400 euros G... jour de retard à compter du quinzième jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; 7°) de mettre à la charge du CHU de Bordeaux, du groupe hospitalier du Havre, de l'Agence de la biomédecine et de l'ONIAM les dépens, ainsi qu'une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative Ils soutiennent que : - le tribunal a omis de statuer sur leur demande tendant à ce que la SHAM soit condamnée à garantir le CHU de Bordeaux, ce qui constitue " une erreur matérielle " ; il appartient à la cour de faire droit à ces conclusions ; - c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu de lien de causalité entre les fautes à l'origine de l'allongement de la phase d'anhépatie et la survenue de la myélinolyse, alors que selon l'expert, cette phase a concouru à la survenue de la complication ; les fautes, à l'origine d'une anhépatie d'une durée 8 fois supérieure à la durée normale, sont à l'origine d'une perte de chance d'échapper à cette complication ; il appartient à la cour de déterminer l'ampleur de cette perte de chance ; - les deux rapports d'expertise qualifient la myélinolyse de complication peu connue et rare ; le risque de 2 % retenu G... le tribunal constitue une probabilité faible ; ni l'hyponatrémie préopératoire modérée, ni l'hypertension portale n'exposaient M. F..., dont la cirrhose était d'origine métabolique et non alcoolique, et qui n'était pas dénutri, à un risque accru ; ainsi, la condition d'anormalité ouvrant droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale est remplie ; - c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu de perte de chance imputable aux fautes du CHU de Bordeaux, du groupe hospitalier du Havre et de l'Agence de la biomédecine, puisqu'il ne peut être affirmé que la myélinolyse serait survenue en l'absence de ces fautes ; - A titre principal, la survenue de la myélinolyse a pour origines des fautes et un aléa thérapeutique, et les préjudices doivent être réparés solidairement à hauteur de 80 % G... le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et l'Agence de la biomédecine, et à hauteur de 20 % G... l'ONIAM, dès lors que : * l'allongement de la durée de la phase d'anhépatie est imputable aux fautes de l'Agence de la biomédecine, du groupe hospitalier du Havre et du CHU de Bordeaux comme l'a démontré le premier expert ; * l'Agence de la biomédecine, qui intervient dans la sélection du donneur et concourt à l'appréciation des qualités du greffon en fonction des informations transmises, a commis une faute en s'abstenant de faire réaliser un scanner abdomino-pelvien du donneur qui aurait permis la découverte de l'adénopathie avant le clampage du pédicule hépatique de M. F... ; * le premier expert a relevé que les apports de sérum salé et de bicarbonate de sodium étaient en relation avec l'impérieuse nécessité de la correction des pertes sanguines et ascitiques ; le second expert a confirmé qu'en cas d'ascite réfractaire, il était recommandé d'utiliser des paracentèses évacuatrices (environ deux G... mois), et contrairement à ce qu'il affirme, il n'a pas été réalisé de ponction ; ces fautes ont eu pour conséquence des pertes ascitiques massives qui ont dû être compensées G... d'importantes quantités d'apports salés, ce qui constitue une faute du CHU de Bordeaux antérieure à la transplantation ; * selon le premier expert, la réalisation du risque de myélinolyse, auquel M. F... était exposé du fait de son état antérieur, aurait été une paresthésie des membres inférieurs, beaucoup moins grave que les séquelles dont il reste atteint ; * la myélinolyse a pour origine les fautes du CHU de Bordeaux, du groupe hospitalier du Havre et de l'Agence de la biomédecine et un aléa thérapeutique ; le droit à indemnisation au titre de ces fautes n'exclut pas une indemnisation au titre de la solidarité nationale ; la part des fautes fixée à 25 % G... le second expert est insuffisante et doit être évaluée à 80 % en tenant compte de la durée de la phase d'anhépatie ; - A titre subsidiaire, la survenue de la myélinolyse est un aléa thérapeutique et ouvre droit en totalité à une indemnisation au titre de la solidarité nationale dont les conditions sont remplies ; - A titre infiniment subsidiaire, la réparation des dommages incombe intégralement au CHU de Bordeaux, au groupe hospitalier du Havre et à l'Agence de la biomédecine qui avaient une obligation de prudence renforcée dès lors que l'état antérieur de M. F... leur était connu ; - ils ne contestent pas le jugement en tant qu'il a condamné le CHU de Bordeaux au titre du préjudice d'impréparation ; En ce qui concerne les préjudices de M. F... : - la demande, actualisée après la communication de la créance définitive de la CPAM de la Charente-Maritime, est recevable ; - seule la caisse est créancière des indemnités relatives aux dépenses de santé actuelles (201 166,78 euros) et futures (209 577,85 euros), aux frais de transport (25 998,84 euros) et à la majoration pour tierce personne de la rente d'invalidité (14 071,59 euros) ; - les frais d'aménagement du domicile se sont élevés à 27 395,42 euros, et compte tenu d'une aide de 5 895 euros versée G... la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), 21 500,42 euros sont restés à charge ; - il est demandé 531,20 euros au titre des frais divers (téléphone, télévision et copie du dossier médical) ; - dès lors que le véhicule d'origine ne pouvait pas être aménagé, il y a lieu de faire droit à la demande relative à l'achat d'un véhicule aménagé en 2018 et à son renouvellement tous les 8 ans, soit un montant total de 95 076,30 euros ; - l'actualisation en appel de la demande relative à l'assistance G... une tierce personne est recevable car elle a pour causes la continuité du dommage subi, et le devis actualisé constitue un élément nouveau ; l'imputation de la prestation de compensation du handicap (PCH) serait inéquitable et porterait atteinte au principe d'égalité entre les justiciables car la Cour de cassation ne la pratique pas ; le coût de l'assistance spécialisée G... un tiers durant 5 heures G... jour, sur la base d'un coût horaire de 24,50 euros selon le devis établi le 10 décembre 2021, s'élève a minima à 3773 euros G... mois ; il y a lieu de retenir 66 249,74 euros au titre des arrérages échus du 2 décembre 2011 jusqu'au 8 avril 2013, date de consolidation, 444 531,75 euros au titre des arrérages échus du 8 avril 2013 au 29 avril 2022, et pour l'avenir une somme capitalisée de 775 464,69 euros ; les 19 heures d'assistance G... jour assurées G... Mme F... doivent être indemnisées sur la base de 15 euros G... heure pour 11 heures d'assistance active de jour et de 10 euros G... heure pour 8 heures d'assistance passive de nuit, et de 57 semaines G... an afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés, soit 132 036,20 euros échus jusqu'au 8 avril 2013, 885 954,90 euros échus du 8 avril 2013 au 29 avril 2022, et pour l'avenir un capital de 1 545 506,55 euros ; l'indemnité sollicitée s'élève ainsi au total à 3 849 743,83 euros ; - il est demandé 20 000 euros au titre des périodes de déficit fonctionnel temporaire, 70 000 euros au titre des souffrances endurées, 20 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire qu'il convient de retenir à hauteur de 6/7 comme l'a fait le premier expert, 135 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent dont le taux ne saurait être inférieur à 75 % dès lors que la marche est impossible, 25 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, 5 000 euros au titre du préjudice d'agrément et 10 000 euros au titre du préjudice sexuel ; En ce qui concerne les préjudices de Mme F... : - il est demandé 980 euros au titre des frais d'hébergement exposés durant l'hospitalisation de son époux, 1 064,17 euros au titre des frais de transport, et 10 000 euros au titre du préjudice d'affection caractérisé G... l'angoisse subie durant la phase d'anhépatie de son époux, et de 10 000 euros au titre du préjudice sexuel ; En ce qui concerne les frais d'expertise : - c'est à bon droit que le tribunal a mis les frais de la première expertise, d'un montant de 3 051,59 euros, à la charge du CHU de Bordeaux ; - les frais de la seconde expertise doivent être mis à la charge de l'ONIAM, du CHU de Bordeaux, du groupe hospitalier du Havre et de l'Agence de la biomédecine. G... des mémoires en défense enregistrés les 14 janvier et 16 mars 2022, l'Agence de la biomédecine, représentée G... la SCP Piwnica et Molinié, conclut au rejet de l'ensemble des demandes présentées à son encontre et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. et Mme F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - le CHU de Bordeaux, la SHAM et le groupe hospitalier du Havre ne sont pas recevables à demander pour la première fois en appel qu'elle les garantisse de leur condamnation ; - contrairement à ce qu'a estimé le premier expert, il n'existait pas d'éléments concordants qui auraient dû conduire à la réalisation d'un scanner ; aucune règle applicable en matière de prélèvement d'organe ne prévoit l'obligation de réaliser ce type d'examen, ni d'éliminer un donneur potentiel dont les antécédents seraient inconnus ou qui présenterait des plaques pleurales ou infiltrats ; si la greffe était programmée, le prélèvement ne l'était pas et devait être effectué en urgence ; le choix du donneur a été validé G... les médecins de M. F... qui ont accepté le greffon hépatique proposé G... le pôle national de répartition des greffons sur la base des informations renseignées G... la coordination hospitalière du Havre ; ainsi, aucune faute n'a été commise ; - le rôle du médecin coordonnateur interrégional consiste à appliquer les règles de répartition et d'attribution des greffons, à synchroniser les étapes du prélèvement et les moyens de transport, et à centraliser les informations concernant le donneur et les conditions de prélèvement ; la réalisation d'examens complémentaires destinés à vérifier la bonne qualité du greffon ne relève pas de ses attributions, mais de celles du médecin de l'établissement qui procède au prélèvement des organes, ainsi qu'il résulte des dispositions des articles R. 1211-13 et R. 1211-14 du code de la santé publique et de l'arrêté du 27 février 1998 fixant les règles de bonnes pratiques alors applicable ; - elle a vérifié la complétude du dossier " Cristal " du donneur et la cohérence des informations collectées G... les médecins en charge du donneur et les chirurgiens préleveurs ; il était indiqué " non " à la question relative à l'existence d'une maladie néoplasique alors que la réponse était inconnue, ce qui engage la responsabilité du groupe hospitalier du Havre, et aucune erreur de conception du logiciel de sélection ne saurait lui être reprochée ; elle n'avait aucune raison de mettre en cause l'appréciation des médecins du groupe hospitalier du Havre et du CHU de Bordeaux qui avaient conclu à l'acceptabilité du greffon hépatique ; il appartenait à l'équipe de prélèvement du CHU de Bordeaux, qui avait connaissance d'un ganglion suspect sur le hile rénal droit jetant un doute sur la qualité du greffon hépatique, d'informer l'équipe chargée de préparer la transplantation ; le risque concernant le greffon a été retranscrit sans délai dans le dossier " Cristal ", et l'équipe bordelaise de transplantation n'a pas tenu compte de cette information ; - dès lors qu'un dossier " Cristal donneur " avait été régulièrement constitué, elle n'avait pas à se substituer aux médecins ayant pris en charge et sélectionné le donneur en demandant la réalisation d'examens complémentaires. G... des mémoires en défense enregistrés les 17 février, 15 avril et 10 mai 2022, le CHU de Bordeaux, la SHAM et le groupe hospitalier du Havre concluent au rejet de l'appel de M. et Mme F... et des conclusions de la CPAM de la Charente-Maritime, et demandent à la cour de condamner l'Agence de la biomédecine à les garantir des condamnations prononcées à leur encontre dans les limites de sa part de responsabilité. Ils font valoir que : - ils s'en rapportent à la sagesse de la cour sur la question de savoir si la myélinolyse remplit la condition de gravité ouvrant droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale ; - le premier expert a conclu que l'implantation différée du greffon hépatique n'a pas eu pour conséquence de majorer les pertes sanguines et G... conséquence les apports salés directs et indirects, et que le risque hémorragique majoré était en relation directe, certaine et exclusive avec l'état antérieur ; si le second expert a retenu, dans la genèse de la myélinolyse, une part de 25 % imputable aux " suppléments " thérapeutiques imposés G... les dysfonctionnements préopératoires, il ne démontre pas en quoi l'allongement du temps opératoire ou l'anhépatie auraient pu contribuer à la survenue de la myélinolyse ; ainsi, les fautes reprochées sont sans lien avec les préjudices ; - le défaut d'information n'engage pas la responsabilité du CHU de Bordeaux dès lors que M. F... n'aurait pas renoncé à la greffe hépatique s'il avait été informé, et à titre subsidiaire, l'état antérieur a joué un rôle majeur dans la survenue de l'aléa thérapeutique ; - les experts n'ont identifié aucun manquement dans la phase antérieure à la transplantation ; - en admettant que le défaut du premier greffon soit pour partie à l'origine du dommage, l'erreur de conception du logiciel de sélection mis en œuvre G... l'Agence de la biomédecine, qui ne prévoit pas la réponse " ne sait pas " ou " non renseigné " à l'item relatif aux maladies néoplasiques, a conduit à sélectionner un greffon impropre à la transplantation ; en outre, si l'Agence a soutenu ne pas intervenir dans le processus de greffe, elle a mis en œuvre des procédures de sélection insuffisantes et a manqué de diligence dans l'information de l'équipe chirurgicale bordelaise, comme l'a relevé le second expert ; - en admettant que leur responsabilité puisse être retenue solidairement avec celle de l'Agence de la biomédecine, elle sera limitée à 25 % comme l'a retenu le second expert ; -les demandes de M. et Mme F... sont irrecevables en ce qu'elles excèdent le montant sollicité en première instance ; - les demandes relatives à l'aménagement du domicile, ainsi qu'à l'aménagement du véhicule dont seul le surcoût peut être indemnisé, doivent être rejetées en l'absence de justificatifs suffisants ; - les demandes présentées au titre de l'assistance G... une tierce personne, du déficit fonctionnel temporaire, du déficit fonctionnel permanent qui n'est pas de 70 % mais de 56 %, du préjudice esthétique temporaire et permanent et des souffrances endurées sont manifestement excessives ; - le préjudice d'impréparation a été indemnisé G... le jugement dont M. et Mme F... se bornent à demander la confirmation sur ce point, et les requérants ne sont pas fondés à demander une somme de 10 000 euros chacun dès lors qu'il n'est pas établi que le consentement de M. F... n'aurait pas été recueilli, qu'il n'y avait pas d'alternative thérapeutique à la greffe, et que Mme F... ne peut prétendre à l'indemnisation d'un préjudice qui ne concerne que son mari ; - les demandes de Mme F... relatives aux frais d'essence et de péage doivent être rejetées, et aucun préjudice sexuel n'a été retenu dans le cadre de l'expertise ; - à supposer que le préjudice d'affection invoqué soit avéré, la somme demandée G... Mme F... doit être réduite à de plus justes proportions ; - la CPAM de la Charente-Maritime est irrecevable à demander en appel le remboursement de frais de 2013 qu'elle n'a pas demandés en première instance ; - alors que la transplantation était nécessaire et aurait imposé des soins, la caisse ne justifie pas des frais directement et exclusivement en lien avec le défaut initial du greffon ; - en ce qui concerne les frais futurs, ils s'opposent à toute capitalisation et ne procéderont à leur remboursement que sur présentation de justificatifs, dans la limite de leur part de responsabilité ; - dans l'hypothèse où leur responsabilité serait retenue solidairement avec celle de l'Agence de la biomédecine, ils demandent à être garantis G... cette dernière des condamnations prononcées à leur encontre. G... un mémoire en défense enregistré le 3 mars 2022, l'ONIAM, représenté G... la SELARL Birot, Ravaut et Associés, conclut à la confirmation du jugement du tribunal administratif et à sa mise hors de cause. Il fait valoir que : - c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la condition d'anormalité du dommage n'était pas remplie dès lors que le risque de myélinolyse ne présentait pas une probabilité faible ; - des fautes mises en évidence G... les expertises ont été commises G... l'Agence de la biomédecine et le groupe hospitalier du Havre dans la sélection du donneur, et G... le CHU de Bordeaux dans l'organisation du prélèvement d'organe ; le second expert a conclu que les préjudices subis G... M. F... résultaient de ces fautes dans une proportion de 25 % et de l'état antérieur pour 75 % ; ainsi, aucune indemnisation n'incombe à la solidarité nationale ; - M. F... présentait un hépatocarcinome qui aurait conduit à son décès en l'absence de transplantation hépatique, et le risque de myélinolyse auquel il était exposé n'était pas le taux théorique de 2 % mentionné G... le premier expert, puisque le patient présentait une hyponatrémie chronique liée au traitement de la cirrhose décompensée ainsi qu'une hypertension portale avec des dilatations variqueuses responsables de saignements très importants pendant l'intervention ; en outre, M. F... a subi durant les deux temps de la transplantation une importante et rapide correction de son hyponatrémie G... des apports salés massifs nécessités G... les pertes sanguines en lien avec son état antérieur et avec l'intervention qui est très hémorragique, et le premier expert a évalué à 20 % la part de la myélinolyse attribuable à l'état antérieur ; eu égard à cette exposition particulière au risque de myélinolyse, le dommage n'est pas anormal et n'ouvre pas droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale ; - il ne saurait être condamné à rembourser la créance de la CPAM de la Charente-Maritime, laquelle ne présente d'ailleurs aucune demande à son encontre. G... lettre du 14 janvier 2022, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de ce que l'instruction serait susceptible d'être close, sans avertissement préalable, G... l'émission d'une ordonnance de clôture ou d'un avis d'audience, à compter du 15 mars 2022. La clôture immédiate de l'instruction a été décidée G... une ordonnance du 1er juin 2022. Des pièces ont été produites à la demande de la cour G... la CPAM de la Charente-Maritime les 31 août et 20 septembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'action sociale et des familles ; - le code civil ; - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - l'arrêté du 27 février 1998 portant homologation des règles de bonnes pratiques relatives au prélèvement d'organes à finalité thérapeutique sur personne décédée ; - l'arrêté du 14 décembre 2021 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique, - et les observations de Me Abidos, représentant les consorts F..., de Me Demailly, représentant le CHU de Bordeaux, le groupe hospitalier du Havre et la SHAM, de Me Dagouret, représentant l'ONIAM et de Me De Cenival, représentant l'Agence de la biomédecine. Des notes en délibéré présentées pour l'Agence de la biomédecine et pour l'ONIAM ont été enregistrées le 12 octobre 2022. Une note en délibéré présentée pour les consorts F... a été enregistrée le 20 octobre 2022. Une nouvelle note en délibéré présentée pour l'ONIAM a été enregistrée le 25 octobre 2022. Considérant ce qui suit : 1. M. F..., qui présentait un diabète de type II et était pris en charge au centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux pour une cirrhose décompensée et un carcinome hépatocellulaire avec une indication de greffe hépatique posée en avril 2010, a été admis dans cet établissement le 26 janvier 2011 pour la réalisation de cette intervention, le greffon devant être prélevé au centre hospitalier du Havre. Le chirurgien du CHU de Bordeaux, qui avait commencé l'opération et procédé à 9 heures au clampage du pédicule hépatique rendant l'hépatectomie irréversible, a été informé à 9 heures 30 de la détection chez le donneur d'une adénopathie rénale cancéreuse, métastase d'un probable cancer pulmonaire. Il a été décidé, après concertation, de renoncer à l'implantation du greffon hépatique en raison d'un bilan bénéfices-risques défavorable. Un second greffon, demandé en " super-urgence " auprès de l'Agence de la biomédecine qui l'a proposé 20 minutes plus tard, a été prélevé à Cholet et implanté dans la nuit du 26 au 27 janvier. Après l'arrêt de la sédation le 31 janvier 2011, M. F... a présenté des troubles neurologiques, et une IRM cérébrale réalisée le 9 février a mis en évidence des lésions de myélinolyse centro et extra-pontine, complication à l'origine de troubles sensitivo-moteurs importants, notamment une tétraparésie dont la récupération est restée limitée malgré la rééducation. 2. M. et Mme F... ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux d'une demande d'expertise, à laquelle il a été fait droit et qui a été étendue à l'Agence de la biomédecine. Dans son rapport déposé le 28 juin 2013, l'expert a conclu que des fautes avaient été commises dans l'organisation du prélèvement, que la survenue de la myélinolyse, en lien direct et certain avec la transplantation hépatique, relevait d'un aléa thérapeutique, et que l'état antérieur du patient y avait contribué à hauteur de 20 %. Leurs réclamations préalables ayant été rejetées, M. et Mme F... ont saisi le tribunal administratif de deux demandes de condamnation du CHU de Bordeaux, de l'Agence de la biomédecine, du groupe hospitalier du Havre et de l'ONIAM, la première à les indemniser de leurs préjudices en lien avec la myélinolyse, et la seconde à leur verser des provisions. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Charente-Maritime a demandé au tribunal de condamner le CHU de Bordeaux à lui rembourser la somme de 177 169,96 euros. Le tribunal a joint les demandes et, G... un jugement du 14 avril 2015, a seulement condamné le CHU de Bordeaux à verser à M. et Mme F... une somme de 10 000 euros chacun au titre de leur préjudice d'impréparation en l'absence d'information sur le risque qui s'est réalisé, et a rejeté le surplus aux motifs, d'une part, que les fautes commises dans la sélection du premier greffon et le défaut de communication entre les équipes du CHU de Bordeaux n'étaient pas en lien direct et certain avec la survenue de la myélinolyse, et d'autre part, que cet aléa thérapeutique, qui ne pouvait être regardé comme présentant une probabilité faible et n'était pas sans rapport avec l'état de santé du patient et son évolution prévisible, n'ouvrait pas droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale. Le tribunal a également rejeté les conclusions de la caisse et a mis les frais d'expertise de 3 051,59 euros à la charge du CHU de Bordeaux. 3. M. et Mme F... ont relevé appel de ce jugement. G... un arrêt avant dire droit du 11 juillet 2017, la cour a retenu les mêmes fautes et a ordonné une nouvelle expertise afin d'apprécier l'existence d'un lien de causalité entre ces fautes et la survenue de la myélinolyse, et d'évaluer l'éventuelle perte de chance que cette complication ne se réalise pas. L'expert, qui a déposé son rapport le 4 juin 2018, a conclu que la myélinolyse avait pour causes " l'état antérieur du patient " pour une part prédominante évaluée à 75 %, et les " suppléments " thérapeutiques imposés G... les dysfonctionnements préopératoires pour les 25 % restants. G... un arrêt du 2 avril 2019, la cour a jugé que les fautes commises étaient à l'origine d'une perte de chance de 25 % d'échapper aux séquelles de la myélinolyse, et a réformé le jugement en condamnant solidairement l'Agence de la biomédecine, le groupe hospitalier du Havre et le CHU de Bordeaux à verser les sommes de 206 289,97 euros à M. F... et de 245 euros à Mme F..., avec intérêts à compter du 8 octobre 2011 et capitalisation à compter du 8 février 2019, ainsi qu'une somme de 44 292,89 euros à la CPAM de la Charente-Maritime, et à rembourser les débours futurs de la caisse sur présentation de justificatifs. L'Agence de la biomédecine et M. et Mme F... se sont pourvus en cassation. G... une décision nos 431291, 431347 du 15 octobre 2021, le Conseil d'Etat a annulé les arrêts des 11 juillet 2017 et 2 avril 2019 et a renvoyé l'affaire devant la cour. M. F... est décédé le 13 juillet 2022, l'affaire étant en état d'être jugée. Sur l'étendue du litige : 4. L'appel de M. et Mme F... ne porte pas sur les sommes que le tribunal a condamné le CHU de Bordeaux à leur verser au titre du préjudice d'impréparation qu'ils ont subi du fait d'un défaut d'information sur le risque de complication neurologique grave. Si le CHU de Bordeaux fait valoir que les requérants ne seraient pas fondés à demander l'indemnisation de ce préjudice, il ne présente pas d'appel incident. Sur la régularité du jugement : 5. M. et Mme F... reprochent au tribunal d'avoir omis de statuer sur leur demande de condamnation de la SHAM à garantir le CHU de Bordeaux des condamnations prononcées à son encontre. Cette abstention entache d'irrégularité le jugement dans cette mesure. Il y a donc lieu de l'annuler en tant qu'il ne s'est pas prononcé sur ce point, d'évoquer, et de constater, comme l'ont fait valoir le CHU de Bordeaux et la SHAM, que cette demande était irrecevable, seul le défendeur pouvant solliciter éventuellement une garantie de son assureur. Sur la responsabilité pour faute : 6. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / (...). " En ce qui concerne la prise en charge antérieure à la transplantation : 7. M. et Mme F... invoquent des recommandations de la Haute autorité de santé publiées en septembre 2007 selon lesquelles, dans le cas d'une ascite réfractaire, il convient, dans l'attente d'une transplantation hépatique, soit de mettre en place une anastomose intrahépatique portocave G... voie transjugulaire, soit de réaliser des ponctions évacuatrices. Ils reprochent au CHU de Bordeaux de ne pas avoir procédé à des ponctions de l'ascite antérieurement à la transplantation, abstention qui aurait eu pour conséquence des pertes ascitiques massives, compensées G... d'importants apports salés ayant favorisé la survenue de la myélinolyse. Le dossier médical fait apparaître qu'une ascite s'est constituée seulement à la fin de l'année 2010, et qu'une ponction réalisée le 24 novembre 2010 n'a pas permis son évacuation. Si le premier expert a indiqué que les apports salés reçus G... le patient lors du premier temps opératoire avaient pour objet de maintenir son hémodynamisme compromis G... des pertes sanguines massives et G... des pertes ascitiques, le second a précisé que l'ascite est un liquide " perdu " non utilisable, de sorte que l'aspiration d'un volume banal de 3,9 litres d'ascite en peropératoire n'avait nécessité aucune compensation. Cette conclusion n'étant pas critiquée, la faute invoquée, à la supposer établie, est sans lien avec le dommage. En ce qui concerne le premier greffon : 8. Selon l'arrêté du 27 février 1998 portant homologation des règles de bonnes pratiques relatives au prélèvement d'organes à finalité thérapeutique sur personne décédée, les médecins du donneur prennent celui-ci en charge depuis le diagnostic de la mort encéphalique jusqu'au prélèvement, lequel est effectué G... des chirurgiens de l'établissement du donneur ou exerçant dans un autre établissement de santé, placés dans ce dernier cas sous la responsabilité du chef de service concerné, le chirurgien préleveur pouvant être ou ne pas être le chirurgien transplanteur. En l'espèce, les médecins du donneur étaient ceux du groupe hospitalier du Havre, et le prélèvement du greffon hépatique a été effectué G... un chirurgien du CHU de Bordeaux placé sous la responsabilité de celui qui devait réaliser la greffe. 9. En vertu de l'article L. 1418-1 du code de la santé publique dans sa rédaction applicable au litige, l'Agence de la biomédecine, qui s'est substituée à l'Etablissement français des greffes, a notamment pour mission, dans le domaine de la greffe, de participer à l'élaboration et, le cas échéant, à l'application de la réglementation et des règles de bonnes pratiques, de formuler des recommandations ainsi que de promouvoir la qualité et la sécurité sanitaires. L'article R. 1418-1 du même code prévoit qu'à ce titre, l'Agence de la biomédecine est en particulier chargée d'assurer " l'encadrement et la coordination des activités de prélèvements et de greffes d'organes, de tissus et de cellules issus du corps humain ". 10. Au titre de cette dernière mission et selon les règles fixées G... l'arrêté du 27 février 1998, la coordination des opérations de prélèvement et de greffe est assurée G... des médecins de l'Agence de la biomédecine présents dans sept inter-régions, désormais regroupées dans les quatre services régionaux d'appui de l'agence. En vertu du I de l'annexe de cet arrêté relative au personnel, chaque établissement de santé concerné doit travailler en liaison avec le coordonnateur interrégional de l'Agence de la biomédecine, les médecins en charge du donneur ainsi que les chirurgiens en charge du prélèvement. Ces mêmes règles prévoient que, lors du processus de prélèvement, les médecins en charge du donneur et les chirurgiens préleveurs sont responsables de la collecte des informations concernant le donneur, en particulier celles susceptibles de donner des indications quant à la qualité des greffons, en vue de leur transmission à la coordination interrégionale de l'Agence de la biomédecine et aux équipes de greffes. La coordination interrégionale de l'agence est ainsi tenue informée de toute éventualité d'un prélèvement, la survenue d'incidents durant le processus qui va du prélèvement à la greffe devant lui être communiquée pour lui permettre d'engager une procédure d'alerte, ainsi qu'une enquête immédiate destinée à comprendre la cause de l'incident et en éviter la répétition. 11. Il résulte de ces dispositions que l'organisation et le déroulement des opérations de prélèvements et de greffes d'organes, en particulier les opérations de sélection du donneur et du greffon, qui nécessitent une étroite coordination entre ses différents acteurs, font participer l'Agence de la biomédecine à la phase de sélection du donneur, tant au stade de la vérification du caractère complet de son dossier et de la cohérence des informations qui y figurent qu'à celui de la concertation lors de sa sélection, ainsi qu'au suivi des informations le concernant, au cours ou à la suite du prélèvement. Dans ces conditions, la victime d'une opération de greffe qui estime que les sélections du donneur ou du greffon n'ont pas été satisfaisantes peut rechercher, sans avoir à établir la faute propre à chacun des intervenants, la responsabilité solidaire tant des établissements de santé impliqués dans l'opération de sélection que de l'Agence de la biomédecine. Conformément aux règles qui régissent la responsabilité des personnes publiques, l'agence peut toutefois, lorsque sa responsabilité solidaire est ainsi recherchée, demander à être dégagée de toute responsabilité en établissant qu'elle n'a commis aucune faute dans l'accomplissement de ses missions propres. S'agissant de la sélection du donneur : 12. D'une part, il résulte de l'instruction, notamment du livret d'aide à la prise en charge d'un donneur potentiel d'organes en vue de prélèvement édité en septembre 2010 G... l'Agence de la biomédecine, produit en première instance G... M. et Mme F..., que l'éventualité d'un prélèvement d'organes doit être envisagée pour tout patient en état de mort encéphalique ou présentant une forte présomption de passage vers cet état, quels que soient l'âge ou les antécédents du donneur potentiel, dès lors que les études montrent de bons résultats avec des donneurs " limite ". Comme l'a relevé le premier expert qui s'est seul prononcé sur la sélection du premier donneur, qu'il a qualifiée de fautive, il existe seulement une obligation de moyens sur la qualité de la sélection du donneur, et non de résultat sur la qualité du greffon. 13. D'autre part, l'article R. 1211-13 du code de la santé publique, prévoyait, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, que : " Avant tout prélèvement d'éléments ou toute collecte de produits du corps humain à des fins thérapeutiques sur une personne vivante ou décédée, le médecin appelé à le réaliser est tenu de rechercher les antécédents médicaux et chirurgicaux personnels et familiaux du donneur potentiel et de s'informer de l'état clinique de celui-ci, notamment en consultant le dossier médical, un document en retraçant le contenu ou tout document comportant les informations pertinentes. (...) Le médecin qui réalise le prélèvement vérifie que les informations ainsi recueillies ne constituent pas une contre-indication à l'utilisation thérapeutique des éléments ou produits à prélever, notamment eu égard aux risques de transmission des maladies dus aux agents transmissibles non conventionnels (...)". L'article I.3.3.2 des règles de bonnes pratiques prévoit notamment que : " Les chirurgiens préleveurs : / - sont tenus d'avoir pris connaissance du dossier du donneur (...) / - recueillent des informations permettant d'apprécier la qualité du (ou des) greffon(s) (...) ". 14. Le donneur, décédé d'un accident vasculaire cérébral, dont l'état de mort encéphalique avait été constaté le 25 janvier 2011 au groupe hospitalier du Havre, était âgé de 74 ans. Les recherches entreprises n'ayant permis de retrouver aucun proche ni médecin traitant, la seule donnée médicale connue était la trace d'une hospitalisation six ans plus tôt, pour une alcoolisation avec la mention d'un alcoolo-tabagisme. Les résultats des examens sanguins réalisés n'étaient pas évocateurs d'une hépatopathie, l'échographie hépatobiliaire n'avait révélé aucune anomalie, et l'expert a admis que la notion d'une consommation d'alcool n'est pas un obstacle en soi au don d'organe hépatique et qu'en l'espèce, la stéatose secondaire à la prise d'alcool était faible (moins de 10 %). L'échographie rénale a été considérée comme normale malgré la présence de kystes parapyéliques bilatéraux, mais la radiographie thoraco-pulmonaire a été qualifiée d'anormale, avec une image à type de plaques pleurales et un infiltrat bilatéral. Dans ces circonstances, et alors que la greffe ne présentait pas pour le patient un caractère d'urgence absolue, ce qui permettait de réaliser l'ensemble des examens nécessaires pour s'assurer de la qualité du greffon hépatique, l'absence de réalisation d'un scanner pulmonaire et d'un scanner abdomino-pelvien G... le groupe hospitalier du Havre est constitutive d'une faute, comme l'a retenu l'expert qui a estimé que les règles relatives à l'élimination d'un donneur potentiel en fonction de critères médicaux avaient été méconnues. Cette faute n'est pas imputable à l'Agence de la biomédecine, à laquelle il n'appartenait pas d'ordonner des examens complémentaires. S'agissant du dysfonctionnement dans la transmission de l'information : 15. Il résulte de l'instruction que l'équipe chirurgicale du CHU de Bordeaux qui avait prélevé le greffon hépatique était encore présente au bloc opératoire du groupe hospitalier du Havre lorsqu'un chirurgien de ce dernier établissement a prélevé les reins et découvert, au plus tard à 7 heures 20, l'adénopathie rénale droite suspecte dont il a demandé un examen histologique à 7 heures 30, tandis que l'équipe du CHU de Bordeaux regagnait son établissement avec le greffon hépatique et un fragment de l'adénopathie. Cette équipe n'a pas informé le chirurgien du CHU de Bordeaux de cette découverte de nature à faire douter de la qualité du greffon hépatique, de sorte que l'intervention commencée à 6 heures 15 avec l'anesthésie du patient a été poursuivie jusqu'au clampage réalisé à 9 heures, rendant l'hépatectomie irréversible. Le défaut de communication entre les deux équipes du CHU de Bordeaux présente un caractère fautif, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté. 16. Il ressort de la chronologie des faits retracée G... le second expert que l'infirmier coordonnateur du groupe hospitalier du Havre a envoyé le ganglion suspect à l'analyse, en a confié une partie à l'équipe du CHU de Bordeaux pour examen anatomopathologique à son retour, et a prévenu l'Agence de la biomédecine. Ainsi, le groupe hospitalier du Havre n'a commis aucune faute dans la transmission de l'information. 17. Pour demander à être dégagée de toute responsabilité dans l'accomplissement de ses missions propres, l'Agence de la biomédecine fait valoir que le risque concernant le greffon a été retranscrit dès la découverte de l'adénopathie rénale dans le dossier " Cristal " qui était à la disposition de l'équipe de transplantation, qu'elle n'avait pas à alerter le CHU de Bordeaux sur le doute quant à la qualité du greffon, et qu'elle lui a transmis les résultats du contrôle anatomopathologique à 9 heures 30. Toutefois, la mission de coordination et d'alerte qui lui est impartie lui imposait, compte tenu de l'urgence, de porter à la connaissance de l'établissement greffeur tout élément de nature à influer sur les décisions chirurgicales, alors même qu'une équipe du CHU de Bordeaux était sur place au moment de la découverte de l'adénopathie du pédicule rénal droit du donneur, et de s'assurer de la bonne réception de cette information, ce qui n'a pas été fait. Ainsi, l'Agence de la biomédecine, qui a commis une faute dans l'accomplissement de ses missions propres, ne peut être dégagée de toute responsabilité. Sur le lien de causalité : 18. Il résulte de l'instruction que la myélinolyse centro et extra-pontine à l'origine des séquelles dont M. F... est resté atteint est une complication rare de la greffe hépatique résultant de mécanismes complexes encore inexpliqués, en lien avec une correction très rapide de l'hyponatrémie (insuffisance de la concentration de sodium dans le sang). En l'espèce, l'hypothèse non contestée retenue G... les experts successifs est que la survenue de la myélinolyse était en rapport avec l'importance, et probablement la rapidité de la correction de l'hyponatrémie durant le temps opératoire. Le premier expert a expliqué que la transplantation hépatique s'est accompagnée d'importants apports intraveineux de sodium dont la finalité n'était pas de corriger l'hyponatrémie chronique initiale modérée, mais de compenser de volumineuses pertes sanguines (12 litres lors de la première intervention et 15 litres lors de la seconde) liées à l'existence d'une hypertension portale et à des troubles de la coagulation en relation avec la cirrhose. Le second expert a apporté des précisions en distinguant les pertes sanguines " prévisibles " liées aux conditions anatomiques locales, en rapport direct avec l'état cirrhotique, et celles " surnuméraires " en rapport avec les temps opératoires supplémentaires imputables au changement de greffon en cours de procédure. Il a relevé que l'absence de disponibilité d'un greffon au moment adéquat avait été à l'origine d'une prolongation du temps chirurgical des deux phases opératoires du fait de la nécessité, lors de la première, de réaliser une anastomose porto-cave temporaire au moyen d'un tube artificiel, et lors de la seconde, de procéder à une réouverture pariétale, de supprimer le bypass veineux artificiel et de retrouver les structures vasculaires, biliaires ou autres abandonnées lors du temps précédent. Il en est résulté une majoration des saignements, imposant un accroissement des apports salés. En outre, s'il n'y a pas eu de saignement significatif lors de la phase intermédiaire d'anhépatie d'une durée de 16 heures 45, il a été néanmoins nécessaire de poursuivre la correction de la natrémie, car une hyponatrémie non corrigée risque de provoquer un œdème cérébral. Ainsi qu'il a été dit au point 3, l'expert a attribué à ces " suppléments " thérapeutiques dus au retard de réalisation de la phase d'implantation du greffon une contribution de 25 % à la survenue de la myélinolyse. Ce retard est en lien avec le dysfonctionnement dans la transmission de l'information et engage la responsabilité solidaire du CHU de Bordeaux et de l'Agence de la biomédecine. 19. Il résulte de l'instruction que la découverte de l'adénopathie rénale suspecte au plus tard à 7 heures 20 permettait d'alerter le chirurgien du CHU de Bordeaux en temps utile et d'éviter le clampage rendant l'hépatectomie irréversible, réalisé seulement à 9 heures. G... suite, la faute commise G... le groupe hospitalier du Havre en s'abstenant de réaliser les examens complémentaires qui auraient pu faire douter plus tôt de la qualité du greffon hépatique est sans lien avec la survenue de la myélinolyse. Dans ces circonstances, la responsabilité du groupe hospitalier du Havre n'est pas engagée. Sur les modalités de la réparation : 20. Il résulte des termes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique que la réparation d'un accident médical ou d'une affection iatrogène G... l'ONIAM au titre de la solidarité nationale n'est possible qu'en dehors des cas où cet accident ou cette affection serait causé directement soit G... un acte fautif d'un professionnel de santé ou d'un établissement, service ou organisme mentionné au I du même article, soit G... un défaut d'un produit de santé. 21. Lorsque, dans un tel cas dont les conséquences dommageables remplissent les conditions prévues G... le II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, une faute commise G... un professionnel, un établissement, un service ou un organisme mentionné au I du même article a, sans être la cause directe du dommage, fait néanmoins perdre à la victime une chance d'y échapper ou de se soustraire à ses conséquences, cette dernière a droit à la réparation intégrale de son préjudice au titre de la solidarité nationale, mais l'indemnité due G... l'ONIAM doit être réduite du montant de l'indemnité mise à la charge du professionnel, de l'établissement, du service ou de l'organisme responsable de la perte de chance, laquelle est égale à une fraction des dommages, fixée à raison de l'ampleur de la chance perdue. 22. G... suite, il appartient au juge saisi G... la victime d'un accident médical ou d'une affection iatrogène de conclusions indemnitaires invoquant la responsabilité pour faute d'un professionnel de santé ou d'un établissement, service ou organisme mentionné au I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, de déterminer si le dommage a été directement causé G... la faute invoquée et, dans ce cas, si l'acte fautif est à l'origine des dommages corporels invoqués ou seulement d'une perte de chance de les éviter. Si l'acte fautif n'est pas la cause directe de l'accident ou de l'affection iatrogène, il lui appartient de rechercher, le cas échéant d'office, si le dommage subi présente le caractère d'anormalité et de gravité requis G... les dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique et doit, G... suite, faire l'objet d'une réparation G... l'ONIAM au titre de la solidarité nationale. Enfin, dans le cas d'une réponse positive à cette dernière question, si la faute reprochée au professionnel de santé ou à l'établissement, service ou organisme mentionné au I de l'article L.1142-1 du code de la santé publique a fait perdre à la victime une chance d'éviter le dommage ou de se soustraire à ses conséquences, il appartient au juge, tout en prononçant le droit de la victime à la réparation intégrale de son préjudice, de réduire l'indemnité due G... l'ONIAM du montant qu'il met alors, à ce titre, à la charge du responsable de cette perte de chance. 23. Il résulte de ce qui a été dit au point 18 que le dysfonctionnement dans la transmission de l'information a fait perdre à M. F... une chance de 25 % d'éviter la survenue d'une myélinolyse. 24. Aux termes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé G... décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail. Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé G... décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé G... ledit décret. " Aux termes de l'article D. 1142-1 du même code : " Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l'article L. 1142-1 est fixé à 24 %. (...). " En l'espèce, le déficit fonctionnel permanent imputable à la myélinolyse a été évalué à 56 % G... le premier expert et à 40 % G... le second. 25. Il résulte des dispositions citées au point précédent que l'ONIAM doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation de dommages résultant directement d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins à la condition qu'ils présentent un caractère d'anormalité au regard de l'état de santé du patient comme de l'évolution prévisible de cet état. La condition d'anormalité du dommage prévue G... ces dispositions doit toujours être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement. Lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé G... sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible. Pour apprécier le caractère faible ou élevé du risque dont la réalisation a entraîné le dommage, il y a lieu de prendre en compte la probabilité de survenance d'un événement du même type que celui qui a causé le dommage et entraînant une invalidité grave ou un décès. Une probabilité de survenance du dommage qui n'est pas inférieure ou égale à 5 % ne présente pas le caractère d'une probabilité faible, de nature à justifier la mise en œuvre de la solidarité nationale. 26. Il est constant que le carcinome hépatocellulaire dont M. F... était atteint aurait conduit à son décès dans l'année en l'absence de greffe hépatique. Ainsi, cette intervention n'a pas entraîné de conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé en l'absence de traitement. 27. Le second expert a qualifié la myélinolyse de complication extrêmement rare de la greffe hépatique, et le premier a indiqué qu'elle pouvait atteindre une incidence de 2 % selon certains auteurs, en particulier lorsqu'il existe une hyponatrémie préopératoire. Toutefois, ainsi qu'il a été exposé au point 18, cette complication résulte de mécanismes complexes encore inexpliqués, en lien avec l'administration d'apports salés importants pour compenser des pertes sanguines. Elle doit donc être regardée comme une affection iatrogène. Il résulte de l'instruction que le risque de myélinolyse n'est que de 1 à 1,5 % pour les patients présentant une hyponatrémie inférieure à 120 mmol/l, plus importante que celle de M. F... qui était modérée à 128 mmol/l. Le rôle potentiel du diabète dans la survenue de cette affection n'est qu'une hypothèse non argumentée évoquée G... le premier expert. Si les experts ont estimé que la cirrhose décompensée et ses conséquences, c'est-à-dire une hyponatrémie préopératoire et une hypertension portale avec des dilatations variqueuses, avaient eu une part prédominante dans la réalisation du risque, la greffe hépatique, intervention G... nature hémorragique, donc imposant des apports salés susceptibles d'entraîner une myélinolyse, constitue une thérapie de dernier recours pour de nombreux patients atteints comme M. F... d'une cirrhose décompensée avec les mêmes risques de saignements très importants. La myélinolyse n'en demeure pas moins une complication rare de cette intervention. Dans ces circonstances, l'existence d'une exposition particulière de M. F... à sa survenue ne peut être retenue. G... suite, cette affection iatrogène a eu pour le patient des conséquences anormales au sens des dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique. L'ONIAM n'est pas fondé à soutenir, pour demander sa mise hors de cause, que la part du dommage non mise à la charge des établissements fautifs serait seulement en relation avec l'état antérieur de M. F.... 28. Il résulte de ce qui précède que la réparation des préjudices de M. F... incombe solidairement au CHU de Bordeaux et à l'Agence de la biomédecine à hauteur de 25 %, et à l'ONIAM à hauteur de 75 %. Sur les préjudices de M. F... : En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux : S'agissant des frais divers : 29. Il est justifié de 292,40 euros de frais de téléphone et de télévision exposés lors des hospitalisations en service de médecine physique et de réadaptation au cours de l'année 2011, et de 218 euros de frais de copie du dossier médical. Les frais divers s'élèvent ainsi à 510,40 euros. S'agissant de l'aménagement du domicile : 30. Le premier expert, qui a indiqué que des travaux d'aménagement de la salle de bains ont été réalisés pour permettre à M. F... d'y accéder en fauteuil roulant, que des portes ont été remplacées avec le déplacement de diverses prises électriques et assimilées, et que des travaux de peinture ont été réalisés, a retenu 19 200,47 euros de frais d'aménagement du domicile imputables aux séquelles de la myélinolyse, dont 5 895,44 euros ont été pris en charge G... la Maison départementale pour les personnes handicapées (MDPH). Toutefois, les dépenses qu'il a admises ne sont pas détaillées, et les pièces produites ne permettent pas de retrouver quelles factures ont été prises en compte pour aboutir à 19 200,47 euros. Eu égard au handicap, il y a lieu d'admettre les travaux de réfection de la salle de bains pour 10 677,65 euros, les travaux de menuiserie pour 1 695,91 euros, le déplacement de prises et d'interrupteurs électriques pour 1 880,70 euros, et l'acquisition de matériel, dont une porte à deux battants, pour 3589,93 euros, soit 17 844,19 euros dont il convient de déduire la participation de la MDPH. Ce préjudice s'élève ainsi à 11 948,75 euros. S'agissant de l'aménagement du véhicule : 31. Il résulte de l'instruction que du fait de son handicap, M. F... ne pouvait s'installer seul sur le siège passager d'un véhicule. La circonstance, à la supposer établie, que le véhicule dont le couple était propriétaire au moment du dommage, qui avait plus de quinze ans, n'aurait pas été aménageable, est sans incidence sur le fait que seul le surcoût de l'aménagement, à l'exclusion de l'acquisition d'un nouveau véhicule, ouvre droit à indemnisation. Le dispositif d'aménagement, d'un coût de 10 085,35 euros, a été acquis le 30 novembre 2018. Eu égard au décès de M. F... le 13 juillet 2022, antérieurement au premier renouvellement, il y a lieu de fixer le préjudice à 10 085,35 euros. S'agissant de l'assistance G... une tierce personne : 32. D'une part, lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire déterminé, au vu des pièces du dossier, G... référence, soit au montant des salaires des personnes à employer augmentés des cotisations sociales dues G... l'employeur, soit aux tarifs des organismes offrant de telles prestations, en permettant le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat et sans être lié G... les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée G... un membre de la famille ou un proche de la victime. 33. D'autre part, en vertu des principes qui régissent l'indemnisation G... une personne publique des victimes d'un dommage dont elle doit répondre, il y a lieu de déduire de l'indemnisation allouée à la victime d'un dommage corporel au titre des frais d'assistance G... une tierce personne le montant des prestations dont elle bénéficie G... ailleurs et qui ont pour objet la prise en charge de tels frais. Il en est ainsi alors même que les dispositions en vigueur n'ouvrent pas à l'organisme qui sert ces prestations un recours subrogatoire contre l'auteur du dommage. La déduction n'a toutefois pas lieu d'être lorsqu'une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement au bénéficiaire s'il revient à meilleure fortune. 34. La prestation de compensation du handicap accordée à toute personne handicapée, mentionné au 1° de l'article L. 245-3 du code de l'action sociale et des familles correspondant aux charges liées à un besoin d'aides humaines y compris, le cas échéant, celles apportées G... les aidants familiaux, a le même objet que l'indemnité allouée à la victime au titre de l'assistance G... tierce personne et ne peut faire l'objet, en vertu de l'article L. 245-7 du même code, d'un remboursement en cas de retour à meilleure fortune. Il suit de là que le montant de cette prestation peut être déduite d'une rente ou indemnité allouée au titre de l'assistance G... tierce personne. 35. Il résulte de l'instruction que l'accident médical a entraîné un handicap lourd, M. F... ne pouvant se déplacer qu'en fauteuil roulant, n'étant pas autonome pour les transferts du lit au fauteuil et ayant besoin d'aide pour la toilette, l'habillage et les gestes de la vie quotidienne. Toutefois, il parvenait à s'alimenter seul bien qu'avec difficulté, pouvait s'exprimer avec une force de la voix atténuée et ne présentait aucun trouble sphinctérien. Lors de la première expertise réalisée le 8 avril 2013, une désorientation temporelle mais non spatiale a été constatée, et son épouse a évoqué des troubles cognitifs. Le 28 février 2018, le second expert, qui a constaté un état globalement stationnaire, n'a retrouvé ni troubles cognitifs, ni désorientation. Il a précisé le besoin de " tierce personne à temps plein " retenu G... le premier expert en l'évaluant à 40 heures G... semaine, ce qui apparaît insuffisant au regard du handicap, lequel ne justifiait cependant pas les 24 heures G... jour sollicitées. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de fixer le besoin d'assistance nécessaire à 10 heures G... jour. 36. L'assistance décrite au point précédent ne présentant pas un caractère spécialisé et ayant toujours été assurée G... Mme F..., il y a lieu de l'évaluer au coût horaire moyen du salaire minimum au cours de la période en cause, du premier retour au domicile de M. F... le 2 décembre 2011 (hospitalisation à domicile) à son décès le 13 juillet 2022, majoré afin de tenir compte des charges sociales, des majorations de rémunération dues les dimanches et jours fériés et des congés payés, soit 15,50 euros G... heure. Il résulte de l'instruction que la durée totale des journées passées au domicile a été de 3 803 jours, ce qui conduit à fixer le préjudice à 589 465 euros. Ainsi qu'il a été exposé au point 34, il y a lieu de déduire la prestation de compensation du handicap perçue à hauteur d'un montant total de 56 760 euros. L'indemnité totale due s'élève ainsi à 532 705 euros. En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux : 37. Il résulte de l'instruction que le déficit fonctionnel temporaire imputable à l'accident médical a été total durant 356 jours d'hospitalisation (du 26 au 31 décembre 2011 après déduction d'une période de deux mois correspondant aux suites normales de la greffe, du 10 février au 8 mars 2012 et du 30 novembre au 21 décembre 2012), et de classe IV (75 %) durant 4133 jours (du 1er janvier au 9 février 2012, du 9 mars au 29 novembre 2012 et du 22 décembre 2012 au 7 avril 2013). Il y a lieu de fixer ce préjudice à 10 700 euros sur la base de 500 euros G... mois de déficit total. 38. Il sera fait une juste appréciation des souffrances endurées, dont l'évaluation à 5,5 sur 7 G... le second expert n'est pas contestée, en fixant leur indemnisation à 20 000 euros. 39. Les experts ont retenu un déficit fonctionnel permanent de 70 %, dont 50 % pour les déficits sensitivo-moteurs avec un syndrome cérébelleux incomplet, ce qui inclut une dysarthrie, une tétraparésie limitant très fortement la station debout et empêchant la marche, une dystonie assez sévère du membre supérieur droit et une raideur de l'épaule droite limitée à 45 % en abduction, 5 % pour des troubles cognitifs mineurs, 10 % pour un état épileptique maîtrisé G... un traitement bien toléré et 5 % pour un état psychique permanent douloureux. Il résulte de l'instruction que toutes ces séquelles sont la conséquence directe de la myélinolyse, de sorte qu'il n'y a pas lieu de réduire le taux de 70 % pour tenir compte d'un " état antérieur " comme l'a fait le premier expert, ou du déficit fonctionnel " habituel après greffe " comme l'a fait le second. M. F... était âgé de 60 ans à la date de consolidation de son état de santé. Il sera fait une juste appréciation du préjudice qu'il a subi jusqu'à son décès à l'âge de 70 ans en le fixant à 63 000 euros. 40. Le préjudice esthétique, caractérisé G... des dystonies, une paralysie faciale, des attitudes vicieuses des membres supérieurs et inférieurs, une immobilisation au lit puis au fauteuil, des mouvements incontrôlés et des escarres, a été coté à 6 sur 7 jusqu'au 31 décembre 2011, puis à 5 sur 7 après cette date, et il est resté inchangé après consolidation. Il y a lieu d'évaluer le préjudice esthétique temporaire et permanent à une somme globale de 18 000 euros. 41. Il résulte de l'instruction que M. F..., propriétaire d'un bateau de plaisance, pratiquait des activités de pêche et de navigation dont la reprise est devenue impossible du fait des séquelles de la myélinolyse. Il y a lieu d'évaluer son préjudice d'agrément à 3 000 euros. 42. Il sera fait une juste appréciation du préjudice sexuel retenu G... le premier expert en fixant son indemnisation à 2 000 euros. 43. Il résulte de ce qui précède que les préjudices de M. F... entrés dans sa succession s'élèvent à 671 949,50 euros, et doivent être réparés à hauteur de 167 987,38 euros G... le CHU de Bordeaux et l'Agence de la biomédecine, et de 503 962,12 euros G... l'ONIAM. Sur les préjudices de Mme F... : 44. Les dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ne prévoient d'indemnisation au titre de la solidarité nationale que pour les préjudices du patient et, en cas de décès, de ses ayants droit. Il ne résulte pas de l'instruction que le décès de M. F..., plus de dix ans après les évènements en litige, serait en lien avec l'affection iatrogène survenue en 2011. G... suite, l'ONIAM ne saurait être condamné à prendre en charge les préjudices de Mme F.... L'indemnisation ne peut être demandée qu'aux établissements responsables de fautes dans la prise en charge de son époux, dans la proportion de la perte de chance. 45. Il y a lieu d'admettre 980 euros de frais d'hébergement de Mme F... lors de l'hospitalisation de son époux du 26 mars au 30 juin 2011. En revanche, les justificatifs produits ne permettent pas d'identifier les frais de péages et de carburant en lien avec cette hospitalisation. 46. Si Mme F... invoque l'angoisse ressentie durant la phase d'anhépatie de son époux, elle ne peut solliciter la réparation d'un préjudice d'affection à ce titre. 47. Il résulte de l'instruction, notamment de la première expertise, que Mme F... a subi un préjudice sexuel. Il en sera fait une juste appréciation en l'évaluant à 2 000 euros. 48. Il résulte de ce qui précède Mme F... a droit à la réparation de ses préjudices G... le CHU de Bordeaux et l'Agence de la biomédecine à hauteur de 25 % de la somme de 2 980 euros, soit 745 euros. 49. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande d'indemnisation des préjudices de M. F... en tant qu'elle excède le montant de 1 614 768,80 euros sollicité en première instance, que le CHU de Bordeaux et l'Agence de la biomédecine doivent être solidairement condamnés à verser les sommes de 167 987,38 euros à la succession de M. F... et de 745 euros à Mme F..., et que l'ONIAM doit être condamné à verser la somme de 503 962,12 euros à la succession de M. F.... Sur les droits de la CPAM de la Charente-Maritime : 50. La CPAM de la Charente-Maritime a demandé en première instance la condamnation du seul CHU de Bordeaux à rembourser ses débours. G... suite, l'Agence de la biomédecine est fondée à opposer l'irrecevabilité des conclusions, nouvelles en appel, dirigées à son encontre. 51. Une caisse primaire d'assurance-maladie ayant été mise à même de faire valoir ses droits devant le tribunal administratif mais ayant omis de demander en temps utile le remboursement de frais exposés antérieurement au jugement de ce tribunal n'est plus recevable à demander ce remboursement devant le juge d'appel. G... suite, le CHU de Bordeaux et la SHAM sont fondés à opposer l'irrecevabilité de la demande, présentée pour la première fois en appel, de débours exposés en 2013, antérieurement au jugement du 14 avril 2015. 52. La CPAM de la Charente-Maritime justifie avoir exposé, en lien avec la faute retenue, des frais d'hospitalisation d'un montant total de 169 933,45 euros entre le 26 mars 2011 et le 21 décembre 2012, ainsi que 4 642,80 euros de frais médicaux entre le 5 décembre 2011 et le 23 juin 2012, 252 euros de frais pharmaceutiques le 2 décembre 2011, 2 045,61 euros de frais d'appareillage entre le 26 novembre 2011 et le 13 juin 2012, et 296,10 euros de frais de transport le 30 novembre 2012, puis, postérieurement au jugement du 14 avril 2015 et jusqu'au décès de M. F... le 13 juillet 2022, 61 478,52 euros de frais médicaux, 3 611,20 euros de frais pharmaceutiques et 3 862,74 euros de frais d'appareillage, soit un total de 246 122,42 euros. Le CHU de Bordeaux et la SHAM, et l'Agence de la biomédecine, doivent être solidairement condamnés à lui verser 25 % de cette somme, soit 61 530,60 euros. Sur les intérêts et leur capitalisation : 53. D'une part, lorsqu'ils sont demandés, les intérêts au taux légal sur le montant de l'indemnité allouée sont dus, quelle que soit la date de la demande préalable, à compter du jour où cette demande est parvenue à l'autorité compétente ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine. D'autre part, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond. Cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière, sans qu'il soit besoin d'une nouvelle demande à l'expiration de ce délai. De même, la capitalisation s'accomplit à nouveau, le cas échéant, à chaque échéance annuelle ultérieure, sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande. 54. Les intérêts sur les condamnations prononcées au bénéfice de la succession de M. F... et de Mme F... G... le présent arrêt prennent effet à compter du 8 octobre 2013, date de réception des demandes préalables, et leur capitalisation à compter du 8 février 2019, date à laquelle elle a été demandée pour la première fois devant la cour, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure. Sur l'appel en garantie : 55. Le CHU de Bordeaux, qui n'a pas demandé devant le tribunal à être garanti des condamnations éventuellement prononcées à son encontre, n'est pas recevable, ainsi que le souligne l'Agence de la biomédecine, à solliciter pour la première fois en appel sa garantie dans le cadre de la condamnation solidaire prononcée à leur encontre. Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte : 56. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, G... la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " Aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " 57. Le présent arrêt étant exécutoire, les conclusions de M. et Mme F... tendant à ce que les condamnations prononcées à leur profit soient assorties d'une injonction de paiement sous astreinte ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais exposés G... les parties à l'occasion du litige : 58. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser les frais de la première expertise, liquidés et taxés à la somme de 3 051,59 euros G... une ordonnance du président du tribunal administratif de Bordeaux du 24 septembre 2013, à la charge du CHU de Bordeaux, et de mettre ceux de la seconde expertise, liquidés et taxés à la somme de 3 334,80 euros G... une ordonnance de la présidente de la cour du 19 juillet 2018, à la charge de l'ONIAM. 59. Il y a lieu de mettre une somme de 2 000 euros à la charge solidaire du CHU de Bordeaux et de l'Agence de la biomédecine et une somme de 2 000 euros à la charge de l'ONIAM au titre des frais exposés G... M. et Mme F... à l'occasion du présent litige. 60. Il y a lieu de mettre à la charge solidaire du CHU de Bordeaux, de la SHAM et de l'Agence de la biomédecine, les sommes de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue G... les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à la CPAM de la Charente-Maritime. 61. L'Agence de la biomédecine, qui est une partie perdante, n'est pas fondée à demander l'allocation d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux nos 1304635, 1400362 du 14 avril 2015 est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur la demande de M. et Mme F... tendant à la condamnation de la SHAM à garantir le CHU de Bordeaux des condamnations prononcées à son encontre. Article 2 : Le CHU de Bordeaux et l'Agence de la biomédecine sont solidairement condamnés à verser les sommes de 167 987,38 euros à la succession de M. F... et de 745 euros à Mme F..., avec intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2013. Les intérêts échus à la date du 8 février 2019, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts. Article 3 : L'ONIAM est condamné à verser la somme de 503 962,12 euros à la succession de M. F..., avec intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2013. Les intérêts échus à la date du 8 février 2019, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts. Article 4 : Le CHU de Bordeaux, la SHAM et l'Agence de la biomédecine sont solidairement condamnés à verser la somme de 61 530,60 euros à la CPAM de la Charente-Maritime. Article 5 : Le surplus du jugement du tribunal administratif de Bordeaux nos 1304635, 1400362 du 14 avril 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 6 : Les frais de la seconde expertise, liquidés et taxés à la somme de 3 334,80 euros G... une ordonnance de la présidente de la cour du 19 juillet 2018, sont mis à la charge de l'ONIAM. Article 7 : Le CHU de Bordeaux et l'Agence de la biomédecine verseront solidairement à Mme F... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 8 : L'ONIAM versera à Mme F... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 9 : Le CHU de Bordeaux, la SHAM et l'Agence de la biomédecine verseront solidairement à la CPAM de la Charente-Maritime les sommes de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 10 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 11 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... F..., à M. A... F..., à M. E... F..., au centre hospitalier universitaire de Bordeaux, à la société hospitalière d'assurances mutuelles, au groupe hospitalier du Havre, à l'Agence de la biomédecine, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Charente-Maritime. Des copies en seront adressées aux experts. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public G... mise à disposition au greffe le 3 novembre 2022. La rapporteure, Anne B... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX03946
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal des pensions de Pau d'annuler la décision du 27 avril 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de révision de sa pension pour aggravation de ses infirmités et reconnaissance de nouvelles infirmités. Par un jugement du 16 mai 2019, le tribunal des pensions de Pau a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 juillet 2019 et le 8 juin 2021, M. B..., représenté par Me Tucoo-Chala, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions de Pau du 16 mai 2019 ; 2°) d'annuler la décision ministérielle du 27 avril 2017 ; 3°) d'ordonner une nouvelle expertise médicale pour déterminer le taux des infirmités objet de la demande ; 4°) de reconnaître son droit à pension au taux de 10 % pour l'infirmité " séquelles de fracture de la clavicule gauche " ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ainsi que " les entiers dépens ". Il soutient que : - les certificats médicaux démontrent une aggravation de son infirmité " rachialgies post-traumatiques diffuses, arthrose vertébrale étagée, raideur rachidienne importante avec cervicalgies fréquentes et sciatalgies " qui justifie une révision de sa pension, à tout le moins une expertise ; - c'est à tort que les premiers juges lui ont opposé le jugement du 15 novembre 2012 pour rejeter la demande relative à l'infirmité " perte de sélectivité due aux traumatismes sonores répétés " ; l'aggravation de cette infirmité n'a pas été expertisée le 24 août 2016 ; l'administration n'apporte pas la preuve d'une cause étrangère ou d'une affection distincte ; une expertise médicale s'impose sur cette infirmité, tout comme pour les infirmités " acouphènes " ; - l'infirmité " séquelles de fracture de la clavicule gauche, déformation visible de la clavicule " est imputable au service puisqu'elle est consécutive à un accident de la circulation intervenu le 11 septembre 1988 lors d'un trajet de retour à son domicile ; - l'infirmité " séquelles de fracture du gros orteil droit ; marche normale, hallus valgus constitutionnel opéré ", dont l'existence est avérée à la date de sa demande, nécessite une nouvelle expertise médicale ; - l'existence de l'infirmité " perte de sélectivité due aux traumatismes sonores répétés ; différence entre 4 000 et 1 000 décibels : oreille droite 30 décibels - oreille gauche 45 décibels inférieur à 50 décibels " est parfaitement établie et une nouvelle expertise médicale s'impose ; - l'existence de l'infirmité " séquelles de fracture de la clavicule droite " est démontrée par les pièces médicales et cette infirmité n'a pas été examinée par le médecin de l'administration ; une expertise médicale doit être ordonnée ; - s'agissant de l'infirmité " fractures bi-malléolaires du pied gauche ", l'administration ne saurait lui opposer le jugement du tribunal des pensions de Pau du 4 mai 1995 qui portait sur une autre infirmité ; une expertise médicale est nécessaire. Par deux mémoires en défense, enregistrés les 13 décembre 2019 et 24 juin 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que : - s'agissant des infirmités auditives, M. B... n'avait, dans sa demande, sollicité que la prise en compte de l'infirmité " perte de sélectivité ", ce qui explique que l'expert ne se soit prononcé que sur celle-ci ; en l'absence de demande préalable, les conclusions relatives aux infirmités hypoacousies et acouphènes sont irrecevables ; la demande relative à la perte de sélectivité qui, contrairement à ce que M. B... soutient, n'est pas une demande nouvelle, a déjà été rejetée par un jugement du 15 novembre 2012 revêtu de l'autorité de chose jugée ; au demeurant, la différence de décibels est inférieure à 50 ; - l'infirmité " fractures bi-malléolaires du pied gauche " est la même que celle dénommée " séquelles de fractures de la cheville gauche " qui a déjà été rejetée pour défaut d'imputabilité au service par jugement du 4 mai 1995 ; M. B... ne rapporte pas la preuve d'un fait nouveau précis de service qui en soit à l'origine ; - il n'est pas établi par les pièces médicales produites que l'infirmité relative aux rachialgies, pour laquelle M. B... bénéficie déjà d'une pension avec un taux de 40 %, se serait aggravée le 20 novembre 2016 par rapport à l'expertise qui en a été faite le 13 mai 2010 ; - l'accident de la circulation dont a été victime M. B... a eu lieu lors d'une permission et ses séquelles ne sont pas imputables au service ; l'infirmité " séquelles de fractures de la clavicule gauche " doit être rejetée pour ce motif ; - alors qu'il la rattache à un accident de la circulation survenu le 24 novembre 1977, l'intéressé n'a pas invoqué d'infirmité relative à des séquelles de fracture de la clavicule droite lors de l'expertise du 20 novembre 2016 ; aucun élément médical, contemporain à la demande, n'atteste de l'existence d'une gêne fonctionnelle, imputable au service, d'un taux indemnisable ; l'expertise, qui a bien porté sur une déformation visible des clavicules, tend à démontrer la modicité de cette infirmité ; - l'infirmité relative aux séquelles de fracture du gros orteil droit a été expertisée le 20 novembre 2016 et a conduit à retenir un taux de 5 %, inférieur au taux indemnisable ; - les certificats médicaux établis en 2019 et qui relatent des constatations médicales faites au jour de leur rédaction doivent être écartés dès lors qu'en vertu de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité, il convient de se placer à la date de la demande pour apprécier le taux d'invalidité. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision 2019/004577 du 16 août 2019. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. D... A..., - les conclusions de Mme Kolia Gallier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., né le 25 juillet 1947, a été radié des cadres de l'armée de terre le 31 décembre 1992 au grade de capitaine. Une pension militaire d'invalidité lui a été concédée par arrêté du 4 février 2008, au taux de 70 % pour les trois infirmités suivantes : " rachialgies post-traumatiques diffuses, arthrose vertébrale étagée, raideur rachidienne importante avec cervicalgies fréquentes et sciatalgies " (taux de 40 %), " hypoacousie de perception bilatérale, perte auditive oreilles droite et gauche : 52,5 décibels " (taux de 30 %) et " acouphènes " (taux de 10 %). Il a présenté, le 16 octobre 2014, une demande de révision de sa pension pour aggravation de ses infirmités et prise en compte de nouvelles infirmités. Par une décision du 27 avril 2017, prise après expertises médicales réalisées les 24 août et 20 novembre 2016 et avis de la commission de réforme, la ministre des armées a rejeté sa demande. Par un jugement du 16 mai 2019, le tribunal des pensions de Pau a rejeté la demande de l'intéressé d'annuler cette décision. L'appel formé par M. B... à l'encontre de ce jugement a été transféré à la cour à la suite de la réforme, par la loi du 13 juillet 2018 susvisée, du contentieux des décisions individuelles relatives aux pensions militaires d'invalidité. Sur les infirmités déjà pensionnées : 2. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, alors en vigueur : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. (...) ". En ce qui concerne l'infirmité " rachialgies post-traumatiques diffuses, arthrose vertébrale étagée, raideur rachidienne importante avec cervicalgies fréquentes et sciatalgies " : 3. Il résulte de l'instruction que M. B... qui bénéficie d'une pension, à un taux de 40 %, pour l'infirmité " rachialgies post-traumatiques diffuses, arthrose vertébrale étagée, raideur rachidienne importante avec cervicalgies fréquentes et sciatalgies " résultant d'une blessure du 16 décembre 1980, a sollicité une première fois, le 22 octobre 2009, la révision de sa pension pour aggravation de cette infirmité. Cette demande a été rejetée par décision ministérielle du 19 novembre 2010 au vu de l'avis du rhumatologue expert auprès de la commission de réforme, qui a conclu à une rachialgie diffuse et à une discopathie L5-S1 et a proposé le maintien du taux de 40 % après avoir noté " qu'il existe une discordance entre l'importance des symptômes rapportés (douleurs et enraidissement) et les lésions dégénératives discales qui sont modérées (pas d'atteinte radiologique spécifique à l'IRM permettant de confirmer une spondylarthrite évolutive, pas de signes neurologiques déficitaires) ". L'expertise du 20 novembre 2016 a également conclu au maintien du taux de 40 % après avoir pris connaissance des certificats médicaux des 20 août et 3 octobre 2014 faisant état d'une aggravation de la discarthrose C5-C6 avec uncarthrose étagée, sans précision sur les séquelles supplémentaires que celle-ci occasionnerait, et après avoir relevé que, par rapport à l'expertise de 2010, il n'existait pas de réelle modification de la symptomatologie. Si M. B... produit deux nouveaux certificats médicaux attestant notamment d'une " raideur rachidienne étendue à la fois cervico-dorso-lombaire en rapport avec une arthrose rachidienne ", le constat établi en 2019 par son généraliste n'est pas de nature à établir une aggravation de son infirmité à la date de sa demande, et le certificat du rhumatologue établi en 2014 est contredit par les conclusions de l'expertise du médecin militaire. Par suite, l'existence d'une aggravation de l'infirmité qui serait de nature à justifier la révision de la pension accordée à M. B... n'est pas établie. En ce qui concerne les infirmités " hypoacousie de perception bilatérale. Perte auditive oreilles droite et gauche : 52,5 décibels ", " acouphènes " et " perte de sélectivité due aux traumatismes sonores répétés " : 4. Le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. Ainsi l'aggravation de l'infirmité initiale, si elle est seulement due au vieillissement, peut justifier une révision du taux de la pension. En revanche, si le vieillissement cause une nouvelle infirmité, distincte de l'infirmité pensionnée, qui contribue à l'aggravation de celle-ci, les dispositions précitées de l'article L. 29 font obstacle à cette révision, dès lors que l'aggravation est due à une cause étrangère à l'infirmité pensionnée. 5. D'une part, M. B... demande la reconnaissance de l'aggravation des infirmités déjà pensionnées, ainsi que la prise en compte d'une nouvelle infirmité liée à une " perte de sélectivité ". La ministre des armées ne peut sérieusement soutenir que le contentieux ne serait pas lié s'agissant de la demande relative à une aggravation des infirmités déjà pensionnées, alors que la décision en litige, tout comme la commission de réforme, se sont prononcées sur ce point. Elle ne peut davantage se prévaloir de l'autorité de la chose jugée dont est revêtu le jugement du tribunal des pensions du 15 novembre 2012 statuant sur une précédente demande de révision de la pension, eu égard au changement de circonstances de fait allégué par M. B.... En outre, contrairement à ce que soutient le requérant, l'infirmité relative à une perte de sélectivité, qui est une composante de l'hypoacousie, ne saurait donner lieu à un taux d'invalidité distinct des infirmités déjà pensionnées, mais seulement à une majoration éventuelle du taux d'invalidité accordé. 6. D'autre part, il résulte de l'instruction que M. B... perçoit une pension au taux de 30 % pour une perte d'acuité auditive bilatérale de 52,50 décibels et une pension au taux de 10 % pour des acouphènes. L'expertise réalisée le 24 août 2016 ne permet pas de constater une aggravation de ces deux infirmités, pas plus d'ailleurs que les résultats du bilan auditif réalisé le 19 juin 2017 à la demande de M. B.... Par ailleurs, cette même expertise de 2016 a conclu à l'absence de perte de sélectivité en lien avec les traumatismes sonores éprouvés entre le 10 et le 13 février 1987 lors de tirs répétés au fusil et au mortier, puis le 4 décembre 1987 à la suite d'un saut en parachute à 6 000 mètres occasionnant un barotraumatisme bilatéral. L'expert a procédé à un bilan audio-tympanométrique qui révèle notamment une perte de 35-40 % de discrimination en audiométrie vocale, qu'il estime en cohérence avec l'hypoacousie pensionnée, et une absence de distorsion du son, et s'est prononcé au vu de plusieurs bilans audiométriques dont le dernier est daté du 6 octobre 2014. Il confirme ainsi la précédente expertise judiciaire du 19 avril 2012, la différence de perception des fréquences entre 4 000 et 1 000 hertz atteignant des valeurs inférieures au minimum de 50 décibels. Si les résultats des examens réalisés par M. B... en 2017 révèlent la présence d'une telle infirmité, il n'est pas établi que celle-ci aurait déjà été présente à la date de la demande, près de trois ans auparavant. Sur les nouvelles infirmités : En ce qui concerne l'infirmité " fractures bi-malléolaires du pied gauche " : 7. Il résulte de l'instruction que par jugement du 4 mai 1995, le tribunal des pensions de Pau a confirmé l'arrêté du 21 septembre 1993 par lequel le ministre de la défense a rejeté la demande de pension pour l'infirmité " séquelles de fractures de la cheville gauche - enraidissement sous astragalien " qui serait due à un accident survenu le 17 avril 1976, en raison d'un défaut d'imputabilité au service. Si M. B... soutient que cette infirmité est distincte de celle dont il fait état dans sa demande du 16 octobre 2014 et relative à des fractures bi-malléolaires du pied gauche, il n'apporte aucun élément pour démontrer que cette dernière serait différente de celle ayant déjà été rejetée par l'administration. Dans ces conditions, et en l'absence de circonstance de fait ou de droit nouvelle justifiant qu'il soit procédé à un nouvel examen de la demande de l'intéressé, l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du tribunal des pensions de Pau fait obstacle, ainsi que le fait valoir la ministre, à la demande du requérant concernant cette infirmité. En ce qui concerne l'infirmité " séquelles de fracture de la clavicule gauche, déformation visible de la clavicule " : 8. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, alors en vigueur : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un accident de la circulation dont est victime un militaire bénéficiant d'une permission régulière ne peut être regardé comme survenu à l'occasion du service que si cet accident a eu lieu, soit en début de permission pendant le trajet direct de son lieu de service vers le lieu où il a été autorisé à se rendre en permission, soit en fin de permission pendant le trajet inverse. Par suite, un accident de la circulation survenu sur le trajet de retour entre le lieu où un militaire a été autorisé à se rendre en permission et celui de son domicile ne saurait être imputé au service. 9. M. B... souffre des séquelles d'une fracture de la clavicule gauche, survenue lors d'un accident de la circulation le 11 septembre 1988. Il ressort de ses propres déclarations sur les circonstances de l'accident, telles que relatées dans un courrier du 29 septembre 1988, que cet accident est survenu au retour d'une permission, alors qu'il rejoignait son domicile. Par suite, cette infirmité ne résulte pas de blessures occasionnées lors d'un accident survenu sur le trajet direct reliant son lieu de service et le lieu de permission, et ne peut donc être reconnue imputable au service. En ce qui concerne l'infirmité " séquelles de fracture de la clavicule droite " : 10. Lors de l'examen médical du 20 novembre 2016, l'expert, saisi notamment des pathologies relatives aux clavicules, n'a noté aucune doléance de M. B..., ni constaté de pathologie pour la clavicule droite, et a seulement relevé une " déformation visible des clavicules au niveau 1/3MY-1/3INT ". La circonstance que M. B... indique avoir eu un accident de la circulation le 24 novembre 1977 dans le cadre du service est sans incidence sur le fait qu'aucune gêne fonctionnelle n'a pu être établie. Par suite, la ministre des armées a pu rejeter la demande de révision en estimant que l'infirmité alléguée était inexistante. En ce qui concerne l'infirmité " séquelles de fracture du gros orteil droit " : 11. Aux termes de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, alors en vigueur : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; (...) ". Aux termes de l'article L. 6 de ce code, alors en vigueur : " La pension prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé après examen, à son initiative, par une commission de réforme selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. / L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. ". En vertu de ces dernières dispositions, l'administration doit se placer à la date de la demande de pension pour évaluer le degré d'invalidité entraîné par l'infirmité invoquée. 12. L'expertise rendue le 20 novembre 2016 a conclu à un taux d'invalidité inférieur à 5 % pour l'infirmité relative aux séquelles de fracture du gros orteil droit, après que l'expert a relevé l'existence d'une fracture résultant d'un accident de service du 8 décembre 1975 et constaté, lors de l'examen clinique, une marche normale de l'intéressé et le port de semelles. Cette appréciation n'est pas remise en cause par les certificats médicaux produits par M. B... qui font état, en juin 2019, " de métatarsalgies statiques avec hallux-rigidus du côté droit et griffe d'orteil des 2e et 3e orteils " ou d'une pénibilité dans la station debout prolongée. Par suite, la ministre des armées n'a pas méconnu les dispositions précitées en refusant de réviser la pension de M. B... au motif que l'invalidité occasionnée par cette infirmité ne dépassait pas, à la date de la demande de pension, le taux de 10 %. 13. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 27 avril 2017. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant, d'une part, au paiement des entiers dépens du procès, lequel au demeurant n'en comporte aucun, et, d'autre part, à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2022. Le rapporteur, Olivier A... La présidente, Catherine Girault La greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 19BX04064
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de l'arrêté du 16 juillet 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi. Par jugement n° 2006229 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 5 avril 2021, M. A..., représenté par Me Rodrigues, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 31 décembre 2020 ainsi que l'arrêté du 16 juillet 2020 pris à son encontre ; 2°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Rhône de lui délivrer, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou un titre de séjour " salarié " en lui délivrant dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 30 euros par jour de retard ; 3°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet du Rhône de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt en lui délivrant dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 30 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - la décision portant refus de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation individuelle ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences sur sa vie personnelle ; - elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions du 2° bis de l'article L. 313-11 du code précité ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du même code ; - la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ; - elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 3 mars 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ; Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant guinéen né le 21 novembre 2000, déclare être entré en France en février 2016 alors qu'il était encore mineur et a été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance de l'Isère avant l'âge de 16 ans. L'intéressé a sollicité, le 1er février 2019, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 16 juillet 2020, le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur la légalité de la décision portant refus de séjour : 2. En premier lieu, la décision contestée portant refus de séjour comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement en visant notamment le 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les raisons justifiant le rejet de la demande de titre de séjour présentée par M. A.... Si l'intéressé conteste le bien-fondé de ces motifs, cette circonstance est par elle-même sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée doit être écarté. 3. En deuxième lieu, il ressort des mentions de cette décision que le préfet du Rhône a pris en considération la situation personnelle de M. A.... Si le requérant soutient qu'il n'a pas pu poursuivre de formation durant les années scolaires 2019-2020 et 2020-2021 en raison de l'illégalité du récépissé qui lui avait été délivré ne l'autorisant pas à travailler et soutient qu'il est isolé dans son pays d'origine, ces éléments ne sauraient caractériser de la part du préfet du Rhône un défaut d'examen mais relèvent de l'appréciation du bien-fondé de la demande. Dès lors, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté. 4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée (...) ". 5. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention " vie privée et familiale ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le juge de l'excès de pouvoir exerce sur cette appréciation un entier contrôle. 6. Il est constant que M. A... a présenté sa demande de titre de séjour dans l'année qui a suivi son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié avant ses seize ans aux services de l'aide sociale à l'enfance. Toutefois, à la date de sa demande de titre de séjour, soit le 1er février 2019, il ne poursuivait aucune formation, ainsi que l'a relevé le préfet du Rhône dans sa décision, dès lors qu'il avait abandonné son cursus de CAP Cuisine au lycée professionnel des métiers René Cassin à Rive-de-Gier en deuxième année au cours de l'année scolaire 2018-2019 le 8 janvier 2019. Il ne justifiait pas davantage du suivi d'une formation à la date de la décision en litige. L'interruption de la formation engagée témoigne de l'absence de caractère réel et sérieux du suivi de la formation sans que M. A... ne puisse à ce titre se prévaloir de l'illégalité du récépissé de demande de titre de séjour qui lui a été accordé et qui est postérieur à cette interruption. En outre, s'agissant de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine, si l'intéressé conteste être en contact avec sa famille restée en Guinée, il n'établit par aucune pièce la réalité du décès de ses parents et a lui-même indiqué dans sa demande de titre de séjour conserver en Guinée sept demi-frères et sœurs avec qui il lui appartient de renouer dès lors qu'aucune contrainte extérieure à sa volonté n'y fait obstacle. Enfin, contrairement à ce qu'il soutient, il ne ressort pas de la décision contestée que le préfet du Rhône aurait fait de l'absence d'isolement dans le pays d'origine un critère prépondérant alors qu'il a porté une appréciation globale sur l'ensemble des critères visés au 2° bis de l'article L. 313-11 du code précité. Par suite, nonobstant l'avis favorable de la structure d'accueil, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet aurait commis une erreur de droit ou méconnu les dispositions précitées du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". 8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est présent en France depuis plus de quatre ans à la date de la décision attaquée. Ainsi qu'il a été rappelé, l'intéressé conserve dans son pays d'origine des attaches familiales qu'il n'a pas en France ainsi que nécessairement des attaches privées. Il ne justifie d'aucune intégration particulière au sein de la société française alors qu'il n'a pas terminé le cursus de CAP Cuisine entamé en 2017 et ne justifie d'aucun diplôme ou suivi de formation. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Rhône a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations et dispositions précitées. Pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de celle-ci sur la situation personnelle de M. A.... 9. En dernier lieu, M. A... réitère en appel le moyen tiré de ce que le préfet du Rhône a entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de faire usage de son pouvoir de régularisation exceptionnelle au vu de sa situation en vertu des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu pour la cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal. Au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, quand bien même le préfet a examiné ce fondement. Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français : 10. Compte tenu de la légalité de la décision portant refus de séjour opposée à M. A..., celui-ci n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre de celle portant obligation de quitter le territoire français. 11. Pour les mêmes motifs que ceux visés au point 8, le moyen tiré de la méconnaissance par la mesure d'éloignement édictée des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi : 12. En raison de l'absence d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de ce que la fixation du pays de destination est dépourvue de base légale doit être écarté. 13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction et d'astreinte et celle présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Rhône. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Bourrachot, président de chambre, Mme Dèche, présidente assesseure, Mme Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 octobre 2022. La rapporteure, V. Rémy-NérisLe président, F. Bourrachot La greffière, A-C. Ponnelle La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY01044 lc
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge, en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2013, à hauteur d'une somme 15 240 euros. Par une ordonnance n° 2000358 du 24 novembre 2020, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 10 décembre 2020, M. A..., représenté par Me Lestoille, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 4ème chambre du tribunal adminitratif de Lyon du 24 novembre 2020 ; 2°) d'examiner l'affaire au fond. Il soutient que : - il a adressé personnellement au tribunal la décision attaquée qui lui avait été réclamée ; - au titre de l'année 2013, il justifie d'une imposition commune avec son épouse qui vivait sous le même toit que lui, et dont il n'était ni divorcé, ni séparé. Par un mémoire enregistré le 6 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - c'est à bon droit que le président de la 4ème chambre du tribunal administratif a rejeté la demande de M. A..., comme manifestement irrecevable en application des dispositions du 4° de l'article R 222-1 du code de justice administrative ; - les époux A... ne vivaient plus sous le même toit en 2013 et devaient faire l'objet d'une imposition distincte. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure, - les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Par une proposition de rectification du 22 octobre 2014, l'administration a notifié à M. A... une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013 dont il a demandé la décharge au tribunal administratif de Lyon. Par l'ordonnance contestée, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif a rejeté sa demande, sur le fondement du 4° de l'article R 222-1 du code de justice administrative, comme manifestement irrecevable, aux motifs qu'en dépit de demandes de régularisation, M. A..., représenté par un avocat, n'a pas présenté de requête, comportant des signets désignant les pièces transmises conformément à l'inventaire par l'intermédiaire de l'application Telerecours et n'a pas non plus produit la décision attaquée. 2. D'une part, aux termes de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales : " En matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif. (...) ". Aux termes de l'article R. 190-1 du même livre : " Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial, selon le cas, de la direction générale des finances publiques ou de la direction générale des douanes et droits indirects dont dépend le lieu de l'imposition (...) ". Aux termes de l'article R. 199-1 du même livre : " L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur sa réclamation, que cette notification soit faite avant ou après l'expiration du délai de six mois prévu à l'article R. 198-10. Toutefois, le contribuable qui n'a pas reçu de décision de l'administration dans le délai de six mois mentionné au premier alinéa peut saisir le tribunal dès l'expiration de ce délai. (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation (...) ". Le dernier alinéa de cet article R. 421-2 prévoit, dans le cas où une réclamation fait l'objet d'une décision implicite de rejet, que : " La date du dépôt de la réclamation à l'administration, constatée par tous moyens, doit être établie à l'appui de la requête ". Aux termes de l'article R. 414-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'elle est présentée par un avocat, un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, une personne morale de droit public autre qu'une commune de moins de 3 500 habitants ou un organisme de droit privé chargé de la gestion permanente d'un service public, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, être adressée à la juridiction par voie électronique au moyen d'une application informatique dédiée accessible par le réseau internet. La même obligation est applicable aux autres mémoires du requérant. ". Aux termes de l'article R. 414-3 du même code : " Par dérogation aux dispositions des articles R. 411-3, R. 411-4, R. 412-1, R. 412-2 et R. 611-1-1, les requérants sont dispensés de produire des copies de leur requête et de leurs mémoires complémentaires, ainsi que des pièces qui y sont jointes. - Les pièces jointes sont présentées conformément à l'inventaire qui en est dressé. - Lorsque le requérant transmet, à l'appui de sa requête, un fichier unique comprenant plusieurs pièces, chacune d'entre elles doit être répertoriée par un signet la désignant conformément à l'inventaire mentionné ci-dessus. S'il transmet un fichier par pièce, l'intitulé de chacun d'entre eux doit être conforme à cet inventaire. Le respect de ces obligations est prescrit à peine d'irrecevabilité de la requête. - Les mêmes obligations sont applicables aux autres mémoires du requérant, sous peine pour celui-ci, après invitation à régulariser non suivie d'effet, de voir ses écritures écartées des débats. - Si les caractéristiques de certains mémoires ou pièces font obstacle à leur communication par voie électronique, ils sont transmis sur support matériel, accompagnés de copies en nombre égal à celui des autres parties augmenté de deux. L'inventaire des pièces transmis par voie électronique en fait mention. ". Aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité manifeste susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office ce moyen qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 222-1 de ce code : " (...) les présidents de formation de jugements des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) ". 4. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif qui tendait à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2013, n'était pas accompagnée de la décision attaquée intervenue sur recours préalable obligatoire et ne répertoriait pas chacune des pièces jointes figurant dans un fichier unique par un signet la désignant conformément à l'inventaire qui en est dressé. 5. Par courriers du 29 janvier 2020, envoyés en recommandé avec accusé de réception et reçus par le conseil de l'intéressé, le 3 février 2020, M. A... a été invité par le greffe du tribunal à régulariser sa requête, dans un délai de quinze jours sous peine d'irrecevabilité, au regard, d'une part, de l'article R. 412-1 du code de justice administrative, en produisant la décision attaquée, et d'autre part, des articles R. 414-1 et R. 414-3 du même code. 6. Il ressort des pièces du dossier de première instance que M. A... avait transmis au tribunal la copie de la réclamation présentée à l'administration conformément aux dispositions de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales. Toutefois, il est constant que l'administration avait expressément rejeté cette réclamation. Ainsi, en application des dispositions rappelées au points 2 et 3, seule la décision expresse de rejet de cette réclamation pouvait être déférée au tribunal administratif, comme constituant la décision attaquée requise par les dispositions précitées de l'article R. 412-1 du code de justice administrative et l'intéressé qui n'entrait pas dans le cas mentionné à l'article R. 421-2 de ce code ne pouvait se borner à produire la pièce justifiant de la date de dépôt de sa réclamation. 7. Si le requérant, dont il est constant qu'il n'a pas régularisé sa demande au regard des dispositions de l'article R.414-3 du code de justice administrative, fait valoir que, par un courrier du 4 février 2020, à la demande de son conseil, il a personnellement adressé à la juridiction la décision attaquée du 13 novembre 2019, compte tenu d'une impossibilité de la faire parvenir par voie dématérialisée, il ne produit, en tout état de cause, aucun élément permettant d'établir que ce courrier serait parvenu au tribunal dans le délai imparti. 8. Par ailleurs, lorsque l'auteur d'un recours n'a pas produit en première instance la décision attaquée ou la pièce justifiant de la date de dépôt d'une réclamation, alors qu'il a été mis à même de le faire par une invitation à régulariser adressée par le tribunal administratif, il n'est pas recevable à produire ces justifications pour la première fois en appel. Par suite, la production devant la cour du courrier du 13 novembre 2019 n'est en tout état de cause pas de nature à régulariser la demande de première instance de M. A.... 9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en l'absence de régularisation. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Bourrachot, président de chambre, Mme Dèche, présidente assesseure, Mme Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 octobre 2022. La rapporteure, P. DècheLe président, F. Bourrachot La greffière, A.-C. Ponnelle La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY03625 kc
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner la commune d'Ars-en-Ré et son assureur à lui verser la somme de 34 087,35 euros en réparation des préjudices subis à la suite de sa chute du 12 avril 2016. E... un jugement n° 1801521 du 11 février 2020, le tribunal administratif de Poitiers a d'une part condamné solidairement la commune d'Ars-en-Ré et la compagnie SMACL à verser à Mme C... une somme de 10 265,04 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis, avec intérêts au taux légal à compter du 28 septembre 2016, d'autre part condamné la commune d'Ars-en-Ré à verser à la CPAM du Puy-de-Dôme une somme de 7 630,86 euros en remboursement des débours exposés ainsi qu'une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et à prendre à sa charge les frais d'expertise pour un montant de 912 euros, et enfin a rejeté le surplus des demandes. Procédure devant la cour : E... une requête et un mémoire, enregistrés le 3 avril 2020 et le 5 janvier 2021, la commune d'Ars-en-Ré et la compagnie SMACL Assurances, représentées E... le cabinet KPL avocats, demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 11 février 2020 ; 2°) de rejeter la demande de Mme C..., ainsi que ses conclusions d'appel incident ; 3°) de mettre à la charge de Mme C... la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - c'est à tort que les premiers juges ont retenu un lien de causalité entre un défaut de signalisation et l'accident survenu, celui-ci n'étant dû qu'à la perte d'équilibre de la victime sur les marches de l'escalier, qui ne présentent en elles-mêmes aucun danger particulier ; la chute n'est due qu'à un état de panique après avoir constaté qu'il manquait des marches pour accéder à la plage ; cette absence de marches était visible et la largeur de l'escalier permettait un demi-tour sans difficultés ; - la victime a bien commis une faute d'inattention lors de la réalisation de son demi-tour, l'escalier ne présentant aucune dangerosité pour un usager normalement attentif ; - s'agissant des préjudices patrimoniaux, la nécessité de porter des semelles orthopédiques n'est pas imputable à l'accident et n'est au demeurant pas justifiée dans son montant ; les frais de déplacement postérieurs à la consolidation ne sauraient être indemnisés dès lors qu'ils n'ont pas été prévus E... l'expert, seuls 916 kilomètres devant ainsi être pris en compte ; s'agissant des frais d'aide E... une tierce-personne, qui ne sauraient dépasser la somme de 205,95 euros, Mme C... n'établit pas qu'ils n'ont pas été pris en charge E... son assurance ; - s'agissant des préjudices extrapatrimoniaux, l'indemnisation au titre du déficit fonctionnel temporaire ne saurait dépasser les sommes de 435 euros pour la période où la gêne a été totale et de respectivement 137,44 euros, 224,91 euros, 182,60 et 439,82 euros pour les périodes où les gênes ont été de classe IV, III, II et I ; celle réparant les souffrances endurées ne saurait excéder 3 000 euros ; - l'indemnisation allouée pour le préjudice esthétique temporaire est excessive, eu égard à l'erreur de frappe contenue dans le rapport d'expertise sur la période à prendre en compte, et au caractère dégressif du préjudice après la nouvelle hospitalisation de l'intéressée; elle ne saurait excéder 500 euros ; - l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent est également excessive et ne saurait excéder 6 000 euros ; il convient au préalable que Mme C... justifie qu'aucune indemnité ne lui a été versée E... son assurance ; - le préjudice d'agrément n'est pas justifié dans son principe. E... deux mémoires en défense, enregistrés les 28 septembre 2020 et 26 mai 2021, Mme C..., représentée E... le cabinet Bonfils Baslé, conclut au rejet de la requête et, E... la voie de l'appel incident, demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 11 février 2020 en tant qu'il a retenu une faute de la victime et limité le montant de son indemnisation à 10 265,04 euros, de porter cette somme à 33 527,35 euros et à ce que soient mises à la charge solidaire des appelants, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 6 000 euros au titre des frais de première instance et de 3 000 euros au titre de l'instance d'appel, ainsi que les dépens, dont les frais d'expertise. Elle fait valoir que : - la responsabilité de la commune est engagée en raison de la carence dans l'usage des pouvoirs de police pour signaler le danger représenté E... l'escalier ; celui-ci n'était pas visible depuis le haut des marches ; - elle n'a commis aucune faute exonérant partiellement la commune, contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges ; sa chute occasionnée E... son demi-tour est due au fait qu'elle n'a pu se retenir à une main courante et que les marches étaient glissantes et étroites ; elle n'a fait preuve d'aucune maladresse ; - les frais liés à l'aide d'une tierce-personne doivent être revus à la hausse pour retenir un montant de 340 euros ; - les dépenses de santé futures liées au renouvellement annuel de ses semelles orthopédiques peuvent être évaluées à 2 017,27 euros, correspondant au coût restant à sa charge et au prix de l'euro de rente ; - l'indemnisation due pour le déficit fonctionnel temporaire partiel doit être portée à 2 390 euros ; - les souffrances endurées, cotées à 3,5 sur une échelle de 7, ont été manifestement sous-évaluées eu égard au traumatisme subi lors de l'accident et aux souffrances qui ont perduré ; une juste appréciation pourra en être faite en lui allouant la somme de 8 000 euros ; - le déficit fonctionnel permanent sera indemnisé à hauteur de 9 600 euros ; - l'indemnisation du préjudice esthétique doit être revue à la hausse en la fixant à 2 500 euros ; - ne pouvant plus pratiquer son loisir de chiner dans les brocantes, une somme de 5 000 euros devra être allouée pour son préjudice d'agrément ; - les autres chefs de préjudice indemnisés E... le tribunal pourront être confirmés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B... A..., - les conclusions de Mme Kolia Gallier, rapporteure publique, - et les observations de Me Pielberg, représentant la commune d'Ars-en-Ré et la compagnie SMACL assurances. Considérant ce qui suit : 1. Alors qu'elle se promenait le 12 avril 2016 sur le chemin longeant le chenal d'entrée du port d'Ars-en-Ré, Mme C... a été victime d'une chute depuis l'escalier situé dans la digue en béton qu'elle avait choisi d'emprunter pour accéder au bord de mer. Souffrant de multiples fractures et alors que la marée remontait, elle a dû être hélitreuillée et transportée au centre hospitalier de La Rochelle. Elle a été hospitalisée une première fois du 12 au 18 avril 2016 pour une fracture du calcanéum droit et un traumatisme de l'épaule, avec rupture du tendon supra épineux. Elle a été hospitalisée de nouveau du 20 au 27 mai dans le service d'orthopédie du centre hospitalier en raison de l'évolution défavorable de sa cheville et de son épaule douloureuse, avant d'être prise en charge en maison de convalescence du 27 mai au 10 juin 2016. Elle a présenté une demande préalable à la commune d'Ars-en-Ré et à son assureur, la compagnie SMACL assurances, pour obtenir l'indemnisation des préjudices subis à la suite de sa chute. E... un courrier du 19 octobre 2016, la compagnie SMACL assurances lui a indiqué qu'aucune prise en charge ne pouvait intervenir en l'absence de certitude sur les circonstances exactes de sa chute. En l'absence de réponse de la commune, une décision implicite de rejet est née le 1er décembre 2016. Mme C... a également saisi le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers afin qu'une expertise contradictoire soit organisée pour se prononcer sur l'étendue de ses préjudices. Le rapport d'expertise a été déposé le 26 octobre 2017. 2. Mme C... a alors saisi le tribunal administratif de Poitiers pour obtenir la condamnation de la commune d'Ars-en-Ré et la compagnie SMACL assurances à lui verser la somme de 34 087,35 euros en réparation de ses préjudices. E... le jugement attaqué du 11 février 2020, le tribunal a, d'une part, condamné solidairement la commune d'Ars-en-Ré et la compagnie SMACL assurances à verser à Mme C... une somme de 10 265,04 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis à la suite de sa chute, avec intérêts au taux légal à compter du 28 septembre 2016, d'autre part condamné la commune d'Ars-en-Ré à verser à la CPAM du Puy-de-Dôme une somme de 7 630,86 euros en remboursement des débours exposés ainsi qu'une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et à prendre à sa charge les frais d'expertise pour un montant de 912 euros, et enfin a rejeté le surplus des demandes. E... la présente requête, la commune d'Ars-en-Ré et la compagnie SMACL demandent l'annulation du jugement et le rejet de la demande présentée E... Mme C.... E... la voie de l'appel incident, Mme C... demande la réformation du jugement en tant qu'il a retenu une faute de la victime et limité le montant de son indemnisation à 10 265,04 euros, et de porter cette somme à 33 527,35 euros. Sur le bien-fondé du jugement en tant qu'il retient la responsabilité pour faute de la commune : 3. Aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales: " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...). ". 4. Il résulte de l'instruction que Mme C... a emprunté un escalier réalisé dans la digue de bord de mer avant de s'apercevoir que la hauteur entre la dernière marche et le sol, d'environ 1m50, ne permettait pas d'accéder à l'estran (zone de balancement des marées). Lorsqu'elle a voulu remonter, elle a perdu l'équilibre et chuté lourdement en contrebas. Si un panneau apposé à l'entrée de l'escalier signalait l'existence d'un danger en raison d'" arrivée massive d'eau fréquente ", aucun signalement n'avertissait le public sur le fait que l'escalier, dont l'accès n'était pas limité, ne permettait pas d'accéder en toute sécurité au bord de mer en raison du décaissement provoqué E... la marée à son point d'arrivée. D'ailleurs, le fait que les appelantes soutiennent que cet escalier était seulement destiné à assurer la surveillance et l'entretien de la manœuvre de la porte de la prise d'eau voisine et non à accéder au bord de mer ne fait que confirmer la nécessité de mesures pour en restreindre l'accès ou avertir de sa dangerosité du fait qu'il était sans issue. En outre, la configuration de l'escalier ne permettait pas de prendre conscience, avant de l'emprunter, de l'impossibilité d'accès à l'estran. E... suite, le maire de la commune d'Ars-en-Ré a commis une faute en ne faisant pas usage de ses pouvoirs de police municipale. 5. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Ars-en-Ré et la compagnie SMACL assurances ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a retenu une faute de nature à engager la responsabilité de la commune. Sur l'existence d'une faute de la victime exonératoire : 6. Il résulte de l'instruction qu'en s'engageant dans cet escalier alors qu'existait une retenue d'eau et de vase à son débouché et alors qu'elle pouvait se douter que les dernières marches étaient rendues glissantes du fait de résidus d'algues, de vase et d'eau issus de la précédente marée haute, Mme C..., qui a en outre réalisé son demi-tour dans un état de panique selon ses propres termes, a commis une imprudence qui est de nature, comme l'ont jugé les premiers juges, à exonérer la commune pour moitié. 7. Il résulte de ce qui précède, d'une part, que les appelantes ne sont pas fondées à soutenir que la faute de la victime exonère totalement la commune de sa responsabilité et, d'autre part, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le jugement a retenu une cause exonératoire à hauteur de 50 %. Sur la réparation des préjudices : En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux : 8. Selon le rapport d'expertise judiciaire, Mme C... a nécessité une assistance E... une tierce personne pour une durée de trois heures E... jour au total pour la période du 19 au 29 avril 2016 lors de laquelle elle était atteinte d'un déficit fonctionnel partiel de classe IV, d'1 heure 30 E... semaine pour les périodes du 30 avril au 19 mai 2016 puis du 11 au 17 juin 2017 correspondant à un déficit fonctionnel temporaire de classe III, et d'une heure E... semaine pour la période de déficit fonctionnel partiel de classe II, soit du 18 juin au 31 juillet 2016. Sur ce total de 45 heures, Mme C... a bénéficié d'une prestation d'aide-ménagère E... sa mutuelle à hauteur de 30 heures. E... conséquent, alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que la mutuelle aurait revu cette prise en charge à la hausse, Mme C... est fondée à solliciter une indemnisation pour le coût de l'assistance resté à sa charge pour un volume horaire de 15 heures. Eu égard au SMIC horaire chargé en vigueur pour l'année 2016, le préjudice a été justement évalué à la somme de 250 euros en l'absence de factures pour un coût supérieur. 9. Au titre des frais divers, les premiers juges ont accordé à Mme C... une indemnisation correspondant aux frais de déplacement rendus nécessaires E... sa prise en charge médicale et représentant un total de 958 kilomètres parcourus. Toutefois, alors que l'expert judiciaire n'a pas relevé la nécessité de soins postérieurs à la date de consolidation fixée au 21 avril 2017, les appelantes sont fondées à soutenir que les trois rendez-vous médicaux ayant eu lieu postérieurement à cette date, les 2 novembre 2017, 22 janvier et 1er février 2018, pour lesquels Mme C... n'apporte aucun justificatif, doivent être exclus de l'indemnisation. Il y a lieu, dans ces conditions, de ramener l'évaluation de ce chef de préjudice de 588,94 euros à 563,93 euros. 10. Il résulte de l'instruction que Mme C... a bénéficié d'un suivi orthopédique pour une fracture complexe du calcanéum droit. Un podologue lui a prescrit une paire de semelles orthopédiques, pour notamment soulager ses douleurs, le 18 avril 2017. Il n'est toutefois pas établi, comme le relève la commune en défense, que le montant de 91,14 euros figurant sur la facture produite n'ait pas été pris en charge E... sa complémentaire santé. E... suite, contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, Mme C... n'est pas fondée à demander le remboursement de cette somme au titre des dépenses de santé actuelles. En outre, si elle produit une attestation de son podologue sur la nécessité d'un renouvellement annuel de ses semelles orthopédiques, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise judiciaire, que cette dépense serait justifiée, postérieurement à la date de consolidation fixée au 21 avril 2017, E... les séquelles de son accident. E... suite, et alors que Mme C... ne justifie ni avoir exposé une telle dépense de renouvellement de son équipement, ni avoir eu un reste à charge, sa demande au titre des dépenses de santé futures doit, ainsi que l'ont jugé les premiers juges, être rejetée. En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux : 11. Il résulte de l'instruction que Mme C... a subi un déficit fonctionnel temporaire total pendant les périodes du 12 au 18 avril 2016, puis du 20 mai au 10 juin 2016, soit un total de 28 jours correspondant à la durée de ses deux hospitalisations. Elle a E... la suite, ainsi qu'il a été dit, souffert d'un déficit fonctionnel temporaire de classe IV du 19 au 29 avril 2016 (11 jours), de classe III du 30 avril 2016 au 19 mai 2016 puis du 11 au 17 juin 2016, soit 26 jours au total, de classe II du 18 juin au 31 juillet 2016 (43 jours), puis de classe I du 1er août 2016 à la date de la consolidation (263 jours). Dans ces conditions, il a été fait une juste appréciation E... les premiers juges des troubles dans les conditions d'existence subis E... Mme C... en retenant la somme de 1 400 euros. 12. Les souffrances endurées, évaluées E... l'expertise à 3,5 sur une échelle de 7, eu égard au traumatisme de l'accident et des conditions de sauvetage de la victime, des douleurs physiques subies depuis lors qui ont conduit à deux périodes d'hospitalisation et des répercussions sur le plan psychologique, seront justement réparées en évaluant ce préjudice à 6 000 euros. 13. Il résulte de l'instruction que le préjudice esthétique temporaire a été évalué à 3 sur une échelle de 7 jusqu'à la date de nouvelle hospitalisation, le 20 mai 2016, puis a été rapidement dégressif E... la suite pour s'établir, après consolidation, à 0,5. Mme C... a dû porter une contention orthopédique et recourir à un fauteuil roulant avant sa nouvelle hospitalisation. Dans ces conditions, l'évaluation du préjudice esthétique temporaire doit être ramenée à de plus justes proportions, de 3 000 à 1 000 euros. En outre, Mme C... conserve une démarche saccadée et une amyotrophie modérée visible. Son préjudice esthétique permanent a été suffisamment évalué à la somme de 1 000 euros. 14. Les séquelles que Mme C... conserve de l'accident ont conduit l'expert à évaluer son déficit fonctionnel permanent, constitué E... les douleurs continues à la cheville droite et la marche saccadée, à 8 %. Eu égard à son âge à la date de la consolidation, soit 63 ans, et alors qu'il n'est pas établi qu'elle aurait reçu une indemnisation à ce titre E... son assurance, son préjudice a été justement évalué E... les premiers juges à la somme de 9 200 euros. 15. Il n'est enfin pas établi que Mme C... subisse un préjudice d'agrément, en raison de difficultés pour conduire et marcher, dans sa fréquentation de brocantes. 16. Il résulte de tout ce qui précède que le montant des préjudices subis E... Mme C... doit être ramené de 20 530,08 euros à 19 413,94 euros. Après prise en compte de l'exonération partielle de la commune d'Ars-en-Ré, la somme mise à la charge solidaire de la commune et de la compagnie SMACL Assurances doit être ramenée à 9 706,97 euros. Sur les frais liés au litige : 17. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le tribunal administratif ait fait une insuffisante appréciation de la somme à mettre à la charge solidaire de la commune d'Ars-en-Ré et de la compagnie SMACL assurances au titre des frais exposés en première instance E... Mme C... en la fixant à 1 600 euros. E... suite, les conclusions de cette dernière tendant à porter cette somme à 6 000 euros doivent être rejetées. 18. En deuxième lieu, le jugement attaqué a mis les frais d'expertise taxés à la somme de 912 euros à la charge définitive de la commune d'Ars-en-Ré. E... suite, les conclusions présentées E... Mme C... en appel à cette fin sont sans objet et doivent être rejetées. 19. Enfin, les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Ars-en-Ré et de la compagnie SMACL assurances, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance d'appel, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés E... elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme C... la somme que les appelantes demandent au même titre. DECIDE : Article 1er : La somme que la commune d'Ars-en-Ré et la compagnie SMACL assurances ont été condamnées solidairement à verser à Mme C... E... le tribunal administratif de Poitiers est ramenée à 9 706,97 euros. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 11 février 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er. Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Ars-en-Ré, à la compagnie SMACL Assurances, à Mme D... C... et à la CPAM du Puy-de-Dôme. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public E... mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2022. Le rapporteur, Olivier A... La présidente, Catherine Girault La greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20BX01228
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... D... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement n° 2105403 du 6 décembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Procédure devant la cour administrative d'appel : Par une requête enregistrée le 15 février 2022, M. A..., représenté par Me Hugon, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 décembre 2021 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 de la préfète de la Gironde ; 3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer le titre de séjour sollicité, sous quinze jours, ou subsidiairement de réexaminer sa situation en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour et de travail, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - la préfète de la Gironde ne pouvait regarder sa demande de titre de séjour comme irrecevable alors qu'il avait produit ses documents d'état civil ; la décision méconnaît donc l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le tribunal a renversé la charge de la preuve sur l'existence d'éléments de nature à faire douter de l'authenticité des actes d'état civil présentés, alors que la préfecture ne l'a pas informé des motifs pour lesquels elle a soumis les documents à vérification ; l'arrêté est entaché d'un vice de procédure de ce fait ; - l'attestation de retenue des documents ne l'a pas informé de la possibilité de présenter des observations, ce qui l'a privé d'une garantie ; - il a justifié de son état civil en produisant la transcription d'un jugement supplétif d'acte de naissance, sa carte d'identité consulaire et une attestation du consulat et une attestation de scolarité en Guinée ; les seuls constats de la cellule de fraude documentaire n'établissent pas l'inauthenticité du jugement supplétif, qui a été légalisé par le ministère des affaires étrangères le 1er avril 2019, et la transcription sur le registre d'état civil, également légalisée, n'est pas contestée ; il n'appartient pas à la juridiction administrative de se prononcer sur la régularité du jugement supplétif au regard du code civil guinéen, qui au demeurant n'impose pas à de tels jugements de comporter les mentions exigées dans les actes de naissance ; le droit guinéen ne prévoit pas la sécurisation de la carte consulaire, si bien qu'aucun défaut de sécurisation ne peut être opposé ; la circonstance qu'il ne détient pas de passeport atteste seulement des difficultés pour obtenir un rendez-vous à l'ambassade ; la scolarisation en " 2ème année " en 2013-2014 à Conakry corrobore l'âge de 9 ans qu'il avait alors ; il avait d'ailleurs été évalué mineur à son arrivée à Pau en 2019, d'où son placement auprès de l'aide sociale à l'enfance, et le procureur de la République de Bordeaux n'a pas donné suite au signalement qui lui avait été adressé ; - la décision méconnaît l'article L.435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre 16 ans et 18 ans, et qu'il suivait avec assiduité depuis plus de 6 mois une formation professionnelle en CAP agent polyvalent de restauration, avec un contrat jeune majeur, et a obtenu un contrat à durée indéterminée en qualité de préparateur en boulangerie ; il n'a plus de contacts avec sa famille qu'il a quittée après le décès de sa mère en 2015, son père et sa belle-mère le maltraitant ; - la préfète n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation au regard de son parcours d'insertion, et a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa vie privée, méconnaissant l'article L.423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : - l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur sa situation personnelle ; - la décision fixant le pays de renvoi est privée de base légale au regard de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. Par un mémoire enregistré le 7 avril 2022, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code civil ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - et les observations de Me Hugon, représentant M. A..., lui-même présent. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ressortissant guinéen se disant né le 26 décembre 2002, est arrivé en France en 2019 et a bénéficié, après évaluation de sa minorité à Pau le 12 février 2019, d'un placement auprès de l'aide sociale à l'enfance en Gironde, renouvelé en décembre 2020 et suivi d'un contrat jeune majeur jusqu'au 25 juin 2021. Le 24 novembre 2020, il a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions alors applicables de l'article L 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenu depuis L.435-3. La préfète de la Gironde lui a indiqué qu'elle retenait ses documents d'identité pour vérification, puis, par un arrêté du 13 septembre 2021, a rejeté sa demande en considérant qu'il ne justifiait pas de son identité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé son pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 6 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. 2. En premier lieu, M. A... soutient que son dossier était complet au regard des pièces requises par l'article R.431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment le 1° demandant à l'étranger de produire " Les documents justifiant de son état civil " (...). Toutefois, la circonstance que la préfète ait indiqué dans l'arrêté qu'au regard des fraudes dont était entaché le jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance produit, M. A... ne justifiait pas de son identité et que sa demande était " irrecevable ", pour regrettable qu'elle soit, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté dès lors que la préfète a néanmoins procédé ensuite à un examen complet de la situation de l'intéressé au regard tant de son parcours en France que de ses liens avec son pays d'origine, pour conclure qu'il ne remplissait pas les conditions prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prétendre à titre exceptionnel à un titre de séjour. 3. En deuxième lieu, la préfète a suffisamment mis à même M. A... de présenter d'éventuelles observations sur l'authenticité de ses documents d'état civil en l'informant préalablement que leur caractère " douteux " l'amenait à solliciter une vérification de leur authenticité auprès d'une cellule spécialisée en fraude documentaire, et l'intéressé a été informé devant le tribunal des conclusions précises auxquelles cette cellule était parvenue, qu'il n'a d'ailleurs pas critiquées. Il n'a ainsi été privé d'aucune garantie. 4. En troisième lieu, l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. ". 5. M. A... persiste à soutenir en appel que le jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance, sa transcription au registre d'état civil de Guinée, tous deux légalisés, et la carte consulaire délivrée par le consulat de Guinée en France suffisaient à justifier de son identité et de sa date de naissance, et donc qu'il avait bien été confié à l'aide sociale à l'enfance entre seize et dix-huit ans. 6. L'article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " La vérification des actes d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". L'article 47 du code civil dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". 7. Lorsqu'est produit devant l'administration un acte d'état civil émanant d'une autorité étrangère qui a fait l'objet d'une légalisation, sont en principe attestées la véracité de la signature apposée sur cet acte, la qualité de celui qui l'a dressé et l'identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu. En cas de doute sur la véracité de la signature, sur l'identité du timbre ou sur la qualité du signataire de la légalisation, il appartient à l'autorité administrative de procéder, sous le contrôle du juge, à toutes vérifications utiles pour s'assurer de la réalité et de l'authenticité de la légalisation. En outre, la légalisation se bornant à attester de la régularité formelle d'un acte, la force probante de celui-ci peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. Par suite, en cas de contestation de la valeur probante d'un acte d'état civil légalisé établi à l'étranger, il revient au juge administratif de former sa conviction en se fondant sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. 8. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de sa demande de délivrance de titre de séjour, M. A..., qui avait déclaré lors de son arrivée en France au début de 2019 n'être en possession d'aucun document d'état civil, a produit un jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance mentionnant sa naissance le 26 décembre 2002, établi le 6 décembre 2018 sous le n°28751, et sa transcription dans les registres d'état civil de la commune de Ratoma, Conakry le 26 décembre 2018 sous le numéro 11160, légalisée par la direction des affaires juridiques et consulaires du ministère des affaires étrangères de la République de Guinée le 1er avril 2019. Il a également produit une carte consulaire délivrée le 24 octobre 2019 par l'ambassade de Guinée en France, et une attestation de cette ambassade indiquant qu'elle ne délivre pas de passeports. 9. Le jugement supplétif, ainsi que l'extrait du registre d'état civil de Guinée ont été soumis par la préfète de la Gironde à l'examen technique de la direction interdépartementale de la police aux frontières de Bordeaux, qui a émis un avis défavorable. Il ressort du rapport établi par ce service le 4 mars 2021 que le timbre fiscal apposé sur le jugement supplétif d'acte de naissance a déjà été utilisé. Un décalage est visible entre le cachet du support et le cachet du timbre. Par suite, l'extrait du registre d'état civil et la carte d'identité consulaire basés sur ce document sont dépourvus de force probante. Ainsi, M. A... ne peut justifier, par les pièces produites, qu'il aurait bien été confié à l'aide sociale à l'enfance entre 16 et 18 ans, et n'entre donc pas dans les conditions prévues par l'article L.435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. 10. M. A... soutient enfin que le refus de titre de séjour méconnait l'article L.423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux termes duquel : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1.Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " 11. Si le requérant fait valoir qu'il a réussi son CAP d'agent polyvalent de restauration en juin 2021 et obtenu au mois de septembre suivant un contrat de préparateur en boulangerie, et qu'il n'a plus de contacts avec sa famille qu'il a quittée après le décès de sa mère en 2015, son père et sa belle-mère le maltraitant, ces éléments, à supposer les derniers établis, ne suffisent pas à démontrer qu'en lui refusant un titre de séjour, la préfète aurait commis une erreur d'appréciation sur l'intensité et l'ancienneté de ses liens personnels et familiaux en France. Par suite, l'obligation de quitter le territoire français n'est pas davantage entachée d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et la décision fixant le pays de renvoi n'est pas dépourvue de base légale. 12. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a refusé d'annuler la décision du 13 septembre 2021 de la préfète de la Gironde. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées pour l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent donc qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer. Une copie sera adressée pour information à la préfète de la Gironde. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2022. La présidente-assesseure, Anne Meyer La présidente, rapporteure, Catherine B... La greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22BX00508
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... D... et son époux M. H... D... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, d'ordonner, avant dire-droit, une expertise afin de déterminer le montant des préjudices résultant de l'intervention chirurgicale subie par Mme D... au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Bordeaux le 12 janvier 2015 ou, à titre subsidiaire, l'existence d'un accident médical, la date de consolidation et le montant des préjudices subis par Mme D..., et, d'autre part, de condamner le CHU de Bordeaux et l'Office National d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à leur verser une indemnité provisionnelle d'un montant de 150 347,84 euros à valoir sur leur entier préjudice ou, à titre subsidiaire, la somme globale de 228 942,73 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation de ces préjudices. Par un jugement n° 1805123 du 9 juin 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 24 juillet 2020, 23 mars 2022 et 22 avril 2022, M. et Mme D..., représentés par la SELARL Coubris, Courtois et Associés, demandent à la cour, en leurs noms propres et en tant que représentants légaux de leurs deux enfants mineurs G... et I... D... : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 9 juin 2020 ; 2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Bordeaux et l'ONIAM à verser une somme provisionnelle de 200 000 euros, à charge pour la cour de la répartir entre eux, à valoir sur les préjudices subis par Mme D..., et d'ordonner une nouvelle expertise confiée à un expert neurochirurgien afin d'évaluer les préjudices complémentaires en lien avec le retrait du matériel d'ostéosynthèse réalisé le 26 octobre 2018 ; 3°) à titre subsidiaire, en cas de refus de toute expertise complémentaire, de les condamner à verser la somme de 329 333,21 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la demande préalable, en réparation de l'ensemble des préjudices subis par Mme D... y compris ceux liés à la nouvelle intervention chirurgicale intervenue en cours de procédure ; 4°) de condamner le CHU de Bordeaux et l'ONIAM à verser la somme de 20 347,84 euros en réparation des préjudices subis par M. D... et leurs deux filles, avec intérêts au taux légal à compter de la demande préalable ; 5°) à titre infiniment subsidiaire, d'ordonner une nouvelle expertise médicale complète confiée à un neurochirurgien ; 6°) de mettre à la charge du CHU de Bordeaux et de l'ONIAM une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens. Mme et M. D... soutiennent que : - l'absence d'information portant sur l'existence d'une alternative thérapeutique caractérisée par le recours à une infiltration foraminale scanno-guidée C7-D1 est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité du CHU de Bordeaux ; ce défaut d'information ne peut être justifié ni par le fait que le risque de récidive du kyste était plus important avec l'infiltration qu'avec l'intervention chirurgicale, ni par l'urgence ; cela a constitué une perte de chance de ne pas subir l'intervention ni les séquelles post-opératoires, qui ne saurait être évaluée à moins de 80 % ; - la réalisation technique de l'acte n'est pas non plus exempte de critiques dès lors que le chirurgien orthopédiste a été remplacé en cours d'intervention et que le matériel posé, qui a provoqué une fracture, n'était pas adapté selon les chirurgiens et experts consultés ; le chef de service n'a pas été informé des conditions difficiles du second temps de l'intervention, conduisant à une arthrodèse unilatérale au lieu de la bilatérale prévue, ce qui a fait obstacle à ce qu'il interprète les douleurs post-opératoires ; - si le médecin de la commission de conciliation et d'indemnisation (CCI) a retenu une date de consolidation, il convient de tenir compte des préjudices complémentaires subis en raison de la nouvelle intervention réalisée pour retirer le matériel, et de la rééducation thérapeutique ; une nouvelle expertise complémentaire est nécessaire ; - le rapport d'expertise de la CCI fait état d'un accident médical non fautif en lien avec l'arthrodèse cervicale unilatérale réalisée au cours l'opération chirurgicale ; si celle-ci a permis de résoudre les névralgies cervico-brachiales, elle a généré une contracture intense des trapèzes, ayant un retentissement au niveau cervical et entraînant des céphalées, qui n'existait pas auparavant ; le lien de causalité avec l'intervention est démontré par l'avis d'un expert qu'elle a consulté et qui retient une difficulté d'ancrage des vis du côté droit, entraînant une arthrodèse unilatérale génératrice de tensions, ainsi que par les constats réalisés à la suite de l'intervention subie pour retirer le matériel d'arthrodèse ; - la gravité des blessures est caractérisée par l'existence d'un déficit fonctionnel permanent de 25 % ; en outre, elle a subi un déficit fonctionnel temporaire de classe 3 pendant plus de six mois et n'a pu reprendre son activité professionnelle initiale et a dû bénéficier d'un reclassement ; les douleurs permanentes et leur retentissement psychologique ont constitué des troubles graves dans ses conditions d'existence ; - l'expertise privée sur pièces réalisée à sa demande démontre que cet acte chirurgical a eu des conséquences anormales en raison de l'apparition de douleurs post-opératoires, lesquelles, inexistantes au moment de l'intervention initiale, revêtent un caractère anormal eu égard à leur rareté et leur intensité ; - les préjudices patrimoniaux temporaires sont constitués par des dépenses de santé actuelles, prises en charge par l'organisme de sécurité sociale, l'assistance temporaire par une tierce personne qui s'élève, en retenant un coût horaire de 20 euros, à 46 346,47 euros, par des frais de rééducation pour un montant de 360 euros et une perte de gains professionnels de 4 768,42 euros ; - les préjudices extra-patrimoniaux temporaires comprennent le déficit fonctionnel temporaire qui doit être indemnisé à hauteur de 8 880 euros pour la période antérieure à la consolidation et de 1 920 euros pour la période postérieure à la nouvelle intervention, et les souffrances endurées, évaluées par l'expert à 3,5 sur 7, qui pourront être réparées par l'allocation de la somme de 10 000 euros pour la première période et 6 000 euros pour la seconde ; - les préjudices patrimoniaux permanents recouvrent les dépenses de santé futures supportées par l'organisme social, les frais de rééducation pour un montant de 320 euros, l'assistance par une tierce personne pour un montant de 11 224,48 euros, le besoin d'assistance par une tierce personne pour l'avenir pour un montant de 97 277,60 euros, la perte de gains professionnels " futurs " en 2018 et 2019 pour un montant de 2236,24 euros et l'incidence professionnelle chiffrée à 50 000 euros ; contrairement à ce que soutient son employeur, les primes font partie intégrante de son revenu et leur perte doit être indemnisée ; le travail administratif qu'elle a dû accepter en poste aménagé est moins intéressant que son activité de manipulatrice en radiologie ; - les préjudices extra-patrimoniaux permanents sont constitués par le déficit fonctionnel permanent et le préjudice esthétique pour lesquels elle demande respectivement 65 000 euros et 9 000 euros, en ce compris la reprise de cicatrice ; le préjudice sexuel, le préjudice d'agrément et le préjudice moral d'impréparation doivent chacun donner lieu au versement d'une somme de 5 000 euros ; - les préjudices subis par son époux et ses deux filles comprennent une perte de gains professionnels pour un montant de 347,84 euros et un préjudice moral qui devra donner lieu au versement d'une indemnité de 10 000 euros pour son époux et 5 000 euros pour chacune de ses filles. Par un mémoire enregistré le 24 février 2022, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde, représentée par Me de Boussac-Di Pace, conclut : 1°) à l'annulation du jugement rendu le 9 juin 2020 par le tribunal administratif de Bordeaux ; 2°) à ce que soit reconnue la responsabilité du CHU de Bordeaux et ordonnée une mesure d'expertise avant dire droit et à ce qu'il soit sursis à statuer sur le montant de l'indemnité ; 3°) à la condamnation du CHU de Bordeaux à lui verser la somme provisionnelle de 25 851,20 euros en remboursement des prestations versées à son assurée sociale, assortie des intérêts et de la capitalisation des intérêts ; 4°) à ce qu'il soit mis à la charge du CHU de Bordeaux la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, les dépens ainsi que la somme de 13 euros au titre des droits de plaidoirie. Elle soutient que : - le CHU de Bordeaux a manqué à son devoir d'information en ce qu'il n'a pas averti Mme D... des alternatives thérapeutiques existantes, et cette dernière est fondée à soutenir qu'elle a perdu une chance d'échapper aux conséquences de l'intervention chirurgicale, laquelle devra être évaluée a minima à 80%. - ses débours provisoires, qui s'élèvent à 25 251,20 euros, sont imputables à l'intervention chirurgicale en cause ; toutefois, l'état de santé de Mme D... ne pouvant être considéré comme consolidé à la date de l'expertise de la CCI eu égard à l'intervention chirurgicale ayant eu lieu postérieurement, il est nécessaire d'ordonner une nouvelle expertise médicale en vue d'évaluer les préjudices définitifs. Par des mémoires en défense, enregistrés le 4 novembre 2020 et le 31 mars 2022, l'ONIAM, représenté par la SELARL Birot-Ravaut et associés, conclut : 1°) à titre principal au rejet de la requête ; 2°) à titre subsidiaire, à ce que la cour ordonne une expertise avant dire droit. Il fait valoir que : - les conditions d'indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies dès lors que le lien de causalité entre l'acte de soins et le dommage subi n'est pas prouvé ; le critère de temporalité ne peut suffire à établir l'existence d'un tel lien de causalité ; un doute ne saurait profiter au demandeur ; l'existence d'un conflit entre le matériel et les masses musculaires postérieures n'est pas documentée par l'imagerie médicale ni établie par le fait que les douleurs ont cessé après le retrait du matériel ; - le défaut d'information portant sur l'existence d'une alternative thérapeutique ne peut aboutir dès lors que cette faute, à supposer qu'elle soit avérée, ne peut ouvrir droit à réparation en l'absence de lien de causalité entre l'intervention et les séquelles ; - l'ONIAM n'a pas été convoqué à l'expertise sur pièces réalisée à la demande de Mme D... en juillet 2020 ; en raison du caractère non contradictoire de cette expertise et du fait qu'elle est contraire à l'expertise de la CCI, le qualificatif d'aléa thérapeutique ne peut être opposé à l'ONIAM ; - une nouvelle expertise médicale contradictoire complète, et avant dire droit, devra être ordonnée ;elle devrait notamment porter sur l'intervention d'ablation du matériel d'ostéosynthèse réalisé le 26 octobre 2018, soit postérieurement au dépôt du rapport d'expertise du médecin de la CCI ; une nouvelle évaluation des préjudices est également nécessaire, eu égard à l'évolution de son état de santé. Par des mémoires en défense, enregistrés le 16 février 2022, le 18 mars 2022, le 29 mars 2022 et le 1er avril 2022, le centre hospitalier universitaire de Bordeaux, représenté par Me Le Prado, conclut : 1°) au rejet de la requête des consorts D... ; 2°) au rejet des conclusions présentées par la CPAM de la Gironde. Il fait valoir que : - aucune faute n'a été commise, tant au niveau du diagnostic, de la proposition thérapeutique, de l'intervention chirurgicale, que de l'évolution postopératoire ; en tout état de cause, les douleurs post-opératoires sont sans lien de causalité direct et certain avec l'intervention chirurgicale ; - aucun manquement au devoir d'information ne peut être soulevé dans la mesure où Mme D... a bénéficié d'un délai de réflexion suffisant avant l'opération ; en toute hypothèse, Mme D... ne saurait se prévaloir d'un préjudice de perte de chance découlant d'un manquement au devoir d'information, alors qu'elle ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité entre l'intervention chirurgicale et les séquelles dont elle demande réparation ; - la demande d'expertise avant dire-droit doit être rejetée dans la mesure où l'expert de la CCI a correctement rempli sa mission et a répondu à l'intégralité des questions qui lui ont été posées ; - s'agissant des préjudices patrimoniaux, l'indemnisation sollicitée pour l'aide d'une tierce personne est excessive et devra être ramenée à de plus justes proportions ; la nécessité d'une rééducation à la suite de l'intervention n'est pas justifiée ; le préjudice lié à la perte de gains professionnels actuels n'est pas justifié alors que la perte de primes est liée à l'arrêt de travail et à la situation initiale ; la requérante ne saurait solliciter une indemnisation à la fois pour la perte de gains professionnels futurs et pour l'incidence professionnelle ; en tout état de cause, l'expert désigné par la CCI n'a pas retenu ces chefs de préjudice et les revenus de Mme D... ont progressé par rapport aux années précédant l'intervention ; - les sommes sollicitées au titre des préjudices extrapatrimoniaux sont excessives ; le préjudice d'agrément n'a pas été retenu par l'expert ; le préjudice moral d'impréparation n'est pas démontré ; - l'indemnisation du préjudice patrimonial de M. D... fait double emploi avec la demande faite au titre de l'aide par une tierce personne ; le préjudice d'affection des proches n'est pas établi eu égard à la faiblesse des séquelles subies par Mme D.... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. F... A..., - les conclusions de Mme Kolia Gallier, rapporteure publique, - et les observations de Me Coulaud, représentant la CPAM de la Gironde, de Me Demailly, représentant le CHU de Bordeaux et de Me Dagouret, représentant l'ONIAM. Considérant ce qui suit : 1. Mme D..., qui était manipulatrice en radiologie au CHU de Bordeaux, a présenté, le 4 juin 2014, une névralgie cervico-brachiale droite. Une IRM a révélé la présence d'un kyste radiculaire foraminal. En raison de l'intolérance au traitement médicamenteux prescrit et de la persistance des douleurs, un neurochirugien du CHU de Bordeaux a proposé de procéder à une intervention chirurgicale. Le 12 janvier 2015, Mme D... a été admise au CHU de Bordeaux aux fins de réaliser une arthrectomie et une foraminotomie C6-C7 et C7-T1, puis une ostéosynthèse C7-T2. Après avoir regagné son domicile le 17 janvier 2015, Mme D... a ressenti de nouvelles douleurs au niveau du trapèze, de l'omoplate et de la clavicule gauches, lesquelles ont été constatées médicalement le 17 février 2015. Elle a alors saisi la commission de conciliation et d'indemnisation (CCI) d'une demande d'indemnisation. L'expertise ordonnée par la CCI, rendue le 9 juin 2017, a conclu d'une part que l'intervention chirurgicale et la prise en charge en rééducation fonctionnelle ont été réalisées conformément aux règles de l'art, et d'autre part que les douleurs postopératoires ont, en l'absence d'explication mécanique, une origine incertaine. La CCI a rendu le 20 septembre 2017 un avis défavorable à la demande d'indemnisation du fait de l'absence de lien de causalité entre l'intervention chirurgicale et le dommage. Par la suite, Mme D... a subi une nouvelle intervention, le 26 octobre 2018, aux fins de retirer le matériel d'arthrodèse, ce qui a conduit à une nette amélioration de son état de santé. 2. Mme D... et son époux, conducteur ambulancier au CHU de Bordeaux, ont saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande d'expertise avant-dire droit pour déterminer l'étendue des préjudices qu'elle a subis et, le cas échéant, leur origine, et d'une demande de condamnation du CHU de Bordeaux et de l'ONIAM à leur verser une provision ou une indemnité définitive au titre des préjudices subis par eux-mêmes et leurs deux enfants. Par le jugement attaqué du 9 juin 2020, le tribunal administratif a rejeté leur demande. M. et Mme D..., en leurs noms propres et agissant au nom de leurs deux filles mineures, relèvent appel de ce jugement et demandent à titre principal, d'une part, que le CHU de Bordeaux ou l'ONIAM soient condamnés à leur verser une indemnité provisionnelle d'un montant au moins égal à 200 000 euros et d'autre part que soit ordonnée une expertise complémentaire afin d'évaluer les préjudices en lien avec le retrait du matériel d'ostéosynthèse réalisé le 26 octobre 2018. Ils demandent, à titre subsidiaire, de condamner le CHU de Bordeaux et l'ONIAM à les indemniser de l'intégralité de leurs préjudices, et à titre infiniment subsidiaire, d'ordonner une nouvelle expertise complète dont la réalisation serait confiée à un expert neurochirurgien. La CPAM de la Gironde demande, dans l'attente d'une nouvelle expertise, la condamnation du CHU de Bordeaux à lui verser une provision à valoir sur les débours exposés pour son assurée. Sur le lien de causalité entre les douleurs et l'intervention : 3. Pour rejeter la demande, le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence de lien de causalité établi entre l'intervention chirurgicale et le dommage, en reproduisant les conclusions de l'expertise ordonnée par la CCI. Toutefois, cette expertise s'est bornée à conclure au caractère " multifactoriel " des douleurs et à leur " origine incertaine ", sans évoquer la moindre explication possible au regard de l'apparition de ces douleurs dans les suites immédiates de l'intervention. Mme D... produit en appel une lettre du 4 juin 2018 d'un médecin du service de chirurgie orthopédique de la Pitié-Salpêtrière à Paris qui, après avoir procédé à un examen clinique avec palpation de l'épaule douloureuse, proposait une ablation du matériel dont l'objectif serait d'éliminer la douleur " due au conflit par le matériel lui-même dans les masses musculaires postérieures ". Elle souligne qu'en effet l'ablation de ce matériel réalisée le 26 octobre 2018 a amélioré son état, ce dont atteste également sa kinésithérapeute qui fait état de la disparition des douleurs à type de décharge lorsque le muscle était en contact avec le matériel. Elle joint également un avis spécialisé d'un neurochirurgien qu'elle a consulté, qui indique que la guérison de la névralgie cervico-brachiale a été acquise au prix des risques propres à cette intervention majeure, lesquels ont créé une pathologie nouvelle qui n'existait pas avant l'intervention et qui lui est donc directement imputable. Il explique que l'arthrodèse unilatérale d'un segment cervical laisse persister une mobilité dans l'articulation interapophysaire contro-latérale, et que les contraintes dynamiques provoquent une sollicitation continuelle du matériel d'ostéosynthèse et des micromouvements du site d'arthrodèse qui provoquent des douleurs et empêchent aussi la fusion des greffons osseux habituellement mis en place. Il constate en l'espèce un retard de fusion, qui n'a commencé à se manifester radiologiquement que plus d'un an après, en février 2017, alors que dans les bonnes conditions de blocage bilatéral la fusion se fait en trois mois. Au vu de ces éléments contradictoires, c'est à tort que le tribunal a écarté la demande d'expertise. 4. Le respect du caractère contradictoire de la procédure d'expertise implique que les parties soient mises à même de discuter devant l'expert des éléments de nature à exercer une influence sur la réponse aux questions posées par la juridiction saisie du litige. Lorsqu'une expertise est entachée d'une méconnaissance de ce principe ou lorsqu'elle a été ordonnée dans le cadre d'un litige distinct, ses éléments peuvent néanmoins, s'ils sont soumis au débat contradictoire en cours d'instance, être régulièrement pris en compte par le juge, soit lorsqu'ils ont le caractère d'éléments de pur fait non contestés par les parties, soit à titre d'éléments d'information dès lors qu'ils sont corroborés par d'autres éléments du dossier. 5. Les éléments produits par Mme D..., relatifs aux explications possibles sur l'origine des douleurs ressenties dans les suites de l'intervention chirurgicale du 12 janvier 2015, étant contestés par le centre hospitalier et l'ONIAM et en contradiction avec les affirmations de l'expert désigné par la CCI selon lesquelles l'absence d'ostéosynthèse du côté de l'arthrectomie ne constitue pas un facteur d'instabilité à moyen ou long terme, il y a lieu d'ordonner une nouvelle expertise contradictoire avant de se prononcer sur l'existence ou non d'un lien de causalité entre les douleurs et l'intervention chirurgicale. Sur la responsabilité du CHU de Bordeaux : 6. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) ". Aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision ". Il incombe alors, en principe, au juge de statuer au vu des pièces du dossier, le cas échéant après avoir demandé aux parties les éléments complémentaires qu'il juge nécessaires à son appréciation. Il ne lui revient d'ordonner une expertise que lorsqu'il n'est pas en mesure de se prononcer au vu des pièces et éléments qu'il a recueillis et que l'expertise présente ainsi un caractère utile. En ce qui concerne l'information de la patiente : 7. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus ". Il résulte de ces dispositions que doivent être portés à la connaissance du patient, en amont du recueil de son consentement à l'accomplissement d'un acte médical, les risques connus de cet acte mais également les alternatives thérapeutiques possibles. 8. En cas de manquement à cette obligation d'information, si l'acte de diagnostic ou de soin entraîne pour le patient, y compris s'il a été réalisé conformément aux règles de l'art, un dommage en lien avec la réalisation du risque qui n'a pas été porté à sa connaissance, la faute commise en ne procédant pas à cette information engage la responsabilité de l'établissement de santé à son égard, pour sa perte de chance de se soustraire à ce risque en renonçant à l'opération. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction, compte tenu de ce qu'était l'état de santé du patient et son évolution prévisible en l'absence de réalisation de l'acte, des alternatives thérapeutiques qui pouvaient lui être proposées ainsi que de tous autres éléments de nature à révéler le choix qu'il aurait fait, qu'informé de la nature et de l'importance de ce risque, il aurait consenti à l'acte en question. 9. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise réalisée à la demande de la CCI et de l'expertise sollicitée par Mme D... le 7 juillet 2020 auprès d'un neurochirurgien, que d'autres solutions de soins recourant à des traitements non invasifs, notamment des infiltrations scanno-guidées, étaient envisageables. Or, s'il est constant que l'intéressée a été informée de l'objet de l'intervention chirurgicale et des risques qu'elle impliquait, il n'est en revanche pas établi qu'elle aurait eu connaissance des alternatives thérapeutiques. La circonstance que celles-ci présentaient un risque supérieur de récidive du kyste n'est pas de nature à justifier cette absence d'information, d'autant que ces solutions non invasives auraient pu constituer un préalable à une éventuelle intervention chirurgicale. Mme D... a ainsi perdu une chance de choisir cette alternative qui aurait pu lui permettre d'échapper à l'intervention chirurgicale et de se soustraire, le cas échéant, au risque de subir les douleurs en lien avec celle-ci. Les pièces du dossier ne permettent toutefois pas de se prononcer sur l'ampleur de cette perte de chance sur laquelle il y a donc lieu d'interroger également l'expert. Cette insuffisance des pièces du dossier fait également obstacle à ce que soit accordée une provision à la CPAM ou à Mme D.... En ce qui concerne le déroulement de l'intervention : 10. Il résulte de l'instruction que l'absence de stabilité des vis posées à droite, qui a conduit à leur retrait en cours d'opération, n'a pas été regardée comme fautive par l'expert au regard des difficultés de l'intervention compte tenu du positionnement du kyste. Le même expert n'a pas davantage retenu comme fautive la fracture de l'apophyse transverse droite de la vertèbre T2 apparue après l'opération, qu'il a considérée comme un aléa thérapeutique. Le fait que le chirurgien orthopédique a été remplacé, en cours d'opération, par un confrère n'est pas, à lui seul, de nature, contrairement à ce que soutiennent les consorts D..., à caractériser un manquement fautif. Par suite, aucune faute ne peut être reprochée au CHU dans la réalisation du geste technique ou dans le déroulement de l'opération. Sur l'indemnisation au titre de la solidarité nationale : 11. Aux termes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " (...) Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret. ". Aux termes de l'article D. 1142-1 du même code : " Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l'article L. 1142-1 est fixé à 24 %. / Présente également le caractère de gravité mentionné au II de l'article L. 1142-1 un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ayant entraîné, pendant une durée au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois, un arrêt temporaire des activités professionnelles ou des gênes temporaires constitutives d'un déficit fonctionnel temporaire supérieur ou égal à un taux de 50 %. (...) ". 12. Il résulte des dispositions citées au point précédent que l'ONIAM doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation de dommages résultant directement d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins à la condition qu'ils présentent un caractère d'anormalité au regard de l'état de santé du patient comme de l'évolution prévisible de cet état. La condition d'anormalité du dommage prévue par ces dispositions doit toujours être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement. Lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible. Pour apprécier le caractère faible ou élevé du risque dont la réalisation a entraîné le dommage, il y a lieu de prendre en compte la probabilité de survenance d'un événement du même type que celui qui a causé le dommage et entraînant une invalidité grave ou un décès. Une probabilité de survenance du dommage qui n'est pas inférieure ou égale à 5 % ne présente pas le caractère d'une probabilité faible, de nature à justifier la mise en œuvre de la solidarité nationale. 13. Il est constant que les douleurs ressenties dans les suites de l'intervention sont à l'origine d'un arrêt de travail de plus de six mois, susceptible de justifier une indemnisation au titre de la solidarité nationale pour la partie du dommage non indemnisée par le CHU. Toutefois, l'état du dossier ne permet pas d'apprécier si les conséquences de l'opération seraient plus graves que celles auxquelles la patiente était exposée en l'absence de cette intervention, ni, compte tenu du caractère non contradictoire de l'avis sollicité par Mme D..., si le risque de subir les nouvelles douleurs constatées après l'opération peut être qualifié de faible. Dans ces conditions, et alors que l'état de santé de Mme D... s'est amélioré depuis 2018 et nécessite donc une nouvelle évaluation de ses préjudices, ce qui fait également obstacle à ce que soit déterminée une provision, il y a lieu d'ordonner une expertise aux fins précisées ci-après. DÉCIDE : Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la demande des consorts D..., procédé par un expert neurochirurgien désigné par le président de la cour administrative d'appel, à une expertise. L'expert aura pour mission de : 1°) se faire communiquer tous documents relatifs à l'état de santé de Mme D..., et notamment tous documents relatifs au suivi médical, aux actes de soins et aux diagnostics pratiqués lors de sa prise en charge par le centre hospitalier universitaire de Bordeaux, ainsi que ceux relatifs à son état de santé postérieurement à l'intervention chirurgicale du 26 octobre 2018 ; prendre connaissance du rapport d'expertise du Dr C... du 20 septembre 2017 et de l'avis du professeur E... ; convoquer et entendre les parties et procéder à un examen médical de Mme D... ; 2°) retracer l'état de santé de Mme D... avant l'opération chirurgicale et dire si une pathologie antérieure est susceptible d'interférer dans les douleurs ressenties à l'issue de l'opération initiale ; 3°) indiquer si les douleurs ressenties par Mme D... après l'opération sont dues au matériel d'ostéosynthèse posé le 12 janvier 2015 ; le cas échéant, préciser si la fixation unilatérale de ce matériel a pu en être à l'origine ; 4°) indiquer si l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles Mme D... était exposée de manière suffisamment probable en l'absence de réalisation de l'arthrectomie et de l'ostéosynthèse ; 5°) dans l'hypothèse où le préjudice subi serait directement imputable à un accident médical non fautif, évaluer le taux du risque opératoire qui s'est, le cas échéant, réalisé en l'espèce, c'est-à-dire la probabilité que le dommage avait de survenir en raison de l'acte de soins en cause, eu égard aux séries statistiques disponibles ; 6°) préciser, en se basant sur le rapport bénéfices/risques, si l'infiltration foraminale aurait dû être privilégiée au détriment de l'opération chirurgicale. Le cas échéant, quantifier la perte de chance d'échapper au dommage ; 7°) dire si l'état de santé de Mme D... est consolidé ou s'il est susceptible d'amélioration ou de dégradation ; proposer, si possible, une date de consolidation de l'état de santé de l'intéressée ; 8°) décrire, sans imputer le taux de perte de chance éventuellement retenu, la nature et l'étendue des préjudices résultant de la prise en charge hospitalière de Mme D..., en les distinguant de son état antérieur et des conséquences prévisibles de sa prise en charge médicale si celle-ci s'était déroulée normalement ; à cet égard, apporter les éléments suivants : a) Préjudices patrimoniaux : - préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation) : dépenses de santé et frais divers, assistance d'une tierce personne ; - préjudices permanents (après consolidation) : dépenses de santé et frais divers, assistance d'une tierce personne ; b) Préjudices extra patrimoniaux : - préjudices extra patrimoniaux temporaires (avant consolidation) : déficit fonctionnel temporaire, en précisant les périodes et le taux, souffrances endurées, préjudice esthétique temporaire, en les évaluant sur une échelle de 1 à 7 ; - préjudices extra patrimoniaux permanents (après consolidation) ; déficit fonctionnel permanent, préjudice sexuel, préjudice d'agrément, préjudice esthétique permanent ; 9°) donner à la cour tout autre élément d'information qu'il estimera utile. Article 2 : Les opérations d'expertise auront lieu contradictoirement entre Mme D..., la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, le centre hospitalier universitaire de Bordeaux et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales. Article 3 : L'expert sera désigné par le président de la cour. Après avoir prêté serment, il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Article 4 : Conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article R. 621-9 du code de justice administrative, l'expert déposera son rapport au greffe sous forme dématérialisée dans le délai fixé par le président de la cour dans la décision le désignant. Il en notifiera une copie à chacune des parties intéressées. Avec l'accord de ces dernières, cette notification pourra s'opérer sous forme électronique. Article 5 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, au centre hospitalier universitaire de Bordeaux et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales. Une copie en sera adressée à la Mutuelle nationale des hospitaliers et professionnels de santé. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2022. Le rapporteur, Olivier A... La présidente, Catherine Girault La greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°20BX02321 2
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de Plougoumelen (Morbihan) à lui verser la somme de 68 379,80 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa réclamation préalable, et de leur capitalisation à compter du 20 septembre 2018, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des fautes commises par cette commune dans la détermination de la constructibilité d'un terrain lui appartenant, situé au lieu-dit Parc Lan er Prah. Par un jugement n° 1705843 du 15 janvier 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 mars 2021, 3 décembre 2021 et 20 décembre 2021, Mme C..., représentée par Me Collet, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 15 janvier 2021 du tribunal administratif de Rennes ; 2°) de condamner la commune de Plougoumelen (Morbihan) à lui verser la somme de 68 379,80 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa réclamation préalable et de leur capitalisation à compter du 20 septembre 2018, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison des fautes commises par les services de cette commune dans la détermination de la constructibilité d'un terrain lui appartenant, initialement cadastré n° E 1606 puis AB 45, situé au lieu-dit Parc Lan er Prah ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Plougoumelen la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la responsabilité de la commune est engagée ; elle a commis une faute en classant sa parcelle en zone constructible au plan d'occupation des sols en vigueur à la date de l'achat de sa parcelle ; elle a commis une faute en lui délivrant un certificat d'urbanisme positif le 13 octobre 2005 ; - son préjudice est né de l'acquisition d'un terrain constructible qui s'est révélé inconstructible lors de son projet de revente ; la délivrance d'un certificat d'urbanisme positif le 13 octobre 2005 est en lien direct et certain avec son préjudice ; son préjudice résultant de la différence entre le prix d'acquisition du terrain constructible et celui du terrain inconstructible est de 48 379,80 euros pour sa part, eu égard au prêt conclu ; son préjudice moral sera indemnisé pour un montant de 20 000 euros. Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 octobre et 13 décembre 2021, et un mémoire enregistré le 12 janvier 2022 qui n'a pas été communiqué, la commune de Plougoumelen, représentée par Me Rouhaud, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête de Mme C... ; 2°) subsidiairement de faire droit aux demandes de Mme C... pour un montant moindre ; 3°) de mettre à la charge de Mme C... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'environnement ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Mas, rapporteur public, - et les observations de Me Collet, représentant Mme C..., et de Me Messéant substituant Me Rouhaud, représentant la commune de Plougoumelen. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... C... a acquis le 17 mars 2006, avec un tiers, la parcelle n° E 1606, devenue AB 45, située à Plougoumelen (Morbihan), pour laquelle, à l'occasion d'un projet de revente en 2010, la commune a indiqué que du fait de l'existence d'une zone humide il n'était pas constructible. Par un courrier du 19 septembre 2017, Mme C... a demandé à cette commune de l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison des fautes commises en classant cette parcelle en zone constructible au plan d'occupation des sols (POS) communal puis en lui délivrant le 13 octobre 2005 un certificat d'urbanisme ne faisant pas état de son inconstructibilité. Par une décision du 24 octobre 2017, le maire de Plougoumelen a rejeté sa demande. Par un jugement du 15 janvier 2021, dont Mme C... relève appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande de condamnation de la commune de Plougoumelen à lui verser la somme de 68 379,80 euros, avec intérêts au taux légal et capitalisation, en réparation des préjudices allégués. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Mme C... soutient en premier lieu que la responsabilité pour faute de la commune de Plougoumelen est engagée du fait du classement de la parcelle qu'elle a acquise en 2006, alors qu'elle était classée en zone constructible UB au plan d'occupation des sols de la commune approuvé le 22 septembre 2000, alors que cette parcelle appartenait dès cette date à une zone humide, interdisant toute construction en application du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) du bassin Loire-Bretagne. 3. Aux termes de l'article L. 212-1 du code de l'environnement dans sa version applicable à la date d'approbation du plan d'occupation des sols de la commune de Plougoumelen le 22 septembre 2000 : " Un ou des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux fixent pour chaque bassin ou groupement de bassins les orientations fondamentales d'une gestion équilibrée de la ressource en eau, telle que prévue à l'article L. 211-1. / (...) Les programmes et les décisions administratives dans le domaine de l'eau doivent être compatibles ou rendus compatibles avec leurs dispositions. Les autres décisions administratives doivent prendre en compte les dispositions de ces schémas directeurs. ". 4. D'une part, une délibération approuvant un plan d'occupation des sols qui se borne à fixer des règles d'utilisation du sol ne constitue pas une décision intervenant dans le domaine de l'eau au sens des dispositions législatives précitées, mais doit néanmoins prendre en compte les dispositions du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux opposable. D'autre part il résulte de ce même article L. 212-1 du code de l'environnement que les décisions administratives prises au titre de législations distinctes de celle de l'eau ne doivent pas, en principe, s'écarter des orientations fondamentales du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux sauf, sous le contrôle du juge, pour un motif tiré de l'intérêt de l'opération envisagée et dans la mesure où ce motif le justifie. 5. Il résulte de l'instruction d'une part que le SDAGE du bassin Loire-Bretagne adopté le 4 juillet 1996 prévoyait de sauvegarder et mettre en valeur les zones humides. A ce titre il était notamment prévu d'inventorier les zones humides et indiqué que " les POS doivent prendre en compte les zones humides, notamment celles qui sont identifiées par le SDAGE et les SAGE, en édictant des dispositions appropriées pour en assurer la protection, par exemple le classement en zone ND assorti de mesures du type : (...) interdiction stricte de toute nouvelle construction (...) ". Il y était également mentionné que " les SAGE doivent établir l'inventaire et la cartographie des zones humides comprises dans leur périmètre en tenant compte de leur valeur biologique et de leur intérêt pour la ressource en eau. ". D'autre part, il ressort du rapport de présentation du plan d'occupation des sols adopté le 22 septembre 2000 par la commune de Plougoumelen que diverses zones humides de la commune ont été classées en zones ND par référence au SDAGE du bassin Loire-Bretagne. Cette situation est alors de nature à faire regarder la commune comme ayant pris en compte les orientations fondamentales de ce schéma directeur, dès lors que les dispositions citées ne lui imposaient pas de réaliser un inventaire des zones humides de la commune préalablement à l'adoption de son POS et qu'il n'existait alors pas de schéma d'aménagement et de gestion de l'eau (SAGE) inventoriant et cartographiant les zones humides de la commune de Plougoumelen. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que l'appartenance de la parcelle de Mme C... à une zone humide, du fait de l'existence d'une prairie humide, pouvait alors être établie à l'évidence, contrairement à ce que soutient Mme C.... Ainsi en 2009, afin d'établir un inventaire de ces zones dans la perspective de l'élaboration du plan local d'urbanisme communal, la commune a dû recourir aux services d'un cabinet spécialisé qui a procédé à un examen par parcelle, en analysant notamment les végétations présentes sur les sites et/ou les sols après sondage. Par suite, la responsabilité de la commune de Plougoumelen n'est pas engagée du fait du classement de la parcelle de Mme C... en zone constructible au POS de cette commune adopté en 2000. 6. Mme C... soutient, en deuxième lieu, que la responsabilité pour faute de la commune de Plougoumelen est également engagée du fait de la délivrance d'un certificat d'urbanisme informatif illégal le 13 octobre 2005, soit avant son achat de la parcelle en litige, en tant qu'il n'écarte pas le classement erroné en zone UB du POS et qu'il ne mentionne pas même de restrictions liées à l'existence d'une zone humide. 7. En vertu d'un principe général, il incombe à l'autorité administrative de ne pas appliquer un règlement illégal. Ce principe trouve à s'appliquer, en l'absence même de toute décision juridictionnelle qui en aurait prononcé l'annulation ou les aurait déclarées illégales, lorsque les dispositions d'un document d'urbanisme, ou certaines d'entre elles si elles en sont divisibles, sont entachées d'illégalité, sauf si cette illégalité résulte de vices de forme ou de procédure qui ne peuvent plus être invoqués par voie d'exception en vertu de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme. Ces dispositions doivent ainsi être écartées, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, par l'autorité chargée de délivrer des certificats d'urbanisme ou des autorisations d'utilisation ou d'occupation des sols, qui doit alors se fonder, pour statuer sur les demandes dont elle est saisie, sur les dispositions pertinentes du document immédiatement antérieur ou, dans le cas où celles-ci seraient elles-mêmes affectées d'une illégalité dont la nature ferait obstacle à ce qu'il en soit fait application, sur le document encore antérieur ou, à défaut, sur les règles générales fixées par les articles L. 111-1 et suivants et R. 111-1 et suivants du code de l'urbanisme. 8. Ainsi qu'il a été exposé au point 5, l'appartenance de la parcelle n° E 1606 à une prairie humide caractérisant une zone humide n'était pas établie en 2000 à la date d'approbation du POS, et il ne résulte pas davantage de l'instruction que cela pouvait être identifié à la date de délivrance du certificat d'urbanisme du 13 octobre 2005 dès lors que cela supposait notamment une analyse de la végétation et des sols, après de possibles sondages. Mme C... n'est alors pas fondée à soutenir que la commune aurait dû écarter l'application du POS alors opposable classant cette parcelle en zone UB lors de la délivrance du certificat d'urbanisme en litige. En conséquence, la responsabilité de la commune de Plougoumelen n'est pas engagée à ce titre. 9. Par ailleurs aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable à la date de délivrance du certificat d'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme indique les dispositions d'urbanisme et les limitations administratives au droit de propriété et le régime des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. / (...) Lorsque toute demande d'autorisation pourrait, du seul fait de la localisation du terrain, être refusée en fonction des dispositions d'urbanisme et, notamment, des règles générales d'urbanisme, la réponse à la demande de certificat d'urbanisme est négative. (...) ". 10. Mme C... n'est pas davantage fondée à soutenir, pour le même motif tenant au défaut d'identification d'une zone humide, que ce même certificat d'urbanisme aurait dû mentionner que la parcelle se trouvait en zone humide où il existait un risque pour la salubrité au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Au demeurant, s'agissant d'un certificat d'urbanisme délivré afin de connaitre les dispositions d'urbanisme et les limitations au droit de construire applicables à la parcelle, sans précision apportée sur le projet de construction, le maire de la commune n'était pas tenu de mentionner les règles générales d'urbanisme permissives applicables. Aussi par son contenu le certificat d'urbanisme du 13 octobre 2005 n'était pas de nature à engager la responsabilité de la commune pour faute. 11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Sur les frais d'instance : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par Mme C.... Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette dernière, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme de 2 500 euros demandée par la commune de Plougoumelen. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Plougoumelen sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la commune de Plougoumelen. Délibéré après l'audience du 14 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 novembre 2022. Le rapporteur, C. A... Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00769
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions en date du 23 septembre 2021 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a refusé le bénéfice d'un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi, lui a fait interdiction de retour pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence. Par un jugement n° 2106398 du 29 septembre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 21 octobre 2021, M. B... A..., représenté par Me Rouvier, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2106398 du 29 septembre 2021 du tribunal administratif de Grenoble ; 2°) d'annuler les décisions en date du 23 septembre 2021 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a refusé le bénéfice d'un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi, lui a fait interdiction de retour pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Il soutient que : - l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence ; elle n'est pas motivée ; elle méconnait l'article 6, 4° de l'accord franco-algérien ; elle méconnait l'article L. 611-3, 5° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle méconnait l'article 3, 1° de la convention relative aux droits de l'enfant ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation compte tenu de ses attaches familiales ; - le refus de délai de départ volontaire n'est pas motivé ; il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; - la fixation du pays de renvoi doit être annulée en conséquence de l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du délai de départ volontaire ; - l'interdiction de retour n'est pas motivée ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; - l'assignation à résidence est illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; elle est entachée d'incompétence ; elle n'est pas motivée ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense enregistré le 31 décembre 2021, le préfet de l'Isère conclut au rejet de la requête au motif que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Par décision du 17 février 2022, la demande d'aide juridictionnelle de M. B... A... a été classée sans suite. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, modifiée, conclue à Rome le 4 novembre 1950 ; - la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ; - l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Stillmunkes, président assesseur, - et les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Par des décisions en date du 23 septembre 2021, le préfet de l'Isère a fait obligation à M. A..., de nationalité algérienne, de quitter le territoire français, lui a refusé le bénéfice d'un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi, lui a fait interdiction de retour pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence. La magistrate déléguée du tribunal administratif de Grenoble a rejeté la requête formée par M. A... contre ces décisions. Ce dernier interjette appel du jugement. Sur l'obligation de quitter le territoire français : 2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Il est constant que le requérant ne justifie pas d'une entrée régulière et ne bénéficie d'aucun titre de séjour. Il relève ainsi des prévisions des dispositions précitées. 3. En premier lieu, la décision a été signée par M. Portal, secrétaire général de la préfecture, sur le fondement de la délégation prévue par arrêté du 7 juin 2021, régulièrement publié le jour même. Le moyen tiré de l'incompétence doit en conséquence être écarté. 4. En deuxième lieu, la décision expose les motifs de droit et de fait sur lesquels elle se fonde. Elle est dès lors régulièrement motivée et il résulte de ses termes que le préfet a pris sa décision après examen de la situation du requérant. 5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... est né à Chief en juin 1995 et qu'il est de nationalité algérienne. Il allègue être entré sur le territoire français, dans des conditions non déterminées, en 2018. Le préfet relève qu'il a fait l'objet en avril 2019, à la suite d'une interpellation pour violences conjugales, d'une précédente mesure d'éloignement, à laquelle il ne s'est pas conformé. Si M. A... invoque un nouveau concubinage avec une ressortissante française et la naissance d'un enfant, il a été interpelé la veille de la décision pour violences sur sa compagne, qui est une personne vulnérable et sa compagne, qui a porté plainte, a précisé qu'il avait précédemment commis de façon récurrente des violences conjugales, parfois devant l'enfant. Le préfet a également relevé la survenue en avril 2019, dans une relation antérieure, de faits constatés de violences conjugales et d'abus sexuel. Le requérant ne justifie par ailleurs pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant. Le préfet a aussi relevé en défense que le requérant avait commis en novembre 2020 des violences sur mineur par ascendant ou personne ayant autorité sur la victime. Il a été également interpelé pour tentative de vol en réunion avec dégradation et le préfet a produit des pièces qui font état de son interpellation pour possession d'arme blanche et menace de mort, ainsi que de l'utilisation de fausses identités. Le requérant ne justifie pas d'un travail régulier ni d'aucune ressource propre. Enfin, s'il se prévaut de la présence de membres de sa famille en France, il ne fournit ni indication précise et circonstanciée ni élément de nature à établir l'existence de relations particulières avec des membres de sa famille qui demeureraient régulièrement en France. Eu égard à la durée et aux conditions de son séjour, ainsi qu'à son comportement, le préfet n'a pas porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, ni n'a méconnu l'intérêt supérieur de l'enfant, en décidant son éloignement. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3, 1° de la convention relative aux droits de l'enfant doivent en conséquence être écartés. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant. 6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) ". En l'espèce, il est constant que le requérant est père d'un enfant de nationalité française, qu'il a reconnu à la naissance en avril 2020. Toutefois, il ne produit aucun élément ni aucune indication susceptible d'établir qu'il contribuerait effectivement à son entretien ou à son éducation, au-delà de la seule année 2020 au titre de laquelle il produit quelques pièces. Les pièces produites au titre de l'année 2021 sont en effet, soit postérieures à la décision, soit non authentifiables en l'absence d'identification suffisante de leur auteur. Enfin, le préfet a relevé, sans être sérieusement contredit, l'absence de tout élément établissant l'existence d'une participation effective du requérant à l'entretien et l'éducation de l'enfant et le requérant ne produit aucun justificatif ni aucune explication circonstanciée, alors au surplus que le requérant a commis comme il vient d'être dit de façon récurrente des faits graves de violences conjugales, qui sont de nature à affecter sérieusement la cellule familiale et notamment l'enfant. Le moyen tiré de la méconnaissance du 5° de l'article L. 611-3 doit ainsi être écarté. 7. En cinquième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 4. Au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an (...) ". Ces stipulations, de portée équivalente à celle des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en dépit des différences tenant au détail des conditions requises, visent à prendre en compte la situation du parent d'un enfant français sous réserve que soit effectivement établie la réalité des liens du demandeur avec son enfant français. 8. Indépendamment de l'énumération donnée par l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une telle mesure à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Lorsque la loi ou une convention internationale bilatérale prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français. 9. En l'espèce, ainsi qu'il vient d'être indiqué, le requérant ne produit aucun élément ni aucune indication susceptible d'établir qu'à la date de la décision litigieuse il aurait exercé effectivement, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de son enfant, ni qu'il aurait subvenu effectivement à ses besoins. Au contraire, le préfet a relevé, sans être sérieusement contredit, l'absence de tout élément probant produit par le requérant et ce dernier ne fournit aucun justificatif ni aucune explication circonstanciée sur la période précédant la décision, alors au surplus que le requérant a commis de façon récurrente des faits graves de violences conjugales, qui sont de nature à affecter la cellule familiale et notamment l'enfant. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 6, 4°, doit en conséquence être écarté. Sur la fixation du délai de départ volontaire : 10. En premier lieu, la décision expose les motifs de droit et de fait sur lesquels elle se fonde. Elle est dès lors régulièrement motivée et il résulte de ses termes que le préfet a pris sa décision après examen de la situation du requérant. 11. En second lieu, le préfet a refusé au requérant le bénéfice d'un délai de départ volontaire, au motif qu'il existait un risque qu'il se soustraie à l'éloignement au sens du 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet a en particulier relevé l'irrégularité de l'entrée et du séjour, la soustraction à une mesure d'éloignement, l'absence de documents de voyage en cours de validité, le comportement délictuel précité, l'absence de résidence établie alors que le comportement de violence conjugale de l'intéressé ne lui permet pas de se prévaloir sérieusement du domicile de sa compagne, et enfin l'absence de ressources, au sens des 1°, 5° et 8° de l'article L. 612-3 du même code. Le requérant, qui ne conteste pas cette analyse, se borne à invoquer une erreur manifeste d'appréciation. Eu égard toutefois à ce qui a été indiqué sur la situation personnelle du requérant et son comportement, le préfet, qui n'a pas méconnu les dispositions précitées, n'a pas entaché sa décision d'une telle erreur. Sur la fixation du pays de renvoi : 12. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit que le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. 13. En second lieu, le requérant ne peut en tout état de cause exciper utilement de l'illégalité de la décision fixant le délai de départ volontaire, alors que la fixation du pays de destination n'est prise ni sur le fondement ni pour l'exécution de la décision fixant ce délai. Sur l'interdiction de retour sur le territoire français : 14. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ". 15. En premier lieu, la décision expose les motifs de droit et de fait sur lesquels elle se fonde. Elle est dès lors régulièrement motivée et il résulte de ses termes que le préfet a pris sa décision après examen de la situation du requérant. 16. En second lieu, le préfet a en particulier relevé la soustraction à une mesure d'éloignement, l'existence d'une menace à l'ordre public et notamment le comportement précité de violence conjugale grave, la durée de présence faible et l'absence d'attaches privées et familiales réelles et ancrées dans la durée. Eu égard à ce qui a été indiqué sur la situation personnelle du requérant et son comportement, et alors que le bénéfice d'un délai de départ volontaire a pu lui être régulièrement refusé, la seule invocation par le requérant de sa qualité de père d'un enfant français ne caractérise en l'espèce aucune circonstance humanitaire au sens de l'article L. 612-6 et le préfet n'a entaché sa décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'aucune erreur d'appréciation. Sur l'assignation à résidence : 17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. 18. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'incompétence doit être écarté pour les motifs qui ont été précédemment exposés, alors que la décision en litige a également été signée par M. Portal, secrétaire général de la préfecture. 19. En troisième lieu, la décision expose les motifs de droit et de fait sur lesquels elle se fonde. Elle est dès lors régulièrement motivée et il résulte de ses termes que le préfet a pris sa décision après examen de la situation du requérant. 20. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : / 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé (...) ". 21. Il est constant qu'à la date de la décision le requérant fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et qu'il ne bénéficie d'aucun délai de départ volontaire. La seule circonstance que le requérant invoque sa situation familiale n'est pas, eu égard notamment à ce qui a été indiqué précédemment sur son comportement de violence conjugale ainsi que sur le risque de soustraction à l'éloignement, de nature à établir que l'éloignement ne demeurerait pas une perspective raisonnable ni que le préfet aurait commis une erreur d'appréciation en décidant d'une assignation à résidence. 22. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, la magistrate déléguée a rejeté sa requête. 23. Les conclusions principales du requérant étant rejetées, ses conclusions relatives aux frais de l'instance doivent être rejetées par voie de conséquence. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient : M. Pourny, président de chambre, M. Stillmunkes, président assesseur, Mme Bentejac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 novembre 2022. Le rapporteur, H. Stillmunkes Le président, F. Pourny La greffière, F. Abdillah La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY03412
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 2014 et 2015. Par un jugement n° 1903636 du 26 octobre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire enregistrés le 30 novembre 2020 et le 19 juillet 2021, M. A... B..., représenté par Me Caudin, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 26 octobre 2020 ; 2°) de lui accorder la décharge demandée ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice. Il soutient qu'en l'absence d'option par la société à l'impôt sur le revenu, sa rémunération en tant que président salarié était déductible et les sommes litigieuses ont été correctement déclarées dans la catégorie des traitements et salaires. Par des mémoires enregistrés le 6 juillet 2021 et le 30 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que la société a sans ambiguïté exercé l'option pour le régime d'imposition des sociétés de personnes. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de commerce ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ; - les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ; - les observations de Me Mercier, représentant M. B... ; Une note en délibéré, présentée pour M. B..., a été enregistrée le 6 octobre 2022. Considérant ce qui suit : 1. La SASU Crazy Training, créée le 14 février 2014, qui exploite une salle de sports à Genay et dont M. B... est dirigeant et unique associé a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2014 et 2015 à l'issue de laquelle l'administration a estimé que cette société avait opté pour l'imposition selon le régime des sociétés de personnes et qu'en application des dispositions du c du II de l'article 211 du code général des impôts, les rémunérations du dirigeant n'étaient pas déductibles des résultats de la société. L'administration en a tiré les conséquences en notifiant à M. B..., par une proposition de rectification en date du 12 décembre 2016, des redressements dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. M. B... relève appel du jugement du 26 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires. 2. D'une part, aux termes de l'article 8 du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société.(...) Il en est de même, sous les mêmes conditions : (...) 6° Des membres des sociétés anonymes, des sociétés par actions simplifiées et des sociétés à responsabilité limitée qui ont opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes dans les conditions prévues par l'article 239 bis AB (...) ". Aux termes de l'article 239 bis AB du code général des impôts, dans sa version alors applicable : " I.- Les sociétés anonymes, les sociétés par actions simplifiées et les sociétés à responsabilité limitée dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché d'instruments financiers, dont le capital et les droits de vote sont détenus à hauteur de 50 % au moins par une ou des personnes physiques et à hauteur de 34 % au moins par une ou plusieurs personnes ayant, au sein desdites sociétés, la qualité de président, directeur général, président du conseil de surveillance, membre du directoire ou gérant, ainsi que par les membres de leur foyer fiscal au sens de l'article 6, peuvent opter pour le régime fiscal des sociétés de personnes mentionné à l'article 8. / (...) / III.- L'option ne peut être exercée qu'avec l'accord de tous les associés, à l'exclusion des associés mentionnés au deuxième alinéa du I. Elle doit être notifiée au service des impôts auprès duquel est souscrite la déclaration de résultats dans les trois premiers mois du premier exercice au titre duquel elle s'applique. (...) ". L'article 46 terdecies DA de l'annexe III au même code dispose : " I. - La notification de l'option des sociétés anonymes, sociétés par actions simplifiées ou sociétés à responsabilité limitée pour le régime fiscal des sociétés de personnes en application des dispositions de l'article 239 bis AB du code général des impôts s'effectue selon le modèle établi par l'administration. / La notification comporte la date d'effet de l'option, l'indication de la dénomination sociale, de l'adresse du siège et, si elle est différente, du principal établissement de la société qui opte ainsi que le numéro d'identité qui lui a été attribué dans les conditions du premier alinéa de l'article R. 123-221 du code de commerce. / Elle est accompagnée de la liste des associés à la date d'ouverture du premier exercice auquel l'option s'applique, avec la mention de leurs nom, prénoms, dénomination sociale et adresse et, le cas échéant, des fonctions exercées par ces associés dans la société. / Cette notification est signée par l'ensemble des associés, à l'exclusion des associés mentionnés au deuxième alinéa du I de l'article 239 bis AB précité. / II. - Les sociétés qui ont opté pour le régime prévu à l'article 239 bis AB du code général des impôts joignent aux déclarations de résultats déposées au titre des exercices pendant lesquels l'option s'applique un état conforme au modèle établi par l'administration, mentionnant : / 1° L'identité, l'adresse du siège et, si elle est différente, celle du principal établissement de la société ayant opté pour le régime prévu à l'article 239 bis AB du code général des impôts ;/ 2° La composition du capital, en titres et en droits de vote, à la clôture de l'exercice, avec les modifications intervenues en cours d'exercice ; / 3° Le cas échéant, l'identité des associés définis au deuxième alinéa du I de l'article 239 bis AB du code général des impôts, avec l'indication de leur dénomination, de leur adresse et de la quote-part du capital et des droits de vote qu'ils ont détenue ensemble au cours de l'exercice ; / 4° Les nom, prénoms et adresse des associés personnes physiques qui ont détenu ensemble au cours de l'exercice, selon les modalités mentionnées au deuxième alinéa du I de l'article 239 bis AB du code général des impôts, au moins 50 % du capital et des droits de vote ; / 5° Les nom, prénoms, adresse et fonction dans la société des associés personnes physiques exerçant une des fonctions de direction mentionnées au premier alinéa du I de l'article 239 bis AB du code général des impôts, qui ont détenu ensemble au cours de l'exercice, selon les modalités mentionnées au deuxième alinéa du I de l'article précité, au moins 34 % du capital et des droits de vote ; / 6° La quote-part du capital et des droits de vote déterminée selon les modalités mentionnées au deuxième alinéa du I de l'article 239 bis AB du code général des impôts, détenue au cours de l'exercice par chacun des associés mentionnés aux 4° et 5°. (...) ". 3. D'autre part, l'article 371 AO de l'annexe II au code général des impôts dispose : " Conformément à l'article R. 123-17 du code de commerce, la déclaration présentée ou transmise au centre de formalités des entreprises compétent, dans les conditions précisées à cet article, vaut déclaration auprès de l'organisme destinataire. ". L'article 371 AS de la même annexe dispose : " Conformément à l'article R. 123-30 du code de commerce, les annexes aux articles R. 123-5 et R. 123-30 du même code précisent les déclarations mentionnées à l'article 371 AI devant être déposées aux centres de formalités des entreprises et les administrations, personnes ou organismes destinataires de ces formalités selon leur compétence. ". L'article R. 123-5 du code de commerce dispose : " Le dépôt des déclarations prévues à l'annexe 1-2 au présent livre est obligatoirement effectué dans les centres de formalités des entreprises au terme d'un délai d'un an à compter de la création du centre. ". Enfin, aux termes de l'article R. 123-17 du même code : " La déclaration présentée ou transmise au centre de formalités des entreprises compétent vaut déclaration auprès de l'organisme destinataire, dès lors qu'elle est régulière et complète à l'égard de ce dernier. (...) ". 4. En application des dispositions citées aux points 2 et 3 ci-dessus, pour exercer valablement leur option pour l'imposition selon le régime propre aux sociétés de personnes, les sociétés de capitaux doivent soit notifier cette option au service des impôts du lieu de leur principal établissement, conformément aux prescriptions de l'article 239 bis AB du code général des impôts et de l'article 46 terdecies DA de l'annexe III à ce code, soit cocher la case prévue à cet effet sur le formulaire remis au centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce dont elles dépendent à l'occasion de la déclaration de leur création ou de leur modification, manifestant ainsi sans ambiguïté l'exercice de leur option. 5. Il est constant que dans la rubrique " options fiscales " du formulaire M0 adressé au centre des formalités des entreprises, la SASU Crazy Training n'a pas choisi de cocher la case " réel simplifié " associée à l'intitulé " IS " relatif à l'impôt sur les sociétés, mais a choisi de cocher la case " réel simplifié " associée à l'intitulé " BIC " relatif à l'impôt sur le revenu. Si M. B... fait valoir que la case d'option intitulée " régime des sociétés de personnes " n'a pas été cochée et qu'il a déclaré, dans la catégorie des traitements et salaires, les revenus qu'il a perçus en 2014 et 2015, lesquels ont fait l'objet de bulletins de salaires ainsi que de versements de charges salariales, ces circonstances ne sont pas de nature à faire regarder comme ambigüe l'option faite pour le régime d'imposition des sociétés de personnes au demeurant confirmée par le fait qu'au titre des exercices litigieux la société a souscrit des déclarations d'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux, peu important à cet égard, la circonstance que la société aurait déposé des déclarations rectificatives en matière d'impôt sur les sociétés. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que la SASU Crazy Training avait, au titre des exercices litigieux, régulièrement opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes et, par voie de conséquence, a imposé les bénéfices dégagés par cette société entre les mains de M. B... dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. 6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 2014 et 2015. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Bourrachot, président de chambre, Mme Dèche, présidente assesseure, Mme Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 octobre 2022. La rapporteure, P. DècheLe président, F. Bourrachot La greffière, A.-C. Ponnelle La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY03517 kc
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Vu la procédure suivante : Par une requête enregistrée le 23 septembre 2020, la SARL Année Distribution, la SAS Govelomat, la SAS Guidis, la SAS Guijardy, la SAS Guivadis et la SAS Utilia, représentées par Me Cazin, demandent à la cour : 1°) d'annuler l'arrêté du 31 juillet 2020 par lequel le maire de la commune de Guignen (Ille-et-Vilaine) a délivré à la SARL Guignen Dis II, un permis de construire sur les parcelles cadastrées à la section ZP sous les n°s 478, 479, 481, 484, 486 et 489, en vue de créer un ensemble commercial, exploité sous l'enseigne " Leclerc ", d'une surface de vente de 2 125 m², ainsi qu'un point permanent de retrait par la clientèle d'achats au détail commandés par voie télématique, organisé pour l'accès en automobile (" drive ") comportant quatre pistes de ravitaillement, en tant que ce permis vaut autorisation d'exploitation commerciale. 2°) de mettre à la charge de la commune de Guignen et de la société Guignen Dis II une somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - le permis de construire attaqué méconnaît l'article L. 752-21 du code de commerce ; le nouveau projet de la société Guignen Dis II présente des similitudes importantes avec un ancien projet refusé ; la société n'a pas pris en compte la motivation de la décision initiale de refus et l'avis défavorable de la CNAC ; - le permis de construire attaqué est incompatible avec les dispositions du document d'aménagement artisanal et commercial (DAAC) du schéma de cohérence territoriale du Pays des Vallons de Vilaine applicable ; - le permis est entaché d'erreur d'appréciation au regard des articles L. 750-1 à L. 750-6 du code de commerce ; l'impact du projet sur l'animation urbaine et commerciale est négatif ; le projet emporte une augmentation des flux de circulation ; l'insertion paysagère du projet est médiocre ; le projet emporte une consommation excessive de l'espace, et ne comporte aucun effet positif en matière de protection des consommateurs ; - le permis de construire attaqué méconnaît les articles R. 431-16 et R. 122-2 du code de l'environnement. Des mémoires en production de pièces, enregistrés les 4 et 18 janvier 2021, ont été présentés par la Commission nationale d'aménagement commercial. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 décembre 2020, la commune de Guignen, représentée par Me Coudray, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge des sociétés requérantes le versement de la somme globale de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par les requérantes n'est fondé. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2021, la SARL Guignen Dis II, représentée par Me Courrech, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge des sociétés requérantes le versement de la somme globale de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par les requérantes n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de commerce ; - le code de l'environnement ; - le code de l'urbanisme ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Mas, rapporteur public, - et les observations de Me Cazin, représentant les sociétés Année distribution, Govelomat, Guidis, Guijardy, Guivadis et Utilia, de Me Lapprand, représentant la commune de Guignen, et de Me Carteret, représentant la société Guignen Dis II. Une note en délibéré, enregistrée le 18 octobre 2022, a été présentée pour les sociétés Année distribution, Govelomat, Guidis, Guijardy, Guivadis et Utilia. Considérant ce qui suit : 1. La société Guignen Dis a déposé à la mairie de Guignen (Ille-et-Vilaine), le 5 juin 2018, une demande de permis de construire, valant autorisation d'exploitation commerciale, sur des terrains situés rue Jean de Saint-Amadour à Guignen, en vue de la création d'un magasin à l'enseigne " E. Leclerc " d'une surface de vente totale de 2 500 m², d'un point permanent de retrait, par la clientèle, d'achats au détail commandés par voie télématique, organisé pour l'accès automobile avec 4 pistes de ravitaillement, ainsi que d'une surface affectée au retrait des marchandises de 292 m² de surface de plancher. Le 12 juillet 2018, la commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) d'Ille-et-Vilaine a émis un avis favorable au projet. Les sociétés Année distribution, Govelomat, Guidis, Guijardy, Guivadis, Utilia et Valma ont formé un recours contre cet avis, le 6 août 2018, devant la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC). Le 8 novembre 2018, la CNAC a émis un avis défavorable au projet. En décembre 2018, la société Guignen Dis a sollicité un nouveau permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour un projet modifié, d'une surface de vente réduite à 2 125 m². Les sociétés Année distribution, Govelomat, Guidis, Guijardy, Guivadis et Utilia demandent l'annulation du permis de construire du 31 juillet 2020, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, par lequel le maire de Guignen a délivré, après un nouvel examen et un avis favorable de la CNAC du 8 juillet 2020, le permis de construire sollicité. Sur les conclusions en annulation : En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 752-21 du code de commerce : 2. Aux termes de l'article L. 752-21 du code de commerce : " Un pétitionnaire dont le projet a été rejeté pour un motif de fond par la Commission nationale d'aménagement commercial ne peut déposer une nouvelle demande d'autorisation sur un même terrain, à moins d'avoir pris en compte les motivations de la décision ou de l'avis de la commission nationale ". 3. La société Guignen Dis a déposé en 2018 une première demande de permis de construire portant sur la réalisation d'un magasin E. Leclerc, et consistant à construire, sur la même parcelle, un ensemble commercial d'environ 2 500 m² de surface de vente ainsi qu'un point " drive ". La Commission nationale d'aménagement commercial avait émis un avis défavorable par un avis du 8 novembre 2018, fondé sur la taille excessive du projet au regard de la population de la commune d'implantation, l'atteinte potentielle au tissu commercial des centre-bourgs des communes voisines, l'insuffisante accessibilité du site par les transports collectifs et les modes alternatifs de déplacements et l'insuffisante insertion architecturale et paysagère du projet. 4. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la demande d'autorisation d'exploitation commerciale, que le nouveau projet de la société pétitionnaire porte désormais sur une surface de vente de 2 125 m², au lieu de 2 500 m², soit une diminution d'environ 15%. La capacité de l'aire de stationnement a également été réduite de 221 à 188 places. Seize emplacements " pré-câblés " sont par ailleurs envisagés pour y accueillir des voitures électriques. Le projet modifié prévoit encore la plantation de 110 arbres de haute tige, au lieu de 80, et de haies bocagères. Les façades du bâtiment seront désormais vêtues de bardage " méta nervuré vertical " de couleur brun clair, et de bardage bois vertical d'aspect à claire-voie. La surface des panneaux photovoltaïques insérés dans la toiture a été légèrement étendue. Le projet est desservi par la ligne 10 du réseau Ileeno, arrêt " bourg ", et une aire de co-voiturage est située à environ 100 mètres. La société pétitionnaire soutient, sans être sérieusement contredite, qu'une voie piétonne sera aménagée depuis la voie publique et les quartiers d'habitation de la zone d'aménagement concertée " de la Vigne " jusqu'au parvis d'entrée en façade principale du bâtiment, garantissant désormais la sécurité des consommateurs et l'accessibilité des personnes à mobilité réduite. Il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 26 septembre 2018, le conseil municipal de Guignen s'est prononcé en faveur de la création de voies piétonnes et cyclables en rive Nord et rive Sud de la rue Jean de St-Amadour afin de permettre un autre accès au piéton et aux cyclistes. Dans ces conditions, et en dépit des similitudes avec le projet précédent, la demande présentée par la société Guignen Dis II doit être regardée comme ayant pris en compte la motivation résultant de l'avis émis par la commission nationale le 8 novembre 2018, dans le respect des dispositions précitées de l'article L. 752-21 du code de commerce. En ce qui concerne le moyen tiré de l'incompatibilité du projet avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Pays des Vallons de Vilaine : 5. L'article L. 142-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2015-1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l'urbanisme et applicable au schéma de cohérence (SCOT) du Pays des Vallons de Vilaine approuvé le 7 mars 2017, dispose que les autorisations d'aménagement commercial doivent être compatibles avec les schémas de cohérence territoriale. L'article L. 142-2 du même code prévoit que le projet d'aménagement et de développement durables du schéma fixe les objectifs des politiques publiques concernant, notamment, l'implantation commerciale. Selon les articles L. 141-16 et L. 141-17 de ce code, le document d'orientation et d'objectifs précise les orientations relatives à l'équipement commercial et artisanal, définit les localisations préférentielles des commerces et comprend un document d'aménagement artisanal et commercial (DAAC) déterminant les conditions d'implantation des équipements commerciaux qui, en raison de leur importance, sont susceptibles d'avoir un impact significatif sur l'aménagement du territoire, le commerce de centre-ville et le développement durable. Il appartient aux autorités administratives, non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale (SCOT), mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent pris dans leur ensemble, y compris ceux se présentant formellement comme régissant des actes distincts des autorisations d'exploitation commerciale, tels que par exemple des documents d'urbanisme. 6. Le document d'aménagement artisanal et commercial (DAAC) du SCOT du Pays des Vallons de Vilaine indique que la commune de Guignen est un pôle secondaire, " de rayonnement communal (et communes limitrophes peu équipées commercialement) destiné à répondre à une population de 3 000 à 6 500 habitants. (...) En cohérence avec sa population, ces pôles ont vocation à proposer une offre commerciale alimentaire complète (achats quotidiens ou hebdomadaires - avec notamment un équipement commercial de type supermarché -), associée à une offre commerciale non alimentaire axée sur les services (coiffure, ...) ". Ce document mentionne également que " les espaces de développement commercial de périphérie ou en tissu aggloméré sont privilégiés pour la création et le développement des plus grands commerces, dont le fonctionnement et la dimension peuvent être incompatibles avec les centralités ". Il identifie le tissu aggloméré de la commune de Guignen, dans lequel est situé le projet litigieux, comme secteur d'implantation préférentiel pour le développement commercial. Il prévoit enfin que " Les espaces de développement commercial de périphérie ou en tissu aggloméré, privilégiés pour la création et le développement des plus grands commerces, dont le fonctionnement et la dimension peuvent être incompatibles avec les centralités. Afin de conforter les activités de proximité dans les centralités, les espaces de périphérie ou en tissu aggloméré n'ont pas vocation à accueillir des activités commerciales de moins de 300 m² de surface de plancher ", que " " sont exclues du champ d'application de ces règles les activités de bars, restauration, hôtellerie ou de loisirs (permettant d'affirmer l'attractivité touristique du territoire) ainsi que les stations de distribution de carburants et les concessionnaires automobiles, garages, motocycles et motoculture (qui répondent à des logiques d'implantation différentes et considérées comme ayant moins d'impact en termes d'aménagement du territoire) " et que " pour les projets mixant plusieurs cellules commerciales, la surface de plancher associée à chaque cellule commerciale (au sens de cellule avec accès différencié à l'intérieur ou à l'extérieur du bâtiment) devra respecter ce seuil ". 7. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le projet, dont la surface de vente a été réduite à 2 125 m², a pour objet de répondre aux besoins d'une population en très forte expansion démographique, et de s'intégrer, d'une part, dans un projet urbain global mené par la commune en vue de l'aménagement concerté de la zone " de la Vigne ", avec une perspective de création de 400 à 430 logements, d'autre part, dans un vaste programme routier porté par le conseil général d'Ille-et-Vilaine (création d'une voie express Rennes-Redon). Le centre-bourg de la commune de Guignen comporte 15 commerces, dont deux boulangeries et une supérette, qui représentent les seuls commerces dits " de bouche ". Si la commune voisine de Guichen comporte une offre commerciale importante, il n'est pas établi que tel serait le cas des autres communes limitrophes. Par suite, et contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, la circonstance que le projet ne vise pas une clientèle appartenant à la seule commune de Guignen ne suffit pas à établir une incompatibilité du projet avec les dispositions précitées du DAAC du SCOT. 8. D'autre part, la cellule commerciale de 50 m², comprise dans le projet et visant à accueillir un service de restauration rapide, n'entre pas dans le champ d'application des dispositions précitées du DAAC du SCOT du Pays des Vallons de Vilaine. Par ailleurs, l'espace de 6 m² visant à accueillir un distributeur automatique de billets ne sauraient être regardé comme une " cellule commerciale " au sens de ces mêmes dispositions. 9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'incompatibilité du projet avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Pays des Vallons de Vilaine doit être écarté. En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des critères fixés par l'article L. 752-6 du code de commerce : 10. D'une part, aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial. (...) ". 11. D'autre part, aux termes du troisième alinéa de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat : " Les pouvoirs publics veillent à ce que l'essor du commerce et de l'artisanat permette l'expansion de toutes les formes d'entreprises, indépendantes, groupées ou intégrées, en évitant qu'une croissance désordonnée des formes nouvelles de distribution ne provoque l'écrasement de la petite entreprise et le gaspillage des équipements commerciaux et ne soit préjudiciable à l'emploi ". Aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine (...) ". 12. Enfin, aux termes de l'article L. 752-6 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; 3° En matière de protection des consommateurs : a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. II.-A titre accessoire, la commission peut prendre en considération la contribution du projet en matière sociale. ". 13. Il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce. S'agissant de l'aménagement du territoire : 14. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux vise à la création d'un magasin de 2 125 m², situé en continuité du tissu urbain aggloméré, à environ 350 mètres à l'ouest du centre-bourg de Guignen, dont il sera immédiatement accessible à pied. La superficie des parcelles d'assiette du projet, non artificialisées, représente environ 2 hectares. 15. D'autre part, l'offre commerciale au sein de la zone de chalandise représente 237 m² par habitant contre 371 m² sur l'ensemble du département d'Ille-et-Vilaine. Le projet s'inscrit dans un programme de développement commercial et résidentiel, au sein de la zone d'aménagement concerté " de la Vigne ", prévoyant notamment la construction d'environ 400 à 430 logements. Il n'est pas sérieusement contesté que la commune de Guignen ne dispose pas de commerce alimentaire, à l'exception de deux boulangeries et d'une " superette ", ni que la population communale réalise principalement ses achats au sein des grands pôles commerciaux de Rennes et Bain-de-Bretagne. La population résidant au sein de la zone de chalandise a par ailleurs augmenté de plus de 41% entre 1999 et 2016 (18, 76 % entre 2007 et 2017). Les supermarchés les plus proches sont situés à Mernel et à Guichen, soit respectivement à 7,6 km et 8,5 km du site d'accueil. 16. Enfin il ressort des pièces du dossier que le projet est situé à proximité immédiate du centre-bourg et de la zone d'aménagement concerté " de la Vigne ", laquelle accueillera 58 lots individuels, 29 lots intergroupés et 2 lots collectifs. Le projet se situe également à moins de 100 mètres des secteurs des Joncquières et de Cormier, qui comprennent respectivement 200 et 36 logements, et des lotissements des Bretellières et des Bretellières " bis ", qui comportent respectivement 30 et 36 lots. Le flux de véhicules supplémentaires généré par le projet, d'environ 150 par jour, n'aura pas d'impact notable sur les axes routiers environnants, compte tenu de leurs réserves de capacité. Ainsi qu'il a été dit au point 4 le projet, situé au sein de l'agglomération existante, sera desservi par les transports en commun et une aire de co-voiturage et demeurera accessible aux piétons et aux cyclistes. 17. Par conséquent, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet soit de nature à compromettre la réalisation de l'objectif énoncé par la loi en matière d'aménagement du territoire. S'agissant du développement durable : 18. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit, sur une emprise foncière totale d'environ 2 hectares, la création de 188 places de parking, dont 60 seront perméables, 16 seront pré-cablées, et 4 équipées de bornes électriques. L'immeuble principal présentera des performances énergétiques nettement supérieures aux normes d'isolation, notamment " RT 2012 ". La société pétitionnaire a prévu l'installation de panneaux photovoltaïques d'une surface de 2 040 m² en toiture du futur bâtiment, dont l'électricité produite sera notamment utilisée pour alimenter l'intérieur du magasin, ainsi que la mise en place de dispositifs économes en eau. 19. D'autre part, si le projet impacte une zone humide d'une surface d'environ 6 530m², en raison de sa localisation le long du ruisseau de la Herbaudière, la société pétitionnaire a prévu des mesures de compensation tenant à la réhabilitation de zones humides existantes situées sur le site des anciennes lagunes de Guignen, d'une surface de 13 200 m². 110 arbres de haute tige et des haies seront par ailleurs plantés dans le cadre de l'aménagement paysager du projet, essentiellement sur les façades nord et ouest du terrain d'assiette. Il n'apparaît pas que la création du magasin principal et du " drive " génèrerait des nuisances sonores, olfactives ou visuelles significatives, ou aurait un impact sur les zones de protection de la faune et de la flore situées à proximité du projet. 20. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le projet serait de nature à compromettre la réalisation de l'objectif énoncé par la loi en matière de développement durable doit être écarté. S'agissant de la protection des consommateurs : 21. D'une part, et ainsi qu'il a été dit, le projet est situé sur le territoire de la commune de Guignen, à proximité immédiate de son centre-ville et des zones d'habitat. Il sera aisément accessible en voiture individuelle, mais également en transport en commun, à vélo et à pied. L'implantation du magasin principal permettra notamment de limiter les déplacements contraints vers des pôles commerciaux extérieurs à la zone de chalandise. 22. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le projet répond à un besoin des consommateurs, notamment de la population communale. Au demeurant une pétition visant à soutenir le projet a été signée par 1 804 habitants de la commune, y compris des commerçants du centre-ville. Le projet vise à contribuer à l'amélioration du confort d'achat et à la valorisation des filières de production locale, l'enseigne ayant déjà développé un partenariat avec plusieurs producteurs locaux. La commune présente dans son centre-bourg un faible taux net de cellules commerciales vacantes, limité à environ 8%. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet litigieux aura un impact négatif sur la pérennité des commerces du centre-bourg, ni sur l'animation de la vie urbaine. Enfin l'exploitation du magasin permettra la création d'environ 40 emplois. 23. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet litigieux soit de nature à compromettre la réalisation des objectifs énoncés par la loi en matière de protection des consommateurs. 24. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaît les critères fixés par l'article L. 752-6 du code de commerce doit être écarté. En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des articles R. 431-16 et R. 122-2 du code de l'environnement : 25. Aux termes de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'il est saisi par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l'article L. 425-4 du présent code, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l'annulation de ce permis qu'en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il vaut autorisation de construire sont irrecevables à l'appui de telles conclusions. " Figurent notamment au nombre des personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du code de commerce, les professionnels dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour le projet, est susceptible d'être affectée par celui-ci. Seuls sont recevables à l'appui du recours formé par ces personnes les moyens relatifs à la légalité du permis en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. 26. Aux termes de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au litige : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : / a) L'étude d'impact ou la décision de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas dispensant le projet d'évaluation environnementale lorsque le projet relève du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement. (...) ". 27. Les sociétés requérantes, qui font exclusivement état de leur qualité de professionnels dont l'activité est susceptible d'être affectée par le projet, soutiennent que l'arrêté attaqué aurait été pris au vu d'un dossier de permis de construire incomplet dès lors qu'il ne comporte ni étude d'impact ni décision de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas dispensant le projet d'évaluation environnementale, en méconnaissance de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme et du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement. Ce moyen n'est toutefois relatif à la régularité du permis de construire qu'en tant qu'il vaut autorisation de construire. Il est, par suite, inopérant. 28. Il résulte de tout ce qui précède que les sociétés Année Distribution, Govelomat, Guidis, Guijardy, Guivadis et Utilia, ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'arrêté du 31 juillet 2020 du maire de Guignen en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Sur les frais liés au litige : 29. D'une part les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Guignen et de la société Guignen Dis II, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme que les sociétés requérantes demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans dépens. 30. D'autre part il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre solidairement à la charge des sociétés Année Distribution, Govelomat, Guidis, Guijardy, Guivadis et Utilia, une somme de 1 500 euros à verser à la société Guignen Dis II et une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Guignen au titre des frais liés à l'instance. DÉCIDE : Article 1er : La requête des sociétés Année Distribution, Govelomat, Guidis, Guijardy, Guivadis et Utilia est rejetée. Article 2 : Les sociétés Année Distribution, Govelomat, Guidis, Guijardy, Guivadis et Utilia verseront solidairement une somme de 1 500 euros à la société Guignen Dis II et une somme de 1 500 euros à la commune de Guignen au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Année Distribution, à la SAS Govelomat, à la SAS Guidis, à la SAS Guijardy, à la SAS Guivadis à la SAS Utilia, à la société Guignen Dis II, à la commune de Guignen et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique (Commission nationale d'aménagement commercial). Délibéré après l'audience du 14 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Francfort, président de chambre, - M. Rivas, président-assesseur, - M. Frank, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2022. Le rapporteur, A. A...Le président, J. FRANCFORT Le greffier, C. GOY La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20NT03025
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Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 28 août 2018 par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Bordeaux a confirmé la décision du président de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Saint-Martin de Ré portant déclassement d'emploi. Par un jugement n° 1802654 du 19 mars 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 21 juillet 2020, M. D..., représenté par le cabinet Themis (Aarpi), demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 mars 2020 ; 2°) d'annuler la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires de Bordeaux du 28 août 2018 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - l'autorité qui a décidé son renvoi devant la commission de discipline était incompétente ; - la commission de discipline qui s'est réunie sans la présence du second assesseur était irrégulièrement composée dès lors qu'il n'est pas établi que son président était valablement habilité à siéger, que le premier assesseur n'était pas l'auteur du compte-rendu d'incident et qu'elle s'est réunie en présence d'un second assesseur ; - la décision est entachée d'un second vice de procédure en ce qu'en ne lui permettant pas de consulter son dossier plus de trois heures avant la tenue de la séance ni d'en prendre une copie, il a été porté atteinte aux droits de la défense et l'article R. 57-7-16 du code de procédure pénale a été méconnu ; - la décision est entachée d'une erreur de droit, le principe de non-rétroactivité ayant été méconnu dès lors que la sanction prononcée le 23 juillet 2018 a pris effet dès le 17 juillet ; - elle est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'il n'est pas à l'origine de l'altercation, et n'est pas l'auteur de l'agression mais victime et a failli être blessé ; - la sanction prononcée, qui est disproportionnée, est entachée d'une erreur d'appréciation. Par un mémoire en défense enregistré le 18 février 2022, le ministre de la justice conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - aucun des moyens nouvellement soulevés en appel par M. D... et tirés de l'incompétence de l'auteur ayant initié les poursuites, de l'irrégularité de la composition de la commission et de la rétroactivité illégale de la sanction n'est fondé ; - les autres moyens doivent être rejetés pour les mêmes raisons que celles énoncées dans son mémoire en défense de première instance. M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 juin 2020. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de procédure pénale ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. F... A..., - les conclusions de Mme Kolia Gallier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. D..., incarcéré à la maison centrale de Saint-Martin de Ré, a fait l'objet le 23 juillet 2018 d'une sanction disciplinaire de déclassement d'emploi à la suite d'une altercation dans les ateliers avec un autre détenu, ayant eu lieu le 17 juillet. Il a exercé contre cette décision de la commission de discipline le recours préalable obligatoire prévu à l'article R. 57-7-32 du code de procédure pénale, alors en vigueur. Par décision du 28 août 2018, le directeur interrégional des services pénitentiaires de Bordeaux a rejeté son recours et confirmé la sanction. Par le jugement du 19 mars 2020 dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de cette dernière décision. 2. Aux termes de l'article R. 57-7-32 du code de procédure pénale, alors en vigueur : " La personne détenue qui entend contester la sanction prononcée à son encontre par la commission de discipline doit, dans le délai de quinze jours à compter du jour de la notification de la décision, la déférer au directeur interrégional des services pénitentiaires préalablement à tout recours contentieux. (...) ". L'institution, par ces dispositions, d'un recours administratif préalable obligatoire à la saisine du juge, a pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Il s'ensuit que la décision prise à la suite du recours se substitue nécessairement à la décision initiale et elle est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité. En outre, si l'exercice d'un tel recours a pour but de permettre à l'autorité administrative, dans la limite de ses compétences, de remédier aux illégalités dont pourrait être entachée la décision initiale, sans attendre l'intervention du juge, la décision prise sur le recours n'en demeure pas moins soumise elle-même au principe de légalité et si le requérant ne peut invoquer utilement des moyens tirés des vices propres à la décision initiale, lesquels ont nécessairement disparu avec elle, il est recevable à exciper de l'irrégularité de la procédure suivie devant la commission de discipline. 3. Aux termes de l'article R. 57-7-5 du code de procédure pénale, alors en vigueur : " Pour l'exercice de ses compétences en matière disciplinaire, le chef d'établissement peut déléguer sa signature à son adjoint, à un fonctionnaire appartenant à un corps de catégorie A ou à un membre du corps de commandement du personnel de surveillance placé sous son autorité. (...) ". Aux termes de l'article R. 57-7-6 de ce code, alors en vigueur : " La commission de discipline comprend, outre le chef d'établissement ou son délégataire, président, deux membres assesseurs ". Aux termes de l'article R. 57-7-7 du même code, alors en vigueur : " Les sanctions disciplinaires sont prononcées, en commission, par le président de la commission de discipline. Les membres assesseurs ont voix consultative. " 4. Il ressort des pièces du dossier que les poursuites disciplinaires à l'encontre de M. D... ont été engagées par M. C... B..., lieutenant chef de détention, et que la commission de discipline qui s'est réunie le 23 juillet 2018 a été présidée par Mme H... G..., directrice adjointe de la maison d'arrêt de Saint-Martin de Ré. Il n'est pas établi que l'arrêté de délégation du 16 mai 2018, produit en défense, par lequel la directrice de la maison d'arrêt a donné délégation de signature et de compétence aux deux intéressés, à l'effet d'engager les poursuites disciplinaires et de présider la commission de discipline, ait été régulièrement publié. Par suite, M. D..., qui a été privé d'une garantie, est fondé à soutenir que la procédure est irrégulière et que la décision du 28 août 2018 doit être annulée pour ce motif. 5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires de Bordeaux du 28 août 2018. 6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. D... sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. DECIDE : Article 1er : La décision du 28 août 2018 et le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 mars 2020 sont annulés. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au garde des sceaux, ministre de la justice. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2022. Le rapporteur, Olivier A... La présidente, Catherine Girault La greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20BX02240