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Mishnah Yoma
משנה יומא
Le Talmud de Jérusalem, traduit par Moise Schwab, 1878-1890 [fr]
https://www.nli.org.il/he/books/NNL_ALEPH002182155/NLI

Mishnah Yoma



Chapter 1

Sept jours avant la solennité du grand pardon, le pontife s’isole de sa famille et se tient dans la cellule des assesseurs (paredri). On lui désigne d’avance un suppléant pour le cas où il lui arriverait un accident (obviant à la célébration du culte). Il faut même, dit R. Juda, lui assigner (dubitativement) une autre femme, de crainte que la sienne meure; or, il est dit (Lv 16, 6): afin d’obtenir grâce pour lui-même et pour sa maison, dernière expression applicable à la femme. -Non, disent les autres sages, si l’on voulait éprouver de telles craintes, cela n’aurait pas de fin.
Pendant les sept jours préliminaires, le grand pontife (pour s’exercer au service) fait les aspersions de sang des sacrifices quotidiens, brûle l’encens à l’autel, nettoie les lampes, offre la tête et les pieds des victimes. Le reste de l’année, il peut à son gré accomplir un de ces services, car le grand pontife peut le premier prendre une part du culte public, de même qu’il a le droit de choisir la première part pour lui.
On lui assignait comme compagnons des vieillards parmi les anciens du tribunal, qui lui luisaient, pendant cet intervalle de temps, la section biblique concernant la solennité du Kippour. Ils disaient: “ô notre maître, grand pontife, lis toi-même ces passages, de crainte de les oublier, ou peut être même ne les as-tu pas encore appris”. La veille du Kippour au matin, on le plaçait à la porte Orientale du temple, faisant passer devant lui des taureaux, des béliers, des agneaux, pour qu’au lendemain il puisse sans hésiter reconnaître chaque victime destinée au culte.
Pendant les sept jours préliminaires, on ne refusait au pontife ni le manger, ni le boire. Mais à partir de la veille du Kippour vers le soir on ne le laissait pas manger beaucoup, car la satiété provoque le sommeil.
Les plus anciens membres du tribunal remettaient le pontife aux mains des plus anciens prêtres, d’où on le conduisait à la chambre de Bet-Abtinos<sup class="footnote-marker">1</sup><i class="footnote"> Là, on préparait l’encens sacré, et le pontife s’exerçait à le manier.</i>;là, on lui faisait prêter serment de se conformer strictement aux rites traditionnels; après quoi, on se disait adieu et l’on se séparait, en ajoutant: “O maître et pontife suprême, nous sommes les délégués du tribunal, et toi tu es le nôtre, ainsi que l’envoyé du tribunal; nous te conjurons au nom de Celui qui a fixé sa résidence en cette maison, de ne rien changer de tout ce que nous t’avons dit”. Puis, il se séparait d’eux en pleurant, et eux se retiraient en pleurant.
Si le grand pontife est un homme instruit, il interprétera à haute vois des passages bibliques (pour ne pas s’exposer à s’endormir la nuit de Kippour); sinon, des savants feront devant lui des exposés d’exégèse. S’il a l’habitude de lire la Bible, il se livrera à cette lecture; sinon, on lira pour lui. Quels livres choisira-t-on? Ceux de Job, d’Ezra, ou des Chroniques. Il m’est souvent arrivé, dit Zakaria b. Qebotal, de lire Daniel devant lui.
S’il voulait s’assoupir les adolescents des cohanim faisaient claquer les doigts<sup class="footnote-marker">2</sup><i class="footnote"> LittéralementÊ: ÒÊavec le doigt médialeÊÓ, contre le pouce.</i>, en lui disant: O notre maître, grand pontife, tiens-toi debout, ou mets un pied sur la dalle de marbre (dont la fraîcheur tient en éveil), et on l’occupait ainsi, par des distractions, jusqu’au moment où c’était l’heure d’égorger la première victime (à l’aurore).
Aux jours ordinaires, on enlève la cendre de l’autel au chant du coq, ou vers ce moment, un peu avant ou après; mais au jour du Kippour, on commence dès minuit (en raison du grand nombre de victimes). Aux jours de fêtes, on commence dès la fin de la première veille (après le tiers), car dès l’aurore, tout Israël envahissait les parvis.

Chapter 2

En principe, quiconque voulait enlever les cendres de l’autel pouvait le faire. Lorsque ceux qui s’offraient pour cet acte étaient nombreux, ils montaient en courant l’escalier qui y conduit; celui des compagnons qui était le plus près du but, dans les 4 coudées voisines, avait le privilège. Si deux desservants se trouvaient à égale distance, le préposé à la section disait à tous de lever les doigts. Ils pouvaient lever un ou deux doigts, sauf le pouce qu’il est défendu de lever au Temple (pour éviter toute fraude de compte).
Un jour, deux d’entre eux se trouvaient à égale distance; en courant pour gravir l’escalier, l’un poussa l’autre compagnon, qui tomba et eut la jambe cassée. En voyant à quel danger ces courses exposaient les cohanim, le tribunal institua que l’enlèvement des cendres sur l’autel serait opéré seulement par la voie du sort. On se réunissait 4 fois par jour pour tirer au sort, et la première opération avait lieu pour cet enlèvement.
La seconde opération du tirage au sort fixait: 1. Celui qui égorge, 2. Qui verse le sang, 3. Qui enlève la cendre de l’autel intérieur, 4. Qui nettoie les lampes, 5. Qui apporte les membres à l’escalier, savoir la tête et le pied droit de devant, 6. Deux autres pattes, 7. La queue, et la dernière patte, 8. L’estomac et la poitrine, 9. Les deux côtés, 10. Les intestins, 11. La farine, 12. Les gâteaux frits, 13. Les vins des libations; soit ensemble, 13 servants admis à l’honneur de ce service. Ben-Azaï dit en présence de R. aqiba, au nom de R. Josué: on devait offrir les divers membres de la façon dont la victime marchait de son vivant (savoir: la tête, un pied, la poitrine, l’estomac, deux pattes, les 2 côtés, la queue et la dernière patte).

On offre le sacrifice quotidien à l’aide de neuf personnes (en comptant depuis les présentations des membres détachés), ou par 10, ou par 11, ou même par 12 soit par 9 au moins et 12 au plus. Voici comment: le minimum habituel est de 9 servants<sup class="footnote-marker">1</sup><i class="footnote"> Savoir: 5 pour les divers membres, 1 pour les entrailles, 1 pour le gâteau frit, 1 pour la farine, 1 pour le vin.</i>; au jour de fête, un servant de plus avait une bouteille d’eau à la main, soit 10; le soir, il y en avait 11, à cause des deux supplémentaires chargés des bûches de bois; de même, il y avait 11 le samedi, à cause de deux supplémentaires portant des cassolettes d’encens qui accompagnent les nouveaux pains de proposition; si, de plus, le jour de fête coïncidait avec le samedi, il y avait trois supplémentaires, soit ensemble 14 servants.
Pour offrir le bélier, il fallait le concours de onze servants, savoir 5 pour les divers membres et deux pour chaque présentation d’entrailles, de farine et de vin.
Pour le taureau, on recourait à 24 servants, savoir 1 pour la tête, 2 pour le pied droit de derrière, 2 pour la queue, 2 pour l’autre patte, 1 pour le poitrail; l’estomac, par trois, les 2 pattes de devant par deux servants, les deux côtés par deux; enfin trois pour chacun de ces objets: les entrailles, la farine, le vin. Toutefois, ce grand nombre n’est de rigueur que pour les sacrifices publics;mais, pour ceux des particuliers, si un seul cohen veut se charger de tout apporter, il le peut. Pour écorcher la victime et la dépecer, il n’y a pas de différence entre le sacrifice public et le privé (un simple israélite suffit au besoin).

Chapter 3

Au matin le chef du service dit au cohanim: allez voir (par le sommet du Temple) si l’instant de commencer à égorger les victimes est arrivé (si la nuit est terminée). A ce moment là, celui qui est de faction s’écrie: l’aube a lui. Selon Mathia ben Samuel<sup class="footnote-marker">1</sup><i class="footnote"> Voir Tamid, 3, 1.</i>, il disait la face de tout l’orient s’est éclairée. -Est-ce jusqu’à Hébron (dans la vallée), lui demandait-on? -Oui, répondait-il.
Pourquoi fallait-il monter s’assurer du jour? C’est qu’une fois la lune brillait tellement, que l’on avait cru à l’arrivée du jour, et l’on s’était mis à égorger indûment le sacrifice quotidien du matin, qu’il fallut ensuite jeter au feu (en s’apercevant de l’erreur). A l’aube, le pontife se rendait au bain. Voici quelle était la règle au Temple: après avoir rempli ses grands besoins, on était tenu de prendre un bain complet; après avoir uriné, il suffisait de se laver les mains et les pieds.
Nul ne peut entrer au parvis pour célébrer le culte, fut-il pur, sans prendre un bain officiel. Quant au grand pontife, le jour du Kippour, il devra prendre cinq bains et se laver dix fois les mains et les pieds, le tout dans une cellule spéciale, sauf le premier bain (qui est obligatoire chaque jour, non spécial du Kippour).
On étendait une toile de lin entre lui et le peuple; puis il se déshabillait, descendait et prenait le bain, remontait et s’essuyait le corps. On lui apportait le costume orné d’or qu’il revêtait; après quoi, il se lavait les mains et les pieds. On lui amenait la victime du sacrifice quotidien, qu’il égorgeait, en coupant la majeure partie du cou, laissant achever cette œuvre par un autre cohen. Il recueillait le sang qui découlait de la victime, et le versait sur l’autel. Il entrait à l’intérieur du sanctuaire pour brûler l’encens, nettoyer le luminaire, offrir la tête et certains membres des victimes, les gâteaux frits et les libations de vin.
L’offre de l’encens au matin avait lieu entre l’aspersion du sang et la combustion des membres; au soir, cette opération avait lieu entre la présentation des mêmes membres et les libations. Si le grand pontife était un vieillard, ou un homme délicat, asqenh", on chauffait pour lui de l’eau (la veille), que l’on joignait le lendemain à l’eau froide du bain, pour l’attiédir.
On conduisait le pontife à la cellule de Parwa<sup class="footnote-marker">2</sup><i class="footnote"> C’est le nom d’un magicien (conservé ainsi), disent les commentaires.</i>, salle de bain située dans le sanctuaire (le 2e bain devant avoir lieu en une place sainte). On étendait un drap de lin entre lui et le peuple. Il se lavait les mains et les pieds (avant de toucher seulement aux vêtements), et puis se déshabillait. Selon R. Meir, après s’être déshabillé (après ce contact), il se lavait les mains et les pieds, puis descendait se baigner, remontait et s’essuyait. On lui apportait le costume blanc, qu’il revêtait, puis il se lavait les mains et les pieds.
Le matin, il portait des vêtements de Pélusium, d’une valeur de douze maneh, et l’après-midi des vêtements des Indes<sup class="footnote-marker">3</sup><i class="footnote"> Neubauer, Géogr., p. 385.</i>, estimés 800 zouz. Tel est l’avis de R. Meir. Selon les autres sages, il avait le matin un costume d’étoffe de Pélusium, coûtant 18 maneh, et l’après-midi un autre de douze maneh, soit en total une valeur de 30 maneh. Si à cette somme (prise du trésor sacré), il veut en ajouter encore, il le pourra, en prenant de son bien personnel.
Le grand pontife se rendait auprès du taureau particulier à sa personne, placé entre le portique et l’autel, la tête placée au sud et la face tournée vers l’ouest. Le pontife se plaçait à l’orient, tournant les regards vers l’ouest; il appuyait les deux mains sur la victime, et récitait la confession, en ces termes: “O éternel, j’ai été pervers, j’ai péché, j’ai commis des fautes devant toi, moi et ma maison”. O Dieu, pardonne les crimes, les péchés et les fautes, dont je me suis rendu coupable devant toi, moi et ma maison, comme il est écrit dans la loi de Moïse, ton serviteur (ib. 30): car, en ce jour, votre expiation aura lieu, etc.”. A ces mots, l’assemblée répondait: “Loué soit à jamais le nom de son règne glorieux!”.
Le pontife arrivait à l’est du parvis et au nord de l’autel, ayant le président à sa droite et le chef de la section du service à sa gauche. Là étaient les 2 boucs auprès d’une urne, calph, contenant les 2 sorts sur tablettes en bois d’ébène, fabriquées en or par le pontife Ben-Gamala. Aussi, l’on rappelle son nom avec éloge.
De même, Ben-Qatin avait fait fabriquer 12 robinets au bassin d’eau, qui n’en avait eu que 2; il l’a aussi embelli d’une appareil mécanique, mecanh, afin que le l’eau ne devienne pas impropre à l’usage par le séjour de nuit. Le roi Monobaz fit en or tous les manches des vases sacrés en usage le Kippour, et sa mère Hélène<sup class="footnote-marker">4</sup><i class="footnote"> La reine d’AdiabèneÊ; voir Derenbourg, Essai, etc., p. 224.</i> fit don d’un chandelier en or, qui fut placé à la porte du sanctuaire, et d’un tableau de même métal sur lequel on grava le texte de la loi relative au soupçon d’adultère<sup class="footnote-marker">5</sup><i class="footnote"> (Nb 5).</i>. Il est arrivé un miracle<sup class="footnote-marker">6</sup><i class="footnote"> Expliqué ci-après, fin.</i> aux portes offertes par Nicanor au temple; aussi, l’on rappelle son nom avec éloge.
Voici les noms de ceux qui méritèrent le blâme (en ce qui touche le culte officiel): la famille de Garmo ne voulait enseigner à personne son système de cuisson des pains de proposition; celle d’Abtinos ne voulait montrer à personne sa manière de préparer l’encens; Hagros, fils de Levi, connaissait un mode particulier de chant, et ne voulait pas le communiquer; enfin Ben-Qamtsar n’a pas voulu faire part à autrui de son talent d’écrivain. Des premiers (les bienfaisants), il a été dit (Pr 10, 7): on rappelle le souvenir du juste en bénédiction; et, de ces derniers, il est dit (ensuite): le nom des impies s’anéantit.

Chapter 4

A la hâte, le pontife saisissait dans l’urne, calph, deux lots<sup class="footnote-marker">1</sup><i class="footnote"> Il les prenait vivement, pour que ce soit bien l’effet du hasard.</i>, sur l’un desquels était écrit: “pour l’Eternel”, et sur l’autre: “à Azazel”. Le président se trouvait à sa droite, et le chef de la section de service était à sa gauche. Si le lot attribuant le sacrifice “à l’Eternel” se trouvait levé dans sa droite, le président lui disait: “ô maître, le grand pontife, élève ta main droite”; si le lot désignant la part “à l’Eternel” se trouvait dans sa gauche, le chef du sacrifice lui disait: “Seigneur grand prêtre, élève ta gauche”. Il plaçait ensuite les lots sur les deux boucs, en prononçant la formule: “à l’Eternel le sacrifice expiatoire”. Selon R. Ismaël, il n’avait pas besoin de parler de péché, mais il disait seulement: “à l’Eternel”. Après quoi, les assistants répondaient: “Loué soit à jamais le nom de son règne glorieux”.
Le pontife attachait une langue (touffe) de laine écarlate à la tête du bouc devant être envoyé à Azazel, et le déplaçait vers la sortie d’où il devait être expédié; le bouc destiné à être égorgé était tourné vers la place où a lieu l’égorgement (pour éviter toute confusion). Puis, il se rendait auprès du second taureau, lui imposait les deux mains et récitait la confession, en ces termes: “O Eternel, j’ai été criminel, j’ai péché, j’ai commis des fautes, moi et ma maison, les fils d’Aaron et ton peuple saint. O, par Dieu, pardonne-moi tous ces iniquités, etc.”.
Le pontife égorgeait ensuite le taureau, recueillait le sang dans un bassin, le remettait au servant chargé de le remuer sur la quatrième dalle du sanctuaire, pour ne pas le laisser figer. Puis, il prenait la poêle, montait au sommet de l’autel, écartait les charbons d’un côté et d’autre, enlevait les plus ardents du milieu, descendait et plaçait l’ustensile sur la quatrième dalle du parvis.
Aux jours ordinaires, le pontife recueille les charbons dans un vase d’argent et les passe dans un autre en or; au jour de Kippour, il les recueille de suite dans un vase d’or, dont il se sert aussi pour les apporter à l’intérieur. Aux jours ordinaires, il se sert, pour cette opération, d’un vase d’une contenance de 4 cabs, et les verse dans un autre d’une contenance de 3 cabs; en ce jour, il emploi de suite un vase de 3 cabs, qu’il emploi aussi pour l’intérieur (au saint des saints). R. Yossé dit: aux jours ordinaires, il recueille les charbons dans un vase contenant un saa, et il les verse dans un autre de 3 cabs; en ce jour, il se sert de suite d’un vase de 3 cabs, qu’il emporte aussi à l’intérieur. Le vase habituelle (des jours ordinaires) était lourd; celui du Kippour était plus léger. L’ordinaire avait un manche court; celui du Kippour avait un long manche. Enfin, le vase ordinaire était en or jaune; celui du Kippour était d’un or rouge. Tel est l’avis de R. Menahem. Aux jours ordinaires, le pontife offrait la valeur d’un demi-maneh le matin, et autant l’après-midi; le jour du Kippour, il ajoutait “une poignée pleine”. Aux jours ordinaires, il prenait de fines épices pour l’encens; au jour du Kippour, il choisissait les plus fines de toutes.
Aux jours ordinaires, les cohanim montaient à l’Est de l’autel et descendaient du côté Ouest; au jour du Kippour, ils montaient et descendaient au milieu; selon R. Juda, toute l’année le grand pontife monte et descend au milieu. Aux jours ordinaires, le grand pontife se lavait les mains et les pieds au bassin officiel; le jour du Kippour, il se servait d’une cruche, cwqwn, d’or; selon R. Juda, le grand pontife emploie toute l’année la cruche d’or pour cette ablution.
Aux jours ordinaires, on brûlait successivement quatre rangées de bois; le jour du Kippour, il en fallait cinq. Tel est l’avis de R. Meir. Selon R. Yossé, il y en avait trois aux jours ordinaires, et quatre le Kippour. Enfin, selon R. Juda, il y en avait deux aux jours ordinaires et trois le Kippour.

Chapter 5

On apportait au pontife (de la cellule des ustensiles) la cuiller et l’encensoir, et de là il prenait une poignée d’encens, qu’il remettait dans la cuiller, que cette mesure soit grande ou petite. Voici comment on mesurait:le pontife prenait l’encensoir de la main droite et la cuiller de la main gauche; il suivait le parvis, jusqu’à ce qu’il arrivait entre les deux rideaux qui servent à séparer le sanctuaire ordinaire du saint des saints, soit un espace d’une coudée. Selon R. Yossé, il n’y avait qu’un rideau, puisqu’il est dit (Ex 26, 33): le rideau vous servira de séparation entre le sanctuaire et le saint des saints. Le rideau extérieur avait un ourlet replié vers le dehors du sud, et le rideau d’intérieur en avait un semblable tourné au nord. Entre les deux, le cohen marchait jusqu’à ce qu’il arrivait au nord; à ce point, il tournait la face vers le sud, il suivait à gauche le long du rideau, jusqu’à son arrivée près de l’arche sainte. Arrivé là, il plaçait la pelle entre les deux barres de l’arche sainte, amoncelait l’encens vers les charbons ardents, de sorte que la maison sainte se remplissait en entier de fumée odorante. Il sortait par la même voie où il était entrée, et récitait une courte prière, qu’il ne prolongeait pas, pour ne pas rendre tout Israël inquiet.
Lorsque l’arche de l’alliance fut enlevée, on trouva à sa place une pierre remontant au temps des premiers prophètes (David et Samuel), et nommée Shatiya; cette pierre (haute de 3 doigts) servait de reposoir.
Le pontife prenait le sang du taureau de celui qui était chargé de le remuer, entrait à la place d’intérieur (au saint des saints) et se tenait au point d’arrêt (entre les barres de l’arche). Il en aspergeait une part vers le haut (de l’autel) et sept parts vers le bas, sans s’appliquer pour cela, ni à verser le sang en haut, ni au bas (du propitiatoire), mais par un simple jet<sup class="footnote-marker">1</sup><i class="footnote"> Tombant à terre.</i>, et il comptait de la façon suivante: une, une et une, une et deux, une et trois, une et quatre, une et cinq, une et six, une et sept. Puis, il sortait et posait le récipient sur un piédestal d’or qui se trouvait dans le parvis.
On lui amenait le bouc, il l’égorgeait, recueillait le sang dans un vase, entrait à l’intérieur et se tenait au point d’arrêt (comme ci-dessus), aspergeait aussi sept fois, une fois en l’air et sept vers le bas, ne s’appliquant aussi, ni à atteindre le bas ni le haut (du propitiatoire), mais par une sorte de jet, en comptant etc. Puis il sortait, posait le récipient sur un second piédestal du parvis. Selon R. Juda, il n’y avait qu’un piédestal (servant tour à tour à déposer chaque récipient). Aussi, le pontife prenait d’abord le sang du taureau, laissant celui du bouc, en aspergeait sur le propitiatoire, vis-à-vis de l’arche, du dehors, une fois vers le haut et sept fois vers le bas, sans s’appliquer à asperger ni le haut, ni le bas (du propitiatoire), mais en usant d’une sorte de jet, en comptant etc. Ensuite, il reprenait le sang du bouc, laissant celui du taureau et opérant exactement de même. Enfin, il versait le reliquat de sang du taureau auprès du reste du sang de bouc, transvasait le bassin plein (des deux sangs) dans celui qui était vide (pour parfaire le mélange), puis:
il se rendait auprès de l’autel placé devant l’Eternel, et, sur lui, sollicitait le pardon, savoir sur l’autel doré (Lv 16, 18). Le pontife commençait à asperger du haut en bas<sup class="footnote-marker">2</sup><i class="footnote"> En faisant l’inverse, de bas en haut, il s’exposait à se salir.</i>, en partant de l’angle nord-est, puis passant au nord-ouest, ou sud-ouest, et au sud-est. A l’emplacement où il commence pour le sacrifice expiatoire sur l’autel extérieur, il terminera pour l’autel intérieur (faisant le tour à l’inverse). Selon R. Eliézer, le pontife, sans se déplacer de l’endroit où il se trouve, répand le sang aux 4 angles, et à chacun il asperge de bas en haut (sans crainte), sauf qu’à l’angle où il se trouve il aspergera de haut en bas.
Sur l’autel purifié (aspergé aux 4 angles), le pontife faisait encore 7 aspersions; il versait le reliquat de sang sur le fondement ouest de l’autel extérieur, et celui qui provenait des victimes offertes sur cet autel extérieur, devait être versé au fondement sud. Enfin, ceux des uns et des autres se mêlaient dans la rigole, d’où ils allaient au canal de Cédron, puis on les vendait aux jardiniers comme engrais; mais ce serait une prévarication des saintetés d’en user avant de les avoir rachetés (payés au trésor).
Pour tout le cérémonial de l’office du Kippour, tel qu’il vient d’être énoncé dans la Mishna, si l’ordre présent n’a pas été strictement suivi, c’est comme si l’on n’avait rien fait. Si l’on a procédé à l’aspersion du sang de bouc avec celui du taureau, on devra reprendre du sang de bouc, après avoir versé celui du taureau, et faire une nouvelle aspersion dans l’ordre. Si, avant d’avoir achevé les opérations du sang à l’intérieur, on l’a versé au fond, il faut reprendre d’autre sang et recommencer les opérations à l’intérieur. Il en sera de même si cela arrive pour les opérations du sang dans le parvis, ainsi que pour celles de l’autel d’or, car chacune de ces séries constitue une expiation à part (à condition d’être achevée). Selon R. Eliézer et R. Simon, il suffit de commencer à l’endroit où l’on s’est arrêté (sans recommencer l’aspersion déjà faite).

Chapter 6

Il est recommandable que les deux boucs à offrir le jour du Kippour soient semblables par la couleur de la peau, la stature, la valeur, la simultanéité d’achat. Si, cependant, ils ne se ressemblent pas, ils sont valables, ainsi qu’au cas de l’achat de l’un en un jour et du second un autre jour. Si l’un d’eux meurt avant l’opération du tirage au sort, il faut compléter le couple, si le tirage a déjà eu lieu, on amènera deux nouveaux boucs, et l’on recommencera le tirage au sort comme en principe. Il dira: Si celui qui a été désigné à l’Eternel est mort, celui qui sera de nouveau désigné comme tel devra le remplacer; si c’est le bouc destiné à Azazel qui est mort, son remplaçant ira à sa place, en étant ainsi désigné. Le second restant du premier couple retournera au pacage, jusqu'à ce qu'il lui arrive un défaut qui permette de le vendre le montant pourra servir à une offrande volontaire (privée), car un sacrifice public d’expiation n’a pas besoin d’être mis dans un enclos jusqu’à sa mort. Selon R. Juda, il faut laisser mourir ce bouc (sans pouvoir rien en tirer). R. Juda dit encore<sup class="footnote-marker">1</sup><i class="footnote"> Jér., (Sheqalim 1, 4) ( 46b).</i>: si le sang du bouc sacrifié a été renversé (la cérémonie étant incomplète), le bouc destiné à être expédié au loin devra périr (avant que l’on ait recours à un autre couple); ou si le bouc d’Azazel est mort subitement (avant l’aspersion du sang du premier), le sang devra être jeté (et il faut aussi un nouveau couple).
Le pontife arrivait alors auprès du bouc devant être envoyé à Azazel; il lui imposait les deux mains et récitait la confession, en ces termes: “O Eternel, ton peuple et la maison d’Israël a commis des crimes et des fautes, il a péché devant toi; ô Eternel, pardonne-lui etc.”.
Il le livrait à l’homme chargé de le mener. Tout homme (même simple israélite) est apte pour le mener; seulement les pontifes ont introduit la règle de ne pas en charger un simple israélite. R. Yossé raconte qu’il arriva à une simple israélite nommé Arsela, de Sephoris, de conduire ce bouc au loin.
On a construit à cet effet un pont spécial, pour échapper aux obsessions des Babyloniens<sup class="footnote-marker">2</sup><i class="footnote"> Terme désignant la populace.</i>, qui venaient tirer les poils du bouc, le harcelant pour hâter son départ, en lui disant: va donc, sors emporter nos péchés. Les plus important personnages de Jérusalem l’accompagnaient jusqu’à la 1re tente. Or, on dressait dix tentes depuis Jérusalem jusqu’à Couq<sup class="footnote-marker">3</sup><i class="footnote"> Neubauer, ib., p. 54.</i>, soit une distance de 90 ris, à raison de 7 1/2 par mille (ou en total 12 milles).
A chaque station, on offrait au messager de la nourriture et de l’eau; et on l’accompagnait d’un arrêt à l’autre, sauf au dernier; on ne poussait pas jusqu’à la dernière limite de Couq, se contentant de s’arrêter de loin pour voir ce qui allait se passer.
Que faisait le messager? (Qu’y avait-il à voir)? Il partageait en deux parts une langue de laine écarlate, dont la moitié était attachée au roc et l’autre moitié aux cornes du bouc; puis il le poussait en arrière dans le précipice, d’où l’animal tombait, en roulant, et avant d’être parvenu à mi-chemin du fond, il était mis en pièces. Le messager allait alors s’asseoir sous la première tente voisine, jusqu’à la nuit. A partir de quel moment ses vêtements étaient-ils impurs? Dès qu’il avait quitté l’enceinte de Jérusalem; selon R. Simon, depuis le moment où il avait lancé le bouc dans le précipice –
Après livraison du bouc d’Azazel, le pontife se rendait auprès du taureau et du bouc qui doivent être brûlés;il les écorchait, enlevait les entrailles, les plaçait dans un bassin, les faisait fumer sur l’autel, puis on suspendait les victimes sur des tiges de bois pour les porter de là au lieu de combustion. A partir de quel moment les vêtements de ces derniers servants devenaient-ils impurs? Dès qu’ils quittaient l’enceinte du portique; selon R. Simon, lorsque la majeure partie est enveloppée de flammes.
A l’arrivée du bouc au désert, on l’annonçait au pontife; pour faire connaître l’arrivée du bouc à destination, on avait placé des sentinelles, diadocoi, qui agitaient des étoffes, afin d’annoncer l’arrivée. Selon R. Juda, on pouvait le savoir par la supputation du temps représentant le trajet de trois milles, puisque de Jérusalem à Bet-Horon il y avait un mille (soit ensemble 3 milles), pour l’arrivée du bouc au désert. R. Ismaël dit: il y avait un bien meilleur signe encore, une langue d’écarlate était attachée à la porte du sanctuaire, et dès que le bouc était parvenu au désert, cette langue de laine blanchissait, selon ces mots (Is 1, 18): Quand même vos péchés seraient comme le cramoisi, ils blanchiront comme la neige.

Chapter 7

Le pontife passait ensuite à la lecture de la section biblique concernant le Kippour; s’il voulait revêtir à cet effet son costume de lin fin, il le pouvait; si non, il se couvrait de son manteau (stola) blanc. Le servant de la synagogue prenait le rouleau, le remettait au président de l’assemblée, qui le passait au vice-président, lequel le donnait au pontife. Celui-ci debout le recevait, lisait deux sections du Lévitique (Lv 16) et (Lv 23, 27-32); puis il roulait le livre de la loi (le refermait), le mettait dans son sein, en disant: Bien plus que je ne vous ai lu se trouve écrit là. Enfin, il récitait verbalement un autre passage du Pentateuque (Nb 29, 7-11), à la suite de quoi il récitait huit bénédictions, se terminant par les formules “sur la loi, le culte, l’action de grâce, le pardon des péchés, le sanctuaire, Israël, les pontifes, le reste de la prière”.
Celui qui voyait le pontife procéder à ces lectures ne pouvait pas assister à la combustion des chairs du taureau et du bouc à brûler; ou s’il voyait cette dernière opération, il n’assistait pas à la lecture. Ce n’est pas que c’était interdit; mais il y avait une grande distance entre les emplacements où chacune de ces cérémonies avait lieu simultanément.
Si le pontife a fait la lecture en costume de lin fin, il se lave les mains et les pieds, se déshabille, descend prendre un bain, remonte et s’essuie le corps. On lui apporte le costume orné d’or; il se revêt, se lave les mains et les pieds, sort, offre son bélier particulier, celui du peuple et les sept agneaux sans défaut. Tel est l’avis de R. Eliézer. R. aqiba dit: avec le sacrifice quotidien du matin, on offrait le taureau servant d’holocauste; et le bouc devant être sacrifié sur l’autel extérieur, était présenté en même temps que le sacrifice quotidien du soir.
Il se lave ensuite les mains et les pieds, se déshabille, descend prendre un bain, remonte, s’essuie, fait apporter le costume blanc qu’il revêt, se lave de nouveau les mains et les pieds. Il entre au sanctuaire pour emporter la cuiller et l’encensoir, se lave les mains et les pieds, se déshabille, descend se baigner, remonte, s’essuie, se fait apporter le costume orné d’or, le revêt, se lave les mains et les pieds, entre au saint des saints, fait fumer l’encens, apprête le luminaire, se lave les mains et les pieds, se déshabille, descend prendre un bain, remonte, s’essuie, se fait apporter ses propres vêtements usuels et les revêt. On l’accompagne jusqu’à sa maison, et là il donne une grande fête à tous ses amis, heureux d’avoir rempli ce saint office et d’en être sorti en paix.
Le grand prêtre se sert de 8 vêtements; le simple prêtre, de 4, savoir: la tunique, le caleçon, le turban (tiare), la ceinture; à ceux-ci le pontife ajoute le rational, l’ephod (surplis), le manteau et le frontal. Dans cette tenue, on consultait l’oracle des Ourim et Toumim, que du reste on n’évoquait pas pour un homme simple (le premier venu), mais seulement pour le roi, ou le tribunal, ou pour l’usage de la communauté.

Chapter 8

Au jour du grand pardon, il est défendu de manger, de boire, de se laver, de s’oindre le corps, de se chausser, d’avoir des relations conjugales. Seuls le roi et la fiancée sont autorisés à se laver la figure (pour ne rien perdre de leur beauté), et une femme en couches peut mettre des sandales, pour ne pas attraper froid. Tel est l’avis de R. Eliézer. Les autres sages s’opposent même à ces exceptions.
Celui qui, au jour du Kippour, mange autant qu’une grosse datte<sup class="footnote-marker">1</sup><i class="footnote"> Cf. (Terumot 6, 1).</i>, l’équivalent du fruit entier avec le noyau, ou qui boit une gorgée la bouche pleine, est coupable d’infraction au jeûne. Tout ce que l’on a mangé, (permis ou interdit) sera joint pour constituer la dite grandeur, ainsi que tous liquides avalés pour former ensemble la mesure prescrite. Cependant, le boire et le manger (en petites quantités) ne seront pas joints pour constituer la mesure interdite.
Celui qui a mangé et bu dans un même état d’ignorance n’est qu’une fois coupable et passible d’un sacrifice expiatoire; mais si dans le même état, il a mangé et travaillé, il est deux fois coupable (ce sont deux infractions d’ordre différents). Celui qui a mangé des objets que l’on ne peut pas manger (tellement ils sont mauvais), ou bu un liquide non potable, ou bu une sauce, ou du jus servant à confire, n’est pas coupable.
On ne force pas les enfants de jeûner au jour du Kippour; mais on les initie progressivement à ce devoir un an ou deux avant le jour de l’obligation afin de les habituer à accomplir les préceptes religieux.
Si une femme enceinte ayant senti l’odeur d’un mets, éprouve en ce jour une forte envie d’en manger (qu’il serait dangereux de ne pas satisfaire), on lui donnera à manger, jusqu’à ce qu’elle soit remise. A un malade, on donne à manger selon l’avis des médecins compétents; à défaut de ces derniers, on lui donne à manger selon son propre désir, jusqu’à ce qu’il déclare en avoir assez.
Si quelqu’un a été pris de fringale (bulimus), on le fait aussitôt manger, fût-ce des objets impurs<sup class="footnote-marker">2</sup><i class="footnote"> Si l’on n’a rien de plus proche sous la main.</i>, jusqu’à ce qu’il rouvre les yeux (en signe de guérison). A celui qui a été mordu par un chien enragé, on ne fera pas manger le réseau interlobulaire du foie de cet animal<sup class="footnote-marker">3</sup><i class="footnote"> Remède empirique, non admis par tous comme efficace.</i>. R. Mathia b. Heresh le permet. Ce dernier dit encore: A celui qui souffre de la gorge, on fera avaler, même le samedi, les plantes médicinales servant de remède, parce qu’il y a danger mortel, et chaque fois qu’il y a un danger tel, on ne tient pas compte du Shabat.
Si un édifice s’est écroulé sur un individu (le jour de la fête du grand pardon), et l’on ne sait pas si cet individu est là, ou non, ni s’il est encore en vie, ou non, ni si c’est un israélite ou un païen, on doit (malgré la fête) faire tout ce qui est possible pour sauver cet individu au cas où on le retrouve en vie; s’il est déjà mort, il n’y a plus qu’à le laisser.
Le sacrifice expiatoire et le sacrifice du péché de certitude produisent le pardon (entraînant forcément le repentir). Avec la mort et par le Kippour, le pardon est obtenu si le repentir l’accompagne. Celui-ci donnera le pardon pour les transgression secondaires des préceptes affirmatifs ou négatifs; pour les péchés graves, le pardon sera suspendu jusqu’après l’achèvement de la solennité du Kippour.